Une RE RE EE RS D.Sc. FRS. n ui x © © œ 0 p= £ = = z Fe n Georges CARRÉ € GC. NAUD, Eüivurs 3, rue Racine, Paris Dr pare BIBLIOTHÈQUE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES Vient de paraître : L'Éclairage à l'Acétylène HISTORIQUE — FABRICATION — APPAREILS APPLICATIONS — DANGERS Par Georges PELLISSIER 1 vol. in-8° carré de 238 pages, avec 102 figures, cartonné à l'anglaise. 5 tr. L'auteur à cherché à faire un exposé aussi fidèle et aussi complet que possible de l'état actuel de la question, en insistant particuliè- rement sur les points d'intérêt général, tels que les dangers possibles, les conditions à réaliser pour la préparation et l’utilisation rationnelles de l’Acétylène. Toutes les applications autres que l'éclairage ont été volontai- rement négligées, elles sont nombreuses et peuvent donner naissance à des industriés considérables, mais n'étant pas encore entrées dans la pratique, leur étude eut entrainé à de trop longs développements. EXTRAIT DE LA TABLE DES MATIÈRES CHAPITRE PREMIER. — Historique. — Propriétés physiques et chimiques de l'Acétylène. — Accidents. — Explosibilité. — Mélanges détonants. — Attaque des métaux. — Toxicité. Car. IL. — Fours électriques. — Four de Pichon. — Fours électriques W. Siemens, Faure, Lontin. — Fours Cowles, Héroult, Borchers, Moissan, Bullier, Willson, de l'usine de Spray, King, Gearing, Vincent, King et Wyatt, Regnoli, Pictet. Cnar. IT. — Le Carbure de Calcium. — Fabrication. — Propriétés. Car. IV — Préparation de l'Acétylène. Car. V. — Appareils générateurs. — 1° Classe. Appareils Dickerson, Janson et Leroy, Bon, Souriou, Clausolles, Voigt, Ducretet et Lejeune, Gabe, Tiroloy, d'Humilly, Exley, Ackermann, Deroy, O'Conor Sloane, Chesnay et Pillion, Frachebois, Ragot. — 2° Classe. Appareils Trouvé, Allemano et Stemmer, Lequeux, d’Arsonval, Serpollet et Létang, .Gabe. — 3° Classe. Appareils Dickerson, Campe, Maréchal, Lequeux, Bullier, Pictet, Thivert, Beau et Bertrand-Taillet, Bonneau, Leroy et Janson. Cap. VI. — Lampes portatives. — 1° Classe, — Lampes Ducretet et Lejeune, Cla- veureul et Guépin, Rossbach-Rousset, Gossart et Chevallier. — 2° Classe. Lampes O'Conor Sloane, Trouvé, Cérckel, Gearing, Allemano et Stemmer, Nou. — 3° Classe. Lampe Claude et Hess. Cuar. VII — Acétylène liquéfié et comprimé. — Conditions à réaliser. — Appareils Dickerson, Pictet. — Bonbonnes à Acétylène liquide. — Prix de revient. — Applications. — Accidents. — Dangers de l'Acétylène liquide. — Acétyiène comprimé. — Procédé Claude et Hess (Acélylène dissous). Cuapr. VIII. — La flamme de l'Acétylène. — Becs bräleurs. Cuap. 1X.— Prix comparé de l'éclairage à l'Acétylène. — Applications. Cap. X. — Manipulations pratiques. — Installation des appareils. — Réglements administratifs. — Gazogènes. N°11. EC Y _ > n ; = h K 7 Georges CARRE et C. NAUD, Editeurs, 3, rue Racine, Paris. Vient de paraitre !: La Plaque hotographique (Gélatino-bromure d'argent) PROPRIÉTÉS — LE VISIBLE — L'INVISIBLE Par R. COLSON CAPITAINE DU GÉNIE, RÉPÉTITEUR DE PHYSIQUE A L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE 1 vol. in-80 carré de 164 pages, avec figures, et 1 planche en chromolithographie, hors texte. . ., ... 5 francs. Après un coup d'œil général sur les propriétés de la couche sensible et sur le principe de sa préparation et de son emploi, l’auteur passe en revue dans les quatre premiers chapitres les influences chimique, lumineuse, calorifique, mécanique et électrique ; on trouvera en particulier dans les deux premiers qui contiennent la base de Ja photographie, une discussion approfondie sur la formation de l'image latente et l’opération du développement, avec des considérations nouvelles sur le rôle de la matière organique, la gélatine. Le chapitre v est consacré aux ARayons X. Dans le chapitre vi, l'auteur remet au jour les anciennes expériences de Niepce, de Saint- Victor relatives à l'emmagasinement de la lumière, qui ouvrent la voie sur un terrain immense, encore très peu exploré, et bien propre à séduire les chercheurs; elles se rattachent directement à la photo- graphie de l’invisible. Celle-ci, dans laquelle est comprise la photo- graphie au travers des corps opaques, fait l’objet du chapitre vu, qui renferme les expériences exécutées récemment sur ce sujet. L'auteur indique aussi certaines précautions à prendre dans la conservation et dans l'emploi des plaques. Cet ouvrage sera utile à tous ceux qui s'occupent de photographie, en leur faisant connaître l'instrument qu'ils emploient, et à tous ceux qui s'intéressent aux nouvelles recherches, en leur fournissant, en mème temps que des indications suggestives, des documents précis et mis au point. Paris. — Imp. E. Cariomoxr et C6, rue des Puitevins, G | (# L "4 VEN Revue générale és Sciences pures et appliquées TOME VINGT ET UNIÈME it ee #) kRevue générale des Sciences pures el appliquées PARAISSANT ;LE 15 ,ET LE 30 DE CHAQUE MOIS Fospareur : Louis OLIVIER, Docreur Es SCIENCES TOME VINGT ET UNIÈME 1910 AVEC NOMBREUSES FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE Librairie Armand Colin 5, rue de Mézières, Paris pa N 1 AA Qi APT NN ei- MANN ATAL RAT 91° ANNÉE N° 1 15 JANVIER 190 Revue générale S'NCIenc pures ef appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction dee œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. SCIENCE ET COMMERCE A PROPOS DU RUBIS DE SYNTHÈSE Pendant longtemps il a paru impie d'imiter la Nature, et de braves gens ont crié au scandale quand la Chimie, science audacieuse, entreprit de fabriquer des substances identiques aux produits naturels. Un tel orqueil attentait aux prérogatives divines et méritait les pires chäâtiments. On aurait tort de croire cette philosophie périmée : elle s'épanouit encore dans l'âme des ignares. Ceux mêmes qui ont pardonné à la Tour Eiffel de s'élever à 300 mètres au-dessus de leur horizon habituel considèrent comme un outrage à l'honneur des lianes la synthèse de la vanilline, comme une insulle au bon renom de notre planète la production artifcielle de certaines gemmes réputées précieuses. Les importateurs de vanille demandent au Dieu-Etat de frapper de ses foudres le parfum que l'art réussit à créer‘. La Chambre syndicale de la Bijouterie-doaillerie supplie aujourd'hui M. le Ministre du Commerce de déclarer faux et de flétrir du nom d'imitation {oute substance minérale qu'une science avancée parvient à produire. Nos lecteurs connaissent les belles recherches de M. A. Verneuil, professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, sur l'obtention du rubis par la cristallisation de l'alumine avec quelques traces d'un sel de chrome dans un mélange de fuorures et de carbonates alcalins. Déjà couronnés de succès il Faune vingtaine d'années, ses travaux ont conduit à une industrie qui, à l'heure actuelle, menace d'une concur- rence redoutable le commerce des rubis naturels. 1] n° J a, en ellel, aucune différence entre le rubis de synthèse bien réussi et le rubis qu'on trouve dans le sol. Tous deux présentent même composition chi- mique, même densité, même structure cristallographique, mêmes qualités optiques. C’est à ce point qu'aucun spécialiste, praticien ou savant, n'est capable de les distinguer. Le rubis artificiel est vérita- blement du rubis. Mais il y a des vérités à M. de la Palisse que M. Prudhomme éprouve quelque peine à Saisir. Parce que les verroteries qui se donnent des airs de diamants sont des silicates el non du car- bone, parce que le plus souvent limitation d'une pierre précieuse ne ressemble à cette pierre que par la forme et la couleur, M. Prudhomme s'est habitué à confondre artificiel avec le faux, à considérer ces deux termes comme synonymes. De ce que T « imitation » du diamant n'est qu'un faux diamant, il conclut que le rubis artificiel est un faux rubis. Et le bon Joaïllier a tout intérêt à entretenir la candeur de M. Prudhomme, son client. Des savants, animés de l'esprit du mal, risqueraïent, si on les laissait approcher de M. Prudhomme, de le corrompre. Mais M. le Ministre du Commerce est là pour un coup! C'est à luï à écarter Satan et à faire la loi. On va done le supplier de proclamer seul vrai ce qu'on trouve * Voyez à ce sujet l’intéressant article de M. A. Béhal sur « L'œuvre de la Chimie contre l'œuvre de la Nature » dans la Revue du 30 novembre 1909, pages 912 et suivantes. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. | 1 » 2 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tout fait dans les entrailles de la Terre, de déclarer faux ce que peut faire la main de l'homme. O, grand Ministre, qui règnez dans les Cieux aussi bien qu'à Paris, vous qui pouvez décider que le thé s'appellera chocolat et que le chocolat s'appellera thé, protégez-nous; faites que le rubis préparé par nos concur- rents soit faux; et si, contre notre altente, vous ne pensez pas qu'il soit faux, décrétez qu'on devra le tenir pour tel. Ministre toul-puissant, qui êtes notre Père, à nous, joaïlliers, prolégez-nous; ne soyez ni le père, ni le frère, ni le cousin de nos concurrents ; ne permettez pas à leurs infernales découvertes d'exister; ne souffrez pas que le misérable oxygène, que le vil acide carbonique dégagés d'une cornue puissent jamais usurper les noms respectables de l'oxygène et de l'acide carbonique de l'air, gaz nobles, créés, sans doute, par l'un de vos honorables et très lointains prédécesseurs ; ne tolérez pas que Lavoi- sier et Meunier aient fait de l'eau; fermez les Universités, les Facultés, où s'élabore une science sub- versive; abaissez la superbe de la race maudite des chercheurs; laïssez-nous, O Grand Ministre, brüler M. Verneuil en place de Grève et nous livrer, dans la paix du cœur, au commerce traditionnel de nos pères. Faites, Seigneur Ministre, que les méchants et les produits des méchants soient chassés à jamais de votre département. Écrasez les savants du poids de votre mépris et leurs inventions des plus lourds impôts ; affermissez dans l'esprit des snobs les préjugés salutaires sur lesquels reposent la société en général et notre commerce en particulier, el nons vous enverrons de temps à autre de gentils petits cailloux à examiner. Ainsi soil-il ! On annonce qu'un chimiste de la rue Elie-de-Beaumont vient de réaliser à peu de frais la synthèse du granit. Dénoncé par le Syndicat humanitaire des carriers de Bretagne, fournisseurs des bordures de nos trottoirs, ce malfaiteur a été déféré à la Cour d'assises. On assure qu'un des membres les plus dangereux de l'Académie des Sciences, professeur de Pétrographie au Collège de France, sera poursuivi comme complice. Louis Olivier. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Emile Bréal. — Avec Emile Bréal, le Laboratoire de Physique végétale du Muséum vient de perdre l’un de ses plus anciens et plus sympathiques travailleurs. Né à Landau (Bavière rhénane) le 2 avril 1836, Emile Bréal entra au Muséum en 1877, presque aussitôt après son retour des pays annexés, où il s’occupait d’in- dustrie, et travailla longtemps avec Dehérain, au milieu de cette brillante phalange d’où sont sortis Moissan et Vesque, pour ne parler que des disparus ; à la mort de notre maître commun, il vint se réfugier dans mon service, avec le titre de préparateur des Hautes Etudes. Modeste jusqu'à l'excès, Bréal n’était guère connu que d'un petit nombre de physiologistes spécialisés ; on lui doit cependant plusieurs observations impor- tantes. Celles qui touchent aux nodosités radicales des Légumineuses suffisent à assurer la perpétuité de son nom dans l’histoire de la Biologie végétale ; c’est, en effet, Bréal qui a, le premier, réussi à propager les tubercules de Légumineuses par vaccination et à cul- tiver in vitro les organismes fixateurs d'azote qu'ils renferment. La question de savoir si ces tubercules sont des pro- ductions normales ou morbides se trouvait ainsi résolue; c'était, en outre, le premier exemple d’une inoculation conférant une qualité, aussi sûrement que l'inoculation d’un virus confère la maladie ou l’immu- nité. En 1889, l'Académie des Sciences décerna à ce travail le prix Desmazières, et la Société nationale d'Agriculture l'honora de sa plus haute récompense. A signaler quelques autres recherches sur l'absorp- tion des matières ulmiques, les fermentations ammo- niacale et nitrique, la production de l’asparagine chez les Légumineuses à l'ombre, etc. Son dernier travail est relatif à un mode particulier de sulfatage des grains de semence, qui, surtout dans le cas du maïs, facilite la germination et augmente notablement la récolte. Il cherchait encore à perfectionner sa méthode quand la mort est venue le surprendre, le 21 décembre 1909, subite et douce, comme si elle eût craint de troubler son inaltérable quiétude. Bréal était foncièrement bon ; aussi n'eut-il jamais que des amis, auxquels il laisse d’unanimes regrets et un noble exemple : celui du travail désintéressé, accompli en dehors de toute compétition, dans la plus profonde sérénité de l'esprit et la plus parfaite amé- nité pour tous. L. Maquenne, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle. Ludwig Mond. — La Science chimique, spéciale- ment la Chimie industrielle, vient de perdre l’un de ses plus éminents représentants en la personne de Ludwig Mond, décédé à Londres le 11 décembre 1909. Né à Cassel le 7 mars 1830, il fréquenta l'Ecole Polytechnique de cette ville, puis il alla étudier la Chimie à Marburg, avec Hermann Kolbe, et à Heidel- berg, avec Robert Bunsen. Sa première contribution à la Chimie industrielle fut une méthode pour la récupé- ration du soufre qui se perd à l’état de sulfure de cal- cium dans la fabrication de la soude par le procédé Leblanc. 11 se rendit en Angleterre en 1862 et y tra- vailla à l'application pratique de son brevet. Après un nouveau séjour sur le continent à Utrecht, il revenait en Grande-Bretagne en 1867 pour s’y fixer cette fois définitivement. A cette époque, le seul procédé connu pour la fabri- cation de la soude était celui de Leblanc, qui consis- tait à traiter le sel marin par l'acide sulfurique, puis à réduire par le charbon et la chaux le sulfate de soude formé. Mais plusieurs chimistes travaillaient à décou- vrir une méthode plus simple, et Ernest Solvay venait de faire connaître le procédé qui porte son nom et qui repose sur l'action de l'acide carbonique sur une solu- tion de sel marin saturée d'ammoniac gazeux. Mond visita les usines Solvay à Couillet en 1872 et ce qu'il vit le décida à introduire le procédé en Angleterre. Il avait fait, dix ans auparavant, la connaissance de J. T. Brunner; il s'était lié d'amitié avec lui et ils avaient CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 3 formé le projet de s'associer un jour pour monter une industrie chimique. L'apparition du procédé Solvay leur fournit l'occasion désirée et, en 1873, ils posaient les bases de ce qui devait devenir la grande fabrique d’alcalis Brunner, Mond et Cie, Les débuts de l’entre- prise furent laborieux, par suite des difficultés techniques qui se présentèrent dans l'exploitation des brevets Solvay; mais la science et l'habileté de Mond les surmontèrent une à une et, à partir de 1875, la maison prit un développement rapide. Une autre question dont se préoccupa Mond est celle de l’utilisation économique des combustibles; le résultat de ses travaux sur ce sujet, dont l’origine remonte à 1879, fut le système de production du gaz qui porte son nom. Du charbon de terre bitumeux de faible valeur est introduit dans un gazogène et soumis à l’action d'air soufflé chargé de vapeur surchauffée. Les gaz produits sont amenés en contact avec de l'acide sulfurique dilué, qui absorbe l'ammoniaque en la trans- formant en sulfate d'ammonium, tandis que les gaz résiduels sont utilisés à l'éclairage, au chauffage ou dans les moteurs à combustion interne. Mond essaya également d'utiliser la pile à gaz de Grove pour la production industrielle de l'électricité, et, quoiqu'il n'y ait pas réussi, ces recherches le con- duisirent accidentellement à une découverte qui suffi- rait à perpétuer son nom : celle des métaux-carbo- nyles. Voulant débarrasser l'hydrogène contenu dans le gaz de gazogène de l’oxyde de carbone qui l’accom- pagne, il reconnut, avec la collaboration de C. Langer et H. Quincke, que ce dernier-gaz se combine avec le nickel pour former une substance gazeuse, connue aujourd’hui sous le nom de nickel-carbonyle. Ce corps était le premier représentant d’un groupe de composés chimiques entièrement nouveaux, dont Mond a pré- paré plusieurs autres membres", Il se forme en amenant l'oxyde de carbone au contact du nickel vers 80° et il se décompose à 200° avec production de nickel métal- lique. Ces propriétés ont été appliquées par Mond à l'extraction du nickel de ses minerais et le procédé fonctionne aujourd'hui en grand à Swansea. Devenu, par l'exploitation de ses découvertes, le possesseur d’une très belle fortune, Mond en employa très libéralement une partie à favoriser le progrès des recherches scientifiques. Ainsi c’est grâce à son appui que la Société Royale de Londres, qui lui avait ouvert ses portes en 1891, a pu entreprendre la publication de son Catalogue international des Mémoires scientifiques, instrument de travail d'une valeur inappréciable pour tous les chercheurs. Mais c'est surtout l'Institution Royale qui a bénéficié de sa générosité : après avoir encouragé à de nombreuses reprises les recherches faites dans ses laboratoires, il lui a fait don, il ya quelques années, d’un magnifique bâtiment pour l’ins- tallation d'un laboratoire destiné aux recherches de science pure et appliquée: il l'a doté des appareils les plus modernes et d'une rente annuelle suffisante pour en assurer le fonctionnement. De ce laboratcire Davy- Faraday sont sortis quelques-uns des travaux mar- quants du commencement de notre siècle, — ceux de Dewar sur les basses températures par exemple, — et c’est’ un des plus beaux titres de Mond à la recon- naissance des savants que d’en avoir facilité l’éclosion. L. Brunet. Q : $ 2. — Astronomie La constitution physique des comètes. — La véritable constitution des noyaux Cométaires semble échapper à l'observation directe, et les astronomes ont soutenu, à ce sujet, les hypothèses les plus opposées: tour à tour, ils ont admis, en effet, que le noyau des comètes pouvait être solide, liquide ou gazeux. Si l'on admet, avec M. Schiaparelli, une relation entre les comètes et les essaims d'étoiles filantes, il Voir la Revue du 30 septemire 1909, t. XX, D. 164. semble difficile de voir dans les amas cométaires autre chose qu'un nuage de particules solides, analogues À celles qui composent les étoiles filantes et les aéro- lithes. Ce serait, du moins, la conclusion qu'on en pourrait tirer pour les noyaux des comètes, et, sur cc point, il nous faut revenir aux théories du Professeur Newton, qui assimilait ces astres errants à de véritables bancs de sable : « sand-banks ». Quelle est la grosseur des particules? Nous l'ignorons complètement, mais il est probable qu'elle peut varier depuis la grosseur d'une poussière jusqu'à celle d'une masse atteignant plusieurs mètres cubes. La question de leur origine, qui a été traitée théori- quement par le colonel du Ligondès dans La Formation mécanique du système du monde, ne résout pas le pro- blème de leur formation physique. L'hypothèse météo- ritique en recule la solution, et, dans ce domaine parti- culier de la science, nous ne sommes guère plus avancés qu'au temps de sir William Herschel. Quoi qu'il en soit, ces particules sont très certaine- ment séparées par de grands intervalles et, toutes pro- portions gardées, nous pouvons dire que les noyaux cométaires sont assimilables à des corps de la grosseur d'une pomme de pin et qui vogueraient à quelques centaines de mètres de distance les uns des autres. Chaque particule porte avec elle une enveloppe gazeuse formée principalement d'une substance four- nissant un spectre analogue aux hydrocarbures. Sous l'action du Soleil, et par un procédé d'ordre électrique peut-être, cette enveloppe devient lumineuse ou phos- phorescente. On ne peut, sans cette hypothèse d’une large distribu- tion des matériaux solides au sein du noyau, expliquer certains faits bien constatés aujourd'hui: par exemple, la visibilité, sans diminution sensible d'éclat et sans réfraction appréciable, des étoiles même les plus faibles au travers du nuage cométaire. Si, comme le faisait récemment remarquer M. Burns, le noyau d’une comète consistait en une masse gazeuse continue, la réfraction aussi bien que l’absorption nous paraîtraient fort sensibles, et le fait que les comètes n’ont jamais présenté de phénomènes de ce genre prouve évidemment en faveur de l'existence de particules solides très disséminées. Th. Moreux. $ 3. — Art de l'Ingénieur L'Exposition internationale aéronautique de Francfort-sur-le-Maïin. — Cette Exposition est close depuis quelques semaines. Comme c'était la pre- mière exposition de ce genre, on peut se demander si elle a présenté une véritable importance scientifique. A cette question, il doit être répondu affirmativement. En voici les raisons : Pour utiliser au mieux les bal- lons dirigeables, ou seulement les ballons libres, il est d'une grande importance de bien étudier les couches atmosphériques qui entourent la Terre, ce que la Météo- rologie recherche activement. Le fait que l'on a beau- coup négligé cette science jusqu'en ces dernières années ne peut être nié, Alors que depuis longtemps l’on était déjà bien renseigné sur les astres très éloi- gnés et sur leurs rapports avec la Terre, il régnait encore une grande ignorance sur la nature de l'air qui nous entoure, et cela jusqu'au milieu du siècle der- nier. Aujourd'hui encore, ce problème n’est pas défini- tivement résolu. Il y a un fait certain, c'est que beau- coup de personnes ressentent, et cela vingt-quatre heures à l'avance, le changement de température, et surtout l'apparition de la pluie; ce qui prouve qu'il y à des variations dans la composition de l'air avant ce changement. Nous ne possédons jusqu'à présent aucun instrument de précision à ce sujet : sans déprécier le baromètre et sa valeur réelle pour la prévision du temps, il faut cependant reconnaître que cet instru- ment, de même que l’hygromètre, manque souvent de précision. Même les cartes synoptiques, qui indiquent 1 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE déjà un certain temps à l'avance la répartition de la pression de l'air, ne nous suflisent pas, ainsi que le prouvent les erreurs nombreuses des pronostiqueurs les plus expérimentés. Il semble donc qu'il y ait dans les couches atmosphériques des changements qui ne sont perceptibles ni par l’aéromètre ni dans l'humidité de l'air. L'intérêt toujours croissant que l'Aviation devra porter à la Météorologie nous fait espérer que la science éclairera ce problème. Pour cette seule raison déjà, l'Exposition de Francfort n'aurait pas été inutile. A ce sujet, il faut noter que, pendant l'Exposition, des cartes synoptiques ont donné, deux fois par jour, les pronostics du temps. En Allemagne, comme en beau- coup d’autres pays, il est d'usage de publier les pro- nosties vers midi, en se basant sur les dépêches reçues entre huit et neuf heures du matin. Exceptionnelle- ment, on a publié un second pronostic, suivant des dépêches recues à 2 heures de l'après-midi. Très sou- vent, les pronostics se basant sur les dépêches du matin ne se sont pas confirmés. Il me paraît donc plus convenable de publier les pronostics l'après-midi seu- lement, pour qu'ils ne soient connus du public que le soir, d'autant plus qu'une publication à midi de la température probable de la seconde partie de la jour- née ne présentera, en bien des cas, qu'une minime importance. En ce qui concerne l'Exposition même, l'intérêt le plus vif s'est naturellement porté sur les différents genres d'aéroplanes qui ont fonctionné, exception faite des ballons libres qui, d’ailleurs, n’ont rien appris de nouveau. L Les ballons dirigeables ont été représentés en leurs trois genres : les rigides, mi-rigides et non rigides. Cependant, le nombre de spécimens a été trop insuffi- sant pour permettre un jugement décisif. L'on peut cependant déclarer, dès maintenant, que les ballons rigides peuvent plus facilement fonctionner par le mauvais temps que les ballons non rigides, quoiqu'ils subissent également l'influence de la température, ce qu'ont prouvé les différents accidents du Zeppelin. Les avantages d’un transport et d’un abordage plus faciles reviennent aux ballons non rigides. On avait peu d’oc- casions d'établir des comparaisons, car, une fois seulement, les deux genres de ballons ont manœuvré ensemble, et l’on a pu constater alors que le non rigide Parseval avancait mieux que le rigide Zeppelin. Les aéroplanes étaient peu représentés à l'Exposition, et, à part Blériot et Rougier, il n'y avait pas d'aviateurs remarquables. On avait l'impression que, pour les aéro- planes, l’agilité personnelle de l’aviateur exerce une plus grande influence que le système de l’aéroplane. Il est à prévoir que l'Exposition de Francfort sera imitée, et que d’autres suivront. Si elle n'avait produit que ce résultat, elle aurait eu déjà sa raison d’être, car elle tien- draainsien éveil l'intérêt quis’attache àla Météorologie. Léopold Lob. $ 4. — Physique L'activation artificielle de l'eau. — On sait que la radio-activité des eaux minérales explique les effets curatifs, naguère énigmatiques, de certaines sources. Or, en raison de l'instabilité de l’émanation qu'elles renferment, la plupart des eaux minérales perdent en peu de jours leur activité et, par consé- quent, leurs vertus thérapeutiques. Il n'existe que peu d'eaux qui, renfermant des substances radio-actives donnant un dégagement permanent d'émanation, con- servent constamment une partie de leur activité. Ces faits une fois reconnus, l’idée se présentait spon- tanément de régler à volonté l’activité de l’eau et de la douer d'effets curatifs donnés par l'addition de quan- tilés dosées d'émanation. L’Administration des Salines de Kreuznach fabrique ainsi, depuis quelque temps déjà, de l'eau potable et des bains artificiellement activés par les matières radio-actives renfermées dans les sources de cette station balnéaire. Le dispositif activateur employé dans ce but consiste en un vase rond de laiton de 50 centimètres de hau- teur. Un couvercle amovible sert à l'introduction de l'eau inactive (eau du secteur par exemple), tandis qu'un robinet fixé au milieu permet la sortie de l’eau activée. Le rendement journalier de l'appareil est de 23 rations d’eau potable de 100 grammes chacune, d'un degré d'activité de 2.000 unités Mache par litre. Un appareil plus grand sert à produire de l’eau de bain artificiellement activée. Cet appareil, disposé immédia- tement à côté de la baignoire, fournit chaque jour quatre bains d'une teneur de 50 unités Mache par litre d’eau de bain. Les 5 litres d’eau à activation concentrée qui sortent de l’activateur sont amenés, à travers um tube de caoutchouc combiné à un distributeur, au bain préparé au préalable. Le distributeur consiste en um tissu de toile métallique à mailles étroites constituant un tube fermé aux extrémités et relié d'un côté au tube de caoutchouc. Ce dispositif est destiné à éviter les pro- jections de liquide et les pertes d'émanation qui em résultent, pendant l'introduction de l’eau activée dans la baignoire. L'activation de l’eau se fait par contact avec les pro- duits radio-actifs insolubles retirés, grâce à un pro- cédé spécial, des résidus laissés par les eaux fortement actives de Kreuznach. L'eau n'étant chargée que d'éma- nation, l’on ne risque pas d'épuiser le pouvoir activant. L'activité se maintient constante dans le cas d’un débit uniforme; un débit réduit augmente temporairement l'activité qui, après quelque temps, redevient constante. Dans un récenttravail”, M. C. Ramsauer rend compte des résultats de l'examen qu'il a fait d'un activateur pareil à l'Institut radiologique de l'Université de Hei- delberg. Il observe que les pertes d'activité de l'eau abandonnée à elle-même, surtout dans le cas d’un rapport favorable entre le volume et la surface, sont. peu importantes pendant la première heure. L'agita- tion réduit, au contraire, rapidement les propriétés actives de l’eau. Toute diffusion à l'air étant évitée, l'activité de l'émanation mettrait 3,75 Jours pour tomber à moitié, en raison exclusivement de la décom- position interne. Les produits de décomposition de l'émanation qui se convertissent, avec une constante de quelques minutes, en radio-plomb très peu actif (constante de décomposition : quarante ans) Sont sans importance. M. Neumann, directeur des Salines de Kreuznach, vient d'imaginer une autre méthode d'activation parti culièrement efficace, destinée à l'activation très intense de liquides quelconques (2.000 à 50.000 unités Mache par litre). Les détails de cette méthode sont encore tenus secrets. Alfred Gradenwitz. LS $ 5. — Océanographie Une nouvelle Expédition océanographique dans PAtlantique. — Le Gouvernement norvégien * vient de mettre son navire le Michael Sars à la dispo- sition d'une expédition projetée par Sir John Murray pour l'exploration des grands fonds de l'Océan Atlan- tique, des iles Canaries aux Feroe, au printemps de 1910. Cette expédition sera accompagnée par M. Hjort, direc- teur des pêcheries de Norvège, M. Kæfæd, son assis- tant, et M. Helland-Hansen, qui continueront à être payés par leur gouvernement, ainsi que le capitaine et le mécanicien du navire, tandis que toutes les autres dépenses sont assumées par Sir John Murray. Le but de l'expédition est d'essayer dans le grand Océan les méthodes et les instruments nouveaux qur ont été imaginés dans ces dernières années. Les organisateurs estiment. en particulier, que les grands. filets de pêche et les lignes de fond qui sont mainte- nant employés dans un but économique dans les eaux Fe L'NME OPTRSENRENREE * 2 7 1 Münchener med. Woch., n° 31, 1909. 2 Scottish Geographical Magazine, t. XXV, p.654 (Décem- bre 1909). CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 5 peu profondes DER Ent être utilisés avec succès dans les grands fonds, même jusqu'à 5.000 mètres. Récem- ment, le Michael Sars, au moyen d'une ligne de fond, a rapporté d'une profondeur de plus de 800 mètres 225 poissons, dont 100 appartiennent à des espèces nou- velles. Si ces appareils de capture plus puissants peu- vent être employés avec succès dans les grandes pro- fondeurs de l'Atlantique, nul doute que des résultats z0ologiques importants et intéressants ne soient oble- nus. L'expédition se propose d'entreprendre également des recherches sur la distribution des œufs et des jeunes des poissons pélagiques, sur celle des algues pélagiques etses relations avec la profondeur à laquelle énètre la lumière solaire aux différentes latitudes, sur ka température et la densité des couches d'eau pro- fonde, sur l'intensité des courants sur les fonds, sur les dépôts océaniques profonds. Le Michael Sars quittera Plymouth le 6 avril pour se rendre à Gibraltar, le long des côtes européennes, puis le long de celles du Maroc jusqu'à Mogador, de là à Madère et aux Acores, enfin, si le temps le permet, à Terre-Neuve, en Islande, aux Feroe et en Ecosse. Le voyage entier durera environ 4 mois. $ 6. — Géographie et Colonisation Les Conventions récentes du Gothard et .u Simplon. — En 1870, la Suisse se mettait d'ac- cord avec l'Italie et la Confédération de l'Allemagne du Nord pour le percement du Gothard. Moyennant le versement de deux subventions de 45 et de 20 mil- lions de francs, ces deux derniers Etats obtenaient des droits aux bénéfices de la ligne future. Ce sont ces droits que la Suisse à dû éteindre en procédant au rachat du réseau auquel appartient le tunnel du ‘Gothard. Les négociations entre les trois pays ont fait l’objet de la Conférence qui s’est réunie à Berne du 24 mars au 20 avril 1909. Pour compenser les frais élevés de construction de Ja ligne, les taxes de transit étaient majorées en ajou- tant à la distance réellement parcourue un certain nombre de kilomètres supplémentaires; c'est ainsi que A’Erstfeld à Chiasso, sur un trajet de 164 km. 5, la sur- taxe est de 64 kilomètres. C’est sur ces majorations de tarifs qu'ont porté les discussions de la Conférence. Comme le fait remarquer très justement M. Jean Brunhes, dans une excellente étude d'ensemble‘, le Gothard est par-dessus tout la grande voie par la- quelle s'échangent les produits industriels de l’Alle- magne contre les produits agricoles de l'Italie. Contre une participation problématique aux bénéfices excé- dant? °/, de dividende au capital-actions, — qui aurait pu être maintenue même avec le régime du rachat, — ces deux Etats ont obtenu de la Suisse une réduction des surtaxes de 35°/,, dès le 12° mai 1910, et de 50 °/, à partir du 1 mai 1920. Le commerce suisse ne bénéli- ciera pas de ces concessions, puisqu'elles ne s’appli- quent qu'au transit. De plus, un principe nouveau est appliqué : la ligne du Gothard jouira du régime de la ligne la plus favorisée, — analogue à la clause de la nation la plus favorisée que l’on insère dans les traités de commerce, — en ce sens que son trafic bénéficiera toujours des mêmes bases de taxes et des mêmes avantages qui sont ou seront accordés par les chemins de fer fédéraux à tout chemin de fer qui existe déjà ou qui sera construit à travers les Alpes. Le Lôtschberg est tout particulièrement visé. .La Conférence franco-suisse des voies d'accès au Simplon, ajournée une première fois en mars 1908, s’est réunie de nouveau à Berne du 1°" au 10 juin 1909. Trois lignes ont été étudiées. Le projet de raccourci Frasne-Vallorbe, sur lequel tout le monde était d'ac- ! JEAN BRON&ES : Gothard et Simplon. A propos des deux Conférences internationales de 1909. Æevue des Deux Mondes, 15 novembre 1909. cord, sera le premier construit. Aucun délai n'est fixé pour la voie de la Faucille, qui doit réunir Lons-le Saunier à Genève. Mais toutes les précautions sont prises pour son établissement le jour où l'on aura trouvé les sommes nécessaires. C’est ainsi que la Con- vention a prévu le rachat de la gare de Cornavin à Genève, la jonction de cette gare avec celle des Eaux- Vives, le partage du trafic entre les deux rives du Léman, la simplification des formalités douanières, lt passage des trains sur le territoire genevois avec Île personnel et les tarifs du réseau Paris-Lyon-Méditer- ranée, le doublement de la voie sur la rive francaise el sur le territoire suisse, de Genève à Saint-Maurice”. La troisième voie donne accès au Lôütschberg par Delle et le réseau de l'Est : le Moutiers-Grange per- mettra d'éviter le rebroussement de Sonceboz en cou- pant la chaine du Jura. Raccourci et tunnel, entière- mentsur territoire suisse, coûteront plus de 20 millions, mais le parcours Delle-Berne-Lütschberg-Simplon de- viendra le chemin le plus court de Paris à Milan, et une notable partie du trafic anglais, belge et hollandais, quis'achemine actuellement par le Gothard vers l'Italie, pourra emprunter nos rails et rentrer dans la sphère économique française. L'inscription tardive de ce projet au programme de la Conférence de 1908 avait été la cause de son ajournement. Il fallait obtenir un partage équitable du trafic entre cette ligne et les chemins de fer fédéraux, représentants du Gothard. L'entente est faite et l'on peut dire que la Conférence du Simplon, à l'inverse de celle du Gothard, donne satisfaction aux intérêts des deux parties contrac- tantes. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 7. — Enseignement A l'Ecole Polytechnique.— M. Carvallo, exami- nateur de sortie de l'Ecole Polytechnique, est nommé Directeur des études à cette école, en remplacement de M. Mercadier, admis, sur sa demande, à la retraite. M. Mercadier était entré à l'Ecole Polytechnique en 1856; sorti dans les Télégraphes, qu'il quittait en 1867 pour se consacrer à l'enseignement, il repre- nait du service en 1870. C’est alors que Gambetta le nommait Commissaire du Gouvernement de la Défense nationale et le chargeait de la direction des télégraphes à Paris. Pendant le siège, M. Mercadier organisa des services importants : celui des ballons qu'utilisa Gam- betta pour gagner la province; les dépêches par pigeons voyageurs et leur lecture microscopique; les sections de télégraphie militaire qui se distinguèrent à Champigny et à Buzenval. Après la guerre, il organisa l'Ecole supé- rieure de Télégraphie, dont il resta le directeur jus- qu’en 1881. C'est à cette époque qu'il prit la direction des Etudes à l'Ecole Polytechnique, où il avait été nommé répétiteur en 1875. Ses recherches sur l’'Acoustique et ses préoccupations de télégraphiste orientèrent ses travaux. La radio- phonie le conduisit en même temps que Graham Bell au premier exemple de téléphonie sans fil. L'Académie des Sciences a consacré l’ensemble de ses travaux en lui attribuant le prix Pierson-Périn. Nominations universitaires. — M. Perez, pro- fesseur de Zoologie à la Faculté des Sciences de Bor- deaux, est nommé maître de conférences de Zoologie (chaire de l’Evolution des êtres organisés) à la Faculté des Sciences de Paris. ; M. Cartan, professeur à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé maître de conférences de Mathé- matiques à la Faculté des Sciences de Paris. 1 Sur l'établissement de ces lignes et leur influence éco- nomique. Cf. nos Chroniques de la Revue générale des Sciences, 28 février 1904, 30 mai 1905, 40 juillet 1906, et notre ouvrage : La Suisse au XXe siècle, Paris, Colin, 1908. 6 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES DE LA MATIÈRE * L'hypothèse d'Avogadro-Ampère, d'après laquelle des volumes égaux de différents gaz, pris dans les mêmes conditions de température et de pression, contiennent le même nombre de molécules, a con- duit à donner le nom de poids moléculaires des corps simples ou composés aux masses de volumes égaux de ces corps à l’état gazeux (l'usage a con- sacré le nom de poids moléculaire). Les poids mo- léculaires des gaz sont les masses de volumes de ces gaz égaux au volume occupé par 2 grammes d'hydrogène ; ils sont ainsi proportionnels aux den- sités des gaz. Je n'ai pas besoin de rappeler ici comment à ces poids moléculaires ont été reliés les poids atomiques des corps simples, et comment la formule chimique du corps représente la composi- ion de son poids moléculaire. Si l’on emploie le langage de la théorie moléculaire, on dira que la formule d’un corps représente la composition de sa molécule en indiquant les atomes qui la consti- tuent. Pour la plupart des gaz, la densité par rapport à l’un d’entre eux, l'hydrogène, par exemple, est à peu près indépendante de la température; le poids mo- léculaire est alors défini sans ambiguïté, et peut être appelé le poids moléculaire normal de la sub- stance. Il est représenté par une formule déter- minée ; ainsi O*et H°0 représentent les poids molé- culaires normaux de l'oxygène et de l’eau. Pour quelques-uns, la densité varie avec la tem- pérature; elle décroit quand la température croît, et reste constante au-dessus d’une certaine tempé- rature. Le poids moléculaire varie proportionnelle- ment à la densité. On interprète cette variation en admettant que les molécules les plus simples, celles qui sont définies par la densité constante la plus faible, peuvent s'associer à basse température. Par exemple, la densité de la vapeur d'iode reste constante depuis le point d’ébullition (180°) jusque vers 650°, et cette valeur constante définit un poids moléculaire 254, double du poids atomique de l'iode 127; au-dessus de 650°, la densité diminue jusque vers 1.500°, température à laquelle elle atteint une valeur deux fois plus petite qu'au-dessous de 650°; elle reste constante au-dessus de 1.500° et définit un poids moléculaire 127. On déduit de là que le poids moléculaire de l'iode est représenté —————————…——…—————.——————…——…—…—…—————…—.—_—_————_—_________]__—…—— 1 Cet article est le développement d’un chapitre d’un livre qui paraîtra prochainement à la librairie Alcan (Nouvelle Collection scientifique) sous le titre : Les étals physiques de la matière. par l'au-dessous de 650° et par I au-dessus de 1.500. En d’autres termes, la molécule d'iode à l'état de vapeur est mono-atomique au-dessus de 1.500°, di- atomique au-dessous de 650° ; entre ces deux tempé- ratures, la vapeur d'iode est un mélange de molé- cules mono-atomiques etdi-atorniques, la proportion de celles-ci étant d'autant plus grande que la tem- pérature est plus voisine de 650°. Ainsi, au-dessous de 1.500°, il y a association moléculaire; une partie des molécules, puis toutes au-dessous de 650°, sont complexes, formées par l'association de deux des molécules les plus simples. Résumons les principaux cas analogues, qui nous seront utiles plus loin pour certaines comparai- sons, et remarquons d'abord que ces cas sont assez rares. La densité de la vapeur de soufre n'est constante qu'au-dessus de 4.000° environ, et définit alors un poids moléculaire 64, double du poids atomique 32 du soufre, et par suite une molécule diatomique S?. A des températures plus basses, le poids molécu- laire croît jusqu'à environ 230 au point d'ébullilion, ce qui correspondrait à peu près à S7; mais, la den- sité variant constamment jusqu’au point d’ébulli- tion, on admet plutôt que la composition de la mo- lécule peut aller jusqu’à S', avec des stades inter- médiaires entre $° et S', et que la vapeur renferme des molécules de différentes complexités, comme la vapeur d’iode entre 650° et 4.500. Le poids moléculaire du peroxyde d'azote est représenté par AzO* au-dessus de 150° environ; au- dessous de cette température, il augmente en ten- dant vers la valeur (AzO*)* à mesure que la tempé- rature se rapproche du point d'ébullition 22. Celui de l'acide acétique est C*H‘0* au-dessus de 2309, ets'élève à mesure que la température s'abaisse au-dessous de 230°; à 125°, c'est-à-dire à quelques degrés au-dessus du point d'ébullition (119°), il est représenté par (C°H‘0*)#, ce qui indique qu'une partie des molécules sont complexes, formées sans doute par l'association de 2 molécules simples. Le cas de l'acide formique est analogue : son poids moléculaire est CH°0° au-dessus de 216°, s'élève à mesure que la température s'abaisse au- dessous de 2169, et est (CH*0*):" au voisinage du point d'ébullition (405°). Les poids moléculaires ont été introduits dans un certain nombre de formules exprimant soit des lois déduites de considérations théoriques, soit des CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES 7 lois empiriques. À chacune de ces formules se rattache une méthode de détermination des poids moléculaires, et ces déterminations se rapportent, suivant les cas, à un état gazeux, liquide ou solide de la substance considérée. Nous allons passer en revue les principales de ces méthodes et les résul- tats qu'on en déduil; nous examinerons d’abord celles qui se rapportent à des substances pures, puis celles qui se rapportent à des substances dis- soules. I. — POIDS MOLÉCULAIRES DES SUBSTANCES PURES. $ 1. — Formule de Eôtvôs-Ramsay. Méthode de la tension superficielle. Cette méthode a été exposée par Ramsay lui- même dans cette evue (1894, p.185) ; j'en rappelle brièvement le principe : Le produit du volume qu'occupe le poids moléculaire d'un gaz par la pression est proportionnel à la température absolue, et le coefficient de proportionnalité est le même pour tous les gaz. Ce volume moléculaire renferme le même nombre de molécules pour tous les gaz; ‘par analogie, on a cherché si le produit de la ten- sion superficielle par une surface -contenant le même nombre de molécules superficielles pour différents liquides pourrait être exprimé aussi sim- plement en fonction de la température. En divisant le poids moléculaire M d’un liquide par sa densité d, on obtient ce qu'on appelle son volume moléculaire 7 puissance + de celte expression représente (e une surface dont on peut admettre qu'elle satisfait à la condition indiquée. Quoi qu'il en soit, c’est 2 cette expression (7) qui intervient dans une for- d mule dont le type a été indiqué par Eôtvôs et qui a été précisée et appliquée par Ramsay et Shields. Cette formule est : y étant la tension superficielle (mesurée, comme toutes les quantités dont il sera question ici, en unités G.G.S.), 6 la différence entre la température considérée £ et la température critique {, du liquide, et K un coefficient qui a, en principe, la même valeur pour tous les liquides : 2,1 environ. Cette constance de K est établie non par des considérations théoriques, mais par les faits sui- vants : pour un certain nombre de liquides dont on à pu mesurer la tension superficielle dans de larges limites de témpérature, les variations de la tension superficielle sont bien représentées par la formule précédente (sauf au voisinage de la température critique), en prenant pour valeur de M celle du poids moléculaire normal, et avec une valeur di coefficient K voisine de 2,1 (les valeurs extrêmes ont été 2,02 pour le formiate d'éthyle et 2,248 pour l'isobutyrate de méthyle). Pour ces liquides, la dérivée par rapport à la température dr ee 2 — —_ 3 dt [r ) | est constante et égale en valeur absolue à 2,1, puis- que 0 est de la forme 6—/,—1; on a trouvé la même valeur de cette dérivée dans des mesures faites dans un plus petit intervalle de température pour un très grand nombre de liquides, formant la grande majorité des liquides étudiés, Il est raison- nable de conclure de là que pour tous ces liquides le poids moléculaire est normal, c'est-à-dire les molécules semblables aux molécules gazeuses. Mais, pour certains liquides, cette dérivée n’est pas constante, lorsqu'on prend comme précédem- ment pour valeur de M le poids moléculaire normal; elle est variable avec la température et supérieure à 2,1. Si on veut alors conserver à la dérivée la valeur constante 2,1, c'est-à-dire si l'on admet la généralité de la relation vérifiée dans la plupart des cas, on est conduit à remplacer M par une valeur supérieure au poids moléculaire normal, de la forme My, x étant un facteur supérieur à l'unité qui représentera, à chaque température, le degré moyen d'association moléculaire du liquide con- sidéré. On trouve ainsi, pour ces liquides, un degré d'association variable avec la température et crois- sant quand la température décroit. Le poids moléculaire moyen de l’eau, parexemple, correspondrait à (H?0)** entre 120 et 140°, (H°0)**! entre 0 et 10°, et de même le degré moyen d'asso- ciation varierait : pour l'alcool éthylique de 1,57 (à 150°) à 3,34 (à — 90°), pour l'acide acétique de 2,36 (à 150°) à 3,73 (à 20°). Ramsay et Shields trouvent ainsi parmi les liquides à molécules associées : les alcools, les acides gras, le phénol, l’acétone, le cyanure d’éthyle, l'éthane nitré. On peut remarquer, en particulier, que les liquides oxhydrilés, c'est-à-dire dont la for- mule de constitulion contient le groupement oxhy- drile (OH), sont à molécules plus ou moins associées. L'acide acétique, l'acide formique, dont les molé- cules sont déjà associées à l’état gazeux, presen- tent le même caractère à l'état liquide, mais avec un degré d'association plusélevé; ilen est de même pour le soufre, pour les molécules liquides duquel la méthode de la tension superficielle indique une composition voisine deS*. D'ailleurs, un assez grand nombre de substances non associées à l'état gazeux le sont à l’état liquide. A vrai dire, si cette méthode paraît bien fournir de précieux renseignements qualitatifs sur les 8 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES liquides à molécules associées (nous verrons que ces renseignements s'accordent généralement avec ceux que donnent d'autres méthodes), il semble que les résultats quantitatifs soient assez peu précis, puisque Ramsay lui-même indique qu'une autre interprétation des résultats numériques conduit à des degrés d'association assez différents des précé- dents, et plus faibles”. Dutoit et Mojoïu ont proposé une formule diffé- rente pour relier la tension superficielle au poids moléculaire *. Cette formule est : 22M — 0,6T (4,8 — log p), dans laquelle p représente la tension de vapeur du liquide à la température absolue T et # l'expression dy gd g accélération de la pesanteur). Les résultats déduits de cette formule concordent en gros avec les résultats de Ramsay et avec ceux qu'on a obtenus depuis les travaux de Ramsay par l'application de sa formule : l’eau, les alcools, acides gras, oximes, nitriles, acétones, phénols, amines non substituées, aldéhydes seraient à molé- cules associées. Pour quelques liquides, les résul- tats donnés par les deux formules sont un peu différents; par exemple, quelques liquides trouvés normaux par Ramsay seraient, d'après la formule de Dutoit, légèrement associés à basse température et normaux à température élevée (aniline, benzoni- trile, nitrobenzène, pyridine). On peutremarquer que ces formules font interve- nir la densité, qui n’est peut-être pas tout à fait la même dans les couches superficielles, siège des phénomènes capillaires, et dans les couches pro- fondes des liquides ; les résultats obtenus corres- pondraient, en principe, aux molécules des couches superficielles. La formule de Ramsay a été appliquée à quelques gaz liquéfiés, qui paraissent avoir un degré moyen d'association un peu plus élevé qu'à l’état gazeux : azote, oxygène (Grunmach), acide chlorhydriqne, phosphure d'hydrogène (Steele). Application aux liquides cristallins.— L'applica- tion de la méthode de Ramsay aux liquides cristal- lins par Schenck*est particulièrement intéressante, parce qu'elle a donné des renseignements sur le poids moléculaire de substances pures à Zétat cris- tallin. On sait que ces substances, étudiées d’abord par Lehmann, puis par Schenck et un grand nombre d’autres physiciens, présentent deux états {y tension superficielle, d densité du liquide, 1 V. aussi Livixésrone et MorGax : Zeitschrift für physi- kalische Chemie, t. LXVII, p. 412, 1909. 2 Durorr et Mosoïu : Journ. de Chimie physique, 1. NII. p.174, 1909. 3 R. SCHENCK p. 346, 1898. : Zeitschrift f. phys. Chemie, t. XXV, liquides stables : un état liquide isotrope ordinaire, et un état liquide cristallin dont le domaine de stabilité s'étend entre le domaine de la variéte solide et celui de la variété liquide ordinaire. Par exemple, pour le para-azoxyphénétol, dont il va être question, l’état liquide cristallin est stable entre 134° et 165°, et à ces températures s'effectuent de véritables changements d'état, caractérisés l’un et l’autre non seulement par un changement dans la structure, mais par une variation brusque des différentes propriétés physiques. Or, Schenck a trouvé que la dérivée : df.fM\E al(c)°] est, pour deux de ces substances, le para-azoxyphé- nétol et le para-azoxyanisol, sensiblement la même à l’état liquide isotrope et à l’état liquide cristallin, et voisine de 2,1, d'où il conclut que le poids molé- culaire de ces substances est, aux deux états li- quides, celui qui correspond à leurs formules les plus simples C“H'$#Az'0$ et C'*H!*Az'0°. Ainsi, une substance peut avoir à un état cristallin les mêmes molécules simples qu'à l'état liquide ou à l'état gazeux. Il peut d’ailleurs n'en être pas ainsi: Schenck a trouvé que, pour le benzoate de choles- térine, la dérivée précédente est inférieure à 2,1, et beaucoup plus faible pour l’état liquide cristallin que pour l’autre, ce qui semble montrer que les molécules de cette substance sont associées à l’état liquide, le degré d'association étant plus grand à l’état liquide cristallin qu'à l’état liquide isotrope. $ 2. — Formules de Troutonet de de Forcrand. La formule empirique de Trouton', reliée à des considérations théoriques par Le Chatelier*, fait intervenir la chaleur latente de vaporisation L. Cette formule est : T représentant la température absolue d’ébullition, L la chaleur latente de vaporisation à la tempéra- ture d'ébullition, M le poids moléculaire de la vapeur à la température d'’ébullition et C une constante; on voit qu'on peut exprimer la loi de Trouton en disant que le quotient de la chaleur latente moléculaire de vaporisation par la tempéra- ture absolue d’ébullition est une constante. Trouton ayant calculé C pour une trentaine de corps trouva que, pour la plupart d’entre eux, sa valeur est peu variable, comprise entre 20,5 et 23,8, avec une moyenne égale à 22,9 (exemples : brome, 1 TROUTON : p. 5#, 1884. 2? H. Le CHATELIER : p- 340, 1888. Philosophical Magazine, 5° série, t. XVII, Annales des Mines, 8e série, t. XIII, CH. MAURAIN -— LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES 9 sulfure de carbone, anhydride sulfureux, benzène, acétone, chloroforme, iodure d'éthyle, acide buly- rique). Mais, pour certains, elle est beaucoup plus faible : acide formique, 14,88 ; acide acétique, 15,72 ; iode 12,8 (mais la valeur de L est très incertaine). Au contraire, l’eau et les alcools méthylique, éthylique et amylique donnent des valeurs plus fortes, voisines de 26. Des premiers de ces écarts on peut donner l'in- terprélation suivante : si C a une valeur plus faible que la valeur normale lorsqu'on donne à M la va- leur du poids moléculaire normal, c'est qu’en réa- lité le poids moléculaire de la vapeur est supé- rieur au poids moléculaire normal, et, en effet, pour les acides formique et acélique, cela s'ac- corde bien avec ce que nous avons dit de leur den- sité de vapeur. Pour expliquer le second genre d'écarts, corres- pondant aux valeurs trop grandes de C, on peut supposer, au contraire, que les molécules sont associées à l'état liquide, et que la chaleur latente L mesurée correspond à deux phénomènes ther- miques concomitants : 1° de la destruction des associations moléculaires, 2 de la vaporisation proprement dite; ce scrait à cette dernière quantité de chaleur seulement que devrait se rapporter la quantité L introduite dans la formule, et l'existence de la première, inséparable de la seconde, rend rl ession EM trop grande. E 5 express T p grande. En conséquence, on doit considérer les molécules de l’eau et des trois alcools comme associées à l’état liquide, ce qui s'accorde bien avec les résultats déduits de la mé- thode de Ramsay. La manière même dont on interprète les écarts dans les deux sens montre combien délicate est l'application de la loi de Trouton ; les deux phéno- mènes précédents, qui motivent des écarts en sens inverses, peuvent se produire tous deux, de sorte que, en toute rigueur, et même si on supposait la loi tout à fait exacte, on ne peut rien conclure de la valeur même de C. Mais on peut déduire de cette valeur des rensei- gnements relatifs au degré d'association des molé- eules liquides si on connaît la densité de vapeur au point d'ébullilion. Supposons d’abord que la den- sité de vapeur est normale, c'est-à-dire les molé- cules gazeuses simples; deux cas peuvent se pré- senter : ou C a la valeur normale, et alors les molécules liquides sont également simples; ou C est supérieur à la valeur normale, et alors les molé- cules liquides sont associées. Supposons mainte- nant la densité de vapeur anormale au point d’ébul- lition, c'est-à-dire les molécules gazeuses associées ; d’après ce que nous avons vu, il convient alors de corriger la valeur de C en la multipliant par le rap- port \ du poids moléculaire réel au poids molé culaire normal, c'est-à-dire par le rapport , de la densité de vapeur réelle à la densité normale; trois cas peuvent alors se présenter : 1° le produit ob- tenu peut être inférieur encore à la valeur normale de C; cela signifierait que les molécules gazeuses sont plus associées que les molécules liquides, mais aucun exemple de ce cas n’est connu; 2 le produit est égal à la valeur normale, ce qui signifie que les molécules ont le même degré d'association à l'état liquide et à l'état gazeux ; ce serait le cas de l'acide L M lition, et on a 14,88 X 1,47 —21,9 ; 3° le produit est supérieur à la valeur normale, ce qui signifie que le degré d'association des molécules liquides est plus élevé que celui des molécules gazeuses; ce formique, car — est environ 1,47 au point d'ébul- \ M un peu supérieur à 1,54 au point d'ébullition, 1,57 en extrapolant les nombres indiqués plus haut, car on a 15,72 X 1,57— 94,17. La formule de Trouton a été l'objet de nom- breuses recherches, en particulier de Schiff et de Louguinine'. Schiff a étudié une quarantaine d'hydrocarbures, pour lesquels la valeur de C est comprise entre 19,8 et 21,1. Louguinine trouve que des substances organiques d'un même groupe donnent des valeurs de C assez voisines, mais que les moyennes correspondant aux différents groupes sont un peu différentes (20,8 pour les acétones, 21,7 pour les éthers des acides bibasiques). Pour les alcools, les valeurs de C sont nettement plus grandes, et l'ordre dans lequel ces valeurs rangent les alcools au point de vue du degré d'association moléculaire concorde à peu près avec celui indiqué par les expériences de Ramsay; le degré d’associa- tion semble diminuer à mesure qu'augmente le poids moléculaire dans la série des alcools. La valeur de G est normale pour les nitriles dont, d'après la formule de Ramsay, certains seraient associés (propionitrile) et d'autres normaux (benzo- nitrile); d’après la formule de Dutoit, le benzoni- trile serait associé à basse température et normal à température élevée. La pyridine paraît normale d'après la formule de Trouton et celle de Ramsay; d’après celle de Dutoit, elle serait associée à basse température et normale à température élevée. La formule de Trouton ne s'applique pas bien aux gaz liquéfiés, dont la température d’ébullition serait le cas de l'acide acétique, pour lequel — est LouGuININE : Annales de Chimie et de Physique, 1° série, t. XIII, p. 289, 1898, et Archives des Sciences ph. et nal., ze série, t. IX, p. 5, 1900. 10 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES T est très basse par rapport à celle de la plupart Rae DM | des liquides; le quotient T décroît avec T; Nernst a montré que la formule : LM = 25 log. T — 0,007 convient approximativement à tous les cas“. De Forerand à proposé une modification de la formule de Trouton *; à la chaleur latente de vapo- risation L il ajoute la chaleur latente de fusion L', d'où la formule : ŒHLIM- 4 rue : T continuant à représenter la température d'ébulli- tion; le numérateur représente la chaleur de solidi- fication d'un gaz. Je n'ai pas à insister ici sur la justification de l'introduction de la chaleur latente L', qui se mesure au point de fusion, dans une formule où figure la température d'ébullition, ni sur l'extension de cette formule (avec la même valeur de C/) aux cas où un gaz est produit par dissociation d'un solide, extension qui en accroît beaucoup l'intérêt; Je me bornerai à indiquer les renseignements qu'on peut déduire de cette formule relativement aux poids moléculaires. Ces renseignements sont analogues à ceux qu'on peut déduire de la formule de Trouton, mais il se présente cette difficulté que, dans l'interprétation des écarts de C/, on peut faire intervenir les change- ments d'association moléculaire soit à l'un, soit à l’autre des deux changements d'état, fusion et ébul- lition. De Forcrand trouve les valeurs de C’ com- prises entre 28,2 et 31,5 pour une dizaine de corps (eau, phénol, naphtalène, glycol éthylénique, ete.); la valeur de C'est plus faible pour l'acide acétique et l'acide formique, ce qui s'interprète comme il a été dit plus haut; elle est un peu plus grande, 32 environ, pour CO*,AzH"; elle est enfin beaucoup plus grande, 40,6, pour l'anhydride azotique; pour ce corps, la chaleur latente de fusion paraît anorma- lement grande (L'=—76,6, supérieure à la chaleur latente de volatilisation L—44,8); de Forcrand pense donc qu'on peut interpréter la grande valeur de C’ en admettant qu'à la solidification, il y a asso- ciation moléculaire exothermique, ce phénomène thermique donnant à L'une valeur anormalement grande. En appliquant la formule de de Forcrand au soufre avec C’ = 30, on obtient comme poids molé- culaire environ $’, ce qui concorde avec les mesures { W. NernsT : Theorelische Chemie, p. 329. 2 De FoncranD : Annales de Ch. et de Ph., 7e série, 1. XXVIIL, p. 384 et 531,1903, et t. XXIX, p. 5, 1903. de densité de vapeur au voisinage du point d'ébul- lition. Variation de la chaleur latente de vaporisation. — On peutrapprocher des résultats relatifs à la for- mule de Trouton le mode de variation avec la tem- pérature de la chaleur latente de vaporisation. En général, cette quantité décroit régulièrement quand la température croit ; pour quelques liquides, le mode de variation est différent : la chaleur latente passe par un maximum, peu accentué d’ailleurs ; voici un exemple relatif à l'acide acétique : t 800 L 91,6 1000 923 1100 92,8 1200 92,1 1300 92,4 Or, ces liquides sont justement des liquides à molécules associées ; la variation anormale de leur chaleur latente de vaporisation provient donc sans doute de ce que, dans cette chaleur latente, inter- vient un phénomène thermique concomitant de la variation du degré d'association à l’état liquide avec la température, et on peut la considérer comme un caractère des liquides à molécules associées. $ 3. — Formules de Longinescu:. AA à sc D'après Longinescu, l'expression 7 Va dans la- n quelle d représente la densité d’un liquide, T sa température absolue d’ébullition et » le nombre des atomes figurant dans la molécule, à une valeur peu variable et voisine de 100 pour un grand nombre de liquides organiques; pour certains autres liquides organiques, elle est très supérieure à 100, si on prend pour » le nombre d’atomes correspondant à la molécule normale ; on peut interpréter ce fait par l'hypothèse d'une association moléculaire, dont on obtient le degré moyen x en écrivant : D dV/nx —100; On trouve ainsi que les alcools, les acides gras, les nitriles, les amines sont à molécules associées, ce qui concorde avec les résultats obtenus par les méthodes précédentes ; les degrés d'association sont en général du même ordre de grandeur que ceux déduits de la formule de Ramsay. Cependant, pour l'eau, on trouve un degré d'association relativement élevé, 4,6. Pour l’aniline, que la formule de Ramsay donne comme normale et celle de Dutoit comme légèrement associée à basse température et nor- male à température élevée, on obtient x — 1,3. Longinescu à tenté d'appliquer une relation de mème forme aux liquides inorganiques et même aux solides, T étant alors la température de fusion et d la densité à l'état solide ; mais, en réalité, ! C. LonGinesot : Journ. de Chimie physique, t. 1, p. 289; 296 et 397, 1903. . CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES q est alors loin d'être constante, d\/n et l'auteur ne peut obtenir de résultats que par des considérations hypothétiques pour lesquelles je l'expression renvoie à ses Mémoires. Ses conclusions générales relatives aux solides sont que les substances dont les molécules sont complexes à l’état liquide auraient à l’état solide des molécules plus complexes encore, et que, parmi les autres substances, la plupart ont aussi à l'état solide des molécules complexes. $ 4. — Poids moléculaires au point critique :. Le rapport de la densité d'un fluide au point cri- tique à sa densité de vapeur théorique est pour un grand nombre de substances organiques voisin de 3,85; pour quelques-unes, ce rapport est un peu plus grand : 4,02 pour les alcools éthylique et pro- pylique, 4,52 pour l'alcool méthylique, 5 pour l'acide acétique. Cette anomalie se retrouve dans l'application d'une formule proposée par Ph.A.Guye: m—IM 4e HEC) CRT reliant le pouvoir réfringent moléculaire (n est l'indice de réfraction) au rapport de la température et de la pression au point critique ; l'alcool méthy- lique et l'acide acétique paraissent, d’après cette formule, associés au point critique, ainsi que l'eau ; l'acool éthylique serait seulement très faiblement associé, l’acool propylique ne le serait pas d'une manière appréciable. On peut remarquer que le rapport des densités dont il vient d'être question paraît bien lié à la complexité des molécules au point critique, car, pour des substances dont les molécules contiennent peu d’atomes, il a une valeur relativement faible : 3,49 pour l'oxygène, 3,53 pour l'azote, et pour largon, monoatomique, celte valeur est seulement 2,1, peu différente de la valeur théorique 2,67 qu'on déduit de la formule de Van der Waals. Les résultats précédents conduisent pour certains corps à un degré d'associalion au point critique plus faible que celui indiqué, pour l’état liquide, par les méthodes précédentes ; mais il n’y à rien là d'étonnant, l'ensemble des résultats montrant que le degré d'association ne peut que s’accroître quand la température s'abaisse. $ 5. — Propriétés générales des liquides et des vapeurs. Tout ce qui précède montre qu'à des points de vue différents les fluides dits à molécules associées se comportent autrement que les autres ; cela appa- raît encore dans la comparaison des courbes repré- ! V. Pa. A. GuYE : Archives des Sc. ph. et nat., 3 série, t. XXII, p. 197, 1890, et t. XXXI, p. 38 et 164, 1894. sentant la variation des lensions de vapeur avec la température, dans les différences de compressibi lité à haute pression, etc. On peut citer aussi ce faut que la loi du diamètre rectiligne de Cailletet el Mathias ne s'applique pas aux basses températures à l’eau, aux alcools méthylique, éthylique el propy lique : la moyenne des densités du liquide et de la vapeur saturée à une même température n'est plus représentée en fonction de la température par une ligne droite aux basses températures. Cela semble provenir de ce que les molécules de ces corps sont associées à l'état liquide et simples à l’état gazeux. Pour l'acide acétique, dont les molécules sont asso- ciées aux deux états, le diamètre est rectiligne. En résumé, l’ensemble de résultats en bon accord général paraît donner une confirmation expérimen- tale sérieuse à l'hypothèse de l'association molécu- laire dans les fluides, et il y a à tenir compte de ces phénomènes d'association dans la comparaison de leurs propriétés. II. — Pons MOLÉCULAIRES DES SUBSTANCES DISSOUTES. On sait déterminer par plusieurs procédés les poids moléculaires des substances dissoutes; les plus importants de ces procédés sont fondés sur des lois établies expérimentalement surtout par Raoult, mais ils ont aussi une base théorique, provenant de l’analogie établie par Van C'Hoff entre certaines propriétés des solutions étendues et des gaz. Les molécules des substances dissoutes sont éparses dans le dissolvant comme les molécules d’un gaz dans le vase qui les contient; le gaz exerce contre les parois du vase une pression qui est l'effet résultant des chocs de ses molécules contre les parois, et qui est proportionnelle au nombre des molécules enfermées dans le vase; or, on à pu Cons- truire des récipients dont les parois laissent passer librement un dissolvant et arrêtent, au contraire, la substance dissoute. Dans ces condilions, ces molé- cules exercent une pression parfaitement mesu- rable, la pression osmotique, tout à fait comparable à la pression d'un gaz, et égale à la pression qu'exer- cerait la substance dissoute si elle occupait à l'état gazeux le même volume. En mesurant alors, comme pour un gaz, la densité de la substance dissoute, c'est-à-dire ici en mesurant la masse qui, dissoute dans un volume donné, produit une pression OSMO- tique donnée, on peut déterminer le poids molé- culaire de la substance dissoute. & $ 4. — Tonométrie. Ebullioscopie. Cryoscopie. A cette méthode, qui n'est guère applicable à cause de la difficulté qu'il y a à .obtenir des parois semi-perméables', s'en rattachent d'autres 1 Cependant, elle a été utilisée parfois, par exemple à la 42 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES basées sur des formules que je rappelle brièvement : a) Tonomeétrie et ébullioscopie. — Lorsque, dans un liquide, on dissout une petite quantité d’une substance non volatile, la tension de vapeur subit une diminution relative proportionnelle à la con- centration. Soit F la tension de vapeur du dissol- vant pur, / celle de la solution à la même tempé- rature, m la masse de la substance dissoute dans 1 gramme du dissolvant (c'est-à-dire la concentra- tion de la solution), M le poids moléculaire de la substance dissoute, M' le poids moléculaire du dis- solvant. On a pour les solutions étendues : (4) FRERE FUN DEN De cette diminution de la tension de vapeur ré- sulte une élévation du point d'ébullition (sous la pression normale), et cette élévation A est donnée, en degrés, par la relation : nm 2 AAC (2) Ar A est une constante pour un dissolvant donné, et sa valeur est 217: SL où T représente la température absolue d’ébullition du dissolvant et L sa chaleur latente de vaporisa- tion (Arrhenius, Beckmann). b) Cryoscopie. — Lorsque, dans un liquide, on dissout une petite quantité d'une autre substance, le point de congélation est abaissé, et cet abaissement à est donné (à la condition qu'au début de la solidi- fication ce soit le dissolvant pur qui passe à l'état solide) par la relation : (3) d— Bxr «avec NE Bi I? T' représentant la température absolue de congé- lation du dissolvant et L' sa chaleur latente de fusion. PRE : Le rapport — qui figure dans ces trois formules M o est le nombre des molécules-gramme de la subs- tance dissoute existant dans une quantité donnée du dissolvant; on peut remarquer qu'il est propor- tionnel au nombre des molécules dissoutes dans celte quantité. Je n'ai pas à indiquer ici les conditions d’appli- cation de ces formules classiques. En principe, si la variation observée est normale, c'est-à-dire satis- fait à la formule correspondante lorsqu'on remplace M par le poids moléculaire normal, on en conelut détermination du poids moléculaire de l'iode en solution alcoolique, pour lequel on a ainsi obtenu l?. que les molécules dissoutes sont normales. Si la variation observée est inférieure à celle que donne- rait dans ces conditions la formule, on peut inter- préter ce fait en admettant une association des molécules, et là encore on aura le degré moyen d'association x en remplacant M par Mx dans la formule; à vrai dire, on pourrait encore admettre une association de plusieurs molécules du corps dissous avec une molécule du dissolvant, ce qui au- fait aussi pour effet de diminuer le nombre des par- ticules dissoutes dans une masse donnée. Enfin, on sait que, dans un grand nombre de cas, la variation observée est, au contraire, supérieure à celle qu'on déduirait de la formule, et l'interprétation la plus satisfaisante, donnée par Arrhenius, consiste à admettre que le nombre des particules dissoutes à été augmenté par suite de la dissociation partielle ou totale des molécules; les solutions correspon- dantes sont les électrolytes, dont je ne m'occuperai pas ici. Mais, dans de nombreux cas, une variation anor- malement petite est due à une circonstance parti- culière : la présence dans la vapeur ou dans le solide qui se séparent de la solution d'une certaine” quantité de la substance dissoute. Ces cas ont été l'objet, depuis une vingtaine d'années, d'un grand nombre de travaux, publiés surtout dans la Zerit- schrilt für physikalische Chemie, et qui ont donné des renseignements relatifs non seulement aux mo- lécules dissoutes, mais aussi à la comparaison de ces molécules et des molécules de la même substance à l'état de vapeur ou en solution solide. [1 serait im- possible de résumer ici tous ces travaux; j’indique- rai seulement les formules correspondant aux cas les plus simples, et je citerai plus loin quelques-uns des résultats, particulièrement de ceux qui sont relatifs à la constitution des molécules des solutions solides. c) Modification aux formules de la tonométrie et de la cr yoscopie. — Soit une solution dont la vapeur renferme une certaine proportion de la substance dissoute. La théorie des solutions étendues conduit au résultat suivant : si l'on admet que les poids moléculaires de la substance dissoute sont les mêmes dans la solution liquide et dans la vapeur, les concentrations de cette substance m, dans la solution liquide, m, dans la vapeur, ont un rapport a TEST - constant += =, indépendant de la concentration, m 1 et, inversement, si ce rapport est constant, c’est que les poids moléculaires de la substance sont les mêmes dans la solution et dans la vapeur. D'ail- leurs, l'élévation du point d'ébullition est alors donnée par la formule : (2)! W= CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES 13 A ayant la même expression que précédemment. La constance du coefficient de partage x et l'exac- titude de la formule mentalement dans un grand nombre de cas, dont quelques exemples seront donnés plus loin. De même, soit une solution de concentration », qui, au début de la modification, laisse déposer non le dissolvant pur, mais une solulion solide conte- nant une certaine quantité de substance dissoute, à la concentration #1, ; les mêmes propositions s'ap- 2}! ont été vérifiées expéri- ; PE mn, pliquent, le coefficient de partage « — A est (pour 1 les solutions étendues) indépendant de la concen- tration si le poids moléculaire de la substance dis- soute est le même dans la solution solide et la solu- tion liquide, et l’abaissement du point de congélation est donné par la formule: té M, — M (3) = B— B ayant la même expression que précédemment". Dans l’un et l’autre cas, », est presque toujours inférieur à 2, ; la variation des points d’ébullition ou de congélation est donc dans le sens indiqué par les formules de Raoult, mais plus faible. S'il se trouve que m, est supérieur à m,, la variation est de sens inverse au sens ordinaire; c'est le cas, par exemple, pour les solutions d’antimoine dans l'étain : l’adjonction à l'élain d’une petite quantité d'antimoine élève le point de solidification; il en est de mème pour les solutions dans le mercure de quelques métaux (Cd, Au, Sn). Enfin si »,—m,, l’adjonction de la subtance dissoute ne modifie pas la température du changement d'état; c'est le cas pour les solutions de l’une des oximes droite ou gauche du camphre dans l’autre; le point de solidification, 119%, est indépendant de la concen- tration. Ainsi, quand une délermination ébullioscopique ou cryoscopique conduit à des variations plus faibles que celles données par les formules de Raoult, on doit s'assurer que, dans la vapeur ou le solide qui se séparent du liquide, il n'y à pas de quantité appréciable de la substance dissoute; s'il en est ainsi, on pourra interpréter le résultat par l'hypothèse d’une association moléculaire ; dans le cas contraire, on devra chercher si le coefficient de partage « est constant ; s’il en est ainsi, on pourra appliquer les formules |2/' ou{3]}'à la détermination du poids moléculaire M, qui est alors le même pour les deux états, vapeur et solution liquide, ou solu- tion liquide et solution solide ; si, enfin, le coefficient 1 On pourra trouver les considérations théoriques rela- tives à ces phénomènes, et la bibliographie correspondante, dans les traités de Nernsr: T'heoretische Chemie, Stuttgart, F. Enke, et d'Osrwazp: Lehrbuch der allgemeinen Chemie, Leipzig, W. Engelmann. de parlage z n'es pas conslant, on pourra inter préter ce fait par un changement d'association mo d'élat l'analyse du phénomène est alors plus complexe el léculaire dans le changement considéré peut être faite dans quelques cas en utilisant la loi de l’action de masse‘; par exemple, si le rapport m, à 1, À — est constant | au lieu de mn) , dans le cas d'une Va, ni, vaporisation, c'est que le poids moléculaire du corps dissous est deux fois plus grand dans la solution que dans la vapeur ; de même, si, dans le cas d’une ee 1e . 11 : solidification, lerapport VI est constant, c'est que mm 1 le poids moléculaire de la substance dissoute es deux fois plus grand dans la solution solide que dans la solution liquide. $ 2. — Résultats. Je dirai d’abord quelques mots des résultats rela- tifs aux cas dans lesquels ne se présentent pas les anomalies précédentes, et dans lesquels on déter- mine seulement le poids moléculaire de substances en solution liquide. a) Tonométrie et ébullioseopie.— II est d'abord à remarquer que, dans la formule (1) de la tonomé- trie, figure le poids moléculaire M' du dissolvant ; dans les considérations théoriques qui conduisent à cette formule, c’est le poids moléculaire du dis- solvant à l'état gazeux qui s'introduit dans les for- mules. On doit donc s'attendre à retrouver les anomalies indiquées par la densité de vapeur; en effet, alors qu'avec la très grande majorité des dis- solvants la valeur qu'on doit attribuer à M' pour satisfure à la formule (1) est très voisine du poids moléculaire normal, avec l'acide acétique cette va- leur est1,64 fois plus grande, etavec l'acide formique 4,55 fois plus grande que le poids moléculaire nor- mal; il est probable, d'ailleurs, que ces nombres, qui représentent le degré moyen d'association des molécules de vapeur de ces deux corps, sont plus précis que ceux déduits des mesures délicates de densité de vapeur (Raoult et Recoura). Passons au poids moléculaire M des substances dissoutes; on lui trouve par la tonométrie, ou par l'ébullioscopie plus fréquemment employée, la va- leur normale pour les solutions des substances organiques et aussi des chlorures des métalloïdes dans un grand nombre de dissolvants : alcools méthylique et éthylique, acétone, éther, acide acé- tique, acide formique. Mais ave: d'autres dissol- vants, tels que benzène, sulfure de carbone, chloro- forme, bromure d'éthylène, on trouve des poids moléculaires supérieurs à la valeur normale pour 1 V. Nerwsr : Zeitschrift f. phys. Chemie, t. VII, p. 10, 1891. 14 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES cerlaines substances organiques normales dans les dissolvants précédents, par exemple pour : acides benzoïque, salicylique et valérique, aniline, acéta- nilide, quelques phénols et oximes. La formule tonométrique (1) ne convient que pour les solutions étendues, et, dans son applica- tion, il convient, commed'ailleurs pour les méthodes ébullioscopique et eryoscopique, d'opérer sur des solutions de diverses concentrations ; en général, le poids moléculaire calculé varie lentement et linéairement avec la concentration, et des résultats obtenus on déduit la valeur du poids moléculaire pour une dilution très grance. Beckmann a étudié par la méthode ébulliosco- pique un grand nombre de solutions; dans le cas, le plus fréquent, où le poids moléculaire en solution très étendue est normal, on trouve en général, en opérant avec des concentrations croissantes, des poids moléculaires variant lentement et linéaire- ment avec la concentration ; dans les cas anormaux, on trouve en général des poids moléculaires crois- sant rapidement et non linéairement avec la con- centration; par exemple, pour les solutions d'acide benzoïque dans le benzène, le poids moléculaire calculé varie de 175, pour une dilution extrème, jusqu'à 250 environ, pour une solution au 1/10 (poids moléculaire normal 122). Je n'insisterai pas ici sur la discussion de ces variations avec la con- centration, discussion délicate puisque les lois sur lesquelles on s'appuie supposent en principe les solutions étendues, et que, d’un autre côté, des associations moléculaires entre le dissolvant et la substance dissoute sont possibles. Il semble que, dans les cas anormaux précédents, le degré moyen d'association varie avec la concentration, en restant généralement inférieur à 2. On peut remarquer que les substances dont les molécules sont associées en solution dans certains dissolvants font partie des substances dont les mo- lécules sont associées à l’état liquide. Il serait inté- ressant d'étudier les autres substances qui sont dans ce dernier cas, par exemple l’eau, l'acide acé- tique, les alcools ; mais ces corps sont très volatils, et leurs solutions dans un autre liquide rentrent dans le cas où la vapeur contient une certaine quan- tité de la substance dissoute. Nernst à étudié un certain nombre de cas de ce genre (/oc. cit., acide acétique dans le benzène, eau dans l’éther) ; les phénomènes sont compliqués par ce fait que les molécules d'acide acétique ou d’eau ne sont pas toutes à un même degré d'association. Nernst arrive à la conclusion que la solution et la vapeur contiennent alors l’une et l’autre des molécules simples et des molécules doubles (presque exelusi- vement des molécules simples dans le cas de l'eau en solution dans l'éther) et que, pour chaque caté- gorie de molécules, le coefficient de partage est indépendant de la concentration. b) Cryoscopie. — Les déterminations cryosco- piques conduisent aussi à ce résultat que, dans la plupart des solutions, les substances dissoutes ont un poids moléculaire normal; parmi les dissolvants avec lesquels les exceptions sont le plus rares se trouvent : acide acétique, acide stéarique, sulfure de carbone; parmi ceux avec lesquels les excep- tions sont le plus fréquentes : benzène, bromure d'éthylène, naphtalène. Dans les cas normaux, le poids moléculaire cal- culé au moyen de la formule (3) varie peu avec la concentration (quand celle-ci n’est pas trop grande) et cette variation est linéaire. Dans les cas anormaux, la valeur du poids molé- culaire correspondant aux solutions très étendues est généralement voisine du double de la valeur normale; c’est pour des combinaisons hydroxylées (acides, alcools, phénols) que ce fait se présente le plus fréquemment, c’est-à-dire pour des corps dont les molécules liquides sont associées. Par exemple, l'acide acétique à un poids moléculaire normal en solution dans l’acide formique, et un poids molé- culaire double de la valeur normale dans l'eau, le benzène, le nitrobenzène, le bromure d’éthylène. L'eau a un poids moléculaire normal dans le phénol, double dans la paratoluidine. Dans ces cas anormaux, parfois la variation avec la concentration du poids moléculaire est peu rapide (croissante ou décroissante), parfois elle est rapide; elle est très rapide dans certains cas, par exemple pour l’alcool éthylique en solution dans le benzène, et pour quelques oximes (par exemple aldoxime dans le diphénylméthane ou l’azobenzène); ces oximes se comportent d'ailleurs normalement dans certains dissolvants (stéarine, uréthane). On a pu faire des mesures cryoscopiques à haute température; J. Guinchant' à trouvé que la for- inule (3) s'applique aux solutions dans l’azotate d'ar- gent de nombreux sels (azotates de K, Li, TI, Pb; chlorure, fluorure, sulfate et iodate d'argent), en prenant pour valeur de M le poids moléculaire normal de ces sels, correspondant à leur formule chimique. Dans le bromure mercurique, l'anthra- quinone et le naphlalène bibromé 8 donnent des abaissements normaux du point de congélation, mais les bromures de K, Ag, TI, Sb et AzH° donnent des abaissements trop faibles (de 1/8 à 1/4 environ) qui pourraient être interprétés par lPhypothèse d'une association moléculaire de ces corps dans la solution. Dans l’iodure mercurique, les iodures de Pb, Ag, K et l'iodure mercureux donnent des abais- 1 J. Guixcuanr : €. R. de l'Acad. “es Sciences, t, CXLV p. 68 et 320, 1907, ett. CXLIX, p. 419 et 569, 1909. CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES 13 sements normaux, mais l’'oxyde mercurique et les chlorures mercureux et mercurique donnent des abaissements trop grands, comme cela se passerait si ces corps élaient dissociés dans la solution. On a ainsi des renseignements sur la constitution de ces milieux liquides et sur la nature de la conducti- bilité électrique qui peut s’y manifester. e) Cas où il y a partage de la substance dissoute entre la solution liquide et la vapeur ou le solide qui s'en séparent. — L'iode est un bon exemple d'ap- plication des formules (2)' et (3)'!, L'application de la méthode ébullioscopique aux solutions d’iode dans certains dissolvants, l'éther et le sulfure de carbone, conduit au poids moléculaire —9254, par application de la formule ordinaire (2); mais les solutions dans plusieurs autres dissolvants fournissent des élévations trop faibles du point d'ébullition, et par suite, si on applique la for- mule (2), des poids moléculaires supérieurs à LP; or, dans ces derniers cas, la vapeur qui s'échappe à l’ébullition contient un peu d’iode; l'expérience a montré que, pour les dissolvants qui vont être cités à l'instant, le coefficient de partage «, ou rap- port des concentrations de l’iode dans la vapeur et dans la solution, est, pour chaque dissolvant, un nombre constant, indépendant de la concentration même jusqu'à des concentrations assez fortes, de l’ordre de 1/10 par exemple, et la formule (2) s'applique bien en donnant à M une valeur con- stante et voisine du double du poids moléculaire ; voici les valeurs de &« pour ces dissolvants : Acttate Alcool Alcool mé- Benzène. d'éthyle. Méthylal. éthylique. thylique. œ 0,144 0,121 0,014 0,30 0,26. Il résulte ainsi de ces mesures que le poids molé- culaire de l'iode est le même en solution dans l’un de ces dissolvants ou dans la vapeur, et est repré- senté par L°, valeur qui concorde avec celle déduite de la densité de vapeur de l’iode aux températures peu élevées. Pour quelques autres dissolvants où l’iode est peu soluble, la vapeur renferme encore de l’iode, mais le coefficient de partage «& n’est plus constant ; ainsi, pour le tétrachlorure de carbone, & varie de 0,337 à 0,318 des solutions les plus étendues aux solutions les plus concentrées, et pour le chloro- forme de 0,167 à 0,139; il semble qu'on puisse en conclure, avec Beckmann, à un commencement d'association des molécules d'iode dans ces solu- tions. D'ailleurs, l'application de la méthode eryosco- pique aux solutions d’iode dans la plupart des dis- solvants (benzophénol, benzile, thymol, p-xylolène, ! Beckwanx et Srock : Zeitschrift f. ph. Chemie, t. XNII, p- 107, 1895, et Beckmanx : d., t. LVIIT, p. 543, 1907. bibromure d'éthylène, naphlalène) conduit, par application de la formule ordinaire (3), au poids moléculaire P, alors que les solutions dans le benzène donnent un abaissement de congélation anormalement faible, et par suite un poids molé- culaire supérieur à l; là encore l’anomalie pro- vient de ce que c’est une solution solide d'iode dans le benzène qui se dépose au début de la soli- dification. La détermination de la composition de tels cristaux mixtes est très délicate, parce qu'ils renferment presque toujours un peu du liquide mé- caniquement interposé ; Beckmann et Stock ont pu montrer, cependant, que le rapport des concentra- tions de l'iode dans les solutions solide et liquide est sensiblement constant, voisin de 0,36. L'appli- cation de la formule (3) donne alors le poids molé- culaire F. Ainsi, l'ensemble de ces résultats montre que les molécules d'iode sont les mêmes, diatomiques, à l'état de vapeur, en solution dans la plupart des dissolvants, et en solution solide benzène. Plusieurs autres cas analogues, dans lesquels une variation anormale du point de congélation est due à la formation de cristaux mixtes, ont été étudiés avec soin; telles sont les solutions de thiophène dans le benzène*, d’iodoforme dans le bromoforme et de pipéridine dans le benzène*. On a constaté dans chaque cas la constance, au moins approxi- mative, du coefficient de partage &, et on à bien vérifié la relation (3)',M représentant le poids molé- culaire normal. Ainsi ces trois corps, thiophène, iodoforme et pipéridine, ont le même poids molé- culaire (normal) en solution liquide et en solution solide dans les dissolvants indiqués. La même explication s'applique à d'autres abais- dans le sements de congélation anormalement faibles signalés anciennement, par exemple : aldoxime dans l’acétoxime, pipéridine et pyridine dans le benzène, m-crésol dans le phénol. Enfin, dans quelques cas, l'anomalie parait due à la fois à la formation d'une solution solide et à l'association moléculaire. Exemple : solution de phénol dans le benzène (Bruni et Garelli). d) Application au cas d'une transformation allo- tropique de cristaux mixtes. — Une substance peut présenter à l’état solide plusieurs variétés de pro- priétés et en particulier de formes cristallines diffé- rentes, el ces variétés se transforment l'une en l'autre à une température bien déterminée à chaque pression; ce sont là des changements d'état réver- sibles, analogues à la fusion, mais d'état solide à étal solide. Si, dans une de ces substances, on en dis- 1 BeckMAN* : Zeitschrift f. ph. Chemie,t. XXII, p. 612,197. ? G. Bruni : Feste Lüsungen und Isomorphismus, p. 102; Leipzig, Akademische Verlagsgesellschaft, 1908. 16 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES sout une aulre, le point de transformation est altéré, comme le point de solidification dans le cas d’une solution liquide; la solution solide (ou cristaux mixtes) formée à un point de transformation dont la température varie avec sa composition; mais, comme la substance dissoute est mélangée au dis- solvant dans l’une et l’autre des deux variétés (du moins c'est le cas très général), on est dans le cas que nous venons d'examiner, et où il convient d'essayer l'application de la formule (3). Rothmund, à qui est due celle extension de la for- mule (3)°, ne l'a appuyée que par des expériences incomplètes sur les cristaux mixtes de tétrabro- mure et de tétrachlorure de carbone’. Les expé- riences de ce genre sont d'ailleurs particulièrement difficiles, puisqu'on a à déterminer la température à laquelle commence une transformation dans un mélange solide, et lacomposition de cristaux mixtes à assez faible teneur. W. Reinders a eu l’occasion d'une vérification assez précise dans son importante étude des cristaux mixtes des bromure et iodure mercurique *. Ces cristaux mixtes subissent une transformation allotropique liée à celle de l’iodure mercurique, qui au-dessous de 127° est en cristaux quadratiques rouges, et au-dessus de 127° en cris- taux orthorhombiques jaunes. La transformation se retrouve dans les cristaux mixtes contenant du bromure, et la température à laquelle commence la transformation est d'autant plus basse que la pro- portion de bromure est plus grande. L'abaissement est proportionnel à la concentration en bromure dans des limites assez larges (jusqu'à ce que cet abaissement atteigne 77°), et la formule (3) se trouve aussi bien vérifiée qu'on peut l'espérer dans de telles mesures, quand on y remplace M par le poids moléculaire du bromure HgBr”, et qu'on cal- (] ne cule la constante B = au moyen de la chaleur de transformation 1,15. On déduit de là que les mo- lécules de HgBr* sont simples dans les deux sortes de cristaux mixtes. e) Application à l'abaissement du point de clari- lication des substances à liquide cristallin. — Nous avons vu que ces substances ont deux points de transformation : l’un de l’état solide à l’état liquide cristallin, et l'autre de liquide cristallin à liquide isotrope ; le second peut être appelé point de clarilicalion, parce que le liquide cristallin, formé par l’enchevêtrement de très petites masses cristal- lines, est trouble. Or la chaleur latente pour ce point de clarification est très faible, de sorte que la constante B est très grande, ce qui permet d’avoir des abaissements considérables avec une très petite 1 Roramuxo: Zeitschrift f. ph. Chemie, t. XXIV, p. 705, 1897- 2 W. Renpers : Id., t. XXII, p. 353, 1900. quantité de substance dissoute. Mais là encore, les substances solubles dans le liquide isotrope le sont aussi dans le liquide cristallin; on à pu montrer que, dans les cas étudiés (par exemple solutions d'hydro- quinone ou de benzophénone dans le p-azoxy- anisol), le coefficient de partage est constant entre les liquides cristallin et isotrope (ici 0,89 et 0,85) et que la formule (3) s'applique bien en prenant pour M le poids moléculaire normal de l'hydroquinone ou de la benzophénone ; on en déduit pour le coeffi- cient B, et par suite pour la chaleur latente de transformation des deux variétés liquides du p-azoxyanisol, une valeur (0°,68) qui s'accorde bien avec les déterminations directes”. La méthode cryoscopique peut être appliquée aussi au point de solidificalion des mêmes sub- stances, et l'on à pu en déduire le poids moléculaire de certaines d’entre elles à l’état de solution dans un autre liquide cristallin; par exemple, le p-azoxy- phénétol est soluble dans le p-azoxyanisol à l’état liquide cristallin, mais il ne l’est pas sensiblement dans la même substance à l’état solide; en d’autres termes, ces deux corps forment des cristaux mixtes liquides, mais pas de cristaux mixtes solides. On peut donc appliquer cette fois la formule ordinaire de la cryoscopie (3) aux solutions du p-azoxyphé- nétol dans le p-azoxyanisol ; elle se vérifie bien, en prenant pour poids moléculaire du premier la va- leur normale, déduite de la formule, et pour la con- stante B les valeurs concordantes déduites soit de la valeur de la chaleur latente de solidification, soit des mesures cryoscopiques faites avec d’autres sub- stances dissoutes. On en conclut que les molécules du p-azoxyphénétol sont simples à l'état de solu- tion dans le liquide cristallin p-azoxyanisol, ce qui s'accorde bien avec la mesure du poids moléculaire déduite de la formule de Ramsay”. $ 3. — Détermination directe du poids moléculaire de substances en solution solide par la tono- métrie. Nous venons de voir comment on peut déduire le poids moléculaire de substances en solution solide de l'étude du partage de ces substances entre une solution solide et la solution liquide dont elle pro- vient. D'ailleurs un certain nombre de solides émettent des vapeurs de tension bien mesurable; on peut se proposer de chercher si la présence de substances en solution dans ces solides, c'est-à-dire formant avec eux des cristaux mixtes, produit un abaissement de la tension de vapeur satisfaisant à la formule (4) : Voir R. Scnexex : Aristallinische Flüssigkeiten, p. 13- Leipzig, W. Eogelmann, 1905. ; 2 [d., p. 92. CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES Si cela est vérifié, on pourra appliquer cette rela- lion à la mesure des poids moléculaires des subs- tances en solution solide. On peut d'ailleurs remar- quer que, si on étend la notion de pression osmotique aux solutions solides, en imaginant d'hypothétiques parois semi-perméables, la formule (1) devient, comme pour les solutions liquides, une conséquence de la théorie des solutions étendues. Speranski' a déterminé dans d'assez larges limites de température les tensions de vapeur des corps suivants : p-dichlorobenzène C'H'CF, p-chlorobro- mobenzène C'H'CIBr, p-dibromobenzène C'H'Br’, à l'état solide et à l’état liquide, et aussi les tensions de vapeur des solutions solides et liquides du der- nier de ces corps dansles deux autres. Parexemple, une solution solide de Ogr.58 de C'H'Br° dans 2 gr. 16 de C'H'CIBr a une tension de vapeur variant de 2 millimètres de mercure environ à 6 millimètres entre 50° et 64°. Le résultat de ces recherches est que, pour les solutions de C'H'Br° dans C'H'CF, la formule (1) s'applique dans de larges limites de concentration aussi bien aux solutions solides qu'aux solutions liquides, en prenant pour poids moléculaire de C'H'Br° 215, nombre peu éloigné du poids molécu- aire normal 236; les molécules de ce corps seraient donc les mêmes, non associées, à l'état gazeux et en solution liquide ou solide dans C‘H'CF. Pour les solutions de C°H'CIBr, la formule (4) s'applique aussi sensiblement, mais dans de plus faibles limites de concentration, aux solutions solides et liquides, à condition de prendre pour poids moléculaire M de C’H‘Br° une valeur supé- rieure au poids moléculaire normal. En réalité, il y aurait certainement à reprendre ces expériences en tenantcompte de la composition de la vapeur, qui renferme une certaine proportion de C°H'Br°, lequel n’est pas beaucoup moins volatil que les deux dissolvants employés ; la formule (1) ne s'applique qu'à la condition que la vapeur soit formée uniquement du dissolvant, et il faudrait lui faire subir une modification analogue à celle indi- quée plus haut pour les formules de l’ébullioscopie et de la cryoscopie. La même objection ne paraît pas s'appliquer aux expériences du même auteur sur les solutions solides de 8-naphtol dans le naphtalène*; la ten- sion de vapeur du 8-naphtol est, en effet, environ 100 fois plus faible que celle du naphtalène, qui atteint 6 à 7 millimètres de mercure au voisinage du point de fusion 80°. En appliquant la formule (1) à une des solutions solides, on obtient la même valeur du poids moléculaire pour les déterminations * SpERANSKI : Zeitschrift f. ph. Chemie, t. LI, p. 4, 1905. SUU- it XDNT p:1041908 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, 17 faites à différentes températures, et celte valeur a varié depuis 198, pour une concentration moléculaire de 14,6 °/,, jusqu'à 255, pour une concentration mo- léculaire de 33,6 °/,. Comme le poids moléculaire normal du G-naphtol est 144, la conclusion serait que les molécules de ce corps sont, en solution solide dans le naphtalène, en partie simples, en partie doubles. Une mesure du même genre, relative à une solu- tion solide de B-naphtylamine dans le naphtalène, à donné pour le poids moléculaire 160 (valeur nor- male 143). $ 4. — Comparaison des poids moléculaires d’une substance dans deux solutions au moyen du coef- ficient de partage. Etant donnés deux liquides en contact, insolubles ou peu solubles l'un dans l'autre, si l’on y dissout une troisième substance en faible proportion, il s'établit un certain état d'équilibre entre les deux solutions. On peut montrer que, comme cela a déjà été indiqué plus haut pour des cas analogues, si les molécules sont les mêmes dans les deux solutions, le coefficient de partage ou rapport des concentra- tions est constant, indépendant de la concentration; si les molécules sont doubles dans la seconde solu- tion de ce qu’elles sont dans la première, c'est le m, V1, loc. cit.). Nernst a vérifié ces lois sur quelques cas : l'acide succinique se partage entre l’eau et l’éther de ma- nière que le coefficient de partage reste cons- tant (5,2); et, en effet, les expériences directes rela- tives à ces solutions montrent que les molécules d'acide succinique sont simples dans l'éther et dans l’eau (abstraction faite d'une faible dissocia- tion électrolytique). Dans le partage de l'acide ben- zoïque entre l’eau et le benzène, c'est cette fois-ci 1 1 \V/n, (0,03), et, en effet, les molécules sont simples en solution dans l’eau et en majeure partie doubles pour les solutions assez concentrées dans le benzène (ce qui est le cas ici). On peut donc appliquer cette méthode à la com- paraison des poids moléculaires d’une même subs- tance dans deux solutions; Küster l’a appliquée au cas du partage du 6-naphtol entre l’eau et les solu- le naphtalène est à peu près insoluble dans l’eau, de sorte qu'on se trouve dans le cas précédent, le 8-naphtol se partageant entre l’eau et le naphta- rapport qui doit être alors constant (Nernst, le rapport qui reste sensiblement constant tions soldes de ce corps dans le naphtalène'; 1F, W. Kuster 1895. : Zeitschrift f. ph. Chemie, t. XVII, p. 357, TC 48 CH. MAURAIN — LES POIDS MOLÉCULAIRES DANS LES DIFFÉRENTS ÉTATS PHYSIQUES ; VD) - us lène. Le rapport —2 semble peu variable, d’où la \ 2, conclusion que les molécules de $-naphtol seraient dans le naphtalène doubles de ce qu'elles sont dans l’eau. Cela s'accorde à peu près avec le résultat des expériences de Speranski sur la tension de vapeur des solutions solides de $-naphtol dans le naph- talène. $S 5. — Méthode fondée sur la variation du coeffi- cient de solubilité. Je ne fais qu'indiquer, ne voulant pas allonger outre mesure cet article, le principe d’une méthode proposée par Nernst': soit un liquide A qui peut dissoudre un liquide B; en mettant À au contact d'un excès de B, on obtient une solution saturée de B dans À; si maintenant on dissout dans B une substance C insoluble dans A, la solubilité de B dans A est diminuée, et Nernst a montré et vérifié que la diminution relative du coefficient de solubi- lité s est proportionnelle à la concentration molé- culaire de B dans A, et est donnée par la formule : s—s! m — —=—.M!, S M 5 dans laquelle s' est la nouvelle valeur du coeffi- cient de solubilité, 22 la masse de C dissoute dans 1 gramme de B, M le poids moléculaire de la subs- tance dissoute C, et M’ le poids moléculaire de la substance dissolvante B. On voit que cette formule est lout à fait analogue à celle qui régit la diminution relative de la tension de vapeur d'une solution, la substance B dissoute dans A jouant le rôle de la vapeur. Dans les cas étudiés, les résultats obtenus ont confirmé ceux déduits des autres méthodes rela- lives aux solutions. III. — RÉSUMÉ DES RÉSULTATS. $ 1. — Corps simples. Les différents résultats relatifs aux métaux con- cordent à caractériser leurs molécules comme gé- néralement mono-alomiques : les mesures les plus précises des densités de vapeur ont toutes conduit à ce résultat (Hg, Cd, Zn, Bi)”. Les mesures tono- métriques de Ramsay sur les solutions des métaux dans le mercure* donnent aussi en général des molécules mono-atomiques: elles ont conduit, pour le calcium, le baryum et le potassium, à des poids moléculaires inférieurs au poids atomique, résultat qui n'a pas recu d'interprélation salisfaisante. # W. Nenxsr: Zeiltschrilt 1. ph. Chemie, {. VI, p. 513, 1890. 2 Biurz er Mexer : Zeitschrilt 1. ph. Chemie, t. IV, p. 249, 1889. 3 W. Ramsay : Journ. Chem. Society, 1889, p. 521. De nombreuses mesures cryoscopiques relatives aux solulions de métaux dans un métal ont été faites par Tammann et Heycock et Neville'; elles : conduisent, en général, aussi à un poids molécu- laire égal au poids atomique; dans quelques cas, le poids moléculaire obtenu est à peu près double du poids atomique (bismuth dans le plomb; Al, Sn, Zn dans l'argent) ou même à peu près lriple {or dans le cadmium), et dans d’autres cas on obtient une valeur comprise entre une et deux fois le poids atomique. Mais, dans un grand nombre de cas, il y aurait à tenir compte de ce fait que le solide qui se dépose au début de la solidification est non le métal pur, mais une solution solide, par exemple pour les solutions d'étain et de zinc dans l'argent; dans quelques cas même, la formation de solution solide est manifestée par ce fait qu'il y a élévation el non abaissement du point de solidification (par exemple Sb dans Sn — Ag, Cu, Au, dans Zn — Cd, Au, Sn dans Hg) : la solution solide qui se dé- pose au début de la solidification est alors plus concentrée que la solution liquide. Dans le cas le plus fréquent, où la solution solide est moins con- centrée que la solution liquide, l'application de la formule (3) conduirait à des valeurs du poids moléculaire inférieures à celles déduites de l'appli- cation de la formule (3), c'est-à-dire se rapprochant du poids atomique. Les molécules des mélalloïdes sont généralement, au contraire, poly-atomiques. Aux renseignements déjà donnés sur leurs densités de vapeur j'ajoute les suivants : la densité de vapeur du phosphore est constante dans un intervalle de quelques cen- taines de degrés au-dessus du point d'ébullition, et voisine de 4,3, ce qui correspond au poids molécu- laire P'; elle décroit ensuite : 3,85 vers 850° — 3,71 vers 19250 — 3,63 vers 1500° — 3,19 vers 1700, c'est-à-dire que le degré moyen d'association décroît à mesure que la température s'élève. La densité de vapeur de l'arsenic correspond à As'un peu au-dessus du point d'ébullition, à As° vers 1700. La densité du chlore correspond à CF jusqu'à 1200° environ et paraît décroitre ensuite ; la vapeur de brome se comporte de même. J'ai déjà indiqué que l'azote et l'oxygène parais- sent avoir à l’état liquide des molécules d'une com- plexité moyenne plus grande qu’à l'état gazeux. Voici quelques résultats relatifs aux poids molé- culaires des métalloïdes en solution : on trouve pour le poids moléculaire du phosphore P° par ébullioscopie dans le sulfure de carbone et par cryoscopie dans le benzène. Pour le soufre, S' par ébullioscopie dans le sulfure de carbone et par Physikalisch-chemische Tabellen de Lannorr, zerlin, Julius Springer. 1 V. les JONNSTEIN et MEYERVOFFER, P. 295; D: GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE 19 cryoscopie dans le naphtalène. Pour le sélénium, Se* également, par eryoscopie dans le phosphore. Nous avons vu qu'on obtient pour l'iode I° dans de nombreux dissolvants. $ 2, — Combinaisons. A l'état gazeux, la plupart des combinaisons ont un poids moléculaire invariable : leurs molécules sont les mêmes à toute température ; quelques combinaisons seulement ont, certaine température, des molécules associées, dont la proportion dans le nombre total des molécules s'accroit à mesure que la température s'abaisse. A l'état liquide, la plupart des combinaisons ont le même poids moléculaire invariable qu'à létat moléculaire se au-dessous d'une gazeux ; l'association rencontre cependant dans un nombre de liquides beaucoup plus grand que celui des gaz à molécules associées, et, en particulier, les substances dont les molé- cules sont associées à l’état gazeux présentent le même caractère, plus accentué, à l’état liquide. Une augmentation du degré moyen d'association corres- pond loujours à un abaissement de la température. On n'a pas de renseignements directs précis sur le poids moléculaire des substances pures à l’état solide, mais on sait que des substances peuvent avoir à un élal cristallin (liquides cristallins) le poids moléculaire normal, c'est-à-dire des molé cules simples ; parfois, d'ailleurs, les molécules sont associées à l'état liquide cristallin. Le poids moléculaire des substances en solution liquide est encore, en général, le poids moléculaire normal, et les résultats relatifs aux solutions solides sont déjà assez nombreux pour qu'on puisse dire qu'il en est sans doute de même pour les substances en solution solide. L'association molé- culaire se manifeste assez fréquemment dans les solutions, et les substances qui la présentent sont, en gros, celles qui présentent le même caractère à l'état liquide ; la nature du dissolvant intervient, certaines substances sont à molécules simples dans cerlains dissolvants et à molécules associées dans d’autres dissolvants. L'analogie des résultats relatifs aux solutions liquides et aux liquides purs semble permettre d'étendre aux solides purs les résultats généraux relatifs aux solutions solides ; les résultats obtenus avec les liquides cristallins appuient, d'ailleurs, cette extension. Il est donc vraisemblable que la plupart des molécules des corps solides, c'est-à-dire des cristaux, sont simples. Ch. Maurain, Professeur à la Faculté des Sciences de Caen. LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE ET LES SUBSTITUTIONS ALIMENTAIRES D'APRÈS LES TRAVAUX DE RUBNER Il s'est rencontré à maintes reprises, dans l'his- Loire de la science, qu'une question difficile ayant élé étudiée par de nombreux expérimentateurs, l’ac- cord n'ait pu se faire, et qu'après de longues con- troverses les opinions se soient groupées autour de deux théories adverses, soutenues par des savants également éminents. Il y a alors grand intérêt à examiner avec soin les arguments mis en avant par chacun des partis, et à rechercher si la conciliation est impossible, si le désaccord n'est pas plus apparent que réel ou ne repose pas sur un malentendu. C'est la situation dans laquelle nous nous trou- vons actuellement, il me semble, pour un des pro- blèmes les plus importants concernant les origines de la chaleur animale, je veux parler de la capa- cité qu'ont les divers aliments de se substituer les uns aux autres Les aliments dits simples ont été classés en trois groupes : les graisses, les hydrates de carbone et les albuminoïdes. Les aliments complexes usuels sont des mélanges de ces trois aliments simples. Les alimentssubissent,entraversantl'organisme, des transformations sur lesquelles nous sommes mal renseignés ; mais ils sont finalement éliminés sous des états pour lesquels l'accord existe entre tous les chimistes et les physiologistes. Les graisses et les hydrates de carbone sont complètement brû- lés jusqu’à l’eau et l'acide carbonique. Les albu- minoïdes, eux aussi, donnent de l’eau et de l'acide carbonique ; mais leur azote s'élimine dans des composés incomplètement brûlés, dont le princi- pal est l'urée. Par le seul fait de la vie, les animaux, même en état de jeûne, éliminent, aux dépens de leur propre substance, de l’eau, de l'acide carbonique, des produits azotés. Le rôle des aliments est de parer à l'usure progressive de l'organisme et à la déchéance qui en résulterait. Ceci est indiscutable. Mais l'accord cesse entre les divers expérimenta- teurs lorsqu'il s'agit de déterminer quel est le rôle de chaque aliment, en particulier de fixer dans 20 D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE quelle mesure et suivant quelle loi ils peuvent se remplacer les uns par les autres. Actuellement nous nous trouvons en présence de deux théories principales : celle dite de l’isodyna- mie, et celle dite de l'isoglycosie. I A la suite des travaux de Rubner et de ceux d’Atwater, la plupart des physiologistes et des médecins s'intéressant aux questions d’alimenta- tion ont adopté la théorie dite de l'isodynamie, entendant par là que la valeur alimentaire d’une substance ingérée s’évalue d’après le nombre de calories que les transformations de cette substance sont susceptibles de dégager dans l'organisme. Par suite, les divers aliments pourraient se substi- tuer les uns aux autres, pourvu qu'ils fussent en quantités dites isodynames, c'est-à-dire dégageant la même quantité de chaleur pendant leur passage à travers l'organisme. Au point de vue pratique, on pourrait donc éva- luer en calories les besoins d’un animal ou d'un homme, sans spécifier la composition de la ration devant fournir ces calories. Ainsi l'on a coutume de dire qu'un homme vivant de la vie habituelle, sans travail spécial, a besoin de 2.400 calories environ par vingt-quatre heures. Bien entendu, ceci comporte certaines restric- tions. On sait, depuis Magendie, qu'il faut à tout animal un certain minimun d’albumine. De plus, un corps quelconque ne constitue pas forcément une substance alimentaire; pour simplifier la question, nous nous bornerons à envisager, comme il a été dit plus haut, les albuminoïdes, les graisses et les hydrates de carbone (amidon, sucres, etc.), ou les mélanges de ces trois substances. Il ne sera pas question de l’eau, indispensable à la vie, et de certains principes minéraux qui ne jouent aucun rôle direct dans la production de la chaleur animale. En somme, a théorie de l’isodynamie, telle que la plupart des physiologistes l'entendent, peut, en prenant pour exemple l'homme, se résumer ainsi : « Un homme vivant de la vie habituelle a jour- nellement besoin, en moyenne, de 80 grammes d'al- buminoïdes environ, qui, dans leur transformation pendant leur passage à travers l'organisme, lui four- nissent 360 calories. Le restant, soit 2.400 — 360 calories — 2.040 calories, chiffres uniquement adoptés pour le raisonnement, peut être fourni à l'organisme indifféremment en albuminoïdes, graisses ou hydrates de carbone ; il suffit que ces substances soient en quantité telle qu’elles dégagent dans leurs transformations intra-organiques la même quantité de chaleur totale”. » 4“ « The simplest form in which a diet may be expressed Ven = Telle est l'expression de la loi dite de l'isodyna- mie et attribuée à Rubner. A cette conception, on oppose généralement celle de Chauveau, dont l’idée première est due à Seegen et qui, il faut le dire, compte peu de partisans. D'après Chauveau, l'organisme ne pourrait uti- liser directement pour ses besoins physiologiques que le glucose. Ce n'est plus un certain nombre de calories qui fixerait les besoins, mais une certaine quantité de glucose. Ce glucose, il faudrait soit que l'organisme le trouvât directement dans sa ration, soit que cette ration contint des substances albuminoïdes et grasses capables de le fournir, après certaines transformations. Autrement dit, en surplus du minimum d’'albu- minoïdes indispensable, point sur lequel tout le monde est d'accord, seraient équivalentes les ra- tions susceptibles de fournir, directement ou après transformation de leurs substances, la même quan- tité de glucose. C’est la théorie de l'isoglycosie. La formule de Chauveau et la formule dite de Rubner paraissent donc absolument inconciliables, et, de fait, si l’on cherche dans quelle proportion les diverses substances alimentaires simples pour- raient se substituer les unes aux autres, d’abord en admettant l'isodynamie, c'est-à-dire en considérant comme équivalents des poids de substances capa- bles, par leurs transformations dans l'organisme, de lui fournir la même quantité de chaleur, puis en admettant l'isoglycosie, c'est-à-dire en considé- rant comme équivalents des poids de substances capables par leurs transformations, suivant des formules établies par Chauveau, de fournir à l'orga- nisme la même quantité de glucose, on arrive aux résultats suivants : POIDS POIDS isodynamiques isoglycosiques SUBSTANCES Glucose”: 2 RES 100 100 Graisse’. 17 LCA RE 39 62 Amidon UP RE RTRE 90 91 Sucre de canne - . . . - 92 92 AÏDUMINE EEE 92 425 Les valeurs des poids isodynames résultent des mesures calorimétriques de Berthelot. Les valeurs des poids isoglycosiques sont calculées d'après des formules de transformations dues à Chauveau; elles n’ont pas le même caractère de certitude expérimentale que les précédentes; peu importe, car il ne s'agit pas en ce moment de chercher une grande approximalion, mais de donner une idée de la différence qu'il y a entre les deux théories. is in terms of protein and energy, since theoretically pro- tein, fat and carbohydrates can replace each other as source of energy in ration of 1: 4,5 : 1 (faute d'impression évidente.) » W. O. Arwater and C. F. LaxGworruy : A Digest of Metabolism Experiments. Washinglon Government Prin- ting Office, 1898, page 58. D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE 21 IT Rubner et Chauveau ont tiré leurs conclusions de résultats expérimentaux et de considérations théoriques ; comment se fait-il que ces conclusions soient si différentes, et, ainsi que je l'ai dit déjà, puissent être considérées comme inconciliables? Pour trancher cette question, j'ai lu et relu avec le plus grand soin les travaux de Chauveau et ceux de Rubner, et je crois pouvoir dire aujourd'hui que, sauf sur des questions de détail, il n’y a aucun antagonisme réel entre ces deux auteurs, mais que l’on à mal lu Rubner. Voici pourquoi je me permets celte affirmation. Il y a trois ou quatre ans, j'entrepris la lecture du livre de Rubner : Die Geseltze des Energiever- brauchs bei der Ernährung'. Au bout de quatre- vingis pages environ, je dus y renoncer, je ne comprenais plus ce que je lisais. Je repris ma lecture il y a environ un an, tradui- sant les phrases une à une, et prenant d’abondantes notes, avec la ferme intention d'aller jusqu'au bout. Le hasard des circonstances me fit rencontrer deux des physiologistes allemands les plus émi- nents, auxquels je fis part des difficultés que je rencontrais. L'un d'eux, T., me dit: « Quand, à Heidelberg, j'ai dit que j'avais lu le livre de Rubner, on m'a répondu que j'étais le seul homme à l'avoir fait; comme cela, nous serons deux », et H. ajouta : « Comment voulez-vous arriver à lire ce livre? Malgré nos efforts, nous, Allemands, nous ne pouvons y arriver; ilest impossible qu'avec les difficultés de langue que vous y trouverez vous puissiez en sortir. » Mais déjà j'avais vu que la clef de ce que je cherchais s'y trouvait; j'ai pour- suivi mon travail jusqu'à la fin. J'ai, dans ma vie, lu des choses bien arides, mais je déclare n'avoir jamais rien déchiffré qui puisse approcher du livre de Rubner, et certainement, s’il fallait lire un second volume, je n’en aurais pas le courage, en ce moment tout au moins. Il n’est pas question de difficultés de langue, que dans le cas particulier je surmontai aisément; mais, en premier lieu, il y a une confusion conti- nuelle de sujets. Au milieu du développement d’une idée, l’auteur se lance dans des digressions accom- pagnées de chiffres dont il est presque impossible de retrouver l'origine, car il ne l'indique jamais. Tous les tableaux numériques sont pleins d'erreurs typographiques; un nombre utilisé à divers en- droits est fréquemment mal recopié, sans, bien entendu, que l’auteur dise d'où il vient : c'est au lecteur à le retrouver. La plupart des calculs sont 1 vol. de 426 pages. F. Deuticke, Leipzig und Wien, 1902. entachés d'erreur; presque toujours, il est impos- sible de reconnaître si un chiffre non concordant provient d'un écart expérimental, d'une erreur de calcul ou d’une faute typographique. Je ne signale là que quelques-unes des causes qui rendent la lecture du livre de Rubner si diffi cile. Si j'ai insisté sur cette difficulté, c'est pour faire comprendre comment il se fait que cet ou- vrage soit si peu connu. S'il était convenablement écrit, on aurait pu trouver des différences de détail entre les idées de Chauveau et celles de Rubner, mais jamais on ne les aurait opposées. Je ferai remarquer encore que dans les Jabres- berichte de Hermann, le livre de Rubner n'est pas analysé. Dans le tome XVI du Centralblatt für Physiologie, l'analyse est annoncée pour le volume suivant; mais, dans la suite, il n'en est plus ques- tion. Cela étant, je veux exposer la théorie de Rubner et montrer qu'elle concorde parfaitement avec celle de Chauveau. ITT Au moment où Rubner commenca ses travaux, la question de l'origine de la chaleur animale n'était pas élucidée. Lavoisier, comme on sait, avait attribué la production de la chaleur par les animaux à une combustion, au moyen de l'oxygène de l'air, des substances du corps et des aliments ingérés. Mais, malgré tous les efforts, on n'avait pu démontrer que la chaleur animale se produit entie- rement et uniquement de cette facon. Au siècle der- nier, la plupart des physiologistes en doutèrent longtemps, se demandant s’il ne fallait pas faire une part à des phénomènes d'ordre purement vital, au système nerveux ou au frottement du sang dans les artères, conceptions qui nous paraissent étranges aujourd'hui. Claude Bernard considérait le problème comme inabordable par l'expérience et, en fait, exposa le plan des recherches qu'il croyait seules capables de conduire à la solution. Ce plan est absolument irréalisable, et eût-il été possible de l'exécuter, que la question n'aurait pas avancé d'un pas. C'est en 1865 seulement que Berthelot traca net- tement le programme à remplir et indiqua la marche à suivre; Rubner réalisa le premier l'expérience. Voici schématiquement ce qu'il y avait à faire : On prenait un animal, un chien, et on le mettait en équilibre de nutrition, c'est-à-dire qu'on lui donnait tous les jours une même ration, jusqu'au moment où, les excreta étant égaux aux ingesta, l'animal ne formait aucune réserve, n'empruntait plus rien à son organisme et restait à poids cons- tant. Dans ces conditions, en vingt-quatre heures il 22 D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE revenait périodiquement au même état, n'ayant consommé que sa ration alimentaire journalière et toute sa ration. Les méthodes enseignées par Ber- thelot permettaient, si l’on faisait l'analyse des ingesta et celle des excreta, de savoir quelle serait la production de chaleur qui accompagnerait pareille transformation de la ration in vitro. Il n'y avait qu'à placer l'animal dans un calorimètre appro- prié et à mesurer la chaleur qu'il fournissait en 24 heures. Rübner trouva qu'elle correspondait pré- cisément à celle que donnait le calcul de Berthelot. Done, la chaleur animale est uniquement et entiè- rement produite par les transformations chimiques intraorganiques; il n'y a pas de chaleur d'origine vilale, nerveuse ou autre. Ces mêmes transforma- tions chimiques auraient produit exactement la même quantité de chaleur « in vitro ». C'était la confirmation de la théorie de Lavoisier. Les expériences de Rubner comportaient certaines causes d'incertitude; Atwater les reprit sur l’homme avec des moyens dont ne disposaient ni Rubner ni aucun autre physiologiste. Grâce à des appareils admirables, mais extrème- ment coûteux, à des collaborateurs nombreux et experts, il put, ne négligeant aucun détail, pousser la précision des recherches beaucoup plus loin que Rubner. Il trouva, comme total de toutes ses expé- riences, que, pour 497.752 calories mesurées au calorimètre, 497.805 calories avaient été produites par les combustions intra-organiques. On peut con- sidérer la vérification comme parfaite; le faible écart qui subsiste peut être attribué aux erreurs fatalement inhérentes à de pareilles recherches. Jusqu'ici, les conclusions tirées des expériences de Rubner et d'Atwater, confirmant la théorie de Lavoisier, sont absolument légitimes et aujour- d'hui universellement admises ; mais voici où elles cessent de l'être. Puisqu'un animal en équilibre de nutrition pro- duit simplement la chaleur correspondant aux transformations de ses aliments, combustion totale des graisses et hydrates de carbone, combustion incomplète des albuminoïdes jusqu’à l’urée, on est en droit, avec la restriction du minimum d’albu- mine, de modifier à volonté la ration, en substi- tuant un aliment à un autre, pourvu que la ration totale contienne le même nombre de calories. Telle est l'interprétation isodynamique abusive que l’on a cru être en droit de donner des expé- riences de Rubner et de leur confirmation par Atwater; on a oublié le sage conseil de Lavoisier « de ne rien conclure au delà de ce que les expé- riences présentent et de ne jamais suppléer au silence des faits ». On admet, en effet, implicitement qu’un sujet se comporte physiologiquement de la même facon, quelle que soit la ration dont il tire ses calories, pourvu que ce nombre de calories soit le même; or le but de l'organisme n’est pas de produire un nombre déterminé de calories. Pour préciser, voici un homme qui produit 2.400 calories; il les trouve dans saration d'entretien; nous n’avons pas le droit de considérer que cet homme se comporte de la même facon suivant qu'un nombre variable de ees 2.400 calories provient de graisses, d'hydrates de carbone ou d'albuminoïdes. Voilà où est l'erreur, et ce qu'il y a de plus remarquable, c’est que l'examen des travaux de Rubner va nous conduire à une conclusion diamé- tralement opposée à celle qu'on en a tirée, conelu- sion nettement formulée par Rubner et conforme à celle de Chauveau. Atwater seul a été l’isodynamiste vrai, nous verrons plus loin pourquoi. IV Rubaer, avant d'entreprendre l'étude de l’alimen- tation, étudie les combustions chez l'animal à jeun. Il y a lieu, avant tout, de signaler un fait quelque peu étonnant. À diverses reprises, Rubner parail se croire le premier à aborder certains problèmes, cependant déjà traités à maintes reprises par divers expérimentateurs qu'il semble ignorer. Par exemple, il ne cite aucun des auteurs qui ont étudié avant lui l'influence des changements de la température ambiante sur les combustions de l'organisme et les échanges respiratoires. Il en est de même pour la loi des surfaces, d'après laquelle la quantité de chaleur produite par les homéothermes varie, non comme la masse de l'ani- mal, mais comme sa surface. Quoi qu'il en soit, Rubner trouve qu'en partant de 0°, on constate, à mesure que la température ambiante s'élève, une chute de la chaleur dégagée par le chien, jusqu'à un certain point à partir duquel il y aurait un accroissement lent. Le minimum de combustion, que l’on rencontre aux environs de 30° pour un chien à poil ras, varie- rait avec les animaux, s’abaissant lorsqu'ils sont mieux défendus contre les déperditions par une abondante couche de graisse ou un pelage bien fourni. Divers auteurs, en particulier Lefèvre, n'admet- tent pas ce minimum; pour eux, la déperdition irait en diminuant constamment, tant que la tempéra- ture ambiante augmente. Ce point n'est pas encore élucidé; il n’infirme du reste pas la suite du rai- sonnement. Passons sur les détails; l'important est de voir comment Rubner interprète les faits et quelles conséquences il en tire. Partons du minimum et abaissons la température extérieure; il se produira un accroissement des D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE 23 pertes de chaleur, et par suite de la calorification, puisque l'animal reste à température constante. Il est impossible de se prononcer sur le mécanisme de ces changements dans la calorification, dont le siège principal est dans la masse musculaire. Tout ce que l’on peut dire, c'est qu'ils ne sont pas liés à des mouvements visibles de l'animal. 11 faut donc considérer que les combustions intra- organiques ne peuvent tomber au-dessous d’un cer- lain minimum. La quantité de chaleur correspon- dant à ce minimum est liée d'une facon indissoluble à la vie même de l'organisme, dont elle est une des manifestations. Si les pertes augmentent pour une raison quelconque, un abaissement de la tempé- rature extérieure, par exemple, il faut un accrois- sement dans Ja production de chaleur, afin que la température de l'homéotherme reste constante. Le mécanisme physiologique de cette régulation de la température ne sera pas étudié iei. Cette chaleur supplémentaire, réglable suivant les conditions de température extérieure, et des- linée à maintenir constante la température du corps, correspond à ce que Rubner appelle la régulation chimique. Cela signifie, en somme, régulation par variation de la chaleur produite par les combustions intra-organiques. Il importe de remarquer que ces combustions sont d'ordre physio- logique; elles se passent dans l'intimité des tissus et sont liées à la vie cellulaire. Nous verrons plus loin qu'il n’en est pas de même d’autres sources de chaleur intérieures. A partir du minimum et au-dessus, il n’y a plus de régulation chimique possible; les combustions _sont réduites au strict minimum compatible avec l'existence et la continuation de la vie. Si la tempé- rature extérieure s'élève, il n'y a plus qu'une res- source pour éviter l'élévation de température du corps. Il faut, malgré la tendance à une moindre perte par rayonnement, maintenir les pertes lotales constantes. Pour cela, les capillaires de la peau se dilatent, la circulation plus active y apporte plus de chaleur, il s'établit une transpiration et une éva- poration de plus en plus importante. C'est là ce que Rubner appelle la régulation physique. Elle peut être insuffisante ; alors la tempé- rature de l'animal s'élève. Cette régulation physique des pertes, qui subsisle seule au-dessus du mi- nimum, peul, du reste, intervenir aussi dans la régulation totale, au-dessous du minimum. N Cela étant, placons-nous dans le domaine de la régulation chimique, à 15°, pour fixer les idées. Considérons un chien à jeun; en vingt-quatre heures, il dégage un certain nombre de calories, 800 par exemple. Pour cela, il brûle de la graisse de ses réserves et de l’albumine. Donnons-lui maintenant une certaine ration ali mentaire contenant moins de calories que celles qu'il dégage en vingt-quatre heures, 600 par exemple. L'expérience montre que, quelle que soil la facon dont cette ration est composée en albumi- noïdes, graisses et sucres, il y aura toujours 800 ca- lories de dégagées; elles ne seront plus toules empruntées à l'organisme, une parlie d'entre elles proviendra de la ration alimentaire. Il pourra même se faire qu'avec 800 calories dans la ration, la chaleur émise ne soit pas modifiée, el, comme ces 800 calories auront pu être fournies par des rations de composition différente, on en conclut l'iso- dynamie. Or il se peut que cette isodynamie ne soil qu'apparente, l'effet des substitutions alimentaires étant troublé par l'intervention de Ja régulation chimique. Rubner a compris la nécessité qu'il y a, pour élucider cette question, à se débarrasser de cette régulation chimique. Pour cela, il a opéré sur des animaux à 33°, au minimum des combustions. Dans ces conditions, les albuminoïdes, les graisses et les sucres ne produisent plus le même effet calo- rifique quand ils sont donnés à rations équivalentes en calories. Donnons, par exemple, à un chien à 23° une ration équivalente à ses besoins calorifiques de jeûne, en albumine, en graisses ou en sucres. Nous constaterons que la calorification augmente. Mais elle n'’augmente pas de la même quantité pour les trois aliments; elle croit d'environ : 31 °/, pour les albuminoïdes, 13 °/, pour graisses et 6 °/, pour hydrates de carbone. A quoi tient cet accroissement? Il ne peut s'expli- quer que d’une facon : pour être utilisé, l'aliment nécessite une élaboration variable suivant sa nature, élaboration accompagnée par le dégage- ment d’une cerlaine quantité de chaleur. Prenons le cas de l’albumine. Le chien à jeun à 33°, à son minimum de com- bustion, éliminait 100 calories (par exemple, pour simplifier les chiffres); ces 100 calories lui sont nécessaires, indispensables; elles sont la condition et la conséquence même de son existence; elles résultent de la vie des cellules de son organisme. Donnons-lui une ration de viande contenant 100 ca- lories ; celte viande ne peut être directement utilisée ; il faut qu’elle subisse une première transformation à laquelle est liée la production d'une certaine quantité de chaleur inutilisable physiologiquement; cette chaleur s'élève à 31 calories. En outre, les conditions de la vie de l'animal entraïnent un déga- gement de 400 calories, ainsi que nous l'avons vu; cela fera en tout 131 calories. Le même raisonnement donne un accroissement 19 ra de 13 calories pour la ration de graisse et de 6 seulement pour les hydrates de carbone. Rubner fait remarquer que ce dernier chiffre est si fai- ble qu'avec les erreurs d'expérience on peut consi- dérer les hydrates de carbone comme directement utilisables pour les besoins de la vie cellulaire. Cette différence entre les trois aliments résulte de ce que Rubner appelle leur action spécifique dynamique. Quelle peut être la cause de l'action spéci- fique dynamique des différentes substances alimen- taires? De nombreux auteurs avaient observé un accroissement des combustions chez des animaux passant du jeùne à l'alimentation. Diverses opinions ont été émises au sujet du mécanisme de cette action ; on a surtout parlé du travail des organes de la digestion, et, en particulier, du travail glan- dulaire. Rubner réfute cette manière de voir, à l’aide d'arguments dont les trois principaux me paraissent être les suivants : 1° En opérant avec diverses substances, il ne semble pas que l'accroissement des combustions varie dans le même rapport que ce que l’on peut attendre du travail des organes digestifs ; 29 Il serait très remarquable que, pour une même substance, les albuminoïdes par exemple, en constate une action spécifique dynamique toujours la même, quelle que soit la grandeur de la ration. Cette action spécifique dynamique est de 31 °/, pour les albuminoïdes; elle sera toujours de 13 °/, pour les graisses et de 6 °/, pour leshydrates de carbone ; 3° Mais l'argument le plus important à mon avis est le suivant : Si l’on met un chien gras en jeûne, après le premier jour il émet un certain nombre de calories, assez constant les jours suivants, tant que l'analyse des excreta montre qu'il vit principale- ment sur ses graisses. Mais, à un moment donné, la calorification augmente; on constate alors qu'il attaque davantage son albumine, et Rubner a calculé que cette albumine se comporte au point de vue spécifique dynamique comme l’albumine ingérée par voie stomacale. Or ici il n'y a eu aucune intervention des organes de la digestion. C'est, par conséquent, uniquement l’utilisation même de l’albumine qui est cause de l'action spécifique dynamique, par suite d’une transforma- tion préalable nécessaire à cette utilisation. Rubner, se basant sur les diverses recherches faites dans ces dernières années sur la chimie des albuminoïdes, arrive à cette conclusion que cette transformation préalable est un dédoublement mettant en liberté du glucose, qui lui seul serait directement utilisable, sans perte sensible, comme le montre avec évidence sa faible action spécifique dynamique. D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE MI Dès lors, voiei comment se passent les choses, suivant Rubner, Le chien à jeun, à 33°, produit 100 calories. Donnons-lui 100 calories en albumine. Pour pouvoir utiliser cette albumine, il faut qu'elle subisse une transformation préalable avec production de glucose. Cette transformalion, d'ordre purement chi- mique, mettra en liberté 31 calories. La chaleur ainsi produite sera inutilisable par l'organisme. La vie cellulaire ne pourra donc tirer que 69 calories de la ration ; comme il lui en faut 100, elle en empruntera encore 31 aux réserves. En tout cela fera 131 calories. Chaque fois que l'organisme à 33° se trouvera dans la nécessité de vivre sur des albuminoïdes, 31 °/, de la chaleur que peuvent dégager ces albuminoïdes seront perdus, 69 °/, seulement seront utilisés physiologiquement. Quelle est, dans ces conditions, la ration d'équilibre à 33°? Si l’on donne 100 calories, nous savons que l'animal en fournit 131 ; il subit donc une perte, il faut lui fournir assez de calories en albumine pour que 69 °/, de ces calories donnent les 100 calories indis- pensables à son existence. Cette ration multipliée par 0,69 — 100, c’est-à-dire qu’elle est égale à 400 : 0,69 — 143 calories. Les mêmes raisonnements s'appliquent à l’utili- sation des graisses et des hydrates de carbone, avec des coefficients d'action spécifique dynamique moindres : 13 °/, pour les graisses, 6 °/, pour les hydrates de carbone. On arrive alors aux rations d'équilibre de 115 calories pour les graisses et de 106 calories pour les hydrates de carbone. Nous voici loin de l’isodynamie. NAT Revenons maintenant au cas où un animal s'alimente à basse température, dans la zone de la régulation chimique de Rubner. Voici ce qui doit alors se passer, toujours d’après Rubner. Un chien, par exemple, émet 1.000 calories en état de jeûne. Ces 1.000 calories ne sont pas toutes indispensables à la vie; il y a une partie réglable par réduction des combustions intra-musculaires ; elle augmente ou diminue suivant les besoins, pour maintenir constante la température du corps; elle peut se remplacer par de la chaleur d'une origine quelconque. Donnons 1.000 calories en albumine; nous savons qu'elles n'en apportent réellement que 690 de physiologiquement utilisables ; il yen aura 310 qui se dégageront, ayant purement la valeur de calories apportées d’une facon quelconque à l'animal. Si la D' GEORGES WEISS — LA PRODUCTION DE LA CHALEUR ANIMALE 19 régulation chimique est d'au moins 310 calories, les 690 calories physiologiquement utiles suffiront à l'organisme ; la régulation chimique restreindra les combustions de 310 calories, qui seront remplacées par les 310 calories dégagées pendant l'élaboration de l’albumine alimentaire. Pour préciser le raisonnement, envisageons trois cas. 1* cas. — Un chien qui émet 1.000 calories en 2% heures a 310 calories de réglables; par consé- quent, 690 calories physiologiques lui sont néces- saires. On lui donne 4.000 calories en albumine; l'élaboration de ces calories mettra à la disposition de l'organisme 690 calories physiologiques qu'il utilisera; mais il se produira 310 calories par voie chimique. Le réglage fera baisser de 310 ca- lories les combustions, et finalement il restera 690 + 310 — 1.000 calories. Mais il n’y aura plus rien de réglable. 2% pas. — Il y a plus de 310 calories, par exemple 400 de réglables. La ration de 1.000 calories d’al- bumine donnera encore 690 calories physiologiques et 310 en chaleur chimique. Sur les 690 premières, l'organisme satisfait un besoin de 600 calories indispensables. En plus, nous avons les 310 calories chimiques, ce qui fait 910 calories. Il restera 90 calories à fournir par le réglage, pour que la température de l'animal ne baisse pas. Le total s ra encore de 4.000 calories. 3 cas. — Il y à moins de 310 calories réglables, 250 par exemple, et 750 de physiologiquement in- dispensables. . Le chien ne trouvera dans la ration que 690 ca- lories physiologiques; il sera obligé d'en prendre encore 60 dans ses réserves; de plus, il y a un dé- gagement de 310 calories de transformation; cela fait 60 calories de trop, le réglage étant à zéro. Donc, la chaleur émise par l'animal aura augmentée par l'apport de la ration. VIII Pour que 1.000 calories fournies en graisse ne fassent pas croître la chaleur émise par le chien, il faut que 130 calories soient réglables; pour les sucres, 60 suffiront. On voit donc que, si l’on élève la température, comme le nombre de calories réglables va en dimi- nuant, une même ration de 4.000 calories, par exemple, fera d'abord sentir son effet pour l’albu- mine, puis pour les graisses et finalement pour les sucres. De même, à une température donnée, à rations surabondantes croissantes, on verra monter la calorification dans le même ordre : albumine, graisses, sucres. En admettant la théorie de Rubner, il me parait important de faire la remarque suivante. Revenons à la ration de 4.000 calories chez un chien ayant 310 calories au moins de réglables. Quelle que soit la composition de la ration en albumine, graisses et hydrates de carbone, le chien dégagera 1.000 calories; nous serons dans l'isody- namie, mais cette isodynamie est apparente, les choses ne se passent pas de même dans les trois cas. Avec la ration d'hydrates de carbone, presque toutes les combustions seront d'ordre physiolo- gique, c'est-à-dire que toutes les calories (sauf 60 environ) seront liées à un processus de vie cel- lulaire. Avec les graisses, il n'y a que 130 calories qui échapperont à cette vie; mais avec l’albumine | il y en aura 310. Ces 310 calories ont la même valeur que de la chaleur apportée d'une facon quelconque, avec de l’eau chaude par exemple ; 690 calories seulement représenteront réellement le résultat de l’activité vitale. Il est évident que les conditions ne sont pas les mêmes. Les trois ra- tions, albumine, graisses, hydrates de carbone, contiennent et apportent au corps le même nombre de calories; mais, quoique ce corps émette la même quantité de chaleur, il ne se trouve pas dans les mêmes conditions d'activité vitale, et l'on ne peut pas dire que les trois rations soient équivalentes. L'albumine est un aliment nécessaire, à dose modérée, nous le savons; mais, au point de vue des combustions et de la vitalité des tissus, comme producteur d'énergie, c'est incontestablement le plus mauvais. IX Atwater a opéré dans la zone de régulation chi- mique; c'est ce qui lui a fait considérer les divers aliments comme équivalents. Nous venons de voir qu'il n'est pas possible d'apprécier la valeur phy- siologique d’un aliment par sa valeur calorifique ; même dans l'organisme, une partie plus où moins grande de la chaleur qu'il dégage peut être nulle au point de vue physiologique. En particulier, les expériences faites sur l'alcool ne sont nullement probantes. Il se pourrait que l'alcool ne serve qu'à fournir de la chaleur ana- logue aux déchets résultant de l'élaboration de l’al- bumine, et qu'il ne livre à l'organisme aucune éner- gie utilisable physiologiquement. Pour élucider ce point, il faudrait, comme l'a fait Rubner pour l'al- bumine, commencer par se débarrasser de la régu- lation chimique ; alors on pourrait voir si l'alcool livre à l'organisme de l'énergie utilisable physiolo- giquement ou simplement de la chaleur résultant de sa combustion: Et maintenant, si nous retournons aux travaux 26 GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE de Chauveau, à la thèse qu'il soutient depuis de longues années, à l'idée qui a inspiré tous ses travaux relatifs aux origines de la chaleur animale et du travail musculaire, que trouvons-nous ? Les cellules qui composent l'organisme ne peu- vent utiliser pour leur travail physiologique, c’est- à-dire pour l'exercice de leurs fonctions, que le glucose. Tous les aliments nécessitent, avant de pouvoir subvenir aux besoins de l'organisme, une élabora- tion consistant en dédoublements d'où résultera le glucose, seul utilisable. Le rendement en glucose des divers aliments, et par conséquent leur valeur au point de vue de l'énergie utilisable physiologiquement, décroît dans l’ordre suivant : albuminoïdes, graisses, hydrates ‘de carbone. La chaleur qui accompagne le dédoublement des aliments lors de la production du glucose n’est d'aucune utilité pour le fonctionnement des or- ganes ; aussi la valeur des rations alimentaires ne peut s'apprécier d’après le nombre de calories qu'elles apportent à un animal. Où donc est le fossé qui sépare Rubner de Chau- veau? Il y a évidemment des différences de détail entre ces deux auteurs; la chaleur de transformation de l’albumine en glucose n'est pas la même d’après la formule de Chauveau et d'après les expériences de Rubner. Chauveau donne une formule de transfor- mation de la graisse en glucose; Rubner dit que l’on ne peut se prononcer sur ce point. Mais, dans les grandes lignes, Rubner arrive à la conclusion que Chauveau soutient depuis de longues années : il n'y a pas d’isodynamie vraie; les aliments ne sont pas équivalents à quantité de chaleur égale dégagée; on ne peut évaluer une ration en calories. Pour l’albumine tout au moins, il faut une trans- formation en glucose avant qu’elle puisse être uti- lisée par l'organisme. Atwater a trouvé l'isodynamie parce qu'il s'est trouvé dans le cas particulier de l’isodynamie appa- rente, mais Rubner doit être placé à côté de Chau- veau, dont il confirme les travaux. D' Georges Weiss, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l'Académie de Médecine. OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE I. — L'ILLUSION DES GRANDS CERCLES. Les tectoniciens modernes ont accumulé prudem- ment les matériaux nécessaires à l'intelligence de la structure du Globe avant d'en entreprendre la synthèse. Ils ont été dûment avertis du danger des généralisations prématurées par les échecs reten- tissants de leurs prédécesseurs qui ont abordé d’em- blée les problèmes les plus difficiles de l'Orogénie, suppléant à l'insuffisance de la documentation par des systèmes hasardés qui se sont tous effondrés l’un après l’autre, malgré la notoriété de leurs auteurs. Cuvier, le père de la Paléontologie, a été aussi le parrain de l'Orogénie, et les a toutes deux orientées, dès leur apparition, dans une fausse direction : d’une part, il a proclamé que sa doctrine de la fixité de l'espèce interdisait toute recherche de filiation entre les êtres vivants et les êtres disparus au cours des temps géologiques, et, d'autre part, il prétendait que les « révolutions du Globe » sont marquées au caractère de la soudaineté des cataclysmes sur la surface entière de la Terre, « la destruction totale de toutes les espèces vivantes ne pouvants’expliquer que par des catastrophes subites et universelles'. » La Paléontologie a pu de bonne heure, grâce à l’in- * G. Cuvxer : Discours sur les révolutions du Globe (1822). fluence de Lamarck continuée par celle de Darwin, se dégager du maillot rigide qui l’enserrait et s'épa- nouir en liberté, mais la Tectonique y est restée comprimée et languissante pendant près d’un siècle. Elie de Beaumont prit, en effet, à la lettre la doctrine cuviériste. Il la compléta en se ralliant à la célèbre hypothèse de Laplace sur le processus de formation du monde planétaire par refroidissement progressif, dérivée de la thécrie de Descartes sur la chaleur centrale de la Terre et de la découverte de l’aplatissement polaire par Newton. Il admit”, dès lors, que la faune et la flore ont été, à plusieurs reprises, brusquement et complète- ment renouvelées par des catastrophes caractérisées par l'érection des chaînes de montagnes, résultat de la contraction de l’ « Ecorce terrestre » par suile de la diminution progressive du rayon du noyau interne liquide. Une observation incom- plètement exacte d’une relation étroite entre l’âge et la direction des grands reliefs le conduisit à considérer « les soulèvements » comme des acci- dents d'orientation constante, qu'il poursuivit arbitrairement sur toute la surface du Globe sous la forme de « grands cercles ». Mais ces conceplions ‘ E. ne Beaumowr : Recherches sur quelques-unes des révolutions du Globe (1829), et Notice sur les systèmes de montagnes (1852). GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE 27 systématiques ne se sont pas vérifiées. Les progrès ! (plus de 700 kilomètres). J'ai montré qu'en rac- ultérieurs de la science ont montré que les périodes géologiques, au lieu d'être brusquement séparées, sont, au contraire, reliées par des « passages » de leurs sédiments, de leur faune et de leur flore. D'autre part, dès 1870, j'ai démontré que le rapport entre l’âge d'un soulèvement et sa direction n'a nullement la rigueur et l'importance qu'il lui attri- buait et, plus tard (1877), Suess a établi que plusieurs des plus hautes chaînes de montagnes sont sinueuses el échappent à toute règle d'orienta- tion rectiligne. Il a été aussi prouvé que la plupart des reliefs sont le produit non pas d'un unique soulèvement, mais d'actions dynamiques réitérées pendant plusieurs périodes géologiques. Vainement plusieurs de ses élèves ont cherché à établir des relations entre les reliefs actuels du Globe et des grands cercles : tels Pissis (184%) et de Boucheporn ‘, qui prêtait aux siens la signification d'équateurssuccessifs dont les déplacementsseraient dus à des chocs de comètes. Elie de Beaumont lui- même, dans la poursuite de l'illusion de ses grands cercles, varia tellement au sujet de leur nombre, porté successivement de 4 à 10, puis à 13, 20, 24, enfin à 96, qu'il devint impossible d'attribuer aux soulèvements qu'ils caractérisaient leur rôle primitif de séparation des périodes géologiques. Une dernière tentative de recours aux grands cercles, due à M. Golfier*, n'a pas mieux réussi, car ce système, plus récent, bien qu'il serre d’un peu plus près le réseau des accidents géologiques et paléogéographiques, n'explique nullement la structure de la surface du Globe. Son assertion hasardée du déplacement des pôles depuis le soulè- vement hercynien n’est assurément pas de nature à lui rallier les géologues. La surface du Globe a été l'objet de bouleverse- ments trop fréquents et trop partiels pour porter la trace continue de grands cercles. On n'a pu, jusqu'à présent, que remonter la série des reliefs par l'observation des plissements et fractures au cours des temps géologiques, et séparer, comme je l'ai indiqué, ceux de la couverture sédimentaire de ceux des roches plus anciennes, de facon à reconstituer le réseau archéen qui s'oriente nette- ment sur les méridiens en tous pays du Globe. Cer- laines de ces lignes méridiennes, qui ont rejoué plus tard° à diverses périodes géologiques, peuvent se suivre sur de longs parcours; par exemple, celle de la fosse érythréenne s'étend sur 60° de longitude * De Boucaeponrx : Etudes sur l'histoire de la Terre et sur les causes des révolutions à sa surface (1844). ? Gorier : Esquisse d'un système orthogonal. B. S. G. Fr. 1903. 3 M. Micuez Lévy a signalé cette fixité dans le temps des « méridiens faibles ». cordant leurs troncons, on peut les prendre comme « axes tectoniques » des grandes masses continen tales des deux hémisphères. Silon concoit difficile- ment l'existence de grands cercles traversant en tous sens la sphère terrestre, en revanche on n'a pas de peine à comprendre que les actions méca- niques qui ont faconné les masses archéennes, relativement homogènes par rapport à la diversité des roches de la couverture sédimentaire, se soient donné rendez-vous à l’aplatissement polaire, région de moindre résistance parce que de moindre épais- seur, et qu'en s'orientant mécaniquement sur l'axe de rotation du Globe, elles se soient manifestées à la surface suivant des tracés méridiens, qui, de tous les grands cereles (ou plutôt des ellipses dont le plan passe par le centre), sont ceux dont la cir- conférence est la plus courte. Tout autre « grand cercle » ne peut être qu'une vue de l'esprit, une illusion. II. —— LA CHIMÈRE DES PULYÈDRES RÉGULIERS. $ 1. — Le Dodécaëèdre pentagonal. Elie de Beaumont poussa son système opiniätre- ment jusqu'au bout. Après avoir couvert la mappe- monde du réseau pentagonal de ses grands cercles, il tint à donner à sa conception de l’orogénie une forme concrète, qu'il réalisa sous la forme d'un polyèdre régulier, le dodécaèdre pentagonal, qui, de tous les systèmes, « est le plus riche en élé- ments de symétrie ». L'essai ne fut pas heureux : la recherche absolue de la symétrie l'avait conduit à un polyèdre trop riche sous ce rapport, car « ce solide, bien connu en cristallographie, est une figure centrée, c'est-à-dire qui exigerait que les saillies continentales, d’une part, et les dépressions océaniques, de l’autre, se répétassent de part el d'autre du centre. Or, c’est précisément l'inverse qu'on observe” ». On mit quelque temps à s'en apercevoir, et le Professeur Haug*a pu dire avec raison que « le réseau pentagonal à malheureusement hypnolisé plusieurs générations de géologues ». Mais l'idée fausse de la comparaison entre le Globe et un cristal avait tellement fasciné les orogénistes, que l'échec du dodécaèdre pentagonal ne-put les décou- rager. Poursuivant leur chimère, ils eurent recours à un polyèdre plus complaisant, dont les faces fussent opposées aux arêtes. Ils crurent découvrir leur idéal dans le tétraèdre, le plus simple des polyèdres d'un nombre impair de faces, sauf à imaginer le rapprochement avec la surface sphé- rique d’une forme qui en est si éloignée, par un PE", ER 1 À. DE LAPPARENT : Traité de Géologie. ? Hau : Traité de Géologie. 28 échafaudage de pyramides hexagonales, de facon à reproduire le polyèdre à faces courbes qui est connu en cristallographie sous le nom d’hexaté- traèdre, « fréquemment réalisé par les cristaux de diamant ». Il existe toute une collection de ces polyèdres qui ont élé invoqués par les auteurs de différents systèmes orogéniques. $S 2. — Le Tétraëèdre de l’homologie. On désigne ordinairement sous le nom d'homo- logie géographique la reproduction du groupement type de la double masse du continent américain terminée en pointe vers le sud et étranglée en son milieu par un isthme long, étroit et sinueux, qui se retrouve dans les formes jumelées de l'Europe- Afrique et de l’Asie-Australie. L'observation en remonte à Bacon (Noyum organum); elle a été reprise par Humboldt (Cosmos), par Carl Ritter (Géographie comparée), reproduite par Reclus (Géographie Universelle), par Dana (7railé de Géologie), par Suess ( Das Antlitz der Erde), ete. Elle est classique en Géographie. Lowthian Green (1873) a tenté d'expliquer cette remarquable coïncidence en la faisant dériver d’un tétraèdre dont la pointe serait au pôle Sud et les trois sommets de base dans les trois continents de l'hémisphère boréal. À. de Lapparent s'est fait en France l'ardent apôtre de ce système, qui ressort plus de la Géographie que de l'Orogénie, mais qui n'est pas plus satisfaisant pour l’une que pour l'autre. J'ai soutenu jadis‘ contre lui une polé- mique assez vive. Plus tard, il eut à prendre la défense de ce tétraèdre contre des partisans d'autres solutions tétraédriques, et préconisa celle d'après laquelle les pointes de ce polyèdre devraient ètre placées, non pas là où Green l'avait indiqué, mais aux trois massifs archéens que, depuis Suess, les géologues appellent les boucliers canadien, scandinave et sibérien. Ce n’est plus alors le tétra- èdre primitif : la base de ce solide est, en effet, reportée du tropique vers le cercle polaire, et le tétraèdre ainsi allongé ne donne plus la même impression de parfaite symétrie cristalline. L'im- portance des trois massifs archéens de l'hémi- sphère Nord appela l'attention sur leurs similaires de l'hémisphère Sud. M. Gregory (1899) les a uti- lisés pour imaginer un autre tétraèdre dont ces derniers seraient les pointes de base, tandis que celle du sommet serait au pôle Nord : ce dernier létraèdre serait celui de l'époque primaire; il aurait été détruit pour faire place plus tard à celui de Green”. L'ancien tétraèdre se serait ‘ Jouroy : Les di-locations du Globe, et A. DE LAPPARENT : Réponse (/tevue Scientilique, 1881). ? W. Prinz : L'hypothèse de la déformation tétraédrique de la Terre (Bruxelles, 1901). GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE retourné comme un gant pour faire peau neuve. Ces complications n’ont pas été sans nuire à la faveur qui avait accueilli la simplicité séduisante de la conception primitive. Ni Green, ni ses élèves n’ont voulu remarquer que la terminaison en pointe vers le sud des trois continents austraux est commune à la plupart des presqu'iles : Groënland, Suède, Espagne, Grèce, Inde, Floride, Californie. Elle n'est même pas limitée à l’époque actuelle, car elle dessinait déjà la pointe méridionale du massif Central et de la Meseta espagnole en fin du soulèvement hereynien. Elle doit être précisément en relation avec la dis- symétrie de position des six massifs archéens, de même que le phénomène de torsion méditerranéen qui fait également partie du système de Green. Aussi, l'idée tétraédrique perdit-elle de jouren jour du terrain au point de vue de son adaptation à la morphologie du Globe, et M. Prinz, qui fut cepen- dant grand admirateur de Green, finit par l'aban- donner. Au point de vue mécanique, elle n'est pas plus soutenable. Comparer la déformation de la Terre à celle d'un ballon qui se dégonfle paraît plutôt puéril. Faire état de la fameuse expérience de Fairbairn sur la déformation triangulaire équi- latérale de tubes métalliques creux à section cireu- laire, n'est guère plus scientifique. Pour tenter de justifier cette comparaison, on a imaginé que la sphère terrestre peut se décomposer en une infinité de tranches parallèles assez minces pour être assi- milées à des anneaux de rayons progressivement décroissants, et, grâce à cette copie hasardeuse des procédés du Caleul infinitésimal, on a cru pouvoir conclure que la déformation d'un tube creux expliquerait celle de la sphère terrestre. Mais on n'a pas réfléchi alors aux conditions mécaniques du problème, qui sont inverses dans les deux cas. En effet, l'expérience de Fairbairn comporte l’exis- tence de forces extérieures agissant uniformément sur la surface du tube, tandis que les déforma lions du globe terrestre sont dues à des forces internes qui ont agi de la facon la plus diverse, tantôt tangentielles, tantôt radiales, produisant des reliefs tantôt rectilignes, tantôt courbes. De plus, l'intégration tubulaire de la surface du Globe ne donne qu'une sphère creuse, c’est-à-dire un corps dont la densité à l’intérieur est beaucoup plus faible qu'à la surface, tandis que la densité de la Terre s'accroît, au contraire, en profondeur. $ 3. — Le Tétraëèdre approximatif. M. Michel Lévy‘ a cru devoir recourir à un * Miceec-Lévy : Sur la coordination et la répartition des fractures -et des effondrements de l'écorce terrestre, avec les épanchements volcaniques. B.S.G.F.; 1908. GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE 29 polyèdre de ce genre pour expliquer le mode de répartition des volcans. En remaniant le tétraèdre de Green, il l'a complété par des grands cercles, tracés d'appui des lignes directrices des manifes- tations souterraines. Malheureusement, beaucoup de volcans échappent à cette systématisation, d’après laquelle les sommets de ce polyèdre, inter- sections des traces de l'activité interne, devraient être signalés par les plus puissants des volcans, le Mauna-Loa, le Fusi-Yama, l'Etna, le Kilimandjaro, etc., qui en sont en réalité fort éloignés, tandis que les sommets de ce tétraèdre se trouvent être, l'un, le pôle sud complaisamment dévié de 18, deux au Mexique et en Arménie, zones de volca- nisme moyen, et le quatrième tombe aux îles Salomon qui n'ont rien de bien volcanique. D'autre part, ces lignes directrices sont forte- ment sinueuses; elles ne désignent plus guère que des zones assez imprécises pour que l’auteur du système déclare que la coïncidence n'est qu'approxi- mative. Ce tétraèdre perd ainsi sa signification initiale et, par conséquent, sa raison d’étre. $ 4. — Les Tétraèdres successifs. I1 semblerait dès lors que l'idée de tétraèdre eût amplement mérité de rejoindre les systèmes chimé- riques des précurseurs de la Tectonique. Aussi les géologues ont-ils éprouvé quelque surprise de la restauration de Marcel Bertrand’, qui a tenté d'appliquer les reliefs du Globe non pas sur un, mais sur deux tétraèdres qui seraient soudés sur une base commune, avec leur sommet à chacun des deux pôles. Et encore ne seraient-ils eux-mêmes que «les tétraèdres réfléchis » d'un polyèdre de cette sorte qui se tiendrait à des profondeurs voisines de 600 kilomètres {1/10 du rayon terrestre), et le nombre des tétraèdres ne se limiterait pas à ce dédoublement, car à chaque période géologique correspondrait un bloc de ce triple tétraèdre. Il y aurait ainsi une quinzaine de ces combinaisons tétraédriques qui, au cours des temps géologiques, auraient tourné dans le sens rétrograde autour de leur axe d'inertie, celui-ci tracant sur la surface du globe, autour du faite idéal des Montagnes Rocheuses de l'Amérique du Nord, une sinussoïde dont les branches auraient des longueurs propor- tionnelles aux nombres 1, 3, 5, 7. Dans le cerveau cruellement troublé du brillant géologue qu'avait été Marcel Bertrand, l'esprit mathématique, origine du mirage des polyèdres géométriques depuis Elie de Beaumont, survivait avec une exaltation qui le conduisit à imaginer une relation mécanique entre les déplacements de l'axe des «tétraèdres suc- ! Déformation tétraédrique de la Terre et HÉRPANt du pôle. C.A.A.S., 1900. cessifs » (qu'il admettait même sous la figure de «tétraèdres déformés ») et le de rotation de la mouvement de l'axe Terre, à représenter enfin chimère comme le grand régulateur de tous les mouvements celle orogéniques. « Quand le tétraèdre sera arrivé à Sa position d'équilibre, le rouage central sera arrêté et la vie géologique de la Terre sera terminée. » La conception des systèmes tétraédriques n'a pas été précisément la revanche de la faillite du réseau pentagonal. III. — SYMÉTRIE ET DISSYMÉTRIES. $ 1. — Importance de la dissymétrie dans la structure du Globe. Les échecs répétés de l'Orogénie systématique ont été attribués uniquement jusqu'ici à l’insuffi- sance de documentation de nos prédécesseurs, esprits éminents pour la plupart, mais trop impa- tients de deviner ce qu'ils ne pouvaient encore con- naître. Il est toutefois une autre cause qu'il convient de mettre en lumière, et qui devait nécessairement fausser toutes ces conceptions orientées vers une idée géométrique : cette cause réside dans la pour- suite chimérique de l’idée de symétrie dans le Temps et dans l'Espace. Au premier abord, la forme du Globe terrestre et de ses reliefs semble se prêter à une tentative de cette sorte; mais, à y regarder de plus près, on ne tarde pas à s'apercevoir que la réalité apparaît comme si la Nature, jalouse de ses secrets, se jouait de l’homme en lui offrant l’amorce trompeuse de la symétrie, tandis que ses procédés sont marqués fortement au cachet de la disposition contraire. L'aspect extérieur du corps humain offre toutes les apparences de la symétrie générale ; mais il faudrait bien se garder d'en conclure que le cœur, le grand régulateur de la vie, est symétrique et symétriquement placé comme le représentent certaines images de piété, tandis qu'en réalité sa conformation et sa place s’affranchissent de toute disposition symétrique. On peut même dire que c’est à la découverte de phénomènes de dissymétrie que nous devons le meilleur de ce que nous con- naissons des mouvements et de la structure de la Terre. L'orbite que parcourt annuellement le Globe n'est nullement, comme on le croyait avant Képler, un cercle, qui est la plus symétrique des courbes planes. Elle est plutôt une ellipse, dont un seul foyer est utilisé, sans que nul puisse jamais savoir ce qu'il advient de son symétrique. En réalité, elle est une sinussoïde qui s'enroule autour de la conique idéale. L'axe de rotation de la Terre n'es nullement placé de facon symétrique, c'est-à-dire d'aplomb sur l’écliptique, et c’est par son incli- 30 GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE naison que nous expliquons le phénomène des sai- sons. Le Globe terrestre lui-même n’est nullement une sphère, le plus symétrique des corps de l'espace, et son renflement équatorial suffit pour déterminer le phénomène de la précession des équi- noxes. Il n'est même pas l’ellipsoïde régulier que promettait la découverte de l'aplatissement polaire, car ses variations de courbure révèlent une forme qui est innomable pour un géomètre, et qui s’est vue qualifiée de géoïde. La dissymétrie règne sans conteste sur la surface du Globe et dans sa structure interne. Les inéya- lités du relief sont sensiblement plus fortes dans l'hémisphère boréal, qui comprend à la fois la plus grande partie des continents, les plus hauts reliefs et les plus profondes des fosses océaniques. La plupart des grandes chaines de montagnes sont fortement dissymétriques : la pente d'un des versants est géné- ralement double de celle de l’autre, et c'est le plus abrupt qui fait face à la plus grande dépression. Leur structure offre encore plus fortement le même caractère, surtout dans les régions de plissement : les phénomènes de charriage en sont même, peut-on dire, l'exagération outrée. L'opposition entre les phénomènes orogéniques et épéirogéniques diffé- rencie absolument les régions qui ont été le siège de plissements de celles qui ont joué le rôle de massifs résistants, avec leur cortège de fractures et d'épanchements volcaniques. Un exemple frappant est celui dû massif hercynien de l'ouest de l'Europe (Bretagne-Massif Central-Vosges-Eifel), qui, pen- dant toute la durée de l'époque tertiaire, a été le théâtre de phénomènes épéirogéniques : lacs oligo- cènes, épanchements d’argiles et de sables éruplifs au début de la période miocène et de laves volca- niques à la fin de cette période jusqu’à l'aurore de l’époque actuelle, tandis que la région contiguë au sud a été le siège de phénomènes orogéniques très puissants qui ont déterminé la formation des Pyrénées à la fin de l'époque éocène et des Alpes à la fin de l’époque miocène. Ce contraste entre deux régions voisines éloigne absolument toute idée de symétrie. Les phénomènes de transgression et de régression inverse et réciproque de dépôts des mers anciennes entre les régions flexibles et les massifs résistants" rentrent dans le même ordre d'idée dis- symétrique. Il en est de même des variations de densité, bases de la théorie de l'isostasie (c'est- à-dire du renflement de la surface d'équilibre dans les parties les moins denses et de la dépression, là où la matière est la plus dense) qui est due à Dutton et qui à conduit son auteur à une explication du mécanisme de la formation des montagnes dans les géosynclinaux. La densité des roches varie, à ‘ HauG : Les géosynclinaux et les aires continentales. B.S.G.F., 1900. travers le Globe, sans aucun souci de symétrie. A l'intérieur, elle atteint en bloc le triple de celle de la surface; mais celle-ci varie sans trop dépendre de l'altitude : par exemple, la présence des silicates basiques, surtout du péridot, la porte jusque près de quatre en Auvergne, région d'émersion pendant l'époque tertiaire, tandis que lu densité des silicates alcalins et des roches sédimentaires dont sont for- mées les Alpes, région voisine, ne dépasse guère 2,5, et les Alpes, bien qu'elles soient actuellement éle- vées au delà de 4.000 mètres, proviennent d'un géosynclinal dont la profondeur a dû être de plus de 3.000 mètres, à en juger par sa faune fossile bathyale. Les trois massifs archéens de l'hémisphère aus- tral sont placés plus à l’est que leurs similaires de l'hémisphère boréal : leur position de dissymétrie par rapport aux méridiens d’un hémisphère: à l’autre est sans doute la cause de la forme en pointe des trois continents et de beaucoup de pres- qu'iles. Leur situation par rapport à leur pôle res- peclif dans chaque hémisphère (ceux de l'hémi- sphère austral sont placés à une latitude beaucoup plus basse que leurs similaires) conduit également à comprendre la présence de la mer libre au pôle Nord et d’un massif montagneux au pôle Sud. On ne manque pas d'exemples pour établir à coup sûr que la dissymétrie est jusqu'ici la meilleure des clefs pour ouvrir les portes mystérieuses de l'Oro- génie qui sont restées fermées à de grands savants, uniquement parce qu'ils ont cherché à y pénétrer au nom de la Symétrie, de la Géométrie, des Mathé- matiques, de l’'Absolu. $ 2. — Le Continent Pacifique et les deux Méri- diens orthogonaux. Cette idée de régularité immuable nous a habi- tués à définir les continents d’après le niveau actuel des mers. Mais, en adoptant l'ancienne conception de l'homologie géographique, on ne comprend guère le vide énorme qui parait exister entre l'Asie et l'Amérique. Les découvertes océanographiques ont permis de constater qu'à une profondeur de 2.300 mètres au-dessous de ce niveau conventionnel de base, il existe là une masse énorme, bordée de chaque côté, à l'Est et à l'Ouest, par des profon- deurs descendant jusqu’à 8.000 mètres, double masse formée en réalité de reliefs allongés du Nord- Ouest au Sud-Est, analogue aux trois doubles con- tinents qui sont complètement émergés. Or, cette profondeur de 2.300 mètres est précisément celle sur laquelle passe la limite de répartition exacte entre la masse des reliefs en dessus et l’ensemble des fosses en dessous : c’est ce que les géodésiens appellent « la surface d'équidéformation »°. C’est * Puiseux : La Terre et la Lune (1908). , GÉNÉRAL JOURDY — OROGÉNIE SYSTÉMATIQUE ET TECTONIQUE POSITIVE 31 réellement elle qui doit être prise comme base de la délimitation des aires continentales; l'homologie géographique répond alors au nombre 4, lieu du fati- dique nombre 3. (La symétrie d'ensemble des homo- logies géographiques dissimule même mal une dou- ble dissymétrie; en latitude, celle de la soudure de l'Asie à l'Europe, et, en altitude, celle de l'effondre- ment de la quatrième double masse continentale.) Mais alors l'Orogénie doit admettre un nouveau- né, le continent Pacifique, qui, du reste, saitdonner signe de vie, car, dans l'hémisphère boréal, il ren- ferme la plus puissante des masses volcaniques du globe, celle dont le sommet forme l'archipel des Sandwich. Si immergé que soit ce continent, les oscillations pendulaires sur les mers qui le re- couvrent confirment son existence par une augmen- lalion sensible de la pesanteur. Le Professeur Haug est arrivé au même résultat en partant de la nécessité de l'existence d'une sépa- ralion, par un massif continental (actuellement immergé), des deux plus profondes fosses du Paci- fique, qui règnent au voisinage de la côte orientale de l'Asie et de la côte occidentale des Amériques, et qui ont contribué à la formation de leurs hauts reliefs côtiers vers la fin de l’époque tertiaire. Il a fait ressortir, de plus, la vraisemblance d'une émersion de ce continent pendant l'époque secon- daire et sans doute aussi pendant la première partie de l’époque tertiaire. Il a rappelé à ce propos les argu- ments zZoogéographiques invoqués jadis par Huxley (1870), puis par Wiemann (1883) et Baur (1897). L'existence de ce continent émergé, portant à 4 les homologies géographiques, m'avait également paru résulter de la considération des « axes tecto- niques’ » que j'ai décrits comme espacés de 90° environ de longitude, c'est-à-dire comme situés le long de deux méridiens se coupant à peu près orthogonalement. On retombe ainsi (tant il est vrai quil est bien difficile de découvrir du nouveau sous le soleil) sur /a loi quadrangulaire de Bruck* (1851), prévue, paraît-il, dès le xvn° siècle par un géogra- phe (Kircher) qui était assurément loin de soup- conner la Tectonique, mais qui n'en avait pas moins deviné que « l’ossature primitive du Globe est constituée par deux anneaux montagneux se coupant à angle droit : ad angulos rectos primam intersecans ». Ces anneaux montagneux orthogonaux ne sont autres que les axes tectoniques, débris encore recon- naissables du réseau archéen, formant « à l’origine», c'est-à-dire avant les dépôts de la couverture sédi- mentaire, une charpente d'orientation méridienne et de forme générale à peu près symétrique, mais progressivement altérée par les actions dynamiques ! Jouroy : Æ'squisse de la Tectonique du solde France(1907). 2 W. Prinz : Loc. cit. | 8 Purseux : La Terre ct la Eune | au cours des différentes périodes géologiques. On ne saurait méconnaîlre que les traces les plus con- stantes des accidents lectoniques dans le Temps ne soient celles qui sont orientées suivant des méri- diens, « les méridiens forts ». Leur fréquence est telle qu’elle a forcément inspiré les inventeurs des systèmes orogéniques les plus récents : c’est ainsi que, sur trois des grands cercles orthogonaux de M. Gollier, il y a un méridien (celui de l'Etna), et que, dans le tétraèdre de Green, les trois arêtes qui convergent au sommet (pôle sud) sont précisément trois grands arcs de méridiens. La structure actuelle du Globe est le d'actions dynamiques qui se sont produites en plu- sieurs sens pendant de longues durées. L'orienta- tion des plissements el des fraclures, ainsi que je l'ai expliqué ailleurs!, s'est beaucoup modifiée dans la suite des temps : primitivement dirigée suivant les méridiens (réseau archéen), elle s'en est écartée progressivement (chaîne huronienne, puis calédo- nienne) jusqu à bissecter les angles des méridiens et des parallèles (chaîne hercynienne) ; plus tard. la forme, découpée en nombreuses lignes brisées, des massifs de résistance aux actions de plissement a déterminé la courbure des vagues tectoniques qui a fait perdre aux chaînes tertiaires les orientations rectilignes. La structure de la Lune* porte égale- ment la trace d’uà réseau rectiligne primitif, qui se retrouve dans le type dit arctique, mais qui, sur le reste de la surface, a été successivement, au cours des âges, morcelé et compliqué, finalement déformé par l'expansion de bassins circulaires*. La symétrie méridienne iniliale, compatible avec l'homogénéité relative des roches archéennes éta- lées alors sur toute la surface du Globe terrestre, n'a cessé de se déformer au fur et à mesure de l'apparition de nouveaux reliefs maintes fois rema- niés et disloqués, de facon à affecter actuellement | des traces trop compliquées pour se prêter à la régularité symétrique dont le type à été cherché à tort dans les cristaux. La Tectonique positive a prononcé la condamnation des théories orogéniques qui étaient basées sur des systèmes trop rigoureu- reusement mathématiques. Les conceptions, gran- dioses dans leur simplicité, qui avaient séduit les princes de la science au commencement du x1Ix° siè- cle, se sont écroulées, chacune à son tour, sous le modeste marteau des tectoniciens qui, à bon droit, se refusent à enserrer l’œuvre de la Nature dans l'absolue rigidité des conceptions géométriques. Général Jourdy. résultat La Loi de position en Géologie. Revue générale des Sciences pures et appliquées, 30 juillet 1909. ? Prinz : Esquisses sélénologiques, dans Ciel et Terre. Bruxelles, 1896-1900. 1908). BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Teixeira (F. Gomes), Directeur de T Académie Poly- technique de Porto. — Œuvres mathématiques. Volume V : Traité des courbes spéciales planes et gauches. Tome I[.—1 vol. in-4° de 497 pages. Impri- merie de l'Université. Coïmbre, 1909. Ce volume complète la monographie des courbes remarquables dont nous avons déjà analysé ici la pre- mière partie‘. Il est consacré, d'abord, à la suite des courbes planes : courbes transcendantes, spirales, cycloïdales, classes de courbes planes ; puis aux courbes gauches : courbes sphériques, hélices et courbes tra- cées sur l'hélicoïde, courbes gauches algébriques, classes de courbes gauches, et enfin polhodie et her- polhodie. Le plan de chacun des chapitres reste tou-, Jours le même : pour chaque courbe, on a rassemblé son histoire, ses propriétés principales, les problèmes où elle intervient, ses relations avec les autres courbes. Par l'élégance des méthodes aussi bien que par la richesse de l'information, ce volume ne le cède en rien au précédent, Signalons particulièrement les chapitres consacrés aux classes de courbes, planes ou gauches : courbes de Ribaucour, de Serret, cycliques, courbes à courbure ou à torsion constantes, courbes de Ber- trand, etc.; sur tous ces sujets, on peut dire que l’au- teur a rassemblé à peu près tous les résultats connus, et cela suppose un travail considérable et une très grande érudition. D'ailleurs, à maintes reprises, l’'émi- nent géomètre établit ou complète les résultats obtenus, par des méthodes personnelles qui donnent ainsi à son œuvre un caractère d'unité original et peut-être inat- tendu, à cause de l'extrême diversité des procédés d'abord employés par les premiers inventeurs. Enfin, il convient de signaler l'importance histo- rique de cet ouvrage; en effet, on peut dire que les courbes célèbres marquent en quelque sorte les étapes du développement des Mathématiques : la plupart appa- raissent pour la première fois comme solutions de problèmes nouveaux, qui ont donné naissance à des méthodes originales. Ce point de vue accroit encore l'in- térêt de cet important ouvrage, qui justifie sous tous les rapports la haute récompense décernée à l'auteur par l'Académie des Sciences de Madrid. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole supérieure des Sciences de Rouen. Cordemoy (C. de), Zngénieur des Arts et Manufac- tures. — Exploitation des Ports Maritimes. — 4 vol. in-16 de 560 pages, avec 175 figures. (Prix :15 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. L'Exploitation des Ports Maritimes fait suite aux deux tomes consacrés par le même auteur à la Cons- truction des Ports Maritimes. De même que ceux-ci, il fait partie de la Bibliothèque des Conducteurs de Tra- vaux publics. Le volume traite de l’utilisation générale des ports, au point de vue technique et administratif. Les installations faites en vue de l'exploitation des ports : hangars, magasins, aménagement de quais, les appareils de manutention, machinerie, etc., les cales, formes de radoub, docks flottants, qui servent à la réparation des navires, sont décrits avec le plus grand soin. Un chapitre spécial est consacré aux ports de pêche, au service des passagers, aux mesures sani- taires et au sauvetage des navires. 1 Voir la Revue gén. des Sciences du 30novembre 1908 p.915. ET INDEX La partie qui a trait aux droits de port, et aux règle- ments relatifs à la police et à l'exploitation des ports ainsi qu'aux ports francs et au régime douanier, pré- sente un grand intérêt. Des documents, des chiffres, des textes de règlement cités par M. de Cordemoy, se dégage une triste impression : l’auteur ne dissimule pas la stagnation de nos ports, l'effrayant recul de notre Marine marchande; il en étudie les causes, et les attribue à la manie de centralisation qui a fait tant de mal à notre pays depuis de longues années, à l'inter- vention de l'Etat, destructrice de toute initiative, parce qu'elle est trop absorbante, et qu'en outre elle est exercée par de trop multiples organes, tandis que, sage- ment dirigée par un ministère unique, elle pourrait être féconde, aussi bien qu'en Angleterre ou en Alle- magne. Il y a dans ce livre des pages sur lesquelles il serait bon que füt attirée l'attention des membres du Par- lement, et où ils trouveraient des renseignements pra- tiques concernant des questions trop peu connues, hélas! dans notre pays. Bref, cet ouvrage termine brillamment la série très intéressante commencée avec les deux volumes sur la Construction des Ports Maritimes. 2° Sciences physiques Chaudier (J.), Préparateur de Physique à la Faculté des Sciences de Montpellier. —+Sur les propriétés électro-optiques des liqueurs mixtes. — 7Jhèse présentée à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1909. On sait que les propriétés électro-optiques des liqueurs mixtes ont été découvertes séparément et à peu près à la même époque dans deux cas très diffé- rents, dont le lien mutuel était d'abord tout à fait inconnu. D'une part, M. Meslin, en recherchant si l'effet d’une dissymétrie créée par un champ électrique ou magné- tique au sein d’un liquide ou d'une dissolution était capable de manifester un dichroïsme, a reconnu que les seuls liquides actifs sont ceux qui renferment en suspension des particules salines cristallines, liqueurs auxquelles il a donné le nom de liqueurs mixtes. Ce dichroïsme, qui s’observe également bien avec des constituants solides incolores, est accompagné d'une déviation du plan de polarisation. L'action du champ est sans doute uniquement d'orienter toutes les parti- cules, car le dichroisme peut encore s’observer uni- quement sous l'action de la pesanteur (dichroïsme spontané). D'autre part, c'est vers la même époque qu'a été découvert le phénomène de Majorana, d'après lequel les dissolutions de fer colloïdal présentent, sous l’action de champs magnétiques intenses, une biréfringence accompagnée d'une rotation du plan de polarisation (appelée rotation bimagnétique) et pouvant ètre accom- pagnée également de dichroisme. Ce sont les recherches de M. Schmauss, confirmées et complétées par les beaux travaux de MM. Cotton et Mouton, qui ont mis hors de doute la nature exacte des liqueurs de M. Majorana. et qui, en y décelant des par- ticules ultramicroscopiques de fer en suspension, les ont rattachées aux liqueurs mixtes; ils ont établi que l'amplitude de la biréfringence est fonction de la gros- seur de ces particules. Ainsi, pour M. Meslin, qui opérait avec des parti- cules supérieures à 3/10 de millimètre, le phénomène BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 33 observé est essentiellement un dichroïsme, tandis que es liqueurs colloïdales de M. Majorana et de MM. Cotton et Mouton sont avant tout biréfringentes. Un problème intéressant était de tenter de relier ces deux cas extrèmes, de suivre la transition progressive de l’un à l’autre, et d'entreprendre une étude générale des propriétés des liqueurs mixtes, de manière à en dé- gager les lois. C’est là le but essentiel du travail, très bien conduit, de M. Chaudier. Les recherches de M. Meslin avaient porté surtout sur l'action d'un champ magnétique; ce physicien n'avait jamais observé de biréfringence magnétique, mais avait rencontré un cas unique de biréfringence électrique appréciable. M. Chaudier à découvert que la biréfringence apparaît dans tous les cas, dès que les particules cristallines deviennent assez lénues. Non seulement le champ électrique, mais encore le champ magnétique et le champ de la pesanteur polarisent ellip- tiquement la lumière. En même temps, le dichroisme persiste, ou très net ou au moins appréciable. La formule de M. Majorana, relative à la biréfrin- gence de ses dissolutions, s'étend aussi à la biréfrin- gence électrique, dont les lois générales sont iden- tiques. L'étude des liqueurs mixtes obtenues avec le mica permet, de plus, de conclure à l’analogie complète des phénomènes spontanés, dus à l’action de la pesan- teur, avec les phénomènes magnétiques et électriques correspondants. Les lois sont les mêmes pour tout champ uniforme capable de produire l'orientation des particules cristallines. Pour obtenir alors l'interprétation théorique de ces phénomènes, M. Chaudier est parti des formules rela- tives à l'équilibre de corps de forme et de structure moléculaire différente, mobiles dans un champ élec- trique. Ces formules n'ayant été vérifiées jusqu'ici que pour des milieux de constante diélectrique faible, l'au- teur les a étendues au cas de liquides d'une constante diélectrique supérieure à celle des corps qui s'y dé- placent. C’est ainsi qu'il est conduit à confirmer l’in- terprétation déjà émise pour expliquer le dichroïsme observé sous l’action d'un champ uniforme quelconque : le phénomène est bien une conséquence de la réflexion de la lumière sur les petits cristaux contenus dans la liqueur, et les deux composantes de la lumière sont moditiées inégalement sans que l’une prenne un retard sur l’autre. MM. Cotton et Mouton, en discutant la théorie du dichroisme de M. Meslin, ont déjà fait remarquer que, pour les cristaux relativement gros, la diffraction est négligeable, et que la cause principale du phénomène devait être attribuée à des réflexions el des réfractions. Par contre, avec des particules cris- tallines très petites, le rôle de la diffraction devient prépondérant, M. Chaudier établit qu'il en est bien ainsi pour les diverses liqueurs mixtes qu'il a étudiées. En outre, il est parvenu à établir la formule générale exprimant le retard entre les deux composantes prin- cipales de la lumière, et permettant de prévoir et d'in- terpréter tous les résultats expérimentaux. Elle contient les diverses lois de la biréfringence des liqueurs mixtes placées dans un champ uniforme capable d'orienter les particules cristallines, et montre que cette biréfrin- gence provient d'un phénomène de diffraction auquel se superpose, dans certains cas, un phénomène de réflexion vitreuse sous l'incidence principale. Enfin le dichroïsme et la biréfringence, étant produits par des phénomènes distincts, ne coexistent pas nécessairement dans une même liqueur. En même temps que le travail, fort bien conduit, de M. Chaudier permet de suivre aussi nettement la trans- formation des phénomènes avec la dimension des par- ticules, il offre le grand intérêt d'appeler l'attention sur cette idée très curieuse, issue des discussions rela- tives aux liqueurs mixtes, que la biréfringence peut ne pas être une propriété distincte. Elle peut résulter simplement de la superposition de phénomènes de réflexion et de diffraction. E. Haunié, Professeur à l'Ecole navale. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Boyer (Jacques). — La synthèse des pierres pré cieuses. — 1 fase. in-8° de 30 pages, avec 6 planche hors texte (Prix : 2 fr. 50.) Gauthier- Villars, édi- teur. Paris, 1909. On ignore souvent dans quelle mesure exacte les savants el les industriels savent reproduire les miné- raux recherchés pour leur beauté ou pour leur rareté. On lira, pour cette raison, avec intérêt, la petite bro- chure de M. Jacques Boyer. En voyant la longue liste d'essais tentés en vue de Ja cristallisation de l'alumine, on se rendra compte de la différence qu'il y a entre les premières synthèses de Gaudin, de De Sénarmont, d'Ebelmen et les expé- riences définitives de M. Verneuil, qui permettent aujourd'hui une fabrication régulière de rubis iden- tique au rubis de la nature. Le rubis est, d'atlleurs, la seule pierre précieuse que l’on sache reproduire avec des dimensions utilisables. Les synthèses de l’opale, de l’émeraude, ne sont pas arrivées à une phase aussi avancée. En présence des résultats indisceutables obtenus par Henri Moissan dans la transformation du carbone amorphe en carbone cristallisé, en considérant la perspicacilé, la persévérance qu'ils ont exigées, on peut penser que le jour n’est pas encore proche où de gros diamants artificiels seront fabriqués. Une impression qui se dégage de la lecture de ce petit livre est que la synthèse des pierres précieuses fut toujours œuvre de savants, et, selon toute vraisem- blance, les progrès qui restent à réaliser sortiront des laboratoires scientifiques, non des fourneaux de quelque amateur facétieux annonçant, comme l’un d'eux le fit récemment, avoir réalisé la fabrication de gros diamants en chauffant au four électrique du charbon avec du mercure. MARCEL GUICHARD, Maitre de Conférences à la Sorbonne. 3° Sciences naturelles Flamand (G. B. M.), Chargé de Cours à l'Ecole supe- rieure d'Alger, Directeur adjoint du Service géolo- gique des Territoires du Sud de l Algérie. — Compte rendu de la campagne 1907-1908 du Service géolo- gique des Territoires du Sud de l'Algérie. — 1 vol. in-8° de 129 pages. Heintz, éditeur. Alger, 1909. L'inventaire des ressources en eau doit être naturel- lement une des préoccupations du Service géologique des Territoires du Sud de l'Algérie. Dans la campagne 1907-1908, ce service a porté ses efforts vers une des régions les plus intéressantes de la bordure du Sahara, vers les Ziban, groupe d'oasis qui s'étend au sud et au sud-ouest de Biskra. Ces investigations, poursuivies principalement par M. Flamand, n’ont pas eu seule- ment un but théorique; le point de vue pratique n’est jamais oublié et l'auteur indique, dans chaque cas, les travaux utiles pour l'aménagement, la conservation ou la reviviscence des sources. Dans cet esprit, il nous décrit successivement les sources artésiennes à appa- reils cratériformes, puis les sources des Ziban avec leurs diverses particularités naturelles ou artificielles (bahr, chegga, fogqara, etc.). Cet inventaire ne com- porte pas moins de 150 sources; il est suivi de l’indi- cation des travaux à entreprendre. Un autre chapitre est consacré au ruissellement et aux eaux vives; quoique les cours d'eau sahariens ne soient pas bien importants, l'auteur montre de quelle facon on pourrait les utiliser. Les recherches de Géologie pure sont résumées dans un autre chapitre; on remarquera, en particulier, celles qui concernent l'existence de la houille dans le Sud- Oranais. Ces recherches géologiques ont pour but l'éta- blissement de la carte géologique des Territoires du Sud. Le Rapport se termine par un glossaire des termes arabes et berbères employés dans ce travail (c'est-à-dire concernant principalement l’eau), glossaire qui sera utile aux géographes autant qu'aux géologues. 1 34 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Comme on le voit par les lignes précédentes, M. Fla- mand continue à déployer son activité dans le domaine saharien ou subsaharien qui est devenu le sien; il faut le féliciter d’avoir su toujours allier la pratique à la théorie et d’avoir apporté immédiatement des rensei- gnements utiles au développement économique des Territoires du Sud de l'Algérie. L. PERVINQUIÈRE, Chef des Travaux du Laboratoire de Géologie à la Sorbonne. Mattoso (Ernesto). — Album de l'Etat de Para. — À vol. grand in-4° de 350 pages, avec de nombreuses photographies. Chaponet, imprimeur. Paris, 1910. Le Gouvernement du Brésil chargeait, l’année dernière, l'un des publicistes brésiliens les plus connus, M. Ernesto Mattoso, de procéder à une étude d’en- semble de l'Etat de Para. Quelque redoutable que fût cette tâche, l'éminent écrivain l'a remplie avec honneur, en condensant, en un volume magnifiquement illustré, les travaux accomplis pendant les huit années de gouvernement du D' Augusto Montenegro. Nulle idée ne pouvait être plus heureuse que l’idée de chercher à mieux faire connaître l’un des plus grands Etats du monde, que l’on n’apprécie point toujours à sa juste valeur, et dont les richesses et les ressources sont inépuisables. L'étranger, industriel ou financier, dont le concours est encore nécessaire au Brésil, saura désormais quelles sont ces ressources et ces richesses; il sera au courant de la vie économique du Para, il verra tous les efforts que le pays a réalisés pour marcher dans la voie de la civilisation. Le livre du D' Mattoso fait honneur à l’auteur et au ministre qui à si heureusement pris l'initiative d'une semblable étude. L°R°1C: Bergeret (Jean). — Flore des Basses-Pyrénées, a414- meutée par EUGÈNE BERGERET. — Nouvelle édition complète, publiée avec une Préface et des Notes, par M. Gasron BERGERET. — 1 vol. in-8°, deuxxvi-960 pages. (Prix : 20 fr.) Klinksieck, éditeur. Paris, 1909. Jean Bergeret (1751-1813), docteur en médecine, pro- fesseur d'Histoire naturelle et vice-président du Con- seil d'agriculture des Basses-Pyrénées, fut un des zélés botanistes de son temps. Il laissa une Flore des Basses- Pyrénées, complète en manuscrit, mais dont deux volumes seulement purent être publiés de son vivant. Son fils, Eugène Bergeret (1799-1868), a enrichi cette Flore de quelques espèces nouvelles et apporté diverses additions ou corrections aux descriptions déjà faites. Il songeait à terminer l'impression de la partie inédite du travail, c'est-à-dire des familles composant les onze dernières classes de Linné, mais son projet ne recut pas de suite. Quoi qu'il en soit, les deux premiers volumes de l'ouvrage incomplet étaient devenus extrêmement rares et atteignaient un prix fort élevé. C'est ce qui a engagé Le petit-fils de l’auteur, M. Gaston Bergeret, non seule- ment à faire imprimer la partie restée manuscrite, mais à donner également une réédition des volumes déjà publiés. « Ne sachant pas la Botanique, dit-il, je ne me suis pas permis de rien ajouter, corriger ni retrancher. » C'est fâcheux sur quelques points: si l'initiative de M. Bergeret permet la diffusion, dans les bibliothèques, d'un très important ouvrage qui était jusqu'ici presque introuvable, elle eût porté des fruits encore meilleurs par un rajeunissement de l'œuvre, qui n’est plus conçue entièrement selon les données de la science actuelle. Gest ainsi que le système de Linné n'est plus suivi par les botanistes systématiciens, et que les recherches se trouveront, de ce fait, rendues plus difficiles. D'autre part, l'intercalation des découvertes récentes qui ont augmenté nos connaissances botaniques sur la région considérée eût été très appréciée des lecteurs. É Cette critique n'enlève d’ailleurs rien à la valeur des observations qui abondent dans le livre et qui ren- dront de très sérieux services aux botanistes herbori- sant dans les Pyrénées. Et, comme au bénéfice scien- tifique s'ajoutera le plaisir de posséder un volume qui jusqu'alors était presque une curiosité de bibliophile, l'initiative de M. G. Bergeret rencontrera certainement un accueil flatteur. LAlUTZ Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. Duval (Mathias), Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, et Gley (E.), Professeur au Collège de France. — Traité élémentaire de Physiologie (9e édition). — 1 vol. 1n-8° de xxxvi-1.164 pages, avec 287 fiqures dans le texte. (Prix : 14 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 190. Nous avons déjà rendu compte aux lecteurs de cette Revue de la première partie de l'ouvrage, consacrée à la physiologie cellulaire et aux premiers chapitres des fonctions de nutrition. La deuxième et la troisième partie, qui ont paru tout récemment, complètent le Traité : comme la précédente, elles sont l’œuvre per- sonnelle de M. Gley. Elles comprennent d’abord la fin des fonctions de nutrition, c'est-à-dire la respiration, les échanges de matières auxquels sont rattachées les fonctions sécrétoires, puis les fonctions de repro- duction, les fonctions d'excrétion et enfin la thermo- genèse. Ce n'est pas sans y avoir mûrement réfléchi que l’auteur à suivi dans son exposition l’ordre que nous venons d'indiquer. Si, en tête des actes d’assimilation et de désassimilation, il nous présente une analyse, très pénétrante d’ailleurs, du fonctionnement des glandes, c'est que ces organes offrent « les exemples les plus remarquables de cette activité spéciale des cellules par laquelle celles-ci extraient du sang les sub- stances dont elles ont besoin et les retiennent à l’exclu- sion des autres ». Ici viendront donc se ranger plus particulièrement celles de ces glandes qui servent aux mutations de matières (foie, pancréas) ou qui contri- buent à maintenir la composition du milieu interne (thyroïde, pituitaire, capsules surrénales, ete.). Si l’on s'étonne de trouver les fonctions de reproduc- tion intercalées dansles fonctions de nutrition, l’auteur saura ménager la transition des unes aux autres par l'étude des phénomènes de croissance et de régénéra- tion, el fera remarquer, avec CI. Bernard, que la nutri- tion n’est qu'une génération continuée et, réciproque- ment, que la reproduction estune croissance qui a lieu au delà de l'individu (Hæckel). Entin, la production de chaleur est liée si étroitement aux échanges de matières que son étude clôt naturellement le cycle des fonc- tions de nutrition. Chacun de ces chapitres, pris isolément, se recom- mande à son tour par l’arrangement méthodique des idées et des faits, par la juste mesure des développe- ments accordés aux diverses questions, suivant le degré d'importance, par un habile choix des documents expérimentaux les plus propres à illustrer l'exposé des doctrines. La deuxième section de l'ouvrage traite des fonctions de relation. Les matières y sont aussi heureusement distribuées que dans la première. En quelques mots, l'auteur nous expose les considérations qui lui ont dicté son plan. « Puisque la mise en jeu de ces fonc- tions (de relation) résulte de la réception par l'orga- nisme de différentes impressions extérieures ou dépend d'excitations internes, il semble logique de déterminer d'abord quelles sont et ces impressions et ces excita- tions. Et comme, d'autre part, les phénomènes de mouvement sont commandés par le système nerveux, il convient d'étudier ce dernier avant d'analyser les mouvements eux-mêmes ». La physiologie des sensa- tions, tant externes qu'internes, parmi lesquelles le sens de l'équilibre et le sens musculaire, forme donc une première et importante subdivision du livre second. Les fonctions du système nerveux central en forment une deuxième : nous y passons successivement BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 35 en revue les propriétés du neurone et ses modes d'acti- vité (actes réflexes, actions d'arrêt, dynamogénie), puis la transmission des impressions sensibles et celle des incilations motrices, enfin le rôle spécial à chacun des centres nerveux (cerveau, moelle, bulbe, cervelet). L'auteur a été bien inspiré en séparant l'étude des conductions, centripète et centrifuge, de celle des réactions propres à chaque partie du système nerveux central, ce qui lui permet de poursuivre sans interrup- tion, à travers les étages successifs du myélencéphale, le trajet et le fonctionnement des voies sensitives, de la périphérie au cerveau, et ceux des voies motrices, du cerveau à la périphérie, au lieu d'en donner, comme on le fait souvent, un tableau morcelé, à propos de chaque centre particulier ; le sujet y gagne en clarté et en unité de vues. Les deux derniers chapitres du livre second résument les notions fondamentales relatives, d’une part, aux pro- priétés et aux fonctions du système nerveux périphé- rique, y compris celles du système sympathique, et, d'autre part, à la physiologie du tissu musculaire, à la mécanique animale et à la phonation. Le Traité se termine par une sorte de précis, très bref d’ailleurs, de Physiologie générale, dont les grandes lignes sont les suivantes : conditions géné- rales de la vie, soit externes, d'ordre physique ou chi- mique, soit internes ou organiques : phénomènes d'adaptation, mécanismes généraux de la vie, ses résul- tats généraux, corrélations fonctionnelles d'origine nerveuse ou d'origine chimique, genèse et évolution des diverses fonctions ou physiogénie. Un pareil essai ne pouvait être que sommaire, en raison même du caractère du livre et aussi, il faut bien le reconnaitre, parce que la Physiologie n’est pas encore à même de formuler toutes les lois générales qui régissent les mécanismes de la vie. Mais, tel quel, cetessai est riche en aperçus et en rapprochements neufs et ingénieux. Nous avons déjà rendu justice, lors de la publication de la première partie de ce Traité, à ses rares mérites, qui en font un livre d'enseignement de premier ordre. Après avoir parcouru les pages nouvellement parues, nous ne pouvons qu'admirer, une fois de plus, ce remarquable travail de coordination et de conden- sation, auquel ont présidé une érudition sûre, mformée de tous les progrès de la Physiologie, et un esprit cri- tique affiné par l'habitude de la recherche personnelle. Et, comme l'auteur met encore au service de ces qua- lités une plume alerte et facile, il a écrit un ouvrage d'une lecture aussi agréable qu'instructive. Le succès qu'il à obtenu prouve que tel a été le sentiment de tous ceux qui l’ont eu entre les mains. Ce ne sera pas une prophétie aventurée que de lui prédire une longue et heureuse carrière, car nous savons que l'édition actuelle est déjà entièrement épuisée, et que M. Gley en prépare une nouvelle. Aussi bien les suffrages les plus autorisés sont encore ceux du public auquel le livre s'adresse, et, quand un auteur, à su se les conci- lier si rapidement et si complètement, il ne faut point « d'autre règle pour juger de l'ouvrage; il est bon et fait de main d'ouvrier ». E. WERTHEIMER, Professeur de Physiologie à la Faculté de Médecine de Lille. La Célébration du centenaire de Charles Darwin par la Section des Sciences de l’Institut national genevois. — Discours prononcés le 42 février 1909 par MM. Emice Yun6, Jon BRiQueT, B. P. G. Hocareu- TINER, Epouarp CLAPARÈDE et Tnéopore FLourNoy. — Une brochure grand in-8° de 72 pages. (Prix : 2 fr.) H. Kündigq, libraire éditeur. Genève, 1909. Le 12 février dernier, jour du centième anniversaire de la naissance de Darwin, la Section des Sciences de l'Institut genevois à tenu au Bâtiment Electoral une séance solennelle, consacrée à célébrer la mémoire du grand naturaliste, en rappelant l'extraordinaire in- fluence qu'il a exercée sur la Science contemporaine. Cinq discours furent prononcés par les membres les plus compétents en matière de doctrines darwiniennes. Ces discours viennent de paraitre dans une élégante brochure à grandes marges, imprimée sur un papier de choix, qui sera lue avec intérêt par lous ceux qui s'occupent de ces questions. L'accueil fait au darwinisme, il y a cinquante ans, par les savants genevois, les Alphonse de Candolle, Pictet de la Rive, Carl Vogt, Edouard Claparède, Marc Thury, etc., y est exposé par M. le Professeur Emile Yung, président de la Section, dans une étude forte- ment documentée. M. le Dr John Briquet, le savant directeur du Jardin botanique de Genève, y traite de Darwin botaniste. M. le D' B. P. G. Hochreutiner, pri- vat docent de l'Université et conservateur au même Jardin, expose plus particulièrement l'hypothèse des gemmules et de la pangénèse, par laquelle Darwin essaya d'expliquer les phénomènes biologiques fonda- mentaux tels que l'hérédité. La conférence de M. le Professeur Edouard Claparède a porté sur les inappré- ciables services rendus par Darwin à la psycholesie générale, grâce à ses recherches sur l'instinctetl’expres- sion des émotions dans la série animale. Enfin, M. le Professeur Th. Flournoy a, sous le titre de Darwin phi- losophe, résumé en quelques pages lumineuses le retentissement qu'ont eu les idées darwiniennes sur la facon de penser de notre époque, et il a montré la remarquable attitude prise par Darwin à l'égard des éternels problèmes qui hantent l'esprit humain. Il y a là, dans un raccourci qui s'allie à une parfaite clarté d'exposition, le tableau de l’activité si variée et si puissante de l’un des plus grands génies du siècle passé et d'une doctrine qui, après avoir soulevé des tempêtes, jouit, de nos jours, de la considération de tous les esprits scientifiques. 4 Sciences médicales Lévy (Dr Paul-Emile), ancien Interne des Hôpitaux de Paris. — Neurasthénie et Névroses. Leur gué- rison définitive en cure libre. — 1 vol. in-16 de 407 pages. (Prix : 4 francs.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1909. On sait combien fréquente, combien tenace est la -neurasthénie; combien, en particulier, elle sévit sur les travailleurs de la science, soit qu'elle les arrète entièrement dans leurs occupations, soit qu'en res- treignant leurs possibilités d'action, elle ne leur per- mette pas de donner leur pleine mesure. Dans son livre bien connu : L’Education rationnelle de la volonté; son emploi thérapeutique, M. Paul- Emile Lévy a été l’un des premiers à énoncer claire- ment les remèdes à apporter à cette pénible affection. Le nouvel et très remarquable ouvrage qu'il vient de publier reprend la question d'une facon tout à fait complète, en assurant aux idées précédemment expo- sées tout leur développement et toute leur portée. « Les névroses sont curables, dit le D' Paul-Emile Lévy, et elles le sont de façon totale et définitive. Cette notion optimiste et consolatrice, scientifiquement jus- tifiée, doit prendre désormais, sans conteste, la place de ces opinions décourageantes qui n'ont que trop longtemps régné, et ne règnent encore que trop large- ment sur les esprits. » Pour que cette guérison puisse être obtenue, il est évidemment nécessaire que le traitement puisse exac- tement se baser, dans chaque cas, sur les causes mêmes de la névrose. Or, parmi ces causes, il en est de particulièrement importantes, et dont la méconnaissance presque con- stante a été la principale raison d'être des échecs si longtemps observés : ce sont les causes d'ordre moral, psychique. L'élément psychique intervient, en effet, à chaque pas, chez les malades nerveux, par essence même infiniment émotifs, impressionnables. De là, le —— | 1 7e édition. F. Alcan, 1909. 36 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX EE OS rôle primordial de la thérapeutique morale, ou psyclo- therapie, sur laquelie le D' Lévy à depuis longtemps insisté, et qu'il a vettement placée sur son terrain rationnel et vrai : l’education de la raison et de la voloute. Quelque importance que l'auteur y attache, la psychothérapie ne saurait, cependant, constituer toute la thérapeutique des névroses Dans des pages d’une analyse tres serrée, M. P.-E. Lévy critique la psycho- thérapie beaucoup trop exclusive et absolue récemment exposée par M. Dubois. Un malade nerveux ne s’est pas rendu tel seulement par émotivité, manque de jJuge- ment, ou illogisme, comme l'a prétendu le médecin de Berne, mais aussi parce qu'il n’a pas eu connaissance exacte de ses capacités d'action et des exigences par- ticulières de son organisme. Il faut donc apprendre au malade à la fois à connaître les limites de ses forces, et l'usage qu'il doit en faire, et à régler sa vie morale, ses émotions. L'éducation... ne doit pas être seulement morale : elle doit être à la fois morale, physique, vitale, elle doit régler l'activité du sujet par rapport à ses occu- pations et à ses conditions d'existence; elle doit être sociale, c'est à-dire s’'etlorcer de l'adapter à son entou- rage et au milieu où il est appelé à évoluer. Le malade arrivera ainsi progressivement à redevenir maitre de lui-même, à « tenir, comme le dit L'auteur, entre ses mains tous les fils de sa marionnette » et, par suite, à demeurer détinitivement guéri. La thérapeutique morale et rééducatrice, ainsi exposée, aboutit nécessairement à une conséquence des plus remarquables, et qui marque, à vrai dire, une évolution dans le traitement des névroses. À l'inverse de l'opinion courante, soutenue encore par MM. Dubois, Déjerine, etc., M. P.-E. Lévy s'élève vigoureusement, en effet, contre la soi-disant nécessité de l'isolement et du repos au lit classiquement imposés pendant des semaines aux malades nerveux. « Il est, en vérité, désolant, dit-il, de constater à l'heure actuelle avec quelle facihté est mise en œuvre systématiquement cette méthode rigoureuse et injustifiée de l'isolement, pour des manifestations neurasthéniques, des phobies, des obsessions, pour quelques crises névropathiques, voire pour de simples dyspepsies nerveuses ! » Non seu- lement cet isolement est inutile, mais il est nuisible et expose presque fatalement à des rechutes, une fois que le malade se trouve remis en contact avec ses Con- ditions de vie antérieure. La cure libre, que l'auteur a pu pratiquer, pour ainsi dire, dans tous les cas, n'imposant aucun éloignement du malade d'avec ses proches, lui permettant de conserver tout ou partie de son activité habituelle, non seulement à pour effet d'augmenter au maximum sa résistance morale, mais constitue pour lui un entrainement pratique, qui le garantit contre toute rechute. Des observations très typiques de malades ainsi traités et guéris, sans récidive ultérieure, viennent apporter une sanction à cette doctrine nouvelle. Signalons encore les pages consacrées à ce que l’au- teur nomme les psychonevroses méconnues, c'est-à-dire à ces casse référant à des affections de natures diverses, névralgies, sciatiques, dyspepsies, etc., parfois longue- ment traitées sans résultats, ou même opérées à tort, parce qu'on n’a pas SU y démèêler la part prépondérante de l'élément psychique, tandis qu'ultérieurement un traitement psychique bien dirigé en amène la rétroces- sion de la facon la plus rapide. En résumé, ce qui doit être retenu de cet ouvrage, c’est la curabilité bien démontrée, non seulement de la neurasthénie, mais de ces affections de tout ordre, si variées dans leurs manifestations, qui ont paru long- temps échapper aux prises de tout traitement métho- dique, cette guérison pouvant d'ailleurs être obtenue en cure libre, c'est-à-dire sans que le malade soit obligé, contrairement aux opinions admises, d'inter- rompre ses occupations, et avec la possibilité, pour lui, de continuer son mode de vie antérieur. D: P. DESFOSSES. 5° Sciences diverses Vaschide (N.), Directeur adjoint du laboratoire de Psychologie pathologique de l'Ecole des Hautes- Etudes. — Essai sur la Psychologie de la main. — 4 vol. in-8° de 504 pages avec 31 planches hors texte. Marcel Rivière, éditeur. Paris, 1909. Au moment où notre pauvre ami Vaschide futatteint de l'implacable maladie qui l’emporta, il était en train de réunir les éléments et les illustrations d’un livre sur la psychologie de la main auquel il avait déjà mû- rement réfléchi depuis des années, et, lorsque j'allais alors le voir, il se laissait entrainer passionnément à m'exposer ses idées sur la concordance logique entre la psychologie de l'individu etla physiologie de sa main. Chaque pensée ne s'accompagne-t-elle pas d'un geste, et chaque geste ne s'inserit-il point sur la main? Ins- cription légère et fugace il est vrai, mais que la répé- tition des mêmes gestes rend profonde et durable, à tel point que l’on peut, à l'inspection de la main, retrouver la pensée dominante etreconstituer la psychologie d’un individu. elle est l'idée qui domine la chiromancie scienti- fique d'aujourd'hui, et que N. Vaschide a mise en lumière dans les divers chapitres de son livre. Les hommes ont toujours cherché à connaître l'avenir, et leur impatience du résultat les a conduits à utiliser des moyens divinatoires, tels que l'astrologie et la chi- romancie, dont l’origine semble commune. Dès le début, la chiromancie fut exploitée parles bohémiens et par les diseurs de bonne aventure, et souvent avec assez d'habileté pour que des hommes positifs et des philo- sophes aient été impressionnés par leurs sentences el aient considéré la chiromancie comme une sorte de science. Ce n'est qu'aujourd'hui que la chiromancie mérite véritablement le nom de science, et encore à la condition que l’on fasse comme N.Vaschide, et qu'on la débarrasse de tout le fatras de la pseudo-divination. On distingue dans cette étude deux parties : 4e La chirognomonie, qui a pour but les renseigne- ments fournis par la forme générale de la main sur la physiologie et la pathologie de l'individu; à elle se raltache l'étude des déformations de la main dans les rhumatismes, dans les paralysies, dans les affections du système nerveux, dans les dégénérescences ; 20 La chiromancie, qui prétend par l'étude des lignes de la main reconnaître le passé et prédire l’avenir. Par des expériences instituées d’une facon précise, N. Vas- chide s’est rendu compte que le rôle divinateur de la chiromancie est mince et qu'il est bien plutôt fait de l'habileté de la chiromancienne à interroger le sujet sans en avoir l'air et à le forcer inconsciemment à se raconter lui-même. Quand la chiromancienne n'a plus à sa disposition que la main du sujet, sans sa physio- nomie et sans sa parole, son art commence à balbutier. Etudiant la main sous tous ses aspects, dans tous ses rôles et par toutes ses techniques, N. Vaschide fait une description des empreintes digitales et des ser- vices qu'elles rendent aujourd’hui à l'identification des individus, esquisse la psychophysiologie et même la psychopathologie de la poignée de main et des divers gestes de la main, expose la symptomatologie, la patho- génie et la thérapeutique de la crampe des écrivains, el fait une revue intéressante, guidée par un œil d'artiste autant que par l'esprit scientifique, des aspects que la main a revêtus dans les œuvres d'art des divers pays et des diverses époques. L'originalité et l'intérêt de cetravail avivent à chaque page nos regrets d’avoir perdu l'ami et le savant d’ave- nir ; et notre reconnaissance va à la femme pieusement dévouée qui à su réunir les documents épars de ce tra- vail et en faire la synthèse philosophique, comme son mari l'avait rêvée. D' MARCEL LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine. Médecin des Hôpitaux de Paris. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 37 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Décembre 1909. M. A. Ladenburg est élu Correspondant pour la Section de Chimie. 12 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré géné- ralise la méthode de Jacobi et l’applique à la théorie de la précession. — M. H. Deslandres a aménagé le grand télescope de l'Observatoire de Meudon de facon à pouvoir s’en servir pour la photographie des comètes ; au moyen du nouveau dispositif, il a pris de bonnes photographies de la comète de Halley. — MM. H. Des- landres et A. Bernard ont photographié le spectre de la comète de Halley; ils ont reconnu que la comète a déjà une lumière propre, qui même est due en partie à des gaz incandescents. — M. Coggia présente ses observations de la comète Daniel et de la comète de Halley, faites à l'Observatoire de Marseille. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Lafay présente un dispositif destiné à l'évaluation de très faibles diffé- rences de pression. Il consiste à faire agir celles-ci sur une mince pellicule de celluloïd ou de collodion ren- due conductrice par un dépôt d'argent et à contreba- lancer leur effet en appliquant à la lame une tension électrostatique déterminée. — M. Eug. Bloch a constaté que, pour un métal et une raie donnés, la grandeur de l'effet photo-électrique de Hertz dépend beaucoup du degré de poli de la surface et du temps; en outre, il varie avec la longueur d'onde des radiations lumi- neuses. — MM. G.-A. Hemsalech et C. de Watteville ont étudié le spectre de raies du calcium donné par le chalumeau oxyacétylénique ; c’est le plus riche qu'on ait obtenu. Un certain nombre de raies n'existent pas à la base de la flamme; elles ne prennent naissance ou ne deviennent fortes qu'au-dessus du cône bleu. — M. E. Caudrelier expose une théorie de la décharge des inducteurs qui permet d'expliquer : 1° que, dans le cas de courtes étincelles, l’'écartement des traits lumineux reste sensiblement constant, lorsqu'on mo- difie la capacité primaire; 2 que la distance de ces traits lumineux varie d’une facon très appréciable quand il s’agit de longues étincelles. — M. L. Dunoyer a étudié la variation de la conductibilité électrique du verre avec la température dans les champs très faibles. La conductibilité reste extrêmement faible jusque vers 150°, où l'isolement ne le cède en rien à celui que donne l’ébonite; à partir de 1809, elle s'accroît très rapidement. — M. L. Bruninghaus a constaté que les régions moyennes d'émission des spectres de phospho- rescence des terres rares sont généralement peu éloi- gnées des régions moyennes d'absorption; il y a généralement alternance entre les groupes de bandes d'absorption et les groupes de bandes de phospho- rescence. — MM. Ph.-A. Guye et N. Zachariadès montrent la nécessité de déterminer toujours par l'expérience la correction de réduction au vide des pesées, pour le calcul des poids atomiques, ou même d'effectuer réellement toutes les pesées dans le vide. — M. J. Taffanel à étudié la propagation des inflamma- tions de poussières de houille dansles galeries de mine. La présence d'un barrage partiel et, par induction, d'un coude brusque a pour effet de rendre, en amont du barrage, le coup de poussières beaucoup moins violent que lorsque la galerie présente en ce point un épanouis- sement favorable à la détente des gaz. — M. E. Goutal a dosé par l'hémoglobine l'oxyde de carbone dégagé des aciers par l'action des sels cuivriques. Les teneurs sont sensiblement les mêmes que celles qu’on dose par oxydation avec 1*05. La teneur maximum ne dépasse pas 0,14 9/,. — M. Emm. Pozzi-Escot décrit une mé- thode pour la séparation du vanadium, du molybdène, du chrome et du nickel dans les aciers spéciaux. - M. G.Chesneau communique une méthode pour l'ana- lyse des niobites et tantalites, basée sur la décompo- sition par fusion avec KHSO* et H®SO$, reprise par l’eau bouillante, précipitation de N°05 et Ta’0°, dissolution de ces derniers dans HF et séparation par la méthode de Marignac. — M. P. Freundler, en chlorant par PCI* l'acide benzène-0-azobenzoïque, oxydant le produit de laréaction, puis chlorantänouveau, a obtenu le dichloro- oxyindazol, F. 187; avec l'acide benzène-azo-p-chlo- robenzoïque, on arrive de même au trichloro-oxyin- dazol, F.209°-210°.— M. M. Godchot a préparé plusieurs dérivés du dicyclohexylphénylméthane, obtenu par hydrogénation du triphénylméthane. Le dicyclohexyl- phénylcarbinol, résultant de l'action du benzoate d’éthyle sur C°H‘'MgBr, fond à 77°. — M. E. Gautrelet a constaté que la digestion artificielle chlorhydro-pep- sique des matières grasses donne des mannites lévo- gyres, tandis que la digestion sodico-pancréatique donne des mannites dextrogyres. — M. M. Holderer à observé qu'en milieu neutre à la phénolphtaléine, la sucrase traverse entièrement les bougies de porcelaine; en milieu neutre au méthylorange, elle est presque complètement retenue à la filtration. — MM. Ch. Mou- reu et A. Lepape ont recherché et caractérisé, d'une manière certaine, le krypton etle xénon dans 26 sources thermales. La présence de ces deux éléments paraît générale dans les gaz des sources thermales. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. H. Guillemard, R. Moog et G. Regnier ont constaté que la perte de poids du corps et la perte d’eau par respiration pulmo- naire et cutanée sont plus faibles en montagne qu'en plaine; il en est de même du rapport entre la perte d’eau et la perte de poids totale. — M. R. Anthony à entrepris, au Laboratoire maritime de Saint-Vaast-la- Hougue, l'élevage du targeur ou Zeugopterus punctatus, en suivant à peu près la même technique que pour le turbot. L'époque de la ponte est plus précoce et la période critique plus courte qu'avec ce dernier; les résultats sont très encourageants. — M. P. Becquerel, ayant fait couper au ras du sol des tiges de Zinnia ele- gans gelés, a observé la production de nombreux rejets donnant de très belles fleurs qui présentèrent une série de variations brusques. — M. A.Prunet a planté des châtaigniers du Japon dans des châtaigneraies attaquées par la maladie de l'encre et a constaté qu'ils résistent depuis sept ans à la maladie et se développent vigoureusement. — M. E. Coquidé a étudié les types de végétation des tourbières du nord de la France; il distingue un type marécageux et un type xérophytique ; dans ce dernier, les végétaux présentent les caractères de la végétation des coteaux de craie et des sols arides. — M. L. Trabut a constaté que le Citrus bigaradia, qui ne paraît pas s’hybrider facilement avec l’oranger doux, s’hybride avec le mandarinier pour donner un Citrus à caractères mixtes. L’oranger doux (C. auran- tium) peut être obtenu par l'effet du croisement d'un C. nobilis et d'un C. bigaradia. — M. Aug. Chevalier adresse des renseignements sur sa mission scientifique en Afrique occidentale, en particulier sur les plantes observées dans la forêt de la Côte d'Ivoire. — M. P. Le- moine a calculé le rétrécissement produit par les plis du bassin de Paris. Il est excessivement faible : il est de l’ordre du mètre pour le plus important, celui du pays de Bray. Dans l'hypothèse où les plisséments sont dus à des refoulements latéraux, il suffirait d'une poussée horizontale de même ordre pour produire ces plissements. —— M. G. Delépine fait connaître l’exis- 38 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tence, dans le calcaire carbonifère belge, de zones fos- silifères parallèles à celles qui ont été établies par Vaughan à Bristol et dans le sud du pays de Galles. — MM. R. Cambier et A. Renier ont reconnu que les Pinakodendron sont des Lépidodendrées au même titre que les Asolanus et les Bothrodendron.Les Cyclostigma ont avec les Pinakodendron de très grandes affinités ; on en viendra probablement à admettre l'identité des deux genres.— M. L. de Launay montre que la source thermale est caractérisée par une remontée rapide, supposant une fracture largement ouverte et nette- ment individualisée. La durée totale du trajet souter- rain des eaux est au minimum de six mois, souvent beaucoup plus forte. — M. E.-A. Martel communique ses recherches sur l'hydrologie souterraine du massif de Pène-Blanque (ou Arbas) dans la Haute-Garonne. Séance du 20 Décembre 1909. Séance annuelle. Proclamation des Prix décernés par l’Académie. Séance du 27 Décembre 1909. M. le Président annonce le décès de M. Bouquet de la Grye, membre, et de M. Lortet, correspondant de l’Académie. — M. A. Gautier est élu vice-président de l'Académie pour 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emile Picard pré- sente ses recherches sur une classe de développements en séries de fonctions fondamentales se rattachant à certaines équations fonctionnelles. — M. J. Haag a déterminé toutes les familles de Lamé composées de surfaces admettant un plan de symétrie variable. — M. D. Pompéiu communique ses observations sur la représentation des fonctions analytiques par des inté- grales définies. — M. Ch. Reïignier indique une for- mule pour le calcul des volants de laminoirs: P— N/Vmoy, Où P est le poids en tonne de la jante, N la puissance maxima en chevaux et Vs. la vitesse en mètres par seconde du centre de gravité de la jante. — M. L. Lecornu a déterminé le moment d'inertie du volant des moteurs d'aviation en fonction des caracté- ristiques de l’hélice, du nombre des cylindres, de la variation proportionnelle du moment moteur et du coefficient de régularité au-dessous duquel on ne veut pas descendre. — M. E. Jouguet démontre, pour les ondes de choc et combustion, le postulat suivant : L'état initial (ou l’état final) étant donné, la variation d’entropie est d'autant plus grande que la variation de pression est plus grande. — M. R. Jarry-Desloges à observé le retrait graduel de la calotte polaire australe de Mars pendant l'opposition de 1909 ; elle semble pla- cée sur un terrain de relief très varié. — M. Coggia adresse ses observations des comètes Daniel (1909 e) et de Halley faites à l'Observatoire de Marseille. — M. Borrelly et M. P. Chofardet communiquent leurs observations de la comète Daniel (1909 e), faites respec- tivement aux observatoires de Marseille etde Besancon. — MM. Montangerand et Rossard adressent leurs observations de la comète de Halley faites à l'Observa- toire de Toulouse. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Arctowski a dressé des cartes des écarts des températures moyennes de chaque année de 1891 à 1900 par rapport aux moyennes des dix ans. Les pléions (aires occupées par les écarts positifs) se maintiennent pendant quelques années, puis se déplacent. — M. Jean Becquerel, en étudiant les modifications que subissent, sous l'influence d’un champ magnétique, les bandes d'absorption des cris- taux, a observé quelques effets qui semblent produits par une variation de l'amortissement. — M. V. Bour- nay a constaté que les électrolytes renfermant deux ions monovalents quelconques élèvent la tension su- perficielle de l'eau; les acides HC], HAzO*, HBr l'abaissent au contraire, Ce phénomène semble dù à l'adsorption des ions I dans la couche superficielle. — M. L. Houl- levigue, en volatilisant dans le vide un fil métallique chauffé par un courant électrique et condensant les vapeurs sur une cloche de verre en rotation, a obtenu des pellicules métalliques très minces. — MM. G. A. Hemsalech et C. de Watteville ont comparé leur spectre du calcium obtenu avec le chalumeau oxyacé- tylénique à celui de M. King obtenu au four électrique ; ils sont identiques à l'exception d’une raie À — 6708,18 que les auteurs attribuent à une impureté, qui n’est autre que le lithium. — M. L. Bruninghaus a vérifié en partie sa théorie d’après laquelle l'émission de lu- mière par phosphorescence est localisée dans les couches internes de la matière, les molécules phospho- rogènes des couches superficielles n’agissant qu'en vertu de leur pouvoir absorbant pour tamiser les radia- tions émises en profondeur. — MM. E. Briner et A. Wroczynski ont constaté que le gaz AzO soumis à une très forte pression se décompose suivant l'équation : 3 AzO — Az°0® EL Az. — M. de Forcrand, en faisant évaporer à froid une dissolution concentrée de rubi- dine, a obtenu des cristaux d’un dihydrate, RbOH + 2H°0, F.459-55°, Avec la cæsine, il a été impossible de préparer un composé analogue. — M. Em. Vigouroux montre que l'étude chimique des alliages nickel-cuivre et surtout celle de leurs forces électromotrices ne per- mettent pas de conclure à l'existence de composés dé- finis. — M. Em. Pozzi-Escot propose de doser l’azote nitrique par réduction à l’aide du système aluminium- mercure et titration de AzH* formé. — M. G. Dupont, en faisant réagir Br sur l’hexine-3-diol-2:5, CH*.CHOH, C: C.CHOH.CHS, a obtenu deux bromures isomères, F. 2149-2159 et 1190-1200, que la poudre de Zn réduit en deux glycols également isomères, F. 69°-70° et Eh. 124° sous 15 mm. — M. Danaila a obtenu l’indigo tétra- bromé en réduisant à froid la solution benzénique du chlorure de l'isatine dibromée 5:7 au moyen d’une solu- tion acétique d'HI. L'indigo tétrachloré s'obtient d'une facon analogue. Ces corps sont donc des dérivés 5:7 : 5:17". — MM. G. Bertrand et M. Holderer ont constaté que le cellose se dédouble entièrement en glucose sous l'influence de la macération d’Aspergillas niger. Celle- ci renfermerait donc une diastase nouvelle que les auteurs nomment cellase. — MM. Em. Perrot et M. Le- prince ont extrait des inflorescences de l’Adenium Hongkel, poison d’épreuve du Soudan français, un corps très actif, de formule C?H*!05. 39° SCIENCES NATURELLES. — MM. J. Auclair et P. Braun ont observé deux cas de fièvre de Malte chez des garcons bouchers de l’abattoir de La Villette à Paris; ils paraissent avoir été contractés au contact de mou- tons atteints de cette maladie: — M. Le Dentu montre que les prétendus anévrismes des os, pulsatiles ou non pulsatiles, doivent représenter réellement un reliquat de tumeurs disparues ; il propose de les appeler héma- tomes des os. — M. P. Bonnier démontre l'existence et l'autonomie de centres bulbaires présidant à la désin- fection du milieu gastro-intestinal. — MM. J. Abelous et E. Bardier ont observé que l'injection d’urohypo-. tensine produit chez le chien une hyperémie intense de la muqueuse intestinale. Cette substance, chauffée à 140°-120°, perd sa toxicité. — M. A. Contamin a traité par les rayons X des souris cancéreuses. L'action est d'autant plus efficace que le tissu de la tumeur est plus jenneet plus prolifique; la résorption d’ane tumeur un peu volumineuse entraîne la mort de l'animal, proba- blement par intoxication. — MM. CI. Regaud et Th. Nogier sont parvenus à stériliser totalement et défini- tivement les testicules du rat par une seule application de rayons X convenablement filtrés, et cela sans pro- duire la moindre modification cutanée. — M. F. Vlès a constaté que l’absorption lumineuse n’est pas uni- forme dans une fibre musculaire. Certaines bandes d'absorption paraissent spéciales aux disques Q biré- fringents ; d’autres sont générales à toute la fibre, sans localisation spéciale. — M. B. Collin présente quelques observations sur deux Acinétiens nouveaux : le Pen- drosomides paquri Collin et le Podophrya fixa 0. F. Muller. — M. G. Arthaud a étudié un spirochète sali- vaire très fin, déjà signalé par Miller, puis Lagarde. Il ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES appartient à la classe des microbes filtrants; on le trouve dans tous les cas de stomatite, la grippe, la rou- geole, la scarlatine. — M. L. Cayeux a reconnu que tous les minerais de fer oolithiques de France étaient calcaires à l’origine, aussi bien par leurs oolithes que par leurs organismes. — M. J. Dumont montre que les roches pures, réduites en poussière, sont attaquables par les solutions acides ou salines ; l'attaque est lente et faible, et fonction de leur degré de finesse et de leur altération préalable. On s'explique ainsi pourquoi les particules sableuses du sol ont conservé leur nature minéralogique propre. — M. J. Savornin à étudié l'évolution paléo-géographique du cap Bon; il montre que la direction des plissements de l'Atlas doit être considérée comme la résultante de deux actions orogé- niques orthogonales. — M. Em. de Martonne a recher- ché la répartition de l'érosion glaciaire dans le lit des glaciers alpins. Elle paraît limitée au palier et aux bords du gradin du glacier; elle tend à un élargissement. — M. E. Noel divise la Tunisie en cinq régions hydrolo- giques dont il donne les caractères : 4° du Nord ; 2° de la dorsale tunisienne et annexes, avec à l'Est celle du cap Bon; 3° des plateaux ; 4° des chaînes subsaha- riennes et sahariennes ; 5° de la plateforme du Sahel. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 14 Décembre 1909. Séance annuelle pour 1909. M. G. Weiss lit le Rap- port général sur les Prix décernés en 1909, et le Prési- dent proclame les noms des lauréats. — M. S. Jaccoud prononce l'éloge de Th. Roussel. Séance du 21 Décembre 1909. M. Lannelongue est élu vice-président de l’Académie pour 1909 et M. G. Weiss secrétaire annuel. — M. le Président annonce le décès de M. E. Brissaud, membre de l'Académie. M. E. Delorme estime que, dans la prophylaxie de la fièvre typhoïde, le résultat de la lutte contre les porteurs de germes a été considérablement grossi et que, seule, la vieille méthode de la purification des eaux de bois- son donne des résultats certains. — M. M. de Fleury signale l'apparition assez générale, chez l’homme de quarante et quelques années, d'une crise de vieillisse- ment, qu'il qualifie de retour d'âge; elle coïncide avec un état de nutrition ralentie, d'auto-intoxication, avec symptômes névropathiques. Chez ces sujets, l’auteur recommande une cure de régime lacté, puis lacto- végétarien, avec médication thyroïde. — M. le D' Capi- tan résume les dernières découvertes d'hommes fos- siles faites par lui dans la Dordogne. — M. E. Boinet a étudié l’abaissement du larynx dans l’anévrisme de la crosse de l’aorte. Le déplacement et les déviations que l’anévrisme de la crosse de l'aorte imprime à la moitié inférieure de la trachée se transmettent aux pre- miers anneaux trackéaux et au larynx. Cette inféro- traction détermine l’abaissement et l'immobilisation relative du larynx, sa latéro-torsion et sa déviation en arrière et à gauche. La réalisation facile de ces condi- tions pathogéniques explique la fréquence relative de ce signe de l'inféro-traction laryngo-trachéale dans l'anévrisme de la crosse de l'aorte. Ce signe indique non seulement l'existence et le siège de l’anévrisme aortique, mais il donne encore des notions sur le volume, l’évolution et le sens de l'accroissement de la poche anévrismale. Il complète parfois le signe d'Oli- ver-Cardarelli et mérite d'être recherché pour établir le diagnostic différentiel entre l'aorte et les tumeurs du médiastin. Séance du 28 Décembre 1909. M. le Président annonce le décès de M. Malassez, membre de l’Académie, et de M. Lortet, correspondant national. MM. A. Poncet et R. Leriche estiment que la tuber- culose inflammatoire est à l’origine d’un grand nombre 39 d'états thyroïdiens. Par irritation ou par sclérose, elle peut engendrer toutes les dysthyroïdisations connues, par défaut ou par excès, et, dans nombre de cas, celles-ci doivent être tenues pour d'anormales manifestations d'une intoxication tuberculeuse à dépister. M. À. Chantemesse signale les conclusions de la Commission médicale d'enquête américaine, qui vient de recom- mander, comme utile et sans danger, la pratique des vaccinations antityphiques dans l'armée pour la pro- phylaxie de la fièvre typhoïde. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 11 Décembre 1909. M. M. Letulle a constaté que l'anévrisme de Ras- mussen se produit en deux temps : après une première phase d’artérite totale, végétante et scléreuse, l’ectasie s'accuse à mesure que la tuberculose ulcère la surface de l'artère fibrosée, et la rupture des parois dégénérées résulte de leur état dystrophique avancé. M. H. Coupin a essayé de naturaliser dans la forêt de Fontainebleau un certain nombre de plantes qui ne s'y trouvent pas à l'état spontané; deux seulement se sont développées jusqu’à la fleur et l'année suivante toutes avaient disparu. — MM. G.Rosenthal et P. Cha- zarain-Wetzel ont observé que la culture en eau blanc d'œuf cachetée du bacille anaérobie du rhumatisme permet la culture secondaire, abondante et riche, du Bacillus perfringens ; le contraire ne se vérifie pas. — M. H. Vincent a reconnu que la bile possède une réelle action antitoxique dans l'intestin ; elle neutralise en partie les poisons sécrétés par les bactéries qui pullulent dans la cavité digestive. — MM. Aug. Lelièvre et Ed. Retterer ont étudié la dégénérescence hémo- globique dans le myométrium puerpéral. — M.J. Jolly a observé que les ganglions lymphatiques du canard se développent par cloisonnement progressif d’un vaisseau lymphatique, auquel peut s'ajouter l’envahis- sement des lobules adipeux voisins par du tissu lymphoïde. — M. E. Maurel a déterminé l'influence de la voie d'administration sur les doses minima mortelles de colchicine pour la grenouille et le lapin. — MM. C. Mathiset M. Léger ont observé que les formes sexuées du Leucocytozoon Caulleryi présentent une périodicité sanguine; l'absence des gamétocytes de la circulation périphérique peut varier de 20 à 40 jours. — M. Ed. Chatton a trouvé, dans le mucus branchial et cutané des Labres, une Amibe, qu'il désigne sous le nom d’Amoeba mucicola, associée à un Cilié péritriche du genre Trichodina. —M. A. Guieysse- Pellissier a étudié un ovocyte abortif de Vesperugo abramus devenu polynucléé par immigration de noyaux étrangers. — M. P. Chaussé a fait ingérer à 41 chats des crachats tuberculeux humains riches en bacilles : aucun n'a contracté la tuberculose. 11 semble que le bacille humain soit moins virulent pour le chat que le bacille bovin. — MM. H. Rubens-Duval et Fage ont constaté que la régression adipeuse du tissu lymphoïde des ganglions lymphatiques se fait suivant le même processus que la régression du tissu myéloïde de la moelle osseuse. — MM. A. Fernbach et E. Vul- quin ont reconnu que les macérations de levures possèdent des propriétés bactéricides qui sont attri- buables à la présence d'amines. — M. H. Vallée a observé que le sérum de cheval hyperimmunisé contre la tuberculose à l’aide de bacilles humains virulents possède, outre des qualités anti-infectieuses, un pouvoir agglutinant marqué, un pouvoir fixateur considérable à l'égard des bacilles, des . qualités précipitantes énergiques à l'égard des tubereulines et une action antitoxique nette contre l'intoxication tuberculinique. — M. G. Rosenthal montre que plusieurs des procédés proposés pour l’aérobisation des anaérobies ne donnent que des cultures pseudo- aérobies. — MM. A. Clerc et Ch. Esmein ont étudié la pulsation oesophagienne chez l’homme normal au moyen d'un petit ballon en caoutchouc gonflé ; ils 10 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ont observé exceptionnellement la présence d'une onde présystolique négative. — M. P. Thaon a constaté la symbiose d’une levure avec un Oospora dans un cas de langue noire pilleuse. — M. H. Busquet a reconnu que le retard de la curarisation produit par la destruction de la moelle ou par le choc nerveux chez la grenouille ne tient pas à une inhibition deséchanges, mais est dû aux troubles cireulatoires accompagnant ces états particuliers. — MM. A. Mayer, F. Rathery et G. Stodel ont étudié les lésions des cellules du foie produites expérimentalement par divers agents toxiques ; elles se divisent en deux grands groupes : 1° cytolyse protoplasmique ; 2° homogénéisation avec coloration massive. — M. A. Alexeieff à (rouvé dans l'intestin terminal de certains Batraciens un nouveau Trichomonas possédant quatre flagelles libres, tous inégaux entre eux ; il le nomme Tr. Prowazecki. — MM. J. Courmont et Ch. Lesieur, en faisant vivre pendant plusieurs heures des cobayes dans une atmosphère chargée de poussières bacillifères, ont reconnu que la tuberculisation parait se faire par voie périphérique bien plus fréquemment que par voie pulmonaire ou intestinale. — MM. F. Rathery et M. Saison ont étudié les lésions cellulaires du foie après chloroformisation. On peut les déceler après 10 minutes d’inhalation ; elles sont légères. Si l’anes- thésie se prolonge, on observe successivement la cytolyse, puis l’'homogénéisation. — M. CI. Gautier à constaté que la réaction d'Ehrmann est provoquée par l'urine du lapin, très alcaline, et disparaît par acidification. — MM. M. Doyon et CI. Gautier montrent que l'extrait de gui n'exerce aucune action sur la coagulabilité du sang chez un chien préalablement immunisé par la peptone. — M. A. de Giacomo a étudié la production du phénol par le coli-bacille ; ce sont les cultures isolées de l'homme, du lapin et du macaque qui en donnent le plus; la production est moindre dans les milieux sucrés que dans les milieux non sucrés. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 21 Novembre 1909. MM. L. Cuénot et L. Mercier ont constaté que les greffes cancéreuses mises en place avant la féconda- tion des souris femelles porte-greffes se développent pendant la gestation ; elles régressent ensuite pendant la lactation. — M. L. Garnier rapporte un cas abso- lument typique de localisation de l’arsenic dans le foie, dans une intoxication aiguë. — MM. P. Haushal- ter et R. Collin ont observé un cas d'hydrocéphalie et de sclérose des plexus choroïdes chez un poupon hérédo-syphilitique. — M. J. Parisot a injecté au lapin un sérum hypophysotoxique obtenu avec le canard ; il a noté un ralentissement de la croissance ; mais les lésions de la glande hypophysaire étaient peu marquées. — M. M. Lucien signale l'existence, dans l'hypophyse, de cellules cyanophiles cantonnées à la limite du lobe postérieur et capables, sous certaines influences, de se multiplier activement et d'envahir une partie plus ou moins étendue de ce lobe. — M. R. de Drouin de Bouville rend compte des essais d'élevage de l'Ecrevisse à pattes rouges (Astacus {luvia- tilis) faits à Nancy dans une rigole bétonnée, longue de 10 mètres, large de { mètre et profonde de 0,50 à jm 25. La fécondation a eu lieu en 1908 et en 1909: on a recueilli 296 jeunes sujets. M. Th. Guilloz pré- sente quelques considérations sur la vision dans l'examen stéréoscopique par la méthode des réseaux. — M.J. Parisot a vérifié que la choline exerce à très faible dose un effet hypotenseur ; à dose plus forte, elle provoque une élévation de pression. Un extrait hépalique ne renfermant pas de choline possède des propriétés hypotensives manifestes. Il ne semble pas, à l'heure actuelle, qu'on puisse considérer la choline comme jouant un rôle principal dans les effets cardio- vasculaires produits par les sécrétions internes. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 Décembre 1909. MM. Edmond Bauer et M. Moulin : 4 constante de la loi de Stefan. De récentes expériences de M. Féry ont mis en doute l'exactitude de la constante 6 de la loi de Stefan (E—5T'), qui avait été déterminée par M. Kurlbaum. MM. Bauer et Moulin ont repris la déter- mination de 5 par une méthode différente de celles qui avaient été employées jusqu'ici. Ils ont comparé, à l'aide d'un même récepteur, le rayonnement fourni par un corps noir porté à la température de fusion de l'or (1064°) au rayonnement d'une lame de platine portée à une température 0, rayonnement qu'il était possible de connaître en déterminant la puissance qu'il faut dépenser par centimètre carré de la surface de cette lame pour la maintenir, dans le vide, à cette température. Cette méthode a fourni, pour 6, une valeur très voisine de 6,0.10 1? (watt. cm —?. degré —#). La précision est de l’ordre de 1 °/, ; il ne semble pas qu'il yait d'erreurs systématiques. Les déterminations seront reprises par une méthode entièrement diffé- rente. La formule de Planck donnerait, pour la charge atomique, la valeur 5,3.10 —10 U.E.S. qui est encore trop grande. Il semble donc que la formule de Planck, malgré son apparence théorique, ne soit pas absolu- ment exacte. Les formules représentant la répartition du rayonnement en fonction de la longueur d'onde doivent tendre vers la formule de Wien pour les petites valeurs du produit AT et vers la formule de Lorentz pour les valeurs élevées de ce produit. On peut ima- giner des relations différentes de celles de Planck et qui satisfassent à cette condition, par exemple la sui- vante : Cette relation concorde avec les expériences de MM. Ru- bens et Kurlbaum, aussi bien que la formule de Planck, et fournit une valeur acceptable pour la charge atomi- que (4,1.1010 avec ce —1,45). — M. A. Dufour : Sur les phénomènes de Zeeman dissymétriques rencontrés dans des spectres d'émission. Au cours des recherches qu'il poursuit sur le phénomène de Zeeman présenté par les bandes d'émission, M. A. Dufour a rencontré des raies qui lui ont fourni des composantes dont les positions et les intensités n'admettent pas toujours comme axe de symétrie la raie d’où elles proviennent. Il présente les résultats qu'il a obtenus relativement aux raies d’é- mission et montre qu'on peut les déduire, dansles cas les plus simples, de la théorie élémentaire de Lorentz complétée. Dissymétries de positions. Deux cas prin- cipaux peuvent se rencontrer en dehors du cas géné- ral de la symétrie de positions : 1° l’ensemble des composantes admet encore sensiblement un axe de symétrie dé positions, mais qui diffère alors de la raie génératrice; 2° l’ensemble des composantes n'admet plus d’axe de symétrie de positions. La technique la meilleure consiste à utiliser deux flammes (contenant ici de l’oxyde de chrome), l'une étant dans le champ, l'autre en dehors, et à photographier ensemble dans une même pose les deux spectres mélangés, l’état de polarisation des vibrations reçues par le réseau étant le même, L'auteur montre en projection des raies du chrome À — 5204,49 et5247,56 qui donnent une décom- position appartenant au premier type avec déplace- ment de l’axe de symétrie vers le violet, et la raie À = 5264,145 qui fournit le second type de dissymétrie. 20 Dissymétries d'intensités. M. À. Dufour projette aussi différents clichés où l’on constate l’existence de dissymétries d'intensités, d'un sens ou de l’autre, de certaines décompositions magnétiques. Dans les deux cas, pour les deux espèces de dissymétries, les phéno- mènes observés avec la lumière émise parallèlement aux lignes de force se retrouvent pour les vibrations ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES A correspondantes dans l'observation perpendiculaire au champ. 3° Considérations théoriques. M. Voigl expli- que actuellement ces dissymétries observées dans les champs intenses par la considération d'électrons àas- sociés. M. A. Dufour croit que, dans les cas les plus simples, on peut encore utiliser la théorie élémentaire de Lorentz (un seul électron). En ce qui concerne les dissymétries de positions, on admettra que la valeur du coefficient reliant la force élastique au déplacement peut, dans certains cas, ètre modifiée par l'intervention du champ extérieur. Ce coefficient peut d'ailleurs ne pas être modifié de la même manière suivant les di- verses directions. Il suffit que les changements sup- posés soient conciliables avec la symétrie propre du champ magnétique. On explique ainsi facilement, en particulier, la dissymétrie de positions rencontrée par Zeeman et Gmelin pour la raie À — 5790 du mercure. Les dissymétries d'intensités peuvent être attribuées à une différence dans l'amortissement des vibrations de sens opposés. — A l'occasion de la Communication de M. Dufour, M. A. Cotton fait remarquer que l’associa- tion d'électrons, même en petit nombre, à permis à M. Voigt de rendre compte de tout l’ensemble de ces modifications variées. Les différents esprits, suivant leurstendances, préférerontsoit des calculs comme ceux de M. Voigt, qui tiennent compte de la présence simul- tanée d'un grand nombre d'objets vibrants, soit des images plus ou moins grossières de ces objets vibrants eux-mêmes. Mais il ne faut pas se dissimuler que, dans un eas comme dans l'autre, on est bien loin d'une explication véritable et complète. Les actions que sup- pose M. Voigt (que les électrons associés aient ou non les mêmes périodes en dehors du champ) sont choisies arbitrairement : il n'est pas étonnant qu'on puisse les déterminer de façon à rendre compte des faits expéri- mentaux ; on peut même se demander si une modili- cation quelconque, qu'on se donnerait a priori, ne pourrait pas être expliquée, ou prévue, d'une facon analogue. Lorentz (Phys. Zeits., t. X, janvier 1909, p- 38) a déjà fait remarquer que M. Voigt ne donne pas une interprétation physique de ces liaisons qu'il suppose et qui ne résultent pas des actions connues du champ sur les électrons. M. Voigt estime qu'on pour- rait les interpréter, mais il pense que ce qu'on imagi- nerait serait toujours bien loin de la réalité. En ce qui concerne les dissymétries de positions, M. Dufour vient d'introduire d'une facon explicite l'hypothèse de la variation avec le champ des coefficients de la force élastique. Lorentz, sans que M. Dufour l'ait su, a récem- ment indiqué sommairement quelque chose d'analogue, à propos du changement subi par laraie 5.790 du dou- blet jaune du mercure. M. Cotton fait remarquer que ces diverses tentatives d'explication ne sont d'ailieurs pas inconciliables si l’on admet que les déformations dont il vient d'être question résultent précisément de mouvements (de rotation par exemple) à l’intérieur des atomes ou des molécules. Il pourrait en être de même de l'influence du champ sur les coeflicients d'amortis- sement que M. Dufour suppose pour expliquer cer- taines dissymétries d’intensités. En terminant, M. Cot- ton insiste sur l'intérêt qu'il y avait à étendre, comme l'a fait M. Dufour, au cas des raies dissymétriques qu'il a étudiées, la relation entre les deux cas princi- paux du phénomène de Zeeman qui existe dans le cas des corps 1sotropes. — MM. V. Henri, A. Helbronner et de Recklinghausen : Appareils de la Société Wes- tinghouse-Cooper-Hewitt, pour la production des rayons ullra-violets. Les auteurs présentent des lampes à mercure en quartz, construites par la Société Westing- house-Cooper-Hewitt, à Paris. La caractéristique prin- cipale de ces lampes en quartz est l'existence d'une ampoule de 3°® à 4°" de diamètre, placée au-dessus de l'anode et qui sert de chambre de condensation; ces lampes brülent d'une facon très régulière, et la Société W. C. H. garantit un minimum de 1.000 heures. La lampe de 110 volts a une longueur de la colonne lumi- neuse de 60, celle de 220 volts a 130w%, Au moyen de ces lampes, ils ont étudié toute une série d'actions des rayons ultra-violets sur les organismes inférieurs, les toxines etles ferments. L'action microbicide des rayons ultra-violets varie beaucoup avec la distance à laquelle se trouve l'émulsion de microbes de la lampe. Ainsi, par exemple, pour le coli, avec une lampe à 110 volts, il faut : à 60 centimètres . 300 secondes d'exposition. 10 _ OT QC LT) = 20 — PA 2 20 — 10 — toute 4 — 2 — fraction de sec, pour obtenir une stérilisalion complète. La tempéra- ture n'a presque aucune influence sur la durée néces- saire pour obtenir la stérilisation. Ce résultat est à rap- procher du fait général que la vitesse des réactions purement photochimiques varie excessivement peu avec la température. La stérilisation s'obtient aussi vite lorsque l’'émulsion de microbes est congelée, à condition que la glace soit transparente. Les rayons qui agissent surtout sont ceux qui ne traversent pas le verre et dont la longueur d'onde est au-dessous de 3021. La stérilisation se produit aussi bien en présence d’air que dans le vide, ou dans une atmosphère d'hydrogène, L'irradiation préalable de l’eau ou d'un milieu nutritif pendant plusieurs heures ne produit aucune modifica- tion sur les microbes qu'on introduit ensuite dans ce milieu. La Société W. C. H. a construit une série d'ap- pareils de stérilisation de l’eau, du lait et des autres liquides d'alimentation. Dans les appareils à eau, des modèles de petite dimension pour usage domestique permettent d'avoir, avec une lampe à 110 volts et 3 am- pères, un débit de 400!, 600! et 1.200! à l'heure. Dans les appareils à lait, la stérilisation ne peut être obtenue que si le liquide est disposé en couche très mince. Le modèle qui est présenté est formé d'un petit cylindre horizontal de 8°" de diamètre et de 8e» de longueur, qui tourne à la vitesse de 300 tours à la minute et qui entraine par capillarité un film de lait de Oum,[ d'é- paisseur ; le débit de ce petit appareil est de 50! à l'heure. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 10 Décembre 1909. M. Justin-Mueller parle de la formation du rouge de paranitraniline; il fait une distinction entre le rouge théorique obtenu par la copulation du &-naphtol sodé avec le chlorure de para-nitro-diazobenzène et le rouge technique produit sur la fibre par l'intervention d'un corps gras — d’un ricinate. Le ricinate prenant part à la formation du rouge technique, la constitution de ce dernier devient plus complexe que celle du rouge théorique et peut être envisagée de la façon suivante : (C'8H%#05)z (OH.C'HSAz : Az.C‘H'.Az0°)}7. Cette formule parait répondre à l’état colloïdal de l'ensemble et à l'entrée du corps gras qui n'obéit pas à la loi des pro- portions définies. M. Justin-Mueller parle ensuite des bains de diazo normaux et anormaux et du rôle de l'acétate de soude dans les bains de diazo, qui n'est autre que de neutraliser l'acide minéral libre du diazo. — M. Mauguin expose ses recherches sur les amides bromées sodées.On obtient ces corps en trailant à — 15° les amides bromées d'Hofmann par du sodium dans l'alcool et précipitant ensuite par de l’éther anhydre. L'acétamide bromée-sodée a pour formule CH*CUAz (Na) (Br) ou la formule tautomère CH*C (ONa): AzBr. Ce corps est tout à fait analogue à un sel de sodium : 1° on peut l'obtenir en évaporant une solution d’acé- tamide bromée dans la soude titrée (le corps obtenu est souillé de NaBr); 2° la solution aqueuse fait le double échange avec AzO*Ag, donnant le dérivé argen- tique très instable, détonant par le simple contact d'une baguette de verre. Les amides bromées-sodées se décomposent avec explosion (le dérivé de l'acétamide à 90°, ceux de la propionamide et de la butyramide à 42 L la température ordinaire), en donnant naissance à du bromure de sodium et à un éther isocyanique 0 : C: Az. CH. Le dédoublement de l’acétamide bromée- sodée est à peu près quantitatif, Les autres dérivés donnent, outre l’éther cyanique, des uréthanes. La formation de l’éther isocyanique nécessite une trans- position, qui n’est autre que la transposition d'Hof- mann. M. R. Marquis, à propos de la communication précédente, rappelle qu'il a montré (C. R., t. CXLHIT, p. 1163) que l'acide benzhydroxamique peut subir la migration de Beckmann en donnant de l’isocyanate de phényle. Cette migration s'effectue sous l’action du chlorure de thionyle avec formation intermédiaire très probable d'un corps isomère ou tautomère de la benza- mide chlorée. — M. M. Guerbet a étudié l’action de la chaleur sur le mélange de camphre et de bornéol sodés. Il a pu isoler deux composés cristallisés qu'il nomme bornylène-camphre et bornylcamphre. Il montre que le bornylène-camphre RTE CH? | | > CH! Nco CH?” se forme dans la condensation de 4 mol. de camphre avec 4 mol. de camphre sodé, et que le bornylcamphre CH — CH CHU | | cn Co CH prend naissance dans l’action du bornéol sodé sur le camphre. Il décrit un certain nombre de dérivés de ces deux composés. — M. M. Delépine démontre que la coloration bleue intense, passagère, produite par la réaction du nitrate d'argent sur un chloro-iridate, est due à la formation du chloro-iridate d'argent, trans- formable spontanément en chloro-iridite d'argent IrCl'Ag*. Cette explication est infiniment plus simple que celle mise en avant par Claus, pour expliquer la coloration bleue. La cristallisation du chloro-iridite d'argent, sous l'influence de l’ammoniaque, est due à la formation d'un sel d'argent diammonium IrClf (AzH*. AzH*. Ag} et non à un simple changement d'état, Le chloro-iridate de thallium IrCISTE est vert bleu foncé; cette coloration vient corroborer la possi- bilité d'un choro-iridate d'argent bleu. Le chloro- iridite de thallium IrCI°TF cristallise dans HCI bouil- lant en lamelles d'éclat bronzé. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2 Décembre 1909. M. W. C. Ball à observé qu'une solution de nitrite de K et de Bi, contenant une trace de sel de Na, à laquelle on ajoute 1 b), tandis que + représente le poids spécifique du corps flottant par rapport à celui du liquide porteur, chaque point (x, y, 2) d'un cube à longueur d'arète 1 carac- : À a vo] térise un cas à considérer x — T'ISER z—&c.Al'aide des équations de condition pour les différentes manières de flotter, ce cube est divisé en plusieurs comparti- ments limitant leurs domaines. Le second cas est irréalisable, le dernier cas assez difficile, mais plus L re abordable dans la supposition x=—y—1 d'un cube flottant. — M. W. Kapteyn présente au nom de M. M. J. van Uven : lecherches des fonctions qui peuvent être obtenues par une itération infinitésimale. Gomplément à la communication précédente. — M. H. E. de Bruyn présente pour les Mémoires, au nom de M. M. H. van Beresteyn : Constantes des marées pour les lieux le long des côtes et à l'embouchure des rivières dans les Pays-Bas, calculées d'après les hauteurs de l’eau en 1906. Sont nommés rapporteurs MM. de Bruyn et J. P. van der Stok. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Zeeman : Le degré d'achèvement de la polarisation circulaire de raies décomposées magnétiquement. Les conclusions que l'auteur tire de ses expériences sont les suivantes : Jusqu'à ce qu'on démontre le contraire, nous devons admettre : 4° que la lumière émanée dans la direction des lignes de force par les raies spectrales d’un gaz dans un champ magnétique n’est polarisée que circu- lairement; 2° que la quantité de lumière naturelle émanée, peut-être en même temps que la lumière polarisée circulairement, ne saurait surpasser, dans le cas de plusieurs raies spectrales, un certain °/o de l'intensité totale. Ce pourcentage s’amoindrit à mesure que l'intensité des appareils augmente, en passant du réseau de Rowland à l'échelon de Michelson. On peut conclure que les trajectoires des électrons équivalents situées en des plans perpendiculaires à la force magné- tique sont sensiblement des cercles; l'hypothèse des orbites elliptiques orientées de toutes manières dans ces plans est donc superflue. Les résultats de l'auteur sont étroitement liés à ceux de M. J. Becquerel (Comptes rendus, t. CXLV, p. #13) et M. A. Dufour (Journ. de Phys., avril 1909). — M. J. van der Waals présente au nom de M. A. Smits : Sur les équilibres photo- et électrochimiques. Résultats de plusieurs expériences faites par M. A. Aten et l'auteur. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. A. Volgraf : Remarques sur les expérienc-s de MM. À. Wilson el G. H. Martin par rapport à la vitesse de rotation de la décharge électrique en des gaz dans un champ maqgné- tique (Proc. Royal Soc, 2? août 1907). Déduction nouvelle de la formule U = Æ,AJHNX à l'aide d'une représentation différente du mécanisme de la décharge. — M. H. Kamerlingh Onnes présente au nom de MM. E. Cohen et J. Olie Jr. : Le volume atomique de inodificalions allotropiques à des températures tres bas- ses. A l’aide d'expériences faites dans le Laboratoire cryogène de l'Université de Leyde, les auteurs con- cluent que, jusqu'à — 1649, il n'y a pas d'indications que les poids spécifiques (respectivement les volumes spécifiques) des modilications allotropiques différentes d'un même élément convergent dans la direction du zéro absolu vers une même valeur. — M. P. van Rom- burgh présente au nom de M. H. Dutilh: Sur Ja racemie partielle. Critique sur les publications de M. A. Findlay et M'ie Hickmans (Jour. chem. Soc. T'rans., t. XCV, p. 1386) et de MM. Ladenburg et Doctor Ber. d. d.chem. (Ges., t. XXXII, p. 50), en rapport avec des expériences personnelles de l’auteur faites dès août 1908. — M. A. F: Holleman présente au nom de M. J. Boëseken : Contribution à la connaissance des phénomènes catalytiques. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. F. A. F. C. Went pré- sente au nom de M!° C. J. Pekelharing : L'inadmis- sibilité de la théorie des statolithes pour le géotro- pisme, prouvée par des expériences. Les partisans de la théorie des statolithes, formulée par MM. Haberlandt et Némec, supposent que la perception du stimulus de la gravitation par la cellule végétale se fait à l’aide de la pression exercée sur le protoplasme par des grains d'amidon.On peut considérer comme indécise la ques- lion de savoir si l'on doit postuler que ces grains d'amidon changent de place si l'on change la position ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de la cellule par rapport à la verticale, mais ce qu'on doit exiger, c'est que la faculté de cette perception ne se révèle que dans les cas où la cellule contient des grains d'amidon. Or, chacun des deux auteurs de Ja théorie a essayé de faire disparaître l’amidon des par- ties sensitives, le premier à l’aide de températures basses, l’autre par l'inclusion des objets dans du plâtre de Paris. Ils y ont réussi tous les deux: la faculté de la perception de la force gravitationnelle disparaissait avec l'amidon et réapparaissait après la régénération de l’'amidon. Cependant, ces expériences n'étaient pas concluantes, parce qu'on ne säit pas si l'opération qui causait la disparition de l’amidon n'est pas nuisible en même temps à la faculté de réagir du protoplasme. En effet, l’auteur a montré que la théorie est inadmis- sible, en faisant disparaître d'une tout autre manière l'amidon des parties sensitives géotropiquement sans que la réaction géotropique en fût affectée. En 1908, M. Fluri avait éliminé l'amidon de cellules vivantes, tant des nervures de feuilles que des algues, à l'aide de sels d'aluminium. Ce procédé suggéra à Ml: Pekelha- riog l'idée que peut-être on réussirait tout aussi bien à faire disparaître l’amidon de la calyptre de racines vivantes. Toutefois, des expériences avec les racines de Lepidium sativum imontraient que les sels d’alumi- nium agissent comme poisons, les racines réagissant par une croissance anormale en largeur et par des . courbures traumatotropiques à l'aide desquelles elles s'éloignent de la solution. Des expériences récentes sur des solutions « en équilibre physiologique » où le poison de l'ion métallique était compensé par l'ion d'un autre métal, suggérèrent l’idée de neutraliser le poison de l'aluminium; ce but fut atteint à l’aide de ions K. En faisant croître les racines de Lepidium en une solulion de { gramme d'alun de potasse sur 4 litres d’eau d’aqueduc, on trouve que quelques racines conservent leur amidon en devenant longues et minces, tandis que d’autres perdent l’amidon et s'élargissent. Parmi ces dernières, on en remarque loujours quelques-unes exemptes d'amidon et droites. L'absence d'amidon peut être constatée à l’aide d’iode et de chloral; dans le cas des petites racines transpa- rentes de Lepidium, un grossissement faible suffit; de plus, une certitude presque absolue fut obtenue à l’aide de sections longitudinales et d’une série de sections microtomiques longitudinales. Ainsi l'auteur a pu cons- tater qu'un cerlain nombre de racines exemples d’amidon se courbaient géotropiquement. Ainsi la per- ception de la gravitation peut se faire sans slatolithes. Quant à savoir si les statolithes favorisent la percep- tion de la gravitation, l'auteur n'a pas obtenu un résultat décisif, quoiqu'elle ait expérimenté sur là durée de la présentation nécessaire au géolropisme dans le cas de racines contenant ou ne contenant plus d'amidon. — Ensuite, M. Went présente au nom de M. J. J. Smith : Jistylium stellare O. K. et Aporosa campanilate J. J.S. — M. W. Burck : Coulribution à la connaissance de la sécrétion de l'eau dans les plantes. Seconde partie : sécrétion des fleurs. — M.G.A.F. Molengraaff présente au nom de M. J.Tesch : Sur des fossiles jurassiques à qilte secondaire en Bra- bant septentrional et en Limbourg. — MM. H. G. van de Sande Bakhuyzen, H. E. de Bruyn, G. A. F. Mo- lengraaff, J. M. van Bemmelen: {Votes sur l'abaisse- ment du sol des Pays-Bas. Rapport à la suite d’une missive de M. le Ministre des Affaires intérieures sur la question des modifications de la côte de la mer du Nord. — M. H. Zwaardemaker présente pour la biblio- thèque : « Leerboek der Physiologie » (Traité de Physio- logie), tome I, fascicule 1. P. H. SCHOuTE. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris, — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE NP 30 JANVIER 1910 Revue générale S Sciences ," U [4 € \ , 1 1 e 4 « D — À < £ \ pures el appliquées LS iiore.- _ à 6 4 BONE -URES - 1-2 p z ‘7? LE QN Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. ! + Tee Adresser tont ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue te Tera Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris ]1a Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1. — Distinctions et Solennités scientifiques CA Noces d'argent académiques. — Il y a vingt- cinq ans, l’Institut de France ouvrait ses portes à M. Cailletet. Pour beaucoup, cet honneur, si envié, est le terme d’une carrière : pour l'illustre physicien, ce ne fut qu'une date, mémorable il est vrai, dans sa vie d'une activité si féconde. Ces noces d'argent, les membres de l’Aéro-Club de France ont tenu à les célé- brer en un banquet au cours duquel ils ont remis à leur Président une superbe plaquette gravée à son effigie. Les amis de M. Cailletet ont dit comme il convenait la part éminente du grand savant dans les prodigieux progrès de la Physique moderne; ils ont rappelé ses travaux sur la compressibilité des gaz, qui suffiraient à illustrer son nom. La /tevue générale des Sciences est heureuse de s'associer au juste hommage rendu au labeur de toute une vie si utilement consa- crée à la Science. Election à la Société Royale des Sciences de Liège. — Dans sa séance du 16 décembre 1909, cette Société à élu comme membre correspondant, M. Ernest Lebon. $ 2. — Art de l'Ingénieur L'état actuel des travaux dans le canal de Panama. — C'est en 1906 que le Congrès américain s'est prononcé pour un type de canal à niveau élevé. Un canal à niveau de marée, plus sûr et plus pratique, aurait eu l'inconvénient d'être beaucoup plus coûteux, en exigeant un délai de construction plus long. C'est surtout ce dernier motif qui l’a fait abandonner. Les Américains ont commencé les travaux en 1904, mais c’est principalement à partir de 1907 qu'ils ont 4 VauGuan ÇCornisn : The Panama Canal. Geographical Journal, 1909, pp.153-180.—R. Ixcour: Les travaux actuels du canal de Panama. Revue politique et parlementaire, 10 octo- bre 1909. — Sur le rôle économique du canal, ef. notre chro- nique de la Aevue générale des Sciences, 15 février 1906. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. été poussés activement. Au 31 janvier 1909, les travaux effectués représentaient un enlèvement de 47.942.470 mètres cubes, sur une extraction totale de 133.445.278 mètres cubes. D'après les derniers rapports de l'Zsthwian Canal Commission, analysés par M. Ingouf, le canal sera constitué de la manière suivante : 4° une portion au niveau de la mer, partant de Colon sur l'Atlantique et allant jusqu’à Gatun; 2° une série de trois écluses, situées à Gatun, et permettant de passer du niveau de la mer à celui du lac de Gatun; 3° un chenal dans ce lac; 4° un passage en tranchée, d'environ 10 kilomè- tres, à travers le massif de partage de la Culebra; 5° une écluse à Pedro-Miguel permettant de passer de la tranchée de la Culebra au lac suivant; 6° un passage dragué dans le petit lac artificiel créé entre Pedro- Miguel et Miraflores par un barrage établi à Miraflores et fermant la vallée du Rio Grande; 7° deux écluses à Miraflores permettant de passer dans le chenal qui ira déboucher dans le Pacifique, au large du port de Pa- nama. Le lac de Gatun, dont nous venons de parler, est une nappe d’eau créée artificiellement en mondant le pays, grâce à la construction d’une grande digue de terre oui doit retenir les eaux du Chagres, à Gatun, et dune petite digue à Pedro Miguel. Le plan d’eau de ce lac — qui représente l'altitude maxima du niveau du canal — doit être à 25,84 au-dessus de la mer, et le lac aura une superficie totale de 42.535 kilomètres carrés. Cet ouvrage constitue la principale difficulté à surmonter. La digue reposera sur des grès argileux surmontant une couche de conglomérats très résistants. placés sur un lit de grès argileux mous, au-dessous desquels on trouve des tufs volcaniques. Les sondages ont aussi révélé la présence d’eaux souterraines sous pression, de faible volume, il est vrai, mais qui pourraient miner le sous-sol de la digue. Le lac lui-même se trouve dans des terrains marécageux ef le Chagres traverse 23 fois le tracé du canal. Il faut encore compter avec des glis- sements possibles dans la tranchée de la Culebra. A ces difficultés résultant de la nature du sol et du sous-sol, il faut joindre celles provenant de l’insalubrité du climat et du recrutement de la main-d'œuvre. Les Américains ont dû vaincre la lièvre jaune et la malaria. 46 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Is y ont réussi grâce à des mesures énergiques : à Pa- nama et à Colon, toutes les habitations furent désinfec- lées, on pava les rues en briques, on construisit des égouts et on amena de l’eau potable. Dans l'isthme, les employés furent logés dans des maisons protégées par des moustiquaires, et on couvrit de pétrole les eaux slagnantes en leur procurant un écoulement. A l'origine, on emplovait presque exclusivement des nègres des Antilles (16.078 au 30 juin 1908), mais l'a- mélioration des conditions hygiéniques permet d'avoir recours de plus en plus aux travailleurs européens, dont le nombre est passé de 500, au 30 juin1906, à 4.913 au 30 juin 1908. Ce sont surtout des Espagnois (Galiciens et Castillans) pour les cinq sixièmes, des Italiens et des Grecs. Les employés et ingénieurs sont presque tous Américains. De la côte de l'Atlantique à celle du Pacifique, le canal aura 66 kilomètres de longueur; mais, pour gagner les eaux profondes, on draguera, de chaque côté, sur un parcours de 6 kilomètres et demi. Le niveau le plus élevé atteindra 25%,84, la profondeur minima 122,46, la largeur minima au fond 60®,80 (à la Culebra). Pour chaque écluse, la longueur utile sera de 30% mètres et la largeur de 33%,4%. Le rayon minimum des courbes ne dépassera pas 1.700 mètres et la moyenne sera de 3.000 mètres. La différence maxima du niveau des écluses atteindra 9,72. La traversée du canal exigera de 8 à 10 heures. Au 30 septembre 4908, les frais s'éle- vaient à 855 millions de francs; la dépense totale est évaluée à 2.325 millions de francs. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $S 3. — Physique influence de l’air dissous sur la densité de Feau. — La variation de densité qu'éprouve l’eau privée d'air au contact prolongé de ce gaz a élé étudiée par MM. Marek et Mahlke à l’aide de pesées hydros- tatiques. Cependant, aucune relation détaillée de ces expériences n'a été faite, et, comme les auteurs n'ont pas déterminé le degré de saturation de l’eau sur laquelle ils opéraient, leurs expériences n’ont pas paru suffisamment sûres pour servir de base aux réductions des pesées hydrostatiques de haute précision exécutées au Bureau international des Poids et Mesures à l’occa- sion de la détermination du volume du kilogramme d'eau. ; M. P. Chappuis, chargé d’une nouvelle étude de la question, vient de communiquer les résultats qu'il a obtenus au dernier Congrès de la Société helvétique des Sciences naturelles, à Lausanne". Il à déterminé la différence de densité de l’eau aérée par deux pro- cédés différents. Le premier procédé, appelé méthode du flacon, consiste à mesurer le volume occupé suc- cessivement par des masses déterminées d’eau privée d'air et d'eau aérée dans un flacon de verre, de 500 cen- timètres cubes environ de capacité, dont le col étroit, formé d'un tube capillaire divisé, permet d'apprécier de très petites fractions de la capacité totale. Suivant le deuxième procédé, on pèse successivement dans l'eau privée d’air et dans l’eau aérée un corps de verre de grand volume, dont la dilatation est connue avec une approximation suffisante. On à eu soin, dans l’une et l’autre série de mesures, de maintenir la température de l’eau et des ballons de verre dans le voisinage du maximum apparent de den- sité de l'eau, afin de réduire autant que possible les corrections relatives à la dilatation de l'eau. Les mesures sur l’eau aérée ont été faites à saturation com- plète, ce qui implique une source d'erreur qu'il n'a pas toujours été possible d'éviter, savoir la séparation de bulles d’air sur les parois des flacons ou du corps immergé. Il est aisé de reconnaître que cette cause ‘ Arch. des Sciences phys. et nat., 4 pér., t. n° 40, p. 356. XXVII, d'erreur tend à exagérer la différence : densité de l’eau privée d'air densité de l’eau aérée dans la méthode du flacon, tandis qu'elle la réduit dans le cas des pesées hydrostatiques. Le résultat de la première méthode peut donc être considéré comme une valeur maximum, celui de la deuxième comme un minimum. Voici les résultats “btenus par M. Chappuis à la tem pérature moyenne de 6°: VARIATION DE DENSITÉ eau pure — eau aérée 0,000 0037 Méthode du flacon (9 mesures). . Méthode des pesées hydrostatiques (HAmesuieS) ER 0,000.002% La valeur moyenne de la variation de densité entre l'eau pure et l'eau aérée est donc de 3 milliunièmes (0,000.003). Les membranes aqueuses et les phéno- mènes superficiels. — On sait que tous les corps sont recouverts de membranes aqueuses dont l’épais- seur, dans le cas de matières chimiquement identi- ques, dépend de l’état de leur surface. C'est ainsi que, pour les tôles polies, cette épaisseur est plus considé- rable que pour les tôles dépolies, et que l'usure à l'émeri ainsi que l'immersion dans l’eau exercent des effets analogues. L'épaisseur d'une membrane aqueuse, abandonnée à elle-même, décroît, en s’approchant asymptotiquement d'une valeur limite. ; M. E. Cohnstædt', dans un récent travail exécuté au Laboratoire de la Société de Physique de Francfort- sur-le-Main, étudie les phénomènes superficiels qui se rattachent à la formation de ces membranes aqueuses. Sa méthode est basée sur le fait que l'épaisseur de la membrane augmente ou d minue à mesure que s'ac- croît ou décroit Phumidité du gaz ambiant, de façon à établir un état d'équilibre entre la membrane et cette humidité. En augmentant la température, on réduit l'épaisseur de la membrane, tandis qu'un abaissement de la pression du gaz ambiant, à humidité constante, reste inactif à cet égard. La tension superficielle de l'eau, calculée par la fonction thermique de la mem brane aqueuse, concorde bien avec la valeur directe- ment observée par M. Quincke. L'effet Pouillet, à l'encontre des vues généralement recues, serait dû, non à la contraction subie par l’eau à la surface de la substance, mais, bien au contraire, à la dissolution de la membrane aqueuse. Les substances à membrane aqueuse amincie peu- vent êlre régénérées par quatre moyens, à savoir : jo par l'introduction dans le vide et l'abandon subsé- quent à l'air atmosphérique; 2 par un bain à l’eau; 30 par l'action de la lumière ultra-violette; 4° par la destruction mécanique de la couche métallique super- ficielle (usure à l'émeri ou à la lime). : Dans le cas de l'aluminium, l'épaisseur de la mem- brane augmente, après le commencement de la régé- nération à l'air de la salle, en trois jours jusqu'à une valeur septuple, pour tomber ensuite à la moitié, pendant un intervalle à peu près égal, et en quarante jours environ à 5 °/,. La valeur limite minimum est sensiblement atteinte après cent jours. D'une facon wénérale, la période de décroissance, plus courte pour d'autres substances, est proportionnelle à l'équivalent électro-chimique. Le minimum décroit à mesure que diminue la densité des substances. Les irradiations de: lumière visible diminuent et celles de lumière ultra- violette augmentent l'épaisseur de la membrane aqueuse. D'autre part, l'action de la lumière visible réduit de beaucoup la faculté que possède l'aluminium de décomposer les acides (le rend passif). Quant aux relations qui existent entre la membrane aqueuse et la conduction de l'électricité dans les gaz, l'auteur constate les faits suivants : La résistance d’un tube à vide décroit en raison du temps de passage du DRE Un CR RP RE 1 Phys. Zeitschr., n° 18, 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 47 courant. Il en est de même de la vaporisation que subit la membrane aqueuse de l'électrode (c'est-à-dire de l'humidité absolue du tube). L'accroissement de pression, dù au passage du courant, correspond au développement de melange détonant de gaz oxygène- hydrogène. Or, ces faits expliquent les accroissements de pression observés dans les tubes à vide, la présence d'hydrogène et d'acide carbonique n'étant qu'un phé- nomène secondaire concomitant. Sur la base d’une théorie nouvelle, l’auteur rattache ensuite l’ettet Volta et l'effet photo-électrique aux phé- nomènes qui caractérisent la membrane aqueuse tou- jours présente. Toute modification de cette membrane entraînerait une variation du potentiel ou de la sen- sibilité photo-électrique, le courant volta-électrique ou M clecirique étant la cause de la décomposition de la membrane qu'on observe. La fatigue photo- électrique serait due exclusivement à la polarisation anodique de la membrane. La photo-activité, c'est-à-dire l'émission de rayon- nements dits métalliques et les phénomènes congé- nères, serait due: primairement, à la formation, aux dépens de la membrane d'eau, d'ions d'oxygène positi- vement chargés; secondairement, à la synthèse de peroxyde d'hydrogène ou d’un oxyde d'azote, à partir del’air ou de la vapeur atmosphérique, et ter‘iairement au dédoublement, accompagné d'oxydation, de ces gaz. Les corps poreux ou liquides ayant absorbé ces gaz dédoublés (gaz métalliques) présentent les mêmes propriétés photo-actives que les métaux qui les engen- drent. Les observations jusqu'ici faites ne permettent pas de démontrer partout les relations de cause à effet qui existent entre les phénomènes superficiels et les mem- branes aqueuses. Il semble cependant qu'on doive leur attribuer la part principale dans tous les phénomènes en question. $ 4. — Chimie industrielle L'enseignement de la Photographie indus- trielie et des procédés photo-mécaniques à l'Ecole Estienne. — Le Conseil municipal de Paris avait été frappé, dès l’année 1900, du développement inoui pris, en quelques années, par la photographie industrielle et les procédés photo-mécaniques, et s'était rendu compte que l'engouement du public et mème, jusqu'à un certain point, des artistes dessinateurs, pein- tres ou sculpteurs eux-mêmes, provenait, d'une part, du bon marché relatif de ce procédé de reproduction, comparativement au coût des illustrations par la gra- vure sur bois, la gravure en taille douce et la lithogra- phie, et, d'autre part, de la fidélité absolue de la repré- séntation du modèle à côté de l'interprétation souvent fantaisiste des artisans el souvent même des artistes graveurs ou lithographes. Le Con eil municipal de Paris, désirant que cette nouvelle industrie,issue d'une découverte francaise, ne fût pas seulement prospère à l'étranger, mais le fût aussi en France; désirant, en outre, que les belles repro- ductions de nos livres et de nos publications illustrées ne fussent pas confiées à des maisons étrangères, comme elles l'ont été trop souvent, etne voulant pas, enfin, que la main-d'œuvre, pour les procédés photo mécaniques, restât en France, comme elle l'est actuellement, en grande partie étrangère, résolut, dès la fin de l'Exposi- ton amverselle. de faire un grand sacrifice. La Ville de Paris avait bien créé déjà un modeste atelier de Photographie industrielle dans les sous-sols de l'Ecole Estienne, mais l'enseignement qui y était donné était rudimentaire etle matériel bien insuffisant; bref, von- lant créer un enseignement complet, rationnel, à la lois théorique et pratique, de la photographie et des procédés photo-mécaniques, le Conseil municipal décida la construction d’un vaste bâtiment aménagé spécialement pour cet enseignement, et 100.000 francs furent affectés à l'édification des nouveaux ateliers de l'Ecole Estienne. A celte première somme, le Conseil municipal, pour parfaire son œuvre, vient d'en ajouter une seconde. en votant 60.000 francs pour aménager ces ateliers dans les conditions les plus désirables, En outre, des professeurs spécialistes, placés sous la dire tion de M. Ch. Féry, dont la compétence scientifique à cet égard est bien établie, vont être incessamment nommés, de sorte que la nouvelle installation fon tionnera dans le courant de l'année 1910. Atin de meitre au point le programme d'études qui sera appliqué prochainement, un voyage d'études à l'Institut kder, de Vienne, l'établissement scolaire le plus important de l'Europe pour les arts graphiques et les procédés de reproduction,a été effectué récemment par le directeur de l'Ecole Estienne, M. Fontaine, par M. Ch. Féry, ainsi que par M. Chassang, professeur tech nique de Photographie. Il n’y a donc plus qu'à attendre la mise en vigueur de ce programme dont voici les lignes principales: L'enseignement théorique comprendra des lecons de mathématiques, de sciences générales, de dessin, de composition décorative et un cours spécial de phy- sique et de chimie photographiques, complété par des manipulations de laboratoire. En ce qui concerne l’enseignement technique, les élèves seront partagés en deux groupes : opérateurs el graveurs. Les premiers exécuteront les clichés sur verre : clichés de trait et cliches de demi-teintes, les reports sur bois, sur métal, le tirage des papiers, les agrandissements, la retouche des clichés pour trait ou simili, en noir ou en couleur; les seconds exécuteront la gravure de clichés sur métal, de trait ou de simili, les reports de grisé ou de points, les épreuves à la presse à bras, la retouche au burin, à la roulette et par remorsures ; le montage et le toupillage des clichés. Ajoutons que, pour être admis à l'Ecole de Photo- graphie industrielle, les élèves devront avoir au moins quatorze ans, et justifier de connaissances suffisantes. Un diplôme leur sera délivré en fin d’études. $ 5. — Agronomie La culture des plantes en sol stérilisé. — On sait, depuis quelques années déjà, que, lorsqu'un sol a été partiellement stérilisé, soit par la chaleur, soit par des antiseptiques volatils comme le sulfure de carbone, le toluène, ete., il devient plus productif. MM. Darbishire et Russell! ont montré que cette pro- priété est générale et qu'elle se vérifie pour toutes les espèces de sols et pour toutes les plantes, excepté celles de la famille des Légumineuses. En outre, on n'obtient pas seulement une meilleure récolte (deux, trois et même quatre fois plus grande après chauffage, de 20 à 50 °/, plus élevée après traitement avec les antisep- tiques), mais les plantes contiennent plus d'azote et de phosphore que celles qui ont été cultivées sur des sols non traités. Vu le baut intérêt de ces résultats, MM. E.-J. Russell et H.-B. Hutchinson ont résolu de reprendre l'étude de cette question?.1Ils viennent d'examiner en détail les effets du chauffage à 98° C. et du traitement avec 4 °/, de toluène sur deux sols différents : l’un qui n’a pas recu d'engrais depuis plusieurs années, l’autre qui a été couvert à diverses reprises d'engrais artificiels depuis 4902. Après traitement, les sols étaient humec- tés et conservés dans des bouteilles fermées par un tampon d’ouate. Or, dans ces sols partiellement stéri- lisés, on observa immédiatement une faible production d'ammoniaque, puis, après une période de faible chan- gement, une production rapide du même composé, suivie de nouveau d'une période de production faible : en un mois, 40 parties d'azote pour 1.000.000 de parties de sol avaient été converties en ammoniaque. Dans les sols non traités. on ne constata aucune accumulation Journ. Agric. Science, AAUS, t. I, p. 305. 2 Journ. Agric. Scienec, 1909, €. LM, p. 111-114. 48 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE d’ammoniaque, et dans les sols traités, lorsqu'on lais- sait le toluène en contact avec le sol, la production d'ammoniaque fut faible. La formation d'Azll est due en grande partie au travail de microorganismes; la présence d'humidité est essentielle : dans un sol qui à été complètement stérilisé par chauffage à 125° C., après la formation initiale d'AzH* qui provient de l'action de la chaleur, la production s'arrête. La pro- duction de composés azotés instables (ceux qui sont décomposés par ébullition avec l'eau et la magnésie) est aussi accélérée par une stérilisation partielle; celle de l’humus est à peine affectée. Les organismes nitri- fiants sont détruits par le traitement, et si, ultérieure- ment, on en introduit d'autres, la nitrification com- mence dans les sols qui ont été traités avec le toluène, mais non dans ceux qui ont été chauffés. Les recherches bactériologiques ont montré qu'après humectation des sols partiellement stérilisés, les bac- téries se multiplient beaucoup plus rapidement et de- viennent plus nombreuses que dans les sols non traités, et que cette augmentation marche de pair avec celle de la production de l’ammoniaque.En ajoutant à un sol partiellement stérilisé un extrait filtré contenant des bactéries d’un sol non traité, on observe un accroisse- ment de la production de l'ammoniaque et du nombre des bactéries, mais non si l’on ajoute le sol non traité lui-même au sol partiellement stérilisé ou un extrait du sol traité au sol non traité. Les auteurs en tirent la conclusion que le solnon traité contient un facteur, non bactérien, limitant le développement des bactéries, ce facteur étant inhibé ou détruit par le chauffage et par le traitement avec le toluène. Ils ont trouvé que de gros organismes — Protozoaires, etc. — sont présents dans le sol non traité et manquent dans les sols partielle- ment stérilisés; plusieurs sont connus pour détruire les bactéries, et tous, en raison de leur taille, sont en tout cas de redoutables compétiteurs. Ce sont eux, qui d'après MM. Russell et Hutchinson, limitent l’activité bactérienne, donc la fertilité des sols non traités, une condition d'équilibre s'établissant entre les gros orga- nismes et les bactéries, condition au delà de laquelle ces dernières ne peuvent pas se multiplier. Par la sté- rilisation partielle, les gros organismes sont tués, mais non les spores bactériennes; ultérieurement, en pré- sence d'humidité, ces dernières germent et les bacté- ries se multiplient avec une grande rapidité, étant soustraites à la compétition ou aux attaques de leurs ennemis. La nouvelle espèce de bactéries paraïit être un peu moins active que les anciennes races; mais, par suite de sa proportion considérable, elle produit une bien plus grande quantité d'ammoniaque. 8 6. — Hygiène publique L’'hygiène de la Boulangerie. — Un très inté- ressant Rapport de M. Laveran, au Conseil d'Hygiène et de Salubrité de la Seine, a remis sur le tapis les ques- tions qui intéressent l'hygiène de la Boulangerie. Le pain fabriqué par l’ouvrier tuberculeux peut-il propager la tuberculose? On sait que, dans le four, la température de la croûte du pain atteint 125 à 140; celle de la mie, 100 à 1020. Il est admis qu'à cette der- nière température les bacilles tuberculeux perdent leur virulence, mais que, cependant, ils ne sont pas devenus inoffensifs : ils sont encore capables de pro- voquer des irritations, des inflammations locales de la muqueuse intestinale. On peut même aller plus loin et se demander si, à la suite de cette prolifération, ils ne récupèrent pas progressivement leur virulence. Il serait intéressant de continuer les recherches. Pour remédier à un véritable danger social, M. Lave- ran propose une série de mesures. La première consiste à faire l'éducation du boulanger et du publie et à leur démontrer la supériorité du pétrissage mécanique sur le pétrissage à bras, qui est malpropre et répugnant, pour ne pas dire dange- reux. Mais, comme cette éducation demande évidemment un certain temps, rien n'étant, hélas! plus tenace que la routine et les préjugés, il y a lieu d'attirer l'attention des patrons boulangers sur l'hygiène de leurs fournils et l'hygiène de leurs ouvriers. L'hygiène des fournils, trop souvent insuffisante, devrait être activement surveillée, surtout au point de vue de la ventilation. L'hygiène relative aux ouvriers consisterait à n'ad- mettre dans les boulangeries que des hommes bien constitués et indemnes de tuberculose. Entre paren- thèses, il y aurait intérêt à ce que d'aussi salutaires prescriptions fussent étendues aux diverses industries de l'alimentation. Mais ces dernières mesures, comme le dit fort bien M. Laveran, ne sont que des palliatifs: le vrai remède consiste dans l'adoption du pétrissage mécanique. Et, pour rendre cette adoption plus facile, il y a lieu, d’abord : D'abaisser le taux de consommation de l'électricité en faveur des boulangers qui adopteront le pétrin élec- trique; de ne pas continuer de faire payer à ces bou- langers, contre tout bon sens, une patente plus élevée qu'à ceux qui conserveront le pétrissage à bras. Tous les hygiénistes, tous ceux qui s'intéressent à la santé publique ne pourront que souscrire aux conclu- sions de notre éminent collaborateur. $ 7. — Géographie et Colonisation Le passage du Nord-Ouest : Roald Amund- sen. — La recherche d’une route maritime permettant de se rendre d'Europe en Asie en gagnant le détroit de Béring par les canaux séparant les îles des archipels de l'Amérique boréale avait préoccupé les navigateurs presque aussitôt après la découverte du Nouveau Con- tinent. C'est ce problème, vieux de quatre siècles, dont le voyage d'Amundsen a fourni la solution définitive. La récente publication, par M. Charles Rabot, d’une traduction française du récit de voyage du capitaine Roald Amundsen! nous fournit l’occasion de donner un aperçu sur les résultats de l’importante expédition de l'explorateur norvégien et sur les difficultés au prix desquelles ont été accomplies ses découvertes. Il convient de rappeler que les premières tentatives faites pour atteindre les Indes et la Chine en prenant, de l'Europe, la direction du Nord-Ouest, remontent aux expéditions de Sébastien Cabot en 1497 et de Cor- tereal en 1500. Plus tard, Davis, envoyé dans le même but par des marchands de Londres, fit, de 1585 à 1587, trois expéditions qui, si elles furent importantes par leurs résultats géographiques, n'aboutirent pas à la découverte du passage auquel le navigateur anglais croyait cependant fermement. Les recherches de la route du Nord-Ouest, longtemps abandonnées, furent reprises au xvi® siècle par Hudson, puis par Baffin, toujours pour le compte des marchands de Londres ; leurs expéditions avaient reculé les limites de nos con- naissances géographiques vers le Nord, mais n'avaient pas encore trouvé le fameux passage. Cependant la question préoccupait encore les esprits en Angleterre à la fin du xviue siècle, et c'est aussi à son étude que se rapportent les voyages de Cook, de John et James Ross et de Parry. On put considérer comme certain, après ces diverses expéditions, que le passage recherché existait, mais aucun navigateur n’en avait effectué la traversée complète du détroit de Davis au détroit de Béring. L'amiral sir John Franklin voulut tenter une entreprise décisive; on sait quelle en fut la fatale issue. Enfin, au cours de l’une des expéditions qui se portèrent sur les traces de Franklin, le capi- taine Mac Clure parvint, en 1850, à franchir le passage dans sa totalité, mais en faisant une partie du voyage ! Capitaine Roacn Amunpsen : Le passage du Nord-Ouest, traduit par M. CHarLes Ravor. Paris, Hachette, 1909, gr. in-8°, 221 pages, 86 grav. et 2 cartes hors texte. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 19 en traineau et en employant des bâtiments venus de deux directions opposées. Amundsen eut la bonne fortune de pouvoir effectuer ce passage entièrement par mer et sur un même navire. Au lieu des armements considérables de la marine britannique, il employa des moyens plus mo- destes : un voilier de 47 tonnes, la Gjoa, muni d'un moteur à pétrole de la force de 13 chevaux. L'équipage comprenait en tout sept hommes : le capitaine, son second Hansen, deux lieutenants, deux mécaniciens et un cuisinier. L'explorateur norvégien avait très jJus- tement compris que c'était seulement avec un navire de faible tonnage qu'il lui serait possible de passer dans les dédales de canaux des îles de l'Amérique boréale, C'est ainsi qu'ayant doublé le cap Farvel, à l'extrémité sud du Groenland, le 11 juillet 1903, la Gjôa franchit le détroit de Béring le 30 août 1906, étant passée de l'océan Atlantique dans l'océan Pacifique par le nord du continent américain. Cette traversée ne s’accomplit pas sans de nom- breuses difficultés de navigation, comme on peut s’en convaincre par le récit de voyage du capitaine Amund- sen. Ayant franchi les détroits de Lancastre et de Barrow, la Gjôa trouva, en approchant de la terre Boothia-Felix, des fonds très dangereux où le navire échoua, jusqu'à ce qu'une tempête aidât à le dégager, puis il faillit être brisé contre les écueils par la violence d'un ouragan. L'Expédition s'installa à la terre du Roi- Guillaume, en septembre 1903, pour hiverner et choisir, à cet elfet, un mouillage qu'elle appela Port-Gjôa. A ce moment, le détroit de Simpson, qui se découvrait dans l'ouest, était libre, et l'on aurait pu achever peut- ètre alors la traversée du passage du Nord-Ouest, mais cette navigation n'était pas le but unique de l'expé- dition. Elle se proposait aussi de prendre de longues séries d'observations magnétiques dans le voisinage du pôle magnétique. Ce point se trouvait à 90 milles dans l'est. La station choisie étant dans une situation très favorable, l'expédition y fit deux hivernages suc- cessifs. Pour observer les différents éléments magnétiques, elle disposait de quatorze aimants destinés à l'étude de la composante horizontale, de trois boussoles d’in- clinaison et de deux de déclinaison, enfin d’instru- ments enregistreurs qui, au moyen d'un mécanisme, notaient les moindres variations de l'aiguille aimantée dans un sens ou dans un autre, ainsi que celles de l'intensité horizontale. Comme l'emplacement même du pôle magnétique est très peu favorable aux obser- vations, Amundsen avait cherché un point où l’incli- naison püt être de 89; Port-Gjôa se trouvait préci- sément remplir cette condition. Pendant dix-neuf mois, jour et nuit sans interruption, les membres de l'expédition purent exécuter une série très complète d'observations magnétiques ; des reconnaissances furent entreprises aussi jusqu'à Boothia-Felix, vers le point où James Ross, en 1831, plaça le pôle magné- tique, et elles permirent à Amundsen d'établir, en mesurant la déclinaison, que le pôle magnétique n’est pas un point fixe, mais, au contraire, un point en per- pétuel mouvement. Pendant ce même temps, des observations météoro- logiques furent effectuées aussi très régulièrement. De très curieuses observations purent être faites également aucours de ces deux années, ainsi d’ailleurs que pendant tout le reste du voyage, sur la vie et les mœurs des Esqui- maux. Une importante reconnaissance fut effectuée dans le courant de 1905 par le second, Hansen, et l’un des mé- caniciens, dans le nord de la terre Victoria, qui recut le nom de terre du Roi-Haakon VII ; 200 kilomètres de côtes inconnues furent levées jusqu'à 7202! de latitude nord. Puis, le 13 août 1905, l'Expédition appareilla pour achever le passage du Nord Ouest. La navigation fut rendue difficile dans le détroit de Simpson par l'étroi- tesse du chenal praticable. Au delà, l'Expédition tra- versa, au prix de mille difficultés, entre les terres du Roi-Guillaume et de Victoria, un archipel plus de cent îles et îlots, séparés par des canaux peu profonds et encombrés de hauts fonds. Enfin, apres une pénible navigation, l'expédition fut arrêtée par les glaces près de l'embouchure de la rivière Mackenzie et dut faire un troisième hivernage à King-Point, sur la côte amé- ricaine. De là, le chef de l'Expédition entreprit un raid en traîneau jusquà la station télégraphique d'Eagle-City, dans l'intérieur de l'Alaska. Après un hiver occupé encore par des observations, la GJ0a arriva à San-Francisco en septembre 1906. Il est à noter que l'Expédition norvégienne a suivi un itinéraire différent de celui de Mac Clure. C'est à l'île Melville que cet explorateur, venu par le Paci- fique et s'étant acheminé en traineau sur la banquise, faute d'avoir pu arracher son navire des glaces, opéra sa jonction avec une autre Mission britannique égale- ment emprisonnée par les glaces et qui venait de l'Est. La route qu'Amundsen avait prise était celle indiquée par sir John Franklin et qu'il avait essayé d'atteindre. Gustave Regelsperger. $ 8. — Enseignement Une réforme au Collège de Franee. — Par une lettre datée du 18 décembre 1908, M. le ministre de l'Instruction publique avait invité l'assemblée des pro- fesseurs du Collèze de France à modifier le décret d'administration de 1873 actuellement en vigueur, en accentuant « ce qui différencie le Collège de France des autres établissements d'enseignement supérieur ». Cette question est l’une de celles qui intéressent au plus haut point notre enseignement national et il est bon de l'examiner ici un peu en détail. | Un premier point concerne le nombre des chaires. Le temps est loin où, avec l'autorisation de François Jér, il était créé deux cours d'hébreu, deux cours de grec, un cours d'éloquence et de philosophie latines, des lecons sur les langues orientales et les mathématiques. En 1840, on comptait 25 chaires; actuellement, celles-ci se sont élevées à 45, et les crédits qu’elles nécessitent ont atteint un demi-million. Cette angmentation ne nous surprend pas, car la science progresse et s'affirme par différenciation. La Physique mathématique, la Chimie physique n’existaient pas comme Corps de doc- trines il y a un demi-siècle. Dans les sciences histo- riques, de nouvelles sections du savoir humain se sont établies à mesure que l'exploration scientifique s'est étendue: des idiomes ont été retrouvés pour l'étude desquels des chaires ont été successivement fondées. Ainsi la conquête de l’Indo-Chine a eu pour consequence naturelle la création d'une chaire de Philologie et d'Histoire indo-chinoise. RS D'ailleurs, tous nos centres universitaires ont béné- ficié de cette augmentation. Ainsi la Sorbonne, qui comptait 45 chaires en 1840, en possède aujourd'hui 150, parmi lesquelles une chaire d’Aviation qui serait peut-être mieux à sa place au Collège de France, S il est vrai que le rôle de cet établissement est d'être à l'avant-garde de la science. et que son but soit de pour- suivre, à côté de l'Université et dans une voie diffé- rente, le développement continu des connaissances humaines. De ce rôle on sait la définition que donna Renan dans ses Questions contemporaines : « Loin de faire double emploi avec les établissements de l'Université, le Collège de France répond à des besoins d'un autre ordre et qui tiennent si profondément au progres de l'esprit humain que la manière plus ou moins fidèle dont il remplit sa mission peut ètre prise comme mesure du développement scientifique à un moment dunné. Les époques où le Collège de France, transformé en succursale des établissements ordinaires, n'a fait que répéter les doctrines recues sans poursuivre aucune méthode nouvelle, ont été des temps de décadence scientifique; les époques où le Collège de France a compté dans son sein les chefs d'un mouvement intel- 50 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE lectuel, ont été des époques fécondes en grands résultats. A côté des établissements où se garde le dépôt des connaissances acquises, il est nécessaire qu'il y ait des chaires indépendantes, où s’enseignent non les branches de la science qui sont faites, mais celles qui sont en voie de se faire, et où la grande originalité qui, dans l’enseignement proprement dit, n'est pas une qualité indispensable trouve juste sa place. » Ce n’est donc pas de l'augmentation du nombre des chaires que l’on doit se plaindre, mais plutôt de leur mauvaise répartition. Il est incontestable qu'il existe au Collège de Frauce certaines ch ires qui n'ont pas d'originalité bien marquée et où l’enseignement qu'on y donne n'est pas très différent de celui qu'on trouve, en face, de l’autre côté de la rue Saint-Jacques. La pré- paration à l'agrégation en Sorbonne et certaines lecons du Collège de France montrent clairement un double emploi. De ce côté, on peut donc dire qu'une partie des crédits est mal utilisée: En revanche, des laboratoires — première condition de travail scientifique — sont négligés ou même n'existent pas, comme, par exemple, dans le cours de Physique générale. Les laboratoires de Chimie minérale et de Biologie générale manquent d'instruments; celui de l'Histoire de l’art n'a pas de bibliothèque, et le professeur, au lieu de disposer de gravures et de dessins, en est réduit à se servir de « mauvaises cartes postales ». Quant à la question des suppléances, on sait que, d'après le règlement actuel, un professeur qui. a un certain nombre d’années d'exercice au Collège de France a droit à un suppléant. Celui-ci s’installe alors en sou lieu et place et se crée ainsi des droits de suc- cession à la chaire, d'autant plus solides que le titu- laire est plus souvent absent. Il paraît qu'il existe des professeurs quon n'a jamais revus! Il serait donc utile de réduire ces abus et fixer des règles de durée pour ces absences. On sait, d'autre part, que le règlement actuel oblige les professeurs à don:.er dans l'année quarante lecons. C’est a Michelet, parait-il, qu'est due cette disposition : ses absences avai: nt pris un tel caractère de perma- nence qu'on se crut tenu d'exiger un minimum de cours. On comprend facilement qu'il soit bon de relâcher un peu :a discipline sur ce point, car, ainsi que le dit fort bien M. Kteeg dans son Rapport, « la valeur des maîtres, leur haute conscience doivent les mettre à l'abri de ces régl mentations tatillonnes ». Il y a des expériences de laboratoire, des méditations de cabinet, des recherches sur place dans les régions inté- ressées, qui valent largement le sacrifice de quelques lecons publiques. * Pour examiner avec soin ces différentes questions, l'assemblée des professeurs, dès qu'elle y fut invitée par le Ministre de l’Instruction pub ique, nomma une Commission, à laquelle se sont joints par la suite plusieurs autres professeurs, et en dix séances cette Commission élabora un avant-projet. Puis l'assemblée des professeurs, au coursde plusieurs réunions, discuta, modifia et finalement adopta l'ensemble du projet par 31 voix contre #. Ce projet diffère de l’ancien règlement sur les points suivants : 4° Au sujet du nombre des leçons, l'assemblée des professeurs n’est pas allée aussi loin que l'y invitait le ministre; elle n'a pas supprimé toute réglementation, mais ele a réduit les obligations des professeurs à deux lecons par semaine pendant un semestre, comme dans les Facultés des Sciences; 20 Sur la question du nombre des chaires, satisfac- tion a été donnée à la Commission du budget par une addition à l’article qui prévoit seulement le maintien ou la transformation des chaires. Désormais, l'assemblée pourra proposer aussi la suppression; 3° Les professeurs ne pourront plus se faire suppléer plus de quatre années de suite, et un même suppléant ne pourra pas rester en fonctions plus de deux ans. Les préparateurs seront nommés pour un an et non plus à vie, en raison de la transformation possible des chaires, qui paraît devoir être de plus en plus fré- quente, le Collège comprenant la nécessité de modifier sans cesse ses cadres pour rester à l'avant-garde de la science. Enfin, le Collège de France prétend aussi à la cen- tralisation de certaines missions scientifiques, que le Gouvernement entretient au loin et qui manquent d'une direction commune et d'un contrôle autorisé. Des missions scientifiques étrangères se louent de dis- positions analogues : la coordination de leurs re- cherches au dehors et des travaux de la métropole au dedans ajoute au prix de leurs efforts, à la valeur de leurs découvertes, à la gloire de leur pays. On comprend que le Collège de France veuille pour nous les mêmes résultats. Les « Amis du Muséum ». — Le Conseil d’admi- nistration de la Société « Les Amis du Muséum et du Jardin des Plantes », dans sa dernière réunion pré- sidée par M. Alfred Grandidier, de l'Institut, l’un des vice-présidents, a pris d’intéressantes décisions. La Galerie de Paléontologie recoit une pièce excep- tionnelle, que ses maigres ressources n'auraient jamais permis d'acquérir : un superbe exemplaire d’Ichtyo- saure découvert à Holzmaden (Wurtenberg). L'acqui- sition de ce fossile à été facilitée par la généreuse intervention de MM. le D' E. Durand et Van Brock. M. le Professeur Bouvier a présenté au Conseil une série de dessins originaux du xvir® siècle, exécutés par Mie de Moustier de Marsilly pour illustrer l’His- toire naturelle des Insertes de Réaumur. Ces dessins faisaient partie de la collection particulière d'un ancien préparateur du laboratoire d'Entomologie, M. Poujade, mort il y a quelques mois. Le Conseil en a voté l’ac- quisition. Nominations universitaires. — M. Guntz, pro- fesseur de Chimie minérale à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé Directeur de l’Institut de Chimie. M. N. Bernard, chargé d’un cours de Botanique à la Faculté des Sciences de Poitiers, est nommé professeur de Botanique à ladite Faculté. M. Gambier, agrégé des Sciences mathématiques, doc- teur ès sciences, professeur de Mathématiques spé- ciales au Lycée d- Montpellier, est nommé maitre de conférences de Mathématiques à la Faculté des Sciences de Rennes. M. Husson, chargé de cours à la Faculté des Sciences de Caen, est nommé prof s-eur de Mécanique ration- nelle et appliquée à ladite Faculté. M. Rothé, maitre de conférences à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé professeur de Physique à ladite Faculté. M. Wah], maître de conférences de Chimie appliquée à la teinture et à l'impression (fondation de l'UÜniver- sité de Naney), estuommé chargé de cours de Chimie industrielle (fondation de l'Université de Nancy) à la Faculté des Scien-es de Nancy. M. Blaise, professeur de Uhimie organique à la Faculté des Sciences de Nancy,,est nommé maître de conférences de Chimie organique à la Faculté des Sciences de Paris, en remplacement de M. Bouveault, décédé. M Marchis, professeur de Physique générale à la Faculté des Sciences de Bordeaux, est nommé profes- seur d'Aviation à {a Faculté des Sciences de Paris (fondation Basil Zaharof”). M. Locquin, docteur ès sciences, préparateur de Chimie à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé maitre de conférences de Chimie générale à la Faculté des Sciences de Lyon. M Jacob, docteur ès sciences, préparateur de Géo- logie et Minéralogie à la Faculté des Sciences de Gre- noble, est nommé maître de conférences de Miné- ralogie, en remplacement de M. Goguel, décédé. ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME 51 LES RECHERCHES MODERNES SUR LE Les volcans ont de tout temps excité la curiosité de l'homme, soit par les désastres dont ils sont cause, soit par le mystère qui enveloppe la genèse des éruptions. La vulcanologie, science d'observa- tion, semblait, à la fin du xix° siècle, être entrée dans la phase de science finie. L'on était à peu près tombé d'accord pour attribuer à l’eau et à sa vapeur un rôle tout à fait prépondérant dans l’évolution du volcanisme, en sorte qu'une éruption était con- sidérée comme un phénom ne aqueux à haute température. Plusieurs théories séduisantes, basées sur certaines expériences et analyses ayant toutes l'eau comme corps ac- tif, étaient érigées en dogme, et les différen- ces qu'elles. présen- {aient n'étaient en réa- lité que des nuances. Le nuage volcanique était considéré comme contenant 9/10 d'eau à l'élat gazeux ; d'autres poussaient même jus- qu'à dire que les 999/1000 en étaient composés. Or, depuis peu d’an- nées, la vulcanologie subit une crise. Tout esi remis en queslion : l'eau est ramenée à un rôle infime ; la science vulcanologique recommence sur de nouvelles bases, totalement différentes des anciennes. En réalité, divers savants, dont M. Wil- liam T Brigham, à propos de Hawaï, M. E. Dou- glas Archibald, à propos du Krakatau, M. Calderon, à propos des volcans d'Olot, avaient déjà émis des doutes sur la légitimité de la théorie aqueuse, lors- que brusquement, coup sur coup, cinq Mémoires publiés dans les Archives des Scieuces physiques ot naturelles (de Genève), de 1905 à 1909, vinrent apporter de tels arguments contre les anciennes idées que les vulcanologues furent forcés de consi- dérer les nouvelles conceptions. Une polémique s'engagea immédiatement. Plusieurs savants émi- nents soutinrent résolument la théorie aqueuse. D'autres, parmiles professeurs de diverses univer- sités, recommandent déjà, dans leurs conférences, d'étude de ce nouveau sujet à leursélèves géologues, afin que ceux-ci soient aptes à se former une opi- nion personnelle, et divers articles de revues scien- tifiques spéciales étudient le nouveau problème. Fig. 1. — Le Stromboli. (Phot. de l'auteuw..) VOLCANISME Étant l’auteur des mémoires qui ont fait le su jet de ces polémiques et ayant jeté les bases d’une vulcanologie dans laquelle l’eau est ramenée à son rôle réel, je pense que le public scientifique fran cais sera intéressé par l'exposé que je vais faire, aussi simplement que possible, de cette nouvelle question. I. LES TEMPÉRATURES ET LES ROCHES EXPLOSIBLES. $S 1. — La Température du volcan. La première observation qui saute aux yeux en étudiant un volcan est que son état el sa phase sonten relation directe avee la température manifestée à la surface. Le maximum d’acti- avec le maximum de tempéra- ture. Il est donc néces- tou d’abord cette tempéra- vité coïncide saire d'établir ture maximum. Négli- geant les eslimalions la pre- détermination Bar- en fantaisistes, mière vraie est toli, qui trouva 1902, pour la lave cou- lante de l'Etna, 1.063°. J'ai repris cette question : Observons d'abord qu'au paroxysme, il est rejeté du magma neuf, plus ou moins fluide, plus ou moins pâteux, plus ou moinsriche en cristaux visibles ou microscopiques. Avec le paroxysme de la cheminée explosive coin- cide l’arrivée de la lave au jour, en sorte que la température de la lave est la même que celle de la cheminée, les produits rejetés étant les mêmes. Or il est manifeste que la température de la che- minée ne peut pas être supérieure à celle du point de fusion du minéral le plus fusible, visible dans la lave. D'autre part, elle ne peut pas être inférieure à celle qui est nécessaire pour ramollir et faire couler le magma complexe qui constitue la lave. En déterminant scientifiquementces deux valeurs, l'on aura les limites entre lesquelles varie la tempé- rature de la cheminée éruptive en des points très voisins de la surface terrestre. Il serait dangereux de vouloir généraliser ces données pour desmagmas situés très profondément, car nous n'avons aucun moyen, pour le moment, de dire quels sont les due à 52 états physiques de zones situées à 200-300 kilome- tres de profondeur. Je me suis appliqué tout d'abord à déterminer le point de fusion de tous les minéraux éruptifs. J'ai trouvé que celui qui fond à la température la plus basse, et qui en même temps est le plus commun, est l’auyile, dont le point de fusion est de 1.230°. Il restait à déterminer le point de fusion du verre qui constitue le liquide coulant dans lequel flottent les cristaux. Cela est assez délicat: carun verre est unliquide, quand bien même il est solide, et sa déformation, seul critère que nous ayons de sa fusion, varie avec le temps, avec la masse, avec la pres- sion qui tend à le dé- former, la tempéra- ture restant la même. Il s'agissait donc de se placer dans des conditions aussi ap- prochées que possi- ble de celles qui se réalisent dans la cou- lée de lave. J'ai adopté pour point de repère la température à la- quelle la lave, en se refroidissant, forme à sasurface « les cor- des » bien connues des vulcanologistes. Cette température donne donc la limite inférieure nécessaire à l'émission de la lave. On est aidé aussi, dans ces déterminations, par l'étude du pointexplo- sif de certains magmas acides, qui, eux, libèrent leurs gaz avec assez de brusquerie pour que la détermination du point critique facile. En faisant ce travail pour un très grand nombre de magmas de différents volcans, j'ai trouvé que la température explosive superficielle ne dépassait en tout cas pas celle de 1230° et ne descendait pas au- dessous de 870°, et que la moyenne générale est de 1.067. f Exenples : Au Vésuve, les cordes se formèrent sur la lave de 190% à 98% et le maximum possible était 1.230°, Pasir-Kiamis a fait explosion à 994, Lipari à 870°, etc. Nous savons donc maintenant entre quelles limites se passe la réaction paroxys- male, et comme, pour couler, la lave doit être plus chaude que le minimum, la réation volcanique Fig. 2. rompu par l'explosion de 1883. (Phot. de l'auteur.) — Rempart nord explosif soit | du Krakatau (altitude 816 m.), ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME moyenne se passe à une température voisine de 1.100. Ce point élant établi, [passons à l'examen des propriétés des laves. $ 2. — Les roches explosibles. Réchauffons une lave quelconque jusqu'au point, déterminé ci-dessus, de 1.100° et répétons l’expé- rience sur un nombre aussi grand de coulées de volcans différents qu'il sera possible. On observera ceci : vers 9002, le bloc commen- cera à émettre de petites fumées blanches; puis tout à coup, à l'instant où la température explosible, un peu variable selon le magma, sera atteinte, le bloc se distendra, gonflera; il se formera des bulles qui, en cre- vant, lanceront avec pression un jet de fu- mée blanche. Une fois la fusion établie, la lave bouiilonnera et débordera bientôt du creuset.Avec des mag- mas très acides, très visqueux,lesgazetles fumées distendront la masse de telle sorte que le volumeà chaud sera parfois 20 fois plus considérable que le volume de la roche primitive. Il se sera formé une ponce lé- gère par une explo- sion interne. Il ne faut pas croire qu'une seule fusion épuise la faculté d'expansion d'une lave. Des blocs du Vésuve refondus 5 fois ont toujours montré la même faculté explosive, apparemment aussi intense les dernières fois que la première. On voit donc que cette ébulli- tion a lieu par des gaz qui se dégagent avec une certaine lenteur et qui ne se dégagent que lorsque la température nécessaire à leur genèse est atteinte, obéissant en cela à une loi générale de Chimie phy- sique. $ 3. — Le co-volume. La pression engendrée au moment de la produc- tion des gaz est gigantesque. On peut la calculer par le principe du co-volume, lorsque l’on connaît le volume et la nature des gaz fournis, la tempéra- ture et la densité du verre avant et après l’explo- sion. ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME 53 En général, la pression passe par l'infini, c’est- à-dire que le volume des gaz fournis ne peut plus rentrer dans le volume primitif, quelle que soit la pression et la température basse à laquelle ils puissent théoriquement être soumis. Ceci explique l'acilement les destructions de montagne (fig. 2), les projections, les ruptures des roches encaissant une cheminée; de même, cela explique que la pression de ces gaz engendrés dans la masse du magma puisse être suffisante pour soulever des colonnes de laves pouvant atteindre d'énormes hauteurs. En effet, 27.000 kilogs par centimètre carré représente la pression d’une colonne de basalte compacte de 100 kilomètres de hauteur. Or, nos gaz fournissent des pressions égales ou supérieures. Il est facile de mettre en évidence ces pressions et ces dilatations des laves; en enfermant l’obsi- TABLEAU I. II. — NATURE ET QUANTITÉ LES GÉNÉRATEURS. DES GAZ. — FUMÉEROLLES DE LA LAVE. LA CENDRE. $ 1. —— Les gaz des volcans. On peut étudier les gaz qui se dégagent des évents, fumerolles, geysers, soufflards, etc. Mais ce moyen ne donne jamais le gaz volcanique pur, parce qu'il est impossible, matèriellement impos- sible, d'aspirer des gaz dans une fumerolle sans -qu'ils soient mélangés d'air et d'humidité de l'air. Le cône volcanique estsi poreux que la pression des coups de vent est sensible à la sortie de la fume- rolle, comme je l'aiobservéau pic de Teyde. Ensuite, dans une série d'analyses des corps volatils puisés à la même fumerolle, l’on n'obtient jamais de résul- — Analyse des gaz de divers volcans. Quantité de gaz en centimètres cubes sous un kilog. (00 — 760 mm). € Quantité de salmiac en milligrammes pour un “kilog. Chlore libre . ARE ë ICI Volumes en 0/, de } SO®. . chaque gaz. . . ) CO*. co . Autres CÉVASnd, caËr die KRAKATAU ! SAMOA * ZIMAPAX * VÉSUVE * ISLANDE * 397 590 311 16,5 11 8,9 , 14 11,76 20,1 5,38 21,12 5,88 40,2 64,09 traces. 12,60 traces. l 14.35 16,01 19,58 2,40 \ 0 Tea .64 10,5 à .02 124 27 { AD3EE 100 100 100 100 dienne dans des tubes d’acier, ceux-ci éclatent. En chauffant la même roche dans des enveloppes ré- fractaires épaisses, celles-ci sont fendues, et l’obsi- dienne, transformée en ponce, jaillit au travers de la fente comme un boudin laminé, rappelant le phénomène de l’Aiguille à la Montagne Pelée, si bien étudié par le Professeur A. Lacroix, comme celui que j'ai observé au Mérapi, dans le centre de Java. Toutes les roches éruptives connues se partagent en deux grandes classes : celles qui se comportent comme je viens de le dire ci-dessus, ce sont les roches actives; celles qui se contentent de fondre sans phénomène particulier, tels les granites, les amphibolites, ete.; ce sont les roches mortes. Voyons maintenant quels sont les gaz émis par le magma actif. ! Krakatau : Obsidienne acide de 1883, moyenne générale de nombreuses analyses ? Samoa : Lave basaltique à péridot, scorie de la surface de la coulée de 1906. * Zimapan (Mexico) : Ohbsidienne acide blonde. * Vésuve : Scorie très bulleuse de leucite-téphrite de la lave culante de 1904. * Islande : Obsidiennes noires (moyenne générale). tats concordants. La proportion varie d'une heure à l'autre. Comme nous savons, par les expériences précé- dentes, que le magma émet des gaz et que c’est lui seul qui les fournit, il suffit donc de provoquer dans le vide l'explosion du magma pour obtenir les produits élastiques purs. Si l’on prend un échan- sillonnage convenablement réparti, les analyses d'une même série sont très concordantes; mais, Si l'on prend, dans la même coulée d'obsidienne par exemple, des échantillons divers, l’on observera que la quantité des gaz par unité de poids de roche peut varier beaucoup. Leur nature est fixe et la proportion relative des différents composés gazeux entre eux ne varie que peu. En général, il semble que tout se passe comme si les générateurs étaient introduits dans la grande coulée de lave par un brassage incomplet. Voici (tableau I) quelques analyses des gaz fournis par des voleans assez distants les uns des autres et des magmas pétrographiquement assez différents pour montrer que le caractère chimique explosifest mondial. Les analyses faites jusqu'à aujourd'hui sont en nombre très considérable et largement D4 ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME suffisant pour pouvoir l’affirmer sans crainte. Pour le caleul total à l'explosion, le salmiac doit être ajouté aux autres gaz; un milligramme vaut 0,83 centimètres cubes (réduits 0° et 760%), Remarquons tout d'abord que le salmiac est essentiel. Il peut déjà, à lui seul, servir à définir une roche active. Mais il y a plus. L'exhalaison paroxysmale est caractérisée par du chlore libre. La présence de cet élément rend donc impossible une réaction dans laquelle l’eau aurait la prépondérance. Elle rend aussi impossible la célèbre réaction de Gay-Lussac moi, ils sont primitifs dans la lave; celle-ci, étant anhydre, ne peut done pas agir sur des carbures métalliques, très hypothétiques du reste), les sili- cales chlorés (silico chlorures de calcium) auxquels s'ajoutent les silicates ferriques des laves), ce qui fait 4 complexes en présence. Je n’insisterai pas sur les multiples analyses qui démontrent ces faits. Il me suffit de dire que l’on peut séparer isolément chacun de ces générateurs et que l'on peut les recombiner entre eux pour former à nouveau le salmiac ebtous les autres gaz, soit en les combinant ? à 2,3 à3 ou les 4 ensemble, ce et Thénard, sur laquelle se basent les partisans de | qui prête à une grande variété d'expériences syn la théorie aqueuse thétiques, faites avec pour expliquer la ge-' [x ou sans l'aide de la nèse du gaz acide lave elle-même, dé- chlorhydrique. Ce barrassée, par une chlore à lui seul est température convena- suffisant pour faire blement soutenue et abandonner les an- suffisante, de ses élé- ciennes idées et en mentsles plus volatils, faire rechercher de Dans la règle, le nouvelles. dernier élément qui Lorsque l'on fait fait l'explosion est le exploser le magma, chlore : à lui seul, l’on récolte encore il peut provoquer une certaine quantité l'explosion. Au Kra- de sels solides, résul- tats de doubles compositions dé- pyro- génées, et volalilisés à la température vol- canique. Ces sels sont condensés la partie froide de l'ap- pareil; tout comme au cratère ou aux fumées les plus chau- des de la lave, ils se condensent sur les lapillis froids. Ce sont des chlorures de sodium, potas- sium, aluminium, cblorures ferreux, titanifères, fluorures, et de la silice impalpable en flocons pré- cipités, du soufre, etc. Ces fumées fixent toujours un peu de HC]I à leur surface. Elles sont d'une ténuité extraordinaire dans on peut les faire flotter dans l'atmosphère des heures et des heures. Elles traversent 3 Elles ont donc des qualités spéciales identiques à celles des fumées du panache blanc du volcan. flacons laveurs sans être arrêtées. $ 2. — Les générateurs. Trois générateurs, agissant entre eux et sur la lave à la température volcanique, fournissent tous ces complexes gazeux. Ce sont : un azoture de sili- cium, un où plusieurs hydrocarbures (on se dispute beaucoup sur l'origine des hydrocarbures; pour Fig. 3. — J'umerolles de chlorhydrate d'aummoniaque, lave du Vésuve en 1906. (Phot. de l'auteur.) | | | kalau, certains des blocs du magma ac- tif ont fourni des gaz litrant jusqu’à 82 °/, de chlore libre. Nous sommes loin de l’idée qui veut que ce soit l’eau, l'eau seule ou prépondé- rante, qui provoque l’éruption. Un contrôle quantitatif peut se faire encore dans la plupart des cas. Il suffit d'étudier combien un magma neuf n'ayant pas encore subi l’action de la chaleur (obsidienne) peut fournir de gaz et de mesurer quel volume de ceux-ci a élé fourni par l’éruption (ce que l'on peut faire en prenant la den- sité des ponces ou des scories) ; l’on trouvera que, quantitativement, la ponce n’a pas pu se dilater avec d’autres gaz que ceux extraits par le vide. Or, comme ces gaz sont anhydres, il s'ensuit que l'ex- plo-ion du magma s'est faite sans eau. Les résul- tats sont très homogènes pour un volcan donné, aussi bien en Islande qu'au Krakatau, qu'à Lipari, qu à l'Asama, qu'au Mexique, etc. Une expérience fort élégante montre encore que l'eau est absente au paroxysme. Il faut faire exploser dans le vide une obsidienne contenant 1 à 2 millièmes d’eau; celle ci s'échappe à 250°-300° ; ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME 55 on ferme les robinets de l'appareil avant de chauf- fer, en sorte que l'explosion ait lieu en présence de la seule eau d'hydratation dont soit capable le magma. On peut chauffer aussi rapidement que l'on voudra: lentement ou vite, le résultat est le même; cette eau oxyde le magma, qui devient rouge brun au lieu de hlanc éblouissant comme sont toutes les ponces connues rejetées par les volcans. Ceci montre done qu'à l'instant du paroxysme, cette eau d'hydratation a disparu depuis longtemps durant la phase du réchauffement, et qu'il n'y en a pas eu non plus d’au- tre ayant pu venir , d’ailleurs. $ 3. — Les fumerolles et la cendre. Nous constatons sur le terrain que la lave fume. Lorsqu'on peut approcher de la coulée à un endroit : où sa surface à très haute température est à découvert, l’on constate, comme je l'ai vu maintes fois, qu'à la surface il se forme des bulles qui erèvent et laissent échapper un jet de fumées blanches (fig. 3), tout comme dans l'expérience précitée. Par places sont de formidables émanations de fumées semblables qui déposent sur les pierres froides les sels volatilisés, qui sont le salmiac acide mêlé de plus ou moins de chloru- res et fluorures (le salmiac du Vésuve en 1906 titrait 6 °/, de fluorure). Ces fumerolles sont sè- ches ; les fumées sont sèches lorsqu'elles ne sont pas mêélées d'air. Mais l’on observera quelquefois que les fentes de Jave fournissent quelque peu d'humidité. Les par- tisans de la théorie aqueuse font grand état de ces observations. À les croire, les rares fentes qui pro- duisent un peu d’eau sont bien plus importantes que le cratère qui n'en fournit point, et que les centaines de fumerolles de la lave qui sont sèches. Il y a là une erreur d'appréciation. D'autant plus que, si l’on applique à ces fentes de la lave qui donnent un peu d’eau (non pas même de l'eau visible, comme dans les fumerolles aqueuses dont .— Le Vésuve en avril 4906; (Phot. de l'auteur.) nous parlerons plus loin, mais un peu de vapeur | mélangée avec tous les autres gaz), si l'on applique dis-je, toutes les corrections nécessaires à une bonne investigation, et si l’on fait attention à l'étal hygrométrique de l'atmosphère et au principe de l'eau virtuelle !, l'on trouve qu il y à à peine possi bilité que cette eau soit sortie du magma : que les cas les plus favorables sont encore douteux. Le cratère qui fume en blanc fournit ces pous- sières chimiques impalpables dont j'ai parlé ci- dessus. Je me suis souvent trouvé enveloppé, sur la lave, où au bord des cratères, par ces fumées acides asphyxiantes; j'ai pu m'assurer, non seule- ment de leur séche- resse, mais de leur insolubilité dans l'at- mosphère. Jamais il n’y a eu la moindre condensa- tion aqueuse, ni sur les instruments, ni sur les pierres, par une température qui, une fois, à + 5°. Par un temps clair, jai vu ces fumées, rendant l'air opalin, aller du l'Etna jusqu'à lAs- promonte, pendant que celles du Strom- boli allaient se per- dre du côté de la Cala- bre. Je les ai vus, de même, partir du som- met du Smeroe, sur lequel je me trouvais, et aller se perdre dans l'immense lointain visible sur l'Océan Indien, et tant d’autres fois aussi j'ai fait la même observation sur d'autres volcans : Vésuve, Stromboli, Mérapi, Lemongan, etc. Ce nuage blanc est solide, il est chloré; ce n’est pas du brouillard d'eau comme on l'a cru. Sa composilion est celle de l’'émanation solide de la lave : salmiac, acide, chlorures, fluorures, silice, ete. Dans ces cratères fumant ainsi, l'on constate que des chlorures hygroscopiques restent secs au sein des fumées, et qu'éloignés de ce point, ils absorbent très vite 1 humidité de l'air descendil sommet de cendre blanche. ! Le principe de l'eau virtuelle est difficile à exposer sans de longs développements. Il faut connaitre tous les élé- ments volatils, leur quantité relative, la quantité totale du carbone, de la lave, et la quantité totale d'oxygène dispo- nibl . C’est un long travail que de s'assurer d'où vient leau qui humecte légèrement certaines fentes des laves chaudes (voir mes Mémoires originaux, VIe partie). D6 ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE VOLCANISME Il n'existe pas non plus de vapeur d’eau chaude pour les décomposer en oxychlorures. M. Armand Gautier s'est donné beaucoup de peine pour expliquer ces faits dans l'hypothèse de la théorie aqueuse. Il est hors de doute que, si du chlorure de magnésium reste sec, solide, et non décomposé, en un point donné, c'est qu'il n'y à pas de vapeur d'eau en ce point. Toutes ces fumées, tous ces sels, salmiac, chlo- rures, etc., se retrouvent dans la cendre avec des sulfates, ces derniers formés instantanément par le chlore qui arrive à l'air humide au contact du SO*, et aussi par L'espace me manque aussi pour parler de l'exha- laison volcanique seconde: phénomène consécutif à l'explosion paroxysmale et qui fait actuellement l'objet de travaux suivis. Cette exhalaison résulte de l’action de l'atmosphère sur les résidus virtuel- lement gazeux des laves. Pour ces expressions et leur développement, voir mon sixième mémoire. III. — L'EAU EXTERNE. $ 1. — Les fumerolles aqueuses. Le paroxysme n'a point d'eau. Mais alors com- ment se fait-il que lente oxydation à l'air humide des sul- lites des cendres frai- ches. S 4. — Cendres. Dans le monde en- lier, une cendre vol- canique fraîche don- nera du salmiac. C'est un cons- tant. Elle contiendra aussi du chlorure de magnésium sec. L'azote vient donc du magma, et non pas de la végétation sur laquelle coule la lave, comme le voulait Bunsen. Erreur répé- lée, recopiée, et si bien enracinée que l'on oublie que, si l’on distille du bois, on caractère obtient tout autre chose que du salmiac blanc et pur. La cendre paroxysmale est sèche. Si l'on dose, comme je l'ai fait nombre de fois, l'eau qu'elle con- ent à l'instant de sa chute et cinq minutes, quinze minutes, soixante minutes après, l'on constate que le titre en eau va croissant. Les expériences faites pour le Vésuve, en 1906 (fig. 4), m'ont montré qu'il était impossible que la cendre ait été projetée par un gaz dont la teneur en vapeur d’eau ait seulement atteint le titre de 17/760 : soit seulement 2 1/4 °/.. Cette trace d'eau est bien éloignée des masses énormes d'eau que se plaisent à imaginer les par- tisans de la théorie aqueuse. Il ne m'est pas possible de citer ici toutes les expériences faites. Si un lecteur s'intéresse à cette question, il voudra bien se reporter à mes Mémoires originaux ‘. * Quelques recherches sur le volcanisme. Arch. des Sc. phys. et nat., années 1905 à 1909. Fig. 5. — La solfatare du Papandajan (Java). (Phot. de l'auteur.) nous voyons des fu- merolles aqueuses, des soufflards, des geysers, des jets chauds et humides? Avant d'aborder la question,qu'il me soit permis de faire une comparaison : Ssup- posons un instant que le Micromégas, de Voltaire, se mette à étudier les Pari- siens.Supposons qu'il n'ait, dans son cer- veau, aucune notion du vêtement. Il aura une peine extrême à s'assurer que - nos habits ne font pas partie intégrante de notre corps vivant, et il lui faudra une suite d'expériences et de multiples raisonnements pour arriver à être certain de l'indépendance du corps et de ses vête- ments. Il en est rigoureusement de même pour le volcan. Le phénomène volcanique est recouvert par un manteau d'eaux de surface, d'eaux pluviales, d'eaux errantes. Il est masqué par ce vêtement; celui-ci subit l'influence du sous-sol, qui, en même temps que la chaleur, lui fournit de nombreux gaz. Au paroxysme seul, le volcan apparaît vu; il a percé sa couverture aqueuse. Sitôt que l’isogéo- therme de 1.000° s'enfonce par le refroidissement, aussitôt les eaux errantes pluviales réoccupent le terrain desséché. Il faut avoir parcouru les grottes des volcans, comme je l'ai fait. à l'Etna, au Chahorra, au Teyde, etc., pour se rendre compte que l’eau coule en sources, en nappes, en lacs, de partout. Les pluies sont instantanément absorbées; les neiges ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERNES SUR LE du Vésuve, du Teyde, de l'Etna ne forment pas de torrents de fonte, elles s'absorbent, Le cône poreux est une éponge; ce n’est qu'à sa base que réappa- raissent ces eaux absorbées, et encore une partie seulement. L'on concoit done que, si le cône se réchauffe, il va refouler ces eaux non pas par conductibilité calorique seule, mais par injection de ses gaz chaudsquis'infiltrent et qui pénètrent bien plusloin. Il y aura donc une zone de passage entre le centre chaud anhydre et la zone froide humide. Comme, d'autre part, dans presque tous les vol- cans, les points du VOLCANISME 57 la température s'élève elles forment une s: continue, depuis les simples sources chaudes soufflards les plus violents. 4° La pression du jet, contenant de l'eau, pre peu supérieure à celle de l'ébullition de l'eau, 110 à sente un maximum à une tempéralure un 120° ; puis cette pression s'abaisse très rapidement pour disparaître bientôt quand la température s'élève. Dans la même série de fumerolles, à 270, la vapeur d’eau n'est déjà plus que la moitié de ce qu'elle était à 98°-100° et, dans les régions très c'est-à-dire au delà du maximum, la pression de chaudes, il n'y a plus maximum de tempé- rature, à la surface, sont toujours multi- ples, l'on voit la com- plexité extrême qu'il y à dans ces zones de passage sinueuses, parfois contradictoi- res, et sans lien appa- rent d'un point à l’autre. L'étude d'un seul volcan ne peut pas suffire pour débrouil- ler la question, pas même l'étude d’un seul groupesitué dans la même région vol- canique ; il faut l'exa- men comparé de groupes assez dis- tants les uns des au- tres pour que leurs conditions aqueuses soient très différentes. J'ai étudié dans ce but les groupes Canariote, Méditerranéen et Javanais(fig.5). Pour fixer les idées, je définis ainsi la fumerolle aqueuse : un jet gazeux contenant au moins 50 °/, d'eau. Voici les lois d'observation auxquelles je suis arrivé : 1° La fumerolle aqueuse, à température égale, est sous la dépendance du climat. Les Canaries présentent le minimum d’exhalaisons aqueuses. Le Timanfaya est anhydre avec 360°. Les fumerolles méditerranéennes sont un peu plus fortes, et elles atteignent le maximum à Java où sont des lacs cra- tériens chauds (fig. 6). 2° Dans un groupe donné, la quantité des fume- rolles aqueuses et la quantité d'eau évaporée dépendent de la forme de la montagne. Le mini- mum est pour le volcan conique, le maximum pour le cratère. Cela est très sensible à Java. 9° Les masses d'eaux évaporées s'abaissent quand Fig. 6. — Lac chaud au fond du cratère du Tangkochan Prahoe (Java). (Phot. de l’auteur.) du tout d’eau. L'émanation aqueuse, aux tempé- voisines du de présente ratures mäaxinUum sion, pres- une instabilité très gran- de. La fumerolle s'éteint, ou disparait, ou change sa tempé- rature très rapide- ment (en peu d'heu- res parfois). Par op- position, le centre chaud ou les points les plus chauds res- tent fixes, dans leur pression, leur tempé- rature et leur teneur en gaz. Ces règles, démé- lées avec beaucoup de peine et de :nom- breuses mesures, l'idée qui veut que ce soit sont en opposition avec le volcan qui émette ou qui fabrique cette eau. Ces lois s'expliquent, au contraire, avec la plus grande facilité par le fait que les eaux d’humecta- tion du cône et les eaux collectées par le cratère creux, pluviales ou errantes, se réchauffent au contact des surfaces chaudes, réchauffement ayant lieu non seulement par l'arrivée d’une nappe aqui- fère sur un cailloutis poreux chaud, mais par péné- tration mutuelle, d'une part de la vapeur d'eau, d'autre part des gaz très chauds émanés par le magma. Rapprochons ici ce que nous savons du pa- roxysme. La conclusion s'impose : Ze volcan ne fabrique pas d'eau. Le mode éruptif est un mode très complexe, mais anhydre; les gaz émis par le magma sont sous la dépendance seulement de la en azotures, silici- richesse relative de celui-ci chlorures et hydrocarbures. Si les proportions 58 ALBERT BRUN — LES RECHERCHES MODERXES SUR LE VOLCANISME relatives sont un peu variables, la nature des com- posés reste constante dans le monde entier. L'élément eau, au contraire, est variable, non seulement d'un groupe à l’autre, mais d'un volcan à l’autre, et au sein du même unique volcan. Il est aussi facile de comprendre pourquoi, lorsque l'iso- séotherme de 1.100°, paroxysmal, s'enfonce par le refroidissement, l'eau pluviale et errante recom- mence à envahir le cratère, qui présente alors, pendant des années, des fumerolles aqueuses chaudes, attribuées, bien à tort, à l'émanation vol- canique elle-même (fig. 7). $ 2. — Torrents boueux. Pluies de boue. J'ajouterai encore deux mots au sujet de ces deux phénomènes, sphère de cetendroit-là par son point desaturation. En 1906, pendant qu'il pleuvait de la boue à Resina, la cendre tombait sèche sur la Somma. Ce phéno- mène est local, perdu êt infime, dans le développe- ment des chutes de cendres d'une éruption. J'ai été témoin, dans le climat le plus sec connu, à Lanzarote, d’une chute de pluie boueuse analogue. L'ombre d'un charriage éolien des sables de la baie de Peneda à suffisamment abaissé la température pour faire passer l'air par sou point de saturation, et il est tombé un peu de boue. Du reste, si l'eau de ces pluies appartenait à de l’eau éruptive, il faudrait que les gaz de l'explosion en fussent saturés, ce qui n'est pas du tout le cas, comme je l'ai montré souvent. IV. — PÉTROGRAPHIE. altribués d’une facon erronnée aux vol- cans. Le torrent boueux d'eau chaude ou froi- de doit être étudié en en examinant rigou- reusement la date et les conditions de for- mation. Exemple: on a attribué (en 1906) à l'éruption du Vésuve les torrents boueux d'Ottajano à la Som- ma : ils étaient dus, douze Jours après l'éruption, aux pluies atmosphériques, le volcan n'ayant fourni que la cendre. Aux La conséquence logique du système éruptif anhydre est que les roches doi- vent crislalliser par voie anhydre. Fou- qué et Michel-Lévy l’ont déjà prouvé pour les roches ba- siques, et je ne sais quelle aberration scientifique, causée par quelques insuc- cès expérimentaux, a fail établir le dog- me que les roches aci- des à 70 °/, de silice et au delà devaient cristalliser en pré- volcans de Java, il y a d'énormes sour- ces chaudes qui,rece- vant la cendre lan- cée, font de la boue qui dévaste les environs. Au Smeroe, l'on a attribué au volcan les Lahar Bandiir, torrents boueux qui descendent de Ja montagne, mais qui sont des phénomènes météorologiques. Si l'on examine avec soin toutes les observations publiées, on voit qu'en saine science ces torrents boueux n'ont rien à faire avec une eau volcanique; il n'y à que la cendre qui ait été fournie par l'érup- tion. Pour ce qui concerne les pluies tombant avec la cendre, il suffit d'établir que l’état hygrométrique de l'air était tel que le seul abaissement de tempé- rature dû à l’opacité absolue des cendres pour la chaleur solaire, a suffi pour faire passer l'atmo- Fig. 7. — Cratère du Brama (Java). (Phot. de l’auteur.) sence de vapeur d’eau sous pression. Ce dogme est par- faitement faux. J'ai montré par de nombreuses expériences que: les magmas considérés cristallisent sans eau et sans pression, à une basse température. Le quartz lui-même cristallise en milieu anhydre. V. — CoNCLüUsIONs. Le système volcanique anhydre est donc homo- gène. I est homogène dans son évolution gazeuse et homogène dans son évolution pélrogénétique. L'épiphénomène aqueux doit être séparé du phé- nomène volcanique pur, au triple point de vue géo- logique, physico-chimique et météorologique. Albert Brun. H. MARCHAND — ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE 59 LES TENDANCES NOUVELLES DE L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE On peut dire, je pense, que, d’une façon générale, | les méthodes éducatives que l'on considère comme répondant le mieux aux besoins actuels de l'in- dustrie sont les méthodes allemandes. Tout l’enseignement technique allemand est for- tement organisé, en effet, et il a concouru au rapide progrès de l'Allemagne dans les domaines indus- triel et commercial. Ce serait cependant une erreur que de le croire adapté à toutes les nations. M. Schneider, dans un Rapport présenté récem- ment à l'American Institute of Electrical Enqi- neers', où la question de l’enseignement technique et professionnel à fait l'objet d'intéressantes dis- cussions depuis quelques mois, a bien fait ressortir, me semble-t-il, la caractéristique fondamentale des méthodes en usage dans les écoles allemandes : « Nous ne pouvons, disait M. Schneider, adopter le système éducatif allemand pour la raison simple que la classification allemande est horizontale et que nous en avons une verticale. En d’autres termes, le problème dont nous nous inquiétons, avant tout, dans ce pays, est de trouver quelle est la plus haute position que ses aptitudes permettent à chaque homme d'atteindre et de l'aider à y arriver. Avec ce principe, l'entrée à l'Université devient forcé- ment le résultat d'une sélection graduelle; dans l'avenir, quand il sera appliqué d'une facon inté- srale, ceux-là seuls recevront l'enseignement supé- rieur qui sont le mieux à même d'en tirer profit et pour lesquels l'éducation universitaire procurera le plus grand bénéfice à l'État, à la communauté. » Présenter ainsi le problème, c'est le considérer dans toute son ampleur et sous tous ses aspects, et il semble bien que telle est la facon dont il faille l’envisager pour lui donner une solution complète et rationnelle. Rien n'est plus juste que de relever, en bloc, les qualités professionnelles des tra- vailleurs; mais il est non moins nécessaire de favoriser le développement complet de toutes les intelligences et de toutes les aptitudes. À ce point de vue, ilest très intéressant d'exa- miner deux méthodes d'éducation préconisées depuis peu de temps en Amérique : la première, basée sur l'application du principe de la concen- tricité à l'enseignement supérieur; la seconde, sur la coopération des écoles et des établissements industriels en vue de la formation méthodique des travailleurs de toutes catégories. * H. Scaxeiner : Proceedings of the American Institute of Electrical Engineers, avril 1909. Toutes deux nous paraissent devoir appeler l'at- tention, non seulement en raison des avantages qu'elles pourraient avoir au point de vue purement! éducatif, mais encore, el principalement, parce ; MUC ; qu'elles nous semblent de nature à faciliter l’orga- nisation de l'enseignement d'après les bases indi- quées ci-dessus ; nous allons les examiner. Voyons, avant cela, à quels desiderata doit satis- faire l’organisation de l'enseignement, d’après les plus éminents ingénieurs et professeurs améri- cains. Les études distribuées dans les établissements d'instrueclion technique peuvent se classer en trois catégories : 1°les études pratiques ou industrielles ; 2° les études scientifiques ; 3° les études de culture. Pour les professions des degrés inférieurs et des degrés moyens, c’est aux études pratiques qu'il est nécessaire de réserver la part principale; les trois sortes d'études doivent être confondues pour la formation des ingénieurs. En ce qui concerne spécialement ces derniers, les points essentiels à élucider sont les suivants : 1° L'étudiant d'Université doit-il être en position de rendre des services immédiats ou son instruc- lion peut-elle être complétée par un stage pralique ? 2 De quelle façon sont à régler éventuellement les cours pratiques? 3° Doivent-ils précéder ou suivre les cours théo- riques ? 4° Faut-il qu'ils comprennent des travaux d’ate- lier? 5° Les conférences extraordinaires sur des sujets d'actualité sont-elles utiles ? 6° L'instruction doit-elle ètre spécialisée ou d’une portée générale ? 7 Faut-il multiplier les subdivisions de manière à répondre aux goûts individuels du plus grand nombre possible d'étudiants ? Ces différentes questions ont été soumises aux délibérations de l'Association américaine des Ingé- nieurs électriciens en 1908 et en 1909”. Des réponses qui y ont été données jusqu'ici, par MM. C. P. Steinmelz, L. D. Stilwell, le Professeur A. Ganz, J. G. White, le Professeur Temple, C. O. Mailloux, H. Barker, A. D. Dean, W. S. Franklin, 1 Proceedings of the American Institute of Electrical Engineers, janvier 190$, juin 1908, juillet 1909, août 1909. 60 H. MARCHAND — ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE J. P. Jackson, H. Schneider, V. Karapetoff, S. W. Ashe, W. S. Atkinson, il résulte que : 1° Les meilleurs ingénieurs sont ceux qui pos- | sèdent l'éducation générale la plus étendue; 2 La spécialisation ne doit pas être poussée à l'extrême, parce que l'ingénieur n’a plus, après sa sortie de l'Université, la même facilité de se per- fectionner dans les diverses sciences se rattachant à sa profession ; 3 L'enseignement théorique doit être approfondi et porter sur l'étude complète des principes fonda- mentaux de la science et de la technique, mais sans que la qualité soit négligée pour la quantité; 4 Les travaux de laboratoire et les travaux pra- tiques doivent se rapprocher étroitement de ceux qui se présentent dans la pratique journalière ; 5° Les jeunes gens devraient être entrainés dès le début des études, füt-ce même avant l'examen théorique des appareils employés, au maniement de ces instruments ; 6° Les travaux d'atelier facilitent beaucoup les études théoriques, mais, réciproquement, celles-ci augmentent l'efficacité de ceux-là ; 7° Dans les conditions actuelles, les ingénieurs sortant de l’Université ne sont à même de rendre des services qu'après une initiation complémen- taire d’une année ou deux; 8° Ce n’est, d'ailleurs, qu'après l’achèvement de leurs études universitaires qu’ils prennent réelle- ment contact avec leur profession et qu'ils entrent dans le milieu où ils auront dorénavant à vivre; 9° Il en résulle que beaucoup d'ingénieurs ne sont qu'incomplètement aptes à l'exercice de la carrière qu'ils ont choisie; 10° On pourrait élaguer des programmes beau- coup de matières que l’on n'enseigne que superfi- ciellement, au début des études, et auxquelles on ne revient plus ensuite. II M. Karapetoff a proposé, pour remédier aux inconvénients de la méthode généralement suivie aujourd'hui, d'appliquer à l’enseignement tech- nique le principe de la concentricité des cours, c'est-à-dire d'élargir progressivement le programme d'année en année. Les cours continueraient de comporter quatre années d'études; ils débuteraient par la partie des- criptive de l’art, l'étudiant n'étant conduit à la théorie que graduellement, les règles et les lois en quelque sorte déduites de l'expérience pratique. Chaque année formerait un cours aussi complet que possible, l’enseignement s'étendant concentri- quement chaque an. A l'expiration de la première période annuelle, l'étudiant aurait acquis un fonds de connaissances suffisant pour pouvoir déjà occuper certaines fonc- tions techniques; d'année en année, il en pourrait postuler de plus rémunératrices. Ce ne serait d’ail- leurs que peu à peu aussi que se prononcerait la spécialisation. La méthode, on le voit, ne manque pas d'attrait et elle contribuerait à résoudre le problème de l'accession des jeunes gens peu fortunés, mais bien doués, aux études supérieures‘. Plus complet, cependant, et d'une portée plus vaste, est le système coopératif de M. Alexander. M. Alexander part de cette considération que, les travaux pratiques et les études techniques se complétant et s'assistant mutuellement, il n'y à plus de raison pour placer en premier lieu l'un plutôt que l’autre et qu'il faut les faire alterner. Il fait remarquer, d'autre part, que les établisse- ments d'enseignement ne sauraient jamais être outillés pour l'éducation pratique aussi bien que le sont les grandes usines. Le travail en atelier est, d’ailleurs, fort utile en ce qu'il met le jeune homme en contact direct avec les travailleurs. Le stage précédant les études universitaires, tel qu'il existe en Allemagne, répond à ce but, mais le régime est d’une application difficile. Les direc- teurs d'usine sont généralement peu disposés à admettre dans leurs ateliers des apprentis dont ils ne peuvent attendre aucun service utile *. Quant au stage venant après les études théori- ques, son efficacité n’est pas réelle : ingénieur ou technicien formé, le jeune homme ne s'accoutume plus que péniblement au travail d'atelier. L'initia- tion pratique qu'il y recoit alors ne vaut point celle qu'il aurait eue en faisant plus tôt son appren- tissage. A tous égards, il est désirable que les deux enseignements, théorique, à l’école, et pratique, à l'atelier, marchent d'un commun accord, côte à côte”. Il faut donc que l’école et l'usine s’assistent, qu'il y ait coopération entre elles. III D'après cela, on voit que, dans la méthode Alexander, l'étudiant travaillerait alternativement, par périodes à déterminer, à l’école et à l'atelier. Le collège — l'Université si l’on préfère — don- nerait tout son temps à la théorie, pour l’enseigne- 1 Kanaperorr : Proceedings of the American Institute of Electrical Engineers, décembre 1907. ? Franz zUR NEDDEN : Engineering Magazine, avril 1909. D. J. Lucas : Bulletin de la Socicté belge d'Electriciens, août 1905. 3 M. W. ALEXANDER : Proceedings of the American Insti- tute of Electrical Engineers, juin 1908. H. MARCHAND — ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE 6l ment de laquelle il est le mieux outillé, laissant aux ateliers le soin de faire l'éducation pratique, pour laquelle ces ateliers sont seuls suffisants. Sous le rapport pédagogique, ce système serait certainement des plus avantageux. La conception mentale est loujours facilitée par l'exemple matériel, et réciproquement ; il y aurait donc une double économie de temps : économie parce que l’enseignement serait rendu plus simple et économie encore parce que des travaux d'atelier que l’on fait aujourd'hui à l'école pourraient être supprimés. M. Alexander pense, et il ne semble pas que cette opinion soit optimiste, que le gain serait d'un an environ sur les six ans qu’exige actuellement la formation d'un ingénieur (quatre ans d'université et deux ans d'atelier ou d'usine). Les cinq premières années seraient consacrées par moitié au travail théorique et au travail à l'usine; la sixième se ferait entièrement au collège, de manière à permettre à l'élève de se consacrer aux recherches de laboratoire qui doivent faire l'objet de sa thèse, ainsi qu’à le mettre plus lar- gement en relations avec ses condisciples ordinaires. Cette interruption momentanée du travail pra- tique n’occasionnerait aucun inconvénient et elle ne ferait certainement pas perdre à la méthode nouvelle les avantages qu'elle offre. Au contraire, il est probable qu'après cette sépa- ration, le jeune homme n'aurait que plus vivement le désir de retourner dans l'usine qui lui aurait permis de finir ses études et de les poursuivre d’une manière dont il ressentirait certainement les bien- faits. L'industriel, de son côté, qui aurait pu apprécier les qualités de l’élève-apprenti, l'accueillerait évi- demment plus aisément, après l'obtention du diplôme, qu'il ne le fait aujourd’hui pour des jeunes sens totalement inconnus de lui. Quant à la longueur des périodes alternatives des deux enseignements, c'est l'expérience seule qui peut l’établir. Si l'éducation se faisait par périodes de six mois passées successivement à l'atelier et à l'école, l’enseignement manquerait infailliblement de cohésion. Il est nécessaire que les deux genres d’études alternent plus étroitement, pour que le jeune homme arrive à l'atelier avec l'esprit d'examen et d'observation que les études excitent, lorsqu'elles sont bien comprises, et rentre au collège avec le caractère pratique et l'énergie physique que déve- loppe le travail dans une grande entreprise. Mais des alternances trop courtes empêcheraient de coordonner les idées et les observations, en même temps que de travailler régulièrement à l'atelier et d'achever les travaux commencés. Il est probable que les périodes n'auront pas la même durée dans REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. le cours des années successives d'études: elles seront de quelques jours, ou de quelques semaines au début, de quelques mois à la fin. A l'Université de Cincinnati, où le procédé est mis à l'expérience, avec la coopération d'une grande compagnie, la durée des périodes est d'une semaine, C'est aussi pendant la sixième année, plus parti- culièrement affectée aux travaux de laboratoire personnels, que pourraient être données à l'étudiant les conférences de praticiens. L'étudiant serait alors remarquablement préparé pour les écouter, pour en tirer bénéfice et pour en apprécier la valeur. En résumé, l'enseignement théorique serait au moins aussi développé qu'à présent et l’enseigne- ment pratique serait bien supérieur à ce qu'il peul être, même après l’accomplissement de deux années de stage. AV Au point de vue éducatif, la méthode Alexander parait également devoir posséder une supériorité nettement marquée Comparativement aux autres. Quelle maturité d'esprit n'auraient pas, en effet, les jeunes gens qui auraient passé par les six années d'enseignement théorique et pratique que comporte le procédé? La liberté dont l'étudiant jouit serait heureusement tempérée par la disei- pline de l'atelier, à laquelle le jeune homme serait astreint complètement. Tout en lui laissant son individualité, ce régime lui ferait se rendre mieux compte des restrictions que la pratique met forcément à l'exercice de la liberté propre. Il le mettrait immédiatement dans le milieu où il sera appelé à vivre; il lui permettrait de s’en accommoder davantage; il lui ferait voir les besoins de ceux qui seront plus tard ses infé- rieurs ; il lui en ferait comprendre les aspirations. Ce ne serait pas inutile; malgré des allures démocratiques, l'étudiant a souvent un inconscient égoïsme qui le laisse étranger à l'âme du peuple; ingénieur, assagi, il est trop rigoureux ou trop faible; ses subordonnés en souffrent et il en pätit parfois lui-même, moralement et matériellement, car le succès de l'industriel dépend autant de son savoir que du talent qu'il a de faire de ses ouvriers des collaborateurs. Les jeunes gens qui auraient suivi les cours organisés par le procédé Alexander auraient une connaissance complète des conditions de travail dans l'atelier. A première vue, on pourrait être tenté d'assimiler la méthode Alexander à la méthode allemande; mais le fusionnement est loin d'être aussi parfait avec celle-ci qu'il le serait avec celle-là. Aux deux avantages très notables que nous venons de voir s'en ajoute un troisième, du plus haut intérêt social, ainsi que je l'ai dit plus haut. CL 62 H. MARCHAND — ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE En règle générale, la méthode Alexander ne serait appliquée qu'à des jeunes gens ayant dix-huit ans au moins et possédant une bonne instruction moyenne. Comme le procédé exigerait des sacrifices de la part de l'industriel, au début de l'apprentis- sage de l'étudiant, on n'admettrait à en bénéficier que des candidats dignes de cette faveur. Les pos- tulants seraient soumis à une épreuve préalable, qui consisterait, d'abord, en un examen théorique, puis en un stage préliminaire de quelques semaines à l'usine. Les jeunes gens admis seraient donc des sujets de valeur à tous points de vue. Dès lors, leurs travaux d'atelier prendraient promptement assez d'utilité pour valoir salaire et, au bout de peu de temps, la rémunération de l'apprenti, graduellement accrue, pourrait devenir suffisante pour couvrir les frais d'entretien de l'étudiant ou tout au moins ses dépenses d'écolage. M. Alexander indique une rémunéralion initiale de 30 francs par semaine, avec une augmentation annuelle de At francs par semaine, ce qui représente un gain total de 6.500 francs pour les six années d’études, alors que celles-ci coûtent en moyenne de 3.000 à 5.000 francs Dans ces conditions, le système coopératif permettrait aux jeunes gens courageux de se frayer un chemin vers les positions techniques lorsqu'ils posséderaient, en même temps que la volonté d'y parvenir, des aptitudes suffisantes pour y être utiles. En même temps qu'excellent comme méthode pédagogique et éducative, il fournirait donc le moyen, cherché par tous les hommes de cœur et de bon sens, de favoriser systémaliquement l’acces- sion des jeunes gens convenablement doués aux établissements d'instruction supérieure. Il va de soi que collège et usine pourraient con- gédier l’éleve dans des conditions déterminées et que la direction des éludes serait confiée à un comité mixte. Rien n'imposerait, d’ailleurs, d'établir la méthode d'une facon générale : elle pourrait très bien fonctionner à côté des cours réguliers. Il suffirait, pour que l'essai en fût possible, qu'il y eût deux brigades de jeunes gens voulant s’y prêter et qui alterneraient entre eux à l’école et à l'usine. La mise en pratique ne présenterait point, par conséquent, d'obstacle exagéré. A la condition que périodes eussent une durée convenable, l'usinier pourrait compter sur une collaboration de la part de ses apprentis-élèves. Les industriels auraient vrai- semblablement moins d'appréhension à admeltre ces apprentis dans leurs usines qu'ils n’en éprouvent vis-à-vis des stagiaires en Allemagne. L'expérience ls suffisante aurait, au surplus, sous tous rapports, assez d'intérêt pour vaincre leurs hésitations. Initié, théoriquement et pratiquement à la fois, Lion en est toutefois plus vaste : dès ses premiers pas, l’étudiant-apprenti serait beaucoup moins malhabile que les apprentis actuels. Le constructeur pourrait, en outre, escompter que les lecons qu'il donnerait à son élève ne seraient pas perdues pour lui. Il y aurait accord d'intérêts, non seulement entre l’école et l'usine, mais entre l’école, l'usine et l'élève. v M. Alexander avait présenté l’idée du procédé coopératif et l'avait soumis aux critiques de l'American Institute of Electrical Engineers pour la préparation des ingénieurs. Le champ d’applica- la méthode peut être employée pour tout l’enseignement profes- sionnel et elle est déjà à l'essai pour quelques professions dans différents milieux aux Etats-Unis. Les spécialistes américains sont unanimes à reconnaitre que, tant pour les carrières moyennes qu'inférieures, leur système éducatif demande des remaniements profonds. Trop d'enfants encore entrent dans le commerce ou l'industrie sans avoir recu aucune instruction et avec une éducation incomplète ; il est urgent de porter remède à cette situation. D'après le Professeur Ayer, de l'Université de Cincinnati, en 1906-1907, il y avait aux Etats-Unis 2% millions d'enfants en âge d'école. Sur ce nombre, 76 °/, fréquentaient l’école ; 18 5 °/, ont complété les cours primaires ; 12,6 °/, sont entrés dans les établissements moyens d'instruction ; 3,4 °/, ont été diplômés ; 1,8°/, fréquentaient les cours uni- versitaires ; 0,67 °/, ont été diplômés d'université”. On peut dire que la majorité des enfants quittent l'école vers l’âge de 15 ans, aussitôt que le permet- tent les dispositions légales, et qu'ils entrent dans le commerce, l’agriculture, l’industrie, ete., sans posséder aucune instruction industrielle; rares sont ceux qui en recevront ensuite. Encore ceux qui persévèrent dans l'étude ne recoivent ils qu'une instruction inappropriée aux besoins, Le Professeur J. Mc Keen Cattell a pu dire qu'il faudrait réformer totalement les procédés ?; l’ensei- gnement est généralement trop technique et trop abstrait ; il ne-fait appel qu’à la mémoire ; l’insuffi- sance d'éducation préliminaire du peuple ne lui permet absolument pas de s'assimiler l’enseigne- ment qui lui est donné dans les écoles spéciales, même lorsqu'il est présenté par les moyens les plus élémentaires"; beaucoup d'hommes pourvus 1 SCHNEIDER Electrical Engineers, août 1919. ? J, Mc KeEN CaTTELz : Popular Science Monthly, mars 1909. 3 W. S. Fraxkzin : Procredings of the American Insti- tute of Electrical Engineers, août 1909. : Procevaings of the American Institute of H. MARCHAND — ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL EN AMÉRIQUE 64 d'une intelligence ouverte végètent faute d'avoir reçu, dans leur jeunesse, une instruction générale convenable"; leurs efforts restent stériles. Il faut donc donner à l'enfant, durant les années qu'il passe obligatoirement sur les bancs de l’école, une instruction primaire sérieuse, qui lui ouvre l'intelligence et le rende accessible à l'instruction professionnelle ultérieure. Le rôle de l’école pri- maire doit être exclusivement un rôle d'éduca- tion”; c’est dans des écoles spéciales que se fera l'instruction professionnelle”. Mais, puisque les nécessités de l'existence im- posent au plus grand nombre des familles d'utiliser leurs enfants à un travail rémunéré aussitôt qu'il est possible, il est indispensable que cet enseigne- ment professionnel soit distribué dans les condi- tions économiques les plus favorables. Tous les avantages du système coopératif reparaissent ici “ et il serait désirable qu'on étudiät activement les mesures propres à le généraliser et à en faciliter l'application pour toutes les carrières, tant indus- trielles que commerciales; pour les gens de métier” comme pour les employés", l'utilité d'une telle méthode n’est pas contestée’. MI Quelques villes américaines font des essais dans ce sens depuis un certain temps. A Fitchburg, notamment, le procédé coopératif est employé avec de très bons résultats. Il est aussi en usage à l’Ængineerimg College de l'Université de Cincinnati. Le professeur de technique pratique ou « coordi- nator » consacre la moitié de son temps à l’enseigne- nent théorique, à l'école, et l’autre moitié à la sur- veillance des travaux d’apprentis, dans une usine. Dans cette seconde partie de sa tâche, il prend note des travaux confiés aux jeunes gens qu'il sur- veille, des données pratiques qui s'y rapportent et qu'il explique, critique, justifie ensuite, ultérieu- rement, à l’école, lorsque les apprentis d'une semaine sont rentrés au collège, prenant la place d'une autre équipe qui, dans le même temps, tra- vaille à l'usine. Le procédé est utilisé également pour la forma- lion des commis d'écriture, des bouchers, des tailleurs, des comptables, ete. W. S. ATKINSON : Jhbid. C. P. STkINMETZ : bi. 5 J. P. JackSON : Jbid. * I. Scuneiner : Proceedings of the American Institute of Electrical Engincers, avril 1909. 5 C. P. STEINMETZ : Jbid. 8 S. W. Asne : Zbid. ? A. D. Dean, C. E. Dowwron, C. P. Srteixuerz, J. P. Jacx- Sox : /hid. Pour la préparation des employés de bureau, on procède de la facon suivante : Pendant une partie du jour, où la moitié seule ment du personnel est indispensable, par exemple de 8 à 10 heures du matin, dans les grandes maisons industrielles ou commerciales, un professeur réunit les élèves disponibles (c'est lui qui se rend chez eux) et leur enseigne la technique de leur métier. Les instructeurs ne sont pas toujours des spécia- listes de l’enseignement : l'industriel ou le com- mercant obtient souvent des représentants des maisons avec lesquelles il est en relations d’affaires qu'ils exposent les principes de leur fabrication, démontrent les qualités spéciales attribuées à leurs produits, etc. Dans le Wisconsin, le système de l'enseignement à l'usine par des professeurs-voya- geurs est couramment employé. Il est vrai qu'avec ce système les professeurs doivent être plus nombreux que si l’enseignement se faisait dans un établissement central et spécial ; mais, par Contre, on économise les installations, l'outillage et on réalise un gain de temps pour les élèves et pour les patrons, deux choses qui ont bien leur importance. La règle est, toutefois, que le côté technique et pratique du métier soit seul enseigné à l'usine, dans l'atelier ou sur le chantier, tandis que les principes formant la base de la pratique sontexpo- sés par des professeurs experts, généralement à l’école. Remarquons bien que les cours ne sont en aucun €as des cours du soir, venant après la tâche journalière. Cours et travaux pratiques ont une égale impor- tance et leur fusion constitue un apprentissage méthodique et rationnel, qui forme aussi bien l’in- telligence que le corps de l'élève. VII Indépendamment des avantages que nous avons reconnus précédemment, la méthode coopérative aurait, appliquée à l'enseignement professionnel, la grande qualité d'être très économique. La coopération de l'usine avec l’école, en met- tant à la disposition des éducateurs le matériel de l'industrie, dispeaserait le collège de faire l'acqui- sition d’un outillage extrèmement coûteux et que l'on ne peut maintenir à la hauteur des progrès que par des sacrifices pécuniaires incessants. C’est sans aucun doute cette considération qui en déli- mitera le champ d'application. La méthode coopérative esl plus spécialement appropriée aux professions qui se rattachent à la grande industrie et au haut commerce; il se fait que ce sont ces professions aussi dont l’enseigne- ment pratique demande un outillage plus onéreux. 64 D: A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE On pourra objecter que l'intervention d'équipes alternatives dans les ateliers nuira à la régularité de la fabrication. C'est un inconvénient tempo- raire, du même ordre celui résultant de l'admission d'apprentis ordinaires dans l'usine, et que il n'y a pas lieu de s’y arrèter. Le procédé coopératif est assez avantageux etil répond suffisamment à des besoins urgents pour qu'on s'applique, non à en rechercher les points faibles, mais à le faire accepter. H. Marchand. REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE Il existe un certain nombre d'appareils glandu- laires qui n'ont pas de canaux d’excrétion. Les humeurs qu'ils sécrètent ne communiquent avec l'organisme que par l’intermédiaire des vaisseaux sanguins et lymphatiques. Fort longtemps, leur rôle est resté tout à fait ignoré. Leur texture était d'ailleurs très mal connue. On les appelle glandes vasculaires sanguines ou glandes endocrines ou encore glandes à sécrétion interne, à cause du rôle qu'on leur assigne, du déversement direct et de la diffusion immédiate de leurs produits de sécrétion dans la circulation. Rien n’est encore assuré dans leurs fonctions, mais on commence à pouvoir établir à leur endroit de très vraisemblables hypo- thèses. Parmi ces glandes, on compte la rate, les cap- sules surrénales, le corps thyroïde et les glandes parathyroïdes : ce sont les mieux connues. D'autres, l'épiphyse, l'hypophyse et le thymus ont gardé leur caractere énigmatique. Mais, ces dernières années, leur étude tant anatomique que physiologique à fait de grands progrès. C'est peut-être le moment d'en faire un exposé sommaire. Notre revue visera particulièrement l'hypophyse et le thymus. Ces deux glandes n’ont l’une avec l’autre d’autres rap- porls qu'un mécanisme physiologique analogue. I. — IlYProPHYsE. Quand on regarde la face interne de la base d’un crâne à l’état sec, on voil à peu près à l'union du liers antérieur et des deux tiers postérieurs, à l'étage moyen et sur la ligne médiane, une sorte de logette formée par la face supérieure du corps de l'os sphénoïde. Cette logette se nomme fosse pitui- taire ou selle turcique, à cause de la forme spéciale que lui donnent les aphophvses osseuses qui la délimitent, Elle contient le corps pituitaire ou hypo- physe C'est un petit organe ovoïde, à grand axe transversal et constitué par-deux lobes. Sa largeur cst d'environ 12 millimètres, sa hauteur de 6 mil- limètres et son épaisseur de 8 millimètres. Son noids est de 0 gr. 50 à O gr. 75. L'hypophyse est appendue au cerveau par l'intermédiaire d’une pelite tige conique et creuse d'un demi-centimètre de longueur, appelée la tige pituitaire. Son implanta- lion au cerveau se fait en arrière du bord postérieur du chiasma des nerfs optiques, sur cette zone grise nommée le tuber cinereum. Ce dernier forme la partie la plus déclive, le plancher du ventricule cérébral moyen. La glande est séparée du cerveau et fixée dans la selle turcique par un pli dure- mérien, qui constitue une sorte de diaphragme (tente de l'hypophyse) que traverse la tige pitui- taire. Des deux lobes du corps pituitaire, lun, antérieur, d'une couleur rose jaunâtre, est volumineux et reni- forme; l’autre, postérieur, est petit et grisätre. Ce dernier est formé de cellules nerveuses, de névroglie surtout : c’est lui qui s'attache à la tige pituitaire, dont le canal intérieur est tapissé par le même revê- tement épendymaire que les cavités cérébrales et médullaires; c'est donc une expansion d'origine purement nerveuse. Le lobe antérieur est d'une tout autre nature. Il contient des cellules épithéliales’et il ne vient pas du cerveau. L'embryologie le montre dérivant de l'ectoderme buccal. Il reste d'ailleurs assez souvent, chez l’enfant et même l’adulte, dans l'épaisseur des parties sous-jacentes à la muqueuse de la voûte naso-pharyngienne, des îlots d'un tissu analogue à celui du lobe antérieur de l'hypephyse. Ces cellules forment donc une sorte de pituilaire: accessoire. Elles émanent de la même source que: l’hypophyse intra-crânienne, car, dans les deux ou trois premiers mois de la vie intra-utérine, il existe un canal entre le crâne et le pharynx. Ettore: Levi a constaté sur des crânes acromégaliques la persislance de ce canal, qui normalement s’oblitère: toujours. Le Double n’en a guère rencontré la per- sistance que deux fois sur 1.000 cränes. Ces cellules. hypophysaires antérieures sont de deux ordres : les unes, volumineuses, granuleuses, à gros noyau, prennent vivement les colorants, tels que l'éosine; les autres, plus petites, restent elaires. Mais on tend généralement à croire, depuis les observations de Pirone, que ces aspects répondent à deux états successifs de mêmes cellules : l'état clair coïneidant avec le stade de r2pos. Ces cellules semblent donner, D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 65 comme produits de sécrétion, des granulations très fines, une substance colloïde et peut-être une matière grasse. Plusieurs auteurs, dont Thaon et Schmiergeld, examinant des hypophyses patholo- giques, disent qu'on peut suivre sur les coupes le passage de la substance colloïde dans les capillaires. Les conséquences de lablation de la glande piluitaire sont encore discutées. De nombreux expé- rimentateurs l'ont pratiquée sur l'animal : les uns prétendent que la morts'ensuit inévitablement dans un laps de temps assez court (vingt-quatre heures); d’autres, que l’extirpation est compatible avec une survie prolongée. Chez l’homme même, des chi- rurgiens, tels que Hochenegg et Stumme, pensent, au cours d'une opération praliquée pour une tumeur, avoir pu enlever complètement el impu- nément l'hypophyse. Mais, dans une intervention aussi laborieuse, il est bien difficile d’être assuré de l’extirpation totale de l'organe. Selon les données les plus récentes de la Physiologie, la Chirurgie redoute actuellement d'enlever la totalité de l'hypo- physe. Les expériences de Lewis Reford et Harvey Cushing corroborent cette appréhension: Ils ont enlevé complètement la pituitaire à 20 chiens : > moururent immédiatement, 10 après quarante- huit heures, 4 le quatrième jour et le dernier le huitième jour. La mort était précédée de gâtisme, de léthargie et de coma. L'injection sous-cutanée d'extrait hypophysaire fut toujours vaine. Les lésions nécroscopiques étaient inappréciables. Les expériences physiologiques de Livon donnent les mêmes résullats : aucun animal hypophysectomisé totalement n’a survécu plus de trente-six heures. Un seul, dont la survie avait duré près de huit mois, avait conservé des fragments de la glande, ce qui fut vérifié à l’autopsie. On fait donc pour l'hypo- physe comme pour les autres glandes endocrines, le corps thyroïde, par exemple : on cherche à en conserver un fragment, dont la persistance dans l'organisme s'oppose à la production des cachexies qui suivent leur atrophie spontanée ou leur abla- tion totale. Pour se rendre compte des effets physiologiques de la glande, on a employé la méthode des injec- tions d'extraits. La constatation des phénomènes ainsi provoqués aide à comprendre une partie des symptômes cliniques rencontrés au cours des mala- dies de l'hypophyse. Ces injections déterminent une augmentation de la pression artérielle et de l'amplitude des battements cardiaques : d’où le ralentissement du pouls. Elles influent sur certains organes et particulièrement sur les glandes ana- logues. Ainsi l'extrait d'hypophyse, l'hypophysine, amène une vaso-constriction accusée et durable sur le corps thyroïde. Son action est ici moindre, mais plus prolongée que celle de l’extrait de cap- sules surrénales. Sur le rein, la vaso-constriction est passagère et suivie de vaso-dilatalion et de polyurie. Sur la vessie, von Frankl-Hochwart el Froühlich ont observé, chez le chien, le chat, le lapin, une augmentation de la contractilité et une hyper- excitabilité faradique de ce réservoir, Ils altri- buent ces phénomènes à l’action de l'hypophysine sur le sympathique pelvien. Chez la lapine, la même hyperexcitabilité s'observe sur l'utérus. Le pneumogastrique, la sécrétion salivaire, les nerfs érecteurs, les muscles ciliaires ne semblent pas être influencés. L'hypophysine est relativement peu toxique. Il a fallu que Parisot injectât à un lapin l'extrait de six à sept hypophyses pour déterminer des troubles aboutissant à la mort. Avec Elienne, il vit que l’hypophysine ne provoque pas l'athé- rome expérimental comme l’adrénaline, bien qu'elle soit aussi hypertensive que cette dernière substance: ce qui tendrait à prouver que l’athérome n'est pas la conséquence de l'hypertension. P. Emile-Weil et G. Boyé ont cherché l'action que peut avoir l'extrait hypophysaire sur la coagu- lation du sang. Ils ont fait leurs essais avec la pituitaire du bœuf. Ils ont vu que les effets sont dissemblables suivant le lobe employé. Les extraits de lobe postérieur (nerveux) accélèrent la coagu- lation du sang du lapin et de l'homme; ceux de lobe antérieur (épithélial) la retardent. Les pre- miers rétablissent la coagulabilité normale dans le sang des hémophiles ; les seconds augmentent encore l'incoagulabilité hémophilique. Le lobe anté- rieur de l’'hypophyse a donc, dans ces expériences, une action analogue à celle de la glande thyroïde. La plupart des effets que nous venons de signaler sont attribuables à l’action de l'extrait du lobe pos- térieur seul. Les divers expérimentateurs sont d'ac- cord sur ce dernier point, — Herring, V. de Bonis, Osborne et Vincent, etc., — quelle que soit l'espèce animale qui ait fourni l'extrait d'hypophyse. Her- ring a fait la remarque intéressante que, chez les animaux dont l'hypophyse ne contient pas l'équi- valent du lobe postérieur des Mammifères, par exemple chez les Elasmobranches, l'extrait n'a d'ordinaire aucune des actions précitées. L'extrait hypophysaire accélère la croissance, active les échanges cellulaires. Falta et Rudinger ont constaté, après son injection, l'augmentation des échanges des albuminoïdes, de la chaux et de la magnésie. Sur les échanges hydro-carbonés, son action semble nulle. Certains auteurs ont noté cependant de la glycosurie. L'extrait provoque une augmentation du fonctionnement de l'hypophyse elle-même, des capsules surrénales, du rein. peut- être même du foie. Il détermine, au contrare, une diminution fonctionnelle du corps thyroïde. Ces perturbations retentissent sur les cellules des 66 D' A. LETIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE glandes correspondantes. Renon et Delille ont trouvé les cellules éosinophiles de l'hypophyse plus nom- breuses et la glande plus riche en substance col- loïde après une série d'injections d'hypophysine. Réciproquement, l'hypophyse subit des modifi- cations quand on supprime les glandes sur les- quelles elle agit. Elle s’hypertrophie après l'abla- ion du corps thyroïde. Son poids augmente sur- tout, d'après Lucien et Parisot, chez les animaux en période de croissance. Herring à vu que cette hypertrophie portait sur- tout sur le lobe postérieur de la pituitaire et s'éten- dait même à la lame formant plancher au troisième ventricule. Elle est due à la multiplication des cor- puscules granuleux, hyalins etcolloïdes et des cel- lules névrogliques. La même hypertrophie hypophysaire s’observe après l'enlèvement des glandes parathyroïdes, des surrénales ou des glandes génitales. On a beau- coup insisté sur les relations entre l'hypophyse et les glandes génitales. L'hypertrophie hypophy- saire après l’ablation des testicules, reconnue par Ficher, Tandler et Gross, etc., est néanmoins con- trouvée par les résullats oblenus par Schütz. Au cours d'observations comparatives sur le poids des glandes pituitaires de bœufs et de chevaux hongres d’une part, et sur celui de taureaux et d'étalons d'autre part, il trouva l'hypophyse généralement plus développée chez les animaux entiers. Nous verrons néanmoins plus troubles génitaux (dysménorrhéiques et agénésiques) sont fréquents dans les tumeurs de l’hypophyse. Joris a étudié la piluitaire au cours de la gesta- tion. Chez la femme, il est impossible de savoir ce qui, dans les modifications ou les lésions subies par l'hypophyse, est imputable à la grossesse ou bien à la maladie terminale. Chez les animaux (c'est la chatte que Joris à choisie comme sujet d’expérimentation), on constate une certaine surac- tivité de la glande. Celle-ci commence, non à la fin de la grossesse comme on l’a soutenu, mais dès le début de la conception. Au contraire, vers la fin de ia gestation, elle diminuerait. De nombreux auteurs, Thaon, Launoïis, etc., avaient fait des constatations analogues. Le succès des greffes d'organes a donné l'idée d'essayer de greffer l'hypophyse d’un animal à son congénère. Clairmont et Ehrlich l'ont d’abord greffée dans la rate sur le lapin, le cobaye, le chien, le rat, mais sans résultat. Von Saar a tenté de mettre la greffe sous le péritoine de la paroi abdo- minale. Jusqu'ici, tous ces essais ont élé vains : l'hypophys® se résorbe complètement. De tout cela, on peut conclure que, si l’on ne peut encore préciser le rôle de l'hypophyse, elle n'en tient pas moins une place fort importante loin que les parmi les actions combinées de l'ensemble des glandes endocrines et qu'elle constitue un centre trophique de haute valeur. C'est la pathologie qui nous permettra de disso- cier quelque peu les effets complexes de l’action hypophysaire. Toute la première période de ces études est, en effet, purement médicale : l’observa- tion clinique, complétée par la nécropsie, en à élabli les bases initiales. La seconde période appar- tient presque entièrement à la chirurgie qui, par ses ressources opératoires, réalise une véritable physiologie expérimentale. L'attention fut attirée sur l'hypophyse par la description que Pierre Marie fit, en 1886, de l’acro- mégalie. Cette maladie est caractérisée par une hypertrophie singulière et progressive des extré- milés supérieures, inférieures et céphalique. Chose remarquable, c'est beaucoup plus la face que le crâne qui fait les frais de l'augmentation de volume de la tête. La face s’'allonge; les parois des sinus frontaux et maxillaires s'épaississent etleurs cavités s’agrandissent, ce qui fait saillir le front et les pommettes; le nez grossit et se déforme suivant divers types; les oreilles se développent également. Le menton s'élargit et avance; la mâchoire infé- rieure s'agrandit plus que le maxillaire supérieur : il en résulte un prognathisme plus ou moins marqué, un dépassement des dents inférieures sur l'alignement des dents supérieures et un allonge- ment considérable de toute la face. Les mains et les pieds prennent des dimensions excessives. Le corps, généralement élevé, souvent gigantesque chez l’acromégalique, se déforme; la colonne ver- tébrale prend des courbures variées et produit la rondeur du dos et l’ensellure des lombes. Tous ces détails donnent aux malades un aspect que l’on à comparé à celui de Polichinelle. Or, ces déforma- tions du squelette sont liées à une tumeur de l'hypophyse. Quand la tumeur intracranienne occupe la région de l'hypophyse, mais ne lèse pas cet organe, il n'y a pas d’acromégalie. Ajoutons encore que toute tumeur hypophysaire ne déter- mine pas fatalement l'acromégalie. Plus tard, en 1896, Brissaud et Meige réunirent l'acromégalie au gigantisme : ce que confirmèrent Lannois et Roy en montrant que les géants patho- logiques sont presque constamment atteints d'alté- rations ou de tumeurs hypophysaires. À ces déformations squelettiques s'ajoutent des troubles divers, qui peuvent exister d’ailleurs en dehors de l'acromégalie. Mais ici la filiation est moins nette, car la situation topographique de l'hypophyse est telle qu'il est difficile de faire la part de ce qui doit être immédiatement attribué aux lésions de Ja glande et de ce qui peut être mis D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 67 sur le compte de la compression ou de leffraction des régions voisines. >armi ces troubles, cilons d'abord la glycosurie. Ce signe fut lié, dès 1884, par Lœb à une tumeur de l'hypophyse. La Marie, s'observerait dans la moilié environ des cas. C'est aussi l'opinion de L. Borchardt, qui à trouvé 90 glycosuriques sur 176 acromégaliques. Est-elle due directement à l'altération glandulaire ou bien aux phénomenes de compression ou encore à des lésions des parties voisines du cerveau? On ne sait exactement. Bien des points des centres nerveux, depuis la découverte de Claude Bernard (plancher du 4° ventricule), ont été décrits comme centres régulateurs de la glycogénie. On a pensé que l’acromégalie correspondait, non à un défaut de la sécrétion hypophysaire, mais à un hyperfonc- lionnement de la tumeur hypophysaire. Borchardt s'est demandé si la glycosurie ne liendrail pas à cette même cause. Il à injecté de l'extrait hypo- physaire provenant du cheval et de l’homme à des lapins. Cette injection sous-cutanée provoque cons lamment la glycosurie trois heures après, et celle-ci ne dure guère plus de vingt-quatre heures. Le taux du sucre atteint parfois 4,2 °/,. Chez le chien, cette glycosurie est exceptionnelle. Chez l'homme, d'ail- leurs, une des particularités les plus intéressantes est sa mobilité. Le sucre apparait dans les urines, disparait à la suite de l'application d’un régime alimentaire, par exemple, puis reparait malgré la reprise ou la continuation de ce même régime, pour disparaître encore au moment même où l’on s'en écarte. Un des autres éléments du syndrome est l'adipo- sité. C'est Frühlich qui, le premier (1901), rattacha l'obésité à l'existence de tumeurs de la région hypo- physaire. La graisse prend parfois une extrème importance, mais, à l'inverse des obèses florides, ces malades sont infiltrés d'une graisse molle et pâle de mauvais aloi. On a fait pour la graisse le même raisonnement que pour le sucre : on l'a attribuée à des lésions voisines des centres nerveux plutôt qu'à celles de l'hypophyse. C'est ainsi que Erdheim pense que son exagéralion dépend d'un centre trophique situé dans l'infundibulum. D'autres, Tandler et Gross, Schüller l’attribuent à l’atrophie des glandes génitales ; mais ce fait n'est pas constant, car trente-deux autopsies d'adiposité hypophysaire n'ont fourni à O. Marburg que douze atrophies génitales. Quand l'hypophyse est complètement détruite, l'adiposité fait place à la cachexie. L'abla- tion de tumeurs hypophysaires faisant rétrocéder l'obésité, il paraît donc bien qu'il y a une relation certaine entre les deux phénomènes. Marburg dis- tingue, pour ces raisons, trois catégories de faits : glycosurie, d'après Pierre l'hyperpiluilarisme amenant l’acromégalie, l'hypo- piluilarisme amenant l’adiposilté générale ou la dystrophie adipo-génitale, et l'apiluilarisme déter- minant la cachexie. 11 faut ajouter que l'adiposité cérébrale n'est pas toujours sous la dépendance de l'hypophyse même et que des tumeurs céré- brales intéressant plus ou moins l'hypophyse peuvent la provoquer. Dans certains cas, cette adiposilé se complique de myxædème. Les acromégaliques présentent aussi un développement anormal des organes sexuels, mais il s'accompagne d'une frigidilé très marquée. En outre, il disparait assez souvent pour êlre remplacé par une atrophie de tout l'appareil génital. Les mêmes phénomènes, avec absence complète des règles, se produisent chez la femme. Outre ces symptômes très apparents, les tumeurs de l’hypophyse, quand elles ont pris un certain développement, agrandi la selle lurcique, com- primé ou gagné les parties voisines du cerveau, donnent lieu non seulement à des signes qui leur sont communs avec Loule tumeur cérébrale, mais aussi à des troubles qui, par leur spécialisation, permettent d'en préciser la localisation. Le groupe des symptômes communs comprend tout ce que peut provoquer l'hypertension intracranienne, c'est- à-dire : la céphalalgie, si fréquente dans l'acromé- galie, les névralgies oculaires ou faciales ou lin- guales, les vertiges, enfin les vomissements. Presque toujours, dans le cas de tumeur hypophysaire, il x a une accélération du pouls. Quelquefois, on observe un abaissement paradoxal de la température, qui descend à 35°, 34° et même 33°. Les malades pré- sentent parfois un appétit excessif avec des dépra- valions du goût et aussi une soif ardente : ces deux signes pouvant être indépendants de toule glycosurie. Les organes des sens présentent aussi des perturbations diverses, mais, parmi celles-ci, les troubles de la vision ont une prédominance extrême. Ils ont été signalés dans de très anciennes observations. La vision peut être atteinte d'un seul ou des deux côtés, mais souvent inégalement. La diminution de l’acuité visuelle est généralement lente, progressive et aboutit à une cécité plus ou moins complète. Ce n'est pas une complication ter- minale; les malades sont aveugles parfois durant de longues anuées. Selon la nature de l'affection causale, les troubles visuels présentent des alter- natives de régression et d’aggravation. Un des phénomènes les plus typiques est l'hémianopsie bitemporale, signalée par Schultze en 1889 et qui, depuis lors, fut maintes fois retrouvée. Lei, le terme hémianopsie ne doit pas être pris dans son sens absolu : il s’agit p'utôt d'un rétrécissement extrême bitemporal du champ visuel. L'hémianopsie est la perte de la moitié du champ 68 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE visuel d'un œil ou des deux yeux. Quand elle est bilatérale, elle peut occuper la moitié temporale du champ visuel d’un côté et la moitié nasale de l’autre : on la dit alors hétéronyme. Quand elle frappe la même moitié du champ visuel, la moitié temporale, par exemple, de chaque æil, elle est dite homonyme. Ce symptôme est le plus souvent caractéristique d'une lésion du chiasma des nerfs optiques. Bila- téral, il est extrêmement rare comme manifestation d’une lésion centrale, parce qu'il faut, pour le réa- liser, une lésion symétrique des deux lobes occipi- taux du cerveau. Au contraire, le croisement des nerfs optiques est situé à la partie antérieure de la selle turcique, et la croix de Saint-André qu’il forme comprend précisément dans son angle postérieur la tige du corps pituitaire. Il suffit done de peu de chose pour l'intéresser, et le moindre développement d'une tumeur pituitaire en haut encombre la selle tur- cique et comprime la jonction des branches du chiasma. Celui-ci est formé par l'intrication des deux nerfs optiques qui, après s'être réunis, se séparent de nouveau. 11 comprend donc des fibres nerveuses qui vont à la fois aux deux yeux; mais celles-ci sont disposées en faisceaux inégaux qui rassemblent l’un les fibres de la partie nasale de la rétine, l’autre les fibres de la partie temporale. Or, les faisceaux comprenant les fibres nasales s’entre- croisent au niveau de la jonction du chiasma. La disposition est donc telle que les fibres qui s'entre- croisent sur la partie médiane du chiasma sont - celles qui se rendent à la partie nasale des deux rétines, c'est-à-dire celle qui est impressionnée par les objets se trouvant dans la partie temporale du champ visuel, tandis que les autres passent le long des angles latéraux du chiasma. Quand done la pituitaire est atteinte, c’est le plus souvent la jonc- tion du chiasma qui est comprimée, d'où l’atrophie des fibres nasales de chaque rétine et la perte du champ temporal. Il va sans dire que, suivant le mode de la compression optique et d'après ce que nous venons de dire de la disposition des fibres dans le chiasma, une hémianopsie unilatérale ou même une hémianopsie homonyme peuvent être observées, mais l'hémianopsie bitemporale est de beaucoup la plus fréquente. Outre l’atrophie du nerf optique, on peut encore constater à l'ophtalmoscope l'ædème de la papille, mais plus rarement dans les tumeurs de l'hypo- physe que dans les autres tumeurs cérébrales. Du reste, toute une symptomatologie est commune aux unes et aux autres. Les malades présentent parfois une certaine lenteur de la cérébration : ils devien- nent indifférents, somnolents, tombent dans un état de torpeur dont il est nécessaire de les faire sortir pour qu'ils n'oublient pas d'accomplir les actes les plus élémentaires de la vie, boire, man- ger, ete. Une malade dont P. Stewart relatail récemment l'histoire, quand on la réveillait pour manger, se rendormait aussitôt la bouche pleine : elle oubliait d'avaler. Quelquefois les malades présentent des idées délirantes, des formes diverses d'aliénation men- tale qui précèdent l’éclosion des signes pathogno- moniques et nécessitent l'internement Chez d’au- tres, ce sont des crises d’épilepsie qui les amènent dans des services hospitaliers spéciaux, comme ce malade dont nous résumerons plus loin l’histoire et qui fut opéré par Lecène après avoir été placé dans le service du Professeur Marie, à Bicêtre. Quand un acromégalique meurt, que trouve-t-on à l'hypophyse? Des lésions diverses, des hyper- trophies glandulaires, des adénomes, des kystes, des tumeurs de nature variable. Mais il s'en faul que les lésions de l’hypophyse déterminent tou- jours l’acromégalie. La réalisation de ce syndrome demande, en effet, un temps prolongé, et les ma- lades peuvent mourir avant qu'il ait pu devenir patent. Dans les maladies infectieuses aiguës, l'hypophyse est souvent lésée : elle est conges- tionnée, le siège d’hémorragies et de phénomènes inflammatoires, ete. Les effets de ces diverses alté- rations se confondent avec d'autres phénomènes morbides ou bien nous ne pouvons encore les apprécier. Dans les grandes infections chroniques, il en est encore ainsi : leurs localisations sur l'hypo- physe passent inapercues en clinique. Et nous. sommes néanmoins certains de leur réalité, puis- qu'on trouve par exemple des bacilles tubereuleux dans la glande ou d’autres agents microbiens. L'hypophyse est soumise aux mêmes conditious morbides que tous les autres organes, et, comme eux, elle présente parfoisdes attirances singulières. Dernièrement, Dupérié trouvait chez un rejeton hérédo-syphilitique des spirochètes abondants sur- tout dans les ovaires et l'hypophyse. Il y en avait dans le lobe nerveux comme dans le lobe glandulaire; mais celui-ci avait son tissu intersti- tiel hyperpasié, et c'est dans ce tissu particulière- ment que les spirochètes étaient en plus grand nombre. Les lésions chroniques de l’hypophyse, des tu- meurs hypophysaires volumineuses peuvent aussi ne jamais déterminer l’acromégalie. On ne sait pas encore bien ce qui cause ces différences dans le processus pathologique. Caussade et Laubry ont étudié celte question à propos d’un cas de sarcome de la glande pituitaire qui n'avait pas produil d'acromégalie. Un vieillard de soixante-dix-sepl ans, jusque-là bien portant et sans antécédents pathologiques graves, se mit à maigrir, tomba dans D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE une asthénie accusée et dans un état de torpeur cérébrale et mourut après avoir présenté des vo- missements devenus de plus en plus fréquents. Rien n'avait pu faire établir un diagnostic ferme et on pensait à l'existence probable d'une tumeur gastrique maligne latente. À l’autopsie, rien aux divers organes, mais à l’hypophyse une tumeur de 3 centimètres et demi de hauteur et d'épaisseur sur 2 centimètres de longueur. Elle était placée sur la selle turcique, dont elle avait détruit et presque nivelé les saillies osseuses, mais elle avait respecté les organes voisins nerveux ou vasculaires, qui étaient légèrement refoulés. À l'examen histolo- gique, cette tumeur apparut comme un sarcome fuso-cellulaire. Dans les tractus fibro-conjonctifs, dont les mailles enserraient les cellules néopla- siques, se trouvaient des cellules de l’hypophyse isolées ou agminées. La pauvreté des symptômes cliniques est un fait relativement fréquent dans les tumeurs de l’hypophyse. P. Stewart en a publié quelques cas, où pendant longtemps les troubles fonctionnels avaient été bornés à un état de som- nolence, ou de sommeil interrompu par de courtes phases de lucidité complète. Caussade et Laubry émettent cette supposition ingénieuse : si, dans leur observation, l'acromégalie n'a pas suivi la lésion bypophysaire, c’est qu'à l'âge du malade l’activité ostéogénique est aussi diminuée que l’activité hypophysaire. L'hypothèse a sa valeur. Des faits recueillis dans la littérature médicale la corrobo- rent; d’autres, il est vrai, ne sont pas susceptibles de recevoir cette explication : on trouve, en effet, chez des enfants, où ces activités susdites sont intenses, des lésions hypophysaires ne déterminant pas davantage l’acromégalie. Aussi, faisant la cri- tique des diverses interprétations en vigueur, ces auteurs insistent sur la notion que l’acromégalie n’est peut-être pas le résultat exclusif d’une action hypophysaire, mais qu'elle pourrait tenir aux actions combinées des glandes en quelque sorte solidaires les unes des autres et qui sont mutuelle- ment influencées par les lésions qui atteignent l’une d’entre elles, comme il arrive par exemple pour. l'hypophyse, la thyroïde, le testicule ou l'ovaire. La chirurgie de l'hypophyse est de date récente. Les premières opérations ont été faites, il y a trois ans à peine, par sir William Horsley. Depuis lors, on à cherché de divers côtés à trouver une voie d'accès favorable et à régler la technique opéra- toire. L'histoire de ces recherches a fait l’objet d'une excellente revue de Robert Proust dans le Journal de Chirurgie d'octobre 1908. Nous y renvoyons le lecteur désireux d’avoir des détails dans lesquels nous ne pouvons entrer ici. Des figures nombreuses et démonstratives accompagnent ce travail. On accède sur la région hypophysaire en ouvrant une brèche dans la partie soit temporale, soit fron tale du crâne. Mais ce mode d'hypophysectomi intra-cranienne semble devoir être délaissé. Les récentes opérations ont été faites de préférence par la voie nasale, qui permet, par le rabattement du nez, un minimum de mutilation. Les cavités nasales mises à jour, on ouvre le sinus frontal, on résèque l'ethmoïde et on évide les fosses nasales; on esl ainsi conduit sur le sphénoïde dont on ouvre le sinus. Alors on n'est plus séparé de l'hypophyse que par la paroi postérieure, mince et bombée, du sinus sphénoïdal. Telle est la voie qui a été suivie ces temps derniers. L. Læwe à tout récemment pro- posé une autre méthode. Elle consiste à inciser le cou transversalement, sur la ligne médiane, au- dessus de l’os hyoïde, entre les deux muscles sterno- mastoïdiens, puis à ouvrir la muqueuse pharyngée. À ce moment, l'extension forcée de la tête et l'élé- vation du maxillaire inférieur donnent un grand hiatus : il suffit alors de sectionner le voile du palais pour voir apparaître toute la voûte supé- rieure du pharynx, dont le sommet est occupé par le corps du sphénoïde. On n'est plus séparé de l'hypophyse que par les parois du sinus sphénoïdal. Cette voie n'a encore été étudiée que sur le cadavre : je ne crois pas qu'on l’ait déjà utilisée sur le vivant. Le traitement chirurgical a été appliqué à des tumeurs de l'hypophyse qui étaient accompagnées ou non d'acromégalie. Et, comme ce dernier fail n'est point rare, on s'est attaché à préciser les élé- ments du diagnostic dans les cas où l’on n'étail point guidé par ce syndrome saisissant. La question a été mise à l’ordre du jour au dernier Congrès de Budapest et le Rapport en à été présenté par von Frankl-Hochwart (de Vienne). S'appuyant sur les données de 155 autopsies, il a ainsi déterminé les principaux termes symptomatiques : somnolence, troubles psychiques, névrite optique, paralysie des muscles de l'œil, polyurie, polydypsie, anomalies de la température qui atteint parfois 41° sans qu'au- cune cause puisse en donner l'explication. L'aug- mentation de la selle turcique est appréciable à la radiographie. Les sujels souvent impuissants ou aménorrhéiques; ils présentent parfois la dégénérescence adipeuse de Frühlich. La symptomatologie de ces tumeurs se confond sur- tout avec celle des méningites de la base et la syphilis cérébrale. Certains acromégaliques opérés par von Eisels- berg, Hochenegg, Exner, ont tiré un bénéfice réel de l'intervention chirurgicale. Hochenegg a publié deux cas d’acromégaliques, chez qui l'ablation de l'hypophyse fut suivie de la régression de quelques sont petits, 70 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE symptômes : les extrémités diminuèrent de volume, l'écartement des mächoires fut moindre. Tous deux avaient des tumeurs de l'hypophyse. Exner enleva en décembre 1908, chez uneacromégalique de trente- quatre ans, un adénome malin de la pituitaire du volume d'une noix. On ne put savoir quelle avait été l'étendue même de l'opération; mais, après celle-ci, les extrémités s'amoindrirent, les circonfé- rences des doigts diminuèrent de 1/2 à 3/4 de cen- timètre, les dents se rapprochèrent, les douleurs de tête s'amendèrent; le corps thyroïde qu'on ne per- cevait plus réapparut et les poils qui avaient poussé sur la lèvre supérieure tombérent. Sur certains opérés non acromégaliques, les mêmes eflets ont été observés. Von Eiselsberg a pu enlever une tumeur kystique de l'hypophyse chez un jeune homme de vingt ans, avec dégénérescence adiposo-génitale, presque aveugle, infantile et obèse : un an après, la vision était améliorée, les maux de tète et les vertiges avaient disparu, les poils poussaient et le sens génésique s'éveillait. Le même chirurgien, sur un malade de vingt-sept ans, encore vivant aujourd'hui, enlevait il y à deux ans un angio-sarcome de la loge hypophysaire; sur un autre, un kyste de la piluitaire. Chez une jeune fille de seize ans, infantile, adipeuse, hémianopsique, souffrant de céphalées intolérables, et dont la selle turcique apparaissait sur la radiographie plus élargie et plus profonde que normalement, von Eiselsberg enleva un kyste pituitaire à liquide brun chocolat sans éléments de tumeur maligne. Une mé- ningite survint le huitième jour. La ponction lom- baire donna du pus franc, à bactéries rares et indé- terminées au premier abord. La culture produisit un bacilleanalogue au bacille fécalalcaligène. Quelques Jours après, une nouvelle ponction lombaire don- nait un liquide clair et la guérison s’ensuivit, ame- nant la disparition de la céphalée et l'amélioration considérable de la vision. C'est encore un homme de trente-six ans, avec hémianopsie bitemporale et atrophie optique, frigidité sexuelle et maux de tête atroces, à qui von Eiselsberg enleva quatre frag- ments d'un épithélioma hypophysaire et qui, quelques mois après, se trouvait dans un état satis- faisant. sa céphalée ayant disparu. Terminons la série de ces exemples par un cas opéré et très bien étudié par Lecène. Il peut être présenté comme la conclusion actuelle des tenta- lives chirurgicales sur l'hypophyse. Un homme de trente-huit ans, bien portant jusqu'à l’âge de vingt ans, avait été atteint vers cette époque de rougeole, puis de scarlatine, enfin de fièvre typhoïde. Cette dernière affection avait été suivie de troubles visuels intéressant surtout l'œil gauche, qui en deux ans fut perdu. En même temps qu'une cé- phalée rebelle apparaissait, le sujet prit de l'em- bonpoint el vit grossir ses pieds et ses mains. Tout cela durait depuis huit ans, quand un jour survint une crise épileptiforme, bientôt suivie d'autres crises et de troubles mentaux. L'hypertrophie des mains et de la face ayant fait songer à l'acromégalie, on procéda à une radiographie de la base du crâne, qui montra une augmentation des sinus frontaux et un allongement notable de la selle turcique. Une atrophie papillaire gauche, et à droite une hémia- nopsie nasale, enfin une atrophie testiculaire com- plétaient le tableau symptomatique. Après avoir fait préalablement une laryngotomie crico-thyroïdienne pour permettre une anesthésie chloroformique plus régulière et après avoir tam- ponné le pharynx pour empêcher le sang de tomber dans la trachée, Lecène pratiqua laborieusement une voie opéraloire aux dépens des os du nez, de Ia partie inférieure des sinus frontaux et de la paroi posléro-superieure des sinus sphénoïdaux. L'hypo- physe apparut alors dans sa loge et 5 gr. 7 de sa substance furent enlevés à la curette. Pendant trente-six jours, on n'observa que quelques accès de fièvre par intermiltences, puis, après plusieurs crises épileptiques, le malade mourut brusquement. Aucun des signes de l'acromégalie ne parut avoir régressé pendant ce temps. L'autopsie montra une tumeur hypophysaire à prolongements multiples intracraniens. Le nerf optique à gauche était dé- truit; le droit était soulevé par la masse néopla- sique, mais d'aspect normal. Lecène évalue à 20 grammes environ le poids restant de la tumeur hypophysaire, que l'examen histologique donna comme un épithéliome’ du lobe antérieur glandu- laire. Cette opération lui a montré que la voie transna- sale avait certains avantages, mais aussi de graves inconvénients. Elle établit une communication plus ou moins large entre la partie restante de l'hypophyse et les fosses nasales, d'où le danger permanent d'une infection. En outre, il est impos- sible de savoir exactement l'étendue de l’ablation que l’on pratique et le chirurgien agit nécessaire- ment à l’aveuglette dans un champ opératoire très profond et très restreint. En outre, comment savoir s'il s'agit d’une hypertrophie adénomateuse ou autre de l'hypophyse ou d’une tumeur ayant envahi la glande et s'étant déjà propagée au cerveau? Lecène. après une critique pleine de bon sens et de prudence sur les bienfaits plus ou moins hypothé- tiques de l'intervention, exprime la crainte que, par suite de la difficulté d'explorer convenablement la région hypophysaire, la chirurgie de la pituitaire soit encore pendant longtemps réduite aux risques d’une «expérience sur le vivant ». A défaut du traitement chirurgical, on a pensé à utiliser les rayons X comme moyen thérapeutique. D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 71 Déjà la radiographie était utilisée pour préciser le diagnostic. Les tumeurs hypophysaires, qu'elles aient retenti ou non sur le squelette en déterminant l'acromégalie, agrandissent presque toujours la selle turcique. La radiographie du crâne montre donc les déformations osseuses localisées, surtout quand les épreuves sont belles. À ce point de vue technique, des progrès sont sans cesse obtenus, el tout récemment Toupet et Infroit déterminaient les meilleures conditions de la pose àréaliser: pour avoir un résultat très net, il faut que la selle lurcique soit perpendiculaire à la plaque et que le “yon normal passe par la selle. C'est surtout quand le développement de la lumeur hypophysaire est ascendant qu'elle n'est plus justiciable d'une tentative opératoire. Béclère, dans des cas analogues, à tenté la radiothérapie. Chez une malade présentant des troubles visuels consécutifs à une tumeur de l'hypophyse, il aobtenu une amélioration de la vision, avec lecture possible et la récupération d'une partie du champ visuel, et Gramegna à, de son côté, appliqué les rayons X par la voie buccale, profitant de ce que les parois de la selle turcique sont généralement amincies dans les tumeurs hypophysaires et de ce que la présence des “cavités des sinus sphénoïdaux diminue la résistance à la pénétration radiaire. Quelquefois même, la glande pituilaire peut refouler les parois osseuses sous la muqueuse rhinopharyngée. À deux reprises, il obtint, chez une malade acromégalique avec neurorétinite bilatérale et céphalée intense, la régression des troubles visuels et des douleurs de tète. Malheureusement, plus tard, la maladie con- tinua son évolution progressive. Il nous reste à dire quelques mots du traitement opothérapique hypophysaire. Les extraits de la glande, et surtout la poudre d'hypophyse desséchée, ont été employés soit dans les affections de l'hypo- physe même, soit dans diverses maladies. La poudre d'hypophyse est administrée par la voie buccale, en cachets contenant, selon les besoins, de 5 à 50 centi- srammes. Les doses quotidiennes ont été très variables : de 0 gr. 10 à 2 gr., et quelquefois conti- nuéespendantplusieurssemaines sans interruption. Renon et Delille qui, dès 1906, ont fait des essais d'opothérapieen employant la poudre totale d'hypo- physe de bœuf à la dose quotidienne de 0 gr. 20, ont remarqué une action générale. Elle porta sur le pouls, qui fut ralenti; la tension artérielle augmenta, le sommeil revintetl’appétitfut stimulé. Ils obtinrent des résullats encourageants dans le goitre exophtalmique et dans la fièvre typhoïde, même avec myocardite; nuls dans la tuberculose à marche chronique. Hallion et Carrion ont rapporté un cas d'application de l'opothérapie hypophysaire par Parhou et Urechie à la maladie de Parkinson. On put obtenir la disparition de la sensation di chaleur, des sueurs et, par suile, de la soif et mème une atténualion du tremblement continu qui agite ces malades. Des effets généraux portant surtout sur la circula tion ont été obtenus par celle médicalion dans la fièvre typhoïde, la grippe, la pneumonie (Azam), la tuberculose (Parisot), les cardiopathies (Tierotoli), etc. Dans la maladie de Basedow, Rénon a observé très tôt, dès le cinquième jour après l'institution du traitement. une amélioration du tremblement, des troubles digestifs et des troubles vasculaires, mais ce n’est que vers le quinzième jour que la tachy- cardie est influencée. Dans un cas, après 20 jours d'ingestion quoti- dienne d'hypophyse de bœuf, à la dose de 0 gr. 30, le volume du corps thyroïde diminua et l'exoph- talmie même régressa. Dans l’acromégalie, les résultats sont variables : les uns n'ont obtenu que des effels nuls; d'autres, au contraire (Zannoui, Thaverski), ont constaté des améliorations. Enfin, Delille, qui a consacré récemment à l'hÿpo- physe une monographie très complète, admet que l'extrait possède un rôle antiloxique. Il insiste également sur l'association presque constante des lésions pituitaires avec celles d'autres glandes, telles que la thyroïde, les surrénales, les glandes géni- tales, ete., et montre le bénéfice que peut, dans cer- tains cas, apporter la combinaison des traitements opothérapiques. IL. — Tuyuus. Nous sommes habitués à considérer des organes qui persistent et fonctionnent pendant toute la vie; il s'agit ici, au contraire, d’un organe qui, bien qu'apparaissant déjà dans les premières semaines du développement de l'embryon, progresse jusqu'à un certain moment de la croissance, puis régresse vers la puberté, s’atrophie et disparaît, si bien qu’à l’âge adulte et plus tard on ne le trouve plus qu'à l’état de traces le plus souvent inappréciables. Ce n'est point la seule formation de ce genre dans l'organisme. On connaît des groupements histolo- giques ou des cellules individualisées qui sont dans le même cas, mais on ne connait guère que le thymus qui ait l'aspect macroscopique d'un or- gane : et c’est une glande qui, chez certains mam- mifères, acquiert un volume relativement énorme. Le ris de veau de nos tables en donne une idée. Parvenu à son développement normal, le thymus est compris dans une sorte de sac fibreux très solide, sans adhérences fermes avec le sternum en avant, mais qui se confond intimement en haul avec les aponévroses du cou et les gaines caroti- 12 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE diennes, en bas avec le péricarde et les gaines des gros vaisseaux de la base du cœur. Les deux lobes, inégaux et souvent accolés, qui constituent la glande sont ainsi contenus dans une capsule dont il est facile de les énucléer. En avant, l'organe se trouve protégé par le sternum, dont il est assez fréquemment séparé par une languette pulmonaire ; mais à la base du cou il s'élève, au-dessus du bord osseux, vers le corps thyroïde, auquel ses deux cornes Supérieures sont reliées par un cordon fibreux. Sa situation le met en rapport avec des organes d'importance majeure, tels que la veine cave supérieure et le trone brachio-céphalique gauche. Rieffel et Le Mée, dont l'étude récente a rectifié quelques points de l'anatomie du thymus, décrivent le lobe gauche comme plus antérieur que le droit, qu'il recouvre partiellement. Dans un tiers des cas, la face postérieure du thymus s’en- fonce entre la trachée et la carotide et prend con- tact avec le nerf récurrent et l’œsophage. Une fois sur cinq, le thymus est en contact direct avec le corps thyroïde, ou au moins il lui est uni par des tractus conjonctifs plus ou moins làches et des lobules glandulaires. À droite, le thymus descend au niveau du troisième espace intercostal; à gauche, il va jusqu'à la cinquième côte et souvent atteint le diaphragme en formant une languette pourvue de quelques éléments glandulaires. Le phrénique et le nerf cardiaque inférieur droits pas- sent derrière la glande; le phrénique gauche passe à côté du lobe gauche et y laisse sa trace. La glande est nourrie par une artère, qui n'émet hors d'elle que des ramuscules destinés à la thyroïde et qui s'atrophie en même temps que le thymus régresse. A la naissance, le poids du thymus est d'environ > à 6 grammes. Il augmente générälement jusqu’à trois où quatre ans, mais on n'est pas d'accord sur l'âge auquel il commence à régresser. Les uns admettent le terme précédent, les autres le repor- tent à huit, dix, douze, quatorze el même vingt ans. D’ordinaire, à vingt-cinq ans il à disparu, mais il en reste souvent des traces que le micro- scope peut déceler jusque dans la vieillesse avancée. Les deux lobes du thymus sont formés d’un certain nombre de lobules de forme pyramidale ou mieux polyédrique, par pression réciproque. Les lobules sont implantés sur une sorte de cordon central fibreux. Chacun d'eux est segrnenté par des cloisons conjonctives qui entourent des follicules. Outre ces deux grands lobes, Tixier et M! Feldzer ont récemment décrit de petites glandules thymi- ques accessoires, au nombre de deux ou trois, disposées à la périphérie de la capsule ou placées dans une sorte d’appendice. Depuis la période initiale de son apparition em- bryonnaire, le thymus reste en évolution constante. Au début, dans les premières semaines de la vie fœtale, les deux diverticules, rudiments de ses lobes, qui naissent de la région pharyngée, forment un canal bordé de belles cellules épithéliales polyé- driques, qui se multiplient par caryocinèse. Pen- dant cette période, l'organe est purement épithélial; mais très tôl, dès la douzième à la quinzième se- maine, la plus grande partie de ses cellules subis- sent des modifications dans le sens de leur divi- sion caryocinétique. Elles évoluent non plus vers le type des cellules épithéliales, mais vers le type lymphoïde, pendant que le tissu conjonctif se vas- cularise. Le lobule thymique, quand il est bien formé, n’est qu'une agglomération de follicules thymiques. Chaque follicule est composé d’une coque épaisse, corticale, de tissu lymphoïde enfermant une sub- stance médullaire faite de cellules épithéliales. Celles-ci sont claires, souvent volumineuses et d’un aspect particulier.Leur groupement apparaîtcomme caractéristique et on l'appelle corpuseule de Has- sall. Ces corpuscules sont constitués par des cel- lules très variées : les unes périphériques, aplaties, disposées en écailles et ayant subi des transforma- tions diverses (graisseuse, calcaire, colloïde ou pigmentaire) ; les autres centrales, sphériques avec de gros noyaux. Plus tard,au moment de la régression du thymus, le tissu lymphoïde est remplacé par un tissu grais- seux, au milieu duquel se trouvent encore quelques corpuscules de Hassall entourés de leur coque lymphoïde, mais ceux-ci finissent par se raréfier el disparaitre. Rien n'est moins certain que les attributs de cette glande. On ne sait le rôle dévolu à ses diverses cellules. Etant donné leur aspect caractéristique, les corpuscules de Hassall ont été supposés les plus importants. Cependant Lucien et Parisot se sont élevés contre cette idée. Ils ont trouvé que le nombre de ces corpuseules était d'autant plus réduit que le thymus était plus développé et dans une période plus active : ils pensent donc qu'ils ne constituent pas l'élément glandulaire essentiel ou qu'ils ne représentent que des formes cellulaires d’involution. Ils rapprochent le thymus des organes lymphoïdes et semblent dénier la spécificité de son action. L'hypothèse la plus plausible qui ait été faile jusqu'ici sur la fonction du thymus le donne comme étant destiné à s'opposer par sa sécrétion à la calcification excessive des os : ce serait un régulateur de l’ossi- fication du squelette. Aussi le thymus disparait-il quand son rôle s'éteint, après la puberté. Du reste, ce sont les inconvénients, les dangers de l'hyper- trophie ou la persistance anormale de cette glande D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 73 bien plus que ses fonctions réelles qui ont attiré l'attention sur cet organe, Le cas le plus saisissant est celui de l'enfant d'un an ou deux, plein de santé, qu'on couche un soir et qu'on retrouve mort le lendemain matin. Quand on peut assister au dénouement, on voit que la mort, dans bien des cas, survient sinon brusque- ment, au moins très rapidement. Ces observations sont assez nombreuses chez les nourrissons et les jeunes enfants. Prenons-en quelques-unes parmi les plus récentes : Lund trouve, chez un enfant d’un mois, mort à peu près brusquement, un thymus énorme, du poids de 20 grammes, et mesurant 6 centimètres de hauteur et 8 centimètres de lar- geur. Les poumons étaient parsemés d'ecchymoses punetiformes. Stewart Smith, chez un enfant de huit mois, mort en quelques minutes d’une brusque allaque convulsive avec cyanose, trouve un thymus de 28 grammes. Huismans, chez un enfant de six mois, pris soudain d'un ràle pendant son sommeil et mort une demi-heure après, mesure un thymus haut de 3 cm. 5 sur 3 centimètres de largeur et 3 cm. à d'épaisseur, entièrement caché dans le médiastin antérieur. Un autre enfant de six mois, qui était tombé dans le coma et mort rapidement, avait un thymus de 8 centimètres sur 5 centi- mètres et 3 em. 5. Iuismans insiste sur le fait que, chez ces enfants, les voies aériennes étaient parfai- tement libres. Les phénomènes de cyanose avaient été pourtant très accusés et des ecchymoses nom- breuses ponctuaient le péricarde et les plèvres. Il suppose que, dans un brusque mouvement d'exten- sion de la tête, pendant le sommeil, la veine eave supérieure avait été comprimée entre le thymus hypertrophié et la colonne vertébrale. Mery et Par- lurier ont relaté une autopsie où le thymus était énorme et la congestion vasculaire intense. C'était chez un enfant dyspnéique, à qui le tubage n'avait, apporté aucun soulagement et qui mourut trente beures après la trachéotomie. L'hypertrophie du thymus se manifeslait ici pendant la vie par une voussure de la région sternale et parasternale, très visible pendant les fortes expirations. Barbier à attribué à la compression de la trachée par le thymus hypertrophié quatre cas de morts d'enfants de trois à dix-huit mois. Les rétrécissements de la trachée que Marfan a étudiés et divisés en congénitaux et acquis, aigus et chroniques, continus et paroxystiques, n'exis- tent guère que chez les très jeunes enfants, en rai- son de la mollesse des anneaux cartilagineux de la trachée. À cet âge, le thymus n'a pas encore suivi son involution. Chez un garcon de douze ans, atteint de diphtérie maligne, Marfan trouva, non des fausses membranes trachéales comme auraient pu le faire supposer les signes cliniques, mais un thymus très volumineux comprimant la trachée au niveau de la partie cervico-thoracique. Ce thymus très congestionné, du fait de l’intoxicalion diphté rique probablement, portait néanmoins des lésions d'hyperplasie ancienne. On voit combien sont variables le volume et le poids de ces thymus pathologiques. Dans quelles limites peut-on les considérer comme anormaux ? Pour du Castel, tout thymus dont le poids dépasse 8 grammes doit étre tenu pour hypertrophié. Sui- vant cet auteur, le rachitisme serait une des rai- sons de cette hypertrophie. Il en favoriserait au moins la persistance. Cependant, le thymus rachi- tique excède rarement 15 grammes. L'hypertrophie thymique est parallèle à la réaction des organes lymphoïdes; elle coincide avec l'hypertrophie de la rate et des ganglions. Remarquons encore, à ce propos, la coexistence des lésions du thymus et de celles du système osseux. K. Basch, en enlevant à de jeunes chiens et lapins le thymus, a observé que leur développement général était entravé et que cet arrêt frappait surtout le squelette. Si l'on fait alors des fractures expérimentales, on constate que le cal est beaucoup plus petit que chez un animal témoin. Cependant, ces phénomènes ne surviennent qu'un mois environ après la thymectomie. Il semble donc que le produit de la sécrétion thy- mique persiste assez longtemps dans l'organisme. Ranzi et Tandler ont obtenu des résultats analogues chez deux jeunes chiens, qui, après la thymectomie, ont présenté un arrêt de la croissance avec mol- lesse des os, titubation et une dentition retardée. Les données précédentes ont recu à diverses reprises leur application en thérapeutique chirur- gicale : d'OElsnitz et Prat purent, par l'ablation de fragments de thymus, faire cesser des accès de suf- focalion chez un enfant de treize mois. Veau a récemment opéré deux cas. Dans l’un, l’ablation de la partie supérieure du thymus, grosse comme une noisette et pesant 2 grammes, amena chez un enfant la disparition d'accès de suffocation avec cyanose. Par contre, dans le second, l’ablation de tout le lobe gauche et de la moitié du lobe droit (% gr. 55) fut inefficace pour soulager des phéno- mènes asphyxiques accompagnés de tirage et de stridor : d’où le conseil de ne pas rapporter au thymus tous les accès de suffocation. Certains sont dus, en effet, à une malformation épiglottique. Le plus souvent, il s’agit de compression directe de la trachée et surtout des vaisseaux par le thy- mus. Ceci ressort d'un cas observé par Deneke. C'était un enfant de cinq ans, d'abord sujet à des syncopes et à des accès de cyanose après avoir pleuré; plus tard, la région sus-sternoclaviculaire se gonfla et les veines superficielles devinrent turges- centes. L'enfant ne présentait ni troubles respira- rs D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE toires, ni suffocation. Soupconnant une hypertrophie du thymus, Deneke entreprit l'opération, qui lui montra, dans l’espace prétrachéal, la saillie des deux lobes du thymus débordant le sternum de 1 à2 cen- timètres. Il put énucléer les deux lobes, qui avaient les dimensions d'un œuf de pigeon. La guérison fut ainsi obtenue. Il y avait dans ce cas plus de compression veineuse que de compression tra- chéale. Pour d’autres auteurs, la compression ner- veuse jouerait également un rôle; c'est ainsi que Robinson attribue les morts subites à la paralysie du diaphragme consécutive à la compression du phrénique ou des rameaux du pneumogastrique. Chez l'adulte même, la persistance du thymus peut déterminer des morts subites, surtout pen- dant la narcose chloroformique. Capelle n’a pas compté moins de 79 fois la persistance du thymus sur 100 morts après l'opération du goitre exoph- talmique. Or, ces morts ont toujours lieu dans des conditions identiques : elles arrivent soit au cours de l'opération, soit dans les quelques heures qui suivent, vingt heures au plus. On attribue ces désastres au collapsus cardiaque, peut-être dû à une auto-intoxication suraiguë par hyperthymisa- tion : pourtant l’action de la sécrétion thymique passe pour être trop lente pour produire des effets si rapides. Lucien et Parisot ont recherché les relations que pouvait avoir le thymus avec les autres glandes à sécrétion interne, en particulier avec le corps thyroïde. Nous venons de voir combien sont fré- quents les thymus volumineux et persistants chez les malades atteints de goitre exophtalmique. Cette persistance n’est pas constante et, quand elle existe, on ne peut établir une proportion entre l'acuité de la maladie de Basedow et l'importance de l'hypertrophie thymique. L'ablation du corps thyroïde semble précipiter la régression du thymus, et réciproquement l'ablation du thymus diminue le poids de la thyroïde. L'opothérapie thymique n'a que des effets indifférents dans le traitement du goitre exophtalmique. Lucien et Parisot arrivent à cette conclusion qu'il n'existe pas de rapports appré- ciables entre les deux appareils glandulaires. Néan- moins, la régression du thymus observée après l’ablation du corps thyroïde est appréciable histolo- giquement. Worms et Pigache ont, en effet, obtenu par la thyroïdectomie chez de jeunes animaux des lésions profondes de dégénérescence du thymus, caractérisées par une régression rapide des lobules, la disparition des corpuscules de Hassall et le développement du réticulum conjonetif. L’attention donnée au thymus a contribué à aug- menter les notions anatomo-pathologiques que l’on possédait sur cet organe. C'estainsi que la tubercu- lose du thymus était si rare qu'elle avait été niée. Or, cette année même, Tixier et M! Feldzer en ont décrit cinq observations. l'une d'elles concerne un nourrisson d'un an, dont le thymus était parsemé de granulations caséeuses et de cavernes. D'autre part, M. Simmond, chez des hérédo-syphilitiques, y a rencontré le tréponème. Le thymus peut encore être le siège de tumeurs variées. EL celles-ci peu- vent se développer très tardivement dans la loge thymique. Achard el Paisseau ont.observé un de ces cas chez une femme de 71 ans. Histologique- ment, c'était un épithéliome pavimenteux lobulé, contenant des corps concentriques, sortes de globes cellulaires qui ont certaines analogies avec les cor- puseules de Hassall et qui sont caractéristiques de l'épithélioma thymique. Enfin, il nous faut ajouter qu'à défaut d'intervention chirurgicale, on peul encore agir sur un thymus hypertrophié ou sur une tumeur thymique au moyen de la radiothérapie. Les expériences d'Aubertin et Bordet ont, en effet, démontré que, soumis aux radiations de Rœntgen, le thymus subit une raréfaction de son tissu lym- phoïde, qui retourne à l'élat de tissu conjonetif indifférencié, puis passe à l’état fibreux. Lenor- mant, dans une excellente étude qu'il fit récemment. dans le Journal de Chirurgie (juin 1909), a pu re- later deux cas d'hypertrophie thymique, compli- quée d'accidents respiratoires, où Friedlander et Myers ont obtenu par la radiothérapie de bons résultats. D' A. Létienne. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 75 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Lebon (Ernest), Agrégé de l'Université. — Savants du jour : Henri Poincaré (/iographie et Biblio- graphie analytique des écrits). — 1 fascicule gr. in-8 de 80 pages. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. L'œuvre de M. Henri Poincaré revêt un éclat incom- parable, tant par l'extraordinaire variété des études et des travaux que par la maîtrise égale et vraiment souveraine avec laquelle l'illustre savant à pénétré dans tous les domaines de la Science. Une biblio- graphie complète en était devenue indisp-nsable : c’est à la constituer que s'est appliqué M. Ernest Lebon, rendant ainsi aux chercheurs et aux savants un service de prix dont les uns et les autres lui seront reconnais- sants. Timerding (H.-E.), Professeur à l'Universilé de Strasbourg. — Geometrie der Kräfte (GÉOMÉTRIE DES FORGES). — 4 vol. in-8° de 381 pages avec 27 figures. (Prix : 20 fr.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1909. La « Géométrie des forces » se propose d'étudier la motion de force, uniquement dans son développement mathématique. Elle constitue une branche auxiliaire de la Mécanique, au même titre que la Géométrie du mouvement et la Géométrie des masses ; elle forme, en mème temps, un lien étroit entre la Géométrie synthé- tique et la Mécanique. Le nom de Geometrie der Kräfte est dû à Plücker; mais on trouve les premiers germes de cette théorie dans la Nouvelle Mécanique de Vari- gnon et dans les Z/éments de Statique de Poinsot. Son importance a été reconnue par Môbius. Les contribu- tions modernes les plus importantes sont dues à Sir Robert Ball. Aujourd'hui, la Géométrie des forces forme une véri- table branche des Mathématiques, comme cela ressort très nettement de cet intéressant exposé de M. Timer- ding. Son étude se fonde, d'une part sur la théorie des vecteurs, d'autre part sur les principes de la Géomé- trie réglée. L'auteur consacre d’abord cinq chapitres au Calcul vectoriel, en se rattachant aux travaux de Grassmann, «ont les opérations (produit intérieur et produit extérieur) sont fort simples et permettent d'établir les notions fondamentales avec beaucoup de précision. Il s’en sert pour introduire et définir les notions de moment, de mouvement de rotation, de force et de dyname. Toutefois, dans la suite, M. Timerding fait peu usage des opérations vectorielles. Les partisans de ces méthodes le regretteront sans doute ; mais l’auteur désire, dit-il, ne pas trop s'éloigner des méthodes habi- tuelles basées sur la Géométrie analytique et la Géo- métrie synthétique. Son exposé n'en constitue pas moins une intéres- sante introduction à l'étude de la Géométrie vecto- vielle et donne une forme très précise aux notions fondamentales dans lesquelles interviennent les idées de vecteurs et de moments. Dans les deux chapitres suivants, l'auteur étudie successivement les mouvements infiniment petits d'un solide invariable, les forceset leur travail, les dynames. Le huitième chapitre est consacré aux éléments de la Géométrie réglée : complexes et congruences linéaires et applications. Puis viennent les propriétés relatives à l'équilibre d’un système, la théorie de Ball, le cylin- droïde et l’'équivalence astatique. Dans le dernier cha- pitre, on trouve l’étude des mouvements d'un corps solide libre ou assujetti à des liaisons. L'exposé de M. Timerding est écrit avec beaucoup de clarté ; il est accompagné des principales indications bibliographiques permettant aux lecteurs de recourii aux mémoires originaux. H. FEeur, Professeur à l'Université de Genève. Vinsonneau (Jules), Zngénieur civil — La Route moderne. — 1 vo/. 11-89 de 199 pages avec 24 figures. (Prix : 6 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs: Paris, 4910. L'automobile soulève sur les routes une poussière malsaine aux dépens de leur durée. On réussit assez convenablement, en s’y pren int comme il faut, à sup- primer la poussière par le goudronnage. Ce dernier s'est montré insuffisant pour assurer la durée de la route, surtout depuis que les voitures sont munies de bandages antidérapants, dont les rivets entament la surface hydrocarburée de la chaussée. On ne mettra la route à la hauteur de la circulation nouvelle qu'en faisant pour elle ce qu'on a fait pour le chemin de fer, le jour où ses trains sont devenus plus lourds et plus rapides : augmenter la résistance de la voie. On yest arrivé en employant des rails plus lourds. Comment accroitre la résistance de la route? En coagulant celle-ci, non seulement à la surface, comme le fait le goudron superficiel, mais dans toute sa masse, comme le fera le goudron intimement mêlé à elle. C'est ce qui amène M. Vinsonneau à définir ainsi qu'il suit le principe fondamental de la route moderne. « La route théorique idéale est celle qui serait cons- tituée par des cailloux durs, réguliers, mis en place sans sable d'agglomération et réunis par une matière for- mant un liant résistant et élastique. Le tout doit être compressé à la charge de cohésion suffisante. » Il y a trois facons d'obtenir la route moderne : 1° l'ar épandage des matériaux à sec, le placement en étant fait au rouleau léger, l’arrosage au moyen de la goudronneuse mécanique, avant le cylindrage de cohésion. C’est à l’aide de ce procédé que M. Vinson- neau a fait ses premiers essai 20 Par épandage des matériaux, trempés sur place mécaniquement dans le goudron, par cylindrage de mise en place, enfin par cylindrage de cohésion. C’est la méthode que M. Vinsonneau préconise actuellement; 3° Par épandage de matériaux hétérogènes préparés et trempés dans une usine avant d’être amenés au lieu d'emploi, et mis en œuvre d’une facon spéciale. C’est le procédé employé par les Anglais avec le tarmac, com- posé de scories d2 hauts fourneaux concassées et satu- rées d'huile de goudron et autres produits. 11 donne de bons résultats, mais est trop compliqué pour être employé couramment. Il doit être réservé aux luxueu- ses chaussées des grandes villes ou de leurs abords immédiats. M. Vinsonneau évalue à Ofr. 45 l'augmentation du prix du mètre carré de rechargement goudronné de 7 centimètres d'épaisseur sur celui du mètre carré de recharsement ordinaire. Le premier durerait 7 ans, alors que le second n’en dure que 3. L'ouvrage expose les modes de construction et d’en- tretien de la route moderne, après avoir décrit le matériel que ces opérations nécessitent, notamment la goudronneuse Vinsonneau-Hédelin. Il donne aussi d'utiles renseisnements sur le gou- dronnage superficiel à chaud età froid, sur les chaussées en asphalte. ciment, pierre, bois, et sur le traitement antiseptique de ce dernier, pour lequel il a inventé, avec M. Marchal, un appareil de trempage. Le livre se termine par l'exposé des conclusions du je Congrès International de la Route, tenu en octo- 1 œ BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX bre 1908, et qui à mis à l'ordre du jour toutes les ques- tions intéressant cette dernière. L'étude de M. Vivson- neau constitue donc un document précieux. Il ne faut pas oublier que les entreprises de transports par auto- mobiles plus ou moins lourdes ne se développeront réellement que quand les routes pourront en assurer la circulation active. GÉRARD LAVERGXE, Ingénieur civil des Mines. 2° Sciences physiques Bouasse (H.), Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse. — Cours de Physique conforme aux programmes des certificats et de l'agrégation de Physique. Tome V : Electroptique. Ondes hert- ziennes. — À vol. grand 1n-8° de 426 pages. (Prix : 14 fr.) Ch. Delagrave, éditeur. Paris, 4910. En établissant des liaisons, souvent inattendues et très intimes, entre des chapitres de la Physique autre- fois complètement indépendants les uns des autres, la science moderne tend de plus en plus à ramener l'étude de tous les phénomènes à celle du mouvement vibratoire d’un milieu universel. Au commencement du siècle dernier a été établie la communauté d'origine des phénomènes électriques et magnétiques d'une part, et celle des phénomènes calo- riliques et optiques d'autre part. La ligne de démarcation entre l'Electricité et l'Op- tique s’est maintenue plus longtemps, mais elle a dû céder à son tour devant les efforts accumulés depuis plus d’un demi-siècle par les physiciens. Cette pénétration réciproque à amené un boulever- sement dans la manière ancienne d'envisager les choses : elle à imposé un remaniement dans leur mode d'exposition. C’est précisément cette évolution scientifique qui a permis à M. Bouasse de présenter le cinquième volume de son cours de Physique sous le titre : Zlectroptique. Ondes hertziennes. Après un premier chapitre de généralités sur les équations fondamentales relatives à un milieu isotrope transparent, l’auteur aborde la production des ondes hertziennes. En étudiant leur propagation, leur ré- flexion, leur réfraction, la formation des ondes station- naires, etc., il familiarise le lecteur avec cette idée que, tout en exécutant des expériences qui appar- tiennent en propre au domaine de l'Electricité, il est amené à en formuler les résultats dans un langage qui, pour les physiciens des générations antérieures à la nôtre, semblait réservé à l’Optique. C’est après cette étude que se place tout naturelle- ment un exposé, à la fois très simple et très clair, de l'application des principes précédents à la télégraphie sans fil, avec l'examen des questions de syntonie, d'é- mission dirigée, etc., si importantes pour l'avenir de ce nouveau mode de transmission des signaux à distance. L'étude de la propagation d'un ébranlement électro- maunétique dans un milieu anisotrope conduit l’auteur à des formules qui conviennent également bien aux phénomènes de la double réfraction lumineuse, et permettent de discuter les diverses théories émises sur celle-ci. Après avoir montré qu'elles sont mathémati- quement équivalentes, il fait un exposé très complet des faits, suivant les vues de Fresnel qui méritent de rester classiques en raison de leur simplicité. Dans les chapitres suivants sont étudiés en grand détail : la production des vibrations elliptiques par double réfraction, les brillants phénomènes donnés par les lames cristallines en lumière polarisée, la réflexion sur les corps transparents, la théorie électromagné- tique des corps absorbants et celle de la dispersion accompagnée des théories modernes sur la constitution du Soleil. Sous le titre : « Phénomènes lumineux dus au mou- vement » sont éludiés successivement la propagation d'une onde dans un milieu en mouvement, l’entraine- ment des ondes, l'influence du mouvement de la Terre sur les observations optiques, l’aberration, le principe de Doppler-Fizeau, puis S vitesse de la lumière dans les divers milieux, avec la question de la dispersion dans le vide. Enfin, après un exposé de la dynamique des électrons et une étude de l'émission lumineuse et du phénomène de Zeeman, un dernier chapitre intituté : « Thermo- dynamique du vide » comprend particulièrement l'étude de la « température de l’espace », de la pression de radiation et des transformations réciproques des radiations. En résumé, le titre même des chapitres indique une fusion très intime des manifestations lumineuses et électriques et l'adaptation d'un langage commun à leur interprétation. Tous les physiciens sauront gré à M. Bouasse d’avoir rassemblé sous une forme aussi nette tant de questions jusqu'ici éparses, et d'en avoir formé un ensemble méthodiquement coordonné et par- faitement homogène. E. CoLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Plimmer (R. H. Aders), Professeur adjoint de Chimie physiologique à University College, Londres. — The chemical constitution of the Proteins. — 2 vol. in-8°, de 100 et 66 pages. (Prix : T fr.) Longmans, Green et Ce, éditeurs. Londres, 1909. La collection anglaise des monographies biochimi- ques publie sous ce titre, et en deux fascicules, un exposé fort intéressant et tout actuel, dû à un biochi- miste exercé, élève d'Emil Fischer, M. R. H. Aders Plimmer. I. Après une introduction consacrée à une tentative de classification des matières albuminoïdes, à l'énumé- ration ainsi qu'aux formules de constitution de leurs dérivés amidés dégagés par l'hydrolyse acide, l'auteur expose en détail les méthodes suivies par Fischer pour séparer chacun de ces produits : directement, par cristallisation en liqueur neutre, la tyrosine, la cys- tine et l'acide diaminotrioxydodécanoïque; puis, par la voie aujourd'hui classique de l'éthérification, les autres acides monoamidés (gl\cocolle, leucine, proline, phé- nylalanine, acides aspartique et glutamique, etc.) ; enfin, par les procédés de Kossel, Kutscher, Platten et leurs élèves, les diamines (arginine, lysine, etc.). C'est une bonne synthèse des nombreux travaux publiés au cours de ces dernières années; ils sont résumés dans des tableaux destinés à montrer la répartilion des acides amidés dans un grand nombre d'albumines choisies dans les principaux groupes. Dans un second chapitre, l’auteur décrit en détail chacun des acides amidés qui entrent dans la consti- tution des protéines et expose, à côté des modes de synthèse, les rapports qui permettent de les rattacher les uns aux autres ou d'établir des relations entre eux et certains corps connus. On ne lira pas sans profit le paragraphe consacré à l'histidine, ce composé sicurieux, un peu troublant même, et qui peut-être (ce n’est pas M. R. H. Aders Plimmer qui parle) ne préexiste pas dans la molécule protéique. Signalons la théorie ingé- nieuse sur la formation du noyau de l’imidazol aux dépens du glucose ou de l'aldéhyde glycérique avec la formaldéhyde, en présence de l'ammoniaque; sur la condensation du méthylimidazol avec le glycocolle pour donner l'histidine, avec l’urée pour former la xanthine, etc#elc. La proline, l'oxyproline, le tryptophane sont l’objet d'une étude également bien documentée que termine un chapitre sur le pouvoir rotatoire des amino-acides, la production des stéréoisomères, leurs transforma- tions, etc. Des tables donnant le pouvoir rotatoire des principaux acides amidés dans les divers dissolvants, en même temps que des indications sur les auteurs qui ont, les premiers, décrit ces dérivés, complètent heu- reusement ce petit volume, enrichi d'un index biblio- graphique étendu, bien divisé et où l'on retrouve l'indi- cation de la plupart des mémoires (plusieurs centaines) publiés dans ces dernières années. 6 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 77 II. Le second fascicule est consacré tout entier à la synthèse des polypeptides et aux tentatives de synthèse des protéines. C'est dire la place qu'y occupent les tra- vaux de Fischer et de son Ecole. Sans exclusivisme cependant ; car, au début, l'auteur rappelle les tenta- tives plus ou moins heureuses de Schützenberger, de Grimaux, de Schiff ; chemin faisant, il n'a garde d'ou- blier les remarquables recherches de Curtius, par le procédé des azides, les récents travaux de Siegfried sur la soudure de l'acide carbonique et des amino- acides, leur transformation en acides carbaminés et ultérieurement en produits de condensation, etc. Mais c'est naturellement aux polypeptides qu'est consacré le chapitre le plus important ; c'est un exposé complet et bien mis au point des méthodes imaginées par Fischer et connues aujourd'hui de tous les chi- mistes : la formation des anhydrides condensés aux dépens des éthers et la production par hydratation de complexes acides plus élevés (glycylglycine, etc.) ; la condensation, après éthérification, des acides aminés avec les chlorures acides halogènés et la substitutiôn. par l’ammoniaque, de l’'amidogène à l'halogène ; enfin la méthode plus générale des chlorures d'amino-acides, préalablement carbéthoxylés ou non, traités par les amino-acides, eux-mêmes éthérifiés, et la production subséquente de termes de condensation de plus en plus élevés, les polypeptides. Ce chapitre se termine par des considérations sur la structure des polypeptides etles particularités stéréoiso- mériques de leur configuration. Vient ensuite une des- cription détaillée de leurs propriétés physiques et chi- miques, ainsi qu'un exposé des travaux de Fischer et de ses élèves touchant la préexistence des complexes poly- peptiques dans la molécule protéique et la possibilité de les retrouver parmi les produits d’hydrolyse. Enfin, une large place est faite à l’action si curieuse et si spécifique des enzymes sur les polypeptides. Cette dernière partie est la plus intéressante par les aperçus qu'elle a ouverts sur la chimie des ferments solubles et les singularités apparentes de leurs actions chimiques. Comme le premier fascicule de l'ouvrage, le second est pourvu d'un index bibliographique très complet, qui évitera aux lecteurs bien des recherches dans les recueils de Mémoires originaux. Et c’est, du reste, ce qu'on peut dire à bon droit de tout l'ouvrage, clair et bien ordonné, de M. R. H. Aders Plimmer. D: L. HuGouNENO, Professeur à la Faculté de Médecine de Lyon, Correspondant de l’Académie de Médecine. Hinard (G.), Chimiste. — Analyse des Laits. — 4 vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aïde- mémoire. (Prix : 2 fr. 50.) Masson et C'°, éditeurs. Paris, 1909. . Voici un petit volume que nous avons lu avec plai- sir et dont nous sommes heureux de faire l'éloge. On voit que l'auteur connaît parfaitement, par une longue pratique du laboratoire, le sujet qu'il s'est proposé de traiter, et qu'il est qualifié pour présenter et recom- mander les méthodes d'analyse du lait les plus faciles d'exécution et les plus exactes dans les résultats. Nous devons savoir gré à M. Hinard de condamner certains appareils fantaisistes et surannés, tels que le crémomètre, el aussi ces calculs ridicules d'écrémage et de mouillage au moyen desquels on indique à un dix-millième près la quantité d'eau ajoutée ou la quan- tité de beurre soustraite à un lait dont on ne connait pas la composition initiale. L'auteur nous donne un procédé intéressant de dosage de l'extrait sec du lait avec l'aide de l'addition préalable de quelques gouttes de formol à l'échantillon à dessécher ; il signale, en passant, l'action retardatrice masser du formol sur la cristallisation du sucre de ait. Ce petit livre ne renferme pasla descriplion de toutes les méthodes d'analyse, mais seulement de celles que l’auteur a reconnues bonnes et pratiques, et le mode REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. d'exécution en est alors toujours très complètement et clairement exposé. En résumé, les chimistes trouveront dans la lecture de cet ouvrage des renseignement précieux et dans lesquels ils pourront mettre toute confiance. R. LE7É, Professeur à l'Ecole de Grignon. 3° Sciences naturelles Dauzat (Albert). — L'Italie nouvelle.— {1 vol. 21-16 de 381 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Fasquelle, éditeur. Paris, 1910. Etre dès vaincus, cela obscurcit parfois le jugement. La supériorité des Anglo-Saxons à paru, à beaucoup d'entre nous, article de foi, et pendant près de trente ans nous n'avons vu que la lumière qui venait du Nord. Une réaction, aussi heureuse que salutaire, se produit depuis quelques années, et l'étude de l'Italie commence à prendre en France la place à laquelle elle a droit. On ne se contente plus d'aller demander au pays de Dante et de Raphaël une vision d'Art et de Beauté, on le considère aussi dans son évolution actuelle, dans l'admirable développement de ses ressources. Le livre de M. Albert Dauzat est né de cette nouvelle pensée, livre nécessaire, livre qui, pour beaucoup, sera révé- lateur, et qui, à tous, fera mieux connaitre l'œuvre immense accomplie par le patriotisme italien, œuvre vraiment prodigieuse si l'on tient compte du petit nombre d'années qui se sont écoulées depuis l'époque du Aisorgimento. Certes, cet essor un certain nombre de Français le connaissent, mais combien, même parmi eux, eussent pu affirmer, sans hésiter, qu'en Italie la densité de la population est supérieure à celle de l’Alle- magne, et que le commerce extérieur se développe plus rapidement que celui de l'Allemagne et des Etats- Unis : il a doublé en dix ans, de 1897 à 1907. C'est cette renaissance économique et sociale, à laquelle on ne peut comparer que le relèvement de la France au lendemain de ses désastres, que M. Dauzat, bien connu déjà par ses travaux antérieurs, étudie en des pages dont l'intérêt ne se dément pas un seulinstant. De cette lecture une conclusion se dégage, saisissante : le développement continu d’un grand Etat moderne, qui açcroit chaque jour ses sources de richesse, et qui s'impose dès aujourd'hui à l'attention du monde. Certes, il subsiste dans:l'Italie actuelle quelques éléments de faiblesse, au premier rang desquels figure, dans le sud, « l’analphabétisme ». L'école n’est pas soutenue partout et par tous comme elle devrait l'être, et de récentes enquêtes, qui datent de quelques jours à peine, nous montrent les progrès qui restent encore à réaliser. Mais c'est là question de temps et de ressources, — les budgets italiens sont en excédent, — et l'on peut être assuré que nos voisins et amis, qui ont vaincu de bien autres difficultés, triompheront également de celle-là. Si nous avions une critique à adresser au livre si intéressant à tant d'égards qu'a écrit M. Dauzat, nous reprocherions à l’auteur, puisqu'il veut faire connaitre l'/tale nouvelle, et qu'il a dû ainsi en effleurer la vie politique, religieuse et sociale, de n'avoir pas com- primé deux ou trois chapitres de l'ouvrage, ceux qui concernent les langues et les dialectes, par exemple, pour donner un apercu de la Constitution et des prin- cipaux rouages du Gouvernement. Nous croyons qu'il eut été possible, sans faire un cours de droit constitu- tionnel, d'indiquer à grands traits, en une cinquantaine de pages, comment Île nouveau royaume a tenté de résoudre, par les dispositions — très libérales quoi qu'on prétende — de la loi des garanties, le difficile et si délicat problème des rapports de l'Eglise et de l'Etat; comment le système d'impôts adopté au delà des Alpes représente l'effort le plus considérable qui 1 Giovanni CenA : La Rinascita dei paesi devastati: Vuova Antologia, 1° janvier 1910. A. Curezut : La Scuola clementare e lo Stato : Nuova Autologia, 16 janvier 1910. BEL = 78 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ait été réalisé pour introduire un peu plus de Justice en matière fiscale; de quelles garanties — dont cer- tain pays qui nous touche pourrait faire son profit — le législateur a entouré le recrutement des magistrats ‘et leur indépendance; de quelle façon, enfin, la repré- sentation au Sénat des intérêts et des capacités, sans porter atteinte aux libertés essentielles, a été organisée pour corriger les écarts, toujours possibles, du suffrage populaire. Alors, l'étude de M. Dauzat eût été à peu près complète. Est-il besoin de dire que nous n'entendons nulle- ment, par ce léger reproche, diminuer la valeur, très grande, d'un ouvrage auquel nous souhaitons les nom- bréuses éditions qu'il mérite, et qui sera lu avec autant d'intérêt que de sympathie par tous ceux qui aiment l'Jtalie et qui font des vœux pour sa prospérité et sa grandeur, nécessaires au maintien et au développement de la civilisation. Lucien RoULLET CHÉRY. Hayes (W.-C.), Chef géoloque du Service géologique des Etats-Unis. — Handbook for Field Goelogists (MANUEL POUR GÉOLOGUES SUR LE TERRAIN). — À vol. in-16 de 159 pages avec 18 figures. (Prix : 8 fr.) John Willey and Sons, éditeurs. New-Yorx, 1909. Le Manuel de M. Hayes ne peut manquer de rendre de très réels services aux géologues qui sont appelés à faire une prospection ou à étudier l'importance et la valeur d'un gisement. Dop (P.), Docteur ès-Sciences, Chargé de Cours de Botanique à la Faculté des Sciences de Toulouse, et Gautié (A.), Docteur en Médecine, Préparateur a la Faculte de Médecine de Toulouse. — Manuel de Technique botanique ; Histologie et microbie vé- gétales (A vec une préface de M. le Professeur G.Bon- NIER, Membre de l'Institut). — 4 vol. de vin-534 pages, avec 137 figures. F. R. de Rudeval, éditeur. Paris, 1909. Nous sommes heureux de signaler l'apparition de ce livre, appelé à devenir un outil précieux pour les bota- nistes qui travaillent au laboratoire, soit qu'ils pour- suivent des recherches de science pure, soit qu'ils se préoccupent plus spécialement des applications de la Botanique à l’Agronomie, surtout la Pathologie et la Microbiologie agricoles, et aussi à la Médecine. Le « Dop et &autié » sera particulièrement précieux à l'étudiant qui s'initie aux recherches originales et qui éprouvait de réelles difficultés à réunir les élé- ments de technique opératoire qu'aucun traité fait par des botanistes pour des botanistes n'avait encore rassemblés à son usage. Certes, il existe de savants et volumineux ouvrages où sont réunis, autant que pos- sible, toutes les méthodes et tous les procédés éclos avec tant d'abondance durant ces derniers temps, car, à notre époque de production intensive, chaque auteur crée un peu sa technique; mais le débutant s'y perd et ne sait comment choisir. MM. Dop et Gautié élaguent résolument et retiennent seulement un nombre res- treint de faits parmi ceux qui leur ont paru être les mieux consacrés, les plus nets ou les plus faciles à reproduire. Ce choix était.délicat et les auteurs ont su s’en tirer avec sagacité et compétence. La technique histologique a réalisé, dans ces der- nières années, des progrès très rapides en ce qui con- cerne surtout les Champignons, les Bactéries et les Algues; il faut reconnaître que c'est depuis peu de temps qu'on aborde assez couramment l'étude des élé- ments différenciés de la cellule des microorganismes. Il ya là tout un monde de faits épars dans les Mémoires originaux ; MM. Dop et Gautié ont su détacher les plus importants etles présenter en un faisceau bien ordonné; ïls n'y sont pas fous, mais nous aurions mauvaise grâce à nous en plaindre, car manque de place ou prudence obligeait les auteurs à serrer leur texte. Ce sont sans doute ces raisons qui ont déterminé les auteurs à passer sous silence (bien que parlant de la métachromasie) le groupe de corps désignés sous le nom de « corpuseules métachromatiques », dont la nature est encore insuffisamment déterminée, il est vrai, mais qui, par suite de leur abondance et de leur fréquence, se placent au premier rang de ceux qui sollicitent l'attention dans toute étude cytologique des organismes inférieurs !. MM. Dop et Gautié, ayant en vue d'écrire un Manuel de Technique botanique générale, c'est-à-dire concernant tous les groupes de plantes : végétaux infé- rieurs et végétaux supérieurs, n'ont pas séparé de leur objet la «technique microbiologique », à laquelle ils consacrent plus de la moitié du livre. Cela nous semble absolument justifié et contribue à donner à leur travail une allure bien moderne. C'est ainsi, par exemple, qu'il est nécessaire de connaître à la fois la technique cyto- logique et la technique bactériologique pour pousser plus à fond qu'on ne l’a fait la question si pleine d'avenir des réactions mutuelles de l'hôte et du para- site ou commensal dans les questions d'associations parasitaires où symbiotiques. Si nous analysons les matières traitées dans cet ouvrage, nous constatons le plan suivant : Les auteurs passent tout d’abord brièvement en revue le micros- cope et son maniement. Ils s'étendent ensuite sur la technique des examens microscopiques ne nécessitant pas la préparation des coupes, sur la technique géné- rale des coupes, les méthodes générales de fixation et de coloration avec application à certains cas particu- liers, tels que la cellulose et ses dérivés, le protoplasma et le noyau, les techniques spéciales se rapportant à l'étude des Algues, Champignons, etc., les plasmo- desmes, les cils et les colorations vitales. Cette pre- mière partie se termine par un chapitre consacré à la plasmolyse. La deuxième partie concerne la technique microbio- logique avec deux subdivisions, l’une pour la technique générale, l’autre pour la technique spéciale. La tech- nique générale comprend la description des appareils, celle des milieux de culture, la technique générale des cultures des aérobies et des anaérobies, l'expéri- mentation sur les animaux, l'examen microscopique des bactéries. La technique spéciale comporte l'étude des méthodes de culture des Algues et Champignons, l'isolement et la culture des microbes de l'eau, de l'air et du sol, ainsi que des bactéries zymogènes, chromo- gènes, lumineuses, thermo-bactéries et enfin patho- gènes; ces dernières, plus spécialement du domaine de la Médecine, sont naturellement traitées d’une facon brève. Un dernier chapitre renferme des indica- tions permettant de déterminer les bactéries à l’aide des caractères morphologiques, physiologiques, cultu- raux, biochimiques, et enfin ceux que peut révéler l'expérimentation sur les animaux. Un appendice, rédigé par M. le D' Constantin, se rapporte à la pra- tique de la photomicrographie. Au commencement de l'ouvrage se place une liste d'un certain nombre de traités généraux concernant la technique histologique ou microbiologique; en outre, à la fin des chapitres se trouvent indiqués quelques travaux originaux se rapportant générale- ment aux méthodes les plus récentes. A ce propos, les auteurs sont peut-être un peu trop brefs en ce qui concerne la bibliographie étrangère et extra-botanique. Cet élégant manuel, très pratique, consciencieuse- ment composé, riche de faits judicieusement choisis et ordonnés, sans être touffu, a sa place marquée dans l'outillage de tous les laboratoires où l’on s'occupe de Botanique pure et appliquée. Nous ne pouvons qu'as- socier notre voix modeste à celle du préfacier autorisé, M. le Professeur G. Bonnier, pour proclamer le succès certain promis à cet ouvrage. J. BEAUVERIE, Chargé d'un cours de Botanique appliquée à l'Université de Lyon. 4 A propos de métachromasie, MM. Dop et Gautié man- quent peut-être un peu de précision en indiquant que le BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 79 4 Sciences médicales Lépine (R.), Professeur de Clinique médicale à 1 Uni- versité de Lyon, Correspondant de l'Institut, Associé de l'Académie de Médecine. — Le Diabète sucré. — 1 fort vol. grand in-8° de 1x-704 pages. (Prix : 16 fr.) Felix Alcan, éditeur. Paris, 1909. Cet important traité est, comme le dit M. Lépine, le résultat de vingt années d'observations et de pratique médicale. Il nous semble d'autant plus intéressant que, depuis des années, l'étude du diabète avait été fort négligée dans notre pays, si l'on compare les travaux publiés chez nous avec l’ensemble de ceux qui sortent des cliniques et des laboratoires d'outre-Rhin. M. Lépine à constamment observé et expérimenté sur ce sujet. On lui doit surtout de très importantes recherches chimiques, faites en collaboration avec M. Boulud, sur les matières sucrées du sang. Il a montré que ce que l’on appelait jusqu'ici le « sucre du sang » ne représente qu'une partie, moins de la moitié, de la quantité totale des matières sucrées du sang; la plus grande partie se trouve à l'état de combinaison, ce qui la dissimule aux réactifs chimiques ordinaires. Cette combinaison est plus ou moins solide suivant les cir- constances, mais le glycose peut s'en dégager sponta- nément dans le torrent circulatoire pour les besoins de la glycolyse fonctionnelle. A ce sucre immédiatement disponible, quoique non apparent, M. Lépine donne le nom de « sucre virtuel ». Quant à l’autre partie des matières sucrées, celle qui est connue depuis CI. Bernard, elle n'est pas non plus tout à fait libre; car elle ne dialyse point. L'état de combinaison lâche, dans lequel elle se trouve, explique en grande partie, et indépendamment de l’état du rein, le défaut de parallélisme entre l'hyperglycémie et la glycosurie. La notion du « sucre virtuel » est très importante. Elle fait comprendre pourquoi, ainsi que je l'ai montré, un diabétique soumis à une cure de réduction hydro- carbonée expulse et brûle, depuis le début de la cüre jusqu’au moment où sa glycosurie cesse, une quantité de sucre supérieure à celle que semble pouvoir conte- nir, d'après les calculs anciens, un organisme animal en état d'hyperglycistie. Il est probable que, non seu- lement dans le sang, mais dans les humeurs, une partie du sucre capable d'être brûlé ou d’être expulsé sous forme de glycose, existe sous une forme chimique spéciale échappant aux réactifs du glycose. M. Lépine étudie les réserves glycogéniques de l'orga- nisme, les sources du glycogène, la manière dont il se transforme en glycose, les causes qui font varier sa proportion dans le foie. Il met en relief le rôle primor- dial du foie dans la fonetion glycogénique. Enfin, il décrit très complètement le mécanisme de la glycolyse, mettant en relief le rôle des ferments dans la destruc- tion du sucre. Sous le nom de glycurie, l'auteur expose les condi- tions dans lesquelles se produisent les éliminations des divers principes sucrés : le glycose, qui est le plus important, le lévulose, le galactose, le saccharose, le lactose, les pentoses. Il passe en revue les glycuries d'origine alimentaire, les glycuries par injection sous- cutanée ou intraveineuse, par excitation nerveuse, par intoxication, les glycuries de la grossesse, des diverses maladies, des affections hépatiques et pancréatiques, Ce chapitre de physiologie pathologique est traité très com- plètement et accompagné d'une copieuse bibliographie qui sera fort utile aux travailleurs. La majeure partie du livre est consacrée à la physio- logie pathologique du diabète. Dans la seconde moitié, M. Lépine traite de l'étiologie, des symptômes, des complications, de l'évolution, du diagnostic, du pronostic et du traitement. Dans tous ces chapitres bleu Unpa donne, une teinte rougeitre « aux éléments amy- lacés »:; cela est vrai pour l'amyloide, mais non pour l'amidon. encore, l'auteur s'échappe volontiers de la clinique pour retourner à son point de vue préféré, l'étude physio- chimique. De l'examen et de la critique de toutes les théorie pathogéniques du diabète, M. Lépine conclut en éclecti- que : « Il n’est pas probable qu'il y ait une maladie diabète; mais il est certain qu'il existe des états mor bides diabétiques qui résultent de l'association irrégu- lière de tels ou tels éléments diabétogènes. Latâche du clinicien consiste à rechercher chacun de ces éléments et à déterminer, autant que possible, la part que chacun prend dans l'ensemble du trouble nutritif. Or, cette tâche est singulièrement ardue et elle n’est même pas, le plus souvent, rendue plus aisée par le résultat de l’autopsie; car il est rare que l'on trouve des lésions suffisamment nettes pour éclairer complètement la pathogénie du cas. » M. Lépine à raison de ne pas émettre nne théorie exclusive pour expliquer la production du diabète, car il y a bien des causes capables de troubler le méca- nisme glycorégulateur. Mais cependant, lorsque ce trouble s’est produit, il est intéressant de connaître le mécanisme qui préside à la constitution de ce que J'ai appelé « l'hyperglycistie », c'est-à-dire à l’accumu- lation des matières sucrées non brülées dans les tissus et les humeurs. L'intérêt du mécanisme de l’hypergly- cistie n'est pas seulement théorique, mais pratique ; il en découle une série de considérations très impor- tantes sur l’action des régimes alimentaires dans le diabète. Pour ce qui est du traitement, M. Lépine donne, à Juste titre, la première place au régime alimentaire. II discute ensuite la valeur et le mode d'action des divers médicaments, et se défend à l'avance de donner à leur sujet des conclusions définitives. Ce scepticisme est fort sage, La dernière partie du livre est un peu écourtée, comparativement à l'importance donnée à la partie théorique. On est en droit de regretter que M. Lépine, avec l'habitude qu'il a de l'observation et du traitement des diabétiques, n'ait point formulé d'une façon plus précise et plus détaillée la conduite que doit tenir le médecin en présence de chaque forme de diabète, la manière pratique d'instituer la cure de l’hyperglycémie, et les résultats qu'on est en droit d'en obtenir dans chaque cas particulier. D' M. Lagpé, Médecin des Hôpitaux, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 5° Sciences diverses Comte (Auguste). — Cours de Philosophie positive. — 6 vol. inA8. (Prix de chaque volume: 2 fr.) Librai- rie Schleicher frères, 61, rue des Saints-Pères. Paris, 1909. Réimpression, sous un format commode et à un prix abordable à tous, de l’œuvre essentielle du fondateur du positivisme. Agendas Dunod pour 1910. — ({(himie, Electricité, Travaux publics, Bâtiment, ete.) (Prix : 3 fr. le vo- lume). Dunod et Pinat, éditeurs, Paris, 1910. Nous sommes heureux d'annoncer la publication, pour 1910, des précieux agendas Dunod dont l'éloge n'est plus à faire. Elégamment présentés, ces petits volumes renferment, sous un format commode, tous les renseignements dont a journellement besoin le technicien. Lumière et fils. — Agenda pour 1910. (Prix : 1 fr.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris. Condensant, sous un faible volume, une petite bibliothèque photographique, l'Agenda Lumière, aug- menté cetle année d'une importante notice sur la Photographie des Couleurs et les Plaques autochromes, sera consulté avec fruit par tous ceux qui s’occüpent de Photographie. 80 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 3 Janvier 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Koenigs a étudié les courbes conjuguées dans le déplacement relatif le plus général de deux corps. Il démontre que toute sur- face intégrale I du cône des vitesses du corps S (lieu des droites qui portent, au cours du mouvement, les vitesses d'un point P de ce corps) a un contact de second ordre tout du long de la courbe de contact avec son profil conjugué l' dans le corps S', et cela à chaque époque du mouvement. — M. A. Demoulin complète ses recherches sur les transformations de Ribaucour et se sert des formules obtenues pour établir et géné- raliser un théorème de M. Bianchi. — M. G. Tzitzeica donne la solution du problème consistant à rechercher tous les systèmes orthogonaux dont les systèmes cycliques donnés par le théorème de Ribaucour con- duisent tous à des réseaux persistant dans æ' défor- mations. — M. A. Denjoy a étudié les fonctions ana- lytiques uniformes à singularités discontinues non isolées. Il démontre que toute fonction continue dans tout le plan, holomorphe hors d'un ensemble E, est développable en série de fractions rationnelles à pôles simples choisis sur E indépendamment de la fonetion. — M. C. Hautier a appliqué la compression d'air adia- batique à un véhicule mü par un moteur à explosion pour remplacer les transmissions mécaniques; ce dis- positif permet de supprimer les appareils d'embrayage et de changement de vitesse et donne une mise en marche automatique. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. A. de Gramont a étudié la répartition des raies ultimes dans le spectre des diverses régions du Soleil; il suppose que ces spectres sont des spectres de dissociation et que leurs diffé- rences sont dues principalement à la variation des proportions des éléments en présence. — M. E. Voi- senet a constaté la production de petites quantités d’aldéhyde formique dans l'oxydation de l'alcool éthylique par voie chimique (mélange chromique, 0°,H°0*, etc.), physique (catalyse, électrolyse) ou biolo- gique (Mycoder ma aceti où vini). — M. E. de Stoecklin décrit une méthode permettant de déceler des traces d'alcool, et reposant sur l’action d’un système peroxyda- sique (H°0* et composé organique de fer), qui produit une aldéhyde facile à mettre en évidence. — M. L. Margaillan propose de séparer le lactose du saccharose par le ferment bulgare, qui détruit le premier et laisse inaltéré le second, que l’on dose par son pouvoir réducteur après inversion. 3° ScENCES NATURELLES. — MM. C. Levaditi et K. Landsteiner, poursuivant leurs recherches sur la transmission expérimentale de la paralysie infantile, ont reconnu que les accidents observés chez les singes inoculés avec les moelles filtrées sont bien dus au virus et non à une toxine. Une première infection non mortelle paraît conférer l'immunité. — Mie P. Cerno- vodeanu et M. V. Henri ont étudié l’action des rayons ultra-violets sur les microbes. Une émulsion faite dans une eau irradiée n'est pas plus sensible aux rayons qu'une émulsion faite dans l’eau ordinaire. Les diffé- rents microbes n'ont pas la mème sensibilité. Ce sont les rayons dont la longueur d'onde est intérieure à 2.800 qui sont le plus bactéricides. — M. Th. Mamelle a reconnu que le cyanure de potassium injecté dans le sol en solution aqueuse a une action insecticide aussi énergique que CS* sans présenter les mêmes inconvé- nients; les plantes n'en souffrent pas. — M. P. Ber- thault montre que toutes les variétés de la Pomme de terre cultivée forment, au point de vue des caractères floraux, un grouge très homogène, distinct de l’en- semble des Solanum tubérifères sauvages. L'étude de ces derniers ne montre pas qu'on puisse trouver en eux avec évidence le Lype sauvage de la Pomme de terre, — M. A. Lacroix signale l'existence à la Côte d'Ivoire d'une série pétrographique continue allant d'un granite à hypersthène presque uniquement con- stitué par du quartz et des feldspaths jusqu'à une norite dépourvue de quartz et renfermant au moins 50 /, d'hypersthène: celte série offre de grandes ana- logies avec celle de la charnockite. — M. J. Boussac a étudié le Nummulitique de la zone du Flysch à l'est et au sud-est du Mercantour. Il à reconnu que les zones sédimentaires sont obliques par rapport aux zones tectoniques; les transgressions se sont faites du centre vers l'extérieur du géosynelinal. — M. E. Péroux donne quelques détails sur le forage d’un puits artésien à Maisons-Laffitte. L'eau a été rencontrée en abondance à 576 mètres de profondeur au-dessous d'une table gréseuse appartenant au Gault (Albien). — M. Héri- baud-Joseph a étudié les Diatomées fossiles des tra- vertins déposés par les eaux minérales de Sainte-Mar- guerite (Puy-de-Dôme). Il a observé de nombreuses Diatomées marines dans le travertin de la zone infé- rieure et l'absence à peu près complète de ces espèces dans les eaux actuelles, ce qui prouve que la salinité des eaux à été à peu près constamment en décroissant. Séance du 10 Janvier 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Guichard pré- sente ses recherches sur les surfaces à courbure totale constante qui correspondent à des systèmes singuliers d'ordre quelconque. — M. C. Russyan communique une généralisation du théorème de W. Stekloff; les formules obtenues représentent la généralisation de celle de la transformation de contact. — M.H. Lebesgue montre les liens étroits qu'il y à entre les intégrales de Stielljes et les intégrales de fonctions sommables. — M. J. Le Roux présente ses recherches sur les formes quadratiques définies à une infinité de variables. — M. E. Jouguet démontre que les détonations se propa- geant par ondes sphériques tendent spontanément à s'atténuer et à se rapprocher du régime des déflagra- tions. — M. H. Deslandres communique les observa- tionsde l'atmosphère solaire supérieure faites à Meudon aux environs du 25 septembre, jour de grand orage magnétique. Avant l'orage, les filaments se sont modifiés profondément pour disparaitre complètement le jour de l'orage. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Esclangon a déler- miné l'intensité de la pesanteur en divers points du département de la Gironde. La région de Bordeaux est le siège d'une anomalie d'ensemble par défaut, malgré le voisinage de l'Océan; la pesanteur est la plus élevée sur les plateaux de l'Entre-Deux-Mers, — M. A. Angot com- munique la valeur des éléments magnétiques à l'Obser- vatoire du Val-Joyeux au 1janvier 1910. La déclinaison a fortement diminué l'année dernière. — M.J. Carpen- tier présente un fréquence-mètre réalisé sur les indi- cations du Ct Ferrié el pourvu de deux aiguilles, mobiles dans deux plans parallèles voisins, dont le point de croisement donne l'indication désirée, — Le même auteur présente une petite balance de précision combinée par M. Collot et dont les poids sont manœuvrés au moyen de boutons disposés extérieure- ment, ce qui permet d'opérer à l'abri des agitations de l'air. — M. E. Estanave décrit un procédé pour obtenir ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAV des images changeantes à deux ou trois aspects sur plaques autostéréoscopiques. — M, Edm. van Aubel à constaté la production d'ozone sous l'influence de la lumière ultra-violette en dissolvant ce corps danslhuile d'olive ou le pétrole et le caractérisant par KI ami- donné. L'eau distillée, soumise aux mêmes radiations, renferme H°0*, — MM. A. Besson el L. Fournier, en soumettant à l’action de l'effluve un mélange d'H et de PCF, ontobtenu un bichlorure P*CI liquide incolore Eb. 1800, F. — 289, se décomposant lentement à l'obs- curité en donnant un précipité jaune clair, PCF. — M. E. Cornec, par la cryoscopie de l'acide hypophos- phorique, ainsi que celle de ses sels, à reconnu que cel acide possède la formule double H#P?0f, — M. P. Joli- bois, par dissolution du nickel dans le mélange d’étain et de phosphure d'élain Sn‘P', a isolé le composé NiP®; par dissolution du nickel dans le mélange Sn#P# et SnP*, on peutisoler le phosphure NiP*. Is ont l'aspect métallique et sont bien cristallisés. — M. F. Ducelliez, par l'étude des forces électromotrices de quelques alliages de cobalt, à constaté l'existence de composés CoSn et CoSb; avec le bismuth et le plomb, Co se sépare sensiblement à l'état de pureté pendant le refroidissement; avec Cu, il y a deux solutions solides, mais pas de combinaison. — M. M. Delépinea constaté que l'acide sulfurique à l'ébullition dissout le platine d'une facon continue si lon a soin d’entrainer par un courant de gaz inerte SO* et H°O formés. Les produits de la réaction sont les acides PL(OH)(SO'H et Pt(OH}SO'H. H°0. — M. R. Lespieau, en faisant réagir l’acroléine monobromée sur les composés organo- magnésiens, a obtenu les alcools éthyléniques 8-bromés CH? : CBr. CHOH.R, que l’action de KOH transforme en alcools acétyléniques CH : CH.CHOH.R. II à ainsi préparé avec CH* Mgl le méthylacéténylearbinol, Eb. 107-109, — M. J. B. Senderens, en faisant passer un mélange d'acide benzoiïque et d’un acide gras en vapeurs sur de la thorine à 4309, à obtenu un mélange de cétone grasse symétrique et de célone mixte aromatique. — MM. Em. Bourquelot et M. Bridel ont constaté que le Chlora perfoliata renferme de la gentiopicrine, gluco- side de la gentiane jaune, dans la proportion de 15 gr. par kilog de plante fraîche récoltée en août. — M. H. Bierry a constaté que divers animaux sont capables de digérer l'inuline. Chez les animaux supérieurs, c'est HCI du suc gastrique qui produit l'hydrolyse; chez les mollusques, c'est un ferment soluble qui dédouble ce corps jusqu'au lévulose, — M.J. Sarthou maintient que la caséine insoluble du lait ne jouit d'aucune pro- priété catalytique vis-à-vis de H°0?; celle qui a été mentionnée par MM. Bordas et Touplain est due à des ferments lactiques. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Nageotte décrit une nouvelle formation de la gaine de myéline, le double bracelet épineux, siégeant au point de contact entre la portion rétrécie du cylindraxe et une surface de la gaine de myéline qui répond à une section normale devenue, par suite d’une inflexion, parallèle à l'axe de la fibre. — M. J. Mawas à étudié la structure des cellules nerveuses ganglionnaires de la moelle amyéli- nique des Cyclostomes. — M. A. Contamin a constaté qu'une souris cancéreuse dontla tumeur s'est résorbée sous l'influence des rayons X est immunisée. L'innocu- lalion d'une tumeur en voie de résorplion ou irradiée “près ablation peut également provoquer l’'immunité. — MM. C. Levaditi et K. Landsteiner ont reconnu que la vaccination préventive des animaux contre la ‘aralysie infantile expérimentale, au moyen des moelles «d':ssévhées, est possible. — MM. A. Thiroux et W. Dufougère ont rencontré, chez un Cercopitheeus patas provenant du Soudan français, un nouveau spirille, voisin de celui de la tick fever et très pathogène, qu'ils nomment S. pitheci. — M. L. Roule décrit les protu- bérancesépidermiques de certains Amphibiens urodèles du genre Æuproctes ely voit la base organique d'où les poils des Vertébrés sont issus. — M. L. Bull montre que c'est l'insecte lui-même qui détermine l’inclinaison TES #1 du plan de ses ailes et qu'il la modifie à volonté selon ses besoins ; c'est ainsi qu'il règle en majeure partie la direction de son vol, sa stabilité et aussi sa vitesse, = M. L. Cayeux estime que les minerais de fer oolithique de la presqu'ile armoricaine s'étendent bien loin à l'est sous le bassin de Paris; maisil faudra procéder ave prudence aux sondages pour les rechercher dans cette région. — M. E. de Martonne présente une théorie mécanique de l'érosion glaciaire, d'après laquelle celle- ci serait proportionnelle au retard apporté à la progres- sion du glacier par les inégalités du lit. Les parties supérieures du névé et l'extrémité de la langue sont des lieux d'érosion à peu près nulle. — M. E. Péroux a fait l'analyse de l’eau fournie par le puits artésien de Maisons-Laflitte. Elle est légèrement alcaline et d'une remarquable pureté. — M. A. Brochet a constaté que les eaux thermalesde Plombières sont fortementradio- actives; leur radio-activité est due à lémanation du radium. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 4 Janvier 1910. M. Kelsch, à propos de la discussion sur la prophy- laxie de la fièvre typhoïde, émet l’opinion que cette maladie, comme d’autres maladies infectieuses, peut se développer non seulement par contagion, mais par autogenèse ou accession à la virulence de germes qui en sont actuellement dépourvus. — MM. L. Jacquet et Jourdanet présentent un travail sur le traitement bio- kinétique des engelures. — M. P. Lassablière donne lecture d'un travail sur de nouveaux procédés de fixation de la ration chez le nourrisson. Séance du A1 Janvier 1910. M. le Président annonce le décès de M. Queirel, associé national. M. H. Vincent revient sur le rôle des porteurs de germes dans la propagation de la fièvre typhoïde, qu'il met en évidence par de nouveaux exemples. Ceux-ci sont surtout dangereux par leurs excrétions, principa- lement à la campagne. Il convient donc de chercher à les dépister et de les informer des moyens très simples qui permettent de conjurer leur pouvoir contagieux. — MM. Rénon, Géraudel et Monier-Vinard commu- niquent un travail sur l’hépatome, tumeur primitive du foie. — M. le D' Delbet donne lecture d'une étude sur l’ostéomalacie dans la maladie de Little. — M. le Dr Saïint-Philippe présente un travail sur la situation faite aux enfants du premier âge dans les hôpitaux et hospices et sur la nécessité d'y remédier. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 18 Décembre 1909. MM. Et. Martin el Lagriffoul ont constaté que l'ap- parition de la tache verte abdominale, dans la putré- faction, est en rapport avec la transsudation d'hémo- globine dans les (issus, suivie de phénomènes d'oxyda- tion 7» situ, sans intervention microbienne. — M. A. Jousset à préparé des sérums antituberculineux qui, à défaut de propriétés thérapeutiques, sont doués de propriétés précipitantes, il est vrai inconstantes, vis-à- vis des humeurs des tuberculeux. — M. Ch. Porcher à constaté la présence de corps indologènes dans la bile, fabriqués probablement par l'intestin, résorbés par la muqueuse et amenés au foie. — MM. Aug. Lelièvre el Ed. Retterer montrent que les cellules de rénovation de l'utérus puerpéral sortent d’une source unique l'épithélium de revêtement ou glandulaire. — MM. H. Vincent el E. Combe ont reconnu que, sans avoir une valeur absolue, la réaction précipitante du liquide céphalo-rachidien vis-à-vis de la tuberculine brute pourra, cependant, apporter en clinique un appoint très utile à un diagnostic hésitant. — M. E. Maurel a étudié l'influence de la voie d'administration sur la production de la diarrhée par la colchicine chez le 82 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES lapin. — MM. E. Fauré-Frémiet, A. Mayer et G. Schaeffer ont fait l'examen critique des réactions chi- miques employées pour déceler les milochondries ; il paraît vraisemblable que les mitochondries renferment à l’état libre ou combiné des acides gras non saturés. — MM. Ch. Achard el Ch. Foix ont constaté que le pouvoir opsonisant du sérum, déterminé en utilisant comme milieu d'épreuve un mélange de solution saline et de sérum de cheval, est presque constamment posi- tif chez les typhiques. — M. A. Borrel montre que la surcoloration par mordancage est une méthode très puissante, capable de rendre de grands services dans l'étude des microbes encore invisibles. — M. C. Fleig propose une nouvelle méthode de transfusion du sang, consistant à inlerposer, entre l'artère et la veine, un segment artériel ou veineux prélevé sur un animal. — M. L. Morel a constalé que, chez le lapin non encore adulte, l'administration d'extrait parathyroïdien semble favoriser l’ostéo-genèse indépendamment de la richesse en Ca des aliments fournis ; l’action de la parathyroïde sur les os adultes semble absolument nulle. — MM. P. Lassablière el Ch. Richet ont observé une hyper- leucocytose prolongée chez le chien à la suite de l’in- toxication par une (oxine végélale, la crépitine. — MM. J.E. Abelous et E. Bardier ont étudié les effets DÉRASIEINUES généraux de l'urohypotensine chez le lapin et le chien; ils rappellent beaue oup les effets de la congestine, décrits par M. Ch. Richet, — Ce dernier propose, en conséquence, d'appeler uro- congestine Vuro-hypotensine. — MM. K. Landsteiner et C. Levaditi ont poursuivi l'étude de la paralysie infantile expérimentale el concluent qu'il y à une analogie frappante entre le virus de la rage et celui de la poliomyélite aiguë. — MM. Ch. Porcher et Ch. Hervieux estiment que la caractérisation de lacé- tone urinaire par la seule réaction de Legal n’est pas suffisante pour affirmer que lon a affaire à ce com- posé, surtout si le taux en est faible. — M. E. Hédon a reconnu que la transfusion carotidienne croisée entre chiens diabétiques et chiens normaux ne met pas for- cément obstacle tout d'abord à léclosion de la glyco- surie après dépancréatisation, mais qu'au bout d'un certain temps elle est capable de l’atténuer et même de la faire disparaitre complètement. — M. G. Rosen- thal montre que la symbiose du bacille bulgare et du B. perfringens n'est suivie que dans des conditions tout à fait spéciales de la disparition de la bactérie anaé- robie ; toutefois, il y a suspension du pouvoir tryptique, grâce à l'acidilicalion du milieu. — M. H. Triboulet montre que la réaction des selles avec la phénolphta- léine, pour prouver valablement la présence de sang, doit être immédiate, diffuse et durable. — MM. A. La- veran et A. Pettit ont trouvé dans le sang d'un cam- pagnol un Trypanosome nouveau, non pathogène, qu'ils nomment Tr. Microti. — MM. H. Dominici et H. Rubens-Duval distinguent trois sortes de néofor- malions de centres Iymphopoïétiques au cours des pro- cessus inflammatoires chroniques : les infiltrats de cel- lules lymphatiques, les nappes de tissu Jymphoïde et les follicules lymphatiques pourvus de centres lympho- poiétiques. — MM. H. Rubens-Duval et Fage décrivent les modilications gangliénnaires dans les adénopathies axillaires non cancéreuses correspondant aux tumeurs du sein. — M. G. Catouillard à découvert dans le sang du Gecko commun de Tunisie (/latydactylus muralis) un Trypanosomenouveau, qu'ilnomme fr. platvdacty li. — M.J.Loris-Melikov a étudié la formation des spores du Bacillus perfringens. H n'est pas rare de trouver deux spores dans le même bacille; elles apparaissent le plus vite sur gélose-amidon. — M. L. Launoy a observé de véritables karyocinèses dans le foie d'un lapin mort tardivement à la suite d'une anesthésie chlorofor- mique. — M. S. Marbé à constaté que le sac de col- lodion filtre l’agglutinine abondante des sérums et ne laisse pas passer les traces de l'agglutinine urinaire. Il y à un rapport direct entre l'agglutinine et l’albumine du filtrat. — M. H. Coupin à déterminé la force que peuvent déployer les jeunes tiges pour sortir du sol au momentde leur germination ; elle varie de 210 grammes pour la courge à 0,5 gramme pour le hégonia. = MM. A. Clere et C. Esmein ont reconnu que la-pul- sation œæsophagienne ne révèle pas de symptôme caractéristique de la maladie mitrale. — M. A. Frouin montre que, si l'on filtre sur collodion un sérum hémo- toxique ou un sérum antimicrobien après l'avoir saturé de NaCI, on ne trouve pas trace d’agglutinine dans le filtrat. La Société procède au renouvellement de son bureau pour 1910. Sont élus : Vice-présidents : MM. E. Gley et M. Letulle; Trésorier : M. J. Jolly; Archiviste : M. M. Nicloux; Secrétaires : MM. À. Claude, G. Coutière, A. Mayer et E. Rabaud. M. A. Pettit est élu secrétaire général pour einq ans. Séance du 8 Janvier 1910. E. Gley annonce la mort de M. président de la Société. M. F. Battelli et M! L. Stern ont constaté que, dans l'oxydation de l'alcool par l'alcoolase des tissus animaux, il y a production d'aldéhyde en même temps que d'acide acétique. — MM. M. Doyon et CI. Gautier montrent que la peptone de Witte, injectée dans une veine de la circulation générale, provoque une entérite hémorragique; injectée dans une veine mésaraique, elle ne provoque cet effet qu'à haute dose. — M. A. Policard estime que, dans la cellule intestinale, les chondriosomes ne jouent pas un rôle direct dans la formalion des vacuoles de graisse, mais au contraire un rôle indirect, non pas même au moment de la genèse de ces grains, mais dans leur maturation. — M. A. Brissemoret à observé que l'hexahydrure et l’oc- tohydrure de phénanthrène possèdent pour le cobaye des propriétés ébrieuses et que le second principale- ment a des effets comparables à ceux qu'on obtient avec la morphine. — M. H. Tissier, par des expé- riences poursuivies depuis deux ans sur deux adultes normaux, à reconnu que le régime végétalien (légumes et fruits pas trop riches en corps azotés) est amplement suffisant non seulement pour les besoins de la vie ordinaire, mais encore pour un travail physique impor- tant. — M. A. Lécaillon signale les ressemblances qu'il y a, chez les oiseaux, entre la segmentation par- thénogénésique de l'œuf non fécondé et la segmenta- tion normale de l'œuf fécondé. — MM. A. Lagriffoul, Arnal et H. Roger ont constaté que la fièvre de Malte, considérée jusqu'ici Comme extrêmement rare en France, s'y rencontre, au contraire, avec une fréquence assez grande. Elle est loin de revêtir toujours la symp- tomatologie classique; son association avec la dothié- nentérie est fréquente. Elle peut être transmise par la brebis comme par la chèvre. — M. A. Berthelot montre que certains aliments peuvent conduire les sucres qu'ils renferment jusqu'au niveau du gros intestin sans qu'ils soient absorbés : ce sont les dattes, les raisins secs, les figues sèches, les carottes, les betteraves. — M. R. Legendre à éludié le réseau interne de Golgi des cellules nerveuses des ganglions spinaux; il pré- sente de grandes analogies morphologiques avec la substance chromatophile. — MM. C. Mathis et M. Léger ont trouvé dans le sang de la poule domes- tique au Tonkin un nouveau Leucoc ylozoon, se diffé- renciant nettement du L. Caulleryi, qu'ils nomment L. Sabrazesi. L. Malassez, RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX 1 Décembre 1909. M. R. Lautier a constaté que tous les liquides orga- niques, normaux ou pathologiques, qui donnent la réaction de Rivalta, forment, dans l'eau acidulée par HCI, des stries blanchâtres, opalines, qui tombent au fond du verre à essai. — M. C. Sauvageau, d'après Séance du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 83 l'étude des algues flottantes, conclut à l'existence pro- bable d'un courant marin venant du sud et aboutissant au wolfe de Gascogne. Il signale, d'autre part, la natu- ralisation dans ce golfe d'une Algue apportée par les courants, le Cystoseira granulata; par contre, d'autres grandes Algues, apportées en grande quantité, ne S'y naturalisent point. — Le même auteur à recueilli dans les Côtes-du-Nord un hybride des l'ueus vesiculosus et F. Serratus. — M. R. Brandéis a observé un adéno- carcinome du rein chez la souris, qui parait avoir débuté par un adénome papillaire simple; il aurait pris naissance dans les cellules de revêtement de la capsule de Bowmann. — M. Cavalié a étudié la structure des kystes paradentaires et le mécanisme d’accroissement de leur cavité. — MM. J. Sabrazès et R. Dupérié ont trouvé de nombreux spirochètes, associés parfois à des pyocoques, dans lesrhagades des lèvres etles érythèmes maculo- et papulo-érosifs des hérédo-syphilitiques. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 14 Décembre 1909. M. M. Lucien estime que la cellule épithélioïde peut, dans l'atrophie thymique chez l'homme, donner nais- sance à la fois au tissu fibreux et aux corpuscules de Hassal; en tous câs, ces derniers ne résultent pas de la prolifération des cellules endothéliales des eapil- laires sanguins. — M. J. Parisot montre qu'au cours d'affections diverses, plus ou moins profondes, du sys- tème nerveux central, le temps perdu du réflexe rotu- lien peut subir des modilications notables. Il en est de même sous l'influence de lanesthésie. — MM. G. Etienne, Rémy et Boulangier ont observé que, pen- dant les phases d'anaphylaxie à la tuberculine, la réac- tion leucocytaire se caractérise par une tendance à l'augmentation des polynucléaires el une diminution des mononucléaires. — MM. Ch. Garnier et F. Vil- lemin ont observé un cas très rare de malformation congénitale des gros vaisseaux de la base du cœur chez un fœtus humain. — MM. M. Perrin et P. Jean- delize ont constaté que les lapins thyroïdectomisés sont moins résistants à l'intoxication par HgCP que les lapins normaux. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 21 Décembre 1909. M. Abeille de Perrin décrit un /?hipidus nouveau de Provence, découvert sous une écorce de chêne-liège, le /?. Boissyi. Ce genre d'insectes parait, dans son état larvaire, vivre en parasite dans le corps des petites Blattes. — MM. Rouslacroix et Wyse-Lauzun signa- lent, à Marseille, un cas degsporotrichose à manifesta- tions dermiques et hypodermiques multiples et dissé- minées, guéri par le (traitement ioduré. Dans un autre cas de sporotrichose, la sporo-agglutination s'est mon- trée positive au 1/50. — MM.J.-C. Gauthier et A. Ray- baud confirment, par de nouvelles expériences, que la puce du rat(Ceratophyllus faseiatus) pique l'homme et est susceptible de jouer un rôle dans la transmission de la peste ou d’autres infections. Les mêmes auteurs ont étudié l'influence de la température sur la survie des puces. À l'étuve, à jeun ou alimentées, presque toutes succombent däns les quarante-huit heures. A la glacière, elles survivent très longtemps : il paraît se produire un véritable sommeil hivernal. — M. S. Costa a pratiqué chez le cobaye des inoculations sous-cuta- nées de bacille de Vincent; ä se produit une tuméfac- tion des ganglions régionaux; la suppuration, une fois installée, est de très longue durée. — Le même auteur a constaté que le bacille fusiforme de Vincent est mo- bile, surtout lorsqu'il provient de lésions non exposées à l'air. — M. C. Gerber à constaté que les ferments protéolytiques du Plerotus ostreatus, parasite, et du Broussonetia papyrifera, parasité, sont très différents, au moins sous leur forme présurante. — MM. A. Col et C. Gerber communiquent leurs recherches sur la Le présure des fusains. — M. A. Vayssière à observé dans l'oviducte d'une femelle de Lamna cornubien, un œuf double, sur chaque moitié duquel se trouvait un petit embryon en voie de développement. Par suite de sa grosseur, il n'avait pu être expulsé et il avait com mencé son évolution intérieurement. MM. Alezais et Peyron ont observé une tumeur carotidienne riche en «plasmazellen » et deux autres riches en « mas zellen », SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 Décembre 1909. M. Jean Becquerel présente les remarques suivantes au sujet des communications faites dans la dernière séance par M. Dufour et M. Cotton : 1° Pour expliquer les dissymétries d'intensités, M. Dufour à émis l'hypo- thèse d’une action du champ magnétique sur l'amor- lissement des vibrations absorbées. Un semblable effet du champ sur l'amortissement paraît bien se manifes- ter dans le cas des cristaux à bandes fines, mais l'action du champ sur l'amortissement ne peut pas suflire, dans le cas des cristaux, à expliquer toutes les dissymétries d'intensité; 2 M. Cotlon à exprimé l'opinion qu'il n'y a pas lieu de faire intervenir, dans l'explication de l'effet Zeeman transversal, une com- posante longitudinale de la force électrique. Or, il est impossible d'expliquer certains faits s'il ne se produit, sous l’action du champ, une force électrique longitu- dinale qui relie, dans un même plan normal au champ, les vibrations ordinaire etextraordinaire. — M. A. Cot- ton rappelle que les remarques qu'il a présentées dans la dernière séance étaient faites en précisant qu'il s'agissait de milieux isotropes. Dans ce cas, il n'ya actuellement aucune raison expérimentale ni théorique d'admettre que les vibrations électriques que l'onde propage dans le champ, comme en dehors, ne sont pas purement transversales. En est-ilde même dans le cas des cristaux; ne peut-on pas ici encore se passer de l'intervention de cette composante? C'est une autre question, que M. Cotton, dans cette communication, n'avait pas abordée, et sur laquelle il reviendra plus tard. — M. H. Le Châtelier : La loi des tensions fixes de dissociation. L'auteur commence par rappeler le rôle prépondérant joué par la loi des tensions fixes dans le développement de la Mécanique chimique. Son exactitude, admise a priori par H. Sainte-Claire-Deville, la conduit indirectement à la découverte de la réver- sibilité chimique. La simplicité de l'énoncé de cette loi a donné rapidement une grande popularité à la nouvelle science. Enfin cette loi a conduit MM. Moutier et Peslin à faire la première application de la Ther- modynamique aux phénomènes chimiques. L'expé- rience ne semblait cependant donner qu'une vérifica- tion très imparfaite de la loi. La dissociation des bicar- bonates, la décomposition des solubles par l'eau, ete., n'y satisfaisaient aucunement, malgré de nombreuses affirmations contraires. L'application de la loi de Clapeyron-Carnot à l’efflorescence des sels montra l'inexactitude de certaines expériences invo- quées à l'appui de cette loi. Enfin les recherches de Roozeboom sur l'hydrure de palladium, celles de Tam- mann sur l’efflorescence des zéolites la contredirent formellement. Plus tard, la loi des phases de Gibbs sembla établir définitivement l'exactitude de cette loi en précisant, ce qui n'avait jamais été fait aupara- vant, l'étendue de son domaine. Et cependant les résul- tats de l'expérience continuaient à ne pas s'accorder avec les prévisions de la théorie. Cela tenait à ce que, dans l'application de la loi des phases, on avait négligé de tenir compte d'une condition importante, signalée par Gibbs. L'énergie mise en jeu dans les réactions chimiques par les tensions superficielles doit être négligeable, ou, si elle ne l’est pas, il y a un terme complémentaire à introduire dans la règle des phases; sa présence fait descendre d'une unité le degré de variance. Les sels effleuris, la chaux poreuse ne satis- sels co pres ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES font pas à la condition des grands rayons de courbure, le rôle de la couche superticielle à densité variable n'est plus négligeable. On peut éviter ces difficultés et réaliser les conditions pour l'existence de tensions tixes en opérant en présence d’un dissolvant qui per- met la cristallisation des nouveaux corps produits, avec des dimensions suflisantes pour annuler toute intervention notable des tensions superlicielles. Ces problèmes se rattachent à ceux qu'on étudie dans la Û himie colloïdale, qu'il serait plus logique d'appeler Capillarochimie, par analogie avec la Thermochimie et lElectrochimie. Ces trois branches de la Chimie traitent en effet, des rapports de l'énergie chimique avec les énergies calorique, électrique et superficielle. — MM. Ch. Fabry et H. Buisson : Mesures de petites varialions de longueurs d'onde par la méthode inter- férentielle ; application à diflérents problèmes de spectroscopie solaire. Différents problèmes de spec- troscopie ou d’astrophysique conduisent à étudier de petits changements ou de petites différences de lon- cueurs d'onde. La méthode ordinairement employée pour cela (mesure de petits déplacements de raies dans un spectre) n’est pas à l'abri de certaines causes d'erreur. La méthode interférentielle se prète très bien à ce genre de mesures. 1° /éthode et apparerls. Le dispositif employé se compose de deux parties: l'appareil interlérentiel et l'appareil dispersif qui pare les interférences dues aux diverses radiations. L'appareil interférentiel est un système de deux sur- faces argentées maintenues au res et à dis- tance invariable. Il produit des interférences à l'infini, qui sont projetées, dans le plan focal d’une lentille, sur la fente du spectroscope. Celui-ci est du type auto- collimateur, avec réseau de Rowland et objectif de 3 mètres de foyer. Dans le cas d’un spectre à raies brillantes, on obtient une série d'images monochro- matiques de Ja fente, réduites chacune à un certain nombre de points brillants, intersections de la fente avec les anneaux d'interférence produits par la radia- tion correspondante. Dans le cas du spectre solaire (spectre continu avec raies noires), on obtient, lorsque la fente à une largeur convenable, l'aspect exactement complémentaire du précédent: spectre continu, avec raies noires, chacune réduite à un certain nombre de points noirs occupant exactement la position des points brillants que donnerait une raie d'émission ayant la même longueur d'onde que la raie d’absorp- tion. Pour déterminer le déplacement d'une raie, il suffit de mesurer les diamètres successifs des anneaux qu'elle produit ; cette mesure est faite soit visuelle- ment, soit, plus souvent, sur des clichés photogra- phiques. 2° Comparaison des raies du spectre solaire avec celles du spectre de lare au fer. Chaque raie du spectre de l'arc au fer se retrouve, sous forme de raie d'absorption, dans le spectre solaire. La comparaison faite par la méthode précédente à montré que, dans les deux spectres, les raies ne coincident pas rigou- reusement. Pour la majorité des raies, il y a, lors- qu'on passe de l'arc au Soleil, un léger déplacement vers le rouge, de quelques millièmes d’angstrôm. Il y a Loutefois de nombreuses exceptions: pour certaines raies, le déplacement est de même sens, mais beaucoup plus grand (jusqu'à 0,030 angstrôm); pour d'autres il est de sens inverse (jusqu'à — 0,030 angstrôm). Ces anomalies trouvent leur explication dans l'étude de l'élargissement des raies. Les raies de l’are ont toutes une largeur finie; elles s'élargissent lorsqu'on aug- mente l'intensité du courant ou la pression de l'atmo- sphère ambiante. Lorsqu'on produit l'arc dans le vide, toutes les raies deviennent beaucoup plus fines. Lors- qu'on élargit la raie par une cause quelconque, cel élargissement se fait d'une manière différente selon les raies. Pour beaucoup d'entre elles, l'élargissement se fait d'une manière symétrique; il ne change pas la position apparente de la raie. Pour d'autres, il se fait d'une manière dissymétrique : pour certaines raies vers le rouge, pour d’autres vers le violet, ce qui change, dans un sens ou dans l’autre, la position apparente de la raie dans le spectre d'émission de l'are. Dans le spectre solaire, cet effet ne se fait pas sentir. Ces élargissements dissymétriques, soigneuse- ment étudiés pour les diverses raies, expliquent com- plètement les déplacements exceptionnels constatés lorsqu'on passe du spectre d’are à celui du Soleil. Si l'on compare le spectre solaire avec celui de l'arc dans le vide, on élimine ces effets d'élargissement et l'on trouve pour toutes les raiesun léger accroissement de longueur d'onde lorsqu'on passe de l'arc au Soleil, Ce déplacement peut être attribué à la pression de la couche renversante de l'atmosphère solaire, et permet alors de calculer cette pression; on trouve ainsi de 5 atm. à 6 alim. 3° Comparaison des spectres du centre et du bord du Soleil. Indépendamment de l'effet Doppler-Fizeau dû à la rotation du Soleil, on trouve que, dans le oe tre du bord, les raies sont légèrement déplacées vers le rouge par rapport à la position qu'elles oce er dans le spectre du centre du disque. Les raies sont en même temps un peu élargies dans le spectre du bord. Les deux effets se résument en un seul : le bord rouge de la raie subit un déplacement de 0,010 angstrüm, tandis que le bord tourné vers le violet ne change pas. Ce phénomène peut être attribué à l'absorption par les parties profondes de la couche renversante, ce qui donnerait environ 12 atm. pour la pression de celle couche profonde. — M. P. Painlevé : Les lois de Ja résistance de Pair. La Revue publiera prochainement un article de l’auteur sur ce sujet, SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 2% Décemlre 1909. MM. P. Nicolardot et L. Clément indiquent les mo- dilicalions qu'ils ont apportées au procédé classique de fractionnement des essences de térébenthine, afin d'y révéler facilement la présence des fraudes ou des im- puretés sans altérer les échantillons. Is signalent, en outre, l'intérêt que présente l'étude de l’action de la lumière sur les essences fraudées. Ils montrent com- ment on peut doser exactementles dérivés du pétrole et les huiles de résine dans les essences. M. Nicolardot sisnale à ce propos quelques-uns des résultats qu'il a obtenus dans l'étude de l'action des sels de mercure sur les terpènes et décrit les méthodes analytiques qu'il a élablies en commun avec Clément, d'après ces premiers résultats, pour l'analyse des essences et des celluloïds. — M. Sauton, au nom de M. A.Trillat et au sien, fail une communication sur les circonstances qui favorisent la formation et la disparition de l'aldéhyde dans les milieux alcooliques. L'aldéhyde acétique prend naissance dans les liquidesgle fermentation alcoolique. Les auteurs montrent aus ne résulte pas d'une dis- location de la molécule sucrée, mais d’une oxydation ultérieure de l'alcool déjà formé. Ils attribuent une importance particulière à l’action des levures vivantes dans cette oxydation. L'agitation d'eau alcoolisée avec des levures tuées par la chaleur ou les antiseptiques ne proyoque pas cette formation d'aldéhyde; il s'en forme, au contraire, des quantités notables en pré- sence de levures vivantes. L'aldéhyde formée disparait ensuite peu à peu pour donner de l'acide et de l’éther acélique. Cette disparition est, comme la formation de l'aldéhyde, favorisée par la présence de levures vivantes. — M. E. Charon a préparé les éthers halogénés de l'alcool cinnamique et quelques produits de substitu- lion de ces éthers. Il signale l'obtention facile du chlo- rure et du bromure par l'action à froid.des solutions aqueuses des hydracides sur l'alcool. L'iodure de ein- namyle ne peut s'obtenir que par l’action de l'iodure de sodium sur le chlorure. L'iodure de cinnamyle est très instable ; le bromure, plus stable, perd cependant son brome avec la plus grande facilité. Quand on traite une dissolution hydro-alcoolique de bromure de cin- namyle dansles alcools méthylique ou éthylique à 80°,, par un sel alcalin faible, tel que le cyanure de potas- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 85 sium ou le bicarbonate de potasse, on obtient surtout comme produit principal los secondaire C°H°.CH (ORCH — CHE, R représentant un éthyle où un méthyle. M. Charon insiste sur les caractères particuliers de cette curieuse migration moléculaire, — MM. Meunier, M. Tiffeneau el A. Valeur signalent des exemples de migrations analogues. — M. E. Charon communique, au nom de MM. J. Dupont el L. Labaune, sur le même sujet, les résultats d'un travail qui à déjà fait l'objet d'une publication préliminaire (Bulletin scien- tilique de la maison Roure-Bertrand lils, de Grasse). Ces auteurs ont été amenés, au cours d'un travail sur les éthers chlorhydriques du linalol et du géraniol, à étudier également l'éther chlorhydrique de lalcool cinnamique. Ils ont préparé ce corps par une méthode articulière et ont observé la transposition qui réalise É passage du type primaire au type secondaire. Notam- ment, action sur le chlorure du nitrate d'argent en solution aqueuse alcoolique leur a fourni, comme produit principal, l'éther phénylallyléthylique. A côté de celui-ci semble se former, en petite quantité, l'alcool! phénylallylique lui-même, — MM. Gabriel Bertrand el H. Agulhon décrivent une technique cénérale extrêmement sensible et précise pour recher- cher de très petites quantités de bore contenues dans l'organisme des animaux et des plantes el, d’une ma- nière générale, dans les milieux complexes, tels que le sol, les aliments, ete. Un millième de milligramme suffit dans cette Lechnique pour caractériser le bore avec certitude. Ils exposent en même temps la méthode qui leur sert dans les mêmes cas pour doser ce métal- loïide. — M. Meunier rappelle à ce propos que le papier de curcuma peut être utilisé avec avantage pour déceler des traces d'acide borique dans certains beurres. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 25 Novembre 1909. MM. G. E. Hale et F. Ellerman présentent leurs recherches sur /a nature des flocules d'hydrogène et leur structure à dillérents niveaux dans l'atmosphère solaire. Les résultats ne sont guère en faveur de la théorie de Julius. Les petites différences observées fré- quemment en comparant les images données par les côtés opposés de Ha sont peut-être dues à la réfraction anomale, mais le phénomène principal des flocules d'hydrogène sombres s'explique d'une facon beaucoup plus satisfaisante par des effets d'absorption. — M. M. J. Fitzgerald complète les recherches qu'il a publiées autrefois sur /e vol battant. W conclut : 1° que l'effet d'inertie dû à l'accélération de l'aile fournit la base d'une explication satisfaisante du planement et du vol lent en air calme ; 2° qu'il n'y aucune vertu spéciale dans une espèce particulière de cycle ; 3° que la vitesse moyenne de dépense de l'énergie pour porter un poids donné varie en raison inverse de la fréquence des batte- ments. — M. E. Cunningham présente quelques con- sidérations sur les effets de mouvement de la tension de l’éther de Maxwell. — M. H. C. Pocklington donne une discussion détaillée des aberrations d'un instru- ment d'optique symétrique en se servant d'une fonction Caractéristique signalée par Lord Rayleigh et qui est l'intégrale de y prise le long de la trajectoire d'un rayon de lumière d'un point (x, y, z) dans le milieu initial jusqu'à un autre (x, ;’, z') dans le milieu final, l'intégrale étant exprimée en fonction de ces six coor- données. — Sir W. de W. Abney a étudié le change- ment de teinte des couleurs du spectre lorsqu'on les dilue avec de la lumière blanche. Il arrive à ce résul- tat que le changement de teinte est dû surtout à l'addi- tion du rouge et du vert contenus dans le blanc, le bleu étant un facteur négligeable. — M. C. et M! M. Cuth- bertson ont mesuré /4 réfraction et la dispersion du néon sur une grande quantité de gaz (300 c. c.) purifiée par M. Watson. L'indice de réfraction à 0°C. et 760 mm., pour la ligne verte de mercure (1 — 5461), est de . 1,000.067.16. La dispersion pour la raie verte du mer- cure et les raies rouge (À — 6438) et bleue (À — 4800 du cadmium est donnée par les chiffres suivants 1 X 10% = 6.438 u —1)10% — 134,02 1.461 134,30 4.s00 134,63 La réfractivité peut être exprimée par la formule de Cauchy u — 1 —0,000.1332 (: j- — Les mêmes auteurs ont déterminé de nouveau /a rélraction et la dispersion de l'air, de l'oxygène, de l'azote et de l'hydrogène et leurs relations. \° La formule de Cauchy ne peut servir à exprimer la dispersion de ces quatre corps. Les valeurs de L dans cette formule, calculées d'après les résultats expérimentaux, aug- mententquand on passe du rouge au violet.20 La disper- sion de ces gaz Sexprime beaucoup mieux par une formule du type de Sellmeier : u-1 — €! (n,?-n°}, où nv, et à sont les fréquences de la vibration libre de l'atome et de la lumière incidente respectivement. 3% Les indices de réfraction de ces gaz sont alors les suivants : u-1 4,6463 X 1027 3j. 25 X 10% ie 3,397 X 1077 12.804 X 10 — n° LM 0 NA en Me LE EP IEEE 17.095 X 107 — n= 1,692 X 10% Air Oxygène (0° Hydrogène (IP) . 4° Les auteurs ont recalculé sous la même forme les indices de réfraction de P,S et Hg. D'après la théorie électronique de Drude, les nombres d'électrons dis- persifs dans H, O0, Az, S et P sont dans les rapports 1, 2,3, 3 et4 1/2. — Enfin, les mêmes auteurs ont encore mesuré la réfraction et la dispersion de lanhydride sulfureux et de l'hydrogène sulfuré. Pour SO? ils ont obtenu la valeur : BAT EE p 8.929 X 10° — 7°? et pour HS : 4,834 X 1027 u , 7 1.808 X 107 — # De ces valeurs, on déduit que le nombre d'électrons dispersifs de SO? est égal à la somme de ceux de S et de O*, tandis que dans HS il y a un électron dispersif de plus que dans H*et S. — MM. H. L. Callendar et H. Moss ont redéterminé la dilatation absolue du mer- cure et corrigé, au moyen de leurs résultats, la valeur du point d'ébullition du soufre (4430,58 C.\ trouvée par Eumorfopoulos en se basant sur les résultats de Regnault, réduits par Broch. La correction à apporter est de 09,97, ce qui élève le point d’ébullition du soufre à ##%40,55, valeur parfaitement concordante avec celle qui est couramment admise (4#40,53). — MM. E. G. Hillet A. P. Sirkar ont déterminé /4 con- ductibilité électrique el la densité des solutions d'acide Huorhydrique. La courbe de la conductibilité molécu- laire présente deux particularités distinctes : 1° à 910/, de HF, la conductibilité augmente avec une grande rapidité pour une très faible diminution de concentra- tion; ce point correspond à la dissociation d’un bydrate 9 H* F* (1 H*O) ; 2 à 53°/, de HF, on note un point d'inflexion de la courbe, qui correspond à l'hydrate HF. H°*0. Les déterminations de densité ne sont ni aussi exactes, ni aussi nombreuses; la courbe des densités est toutefois analogue à celle des conduc- tibilités et dénote également un point d'inflexion à 53 °/, d'acide. — M. A. E. H. Tutton a étudié Les rela- tions du thallium et des métaux alcalins. Les propriétés 86 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES morphologiques et physiques des cristaux des sels doubles de thallium, de la série RM(S,0*).6He0 les placent dans la série isomorphe des métaux alcalins, — c'est-à-dire celle dont les membres ont une analogie chimique définie, cristallisent avec la même symétrie el développent des formes dont les angles interfaciaux différent au plus de 20,5, — mais non dans la série eutropique plus exclusive, obéissant à la loi de pro- uression suivant le poids atomique des métaux inter- changeables. Ainsi les sels de K, Rb et Cs sont eutro- piquement isomorphes, tandis que ceux de TI et de K sont simplement isomorphes. La position de TI est proche de AzH* et aussi de Rb, excepté pour leur pro- priété spécifique caractéristique : leur énorme pouvoir de réfraction. — MM. W. Rosenhain etJ.C. W.Hum- frey exposent leurs recherches sur /a structure cris- talline du fer aux hautes températures. 1° Le fer, jusqu'à 41.100°C., se comporte comme un agrégal cristallin et subit une déformation plastique par un processus de glissement sur les plans de clivage ou de clissement de ses étistaux constituants. 2 Le fer, entre les températures ordinaires et 1.000°C., existe sous trois modifications distinctes possédant des pro- priétés mécaniques très différentes; les intervalles de température dans lesquels ces modifications existent s'accordent avec l'hypothèse qu'elles sont identiques avec les formes «, 8 et y d'Osmond et Roberts-Austen. 3e Le fer $, quoique existant à une température plus élevée, est plus dur et plus résistant que le fer «&; la transformation «-B6 s'accompagne d'un changement de volume. 4° Le fer y, trouvé dans le fer presque pur à haute température, possède la structure caractéris- tique et les propriétés trouvées dans les aciers à fer y. — Sir D. Bruce, MM. A. E. Hamerton, H. R. Bate- man et F.P. Mackie ont poursuivi leurs études sur /a maladie du sommeil dans l'Ouganda. MS ont reconnu que la Glossina palpalis des côtes inhabitées aujour- d'hui du Victoria Nyanza peut conserver son infectivité pendant une période d'au moins deux ans après que la population indigène a été éloignée. Deux hypothèses sont seules permises : ou bien la durée de vie de ces mouches est de plus de deux ans, ou bien les mammi- fères et oiseaux des côtes du lac ont été infectés et servent de réservoir à la maladie; mais rien n'a con- lirmé jusqu'à présent cette dernière hypothèse. Séance du 30 Novembre 4909. Séance anniversaire annuelle. La Société procède au renouvellement de son bureau, qui est ainsi composé : Président : Sir Archibald Geïikie ; Vice-présidents Sir A. Noble, Sir J. Stirling, MM. E. B. Poulton el H. Lamb; Trésorier : M. A. B. Kempe: Secrétaires : Sir J. Larmor et M.J. R. Bradford; Secrétaire pour l'étranger : Sir W.Crookes. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 16 Décembre 1909. MM. G. T. Morgan et J. A. Pickard ont constaté que les sels de diazonium des alkyl- et arylsulfonyl-p- diamines, traités par l'acétate de soude aqueux, for- ment des alkyl- et aryl-sulfonyl-p-diazoimides; cette réaction est tout à fait générale. Les auteurs ont pré- paré ainsi les deux membres les plus simples de la série, le méthane-sulfonyl-p-phénylènediazonmide et le méthane-disulfonvyl-bis-p-phénylènediazoimide : CH3.S02.A7-C'H9 A7 et, CH?(S0.Az- CH A7) — MM. G. T. Morgan et G. S. Whitby et M!ie F. M. G. Micklethwait, en faisant réagir SbCl* sur le camphre sodé, ont obtenu le chlorure de tricamphorylstibine (CH°0YSbCE, qui est hydrolysé par les alcalis aqueux en camphre, HCI et acides antimoniques. Le chlorure de triphénylstibine, traité par le nitrate d'argent al- coolique, donne le nitrate de triphénylstibine, qui est partiellement hydrolysé par l’eau chaude en hydroxy- nitrate (C'H°)Sb(OH)A70*. L’'hydroxysulfate s'obtient par l’action du sulfate d'argent aqueux sur le chlorure. — MM. F. Tutin et H. W. B. Clewer ont isolé du Rumex Ecklonranus les constituants suivants : alcool cérylique, un phytostérol C*H%#0 semblant identique au rhamnol, acides palmitique, stéarique, oléique, linolique et isolinolénique, ipuranol, camphérol, acide chrysophanique, émodine et son éther méthylique, un sucre donnant de la d-phénylglucosazone. — M. F. L. Usher a étudié l'influence des non-électrolytes sur la solubilité de CO? dans l’eau à 20°. Le sucrose, la man- nite, le dextrose, la glycine, le pyrogallol, la thiocar- bamide, l’antipyrine, la carbamide, l'acide acétique, le catéchol, l’uréthane et l'alcool n-propylique la dimi- nuent, de 26 °/, pour le premier à 4 °/, seulement pour le dernier. L'’acétamide, le quinol et le résorcinol l'augmentent légèrement. — MM. F. G. Pope et H. Howard, en condensant la benzaldéhyde et le résorci- nol en présence d'alcalis aqueux, ont obtenu le 2 : 4-dioxybenzhydrol, qui se condeñse à son tour avec les phénols et les amines en présence de ZnCEË pour former des xanthènes et des hvdroacridines substitués. — M. W. Parry a préparé l’«-hydroxyisobutyrate d'éthyle, Eb. 1489-150°, en convertissant l’acétone en cyanohydrine, hydrolvsant, isolant l'acide formé à l'état de sel de Zn et chauffant celui-ci avec H*SO* et l'alcool. — M. E. de Barry Barnett a éludié l’action de H°0? sur la thiocarbamide et quelques-uns de ses dérivés et a constaté la formation d'acides sulfiniques. — MM. K. J. P. Orton et W. J. Jones ont reconnu qu’en solution acétique glaciale, Br et les acylchlo- roaminobenzènes, d'une part, HCI et les acylbromoa- minobenzènes, d'autre part, réagissent quantitative ment, donnant des solutions identiques : Ar.AzCIlAc — HBr — Ar.AzHAc + BrCl; Ar.AzBrAc + HCI — Ar. AzHAc + RrCIl. L'acide bromhydrique et une acylbro- mamine réagissent ainsi : Ar.AzBrAc + HBr — Ar.Az HAe-E Br°. Enfin Hlagit de l’une des façons suivantes : Ar.AzCIAc + HI — Ar.AzHAc — CIT ou Ar.AzClAc +2HI — Ar.AzHAc + I° HCI. — M. R. A. Gortner a retiré de la larve du T'enebro molitor une nouvelle tyrosinase, insoluble dans l'eau et incapable d’oxyder le résorci- nol et le quinol. Cette même larve renferme un chro- iogène donnant avec la tyrosinase des réactions colo- .rées identiques à celles de la tyrosine. — MM. A. Lap- worth et E. Wechsler ont fait la synthèse de l'acide ay-diphényl-y-1-naphtylallène-x-carboxylique C'H7.C (GH®):C:C(C'H)COH, mais n'ont pu le résoudre en ses constituants actifs. — MM. R. W. L. Clarke et A. Lap- worth ont préparé la cyanocarone, qui perd facilement les éléments de l'acide cyanhydrique pour se trans- former directement en eucarvone. — MM. A. Lapworth et d. R. Partington ont étudié l'influence de l’eau sur l'efficacité de solutions très diluées de HCI dans l'alcool absolu. Ils ont reconnu qu'elle est proportion- nelle à la concentration de HCI/r + concentration de l'eau, » étant identique à la constante hydrolytique de Goldschmidt et Udby. Sa valeur est égale à 0,10 à 25° dans tous les cas. — M. W. O. Wootton à préparé des acides +-camphoramiques et les imides correspondantes qui dérivent de la condensation de l'anhydride campho- rique avec diverses amines grasses et aromatiques. — M. J. F. Thorpe proposele nom de cétimines pour les composés qui renferment le groupe C : AzH, en conser- vant le terme d’imines pour les amines secondaires C AzH. D'autre part, il désigne sous le nom de cé- C timine-énamique lisomérisme des substances CH.C (: AzH). C et C: C(AzH®) C. — MM, G: T: Morganet W. R. Moore, en condensant le camphre sodé avec PCE et extrayant le produit avec les hydrates alca- lins aqueux, ont obtenu l'acide dicamphorylphosphi- nique (C#“HOŸPO.OH. — M. A1. Scott a déterminé ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 87 le poids atomique du carbone d’après la combustion du naphtalène (G=— 11,999) et d'après celle de l'acide cin- namique (C=12,0015). La moyenne est C= 12. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 21 Octobre 1909. M. W. B. Davidson relrace les progrès récents de l'industrie du gaz d'éclairage. envisage successive- ment l'emploi du gaz à l'éclairage, au chauffage indus- triel et domestique et à la production de force motrice, puis la qualité du gaz, entin la fabrication proprement dite. La combinaison de grandes charges de cornue avec de hautes températures de distillation caractérise les méthodes modernes de travail : elle donne une quantité moindre de gaz, mais une qualité supérieure. L'auteur termine par l'étude des résidus de la fabri- cation et des appareils employés. SECTION CANADIENNE Séance du 22 Octobre 1909. M. R. F. Ruttan décrit un procédé de préparation de l'alcool éthylique avec la sciure et les autres déchets de bois. Ce procédé, dû à MM. Ewen et Tomlinson, se base sur une réaction trouvée par Classen. La sciure de bois est traitée, dans un cylindre tournant fermé, par une solution presque saturée de SO? à une température de 150°C. environ, qui transforme la cellulose en un sucre fermentescible. Au bout de 4 à6 heures, la masse est extraite par l'eau, la solution est neutralisée et clarifiée, soumise à la fermentation par la levure, puis distillée. Ce procédé est exploité industriellement aux Etats-Unis par la Standard Alcohol Company aux environs de Chicago. En tenant compte de la valeur des sous-produits, il semble pouvoir donner l'alcool industriel à un prix égal à la moitié du prix actuel. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 10 Novembre 1909. M. J. M. Taylor expose une méthode rapide pour la détermination du zinc en présence du fer. Dans la solution neutre diluée, HS précipite du sulfure de zinc en mettant en liberté une quantité équivalente d'acide ; le fer, qui doit être amené à l'état ferreux, n'est pas affecté. On titre alors l'acide libre avec la soude caus- tique, en employant le méthylorange comme indicateur. SECTION DE LONDRES Séance du 1* Novembre 1909. M. J. C. Stead décrit la fabrication de la pierre artificielle au moyen de sable et de chaux. Le mélauge de sable et de chaux est introduit dans des moules, soumis à l’action de vapeur ou d’eau chaude sous une pression croissante, maintenu quelque temps à 9-10 atmosphères, puis refroidi, enlevé des moules etutilisé tel quel. La meilleure proportion de chaux est d'environ 10 2, ; il faut que la totalité de la masse soit saturée d’eau ou de vapeur le plus tôt possible au commence- ment de la fabrication. Ces pierres résistent à des tensions élevées et constituent de bons matériaux de construction. Séance du 6 Décembre 1909. M. W. P. Dreaper expose l'état actuel de l'industrie de la soie artificielle, La Revue publiera prochaine- ment un article sur cette question. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 17 Novembre 1909. MM. J. T. Wood et S. R. Trotman ont déterminé la quantité de substance peau dissoute dans les liqueurs calciques des peaussiers. Elle peut atteindre 3,37 0}, et est en moyenne de 1 °/,. Les auteurs recommandent l'emploi d'une liqueur calcique ne renfermant pas moins de 0,1 gramme de CaO par 100 centimètres cubes et dont l’alcalinité n'excède pas 6 centimètres cubes N/1 par 100 centimètres cubes. ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES ET DES LETTRES DE DANEMARK Communications présentées en 1909 (suite). M. Martin Knudsen: Sur les courants d'air provo- qués au sein des corps poreux par les différences du température. La théorie présentée par l'auteur fait voir que, lorsqu'un gaz se trouve au contact d'un solide ou d'un liquide à la surface duquel il existe des diffé- rences de tempéralure, le gaz doit glisser le long de cette surface, des endroits à basse température aux endroits à haute température. Ce courant de glisse- ment est compensé par les courants rétrogrades, sui- vant d’autres trajectoires, qui se produisent dans la masse gazeuse environnante ou par un déplacement faible, mais permanent de cette dernière. Il résulte aussi de cette théorie que, lorsqu'une plaque poreuse est plus chaude sur l’une de ses faces que sur l'autre, elle doit aspirer l'air à travers sa masse, de la face froide à la face chaude, aussi longtemps que la diffé- rence de température est maintenue, à moins qu'il n'existe sur la face chaude un surcroït de pression de grandeur appropriée. Les expériences faites par l’au- teur concordent parfaitement avec les déductions de cette théorie. — M. C. Christiansen : Æecherches expérimentales Sur l'origine de l'électricité de frotte- ment. Bien quil existe de nombreux travaux sur l'électricité de frottement, 1l est impossible d'affirmer quoi que ce soit de définitif au sujet des phénomènes determinant l'espèce et la quantité de l'électricité engendrée par frottement. D'autre part, tout le monde est d'accord pour adopter l'hypothèse indiquée par Helmholtz et confirmée par lui de différentes manières, à savoir que le frottement ou le contact de deux corps s'accompagne de la formation d'une couche double électrique. En se séparant l’un de l'autre, les deux corps emportent chacun sa part de cette couche, ce qui se manifeste par la production d'un effetélectrique. Il était jusqu'ici difficile de rechercher les facteurs déterminant la nature de ces chañges, puisque des variations presque insensibles suffisent bien souvent à intervertir Jusqu'à leurs signes. Or, l'auteur fait voir que, dans tous les cas, ce sont les propriétés chimiques des corps qui exercent l'influence essentielle, en par- ticulier l’état humide ou sec de la surface des corps, l'absorption superficielle d'oxygène ou d'acide carbo- nique, ou la dissolution, dans la couche superficielle, d’une partie de la matière elle-même, comme cest le cas de l’ébonite recouverte d'une couche d'acide sulfu- rique ou du verre recouvert d’une solution de soude. — MK. Prytz: Les étalons Rômer. En 1623, les poids et mesures du Danemark et de la Norvège furent réglés par une ordonnance royale en vertu de laquelle l'aune danoise formerait désormais la base immuable de toutes les mesures et de tous les poids. Ole Rümer, promoteur de celte ordonnance, établissait ainsi un principe qui devait être adopté en France un siècle plus tard, à savoir que l'unité de volume et l'unité de poids doivent se baser sur l'unité de longueur. Un pied cube d'eau douce pèserait en conséquence 62 livres. L'auteur a entrepris de déterminer, en collaboration avec M. J. N. Nielsen, sur l’un des étalons conservés jusqu’à ce jour, la valeur du pied Rômer, exprimé en centimètres, et celle de la livre Rômer, exprimée en grammes. Le premier se trouve être à 19 égal à 34,407 centimètres ; la seconde à 499,75 grammes. Or, un fait absolument remarquable, c'est qu'en suppo- sant le poids de la livre égal à 1/62 du poids, dans le vide, d’un pied cube d’eau pure, à une température 88 —ñ@—_————— ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES voisine de 0°, le pied étant égal à la moitié de l’aune des Archives, à 18°, on obtient un poids de la livre qui ne diffère que de Ogr.07, soit de 1/7 °/5, du poids actuel, donné plus haut, de la livre de Rômer. Cet écart, du même ordre que ceux qui existent entre les divers poids conservés Jusqu'à ce Jour, indique proba- blement la haute exactitude despesées faites par Romer. Alfred GRADENWI TZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 2 Décembre 1909. {1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Wirtinger com- munique quelques observations sur la théorie des dif- férentielles totales. Il montre que les 1/2 n(n-1) équa- tions 2X/0xx — 9Xx 0x: sont déjà une conséquence de (n-1) équations et de l'existence et de la continuité de 2X:/0x , quand n N) X7 dxn pæ ñ=1 est une différentielle totale. 20 Scrsnces PHysiQues. — M. W. Trabert a recherché la cause des mouvements verticaux dans l'atmosphère. A l'intérieur d'une colonne d'air chaud, la pression baisse vers la surface du sol et l'air se meut vers le haut, tandis qu'à l'intérieur d'une colonne d'air froid, la pression s'élève à la surface du sol et l'air se dirige vers le bas. À ces mouvements verticaux sont liés des variations de volume qui provoquent une poussée ou un appel d'air latéraux. Les cyclones et les anticyclones sont la résultante de ces actions à la fois thermiques et dynamiques. — M. K. Przibram a mesuré les mobi- lités des ions dans des mélanges d'air avec des vapeurs saturées. L'eau, les alcools, les acides gras et le chlo- roforme abaissent la mobilité des ions négatifs plus fortement que celle des ions positifs; c'est le contraire pour les éthers des acides gras. Les hydrocarbures, CCI: et C°H°I agissent comme retardateurs simplement enélevant la densité du milieu. — MM. P. Friedlænder et A. Felix ont préparé une série de matières colo- rantesindigoides des séries de l’indène, du coumarane, de la quinoline, du thiazol et du pyrazol, ainsi que leurs produits de décomposition aldéhydiques. 3° SCIENCES NATURELLES. M. R. Possek montre qu'aucune objection de principe ne s'oppose à un trai- tement conservatif de la cataracte. Ses expériences prouvent qu'on peut obtenir thérapeutiquement la guérison en s'y prenant à l'origine et avec une modifi- cation du cristallin très peu avancée: une cataracte développée résiste, par contre, à tout traitement non opératoire. — MM. H. Rabl et J. Schafñffer poursuivent leurs études sur le système thyréo-thymique de la taupe et de la musaraigne, en opérant sur une série d'embryons de 3 1/2 à 11 millimètres de longueur, — M. F. Steindachner décrit deux nouvelles espèces de Cichlides du lac Tanganyika, le Plecodus brmaculatus et l'Ectodus albini. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Septembre et d'Octobre 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Burgatti : Sur les équations générales de la Dynamique. — M! G. Graziani : Sur la formule intégrale de Fourier. — M. L. Tonelli donne une formule d'intégration par parties, pour les fonctions de deux variables. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Righi expose les notions plus précises qu'il a cherché à obtenir par de nouveaux essais sur le mouvement d'un électron autour d’un ion dans la décharge magnétique, pour arriver à la connaissance des rayons dits magnétiques. — M. A. Amerio étudie l'émission de la photosphère solaire; il arrive à la conclusion que l'irradiation de cette photo- sphère doit être considérée comme égale à celle d'un corps parfaitement ou au moins approximativement noir. —M. À. Lo Surdoétablit les conditions auxquelles doivent satisfaire les séismographes pour enregistrer l'accélération séismique. —M. A. Mazzucchelli, pour- suivant ses recherches sur les sels de molybdène, a. obtenu des résultats qui jettent quelque lumière sur la constitution des acides complexes du molybdène en général. — M. F. Olivari s'occupe encore du poids moléculaire du sélénium dissous dans l'iode. — M. G. Pellini transmet la description de ses recherches sur l'isomorphisme des sulfates, séléniates et tellurates, et sur les combinaisons du sélénium et du tellure avec le mercure. — M. C. Ravenna et M. Zamorani ont exé- cuté de nouvelles expériences pour étudier la fonction physiologique de l'acide cyanhydrique dans le Sorghum vulgare; ces expériences, faites sur des feuilles déta- chées dont les côtes étaient immergées dans des solu- tions différentes, prouveraient que l'acide prend nais- sance aux dépens des hydrates de carbone et des nitrates, et qu'il représenterait le premier produit organique qui se forme dans la synthèse des substances protéiques. — MM. G. Plancher et O. Carrasco dé- crivent quelques réactions de la Bz-3-méthyl-Pr-3 : 3:2- triméthylindolénine. — MM. M. Padoa et F. Graziani continuent leurs recherches de nouvelles substances phototropes, dans la classe des hydrazones. — M. A. Minozzi a préparé des séléniures de platine, et ül donne la description des méthodes suivies et des pro- priétés des deux séléniures obtenus. — MM. L. Fran- cesconi et G. Gusmano étudient l'action de l'hydroxyl- amine libre sur la coumarine. — M. L. Mascarelli à fait de nombreuses recherches sur le cyclohexane employé comme solvant cryoscopique. — M. E. Oliveri- Mandalà étudie l’action de l’hydroxylamine sur des substances contenant la triple liaison entre deux car- bones. — M. F. Bottazzi décrit les phénomènes qu'il a observés de la migration anodique du chloroforme soumis à l'action d'un fort champ électrique, et de la décomposition électrolytique de ce chloroforme à l'anode avec formation d'acide chlorhydrique. — MM. C. Ravenna et O. Cereser cherchent à éclaircir la question de l'origine et de la formation physiologique des pentosanes dans les végétaux, à l'aide d'expé- riences exécutées sur les plants de haricots. Les auteurs croient que ce sont les sucres simples, au lieu des hydrates de carbone complexes, qui prennent part à la formation des pentosanes. — M. B.-L. Vanzetti à trouvé que dans l'olivier existe un glucoside, qui pré- sente une belle fluorescence azurée. — Dans une autre note, M. Vanzelti décrit un appareil dont il a fait usage pour étudier la diffusion des électrolytes dans une solution aqueuse. — M. G. Quagliariello a étudié l'influence de l'acide chlorhydrique et de la soude caustique sur la vitesse de coagulation du cristallin de l'œil. — Dans une autre note, M. Quagliariello s'occupe des propriétés physico-chimiques du sang chauffé à 55-600, 39 SCIENCES NATURELLES. — M. B. Grassi et M!!e A. Foa transmettent leurs dernières recherches sur le Phyl loxera de la vigne. —M. F. Eredia s'occupe des déduc- tions que l'on tire ordinairement de l'étude des cou- rants dans les basses couches de l'atmosphère, et indique une manière nouvelle de considérer ces cou- rants en tenant compte des influences orographiques d'une localité; il applique son système à l'Italie cen- trale, pour les deux versants tyrrhénique et adriatique. ERxEsr0 Maxcixi. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris, — L. nARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91° ANNÉE N° 3 15 FÉVRIER 1910 Revue générale des DONC pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris, — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et 1a Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Elections à lPAcadémie des Sciences de Paris. — Dans ses dernières séances, l’Académie des Sciences a conféré à l’unanimité à deux illustres sa- vants, Lord Rayleigh et A. von Baeyer, le plus haut titre dont elle peut disposer : celui d’Associé étranger. Lord Rayleigh est surtout connu du grand public par les belles recherches sur la densité de l'azote pro- venant de différentes sources, qui l’ont conduit à pré- dire l'existence dans l'air d'un nouveau gaz inerte plus lourd que l’azote et à l'isoler ensuite, sous le nom d'argon, avec le concours de Sir William Ramsay. Mais son œuvre globale est autrement considérable et, depuis 1870, il est peu de domaines de la Physique où son double talent de mathématicien analyste et d'expérimentateur ne se soit déployé. Citons : en Acoustique, ses travaux sur la propagation des ondes sonores, les vibrations des membranes et des tubes, la résonance, l'audition; en Optique, ses recherches sur la transmission de la lumière et l'influence de petites particules en suspension dans l'atmosphère, sur les réseaux de diffraction, le spectroscope, le microscope, la photographie; en Electricité, la détermination de l’ohm et de la force électromotrice des piles de Clark, ses travaux sur la bobine d'induction, le magnétisme, l'électromagnétisme; enfin toutes ses recherches sur la physique des fluides, leur mouvement et leur résis- tance, la formation et les propriétés des gouttes et des Jets d’eau, la capillarité, les densités et les compressi- bilités des gaz. C’est également une découverte retentissante, d'une portée industrielle et commerciale considérable, la synthèse de l'indigo, qui a rendu célèbre le nom d’A- dolphe von Baeyer. Mais elle n’a été que le couronne- ment d’une série ininterrompue de travaux de Chimie organique, qui commencèrent en 1858 avec une thèse sur les composés méthylés de l’arsenic et qui ont porté sur l'acide urique, les combinaisons de l'acide phta- lique et des phénols, l'acide mellitique, la constitution du benzène, la détermination des positions dans la série serpénique, enfin et surtout sur l'isatine et ses dérivés, qui ont servi à la synthèse de l’indigo. L'Académie vient également de nommer membre REVUE G'NÉMAL= DES SCIENCES, 1910. correspondant Sir Patrick Manson, le professeur et médecin anglais bien connu; elle a voulu ainsi rendre hommage à un ensemble remarquable de recherches dans le domaine de la Pathologie tropicale. $ 2. — Astronomie Relation entre la grandeur stellaire mi- nimum et l’ouverture des lunettes. — Ayant eu besoin, à différentes reprises, de comparer la gran- deur de la comète de Halley avec des étoiles visibles à la lunette et dans le même champ, j'ai été amené à faire des recherches sur la relation de l'ouverture de la lunette avec la plus petite étoile visible dans l’ins- trument dont je me servais. D'après une étude de M. Bigourdan, parue dans l'Annuaire du Bureau des Longitudes en 1909, un objectif de 157 millimètres ne décèlerait que des étoiles de 11° grandeur. L'instrument dont je me sers me permet de voir bien au delà. Il offre un diamètre de 162 millimètres, il est vrai, mais la différence de 5 mil- limètres ne saurait expliquer seule ce pouvoir de péné- tration. D’après Young, si une lunette montre une étoile de grandeur donnée, pour voir les étoiles d’une grandeur au-dessous, il faudra un instrument ayant une ouver- 10 ture plus grande dans le rapport de ÿ/2,512 (ou 100) à 1, soit par conséquent comme 1,59 est à 1. Il s'ensuit qu'en décuplant le diamètre de l'ouverture, la puis- sance de pénétration atteint cinq grandeurs plus bas dans la série des étoiles. En supposant, ce qui paraît très près de la vérité, que des yeux normaux puissent atteindre la 9° grandeur avec une lunette de 75 millimètres, la formule : m—9 +5 x log de l'ouverture en pouces nous donne le tableau I suivant (page 90), qui est très différent de celui de M. Bigourdan, mais qui me parait s'accorder infiniment mieux avec Ce que nous per- mettent de voir des lunettes de 63, 108,162 millimètres dont je me sers journellement. En pratique, la valeur théorique n’est jamais atteinte, en raison de l'atmosphère et de l'absorption de lumière 3 90 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE qui augmente avec l'épaisseur des lentilles. Cependant, les grandes lunettes de Lick et de l'Observatoire Yerkes Tagzeau I. — Grandeur des étoiles atteinte avec une lunette dont l'ouverture est donnée en millimètres. GRANDEUR stellaire atteinte OUVERTURE OUVERTURE en millimètres GRANDEUR stellaire en atteinte millimètres ——— | | ne 160 254 403 583 1.010 1.602 10 16 25 40 63 101 paraissent donner raison à la formule, même pour les étoiles de 17e grandeur. Je serais heureux de voir quel- ques astronomes, habitués aux observations stellaires, vérifier ou infirmer les conclusions générales de cette Note. Abbé Th. Moreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. $ 3. — Art de l'Ingénieur La Grenade-Sbrapnel Marten Hale. — [La grenade, arme qui joua autrefois sur les champs de bataille et dans les sièges un rôle des plus importants, fut employée dans des conditions tout à fait inatten- dues pendant la guerre russo-japonaise. Ce fut princi- palement à Port-Arthur qu'elle jouit de la plus grande faveur de la part des belligérants. Les Russes, qui avaient organisé trois ateliers destinés à sa fabrica- tion, n'en lancèrent pas moins de 18.000. Le général Kondratchenko, l'âme véritable de la défense, avait la plus grande confiance dans leur efficacité, confiance tellement partagée par les soldats russes que maintes fois ceux-ci, pour avoir les mains libres et iancer plus facilement ces petits projectiles, abandonnèrent mème leurs fusils. Russes et Japonais se sont ingéniés à les projeter le plus loin possible à l’aide de frondes, de catapultes ou de petits mortiers en tôle d'acier ou en bois cerclés de cordes, très légers, très portatifs et que les assail- lants transportaient avec eux le plus loin possible et parfois jusqu'à cinquante mètres de l'ennemi. Cette nécessité d'envoyer la grenade à très grande distance pour lui assurer son maximum d'efficacité a stimulé les inventeurs et, il n'y a pas longtemps, un ingénieur anglais, M. F. Marten Hale, a découvert une grenade qui parait satisfaire à tous les desiderata. Elle se compose essentiellement d'un solide tube de laiton T, qui a 140 millimètres de longueur et 35 milli- mètres de diamètre, entouré, vers le tiers supérieur, d’un anneau d'acier découpé S, qui, au moment de l'explosion, peut se fragmenter en 24 morceaux, au minimum, projetés dans toutes les directions. Vissée au bas du tube de laiton est une tige d'acier Q, qui peut être recouverte d’une mince couche de cuivre et a 250 millimètres de longueur; cette tige forme queue et assure pendant le tir la rectitude de la tra- jectoire; elle a à peu près le même diamètre que l'âme du fusil devant tirer la grenade pour pouvoir s'ajuster exactement à l'intérieur du canon. La gre- pade est, en effet, destinée à être tirée par un fusil, et c’est l'extrémité de la tige Q qui reçoit directement l'impulsion produite par la déflagration de la car- touche, Un petit tube {, de diamètre beaucoup plus faible, et qui lui est concentrique, se trouve à l'intérieur du tube de laiton T formant le corps de la grenade. Dans la partie annulaire G comprise entre les deux tubes est placée la charge d’explosif : environ 115 grammes de tonite, explosif très puissant, de maniement peu dangereux, analogue à la dynamite n° { au point de vue des effets produits, et très fréquemment employé en Angleterre. À la partie supérieure du pelit tube se trouve un détonateur D, portant en A une capsule de fulminate de mercure pour provoquer l'explosion de la grenade. Le détonateur D est fixé à un écrou mol- leté E vissé sur la plaque P formant la tête de la Fig. 1. — Vue en coupe de la grenade-shrapnel Marten Hale. — T, tube de laiton; S, anneau d'acier; Q, lige d'acier; {, petit tube concentrique; C, partie annulaire renfermant la charge d'explosif; D, détonateur; A, capsule de fulminate; E, écrou molleté; P, plaque de tête; M, percuteur,; F, fil de EL G, goupille; B, boucle en corde. grenade. Pour éviter tout risque d'accident, si faible soit-il, le détonateur est transporté généralement à part; c’est seulement au moment de faire usage de la grenade que le tireur le visse sur la plaque P. L'éventualité d’un accident est néanmoins très invraisemblable, car la capsule A, pour prendre feu, doit recevoir le choc d’un marteau ou percuteur en laiton M, maintenu en place d'abord par un fil de hit CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1 cuivre F et, de plus, par une goupille de sûreté G munie d'une boucle en corde à fouet B, Au moment de tirer la grenade, le combattant la place dans son fusil et, à l'aide d'une violente secousse produite sur la boucle B, arrache la goupille Q de son logement, puis il met en place le détonateur D. Le percuteur est encore retenu par le fil de cuivre F; mais, au moment où la grenade tirée tombe sur le sol ou heurte un objet dur, les extrémités du fil de cuivre sont cisaillées et le percuteur, glissant dans le tube 4, vient heurter et faire exploser l'amorce A. Le poids de la grenade complète n'étant que de 680 grammes environ, un homme peut facilement en porter 8 ou 10 à son ceinturon et sans le moindre danger. La tonite, en effet, doit être enflammée par un détonateur pour faire explosion : elle peut subir un choc sans inconvénient; ainsi on à tiré à balle à une distance de 100 mètres sur une grenade Marten Hale qui n'était pas munie de son détonateur; la charge de tonite fut traversée et mise en pièces, mais aucune explosion ne se produisit. Tirée avec une cartouche à cordite de l’armée an- glaise, la grenade peut être lancée à une distance d'en- viron 150 mètres, le fusil étant tenu sous un angle de 30°. Naturellement on peut faire varier la portée en modifiant l'angle de tir et en utilisant des charges de cordite un peu plus fortes; ainsi, avec 3 grammes de cordite, landis que la cartouche réglementaire de l'armée anglaise n’en contient que 2 grammes, on peut atteindre une distance de 300 mètres. Il est cependant bien évident que l’on ne peut faire usage, pour le tir de la grenade, d'une cartouche à balle : ce serait une très grave imprudence, car, d’une facon à peu près inévitable, on ferait crever le canon du fusil au point où la balle rencontrerait l'extrémité de la tige Q. Un phénomène très remarquable, c’est que, si l’on tire une grenade, le recul est sensiblement moindre que si l'on tire une cartouche ordinaire à balle; d’autre part, le tir de la grenade ne cause aucune dé- térioration au fusil, contrairement à ce que l’on crai- gnait lors des premières expériences, où l’on redoutait de voir le canon faire explosion. On peut passer alter- nativement et sans inconvénient du tir à balles au tir à la grenade. De nombreuses expériences ont été faites avec la grenade Marten Hale, soit au point de vue de la sécu- rité de son fonctionnement, soit au point de vue de son efficacité. Ainsi on a fait tomber une grenade d’une hauteur de 1,80 et la tête en bas sans provo- quer d’explosion; ce n'est que d’une hauteur de 2,40 que le percuteur put produire la déflagration; en modifiant le poids de celui-ci, on peut arriver exacte- ment au degré de sensibilité désiré. Des essais très complets ont été effectués avec ce nouveau projectile; certaines expériences ont même été faites en présence des attachés militaires ou de délégués de la plupart des grandes Puissances : il fut lancé soit sur des buttes de tir, soit sur des panneaux en papier représentant la même surface qu'une troupe en marche. Les effets destructifs furent extraordi- naires, les grenades produisant des excavations dans le sol, projetant en tous sens de nombreux fragments, renversant et criblant de trous les panneaux. Dans d’autres expériences, qu'il est impossible de relater ici complètement, on s'est attaché à conserver, à l’aide de certains artifices, tous les fragments émis par une grenade faisant explosion. On put ainsi re- cueillir 31 morceaux pesant ensemble 157 grammes et dont le plus petit était de 0,22 gramme. La qualification de grenade-shrapnel est done par- faitement légitime, car c'est bien en réalité un petit obus avec lequel on peut faire du tir indirect fur une troupe abritée derrière des tranchées ou des parapets : cela s'explique facilement, car la flèche de la trajec- loire d'une grenade tirée à une distance de 300 mètres est äe 75 mètres environ. Pendant leur récente campagne contre les Marocains, les Espagnols ont fait usage de la grenade Marten Hale, qui leur à rendu les plus grands services. C'est, en somme, une nouvelle arme très curieuse qui, dans le combat à courte distance, peut remplacer avantageusement peut-être, l'artillerie celle-ci ne pouvant suivre partout l'infanterie, qui se trouve ainsi munie d'un projectile dont l'effet moral est grand que les résultats effectifs sont meurtriers, Louis Serve. aussi $ 4. — Physique Recherches spectroscopiques sur les ares voltaïques aux pressions réduites. — Comme les rares travaux consacrés aux arcs voltaiques brûlant à basse pression se limitaient à la photographie des spectres de réseau de l'arc voltaïque, les phénomènes optiques des différentes zones de l'arc étaient jusqu'ici à peu près inconnus. M. A. Hagenbach s’est posé la tâche d'étudier les phénomènes spectroscopiques des arcs électriques à pression réduite en examinant, non pas les déplace- ments des raies spectrales, mais les spectres eux- mêmes qu'émettent les différentes parties de l’are. L'arc voltaique est renfermé dans un vase de fonte grise à parois de 4 centimètre d'épaisseur, de 30 centi- mètres de longueur, 12 centimètres de largeur et 30 centimètres de hauteur. Pour empêcher les oxyda- tions, la lampe à arc est faite exclusivement avec du laiton; les porte-électrodes sont isolés des parois du vase par des morceaux de marbre de 5 centimètres de longueur. Deux robinets métalliques servent respective- ment à faire le vide et à donner accès aux gaz. Les pressions élevées sont mesurées par un manomètre métallique et les basses par un manomètre à mercure. En regard des électrodes, à l'avant du vase, est vissé un anneau de laiton, entourant un disque-visière de quartz de 2 centimètres d'épaisseur et de # centimètres de diamètre. Aux pressions inférieures à la pression atmo- sphérique, les arcs voltaiques subissent des modifica- tions caractéristiques. L’électrode positive présente, indépendamment de sa position relative, un excès de température d'autant plus grand sur l’électrode négative que la pression est moindre. Tandis qu'à la pression atmosphérique l’électrode négative d’un arc fonction- nant pendantlongtemps finit par devenir incandescente, elle n'atteint jamais l’incandescence aux pressions inférieures (1 à 2 centimètres) et aux intensités de courant moindres que 9 ampères. À mesure que décroît la pression du milieu entourant l'arc voltaique, on y reconnait de plus en plus distinctement trois zones nettement différenciées. Au pôle positif, se forme une aigrette brillante, de la couleur ordinaire des arcs à électrodes de cuivre, et qui renferme presque exclusivement le spectre du cuivre. Au pôle positif, l’on observe, au contraire, à une raréfaction quelque peu considérable et en nombre variable, des points d'attaque violet-rougeàtre. Aux pressions basses, ces points d'attaque deviennent en général de plus en plus nombreux et finissent par envélopper l'électrode tout entière, sur une longueur de quelques centimètres, d'un duvet lumineux, présentant (ainsi que les points eux-mêmes) le spectre gazeux (azote). Entre les deux électrodes se trouve une enveloppe assez faiblement lumineuse, qui s’élargit de plus en plus quand la pression décroit. Aux pressions inférieures à 10 centi- mètres, on étire facilement l'arc voltaique à 5 centi- mètres de longueur sans l’éteindre, tout en élargissant l'enveloppe moyenne à quelques centimètres de largeur. Cette portion moyenne donne, à l'examen spectrosco- pique, un mélange des spectres d'électrodes et du gaz. La forme de la décharge dépend, on le voit, large- ment de la pression du milieu ; à mesure qne décroît celte pression, l’effluve tend de plus en plus à pré- dominer. 92 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE On remarque aussi, dans les spectres, les compo- santes de l'atmosphère environnante. Il s'établit, pour ainsi dire, un état d'équilibre entre la conduction due à la substance des électrodes et la conduction atmo- sphérique, équilibre qui dépend de cette substance ainsi que de la nature, de la pression et de la tempé- rature du milieu. D'autre part, les spectres des deux pôles sont nette- ment différents : Au pôle négatif, c'est le spectre du cuivre qui domine avec toutes ses raies d'arc et d'étin- celle, tandis que le spectre positif se confond plutôt avec le spectre de l'atmosphère. On trouve cependant, même au pôle négatif, à pression basse, des composantes atmosphériques partiellement différentes de celles du positif; c’est ainsi que l'arc brülant dans une atmosphère d'acide carbonique fait voir au pôle positif le monoxyde de carbone et au pôle négatif le spectre de Swan. D’autres composantes, commele cyanogène etl'hydro- gène, se trouvent pourtant réparties dans l'arc tout entier. Comme, dans tous les cas soumis à l'expérience, les atmosphères se composent de différents gaz, il se produit, à un certain degré, une séparation des com- posantes, des réactions chimiques ayant lieu aux températures élevées de l’arc. La diversité des spectres aux deux pôles est due, semble-t-il, aux conditions électriques et, d'autre part, aux conditions thermiques, déterminées par les premières. La méthode de l'arc aux pressions basses présente, paraît-il, différents avantages sur les tubes de Geissler pour l'étude des spectres gazeux, avantages dus aux intensités de courant beaucoup plus grandes qui sont accessibles aux arcs et aux intensités lumineuses bien supérieures qui en résultent. On peut réaliser des spectres gazeux, en courant continu, à de faibles différences de tension entre les électrodes. Dans un travail ultérieur, l’auteur se propose d'étudier dans des conditions analogues les propriétés électriques des arcs voltaïques et de les comparer aux propriétés optiques. $ 5. — Chimie La nature et la nuance du Pourpre antique. — M. Friedländer, le savant professeur du Conserva- toire des Arts et Métiers de Vienne, vient de résumer, en une étude définitive, les nombreuses publications dans lesquelles il a fait connaître ses travaux sur le pourpre antique. Le moment est d'autant plus opportun pour exposer le résultat de ces recherches qu’elles viennent d’être couronnées du plus complet succès. Nous connaissons maintenant d'une façon exacte la composition et la teinte de la célèbre matière colo- rante. Non seulement il est intéressant, au point de vue historique, d’avoir pu reconstituer ainsi un cha- pitre perdu de la technologie des arts d'autrefois, mais un semblable travail est un bel exemple de per- sévérance appliquée à vaincre des difficultés de toute sorte qui eussent paru insurmontables à la plupart des chercheurs. Si nous possédons, en effet, des échantillons d'étoffes teintes en pourpre antique, il est impossible, dans la plupart des cas, de savoir exactement s'il s'agit de véritable pourpre ou d’une des nombreuses imitations connues des Anciens. Il est impossible également de déterminer la nuance de la teinte d'après l'aspect actuel des étoffes anciennes; malgré sa solidité exem- plaire, le pourpre n'a pu résister à l’action des siècles, et tous les tissus authentiquement teints autrefois sont maintenant bleus, rouges, violets ou noirâtres. Même incertitude en ce qui concerne la signification du mot pourpre; au point de vue de la valeur des teintes, il possède, en France et en Angleterre par exemple, des sens différents. Il reste bien certaines peintures murales retrouvées à Pompéi, mais encore faut-il admettre que les tons ne se sont pas modifiés, réserve nécessaire si l’on réfléchit qu'à Pompéi mème les vêtements de cérémonie de la noblesse romaine, qui devaient être teints en pourpre, sont passés au violet vif. Enfin, si l’on possède sur les variétés de mollusques employés autrefois comme matière première du pourpre des données assez précises, l’on ignore abso- lument tout des procédés de teinture, qui furent tou- jours des secrets professionnels jalousement gardés Jusqu'à la disparition des dernières teintureries impé- riales de Byzance, lors de l'invasion des Barbares. C'est dans ces conditions qu'ayant obtenu des sub— sides suffisants de l’Académie des Sciences de Vienne, M. Friedländer résolut de déterminer la nature, le- mode d'emploi et la nuance du pourpre antique. I s'occupa d'abord de réunir une importante quantité de mollusques à pourpre, dont les variétés furent déterminées d'après les descriptions des naturalistes. latins, et les amas de coquilles retrouvés près de l'emplacement des anciennes teintureries de Tyr; les. directeurs de plusieurs Instituts maritimes de recher- ches biologiques : MM. R. Dubois à Toulon, Delage à Roscoff, Hermès à Rovigno, Cori à Trieste, lui pro— curèrent d’amples pêches de Murex brandaris et trunculus. Les coquillages furent brisés et le contenu des glandes à pourpre exposé au soleil pour le déve- loppement de la nuance. La matière colorante était ensuite débarrassée de ses impuretés par lavage à l’acide sulfurique dilué, puis dissoute dans des sol- vants tels que la quinoléine, l’éther benzoïque, etc., puis enfin purifiée par cristallisations successives. On jJugera de la difficulté du travail par ce fait que 12.000 Murex produisirent finalement un gramme et demi de matière colorante pure! L'analyse ayant permis de constater une forte teneur en brome, on fut amené à comparer le pourpre à cer- tains dérivés halogénés de l'indigo, découverts par MM. Friedländer et A. Bæyer, et fabriqués industrielle- ment depuis plusieurs années: les propriétés chimi- ques et physiques sont absolument semblables à celles. du dibromo-6:6"-indigo : Br/ N/ Na NazH/ N/NBr Des cinquante isomères répondant à la formule brute de composition centésimale, tous ceux qui dérivent de l'indirubine devaient être écartés, le processus d’oxy- dation chromogène indiquant une constitution symé- trique analogue à celle de l’indigotine. Le choix étant ainsi restreint entre quatre dibromo-indigotines, dont plusieurs avaient déjà été décrites, il fut facile d’iden- üfier produit naturel et substance synthétique. Or, les nuances pourpres obtenues soit naturelle- ment, soit synthétiquement, par M. Friedländer sont loin d’avoir la beauté que nous leur prêtions, au dire des poètes grecs et latins; la collection des couleurs d'aniline nous offre une riche variété de rouges et de violets très vifs, auprès desquels le rose violacé du pourpre véritable paraît très terne. Et les colorants modernes ont, en outre, l’incomparable avantage d’un prix de revient bien moindre que celui du pourpre d'origine animale : M. Friedländer estime, en effet, à environ 50.000 francs le prix du kilogramme de pro- duit pur extrait du Murex. Aussi, tandis que le pour- pre était porté par les seuls grands dignitaires, les indigos bromés sont-ils maintenant employés dans Ja confection des indiennes et autres tissus imprimés à bon marché. Et la moindre ouvrière moderne peut s'offrir un luxe autrefois réservé aux seules patri- ciennes. « Nous perdons une illusion, conclut M. Friedlän- der ; ces leintures qui passaient, il y a des milliers d'années, pour les plus belles et les plus brillantes qu'il fût possible d'obtenir, nous paraissent ternes et sombres ». Cela est évidemment dû à ce que nous con CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 93 naissons une infinité de colorants plus vifs; mais la renommée d'antan du pourpre ne proviendrait-elle pas aussi de la rareté du produit? Certains goûts fas, tueux des Romains, par exemple, étaient évidemment dictés non pas par la valeur propre des choses, mais par leur étrangeté, et il se pourrait très bien que la légende du pourpre n'eût pas d'autre origine. H. Rousset. $ 6. — Géologie Les méandres encaissés des cours d’eau. — La formation des méandres encaissés, c'est-à-dire des gorges plus ou moins profondes et toujours sinueuses que creusent certains cours d’eau et que l'on avait autrefois essayé d'expliquer par des réseaux de frac- tures presque toujours invisibles, était généralement attribuée jusqu'ici à un mouvement tectonique lent, qui, en soulevant le sol, obligeait les eaux courantes à enfoncer leur lit dans les roches dures du substratum. Les méandres encaissés devenaient ainsi une sorte de projection verticale plus ou moins fidèle des méandres divagants à l’origine sur un plateau ou une pénéplaine. C’est dans ce sens que l’on à parlé de cours d'eau anté- cédents et que l’on à pu dire que certaines rivières sont plus anciennes que les vallées qui les abritent. M. Vacher*, professeur à l'Université de Renses, qui a étudié récemment plusieurs rivières à méandres de petit rayon (la Creuse, la Bouzanne, l'Arnon, l’Auron, le Cher, la Grande Sauldre, l’Indroye, etc.), pense tou- tefois que les mouvements tectoniques invoqués par les partisans des cours d’eau antécédents n'ont pas une signification nécessairement générale etque, dans bien des cas, le travail de l'érosion, qui abaisse le niveau de base du cours d’eau, peut parfaitement, et à lui seul, expliquer le creusement des méandres. Pour le Cher, par exemple, la région de Montluçon joue le rôle d'un ombilic séparant deux biefs distincts : celui d'amont s’est développé d’une façon autonome, tandis que celui d'aval, qui est creusé dans des sédiments meubles, subissait de fréquentes modifications de ni- veau. Des phénomènes analogues se rencontrent éga- lement dans les vallées de la Creuse, de la Meuse ardennaise, etc. D'après M. Vacher, le creusement des méandres encaissés, réalisé suivant la tactique générale des eaux courantes, s’'expliquerait donc par la simple évolution cyclique de l’activité des rivières. Pendant une pre- mière période, de longueur indéterminée et variable suivant les cas, le cours d’eau déroule ses méandres divagants dans des roches meubles (couche génératrice des méandres), qu'il affouille et enlève, n'en laissant souvent que des lambeaux. Plus tard, lorsqu'il arrive à une couche plus résistante, obéissant alors aux lois de l'écoulement, il peut, en travaillant surtout dans le sens horizontal, imprimer ses méandres dans les roches assez tendres pour être sculptées, mais suffisamment résistantes pour les conserver (roches à méandres). M. C. Calciati?, qui a étudié le cours de la Sarine aux environs de Fribourg (Suisse), arrive à peu près aux mêmes conclusions. Toutefois, il attache moins d'importance à la couche génératrice que M. Vacher, et, pour lui, le fait qui domine tout, c'est la question de l'écoulement. Il admet les roches à méandres, et les définit même d’une façon assez originale, mais tout en reconnaissant que, suivant les cas, la même roche peut devenir un terrain à méandres ou un terrain à canons. ” Ces deux études sont intéressantes : elles établissent nettement que tous les méandres encaissés ne sont pas nécessairement fectoniques, mais que, dans bien 4 A. Vacuer : Rivières à méandres encaissés et terrains à méandres. Annales de Géographie, 15 juillet 1909. ? C. Caccrari : Le travail de l’eau dans les méandres encaissés. Les méandres de la Sarine. (Mém. Soc. fribour- geoïse, 1909.) des cas, ils sont simplement cycliques. Elles montrent aussi, une fois de plus, la puissance de variabilité des cours d'eau dans la réalisation de leurs travaux, parce que, tout en poursuivant leur but, ils doivent surmon- ter des obstacles essentiellement variés et variables. E. Fleury, Professeur à l'Ecole des Hocl $ 7. — Physiologie Études d'alimentation. — On sait que, pour établir un régime alimentaire pour l'homme, il im- porte de tenir compte de deux conditions essentielles : il faut fournir une quantité d'énergie chimique sufli- sante pour couvrir les dépenses calorifiques et méca- niques de l'organisme; il faut fournir un minimum de substances azotées assimilables. On sait que 100 gram- mes de protéines consommées en vingt-quatre heures sont suffisantes pour satisfaire aux besoins azotés d'un homme adulte de poids moyen. En pourrait-on donner moins sans inconvénient? Cela est très vraisemblable; les peuples d'Extrème-Orient ne consommeraient guère plus de 40 à 50 grammes d’albumine. D'ailleurs, on a pu réduire à ce même taux l’albumine alimentaire, dans des expériences instituées sur des Européens, les conclusions de ces dernières expériences, toutefois, n'étant acceptées qu'avec quelque réserve, étant don- née leur courte durée. Nous trouvons sur cette importante question de pré- cieux renseignements dans une Note publiée par M. H. Tissier‘. Dans un but thérapeutique, M. H. Tissier adopte un régime alimentaire riche en sucres et amidon, aussi pauvre que possible en protéines; il supprime les viandes, les œufs, le lait, les fromages: il permet les légumes et les fruits (mais non les graines de légumi- neuses). Pour rendre ce régime tolérable, il permet l'usage des graisses animales et des condiments ani- maux contenant moins de 1 °/, d’albumine : beurre, bouillon gras, jus de viande cuite, par exemple. Ce régime a été suivi pendant deux ans déjà, sans provoquer d'accidents ou de phénomènes de dénutri- tion par deux hommes adultes normaux : un médecin âgé de quarante-trois ans, ayant 1%,66 de taille et pesant 64 kilogrammes, et un chimiste âgé de trente-trois ans, ayant 1,65 de taille et pesant 66 kilogrammes. La ra- tion alimentaire journalière contient en moyenne de 42 à 50 grammes d’albumine, de 103 à 143 grammes de graisse, de 225 à 249 grammes d'hydrocarbonés, et elle correspond à 2.100 à 2.280 calories. Cette alimentation, très pauvre en albumine, a tou- jours paru suffisante, alors même que les sujets, en dehors de leurs travaux habituels, ont fait de la marche, de la bicyclette ou des exercices en plein air. L'urée éliminée a été de 10 gr. 3 à 10 gr. # par vingt- quatre heures, l'acide urique de 0 gr. #3 à 0 gr. 55, l'azote total de 4 gr. 39 à 5 gr. 94. L'équilibre azoté était réalisé comme suit : par exemple, azote uri- naire 4 gr. 71, azote fécal 1 gr. 36, soit azote excrété 6 gr. 07, azote des aliments 6 gr. 28. Ce régime pauvre en albumine a suffi aux besoins des sujets en expérience, non seulement pendant les périodes de repos relatif, mais même pendant les périodes de suractivité physique considérable (marche à pied de 30 kilomètres, course en bicyclette dans des conditions atmosphériques défavorables de 200 kilo- mètres), à condition de compenser les besoins énergé- tiques par un supplément de graisses et d'hydrocar- bonés. De ces intéressantes observations, il résulte que la ration d’albumine pourrait sans inconvénient être fixée à un taux notablement plus bas que les 80 et 100 grammes admis par les auteurs classiques. 1 Comptes rendus de la Société de Biologie (Régime végé- talien utilisant les graisses animales suivi depuis deux ans), 8 janvier 1910, p. 12-4. 94 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 8. — Géographie et Colonisation La régénération de la Corse'.— La Corse est, suivant l'expression de Ratzel, un pays de montagnes dans la mer”, une terre de 877.000 hectares qui n'arrive pas à nourrir ses 291.160 habitants (1906). Ce peuple de ruraux — 24,8 °/, seulement vivent dans les villes — exploite un sol âpre et dur, où la culture pourrait encore s'étendre beaucoup et surtout accroître ses rendements. Le blé ne donne que 8 hectolitres à l’hectare, contre une moyenne de 20 en France. C’est que le Corse est avant tout un montagnard et un pâtre, qui ne dispose, comme cultivateur, que d’un outillage rudimentaire. La production des céréales est insuffisante; celle des fruits est plus importante parce qu'elle réclame moins de travaux et qu'elle s'adapte parfaitement au climat méditerranéen. Mais la culture des légumes et des pri- meurs, qui pourrait être si rémunératrice, est à peu près complètement délaissée. Le petit bétail est trop nombreux, tandis que les bêtes à cornes ne repré- sentent qu'un trop faible contingent. Malgré la présence des richesses minières, l’indus- trie extractive souffre de l'insuffisance des voies de communication, et, dans un pays où la houille blanche abonde, aucune usine n’est installée pour le traitement des minerais. Les industries de transformation ne sont pas plus développées; elles se limitent à quelques minoteries, huileries, scieries, fabriques d'acide gal- lique. Les forêts, qui couvrent une partie de l'ile, pour- raient être une source de richesses; mais la Corse est encore un pays de transhumance : la chèvre a com- mencé le déboisement et l’homme continue l'abus, s’attaquant surtout aux châtaigniers parce que, du fait d’une mauvaise organisation commerciale, il est plus avantageux de fabriquer de l'acide gallique que de vendre les fruits. A ces mauvaises conditions économiques s'ajoutent de mauvaises conditions sociales. La Corse est «un morceau du Moyen-Age subsistant au milieu de la Méditerranée », où la Justice est affaire personnelle et où la vendetta est portée à la hauteur d’une institution nationale. Les luttes politiques absorbent tout l'intérêt de la population au détriment de l’organisation écono- mique. D'autre part, la plupart des fleuves n’ont pas d'embouchure, en ce sens qu’un bourrelet de sable arrête l’eau qui se répand en lagunes où prospère l’ano- phèle. La moitié de la population est atteinte par la malaria et la moyenne de la vie descend jusqu'à 23 ans dans certains districts. Aussi, bien que le pays soit très prolifique, il se dépeuple, aidé encore par l'émigra- üon. Il faudrait donc commencer par assainir le pays en drainant et en créant des canaux d'irrigation en eau vive; du même coup, on étendrait les cultures en élevant les rendements. Cette œuvre est, en partie, du rôle de l'Etat, mais elle serait puissamment favorisée par la création de Syndicats agricoles qui développe- raient l'initiative privée. La Corse possède un Syndicat d'initiative pour le développement du tourisme; c’est une œuvre excel- lente, sans doute, mais, comme le fait remarquer M. Hauser, elle doit ètre précédée de la régénération agricole, sans quoi elle ne laisserait que peu de béné- fices; il faut alimenter le tourisme et l’outiller avant de le susciter. Les Corses aiment l'instruction; c'est pourquoi il faut les doter d'écoles professionnelles qui les détourneront des carrières libérales au grand profit de l’agriculture, # Henri Hauser : Une terre qui meurt. Revue du Mois, 10 no- vembre 1909. — Jo. : La régénération de la Corse. Revue politique et parlementaire, septembre 1909. — J. BerntTRaANo : L'évolution de la Corse. Revue du Mois, 40 avril 1908. ? Fr. Rarzez : La Corse. Annales de Géographie, juil- let 1899. de l'industrie et du commerce. Il faut, enfin, favoriser les débouchés, et, pour cela, perfectionner les moyens de transport. Le mètre cube de bois de construction, vendu sur place de 2 à 10 francs, revient actuellement dans les ports à 30 ou 40 francs. Ouvrir de nouvelles routes, prolonger les voies ferrées, augmenter les ser- vices et les escales des Compagnies de navigation, établir des tarifs soudés avec les Chemins de fer fran- cais, toutes ces mesures s'imposent à bref délai. Et il faudra encore organiser le crédit agricole et commer- cial, car l’île entière ne possède que deux bureaux de la Banque de France et quatre banques locales. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 9. — Enseignement Conseil de l'Université de Paris. — Le Con- seil de l'Université de Paris vient d'examiner le Rap- port qu'il adresse chaque année au Ministre sur les. actes et la vie de l'Université au cours de la dernière année scolaire. Le Rapport de cette année a été rédigé par M. le Professeur Cauwès, de la Faculté de: Droit. L'an dernier, un anonyme a mis à la disposition de. l’Université de Parisune subvention annuelle de 30.000 fr. pour créer des bourses de séjour près les Universités de l'étranger, en faveur de jeunes professeurs ou de futurs professeurs de l’enseignement supérieur et de l’enseignement secondaire. Le Conseil a décidé que le montant de chaque bourse serait de 3.000 francs. Elles seront au nombre de dix, et seront attribuées à des docteurs en droit, à des docteurs en médecine, à des pharmaciens de 1"° classe qui se destinent à l’en- seignement, à des agrégés des divers ordres de l’ensei- gnementsecondaire, hommes ou femmes. Lesdemandes devront être adressées au vice-recteur avant le 42° mai de chaque année. Le vice-recteur a exposé au Conseil le résultat des. négociations engagées par lui avec l’Institut Pasteur pour la construction à frais communs, sur une portion des terrains appartenant à l'Université, entre les rues d'Ulm et Saint-Jacques, d’un laboratoire destiné à l'étude des phénomènes de radio-activité et aux applica- tions thérapeutiques de ces phénomènes. À l’unani- mité, le Conseil d'administration de l’Institut Pasteur est entré dans ces vues. Le laboratoire projeté com- prendra deux parties : l’une pourles recherches scien- tifiques sous la direction de M: Curie, l’autre pour les applications médicales sous la direction de l'Institut Pasteur. Celui-ci contribuera aux dépenses de cons- truction et d'installation de l'établissement par une subvention de 400.000 francs prélevée sur les arré- rages du legs Osiris. M. Liard a informé le Conseil que le Conseil muni- cipal venait d'approuver les plans et devis de l’Institut de Chimie à construire sur les terrains de l'Université. Enfin, ila porté à sa connaissance la nomination de M. Marchis à la chaire d'aviation créée par M. Basil Zaharoff, avec les arrérages d’une somme de 700.000 fr. que ce généreux donateur a offerte à l'Université. Le vice-recteur a également mis le Conseil au cou- rant de l’état du projet de création de l’Institut aéro- technique que l’Université devra à la libéralité de M. Deutsch (de la Meurthe), laquelle comprend un capital de 500.000 francs et une subvention annuelle de 15.000 francs: Cet Institut va être construit sur un terrain de # hectares dans la commune de Saint-Cyr, à l'intersection de la route de Rambouillet et du che- min de Bois-d’Arcy. En outre de cette surface consi- dérable, il sera pourvu d'une piste rectiligne de 1.300 mètres de longueur, contiguë au champ de ma- nœuvres de l'Ecole de Saint-Cyr. Les plans sont prêts, les travaux comméncés, et il y {a tout lieu d'espérer que le nouvel établissement pourra fonctionner au 1 mai 1910. Û D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 95 LE CALCUL ET L’OBSER VATION DE L’ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 VISIBLE EN FRANCE I. — INTÉRÊT DE L'ÉTUDE DES ÉGLIPSES. Il y à un ensemble de phénomènes célestes dont l'observation, tout en ayant pour les profanes l’at- trait de spectacles impressionnants, présente en même temps pour les savants des objets d'étude précieux, leur permettant de tirer des conclusions sur la nature et les dimensions des corps célestes et sur les lois mécaniques qui règlent leur marche. Les éclipses de Soleil sont certainement parmi les plus intéressants des phénomènes de cette caté- gorie, et leur prédiction et observation à toujours suscité un vif intérêt. Le grand éclat que la lumière solaire répand autour de cet astre rend invisibles les autres corps célestes, quand ils sont dans son voisinage. Or, l'observation d’une éclipse permet aux astronomes de déterminer, avec une grande précision, la con- jonction des deüx astres et d'en tirer les coordon- nées de la Lune à une époque où toute autre obser- vation de notre satellite est impossible. De plus, s’il existe des planètes entre Mercure et le Soleil, ce n’est que pendant la très courte durée des éclipses totales qu'on peut espérer les observer directement. Certains phénomènes astronomiques n'ont été découverts que grâce à l'observation des éclipses. On peut citer : les diverses parties de la couronne solaire; le cercle rouge qui enveloppe la photo- sphère, et qu'on appelle la chromosphère, avec ses protubérances; la couche renversante, et plusieurs autres. Quant au calcul d'une éclipse, s’il est fait avec toute la précision qu'il comporte, et si l'on se pro- pose de déterminer toutes les circonstances du phénomène pour les divers points du Globe ter- restre d’où l'on peut observer ses phases, ce calcul est certainement parmi les problèmes les plus inté- ressants qui se posent à l'astronome calculateur. Les éclipses du Soleil par la Lune, visibles à la surface du globe terrestre, ne sont pas précisément rares, et leur nombre peut dépasser 250 dans l’es- pace d’un siècle. Ainsi, l’on a pu observer 255 éclipses, tant partielles que totales ou annu- laires, dans le courant du xvur° siècle; le xIx° siè- cle en à eu 242, tandis que le xx° n'en verra que 226. Mais ces phénomènes ne sont pas visibles de tous les points de la Terre, et la plupart des points ne voient qu'une partie plus ou moins grande du disque solaire éclipsé par la Lune. La largeur de la zone terrestre pour laquelle le Soleil disparait entièrement dépasse rarement quelques degrés en latitude géographique, et la durée de la phase totale dans un même lieu reste toujours inférieure à huit minutes de temps. Dès lors, on conçoit facilement que la probabi- lité de voir une éclipse totale ou annulaire se pro- duire en un certain lieu, ou dans une région limitée de la Terre, est très petite et que souvent plusieurs générations ont pu passer dans un pays sans avoir eu l’occasion d'observer ce phénomène. Si nous considérons en particulier la France, nous trouvons que, dans l’espace de trois siècles, son territoire n'est traversé que par six éclipses totales et une annulaire. Au xvi° siècle, deux éclipses totales ont passé sur la France: la pre- mière le 12 décembre 1706 et la seconde, le 22 mai 1724. Cette dernière se présentait d’une facon défavorable pour les observations, le Soleil, pendant la phase totale, étant trop près de l'horizon. Dans le courant du xix° siècle, on a pu voir, le 8 juillet 1842, une éclipse dont la phase totale, d'une durée de plus de deux minutes, a passé sur Perpignan, Narbonne, Marseille et Toulon. Elle a été observée, de la terrasse de la citadelle de Per- pignan, par Arago, qui a ensuite discuté l’ensemble des observations faites, tant en France que dans les autres pays de l’Europe, dans un Mémoire inséré à l'Annuaire du Bureau des Longitudes pour 1846. Le 9 octobre 1847, une éclipse annu- laire a traversé la France, tandis que les éclipses totales du 18 juillet 1860 et du 30 août 1905, qui, toutes les deux, ont passé sur le nord-est de l'Es- pagne, ont côtoyé le territoire de la France, en sorte qu'on a pu voir des éclipses presque totales dans les départements du Midi. Pendant tout le xx° siècle, la France ne sera traversée que par trois éclipses totales : celle du 47 avril 1912, dont nous parlons ici, et deux autres, dont l'une passera, le 15 février 1961, dans le Midi, tandis que celle du 11 août 1998 touchera plusieurs départements du Nord. La zone terrestre dans laquelle on voit la phase totale ou annulaire d’une éclipse de Soleil est formée 96 D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 par l'intersection de la surface de notre planète avec le cône d'ombre qui enveloppe intérieurement le Soleil et la Lune. Le sommet de ce cône peut tom- ber au delà du plan fondamental qui passe par le centre de la Terre perpendiculairement à l'axe du cône : dans ce cas, l’éclipse est {o{ale. Sile sommet du cône reste en decà du plan fondamental, deux cas peuvent se présenter : ou bien ce sommet reste assez éloigné du plan fondamental pour ne rencon- trer la surface du globe terrestre en aucun point, l'éclipse est alors annulaire; où bien ce sommet pénètre pendant un temps assez court dans l’inté- rieur du globe, et l'éclipse, après avoir été annu- laire dans certains lieux de la Terre, devient totale pendant quelque temps, pour redevenir annulaire vers la fin. On comprend facilement que, dans ce dernier cas, Fig. 14. — Schéma indiquant les points de la surface ter- restre où l'éclipse sera lotale et ceux où elle sera annulaire. la largeur de la zone qui voit la totalité est très petite et que la durée de la phase totale en un cer- tain lieu est très courte. Ce cas se trouve représenté dans la figure 4. Si la ligne pointillée est la trace du chemin parcouru par le sommet du cône d'ombre relativement à la Terre supposée fixe, on voit qu'aux points A et D de la surface terrestre l’éclipse sera annulaire, tandis que les points de cette surface compris entre B et C verront une éclipse totale de très petite durée, C'est ce qui se produira pour l’éclipse du 17 avril 1919, si l’on admet pour le demi-diamètre de la Lune la valeur 15'32",83, dont on se sert dans les calculs de la Connaissance des Temps et que nous avons éga- lement adoptée pour ce travail. IT. — LE CALCUL DE L'ÉCLIPSE. Pour faciliter l’organisation des observations autour de la phase totale si restreinte, nous avons cru utile d'introduire dans le calcul de cette éclipse encore plus de soin qu'on n’en apporte habituel- lement. On arrive à ce but en remplissant deux condi- tions : il s'agit d'abord de connaître d'avance, avec toute la précision possible, les dimensions et les positions respectives du Soleil et de la Lune par rapport à la Terre, à l'époque du phénomène; il faut établir aussi, avec la plus grande rigueur, la théorie de ces phénomènes. La théorie des éclipses a été développée, avec toute la précision désirable, dans un travail de P. A. Hansen, extrait des Mémoires de l'Académie des Sciences de Saxe (Leipzig, 1858), et ce sont les formules de Hansen, appliquées dans les calculs de la Connaissance des Temps, qui nous ont servi. Ces formules demandent une très grande quan- üité de calculs, et la théorie de Hansen soulève sou- vent des questions assez délicates quant à l’inter- prétation géométrique des Lermes analytiques em- ployés; mais, en revanche, elle permet de calculer avec une précision extrême les circonstances du phénomène pour les divers points de la Terre à tous les instants compris entre le commencement et la fin de l’éclipse générale. Les diverses courbes-limites, que l’on trouve assez facilement par des méthodes graphiques, si l’on se contente d'une approximation grossière, ne s'ob- tiennent, par la méthode de Hansen, qu'après de longs calculs, dans lesquels on est souvent obligé de recourir à plusieurs approximations successives. Pour certaines de ces courbes, en particulier pour celles qui donnent les conditions du phéno- mène à l'horizon, on pourrait, à la rigueur, se dis- penser de faire les calculs avec une très grande préci- sion, étant donné le peu d'exactitude qu’on peut attendre des observations faites dans le voisinage de l'horizon. Mais les courbes qui se rapportent à la phase totale ou annulaire doivent être données avec toute la précision que comporte la théorie, puisque celle phase peut être observée avec beaucoup d'exactitude et que l’on peut, en comparant les ré- sultats des observations avec ceux que donnent les calculs, déterminer les corrections qu'il faut appli- quer à certaines données astronomiques. Mais, avant de calculer les diverses circonstances d'une éclipse, il faut connaître, avec la plus grande exactitude possible, les positions du Soleil et de la Lune par rapport au centre de la Terre. III. — EPHÉMÉRIDE DU SOLEIL. On se sert, dans les calculs de la Connaissance des Temps, des Tables de Le Verrier, publiées dans le tome IV des Annales de T Observatoire de Paris. On peut également tirer les positions du Soleil des Tables de Newcomb (Astronomical Papers of D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 97 the American Æphemeris and Nautical Almanac, vol. VI) qui sont calculées pour le méridien de Greenwich. Si l’on réduit au même méridien les données tirées de ces deux Tables, on trouve des différences très petites. Dans un travail que nous avons publié, il y a une dizaine d'années, sur les Ephémérides astronomiques en France et à l'Etranger (Paris, Imprim. Nationale, 1898), avons donné, pour 1900, un tableau de comparaison des Æ et D du Soleil tirées des deux Tables. La différence maximum était de 05,10 pour l’Æ et de0",4 pour la D. En faisant la même comparaison onze ans plus tard, on trouve qu’en 1911 les différences se main- tiennent dans les mêmes limites (0°,10 en Æ et 0",5 en D). Pour l'éphéméride que nous avons calculée d'après les deux Tables, et qui s'étend autour du 17 avril 1912, nous trouvons que les longitudes apparentes du Soleil, d'après Le Verrier, sont de 0",43 plus grandes et les latitudes de 0",04 plus petites que d'après Newcomb. Le logarithme du rayon vecteur, qui peut parfois différer d'une quinzaine d'unités du 7° ordre décimal, a été trouvé, pour cette époque, de 4 unités plus grand dans Le Verrier que dans Newcomb. Dans l'éphéméride adoptée pour nos calculs, nous avons, en attribuant un poids égal aux deux Tables, pris les moyennes des valeurs trouvées". Pour le demi-diamètre moyen du Soleil, nous avons pris la valeur 15/59”,63 donnée par Auwers et adoptée par les astronomes de tous les pays. nous IV. — ÉPnÉMÉRIDE DE LA LUNE. Les positions de la Lune sont tirées des Tables de À. Hansen. Jusque vers 1860, elles représen- taient les observations à moins de 3" en longitude; mais, à partir de cette date, on trouve que les lon- gitudes tirées de ces Tables sont toujours plus grandes que celles qu'on observe. Actuellement, ce désaccord, qui va en augmentant, atteint environ une demi-minute d'arc. Dans ses Researches on the Motion of the Moon (Appendix II of the Washington Observations for 1875), M. Newcomb trouva que l'on pourrait pres- que entièrement faire disparaitre le désaccord qui existe entre les Tables de Hansen et les observa- tions, en substituant à un terme empirique, que Hansen avait déjà été obligé d'introduire dans ses Tables, une modification (également empirique, du reste) d'un autre terme de Hansen provenant de 1! Les valeurs de la parallaxe solaire (8,80), de la nutation (9”,21) et de l'aberration (20/,47) sont celles qui ont été adop- tées en 1896 par la Conférence de Paris. La constante de la précession est celle de Newcomb. l'attraction de Vénus, et en modifiant convenable- ment les éléments du mouvement moyen”. M. Newcomb a donné un tableau de la valeur de ces corrections jusqu'en 1900; nous l'avons con- tinué jusqu'en 1930 (voir Zulletin Aslronomique, octobre 1908)°. Les coordonnées de la Lune, ainsi corrigées, s'accordent-elles avec les observations? Pour répondre à cette question, nous avons utilisé les observations faites à Greenwich el publiées dans les volumes annuels de cet observatoire. L'étude des observations faites de 4895 à 190% nous avait amené, en supposant une marche linéaire pour la différence [observation-caleul}, à appliquer à PA de la Lune du 17 avril 1912 une correction de + 05,35 trouvée par extrapolation. D'après le tableau publié dans le Bulletin Astro- nomique, et pour lequel nous avons pu utiliser les observations allant jusqu'à la fin de 1907, on voil que nous aurions même pu porter celle correction à + 065. Dans les Monthly Notices (janvier 1909), M. New- comb a repris à nouveau cette étude des désaccords existant entre la théorie de la Lune et la marche observée de cet astre. Il constate qu'on n'a pas encore pu expliquer les causes théoriques de ces désaccords et qu'on ne peut, par conséquent, pas prédire avec précision la marche future de cet astre. Il émet l'avis que, si l’on demande la déter- mination aussi exacte que possible de la longitude lunaire, on doit corriger de temps en temps par les observations les longitudes moyennes tirées des Tables de la Lune. C'est ce que nous avions fait en vue du caleul de cette éclipse, et nous sommes d'avis qu'on pourrait généraliser ce procédé dans d'autres calculs où 1 Si l’on désigne par V, le terme empirique : Ve—21",47 sin (8V — 13T + 274014!) la somme des termes qui forment Ja correction de Newcomb devient : — V. — 10,14 — 990,17 0 — 31,76 T° — 15/,49 cos À, où T est le temps, compté en siècles à partir de 1800,0, Vet T les longitudes moyennes de Vénus et de la Terre, rapportées à l'équinoxe de 1800,0. 2 Pour faire entrer ces corrections dans les Tables de Hansen, nous avons employé le moyen le plus simple, qui consiste à remplacer la table XLI (Arg. 30) de Hansen par le terme : 201,33 — 99! TT — 31,76 T2 — 15/,49 cos À reduit en unités de Hansen. On obtient ainsi, avec le temps comme argument, une nouvelle table XLI qu'il faut substi- tuer à celle de Hansen. s Ces corrections, tout en étant des moyennes obtenues par un grandnombre d'observations des coordonnées équatoriales (R et D), devraient être appliquées à la longitude écliptique de la Lune. En effet, les observations ayant été faites dans toutes les positions de la Lune, aussi bien au-dessus qu'au- dessous de l'écliptique, leurs moyennes peuvent ètre considérées comme des corrections à lalongitude et doivent alors entrer dans la transformation des coordonnées éclip- tiques en équatoriales. 95 D. entrent les coordonnées de la Lune, en particulier dans les calculs des occultations. Pour le demi-diamètre lunaire, la Connaissance des Temps adopte la valeur 15'32",83. Il est très possible que cette valeur soit trop grande, et alors la durée calculée de la phase totale, ainsi que la largeur de la zone terrestre dans laquelle on voit la totalité, seraient également trop grandes. Dans son ouvrage sur les éclipses de Soleil (Paris, Gauthier-Villars, 1905, et Annuaire du Bureau des Longitudes pour 1906), M. Bigourdan signale que, pour l'éclipse du 28 mai 1900, la durée réelle de la totalité fut de 3 à 5 secondes inférieure à celle donnée par la Connaissance des Temps. De son côté, M. Downing, le directeur du Naulical Almanac anglais, avait également signalé le désac- cord existant entre la valeur généralement adoptée pour le demi-diamètre lunaire et celle qui paraît résulter de l'observation des dernières éclipses. C'est à son instigation que M. le D' Peters avait entrepris, il y a quelques années, de déterminer une nouvelle valeur de ce demi-diamètre. Dans le volume pour 1911 du Nautical Almanac, nous trouvons la valeur 15'31",65, qui résulte de ce travail. Cette valeur est de 4”,18 inférieure à celle de la Connaissance des Temps”. V. — ITINÉRAIRE DE L'ÉCLIPSE. L'éclipse du 17 mars 1912 commence comme éclipse annulaire au Venezuela, dans le lieu dont : la longitude est : 64° 12/,6 à l’ouest de Paris et la latitude 4° 43,4 N. Après avoir passé sur la Guyane anglaise, elle devient totale dans la traversée de l'Océan Atlantique, vers le lieu dont la longitude est 23° 5’ O. et la latitude 28° 12! N. Le premier point du continent européen d'où 1 L'éclipse de 1912, par le très grand nombre d'observa- tions qu'elle provoquera à son passage à travers l'Europe, contribuera certainement beaucoup à la détermination d'une valeur définitive de cet élément si important dans la pré- diction des éclipses. Si la surface de la Lune était dépour- vue d'aspérités, la valeur de ce demi-diamètre employée pour les éclipses serait identique à celle qui convient aux occultations. Mais la moyenne qu'on obtient par l'obser- vation d'un très grand nombre d'occultations, ayant eu lieu, lantôt derrière un massif montagneux, tantôt dans une vallée lunaire profonde, se rapporte à un niveau intermédiaire de notre satellite. Dans l'observation d'une éclipse Lotale, les aspérités du bord de la Lune se traduisent par l'apparition, quelques secondes avant et après la totalité, d'une série de grains — Baiïly-beads — séparés par des espaces sombres. Les premiers correspondent aux vallées, les seconds aux montagnes lunaires. Or, si l’on convient de considérer la disparition du dernier rayon lumineux comme le commen- cement, et l'apparition du premier rayon comme la fin de l'éclipse totale, on voit facilement que le demi-diamètre correspondant est celui qui convient aux dépressions de la surface lunaire; il doit donc être plus petit que celui qui résulte, comme moyenne, de l'observation d'un grand nombre d’occultations. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 l'on pourra observer la phase totale se trouve sur la côte portugaise, vers 11° 0' 0. et 40° 40" N., à une quarantaine de kilomètres au nord de l'Observa- toire de Coïmbre. Elle quitte la péninsule ibérique tout près de la ville espagnole de Gijon (à environ 8° de long. O. et 43° 35’ de latitude N.). C’est dans la traversée de la péninsule que la phase totale atteint le maximum de sa durée, qui n’est que de six secondes. | La ligne centrale coupe la côte de France à une dizaine de kilomètres au sud-est des Sables-d'Olonne, dans le lieu : 4° 0’ O. et 46° 27’ N. La durée de la totalité n'est plus que de quatre secondes. Après avoir passé à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest des Observatoires de Paris et de Meu- don, entre Saint-Germain-en-Laye et le Vésinet, avec une durée de la totalité de deux secondes, elle cesse d’être totale à 3° 4’ de long. E. et 50° 44 de latitude N., près de Liége en Belgique. Ensuite elle traverse, comme éclipse annulaire, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Russie et, après avoir passé au sud de l'Observatoire de Poulkovo, la phase annu- laire finit en Russie d'Asie dans le lieu : 88° 36'E. et 56° 53! N. On voit par cet itinéraire de la ligne centrale que la phase la plus intéressante de cette éclipse tra- verse une série de pays qui disposent d’un outillage scientifiquetrès puissant. En passant à proximité de plusieurs grands observatoires de l'Europe, elle contribuera, par la multiplicité et l’organisation systématique des observations, à la détermination encore plus exacte de certaines données relatives. à notre système solaire et à l'étude des phéno- mènes physiques qui ont lieu à la surface du Soleil. VI. — ÉLÉMENTS ET CARTES DE L'ÉCLIPSE. Les données étant fixées pour les deux astres, on détermine les éléments de l'éclipse qui servent au caleul rigoureux des phases, pour tout lieu de la Terre dont on connait les coordonnées géographi- ques. Ces éléments sont publiés dans la Connais- sance des Temps, qui donneégalement les tableaux des positions géographiques des points ayant servi à tracer la carte générale de l’éclipse. Cette carte facilite aux observateurs la détermination assez fastidieuse des phases, laquelle demande, même pour un calculateur exercé, de longues heures de calculs. Pour la France etles pays limitrophes, ces calculs se trouvent entièrement supprimés et remplacés par une interpolation graphique très simple sur la carte que nous avons dressée à cet effet, et dont nous publions ici une reproduction à une échelle réduite (fig. 2). Nous donnons dans le Tableau 1 (p. 100), pour un D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 cerlain nombre de lieux, silués sur notre carte, les circonstances de l'éclipse telles qu'elles résultent d'une simple lecture faite sur l'original de la carte. Les heures des commencements el fins de l'éclipse sont données dans ce tableau en temps moyen civil de Paris (compté de 0 h. à 24 h.). 99 Sur la carte, les longitudes lerrestres sont comp tées de 0° à 180v à l'est et à l'ouest de Paris, el / heures sont exprimées en {emps moyen astrono les mique de Paris. On trouve le temps civil, en ajoutant douze heures au temps astronomique. On a tracé sur cette carte : Fig. Le] Pour exprimer la grandeur de l'éclipse, on à pris le diamètre du Soleil comme unité. L’angle au pôle est compté en allant du point nord du disque solaire par le deuxième bord au pôle sud. L'angle au zénith se compte dans le même sens, mais en prenant pour origine le point zénithal du disque solaire. FLoOFREMAN ST el. 2. — Carte indiquant les circonstances de l'éclipse pour divers points de la France. Les heures sont comptées en temps moyen as{ronomique de Paris. 1° Les limites, boréale et australe, de l'éclipse totale, qui se confondent dans le nord-est de la France avec la courbe de l'éclipse centrale. On à marqué, sur le parcours de la ligne centrale, les points où l’éclipse centrale à lieu au commence- ment de chaque minute. On trouvera pour les autres points, par interpolation graphique, l'heure de la centralité, à quelques secondes près; 100 D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1942 2° Les courbes boréales ou australes qui relient | les points dans lesquels on verra, au moment de la phase maximum, le Soleil éclipsé de 0,95, 0,90, 0,85, etc., de son diamètre. L'interpolation gra- phique donnera, pour les autres points de la carte, le maximum de la phase; au pôle P (si l'on observe dans un instrument monté équatorialement) ou l'angle au zénith Z (dans les autres cas) pour le commencement (C) et la fin (F) de l’éclipse partielle. Venant de l'Atlantique, la ligne de l'éclipse cen- trale et la phase totale ou annulaire passent sur les Tagceau I. — Conditions de l'éclipse en diverses villes de France et des pays voisins. Commence- ment avril 17 Fin avril 17 h 10 10. 11. ae 10. 10. 10. ade 5 Angers. . Bayonne . Berne . . - Besancon Bordeaux Bourges . Brest Bruxelles Cherbourg Clermont-Ferrand Dijon Dunkerque Düsseldorf . Gênes: - Genève Grenoble. . Greenwich. . . Ce rs Ce Æ Ge © À Of He © Or = © NO > 9 Qt Cr ©t © Limoges . . . Lyon re Maestricht . . . Mannheim . . Mans (Le) . . Marseille. . . Meudon . . Milan . te Montauban. . . Montpellier Mulhouse Cr Qt DO 10 À Où NI © © be O1 =) O0 CE eme = OT ND LONRRYNMAIL= OR RO S D QI ÉR CE Jr QE ET © 02 À O2 NO CO CS O0 He de I OT Où NO NO OF CO Où © =I € No De=LRwINWUIUIN=OU--ONIE= HE 4 0 O0 00 1H 00 © + VUS Ur H = © O0 O CO — Strasbourg. Toulon Ep triot CAPE Henlouse MRC ER TC 11. Tours Tome. Zurich TEMPS MOYEN CIVIL DE PARIS rm ANGLE AU POLE ANGLE AU ZENITH GRANDEUR maximum de Premier contact Premier contact Dernier Dernier contact l'éclipse contact 0,995 0,939 0,890 0,915 0.952 0.958 0,925 0,985 0,938 0,921 0,929 0,958 0,995 0,812 0,890 0,872 0,921 0,962 0,992 0,996 0,975 0,947 0,898 0,999 0,936 0,994 0,834 0,997 0.834 0,908 0,863 0,910 0,999 0,945 0,977 0,817 0,982 0,929 0,996 0,856 0,921 0,967 0,987 0,976 0.924 0,822 0,898 0,987 0.844 0.886 2310 234 238 237 233 234 227 232 228 935 236 230 233 243 238 238 229 230 232 233 231 234 237 233 237 231 240 239 242 235 238 237 233 235 230 3° Les courbes horaires sur lesquelles l’éclipse partielle commence (ou finit) aux heures indiquées. On trouvera par interpolation entre ces courbes, pour chaque lieu, l'heure du commencement ou de la fin de l'éclipse partielle. | Avec les deux tables suivantes (Tableaux IT et III), dont l'argument horizontal est la longitude L et l'argument vertical la latitude +, on trouvera l'angle | territoires, ou à grande proximité, des communes suivantes et aux heures indiquées ci-après, mesu- rées sur la Carte : TEMPS MOYEX LIEU civil de Paris avril 17 h m Talmont (Vendée) 12.14,4 Les Essai Vendée) Er EL 12.12,4 Les Herbiers {Vendée} 12.12,9 D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 101 Tagceau IL — Angle au pôle compté du point Nord — deuxième bord — point Sud. 2360 235 234 233 233 232 231 230 230 229 TEMPS MOYEN Nous avons signalé plus haut la grande impor- LIEU civil de Paris tes Ê avril 47 tance du demi-diamètre de la Lune dans le calcul Ni atie des divers éléments d’une éclipse et nous avons Saint-Laurent (Vendée) . . . 12 13,1 vu que la valeur de ce demi-diamètre, déterminée Bean (Momeetloire). 4 Del par le D’ Peters et adoptée par le Nautical Alma- Baugé (Maine-et-Loire) . . 12.15,0 : a : à Le Lude (Sarthe) . . . 42.15,5 nac anglais, est de 1”,18 plus petite que celle qui re Eorel SA 12.15,8 entre dans les calculs de la Connaissance des Grand Luce (Sarthe) 12.16,2 Bouloire (Sarthe) . . 12.46,5 Temps. RU. ee : Vibraye (Sarthe) . : . . . . . . . 12.16,8 Il était intéressant de calculer au moins les Montmirail (Sarthe) 12.16,9 limites et la durée de la phase totale ou annulaire, Frazé (Eure-et-Loir) 12:17,5 Th I Deroimes Maintenon (Eure-et-Loir) . 12.186 en prenant pour base la valeur (15/31",65) don- Épernon (Eure-et-Loir) . 12.18,8 née pour le demi-diamètre lunaire par le D' Pe- Les Clayes (Seine-et-Oise). 42-49°5 ters Villepreux (Seine-et-Oise) . 12.19,5 EN L'Étang-la-Ville (Seine-et-Oise) 12.19,6 Nous avons fait ce calcul, et nous trouvons RTE PR A -- 12.19,7 qu'alors l’éclipse du 17 avril 1912 resterait annu aint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise). 12.19,7 : : IC : becs (SOC) M PE 12 49.7 laire pendant tout son passage sur le continent Le Vésinet (Seine-et-Oise) 12.19,7 européen. La durée de la phase annulaire serait Montesson (Seine-et-Oise). ee 129,8 de 2,3 sur la côte de l'Atlantique ; elle monterait Houilles-Sartrouville (Seine-et-Oise). 12.19,9 Rp n x cs : Z Eaubonne (Seine-et-Oise) . . . 12.200 à 4,3 en passant près de Paris et atteindrait Attichy (Oise) . 12.91 ,6 6 secondes dans le point où la ligne centrale coupe SARA CESSE : fes la frontière belge. Cette durée s'annule pour un Sains (Aisne). . . . 12.22,9 É : A Mettet (Belgique) . 12.24,7 point de la ligne centrale qui tombe dans l'océan Tongres (Belgique) . 12.26,2 Atlantique. Le sommet du cône d'ombre rase en Maestricht (Hollande) . 12.26,5 % Hi la ere lu globe terrestre sans v pé- Honor Alemasae 0 A 12.273 ce point la surface du globe terrestre sans y pé Crefeld (Allemagne). . . . . . . 12.28 ,1 nétrer. TAgLeAU III. — Angle au zénith compté du point zénithal Nord — deuxième bord — point Sud. L Go O 4 O 2 O 00 % E I & E ( G F Œ E G F (6! F C F F ( E 420 265 260 | 9640 210 | 2630 ATo | 9620 430 | 2600 go 43 262 28 262 23 261 19 260 15 42 44 260 30 260 25 239 21 258 17 14 45 238 31 2 955 £ 17 38 256 32 20 17 954 35 22 48 252 31 24 49 250 39 97 50 248 41 29 51 246 43 31 102 D. SAVITCH — L'ÉCLIPSE DE SOLEIL DU 17 AVRIL 1912 NII. — L'OBSERVATION DE L'ÉCLIPSE. Nous ne parlerons pas ici de toutes les observa- tions que l’on peut faire pendant les éclipses. Dans son ouvrage sur les éclipses de Soleil, M. Bigour- dan a exposé avec autorité l'ensemble de ces obser- vations. On y trouve, d'une part, des instructions pour les observations qui, se faisant à Fœil nu, ou à l’aide d'instruments simples, peuvent être entre- prises par un grand nombre de personnes. En même temps, M. Bigourdan expose les observations plus délicates qui exigent un outillage spécial et ne peuvent être faites que par des astronomes familiarisés avec les méthodes scientifiques d'ob- servation. En ce qui concerne en particulier l'éclipse de 1912, remarquons d'abord qu'il ne faut pas s'attendre, même en se placant sur la ligne centrale, à ce que l'obscurité soit grande. Déjà pendant la dernière éclipse importante, que nous avons pu voir à Bur- gos, le 30 août 1905, l'obscurité, malgré une durée de presque 3 minutes, n'avait pas été aussi grande qu'on eùt pu l’espérer. Il faudra donc, en 1912, renoncer à une partie des observations d'Astronomie physique qui ne peuvent se faire que pendant une durée assez pro- longée de la totalité. Mais on sail que la couronne solaire, ainsi que la chromosphère et les protubé- rances, peuvent être observées quelque temps avant et après la phase totale. Parmi les observations de grande précision qu'on peut faire en se placant sur la ligne centrale, viennent au premier rang les contacts intérieurs des deux disques. Or, étant donnée l'incertitude des valeurs qu'on adopte pour le diamètre lunaire, on ne peut même pas prédire, avec certitude, pour l'éclipse de 1912, l'ordre dans lequel se suivront ces contacts sur la partie de la ligne centrale qui tra- verse la France et la péninsule ibérique. En effet, l'ordre de ces contacts se trouve renversé suivant -que l'éclipse est totale ou annulaire. Et comme, d'autre part, l'intervalle maximum qui peut séparer ces deux contacts n'atteindra pas 6 secondes dans le passage à travers la France, il sera difficile à un seul observateur de saisir les deux contacts dans le même instrument. Quand done on aura choisi un point avantageux sur la ligne centrale, pour y établir un poste d’obser- vation, il sera utile de lui adjoindre des postes se- condaires conjugués,répartis de partet d'autre sur la perpendiculaire à la ligne centrale et à quelques kilo- mètres de distance de celle-ci. Si l'éclipse est totale, on pourra ainsi fixer les limites réelles dela totalité et par cela mème la position exacte de la ligne cen- trale, ce qui permettra de déterminer ensuite, en | même temps, les coordonnées et le diamètre réels de la Lune, Des observateurs placés, par exemple, sur les hauteurs de la forêt de Marly, ou sur la terrasse de Saint-Germain, verraient dans le cas où léclipse serait lolale, Sans le secours d'aucun instrument, l'ombre de la Lune, ayant une forme presque circu- laire d'un peu plus de 2 kilomètres de diamètre, tra- verser vers 12°19%50$ les territoires compris dans la boucle de la Seine à une vitesse de 800 mètres à la seconde, venant de Mareil-Marly et se dirigeant sur Houilles-Sartrouville. Mais, si l'éclipse reste annulaire, il serait inté- ressant de chercher à fixer les points de la Terre pour lesquels on aura vu les deuxième et troi- sième contacts réunis au même point du bord so- laire. Il est évident que les limites réelles de la zone annulaire doivent passer par ces points et la ligne centrale à égale distance entre elles. Les disques du Soleil et de la Lune seront-ils rigoureusement circulaires, ou présenteront-ils des diamètres de longueurs inégalessuivant les diverses directions? C’est là encore une question qu'on pourra facilement élueider à cette occasion. En effet, pour tous les points de la ligne centrale, les deux disques, de grandeur presque identique dans cette éclipse, deviennent concentriques à un moment donné. Ainsi, il est certain que, pour les points de la ligne centrale situés aux environs de Paris, la valeur absolue de la différence entre les deux diamètres, quel que soit d'ailleurs son signe, n'atteindra pas 14/1000 du diamètre solaire. En sup-. posant, par exemple, que pour ces points l’éclipse soit annulaire, le Soleil se présenterait alors, au moment de la centralité, sous la forme d’un anneau exces- sivement mince. Avec deux disques rigoureusement circulaires, cet anneau aurait partout la même épaisseur, tandis que la moindre déformation de l'un des deux disques, relativement à l'autre, se traduirait par une différence facile à observer, de l'épaisseur de l'anneau dans ses diverses parties, ou même par sa rupture. VIII. — Cuoix D'UN POSTE D'OBSERVATION. Nous terminerons cet arlicle par quelques indi- cations qui pourront guider les observateurs dans le choix d’une station. Nous avons déjà signalé, en décrivant l'itinéraire de la ligne centrale, que le maximum de la durée se trouve sur la côte du Portugal. Si l'on veut s'élever à une grande allilude, on trouvera dans les montagnes Cantabriques, au sud d'Oviedo, des points situés dans le voisinage de la ligne centrale et s’élevant à près de 2.000 mètres. La simple inspection d'une carte hypsométrique L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU de la France nous montre qu'il faut renoncer à y trouver des points très élevés sur le parcours de la ligne centrale. Elle traverse les grandes plaines qui partent de l'Atlantique et s'étendent jusqu'à la frontière de Belgique. Dans la Sarthe on trouve, au N.-E. de Montmirail, une région où les cotes dépassent 250 mètres. Dans la traversée de la forêt de Rambouillet, on peut s'élever à près de 200 m. (les Bréviaires : 192 mètres). A l'est de la forèt de Compiègne, la ligne cen- trale passe par des points qui ont 151) mètres d’al- titude, et près de la frontière belge on trouve des cotes de 250 mètres. Si l’on envisage la probabilité d'avoir du beau temps le jour de l’éclipse, on voit, par un simple coup d'œil jeté sur une carte donnant la répartition des pluies en France, que la ligne centrale traverse des régions favorables, où la quantité moyenne annuelle de pluie ne dépasse pas beaucoup 50 cen- timètres. Nous nous proposons de publier prochainement les positions géographiques des points les plus inté- ressants situés sur le parcours de la ligne centrale à travers la France. FONCTIONNEMENT NERVEIL 103 IX: CONCLUSION. On a pu voir, par les lignes qui précèdent [ue l'éclipse de 1912 n'est remarquable ni par la durée de sa phase totale, ni par l'étendue de la zone de sa visibilité, dont la largeur, en France, ne dépassera certainement pas quelques kilomètres. Ce qui la rend exceplionnellement intéressante, c'est la position géographique de sa ligue centrale, qui permettra, si le temps est favorable, de varier et de multiplier presque indéfiniment les observa- tions autour d'elle, sans grand déplacement de personnel ni de matériel. S'il était important, à cause des particularités du phénomène, d'en calculer les circonstances avec la plus grande précision possible, il est bien plus important encore, élant surtout données les diffi- cultés qui résulteront du rapprochement extrême des époques des contacts intérieurs, que nos corps savants, et même les grandes Associations scienti- fiques de Paris et de province, prennent en temps utileles mesures nécessaires à l'organisation métho- dique de ces observalions et à la préparation spéciale indispensable du personnel. D. Savitch. PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX ÉLEMENTAIRE I. — SCuËMA DE L'ARC RÉFLEXE Il me faut, au préalable, discuter la structure de l'appareil dont nous voulons étudier le fonctionne- ment. En effet, la fonction élémentaire du système nerveux ne peut pas, à mon avis, se représenter sur le schéma qu'on donne ordinairement du réflexe. L'arc diastaltique, constitué par un neurone cen- tripète linéaire uni à un neurone centrifuge égale- ment linéaire, peut bien figurer la voie, aller et retour, de l’influx nerveux dans le cas du réflexe simple ; mais la question n'est pas de savoir par où passe l’influx dans ce cas: c'est de savoir pourquoi (ou comment) tantôt il suitet tantôt ne suit pas cette voie; c’est de savoir comment, au lieu d’un effet moteur par exemple, revenant sur un muscle voi- sin de la périphérie excilée, une réponse différente apparaitra en un pointéloigné ; comment une partie plus ou moins importante du corps entier prendra part à la réaction, ou bien toute réponse apparente sera supprimée. Ces arrêts, ces changements en direction, inten- sité et délai ne s'observent plus quand on réduit les centres nerveux à un petit troncon de moelle épi- nière, où à un seul ganglion de la chaîne ventrale, D'accord! Mais osera-t-on affirmer explicitement qu'avec ces mutilations on n'a pas touché à la fonc- tion essentielle du système nerveux ? Il estelassique de considérer la réaction des ganglions antérieurs, des portions supérieures de l'axe encéphalo-rachi- dien, comme une fonction superposée, une compli- cation en quelque sorte adventice. Admettons un tel point de vue pour un instant, et faisons abstrac- tion de cette partie du système nerveux. Alors, la disposition supposée primordiale de l’are réflexe apparait comme une absurdité organique. Un sys- tème nerveux de ce type n’est pas un appareil bien adapté; la cellule myo-épithéliale lui est supérieure. Quand l'orteil d’une grenouille à été pincé, si c'es uniquement pour revenir sur la jambe que l’exci- tation remonte au milieu du dos, les trois quarts de l’are réflexe sont inutiles; done, ils sont nui- sibles, car c'est un accroissement du temps perdu, inévitablement fonction de la longueur du trajet. Mais, sur une grenouille entière, normale, le réflexe n’a jamais lieu de la façon régulière, uni- voque, correspondant au schéma trop simple que je critique. Bien plus, même sur une grenouille 10% L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX décapitée, n'ayant plus qu'un tronçon de moelle, le plus modeste réflexe unilatéral présente un cer- tain degré de coordination; l'accroissement des excitations en intensité provoque dans les réponses une extension systématique. Cela suppose plus de deux neurones en connexion. Et voici bien le vice du schéma par lequel on a voulu représenter la forme élémentaire du système nerveux : En additionnant ce schéma à lui-même autant de fois qu’on le voudra, on ne complique pas la fonction, on ne trouve jamais le moyen d'introduire l'irradiation, ni la déviation. Il n’y a pas de place pour amorcer une voie latérale. Pourtant, on a souvent dit que le rôle du centre nerveux est celui d’un aiguilleur de chemin de fer. Or, qui dit aiguillage dit hifurcation. En fait, la fibre radiculaire postérieure, c'est-à- dire précisément le neurone centripète qui est en jeu quand le schéma s'applique à l'expérience pour laquelle il aété concu, cette fibre est toujours bifur- quée. En arrivant à la moelle, chaque voie élémen- taire se divise en une branche ascendante et une branche descendante, qui à leur tour émettent plu- sieurs rameaux pénétrant à diverses hauteurs dans la substance grise. Découverte en 1889 par Ramon y Cajal chez les Oiseaux et chez les Mammifères, cette bifurcation est constante, c'est-à-dire affecte toutes les fibres sensitives des racines postérieures chez ces animaux ; elle est générale, car elle a été retrou- vée ensuite chez les Reptiles, les Batraciens et les Poissons; elle existe de même pour les nerfs sen- sitifs craniens. On a constaté, de même, chez les Invertébrés, Vers et Articulés, où pourtant la dis- position des neurones se présente sous un aspect si différent de la disposition des Vertébrés, que le cylindre-axe centripète est loujours bifurqué (Len- hossek et Retzius') Une règle anatomique si générale doit corres- pondre à quelque point essentiel du fonctionne- ment; ce point essentiel, c'est l’aiguillage. Le pro- blème physiologique consiste à reconnaitre le mécanisme physico-chimique qui détermine la di- rection de l'influx nerveux. Dans l'ancien schéma du système nerveux, on concevait celui-ci comme un réseau de fibres, dont chaque point nodal était occupé par une cellule : cellule polygonale, d'après l'apparence révélée, no- tamment dans les cornes antérieures de la moelle, par les colorations histologiques; quand on figu- rait l'arc diastaltique simple, même au maximum de simplicité, avec une seule cellule faisant la jonction de la fibre centripète à la fibre centrifuge, 1S. Ramon x Cayaz : Histologie du système nerveux, 19 p. 498 de l'édition française, Paris, 1909. 1 on gardait la possibilité d'accrocher une troisième fibre à un autre angle de la cellule; ainsi, la mul- tiplicité des voies restait impliquée dans la PRIE sentation du trajet le plus court. Au point de bifurcation, à l’aiguille, la cellule se trouvait en bonne place pour jouer le rôle d’ai- guilleur. Comment? On ne cherchait guère à pré- ciser; la cellule était une entité vaguement anthro- pomorphique ; par le mystère qui était en elle, on expliquait tout ce qu'on voulait. Aujourd'hui, la cellule nerveuse des anciens histologistes n’est plus qu'une partie de cellule, le corps du neurone; en Physiologie, elle n’est pourtant pas déchue de tout son prestige passé; une théorie, si elle ne lui recon- naît pas un pouvoir supérieur dans les fonctions nerveuses essentielles, heurte un sentiment tradi- tionnel. Que sait-on, en fait, sur cette partie du neu- rone? C’est la partie qui contient le noyau; elle contient, en outre, des substances colorables spé- ciales qui disparaissent dans la fatigue extrême et dans la réparation des lésions, qui sont, en un mot, des substances de réserve; mais ce second fait se rattache au premier, au pouvoir trophique qui est une fonction du noyau. Tout cela s'exprime fort bien par le nom qu'a proposé Sherrington : le périkar yon (autour du noyau). Ilest donc préférable d'employer ce terme qui traduit ce que nous savons, qui n’exclut pas autre chose qu'on pourrait venir à constater, mais qui est débarrassé de l’auréole légendaire attachée à la cellule nerveuse. Dans nos connaissances actuelles, les bras de l'étoile cellulaire (prolongements protoplasma- tiques) sont, en thèse générale, convergents (par rapport au mouvement de l'influx normal); les bifurcations divergentes se trouvent en dehors de la cellule, en cours de fibre; ce sont des divisions de l’axone. Là, point de place pour un aiguilleur; bien mieux, nous savons que là il n'y a point d’ai- guillage. L'influx nerveux parcourant une quel- conque des trois branches d'une fibre formant un T ou un Ÿ pénètre dans les deux autres, fut-ce em sens inverse du cours normal. C'est, sous une forme un peu différente, la loi bien connue de la conductivité indiflérente. Le fait qui établit cette loi de la facon la plus directe est l'expérience clas- sique de Babuchin sur la fibre innervant l'organe électrique du Malaptérure; la libre communication entre les branches de la bifurcation y apparait évidente. En généralisant un peu, on arrive à dire ceci : quand l'excitation a pénélré dans un neurone en un point quelconque, elle parcourt ce neurone dans toute son étendue, Jusqu'à l'extrémité de toutes ses branches. Mais ce neurone est en relation, par ces extré- L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 105 milés, avec plusieurs autres neurones, et, par l'intermédiaire de ceux-là et des suivants, avec le système nerveux tout entier. Si la conductibilité élait la même de neurone à neurone qu'à l'inté- rieur d’un neurone, chaque excitation diffuserail dans tout le système nerveux. Nous constatons, sans le comprendre, un pre- mier système d'obstacles à cette diffusion en tout sens. L'excitation de la racine antérieure, sec- tionnée du côté de la périphérie, ne provoque aucune réaction, comme l’a fait remarquer Gad, et Mislawski a montré qu'il n'y avait alors aucun signe d'activité, aucun courant d'action dans les racines postérieures en relation avec le bout cen- tral des racines antérieures excitées. Il faut admettre que certaines extrémités du neurone sont faites pour recevoir, d'autres pour émettre l'influx nerveux, et elles sont ainsi con- struites que leur fonctionnement n'est pas réver- sible. Mais laissons de côté cette propriété. Si les voies multiples offertes par les seuls pôles émissits des neurones étaient indifféremment ouvertes, le fonctionnement serait alors celui que nous pré- sente un animal empoisonné par la strychnine : des convulsions généralisées au moindre ébranle- ment. Dans le fonctionnement normal, il faut donc admettre une résistance (le terme de physique impédance vaudrait mieux) à certaines des com- munications interneuroniques dans la direction normale de l'influx. II. — LE NEURONE. DISCONTINUITÉ DU SYSTÈME NERVEUX. Remarquons-le explicitement : nous admettons la doctrine du neurone; nous admettons que le système nerveux est discontinu, formé d'éléments distincts et juxtaposés. Cette doctrine du neurone a été, ces années der- nières, fortement attaquée de divers côtés; il me semble que, dans sa partie essentielle tout au moins, elle à fort bien résisté. D'ailleurs, il m'im- porterait peu que le concept du neurone ne restät pas, comme l'ont posé Waldeyer et His, une unité cellulaire embryologique aussi bien qu'anatomique; la nature calénaire d'un neurone, formé d'éléments successifs fusionnés en un cylindre-axe unique, ne me paraît nullement établie; mais, si les choses étaient ainsi, la continuité des anneaux de cette chaine, aboutissant à la discontinuité lors du con- tact avec une chaîne différente, donnerait au point de vue fonctionnel les mêmes conditions que le neurone unicellulaire. Au contraire, la doctrine d’Apathy et de Bethe, — la fibrille, élément conducteur continu à travers touf le réseau nerveux, — constituerait des condi- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. tions toutes différentes et incompatibles avec la théorie que je veux exposer. Les figures données par ces auteurs sont bien nettes ;et, au témoignage d’anatomisies en qui j'ai toute confiance, les pré parations d’Apathy sur la sangsue sont elles-mêmes élat de faire la discussion technique si délicate qui se très nettes. Je ne me sens nullement en rencontre ici comme en tant de questions histolo- giques, à savoir jusqu'à quel point les images obtenues après action des réactifs représentent la structure vivante des tissus. Admettons que la fibrille passe directement d'un neurone à un autre. Il n’en résulte pas qu'il n’y ait point discontinuité {onctionnelle à la limite de deux neurones, même chez les animaux où s'observent de telles dispo- sitions. En effet, une fibrille nerveuse, quelle que soit l'assimilation intuitive qui tende confusément à s'établir lorsqu'on regarde ces apparences, ne con- duit certainement pas l’influx nerveux à la facon dont un fil métallique conduit l'électricité. Les physiologistes et les physico-chimistes qui traitent de cette conduction pour elle-même sont généra- lement d'accord pour admettre que le processus essentiel de la conduction nerveuse se passe nor dans la fibrille elle-même, mais au contact de la fibrille et du protoplasma cylindraxile. Si incon- sistantes que soient encore les théories de la con- duction nerveuse, elles s'orientent vers le principe du conducteur à noyau‘. Dans cette conception, la discontinuité le long du conducteur peut s'intro- duire par un changement brusque dans la nature de l'enveloppe, quand même le noyau resterait homogène; or, Apathy ni Bethe ne dénient la limi- tation du protoplasma suivant le schème du neu- rone ; au point de vue trophique, dans les processus de dégénérescence, par exemple, il y a discontinuité non contestée. J1 peut être utile de faire ici la remarque psycho- logique suivante : l'attention des anatomistes, des histologistes en particulier, est professionnellement dirigée vers la continuité dans le système nerveux ; leur préoccupation est de trouver le chemin par où peut passer l'influx. Représentons-nous une chaine de nettement discontinus et seulement contigus; pour y figurer schématiquement le trajet d'un influx ner- veux, nous serons amenés à tracer une ligne con- tinue à travers ces neurones. C'est cette ligne que cherchent toujours les histologistes, habi- tués à penser formes et non fonctions; il leur semble avoir facilité la tàäche de la Physio- logie quand ils ont pu montrer quelque chose unis- neurones, 4 Voir, par exemple, Borurrau, in Physikalische Chemie und Medizin de Koranyi et Richter. Leipzig, 1907, t. 1, p. 465 et suiv. 3* 106 L. LAPICQUE PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX sant d’une facon permanente le point de départ et le point d'arrivée du réflexe. Or, c’est à peu près comme si l'on voulait expli- quer le fonctionnement d’une sonnerie électrique en représentant un circuit fermé en permanence. Il était histologiste pourtant, ce physiologiste qui, il y a quelques années, imagina, entre les neu- rones, des contacts lantôt rompus et tantôt réta- blis par le mouvement amæboïde des terminaisons. Mais, c'était le sommeil, c'est-à-dire un état dura- ble de non-fonctionnement, qu'ilexpliquait de cette façon ; il se cantonnait encore sur le terrain de la continuité anatomique comme base du fonctionne- ment, puisqu'une rupture mécanique lui paraissait nécessaire pour qu'aucune excitation ne passät plus. Cette théorie est abandonnée. Les neurones sont conçus comme accolés les uns aux autres par des surfaces définies et permanentes, sinon immuables. Certains éléments nerveux, imprégnés par la mé- thode de Golgi, présentent si nettement des tenons et des mortaises que leur emboîtement réciproque s'impose à l'imagination : par exemple, les éléments caractéristiques de la circonvolution cérébelleuse. Ailleurs, on n’a aucune raison de supposer autre chose que ce ferme engrenage des éléments, for- mant de l’un à l’autre une synapse”. III. — LE PROBLÈME FONDAMENTAL EST À LA JONCTION DES NEURONES. ESQUISSE D'UNE SOLUTION. Nous voici arrivés à ce point : l'influx nerveux, aux ramificalions d'un cylindre-axe, suit toutes les branches, et aux extrémités de celles-ci vient jus- qu'à la surface de plusieurs autres neurones. Va- t-il franchir cette surface? C'est là qu'est le pro- blème véritable; c’est à la synapse qu'est localisée la fonction essentielle du centre nerveux. Avec la théorie du neurone, cette conception s'im- pose ; elle a déjà été exprimée plusieurs fois. Arthus, ne voulant plus localiser le centre (fonctionnel) dans la cellule, etrépugnant à localiser le rôle du centre dans « ce terrain neutre qui est la limite de deux neurones », en arrive à proposer de supprimer la notion de centre pour lui substituer celle du relai. Morat, dans les « Fonctions d'innervation » de son Traité de Physiologie, reproduit, comme figure, le trop simple arc réflexe linéaire; mais son texte insiste sur la complexité des relations interneuro- niques, le « chevauchement des champs polaires », l'« organisation en systèmes » d'un certain nombre de neurones. D'autre part, dans des expériences peut-être un peu schématiques*, il s'est efforcé de 1 Foster (1899): Du grec sun-apto, attacher ensemble. ? Morar : Sur le pouvoir transformateur des cellules ner- veuses. Archives de Physiologie, 1898, p. 278. démontrer que l'influx nerveux ne subit, au pas- sage par la cellule (disons lepérikaryon), aucune des modifications caractérisant l’action d'un centre. « Le centre de réflexion ne saurait donc être qu'au point où l’un de ces éléments (nerveux) agit sur l’autre. » Sherrington à donné un résumé, remarquable dans sa concision”, des différences qui distinguent de la simple propagation dans un tronc nerveux le passage de l'influx par les centres, et il a montré que presque toutes ces différences peuvent se caractériser de la facon suivante : {ransmission in- tercellulaire au lieu d'une transmission intracellu- laire; il fait cette remarque suggestive qu'un bon nombre des particularités de cette transmission intercellulaire se retrouvent aussi bien entre la fibre nerveuse afférente et l'appareil actif, museles ou organe électrique. La surface de séparation des deux éléments, qu'il y ait ou non une mem- brane matériellement distincte, introduit des con- ditions particulières qui doivent rendre compte des phénomènes caractéristiques du centre réflexe. Le problème est ainsi déplacé topographiquement du périkaryon aux contacts interneuroniques. Il n’est pas résolu davantage ; du moins, ne sera-t-on guère tenté d'attribuer au ciment inter-cellulaire, à une simple membrane, la puissance mystique qui seyait à la cellule nerveuse. Il nous faut cette fois une solution physico-chimique. Voici celle que je propose : Non seulement les neurones sont distincts les uns des autres anatomiquement, mais ils sont dif- férents les uns des autres quant à leurs propriétés physico-chimiques. La structure intime de leur substance varie d’un neurone à un autre, et, par suite, le phénomène de conductivité, ou influx ner- veux, qui est la réaction spécifique de chaque neu- rone, conditionné par cette structure, diffère aussi de neurone à neurone (à peu près comme le son de chaque corde dans un piano) par une période par- ticulière. Lorsque l'influx nerveux est arrivé à l'extrémité d'un neurone À, ce qui passe dans un neurone B contigu n’est pas identiquement le phénomène qui constituait la conduction dans le neurone À ; la perturbation au point de contact tend seulement à provoquer dans le neurone B l'apparition de l'in- flux propre à ce second neurone; pour une inten- sité donnée, l'efficacité de cette excitation dépend du degré de ressemblance des deux influx; plus les modalités de ces influx seront différentes, plus il faudra que l’influx excitant soit intense. Le neu- rone À étant en contact, par ses pôles émissifs, avec plusieurs neurones B, C, D..., lorsque l’influx À * Ergebnisse der Physiologie, t. 1V, 1905, pp. 814-816. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 107 ira en croissant d'intensité, il y aura d'abordtrans- mission de l'activité nerveuse exclusivement dans celui des neurones, B, par exemple, qui sera le mieux accordé avec À, puis à la fois dans celui-là et dans C, ensuite à B, G et D, etc... Ce schéma fonctionnel répond directement au cas simple el fondamental duréflexe médullaire classique, d'abord localisé, puis progressivement généralisé avec l’ac- croissement de l'excitation. Je vais l'expliquer plus loin et montrer comment ces données essentielles ont été fournies par l’expérience. Mais je tiens à faire remarquer tout de suite qu'il est incomplet comme représentation du fonction- nement des centres nerveux. En effet, il suppose tous les neurones B, C, D,... à l’élat neutre, ou de repos, tant que À ne vient pas agir sur eux. Or, dans un système nerveux intact, non simplifié par des sections opératoires, ces neurones seront en général soumis aux incitations simullanées d'autres neurones, provenant d’autres centres; de ces inci- tations, certaines pourront, bien entendu, être efficaces par elles-mêmes; mais, par rapport à À, il faut considérer le cas où, sans mettre en activité B, C, D,..., elles modifient l'état de ces neurones au moment où l'influx de À va les aborder. Cette modification peut s'exercer en deux sens opposés. Elle peut être positive, dans le sens de la mise en aclivité, quoique restant au-dessous du seuil; en langage physiologique usuel, c'est une excitation latente. G ou D subissant à la fois cette action et celle de À, nous savons qu'il peut y avoir addition des effets, de sorte que C ou D pourront alors être déclanchés par À avant B, malgré l’hétérogénéité plus grande des influx. Mais la modification peut être négative, dans le sens de l'arrêt d'activité : c'est l’inhibition. Si B est inhibé, c'est encore par G ou par D que passera le plus facilement l’influx de A. Cette déviation du trajet normal, qui constitue la partie la plus intéressante du fonctionnement ner- veux, je ne suis pas en état de l'expliquer. Mais, évidemment, le mécanisme de la déviation ne peut être abordé que si l’on connaît d'abord le fonction- nement de la voie normale; la théorie de ce fonc- tionnement est la base qu'il faut établir. Les seuls neurones dont les propriétés physiolo- giques soient directement accessibles à nos investi- gations sont les neurones dont les cylindraxes forment les nerfs périphériques; et, parmi ceux-ci, les neurones moteurs offrent de beaucoup les meilleures conditions à l'étude. La plus grande partie de nos connaissances sur le fonctionnement nerveux élémentaire a été acquise en prenant le mnusele comme réactif de l’activité nerveuse. Nous allons examiner, au point de vue spécial de notre question, les propriétés des neurones moteurs; ces propriétés sontétroitement liées, comme nous allons le voir, aux propriétés des muscles correspondants. IV. — RYTNIMES DIVERS DE L'INFLUX MOTEUR. La durée d’une contraction musculaire simple, ou secousse, produite par une excitation artificielle unique, varie dans un même animal suivant le mus- cle considéré, et aussi suivant l'espèce animale quand il s'agit de muscles homologues. Pour les muscles de la vie de relation et les Vertébrés, Marey a donné des déterminations de cette durée de la secousse, qui vont de 0°,03 (3 centièmes de seconde) chez lé pigeon, à 0°,8 chez la tortue. Le gastrocné- mien de la grenouille verte, objet ordinaire des études myographiques, présente une durée de secousse d'environ 0,15. Si le muscle recoit une nouvelle excitation .pen- dant quil est encore contracté, une deuxième contraction recommence sans que le muscle ait le temps de revenir à sa longueur primitive; les deux secousses sont ainsi plus ou moins fusionnées. Si le muscle recoit une série d’excitations rythmées à intervalle assez court, le muscle n’a pas le temps, entre deux contractions nécessaires, de se relâcher d’une manière appréciable; le poids qui le tendreste soulevé et immobile ; la contraction est en appa- rence continue; c'est ce qu'on appelle Ze fétanos. Un examen plus délicat permet de dénombrer dans ce tétanos les processus élémentaires dont il est la réunion : vibrations de la surface du muscle, perceptibles mécaniquement ou par la hauteur du son qu’elles produisent; variations électriques enre- gistrées par les photochronographies. On peut rapprocher les excitations bien au-delà de la fré- quence nécessaire pour produire le tétanos; on retrouve toujours dans ces processus élémentaires le nombre des excitations, si ces excitations ont été portées directement sur le muscle ou sur son nerf moteur. Mais, si on fait tomber les excitations sur la moelle épinière, la fréquence des oscillations musculaires ne suit plus la fréquence des excita- tions; elle s'arrête à un nombre fixe, qui est voisin de vingt par seconde pour le gastrocnémien de la grenouille comme pour un assez grand nombre de muscles chez les Mammifères ; c’est le centre ner- veux moteur, cette fois, qui répond aux excita- tions par son rythme à lui, par son influx nerveux normal. Car la contraction naturelle d'un muscle, telle qu'elle se produit dans les mouvements volontaires est un tétanos; la périodicité de ce tétanos nature peut être déterminée par les mêmes procédés que ci-dessus, et on trouve les mêmes valeurs. L'influx nerveux normal est discontinu, périodique; et l’on constate que sa fréquence est exactement celle qui 108 est nécessaire pour produire le tétanos dans le muscle correspondant. Elle varie donc avec le muscle; plus est grande, en effet, la durée de la secousse, plus évidemment les excitations peuvent s'espacer sans que la contrac- tion d'ensemble du muselecesse deparaîtrecontinue. Il faut 20 à 25 excitations par seconde pour téta- niser le muscle de la grenouille; Marey a constaté" qu'il n’en faut que 2 ou 3 dans le même temps pour les muscles des membres de la tortue, tandis qu'il en faut 70 pour les muscles de l'aile des oiseaux el plus de 200 pour les muscles de l'aile des insectes. Ranvier, puis Kronecker et Stirling” ont constaté qu'il faut, chez le lapin, des excitations plus fré- quentes pour tétaniser les muscles blancs, plus rapides en leur contraction, que les muscles rouges, plus lents. Ch. Richet a montré que, chez l’écrevisse, le muscle de la queue donne une secousse beaucoup plus rapide que le muscle de la pince; il a observé en même temps que, pour obtenir le tétanos com- plet sur le premier muscle, il faut des excitations bien plus rapprochées que sur le second”. On pourrait ciler beaucoup d’autres faits ; ceux- là sont classiques. Ils suffisent à permettre la con- clusion suivante : - Dans les neurones moteurs, en fonction normale, le rythme de l'influx nerveux s'accélère ou se ra- Lentit suivant la vitesse propre de la contraction du muscle correspondant. V.— DIvERSES VITESSES DE CONDUCTION NERVEUSE. * Un physiologiste américain, A.-J. Carlson, vient de mettre nettement en évidence une autre relation qu'il formule ainsi : La rapidité de conduction dans le nerf moteur est en proportion directe de la rapidité de contrac- tion du muscle correspondant”. Il y a presque exactement proportion inverse entre la durée de la contraction musculaire et la vitesse de l’influx moteur dans le nerf, lorsque l’on compare divers muscles et nerfs d’un même animal, ou bien des muscles et des nerfs homologues chez #Marey : Du mouvement dans les fonctions de la vie. Paris, 1868. 2KroneckER el STiRLING : Ueber die Genesis des Teta- nus. Monatsb. d, Berliner Akad., 1831, p. 159. Ranvier: De quelques faits relatifs à l'histologie et à la physiologie des muscles striés. Archives de Physiologie, 1874. — Les auteurs sont d'accord sur le sens de la variation, non sur les chiffres absolus, à cause de la différence de leur crité- rium du tétanos parfait. * A.-J. CarLsox : The rate of the nervous impulse.. Ame- rican Journal of Physiology, 190%, t. X, p. 401. Further evidence of the direct relation between the rate of conduction in a motor Nerve and the rapidity of con- action in the Muscle. Amer, J. of Physiology, 1906, L XV, p. 156. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX des animaux d’un même groupe naturel; dans l’ensemble de la série animale, la relation, en gros, reste toujours de même sens. Voici quelques-uns des chiffres sur lesquels se fonde Carlson (ce sont des moyennes d'expériences personnelles, suffisamment nombreuses et relative- ment peu divergentes) : DURÉE VITESSE de de l'influx contraction moteur du muscle en mètres par seconde Adducteur de la pince (Crustacés décapodes). Homard. 0S25 12,00 Crabe araignée . 0,50 6,00 Limule 7e 4,00 3,25 Fibres musculaires du manteau (Mollusques céphalopudes). Calmar . 0,20 4,50 Poulpe . . 0,50 2,00 Muscles du pied (Mollusques gastéropodes), TIMACE Re CR TR 4,00 1,25 Pleurobranchæa. 10,00 0,75 ATIOIIMAX- ACER 20,00 0,:0 Pour la comparaison générale, ajoutons (chiffres du même auteur) : Gastrocnémien de la grenouille. 0,10 Hypoglosse de la couleuvre . . 0,15 27,00 14,00 La loi est tout à fait manifeste. Il faut rappeler que déjà, en 1878, Chauveau avait constaté, chez le cheval, une vitesse de 65 mètres dans les nerfs moteurs du larynx, et une vitesse de 8 mètres seulement dans les nerfs mo- teurs de l’æsophage . Or, les muscles du larynx ont des mouvements très rapides; ceux de l’æso- phage, quoique encore striés, ont des mouvements relativement lents. Chez les Invertébrés, Fredericq et Van de Velde avaient trouvé, sur le nerf moteur de la pince du homard (muscle adducteur), des vitesses de 6 à 12 mètres suivant la température ; Fuchs*, puis Boruttau *, sur les nerfs moteurs du manteau des Mollusques céphalopodes, avaient noté des vitesses de 1 à-5 mètres. Et antérieurement encore, Fick, sur le nerf du muscle adducteur des valves chez l’Anodonte, avait estimé que l'influx nerveux ne franchit guère que un centimétre par seconde. Ces vitesses, très diverses, se rangent dans le même ordre que la vitesse de contraction des muscles cor- respondants. à D'autre part, on savait qu'un abaissement de température, dont l'effet sur le muscle est d’allon- 1 CHauveau : C, R. de l'Acad. des Sc., 1858, t. LXXXNII, pp. 95, 138 et 238. ? Fucus : Uber den zeitlichen Verlauf des Erregungsvor- ganges im marklosen Nerven. Sitzungsber. d. K. Akad. der Wissensch, Wien, Abth. IL, t. CIII, p. 207, 1894. # H. Borurrau: Der Electrotonus und die phasischen Actionstrümeam marklosen Cephalopodennerven. PAluger's Arch., t. LXNI, p. 285, 1897. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 109 ger sa courbe de contraction, ralentit sensiblement la vitesse de l’influx nerveux. La loi de Carlson est done en accord avec les faits connus, dont elle est une belle systématisa- tion. VI. — DURÉE VARIABLE DE L'ONDE NÉGATIVE, L'onde d'activité nerveuse, dont la répétition rythmée constitue l’influx physiologique, possède une forme qui est connue depuis longtemps. Du moins, on à déterminé depuis quarante ans déjà l'allure en fonction du temps de la variation négä- live provoquée dans un sciatique de grenouille par une excitation unique, correspondant à une con- traction élémentaire ou secousse du musele. Or, il n’est plus possible d'en douter aujourd'hui : la ma- nifestation électrique des nerfs, désignée par Du Bois-Reymond sous ce nom de variation négative, appelée par L. Hermann négativilé fonctionnelle, est bien la révélation physique du passage, en chaque point du nerf, du processus que l’on nomme influx nerveux quand on considère ses consé- quences physiologiques. Le fonctionnement mus- culaire nous a montré que cet influx est périodique ; le galvanomètre permet d’en analyser la période. D'abord, il n’y a point de renversement de signe à chaque demi-période, comme dans une vibration, ou comme dans un courant électrique alternatif; une série d'ondes nerveuses s’additionnent au gal- vanomètre comme une série de décharges de con- densateur. Ce qui nous intéresse le plus, c'est la forme de chacune de ces ondes. Bernstein, qui, le premier, a réalisé cette analyse au moyen de son rhéotome répétiteur”, a reconnu tout de suite que la diffé- rence de potentiel présente une phase ascendante, un maximum et une phase décroissante; il a indiqué, pour la totalité du phénomène, une durée de 0,7 6, soit sept dix-millièmes de seconde”. Ce chiffre était beaucoup trop faible, comme on l’a reconnu par la suite en perfectionnant la mé- thode et en en augmentant la sensibilité. IL est facile de comprendre qu'avec un phénomène de cette forme, qui commence et finit graduellement au voisinage de zéro, le début apparent et la fin apparente dépendent du minimum d'intensité per- ceptible; on néglige toujours quelque chose au commencement et à la fin, surtout à la fin, lorsque, comme c’est ici le cas, la variation ascendante est plus rapide que la variation descendante; on 1 J. BerNsTEN : Ueber den zeitlichen Verlauf der negativen Schwankung des Nervenstromes. P{luger's Archiv, t. I. ?Nous prendrons désormais comme unité de temps le millième. de seconde et nous le représenterons, suivant l'usage, par la lettre grecque 6. néglige plus ou moins, el, par conséquent, on cons- late des durées plus ou moins courtes, suivant que l'instrumentation reste inerte pour une variation objective plus ou moins importante. L. Hermann, en 1880, attribue à l’onde de néga- tivilé, pour le sciatique de la grenouille à la tem- pérature ordinaire, une durée de 5 ç environ, dont le quart ou le cinquième occupé par la phase ascendante. H. Head*, en 1887, se placant systéma- tiquement dans les conditions de plus grande sen- sibilité, trouve qu'il faut allonger beaucoup cette durée, la porter dans certains cas jusqu'à 20 6, soit le quadruple du chiffre de Hermann ; mais la durée de la phase ascendante, dans les mêmes conditions, n'apparaît que doublée. Nous pouvons done attri- buer à cette phase ascendante, qui est la plus im- portante, une durée de 1 à 2 5 pour le sciatique de la grenouille. Sur les nerfs moteurs du manteau des Cépha- lopodes, dans les recherches mêmes que nous avons déjà citées plus haut, Fuchs, puis Boruttau, avec des appareils certainement inférieurs comme sen- sibilité aux appareils de Head, et même de Her- mann, constatent une onde de même forme tou- jours, durant de 8 à 11 6, phase ascendante 2 à 3 5. Un auteur fort compétent, et qui ne s'est point préoccupé de la relation systématique étudiée ici, qui n'avait, par conséquent, aucune idée préconçue dans ce sens, Biedermann, dit textuellement, en rendant compte des expériences de Fuchs : « Il est difficile de mettre en doute que, si l’on employait une méthode correspondant à celle de Head, la durée de l’onde négative apparaîtrait notablement plus grande que ne l’a trouvée Head pour le nerf de grenouille * ». Il y a là un point très important, qui est malheu- reusement jusqu'ici peu fondé expérimentalement. Mais, s’il n'y a pas à douter, comme le dit Bieder- mann, et pour d’autres raisons encore, que des expériences vraiment comparables montreraient une onde plus durable sur les nerfs de Céphalo- podes, dont l'influx se transmet à la vitesse de 3 mètres, que sur les nerfs de grenouille, dont l’in- flux se transmet à la vitesse de 30 mètres, on ne peut guère douter non plus, pour de simples raisons de nécessité physique, que la vitesse d'accroissement et de déclin de telles ondes soit, d'une façon générale, fonction de la vitesse de pro- pagalion de l’onde. Je ne vois pas quel est le phénomène de cette 1 L. Hermann : Unters. über die Actionstrome des Nerven. Pfuger’s Archiv, t. XVIIL, p. 574, 1818, et t. XXIV, p. 246, 1880. 2 H. Hgan : Ueber die negativen und positiven Schwan- kungen des Nervenstromes. P{luger's Archiv, t. XL, p. 207, 1887. 3 BrgneRmANX : Electrophysiologie, p. 666. 110 L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX forme où il pourrait y avoir dissocialion de ces deux vitesses; et, en particulier, pour tous les phé- nomènes auxquels on peut penser comme substratum de l'influx nerveux : polarisation d'un conducteur à noyau, coagulation réversible de particules colloïdales plus ou moins grosses, ete., il apparaît que, si le processus se transmet lentement de proche en proche, il mettra longtemps, pour un point donné, à atteindre son maximum, puis à revenir à zéro, et inversement. A priori, on pourrait donc poser déjà comme très vraisemblable la loi suivante : la durée de l'onde de négativité fonctionnelle varie en sens inverse de la vitesse de l'influx nerveux. La vérification donnée par la comparaison du sciatique de grenouille et du nerf palléal de Céphalopode, peut-être insuffi- sante en elle-même, est importante néanmoins par ce fait qu'elle n’a pas été cherchée comme vérifi- cation. De sorte que la vraisemblance de la rela- tion en devient largement égale à celle d’autres lois considérées comme acquises. physico-chimiques VIT. — CuAQUE NERF MOTEUR A SON INFLUX CARACTÉRISTIQUE. Résumant ce que nous venons d'examiner parmi les neurones moteurs, nous voyons que : 1° L'influx nerveux est discontinu et périodique; il se compose d'ondes successives à intervalles réguliers ; 2° La fréquence de ces ondes croit avec la vitesse de contraction du musele inverse ; 3° Leur vitesse de transmission croit suivant la même loi; 4 La durée des ondes et de leurs diverses phases varie suivant la proportion inverse. On peut figurer schématiquement l’influx ner- veux, d’une facon générale, par une courbe telle 0 5 10 15 20 Fig. 1. — forme schematique de l'influx nerveux. que celle de la figure 1 (l'intensité est en ordonnée, le temps en abscisse). Pour faire représenter à cette courbe l'influx d'un neurone déterminé, il faudra seulement affecter une valeur particulière à l'unité d’abscisse ; l'unité figurée ici vaudra, par exemple, un à deux millièmes de seconde s’il s’agit, chez la grenouille, des fibres du sciatique innervant le gas- irocnémien ; elle sera voisine du centième de se- conde s'il s'agit du nerf palléal des Céphalopodes; elle prendrait des valeurs beaucoup plus grandes encore s’il s'agissait de représenter l’influx inner- vant le pied d’un gastéropode ou l'estomac d'un vertébré. Ainsi, chaque nerf moteur a son influx propre, caractérisé par une constante de temps particulière. VIIT. — CoNSTANTE DE TEMPS DANS L'EXCITABILITÉ, OU CHRONAXIE. L'excitabilité comporte aussi une constante de temps propre à chaque élément nerveux. Ce para- mètre caractéristique joue un rôle important dans tous les phénomènes de l'excitation, et, suivant sa valeur, imprime à ces phénomènes des allures souvent fort dissemblables. Voici une forme de phénomène sous laquelle il me paraît assez direc- tement accessible. Faisons passer dans un nerf un courant électrique d'intensité constante, débutant brusquement, et prolongé indéfiniment; le début de ce passage de courant provoquera une excitation, si l'intensité est convenable. Cherchons d'abord l'intensité juste suffisante pour produire la plus petite réponse perceptible dans ces conditions. Cette intensité liminaire' du courant brusque indéfiniment pro- longé est une mesure préalable nécessaire pour apprécier l'influence de la forme ou de la durée d'un courant électrique; j'ai proposé de l'appeler rhéobase*. Ensuite, raccourcissons progressive- ment la durée de passage du courant : au-dessous d'une certaine durée, on voit l'excitation dispa- raitre; pour la faire réapparaitre avec un passage de courant ainsi raccourci, il faut augmenter l'intensité. j La durée minima pour laquelle on atteint encore le seuil avec l'intensité rhéobasique est variable suivant l'objet considéré. Parmi les muscles, elle varie dans le méme sens que la durée de la con- traction. Je vais donner quelques exemples; mais la con- stante de temps sera mesurée par autre chose que par cette durée, dont la détermination est impré- cise. La donnée expérimentale qui exprime le mieux la vitesse de l’excitabilité (par son inverse) est la durée du passage du courant constant pour laquelle l'intensité liminaire égale exactement deux fois la rhéobase. Une fois connue cette durée, que j'appelle chro- naxie, on peut en déduire tout ce qui concerne l'influence du temps dans l’excitabilité. Car il n'y a qu'une seule loi d’excitabilité, au moins pour tous les muscles et tous les nerfs moteurs, et la différence de l'un à l’autre ne porte que sur leur chronaxie. ! Correspondant au seuil (limen) de l'excitation. ? Société de Biologie, juillet 1909. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 111 Voici comment on peut se rendre compte, avec une formule algébrique très simple, de ce qu'est la chronaxæ dans le cas du courant constant à durée variable. Au-dessous de la durée minima qui permet l’exci- tation avec l'intensité rhéobasique, plus on rac- coureit la durée du passage, plus il faut augmenter l'intensité pour retrouver le seuil. La relation entre la durée du passage et l'intensité liminaire à été étudiée d'assez près dans ces dernières années ; celte relation ne peut pas s'exprimer exactement par une formule simple. Mais on obtient une approximation déjà utile, comme l'ont montré Hoorweg, puis Weiss, en assimilant cette relation à la formule de l’hyperbole équilatère. Je vais me servir de cette approximation en lui donnant une forme différente, plus commode et plus claire pour notre question. Soit B la rhéobase; l'intensité 7 liminaire pour une durée de passage { sera (approximativement) : i=8(1+5); + est la constante de temps caractéristique de l’objet étudié. On voit qu'on obtient directement, sans calcul, sa valeur par l'expérience, si, ayant préala- blement déterminé B, on détermine par tätonne- ment la durée de passage f, pour laquelle le courant liminaire est d'intensité :==2B. En effet, dans ce , À cas, il faut que 7 — 1, et par conséquent r — {,. 4 Pour toute durée de passage au-dessous de 7, l'intensité nécessaire augmente rapidement; elle 4 1 1 est égale à 3B pour {— 57, 4B pour {— 37, etc. Pour toute durée plus longue, l'intensité nécessaire diminue lentement ; elle estégale à 1,5 B pour {—2+ 1,1B pour t— 107, etc. Dans ce dernier cas, l’in- tensité liminaire est indiquée comme bien voisine de la rhéobase; en réalité même, le faible excès qu'indique la formule n'existe pas; la rhéobase est atteinte pour une durée de passage égale à 10 fois la chronaxie. Voici maintenant les valeurs de la chronaxie pour quelques muscles * : MUSCLE ET ANIMAL CHRONAXIE (en seconde) Gastronémien : Rana esculenta . . . . . . . 00003 Droit antérieur de l'abdomen : Rana esculenta. 0,0009 Gastrocnémien : Bufo vulgaris . . . . . . . 0,00143 Fibres longitudinales du pied : Helix pomatia. 0,0048 Myocarde ventriculaire : festudo mauritanica. 0,008 Adducteur de la pince : Carcinus mænas. . 0,03 Fibres longit. du manteau : Aplysia punetata. 0,08 Fibres circulaires de l'estomac: R. eseulenta . Aseconde 1‘ Sauf pour l'estomac, ces chiffres sont repris de recher- ches que j'ai faites à un moment où je me servais de la La durée de la contraction du gastrocnérmien de grenouille est de l’ordre du dixiéme de seconde ; la durée de contraction de l'anneau stomacal est de l’ordre de la minute, soit au moins cent fois plus grande; corrélalivement, en passant d'un muscle à l’autre, on voit la chronaxie devenir {rois mill deux extrêmes, si fois plus grande. Entre ces les autres tissus irritables mentionnés élaient rangés suivant leur durée de contraction, cet ordre serait le même que celui où ils se présentent rangés suivant leur chronaxie. IX. — ISOCHRONISME DU MUSCLE ET DE SON NERF MOTEUR. Avec une constante de lemps susceptible de valeurs si largement différentes, le phénoraène de l'excitation est, au point de vue pratique, on le comprend, très fortement modifié par les variations de cette constante. Mais, avant d'examiner l'effet de ces variations, il faut d’abord, afin de pouvoir utiliser les docu- ments expérimentaux disponibles, étudier la rela- tion d’excitabilité qui existe entre un muscle et son nerf moteur. Le tableau ci-dessus comprend exclu- sivement des muscles; si l'on peut facilement étudier à part les neurones moteurs du gastro- cnémien, par exemple, il n’en est pas de même des neurones moteurs du musele stomacal. Or, c’est l’excitabilité neuronique qui nous intéresse; pou- vons-nous la juger par l’excitabilité musculaire? La relation est bien simple, et peut s'exprimer ainsi : un muscle et son nerf moleur Sont iso- chrones, c'est-à-dire qu'ils ont tous deux la même chronaxie. Cette loi est intéressante, non pas seu- lement pour les renseignements de détail qu'elle fournit sur la chronaxie de certains neurones, mais pour la question générale que nous étudions. Voici comment elle est fondée : Si on applique sur un nerf moteur des électrodes de formes diverses, à des distances diverses, on constate pour la rhéobase des voltages et même des intensités variables (on sait, en effet, que c'est la densité du courant à l'électrode active, et non a Ds: À formule : i = - + b, formule de Hoorweg et de Weiss; 1 et t ont la mème signification que ci-dessus; b est, somme toute, ce que j'ai défini par la rhéobase et appelé B: à est une constante sans signification acceptable: la constante de temps est alors représentée par le rapport des deux cons- a ls tantes 3 Cest ainsi que je l'ai obtenue par le calcul sur 2] deux déterminations faites avec des durées quelconques. Ces valeurs né sont pas identiques à celles que l'on obtiendrait en mesurant directement B el + comme je viens de l'indi- quer, mais elles en sont très voisines, et, en attendant une revision, ces chiffres sont tout à fait suffisants pour le raiï- sonnement que nous allons faire. 4142 L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX son intensité, qui est le facteur de l'excitation); mais la chronaxie est invariable. Si on applique les électrodes directement sur le muscle, on observe que la rhéobase atteint une valeur relativement très élevée, mais la chronaxie est encore la même. Cette constatation ne permet aucune conclusion. Il est possible, en effet (il est même probable), que, dans ce dernier cas, le courant électrique exeite encore les nerfs moteurs, c’est-à-dire leurs fibres terminales dispersées dans la masse musculaire qui constitue ainsi simplement une électrode large. Il faut, pour être sûr d'atteindre l’excitabilité musculaire elle-même, avoir préalablement mis hors de service les nerfs qui s'y rendent. Deux procédés sont classiques : le curare — la dégénérescence des nerfs par section préalable. Tous deux ont, en concordance, mené à la con- clusion suivante : le nerf et le muscle ont chacun leur exeitabilité propre, très différente de celle de l'autre; le muscle a une excitabilité lente, le 2erf a une excitabilité rapide. Il faut discuter ces résultats. D'abord, on n’est pas fondé à dire : le muscle, le nerf; il ya mille muscles, il y a mille nerfs, el autant d’excitabilités différentes. Je pense que le fait ressort suffisamment des trois quarts de cet article. Prenons un muscle déterminé et son nerf, un gastrocnémien de ana esculenta, par exemple. De ce complexe névro-museculaire, on a déterminé la chronaxie; cette chronaxie peut sans hésitation être identifiée à celle du nerf. On curarise; l'excitation du nerf n'est plus transmise au muscle; si on appli- que les électrodes sur la masse musculaire, on a cette fois l'excitation du muscle : on constate que la chronaxie a augmenté. Le ralentissement du processus d’excitation peut être si considérable qu'il a été reconnu à une époque où la notion de vitesse dans ces phénomènes était extrêmement vague. Ainsi Brücke, en 186, a montré que le muscle curarisé (fortement curarisé) est devenu presque insensible aux chocs d’induction, tandis que son excitabilité pour les courants de pile (c'est-à-dire des passages prolongés de courant constant) est à peine diminuée. C'est un des fails essentiels sur lesquels repose la réputation de lenteur faite à l’excitabilité musculaire. Mais si, en prenant à chaque stade une détermi- nation précise de la chronaxie, on procède à un empoisonnement graduel par le curare (pratique- ment, on opère sur une série de muscles sembla- bles recevant des doses croissantes de curare), voici ce qu'on observe. La chronaxie augmente avec la dose de poison; au moment où elle a doublé, la curarisation est parfaite, c'est-à-dire l’inexcita- bilité par le nerf est totale; la chronaxie continue à augmenter avec la dose de curare, presque indé- finiment : elle va au triple, au quintuple, au décuple, au vingtuple de la chronaxie primitive. S'il y avait une excitabilité musculaire et une excitabilité nerveuse, si l'action du curare con- sistait simplement, comme on l’admet, à couper la communication du nerf au muscle, par l'intoxica- tion d'un organe intermédiaire, — alors on pas- serait, graduellement peut-être, de l’excitabilité. nerveuse à l’excitabilité musculaire; mais, une fois la curarisalion parfaite obtenue, on aurait une excitabilité musculaire définie et stable, un plateau dans la marche de la chronaxie en fonction de la dose de curare. Ce qui n’est pas. On à, au contraire, quelque chose qui se traduirait au mieux de la facon suivante : le curare est un poison musculaire dont l'effet est de ralentir l’excitabilité musculaire. Mais qu'est-ce alors que la curarisation? Com- ment s'effectue le décrochement fonctionnel du nerf et du muscle ? Un autre poison va nous répondre. La strychnine à haute dose produit aussi la curarisation. Or, si l’on étudie la marche de la chronaxie sur le nerf d'une part, sur le muscle de l’autre, avec des doses croissantes de poison, on observe ceci : la chronaxie du nerf diminue, descend à la moitié sensiblement de sa valeur primitive, puis l’excitabilité par le nerf disparait. À ce moment, le muscle, dont l’excita- bilité est seule en cause au même litre que dans la curarisation par le curare, présente une chronaxie qui est exactement la chronaxie primitive. On est obligé de reconnaitre que la strychnine est un poison nerveux dont l’action est d'accélérer l’excitabilité nerveuse. Mais la curarisation? Elle s'est produite ici quand la chronaxie du nerf a été diminuée de moitié, celle du muscle n'ayant pas changé. Avec le curare, elle se produit quand la chronaxie du muscle a doublé, celle du nerf étant inconnue. Ces divers faits, au point de vue de la relation entre l’excitabilité du muscle et celle de son nerf moteur, peuvent s'exprimer de la facon suivante : Le muscle et son nerf moteur sont isochrones (égalité de chronaxie). S'il y à altération de la chronaxie de l’un seulement, quel que soit le sens. de l’altération, il y a décrochement fonctionnel quand l’hétérochronisme (rapport des chronaxies) égale 2 ou 1/2. Quant au muscle dont le nerf est dégénéré, c’est aussi un muscle dégénéré. Sa contraction est ralentie. D'ailleurs, sa structure histologique est altérée ; la proportion de sarcoplasma a augmenté, la proportion de substance anisotrope, c’est-à-dire de substance différenciée pour la contraction, à diminué ; cette altération de structure le rapproche des muscles lents, comme son changement de fonc- tion contractile. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 113 Son excitabilité est en même temps ralentie; il n'y a là rien que de bien naturel, mais la significa- tion de ce ralentissement est tout autre que ce qu'on a cru voir; il est évidemment impossible de conclure de l’excitabilité du muscle ainsi altéré à l'excitabilité du muscle normal. En tout cas, l'expérience par la strychnine nous montre directement un muscle curarisé (au sens large du mot, un musele inexcitable par son nerf), c'est-à-dire un muscle dont l’excitabilité propre est seule en jeu et qui présente la même chronaxie que le complexe nervo-musculaire”. Et lorsqu'on fait porter les excitations sur un complexenervo-musculaireoüilestanatomiquement impossible d'isoler l’excitabilité nerveuse, nous avons le droit d'attribuer à celle-ci la chronaxie constatée. X. — VARIATION DE L'EXCITABILITÉ PRATIQUE SUIVANT LA CHRONAXIE. Reprenons maintenant l'examen des exeitabilités à chronaxie plus ou moins grande. Au simple point de vue de l’action du courant constant sur un muscle lisse tel que l'estomac, le seuil de l'excitation est atteint avec une intensité moitié moindre si le courant dure dix secondes que s’il dure une seconde; ilest quasiment impossible de ne pas voir, au premier examen expérimental, l'influence de la durée du courant constant. Aussi, sur des objets doués d’un chronaxie du même ordre, Fick sur l'adducteur des valves de l'anodonte, en 186%, puis Engelmann sur l'uretère en 18170, démontrent parfaitement cette influence; il leur suffit, pour cela, de fermer et d'ouvrir le circuit électrique à la main, en comptant la durée de ferme- ture sur les battements d’un métronome ordinaire. Sur le gastrocnémien de la grenouille verte (excité directement ou par le sciatique), que le passage de courant dure une seconde ou un dixième de seconde, ou un centième, et même un demi- centième de seconde, on trouve le seuil exactement avec la même intensité. On est donc tenté de dire que le temps ne fait rien à l'affaire; et c'est, en effet, ce qu'affirme la Physiologie classique, depuis Du Bois-Reymond (1848). En1901 seulement, G. Weiss” a réussi à démontrer que la durée joue le même rôle ici que pour les préparations de Fick ou d’Engelmann, mais à condi- tion de considérer des fractions de millième de seconde. Ces durées sont presque au-dessous de ce que nous pouvons imaginer; elles sont, en réalité, parfaitement maniables, avec l’ingénieux rhéotome 1 M. et Mme LarrcquE : Sur le mécanisme de la curarisation. Soc. de Biologie, 26 décembre 1908. ? Archives ilaliennes de Biologie, 1904, balistique de Weiss, qui utilise, pour fermer (par rupture d’un court-circuit) et pour rompre le cou- rant, une balle de carabine ; le projectile marchant à 200 mètres par seconde, un millième de seconde est représenté par un intervalle de 20 centimètres, très facile, exactitude. La bobine d'induction Physiologie (appareil de Du Bois-Reymond) a été systématique- ment établie en vue de l'excitation du gastrocné- mien de la grenouille; l’onde induite à la rupture du courant primaire dure environ un millième de seconde; elle excite le gastrocnémien avec une intensité minime; il faut la porter aux intensités les plus grandes pour qu’elle commence à être efficace sur le muscle lisse. Cette constatation fait dire classiquement que l’excitabilité du muscle lisse est d’une autre espèce que celle du gastrocnémien; la considération de la différence de chronaxie suffit parfaitement à rendre compte de la différence d'action; reprenons la formule approchée que nous avons vue plus haut (page 111), et donnons à # la valeur de 0°,001, à + les valeurs expérimentalement constatées pour la chronaxie du gastrocnémien 05,0003, puis del’estomac 1° ; on voit que, dans le pre- mier cas, l'intensité nécessaire égale 1,3 B; dans le second cas, 1000 B.Leseuil dans les deux préparations étantsupposéatteintpar le courant constantprolongé avec la même intensité, la différence de chronaxie suffit pour exiger, dans le second cas, un choc d'induction 7 à 800 fois plus fort que dansle premier”. La différence de réaction, en raison simplement de la différence de chronaxie, est encore bien plus marquée si l'on considère l'action des courants électriques s’établissant progressivement. On sait qu'un tel courant, même indéfiniment prolongé, est moins excitant qu'un courant d'égale intensité qui s'établit brusquement. Et, si l'accrois- sement de l'intensité en fonction du tempsest assez lent, on n'aura pas d'excitation du tout, quelle que soit l'intensité jusqu'où l’on pousse cette progres- sion. L'inexcitabilité, dans ces conditions, avait natu- rellement frappé les premiers observateurs qui l'ont rencontrée. C’est un des deux faits (l’autre étant l’inutilité apparente de la durée du courant constant) sur lesquels Du Bois-Reymond fameuse loi : « L'excitation est fonction de la dérivée de l'intensité par rapport au temps ». Mais qu'est-ce que veut dire brusque, ou lente- comme on voit, à subdiviser avec usilée en avait fondé sa 4 En supposant la formule pratiquement exacte, ce qui n’est pas réalisé dans d'aussi larges limites; À ne monte pas aussi vite lorsque £ devient aussi petit par rapport à +; mais, d'autre part, la rhéobase, à égale surface de l'électrode active, est sensiblement plus élevée pour l'estomac que pour le gastrocnémien, 11% ment progressif? Quel ordre de temps y a-t-il lieu de considérer ? Sur le sciatique de la grenouille, pris comme nerf moteur du gastrocnémien, les moindres ralentisse- ments dans l'établissement du courant sefontsentir. Par le déplacement d'une pointe de zine le long d'une gouttière remplie d’une solution de sulfate de zine, on peut s'arranger de facon qu'il y ait dans le circuit d’excitation une différence de potentiel, et, par conséquent, une intensité proportionnelle au déplacement de la pointe; les mouvements les plus vifs que puisse effectuer la main tenant la pointe doivent être considérés comme lents. Pour étudier avec quelque précision l'influence de la rapidité plus ou moins grande de l'établissement du cou- rant, il a fallu imaginer des appareils mécaniques spéciaux, les orthorhéonomes, dont le premiera été celui de von Fleischl; dans de telles expériences, les temps que l'on considère sont del'ordre du centième de seconde; si la progression linéaire dure un dixième de seconde, il faut déjà monter, pour retrouver le seuil de l'excitation, à 8 ou 10 fois l'in- tensité du courant brusque. On est près de la pente limite au-dessous de laquelle on n'arrive plus jamais à l’excitation. Au contraire, sur les muscles lisses, adducteurs de l'anodonte, uretère ouestomac, un courantqui a mis une seconde ou même plusieurs secondes à s'établir garde la même efficacité que s'il avait atteint son intensité totale en un dix-mil- lième de seconde. La constatation de ce fait est ancienne; sousl'empire delaloi de Du Bois-Reymond, elle a naturellement fait conclure que l’excitabilité des muscles lisses était radicalement différente de l'excitabilité du sciatique. Mais il n'est pas besoin de comparer deux tissus aussi distants l’un de l’autre dans la série des chronaxies pour que la diffé- rence d'action des courants progressifs apparaisse comme un phénomène remarquable. Dans une série des travaux qui sont, il est vrai,exceptionnellement poussés quant à la technique de l'excitation, Grützner et quelques-uns de ses élèves ont signalé comme différant nettement l’une de l’autre l’excita- bilité du gastrocnémien de la grenouille et l’excita- bilité du gastrocnémien du crapaud. Leur interpré- tation desphénomènesest devenue caduque, comme la loi de Du Bois-Reymond dont elle procédait ; mais certaines de leurs constatations sont, à juste titre, fréquemment citées, notamment ce fait que l’on obtient une secousse plus haute, sur le gastrocné- mien du crapaud, avec l'onde induite de fermeture qu avec celle de rupture; frappant comme opposi- * Quand il s'agit de muscles, il faut distinguer l'excitation qui se propage, et qui seule est comparable à celle des nerfs, de l'excitation locale au contact mème de l'électrode. C'est ce qu'a très bien montré Keith Lucas : Journal of Physio- 10gy, décembre 1907. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX tion aux coutumières observations sur le gastrocné- mien de la grenouille, ce fait n’a, d’ailleurs, pris dans la science que la place d'une curiosité. A. Waller, au contraire, à la suite de recherches relativement sommaires et faites simplement avec des condensateurs de capacités graduées, à intro- duit une conception éminemment suggestive*. La durée de la décharge, la résistance étant cons- tante, est proportionnelle à la capacité; on peut obtenir dans tous les cas un même effet physiolo- gique, en faisant varier convenablement le poten- tiel de charge. Or, parmi ces décharges physiologi- quement équivalentes, il y en a une qui dépense . moins d'énergie que toutes les autres, soit plus brèves, soit plus allongées. La durée de décharge pour laquelle on constate cette dépense minima d'énergie n'est pas toujours la même ; notamment, si on refroidit un nerf, on déplace ce minimum vers une durée plus grande. N'y a-t-il pas là, dit Waller, l'indication d’un rythme caractéristique du tissu excitable? Et il s’explique par l'image sui- vante : Un navire, déplacé de son équilibre en eau calme, présente une période d'oscillation, une durée de roulis qui lui est propre ; à la mer, une houle de même période, même faible, le fera plus rouler qu'une houle plus forte, mais en même temps plus courte où plus longue (phénomène de réson- nance). D'après ce que nous savons aujourd'hui, il est parfaitement exact que la décharge du conden- sateur dépensant au seuil le minimum d'énergie donne par sa constante de temps (produit la ré- sistance R par la capacité C) une mesure de la constante de temps de l’excitabilité; ce produit RC est dans un rapport très étroit avec la chronaxie. Mais nous savons aussi que la quantité d'énergie dépensée par une décharge du condensateur n'est nullement la cause de l'excitation ; il ne s’agit pas la d’un phénomène de résonnance. D'autre part, la forme de ces décharges n'est pas apte à mettre en lumière les plus intéressantes conséquences d’une différence de chronaxie. En effet, la courbe de l'intensité en fonction du temps présente d’abord (dans les conditions ordi- naires des expériences physiologiques, où la self induction du cireuit est très petite, et sa résistance très grande) une variation brusque de zéro au maxi- mum, quelle que soit la capacité ; seule, la descente de la courbe est plus ou moins allongée suivant la capacité. I en résulte ceci dans la comparaison d’un tissu rapide et d’un tissu lent : si on passe gra- duellement des petites capacités aux grandes, on voit bien le tissu rapide entrer en activité le pre- 1 A, WALLer : The caracteristic of the Nerve. Proc. of the Roy. Soc., t. LXV, 1900. L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX 115 mier, mais toutes les décharges plus allongées con- tinuent à l’exciter, de sorte qu'à partir d'une cer- taine capacité jusqu’à l'infini, les deux tissus sont excilés de la même facon. XI. — EXCITATIONS SÉLECTIVES PAR LES ONDES PROGRESSIVES. Mais on peut s'arranger de manière que la décharge présente, au lieu de ce début brusque, une phase d'accroissement progressif, dont la durée aille aussi, comme pour la descente, en croissant avec la capacité. Il suffit, pour cela, de disposer un deuxième jeu de capacités en dérivation sur le cir- cuit de décharge ‘. Ce dispositif du double conden- sateur donne (si l'on prend dans chaque cas les deux capacités égales entre elles, et qu'on place la déri- vation aux trois quarts de la résistance) une onde (e 1 2 3 # 5 6 Fig. 2. — Forme de l'onde électrique donnée par le double condensateur. — La décharge ordinaire du condensateur est figurée en pointillé. électrique dont la forme peut toujours être repré- sentée par la courbe ci-contre (fig. 2) (courbe en trait continu, la décharge ordinaire du condensa- teur étant figurée en pointillé) ; mais, suivant la capacité et la résistance choisies, l'unité d’abscisse représentera à volonté un dixième, un centième ou un millième et même un dix-millième de seconde. Remarquons tout de suite que la forme de cette onde rappelle beaucoup celle de l'onde de négati- vité fonctionnelle dans les nerfs ; l’une comme l’autre sont affectées d'un paramètre chronolo- gique en vertu duquel la phase ascendante, pour ne parler que de ceHe-là, dure un temps variable suivant les cas ; enfin, les conditions physiologiques d'une part, instrumentales de l’autre (capacité en fractions de micro-farad et résistance en milliers d'ohms) sont telles que ces temps sont du même ordre. On obtient donc avec le double condensa- teur quelque chose comme une reproduction syn- _ Louis Larrcque : Excitation par double condensateur. C. R. Soc. de Biologie, 29 février 1908. thétique de l'onde de négativité physiologique. Appliquons cette sorte d’excilation à une prépara- lion physiologique quelconque, par exemple à un gastrocnémien de grenouille, par l'intermédiaire du sciatique, et cherchons comment varie avec la capacité employée le voltage liminaire. Avec le condensateur simple, lorsqu'on passe des petites capacités aux grandes, le voltage diminue conli- nuellement jusqu'à ce qu'on atteigne la rhéobase. Avec le double condensateur, il diminue d'abord, puis augmente de nouveau quand la phase d'ascen- sion est devenue assez considérable pour entrainer une diminution notable de l'efficacité, c'est-à-dire, dans le cas présent, dès qu'elle dure quelques millièmes de seconde”. Il y a donc une certaine valeur chronologique de cette forme d'onde pour laquelle on obtient Voltage lminaire 0 Capacite du condensateur Fig. 3. — Courbes de variation de Ja capacilé du condensa- teur en fonction du voltage liminaire pour un muscle rapide (gastrocnémien de grenouille) et un muscle lent (gastrocnémien de crapaud). l'excitation avec une valeur minima de l'intensité”. Prenons une autre préparation physiologique, un musele un peu plus lent, par exemple un gastro- cnémien de crapaud, ou bien le même muscle re- ‘froidi, c'est-à-dire ralenti par le froid ; nous trou- verons ce minimum pour une durée de décharge plus grande. Si l’on trace la courbe des intensités (ou voltages) nécessaires, en fonction des capacités employées (fig. 3), on voit en général, pourvu que les rhéobases ne soient pas trop différentes, que la courbe de la préparation lente et celle de la rapide se coupent; du côté des petites capacités, c’est-à-dire des ondes rapides, la courbe du muscle lent est la plus ! La progression logarithmique, comme ici, entraîne une diminution d'efficacité bien plus marquée que la progres- sion linéaire fournie par l'orthorhéonome {Voir Journal de Physiologie et de Pathologie yéncrale, novembre 1909, p. 1043). On verra donc le phénomène s’'accuser avec des durées plus courtes dans le premier cas que dans le second. 2 L'intensité est proportionnelle au voltage, si la résistance reste constante. Ne pas confondre ce minimum d'intensité avec le minimum d'énergie des auteurs tels que Waller. 116 L. LAPICQUE — PRINCIPE POUR UNE THÉORIE DU FONCTIONNEMENT NERVEUX haute; du côté des grandes capacités, c'est-à-dire des ondes lentes et prolongées, c’est le contraire. Suivant qu'on choisira la capacité d’un côté ou de l’autre du point de croisement, le premier seuil d'excitation que l’on rencontrera en faisant croître graduellement les voltages appartiendra à un musele ou à l'autre. Pour rendre les choses plus claires, faisons une expérience plus grossière. Prenons, d’une part, un anneau découpé dans l'estomac d’une grenouille, d'autre part, un nerf sciatique du même animal avec le gastrocnémien; placons l'anneau d'estomac et le sciatique dans un même circuit électrique, de facon qu'ils soient tou- jours l’un et l’autre parcourus au même instant par le même courant. Avec une gouttière de sulfate de zinc et une pointe de zine mue à la main, constituant un orthorhéonome rudimentaire, il est très facile d’exciter, à volonté, exclusivement l'une ou l’autre des préparations. Une brève plongée de la pointe de zine vers le milieu de la gouttière : le gastrocnémien donne une belle secousse, l'anneau d'estomac reste inerte; un lent déplacement de la pointe le long de la gouttière : c’est l'anneau d'es- tomac qui se contracte, tandis que le gastrocnémien ne bouge pas. Il y a là deux formes d'excitabilité distinctes, disait-on naguère; rien done d'étonnant si l'on peut éveiller l'une sans mettre l’autre en jeu. Nous disons que ce sont deux excitabilités de même forme, mais caractérisées par des chronaxies très différentes. En perfectionnant l’instrumentation, nous comprenons que nous pouvons, d'une ma- nière analogue, mettre en jeu sélectivement des ex- citabilités à chronaxie beaucoup plus voisine. Avec le double condensateur, on réussit facilement l’ex- périence sur les gastrocnémiens du crapaud d’une part, de la grenouille verte de l’autre (rapport des chronaxies, d’après le tableau donné plus haut, environ de 1 à 4; j'ai réussi, sans beaucoup de peine, l'excitation sélective avec un rapport des chrona- nies de 1 à 2). Les deux sciatiques sont placés côte à côte sur uneseule etmème paire d’électrodes impolarisables, et reçoivent par conséquent en même temps toute décharge passant par ces électrodes entre lesquelles ils forment pont. Si cette décharge est celle d'une petite capacité, le muscle de grenouille saute, l'autre ne bouge pas; si c’est la décharge d’une grande capacité, le muscle de grenouille reste insensible, et c’est le muscle du crapaud qui saute. Cela, à condition que l'intensité soit faible; en augmentant cette intensité, avec l'une ou l’autre des capacités, on met en activité simultanément les deux muscles. Cette expérience est pour moi une image de la façon dont pourrait fonctionner un centre nerveux schématique où s’intriqueraient 4 neurones, 2 cen- tripètes et 2 centrifuges. XII. —"RÉsuMÉ. Nous voici ramenés à la conception fondamentale de la théorie, telle que je l'ai donnée aux pages 106 et 107. Avant que de la reproduire, nous allons résumer les connaissances que nous avons succes- sivement, au cours de cette étude, dégagées des faits classiques ou établies sur des expériences nouvelles. Je laisse de côté le point de vue anato- mique, la constitution par neurones distincts, point supposé préalablement acquis. A. Négativité fonctionnelle. — La variation d'état électrique, qui accompagne toujours l’activité ner- veuse et qui en suit fidèlement toutes les modalités, est périodique. Chaque onde se compose d'une phase de croissance progressive à laquelle succède une phase de décroissance. Parmi les divers nerfs moteurs, la durée de l’onde et de chacune de ses phases s’allonge ou se rac- courcit avec la durée de contraction du muscle cor- respondant. La vitesse de transmission (mesurée aussi bien par la réaction physiologique que par le galvano- mètre) varie en sens inverse de la durée de contrac- tion du muscle. Conséquence : Un point quelconque d’un cylin- draxe moteur en activité subit des variations élec- triques dont la rapidité est fonction de la rapidité de contraction du muscle correspondant. B. Æxcitabilité. — Dans les divers nerfs moteurs, l’excitabilité étudiée par les ondes électriques com- porte une constante de temps, chronaxie, qui augmente ou diminue avec la durée de contraction du muscle correspondant. Quand les courants électriques débutent par une phase d’accroissement progressif, leur efficacité est diminuée d'autant plus que la chronaxie est plus petite. Conséquence de À et de B. — Dans un neurone moteur, l’excitabilité et la conductivité sont affec- tées d'une même constante de temps, où chronaxie. Pour être mis en activilé, ce neurone exige des ondes électriques plus ou moins rapides, suivant que l’influx nerveux, qui est sa réaction propre, consiste lui-même en ondes plus ou moins rapides. A ces constatalions, ajoutons les deux hypo- thèses suivantes, qui ne sont que des extensions, modérées et vraisemblables, de nos connaissances : 1° Les neurones de toute espèce possèdent, comme les neurones moteurs, des chronaxies très diverses ; 2% L'onde de négativité fonctionnelle, arrivant à l'extrémité d'un cylindraxe, au pôle émissif d'un A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE 117 neurone, agit, au point de contact avec un autre neurone, sur le pôle émissif de celui-ci, de la même facon que l'onde électrique agit sur la surface lon- gitudinale du cylindraxe à l'électrode active. Nous pouvons maintenant déduire le fonctionne- ment nerveux élémentaire : Considérons un neurone centripèle À, affecté d'une chronaxie 1. Les diverses terminaisons de son cylindraxe sont en relation effective, en synapse, avec 3 neurones B, C, D, dont les chronaxies res- pectives sont 1/4, 1, 4. À entre en activité, très fai- blement d’abord, puis avec une intensité toujours croissante. Faible ou fort, l'influx qu'il apporte est réglé par sa chronaxie propre; ses terminaisons présentent, toutes trois à la fois, des variations de potentiel électrique rythmées, des ondes succes- sives qui croissent, passent par un maximum et décroissent suivant une pente donnée. A travers la membrane qui forme la jonction des neurones, ces ondes induisent des perturbations dans B, C et D; mais les plasmas neuroniques sont différents. Sous une intensité donnée, C va réagir, tandis que D restera en repos parce que la perturbation est trop brève pour lui, et B restera aussi en repos parce qu'elle se produit suivant une progression trop lente pour lui. Sous une intensité plus forte, B, C et D entreront simultanément (non pas identique- ment) en activité. Que, dans le réseau infiniment compliqué du système nerveux, les chronaxies nuancées des neu- rones longs et courts déterminent en premier res- sort une telle sélection des voies, cela me parail non seulement probable, mais je dirai presque fatal. Reste à savoir le rôle effectif joué par ces isochro- nismes el ces hétérochronismes, Encore une fois, cela ne peut constiluer qu'une partie de la théorie fonctionnelle des centres. Müais, bâtie sur des faits, presque reconstituée expérimentalement par le double condensateur exci- tant les pattes de grenouille et de crapaud, la con- ception de cet aiguillage primaire par la chro- naxie ouvre la porte à des explications plus larges, si plus aventurées. Je ne veux pas m'y laisser en- traîner dans cet article déjà trop long. Il me suffirait d'avoir pu montrer la réalité et l'intérêt des diffé- rences de vitesse dans le fonctionnement des neu- rones. Louis Lapicque, Maitre de conférences de Physiologie à la Sorbonne LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE ‘ Les travaux de Béchamp ont expliqué la véri- table nature des produits de la nitration de la cellu- lose et en ont donné une classification complète. Is furent le prélude d’une vaste série de recherches, dont le but principal a été la reconnaissance du rapport qui existe entre la composition du mélange nitrique et le degré de la nitration qu’on obtient au moyen de ce mélange. Les travaux de ce genre eurent d'abord surtout un but pratique : la déter- mination des conditions nécessaires pour obtenir telle ou telle sorte de nitro-cellulose; mais ils acquirent avec le temps un intérêt théorique la création d'une théorie des lois générales de la formation des éthers nitriques de la cellulose. Je ne ferai pas ici un aperçu détaillé de ces tra- vaux; je me permettrai seulement de rappeler les recherches connues faites dans ce domaine par Vieille ; il a étudié en détail le procédé de nitration de la cellulôse par l'acide nitrique, soit seul, soit mêlé avec:l'eau en proportion variable, et aussi par les mélanges ternaires de HAzO*, H°SO* et HO. Les travaux de Bruley méritent aussi une grande -! Rapport présenté au Congrès international de Chimie appliquée, à Londres, en 1909. attention; malgré le but technique qu'ils pour- suivent, on y trouve des généralisations théoriques très intéressantes. Dans ces travaux, la méthode même d'expression de la composition des mélanges nitriques est tout à fait originale; elle permit à l’auteur d'expliquer, en général, les conditions de la formation des stades les plus importants de la nitration, M. Bruley est dans la juste voie, Cepen- dant, la détermination qu'il a adoptée pour la com- position des mélanges nitriques ne convient pas tout à fait à l'expression de la composition de la majorité des différents mélanges. En outre, tra- vaillant dans un but pratique, il à négligé une circonstance qui a, d’ailleurs, échappé aussi à l'attention de tous ses successeurs. C’est la déter- mination de la relation qui existe entre l'acide nitrique, l'acide sulfurique et l’eau non seulement en pour cent du poids, mais aussi dans les rapports moléculaires. Je ne puis pas passer sous silence les travaux moins connus, mais excessivement intéressants, de Mendeléeff et ceux de ses collaborateurs sur la question du pyrocollodion, c'est-à-dire concernant le pyroxylène riche en azote et soluble. On y tenta pour la première fois la préparation de mélanges 118 nitriques dont les parties composantes possédaient une relation moléculaire déterminée, permettant d'obtenir le degré de nitration désiré. Dans ces recherches, on trouve beaucoup d'idées justes et un essai d'explication théorique des conditions nécessaires pour obtenir un degré exact de ni- tration. Enfin, les nombreux travaux faits dans ce domaine par Lunge et ses collaborateurs sont bien connus de tous; on y trouve beaucoup de matériaux expé- rimentaux, mais malheureusement aucune idée théorique qui puisse guider dans ce domaine. En considérant l'étude persévérante et détaillée que l'on a faite de la nitration de la cellulose, on se demande involontairement pourquoi nos connais- sances sur ce procédé au point de vue théorique sont si médiocres? Pourquoi sommes-nous réduits aux seuls matériaux déjà nommés, et aux quelques règles, d'un caractèreexpérimental, quinousservent à obtenir les diverses sortes techniques de nitro- cellulose? Les causes principales de ce fait se trouvent dans la nature même des éthers nitriques de la cellulose, dont on n'a pasencore établi ni le nombre exact, ni la classification. Nous ignorons complètement leur poids moléculaire et leur composition, et nous sommes forcés, pour caractériser chaque degré de nitration, de nous borner à la détermination de la quantité d'azote et à fixer la solubilité dans un dissolvant. Ces propriétés seules ont suffi pour découvrir l'existence de l’isomérie dans les éthers nitriques de la cellulose, quoique sans possibilité de les reconnaitre et de les isoler. Une autre difficulté non moins importante est que nous sommes forcés, dans la pratique, de tra- vailler presque toujours avec les mélanges ter- paires des acides nitrique et sulfurique et de l’eau, alors que les relations réciproques de leurs parties composantes ne sont point encore bien connues. IL faut ajouter que le système composé de la nitro-cellulose solide et du mélange liquide des acides est physiquement hétérogène et que, par conséquent, la loi des masses actives n’est pas applicable à ce cas d'équilibre chimique. Toute cette masse d'expériences ne sera donc d'aucune utilité pour l'explication théorique du procédé de nitration, si les relations réciproques de toules les parties composantes des mélanges nitriques et les conditions d'équilibre hétérogène ne sont pas prises en considération. Voilà pourquoi j'ai attiré l'attention sur les recherches de Men- deléeff au sujet des conditions indispensables pour A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE obtenir le pyrocollodion; on y trouve, pour la pre- mière fois, la tentative d'établir un rapport entre le degré de la nitration et de la nature du produit, d'une part, et, d'autre part, non pas le pour-cent de la teneur en acides nitrique et sulfurique, mais la composition précise des mélanges nitriques, d’après l'expression suivante : 2 HAzO° + x H°SO*‘ + (x +2) HO. Dans la suite, les recherches montrèrent, il est vrai, que celte règle a une signification limitée et qu'on peut l'appliquer seulement dans certaines limites de variation de la quantité x. Ainsi, nous savons à présent qu'on peut obtenir le pyrocollodion avec d’autres compositions de mélanges nitriques. Mais l'idée de rechercher le rapport entre le degré de la nitration et, en général, la nature de la nitro- cellulose et la composition moléculaire du mélange nitrique est tout à fait féconde. Il y a dix ans, travaillant à l’Institut physico- chimique de Leipzig, je m'étais fixé le but de trouver une méthode applicable à l'étude de la nature du système ternaire d'acides nitrique et sulfurique et d’eau. J'avais la ferme certitude que, précisément, la solution de cette question-là ouvrirait la voie à l'intelligence exacté du procédé de formation des éthers nitriques de la cellulose. Après une série de tentatives, profitant des indi- cations du Professeur W. Ostwald, je me suis arrêté définitivement à la méthode de la pression de vapeur de l'acide nitrique. L'application de cette méthode à trois cas particubiers des mélanges d'acide sulfurique pur (H*S0”) avec l’acide nitrique de poids spécifique 1,51 —1,48 — 1,4 m'a donné déjà la possibilité de poser quelques conclusions précises”. Voici les plus importantes : 1° La pression de vapeur de l'acide nitrique: s'abaisse beaucoup si l’on ajoute progressivement de l'eau, et quand on arrive aurapport HAzO*—+ H°O, elle devient infiniment petite; cela s'explique évi- demment par la formation d'hydrates, dans les- quels la pression de vapeur est très petite en com- paraison avec l'acide nitrique pur; 2% S'il existe une réaction quelconque entre HAZ0O° et H°SO*, elle ne se manifeste pas. Mais, dans les mélanges à grande teneur en acide sulfu- rique (80-90 °/), commence la formation d’anhy- dride nitrique, suivant l'équation : 2HA7z0$% + nH?S0# = nH?S0*.H°0 + Az°05. 3° Dans les mélanges ternaires de HAzO*, H*SO* et HO, l’eau se partage entre les deux acides, en formant avec eux certains hydrates, dont la compo- sition et la quantité dépendent de la proportion Le détail de ces recherches a été publié dans le Zeit- schrift für phys. Chemie, t. XLV, LI, LII. ; A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA relative des acides. Ge procédé est inverse el s'exprime par l'équation suivante : HAzO%,n180 + H2S01 72 HAZO%.(n — x) H°0 + HPSO4. xH?0, Si nous commencons à ajouter de l'acide sulfu- rique à un mélange quelconque d'acide nitrique avec l’eau, nous verrons que l'acide nitrique com- mence à perdre de l’eau. Au moment où la quantité d'acide sulfurique devient égale à la quantité d’eau (sous le rapport moléculaire), le mélange ternaire aura la composition suivante : HAZ0! + nH?S0# + nH°0 = HAzO* + n (H*S0*.H°0); alors l'acide nitrique se débarrasse tout à fait de l'eau et se conserve à l’état de monohydrate HAZO”, Possédant cette conception de la nature des mélanges nitriques, il m'a été facile de l'appliquer au phénomène de la nitration de la cellulose. J'ai réussi à établir un rapport intime entre la nature des mélanges nitriques, exprimée par la pression de vapeur de HAZO”, et le degré de la nitration de la cellulose. J'ai pu aussi trouver, au moins pour une seule forme de nitrocellulose, les conditions tout à fait précises de la nitration, notamment : la forma- tion de pyroxyle insoluble très nitré ne peut avoir lieu qu'avec les mélanges nitriques où l'acide nitrique se trouve à l'état de monohydrate HAZO° indépendant. En ce qui concerne la trop grande quantité d'acide sulfurique dans les mélanges de cette sorte, on s'arrange à ce que la nitrocellulose formée ne commence pas à se dissoudre dans le surplus de l'acide sulfurique, ou, suivant l’expli- cation de Berl, que le phénomène inverse de la décomposition de la nitrocellulose sous l'influence de cet acide n'ait pas lieu avec formation d'acide nitrique et de certains produits de transformation de la cellulose. En outre, il faut prendre en considération le fait que l'acide nitrique dans les mélanges doubles avec l’eau, à mesure que nous augmentons la teneur rela- tive en eau, perd vite la faculté de former les éthers nitriques de la cellulose. Lorsque la proportion relative de l'acide et de l’eau atteint HAzO*.H*O, toute possibilité de formation d'une nitrocellulose avec ce mélange disparait complètement". II Cependant, ces cas particuliers ne donnaient pas encore la solution complète et générale de la question de la nature des mélanges ternaires que consliluent les acides nitrique et sulfurique avec l'eau. Dans ce but, il m'a semblé indispensable 4 Les détails de ces recherches se trouvent dans le Zeitschrift fur die gesammte Schiess- und Sprengstoff- Wesen, | I, 1906. CELLULOSE 119 d'élaborer toutes les matières expérimentales déjà connues d’après la méthode des coordonnées trian gulaires. Les résultats de cette élaboration, quant à la pression de vapeur de l'acide nitrique, s'ex priment par le diagramme de la figure 4 (p. 120), el quant au degré de la nitration de la cellulose par le diagramme de la figure 2. J'y ai rassemblé jusqu'à 150 expériences différentes sur la nitralion, prises en partie à d'autres travaux (Vieille, Bruley, Lunge, etc.), en partie aux miens. Dans ces deux diagrammes, la composilion des mélanges ternaires s'exprime en pour-cent molécu- laires. Aux sommets de ces diagrammes se trouvent les parties composantes dégagées. La composition du mélange de n'importe quel point à l'intérieur du diagramme peut être facilement lue grâce à l'échelle. Dans le premier diagramme, nous avons plusieurs courbes de distribution des mélanges ternaires ayant des pressions de vapeur iden- tiques. Dans le second diagramme, il y à trois courbes. La première sépare la région des mélanges au moyen desquels on obtient les nitrocelluloses de la plus haute nitration (AzO*)". L'espace entre les courbes I et II nous donne la plupart des nitro- celluloses très nitrées et solubles, dont la composi- tion s'approche de celle du pyrocollodion avec (AzO*)". Enfin, dans l'espace entre les courbes II et IT, nous avons, pour la plupart, différentes sortes de pyroxylènes solubles nommés en général collo- dions, avec (AzO?)" —(Az0°)". Cette troisième courbe est la limite au delà de laquelle, à ce qu'il parait, la nitration de la cellulose est complètement impos- sible, ou, si elle a lieu, donne des produits très peu nitrés et non homogènes. Si nous examinons plus attentivement le dia- gramme de la pression de vapeur de l'acide nitrique (fig. 1), nous y découvrirons facilement les mêmes rapports, — mais sous une forme plus générale, — qui ont été notés déjà pendant l'étude des cas par- ticuliers signalés plus haut. La pression de vapeur de l’acide nitrique, par exemple sur la ligne HAzO° — HO, ou sur la ligne HAzO'— H*S0', s'abaisse vite avec la diminution de son contenu relatif; cependant, dans le premier cas, la cause principale est la formation des hydrates de l'acide nitrique peu volatiles, et l'abaissement de la pression a lieu beaucoup plus vite. Dans le second cas, cet abais- sement arrive à la suite du mélange de deux matières qui ne réagissent pas chimiquement l’une sur l’autre et à cause de la diminution de la con- centration en acide nitrique qui en résulte. Si nous prenons un mélange double quelconque sur la ligne HAzO' —1H°0 et si nous commencons à y ajouter de l'acide sulfurique, nous verrons que la pression de vapeur du mélange monte bien vite. j Ainsi, à mesure que nous augmentons la teneur en 120 acide sulfurique dans les mélanges d'acide nitrique avec l'eau, les courbes de la pression de vapeur reculent dans la région des mélanges plus pauvres en acide nitrique. Dès que ces courbes atteignent la ligne HAZO'—HFSO*.H'O, c'est-à-dire des rap- ports moléculaires égaux de H°S0° et de H°0, elles font un retour du côté inverse, c'est-à-dire qu'elles reviennent de nouveau dans la région des mélanges plus riches en acide nitrique. On peut expliquer comme suit l'élévation de la pression de vapeur de l'acide nitrique contenant de l’eau à la suite de l'addition de l'acide sulfurique dans ce mélange : l'acide nitrique perd peu à peu de l’eau d'hydrata- tion et il atteint enfin un état tout à fait anhydre sur la ligne des rap- ports moléculaires égaux de l'eau et de l'acide sulfurique. L'élévation de la pression de vapeur de l'acide ni- trique dans les mélanges avec l'acide sulfurique, qui résulte de l'addition H Az 0 /\ 4 L\ A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE est bien proche de la ligne des mélanges ternaires dans lesquels le rapport du nombre des molécules des acides nitrique et sulfurique est égal à 2:1 et se conserve presque constant. La signification de la première ligne réside sans aucun doute en ce que, dans la rangée des mélanges située à sa droite, l'acide nitrique se trouve tout le temps à l’état anhydre de HAZO* pur. Cette circonstance nous garantit la possibilité d'obtenir la nitration de la cellulose au plus haut degré. Sur la seconde ligne inférieure se dispose toute une rangée de mélanges à partir desquels l'acide sulfurique commence déjà à décomposer la nitrocellulose. Cela amène d’abord l’abaissement du degré de la nitra- tion, et, si la teneur en acide sulfu- rique est trop grande, nous remar- quons la décomposition complète ou l'impossibilité du procédé de la nitra- \ tion lui-même. < L'étude plus détaillée de cette par- de l'eau, doit ètre expliquée, selon toute apparence, tie du diagramme, limitée par les courbes signalées, par le fait que la HA:03H20 , altire notre atten- tion encore sur ce pression partielle de HAZO° dans ces fait que la plupart mélanges avec l'a- cide sulfurique des données expé- rimentales concer- contenant de l’eau s’abaisse moins nant la nitrocellu- - lose très nitrée et que dans les mé- langes avec l'acide insoluble coïnci- dent avec la com- sulfurique anhy- dre. position des mé- \ que H:0 Par conséquent, les mélanges ter- naires les plus avantageux, 2'est- à-dire ceux qui contiennent le moins d'acide ni- trique tout en conservant la plus grande pression de vapeur, se disposent sur la ligne des rapports égaux des molécules d'acide sulfurique et d'eau. La déviation de cette rangée de mélanges vers l'un ou l'autre côté est en relation intime avec l'abaissement de la pression de vapeur. Fig. 1. III Examinant de plus près le diagramme qui indique le rapport entre le degré de la nitration et la com- position du mélange des acides (fig. 2), nous pouvons formuler les conclusions théoriques suivantes : La région de la nitrocellulose la plus riche en azote et insoluble — (Az0*)" — est limitée par deux lignes : l'une d'elles passe non loin de la ligne HAzO°— H'SO!HO, c'est-à-dire de la ligne des H:S0* — Diagramme, en coordonnées triangulaires, des pressions de vapeur de l'acide nitrique dans ses mélanges avec H°0O et H?S0O* pour la nitration de la cellulose. langes ternaires très proches de la ligne des rapports égaux des molé- cules de HO et H°SO* et — dans tous les cas — des mélanges pauvres en acide nitrique. Pour tous les mélanges pauvres en eau, c’est-à-dire rapprochés de la ligne HAz0° — H'S0', le degré de nitration n'atteint pas une seule fois (AzO*)'! et varie dans les limites (AzO®)'%5 —(AzO*)#7, Cette dernière circonstance est certainement liée aux indications données plus haut que l'acide sulfurique anhydre abaisse beau- coup plus la pression de vapeur de l'acide nitrique que ne le fait le même acide contenant un peu d’eau. II nous est encore difficile de préciser la relation intime qui existe entre ces deux phéno- mènes. Mais, dans tous les cas, cette région du diagramme qui nous donne la nitrocellulose inso- luble doit être limitée par les deux lignes signalées déjà plus haut, et encore par une ligne quelconque sur son côté droit, passant non loin de la ligne HAz0° — H°S0*. Ainsi ces trois lignes forment un relations égales des molécules H?0 et H*SO*; l’autre | triangle, à l'intérieur duquel tous les mélanges A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE doivent nous donner la nitrocellulose très nitrée et insoluble. Malheureusement, dans la région du diagramme proche de la ligne HAZO* — H°S0", il nous manque des données expérimentales el il vous est impossible d'atteindre complètement la ligne HAZO®' — H*SO' avec les deux premières lignes, comme le représente le diagramme. Examinant les produits de la nitralion obtenus au moyen des mélanges silués loul près de celle région de la nilrocellulose insoluble, mais qui contiennent une quantité un peu plus grande d’eau ou d'acide sulfurique, il ne nous sera pas difficile de remarquer que les nitrocelluloses qui y prédo- minent possèdent une quantité de groupes nitrés très rapprochée de 10; ce sont les sortes de nitro-celluloses solubles ayant le plus haut degré de nitralion. En réunissant par une seule ligne IT les points extrêmes où lon rencontre le même degré de nilra- 121 semblables qu'il est encore impossible de donner des indications plus précises à ce sujel; cependant, la tendance générale se marque assez distincle- ment, notamment si nous nous avancons sur la ligne du rapport moléculaire égal des acides HAZ0" et H°SO'; autrement dit, sur la ligne HO - HAZO".H*SO*, du côté où la teneur en eau aug menlte, nous pourrons remarquer qu'avec une augmentation relative de l’eau de 23 °/, molécu- laire, dans la région des mélanges entre la 2° et la 3° lignes, les degrés de nitration s'abaissent vile; au delà de la 3° ligne, les produits de nilration sont tout à fait absents. HAz0° IV Désirant vérifier, ne fül-ce qu'en partie, les déductions obtenues, j'ai fait deux séries d'expériences de ni- tration dans les deux directions diffé- tion, nous dégagerons la région des mélanges qui pa-; rentes du diagramme que nous exami- nons. D'abord, j'ai raitfavorable pour obtenir ce degré de HA:03H°0 fait Ja nitration sur la rangée des nitration (AzO*)". En nous éloi- , À207 75.9 mélanges d'acides . A0 msus disposés sur la li- gnant encore da— » AzD° H°0 H?S0* Fig. 2.— Diagramme, en coordonnées triangulaires, des degrés de nilration de la cellulose par les mélanges ternaires. de 20-60 °/, mo- léculaire; les ré- sultats obtenus ont vants : été les sui- Quantité de HAzO®. 20 30 40 50 60 0/, mol. 0/0 d'azote dans la nitrocellulose . 13,21 13,34 43,38 13,41 13,09 NZ x 10,64 10,82. 10,88.115:00 10,47 Dans tous les cas, la nitrocellulose est tout à fait insoluble. L'autre série d'expériences a été faite sur là rangée de mélanges construits d’après la règle de Mendeléeff pour obtenir le pyrocollodion, c'est- à-dire avec le rapport moléculaire : 2 HAzO3 E xHESO' + (x + 2)H°0. Tous les mélanges de cette sorte sont disposés sur la ligne avec même teneur en eau dans les 50 °/, moléculaires. La a élé opérée pour sept mélanges en faisant varier x de 5 jusqu'à 0,5, ou, en pour cent moléculaires de l'acide sulfurique, de 35,7 °/, H°*S0* jusqu'à 10 °,, HSO*. nitration BY 192 A. SAPOJENIKOW — LA THÉORIE DE LA NITRATION DE LA CELLULOSE Les résultats ont été les suivants : 5 3 2 4,5 1 0,5 x 2 549, 42,15, 44564 44546 . . . . . J 0/, d'azote. 12,59 1 D + Dans tous les cas, la nitrocellulose est tout à fait soluble. Si nous tracons tous ces résultats sur le dia- gramme de la nitration, les trois premiers points se trouveront dans la région des mélanges qui donnent la nitrocellulose avec (Az0°)", et, comme on le voit, les données de la teneur en azote dans les trois nitrocelluloses sont bien rapprochées de ce degré de nitration. Dans le quatrième point, qui se trouve déjà hors de cette région, la teneur en azote est moindre, et à mesure que nous nous avancons plus loin dans la même direction, nous avons des produits toujours plus pauvres en azote. Ces expériences nous montrent clairement que la règle donnée par Mendeléeff n'est applicable que dans des cas particuliers, et si nous voulons pré- parer la nitrocellulose très nitrée et soluble, avec (AzO°)", en nous bornant à ces sortes de mélanges, nous voyons que les limites dans lesquelles cette règle est applicable sont bien restreintes. En outre, le diagramme même nous montre encore que, pour cette sorte de nilrocellulose avec (AzO*)", toutes les condilions possibles d'obtention ne peuvent pas être exprimées par une équation mathématique, parce qu'il existe pour chaque degré de nitration de la cellulose une quantité innombrable de mélanges différents, disposés dans une certaine partie du diagramme donné. Si nous rappelons que, pour construire le dia- gramme présent, il a fallu boute une série de données expérimentales de différents auteurs, que ces expériences s’accomplissaient dans les condi- tions les plus diverses, notre attention sera invo- lontairement attirée sur ce fait que la plupart des expériences et des compositions des mélanges des acides qu'on peut appliquer dans la pratique, se sont accumulées dans la région du diagramme avec la moindre teneur en acide nitrique et com- parativement riche en eau. Alors la ligne HAz0* — H'O.HS0", c'est-à-dire la ligne des relations égales des molécules de l'acide sulfurique et de l'eau, sera comme la limite qui divise le diagramme en deux parties : — à sa droite, la région des nitrocelluloses très nitrées et insolubles; à sa gauche, toute une rangée de nitrocelluloses s0- lubles, commencant par le pyrocollodion et finis- sant par les produits les plus stériles en azote. En donnant ces tentatives de représentation théorique des relations qui existent entre la com- position des mélanges d'acides et les degrés de nitration obtenus, je suis loin de penser que j'ai résolu complètement la présente question, si com- pliquée. Mais j'espère que la voie choisie par moi est juste et qu'en appliquant cette méthode pour l'élaboration des différentes données expérimentales relatives à la nitrocellulose, nous acquerrons la possibilité de continuer nos recherches sur cette question d’une manière plus consciente et exacte, sans faire sur la nitration de la cellulose une mul- titude d'expériences mal fondées et par conséquent peu utiles. A. Sapojenikow, Privat-docent de Chimie à l'Université de Saint-Pétershourg. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 123 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 41° Sciences mathématiques Arnoux (Gabriel), Ancien Officier de Marine. — Arithmétique graphique : les espaces arithmé- tiques. — 1 hroch. in-8° de xn-8% pages. Gauthrer- Villars, éditeur. Paris, 1909. Ce troisième fascicule que M. Gabriel Arnoux publie sur l'Arithmétique graphique à été rédigé, comme les précédents, avec la précieuse collaboration de M. Lai- sant. Après avoir indiqué dans une courte introduc- tion les principes généraux et les considérations établies dans ses travaux antérieurs, l’auteur étudie les espaces arithmétiques illimités, base de la géo- métrie des quinconces. Puis il expose, dans les pages suivantes, les transformations de ces espaces et des figures arithmétiques qu'ils contiennent. Grâce au rôle capital que les déterminants jouent en ces questions, on commence à entrevoir un lien de plus entre l'AI- gèbre et la Géométrie de situation. Dans le chapitre II, se trouvent des formules nou- velles sur la structure des espaces modulaires, formules qui aideront le lecteur à en mieux saisir la nature. Ensuite, M. Arnoux en traitant de la transformation des espaces modulaires, s'attache simplement aux principes les plus généraux pour montrer que ces nou- velles conceptions ne tarderont pas à acquérir le caractère de méthode qui leur manquait jusqu'ici. Le chapitre V se rapporte aux espaces multi-modu- laires, notion qui apparut incidemment à l’auteur à propos des tables de numération, dans ses recherches sur les fonctions arithmétiques, mais dont la portée beaucoup plus grande vient combler une lacune existant antérieurement. Effectivement, comme le dit M. Arnoux dans son avertissement, « grâce aux espaces multi-:modulaires, tout se simplifie, s'harmonise et s'éclaire. Bien des obstacles s'aplanissent et bien des nuages se dissipent ». Enfin, dans les dernières pages de sa brochure, le savant mathématicien indique la nature d'espaces par- tiellement modulaires. Cette étude présente un sérieux intérêt en vue des applications diverses {géométrie des tissus, problème des 36 officiers d'Euler, grilles et constellations de G. Tarry), signalées autant pour éclairer la théorie que pour en montrer l'utilité. Jacques Boyer. Ministère de l'Agriculture. — Compte-rendu et résultats des Etudes et Travaux au 31 décembre 1907, {ome III, publié par le Service d'Etudes des grandes forces hydrauliques (Région des Alpes). — 1 vol. in-8° de 688 pages, avec figures. Dunod el Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Tous les peuples comprennent les avantages de la houille blanche, et leurs gouvernements s'efforcent d’en favoriser l'emploi. En France, c’est dans la région des Alpes qu'on la trouve la plus abondante; et, pour elle, un Service d'études est, depuis plusieurs années, organisé au Ministère de l'Agriculture. Deux volumes, formant le fascicule 32 des Annales du Ministère, ont déjà été publiés sur les travaux de ce Service. Le tome JT ‘donne les progrès accomplis et les résultats acquis pendant les années 1906 et 1907, pour la partie des Alpes comprise entre le cours du Rhône, le lac Léman, la frontière d'Italie et le bassin de la Durance. Celle qui s'étend au Sud jusqu'à la Méditerranée fera l'objet d'une étude analogue, confiée aux soins de M. l'Ingénieur en Chef R. Tavernier. L'ouvrage que nous analysons comprend un compte rendu général, dû à M. l'Ingénieur en Chef R. de la ET INDEX Brosse, et les résultats obtenus par les collaborateurs placés sous ses ordres. Sur les 26.000 kilomètres carrés qui s'étendent du Léman à la Durance, il y avait en 1905 une soixantaine de stations de jaugeage; le nombre atteignait la cen- taine à la fin de 1907 : les stations, presque toutes à passerelle, sauf sur les cours d’eau dont la largeur rend nécessaire l'emploi d'une barque, sont munies à peu près toutes d'une ou plusieurs échelles hydromé- triques en lave émaillée, dont les indications servent de bases aux mesures des débits; certaines sont munies de limnigraphes Richard, qui enregistrent le niveau de l’eau. Les jaugeages se font surtout à l'aide de moulinets, pour lesquels on a créé à Grenoble une station de tarage, qui rend de précieux services. On à fait, en 1907, 220 jaugeages, çe qui a porté à 1.000 leur nombre total. Pendant les deux années 1906 et 1907, on à exécuté la planimétrie de 918.643 hectares; la superlicie relevée antérieurement était de 1.387.965 hectares. La longueur des nivellements opérés par le Service du Nivellement général de la France a été de 565 kilom. 6, ce qui à porté le total à 1.744 kilomètres. Le même service est en train de relever les profils en long des cours d’eau de la région. Les travaux exécutés jusqu'ici ont permis d'arrêter, avec une exactitude suffisante, les débits quotidiens el les courbes correspondantes dans un grand nombre des stations de jaugeage. On a aussi condensé dans un lésumé du mouvement des eaux tout ce qui intéresse chaque station, les chiffres moyens et extrêmes des débits, leurs rapports, leurs durées respectives, les coefficients par unité de surface. Le régime est ainsi défini avec toute la précision désirable, soit en cotes, soit en débits. De tous ces travaux ressort, pour M. de la Brosse, la conviction que les cours d’eau des Alpes françaises se- raient capables, en basses eaux, de fournir 1.500.000 che- vaux. Or, les usines existantes n'en utilisent jamais plus de 325.000. On peut donc, par un aménagement approprié, mettre près de 4.200.000 chevaux à la dis- position de l’industrie. Indépendamment des distribu- tions de force et de lumière, qui ne manqueront pas de s'étendre, l'électro-métallurgie (fers et aciers spé- ciaux, aluminium, métaux alcalins), l'électro-chimie (fixation de l'azote atmosphérique), l’électrification des chemins de fer, les irrigations agricoles assureront facilement la consommation de cette énergie. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. 2° Sciences physiques Gossart (E.), Professeur de Physique expérimentale à la Faculté des Sciences de Bordeaux.— La Gram- maire des électriciens, enseignée aux débutants par expériences et mesures. Tome I : Le courant continu.— 1 volume in-8° de 433 pages, avec figures. (Prix :6 fr.) Vuibert et Nony, éditeurs. Paris, 1909. Cet ouvrage sera lu avec fruit par les amateurs et les ouvriers électriciens. L'auteur, évitant l'écueil des Traités ordinaires de vulgarisation à allures trop timides, a su, comme il le dit : « vaincre cette terreur instinctive des symboles et des formules », grâce à un exposé clair et mis à la portée de tous. L'on peut apprécier surtout la facon dont est traitée la question des grandeurs électriques et du langage scientifique dont ces grandeurs forment la base. G. DE LAMARCODIE, \ncien Elève de l'Ecole Polytechnique BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Granger (Albert), Professeur à l'Ecole de la Manu- facture nationale de Sèvres. — Pierres et matériaux artificiels de construction. — 1 vol. de l'Encyclo- pédie seientifique. (Prix : 5 fr.) Octave Doin, édi- teur. Paris, 1910. L'Encyclopédie scientifique s'est enrichie d'un nou- veau volume de M. Granger sur les pierres et les maté- riaux artiliciels utilisés dans la construction des édi- fices d'habitation. L'auteur, spécialisé depuis longtemps dans ces ques- tions, tant par son enseignement à l’École annexée à la manufacture de Sèvres, que parses articles périodiques dans le Moniteur scientilique et autres revues tech- niques, était tout indiqué pour exposer, dans son état actuel, un ensemble d'industries, parmi lesquelles la récente fabrication des briques silico-calcaires a pris dans ces derniers temps une très grande extension. Le premier chapitre est consacre à l'étude des terres cuites : briques, tuiles, carreaux, tuyauterie et terres cuites architecturales, émaillées ou non. La matière première est alors une masse plastique à base de sili- cate d'aluminium hydraté, que la chaleur agglomere et rend résistant par la déshydratation du sel d'alumi- nium. Dans les grès, porcelaines et verres, traités dans la deuxième partie de l'ouvrage, l'agglomération se pro- duit par la fusion de certains éléments contenus dans le melange initial. Toute la masse peut d'ailleurs subir une vitrilication complète comme dans la porcelaine. La fabrication des pierres artiticielles ou agglomérés obtenus par hydratalion où même par l'intermédiaire de ciments spéciaux : ciment zincique, agglomérants organiques, est traitée longuement dans là dernière partie de l'ouvrage. Elle en forme la partie la plus neuve et la plus intéressante. Un résumé de l'étude des pierres silico-calcaires, par exemple, nous fera bien comprendre l'ordre suivi par l’auteur dans l'exposé de chaque industrie. Autour d'un examen approfondi des brevets Zer- nikow et Michaelis, sur lesquels repose toute la tech- nique des briques silico-calcaires et dans lesqueis se trouvent contenus, par conséquent, les multiples brevets postérieurs, M. Granger groupe tout l'historique de la fabrication. Il examine ensuite les matières premières, chaux et sable; décrit les traitements indépendants à leur faire subir : extinction, lavages, avant leur réu- nion dans le mélangeur; retrace les phases de com- pression et de durcissement dans la vapeur sous pression, analyse ensuite les différentes réactions dont la brique est le siège et qui concourent à sa prise et à l'apparition de la dureté. L'étude se termine par la description de deux installations types, avec prix de revient, et par un tableau exposant le développement de cette nouvelle industrie dans les dilférents pays La France, en 1906, ne possédait encore que 15 usines fournissant annuellement 80 à 90 millions de briques, mais l'intérêt qui s'est porté de plus en plus sur ces pro- duits a dû entrainer dans ces trois dernières années une grande extension, tant dans la production des usines déjà établies que dans leur multiplication. 55 figures, extrèmement soignées, permettent au lec- teur de se rendre compte de la construction des diffé- rentes machines en usage dans la fabrication des divers matériaux artificiels. Peut-être n'eût-il pas été inutile pour quelques-unes d'entre elles, malgré la netteté du dessin, de les accompagner de légendes explicatives. CAMILLE MATiGNON, Professeur au Collège de France. Foveau de Courmelles (Dr). — L'année électrique, électrothérapique et radiographique. — 1 vo/. 11-16. (Prix : 3 fr. 50.) Béranger, éditeur. Paris, 4910. La dixième Année électrique continue la tâche des volumes qui l'ont précédée: présenter les progrès élec- triques, électrothérapiques et radiographiques de l'année écoulée sous une forme concise et claire. 3° Sciences naturelles Martonne (Emmanuel de), Professeur de Géogra- phie à la Faculté des Lettres de l'Université de Pa- ris. — Traité de Géographie physique. — 1 vol. in-8° raisin de M2 pages, aveë 396 figures, 48 planches phot. et 2 cartes en couleurs. (Prix : 22 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 190. Ce livre est une synthèse, et il faut louer M. de Mar- tonne d’avoir eu le courage de l’entreprendre et le talent de la mener à bonne fin. Il est très suggestif de constater que les études de Géographie physique ont pris surtout une tournure scientifique bien nette, depuis que les études de Géo- logie sont entrées dans une voie synthétique. C'est d’ailleurs avec la Géologie que les affinités de la Géographie sont les plus accentuées. Aussi peut-on dire que, pour comprendre la Géographie, il est néces- saire d’être géologue, ou, au moins, de savoir appliquer les idées et les méthodes géologiques à la Géographie physique. D'ailleurs, l'état actuel de notre globe n'est-il pas, comme on le dit souvent, la résultante des efforts du passé ? Ce sont précisément des géologues tels que Suess, Heim, Marcel Bertrand, de Lapparent, de Margerie, Vélain, Penck, etc., qui, avec de Reichthofen, Davis, Schimper, Vidal de la Blache, ont le plus contribué à souder les deux sciences l’une à l’autre. La lecture des phénomènes géologiques du beau traité de Géologie de M. Haug est aussi utile à un géographe qu'à un géo- logue. Mais la Géologie n'a pas la prétention de tout expliquer et la Géographie ne doit pas être la vassale étroite de la Géologie. Elle à, elle aussi, sa personnalité et son autonomie. L'ouvrage de M. de Martonne nous en fournit -une preuve excellente. L'auteur à eu une base solide pour écrire ce travail avec les publications des auteurs précités, tous plus ou moins spécialisés. Mais il a été obligé, pour faire œuvre synthétique, et c’est un de ses mérites, de rechercher beaucoup d'éléments d'étude au milieu de matériaux très dispersés. Il a pu donner ainsi un ouvrage dans lequel n'entrent pas exclusive- ment des vues d'ordre morphologique, mais aussi an exposé complet sur la Météorologie, l'Hydrographie et laGéographie biologique, quisont sérieusement traitées, à la lumière des idées nouvelles, et, dans nombre de cas, avec des vues originales et bien personnelles. L'ouvrage est divisé en cinq parties : La première comprend des wotions générales sur la Géographie; la seconde à trait au climat; la troisième étudie l’Æydrographie {les océans, les mers, les lacs, les rivières). Dans la quatrième, qui est la plus importante, puis- qu'elle ne comprend pas moins de 350 pages et de 11 chapitres, M. de Marlonne a exposé avec grands détails le Æelief du sol. Les titres seuls des caapitres qui se rapportent à cet exposé morphologique en sou- hgnent tout l'intérêt (Le cycle de l'érosion fluviale. Influences des roches sur le modelé. Influences tecto- niques sur le relief. Reliefs volcaniques. Evolution du relief et du réseau hydrographique. La Paléogéographie. Glaciers et Topographie glaciaire, ete.). Les cinq chapitres de la cinquième partie (Biogéo- graphie où Géographie des êtres vivants) montrent les relations de la Géographie avec la Zoologie et la Bota- nique. Chaque chapitre est suivi d'un index bibliographique important qui facilitera beaucoup les recherches des spécialistes. L'ouvrage, que nous avons le regret d'analyser aussi sommairement, offre d'autres qualités que nous devons signaler. Il est présenté avec beaucoup de méthode et de clarté. Il renferme, en outre, de nombreuses figures qui ont élé soigneusement sélectionnées par l’auteur dans les diverses publications parues ; mais il offre également BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 125 des cartes multiples, des croquis, des schémas, qui parlent singulièrement aux yeux. Il n'est rien de tel, pour faire pénétrer une idée, que de la représenter sous forme de dessins, aussi simples que possible. Je w'y applique de mon mieux dans mes cours de Ja Faculté et J'en obtiens d'excellents résultats. M. de Martonne, qui emploie une méthode analogue dans son enseignement, à voulu faire profiter le lecteur «de ses idées personnelles, exprimées par des croquis el des schémas, et il en à choisi un assez grand nombre qui, venant s'ajouter à ceux de Davis, rendent la lec- ture de l'ouvrage des plus agréables. Et, comme mon savant collègue sait rendre d'une façon exacte ce qu'il a vu ou ce qu'il veut montrer, ses dessins ont une réelle valeur scientifique. La maison Colin a fait de gros sacrifices pour l’illus- ration photographique, en présentant, non plus les photographies dans le texte, mais sur des planches sé- parées et sur papier couché, comme elle l'avait déjà fait pour le traité de Géologie de M. Haug. Le traité de Géographie de M. de Martonne ne com- prend pas moins de quarante-huit planches photogra- phiques qui lui fontune véritable parure. Elles achèvent de donner du relief à ce livre, puisque chacune d'elles est comme un document vivant. Le traité dont nous parlons comble done une lacune importante dans la littérature géographique, car il n'existait pas jusqu'ici d'ouvrage embrassant tout ce qu'on est convenu aujourd'hui d'appeler Géographie physique. Il cimente, en outre, plus intimement, l'union de plusieurs sciences : la Météorologie, la Zoologie, la Botanique, la Géologie, etc., et montre une fois de plus que la Géographie physique est une véri- table science, servant de trait d'union à plusieurs autres, qu'elle coordonne étroitement. Cet ouvrage rendra donc de grands services non seulement aux géographes spécialisés, mais aussi aux étudiants et aux personnes, de plus en plus nombreuses, qui s'inté- ressent aux recherches géographiques et qui ont besoin d'un guide sûr et éclairé. PH. GLANGEAUD, Professeur de Géologie à l'Université de Clermont-Ferrand Vidal de La Blache (P.),, Membre de lInstitut, Professeur à la Faculté des Lettres de l'Université de Paris. — Atlas général (Histoire et Géogra- phie). — 1 vol. qr. in-4, avec 420 cartes et cartons. (Prix : 30 fr.) Librairie Armand Colin. Paris, 1909. Le succès de l'Atlas Vidal de La Blashe a obligé la Librairie Colin d'en donner une nouvelle édition, et il faut dire tout de suite que cette édition est digne de figurer au premier rang des plus belles publications géographiques, tant par la valeur des documents et la science avec laquelle ils sont présentés, que par l'admirable exécution du travail cartographique. Est-il besoin d'analyser l'Atlas Vidal de La Blache, puisqu'il se trouve sur la table de tous ceux qui aiment la géogra- phie? Qu'il nous suffise de dire que le savant professeur da la Faculté des Lettres de Paris a doté la cartogra- phie d’un inestimable instrument de travail, et que la Librairie Colin, en cette nouvelle et splendide édition, s'est encore surpassée. L. R.C. 4 Sciences médicales Labbé (Marcel), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin des Hôpitaux de Paris. — Régimes alimentaires.— 1 vol. in-8° de 585 pages, avec 41 figures dans le texte. (Prix : 42 tr.) J. Baiïl- lière et fils, éditeurs. Paris, 190. L'auteur était particulièrement qualifié pour la rédaction d'un ouvrage de diététique générale, par ses travaux antérieurs relatifs à la nutrition et par les enquêtes, poursuivies en collaboration avec le Profes- seur landouzy, et concernant l'alimentation ouvrière et collective. Dans la première partie sont rappelés les principes généraux et les procédés cliniques indispensables à l'étude de la nutrition, son mécanisme, ses résultats. La deuxième partie est consacrée à une revue suc- cincte des aliments simples et composés. La troisième partie traite de l'alimentation des sujets sains. L'auteur y étudie l'alimentation selon les condi- tions physiologiques (âge, sexe, idiosyncrasie), selon les conditions géographiques (saisons, climats, races), selon les conditions économiques, selon les rites reli- gieux. L'alimentation des collectivités (armée, marine, hôpitaux, prisons), les cures de régime font l'objet de chapitres importants. L'alimentation des malades forme la quatrième partie de l’ouvrage, la plus développée. On y trouvera exposés les régimes qu'il convient d'instituer dans les diverses espèces cliniques, qu'il serait fastidieux d'énumérer ici. Bornons-nous à signaler les chapitres particulière- ment «vécus» consacrés à l'alimentation des obèses, à la cure de l'obésité, à l'alimentation des diabétiques, à la cure du diabète, qui ont fait d'ailleurs, de la part de l’auteur, l’objet de recherches patientes. La cinquième partie, enfin, intitulée cuisine diété- tique, rappelle les notions essentielles à la pratique culinaire, à la préparation rationnelle des aliments destinés aux malades. Ce résumé thématique indique suffisamment que l'alimentation normale et pathologique a été envisagée sous tous ses aspects. Une expérience clinique pro- longée, une érudition solide, un éclectisme avisé ont présidé à la rédaction de l'ouvrage, et ont permis à l’auteur de traiter ces questions avec toute la précision compatible avec l’état actuel, encore inconsistant en plus d’un point, de la science diététique. D' ALFRED MARTINET, Ancien Interne des Hôpitaux. Meunier (D' Raymond). — Le Hachich. — 1 vol. in-16 de 218 pages de la Bibliothèque de Psychologie expérimentale et de Métapsychie. (Prix : 3 fr.) Bloud et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Cet ouvrage est consacré à l'étude du hachich et de ses dérivés, aux symptômes de l'ivresse hachichique et à la folie hachichique, enfin à l’action thérapeutique de ce toxique. Le hachich paraît être un poison de l'écorce céré- brale et du bulbe. 11 augmente la suggestibilité et l'auto-suggestibilité. Il supprime la maitrise de soi- même. Ne füt-ce que pour cette seule raison, l'emploi en doit être prohibé. 5° Sciences diverses Duhem (Pierre), Correspondant de l'Institut de France, Professeur à la Facullé des Sciences de Bordeaux. — Etudes sur Léonard de Vinci : ceux qu'il a lus et ceux qui l’ont lu. Seconde série. — 4 vol. gr. in-8° de 460 pages, avec figures. (Prix : 15 fr.) A. Hermann et fils, éditeurs. Paris, 1909. L'intérêt de ce livre est double. On y voit d’abord le grand peintre en pleine activité intellectuelle : les modernes ont le goût de ce genre d'études qui leur permet de surprendre un esprit en pleine recherche, de saisir par quelle méthode, spontanée ou voulue, il est arrivé à telle vérité. M. Duhem s'est acquitté de cette première partie de sa tâche avec une profondeur et une finesse qui forcent l'admiration. Les difficultés, pourtant, ne manquaient pas et la besogne était ardue : les notes laissées par Léonard de Vinci offrent souvent l'aspect d'un véritable labyrinthe, et nombreux sont ceux qui ont échoué dans la recherche du fil d'Ariane. Ces notes, M. Duhem a su les faire revivre en interro- geantl'époque qui les a vues naïlre, en prenant connais- sance des discussions philosophiques en vogue au début du xvie siècle et qui ont dû préoccuper aussi Léonard de Vinci, enfin en lisant les nombreux volumes qu'il a médités. Alors, telle pensée décolorée, isolée, qui pou- vait paraître insignifiante ou obscure, reprend le sens BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX et la vie et éclaire d'une vive lumière les problèmes dont cet esprit génial était agité. Il a fallu à M. Duhem une documentation de savant et un talent de véritable historien pour opérer une telle résurrection. Les lec- tures qu'a faites Léonard ont vivement sollicité son attention et c'est avec juste raison. Léonard de Vinci a beaucoup lu et d'une façon originale. Rencontrait-il une idée nouvelle en ces pages que sa main feuilletait ? Aussitôt il la copiait, l'examinait en tous sens, en cher- chait les tenants et aboutissants, la formulait à nou- veau jusqu'à cinq, six reprises différentes. Sur ce labeur auquel s'est livré Léonard, M. Duhem a écrit des paroles définitives, d’une très grande hauteur de vues: « Chaque vérité a un lien, plus ou moins immédiat, avec chaque vérité; tel est le principe qui nous paraît dominer le génie de Léonard et en commander toutes les démarches. Dirigé par ce principe, le Vinei a su lire mieux que qui que ce fût; bien lire, en effet, c’estnon seulement recevoir la vérité nouvelle que le livre met sous nos yeux, mais c'est encore apercevoir clairement les rapports qu'a cette vérité avec toutes les vérités que nous connaissons déjà, avec tous les problèmes dont nous souhaitons la solution. « Etc'est précisément parce que Léonard lisait ainsi, parce qu'il lisait bien, qu'il a été un grand inventeur. Toutes les fois qu’en ses courtes notes, nous voyons apparaître une de ces idées qui portent la marque du novateur génial, nous reconnaissons que cette idée est née du rapprochement de deux autres pensées ; tantôt ces deux pensées, au contact fécond, ont été tirées de deux livres: tantôt l'une d'elles est venue, par la lec- ture, retrouver l’autre que l'observation avait tirée des faits. » Mais, en recherchant les nombreuses sources de la pensée de Léonard, M. Duhem a été conduit à élargir singulièrement le cadre de son ouvrage. Et c'est en cela que réside précisément le second intérêt du livre. M. Duhem fait une large esquisse du mouvement phi- losophique et des préoccupations scientifiques du Moyen-Age jusqu'à l'aurore des Temps modernes. Il est même amené à remonter plus haut à travers les siècles et à examiner ce que la philosophie grecque avait déjà dit sur les problèmes qui ont intéressé le Moyen-Age. La portée du livre est donc très générale: elle permet de suivre la filiation de quelques grandes idées qui ont abouti au magnifique épanouissement de la Science moderne. C’est d'une facon à la fois sobre et magis- trale que M. Duhem retrace, en particulier, le tableau intellectuel de deux époques très intéressantes au point de vue du développement de la pensée moderne : l’une de ces époques coïncide avec la fin du x siècle, l’autre avoisine l'an 4500. Dans la première, la pensée chré- tienne triomphe à Paris et à Oxford de la tyrannie péripatéticienne ; dans la seconde, la Scolastique, qui s'alanguit à Paris et dans les universités allemandes, reprend une vigueur nouvelle en Italie par le contact avec la Géométrie antique. « Léonard de Vinci résume et condense, pour ainsi dire, en sa personne, tout le conflit intellectuel par lequel la Renaissance italienne va devenir l'héritière de la Scolastique parisienne. » Le livre se compose de quatre parties et se termine par des « Notes » complémentaires, assez volumineuses. La première partie a pour titre : Léonard de Vinei et les deux infinis.M. Duhem montre comment, jusqu'à la fin du xv° siècle, la Scolastique poursuit l'analyse logique du concept /imite. Le goût de la précision, de la logique, de la distinction subtile, sans laquelle il n'est pas de véritable rigueur, sont caractéristiques de cette période. Mais, vers la fin du xv° siècle, et surtout au début du xvi® siècle, la plupart des philosophes se détournent de ces études précises et ardues. Le bel esprit de l’huma- nisme fait tort à la rigueur logique, au langage tech- nique des maîtres de la Scolastique. Un scepticisme général ruine tout ce que les terminalistes avaient dit de précis au x1v° siècle sur l'infiniment grand et l'infi- niment petit. Et il faudra des siècles pour que la tradition rompue par l’'humanisme soit reprise par les mathématiciens et pour que les géomètres en fassent sortir le Calcul infinitésimal. Le Vinci est le seul, parmi ses contemporains, qui apprécie la valeur des grandes vérités établies par les logiciens du xiv° siècle et qui en saisisse toute la profondeur. La deuxième partie du livre s'intitule : Léonard de Vinci et la pluralité des mondes. Afin d'expliquer un texte important de Léonard sur la chute des graves, l'auteur examine les principales théories que le Moyen- Age a émises au sujet de la pesanteur. Il montre l’im- portance des discussions médiévales sur cette grosse question. Il s'agissait de savoir si, comme le professait Aristote, un corps tend vers son « lieu naturel » sim- plement par sa nature même et pour y atteindre sa perfection, ou bien si ce corps est mû par une attrac- tion qu'il éprouve de la part des corps semblables? Si le poids d'un corps est indépendant de la distance de ce corps au centre du monde, ou bien, au contraire, si ce poids est d'autant plus grand que le grave est plus près de son lieu naturel? Ces questions étaient inti- mement liées à cet autre problème : existe-t-il un ou plusieurs mondes? Aristote avait déclaré que le monde élait unique et qu'il ne pouvait en être autrement. Mais cette affirmation n'était-elle pas en contradiction avec la doctrine chrétienne de la toute-puissance de Dieu? Guillaume d'Ockam, en particulier, va s’efforcer d'éta- blir que la puissance de Dieu est illimitée et qu'il lui est possible de créer plusieurs mondes. Malgré tout, les contradicteurs d’Aristote ne sont pas nombreux. Les scolastiques du xiv° siècle rejettent, en général, l'hypothèse de l'attraction à distance; mais, pour la réfuter, ils sont obligés d'en développer les conséquences, de reconnaitre que, d'après cette sup- position, le poids d’un corps varierait avec la distance de ce corps à son centre d'attraction, que ce poids diminuerait en mème temps que cette distance aug- menterait, et que le corps, en tombant, aurait une vitesse initiale d'autant plus faible que son point de départ serait plus éloigné du centre d'attraction. La révolution copernicaine fut donc préparée par les dis- cussions de la Scolastique. La troisième partie du livre est consacrée à une large esquisse du système philosophique de Nicolas de Cues, de sa dynamique, de sa mécanique, et aux em- prunts que Léonard de Vinci a faits à la pensée du cardinal allemand. Enfin, la dernière partie a trait aux origines de la Géologie. De Léonard date vraiment la naissance de la Géologie. Les maîtres italiens de son temps pensaient que la cause essentielle de la formation des nouveaux continents n’est pas le soulèvement lent du fond de la mer, mais que cette cause est éruptive. Léonard revient à une ancienne opinion et montre, par de nombreux arguments, que les fossiles ne sont pas des épaves transportées accidentellement à de grandes dis- tances par la mer débordée, mais que ce sont des restes d'animaux ayant vécu sous les flots pendant de longues durées, aux endroits mêmes où ils ont été enfouis et pétrifiés. C'est dans cette science géologique que Léonard imprime le plus fortement sa marque géniale et se montre comme un promoteur des plus clairvoyants et des plus féconds. On ne peut terminer sans dire un mot de la facon remarquable dont le livre est écrit. Il y a telle page de large philosophie qui mérite de devenir classique, non seulement par l’envergure de l’idée, mais encore par la sobriété élégante du style. C'est clair, exact, d'une belle rectitude scientifique. La pensée s'affirme avecune telle force que, lorsqu'on veut l’exprimer à son tour, on a peine à écarter le terme même dont s’est servi l’auteur ; il revient impérieusement à la mémoire : c'est qu'il est le seul juste, le seul propre, le seul qui réponde au précepte fameux de La Bruyère. LÉON JALOUSTRE, Ancien élève de l'École Normale supérieure, Professeur agrégé de l'Université. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 127 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 Janvier 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin établit les propriétés d’une série de systèmes et de congruences qu'il désigne par la lettre K. — M. U. Cisotti montre que le théorème de M. Poincaré généralisant le théo- rème de Jacobi peut, en augmentant le nombre des rariables, être déduit à son tour du théorème de Jacobi. — M. L. Zoretti développe certaines définitions rela- tives à un ensemble de points. — M. A. de Gramont a reconnu que les raies ultimes ne se présentent pas dans les spectres des étoiles les plus chaudes; elles font leur apparition dans Algol, augmentent dans Sirius, Castor et Procyon ét atteignent leur maximum dans Capellà, Arcturus et Bételgeuse. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Bouty à déterminé la cohésion diélectrique du néon; elle atteint au maximum 7,6. C'est la plus faible parmi celles de tous les autres gaz. — M. L. Décombes décrit une méthode permettant d'éliminer les couples directeurs électriques et les effets dus à la dissymétrie, à l'absence de réglage et aux forces électromotrices de contact dans les élec- tromètres à quadrants. — MM. Ed. Bauer et M. Moulin ont constaté que le pouvoir émissif d’une lame de pla- tine, constant pour des angles d’émissioninférieurs à 409, augmente notablement pour des angles plus grands. En corrigeant d’après cette indication les résultats obtenus pour la constante de la loi de Stefan, on a : 6 —5,3 X 1012. — M. E. Kohn-Abrest a observé qu'au cours d’un chauffage à 100° dans un tube de porcelaine, l’alu- minium se volatilise en réagissant sur les parois de l'enceinte et en mettant en liberté du silicium qui cris- tallise de l'aluminium liquide. — MM. G. Charpy et S. Bonnerot établissent que le carbone solide ne cémente pas le fer à 1.000° en l'absence d'un véhicule gazeux qui paraît être, dans leurs expériences, l’oxyde de carbone. — M. P.Camboulives a fait réagir CCI' sur les anhydrides et les oxydes métalliques à des tempé- ratures comprises entre 2150 et 5800, Il a obtenu presque dans tous les cas les chlorures correspondants, avec dégagement de CO? et de COCF. — M. A. Verneuil, en fondant l'alumine avec une petite quantité d'acide tita- nique mélangé d'oxyde salin de fer, a obtenu par refroidissement des ovoides possédant la couleur bleue et les propriétés cristallographiques du saphir. — M. M. Guerbet, en faisant réagir l'alcool butylique secondaire sur son dérivé sodé, a obtenu l'alcool dibu- tylique ou méthyl-3-heptanol-5, Eb. 167-1690, et l’al- cool tributylique, Eb. 2500-2550, — MM. G. Bertrand et G.Weisweiller ont préparé par hydrolyse de la vicia- nine, glucoside cyanhydrique des graines de Viera anqustifolia, un nouveau sucre réducteur, le vicianose, CG#H%0", F. 2100, [«]n ——+ 399,72, très soluble dans l'eau. — M. R. Fosse a constaté que l'acide hypophos- phoreux transforme le triphénylcarbinol, le dinaph- topyranol et l'hydrol de Michler, d’une pari en acides phosphineux par liaison du P au C, d'autre part en carbures correspondants par réduction. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Conte a observé diverses anomalies et variations spontanées chez des oiseaux domestiques : ainsi le croisement du bec chez des poussins, le fanon sous-æsophagien de l’oie tou- lousaine chez la poule. — M. L. Masson a constaté que l’accoutumance des bactéries à des doses crois- santes d'antiseptique est un phénomène temporaire ; la propriété acquise est toujours suivie d’un retour à la résistance initiale et normale. — M. W. Kilian à établi une série phylogénétique très nette, allant de l'Hauterivien à l’Albien, et rattachant le sous-cenre Leopoldia au groupe de l'Ammonites bicurvatus. À cet ensemble de formes, il propose de donner le nom de Saynella. Séance du 2% Janvier 190. Lord Rayleigh est élu Associé étranger de démie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Le Roux à recherché les conditions de maximum et de minimum d'une fonction analytique d'une infinité de variables. — M. D. Mirimanoff démontre le théorème suivant : Si l'équation x? + y? + Z—0 est possible en nombres entiers premiers à p, le quotient de Fermat : l'Aca- D est divisible par p. — M. Galbrun expose ses recherches sur la représentation des solutions d'une équation aux différences finies linéaire pour les grandes valeurs de la variable. — M. Ch. André signale l'observation faite à Lyon par M. Guillaume, le 21 janvier à 5 h. 20, de la comète de Johannesbourg. — M. E. Esclangon à observé la même comète au grand équatorial de l'Obser- vatoire de Bordeaux le 22 janvier. — M. H. Bourget a observé la même comète (4910 a) à l'Observatoire de Marseille les 19, 20 et 21 janvier, Son noyau mesure 12", sa queue environ 159. — M. E. Maubant a calculé les éléments de la comète Tempel, au 21 février 1910, époque de son prochain passage au périhélie; elle sera difficilement observable à cause de son voisinage du Soleil. — M. K. Birkeland montre que les rayons cor- pusculaires provenant du Soleil ont une déviabilité magnétique énormément moins grande et un pouvoir de pénétration beaucoup plus fort que les rayons du groupe $ connus jusqu'ici. — M. A. Angot signale l'enregistrement au Parc-Saint-Maur, le 22 janvier, d'un tremblement de terre de grande violence, dont l’épicentre se trouve à un peu moins de 3,000 kilo- mètres dans le Sud-Est. — M. B. Brunhes annonce que la même secousse à été enregistrée à l'Observa- toire du Puy-de-Dôme. — M. A. Grandidier donne le compte rendu de la Conférence de Londres ‘ pour l'exé- cution d'une carte internationale de la Terre au 1/1.000 000€ et propose à l'Académie d'émettre le vœu que la France prenne une part active à ce travail et qu'il soit confié au Service géographique de l'Armée. — M. P. Helbronner indique le résultat des jonctions de la chaîne méridienne de Savoie avec les triangula- tions fondamentales italienne et suisse. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. Edm. van Aubel a uti- lisé les mesures de Wintgen pour rechercher si le fac- teur de proportionnalité établi par Pulfrich entre la contraction de volume et le pouvoir réfringent des mélanges liquides est toujours positif. Il a obtenu une valeur négative dans le cas d’un mélange à volumes égaux d’une solution d'heptamolybdate d'ammonium avec une solution d'acide tartrique. — M. P. Vaillant montre que, dans le cas dun vase incomplètement rempli ne communiquant avec l'extérieur que par une ouverture pratiquée dans la paroi supérieure et relati- vement étroite, la vitesse d'évaporation est donnée par la formule g— a MF‘, où a dépend en faible propor- tion de la nature des liquides, F est la tension de vapeur et M le poids moléculaire. — M. C. Féry pré- 1 Voir la Revue du 50 décembre 1909, t. XX, p. 981. 128 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sente un prisme à faces courbes applicable à la Spec- troscopie, qui permet de supprimer tout dispositif de concentration étranger au prisme. — M. G. Gaillard a observé une dissymétrie appréciable dans la vitesse de dissolution des cristaux de sucre candi suivant leurs différentes faces. Les différences sont surtout sensibles pour la face ® par rapport à 2, et p. — MM. J.Chaudier el E. Chauvenet ont reconnu que la radio-activité des composés halogénés et oxyhalogénés du thorium, pour des quantités de substance contenant plus de 10 milli- crammes de Th, diminue lorsque le poids atomique des éléments associés augmente. Elle se confond avec celle du Th pour des quantités de matière suffisam- ment faibles. — M. P. Camboulives moutre que la vapeur de CCI! agit sur les oxydes métalliques naturels, pour les transformer en chlorures, comme sur les oxvdes artificiels, pourvu que ieur état de division soit suffisant. On peut, au moyen de ce réactif, faire des séparations analytiques. — MM. Ch. Moureu et J. Ch. Bongrand, en soustrayant deux molécules d'eau à la butine-diamide COAZH®.C : C.COAZH®?, ont obtenu un corps C‘Az° ou Az : C.C : C.C : A7, qu'ils nomment sous-azoture de carbone. Il cristallise en aiguilles blanches, F.20°,5-21°, Eb. 76° sous 753 milli- mètres. — MM. G. Bertrand et M. Holderer ont reconnu qu'il existe une diastase spécifique du cellose, qu'ils nomment cellase, plus ou moins mélangée avec d'autres espèces diastasiques dans des organes appar- tenant à des végétaux divers : amandes de l’abricotier et de l’amandier, graines de l'orge, ete. — M. M. Lom- bard montre que la mise en liberté d'iode par l’eau traitée par les rayons ultra-violets n'est pas due prin- cipalement à la formation de H°0?, mais aux nitrites formés par réduction des nitrates. Toutefois, le pouvoir stérilisant des lampes en quartz à vapeur de mercure semble dû surtout à une action abiotique propre aux rayons ultra-violets. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Marage signale que la photographie des vibrations laryngiennes permet de faire voir d'une facon très nette l’état de la voix au début et à la fin d'un traitement. Ce procédé est un guide pour le praticien dans la marche des soins à donner. — M. A. Rosenstiekl montre que l'expérience et la théorie sont d'accord pour constater la formation constante du blanc par le mélange de deux couleurs. De ee fait, l'intensité de coloration des mélanges binaires varie entre 1/3 et 1/6 de l'intensité du blanc pour un même éclairage, mais leur intensité lumi- neuse totale reste constante. — M. P. Hachet-Souplet a observé que la loi d'association des sensations chez les animaux (loi de récurrence), bien mise en évidence par le dressage, s'applique aussi aux animaux vivant à l’état de nature. — M. A. Lécaillon a constaté, sur l'œuf nouvellement pondu du merle, que l'enveloppe de la sphère vitelline comprend trois couches super- posées régulièrement; l'œuf ovarien des oiseaux, à un stade avancé de son évolution, est enveloppé d'un fol- licule présentant exactement ces trois mêmes couches, mais qui dégénère en général dans l'œuf pondu. — M. L. W. Collet signale la présence de Cénomanien fossilifère dans les Alpes calcaires de la Haute-Savoie, sur la rive droite du Giffre en amont de Sixt. — M. E. de Martonne montre que les formes alpines sont d'origine très complexe. Pour les expliquer, on ne saurait se contenter de considérer soit la tectonique, soit l'érosion fluviale, soit l'érosion glaciaire. Ces trois facteurs doivent entrer en ligne de compte. Il est nécessaire d'admettre des mouvements du sol impor- tants dans les Alpes jusqu'à la fin du Pliocène. — M. #. Kerforne a trouvé à Beslé (Loire-Inférieure d'anciennes exploitations, probablement gallo-ro- maines, sur un filon quartzeux minéralisé en or libre, pyrite et mispickel; l'or natif se présente sous forme de paillettes minces ou de fils contournés; il est abon- dant. L'exploitation du filon, qui ne s’est pas étendue en profondeur par suite d’une venue aquifère pourrait être reprise. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 15 Janvier 1910. MM. Ch. Porcher el Ch. Hervieux ont constaté que le corps dont la présence est décelée dans le distillat de l'urine par la réaction de Legal est l'hydrogène sulfuré ; ils l'ont caractérisé, en outre, par la production de PbS et la formation de la thionine. — M. L. Blaizot a constaté que le virus de la spirochétose des poules produite par le Sp. gallinarum s'atténue sur le poussin et devient un vaccin efficace pour préserver de l’in- fection la poule adulte. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre ont reconnu que les premières hématies des Mammifères, volumineuses et nucléées, équivalent à une cellule entière dont le corps cellulaire s'est chargé d'hémoglobine. Quant aux petites hématies définitives ou anucléées, elles dérivent du noyau des cellules de l'embryon plus âgé. — MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez ont observé que les plaquettes ne jouent aucun rôle dans la rénovation sanguine et ne se trans- forment pas en globules rouges. — M. A. Policard décrit la structure de la cellule hépatique chez le chien après fixation par le formol et ses modifications au cours de son fonctionnementnormal.—M J.Nageotte a observé, dans la membrane des incisures de Schmidt-Lanterman, des granulations mitochondriales ; ces incisures cons- tiluent une formation différente des réseaux intra- myéliniques. — M. Ch. Pérez a constaté que les tubes de Malpighi des Muscidés persistent de la larve à l'imago, présentant chez toutes deux une structure différenciée très comparable et passant dans l'intervalle par une structure beaucoup moins différenciée. — M.R. Legendre montre que la méthode de Golgi ne permet pas d'affirmer l'identité du réseau interne et du réseau spongioplasmique incrusté de corps de Nissl; mais elle ne permet pas d'affirmer leur nature différente. — MM. H. Dominici et H. Faure-Beaulieu ont constaté que, pour le lapin, c’est entre 20 et 50 millièmes de milligramme que se trouve la dose minima de sulfate de radium suffisante pour être retenue par les tissus pendant une durée dépassant une année ; cette injection est, d'ailleurs, inotfensive. — MM. A. Calmette el L. Massol montrent qu'on ne doit en aucune manière attribuer des propriétés antitoxiques vis-à-vis de la tubereuline aux sensibilisatrices antituberculeuses contenues en abondance dans le sérum des Bovidés ayant recu des injections intra-veineuses massives de tubereuline. — M. D. Jacobson a reconnu que, dans les cas de tuberculose latente ou localisée, on peut déceler la présence de très faibles quantités de toxine tuberculeuse dans la circulation par la déviation du complément, en employant une quantité moindre de ce dernier. — MM. C. Dopter et G. Repaci ont repro- duit expérimentalement la dysenterie bacillaire chez le lapin en faisant ingérer en une seule fois à l'animal une dose massive de microbes vivants. L'autopsie révèle des altérations portant uniquement sur le gros intestin. — MM. P. Aubert, P. Cantaloube el E. Thibault, sur #21 animaux domestiques examinés à Saint-Martial (Gard), ont reconnu chez 87 la fièvre de Malte; la majorité des animaux atteints sont des chèvres, mais il y a aussi des moutons et lapins. — MM. H. Bierry et L. Morel ont constaté que, sur des chiens âgés, la section intrathoracique des splanch- niques droit et gauche empêche la glycosurie adréna- lique, au moins pendant # heures, tandis qu'elle n'a pas d'action sur des chiens jeunes. — M. L. Lapicque décrit un modèle d'excitateur pour le sciatique de la “renouille. — MM. A. Lagriffoul et H. Roger ont observé la persistance pendant 4 ans de la réaction agglutinante chez un homme ayant eu la fièvre de Malle. — MM. F. Arloing et H. Gimbert ont reconnu que les diverses variétés du bacille tuberculeux possèdent un pouvoir chimio-tactique positif, qui est en raison inverse de la virulence. — M. H. Laugier à étudié l'influence de la concentration saline sur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'excitabilité musculaire et nerveuse; dans tous les cas, qu'il y ait hypertonie ou hypotonie, on observe une élévation du seuil et une augmentation. de la vitesse, Séance du 22 Janvier 1910. MM. N. Fiessinger el L. Lyon-Caen ont éludié les altérations des canalicules biliaires intercellulaires; elles ne sont nullement la conséquence d’une stase biliaire, mais se produisent à la suite des dégénéres- cences atrophiques. — MM. G. Rosenthal et P.Chaza- rain-Wetzel ont étudié la symbiose du bacille pyocya- nique et du bacille bulgare en tubes de lait écrémé; l'acidification du milieu produit l’inhibition, puis la disparition du premier, tandis que le second prend une forme de résistance el de moindre activité. — M. G. Rosenthal à constaté que le lait caillé est incontami- nable par le bacille du rhumatisme aigu; l’'ensemence- mentsimultané du bacille bulgare et du bacille du rhu- malisme en milieu favorable est suivi d’une symbiose avec disparition du second dans un délai assez courtpar suite «le l'acidification du milieu. — MM. L. Lortat- Jacob et H. Labbé montrent que l'augmentation anormale de l'indosé urinaire constitue un symptôme précoce du diabète. — M. E. Berger à observé la fusion stéréoscopique des images se dessinant sur des points non identiques des deux rétines, grâce à un mouvement inconscient de rotation de l'œil. — MM.J. Auer et P.-A. Lewis ont recherché la cause de la mort dans l’anaphylaxie aiguë du cobaye; elle est due surtout à l'asphyxie, provenant de l’occlusion des canaux respiratoires par une sorte de tétanie; la pro- duction en est indépendante du système nerveux central. — MM. Ed. Retterer el Aug. Lelièvre ont reconnu que les sinus des ganglions lymphatiques des cobayes à la naissance ou des adultes bien nourris sont gorgés d'hématies, produites par les cellules mêmes qui constituent le tissu des ganglions. — M. P. Mulon a constaté que, dans la cellule corticale surrénale du cobaye, la méthode de coloration des mitochondries de Benda colore des points de l'aire cytoplasmique où d’autres méthodes lui ont montré l'existence d'un acide gras. — MM. P. Remlinger et O. Nouri mon- trent que certains micro-organismes pathogènes du sol peuvent, au cours de la croissance, être entrainés le long des tiges et sur les feuilles des plantes; mais les chances d'entrainement sont faibles dans l’'épandage rationnel. — M.G. Seiïllière a observé que la dessicca- tion réduit la digestibilité des celluloses rendues digestibles par les diastases à la suite de l’action d'agents chimiques. — MM. M. Laignel-Lavastine el P.Baufñe ont observé un cas d’entérococcémie et d'hé- matome suppuré du grand droit abdominal chez un typhique. — MM. M. Laignel-Lavastine et Lasausse ont constaté que le liquide céphalo-rachidien des paralytiques généraux ne contient pas d'ammoniaque préexistante. Il renferme des substances qui en perdent très facilement sous l’action de la chaleur ou des réactifs. — MM. A. Veillon et P. Mazé ont employé le nitrate de potasse pour éviter le dégagement d'hydro gène gazeux dans la culture et l'isolement des microbes anaérobies. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont obtenu des cultures très abondantes de Leishmania Donovani en milieu peptone-sel et sang de lapin défibriné placé dans une fiole de Roux horizontale. — M. Ch. Pérez décrit la métamorphose de l'intestin postérieur chez les Muscidés. — MM. A. Marie et Beaussart ont expé- rimenté la séro-agglutination et la déviation du com- plément tuberculeuses dans diverses maladies men- tales ; les résultats ont été négatifs. — MM. C. Mathis et M. Léger ont découvert chez la petite tourterelle d'Orient et chez la sarcelle d'hiver deux nouveaux parasites du sang apparlenant au genre Leucocytozoon, qu'ils nomment L. Marchouxi et L. Simondi. — M.T. Yamanouchi a étudié l'action de l’atoxyl sur les try- panosomes dans l'organisme; la substance trypanocide est produite par les globules rouges du sang; elle est 129 soluble dans l'alcool et thermostable, M. C. Fleig à préparé pour la conservation du sang in vitro des vases lapissés intérieurement d’endothélium vaseu laire ; le sang ne subit aucune coagulation au contact de cet endothélium, même d'une espèce hétérogène, M. W. Mestrezat a décelé la présence de bilirubine et de biliverdine dans un mucocèle des sinus frontaux. — MM. Ch. Achard, H. Benard ct Ch. Gagneux on! observé une leuco-réaction positive dans 29 cas d'affec lions cancéreuses. M. G. Finzi a employé avec succès la réaction précipitante dans le diagnostic de la tuberculose des Bovidés, en se servant non de tuber- culine, mais de bouillons, fillrés sur papier, de cul- tures de bacilles de Koch. — MM. E. Maurel et Ar- naud ont constaté que, sous l'influence de la colchi- cine, aux ‘doses capables de Jui donner au moins des selles molles, le lapin ingère moins d'aliments; néan- moins ses excrela urinaires, azotés et salins, sont augmentés. — M. L. Panisset a observé que le sérum non dilué des chevaux morveux précipite nettement la malléine diluée. — M. A. Perroncito à reconnu que le sang délibriné de lapins et de cobayes qui ont reçu des injections de petites quantités de sérum d'anguille peut se montrer fortement toxique pour les lapins et les cobayes neufs et sains. — Mie A. Baïllet a déter- miné la teneur en fer du foie dans les deux sexes de la naissance à la puberté. — M. L. Lapicque déduit des déterminations précédentes et des siennes propres que le fer du foie est le même dans les deux sexes jusqu'à l'âge de dix ans; de dix à quatorze ans, il aug- mente chez les filles et ne varie pas chez les garçons; puis un renversement se produit, et à partir de vingt ans il est constamment plus élevé chez l'homme que chez la femme. — MM. H. Claude et P. Lejonne ont constaté qu'une intoxication par la strychnine, sans influence sur le chien normal, provoque des crises d'épilepsie chez le chien présentant une lésion mé- ningo-encéphalique antérieure, dont les effets n'étaient plus apparents. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du # Janvier 1910. M. R. Brandeis confirme la présence de fibres mus- culaires périvasculaires dans le rein pathologique, mais l'hyperplasie musculaire peut pénétrer jusque dans la substance rénale. — M. J. Gautrelet confirme la présence d'une substance offrant les caractères du noyau choline dans les extraits pancréatiques, de thyroïde, de rate, etc. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 11 Janvier 1910. M. L. Spillmann décrit un dispositif facilitant la recherche du spirochète au moyen du condensateur à fond obscur. — M. R. Moreaux montre que la sécré- tion de l'épithélium de la trompe utérine chez les Mammifères est une sécrétion muqueuse. Le cycle secrétoire d'un élément épithélial peut se diviser en quatre phases : la ciliation, la sécrétion, l’excrétion, la reconstitution. — MM. L. Richon et M. Perrin on! observé que, sur six lapins ayant reçu de nombreuses injections sous-cutanées d'une solution de tabac, deux ne présentent aucune liaison aortique el quatre pré- sentent des lésions athéromateuses variables. Les inhalations de nitrite d’amyle à haute dose n'empê- chent pas la production de l’athérome adrénalinique. — MM. M. Perrin et P. Jeandelize confirment par de nouvelles expériences la moindre résistance des lapins thyroïdectomisés à l'intoxication par le chlorure mer- curique. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 7 Janvier 1910. M. J. de Kowalski: Sur la phosphorescence à basse température. 1. L'auteur à examiné, à la température 130 , ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de l’air liquide, un nombre considérable de substances organiques en solution dans différents solvants. a. Il se dégage de cette étude que l'intensité de la phospho- rescence observée immédiatement après l’éclairement est liée étroitement à la constitution moléculaire du corps. b. Pour les solvants de caractère chimique semblable, on remarque dans le spectre de phospho- rescence un fait analogue à celui qui se produit, selon la règle de Kundt, dans l'absorption. Le spectre de phosphorescence est déplacé vers le rouge lorsqu'on à un solvant possédant un grand pouvoir de dispersion, ec. Les substances aromatiques donnent, en solution alcoolique, un spectre de phosphorescence à bandes sur fond continu. d. L'intensité du spectre continu décroît avec le temps plus vite que celle du spectre de bandes; les longueurs d’onde plus faibles disparaissent moins vite que les plus grandes. e. Le spectre de bandes d'un grand nombre de substances se réduit à un spectre présentant des groupes de lignes étroits et réguliers. {. En comparant les spectres de fluorescence obtenus à la température ordinaire par Stark, Ley, Engelhardt et d’autres pour les mêmes corps, avec les spectres de phosphorescence étudiés à la température de l'air liquide, on remarque pour ces derniers un déplacement considérable vers le rouge. g. En compa- rant, au contraire, les spectres de l'auteur avec les spectres de cathodofluorescence de Goldstein, on observe dans les premiers un déplacement vers le violet. Z. 11 existe, pour les corps de la série benzé- nique, un rapport simple entre les bandes caractéris- tiques d'absorption dans l'ultra-violet et les bandes de phosphorescence; Ja différence des nombres de vibra- Lions est constante pour un même corps.L'examen de la phosphorescence à la température de l'air liquide est un moyen excellent pour vérifier la pureté d'un corps organique. II. L'auteur communique certaines diver- gences de la loi de Stockes qu'il a observées à diffé- rentes températures. La théorie corpusculaire de la lumière fournit pour K, la constante universelle de Boltzmann, la valeur 7,5.140—17, Cette constante, calculée par Einstein, d’après la théorie cinétique des gaz, est K—6,5.10-17. La coïncidence remarquable de ces résultats, établis de façon si différente, est favorable à la théorie corpusculaire de la lumière. — M. G. Gouy : Sur les décharges électriques dans les champs magné- tiques intenses. On sait que la décharge dans les gaz raréfiés est profondément modifiée par le champ ma- ynétique. La cathode devient la source de rayons magnéto-cathodiques qui dessinent les lignes de force (Plücker, Birkeland, Broca, Villard), et dont la nature n'est pas encore connue d'une manière certaine. L'au- teur laisse de côté les phénomènes qui ont la cathode comme point de départ, pour ne s'occuper que de ceux, encore peu étudiés, qui se montrent au voisi- nage de l'anode et qui forment la couronne magnéto- anodique. La couronne magnéto-anodique prend tout son développement quand la cathode cesse d'émettre ses rayons propres; cela s'obtient en donnant à la cathode une très grande surface, qui produit une baisse de 90 o/, sur le voltage du tube. La couronne entoure l’anode d'un anneau lumineux, plus ou moins bien défini, dont le milieu est obscur; elle prend sou- vent des dimensions considérables, Tout obstacle qui rencontre la couronne y produit une sorte d’ondulation ou de zigzag, qui est la particularité la plus intéres- sante de ces expériences. C’est une sinusoïde ou une ligne brisée, tracée sur un tube de force magnétique. L'amplitude du zigzag varie de { millimètre à plusieurs centimètres; le pas semble étre inversement propor- tionnel au champ; il est compris entre 0,5 et 8 mil- mètres. La direction du champ est bissectrice de l'angle du zigzag. Un observateur qui parcourrait la couronne en marchant en sens inverse du courant magnétisant rencontrerait l'obstacle avant les ondulations qu'il produit. L'aspect du phénomène suggère l’idée que l'agent lumineux, existant dans la couronne, est dévié de sa position normale par l'obstacle, et 7 revient en exécutant des oscillations amorties, parallèlement au champ magnétique, pendant qu'une sorte de dérive l’entraîne dans un sens perpendiculaire. On peut faire l'hypothèse que cet agent n'est autre que celui du rayon magnéto-cathodique, qui oscillerait ainsi sui- vant la ligne de force magnétique, de part et d’autre d’une position d'équilibre. Quant à la dérive, elle résul- terait de l’action transversale du champ électrique sur le rayon magnéto-cathodique, découverte par M. Vil- lard. — MM. Ch. Féry et C. Chéneveau : La loi du rayonnement des lampes à incandescence. Par l'appli- cation des lois connues du rayonnement et en faisant quelques hypothèses supplémentaires, MM. Féry et Chéneveau sont arrivés à formuler la loi qui lie l'in- tensité lumineuse obtenue aux watts dépensés dans le filament. Les hypothèses faites par ces auteurs sont les suivantes : 1° Dans les lampes à incandescence, la presque totalité de l'énergie est dissipée par rayonne- ment, et l'on peut négliger les pertes par les attaches du filament et celles dues à la convection de l’ampoule. La conséquence est que le filament de charbon doit suivre la loi de Stefan: (1) W—a0#, en faisant l'hypothèse nouvelle que le charbon ne s'éloigne pas sensiblement du corps noir, ou tout au moins se comporte comme un corps gris. 2° Ils ont admis aussi que, dans les limites étudiées, w variant dans le rapport de 4 à 3, le dépla- cement dela longueur d'onde du maximum de l'énergie dans le spectre est assez faible pour pouvoir être né- gligé. Si cette supposition est exacte, la loi du rayon- B nement monochromatique : (2) h —Ae ! pourra être appliquée en faisant À—0:,54 (longueur d'onde de Langley). Les formules 1 et 2 ont été vérifiées expé- rimentalement, la première au moyen d’un pyromètre optique à absorption, et la seconde par des mesures photométriques ordinaires ou par l'emploi du photo- mètre à lecture directe de C. Féry. Pour étendre ces hypothèses aux lampes à filament métallique et en particulier à la lampe Z, étudiée par les auteurs, ces derniers ont admis que la loi du rayonnement total du tungstène se faisait suivant une loi de la forme : W— «0%, la valeur x étant très voisine de celle du pla- tine. En déterminant par l'expérience x pour le pla- tine, ils sont arrivés à la valeur numérique 4,6. Ils onk, au cours de ce travail, remarqué que le point de fusion du platine oscille entre 1.710°et 1.750°, suivant qu'il est fondu en atmosphère oxydaute ou réductrice. Gette propriété est d'ailleurs connue pour d'autres métaux. En appliquant à la loi du rayonnement (2) la valeur déduite pour la température de la formule : W— a0%5, le calcul et l'expérience se trouvent d'accord, comme le montrent les tableaux donnant en fonction des watts I, calculé ou mesuré photométriquement; l'erreur maxima ne dépasse pas 3 °/,. La conclusion de ce tra- vail est que la faible élévation de température pré- sentée (1002) par le filament métallique au régime nor- mal suffirait à expliquer le bon rendement des lampes nouvelles, étant donnée la variation extrêmement ra- pide de FE, en fonction de la température. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 9 Décembre 1909. M. Th. Wright a calculé les constantes harmo- niques des marées pour certains ports de la Chine et de la Nouvelle-Zélande : Wei-hai-wei, Woosung, Port Chalmers, Port Lyttelton, Wellington et Auckland. — M. W. M. Hicks : Ztude critique des séries spectrales. 1: Les métaux alcalins, l'hydrogène et l'hélium. L'au- teur arrive à ce résultat que les nombres d'onde d’une série quelconque peuvent être pratiquement repré- sentés, aux erreurs d'observation près, par une for- mule basée sur une modification de la forme de Ryd- berg, soit : N (2 + p + a/m)? n = À — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 131 Les variations des séries de lignes, lorsqu'on passe d'un élément à un autre, sont en relations avec les poids atomiques. — M. G. W. C. Kaye a étudié /a distribution des rayons de Rôntqgen émis par une ampoule focus. Pour cela, il a construit une amp oule de Rüntgen avec une anticathode dont l'inclinaison par rapport au faisceau de rayons cathodiques pouvait être variée à volonté. L'ampoule entière était égale- ment susceptible de rotation; par l'emploi d'une chambre d'ionisation stationnaire, on déterminait des courbes de distribution d'intensité des rayons X. L'au- teur a constaté que la dureté et l'intensité des rayons Rüntgen sont à peu près indépendantes de l'obliquité de l’anticathode. 11 suggère quelques perfectionne- ments possibles de l’ampoule focus. — M. R. D. Klee- man : Sur la nature de l'ionisation d'une molécule par une particule «. Quand une particule « rencontre une molécule, on peut s'attendre à ce que la direction du mouvement de l’électron projeté dépende de celle de la particule &. Si le Lotal ou une partie de l'énergie d'ionisation dérive de la particule «, l’électron doit avoir une composante de mouvement dans la même direction que celle du mouvement de la particule. Les expériences de l'auteur montrent que, quand des-par- ticules + sont lancées à travers des feuilles métalliques minces, il sort plus d'électrons du côté de la feuille où les particules « émergent que du côté où elles entrent. On en déduit que le mouvement des électrons libérés est en majorité dans la même direction que celui de la particule > ionisante. — M. S. Kinoshita a étudié l'action photographique des particules « émises par les substances radio-actives. Elle est très différente de celle de la lumière : on n'observe aucune diminution de cette action quand les rayons sont criblés par une substance absorbante, aussi longtemps qu'ils sont capables de traverser la pellicule photographique, tandis que, dans le cas de la lumière, l'action varie avec l'intensité de la lumière, qui diminue par le pas- sage à travers un milieu absorbant. L'action photogra- phique des rayons « est donc indépendante de leur vitesse et dépend du nombre N de particules « qui traversent la pellicule, et qui peut être exprimé par la mesure de la densité D, d’après l'équation : D—D,, ({—erS). L'auteur trouve qu'un grain d’halogénure d'argent de la couche est susceptible de développement quand il à été heurté par une seule particule «; il en déduit une nouvelle méthode de numération de ces particules. — MM. F. Soddy et A. J. Berry ont déter- miné Ja conduction de la chaleur à travers les gaz raréliés. Par une méthode électrique, la chaleur dis- sipée par une bande de platine, maintenue à 61° dans le gaz, a été mesurée à des pressions diverses descen- dant jusqu'à un vide thermiquement parfait. Aux pres- sions ordinaires, H et He sont de beaucoup les meil- leurs conducteurs, CO? le plus mauvais; à basse pression, la conductibilité de CH', C?H?, (CAz} excède légèrement celle de H, et celle de He est à peine meil- leure que celle de CO?. À basse pression, la conduc- tibilité a été définie par les calories (>{ 10 —5) dissipées par seconde, pour 0,01 millimètre de pression, par centimètre carré de surface et pour 1° de différence de température entre la surface et la paroi du vase d'expérience. Dans le tableau suivant, K et Q expri- ment les valeurs expérimentales et calculées de la conductibilité, Q étant le produit du nombre de chocs des molécules, par seconde et par centimètre carré, par la chaleur spécifique de la molécule : K Q K ) INT 1,30 1,20 A7205.. NORMES 1,176 1,10 Nate COS: : 1° 01 80 HU EN OR. |: ANOIPMRONS (CAz° He . 1,94 3,80 CHA. CO. 1,96 2,38 CH. Ces résultats fournissent quelques notions sur la nature du choc simple d’une molécule gazeuse sur une sur- face. Pour Ar et Ne, la communication d'énergie paraît parfaite; ce n'est plus le cas pour les autres gaz. — M. R. J. Strutt : L'acecumulation de l'hélium dans les périodes géologiques. IX. Les nouvelles recherches de l'auteur concernent la quantité d'hélium présente dans le zircon. On trouve ce minéral dans les roches ignées de tout âge et les analyses montrent clairement que les quantités d'hélium engendrées suivent de près l'âge géologique. Elles varient de 0,807 » 10-14 cc. d'hélium dans un zircon tertiaire à 575 X 101 c.c. dans un zircon des terrains anciens. — MM. V. H. Veley el A. D. Waller ont étudié l’action comparative de la stovaïne et de la cocaïne d'après leur effet direct sur la contractilité du musele isolé. NS arrivent à la con- clusion que ces deux corps ont à peu près la même action physiologique et que la substitution d'un groupe méthyle au groupe éthyle de la stovaine ne produit pas d’altération de l'effet toxique. — M. H.E. Arbuckle a fait quelques expériences sur le venin de Causus rhombeatus, petit serpent vipérin de Sierra Leone. L'action de ce venin se traduit par des ecchymoses locales, de l’assoupissement et de la faiblesse muscu- laire; dans la moitié des cas, il y à un ralentissement marqué de la respiration avec une grande difficulté d'inspiration. L'examen post-mortem montra dans la plupart des cas des hémorragies superficielles dans les viscères, spécialement le cœur et les poumons, — MM. L. S. Dudgeon et H. A. F. Wilson : Sur la pre- sence des hémo-agglutinines, hémo-opsonines et hé- olysines dans le sang de l'homme atteint de maladies inlectieuses et non infectieuses. II. Les résultats des nouvelles recherches des auteurs se résument comme suit : 1° L’auto-agglutination des cellules rouges du sang se présente occasionnellement dans le sang pa- thologique, mais Jamais dans le sang normal; 2° L'iso- agglutination se rencontre souvent dans le sang des malades souffrant de la même maladie; 3° L'hémo- agglutination est un phénomène largement spécifique, à la fois dans le sang normal et pathologique, et l'effet spécifique persiste même si les cellules rouges ont été soumises à une température élevée ou à une dessicca- tion complète; 4° L'hémo-agglutination et l’agglutina- tion bactérienne sont des phénomènes distincts; 50 L'iso-hémolyse bien marquée dans les spécimens de sang normal et pathologique n'est pas commune. — M. Edgar Schuster présente une note préliminaire sur la lamination cellulaire de l'écorce cérébrale de l'Echidna et sur le nombre des fibres dans les nerfs craniaux. Il distingue cinq types différents de lamina- tion cellulaire, dont il donne la distribution dans l'é- corce. — MM. F. W. Mott, Edg. Schuster et W. D. Halliburton ont étudié Ja laminalion corticale et les localisations dans le cer veau du petit singe. Le cerveau de cet animal est petit et fendu par des fissures relati- vement peu nombreuses; parmi elles, seules les fis- sures sylvienne, hippocampale et calcarine ont une profondeur notable. Les auteurs ont fait une série de sections de l'écorce cérébrale et délimité les types de lamination cellulaire. Comme chez le Lémur, l'aire motrice présente deux types : dans l’un, les cellules de Betz sont grandes et bien visibles; dans l’autre, qui correspond aux mouvements de la face et de la tête, non seulement des cellules motrices sont plus petites, mais une couche de granules indique que cette partie du cerveau a une fonction sensorio-motrice. La loca- lisation histologique des fonctions a été contrôlée par la méthode physiologique de la stimulation. — M. R. H. Whitehouse expose ses recherches sur /a nageoire caudale des poissons. Il arrive à la conclusion que la nageoire caudale homocercale est, en réalité, une nageoire postérieure anale, qui doit sa position actuelle à la grande diminution de l'axe combinée avec le retroussement excessif de l'extrémité de la chorde. — M. L. Doncaster : La gamétogenèse de la mouche de la noix de galle, Neuroterus lenticularis (Spathegaster baccarum). 1. Ce Cynipide a deux générations par an, qui éclosent en avril et juin. Celle d'avril est constituée 132 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES seulement de femelles, qui déposent des œufs parthé- nogénétiques: certaines mouches déposent seulement des œufs destinés à devenir des mâles, d'autres seule- ment des œufs destinés à devenir des femelles. La gé- nération de juin se compose de mäles et de femelles; les œufs sont fertilisés et donnent naissance à la géné- ration d'avril suivant. L'auteur étudie la spermatoge- nèse et le développement des œufs. L'étude de la maturation des œufs de la génération de printemps montre que les œufs de certaines femel'es subissent la réduction des chromosomes, ceux des autres femel- les non. Il est possible que les premiers donnent des mä es, les seconds des femelles. -— Sir D. Bruce, MM. A. E. Hamerton, H. R. Bateman et F. P. Mackie, ont constaté que les Glossina palpalis des rives du lac Victoria sont infectées, non seulement par le Trypanc- soma gambiense, mais aussi par le Tr. vivax. Le réser- voir du virus de ce dernier est encore inconnu. SOCIÈTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION LE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 3 Décembre 1909. M. H. Howard a pris la chaleur de réaction chimi- que comme base d'une nouvelle méthode analytique. Il l’a appliquée à la détermination de l'acide sulfuri- que fumant et il mesure la chaleur développée par la combinaison de SO* libre avec l’eau. Pour éliminer la chaleur de dilution de l'acide sulfurique, il emploie comme source d'eau un acide sulfurique d'une concen- tration telle qu’en le mélangeant avec un poids égal d'acide fumant le produit résultant contient à peine plus d’eau qu'il n’est nécessaire pour former le mono- hydrate. L'auteur donne une table des teneurs en SO0* de l'acide fumant correspondant aux diverses tempé- ratures de réaction. La même méthode peut être appli- quée à l'essai de l'acide sulfurique monohydraté, con- tenant de 95 à 100 °/, de H?S0*, au moyen d'acide fumant contenant 24 à 25 °/, d'anhydride. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 8 Décembre 1909. M. J. M. Wilkie a étudié l'application de la méthode de Ronchèse à la détermination de l'acide total des sels d'ammonium et des solutions ammoniacales orga- niques. Cette méthode repose sur le fait qu'en pré- sence d'un grand excès de formaldéhyde les sels d'am- monium forment de l’hexaméth\lènetétramine en libérant tout leur acide qui est ensuite titré. L'auteur montre que cette méthode n'est applicable que lorsque la neutralité du sel à un indicateur convenable peut être assurée; autrement, on n'est pas certain que l'acide libéré dérive entièrement du sel d'ammonium. L'auteur propose donc de neutraliser au préalable au rouge de méthyle la solution du sel, en ajoutant de l'alcali ou de l’acide, puis d'ajouter l’aldéhyde formi- que et de titrer enfin l'acide libéré par la baryte 3N/20 en employant la phénolphtaléine comme indi- cateur. Pour les sels dont la neutralisation initiale avec un indicateur est impossible, la détermination donne l’ensemble de l'acide libre et combiné. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 9 Décembre 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Trabert à étudié, d'après les observations faites au Lindenberg, le rap- port entre les températures de l'atmosphère et la pres- sion à la surfare de la lerre. Au-dessous des colonnes d'air froid, le baromètre monte; au-dessous des colonnes d'air chaud, il s'abaisse. Par contre, à Berlin, dans 80 °/, des cas, une pression basse est suivie au bout d'un à deux jours d'une colonne d'air froid, une pression haute d'une colonne d'air chaud, 20 = à SCIENCES NAÏURELLES. M. F. Steindachner décrit une nouvelle espèce de Tilapia, le T. adolfi, et une nouvelle espèce de Lamproloqus, le L. attenuatus, provenant du lac Tanganyika, et deux exemplaires de Brachyplatystoma (Taenionema) platynema provenant des environs de Para. Séance du 16 Décembre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Schnee présente ses recherches sur les formules des valeurs moyennes dans la théorie des séries de Dirichlet. 29 SCIENCES PHYSIQUES, — M. A. Wagner a déterminé la dispersion électrique et le nombre des ions de l'air à Kalocsa. Outre les constatations générales déjà faites par Elster et Geitel et d'autres, l’auteur a reconnu : que la dispersion en ce lieu augmente considérable- ment avec une élévation de température; que l’action ionisante du vent se fait sentir sur l’ensemble des masses d'air qui recouvrent le lieu d'observation; que la dispersion augmente plus rapidement lorsque le ciel commence à se couvrir de nuages que lorsqu'il est complètement couvert. — MM. F. von Lerch et E. von Wartburg, par une courte électrolyse des solutions d'induction du thorium, ont séparé un nouveau pro- duit à rayonnement 6 qui paraît identique au thorium D de Hahn et Meitner. Il est électrochimiquement moins noble que le thorium B ; sa température de vola- tilisation est inférieure au rouge, ce qui permet encore de le séparer partiellement de Th B. Enfin on peut encore le séparer de Th A et Th B par sa moindre solubilité dansles acides. — M. B. O. Pribram montre que les éthers des amino-acides peuvent être préci- pités très facilément de leurs chlorhydrates par AzH° gazeux. — M. M. Pfannl a réalisé l’hydrolyse complète des protéines par HCI alcoolique et obtenu qualitati- vement et quantitavement les mêmes produits que dans lhydrolyse par HCI aqueux. Séance du 7 Janvier 190. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Hopfner com- plète la méthode d'Oppenheim pour la détermination des périodes d’un phénomène périodique, en donnant un critère qui permet de déterminer à l'avance le nom- bre des périodes cachées dans le phénomène observé. Il montre, toutefois, que la méthode n'est utilisable que si l'intervalle constant dans lequel les observations se suivent est plus petit que 1,/27, T; étant la plus petite période cachée dans le phénomène. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Himmelbauer a étu- dié le groupe des scapolithes qui, d’après Tschermak, seraitconstitué par des mélanges isomorphes de deux silicates : la méjonite SifAl‘Ca'0* et la marialithe SifAPNatO*iCl. Les propriétés physiques et chimiques des membres du groupe se rangent, en effet, d'une facon régulière entre celles de ces deux corps, sans qu'on puisse toutefois noter des propriétés additives exactes. Les acides siliciques retirés de la méjonite et de la marialithe semblent correspondre aux formules SitH#20* et SSH 20%, — MM. J. M. Ederet E. Valenta : Mesures de longueurs d'onde dans le domaine visible des spectres d’are. I : Les éléments aldébaranium et cassiopéium découverts par Auer von Welsbach. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zikes a observé sur les plantules d'orge, recouvrant la pointe de la racine, une zooglée bactérienne qui, en grande quantité, forme une membrane jaune ou rouge, et il a reconnu que ces bactéries existent déjà dans la graine. En grand nombre, ces zooglées peuvent nuire à la plan- tule; introduites par le malt dans la bière, elles peuvent également nuire à la fabrication de celte dernière. Des zooglées jaunes, l’auteur a isoléle Z. fluorescens lique- faciens et le B. herbicola aureum, rarement le B. rubrum; deszooglées rouges, surtout le Z. herbicola rubrum. Le Direcieur-(rérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21e ANNÉE N° 4 28 FÉVRIER 1910 Revue générale ND CI0nCeS pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Élection à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 7 février, l'Académie a conféré le titre d'Associé étranger à M. J. D. van der Waals, ancien professeur de Physique à l'Université d'Amsterdam. L'œuvre de l'illustre savant hollandais est trop connue pour que nous ayons besoin de la rap- peler en détails à nos lecteurs. Inaugurée en 1873 par une tbèse qui fit époque sur la continuité des états liquide et gazeux, elle s’est poursuivie depuis lors dans une série de travaux consacrés surtout à la Physico- Chimie, science que M. van der Waals a contribué plus qu'aucun autre à édifier. Le choix de l’Académie des Sciences est une nouvelle consécration de la haute valeur de cette œuvre. Élections à FAcadémie des Sciences de Saint-Pétersbourg. — Dans une de ses dernières séances, cette Académie a nommé membres corres- pondants nos deux éminents collaborateurs : M. Emile Haug, professeur à la Sorbonne, et M. A. Lacroix, membre de l'Institut, professeur au Muséum. La /tevue est heureuse de les féliciter de cette flatteuse distinc- tion. $ 2. — Nécrologie Bouquet de la Grye. — La evue générale des Sciences avait l'honneur de compter M. Bouquet de la Grye parmi les membres du Comité de Patronage de ses Croisières et Voyages d'Etudes. Aussi a-t-elle ressenti plus vivement encore la perte qu’a faite la Science française en la personne de l’illustre savant, et a-t-elle demandé à l’un des hommes qui connaissent le mieux l’œuvre de M. Bouquet de la Grye de dire ici ce que fut cette vie toute de travail! et de droiture. La Section de Géographie et Navigation de l'Aca- démie des Sciences a perdu le 21 décembre dernier son doyen. Né en 1827, Bouquet de la Grye avait donc atteint un âge déjà avancé, mais, conservant jusqu'à ces derniers mois son activité et son intelligence éveillée, il n'avait pas arrêté les études variées qui faisaient de lui une des personnalités les plus en relief REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. de l’Académie. Doué d'une rare puissance de travail, il embrassait le domaine entier de la Géographie et de la Navigation. F Malgré la diversité des sujets qu'il a abordés, sa carrière présente un remarquable caractère d'unité. Le corps des ingénieurs hydrographes auquel il appar- tenait jouit, en effet, du privilège d'être limitrophe de la plupart des sciences : son fable effectif et les exi- gences du service lui interdisent les spécialisations trop étroites. Un aperçu rapide de l'activité de Bouquet de la Grye nous montrera, d'ailleurs, que les nom- breuses voies où il s'est engagé aboutissaient toujours à ses occupations professionnelles. Sorti de l'Ecole Polytechnique en 1849, il débute sous les ordres de Darondeau aux côtes ouest d'Italie. Chargé ensuite d’un levé de l'embouchure de la Loire, il est envoyé en 1854 en Nouvelle-Calédonie pour dresser la carte de cette colonie nouvelle et totalement inconnue. Malgré les circonstances les plus difficiles : manque presque absolu de moyens de travail (la guerre de Crimée l'avait à peu près fait oublier), hostilité des populations sauvages, difficultés de terrain, etc., il arrive en trois ans à s'acquitter de sa tâche. Une lecture faite par lui à l'Institut trace un tableau très vivant et pittoresque de cette campagne. Rentré en France, il participe en 1859 au levé de la Charente marilime, et la même année explore le plateau de Rochebonne en vue de l’établissement d’un feu flottant; puis, après une mission à Alexandrie, c'est lu revision de nos côtes ouest (1863-67), qui n'avaient pas vu de travail d'ensemble depuis Beautemps-Beaupré el à laquelle nous coopérions sous ses ordres. Pendant le siège de Paris, il dirige l'Observatoire militaire de la Tour Solferino à Montmartre, puis, tout en achevant la rédaction et la publication de ses tra- vaux, et participant aux Commissions nautiques du littoral, il se prépare à aller observer les passages de Vénus. Chef des missions de l'ile Campbell (1874) et du Mexique (1882), il en rapporte une abondante moisson scientifique. Entre les deux, il allait étudier le port de la Rochelle en vue de travaux d'amélioration. Après son retour du Mexique, ses travaux obtinrent leur cox- sécration : il remplaca Yvon Villarceau à l'Institut en 1884. En 1885, campagne à Dakar et Ténériffe pour 4 134 faire des observations astronomiques et météorolo- giques. Il entra au Bureau des Longitudes en 1886. La même année, il était nommé ingénieur en chef et chargé de réorganiser le Service hydrographique, dont il garda la direction jusqu'en 1891, année de sa retraite volontaire. Cette retraite n'arrêta pas son activité; en dehors de sa participation aux travaux de l’Institut et du Bureau des Longitudes, il donnait son temps à de nombreuses sociétés : Président de la Société de Géo- graphie, de la Société astronomique, de la Société amicale des Anciens élèves de l'Ecole Polytechnique, délégué à l'Association géodésique internationale, membre de tant d'autres Commissions, Congrès, elc., auxquels il s'intéressait activement. ; L'œuvre de Bouquet de la Grye est considérable. Elle commence surtout par le levé et la publication des cartes de la Nouvelle-Calédonie. Les conditions pré- caires dans lesquelles il opérait eurent leur retentisse- ment sur toute sa carrière, en lui apprenant à ne compter que sur lui-même, à se contenter d’un mini- mum de moyens d'action, et à suppléer par son ingé- niosité à ceux qui lui faisaient défaut. Cela lui permit plus tard d'opérer la revision des côtes ouest sans demander l'armement d’un bateau spécial, et en se contentant des moyens de fortune que lui offrit la petite station navale alors existante. Ce travail comprit la réfection de la triangulation, des sondages et d’une grande partie de la topographie côtière, depuis Pen- march jusqu'à Saint-Sébastien en Espagne : il donna lieu à de nombreuses cartes nouvelles, à la correction de toutes les cartes existantes, aux études de régime de la côte et des estuaires, en vue des travaux maritimes, enfin à la publication de deux volumes du « Pilote des côtes occidentales de France », œuvre originale, dans laquelle l’auteur complétait les indications relatives aux routes à suivre par des notions précises sur les marées, vents et courants. Comme résultats, en dehors des documents fournis à la navigation, relevons plus spécialement les Mémoires sur la Loire maritime et sur l’amélioration des embouchures des rivières : il y établissait sa loi du «double tracé sinusoïdal », généra- lisation d'une théorie de son ami M. Fargne, et l'appli- quait à l'étude des conditions dans lesquelles doivent être établies des digues longitudinales ; la loi des pro- fondeurs sur les barres, et les moyens d'approfondir celles-ci par des digues courbes; l'influence des cou- rants de marée et des crues d’amont. Il en déduit des projets relatifs à la Loire, à l'Adour, à l'entrée du Cap-Breton. Vint ensuite le Mémoire sur Saint-Jean-de-Luz; l'adoption de son programme de digues au Socoa, sur la roche Artha et à la pointe Sainte-Barbe, a arrêté l'érosion de la plage et donné aux marins un port de refuge sur une de nos côtes les plus dangereuses. Mais son projet le plus neuf fut celui que lui suggéra l'étude du port de la Rochelle, et qui, grace à son énergique persévérance, grâce surtout au soin avec lequel les plans furent établis, aboutit à la création du port de La Pallice, en face de l’île de Ré, œuvre d'une grande portée, qui a rendu son nom popu- laire sur le littoral. C’est ici le lieu de rappeler un autre projet auquel il s'était dévoué depuis plus de quinze ans, le projet bien connu de « Paris-Port de mer », qui avait pour objet la canalisation de la Seine et l'établissement à Saint- Denis d’un port capable de recevoir de grands navires de mer. Il appliqua les résultats de son expérience dans les Commissions nautiques du littoral, auxquelles il appor- tait à la fois ses connaissances d'ingénieur et de marin. Il aimait les solutions hardies et peu banales : tel son projet de dérochement des passes d'Alexandrie, de dévasement du port de Lorient, de mouillage du ponton de Rochebonne au moyen d’ancres à champi- gnon, elc. La rédaction des Mémoires sur l’état des estuaires exigeait des comparaisons donnant lieu à de longs calculs de cubages. Il en était de même pour d’autres CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE recherches sur les marées, les ondes atmosphériques, sur la chloruration de l’eau de mer. De tendances très pratiques, il goûtait peu les Mathématiques pures; mais son esprit laborieux se plaisait aux calculs numé- riques, à la manipulation de montagnes de chiffres, pour lesquels il établissait des règles à calcul spéciales. Son dernier travail de ce genre est la discussion des observations des passages de Vénus, dont il fut chargé au Bureau des Longitudes et qu'il mena à bonne fin. Nous avons rappelé ses deux campagnes pour l’obser- vation de ces passages, qui représentent sa principale, mais non son unique contribution aux sciences astro- nomiques. Il avait déjà mesuré des bases par des obser- vations de latitude en Nouvelle-Calédonie, il avait déterminé les longitudes de Nouméa et d'Alexandrie par des culminations lunaires, observé le passage de Mercure sur le Soleil en 1868. Doué d'une grande acuité de vision et d'ouie, très ingénieux à concevoir des appareils, habile à les manier et au-besoin à les réparer, il était très bon observateur, porté par là même à s'exagérer quelquefois la précision des résul- tats, mais obtenant des nombres très exacts. Le premier en France, il réalisa et employa des ins- truments réitérateurs, parmi lesquels je citerai surtout le cercle azimutal qu'il fit construire par Brunner et qui servit de modèle au Service géodésique de l'Armée. Il serait trop long d’'énumérer ici tout ce que lui suggéra son génie inventif; citons pourtant l'incli- nomètre à liquide pour mesurer les mouvements du navire, les expériences sur les tourbillons liquides, les projectiles sans frottement, la pièce additionnelle adaptée au petit théodolite pour la mesure de la décli- naison magnétique et la combinaison de méthodes astronomique et physiques : vitesse du son, fusées lancées d'un navire et relevées à 60 kilomètres de là d'un point terrestre, pour fixer la position du plateau de Rochebonne que Beautemps-Beaupré n'avait pu réussir à rattacher à la triangulation. Voilà le très bref apercu de l’œuvre du savant et de l'ingénieur, et nous sommes loin d'avoir épuisé la liste de ses travaux. Quant à l'homme, tous ceux qui ont eu le privilège d'approcher Bouquet de la Grye se rappel- leront le charme et la sûreté de ses relations, sa bonté, son obligeance et sa bienveillance avisée. Il avait le, droit d'ètre exigeant vis-à-vis de ses collaborateurs, étant avant tout sévère pour lui-même, esclave du devoir, ne marchandant ni son temps ni ses peines, d'un désintéressement et d'une générosité rares : il laisse le souvenir d’un galant homme et d’un homme de bien. C.-Ed. Caspari, Ingénieur hydrographe en chef, en retraite. $ 3. — Astronomie L'Observatoire populaire de Zürich.— Grâce à l'initiative de M. Rudolf Goldlust, la ville de Zürich possède, depuis près de trois ans, un établissement de vulgarisation scientifique qui est bien unique en son genre, une institution sans précédent, et vouée peut- être, hélas! à rester longtemps sans pareille. C’est l'observatoire Urania, sorte d'Université populaire spé- cialement consacrée à l'Astronomie. Depuis maintes années, M. Goldlust rêvait celte création, et il convoitait, à cet effet, un tertre qui se dresse au centre de la ville, et du haut duquel on do- mine celle-ci tout entière. Un jour, il fut question de démolir une vieille bâtisse qui se dressait là-dessus, et de niveler le sol pour substituer au tertre une place. M. Goldlust, alarmé, se mit en campagne. D'abord il entra en pourparlers avec l'Observatoire « officiel ». Mais cet Etablissement n’est pas riche, et il fallut constater que rien n'était possible de ce côté. Alors M. Goldlust chercha des fonds. Mais un capital important était nécessaire, et M. Goldlust, qui avait en son projet une confiance même financière, ne réussis- sait guère à faire partager cette confiance. Il s'arrêta enfin à une combinaison aussi hardie qu'ingénieuse, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 135 celle d'un immeuble de rapport enveloppant et soute- nant l'observatoire. 11 eut le bonheur d'être immédia- tement compris par la Société d'entreprise de construc- tion de MM. Fietz et Leuthold. Quelques-uns des financiers avec lesquels il avait en vain cherché à négocier un emprunt pour l'édification d'un observa- toire pur et simple, s'empressèrent alors d'apporter leur concours au nouveau projet. Il en résulta une sorte de coopérative pour la location des magasins et appartements et l'exploitation de l'Observatoire, et celui-ci put être inauguré le 15 juin 1907. L'immeuble comporte des magasins au rez-de-chaus- sée et au premier élage, et quatre élages d'apparte- ments. Il offre l'aspect des constructions américaines les plus récentes. Au centre, on à ménagé une cage spacieuse, pour quatre ascenseurs, entre lesquels se dresse le pilier de l'Observatoire. Ce pilier est isolé dans l'extrême mesure du possible. Bien que l’on soit au cœur de la ville, on n'a pas à enregistrer la moindre trépidation, même quand des auto-camions très lourdement chargés cir- culent à grande vitesse au bord des trottoirs. | Le pilier est constitué de deux parties, dont l'une, de dix mètres sur dix, construite en maconnerie, et tout entière au-dessous du niveau des rues avoisinantes, est haute de douze mètres. La seconde partie, sur une base carrée de 1,50 de côté, haute de 40 mètres, et construite en béton armé, porte le réfracteur. La cou- pole coiffe une tour dont la hauteur équivaut à celle de cinq étages ordinaires. Le réfracteur, qui vient de la célèbre maison de Carl Zeiss, à Léna, comme d'ailleurs tous les autres instru- ments, pèse, pour sa partie mobile, quatre tonnes, dont la moitié pour le télescope et le système des axes, . et la moitié pour le contrepoids. Objectif de 300 milli- mètres, et distance focale de 5,10. Le montage est d'un genre nouveau : le point de rencontre des deux axes est au milieu précis de la coupole, ce qui permet une extrémité oculaire extrèmement courte. On peut faire accomplir à la lunette un cercle parfait autour de l'axe horaïre, même quand elle est placée à une décli- naison de 90°, et l'observateur n’a à se déplacer que très peu, quelles que soient les positions de la lunette. L'instrument suit le mouvement quotidien apparent du ciel, grâce à un poids suspendu à une chaîne de Galle ‘et continuellement remonté par électromoteur. Il est pourvu de dix oculaires au grossissement de 55.000, et d'installations pour projection solaire et micrométrie oculaire. La coupole, qui a 10 mètres de diamètre et 8",50 de hauteur, abrite, en outre, deux télescopes de 90 milli- mètres d'objectif, et deux chercheurs de comètes de 80 millimètres d'objectif et 400 millimètres de distance focale. On pense bien que ces chercheurs ne chôment guère. Deux astronomes sont attachés à l'Observatoire. L'accès de l'Etablissement coûte 1 franc par personne le jour et 1 fr. 50 la nuit; mais le prix est réduit de moitié pour les abonnés, ainsi que pour les membres des syndicats ouvriers et des coopératives de produc- tion ou de consommation. De plus, les élèves des écoles élémentaires (primaires) et moyennes (secondaires), sous la conduite de leurs maîtres, ne paient que 0 fr. 20. Du 15 juin 1907 au 31 octobre 1909, le nombre des visiteurs a été de plus de 70.000. Des tableaux détaillés n'ont encore pu ètre établis que pour le second semes- tre de 1907. On y voit le maximum d'environ 640 visi- teurs pour le 13 août, puis 570, 560, 530, pour d’autres jours du même mois; le maximum pour juillet était de 480 ; pour septembre et octobre, de 450 ; pour novem- pres CASE On trouve encore, en décembre, un jour à Jours à 60. A. Chaboseau. $ 4. — Art de l'Ingénieur La dessiceation de l'air soufflé dans les hauts fourneaux. — Nous avons signalé autrefois à nos lecteurs le procédé de dessiccation du vent soufflé dans les hauts tourneaux par le refroidissement de l'air aspiré au moyen de machines frigoritiques" Depuis lors, d'après une communication de M. G. Richard à la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, — ce procédé s'est répandu dans de nom- breuses installations, principalement aux Etats-Unis, avec des résultats satisfaisants d'économie de et des surproductions des hauts fourneaux : économie de coke allant jusqu'à 18 °/,, et surproductions attei- gnant 20 °/,; mais l'établissement de ce procédé est très coûteux : 300.000 francs, par exemple, pour un haut fourneau de 150 tonnes, de sorte qu'il inspire tout d'abord une crainte respectueuse qui en ralentit l'extension. Deux ingénieurs métallurgistes, MM. Daubiné et Roy, attachés à la Société des Hauts fourneaux de Pont-à- Mousson, ont cherché à remplacer ce refroidissement de l'air par un desséchement au moyen de substances chimiques. Leur choix s’est arrèté sur le chlorure de calcium en raison de sa grande capacité d'absorption, mème à l'état très dilué, de son prix modéré et de la facilité de ses manipulations. Voici, d'après eux, en quoi consisterait une de leurs installations, dans une forge ne disposant pas d'un excédent d'énergie, et établie de facon à utiliser le plus possible la chaleur des fumées *? : Chaque élément se compose : 1° d'une grille à circu- lation d'eau composée de tubes radiateurs à ailettes sur laquelle repose le chlorure de calcium; 2 d'un faisceau tubulaire constitué par des tubes, radiateurs également, à section triangulaire reposant sur la grille par l’une de leurs arêtes et traversant la masse de chlorure; 3° de deux caissons plats en fonte, l'un d'a- menée, l’autre de sortie du vent. Le vent à dessécher, soufflé par un ventilateur, arrive dans un premier caisson distributeur en tôle qui répartit le vent en parallèle dans tous les éléments. L'air traverse ensuite de haut en bas la masse de chlo- rure, la section libre entre les tubes de fumées étant progressivement croissante et variant de 5m?,40 au début de passage à 9 mètres carrés en fin de passage. Le vent desséché se rend ensuite dans un autre collec- teur qui le conduit à l'aspiration des soufflantes. Pour que la résistance offerte au vent soit la mème quel que soit l'élément considéré, et pour qu'il ne se produise pas de court-circuit qui répartirait inégalement l’eau à déposer entre les divers compartiments, il convient que l'arrivée dans le distributeur de vent humide et sa sortie dans le collecteur de vent sec soient diagonale- ment opposées. La circulation des fumées est analogue à celle de l'air. Un premier collecteur prend les fumées chaudes dans le carneau, pour les distribuer dans les faisceaux de tubes triangulaires. A la sortie de ces faisceaux, les fumées ayant abandonné une partie de leur chaleur sensible sont recueillies par un autre collecteur, qui les emmène soit à la cheminée, soit à un ventilateur produisant le tirage. Cette circulation ainsi conçue est diagonale, comme celle de l'air. Ë Pendant le passage des fumées dans les faisceaux tubulaires, un ventilateur secondaire produit dans les différents caissons une circulation d'air inverse de celle du vent devant alimenter les soufflantes. En faisant marcher plus ou moins vite ce petit ventilateur secon- daire, on peut modérer convenablement la température à l'intérieur de la masse de chlorure à dessécher, en réaliser le chauffage progressif et éviter de dépasser la température de 235° qui a été reconnue comme tem- pérature limite. ; ; En ce qui concerne la circulation de l’eau, une con- duite verticale munie d'une vanne distribue l’eau froide aux différentes grilles; il est facile de suivre, par la température de l'eau sortant de ces grilles, les progrès du refroidissement. ———————— 1 Voir la Revue du 15 décembre 1904, t. XV. p. 1059. 2 Bulletin de l'Industrie minérale, nov. et dec. 1909. coke 136 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE L'ensemble de l'appareil est calorifugé de manière à réduire au minimum les pertes de chaleur par rayon- nement pendant la phase de régénération. La conduite de la dessiccation est excessivement simple. Pour chaque haut fourneau, il y a quatre ap- pareils analogues à celui qui a été décrit, de telle facon qu'à un même instant on ait un appareil au vent, un appareil en chauffage, un appareil en refroidissement et le quatrième appareil en visite, nettoyage ou répara- tion. Les inversions se font par permutation circulaire, d'heure en heure par exemple. Un appareil étant au vent, il suffit, pour le mettre en chauffage, de l’isoler dn ventilateur à grand débit alimentant la soufflerie et de l'aspiration des soufflantes, d'ouvrir les registres d'entrée et de sortie des fumées, de diriger par un jeu de vanne dans l'intérieur de l'appareil l'air venant du petit ventilateur pour produire l’entraînement de la vapeur d'eau, et de suivre la loi du chauffage progressif déterminée expérimentalement, à l’aide de pyromètres à cadran plongés dans le chlorure. Pour mettre ensuite un appareil en refroidissement, il suffit de l'isoler complètement en fermant soigneu- sement toutes les ouvertures et de faire passer dans les grilles une très rapide circulation d’eau. Un calcul très simple montre, à cet égard, qu'il suffirait d'une quantité d’eau de quelques dizaines de mètres cubes à l'heure pour produire le refroidissement. D'après MM. Daubiné et Roy, alors que l'application du procédé frigorifique à un haut fourneau de 150 ton- nes ne laisserait qu'un bénéfice de 2 à 3 francs par tonne de fonte et coùterait environ 300.000 francs, l'application du procédé au chlorure de calcium, qui ne coüûterait qu'environ 50.000 francs, rapporterait environ # francs par tonne pour une usine consom- mant, dans ses annexes, le maximum possible du gaz des hauts fourneaux, et au moins 6 francs pour des hauts fourneaux isolés, disposant d'un excès d'énergie, pour lesquels on n'aurait pas à tenir compte de la diminution de la puissance calorifique du gaz et de la quantité de gaz produit. Ce ne sont là encore que de très belles espérances, mais fondées sur une étude scientifique très conscien- cleuse. $ . — Physique Mesures de grandes longueurs d'onde spectrales. — C'est sous ce titre trop modeste que M. H. Rubens a présenté tout récemment à l’Acadé- mie de Berlin la suite de ses classiques travaux sur le spectre infra-rouge, qu'il vient d'étendre par des déter- minations d’un très grand intérêt faites avec la collabo- ration de M. H. Hollnagel. Dans ce dernier travail, comme dans les recherches antérieures de M. Rubens, les radiations à étudier étaient isolées par la méthode des rayons résiduels, qui consiste, comme on sait, à provoquer la réflexion répétée d’un faisceau sur une surface polie, douée d’un pouvoir réfléchissant sélectif. La source était, comme précédemment, un manchon Auer sans verre; les surfaces réfléchissantes ont été successivement du sel gemme, du chlorure, bromure et iodure de potassium. Le procédé de mesure des longueurs d'onde n'était plus celui du réseau. MM. Rubens et Hollnagel se sont servis d'un réfractomètre interférentiel, dans le champ duquel ils ont exploré, ainsi que l'avaient fait autre- fois Fizeau et M. Michelson pour les radiations visibles, la répartition du rayonnement, dont le plus ou moins de « visibilité », c'est-à-dire le plus ou moins de nettelé des maxima et minima, permet de conclure à la forme même des bandes de réflexion sélective. Cette méthode, beaucoup plus délicate que celle du réseau, justifiait un nouvel examen du Sel gemme et de la sylvine (chlorure de potassium), que M. Rubens avait déjà utilisés dans ses précédents travaux. Les résultats actuels consacrent plusieurs faits nou- veaux. Ils montrent d'abord, dans les spectres de réflexion des trois premiers corps, l'existence de deux maxima nettement séparés dans la région des très grandes longueurs d'onde. Et, pour l'iodure de potas- sium, ils révèlent une bande de réflexion dont la lon- gueur d'onde moyenne est de 964, près d'un dixième de millimétre. Dans cette bande, l'énergie était trop faible pour qu'on pt en faire une exploration détaillée. Mais le fait essentiel est que, par sa découverte, les radia- tions isolées, ou, si l’on veut, le spectre aujourd'hui connu, se trouve étendu d’une demi-octave par rap- port à la région explorée jusqu'ici, et qui n'avait, depuis dix ans, éprouvé aucune extension. Le bromure de potassium lui-même présente son maximum prin- Cipal à 864,5; son énergie, après quatre réflexions, le rend encore bien net. La transparence d'un grand nombre de substances aux nouveaux rayons à été essayée. La fluorine, le sel gemme, le verre, la sylvine, leur sont opaques. L'eau, sous une épaisseur de 2,6, en absorbe déjà 23 °/.. L'an- hydride carbonique, sous une épaisseur de 400 milli- mètres, ne les affaiblit pas sensiblement. Un autre fait très intéressant mis en lumière par les nouvelles expériences est que l'indice de réfraction de l'eau possède encore, pour À — 82,3, valeur moyenne des rayons résiduels du bromure de potassium, la valeur 1,41, du même ordre de grandeur que celle des rayons lumineux. C'est donc encore plus loin, dans l'intervalle inexploré compris entre 0,1 millimètre et 3 millimètres, que commence l’anomalie bien connue de réfringence de l’eau. $ 6. — Électricité industrielle L'industrie de l'énergie électrique, ses con- ditions économiques. — Le développement de: plus en plus marqué des emplois de l'électricité se: répercute sur la production de l’énergie électrique, em vue de fournir le courant aux divers consommateurs *. Le producteur d'énergie doit s’efforcer de réunir les conditions les plus favorables pour livrer le courant à bas prix, de telle sorte qu'il puisse attirer dans sa clientèle les usiniers qui seraient disposés, sans cela, à établir une centrale pour leur usage propre. Son plan d'installation et l'établissement de son réseau de dis-. tribution doivent prévoir une extension progressive. Les usines pour la production de l'énergie électrique: travaillent tantôt avec la houille blanche, tantôt avec: la houille noire; mois, même dans le second cas, l'usine doit être installée près d’un cours d’eau qui lui assurera un double avantage : l’eau nécessaire pour la condensation, et, s’il est navigable, une économie de: frais de transport. La grande usine centrale d'énergie électrique peut. l'emporter sur l'installation spéciale à une consom— mation industrielle, au point de vue d'un rendement plus économique, par les avantages bien connus de la, concentration qui réduisent le prix de revient, etaussi par le fait de la diversité de la clientèle qui ne réclame pas sa consommation à la même heure. De telle sorte qu'il est possible de satisfaire les divers besoins en jeu (lumière, traction, force motrice) avec une puissance- effective bien inférieure à la somme des puissances à fournir aux clients. L'industriel consommateur d’une grande centrale bénéficie encore d’une économie d'installation, d’une diminution des frais de répara— tion, des chances d'accidents, d'une plus grande régu- larité de marche et de la faculté d'obtenir rapidement un accroissement de la puissance dont il a besoin. L'emploi de l’eau est plus économique que l'emploi du charbon, malgré les frais parfois très élevés de l'installation. Le grand inconvénient des usines hydro- électriques,c'estsouventl'irrégularité du débit, àlaquelle on peut remédier soit par la création de réservoirs, 1 A. Azey : Bulletin de la Sociélé d'Encouragement pour l'Industrie nationale, juillet 19(9. — En. PayeN : Econo-- miste français, 21 novembre 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 137 soit par l'établissement d'une usine à vapeur de se- cours, soit, enfin, par l'adoption des vues de M. l'ingé- nieur en chef Tavernier, en reliant entre elles les usines hydro-électriques établies sur des cours d’eau de régime différent, de manière à équilibrer ces régimes et à diminuer l'influence des éliages qui se produisent généralement en hiver sur les rivières d'origine glaciaire et en été sur les autres rivières. Le sort de l'usine hydro-électrique dépend en quel- que sorte du régime juridique du cours d'eau sur lequel elle est située. Cette importante question à été très clairement exposée dans deux substantiels Rap- ports présentés par M. Jean Coignet à la Chambre de commerce de Lyon‘. Il importe d'abord de distinguer, assons à la troisième question que nous nous élions posée. Les micelles sont-elles caractéris- tiques de la matière vivante? Non, elles ne le sont pas. Les chimistes ont appris à en faire qui, quoique composées d'une facon toute différente, présentent avec les micelles naturelles un grand nombre dé ressemblances. Si, comme la fait Graham, nous mélangeons deux solutions, l’une d'acide chlorhydrique, l’autre de silicate de soude, et si nous nous débarrassons du chlorure de sodium formé, il nous restera une solution de silice. Dans certaines conditions, par l'addition d’un sel, ou par une élévation de température, cette solution se prendra en une gelée très semblable à une gelée de gélatine, ou à du blanc d'œuf coagulé par la cha- leur. Evaporée, elle ne donnera pas de cristaux, mais une sorte de vernis solide transparent et amorphe comme de la gomme arabique. Enfin, — et ceci est plus important pour nous — tandis que les solutions d'acide chlorhydrique et de silicate de soude contiennent des molécules ordinaires isolées au sein de l’eau, la solution de silice contient des micelles, formées d’un grand nombre de molécules de silice unies entre elles par le même lien qui unit les molécules de mallose dans l’amidon. Ainsi, nous savons produire un composé de structure micellaire, et ce composé présente de remarquables ressemblances avec la matière organisée naturelle. Nous arriverions au même résultat et aux mêmes conclusions en substituant, au silicate de soude, du tungstate ou du stannate : la solution finale contiendrait alors des micelles d'acide tungstique ou d'acide stannique. Beaucoup d'autres sub- stances, de composition chimique excessivement variée, pourraient encore être employées ; on peut ciler, par exemple, parmi beaucoup d’autres : Des éléments : or, argent, platine, soufre, mercure, Cuivre. Des composés de métalloïdes entre eux : sulfures d'arsenic, d’antimoine. Des oxydes métalliques : de fer, aluminium, chrome, thorium. Des sulfures métalliques : de zinc, de cadmium, de mercure. Des composés ternaires : sulfate de baryum, chromate d'argent, ferrocyanure de cuivre, etc. Il est impossible de découvrir aucune analogie chimique entre tous ces corps : pas une propriété ne leur est commune. Leurs solutions dans l'eau, préparées d'une certaine manière, n’en présentent pas moins ce caractère commun de renfermer, non pas des molécules libres, mais des micelles, et de posséder, en raison de ce seul fait, des propriétés physiques ou physico-chimiques particulières. On a donc pu les réunir en une seule classe : depuis Graham, on les appelle les colloides et on donne aux solutions qu'ils forment dans l’eau le nom de solutions colloïdales. Une solution colloïdale est une solution qui renferme, non des molécules libres, mais des micelles. Comme telle, elle a un certain nombre de propriétés différentes de celles des solu- tions ordinaires, et l'expérience montre que ces propriétés sont les mêmes, qu'il s'agisse d'une solu- tion colloïdale naturelle comme le blanc d'œuf ou d’une solution artificielle comme celle de silice. Par exemple, toutes ces solutions ont ce carac- tère commun, déjà reconnu chez les substances organisées, de ne pouvoir donner de cristaux définis'. La plupart d'entre elles, soumises à un degré suffisant de chaleur, se prennent en masse comme du blanc d'œuf cuit ou du lait caillé. L'al- cool les précipite, c’est-à-dire sépare de l’eau le composé colloïdal, comme il en sépare l’albumine ; des sels neutres, tels que le chlorure de sodium ou le sulfate d'ammoniaque, produisent le même effet. Desséchés, puis remis dans l’eau, ils ne se redis- solvent généralement pas, pareils en ceci à l'ami- don ou à la gélatine. Ils n’ont pas des propriétés constantes et définies, ni une composition toujours la même, et ceci les rapproche des substances orga- nisées naturelles et les éloigne des composés miné- raux ou organiques. Enfin, ilserait possible de citer encore d’autres ressemblances d'ordre physico- chimique, ressemblances plus difffciles à expli- quer : celles que j'ai citées suffisent à faire com- prendre que c’est bien à leur structure micellaire que nos colloïdes de synthèse doivent d'être des imitations de la matière organisée naturelle, puisque elle estévidemment, en l'absence de toute analogie . chimique, la seule raison qu'on puisse invoquer pour expliquer leurs ressemblances. La structure micellaire n’est donc pas, en elle- même, caractéristique de la vie, el nous savons la reproduire. Par suite, il n'y a rien d'impossible à ce qu'on fasse aussi bien, un jour, la synthèse des pro- 1 On a décrit l'albumine cristallisée, la cellulose cristal- lisée, mais ces malières ne sont pas pures. 144 JACQUES DUCLAUX — LA MATIÈRE ORGANISÉE duits organisés que celle des produits cristalli- sables. Sur cette voie cependant, les chimistes sont beaucoup moins avancés, et l'on peut dire que, à côté de la Chimie organique brillamment déve- loppée, la Chimie organisée est encore à créer de toutes pièces. En ce quiconcerne l’amidon, la cellu- lose, la gomme, presque rien n'est fait. Dans la direction de l’albumine, des résultats assez impor- tants ont été déjà acquis : Grimaux, par exemple, est arrivé de deux manières différentes, en partant de l'acide aspartique ou de l'acide amidobenzoïque, à des colloïdes de synthèse qui, tout en présentant une composition différente de celle de l'albumine, lui ressemblaient par beaucoup de caractères : amorphes comme elle, donnant avec l’eau des solu- tions claires et un peu visqueuses, précipilables par l’action de certains sels et se coagulant sous lin- fluence de la chaleur. Dans ces dernières années, le grand chimiste allemand Emile Fischer a réalisé la synthèse des polypeplides, composés formés des mêmes éléments que l'albumine naturelle, présen- tant des propriétés très voisines, et résultant de la condensation les unes avec les autres des molécules de diverses substances, telles que la leucine, l’ala- nine, le glycocolle ou l'acide aspartique, qui sont des résidus de la décomposition de cette même albumine, et qu'on suppose y exister à l'état de molécule complète ou presque complète comme le maltose dans l’amidon. Entre les polypeptides et l’albumine, il ne semble pas que le pas à franchir soit bien grand, et peut-être la synthèse d’une albumine est-elle prochaine. Je dis une albumine, parce qu'il y en à un nombre considérable de va- riélés et qu'on ne peul savoir d'avance laquelle on obtiendra, ni même si celle qu'on obtiendra sera identique à l'une des albumines naturelles. Ainsi rapprochées des produits de synthèse, les malières organisées ne sont plus que des colloïdes naturels, et c'est désormais ainsi que je les dési- gnerai, les deux mots ayant, comme nous venons de le voir, un sensidentique dans les acceptions où nous les prenons. Aucune cellule vivante n'est nécessaire à leur produclion : il nous reste mainte- nant à considérer le rapport inverse et à nous demander s'il ne sont pas, eux, nécessaires à la produetion d'une cellule vivante. On est amené à le croire si l’on voit combien les colloïdes sont nom- breux et universellement répandus chez les êtres vivants. La membrane de la cellule est un colloïde, à structure micellaire. Dans les végétaux, l'amidon, qui joue un rôle si important, est un colloïde : la cellulose, qui forme (avec quelques substances voisines) la partie solide du corps, est un colloïde. La partie la plus active, le contenu des cellules de la plante, est une matière albuminoïde mélangée à des sucres et à quelques sels. La sève contient en solution, à côté de sels minéraux, des gommes et d'autres corps colloïdes. Dans le règne animal, il en est de mêne : le tissu de l’os est un colloïde, l’osséine, imprégné de carbonate et de phosphate de chaux; le sang est une dissolution d’un colloïde, la fibrine, et l'hémoglobine elle-même, chargée de transporter l'oxygène, est peut-être un colloïde. Dans le lait, à la matière grasse et au lactose (sucre de lait) vient s'ajouter, comme matière azotée, la caséine, matière azotée colloïdale, parente de l’albu- mine. Evidemment, une aussi grande extension du colloïde, presque totalement absent du règne mi- néral (l'argile cependant en est un), n’est pas un effet du hasard : elle doit tenir à quelque cause profonde qu'il nous faudra découvrir. VI J'ai donné plus haut une liste de quelques corps colloïdaux : j'aurais pu la faire beaucoup plus longue’. En la parcourant alors, on aurait vu qu'elle ne comprend que des corps insolubles dans L'eau à l'état moléculaire, c'est-à-dire ne pouvant exister sous la forme de solution ordinaire. L'eau ne dissout aucune substance de cette liste, pas d'or, ni d'argent, ni de soufre, ni de mercure, ni de fer oligiste, qui est de l'oxyde de fer, ni de blende, qui est du sulfure de zine; c’est-à-dire que, si l’on place dans l’eau des morceaux compacts de blende ou de fer oligiste, ou des lingots d'or et d'argent, il ne s'en dissout aucune trace percep- tible. Pour les amener à l'état de solulion (mais alors, de solution colloïdale), on est obligé d'em- ployer des moyens délournés : de réduire, par exemple, unsel d'or parle phosphore, ou de traiter par l’ammoniaque un sel de peroxyde de fer. Mais l'ouvrage qu'on à ainsi fait est facile à défaire, et il suffit généralement de dessécher la solution pour que la matière colloïdale redevienne complètement insoluble. Je suis obligé d’insister sur le mot complètement, à cause de la mauvaise habitude qu'ont prise les chimistes d'appeler insolublés tous les corps qui ne se dissolvent pas abondamment, tels que le carbonate de chaux, dont un litre d'eau dissout trois centigrammes, le sulfate de baryum ou le chlorure d'argent dont l’eau prend 2 milligrammes. Ce nom devrait être réservé aux corps colloïdaux, dont un litre d’eau ne dissout généralement pas plus de ï de milligramme. La différence peu ne pas paraitre grande, si l’on envisage le poids de matière contenu dans un litre d'eau : elle devient 1 Une liste de ce genre vient d'être publiée par Svedberg : elle comprend les noms d'une centaine de colloïdes de la Chimie minérale. JACQUES DUCLAUX — LA MATIÈRE ORGANISÉE 145 immédiatement plus sensible si l'on pense qu'il faudra dans le premier cas, pour dissoudre un granme de chlorure d'argent, 500 litres seulement, et 1.000 mètres cubes au moins pour dissoudre le même poids d'un colloïde. Cela nous fait découvrir une première raison, fort simple, pour que cerlains organismes soient formés de colloïdes; l'insolubililé est, pour eux, une condition absolue d'existence. On ne concoit pas des poissons dont le corps serait soluble dans l’eau. On le concoit encore moins pour des micro- bes, qui devraient, étant données leurs petites dimensions, fondre très rapidement dans l'eau s'ils y possédaient une solubilité quelconque. La mem- brane extérieure de leur corps, tout au moins, doit résister indéfiniment à l’eau, et il faut pour cela qu'elle soit presque rigoureusement insoluble, car les microbes se trouvent souvent en contact avec des quantités d'eau énormes; par exemple, dans une expérience de Trenkmann, des bacilles tubereuleux, ensemencés au nombre de 1.600 par centimètre cube, se sont maintenus en vie, quoi- que, dans cette expérience, un gramme de mi- crobes (supposés secs) fût en suspension dans un océan de dix mille mètres cubes d'eau, à laquelle ils présentaient une surface d'attaque de dix mètres carrés. Cette insolubilité nécessaire ne prouve pas, à elle seule, que la membrane doive être de nature colloïdale, car un corps de microbe entouré d'une feuille d’or battu (qui n'est pas colloïdal du tout), résisterait aussi bien à l'eau. Mais cette membrane est une production du microbe; or, toutes les fois qu'il y à dans une réaction chimique production d'un composé réellement insoluble, à moins que la réaction ne soit extraordinairement lente (ce qui n'est pas le cas ici), les molécules de ce composé s'unissent pour former des micelles et le composé se présente sous la forme colloïdale', soit qu'il’ reste ainsi en solution, soit qu'il prenne immédia- tement la forme solide amorphe. Ainsi la mem- brane insoluble et tissée par le microbe ne peut être qu'un colloïde. Pour les animaux et les végétaux supérieurs, la mème raison d’insolubilité n'existe pas; pourvu qu'ils soient formés de matériaux peu solubles, jamais ils ne viendront en contact avec une quan- ! Ceci est très général et s'applique encore dans le cas de milieux autres que l'eau. On peut, en eftet, obtenir des colloïdes dans d'autres liquides; jamais on ne les obtient qu'avec des substances insolubles. Comme les solubilités sont très variables d'un liquide à l’autre, un même corps peut très bien exister à l'état de solution ordinaire dans un liquide, à l'état de solution colloiïdale dans l’autre: c'est ainsi que le sel ordinaire a pu être obtenu à l'état colloïdal dans le benzène ou le toluène qui ne le dissolvent pas (Paal). tilé d'eau suffisante pour leur porter atteinte, Mais il y a pour eux une autre raison du même genre, que nous pourrions appeler une raison de bon sens, pour qu'ils soient formés de colloïdes : il faut qu'ils soient à la fois mécaniquement résistants et doués d’une certaine souplesse, et les animaux, en particulier, doivent pouvoir remuer. Or, l'inva- riabilité de la matière cristallisée leur rendrait les mouvements bien difficiles. Cette matière est com- pacte : elle correspond, pour toutes les substances, à la densité maxima, c'est-à-dire que les molécules y sont le plus près possible les unes des autres, et, d’ailleurs, dans une position presque invariable, I] en résulte en général une grande dureté et une grande cohésion, mais aussi une grande fragilité. Que l’on suppose la feuille d’un arbre tenue à la branche par un pétiole formé de substances eris- tallisées ; à moins que ce pétiole ne soit beaucoup plus gros que celui que nous connaissons, il sera brisé par le premier coup de vent arrivant nor- malement à la feuille, au lieu d'être seulement tordu. Le colloïde organisé n'a pas la même dureté ni la même ténacité que le cristalloïde, mais, ce qu'il perd de ce côté, il le regagne, et au delà, en sou- plesse. Il est facile de le comprendre : les micelles, qui remplacent les molécules, sont placées les unes par rapport aux autres dans des positions sinon quelconques, du moins susceptibles d'un certain jeu; elles n’ont plus les unes par rapport aux autres la même fixité que les molécules d'un cristal; comme elles n’ont pas toutes la même orientation, le solide qu'elles forment n’a pas de ces plans de clivage qui donnent aux cristaux une grande fra- gilité et font que le carborundum par exemple, malgré son extrême dureté, se pulvérise très aisé- ment, tandis qu'un morceau de liège ou un fanon de baleine supportent des chocs très violents sans se désagréger. La cohésion qui unit les micelles, sans être d'une essence différente de la cohésion qui unit les molécules cristallines, leur permet de s’écarter à une beaucoup plus grande distance sans rupture : peut-être même les micelles sont-elles déformables. Sans aller jusqu’au caoutchouc, qui est une substance organisée vraiment extraordi- naire, incompréhensible même, mais qui paie son élasticité par une très forte diminution de la résis- tance à la traction (ténacité), comparons un arc en bois avec un arc de dimensions identiques, mais taillé dans un roc : alors que le premier se pliera de 50 centimètres et résistera à des chocs extrème- ment violents, le second pliera de quelques milli- mètres et ne pourra tomber à terre sans se rompre. Que, dans notre squelette, où la matière organisée, l'osséine, ne forme pourtant que le quart du poids total, cette osséine vienne à disparaitre, et nos os 146 JACQUES DUCLAUX — LA MATIÈRE ORGANISÉE deviendront fragiles comme du verre’; que les cartilages, eux aussi, cristallisent, et nous ne pour- rons plus descendre d’omnibus sans que le choc de notre pied par terre, n'étant plus amorti, nous fende le crâne. VII Enfin, il y a une troisième raison, moins évi- dente celle-là, pour que les tissus vivants soient formés de colloïdes pour la plus grande partie. Cette raison ne vaut que pour les tissus tels que nous les avons sous les yeux, et il est certainement possible de concevoir des êtres auxquels elle ne s'appliquerait pas; mais la Chimie n’a pas à se préoccuper de ces êtres, et s’en tient à ceux qui ‘existent. Or ceux-ci, tels qu'ils sont, ne peuvent fonctionner sans dommage que si leurs tissus pré- sentent certaines propriétés inséparables de leur nature organisée où colloïdale. Il suffit, pour s’en rendre compte, d'examiner d'un peu près comment se font les échanges des cellules avec le milieu extérieur. Tout, dans les organismes, s'effectue par voie de diffusion. Une cellule n’a pas de porte sur l’exté- rieur; tout ce qu'il lui faut, elle le recoit à travers ses murs, par diffusion; elle ne peut faire com- merce que de matières dissoutes. Les matériaux qui constituent la cellule sont donc formés, néces- sairement, par les réactions des matières dissoutes absorbées, soit entre elles, soit avec les substances qui existaient auparavant dans la cellule. Ces der- nières ne doivent pas pouvoir sortir, sans quoi les réactions d'assimilation s'effectueraient aussi bien au dehors qu'en dedans et la croissance ne se ferait pas. (Si, par exemple, la chlorophylle d'une algue pouvait passer dans l’eau où vit cette algue, avec tout ce qui l'accompagne, l'assimilation du car- bone se ferait dans l'eau et non pas dans l'algue, qui ne se développerait pas.) Or, toutes les sub- stances actives d'une cellule doivent être dissoutes, en raison de ce vieil axiome que ce qui n’est pas dissous n'agit pas : corpora non aguut nisi soluta. Il faut donc que la membrane cellulaire ait la double propriété de laisser passer certaines sub- stances dissoutes — les aliments — et d'en arrèter d'autres — les aliments élaborés et devenus partie constituante de la cellule. — Elle doit se comporter eomme une sorte de filtre intelligent. Une membrane de cette nature serait bien diffi- cilement réalisable à l’aide d'éléments cristallisés, ou, pour employer l'expression de Graham, cris- talloïdes. On ne voit guère d'autre moyen que celui ! Dans certaines maladies, c'est la partie minérale qui disparait, et l'os devient ainsi très fragile. Il n'y a pas con- tradiction favec ce que je dis, car, dans ces cas, la partie organisée est aussi profondément altérée. qui consisterait à envelopper la cellule d'une sorte de bougie Chamberland formée de porcelaine poreuse; il faudrait, pour cela, une mullitude de cristaux enchevêtrés, une sorte de papier-filtre dont les éléments seraient des aiguilles cristallines au lieu d’être des fibres végétales. Une telle dispo- sition est assurément possible, et la preuve en est fournie par le plâtre qui, une fois pris, possède à peu près cette texture et est perméable à l'eau. Mais pour qu'une semblable cloison laisse passer cer- taines substances et en retienne d’autres, il faut que le diamètre des pores et, par suite, aussi celui des cristaux soient comparables aux dimensions moléculaires; il faut que les cristaux aient une épaisseur voisine du millionième de millimètre, et nous ne connaissons pas de circonstances dans lesquelles il se forme des cristaux aussi petits. Ceux que l'on observe (plâtre dans le règne mi- néral, oxalate de chaux dans les plantes, urates chez l'homme, etc.), sont au moins mille fois plus gros en diamètre. Au contraire, la structure micellaire se prête à merveille à ce rôle de tamis, puisque les micelles sont elles-mêmes de petites masses plus grosses que les molécules, mais de dimensions encore com- parables. On comprend très bien qu'une membrane colloïdale, formée par la juxtaposition d'un nombre immense de ces micelles unies par la cohésion, joue le rôle de Zltre à molécules, de même que du sable fin peut jouer le rôle de filtre par rapport aux sédi- ments ou aux microbes en suspension dans l’eau. Une telle membrane aura donc, de par sa seule texture, la propriété d’être perméable à cerläines substances (en général de petites dimensions, c'est- à-dire de poids moléculaire peu élevé) et imper- méables à d'autres, et surtout à celles qui ont de grosses molécules”, d'être semi-perméable, pour employer le mot actuellement en faveur. Que la semi-perméabilité soit effectivement sous la dépendance de la structure micellaire résulte de deux ordres de faits. D'abord, toutes les mem- branes de l'organisme sont, à un plus ou moins haut degré, semi-perméables. La plupart laissent passer les composés simples, parmi lesquels le plus important pour les animaux est le chlorure de sodium, et arrêtent les composés organiques complexes. Par exemple, les membranes qui sé- parent, dans le rein, l'urine du sang, sont nor- malement perméables au sel et imperméables au ! Il n'est pas certain que la membrane agisse seulement ainsi, mécaniquement. Bien des physiologistes et physico- chimistes pensent qu'elle agit aussi en vertu de phéno- mènes de dissolution. Cette question est fort embrouillée, et il n'est même pas sûr que la distinction ait un sens. Quand on parle de molécules, il devient bien dangereux de vouloir décider ce qui est mécanique, physique ou chi- mique. JACQUES DUCLAUX — LA MATIÈRE ORGANISÉE 147 glucose; quoique ce sucre existe loujours dans le sang, et surtout pendant la digestion, ce n’est que dans le cas de diabète sucré qu'il passe dans l'urine. Beaucoup de membranes végétales sont, elles aussi, imperméables au sucre; sans cela, les betteraves abandonneraient le pluie ou du sol. Enfin, d’une façon générale, une membrane vivante quelconque est presque rigou- reusement imperméable aux solutions de colloïdes, leur aux eaux de dont les micelles sont trop grosses pour pouvoir s’y faufiler, Cette dernière propriété est d’ailleurs presque évidente; il ne faut pas que le contenu de la cellule, contenu formé en majeure partie de col- loïdes, puisse sortir de cette cellule. Lorsqu'il en sort, on peut présager un trouble assez sérieux c'est ce qui arrive, par exemple, quand l’albumine passe dans l'urine. Les membranes colloïdales naturelles étant ainsi reconnues semi-perméables, il nous reste à voir si la même propriété s'étend aux membranes artifi- cielles. Il en est bien ainsi, et cette propriété n’est aucunement caractéristique de la matière vivante. Des expériences très intéressantes de Traube ont montré qu'une membrane de ferrocyanure de cuivre, par exemple, perméable au sel marin ou au sulfate d'ammoniaque, est imperméable au sucre. La même propriété a été reconnue à des membranes de constitution toute différente, telles que celles du tannate de fer. Aïnsi il n'y a pas de doute qu'elle dépend surtout de la texture micellaire, et, à un beaucoup plus faible degré, de la nature chimique des micelles. Je note en passant, comme un phénomène curieux et encore bien mal expliqué, que la mort de la cellule paraît changer la perméabilité de la paroi. La membrane d’une cellule morte se laisse, en général, plus facilement traverser que celle de la cellule vivante, et, pour reprendre l'exemple qui nous à servi tout à l'heure, une betterave tuée par la chaleur laisse échapper son sucre par diffusion beaucoup plus facilement qu'une betterave fraiche. AQU 11 me reste à justifier, dans les limites où on est en droit de le faire, la distinction entre la matière organique et la matière organisée en tant que devant être étudiées, l’une par la Chimie, l’autre par la Biologie. Cette distinction n'est plus soute- nable si l'on n’envisage que la nature chimique des substances, puisque rien ne s'oppose, comme mous l'avons vu, à ce qu'on fasse la synthèse des unes aussi bien que celle des autres. Mais les diffi- cultés commenceraient si l'on voulait aller plus loin. Nous n’apercevons pas de difficulté théorique qui nous empêche d'arriver à l’amidon par exemple. Mais l'amidon, substance chimique, est une chose, el le grain d’amidon, produit de la vie, en est une autre. Il à une forme : il est composé de couches concentriques de propriétés différentes, inégale- ment attaquées par l’eau chaude ou par les diasta- ses. Ces diverses couches n'ont pas été toutes dé- posées dans les mêmes conditions; les unes peut- être l’ont été de jour, les autres la nuit; les unes en présence d'un excès d’eau, les autres pendant une période de sécheresse. Pour bâtir un grain d'ami- don, il faudra connaître toutes trouver le moyen de les réaliser et de les faire agir successivement. Or, il n’est pas du tout sûr que ces conditions soient réalisables en dehors de la plante, ou, si l'on veut, par un mécanisme plus simple que la plante. HN se pourrait fort bien que la synthèse du grain d'amidon ne püt être obtenue que comme une conséquence de la synthèse de la plante avec toutes ses fonctions. Or, quoiqu'on ait voulu expli- quer par des forces physiques ou chimiques les apparences les plus compliquées de la cellule, telles que celles de sa division en deux (figures de karyo- kinèse), les explications données jusqu à ce jour ne sont que de purs enfantillages et ne nous appren- nent rien que la naïveté de leurs auteurs. Quand on réfléchit aux difficultés que présentera la cons- truction d’un grain d'amidon, pourtant bien simple en apparence, on se demande si vraiment on arri- vera un jour à reconstituer un assemblage aussi complexe et à le faire tenir dans un espace de moins d'un dixième de millimètre. Même si l’on arrivait à faire isolément la synthèse de toutes les substances qui entrent dans la compo- sition d’une cellule, il sera bien plus difficile d'ob- tenir que leur mélange évolue comme cette cellule. Pour expliquer la vie d’un animal ou d’une plante, il semble bien qu'il faudra toujours remonter, si peu que ce soit, dans son histoire, c’est-à dire avoir recours à la Biologie. Le propre des réactions chi- miques est de ne dépendre à chaque instant que de l'état présent du système et non du chemin suivi pour y arriver: ilsemble difficile que cette règle s'ap- plique sans modification aux réactions complexes, et, de plus, héréditaires, de la vie. La Chimie n’est guère en état de disputer à la Biologie l'étude des substances naturelles organisées, en tant que pos- sédant une forme doués de propriétés définies et stables ; elle reprend ses droits quand la dernière trace de vie est éteinte, et quand toutes ces substances sont isolées. Ainsi elles ne peuvent être vues sur toutes leurs face ; d'un seul des deux domaines voisins; mais, SUivai ce qu'on veut en voir, il faut se placer d'un côté ou de l’autre. ces conditions, ou constituant des mélanges Jacques Duclaux, Préparateur à l'Institut Pasteur, 118 P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES LA CLASSIFICATION DES MYCOSES On appelle mycoses les maladies qui doivent leur origine ou leur caractère propre au développement, dans l'organisme supérieur (chez l'homme, par exemple), d'un champignon parasite. Les caractères cliniques ne distinguent pas immé- diatement une maladie déterminée par un champi- gnon d'une maladie déterminée par un parasite différent végétal ou animal, ou même par certains agents inanimés. La constalation, directe où indi- recte, de l'agent provocateur est nécessaire pour nous assurer que nous sommes en présence d'une mycose. Les mycoses étant définies par les données com- binées de l'observation clinique et de l'analyse botanique, quelle place prendront-elles dans les grands cadres de la classification nosologique? On fait généralement des mycoses un chapitre des maladies parasitaires. Cet usage ne soulèverait aucune objection si, comme l’admettait Duclaux, on appelait maladies parasilaires toutes les mala- dies causées par des parasites, en rangeant dans cette classe l'infection purulente, les furoncles, la fièvre récurrente, l’érysipèle, la diphtérie et la tu- bereulose aussi bien que la gale. Mais aujourd'hui, les pathologistes les plus auto- risés opposent les maladies parasitaires aux mala- dies infectieuses. Les Bactéries, dont tout le monde connait le rôle prépondérant dans une foule d’in- fections, sont fréquemment mises à part des autres parasites. Les programmes officiels des Facultés de Médecine consacrent des enseignements et des examens distincts à la Parasitologie et à la Bacté- riologie. Pour faire bien comprendre que la séparation de ces deux branches d'une même science, justifiée par des raisons d'opportunité didactique, ne repose pas sur une distinction fondamentale, il importe de montrer les connexions qui relient les mycoses à ce que l’on nommerait volontiers les bactérioses. L'idée première de cette séparation est quele para- site, tel qu'on le connaissait avant l'ère des mi- crobes, est assez volumineux pour impressionner l'organisme par sa masse, pour exercer une action mécanique à son contact, pour dévorer les réserves nutritives, les tissus constitutifs de son hôte, tandis que la bactérie nuit par ses sécrétions, exerce une action chimique à distance. Les premières mycoses qui aient attiré l'attention sont celles où la masse du champignon est consi- dérable, visible à l'œil nu, qu’elle soit superticielle, comme le godet de la teigne faveuse, la gaine des cheveux des tondantes, la plaque crémeuse du muguet, les efflorescences des pilyriasis, ou qu’elle soit profonde, comme les moules bronchiques con- séculifs au muguet ou les membranes aspergillaires. Mais les Bactéries ne sont pas moins encombrantes, soit qu'elles s'accumulent en amas, qu'elles cons- tituent des fausses membranes avec les exsudats fibrineux coagulés ou les débris épithéliaux entassés autour d'elles, soit qu'elles envahissent en grand nombre les humeurs de l'organisme. Pasteur expli- quait d'abord le rôle de la Bactéridie dans la maladie charbonneuse par la concurrence alimentaire qu’elle livre aux globules sanguins en leur disputant l'oxygène. L'action des Champignons parasites présente de si étroites analogies avec celle des Bactéries, que la maladie causée par l'Aspergillus fumigatus à reçu les noms de bronchite, de pneumonie, de tuberculose (bronchite membraneuse aspergillaire de Rénon; pneumonomycose de Rother, Weich- selbaum, Saxer; pseudotubereulose aspergillaire de Dieulafoy, Chantemesse et Widal; tuberculose aspergillaire de Potain). Personne ne conteste le caractère infectieux de la tuberculose déterminée par le bacille de Koch. En dehors des symplômes et de l’évolution de la maladie, l'infection générale se révèle expérimen- talement par les réactions de l'organisme malade à la tuberculine injectée dans le derme ou déposée sur la peau ou les muqueuses les plus éloignées de la région où siègent les lésions tuberculeuses. Ces lésions elles-mêmes indiquent une réaction locale toute pareille à celle qui se manifeste au contact des parasites plus volumineux. Le tuber- cule, avec la cellule géante qui en fut longtemps considérée comme le caractère histologique le plus précis, a été retrouvé, non seulement dans diverses mycoses, mais aussi en présence d'animaux et de simples particules inertes. On ne peut refuser au bacille de Koch une action de contact comparable à un traumatisme. Cette action ne diffère pas foncièrement de l’action chi- mique des substances dissoutes. Auclair à repro- duit le nodule à cellules géantes en inoculant des extraits éthérés de bacille tuberculeux dans les- quels sont dissoutes, d'après Dorset et Emery, des substances saponifiables, telles que les matières grasses ou cireuses, et une substance possédant la plupart des caractères des alcools supérieurs de la série aliphatique. Evidemment, ces poisons à détermination locale P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES 149 n'agissent pas comme un Coup; mais il ne paraitra pas excessif de dire que certaines substances élroi- tement enchaînées au corps des microbes exercent, par leurs propriétés physico-chimiques, une sorte de traumatisme moléculaire. On à ramené d'ailleurs à une véritable osmo-toxicilé l'action, plus physique que chimique, de divers poisons sur les liquides organiques. Le parasite de l’actinomycose, qui est un cham- pignon incontesté, à fourni à Auclair (1903) une éthéro-actinomycéline, dont l'action est la même que celle de l’éthéro-bacilline. D'autre part, on connaît des poisons diffusibles, comparables aux toxines bactériennes, isolés des cultures de Champignons. Feistmantel, de Buda- pest (1904), a montré que l'extrait de Nocardia lareinica provoque les mêmes réactions que la tu- berculine chez les cobayes qui ont reçu des inocu- lations de farcin. Son action sur les cobayes tuber- culeux présente à l'égard de l’action de la tuber- culine une simple différence de degré. Le type le plus populaire des champignons parasites, l'As- pergillus fumigatus, présente, outre l'action phy- Sico-chimique locale comparable à l’action de l'éthéro-bacilline, une action infectieuse due à un poison diffusible. Dès 1896, Lucet avait remarqué l’action pyrétogène exercée sur le lapin par les cultures filtrées de ce champignon. Plus récem- ment, Louis Gautier à provoqué, à l’aide de cette toxine soluble, des convulsions, du tétanos, la para- lysie et la mort chez le lapin et chez le chien. Le cobaye, le chat, la souris, le rat blanc présentaient des symptômes plus atténués. Le pigeon s'est montré insensible au poison diffusible, tandis qu'il est, comme on sait, l'animal le moins résistant à l’action locale du champignon, dontle chien n'acure. Nous ne voyons pas plus de raison de séparer les mycoses des maladies infectieuses que les bac- térioses des maladies parasitaires. Est-ce à dire que les maladies infectieuses et les maladies para- sitaires doivent être confondues dans un même groupe nosologique? Non pas. Il s’agit de deux groupes basés sur des principes tout à fait difré- rents ; et, ce qui peut nous surprendre, c'est qu'on ait songé à les comparer. L'infection est une per- version dans la constitution intime de l'organisme livré à ses propres moyens ou envahi par des êtres étrangers, grands ou petits; mais, dans tous les cas, c’est l'organisme qui fait l'infection, de même qu'il est, d'une façon générale, le propre artisan de ses maladies. C'est, comme l’a si bien dit Bouchard, l'organisme, et non le microbe, qui fait la maladie, Un parasite est toujours extérieur à l'organisme ; lors même qu'il est logé dans la profondeur des cellules, il est encore étranger au protoplasme qui vit dans ces cellules. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Il était tout naturel de parler de maladies para- sitaires au lemps où l'on croyail que les lissus allérés ou les humeurs viciées engendrent des parasites. La désignation de maladies parasilaires a survécu à celte vieille erreur dont elle procède. Aujourd'hui, on sépare avec soin la cause et le mécanisme des maladies et l'on oppose volontiers les classifications éliologiques aux classifications pathogéniques. Cette distinction est juste. Mais, pour l'appliquer, il faut se rendre compte des causes complexes qui président à l'éclosion d'une maladie. Si l’on constate la pénétration d'un parasite, d'un microbe, par exemple, à l’origine d'une maladie et si l'on saisit un rapport entre la présence du para- site etle développement des symptômes patholo- giques, on conclut aussilôt que le parasite est Ja cause initiale de la maladie. Mais la maladie n'est pas la conséquence directe et nécessaire de la pré- sence du parasite. Certains organismes hébergent les parasites les plus redoutables sans être malades. Le parasite rend la maladie possible; mais l’orga- nisme seul la réalise. À côté des causes externes qui sont des causes adjuvantes, occasionnelles, il ya les causes internes qui sont délerminantes. Dans un récent article sur la réceptivité et l’im- munité chez les essences forestières, E. Münch montre que la prédisposilion résulte à la fois de facteurs internes et de facteurs externes. Il à bien compris que les premiers résident dans les états constitulionnels du sujet, tandis que les seconds n'ont rien à faire avec la constitulion. Il nomme les premiers « Krankheïtsempfänglichkeit », ce que nous traduisons par réceptivilé ; il réserve aux seconds le nom de causes de la maladie. Le mot réceplivité couvre également des causes tou- jours agissantes, qui sont l'œuvre de l'organisme lui-même. Quand on limite les causes dela maladie aux facteurs externes, on sépare sans raison le sujet de la nature dont il fait partie, le malade de la maladie qui n'a pourtant aucune réalité en dehors de lui. C'est un vestige des vieilles croyances qui opposaient l'homme aux génies malfaisants qui le menacent. C'est à cette conception étiologique étroite que se rattache la notion actuelle des maladies parasi- taires. Nous pouvons l’écarter sans scrupule. Le terme maladies parasitaires est impropre, puisque le parasite ne suffit jamais à causer une maladie, puisque c'est l'organisme qui fait la maladie par sa facon de réagir aux provocations des agents étrangers. S'il n'existe pas une classe nosologique définie par la seule présence des parasites, les mycoses, définies par l'intervention des Champignons para- sites, ne sauraient être considérées comme un type à part de maladies. Nous n'y voyons qu'un grou- 4% pement artificiel de diverses maladies, infectieuses dont commun est de compter l'action d'un champignon au nombre de ou non, le seul caractère leurs facteurs étiologiques. Dans la pratique, il est utile de systématiser l’étude des facteurs externes de la maladie, parce que nous avons directement prise sur eux; ils sont de ceux que nous pouvons le plus aisément pré- venir, entraver où supprimer. L'unilé des mycoses réside, non dans les symp- tômes ou les lésions, mais dans les caractères de leurs agents d'origine extérieure, qui appartiennent à une même classe botanique. Les mycoses ne forment pas un chapitre de la Pathologie, mais un chapitre de la MATIÈRE MORBIFIQUE, science généra- lement méconnue, qui rend à la Pathologie des services comparables à ceux que la matière médi- cale rend à la Thérapeutique. I] Chaque espèce de champignon parasite de l'homme peut être isolée, cultivée, inoculée ; on précise la facon dont elle s'accroit, s'étend ou se disperse ; on analyse les sécrétions qu'elle rejette, les modifications qu'elle imprime au milieu inerte ou vivant. On arrive ainsi à marquer les limites de son potentiel morbilique, et l'on retrouve, sinon de la constance, du moins un certain degré de spéci- ficité dans les réaclions pathologiques de l'orga- nisine qu'elle envahit. L'agent provocateur d'une mycose, étant le mieux connu, le plus mesurable des facteurs de la maladie (sinon le plus essentiel), est considéré comme le plus sûr indice de la spécificité de la maladie, En conséquence, les médecins pensent avec raison que le nom d’une mycose doit être tiré du nom de son agent. Le principe est simple; mais il n’est applicable qu'à la condition d'introduire dans la nomencla- ture nosologique les règles de la nomenclature botanique. Toute espèce végétale est: désignée scientifiquement par la combinaison de deux noms latins, un nom générique el un nom spécifique. Un nom degenren’indique pas les caractères de l'espèce. Un nom d’espèce ne signifie rien, s’il est séparé du nom générique qu'il qualifie ou détermine. Si, pour se conformer à l'usage, on désigne une mycose par le nom du champignon qui la provoque, en substituant la désinence ose à la désinence latine du nom botanique, il faut recourir à un nom com- posé. Pour distinguer la mycose due à l’Aspergillus fumigatus de la mycose due à l'Aspergillus mali- gaus, on ne peut se contenter ni du mot aspergil- lose, ni du mot fumigatose ou malignose. Il fau- drait dire : aspergillo-fumigalose et aspergillo- P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES malignose. Il est beaucoup plus simple de recourir à une périphrase et de dire mycose à Aspergillus fumigatus, mycose à Aspergillus malignus. Cet usage n'entrainera pas un plus grand effort de mémoire et il permettra de retrouver sans hésita- tion dans les flores le nom de l'espèce qui intéresse le médecin. Il s'impose, tout au moins, quand on tient à définir une maladie par sa cause parasitaire. Cela ne saurait faire rejeter l'usage courant des noms de maladie, semblables à ceux que Linné appelait triviaux, tels que favus, farein, actino- mycose ou tuberculose. III Il ne suffit pas de distinguer les mycoses en général et chaque espèce de mycose en particulier. Leur nombre s'accroît sans cesse; les praticiens sentent le besoin de les classer; ils reconnaissent généralement que les subdivisions du chapitre des. mycoses doivent reposer sur les données de l'His- toire naturelle. Les premières classifications des mycoses ont un caractère hybride. Virchow basa son système sur la localisation des champignons dans le corps humain. Il accouplait le mot mycose à un terme anatomique et forgeait des mots tels que pneumo- mycose, néphromycose, dermatomycose, trichomy- cose, onychomycose, ete. Le même esprit a présidé, depuis Malmsten, à la construction des noms de champignons parasites, tels que 7richophyton tou- surans, et nous à valu des genres tels que Lepido- plhyton, Epidermophyton, ou des espèces telles que Tricophyton megalosporon endotlrix, ete. Cette conception n'est ni botanique, ni médicale et ne peut grouper les faits particuliers d'une facon utile ou simplement logique. Virchow classait les. lésions et non les maladies. Or, un même champi- gnon peut provoquer des pityriasis sur la peau nue, des teignes sur le cuir chevelu. Une même espèce amène des inflammations localisées au poumon ou une infection généralisée. Une classification franchement botanique rendra plus de services aux médecins, parce qu'elle don- nera exactement ce qu'on lui demande. C'est encore là un principe simple. Mais, tel qu'il est généralement appliqué, il fournit des. résultats peu encourageants. On a voulu fabriquer mécaniquement des noms de groupes nosologiques. par le procédé que la nomenclature binaire rendait impraticable pour les noms d'espèces morbides. Pour y arriver, on s'est contenté de consulter, sans. aucune critique, les tableaux de la classification des Champignons, tels qu'ils sont présentés par un savant dont le nom fait autorité, et de former des désignations de groupes de maladies en imposant. P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES la terminaison au d'un d'une famille ou d’un groupe taxinomique quelconque. osC nor genre, Les inconvénients d'une telle pratique sont mul- liples. Le premier qui ait frappé les médecins, c'est qu'elle n’assure pas à la nomenclature la fixité qu'ils se croyaient en droit d'attendre de la rigueur scientifique. Ainsi que Lamarek la bien dit : « La Nature franchit de toutes parts les limites que nous lui marquons si gratuitement.» Les catégories dans lesquelles il nous plait de diviser les êtres vivants sont comme un réseau de triangulation tracé dans la vaste domaine de l'Histoire naturelle pour nous permettre de nous y orienter. Les limites de tous les groupes, même des genres les plus homogènes, parfois des espèces, sont flottantes, parce qu'elles sont conventionnelles et sujettes à d’'éternelles revi- sions. Devrons-nous changer le nom des mycoses chaque fois qu'un naturaliste se placera à un nou- veau point de vue ou qu'un érudit trouvera, sous la poussière des bibliothèques, un nom oublié, sou- vent mal conçu, mais jouissant d'un droit vénérable de priorité? Plusieurs zoologistes, non desmoindres, sont intransigeants sur ce point. Aussi enregistrons- nous avec soulagement la récente déclaration de l’un d'eux au sujet de la maladie des mineurs causée par un parasite ballotté entre les genres Ankylostomum (forme latinisée d'Agchylostoma) et Uncinaria. Tout en acceptant le nom d'ankylos- tomose (rectification d’ankylostomiase), Guiart ajoute : « On peut également lui substituer le terme d'uncinariose, la loi de priorité de la nomenclature ayant substitué le genre Uncinaria au genre Anky- lostomum. Toutefois, comme le nom vulgaire du parasite reste Ankylostome, et ‘comme, d’après les lois de la nomenclature zoologique, le nom géné- rique des parasites peut changer constamment, nous croyons préférable, au point de vue médical, de dénommer l'affection d’après le nom vulgaire du parasite, qui a le moins de chances de varier. » Les zoologistes en arrivent donc à préférer le nom trivial au nom scientifique comme base de la nomenclature nosologique. Il est temps que les botanistes suivent les mêmes errements, s'ils veu- lent cesser d'entrainer les praliciens dans d’inex- tricables confusions. Un exemple suffira pour nous montrer l’instabi- lité de la nomenclature nosologique basée sur les noms des genres de Champignons. Le nom d'acti- nomycose parut satisfaisant et indiscutable tant que l’on erut qu'il existait une seule espèce du genre Ac{inomyces et que cette espèce ne vivait que dans les lésions de l'animal ou de l'homme. Bientôt on mit en discussion, et la priorité du nom, et la valeur du genre, et la spécificité de l'Actinomyces bovis. On soupconna à la fois des affinités entre l'Actinomyces et d'autres charmpi- gnons, entre l'actinomycose et d'autres mycoses. Et voilà que, sous prétexte de correction scienli fique, le nom de la même maladie, suivant les vicissitudes des genres Streplothrix, Cladothrix, la engagée entre les partisans des piscomycoses et les Nocardia, est aujourd'hui l'enjeu de artie , \ « partisans des oosporoses. Celle controverse est in- différente aux médecins, réserve faite pour les candidats à certains examens où il est bon de servir le mot classique de la dernière heure. Ji crois donc superflu d'exprimer mon avis sur la légitimité du mot Discomyees où du mot Uospora appliqué au champignon de l’actinomycose et je me bornerai à montrer ce que gagnera la Patho- logie si l’un ou l’autre triomphe. Si c'estle premier, le praticien dira que la ci-devant actinomycose est une maladie à Discomyces où, renoncant au latin qu'il commence à laisser aux personnages de Mo- lière, il parlera des maladies à Discomycètes. Le mot à déjà paru dans des journaux de médecine. Or, si peu botaniste qu'on soit, on sait que les Discomycètes sont de grands champignons comme les Morilles ou les Pézizes. Envisageons la seconde alternative. Supposons que les Ac{inomyces soient légitimement classés dans le genre Üospora et que, pour celte raison, on classe la maladie qu'ils cau- sent dans les oosporoses; alors ils rencontreront dans le même groupe les champignons des teignes, car un des mycologues les plus autorisés de notre époque, Saccardo, rattache jusqu'à nouvel ordre au genre Oospora les anciens genres Achorion, Tri- chophyton, Microsporum. Si c’est là que nous mène l'application de l’'His- toire naturelle à la Pathologie, si elle conduit à confondre le parasite de l’actinomycose avec les Discomycètes ou à ranger dans un même chapitre nosologique l’actinomycose et les teignes, les esprits chagrins ne manqueront pas de crier à la faillite de la science. La Science n’est pas responsable des erreurs de ses imprudents amis, trop pressés d'appliquer des noms mal définis ou des formules mal étayées. L'instabilité de la nomenclature est le moindre défaut des désignations nosologiques empruntées aux noms des groupes taxinomiques de l'Histoire naturelle. Le vice rédhibitoire de la méthode réside dans l'erreur fondamentale de son point de départ. La classification botanique des mycoses n’a de sens qu'à une condition : c’est que les différences entre les diverses catégories mycologiques et les di- verses catégories nosologiques soient égales ou au moins de même ordre. Or, l'observation la plus sommaire montre que cette concordance fait défaut. Les affinités botaniques sont déduites d’un ensemble de caractères parmi lesquels ceux qui 452 peuvent expliquer l’action morbifique d'un champi- gnon tiennent une place très petite ou nulle. En conséquence, il n'existe pas de commune mesure entre le degré d'affinité des plantes rangées dans les divers cadres de la classification la plus natu- relle et le degré de parenté nosologique des mala- dies qu'elles occasionnent. Nous voyons déjà des races inoffensives au sein des espèces redoutées à bon droit. Si nous passons au genre, le potentiel morbifique diffère d'une es- pèce à l’autre, quantitativement et qualitativement. Ces différences s’observent dans les genres les plus homogènes, ainsi que nous le montre la diversité d'action vénéneuse des espèces du genre ÀAmanita. Supposons que le médecin réunisse les accidents causés par la consommation des Amanites sous le nom d'amanitose ou sous tout autre vocable tiré du nom générique Amanita, il confondrait dans une même famille ou un même genre d'empoisonne- ments les morts rapides causées par l’Amanita phalloides, les troubles nerveux produits par l'Ama- nila muscaria et les indigestions qui pourraient à larigueur résulter d'une consommation immodérée de l'excellent Amanita cæsarea. Cet exemple nous montre ce qu'aurait d'inexact le nom d'un groupe nosologique tiré d'un nom de genre. Et encore nous sommes-nous adressés à un genre des plus homogènes, à un genre fondé sur des caractères dont l'importance et la fixité sont admises par le suffrage unanime des hommes com- pétents. Les genres dans lesquels on range les parasites des mycoses ne sont pas fondés, comme le genre Amanila, sur des caractères dans lesquels on recon- nait un indice certain des affinités. Les Champignons parasites sont connus le plus souvent par l'appareil végétatif, portant l'empreinte des conditions spéciales de la nutrition aux dépens des organes vivants. L'action d'un milieu identique provoque des adaptations convergentes créant un air de famille entre espèces qui ont entre elles de faibles affinités. Les cultures, même variées, même prolongées, ne permettent pas de reconstituer l’évolution complète de ces espèces, car elles four- nissent rarement les fructifications de type supé- rieur liées directement ou indirectement à la sexua lité, d'après lesquelles on a établi les systèmes les plus naturels. L'insuffisance des données de l’obser- vation a laissé le champ libre aux hypothèses. Les traités classiques, jaloux de donner une plus haute autorité aux systèmes qu'ils imposent aux prati- ciens peu versés dans l'étude de la Botanique, ont pris la déplorable habitude de ranger dans les cadres de la classification naturelle ces espèces incomplètement connues. D'après des analogies souvent trompeuses, toujours discutables, ils ins- P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MXCOSES crivent dans l’ordre des Ascomycètes, dans des familles, parfois dans des genres définis par les fructifications supérieures, des champignons où personne n'a jamais vu d'asques. Rien n'est plus dangereux que l'ignorance dissimulée sous le masque de la science. Ici de pareils errements n'ont même pas l’excuse de suggérer des rapprochements utiles, puisque l’affinité botanique est sans rapport nécessaire avec l'affinité nosologique. IV Une classification des mycoses ne peut être utile que si elle s'appuie sur des données concrètes et particulièrement sur les faits que le médecin est à même de constater par une observation simple dans chaque cas particulier. L'examen direct des produits pathologiques, complété par des cultures faciles et suftisamment rapides pour être utilisées dans la pratique, révèle les caractères de l'appareil végétatif et des fructifi- cations accessoires qui en dépendent. Ces données sont modestes, mais elles sont positives. Si l’on avait consacré à leur analyse le femps que l'on a perdu à la poursuite d'illusoires ressemblances avec les caractères mentionnés dans les manuels classiques, on y aurait trouvé les bases d’une clas- sification solide des mycoses. Nous allons essayer de construire un tel système. Nous ne prétendons pas qu'il soit naturel, car tout système est plus ou moins subjectif, ainsi que La- marek l'a compris ; mais, sincèrement basé sur les faits, il n’est pas moins naturel que les systèmes classiques qui mettent au premier plan les appareils reproducteurs principaux. Je dirai plus : par cela même qu'il repose comme ceux-ci sur l'observation, il en diffère moins qu'on ne s’y serait attendu. Enfin, s'il place au premier plan les caractères revê- tus par le champignon dans l'organisme du malade, il mettra en lumière des affinités pathogéniques traduites par la capacité de se plier de la même facon aux conditions du milieu vivant et d'imposer le même ordre d’altérations à ce milieu. Nous cher- chons premièrement la vérité scientifique; les applications nous seront données par surcroît. L'appareil végétatif des Champignons, qui fournit les éléments initiaux et constants de la classification des mycoses, offre à considérer des propriétés dyna- miques, cinématiques et staliques. Au point de vue dynamique, il agit sur le milieu ambiant par ses propriétés mécaniques et physico-chimiques, par son mode d'extension, de pénétration, par son ali- mentation, ses sécrétions, etc. ; il réagit également aux influences extérieures. Il manifeste ainsi ses qualités d’être vivant. Ces qualités essentielles se prêtent difficilement à une mesure directe et sont RS P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES 153 insuffisamment connues pour être généralement appliquées à une classification. Au point de vue cinématique, il faut considérer les étapes successives du développement et les transformations liées à l'âge ou aux conditions d'existence. Dans la pratique courante, on se con- tente d'analyser les propriétés statiques, résultante des précédentes, et l'on s'arrête à l’état le plus habituel ou le plus complet, dans lequel l'organi- sation offre au moins l'apparence d'un équilibre et fournit un point de comparaison suffisamment fixe. Les propriétés statiques sont déterminées prin- cipalement par l'analyse chimique et par l'examen morphologique. Ce dernier procédé est le plus expédiuif et l'on s'y lient provisoirement pour l'étude des Champignons, en empruntant pourtant au premier les réactifs colorants qui révèlent la fine structure du protoplasme et qui suftisent à caractériser les membranes de certains groupes naturels, en l'absence des fructifications supérieures et même des fruclifications accessoires. La forme de l'appareil végétatif dérive d’un type qui se retrouve plus ou moins altéré chez tous les Champignons. Ce type est représenté par un sys- tème de filaments ramifiés, de calibre croissant du sommet à la base. C'est une variété de thalle assez spéciale aux Champignons pour avoir recu le nom de mycélium (de uüxns, champignon). Dans cer- taines conditions, les filaments cessent tantôt de s'épaissir et restent d'une extrême finesse tantôt de se ramifier ou mème de s’allonger. Dans ce der- nier cas, ils passent au simple globule. Ces condi- tions sont parfois locales ou transitoires, et l’on saisit sur le fait le passage du filament robuste, soit au fil ténu, par exemple chez les Pézizes du genre Chlorosplenium qui colorent le bois en vert et dont le mycélium devient aussi fin que des Bacté- ries quand il se loge dans les vaisseaux, soit au globule, par exemple, chez le Champignon du muguet et la plupart des espèces rangées primi- tivement dans le genre Aonilia, où les filaments allongés émettent des rameaux de plus en plus courts et finalement des globules arrondis comme la levure de bière. Chez de nombreuses espèces, le mycélium n’est connu qu'à l'état de fils de calibre bactérien ou de globules levuriformes. Une autre modification du mycélium, qui s'observe dans les filaments robustes aussi bien que dans les fils té- nus, consiste en un morcellement du mycélium en fragments dont la longueur est peu ou pas supé- rieure au diamètre, Le morcellement est tantôt gé- néral et précoce, tantôt limité à un certain âge et à certains rameaux. Ces diverses modifications du mycélium, fré- quentes chez les parasites de l'homme, seront utili- sées dans la classification. Mais, comme elles sont secondaires, elles n'interviendront qu'à la suite d'une première dichotomie fondée sur les diffé- rences fondamentales que l'on observe dans les mycéliums typiques, robustes et ramifiés. Il existe deux sortes de tubes mycéliens, les siphons et les hyphes. Les siphons ont la structure cénocytique, c’est- à-dire que la multiplication des noyaux, qui marque l'augmentation numérique des unités biologiques solidarisées dans le mycélium, ne s'accompagne pas de cloisonnement et d'individualisation de cellules. Les siphons sont continus, au moins pri- milivement; l'apparition de cloisons y est acciden- telle et provoquée par des irrilations secondaires faciles à démasquer. Les noyaux sont nombreux dans chaque compartiment, même dans les cir- constances où le mycélium se réduit à des globules bourgeonnants, nommés ferment sphérique par Ulysse Gayon. Les hyphes sont cloisonnées, parce qu'elles pré- sentent la structure cellulaire. Les compartiments renferment typiquement un noyau simple ou double. Ce caractère se maintient; il est mème par- ticulièrement manifeste dans les formes globu- leuses dérivées des hyphes, qui s'opposent ainsi aux ferments sphériques issus des siphons. Cepen- dant la structure cellulaire de l'hyphe s'altère sous diverses influences, parce que le cloisonnement n'est pas aussi étroitement lié à la bipartition du noyau que chez les plantes supérieures. On observe des retards, des ajournements parfois indéfinis dans l'apparition de certaines cloisons. Les hyphes qui s’allongent rapidement emploient tous leurs hydrates de carbone à la confection de la membrane périphérique; les vieux filaments présentent par- fois des noyaux assez nombreux dans chaque com- partiment. Mais ces altérations secondaires de la structure cellulaire n’effacent pas ses traces dans les portions du mycélium qui se sont constituées régulièrement, et l'apocyte qui dérive de la cellule se distingue sans peine du cénocyte, qui est pri- mitif. Si nous jetons un coup d'œil sur les systèmes classiques, nous trouvons le siphon dans les fa- milles caractérisées par des zygospores ou des oospores. Les formes de passage à l'hyphe s'obser- vent seulement chez les Entomophthorées et autres types qui n'intéressent pas le médecin et dont la place systématique est encore discutée. Nous trou- vons l’hyphe dans les familles caractérisées par des asques ou des basides. Les Ascomycèêtes et les Basidiomycètes ont été considérés comme des ordres fondamentaux. Les recherches récentes, celles de Dangeard en particulier, ont démontré que l'asque et la baside sont des organes équivalents de reproduction liée à la sexualité. H longtemps 154 P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCUSES se trouve donc que l'hyphe caractérise une des divisions primordiales des Champignons, celle qui mérite le plus sûrement le nom de champignon, et qu'elle présente une valeur taxinomique supérieure à celle de l’asque et de la baside, sans compter qu'elle permet de régulariser la situation d'une foule de déshérités où l’asque et la baside sont inconnus. Nous appellerons Æyphales la grande division des Champignons pourvus d'hyphes, celle qui ren- ferme la majorité des agents des mycoses. Le nom de Siphales convient aux Champignons dont le mycélium est formé de siphons. L'appareil végé- talif cénocytique démontre l'unité fondamentale des Phycomycètes, formés de la réunion des Zygo- mycètes et des Oomycètes, encore séparés par plu- sieurs maîtres de la Botanique. Le nom de Siphales vaut mieux que celuide Phycomycètes (güxos, Algue), car, si ce dernier indique les affinités évidentes des Champignons siphonés et des Algues siphonées, il donne l'impression trompeuse que ce sont les seuls Champignons parents des Algues. Les Siphales renferment plusieurs parasites de l’homme, dont les mieux connus se rattachent à l’ordre des Muco- rinées. L'appareil végétatif suffit pour les séparer immédiatement des autres Champignons morbi- fiques. Les mycoses se trouvent partagées naturellement en deux groupes primordiaux : les siphomycoses et les hyphomycoses, à la fois conformes aux affi- nités botaniques et facilement utilisables, puisqu'ils reposent sur les caractères qui sont toujours à la portée de l'observation médicale. Il est superflu de subdiviser les siphomycoses. En dehors des Mucorinées, on a signalé comme parasites des ZLeptomilus, genre de Saprolégniées ; cette opinion semble reposer sur une erreur de détermination. En cas de doute, on aura recours aux caractères microchimiques des membranes, qui séparent les Saprolégniées des Mucorinées. Il sera loujours loisible de spécifier qu'une siphomy- cose est délerminée par une Mucorinée ou par un représentant de ce groupe sans avoir recours à un nouveau nom en ose. Le mot mucormycose, déjà employé, a le tortde rappeler un nom de genre dont les limites sont diversement appréciées. L'agent de la plus connue des siphomycoses était d'abord appelé Mucor corymbifer. J'ai fait remar- quer depuislongtemps que cette espèce est déplacée dans le genre Mucor et même dans le groupe (famille ou tribu) des Mucorées, car elle a les carac- tères des Absidiées, et je l'ai rangée à côté des A- sidia, dans le nouveau genre Zichlheiïmia. Plus hardi que moi, Lendner vient de l'inscrire dans le genre Apsidia. C'est là une simple question d'ac- colade. Suivant des points de vue subjectifs, les genres Zichtheïmia et Absidia, qui sont contigus, seront distingués ou réunis en un seul. Ces débats ne gêneront pas le praticien, si, au lieu d'hésiter entre mucormycose ou mucorose, lichtheimiose et absidiose, nous parlons d’une siphomycose déterminée par le Jucor corymbifer ou parle Lichtheïmia corymbifera ou par V A bsidia corymbifera. La maladie sera suffisamment dé- finie par le titre du chapitre des siphomycoses, rap- proché du nom spécifique corymbifer qui n’est pas en cause dans les revisions des genres ou des fa- milles botaniques. V Le groupe des hyphomycoses est plus vaste et appelle des subdivisions. Nous les établirons d’après les caractères secondaires de l'hyphe et ses rapports avec les fructifications accessoires, qui permettent de classer les Hyphales sans recourir aux asques ou aux basides. I. MicrosrPhonÉs. — Nous séparons d’abord les Mi- crosiphonés des Hyphales facilement reconnaissa- bles. Ce groupe a pour type les parasites du farein (Nocardia farcinica) et de l'actinomycose. Il est ca- ractérisé par un mycélium fin comme des bactéries. Lorsque l’hyphe descend à ce calibre ténu, assez uniforme, comme nous l'avons vu chez la Pézize qui colore le bois en vert, on ne distingue plus de noyau nettement individualisé dans le protoplasme. En même temps, les tubes s’allongent et se rami- fient indéfiniment sans se cloisonner. Ce défaut de cloisonnement est bien connu et a été démontré notamment par Sauvageau et Radais. Nous appe- lons microsiphon l'hyphe ainsi réduite dans son calibre et dépourvue de cloisons. Ce caractère du mycélium est rappelé dans le nom de Microsi- phonés. Les Microsiphonés n'ont pas ‘d’affinités avec les Siphales. Ce n’est pas àdire que le siphon ne puisse pas descendre à un calibre très fin. Tel est le cas des Mortiérellées. Mais alors les tubes se distin- guent morphologiquement du siphon par leurs anastomoses habituelles. Ils ont aussi des carac- tères microchimiques différents. Ajoutons que ce type de mycélium n'a pas été signalé chez les para- sites de l’homme, ni même chez un parasite du chat rapporté sans preuves suffisantes au genre Mortierella. Le microsiphon dérivé de l’hyphe fait parfois re- tour à l'hyphe. Nous en avons observé un exemple dans le Champignon de l'actinomycose. Sur une mâchoire congelée de bœuf atteint d'ostéosarcome actinomycosique, les filaments microsiphonés s'étaient prolongés au-dessus du support. Ce début PR CSS P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES de végétation aérienne se caractérisait par des fila- ments robustes, nettement cloisonnés. Cet exemple nous montre la réciproque de celui du (Chlorosple- nium. I indique que la structure microsiphonée est la conséquence de la pénétration du mycélium dans la profondeur du substratum nourricier solide, con- dition fréquemment réalisée par le parasitisme. Comme l’hyphe en général, le microsiphon est sujet au morcellement. La disjonction des frag- ments bacilliformes est nécessairement précédée d'un cloisonnement cicatriciel, que l'on ne con- fondra pas avec la division cellulaire, ainsi que l'on a fait parfois. Lorsque le mycélium se présente exclusivement ou habituellement sous forme de microsiphons, il caractérise un groupe facile à séparer du reste des Hyphales. Les Wicrosiphonés déterminent une caté- gorie de mycoses d’allures particulières, distinguée des autres hyphomycoses sous le nom de MicRo- MYCOSES. Si les microsiphons se fragmentent en articles répondant à la notion vulgaire de bactéries, et si ce morcellement est précoce et habituel, nous arri- vons à des bactéries dont les affinités avec les champignons sont indéniables. Est-ce à dire que toutes les Bactéries sont des Champignons modifiés, des Schizomycètes au sens donné à ce mot par Naegeli? Nous ne le pensons pas. Il faut distinguer les Microsiphonés bacilliformes, tels que l'agent de la tuberculose, des bacilles mobiles, tels que l'agent de la fièvre typhoïde ou du choléra. Ce sont là des données de l'Histoire naturelle qui, je crois, ne peuvent qu'éclairer les affinités pathogéniques. Il. Hyruares (sensu stricto). — Les Microsi- phonés mis à part, les Hyphales seront divisées, d’après les connexions des appareils reproducteurs accessoires avec le mycélium, en deux sections : les Conidiosporés et les Thallosporés. a) CONIDIOSPORÉS ou HYPnomycÈTEs sensu stricto. — Les conidies sont des spores distinctes du mycé- lium dès leur apparition. Leur présence caractérise les Conidiosporés où Hyphomycètes proprement dits. Nous y trouvons quatre subdivisions : 1. Sporophorés. — Des filaments spéciaux (spo- rophores) sont intermédiaires entre le mycélium végétatif et les conidies, et précèdent l'apparition des conidies. 2. Sporotrichés. — Les conidies sont insérées directement sur les filaments mycéliens (642). Ceux- ci gardent leur caractère primitif ou bien subissent secondairement des modifications locales corréla- tives et contemporaines de la formation des conidies. 3. Hémisporés. — La conidie se différencie en deux temps. La protoconidie, au lieu de s’isoler immédiatement, continue à croître et donne les deutéroconidies fonctionnelles par morcellement secondaire, nues ; mais le mycélium reste Lypique,sanstendance 4. Aphanosporés. — conidies sont incon à donner des thallospores, ce qui permet de sup- poser que la reproduction s'accomplit dans des circonstances inobservées, indépendamment de lui. la procède d’une transformation D) TuazrosPoRés. — Chez les Thallosporés, spore (thallospore) du mycélium lui-même (qui est, comme on sait, une forme de thalle), en éléments courts. La pro- duction de conidies fait défaut, du moins dans les conditions de l'observation courante. On y recon- nait deux groupes principaux : les Arthromycètes et les Blastomycètes. 1. Arthromycèles. — La thallospore se forme par désarticulation des filaments en /r1gments. Les fragments sont coupés carrément (troncons de cylindre) ou secondairement arrondis. Les Cham- pignons des teignes sont des Arthromycètes. 2. Dlastomycètes. — La thallospore a des con- tours arrondis primilivement. Le globule bour- geonnant (Bhzcrn, bourgeon) des levures en est le type. Un même élément est susceptible simultané- ment ou successivement de végéler et de dissé- miner la plante. En résumé, nous classons les Champignons para- sites de l'homme dans le tableau suivant : SIPHALES : Mycélium typique continu (Ex. : Mucorinées.. HYPHALES : Mycélium réduit à des microsiphons : MicrosIPHOXÉS. Sporophorés. pue DE Ses THALLOSPORÉS . . ie Blastomycètes. Cette classification diffère à certains égards de celle qui est adoptée par les grands traités qui embrassent l’ensemble des Champignons. Mais elle n'est pas moins naturelle, puisqu'elle s'appuie sur les faits observés. Elle est plus complète, puis- qu'elle fait une place aux espèces qui, comme la plupart des Microsiphonés et des Thallosporés, sont exclues des systèmes classiques ou rappro- chées, sans preuves suffisantes, des espèces où l'on connait des fructifications supérieures. Nous n'avons pas cru devoir introduire dans notre classification la division usuelle des Hypho- mycètes rappelée dans le tableau suivant : Appareils conidiens diffus : Filaments päles. . . Mucédinées. Filaments sombres . . . Dématiées. Appareils conidiens groupés : | En bouquets (coremium). . Stilbellacces. En coussinets(sporodochium). Tuberculariacées. 156 P. VUILLEMIN — LA CLASSIFICATION DES MYCOSES Cette division a rendu d'incontestables services pour cataloguer l'ensemble des champignons incomplets; mais elle n'a pas de valeur absolue. Les deux premiers groupes seraient moins artifi- ciels, si, à la différence de coloration mentionnée dans les flores, on substituait la différence de structure des membranes, tantôt simples, tantôt cortiquées, el généralement claires dans le premier cas, sombres dans le second. Même avec celte correction, nous voyons là un caractère de trop mince importance pour distinguer des familles, Nous l'utiliserons seulement dans la diagnose des genres. Quant au groupement des appareils conidiens en bouquets ou en coussinets, il indique simple- ment des degrés de développement. Une même espèce peut offrir, suivant les conditions de milieu, le caractère des Mucédinées, celui des Stilbellacées, celui des Tuberculariacées. Telle Dématiée présen- tera aussi des formes corémiées ou pulvinées. On ne saurait donc nous reprocher de sacrifier les principes de la Systématique à l'opportunité de la pratique. VI La classification botanique, basée sur les carac- tères toujours observables du thalle et éventuelle- ment des fructifications accessoires, nous fournit huit groupes ultimes, eux-mêmes rassemblés dans des groupes plus généraux. Ce nombre est suffisant pour diviser les mycoses. Chaque groupe de mycoses prendra le nom du groupe botanique correspon- dant, avec la désinence mycose s'il s'agit d'un groupe principal, et la désinence ose s'ils'agit d'un groupe restreint. Le nom de SIPHOMYCOSES convient à tous les cas où le mycélium est formé de vrais cénocytes ou si- phons. Nous appelons microuycoses les maladies provoquées par les Microsiphonés; elles relient les mycoses à une partie spéciale des maladies bacté- riennes. La tuberculose, par exemple, est une micromycose causée par un Microsiphoné bacilli- forme. Les uyYPHOMYcoSES proprement dites com- prennent des hyphomycoses indéterminées dues aux Aphanosporés et trois subdivisions, dont deux déjà sont adoptées dans la pratique médicale. Ce sont les SPOROTRICHOSES et les HÉMISPOROSES. Il suffit de spécifier que ces termes sont valables, non parce qu'ils sont fondés sur un nom de genre, mais parce que le nom de genre qu'elles empruntent indique justement les rapports des spores et des hyphes, base de notre classification. La dernière famille d'hyphomycoses est celle des SPOROPHOROSES. Les ARTIROMYCOSES groupent un grand nombre de parasites de la peau. Enfin les BLASTOMYCOSES ont depuis longtemps droit de cité en Pathologie. Les noms qu'on à voulu substituer à blastomycose : exascose par exemple, reposent, non sur les faits, mais sur des textes mal lus ou mal inter- prélés. Il est inutile de multiplier davantage les noms de groupes nosologiques auxquels nous réservons en principe la désinence ose. Dès que les affinités botaniques sont mieux précisées, on a toujours la ressource de faire suivre le nom de la mycose du nom technique de son agent. Au lieu de dire que le muguet est une oïdiomycose, ou une moniliese, ou une saccharomycose, ou une endomycose, on dira que c'est : dans certains cas une blastomycose à Saccharomyces anginae, dans d'autres une blasto- mycose à £udomyces albicans. Malgré toute l'im- portance des asques de ce dernier, je ne serai démenti par aucun médecin si j'avance que les globules bourgeonnants sont d’une observation plus fréquente que les asques. De même, on spéci- fiera qu'on est en présence d’une arthromycose à Trichophylon tonsurans, d'une sporotrichose à Rhinocladium Beurmanni, d'une micromycose à Aclinomyces bovis. Si l'on n’est pas satisfait de ce dernier nom générique et qu’on lui préfère Strepto- tÎrix, Cladothrix, Discomyces, Oospora, ete., om substituera sans trop de dommage au mot Ac{ino- myces le nom générique préféré; sous ces divers travestissements, la maladie restera définie par les termes invariables MIcROMYCOsE et bovis. Les noms qui viennent d'être proposés pour les mycoses ne s'imposent pas, cela va sans dire, dans le langage courant des médecins. Toute maladie suffisamment vulgaire doit garder le nom banal consacré par l'usage, de même qu'il est permis à un botaniste de parler du cèpe commun ou de la rose de Jéricho, sans méconnaitre la valeur des genres Poletus où Anastatica. Nous tolérerons même les noms en ose auxquels les médecins sont très attachés, mais à la condi- tion qu'ils les manient sans prétention scientifique. Tuberculose est un nom commun bien compris ; bacillose est un terme vicieux, qui ne peut avoir d'autre effet que de rapprocher des maladies comme la tuberculose et la fièvre typhoïde, aussi différentes aux yeux du naturaliste que du patho- logiste. Je ne vois pas de raison pour rejeter le nom his- torique d’actinomycose employé sans arrière-pensée botanique. J'accepte comme nom trivial le mot ASPERGILLOSES. Je l’accepte, non pas comme tiré d'un nom de genre botanique, mais bien plutôt parce que le mot Aspergillus (qu'on ferait mieux d'écrire aspergille quand on parle francais) est un nom vulgaire appliqué sans confusion à la forme sporophorée des ÆZurotium, des Sterigmatocystis comme des Aspergillus au sens striet. L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION 157 VII En résumé, la classification des mycoses tient sa Elle emprunte à la Botanique des observations positives rigueur des faits sur lesquels elle repose. que le médecin est à même de contrôler. Elle se désintéresse des hypothèses et des conventions qui bouleversent périodiquement la classification bota- nique. Elle ne se laisse pas éblouir par le mirage des classifications naturelles qui ont atteint leur remarquable symétrie en négligeant systématique- ment les enfants trouvés de la clinique qui n'ont pas leurs papiers en règle, ou en les rallachant, par le raisonnement, aux groupes fondés sur les caractères que le médecin’ a rarement l'occasion d'observer. En un mot, les applications de la Bota nique reposent sur le fond de la science et non sur la forme de la science, qui devient trop souvent ll masque de l'erreur et l'entrave du progrès. P. Vuillemin, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION PRÉPARATION INDUSTRIELLE DE NOS ALIMENTS ET DE NOS BOISSONS Ja fin du xix° siècle constitue la période la plus décisive de l’évolution économique que le Monde ait eu à subir depuis ses origines. L’envahissement des continents par les réseaux ferrés et les réseaux télégraphiques et téléphoniques, la prise de posses- sion des mers par les navires à vapeur, la perfec- tion de notre outillage industriel, le besoin de gagner et de se défendre contre la concurrence pour faire face aux dépenses croissantes de la vie, ont profondément modifié notre industrie et notre commerce. Dans ce mouvement, qui ne cessera plus, on voil sombrer la petite initiative, les petits méliers et les petits commerces; la grande indus- trie et les grandes entreprises commerciales les étouffent chaque jour davantage, en adoptant un outillage el une organisation susceptibles de dimi- nuer les frais généraux. On constate alors que la fabrication des objets de première nécessité, réservée autrefois au cultivateur, au tisserand et au forgeron de nos villages, se concentre aujourd'hui vers les établissements industriels. Dans cet article, je désire restreindre à la prépa- ration de nos matières alimentaires l'exposé de cette industrialisation à laquelle nous assistons chaque jour. Le dessinateur Robida, qui a prévu, il y a quelques trente ans, la navigation aérienne dont nous constatons la réalisation aujourd'hui, nous a montré également chacun de nos appartements munis de tuyauteries susceptibles de nous amener nos aliments préparés dans une cuisine centrale; nous n'en sommes pas encore là. Mais le premier pas est fait : le lait nous arrive chaque nuit à Paris après avoir parcouru plus de 100 kilomètres, et l'on peut prévoir le jour où le pain fabriqué en usine nous sera apporté chaque matin par un service d'automobiles. Suivons donc dans ce développement industriel la préparalion de la farine et du pain, du vin et de l’eau-de-vie, du cidre, de la bière, du lait et de ses sous-produits, beurre et fromages, des matières grasses alimentaires, du sucre, des conserves de légumes et de fruits. I. — LA FARINE ET LE PAIN. La substitution aux meules de pierre des broyeurs à cylindres, venus de Hongrie, vers 1884, a boule- versé l'équilibre industriel et commercial de la meunerie, Sans doute, avant celle époque, il y avait de grands moulins broyant, avec leurs six paires de meules, exceptionnellement avec douze paires, 60 à 120 quintaux de blé en 12 heures. Mais combien de petits moulins à une ou deux paires de meules, installés sur le ruisseau du village, travaillaient à facon pour le cultivateur voisin, qui leur apportait son grain et recevait en échange, et pour une faible redevance, la farine et le son extraits ! La perfection des résullats obtenus au moyen des cylindres, l'économie de main-d'œuvre et de force motrice réalisée, l'exigence de la clientèle qui demande le pain le plus blanc, entrainaient forcé- ment le meunier à abandonner les pierre, qui avaient nourri l'humanité pendant tant de siècles, et c'était naturellement la petite meu- nerie qui devait souffrir de ce changement. Le procédé de mouture hongrois, qui oblige le blé à passer successivement dans une série de six broyeurs, ne s'appliquait, en effet, économiquement qu'aux moulins qui pouvaient disposer au mini- mum de 50 quintaux de blé par jour, c'est-à-dire possédaient au moins cinq à six paires de meules. C'était la déchéance des petits moulins qui ne se trouvaient pas dans une situalion géographique avantageuse ou dont les propriétaires ne possé- daient pas les capitaux nécessaires pour augmenter meules de 158 L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION la puissance de leur travail et transformer leur outillage. Ces petits moulins n’ont cependant pas tous disparu; beaucoup sont encore debout; mais ils ne peuvent pas supporter la concurrence des grands moulins pour la mouture du blé; quelques- uns ont continué à faire du travail à façon ; d’autres réduisent le maïs en semoules et préparent la polente; d'autres tournent pour moudre des grains destinés à l'alimentation du bétail, maïs, seigle et orge; d'autres, enfin, triturent des graines oléagineuses. Nous ne possédons guère de documents qui nous permettent de mesurer ce mouvement de concen- tration vers la grande meunerie. On estimait, avant l'introduction des moulins à cylindres, à 50.000 le nombre des moulins établis en France. Quelle pré- cision présente ce chiffre? Nous n'avons pas, en tout cas, de raisons pour le rejeter. D'autre part, le recensement fait en 1896, à une époque où déjà nombre de cylindres avaient remplacé les meules, indique le chiffre de 317.051 moulins, dont 28.806 sont d'importance assez restreinte pour ne comporter qu'un meunier travaillant seul ou employant un ou deux ouvriers. Si l’on admet le premier chiffre comme une esti- mation suffisante, on constate que, de 1884 à 1896, le nombre des moulins a diminué d'un quart. Nous pouvons aller plus loin et consulter la statistique agricole* de 1907; nous y constatons que la France possède 4.181 minoteries à cylindres, 4.276 minoteries à meules, et 23.902 petits mou- lins à eau et à vent, soit au total 32.359 moulins. S'il est permis de comparer deux statistiques d’origine différente, nous voyons que 42 °/, des moulins existant en 1896, évidemment moulins à meules, ont disparu en 4907. Un autre document nous permet encore de suivre ce mouvement de concentration vers la meu- nerie industrielle. Nous savons par Heuzé* qu'en 1878, avant l'apparition des cylindres, les deux départements de Seine-et-Oise et de Seine-et-Marne comptaient 570 moulins. Or, la statistique agricole de 1907 ne nous en montre que 334, dont 213 montés aux cylindres, 37 montésencore aux meules, et 84 fonctionnant par l’eau ou par le vent; nous avons tous parcouru ces deux départements et, sans mettre en doute l'exactitude des renseigne- ments fournis au Ministère de l'Agriculture, nous pouvons supposer que ces #4 pelits moulins n'ont pas grande influence sur le marché des farines. Admettons-les quand même, et constatons que, © GRANDEAU : Rapport général de l'Agriculture à l'Exposi- tion Universelle de 1900. * Statistique agricole, publiée par le Ministère de l'Agri- culture. Hevzé : Rapport à l'Exposition Universelle de 18178. depuis l'adoption des cylindres par la meunerie, les moulins de Seine-et-Marne et de Seine-et-Oise ont diminué en nombre de 40 °/,, et remarquons en outre que la population parisienne, dont ces mou- lins fournissent l’approvisionnement, a augmenté depuis 1878 dans de sérieuses proportions. M. H. Cornu, secrétaire général de l'Association nationale de la meunerie francaise, a bien voulu me fournir, sous toutes réserves, une estimation du nombre et de la puissance de nos moulins, en négligeant la production des petits moulins à eau et à vent. D'après cette estimation, les 120.000.000 de quintaux de blé nécessaires à notre alimenta- tion seraient répartis de la facon suivante : TOTAL DU BLÉ NOMBRE QUANTITÉ TRAVAILLÉE susceptible de par jour (en moyenne d’être travaillé moulins et par moulin par an (300 jours) 25 quintaux. 31.500.000 quintaux. 50 — 37.500.000 — 100 — 15.000.000 — 200 — 18.000.000 — 300 — 18.000.000 — 500 — 4.500.000 — 130.500.000 quintaux. 8.530 Les moulins qui travaillent journellement plus de 500 quintaux, tels que Corbeil (5.000 quintaux), Port-Saint-Louis, Janville, ete., sont comptés dans celte statistique pour plusieurs unités. En présence de cette diminution qu'a subie le nombre des moulins depuis l'adoption des eylin- dres, on est obligé de reconnaître que beaucoup ont augmenté leur travail journalier. D’autres, dont la production est restée stationnaire, se sont vus forcés de limiter leurs heures de travail; tous ont profité des avantages que confère la mouture aux cylindres, économie des frais de fabrication et production d’une farine plus blanche. susceptible de faire un pain mieux levé. La fabrication du pain n'a pas pris aussi vite cette allure industrielle que nous voyons se déve- lopper dans nos moulins; le pain ne se transporte pas comme la farine ; le consommateur veut qu'il soit croustillant et frais. De plus, dans les grandes villes, comme Paris, chacun exige que son pain lui soit apporté chaque malin, et cette exigence est à peu près incompatible avec la concentration en quelques points de la ville de l’industrie boulan- gère; celle-ci devrait avoir, pour ainsi dire, des relais, des dépôts, d'où partirail, au même moment, la provision de chacun, mais qui augmenteraient les frais d'exploitation. C'est ce qu'a tenté de faire, il y a quelques années, M. Schweilzer; mais, s'il n'a pas réussi, c'est surtout parce que la consom- mation à refusé le pain bis qu'il produisait inten- tionnellement dans son usine de la Villette. La Société « La Vigneronne » à fait à Paris, depuis L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION 159 quelques années, une tentative de ce genre, qui à donné des fort commerce du pain qu'elle fabrique dans la boulan- résultats intéressants; mais le serie industrielle de la rue du Département n'est pas exclusif; elle alimente ses 115 dépôts de vin, de charcuterie, d'épicerie, de pâtisserie, ete.; c'est une Société d'alimentation comme celles qui se créent aujourd'hui de Lous côtés, sociétés particu- lières ou sociétés coopératives, mais qui fabrique le pain au lieu de le faire faire par des boulangers urbains et pour qui la vente, dans ses dépôts, de marchandises variées, diminue considérablement les frais généraux qui incomberaient à un seul article, si la Société se contentait de faire du pain. Le travail commence à à heures du soir et se pour- suit toute la nuit; on fait neuf pétrissées au moyen de pétrins mécaniques, et on cuit chaque nuit 11.000 kilogs de pain; Pinstallation du fournil de « La Vigneronne », qui comporte dix fours Bru- nelle, permettrait d'en fabriquer journellement 40.000 kilogs. Nous pourrions citer également, dans cet ordre d'idées, les boulangeries militaires comme celle du quai Debilly, la boulangerie centrale de l'Assis- tance publique, qui délivre chaque jour'aux hospices et hôpitaux de Paris et de la banlieue 16.000 kilogs de pain. Mais ces boulangeries sont un peu en dehors de ce mouvement de concentration indus- trielle que je tiens à signaler; elles répondent à un but spécial; ce sont plutôt des administrations industrielles que des usines à proprement parler. Le mouvement social à déterminé la création en France de nombreuses boulangeries coopératives. Dans l'Almanach de la Coopération de 1906, j'en ai compté près de600. Les plus importantes de toutes sont « L'Union » de Roubaix et «L'Indépendante » de Lille (7.000 sociétaires), qui fabriquent mécani- quement chacune 6 à 7.000.000 de kilogs de pain par an; à Lille se trouvent également deux autres coopératives, «La Coopération » et« La Prévoyance», moins importantes que la première; le pain de 2 kilogs y est vendu et apporté à domicile pour 0 fr. 50; chaque client recoit avec son pain un jeton de ristourne qui lui rapporte de 0 fr. 41 à 0 fr. 12; en outre, chaque sociétaire est assuré en cas de décès à un taux déterminé par son àge. Les fondateurs de ces Sociétés ont renoncé d'avance aux dividendes et aux intérêts du capital qu'ils ont versé, el font même des sacrifices pécuniaires aux époques où le blé trop cher risquerait de faire perdre aux bénéficiaires la ristourne qu'ils atten- dent. Ces établissements peuvent être considérés plutôt comme des œuvres sociales que comme des exploitations industrielles. Nous rencontrons encore de grosses boulangeries coopératives (500 à 1.000 sociétaires) dans les régions ouvrières, à Avesne, à Fourmies, à Hautmont, à Leers, à Calais: à Lyon, où six établissements coopéralifs réunis- de 500 Rive-de-Giers, à sent une movenne sociétaires chacun, à Oullins, à Saint-Chamond, à Tours, à Niort, à Essonnes, à Saint-Denis, à Rouli gnon (Basses-Pyrénées). Dans le sud-ouest de la France, là où nous verrons l'esprit d'association si développé vers l’industrie laitière, on trouve de très nombreuses boulangeries coopératives, mais de plus faible importance, puisque chacune d'elles ne compte d'ordinaire que de 100 à 300 sociétaires ; l’'Almanach de la Coopération nous en fait connai- tre 443 dans la Charente-[nférieure; 16 dans la Charente, 23 dans la Vendée, 15 dans l'Indre-et- Loire, 32 dans la Gironde. Je voudrais, dans cet article, n'examiner que ce qui se passe en France, de facon à ne pas m'expo- ser à cette objection si fréquente qui consiste à dire que « les conditions ne sont pas les mêmes »; mais je trouve à l'étranger un fait qui vient appuyer l'opinion que j'émettais plus haut et d’après laquelle l'industriel est appelé à concentrer sa fabrication pour diminuer ses frais généraux. Il s'est établi à Anvers une boulangerie coopérative « Help U Zelve » (aide-toi toi-même), qui, travaillant dans des conditions analogues à nos coopératives de Lille et de Roubaix, produit environ 17.000 kilogs de pain par jour. Pour lutter contre la concurrence de cette coopérative, une cinquantaine de patrons boulangers ont renoncé à la fabrication du pain dans leurs fournils et ont créé une boulangerie mécanique, à laquelle, chaque jour, le patron passe sa commande, et qui lui délivre chaque matin, dès l'aube, les divers pains réclamés par sa clientèle ; la boulangerie centrale produit cent dix sortes de pain, de qualité el de poids différents”. II. — LE VIN ET L'EAU-DE-VIE. L'apparition du phylloxera dans nos vignobles du Midi a été la cause principale du développement industriel qu'ont pris nos celliers. Seuls les gros propriétaires ont été à même de reconstituer la propriété vinicole; ils ont acheté des terrains à vignes et ont planté des cépages américains, ou bien ils ont eu recours, vis-à-vis des anciennes vignes francaises, aux procédés de défense connus, et spécialement à la submersion. L'introduction des cépages à grand rendement, comme l’'aramon, a doublé et triplé la production, et il à fallu alors employer des vases vinaires de grande dimension, les abriter dans des celliers qui n’ont aucune ana- logie avec nos anciens pressoirs, avec ceux que ‘ Renseignement fourni par M. Mérelle, ingénieur chi- miste. 160 l’on retrouve dans les pays de petite culture et de grands vins, en Bourgogne, par exemple. L'étude plus approfondie des phénomènes de la fermenta- tion à, en même temps, rendu la fabrication plus scientifique et, partant, plus industrielle; on sait aujourd'hui sulfiter, phosphater, pasteuriser et refroidir les mouts, ensemencer de levures pures, etc. Mais ce ne sont pas seulement les propriétaires qui, en agrandissant leurs vignobles, ont réalisé la concentration; ce sont aussi les vignerons qui ont créé des coopératives. Le travail en commun offre divers avantages : on prépare un meilleur produit, parce qu'il est mieux surveillé; on n'est pas obligé, par suite d’une pénurie de vaisselle vinaire ou d'une pénurie de capitaux, de vendre la récolle à vil prix; on peut plus aisément frapper aux caisses de crédit, et on peut enfin vendre direc- tement à la consommation et ne pas subir la dime de l'intermédiaire. Plusieurs coopératives se sont ainsi créées dans ces dernières années à Camps (Var), à Saint-Georges (Hérault), à Lézignan (Aude), à Bompas (Pyrénées-Orientales), dans la région de Dupleix (département d'Alger). On peut aller encore plus loin et imaginer ce que M. Barbet a appelé des « Vineries», c'est-à-dire des établissements industriels, où les vignerons vien- draient apporter leurs raisins, comme les cultiva- teurs apportent leurs betteraves à la sucrerie. Des procédés nouveaux de vinification, proposés par M. Barbet, par M. Rosensthiel, par M. Semichon, et que nous ne saurions décrire ici, permettraient de traiter de grandes quantités de raisins à la fois dans des cuves de macération méthodique, et même de conserver les moûts en présence de l’acide sul- fureux, au delà de l'époque de la vendange, pour les traiter plus tard, après élimination de l'acide sulfureux et introduction de levure pure (procédé Barbe). Le jour où ce système des vineries, qui est trop jeune pour qu'on ail le droit de ne pas lui faire crédit, sera adopté, la fabrication du vin sera devenue une véritable industrie. C’est encore au phylloxera qu'est due la modifi- cation profonde à laquelle il nous a été donné d'assister dans la fabrication charentaise des eaux- de-vie. Le phylloxera a ravagé la grande et la petite Champagne et les Borderies; là encore la petite propriété où chaque famille récoltait son vin et le distillait a été achetée par de gros capitalistes, en général les propriétaires des maisons de commerce qui centralisaient les eaux-de-vie des récoltants ; eux seuls ont pu reconstituer à grands frais et au ! Renseignements fournis par M. Semichon, directeur de Ja Station œnologique de l'Aude. L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION prix des plus grosses difficultés les vignes détruites et produire, au bout de quelques années, des eaux- de-vie ayant la qualité de celles d'autrefois. Ces grands propriélaires ont monté des usines de dis- üllation; mais l'outillage n'a pas changé; la forme et la dimension de l’alambic charentais assurent la qualité de l’eau-de-vie, et la méthode des «brouillis », c’est-à-dire de deux distillations suc- cessives, ne peut être abandonnée; ils ont done reconstitué l'atelier charentais, mais ils ont mul- tiplié le nombre des alambics. La fabrication indus- trielle des eaux-de-vie a pris dans la région cha- rentaise une grande importance, et l'on expédie annuellement de cette région 300.000 hectolitres d'eau-de-vie provenant exclusivement de vin. III. — LE CIDRE. Si le mouvement industriel n’a pas pris vis-à-vis du cidre un grand développement, la cause en est aux variations considérables que subit chaque année la récolte des pommes. Quand le cultivateur est en face d'une récolte déficitaire, il en est quitte pour laisser son grugeoir et son pressoir au cellier ou mieux encore pour ne pas convoquer «l’ambu- lant». Mais il n'en est pas de même de l'industriel dontles frais généraux, impôts, assurance, matériel, courent de la même facon. Aussi les industriels se font-ils plutôt distillateurs de cidre que fabricants de cidre; ils peuvent acheter dans les années d’abon- dance les pommes à bas prix, et au lieu de se débarrasser avec peine de leur cidre, ils le con- servent pour le distiller; si le cidre est éminem- ment altérable, l'eau-de-vie gagne à vieillir, son prix n'est pas sujet aux fluctuations, et le marché du produit fabriqué se trouve ainsi régularisé. Dans le but de régulariser le marché du cidre, il serait également à souhaiter que la concentration des moûls, susceptibles dès lors de se conserver, fût autorisée. Mais le cidre doit être, d'après la défini- tion du Congrès de Genève, «le produit de la fer- mentalion du jus frais de la pomme », et la mise en fermentation d'un moût concentré, en dehors de l'époque régulière de la fabrication, serait peut- être réprimée par les tribunaux, et cependant les cullivateurs trouveraient un grand intérêt à cette pratique qui maintiendrait le marché des pommes; la « razière » (50 litres) se vend à des prix qui oscillent entre 0 fr. 25 et 2 francs. Une autre cause qui entrave le développement de la fabrication du cidre en usine est la difficulté qu'il y a pour les industriels à se débarrasser des pelits cidres ou «boissons », résidus nécessaires ! Renseignements fournis par M. Guillon, directeur de la Slation vinicole de Cognac. L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION 161 de la fabrication. Le cullivateur vend son cidre » ou «maitre-cidre », el il conserve la boisson oros « gros pour son usage; on n'achèle pas de la boisson, cela ne vaut pas le transport. Il existe néanmoins un certain nombre de cidre- ries-distilleries en Normandie qui ont le caractère industriel, soit que le propriélaire achète toutes les pommes nécessaires à sa fabrication, soit qu'il n'en récolte qu'une partie et achète le reste. Je ne connais pas de cidreries coopéralives; l'esprit de coopération est peu développé dans nos régions normandes. On comple onze cidreries-distilleries industrielles dans le Calvados (Lisieux, Orbec, Mesnil-Guil- laume, Caen, Pont-l'Évèque, Saint-Sever, Falaise, Pont-d'Ouilly, Canteloup, Bayeux, Trouville); neuf dans l'Eure (Conche, Vernon, Pont-de-l'Arche, Evreux, Brionne, Saint - Georges-Motel, Bernay, Pont-Audemer, Beuzeville); huit dans l'Orne (Le Theil, Regmalard, Boucé, Flers, Mantilly, Hesloup, Vimoutliers, Passais) ; neuf dans la Seine-Inférieure (Orbiquet, Gournay, Rouen, le Havre, Neufchâtel, Aumale, Dieppe, Yvetot, Saint-Valery-en-Caux); six dans la Manche (Cherbourg, Subligny, Saint- Waasl-la-Hougue, Avranches, Cerences, Pontau- baull) *. IV. — LA BIÈRE... Il n'y à pas grand’chose à dire, au point de vue qui nous occupe, de la fabrication de la bière. Sa situation industrielle ne change guère. Les petites brasseries du Nord continuent à fabriquer des bières hautes qui répondent, par leur goût et le prix auquel on peut les vendre, aux habitudes de la population locale ; mais, partout ailleurs, partout où l’on fait de la bière basse, destinée à l'expédi- tion, se trouvent des brasseries plus importantes, mieux outillées et plus scientifiquement dirigées. Les brasseries de l'Est, les brasseries de Paris, de l'Allier, des Bouches-du-Rhône, ete., restent ce qu'elles étaient depuis de longues années. V. — LE LAIT, LE BEURRE ET LES FROMAGES. Si le lait qui approvisionne les grandes villes nous était directement envoyé par le producteur, nous risquerions fort de le recevoir, en été surtout, en voie d'acidification et, par conséquent, de coagu- lation ; pour lui permettre de supporter le voyage, il convient que le producteur le refroidisse aussitôt la traite et l’expédie froid au ramasseur; celui-ci le pasteurisera et le refroidira de nouveau avant de le mettre sur wagon. La technique industrielle va Ce * Renseignements fournis par M. Warcollier, directeur de la Station pomologique de Caen. donc intervenir pour assurer la conservalion du lait, en raison de la grande distance qu'il aura à parcourir, et du lemps qu'il mettra à aller de la ferme au consommateur en passant par la boutique du détaillant Ville de tée à l'enceinte fortifiée, consomme journellement 830.000 litres de lait ; 83.000 litres sont produits dans les vacheries urbaines ; 191.000 nous arrivent crémier, La Paris, Jimi- par voitures des vacheries suburbaines (Seine el Seine-et-Oise), et la grosse masse, 556.000 litres, soit 66 °/,, débarque chaque nuit par le chemin de fer, et spécialement par le chemin de fer de l'Ouest. Ces 556.000 litres sont ramassés, pasteurisés el expédiés dans les conditions précitées, par la Société des Fermiers réunis, la Lailerie Centrale, la Société Maggi, la Société générale des Laits contrô- lés, etc. 11 convient de citer, en outre, les œuvres philanthropiques qui s'efforcent de fournir des laits purs à des prix dont elles n'attendent aucun béné- fice, telles que les gouttes de lait, analogues aux Milchküche allemandes, l'OEuvre philanthropique du lait fondée par le D' de Rothschild, etc.". Là encore ces œuvres possèdent pour la manutention du lait des installations industrielles. La stérilisation du laiten bouteilles n'est pas une opération de la grande industrie laitière ; elle est, en effet, pratiquée aujourd'hui dans nombre de laiteries de moyenne importance ; cependant, elle demande une surveillance très attentive, surtout quand on la fait précéder de l’homogénéisation, opération qui à pour but de diviser, au moyen de la machine Gaulin, les globules gras, et de leur donner une masse tellement faible qu'ils ne re- montent plus à la surface sous forme de crème. Il existe également de grandes exploitations où l'on prépare le lait stérilisé, par exemple à Neufchätel- en-Bray (Seine-Inférieure). Depuis quelques années, M. Hatmaker a introduit en laiterie une machine destinée à dessécher le lait sous forme de poudre, que lon emploie de plus en plus dans la préparation des pains au lait, des cho- colats au lait, en tablettes ou en bonbons, etc. Cette préparation n'entraine pas non plus des ins- tallations bien importantes. Il n’en est pas de même des condenseries de lait; celles-ci exigent un outillage et une direction scien- tifique qui en font une véritable industrie; c'est naturellement dans les pays de grande production laitière que ces condenseries sont installées, dans la Seine-Inférieure (Neufchätel-en-Bray), en Cal- vados (La Chapelle-Yvon), dans la Charente-Infé- rieure (Angoulens-sur-Mer), etc. 1 Beau : L'approvisionnement en lait des grandes villes. Soc. scientifique d'Hygiène alimentaire, 1908, p. 270. L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION La fabrication agricole des beurres perd chaque année de l'importance. Pour fabriquer un bon beurre aujourd'hui, il faut des écrémeuses, des machines frigorifiques, des cuves de maturation pour la crème, un grand débit d'eau pure; il faut surveiller la valeur du lait, son acidité aux diffé- rentes phases du travail, et même pasteuriser les crèmes et les ensemencer ensuite au moyen de fer- ments lactiques; il faut, en outre, expédier dans de bonnes conditions et être assuré de la vente dans les grands centres de consommation; il faut enfin acheter à bon compte, c'est-à-dire par grandes quantités, les colorants, les toiles à beurre, les paniers d'expédition, ete. Ce sont ces considérations qui ont déterminé, dans le sud-ouest de la France, la formation des laiteries des Charentes et du Poi- tou, et en ont assuré le succès. Ces coopératives toutes récentes, créées, au lendemain des désastres dus au phylloxera, par l'initiative de M. le sénateur Rouvier et de M. Dornic, ingénieur agronome, réunies en association, comptent aujourd'hui (1908) 112 laiteries-beurreries, dont 41 dans les Deux- Sèvres, 39 dans la Charente-Inférieure, 17 dans la Vendée, 15 dans d’autres départements (Vienne, Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Loire-Inférieure); elles appartiennent à 67.026 sociétaires, ce qui représente en moyenne 600 sociétaires par laiterie ; elles sont alimentées par 165.021 vaches, ce qui représente en moyenne 2 à 3 vaches par sociétaire. La quantité de beurre fabriqué dans les coopératives des Charentes et du Poitou a été, en 1908, de 11.636.497 kilogs, et a produit près de 33.000.000 de francs. Le service du Ministère de l'Agriculture estime à 130.000.000 de kilogs le beurre annuelle- ment fabriqué en France; la production de ces coopératives atteint donc 9 °/, de la production totale. Le prix de vente de ces beurres, qui sont livrés à Paris, a été en moyenne de 2 fr. 85 le kilog, et les bénéfices réalisés par l'Association (y compris l’utilisation du petit-lait à la nourriture des veaux) font ressortir le prix du lait à 0 fr. 1527 le litre, alors qu'il existe en France un grand nombre de régions où il est acheté O0 fr. 10 à 0 fr. 42. La concurrence que font aujourd’hui les beurres des Charentes et du Poitou aux beurres normands, sur le marché parisien, montre les avantages que ceux-ci ont su retirer d'un travail industriel, et de ce fait plus scientifique ; les producteurs de la Nor- mandie sont un peu plus rebelles à l’idée d’associa- tion ou de dessaisissement ; aussi le mouvement coopératif et industriei ne s'y développe-t-il que lentement. Le Calvados compte 8 beurreries indus- trielles, l'Eure, une seule, près de Gisors, les Côtes- 1 Renseignements fournis par M. Dornic, directeur de l'Association centrale des coopératives des Charentes et du Poitou. du-Nord, une beurrerie coopérative (Bayeux), la Manche, plusieurs beurreries coopératives ou indus- trielles (Periès, Benoistville, Isigny avec stations d'écrémage à Lacambe et à Trévise, Cartigny-les- Pinay, Chef-du-Pont, etc.). Dans la production industrielle du beurre, il y a lieu de faire figurer les /ruitières du sud-est de Ja France (Doubs, Jura, Ain, Savoie et Haute-Savoie). Ces associations, dont l’organisation à été maintes fois décrite, ont été créées, dit-on, au x siècle’, dans le but de préparer, avec une quantité de lait qu'un seul cultivateur ne pouvait fournir journelle- ment, un fromage de grande taille, susceptible de se conserver et d'être expédié, à des moments pro- pices, par les moyens de transports primitifs dont on disposait à cette époque; et c'est encore, malgré la facilité actuelle des communications, le besoin de réunir chaque jour de grandes quantités de lait qui prédomine dans la fabrication en commun des fromages, tels que Gruyère et Emmenthal. Ces frui tièressesont beaucoup développées dansla deuxième moilié du xix° siècle; on en compte 204 dans l'Ain, 362 dans le Doubs, 492 dans le Jura, et 430 dans la Haute-Savoie, au total 1.488, alimentées par 135.000 vaches, soit en moyenne 90 vaches par fruilière. Aux fromageries coopératives il convient d'ajouter plusieurs fromageries particulières dont il est difficile de déterminer le nombre, attendu que les industriels sont obligés d'acheter leur lait aux fruitières, qui ne fonctionnent plus dès lors que comme coopératives pour la vente du lait. L'atelier de la fruitière est donc devenu une petite usine, bien modeste quelquefois, et c’est à ce point de vue, parce qu’elle réunit le travail de plusieurs associés, que nous devons la faire figurer ici. Mais, comme je le disais plus haut, la fabrication du fromage n'est pas exclusive dans les départe- ments à fruitières; le gruyère est fait avec du lait légèrement écrémé, et avec la crème les fruitières préparent du beurre. Les fruitières du Sud-Est pro- duisentannuellement 45.000.000 de kilogs de beurre, soit 3,5 °/, de la production totale de la France (Ain : 536.000 kilogs; Doubs : 1.125.000 kilogs ; Jura : 1.200.000 kilogs; Savoie : 385.000 kilogs ; Haute-Savoie : 4.200.000 kilogs”*). La quantité de fromage dit de Gruyère sortant des fromageries coopératives ou industrielles du Sud-Est dépasse naturellement de beaucoup celle du beurre qui y est préparé; elle représente: 21.100.000 kilogs, soit environ le quart de la pro- duction francaise (Aïn : 2.744.000 kilogs; Doubs : 4 M. Prost (Mém. de la Soc. d'émulation du Doubs, 1879) cite un texte de 128$, où il est question de « fromaiges de fructère ». ? ? Enquête sur l'industrie laitière, 1902 (Ministère de l'Agriculture). L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION 163 5.626.000 kilogs; Jura : 6.538.000 kilogs ; Savoie : 1.732.000 kilogs ; Haute-Savoie : 4.460.000 kilogs”). C'est, d'autre part, dans le village de Roquefort que, pour y être affinés dans les caves naturelles du Combalou, sont centralisés les fromages faits en blanc dans les laiteries avoisinantes. On compte 170 laiteries dans l'Aveyron, et 12 dans l'Hérault; elles appartiennent pour la plupart aux 20 sociétés qui possèdent les caves. La production du Roque- fort, qui représente annuellement5.000.000 dekilogs de fromage, constitue done une fabrication indus- trielle, et son organisation ne s'est guère modifiée depuis longtemps. Le centre de la fabrication des fromages à pate molle et fermentée, comme le Camembert, le Liva- rot, le Pont-l'Evêque, etc., est constitué par les départements du Calvados, de l'Orne et de l'Eure. Commencée modestement dans les fermes, elle s’est, depuis un certain nombre d'années, développée dans des usines qui produisent pendant les jours d'été de 2 à 5.000 fromages, ce qui représente un approvisionnement journalier de 4 à 10.000 litres de lait. Le Calvados compte 48 fromageries indus- trielles, l'Orne 38, et l'Eure 25. On fabrique annuel- lement dans ces trois départements 12.500.000 ki- logs de Camembert (Calvados : 7.000.000 de kilogs; Orne : 3.500.000 kilogs; Eure : 2.000.000 de kilogs), — 1.500.000 kilogs de Livarot (Orne : 1.250.000 de kilogs), — et 150.000 kilogs de Pont- l’Evèque (Calvados), soit au total environ le 4/5 de la production francaise. En Normandie, on prépare encore les fromages de Neufchâtel et de Gournay (Seine-Inférieure), dont la production annuelle représente 2.600.000 kilogs, et le fromage à la crème dit « petit suisse » (800.000 ki- logs). Cette fabrication doit ètre considérée encore comme industrielle, puisque c'est dans six établis- sements seulement que l'on produit ces 3.400.000 ki- logs de fromages. Les fromages de Brie (Meaux, Coulommiers, Melun) sont, comme les fromages de Camembert, des fromages à päte molle et fermentée. Mais les avantages que les fermiers Briards ont trouvés dans la vente de leur lait en nature pour l'alimentation parisienne et les difficultés qu'ils ont eu à recruter le personnel fromager leur ont fait abandonner la fabrication, qui ne se poursuit plus que dans quelques fermes et dans les exploitations sou- cieuses de conserver leurs marques; celle-ci à émigré dans l’est de la France, dans la Marne, la Haute-Marne et la Meuse. Le consommateur ne connait pas toujours cette situation, et, comme il reste attaché à l’idée que les produits d’origine sont toujours les meilleurs, on lui vend sur les marchés ‘ Enquète sur l'industrie laitière, 4902. de Seine-et-Marne des fromages fabriqués dans l'Est. Là, la fabrication a pris une allure franche- ment industrielle. C'est vers 1852 que fut créée par M. Bailleux-Adrien, à Maison-du-Val, près Noyers, la première fromagerie industrielle de la Meuse; celte fromagerie existe encore aujourd'hui el recoil journellement une quantité de lait qui peulalleindre jusqu'à 20.000 litres. Les autres fromageries de la Meuse, créées depuis, à Lagrange-Lecomte, à Vieux- Moutiers, à Biancourt, à la Jonchères, près Gon- drecourt (Meuse), à Fère-Champenoise (Marne), à Vignon (Haute-Marne), ete., travaillent de 1.000 à 6.000 litres de lait par jour". On peut estimer à 2.000.000 de kilogs la production des fromages de la Meuse (façon Brie, Coulommiers, Camembert), el à plus de 3.000.000 de kilogs celle des fromages de la Marne (1.186.000 kilogs facon Brie, 1.385.000 ki- logs facon Coulommiers, 623.000 kilogs facon Ca- membert)*. Ce mouvement de centralisation industrielle de la fabrication des beurres et des fromages se conti- nuera forcément. Devant la concurrence générale, les fabricants comprennent qu'il devient nécessaire de recourir à la science, et seuls les industriels ou les coopératives sont aptes ou disposés à faire les sacrifices nécessaires. Le service que M. Mazé, ingénieur agronome, à su créer el développer à l'Institut Pasteur livre, par mois, 800 à 1.000 litres de ferments divers, destinés à la beurrerie et à la fromagerie. Il faut également avoir l'esprit scienti- fique pour diriger la maturation des crèmes ou des caillés en suivant leur acidité, pour pasteuriser les laits et les crèmes destinés à la fabrication des beurres ou des fromages, pour entretenir les locaux et les ustensiles dans un état de propreté microbio- logique, pour parer, au moyen des antisepliques, aux infections qui se produisent dans les locaux. VI. — LES MATIÈRES GRASSES ALIMENTAIRES. Ce n'est pas seulement au beurre, dont il à été question dans le chapitre précédent, que notre orga- nisme emprunte les matières grasses dont il à besoin; nous consommons de la margarine, des graisses et des huiles végétales, et il y à lieu d'exa- miner ici la situation industrielle qu'occupe la fabrication de ces matières grasses; je laisse de côté les suifs de bœuf et les saindoux. Les soins de propreté, le contrôle scientifique, l'obligation où l'on est de mener rapidement le tra- vail pour obtenir un produit de grande fraicheur, ont toujours fait de la margarine l’objet d'une ————————_————— ! Renseignements fournis par M. Ripert, président du Syndicat général de l'Industrie fromagère de l'Est. 2 Enquête sur l'industrie laitière, 1902, 164 fabrication industrielle. C'est, en effet, dans un petit nombre d'usines, à Pantin, à Aubervilliers, aux Prés-Saint-Gervais (Seine), à Malaunay (Seine-Infé- rieure), à Bondues et Solesmes (Nord), à Béthune (Pas-de-Calais), à Marseille et à Bordeaux que l'on fabrique annuellement la quantité considérable de margarine qui se consomme; laproduetions'élèveen effet à 11.000.000 de kilogs, c'est-à-dire à 8 ou 9 °, de la production du beurre; sur cette quantité, nous en exportons 1.800.000 kilogs, dont 1.300.000 kilogs en Angleterre’. Mais la margarine a rencontré récemment dans les « beurres végétaux » une concurrence nouvelle vis-à-vis des beurres de lait. L'huile que l’on extrait de l’amande du Coccos nucifera ou noix de coco, l'huile que l'on extrait du coprab, etc., convenable- ment neutralisées et désodorisées, sont entrées dans la consommation sous le nom de végétaline, cocose, palmin, kunerol, nucoline, etc. Trois usines de Marseille raffinent à elles annuellement 16.000.000 de kilogs de beurres végétaux”. La fabrication des huiles alimentaires se pré- sente sous deux faces essentiellement différentes : d'une part la fabrication de l'huile d'olive, qui se pratique dans les celliers, en général modestes, du Var, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, de la Corse, ete., et que l’on peut estimer à 9 ou 10.000.000 de kilogs par an, et d'autre part la fabri- calion des huiles d'arachide, de sésame, de coton, seules huiles neutres destinées à être vendues sous le nom d'huile d'olive, et qui se pratique au contraire dans de grandes usines, situées dans nos ports de Mar- seille, de Bordeaux, de Dunkerque, là où les graines dont elles dérivent débarquent en franchise; on n'extrait pour la consommation de bouche que la partie de l'huile qui s'écoule de ces graines par une première pression; il est donc presque impos- sible d'en fixer même approximativement la quan- tité produite annuellement VII. — LE SUCRE. La fabrication du sucre de betteraves n'a jamais été une industrie ménagère, comme la fabrication du beurre et des fromages ; tout au plus a-t-elle été, à l’origine, une industrie agricole, exercée à la ferme, et mettant en œuvre exclusivement les betteraves de l'exploitation; cette définition s’ap- plique encore à nombre de distilleries de betteraves: mais le matériel de la sucrerie est trop coûteux, et les frais généraux trop importants pour que les sucreries agricoles puissent subsister. On rencon- tre en vérité des cultivateurs qui sont fabricants Renseignements fournis par M. Aug. Pellerin. 3 Boxroux : Technique moderne, 1909, p. 605. L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION de sucre; mais leurs betteraves ne leur suffisent pas ; ils en achètent à leurs voisins ; ils sont indus- triels. On rencontre également des cultivateurs associés dans la même entreprise; chacun d'eux fournit ses betteraves à l'usine dans les conditions où il les livrerait s'il n’était pas sociétaire. J'ai tenu cependant à faire figurer le sucre dans cet article, d'abord parce qu'il constitue un de nos aliments les meilleurs, mais surtout parce qu'il nous offre un exemple typique de la nécessité où se trouve aujourd'hui l'industrie d'augmenter l'impor- tance de son travail pour diminuer ses frais géné- raux else pourvoir d'une direction scientifique. Pour fabriquer environ 400.000 tonnes de sucre (compté enraffiné), nous possédions, dans les années quiont suivi 1870, environ 520 fabriques, ce qui représente en moyenne une fabrique pour 770 tonnes. A partir de cette époque, le nombre de fabriques a toujours été en diminuant. Il est vrai que la sucrerie a subi, de 1875 à 1884, une crise, due à ce que les betteraves cultivées élaient trop pauvres et à ce que l'outillage employé était défectueux, et qui s’est traduite par un ralentissement marqué de la production du sucre; mais, sous l'influence de la loi du 29 juil- let 1884, la sucrerie a adopté les betteraves riches et un outillage perfectionné:; elle a doublé sa pro- duction, et cependant le mouvement de décrois- sance qu'a subi le nombre des fabriques s’est con- tinué régulièrement; plusieurs usines ont succes- sivement fermé leurs portes, tandis que d’autres augmentaient la puissance de leur matériel. En 1908- 1909, la sucrerie française a produit 723.000 (onnes dans 251 usines, soit une moyenne 2.880 tonnes par fabrique. Chaque usine peut donc être con- sidérée comme ayant, en moyenne, depuis 1870, triplé ou quadruplé sa production. Il convient d'ajouter que la campagne est menée aujourd'hui plus rapidement qu'autrefois; au lieu de se termi- ner en février, elle prend fin vers le 15 décembre, et l’on juge alors de la façon dont le travail s'est concentré entre les mains de ceux des fabricants qui, grâce au perfectionnement de leur outillage, ont pu résister aux crises successives qui ont frappé la sucrerie, notamment à celle que nous à valu la Convention internationale de Bruxelles du 5 mars 1902. Il est inutile de rappeler que le sucre produit en fabrique est raffiné dans des établissements indus- triels, qui, parce que grands au début, n'ont pas eu à se développer. On compte une quinzaine de raffineries installées dans les fabriques; mais la grosse masse de sucre, lant sucre de betteraves que sucre de cannes, est raffiné dans 25 usines seu- lement, dont cinq à Paris (raffineries Say, Lebaudy, Sommier, Guillou, etc.), six à Nantes (Cossé-Du- val, etc.), trois à Marseille (raffinerie de la Médi- L. LINDET — REVUE DES INDUSTRIES DE L'ALIMENTATION 165 terranée, de Saint-Louis, ete.), quatre à Bordeaux, deux à Lille, etc. VIII. — LES CONSERVES ALIMENTAIRES. Il conviendrait de passer encore en revue la fabrication des conserves de viande, de légumes et de fruits. Mais là, nous nous trouvons obligés de constater qu'il y aurait souvent intérêt à décentra- liser la fabrication. Sans doute, nous ne possédons pas tous un, jardin, et les conserves de pois, de haricots verts, les légumes secs, les compotes et les confitures, sont industriellement préparés pour ceux qui ne sont pas propriétaires ; mais beaucoup de ceux qui récoltent laissent perdre, pendant les années d'abondance, les fruits et les légumes, faute de savoir ou de vouloir les conserver. En Allemagne, la conserve de légumes et de fruits est une occupa- lion ménagère, et les appareils qui y sont employés s'introduisent de plus en plus en France. C'est dans les Bouches-du-Rhône, la Dordogne, la Gironde, le Lot-et-Garonne, la Sarthe, la Loire- Inférieure, le Morbihan, le Loiret, la Seine-et- Oise, etc., que l’on prépare industriellement les conserves de légumes. La statistique agricole de 1907 relève 176 usines; je n'ai pu me procurer la quantité de conserves de légumes fabriquée annuel- lement. Il en est de même de la quantité de confitures ; elle représente peut-être 20.000.000 de kilogs, répartis, d'après la statistique agricole, dans 147 confitureries, situées dans les départements de la Seine (1/5 de la production), des Alpes-Mari- times, des Bouches-du-Rhône, de Vaucluse, du Puy- de-Dôme, de la Meuse, de la Seine-Inférieure, etc. Il convient d'ajouter à ces confitureries les sécheries de pruneaux de Lot-et-Garonne, d’Indre-et-Loire, les fabriques d'abricots simplement stérilisés de Vaucluse, etc. I est plus difficile de faire, dans les ménages, de la conserve de viandes, et les fabriques de pâtés, de saucissons, etc., sont des établissements industriels. Il en est de même des ateliers où l’on conserve les poissons, et spécialement les sardines (côtes de Bretagne et de Vendée, depuis Brest jusqu'à Roche- fort). Tel est ce mouvement, lent en réalité, mais fatal, qui s'insinue dans nos mœurs industrielles, et qui à son point de départ dans l'obligation où se trouve chaque fabricant de faire mäeux et de produire moins cher que son concurrent. Pour faire mieux, il en appelle au contrôle de la science, à l’habileté des constructeurs, et pour produire moins cher, il diminue les frais généraux en les répartissant sur une plus grande quantité de produits manufac- Lurés. C'est le mouvement qui tend à établir, au lieu et place du petit commerce, les grands ma- gasins de nouveauté, d'ustensiles de ménage, d'alimentation, au lieu et place des petites banques provinciales les grands établissements de crédit. Ce mouvement à tué bien des initiatives et fait employés ceux qui, par leur intelligence et leur travail, étaient appelés à devenir patrons ; mais en fin de compte, et s'il faut chercher à qui il profite, on se trouve en face du consommateur; celui-ci est peut-être le plus intéressant de tous ceux qui, dans l’activité nationale, entrent en jeu, : puisqu'il représente la totalité des individus qui y prennent part. L. Lindet, Docteur ès sciences, Professeur à l'Institut National Agronomique, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 4 166 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Rouse-Ball (W.), F'ellow and Tutor of Trinity Col- lege, Cambridge. — Récréations mathématiques et Problèmes des temps anciens et modernes. — 3 vol. de 360 pages chacun environ. (Prix : 5 fr. le volume.) À. Hermann, éditeur, 6, rue de la Sor- bonne. Paris, 1909. Ces Récréations en sont déjà à leur quatrième édi- tion anglaise, et la deuxième édition française a paru, enrichie d'additions nombreuses dues au traducteur M. Fitz-Patrick, à MM. Margossian, Herrmann, Aubry, etc. C'est dire le succès mérité de l’ouvrage et constater, une fois de plus, l'attention qu'on apporte aujourd’hui, dans les milieux scientifiques et pédagogiques, à ins- truire en présentant la science par ses côtés curieux, à la rendre plus attrayante en l’objectivant davantage, en la dépouillant de l'appareil dogmatique et froid que le simple amateur redoute, pour le trop connaître, dans les seuls livres de Mathématiques qu'on écrive d’ordi- naire : les ouvrages destinés aux professionnels ou aux candidats aux examens. Tout le monde connait, à cet égard, les ädmirables volumes de Lucas, les publications plus élémentaires de Fourrey, Laisant, Ahrens, etc. Ce qui caractérise l'œuvre de M. Rouse-Ball, c’est l'extrême diversité des matières traitées. Loin d’être une collection plus ou moins complète de problèmes curieux, de jeux, de carrés magiques ou diaboliques, l'ouvrage étudie et élucide une foule de questions his- toriques, offre une bibliographie précieuse aux cher- cheurs, présente des vues philosophiques sur certains objets (géométrie non euclidienne, hyperespace, théorie des nombres, etc.). Il embrasse même trop de sujets et quelques-uns qui n’ont qu'un rapport lointain avec les Mathématiques; ainsi, une histoire anecdotique des Nombres, qui eût gagné à ne pas reproduire les rève- ries et divagations laissées par l'Antiquité et le Moyen- Age; de même, des récréations de « Mécanique », dont une partie au moins serait mieux à sa place dans un recueil de « Tours de physique », ou tout au moins de « Récréations scientifiques » comme celles de Tis- sandier. Enfin, que peut avoir à faire ici une étude sur l'Astrologie ? Parmi les chapitres les mieux venus, citons (sans ordre, car la division de l'ouvrage est toute convention- nelle et même peu logique) : Questions énigmatiques d’Arithmétique supérieure, entre autres : détermina- tion de la valeur de p qui rend premier un nombre de la forme 2? — 1 (Nombres de Mersenne), une théorie des Réseaux géométriques, soit réseaux continus, depuis le problème d’Euler jusqu’au jeu d'Hamilton, un Essai sur l'histoire du vocabulaire et du symbolisme mathé- mathiques, une excellente tentative de vulgarisation des propriétés géométriques des courbes, propriétés qui, en effet, sont les seules utilisées dans les applica- tions, une Note montrant tout l'intérêt de la théorie des Identités et des Inégalités dans la formation du débutant, enfin l’histoire de trois des problèmes les plus fameux chez les Anciens et celle de la Résolution de l’'Equation du troisième degré (d’après les travaux de Terquem). Cet ouvrage s'adresse à tous ceux qui, sans avoir fait d'études mathématiques spéciales, sont cependant familiarisés avec les méthodes algébriques et géomé- triques. En. DEmoLis, Professeur à l'Ecole Professionnelle de Genève. ET INDEX Armengaud (jeune), /ngénieur, ancien Elève de l'Ecole Polytechnique. — Le problème de l’Avia- tion, sa solution par l'Aéroplane. — 1 hrochure in-8° de 86 pages. (Prix : 2 fr. 50.) Ch. Delagrave, éditeur. Paris, 1909. Cette brochure d'une centaine de pages est, d'après l’auteur, le texte d'une conférence faite au Conserva- F toire des Artset Métiers; mais des développements nom- breux y ont certainement été ajoutés. Après quelques pages consacrées à la direction des aérostats, M. Armengaud aborde son sujet en décrivant les expériences de M. Santos-Dumont, dont l’aéroplane est le premier qui se soit élevé sur l’ancien continent. Revenant en arrière, il passe en revue les travaux des précurseurs : Ponton d’Amécourt, Pénaud, fait un exposé sommaire des études de Marey sur le vol des oiseaux, puis arrive aux expériences de glissades aériennes de Lebris, Lilienthal, Pilcher, des frères Wright, du capitaine Ferber, etc. Il passe ensuite à des considérations sur l’aéroplane, le cerf-volant, les dif- férentes théories du vol plané, les lois de la résistance de l'air. Comparant l'hélicoptère à l'aéroplane, il se prononce nettement en faveur de ce dernier, et con- sacre la fin de sa brochure au récit des expériences les plus récentes, celles de Farman, de Delagrange, des frères Wright et de leurs principaux émules. Cet ouvrage est illustré de nombreuses gravures, et l'auteur s’est efforcé de rendre accessibles à tous ses lecteurs les démonstrations, forcément arides, des prin- cipes fondamentaux de l'Aviation. Il a voulu, d'une facon particulière, rendre justice à tous ceux qui ont pu contribuer à la solution du grand problème et, dans son Introduction, il a consacré au Colonel Charles Re- nard quelques lignes dont je lui suis profondément reconnaissant. Cette brochure fournit de précieux renseignements sur les travaux de ceux quon pourrait appeler les précurseurs de la conquête de l’air. Elle sera lue avec intérêt par tous ceux que passionne aujourd'hui la navigation aérienne. C! Pauz RENARD. Camus (G.), /ngénieur des constructions civiles. —- La technique des hélices aériennes. — 1 hroch. in-8 de 71 pages avec 17 figures. (Prix : 3 fr.) L. Vivien, éditeur. Paris, 1910. Le problème de la construction des hélices aériennes à pas variable commence à entrer dans l’enseignement technique : le cours de Stéréotomie du Conservatoire des Arts et Métiers a déjà donné asile aux épures de construction des hélices à ailes en bois. M. Camus a résumé les procédés dont on use actuel- lement pour déterminer les éléments et pour faire le tracé des ailes des propulseurs hélicoïdaux. Les prin- cipes de son exposé sont empruntés aux travaux de Ferber et de Drzewiecki : la base scientifique n'est pas encore très solide, mais on s’en contente pour le moment. Les jeunes ingénieurs et les constructeurs trouveront avec peud’effort, dans la présente brochure, des indications pratiques utiles. A. BOULANGER, Professeur à la Faculté des Sciences de Lille. Gorgeu /P.), Capitaine d'Artillerie. — Machines- outils, Outillage, Vérificateurs, Notions pratiques. — 1 vol. in-8° de 232 pages, avec 197 figures. (Prix : 7 fr. 50.) Gauthier- Villars, éditeur, Paris, 1909. Comme l'indique son titre, cet ouvrage se borne, sur ce vaste sujet des machines-outils, à des notions très BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 167 sommaires relatives à leur installation, leur emploi, la confection des outils. C'est une bonne introduction à la technologie de ces machines, avec des figures schématiques bien groupées, claires et suggestives. Peu d'erreurs, et de faible importance, comme celle-ci, par exemple, que le débit des fraiseuses est faible (p. 115), alors qu’en fait elles arrivent à débiter plus de 10 kilogrammes de copeaux d'acier par minute. G.R. 2° Sciences physiques Guilbert (Gabriel), Secrétaire de la Commission météorologique du Calvados. — Nouvelle Méthode de prévision du temps. /’réface de M. BEerNaro Brunues, directeur de l'Observatoire du Puy-de- Dôme.— 1 vol. in-8° de XxxXvIn-344 pages, avec nom- breuses figures et cartes. (Prix : 43 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. Il nous suffira de signaler cet ouvrage à nos lecteurs; la préface de M. Bernard Brunhes, qui ouvre le volume, a déjà paru iei même (n° du 15 mai 1909, p. 393) et à donné, de la méthode de M. Guilbert et des critiques dont elle est passible, un résumé aussi clair qu'auto- risé. Les personnes que la question intéresse trouve- ront dans le reste de l'ouvrage les détails d'application pratique des règles de prévision de M. Guilbert. Schaffers (V.), Docteur ès Sciences. — La Machine à influence, son évolution, sa théorie. — 1 vol. in-8° de 499 pages, avec 197 figures. (Prix : 10 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. L'auteur a eu le courage d'aborder un sujet des plus ingrats, les machines électrostatiques étant presque complètement délaissées et n'offrant pas d'intérêt actuel au point de vue des applications industrielles. Ce qui a déterminé M. Schaffers à se consacrer à l’étude des machines à influence, c'est que, précisément parce qu'on s’en est désintéressé, la théorie n’en a été éta- blie que d’une façon très superficielle et qu'il y avait là une lacune à combler. Cet ouvrage, au point de vue scientifique, offre ainsi un réel intérêt. Les chapitres qui traitent des mesures exécutées sur les machines à influence sont particuliè- rementdocumentés, et les travaux de l’auteur lui-mème éclaircissent bien des points restés obscurs. s G. DE LAMARCODIE, Professeur à l'Ecole d’Electricité et de Mécanique industrielles. Ladenburg (A.), Professeur à l'Université de Bres- lau. — Histoire du développement de la Chimie, depuis Lavoisier jusqu’à nos jours. — 7raduit sur la quatrième édition allemande par M. A. Corvisy, Professeur au Lycée Gay-Lussac et à l'Ecole de Médecine et de Pharmacie de Limoges. — 1 vol. in-8° de 380 pages. (Prix: 15 fr.) À. Hermann et lils, éditeurs. Paris, 1909. Le savant chimiste allemand donne dans cet ouvrage des vues extrêmement profondes sur l’évolution de la Chimie depuis Lavoisier. Ses remarquables leçons ren- dront de précieux services aux étudiants français, qui ne trouvent pas dans nos Universités de cours équi- valents et qui ont cependant besoin, s'ils se soucient de former leur esprit en augmentant leur savoir, d'aller jusqu'aux racines des idées qui dominent la science chimique moderne. Ce livre substantiel les conduira sûrement, à travers le dédale des travaux chimiques de tous les pays et de tous les temps, depuis la Chimie du xvin® siècle jusqu'à celle d'hier et d'aujourd'hui, jus- qu'aux plus récentes et aux plus audacieuses investiga- tions de l’esprit scientifique moderne. Il est bien intéressant, sous la conduite d'un maître tel que Ladenburg, arrivé au terme d'un aussi long voyage, de se demander ce qui restera de l’œuvre de la science actuelle. Il a semblé au vieux chercheur, longuement müûri par le laboratoire, que la marche actuelle de la science était trop nerveuse, moins pai- sible et moins sûre qu'au temps de sa jeunesse, comme si la hâte et la précipitation qui caractérisent la vie moderne s'étaient malheureusement imposées à la science. Bien que Ladenburg ne soit pasle seul savant qui aitune impression de ce genre, bien que d'autres, qui aiment également la science et qui consacrent leur vie au laboratoire, partagent les mêmes craintes, il semble qu'il y ait quelque exagération à s'affliger de la sorte devant le spectacle plutôt réconfortant qu'offre Ja science nouvelle. Les spécialistes, pas plus que les étudiants, ne dédai- gneront ce livre, car 1ls y trouveront une abondante bibliographie qui leur permettra de mener rapidement à bien les recherches historiques qu'ils pourroient désirer faire sur des points jugés par eux plus particu- lièrement intéressants. Peut-être gagneront-ils même à cette lecture le désir d'initier leurs élèves, au cours de leurs exposés théoriques, à l'étude des antécédents des idées généralement acceptées aujourd'hui. Ils seront alors probablement amenés à simplifier encore devant leur auditoire ces Leçons de Ladenburg, après les avoir largement complétées pour eux-mêmes en se reportant aux sources ; c’est que, s’il est nécessaire pour le professeur d’avoir présents à l'esprit les nom- breux faits sur lesquels reposent les considérations qu'il expose, il n'est pas moins utile qu'il ne laisse passer dans son enseignement que les faits les plus gros ; le menu détail risque trop de dérouter l'auditeur, de lui faire perdre de vue l'objectif principal de la leçon et de semer dans son esprit un désordre dange- reux. On trouvera précisément sur certains points, dans quelques-unes de ces Lerons, une accumulation peut-être excessive de faits qui fait perdre parfois un peu d'intérêt au sujet, surtout dans une première lec- ture. Si le petit livre de William Ramsay sur les « Gaz de l'atmosphère »est si captivant dans sa partie histori- que, c’est parce qu'il est extrêmement sobre en détails et qu'il se borne à renvoyer le lecteur plus exigeant aux sources où il a lui-même puisé. Mais les quelques leçons qu'on peut trouver un peu lourdes n’empêchent pas les autres d’être d'une partaite clarté. Sur la fin du livre, en particulier, au moment où l’on arrive au mouvement chimique moderne, l'in- térèt renaît puissamment, et la forme adoptée par l’au- teur rappelle d'assez près les beaux livres de la Biblio- thèque de Philosophie scientifique relatifs à l’évolution de la Physique et de l’Electricité. Il me reste à me demander si l’auteur a bien atteint le but qu'il visait : montrer que les idées actuelles ne sont que le développement d'idées antérieures. Sans doute, on ne peut nier que les vérités depuis longtemps acquises et même les tâtonnements et les erreurs d'autrefois ne conservent une certaine influence sur la marche actuelle de la science, et il en sera de même éternellement. Il y a cependant quelque exagération à prétendre, même si la plupart des idées actuelles sont un peu le développement d'idées antérieures, qu'elles ne sont que cela, en Chimie comme ailleurs. Et je ne crois pas que ce dernier point soit établi, ou même que l'auteur ait cherché nettement à l'établir au cours de ses Leçons. La dernière leçon, en particulier, qui est une rapide, mais excellente revue des travaux physico- chimiques récents, démontrerait plutôt au lecteur qu'il est des idées, extrêmement fécondes d'ailleurs, actuel- lement en cours dans la science, qui sont tout autre chose que le développement d'idées antérieures. Peut- être est-ce un peu ce qu'il y a de vraiment nouveau dans le mouvement scientifique contemporain qui ins- pire précisément à l’auteur une défiance et une tris- tesse exagérées. Quoi qu'il en soit, le livre de Ladenburg est plein de la meilleure philosophie, et l’on est heureux qu’en la circonstance le mot de M. Duhem ne s'applique pas et que de grands artistes sachent parfois très bien philo- sopher sur leur art. LÉON JALOUSTRE, Ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure, Agrégé des Sciences physiques. 168 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ————————————————. 3° Sciences naturelles Commission géographique et géologique de l'Etat de Saint Paul. — Carte générale de l'Etat de Saint-Paul (Brésil). Zchelle : 1/1.000.000. — À carte en couleurs de 64 X 105 centimètres. Weiszflog Irmaos, éditeurs. Sao-Paolo, 1909. Nous avons déjà signalé dans la Revue l’activité dont fait preuve la Commission séographique et géologique de l'Etat de Saint-Paul, qui a entrepris, depuis plu- sieurs années, le relevé méthodique de la configura- tion de ce grand Etat, l’un des plus importants du Brésil. Elle vient de condensér les résultats de ses tra- vaux dans une carte générale à l'échelle du millio- nième. Celle-ci donne le réseau hydrographique, les noms des villes et villages et les voies ferrées, avec un plan de la capitale de l'Etat et des environs. On peut regretter l'absence de toute figuration oro- graphique (à l'exception des noms de quelques chaînes de montagnes); mais il faut ajouter que la Commis- sion géographique à entrepris une œuvre plus con- sidérable : la publication d'une carte au 4/100.000° donnant le relief du pays au moyen de courbes de niveau distantes de 25 mètres. Plusieurs feuilles ont déjà paru : celle d'Ouro Fino, que nous avons entre les mains, est d'une exécution cartographique très remar- quable. C’est là une œuvre que beaucoup de pays euro- péens pourraient envier à la République sud-américaine et dont il faut féliciter très hautement la Commission géographique et géologique de l'Etat de Saint-Paul en lui souhaitant de pouvoir la mener rapidement à terme, tout au moins pour la partiè orientale de l'Etat. Gallois (L.), Professeur à la Faculté des Lettres de l'Université de Paris. — Régions naturelles et noms de pays (Etude sur la région parisienne). — À vol. in-8 de 350 pages, avec 8 planches. (Prix : 8 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. « Régions naturelles, noms de pays», sont des expressions assez fréquemment employées. Il s’en faut cependant que la signification soient claire. L'objet du présent ouvrage est de les élucider et de montrer quels rapports elles ont entre elles. M. Gallois commence par suivre, en deux chapitres fort solidement documentés, le développement de ces deux notions, depuis le milieu du xvure siècle, dans les ouvrages de l'abbé Guettard, de Giraud-Soulavie, de Cuvier, de Brongniart, de Coquebert de Montbray, de d'Omalius d'Halloy, d'Elie de Beaumont. Mais, comme il est nécessaire, pour éclairer ces questions, d'étudier en détail certaines étendues territoriales limitées, M. Gallois à choisi la région la plus suscep- tible de nous intéresser, la région parisienne. Il a donc relevé les noms de pays qui entourent Paris, tels que Beauce, Hurepoix, Gâtinais, Puysaye, Brie, Tardenois, Valois, Vexin, etc. Puis, à propos de chacun d'eux, il s’est livré à une triple recherche : il a étudié les carac- tères physiques de la région désignée; il a suivi le nom dans ses applications variées à travers les textes historiques; enfin, sur place, il à essayé de se rendre compte du degré d'usage où même de popularité du nom en question. Soit le terme « Beauce ». Au sud de Paris et de la Seine s'étend un vaste plateau sur lequel tout est uni- forme : constitution géologique du sol, culture, ma- nières de se grouper et de vivre. Si loin qu'on remorte dans l'histoire, cette région agricole a été désignée par ce terme de Beauce; c’est le plus frappant exemple d'un nom de pays bien adapté à une région naturelle. Mais chaque enquête n'aboutit pas à des conclusions aussi affirmatives. Soit le terme « Hurepoix ». Entre la Seine, l'Essonne et la Beauce s'étend un ensemble de plateaux, découpés par l'érosion. Les cartographes se sont avisés de lui appliquer ce vieux nom de Hurepoix. qui apparaît déjà dans les chansons de geste. Mais il n'est pas en usage dans le pays même ainsi désigné. Ce terme ne saurait donc être considéré comme un véritable nom de pays. Austères, exigeant des recherches dispersées dans les ouvrages les plus variés, les études entreprises par M. Gallois présentent une grande utilité. Grâce à elles, on connaît la valeur exacte de quantité de termes dont le sens était resté incertain. A son étude de la région parisienne M. Gallois a joint, en appendice, plusieurs dissertations sur diverses autres régions naturelles. Il faut également signaler d'une manière particulière un morceau relatif aux progrès de la cartographie de la région parisienne Jusqu'à la carte de Cassini. Cette bibliographie, qui comprend soixante-treize titres de cartes et qui permet de suivre l'œuvre cartographique de la Guillotière, de Damien de Templeux, de Tassin, des Sanson, de l’Aca- démie des Sciences et de Delisle, sera vivement appré- ciée des géographes et des historiens. Hexr1 DEHÉRAIN, Docteur ès Lettres, Sous-Bibliothécaire à l'Institut. Bellet (Daniel), Professeur à l'Ecole libre des Scien- ces politiques. — Les Grandes Antilles. Erune ne GÉOGRAPHIE ÉCONOMIQUE. Préface de M. E. LE\AssEuUn. —1 vol. in-8° de 314 pages. (Prix:6 fr.) E. Guilmoto, éditeur, 6, rue Mézières. Paris, 1909. Dans cet ouvrage, M. D. Bellet s’est proposé de donner une description de l’état actuel des quatre îles qui constituent les Grandes Antilles : Cuba, Haïti et Saint-Domingue, Porto-Rico, Jamaïque, envisagées au quadruple point de vue de l’économie générale, de l’agriculture, de l'industrie et du commerce. La population des quatre Grandes Antilles dépasse 5 millions d âmes, et l’on peut évaluer approximative- ment à plus d’un milliard et demi de francs leur commerce extérieur en 1906. Le sucre y est encore l’article principal de commerce : il en a été exporté pour plus de 450 millions de francs en 1906, surtout de Cuba et de Porto-Rico ; le café, que produisent princi- palement Haïti et la Jamaïque, et le tabac de Cuba, de Porto-Rico, de Saint-Domingue, viennent au second rang ; au troisième, sont les bananes, le cacao, le coton, les bois, le hennequen. ; Dans ce commerce, les Etats-Unis se sont taillé la part du lion depuis la guerre hispano-américaine : l'Angleterre domine à la Jamaïque. La France ne vient qu'après ces deux Etats, à une grande distance. En 1906, elle a acheté à Cuba surtout des éponges et du tabac, à Porto-Rico du café, et elle a vendu des médicaments, des vêtements et de la lingerie, des machines et outils, en tout pour 28 millions de francs. Le chiffre de son commerce spécial avec les deux républiques de l'île de Haïti est un peu plus élevé, supérieur à 37 millions ; il consiste principalement en achat de café, de bois et de cacao, et en vente de tissus de coton et de tabletterie. En somme, environ 67 millions sur un commerce d'un milliard et demi. C’est trop peu. La France ne peut pas espérer s'élever dans ces parages au-dessus des Etats-Unis, ni de l'Angleterre, mais elle doit tenir à ne céder à aucune nation la troisième place. Il faut espé- rer que le livre de M. Bellet, en éclairant les commer- cants français sur les ressources de ces contrées, les invitera à y développer leurs opérations. Marineseo (D: G.), Professeur de Clinique des mala- dies nerveuses à l'Université de Bucarest. — La Cellule nerveuse. — 2 vol. in-16 de l'Encyclopédie scientifique publiée sous la direction du D° Toulouse. Préface de M. le Professeur Ramon y Cajal. (Prix : 10 fr.). Doin, éditeur. Paris, 1909. L'auteur, déjà si avantageusement et universellement connu pour ses nombreux travaux en neurologie, en histologie nerveuse normale et pathologique, pouvait présenter lui-même son ouvrage. Il a eu l'honneur d'une préface du Professeur Ramon y Cajal. Cette pré- face rend la tâche de l’analyste facile et agréable, puis- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX que le bien que le Professeur Ramon y Cajal dit de l'au- teur el de son œuvre, il n'y à plus qu'à le répéter après lui. La préface elle-mème offre au lecteur un grand intérêt; écrite par le célèbre histologiste espagnol, elle exprime un état d'âme, une philosophie scienti- lique qu'il n'est pas indifférent de connaître. A ce titre, les lignes suivantes méritent d'être citées : « La destinée du savant qui cherche là vérité d'une façon désinté- ressée est d'avancer en combattant à là manière d'un explorateur en pays inconnu qui, pour se frayer un chemin, doit lutter obstinément contre tous les élé- ments naturels et contre les hommes. Cette image, cependant typique, ne donne qu'une faible idée des difficultés que rencontre le chercheur biologiste, car, si l'explorateur doit se battre avec des races étrangères, elles n’en sont pas moins ingénues, tandis que le biologiste doit en plus entrer en contestation à chaque pas avec ses compagnons d'expédition, tous occupés à le retenir et à l'arrêter sous je prétexte de corriger ses erreurs el à lui tracer des routes qui, à tout le moins, l'exposent à s'égarer hors de sa voie et à se briser, » Le tome 1° est consacré à la Cytologie normale et à l'Histophysiologie de la cellule nerveuse, le second à la Cytologie pathologique. Ce serait faire injure à M. le Professeur Marinesco que de constater que ces deux parties sont parfaitement au courant de la science. Un index bibliographique extrémement abondant et aussi complet qu'on peut en dresser un, termine l'ouvrage. La matière est bien ordonnée, et la lecture est agréable. Les imperfections qu'on pourrait signaler sont trop peu de chose pour ne pas les passer sous silence, au regard des mérites de ce livre. Toutes les figures sont originales et témoignent ainsi du caractère si per- sonnel de l'ouvrage. Il est même fâcheux que la modi- cité du prix de la publication n'ait pus permis de donner à ses figures plus de cachet artistique, et même quelquefois ait nui à leur valeur démonstrative. Il est certain, par exemple, que des figures telles que 74, 84, 85, 86, et beaucoup d’autres, illustrant des différences fines de structure dans des cillules expérimentalement lésées, avaient besoin, pour être significatives, d’une plus grande perfection dans le procédé de reprodue- tion. Mais c'est là un reproche qui ne s'adresse pas à l’auteur, et qui atteint à peine l'éditeur et le directeur de l'Encyclopédie, puisqu'on leur doit, à un prix très bas, un ouvrage d'ensemble sur la cellule nerveuse, qui, pour un temps, fixe admirablement l’état de la science. A. PRENANT, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Paris, Abelson (A. R.). — Mental Fatigue, and its Measu- rement by the Œsthasiometer (LA FATIGUE MENTALE ET SA MESURE PAR L'ESTHESIONÈTRE). l'hèse présentée à la Faculté des Lettres de ? Université de Rennes. — 4 vol. in-8°, Rennes, 1909. La thèse d'Abelson, un intelligent et actif instituteur anglais, à été faite au moyen d'expériences qu'il a pratiquées en Angleterre et en France dans les écoles primaires. Abelson est un fervent adepte de la méthode esthésiométrique, qui consiste à mesurer la fatigue intellectuelle par la diminution de sensibilité tactile qu'elle produit. 11 croit, et par les documents expéri- mentaux qu'il apporte dans sa these, il tend à démon- trer que cette méthode est capable de faire apprécier si un groupe d'élèves est plus fatigué à telle heure de la journée qu'à telle autre, après tel travail qu'après tel autre. Les chiffres des expériences semblent bien lui donner raison; et nous avons en outre le sentiment que son travail a été fait avec beaucoup de soin et de conscience; la technique qu'il a imaginée nous parait simple et recommandable. Mais, dans ses conclusions, il va plus loin: il croit pouvoir affirmer que la méthode esthésiométrique ne sert pas seulement à donner des indications sur l’état de fatigue d'un groupe d'enfants, 169 et qu'elle peut mesurer la fatigue individuelle d’un écolier. Sur ce point, nous croyons, d'après nos expé riences personnelles, devoir faire des réserves. Juver un groupe est beaucoup plus facile que de juger un individu, et nous ne pensons pas que jusqu'ici la méthode de l’esthésiomètre suffise pour déterminer si quelqu'un à de la fatigue intellectuelle, et à quel degré il en a. A. B. 4 Sciences médicales Janet (D' Pierre), Professeur de Psychologie au Collège de France. — Les Névroses. — 1 vol. de 397 pages de la Bibliothèque de Philosophie scienti- fique. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1909. L'auteur, dans cet ouvrage, s'est appliqué à résumer les nombreux travaux publiés par lui antérieurement sur les névroses et leurs différentes manifestations. I a senti lui-même les difficultés de cette tâche; mais il s'estefforcé de les vaincre, ayant le désir de faire œuvre de vulgarisation pour les idées et les conceptions géné- rales qu'ont fait naître en lui l'observation et l'analyse des faits. On retrouvera donc résumées dans cet ouvrage les brincipales études de Pierre Janet sur les idées tixes, es obsessions, les amnésies et les doutes, les paralysies, les phobies, les troubles des instincts et des fonctions viscérales, les troubles du langage et du mouvement. L'auteur envisage ces désordres tantôt chez les hysté- riques, tantôt chez les psychasthéniques. Il's'attache à donner à l'hystérie et à la psychasthénie des caractères différentiels qui, selon lui, permettent de séparer nette- ment ces deux états névropathiques. Pour lui, en effet, il existe un état mental hystérique spécial à cette névrose, de même qu'il existe un état mental propre à la psychasthénie. Ce livre se termine par l'exposé d'une conception de la névrose que l'auteur résume en ces termes : « Les névroses sont des troubles des diverses fonctions de l'organisme, caractérisés par l'arrêt du développement sans détérioration de la fonction elle-même. » L'émoti- vité joue un grand rôle dans la genèse des névroses. Celles-ci, en effet, naissent de la « tendance à remplacer les opérations supérieures par l’exagération de certaines opérations inférieures et surtout par de grossières agi- tations viscérales. » 5° Sciences diverses Lindet (Léon), Docteur ès Scrences, Professeur à l'Ins- titut Agronomique. — L'esprit et le cœur de l’en- fant. — 1 vol. in-80 de 167 pages. Belin, éditeur, Paris, 1910. Ce livre charmant a été écrit, non par un profes- sionnel de la Psychologie, ou de cette science nou- velle qu'on appelle pédantesquement la Pédologie, mais par un simple amateur, un père qui aime les enfants, qui aime les observer, les écouter, et qui, au jour le jour, a recueilli les jolis mots, les réflexions piquantes, les actes curieux de ses enfants ou de ceux de son entourage. Mais ce petit livre est beaucoup plus et mieux qu'un recueil d'une lecture agréable. Si l’auteur, qui est un savant, s'est bien gardé d'écha- fauder des théories ambitieuses, il a voulu, du moins, rester fidèle à l'esprit scientifique. Les documents qu'il produit, et qu'il a soigneusement choisis parmi ceux qui suggèrent le plus d'idées, il les a classés par catégories, et c’est ainsi qu'il étudie chez l'enfant : l'entendementet l'interprétation du langage, la concep- tion du monde extérieur, l'influence de l'esprit de com- paraison, les associations d'idées, les Jugements et les raisonnements, l'imagination imitatrice et créatrice, et, enfin, les sentiments moraux. Et il a ainsi écrit, très simplement, un petit livre remarquable que liront avec profit tous les parents, tous les éducateurs et tous les amis de l'enfant, 170 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 31 Janvier 1910. M. Ad. von Baeyer est élu Associé étranger de l’Aca- démie, et sir Patrick Manson Correspondant pour la Section de Médecine et de Chirurgie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — MM. H. Deslandres, A. Bernard el L. d'Azambuja ont photographié à l'Observatoire de Meudon la comète 1901 a. Elle est remarquable par sa couleur rougeâtre, la longueur et la grande largeur de sa queue. La radiation du sodium, très forte à l’origine dans son spectre, a disparu pour être remplacée par le spectre des hydrocarbures et celui du cyanogène. — MM. Giacobini et P. Chofardet présentent leurs observations de la même comète, faites respectivement aux Observatoires de Paris et de Besancon. — M. Ch. Fabry a déterminé par des mesures photographiques l'éclat intrinsèque du ciel étoilé en deux régions; dans la région voisine du pôle céleste, l'intensité photographique de 1 degré carré est égale à celle de 0,103 polaire où de 0,92 étoile de grandeur photographique 5; dans la région entre Bet y du Cygne, les chillres correspondants sont respective- ment 0,212 et 1,90. — M. Ch. L#liemand a reconnu une erreur systématique dans la détermination du niveau moyen de la mer à l’aide du médimarémètre, provenant de l'entraînement de quelques gouttes d’eau par la sonde, chaque fois qu'on la retire du tube. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Biquard décrit un pro- cédé de mesure du coefficient de conductibilité ther- mique des corps peu conducteurs, qui utilise le prin- cipe de l’anneau de garde et la fusion de la glace par la chaleur transmise. — M. G. Thovert montre que le coelficient de diffusion des substances nou électrolytes en solution d'alcool méthylique satisfait à la rela- tion DVM — 12 X 10—5 à 18°; en solution aqueuse, on a D YM—S8 X 10 —5, chiffre qui est au précédent comme la viscosité de CH*OH est à celle de l’eau. Ces formules peuvent s'interpréter par la théorie cinétique des solu- tions. — M. J. H. Russenberger a étudié l’absorption des liquides par les substances poreuses. La puissance d'absorption varie avec la qualité de la substance absorbante; pour le coton hydrophile, elle est propor- tionnelle à la section droite de la mèche; elle augmente considérablement avec la température. — MM. F. La- porte et P. de la Gorce ont déterminé l'équivalent élec- trochimique de l'argent. En améliorant les procédés de purilication de l’azotate d'argent, ils sont arrivés à une valeur (1,118.29 mgr. par coulomb) qui concorde sen- siblement avec celle du N'atioual Physical Laboratory.— M. G. Fouquet a éiudié la cristallisation spontanée du sucre; elle ne se produit pas dans les solutions sursa- turées au repos, mais elle a lieu régulièrement dans les solutions agitées. La température de cristallisa- tion est définie pour une concentration donnée. — M. P. Yvon, par action de Sb*0* sur le tartrate acide d’ani ine, a obtenu l'émétique d'aniline, C‘H5O$ (SbO) C'H7Az, hydraté à + 15°, anhydre à + 35°. — M. Ober- reit rappelle que le 5 : 7:5!:7'-tétrachlorindigo décrit récemment par M. Danaila a déjà été obtenu en 1901 à partir de l'acide dichlorophénylglycine-carbonique, provenant de la chloruration directe de l'acide phényl glycine-0-carbonique. — M. M. Holderer montre que l’amylase, la dextrinase et la peroxydiastase du malt traversent les bougies de porcelaine quand elles sont neutralisées à la phénolphtaléine, tandis qu’elles sont retenues lorsqu'on les neutralise au méthylorange. — M. H. Agulhon montre que le bore est un élément très utile aux végétaux supérieurs. L'addition de petites quantités de bore dans un milieu de culture synthétique ou dans un sol naturel augmente sensiblement le poids de matière sèche formée. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Muntz a déterminé les quantités de limon enlevées au sol par la crue récente de la Seine. La proportion a été en diminuant à mesure que la crue se prolongeat. Elle n'est pas suffisante pour compromettre la force productive des terres inondées. — M. H. Douvillé à déterminé un cer- tain nombre de fossiles envoyés de Madagascar, qui lui permettent de conclure à la présence du Trias marin dans l’île. — M. A. Brochet a étudié la radio- activité de quelques sources thermales non captées de la région des Vosges; elle est assez élevée. Séance du 7 Février 1910. M. J. D. van der Waals est élu Associé étranger de l’Académie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin pour- suit ses recherches sur les systèmes et les congruences K.— M.J Mollerup présente une remarque sur les équationsintégrales de première espèce. — M. N.Kryloff démontre le théorème suivant : Toute fonction continue intégrable et de carré intégrable, ainsi que sa première dérivée entre — 1 et +1, se développe en série absolu- ment et uniformément convergente, procédant suivant les polynomes de Jacobi, dont les paramètres & et 8 sont plus grands que un. — M M. Plancherel commu- nique ses recherches sur la représentation d'une fonc- tion arbitraire par une intégrale définie. — M. R. Bir- keland a étudié certaines intégrales irrégulières des équations différentielles linéaires. — M. A. Etévé à examiné les phénomènes d'autorotation qui se pro- duisent au cours du déplacement des surfaces dans l'air ; ils peuvent améliorer le rendement des hélices. En particulier, il y a avantage à faire des stries longi- tudinales peu profondes sur le dos des hélices tournant à grande vitesse. — MM. A. Claude, Ferrié et L. Drien- court ont fait des comparaisons de chronomètres ou de pendules à distince, par la méthode des coincidences, au moyen de signaux radiotélégraphiques entre l'Obser- vatoire de Paris et celui de Montsouris. La méthode dunne des résultats exacts à moins de 0°,01, Elle sera bientôt employée à la détermination de la longitude entre Paris et Brest. — MM. Luizet et J. Guillaume communiquent leurs observations de la comète Innes (1910 a) faites à l'Observatoire de Lyon. — MM. Javelle, Charlois el Chaumasse, d'une part, MM. Borrelly et Coggia, d'autre part, adressent leurs observations de la même comète, faites respectivement aux Observatoires de Nice et de Marseille. 20 SCIENCES PHY-IQUES. — MM. C. E. Guye et S. Rat- novsky ont déterminé expérimentalement la variation de l'inertie de l’électron en fonction de la vitesse dans les rayonscathodiques. Les résultats obtenuss'accordent beaucoup mieux avec la formule de Lorentz qu'avec la formule d'Abraham. — MM. G. A. Hemsalech et C. de Watteville ont examiné le spectre du fer dans la flamme du chalumeau oxyacétylénique ; l'intensité des raies est plus grande qu'avec le chalumeauoxyhydrique ; en outre, on observe l'apparition de traces de quelques raies caractéristiques du cône bleu du bec de Bunsen. — M. H. Guilleminot a constaté que la paraffine, se rapprochant en cela des tissus organiques, possède, comparativement à l'aluminium, une puissance absor- bante très élevée pour les rayons & et 8 du radium ; le taux d'absorption millimétrique est considérable pour les premières couches traversées. —M.L. Dunoyer a véri- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 171 fié l'émission de charges électriques par les métaux alcalins à l'obscurité; la plus faible lumière augmente énormément le phénomène. L'émission à l'obscurité pourrait alors s'expliquer par l’action sur le métal du rayonnement d'équilibre existant à la température ordi- naire à l'intérieur du corps noir où est placé le métal. — M. A. Rosenstiehl : Conséquence de la théorie d'Young ; construction chromatique dans l'espace (voir p.173). — M. D. Gernez montre que la phospho- rescence des sulfures de Ca, Sr el Ba peut s'atténuer lentement, puis s'éteindre sous l’action prolongée de l'air et de l’eau. On peut la leur rendre en les chauffant dans un courant d'hydrogène sec. — M. L. Nomblot n'a pu obtenir de dérivés du triazane par la réduction des dérivés nitrosoacidylés de l’hydrazobenzène. — M. A. Trillat a reconnu que la combustion incomplète de la paille légèrement humectée fournit des dérivés aldéhydiques et polyphénoliques qui jouissent de pro- priétés antiseptiques et désinfectantes notables. — MM. F.Bordaset Touplain ont constaté que le lactateet l'oxalate de fer, l'argile colloïdale, décomposent H°0* et donnent toutes les réactions colorées caractéris- tiques des prétendues enzymes peroxydantes du lait cru; il en résulte que ce dernier doit ces diverses réactions uniquement à son état colloïdal. — MM. Ch. Maurain et G. Warcollier ont observé que la stérilisa- tion du vin blanc en fermentation par les rayons ultra-violets est plus facile que celle du cidre ;-elle est obtenue après une minute d'exposition en couche de 1,7 millimètre d'épaisseur. — M. J. Chevalier à reconnu que la teneur en alcaloïdes des feuilles de belladone est considérablement augmentée par l’addi- tion d'engrais azotés ; les engrais potassiques el phos- phatiques n'ont pas d'influence bien sensible. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Doyon montre que l'atropine détermine chez le chien l'incoagulabilité du sang quand elle a été injectée dans une veine mésa- raïque ou le canal cholédoque ; elle agit par l'intermé- diaire du foie. — M. H. Vincent a réalisé la vaccination antityphique chez le cobaye par injection soit du bacille vivant en culture de vingt-quatre heures, soit d'une macération de bacilles vivants, centritugée et stérilisée, soit d'une culture de vingt-quatre heures tuée par la chaleur à 55°. — M. H. Carré a reconnu que la congestion intestinale du cheval n’est pas une affec- tion du tube digestif; c'est une infection générale de l'organisme surmené par le bacille de Preisz-Nocard ; les lésions constatées sont dues au poison sécrété par ce bacille. — M. E. Vasticar présente ses recherches sur la structure de la tectoria. —- M. L. Roule signale l'existence dans la Méditerranée d'un Nemyehtys véri- table, nettement caractérisé faisant partie du cycle des formes d'une espèce atlantique déjà connue, le N. scolopaceus Rich. — M. Hegyi à étudié en Hongrie la maladie du pied noir de la pomme de terre. Elle est due à des bactéries dusol pénétrant à l’intérieur de latige par des lésions faites par des insectes. — M. L. Cayeux montre que le- Girvanella et toutes les autres algues calcaires du même type sont absolument étrangères à la genèse de la structure oolithique. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 48 Janvier 1910. M. Albert Robin expose les principes du traitement de la déminéralisation chez le tuberculeux ou le pré- tuberculeux. Il faut chercher à introduire les éléments minéraux sous la forme alimentaire, ou aider l’assimi- lation en veillant au fonctionnement du foie et de l’in- testin. On ne reminéralise pas s’il y a dans l'organisme une fabrique permanente d'acides, si l’on alimente avec des produits acides, même combustibles, ou avec des produits formant des acides au cours de leur évo- lution intra-organique. L'auteur indique ensuite un nouveau mode de pratiquer l’antisepsie pulmonaire directe, par inhalation d'iodure d’éthyle au milieu d'un fort courant de vapeur d’eau, — L'Académie con- tinue ensuite la discussion sur la prophylaxie de la fièvre typhoïde. La /evue reviendra ultérieurement sur celte question. Séance du 8 Février 1910*. M. F. Widal présente un Rapport sur une commu- nication de M. Marmorek concernant le diagnostic de la tuberculose par la méthode de la déviation du com- plément. Cet auteur suppose que les bacilles en acti- vité émettent une toxine différente de la tuberculine : c'est cette toxine qu'il recherche dans le sérum des malades avec son sérum antituberculeux, en ajoutant comme complément une ou deux gouttes de sérum frais de cobaye. La réaction a été d'accord avec le dia- gnostic dans 95 °/, des cas. — Suite de la discussion sur la prophylaxie de la fièvre typhoïde. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 29 Janvier 1910. M. Ch. Porcher a constaté que l’extrail éthéré de l'intestin des jeunes animaux nourris exclusivement au lait dédouble le cellose en donnant naissance à du glucose. — MM. M. Doyon et Cl. Gautier montrent que l’atropine en injection mésaraique, tout en pro- duisant une baisse de la pression et l’incoagulabilité du sang chez le chien, ne provoque pas d'hémorragies intestinalescommelapeptone.—M.G. Loiselareconnu, par une série d'expériences ayant duré cinq ans chez le lapin, que le procréateur mâle, non seulement déter- mine pour sa part les caractères d’une partie de la descendance, mais encore modifie la transmission héréditaire des caractères récessifs des grands-parents. — MM. H. Busquet et V. Pachon ont observé que l’atropine, qui fait disparaître tout effet hypoteseur de la choline, laisse persister dans son intégralité l'effet hypotenseur des extraits de thymus, de thyroïde, de pancréas, ce qui prouve que la choline n’est pas l'élément hypotenseur de ces extraits. — MM. Ch. Achard, H. Bénard et Ch. Gagneux montrent que l'étude des leuco-réactions génitales permet de recon- naître chez la femme l’état de grossesse par l'examen du sang. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont découvert dans le foie de l'Agama colonorum une coccidie parasite nouvelle, à laquelle ils donnent le nom de C. agamëæ. — M. L. Morel à reconnu que l’ablation de la plus grande partie du tissu parathyroïdien chez le chat non encore adulte retarde nettement le processus de réparation des fractures, tandis qu'elle n’a aucun effet chez le chat adulte. — MM. E. Wer- theimer et E. Duvillier ont constaté que l'injection de chloroforme dans lintestin d’un chien provoque une accélération plus ou moins marquée, parfois considérable, de la sécrétion pancréatique. — M. Ch. Pérez ramène les phénomènes histologiques de la métamorphose des insectes à trois ensembles de processus généraux : destructions totales, histogénèses nouvelles, remaniements sur place. — MM. E. Maurel et Arnaud montrent que la colchicine, après son absorption, active les dépenses des protoplasmas: lorsque cette action est trop intense, l'organisme, pour l'éliminer, trouvant la voie rénale insuflisante, a recours à une voie supplémentaire, celle de l'intestin, en exagérant ses sécrélions. — M. A. Frouin à observé que le chauffage à 80° du sérum antidiphtérique ne permet pas d'en extraire l'antitoxine par les solutions de NaCl; à 75°, l'extraction s'élève à la moilié ; à 70°, elle est complète. — MM. A. Frouin et M. de Medeiros ont constaté que la peptone diminue l’action sécrétoire de HCI sur l'intestin, tandis qu'elle augmente celle des acides organiques; les sucres augmentent l’action sécrétoire des acides organiques. — MM. A. Frouin et S. Marbé montrent que l'action précédente de la peptone provient de ce qu'elle empêche la production 1 Par suite de la crue de la Seine, il ny à pas eu de séances les 25 janvier et 4er février. 472 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de sécrétine sous l'influence de HCI et augmente, au contraire, la production de sécrétine sous l'influence des acides organiques. — M. P. Wintrebert a observé que le vomer et le paiatin larvaires de l'Amblystoma tigrinum disparaissent pendant la métamorphose par décalcification progressive ; l'histogénèse détermine la formation tardive d’un vomer nouveau, autonome, sans participation du palatin. Séance du 5 Février 1910. MM. M. Doyon et CI. Gautier ont constaté que la bile est plus nocive pour lorganisme lorsqu'elle pé- nètre par la veine porte que lorsqu'elle pénètre par la saphène. — MM. F. Rathery et M. Saison ont observé que l'inhalation d’éther chez le lapin peut produire des lésions rénales et hépatiques; mais ces lésions sont inconstantes. Elles sont caractérisées par de la con- gestion, de la cytolyse protoplasmique et de l'homo- généisation. — MM. A. Raulliet el A. Henry décri- vent une série de Nématodes parasites de l'œil, dont plusieurs rangés dans le genre Ærlaria, qui doivent rentrer en réalité dans le genre Thelazia, créé par Bosc en 1819. — M. G. Repaci à isolé du pus d'un abcès gangreneux du poumon un streplococcobacille anaérobie, très pathogène, qu'il nomme Streptobacil- lus niger qangrienæ pulmonaris. — M. A. Lécaillon donne quelques renseignements complémentaires sur les trois couches de la capsule vitelline de l'œuf nou- vellement pondu du merle. — MM. G. Guillainet G. Laroche ont constaté que le cerveau de l'homme et du cobaye asepliques fixe la tuberculine et la retient malgré des lavages répétés; en outre, il active son pouvoir toxique. — M. F. Guéguen a étudié une mala- die du fruit du cacaoyer produite par une Mucédinée du genre Acrostalaginus ; celle-ci pénètre dans le fruit par un trou percé par un petit coléoptère brun de la lamille des Scotylides. — MM. H. Busquet el V. Pa- chon montrent que l'action hypotensive de l'extrait d'ovaire, qui se manifeste chez l'animal normal, per- siste dans son intégralité chez le chien atropinisé. — MM. A. Calmette et L. Massol ont reconnu que cer- tains sérums d'animaux possèdent la propriété d'em- pêcher la réaction de fixation de Bordet-Genzou pour le diagnostic de la tuberculose; cela tient à ce qu'ils renfermenteux-mêmes des anticorps. — M. G. Moruzzi a observé que les ions H et OH empêchent le pouvoir hémolytique des sérums artificiels, mais ils n’em- pêchent pas l’ambocepteur de se fixer sur les globules rouges. — MM. L. Karwacki et C. Szokalski montrent que les spirochètes d'Obermeier peuvent se conserver dans les sanssues au delà de cent jours. Les anticorps spécifiques, introduits dans l'organisme de la sangsue avec les spirochètes, possedent une action spirochéti- cide presque insignifiante en comparaison avec celle des microbes secondaires du tube digestif de la sang- sue. — M. M. Doyon à observé que l’atropine agit sur la coagulabilité du sang par un mécanisme analogue, sinon identique, à celui de la peptone. — MM. P. Teis- sier et R. Benard ont constaté des troubles ou lésions hépatiques nets chez beaucoup de scarlatineux : hyper- trophie, sensibibilité à la pression ou à la percussion, ictère. — M. Ch.-A. François-Franck à appliqué la méthode de Gaertner, avec ou sans anémie préalable, à la sphygmomanométrie digitale. — MM. A. Lagrif- foul, Arnal et H. Roger ont observé, au cours d’une épidémie de fièvre de Malte, dans un certain nombre de cas, une association très nette de cette fièvre avec la typhoïde, caractérisée par la double séro-agglutina- tion. M. Ph. Pagniez est élu membre titulaire de la So- ciété. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 18 Janvier 1910. MM. J. C. Gauthier et A. Raybaud ont déterminé les Pulicides parasites des rats à Marseille. Sur les rats noirs et alexandrins des cales des navires, le Pulex Cheopis prédomine de beaucoup ; sur les rats gris des quais, la prédominance revient au Ceratophyllus fascialus ; cependant, à certaines époques, elle peut passer au P. Cheopis. — M. S. Costa à observé une ascile et des lésions viscérales mortelles à la suite de l'inoculation sous-cutanée du bacille fusiforme de Vincent chez le cobaye. Le même bacille parait jouer un rôle dans les suppurations prolongées et les lésions viscérales consécutives chez l'homme. — M. C. Gerber a étudié la loi d'action des sels neutres de K, Na, AzH!, Li, Ca, Sr, Ba, Mg, Cd, Zn, Pb sur la coagulation de la caséine du lait bouilli emprésuré. — MM. Alezais et Peyron ont constaté le développement d'éléments cellulaires de la série connective aux dépens de formations d’origine épithéliale dans les tumeurs glandulaires de la face. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 21 Janvier 1910. M. Ch. Nordmann expose quelques-uns des résultats des recherches qu'il poursuit depuis quatre ans sur les températures ellectives des étoiles. Sir Norman Loc- kver, par la considération de la simplicité plus ou moins grande des divers spectres stellaires et par l'in- tensité avec laquelle s'y manifestent les enhanced lines (dont il a, au moyen de sources terrestres, constaté l'apparition progressive à mesure que la température s'élève), a cru pouvoir ranger les diverses classes d'étoiles suivant une échelle croissante de tempéra- tures. Les hypothèses de Lockyer n’ont pas toutes été acceptées sans objections, et il était nécessaire d'abor- der si possible par des méthodes directes la mesure des températures stellaires. C’est ce que s'est proposé M. Nordmann par l'application des nouvelles lois du rayonnement aux données fournies par son photomètre stellaire hétérochrome, qui permet de comparer les intensités relatives des étoiles dans certaines régions spectrales bien définies, entre elles et avec celles de sources terrestres connues. Les résultats ainsi obtenus permettent, indépendamment de toute loi numérique, de classer les étoiles étudiéés par ordre de températures croissantes, et ces étoiles se sont, à très peu d’'exceptions près, trouvées dans l’ordre prévu par Sir Norman Lockyer, ce qui paraît constituer une con- firmation des hypothèses qu'il avait faites. En outre, en appliquant la loi de Planck et une certaine méthode d'approximations successives, on obtient des valeurs numériques qui sont comprises entre 2.870 absolus pour p Persée et 40.000° pour À Taureau. Pour le Soleil, on à obtenu 5.320° par ce procédé, qui conslitue en somme une méthode de pyrométrie optique différen- tielle : ce nombre est du même ordre que ceux qu'ont fournis récemment les méthodes actinométriques et pyrhéliométriques. L'auteur discute ensuite quelques- uns des résultats obtenus et attire notamment l'atten- tion sur les points suivants : 1° On connait le rapport des éclats intrinsèques de l'une des étoiles étudiées (Algol) et du Soleil. Or, en appliquant à cette étoile la loi (démontrée depuis plusieurs années sur les sources terrestres et que l’auteur à aussi véritiée en ce qui con- cerne les étoiles) d'après laquelle le rayonnement vi- sible total d'une source varie en fonction de la tempé- rature comme l'intensité de la radiation 0u,54, on trouve pour Algol une température effective de 13.800, c'est-à dire presque identiquement la même qui a été trouvée indépendamment au moyen du photomètre stellaire hétérochrome ; 2° En réalité, les étoiles ne peuvent pas être assimilées rigoureusement à des corps noirs, car leurs photosphères sont entourées d’atmo- sphères absorbantes dont l'effet sur leur température effective n’est pas le même suivant qu'on mesure cette température effective par l'étude qualitative ou quantita- tive du rayonnement de l'étoile. L'auteurexpose notam- mentdans le cas du Soleil la signification numérique de ces faits ; 3° Enfin, l’auteur montre comment le nombre trouvé pour y Cygne (5,620° absolus) fournit la première ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES donnée connue sur la température de létincelle forte- ment condensée, et il expose quelques faits nouveaux relatifs à l'étoile variable à Céphée, pour laquelle il à trouvé des températures effectives notablement diffé- rentes au moment du minimum et à celui du maximum de son éclat. — M. Guillet : L'électrodiapason: contact et amplitude dans l'entretien direct. L'auteur rap- pelle que l'entretien électrique des vibrations du dia- pason comporte l'emploi d'un contact dont l'un des pôles a est fixe et dont l’autre pôle 2 participe en tout ou partie, selon la nature de la liaison, au mouvement du diapason. Le contact fut d’abord commandé par un interrupteur auxiliaire (Lissajous, Helmholtz); l'entre- tien était alors obtenu par synchronisation. Plus tard, on fit de l'auto-entretien en adaptant le contact au dia- pason lui-même, Pour suivre le jeu du contact, et déterminer les conditions auxquelles doit satisfaire sa construction, M. Guillet raisonne sur le mobile clas- sique M qui parcourt d'un mouvement uniforme, pen- dant la durée T de la vibration du diapason, une cir- conférence ayant pour centre la position d'équilibre du pôle mobile et pour rayon l'amplitude de la vibration de ce pôle. Si M, est la position de M qui correspond à la fermeture du circuit, l'ouverture du circuit corres- pondra au passage de M par la position M, symétrique de M, par rapport au diamètre trajectoire de b, et la durée t de la fermeture sera : (—2fT/2xr, en dési- gnant par 26 l'angle M,OM,. Un milliampère inséré dans le circuit indique par conséquent un courant appa- rent : — Ng, N étant la fréquence du diapason et g la quantité d'électricité admise dans le circuit à la fois pendant que celui-ci est fermé et au moment où il s'ouvre. M. Guillet projette des courbes obtenues en portant en abscisses les valeurs du courant apparent 7 et en ordonnées les amplitudes à des vibrations du spot formé, sur une échelle transparente, par un miroir sphérique de 3 mètres de rayon, fixé sur l'extrémité de l’une des branches du diapason. Pour un circuit d'en- tretien et une force électromotrice donnés on fait va- rier $, et par suite 7, en modifiant la distance qui sépare, à l'équilibre, les deux pôles du contact ; dans le cas d'un contact à mercure, on élèvera donc progressivement le niveau du liquide. Les courbes montrent que la dévia- tion à augmente d'abord Urès rapidement (quelques millimètres par centiampère) lorsque 6 croît à partir de zéro, passe par un maximum A pour une valeur 7, voisine de 1/2 (1 étant le courant au repos, le contact étant fermé), puis diminue ; le fonctionnement n'est plus alors stable et bientôt le diapason se décroche. Toute modification qui laisse 1 constant (variation du bras d'action / de l’électro, substitution d'un diapason à un autre, etc.) entraîne une variation de À, mais les sommets de toutes les courbes (1, à) seront sur la droite i—=1,. En communiquant au diapason une aimanta- tion iniliale d'intensité variable et de sens convenable, la déviation À va d’abord en augmentant, passe par un maximum, puis diminue. M. Guillet insiste sur la nécessité d'employer des contacts géométriquement définis, aussi indéformables que possible pendant la marche. Puis il projette divers contacts : 1° contact à fil tendu ; 2 contact à lame ; 3° contact pneumatique dans lequel le courant est établi et supprimé par le Jeu d'une membrane armée fermant un tube de très petites dimensions dans lequel oscille un piston soli- daire du diapason. M. Guillet décrit enfin un contact unilatéral, fermant le circuit seulement pendant que les branches du diapason se rendent vers l’électro. — M. A. Rosenstiehl : Conséquence de lathéorie d' Young. Le blanc binaire, le blanc ternaire, le cercle chroma- tique. Il ÿ a trente ans que M. Rosenstiehl a fait obser- ver qu'il existe un nombre indéterminé de lumières blanches, qui physiquement sont différentes, tandis que la sensation du blanc est la même pour toutes. Le but de sa communication actuelle est de démontrer que, si d’après Young la sensation du blanc est ternaire, il suflit d'admettre que le blanc résulte de l'excitation égale des trois sensations primaires pour que le blanc 173 devienne unité de mesure pour un éclairage donné, L'expérience et une construction géométrique corres- pondante montrentque, quand on mêle deux couleurs, une partie de la coloration disparait et est remplacé par la sensation du blanc. {1 y a formation de blanc binaire. Il faut donc distinguer pour chaque coule binaire deux espèces d'intensités : celle de la coloration et celle de l'intensité lumineuse totale ; dès lors chaque couleur est représentée par deux points. Le lieu des intensités de coloration se trouve sur le péri- mètre d'un triangle et celui des intensités lumineuses sur le cercle circonscrit. Si l’on fait intervenir la troi- sième sensation primaire, les couleurs obtenues ne peuvent plus s'inscrire dans un plan. La construction devient une figure dans l'espace. Celle-ei est une pyra- mide triangulaire enveloppée d'un cône, dont le som- met représente le blanc; un cas particulier est repré- senté par les couleurs de #6me intensité de coloration et d'intensité lumineuse totale variable. Ces couleurs se trouvent placées sur une perpendiculaire au plan et parallèle à l'axe de la figure ; et, pour l’ensemble des diverses couleurs d'un cercle chromatique, le lieu des points est un cylindre inscrit, dont le diamètre carac- térise les intensités et dont les génératrices représentent les intermédiaires entre la couleur la plus foncée et la couleur la plus claire. Ces couleurs sont intéressantes au point de vue des applications : ce sont les vrais camaieux. En supposant réalisé le maximum de colo- ration théoriquement possible, l'intensité correspon- dante de chaque couleur primaire est le tiers du blane. Cette intensité décroit pour les couleurs binaires jus- qu'au minimum de 1/6. Toutes ces couleurs sont mé- langées de blanc de manière à maintenir constante l'intensité lumineuse totale. Si l'on veut réaliser F intensité de coloration pour toutes les couleurs, il faut la ramener au 1/6 et par conséquent diminuer de moitié celle des couleurs primaires. La figure devient alors un cercle. Pratiquement, on ne peut actuellement réaliser cet idéal, faute de matières colorantes appro- priées. M. Rosenstiehl présente un cercle chromatique tel qu'il résulte de la théorie d'Young et fait observer que l'intensité de coloration des couleurs de ce cercle est inconnue. Son intensité lumineuse totale est repré- sentée par un secteur blanc de 50° en moyenne (théorie 1209). Ces 50° sont un maximum ; ils renfermi nt {rois espèces de blancs qui sont : la lumière blanche inci- dente diffusée, la sensation du blanc binaire et le blanc ternaire surajouté. L'ignorance dans laquelle nous sommes au sujet de la première donnée enlève pour l'instant à la construction dans l’espace tout l'intérêt pratique. Mais cet intérêt subsiste relativement à la représentation dans un plan et aux intensités de coloration. Cette figure permet de résoudre une série de problèmes relatifs à la distance angulaire, à l'inten- sité relative des couleurs, à leur analyse et leur repro- duction synthétique à l’aide des disques tournants. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 14 Janvier 1910. La Société procède au renouvellement de son bureau pour 1910, qui est ainsi composé : Président : M. A. Haller; Vice-présidents : MM. Hanriot, A. Hébert, A. Béhal et Ch. Moureu ; Secrétaire général : M. P. Freundler; Secrétaire : M. Marquis; Trésorier : M. Chenal. Séance du 28 Janvier 1910. M. M. Delépine a repris l'étude de-la dissolution du platine par l'acide sulfurique, afin de donner une expli- cation des résultats de M. Quennessen concernant l'action favorable de l'oxygène. Il montre que l'oxygène n’est pas nécessaire, mais qu'il aide la dissolution en faisant disparaître l'anhydride sulfureux formé dans la réaction, anhydride qui contrarie la dissolution et peut 174 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'arrêter si Fon opère en tube scellé, comme M. Quen- nessen. Les solutions provenant de lattaque con- tiennent l'acide sesquioxyplatisulfurique de M. Blondel et un composé brun cristallisé que l’on peut écrire provisoirement Pt(OH)?SO*H.2H°0. Ce sont deux combi- naisons dérivées du platine trivalent, à acide sulfu- rique dissimulé. — MM. Ch. Moureu et J.-Ch. Bon- grand confirment la communication préliminaire sur le sous-azoture de carbone qu'ils ont faite à la Société en juillet dernier. En dehors du cyanogène (Gay- Lussac, 4815), on n'avait pas encore obtenu d'autre corps défini exclusivement formé de carbone et d'azote. La formule est C‘Az?, soit Az = C-C= CG-C = A7. Le sous- azoture de carbone fond à 20°,5-210, et bout à 76° sous 753 millimètres; D?°—0,9703. La réfraction molécu- laire et la dispersion moléculaire présentent de fortes exaltations. Son odeur, ainsi que les propriétés violem- ment irritantes de sa vapeur rappellent le cyanogène. Très aisément combustible, il prend feu spontanément à l’air vers 130°. Sa flamme est pourprée comme celle du cyanogène. Son point d'ébullition est inférieur de 190° à celui du dinitrile saturé correspondant AzC-CH?-CH°-CAz. Une série de rapprochements, notam- ment avec le cyanogène et le sous-oxyde de carbone C#0?, montrent que cela tient à la structure très simple et très spéciale à la fois du sous-azoture de carbone, et en particulier à ce fait que deux éléments seulement composent sa molécule. — MM. Gabriel Bertrand et Maurice Holderer exposent le résultat de leurs recherches sur la cellase, nouvelle diastase dédoublant le cellose. Ils montrent qu'il existe une diastase spéci- fique du cellose. Cette diastase, qu'ils proposent d'appeler cellase, se trouve, plus ou moins mélangée avec d’autres espèces diastasiques, dans des organes appartenant à des végétaux divers : amandes de l'abri- cotier et de l’amandier, graines de l'orge, mycélium de l’Aspergillus niger, ete. Les auteurs n’en ont pas trouvé dans le sérum de cheval, du moins en propor- tion appréciable, ni dans la levure haute, ni enfin dans la macération glycérinée de Pussula quercetii. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 13 Janvier 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. F. Richardson indique une méthode de solution arithmétique appro- ximative, par des différences finies, des problèmes de Physique comportant des équations différentielles ; il en donne une application à la détermination des ten- sions dans une digue en maconnerie. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. G. C. Simpson : L'élec- tricité de la pluie et de la neige. L'auteur a poursuivi ses mesures d'électricité de la pluie et a, en outre, fait une série de déterminations de l'électricité de la neige pendant l'hiver 1908-1909. Il confirme ses conclu- sions primitives et montre qu'à Simla : 140 la pluie transporte avec elle de haut en bas plus de trois fois autant d'électricité positive que d'électricité négative; 20 plus la pluie est intense, plus elle est chargée posi- tivement ; 3° une pluie légère est en général plus chargée qu'une pluie forte, que la charge soit positive ou négative ; 4° la charge positive entraînée par la neige est trois à quatre fois plus forte que la charge méthode pour la détermination de la viscosité des gaz, spécialement lorsqu'on ne dispose que de faibles quan- tités. L'appareil de l’auteur se compose essentiellement de deux tubes de verre verticaux réunis en haut et en bas par des coudes, de façon à former une enceinte close, L'un de ces tubes est un capillaire; l’autre pos- sède une section plus large, mais suffisamment étroite pour qu'une colonnette de mercure s'y maintienne intacte, L'appareil est rempli du gaz à étudier à la pression atmosphérique. La colonnette de mercure, placée vers le haut du tube large, tend à descendre sous son propre poids et chasse au-dessous d'elle le gaz qui remonte par le tube capillaire avec une vitesse qui dépend de sa viscosité. L'auteur arrive à établir l'équation n—7R'7b/SlvA, qui donne le coefficient de viscosité en fonction de R, rayon du tube capillaire, g, intensité de la pesanteur, /, longueur du tube capil- luire, v, volume de gaz poussé par le mercure, A, sec- tion du tube large, et h, constante. Les mesures de la viscosité de l'air sec faites au moyen de cet appareil ont donné pour n X 10*:à120,3C , 1,779; à 15°,1,799; à 170,8, 1,819; à 230,1,1,857. — M. P. Phillips a déterminé la recombinaïson des ions à différentes températures. Une couche d'air d'épaisseur uniforme, située entre deux électrodes parallèles, est ionisée par un seul éclat d’un tube de Roentgen. La quantité d'électricité reçue par chaque électrode dépend du champ établi entre elles; pour deux champs 7, et 7,, les nombres d'ions recus par unité de surface de l’électrode seront N, et N,. A la température ordinaire, on peut obtenir expé- rimentalement la valeur de (N,—N,)/N, et celle de la déviation D, d’un galvanomètre proportionnelle au nombre d'ions par c.c. produits à l’origine par l'éclat du tube de Roentgen. Ces valeurs entrent d'autre part dans une équation avec «, coefficient de recombinai- son, k, et Æ,, vitesses des ions positifs et négatifs dans le champ unité, qui sont connus, et à, constante incon- nue. On calcule cette constante au moyen des autres valeurs connues. Puis l’on répète l'expérience à diver- ses températures, et au moyen de la formule dont on conpait maintenant la constante, on calcule alors «. L'auteur a ainsi obtenu les valeurs suivantes en prenant a égal à l'unité à la température ordinaire : 160 107° 1769 7 1,0 0,5 0,360 2139 0,118 41550 0,399 La dernière valeur est probablement trop basse par suite de l'intervention de la diffusion. — Sir E. Thorpe et M. À. G. Francis ont procédé à une nouvelle déter- minalion du poids atomique du Strontium. Ils ont pré- paré à un grand état de pureté le chlorure et le bro- mure de strontium, puis ont cherché à déterminer les rapports 2Ag : SrBr°; 2AgBr:SrBr°; 2Ag:SrCl°; 24gcCl: SrCPE, d’abord en titrant les solutions de bromure et de chlorure avec une solution connue de nitrate d’Ag, puis en pesant les précipités de AgBr et de AgCl formés. Enfin les auteurs ont encore mesuré les rapports SrBr=:SrS0® et SrCl:SrS0*. Les moyennes des six séries d'expériences sont les suivantes : 87,645 + 0,0037, 87,653 0,0045 ; 87,642 +0,0017 ; 87,645 + 0,0020 ; 87,629 + 0,021; 87,661 +0,0078. La moyenne générale est de 87,646 +0,0029, soit 87,65, au lieu de 87,62, nombre adopté pour la Table internationale. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 21 Janvier 1910. M. R. E. Baynes : Les chaleurs spécifiques de satu- ralion avec les caractéristiques de van der Waals et de Clausius. L'auteur montre que, par l'emploi d’une variable spéciale y, on peut trouver des expressions exactes, avec la caractéristique de van der Waals et celle de Clausius, pour les chaleurs spécifiques s'et s' du liquide et de la vapeur saturés et pour toutes les autres grandeurs reliées à l’état de saturation. Les résultats sont toutefois très différents suivant que l’on emploie l'une ou l’autre caractéristique, surtout pour la différence s-k (k étant la chaleur spécifique isomé- trique) et pour la chaleur latente de vaporisation. — M. Thornton a étudié /a polarisation d’ellipsoïdes et de cylindres diélectriques suspendus dans un champ de force permanent. Des mesures de l'intensité du champ, des dimensions des ellipsoides et de la fréquence des oscillations de torsion, on déduit la constante diélec- trique. La composante longitudinale de la polarisation est indépendante de l'intensité du champ à l'intérieur de l’ellipsoide. Les substances examinées ont été le quartz, le flint, l’'ambre, le soufre, l’ébonite, le caout- chouc, la gutta, la paraffine, la résine. De l’augmen- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 115 tion de la constante diélectrique, on déduit la résistance spécifique en considérant la variation de polarisation comme équivalente à un courant. La vitesse de dépo- larisation quand le champ est renversé à été trouvée la mème que celle de polarisation et uniforme pendant plusieurs heures. — M. A. Campbell: Sur l'emploi des inductomètres mutuels. L'auteur préconise l'emploi avec ces instruments d’un pont à bras égaux, en intro- duisant les deux moitiés du circuit secondaire dans des bras adjacents du pont. Ces inductomètres se prêtent très bien à la mesure des résistances effectives, ainsi qu'à l'essai du fer par une méthode de zéro. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 20 Janvier 1910. MM. G. Barger et A. J. Ewins ont observé que l'ergotinine, anhydride de l’ergotoxine, chauffée avec une solution diluée d'HPO* dans l'alcool absolu, four- nit le phosphate cristallin de l’éther éthylique de l'ergotoxine CH#0*Az5.CO?C?H°.H*PO"; la nouvelle base est amorphe et insoluble dans NaOH. Par distillation destructive de l’ergotinine aussi bien que de lergo- toxine, on à obtenu un sublimé d'isobutyrylformamide. — MM. F. B. Power et Ch. W. Moore ont déterminé les constituants de la pulpe de coloquinte (Citrullus colocynthis). La partie de l'extrait alcoolique soluble dans l’eau contient un alcool C*#*H*O*(OH}*°, F.285°-2909, le citrullol, et un principe alcaloïdique amorphe. De la partie insoluble dans l’eau on a retiré de l’a-élaté- rine, F.232°, un peu d'hentriacontane, un phytostérol C#H%0, F.160-162, et un mélange d'acides gras. Les graines de coloquinte contiennent des traces du prin- cipe alcaloïdique, un peu d’enzyme et 12,72°/, d'une huile grasse, contenant un phytostérol, C*’H*0, F.1580-160°. — MM. F. Challenger et F. S. Kipping ont préparé, par action du chlorure de dibenzyléthyl- silicyle sur C‘H'MgBr, le dibenzyléthylpropylsilicane Si (C°H°)(C*H7)(CH?C°H'}, Eb.2620-265°, qui, traité par l'acide chlorosulfonique, donne un acide d/-monosul- fonique, résoluble en ses constituants actifs par cris- tallisation fractionnée de ses sels avec des alcaloïdes actifs. — MM. H. R. Le Sueur et P. Haas, en faisant réagir KOH alcoolique sur l'acide ax'-dibromoadipique, ont obtenu l'acide cis-tétrahydrofurane-2: 5-dicarboxy- lique et l'acide muconique. L'action de la diéthyla- niline sur l'œx-dibromoadipate d’éthyle fournit du 1-phénylpyrrolidine-2 : 5-dicarboxylate d’éthyle et un peu de muconate d'éthyle. — MM. M. O. Forster et R. Muller ont préparé les acides méthyl-, éthyl- et phényl-triazo-maloniques et acétiques et étudié leurs propriétés. — Mie M. Boyle a préparé les éthers et les sels des acides 2:5-, 3:5-, 2: 4- et 3 : 4-diiodobenzè- nesulfoniques et 3:4:5-, 2:4:5- et 2:3:5-triiodo- benzènesulfoniques ; l’accumulation d'iode dans le noyau réduit la stabilité des éthers sulfoniques. — Mie A. Homer et M. J. E. Purvis ont étudié les spec- tres d'absorption du naphtalène et du tétraméthyl- naphtalène; en solution N/ 1000, ils présentent tous deux quatre bandes étroites. Les courbes d'absorption sont tout à fait analogues. — MM. P. F. Frankland et D. F. Twiss ont préparé les halogéno-anilides de l'acide tartrique et comparent leur activité optique avec celle de la tartranilide. — M. I. Masson a cons- taté qu'en mélangeant du carbure de calcium pulvérisé avec des hydrates cristallins pulvérisés, il se dégage rapidement de l’acétylène, à froid ou à une faible tem- pérature, en même temps qu'il se forme des hydrates inférieurs ou des sels anhydres. — MM. P. C. Ray et A. C. Ghosh ont observé que le nitrite de dimercu- rammonium AzHg?’Az0?, chauffé lentement à 250°, se décompose en donnant Hg,0,Az et Az*0. — M. A. J. Berry à étudié l’adsorption de l’uranium X par le sulfate de baryum et a trouvé que la quantité log (a-x): log x/m est constante, où a est la quantité initiale d'uranium X en solution, x la quantité adsorbée et m la masse de sulfate de baryum qui l’adsorbe. — MM. Al. Mc Kenzie et H. B. P. Humphries ont résolu l'acide $-hydroxy-B-phénylpropionique en ses consti- tuants optiquement actifs et étudié le déplacement de OH par Br dans ces composés. — M. P. C. Ray à pré- paré les nitrites doubles du mercure et des métaux alcalino-terreux : Hg{AzO®}®.Ca(Az0®)*.5H°0; 3Hg(Az0 2Sr (AzO®}.5H*0 ; 3Hg(Az0*):.2Ba(Az0*}.5H<0. — MM. Th. H. Easterfield el J. Bee ont trouvé dans la résine du matai (Podocarpus spicatus) une substance cristalline C!#H*#0°, isomère du pino-résinol, K.119, contenant comme lui deux groupes OH et deux grou- pes CHS0. — M. A. V. Elsden à recherché si, confor- mément aux résultats de Zeughelis, la vapeur d'iode est capable de traverser les parois de verre minces; un tube de verre à parois très minces, contenant de l'iode et scellé, a été pesé à diverses reprises pendant neuf mois; son poids s’est maintenu abso- lument constant. — M. A. W. Crossley et MI: G. H. Wren ont réalisé la synthèse de l'acide 3:5-dichloro-0- phtalique en partant de 3 : 5-dinitro-0-xylène; le pro- duit obtenu est identique à celui qui résulte de l’action de PCI sur la diméthyldihydrorésorcine. — M. J. R. Partington à constaté que la loi de dilution des élec- trolytes peut s'exprimer par la relation &/(v+-Ka)(1-x) —constante, qu'il a vérifiée expérimentalement pour plusieurs sels. — M. A. W. Titherley, en faisant réagir le salicylate de phényle sur la phénylbenzamidine à 1109, a obtenu, en passant par divers composés intermé- diaires,la2-phényl-1:3-benzoxazine-4-one, qui résulte également de l’action catalytique de HCI sur les O- et Az-benzoyl-salicylamides entre 110 et 140°. Elle fond à 106° et possède des proprittés additives marquées ; elle est rapidement décomposée en présence d'ions H. — MM. E. de B. Barnett et S. Smiles ont étudié le réarrangement intramoléculaire des o-sulfoxydes de diphénylamine en sels d'azothionium. — MM. S. R. Edminson et T. P. Hilditeh, résumant leurs recher- ches sur l'effet de l'accroissement des groupes contigus non saturés sur l’activité optique d'un système, mon- trent que, sur onze séries de composés, quatre présen- tent uneaugmentation progressive du pouvoirrotatoire, quatre une diminution progressive, et trois des relations variables; il n'y a donc pas de règle générale. — M. B. C. Aston a trouvé dans le pukatea (Laurea novæ Zelandiæ) trois alcaloïdes : la pukatéine, cris- tallisée, C!7H'70*Az, F.2009, [a], ——220°; la lauréline, amorphe, C‘#H*05Az, et la laurépukine, également amorphe, C'*H'#O*Az. — M'° A. Homer montre que la réaction de Friedel et Crafts, appliquée au naphtalène, procèdesuivant deux équations : RH ÆR,CI—RR, +HCI et RH RH—RR 2H, la seconde étant prépondérante aux hautes températures. En opérant avec le tétra- chlorure d’acétylène, on obtient une substance C#H:,F.267,5, identique à celle que Dewar et Jones ont obtenue par action du nickel-carbonyle sur le naphtalène, et qui semble être l'añaf'-dinaphtan- thracène. SE SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 3 Janvier 1910. M. G. T. Holloway présente une étude sur les rela- tions entre les industries minérales et chimiques, en attirant spécialement l'attention sur la façon dont les minéraux et leurs agrégats sont produits dans la Nature et la manière dont ils sont associés originelle- ment ou s'associent ultérieurement. SECTION DE MANCHESTER Séance du 3 Décembre 1909. M. Ch. W. Gamble a étudié les propriétés de cer- tains corps collagènes et la facon dont ils se comportent vis-à-vis de la lumière quand ils Sont associés avec des bichromates alcalins. On sait que, si de la gélatose 176 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES (colle de poisson) est mélangée à une solution de bichromate alcalin et qu'on sèche le tout à l'obscurité, le mélange peut être de nouveau dissous à froid. Mais si, après dessiccation, on expose la masse à la lumière pendant un temps assez long, elle brunit par suite de la réduction du composé chromique et elle n’est plus soluble dans l’eau, même à 50°. D'autre part, si un mélange de peptone de gélatine et de bichromate alcalin est exposé à la lumière, quoique la masse noir- cisse, elle reste soluble dans l’eau entièrement, quelle que soit la durée d'exposition. En outre, si la colle de poisson est soumise à l’hydrolyse, de facon que la gélatose soit transformée en peptone de gélatine, cette peptone n'est pas rendue insoluble dans l’eau par expo- sition à la lumière avec un bichromate alcalin. Comme toutes les formes ordinaires de gélatose sont des mé- langes de gélatose et de peptone de gélatine, on voit qu'une partie seulement du contenu solide de cette substance est capable de donner un produit insoluble avec l’oxyde de chrome. C’est ce qui explique la varia- tion de sensibilité des pellicules bichromatées em- ployées dans la photogravure; pour avoir le maximum de sensiblité, il faut donc éloigner autant que possible la peptone. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 13 Décembre 1909. M. J. W. Cobb a étudié la formation des silicates complexes. Il a commencé par l'étude de la réaction du carbonate de chaux sur la silice. Elle commence à environ 800° C., mais à cette température elle est très lente ; elle augmente à 1.100° et à 1.250° C., et à 4.400° elle est complète. Le silicate formé est entièrement soluble dans HCI. L'auteur a ensuite fait réagir le sul- fate de chaux sur la silice. Tandis que la température de dissociation du sulfate de chaux est de 1.225-1.230°, la silice le décompose déjà à 1.005°-1.010° pour former un silicate de calcium; cette température est indé- pendante du rapport des deux substances. A basse température, le silicate formé semble être 2Ca0.Si0*; mais, lorsque la température s'élève, il se rapproche de CaO.Si0?. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 27 Novembre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Kapteyn présente au nom de M. M. J. van Uven : Sur les trajectoires d'une fonction obtenue par itération infinitésimale dans son plan complexe. Si l’on suppose que la fonction Va= gn(x) est déduite de l'identité à l’aide de l'itération infinitésimale, la représentation conforme y: = 9 (x), s’engendra en même temps. L'auteur imagine deux plans complexes parallèles &, et «,, dont les axes réel et imaginaire de l’un sont les projections des axes cor- respondants de l’autre, et engendre une congruence de droites en joignant les points correspondants x, y de ces plans; à son tour cette congruence engendre un complexe de droites pendant que y est déduit de x par itération infinitésimale. Etude de ce complexe. Cas où le plan des y s'éloigne du plan des x de manière que la distance An soit proportionnelle à l'indice » d'itéra- tion. Courbes gauches, lieux des points y correspon- dant aux points x, etc. — Rapport de MM. H. E. de Bruyn et J. P. van der Stok sur le Mémoire de M. M. H. van Beresteyn, intitulé : « Constantes des marées pour des lieux le long des côtes et à l'embouchure des rivieres des Pays-Bas, calculées d'après la hauteur des eaux en 1906. » Le Mémoire paraîtra dans les publica- tions de l’Académie. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. C. Kapteyn : « On the absorption of light in space. » (Sur l'absorption de la lumière dans l’espace.) — M. W. H. Julius : L’or1- gine de la lumière de la chromospüère. Dans une . communication intitulée : « Photography of the flash spectrum without an eclipse », MM. Hale et Adams con- clurent que les longueurs d’onde de 121 raies de la chromosphère mesurées par eux ne diffèrent qu’extré- mement peu de celles des raies correspondantes de Fraunhofer de la table de Rowland. La déviation moyenne s'élève dans le sens positif ou négatif à 0,013A et, en faisant attention au signe, la déviation o systématique 0,002A est beaucoup plus petite que les erreurs de mesure. D'après ces savants, ce résultat ne s'accorde pas avec l'hypothèse émise par l’auteur, d'après laquelle les raies claires du spectre de la chro- mosphère et de la couche renversante seraient dues principalement à la réfraction anomale de la lumière venant de la photosphère. Cela tient à ce que MM. Hale et Adams se sont servis d’une version incorrecte de la théorie de l’auteur publiée par M. Hartmann dans les Astron. Nachr. de 1907. L'auteur fait voir en quoi sa théorie diffère de la représentation qu'en a donnée M. Hartmann et démontre que les résultats de MM. Hale etAdars ne sont pas en conflit avec elle. —M.H.Kamer- lingh Onnes présente au nom de MM. J. W. Giltay et M. de Haas : Sur le mouvement du chevalet du vio- lon. D'après les expériences des auteurs, le chevalet du violon est animé à la fois d’un mouvement parallèle et d'un mouvement transversal, et l’on fait varier consi- dérablement le timbre du violon si l’on varie l’inten- silé d’un de ces mouvements. Ces expériences font connaître en même temps l'explication physique de l'influence de la sourdine. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. J. van Laar : Quelques remarques sur un mémoire de MM. Tiramermans et Kohnstamm (Rev. gén. des Sciences, t. XX, p. 976). — Ensuite M. Lo- rentz présente la thèse de M. F. Fontein : « Onderzoe- kingen in verband met de afscheiding van foezelolie uit alcoholische vloeistoffen » (Recherches sur l'extraction de l'huile de fusel des liquides alcooliques). — M. A.P. N. Franchimont présente au nom de M. E. Kramer : Les dérivés de la pipérazine.— M. J. M. van Bemmelen présente au nom de M. W. P. Jorissen : Le Labora- toire chimique de l'Université de Leyde et ses pro- fesseurs depuis 1859 jusqu'à 1909. P. H. Scoure. 3° ScrENCES NATURELLES. — M. K. Martin : Rangifer tarandus aus Niederland (« Rangifer tarandus » des Pays-Bas). Description des restes d’un renne trouvé en juillet 1909 près de Gramsbevgen, dans un petit fleuve. — M. P. P. C. Hoek : Déduction de l’âge du saumon de la structure des écailles. Pendant la vie des saumons, les écailles s'agrandissent, leur nombre res- tant sensiblement le mème. La forme des écailles est assez régulière; elles sont oblongues d'abord et devien- nent de plus en plus circulaires ; annuellement, 12, 15, 20 anneaux nouveaux s'ajoutent au contour; ainsi le nombre des anneaux fait connaître à peu près l’âge du saumon. — M. H. Zwaardemaker présente au nom de M. A. K. M. Noyons : Communications sur lélectro- gramme de l'Atrium cordis. — M. S. H. Koorders : Pflanzengeographischer Ueberblick über die Tagaceae von Java. Apercu de géographie botanique sur les Tagaceae de l’île de Java. — M. F. A. F. C. Went pré- sente les thèses de M. J. Kuyper : « L'influence de la température sur la respiration des plantes supérieures », et de Mie C. J. Pekelharing : « Recherches sur la perception de lirritation de la pesanteur par les plantes ». Le Directeur-Gérant : Louis OLivIeR. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. Le 21° ANNÉE 5 15 MARS 1910 Revue générale BON SCIonces pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagnrde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1: — Nécrologie F. NV. Kohlrausech. — La Physique vient de perdre un de ses représentants les plus distingués en la personne de F. W. Kohlrausch, décédé en janvier dernier. Né en 1840 et fils d'un physicien connu, qui, avec Weber, fit la première détermination du rapport des unités électrostatiques et électromagnétiques, il se tourna de bonne heure vers cette partie de la science, qu'il étudia à Gôttingen et à Erlangen. Après avoir pro- fessé successivement à Gôüttingen, Frankfort-sur-le Main, Darmstadt, Wurzburg et Strasbourg, il fut nommé en 1895 président du PAysikaliseh-Technische Reichsanstalt à Charlottenburg, fonction qu'il résigna il y a quelques années. Bien que ses recherches se soient étendues sur plu- sieurs branches de la Physique, Koblrausch s’est sur- tout occupé des méthodes de mesure des quantités magnétiques et électriques : mesure absolue de la composante horizontale du champ magnétique ter- restre, de l'intensité d’un courant électrique, de l'unité de résistance électrique, de la résistance électrique des électrolytes, etc. Kohlrausch est l’auteur d'un ouvrage, classique en Allemagne, pour l’enseignement de la Physique expé- rimentale, les Leit{aden der praktischen Physik. Depuis 1870, ce livre a eu dix éditions dans son pays d'origine et deux éditions anglaises. $ 2. — Astronomie La comète de Halley dans le Talmud. — On ne pourrait contester que l'honneur d’avoir le premier établi la théorie cométaire sur une base scientifique et mathématique revient à l'astronome anglais Halley, qui, inspiré par les travaux de son ami Newton, essaya de rattacher les comètes à la loi de la gravitation uni- verselle, et y réussit pleinement par l'étude de leurs mouvements. Toutefois, il n'est peut-être pas sans intérêt de nous demander si, avant lui, aucun savant n'a eu connais- sance de la marche des comètes dans l’espace et de leur périodicité. Or, en compulsant certains passages REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. du Talmud, je crois avoir reconnu que les anciens observateurs de la Palestine ont, à ce sujet, possédé de curieuses indications. Voici, notamment, la traduc- tion textuelle d’un fragment qui me semble s'appliquer à la comète de Halley : « Deux sages de la Palestine, R. Gambiel et R. Josué, ont fait ensemble un voyage maritime. Le premier avait emporté une provision de pain. Le second avait, en outre, de la farine. Lorsque Gambiel eut mangé tout son pain, il demanda de la farine à son compa- gnon et Jui dit : « Tu savais donc que nous resterions si longtemps en route que tu as eu la précaution de te munir de farine? » — Josué répondit : « Il y a une étoile très brillante qui apparaït tous les soixante-dix ans et qui trompe les navigateurs. J'ai pensé qu'elle pourrait nous surprendre pendant notre voyage, nous égarer et prolonger ainsi notre séjour sur la mer. C'est pour cela que j'ai fait provision de farine. » La différence entre la période indiquée ici (70 ans) et la période réelle de la comète de Halley (75 à 76 ans s’expliquerait aisément par le fait que, dans les anciens textes hébreux, les valeurs ne sont généralement don- nées qu'en nombres ronds, c'est-à-dire avec un zéro pour chiffre terminal. Ajoutons aussi qu'il n'y a rien de surprenant à ce que les astronomes asiatiques aient ramené la durée de cette révolution cométaire au nombre 70, qui était sacré chez les Hébreux. Il s’agit très probablement de l'apparition de l'an 66. En effet, Gambiel II, l’un des personnages dont il vient d'être question, naquit dans la première moitié du siècle premier de notre ère, et fut Nassi ou chef suprême des Juifs, de l’an 90 à l’an 110, dans l'école de Jabneh, ville de la Palestine située sur le rivage méditerranéen, entre Joppé et Asdod. Cette école, dans laquelle on étudiait et commentait les problèmes reli- gieux dont les discussions réunies formèrent plus tard le Talmud, avait été fondée par lochanan ben Sakkaï, après la destruction du temple de Jérusalem, en l’an 70. Gambiel était fort instruit. Outre sa langue maternelle, il parlait grec et latin, et possédait des connaissances astronomiques, de même que son ami Josué, moins connu que lui, ce qui ne les empêchait pas, l’un et l'autre, de s'occuper de négoce. Le voisi- nage de la mer facilita les nombreux voyages qu'ils 5 178 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE firent presque toujours ensemble, soit dans un but commercial, soit pour toute autre cause. En l’année 95, Gambiel se rendit à Rome’ pour inter- céder auprès del’empereur Flavius Clemens, en faveur de certains de ses coreligionnaires. Ces détails mon- trent qu'il ne s’agit pas là d'une légende, mais d’un fait historique. Maintenant, cetteétoileapparaissant tous lessoixante- dix ans était-elle vraiment une comète ? Sans doute, car nous ne connaissons aucune étoile variable à période aussi longue. Il nous faudrait admettre que cet astre, arrivé aux derniers stages de sa vie stellaire, et après de lentes fluctuations d'éclat, très espacées, se serait éteint ou aurait tellement diminué d'éclat dans l'intervalle de ces dix-huit siè- cles qu'aucun changement appréciable n'aurait pu être constaté en lui par les observateurs modernes. C'est peu probable. L'hypothèse d'une comète pério- dique se pose logiquement. C’est ce que laisse entendre, d'ailleurs, le plus grand commentateur du Talmud, le célèbre Raschi, qui vécut en France de 1040 à 1105. « Les anciens navigateurs, dit-il, n'avaient pour guides que les étoiles. Ils connaissaient la position qu'occupent dans le ciel certaines constellations à des époques déterminées de l’année; ils savaient quel groupe ils devaient laisser à leur gauche, et quel autre ils devaient laisser à leur droite pour se rendre d’un port à l’autre. On conçoit alors que la présence d’un astre éclatant se déplacant relativement vite parmi les étoiles, et visible tantôt au nord, tantôt au sud, ait pu troubler pour eux l'harmonie des constellations et risqué de les induire en erreur. » Si l’on cherche à identifier l'apparition dont parle Josué à Gambiel avec l’une des comètes mentionnées dans les annales historiques et astronomiques, on ne trouve que la comète de Halley qui puisse lui corres- pondre, surtout si l'on tient compte de la remarque faite plus haut, concernant l'expression des périodes hébraïques. Pour que les astronomes asiatiques du premier siècle chrétien aient eu connaissance de la périodicité de cette fameuse voyageuse céleste, il faut admettre que plusieurs de ses apparitions antérieures avaient été observées avec soin. La précédente avait eu lieu en l’an 12 avant notre ère (passage au périhélie le 8 octobre). D'autre part, M. Crommelin a identifié la comète de Halley avec les apparitions des années 87, 163, 240 et 467 avant J.-C. 11 est même parvenu, pour les trois premières, à calculer le. passage au périhélie, qui aurait eu lieu le 145 août 87, le 20 mai 163 et le 15 mai 240. En résumé, le fait important est que, vraisembla- blement, la période de la comète de Halley était connue des Hébreux, et c’est là un point historique du plus haut intérêt, qui mérite d’être signalé. G. Renaudot. $ 3. — Art de l'Ingénieur Les progrès de l’industrie de la tourbe. — Les méthodes d'extraction, de traitement et d'utili- sation de la tourbe ont été notablement améliorées depuis quelques années, notamment par le perfection- nement de l'outillage mécanique. D'ailleurs, le renché- rissement graduel du charbon de terre, augmentant peu à peu la valeur relative des combustibles secon- daires, permettra probablement de recourir, pour mettre ces derniers en valeur, à des procédés qui n’au- raient pas été avantageux autrefois. La question de l'utilisation industrielle des tourbières doit donc être considérée comme entrée dans une phase nouvelle, et l’on s'en occupe plus activement que jamais dans les pays européens qui possèdent des gisements de cette espèce, de même qu'aux Etats-Unis et au Canada. Dans plusieurs contrées européennes, on fabrique “ J. DerexsourG : Essai sur l'histoire et la géographie de la Palestine d'après le Talmud, p. 34%, depuis longtemps du charbon de tourbe et d’autres dérivés de ce corps dans des conditions industrielles ; le charbon de tourbe est employé sur une grande échelle en Suède, en Norvège, en Danemark, en Fin- lande, en Russie, en Allemagne, en Autriche, en Irlande et aux Pays-Bas; la plupart de ces pays pos- sèdent également de grandes fabriques de litière et d'ouate de tourbe, dont la consommation augmente rapidement. Enfin, de nouveaux usages ont été indi- qués; les principaux sont la fabrication du coke de tourbe, beaucoup étudiée en Allemagne, et l’utilisation de la tourbe pour la production du gaz pauvre, appli- cation dont il existe plusieurs exemples en Suède. La Suède ne produit que peu de houille et de qualité secondaire; elle possède, par contre, de grandes tour- bières; le Gouvernement cherche à en favoriser la mise en exploitation de plus en plus étendue; un ser- vice spécial d'ingénieurs est attaché au Département de l'Agriculture pour étudier les procédés nouveaux, seconder les inventeurs, etc.; d'importants prix sont distribués pour encourager les innovateurs ingénieux ; un crédit de plusieurs millions sert à des prêts et sub- sides en vue de l'agrandissement ou de l'établissement d'usines; une installation expérimentale a été montée à Koskivara, sous 66°39' de latitude, à l'effet de recon- naître si les conditions climatériques permettent d’ob- tenir une bonne dessiccation (résultats affirmatifs); à Markaryd existe une école subventionnée pour la for- mation de directeurs et conducteurs d'usines d’utilisa- tion de la tourbe; le Gouvernement et les municipalités interviennent pécuniairement dans les grandes entre- prises de drainage. La situation est à peu près semblable en Norvège, où il n’y a pas de houille. Le Danemark, qui n’a pas de charbon et ne possède que peu de forêts, utilise également la tourbe; cette industrie est favorisée par le climat : les conditions sont favorables au séchage. En Finlande, l'exploitation des tourbières est en pro- grès, bien que le bois soit encore abondant et peu coûteux. En Allemagne, elle est très développée dans quelques parties, et plusieurs ingénieurs allemands ont largement contribué au perfectionnement des ma- chines et à l'amélioration des procédés; le Gouverne- ment dirige plusieurs fermes expérimentales pour la culture des tourbières; il subventionne une société pour l'avancement de cette science ; il a établi des canaux dans le but de faciliter les transports du combustible de tourbe, qui est employé, au même titre que le lignite, par des chemins de fer. L’Autriche a aussi plu- sieurs fermes expérimentales qui s'occupent de la culture des tourbières et de l’atilisation de la tourbe, à Sébastianberg, Laibach, Klagenfurt, Admont, Ster- ging et à Vienne; une société d'études poursuit des recherches. La tourbe est employée comme combustible depuis des siècles en Hollande, où la production annuelle dépasse aujourd'hui 4 million de tonnes; les tourbières épuisées sont ulilisées avec grand succès pour l’agri- culture; on évalue à 400 et 800 kilomètres respecti- vement la longueur des canaux navigables et de drai- nage qui ont été établis dans les tourbières hollandaises depuis cinquante ans; leur coût s’est élevé à 45 millions de francs environ; les trois quarts des frais ont été supportés par l'Etat et les provinces; le chauffage à la tourbe revient plus cher que par le charbon de terre, qui peut être importé à bas prix d'Angleterre ou d'Allemagne; il est néanmoins très employé pour les usages domestiques; le Gouvernement l'utilise égale- ment et le favorise par tous moyens, afin de pouvoir être indépendant de l'étranger, tout au moins en cas de guerre. En Irlande, le Département de l'Agriculture et de l’Instruction technique assiste les inventeurs et les entrepreneurs en étudiant leurs projets. C’est la Russie qui tient la tête pour le développe- ment de l'industrie de la tourbe : il ne s'y trouve pas moins de 4,300 usines, outillées mécaniquement, pour l'extraction et l’utilisation ; quelques-unes de ces instal- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 179 lations appartiennent à l'Etat, qui a de plus affecté une somme de 1.800.000 francs à l'érection d'une fabrique de coke de tourbe à Redkino ; des tourbières sont don- nées en location aux petits entrepreneurs et le Gou- vernement se charge de faire l'éducation de ceux-ci et de les aider dans leur mise en œuvre; les tarifs de transport sont abaissés pour la tourbe et les matières qui en proviennent; des fonds sont avancés aux fabri- cants (40 °/, de la valeur des installations, rembour- sables en tourbe ou produits); les usines de l'Etat sont mises à la disposition des producteurs pour la carbo- nisation de la tourbe séchée; la quantité de tourbe employée annuellement en Russie est de 5 millions de tonnes approximalivement. Aux Etats-Unis, les tentatives faites jusqu'ici pour l'utilisation des tourbières ont été peu heureuses; le Gouvernement à toutefois pris à présent la chose en main très sérieusement; il fait étudier les méthodes utilisables, théoriquement et expérimentalement; il intervient activement dans la réalisation de projets de canaux de drainage. Le Canada fait de grands efforts pour introduire l’in- dustrie de la tourbe dans les provinces de l'intérieur, qui sont tributaires des Etats-Unis pour le charbon, alors qu'elles ont des tourbières immenses et d’une richesse à peine calculable : d’après une publication du Geological Survey, leur étendue est 100.000 kilo- mètres carrés environ, avec une profondeur moyenne de 2 mètres; beaucoup n'ont encore été qu'incomplè- tement explorées. Le Gouvernement vient d’en com- mencer le recensement systématique; le Département des Mines a commissionné deux ingénieurs spécialistes à cette fin; il examine gratuitement les gisements que des entrepreneurs se proposent de mettre en exploi- tation ; il étudie aussi tous les procédés nouveaux et il a monté une usine de démonstration du traitement mécanique. La tourbe devrait surtout être substituée au bois, que la majeure partie de la population utilise encore et qui, moins bon combustible, a une grande valeur pour d’autres usages; d'autre part, la moitié à peu près du combustible-houille employé au Canada y est importée (1906 : total de la consommation : 15.326.466 tonnes; charbon indigène : 7.927.560; char- bon importé : 7.398.906); l'augmentation de la popula- tion et l’activité industrielle croissante demandent que l’on recherche activement de nouvelles sources de com- bustible : en 1907, un ingénieur canadien a été chargé par le Gouvernement d'aller étudier sur place les pro- cédés d'exploitation des tourbières en usage en Europe. Pour ce qui est de la fabrication du charbon de tourbe, les méthodes actuellement en usage sont ba- sées sur la dessiccation à l'air libre, qui, malgré son incertitude, a été reconnue la plus économique et la plus pratique; d'importantes sommes d'argent ont été consacrées à l’expérimentation d’autres méthodes qui n'ont pu être adoptées; la dessiccation à l'air conti- nuera donc vraisemblablement à être employée et l’on on y recourra sans doute dans les nouvelles exploita- tions, aux Etats-Unis et au Canada, où les conditions climatériques sont au moins aussi bonnes que dans les pays européens. L’extraction à la main, encore souvent utilisée, n’est pas recommandable pour les grandes exploitations, surtout lorsque la main-d'œuvre coûte cher; il vaut mieux employer des machines spéciales (Schlickeysen, Dolberg, Heinen, Lucht, Anrep, Svedala, Akerman); ces machines sont simplifiées lorsque la tourbe est exempte de racines, de souches, etc. (excavateur Strenge). La fabrication des briquettes de tourbe (ma- chines Schulz) ne parait pas très lucrative; il y a cependant, en Allemagne, d'excellentes machines pour la confection des briquettes de lignite. M. Eken- berg, de Londres, à inventé un intéressant procédé de carbonisation humide, essayé avec succès en Suède. La méthode de M. Ekelund, de Jünküping, en Suède, qui donne de la poudre de tourbe, a été signalée comme très avantageuse. ù Le meilleur procédé de transformation de la tourbe en coke est celui de M. Ziegler, de Beuerberg (Bavière) ; on utilise aussi la carbonisation en meule, à Triangel (Allemagne); des fours ont été imaginés par Hahne- mann, Wagenmann, etc. D'une facon générale, l’éco- nomie de la méthode dépend beaucoup des conditions locales du marché pour les sous-produits. Le système Ziegler est appliqué à Oldenbourg, à Redkino et à Beuerberg ; à Elisabethfehn fonctionne une installation Bamme ; à Brockville (Ont.), une usine a été montée, il y a quelques années, par M. Sahlstrom, mais elle n'a pas marché; une usine donnant 77 tonnes de coke par vingt-quatre heures et employant un procédé mixte, dû àMM. Schôning, de Stamsund (Norvège), et Fritz (de Berlin), est en service à Carolinenhorst, près de Stettin. La tourbe peut être employée économiquement pour la production de la vapeur, soit directement, soit gazéifiée; elle est utilisée de cette facon dans des sucreries suédoises; des essais dans le même sens ont été faits en Allemagne et en Suède pour le chauffage des locomotives; l'usage de la tourbe aurait pu être poursuivi si le grand volume du combustible n'avait nécessité un agrandissement du tender; il rendait le travail difficile au moyen d'un seul chauffeur; des foyers spéciaux, à grille inclinée, ont été construits par Lanz, de Mannheim, Kowalsky, d'Oriechowo; des fours mixtes (gazéification), par Reich, de Hanovre, Keilmann et Vôlcker, de Bernburg, et employés en Suède, en Allemagne, en Russie. Le gaz de tourbe, pour le chauffage de fours ou de chaudières et pour la production de la force au moyen de moteurs à gaz, est utilisé en Suède, en Russie, en Allemagne, en Autriche; on l’emploie dans l’industrie sucrière, en métallurgie, pour la fabrication du verre, la cuisson des briques, la préparation de la chaux. La tourbe est généralement très économique pour ces divers usages et, dans certains cas, le bénéfice résul- tant de son emploi se chiffre à 30 ou 40 °/,. La méthode la plus rationnelle pour utiliser les gise- ments de tourbe en grand est d'établir des usines de force sur les lieux d'extraction, en suivant le modèle des installations existant notamment en Suède; avec cette solution, le volume de la tourbe a moins d'incon- vénient que pour les autres usages; elle permet d'ail- leurs l'emploi d'une tourbe à 40 ou 45 °/, d’eau et simplifie donc les opérations préliminaires. La fabrication du papier de tourbe, de l'alcool de tourbe, des tissus de tourbe, etc., n'est pas encore sortie du domaine de l'expérience ‘. H. Marchand. $ 4. — Chimie Le rôle des laboratoires municipaux. — La Préfecture de Police vient de publier le compte rendu des travaux faits, au cours de l’an dernier, par le Labo- ratoire de la Cité; il est intéressant de reproduire quelques-uns des chiffres les plus importants du clas- sement des échantillons analysés. La forme sèche des tableaux statistiques, convenablement interprétée, peut révéler intimement le fonctionnement du Laboratoire ; elle peut surtout suggérer à ce propos quelques remar- ques sur le rôle qu'il pourrait, qu'il devrait jouer ?. Plus de 30.000 échantillons furent analysés, en 1909, au Laboratoire municipal; si l’on défalque de ce chiffre le nombre des analyses payantes faites pour le public — que n'importe quel laboratoire privé eût pu tout aussi bien faire — le total est ramené à près de 26.000. Les laits (11.872 échantillons), les vins (4.732), les ! Sur la question de la tourbe, on consultera avec fruit les Rapports détaillés, publiés récemment par les gouverne- ments du Canada et des Etats-Unis ; voir surtout : E. Nysrron: Peat and lignite, Ottawa (Canada). ? Nous devons remercier MM. Girard et Roux, directeurs des laboratoires de Paris, qui voulurent bien nous commu- niquer tous les chiffres reproduits ci-après. 180 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE eaux (556), les conserves (1.124), les beurres (759), les cidres, confitures, épices donnent les nombres les plus forts; si l’on ajoute au total des analyses de ces pro- duits les chiffres concernant les chocolats, huiles, farines, vinaigres, l'on arrive à très peu près au chiffre global. De fait, l’on peut relever sur le tableau officiel, pour les échantillons de parfumerie, de pétrole, de Jouets (examinés au point.de vue de la nocivité de leurs couleurs), des chiffres variant entre 0 et5. Pratiquement, le Laboratoire municipal ne s'occupe donc que des matières alimentaires. Et, sans doute, c'est indispensable; car les services « pour la répres- sion des fraudes pour le commerce des-denrées », orga- nisés par le Ministère de l'Agriculture, ont un objectif très différent de celui qui devrait incomber aux labo- ratoires municipaux. Il serait d'autant plus dangereux de leur abandonner complètement le contrôle des matières alimentaires que tous les efforts de la nou- velle organisation tendent à enraciner chez les consom- mateurs ces préjugés ridicules, que M. Louis Olivier rail- lait dernièrement ici, contre tout ce qui est«artificiel », c'est-à-dire progrès, confondu malheureusement avec le faux et avec la fraude. Tandis que les Services du Ministère de l'Agriculture, conçus dans le seul but de protéger les producteurs de denrées «naturelles », ne mettent qu'en seconde ligne l'intérêt du consommateur, le Laboratoire municipal devrait se placer unique- ment à ce dernier point de vue. Question de toute première importance pour la technique elle-même, car, selon le cas, les méthodes analytiques différeront du tout au tout. C’est ainsi, par exemple, que, pour l'analyse des matières grasses, les chimistes du Service des fraudes accorderont une grande valeur à des essais purement empiriques, comme l'indice Crismer dans les beurres, les réactions de Bechi et de Brullé dans les huiles, quoiqu'ils n’obtiennent ainsi aucun renseignement sur la composilion centésimale de dif- férents constituants du produit, abstraction faite de son origine. De même, le Service des fraudes recher- che bien dans les aliments les matières nocives telles que les antiseptiques, les colorants toxiques. Mais il y à dans ses interprétations des équivoques et des distinctions trop subtiles : si telle matière colo- rante est jugée indispensable par les producteurs de matières « naturelles » (couleurs d'aniline dans les sucreries, dans le beurre, sulfate de cuivre pour le verdissage des conserves), on en « tolère » une certaine minime quantité. Si, au contraire, l'emploi de tel autre produit, ni meilleur, ni plus mauvais, lèse les intérêts de l’agriculture (saccharine dans les bières et sirops), on le prohibe très sévèrement. Il est donc nécessaire de posséder aussi, au Laboratoire municipal, un ser- vice pour le contrôle du commerce des denrées. Mais il faudrait s'y placer toujours au seul point de vue de l'intérêt du consommateur, sans craindre de léser per- sonne autre. C'est ainsi que la détermination de l'ori- gine des produits — recherche d'autant plus vaine qu'il est impossible, quand la fraude est bien faite, de conclure sûrement, les produits naturels étant de com- position essentiellement variable — serait remplacée par Ja détermination dela valeur physiologique, laquelle dépend de la teneur centésimale des différents consti- tuants. Et l’on ne craindrait pas — puisque c'est la vérité — d'affirmer que la margarine et la graisse de coco comestible constituent ainsi des aliments supé- rieurs au beurre tant par leur plus grande pureté que par leur prix moindre. Ce serait d'autant plus utile que l’on a toujours de parti pris faussé sur ce sujet toutes les idées du public. Il ne faut pas se dissimuler que la tâche serait, d’ailleurs, extrèmement difficile; on connaît incomplètement et mal la valeur des diffé- rents principes alimentaires dans les rations d’entre- tien et de fatigue; on discute sur la nocivité des nombreux antiseptiques ou colorants sans avoir de bases bien sûres, Ce serait justement le rôle du Labo- ratoire municipal que de se consacrer à l'étude de ces sujets. Il conviendrait d'élaborer, en conséquence | des résullats obtenus, des méthodes mieux inspirées de l'esprit scientifique que celles du Service officiel des fraudes. Or, il faut bien le constater, ni les méthodes em- ployées au Laboratoire municipal (qui furent publiées à plusieurs reprises), ni, hélas! les moyens dont il dis- pose, ni sa classification trop sommaire entre échan- tillons « bons » et échantillons « mauvais » (c'est-à-dire en réalité « fraudés »), ne répondent complètement au rôle qu'il devrait jouer. Ceci naturellement, comme toutes nos critiques, s'applique moins au Laboratoire parisien, — il n'est ici qu'un exemple commode, — qu'aux laboratoires municipaux en général. Nous l'avons vu : en dehors des échantillons de denrées, l’on ne s'inquiète pas, au Laboratoire muni- cipal, de tous les autres produits commerciaux; cepen- dant, outre les aliments, il y a dans le commerce une infinité de produits dont il importerait de contrôler la valeur et l'innocuité, d'autant plus que, dans le Service de répression des fraudes, on peut constater la même tendance à s'occuper exclusivement des denrées. Dans le premier semestre 1909, par exemple, sur 5.800 échantillons analysés au Laboratoire central de Paris, on relève plus de 2.600 laits, près de 2.000 vins, plus de 200 beurres... Il existe cependant une infinité d'autres produits commerciaux le plus souvent falsi- liés. M. Girard fit ainsi autrefois de très intéressants tra- vaux sur Jes lotions employées pour la chevelure : telle solution aqueuse d’un sel de plomb à 1 °/, était vendue à raison de 20 francs le litre. Un tel commerce ne devrait-il pas être contrôlé? Il serait nécessaire d'étudier comparativement, en dehors des produits de consommation, toutes les choses pouvant être employées dans la maison. Et là encore il y aurait beaucoup à innover; car les tra- vaux faits jusqu'à présent l'ont été dans un but indus- triel, et non dans l'intérêt du particulier. Lors de l'achat du moindre objet, rien ne guide l'acquéreur, landis qu'au contraire la réclame le trompe. Comment savoir de toutes les sources de lumière : électricité, gaz, pétrole, alcool, quelle est plus économique? Et, ceci su, entre toutes les lampes, laquelle est meilleure? Pourtant il s’agit là de choses ayant déjà leur impor- tance dans un ménage modeste d'ouvriers ou d’em- ployés. Semblablement, pour choisir le fourneau de cuisine, on est réduit aux on-dit contradictoires, et aux affirmations intéressées, parfois ignares, du vendeur. Dans les usines bien conduites — lesquelles, il est vrai, sont l'exception — le chimiste contrôle la combustion pour déterminer les calories perdues dans les gaz brûlés et perfectionner la marche en conséquence; pourquoi ne déterminerait-on pas ainsi, au Laboratoire municipal, le rendement thermique des différentes variétés de charbon brülées dans les calorifères de tous systèmes existant dans le commerce ? On objectera peut-être que, si tous ces travaux avaient été déjà faits, bien peu de personnes les eussent consultés avant de faire une acquisition. Mais n'y en eüt-il que quelques-unes, celles-là mériteraient plus que la foule des autres. Au reste, ce serait justement la tâche la plus importante du Laboratoire que de savoir vulgariser convenablement ces enseignements pour qu'ils soient connus de ceux auxquels ils sont destinés. Et puis, il y a là une question d’accoutumance et d'édu- cation. Evidemment, l’élégante en quête d'une four- rure ne demandera pas au calicot qui la lui vend le coefficient d'isolation thermique de telles ou telles peaux de bêtes; à peine si l'industriel l'exige lors de ! Il pourrait d'ailleurs n'en être pas ainsi, si l'enseigne- ment professionnel était chez nous ce qu'il est, par exemple, en Allemagne. Dans les cours du soir que tous IE apprentis sont effectivement obligés de suivre, «le maitre enseigne aux coiffeurs, par exemple, les conditions hygiéniques du travail; il explique la fabrication du savon, de l'huile, des parfums, des teintures; il parle de l'hygiène du corps, de la peau, des ongles ». (J. HuRET : En Allemagne.) CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 181 l'achat de calorifuges; c'est que l’une et l’autre ne farent pas convenablement éduqués; ils savent mal l'importance usuelle et pratique des données du labo- ratoire. De fait, on doit considérer qu'il faut le temps de connaitre des choses si nouvelles et d'y conformer ses actes, Mais on s'y accoutumerait vite. Et ce devrait justement être la préoccupation des Pouvoirs publics intelligents el vraiment soucieux d'aider au progrès en organisant la recherche métho- dique du rationnel, en vulgarisant les avantages de son application jusque dans les choses les plus humbles et ménagères; d'aider puissamment, eflicacement, au bien-être de chacun et à la prospérité nationale, en cherchant à diminuer le colossal gaspillage d'argent et d'énergie qui résulte journellement de nos ignorances obligées. H. Rousset. La production d'oxydes de l'azote dans la combustion de l'oxyde de carbone. — MM. Fr. Haber et J. E. Coates' viennent de publier le résul- tat d'expériences très intéressantes sur la production d'oxydes de l'azote dans la combustion de l’oxyde de carbone. A priori, la haute température atteinte dans cette réaction pouvait permettre de prévoir la forma- tion de faibles quantités de produits azotés par combi- naison de l'azote et de l'oxygène de l'air. Les recherches des auteurs ont entièrement confirmé ces prévisions. En employant un mélange à volumes égaux d'oxy- gène etd'azote, à la pression atmosphérique, on observe la formation de petites quantités d’AzO?, qui aug- mentent légèrement si les gaz sont préalablement chauffés à S00v. Si, sans faire varier la température des gaz, on les comprime avant la combustion, on constate, au contraire, une forte augmentation de la production d’AzO®. Les auteurs trouvent ce phénomène très intéressant au point de vue industriel. L'oxyde de carbone concen- tré est un sous-produit de très faible valeur dans plu- sieurs industries. Recueilli, il pourrait être comprimé à 9 atmosphères, amené sous cette pression à une chau- dière de locomotive verticale et brûlé dans les tubes à flamme avec de l'air ou un mélange d’Q et d'Az à la même pression; les gaz de la combustion seraient refroidis pour séparer Az0* à l’état liquide, puis déten- dus jusqu'à la pression ordinaire dans un appareil approprié. La chaléur de la combustion produirait de la vapeur dans la chaudière qui servirait à actionner les compresseurs, et le travail de la détente donnerait l'énergie nécessaire au refroidissement. Dans une usine de carbure dégageant chaque jour 10.000 pieds cubes d'oxyde de carbone, en employant l'air pour la combustion, les auteurs ont calculé qu'on pourrait produire 250 m. c. d’Az0O®, correspondant à environ 660 kilogs d'acide nitrique. L'utilisation de l’oxyde de carbone sous cette forme semble donc digne d'être prise en considération. $ 5. — Zoologie La disparition du mouton en Europe. — Une statistique publiée par M. Tisserand montre com- bien les troupeaux de bêtes ovines ont diminué depuis quelques années aussi bien en France qu’à l'Etranger. La France, en 1840, comptait 32 millions de mou- tons ; en 1862, 29 millions; en 1882, 23 millions; au 1° janvier 1907, 17 millions. Depuis un demi-siècle, on constate donc une dimi- nution de plus de 40 °/,. A l'Etranger, la situation est presque partout la même. L'Allemagne accuse la plus forte diminution : de 25 millions de têtes en 1870, son troupeau passe à 7 millions en 1907, soit une différence de près de 70°/,. En Autriche-Hongrie, de 20 millions de moutons en 1869, l'effectif est tombé à 10 millions en 1905. Même mouvement en Norvège, en Suède, en Dane- 4 Zeitsch. f. physikal. Chemie, t. LXIX, p. 337-388. mark. Seul, le troupeau anglais a peu varié : 33 mil- lions en 1871 et 31 millions actuellement. $ 6. — Géographie et Colonisation La décadence des Antilles françaises. Un récent Congrès vient d'attirer très heureusement l'attention sur la situation précaire de nos anciennes colonies ‘. Nous les avons certainement trop délaissées, portés naturellement à nous occuper de préférence de nos acquisitions plus récentes et beaucoup plus étendues. Quelques chiffres montreront qu'il est grand temps d’aviser. De 1882 à 1908, le commerce de la Martinique est tombé de 67 millions de francs à 36, celui de la Guadeloupe de 68 à 32, celui de la Réunion de 59 (en 1880) à 27. Dans nos Antilles, la population blanche a émigré, passant de 19.000 en 1847 à 5.000 en 4906, et emportant avec elle les capitaux qui fai- saient fructifier ces iles. Pendant le même espace de temps, la population de couleur s'élevait, au contraire, de 231.000 à 367.000 *. Les causes de cet état de choses sont nombreuses. Causes politiques et sociales, d’abord : organisation administrative surannée, instabilité des gouverneurs, dilapidations financières, mauvaise organisation judi- ciaire, animosité des races blanche et noire, luttes électorales. Causes économiques, ensuite : exode des capitaux, organisation défectueuse du travail, maintien de la monoculture de la canne, cherté des frets, insuf- fisance des banques et du crédit, mauvaise situation sanitaire. Il faudrait d'abord une constitution politique mieux adaptée aux conditions géographiques et ethnogra- phiques : instituer, par exemple, comme l’a préconisé M. A. Girault et comme cela existe dans les Antilles anglaises, un Conseil législatif où l'élément élu par les noirs serait en minorité, et qui serait formé principa- lement par des chefs de service et des membres élus par le Conseil colonial. A une plus grande autonomie politique, il faudrait joindre une plus large autonomie douanière, comportant simplement des privilèges réci- proques pour les produits coloniaux et métropolitains. La population de couleur fournit une main-d'œuvre médiocre, qui serait peut-être suffisante en nombre, mais qui est insuffisante en qualité. Aussi, est-il permis de regretter la suppression complète, depuis 1884, de l'immigration des travailleurs du dehors. C'est ainsi que, de 1852 à 1884, 68.000 coolies indiens vinrent sup- pléer les nègres qui ne voulaient plus travailler; d’autres engagements analogues amenèrent encore 16.000 noirs du Congo et quelques milliers de Chinois et d'Annamites *. Tous les produits tropicaux croissent aux Antilles : le caféier est répandu à la Guadeloupe; la culture du cacaoyer se développe dans les vallées abritées et hu- mides; le manioc se rencontre partout; la préparation de la vanille est en progrès à la Guadeloupe, et c’est encore dans cette île que l’on poursuit avec succès la culture du cotonnier. Mais, depuis l’époque, fort loin- taine déjà, où le sucre donnait de grands bénéfices, les planteurs ont gardé toute leur prédilection pour la canne. Et, à l'heure actuelle, malgré tout le terrain gagné en Europe par la betterave, la canne occupe encore aux Antilles francaises la moitié des terrains cultivés #. Si l’on ne veut pas abandonner cette plante, du moins faudrait-il augmenter ses rendements et sur- tout perfectionner les procédés de fabrication. La rénovation de l'outillage est la condition principale du ET — 1 Cf. sur la situation de la Guyane francaise notre chro- nique de la Revue générale des Sciences, 1à avril 1908. # M. 0e Peter : Les Antilles francaises. Supplément au Bulletin de l'Office colonial, mai 1909. / 3 PyeReE LEROY-BEAULIEU : Fconomiste français, 6 novembre 1909. 4 Cf. E. Lécrer : L'industrie sucrière à la Guadeloupe et à la Martinique. Supplément au Bulletin de l'Office colonial, juillet 190.9 182 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE EEE EEE SERRE EE LOL LN = SAONE OISE EU AUS SEE = 2 SE relèvement de l'industrie sucrière coloniale, qui aurait alors l'avantage de bénéficier du bas prix de la main- d'œuvre. Mais il faut aussi développer les autres cul- tures : le cacao, le coton, les fruits frais, ananas et bananes surtout, qui sont appelés, ces derniers prin- cipalement, à une consommation croissante. Leur transport sera facilité par les cargos mis en ligne cette année par la Compagnie Transatlantique et dont les cales sont munies d'appareils frigorifiques. Ces trans- formations nécessiteront la création de cultures d'essais, de distribution de semences et aussi la diffu- sion de l'enseignement agricole. Les Banques de la Martinique et de la Guadeloupe, banques d'émissions et de prêts sur récoltes et sur marchandises, et le Crédit foncier colonial, institué en 1863, peuvent jouer un grand rôle dans la réorganisation industrielle de ces îles. Enfin, il ne faut pas oublier que les escales de Pointe-à-Pitre et de Fort-de-France, situées sur la route du futur canal de Panama, gagneront, de ce chef, une importance croissante. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Eyon. $ 7. — Enseignement Les Universités provinciales, écoles tech- niques. — La caractéristique de nos Universités pro- vinciales est leur diversité. C’est un fait d'autant plus remarquable que notre enseignement est plus _centra- lisé. Chacune de ces jeunes Universités provinciales prend de plus en plus, en effet, un air particulier, l'air de sa région. Ainsi se vérifie l'observation faite par un ancien recteur : « C’est le caractère original et fécond entre tous de notre organisation universitaire, qu'aux enseignements qui sont le fonds commun de l'éduca- tion scientifique puissent se joindre, dans leur variété nécessaire, les enseignements qui mettent en valeur sur tous les points les richesses naturelles en même temps que le génie de la France. » Die À Grenoble, depuis 1894, un cours d'Ælectricité in- dustrielle répond aux besoins locaux d’une région riche en « houille blanche ». Dès 1904, l'Université de Lille inaugurait un cours public, à la création duquel la ville avait coopéré, sur les questions économiques in- téressant la région du Nord. La Faculté des Sciences de Dijon possède une intéressante annexe : l'Institut régional agricole et œnologique de la Bourgogne {cours de Chimie agricole, d’OEnologie, jardin d'expé- riences):; celle de Bordeaux possède une Station viticole qui rend à toute la région d'importants services. L’U- niversité de Lyon a son Æcole de Chimie industrielle et son Zcole francaise de Tannerie; celle de Nancy, son Laboratoire de Brasserie. La Faculté des Sciences de Grenoble a complété son enseignement de l'Electricité industrielle par la créa- tion d'un /nstitut électrotechnique, auquel sont adjoints une Æcole d'Ingénieurs électriciens et un Bureau de contrôle et d'essai. En 1904, la Faculté des Sciences de Rennes a annexé à son laboratoire de Zoologie une Station entomologique qui fournit gratuitement tous les renseignements concernant les moyens à employer pour la destruction des insectes nuisibles. Enfin, l'Université de Besancon a organisé tout un ensemble d'enseignements techniques, dont voici, pour l’année scolaire 4909-1910, l'original programme. Cette Université n'a pas cru déroger en faisant la part la plus large à l’industrie maîtresse du pays : l'horlogerie, Elle a organisé un Observatoire chronométrique, qui permet désormais à ses étudiants, aux élèves de l'Ecole d'Horlogerie et à tous les horlogers régleurs de la ville, de faire subir les épreuves les plus variées aux chro- nomètres de poche, chronomètres de marine et pen- dules astronomiques. La Faculté des Sciences est, avec l'Hôtel de ville, un des deux centres publics du service de transmission de l'heure. Elle possède, d’ailleurs, un cours de Chronométrie et Ecole pratique de réglage qui prépare au certificat de chronométrie et au diplôme d'ingénieur horloger, L'Institut de Physique de cette Université, doté d'un atelier et d'une forge, prépare au Certificat d'Electri- cité industrielle et au diplôme d'Electricité appliquée. L'Université de Besançon a, de plus, un cours de Chimie appliquée, et elle a créé un diplôme d'Agriculture, destiné aux instituteurs, aux fils d'agriculteurs et aux régisseurs d'exploitations agricoles et forestières. Cet enseignement agricole est complété par la Station agro- nomique de Franche-Comté, créée en 1901. On voit que, si nos Universités provinciales font peu parler d'elles, elles font en silence du bon travail, si bien que leur développement est continu. Heureusement, nous sommes loin de cette année 1865, où la création du premier laboratoire universitaire de recherches scientifiques, celui d'Henri Sainte-Claire Deville, provoquait l’étonnement:; en voyant s'élever au milieu de l’ancienne et docte Sorbonne des chemi- nées d'usine, on souriait et on traitait l'Ecole des Hautes Etudes, dit un contemporain, « d'école des hauts fourneaux ». Aujourd'hui, nos Universités tout entières sont plutôt de vastes usines adaptées à la diversité des travaux scientifiques. E. C. Les étudiants étrangers de l'Université de Paris. — L'affluence des étudiants étrangers à l’Uni- versité de Paris va toujours en croissant. Autrefois, c'était surtout aux universités allemandes qu'allaient les étudiants étrangers : la science germanique était la seule qui parût digne d’être recherchée. Actuellement, les courageux efforts des Universités françaises com- mencent. à porter leurs fruits. Il y a vingt ans, en 1888-89, le nombre des étrangers à l'Université de Paris était de 457; il y a dix ans, en 1898-99, il était de 1.174; il est en 1908-09 de 3.326; il a doublé dans les cinq dernières années, car il n’était encore que de 1.633 en 1904-05. Cesétudiants viennent de toutes les parties du monde; d'Angleterre 115, des Etats-Unis 107, d'Egypte 165, de la Roumanie, cliente fidèle, 243, d'Allemagne 231, d’Autriche-Hongrie 139, de Russie 1.356; enfin de Suède et Norvège, de Bulgarie, de Grèce, du Canada, du Mexique, de Buenos-Aires, de Rio-de-Janeiro, de Chine et du Japon. Il semble voir renaître les grands jours de l'antique Université, du temps où toutes les nations venaient aux écoles de la montagne Sainte-Geneviève. Un fait nouveau est que ces étudiants étrangers ne sont pas tous des jeunes gens sortis récemment des écoles d'enseignement secondaire ; bon nombre d’entre eux, en effet, nous viennent munis des diplômes supé- rieurs de leurs Universités. Ils nous sont envoyés comme boursiers par leurs gouvernements : le gouver- nement jeune-ture, la République Argentine, le gou- vernement hongrois, etc. Il nous semble qu'après avoir fréquenté nos amphi- théâtres et nos laboratoires, pratiqué nos méthodes et éprouvé la séduction du génie français, ces étudiants rentrés chez eux ne pourront que rester des amis de notre pays. Ainsi notre vieille Université aura bien mérité de la France et de la Science. $ 8. — Congrès Le 3° Congres international de Physiothé- rapie. — Ce Congrès se tiendra à Paris du 29 mars au ? avril dans les locaux de la Faculté de Médecine. Ses travaux seront répartis sur sept sections : 4° Kiné- sithérapie; 2° Hydrothérapie, cryothérapie, thermothé- rapie, aérothérapie; 3° Climatothérapie et thalassothé- rapie; 4 Electrothérapie; 5° Radiothérapie, radium- thérapie, photothérapie ; 6° Crénothérapie ; 7 Diatétique. Pendant le Congrès aura lieu une vaste exposition de tout l’appareillage de la Physiothérapie, des stations thermales et climatiques, des principaux produits dié- tétiques. Pour tous renseignements, s'adresser à M. le D" Va- quez, secrétaire général, 27, rue du Général-Foy, Paris. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 183 L’AVIATION PREMIÈRE PARTIE [ y à un peu plus d'un an, j'ai entretenu les lecteurs de la Æevue de la question des aérostats dirigeables”; j'ai alors laissé complètement de côté les appareils plus lourds que l'air; c'est d'eux que je voudrais parler aujourd'hui. Mais, avant d'aborder l'objet spécial de cet article, il est indispensable de rappeler les principes fondamentaux de la navi- gation aérienne. Sa réalisation exige la solution de deux problèmes : la sustentation et la direc- lion. La sustentation consiste à maintenir un navire aérien en équilibre à une certaine hauteur de l'atmosphère. On peut la réaliser par deux pro- cédés. Le procédé statique consiste à employer des gaz plus légers que l'air, enfermés dans une enveloppe imperméable, et à obtenir ainsi l’équi- libre de l'appareil par une simple application du principe d'Archimède; c'est le système du plus léger que l'air, qui rentre dans le domaine de l’Aérostation. Le procédé dynamique consiste, au contraire, à obtenir la sustentation grâce à une dépense continue de puissance motrice; c’est le système du plus lourd que l'air, et l'on a donné à la branche de l'Aéronautique consacrée à ce genre d'appareils le nom d’Aviation, qui signifie imita- tion du vol des oiseaux. Si le problème de la sustentation peut être résolu de deux manières, il n’y en a qu'une seule de résoudre celui de la direction. Ce point a été développé dans l’article sur les ballons dirigeables auquel je faisais allusion; je prie donc les lecteurs de s'y reporter, car je ne pourrais que répéter textuellement ce que j'ai déjà dit*. Nous ne rappellerons ici que le principe fonda- mental : pour qu'un navire aérien soit dirigeable, il faut et il suffit qu'il possède, par rapport à l'air ambiant supposé immobile, une vilesse propre supérieure à celle du vent régnant. I. — AÉROSTATION ET AVIATION, Si le problème de la direction est le même pour tous les aéronefs, quels qu'ils soient, la solution en est beaucoup plus facile en aviation qu'en aéros- tation. Pour obtenir la vitesse propre, il faut, en effet, vaincre la résistance que l'air oppose à * Ct P. Rexaro : Les aérostats dirigeables. Revue générale des Sciences des 15 et 30 juin 1908, t. XIX, p. 426 et 419. ? Voir la Æevue générale des Sciences du 15 juin 1908, pages 426 à 431. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES l'avancement du véhicule; or, sans entrer dans des calculs compliqués, il saute aux yeux que, pour un aéroslat dirigeable, condamné à traîner à tra- vers l'atmosphère le volume énorme de son enve- loppe à gaz, la résistance à vitesse égale est beau- coup plus grande que pour un aéroplane. Celui-ci est, en effet, composé de pièces qui ont toutes de faibles dimensions transversales ; les formes de ces appareils sont généralement grêles, et la plus grande résistance est certainement opposée par l'aviateur lui-même et son habitacle, tandis que, dans un dirigeable, la résistance de la nacelle est bien peu de chose par rapport à celle du ballon. La puissance motrice nécessaire pour obtenir une vitesse donnée sera donc beaucoup moindre avec les appareils d'aviation qu'avec les aérostats. C'est là un avantage incontestable à l'actif du plus lourd que l'air, et ce fut de tout temps le grand argument des partisans de ce système. Ils poussaient même souvent leurs raisonnements au delà des limites permises; c'est ainsi qu'on disait fréquemment que les ballons ne pourraient jamais être dirigés, parce qu'ils seraient toujours le jouet des vents, en raison de l'énorme surface qu'ils présentent aux courants d'air. Nous avons vu ce qu'il faut penser de tels arguments. Le grand volume d'un ballon n'est pas un obstacle absolu à sa dirigeabilité : c’est une gêne; au lieu d'une impossibilité formulée en termes vagues, il faut voir en lui une difficulté d'ordre précis, qui peut se chiffrer par une résistance déterminée, et, pour vaincre cette résistance, il faut disposer d’une force propulsive supérieure. Quoi qu'il en soit, sous le rapport de la direc- tion, les appareils d'aviation sont dans des condi- tions beaucoup plus favorables que les aérostats; malheureusement, cet avantage est bien chèrement payé. En aérostation, la sustentation est gratuite au point de vue dynamique, c'est-à-dire qu'il n’y a aucune dépense de travail à faire pour se soutenir, ni même pour s'élever dans l'atmosphère *. Ce dernier point semble un peu paradoxal. Toute éléva- tion de poids suppose, en effet, une dépense de travail correspondante, et l'on voit des ballons qui s'élèvent, sans aucune dépense d'énergie apparente, jusqu'à des centaines et des milliers de mètres de hauteur. En réalité, ily a eu un emmagasinement préalable d'énergie auquel on ne pense généralement pas. Lorsqu'on a gonflé le ballon d'un gaz léger, ce gaz se trouve maintenu dans la partie inférieure de l'océan aérien, l'enveloppe du ballon étant soigneusement 184 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION Il n'en n'est pas de même des appareils plus lourds que l'air. Ils ne peuvent se soutenir qu'à la condition de faire une dépense continuelle d’éner- gie, et c'est cette dépense qu'on désigne sous le nom de fravail de sustentation; elle est tellement importante qu'elle dépasse généralement le fravail de propulsion, c'est-à-dire celui qui est nécessaire pour obtenir la vitesse propre. Par suite de celte circonstance, la grosse affaire, en aviation, c'est d'obtenir la sustentation; lors- qu'on disposera d’une puissance motrice suffisante pour réaliser ce desideraltum, il en restera assez pour oblenir en même temps la direction. Ce qui précède est vrai pour loute espèce d’appa- reils d’avialion, mais c'est vrai surtout pour les aéroplanes, On sait, en effet, que ces appareils ne peuvent se soutenir qu'à la condition d'avancer horizontalement; la sustentation est donc un résultat de là propulsion, el, du moment que l’on arrive à maintenir en l'air un aéroplane, on esl certain qu'il sera, par le fait même, animé d’une vilesse propre horizontale de grande valeur. Aussi, le problème de l'aviation consiste surtout dans l'étude de la sustentation dynamique; ce fut pendant des siècles la pierre d'achoppement des aviateurs : c'est cette sustentation que l’on désirait obtenir, et tous ceux qui étaient au courant de la question élaient bien persuadés que, le jour où la sustentation dynamique serait réalisée, la direc- tion ne serait plus qu'un jeu. Les uns exprimaient celte vérité sous la forme imprécise chère à la grande majorité des esprits. On disait qu’en raison de sa masse et de son faible volume, l'appareil d’avialion ne serait pas le jouet des vents, et que, par conséquent, il se dirigerait facilement à son gré. On sous-entendait| évidemment qu'il fallait avant tout, pour cela, qu’il pût se soutenir. Ainsi comprise, cette phrase renfermait implici- ‘lement la vérité, mais, pour la formuler d’une manière scienlifique, il convient de dire que, le travail de sustentation étant forcément considé- rable, le travail de propulsion peut être au plus équivalent, et souvent il sera de moindre impor- tance; par suile, la direction sera résolue dès qu'on sera parvenu à réaliser la sustentation. C'est ce que l'expérience a surabondamment démontré. En fait, l'humanité attendit des milliers fixée dans le voisinage du sol. Or, pour faire place à ce gaz léger, il a fallu refouler l'air ambiant, et cela se traduit par une élévation, bien faible sans doute, mais réelle, du centre de gravité de l'atmosphère; quand on abandonne le ballon à lui-même et que le gaz s'élève, l'air ambiant vient remplir la place qu'il occupait, et le centre de gravité de l'atmosphère s'abaisse peu à peu: c'est en somme cet abais- sement qui fournit le travail nécessaire à l'élévation de l'aérostat. Si donc les ballons peuvent s'élever dans l'air, c’est grâce à un travail mécanique préalablement accumulé. d'années avant de pouvoir s'élever dans les airs, et il ne s'écoula que l’espace relativement court d'un siècle pour réaliser la direction des aérostats. Quand la postérité étudiera l’histoire des débuts de la navigation aérienne, elle trouvera certaine- nement cet intervalle bien court, et l’on oubliera cette période pendant laquelle les appareils de locomotion aérienne étaient de simples bouées entrainées au gré des vents. Toutefois, il faut bien remarquer qu'il aurait pu s'écouler un temps beaucoup plus considérable entre l'apparition du premier ballon libre et celle du premier dirigeable. La manière de résoudre les deux problèmes est, en effet, toute différente. En aérostalion, la sustentation est une simple appli- cation du principe d'Archimède; la direction sup- pose, au contraire, la connaissance des lois de la résistance de l'air, et la possession d’une puis- sance motrice considérable sous un faible poids. On voit que les deux questions n'ont aucun rapport entre elles, et que la première peut être résolue sans qu'il y ait aucun motif pour que l'on par- vienne à la solution de la seconde. Il n’en n'est pas de même en aviation : là, les deux problèmes fondamentaux sont résolus par des procédés analogues; c'est, pour l’un comme pour l’autre, une question de résistance de l'air et de puissance motrice. Aussi, il ne faut pas s’éton- ner si, dans le système du plus lourd que l'air, la direction et la sustentation ont trouvé en même temps leur solution. C'est là une différence capitale entre les deux procédés de navigation aérienne, et le Colonel Renard, qu'il faudra longtemps encore citer dans toutes les questions de ce genre, disait déjà il y à plus de vingt ans : « Le principe de la direction des aérostats étant trouvé, les perfectionnements apportés aux moteurs el aux différentes parties de ces appareils se traduiront par une augmentation lente et progressive de la vitesse propre; l'emploi des dirigeables deviendra donc de plus en plus pratique, Il n’en sera pas de même des appareils d'aviation : tant qu'on n'aura pas trouvé le moyen de les soutenir — et pour cela il faudrait disposer d'une puissance motrice que nous ne possédons pas encore — il n'y aura rien de fait; ces appareils n’existeront que dans l'imagination de leurs inven- teurs. Mais, du jour où on pourra les soutenir par un travail dynamique, on pourra en même temps les diriger; la solution du problème de la navi- gation aérienne par le plus lourd que l'air s’obtien- dra donc en une seule étape et non en deux. » Les événements dont nous sommes les témoins ont confirmé merveilleusement cette prédiction, à la réalisation de laquelle son auteur n'a malheu- reusement pas pu assister. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION IT. — DiFFICULTÉS INTRINSÈQUES DU VOL MÉCANIQUE. Puisque la sustentation est le point capital en avialion, c'est donc de ce problème que nous allons d'abord nous occuper. On peut se demander comment il n'a pas élé plus tôt résolu. Il y a, en effet, non pas des années, non pas même des siècles, mais des milliers d'années que l’homme essaie de réaliser le vol mécanique; il y à plus longtemps encore que la Nature nous en fournit des solutions merveilleuses. Comment se fait-il que, jusqu'à l’époque actuelle, l'homme n'ait pas pu réaliser ce que font depuis des siècles les insectes, les chauves-souris et les oiseaux? Lorsque la solution d’un problème se fait si longtemps attendre, malgré tous les efforts combinés pour l'obtenir, c'est, évidemment, que ce problème présente des difficultés toutes spéciales; c'est ce que nous allons chercher à voir. Les difficultés du problème d'aviation sont, en effet, de premier ordre, non pas seulement à cause de leur importance, mais à cause de leur nature. Ce ne sont pas de simples obstacles matériels, mais ce sont des difficultés d'ordre mathématique, je serai presque tenté de dire d'ordre métaphysique, et les difficultés de ce genre ne sont pas de celles que l’on résout grâce à des tours de main plus ou moins habiles. Le vol mécanique est, en effet, d'autant plus difficile que les êtres qui essaient de s'y livrer sont plus lourds. Si la Nature nous présente un nombre considérable de solutions du vol mécanique, ce mode de locomotion n'est réalisé que pour des animaux d'un poids relativement faible : les plus grands volateurs connus ne pèsent guère qu'une dizaine de kilogs. Il y a bien des oiseaux de plus forte taille, comme les autruches, mais ils ne volent pas : ce sont de simples girafes à deux pattes. Dans les périodes géologiques antérieures, on ne trouve pas non plus de volateurs de grandes dimensions; les espèces disparues, comme le Ptérodactyle ou l'Epiornis, n'élaient pas sensible- ment plus lourdes que nos espèces actuelles ; et, si quelques géologues découvraient des animaux volateurs de grandes dimensions, on pourrait affirmer à priori que ces animaux n'étaient pas des volateurs proprement dits, et qu'ils se bornaient à faire des glissades aériennes ou des descentes en parachutes, ou bien que la densité de l'atmosphère était beaucoup plus considérable à l’époque où ils vivaient, ce qui permettait de réaliser le vol méca- nique pour des êtres plus lourds. Quelle est donc la cause intrinsèque de cette difficulté du vol mécanique pour des animaux de grandes dimensions ? C'est un cas particulier de l'infériorité générale que subissent, au point de vue dynamique, les grands appareils par rapport aux petits. C'est, en somme, une application spéciale des lois de la similitude mécanique; nous allons chercher à l'expliquer par un exemple : Tout le monde a entendu dire que la puce est un animal d'une agilité merveilleuse : elle saute un nombre considérable de fois sa propre hauteur. Sup- posons, pour simplifier notre raisonnement, qu'une puce ait exactement un millimètre de hauteur et qu'elle saute cent fois sa hauteur, soit 10 centimètres. Supposons ensuite qu'il existe une puce géométrique- ment semblable à la puce ordinaire, mais avant des dimensions linéaires dix fois plus grandes : elle aura 1 centimètre de hauteur au lieu d'un millimètre; par suite des lois de la similitude géométrique, sa surface extérieure sera cent fois plus grande et son volume mille fois plus grand que celui de la petite puce. Supposons qu'elle soit formée de matériaux de mème densité moyenne, son poids sera aussi mille fois plus considérable. Entin, supposons, au point de vue mécanique, qu'elle soit douée d’une manière analogue, c’est-à-dire que chaque milligramme du corps de cel animal contienne emmagasinée la même quantité d'énergie que pour la petite puce. Dans ces conditions, elle sera mille fois plus lourde, eten même temps mille fois plus forte que la première. Faisons encore une hypothèse : nous avons d'une part mille petites puces dont l'éducation a été soignée el qui ont appris à sauter en même temps au com- mandement. À côté de leur groupe, plaçons notre grosse puce. De part et d'autre, nous aurons le même poids : mille fois celui d'une puce ordinaire; nous aurons également de part et d'autre la mème énergie, mille fois celle d'une petite puce. Dans ces conditions, sices mille et un animaux se mettent à sauter en même temps, les mille petites puces emploieront la mème énergie que la grosse à soulever le même poids. Par conséquent, le résultat sera le même, c'est-à-dire que la grosse puce s'élèvera exactement à la même hauteur que chacune des mille petites. Nous avons supposé que cette hauteur était de 10 centimètres pour la petite puce ; ilen sera donc de mème pour la grosse, mais ici apparaît l’infériorité des gros animaux. Tandis que nous nous extasions sur l'habileté de la petite puce qui saute cent fois sa hauteur, la grosse, qui est aussi bien douée au point de vue de l'énergie musculaire, n'arrivera à sauter que 10 fois sa propre hauteur; cela paraîtra donc beaucoup moins merveilleux. Poursuivons notre raisonnement et supposons une puce géante qui ait, non pas un centimètre, mais un décimètre de hauteur; elle va être mille fois plus grosse, mille fois plus lourde, et mille fois plus forte que la grosse puce d’un centimètre. Si l’on fait pour ve troisième terme de la série le même raisonnement qu'on a fait pour le premier et le deuxième, on arrivera à cette conclusion que la puce géante sautera à la même hauteur que la grosse ou que la petite, c'est-à-dire toujours à 10 centimètres, et pour elle ce ne sera plus cent fois, ni dix fois sa hauteur, ce sera simplement sa propre hauteur. Continuons encore, et imaginons une puce Mmons- trueuse qui ait un mètre de hauteur. Elle va être mille fois plus lourde et mille fois plus forte que la puce géante de 10 centimètres et, toujours d'après le même raisonnement, elle arrivera, comme ses moyennes et ses petites camarades, à sauter à 10 centimètres de hauteur. Cette fois, ce n’est plus qu'un dixième de sa propre hauteur qu'elle peut atteindre. | Ainsi, voilà une série d'animaux géométriquement semblables, et semblablement doués au point de vue de l'énergie emmagasinée dans leur corps; le petit animal d'un millimètre paraît une merveille de légèreté, et le monstrueux animal d'un mètre semble un type de lourdeur ; les échelons intermédiaires ont des 186 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION propriétés moyennes. Cet exemple montre l’infériorité apparente que présentent, par le seul fait de leurs grandes dimensions, les gros animaux par rapport à leurs semblables que la Nature a faits plus petits. I se passe quelque chose d'analogue en aviation ; ce n’est, évidemment, pas tout à fait la même chose, mais les grands volateurs sont dans des conditions inférieures par rapport aux petits. Sans entrer dans aucun raisonnement de détail, on se rend compte à priori qu'il est évident que la difficulté de la sustentation dynamique doit être d'autant plus grande que le poids à soutenir est plus considérable par rapport à la surface porteuse. Le rapport du poids de l'appareil à la surface sustentatrice à recu un nom, en aviation; on l'appelle la charge par mêtre carré, etil est certain que plus cette charge est grande, toutes choses égales d’ailleurs, plus il est nécessaire de dépenser de travail pour soutenir un poids donné. Quand on coupe une partie des ailes d'un oiseau, tout le monde sait que l'on gêne son vol et que quelquefois on l'empêche complètement. Or, ici, les lois de la similitude interviennent également. Considérons deux animaux volateurs semblables. L'un pèsera dix grammes et aura une surface porteuse d’un décimètre carré; en d’autres termes, son poids sera d’un centième de kilo- gramme et sa surface porteuse d'un centième de mètre carré; la charge par mètre carré sera donc de 1 kilog. Supposons un animal géométriquement sem- blable, mais de dimensions linéaires dix fois plus grandes; supposons aussi qu'il ait la même densité. Sa surface porleuse sera multipliée par cent, elle sera donc d'un mètre carré; quant à son volume et à son poids, ils seront multipliés par 1000; cet animal pèsera done 10 kilogs; sa charge par mètre carré va se trouver, par suite, être de 40 kilogs au lieu d'un. C'est une loi générale que des vola- teurs” géométriquement semblables auront une charge par mètre carré proportionnelle à leurs dimensions linéaires. On conçoit donc que la dé- pense d'énergie pour réaliser le travail de susten- tation doit être plus grande pour le gros que pour le petit, et, en fait, la Nature ne nous offre pas de spécimen d'animaux volateurs pesant plus de 10 kilogrammes. Qu'est-ce que cela prouve? C'est que, étant donnée l'énergie qu'il est possible d'emmagasiner dans les muscles, on ne peut réaliser le vol mécanique que jusqu'à cette limite de poids. Si l’on veut soutenir en l'air un animal plus gros, en particulier un homme qui pèse en moyenne 70 kilogs, l'énergie musculaire sera insuffisante, et il faut recourir à ‘ Nous donnons ce nom aux appareils réalisant le vol mécanique, qu'ils soient naturels ou artificiels. d'autres sources. C’est pour cela que la réalisation des appareils d'aviation n'a pu se produire que lorsque l’on a imaginé des moteurs renfermant sous un faible poids une énergie beaucoup plus considérable que celle dont disposent les animaux. Tant que ces moteurs n'existaient pas, il n'y avait rien à faire. Cette difficulté due aux lois de la similitude mé- canique, nous ne l'avons pas tout à l'heure envi- sagée d’une manière complète; elle est, en réalité, plus grande qu'elle ne parait d'abord. Nous avons supposé, en effet, que, dans les appa- reils géométriquement semblables, on pouvait em- magasiner une quantité d'énergie proportionnelle au poids ou au volume de l'appareil; cela n’est pas absolument vrai. Plus les dimensions sont grandes, plus la proportion du poids mort au poids utile augmente; un exemple simple permettra de tou- cher ce fait du doigt : Supposons une corde suspendue à un point d'attache situé à 10 mètres de hauteur; au bas de cette corde est attaché un seau du volume de 10 litres, contenant par conséquent 10 kilogrammes d'eau. Je considère, dans cet exemple, que le poids de l'eau contenue dans le seau est le poids utile, et que le poids de la corde et du seau lui-même est le poids mort. Considérons un appareilgéométriquementsemblable, mais dont toutes les dimensions sont doubles. Le volume du seau sera huit fois plus grand que dans le cas précédent; il contiendra donc 80 litres. Si nous négligeons le poids du seau pour ne nous occuper que de celui de la corde, celle-ci devra porter un poids huit fois plus grand que dans le premier cas; elle devra donc être composée, à solidité égale, d’un nombre àäe brins huit fois plus considérable. Comme ces brins pèsent quelque chose, le poids d’un mètre de longueur de la deuxième corde sera égal à huit fois celui d’un mètre de longueur de la première. Mais, comme nous avons supposé que tout l'appareil était géométriquement semblable, la corde, au lieu d’avoir 10 mètres comme dans le premier cas en aura vingt. La longueur de corde étant double, et le poids du mètre linéaire étant multiplié par huit, le poids total de la deuxième corde sera non pas huit fois, mais seize fois plus élevé que celui de la première. Ainsi, pour porter huit fois plus d’eau, en d’autres termes avoir un poids utile huit fois plus considérable, nous aurons un poids mort qui ne sera pas huit fois, mais seize fois plus grand. Il en est de même à peu près en toute espèce de machine; le poids mort augmente avec les dimen- sions homologues, si bien que, dans deux appareils semblables, on ne peut pas emmagasiner une énergie proportionnelle au volume. Mais les gros appareils ont, sous ce rapport, une infériorité no- table sur les petits, et c'est là une nouvelle cause qui vient augmenter les difficultés lorsque l’on veut opérer en grand. Ces histoires de puces, de cordes, n'ont rien, en apparence, à voir avec l'aviation, mais, en réalité, le problème qui nous intéresse n'échappe pas à ces lois générales dont nous avons cherché à faire saisir l'importance par ces exemples familiers. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION III. — LES LEÇONS DE LA NATURE. Il est donc bien entendu que, pour réaliser le vol mécanique, il faut disposer de moteurs puissants. Mais ce n'est pas tout : il faut savoir se servir de ces moteurs, c'est-à-dire les faire agir en impri- mant des mouvements convenables à des surfaces appropriées, J'entends d'ici la réponse : « C'est bien simple, il n'y à qu'à imiter la Nature. » Voyons un peu ce quil faut penser de cette solution simpliste. Pour construire des machines, les procédés de l'homme et ceux de la Nature diffèrent complète- ment. L'homme prend les matériaux de construc- tion, les taille en morceaux de forme déterminée et assemble ensuite ces morceaux. Parfois, ces assemblages sont permanents, comme lorsqu'on rive ensemble les diverses pièces d’une charpente en fer; d’autres fois, ils sont démontables, comme cela arrive dans toutes les machines, dont on peut, pour des réparations ou d’autres causes, séparer assez facilement les pièces les unes des autres. Il n'en est pas ainsi dans la Nature; les diffé- rentes parties qui constituent le corps d’un animal sont toujours reliées entre elles d'une facon per- manente, et, de plus, elles communiquent les unes aux autres grâce à des canalisations plus ou moins compliquées dont le but est d'assurer la nourri- ture des différentes parties du corps. Lorsque l’homme construit une machine, il ne lui demande qu'une chose, une fois la construction terminée : c'est que les pièces puissent prendre les unes par rapport aux autres les mouvements prévus. Ceci est nécessaire aussi pour les mécanismes de la Nature; sans cela ils ne rempliraient pas leurs fonctions; mais il faut, en outre, que l'être orga- nisé puisse se nourrir, réparer les pertes de toute nature auxquelles il est sujet, et même, dans une partie de son existence, accroître ses dimensions. Cette nécessité de la nourriture et de la crois- sance impose aux mécanismes naturels cette sujé- tion de la continuité dont les machines construites par l’homme sont affranchies. De ce fait, il résulte une conséquence importante : c'est que les méca- nismes naturels sont limités dans leurs mouve- ments, tandis que l’homme peut construire des machines destinées à réaliser tous les mouvements qu'il lui plaira d'imaginer. Parmi les mouvements possibles, il en est un qui est constamment employé dans tous les méca- nismes construits par la main de l'homme : c'est le mouvement de rotation continue autour d'un axe; on peut dire que cette sorte de mouvement est la base de la Mécanique humaine. Or, ce mou- vement est absolument impossible dans un méca- nisme naturel; car il ne peut exister qu'à la condi- 187 tion que l'arbre tournant constilue une pièce absolument indépendante des pivols, coussinets ou autres organes fixes assurant sa position. Voilà donc une différence essentielle entre les mécanismes construits par l’homme et ceux dont la Nature nous offre l'exemple. Nous pouvons fabri- quer des machines dont certains organes seront animés d’un mouvement de rotation continu; dans la Nature, on ne peut voir que des mouvements alternatifs. Or, au point de vue mécanique, il est hors de doute qu'un mouvement continu est préférable à un mouvement alternatif, car celui-ci met en jeu, à chaque changement de sens, des forces d'inertie plus ou moins considérables, et tout le monde sait quels inconvénients de toute nature présentent ces forces chaque fois qu'elles interviennent. L’impos- sibilité de recourir aux mouvements de rotation continus est donc, pour les mécanismes naturels, une cause notoire d'infériorité; nous serions bien mal inspirés si nous voulions, sous prétexte d'imiter la Nature, nous imposer dans nos mécanismes cette infériorité dont nous sommes maîtres de nous affranchir. C’est pour cette raison que l'homme n'a pas eu intérêt à construire des navires à nageoires ou des locomotives à pattes; il n'en aura pas davantage à faire des appareils d'aviation à ailes battantes à la manière des insectes et des oiseaux. Est-ce à dire que nous n'avons rien à apprendre, en aviation, dans l'étude de la Nature? Loin de moi semblable pensée : la Nature estun livre ouvert qui enseigne des choses excellentes à qui sait y lire; mais ses enseignements ne découlent pas tou- jours immédiatement d'une observation superli- cielle. Il faut, en aviation, bien se rendre compte du fonctionnement des volateurs naturels que nous avons sous les yeux, et savoir discerner, parmi les caractères qu'ils présentent, ceux qui leur sont imposés par leur constitution même, et qui souvent n'ont aucune utilisation au point de vue mécanique, et ceux qui, au contraire, servent à la solution du problème qui nous intéresse. Lorsque nous aurons découvert, dans un oiseau, les conditions grâce auxquelles il peut réaliser son vol merveilleux, nous chercherons à construire des appareils qui remplissent ces conditions; mais, pour arriver à ce résultat, nous procéderons en employant les moyens qui sont à notre disposition, sans nous astreindre à copier les procédés auxquels la Nature est condamnée. Au cours de cette étude, nous aurons plusieurs fois l’occasion de revenir sur cette question, et de faire voir, par des exemples particuliers, le genre d'enseignements que la Nature peut nous fournir en locomotion aérienne. Je me bornerai à dire ici qu'en aviation comme en toutes choses, il faut 188 COMMANDANT PAUL RENARD — L’AVIATION toujours étudier la Nature, s'en inspirer souvent, ne la copier jamais. IV. — LES TROIS SORTES DE TRAVAIL MÉCANIQUE EN AVIATION ET LE TRIPLE ROLE DE LA RÉSISTANCE DE L'AIR. Le vol artificiel est une application des lois de la Mécanique, et l'on sait qu'on ne peut réaliser un mouvement quelconque sans dépense d'énergie. Lorsqu'on veut se rendre compte du problème de l'aviation, il est nécessaire de chercher à connaître quelle quantité d'énergie il faut consommer pour arriver au résultat cherché, en d’autres termes, quelle dépense de travail mécanique il faut faire. Ce travail peut se décomposer en trois parties distinctes, auxquelles nous donnerons les noms de travail de dénivellation, travail de propulsion ou de translation, et travail de sustentation. Le travail de dénivellation est celui qui est néces- saire pour transporter l'appareil d'un point de dé- part situé à une certaine altitude à un point d’ar- rivée situé à une altitude différente. Ce travail est commun à toute espèce de véhicules; de plus, il est toujours le même, quel que soit le véhicule considéré. Sa valeur numérique s'obtient en mul- tipliant le poids de l'appareil par la différence de niveau entre le point de départ et le point d’ar- rivée. Si nous prenons un aéroplane de 500 kilo- grammes au niveau de la mer et si nous l'élevons à 100 mètres d'altitude, pour obtenir ce résultat il fiudra dépenser un nombre de kilogrammètres égal à 500 X 100, c'est-à-dire 50.000 kilogrammè- tres. Qu'il s'agisse d’un aéroplane supporté par la réaction de l'air, d'une voiture roulant sur une route, d'un poids remorqué par un treuil, pour élever 500 kilogrammes à 100 mètres de hauteur, il faudra toujours dépenser 50.000 kilogrammè- tres. Lorsque le point de départ et le point d'arrivée sont à la même hauteur, le travail de dénivellation est égal à zéro; tel est le cas d'un bateau navi- guant sur l'océan, d'un chemin de fer parcourant une voie rigoureusement horizontale, d'un bal- lon ou d’un aéroplane se maintenant à la même altitude. Si le point d'arrivée est à un niveau inférieur au point de départ, le travail de dénivellation est né- galtif; la pesanteur, au lieu de nuire au mouve- ment, l'a, au contraire, favorisé. C’est le cas d'un aéroplane qui descend au niveau du sol, d'une benne de mine qui s'enfonce dans un puits, d'une voiture qui circule sur une route descendante, etc. En semblable circonstance, le moteur est soulagé, et quelquefois même il peut ne plus avoir rien à faire. Le travaii de translation est celui qui est néces- saire pour déplacer horizontalement le véhicule ; de même que le précédent, il existe pour les appa- reils de locomotion quels qu'ils soient, mais il dif- fère du travail de dénivellation en ce sens que les lois auxquelles il obéit ne sont pas les mêmes pour les différents genres de véhicules. S'il s'agit d'un appareil de locomotion terrestre, c'est-à-dire prenant appui directement ou indirecte- ment sur le sol, le travail de translation pour par- courir un chemin donné est égal au produit du chemin parcouru par la résistance à l'avancement. Cette résistance à l'avancement, qui tient unique- ment au frottement, soit de glissement, soit de roulement, du véhicule sur le sol, est égal au poids de l'appareil multiplié par un certain coefficient. Sur les chemins de fer, ce coefficient est égal à quelques millièmes, sur les routes à quelques centièmes. Quelle que soit d'ailleurs la valeur numérique de ce coefficient, il présente ce caractère qu'il est indépendant de la vitesse; la résistance à l'avancement d’un véhicule terrestre est donc cons- tante. Le travail nécessaire pour parcourir une longueur donnée, un kilomètre, par exemple, est indépendant de la vitesse avec lequelle le chemin est effectué. | Si l’on circule sur une bonne route pour laquelle le coefficient est de 3°/, et s'il s'agit d'une voiture pesant, tout compris, 2.000 kilogs, la résistance l'avancement sera de 60 kilogs, et chaque fois que l'on parcourra un mètre, il faudra dépenser 60 kilogrammètres ; si l'on parcourt un kilomètre, on en aura dépensé 60.000. Ce chiffre sera le même, que le kilomètre ait été parcouru à une allure lente ou rapide. 5 S'il s'agit, au contraire, d'évaluer le travail con- sommé dans l'unité de temps, comme le chemin parcouru pendant celte période est égal à la vitesse du véhicule, le travail dépensé par heure augmen- tera avec la vitesse; il faudra toujours 60 kilo- grammètres par mètre parcouru. Si l'on marche à la vitesse d'un mètre par seconde, on dépensera 60 kilogrammètres par seconde; si l'on marche à la vitesse de deux mètres par seconde, on en dépen- sera 120, et ainsi de suite. On voit donc que le tra- vail consommé par unité de temps sera propor- tionnel à la vitesse. Dans la pratique, ce qui précède n’est rigoureuse- ment vrai que pour les vitesses faibles, car, aux vitesses élevées, il faut compter avec la résistance que l'air oppose à l'avancement du véhicule; les bicyelistes, les automobilistes et les ingénieurs de chemins de fer le savent bien, mais ceci n’infirme pas la théorie que nous venons d'exposer. Seule- ment, en pareil cas, le véhicule n’est plus exclusive- ment terrestre; il a à vaincre, pour se transporter COMMANDANT PAUL RENARD — d'un point à un autre, non seulement le frottement contre le sol, mais encore la résistance de l'air à l'avancement, et cette résistance est soumise aux lois que nous allons indiquer. Les véhicules qui traversent un fluide, air ou eau, ont à vaincre la résistance que ce fluide oppose à leur pénétration. Celte résistance varie suivant différentes circonstances, dont les principales sont la nature et la densité du fluide, la forme du corps, ses dimensions géométriques, et enfin la vitesse du mouvement. Toutes choses égales d'ailleurs, et vilesses qui sont susceptibles de nous intéresser, c'est-à-dire jusqu'aux environs de 100 mètres à la seconde, qui correspondent à 360 kilomètres à l'heure, on admet que la résistance qu'un fluide oppose aux mouvements d’un corps solide est pro- portionnelle au carré de la vitesse; c'est-à-dire que, si cette résistance est de 10 kilogs à la vitesse de 1 mètre par seconde, pour une vitesse de 2 mètres, elle sera, non pas de 20, mais de 40 kilogs; pour une vitesse de 3 mètres, de 90 kilogs et non pas de 30; pour une vitesse de 10 mètres, de 1.000 kilogs et non pas de 100. Il en résulle que le travail nécessaire pour par- courir un chemin déterminé, un kilomètre, par exemple, n'est pas indépendant de la vitesse, mais augmente, et très rapidement, avec celle-ci. Si nous parcourons, avec le véhicule considéré, le kilomètre à la vitesse de 1 mètre par seconde, il faudra dépenser 10.006 kilogrammètres ; à la vitesse de 2 mètres, le kilomètre nous coûtera 40.000 kilo- grammètres ; à la vitesse de 3 mètres, 90.000 kilo- grammètres; à la vitesse de 10 mètres, 1 million. On voit que la loi est absolument différente pour les véhicules aquatiques ou aériens et pour les véhicules terrestres. Mais si, au lieu de considérer le travail nécessaire pour parcourir un chemin donné, on considère le travail dépensé par unité de temps, la différence est encore plus considé- rable. Pour obtenir ce travail, il faut, en effet, multiplier la résistance par le chemin parcouru pendant la période considérée. Or, la résistance à l'avancement est proportionnelle au carré de la vitesse, le chemin parcouru pendant la période considérée est égal à la vitesse elle-même; done le travail par unité de temps sera proportionnel au carré de la vitesse multiplié par la vitesse, c'est- à-dire au cube de la vitesse. Si nous reprenons notre exemple précédent, el si nous marchons à l'allure de 1 mètre par seconde, nous aurons à dépenser par seconde un travail égal au produit de la résistance, soit 10 kilo- grammes, par 1 mètre, c'est-à-dire 10 kilogram- mètres. Si nous marchons à la vitesse de 2 mètres par seconde, la résistance sera portée à 40 kilo- pour les L'AVIATION 189 grammes, le chemin parcouru sera de 2 mètres, la dépense de travail dans l'unité de temps sera par suite de 80 kilogrammètres, c'est-à-dire huit fois plus considérable; avec une vitesse de 3 mètres par seconde, nous aurons à dépenser 90 kilogrammes multipliés par 3, soit 270 kilogrammètres dans l'unité de temps; à l'allure de 10 seconde, nous aurôns une résistance de 4.000 kilo- métres par grammes qu'il faudra multiplier par la vitesse de 10 mètres donc de 10.000 kilograminètres, soit mille fois : la dépense de travail par seconde sera plus grande que quand la vilesse est dix fois plus petite. Tel est le prix énorme auquel il faut payer la vitesse quand il s’agit de véhicules prenant leur appui sur un fluide; cette rancon formidable esl prélevée sur les ballons, sur les appareils d'avia- tion, sur les bateaux. Elle est la même pour tous, mais il y a entre les véhicules aquatiques et les véhicules aériens une différence notable à ce point de vue. Pour les bateaux, la vitesse est toujours agréable, souvent utile, mais c’est un luxe dont on peut, à la ri- gueur, se passer. Avec des vitesses moitié moindres, nos transatlantiques mettraient deux semaines au lieu d'une pour aller du Havre à New-York, mais ils arriveraient tout de même; la dépense par jour serait huit fois moindre et la dépense totale quatre fois plus faible. Si l’on s’astreint à supporter les frais considérables de la vitesse, c’est parce qu'on le veut bien. Il n'en n'estpas de même en navigation aérienne. En raison de la nécessité d'avoir une vitesse propre supérieure à celle du vent, on est obligé, si l’on veut être réellement dirigeable, d'avoir de grandes vitesses et, par conséquent, de les payer cher. Pour résumer ce que nous venons de dire de ces deux premiers travaux, le travail de dénivellation existe pour tous les véhicules, et il est le même pour tous ; le travail de translation existe pour tous les véhicules, mais ses lois sont beaucoup plus désavantageuses lorsqu'il s'agit de véhicules aqua- tiques ou aériens. Pour les véhicules terrestres, la vitesse ne coûte pour ainsi dire rien, tandis que pour les bateaux et les aéronefs, elle coûte fort cher. De plus, si, pour les bateaux, la vitesse est un luxe auquel on peut renoncer si l’on veut écono- miser l'énergie dépensée, pour les véhicules aériens c'est une condition de première nécessité; ils sont donc de beaucoup les moins avantagés, sous ce rapport, de tous les modes de locomotion. Reste enfin le éravail de sustentation, qui est spécial aux appareils d'aviation. La voiture qui roule sur une route, le bateau qui flotte au niveau de la mer, le ballon en équilibre à une hauteur 190 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION donnée, n'ont aucun travail à dépenser pour se soutenir; les appareils d'aviation, au contraire, ne se maintiennent en équilibre que grâce à une dépense continuelle d'énergie, et cette dépense d'énergie est, au point de vue mécanique, absolu- ment perdue. C'est un véritable gaspillage de tra- vail, car le travail ainsi dépensé ne correspond à aucun effet utile. Il faut done — et ainsi que nous avons déjà eu l'occasion de le dire, c'est là presque tout le pro- blème de l'aviation — arriver à réaliser ce travail de sustentation dans les meilleures conditions possibles et, avant tout, en bien connaitre les lois. C'est done à la sustentation qu'il faut s'attacher d'abord, et c'est d'elle que nous nous occuperons presque exclusivement dans la suite de cette étude. Mais, avant d'aborder ce problème, il est néces- saire de dire quelques mots de la résistance de Fair en général. ; L'aviation n'est, en effet, qu'une application, dans un but déterminé, des lois de la résistance de l'air. Si un navire aérien plus lourd que l'air se maintient en équilibre, s'il avance dans l’atmo- sphère, il ne peut, pour obtenir ces résultats, prendre appui sur autre chose que sur l'air; par conséquent, c'est grâce à la résislance que l'air offre à certaines surfaces que l'on peut obtenir et la sustentation et la direction. Cette résistance de l’air peut être envisagée, dans l'aviation, à un triple point de vue : on peut con- sidérer l'air comme un obs{acle, comme un sup- port où comme un point d'appui. Sous le premier aspect, l'air sera pour nous un ennemi à vaincre : c'est lui qui s'oppose au dépla- cement du véhicule et qui vient nous empêcher de prendre notre vitesse. Sous le deuxième aspect, l'air est, au contraire, un allié sans le concours duquel nous ne pouvons rien en aviation : c'est grâce à la résistance qu'il oppose à des surfaces sustentatrices que notre appareil s'affranchit des lois de la pesanteur. Sans ce support, l’aéronef tomberait immédiatement à terre. Enfin, sous le troisième aspect, l'air est encore un auxiliaire indispensable : c’est à cause du point d'appui qu'il nous fournit que nous pouvons exercer sur le véhicule un effort horizontal, grâce auquel nous obtenons la vitesse propre indispen- sable. Il est d'ailleurs à peine utile d'ajouter que ces trois manières d'envisager la résistance de l'air sont de simples conceptions de notre esprit, pour rendre plus claire et plus facile l'étude de l'avia- tion, mais que les lois de la Physique se soucient fort peu des points de vue sous lesquels il nous plait de les envisager, et qu’elles sont toujours les mêmes et donnent lieu aux mêmes phénomènes chaque fois que les mêmes circonstances se repro- duisent. V. — L'AIR CONSIDÉRÉ COMME OBSTACLE. Disons d’abord quelques mots de l’air considéré comme obstacle. Lorsqu'un corps quelconque est animé d'un mouvement relatif par rapport à l'air ambiant, il éprouve de la part de cet air une résistance qui, ainsi que nous l'avons vu, dépend de la forme du corps, de ses dimensions géométriques, de la den- sité du fluide et de la vitesse du mouvement relatif. Si ce corps est symétrique par rapport à un axe parallèle au déplacement, par raison de symétrie, la résistance de l'air est elle-même dirigée suivant cel axe. Voyons quelle est l'influence des difré- rentes variables sur la valeur de la résistance au mouvement du corps dans l'air”. De l’ensemble de toutes les expériences faites, on peut déduire les lois suivantes, qui ne sont peut-être pas rigoureusement exactes, mais qui le sont avec une approximation suffisante pour qu'on puisse sans inconvénient les admettre dans la pra- tique : 1° La résistance de l'air dépend de la forme géo- métrique du corps. Il est impossible de formuler une loi à ce sujet; la seule chose que l’on puisse dire, c’est qu'à chaque forme déterminée corres- pond un coefficient de résistance spécial, que nous désignerons par la lettre y. 2 La résistance de l'air est, en outre, propor- tionnelle au poids spécifique du fluide. Cette pro- portionnalilé se vérifie dans un même fluide dont le poids spécifique vient à changer par suite des variations de pression ou de température; elle se vérifie encore dans des fluides de nature différente, et, même s'il s’agit de gaz et de liquides, la pro- portionnalité est encore sensiblement exacte, à la condition toutefois que la viscosité du liquide soit très faible. Si done l’on désigne par a le poids spécifique de l'air dans lequel se meut le corps considéré, la résistance sera proportionnelle à à. 3° On admet, en outre, que, pour des corps géo- métriquement semblables, la résistance est propor- tionnelle à la surface de la maitresse section. On désigne sous ce nom la section la plus grande que ! Dans tout ce qui va suivre, nous adoplerons les unités suivantes : les longueurs seront exprimées en mètres: les temps, en secondes; les vitesses, en mètres par seconde ; les surfaces, en mètres carrés; les volumes, en mètres cubes: les forces, en kilogrammes; et les poids spécifiques, en kilogrammes par mèlre cube. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 191 l’on puisse faire dans le corps par un plan perpen- diculaire au sens du mouvement, lequel, par hypo- thèse, doit être parallèle à l'axe de symétrie du corps considéré. Cette loi de la proportionnalité des surfaces el de la résistance n'est qu'approximative ; mais on peut l’admettre dans la pratique. Si donc l'en désigne par S la surface de la maîtresse section, la résistance est proportionnelle à cette surface, c'est- à-dire au carré des dimensions linéaires du corps considéré. # Enfin, loutes choses égales d'ailleurs, on admet que la résistance de l'air est proportionnelle au carré de la vitesse. Si l’on désigne cette vitesse par V, la résistance est donc proportionnelle à V°. Celte loi n'est encore qu'approximative, mais elle à été vérifiée jusqu'aux environs de 50 mètres sans fléchir d'une manière sensible. Des considéra- tions théoriques permettent de supposer qu'elle doit être exacte jusque vers 100 mètres par seconde, ce qui nous suffit largement’. Il résulte de tout ce qui précède que, si l’on désigne par R la résistance de l'air, cette résistance est donnée par la formule : (1) R — paSV®. Si le poids spécifique de l'air est égal à 1 kilog par mètre cube, la surface de la maitresse section à 1 mètre carré et la vitesse à 1 mètre par seconde, on aura: R = y. Par conséquent, le coefficient w représente la valeur numérique de la résistance de l'air pour un corps de forme donnée, ayant une maitresse sec- tion de 1 mètre carré, s'avancant avec une vitesse de 1 mètre par seconde dans un gaz pesant 1 kilog par mètre cube. Dans la pralique, on a préféré, pour donner un aspect moins compliqué à la formule, réunir sous un même symbole le coefficient w et le poids spéci- tique de l'air 4. On pose alors : ua — 9, et la for- mule s'écrit : (2) R — ?S V2. Si, dans cette formule, on suppose S et V égaux à l'unité, il reste : KR — Le coefficient # représente done la valeur numé- rique de la résistance dans l'air d'un corps de forme déterminée, ayant une maitresse section égale à l'imètre carré et une vitesse relative de 1 mètre par seconde *. NS © PR ie, nn 2 © ‘ Les lecteurs désireux de connaitre avec plus de détails la question des lois de la résistance de l'air pourront se reporter à un article que j'ai publié dans la Revue générale des Sciences du 30 janvier 1909. * Il est évident que, le poids spécifique de l'air pouvant varier, la formule (2) n'est exacte que pour des conditions déterminées de température et de pression. Dans la pratique, on suppose que l'air est à la température zéro, à la Lorsqu'on veut étudier les lois de la résistance de l'air, on trouve plus simple de comparer celle des différents corps à la résistance d'une surface élalon. La surface étalon généralement adoptée est le plan mince animé d'un mouvement orthogonal par rapport à l'air ambiant. Dans ce cas, la for- mule est la même que précédemment, avec cette différence qu'on désigne généralement le coefficient par la lettre K. La formule devient par suite : 3 R=KSV:. K n’est autre chose que la valour particulière que prend le coefficient o pour un plan mince s'avançant perpendiculairement. L'adjectif mince veut dire que le plan considéré est réduit à l'épais- seur minima nécessaire pour conserver sa rigidité. D'après les expériences les plus dignes de foi, le coefficient K doit être compris entre 0.070 et 0,080. On peut adopter comme chiffre moyen 0,075, ce qui veut dire que, si un plan mince d'un mètre carré de surface s'avance perpendiculairement dans l'air, à la vitesse d'un mètre par seconde, il éprouve une résistance de 75 grammes, dans les conditions nor- males de température et de pression. On à donné à ce coefficient d’une importance capitale le nom de coefficient de Ja résistance de l'air. En réalité, c’est le coefficient de la résistance éprouvée par un plan mince s’avancant perpendi- culairement. Lorsqu'un corps symétrique s'avance dans l'air parallèlement à son axe, il éprouve, ainsi que nous l'avons vu, une résistance qui est donnée par la formule (2) : R — ? SV°. Imaginons un plan mince orthogonal, ayant une surface s, et éprouvant à l'avancement la même résistance R que la surface de forme quelconque considérée. La résistance de ce plan étant exprimée par la formule (3) : R— KsV', et les deux résis- tances étant égales, on aura : (4) pSV?—=KsV? ou pS —=Ks. pression 760, et qu'il est complètement sec. Pour tenir compte des changements de température et de pression, il suffit d'appliquer un terme de correction qui, dans la pra- tique, se réduit à quelques centièmes. Toutefois, si l’on supposait les variations maxima possibles de température et de pression dues aux circonstances météorologiques, on arriverait à conclure que la valeur de la résistance peut varier jusqu'à 1/4 ou un 1/3 de sa valeur. Cette variation est beaucoup plus grande si l’on fait des évolutions en altitude, car on sait que la densité de l'air diminue notablement au fur et à mesure qu'on s'élève. Il n’est même pas inutile de se rendre compte de l'impor- tance des variations de cette nature ; on entend souvent dire, en effet, que les aéroplanes ou autres appareils auront d'énormes difficultés à se soutenir s'ils veulent s'élever à des hauteurs de plusieurs centaines de mètres. En réalité, il n'en est rien, car, si l'on fait le calcul, on constate qu'à 800 mètres de hauteur l'air a perdu environ 1M0 de sa den- | sité, à 1.750 mètres, environ 1/4, et à 5.500, environ la moitié. Tant qu'on se maintient à des hauteurs de quelques centaines demètres, il n'y a donc pasdegrande modification. 192 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION On dit alors que le plan mince est équivalent, au | tourne la concavité vers l'arrière, le coefficient ç point de vue de la résistance, à la surface considé- rée. Cette résistance est, en effet, la même dans tous les cas, puisqu'elle est proportionnelle au carré de la vitesse et que le produit des deux autres termes de la formule # S ou Ks est le même pour la surface de forme quelconque et pour le plan mince: Si l'on connait le coefficient correspondant à une surface de forme donnée, il sera toujours facile de trouver la surface du plan mince équi- valent. 11 suffira de se reporter à la formule (4) et de résoudre l'équation par rapport à s. On aura ainsi : os (5) S=T. Cette considération des surfaces équivalentes est d'un emploi fréquent en aviation, car elle permet de substituer dans le raisonnement un plan mince de surface déterminée à un corps de forme plus compliquée. De l'équation (4) on peut également tirer la for- mule : © (6) K- S = Ceci veut dire que les rapports des maitresses sections du plan mince et de la surface considérée sont en raison inverse de leurs coefficients de résis- tance respectifs. Il en résulte que, si l'on veut avoir le coefficientde résistance d'unesurface déterminée, il n'est pas même nécessaire de le mesurer : il suffit de connaitre son rapport avec celui du plan mince, c'est-à-dire l'expression #/K. On peut alors écrire : (1) o —K CAR Le coefficient g est donc d'autant plus faible que la surface du plan mince équivalent est plus petite par rapport à la maitresse section du corps consi- déré. On désigne par le symbole ç le rapport s/S. On peut l'appeler le coefficient de réduction de la résistance de la surface par rapport à celle du plan mince. Si ce coefficient de réduction est connu, le coefficient # est donné par la formule : (S — 06K. On peut ainsi calculer le coefficient de résistance de surfaces quelconques en fonction de celui du plan mince si l’on connait le coefficient de réduc- tion ç. Plusieurs expérimentateurs, le Colonel Renard entre autres, ont fait des recherches à ce sujet, et voici quelques-uns des résultats obtenus : Une sphère pleine a un coefficient de réduction de 0,158, c'est-à-dire résistance est environ sixième de celle du plan mince de même section. Si l'on prend une demi-sphère creuse dont on que sa un est de 0,392, c'est-à-dire qu'une semblable demi- sphère résiste plus du double que la sphère entière. Si l'on tournait la concavité de la demi-sphère en avant, le coefficient s serait alors de 1,283, c'est-à-dire que cette sorte de cuiller résiste nota- blement plus que le plan mince. Un cylindre circulaire qui s'avance perpendicu- lairement à ses génératrices a un coefficient de réduction de 0,596. Si l'on considère des fuseaux allongés analogues aux formes de ballons dirigeables, on constate que les coeflicients de réduction sont extrèmement faibles, c'est-à-dire que de semblables surfaces résistent très peu. Ainsi un fuseau allongé à 2 pour 1, c'est-à-dire dont la longueur, de pointe à pointe, est égale au double du diamètre de la maitresse section, a un coefficient de résistance qui n'est que de 0,073 par rapport au plan mince. Par rapport à la sphère de même diamètre, la résistance d'un semblable fuseau est de 46 cen- tièmes ; si l’on passe à un fuseau ayant un allon- gement de trois, le coefficient « tombe à 0,032, c'est-à-dire qu'un semblable fuseau à une résis- lance qui n’est environ qu'un trente-et-unième de celle d'un plan mince-de même diamètre. Ces considérations de résistance à l'avancement des carènes sont extrêmement importantes en navi- galion aérienne, mais il faut convenir qu'elles présentent moins d'intérêt en aviation qu'en aéros- tation. Les ballons dirigeables ont, en effet, des dimensions beaucoup plus considérables que les- aéroplanes : leur résistance à l'avancement est donc beaucoup plus grande. Par conséquent, il est du plus haut intérêt d'étudier avec le plus grand soin les moyens de diminuer cette résistance. L'étude des formes des carènes est donc ici d'une importance capitale. En aviation, sans perdre tout intérêt, ces consi- dérations sont d'une importance moindre ; les dimensions transversales sont toujours restreintes, par conséquent la maitresse section faible, et on peut à la rigueur tolérer un coefficient 4 d'une plus grande valeur. Mais, ainsi que nous le verrons plus loin, il est mauvais de présenter à l'avancement une résistance exagérée et l’on à un intérêt sérieux à la diminuer. L'étude de la résistance des carènes est donc très utile aussi aux aviateurs, et, si les premiers qui se sont lancés dans les airs à bord d'aéroplanes ont paru les négliger, on se rend compte aujourd’hui qu'ils ont eu tort et qu'on peut avoir un grand avantage à réduire au minimum les résistances à l'avancement. Si le déplacement du corps n'est pas parallèle à l'axe de symétrie, ou même si ce corps n'a pas COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 193 d'axe de symétrie, les lois de résistance sont très compliquées. Nous ne pouvons, à priori, connaître la direction de la force que l'air oppose au mou- vement du corps ; déterminer d'avance son point d'application ; nous ne savons même pas si la résistance sur l'ensemble nous ne pouvons non plus des éléments de la surface considérée a une résul- lante unique, ou si le résullat de la composition des résistances élémentaires n’est pas une force et un couple. En réalité, il en est fréquemment ainsi, el pour des corps dissymétriques, et même des corps symétriques s’avancant sous certaines incidences, il y à à la fois force résistante et couple résistant. Aussi le corps s’avance en tournoyant constamment. Nous nous bornerons à signaler ce fait sans entrer dans une étude complète de la question, étude d'ailleurs inextricable ; mais nous aurons, dans ce qui va suivre, l'occasion d’exami- ner des cas particuliers de corps n'ayant pas d'axe de symétrie ou ne s’avancant pas parallèlement à cel axe. VI. — L'AIR CONSIDÉRÉ COMME SUPPORT. LA SUSTENTATION ORTUOPTÈRE. Après avoir envisagé l'air comme un obstacle à vaincre, nous allons examiner comment on peut l'employer comme support. La théorie est extrême- ment simple : il suftit de s'arranger pour que cer- laines surfaces faisant partie du corps à soutenir éprouvent de la part de l'air des réactions dont la composante verticale soit égale au poids de l’appa- reil à supporter. Mais, si la chose est fort simple en théorie, dans la pratique elle est beaucoup plus compliquée. Avant d'indiquer par quel mécanisme on peut arriver à réaliser la sustentation dynamique d'un appareil, il n’est pas inutile d'examiner ce qui se passe lorsqu'on laisse tomber librement un corps pesant dans l'atmosphère. Tout le monde sait que, si la chute avait lieu dans le vide, le corps pesant, étant constamment soumis à l’action de la pesan- teur, serait animé d'un mouvement uniformément accéléré. On sait même que l'accélération due à la pesanteur a une valeur déterminée d'environ 9%,81 dans les régions que nous habitons. Si la chute a lieu dans l'air, les choses ne se passent pas de la même manière. Au début, c’est comme si le corps tombait dans le vide, mais, dès qu'il à pris une certaine vitesse verticale, il éprouve de la part de l'air une résistance à son mouvement. Supposons qu'il ait un axe de symétrie et que cet axe de symétrie soit vertical. La résistance de l'air aura une résultante unique dirigée suivant cet axe, et nous n'aurons pas à nous occuper des faits secondaires de rotation. À mesure que, sous REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, l'action de la pesanteur, la vitesse de chute ira en augmentant, la résistance de l'air augmentera aussi, el comme elle augmente proportionnelle- ment au carré de la vitesse, elle prendra rapidement des valeurs considérables. Cette résistance, étant dirigée de bas en haut, sera directement opposée à la pesanteur, qui est dirigée de haut en bas, el son effet apparent sera de diminuer l'intensité de Ja pesanteur. Cet effet, nul au début de la chute, ira en augmentant, si bien que, tout compte fait, la force verticale dirigée de haut en bas appliquée au corps tombant ira constamment en diminuant; le mouvement sera donc accéléré, mais non unifor- mément. néanmoins la L'accélération sera décroissante, mais vitesse continuera à augmenter ; avec elle augmentera la force de résistance, et il arrivera un moment où cette force de résistance sera égale au poids du corps. Théoriquement, ce moment n'arriverait jamais, mais on s'en rap- proche d'une manière asymptotique, et dans la pra- tique on peut dire qu'au bout d’un temps plus ou moins long, un corps tombant dans l'air atteint une vitesse telle que la résistance de l'air est égale à son propre poids. À partir de ce moment, il est sollicité par deux forces verticales égales et con- traires qui se neutralisent ; il se trouve donc dans la situation d'un corps ayant une vitesse initiale, et n'étant sollicité par aucune force. Ce corps prend un mouvement uniforme qu'il conserve indéfiniment, tant que les circonstances ne sont pas modifiées. Le mouvement d'un corps pesant tombant dans l'air est donc un mouvement accéléré dont l'accélé- ration va en diminuant de manière que le mouve- ment finisse par se transformer en une chute à vitesse uniforme. C'est même un procédé qui a été employé pour chercher le coefficient de la résis- tance de l'air : il suffisait d'observer la chute jus- qu'à ce que la vitesse fût uniforme, et à ce moment la résistance de l'air était certainement égale au poids du corps tombant. Plus le coefficient de résistance sera grand et plus la surface de la maitresse section horizontale sera considérable, plus tôt la vitesse uniforme sera atteinte. En effet, lorsque ce régime sera établi, la résistance de l'air R sera égale au poids P de l’ap- pareil, et, si l’on se reporte à la formule (2), on aura : (9) P — &SV?. Le poids P est donné, et l'on voit que plus e et S seront considérables, plus la vitesse du régime sera faible. C'est de ces considérations qu'est née l’idée du parachute ; on développe considérablement la sur- face horizontale, on lui donne une forme possédant un grand coefficient de résistance, puisque nous 3e 194 avons vu qu'une demi-sphère creuse résiste plus qu'un plan mince, et, grâce à ces dispositions, on arrive à avoir une vitesse de régime faible, malgré le poids notable du parachute et de l’aéronaute. Lorsqu'un parachute descend avec une vitesse uniforme, la sustentation dynamique est, à vrai dire, réalisée, puisqu'on est arrivé à développer, grâce à la résistance de l'air, une force verticale dirigée de bas en haut, et qui fait rigoureusement équilibre au poids de l'appareil. On voit donc qu'ainsi on équilibre le poids de l'appareil par la résistance de l'air, et cela grâce à une dépense de travail; cette dépense de travail est fournie par la pesanteur, qui entretient ainsi la vitesse verticale de chute uniforme. Le parachute est donc le plus simple des appa- reils d'aviation, et, pour réaliser sa sustentation dynamique sans se rapprocher de terre, il suffit de prendre des dispositions telles que la surface sus- tentatrice soit frappée par un courant d'air vertical de vitesse V, grâce à des mouvements qui lui sont imprimés au moyen d’un moteur installé dans l’ap- pareil d'aviation. Si l'on oblient ce résultat, la force sustentatrice sera la même que dans le cas de la chute, mais la vitesse de l'air frappant les surfaces porteuses sera due au mouvement artifi- ciel imprimé par le moteur; le poids de l'appareil sera équilibré et il ne descendra plus. La seule dif- férence entre le cas d’un appareil d'aviation à moteur et un simple parachute, c'est que le travail de sustentation est fourni dans le premier cas par le moteur au lieu de l'être par la pesanteur, comme dans le second. C'est de cette idée simple qu'est venu le premier système de sustentation dynamique auquel on ait songé : le système orthoptère. Nous allons voir en quoi consiste ce système. Une surface planehorizontale À (fig. 1)estanimée, grâce à un moteur installé dans l'appareil, d'une RE BB A; Fig. 1. vitesse verlicale descendante V, telle que le produit KSV* soit égal au poids P de l'appareil. S'il en est ainsi, laréaction de l'air exercée sur la face inférieure du plan sera égale au poids de l'appareil et il y aura sustentation. Mais, en pratique, il est impossible que la surface À puisse descendre irdéfiniment par COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION rapport à l'appareil : elle aura, comme toute ma- chine, une course limitée. Lorsqu'elle sera arrivée au bas de sa course, en A, elle cessera d'agir, et, si l'on veut continuer à obtenir la sustentation, il faudra une autre surface B qui descende de B en B’ avec la même vitesse, de manière à produire le même effort vertical pendant que la surface A! remontera en A. Mais comme, pendant ce mouve- ment, elle détruirait l'effet sustentateur produit précédemment, on aura soin de la disposer verti- calernent comme on le voit en À,, de manière que, pendant la remontée, elle n’éprouve de la part de l'air qu'une résistance insignifiante. Lorsque la sur- face B sera arrivée en B', la surface A sera revenue à sa position supérieure. On la placera horizontale- ment, on l’abaissera de nouveau; pendant ce temps, on fera remonter la deuxième surface de B'en B, après avoir eu préalablement soin de la placer verticalement. En continuant ainsi ces mouve- ments allernatifs de palettes, horizontales pendant la descente et verticales pendant la montée, on pourra entretenir la sustentation d'une manière permanente. Tel est le principe de tous les sustentateurs or- thoptères. Les dispositions de détail varient à l’in- fini. 11 y a des parapluies qui s'ouvrent pendant la descente et se ferment pendant la montée; il ya des persiennes à châssis horizontal dont les lames s'appliquent horizontalement contre des nervures disposées ad hoc pendant la descente et occupent une position verticale pendant la remontée. On peut imaginer ‘un nombre infini de dispositions de ce genre et on nes'’en est pas fait faute. C'était l'idée la plus ancienne que l'on ait eue en aviation, et l’on croyait d'autant plus à la possibi- bilité de réaliser la sustentation par un procédé de ce genre qu'on se figurait imiter ainsi le mouve- ment alternatif des ailes d'oiseau. Nous verrons plus loin que l’imitation était extrèmement gros- sière, mais nous allons montrer immédiatement qu'avec un semblable système on ne peut espérer aucun résultat pratique. La sustentation dynamique n'est, en effet, admis- sible que si l’on peut obtenir le maintien de l'appa- reil en équilibre sans une dépense exagérée de travail. Cherchons donc à nous rendre compte du rapport entre le travail T dépensé par seconde et le poids P de l'appareil; en d'autres termes, évaluons la fraction T/P. Le dénominateur nous est connu. Nous savons, en effet, que le poids de l'appareil doit être égal à KSV?, S étant la surface sustentatrice et V la vitesse d'abaissement de cette surface. Quant au travail, il suffit, pour le connaître, de multiplier l'effort exercé par la machine sur la palette par la projection du chemin parcouru sur la direction de l'effort. Dans COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 195 ce cas particulier, l'effort est parallèle au chemin parcouru, l’un et l’autre sont perpendiculaires à la surface de la palette : nous avons done à multi- plier l'effort par le chemin parcouru dans l'unité de temps. Or, nous savons que cet effort est égal à KSV?; quant au chemin parcouru dans l'unité de temps, il est égal à la vitesse d’abaissement de la palette sustentatrice. On a donc, pour l’évalua- tion du travail : (10) T—=KSY:. Si nous voulons avoir le rapport T/P, il nous est donné par la formule suivante : LR SYE 44) P— KV — C'était d’ailleurs évident à priori, puisque, pour obtenir le travail par unité de temps, nons devons multiplier l'effort par la vitesse. De cette formule, nous devons tirer une conclu- sion importante : c'est que le rapport T/P n'est pas une caractéristique d'un appareil donné. Ce rap- port est égal à la vitesse d’abaissement de la palette. On peut donc avoir, dans le système orthoptère, des appareils qui dépensent beaucoup de travailet d’autres qui en dépensent peu, suivant que la vitesse V sera plus ou moins grande. Mais, si l’on veut que cette vitesse soit faible, comme on doit toujours avoir pour la sustentation P =KSV*, et que K est un nombre constant sur lequel nous ne pouvons rien, on sera amené à donner aux sur- faces sustentatrices la plus grande étendue pos- sSible, c’est-à-dire à augmenter S. Les meilleurs appareils orthoptères, ceux qui dépenseront le moins de travail pour soutenir un poids donné, seront donc les plus grands, et, si l’on pouvait avoir des surfaces sustentalrices de dimensions infinies, leur vitesse d'abaissement serait nulle et le travail nécessaire à la sustentation d’un poids quelconque serait nul aussi. Nous allons retourner un peu cette question pour arriver à des conclusions analogues. Si le rapport T/P nest pas une caractéristique d’un appareil déterminé, il serait intéressant de connaître une fonction du travail dépensé et du poids soutenu qui, pour un appareil donné, soit toujours la même, c'est-à-dire indépendante de la vitesse des surfaces sustentatrices. Cette fonction est facile à trouver. Comme V entre à la troisième puissance dans l’éva- luation de T, et à la deuxième seulement dans celle de P, si l'on élève le travail au carré et le poids au cube, chacune de ces deux expressions contiendra la vitesse à la sixième puissance; si l’on fait le quotient de ces deux quantités, la vitesse s'élimine d'elle-même. C'est ce que montre la for- mule suivante : TS 2MRASAUE 5) Pi — RSS 1 KS° Ici, nous trouvons une fonction de T et de P qui est indépendante de la vitesse verticale des palettes, et qui est une caractéristique de l'appareil consi- déré. Malheureusement, il faut convenir que cette for- mule ne parle pas beaucoup à l'esprit : le carré d'un travail, divisé par le cube d'un poids, est égal à une fraction qui a pour numérateur l'unité, et pour dénominateur le produit de la surface susten- tatrice par le coefficient de la résistance de l'air. 1] semble qu'on ne puisse pas tirer grand'chose d'une telle formule. Nous allons, d'après le Colonel Re- nard, la transformer légèrement; nous prendrons une des puissances du poids que nous enlèverons au dénominateur du premier membre pour le mettre au numérateur du deuxième. Nous obtien- drons ainsi : que nous écrirons de la manière suivante : TRUE TP (G)=rxs- Ici, nous avons le carré d’une fraction qui est égal au produit de deux autres, mais chacune de ces trois fractions est susceptible d'une interpréta- tion très claire. La première T/P n'est autre que le rapport du travail par unité de temps au poids soutenu. C'est précisément ce que nous avions cherché à évaluer au début. Or, qu'est-ce que le quotient d'un travail par une force? C'est un chemin parcouru, et, s'il s'agit du travail par unité de temps, c’est un chemin parcouru dans l'unité de temps, c'est-à-dire une vitesse. Qu'est-ce que cette vitesse? Nous savons que, dans le système orthoptère qui nous occupe maintenant, cette vitesse est celle avec laquelle on abaisse verticalement les palettes sustentatrices. Mais elle est susceptible d’une autre interprétation, qui à l'avantage d'être absolument indépendante du système de sustentation employé. (CEE Pour soutenir un poids P, nous dépensons un certain travail T. Le rapport de ce travail au poids soutenu est égal à une certaine vitesse; mais si, au lieu d'employer le travail T par unité de temps dans un appareil d'aviation, on l’employait à élever le poids P au moyen d'un treuil, d'une poulie ou de tout autre engin de levage dont le rendement mécanique serait égal à l'unité, ce poids P monte- rait avec une certaine vitesse par seconde qui serait précisément donnée par le rapport T/P. Nous con- clurons de là que, pour soutenir un poids donné au moyen d'un appareil d'aviation, il faut dépenser le même travail que celui qui serait nécessaire pour élever au moyen d'une machine quelconque le poids de l'appareil avec une certaine vitesse ver- 196 L. MAQUENNE &r E. DEMOUSSY — LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES ticale. Nous donnerons à celte vitesse verticale le nom de rzlesse fictive d'ascension. Cette vitesse est celle avec laquelle on arriverait à faire monter un poids égal à celui de l'appareil si, au lieu de dépenser l'énergie du moteur à se soutenir simple- ment dans un appareil d'aviation, on lutilisait dans un engin de levage. La considération de cette vitesse fictive d’ascen- sion est très intéressante en sustentation dyna- mique : elle est, en quelque sorte, une mesure du travail gaspillé uniquement pour se soutenir, el plus elle sera faible, meilleur sera l'appareil. Nous reviendrons plus loin et à plusieurs reprises sur ces considérations. Passons aux fractions contenues dans le deuxième membre de l'équation (13). La première, 1/K, est l'inverse du coefficient de la résistance de l’air.C'est un nombre constant pour un poids spécifique donné de l'air atmosphérique. Sur cette fraction, nous ne pouvons rien : il faut la prendre telle qu'elle est. Si l'on admet pour valeur de K 0,075, son inverse est égal à 13,333. Quant à la deuxième fraction du deuxième membre P/S, c'est le rapport du poids de l'appareil à la surface sustentatrice. Ce rapport à recu un nom en aviation : on l'appelle la charge par mètre carré. On comprend tout de suite que celte quan- tité est d’une importance considérable : la susten- tation est d'autant plus coûteuse, au point de vue dynamique, que chaque mètre carré de la surface sustentatrice doit porter davantage. C'est, en effet, ce qu'exprime très bien la formule (13). Nous pou- vons la modifier en prenant la racine carrée des deux membres et nous trouvons : Ex VE Comme 1/K est connu, nous pouvons, en effec- tuant le calcul, écrire : (14) En langage vulgaire, cette formule peut s'énoncer ainsi : la vitesse ficlive d’ascension est proportion- nelle à la racine carrée de la charge par mètre carré. Nous avons intérêt à diminuer la vitesse fictive d'ascension et, d'après la formule (14), nous n'avons pour cela qu'un seul moyen dans le système orthop- tère, c’est de diminuer P/S. Or, pour diminuer une fraction, on n'a trouvé jusqu'ici que deux pro- cédés : diminuer le numérateur où augmenter le dénominateur. P est intangible : c’est le poids de l'appareil. Nous n'avons d'autre ressource que d'augmenter le dénominateur, c'est-à-dire la sur- face sustentatrice. C'est à cette conclusion que nous étions arrivés par des raisonnements diffé rents. Nous avons tenu à reprendre la question d'une autre manière pour bien faire comprendre que, dans le système orthoptère, il n’y a qu'un seul moyen d'économiser le travail de sustentation, mais surtout pour faire connaître la fonction TP* caractéristique de la valeur de l'appareil, et pour signaler l'importance de ces deux rapports : T/P, vitesse fictive d’ascension; P/S, charge par mètre carré. Ces notions, que nous venons de découvrir à propos du système orthoptère, s'appliquent, en effet, à tous les systèmes de sustentation quels qu'ils soient. Aussi nous a-t-il paru nécessaire de les, faire connaitre avec précision au lecteur. Dans une deuxième partie, nous exposerons: l'application de ces notions au problème de l’avia- tion. Commandant Paul Renard, Ancien élève de l'École Polytechnique LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES La plupart des feuilles caduques jaunissent avec l’âge, en passant par une multitude de teintes dont le mélange forme cette merveilleuse, mais trop fugace palette des paysages d'automne. C'est là un phénomène banal, dont le plus souvent on se contente d'admirer les effets sans en rechercher la cause. Celle-ci est pourtant bien simple: elle repose tout entière sur la dégénérescence du grain de chlorophylle, alors insuffisamment protégé par le protoplasma vieilli : les phénomènes d'oxydation l'emportent sur les phénomènes de réduction, qui prédominaient pendant toute la période d'activité de la plante; tout ce qui est facilement combustible brûle, et, en fait, la couleur des feuilles mortes se rapproche beaucoup de celle que prend une solu- tion de chlorophylle quand on l’insole au contact de l'air. Bref, le jaunissement ultime des feuilles. est une manifestation post-mortale, qui n’a rien de mystérieux; mais il est certaines espèces qui, aw lieu de jaunir, noircissent avec le temps ou sous l'action de traumatismes divers. C'est le cas bien connu de l'Aucuba japonica, qu'il est à peu près impossible de conserver en herbier avec sa couleur habituelle : la feuille, en se desséchant, devient noire dans toute son étendue, et cela aussi bien dans ses parties claires que dans ses parties foncées, ce qui semble déjà exclure toute intervention, en tant que produit autochtone, de la chlorophylle préformée. L. MAQUENNE er E. DEMOUSSY — LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES 197 Est-ce encore là un phénomène post-mortal? Les circonstances dans lesquelles on l'observe portent à le croire, sans pourtant suffire à le démontrer; tout ce qu'on peut dire à priori, c'est qu'il doil relever d'un chimisme différent de celui qui donne lieu à la couleur feuille morte, car il se produit encore en l'absence presque totale de malière verte. C'est en cherchant à préciser l'influence, recon- nue nocive, des rayons ultra-violets sur les végé- taux supérieurs, que nous avons élé conduits à nous occuper de celte question et à la résoudre dans ses grandes lignes; elle va nous apparaitre d'autant plus simple qu'elle se rattache intime- ment, d'une façon assez inattendue, à d'autres déjà élucidées. Il y a environ trente ans que l'on soupconne les rayons chimiques de très faible longueur d'onde d'exercer une action funeste sur la végétation. Après que Hervé Mangon et Prillieux eurent fait voir que la lumière électrique favorise le verdisse- ment des feuilles et excite la fonction chlorophyl- lienne comme le rayonnement solaire, il était naturel que l’on songeût à renforcer celui-ci, sinon à le remplacer entièrement, par un éclairage artifi- ciel intensif. Les premières expériences entreprises dans cette voie datent de 1880 et 1881; elles sont dues à Sie- mens qui, après quelques essais jugés favorables, n'hésita pas à conseiller l'éclairage nocturne des serres par de puissautes lampes à arc; il recom- mandait, d'ailleurs, d'entourer celles-ci de globes en verre transparent, pour absorber les rayons ultra-violets, qu'il avait reconnus nuisibles. Cette action fâcheuse du rayonnement électrique total se manifesta plus nettement encore dans les essais de culture que Dehérain entreprit, vers la même époque, à l'Exposition d'Électricité, au milieu du grand hall du Palais de l'Industrie. Dans la partie de la serre qui était éclairée, assez faible- ment du reste, par l'arc électrique nu, et où Dehé- rain espérait, d’après les dires de Siemens, montrer au public une végétation au moins normale, les résultats furent littéralement désastreux : toutes les plantes dépérirent, certaines devinrent noires, et, dans ce cas, les ombres portées par la lumière de l'arc se dessinaient à la surface des feuilles aussi franchement qu'elles l’auraient fait sur un papier photographique à noircissement direct. On n'observa plus rien de semblable lorsque le foyer fut, plus tard, muni d'un globe en cristal épais; la végétation resta seulement languissante par défaut d'éclairement : celui-ci n'était, {en effet, que de 2.000 bougies à 2 mètres de distance , par consé- quent très inférieur à la lumière du jour. M. G. Bonnier, qui, en 1892, au Pavillon d'éle tricité des Halles, reprit toutes ces expériences avec une lumière plus puissante, soigneusement filtrée à travers des globes ou des glaces, obtint, au con- traire, des résultats avantageux, surtout en ce qui concerne la production de chlorophylle, tellement abondante que, dans certains cas, elle affectait jus qu'aux Lissus qui, comme la moelle, n'en renferment pas d'ordinaire. La conclusion qui ressort avec évidence de ces essais, tentés surlout en vue d'une nouvelle appli- cation pratique de l'électricité, c'est que le rayon- nement de l’are, malgré sa ressemblance avec celui du Soleil, renferme des radiations nuisibles qui, sans aucun doute, appartiennent à la région ultra- violette du spectre, puisqu'elles sont arrèlées par le verre. Le Soleil, qui est encore beaucoup plus chaud, en émet certainement davantage, mais Pat- mosphère les empêche d'arriver jusqu'à nous, en sorte que c'est seulement aux hautes altitudes que leur influence peut devenir appréciable. Sur quoi et comment s’exerce-t-elle? On s'accor- dait jusqu'ici pour admettre que les rayons chimi- ques décomposent la chlorophylle, agissant à l’en- contre des rayons lumineux proprement dits, qui provoquent ou activent sa formation, quelle que soit leur réfrangibilité; il est vrai que les mêmes rayons lumineux peuvent produire l'effet inverse in vitro, avec le concours de l'oxygène atmosphé- rique. Sans doute, cette action destructive est possible; elle est mème certaine, car nous avons vu les rayons ultra-violets décolorer un papier teint à la chloro- phylle beaucoup plus vite dans un tube de quartz que dans un tube de verre; mais ce n'est certaine- ment pas à elle qu'il convient de rapporter la méla- nisation de certaines espèces végétales, puisqu'il y en à beaucoup d’autres qui ne possèdent pas cette propriété et qu'il n’est pas dans les habitudes de la chlorophylle de noircir en se décomposant. Il y à autre chose, et la seule manière d'en déterminer la nature était de soumettre une plante saine à l'action directe d’une source riche en rayons ultra-violets. L'emploi de la lampe à vapeur de mercure était tout indiqué ; nous nous sommes servis du modèle ordinaire en quartz d'Heraeus, qui fonctionne avec une régularité parfaite en dépensant 3 ampères sous 110 volts. La chaleur émise est assez faible pour qu'on puisse en rapprocher beaucoup les plantes sans craindre de les faner ; abstraction faite des rayons invisibles, l'éclairement total est alors très supérieur à celui que donnaient les lampes à arc dans les expériences que nous venons de rappeler. Dans ces conditions, il est facile de reproduire en quelquesheures tous les effets qui, dans la serre 198 L. MAQUENNE er E. DEMOUSSY — LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES de Dehérain, mettaient des jours ou des semaines à se manifester. Certaines espèces conservent leur apparence primitive, d’autres se flétrissent ou bien, comme le laurier, prennent la couleur feuille morte, quelques-unes enfin deviennent noires ; occupons- nous seulement de celles-ci, qui nous intéressent davantage ; leur changement de coloration en rend, d’ailleurs, l'étude plus facile à suivre. À 20 centimètres de la lampe, c'est-à-dire avec une puissance lumineuse équivalant à un arc d'environ 20.000 bougies placé à 2 mètres, la durée d’insolation nécessaire pour provoquer le noircissement est très variable. Deux à trois heures suffisent pour les feuilles à parenchyme mince ou mat, comme celles du figuier, du troène ou du chrysanthème; elle doit être prolongée pendant pas encore été signalées et qui, par leur imprévu, nous ont d'abord assez vivement surpris. Le noircissement commencé par l’insolation élec- trique s'accentue d'une facon extraordinaire pen- dant plusieurs jours, après que la plante a été éloignée de la source, à ce point qu'il peut appa- raître alors qu'il n'était pas ou n'était que difficile- ment perceptible au début ; il ne se produit d’ail- leurs aucune flétrissure ni aucune fanaison indi- quant un arrêt dans le fonctionnement du système vasculaire. Les figures 1-IT et 1-III montrent cette action du temps sur une feuille de figuier insolée pendant deux heures derrière un écran de carton découpé et à 20 centimètres de la lampe à mercure ; les ombres, presque invisibles d’abord, ont pris après Fig. 1. — Fiquier insole pendant 2 heures à 0,20 de la lampe à mercure. — I. Feuille protégée à la partie supérieure par une lame de verre. — II. Feuille placée derrière un écran découpé en gril, aussitôt après l’insolation. — IL. La même après 48 heures. sept, huit heures et même davantage dans le cas des feuilles épaisses ou à cuticule lisse, comme celles du lierre ou de l'Aucuba; le laurier met éga- lement un très long lemps à jaunir; chez toutes ces plantes, l’épiderme joue le rôle d’un écran pro- tecteur, qui arrête au passage les rayons nocifs et les empêche d'atteindre les cellules intéressées. L'effet se produit à l'intérieur d’un tube de quartz comme à l'air libre, mais il n’a plus lieu derrière une glace, ce qui démontre encore une fois qu'il s'agit bien de rayons ultra-violets, absorbables par le verre. Les figures 1-I et 3-III montrent l'aspect que pré- sentent une feuille de figuier et un rameau de troène à demi protégés par une vitre, après deux heures d'éclairement et un certain temps de repos. Ces observations ne font que confirmer, en les précisant, celles que nos prédécesseurs avaient déjà faites avant nous ; en voici d’autres qui n’ont quarante-huit heures une intensité vraiment sur- prenante, que la photographie n’arrive à repro- duire que très imparfaitement. La feuille avait donc, au cours de son éclairement, subi une modification latente qui lui permit de continuer seule l'effet amorcé par les rayons chimiques; faut-il voir dans ce phénomène inattendu le résultat d’une excita- tion particulière de la cellule, exerçant dès lors son activité dans une voie nouvelle, ousimplement la conséquence d'un état morbide aboutissant à la mort ? L'action bactéricide, bien connue, des rayons ultra-violets, les désordres qu'ils provoquent chez les animaux supérieurs, rendaient celte dernière hypothèse fort probable; mais on ne pouvait l'ad- meltre sans preuve expérimentale; nous en ayons trouvé la démonstration en examinant au micro- scope les cellules épidermiques desfeuilles insolées. Dans tous les cas le protoplasma était devenu inerte L MAQUENNE «ur E. DEMOUSSY — LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES 199 et notamment insensible à la plasmolyse, ce qui est le eritérium de la vie cellulaire. L'expérience estparticulièrement nette avec le Tradescantia dis- color et les pétales de Dahlia rouge, qui sont très sensibles, bien qu'ils ne noircissent pas, et dont la coloration permet de saisir au microscope les moindres déplacements intérieurs. Après quinze minutes seulement d'exposition à la lampe, le contenu des cellules épidermiques paraît réduit à leurs seuls noyaux et tout mouvement cesse de s'y produire; le protoplasma est devenu incapable de se contracter dans une solution saline aussi bien que de se gonfler dans l'eau pure; il abandonne même à celle-ci, en la teintant de rose, les prin- cipes colorants que d'habitude il retient avec éner- gie; en un mot, il présente tous les caractères de la mort définitive. Ce fait présente un certain intérêt général, parce qu'il nous montre les rayons ultra-violets agissant sur les organes végétaux de la même manière que sur les organes animaux ou les infiniment petits. On devra done désormais les compter parmi les pires ennemis de la cellule, sans distinction d’ori- gine, avec pourtant cette réserve que, dénués de toute pénétration, ils n’agissent efficacement que sur les tissus superficiels, sans jamais atteindre les profondeurs. Une conséquence immédiate de ces résultats est que la chlorophylle des feuilles électriquement insolées doit fatalement se détruire peu à peu, comme elle se détruit pendant le jau- nissement automnal; à ce point de vue, les rayons ultra-violets ne semblent exercer aucune action qui leur soit spéciale. Mais alors, si leur influence mélanisante n’a rien de spécifique, si elle se réduit, comme nous venons de le dire, à une simple mortification des feuilles, on doit pouvoir reproduire les mêmes apparences en tuant celles-ci d'une autre manière. C'est, en effet, ce qui a lieu, et c'est ce qui nous a conduils à étudier de près l'action de la chaleur, du chloroforme et de l’éther sur les plantes vertes noircissantes,. IT Le séjour dans une atmosphère saturée de chlo- roforme ou d’éther produit exactement le même effet que les rayons chimiques sur les feuilles qui sont sensibles à leur influence; le noircissement est seulement plus rapide, visible, par exemple, au bout de cinq minutes de chloroformisation ou trente minutes d'éthérification sur les feuilles d'Aucuba, Qui ne sontencore que très peu touchées après huit heures d’éclairement à 20 centimètres de la lampe à mercure. Comme dans ce dernier cas, aussi bien avec le changement de pigmentationest progressif, s'accen tuant par le repos et jusque pendant le séchage des feuilles en herbier. C'est l'œuvre de la mort qui s'accomplit et se traduit au dehors par cette mani festalion d'un ordre tout spécial. On nous fera peut-être observer, en passant, que les feuilles d’Aucuba noircissent lorsqu'on les sèche à l'air libre, sans insolation ni chloroformisation préalables; c'est parfaitement exact, mais le phéno- mène est alors beaucoup moins rapide, et, bien qu'il conduise au même résullal, ne saurait être confondu avec le précédent; nous aurons bientôt occasion de revenir sur ce cas particulier. La rapidité d'action du chloroforme permet de révéler des cas de mélanisation que ne décèle pas l'insolation électrique, ou qu'elle ne décèlerait qu'après un temps fort long. Si, par exemple, on applique sur la surface jaune d'une pomme un écran en papier perforé et soigneusement imperméabilisé par une épaisse couche de gomme, on voit, après un séjour d'une à deux heures dans l'air chloro- formé, puis quelques jours de repos, apparaître sur l’épiderme bruni la silhouette claire de l'écran pro- tecteur. On a donc là un excellent moyen de recon- naître et de caractériser les espèces susceptibles de mélanogenèse; l'emploi de l’éther, notablement moins actif, parait, à ce point de vue, moins avan- tageux que celui du chloroforme. Rappelons à ce propos que M. Ed. Heckel a vu récemment, parmi les plantes à coumarine, le Zia- tris spicala noircir sous l'influence du chloroforme, tandis que, dans les mêmes conditions, le mélilot et la flouve odorante conservent leur couleur verte inaltérée. Ces observations, non plus que celles qui touchent à l’action des rayons ultra-violets, ne nous four- nissent encore aucune donnée sur le mécanisme chimique du noircissement ; l'action de la chaleur va nous renseigner sur ce sujet d'une facon plus précise. III Lorsqu'on plonge une feuille noircissante pen- dant une seconde dans l'eau bouillante ou pendant une minute dans l’eau à 65-70°, on la voit en moins d’une heure brunir comme si elle avait subi l’action du chloroforme ou des rayons ultra-violets : l'effet est identiquement le même, parce que cette chautfe très courte ou peu énergique n'a attaqué que le protoplasma, le plus sensible de tous les compo- sants de la cellule. Les autres sont restés indemnes, et la chlorophylle, en particulier, ne semble avoir subi aucune altération de nature à modifier sa teinte primitive; au contraire, les feuilles sortant de l'eau chaude sont d'un vert plus vif qu'à l'état troène, le lierre ou le figuier qu'avec l'Aucuba, le | normal, sans doute parce qu'elles sont injectées, 200 L. MAQUENNE er E. DEMOUSSY — LE NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES et, par suite, transmettent mieux la lumière. Le noir- cissement qui va bientôt se produire n’est donc pas, suivant toute probabilité, la conséquence d'une transformation de la matière colorante propre aux feuilles, mais bien celle d'une réaction possible seulement après la mort du protoplasma. Il suffit de modifier légèrement l'expérience précédente pour voir en quoi consiste cette réaction. Si on prolonge l'action de la chaleur, si, par exemple, on maintient les feuilles à 100° pendant deux minutes au lieu d'une seconde, ce qui équi- vaut à une cuisson quasi-complète, le résultat est tout autre : le lierre, le troène et le figuier ne se modifient plus, même après dessiccation ou chlo- roformisation ultérieures. Seul, parmi les espèces que nous avons examinées, l’Aucuba noircit encore, duit que sur une bande étroite, dont la limite infé- rieure coïncide avec le niveau de l’eau dans laquelle on a trempé la feuille, c'est-à-dire avec la ligne de démarcation de la partie chaude et de la partie froide. Au-dessus de cette bande, la température était évidemment trop basse pour que le phéno- mène qui nous occupe se produisit; au-dessous, elle était trop élevée. Les mêmes apparences se manifestent avec toutes les espèces noircissantes ; c’est donc que l’un des principes qui concourent à leur mélanisation est détruit par la chaleur, postérieurement à la mort du protoplasma. L'expérience nous apprend que c'est à partir de 65°, température déjà incompa- lible avec la vie cellulaire chez les végétaux supé- rieurs, que cetle destruction commence à se faire Fig. 2. — Aucuba. — TI. Feuille dans l’eau bouillante pendant 2 minutes. — II. À moitié dans l'eau bouillante pendant 2 minutes. — III. Eau bouillante à moitié pendant 1 seconde. — IV. À moitié dans l'eau à 70° pendant 30 secondes. — V. A moitié éthérifiée pendant 30 minutes. — VI. À moitié chloroformée pendant 5 minutes. Aspect après 45 minutes. mais seulement après un temps très long, vingt- quatre heures par exemple; nous avons déjà dit qu’il y a là un cas particulier, nous v reviendrons encore pour donner l'explication de cette anomalie apparente; retenons seulement de ce qui précède que, en général, la chaleur, capable de noireir les feuilles mélanifères lorsque son action est de courte durée, les empêche, au contraire, de se pigmenter quand elle agit plus longtemps ou élève davantage leur température. La figure 2 représente de feuilles d'Aucuba, soumises individuellement à l'action de la chaleur, du chloroforme ou de l’éther; on voit que la première, cuite dans toute son étendue, a conservé après trois quarts d'heure son aspect pri- milif, landis que la troisième, moins longtemps chauffée, et seulement jusqu'à mi-hauteur, a noirci pendant le même temps d'une facon intense. La seconde, cuite à moitié, est particulièrement inté- ressante en ce que le noircissement ne s’est pro- une série sentir, qu'elle est immédiate à 100°, enfin nulle, à froid, dans les vapeurs de chloroforme ou d’éther : le principe en question doit donc être une diastase. D'où cette conclusion, insoupconnée d'abord, que le noircissement des feuilles est le résultat d'une action diastasique post-mortale; en d’autres termes et sauf exception, l'apparition du phénomène né- cessile deux conditions, qui sont nécessaires et suf- fisantes : la mort du sujet et l'intégrité d'au moins une des diastases qu'il renferme. L'identité des effets causés par le rayonnement de la lampe à mercure, les vapeurs anesthésiques et une élévation ménagée de la température en découle tout natu- rellement; la figure 3 en fournit une nouvelle preuve tirée du troène. Mais quel est l’enzyme, spé- cifique ou non, qui entre en jeu ici, et quelle est, s'il est possible de la déterminer, la nature du pro- duit qu'il attaque en le noircissant? Si l’on rapproche ces observations des faits sem- blables observés dans d'autres circonstances et sur L. MAQUENNE «er E. DEMOUSSY — LE d'autres sujets, on est tout naturellement conduil à attribuer le noircissement des feuilles à une action oxydasique, analogue à celle qui s'exerce chez certains agarics, où encore dans les jus de pommes ou de betteraves, pour ne ciler que des exemples tirés du règne végélal. On sait qu'alors il a pour cause première une oxydalion profonde de la tyrosine qui, sous l'influence de la tyrosinase, fixe directement l'oxygène de l'air; comme dans le ‘as des feuilles vertes, il cesse de se produire quand les plantes ont été cuites; il n'a pas lieu davantage quand on les prive d'air en les maintenant dans le vide ou dans un gaz inerte. Il fallait, pour pousser plus loin l'analogie et vé- rifier notre hypothèse, s'assurer que la pré- sence de l'oxygène est également nécessaire au noircissement des feuilles; l'expérience sur ce point est extré- mement instructive, car elle va nous ap- prendre que le phéno- mène est d'ordre com- plexe et en rapport avec différents enzy- mes, qui ne sont pas toujours et nécessaire- ment des oxydases, ainsi qu'on aurait pu le croire. Un fragment de feuille de lierre ou de NOIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES 201 que dans l'air; il ne saurait donc être question à leur égard d'oxydation ni d'oxydases, et il faut chercher ailleurs la cause de leur noircissement; ce sera, en même temps, celle des singularités qu'offre celle espèce dans les circonstances relalées plus haut. Qu'une feuille d'Aucuba complètement cuite ne noircisse pas après une heure de conservalion, cela se comprend sans peine d'après ce qui précède, puisque l’action prolongée de la chaleur a détruit tous les enzymes existant dans la plante fraiche. Qu'elle noircisse après vingt-quatre heures, cela ne peut plus s'expliquer qu'en admettant l'intervention d'une autre influence, capable de produire, plus le effet que ces enzymes. lentement, même Il va nous être facile de la définir en nous travail que MM. Bourquelot el reportant au Hérissey ont publié en 1904 sur la composi- tion immédiate de l'Au- cuba. Cette plante ren- ferme dans toutes ses parties un glucoside particulier, l’aucubine, qui à pour principal caractère de se dédou- bler, diastasique ou acide, en glucose et une sub- stance brune insoluble dans l’eau. C'est incon- par hydrolyse troène, enfermé dans Fig. 3. — Troñne. — 1. À moitié chloroformé. — II. A moi- lié dans l’eau à 70° pendant 30 secondes. — III. Insolé pen- dant 2 heures à la lampe à mercure, le haut protégé par testablement cette ma- lière qui est cause de un tube vide d'air, où on l’a, au préalable, maintenu vingt-quatre heures pour lui permettre de consommer les traces d'oxygène qui auraient pu rester dans le résidu gazeux ou en dissolution dans le suc cellulaire, ne noircit pas quand on le chauffe doucement; il en est de même si l'on place à côté de la feuille une petite ampoule à chlo- roforme que l'on brise ultérieurement par agitation; mais, dans les deux cas, le noircissement com- mence à se manifester dès que l'on casse la pointe du tube pour y laisser rentrer l'air. La présence de l'oxygène est ici indispensable; donc le noircisse- ment des feuilles de lierre et de troène est le résul- {at d'une combustion interne, et nous sommes en droit de comparer ces espèces à la russule noircis- sante dont l'agent actif est la tyrosinase. C'est exactement l'inverse qui s'observe avec les feuilles d'Aucuba ; malgré les précautions les plus minutieuses, nous les avons toujours vues noircir aussi vite et d'une facon aussi intense dans le vide une lame de verre. Aspect après 16 heures. la pigmentation qui nous intéresse. L'émulsine, également présente dans les tissus de l'Aucuba, produit cette hydrolyse avec facilité; c’est par conséquent à elle que nous devons attribuer le noircissement rapide qui s'opère sous l’action du chloroforme, de l’éther ou d'une température modérée. Les acides, au contraire, n’agissent qu'avec lenteur; mais les plus faibles, ceux, par exemple, qui existent à l'état normal dans le suc cellulaire, sont encore capables d'hydrolyser l'aucubine : c’est donc à leur présence qu'il convient de rapporter le noircissement tardif des feuilles d’Aucuba préalablement bouillies, c'est-à-dire exemples de diastases. En aucun cas il ne se produit d'absorption d'oxygène, et c'est pourquoi l'effet qui nous occupe se manifeste aussi énergi- quement dans le vide qu'à l'air libre. En définitive, l'étude approfondie de l'Aucuba, comparée à celle du lierre, du troène ou du figuier, nous enseigne que le noircissement des feuilles peut être déter- 202 L. MAQUENNE £r E. DEMOUSSY — LE NUIRCISSEMENT POST-MORTAL DES FEUILLES miné par des diastases de fonctions très différentes et même parfois apparaitre en l'absence de tout enzyme, à la suite d'une simple réaction chimique survenue entre les principes immédiats de la plante considérée. Ilest, par suite, fort difficile d'empècher le noir- cissement post-mortal des feuilles d’'Aucuba; nous y avons partiellement réussi en les chauffant brus- quement en vase clos, par exemple en immergeant le tube qui les renferme dans un bain de glycérine à 120° : il ne se produit plus, même à l'air, qu'un petit nombre de taches brunes, irrégulièrement parsemées à la surface du parenchyme assombri. On peut aussi faire bouillir la feuille pendant quelques minutes dans l'alcool fort, de facon à la déshydrater rapidement. Le meilleur moyen con- siste à dessécher la feuille dans le vide sulfurique; si elle est exempte de toute tare, elle conserve jusqu'à la fin son apparence initiale, mais elle noircit à nouveau si on la fait macérer dans l'eau froide, parce qu'elle renferme encore les éléments nécessaires à sa mélanisation, à savoir de l’aucu- bine et de l'émulsine inaltérées. IN Ces phénomènes ne se manifestent qu'après la mort de l'organe noircissable; tant que la plante est vivante, il ne se produit rien. C’est donc que l'enzyme et le composé mélanigène sont isolés au cours de la vie normale, comme le sont, d’après les travaux classiques de M. Guignard, la myrosine et la sinigrine dans la moutarde, l’'émulsine et les glucosides nitrilés chez les plantes à acide eyanhy- drique, etc. L'action diastasique ne peut se déve- lopper que si l'obstacle qui éloigne les corps réagissants vient à disparaitre, el c'est ce qui arrive lorsque le protoplasma mortifié a perdu ses pro- priétés osmotiques, laissant ainsi s'établir la libre diffusion des matières dissoutes dans le suc cellu- laire. Cette manière de voir, énoncée pour la première fois par M. Guignard, vérifiée par lui-même, par M. Mirande et par M. Heckel sur différentes espèces à principes odorants, est applicable sans modifica- tion au noircissement post-mortal des feuilles, qu'il soit d'origine diastasique ou non. Elle y trouve même un nouvel appui, car, à l'influence du gel et des anesthésiques sur lacyanogenèse, nous pouvons dès maintenant ajouter celle des rayons ultra- violets, à la cyanogenèse et à la production post- mortale de coumarine ajouter la mélanogenèse, qui procède du même mécanisme. Une feuille de laurier, soumise pendant plusieurs heures, dans un tube de quartz, au rayonnement de la lampe à mercure, dégage de l'acide cyanhydrique en abondance, en même temps que se fait sentir l'odeur pénétrante de l’aldéhyde benzoïque; dans un tube de verre disposé comme témoin à côté du premier, la feuille reste indemne, ce qui démontre une fois de plus que ce sont bien les rayons ultra- violets qui provoquent la dégénérescence du proto- plasma et que c'est à la suite de cette dégénéres- cence qu'apparaissent les actions diastasiques anormales. Si, enfin, le noircissement des feuilles est, comme l'exige la théorie de M. Guignard, déterminé par le mélange de deux corps habituellement séparés par des cloisons semi-perméables, on doit le voir se produire à la suite de contusions ou de trauma- tismes d'ordre mécanique susceptibles de déchirer ces cloisons. L'expérience montre, en effet, que les feuilles mélanifères, en particulier celles d'Aucuba, noircissent quand on les comprime fortement : il suffit d'écrire sur ces feuilles, en appuyant un peu, avec l'extrémité d’une baguette de verre pour voir bientôt les traits se dessiner en brun sur le fond resté clair du parenchyme intact. Le moindre froissement, un simple pli donnent lieu au bout d'un certain temps à des taches, et c'est pourquoi il est si difficile de dessécher une feuille d'Aucuba sans la noircir. Néanmoins, la possibilité de cette dessiccation montre que le protoplasma garde sa vitalité jusqu'au moment où la déshydratation des tissus est assez profonde pour que la diffusion des principes dissous y soit devenue impossible. Nous avons déjà dit que toutes les causes de mor- tification mises en œuvre par nous agissent de la méme manière sur la même espèce; toute feuille qui jaunit ou noircit devant la lampe à mercure prend les mêmes colorations quand on la soumet à l’action du chloroforme ou de la chaleur modérée; la gelée, dans laquelle M. Guignard a reconnu un agent capable de favoriser l'hydrolyse des gluco- sides cyanhydriques, peut aussi provoquer la méla- nogenèse ; il n’est pas rare, en hiver, de rencontrer des feuilles de troène ou de lierre qui présentent des plages brunes toutes semblables à celles que déterminerait l'éclairage électrique et qui ont très probablement la même origine: une mortification ou au moins une contraction exagérée du proto- plasma dans un certain nombre de cellules, qui alors échangent librement leur contenu. En résumé, le noireissement des feuilles, phéno- mène auquel chacun de nous à assisté maintes fois sans jamais y prêter attention, sans doute parce qu'il est trop commun, rentre, en général, dans la catégorie des actions diastasiques, à laquelle appar- tiennent presque toutes les manifestations de la vie végétale. Sa cause la plus fréquente paraît être une combustion intracellulaire anormale, portant sur certains principes tels que la tyrosine, et déter- H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE minée par leur mélange accidentel avec une oxydase. Exceptionnellement peuvent intervenir d'autres enzymes qui n'ont besoin que d'eau et d'une tempéralure convenable pour exercer leur action : c'est le cas de l'émulsine chez l'Aucuba. Enfin, il peut arriver que le noircissement ail une origine purement chimique, auquel cas il peut s'effectuer sans le concours d'aucune diastase. Comme dans une foule d’autres circonstances, la Nalure dispose ici de différents moyens pour arriver au même résullat, mais toujours le noir- 204 cissement post-mortal des feuilles doit être envi sagé comme une conséquence de la règle posée autrefois par M. Guignard, à la suite de ses re- cherches sur la localisation des principes végétaux, De semblables rapprochements présentent une réelle importance, parce qu'ils simplifient l'étude des phénomènes biologiques et en resserrent l'im- mense horizon. L. Maquenne, E. Demoussy, Membre de l'Institut, Assistant au Musfum, Professeur au Muséum. De (QE LT 2 \ LA CELLULOSE ET L'ÉTAT ACTUEL DE L’INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICI I. — CHIMIE DE LA CELLULOSE ET DE SES TRANSFORMATIONS, DANS SES RAPPORTS AVEC LA SOIE ARTIFICIELLE. S 1. — Dissolution et Coagulation de la Cellulose. 1. La Cellulose. — La cellulose, matière première entrant dans la fabrication de la soie artificielle, est la substance qui forme les parois des jeunes cellules et des fibres des végétaux, ainsi que la majeure partie du bois ; sa formule est (C°H"O°)". Cross et Bevan, auxquels on doit en vérité les premiers travaux sur la chimie de la cellulose, divisent les celluloses qui se trouvent dans la Nature en deux classes distinctes : a) les celluloses simples ; 2) les celluloses complexes. a) Les celluloses simples comprennent elles- mêmes : les celluloses ordinaires (type coton), les oxycelluloses et les hémicelluloses ou pseudocellu- loses. Sous le nom de cellulose ordinaire, on désigne la cellulose provenant du coton purifié ou du papier à filtre Berzélius ; on peut également extraire cette cellulose ordinaire de la ramie, du chanvre, du lin el d’autres textiles analogues. Le coton, en parti- culier, trouve son emploi fréquent dans la fabri- cation de la soie artificielle et du crin artificiel. La cellulose ordinaire offre une grande résis- tance à l'oxydation et à l’hydrolyse ; sous l'influence de la soude caustique concentrée, elle n'entre pas en dissolution, et par hydrolyse, au moyen d'un mélange d'acide sulfurique et d'acide chlorhy- drique dilués, elle ne donne pas de furfurol. L'oxycellulose se rencontre en abondance dans les végétaux; elle constitue surtout : la paille, les tissus ligneux et le bois. Au point de vue de leur constitution, les oxycel- Q ULIBRAr | ARY Z\ RTE \ D M à SsS luloses présentent des groupes carbonyle CO" et des groupes méthoxyle O.CH°. Sous l'influence de la soude caustique concen- trée, les oxyceiluloses se dissolvent rapidement ; l'hydrolyse des oxycelluloses s'effectue facilement, par exemple au moyen d’un mélange d'acide sulfu- rique et chlorhydrique dilués, et l’on obtient une forte proportion de furfurol. Les hémicelluloses ou pseudocelluloses sont des celluloses non arrivées à maturité; on les rencontre dans les écorces des pois et dans les cellules des graines. b) Les celluloses complexes comprennent : les lignocelluloses, les pectocelluloses et mucocellu- loses, les adipocelluloses et cutocelluloses. On trouve les lignocelluloses dans le bois, les tissus ligneux et dans la paille; le jute est le véri- table type des lignocelluloses. Ces lignocelluloses sont constituées par un mélange de deux celluloses (dont l'une est une oxycellulose) associées à une matière spéciale, désignée sous le nom de lignone, qui, sous l’in- fluence du chlore, forme un composé soluble dans les alcalis et l’eau ; cette réaction particulière per- met d'éliminer la lignone et d'obtenir la cellulose. Les lignocelluloses sont utilisées dans la fabri- cation des pâtes de bois; elles constituent la matière première de certains papiers, crins artificiels et soies artificielles. Quant aux pectocelluloses, mucocelluloses, adi- pocelluloses et cutocelluloses, formant alors les autres celluloses complexes, elles ne sont pas employées dans la fabrication de la soie artificielle. Si l'hydrolyse de l'amidon, substance apparte- nant à la classe des hydrates de carbone, peut se faire facilement, sous l'action de la diastase, il n’en est pas de même pour la cellulose, etil faut s’adres- 204 ser à d'autres moyens, tels que les acides minéraux dilués, pour rompre l’agrégat moléculaire qui constitue l'édifice de la cellulose. Par hydrolyse de la cellulose, on peut obtenir, suivant la méthode employée, des corps de formule générale (C‘H“0°)"H0. Eu égard à sa fonction chimique, la cellulose se comporte vis-à-vis de cerlains acides, tels que l'acide azotique ou l'acide acétique, comme un alcool polyatomique dont le degré d’atomicité serait 3; la cellulose est donc considérée comme un trialcool, susceptible par conséquent de s'éthé- rifier par l'acide acétique ou par l'acide azotique, et de fournir l’éther correspondant. Lorsqu'on fait agir les alcalis caustiques con- centrés, tels que la soude caustique, sur des fibres de coton ou sur de la cellulose, il se manifeste une action physico-chimique, qui se traduit physi- quement par un retrait, signalé par Mercer, et chimiquement par une combinaison de la cellulose et de la soude caustique, qui se produit avec un dégagement de chaleur. Dans ces conditions, il se forme des alcalis cel- lulosiques hydratés : ainsi, avec la soude caustique, on obtient un hydrate de cellulose sodique de forme : (COS) n!Na°O + n'H°0, corps transparent et élastique. Par le traitement de cet alcali cellulosique hydraté au moyen d’un acide très dilué, et par un lavage à l’eau, on peut éliminerlasoude caustiqueet obtenir finalementune hydrocellulose (C°H"O°)"H°O, qui, sous l'action du séchage, peut perdre son eau en partie. 2. Dissolution de la cellulose. — Lorsqu'on traite la cellulose par de la liqueur de Schweitzer (liqueur obtenue par dissolution du sulfate basique de cuivre dans l'ammoniaque concentrée), ou par de la liqueur de Péligot (liqueur obtenue par l’action de l'ammoniaque concentrée sur du cuivre métallique au contact de l'air), la cellulose se gonfle d'abord, puis entre en dissolution, et cela en pro- portion d'autant plus grande que les agents puri- ficateurs de la cellulose ont agi avec plus d'énergie, et que les teneurs de la liqueur en cuivre (oxyde de cuivre) et en ammoniaque sont plus élevées. Il y a, bien entendu, une limite à l'énergie des agents purificateurs et à l'élévation des teneurs en cuivre et en ammoniaque de la liqueur cupro- ammoniacale mise en œuvre; mais on arrive à dis- soudre jusqu'à 14 °/, et 45 °/, de cellulose dans la liqueur dissolvante, et c'est cette dissolution, dont la teneur en cellulose varie suivant les usines, qui est utilisée, dans une certaine catégorie de procé- H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE dés, pour la fabrication du erin artificiel et de la soie artificielle. Sous l'influence des hypochlorites, d'une part, et des alcalis, d'autre part, certains principes immé- diats, qui entravent l'action dissolvante de la liqueur cupro-ammoniacale et accompagnent les fibres végétales, sont éliminés, et la cellulose est obtenue pure ; de plus, ces mêmes traitements transforment la cellulose, de variélé non soluble dans la liqueur cupro-ammoniacale, en cellulose immédiatement soluble dans cette liqueur. Ces faits, signalés depuis longtemps par Payen, ont été appliqués à la préparation des dissolutions de cellulose pour la fabrication de la soie artificielle par Max Fremery et Urban dans leur brevet fran- çais du 17 mars 1899. Pour obtenir des dissolutions de cellulose, iln’est pas nécessaire d'opérer à. basse température; mais, comme il se produit un dégagement de chaleur pendant la réaction dissolvante, il est bon de com- battre l'élévation de température, qui est gènante au cours de l'opération, en maintenant la constance de la température initiale appropriée; on maintient ainsi la stabilité de la liqueur cupro-ammoniacale en évitant les dégagements exagérés de vapeurs ammoniacales. Dans son procédé, E. Crumière prépare la cellu- lose devant servir à la fabrication rapide des dis- solutions qu'il utilise dans l'obtention de la soie artificielle, en traitant le coton, ou autres fibres végétales, plongé dans une solution de soude caus- tique diluée, par un courant d'ozone, puis en por-, tant la masse liquide, renfermant le coton, à l'ébul- lition ; à la suite de ce traitement, le coton spécial obtenu est lavé soigneusement. La liqueur cupro-ammoniacale et la liqueur nickelo-ammoniacale ne sont pas les seuls dissol- vants de la cellulose ; le chlorure de zinc en solu- tion concentrée, renfermant par exemple 40 °/, de ZnCF, dissout également la cellulose. Cette dissolution peut s'effectuer à chaud, vers + 60° C., et le coton se dissout en formant alors une espèce de gelée blanche; si l'on a soin de prendre du coton bien purilié, dégraissé par les alcalis et traité par les hypochlorites, on facilite la dissolution de la cellulose. Il convient de remarquer que, malgré les tenta- tives faites, les dissolutions de cellulose dans le chlorure de zinc ne sont pas employées actuelle- ment dans les usines où l’on fabrique la soie arti- ficielle et le crin artificiel. 3. Coagulation de la cellulose. — Si l'on ajoute de l'eau à une dissolution de cellulose dans la liqueur cupro-ammoniacale, on rompt les condi- | tions de dissolution, et la cellulose se précipite. H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE L'alcool, les acides sulfurique, chlorhydrique, acétique, tannique, la soude caustique, la polasse caustique, le carbonate de sodium et le zincate de sodium ou de potassium produisent aussi la préci- pilation de la cellulose ; il se forme une coagula- lion, et c'est cette propriété qui est utilisée pour obtenir la coagulation des dissolutions de cellulose sous forme de fils, en sortant des filières ou ori- lices capillaires, dans la fabrication de la soie arti- ficielle et du erin artificiel. En faisant agir de la soude caustique ou de la potasse caustique sur une dissolution de cellulose dans la liqueur cupro- ammoniacale, Mulder a constaté que la cellulose est précipitée sous forme de coagulum, composé de cuivre et de soude caustique ou de potasse caus- tique suivant l’alcali employé. Les produits obtenus répondraient aux formules : 2 CSH!05Cu”Na?0 2 CH '05Cu/K20. Cette méthode a d'abord étéappliquée par Krusche dans son brevet français n° 286.445 du 2 mars 1889, dans la fabrication de pellicules, en particulier; il éli- minait le cuivre par un acide pour obtenir la cellu- lose. Il convient de remarquer que cette méthode se retrouve dans des brevets pris postérieurement par d’autres auteurs sur la fabrication des pelli- cules, de la soie artificielle et du crin artificiel. En traitant des dissolutions de cellulose dans la liqueur cupro-ammoniacale par le zincate de s0- dium, de formule Var + 2NaOH, NoNa E. Crumière a constaté qu'il obtenait une masse coagulée de la forme : (CSH1205}r (CuO)r' (ZnO)r" (Na°O)w!' ; c'est cette méthode qu'il emploie dans sa fabrica- tion de soie artificielle et de crin artificiel. Pour séparer la cellulose des oxydes des métaux cuivre et zine, cet auteur opère par électrolyse, en soumettant la masse des filscoagulés, plongés dans de l'acide sulfurique dilué, à l’action du courant électrique, l'acide formant l’électrolyte. Quant aux dissolutions de cellulose dans le chlo- rure de zinc que nous avons signalées, leur coagu- lation peut se faire au moyen de l'acide acétique, l'ammoniaque, l’éther ou la glycérine, mais les fils obtenus dans ces conditions sont de qualité inférieure à ceux qu'on obtient avec la liqueur cupro-ammoniacale. $ 2. — Dissolution et Coagulation de la Nitro-cellulose. La nitro-cellulose trouve son utilisation, comme matière première, dans certains procédés de fabri- LA SOIE ARTIFICIELLE 205 calion de la soie artificielle; l'équation générale de formalion des nitro-celluloses peut être représen- tée par : C‘112205 + m(AzO?OH) = CH!° —m(AzO!mO0S + mH°0 Cette équation montre quel'acide nitrique AzO®.OH peut entrer, par son groupement AzO*, en combinai- son avec la cellulose et donner toute une série de celluloses à nitration variable. Certains auteurs considèrent, d’une part, le coton- poudre ou fulmicoton, employé pour explosif, comme formé de cellulose déca-nitrique, répondant à la formule C“H*(Az0*)"0”, pondant à celle de Béchamp représentée par C®#H"#(Az0*) 0", et d'autre part, la nitro-cellulose, destinée à faire le celluloïd ou le collodion, comme formule corres- constituée par de la cellulose octo-nitrique, répon- dant à la formule C*H*{(Az0*)"0”, formule qui cor- respond à celle de Béchamp C°H"(Az0*/'0", ou encore à la cellulose di-nitrique C'H*(Az0°)°0”, lors- qu'on vient à faire n — 1 dans la formule de Ja cellulose (C°H"0°)", et m—2 dans l'équation géné- rale de formation des nitro-celluloses précédem- ment établie. Dans la pratique, on constate que la cellulose nitrique obtenue, au cours de sa préparation, n'est pas en général constituée par une seule variété bien définie de nitro-cellulose, mais par plusieurs variétés de nitro-celluloses plus ou moins voisines dans leurs degrés de nitration, suivant les condi- tions dans lesquelles la préparation a été effec- tuée. On obtiendra, en matière de fabrication, nitro-celluloses explosibles ou des nitro-celluloses inexplosibles, suivant le manuel opératoire em- ployé ; ainsi, on peut dire que les nitro-celluloses explosibles sont obtenues à froid avec des acides concentrés et se caractérisent par leur insolubilité dans l'alcool et l'éther, tandis qu'au contraire les nitro-celluloses inexplosibles sont obtenues avec de l'acide nitrique moins concentré et possèdent la propriété de se dissoudre dans un mélange d'éther et d'alcool. C'est cette deuxième catégorie de nitro-cellulose qui est employée dans la fabrication des dissolu- tions pour soie artificielle. Les nitro-celluloses destinées à cette industrie spéciale demandent à être préparées à un degré de nitration non élevé, de facon que la variété de nitro-cellulose qu'on se propose d'obtenir soit bien soluble dans un mé- lange d'éther et d'alcool; c'est sur ces données que l'on réglera, en matière de fabrication, le terme de cette nitration, en terant compte que la tri-nitro- cellulose ou C°H7(4z0°)"0* est la nitro-cellulose la plus fortement nitrée que l'on puisse préparer. Lorsqu'on fait des mélanges d'acide des usage 206 H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET nitrique et d'acide sulfurique pour obtenir des nitro-celluloses, l'acide sulfurique mis en œuvre n'intervient dans la réaction que pour àabsorber l’eau formée au cours de l'éthérification de la cel- lulose, et pour éviter, par cela même, la dilution de l'acide azotique qui diminuerait l'énergie de son action. Les dissolutions de nitro-cellulose, destinées à la filature de la soie artificielle, sont de véritables collodions, de teneur convenable en nitro-cellu- lose, obtenus par l’action dissolvante d'un mélange d'alcool et d'éther; il en est ainsi dans le procédé de M. de Chardonnet. On prépare également des dissolutions de nitro- cellulose, qui ont été préconisées pour la fabrica- tion des fils de soie artificielle, en traitant la nitro- cellulose par: l'acétate d’amyle, l'acétone, l'acide acétique cristallisable ou l’éther acétique. À ces diverses solutions, certains auteurs ont ajouté des substances telles que: de l'huile de ricin, de l'huile de résine, du caoutchouc, de la gutta-percha, de la gélatine ou des matières albu- minoïdes; de même les dissolutions de nitrocel- lulose sont quelquefois obtenues en associant entre eux certains dissolvants parmi ceux qui ont été cités. M. Cazeneuve fit, le premier, usage de l’acétone CH°.CO.CH*, ou diméthylcétone, pour dissoudre la nitro-cellulose : il en a revendiqué la propriété en 190% dans son brevet francais n° 346.693 ; l’acétone employée est l’acétone ordinaire pure. Dans un autre brevet, M. Cazeneuve a constaté que les impuretés de l'acétone commerciale, et surtout l’eau, nuisent à la dissolution de la nitro- cellulose; pour ces raisons, il purifie l’acétone; cet auteur l'additionne alors de quelques grammes de permanganate de potasse par litre, puis il dis- tille l’acétone ainsi traitée, après lui avoir laissé subir un contact de vingt-quatre heures environ avec le réactif. Pour effectuer sa dissolution, on traite la nitro- cellulose par 2 à 3 parties d'acétone ; la pâte ainsi obtenue est prête à être filée, mais on peut la déni- trer par des sulfhydrates ou des sulfures, et il paraît ainsi se former de véritables amidonitrocel- luloses, qui resteraient solubles dans la masse même de l’acétone. Cette dissolution est envoyée par la pression à travers des filières et on coagule les fils en les fai- sant passer dans une atmosphère très humide, marquant de 70 à 85° hygrométriques à la tempé- ralure de 45 à 22° C.; finalement, les fils obtenus sont soumis à l’action d'une atmosphère de gaz ammoniac possédant 15 à 25° de température. Lorsqu'il s'agit des dissolutions de nitro-cellu- lose dans les mélanges d’éther et d'alcool, ces dis- L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE solutions sont coagulées à la sortie des filières, soit simplement par exposition des fils à l'air, soit par le passage dans un bain constitué au moyen d'un des produits suivants : benzine, essence de térébenthine, chloroforme, sulfure de carbone, pétrole, aniline. & 3. — Dissolution et Coagulation du Xanthate de cellulose. Nous avons vu que la cellulose traitée par un aleali caustique, tel que de la soude en solution concentrée, se mercerise : les fibres se gonflent, deviennent transparentes et il se forme un alcali cellulosique hydraté ou cellulose sodique hydratée. Cet alcali cellulosique hydraté, en présence du bisulfure de carbone, donne lieu à une réaction chimique : les fibres se gonflent encore, se gélati- nisent, et il se forme finalement un xanthate cellu- losique de sodium ou cellulosyl-disulfocarbonate de sodium, corps analogue au xanthate de sodium ou éthylsulfocarbonate de sodium, répondant à la formule O.C*H° cs SNa Si l’on met en évidence le groupe cellulosyl de la cellulose C'H"0”, fonctionnant comme alcool, on aura la formule C'H'O'.OH, analogue à celle de l'alcool éthylique CH°.0H; si l'on attribue à la cel- lulose sodique hydratée la formule C°H!O*.NaOH, la formation du xanthate cellulosique de sodium sera donnée par l'équation : O.CH°0* CSHLOSNaOH + CS? — cs HO: S Na Ce xanthate cellulosique de sodium est soluble dans l’eau et fournit une solution jaune visqueuse à laquelle le nom de viscose a été donné. Si l’on ajoute de l’eau à cette solution, le xan- thate cellulosique de sodium se dissocie et la cel- lulose se précipite. On peut encore coaguler la cellulose en chauf- fant la solution entre 80 et 100°, ou en l’évaporant à siccité par chauffage, ou simplement par aban- don à la température. ordinaire, ou enfin sous l'influence d'agents d'oxydation. La décoloration et la purification des solutions brutes de xanthate cellulosique sodique peuvent se faire par addition d'acide sulfureux; il y a alors élimination de l’alcali restant et formation d'hypo- sulfite de soude. On peut encore obtenir cette purification en pré- cipitant le dérivé de la cellulose par une solution concentrée de sel marin, puis en lavant le préci- pité obtenu avec une solution alcaline, afin d’en- lever les sulfocarbonates alcalins ; quant à l'élimi- H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE 207 nation de la solution alcaline, elle se fait par la pression. Le produit purifié : xanthate cellulosique de sodium, est blanc verdâtre; il se dissocie dans l’eau en donnant une solution, presque incolore, ayant les propriétés de la solution originelle. Cross, Bevan et Beadle ont pris, le 7 mai 1892, sous le n° 8.700, une patente en Angleterre, et un brevet en France, le 10 janvier 1893, sous le n° 227.034, sur cette fabrication; ces brevets sont actuellement tombés dans le domaine public. Un brevet français au nom de Stearn à été pris le 31 mars 1903, sous le n° 330.753. Ce brevet à pour but de fabriquer des fils de soie artificielle, en se servant de certaines solu- tions de viscose obtenues en se basant sur l'insta- bilité des solutions de xanthate de sodique par l’action du temps. Les solutions de xanthate de cellulose sodique: cellulose en SNa soumises à l’action du temps, se décomposent, et il se forme un coagulum qui se contracte peu à peu en perdant de l’eau. Or, la cellulose C'H"O0* ou C'H'O'.OH présente plusieurs fois la fonction alcoolique, et l’on peut obtenir une série de composés de cellulose avec les solutions de xanthate de cellulose sodique abandonnées à l'action du temps. Ces corps peu- vent être représentés par les formules : 0.GH°°0° O:C**H#0:° O.C'SH°S0! “ cs ss N SNa CS cs NS Na NS Na } Au cours de ces différentes phases, les composés xanthiques de la cellulose sodique ont leur solu- bilité modifiée. Ainsi, dans la deuxième phase, le composé xan- thique obtenu : DAC OS S est soluble dans l'eau, la soude caustique et les acides faibles, tandis que, dans la quatrième phase, le composé obtenu : O0 .C°‘H%0!° osé "NENa est insoluble dans l'eau, les acides faibles, mais reste soluble dans la soude caustique de concen- tration convenable; en neutralisant l'excès de soude caustique dans la solution, la matière peut être précipitée sous forme gélatineuse. En tenant compte de ces constatations, on peut obtenir la malière sous la forme convenable pour la formation des filaments; dans ce cas, on prend la quatrième phase qui fournit le composé xan- thique : O0. C*'H#0!° CS \ - ? NS Na maintenu en dissolution dans une solution de soude caustique; c’est cette solution que l'on fait passer par des filières, au moyen de la pression, dans un bain de sulfate d'ammoniaque, qui a pour but de coaguler la cellulose et par suite les fils formés. Dans son brevet francais, n° 334.515, en date du 8 août 1903, la Société la Viscose se sert d'un bain de sulfate ferreux pour éliminer les sulfures et sulfhydrate d'ammonium qui se produisent au cours de la coagulation par le sulfate d'ammo- niaque, corps rendant les fils raides, durs et adhé- rents entre eux. On peut encore employer un sel soluble de zinc ou de manganèse. Il. — FABRICATION DE LA SOIE ARTIFICIELLE. S 1. — Soie artificielle provenant de la nitro-cel- lulose. Les procédés de fabrication de la soie artificielle au moyen de la nitro-cellulose ont pour type le procédé de M. H. de Chardonnet. Le coton est d'abord purifié par les procédés habituels : on le dégraisse au moyen des lessives alcalines, puis on le blanchit par les hypochlorites: après lavage et séchage parfaits du coton, on pra- tique la nitration. Cette nitration peut s'effectuer en trempant le coton bien sec, préparé ainsi qu'il a été dit, dans un mélange de 12 litres d'acide nitrique de densité 1,37, et 20 litres d'acide sulfurique de densité 1,83, suivant le brevet français n° 201.740; puis on retire le coton au bout de quelques instants et on l'essore. A l’essorage, on recueille environ les trois quarts du bain, qu'on revivifie en ajoutant des acides neufs ; on peut également revivifier les vieux bains par distillation ; l'acide nitrique distille au-dessous de + 200°, sans soubresauts, et il suffit ensuite de chauffer l'acide sulfurique restant pour le con- centrer. Après essorage du coton nitré, on le lave à grande eau, dans des piles à laver (l'eau doit être froide et pure), puis on procède à des essorages successifs. On peut essorer complètement la nitro-cellulose : mais, suivant le deuxième certificat d'addition au brevet français n° 231.230, il est préférable de laisser la nitro-cellulose encore humide, et renfer- mant de 25 à 30 °/, d'eau, car dans cet état le py- 208 H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE roxvle est beaucoup plus soluble que sec; on lave alors le pyroxyle avec de l'alcool à 85 et 90 degrés Gay-Lussac ; enfin, après brassage et essorage, le pyroxyle ou nitro-cellulose est prêt pour la disso- lution. Il est bon de noter que l’on peut encore préparer la nitro-cellulose, suivant le certificat d’addition cité, en traitant le coton, pendant 12 à 24 heures, à la température de + 28 à + 30° C., par un mélange de 9 litres d’acide nitrique, de densité 1, 3, et de 15 litres d'acide sulfurique, de densité 1,835; dans ce cas on élimine les acides par pressage, et on les revivilie en prenant 85 °/, en volume de ces acides vieux, et leur ajoutant 15 °/, de bain frais, formé de 3 volumes d'acide sulfurique monohydraté. Après cette nitration, le pyroxyle est pressé et lavé à grande eau, pendant plusieurs heures, dans une pile à laver, et blanchi, pendant le lavage, avec un peu de chlorure de chaux et d'acide; un lavage à grande eau et un essorage partiel termi- nent l'opération. Le pyroxyle, préparé par l’un des moyens indiqués, et qui renferme de 25 à 30 °/, d'eau, est introduit dans un malaxeur, et, pour 28 à 30 kilogs de ce pyroxyle, on ajoute 40 litres d'alcool et 60 litres d'éther; le pyroxyle ou nitro- cellulose se dissout rapidement; on obtient ainsi le collodion, que l’on filtre par la pression pour éliminer les particules insolubles de matières susceptibles de se trouver dans la masse. Le collodion est alors prèt à être filé; on lem- magasine d'abord dans un réservoir en cuivre étamé, et on l'envoie par la pression dans des con- duits débouchant dans des filières constituées par des tubes en verre à orifices capillaires ; les fils se forment par coagulation du collodion à l'air, et l'alcool ainsi que l’éther s'évaporent. Au fur et à mesure de leur formation, les fils unitaires .sont réunis, suivant 10, 12, 14%, 16, 18 brins et plus, d'après la grosseur des fils à obtenir, et sont enroulés mécaniquement sur des bobines animées d’un mouvement de rotation. Ces bobines sont ensuite dévidées, puis les fils sont mis en écheveaux, tordus ensemble et disposés en flottes comme dans le travail de la soie natu- relle. Les écheveaux oblenus sont alors soumis à la dénitration, en les plongeant dans la partie claire d'un bain composé de 8 kilogs de sulfure de cal- cium et de 4 kilogs de sulfate d'ammoniaque pour 100 litres d’eau, suivant le troisième certificat d’'ad- dition au brevet français n° 231.230. Pour 2 kilogs de soie artificielle, on prend 1 hec- tolitre de ce bain qu'on chauffe entre + 98 et + 30 degrés, et on y laisse les écheveaux pendant 1 heure environ; après dénitration, les fils sont lavés, blan- chis, lavés à l'eau et séchés. $ 2. — Soie artificielle provenant du Xanthate de cellulose. On prépare d'abord le xanthate de cellulose; pour cela, on peut employer le coton blanchi, mais en général on utilise des pâtes de bois blanchies et rendues les plus pures possible. La pâte de cellulose est imprégnée d'une solution de soude caustique à 15 °/, de NaOH, c'est-à-dire de densité 1,168, et malaxée; par la pression ou l'essorage, l'excès de liquide est enlevé, mais de telle facon que la pâte renferme encore trois à quatre fois son poids de solution, suivant le brevet français n° 227.034. Cette alcali-cellulose obtenue est soumise en vase clos à l'action du sulfure de {carbone, à la tempé- rature ordinaire; on emploie le sulfure de carbone dans les proportions de 30 à 40 °/, du poids de la cellulose, eten trois heures la réaction est terminée. On obtient le xanthate de cellulose, soluble dans l’eau, puis on procède à la maturation de la solu- tion de viscose ainsi préparée suivant le procédé Stearn (Brevet français n° 330.753). À la viscose, fournie par 100 kilogs de pâte de bois, on ajoute 54 kilogs de soude caustique, dissoute dans 3090 litres d’eau, et l'on agite le tout, pour avoir une masse homogène : le produit obtenu est un xanthate double de cellulose et de soude, en solution dans un excès de soude caustique; ce xanthate est facilement soluble dans l'eau, mais il se scinde ; progressivement, il se forme des combi- maisons cellulosiques indépendantes et la solubilité se modifie. à Cette maturation est proportionnelle à la tempé- ralure et à la durée, mais en général elle est com- plète après un repos de sept jours à Æ 15° C. La solution de xanthate de cellulose est alors filtrée, puis envoyée par la pression dans des filières capillaires, plongeant dans un bain coagu- lant composé de sulfate d'ammoniaque ou de sul- fate de soude. Les fils coagulés sont enroulés sur des bobines et mis en écheveaux; on élimine le soufre, qui est précipité sur les fils et les ternit, en plongeant ces fils dans une solution chaude de sulfure desodium, et on les blanchit au chlorure de chaux. Après lavage à l'eau, passage à l'acide, lavage à l'eau, les fils sont égouttés, rincés, savonnés, essorés el finalement séchés sous tension. $ 3. — Soie artificielle provenant de la Cellulose dissoute dans la liqueur cupro-ammoniacale. Contrairement aux procédés précédents (nitro- cellulose et xanthate de cellulose), qui utilisent des. produits inflammables, explosifs et dangereux à manipuler, tels que : le coton-poudre, l’éther et le H. DE LA COUX — LA CELLULOSE sulfure de carbone, les procédés de fabrication de la soie artificielle au moyen des dissolutions de cellulose dans la liqueur eupro-ammoniacale pré- sentent toutes les garanties de sécurité désirables. C'est à Despeissis que revient l'honneur de la conception de la soie artilicielle, fabriquée au moyen de la cellulose dissoute dans la liqueur cupro-ammoniacale. Le 12 février 1890, cet au- teur prenait, en France, sous le n° 203.741, un brevet qui, actuellement, est tombé dans le domaine publie. Deux procédés que nous allons étudier, basés sur l'emploi des dissolutions de cellulose dans la liqueur cupro-ammoniacale, ont donné réellement des résultats industriels; ce sont : les procédés de la Société Vereinigte Glanzstoff Fabriken, exploités en France à Givet et à Yzieux, et les procédés €. Crumière, exploités en France à Flaviac et à la Voulte (Ardèche). 1. Procédés de la Société Vereinigte Glanzstoff Fabriken. — Le coton brut est d'abord dégraissé, par un traitement dans un autoclave, au moyen d’une solution de soude caustique et de carbonate de soude; au bout de trois heures environ, le coton est retiré, lavé à grande eau et essoré. Après essorage, le coton est blanchi par un bain de chlore, dans des conditions déterminées ; ensuite il est lavé à grande eau, essoré et séché; le coton ainsi préparé est dissous dans de la liqueur cupro- ammoniacale. Cette liqueur peut être préparée au moyen de morceaux de cuivre, placés dans une colonne ver- ticale, dans laquelle on ajoute de l’'ammoniaque. On injecte alors de l'air, par la partie inférieure de la colonne, au moyen d'une pompe à air, pendant l'opération. On titre la liqueur cupro-ammoniacale obtenue ; lorsqu'elle contient la quantité voulue de cuivre, on introduit le coton, préparé ainsi qu'il a été dit, dans un malaxeur, et l’on y ajoute un volume déter- miné de liqueur cupro-ammoniacale ; puis la masse est refroidie de facon à opérer à basse température. Lorsque la dissolution de la cellulose est effec- tuée, on la filtre et elle est alors prête à être filée. Cette dissolution de cellulose est emmagasinée dans des réservoirs et envoyée au moyen de la pression dans des filières capillaires, plongeant dans de l'acide sulfurique dilué; les fils se forment au contact de l'acide et sont enroulés sur des bobines. Ces fils sont ensuite traités par de l'acide sulfurique dilué, pour éliminer le cuivre, puis lavés à grande eau. Après lavage, les bobines de fils sont portées au séchoir. Les fils sortant du séchoir sont humidifiés, dévidés, tordus et blanchis. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. IT L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE 209 2. Procédés Æ. Crumière. On soumet le coton ou cellulose à l’action d'un courant d'ozone dans des conditions particulières (d’après le brevel 361.048 et la n° 187.263), et l'on opère de la facon suivante : français n° patente allemande Dans une cuve cylindrique en fer munie d'agila- teurs à palettes, on introduit une solution de soude caustique très diluée, et l'on fait passer dans le liquide, pendant cinq minutes, un courant d'ozone ou d'air ozoné, puis on ajoute le coton, à cette solution ainsi préparée, dans les proportions de 100 kilogs de coton par 150 à 200 litres de ladite solution. On fait ensuite passer le courant d'ozone, pen- dant vingt minutes environ, dans le liquide qui contient le coton, et pendant cette opération on agite toute la masse au moyen de l’agitateur méca- nique, mû par un arbre de transmission. Le courant d'air ozoné est arrêté et toute la masse est portée à l'ébullition, pendant trente minutes environ; le coton, après ce traitement, esl retiré de la cuve, lavé et essoré, et il est alors prêt à être dissous. Pour cela, on porte le coton, ainsi préparé, dans un malaxeur, dans lequel on a introduit de la liqueur cupro-ammoniacale, préparée spécialement. Cette dissolution du coton ou cellulose se pro duit avec une très grande rapidité, et l'on obtient une masse visqueuse, dont la constitution particu- lière la rend propre à fournir des fils très élas- tiques et résistants. Après filtration de cette disso- lution de cellulose dans des filtres spéciaux, elle est alors prête à la filature. Cette dissolution visqueuse de cellulose est emma- gasinée dans un réservoir et envoyée par la pres- sion dans des filières ou orifices capillaires montés sur une machine dite métier à filer. Ces filières plongent dans un bain coagulant, extrêmement énergique, composé de zincate de sodium en solution (suivant le brevet francais n° 377.118 et la patente américaine n° 911.868); la matière, en sortant des capillaires, se coagule au contact du bain de zincate de sodium, et donne naissance aux fils qui sont enroulés ensemble, sui- vant un nombre de brins déterminés, d'une facon automatique, sur des bobines spéciales. Les fils ainsi formés sont constitués par un com- posé sodique de cellulose, d'oxyde de cuivre et de zinc, et l’on procède à l'isolement de la cellulose par élimination et récupération du cuivre, par une méthode électrolytique appropriée (brevet francais n° 375.827 et patente américaine n° 904.684). Pour cela, les bobines sont portées dans une cuve dite ; cuve à électrolyser, doublée de plomb intérieure- ment, et formant cathode; l'anode est constituée par une plaque de plomb, suspendue verticalement S2* 2 210 dans la cuve remplie d'acide sulfurique dilué à 5 °/, environ, et qui sert d'électrolyte. On fait passer le courant électrique dans l’élec- trolyte, à travers toute la masse du liquide et des fils; l'oxyde de cuivre, combiné sous forme de composé cellulosique, qui constitue la masse des fils, se solubilise au fur et à mesure, puis se décom- pose, sous l’action du courant électrique, en cuivre métallique, qui se porte sur la cathode. L'acide sul- furique se régénère et l’électrolyte acide mis en œuvre est prêt à être utilisé de nouveau. La cellulose, par suite de ces réactions, est, en outre, isolée de sa combinaison, et les fils alors obtenus se présentent avec une grande élasticité. Pendant l'opération, les bobines de fils tournent dans le bain électrolyte, et l'isolement de la cellu- lose ainsi que la récupération du cuivre et la régé- nération de l'acide s'effectuent automatiquement, avec rapidité. Les bobines de fils sont ensuite lavées, dévidées et séchées ; une torsion des fils et un blanchiment ter- minent les opérations; finalement, on obtient une soie artificielle résistante, ayant une grande élasti- cité et prenant bien la teinture. Dans l'étude que nous venons de faire, seuls les procédés qui réellement ont été industrialisés H. DE LA COUX — LA CELLULOSE ET L'INDUSTRIE DE LA SOIE ARTIFICIELLE et donnent lieu actuellement à une exploitation commerciale ont fait l’objet de notre examen: conséquemment, nGus avons passé sous silence les. acétates de cellulose, en matière de soie artificielle. Il y a vingt-cinq ans environ, la soie artificielle n'avait guère qu'une ténacité de 60 grammes pour 100 deniers, une élasticité de 5 °/,, et une résistance: pour ainsi dire nulle lorsque le fil était mouillé. Si l'on considère maintenant, parmi les procédés industrialisés, le plus récent (procédé E. Crumière), on constate, d’après un bulletin officiel de la Condi- lion des soies de Lyon, que la soie artificielle obtenue possède une ténacité de 135 grammes pour 100 deniers et une élasticité de 19,5 °/,; de plus, à l’état mouillé, le fil présente une ténacité de 31 grammes pour 100 deniers et une élasticité de 27 °/,; ces divers chiffres, indiqués parallèlement, permettent de constater l'importance des progrès réalisés dans l’industrie de la soie artificielle. Cependant la Chimie n’a pas dit son dernier mot, et un jour viendra, qui n’est peut-être pas éloigné, où la synthèse chimique permettra d'égaler et même de surpasser, sous tous les rapports, la soie naturelle. H. de la Coux, Ingénieur chimiste expert, Inspecteur de l'Enseignement technique au Ministère du Commerce et de l'Industrie. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Fournier (Vice-Amiral E.). — Vitesse des Navires. Résistance de l'eau en navigation ordinaire et en navigation sous-marine. — 4 vol. 1n-8° de x:109 pages, avec 15 fiqures dans le texte et 23 planches hors texte. (Prix : 4 fr.) Berger-Levrault et Ci, éditeurs. Paris et Nancy, 1910. On sait la grande importance que présente, dans les divers genres de locomotion, la résistance du milieu. Elle varie avec les formes du véhicule et s'accroît rapi- dement avec la vitesse. Son étude est donc devenue beaucoup plus importante depuis que l’on construit, aussi bien pour la navigation dans l’eau que dans l'air, des véhicules de formes plus variées qu'autrefois, et qu'on leur demande, en outre, des vitesses de plus en plus considérables. Or, la théorie de la dynamique des fluides étant peu développée, on n’est pas encore parvenu, malgré les efforts des plus grands mathématiciens, à établir a Loi suivant laquelle le milieu résistant réagit sur la sur- face des corps qui s'y déplacent. Il en résulte, pour l'ingénieur des constructions navales en particulier, l'impossibilité de calculer, par une formule théorique rigoureuse, la force motrice nécessaire à la propulsion du navire pour lequel il trace les lignes d’eau dont dépendent le volume et l’affinement de la carène. On est obligé, à cet effet, de recourir à l'emploi de bassins d'essais, dans lesquels on mesure les résistances oppo- sées par l’eau à des modèles de navires projetés, qui sont remorqués à diverses vitesses. Ce procédé, tout en étant fort coûteux, n'est, en somme, applicable qu’une fois que l’on a définitivement fixé les caractéristiques du bâtiment; il ne se prête donc pas aux fätonnements nécessaires, dans l'étude d'un avant-projet, pour concilier les formes extérieures du navire avec les autres exigences imposées au cons- tructeur. L'amiral Fournier donne à cette question, si impor- tante, une solution beaucoup plus pratique et élégante, dans son ouvrage sur la Vitesse des navires, qu'il vient de faire paraître. Ce résultat a été obtenu en reprenant à la base, et dans son ensemble, l'étude de la résistance que l’eau oppose à la translation des navires, par l'analyse des phénomènes que le passage d’un flotteur engendre dans une masse liquide incompressible. Il résulte de cette théorie que la Jo1 de la variation des résistances est beaucoup plus simple pour un sous-marin, naviguant à une profondeur suffisante pour ne produire aucune dénivellation de la surface libre de l’eau, qu'en navigation ordinaire, où le bateau soulève et entraîne autour de lui un ensemble d'ondes, qui changent la réaction de la masse liquide, et modi- fient l’enfoncement et l’inclinaison longitudinale du flotteur. Pour étudier et comparer les résistances dans ces deux cas, l'amiral Fournier introduit une notion nou- velle, celle d’une vitesse caractéristique W, la seule, en dehors d'une vitesse nulle, pour laquelle s’annule ia différence entre les résistances en immersion pro- fonde et à la surface. Une autre notion, également nouvelle, est celle du coefficient d'attaque n de la carène, qui est fonction de la vaieur moyenne 1, des incidences maxima des lignes d'eau du flotteur sur la direction de la translation. L'analyse des phénomènes dynamiques montre qu’en navigation Sous-marine, à immersion profonde, la ET INDEX résistance varie proportionnellement au carré de la vitesse, tandis qu'il existe, dans la navigation à la surface, trois régimes essentiellement différents el qui ne peuvent donc pas être représentés par une expression analytique unique. Ainsi, tant que la vitesse v d'un navire reste W, une partie de la réaction longitudinale de la masse liquide se trouve amortie, ce qui produit, avec le changement d’assiette du navire, un premier régime toujours favorable à la vitesse (à puissance motrice égale). Si, au contraire, v=>>W, deux cas se produisent, selon le degré d’affinement de la carène, caractérisé par la valeur de l'angle LE, : Si In <<7°11', le régime reste favorable à la vitesse, taadis qu'il devient nuisible pour 1, > 7014". On peut en conclure que les navires aptes aux grandes vitesses doivent avoir l'angle moyen des incidences maxima moindre que 711. Pour étudier ces divers régimes, l'amiral Fournier a imaginé une nouvelle méthode graphique. E étant la surface de carène, on porte sur deux axes rectangu- laires, comme abscisses et ordonnées, les valeurs ARS A RUE UE Ty Ÿ—GnkS° La courbe, qui passe par les extrémités des ordon- nées, représente alors la marche des résistances R. Quand il s’agit d'un sous-marin en plongée, cette courbe se réduit simplement à une droite partant de l'origine et inclinée de 450 sur les axes. L'étude de la forme affectée par la courbe des résis- tances en navigation ordinaire à été faite par l'amiral Fournier au moyen des mesures prises sur neuf mo- dèles de navires, de toutes formes, qui ont été remor- qués, à diverses vitesses, dans les bassins d'essais de Brest et de Paris. Il résulte de cette étude que, pour les navires modernes autres que les contre-torpilleurs et torpilleurs, on peut représenter les parties de ces courbes, voisines des points correspondant à la vitesse maximum, par des arcs de cercle très faciles à cons- truire et dont les éléments sont exprimés en fonction des caractéristiques de la carène et des valeurs W et n». Or, cet arc ayant été tracé avec les données d'un avant-projet, ses ordonnées mesurent, à l'échelle adoptée, la résistance que l’eau opposerait à la carène projetée, aux diverses vitesses. Pour les contre-torpil- leurs et torpilleurs, dont la vitesse maximum dépasse W, cette courbe affecte un trajet ondulé que l'amiral Fournier donne également le moyen de tracer. La résistance étant ainsi connue, si P représente /a puissance des appareils moteurs et propulseurs, dont le constructeur connaît le coefficient de rendement d'ensemble F, le travail effectif des machines sera FP, et, comme il est égal au travail résistant RV de l’eau, à la vitesse V, on tirera facilement de cette égalité la X 2. ë RVERE : valeur de la puissance motrice P — “p ‘nécessaire pour obtenir la vitesse Vi, Ainsi se trouve résolu le problème fondamental qui ‘ Le fonctionnement des appareils propulseurs (héli- ces, etc.) aux très grandes vitesses n'étant connu qu'im- parfaitement, l'amiral Fournier montre, en appliquant sa méthode à uné quinzaine de navires construits par les Forges et Chantiers de la Méditerranée, comment on peut tirer parti de ces formules pour déduire, des essais à grande vitesse, la facon dont les hélices utilisent la puissance motrice et, si elles sont mal appropriées, procéder à leur remplacement. se pose dans l'étude de l'avant-projet d'un navire. Le volume publié par l'amiral Fournier contient, en outre, la réponse à plusieurs autres questions restées obscures jusqu'à présent. Ainsi, l'analyse des mouve- ments qui se produisent dans la masse liquide au pas- sage d’un flotteur permet d'expliquer très simplement les anomalies observées dans les mesures de vitesse, effectuées sur des bases insufffisamment profondes, et, notamment, la cause de la déperdition de la puissance motrice des machines (qui atteint précisément son maximum à la vitesse W). On trouve également dans cet ouvrage une nouvelle formule pour le calcul de la surface X d'une carène. Cette surface figurant dans l'expression de la résis- tance, on est obligé de l'évaluer par des formules em- piriques. Ces formules ne devraient pas donner des écarts dépassant 5 °/, de la valeur réelle; or, les meil- leures des formules existantes donnent souvent des écarts qui dépassent cette limite. La nouvelle formule, trouvée par l'amiral Fournier, est : S — 2.98 ()" gs VLU [U étant le volume, L la longueur, ] la largeur, p la pro- : a MOT + LAS fondeur de la carène et f = gg S0n coefficient d’affine- ment longitudinal, c'est-à-dire le rapport de son vo- lume au cylindre circonscrit au maïître-couple de sur- face 8]. En l'appliquant à une vingtaine de bâtiments fort dissemblables, dont les surfaces ont été mesurées, on ne trouve jamais d'erreur relative dépassant + 0,05, qui est la limite admise. Telles sont les principales questions traitées dans cet ouvrage, qui marquera une étape importante de la théorie du navire et de son adaptation aux grandes vitesses. D. Savircu. 2° Sciences physiques Sartori (Giuseppe), Zngénieur, Professeur d'Électro- technique à l'Institut royal technique supérieur de Milan. — La Technique pratique des Courants alternatifs.2° édition française, traduite de l'italien, revue et corrigée par M. J.-A. MonrrELLieR. Tome 11: Développements et calculs pratiques relatifs aux phénomènes du courant alternatif. — 1 vol. in-8°, de 64% pages, avec 287 figures. (Prix :20 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Cet ouvrage complète le tome premier: Æxposé éle- mentaire et pratique des phénomènes du courant alter- natil, que nous avons précédemmeut analysé dans cette Revue. Il ne rentre pas dans la catégorie des ouvrages qui se signalent par la nouveauté des théories; mais il attire l'attention par une méthode d'exposition pleine de clarté et mettant à la portée de ceux qui n’ont que des connaissances théoriques assez restreintes toute la technique des courants alternatifs. Des applications numériques, fort bien choisies en vue de la pratique industrielle, en complètent les différents chapitres. En somme, c’est un travail consciencieux qu'a fait là M. Sartori, et qui est destiné, comme ille dit lui-même, à « faciliter à tous l'étude des phénomènes du courant alternatif »: à ce point de vue, il mérite d'étre signalé. G. DE LAMARCODIE, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. Cavalier (J.), Professeur honoraire à la Faculté des Sciences de Rennes, Recteur de l'Académie de Poi- tiers. — Leçons sur les Alliages métalliques. — 1 vol. in-8° de 466 pages, avec 124 figures et 91 micro- photographies sur planches. Vuibert et Nony, édi- teurs. Paris, 1910. L'application des lois de l'équilibre chimique aux alliages a été poursuivie depuis quelques années avec une ténacité peu ordinaire. Cette opiniâtreté tient à plu- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX sieurs causes. D'abord, le désir de pénétrer la constitu- tion assez mystérieuse des alliages, en suivant une voie toute tracée par quelques savants, par M. H. Le Chatelier, en particulier, qui a posé le problème ici même’, il y a quinze ans, avec une netteté et une pré- cision qui ne laissaient rien à désirer. L'essor si grand qu'a pris l'étude physico-chimique des alliages tient aussi à l'industrie; celle-ci, comprenant qu'elle ne pouvait pas rester en arrière de ce mouvement scien- tifique, a créé des laboratoires spéciaux, surtout depuis que M. Guillemin d'abord, puis M. L. Guillet, l'ont orientée dans cette voie. L'ouvrage de M. Cavalier est destiné à l’enseignement, qui n'a plus le droit de méconnaître les principes fon- damentaux de la science des alliages, bien que tous les résultats acquis ne soient pas encore définitifs. Son livre comprend deux parties. La première est consa- crée aux généralités : procédés généraux de prépara- tion et d'étude ; étude chimique, métallographique, thermique ; propriétés physiques et mécaniques. L'auteur insiste sur les méthodes qui permettent d'arriver le plus rapidement et le plus sûrement à la connaissance de la constitution. Dans cet exposé, il est resté très élémentaire. Il rappelle, au fur el à mesure des besoins, toutes les notions de Chimie phy- sique strictement nécessaires à son objet, de manière à pouvoir être lu etcompris par qui possède seulement les connaissances scientifiques d’un bachelier. La seconde partie renferme l'étude particulière de quelques alliages. L'auteur montre, par des exemples concrets, comment les méthodes générales ont été effectivement appliquées et ce qu’elles ont pu donner en réalité. A. Hozcarn, Docteur ès Sciences, Chef du Laboratoire central des Usines de la Ci° française des Métaux. 3° Sciences naturelles Dehéraïin (Henri) — Etudes sur l’Afrique (seconde série). Le Cap de Bonne-Espérance au xvi siècle. — 1 vol. in-16 de 256 pages, avec 3 cartes. Hachette et Cie, éditeurs. Paris, 4910. M. Henri Dehérain, qui a entrepris des études histo- riques sur diverses parties de l'Afrique orientale et australe, avait, dans un précédent ouvrage paru en 1905, L'expansion des Boers au xix° siècle, présenté l'histoire de leurs migrations de l’Orange au Vaal, puis au Limpopo, et de leur tentative d'établissement au Natal. Remontant plus haut dans le temps, il a consacré ce nouveau volume aux origines de l’occupa- tion du Cap par les Européens. Il à utilisé pour ce travail des documents de premier ordre qu'il a énu- mérés à la fin de son ouvrage et, notamment, le très important recueil, Precis of the Archives of the Cape of Good Hope, publié par les soins du conservateur de cette collection, M. H. C. Vos Leibbrandt; il a puisé aussi dans les relations, anciennement publiées ou même inédites, de voyageurs ayant séjourné au Cap dans la seconde moitié du xvn® siècle. Les recherches auxquelles M. Dehérain s'est livré ont été forcément très longues; aussi cet ouvrage est-il une œuvre d’éru- dition et de patiente et sagace critique historique. Dans une première partie, l'auteur montre com- ment les directeurs de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales ont été amenés à créer au sud de l'Afrique une escale de relâche et de « rafraichisse- ment » pour les navires se rendant des Pays-Bas aux Indes, et comment Johan van Riebeeck, officier de la Compagnie, chargé d'organiser et de commander cet établissement, sut remplir sa mission. On lira avec intérêt les curieux détails que donne l'auteur sur la facon dont van Riebeeck, tout en fai- sant construire des ouvrages de défense, s’est préo- cupé de la création de jardins et de cultures, ainsi Re 1 Voir la Revue générale des Sciences du 30 juin 1895. | 4 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES que de la formation de troupeaux en s'aidant du con- cours des indigènes. Van Riebeeck fit aussi des recon- naissances sur les côtes et recueillit les éléments de véritables « Instructions nautiques ». Il organisa à l'intérieur des expéditions de découverte qui firent connaître le pays jusqu'à environ 300 kilomètres au nord-nord-est du fort. M. Dehérain montre aussi com- ment van Riebeeck administra l'établissement pour lequel il rêvait de grandes destinées; il décrit ses luttes pour imposer l’escale du Cap aux commandants de navires et supplanter Sainte-Hélène. On peut donc faire remonter au créateur du Cap le rôle important que joua ce port jusqu'au percement du canal de Suez. Dans la seconde partie de Pouvrage, M. Dehérain fait l'historique des débuts de la colonisation au Cap. Les premiers colons, en 1657, furent des agents de la Compagnie qui quittèrent leur service pour se livrer à l'agriculture et à l'élevage. Puis l’auteur suit le mouve- ment de la population coloniale depuis ce point de départ jusqu'aux premières années du xvui* siècle, examinant de quels pays les colons étaient venus et dans quelles circonstances ils s'étaient fixés dans le sud de l'Afrique. Nous trouvons des détails sur l'expansion géogra- phique de ces colons dans l'intérieur du pays, sur° leurs entreprises agricoles et d'élevage, sur la main- d'œuvre dont ils disposaient et qui était constituée par des esclaves. Van Riebeeck estimait que les esclaves étaient néces- saires au Cap. Les Hottentots étaient alors trop forte- ment constitués pour pouvoir être réduits en esclavage. On recruta des indigènes sur divers autres points des côtes de l'Afrique, mais plutôt dans lInde et à Madagascar. M. Dehérain indique quel fut, aux diverses époques, le nombre de ces esclaves et quelle en était la condition. Dans l’espace de cinquante ans, de 1658 à 1708, leur nombre s'était accru dans la proportion de 4 à 12; il s'était élevé de 89 à 1.147. Parmi les colons qui vinrent s'établir au Cap, un groupe important fut celui des huguenots français, dans les années 1688 et 1689. Cet élément fut intéressant en ce qu'il introduisit la langue française dans l’Afri- que du Sud, mais ce fut une influence de peu de durée ; M. Dehérain trace un intéressant tableau de la lutte entreprise par les directeurs de la Compagnie néerlandaise pour l'extinction du français, et, de fait, elle y réussit. Le livre très substantiel de M. Dehérain nous met à même de bien comprendre comment, malgré l'établis- sement ultérieur des Anglais au Cap, cette colonie est restée si fortement empreinte des traits et du caractère de la race hollandaise. GUSTAVE REGELSPERGER. Fleury (D' Ernest) — Le Sidérolithique suisse. Contribution à la connaissance des phénomènes d’altération superficielle des sédiments (Wémoires de la Societé fribourgeoise des Sciences naturelles, volume V1). (Prix : 5 fr.) Fribourg (Suisse), 1910. Une formation géologique sur l’origine de laquelle les opinions ont été fort divergentes est celle qui est appelée sidérolithique. On sait que, sous cette dénomi- nation, due à Thurman, on désigne un complexe d’as- sises d'allure et d'aspect variables, ordinairement ca- ractérisé par des minerais de fer en grains, pisiformes ou pisolithiques (bonherz des géologues allemands), des argiles ferrugineuses (Lo!s), des terres réfractaires, des sables siliceux et même des calcaires. Cette formation a fait l'objet de nombreux travaux, surtout en Suisse, où les minerais et substances utili- sables qu'elle renferme ont été le siège d’exploita- tions très actives. Présenter une synthèse de tous ces travaux, les compléter par des recherches personnelles, expliquer et discuter l’origine de ces curieuses assises, telles sont les questions qui viennent d'être traitées par le D' Ernest Fleury dans un intéressant Mémoire édité par la Société des Sciences naturelles de Fri- bourg. ET INDEX 243 En débutant, l'auteur fait remarquer que cette ex pression de sidérolithique est peut-être défectueuse, mais qu'elle doit être maintenue et appliquée non à un échelon de l'échelle stratigraphique, mais exclusi- vement à un phénomène, à une formation géologique, Il n'y à pas un étage sidérolithique, mais 11 y a un a cident minéralogique qui s'est produit à diverses épo- ques, parallèlement à d'autres formations géologiques, et qui a formé des sidérolithiques. Si. dès 1821, grâce au géologue Mérian, de Bâle, on avait reconnu que cette formation à un substratum et un superstratum, et si, dès 14852, il fut établi qu'elle renferme des ossements de mammifères permettant, d'après le D' Greppin, de la considérer comme tertiaire, par contre on se méprit complètement sur son origine. A la suite de Brongniart et de Gressly, la plupart des auteurs crurent pouvoir attribuer aux matériaux sidé- rolithiques une origine interne; pour eux, ces matériaux proviendraient des profondeurs terrestres par voie hydrothermale et semi-plutonique. Cette manière de voir ne fut pas admise par tous et, en 1853, le Profes- seur Muller proposait une nouvelle explication, qui fut reprise plus tard par Dieulafait et M. E. Van den Broeck. Elle devait délinitivement triompher; c'est que le phénomène sidérolithique n’est autre chose qu'un phénomène d’altération superficielle des sédiments, et que les matériaux du sidérolithique jurassien sont dus à la dissolution des roches calcaires par les eaux acides. L'interprétation de M. Van den Broeck repose essen- tiellement sur le travail de l'érosion continentale par les eaux météoriques. D'après ce savant, « les argiles ferrugineuses ou plastiques, le fer hydraté, le minerai de fer en grains sont très généralement les résidus d’altération, de dis- solution, de concrétionnement et de métamorphisme hydro-chimique de dépôts soumis à des phénomènes accentués d'altération sur place ». Cette interprétation est précisée par le D' Fleury, qui reconnait deux phases successives : 1° une phase d'élaboration, pendant laquelle les roches superficielles exposées aux actions des agents atmosphériques ont été altérées par un travail d'érosion comparable à celui qui transforme actuellement les roches des régions tropicales, élaboration à laquelle l'auteur donne le nom de phase de la latérite'; 2% une phase d'évolu- tion, pendant laquelle la latérite primitive s’est trans- formée, s'est stralifiée et individualisée, pour aboutir au type sidérolithique actuel. Cette phase peut être appelée phase sidérolithique proprement dite. On doit conclure, dit M. Fleury, que l'élaboration des matériaux du Sidérolithique s'est faite par la « latérisation » des roches calcaires, et que le Sidérolithique proprement dit actuel est une ancienne latérite transformée et évoluée. L'interprétation du géologue suisse est établie sur des. bases sérieuses, et c'est, à l'heure actuelle, celle qui est acceptée par la majorité des géologues. Elle est traitée et défendue par l’auteur avec beaucoup de talent; nous regrettons seulement que, dans l'exposé de la distribution du Sidérolithique, il ne fasse aucune mention du Jura méridional français, où les gisements sont nombreux et ont été bien étudiés par MM. Kilian, Depéret, Douxami, Maillard, ete. Nous aurions aimé également le voir entrer dans quelques considérations sur la paléographie du Crétacé supérieur et du Ter- tiaire inférieur, c'est-à-dire sur celle de l'époque où se constituaient ces dépôts continentaux. Il y a là une lacune que nous lui conseillons de combler lorsqu'il publiera les résultats des nouvelles recherches quil a l'intention d'entreprendre. J. Révie, Président de l'Académie des Sciences, Belles-lettres et Arts de Savoie. 1 La dénomination de cette phase ne nous parait pas très heureuse, les Jatérites étant des formations résultant de la BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Von Uexküll (J.). — Umwelt und Innenwelt der Tiere. (LE MONDE EXTÉRIEUR ET INTÉRIEUR DES ANIMAUX.) — 1 vol. in-$° de 259 pages (Prix : 8 fr. 15). Julius Springer, éditeur. Berlin, 1909. Von Uexküll, de Heidelberg, compte parmi les chercheurs les plus originaux dans le domaine de la psychologie des animaux inférieurs ; il a l'horreur du mal délini, du mystique, ou, pour autrement dire, de la psychologie comparée, qu'il tient pour inexis- tante; rigoureusement mécaniste quand il parle des organes développés et des réactions des animaux, il se réfugie, faute de mieux, dans le vitalisme quand il envisage le développement de l'être et la faculté de régénération, qui lui paraissent être des propriétés bypermécaniques, c’est-à-dire qui, d'aucune manière, ne peuvent être considérées comme appartenant à de pures machines. Le monde d’un animal, son l’mwelt, très différent de notre monde à nous, comprend les facteurs externes qui peuvent agir sur lui, et qui varient naturellement suivant son plan de structure ; leur nombre est déter- miné par celui-ci, si bien que plus l’animal est simple, plus simple est son l/mwelt. Les facteurs externes déterminent dans le système nerveux des réactions, également réglées par le plan de structure de l'être; leur ensemble forme l'/nnenwelt, le monde intérieur de l'animal. Si nous laissons de côté ces considéra- tions, qui n’ont en somme rien d'inattendu ni de révo- tionnaire, bien que l’auteur paraisse les considérer comme des vérités transcendantes, on reconnaitra que von Uexküll, alors pur mécaniste, a étudié avec une rare pénétration les mouvements des animaux et leur manière de se comporter; ce livre est une réunion de courtes monographies d'animaux représentatifs : l'A- mibe, l'Infusoire, l’Actinie, la Méduse, les Oursins, le Siponcle, le Lombric et la Sangsue, l'Ascidie et l'Aplysie, le Carcinus mœnas, le Céphalopode et la Libellule, dont il décrit les récepteurs sensitifs et les réactions élémentaires qui suivent les excitations de l'Umvwelt, il emploie un langage original en compa- rant le plan de structure à un appareil mécanique, parfois d'une façon exagérée, comme Jennings le lui reproche avec justesse dans un article qu'il vient de publier sur l’œuvre de von Uexküll (Journal of compa- rative Neurology and Psychology, vol. XIX, 1909, p. 313). Les zoologistes français qui étudient la psy- chologie liront certainement ce livre avec intérêt, quelque éloigné qu'il soit de leurs tendances. E.-CuéNor, Professeur à l'Université de Nancy. Weiss (G.), /ngénieur des Ponts et Chaussées, Pro- fesseur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l'Académie de Médecine. — Physiologie générale du travail musculaire et de la chaleur animale. — 1 vo/. in-8°, de 268 payes. (Prix: 6 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1910. « Mon but, dit l’auteur dans son Introduction, n’a pas été de faire un traité de chaleur animale, mais de mettre mes lecteurs au courant des principes qui dominent les échanges énergétiques chez les êtres vivants. » Disons tout d'abord que ce but a été rigoureusement atteint, malgré l'extrême difficulté de la tâche entre- prise. Condenser, en effet, en 260 pages de large impression et de grande clarté scientifique, l'ensemble des recherches effectuées sur le travail musculaire et la chaleur animale depuis Lavoisier jusqu'à aujour- d'hui, nécessitait une très large et très complète docu- mentation, un sens critique très sûr, et une double éducation de physiologiste et de physicien (on pour- décomposition de roches silico-alumineuses, tandis que les éléments du sidérolithique jurassien sont principalement dus à la dissolution et au métamorphisme hydro-chimique de roches calcaires. rait ajouter de mathématicien) qui n’est pas encore très courante, bien qu'elle devienne de plus en plus indispensable pour lexposition et l'étude de bon nombre de questions biologiques. Mais, avec cette rare variété de connaissances et l'éducation première de polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, qu'a M. G. Weiss, un écueil était à éviter : celui de donner une importance et un développement trop grands aux considérations d'ordre essentiellement physique et mécanique qui devaient cependant trouver place dans un volume destiné surtout aux physiologistes. Or, ceux- ci peuvent entreprendre la lecture de l'ouvrage en toute confiance ; les chapitres relatifs à la force et au mouvement qu'elle détermine, aux transformations de l'énergie, à l'équivalent mécanique de la chaleur, au principe de Carnot, aux diverses variétés de travaux, statique, positif, négatif, etc., sont d’une grande conei- sion et d'une belle clarté. Ce n’est pas cependant que la lecture de certaines pages soit bien facile et puisse être entreprise au hasard d’un loisir de laboratoire, entre deux expériences; et la faute n'en est pas à l’auteur, mais à la nature même des questions, qu'il serait, je crois, bien difficile d'exposer plus claire- ment sans développements excessifs pour les lecteurs auxquels le volume est destiné. Quant aux chapitres plus exclusivement physiolo- giques, ils sont autant de résumés complets et cri- tiques, où rien de ce qui est essentiel n’a été omis, où rien de ce qui n’est pas indispensable ne vient allonger la rédaction. L'auteur a été, d'autre part, bien inspiré, me semble- t-il, en adoptant, dans l'exposé des si nombreuses recherches relatives au travail musculaire et à la cha- leur animale, l’ordre chronologique, qui montre « par quelle série de tâätonnements il a fallu passer pour établir un fait qui, aujourd'hui, nous paraît l'évidence même ». L'ouvrage peut, à ce point de vue, être com- paré à une sorte de bande cinématographique qu’au- ront intérêt à dérouler, devantleurs yeux et leur esprit attentif, ceux mêmes qui sont familiarisés déjà avec les tableaux successifs, car ils auront, par la lecture du volume de M. G. Weiss, une belle et rapide vue d’en- semble des progrès accomplis en moins de deux siècles d’études, gràce à l'effort ininterrompu d'innombrables chercheurs, au nombre desquels figurent des savants illustres. C'est une formule d'apparence banale que dire d’un ouvrage qu'il « comble une lacune »; on doit cepen- dant l’'employer, en toute sincérité d'appréciation, pour l'ouvrage de M. G. Weiss, et ce sera, j'en suis persuadé à l'avance, l'avis de tous ceux qui liront la Physiologie générale du travail musculaire et de la chaleur ani- male. A. IMBERT, Professeur à la Faculté de Médecine de Montpellier. 4 Sciences médicales Antheaume (D° A.) et Mignot (D° R.), Médecins de Charenton. — Les Maladies mentales dans l’Ar- mée française. — 1 vol. in-12 de 253-xv pages, avec 13 tableaux (Prix : 4 fr.) Bibliothèque moderne des Sciences médicales. H. Delarue, éditeur. Paris, 4910. L'étude des maladies mentales dans un organisme tel que l'armée comporte à la fois un intérêt médical et une importance sociale des plus élevés. Comme médecins de la Maison Nationale de Charenton, MM. Antheaume et Roger Mignot étaient, mieux que tous autres, désignés pour étudier les maladies men- tales chez les militaires, puisque cet établissement national hospitalise les soldats et officiers devenus aliénés. Les maladies mentales s’observent dans l’armée fran- çaise avec une fréquence très appréciable : elles pro- voquent, en effet, sur 10.000 hommes d'’effectif, la radiation de 4,3 militaires par an. A considérer les tableaux graphiques que reproduisent les auteurs, la progression du nombre des radiations est considérable : BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 215 du chiffre de 60 en 1877, la courbe s'élève à 340 en 190%. L'examen des statistiques démontre que cette aug- mentation résulte principalement du plus grand nom- bre de radiations pour « idiotie et imbécillité ». Bien loin de s'inquiéter de cette progression, l'on doit se féliciter que le Service de santé élimine de l'armée le maximum de débiles intellectuels; ces sujets y cou- rent des risques nombreux, tout en étant un élément de troubles. Une seconde constatation, bien mise en évidence par les auteurs, est la prédominance des troubles mentaux dans certaines catégories de militaires, où précisément la délinquance est très commune. En effet, tandis que, chez les soldats en général, la moyenne annuelle des radiations pour aliénation est de 0,33 °/,, elle atteint 0,91 dans les corps d'épreuve, 1,69 dans les prisons, pénitenciers et ateliers de travaux publics et 1,94 dans les régiments étrangers. Cette fréquence excessive de la folie chez les militaires de ces catégories invite à examiner d'une manière spéciale leur état mental au moment du recrutement. On observe dans l’armée toutes les maladies mentales susceptibles de se développer chez les hommes adultes, mais certaines formes morbides s'y rencontrent d'une facon prédominante : chez les soldats, ce sont les syn- dromes en rapport avec la débilité mentale et la dé- mense précoce; chez les officiers, c’est la paralysie générale (63°/, des cas); chez tous, enfin, ce sont les affaiblissements psychiques secondaires aux trau- matismes et aux infections coloniales. Les auteurs exposent, en s'appuyant sur des observations person- nelles nombreuses, quelle est l'influence du milieu dans l’éclosion de ces diverses affections, et, d'autre part, quelles sont les répercussions des troubles psy- chiques sur le milieu. - Cette dernière question se trouve développée dans la troisième partie de l'ouvrage, où sont traités les rapports des délits militaires avec l’aliénation mentale. Ces rapports sont fréquents, puisque, sur 101 sujets observés en quatre ans à Charenton, 41, soit le dixième environ, avaient été punis pour des actes accomplis au cours d’une maladie mentale avérée. La méconnaissance de la folie n’est pas spéciale au milieu militaire, mais elle comporte là, plus que par- toutailleurs, des inconvénients et des dangers. L'armée, pour remplir son rôle, doit être constituée de sujets bien portants; or, l’aliéné, comme malade, est non seulement une non-valeur militaire, mais, en outre, du fait de ses réactions, un agent de trouble et de désorganisation. Il faut donc éliminer de l’armée tous les aliénés et, parmi eux, en particulier, les débiles et les déséquilibrés inadaptables, souvent plus nocifs que les aliénés délirants. Pour arriver à ce but, les au- teurs préconisent divers moyens; ils insistent plus particulièrement sur la nécessité de l'examen mental des engagés volontaires, des bons-absents, des insou- mis, et de tous les sujets en prévention de conseil de discipline. N'est-ce pas, en eflet, dans ces catégories de militaires que se rencontrent le plus souvent les maladies mentales ? Après avoir rendu justice aux efforts accomplis par l'autorité pour donner aux médecins de l’armée une éducation psychiatrique élémentaire, les auteurs mon- trent l'opportunité de créer un corps d’aliénistes mili- taires, car seuls des spécialistes peuvent acquérir la compétence nécessaire pour l'appréciation des cas médico-légaux litigieux, quisont le plus grand nombre. L'ouvrage se termine par une série de documents offi- ciels intéressants et par une bibliographie, la plus riche qui ait encore paru sur le sujet. Ajoutons que la monographie de MM. Antheaume et Mignot se recom- mande par la critique consciencieuse des documents, la clarté de la discussion et la précision des conclu- sions pratiques. D' P. SÉRIEUX, Médecin en Chef des Asiles d'Aliénés de la Seine. 5° Sciences diverses James (William), Professeur de Psychologie à Har- vard University. — Précis de Psychologie. T'ra- duit par MM. E. BauniN, Professeur de Philosoph je au Collège Stanislas, et G. Bertin, Directeur de l'Ecole des Roches. — 1 vol. 1n-8° de xxxvi-631 pages. (Prix : 10 francs.) Marcel Rivière, éditeur. Paris, 1910. Les principales théories psychologiqu, de William James sont connues en France depuis plusieurs années. Les traducteurs de son lrécis se trompent lorsqu'ils déclarent que le public français ne connaît de lui que l'Expérience religieuse ou le Fragmatisme. La Cri- tique philosophique a publié, en 1888, sa théorie de l'effort et de la volonté; M. Georges Dumas à traduit, en 1903, son chapitre sur l'Emotion; et ses idées sur la continuité du courant de conscience, sur la multiplicité des instincts humains, sur l'habitude, sur Ja percep- tion visuelle de l’espace, ete, ont fait l'objet de nom- breuses discussions dans nos revues et même dans nos manuels scolaires. Il n'en était pas moins utile et inté- ressant de nous donner la traduction complète du Text- book de W. James, qui contient l’ensemble de ses théories psychologiques sous une formg résumée, mais encore assez ample. Les traducteurs se sont efforcés de conserver les qua- lités littéraires de cette œuvre vivante, écrite dans une langue savoureuse et pleine d'humour. Ils y ont réussi. Ils ont cru devoir accompagner le texte de quelques notes et le faire précéder d’une introduction dont l'uli- lité est contestable : le texte se suffit. James distingue assez nettement la Psychologie, considérée comme science naturelle, de la Philosophie, c'est-à-dire de la métaphysique, pour que toute interprétation matéria- liste de son œuvre soit manifestement inexacte : les précautions prises par les traducteurs pour écarter cette interprétation n'étaient donc pas nécessaires. Leur introduction a, en outre, l'inconvénient d'exagé- rer la ressemblance qui peut exister entre la théorie de James sur la continuité du courant de conscience et celle de Bergson sur les données immédiates de la conscience. Sans doute, ils reconnaissent les différences qui séparent les doctrines métaphysiques des deux auteurs. Mais ils semblent rapprocher a l'excès leurs méthodes. Jamais W. James ne parait avoir eu l'idée de l’ « observation profonde » de Bergson; c'est la simple introspection qui aperçoit un « courant » con- tinu là où les associationnistes prétendaient voir des « atomes » psychologiques discentinus ; c’est la simple introspection qui saisit des relations aussi bien que des états, sans que l’auteur ait jamais songé à lui reprocher, comme le fait Bergson, d’altérer les « don- nées immédiates » de l'observation plus profonde. Nous n'avons pas à exposer, et moins encore à dis- cuter, la curieuse psychologie de W. James. Elle n’est pas seulement suggestive par les solutions qu'elle pro- pose, mais plus encore peut-être par les problèmes qu'elle soulève. Sur le rôle des associations d'idées — et particulièrement des associations par ressemblance; sur je rôle de la finalité dans la vie psychologique; sur la puissance inventive du raisonnement; sur la valeur de la conscience, et sur mainte autre question, l'opinion de W. James se heurte à des difficultés telles que lui-même paraît hésitant : après avoir consacré tout son livre à l'étude des faits psychologiques et sou- tenu que la conscience n’est pas un épiphénomène, il se demande, à la dernière page, si les faits psycholo- giques sont autre chose que des faits physiques, et il ne répond pas à cette question embarrassante, Mais cette attitude mème peut piquer la curiosité. Par sa forme comme par son contenu, le livre de James invite à la réflexion : il rendra de grands services. Pauz LaAPir, Professeur à l'Université de Bordeaux. 216 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 14 Février 4910. {1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emile Borel donne une nouvelle délinition de l'intégrale définie, qui rat- tache l'intégrale au sens de L ebesgue à l'intégrale au sens de Riemann. — M. J. Le Roux applique les pro- priétés des systèmes d'équations linéaires dérivés des formes quadratiques positives infinies à l'étude du principe de Dirichlet. — M. F. Boulad présente ses recherches sur la disjonction des variables des équa- tions nomographiquement rationnelles d'ordre supé- rieur. — M. C. Bourlet formule une loi de la distribu- tion de la pression sur une surface pleine se déplaçant dans l'air, — M. E. Esclangon a étudié à l'Observa- loire de Bordeaux les transformationsde lacomète 1910 a du 22 janvier ; une part importante des modifications observées provient de la facon dont elle s’est diverse- ment et successivement présentée à nous durant celte période. — M.J.Comas Sola a observé la même comète à Barcelone. La partie principale de la queue était convexe par rapport au mouvement de la comète; la queue sec ondaire, par contre, était concave par rapport à ce mouvement. — M. Borrelly à déterminé les posi- tions de la comète 1910 a, à l'Observatoire de Marseille, du # au 11 février. — M. G. Lippmann présente un sismographe à colonne liquide auquel on peut donner une durée d’oscillation telle que les courbes qu'il trace n'aient plus besoin d’être réduites. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Besson a vu de l'Observatoire de Montsouris, le 5 février 4910, un arc presque incolore, occupant sensiblement la place de l’are-en-ciel, mais différant du phénomène connu sous le nom de cercle d'Ulloa. — M. L. Décombe décrit un procédé de mesure de lindice de réfraction des liquides au moyen du microscope. Entre une lame à faces parallèles et une lentille plan-convexe, on intro- duit le liquide, puis avec un microscope on pointe successivement le point de contact de la lame et de la lentille, puis un point lumineux situé au delà — Mne P. Curie et M. A. Debierne ont isolé de quelques tonnes de résidus de minerai d’urane environ 0,1 milli- gramme de polonium. Son spectre présente les 4 4 raies suivantes, qui lui paraissent propres : 4#642,0 ; 4170,5 3913,6 ; 3652,1. Il décompose l’eau par ses rayons « en libérant en même tempsune certaine quantité d'hélium. — M. P.-R. Jourdain montre que l’alumine obtenue par l'oxydation à l'air de l'amalgame d'aluminium n'est pas, malgré sa forte teneur en eau, constituée par un hydrate défini. —M. M. Delépine, en traitant l’aldéhyde crotonique par HCI dilué, a obtenu un dimère C#H‘°0?, Eb. 860-87° sous 18 mm., qui est oxydable en un acide CSH°0%. H°0, F. hydraté 680-719, anhydre 859-870. — M. J. Bougault à constaté que HIO naissant agit comme oxydant sur l'acide +-cyclogéranique, en le transformant avec perte de CO? en 1:5:5-triméthyl-4"- cyclohexénol-2, Eb. 1939, et en cétone correspondante. — M. F. Reverdin, en faisant réagir H?S0* concentré sur la nitramine de Ja dinitro-3:5-monométhylanisi- dine, F.118°, a obtenu la nitrosamine correspondante, F.135°. — M. L. Barthe, en faisant réagir l'acide sul- fosalicyclique sur le phosphate trisodique, a obtenu le remplacement de deux groupes ONa par le radical de l'acide, avec formation du sel PO (ONa) [OC‘HS(0'H) (COONa) = ; avec l’arséniate trisodique, il semble se for- mer un arsénotrisulfosalicylate de soude. — M. A. Brochet a déterminé le rapport entre la richesse en émanation et l'extrait sec des eaux thermales de Plom- bières. Ce rapport augmente des sources chaudes aux sources froides ; les sources chaudes perdent la majeure partie de l’émanation avec leurs gaz. 3° SCIENCES NATURELLES. — Mme Phisalix a étudié l’action physiologique du mucus des Batraciens sur ces animaux eux-mêmes et sur les serpents; il exerce les mêmes effets stupéliants, paralysants et généralement diastoliques que le venin de la Vipère. — MM. L. Jam- mes et A. Martin ont observé les phases successives par lesquelles les Nématodes parasites s'adaptent à la température de l'hôte : nécessité d'une température relativement basse, indifférence à l’augmentation pro- gressive de celle-ci, subordination à la température de l'hôte, état vivipare. — M. E. Grynfelt signale dans le segment antérieur de l'œil des Téléostéens un muscle tenseur de la choroïde qu’on a pris jusqu'à présent pour un ligament ciliaire. — M. L. Joubin donne la description d'une jeune Spirule recueillie à 3.000 mètres de profondeur au sud-ouest des Canaries. — MM. L. Léger et Ed. Hesse ont trouvé dans les larves d'Ephe- mera vulgala trois genres différents de Cnidosporidies : un Nosema, le N. Schneideri, et deux genres nou- veaux, représentés par le Stempellia mutabilis et le T'elomyxa qglugeilormis. — M. J. B. Gèze a constaté que la Pavie blanche cultivée dans les marais de Fos (Bouches-du-Rhône) estle T'ypha angustata non encore signalé en France ; le Boutard blanc est aussi un 7: augustala, probablement la variété abyssinica. — M. L. Barlinghem a obtenu, à la suite de mutilation, une race instable de Nigella damascena polycephala carac- térisée par la multiplication extrême du nombre des carpelles et la dissociation des fruits en groupes verti- cillés superposés ou en groupes disjoints. — M. Aug. Chevalier adresse un inventaire des ressources fores- tières de la Côte d'Ivoire en bois, végétaux caoutchou- tifères et oléagineux. — M. J. Thoulet a recherché: l'origine des mattes, roches sous-marines demi-dures, gréseuses ou d'une pâte plus compacte, souvent bour- rées de coquilles entières ou brisées et riches en débris végétaux. Elles sont dues à la décomposition des animaux marins après leur mort. Séance du 21 Février 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Humbert, en appliquant la méthode d'Hermite aux minima des classes de formes quadratiques binaires et positives, a obtenu des formes arithmétiques nouvelles où figurent. encore les minima et qui contiennent, en outre, un paramètre arbitraire, dont la présence permet d'intro- duire dans les formules une fonction numérique arbi- traire. — M. G. Darboux présente un Rapport sur un mémoire de M.G. Koenigs sur les courbes conjuguées dans le mouvement relatif le plus général de “deux corps solides. — M. W. Stekloff démontre un théo- rème général d'existence des fonctions fondamentales correspondant à une équation différentielle linéaire du second ordre. — M. D. Pompéiu complète ses re- cherches sur les singularités des fonctions analytiques uniformes. — M. J. Chazy a étudié les équations différentielles dont l'intégrale générale possède une coupure essentielle mobile. — M. G. Cotty a recherché toutes les transformations d'ordre +1 des fonctions abéliennes laissant invariante une relation singulière donnée. — M. M. Brillouin indique une méthode pour la détermination des fonctions données par leur valeur sur une partie de la frontière et celle de leur dérivée normale sur le reste de la frontière. — M. P. Lowell signale l'apparition de deux canaux nouveaux sur Mars à l'est du Syrtis Major. — M. Ch. Nordmann à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES constaté que le Soleil émet 1,62 fois plus de lumière qu'on ne le calculerait d'après sa températive effective de 5.320°; son éclat apparent correspond à une tempé- rature intermédiaire entre cette température effective et celle de sa photosphère et voisine de 5.870; il est égal à 319.000 bougies décimales par cm°.— M. Coggia présente ses observations de la comète 1910 à faites à l'Observatoire de Marseille du % au 11 février. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. de Montessus de Bal- lore montre que le barographe ne peut être considéré que comme un très infidèle sismoscope enregistreur ; à Santiago du Chili, la statistique comparée des phéno- mènes sismiques et barométriques ne décèle aucune relation. — M.H. C. Saint-René propose une nouvelle solution du problème de la télévision. — M. A. C. Vour- nassos a constaté que des vapeurs de P,S et As, réagissant sur l'hydrogène à l'état naissant produit par décomposition du formiate de soude à 200°, forment les composés PH*, SH? et AsA*. — M. H. Baubigny à préparé le dithionate de K par décomposition du sulfite d'Ag, et le dithionate de Na par décomposition du sul- fite double d’Ag et de Na. Ces deux dithionates, chauffés à 4500, se décomposent en S0O* et sulfates correspon- dants. — M. H. Gaudechon à étudié d'une façon appro- fondie l'action de l’ammoniaque sur le bromure mer- curique en présence de l’eau et mis en évidence l’exis- tence de trois composés définis : (AzHg*Br)'HgBr°, AzHg*®Br.AzH'Br et AzHg*Br.3AzH'Br, ce dernier avec quelques réserves. — M. V. Auger, en faisant réagir à chaud NaOH sur KMnO', puis traitant à froid par la soude concentrée, a obtenu des cristaux bleu-vert d’un mangani-manganate de sodium, Mn°05.3,5Na°0.8H°0, altérable à l'air, immédiatement hydrolysé par l’eau. — M. H. Copaux a obtenu accidentellement, et toujours accompagnée de cristaux droits, la variété lévogyre du silicotungstate de potassium dans la cristallisation spontanée du sel non purifié venant de la saturation de l'acide silicotungstique brut par K?CO0*. L'espèce gauche est plus rapidement soluble que l'autre ; l’au- teur croit se trouver en présence de deux variétés dimorphiques. — M. L. Vignon a constaté que les cou- leurs insolubles, très divisées, se fixent indifféremment sur tous les textiles, quelle que soit la nature chimique de ces derniers. Cette fixation doit être attribuée à l'attraction moléculaire (au sens physique). — M. J. Wolff confirme le fait que le phosphate disodique favo- rise nettement l'oxydation de la tyrosine par le suc de Russula delica. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Vincent montre que la méthode immunisante la plus recommandable, pour l'homme, contre la fièvre typhoïde, consiste dans l'em- ploi des autolysats de bacilles vivants; il y a lieu de se servir d’un vaccin polyvalent, formé du mélange de bacilles d'origines diverses; trois injections à doses croissantes sont nécessaires. — M. P. Hallez à observé que, lorsque le Prostoma lumbricoideum Dugès, némerte d'eau douce, se trouve dans de mauvaises conditions, il s'entoure d'un enkystement de protection. — M. Billon-Daguerre a stérilisé l'eau au moyen de radiations situées dans la région invisible du spectre, entre 1030 et 4100 unités, et qui possèdent un pouvoir bactéricide au moins vingt fois plus élevé que les rayons des lampes à vapeur de mercure. — M. F.Die- nert a constaté que les eaux stérilisées par l'ozone ou les rayons ultra-violets renferment une quantité de substances fluorescentes nettement plus faible qu'avant la stérilisation; cette propriété peut permettre de suivre la marche des installations de stérilisation. — M. A. Gautier donne une série de caractères différen- tiels qui permettent de distinguer les eaux de source d'origine superficielle ou météorique des eaux d’origine centrale ou ignée., — M. F. Kerforne montre qu'après les dépôts de l’Algonkien il y a eu dans tout le massif breton des plissements très énergiques, suivis d'une période d’abrasion; sur la pénéplaine ainsi formée sont venus se déposer les premiers sédiments cambriens, plissés plus tard par les mouvements hercyniens. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 15 Février 1910. M. Dieulafoy signale deux cas de gangrène de la jambe et du pied, avec lésions vasculaires oblitérantes, chez des hommes âgés et diabétiques. Dans l'un des cas, qui fut traité par des douches biquotidiennes d'air surchaufté, la gangrène est restée sèche et non infec- tante, tandis que, dans le second, auquel on n'appliqua pas le même traitement, une infection gangreneuse a mis en péril la vie du malade. 11 en résulte qu'en sté- rilisant les tissus sphacélés par de fréquentes douches d'air surchauffé, on arrive à rendre la gangrène inof- | fensive, on s'oppose aux infections secondaires, on pré- vient les lymphangites infectieuses et les résorptions toxiques; en un mot, on transforme la partie spha- célée en un tissu momifié sans danger pour l'économie | et on donne ainsi au chirurgien le temps de choisir son moment si une opération est nécessaire. Ce traitement doit s'appliquer à toutes les gangrènes. — M. le D' Martel lit un travail sur les intoxications alimen- taires envisagées dans leurs rapports ayec les contami- nations des viandes. — M. le D' Lucet présente une communication sur l’'hémoglobinurie paroxystique a frigore du cheval. Séance du 22 Février 1910. M. le Président annonce le décès de M. Ph. Thomas, correspondant national. M. A. Béhal présente le Rapport de la Commission chargée d'étudier /es colorants employés dans la fabri- cation des produits alimentaires. La Commission est d'avis qu'il y a lieu de proscrire l'introduction de toute matière colorante dérivée de la houille dans les produits alimentaires (pain, viande, lait, huiles, beurre, etc.) et dans les boissons et liquides (vin, cidre, poiré, bière, etc.) de consommation journalière. Pour ce qui est du caramel, de l’orseille, de la cochenille et de la décoction de chicorée, consacrés par un long usage pour colorer les eaux-de-vie d'industrie, les vinaigres, les cidres et poirés, ces substances colorantes peuvent être acceptées sans inconvénients pour ces derniers produits. La Commission pense, d'autre part, que l'emploi de certaines matières colorantes dérivées de la houille et commercialement pures pourra être tolére dans la pâtisserie, la confiserie et certaines liqueurs qui ne sont pas consommées journellement et qu'on n'ingère qu'en petites quantités. Les sirops, confitures, produits de charcuterie ne pourront être colorés par les substances dérivées de la houille. Les conclusions de ce Rapport sont adoptées par l'Académie. — MM. H. Hallopeau et P. Fumouze ont traité deux cas d'épithé- liome «du visage par la solution aqueuse de formol à 40 °/,. La tumeur a complètement disparu en laissant une cicatrice parfaitement lisse. Le seul inconvénient de cette médication est la vive douleur qui suit pendant quelques heures l'application du topique : on peut y obvier par des injections réitérées de novocaine. — MM. les D Wallisch et R. Simon communiquent un travail concernant l'influence du mode d'allaitement du nourrisson sur le développement définitif de la taille. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Seance da 12 Février 1910. |) MM.A. Gilbert et A. Philibert ont observé la résorp- tion du bleu de méthylène par la séreuse péritonéaleau cours de l’ascite cirrhotique; il en résulte très vrai- semblablement que le liquide d'ascite n'est pas stag- nant, mais se résorbe constamment. — MM. M. Parvu et G. Foy ont constaté qu'au cours de la leucémie aiguë les polynucléaires seuls restent doués de leur pouvoir phagocytaire; l'indice opsonique est très abaissé. — M. L. Babonneix a reconnu que l’ablation | de la rate ne paraît pas accroitre l'excitabilité muscu- laire d’une facon aussi nette et aussi prolongée que 218 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l’ablation des parathyroiïdes. — MM. A. Railliet et A. Henry rétablissent le genre Onchocerca de Diesing pour certains Nématodes parasites du tissu conjonctif et en décrivent plusieurs espèces. — M. M. Doyon a observé que la crépitine en injection intra-veineuse (surtout mésaraique) détermine chez le chien l'incoa- gulabilité du sang; le sang ainsi rendu incoagulable empêche 12 vitro le sang normal de coaguler. — M. G. Bohn montre que, quand les perturbations pro- voquées par les oscillations de la marée sont éliminées, toutes les Actinia equina sans exception présentent un rythme nycthéméral des plus marqués, déterminé par le facteur lumière. — MM. L. Marre et O. Taiïllandier ont constaté qu'in vitro, en présence de matières fécales, il se forme toujours des nitrites aux dépens du sous-nitrate de bismuth; cette production est forte- ment entravée par l'action des rayons X. — MM. J. Nicolas, M. Favre et Cl. Gautier ont préparé sous le nom de syphiline un extrait glycériné de foie de fœtus hérédo-syphilitique et ont reconnu qu'il donne une intradermo-réaction très nette chez 7 syphilitiques sur 12. — MM. H. Vallée et G. Finzi montrent que le sérum de cheval hyperimmunisé contre la tuberculose possède un pouvoir précipitant manifeste à l'égard du sérum des Bovidés et des chiens tuberculeux; le pré- cipito-diagnostic avec la tuberculine donne des indi- cations parallèles. — MM. R. Lépine et Boulud signa- : lent un cas chez le chien où, en l'absence de glycogène de réserve, il s'estproduit du sucre dans le sang direc- tement aux dépens de l’albumine. — MM. A. Wilhelm et C. Delval rapportent un cas d'éosinophilie sanguine très intense au cours d'une association parasitaire : kyste hydatique et lombricose. — MM. C. Levaditi et V. Stanesco ont observé un cas de paralysie faciale chez un singe après injection du virus de la poliomyé- lite; celui-ci s'était localisé primitivement dans le noyau de la VIIe paire. La généralisation ultérieure de ce virus dans la moelle épinière a été suivie de phéno- mènes paralytiques intéressant les quatre membres. — M. L. Alquier signale un cas de cirrhose de Laënnec provenant d'une hépatite tuberculeuse chez un sujet indemne d'autre localisation bacillaire et alcoolique. — M. E. Géraudel a constaté l'existence de métas- tases cancéreuses par envahissement lymphatique rétrograde, déterminé par l'existence préalable d'une lymphangile oblitérante, souvent attribuable à la syphilis. — MM. P. J. Teissier et M. Duvoir ont essayé d’inoculer par voie cutanée la variole aux lapins: en général, ils ne réagissent pas, mais présentent, à partir du 7 jour, une immunité d'abord partielle, puis totale, envers l’inoculation vaccinale d'épreuve. — MM. P. Teissier et R. Bénard ont reconnu que la réaction de Wassermann est très fréquente chez les scarlatineux atteints de lésions hépatiques. — Me: Z. Gruzewska a observé que l'action de H°0? dans les mêmes conditions est plus énergique sur le glycogène que sur l'amidon. C'est l'inverse de ce qui se passe dans l'action de l'amylase du suc pancréatique du chien sur ces deux substances. Séance du 19 Février 1940. M. L. A. Amblard décrit une technique nouvelle pour lamesure de la pression vasculaire chez les aryth- miques. — M. L. Tixier et M!° Feldzer montrent que, dans la plupart des affections chroniques du jeune âge, l'atrophie plus ou moins considérable du thymus cor- respond à une régression pathologique de la glande. — MM. P. Teissier et M. Duvoir ont reconnu que le trai- tement par CO* abaisse beaucoup la résistance à l'hémo- lyse des globules rouges, tandis que cette résistance n'est pas modifiée pour les globules traités par O, Az ou l'air dépourvu de CO?. — MM. P. Teissier et R. Bénard ont constaté que la scarlatine normale, régulière, ne modifie pas la résistance globulaire; dans la scarlatine avec troubles hépatiques, elle augmente en général d’une facon passagère. — M. A. Lécaillon pense que la couche externe de Ja capsule vitelline de l'œuf du merle commun se forme dans l’oviducte et que l'œuf n'emporte avec lui, lors- qu'il se détache de l'ovaire, que la couche interne et la couche moyenne. — MM. L. Karwacki et S. Szo- kalski montrent que la survie des Spirochètes dans la sangsue est conditionnée par leur multiplication. Ils se divisent longitudinalement, mais certaines formes plaident aussi en faveur de la possibilité de la division transversale. — MM. J. Lhermitte et A. Guccione ont reconnu que, dans les hyperplasies comme dans les néoplasies, c'est parune différenciation protoplasmique que s'édifient les éléments fondamentaux des tissus musculaires et névrogliques. — MM. A. Paris et G. Sa- baréanu ont observé que la séro-réaction par le glyco- cholate de soude se produit souvent chez les syphili- tiques, mais aussi chez les non-syphilitiques ; elle semble donc dépourvue de toute valeur diagnostique. — M. G. Repaci a trouvé dans le pus d'une gangrène pulmonaire un nouveau germe anaérobie, qu'il nomme Streptococcus par vulus non liquefaciens.—M.M. Doyon montre que l’atropine détermine la formation par le foie d’une substance anticoagulante, même quand le foie a été lavé depuis plusieurs heures. — MM. A. Sézary et H. Païllard ont mis en évidence, pendant la vie, le tréponème dans le liquide céphalo-rachidien d’un sujet atteint de syphilis acquise avec manifestation nerveuse. — MM. J. Roubinovitch et H. Païillard ont étudié l'influence de la ponction lombaire sur la pression artérielle et la fréquence du pouls dans diverses formes de psychoses. — M. J. Georgévitch a obtenu des cul- tures riches de Crithidia melophaga dans des gouttes pendantes de sérums d'origines variées. — M. P. Win- trebert a observé que la région palatine du ptérygo- palatin, chez la Salamandre, disparaît au début de la métamorphose; la région ptérygoïdienne, légèrement remaniée, se déplace au dehors. Le vomer de la larve persiste et forme chez l'adulte la partie interne et pos- térieure du bouclier vomérien. — MM. G. Vallet et L. Rimbaud ont reconnu que la lécithine n'est pas douée de propriétés bactéricides à l'égard du bacille d’'Eberth et des bacilles paratyphiques A et B. L'injec- tion au lapin de cultures de ces bacilles additionnées de lécithine ne donne pas au sérum un pouvoir agglu- tinant supérieur à celui que l’on obtient par l’injee- tion de cultures seules. — MM. J. Chevalier et L. Gi- roux montrent que les saponines possèdent une toxi- cité et un pouvoir hémolytique très variables suivant leur mode de préparation. — M. J. Chevalier a étudié l'action pharmacodynamique de l'essence de criste marine (hyperexcitabilité, phénomènes convulsifs, mort) et celle de l'apiol qu'elle renferme (mêmes phéno- mènes, mais plus tardifs). — MM. M. Letulle et Nat- tan-Larrier ont observé des nécroses aiguës des épi- théliums sécréteurs du rein dans l’urémie. — M. H. Guilleminot a reconnu que l’action nocive exercée par les rayons X et du radium sur la graine à l’état de vie latente n’est pas suivie de l’action réparatrice de la part de la graine, et que l'effet nocif s'ajoute simple- ment à l'effet nocif du temps. — MM. C. Levaditi et K. Landsteiner ont constaté que le sérum des ani- naux guérisagit in vitro sur le virus de la poliomyélite, à la condition toutefois que l'émulsion virulente soit homogène et le temps de contact suffisamment long. — M. A. Frouin a observé que des animaux éthyroïdés, soumis au régime calcique depuis deux mois et en bonne santé, présentent un nombre de leucocytes nor- mal. Les sels de Th et La ne peuvent remplacer les sels de calcium. —- M. V. Babes montre que les cor- pusculesmétachromatiques des bacillesacido-résistants se colorent bien, chezles jeunes bacilles, par la méthode d’Ehrlich et de Ziehl, et, chez les bacilles plus âgés, par le Gram et l'Ehrlich. Ce sont les parties les plus résistantes des bacilles. — M. A. Guilliermond a re- connu que l'Endomyces fibuliger se distingue de l’Z. capsularis par la présence de conidies qui manquent dans celui-ci; toutefois, ce sont deux formes très voi- sines. — MM. G. Roussy et J. Clunet ont constaté, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans quatre cas de maladie de Parkinson, des modifi- cations des parathyroïdes caractérisant les glandes en état d'hyperfonction. — MM. Ch. Achard, H. Bénard et Ch. Gagneux ont essayé le leuco-diagnostie de la syphilis. Les réactions les plus fortes correspondent à la période de floraison des accidents secondaires; elles sont plus faibles dans l'hérédo-syphilis et les accidents éloignés. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 1 Février 1910. M. J. Carles à constaté que le bismuth et le salicy- late de soude ingérés par un chien porteur d'un abecès de fixation viennent se fixer au niveau de cet abcès. — M. J. Chaine a étudié les arbres attaqués par les Ter- mites ou fourmis blanches dans la Charente-Inférieure : ce sont les poiriers, pommiers, cerisiers, châtaigniers, figuiers, la vigne, les magnolias, ormeaux, marron- niers, frènes, acacias, peupliers et chênes. — MM. B. Auché et Augistrou ont examiné les lésions précoces et essentielles produites par lintradermoréaction. L'épiderme et le derme sont infiltrés par une très grande quantité de leucocytes polynucléés. — M. B. Auché a reconnuque lescultures de bacilles typhiques, paratyphiques B, dysentériques type Flexner et Shiga, de coli-bacilles, de streptocoques pyogènes et de sta- phylocoques dorés, introduites dans des pains d'un sou et des pains d’un kilogramme, sont complètement détruites par la cuisson. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE. FRANCE Séance du 11 Février 1910. Poursuivant ses recherches sur la condensation des alcools avec leurs dérivés sodés, M. M. Guerbet à obtenu, par la méthode qu'il a déjà décrite, les alcools dibutylique secondaire C*H'*O et tributylique secon- daire C'*H#0, issus respectivement de la soudure de deux molécules et de trois molécules d'alcool butylique secondaire. L'alcool dibutylique secondaire est un liquide incolore d'odeur forte rappelant la menthe, bouillant à 167-169 (corr.). Sa densité à 0° est 0,8493. Son éther acétique bout à 183-185°. L'acétone corres- pondante CHO bout à 161° {corr.). Elle ne se com- bine pas au bisulfite de sodium. Sa semicarbazone fond à 96°. L'étude des produits d'oxydation de cette acé- tone montre qu'elle doit être considérée comme la méthyl-3-heptatone-5, C°H°.CH(CH*).CH°.CO.C2H5. L'al- cool tributylique secondaire C'*H*0 est un liquide incolore huileux, d'odeur forte et agréable. Il bout à 250-2559 (corr.); sa densité à 0° est 0,9210. Son acé- tone C®H#0 bout à 247-2480 (corr.) et fournit une semi- carbazone fusible à 161-1629. La constitution de l'alcool dibutylique secondaire : C?H°.CH(CH*).CH°.CHOH.C?H montre que la condensation des deux molécules buty- liques C’H5.CHOH.CH* s’est faite par le groupe méthyle voisin du groupement fonctionnel. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 20 Janvier 1910. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — Sir W. Crookes a poursuivi ses recherches sur le scandium". Il en a préparé le chloraurate 3 SceCI.2 AuCI.21H°0, par mélange des solu- tions concentrées des composants et dessiccation sur H°S0* dans le vide. En prolongeant la dessiccation, on obtient des hydrates à 8 et 2 H°0, et par chauffage à 100° le sel anhydre. Le platinocyanure Sc? [Pt(CAz)*}. 21H°0 se forme par double décomposition du sulfate de Sc avec le platinocyanure de Ba ; il cristallise en prismes monocliniques dichroïques. L'iodate Sc(105) cristallise en poudre blanche avec 18H°0. Plusieurssels organiques ont été préparés par action des acides correspondants sur l'hydrate de scandium; ce sont: le malate C?H° { Voir la Revue, t. XIX, p. 722. 219 (OH) (COO)*Sc(OH).H*0, poudre blanche; le malonate CH°? (CO0)Sc(OH), se précipitant avec 4 ou 2 H°0, et le malonate basique CH? [COOSc(OH*)E ; le tartrate ina tif C*H*{O0H)(C00 Sc(OH), poudre cristalline blanche le racémate cristallisant avec 4#H*0 ; le /-tartrate, cris- tallisant avec 2H°0, 29 SCIENCES NATURELLES. — MM. V. H. Veley et À. D. Waller ont déterminé /a vitesse d'action des médica ments sur le muscle en fonction de la température. Leurs observations ont porté sur l'alcool, le chloro- forme, la quinine et l’aconitine entre 7° et 25°, Pour calculer les résultats, ils ont fait usage de la formule d'Esson légèrement moditiée : log L, — log L, — m{log T,—log T,), où L, et L,, sont les espaces de temps entre l'application de la substance et la cessation de la con- traction, T, et T, les températures absolues auxquelles l’action se produit, et m la constante expérimentale. On a trouvé pour m les valeurs suivantes : alcool, 20,8; chloroforme, 14,3; quinine, 26,7. (On avait trouvé 20,38 pour H°0* et HI, 26,5 pour HO’ et FeSO“). Les coefficients de température correspondants par 10°sont: alcool, 2,04; chloroforme, 1,63 ; quinine, 2,52. L'action de l’aconitine est complètement arrêtée à 7 et ne se manifeste qu'à partir de 17°. — M. V. H. Veley à exa- miné Jes propriétés physiques et physiologiques du tétrachloréthane et du trichloréthylène. Le tétrachlo- réthane CHCE.CHCE a été préparé par l’action de CI sur l’acétylène en présence d'AICF, le trichloréthylène CHCI:CCF par chauffage du précédent avec les alcalis. Le premier bout à 1470,2; sa densité à 4° est de 1,6208; le second bout à 87,55 ; sa densité à 4° est de 1,49045. Les effets des deux substances sur le muscle isolé ont été comparés à celui du chloroforme ; les toxicités du chloroforme, du trichloréthylène et du tétrachloréthane sont dans les rapports 1 : 1,5 : 4. L'action du trichloré- thylène, en particulier l’anesthésie qu'il provoque, est plus régulière que celle d'aucun autre médicament ou anesthésique. —M.C. Bolton a poursuivises recherches sur la pathologie de l'ulcère gastrique. 1 a étudié les effets de l’action des fonctions motrices de l'estomac sur la guérison de l'ulcère, l'alimentation et l'acidité du contenu intestinal étant normales. Les ulcères gas- triques étaient produits chez le chat par l'injection locale de sérum gastro-toxique. L'insuffisance motrice de l'estomac, conduisant à la rétention de son contenu, — forme la plus commune de l'indigestion chez l'homme, — à été produite par constriction du pylore du chat au moyen d’un tube de caoutchouc, l'ulcère étant alors formé sur la paroi antérieure de l'estomac. Dans ces conditions, la guérison de l’ulcère est retar- dée au double du temps normal. Les ulcères, cepen- dant, guérissent parfois, mais la membrane muqueuse régénérée est d’un type inférieur au type normal. Ces résultats sont dus à la digestion ou à l'irritation de la base de l’ulcère, conduisant à la nécrose ou à une for- mation exagérée de tissu fibreux, de telle sorte que la membrane muqueuse régénérée ou bien ne peut pas croître ou bien consiste en une simple couche de cel- lules ou de glandes d’un type inférieur. Quand la base est excessivement fibreuse, les glandes n’ont plus un stroma vasculaire et cellulaire suffisant pour proliférer. — MM. G. Dreyer et J. S. C. Douglas : La vitesse de réaction dans l'absorption des agqglutinines spécifiques par les bactéries et dans l'adsorption des agqlutinines, de la trypsine et de lacide sulfurique par le noir ani- mal. On ne possède sur l'absorption des agglutinines par les bactéries que les observations de Eisenberg et Volk, qui concluent qu'elle est très rapide et indépen- dante de la température entre 0° et 37° GC. Les auteurs sont arrivés à des résultats tout à fait différents : 1° L'établissement de l'équilibre dans l'absorption des agglutinines par leurs bactéries spécifiques n’est pas atteint en moins de cinq minutes à 0°, comme le pré- tendaient Eisenberg et Volk, mais prend un temps con- sidérable, car il n’est pas atteint en quatre heures à la température du laboratoire ; 2° L'adsorption d’aggluti- nine ou de trypsine par le charbon n'’atteint pas son ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES équilibre en quatre heures à la température du labora- toire, ni celle de l'acide sulfurique en vingt-quatre heures ; 3° 11 n’est pas fondé de juger de la nature de l’action entre une substance absorbante et une matière absorbée d’après la rapidité ou la lenteur avec laquelle l'équilibre est atteint, comme l'a fait Arrhénius. — MM. G. Dreyer et J. S. C. Douglas : L’absorption de lagglutinine par les bacteries et l'application des lois physico-chimiques à ce phénomène. En se basant sur des expériences d'Eisenberg et Volk, Arrhénius a mon- tré l'existence d'une relation entre la quantité d'agglu- tinine C absorbée par les bactéries et la quantité B qui reste dans le fluide, et il a exprimé cette relation par la formule simple G=— k B". Les recherches des auteurs les ont amenés aux conclusions suivantes : 4° Quand un sérum agglutinant à différentes concentrations est traité par des quantités constantes de bactéries, la | quantité absorbée C peut non seulement augmenter | Jusqu'à une valeur limite, mais, quand ce point est passé, décroitre jusqu'à O0 quand la concentration du sérum s'accroit, ce qui est très différent des résultats d'Eisenberg et Volk ; 2 Il est impossible, d'après la plus ou moins grande valeur de l'exposant 7 dans la formule C—/B", de déterminer si, dans le cas de lagglutinine, on à affaire à un processus d'absorption ou d'adsorption, comme le faisait Arrhénivs, car, dans les deux cas, » peut varier dans le même intervalle ; 3° La formule proposée par Arrhénius comme un exemple spécial de la loi de Guldberg et Waage ne se vérifie ni dans le cas de l'absorption de l’agglutinine par les bactéries, ni dans celui de la neutralisation de l’agglutinine par les filtrats bactériens homologues ; 4° La combinaison de l'agglutinine et de la bactérie n'est donc pas un processus simple, comme le croyait Arrhénius ; mais elle est très complexe, et probable- ment de même nature que l’action des toxines et des anti-toxines bactériennes. — MM.J. D. Thomson et A.R. Cushny ont étudié l’action des composés de l'anti- moine dans la (rypancsomiase du rat. Le métaantimo- niate de K n’a guère d'action; le sulfoantimoniate de soude détruit les trypanosomes, mais produit une forte réaction locale. Les composés organiques sont bien | supérieurs; les auteurs ont obtenu de bons résultats avec l’antimonylmalate de soude et surtout avec l’anti- monyltartrate d'éthyle, qui, associé à l'atoxyl, s'est montré particulièrement actif dans la trypanosomiase. — Sir D. Bruce, MM. À. E. Hamerton, H. R. Bateman et F. P. Mackie ont étudié une maladie du bétail de lOuganda connue sous le nom d'amakebe. Elle parait être identique à la maladie découverte par Koch et appelée par lui « Fièvre de la côte orientale »; elle attaque surtout les jeunes bestiaux. Quand l'animal se guérit, il est immunisé. Le sang de la plupart des bes- taux de l'Ouganda contient le Piroplasma bigeminum et le P. mutans, mais ces deux organismes ne sont pas les agents de l’'amakebe. La maladie n’est pas transmis- sible par inoculation du sang des animaux atteints. Les agents de transmission paraissent être des /thipi- cephalus. SOCIETE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 11 Février 1910. Séance générale annuelle. La Société procède au renouvellement de son Bureau, qui est ainsi constitué : Président : M. H. L. Callendar; Vice-présidents : MM. A. Campbell, C. H. Lees, A. Schuster et S. Skinner; | Secrétaires : MM. W.R. Cooper et S. W. J.Smith; | Secrétaire étranger : M. S. P. Thompson; Trésorier : M. W. Duddell; Bibliothécaire : M. W. Watson. M. S. Arrhenius, M: Curie et M. G. E. Hale sont élus membres honoraires de la Société. M. H. L. Callendar présente ensuite une commu- nication sur l'application des thermomètres à résis- tance à lenregistrement des températures cliniques. Le D' Gamgee avait employé dans ce but un thermo- couple, mais la f.6.m. développée est si faible que les instruments enregistreurs doivent être très sensibles, ce qui les rend impropres à l'usage ordinaire. Le prin- cipal obstacle à l'emploi des thermomètres à résistance réside dans l’échautffement produit par le courant; l’auteur montre comment cette difficulté a été sur- montée. Il présente trois types de thermomètres pour l'usage rectal, kuccal et superficiel, ainsi que des enregistrements continus de la température de diverses personnes. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 3 Février 1910. M.S. U. Pickering a préparé trois citrates cupriques aux dépens du citrate potassio-cuprique (G°H°07)*K'Cu, où Cu est quadrivalent et uni a deux C. — Le même auteur donne de nouvelles preuves de lindividualité des cinq sels basiques formés par l’action de la chaux sur le sulfate de cuivre et montre que, tandis que les premiers membres sont de vrais sels basiques, les autres contiennent le cuivre comme élément électro- négatif et sont des cuprates de calcium. — MM. F. B. Power et A. H. Salway ontisolé de l'extrait alcoolique des fleurs de trèfle rouge : une huile essentielle, con- tenant de l’aldéhyde furfurique; un sucre donnant de la d-phénylglucosazone; les acides salicylique et p-cou- marique ; del'isorhamnétine; du pratol OH.C'*H°0*.0CH?, F. 2530, qui paraît être une hydroxyméthoxyflavone; du pratensol C!7H°0*(0H}, F. 210°; un glucoside, la trifoline, C*H#01.H20, F. 260°, donnant par hydrolyse une matière colorante jaune, la trifolitine, C'H#0, F. 2750, et du rhamnose; l'isotrifoline, F. 250°; de l'alcool myricylique, de l’heptacosane, de l'hentriacon- tane, du sitostérol et un nouvel alcool, le trifolianol, C#H#02{(0H}, F. 2950. — M. F. L. Usher à étudié l'in- fluence de l’'émanation du radium sur l'équilibre d'un système gazeux AzH®, Az et H. L'ammoniac est rapide ment décomposé à la température ordinaire; cette décomposition est presque irréversible, la recombinai- son de Az et H ne dépassant pas 0,86 °/,. La décompo-. sition suit approximativement le cours d'une réaction unimoléculaire; un atome d'émanation décompose 134.300 molécules d'AzH®. — M. F. L. Pyman a fait réagir HCI sous pression sur les dérivés de la 6 : 7-dimé- thoxyisoquinoline; il a obtenu des 3 : 4-dihydroxy- phényléthylalkylamines douées de propriétés hyper- tensives considérables. — MM. F. D. Chattaway el N. K. Chaney ont essayé l’action du chlore sur le phényl- carbamide; elle est très compliquée, car 1, 2 ou 3 H attachés à l’Az peuvent être échangés contre Cl, qui peut aussi passer dans le noyau. — MM. F. D. Chat- taway et EF. A. Mason ont préparé les dérivés halo sénés du malonanilide et du malonanilate d’éthyle en chauffant le malonate d'éthyle avec les anilines halo- génées. L'hydrolyse des éthers donne les acides malo- naniliques halogénés, que la chaleur décompose en CO* et acétanilides substilués. — M. A. G. Perkin a étudié un colorant substantif naturel, le dura rouge du Sou- dan, formé par les feuilles et les tiges d'une variété d'Andropogon sorghum. I renferme une matière colo- rante rouge-violet, C:64#05, que l’auteur nomme dura- santaline:; par fusion avec les alcalis, elle donne du phloroglucinol et de l'acide p-hydroxybenzoïque. — M. G. Senter a déterminé les vitesses de réaction des acides bromacétique, «-bromopropionique, «-bromo- butyrique et de leurs sels de sodium avec les sels d'argent en solution aqueuse; elles sont exprimées par les nombres : 1, 100, 450; 3, 450, 1100. Le bromure d'argent précipité a une forte influence accélératrice sur ces vitesses. — MM. W. H. Perkin jun. et R. Ro- binson discutent la constitution de la strychnine et de la brucine et proposent une modification à la lormule de la berbérine. — MM. V. J. Harding et Ch. Weiz- mann ont préparé l'acide A'-nonylénique et ses dérivés ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 221 — MM. J. B. Cohen et J. Marshall ont préparé les dérivés /-menthylaminiques des amidines préparées par deux méthodes : 1° action de l'aniline sur l'imido- chlorure de benzoyl-p-toluidine; 2° action de la p-tolui- dine sur l’imidochlorure de benzanilide, Dans les deux cas, les produits sont identiques quant à la rotation optique et aux autres propriétés physiques. Si l'on emploie un mélange de d- et /-bornylamine, le dérivé de l’amidine est inactif, mais il n’a pu être résolu en ses constituants actifs. — M. R. W. Gray el Sir W. Ramsay ont redéterminé la période de demi-vie du radium d’après le volume d'émanation donné par 1 gramme d'élément en équilibre radio-actif; elle est de 1.74% ans. — Mie A. Homer et M. J. Purvis ont com- paré les spectres d'absorption du dinaphtanthracène et de son dérivé hexahydrogéné avec ceux de ses iso- mères. Ils en concluent que l’hydrocarbure C#H', F. 267°,5, est un composé dinaphtanthracénique, tandis que son hydrure C*H* ne contient plus de liaison anthracénique. Le dihydro-dinaphtanthracène de Har- tenstein est, en réalité, un isomère du composé F. 267,5 et du picène. — MM. A. E. Dixon et J. Taylor présentent un appareil pour la démonstration de l’élec- trolyse de l'acide chlorhydrique. — M. H. T. Clarke à constaté que la réactivité vis-à-vis de la pyridine alcoolique des halogènes X dans la série de composés X.CHE.R dépend de l’affinité résiduelle de l’atome ou du groupe R. — MM. J. F. Spencer et G. M. Price mon- rent que le calcium réagit sur les halogénures orga- niques suivant les deux équations : RX + Ca —R.CaX et 2RX + Ca —CaX?+ R.R. Le composé RCaX est décom- posé par l’eau suivant l'équation : 2RCaX — 2H°0 — 2RH —- CaX?+ Ca (OH)*. En solution éthérée, Ca réagit comme Mg dans la réaction de Grignard. Le lithium réagit suivant les deux équations suivantes : RX + 2Li —RLi + LiX et 2RX + 2Li —=2LiX + R.R.; le composé RLi est immédiatement décomposé par l’eau en formant le composé RH. — M. T. Suzuki a préparé un hydroxyco- baltinitrite d'argent jaune-paille Ag*Co?(AzO?)(OH)‘; le sel de Lang paraît avoir une formule analogue, dans laquelle de l’hydrate cobalteux et de l'hydroxynitrite seraient combinés à l’hydrate cobaltique. — MM. J. J. Fox et À. J. H. Gauge ont déterminé la solubilité du sulfate de potassium à 25° dans des solutions aqueuses concentrées de non-électrolytes. Elle augmente avec le nombre de groupes OH dans la molécule des non-élec- trolytes. — M. M. O. Forster et M!° H. M. Judd ont préparé les produits de condensation de la p-triazo- benzaldéhyde avec l’hydroxylamine, la phénylhydra- zine, le p-aminophénol et la d-camphorylsemicar- bazide. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 28 Octobre 1909. M. J.-H. van ’t Hoff donne lecture d'un Mémoire sur les effets synthétiques des ferments. Les recherches de M. Croft Hill ont fait voir, dès 1894, que les ferments (enzymes) sont susceptibles d'effectuer, non seulement une scission (dédoublement du glucose en alcool et acide carbonique), mais des processus synthétiques, tels que la formation, à l'aide de la maltase, d'un disaccharide à 12 atomes de carbone, à partir du glu- cose à 6 atomes de carbone. La suite de ces recherches a mis en lumière la grande fréquence de ces réactions, qui semblent jouer un rôle fort important dans l'éco- nomie des organismes végétaux. La position d'équilibre des processus hydrolytiques enzymatiques correspon- drait probablement, dans le cas où l’enzyme agirait comme catalysateur idéal, à l'équilibre d'éthérification, déterminé par Menchoutkine. Séance du 4 Novembre 1909. M. W. Waldeyer donne lecture d’un Mémoire sur les variétés de forme, de nombre et de position des dents humaines; il fait la démonstration d’un nombre de variétés rares et remarquables, en discutant les possibilités de leur origine, surtout pour les anomalies de position. Séance du 18 Novembre 1909. M. J. Orth rend compte de ses recherches sur cer- tains problèmes relatifs au cancer. Il discute la nomen clature des formations épithéliales et surtout la notion du terme d’adénome, employé si souvent à tort dans la littérature scientifique. Les expériences faites sur son conseil par le D' Calderara, à l'Institut Patholo- gique de Berlin, apportent de nouvelles lumières sur la question des tumeurs cancéreuses à cellules hétéro- morphes. Sous le chapitre « Genèse causale du cancer », il rend compte de recherches faites par le D° Tsunoda, au Laboratoire de l'Institut, et qui ne confirment point les vues de Borrel sur l'importance du Demodex [olli- culorum. — M. F. Schottky présente une Note sur les fonctions potentielles dont les dérivées premières sont reliées par des équations. Il s'inspire des travaux de Jacobi, Weingarten et Frobenius, pour discuter les cas où les valeurs des trois dérivées d’une fonction poten- tielle ne sont point indépendantes l’une de l’autre. — M. Struwe adresse un Mémoire de M. H. Samter sur l'orbite de la planète Ægéria. Dans une thèse publiée, il y a deux ans, sur le mouvement de la planète Egéria, M. J. Hoelling signalait les écarts considérables, vis-à-vis des tableaux de Hansen, que présentent les récentes observations. M. Samter à réussi à trouver la cause de ces écarts dans les perturbations négligées du second ordre, introduites par le produit des masses de Jupiter et de Saturne, et à établir ainsi l'accord des observations avec la théorie de Hansen. Séance du 25 Novembre 1909. M. J. K. Helmert donne lecture d'un Mémoire sur la profondeur de la surface de compensation, dans l'hypothèse de Pratt sur l'équilibre de l'écorce terrestre et l'allure de la perturbation de la gravité, de l'intérieur des continents et des océans vers les côtes. Dans un Mémoire antérieur‘, l’auteur avait signalé l'accord général des phénomènes de perturbation de la gravité avec l’isostasie de l'écorce terrestre, suivant l'hypothèse de Pratt sur la distribution des masses. Aussi devait-on pouvoir calculer la profondeur de la surface de com- pensation par les perturbations de l'accélération de la gravité g sur les côtes escarpées des océans. Or, l’auteur a fait, pendant l'hiver dernier, la première tentative d'un calcul pareil, dont le résultat concorde parfaite- ment avec celui des géomètres américains. Suivant les calculs du Coast and Geodetic Survey, la profondeur de la surface de compensation (déterminée par les dévia- tions de la verticale dans le territoire des Etats-Unis) serait, en effet, de 114 kilomètres, ou, d'après une revi- sion récente, de 122 kilomètres. D'autre part, l’auteur, par la méthode mentionnée ci-dessus, trouve, comme moyenne de 51 stations réparties dans toutes les parties du globe, la valeur de 124 kilomètres. L'accord de ces deux résultats confirme l'hypothèse de la distribution des masses. Séance du 2 Décembre 1909. M. H. Müller-Breslau rend comple de la suite de ses essais sur la pression latérale de masses sablon- neuses, en y joignant un aperçu de l'ensemble de ses résultats. Une partie des pressions mesurées excède de beaucoup les valeurs calculées à l'aide des procédés jusqu'ici en usage, procédés basés sur l'hypothèse de surfaces de glissement planes. — M. G. Frobenius pré- sente une brève démonstration des résultats trouvés par M. Wieferich, au sujet du théorème de Fermat. — M. Waldeyer présente une Note de M. K. Gorjanovic- Kramberger, professeur à Agram, sur la mâchoire inférieure des Esquimaux, comme porteuse de carac- téristiques primitives. Il constate une grande variabi- lité de toutes les parties de la mâchoire et, à côté de 1 Sitzungsberichte, p. 1058, 1909. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES quelques caractères primitifs, des caractères tout à fait récents. Séance du 46 Décembre 1909. M. A. Engler donne lecture d’un Mémoire intitulé : « L'importance des Aracées pour la structure, au point de vue de la géographie botanique, de l’Asie orientale tropique et extra-tropique. » Les espèces de presque tous les genres d’Aracées présentent des phénomènes physiologiques identiques; aussi la distribution de ces différents genres peut-elle être parfaitement utilisée pour délimiter les districts botaniques. En appliquant ce procédé à l'Asie orientale, l’auteur fait remarquer l'importance des Aracées pour caractériser les diffé- rentes provinces de la région monsounienne; d'autre part, il fait voir que leur diffusion donne lieu à un district transitoire qui embrasse, entre la région mon- sounienne et l'Asie orientale extra-tropique, une partie de la Chine orientale et du Japon méridional. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 19 Novembre 1909. MM. E. Gehrcke et M. von Wogau rendent compte de leurs recherches magnétiques. Les auteurs se sont attachés à donner plus de précision aux mesures des champs magnétiques, que le physicien est appelé à faire incidemment lors de la détermination de certaines constantes physiques (charge spécifique des élec- trons, etc.). Les avantages de leur mode opératoire, qui leur fournit des mesures magnétiques relatives exactes à 0,1 °/,, près, résident surtout dans sa simpli- cité : Deux impulsions d’induction de même grandeur, mais de sens opposé, sont lancées simultanément dans un galvanomètre, à l'aide des deux champs magné- tiques qu'il s’agit de comparer. Les auteurs, on le voit, opèrent par réduction à zéro, ce qui leur permet de comparer entre elles des déviations galvanométriques bien trop grandes pour pouvoir être appréciées indivi- duellement. D'autre part, les grandeurs à déterminer deviennent indépendantes des constantes spécifiques du galvanomètre (proportionnalité de son échelle, etc.). — M. R. Lindemann adresse une note sur l'accroissement de résistance des conducteurs subdivisés, dans le cas «es oscillations rapides. Après les recherches de M. W. Thomson, qui le premier avait mis en lumière l'existence du « skin effect », c'est-à-dire du déplace- ment vers la surface des conducteurs que subissent les lignes de flux alternatif, M. Dolezalek! fit voir que l'accroissement de résistance considérable, dû à ce mème effet, qu'on observe dans le cas des bobines de fils massifs (ainsi que la faible réduction du coefficient de self-induction) est éliminé presque entièrement en remplaçant le conducteur massif par des systèmes de brins minces isolés légèremeut l’un de l’autre. Pour les fréquences si élevées dont se sert la radio-télégra- phie, cette disposition, non seulement n’est plus effi- cace, mais peut même devenir nuisible. Or, les re- cherches faites par l'auteur, en vue surtout du problème si important d’une réduction aussi grande que possible de la résistance des circuits à haute fréquence;font voir qu'une torsion « idéale » des systèmes de brins, c'est- à-dire une distribution uniforme du courant aux diffé- rents conducteurs dont se compose le système, est réalisée par la méthode de torsion multiple, en isolant soigneusement, l’un de l’autre, les différents conduc- teurs. Cette disposition assure, entre le coefficient de self-induction et la fréquence des bobines, une indé- pendance suffisante pour qu'on puisse négliger le déplacement des lignes de flux dans les fils individuels. Comme toutefois la résistance de ces bobines aug- mente toujours considérablement avec la fréquence, les difficultés que présente, pour les hautes fréquences, la construction de self-inductions étalons de résistance ‘ Ann, d. Phys., (4), t. XIL, p. 1442, 1903. constante ne se trouvent pas éliminées. Quoi qu'il en soit, l'emploi de ces systèmes permet de calculer cet accroissement de résistance, quand la résistance est donnée pour une fréquence quelconque. Séance du 3 Décembre 1909. M. H. du Bois fait la démonstration de quelques nouveaux appareils. Son spectroscope et monochroma- teur à forte dispersion et haute intensité lumineuse, construit en collaboration avec MM. G.-J. Elias et F. Lüwe, présente un pouvoir dissolvant, au vert jau- nâtre, d'environ 65.000. La lumière, fortement polarisée en direction verticale, que donne Ja fente de sortie, est d'une homogénéité remarquable. Le monochromateur à vision directe est d’une grande intensité lumineuse ; l'ensemble de son système optique est fixé dans un tube s’amincissant de côté et d'autre. Le pouvoir dis- solvant de son prisme est intermédiaire entre 3.000 et 4.000. Le troisième appareil de l’auteur est un nou- veau type d'aimant semi-circulaire, forme perfec- tionnée d'un dispositif décrit il y a une dizaine d'années. Le quatrième dispositif comporte enfin une nouvelle espèce de verre inactif au point de vue ma- gnéto-optique et à rotation négative. Les verres à 20 °/, de cérite sont inactifs vis-à-vis de la lumière jaune; ceux à 25 °/, présentent déjà une rotation négative. Ces verres sont susceptibles de rendre de grands services dans bien des expériences. — M. H. Barkhausen adresse une note sur la conversion du courant alternatif en courant continu. Dans un travail antérieur, l’auteur avait déduit les deux théorèmes suivants : Dans une résistance ohmique variable traversée par un courant électrique, il ne saurait se produire, en dehors du développement de chaleur, qu'un échange d'énergie de courants continu et alternatif. Dans une self-induction ou une capacité variable, traversée par un courant électrique, il ne saurait se produire, en dehors du développement de chaleur, qu'un échange entre l'énergie mécanique et l'énergie du courant alternatif. Il résulte de ces théorèmes que, sans modification de la résistance ohmique, c’est-à-dire par la seule modifica- tion de la self-induction ou de la capacité, il estimpos- sible de convertir du courant alternatif en courant continu, ou inversement. Or, l’on a essayé à diffé- rentes reprises d'opérer une conversion pareille en appliquant une bobine de réaction à une force électro- motrice purement périodique, telle qu'un système à courant alternatif. Comme l’auteur le fait voir par des discussions théoriques, illustrées par un graphique, ces tentatives sont absolument illusoires. — M. R. Pohl adresse un mémoire sur l'effet photo-eélectrique des métaux alcalins en lumière polarisée et sa relation avec les longueurs d'onde. Dans un travail antérieur, l’auteur avait fait voir que la position exceptionnelle des métaux alcalins, au point de vue de leurs effets photo-électriques en lumière polarisée, ne s'explique point par l'état liquide dans lequel on les étudie. Pour établir une relation entre ce phénomène et les diffé- rences des longueurs d'onde excitatrices, il étudie des surfaces alcalines liquides dans les différentes régions spectrales d’une lampe à vapeur de mercure, à haute pression. Il fait voir que les métaux alcalins, dans la région des rayons ultra-violets, se comportent identi- quement aux autres au point de vue photo-électrique en lumière polarisée; leur position exceptionnelle se limite aux longueurs d'onde visibles et à celles qui leur sont voisines. Séance du 17 Décembre 1909. M. F. Neesen donne lecture d'un Mémoire sur la pendulation des projectiles, c’est-à-dire le mouvement de précession sous l'influence de la résistance de l'air. Tandis que la cause de ce phénomène, d'une impor- tance fondamentale pour la détermination des trajec- toires, ne donne plus lieu à la moindre incertitude, il n'existe que des hypothèses, conduisant à des résultats, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 223 fort divergents, au sujet de la durée et des autres con- ditions quantitatives du phénomène. Or, la maison Krupp, par ses récentes études photographiques de projectiles luisants, vient de fournir une contribution fort précieuse à notre connaissance de ce phénomène. A propos de l'analyse de l'un des clichés obtenus par cette maison, l’auteur discute les conditions dont dépend la largeur des ombres, Le retour de positions identiques où analogues, tel qu'il se produit dans le cas d’une pendulation, doit entrainer des accroisse- ments et des décroissances périodiquement renou- velés. Ces variations se corapliquent par les facteurs suivants : 4° hauteur et largeur de la flamme de ma- gnésium; 2 distance entre le projectile et la plaque photographique; 3° variations de la tangente à la tra- Jectoire. Or, l’auteur fait voir que le facteur 2 est sans importance ; le facteur 1, grâce à la brièveté des inter- ils peut être considéré comme constant, à moins que les inscriptions ne soient faites au commence- ment ou à la fin de l'inflammation du mélange incan- descent. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 13 Janvier 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. WeitzenbücK : Sur le système de # plans en R,. — M. R. Daublebsky von Sterneck décrit les méthodes employées pour la détermination de la pesanteur dans le tunnel des Tauern et dans la région du Sonnblick. 20 SareNces PHYSIQUES. — M. H. Mache a mesuré le rayonnement radio-actif à haut pouvoir de pénétration existant dans l'atmosphère. Il se compose de deux parties : la première provient des substances radio- actives contenues dans les couches supérieures de la Terre et de leurs produits de décomposition (elle diminue après les jours de pluie et plus fortement encore quand le sol est couvert de neige); la seconde provient des produits de décomposition de l’éma- nation contenue dans l'atmosphère (elle augmente les jours de pluie. diminue quand souffle le foehn ou un vent analogue, augmente avec la chute de potentiel). MM. F. et S. Exner étudient les bases physiques de la coloration des fleurs. La couche de mésophylle qui se trouve dans beaucoup d’entre elles, et qui doit son aspect crayeux à l’air intercellulaire, augmente, par la réflexion de la lumière qu’elle provo- que, la vivacité de la couleur de la corolle due aux cellules épithéliales pigmentées. D'autre part, la grande variété des tons desfleurs provient, non seulement des variations de coloration des pigments, mais de la pro- duction de couleurs d'addition et de soustraction. Séance du 20 Janvier 1910. SCIENCES PHYSIQUES. — M. H.Benndorfdonnela descrip- tion de la Station d'électricité atmosphérique qu'il a fon- dée à Graz et des appareils pour l’enregistrement de la chute de potentiel, de la conductibilité de l'air et de l'électricité des précipitations. -— M. O. von Myrbach- Rheiïinfeld a calculé le coefficient de transmission de l'atmosphère pour le rayonnement solaire au moyen de 792 observations faites à Innsbruck en 1908 avec un pyrhéliomètre à compensation d’Angstrôm. Ce coeffi- cient dépend de la tension de la vapeur d'eau et ensuite de la pression de l'air, l'atmosphère étant bien moins transparente en cas de courants d’air ascendants qu'en cas d'équilibre ou de courants descendants. — M. P. Artmann : Sur la façon dont se comporte l’eau radio- active enfermée dans des vases clos. — MM. P. Artmann et K. Fiedler : Mesures de radio-activité dans les conduites d’eau de la ville de Reichenberg. — MM. M. Bamberger et K. Krüse: Contribution à l'étude de la radio-activité des sources minérales du Tyrol. II. — MM. J. M. Eder et E. Valenta ont mesuré les lon- gueurs d'onde dans la partie visible rouge à verte des spectres d'arc des métaux suivants : Dy, Te, Er, Thu, Gd, Sa, Eu, Yt,7r, La. — M. C. Doelter : La conduction de l'électricité dans lescristaux à haute température, — M. G. Kaôpfer a étudié sur 18 exemples la transfor- mation des semi-carbazones en phénylhydrazones par l'action de quantités moléculaires de phénylhydrazine; elle est en général facile, mais la réaction inverse se produit également, de sorte que souvent la transforma- tion est incomplète. Si l'on fait agir une aldéhyde ou une cétone à la fois sur la semi-carbazide et la phényl- hydrazine, on peut obtenir ou seulement la semi carbazone, ou seulement la phénylhydrazone, où un mélange des deux. Séance du 3 Février 1910. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. I. von Hepperger, au moyen de la formule de rayonnement de Planck, compare les températures des étoiles déterminées à Potsdam avec ies indications de grandeur du Catalogue de Draper et de la Photométrie revisée de Harvard. Le résultat est en général satisfaisant et peut servir à déterminer la grandeur apparente relative d'une surface lumineuse. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Salpeter a étudié l'influence du champ terrestre sur la répartition de l'induction du radium dans l'atmosphère et sur la surface terrestre. Il conclut que la teneur de l'air en induction du radium doit être plus faible (d'environ 20 °/,) que celle qui correspond à l'équilibre radio- actif avec l'émanation du radium. Le rapport entre la densité dans l'espace de l'induction du radium et celle de l’émanation doit être inverse de l’allure de la chute de potentiel. — M. J. Zangerle, en traitant l'«-naphtyl- hydrazone de l'isopropylméthylcétone par une solution alcoolique de SnCl® dans HCI, a obtenu la Pr-3:3-dimé- thyl-2-méthylène-«-naphtindoline, qui, par traitement avec CH“, peut être transformée en une base indoli- nique tertiaire. On obtient des résultats analogues avec la &-naphtylhydrazone. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. O. Bobisut montre que les cellules en forme de croissant de la zone de glisse- mentdes urnes de Nepenthes sont les cellules de ferme- ture surélevées d'appareils d'ouverture en forme de crevasses métamorphosés et représentent vraisembla- blement des dispositifs qui permettent le glissement vers le bas des insectes à capturer. — M. J. Menz à constaté que les ouvertures en forme de crevasses des feuilles du périanthe à vie relativement courte (perigon, corolle) échappent dans la règle aux dispositions mul- tiples pour la diminution de la transpiration qui caractérisent les mêmes ouvertures des organes d’assi- milation des xérophytes. — M. H. Mobr indique les observations géologiques faites dans le tunnel du Hartberg. Séance du 10 Février 1910. 49 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. F. Haïser et F. Wen- zel ont reconnu que le pentose retiré de l’inosine et de l'acide inosique n'est pas le d-Iyxose comme ilsl'avaient prétendu, mais bien le d-ribose, comme l'ont soutenu Levene et Jacobs. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. G. Simmler présente une monographie du genre Saponaria, basée surtout sur ses recherches anatomiques. En tenant compte de celles-ci autant que des données morphologiques et de la répartition géographique, il propose de diviser ce genre en deux sous-genres : Saponariella (avec trois sections : Smegmathamnium Fenzl, Kabylia Simmler, Bustia Neck.) et Saporrhizaea (avec deux sections : Proteinia D. C. et Silenoides Boiss.). ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Novembre et de Décembre 4909. 1° Screxces MATHÉMATIQUES. — M. E. Millosevich : Observations de la comète de Halley, faites à l'Obser- vatoire astronomique du Collège Romain. — M. V. Vol- terra : Sur les équations intégro-différentielles de la théorie de l'élasticité. — M. C. Arzelà : Sur l'intégra- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tion de quelques équations aux dérivées partielles, à l'aide des fonctions de Bessel. — M. E. Almansi Action exercée par une masse liquide en mouvement sur un corps fixe. — M. E. Pascal : Observations sur une propriété des intégrales d'une classe d'équations différentielles. M. Pascal décrit en outre un appareil qu'il appelle « intégrateur mécanique » pour les équa- tions différentielles, particulièrement du premier ordre. — M. P. Burgatti complète sa communication précédente sur la forme la plus générale des équations de la Dynamique. — M. A. Del Re : Sur une formule générale dans le calcul des extensions. — M. N. Cru- deli démontre que, étant donnés les déplacements en surface, il est possible de résoudre directement le pro- blème de l'équilibre élastique des corps homogènes et isotropes, sans recourir à des déformations auxiliaires, en déterminant la dilatation cubique en surface à l'aide d'uneéquation intégrale de Fredholm de deuxième espèce. — M!° G. Graziani : Fonctions représentables avec la formule intégrale de Fourier. — M. L. Silla s'occupe d’un problème de dynamique des électrons dans le cas des phénomènes lumineux qui se produisent dans un tube en verre contenant un gaz raréfié, par- couru par des décharges électriques et soumis à l'action d’un champ magnétique. M. Silla fait un exa- men quantitatif des équations établies par M. Righi, intégrant complètement ces équations au moyen des transcendantes elliptiques. — M. Kryloff : Sur le pro- blème des vibrations transversales des verges élas- liques. 90 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Pochettino areconnu, en poursuivant ses recherches sur la conductibilité du sélénium, que les préparations de Se, douées d’une haute résistance et présentant une déviation plus grande de la loi de Ohm, sont capables de donner un courant secondaire plus fort, et manifestent une plus grande aptitude à redresser le courant alterné. M. Pochettino ajoute la description de ses expériences et de ses observations sur les propriétés des solutions colloïdales de sélénium, et s'occupe de quelques phé- nomènes qu'il a observés en étudiant la luminescence que présentent quelques substances organiques dans les tubes à vide parcourus par des décharges élec- triques. — M. G. Guglielmo décrit quelques expé- riences faites dans le but de déterminer la différence des potentiels dans l'air entre le zinc et le cuivre et leurs sulfates et chlorures respectifs, à l’aide du collec- teur électrostatique de lord Kelvin. Dans une seconde note, M. Guglielmo donne la description d’un appareil formé par un prisme à réflexion suspendu comme ua pendule devant une partie de l'objectif d’une lunette, et présente les résultats de quelques déterminations de l'heure exécutées à l’aide de cet appareil, avec la méthode des hauteurs correspondantes. — Dans une troisième note M. Guglielmo, partant des formules de Van der Waals, établit les conditions d'équilibre entre solvant pur et solution dans la surface imper- méable de contact, et entre solvant pur, solution et vapeur, déduisant les lois déjà connues et d'autres con- séquences. — M. E. Oddone fait un examen des mesures systématiques des températures des produits volca- niques chauds ou incandescents, et des procédés les meilleurs pour accomplir ces mesures. — M. L. Rolla donne des formules relatives à la tension de la vapeur à basse température, et décrit l'appareil dont il fait usage pour ses recherches au Laboratoire du Profes- seur Nernst à Berlin. — MM. G. Ciamician et C. Ravenna s'occupent de la propriété des plantes de transformer des substances aromatiques en glucosides ; pour ces expériences, on recourait à une bouillie de plants de mais triturés, à laquelle on ajoutait la sub- stance aromatique en laissant en repos pendant deux mois.— M. A. Piutti donne des détails sur la préparation et sur les propriétés de quelques dérivés maléiniques et fumariques des p-aminophénols. — MM. G: Plan- cher et D. Giumelli : Synthèse des célones et des indolénines; action du chloroforme sur le diméthyl- pyrrol symétrique. — M. F. Olivari étudie les pro- priétés de l’iode employé comme solvant cryosco- pique. — MM. C. Ravenna el N. Zamorani ont reconnu que le lithium en très petite quantité ne manifeste pas d'action toxique ni sur les pommes de terre, n1 sur les plantes de tabac. — MM. A. Scala et G. Bonamartini décrivent leurs recherches qui prouvent que l’albumine ou les matières albuminoïdes forment avec les sels minéraux des composés à type constant. — M. M. Padoa à fait, avec un résultat néga- tif, un essai de synthèse asymétrique avec la lumière polarisée circulairement; cet essai consistait dans la bromuration de l’acideangélique. —MM. F. Bottazzi et N. Scalinci décrivent leurs recherches sur l’imbibi- tion du cristallin de l'œil, à des températures diffé- rentes, dans les acides et dans les alcalis. — M. G. Bu- glia et L. Karezag ont fait des expériences pour établir l'influence manifestée par la configuration stéréochimique d’un corps sur la propriété que possèdent plusieurs colloïdes organiques de coaguler . sous l’action de la chaleur. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Serra poursuit l'étude de quelques espèces minéralogiqués : heulan- dite, mésulite, smithsonite, et de quelques+ roches basaltiques de la province de Sassari en Sardaigne. Dans une autre note, M. Serra donne la description d'un cristal de scheelite de Traversella qui présente des singulières particularités. — M. A. Martelli décrit ses recherches pétrographiques et chimiques sur les formations de Gavorrano. — Mie B. Bonfigli transmet la description morphologique d’une Phylloxerina qui se développe sur les peupliers (Populus alba), signalée déjà par M. Grassi et Mlie Foà comme une forme très proche de celle qui vit sur les saules. — M! A. Foù à eu l’occasion d'observer le ÆRhyzogliphus echinopus (Fum. et Rob.) Moniez, et un autre acarien qui se déve- loppe avec lui sur les racines des vignobles; de cette manière, les dégâts s'ajoutent à ceux produits par l'infection phylloxérique. — M. G. Brunelli décrit la manière de se comporter du monosome dans les sper- magotonies de la T'ryxalis. — M. A. Negri a fait d’au- tres observations sur la structure du Neuroryetes hydrophobiæ Calkins, et sur ses changements intimes que l’on peut suivre à l’aide de colorations, change- ments qui confirmeraient la nature parasitaire des « corps Spécifiques » de la rage. — MM. G. Galeotti et E. Simonelli étudient l'influence de l'anhydride carbo- nique et de l'oxygène sur le cœur des reptiles et des amphibies. — M. C. Gorini transmet le résultat de ses recherches surles différences qui peuvent exister entre le vaccin et d’autrès maladies semblables à ce dernier sur les mamelles des vaches lactifères (aphte épizooti- que, etc.). — M. V. Peglion s'occupe de la virulence particulière qu'a, dans ces dernières années, présentée en Italie, pendant les saisons automnales chaudes, l’oïdium de la vigne dans la province de Ferrare. — MM. E. Pantanelli et M. Sella étudient l'absorption élective des ions dans les racines des plantes vertes. M. L. Petri a fait des recherches sur l’épaississement de l'écorce secondaire des racines dans le genre Vis, en rapport avec les lésions phylloxériques; il donne en outre plusieurs indications sur quelques maladies de l'olivier. — M. B. Longo a fait des expériences au Jardin botanique de Sienne sur un cas de parthéno- carpie, obtenant la floraison et la fructification des fleurs de Diospyros virqginiana L. dont on avait sous- trait les fleurs à l’action fécondante du pollen. ErNesr Mancini. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91° ANNÉE N° G 30 MARS 1910 Revue générale Science pures el appliquées des Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris In Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Élections à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 14 mars, l’Académie a procédé à l'élection d’un membre dans sa Section de Géographie et Navigation, en remplacement du regretté Bouquet de la Grye. La Section avait présenté comme candidats : en première ligne, M. Ch. Lallemand; en seconde ligne, MM. A. Angot, F. Arago et R. Bourgeois. Au premier tour de scrutin, M. Lallemand a été élu par 52 suffrages sur 59 votants. Les recherches scientifiques du nouvel académicien se réfèrent presque toutes à deux grandes œuvres natio- nales, auxquelles il fut appelé à collaborer dès la pre- mière heure et qui, en dehors de leur intérêt écono- mique et technique, se rattachent par les liens les plus étroits au domaine de la Géodésie : le nivelle- ment général de la France et la réfection du cadastre. Chargé de l’organisation technique de ces entreprises, il a dü, non seulement former un personnel compétent, mais surtout rechercher, pour les instruments et les métbodes, tous les perfectionnements susceptibles d'accroître la précision des résultats sans rien sacrifier de la rapidité ni de l’économie du travail. Ses efforts ont été couronnés de succès, puisqu'ils ont valu aux méthodes et aux instruments du Nivellement générai de la France et du nouveau Service technique du cadastre d'être adoptés pour les opérations analogues exécutées dans un assez grand nombre de pays étrangers. Parmi les autres travaux de M. Lallemand, nous citerons encore ceux qui se rapportent aux relations de la figure du globe avec la distribution des volcans et des trem- blements de terre, aux mouvements lents et aux marées de l'écorce terrestre. C'est cet ensemble de recherches que l'Académie à voulu récompenser en appelant l’auteur à venir siéger dans son sein. La Revue le félicite vivement de cette distinction méritée. Au cours de ce mois, l'Académie a également pro- cédé à l'élection de deux nouveaux associés étrangers : MM. R. Dedekind et W. Hittorf. à M. Dedekind est l'un des doyens des mathématiciens allemands. Ses recherches ont surtout porté sur la théorie des nombres, sur laquelle il a publié des tra- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. vaux étendus et de tout premier ordre. M. Hittorf est, lui, le doyen des physico-chimistes allemands; ses recherches sur les spectres des éléments, d'une part, sur l’électrolyse et la théorie des ions, d'autre part, pour ne citer que les plus connues, sont devenues classiques. $ 2. — Astronomie La comète 1910 a. — Le commencement de cette année a été marqué, pour la science astrono- mique, par la découverte d'une première comète par- ticulièrement intéressante, dont nous allons résumer ici les principales observations. Le 17 janvier dernier, le Bureau central astrono- mique de Kiel (Allemagne) recevait par télégramme une communication officielle de l'Übservatoire de Johannesburg (Transvaal), annonçant l'apparition d'une nouvelle comète présentée sous le nom de Drake, par suite d'une erreur de transmission téléphonique, le mot anglais great, c’est-à-dire « grande », ayant été mal compris et inscrit « drake ». De fait, il s'agissait d'une comète ayant des dimensions considérables, visible à l’œil nu et aperçue pour la première fois le 15 janvier, par un groupe d'employés du chemin de fer de la station de Kopjes (Etat libre d'Orange), qui signa- lèrent l’astre nouveau au directeur de l'Observatoire de Johannesburg, M. Innes, lequel ne put le distinguer le lendemain, en raison du mauvais temps. C'est seu- lement le 17 qu'il parvint à l'observer avec son colla- borateur M. Worssell, brillant d’un vif éclat, très près du Soleil levant. MM. Innes et Worssell purent alors suivre la comète pendant toute la matinée, jusqu'à midi, et en prendre des positions approximatives. Mais ces premières mesures n'avaient pas un caractère de précision absolue, aucune étoile ne se trouvant là, dans la clarté du jour, pour servir de point de repère. Cette observation initiale indique que l’astre comé- taire se composait d’un noyau rond, pouvant avoir 5 minutes d'arc en diamètre, et d’une queue se déployant sur une vaste étendue. La comète atteignit son périhélie ce même jour, 17 janvier, et se perdit dans le rayonnement solaire pour reparaître le 18, comme astre du soir, dans l'hé- 6 t2 12 [=] CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE misphère boréal. A partir de cette date, elle a été observée partout où l'état de l'atmosphère ne s'y est pas opposé, aussi bien en Europe qu'en Asie, dans l'Afrique septentrionale et en Amérique. Quoiqu'elle ait été visible à l'œil nu à Paris comme ailleurs, elle a peu frappé l'attention des citadins, car elle s’est tenue fort peu élevée au-dessus de l'horizon et a été presque constamment voilée, tant par les brumes que par les lueurs du crépuscule. Par contre, un nombre considérable d'observations ont été faites dans les divers établissements astro- nomiques du monde, notamment aux Observatoires de Rome, Alger, Milan, Marseille, Nice, Lyon, Paris, Meudon, Juvisy, Besancon, Uccle, Greenwich, Cam- bridge, Edimbour:, Berlin, Treptow, Heidelberg, Vienne, Saint-Pétersbourg, Yerkes, etc., où, pendant plusieurs semaines, elle à été assidûment suivie. Cette comète a été non seulement remarquable par ses dimensions et son éclat, mais encore par les extraordinaires variations qu'elle a présentées durant son règne éphémère, et aussi par la soudaineté de sa disparition. Le 19 janvier, M. A. R. Hinks, à l'Observatoire de Cambridge, attribuait au noyau l'éclat de Mercure, et à la queue une longueur de 2. Le 20, à l'Observatoire Radcliffe d'Oxford, le noyau a été noté de couleur rougeâtre, comme Mars, mais un peu plus brillant, avec une queue mesurant environ 2930". A l'Observatoire de Lyon, l'étendue de la queue a été estimée de 25° le 26 janvier, de 30° le 29 et le 30, et seulement de 22 le 31. A l'Observatoire de Paris, M. Giacobini trouvait pour la queue une longueur de 60 le 22 janvier, de 15° le 27 et de 45° le 29, Un certain nombre de photographies prises à l'Oh- servatoire Flammarion, de Juvisy, du 21 janvier au 4 février, montrent une queue principale, formée de deux aigrettes séparées par un espace sombre et pré- sentant une courbure marquée près du noyau. Les phototypes des 29 et 30 janvier, pris par M. Quénisset, révèlent l'existence d’une queue anormale, c'est-à-dire d'une masse nébuleuse s'étendant à 8! en avant de la tôte de la comète, par conséquent dans la direction du Solerl. Ce phénomène très curieux nous prouve qu’en outre de la force répulsive émanée du Soleil, qui pousse les queues cométaires à l'opposé de cetastre, il y a dans ces appendices gazeux d'autres forces en jeu, déjà mises en évidence par la comète Morehouse (1908 c). Les mesures prises à l'Observatoire de Marseille ont donné 15° de longueur pour la queue le 25, et 30° le 30 janvier. Le 3 février, M. Borrely, astronome en cet observatoire, a constaté que la comète avait considé- rablement diminué d'éclat. Le 7 février, elle n'était plus que de grandeur 8 1/2. A cette date, la queue a disparu et la comète n'apparaissait plus que comme une faible nébulosité ronde. Ces étranges transformations, constatées par tous les observateurs, nous font penser que des modifica- tions fantastiques se sont rapidement produites dans la matière cométaire, hypothèse renforcée par le phénomène que nous avons signalé plus haut, consis- tant en l'apparition d'un rudiment de queue secon- daire, située en avant de la tête, vers le Soleil. Quant au noyau, il à été généralement estimé de l'éclat d’une étoile de première grandeur, et de nuance Jaunâtre ou rougeûtre. Les mesures prises à l'Obser- vatoire de Besançon indiquent un diamètre de 12! le 27 janvier. Voici donc la plus belle comète que nous ayons eue depuis longtemps. A la fin de janvier, les dimensions réelles de sa queue ont certainement surpassé 400 mil- lions de kilomètres. Lancée sur une orbite parabo- lique, elle s’est précipitée vers le foyer avec une vitesse prodigieuse, a pour ainsi dire frôlé le Soleil le 17 jan- vier, date du périhélie, n’en ayant été séparée que par une distance de 19 millions de kilomètres, et a pour- Ds € suivi son cours avec un mouvementnon moins rapide. Le 28 janvier, elle était déjà à 70.594.000 kilomètres du Soleil;le 1° février, elle en était à 88.355.000, le 5 à 104.875.000, le 9 à 120.348.000, le 13 à 139.783.000 kilomètres. Tout en s’éloignant du Soleil, elle s'écar- tait aussi de la Terre. Lors de son passage au périhélie, elle se trouvait à 130.000.000 de kilomètres de nous; le 28 janvier, elle en était déjà à 182.242.000, le 4er février, à 202.873.000 kilomètres. A cette date, M. Albrecht à constaté au spectroscope un déplacement des lignes du sodium indiquant que la comète s’éloignait de nous à la vitesse de 66 kilomètres par seconde. Le fait est qu'elle s’enfuyait si vite, qu'à partir du 11 février elle est devenue totalement invisible, même dans les ins- truments les plus puissants. Simultanément à l’investigation télescopique et pho- tographique, l'analyse spectrale a été appliquée à l'étude de cet astre chevelu. Les recherches faites à l'Observatoire de Meudon par M. Deslandres et ses collaborateurs ont tout d'abord montré dans le noyau un spectre continu s'étendant de À 700 dans l'extrême rouge à À 420 dans l’indigo, avec plusieurs condensa- tions nettes, et la ligne principale D du sodium très accentuée. Mais les spectrogrammes obtenus ensuite, du 24 au 30 janvier, ont révélé une transformation curieuse du spectre cométaire. La radiation du sodium, qui était la plus forte, s'est graduellement atténuée, tandis que les bandes des hydrocarbures, primitivement faibles, augmentaient d'intensité et que les raies du cyanogène apparaissaient, le spectre continu s'éten- dant alors jusqu'à l’ultra-violet. Le 29 et le 30 janvier, le sodium avait disparu ; au contraire, le spectre des hydrocarbures (A 565, 517, #74) et celui du cyanogène (À 388, 387, 386), très intenses et complets, se développaient du rouge à l’ultra-violet. Même le spectre des hydrocarbures a semblé s'étendre dans la queue à une grande distance. Ces transfor- mations s'observent généralement dans les comètes qui s’approchent beaucoup du Soleil. Tout près de l'astre central, les raies métalliques prédominent ; mais, lorsque la comète s'éloigne, le spectre classique des hydrocarbures et du cyanogène redevient le carac- tère principal du spectre cométaire *. 2 Plusieurs éphémérides ont été calculées par diffé- rents observateurs pour cette comète. Nous donnons ici celle de M. Kobold, qui nous parait la meilleure, et dont les éléments sont fondés sur les observations des 20, 23, 26 et 30 janvier : Passage au périhélie. . . . . . 1910 janvier 17,1235 Longitude du périhélie. . . . 344058! Nœud ascendant. . . . . . . . 83047! Inclinaison . . . "1380470 Log. de la distance du périhélie. 9,414.53 L'inclinaison de l'orbite, supérieure à 90°, montre que le mouvement est rétrograde. Le logarithme 9,11153 correspond au nombre 0,129, la distance de la Terre au Soleil étant prise pour unité, ce qui donne 19.222.000 kilomètres. Terminons en disant que cette intéressante comète est perdue pour nous. La gigantesque orbite parabo- lique qu'elle décrit l'emporte vers des destinées incon- nues. G. Renaudot. L'Observatoire populaire de Rouen. — Nous recevons de M. H. Delehaye la communication sui- vante : « Monsieur le Directeur, « Dans le n° 4 de la Revue générale des Sciences de 1910, à la page 434, est inséré un article de M. A. Cha- boseau signalant l'existence d’un Observatoire popu- laire à Zurich comme d'une chose unique en son genre, d’ « une institution sans précédent et vouée peut-être, hélas ! à rester longtemps sans pareille ». ———_—_—_———————————— 1 C. R. Acad, des Se., séance du 31 janvier 1910. v:. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE « À Rouen, un tel établissement existe et fonctionne régulièrement depuis vingt-cinq ans. Fondé en 1884 par Ludovic Gully, un fervent apôtre de l'instruction démocratique et de la vulgarisation des sciences, cel observatoire est situé dans la partie élevée de la ville. Il possède un équatorial de Maiïlhat, grand modèle, un télescope Foucault et une installation méridienne. Ouvert au public tous les jeudis et tous les samedis ainsi qu'aux soirs où des phénomènes célestes peuvent être particulièrement intéressants, l'entrée en est rigoureusement gratuite, et tous, sans aucune distinc- tion, y ont accès, observent aux appareils et s'ins- truisent. Les Rouennais sont habitués maintenant à leur observatoire et, à chaque séance, un grand nombre «auditeurs : ouvriers, employés, professeurs même, se rencontrent autour de nos appareils. Une station météorologique y fonctionne, livrant tous les jours à la presse locale des bulletins météorologiques et l'état «es taches solaires. Bien entendu, lycées, écoles nor- males, écoles publiques et privées y ont des séances particulières. Une bibliothèque gratuite, avec prêt à «lomicile, sert aux personnes désireuses de s'instruire. « Cet établissement fonctionne avec un faible budget annuel de 4.500 francs, alimenté par des cotisations de membres et des subventions du département, de la Ville et de la Ligue de l'Enseignement. Son conseil d'administration est composé de personnes dévouées à l’œuvre de la vulgarisation scientifique, s'occupant activement des séances d'astronomie et ne recevant aucune rétribution. « Je pense qu'à côté de l'œuvre de Zurich, il peut être utile de signaler celle de Rouen. « Veuillez agréer, etc. H. Delehaye, Directeur de l'Observatoire populaire de Rouen. $ 3. — Art de l'Ingénieur L’emploi de la surchauffe sur les locomo- dives. — Nous avons sigualé il y a quelques années à mos lecteurs l’un des premiers essais tentés dans cette voie‘. Depuis lors, la question a fait de très grands progrès et, pour plusieurs pays, elle est entrée dans la pratique courante, comme on peut s'en rendre comple par la lecture d’un récent Mémoire de M. Dassesse*. Voici quelques-unes des conclusions que l’auteur tire «de l'étude de ce sujet : La plupart des administrations de chemins de fer ont ‘essayé ou essaient la surchauffe de la vapeur aux locomotives; celles d’entre elles qui ont une pratique déjà longue de la surchauffe en ont étendu l’applica- tion, souvent même dans une large mesure; aucune n’y a renoncé. Les économies de combustible et d'eau sont en rapport direct avec le degré de surchauffe. C'est quand a locomotive est soumise à un travail considérable, et surtout continu, qu'elles sont les plus grandes. Avec des machines à simple expansion, elles ont atteint 29,64°/, pour le charbon, et 28,67 °/, pour l’eau dans certains essais de l'Etat belge. D'autre part, une économie appréciable ne commence à apparaitre qu'à partir d'une surchauffe de 30 à 40°. De même qu'aux essais, les résultats de la pratique courante sont nettement en faveur de la surchauffe; des locomotives à simple expansion et à surchauffe réalisent jusqu’à 18, 20 et même 22 °/, d'économie de charbon par rapport aux locomotives similaires à vapeur saturée ayant fonctionné dans les mêmes séries, c'est-à-dire ayant assuré les mêmes trains dans des conditions absolument identiques. La température de la vapeur surchauffée ne doit pas dépasser 4509. Celle de 320° parait, pour les locomotives à simple expansion, donner les meilleurs résultats au -1 Voir la Revue du 15 avril 1906, p. 306. ? Bulletin du Congrès international des Chemins de fer, <écembre 1909. point de vue du rendement et de la bonne conser- vation des organes. Vu la grande fluidité de la vapeur surchauffée, les pertes dues au laminage sont atténuées, la pression à l'admission se tient à un taux plus élevé qu'en vapeur saturée, ce qui permet aux machines de réaliser des vitesses plus grandes. Les lignes de niveau sur lesquelles les locomotives couvrent de longues étapes à régime constant, de mème que les longues et fortes inclinaisons sont parti- culièrement favorables aux locomotives à surchauffe. La surchauffe se comporte de facon moins avantageuse sur les lignes dites en dents de scie, formées d'une succession de pentes et rampes de faible longueur; il en est de même, et pour des motifs analogues, avec des trains à arrêts fréquents et surtout prolongés. De ce que la surchauffe peut, dans certains cas, aug- menter de 30 °/, la puissance d'une locomotive à simple expansion, il s'ensuit que les locomotives à deux cylindres, de construction simple et économique et d’un fonctionnement sûr, peuvent êlre conservées comme type avant qu'il faille recourir aux locomotives de grand encombrement. Eu munissant la machine compound d'un surchauf- feur, on augmente son rendement. Les compounds express à quatre cylindres de l'ancienne Compagnie des chemins de fer de l'Ouest sont de 13 à 44 °/, plus économiques que les compounds similaires utilisant la vapeur saturée. D'autre part, la surchauffe permet de réaliser sur le mode compound des économies de charbon qui ont été trouvées de 12,3 °/ par cheval au cylindre dans les essais faits à l'Etat belge sur des locomotives express, et à l'Etat italien de 7,3 à 10 °/o par cheval indiqué également sur des locomotives pour trains express. Il semblerait résulter du rapprochement des chiffres ci-dessus, obtenus avec des machines en bon état, que la locomotive express compound à quatre cylindres à surchauffe ne pourrait accuser un avantage bien marqué sur la locomotive équivalente à 4 cylindres à simple expansion à surchauffe, qui se recommande encore par la simplicité de construction, la facilité de conduite et la stabilité aux vitesses élevées. L'avantage en faveur de la locomotive compound à surchauffe peut S'accentuer au cas où il est fait emploi de distributeurs susceptibles de présenter rapidement des fuites impor- tantes. Les économies d'eau permettent d'espacer les réali- mentations de la chaudière, avantage particulièrement appréciable sur les rampes, d'augmenter les parcours avec les mêmes approvisionnements et de distancer les lavages. | Le supplément de puissance que donne la surchaufTe n'est pas immédiatement disponible; il n’est obtenu qu'après un certain parcours, variable avec la charge et la vitesse du train, et le profil de la ligne. De ce que la surchauffe est d'autant plus écono- mique que la pression initiale de la vapeur est plus faible, il n’y a en général pas intérêt à marcher avec un timbre élevé à la chaudière. On évite en même tempsles dépenses onéreuses d'entretien des chaudières fonctionnant à haute pression. è La haute surchauffe nécessite des dispositions parti- culières des garnitures des pistons et distributeurs appropriés, ainsi que des graisseurs multiples à huile spéciale de haute qualité. Toutefois, en ce qui concerne les compounds, les résultats obtenus dans les divers essais des réseaux français ont fait reconnaître que les différents organes de la basse pression peuvent être identiques à ceux des locomotives similaires non munies de surchauffeur. L'addition d’un surchauffeur Schmidt à une locomo- tive à simple expansion de l'Etat belge, ainsi que les modifications qu'elle nécessile aux organes en contact avec la vapeur surchauffée, grève le prix d'achat de 4.000 à 5.000 francs, non compris la licence, et aug- | mente le poids de la machine de 2 tonnes environ. 228 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE L'utilisation du grisou comme combustible, — Aux mines de houille de Frankenholz, à Mittelbese- bach (Bavière rhénane), le chauffage de deux chau- dières, qui nécessitait 45 tonnes de charbon par jour, à pu être assuré par un captage de grisou’: Un sondage tubé, pénétrant à 50 mètres dans la masse carbonifère, avait été fait dans un but de recon- naissance, préalablement au fonçage d’un puits. Du grisou se dégagea en abondance, sous forte pression. Comme le dégagement ne diminuait pas, on établit une canalisation évacuant le grisou à bonne distance de la ruine, et des chaudières à brûleurs, analogues à celles que l’on emploie pour l'utilisation du gaz naturel aux Etats-Unis, furent installées. Un second trou de sondage va être effectué pour capter le grisou et en libérer en même temps la couche de charbon. $ 4. — Physique L'action des rayons © sur la conductivité des diélectriques liquides. — Les récentes recherches de M. H. Greinacher® sur l'influence exercée par les rayons & sur la conductivité des dié- lectriques solides avaient fait voir que les variations de courant observées, loin d’être dues à une augmen- tation de la conductivité des couches, doivent être attribuées, soit au contact imparfait des armatures d'aluminium, conjointement avec une électrisation de la couche intermédiaire, soit à la charge positive des particules &. Ce résultat était d'autant plus frappant que de nom- breux auteurs avaient démontré l'augmentation de conductivité des diélectriques solides sous l'influence des rayons pénétrants du radium (rayons B et y), et que, par suite du pouvoir ionisateur bien plus élevé des rayons «, on aurait dù s'attendre à des efforts par- ticulièrement considérables. Aussi, l’auteur suppose- t-il que l’absence de toute augmentation de courant doit être attribuée à une recombinaison très rapide des ions, déterminée par leur mobilité extrêmement faible. Dans cette hypothèse, il fallait s'attendre à obtenir des résultats plus positifs avec des liquides où les ions formés par les rayons «, grâce à leur mobilité plus considérable, peuvent être accélérés suffisamment pour arriver aux électrodes avant leur recombinaison complète. Comme l'auteur le fait voir dans un Mémoire ulté- rieur“, l'huile de paraffine et l’éther de pétrole présen- tent, en effet, sous l’action des rayons «, une augmen- tation de conductivité. Ce fait prouve la possibilité qu'il y a d'ioniser les diélectriques liquides aussi à l'aide des rayons positifs. L'augmentation de la conduc- tivité est sensiblement indépendante du sens du cou- rant Ceci semble démontrer que les mobilités des ions positifs et négatifs ne se distinguent pas considé- rablement l'une de l’autre. Dans le cas de l'huile de paraffine, le courant s'accroît d'abord plus rapidement que la tension (à peu près en raison de V*), puis, pour les tensions élevées, plus lentement que celle-ci. Dans le cas de l’éther de pétrole, l’auteur n'observe que la deuxième moitié de la courbe. Dans l’un et l'autre de ces liquides, il se produit, pour des tensions élevées, saturation de l'augmentation de conductivité. Les effets observés ne s'approchent tou- tefois que lentement de la saturation parfaite. Loin de se produire instantanément, l'augmentation de conductivité n’atteint sa valeur définitive qu'après plusieurs minutes d'irradiation dans le cas de l'huile de paraffine. Cette approche se fait, chose remarquable, d'abord lentement et, après un temps considérable, plus rapidement. Revue universelle des Mines et de la Métallurgie, t. XXIX, no 4, p. 95. 2 Le Radium, 1. VI, p. 291, 4905. Phys. Zeitschr., n° 25, 1909. En employant de faibles champs électriques, on voil, dans l'huile de paraffine, disparaître l'augmenta- tion de conductivité quelques minutes seulement après la cessation de l'irradiation, mais presque instantané- ment dans le cas des champs électriques élevés. L'éther de pétrole présente, au contraire, toujours une dispa- rition rapide de l'effet. L'allure des courbes de décrois- sance est parfaitement analogue à celle des courbes d'accroissement. Une particule &, dans le cas d’une absorption com- plète dans l'éther de pétrole, engendre environ deux mille fois et, dans l'huile de paraffine, environ mille fois moins d'ions qu'au sein de l'air. K 5. — Chimie Un nouveau gaz pour ballons. — Au récent Congrès des Aéronautes allemands à Francfort-sur-le- Main, le Dr W. von OUechelhaeuser a présenté une note préliminaire sur les résullats des expériences qu'il vient de faire, en collaboration avec la Société alle- mande continentale du Gaz, en vue de la production d'un nouveau gaz pour ballons. Ces expériences ont fait voir que la décomposition du gaz de houille ordinaire, en cornue verticale, permet d'obtenir, en opération régulière, un gaz aérostatique de poids spé- citique égal à 0,225, de facon qu'un mètre cube de ce gaz exerce une poussée d'environ 1 kilog. Or, suivant les statuts et les règlements de l’Asso- ciation aéronautique internationale, on admettait jusqu'ici 0,700 kilog comme valeur oflicielle de la poussée d'un mètre cube de gaz d'éclairage et 1 kil. 050 comme celle de l'hydrogène. Il est vrai que, dans certaines installations, on a réalisé avec l'hydrogène une poussée de 4 kil. 485 et que, d'autre part, la valeur officielle de 0,700, qui correspond au poids spéci- fique de 0,44, est manifestement un peu trop faible pour de nombreuses usines à gaz. Il semble, en effet, que ce poids spécifique ne soit exact que dans le cas du charbon à gaz récent, tel que le charbon de Silésie, ou pour un gaz additionné de gaz à eau. C’est ainsi que, lors des ascensions Gordon-Bennett, à Berlin, on se servait d'un gaz du poids spécifique de 0,4, cor-. respondant à une poussée de 0,776 kilog par mètre cube. Quoi qu'il en soit, en se basant sur les valeurs officielles mentionnées ci-dessus, valeurs qui, malgré leur imperfection, sont toujours les mieux établies, on voit que la poussée exercée par le nouveau gaz équivaut presque à celle de l'hydrogène, étant à celle-ci comme 1.000 est à 1.050. C'estdire qu'un ballon d’une capacité de 1.000 mètres cubes, rempli de ce gaz, permettra d'enlever un poids supplémentaire de 300 kilogsen plus du poids porté par un ballon de mêmes dimensions, rempli de gaz de houille ordinaire, ou qu'à poussée égale les dimensions du ballon pourront être réduites de 30 0/0. Le nouveau gaz renferme plus de 80 °/, d'hydro- gène ; la teneur en méthane —composantparticulière- ment difficile à décomposer — se trouve réduite de 35 à 70/,.Ilest presque inodore, ce qui sera particuliè- rement agréable aux voyageurs des ballons libres à tubulure ouverte. D'autre part, il ne renferme ni benzol ni autres hydrocarbures lourds, susceptibles d'attaquer l'enveloppe du ballon. Il est vrai que la science connaît depuis longtemps le fait de la décomposition du gaz de houille, sous l’action d'une chaleur élevée, fait qui sert de base au procédé de M. von Oechelhaeuser; c’est, semble-t-il, M. Bunte qui, il y a environ vingt ans, en publia le premier compte rendu. Mais les difficultés rencontrées dans les tentatives d'utiliser cette décomposition pour la production industrielle, sur grande échelle, d'un gaz beaucoup plus léger, semblaient naguère encore insurmontables. Or, M. von Oechelhaeuser a réussi à engendrer ce gaz pendant le service normal de l'usine et dans les mêmes fours qui servent à produire le gaz CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 229 de houille. 11 s'est servi, à cet effet, et pour des raisons d'ordre physico-chimique, des fours verticaux de l'Usine de Dessau. Des expériences ultérieures feront voir sile même procédé peut être réalisé aussi dans les fours horizontaux ou autres. Aussitôt que les détails techniques du procédé auront été définitivement établis, c'est-à-dire dans peu de mois, l'inventeur se propose de les publier au bénéfice des nombreuses usines à gaz qui s'occupent d'encourager l’'Aéronautique. A. G. La préparation du bore à Fétat pur et ses propriétés, — On prépare généralement le bore cristallisé par l'action du magnésium sur l'anhydride borique; mais le produit obtenu, le bore adamantin, n’est pas pur : il renferme une certaine quantité de magnésium. MM. E. et G. Weintraub et E. Kraus! ont repris l'étude de la préparation du bore et, après avoir essayé inutilement plusieurs méthodes, ils sont par- venus à obtenir du bore pur par réduction du chlo- rure de bore, en faisant passer un arc électrique à travers un mélange de vapeur de chlorure et d'hydro- gène. Un ou plusieurs arcs à courant alternatif, alimentés par un transformateur à haut potentiel, jaillissent entre des électrodes de cuivre refroidies par une cir- eulation d'eau ou d'air, dans un mélange de BoCl' avec un grand excès d'hydrogène, contenu dans un vase de verre ou de cuivre. Le bore est obtenu en partie sous forme de poudre fine, qui se dépose sur les parois du récipient et sur les électrodes, en partie sous forme de morceaux fondus produits par la chute de globules liquides tombant de l'extrémité des électrodes. La poudre, après avoir été débarrassée d’une petite quan- tité d’anhydride borique, donne à l'analyse 99 à 99,5 °/ de bore, les morceaux fondus de 99,8 à 100,2 0/4. Le rendement est d'autant plus élevé que l'hydrogène est en plus grand excès. Pour fondre la poudre de bore, deux méthodes ont été employées : l'arc au mercure dans le vide ou dans un gaz inerte, ou l'arc à haut potentiel dans un gaz inerte. Le bore pur fond entre 2.000 et 2.500° ; dans le vide, il commence à se volatiliser avant de fondre, puis fond ensuite; quand la surface est fondue, la tendance à la volatilisation diminue considérablement. La pres- sion de vapeur est très élevée déjà à 1.600° C. La dureté du bore n'est inférieure qu'à celle du dia- mant; sa cassure est conchoïdale, C'est un très faible conducteur de l'électricité à la température ordinaire; mais sa conductibilitéaugmente très rapidement quand la température s'élève : elle est environ 2.000.000 de fois plus grande au rouge qu'à 23°. Ainsi, quoique à 23° ilaitune résistance spécifique d'environ 1,7 X 10° ohms, il devient relativement bon conducteur par l’applica- tion de voltages modérés, le changement de résistance ayant lieu rapidement. Par suite de ses propriétés élec- triques remarquables, le bore peut être employé indus- triellement dans la fabrication des dispositifs pour le démarrage des moteurs, des pyromètres et bolomètres sensibles, des détecteurs d'ondes hertziennes, ete. En dissolvant de petites quantités de carbone dans le bore, la conductibilité à la température ordinaire est fortement accrue (de 12 fois par quelques mil- lièmes de carbone), et le coefficient de température négatif de la résistance est réduit; on peut ainsi obte- nir des produits présentant un coefficient de tempéra- ture négatif quelconque avec des mélanges de bore et de carbone contenant jusqu'à 8 °/, de ce dernier. D'autre part, par l'introduction d'une trace de bore dans le carbone, ce dernier est métallisé, c'est-à-dire converli en une variété ayant une résistance spéci- ique basse et un coefficient de température positif de la résistance. Cet effet catalytique du bore est caracté- ristique; tous les autres éléments examinés, y compris le fer et le silicium, ne produisent pas d'effet analogue. RE A de 1m ea. ! Electrochem. and Met. Ind., t. VII, p. 509-512 (1909). $S 6. — Géologie Les effets des tremblements de terre sur les sources minérales. Suivant tions faites, lors du tremblement de terre du 10 octobre, par M. F. Mulli!, directeur de l'Etablissement gouver- nemental styrien des cures balnéaires, à Rohitsch Sauerbrunn, les sources minérales de Rohitsch ont présenté, immédiatement après la secousse séismique, un précipité brun de rouille et des exhalaisons plus abondantes qu'à l'ordinaire d'acide carbonique. À 9 h du matin, les sources recommencèrent à fournir de l'eau minérale limpide, tandis que l'abondance des exhalaisons gazeuses continua jusque dans l'après-midi. Or, l’action des tremblements de terre sur les sources, même éloignées, est un phénomène assez fréquent, dont M. F. E. Suess, dans les Mémoires de institution L. et R. de Géologie, de 1900, donne une interprétation fort satisfaisante. Comme on le confirme facilement sur un siphon quelconque, les secousses imprimées à une solution gazeuse sursaturée activent à un haut degré le déga- gement du gaz. Ce dégagement a lieu avec une inten- sité bien plus grande encore que dans le cas d’une colonne liquide intégralement déplacée, quand le liquide est mis en vibrations moléculaires analogues aux vibrations acoustiques. Or, dans les effets à dis- tance des fortes secousses séismiques, il s’agit évidem- ment de vibrations imprimées aux masses minérales au voisinage des sources, vibrations parfaitement sus- ceptibles de provoquer la décharge spontanée des masses gazeuses, en même temps que l’éruption sou- daine du liquide et la projection de composés solides. les observa- $ 7. — Biologie Le mécanisme des migrations nycthéme- rales des Cladocères planktoniques. — On sait qu'un grand nombre d'organismes planktoniques, en particulier des Crustacés, viennent la nuit à la surface des eaux, et émigrent en profondeur pendant le jour. Ces migrations périodiques ont, à juste titre, attiré l'attention des biologistes, et Lœæb en a proposé une explication très séduisante. Lœæb a admis que c'était par suite d’un héliotropisme positif que les animaux capables de nager activement résistaient à l’action de la pesanteur et se maintenaient à la surface des mers. Mais un héliotropisme, ou mieux un phototropisme positif peut presque toujours devenir négatif ; il suffit, pour cela, que l'intensité lumineuse devienne très forte, ce changement de sens du tro- pisme se trouvant être fort utile aux organismes. Seu- lement, tandis que, pour provoquer un phototropisme négalif, il faut chez certains animaux une très grande intensité lumineuse, chez d'autres il suffit d’une inten- sité moyenne ou même relativement faible. Dès lors, voici comment les choses se passeraient pour Îles migrations périodiques d'organismes planktoniques : étant en profondeur, la lumière étant faible, ils pos- sèdent un phototropisme positif etvont vers la lumière ; ils arrivent à ia surface la nuit et s’y maintiennent jusqu'à ce que, le jour venu, la lumière devienne trop intense; ils fuient alors la lumière et redescendent jusqu'à une profondeur où la lumière est très faible et où ils reprennent leur phototropisme positif, pour remonter par conséquent au fur et à mesure que la lumière diminue et cesse de changer le signe de leur tropisme ; ils n'arrivent donc à la surface que la nuit. Cette conception, vérifiée en partie par Lœb et Groom sur des nauplius de Balanes, qui, à la lumière du jour, ne tardaient pas à acquérir un phototropisme négatif, semble devoir être assez nettement modifiée * 4 Die Umsechau, n° 4%, 1909. Lis ! : ? Biologisches Centralblatt, t. XXX, n° { et 2, janvier 1910. 230 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE d'après d’intéressantes expériences d'Ewald sur des Cladocères planktoniques. Cet auteur a constaté, en éclairant ces Crustacés, en aquarium, normalement à la surface de l’eau, que, s'il existe une orientation phototropique, l'animal tenant son corps parallèlement à l'axe des rayons lumineux, suivant une direction qui, dans le cas normal, est identique à celle que déterminerait la pesanteur, en revanche il ne se manifeste pas d'attraction phototro- pique proprement dite : les Cladocères, soumis à un éclairage uniforme, présentent des oscillations assez régulières, montant à la surface, et descendant en se laissant retomber sur le fond de l'aquarium, la pério- dicité des oscillations étant de l'ordre de quelques minutes ; l'animal s'éloigne ou s'approche de la lumière indifféremment, quel que soit l'éclairage, aussi faible ou aussi intense soit-il, l'intensité de l'éclairage élec- trique n'ayant d'ailleurs pas été mesurée de façon pré- cise, ce qui laisse un doute sur l'absence d’une limite supérieure d'intensité au delà de laquelle il pourrait y avoir phototropisme négatif constant. Quoi qu'il en soit, dans les limites des intensités employées par l’auteur, les intensités absolues se sont montrées sans action. En revanche, toute variation suffisamment brusque de l'intensité exerce une action très nette : s'il y à augmentation de l'éclairement, il y a phototropisme négatif, augmentation de l'activité et de l'amplitude des oscillations spontanées, puis, si la lumière redevient constante, retour à l’état d'indifférence antérieur; sil y a diminution de l’éclairement, il se manifeste un phototropisme positif, mais avec activité moindre et diminution de l'amplitude des oscillations; si l’inten- sité lumineuse baisse même trop brusquement au- dessous d’un certain seuil, il peut y avoir immobilisa- tion complète de l'animal, qui tombe et pourrait paraître s'éloigner ainsi de la lumière. Pour agir, il faut que la variation d'éclairement atteigné une certaine valeur, un certain seuil dans l'unité de temps; malheureusement, il n'y a pas de chiffres, et rien ne permet de déterminer si ce seuil est en rapport avec l'intensité primitive selon la loi de Weber, ce qui est extrêmement probable. Pfeffer, comme on le sait, l’a vérifié dans le cas de l’attraction par l'acide malique des anthérozoïdes de fougères, attraction réalisée par des augmentations locales de concentration des solutions; et, pour ce phénomène, qui appartient aussi bien à la sensibilité différentielle de Læb qu'à la sensibilité différentielle des psycho- physiciens, il serait étonnant qu'il n’en fût pas de même. En tout cas, s'il n'y a d'action que par variation lumineuse, on ne peut plus invoquer dans les migra- tions périodiques le changement de signe du tropisme provoqué par une intensité donnée d’éclairement. Voici alors l'hypothèse d'Ewald. Si, en aquarium, l'animal s'adapte à une lumière quelconque parce qu'il ne peut atteindre une zone d'éclairage plus intense ou d'éclairage moindre, dans la Nature, il se trouve adapté à un éclairage donné, et, suivant les variations de la lumière extérieure,s’enfonce ou s'élève assez pour retrouver toujours une zone où l'éclairage présente l'intensité à laquelle il est adapté, l'intensité optima pour lui. Cette intensité doit, dès lors, être une intensité minima, bien qu'Ewald ne le dise pas, celle qui est donnée à la surface de la mer dans les nuits obscures, car ces organismes doivent nécessaire- ment s'y adapter faute de pouvoir trouver plus de clarté. Une fois qu'il est adapté à cette faible intensité, lorsque vient le jour, les variations successives pro- duisent des fuites répétées menant l'animal en des zones de plus en plus profondes où il trouve toujours son faible éclairage devenu optimum par adaptation; il arrive à une profondeur limite où il se tient, jusqu'à ce que, la lumière du jour baissant, une série de mou- vements d’ascension, dus aux « poussées » de photo- tropisme positif engendrées par ‘les variations « em moins » de l’éclairement, le ramènent progressivement à la surface, où il retrouve son clair-obscur, ou, lorsque la nuit est trop claire, aux environs de la surface. Il n’y à dans cette conception qu'une difficulté : c'est que la variation continue de la lumière puisse produire les réactions par saccades, les Cladocères étudiés ne se montrant sensibles qu'à des variations suffisamment brusques. Ewald déclare que ce sont les oscillations spontanées des Cladocères qui l'expliquent, mais il n’entre dans aucun détail et cela reste bien obscur et bien douteux. Quand il compare ces organismes à un anémomètre- soustractif que le vent ne met pas en rotation, mais arrête, au contraire, en freinant un mécanisme moteur,. appareil beaucoup plus sensible que l'anémomètre ordi- naire, il fait comprendre, à la rigueur, que les Clado- cères soient, grâce à leurs mouvements spontanés, particulièrement dociles aux réactions induites par des. variations d'éclairage qui ne seraient peut-être pas capables d'engendrer seules des mouvements. Mais cela laisse intact le problème capital : Comment des. variations continues vont-elles agir de façon discon- tinue et par saccades? Il faudrait d'abord savoir si le fait est réel et déterminer exactement le seuil différen— tiel de la réaction suivant les intensités lumineuses, puis comparer les chiffres à des mesures photomé- triques des variations de la lumière dans l'unité de- temps au cours du cycle nycthéméral. Mais, mème sk l'interprétation devait encore se faire attendre, il y a là en tout cas une donnée qui permettrait de savoir Si l'hypothèse d'Ewald est réellement vérifiée. Elle est en tout cas séduisante, et tient compte des faits qui contredisent l'hypothèse première de Læb. H. Piéron, Docteur ès Sciencese $S S. — Sciences médicales La diaphylaxie. — Par plusieurs milliers d'expé- rimentations cliniques suivies depuis plus de trois ans- et dont certaines ont été publiées (Sociétés de Neuro-. logie, de Biologie, Académie des Sciences, Académie de Médecine), le D° Pierre Bonnier s'est efforcé de- définir le rôle des centres nerveux bulbaires dans ce- qu'il a appelé la diaphylaxie, c'est-à-dire la lutte de- l'organisme contre l'infection. Dans tout état infectieux, la question qui se pose est littéralement celle-ci : lequel, du microbe ou de l’or- ganisme envahi, digérera l'autre? Chacun s'efforce de- neutraliser la résistance de l'autre par ses toxines et ses antitoxines, et exerce sur lui toute sa capacité digestive. Exactement comme la digestion alimentaire, la digestion diaphylactique est sous la régie directe des centres bulbaires, d’après les nombreuses expé- riences de l’auteur. À côté des procédés pastoriens qui permettent d'amoindrir la toxicité et la capacité diges- tive du microbe, il est donc utile de chercher le moyen pratique de réveiller ou d’exalter la vigilance et l’acti- vité des centres diaphylactiques, quand leur défaillance a permis l'invasion microbienne. Ces centres, que Cl. Bernard et d’autres expérimen- tateurs atteignaient par le quatrième ventricule, mais pour les détruire, on peut souvent, avec la plus grande facilité, les solliciter, les réveiller par la cautérisation très légère du nerf de la muqueuse nasale, en des points conjugués, que la morphologie de cette région rend facile à trouver, à moins d'anomalies dans la dis- tribution nerveuse. M. le D' Bonnier cite de nom- breux cas où, très rapidement et d'une facon durable, il a pu constater la disparition de troubles de tout ordre. diathésiques ou infectieux, si profonds et si anciens qu'ils fussent. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 231 L’'AVIATION DEUXIÈME PARTIE : LES MOYENS DE RÉALISER LE VOL MÉCANIQUE Dans une première partie", à la suite de considé- ‘alions générales sur l'aviation, nous sommes ar- rivé à cette conclusion qu'en adoptant la susten- tation orthoptère, le seul moyen de soutenir un poids donné sans dépense exagérée de travail, c'est de diminuer la charge par mètre carré, et à cet effet d'augmenter l'étendue de la surface sustentatrice. I. — LA QUALITÉ SUSTENTATRICE. Cela parait très simple en théorie, mais, dans la pralique, cela présente d'énormes difficultés, au moins pour les appareils de grandes dimensions. Ces surfaces, en effet, ont un poids qui n’est pas négligeable, et, lorsqu'on veut leur donner une cerlaine étendue et qu'il s'agit d'appareils d'un poids total élevé, le poids des surfaces sustenta- trices devient tel qu'il serait absolument prohi- bitif; il absorberait toutes les disponibilités, et il ne resterait plus rien pour le moteur, les passagers et l’'approvisionnement. Il faut d’ailleurs remarquer que, sous ce rapport, les gros appareils sont dans des conditions beau- coup moins favorables que les petits. Considérons, eu effet, deux appareils d'aviation géométrique- ment semblables et formés de matériaux de même densité : les surfaces sustentatrices ont des étendues proportionnelles au carré des dimensions homo- logues ; le volume des appareils et leur poids sont, au contraire, proportionnels au cube de ces mêmes dimensions. Il en résulte que la charge par mètre carré dans les appareils semblables augmente pro- portionnellement aux dimensions linéaires. Si l’on double les dimensions de l'appareil, on a donc une charge par mètre carré deux fois plus forte; c'est le contraire qui se passe si les dimensions linéaires diminuent. Or, que voyons-nous dans la Nature? Les plus grands oiseaux volateurs ont une charge de 10 kilogs par mètre carré; pour certains d’entre eux, les vautours, par exemple, l'envergure est d'environ 2%,50. Si nous considérons des oiseaux de dimensions dix fois plus petites, ayant une envergure de 25 centimètres seulement et géo- métriquement semblables, ils ne porteront plus que 1 kilog par mètre carré; si l’on réduisait les dimensions à 25 millimètres, la charge par mètre carré ne serait plus que de 100 grammes. Or, avec ces charges, la vitesse fictive d'ascension et, par con- 1 Voir la Revue du 45 mars 1910, p.483 el suiv. séquent, la difficulté de la sustentation diminuent dans de fortes proportions. Un appareil orthoptère portant 10 kilogrammes par mètre carré devrait avoir une vitesse fictive d'ascension de 11,53 ; s'il ne porte que 1 kilog, la vitesse fictive d'ascension sera réduite à 3,65; s’il ne porte que 10 grammes par mètre carré, ce qui serait le cas d'un animal volateur ayant environ 2 millimètres et demi d’en- vergure, la vitesse fictive d'ascension ne serait plus que de 0,11. Or, cette dernière vitesse correspond à peu près à la force musculaire de l’homme. On ‘constate, en effet, qu'un alpiniste moyennement entrainé peut gravir 400 mètres à l'heure, et comme il y a 3.600 secondes dans une heure, il s'élève par se- conde de 11 centimètres environ. Si l'on pouvait réaliser un appareil du système orthoptère dont la charge par mètre carré ne serait que de 10 grammes, la sustentation pourrait être obtenue moyennant une dépense d'énergie égale à celle que fait norma- lement un excursionniste en pays de montagnes. Mais nous venons de voir que cette charge par mètre carré ne serait possible que pour des ani- maux de très petites dimensions : leur envergure serait la millième partie de celle d'un vautour et, par conséquent, leur volume et leur poids seraient un million de fois plus faibles, c'est-à-dire qu'un de ces animaux pèserait moins d'un centigramme. On pourrait donc conclure de là que la susten- tation par le système orthoptère peut être appliquée par certains animaux dont le poids ne dépasse pas un centigramme ; en réalité, ce système peut être employé par des animaux sensiblement plus grands, car il est plus facile de développer davan- tage les surfaces sustentatrices dans de petits appareils que dans de gros. On doit donc admettre que la similitude géométrique n’a pas lieu à ce point et qu'à proportion de leurs dimensions linéaires, les petits volateurs ont des surfaces sustentatrices plus développées que les gros. Quoi qu'il en soit, la sustentation orthoptère peut être employée par des animaux pesant jus- qu'à un décigramme, peut-être même davantage, mais elle n’est certainement pas employée par les volateurs de grandes dimensions. Plusieurs auteurs ont pesé des animaux vola- teurs et mesuré leur surface sustentatrice. Bor- nôns-nous à citer deux résultats : la chauve-souris nyctinome, d'un poids total de 6 grammes, a une charge par mètre carré de 0 kil. 637. Pour appli- 232 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION quer le système orthoptère, il lui faudrait une vitesse fictive d'ascension de 2%,92 par seconde. Elle serait donc obligée de déployer une énergie musculaire qui serait à peu près vingt-sept fois celle d’un alpiniste. Si nous passons au vautour oricou, dont le poids total est de 8 kil. 152, sa charge par mètre carré est de 7 kil. 323, et sa vitesse fictive d’ascension devrait être de 9,89. L'énergie que devrait dé- penser 1 kilog de musele de cet animal, uniquement pour se soutenir, serait donc égale à 90 fois environ celle que dépense 1 kilog de musele d'alpiniste. Il est absolument invraisemblable qu'une chauve- 27 fois mieux douée et un vautour 90 fois mieux doué qu'un homme au point de vue de l'énergie musculaire. Il est donc évident, à priori, que ce n'est pas par le système orthoptère que les oiseaux volent. 11 faut, pour expliquer la sustentation, faire intervenir une notion nou- velle : c’est celle à laquelle le colonel Renard à donné très heureusement le nom de qualité susten- latrice. Considérons deux appareils d'aviation : le pre- mier est du système orthoptère, son poids est P, le travail nécessaire à la sustentation est T et sa sur- face sustentatrice est S. Considérons un autre appareil, dont le poids soit P’ et avec lequel, grâce à la dépense d'un travail de T/ par seconde, on ob- Lienne la sustentation au moyen d'une surface de dimension S'. Nous savons que les formules (9) et (10) (voir p.193 et 195) et les formules (12), (13) et (14) (voir p. 195 et 196) qui en sont la conséquence font connaître, pour le système orthoptère, les relations qui existent entre T,PetS. Pour l'appareil d'aviation d'un autre système, il existe des relations entre T', P'etS'. Non seulement ces relations existent, mais elles sont de la même forme, à un coefficient près, que celles du système orthoptère. Le point capital, en effet, que nous avons signalé à propos de ce dernier système, est le suivant : la caractéristique de la valeur d’un appareil au point de vue de la sustentation n’est pas le rapport T/P, mais le rapport T'/P°. Or, ce que nous avons supposé pour arriver à cette conclusion en ce qui concerne le système orthoptère, c’est tout sim- plement que la résistance de l'air est proportion- nelle au carré de la vitesse. Cette loi, étant géné- rale, s'applique à tout système de sustentateur aussi bien qu'au système orthoptère. Dans le système orthoptère, nous avons vu, d'après la formule (9), que le poids de l'appareil est égal à KSV°. Avec un système de sustentation quel- conque, la force sustentatrice sera loujours propor- tionnelle à l'étendue de la surface porteuse et au carré de la viesse relative de cette surface par souris soil rapport à l'air ambiant. Nous aurons donc pour la formule de la susten- tation : 15) P==ASINE La seule différence avec la formule du système orthoptère est que le coefficient &, au lieu d'être égal au coefficient K de la résistance de l'air, aura une valeur quelconque, dépendant de la nature et de la forme de l'appareil, ou du système adopté en un mot. Si, maintenant, je veux évaluer le travail par unité de temps, il faudra multiplier la force sustenta- trice par la projection, sur la direction de cette force, du chemin parcouru pendant l'unité de temps. Mais ce chemin, quelle que soit la compli- cation du système, sera proportionnel à la vitesse, et il en sera de même de sa projection sur la direc- lion de la force sustentatrice. Il faudra donc, pour obtenir le travail, multiplier P par la vitesse V et par un certain coefficient que nous appellerons £ et qui, comme £, dépendra de la forme de l'appareil. Le travail sera exprimé par la formule : LESSNE Lorsque nous formerons la fraction T*/P°, nous aurons donc, comme dans le cas du système or- thoptère, V5 au numérateur et au dénominateur, S® au numérateur, S° au dénominateur, et finale- ment une équation de la forme : (17 Di À résultant d'une combinaison des coefficients, en sorte que la formule, à un coefficient près, est identique à celle du système orthoptère. Seulement, il y à une différence : c’est que le coefficient du second membre, au lieu d’être égal à K, c’est-à-dire à 0,075, a une valeur À qui dépend de la nature et de la forme de l'appareil employé. De même que, dans le système orthoptère, nous avons trouvé utile de modifier la formule (12) afin de faire apparaître, d'une part, la vitesse fictive d'ascension et, d'autre part, la charge par mètre carré, comme on le voit dans les formules (13) et (14), de même nous transformons la formule (17) que nous pouvons écrire : Ke IDL\S DNIPOPI de ()=5xs ou encore : Fi NA 1 JP! (19) RER SG Nous voyons donc que, dans un système susten- tateur quelconque, il y a une vitesse fictive d'ascen- sion qui est proportionnelle à la racine carrée de la charge par mètre carré. Pour rendre la sustentation économique, il faut COMMANDANT PAUL RENARD — diminuer autant que possible la vitesse fictive d'ascension. Dans un système quelconque, comme dans le système orthoptère, nous avons la possibi- lité ‘de réduire la charge par mètre carré; nous avons, en outre, au moyen de dispositions spé- ciales, à chercher à augmenter le coefficient À. Il est évident, en effet, que, plus ce coefficient sera grand, plus faible sera la vitesse fictive d’ascension par rapport à la charge par unité de surface por- teuse. Supposons que nous ayons deux appareils, l’un orthoptère, l'autre d'un système différent, pour lesquels la vitesse fictive d'ascension soit la même, mais dont la charge par mètre carré soit diffé- rente. Si le deuxième système a une charge double par mètre carré, nous dirons avec le colonel Renard que sa qualité sustentatrice est de deux. S'il a une charge triple, sa qualité sustentatrice sera de trois, et ainsi de suite. Cette conception est absolument rationnelle, car dire que la charge par mètre carré est double pour une même vitesse fictive d'ascension, c'est dire que, moyennant une mème dépense de travail, on arrive à faire porter deux fois plus à une surface donnée; par conséquent, dans le deuxième cas, la surface est deux fois plus efficace au point de vue de la sustentation : on peut donc dire que sa qua- lité sustentatrice est double. Désignons par Q cette qualité. Comme nous avons supposé que les vitesses fictives d'ascension sont les mêmes dans les deux cas, on a : T T BF En nous reportant aux équations (13) et (18) nous trouvons : ; PR (21) Rs D'après la définition que nous venons de donner de la qualité sustentatrice, on a évidemment : (22) et d'après l'équation (21) : (23) = La qualité sustentatrice est donc proportionnelle au rapport de ce coefficient À au coefficient fonda- mental K. Augmenter la qualité sustentatrice revient par suite, dans la pratique, à avoir un secret merveilleux pour augmenter le coefficient de la résistance de l'air, et ce secret est d'autant plus merveilleux que nous n’augmentons ce coefficient qu'au point de vue de la sustentation, c'est-à-dire “ans le cas où il nous est utile, el, par une rare L'AVIATION 233 bonne fortune, nous pouvons lui laisser sa valeur réelle au point de vue de la résistance à l'avance ment, c'est-à-dire quand nous considérons l'air comme un obstacle nuisible. La question de la qualité sustentatrice peut être envisagée sous différents point de vue : si, par exemple, on suppose que les surfaces porteuses el les vitesses fictives d'ascension restent les mêmes, on peut dire que la qualité sustentatrice sera pro- portionnelle au poids lotal de l'appareil. Si lon suppose, au contraire, deux appareils de même poids et de mêmes vilesses ficlives d'ascension, les qualités sustentatrices seront en raison inverse de l'étendue des surfaces porteuses. Si, enfin, on suppose la même charge par mètre carré, les qua- lités sustentatrices seront en raison inverse de la racine carrée de la vitesse fictive d'ascension. IL. — MOYENS D'AMÉLIORER LA QUALITÉ SUSTENTATRICE. Nous avons retourné à peu près sous toutes ses formes cette question de la qualité sustentatrice, de manière à bien en faire voir l'importance. Reste à indiquer quels sont les moyens dont on dispose pour l'améliorer. On en connaît aujourd'hui trois principaux : le premier et le plus important de tous est l'attaque oblique. Il est actuellement reconnu par tous les aviateurs que, lorsqu'au lieu de frapper l’air perpen- diculairement, comme dans le système orthoptère, on s'arrange de manière que la surface sustenta- B EE —— A Courant d'air relatif DCE trice AB (fig. 1) soit rencontrée par un courant d'air sous une faible incidence, on améliore dans de grandes proportions la qualité sustentatrice. Cet angle d'incidence, x, est généralement désigné en aviation sous le nom d'angle d'attaque. L'attaque oblique ou vol oblique, c'est là le grard facteur de l'amélioration de la qualité sustentatrice. Ce fait, aujourd'hui généralement admis, à été longtemps contesté : ce fut la grande querelle des simplistes et des quadratistes. Pendant la plus grande partie du xix° siècle, les personnes qui s’in- téressaient à l'aviation appartenaient à l’un de ces deux partis irréconciliables, et, si leur querelle fit moins de bruit que celle des nominalistes et des réalistes du Moyen-Age, cela tient au petit nombre des champions, car, pendantune centaine d'années, 234 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION les deux camps réunis n'ont certainement jamais compris dans le monde entier plus d'une vingtaine de personnes à la fois. Mais l’acharnement des adversaires était aussi grand. Bien que cette querelle soit aujourd'hui complè- tement oubliée, il n’est pas inutile de faire voir en quoi elle consistait. Lorsqu'un plan AB (fig. 2) est rencontré sous un angle par un courant d'air, l'ensemble de la résis- Fig. 2. tance de l'air sur cette surface à une résultante R qu'on peut décomposer en deux forces, l’une N, normale à la surface, et l'autre T, tangentielle. L'expérience constate que, si l'angle & est faible, la force tangentielle est peu importante; s'il s'agit d'une surface sustentatrice déplacée horizontale- ment et peu inclinée sur la direction du mouve- ment, la force normale N voisine de la verticale est de beaucoup la plus intéressante au point de vue de la sustentation. Or, les quadratistes prétendaient, d'après New- ton, que la réaction normale N est proportionnelle au carré du sinus de l'angle &; les simplistes, au contraire, abritant leurs idées sous le patronage d'Euler, affirmaient que cette réaction est propor- tionnelle, non pas au carré du sinus, mais au sinus simple de l'angle d'inclinaison. Les autorités sur lesquelles on s’appuyait étaient éminemment respec- tables l’une et l’autre, et l'expérience seule pouvait décider qui avait raison. L'Académie des Sciences de Paris éprouva, vers la fin du xvm°-siècle, le besoin de faire trancher la question entre Euler et Newton, et chargea Borda d'exécuter des expé- riences dans ce but. Inutile de dire avec quel soin et quelle méthode ces expériences furent faites. Le résultat fut absolument en faveur du sinus simple, ce qui n'empêcha pas, pendant une centaine d'années, le sinus carré de conserver des partisans convaincus. Ces partisans se rattachaient d'ailleurs à une école de mathématiciens purs, qui posent une pre- mière équation comme représentant un principe évident, sans se rendre compte que ce soi-disant principe peut être fort contestable; partant de là, ils enfilent des équations à perte de vue pour en tirer des conséquences. Nous ne les suivrons pas dans leurs caleuls, et nous nous bornerons à faire remarquer que, si la loi du sinus carré était vraie, il nv aurait aucun avantage à faire de l’atlaque oblique. La qualité sustentatrice serait toujours la même, quel que soil l'angle d'inclinaison et, en particulier, si cet angle était de 90°; le vol oblique et le vol orthoptère seraient équivalents, c'est-à-dire impraticables. C'est ce qu'exprimait avec esprit un des partisans du sinus simple en disant que ses adversaires, les quadratistes, dépensaient énormément de science et d'ingéniosité pour arriver à démontrer que les oiseaux ne pouvaient pas voler ‘. Si l’on admet, au contraire, la loi du sinus sim- ple, l'attaque oblique présente un avantage énorme. Si nous nous reportons, en effet, à la figure 9, il nous est facile d'évaluer la force sustentatrice et le travail nécessaire à la sustentation. Nous supposons que l’angle « est petit. La force sustentatrice verti- cale Fest égale, d'après la figure, à N cos &. Mais, comme & est petit, nous pourrons remplacer cos « par l'unité et écrire : N— EF. D'autre part, si l’on admet la loi du sinus, on aura : (24) NES VE SIN 0: Dans cette formule, KSV* est la valeur qu'aurait la résistance de l'air dans le cas du système orthop- tère, sest l'angle d'inclinaison, et 8 un certain coef- ficient que l'expérience servira à déterminer. Si, comme nous l'avons supposé, N est égal à EF, d'autre part, pour qu'il y ait sustentation, il faut que la force verticale P soit égale au poids de l'appareil. On peut donc écrire : (25) — &KSV? sin &. Quant au travail, il est égal, en négligeant la composante tangentielle, au produit de l'effort par la projection du chemin parcouru sur la direction de l'effort. Or, l'effort est égal à P; quant au chemin parcouru pendant l'unité de temps, il est égal à V, vitesse de translation horizontale du plan oblique. Soit CE cette vitesse. Mais sa projection paralle- lement à l'effort est égale à EG, c'est-à-dire à Vsin +. Le travail T est donc égal à PV sin & et comme, d'après l'équation (25), nous connaissons la valeur de P, nous en concluons pour T : (26) \T— $KS\° sin? «. Si nous voulons maintenant apprécier l'efficacité du sustentateur oblique, nous n'avons qu'à former ! Le lecteur désireux d'être renseigné d'une facon un peu plus précise sur cette question pourra se reporter aux confé- rences que j'ai faites en janvier et en février 1909, à la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, et notamment à la quatrième conférence publiée dans le Bulletin de cette Société du mois d'avril 1909. Ces confé- rences, réunies en un volume, ont été éditées à la librairie Dunod et Pinal. COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION la fonction caractéristique T°/P° déjà connue, Nous {trouvons : V' sin! « Ps GRESS VS sit @ T2 fEK'S et en réduisant : T* sin«a 27 + = mms 7 Di fKS Cette formule est presque identique à la formule (42) relative au système orthoptère, mais elle en diffère par deux points : le premier, c'est que la coefficient K du dénominateur doit être multiplié par un certain coefficient B qui résultera de l'expé- rience. Cela peut améliorer la qualité sustentatrice, mais d'une facon indépendante de l'angle &. Ce qui est beaucoup plus intéressant, c'est de voir que cette expression contient sin & au numérateur. Par conséquent, plus « sera faible, plus le rapport T°/P° sera petit, et, en rendant & égal à zéro, on arriverait à conclure que T'/P° deviendrait nul et que, par conséquent, sans aucune dépense de travail, à la condition d'avoir un angle d'attaque nul, on arriverait à soutenir un corps dans l'air. On obtiendrait donc la sustentation gratuite. Nous verrons plus loin qu'il n'en est pas tout à fait ainsi, mais, jusqu'à certaines limites, on a un intérêl considérable à réduire l'angle d'attaque. Nous allons transformer la formule (27) comme nous avons fait pour les formules analogues et nous trouvons : Mein P (5) MERS et enfin : ni Sin x P (29) Des /sin % VE P_ N ET XVS Dans cette formule, comme dans celle de la sustentation orthoptère, nous voyons que la vitesse fictive d’ascension est proportionnelle à la rasine carrée de la charge par mètre carré. Ceci est vrai pour tous les systèmes de sustentation possibles ; mais l'autre facteur du second membre de l'équa- lion, au lieu d'être un simple résultat d'expérience 1 contient bien VE qui K pK notre volonté, mais il contient au numérateur \/Sins que nous sommes maitres de modifier. Il nous suffit, pour cela, de changer l'angle d'attaque, el nous voyons que ce facteur tend vers zéro lorsque l’angle d'attaque diminue indéfiniment. Nous pouvons donc, théoriquement, abaisser au delà de toute limite la vitesse fictive d’ascension el avoir ainsi une sustentation aussi avantageuse que possible. Quant à la qualité sustentatrice, si l’on se reporte à ce que nous en avons dit plus haut, elle est égale à 2/K. Mais ici, À est égal à comme échappe à BK/Sinz. On à donc, dans le cas de l'attaque oblique, pour la qualité sustentairice la formule : G 3 (30 Q LE SIN œ Cette qualité est, par suile, en raison inverse de l'angle d'attaque. Quelle que soit la manière dont on retourne la question, quand on admet la loi du sinus simple, on arrive forcément à constater les grands avan- ages de l'attaque oblique. Nous avons démontré plus haut qu'il est impos- sible que les grands oiseaux puissent voler dans les conditions du système orthoptère : l'observation démontre qu'ils pratiquent le vol oblique, atta- quant l’air sous de très faibles incidences : ils x trouvent certainement un avantage. D'autre part, en admettant la loi du sinus simple, on arrive à conclure que l'attaque oblique sous de faibles angles doit être avantageuse, Par conséquent, sans s'en douter, depuis des milliers d'années, les grands oiseaux démontraient par leur vol plané la vérité de la loi du sinus simple et la fausseté de celle du sinus carré. Les expériences de Borda et de ses successeurs n'ont fait qu'apporter une démonstra- tion directe à un fait dont la preuve indirecte étail donnée depuis longtemps. En réalité, la réaction normale n’est pas rigou- reusement proportionnelle au sinus de l'inclinai- son. Beaucoup de chercheurs ont essayé de repré- senter par une formule la fraction N, N,,. Dans cette fraction, le numérateur exprime la valeur de la composante normale pour un angle d'attaque 7, et le dénominateur la valeur de cette mème compo- sante pour un angle égal à 90°. Je crois inutile de donner ici ces formules, que le lecteur pourra trouver dans mes conférences déjà citées à la Société d'Encouragement. Bornons-nous à dire que, pour de petits angles, elles reviennent à la loi du sinus simple, en donnant au coefficient 8 la valeur ‘2. On aurait N—2KSV* sin ©. donc dans ce cas: Après l'attaque oblique, le meilleur d'améliorer la qualité sustentatrice, c'est de don- ner aux surfaces porteuses, dans le sens perpendi- culaire à la marche, des dimensions beaucoup plus considérables que dans le sens du mouvement. I serait plus exact de dire que c'est à cette condition seule que l'on bénéficie complètement des avan- tages de l'attaque oblique. La loi du sinus simple n’est vraie et ne produit toutes ses conséquences Inoven heureuses que lorsque les sustentateurs sont très développés dans le sens transversal et de dimen- sions restreintes dans le sens de la marche. C'est ce qui a lieu pour tous les grands volateurs, et 236 depuis longtemps le bon sens populaire s'en est rendu compte; on apprécie, en effet, les qualités volatrices d'un oiseau d’après son envergure, c'est- à-dire d’après la dimension transversale de sa sur- face sustentatrice. On peut même démontrer mathématiquement que, si l’on disposait un sustentateur oblique de manière qu'il ait de très grandes dimensions dans le sens du mouvement, et de très faibles dans le sens transversal, la loi du sinus carré serait exacte, et qu'alors l'attaque oblique ne présenterait aucun avantage (voir pour la démonstration les confé- rences déjà citées de la Société d'Encourage- ment). Aussi les oiseaux planeurs se gardent-ils bien de replier leurs ailes en arrière, ou, s'ils le font, c’est quand ils veulent diminuer leur qualité sustenta- trice pour descendre avec rapidité. Enfin, après l'attaque oblique et après l’enver- gure, un moyen incontestable d'améliorer la qua- lité sustentatrice, c’est de donner aux surfaces porteuses non pas une forme plane, mais une forme courbe dont la concavité soit dirigée vers le bas. Cette courbure est faible; les aviateurs pré- tendent que la flèche ne doit pas dépasser un dixième de la largeur des sustentateurs, largeur mesurée dans le sens de la marche. C'est à peu près ce que présentent les ailes d'oiseaux. D’autre part, on est d'accord pour penser qu'il est préfé- rable que la courbure soit dissymétrique, c'est- à-dire plus prononcée vers l'avant que vers l’ar- rière. Mais ce sont là des notions vagues qui deman- deraient à précisées, et malheureusement aucune expérience précise digne de foi n’a encore été faite. C'est évidemment une lacune à combler, mais ce c'est qu'une courbure modérée des sustentateurs est avantageuse. être que l’on sait, En résumé, les trois grands moyens d'améliorer l'attaque oblique, l’envergure et la courbure des surfaces porteuses. la qualité sustentatrice sont : III. — SUSTENTATION DÉPENDANTE OU INDÉPENDANTE. Avant de quitter celle question de la sustenta- lion et de passer au troisième point de vue sous lequel il convient d'envisager la résistance de l'air dans l'aviation, il n'est pas inutile de dire quelques mots de la manière pratique dont on peut réaliser la sustentation oblique, la seule qui puisse donner des résultats. La sustentation d'un appareil d'aviation peut être dépendante ou indépendante de la marche horizon- tale de l'appareil; il est évident qu'au point de vue de la commodité des manœuvres, la sustentation COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION indépendante est de beaucoup préférable. Avec la sustentation dépendante, ce qui est le cas pour les aéroplanes et les grands oiseaux volateurs, l'appareil ne peut se maintenir à une hauteur déterminée qu'à la condition de progresser rapi- dement; dès qu'il s'arrête, il tombe, Comme nous le verrons plus tard, ce n’est pas toujours la chute verticale et désastreuse; ce doit être, et heureu- sement, dans la plupart des cas, c'est la descente en pente douce. Toujours est-il que, pour les appa- reils de ce genre, la sustentation est incompatible avec le stationnement sur une même verticale. D'une manière générale, un appareil d'aviation à sustentalion dépendante ne peut se soulenir que s'il est animé d'une vitesse horizontale par rapport à l'air ambiant, et cette vitesse doit tou- jours, dans la pratique, être considérable. C'est à cause de cet inconvénient que les aéroplanes ont besoin pour leurs départs et leurs atterrissages de disposer de vastes plaines; ils partagent d’ailleurs cet ennui avec les grands volateurs naturels, et, lorsqu'on veut retenir en captivité des aigles ou des condors, il n’est pas nécessaire de les enfermer dans une cage: il suffit de les placer dans une enceinte entourée de murs ou de barrières, à con- dition que les dimensions de cette enceinte soient assez petites pour qu'il leur soit impossible de prendre leur essor avant d'être arrêtés par la elô- ture qui les entoure. Les appareils à sustentation indépendante sont done d'un emploi beaucoup plus commode; aussi a-t-on cherché à les réaliser depuis longtemps. En laissant de côté tous les systèmes de sustentation orthoptère et tous ceux qui s'en rapprochent, il n'y à qu'un seul moyen d'appliquer mécanique- ment la sustentation oblique, d’une facon indé- pendante de la marche : c’est de munir l'appareil d'une ou plusieurs hélices à axe vertical. Ces hélices, animées d’un mouvement de rotation ra- 1 Toutefois, il est indispensable de remarquer que, dans ce qui précède, nous ne parlons que des mouvements de l'appareil par rapport à l'air supposé calme ; il sera possible de voir à certains moments un aéroplane ou un oiseau planeur stationner longtemps au-dessus du même point, mais c'est qu'alors leur vitesse horizontale propre sera égale et directement opposée à la vitesse du vent. Par un vent du nord de 60 kilomètres à l'heure, l'aéroplane du comte de Lambert aurait pu stationner au-dessus de la tour Eiffel : mais, pendant ce temps-là, son moteur et son hélice se seraient comportés de manière à propulser l'appareil vers le nord à la vitesse de 60 kilomètres à l'heure, et pour l'avia- teur la sensation aurait été exactement la même que s'il avait opéré en air calme; il aurait senti en face de lui un courant d'air de 60 kilomètres à l'heure, et un anémomètre installé à bord de l'aéroplane aurail indiqué cette vitesse. Seule la vue de la tour Eiffel, placée au-dessous de lui, l'aurait averti de son immobilité par rapport au sol; mais, si un nuage était venu lui dérober la vue du monument, rien ne l'aurait informé de son stationnement, et il aurait pu se croire emporté vers le nord à grande vitesse. COMMANDANT PAUL RENARD — L’AVIATION 237 pide, peuvent développer une poussée de bas en haut égale au pas de Fappareil. On à donné à ce genre de navire aérien plus lourd que l'air le nom d'hélicoptère, et il est réalisé depuis longtemps sous la forme de ces jouets que tout le monde connait. Il y à une précaulion à prendre avec ces appa- reils : c’est d'empêcher l’ensemble du navire aérien de tourner sur lui-même en sens inverse de l'hélice, en vertu du principe de l’action et de la réaction; le meilleur moyen de S'y opposer est d'avoir deux hélices identiques, tournant à la même vilesse, en sens inverse l’une de l’autre; c'est déjà une complication. Nous verrons plus loin qu'il y en à d’autres. Mais ce n'est pas cela qui à empêché jusqu'ici les hélicoptères d'être employés dans la pratique : c’est l'infériorité de leur qualité susten- latrice. Le colonel Renard à défini cette quantité, en ce qui concerne les hélices porteuses. Pour elles, comme pour tous les systèmes de sustentation, ce qui caractérise leur valeur, c'est le rapport du carré du travail au cube du poids de l'appareil ; nous avons vu plus haut l'importance de cette fraction T°/P°. On peut imaginer un sustentateur orthoptère, c’est-à-dire dans lequel des plans hori- zontaux frappent l'air verticalement, pour lequel celte fraction caractéristique sera la même que pour une hélice donnée ; on dit alors que les deux appareils sont équivalents au point de vue de la sustentation, et, en fait, dans toutes les circons- lances possibles, la dépense de travail dynamique pour soutenir un poids donné sera la même pour l'un comme pour l’autre. Pour apprécier la qualité sustentatrice d'une hélice, il suffit de se rendre compte du rapport des dimensions du cerele décrit par ses palettes, et désigné sous le nom de rerrle balaye, et de celles du plan mince orthogonal équi- ralent. Si ces dimensions sont les mêmes, on dit que l'hélice a même qualité sustentairice que le plan mince, ou que sa qualité sustentatrice est égale à l'unité. Si la surface du cercle balayé par l'hélice n’est que la moitié de celle du plan mince équivalent, on dit que la qualité sustentatrice est 2, et, en effet, avec une surface moitié moindre, on arrive à supporter le même poids moyennant un ième travail. Plus le cercle balayé est petit, par rapport au plan mince de même efficacité, plus la qualité sustentatrice de l’hélice est considérable. Or, d'après les expériences du colonel Renard, la meilleure qualité qu'il ait obtenue a été de 1,14; c'est donc un peu meilleur que le plan mince ortho- gonal, mais pas beaucoup. Ilest vrai de dire que le poids d'une hélice est notablement inférieur à celui d'un plan mince qui aurait même surface que le cercle balayé; néanmoins, jusqu'à présent, les hélices à axe vertical sont des sustentaleurs mé diocres, dans lequels l'énergie est gaspillée. Les conditions pourront s'améliorer, car le colonel Renard à démontré que la qualité sustentatrice des hélices pouvait atteindre un maximum de 6: dans ce cas, leur application comme sustentateur devien- drait infiniment plus avantageuse. Quoi qu'il en soil, dans l'état actuel, pour soutenir un poids déterminé avec une hélice à axe vertical, il faut dépenser beaucoup plus d'énergie que dans le cas de la sustentation dépendante. Cette dernière consiste à disposer sur le navire aérien des surfaces sustentalrices de grande enver- gure et légèrement relevées vers l'avant. Ces sur- faces sont fixes par rapport à l'appareil, ce qui est une grande simplification dans la construction et le fonctionnement. On imprime à l’aéronef un mou- vement horizontal rapide, au moyen d'un moteur et d'un propulseur, comme s'il s'agissait d’un ballon dirigeable; et, par le fait même de ce mou- vement, les surfaces sustentatrices inclinées sont léchées par un courant d'air rapide, qui engendre par sa réaction la force sustentatrice désirée. Les appareils de ce genre sont désignés sous le nom d'aéroplanes. Outre l'avantage de la simplicité de la construction, ils ont celui d'une utilisation mécanique très supérieure à celle des hélicoptères. C'est là un fait d'expérience, mais on peut s'en rendre assez facilement compte. Pendant la rota- tion d'une hélice à axe vertical, les palettes ren- contrent toujours la même colonne d'air, qui n’a pas eu le temps de se renouveler entre deux pas- sages des paiettes au même point; les sustentateurs d'un aéroplane, au contraire, rencontrent, dans leur marche, de l'air toujours nouveau, qu'il faut dévier de sa position, el qui procure à chaque ins- tant une réaction sustentatrice aussi forte qu'au début. C'est évidemment une raison de sentiment qui n'a rien de bien précis ; elle suffit néanmoins à expliquer la supériorité des sustentateurs aéro- planes par rapport aux hélicoptères. C’est pour cela que, malgré les inconvénients pratiques que présente la sustentation dépendante, on se résigne à l’adopter exclusivement jusqu'ici; à actuelle, on ne peut réaliser la sustentation indé- pendante sans un gaspillage d'énergie, et nous ne sommes pas encore arrivés au moment Où nous l'heure pourrons nous permettre semblable proaigalité. IV. — L'AIR CONSIDÉRÉ COMME POINT D'APPUI. Il nous reste maintenant à envisager la résistance de l'air sous un troisième aspect; après l'avoir con- sidéré comme un obstacle, puis comme un support, nous allons considérer l'air atmosphérique comme 238 COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION un point d'appui, gràce auquel on peut employer de l'énergie mécanique à imprimer un déplacement horizontal à un navire aérien. Au premier abord, la question du point d'appui ne semble pas différer de celle du support. Lors- qu on envisage la résistance de l’air à ce dernier point de vue, on cherche à s'arranger de facon à obtenir, grâce à elle, une force verticale faisant équi- libre au poids de l'appareil, tandis que, dans le cas du point d'appui, on cherche à obtenir un effort horizontal faisant équilibre à la résistance que l'air oppose à l'avancement du navire aérien. Les deux problèmes paraissent done identiques; mais, en réalité, s'ils présentent des analogies réelles, ils diffèrent profondément l’un de l’autre. 11 convient d'abord de remarquer que, s'il s'agit de sustentation, la force à obtenir est constante et égale au poids de l’appareil. Quand il s'agit, au contraire, de propulsion, la force que l’on désire réaliser varie avec la vitesse du véhicule, et nous savons que, pour un aéronef donné, celte force est proportionnelle au carré de la vitesse d'avance- ment. C’est déjà une différence, mais elle n'est pas de très grande importance; la variabilité de la résistance à l'avancement du navire aérien n'a qu'une seule conséquence, c'est qu'à une force propulsive donnée correspondra une vitesse d’avan- cement déterminée. En appliquant cette simple considération, on arriverait à savoir tout ce qui intéresse les propul- seurs, si l’on avait une connaissance suffisante de la question des sustentateurs. Mais il y a une autre différence beaucoup plus importante. Lorsqu'il s’agit d'un sustentateur, on opère sur un air primitivement immobile, et les expériences dites au point fixe peuvent parfaite- ment servir à connaitre ce qui se passera dans la réalité. Si, par exemple, en attelant un moteur de 20 chevaux à une hélice fixe, on obtient un effort de 200 kilogrammes, mesuré avec un appareil dynamométrique quelconque, on peut être certain que, si l’on emploie cette hélice à axe vertical, et si on l’actionne par un moteur de 20 chevaux, on pourra maintenir suspendu dans l'atmosphère un poids de 200 kilogrammes. Prenons lamème hélice, actionnons-la par le même moteur, mais en placant son axe horizontalement, de facon à avoir une hélice propulsive; en l'essayant au point fixe, nous constaterons que, sous l'influence d'une puissance de 20 chevaux, elle exerce dans le sens horizontal, comme elle l'avait fait dans le sens vertical, un effort de 200 kilogrammes. Supposons maintenant que nous attelions cette hélice ainsi actionnée à un dont nous aurons préalablement mesuré la résistance à l'avancement à différentes allures; à la vitesse de 10 mètres par seconde, sa navire aérien résistance a été trouvée, par exemple, égale à 30 kilogrammes. Comme cette résistance est pro- portionnelle au carré de la vitesse, à l'allure de 20 mètres à la seconde, elle sera quadruplée et égale à 200 kilogrammes; c'est précisément l'effort de traction que fournit notre hélice actionnée par un moteur de 20 chevaux. Il semble que, quand nous la placerons à bord du navire aérien, et que nous mettrons le moteur en marche, nous obtien- drons une vitesse de 20 mètres à la seconde, puisque, dans ces conditions, la résistance opposée par l'air au mouvement en avant de l’aéronef sera égale à la force de traction de l’hélice. Eh bien! ce n'est pas du tout ce qui arrivera : nous aurons la surprise de constater une vitesse notablement diffé- rente des 20 mètres espérés. Que se sera-t-il done passé? C’est que l'hélice, une fois installée à bord du navire aérien, se trou- vera dans des conditions nouvelles, par suile du mouvement relatif du navire; les choses se passe- ront comme si, étant immobile, on recevait un courant d'air venant de l'avant; dans ces condi- tions, l'hélice n’agira plus sur un air calme, comme dans les essais de laboratoire, mais elle se trouvera en présence d’un air constamment renouvelé, qui semblera marcher en sens inverse du mouvement du navire aérien. Il faut tenir compte de cette cir- constance lorsqu'on étudie les propulseurs, et c’est assez compliqué. Le mouvement en avant modifie l'incidence des filets d'air, par rapport aux palettes de l’hélice, et les choses ne se passent plus du tout comme au point fixe; il faut modifier en consé- quence la construction des hélices, et les expé- riences à faire sont très difficiles. Actuellement, on en est réduit à des tätonnements et à des règles plus où moins empiriques. Il y à pourtant un cer- tain nombre de principes simples sur lesquels tout le monde est aujourd'hui d'accord ; nous allons les énoncer rapidement. Pour les propulseurs comme pour les sustenta- teurs, le système orthoptère est très défectueux au point de vue mécanique; pour les uns comme pour les autres, l'attaque oblique est de beaucoup pré- férable. Le seul moyen pratique de réaliser l'attaque oblique dans la propulsion est l'emploi des hélices, et à l'heure actuelle tous les spécialistes sont d'avis que les autres propulseurs ne valent pas la peine d'être étudiés. Pour obtenir, au moyen d'un propulseur, une efficacité aussi grande que possible, il faut en diminuer /e recul; celte expression a besoin d'être définie rigoureusement. On appelle pas d’une hélice la quantité dont elle avancerait si elle se vissait dans l'air comme dans un écrou. Dans ce cas, à chaque tour d'hélice, le navire aérien avancerait COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 239 d'une quantité égale au pas. Mais, en réalité, l'avance par tour est inférieure au pas de l'hélice, et plus la différence proportionnelle est consi- dérable, plus il y à de recul, Si, par exemple, une hélice à un pas de 10 mètres, et qu'à chaque tour ie navire aérien n'avance que de 7 mètres, on dira que le recul est égal à 3/10 ou 30 °/,. On démontre que le rendement mécanique d’un propulseur est égal au complément du recul par rapport à l'unité *. Dans le cas qui nous occupe, le rendement serait de 0,7; on à donc tout intérêt à diminuer le recul pour augmenter le rendement. D'autre part, le recul ne dépend pas seulement du propulseur, mais aussi des dimensions et des formes du navire aérien auquel il est attelé. Pour une hélice de forme donnée, le recul est d'autant plus faible que le diamètre du cercle balayé est plus grand; d'autre part, le recul augmente avec le coefficient de résistance du navire aérien, c'est-à- dire avec le nombre par lequel il faut multiplier le carré de la vitesse pour obtenir l'effort de traction nécessaire. Pour un navire aérien très résistant, c'est-à-dire présentant une grande section trans- versale et des formes obtuses, le recul sera, toutes choses égales d'ailleurs, plus considérable que pour un navire de petite section et de formes effi- lées ; il faut done, pour avoir un rendement accep- table, proportionner la surface du cercle balayé aux dimensions tranversales de l’aéronef. Nous en tirerons immédiatement cette conclusion que les hélices propulsives des navires aériens plus lourds que l'air n'ont pas besoin d'avoir des dimensions aussi grandes que celles des aérostats dirigeables, et en fait les grandes hélices d’aéroplanes pour- “aient passer pour de petites hélices de dirigeables. Néanmoins, il est plus avantageux, au point de vue du rendement mécanique, de ne pas avoir d'hélices trop petiles, même pour les aéroplanes. J'ai déjà traité cette question des hélices propul- sives à propos des ballons dirigeables. (Voir la Revue générale des Sciences du 15 juin 1908.) Les considérations formulées s'appliquent aux aéro- planes, avec les restrictions que je viens d’indi- quer; mais nous ne nous sommes occupés jusqu'ici que du rendement mécanique. Si l’on fait inter- venir les questions de sécurité, les hélices par trop rapides doivent être proscrites, car la catastrophe de la Æépublique a surabondamment démontré le danger qu'elles peuvent présenter. V. — ORNITHOPTÈRES ET HÉLICOPTÈRES. Après avoir envisagé successivement l'air comme ! Nous renvoyons, comme précédemment, les lecteurs qui désireraient approfondir ces questions à nos Conférences «le 1909 à la Société d'Encouragement. \ un obstacle, comme un support el comme un point d'appui, il faut maintenant appliquer les différentes notions que nous avons acquises pour construire des navires aériens plus lourds que l'air, Les con- ceptions essayées jusqu'à ce jour ont abouli à trois grandes classes d'appareils : les ornithoptères, les hélicoptères et les aéroplanes. Comme leur nom l'indique, les ornithoptères sont des appareils dans lesquels on cherche à imiter le mouvement des ailes des oiseaux. Jusqu'à ces derniers temps, on désignait fréquemment ces appareils sous le nom d’'orthoptères; cette appella- tion remonte à une époque où beaucoup de gens croyaient que les oiseaux frappent généralement l'air perpendiculairement avec leurs ailes. Le lec- teur sait maintenant qu'il n'en est rien, et que cette appellation est absolument impropre; aussi le mot orthoptère est-il réservé pour désigner un genre particulier de sustentation ou de propulsion, que nous avons d’ailleurs reconnu être défectueux, et les oiseaux mécaniques à ailes animées de mou- vements alternatifs sont désignés sous le nom d'ornithoptères. Ces appareils ne seront d'ailleurs probablement jamais que des jouets scientifiques ; nous avons vu, en effet, au début de cet article que, dans les ma- chines qu'il construit, l’homme a toujours intérêt à recourir au mouvement rotatif continu, qui est interdit aux mécanismes naturels, et il n'y aaucune raison pour qu'en aviation il en soit autrement que dans tous les autres appareils mécaniques. Il est néanmoins nécessaire de dire ici quelques mots de ce que pourraient être des ornithoptères, si l’on cherchait à en construire. Les grands vola- teurs pratiquent le vol oblique, et sous ce rapport nous devons les imiter. Les différences essentielles entre leur mécanisme et celui des aéroplanes, c'est qu'un seul et unique organe, l'aile, assure à la fois la sustentation et la propulsion. On sait bien aujourd'hui que les oiseaux de grande envergure tiennent leurs ailes souvent immobiles; ces ailes étendues présentent la plus grande analogie de forme avec les surfaces sustentatrices d’aéroplanes, et fonctionnent de la même manière. Ce qu'on connaît moins bien, c’est la facon dont se fait la propulsion ; les observations sont, en effet, très difficiles. Les volateurs se trouvent sou- vent à de très grandes distances des observateurs, et on peut se méprendre sur la nature des mouve- ments de leurs ailes. Il est également difficile de savoir s'ils restent exactement à la même altitude, ou s'ils descendent lentement; il est encore plus impossible de savoir s'ils se trouvent aidés dans leur vol par des courants ascendants. C'est ce qui explique comment on peut les voir absolument immobiles, et comment on a pu supposer qu'ils se G 210 donnaient un mouvement horizontal sans aucun dé- placement de leurs ailes. Il ne doit pas en être tou- jours ainsi, et, s'ils savent profiter de circonstances favorables, ils sont certainement obligés de dépen- ser fréquemment un travail moteur pour se pro- curer la vitesse horizontale nécessaire à leur sus- tentation. L'opinion généralement admise aujourd'hui est que les grands oiseaux donnent, dans ce but, des M 2 Fig. 3. coups d'ailes d'assez faible amplitude. Pendant ce mouvement, la partie de leurs ailes la plus rap- prochée du corps oscille légèrement autour d'un axe sensiblement horizontal, mais en restant tou- jours relevée à la partie antérieure. L'ensemble des deux ailes, vu par devant, forme, ainsi que l'indique la figure 3, tantôt un A, tantôt un V très ouverts; mais, si l'on fait une section transversale, on obtient toujours la disposition représentée par la figure 4, c'est-à-dire une surface relevée vers l'avant et pouvant procurer la sustentation lors- qu'elle est frappée par un courant d'air horizontal. Pendant ce temps, la partie extérieure de chaque aile modifierait son inclinaison à chaque battement. Pendant le mouvement de descente, l’avant serait Fig. 4. ubaissé et l'arrière relevé, si bien que cette partie des ailes 'agirait à la façon d’une palette d’hélice pendant la partie descendante de sa rotation, et propulserait l'appareil vers lavant; pendant la remontée, la partie extérieure des ailes s’incline- rait, au contraire, l'arrière vers le bas, et fonction- uerait ainsi à la manière d’une palette d'hélice pen- dant la partie ascendante de sa giration; elle pro- pulserait encore dans cette position l'oiseau vers l'avant. Ainsi, d'après cette théorie, les mouvements alternatifs des ailes n’empêécheraient pas la partie centrale de celles-ci de fonctionner constamment à COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION la manière des sustentateurs d'aéroplanes; la partie extérieure fonctionnerail, au contraire, comme des bélices propulsives; mais ces hélices seraient ani- mées de mouvements alternatifs et l'inclinaison de leurs paleltes changerait en même temps que le sens du mouvement, de manière à procurer tou- jours la propulsion en avant pendant la phase des- cendante comme pendant la phase ascendante. Cette théorie n'a pas, à ma connaissance, été vérifiée par des expériences très précises, et différents auteurs, Marey entre autres, se refusent à l'admettre ; mais, dès 1872 ou 73, Alphonse Pénaud avait construit un petit oiseau mécanique, actionné par un moteur en caoutchouc et fondé sur ce principe. Je n’ai jamais vu cet appareil, mais mon frère le Colonel Charles Renard m'a plusieurs fois affirmé qu'il l'avait vu et qu'il volait parfaitement: il ajoutait même que le changement d'orientation des extrémités des ailes, à la fin de chaque période du mouvement général de celles-ci, était assuré par de petits ressorts en caoutchouc spéciaux, et, lorsqu'on enlevait ces ressorts, ces changements d'orientation ne se fai- sant plus, l'appareil refusait absolument de voler. Quoi qu'ilen soit, nous ne verrons probablement jamais d'ornithoptères enlever un homme dans l'atmosphère, et si, par hasard, on construisait un jour une semblable machine, ce serait un objet de curiosité, comme pourrait l'être une automobile marchant sur des pattes au lieu de rouler sur des roues, et de tels véhicules n'entreront jamais dans la pratique courante. Nous avons déjà vu que les hélicoptères sont des appareils d'aviation dans lesquels la sustentalion est obtenue au moyen d'hélices à axe vertical. Ces appareils jouiraient de la sustentation indépen- dante de la marche, mais, malgré cet avantage incontestable, les hélicoptères ne sont pas jusqu'ici entrés dans la pratique courante. Nous savons que la véritable raison de cet état de choses est la mau- vaise qualité sustentatrice des hélices à axe verti- cal. On peut espérer que cette qualité s'améliorera un jour et alors la siluation pourra changer. Néanmoins, les hélicoptères seront toujours des machines assez compliquées. Leurs deux hélices à axe vertical ne peuvent servir qu'à assurer la sus- tentation, et il faut bien, si l’on veut être dirigea- ble, avoir en outre des organes de propulsion; autrement les hélicoptères seraient absolument assimilables aux ballons sphériques libres. Comme eux, ils pourraient évoluer dans la verticale, mais leur mouvement horizontal serait réglé par les caprices du vent. Pour leur donner la vitesse propre, il faut, en outre des hélices verticales, disposer d'une ou deux hélices à axe horizontal: il faut, de plus, pouvoir COMMANDANT PAUL RENARD — L'AVIATION 9 mettre en marche ces hélices propulsives indépen- damment des hélices sustentatrices. C'est là une ‘complication mécanique assez grande; aussi plu- sieurs inventeurs ont-ils reculé devant cette diffi- culté, et ont songé à avoir des hélices à axe incliné, soit d’une manière permanente, soit à volonté ; la force produite par ces hélices aurait une compo- sante verticale sustentatrice, et une composante horizontale propulsive. Ce mécanisme simplifié peut présenter certaines qualités, mais il fait perdre en tout ou en partie les avantages de la sustentation indépendante. Quoi qu'il en soit, à l'heure actuelle, les partisans des hélicoptères ne les considèrent généralement pas comme des appareils devant supplanter les aéroplanes ; on songe plutôt à combiner les deux systèmes entre eux, de manière à donner aux aéro- planes, en cas de besoin, l'indépendance de la sus- tentation et de la propulsion. Il est probable, en effet, que, malgré tous les avantages qu'on peut attendre des hélices sustentatrices, elles exigeront toujours, pour un même poids à supporter, une dépense d'énergie plus considérable que les susten- lateurs aéroplanes, et ce sera loujours un gaspil- lage de puissance que de recourir à la sustenta- tion hélicoptère; on s'y résignerait pendant les manœuvres de départ et d'atterrissage, et en marche normale, c’est-à-dire pendant la presque totalité du voyage, on fonctionnerait comme aéro- plane. Il est probable que ce sera là le véhicule de l'avenir. VI. — AÉROPLANES. Dans tout ce qui précède, nous avons fréquem- ment parlé d'aéroplanes, et nous n'avons pas encore défini rigoureusement cet appareil. Nous allons combler cette lacune. Un aéroplane est un appareil d'aviation à susten- tation dépendante, dans lequel la propulsion et la sustentation sont assurées par des organes dis- tincts. Cette définition est un peu longue, mais elle est nécessaire pour bien caractériser ce genre d'appareil. Le fait d'être à sustentation dépendante le différencie, en effet, des hélicoptères et de la plu- part des volateurs naturels. Mais il est nécessaire, en outre, de le différencier des grands oiseaux exelu- sivement planeurs. C'est l’objet de la deuxième partie de la définition : chez les oiseaux, c'est un même organe, l'aile, qui assure à la fois la susten- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. = lation et la propulsion, tandis que, dans les aéro- planes, ce sont deux organes différents, Ainsi que nous l'avons vu, l'organe propulseur consiste en une ou deux hélices à axe horizontal: quant à l'organe sustentateur, il est fixe par rapport à l'ensemble de l'appareil, et est constitué par des surfaces à grande envergure, dont l'avant est relevé par rapport à l'arrière el qui généralement pré- sentent une faible concavilé vers le bas. Les dispositions des sustentatrices peuvent varier plus ou moins; il en est de même des organes d'évolution dans le sens vertical ou dans le sens horizontal. Sous peine d’allonger cet outre surfaces article mesure, nous ne pouvons entrer aujourd'hui dans tous ces détails ni étudier le fonc- tionnement des aéroplanes, qui présente des parti- cularités extrêmement intéressantes. J'en ai dit assez, je l'espère, pour bien convaincre le lecteur que le seul moyen de réaliser le vol méca- nique est d'employer la sustentation oblique, et que la manière de le faire pratiquement est de cons- truire des aéroplanes. Aussi ne faut-il pas s'étonner si, à l'heure actuelle, l’'aéroplane est le seul appareil d'aviation qui ait donné des résultats. Les progres réalisés grâce à lui dans le vol mécanique ont été tellement rapides qu'on ne trouve, je crois, dans l'histoire de la science, ancun exemple d’un déve- loppement semblable. En admirant les exploits des aviateurs d'aujourd'hui, il est juste de reconnaitre qu'ils récoltent une moisson laborieusement semée depuis plus d’un siècle par des chercheurs persé- vérants. Ces hommes, la plupart inconnus, on! dégagé les véritables principes du vol mécanique, etils avaient tellement bien étudié le problème que, dès qu'on s'est trouvé en possession du moteur puissant et léger si longtemps désiré, les résultats ont dépassé toutes les espérances, et les progrès ont marché à pas de géant. On ne saurait avoir trop de reconnaissance pour ces précurseurs; ce son! eux qui nous ont mis dans la voie où nous sommes aujourd'hui, qui est certainement la véritable voie à suivre. Tout ce que l’on fera dans l'avenir en avialion ne sera qu'un perfectionnement de ce que nous faisons à l'heure actuelle, mais les principes fondamentaux resteront les mêmes. Je termine ici ces considérations générales, me proposant, dans un prochain article, de faire une élude spéciale des aéroplanes. Commandant Paul Renard, Ancien élève de l'École Polytechnique. 6* NN D 42 H. PÉCHEUX — RÉSISTIVITÉ ET THERMO-ÉLECTRICITÉ DES ALUMINIUMS IRÉSISTIVITÉ ET THERMO-ÉLECTRICITÉ DES ALUMINIUMS ET DES CUPRO-ALUMINIUMS APPLICATIONS L'aluminium marchand est obtenu, comme on sait, par l’électrolyse de la bauxite blanche (pro- cédé Héroult), ou de la cryolithe (procédé Minet) : dans le premier cas, le métal est formé de plus de 99 °/, d'aluminium pur, avec des traces de fer (pro- venant de l’oxyde ferrique qui demeure toujours en quantité très faible dans la bauxite blanche), et de silicium (provenant de la silice qui accompagne la bauxite); dans le deuxième cas, le métal est encore plus riche en aluminium et renferme des traces de fer {provenant de la cuve d'électrolyse), mais pas de silicium. Nous avons étudié trois échantillons d'alumi- nium marchand, lesquels se caractérisent ainsi, d’après l'analyse que nous en avons faite : IMPURETÉS FER SILICIUM totales Aluminium (P), de 1903. . . 0,250, 0,120/ 0,370) — (Ch), de 1905 . . 0,07 0,06 0,13 — (E.N), de 1907. . 0,12 traces. 0,12 Les deux premiers échantillons proviennent de la bauxite, le troisième de la cryolithe. On voit que la pureté du métal croît du premier au troisième échan- tillon; malgré tout, il est impossible, dans l’état actuel de la métallurgie de l'aluminium, d'obtenir ce métal sans fer ; mème eu traces faibles, le fer s'y rencontre toujours. Nous allons montrer comment les propriétés élec- triques (résistivité, thermo-électricité) de l’alumi- nium sont modifiées, assez sensiblement, par la présence des impuretés en question. Nous étudie- rons, ensuite, l'influence du cuivre sur les mêmes propriétés de l'aluminium dans les six cupro-alu- miniums que nous avons examinés, lesquels sont à : SH 00/0 00)e, 1041/2%/5, A00/tet9me)/d'alurmi niun. I. — RÉSISTIVITÉ. $ 1. — Mesures. Nous avons mesuré la résistivité de nos métaux et alliages au pont de Wheatstone à corde, comme nous l’avions fait pour les nickels et leurs alliages": une spirale de chaque échantillon était reliée à l’une des branches du pont par deux gros fils de cuivre de résistance connue, et comparée à un étalon de 1 Revue gén. des Sciences, n° 18, 30 sept. 1909. 1/10 d'ohm; chaque spirale était immergée dans un bain de paraffine, porté à l'ébullition (370°) pour le recuit; à côté d'elle se trouvait la soudure de notre pyromètre nickel-cuivre; nous faisions refroi- dir ensuite le bain, en faisant 7 à 8 mesures de résistance, de 370° à 15° environ. Soient : &, la résistivité à {° centigrades; r,, la résistance (à {°) d’une spirale essayée; / (centi- mètres) la longueur: s (centimètres carrés) la sec- : : : s tion droite de cette spirale; on à : p=:ri PCA en microhms si r,estexprimée elle-mème en microhms. $ 2. — Résultats. Le calcul nous à montré que, pour l'aluminium et les cupro-aluminiums, de 0° à 370°, la résistivité varie linéairement. On peut donc la représenter par une formule comme celle-ci : p—9{1—+al), dans laquelle e = résistivité à 0°; , à /°; a, le coefficient de tem- pérature, Tous nos résultats ont été obtenus en microhms, avec deux chiffres décimaux exacts. ï A. Aluminiums. — Voici d'abord les formules relatives aux aluminiums : TagLeau |. — AJuminiums marchands. Aluminium (P). .. (GR) (FLN). . = 2e SO(L + 0,0046 4); 6, = 2 uw 72 (1 + 0,0042 4): pe, = 2upw T5 (1 + 0,00404). Conclusions tirées de l'examen de ce tableau‘: 1° La résistivité à 0° croit avec la teneur en fer; 2% Le coefficient de température croît avec la teneur en silicium. M. Benoît a trouvé, pour un échantillon d'alu- minium, la formule suivante : ge= 2,89(1 + 0,0039{) microhms. Cet échantillon devait renfermer plus de fer que les nôtres, très certainement. D'ailleurs, les ana- lyses faites par Moissan et Ditte, depuis une quin- zaine d'années, ont montré la décroissance continue du fer dans l'aluminium, les bauxites étant aujour- d'hui obtenues beaucoup plus pures. 1 C. R. Acad, Sc., 8 mars 1909. H. PÉCHEUX — RÉSISTIVITÉ ET THERMO-ÉLECTRICITÉ DES ALUMINIUMS 243 2. (upro-aluminiums. — Les expériences ont Le prix de la canalisation en cuivre (densité —8,9 donné les résultats suivants : TagLeau Il. — Cupro-aluminiums". TENEUR EN ALUMINIUM RÉSISTIVITÉ 9 (MICROIHMS) 3 0/6 « 8,26 (1 + 0,001.02 4) ETAT 10,21 (1 + 0,000.70 4) M 4 11,62(1 + 0,000.55 4) ER SS 13,62(1 + 0,000.36 4) 107, 12,61(1 + 0,000.32 4) (72 3,10 (1 + 0,003.80 4) Conclusions : 1° La résistivité, à 0°, de ces alliages croît d'abord avec la teneur en aluminium jusqu'à l’alliage à 7,5 °/,, puis décroît ensuite; 2 Le coefficient de température décroît quand la teneur en aluminium augmente, sauf pour l'alliage à 94 °/, d'Al, où la résistivité à 0° et le coefficient de température se rapprochent de ceux de l'aluminium pur. En résumé : l'addition de faibles quantités d'aluminium au cuivre augmente considérablement la résistivité du cuivre; au contraire, l'addition de faibles quantités de euivre à l'aluminium modifie très peu la résistivité de ce dernier métal. S 3. — Applications. À. Alumimums. — L'aluminium est plus tenace que le cuivre, et il est beaucoup plus léger; aussi a-t-on pensé à l'utiliser, à la place du cuivre, pour la conduction des courants électriques. La compa- gnie l'Energie électrique du littoral méditerranéen a récemment essayé ce métal à cet usage. Si l'aluminium est plus tenace et plus léger que le cuivre, on conçoit qu'il doive en résulter une économie dans la pose des potences de soutien de cäbles, celles-ci pouvant être plus distantes qu'avec le cuivre. Mais la résistivité du métal est, par contre, plus élevée que celle du cuivre. Néanmoins, l'emploi de l'aluminium réalise une économie, comme l'exemple suivant le montrera aisément. Soit : R, la résistance nécessaire, pour une lon- gueur / de câble, au transport d’une certaine quan- lité d'énergie électrique. Avec le cuivre (9, s) on 1 Ex aura : R—É; avec l’aluminium (9, s') on aura : ! R— ee d'où : © GE et : s'— =. En choisissant S S S p le meilleur de nos trois échantillons, nous aurons : p = Zu, 12; p (cuivre) — Auw,60; d'où ; s' — 1,60 Le prix de la canalisation en aluminium (densité = 2,6; prix du kilog = 2 fr. 50) sera : NSP SES Tr 50: 1 C,. R. Acad, Sc., 19 avril 1909: prix du kilog = 1 fr. 50) serait : n = $s1X 8,9 X 1 fr, 50: on tire de là : ! 11 2,6 X 2,50 8,9 X 1,50 s1./2/6.X2,50 . 2,72, n S 7 89xX1,50 1,60 ! n _ ‘s . # . # ou : — — 0,827, L'économie réalisée pour la cana- 1 lisation serait donc de 17,3 °/,. Avec l'échantillon : aluminium (P), l'économie serait un peu plus faible : 14°/, seulement. L'aluminium marchand, étant impur, s'altère lentement au contact des solutions salines sui- vantes, même très étendues : NaCI, SO‘Cu. Un fil limé, immergé dans une solution en question, donne lieu à un dégagement très apparent d'hydro- gène, lequel s'arrête quand la couche d'alumine formée sur le métal est devenue assez épaisse : le métal devient alors cassant. L'aluminium à traces de fer se comporte comme une pile dans laquelle Al est électro-positif, ce qui explique cette altération par oxydation de l'alu- minium. Les fils d'aluminium marchand s'altèrent aussi, quoique lentement, dans une atmosphère chargée de vapeurs salines chlorurées : il y a là une objec- tion assez sérieuse contre l'emploi de l'aluminium ; avec des fils d'assez gros diamètre, l’altération ne reste que superficielle, sans nuire sensiblement à la ténacité du métal. 2. Cupro-aluminiums. — La résistivité des cinq premiers alliages est comprise entre celle du nickel pur et celle du fer ou du platine; aussi ne peut-on songer à les utiliser dans la fabrication de résis- tances étalonnées ; leur coefficient de température, il est vrai, est aussi faible que celui des maille- chorts ou des cupro-nickels, mais il en faudrait un volume beaucoup plus grand pour une résis- tance donnée. IT. — TuERMo-ÉLECTRICITÉ. S 4. — Mesures. Nous avons mesuré la thermo-électricilé de nos échantillons par la méthode des déviations. Chaque métal ou alliage formait, avec le cuivre pur, un couple que nous comparions, au four à gaz Mermet, à notre couple pyrométrique Ni/Cu soigneusement étalonné; les deux soudures, bien isolées, étaient disposées l’une près de l’autre dans un tube de por- celaine mince, fermé à un bout, et chauffé métho- diquement et extérieurement par les flammes du four. Chacun des couples était relié, par un circuit 244 H. PÉCHEUX — RÉSISTIVITÉ ET THERMO-ÉLECTRICITÉ DES ALUMINIUMS formé de fils de laiton et d’une boite d’ohms, à un galvanomètre Deprez-D’Arsonval. Le couple Al/Cu est plus facilement comparable au couple Ni/Cu qu'au couple platine iridié-platine, mais il faut refroidir {rès lentement les soudures. De plus, les pouvoirs thermo-électriques des couples Al/Cu, ou cupro-aluminium/euivre, étant très faibles et très voisins, il importait d'obtenir les lectures avec une sensibilité plus grande que celle adoptée pour les Ni/Cu; nous avons monté le cireuit des Al/Cu pour obtenir les f.é.m. thermo- électriques par : E — 80 à (la grande résistance du galvanomètre ne permettant pas de choisir une constante plus faible que 80). L'erreur absolue probable sur chaque lecture ne dépassait pas 10 microvolts. Nous avions gradué la règle du pyromètre Ni/Cu en degrés centigrades de 40° en 40°; les échelles du galvanomètre du pyromètre et du galvanomètre du couple étudié étaient très voisines, l’une au-dessous de l’autre, les spots lumineux àllant l’un au-devant de l’autre : les lectures étaient ainsi rapides el faciles *. Chaque refroidissement durait environ 3 heures, de 600° à la température ambiante (l'aluminium fondant vers 655°). Un 2. — Résultats. Des tableaux des f.6.m. relevées, nous avons déduit les formules suivantes, applicables jusqu'au point de fusion de l'aluminium (pour les couples Al/Cu), et jusqu'à 700° (pour les eupro-alumi- nium/cuivre). Nous indiquons, dans les tableaux suivants, les f.é.m. E (microvolts), les pouvoirs j d'E\ : thermo-électriques (%) en microvolts, et l’ap- proximation fournie dans l'évaluation des tempé- ratures à l’aide de chacune des formules trouvées. À. Couples aluminium/cuivre. — Le tableau III donne les valeurs trouvées pour les couples alumi- nium/cuivre : Tagzkau IT, — Couples aluminium-cuivre. dE uy TEMPÉRATURES COUPLES Euy dt ‘ données à : Al(P)— Cu . .13,#4+0,00394| 3,34 0,00784|/ 2° près. AI(Ch) — Cu. . AI(F.N)— Cu . 3,564 0,0029/2|-3,56-L 0,0058/| 3 — 3.60 4 + 0,0030 1° | 3,60 + 0,00604| 21}, près. Les paraboles qui représentent très sensiblement les f.é.m. des couples ne donnent lieu qu'à une erreur absolue moyenne de 9 uv (Al/Ch), 7 uv 1/2 AI/F.N.) et 6 uv (A1/P). Mais les pouvoirs thermo- électriques sont très faibles, et l'approximation dans l'évaluation des températures en est atténuée. 1 Revue gén. des Sciences, 30 septembre 1909. La figure 1 nous montre les courbes des f.6.m. des couples Al/Cu. Nous voyons que : 1° La présence simultanée du fer et du silicium relève la f.6.m. thermo-électrique, à partir de 290° environ; avant cette tempéralure, la présence du silicium contrarie les effets du fer seul; 2 L'influence du fer l'emporte de beaucoup sur celle du silicium, comme le montrent les courbes P FN ?AL Euv Ch [ | [ | l I Û ! 1 [ ! | ! | [ ! | [ ! I [ | 320 400 480 560 600 (£7) Fig. 1. — Courbes des forces clectro-motrices des couples AJ/Cu. de l’AI(F.N)et de l’AI(Ch) : ces deux métaux ren- ferment señsiblement la mème quantité d'impu- retés totales, mais le (F.N) est plus riche en fer !; 3° Il y a inversion entre l'AI(P) et les deux autres; cette inversion a lieu à 220°, entre AI(P) et AI(Ch), et à 289 entre AI(P) et AI(F.N). Les courbes Al(Ch) et AI(F.N) demeurent constamment séparées, jusqu'à 650. L'aluminium est, comme le cuivre et le platine, 1 C, R. Acad. Sciences, 8 mars 1909. H. PÉCHEUX — RÉSISTIVITÉ ET THERMO-ÉLECTRICITÉ DES ALUMINIUMS 19 _ un des rares mélaux ne subissant aucune lrans- lormalion moléculaire avant son point de fusion : ceci explique l'allure très régulièrement parabo- lique des couples Al'Cu. 2. Couples cupro-aluminium/euivre. — Le ta- bleau IV indique les résultats obtenus avec ces couples. TagLeAu IV. — Couples un ordre régulier, dans la série thermo-électrique ; Cette première conclusion est contraire à celle de M. E. Steinmann (Thèse, Genève, 1900), qui d'ailleurs n'a étudié que trois alliages : à 5 °/,, 711/2°/, et 10°/, d'AL; pour ceux-là, on remarque qu'ils se suivent dans un ordre tel que le plus riche en aluminium est le plus éloigné de ce métal dans la série. Nos résultats montrent qu'au eon- cupro-aluminium/cuivre. COUPLES Eyvy 2,31 4 + 0,001.50 4 2,534 + 0,004.60 4? 1,784 + 0,000.20 2 1,59 4 + 0,000.45 4,21 4 + 0,000.52 4 2,91 t + 0,003.40 £ Cu-A1(3 °/, d'Al)-Cu (3 Cu-A1(5 /9 d'Al)}-Cu Cu-A1(6 0/0 d'Al)-Cu . . Cu-Al(1 /; °/o d'Al) Cu. Cu-A1(10 °/, d'Al)-Cu. . Cu-A1(94 °/o d'Al)-Cu. . = ÉCART MOYEN ENTRE E LUE ET E CALCULÉE AVEC LES FORMULES (40 (49 (u0 à (40 à (4° (40 à 101}, microvolts:; à 40 près). 00.90 £ 01.044 06.80 4 => > 10 L'approximation obtenue, avec ces couples (sauf le premier), est supérieure à celle que donnent les couples Al/Cu; ceci, malgré le faible écart de f.6.m. d’une tem- pérature à l’autre pour un même couple, et aussi la difficulté de re- pérer des indica- tions aussi rap- prochées. Les deux pre- miers couples pré- sentent, pourleurs courbesdes f.6.m. (fig. 2), un coefi- cientangulaire très voisin de ce- lui des couples Al/Cu ; il en est sensiblement de même pour les cu- pro-aluminiums à 10°/, et 94°/, d'Al. Quant aux al- liages à 6 °/, et 7,5 °/,, — très voi- Euv 1,9 sins dans la série thermo-électrique, l'allure de la 0 courbe des f.6.m. est très sensible- ment rectiligne. L'examen de la figure 2 nous conduit aux con- clusions suivantes : 1° Les cupro-aluminiums ne se suivent pas, selon L. Fig. 27 — Courbes des forces électro-motrices des couples cupro-alumi- nium/euivre. traire l'ordre est alterné, de 3 °/, à 10 °/,; que, pour l'alliage à 94 °/,, la courbe se rapproche de celle de l'aluminium pur. En somme, sauf pour ce dernier al- liage, on peut dire que « les alliages les plus riches en aluminium, jus- qu'à la teneur 10°/,, ont une ten- dance à s'éloigner de l'aluminium, dans la série ther- mo-électrique » ; 2° Il y à inver- sion entre les cu- pro-aluminiums à 6°Let7,5°/, à 760° (ces alliages de- meurant toujours très voisins); entre les alliages 94°/, ete ou, il y a inversion à: 53° (3°/,et94°/.),età A71°(52/,et94°/0); 3° Le coeflicient Al (P) 72% 2 6% angulaire des cour: bes des f.é.m. di- minue d’abord, ré- gulièrement, dans l'ordre des dia- 6G°/,), passe par un minimum 760 grammes (5 °/c; 3 °/o; 1 C. R. Acad. Sciences, 19 avril 4909. pour l’alliage à 6 °/,, augmente ensuite de 6 °/, à 940] SJ AOY (RS Ces résultats sont à rapprocher de ceux fournis par les résistivités, qui varient d’une facon ana- logue, mais en sens inverse. $ 3. — Applications. 1. Couples aluminium/cuivre. — L'aluminium donne un pouvoir thermo-électrique trop faible pour qu'on l'utilise dans la pyrométrie; il s’altère d’ailleurs au contact des vapeurs salines, ce qui rendrait son emploi délicat dans les laboratoires ou les industries chimiques. 2. Couples cupro-aluminium/cuivre. — La fai- blesse de leurs pouvoirs thermo-électriques ne permet pas d'employer ces couples en pyrométrie : on n’obtiendrait pas une échelle des températures à nombres suffisamment espacés pour faire des lectures suffisamment approchées. Une application JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE intéressante de ces alliages se présente dans les laboratoires : les alliages à 6 °/,, 7,5 °/, et 10 ont, avec le cuivre, un pouvoir thermo-électrique plus faible que le laiton; ils remplacent donc avan- tageusement celui-ci, dans les circuits servant à l'évaluation des courants thermo-électriques : effet Peltier entre ces alliages et le cuivre est beaucoup plus faible (de deux à trois fois plus faible), et les f.é.m. parasites sur les circuits absolument négli- geables. Si l’on tient compte aussi de ce fait que les cupro-aluminiums sont inaltérables à l'air hu- mide, ou dans les vapeurs salines ou acides faibles, on conçoit l'avantage qui résulterait de la substi- tution de ces alliages au laiton, dans la confection des bornes des appareils de mesure, et des serre- fils ou jonctions quelconques. K. Pécheux, Docteur ès sci nces physiques d'Université, Professeur à l'Ecole d'Arts-et-Métiers d'Aix, REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE PREMIÈRE PARTIE I. — LA PÉRIODE ANTHRACOLITIQUE. De grands progrès ont été réalisés dans l’ensei- gnement de la Géologie par la publication du magistral traité de M. le Professeur Emile Haug, traité dont nous avons déjà présenté le premier volume aux lecteurs de cette /fevue. Le second — dont un fascicule seul à paru‘ — ne le cède pas en importance au premier et est appelé à rendre de réels services à tous ceux qu'intéresse l'étude de notre science. La notion des géosynclinaux et des aires continentales constitue une des idées directrices de l’œuvre, et c’est par là qu'elleest supérieure à celles qui l’ont précédée. Le fascicule publié est consacré à l'examen des périodes géologiques, depuis la période antécam- brienne jusqu’à la période triasique inclusivement. Ne pouvant suivre l’auteur dans l'exposé de cette longue évolution, nous nous contenterons d'étudier ce qui à trait au « Système anthracolitique ». Sous ce nom, — et c'est là une idée heureuse, — notre savant confrère réunitles deux dernières périodesde l'ère Paléozoïque, le Carbonifère etle Permien, qui présentent tant de caractères paléontologiques communs. — Nons savons d'ailleurs, depuis les études d'E. Suess, que ces périodes constituent ? Euize Hauc : Traité de Géologie, t. II. Les périodes géo- logiques (fascicule 1}. Paris, librairie Armand Colin. l’une des phases les plus remarquables de l’histoire de la Terre”, La période que nous nous proposons d'étudier se fait remarquer par l'importance de ses formations continentales, dont les dépôts sont excessivement riches en débris de végétaux terrestres. La flore comprend des Cryptogames vasculaires et des Gymnospermes. Chacun de ces embranchements est représenté par des classes éteintes, qui générale- ment n'ont pas survécu à la fin de l'ère primaire, et par des classes vivant encore de nos jours. Quant à la faune, elle est également riche et variée; on y constate la présence de genres qui lui sont parti- culiers. Toutefois, le fait paléontologique le plus important est l'apparition des premiers Vertébrés, représentés par de véritables Reptiles, dont on connait une espèce de Blanzy (Saône-et-Loire), le Sauravus Costei, qui a été décrit par M. Thévenin, assistant au Muséum d'Histoire naturelle de Paris. Nous connaissons de l’époque anthracolitique des formations lacustreset fluviatiles avec des Gastéro- podes pulmonés terrestres et des Insectes. Quant aux formations marines, elles correspondentpresque toutes à une sédimentatlion dans des eaux peu profondes : ce sont des formations néritiques (Millstone grit d'Angleterre, calcaires à lusu- 1 E, Suess : « La face de la Terre » (traduction E. de Mar- gerie), t. II, loc. eit., p. #10. JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 2 dines, etc.). Des formations bathyales (grès et schistes à Goniatites el à Posidonomyes, marnes à Céphalopodes) sont cependant à signaler, ainsi que des formations abyssales (phtanites à Radiolaires et à Spongiaires siliceux). La limite des systèmes dévonien et carbonifé- rien est purement conventionnelle, et le remplace- ment d’une faune par l'autre se fait d'une manière insensible. Dans un petit nombre de régions seule- ment, le Carbonifèreinférieur (Dinantien) est discor- dant sur le Dévonien, ou tout au moins transgressif par rapport à lui. C'est done à la Paléontologie qu'il faut recourir, et l'apparition brusque, au début du Carbonifère, du phylum des Glyphiocératidés, en particulier du genre Pericyelus, essentiellement “ryptogène, fournit un point de repère assez précis. D'autre part, le Permien peut être caractérisé par la présence d'un Ammonoïdé, le genre J/edlicottia. Il est possible, au moins pour le Carbonifère, l'établir une succession de zones caractérisées par une ou plusieurs espèces d'Ammonoïdés; mais, pour le Permien, les données n’ont pas encore la préci- sion nécessaire et les zones n'en sont que provi- soires. Cette succession est la suivante, en remon- tant la série: 1° zone à Pericyclus princeps; 2° zone à Goniatiles striatus (Dinantien); 3° zone à Glyphioceras striolatum; # zone à (rastrioceras Listeri (Moscovien); 5° zone à, (rastrioceras marianum (Ouralien); 6° zone à H/edlicottia; 1° zone à Waagenoceras Mojsisovici; 8° zone à Xenapis carbonarius; %zone à Cyclobus Oldhami (Permien). En se basant sur les végétaux terrestres, pour ce Qui à trait aux formations continentales, cinq phases successives, à caractères botaniques spé- ciaux, peuvent être reconnues ; 1° phase dinan- tienne, 2 phase sudétienne, 3° phase westpha- lienne, 4° phase stéphanienne, 5° phase permienne. Ces notions établies, l'auteur étudie ensuite de facon détaillée la répartition géographique et les principaux types de l’Anthracolitique en Russie et dans l'Europe boréale; dans lEuropecalédonienne, c'est-à-dire dans les régions qui ont été le théâtre «le mouvements orogéniques au début du Dévonien; dans l'Europe hercynienne, c’est-à-dire dans les régions qui ontété affectées demouvements pendant le Houiller ou le Permien; dans l'Afrique septen- trionale, dans l'Asie centrale et orientale, dans l'Amérique du Nord, dans l'Amérique centrale et méridionale, enfin dans l'Australie. Les descrip- tions, écrites dans un style clair et précis, tenues au courant des dernières découvertes, sont une mine de précieux documents, qui seront consultés avec fruit, Nous ne pouvons en donner iei que les résultats généraux. Au début de l'Anthracolitique, la distribution des terres et des mers diffère peu de ce qu'elle élait vers _— 1 la fin dela période précédente (période dévonienne), Le continent Nord-Atlantique, le faite sibérien, l'île du Thibet, le grand continent qui s'étendait du Brésil à l'Australie (continent de Gondwana) exis- taient intégralement. Une mer, appelée « Thélys » par E. Suess, s'étendait de l'Espagne à la Birmanie. Avec le Carbonifère moyen (Moscovien) se mani- feste une transgression marine à l'Ile aux Ours, au Timan, au Sahara, dans le nord de Ja Chine, dans le centre des États-Unis, régions où les eaux n'ont qu'une faible profondeur. Le Carbonifère supérieur (Ouralien) permet de constater l'abandon par la mer de la dépression de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne du Nord, ainsi que des régions ardennaises et rhénanes. Par contre, il y à envahissement de la plus grande partie de la Téthys, puis de l’Australieet.des Andes, contrées où le Carbonifère supérieur se présente généralement en discordance sur le Carbonifère inférieur ou des terrains plus anciens. La mer permienne inférieure (Artinskien) aban- donne le centre de la plate-forme russe, l'Afrique du Nord, l'Amérique du Sud, la partie.orientale des États-Unis, l'Amérique arctique et, en général, les aires continentales. Au Permien moyen et supérieur (Saxonien, Thu- ringien), les eaux reprennent possession de la dépression de l'Allemagne du Nord et pénètrent dans l'ensellement compris entre les massifs émergés de l'Ardenne et de la Bohème. Elles s'étendent en transgression sur les Dinarides, sub- sistent dans le bassin du Donetz, sur le bord occi- dental de l'Oural, le nord de la Perse, l'Himalaya et la Salt’ Range, les Montagnes Rocheuses et l'Arkan- sas, ainsi que le bord atlantique de l'Amérique du Nord. La mer abandonne la Chine septentrionale, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et pro- bablement tout le géosynclinal circumpacifique. Au point de vue climatique, trois ordres de faits caractérisent l'époque anthracolitique : 1° végéla- tion luxuriante, dont les restes sont la cause de la production de la houille'; 2 grande éxtension gla- ciaire : > rôle joué par les précipitations chimiques dans les lagunes de la fin de la période. L'uniformité de la flore sur toute la surface du globe pendant le Carbonifère inférieur et le Car- bonifère moyen permet de conclure à un climat humide, favorisant l'établissement de marécages où { La question de la formation de Ia houille — qui à donné lieu à de si nombreuses discussions — a été lon- suement et magistralement traitée par M. Haug dans le précédent volume. Suivant les cas, les houilles sont autoch- tones, c'est-à-dire formées sur place, à la manière des tour- bes et lignites, et dans d’autres a/lochtones, c’est-à-dire résultant de l'accumulation de végétaux charriés, En outre, certains dépôts houillers ont une origine marine, et on doit conclure que la fermentation houillère a pu se produire aussi bien dans les eaux salées que dans les eaux douces. 248 vivaient des Hydrophites pourvus de racines vigou- reuses et de rhyzomes à bourgeons adventifs. Quant à l'accumulation des couches de houille successives en nombre élevé, elle s'explique par des conditions géodynamiques spéciales. Des traces d'actions glaciaires datant de la période que nous étudions, traces signalées parti- culièrement l'Inde, en Australie et dans l'Afrique du Sud, ne peuvent plus être contestées aujourd'hui, en ce qui concerne ces régions. Nous nous en occuperons dans un autre chapitre. Une grande abondance d'éléments formés par précipitation chimique (gypse, sel gemme, sels déliquescents) dans les couches du Permien de l'Europe indique un climat sec. Ces formalions s'observent dans l'Allemagne du Nord, dans la Russie orientale et, sur une moindre échelle, dans les Alpes orientales, ainsi qu'aux États-Unis. Elles sont accompagnées d’argiles rouges généralement associées à des grès de même couleur, grès caractérisant des périodes à climat sec et à insola- tion intense. Il n'en est pas de même du facies houiller, qui suppose un climat très humide, modé- rément chaud et probablement une atmosphère chargée de nuages. « Sous un pareil climat, conclut M. Haug, les régions d'altitude élevée devaient rece- voir d’abondantes chutes de neige et se couvraient peu à peu de calottes glaciaires. C’est pourquoi, à la fin du Carbonifère et au début du Permien, le phé- nomène houiller et le phénomène glaciaire ont pu coexister. » dans Abordant l'étude des mouvements orogéniques et épirogéniques, l’auteur insiste sur un fait impor- tant : c'est que, dans l'Europe calédonienne, aucun mouvement orogénique ne s'est produit à la limite du Carbonifère inférieur et du Dévonien supé- rieur. Les deux étages, ainsi que celui du Carboni- fère moyen, sont concordants. L'accumulation de grandes épaisseurs de sédiments sur l'emplacement des plissements de l'époque précédente s'explique par l'hypothèse d'un géosynelinal peu profond dont la descente s'effectuait par saccades. Son axe avait la même direction que les plissements eux-mêmes. Cette dépression se comblait de matériaux détri- tiques et de végétaux charriés; elle se transformait en une région de forêts marécageuses, située au niveau de la mer. Peu après le début du Carbonifère supérieur (Stéphanien), l'Europe calédonienne était entière- ment exondée; toutefois, le phénomène de plisse- ment était localisé dans le bassin houiller franco- belge, dans sa prolongation à l'Ouest et à l'Est. Quant à la partie septentrionale, elle ne fut affectée que par des ondulations à grand rayon de courbure. Les mouvements orogéniques permo-carbonifères se sontsuperposés aux mouvements anté-dévoniens JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE (calédoniens). La zone affectée par les premiers comprend toute l'Europe centrale et deux diree- tions y sont prédominantes: l’une, nord-ouest-sud- est, correspond à la chaîne armoricaine ; l'autre, sud-ouest-nord-est, correspond à la chaîne varisque. L'ensemble est désigné par les géologues français sous le nom de chaïne hercynienne. Ces deux directions se rencontrent, à angle aigu, dans le Plateau central, tandis que, plus au Nord, dans l’Ardenne, elles se raccordent insensiblement par une courbe largement ouverte au Nord. Ajoutons que les mouvements hercyniens ont encore fait sentir leur action au sud de la Médi- terranée, jusqu'à la zone africaine des plissements calédoniens. Nous devons faire observer que, dans cet immense territoire s'étendant de l’Ardenne aux confins du Sahara, les mouvements de la période anthraco- litique ne se sont pas produits partout simultané- ment. Dans le sud de l'Angleterre, dans l’Ardenne,, en Westphalie et dans le Hartz, le plissement est postérieur au Carbonifère moyen (Westphalien). Dans une bande plus méridionale, comprenant le massif Armoricain, le bassin de Saarbrück, les Vosges, la Forêt-Noire, la Thuringe, la Basse-Silésie, des mouvements orogéniques ont eu lieu entre le Tournaisien et le Viséen (sous-étages du Carboni- fère inférieur), et ils ont rejoué entre le Carbonifère moyen (Westphalien) et le Carbonifère supérieur (Stéphanien). Dans le Plateau central, les principaux mouve- ments orogéniques sont antérieurs au Stéphanien (Carbonifère supérieur), dont les assises reposent en discordance sur le Carbonifère inférieur ou sur des terrains plus anciens. C'est l'âge des principaux mouvements paléozoïques dans les chaines exté- rieures des Alpes occidentales et dans les Alpes orientales. Par contre, dans la zone axiale des Alpes (zone du Brianconnais), s’observe une suc- cession comprenant des terrains mélamorphiques d'âge indéterminé; lé Carbonifère, le Permien et le Trias sont en parfaite concordance. Seul dans toute l'Europe, pendant la période anthracolitique, ce géosynelinal a échappé aux mouvements de compression latérale qui, ailleurs, se sont traduits par des dislocations d’une certaine intensité. En dehors de l'Europe, on retrouve des plisse- ments datant de la période que nous étudions dans tous les continents actuels. Le pendant des plisse- ments armoricains existe dans l'Afrique du Nord. En Asie, la zone montagneuse, s'étendant entre le faite ancien du centre de la Sibérie et les chaînes tertiaires du Sud, est constituée en grande partie par des chaines datant du milieu de l'époque anthracolitique. Ce sont les Altaïdes d'E. Suess. Dans l'Himalaya, une discordance existe aussi dans JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE le milieu de la même série, et il en est de même en Australie, où le principal mouvement orogénique est postérieur au Carbonifère inférieur (Dinantien) et antérieur au Carbonifère supérieur. L'examen que nous venons de faire, conclut judicieusement l'auteur, apporte une nouvelle con- firmation à la loi des transgressions et des régres- sions. La régression du Carbonifère moyen est compensée par une transgression du même élage se manifestant sur les aires continentales. La trans- gression ouralienne el la transgression permienne propres aux zones de plissement sont compensées par une régression sur les aires continentales. Des mouvements épirogéniques permettent ensuite à la inner permienne de pénétrer dans les dépressions transversales séparant les diverses aires de surélé- valion. Elle s'introduit dans une dépression située entre l’Ardenne et la Bohème : elle prélude ainsi à un état de choses qui devient général, au début des lemps secondaires. II. — LES TERRAINS PRIMAIRES DU Monvan ET DE LA LOIRE. Les Bulletins du Service de la Carte géologique de France, où ont paru tant de travaux intéressants, se sont enrichis, en 1908, d’un Mémoire qui nous est parvenu trop tard pour que nous en rendions compte dans notre précédente revue. Ce Mémoire, qui à pour auteur M. Albert Michel-Lévy!, a trait aux terrains primaires du Morvan et de la Loire; il apporte une importante contribution à l'étude de ces lerrains. Les résultats obtenus intéressent à la lois les stratigraphes, les pétrographes et les paléontologistes ; ils complètent, en les confirmant, les études publiées sur cette région, particulière- ment celles du père de l’auteur, le savant directeur de la Carte géologique, M. Auguste Michel-Lévy. Une carte géologique hors texte accompagne cette monographie et en facilite la lecture; elle embrasse le Morvan, les montagnes entre la Saône, la Loire et l'Allier, jusqu'au delà de Lyon. Une seule teinte y est adoptée pour les niveaux du Jurassique et du Lias; aussi tous les massifs mon- lagneux, constitués par des roches anciennes, v ressortent-ils avec une admirable netteté. La région étudiée s'étend du nord du Morvan à l'extrémité septentrionale des Cévennes. Au point de vue géographique, elle se divise en deux parties nettement distinctes : au Nord, le Morvan, massif montagneux très érodé, dont les altitudes ne dé- passent pas 500 mètres ; au Sud, la partie nord-est du Plateau central, comprenant le Forez, les monts 1 Azgerr Micaec-Lévy : Les terrains primaires du Morvan el de la Loire. (Bulletin des Services de la Carte géologique de France, t. XVIII, n° 120, 1908.) 249 du Mâconnais, du Beaujolais, du Lyonnais et le seuil rocheux de la Loireentre les bassins tertiaires de Roanne et de Montbrison. Ce territoire atteint des altitudes allant de 500 à 4.600 mètres. Au point de vue stratigraphique, l'histoire de la sédimentalion est semblable dansles deux régions; on y rencontre des dépôts appartenant aux forma- tions suivantes : 1° Dévonien supérieur ; 2 Carbo- nifère inférieur (Dinantien); 3° Stéphanien et Per- mien. 1° Dévonien supérieur. Dévonien supérieur, le /‘rasnien et le Faménien, sont représentés. Le premier offre des calcaires compacts durs et très spathiques et, à la partie supérieure, contient des bancs dolomitiques rosés - Les deux élages du vacuolaires avec moules de Brachiopodes, souvent indéterminables. A Dion et à Gilly, les fossiles sont assez abon- dants; à côté de nombreux Polypiers et de Stroma- topores, on rencontre des Brachiopodes (Spirifer Verneuili Murch., Orthis striatulata Schloth., Atrypa reticularis Linn, Rhynchonella cuboides Sow., ete.), quelques Tribolites (Phacops cf. fe- condus Barr. mut. supradevonica Frech.). Cette faune est l'indice d’un facies néritique et récifal. Le niveau des calcaires frasniens ne se retrouve nulle part à l’état fossilifère, mais il est représenté soit par des calcaires marmorisés, soit par des granites à amphibole accompagnés de nombreuses diabases, diorites, porphyres et cornes vertes. M. Michel-Lévy à pu dater ces phénomènes d’en- domorphisme et les attribuer à la transformation des calcaires dévoniens. En admettant cette assimilation, on doit attribuer au Frasnien une grande extension dans le Morvan et le nord du Plateau central ; sa présence se cons- tate à la base de tous les affleurements des terrains paléozoïques de ces régions. Le Faménien consiste en une puissante série de schistes gris verdâtres très psammitiques, avec une faune assez riche découverte par l'auteur aux environs de Bourbon-Laney (gisement du Moulin- du-Roi). Elle contient principalement des Céphalo- podes, Orthocères, Goniatites et Clyménies (Pseudo- clymenia Sandhergeri Frech., Chiloceras sp., Mene- ceras sp., Oxyclymenia cf. striata Gümb, ete.), des Trilobites(Phacops cf. Cryptophalmus Ennn.,ete.), des Ostracodes (Æntomis serrostriata Sandb.), plus rarement des Brachiopodes (Chonetes Sp., Orthis sp.), des Gastéropodes (Loxonema sp.), et quelques Lamellibranches (Nucula). Ces schistes sont l'indice d’un facies bathyal et ils couvrent de grandes sur- faces entre la Loire, Bourbon-Lancy et la vallée de l’Alène. Dans d’autres régions du Morvan et dans le nord 250 du Plateau central, le Faménien est généralement métamorphisé. Des schistes succèdent aux niveaux dioritiques et sont inférieurs aux grès et pou- dingues du Carbonifère inférieur, 90 Carbonifère inférieur (Dinantien). — Les deux étages de la formation carboniférienne infé- rieure, le Tournaisien et le Viséen, ont pu être distingués. Dans le Morvan, aux environs de Bourbon-Lancy et dans la région de Saint-Seine, Avrée, le Tournai- sien débute par un niveau de grès à plantes et de poudingues dénotant une période d'émersion ma- rine. Cette émersion parait avoir élé d'assez longue durée. Elle n’a pas été également continue, et plu- sieurs intercalations de niveaux gréseux et schis- teux indiquent des réinvasions locales. A la première régression fait suite une transgres- sion paraissant embrasser le sommet du Tournai- sien et le début du Viséen. Des schistes gréseux fossilifères existent aux environs de Saint-Seine, de Savigny Poil-Pol et d'Avrée. Ils contiennent une faune marine nettement tournaisienne, avec prédo- minance de Bryozoaires, de Crinoïdes, de Brachio- podes, de Gastéropodes. Cette faune caractérise un facies d'eaux peu profondes (facies néritique) et indique la proximité d’un rivage. Dans le nord du Morvan, de la Loire et de l'Allier, le Viséen consiste en dépôts marins se présentant sous la forme de bancs calcaires gris ou noirs, en lentilles discontinues, intercalés dans des schistes ou dans des grès arkosiens. La faune est riche en Crinoïdes, Brachiopodes, Gastéropodes et Lamel- libranches. Les espèces les plus caractéristiques sont : Phillipsia Kichwaldi Fisch., Productus giganleus Mart., Chonetes papilionacea Phill., Spi- rifer daplieicosta Phil., Martinia glabra, ete. On trouve encore d'abondants Foraminifères (Æn- dothyra, Valvulina, Trochammina). \ci, encore, nous avons affaire à un facies néritique. Un fait inléressant doit être noté: c’est que le métamorphisme du granit a modifié le Tournaisien el tous les niveaux qui lui sont inférieurs, sans avoir atteint le Viséen. De plus, comme on trouve dans le Viséen des galets de granite qui n'existent pas dans le Tournaisien, on en peut conclure que, dans la région étudiée, la venue du grauite se place exactement entre le Tournaisien et le Viséen. Jusqu'ici, l’âge d'une venue granitique n'avait jamais été établi avec une précision aussi absolue. A ce point de vue, les faits observés dans le Morvan par M, Albert Michel-Lévy sont très importants; ils méritent de devenir classiques. La fin du Viséen est en grande partie représentée par des dépôts et des formations éruptives. C'est à cette époque que se place la première et princi- JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE pale phase orogénique hereynienne de la région. Cette phase succéda à la période de grande activité éruptive qui, conclut l’auteur, paraît la suite natu- relle de l'ascension du magma granilique. 3. Stéphanien et Permien. — D'intenses éro- sions et une végétation luxuriante ont permis la formation de dépôts stéphaniens dans certaines régions basses de la chaîne hercynienne. Ce sont de petits synclinaux nouveaux, à peu près paral- lèles aux axes directeurs hercyniens, et des cluses étroites, transversales à ces axes hercyniens et dues vraisemblablement aux mouvements épiro- géniques. Ajoutons encore qu'on lrouve des assises permiennes (Autunien et Saxonien) dans les géosyn- clinaux d’Autun et de Blanzy. Ces assises con- sistent en dépôts lagunaires (poudingues à élé- ments granitiques, arkoses, schistes bitumineux, charbon). Enfin, postérieurement aux dépôts du Permien inférieur, se place une seconde phase orogénique hercynienne moins intense que la pre- mière. Au point de vue tectonique, les études détaillées de la région ont permis à l'auteur de distinguer trois faisceaux paléozoïques : 1° Faisceau du Morvan, qui comprend cinq syn- clinaux hereyniens ; 2 Faisceau de Blanzy-Bert, en grande partie caché sous un vaste synclinal houiller et permien ; 3° Faisceau de la Loire, comprenant quatre syn- clinaux hereyniens. Des massifs granitiques, correspondant à des aires anticlinales hercyniennes, séparent ces divers faisceaux. Du Nord au Sud, ce sont : le granite du Luzy, le granite du Charolais, le granite du Beau- jolais, prolongement de la chaîne du Pellerat. Le faisceau de la Loire se signale par des « dé- crochements » d'une certaine importance, dus prin- cipalement à des mouvements orogéniques post- hereyniens et qui ont joué à nouveau lors des mouvements alpins. Quant au faisceau du Morvan, les bandes paléozoïques sont continues dans leur allongement. Les contre-coups des mouvements alpins n'y sont arrivés qu'atténués, comme si le petit synelinal permien de Blanzy-Bert en avait arrêté la transmission. Nous devons encore faire observer que, dans la Loire, l'enfoncement géosyn- clinal antérieur aux plis hercyniens paraît avoir été plus important: tout le Dévonien et tout le Tournaisien sont très métamorphiques ; le Viséen seul est encore fossilifère. Un résultat extrêmement important, dû aux recherches de notre confrère, est le suivant : les sédiments primaires du Morvan permettent de se faire une idée de la profondeur à laquelle se sont effectués les phénomènes de métamorphisme JOSEPH RÉVIL — REVUE dus au granite. Cette profondeur est faible. En effet, l'auteur nous à fait voir que les couches les plus élevées du Tournaisien ont été métamorphisées, tandis que, dans les couches qui les suivent (Viséen), on trouve à l’état de galets des débris des couches immédiatement antérieures. L'érosion qui s'est produite entre la fin du Tournaisien et le com- mencement du Viséen à done été minime; au moment où elles ont subi le métamorphisme, les assises tournaisiennes ne se trouvaient que sous une faible épaisseur de sédiments. Il n’est pas sans intérêt de constater encore que le métamorphisme dû au granite est plus intense dans la région du Morvan que partout ailleurs, et que l'activité éruptive s'y est grandement mani- festée. Cette constatation doit être rapprochée du fait que le Plateau central est la région de rebrousse- ment des plis armorico-varisques. C'est une région faible de l'écorce terrestre, et elle l’est restée à l'époque tertiaire (éruptions du Cantal, du Mont- Dore et de la chaîne des Puys, si bien étudiées par MM. Auguste Michel-Lévy, Marcelin Boule, P. Glan- geaud, etc:). L'étude. que nous venons d'analyser est une œuvre de grand mérite. Elle fait honneur au jeune naturaliste qui porte un nom estimé de tous, et continue dignement les travaux d’un des maitres de la Géologie contemporaine, III. — LE TRIAS DES ALPES FRANCAISES. MM. W. Kilian et J. Révil ont commencé en 1904 la publication d’un ouvrage qu'édite l’Imprimerie nationale et qui est consacré à la Géologie des chaines intérieures des Alpes françaises. Le lome I avait pour objet la description orographique et géologique de quelques parties de la Tarentaise, de la Maurienne et du Brianconnais septentrional. Nous en avons développé, ici même, les principales conclusions. Le tome If, dont le premier fascicule vient d’être publié‘, comprend l'étude des terrains prenant part à la constitution non seulement de ces régions, mais encore de toute la chaine. Dans ce fascicule sont successivement étudiées les forma- tions cristallophylliennes et éruptives (1), carboni- fériennes (Il), permiennes (III) et triasiques (IV). Le chapitre consacré au Trias forme plus de la moitié du volume, et renferme de nombreuses données ayant trait aux Alpes françaises. Il nous a semblé utile d'en faire un exposé sommaire, ces données apportant un peu de lumière sur certaines 4 W. Kicra et J. RÉVIL : Æ{ude géologique dans les Alpes occidentales. Description des terrains qui prennent part à la constitution géologique des zones intra-alpines françaises, t. II, fasc. 1, Paris, 1908, ANNUELLE DE GÉOLOGIE 251 questions que n'avaient pas élucidées les travaux antérieurs. Dans les zones intra-alpines francaises, le Trias comprend les termes suivants, en remontant la série : 1° quartzites; 2° schistes siliceux, marbres ou schistes phylliteux, gypses et cargneules infé- rieurs; 3° calcaires gris parfois siliceux ou dolo mitiques ; 5° schistes bariolés et banes de calcaires dolomi- tiques, à patine « nankin ». 4 cargneules el gypses supérieurs; 4. Quartziles. — Is consistent en grès sursili- ceux, à grains plus ou moins nets de quartz blancs, roses ou verdâtres. Malgré la recristallisation de leurs éléments, ils se présentent avec un facies éminemment détritique et se sont formés aux dépens d'éléments empruntés aux antielinaux pri- mitifs de la zone du Mont-Blanc. Dans les Alpes occidentales, ils occupent une grande étendue el peuvent se suivre de la Tarentaise aux Alpes-Mari- times. 2, Schistes siliceux, marbres ou schistes phyl- liteux, gypses et cargneules inférieurs. — Aux quartzites succèdent des assises de diverses natures: calcaires phylliteux, schistes siliceux, cargneules et gypses. Les calcaires phylliteux, surtout développés dans le massif de la Vanoise, consistent en calcite cris- talline et translucide et en zones chloriteuses ou sériciteuses grossièrement parallèles à la stratili- cation, ce qui leur donne un aspect gneissique très remarquable. Quelques minéraux de métamor- phisme y ont été constatés. Des calcaires siliceux et schisteux sont égale- ment assez constants à la base des calcaires tria- siques dans certaines parties de la zone du Briancon- nais. En outre, un horizon inférieur de cargneules et de gypses séparant les quartzites des calcaires, et occupant le même niveau stratigraphique que les calcaires phylliteux, s'observe dans un certain nombre de localités. Cet horizon n'est qu'un acei- dent des calcaires et marbres phylliteux; ce n’est qu'une simple modification due à des actions chi- miques (décalcification et gypsification) posté- rieures au dépôt des assises. 3. Calcaires gris parfois siliceux ou dolomi- tiques (Calcaires à Gyroporelles).— La plus grande partie du Trias est constituée dans les zones intra- alpines francaises par des calcaires sub-cristallins d'un gris cendré, généralement siliceux et parfois dolomitiques. Ces calcaires, dont la pénurie en fos- siles est due à la recristallisation, pourraient repré- senter une série d'horizons paléontologiques. De nombreuses vermiculations, à la surface des 252 JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE bancs, rappellent le Muschelkalk classique de l'Est de la France et du Var. M. Termier y a découvert des débris de Polypiers et pense que la majeure partie est d'origine corallienne. Des Encrines, des Gastéropodes, mais malheureusement indétermi- nables, ainsi que des Diplopores y ont été ren- contrés. Ce facies du Trias de la zone du Brianconnais a un développement comparable à celui qu'il pré- sente dans les Alpes orientales. Cette zone de cal- caires gris doit être considérée comme une dépen- dance occidentale de la mer triasique du Tyrol méridional et de la Lombardie. Cette mer est venue probablement, par la région du lac Majeur et du Piémont, empiéter sur la région qu'oceupent actuellement les zones intra-alpines francaises, pour mourir graduellement vers l'Ouest, le long d'une bande moins profonde et lagunaire, corres- pondant à la zone cristalline delphino-savoisienne (Mont-Blanc, Pelvoux, Mercantour), 4. Cargneules et Gypses supérieurs. — Aux environs de Saint-Jean-de-Maurienne et de Moùû- liers, c'est-à-dire à l'Ouest de la « zone axiale houillère » et de la « zone des Aiguilles d'Arves », affleurent des gypses blancs passant à l’anhydrite dans la profondeur, parfois accompagnés ou rem- placés par des calcaires dolomitiques jaunâtres vacuolaires (cargneules). Les gypses sont moins développés dans le Briançonnais, où se rencontrent surtout des cargneules. Dans la partie orientale de la zone, ils font souvent défaut, et les brèches du Lias reposent alors sur les calcaires triasiques. 5. Schistes bariolés et calcaires dolomitiques. — Au-dessus de l'horizon des gypses et cargneules supérieurs se développent, en quelques points, des dolomies à cassure parallélipipédique, mate ou suberistalline, en lits bien réglés et parfois accom- pagnées de « schistes bariolés ». Les dolomies de ce niveau constituent un horizon constant dans les Alpes francaises. Dans leur voi- sinage, ou les remplacant d'une facon complète, se montrent, particulièrement en Maurienne, des schistes tantôt noirâtres, tantôt lilas et verdâtres. Lorsqu'ils existent, ils constituent un des niveaux les plus faciles à reconnaitre dans le Trias des chaines alpines el se trouvent toujours à la partie tout à fait supérieure de la formation. Nous devons faire remarquer qu'il est fort diffi- cile de synchroniser la série triasique intra-alpine française, soit avec les trois élages du Trias de l'Europe centrale, soit avec les cinq étages distin- gués par M. von Arthaber dans le lype « austro- alpin ». Notre série triasique est trop pauvre en fossiles pour tenter des parallélismes paléontolo- giques rigoureux. Seuls, les quartziles de la base, les deux horizons de gypses et cargneules séparés par la masse des calcaires triasiques, et les schistes bariolés du sommet peuvent fournir quelques points de repère. Les premiers peuvent être synchronisés avec les couches de Werfen, et les seconds avec les gypses et cargneules se présentant quelquefois, d'une part, au sommet du Werfénien et à la base de l’Anisien, de l’autre, dans les couches de Raïbl (Car- nien). Quant aux schistes bariolés, ils rappellent les « Quartenschieffer » des Alpes suisses, tandis que les couches à À vicula contorta de la Maurienne se caractérisent par la faune des couches de Koes- sen, couches que la plupart des auteurs allemands rangent encore dans le Trias. Les calcaires triasiques à Gyroporelles (n° 3) du Brianconnais doivent être considérés comme repré- sentant plusieurs divisions de la série des Alpes orientales. Les quelques fossiles rencontrés per- mettent de tenter les assimilations suivantes : la partie inférieure à Spirigera trigonella N. Schloth serait virglorienne (dinarienne) ; la partie moyenne, qui à fourni le Diplopaura pauciforata Guemb.. représenterait un niveau plus élevé : le Wetter- steinkalk ou le Ladinien (Tyrolien); enfin, les couches supérieures qui passent aux « schistes lustrés », et dans lesquelles M. Franchi a recueilli, en Piémont, des Loxomena et la faune à Worthenia solilaria, correspondraient au Trias supérieur. Le développement de cette série triasique el les relations que présentent ses divers termes per- mettent de formuler quelques conclusions d’un certain intérêt. C’est, en premier lieu, que les assises de ce lerrain sont recouvertes en concordance par les premiers dépôts jurassiques, partout où les éro- sions ultérieures n'ont pas fait disparaître ces der- niers. Le caractère nettement marin des premiers dépôts jurassiques, succédant aux dépôts lagunaires du Trias, indique une éransgressivilé de l'étage rhétien. Dans la zone du Brianconnais, c'est-à-dire à l'Est, la concordance avec les grès permiens est absolue, et la continuité des dépôts évidente; elles marchent de pair avec une épaisseur considérable des forma- tions marines et le développement des calcaires massifs. C'est le éype brianconnais, dénotant une grande tranquillité dans les conditions de sédi- mentation. A l'Ouest de cette zone, la discordance avec le substratum est manifeste, et il y à une notable réduction des assises. Des lacunes stratigraphiques apparaissent à la base du système; en certains points des zones externes, comme à Beaumont, le Trias fait même défaut. La discordance du Trias, limitée à la région des | massifs de la première zone (Aïiguilles-Rouges, JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 253 Mont-Blanc, Belledonne, Rocheray, Pelvoux, Mer- “antour) et aux pays les avoisinant à l'Est, est le résultat de mouvements anté-permiens, tels que ceux qui se sont manifestés dans le Plateau Central. A l'époque triasique inférieure, la plus grande partie de la région intra-alpine est immergée et soumise à un régime assez uniforme, le système débutant presque partout par des grès, des conglo- inérals ou äes arkoses, souvent par des quartzites. Ensuite, deux régions se différencient : à l'Est, dans la zone du Brianconnais, c'est la mer qui dépose surtout des calcaires massifs, souvent for- més de débris d'algues calcaires (Gyroporelles). A l'Ouest se constituent des sédiments rappelant ceux de l'Europe centrale (gypses, cargneules, marnes bariolées). Ces sédiments d'origine lagunaire sont la preuve d’un certain assèchement de l'Océan tria- sique, après sa première incursion, par un léger ridement orogénique. À l’époque triasique, l'empla- cement des Alpes francaises élait une dépendance du Massif central alors émergé. En s’éloignant de ce massif, on trouve d’abord une région littorale et lagunaire, puis, plus à l'Est, une région sublitto- rale, franchement marine. On peut donc considérer comme actuellement établie l'existence, dans plusieurs massifs (Pelvoux, Grande-Rousse, La Mure, etc.), de plis anté-triasi- ques, dont la direction ne coïncide pas toujours avec celle des plis plus récents, plis limitant à l'Ouest la région marine du Briançonnais. Dans cette der- nière, comme nous l'avons dit, succèdent aux quartzites werféniens des masses de calcaires pro- bablement construits, des dépôts calcaires schisteux intercalés entre deux niveaux de gypses et car- gneules, témoignant des variations de profondeur. Un régime marin s'y est établi après une première phase lagunaire, suivie elle-même, en certains points, par un épisode lagunaire final. D'autre part, il faut attribuer à des communica- tions directes entre la mer du Muschelkalk lorrain et celle de la Basse-Provence l’analogie existant entre le Trias moyen à Ceraltites et Coenoihyris vulgaris Schl. sp. de ces deux régions si éloignées l'une de l’autre. Une communication directe devait exister entre la Franche-Comté et le bassin du Var, sous forme d'un chenal contournant les masifs cristallins alpins de la zone delphino-savoisienne. Les dépôts de ce détroit, ramification de la mer intérieure du Trias moyen de l'Europe centrale, nous sont actuellement cachés sous les sédiments du bassin rhodanien et des chaines subalpines. Si nous cherchions à comparer le Trias des Alpes françaises avec les types classiques du Trias euro- péen, nous constaterions qu'il n'offre d'identité absolue avec aucun d'eux. Notre Trias constitue un type mixte ou de passage, se rapprochant beaucoup dans les zones nord-ouest et sud-ouest du type germanique, tandis que, dans la zone du Brian- connais, l'apparition des masses calcaires rappelle le type des Alpes orientales et le type méditerranéen, alors que plus à l'Est encore, dans la zone des « Schistes lustrés », apparaît un type métamorphique (quartzites gneissiformes, calcaires et marbres cris- tallins) assez différent du Trias germanique comme du Trias méditerranéen. D'une facon générale, concluent les auteurs, «il faut se représenter le fond de la mer triasique, sur l'emplacement des Alpes françaises, comme formé par un plan incliné de l'Ouest et du Nord- Ouest vers l’Est-Sud-Est. C’est tout au plus si la répartition des facies et les limites des zones de sédimentation semblent indiquer, par leur dispo- sition générale, sensiblement parallèle à la future chaine alpine, la direction des accidents qui se produiront aux époques suivantes ». IV. — LES RÉGIONS VOLCANIQUES DU Puy-vEe-Dômx. Depuis que Guettard, en 1751, annonçait l’exis- tence en Auvergne de volcans comparables à ceux du Vésuve et de l’Etna, mais éteints et démantelés, cette région à élé visitée par de nombreux savants. On doit à M. Michel-Lévy ! la connaissance de l’âge des éruptions du Mont-Dore et de la chaîne des Puys, ainsi qu'une importante étude pétrographique des principaux gisements. Nous rappellerons aussi qu'en 1905 l’Académie des Sciences de Paris cou- ronnait un Mémoire de M. Marcelin Boule* : « Sur l’âge des derniers volcans de la France ». Malgré l'importance de ces travaux, bien des points restaient obscurs et bien des problèmes attendaient leur solution, surtout en ce qui con- cerne la Limagne et les chaines volcaniques de la partie occidentale du département du Puy-de- Dôme. Ce sont ces questions qui viennent de faire l’objet d'une monographie de M. Ph. Glangeaud ”. Nous en résumerons les principales données. Considéré à un point de vue général, le dépar- tement du Puy-de-Dôme peut être divisé en trois grandes zones de direction Nord Sud et sensible- ment parallèles : les monts du Forez et du livra- dois à l'Est, la Limague dans la partie centrale, et, à l'Ouest, la région granitique et archeenne servant de soubassements à de nombreux volcans (Cézal- lier, Massif du Mont-Dore, Chaine des Puys, ete.). 1 Mrcuec-Lévy : Comptes rendus de la réunion extraordi- naire de la Société géologique à Clermont-Ferrand. (Bull. Soc. géol. France, 3° série, t. XVIII, p. 68N, 1840.) 2 M. Boue : L'âge der derniers volcans de la France. (La Géographie, mars-mai 1906.) 3 Pn. GLanGEAUD : Les régions volcaniques du Puy-de- Dôme. (Bulletin des Services de la Carte géologique de France, n° 123, t. XIX, 1909.) 254 Cette dernière zone se fait remarquer par deux dépressions : 1° dépression suivie par les vallées de la Miouse et de la Sioule ; 2 dépression en relation avec la dislocation houillère, Asprière-Sauvigny, qui fut transformée en chenal à l'époque oligocène. M. Glangeaud ne s'occupe que des éruptions de la Limagne, de celles de la Sioule et du chenal houiller, enfin de la chaîne volcanique du bord cristallin occidental de la dépression lémanienne. Le synclinal de la Limagne a été comblé, peu à peu, par une série de sédiments saumâtres ou la- custres atteignant en certains points plus de 100 mètres d'épaisseur. Cette accumulation de dépôts, nous dit M. Glangeaud, « se fit constam- ment sous une faible profondeur d'eau, par suite de l’enfoncement progressif du synclinal, au fur et à mesure que les refoulements tangentiels faisaient se rapprocher et s'élever ses bords ». Les dépôts remplissant la dépression sont d'âge tertiaire. L'Oligocène débute (Sannoisien) par des formations saumâtres ou lacustres en communication avec le bassin du Rhône, se continue par des formations également saumäâtres au début du Stampien et, sauf en quelques points, se termine par des dépôts la- custres (Stampien moyen, supérieur et Aquitanien). A la période suivante (Miocène), les premiers cours d’eau s'établirent suivant le fond des syncli- naux oligocènes. Par suite du relèvement général du Sud vers le Nord et de l’exhaussement continu des clefs de voûte anticlinales, les rivières prirent un cours général Sud-Nord, avec affluents Est-Ouest et Ouest-Est. La partie du cours d'un de ces affluents à pu être reconstituée grâce à des formations allu- viales conservées sous les coulées de basalte de Gergovie. Ce sont des sables, marnes, lignites où ont été recueillis : Melanoides Escheri, Melanopsis Hericarti, Unios, Planorbes, etc., et une flore très riche qui a été étudiée par l'abbé Boulay. Ces sables sont d'âge burdigalien. À la même époque se déposèrent les sables granitiques des côtes de Cler- mont et de Chanturgue qui recouvrent l'Oligocène avec une légère discordantce et sont recouverts par des coulées d'âge burdigalien et des alluvions d'âge helvétien inférieur. Ces mouvements du sol avaient amené l’'émersion des synclinaux et l'établissement du réseau hydro- graphique. Ils furent suivis de la formation de fractures généralement Nord-Sud sur lesquelles s'édifièrent des volcans. De cette époque datent les coulées de Gergovie, du Puy-Saint-Romain, des Côtes de Clermont, la coulée inférieure du Puy-du- Var, qui sont comprises entre les dépôts burdiga- liens et les alluvions helvétiennes inférieures. Ces éruptions de la Limagne du début du Miocène sont les premières éruptions volcaniques, non seu- lement du Puy-de-Dôme, mais du Massif Central. JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Peu après le dépôt des alluvions helvétiennes à Dinotherium et Mastodontes, s'ouvrirent de nou- velles fractures sur lesquelles s'édifièrent des vol- cans (Puy du Var [coulée supérieure], Chanturgue, Puy de Mur). À une troisième période miocène se rattache le plateau basaltique de Pardines, qui n’est qu'à 224 mètres au-dessus de l'Allier et qui repose sur les alluvions à galets de quartz. La continuité des mouvements du sol, marqués surtout par des tassements, à diverses reprises de l'époque pliocène, se traduisit dans la Limagne par la formation de nouvelles fractures. Elles découpèrent non seulement les sédiments oligo- cènes et miocènes de la région, mais encore les coulées basaltiques qui les surmontaient. Sur cer- taines de ces fractures s'élevèrent des volcans mieux conservés que les volcans miocènes (volcans de Corent, de Perrier, de la Roche-Noire, du Broc, du Montcelet, ete.). En l'absence de documents paléontologiques sous certaines coulées, on peut se baser sur la hauteur des coulées suspendues au-dessus de la vallée de l'Allier pour établir provisoirement leur âge. Par contre, une coulée dont l’âge a été précisé est celle du basalte dit « de Perrier », car, à la partie supérieure des sédiments recouvrant ces basaltes, a été recueillie une faune du Pliocène moyen. Au début du Pléistocène, toujours sous l'influence des tassements, se produisit un dernier effort de l'activité volcanique, qui amena l'édification de la chaine des Puys, ainsi que celle d’une autre petite chaine située sur la rive gauche de la Sioule, que le professeur de Clermont désigne sous le nom de « Petite chaine des Puys ». A cette époque, se for- mèrent les volcans de Gravenoire et de Beaumont, dont les coulées reposent sur des alluvions renfer- mant des restes de Pos et d'Æquus, coulées qui ne sont situées qu'à environ 60 mètres au-dessus du niveau actuel de l'Allier. La butte sur laquelle est construite la partie haute de Clermont-Ferrand est le reste d’un cône éruptif également récent, datant probablement du Pléistocène inférieur. Du même âge seraient les volcans de Crouelle, de la Poy, de la Sault, Lussat et Malintrat. Avec ces derniers volcans, se termine la série des périodes éruptives de la Limagne, qui avait débuté au Miocène inférieur et s'était continuée durant le Miocène, le Pliocène et jusqu'au Pléistocène, durant sept périodes volcaniques. Leurs coulées sont actuellement suspendues au-dessus de l'Allier, à des hauteurs variant de 390 à 60 mètres. Le bassin tertiaire de la Limagne est la région du Massif Central où les éruptions volcaniques se sont succédé le plus longtemps. On doit ajouter que la température très élevée du sous-sol de la JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 253 Limagne (le degré géothermique est de 14 m. au lieu de 33), les nombreuses sources thermales, les dégagements d'acide carbonique, les venues de bitume et de pétrole, montrent que l’activité volca- nique n’est pas éteinte dans cette région. De l’autre côté de la chaine des Puys s'observent les restes de l'ancienne chaine volcanique de la Sioule, dont M. Glangeaud à également reconstitué l'histoire. Gelle chaine comprend une quinzaine de collines basaltiques, s'alignant le long des vallées de la Miouse, de la Sioule et de la haute vallée de la Morge. Ces volcans présentent un certain nombre de caractères communs avec ceux de la Limagne, mais leur appareil éruptif est mieux conservé, ce qui tient à ce que leur soubassement, formé de roches cristallines, élait moins accessible à l’éro- sion. Ils sont généralement situés sur des disloca- lions anciennes d'âge carbonifère (dislocalions hercyniennes), qui s'ouvrirent de nouveau sous l'influence de mouvements du sol et par lesquelles, pendant le Tertiaire (Miocène) et le Quaternaire (Pléistocène), s'épanchèrent des laves basaltiques. C'est un fait très intéressant et qui n'avait pas encore été mis en lumière dans le Massif Central que cetle superposition de mouvements miocènes aux mouvements hercyniens. Cette conclusion, nous dit l'auteur, est d'ordre plus général qu'on ne l'au- rait supposé; elle s'étend à la plupart des régions éruplives du Puy-de-Dôme, notamment au Livra- dois, au Mont-Dore, ainsi qu'à la chaîne des Puys. De Noyant à Asprières, le Massif Central est tra- versé en écharpe par une dislocation d'âge houiller, dont un certain nombre de géologues se sont déjà occupés. Cette dislocation, peut-on se demander, est-elle due à une fracture unique s'étendant sur une longueur de 240 kilomètres ? Non, répond M. Glangeaud, « il existe en réalité un ancien chenal, vraisemblablement esquissé au début du Carbonifère (Dinantien), qui se fractura à cette époque, et dont certaines parties, devenues éruptives, se comblèrent de produits volcaniques connus sous le nom de tufs orthophyriques ». Ce chenal doit être considéré comme un synclinal bordé d'anticlinaux parallèles. En réalité, il existe à travers le Massif Central une grande zone de direction nord-nord-est, marquée non seulement par des bassins houillers, mais aussi par des séries de failles, de fractures parallèles, par des bandes plissées et effondrées de même direction, par des filons de granulite et métallifères ainsi que par des décrochements. Cet ensemble de dislocations était constitué au début du Tertiaire. Cette zone de l'écorce terrestre joua de nouveau un rôle actif aux époques oligocène et miocène. Ce qui mérite de retenir l'attention pour la région étudiée, c'est cette superposition du chenal oligo- cène à la dépression houillère; c'est aussi la succes sion, le long d'une même zone de l'écorce terrestre, de mouvements oligocènes à des mouvements her- cyniens. Plus tard, au Miocène, se produisirent des lassements, le long de ce territoire, et les fractures anciennes s'ouvrirent de nouveau, Par ces fractures sortirent des laves et s'édifièrent des volcans, dont les principaux sont ceux de Saint-Gulmier, de Voingt, des environs de Pontaumur, de Messeix, de Bort, etc. Les laves fournies par ces volcans sont variées : les basaltes dominent, mais on trouve aussi des trachytes, des labradorites, des phonolites. Les dépressions tertiaires de la Limagne et de la Sioule sont dominées par la chaine des Puys ou Monts-Dômes. Cette chaîne n'est pas installée sur la ligne de faite séparant ces dépressions, mais en contre-bas et à l’ouest d'un bourrelet de roches cristallines, de direction nord-sud, qui domine la base des volcans d'environ 100 mètres, M. Glangeaud considère cette bande de terrains cristallins comme la clef de vouüte d'un anticlinal Nord-Sud, sur les flancs duquel serait installée la chaîne des Puys. Les efforts orogéniques qui don- nèrent naissance à cet anticlinal commencèrent à l'Oligocène et acquirent leur plus grande ampleur au début du Miocène. À cette même époque, cer- taines parties de la clef de voûte se fracturèrent, ce qui occasionna la sortie des laves et l'édification d'un certain nombre de volcans. « Les débris de ces volcans, nous dit le professeur de Clermont, se trouvent non seulement dans les projections des volcans à cratère, mais aussi dans les roches domi- tiques elles-mêmes, en particulier dans la domite du Puy-de-Dôme, où l’on observe un grand nombre de blocs de basalte. » — Ces basaltes se trouvent encore en galets dans les alluvions situées sous les coulées de certains volcans, et, pour cette raison, il semblerait que leur édification est d'âge miocène. Les restes se trouvent aux environs de Pardon, Chatra, Mouson, Solagnat, Mont-Rodeix et Orcines. Une autre série de volcans s'alignant du Nord au Sud, de Villars à Olloix, se trouve à l'Ouest de la faille occidentale de la Limagne. Ils paraissent s'être édifiés à l'époque du Miocène supérieur, Les résultats obtenus par notre confrère seront certainement appréciés par tous les géologues ; c’est à juste titre que l'Académie des Sciences de Paris vient de leur décerner une de ses plus hautes récompenses. Dans un second article, nous poursuivrons l'exposé des plus importants travaux géologiques récents. sh Joseph Révil, Président de l'Académie des Sciences, Belles-lettres et Arts de Savoie, 256 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Riquier (Charles), Professeur à la Faculté des Sciences de Caen, Lauréat de l'Institut. — Les Systèmes d'équations aux dérivées partielles. — 1 vol. 1n-8° de590 pages. Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1910. L'important ouvrage dont nous allons essayer de donner ici une analyse succincte à pour objet principal d'étudier les conditions d'existence des intégrales géné- rales régulières d’un système quelconque d'équations aux dérivées partielles. Ce problème, beaucoup plus compliqué pour les systèmes partiels que pour les équations différentielles ordinaires, à donné lieu, depuis le Mémoire classique de Cauchy (1843), à de nombreux travaux. Dans la très intéressante préface de son livre, M. Riquier en retrace le tableau et montre en même temps la genèse de ses propres recherches sur la question, ainsi que les résultats nouveaux qu'il a obtenus. L'auteur se place toujours au point de vue fonction- nel de M. Méray : étant donné un système partiel (limité), renfermant un nombre quelconque de fonc- tions inconnues, u, Y..…., à un nombre quelconque de variables x, y, Z...., il s'agit de reconnaitre l'existence d'intégrales générales régulières de ce système, déve- loppables à partir des valeurs initiales Xo, Vos Zo..…., es variables, en des séries entières par rapport à x-x, V-Vos Z-Zo...., CL de déterminer les éléments arbitraires qu'elles renferment. Quatre chapitres introductifs sur la théorie générale des fonctions olotropes assurent aux lecteurs les connaissances nécessaires à l'étude de j'ouvrage tout entier. Après quoi, l’auteur s'occupe tout d'abord de construire, à l’aide du système donné, les développements des intégrales hypothétiques. Supposant, à cet effet, le système résolu par rapport à certaines dérivées, qui, dès lors, figurent seules dans les premiers membres, M. Riquier attribue à ces déri- vées, ainsi qu'à toutes celles qui s’en déduisent par différentiation, la qualification de principales, landis que les autres sont dites paramétriques, et il appelle détermination initiale de l'une des intégrales hypo- thétiques la portion de son développement dont les coefficients sont, aux facteurs numériques connus près, les valeurs initiales de la fonction et de ses dérivées paramétriques de tous ordres. [l prouve alors, par des considérations élémentaires (chap. V), que, pour se donner arbitrairement les déterminations initiales des intégrales (hypothétiques), il suffit d'imposer à ces intégrales et à telles ou telles de leurs dérivées, en nombre essentiellement limité, la condition de se réduire respectivement, pour les valeurs initiales de tels ou tels groupes de variables, à des fonctions arbi- traires des groupes de variables restants. Aïnsi se trouve fixée, très simplement, l'économie des conditions initiales. Ce résultat fondamental étant acquis, il faut étudier la concordance numérique qui doit exister, relative- ment à des conditions initiales données, entre les équa- tions du système indéfiniment prolongé par différen- tiation, lorsqu'on y considère les valeurs initiales des variables, des fonctions et de leurs dérivées comme autant d'inconnues distinctes. Cette concordance est évidemment nécessaire à l'existence des intégrales répondant aux conditions initiales données; récipro- quement, si elle a lieu, on peut construire les dévelop- pements des intégrales, et si, en outre, ces développe- ments sont convergents dans un certain domaine, les intégrales dont il s’agit existent effectivement. Dans le ET INDEX cas, seul intéressant à étudier, où la concordance numérique a lieu pour un choix arbitraire des condi- tions initiales, le système est dit passif, et si, pour le choix arbitraire dont ils’agit, les développements que l'on peut construire sont convergents, le système est dit complètement intégrable. I est clair, d’après ce qui a été dit plus haut sur l'économie des conditions initiales, que la solution générale d’un système com- plètement intégrable dépend d’un nombre fini de fonc- tions et de constantes arbitraires. M. Riquier recherche, dès lors, des formes générales de systèmes partiels où la passivité soit exprimable à l'aide d’un calcul limité, et où la convergence des développements des intégrales soit assurée ; il signale, tout d’abord, la forme dite orthonome, dont l'étude fait l'objet principal du chapitre VIT. La forme orthonome est caractérisée par une certaine disposition des déri- vées dans les deux membres des équations, disposition qui résulte d’un mode de classement de ces dérivées, imaginé par M. Riquier, au moyen de nombres entiers attachés à chacune d'elles etquisontappelés leurs cotes. M. Riquier commence par établir que les conditions de passivité d'un système orthonome sont en nombre limité; puis il montre, par la méthode des fonctions majorantes, que les développements des intégrales convergent toujours, en sorte que {out système ortho- nome passif est complètement intégrable : c'est là un résultat capital, car la forme orthonome passive, créée par M. Riquier, contient comme cas très particuliers tousles types complètement intégrables étudiés jusqu'à ce jour. L'auteur cherche ensuite (chap. IX et X) à perfection- ner et à étendre les résultats obtenus; d'une part, il simplifie la recherche des conditions de passivité dans la forme orthonome ; d'autre part, il obtient des formes plus générales, où, sous laseule restriction que certaines inégalités numériques soient vérifiées, cette même recherche s'effectue au moyen d’un calcul tout sem- blable, sans que, d’ailleurs, la convergence des déve- loppements cesse d’être assurée. Dans la préface, M. Riquier cite deux exemples typiques des progrès ainsi réalisés, notamment celui d’une équation du second ordre, oùil obtient comme condition suffisante d'existence une simple inégalité numérique, alors que les recherches antérieures assignaient comme condi- tion de ce genre la nullité identique d'au moins une fonction de plusieurs variables. Dans le chapitre suivant, M. Riquier traite complète- ment deux applications importantes : 4° Déformations finies d'un milieu continu dans l’espace à n dimen- sions ; 2° Détermination des systèmes de coordonnées curvilignes orthogonales à » variables. Les deux ques- tions rentrent dans l'étude d'un système d'équations à n inconnues u, V,..…, W de n variables x,, x,,...., x, de la forme Su à 9v 9 wa ou cu ov cv cW oW — +. + — — Ji ks (JS MISE 9x; 9Xk Ox; OXE OX; OXk à J fonctions don- ET c \ 4) M. Riquier établit entre les het) nées y; les conditions nécessaires et suffisantes pour l'existence des intégrales, et montre qu'en les suppo- sant satisfaites, la solution générale du système dépend FA n(n +1) 2 système partiel formé par les conditions imposées aux fonctions y, le met sous une forme orthonome com- plètement intégrable, et fait voir qu'il laisse arbitraires constantes arbitraires; puis il étudie le BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 257 n des fonctions y convenablement choisies. L'hypo- thèse px = 0, quand ; estdilférent de 4, donne la solu- tion du second problème, proposé, il y a quelques années, pour le prix Bordin, et non résolu par les concurrents : M. Riquier le traite complètement, et montre que sa solution générale dépend de me) fonctions arbitraires de deux variables. Le chapitre XIT à pour objet d'intéressantes simpliti- cations relatives aux systèmes dits réguliers. Le cha- pitre XITI contient des résultats importants sur les sys- tèmes réductibles aux équations différentielles totales: il est consacré à l'examen du cas où l’ensemble des éléments arbitraires ne renferme, avec un nombre quelconque de constantes, qu'une seule fonction d'un nombre, quelconque de variables. Ce cas renferme, en particulier, celui d’une équation du premier ordre non linéaire : d'où, pour intégrer cette équation, une méthode différente des méthodes classiques. Enfin, dans le chapitre XIV, M. Riquier aborde la réduction d’un système quelconque à une forme com- plètement intégrable, et compare, dans deux formes passives provenant d'un même système différentiel, le nombre etla nature des éléments arbitraires que com- portent les conditions initiales. Tel est le résumé sommaire de cet ouvrage. Avec une puissance d'invention et une profondeur remarquables, M. Riquier, en ne s'appuyant que sur les notions géné- rales les plus simples, a pu édifier la théorie la plus complète qui ait paru jusqu'à ce jour sur ce difficile sujet. L'unité de la méthode, la précision parfaite de l'exposition, le souci constant de simplifier autant que possible des démonstrations et des résultats dont l'extrême généralité entraîne forcément la complica- tion, assurent l’une des premières places, dans la litté- rature des équations aux dérivées partielles, à ce livre qui justifie de tout point les distinctions qu'à plusieurs reprises l’Institut de France a décernées à l’éminent auteur. M. LeLIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. Bogaert (Ed. W.), Zngénieur de la Marine de L'Etat belge, ancien Elève de l'Ecole du Génie maritime de lrance. — Notes sur le problème de l'aéroplane (Equilibre et stabilité). — Monographie in-8 de 10 pages. Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1909. « Dans les petits pots, les bons onguents »; ce vieux dicton me revenait à l'esprit en parcourant cette bro- chure de soixante et quelques pages. L'auteur, ingé- nieur de la Marine belge, s'adresse à un public fami- liarisé avec les Mathématiques et la Mécanique ration- nelle; néanmoins, il commence par reconnaître que le problème de l’Aéroplane n’est pas susceptible d'être rigoureusement mis en équation. Dans le premier chapitre, il étudie la résistance d’un corps solide de faible épaisseur, adopte pour le plan mince la loi du sinus simple, et présente d'une manière intéressante ce que l’on connait de la résistance des surfaces courbes et du déplacement du centre de pres- sion. Le deuxième chapitre renferme des considérations du plus grand intérêt sur les relations entre la vitesse, la force sustentatrice, l’utilisation d’uneaile d'aéroplane et le vol des oiseaux. Dans le chapitre suivant, l'auteur étudie l'aéroplane lui-mème, considéré au point de vue de l'équilibre, et examine successivement le vol en ligne droite, les manœuvres dans le plan vertical, le vol avec moteur stoppé, les démarrages etatterrissages, les manœuvres dans le plan horizontal et les virages. Le chapitre IV est consacré à la très délicate question de la stabilité de l’aéroplane dans le sens longitudinal et dans le sens transversal, ainsi que pendant les manœuvres et les virages. C’est ce chapitre, à mon avis, qui constitue la partie la plus intéressante du volume. La conclusion de l’auteur est à noter. D'après lui, l'aéroplane possède une stabilité naturelle suffisante en air calme et dans le cas de courants horizontaux ; REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, pour les cas de remous, il faudrait compléter l'aéro- plane par les appareils stabilisateurs. Dans le cinquième et dernier chapitre, M. Bogaert étudie la construction des aéroplanes, et notamment la question du moteur, celle du propulseur et celle des appareils stabilisateurs dont il a affirmé la nécessité dans le chapitre précédent; pour ce dernier, il se borne à donner de simples indications, et à constater que la question est loin d'être résolue. Tel est le résumé de ce petit volume, dont lalecture, malgré l'abondance des formules et des calculs, est agréable et intéressante pour les personnes possédant l'instruction préalable nécessaire; c'estd’ailleurs à elles seules que l’auteur s'adresse, Je ne dirai pas que sur tous les points je partage sa manière de voir, mais les différences d'opinion entre M. Bogaert el moi ne portent que sur les questions où il à fait lui-même des réserves; là où il se montre plus affirmatif, j'ai cherché conscrencieusement si nous étions quelque part en désaccord, et je ne l'ai pas trouvé. Ne prétendant pas posséder un brevet d'infaillibilité en Aéronautique, je ne me porte pas garant de l'exactitude de tout le volume, mais ce que je puis affirmer, c'est que les mécaniciens qui s'inté- ressent à l'aviation liront avec plaisir et prolit cette excellente étude. Ct Pauz RENARD. Service géographique de FArmée. — Rapport sur les Travaux exécutés en 1908 au Service yé0- graphique de l'Armée. Paris, 1909. On ne se doute pas du nombre et de l'importance des travaux qu'exécute le Service géographique de l'Armée, avec des ressources limitées et des crédits insuffisants. Il a effectué, en 1908: des triangulations pour l'établissement de la carte au 50.000°; des opé- rations géodésiques pour l'établissement des cartes d'Algérie et de Tunisie; des observations astronomi- quesdans le plateau central de la France; la triangulation de la moitié de l'ile de Crète; les calculs des ohserva- tions faites par la Mission de l'Equateur, ete., etc. De pareils travaux seraient impossibles à réaliser sans la science profonde et le dévouement des officiers du Service, souvent obligés de vivre sous la tente pen- dant de longs mois, exposés à toutes les intempéries. L'on peut dire que les résultats obtenus sont des plus remarquables, et que le Service géographique, auquel ils font le plus grand honneur, et “ont le budget est pourtant si parcimonieusement établi, mériterait à tous égards d'être, de la part des Chambres, l’objet d’une meilleure dotation. 2° Sciences physiques Arctowski (Henryk). — L'Enchainement des Varia- tions climatiques. — 1 vol. in-8° de 135 pages, avec graphiques. Bruxelles, Société Belge d'Astro- nomie, 1910. La Météorologie est peut-être, de toutes les sciences physiques, celle qui a déjà accumulé le plus d'observa- tions. Cependant, de cet immense amas de documents, ce n’est un secret pour personne, on n'a pu constituer encore une véritable science. Malgré des travaux de toute première valeur, il est im- possible de dire avec certitude le temps qu'il fera. Et cependant, derrière nos chiffres accumulés se cachent certainement des lois. C'est à peine si quelques esprits avancés, notés comme fort téméraires, essaient timide- ment de rapporter les phénomènes météorologiques à des causes très générales, comme les variations à longue période de l’activité solaire. Evidemment, l'influence du Soleil ne saurait désor- mais être mise hors de cause, et nous avons, ily a quelques années, dans notre /n/roduction à la Météo- rologie de l'Avenir, montré l’étroite corrélation qui existe entre les manifestations solaires et la climatolo- gie terrestre. G** 258 C'est une contribution à ce colossal problème que M. H. Arclowski a voulu apporter en écrivant son « Enchainement des variations climatiques ». Jusqu'à quel point l'auteur a-t-il réussi ? c'est ce que nous dira l'avenir. Il est certain que la méthode employée est tout à fait suggestive et nous regrettons que les météorolo- istes de profession se bornent trop souvent à enregis- trer de simples nombres. L'exemple de M. Arctowski montre quel parti on pourrait tirer de nos statistiques. Voici un cas particulier : Si l’on trace des isothermes moyennes pour diffé- rentes saisons el pour un grand nombre d'années, il semble que les maxima et les minima de température dans une région réapparaissent d'une façon pério- dique. Des cartes de ce genre, lorsqu'elles affectent de grandes superficies, paraissent au premier abord pré- senter l'aspect de nos cartes météorologiques où le Bureau central enregistre journellement les déplace- ments des aires de basse en haute pression. La ré- partition saisonnière des températures sur une large contrée est, sans doute, soumise à une loi simple, mais inconnue ; une étude approfondie des statistiques, mises sous.cette forme, pourrait peut-être nous donner plus d'un enseignement utile, et. sous ce rapport, la méthode de M. Arctowski mérite d'être prise en con- dération. Si nous avions un léger reproche à adresser à l’auteur, ce serait de n'avoir pas mis assez en relief ses conclu- sions générales et d'avoir abusé peut-être de néologismes dont le sens, pour être parfaitement compris, exige une petite recherche d'attention. Mais n'oublions pas que ce travail très intéressant n’est qu'un essai d'applications de méthodes graphiques nouvelles. De ce premier Mémoire, qui constitue une initiative des plus heureuses, l’auteur saura, nous en somines convaincu, lirer des lois plus générales qui aiguilleront la Météorologie sur des voies plus fécondes. Tu. MorEux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. Kayser (E.), Docteur ès Sciences, Directeur du Laboratoire des Fermentations à l'Institut national agronomique, etManeeau (E.), Docteur ès Sciences, Directeur de la Station œænologique Moët et Chandon. — Les ferments de la graisse des vins. — 1 vol. in-8° de 132 pages, avec planches. Henri Villers, édi- teur. Epernay, 1910. La graisse des vins est une maladie assez répandue et dont l'étude est très importante au point de vue pratique. L'origine microbienne en fut établie par Pas- teur en 1866, et, depuis cette époque, de nombreux chercheurs ont essayé d'isoler les bacilles, cause de cette maladie. Un travail d'ensemble était nécessaire pour mettre cette question au point. C’est ce qu'ont fait MM. E. Kayser et E. Manceau, qui ont réussi à iso- ler huit microbes produisant la graisse de vins récol- tés dans huit régions viticoles différentes. Tous ces germes sont des bactéries anaérobies, isolées ou en chaînes, selon le milieu de culture, entourées d'une gaine mucilagineuse, laquelle communique aux vins gras cette consistance huileuse qui les caractérise. Ce sont des ferments des sucres, réclamant un milieu de culture légèrement acide, à peu près privé d'oxygène et surtout riche en matières organiques azotées. Le bouillon de haricots, certains milieux riches en pep- tone (toutes les peptones ne réussissent pas, mais les auteurs ont oublié de citer celles qui leur ont donné de bons résultats), l’eau de levure, le moût de raisins dont l'acidité a été partiellement saturée par la potasse, sont d'excellents bouillons de culture pour les lerments de la graisse. l'isolement de ces différents bacilles n'était pas une opération aisée, à cause, surtout, de celle substance mucilagineuse qui les entoure et entraîne toujours avec elle les germes étrangers, surtout des aérobies. II a fallu à ces deux savants de nombreux passages sur BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX milieux solides et liquides pour obtenir des cultures absolument pures. En étudiant comparativement les caractères géné- raux de ces différents ferments de la graisse, tant au point de vue morphologique que physiologique, MM. Kayser et Manceau sont arrivés à cette conclusion que les huit germes isolés avaient une très grande parenté. Tous ces microbes donnent des acides acétique et lactique et de la mannite avec le lévulose ; ils donnent seulement, avec le glucose, des acides acétique et lac- tique. Constatälion assez remarquable, le ferment mannitique de Gayon donne moins de mannite que les ferments de la graisse. Il se différencie du reste nettement de ces derniers. Les dosages de l'acide lactique et de la mannite, et surtout de ce dernier corps, furent, dans la plupart des bouillons de culture employés, très pénibles. Les auteurs ne cachent pas dans leur livre la difti- culté de pareils dosages en présence de la peptone. Ils se sont principalement contentés, et avec raison, des résultats comparatifs, les seuls intéressants, et leur livre renferme de très nombreuses analyses qu'il ne nous est guère possible de résumer ici. Les facteurs qui nuisent au développement des fer- ments de la graisse sont : l'oxygène de l'air, une trop grande acidité, une température trop basse (inférieure à 10°) ou trop élevée (supérieure à 30), une trop grande richesse en sucre, en tannin (supérieure à 4 gr. par litre) ou en alcool (supérieure à 13°). Enfin l'acide sul- fureux, à raison de 0 gr. 200 de métasulfite de potasse par litre, empèche le début de la fermentation grasse, landis qu'il en faut 0 gr. 500 pour arrêter une prolifé- ration existante de bacilles de la graisse. Il est donc plus facile de prévenir que de guérir celte maladie. . Toute cette étude, faite avec beaucoup de soins et d'habileté, conduit les auteurs à rechercher pourquoi un vin devient gras et comment il faut le traiter pour empêcher ou arrêter le développement de cette maladie. Puisque ces germes sont anaérobies, on pourrait croire qu'il suflit d'aérer un vin gras pour arrêter la maladie. Il n’en est rien cependant. Quand on aère un tel vin, les germes aérobies se développent, troubtent le liquide et absorbent l'oxygène, préparant un excel- lent milieu pour les ferments de la graisse. Le voile signalé par Pasteur à la surface de certains vins gras n'est pas constitué, comme l'illustre savant le pensait, par les ferments de la graisse, mais par des germes aérobies saprophytes. Si, l’on n'aère pas le vin, l'absence d'oxygène favorise le développement de cette maladie. L'aération du vin n'est donc pas un remède à con- seiller. Les vins sujets à la graisse ne sont pas, comme on l'a cru pendant longtemps, pauvres en tannin. Il n'y à jamais assez de tannin, dans un vin, pour empècher la graisse. MM. Kayser et Manceau ont reconnu que l'acide tartrique libre joue un rôle fondamental dans la protection contre cette maladie. Au contraire, un vin riche en matières azotées ou pauvre en alcool est sensible à la graisse. D'où les conclusions pratiques suivantes : 1° Faire fermenter le mieux possible le vin pour qu'il ne renferme presque plus de sucre ; 2% Avoir un vin très clair et pour cela le traiter en conséquence ; 3° Ajouter une petite quantité d'acide tartrique libre dans les vins qui ne sont pas assez riches en cet élé- ment ou choisir judicieusement l'époque de la ven- dange ; 4° Employer des levures pures quand, dans les vins mousseux, il s’agit de favoriser la fermentation du sucre et de faire prendre aux levures le pas sur les microbes. L'addition de tannin, si elle à pour but de précipiter en partie la portion mucilagineuse des vins gras, n'agil qu'indirectement en précipitant certaines substances BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX précipilables qui se trouvent dans le vin etentraine les microbes et leur gaine. Assez souvent, la graisse du vin n'est qu'une maladie passagère. Au bout d'un temps variable avec les cir- constances, la portion mucilagineuse se précipite elle vin s'éclaircit, Le vin, quoique ayant l'apparence d'un vin sain, ne sort pas indemne de celte épreuve. I à perdu de ses qualités essentielles. Il est plat et de valeur marchande médiocre. Il est donc indispensable surtout de prévenir celte maladie. Ce livre estaussi intéressant à lire pour les personnes s'intéressant aux exigences de la vinification que pour les hactériologistes et hygiénistes, qui pourront faire d'utiles rapprochements entre la maladie d'un liquide d'origine végélale et la maladie d'un être vivant. Trente-deux planches en couleurs, admirablement dessinées par M. Roussel, dont les planches sont si remarquées dans les Annales de linstitut Pasteur enrichissent ce livre, fort bien édité par les soins de la librairie Villers, d'Epernay, sous les auspices de MM. Chandon de Briailles. Les auteurs connaissent admirablement la question des vins, tant au point de vue pratique que bactériologique, et sont, sur ces ques- tions, de réputés el savants spécialistes. Nous ne pouvons faire un meilleur éloge de ce livre qu en disant qu'il forme un digne pendant à l'ouvrage publié par Pasteur, en 1866, sur les maladies des vins. Il est donc assuré d’un grand succès. F. DiexerT, Docteur ès Sciences. 3° Sciences naturelles Geikie (James), Professeur de Géologie et de Minc- ralogie à l'Université d'Edimbourg. — Traité pra- tique de Géologie, traduit et adapté de l'ouvrage an- glais « Structural and Field Geology », par LEMOINE (Paul), chef des Travaux de Géologie coloniale au Muséum. — 1 vol. de 490 pages, avec 187 figures et 64 planches. (Prix : 45 fr.) À. Hermann et fils, édi- teurs. Paris, 1910. L'ouvrage de M. James Geikie, intitulé « Structural and Field Geology », qu'une traduction ou plutôt une adaptation de M. Paul Lemoine vient de mettre à la portée des lecteurs français, est une œuvre s'adressant non seulement aux personnes qui débutent dans les études géologiques, mais encore à tousceux (ingénieurs, prospecteurs, hydrologues, agronomes, etc.) qui ne demandent à la science que des résultats pouvant être utilisés. Accueilli avec faveur en Angleterre, où, en moins de trois ans, il a eu deux éditions, ce Traité ne sera pas moins apprécié en France, car il constitue un ouvrage de vulgarisation absolument remarquable ; il présente des qualités de clarté et de précision qui le feront vivement estimer. De-plus, il est accompagné de nombreuses et belles photographies, dont quelques- unes, ainsi que le constate dans la préface M. Michel- Lévy, valent des lecons sur le terrain. Laissant de côté tout ce qui a pour objet les phases évolutives du globe terrestre, l’auteur ne s'occupe que de la nature et de l'agencement des matériaux qui en forment l'ossature. Après un chapitre préliminaire consacré aux procédés d'études des roches (1). il traite successivement des minéraux des roches, en ne décri- vant que ceux qui sont importants à connaître (un), des roches ignées (11), des roches sédimentaires qu'il subdivise en roches d'origine mécanique, d’origine chi- mique, d’origine organique (1v), des roches métamor- phiques et cataclastiques (v), des fossiles (vr), de Ja stratification des roches (vir), des concrétions et sécré- tions (vit), de l'inclinaison et du plissement des couches (1x), des diaclases (x), des failles (x1), du mode de gise- ment des roches éruptives (xn), de l’altération et du métamorphisme (xin), des formations métallifères (x1v), de l'influence et de la structure géologique sur la topographie (xv), des études sur le terrain (xvi), des recherches de matériaux utiles (xvi), des recherches | | pheaui d'eaux (xvin), des sols et sous-sols, de leur agricole (xIx). Ce relevé titres de tous les chapitres n | l'intérêt du volume, et de quelle utilité il sera de nombreux lecteurs, Alin que ceux-ci puissen rendre compte de la manière dont sont exposées diverses questions, nous résumerons le chapitre ayant traitaux modes de gisement des roches éruptives, cha pitre qui est complété par des documents dus à M. 4 moine, et qui traitent des recherches récentes d savants français. Le vrai caractère d'une roche ignée, nous dit M. Geikie, ne peut être déterminé que sur le terrain, en observant ses relations avec les roches qi l'en- tourent. Une roche éruptive ne se présente pas toujours avec le même aspect et peut affecter plusieurs types. Les plus importantes de ces structures sont les Hautho- lites, les Laccolithes, les Filons-couches, les Necks, les Dykes. Sous le nom de PBatholites, on désigne une masse intrusive semblant occuper une cavité irrégulière, ordi- nairement de très grande dimension, et pouvant arriver à mesurer plusieurs kilomètres de diamètre. Sur le bord d’un Batholite s’observent fréquemment des roches étrangères à la roche éruptive et qui ont été arrachées aux roches sous-jacentes; c'est ce qu'on appelle des xénolithes ou enclaves. Elles ont fait l'objet d'importants travaux de M. Lacroix, qui les classe de la façon suivante : enclaves énallogènes, enclaves lomcæogènes, enclaves prneumatogènes, enclaves poly- gènes. M. Lemoine expose d'une façon détaillée les idées actuelles au sujet de ces enclaves, en raison de leur importance au point de vue des théories sur le méta- morphisme. Les enclaves énallogénes sont surtout intéressantes ; « elles sont comme le résultat de véritables coups de sonde opérés par la roche intrusive ». Quant aux enclaves homæogènes, ce sont des fragments arrachés aux couches sous-jacentes, mais de nature apparentée à celle de la roche éruptive. Enfin, les enclaves pneu- matogènes sont le résultat de la cristallisation des matières volatiles émanées du magma. La plupart des pétrographes pensent que les roches qui occupaient autrefois l'emplacement des Batholites ont été « digérées » et assimilées par le granite. Cette manière de voir est confirmée par le fait qu'il existe souvent des différences de composition chimique entre les différents points d’une masse de granite. Le granite ne se présente pas toujours en batholite; il apparait souvent en couches d'épaisseur variable, injectées au milieu des assises quil à digérées. Ces « apophyses » (c’est le terme consacré) peuvent avoir leur origine dans une masse située à une certaine profondeur. On appelle Laccolithes des masses de roches érup- tives qui s'intercalent comme des lentilles au milieu des couches sédimentaires. Les Laccolithesapparaissent fréquemment par groupes, la présence de chaque groupe étant indiquée par une montagne en dûme. Les Filons-couches consistent en masses éruptives qui sesontinjectées, le long des plans de stratification ; ils ont, par suite, une disposition en lits plus ou moins réguliers. À La dénomination de Necks est attribuée aux chemi- nées d’ascension des produits voleaniques, remplies par des roches cristallines ou des matériaux [ragmen- laires. Les roches éruptives s'étant solidiliées dans des fissures très inclinées ou verticales sont appelées Dykes, tandis qu'on réserve le terme de veines érup- tives aux intrusions plus irrégulières, souvent tor- tueuses et bifurquées, et on les subdivise en veines exogènes ou intrusives et en veines aulogènes ou endogènes. L'auteur consacre ensuite quelques pagesaux données relatives aux roches eflusives, c'est-à-dire à celles qui se sont épanchées à l'air. Elles sont de deux sortes des 260 les Laves et les Z'ufs. Les Laves sont habituellement scoriacées, poreuses et caverneuses. Quant aux Tufs, ils ont des caractères variables. Le plus ordinairement, les matériaux dominants sont des débris menus, ou des fragments plus grands des laves qui les accompagnent. On y rencontre toutes les variétés de texture et de structure. Non moins intéressant que le chapitre que nous venons de résumer est celui portant pour titre « Alté- ration et métamorphisme ». Des faits importants, rela- tifs au métamorphisme des calcaires et des poudingues, y sont signalés par M. Lemoine, d’après les travaux de AIM. Auguste et Albert Michel-Lévy. L'analyse de ces recherches nouvelles dépasserait les limites de ce compte rendu. Nous aurons d'ailleurs l’occasion d'y revenir dans une étude spéciale que nous destinons à la Revue generale des Sciences. Les autres sujets sont traités avec le même talent et les inêmes qualités d'exposition; ainsi s'explique le succès de ce volume en Angleterre. Il comble véritable- ment une lacune dans l’enseignement de la Géologie appliquée, et nous devons féliciter M. Paul Lemoine de l'avoir mis à la disposition de nos étudiants. J. RÉvIL, Président de l'Académie des Sciences, Belles-lettres et Arts de Savoie. Blanchard (R.), Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l'Académie de Médecine. — L'Insecte et l'Infection. Histoire naturelle et médicale des Arthropodes pathogènes. Premier fascicule : Acariens. — 1 vol. gr. in-8° de 160 pages, avec 197 figures. (Prix : 6 fr.) Librairie scientifique et littéraire. Paris, 1910. Depuis quelques années, la Parasitologie a profon- dément évolué. Nous n'en sommes plus au temps où lon n’envisageait que le seul Microbe, dans l'étude étiologique des maladies. La plupaït de celles-ci sont microbiennes, c'est entendu; mais aujourd'hui, où l'hygiène a pris une place prépondérante dans la vie des peuples, il importe surtout de savoir comment les Microbes pénètrent dans notre organisme. Or, nous savons que les Insectes jouent un rôle considérable dans Ja transmission des Microbes d’un individu malade à un individu sain. Les Moustiques nous inoculent la filariose, le paludisme et la fièvre jaune ; les Mouches peuvent transmettre le charbon ou la maladie du sommeil; les Puces, la peste; les Punaises et les Argas, la fièvre récurrente, etc. Bref, les Insectes, en tant qu'agents d'inoculation des maladies, sont devenus très importants à connaître pour le médecin, et l’Entomologie constitue maintenant un des chapitres principaux de la Parasitologie. Or, c'est précisément ce chapitre que M. le Professeur R. Blanchard s’est proposé d'écrire. Le terme d'Insecte est pris ici dans son acception la plus large, telle que la comprenait Linné, c’est-à-dire qu'il s'applique aussi bien aux Arachnides et aux Myriapodes qu'aux Insectes proprement dits; ce sont on un mot tous les Arthropodes, qui respirent au moyen de trachées. Mais l’auteur, ne se proposant d'étudier que ceux qui jouent un rôle dans la propa- gation des maladies infectieuses, envisagera seulement les Acariens parmi les Arachnides, les Hémiptères et les Diptères parmi les Insectes. Le présent fascicule est consacré aux Acariens, et à peu près exclusivement aux Acariens de la famille des Ixodidés. On y trouvera résumés de main de maître tous les renseignements concernant leur morphologie, leur anatomie, leur évolution et leur biologie. Mais l'étude systématique de tous les genres et de toutes les espèces d’Ixodidés constitue de beaucoup la partie la plus importante. L'auteur à été puissamment aidé dans cette partie de son travail par les travaux remar- quables du Professeur Neumann, de l'Ecole vétérinaire de Toulouse. Mais tous ceux qui connaissent l'esprit clair et didactique de M. R. Blanchard, tous ceux BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX qui ont eu entre les mains son livre sur l'Histoire naturelle et médicale des Moustiques, se doutent bien qu'il a fait une œuvre originale. Tout le monde sait, en effet, que M. R. Blanchard sait résoudre avec une véritable élégance les difficultés en apparence les plus insupportables de la nomenclature. Aimant cette nomenclature dont il est le père, et connaissant Ja bibliographie mieux que personne, il est certainement le zoologiste le plus autorisé pour mettre au point une question de systématique. On retrouvera, du reste, dans le présent livre, le plan général d'ensemble et les tableaux analytiques qui ont fait le succès de son ouvrage sur les Moustiques. A la fin du volume, l’auteur étudie l’action pathogène des Demodecidæ, des Sarcoptidæ, des Gamasidæ et des Trombididæ. Ce sont là des questions bien nouvelles et bien peu connues, mais qui n’en sont pas moins intéressantes. Nous ne pouvons que féliciter notre maître d'avoir eu le courage d'entreprendre un travail aussi difficile et aussi ingrat. [l en sera certainement récompensé par les services qu'il rendra et nous n'avons plus qu'à attendre avec impatience les prochains fascicules. D' Juces Gurarr, Professeur à la Faculté de Médecine de Lyon. 4 Sciences médicales Pavy (EF. W.), Médecin honoraire du King Edward VII Hospital, Médecin consultant de Guy's Hospital. — Pathogénie et traitement du Diabète sucré. — 4 vol. in-8° de 130 pages. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1910. Partant de ses expériences et observations, l’auteur expose la théorie du diabète sucré : à l’état normal, les hydrocarbonés ingérés ne se retrouvent ni dansle sang, ni dans l'urine; au cours du diabète, on les retrouve dans les deux, et la quantité de sucre éliminée est proportionnelle à la quantité de substances hydrocar- bonées ingérées. Dans le premier cas, les hydrocar- bonés disparaissent et sont utilisés; dans le second, ils filtrent à travers les tissus jusque dans l'urine sous forme de sucre, et sont éliminés sans avoir été assi- milés. ; Cette différence est attribuée par l’auteur à ce que, dans le premier cas, les hydrocarbonés sont assimilés, c'est-à-dire transformés en substances protéiques, puis transformés en substances grasses au niveau du siège d'absorption, et subsidiairement convertis en glycogène et en substances grasses dans le foie. Si ces hydrocar- bonés s’assimilent, il n'existe pas de sucre libre dans le sang, ni, par suite, dans l'urine. Si, au contraire, ils passent dans le sang à l'état de sucre, ils s’éliminent par l'urine. En somme, le pouvoir d’'assimilation des hydrocar- bonés est, suivant Pavy, la condition la plus importante ; le pouvoir de combustion des hydrocarbonés passerait au second rang, et le diabète serait essentiellement caractérisé par une diminution de ce pouvoir d’assimi- lation. Il y à dans cette théorie quelque chose de très sédui- sant. Mais, si elle nous rend compte de la glycosurie, elle ne nous explique point la genèse des autres phéno- mènes diabétiques. D' Marcez LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine, Médecin des Hôpitaux de Paris. 5° Sciences diverses Bouquet (D' H.). L'évolution psychique de l'enfant. — À vol. in-46 de 97 pages. (Prix : À fr. 50.) Bloud, éditeur. Paris, 1910. Ce petit livre est le résumé populaire d'un certain nombre de notions courantes sur la psychologie de l'enfant. Il est d’une lecture facile, écrit d'une plume aisée. On dirait le résumé d'une conférence faite à un public mondain. A. B. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 261 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER F ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 28 Février 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Picard énonce un théorème général sur certaines équations intégrales de troisième espèce. — M. J. Boussinesq présente ses recherches sur la manière dont le potentiel des vitesses, dans le problème des ondes par émersion, dépend de l'état initial. — M. Em. Borel indique une nouvelle condition d’'intégrabilité : Toute fonction d'une variable réelle définissable analytiquement est inté- grable lorsque l'ordre maximum de ses pôles est un nombre inférieur à 1. — M. Em. Cotton donne une démonstration nouvelle du théorème d'existence des solutions asymptotiques des équations différentielles, basée sur la méthode des approximations successives de M. Picard, appliquée après transformation des équa- tions différentielles en des équations intégrales conve- nablement choisies. — M. S. Bernstein a recherché, les conditions nécessaires et suffisantes pour la possi- bilité du problème de Dirichlet. — M. J. Marty a retrouvé les propriétés principales des valeurs singu- lières d'une équation intégrale du type équation de 3e espèce. — M. L. Féjer présente ses recherches sur une paire de séries de Fourier conjuguées. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Angot a étudié la variation séculaire des éléments magnétiques dans la région de Paris. La composante horizontale a passé par un maximum en 1906-07; la composante nord approche d’un maximum en 1909; tous les autres éléments sont en décroissance. — M. J. B. Fournier montre que, pour déterminer Ja température de la vapeur surchauffée, il est de toute rigueur que le réservoir du thermomètre employé ne soit pas placé dans une niche, mais plonge entièrement dans la vapeur en mouvement. — M. Ch. Féry présente une bobine symétrique pour galvanomètre à cadre mobile, — M. G. Gabet a appli- qué avec succès son télécommutateur et radio-combi- nateur à la commande de la torpille radio-automatique. — M. E. Baud a déterminé les poids moléculaires par la cryoscopie en solutions concentrées, en faisantusage de dissolvants non polymérisés tels que le bibromure d’éthylène, le benzène et le nitrobenzène. Il a obtenu de bons résultats avec les liquides non associés. — M. E. Louise a appliqué sa méthode d'analyse par les courbes de miscibilité aux essences de térébenthine, en les mélangeant avec l’aniline; les essences additionnées de white spirit ou d'huile de résine donnent des courbes très différentes de celles des essences pures. — M. G. Denigès a décelé des traces de méthanal en présence d'éthanal par la fuchsine bisulfitée, qui donne avec le premier une coloration violette intense. — M. M. Delépine a déterminé la constitution de l'aldéhyde dimère de l’aldéhyde crotonique, C*H‘#0?, qu'il a obtenu précédemment. Il répond vraisemblable ment à la formule : CH? — CH — C.CHO | | : CH*.CH — O — CH.CH*' — MM. À. Haller et A. Brochet, en faisant réagir l'ozone en présence de 10°/, d'eau sur le ricinoléate de méthyle, ont obtenu un ozonide C#1#07 etses produits huileux qui, traités par le carbonate et le bisullite de soude, fournissent: de l'acide B-oxypélargonique actif, de l'acide azélaïque et son éther méthylique acide, la semi-aldéhyde de l'acide azélaïque et son éther méthy- lique. La distillation de l'acide $-oxypélargonique, suivie d’une oxydalion, de même que l'oxydation directe des produits huileux, donne de l'acide hepta- noiïque. — MM. F. Bodroux et F. Taboury ont fail réagir le dérivé monosodé du cyanure de benzyle sur différents éthers simples de la série grasse suivant l'équation : C‘H°.CHNa. CAZHR'X — NaX + C'HSCHR'.CAZ. — MM. À. Wahl et C. Silberzweig ont préparé les méthoxybenzoylacétates de méthyle par la méthode de Claisen : condensation de l'acétate de méthyle avec les méthoxybenzoates par le sodium. Le dérivé ortho bout à 1792-1809 sous 15 mm, ; le dérivé méta à 180° sous 14 mm.; le dérivé para fond à 270-280, — M. J. Bougault montre que le triméthyleyclo- hexénol est le premier terme d’oxydation de l'acide a-cyclogéranique: il s’oxyde ensuite en triméthyleyclo- hexénone. — M. A. Backe signale la présence, dans un grand nombre de produits alimentaires, d'un corps donnant des réactions très voisines de celles de l'acide salicylique et proche du maltol. Il se forme par l'action de la chaleur sur certains sucres et les matières amyla- cées ayant subi l'influence d’un enzyme différent de l’amylase. — M. F. Bordas montre que la benzidine oxydée n’est pas un réactif caractéristique du sang; toutes les substances contenant une trace de fer et capables de décomposer H*0* donnant la réaction de Macweeney. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Lannelongue a observé que les populations de l'Extrême-Orient possèdent des membres inférieurs doués d'une grande souplesse el d'une grande agilité. Le pied n’est plus chez elles un organe exclusifservant à porter le corps; il peut, selon le genre de vie des gens, s'accommoder à d’autres fonc- tions et devenir un organe de préhension. — M. J. Chaine montre que, la crête et la fosse iliaque, princi- paux lieux d'origine des fessiers, se trouvant en arrière des fémurs chez l'homme, ces muscles ne peuvent, chez lui, qu'être situés postérieurement, à l'inverse des autres mammifères. — M. J. Nageotte, en placant sous l'objectif un fragment de nerf dégénéré vivant, plongé dansune goutte d'humeur aqueuse ou de sérum sanguin, a observé sur le vif l’activité de la myéline au cours de la dégénération wallérienne des nerfs. — MM. M. Favre et C1. Regaud, en traitant de petits morceaux de peau de la paume de la main de l'homme par les procédés appropriés à la coloration des formations mitochondriales, ont mis en évidence, dans la couche génératrice de l’épiderme, des filaments de nature mitochondriale. — MM. E. Doumer et G. Lemoine ont traité avec succès par les courants de haute fréquence les douleurs névralgiques rebelles qu'on observe chez les hypertendus. — M. P. Hallez a observé chez une Némerte d’eau douce, le Prostoma lumbricordeum, une ponte d'été, donnant des œufs dont le déveloprement est très rapide, et une ponte d'hiver, donnant des œufs à développement lent. — MM. C. Vaney et A. Conte ont étudié le développement de l'œuf du ver à soie univoltin. L'histogenèse s'accompagne toujours d'une forte consommation de glycogène ; le développement dans l'œuf est en tous points homologue au développement hors de l'œuf. — M. G. André a constaté que des bulbes d'oignon ne se sont pas épuisés au cours de leur développement, mais ont grossi et vu le poids de leur matière sèche angmenter après l'apparition de la tige et des fleurs. — M. L. Matruchot moutre que les agents connus des sporotrichoses appartiennent à trois types différents ë le Sporotrichum Beurmanni, le Sy. Sehencki et un type nouveau, le S. Gougeroli, variété stable du S. Beurmanni, présentantune grande abondance deformes 262 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES bourgeonnantes. — MM. Ed. Urbain, CI. Scal et A. Feige montrent qu'il est inutile de chercher à employer, pour la stérilisation de l'eau, des longueurs d'onde inférieures à 1860 UA, le quartz et l’eau absorbant la presque totalité des rayons de longueur d'onde infé- rieure. — Mie Cernovodeanu et M. V. Henri ont reconnu qu'au-dessous de 2.900 ou 2.800 UA, les rayons ultra-violets deviennent incompatibles avec la vie, abiotiques; cette limite est précisément celle à laquelle s'arrètent les radiations ultra-violettes qui arrivent du Soleil à la surface de la Terre. — M. Jean Brunhes a reconnu, par des recherches faites sur l'Oze (Côte- d'Or), qu'en temps de crue les érosions sur la rive droite dune rivière prédominent de beaucoup (environ 70 °/,) sur les érosions de la rive gauche. Séance du 7 Mars 1910. La Section de Géographie et Navigation présente la liste suivante de candidats à la place vacante par le décès de M. Bouquet de la Grye : 4° M. Ch. Lallemand; 20 MM. A. aAngot, F. Arago et R. Bourgeois. — M. R. Dedekind est élu Associé étranger de l’Aca- démie. 1°. SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Denjoy présente ses recherches sur la mesure des ensembles. Le pro- grès essentiel et irréductible réalisé par la mesure de Borel-Lebesgue sur celle de Cantor réside dans la mesure des ensembles de mesure nulle. — M. de Sé- guier a éludié les propriétés du groupe symétrique et du groupe alterné. — M. W. Stekloff poursuit ses recherches sur le développements d’une fonction arbi- traire en série procédant suivant certaines fonctions fondamentales. — M. J. Marty montre comment il est possible d'obtenir certains développements suivant les solutions singulières d’une équation intégrale. — M S. Janiszewski démontre le théorème suivant : Soit C une courbe plane qui a au plus un nombre limité de points ou de segments communs avec chaque segment de longueur finie d'une droite arbitraire ; cette courbe a au moins une tangente en chaque point. — M. H. Andoyer,étantdonnée l'insuffisance des Tablesactuelles de logarithmes pour les besoins des calculs de préci- sion, aétabli de nouvelles Tables, quivontêtre publiées, contenant comme parties principales les logarithmes des lignes trixonométriques de dix en dix secondes sexagésimales avec 14 décimales. — M. J. Boussinesq a obtenu l'intégration des équations des ondes d’émer- sion, par la formule de Mac Laurin, en séries toujours convergentes, pour un canal profond sans extrémilés et pour un bassin indéfini en tous sens. — M. J. Hada- mard donne l'équation générale à laquelle doit satis- faire la propagation des petits mouvements à la surface d'un liquide parfait, — M. M. Brillouin étudie diverses questions de Physique mathématique comportant des conditions différentes sur diverses parties d'une même frontière. — M. M. Hamy donne la description du spectrographe destiné spécialement à la détermination des vitesses radiales à l'Observatoire de Paris. L’équa- torial coudé est employé comme générateur d'images; le spectrographe a pu recevoir ainsi des dimensions inusitées. — M. J. Guillaume présenteses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le troisième trimestre de 1904. Le nombre de groupes et la surface totale tachée sont un peu plus forts que dans l'exercice précédent — M. Ch. Gallissot montre que le phénomène de Purkinje intervient dans les mesures de grandeurs d'étoiles effectuées au moyen de photomètres, mais non dans Ja méthode d’Argelander. — M.B. Galitzine donne une formule pourdéterminer l'épicentre d’un tremblement de terre d’après les don- nées d'une seule station sismique, en mesurant à celle-ci, au moyen de deux pendules très sensibles, l'azimut d’où viennent les ondes sismiques. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Dufour montre que la raie 5.247,56 du chrome forme dans le champ ma- gnétique un triplet dont l'axe de symétrie est déplacé vers le violet; cette dissymétrie de position par rap- port à la raie initiale croit comme le carré du champ. — M.E. Caudrelier a reconnu que la cause essentielle de la production des traits lumineux dans l’étincellie de décharge des inducteurs est bien la capacité du système formé par les électrodes et les portions atte- nantes du circuit. — M. Léo Vignon montre que les matières colorantes considérées comme étant solubles forment deux groupes très nets : les matières du pre- mier groupe donnent de véritables solutions (type acide picrique); celles du deuxièmesont, à proprement parler, insolubles et forment de fausses solutions (type rouge Congo). — MM. A. Haller et Ed. Bauer ont constaté qu'au sein de l’éther anhydre la pinacoline fournit avec l’amidure de sodium un dérivé sodé soluble qui, traité par les iodures alcooliques, donne naissance à un mélange de mono- et di-alkylpina- colines qu'on peut séparer par distillation fractionnée. Les trialkylpinacolines ne peuvent se préparer qu'en milieu benzénique ou toluénique. Toutes ces cétones sont réduites en alcools secondaires correspondants par action de Na au sein de l’alcool absolu. — M. P. Dupuis, en faisant réagir PCI sur le gaïacol, a obtenu: le chlorure monogaïacophosphoreux CH*0.C‘H:0PCF, Eb. 135° sous 43 mm., le chlorure digaïacophosphoreux (GH*O.C‘H*O PPCI, Eb. 235° sous 13 mm., et le phos- phite de gaïacol (CH*O.C‘H‘0)*P, F.59°. — M.A. Kling propose une nouvelle méthode de dosage de l'acide tartrique droit, consistant dans sa précipitation à l’état de racémate de chaux par addition d'acide gauche et d'acétate de chaux. Les substances qu'on rencontre à côté de l'acide tartrique dans les produits naturels n'ont pas d'influence sur cette précipitation. 30 SCIKNCES NATURELLES. — M®%° M. Phisalix montre que les Batraciens et les Serpents qui résistent au venin granuleux dorsal des premiers, en particulier à la salamandrine, manifestent une immunité naturelle aussi grande vis-à-vis du second poison cutané, le venin muqueux. Cette immunité ne se manifeste que lorsque les venins ne sont pas portés directement sur les centres nerveux; elle est donc surtout humorale. — M. A. Briot a constaté que, dans le sérum des lapins anaphylactisés avec le sérum de cheval, existe un principe qui, en agissant 1n vitro sur le sérum de cheval, dégage le poison anaphylactique. — M. R. Ro- binson à reconnu que, chez l’homme, le cæcum est souvent bien développé; cette typhlectasie n’est pasun état pathologique, mais un état d'infériorité, une infir- mité. — MM. H. Bordier et R. Horand ont observé que les rayons ultra-violets tuent le Trypanosoma Lewisi, même à doses très faibles. — M. G. Vallet a étudié l'action bactéricide des rayons ultra-violets dans différents milieux : l'alcool méthylique, la glycé- rine et beaucoup de solutions salines se laissent faci- lement traverser; l’albumine, la peptone et l'huile sont fortement opaques. — M. Ed. Griffon, après cinq années consécutives de greffes de plantes herbacées, n'a observé en aucun cas d'influence spécifique du sujet et du greffon, d’altération des caractères fon- damentaux d'espèce ou de variété, d'hybridation asexuelle. — M. A. Joxe à étudié les modes d’ouver- ture des akènes et des noyaux au moment de leur germination. L'agent mécanique de l'ouverture est toujours la poussée interne produite par la graine germant; la place des lignes d'ouverture est déter- minée histologiquement par des régions à faible résis- tance. — M. Aug. Chevalier poursuit la description des ressources forestières de la Côte d'Ivoire par les excitants (caféiers et kolatiers), gommes et résines. — M. J. Thoulet a établi une carte lithologique sous- marine de la côte du Languedoc, de Palavas à l’em- bou:hure de l'Aude. Il a reconnu que le courant médi- terranéen venant de l'est et se dirigeant au sud par l'ouest accumule les vases sur les faces des golfes d’Aigues-Mortes et d'Agde qui rexardent l'ouest et les sables sur les faces opposées. L’axe de plus grande vi- tesse contre le sol de ce courant se trouve par 25 à 30 m. de profondeur et sa vitesse est de 350 m. à l'heure. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 1°" Mars 1910. M. d’Espine (de Genève) et Sir V. Horsley (de Londres) sont élus Associés étrangers de l'Académie. M. Ch. Moureu présente, en réponse aux questions posées par une Commission du Sénat, un Rapport sur la composition chimique de lPabsinthe, qui conclut ainsi : 4° Hormis le cas de certaines liqueurs à bon marché, la présence de la (huyone est constante dans les liqueurs d’absinthe; 2° Elle peut se rencontrer aussi, mais généralement en moindre quantité, dans d'autres liqueurs et aussi dans des amers ou des spiri- tueux divers; 3° On ne connait actuellement aucun moyen simple et rapide de la déceler avec certitude ni de la doser. Sa détermination en toute sécurité comporte des opérations longues et délicates. Ces réserves élant faites, nous possédons une réaction, la réaction de Légal-Cuniasse, au moyen de laquelle on pourra reconnaitre les liqueurs suspectes, avec un haut degré de probabilité quant à la présence ou à l'absence de thuyone. L'examen approfondi, indispen- sable pour la caractérisation légale de la thuyone, ne devra être fait que sur les produits donnant nettement la réaction de Legal-Cuniasse. Ces conclusions sont adoptées par l’Académie. — M. G. Weiss présente un Rapport sur un travail de M. Frenkel relatif à la patho- qéuie de la cataracte sénile. L'auteur part du fait, constaté par lui, que la perméabilité rénale est dimi- nuée chez les cataractés. La vie et l'usure du cristallin déverseraient dans le sang circulant des corps qui peuvent provoquer la formation de lentitoxines pour la même espèce : des autolentitoxines. Sous l'influence de l'insuffisance rénale, ces lentitoxines, partiellement retenues dans l’économie, peuvent exercer leur action sur le cristallin, en vertu de leurs propriétés de poi- sons spécifiques. — MM. G. Linossier et G. H. Le- moine : Aecherches sur le régime alimentaire dans les affections du rein. Les auteurs arrivent aux con- clusions suivantes : 1° Les aliments albuminoïdes d'origine animale crus ont tous, mème le lait, une action néphrotoxique; 2° Le contact suflisamment pro- longé d'un suc gastrique actif détruit en général la néphrotoxicilé. Les aliments albuminoïdes crus sont donc particulièrement à redouter chez les néphritiques dyspeptiques; 3° La cuisson détruit la néphrotoxicité des aliments albuminoïdes; on doit interdire aux néphrétiques les viandes saignantes, les œufs glaireux, le lait cru; 4 A condition que les viandes soient bien cuites, l'interdiction des viandes rouges est superflue ; 5° En raison de l’accoutumance de certains organismes à l'action néphrotoxique des viandes, il sera utile de prescrire aux néphrétiques une grande régularité dans leur ration carnée,; 6° Les considérations précédentes s'appliquent daus une certaine mesure au régime des hépatiques. — L'Académie procède au vote des propo- sions présentées au cours de la discussion sur la pro- phylaxie de la fièvre typhoiïde. La Revue reviendra sur cette question dans un prochain article. Séance du 8 Mars 1910. MM. Balland et A. Poncet sont élus Associés natio- naux de l’Académie. Sir D. Duckworth donne lecture d’une étude cli- nique sur les particularités de la diathèse arthritique. — M. Mollereau lit un mémoire sur la mammite strep- tococcique des vaches laitières. — M. Petit donne lecture d’un travail sur la pathologie comparée des tumeurs du sein. — M. le D' Mahar présente un mémoire sur la radiothérapie dans Les adénites tuber- culeuses. Na SOCIÈTE DE BIOLOGIE Séance du 26 Février 1910. MM. E. Maurel et Carcanague ont constaté que, pour l’ensemble des légumes, le blanchiment de trente 263 minutes leur fait perdre la moitié de leurs matières salines. — M. P. Lassablière indique deux nouveaux procédés de mesure de la surface cutanée chez le jeun: enfant : 4° multiplier le carré du tour de poitrine en centimètres par 2,3; 2° multiplier le carré de la taille en centimètres par 0,92. — M. E. Hédon a pratiqué la transfusion croisée du sang chez les animaux par anastomose carotidienne, 11 se produit alors une dimi nution considérable de la sécrétion urinaire, — MM.G. Linossier el G.-H. Lemoine ont observé que les ali- ments albuminoïdes d'origine animale, injéctés sous la peau, produisent des altérations toxiques du rein. Cette action néphrotoxique est détruite par le suc gas- trique. Par injections répétées, il se produit une cer- taine accoutumance du rein. — M. E. Marchoux montre que la peste aviaire n'est pas une maladie contagieuse; elle doit se transmettre par un hôte intermédiaire, probablement un Acarien spécial. — M. E.-F. Terroine à reconnu que le suc pancréatique chauffé pendant 10 minutes à 65° perd tout pouvoir lipolytique; la lipase est très sensible au chauffage : dejà à 45° son activité est notablement atténuée. — M. G. Rosenthal à con- staté que la culture de bacille bulgare en lait-sérum est incontaminable par le bacille diphtérique; au con- traire, le bacille bulgare, introduit dans les cultures diphtériques, se développe et produit la mort du bacille d'Eberth. — M. S. Marbé a observé que les cobayes hyperthyroïdés présentent une diminution de résistance vis-à-vis de l'infection éberthienne expéri- mentale. — MM. M. Guerbet, A. Mayer et G. Schaeffer montrent que, si l’on fait agir Br ou I sur les microbes qui prennent le Gram et qu'on les colore ensuite, ils se décolorent ensuite sous l'influence de l’alccol. Si l'on oxyde énergiquement les mêmes microbes, ils ne prennent plus le Gram.— MM. J.-P. Langlois et Gar- relon ont constaté, malgré la diminution du nombre des mouvements respiratoires, une légère augmentation des échanges pendant la période d'hypertension due à l'adrénaline, augmentation attribuable au travail exa- géré de l'appareil respiratoire. — MM. A. Lagriffoul, H. Roger et W. Mestrezat ont observé que le liquide céphalo-rachidien dans la fièvre de Malte se caractérise par sa teneur élevée en sucre; il est dénué de pouvoir agglutinant vis-à-vis du Micrococcus melitensis. — M. P. Remlinger estime que les femmes, qui consti- tuent les 4/5 des porteurs chroniques de germes typhiques, peuvent transmettre la fièvre typhoïde par les rapports sexuels. — MM. Javal et Boyet montrent que les excès de concentration moléculaire du sérum sanguin sont dus soit à l'azotémie pure, soit à la chlorurémie pure, soit à des rétentions encore chimi- quement indéterminées. — M. A. Guilliermoand consi- dère les éperons qui se rencontrent dans presque tous les asques de Schwanniomyces comme les vestiges d'une conjugaison ancestrale analogue à celle des Debaryomyces. — M.3. Wolf a constaté que de faibles doses de diphosphates alcalins exaltent considérable- ment l’activité de la tyrosinase. — M. E. Laguesse à vérifié, par de nouvelles expériences sur le pigeon, que le jeûne augmente le nombre des ilots endocrines du pancréas, et que le retour à la ration normale le ramène à ce qu'il était antérieurement. Séance du 5 Mars 1910. M. Lafforgue a déterminé la résistance globulaire dans deux cas de pleurésies hémorragiques ; certaines hématies avaient une résistance plus grande que la normale, d'autres une résistance plus laible; par contre, les globules du sang avaient une résistance normale. — M. E. Choay conclut de ses recherches que l’action prédominante des ferments gastriques est celle qui a pour but de solubiliser la matère protéique, le rôle peptonique de ces mêmes ferments n'apparaissant que secondaire. — MM. V. Baroni et C. Jonesco-Mihaïesti ont constaté que la dilution favorise l'action destruc- tive des rayons ultra-violets sur les principes actifs des sérums normaux et préparés, par diminution de la 264 ACADÉMIES ET SOCIÉËTÉS SAVANTES quantité des substances colloïdales. Cette action est comparable à celle de la chaleur. — MM. Javal et Boyet montrent que les hyperconcentrations du sérum sanguin reconnaissent des causes multiples : à côté des rétentions associées qui sont les plus fréquentes, on peut quelquefois dépister des rétentions chlorurées et azotées isolées. — MM. G. Moruzzi et G. Repaci communiquent leurs recherches sur l'hypersensibili- sation des cobayes par une sodoalbumine et une chloral- bumine isolées du sérum du cheval. — M. G. Moruzzi a constaté que le sérum hémolytique lapin-anti-bœuf perd son pouvoir hémolysant lorsqu'on y ajoute de la soude à des concentrations variables entre 0,018 et 0,025 normal. — M. Ch. Richet a calculé que la pro- gression annuelle des mémoires et travaux de Physio- logie est de 8 °/, environ depuis quarante ans; #7 °/o sont écrits en allemand, 26 °/, en français. — M. A. Briot a obtenu nettement l’anaphylaxie passive et l'anaphylaxie 22 vitro chezle lapin au moyen du sérum de cheval. — M. E. F. Terroine a reconnu que le suc pancréatique neutre possède une activité lipasique no- table. En milieu acide, l’activité lipolytique diminue au fur et à mesure que l'acidité augmente; en milieu alcaliv, elle augmente, atteint un optimum et diminue ensuite. — MM. Ch. Achard et P. François ont observé que l’accoutumance spécifique des globules blancs aux poisons s'étend à la scopolamine et à l’atropine. — MM. A. Mayer, F. Rathery ei G. Schaeffer ont étudié les propriétés chimiques des granulations ou mito- chondries de la cellule hépatique normale; tout se passe comme si ces granulations contenaient, en forte proportion, des composés d'acides gras non saturés. — M. G. Repaci a isolé dans un cas de gangrène pul- monaire un nouveau bacille strictement anaérobie, qu'il nomme B. moniliformis. — M. $S. Marbé a cons- taté qu'un surplus même minime de corps thyroïde sensibilise les cobayes, en pleine infection pesteuse, et les fait mourir malgré la présence d’un sérum spé- cifique qui s'est montré suffisant pour sauvegarder les témoins. — MM. E. Maurel et Arnaud ont vu l’arsé- niate de soude provoquer la diarrhée lorsque sa dose a été assez élevée pour altérer les reins et probable- ment diminuer leur perméabilité; la diarrhée serait donc un moyen de suppléance destiné à aider le rein comme organe d'élimination. — MM. C. Levaditi et K. Landsteiner ont reconnu que le microbe de la poliomyélite peut envahir le système nerveux central en pénétrant par la muqueuse du nez, préalablement lésée, et en suivant, très probablement, les ramifica- tions du nerf olfactif. — M. P. Wintrebert a étudié les variations de l'appareil voméro-ptérygo-palatin chez l’Axolotl en dehors de la métamorphose et chez l'Amblystome branchié. — M. D. Roudsky a constaté que l'inoculation au rat du 7rypanosoma Lewisi après un deuxième passage en milieu de Novy est suivie de l'apparition de formes de multiplication, inoculables à la souris blanche. — MM. F. Arloing et A. Dufourt ont reconnu que la réinoculation de la tuberculose dans le tissu conjonctif du cobaye est possible, mais sans tendance à la propagation, dans les quinze à viogt jours qui suivent une première inoculation de bacilles humains de virulence modérée ou faible. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST Séance du 24 Janvier 1910. MM. V. et Al. Babes signalent l'absence de microbes visibles et cultivables dans un cas mortel ayant les caractères d’un érysipèle. — MM. G. Marinesco et C. Parhon ont étudié chez un malade l'effet de l’inha- lation d'oxygène sur la respiration de Cheyne-Stokes. Elle a amené une augmentation numérique plus ou moins régulière des mouvements respiratoires avec diminution de la pause et ensuite disparition de cette dernière. — M. G. Proca a cultivé la trichobactérie du genre Cladothrix qui apparaît dans les échantillons de lymphe vaccinale glycérinée vieux de sept à douze mois. 11 a obtenu des formes présentant de grandes ressemblances avec les corps de Guarnieri. — M. G.-J. Slavu à étudié la toxicité d'un certain nombre de métaux pour la grenouille. Elle est d’autant plus grande qu'ils appartiennent à des groupes plus éloignés du premier dans le système de Mendéléeff et. que la dissociation moléculaire de leurs sels est plus grande. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 15 Février 1910. MM. Alezais et Peyron ont observé un sarcome du fémur à stroma plasmazellaire. — M. L. Raybaud à constaté que les radiations ultra-violettes comme la chaleur coagulent les substances albuminoïdes, fixent le protoplasma et produisent sur les Mucorinées en voie de croissance des effets de même ordre. — M. C. Gerber poursuit ses recherches sur les présures et étudie la loi d'action aux diverses températures des sels neutres des métaux sur la coagulation du lait bouilli par les présures végétales actives. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 Février 1910. M. J.-H. Russenberger Sur l'absorption des liquides par les substances poreuses. La puissance absorbante spécifique X d'une substance poreuse, con- sidérée comme une machine élévatoire, a été trouvée expérimentalement sensiblement constante, quelle que soit la hauteur 2 à laquelle le liquide de densité D doit être porté, sauf si cette hauteur dépasse une certaine limite. On a : (1) — Q D 270 Q étant le poids de substance poreuse : coton, sciure, etc., contenue dans l'unité de volume de la mèche; dh/dt la vitesse d’ascension au niveau 4. Intégrant (1), il vient : lDE AU = px + 2) L \# Pour vérifier la première formule, on détermine dh/dt à l’aide de la vitesse avec laquelle s'enfonce une mèche dans laquelle le liquide est constamment à une hau- teur 4. Pour vérilier la seconde, on place la substance à étudier entre quatre lames de verre. Si l’on note le temps à partir du moment où 2 cesse d’être nul, C—0; mais il faut avoir soin de retrancher de 2 une hauteur qui semble dépendre principalement de l’écartement des lames de verre. Dans ces conditions, non seulement les expériences de l’auteur, mais encore celles de M. Goppelsræder vérifient la formule (2). M. Wolfgang Re + BALE Ostwald à proposé la formule 1— F An qui vérifie éga- lement les expériences de M. Goppelsræder et où 4 et m sont des constantes dépendant de la nature du liquide étudié. Les formules (1) et (2) ont cependant les avantages suivants : 1° Elles expriment une notion très simple, la constance de la puissance absorbante spécifique; 2° Elles permettent de voir que, si les diffé- rences observées entre l'ascension de divers liquides sont attribuables à des différences de puissance absor- bante, celles-ci sembleraient dues principalement aux différences qui existent entre les densités et viscosités des homologues d’une même série; 3° Elles permettent de caractériser utilement la qualité de produits indus- triels, tels que le coton hydrophile et le papier buvard; 4° Enfin elles sont bien l'expression exacte de l'ascen- sion des liquides dans les limites indiquées, ainsi que nous le montre la théorie‘. — M. le C' Ferrié présente quelques considérations au sujel de nouveaux appareils de mesure. Considérons un phénomène quelconque, # Voir, pour plus de détails, les Comptes rendus de l'Aca- démie des Sciences de Paris du 31 janvier 1910, p. 275. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES électrique où mécanique par exemple, que l'on fait agir sur deux appareils construits chacun de telle sorte que les variations des éléments du phénomène se tra- duisent par des variations du déplacement angulaire d'une aiguille mobile devant un cadran commun aux deux appareils. Supposons que les déplacements angu- laires 0, de l'aiguille du-premier appareil soient liés aux éléments variables « et 6 du phénomène par la rela- tion : 0, —/, (a, $), et que pour l'aiguille du second uppareil on ait une relation analogue : 0, = f,(a, 6). Eli- minons $ entre les deux équations; on à : &« — #(0,, 0,). En donnant à « une série de valeurs numériques &,, «,, Monde, —0(0,, 0e —*|(1}, 10) -"uCestéquations représentent une famille de courbes en coordonnées hipolaires, ayant les centres de rotation des aiguilles comme pôles. On obtient de même une seconde famille de courbes en éliminant «& : f, —4(0,, 0.), 6, — Ÿ(0,, 0,), .… Quand ces deux familles de courbes sont tracées sur le cadran commun aux deux aiguilles, on dispose d’un appareil permettant de résumer les valeurs &, 6, des “léments variables du phénomène considéré à un instant quelconque. Il suffit d'observer le point de croisement des deux aiguilles et de noter le numéro de la courbe de chacune des deux familles qui passent par ce point. Ce principe peut recevoir de très nom- breuses applications, en électricité par exemple. Trois appareils de ce genre ont déjà été réalisés, d’une manière aussi parfaite que possible, par M. Carpentier, et sont présentés à la Société. Le premier permet de lire sur un même cadran simultanément l'intensité, le voltage aux bornes, et la résistance d’un circuit par- couru par du courant continu. On pourrait encore ajouter une seconde famille de courbes indiquant la puissance. Un autre appareil permet de mesurer, par simple lecture, la fréquence d’un courant alternatif. Les deux aiguilles sont commandées par deux fils ther- miques parcourus: l’un par le courant qui traverse une résistance ohmique, l’autre par le courant qui traverse une self. On à évidemment : w— #{0,, 0,). L'appareil présenté permet de faire la lecture por r des fréquences allant de 25 à 65. Cette échelle peut être étendue à volonté. Enfin le troisième appareil est un fréquence- mètre pour courants de haute fréquence, c'est-à-dire un ondemètre pour la télégraphie sans fil par exemple. 11 est absolument analogue au précédent et présente sur les autres ondemètres l'avantage de permettre la lecture directe des longueurs d'onde sans avoir à manœuvrer un organe quelconque. — M. G. Gouy : Sur la constitution de la charge électrique à la surface d'un électrolyte. On admet généralement que, lorsqu'on électrise un électrolyte, les ions forment une charge superficielle. Cette idée conduit pourtant à des contra- dictions singulières; ainsi on voit aisément qu'une petite charge ne fait pas varier la concentration à l’intérieur, ce qui est paradoxal, puisque les ions accu- mulés à la surface sont soustraits à la masse liquide. Un examen plus attentif montre que les ions doivent êlre soumis, en outre des forces électriques qui tendent à les accumuler à la surface, à la pression osmotique qui tend à rétablir l'homogénéité. L'état d'équilibre qui se réalise ainsi est tel que la densité électrique en volume possède à ja surface une valeur finie, et s’annule asymptotiquement lorsqu'on s'enfonce dans l'électrolyte. Les formules sont surtout très simples quand la charge ne dépasse pas 10 unités électrosta- tiques par centimètre carré. La charge consiste alors en une légère condensation des ions d'un certain signe et une légère raréfaction des ions de signe opposé, qui sont telles que la compensation se fait quant aux nombres des ions, et que la masse intérieure n’est pas appauvrie. Le centre de gravité de la charge est à une distance de la surface qui vaut 04,001 pour une solution décinormale, 04,01 pour une solution millinormale, et 1, pour l’eau pure. Lorsque, au contraire, la charge est considérable, comme dans les phénomènes de polari- sation des électrodes, la charge est, pour la moyenne partie, au voisinage immédiat de la surface. SOCIÈTE CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 25 Février 1910. M. E. Kohn-Abrest rend compte de quelques résul lats nouveaux obtenus au cours de ses recherches sur les propriétés de l'aluminium ; chauffé dans le vide à 1.100°, le métal se volatilise partiellement, L'arrêt se produit au bout de 44 heures environ ; le métal non volatilisé renferme des quantités considérables de siliciure noir lorsqu'on opère dans nacelles en alumine pure. Elles sont dues très vraisemblable ment aux vapeurs de silicium mises en liberté dans le tube de porcelaine qui sert d'enceinte extérieure. Lorsqu'on opère en milieu exempt de silicium, c'est-à- dire dans un tube de fer doux placé dans le tube de porcelaine, l'aluminium se volatilise et la partie rési- duelle ne renferme plus de siliciure., L'allure de la volatilisation n'est cependant pas régulière, et les pro- duits résiduels présentent des différences comparés à l'aluminium pur qui a servi aux expériences. Puis l’auteur présente une contribution à l'étude de l’action des traces de bichlorure de mercure sur l'aluminium ; il montre que cette action du mercure est de nature oxydasique, mais que, cependant, elle est soumise à des règles quantitatives, qui permettent de la soumettre à la volonté de l'opérateur. — M.C. Tanret, à propos de la première communication de M. Kohn-Abrest, signale qu'il a observé la formation de siliciure de magnésium en chauffant de la poudre de magnésium dans un tube à combustion. Cette formation est analogue à celle de siliciure d'aluminium. — M. J. Bougault expose ses recherches sur l’action de l'acide hypoiodeux naissant (fourni par | + HgO en solution éthérée, ou + CO'Na* en solution aqueuse) sur l'acide «-cyclogéranique. La réaction aboutit, dans les deux cas, à une oxydation de l'acide +-cyclogéranique avec perte de CO® : ily a formation d'un mélange où domine le triméthyl- 4:5:5-Af%-cyclohexénol-2 (Eb. 193°); cet alcool est accompagné de la cétone correspondante (Eb. 192-193°) et de produits à point d’ébullition plus élevé. On peut encore obtenir les mêmes composés par la décomposition spontanée, en milieu aqueux, de l'a-cyclogéranate mercurique. Si cette décomposition s'effectue en milieu acétique, il se forme exclusi- vement l'acétate du triméthyleyclohexénol, qu'on obtient ainsi facilement très pur. Le triméthyley- clohexénol lui-même est oxydé par la solution acétique d'acétate mercurique et converti, avec de bons rendements, en la cétone correspondante. — M. V. Auger a obtenu, en décomposant par la chaleur le permanganate de potassium en présence d'un exces de soude, un sel microcristallin, bleu-vert, Mn*0°.7Na°0, qui représente un mangani-manganate de sodium analogue aux mangani-manganates alcalino-terreux, obtenus par lui en 1904. M. O. Sackur a déjà reconnu qu'en soumettant à un courant d'air un mélange fondu de NaOH et Mn0*, on obtient un sel Mn*05.2Na°0 qu'il n'a pas isolé, mais dont il a prouvé l'existence par l'analyse. — M. M. Delépine aentrepris des recherches sur l’uldéhyde dimère de l'aldéhyde crotonique qui se forme en même temps que celle-ci dans la préparation au moyen de l’aldéhyde ou de la paraldéhyde et de l'acide sulfurique concentré. le dimère prend naissance par action des acides minéraux étendus sur l'aldéhyde crotonique. M. Delépine est arrivé à en obtenir 25 ?/. du poids de l'aldéhyde crotonique en chauffant celle-ci 1/2 heure avec 6 parties d'acide chlorhydrique à 1/6, entraînant par la vapeur d'eau et rectitiant. Le composé C“H®0? est une monoaldéhyde C'H‘0.CHO, dont l’oxime fond à 106. Oxydé suivant la technique indi- quée par MM. Delépine et Bonnet, il fournit un acide CSH20:, en cristaux incolores, fusibles à 68-71° quand ils sont sous forme d'hydrate C*H205 H°0, fusibles à 85-870 s'ils sont déshydratés. L'eau de brome le trans- forme en un acide CfH#0*br, très soluble dans l’eau et l'éther, selon l'équation CSH'°05 HE A°0 + Br° — des 266 CGH®OBr + HBr. L'oxydation de l'acide CSH‘0* par un excès d'acide chromique a lieu suivant l'équation : CSH20: -E 5,50? — 2CH*.CO*H<Æ4C0*+2H°0, ce qui prouve quil y a deux méthyles dans le résidu C'H!0. Le second atome d'oxygène est de nature oxydique. L'aldéhyde, traitée par C?H°Mgl, fournit un alcool C'H‘:0.CHOH.CH°.CH, qui n’a pu être que mono- acétylé; cet alcool déshydraté conduit à un oxy-car- bure C'H'10.CH : CH.CH*, Eb. 820-84° sous 18 min., qui ne s’acétyle pas ; l’éther éthylique, traité de même par C?H°M£gl, fournit un composé C*H#0#, Eb. 151-1549 sous 19 mm., ayant bien la composition de l'alcool tertiaire attendu, C'H!0.C(OH)(C*H*}, mais ce composé n'a pu être ni acétylé, ni déshydraté, ce qui conduit à penser que non seulement l'oxygène du C'H'"O est oxydique, mais que le nouvel oxhydrile est lui-même entré dans une chaîne fermée oxydique. La réfraction justifie cette opinion. Ces résultats conduisent à assi- guer à l'aldéhyde la formule suivante : CH ANS CH?” ŸC-CHO cu-cnl, Jen-er 0 Une critique des mesures réfractométriques rela- tives à l'aldéhyde, à l’éther éthylique de l'acide et à l'oxycarbure dérivé de l'alcool secondaire corrobore cette constitution. — M. Hébert dépose une note de M. Sartory sur la composition d’une nouvelle source d'eau minérale découverte en faisant un sondage à S00 mètres de profondeur dans le parc Sainte-Marie, à Nancy. Le débit de cette source atteint 5.000 litres à la minute ; l’eau s'élève à une hauteur de 30 mè- tres au-dessus du niveau du sol et sort à une tem- pérature de + 36°. Cette eau contient une notable proportion de lithine et se rapproche par sa composi- tion des eaux de Vittel et Contrexéville. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 27 Janvier 190. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Cunningham «à cherché à déterminer /a vitesse de chute tranquille des particules sphériques à travers un milieu fluide. W examine deux sources de divergence avec la loi tirée par Stokes de considérations hydrodynamiques. D'abord, en traitant ls particules comme des sphères lisses se mouvant à travers un gaz, il montre que la déviation qu'on peut supposer par suite de la petitesse du dia- mètre de la particule comparé au trajet libre molécu- laire est extrêmement faible pour les particules qui ont été expérimentées; il propose la modification sui- vante de la formule de Stokes : W (1 JE LL 1 = 6 apaV, \ ASE) où est le trajet libre moyen des molécules d'air, W le poids, a le rayon et V la vitesse limite d’une particule tombante, y la viscosité de l’air et l'une fraction dépen- dant de la nature de la surface de la particule, égale à l'unité pour une surface élastique parfaitement lisse. Dans les cas courants, f est entre 0 et 0,5. Ensuite, l’auteur examine l'effet de la présence simultanée d'un grand nombre de particules se mouvant avec la même vitesse à travers le fluide, et il trouve que la force requise pour maintenir le mouvement de l’une d'elles dépend non seulement du diamètre, mais du rapport du diamètre à la distance entre les particules, et quelle augmente rapidement lorsque ce rapport passe au-dessus de 0,1. Avec les nombres obtenus par J.-J. Thomson, ces corrections ne donnent pas une augmentation de plus de 0,07 X 19— 1% dans la charge de l'ion gazeux. — M. G. W. Walker à étudié le mouvement accéléré initial des systèmes électrifiés | ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d'étendue finie et la réaction produite par la radiation résultante. Le but de l’auteur était d'obtenir, direc- tement à partir des équations fondamentales de l'Electromagnétisme, une méthode pour traiter les petites perturbations d'un état tranquille de mouve- ment et d'éviter ainsi les erreurs possibles si l'on se repose entièrement sur le principe connu de l'état quasi-stationnaire. La méthode développée par l’auteur comprend le problème du mouvement initial unifor- mément accéléré d'un conducteur chargé de dimen- sions finies, à partir soit de l'état de repos, soit d'un mouvement uniforme en ligne droite. Elle est ensuite appliquée au mouvement linéaire et rotatoire accéléré des isolateurs. — M. H. Thirkill : Sur la nature des rayons maguélo-cathodiques. Les expériences de l'au- teur montrent que les rayons agissant comme rayons magnéto-cathodiques consistent en particules négati- vement électrisses se mouvant lentement, qui ont été enroulées en spirales très fines. La charge portée par ces particules peut être décelée en employant un gal- vanomètre sensible. Les résultats obtenus par Righi et d'autres s'expliquent parfaitement dans cette hypo- thèse. Les conditions de la décharge électrique dans un tube sont très complexes; les espèces de rayons déjà distinguées augmentent en nombre et dépendent beau- coup des conditions de l'expérience. Prouver la non- existence d’une espèce de rayons est difficile, mais pour le moment il n'est pas nécessaire de postuler que les rayons suivant les lignes de force magnétique sont autre chose que des rayons cathodiques à mouvement lent. — Sir W. de W. Abney : Sur l'extinction de cou- leur par réduction de luminosité. L'auteur a réduit la luminosité de tous les rayons du spectre jusqu'au point où ils deviennent incolores comparés avec le blanc. Le. blanc lui-même varie de teinte suivant la réduction de sa luminosité. Aucune indication n'a été donnée de celte variation, de sorle que quelques parties du spectre n'ont pas besoin d’une réduction si grande pour égaler le blanc que ce ne serait le cas si le blanc con- servait une teinte uniforme. — Sir J. Dewar : Déter- mination à longue periode de la vitesse de production de l'hélium par le radium. L'auteur à placé du chlorure de radium dans un tube, qui a été ensuite scellé et con- servé pendant neuf mois; puis on à brisé la pointe du tube dans une enceinte où l’on avait fait le vide et on a mesuré la pression de l'hélium dégagé après avoir chauffé le sel. Cette pression, toutes corrections faites, fut de 0,01613 millimètre pour l’hélium produit en deux cent soixante-quinze jours par 70 milligrammes de RaCE pur dans un espace dont le volume total était de 320 centimètres cubes. Cela correspond à un déga- gement de 0,43 millimètre cube d'hélium par gramme de radium et par jour. — Sir J. Dewar et M. H.-O. Jones : Sur le monosullure de carbone. Les auteurs ont constaté que le nickel-carbonyle et le thiophosgène réagissent à la température ordinaire suivant l'équa- tion : 2CSCE + 2Ni(CO)* = 2NiCE + 4100 + (CS), pour produire une forme polymérisée du monosulfure de carbone. Les produits solubles sont séparés par traite- ment à l'eau, et le résidu insoluble, après dessiccation à 150° C. sous pression réduite, est obtenu sous forme d'un solide amorphe brun sombre ou noir, peu soluble dans les solvants comme C*H?Br°, CS* ou le phénol; la solubilité est insuffisante pour déterminer le poids moléculaire par cryoscopie. La densité est de 1,6 et le volume moléculaire de 27,5 (CS? — 52,4). Une compa- raison avec les valeurs correspondantes pour CO!28) et CO*(28,7) montre que le monosulfure de carbone est formé aux dépens du disulfure avec une grande con- densation. En le chauffant, il n’y a pas de changement jusqu’à 360°; au rouge, il se décompose en C et CS*. Le monosulfure se dissout dans l'acide sulfurique en brun- pourpre; l’eau le reprécipite inaltéré. Il se dissout aussi dans les alcalis en brun sombre, d’où les acides le reprécipitent inaltéré. 29 SciENCES NATURELLES. — M. S.-B. Schryver : La formation photochimique de la chlorophylle dans les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES plantes vertes. L'auteur décrit d'abord une méthode qui permet de déceler la formaldéhyde en très faibles quantités (un millionième); elle est basée sur la colo- ration rouge fuchsine qu'elle donne après addition de chlorhydrate de phénylhydrazine, de ferricyanure de potassium et d'HCI. Gette réaction a permis de démon- trer la présence de formaldéhyde dans la chlorophylle retirée de l'herbe après quelques heures d'insolation ; au bout de quelques jours, la solution de chlorophylle ne donne plus cette réaction; en exposant une couche de cette solution au soleil en présence de CO*, la réac- tion de la formaldéhyde réapparaît. Ces résultats indiquent que la formaldéhyde, formée dans les plantes, entre en combinaison stable avec un consli- tuant de la chlorophylle. Le dérivé méthylénique ainsi formé ne subit en présence de l'eau qu'une faible hydrolyse et l'équilibre se maintient en présence d’une trace de formaldéhyde libre; à meure que celle-ci se polymérise ou disparaît autrement, l'hydrolyse se pour- suit, et la quantité de formaldéhyde libre présente es toujours réglée de facon à n'être pas toxique pour la plante. Séance du 3-Février 4910. SCIENCES NATURELLES. — M. F. Medigreceanu à détei- miné les dimensions relatives des organes des rats el des souris portant des tumeurs malignes. Les expé- riences ont été faites sur 200 rats el souris portant les tumeurs suivantes : 13 tumeurs transplantables et 4 tu- meurs spontanées chez les souris, 2 tumeurs transplan- tables chez le rat. On a observé :1° aucune augmentation de poids du canal alimentaire en comparaison avec les animaux normaux; 2 une hypertrophie du foie dans tous les cas; jusqu’à un certain point, l'hypertrophie est proportionnelle au poids de la tumeur ; 3° une hyper- trophie du cœur dans la plupart des cas, proportionnelle aussi, en général, au poids de la tumeur ; 4° un poids normal des reins, sauf dans un cas de sarcome trans- plantable du rat, où l'on nota de l'hypertrophie,; 5° des poids divers des poumons. En somme, c’est l’hyper- trophie du foie qui paraît la caractéristique des ani- maux porteurs de tumeurs. — M. M. Haaland à recherché s'il existe un contraste entre les réactions d'implantation du cancer après l'inoculation de cellules vivantes ou de cellules désintégrées mécaniquement. 1 a reconnu que la désintégration complète des cellules de tumeurs leur enlève entièrement leurs propriétés immunisantes; il n'y à aucune différence entre les cellules de tumeurs et les cellules normales sous ce rapport. L'absence de pouvoir immunisant ne semble pas être une question de dose de la substance intro- duite. La propriété immunisante n’est donc pas liée à la protéine de la cellule, mais dépend d’un principe différent; des cellules vivantes, et même ayant crù un certain temps, sont nécessaires pour induire la résis- tance à la transplantation du cancer. L'inoculation de cellules désintégrées semble plutôt préparer le terrain à une croissance ultérieure de tumeurs. — MM. E. F. Bashford et B. R. G. Russell : Nouvelles preuves de l'homogénéité de la résistance à l'implantation de tumeurs malignes. Les auteurs montrent qu'il n'existe qu'une forme de résistance active à l'implantation du cancer d'un animal à un autre. Cette résistance suit immédiatement l'absorption du tissu de tumeur vivante ou de tissu normal vivant d'un animal après son intro- duction dans un autre animal de même espèce. Elle consiste surtout en une inhibition des pouvoirs chi- miotactiques spécifiques que les cellules cancéreuses exercent sur les tissus conjonctifs et vasculaires de l'hôte. — MM. E. A. Minchin et J. D. Thomson ont étudié la transmission du Trypanosoma Lewisi par la mouche du rat (Ceratophyllus fasciatus). Le Ceralo- blyllus fasciatus peut transmettre le Trypanosoma Lewisi de rats infectés à des rats non infectés. La transmission a lieu par la méthode cyclique ; on n'a pu prouver la transmission par la méthode directe. La période d'incubation de la mouche, c'est-à-dire celle 267 du cycle de développement du trypanosome ine longueur minimum de 6 à 7 jours, mais peut être plu longue. La période de multiplication du trypa DIE dans le rat dure environ 12 jours. Dans le cycl lutif, l'établissement du trypanosome chez la m he commence par la multiplication dans le rectum formes analogues aux Crithidia. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 17 Février 1910. M. W. 0. Wootton à essayé de résoudre les aldéhydes racémiques du type CHRR'.CHO en leurs antipodes optiques par combinaison avec l'acide 3-amino- phényl-a-camphoramique, mais sans résultat. Le d-6- méthylglycidate de Na a été obtenu par résolution de son sel de brucine, mais il donne par hydrolyse un aldéhyde hydratropique inactif, — MM. AI. Findlay et EH. J. M. Creighton ont étudié l'influence de colloides et de suspensions fines sur la solubilité des gaz dans l'eau. A la pression atmosphérique, l'acide silicique et le noir animal augmentent la solubilité de CO: et AzO*: l'hydrate ferrique et la gélatine augmentent celle du premier et diminuent celle du second; le sulfure arsé- nieux n'a pas d'influence; la dextrine, l'amidon, le glycogène, l'albumine diminuent la solubilité des deux gaz. — M. J.-E. Purvis a mesuré le spectre d’absorp- lion des vapeurs de pyridine et de quelques-uns de ses dérivés à différentes températures et pressions. La vapeur de pyridine présente un nombre considérable de bandes d'absorption, la plupart arrangées en groupes; l'augmentation de température et de pression produit l'élargissement des bandes et l'apparition de nouvelles bandes, absorption générale étant déplacée vers le rouge. L’x-picoline présente beaucoup moins de bandes que la pyridine; les deux lutidines et la tri- méthylpyridine ne présentent plus du tout celles qui sont caractéristiques de la pyridine, mais montrent une forte bande d'absorption dans l'ultra-violet, — Mit CI. Smith et C. H. Watts ont appliqué l'examen du spectre d'absorption à élucider la constitution du produit d'éthylation directe du »-p'-dinitrodiazoami- nobenzène. — MM. W. H. Perkin jun. et R. Robinson ont réalisé la synthèse de la gnoscopine (d/-narcotine en faisant bouillir un mélange de cotarnine et de méconine en solution alcoolique avec le carbonate de potassium. L’alcaloïde synthétique fond à 227 comme l’alcaloïde naturel. — M. W. A. Knight et Ml: E. M. Rich ont préparé par une nouvelle méthode le chlorure chromeux et ont obtenu une modification vert sombre de l’hydrate bleu foncé CrCE.4#H°0; ils ont également préparé deux nouveaux hydrates : CrCl.3H°0 (bleu pâle) et CrCE.2H?0 (vert pâle). Par des mesures de ten- sions de vapeur et cryoscopiques, les auteurs montrent que le tétrahydrate bleu est dissocié en trois ions, le tétrahydrate vert en deux ions. — M. Ch. Jones, en réduisant les composés halogénés doubles ou mixtes de Hg et Ag, a obtenu les amalgames Ag*Hg, AcHo, AsH£s*,AgHg* et AgHgf. — MM. E. de B. Barnett el S. Smiles discutent la constitution des substances obtenues par condensation des dérivés aromatiques avec les o-sulfoxydes de diphénylamine et montrent leur analogie avec les sels les plus simples de phénazo- thionium. — M. E. Vanstone a déterminé les pres- sions de vapeur du campbhre et du bornéol et de leurs solutions solides. Pour le camphre et le bornéol, les rapports des températures absolues correspondant à des pressions de vapeur égales sont constants. Les pressions de vapeur des solutions solides suivent la loi des mélanges : 100 P;=n P, + )——n) Pr, Où PA et Ps sont les pressions de vapeur de substances pures A et B, et » le nombre de molécules de À pour 100 de mé- lange. Les poids moléculaires du camphre et du bor- néol en solutions solides sont probablement normaux, ainsi que les densités de vapeurs aux températures employées, 2 268 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 9 Décembre 1909. M. H. Holcroft : Les principes de l'émaïllage vi- treux de la fonte dans l'industrie. L'auteur signale au moins quatre principes différents bien définis dans l'application des émaux à la fonte : 4° celui du brevet Clark, qui emploie une première couverture d’épais- seur considérable, à point de fusion relativement élevé; elle est appliquée à l’état humide, séchée et fondue; puis on ajoute une couche supérieure d'émail à point de fusion inférieur; 2° une couche très mince spéciale est appliquée à l’état humide, séchée et fondue dans le fer ; elle donne un revêtement à peine visible, mais la surface du fer est affectée de façon à retarder la propension aux ampoules, et une couche supérieure fusible peut être appliquée; 3° on applique à l'état humide un émail modérément fusible sur la surface du fer, on sèche et fond; 4° une ou plusieurs couches d'émail très fusible sont appliquées à l’état sec direc- tement sur la surface chauffée au rouge du métal. Les méthodes 1, 2 et 4 peuvent être appliquées soit sur la surface naturelle de la fonte, soit sur la surface tra- vaillée ; la 3° méthode ne peut en général être appli- quée que sur une surface travaillée. SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Novembre 1909. Séance consacrée à la présentation et à la descrip- ion d'un certain nombre d'appareils : appareil pour l'analyse du gaz d'éclairage, appareil pour l'essai des gaz des carneaux, appareil pour distiller l'huile de gaz, appareil pour la détermination du soufre dans l’oxyde épuisé, de M. A. H. Elliott; photomètre à banc por- tatif, de M. E. G. Love; appareil pour la distillation du goudron de gaz à l’eau, appareil pour l'analyse du gaz d'huile, lampe photométrique type, flacon pour calibrer les appareils pour l'essai volumétrique des gaz, de M. E. C. Uhlig. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 13 Décembre 1909. MM. F. W. Richardson el A. Jaffé présentent une forme simplifiée d’eudiomètre pour l'analyse des gaz. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 2% Décembre 1909. 1° Scgxces PHYSIQUES. — M. A.-F. Holleman : Sur l'introduction d'un troisième substituant dans le benzène substitué deux fois. — Ensuite M. Holleman présente, en son nom et au nom de M. J. Boëseken : Sur la cause du contraste entre la substitution en para et ortho et celle en méta dans le noyau du benzène. — Enfin M. Holleman présente en son nom et au nom de M. J.-J. Rinkes : Sur la préparation et les propriétés physiques des phénols monochloré et monobromé. — M. P. van Romburgh présente au nom de M. H.-R. Kruyt: L'équilibre solide-fluide-gaz dans les systèmes binaires de cristaux de mélange. — M. J. D. van der Waals présente au nom de M. Ph. Konhstamm Réponse brève aux remarques de M. van Laar. — M. P. Zeeman présente les thèses de Mn° van Bilder- beek (née van Meurs): « Magnetische splitsing van het ultraviolette ijzerspectrum (2 2.300 — 2 4.500) » (Décom- position magnétique du spectre ultraviolet du fer, de À 2.300 jusqu'à À 4.500), et de M. A. Vas Nunes : Expe- rimenteel onderzoek der klokken van F. Hemony » (Examen expérimental des cloches de F. Hemony). 20 SCIENCES NATURELLES. — M. H.-G. van de Sande Bakhuyzen : Notice nécrologique sur M. N. W. P. Rauwenhoff (1826-1909), professeur de Botanique à l'U- SD niversité d'Utrecht de 1863 à 1896. — M. C.-A. Pekelha- ring présente,enson nom et au nom de M. C. J. C. van Hoogenhuyze : La production de créatine dans les muscles pendant le tonus et le développement de la rigidité. Des recherches antérieures ont conduit les auteurs à la conception que la décomposition des matières protéiques dans les tissus vivants donne lieu à la naissance de créatine et qu'une partie de ce produit est excrétée par les reins comme créatinine. Si cette conception est juste, il faut admettre qu'une partie considérable de la créatinine éliminée provient du tissu musculaire. Pourtant le travail musculaire ne cause pas une augmentation appréciable de l’excré- tion de créatinine. Les auteurs ont examiné la suppo- sition que le tonus musculaire pourrait être accom- pagné d'une production de créatine. La teneur des muscles en créatine fut déterminée par la méthode de Folin. Chez le lapin, on trouvait une perte de créatine dans le gastrocnémien trois jours après la section du nerf sciatique, comparé avec le gastrocnémien de l'autre côté. Plus concluantes étaient des expériences chez des chats, opérés d’après la méthode de Sherring- ton, afin de faire naître la « decerebrate rigidity ». La « décérébration » avait lieu après la section des racines postérieures des quatre ou cinq nerfs cervicaux infé- rieurs et des deux nerfs thoraciques supérieurs d’un côté, en sorte que le tonus se développait dans une des pattes antérieures, tandis que les muscles du côté où les racines étaient sectionnées restaient détendus. Dans cinq éxpériences, le triceps brachial contenait, sans exception, plus de créatine du côté qui avait été pen- dant quelques heures en tonus que du côté qui était resté détendu. La différence était de 7,9 à 19, 5 0/4. D'autres séries d'expériences furent instituées chez des grenouilles. L’excitation du nerfsciatique, après l’exclu- sion dela circulation, soit par des courants d'induction télanisants, soit par de simples chocs d’induetion, répé- tés vingt-quatre fois par minute, jusqu'à l'épuisement, necausait pointde différence appréciable dans la teneur en créatine entre les muscles irrités et les mus- cles correspondants restés en repos. Trois jours après la section du nerf sciatique d’un côté, on trouvait par contre dans les muscles paralysés une perte sensible de créatine. Ensuite fut examinée l'influence de subs- tances de nature fort différente, mais qui se ressem- blent en ce qu'elles ont le pouvoir d’exciter le tonus : vératrine, nicotine, chlorure de chaux, rhodanure de soude et caféine. Les deux pattes d'une grenouille, dépouillées de la peau, furent plongées l’une dans la solution de Ringer, l’autre dans la même solution additionnée d'une des substances nommées, ou, dans le cas du chlorure de chaux, dans une solution isotonique de ce sel. Les nerfs sciatiques des deux côtés furent irrités par des chocs d'induction, vingt-quatre fois par minute, pendant une demi-heure. Sans exception, les muscles tonisés contenaient plus de créatine que les muscles qui avaient seulement fait des contractions. L'hypothèse fut donc confirmée que, dans le tonus, le muscle produit de la créatine, par conséquent con- somme des matières protéiques. Aussi dans la rigidité, soit par la chaleur, soit postmortale, on a trouvé une augmentation de créatine. — M. L. Bolk : Sur l'incli- naison du foramen magnum chez les Primates. — M. G. A. F. Molengraaff présente au nom de M. H.-A. Brouwer : Le piénacrile, une foyaïte mélanocrate du Transvaal. — M. A.-A.-W. Hubrecht présente : « Die Süugetierontogenese in ihrer Bedeutung für die Phy- logenie der Wirbeltiere » (L'ontogénèse des Mammi- fères dans son importance pour la phylogénie des Ver- tébrés) et: « The fœtal membranes of the vertebrates », (Les membranes fœtales des Vertébrés). P. H. ScHouTE. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, {, rue Cassette. het dt… d. unten. 91° ANNÉE N° 15 AVRIL 1910 Revue générale SC IenNC pures ef appliquées DiREcTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Kevws ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris Ia Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Art de l’Ingénieur Une forme récente de la concentration industrielle : L’intégration dans la métallur- gie'. — On appelle intégration, dans le langage de l'Economie politique, la réunion, dans une seule entre- prise, de branches industrielles qui étaient jusqu'ici exploitées séparément. C’est ainsi qu’un laminoir s'intègre à une aciérie, une aciérie à un haut fourneau, une fabrique de wagons à une Compagnie de chemins de fer, un chantier de constructions navales à une Compagnie de navigation, une filature à un tissage, une sucrerie ou une distillerie à une exploitation agricole. La fabrique d'engrais de Saint-Gobain pos- sède une saline, une mine de pyrites et des gisements de phosphates. L'intégration existe depuis longtemps, mais ce qui est récent, c'est sa généralisation rapide. Tandis que le trust et le cartel, Yes deux grandes formes actuelles de la concentration industrielle, se proposent d'agir avant tout sur la production et sur les prix, tout en restreignant les frais généraux, l'intégration n'a pour but que ce dernier objet. Trusts et cartels sont géné- ralement intégrés, comme le fait remarquer M. J. Les- cure, mais les entreprises intégrées ne font pas forcé- ment partie d'un trust ou d'un cartel. L'intégration a des causes d'ordre technique et d'ordre économique. Elle procure d'abord une écono- mie de force en évitant les manutentions inutiles par le rapprochement des différentes opérations, Le haut fourneau sera installé dans le voisinage de la mine et ses gaz seront utilisés comme force motrice. On obtiendra aussi une notable économie de combustible en utilisant la chaleur de la fonte pour le passage au convertisseur dès sa sortie du haut fourneau et celle de l'acier pour le passage au laminoir. D'un autre côté, l'intégration supprime les frais d'intermédiaire, réduit la charge des escomptes en évitant des ventes et des achats successifs et con- centre dans une seule main les bénéfices réalisés par chaque branche autrefois séparée. Elle permet encore RS OR nn Di peer * J. Lescure : L'intégration dans la métallurgie. Revue Economique Internationale, août 1909. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. une adaptation plus facile du produit aux exigences de la consommation, en supprimant une fabrication pour la remplacer par telle autre ou en vendant le produit brut ou fini suivant les cas. Son but essentiel est la réduction du coût de production, nécessitée par le développement incessant de la concurrence. L'intégration s’est surtout répandue aux Etats-Unis, principalement à partir de 1890, pour atteindre son extension maxima avec la constitution du trust de l'acier en 1901. L'Allemagne, l'Angleterre, puis la France ont suivi cet exemple. Tandis qu’en Angleterre, les productions de la houille, du coke et de la fonte sont le plus souvent soudées naturellement par le fait du voisinage des matières premières, en France, elles sont séparées pour la raison inverse, et nos grandes sociétés métallurgiques sont, en général, obligées d'acheter leur houille ou leur coke. Elles cherchent aujourd'hui à produire elles-mêmes leur combustible. Les Aciéries de Denain-Anzin ont acquis récemment la mine d’Azincourt. Les retards apportés par l'Etat à concéder les nouveaux gisements de houille du Pas-de- Calais et de Meurthe-et-Moselle ont même obligé nos métallurgistes à rechercher des concessions à l’étran- ger, dans la Campine belge, en particulier. M. J. Les- cure signale le fait qu'ils ont ainsi dépensé près de 50 millions à la mise en valeur de houillères étran- gères, alors que ces capitaux eussent pu être fructueu- sement employés dans notre pays. Faute de coke, le bassin de Briey, si riche en minerai de fer, se trouve entravé dans son développement. L'intégration des branches métallurgiques est beau- coup plus avancée dans notre pays. La transformation de l'acier en produits fabriqués est poussée le plus loin possible, en même temps que les aciéries tendent de plus en plus à produire leurs matières premières. Les forges de Gorcy, par exemple, ont récemment construit une aciérie pour transformer le minerai jusqu'aux produits fabriqués. Dès 1897, les Forges de Châtillon- Commentry ont absorbé la Société de Champigneules et Neuves-Maisons pour produire elles-mêmes leur fonte. Le Creusot, qui a dû arrêter ses hauts fourneaux de Cette, songerait à en établir à Conflans pour utiliser les minerais de fer de ses concessions de Droitammont. On ne saurait oublier, d'ailleurs, que cette grande 1 270 entreprise a longtemps réalisé, au Creusot même, avant l'épuisement des gisements environnants (mine de fer de Mazeney), un exemple de complète intégra- ion allant du minerai aux produits les plus finis : canons, locomotives, ponts métalliques. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 2, —_ Physique un L'action des rayons «sur le verre.—Les aires colorées ou halos pléochroïques de forme sphérique observés sur le mica brun contiennent invariablement à leur centre un minuscule cristal de zirconite, plus rarement d'apatite, tous deux minéraux riches en radium. Le rayon moyen des halos est d'environ 0,04 millimètre, ce qui est à peu près la trajectoire des rayons «les plus pénétrants des produits urano-radi- fères dans une substance comme le mica. M. Joly! en a déduit que ces halos sont dus à l’action des rayons x du radium. Or, M. Rutherford® vient d'observer un effet corres- pondant dans le verre exposé aux rayons «. Une grande quantité d'émanation de radium puriliée fut conden- sée dans un tube capillaire en verre sodique (de 0,6 millimètre de diamètre extérieur), puis abandon- née pendant environ un mois, pendant lequel la plus grande partie se transforma. En observant ensuite le tube sous le microscope, on apercut une zone de cou- leur rougeâtre entourant le capillaire dans toute sa longueur, la distance entre le bord du capillaire et le bord de l'aire colorée étant partout de 0,039 millimètre, malgré de grandes variations dans le calibre du capil- laire suivant sa longueur. La ligne de démarcation entre le verre coloré et incolore était très nette. La coloration est sans nul doute due à l'effet des rayons «. La purification spontanée des cristaux liquides. — Les tentatives de M. 0. Lehmann pour produire une coloration artificielle de ses cris- taux liquides avaient fait voir que ces derniers sont aussi incapables que les cristaux solides d'absorberles matières étrangères moléculairement réparties. D'autre part, le même savant avait observé la pro- duction assez fréquente de cristaux combinés de corps non isomorphes, tandis que les corps isomorphes sont assez souvent incapables de former des cristaux mixtes. Dans un récent Mémoire*, M. Lehmann émet l'opi- nion que les molécules étrangères se disposent régu- lièrement dans le schéma cristallin des autres molé- cules, ee qui expliquerait aussi la production du dichroisme. La force directrice moléculaire s'étendrait par conséquent aux molécules étrangères, dont l'agré- ation irrégulière semblerait absolument impossible. Un cristal croissant dans une masse visqueuse ou en suspension colloïdale éliminerait, en raison de sa force cristallisatrice, les particules suspendues. Ce phénomène s'observe, par exemple, sur le para-azoxya- nisol, dissous dans le mono-bromo-naphtalène, en employant comme particules suspendues les germes sphériques minuscules de Lykoperdon. L'élimination progressive de ces particules est très frappante dans les cristaux dégagés par le refroidissement d'une solution saturée à chaud. Une autre suspension incomparable ment plus fine est fournie par une couleur provenant des usines de Th. Günzberg, à Würzhurg, et qui se compose de particules de suie, réduites au mortier à un état d'extrème finesse et combinées avec un ciment huileux ou savonneux. Or, les cristaux liquides pré- sentent une allure toute identique; lorsque, par exemple, dansle cas mentionné ci-dessus, la concen- tration est telle que le refroidissement de la solution saturée à chaud donne lieu au dégagement de gouttes ‘ Philosophical Magazine, mars 1907. 1bid,, 4910,t. XIX, p. 192-194. " Phys. Zeitschr,, n° 2, 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE cristallines, ces dernières éliminent les particules sus- pendues tout en restant parfaitement claires, de façon que toutes les particules étrangères finissent par être resserrées dans l'étroit intervalle séparant les gouttes, qui, elles, se présentent parfaitement claires sur fond noir. Vu l'impossibilité où il se trouve de maintenir en suspension dans un liquide cristallin une matière col- loïdale à distribution quelconque, M. Lehmann attribue aux cristaux liquides un pouvoir de purification spon- tance, semblable à celui des cristaux solides, et qui permettrait de purifier les corps cristallins liquides par des cristallisations répétées (à l’état de cristaux liquides) d'une facon touteanalogue aux corps cristallins solides. Il n'y a donc pas de solution colloïdale cristalline liquide. Dans les cas très rares où l’auteur a réussi à colorer artificiellement des cristaux liquides, cette coloration était presque toujours dichroïtique, c'est-à-dire mettait en évidence l'orientation régulière des molécules étran- gères. Il est vrai que, dans certains cas, la structure des cristaux liquides subit des perturbations considé- rables (rotation desgouttes, rotation du plan de polari- sation etde la direction d'absorption maximum, Lorsion de la structure visible, etce.). Ce pouvoir de purification spontanée, caractéristique des liquides cristallins et qui les distingue des liquides amorphes, peut servir dans les cas douteux de critère pour établir la nature d'un liquide donné. Il est dù évi- demment à l'action de la force directrice moléculaire, les molécules étrangères ou faussement orientées étant chassées par les moléculeshomogènes et uniformément orientées. C'est pourquoi toutes les solutions colloï- dales sont nécessairement amorphes. $ 3. — Electricité industrielle Le haut fourneau électrique. — Les expt- riences de MM. Héroult, Keller, Gin, Stassano, Borchers, Neumann, etc., en Europe, et celles de MM. Day, Rossi, Haanel, Noble, etc., en Amérique, ont établi que le traitement électro-thermique est applicable aux prin- cipaux minerais de fer, à l’hématite, à la magnétite et aux minerais tilanifères. En dehors de ceux de M. Keller et de M. Haanel, ces essais n'avaient toutefois pas été effectués dans des conditions comparables à celles de la pratique métal- lurgique; après les recherches faites à Sault-Sainte- Marie !, il restait à réaliser un appareil qui répondit à toutes les exigences de l'industrie sidérurgique. C'est à la solution de ce problème que sont attachés, en Suède, MM. Grônwall, Lindblad et Stalhane, en Amérique, MM. Turnbull, Wolff, Noble et Taylor. D'intéressantes installations ont été établies par ces différents expéri- mentateurs, qui sont tous arrivés déjà à des résultats remarquables; les travaux les plus importants sont ceux de MM. Grünwall, Lindblad et Stalhane. Ces ingénieurs ont commencé leurs expériences, en avril 1907, avec un petit four à cuve, à sole de quartz, creusée de deux canaux communiquant avec des blocs de graphite extérieurs servant à l'entrée et à la sortie du courant électrique; des tuyères permettaient de donner du vent pour l’allamage; une fois le four allumé et les rigoles remplies de fonte, le fonctionne- ment devenait normal; mais la disposition n'était pas pratique, parce que la sole était conductrice à chaud; le même défaut persistait dans le second modèle expé- rimenté : un four du même genre que le premier, mais avec des électrodes placées en regard l'une de l'autre ; une troisième disposition, avec des électrodes à hauteur de l'étalage, ne donna pas de meilleurs résultats. Ces essais préliminaires confirmèrent done que, comme M. Haanel l'avait déjà signalé, il est nécessaire de soustraire au contact des matières les parois à proxi- ÉL PRT CNRS | ‘ Revue générale des Sciences du 30 mui 1909, p. 443. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 97 mité des électrodes, ainsi que celles-ci en dehors de la charge; dans le quatrième modèle, une grande chambre de fusion voûtée fut en conséquence employée; elle était surmontée d'une cheminée basse; les électrodes étaient introduites obliquement dans la chambre en traversant la maconnerie de la voûte dans des boites de réfrigération; la puissance utilisable eût pu être de 800 chevaux, mais on ne disposait pas de toute cette puissance, Cet appareil a servi à des essais étendus portant sur la composition du revêtement, la matière à employer pour la confection de la voûte, la façon d'introduire et de régler les électrodes, ete,; dans l'une des expé- riences, il a pu fonctionner sans interruption pendant près de quatre semaines, résultat qui n'avait jamais été atteint avec aucun autre four électrique appliqué à la réduction des minerais de fer etque l'on doit considérer comme constituant une étape essentielle dans l'his- toire de l'électrosidérurgie, C'est ce quatrième four qui a servi de modèle au haut fourneau électrique établi ensuite et qui a été employé pour les recherches poursuivies pendant l’année 1909, Le haut fourneau en question, installé dans les dépendances des aciéries de Domnarfvet, est formé d'une grande chambre de fusion que surmonte une cheminée, munie des appareils de chargement et de collection des gaz usités pour les hauts fourneaux ordinaires; la cheminée est supportée par une char- poor de fer qui la rend indépendante du creuset; elle orme, à sa base, un étranglement qui dirige la chute des matières, de façon à les tenir à distance des élec- trodes, dont les extrémités seules plongent dans la masse; des tuyères, traversant les parois, permettent de diriger contre la voûte les gaz provenant du four mème et refroidis, Le service du four se fait par deux équipes compre- nant: un ouvrier pour le chargement, un pour le réglage des appareils électriques, deux pour les coulées et un contre-mailre. La mise en marche s'effectue de la mème facon que pour un haut fourneau ordinaire, en donnant le vent et en allumant au bois. Le four a une capacité de 72 charges de 100 kilogs de minerai, 24 kilogs de coke et 3 kilogs de calcaire, Au début de l'opération, lorsque le four est encore froid dans la partie inférieure, on remarque que le courant à une tendance à échaufler surtout les couches supérieures, jusqu'au voisinage de la voûte, qui peut atteindre de ce fait une température dangereuse; mais, si on la refroidit énergiquement en dirigeant contre elle le jet des tuyères, l'echaullement se porte vers le bas de la masse, dont la résistance électrique diminue ainsi peu à peu et par où le courant passe bientôt presque en totalité; à partir de ce moment, on peut se dispenser de la circulation des gaz pour la réfrigération, surtout lorsque l’on additionne du charbon de bois à la charge, car ce combustible semble contribuer à maintenir la conductibilité dans la zone de fusion. En tout cas, la marche du haut fourneau électrique est toujours très régulière et l'on n'observe point d'à-coup de courant; le réglage des électrodes est très aisé; il se réduit simplement au déplacement des erayons pour compenser la disparition des parties brülées; il se fait en moyenne une fois par jour et il est arrivé qu'on n'eûl pas à y toucher pendant une semaine ; il n'est nullement nécessaire de prévoir des régulateurs automatiques. Avec du courant de fréquence 25, on arrive à un l'ac- teur de puissance de 0,8 à 0,9; si l'on emploie du cou- rant à 60 périodes, ce facteur de puissance est encore de 0,7 environ, Au point de vue électrique, les condi- tions de fonctionnement sont done satisfaisantes, On peut donc dire que, d'une facon générale, MM. Grônwall, Lindblad et Stalhane ont résolu le pro- blème du traitement éleetro-thermique des minerais de fer; s'il reste quelque chose à faire, ce n'est qu'uu point de vue du rendement; la dépense d'énergie élac- tique à éLé relativement grande; mais on peut espérer qu'elle seraabaissée lorsqu'on travaillera avec de grands appareils, Telles sont, du moins, les conclusions que l'on lire des Rapports publiés au sujet du haut fourneau éle: tique de Domnarfvet, Deux séries de constatations ont principalement été faites : en décembre 1908, pui M. Haanel, au cours d'un premier essai de deux jours de durée, et en avril-juillet 4909, par MM. Yngstrom et Lungberg, d'une part, par MM. Thorne, Farup et Vogt, d'autre part; cette dernière expérience, faite d'une traite, n'a été interrompue qu'à la suite de ch constances de force majeure: la grève générale déclarée en Suède dans les conditions dont on se souvient, Nous avons déjà signalé les essais auxquels M. Haanel a assisté, délégué par le Gouvernement du Canada. Pendant cette expérience, on avait traité de la magné tite de Grüngesberg, avec du coke comme réducteur: malgré différentes circonstances défavorables, la mau vaise qualité des matières premières, très humides, l'insuflisance d'énergie disponible et l'imparfaite dessie- cation de la masse du haut fourueau, celui-ci satistit entièrement M. Haanel, La fonte obtenue était excellente; la désulfuration se faisait remarquablement; la marche était parfai- tement stable; aucune cause de faiblesse ne paraissait exister; le rendement augmentait à mesure que le haut fourneau se trouvait mieux en état; la production par cheval en est passée successivement à 0,744 tonne de fonte à lu 2° coulée, 1,870 à la 3°, 2,180 à la 4°, 2,960 à la 5°, 2,440 à la 6°, 3,100 à la 8°, Une Commission norvégienne a surveillé Le travail du haut fourneau pendant les journées des 14 au 19 juin, de la campagne du 7 mai au 34 juillet, Durant cette période, les métallurgistes suédois ont traité, une fois encore, de la magnétite de Grüngesberg; les charges élaientcomposées de 100 kilogs de minerai de Gringes- berg, 2 kilogs de chaux, 9 kilogs de charbon de bois, 9 kilogs de coke ; elles contenaient 62,50 °/, de fer, { °/, de phosphore et 0,25 de soufre, L'opération à donné de la fonte grise à 1,75 °/, de phosphore et 0,016 ©/, de soufre; le laitier contenait 27,99 o/, de silice, 12,20 ®/, d'argile, 51,70 de chaux, 0,80 °/, d'oxyde de fer et 0,82 de soufre, Le four fonctionna 4142/3 heures el consomma 49,305 kwh, pour donner 15,031 kilogs de fonte, ce qui correspond à une production de 1,96 tonne par cheval-an (3,286 kwh par tonne). Les analyses des fontes obtenues pendant la cam- jagne de 1909 montrent que l'on peut préparer les fontes les plus variées par le simple réglage de la tem- érature, réalisé en agissant sur le courant fourni au ant fourneau ; en règle générale, la teneur en carbone est de 2? à 3°,,; mais on peut l'abaisser à 1 v/,; de même, la teneur en silicium peut être variée avec faci- lité entre des limites étendues, Au point de vue du fonctionnement électrique, les essais de 1909 ont été très instructifs. On à, par exemple, constaté que la tension aux bornes du four dépend essentiellement de la composition de la charge; les dépenses de combustible et d'énergie électrique néces- saires, pour diverses teneurs de fer dans les charges, ont été lixées avec précision, Les dépenses CS ont été satisfaisantes; le rendement électrique, par contre, est resté inférieur à ceux que l'on avait relevés en d'autres circonstances; il a été de 54 °/, approximativement; les pertes sont dues à l'échautflement des électrodes, contacts, ete., et au rayonnement, Comme les grands appareils donnent lieu à des Jertes moindres par rayonnement, il est probable que ‘on atteindra, avee les hauts fourneaux de 2,500 che- vaux qui seront établis, un rendement de 80 °/,, cor- respondant à une produelion de 3 tonnes de fonte par cheval-an (ou 2.000 kwh, par tonne). Pendant les trois mois où il a marché sans arrêt, le haut fourneau électrique s'est parlauitement comporte ; au moment où l'opération a été interrompue, il était en état de marcher longtemps encore; le Gomité d'enquête 972 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE norvégien estime que sa durée peut être évaluée à un an; la partie la plus attaquée est la voûte au-dessus des électrodes et la maçonnerie de la chambre de fusion en arrière de ces électrodes ; la sole et la cheminée ne sont pas plus attaquées que dans le haut fourneau, les réparations sont faciles. Des hauts fourneaux électriques Grünwall, Lindblad et Stalhane sont en construction en Suède, en Norvège et au Canada. H. Marchand. S 4. — Chimie physique Le mécanisme de l’adsorption de lhydro- gène par le charbon. — La vraie nature de l'adsorption de l'hydrogène par le charbon est loin d'être suffisamment élucidée. Suivant les différentes théories proposées pour expliquer ce phénomène, il s'agirait, soit d’une combinaison chimique réelle, soit d’une véritable solution solide, soit d’une solution solide modifiée (où les couches extérieures seraient à peu près seules saturées), soit enfin d’une conden- sation à la surface extérieure du solide. Or, de ces quatre hypothèses, les deux premières sont en désaccord manifeste avec les exigences de la théorie dynamique. Quant aux deux autres, M. J. W. Mc Bain, dans un récent Mémoire*, en prouve l'incompatibilité avec les résultats de l'expérience et les relations de temps assez compliquées qui sont en cause. D'autre part, il se propose de démontrer, par l'analyse mathé- matique, que la troisième hypothèse ne concorde pas avec les lois bien connues de la diffusion. Les expériences de l’auteur diffèrent de toutes celles qu'on a faites jusqu'à ce jour, par le compte exact qu'elles tiennent du temps. Comme l’adsorption, même à la température de l’air liquide, ne demande que quelques minutes pour atteindre un état d'équilibre, et que, d'autre part, la diffusion à l'intérieur du charbon (adsorption, solution solide) exige plusieurs heures pour être complète, on peut, par une manipu- lation appropriée, préparer un échantillon de charbon hautement chargé d'hydrogène, à l’état de solution solide, tout en étant à peu près exempt d'hydrogène condensé à sa surface. Ce résultat s'obtient facilement en exposant soudainement au vide du charbon anté- rieurement saturé, à température constante, par un contact prolongé avec de l'hydrogène. Bien qu'étant sursaturé (par rapport à la solution solide), ce charbon absorbe d’abord une nouvelle quantité d'hydrogène (par condensation à la surface), pour le dégager ensuite en quantité même plus grande, jusquà ce qu'un équilibre définitif soit établi. Dans le cas inverse où, l'intérieur étant exempt d'hydrogène, la surface a été sursaturée en l’exposant pendant un temps très court à deux gaz à haute pression, l'hydrogène est d’abord dégagé et ensuite absorbé de nouveau, par diffusion dans le charbon. En étudiant à fond ces deux phénomènes, l'auteur prouve à l'évidence que l’adsorption de l'hydrogène par le charbon consiste en une condensation surperficielle accompagnée de diffusion (solution solide) vers l'inté- 1 B.-F. HaaxEz : Votes on the Ssmelling of titaniferous ,:ron ores in the Electric furnace, 1909, Ottawa, Canada. E. Haaxez : Report on the investigation of an electric shaft l'urnace, Domnarfvet, Sweden, 1909, Ottawa, Canada. E. HaaxeL: American Electrochemical Society, 6 mai 1909. W. Ricuaups : Zbi. Taorxe, Farup, VoGr : Forelbig Indberetning I fra den komite tel utredning av sporsmaalet om elektrometallurgisk fremstillinq av jarn og Staal, 1909, Chrisliania, Norvège. Tuonxe, Farur, VoGr : Z‘orelbiq Indberetuinq IT, ibid. Yxcsrrom : Redogürelse for vid Domnarfvets jaraverk gjorda fürsok all à elektrisk ugn framställa järn ur jarn- inalm, 1909. E. J. LiuxégerG : Zron and Steel Institute, septembre 1909. B. NeuMaANX : Stahl und Eïisen, 11 novembre 1909, p. 1801. D. A. Lxon : American Electrochemical Society, Llectri- cian, 24 décembre 1909, p. 423. 2 Phil. Mag., décembre 1909. rieur du charbon. La condensation à la surface est presque instantanée, à la température de l'air liquide, n'exigeant, tout au plus, que quelques minutes, tandis que la diffusion demande environ 12 heures. L'auteur fait une mesure approchée de la solubilité vraie (distincte de la condensation superficielle) de l'hydrogène dans le charbon de coco. A la température de l'air liquide, ce factsur varie suivant la racine carrée de la pression. C'est dire que l'hydrogène dissous dans le charbon se dédouble en atomes simples. La solubilité est de 4 centimètres cubes d'hydrogène par gramme de charbon, à la pression de 19 milli- mètres, ce qui équivaut à 1/7 de la quaniité totale de gaz absorbée par le charbon. La solubilité vraie, aux températures ordinaires, est inférieure à 1/100 de cette valeur. Comme l’adsorption, dans les seuls cas jusqu'ici étudiés, est d’une nature dualistique, l’auteur propose d'embrasser tous les phénomènes d'adsorption et d'occlusion sous le terme générique non hypothétique de sorption. $ 5. — Physiologie Les effets thermiques des courants de haute fréquence dans les tissus organisés. — On sait que les effets dus aux vibrations électriques rapides dans les tissus organisés s'exercent (surtout dans le cas des basses fréquences) sur les nerfs, d’une part, et, d'autre part, dans les profondeurs. Or, la médecine recherche depuis longtemps une méthode pour localiser les effets thermiques à l'intérieur des tissus. Les bains et bandages couramment appliqués assurent tout au plus une pénétration de quelques millimètres de profondeur au-dessous de la surface de la peau. C'est dire que cette localisation de la chaleur est excessivement limitée. Or, les vibrations continues de l'arc de Paulsen pré- sentent un excellent moyen d'appliquer de la chaleur localisée à l'intérieur du corps. Dans un récent Mé- moire, M. E. Nesper! décrit l'appareil suivant basé sur ce principe : La boite qui renferme tous les instruments et acces- soires est fermée en haut par une plaque de marbre, sur laquelle on a disposé un petit groupe générateur de Paulsen-Lorenz à champ maguétique transversal, une bobine d’accouplage variable, un ampère-mètre à courant continu, inséré dans le circuit du groupe générateur, une petite lampe à incandescence destinée à contrôler les vibrations à haute fréquence, ainsi que deux trous à fiches de contact. Par une échancrure à la partie antérieure de la boîte, on règle la résistance insérée dans le groupe générateur. Au-dessous de la plaque de marbre, se trouvent disposés un condensa- teur à plaques de verre, ainsi que deux condensateurs à feuilles de mica. A la partie droite de la boîte, on a prévu les clefs et bornes de connection pour la canali- sation électrique (courant continu à 220-440 volts) ainsi que des fusibles. | Le Le groupe générateur, avec la bobine primaire du transformateur d'accouplage et les condensateurs à plaques de verres et de mica, constitue le système vibratoire servant à engendrer des vibrations à haute fréquence. Le condensateur à feuilles de mica sert à éliminer, du système à haute fréquence, la ten- sion de courant continu. La présence et la continuité des vibrations sont établies à l’aide de la petite lampe à incandescence. L'intensité de courant fournie à l’are est lue sur l'ampère-mètre. La bobine secondaire et les électrodes servent à transmettre les vibrations à haute fréquence, grüce aux effets d'induction, à l’objet soumis à la pénétration thermique. Un ampère-mètre spécial à fil chauffé, inséré dans le conducteur relié à l’une des électrodes, peut servir à mesurer le flux de haute fréquence. 4 Phys. Zeitsehr., n° 2, 1910, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 2 Cette disposition assure une pénélralion thermique très uniforme de l'objet, bien que l'accouplage entre les électrodes et le système vibratoire ne puisse pas ètre d'une fixité absolue. Pour appliquer un accou- plage extrêmement fixe, il faut relier aux électrodes les bornes de la bobine primaire, en supprimant la bobine secondaire. Il semble cependant que, dans ce cas, la pénétration thermique ne soit pas de la même régularité que dans celui de l'accouplage inductif. Lorsqu'au contraire, il s'agit d'utiliser ce dispositif pour la cautérisation à froid, on préfère la connec- tion galvanique. En insérant entre les électrodes un morceau de viande dont la résistance avait été déterminée à 4% ohms, l'absorption de courant maximum étant de 1,4 ampère, l’auteur constata que ce morceau se comporte comme une résistance à haute fréquence équivalente et que sa résistance de capacité est ou nulle ou extrêmement faible. La pénétration thermique à l'intérieur des tissus animaux est donc due essentiel- lement aux courants de conduction pure. L'insensibilité des tissus organisés vis-à-vis des vibrations continues résulte, du reste, de la théorie de d'Arsonval, la fréquence étant très grande. Dans le cas présent, il faut, semble-t-il, y joindre un phénomène d’accommodation, lequel se fait d'autant plus sentir qu'il s'agit de courants alternatifs de périodes plus longues. La disposition du galvanomètre à fil chauffé et la connection, en dérivation par rapport aux électrodes, d'un volt-mètre, permettent de mesurer l'énergie élec- trique existant dans l'objet et, par conséquent, de régler à volonté cet apport d'énergie. $ 6. — Géographie et Colonisation ‘La Mission Tilho au Tchad. — Le capitaine Tilho vient d'exposer devant la Société de Géographie les résultats de sa mission dans les territoires du Niger et du Tchad. Le programme qui lui avait été donné par le Ministère des Colonies était précis : en premier lieu, délimitation, en collaboration avec une mission anglaise, des territoires français entre Niger et Tchad et de la Nigeria britannique; puis, exploration scienti- fique du Tchad et des pays situés à l'Est, en vue d'étudier le desséchement auquel cette partie de l'Afrique est actuellement soumise. Outre son chef, qui s'était déjà signalé par d’intéres- sants travaux dans cette région, cette mission compre- nait le lieutenant de vaisseau Audoin, un vétéran du Tchad ;les capitaines Lauzanne et Vignon, astronomes ; les lieutenants Mercadier et Richard et six sous- officiers chargés des levers topographiques; un z0olo- giste, le docteur Gaillard; un géologue, M. Garde, pré- parateur à la Faculté des Sciences de Clermont; entin, l'officier interprète Landerouin. En janvier 1907, les missions anglaise et française commencaient les opérations d'abornement entre les possessions francaises et la Nigeria. La délimitation de ces 1.400 kilomètres de frontière a exigé treize mois d’un travail acharné. : La région que nous a donnée la Convention de 1906 et qu'a parcourue la mission est une zone de savanes, avec de l’eau en abondance et 300.000 habitants vivant d'agriculture et d'élevage. D'après le capitaine Tilho, ce pays est un excellent territoire de colonisation indigène, qui pourrait facilement nourrir une popula- tion dix fois plus dense. Arrivé sur le Tchad, le capitaine Tilho trouva, à la place du fameux lac, un immense marais impraticable. Déjà, en 1904, cet explorateur avait constaté un dessé- chement considérable; depuis, le phénomène s'est accentué, si bien qu'aujourd'hui on peut dire que le Tchad n’est plus qu'un souvenir. Cette nappe d’eau, grande, il y a une dizaine d'années, comme quarante fois le lac de Genève, est actuellement presque à sec ou transformée en bourbier. Grâce au soleil tropical et à l'humidité, une abondante végélation, presque une forêt, s’est déjà établie sur cet emplacemont A l'est du Tchad, au delà du Kanem, ce desséche- ment se propage : les lacs ne sont plus représentés que par de vastes cuvettes dont les berges sont encore nettement marquées et toutes jonchées de débris de poissons. D'après les traditions des indigènes, vers 1820, le Tchad était presque à sec, comme aujourd'hui, puis progressivement les eaux sont revenues pour atteindre un maximum vers 4860; puis, vers la fin du xix° siècle, elles ont commencé à baisser pour dispa- raître presque complètement. M. Rabot, dans une note intéressante, fait remarquer que ces fluctuations sont probablement déterminées par une variation de climat, de nature plus ou moins cyclique, analogue à celles qui engendrent les crues et décrues des glaciers dans nos montagnes. Et de même, ajoute ce savant explora- teur, que le recul des glaciers des Alpes affecte l’éco- nomie domestique des montagnards, en réduisant leurs disponibilités en eau pendant l'été pour les irri- gations et la production de la force motrice, le dessé- chement du Tchad entrave notre établissement sur ses rives. Les rapides et faciles communications que le lac permettait naguère entre les territoires du Chari et ceux de l'Afrique occidentale sont interrompues, et ces deux régions de notre domaine colonial sont main- tenant isolées par une mer de boue. $ 7. — Enseignement L'Aéronautique en Sorbonne. — La nouvelle chaire d'Aéronautique de la Sorbonne, dont la créa- tion est due à la générosité de M. Basil Zaharof, vient d'être inaugurée. M. Liard, vice-recteur de l'Académie de Paris, avait tenu par sa présence à consacrer ce nouvel enseignement; il a associé dans un même hom- mage de reconnaissance le créateur de cette chaire el M. Henry Deutsch, qui a permis par sa libéralité la création d'un Institut d'Aérodynamique, offert égale- ment à l'Université de Paris, et dont la Aevue a indiqué l'organisation. Le nouveau professeur, M. Marchis, dans sa pre- mière lecon, ne pouvait qu'exposer sa méthode de travail. «Ce que je me propose de faire, a-t-il dit, c’est bien un enseignement didactique, mais non dégagé de formules, et, sans les compliquer, je veux déclarer tout d’abord que ce ne sera pas de la vulgari- sation et de l'aéronautique à la portée de tous. » M. Marchis a alors indiqué le concours qu'il deman- derait aux ingénieurs, aux constructeurs, même aux pilotes aviateurs. Il a dit la nouvelle installation déjà faite à la Sorbonne d’une bibliothèque d'Aéronautique qui pourra être utilement consultée surtout par les inventeurs; il a expliqué la technique de son cours et il a annoncé que son enseignement de l’année, en dehors de l'étude générale des problèmes de l'Aéronau- tique, porterait particulièrement sur les moteurs à explosion à grande puissance massique, sans lesquels, dit M. Marchis, aucun vol artificiel n’est possible. L'Université a désigné M. Robert Esnault-Pelterie comme assistant de la chaire d'Aéronautique, el M. Henri Frossard comme préparateur. Nominations universitaires. — M. Widal, agrégé de la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Pathologie interne à ladite Faculté. M. Achard, agrégé de la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Pathologie et Théra- peutique générales à ladite Faculté. , M. Boutan, docteur ès sciences, chargé de cours à la Faculté des Sciences de Bordeaux, est nommé pro- fesseur de Zoologie et Physiologie animale à ladite Faculté. M. Buhl, docteur ès sciences, chargé de cours à la Faculté des Sciences de Toulouse, est nommé profes- seur de Mathématiques générales à ladite Faculté. A LE 1 4 ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER: Que faut-il entendre par ces mots : «Les hautes études techniques »? On distingue à l'étranger, on devrait distinguer en France, divers degrés dans l'instruction des ingénieurs. Tous ne sont pas appelés à des rôles de même ordre; ils se divisent en deux catégories distinctes : Les uns bornent leur ambition à devenir des praticiens et à acquérir les connaissances qui leur sont nécessaires pour bien diriger leurs services; c'est l'immense majorité ; ils formeront les cadres de l'armée industrielle. D'autres, au contraire, qui sont doués de facultés exceptionnelles ou qui ont la vocation, aspirent aux plus hauts sommets de la science, soit pour accomplir des découvertes, soit pour mériter d’être placés à la tête des grandes entreprises, soit enfin pour se vouer au professorat; ce sera l'état-major. Aux premiers convient une solide éducation théo- rique et pratique, aux seconds une éducation, sinon transcendante, au moins d'ordre supérieur. C'est à cette seconde nature d'instruction que l’on réserve ordinairement le nom de «hautes études »; nous adopterons ce terme : il représentera pour nous les degrés les plus élevés de la culture technique. Nous désignerons par le nom d'enseignement supérieur du premier degré celui dont la supériorité est purement relative, et qui convient au plus grand nombre d'ingénieurs praticiens. On prétend que les réformateurs qui ont ouvert la campagne contre l'enseignement actuel ne tendent à rien moins qu'à avilir l'instruction et à ravaler l'ingénieur au rang de contremaitre. Rien n'est plus faux : nous pensons, il est vrai, qu'il ne faut pas égarer les futurs praticiens dans des spécu- lations transcendantes qui ne leur servent à rien, mais nous sommes persuadé aussi, plus que per- sonne, que la haute culture technique est indispen- sable à la prospérité et même au salut de l’industrie nationale; nous prétendons qu'elle n’existe pas en France, ou du moins qu’elle est mal donnée et mal distribuée. Le but de cette étude est précisément de rechercher en quoi elle est mauvaise et comment elle devrait être établie. La distinetion entre les divers degrés d'instruc- tion est parfaitement comprise à l'étranger et par- ticulièrement en Amérique; c'est là que les hautes études sont le plus en honneur et le mieux orga- nisées. Comme elles sont établies à peu près sur le mème plan dans les diverses écoles, nous nous bor- { Extrait d'une conférence donnée à la Technique Moderne le 9 mars dernier. Nous remercions notre confrère de l'ama- bilité quil a eue de nous communiquer, par faveur spé- ciale, cette importante étude. nerons à en prendre une pour exemple. Nous choi- sirons l'Institut technologique de Boston, qui se trouve au premier rang ou tout au moins dans les premiers; nous décrirons le cycle complet des études de tous les degrés qui conduisent au grade de docteur. En Allemagne également, ce grade existe; il est très apprécié et très difficile à acquérir. L'Angleterre va créer une institution analogue. Nous dirons quelques mots des cycles de ces deux derniers pays. En France même, l'idée d'une hiérarchie dans l'enseignement supérieur n'est pas nouvelle; elle est déjà appliquée dans certaines carrières : ainsi, dans le corps médical, la majorité se contente du grade de docteur; ceux qui veulent se livrer à des travaux scientifiques ou simplement augmenter leur savoir recherchent des titres plus élevés. Les officiers ont une École supérieure de guerre. Pour les ingénieurs, il n'existe aucune institution ana- logue; cependant, on considère que le titre de polytechnicien implique qu'on a poussé très loin l'étude de certaines sciences, et équivaut à un brevet supérieur. L'École Polytechnique représente done chez nous, pour la formation des ingénieurs, la haute culture; à ce titre, elle rentre dans le cadre de notre étude et nous analyserons brièvement son enseignement. I. — CYCLES ÉTRANGERS. S 1. — Cycle américain. L'Institut technologique de Boston confère les trois diplômes de bachelier, maître ès sciences et docteur. Nous allons passer brièvement en revue les études qui conduisent à ces trois grades. 1. Diplôme du premier degré. — La plupart des ingénieurs se contentent de ce diplôme; l'étudiant, dès son entrée à l'École, doit se spécialiser et opter entre l’un des cycles suivants : 1° Génie civil. Ce cycle, analogue à celui de notre École des Ponts:et Chaussées, comprend l'étude des ouvrages d'art, de la mécanique et des chemins de lens 2° Mécanique; 3° Mines; 4° Métallurgie; 5° Mines et Métallurgie. Ge cycle est destiné à former des ingénieurs pour les entreprises qui comprennent à la fois des mines et des établisse- ments métallurgiques ; 6° Chimie industrielle; T° Électricité; ANDRÉ PELLETAN 8 Ælectrochimie: 9 /ngénieurs-chimistes. Ce cycle se distingue du sixième en ce qu'il comprend l'étude des appa- reils mécaniques qui sont employés dans l'industrie chimique ; 10° /ngénieurs-hygiénistes. Ce cycle est analogue au premier (Génie civil), mais il comporte des développements moins étendus sur certains sujets, notamment sur les machines électriques; il com- prend, par contre, l'étude de la Chimie, de la Biologie et de la Bactériologie. Il s'adresse aux ingénieurs que leurs fonctions appellent à s'occuper de l'hygiène publique, par exemple à ceux qui s'occupent des distributions d'eau ; 11° Géologie et Géodésie; 12° Génie maritime. A ces cycles s'en ajoutent d’autres qui ne sont pas d'ordre technique, et dont nous ne parlerons pas ici. Le jeune Américain entre à l'Institut de Boston quand il a terminé ses études secondaires; elles se prolongent un peu plus tard que chez nous, et l'âge moyen des élèves de première année est de dix- neuf ans. La durée totale des études est de quatre années. La première est commune à la plupart des cycles et est consacrée aux sciences théoriques. Dans les sui- vantes. on continue ces mêmes études, concurrem- ment avec les études techniques. Nous donnons à titre d'exemple le détail du cycle n° 5 (Mines et Métallurgie) : NOMBRE D'HEURES de leçons oud'exercices pratiques TRS 1ersemestre ?°semestre 1 année. _ _— MINES ET MÉTALLURGIE Algèbre, éléments de Géométrie analy- ÉIQUE 0 D'Éx oM 0-0 GET RL » Trigonométrie plane UE Doc en » Chimie inorganique rs lecons EH CONTÉTEDCES) 05 105 Dessin de machines et Géométri ie > descrip- DVECOUrTS ELIEXENCICES) CCE M 90 90 BRON a Main IevÉe LR 15 30 HS CLIS = en ee cine) tue ete LEO 45 Anglais. . A CL NO ET ul 30 30 Art TANÉQIrE > - - TS ie AD 45 Entrainement physique ‘(lee ons sur l'hy- giène, séances de gymnastique) . . . 25 15 Exercices de Géométrie ne plane et Alcèbre | HMS RES » 60 Histoire des Etats- Unis b-15 Edo, SES » 30 2e année. Analyse qualitative et quantitative (cours, conférences individuelles et travaux de laboratoires) . . Ci 105 Eléments de l'exploitation des DUNES NUS » Minéralogie (cours a 60 60 Géologie générale. . . . . . 30 » Calcul différentiel et intégral, Géométrie analytique à trois dimensions. UT 49 45 Physique. . . 75 .75 Topographie(cours sete exercices pr atiques) j 90 60 LA FORMATION DES INGENIEL JRS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER 275 NOMBRE D HRURES MINES ET MÉTALLURGIE ou d Au : pratiq 168 a. _ _ 1 1" semestre 2° semestre 2° année. — — Diitérature anglaise. 2"... NUS 30 Histoire de l'Europe. . . . Dr et EG Ù Stratigraphie (coursetexercic es pri atiques ” 30 Tectonique et levé des cartes géologiques. » 55 DESSINMIOPORTAPQUE Ce D 30 3e année. Essai des métaux (cours et exercices pra- WAUES)E Se D EU © OR OL M | A) Géologie appliquée À: 30 » Levé des cartes géologiques. . . . 15 » Analyse quantitative (cours et exercices pratiques) . . D OU ROOMS EUTen ul 105 Exploitation des Mines Re dette della ae AU 45 AN RE à or à le 6 ir ee Al) 45 PÉYSIqQUECHAlEUT) ER CN 1 ” Laboratoire de physique . . . . . . . . 10 30 MRÉOHElAES MENT EEE OI » Allemand. : 15 45 Economie politique. 15 » Chimie théorique . . . yo ot € » 30 Droit commercial et industriel LA Konto CC » 15 4e année. Levé des cartes SAT théorie et pratique) . . . 30 30 Exploilation des mines (préparation mé- canique, machines de mines) . . 45 D] Compte rendu des travaux de labora- Core NS dl 15 Laboratoire de métallurgie Cher 00 » Métallurgie des métaux autres que le (er. 30 45 En MN LUE TUE der ds » Dictons ea ele ve Let Mva0 » Hydraulique IE RE O0 DT D » 15 Traductions de français et t d'allemand RU 15 Analyse quantitative NT deal tel OÙ 105 Mesure des températures . SRE 30 » Mécanique appliquée 15 » ÉNULES SE ÉDETAIeS RS PR TC » » DOS ESP M Re ete fe bete » » L'année scolaire dure du commencement d'oc- tobre au commencement de juin. Les travaux manuels et exercices pratiques occupent la plus large place dans l’enseignement. Pendant l'été, les élèves de notre cycle consacrent plusieurs mois aux courses géologiques, aux visites d'usines métallur- giques et à un stage dans une mine; ils accom- plissent ce dernier sous la direction de leurs maitres; ils procèdent à une étude méthodique de l'exploitation, de la préparation mécanique et des levés de surface ou souterrains. Ils exécutent eux- mêmes des travaux pratiques dans tous ces genres d'opérations. Les autres cycles sont organisés sur un plan analogue. 1 Il s'agit de conférences auxquelles prennent part le maître et les élèves et où sont discutées les diverses ques- tions qui se sont présentées dans le travail des laboratoires. 2 Ces études comprennent un certain nombre de cours d'économie politique, de langues vivantes ou d'histoire, entre lesquels l'élève fait son choix. 276 ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER 2, Diplôme de maitre ès sciences. — La prépa- ration au diplôme de maître ès sciences consiste non seulement à suivre des cours de degré supé- rieur, mais encore à effectuer des travaux et des recherches personnels; elle dure au moins une année. Le postulant s'entend avec le professeur dans le département duquel est placée sa spécialité ; il dresse, d'accord avec lui, un plan d’études et choisit un sujet de thèse. Le programme des cours supérieurs entre lesquels il peut opter est le même que pour le doctorat; il en sera parlé plus loin. Le plan d’études et le sujet de thèse doivent être approuvés par la Faculté. Pour obtenir le diplôme, le candidat doit subir un examen sur toutes les malières qui figurent dans son programme, faire preuve d'aptitude pour les recherches originales et soutenir sa thèse avec succès. Les hautes études qui conduisent au grade de maitre ès sciences ont pour but de compléter l'instruction des futurs ingénieurs non seulement sur les principes fondamentaux de leur art, mais aussi sur les théories mathématiques qui peuvent lui être appliquées. La nature des travaux et les conditions dans lesquelles ils sont exécutés dif- fèrent absolument de la forme d'enseignement qui conduit au premier grade. Le contact plus intime avec les maîtres, l'étude de mémoires et de mono- graphies scientifiques, développent chez le futur ingénieur l'originalité et l'esprit d'initiative qui sont les qualités maîtresses du praticien et du savant. La possession de ce diplôme n'est pas nécessaire pour se présenter au doctorat. Ceux qui le recher- chent n’aspirent pas, en général, au grade supé- rieur. Le titre de docteur-ingénieur est certaine- ment beaucoup plus apprécié; mais, commeilexige de longues études, les jeunes gens de talent qui n'ont ni les ressources pécuniaires, ni les loisirs suffisants pour prolonger leur séjour à l’école, se contentent du titre de maître ès sciences. 3. Doctorat. — Le nombre sans cesse croissant des demandes présentées par des hommes non seu- lement rompus aux travaux pratiques, mais encore doués de facultés qui les portent à étudier des pro- blèmes nouveaux, a décidé l’Institut de Boston a créer un enseignement pour la préparation au doc- torat. Il comporte, comme le précédent, de hautes études et des recherches originales; il exigeen prin- cipe au moins deux années, en pratique trois années de travail. Pour établir son programme d'études, le can- didat fera un choix entre les divers enseignements que lui offre l'Institut technologique; on les dis- tingue en deux classes : sujets majeurs et sujets mineurs. Les sujets majeurs sont ceux des cours spécialement établis en vue de la préparation aux grades supérieurs ; on appelle sujets mineurs ceux qui sont professés dans les cycles du premier degré, c'est-à-dire en vue de l'obtention du grade de bache- lier; il en est parmi ces derniers que le candidat n'a pas eu l’occasion d'apprendre, qui cependant touchent par quelques points à sa spécialité et qu'il lui serait utile de connaitre. Il prendra donc parmi les cours de quatrième année, et exceptionnellement parmi les cours de troisième année, les matières qui lui paraîtront nécessaires pour parfaire son instruc- tion, de facon que l’ensemble forme avec son étude principale un programme logique et bien ordonné. Voici, à titre d'exemples, les divers sujets pour le doctorat mines-métallurgie : SUJETS MAJEURS Cours supérieur d'exploitation des mines. Cours supérieur de préparation mécanique des mi- nerais. Cours de projets d'exploitation de mines (au cours sont adjoints des exercices de calcul et de dessin). Métallurgie générale (cours et exercices pratiques). Petits métaux. Calculs métallurgiques. Cet enseignement consiste en exercices pratiques; ils portent sur la résolution de problèmes relatifs au rendement des divers appareils et procédés métallurgiques. Cours de projets de métallurgie. Dans ce cours, on étudie les détails de construction des appareils métal- lurgiques, et les calculs fondamentaux par lesquels on résout les problèmes se rapportant à ce genre de con- struction. Cours supérieur de Géologie appliquée. Cours supérieur de levé de cartes géologiques. Géologie des roches ignées. à Minéralogie et Géologie chimiques. Cette branche de la science a pour but d'appliquer les théories de la Chimie physique aux problèmes de la formation des minéraux et des roches. Cours supérieur de Pétrographie. Cours supérieur de Paléontologie. Distillation de la houille. Mesure des températures. Il s’agit dans ce cours de la mesure des hautes températures des fourneaux et autres appareils métallurgiques. SUJETS MINEURS Géologie glaciaire ; Géologie expérimentale ; prin- cipes de Paléontologie. Machines électriques; laboratoire d'électricité; me- sures électriques; électro-chimie (cours de laboratoire); électro-métallurgie. Machines à vapeur (ce cours comprend la Thermo- dynamique et l'étude de tous les phénomènes qui se produisent dans les machines à vapeur). Analyse des gaz. Cours supérieur de topographie souterraine. Le postulant, en posant sa candidature, indique le sujet des recherches sur lesquelles il désire faire porter sa thèse. Il présente, en outre, un programme d'instruction qu'il a dressé de concert avec le direc- teur des études. La liste des cours demandés doit comprendre d'abord un sujet majeur : ce sera la science technique dans le domaine de laquelle ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER 277 s'exercent ses recherches, el ensuile des sujets mineurs: ce sera l'ensemble des connaissances qui se rattachent à son étude principale. Sujet de thèse et programme sont soumis à la Faculté; celle-ci nomme une Commission sous la surveillance et la direction de laquelle le candidat sera placé. Il subira des examens sur toutes les matières de son programme; mais, pour réussir, il ne suffit pas d'avoir fait d'excellentes études et de posséder par- faitement la science théorique et technique: il faut encore avoir exécuté des recherches originales et d'une haute valeur, condition essentielle, sans laquelle on n’obtiendra pas le titre de docteur. $ 2. — Des cycles allemands et anglais. Nous ne nous appesantirons pas sur les cycles allemands qui ont déjà été décrits maintes fois : rappelons seulement qu'ils sont spécialisés, comme les cycles américains, et qu'ils durent comme eux quatre années. La seule différence consiste en ce que les Hochschulen exigent un apprentissage manuel qui s’intercale entre les années scolaires : il dure généralement douze mois, répartis sur une ou deux périodes, ets'accomplit à l'usine, à l'atelier ou à la mine, suivant la carrière à laquelle se des- tine le futur ingénieur. Le grade supérieur, celui de docteur-ingénieur, s'obtient par la soutenance d'une thèse : les travaux qui y conduisent sont des études personnelles et des recherches originales; il n'existe pas d'enseignement spécial pour les candidats. Il y a quelques années, les Anglais, qui avaient reconnu l'insuffisance de leur enseignement tech- nique, résolurent de le réformer, ou plutôt de le réédifier complètement sur de nouvelles bases : ils ouvrirent une enquête mondiale, appelèrent en consultation les plus qualifiés de leurs ingénieurs ; quand ils furent ainsi documentés, ils décidèrent de créer une grande école technique, conforme aux méthodes modernes : elle s’appellera le Collège des Sciences appliquées. Ils trouvèrent facilement toutes les ressources nécessaires, et une Commis- sion d'ingénieurs nommée à cet effet établit ainsi qu'il suit les grandes lignes du programme d’études qui y sera suivi : Les élèves entreront à l'école vers dix-sept ans, la limite minimum étant de seize et la limite maximum de dix-huit. Le cycle sera de trois années; la première sera commune à tous; les élèves ne se spécialiseront que dans la deuxième, peut-être même dans la troisième année. Avant d'entrer au Collège des Sciences appliquées, ils accompliront un stage d'au moins un an, de deux ans au plus, comme simples ouvriers dans un ate- lier de mécanique, car on a pensé que la connais- sance pratique de cet art est nécessaire à tous les ingénieurs, quelle que soit la carrière à laquelle ils se destinent. Ce stage pourra d’ailleurs, dans certains cas, être reporté entre la première année d'études et la seconde, mais jamais il ne sera reculé plus loin. Le diplôme ne sera pas délivré dés la sortie de l'Ecole : il faudra pour l'obtenir que l'in- génieur accomplisse encore trois années de pra- tique dans un établissement industriel. Cette durée pourra être réduite à deux ans pour les ingénieurs qui auront fait preuve de talents exceptionnels. I] est recommandé d’en employer une partie à tra- vailler comme dessinateur s'étudient les projets. Une quatrième année d’études est instituée pour ceux qui désirent perfectionner leur instruction: elle n’est accessible qu'aux ingénieurs qui sont munis du diplôme et qui, par conséquent, pos- sèdent déjà la pratique de l’industrie. Le travail de cette dernière période n'a pas encore fait l'objet d’un programme précis; mais il aura surtout pour but de développer le goût et l'habitude recherches personnelles. dans un bureau où des II. —— L'ENSEIGNEMENT POLYTECHNICIEN. S 1. — Du rôle des Mathématiques dans l’enseignement. Le cycle polytechnicien comprend, en général, trois années de Mathématiques spéciales, ensuite deux d'Ecole Polytechniqueet trois d'Ecole d'appli- cation. Cela fait en tout cinqannées consacrées à la théorie, ou plusexactementaux Mathématiques, car, à l'exception de la Chimie, toutes les sciences expé- rimentales ou techniques sont traitées comme des thèmes à développement d'analyse et de géométrie. Pour juger le système en connaissance de cause, il convient d’abord d'examiner deux questions fon- damentales : À quoi servent les Mathématiques? Quelle place doivent-elles occuper dans l'ensei- gnement technique? Un grand géomètre, l'autorité la plus écoutée des Conseils de l'Ecole Polytechnique, a traité la première question dans de très belles pages : il commence par écarter d'un geste dédaigneux les « praticiens intransigeants » qui réclament de cette science un « moyen de gagner de l'argent », et il ajoute : « Les Mathématiques ont un triple but. Elles doivent fournir un instrument pour l'étude de la Nature. « Mais ce n’est pas tout : elles ont un but philo- sophique et, j'ose le dire, un but esthétique. « Elles doivent aider le philosophe à approfondir les notions de nombre, d'espace, de temps. « Et surtout leurs adeptes y trouvent des jouis- sances analogues à celles que donnent la peinture 218 ANDRÉ PELLETAN — IA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER et la musique. Is admirent la délicate harmonie des nombres et des formes; ils s'émerveillent quand une découverte nouvelle leur ouvre une perspective inattendue, ét la joie qu'ils éprouvent ainsi n'a- t-elle pas le caractère esthétique, bien que les sens n y prennent aucune part? Peu de privilégiés sont appelés à la goûter pleinement, cela est vrai, mais n'est-ce pas ce qui arrive pour les arts les plus nobles ? « C'est pourquoi je n'hésite pas à dire que les Mathématiques méritent d'être cultivées pour elles- mêmes el que les théories qui ne peuvent être appliquées à la Physique doivent l'être comme les autres. » A cette brillante théorie, la science étrangère oppose une conception toute différente : c’est l'Ecole pratique. Aux Etats-Unis, l’enseignement mathématique des Universités est uniquement tourné vers les applications pratiques; en Alle- magne, les plus grands géomètres dirigent leurs recherches vers la solution des problèmes tech- niques; quelques-uns même ne rougissent pas, n'en déplaise à l'illustre maitre, de gagner, avec leurs découvertes, beaucoup d'argent. Pour me borner à un exemple de la nature de leurs travaux, Je citerai l’industrie optique, qui a pris aujourd'hui un grand développement; elle a fait l'objet d’études transcendantes de la part de profonds analystes, et elle entretient pour sa fabrication courante des bureaux de mathématiciens. Même dans les milieux scientifiques voués à la théorie pure, comme les Universités, rarement l'Allemand moderne en- fourche une chimère pour chevaucher dans les nuages. L'influence des mathématiciens esthètes domine dans les cercles polytechniciens. Au fond de leur doctrine, se trouve une forte dose de scepticisme. Is considèrent les Mathématiques comme le prolon- gement des humanités; on les apprendra comme on à appris le latin pour appartenir à l'aristocratie intellectuelle ; il est entendu qu'on les oubliera plus tard. Et cependant l'idée qu’elles n’ont pas d'utilité pratique est radicalement fausse. La Mécanique notamment et encore plus l'Électricité font appel à certaines théories élevées du Calcul différentiel et intégral; les praticiens doivent les employer; cependant nos ingénieurs s'en servent peu ; nous sommes le pays du monde où on les étudie le plus et où on les applique le moins. L'Ecole des Mines a été appelée récemment à traiter une question du plus haut intérêt : quelle est la somme de Mathématiques, de Mécanique rationnelle, de Physique et de Chimie qui peut servir à l'ingénieur? Voici quelle à été notre méthode de travail : des programmes très étendus ont été dressés par les professeurs de sciences théoriques ; ces projets ont été soumis aux profes- seurs des cours techniques ; chacun d'eux en a barré les articles qui n'intéressaient pas son ensei- gnement et a inscrit d'office ce qui lui a semblé bon. Tout ce qui n'a pas été condamné par l'una- nimité des maitres a été conservé; tout ce qui a été réclamé par lun quelconque d'entre eux a été accepté. Nous avons ainsi formé ce que j'appellerai le programme maximum : il est presque identique à celui que la Sorbonne a adopté pour la préparation aux études physiques ; il se rapproche également beaucoup de celui des écoles techniques étran- gères. Il devait nécessairement en être ainsi, puisque les uns et les autres se sont inspirés du même principe : n'enseigner que les théories utiles. Il peut être facilement professé dans l'espace de deux années, en y laissant encore une large place pour les cours techniques. Nous admettons parfaitement que ce programme ne suffit pas à certains esprits supérieurs ; on peut enseigner sans inconvénient toutes les théories les plus abstraites et les plus transcendantes à un Maxwell ou à un Helmholtz, ou même, sans monter si haut, à tout mathématicien éminent qui voudra se livrer à la poursuite des découvertes ; à ceux-là ne limitons pas le champ d'études ; peut-être quel- qu'un d'entre eux trouvera-t-il l'emploi d'une théorie réputée stérile. Mais ne faisons pas de l'exception la règle, et n'élevons pas des géné- rations entières d'élèves comme s'ils étaient tous destinés à l'Institut. Les défenseurs les plus acharnés de l’enseigne- ment polytechnicien ne peuvent soutenir, et ne soutiennent pas, en effet, qu'il ait par lui-même une utilité directe ; ils le préconisent comme une gymnastique intellectuelle ; ce vocable, cher à la routine, incarne une idée très fausse : celle qu'il suffit de se remuer pour faire de la bonne gymnas- tique. Loin de là, il faut procéder méthodiquement ; il faut exécuter, non des tours de force, mais des mouvements normaux. Ainsi procède l’école moderne pour l'entrainement physique, et il doit en être de même pour celui de l'esprit. Point d'exercices extraordinaires, mais des exercices usuels, conformes à ceux que demande la vie réelle. I n'est, d'ailleurs, pas légitime d’assimiler au travail corporel celui de la pensée et de croire qu'on peut dilapider sans inconvénient le second comme le premier. Quand je dépense mes forces physiques dans un effort inutile, elles renaissent le lendemain, et l'exercice n’a fait que les développer ; mais quand j'applique mon esprit à une étude stérile, je charge ma mémoire d'un poids mort, et, comme elle ne peut porter qu'un fardeau limité, j'ai immobilisé sans profit une partie de mes forces ; j'ai perdu une partie de mon capital intellectuel. ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER 279 On prétend encore que l'étude des Mathématiques apprend à raisonner; mais on n'en donne aucune preuve; elles ne développent certainement pas le bon sens, qui est un don naturel. Notre corps des Ponts et Chaussées, qui à été élevé d'après ces principes, ne montre pas plus de justesse ou d'en- vergure d'esprit que ceux des autres pays ; il ne s'est distingué ni dans l'aménagement de nos ports, ni dans l’organisation de notre réseau de canaux ; il a accueilli avec défiance les chemins de fer, a con- damné comme irréalisable le percement de l'isthme de Suez et prêté son concours à la folle entreprise de Panama. Dans la question des eaux, il a refusé de reconnaître les lois de l'hygiène moderne; il s'est acharné à empoisonner les populations, et n'a capitulé que devant le soulèvement de l'opinion publique. Sont-ce là les marques de l’éclatante raison qu'engendrent les Mathématiques ? $ 2. — Cycle des études polytechniciennes. Ce cycle commence par la classe de spéciales ; les candidats y entrent vers l’âge de dix-sept ans, dès le baccalauréat passé; voici, pour une promotion moyenne, le nombre d'années de préparation accom- plies par ceux qui réussissent : Durée totale de la préparatoire. NOMBRE POURCEN- d'élèves TAGE Élèves ayant accompli : 1 année de spéciales ou classes similaires. 4 2 2 — — — =). Len 22 3 _ = — il 45 4 — = — TA 27 ] — — — 7 il La durée moyenne des études est de trois ans; près du tiers des candidats y consacrent quatre ou cinq années. Cet enseignement a été l'objet de critiques sévères et très justifiées. Il comprend l’'Algèbre supérieure, la Géométrie analytique, le Caleul différentiel et intégral, la Géométrie descrip- tive, la Trigonométrie, la Chimie des métalloïdes, la moitié de la Mécanique rationnelle et de la Physique, sans parler des langues vivantes; tout cet ensemble de sciences est professé dans l’espace de six ou sept mois, ce qui est insuffisant pour un programme aussi chargé. Chaque année, l'élève recommence le même cours; cette perpétuelle répétition des mêmes théories ne peut que le dégoüter de ses études. L'instruction, tournée uniquement vers les questions d'examen, perd tout caractère scientifique et n’exerce que la mémoire : elle est unanimement condamnée par les maîtres les plus qualifiés de l'Université. Enfin l'effroyable surmenage que subissent nos jeunes gens à trans- formé les classes de Mathématiques spéciales en vérilables écoles d'abrutissement, Müis je laisse ces critiques de côté : je ne veux examiner que les programmes el la facon dont ils sont compris. Presque tout l'enseignement roule sur la Géométrie analytique. Il faut connaitre à fond les principes de cette science, mais les propriétés des courbes et-des surfaces de second ordre, ainsi que la recherche des lieux géométriques, qui absorbent la majeure partie du temps des élèves, sont du domaine de la spéculation pure el n'ontaucun intérêt pratique. En outre, les sujets les plus simples etles plus clairs donnent lieu à une analyse raffinée ; ce ne sont qu'abstractions quintes- cenciées par ce que la métaphysique a de plus subtil. D'autre part, la partie pratique du programme est absolument négligée ; dans la vie pratique des ingénieurs, toutes les questions aboutissent à un calcul numérique. Il faut être entrainé à ce genre d'exercices qui exige une éducation spéciale el prolongée. Or, nos candidats sont absolument incapables de traiter un problème réel et numérique. Quand on leur en pose un de cette nature, ils apportent des solutions non seulement fausses, mais absurdes, dont rougirait un élève des écoles primaires. Au sortir des classes de spéciales, le candidat heureux entre à l'École Polytechnique. Voici, d’après le dernier règlement des études, le pro- gramme de son enseignement (Tableau 1). Pour chaque matière, nous donnons, en même temps que le nombre de lecons ou d'exercices, le coeffi- cient d'influence, c'est-à-dire le nombre de points pour lequel les uns et les autres comptent dans le classement. Parlons d’abord de l'Analyse : une décision, qui date déjà de quelques années, a reporté au pro- gramme des spéciales la presque totalité du Calcul différentiel et intégral; il était donc logique d'en supprimer l'étude à l'École Polytechnique, ou tout au moins de la réduire à quelques lecons. Mais les professeurs chargés de ce cours n'ont rien voulu savoir; ils se trouvent, par une longue tradition, en possession d'un programme auquel ils sont ha- bitués; ils le gardent comme le feu sacré etles élèves subiront une fois de plus la répétition des théories qu'ils ont déjà ressassées trois ou quatre fois en spéciales et sur lesquelles ont porté leurs examens d'entrée. Nous en dirons autant pour la première moitié du cours de Mécanique. Quant à la prétendue Géométrie descriptive, c'est, pour la plus grande part, un cours de Géométrie supérieure dans lequel on reprend, par d'autres méthodes, la théorie des courbes et des surfaces déjà complètement étudiée dans les cours de Géo- métrie analytique ou de Calcul différentiel. Elle fait done double ou triple emploi et peut être sup- primée sans inconvénient. 280 ANDRÉ PELLETAN LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER En ce qui concerne la coupe des bois, la taille | pas y voir figurer la résistance des matériaux, qui des pierres, les propriétés optiques des cristaux, l'acoustique, l'astronomie et l'architecture, ce sont des sujets qui n’intéressent que certains spécia- listes; elles se trouvent absolument déplacées dans TABLEAU I. est une science du plus haut intérêt pour toutes les catégories d'ingénieurs; la raison de cette omission est bien simple : la résistance des matériaux ne se prète pas à des calculs élégants; elle n'a pas paru — Programme de l’enseignement de l'Ecole Polytechnique. RL 1" ANNÉE 2° ANNÉE TT COR ER IG ENT NATURE DES EXAMENS Nombre Nombre ee de leçons Coefficients de leçons Coefficients ou d'exercices ou d'exercices ——@—_—_—_——_—— EEE —————————— | Lecons, : 35 » 32 » , interrogations è 3 0,5 3 2 Analyse. . + ) Examen . é F 1 4,25 » 17 Compositions éc riles . 2 0,5 2 2 (ALeT ons 24 » » » Géométrie descrip- \ Interrogations . 3 0,5 » » DOVE MT TRI TNNEXBmMEN. 1 3 » » / Epures. . » 0,75 » » { Lecons. » » 14 » Sléréotomie. . . s Examen. » » » 5 l Epures. » » » 2,9 { Lecons. TE 36 » 38 » Mécanique et Machi- interrogations ; 3 0,5 3 2 2,5 DE ON IE Comes 1 4,25 dl 17 21,25 Compositions éc crites. 2 0,5 2 2 225) \ Lecons. à 90 » 30 » » : interrogations : 3 0,5 3 2 255 Physique . : ) Examen 1 316 1 15 18/75 Exercices 6 0,25 6 1 4229 Lecons. "2 : 29 » 30 » » Chimie interrogations : 2 0,5 3 D) 2-5 i FA LE * *: ) Examen . il :| 2 15 Exercices pratiques. A1 0,5 11 2 2,5 ( Lecons. = » » 28 » » Astronomie . US Interrogations à A » » 3 2 à { Examen PLSMSES FANS MERE » » 1 1 7 Architecture Lecons. . 8 14 » 16 » » rchitecture. . SRE Croquis af projets Vo S 0,5 » 2 2,5 Histoire et Littéra- 5 € Stone 9 , 9 iüre . { Compositions. . . 4 1,25 4 3 4,25 ( Lecons. 20 » 20 » » angue £ ‘ M: CE Langue allemande ) interrogations et compositions. » 0,75 » 3 3,79 Dessinid'imitation CIAVIS ERP RE » 2,5 » 2,5 5 Art militai ; Lecons. SO 22 » 20 » » EL EUITES Interrogations . . 1 1 » k 5 / Manœuvre d'infanterie . 1% » 1% » » Manœuvre d'artillerie. 14 » 14 » » Instruction sur les règlements. 30 » 30 » » Exercices de topogr. militaire. 6 » 6 » » , PT. Equitalion . 4 s0 » 80 » » Ecole du soldat. . . Gymnastique. 64 ï 64 « ÿ Escrime . : 40 » 40 » » Boxe. 16 » 16 » » ToTaAL. . 26% 264 un enseignement qui doit conserver un caractère très général, puisqu'il prépare à des carrières dif- férentes. Pourquoi, par exemple, l'ingénieur hydro- graphe doit-il étudier l'appareil du pont biais? Pourquoi l'ingénieur des tabacs calcule-t-il une éclipse de lune? Le temps très long que l'on con- sacre à toutes ces matières est absolument perdu pour la plupart. Par contre, tandis que l’enseigne- ment est surchargé d'inutilités, on s'étonne de ne digne de prendre place dans l’enseignement poly- technicien. En somme, dans tout cet ensemble, il n'y d'utile que quelques lecons d'Analyse, la moitié du cours de Mécanique, la moitié du cours de Physique et la Chimie; le reste est à supprimer. Je montrerai encore par un exemple l’incurie el le sans-gène que l'Administration de la Guerre apporte dans tout ce qui touche à l’organisation des ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER 281 études. Pour décharger l'enseignement de Fontai- nebleau, elle en à reporté une partie au programme de Polytechnique, sans considérer que ce n'était pas une école exclusivement militaire; mais elle s’est heurtée à une difficulté : tant que les élèves restent sur les bancs de l'École, ils ne sont pas définitive- ment classés; on ignore donc dans quelle arme ils serviront, et même s'ils serviront dans l’armée de terre ou de mer : à qui donc faut-il enseigner l'artil- lerie, à qui la fortification? On n'a pas été embar- rassé pour si peu : tous apprendront les deux spé- cialités. Voilà donc des jeunes gens déjà accablés de travail à qui on impose, par surcroît, l’appren- tissage de métiers que certains de leurs camarades exerceront, mais qu'eux-mêmes n’exerceront pas : voilà un futur marin qui est obligé de se consumer sur l'étude de l'administration des troupes de cam- pagne, du service des pontonniers et de la fortifi- cation ; il montera à cheval et on lui donnera des notes d'équitation. Va-t-on l’enrôler dans la cava- lerie de Mascarille? Si l’on se trouvait en présence d’une difficulté insurmontable, peut-être ce système invraisem- blable aurait-il quelque excuse; il n’en est rien; tous les polytechniciens passent aujourd'hui une année sous les drapeaux comme simples soldats ; qu'on leur donne pendant ce temps toute l’instruc- tion théorique et pratique nécessaire à l'officier. Rien n'empêcherait même de placer le temps de service après la sortie de l'École; de cette facon, quand nos jeunes gens arriveraient au régiment, ils seraient déjà classés et on pourrait les spécia- liser dans l'arme où ils sont appelés à servir. Mais on a trouvé plus simple de surcharger d’une double instruction militaire des études déjà écrasantes : peut-on abuser d’une facon aussi scandaleuse du temps et des forces de la jeunesse! Voilà pour les programmes; arrivons maintenant aux méthodes : la didactique moderne recom- mande, comme principal moyen d'enseignement, les travaux personnels el les exercices de labora- toire. Voyons comment sont compris les uns et les autres. La seule méthode efficace pour qu'un élève S'assimile l'Analyse et la Mécanique rationnelle, c'est de présenter sans cesse à son activité intellec- tuelle de nouveaux problèmes à résoudre; faute de cet entrainement, il sera incapable d'appliquer la science; pour connaître un outil, il ne suffit pas d'avoir été appelé à le considérer sous toutes ses faces, il faut lavoir manié. Un instituteur qui enseignerait aux enfants la théorie des quatre opé- rations, sans jamais leur faire exécuter aucun calcul, serait traité d’incapable et révoqué. Pro- fesser les Mathématiques supérieures sans les faire appliquer est une erreur tout aussi grossière. A l'École, les épreuves consistent presque exclusive ment en interrogations ou examens dans lesquels on demande seulement à l'élève de savoir le cours ILest bien vrai que, ce système d'un autre âge ayant soulevé de vives protestations, le Conseil de perfec tionnement s'est résigné à inslituer des composi- tions écrites, mais il en a limité le nombre au chiffre dérisoire de deux par an; c'est exactement comme s’il n'y en avait pas. Si, au moins, elles avaient une influence appréciable sur le classement, peut-être les élèves les prendraient-elles au sérieux : mais elles ne comptent que fort peu : à peine 1/10 de l’ensemble des examens d'Analyse et de Méca- nique. Elles ont le même coefficient que les exer- cices militaires, boxe, escrime, ete. Les qualités du troupier ont done, aux yeux des organisateurs de l'instruction, autant de poids que la faculté mai- tresse, je dirai presque l'unique faculté qu'on serait en droit d'attendre de jeunes savants voués presque exclusivement aux Mathématiques, celle de savoir traiter un problème. Qu'en résulte-t-11? C'est qu'ils ne possèdent pas le maniement de l'Analyse. APRÈS CINQ ANNÉES CONSACRÉES AU CALCUL DIFFÉ- RENTIEL ET INTÉGRAL, LES MEILLEURS SONT INCAPABLES DE SUBIR AVEC SUCCÈS MÈME L'EXAMEN DE LA LICENCE; IL LEUR FAUT, POUR OBTENIR CE GRADE, RETOURNER S'ASSEOIR SUR LES BANCS DES AMPHITUÉATRES, ET DEMANDER A LA SORBONNE LA VÉRITABLE INSTRUCTION SCIENTIFIQUE. Passons aux exercices pratiques; le matériel et l'outillage font absolument défaut. D'ailleurs, le nombre en est absolument insuffisant : 6 de Phy- sique et 11 de Chimie par an, contre 264 séances d'exercices militaires! En ce qui concerne les travaux pratiques de Méca- nique, le règlement des études ne contient qu'une phrase, d’ailleurs énigmatique ; la voici: « Les élèves sont appelés à voir de près le fonctionne- ment des machines en mouvement. » Tout le monde est appelé à voir de près des machines en mouve- ment, même au milieu des rues de Paris; ce n'est pas là un privilège ni un programme d'instruction. S'agit-il de machines fonctionnant à l'École même? J'y ai bien découvert un petit appareil à vapeur, égaré là par le hasard de je ne sais quelle donation ; le conservateur des collections a placé cet objet sous verre, comme si c'était une nouveauté rare et délicate qu'il fallait mettre à l'abri des curiosités indiscrètes. Mais l'appareil est hors d'usage; ce n’est certainement pas lui qu'on offre en spectacle. Comment donc faut-il interpréter le texte sybillin arrêté par le Conseil de perfectionnement? Il signifie simplement que les élèves sont invités, quand ils en ont l'occasion, à s'approcher des machines et à les regarder tourner. C'est à cela que se borne leur instruction mécanique pratique. 282 ANDRÉ PELLETAN — LA\ FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER Une autre lourde faute à été de militariser l'École; enfermer des aspirants ingénieurs dans une caserne sombre et délabrée, les soumettre à une discipline de fer, leur infliger consigne et salle de police pour la moindre vétille, les astreindre, pen- dant les rares heures que les travaux scientifiques laissent disponibles, à exécuter des manœuvres ou à apprendre les règlements de l’artilleur et du fantassin, c’est une véritable barbarie. Le cycle se termine par les écoles d'application; le manque de spécialisation, de travaux pratiques et d'apprentissage manuel les met en état complet d'infériorité. Comme les études n'y sont pas d'une plus longue durée que dans les écoles étrangères, et qu'elles portent sur beaucoup plus de sujets très divers, elles sont loin d'être plus approfondies. Elles ne constituent done pas une haute culture, et ne rentrent pas dans le cadre de notre sujet. Nous n'en parierons donc pas. III. — ORGANISATION DES HAUTES ÉTUDES TECHNIQUES. $ 1. — Des concours. La France recrute ses fonctionnaires sur les bancs du lycée; aussi ne cherche-l-on pas à recon- naitre chez ces jeunes collégiens, voués prématuré- ment au service de l’État, s'ils possèdent les qua- lités de leur emploi, le bon sens et l'esprit pratique. On s'efforce seulement de distinguer les plus intel- ligents et on les soumet, d'abord pour les recevoir et ensuite pour les classer, à une multiple série d'épreuves. Cette précoce conseription des talents donne-t-elle de bons résultats? Le premier défaut de ces concours intensifs, c'est qu'ils ne laissent pas place au développement des facultés personnelles; le obsédé par l'idée de l'examen, n'a le loisir d'appro- fondir aucun sujet. À peine sorti d'une interroga- tion, il lui en faut préparer une autre. S'il s'arrête sur une question intéressante, s'il s’attarde dans un travail que la curiosité lui suggère, il est dépassé par ses concurrents et perdu sans ressources. La mémoire, et la mémoire seule, doit fonctionner sans relâche. À celui qu'a faconné ce régime, il ne faut pas demander l'esprit d'initiative : l’école l'a tué. Mais un vice plus grave encore du système est qu'il crée forcément des corps fermés : puisque vous placez un concours au seuil de la carrière, il faut bien que vous en interdisiez l'accès aux intrus qui voudraient y pénétrer par une autre porte. L'ingénieur, investi de son privilège, n'a plus à redouter aucuné concurrence; il se complait dans la pensée que l'École Polytechnique est la première de ce monde, que le corps auquel il appartient est la gloire de la France et que l'Europe nous l'envie; candidat, sans cesse enfin que lui-même n'a plus rien à apprendre Indifférent à toute autre étude qu'à celle de ses papiers administratifs, doucement porté par une confiante et paisible routine, il arrivera sans efforts aux plus hautes dignités de la bureaucratie, sans avoir jamais pris aucune initiative et sans avoir jamais remué aucune idée. Telle est la glorieuse destinée à laquelle aspire la meilleure part de la jeunesse française. Enfin, et c'est là le point capital, le concours à lieu entre de trop jeunes gens; combien voyons- nous de brillants écoliers chez lesquels toute acti- vité cérébrale s'éteint de bonne heure, et qui, arrivés à la maturité, ne possèdent plus que de très vulgaires capacités! Cependant, parmi les esprits d'élite qu'attire l'École Polytechnique, il en est qui révèlent dès la jeunesse les hautes facultés dont ils seront doués plus lard. Beaucoup d’entre eux sorti- ront dans les premiers rangs; ils se consacreront aux sciences ou parfois à l'industrie; d’autres, tout aussi intelligents, mais inhabiles aux examens, se tourneront vers des carrières où ils trouveront l'emploi de leur activité intellectuelle, comme le génie maritime ou certains services techniques de l'artillerie. Mais de ces esprits réellement doués pour les sciences et qui en conservent le goût, combien faut-il en compter par promotion? Ce serait une très grosse exagération que d'en chiffrer le nombre à une demi-douzaine; le reste ne con- stitue ni une aristocralie scientifique, ni une aris- tocratie intellectuelle : la préparation artificielle et le maquignonnage effréné qui se pratique sur les candidats pour les faire briller aux yeux des exa- minateurs faussent radicalement le concours. Cer- tains établissements que je ne veux pas nommer sont passés maitres dans cet art néfaste : ils ont peuplé les services publics d'hommes sans valeur. Du reste, ne croyez pas que le candidat qu'un savant entrainement aura fait entrer à l'École échouera nécessairement dès qu'il sera réduit à ses propres forces, et que le classement final corrigera le classement d'entrée. Comme on ne demande au polytechnicien que d'apprendre son cours et qu'on n'exige de lui aucun travail personnel, rien ne permet de discerner sa véritable valeur : ceux qui ont beaucoup de mémoire et peu d'intelligence, les « bottiers » comme les appelle l'argot de l'École, peuvent obtenir des notes de supériorité, même en Mathématiques ; on les retrouve souvent à la sortie dans les premiers rangs. L'École fournit ainsi une brillante élite, mais elle remplit l'administration el les bureaux d’honorables et solennelles médio- crités. La plus grande partie de nos fonctionnaires n'a pas besoin d’une instruction mathématique trans- cendante; considérez, par exemple, le corps des ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER Mines. Il surveille les exploitations souterraines, les chemins de fer et les machines à vapeur, trois spécialités qui, par parenthèse, n'ont aucun rapport entre elles et devraient être séparées. Le service consiste uniquement dans des inspections, dans des instructions d'accidents ou de demandes en conces- sion, et surtout dans un énorme travail de bureau : il exige de solides connaissances pratiques, mais les Mathématiques supérieures n'y servent absolu- ment à rien. Il en est de même de la plus grande partie du corps des Ponts et Chaussées. Les services ordinaires ne comportent en général que de l’entre- tien courant, de petits travaux et des questions d’aliment ou autres de même ordre où le Calcul différentiel et intégral n'a rien à voir. Il est tout à fait inutile de faire passer lous ces fonctionnaires par une école de hautes sciences. Que l'Adminis- tration les choisisse parmi les ingénieurs qui auront recu une bonne instruction supérieure du premier degré, et de préférence, toutes les fois que ce sera possible, parmi ceux qui auront déjà accom- pli un certain temps de pratique dans l'industrie. La haute culture ne doit être exigée que des hommes supérieurs à qui on confiera l'exécution de grands travaux d'art, ou que l’on placera à la tête de ser- vices de premier ordre, comme les directions de chemin de fer, voie, traction ou exploitation. Qu'on ouvre donc un concours pour recruter les talents exceptionnels, rien de mieux, mais qu'on l'établisse dans des conditions où il donne toutes garanties, c'est-à-dire entre hommes faits. $ 2. — Principes fondamentaux du haut enseignement technique. Il existe, pour l’organisation des hautes études techniques. deux principes fondamentaux qui sont admis à l'étranger, et qui doivent être adoptés par nous. 1° La haute culture technique doit être réservée à l'élite capable d'en profiter; 2 Elle ne doit être donnée qu'à ceux qui possé- dent déjà l'instruction technique. Les hautes études ne sont requises que pour les esprits supérieurs qui peuvent accomplir des dé- couvertes ou entreprendre de grandes œuvres; l'immense majorité des autres n'en à pas besoin et est généralement incapable de les comprendre; certains maîtres disent : « Jetons au vent la se- mence de la science; peut-être quelque grain tom- bera-t-il sur un terrain propice et germera. » Ce système de culture intellectuelle est déplorable; vous imposez à toute une génération d'élèves une instruction trop élevée, sous prétexte que quelques- uns en profiteront peut-être ; vous vous arrogez le droit de disposer à votre guise des années les plus fécondes de la jeunesse, vous dilapidez le temps et 283 les forces de ceux qui vous sont confiés : ce ne sont pourtant pas des millionnaires; ils ont besoin de gagner leur vie : prolonger inutilement leur séjour dans les écoles est un détestable abus, qui n'aboutit qu'à écarter de la carrière les moins riches. Donnons à tous la solide instruction du premier degré dont ils ont besoin: si nous rencon- trons quelque esprit particulièrement doué pour les sciences, sachons le distinguer et procurons-lui les moyens de suivre sa vocation. Le second principe consiste en ce que les hautes études doivent suivre l'École d'application: il est évident, en effet, que, si elles la précèdent, elles ne porteront que sur les Mathématiques, c'est-à-dire sur une branche des sciences, branche maîtresse, il est vrai, mais branche unique; la haute culture n'a donc pas pour objectif les sciences pratiques : c'est le vice de l'École Polytechnique; ainsi com- prise, cette École fait double emploi avec la Sor- bonne; elle produit beaucoup de grands savants, mais fort peu de grands industriels; le corps des Mines compte onze membres de l'Institut et ne possède pas un seul ingénieur qui se soit signalé par ses travaux sur l’art des Mines. È L'organisation actuelle à été créée il y a un siècle, alors que les sciences mécaniques et indus- trielles étaient dans l'enfance, tandis que les Ma- thématiques étaient arrivées à un haut degré de perfection. Il était tout naturel alors de considérer celles-ci comme constituant à elles seules la haute culture; mais il n'en est plus de même aujourd'hui. Les théories de la Chimie et de la Physique indus- trielles, ainsi que les applications de la Mécanique et de l'Électricité ont pris un prodigieux essor, et la haute culture doit porter sur elles aussi bien et plus que sur les sciences purement théoriques. Le système qui avait été imaginé par les fondateurs de l'École était alors logique; il ne l'est plus au- jourd'hui et ne saurait subsister qui doit le remplacer. cherchons ce IN. — ConczusroNs. En France, l'enseignement technique n'est pas à réformer, il est à créer. Pour la préparation aux écoles techniques, il faut renoncer à l’enseignement polytechnicien, non pas seulement parce qu'il est absurde, mais parce qu'une instruction supérieure n'est pas à sa place au seuil des études techniques. Quand même il serait amélioré, il ne faudrait pas le maintenir où il est maintenant : demander avant tout cinq années de Mathématiques à nos futurs ingénieurs est une funeste aberration; l’École Polytechnique, consi- dérée comme école de hautes études, doit logique- ment, nous le répétons, suivre les écoles techni- 284 ques. Constituée en École supérieure des arts et de l'industrie, réservée à une élite, elle répondrait bien mieux à son titre et à la pensée de ses grands fondateurs. Comment alors organiserons-nous les études? Puisque nous avons le privilège peu en- viable d'entrer les derniers dans la voie du progrès, profitons au moins de l'expérience des autres; prenons à chacun ce qu'il a de mieux et formons-en un ensemble approprié à nos besoins. Fondons, comme l'Angleterre, un collège des sciences appliquées, où se donnera à la fois l'ins- truction théorique et pratique. Il est à créer de toutes pièces. On me demandera si l’on ne pourrait pas utiliser nos écoles actuelles en les moderni- sant; il n'y faut pas songer : on serait obligé de doter tous nos vieux établissements de laboratoires neufs, électricité, mécanique, etc., et ils ne se pré- teraient guère à ces transformations. D'ailleurs, pour chaque école, il faudrait un laboratoire de chaque espèce; ces installations multiples coûte- raient plus cher que la construction d'une école unique et le replâtrage donnerait des résultats inférieurs. Adoptons pour l'enseignement du premier degré le cyele de quatre années avec spécialisation; la classification des arts et industries, telle qu'elle a été établie par l'Instilut de Boston, nous parait l'un des meilleurs modèles à suivre. Point de concours à l'entrée de l'École : un simple examen qui per- mette de reconnaitre si le candidat possède les connaissances suffisantes pour suivre l’enseigne- ment. Les limites d'âge pour l'admission seraient de seize à dix-huit ans; en ce qui concerne l’ap- prentissage manuel, nous donnerions la préférence au système anglais ; chaque élève, avant d'entrer à l'École ou après la première année d’études, accom- plira un stage d'un an dans un atelier de méca- nique ou d'électricité. Nous instituerons également une culture supé- rieure: et c'est là que nous voyons la place d'une grande École Polytechnique, qui ne sera plus à la ANDRÉ PELLETAN — LA FORMATION DES INGÉNIEURS EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER base de l'enseignement, mais qui en formera, au contraire, le couronnement. Elle pourra être asso- ciée à la précédente; on y étudiera non seulement les Mathématiques, mais toutes les sciences théo- riques ou techniques. Elle aura comme maîtres les plus grands savants de l'Université et de l'Indus- trie; on y entrera par un concours auquel seront admis les ingénieurs diplômés, industriels ou fonc- tionnaires, ayant au moins deux années de pratique dans un service actif. Les études comprendront des cours d'ordre très élevé et des recherches person- nelles. Les épreuves consisteront dans des examens et la soutenance d'une thèse. Les candidats qui auront réussi obtiendront le brevet supérieur. Ce brevet pourra êlre exceptionnellement accordé, sans concours, aux ingénieurs qui auront accompli des découvertes remarquables ou de grandes œuvres. Tel est le plan que nous osons soumettre à ceux qui s'intéressent au progrès. Il nous fournira une élite d'ingénieurs tout aussi brillante et infiniment plus pratique que celle que nous possédons aujour- d'hui. Nous ne nous dissimulons pas les difficultés de l’entreprise; elle se heurtera à l’implacable opposition de la routine; nous en triompherons. Elle coûtera 10 ou 20 millions; cela n’est pas pour nous effrayer. Les dépenses qui sont faites pour l'instruction des ingénieurs ne sont pas improduc- tives; elles constituent un placement à gros inté- rêts. Nous avons confiance dans l'avenir; nous sommes persuadé que les Pouvoirs publics com- prendront que notre enseignement technique est dans un état de profonde infériorité, et qu'il faut consentir tous les sacrifices nécessaires pour le relever au rang qu'il doit occuper dans le monde. La prospérité de l’industrie francaise est à ce prix. André Pelletan, Inspecteur général des Mines, Sous-directeur de l'École Nationale supérieure des Mines. D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 285 L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOIDE L'Académie de Médecine vient de terminer la discussion du Rapport de M. Vincent sur l’étiologie, l’'épidémiologie et la prophylaxie de la fièvre typhoïde. Les débats, qui n'ont pas occupé moins de dix séances, ont pris une ampleur inaccoultu- mée, parfaitement justifiée d’ailleurs par ce fait que « tous les quinze ou seize ans, la fièvre typhoïde enlève à notre pays un nombre d'habitants égal à celui d'une grande ville telle que Toulouse » (Vincent). Cette discussion a done montré que la défense de la population contre cette maladie endémo-épidémique laisse encore à désirer. Mais son grand avantage a élé d'indiquer dans quel sens cette défense devait être complétée, en nous faisant connaître une série de faits nouveaux, rela- tifs aux modes insoupconnés ou peu connus d’in- fection ou de contamination par le bacille typhique, relatifs surtout au rôle des « porteurs chroniques de bacilles », terme sous lequel on désigne les convalescents de fièvre typhoïde ou les personnes de l'entourage des typhiques qui, pendant des semaines et des mois, continuent à expulser avec leurs déjections et leur liquide urinaire des bacilles typhiques virulents. Ce sont ces faits nouveaux, complétés par ceux qui sont consignés dans la littérature’, qu'on trou- vera dans les lignes qui suivent. I. — LA CONCEPTION ACTUELLE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE. 3 Mais, avant de passer à l'exposé des faits con- cernant l'étiologie et l’épidémiologie de la fièvre typhoïde, il est nécessaire de rappeler la facon dont on concoit aujourd'hui la pathogénie de cette affection, c'est-à-dire la facon dont l'organisme est envahi par les bacilles typhiques. $S 1. — Biologie du bacille typhique. On dit couramment, même dans le publie éclairé, que le bacille typhique « vit dans l’eau ». Cette opinion n'est pas tout à fait exacte. Certes la pré- sence éventuelle du bacille typhique dans l’eau d'un puits, d'une rivière, d'une source, ne saurait ètre mise en doute. Mais, de plus en plus, on tend ‘ La littérature médicale concernant cette question a pris, dans le courant de ces dernières années, une exten- sion considérable. On en trouvera la bibliographie presque complète dans le travail de S. Cagnicacci : Thèse de doctorat, Paris, 1909. — Parmi les autres travaux consultés pour la rédaction de cet article, nous citerons : 19 Communications de MM. Chantemesse, Delorme, Kelsch, Netter, Thoinot, Vaillant, Vincent in Bullet. de l'Acad. de Med., 1909, nos 38-43, et 1910, nos 4-10; 20 E. SACQUÉPÉE : REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, 1 à admettre, avec Robert Koch, que la survie du bacille typhique dans les cours d'eau et l'eau potable est éphémère et ne dépasse pas quelques heures, un jour tout au plus. la rareté excessive avec laquelle on arrive à déceler le bacille d'Eberth dans une eau manifestement souillée et notoirement typhogène ; 2° le caractère particulier des épidémies d'origine hydrique. Ces épidémies sont,eneffet, caractérisées par leur appa- rition brusque et le grand nombre de personnes qu’elles frappent, ainsi que par leur cessation non moins brusque lorsqu'on arrive à faire tarir la source d'infection. Cette source, comme on le sait, est constituée par les déjections des typhiques, qui sont Jetées directement dans une source ou qui y arrivent, du moins les bacilles qu'elles renferment, par filtration à travers les fissures du sol ou à tra- vers les terrains calcaires. Si les épidémies par eau potable souillée se prolongent parfois pendant des semaines, c'est parce qu'on n'arrive pas à découvrir ou à arrêter la source de l'infection. Mais, lorsqu'on parvient à l’annihiler, l'épidémie cesse, on pourrai dire du jour au lendemain, en raison même de la très courte survie du bacille d'Eberth dans l’eau. Le virus de la fièvre typhoïde ne vit donc pas dans l’eau. Le vrai habitat du bacille d'Ebertb, c'est l'homme, le fyphique. Expulsé par le malade avec les déjections, il apparait dans le monde extérieur, se fixe sur les aliments ou les objets usuels et, de plusieurs facons, pénètre dans l'orga- nisme, le plus souvent dans l'intestin de l’homme. C’est sa grande résistance qui lui permet de réali- ser les différents modes d'infection et de conlami- nation que nous allons étudier dans un instant. « Ce qui domine l’étiologie de la fièvre typhoïde, écrit à ce sujet le Professeur Chantemesse, ce sont les propriétés biologiques du bacille d'Eberth, sa résistance à la dessiccation, au froid, à la chaleur, l'exiguïté de ses besoins, sa faculté de supporter la présence et le défaut d'oxygène. Au sortir du corps de l'homme, que le virus se mêle à des objets servant ou non à l'alimentation, à l'air, aux poussières, aux fumiers, au sol, à la vase des A l'appui de cette opinion, on invoque: 1° Rev. d'Hyg., 190, n° 2, p. 125; 30 E. Lesxé et L. Dreyrus : La Clinique, 1910, nos 5 et6: 4° P. REMLINGER : Hyq. gén. et appliq., 1909, n° 4, p. 353; 50 E. BerTareLLI : Centralb. f. Bakteriol., 1910, vol. LILI, n° 5, p. 486; 60 F. Scaweix- BURG Wien. Klin. Wochensch., 1910, n° 9, p. 316: 70 G.-H. LEMOINE : Soc. Méd. publique, in Bullet. Méd.. 1910, n° 47, p. 200: 80 P. REMLINGER : Comp. rend. Soc. de Biol., 1910, n° 8, p. 360; 9° Hexry-Tnierry : //vq. géncr. et appliq., 1910, n° 1, p. 1. 286 D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE fleuves, à l'eau, ete., il y conserve sa vitalité ; peut- être même y augmente-t-il sa puissance pendant un temps variable. » De nombreux faits d'expérimentation et d'obser- vation précise démontrenteffectivement cette résis- tance du bacille typhique. Grancher et Deschamps, ayant ensemencé des bacilles tvphiques sur un terrain d'épandage, les ont retrouvés vivants et virulents au bout de cinq mois, à 50 centimètres de profondeur. Sur des matières fécales provenant d'individus bien portants, Uffelmann a vu les cul- tures typhiques rester vivantes pendant quatre mois. Prudden a constaté que la glace infectée de bacilles d'Eberth, et maintenue pendant trois mois à une tempéralure au-dessous de 0°, contenait encore, au bout de ce temps, des milliers de germes virulents. En parlant des porteurs chroniques de bacilles, nous verrons qu'il est des cas où le bacille reste vivant et virulent dans l'organisme pendant des mois et des ännées. Voici, en attendant, dans ordre d'idées, deux faits parüieculièrement typiques : Le premier de ces faits, observé par Huggenberg, concerne une famille dans laquelle il y a eu, dans l'espace de trente ans, treize cas de fièvre typhoïde ; il a été démontré que la cause de ces in- fections répétées a été la maitresse de la maison, qui, trente ans auparavant, avait eu une fièvre typhoïde et dont les déjections, examinées au moment de l'enquête, contenaient encore des bacilles typhi- ques ; ceux-ci sont donc restés pendant trente ans dans l'organisme de cette femme. Le second fait, d'ordre expérimental, a été signalé par Dorr, qui, après avoir inoculé des bacilles typhiques à un lapin, les a retrouvés, vivants et virulents, cent vingt jours après l'inoculation, dans la vésicule biliaire de cet animal. cet S 2. — La conception actuelle de la pathogénie de la fièvre typhoïde. Il y a seulement quatre ou cinq ans, on admet- tait — et c'était la conception classique — que le bacille typhique pénétrait, les aliments souillés, dans l'intestin, qu'il s'y établissait, y pro- avec liférait, y fabriquait des toxines et, dans certains cas, émigrait de l'intestin pour envahir tel ou tel organe. Les nouvelles méthodes d'examen du sang et les perfectionnements de la technique hématolo- gique ont complètement modifié cette conception, si bien gr'aujourd'hui la lièvre typhoïde est consi- dérée comme une des formes de l'infection du sang par le bacille {yphique. Les recherches hématologiques ont, en effet, éta- bli que, plusieurs jours avant que la fièvre typhoïde prenne l'aspect clinique qu'on lui assigne, on peut déjà trouver des bacilles typhiques dans le sang. En tout cas dès les premiers jours, quand les symp- tômes du côté de l'intestin sont encore peu mar- qués, quand la séro-réaction de Widal est encore souvent négative, il existe déjà des bacilles typhi- ques dans le sang. Dans le travail qu'il vient de faire paraitre et dans lequel, à côté des observations personnelles, sont réunies les statistiques de la plupart des auteurs, Schweinburg évalue à 90-97 0}, des cas la fréquence avec laquelle le bacille tvphique existe dans le sang des malades dans le courant de la première semaine de leur maladie. L'infection du sang par le bacille d'Eberth est done la règle et la première élape dans la fièvre typhoïde clas- sique. Le second fait, non moins intéressant, mis hors de doute par les recherches hématologiques, c'est que l'infection du sang par le bacille d'Eberth n'aboutit pas forcément à créer la lièvre typhoïde. Un certain nombre d'états morbides, comme c'est aujourd'hui parfaitement démontré pour l'embar- ras gastrique et les différentes formes d’ictères, sont souvent les seules manifestalions cliniques de la pénétration du bacille d'Eberlh dans le sang. Ces faits sont aujourd'hui mis hors de doute par un grand nombre de recherches, par celles toutes récentes de Lemoine, qui, ayant systématiquement pratiqué pendant trois ans, dans son service du Val-de-Grâce, l'hémoculture de tous les embarras gastriques et ictères, a trouvé le bacille d'Eberth dans le sang de 40 °/, de ses malades. La facon dont le bacille d'Eberth pénètre dans le sang n'est pas encore élucidée d'une manière com- plète. Le rôle prépondérant que l’eau et les aliments souillés jouent dans la genèse de la fièvre typhoïde doit faire admettre que, le plus souvent, le bacille typhique, comme le font bon nombre d'autres bacilles, ne pénètre dans le sang qu'après avoir traversé la muqueuse intestinale. Mais il est pos- sible que cette voie d'entrée soit un autre point du tractus digestif, les amygdales par exemple, ou mème les voies respiratoires, lorsque le bacille typhique est véhiculé, comme nous le verrons dans un instant, par des poussières. Que devient le bacille une fois qu'il a pénétré dans le sang ? L'organisme met en avant ses « défenses »: propriétés bactéricides et bactérioly- tiques de ses humeurs, phagocytose, et cherche à s'en débarrasser, à l’éliminer par ses émonctoires. La fréquence de la bactériurie éberthienne dans la fièvre typhoïde montre la part des reins. Mais la grande voie d'élimination des bacilles typhiques, c'est la bile. Ge fait, qui explique le rôle épidémio- logique de la bile des typhiques, est complètement démontré par l'expérimentation el la clinique. L'expérimentation à notamment montré que, chaque fois qu'on injecte des bacilles typhiques à D' R. ROMME -- L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIEVRE TYPHOIDE 287 un animal, ceux-ci se retrouvent dans sa vésicule biliaire. D'un autre côté, les stalistiques relatives à la fréquence des ictères à bacilles d'Eberth, celle de Lemoine, citée plus haut, montrent que les choses ne se passent pas autrement. Cette élimina- lion par la bile peut ne pas avoir de suites patho- logiques ; mation des voies biliaires et de la vésicule, angio- cholile el cholécystite, si les bacilles se mettent à proliférer dans la bile. Or, la bile constitue préci- sément un excellent milieu de culture pour les bacilles d'Eberth, au point qu'elle figure dans tous milieux nutritifs sur lesquels on cultive le bacille typhique. La clinique, enfin, apporte son contingent defaits relatifs à cette élimination de bacilles typhiques par là bile. On possède aujourd'hui un certain nombre d'observations (Dauriac, Blumenthal, Pratt) concernant des individus n'ayant jamais eu la fièvre typhoïde et qui entrent à l'hôpital pour une inflammation calculeuse ou purulente de la vésicule biliaire ; on les opère et, dans le pus de la vésicule biliaire enlevée, on trouve des bacilles tvphiques presque à l’état de culture pure. Plus nombreuses encore sont ces observations (Gilbert et Gérode, Dauriac, Faitout et Ramond, Pratt, Miller, Droba, Hunner) chez d'anciens typhiques, c'est-à-dire chez des individus chez lesquels, après une atteinte de fièvre typhoïde remontant à cinq, à dix, à dix-sept et même à vingt-neuf ans comme dans le cas de Hunner, on trouve, à l'opération, une vésicule biliaire remplie de pus ou de calculs et contenant des bacilles typhiques virulents. Disons enfin que l'examen bactériologique de la bile chez des individus ayant succombé à la fièvre typhoïde (Forster et Kayser) a montré l’excessive fréquence des bacilles typhiques dans la vésicule biliaire. Ces faits montrent donc, comme nous l'avons déjà dit, que l'infection du sang par le bacille typhique n'aboutit pas forcément à provoquer la fièvre typhoïde classique. Celle-ci ne se déclare que lorsque le bacille typhique, après avoir pénétré dans le sang et s'être accumulé dans la vésicule biliaire, finit par « se condenser surtout dans le système lymphatique, la rate, les plaques de Peyer et la moelle osseuse » (Vincent). C'est cette fièvre typhoïde classique que nous étudierons maintenant au point de vue de son étiologie et de sa prophylaxie. mais elle peut aussi amener une inflam- II. — L'ÉTIOLOGIE ET L'ÉPIDÉMIOLOGIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE. Dans la genèse et la propagation de la fièvre typhoïde, nous étudierons successivement le rôle de l’eau et des aliments infectés, celui des bains, des poussières bacillifères et des mouches, en insistant particulièrement sur les modes de conta minalion peu connus. $ 1. — Rôle épidémiologique de l’eau souillée. Il est dé duit de la façon dont la morbidité Lyphique est Il est aujourd'hui amplement connu. influencée dans les collectivités et les aggloméra- tions quand on leur fournit une eau potable, à l'abri de la contaminalion qui se fait le plus sou- vent, comme on le sait, par les déjections de typhiques venant polluer les sources, directement où par filtration à calcaire. On relatives citerons cependant la statistique globale présentée travers un terrain fissuré ou connait également les statistiques à celte influence de l'eau potable. Nous par Delorme et qui a l'avantage de résumer en quelque sorte tous ces Divisée en quatre périodes quinquennales, de 1888 à 1907, elle montre la diminution progressive de la morbidité typhoïdique dans l'armée à mesure que les casernes étaient, en nombre de plus en plus grand, pourvues d'une eau potable de bonne qualité, En consultant ce tableau, on voit, en effet, que la morbidité typhoïdique à été : faits. 1° Pour la 1re période (1888-1592) : ANTÉRIEUR CARE Re U EL En Algérie, Tunisie . . ions 0 ML, 2 Pour la 2€ période (1892- 1897) AMIFOTÉTIEUT RE ME M RENE EE. En Algérie, Tunisie . . RS Nu 25.0 3° Pour la 3e période (1897- 1903) : A l'intérieur . Ts rte EG 0) gS En Algérie, Tunisie . . Mr 28 4o Pour la 4e période (1903- 1907) : A l'intérieur . . . Re Ce C0 1 44010) En Algérie, Tunisie. NN te. 01400 Ainsi donc, dans l’espace de vingt ans, l'amélio- ration progressive et de plus en plus étendue du régime des eaux de boisson a diminué de moitié la fréquence de la fièvre typhoïde dans l’armée. S 2. — Rôle épidémiologique des bains dans l'eau souillée (bains de rivière, de piscine, de baignoire). Ce que l’on ne sait pas — et nous devons aux médecins militaires la connaissance de ces faits — c'est que Ze bacille typhique peut pénétrer dans notre organisme non seulement avec l'eau potable, mais encore à la suite de bains: bains de rivière, bains de piscine, pris dans une eau souillée. C'est l'étude de quelques épidémies régimentaires à allures bizarres qui a permis de mettre en lumière cette source d'infection typhique. Voici, brièvement résumés, quelques-uns des faits qui s’y rapportent : En 1896, à Castelnaudary, au 16° de ligne, 34 cas de fièvre typhoïde sont observés à la suite de bains 288 pris dans le canal du Midi, au voisinage d’un grand bassin qui recoit les eaux des lavoirs et les égouts de la ville; les réservistes convoqués dans cette même période ne prirent pas de bains et n’eurent aucun cas de fièvre typhoïde (Daussat). A Reims, pendant l'été de 1908, le 22° dragons, dont les hommes prenaient des bains de rivière dans la Vesle, eurent 3 cas de fièvre typhoïde, tandis que le 26°, placé dans des conditions identiques, mais qui ne prenait pas de bains de rivière, demeura indemne (Tranchant). Évidemment dans ces cas» ainsi que dans d’autres qui ont été rapportés, l'eau était à tel point souillée que les hommes n'en ont sûrement pas bu. Comment l'infection typhique a-t-elle donc pu se réaliser? En analysant et en interprétant ces épidémies, Remlinger répond à cette question dans les lignes suivantes : « La pathogénie des accidents n’est certainement pas univoque. La déglutition d'eau, soit volontaire, soit accidentelle, réclame probablement quelques cas; de même, la souillure directe des lèvres et des narines au cours des plongées, par exemple. Plus souvent peut-être, il convient d’accuser les mains qui, immergées dans l’eau malpropre, se chargent de microbes pathogènes dont elles souilleront en- suite les aliments, le pain notamment. Les microbes déposés au cours du bain sur le reste des tégu- ments peuvent aussi n'être pas sans danger. Il n’est pas irréalisable que, par l'intermédiaire des bains, ils ne viennent au contact des aliments. » Cette conception s'esttrouvée, du reste, parfaitement réalisée, presque avec la rigueur d’une expérience, dans une épidémie étudiée par Rudler. Cette épidémie, qui a fourni 18 cas dans un régiment de dragons caserné à Belfort, est sur- venue à la suite de la baignade des chevaux dans une rivière, la Savoureuse, coulant dans une vallée infectée de fièvre typhoïde. Les cavaliers s'y ren- daient, munis de la musette contenant une épous- selte, une brosse et généralement un morceau de pain. À la sortie de la rivière, les chevaux étaient sommairement pansés, lavés, massés, et les objets de pansage, ainsi que la brosse et l'époussette, allaient rejoindre, dans la musette, le morceau de pain. Celui-ci, souillé par l'eau de la Savoureuse, était mangé soit au moment du pansage, soit peu de temps après, soit au retour à la caserne. On conçoit que ce mode d'infection peut encore ètre réalisé par des bains pris dans une piscine ou une baignoire, si l'eau qui y arrive ou qu'on y verse est contaminée par le bacille d'Éberth. $ 3. — Rôle épidémiologique des aliments infectés. Cette infection peut se faire par l’eau souillée, par les déjections et poussières bacillifères. D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE a) Le meilleur exemple de l'infection des ali- ments par l'eau souillée est fourni par les petites épidémies consécutives à l'ingestion des uitres. Ces épidémies, aujourd'hui bien connues, sont dues à ce que, dans certaines régions, les buitres sont élevées dans des parcs à proximité des bou- ches d’égouts, ou encore à ce que les huitres sont arrosées, par les marchands en détail, avec une eau souillée. On connaît également les épidémies provoquées par le lait infecté. Nous verrons plus loin que, dans les épidémies provoquées par le lait, le rôle infec- tant appartient, dans l'énorme majorité des cas, aux porteurs chroniques de bacilles. On possède cependant un certain nombre de faits où l'épidémie a été provoquée par l’eau souillée, versée directe- ment dans le lait ou ayant servi au lavage des bidons et des flacons. C’est ainsi que dans une de ces épidémies, qui avait frappé les clients d’une laiterie, il a été établi par l'enquête et par les aveux du laitier que son lait était régulièrement mélangé avec l’eau de lavage des seaux. b) L'épandage direct des matières fécales hu- maines sur le sol destiné aux cultures maraï- chères ou autres est fréquemment l’occasion de l'infection directe des aliments par les déjections typhiques. C’est ainsi que, dans 6 cas de fièvre typhoïde, observés en 1906 à Lens, l’origine de cette épidémie a pu être attribuée à l’ingestion de salade crue. Cette salade avait été arrosée avec des liquides provenant des cabinets d'aisances, dans lesquels avaient été jetées les matières fécales d'un enfant atteint de fièvre typhoïde (Vincent). Il serait facile de continuer ces exemples, dont la multipli- cation tient précisément à l'extension progressive de la pratique de l’'épandage. On comprend donc comment cette contamination des légumes, des fruits, des salades, cresson, tomates, radis, con- combres, fraises, etc., consommés à l’état cru, est capable de semer la fièvre typhoïde parmi les populations urbaines. c) La facon dont les aliments peuvent ètre infectés par des poussières bacillifères est facile à comprendre. A la campagne, notamment, où les water-closels n'existent pour ainsi dire pas, les villageois vident leur intestin n'importe où, derrière les maisons, dans les cours, dans les champs et les prés, le long des routes. Desséchées où entrainées avec la pluie, les déjections se mêlent à la terre et, sous forme de poussière ou de boue attachée aux vêtements et aux souliers, pénètrent à l'intérieur des maisons. Que ces déjections proviennent d'un typhique qui nest pas encore alité ou qui ne le sera jamais en raison de la forme fruste de sa fièvre typhoïde, et la pous- sière bacillifère se retrouvera dans les habitations D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE où elle ne manquera pas de se déposer sur les aliments ou sur la vaisselle, et de pénétrer, avec les bacilles typhiques, dans l'intestin des habitants. Cette étiologie de la fièvre typhoïde a été nettement établie par plusieurs enquêtes. C'est ainsi qu’en 1895, une grave épidémie de fièvre Lyphoïde s'était déclarée dans la brigade de dragons de Reims, à la suite de manœuvres sur des terrains d'épandage. Une autre épidémie, au camp de Châlons, n'a pris fin qu'après désinfection des effets d'équipement. $ 4 — Rôle épidémiologique des mouches. Pour comprendre le rôle des mouches, il suffit de se figurer, dans une chambre remplie de mou- ches, un typhique dont le linge de corps, les draps et la literie sont forcément souillés de matières virulentes. En reposant sur les linges souillés et le vase de nuit du typhique, les mouches se chargent de matière virulente qu’elles transportent dans une autre pièce ou au loin, sur leurs pattes, sur leurs ailes, sur leur trompe, dans leur intestin. Elles peuvent s'en charger encore en se posant sur les déjections (yphiques jetées dans une cour où un champ, et reparaitre dans une habitation. En se posant ensuite sur le pain ou le lait ou le sucre ou le fromage ou les viandes conservées, comme le jambon et le saucisson, sur les fruits, elles infec- tent ces aliments et font pénétrer les bacilles typhi- ques dans l'intestin de l’homme. Cette conception relative au rôle des mouches dans l’étiologie de la fièvre typhoïde est restée long- temps purement théorique. Ajoutons que les faits qu'on peut invoquer aujourd'hui en sa faveur sont encore peu nombreux : Celli, le premier, a mis des mouches sous une cloche à côté de cultures typhiques. En examinant ensuite les déjections de ces mouches, il y trouva des bacilles typhiques virulents. Dans une série d'expériences analogues, Fischer à constaté que les mouches qui se trouvent en contact avec des cultures ou des matières typhiques gardent les bacilles, virulents et vivants, pendant cinq jours sur leurs pattes et leur trompe, pendant neuf jours dans leur intestin. Hamilton, ayant capturé 18 mouches dans la chambre d'un typhique, en a trouvé 5 sur lesquelles étaient fixés des bacilles typhiques. Tout récemment, Bertarelli a contrôlé cette expérience d'Hamilton, et, sur 155 mouches cueillies sur les murs et dans la cour d’une ferme où il y avait quatre typhiques, il a trouvé, par voie de cultures, 8 insectes qui avaient sûrement des bacilles typhiques sur leurs pattes et leur trompe. Le diagnostic bactériologique est resté douteux pour les cultures faites avec les pattes et les têtes de 106 autres mouches capturées dans cette ferme, Ces faits d'expérience montrent donc que les 289 mouches peuvent fort bien transporter le bacille d'Eberth et propager ainsi la fièvre typhoïde. Cepen- dant, les difficultés sans nombre que rencontrent les enquêtes épidémiologiques font que, jusqu'à présent, il n’a pas été possible d'attribuer aux mouches, d'une facon certaine et indiscutable, un rôle effectif dans la genèse d’une endémie ou d'une épidémie typhique. $ 5. — Propagation de la fièvre typhoïde par le contact. Le rôle du contact direct avec un typhique, dans la propagation de la fièvre typhoïde, était difficile- ment accepté lant que l’étiologie de l'infection éber- thienne paraissait ressortir presque exclusivement à l’eau potable. Aujourd'hui, on possède un très grand nombre d'observations de fièvre typhoïde chez les personnes de l'entourage d'un typhique ou chez les personnes soignant un typhique. Le méca- nisme de l'infection chez ces personnes est facile à saisir. En touchant le typhique, en le changeant de place, en le transportant, ces personnes ont leurs mains souillées par les matières virulentes du typhique, matières qui se trouvent sur son corps, sur son linge. Si, après ce contact infectant, elles n'ont pas soin de désinfecter leurs mains, les bacilles qui s'y trouvent peuvent se retrouver sur les ali- ments, sur la vaisselle, sur le verre dans lequel on boira. III. — LES PORTEURS CHRONIQUES DE BACILLES ET LEUR RÔLE ÉPIDÉMIOLOGIQUE. Nous avons donné, dès le début de notre article, la définition des porteurs chroniques de bacilles typhiques : convalescents de fièvre typhoïde, ou anciens typhiques, ou individus ayant été seule- ment en contact avec des typhiques, qui continuent à éliminer pendant des semaines, des mois et des années, avec leurs matières fécales et leur liquide urinaire, des bacilles typhiques vivants. Pour apprécier le rôle de ces porteurs chroniques dans l’épidémiologie de la fièvre typhoïde, nous envisagerons successivement les conditions et la fréquence de cette élimination, ainsi que la viru- lence des bacilles typhiques ainsi éliminés. $ 1. — Fréquence de l'élimination prolongée et propagation des porteurs chroniques de bacilles. Nous avons montré, en parlant de la pathogénie de la fièvre typhoïde, que, lorsque le bacille typhique passe dans le sang après avoir pénétré de quelque facon dans l'organisme, il est éliminé par le liquide urinaire et la bile. Quelle que soit la forme clinique que revêtira cette infection, on doit donc trouver et on trouve effectivement, avec une fréquence 290 D' R. ROMME L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏIDE variable, des bacilles dans les matières fécales et l'urine. En ce qui concerne plus particulièrement les typhiques classiques, chez lesquels les bacilles d'Eberth finissent par s'établir dans l'intestin même, on les décèle régulièrement, dans les matières fécales, dès les premiers jours de la maladie, et avec une fréquence de 20 °/, (Vincent) dans l'urine. Cette élimination de bacilles avec les matières fécales et l'urine persiste pendant trois à quatre semaines dans les caslégers, un peu plus longtemps dans les cas graves. Il est cependant des cas où cette élimination avec les matières fécales et l’urine se prolonge pendant la convalescence et persiste plus ou moins long- temps après la guérison. La durée de cette persis- tance, autrement dit la proportion des porteurs chroniques de bacilles, est diversement appréciée par les auteurs qui se sont occupés de cette ques- tion (Drigalski, Matther et Neumann, Simon et Dennemark, Schneider, etc., etc.). Il serait trop long de citer ici les statistiques de chacun de ces auteurs. Mais nous pouvons prendre la statis- tique globale de Frôsch, qui porte sur un total de 6.708 typhiques dont les matières fécales étaient examinées à partir de la dixième semaine après le début de leur fièvre typhoïde. Sur ce nombre, on en trouva 310, soit 4,62 °/,, chez lesquels la persis- tance des bacilles a duré : De 10 semaines à 3 mois . 144 cas, soit 2,15 0h 3 mois à l an 64 cas 1 an à 3 ans. 81 — 3 ans à 3 ans 1/2. 15 — 166 cas, soit 2,47 °)o Trois ans et demi ne constituent pas cependant le terme ultime de cette élimination, et aujourd’hui on connait un certain nombre de cas où cette élimi- nation à persisté pendant dix, quinze, vingt ans et même davantage. Mais ces cas, que nous retrouve- rons à l’occasion du rôle épidémiologique des por- teurs chroniques de bacilles, sont exceptionnels. D'une facon générale, on peut évaluer à près de 5°/, la proportion des porteurs chroniques, c'est-à- dire la proportion des typhiques qui, après leur guérison, continueront à éliminer pendant des semaines et des mois. Ajoutons que cette élimi- nation de bacilles est tantôt continue, tantôt inter- mittente, et que le nombre de bacilles ainsi éliminés varie d'un cas à l’autre. Dans un cas, cité par Vail- lard, le porteur chronique éliminait de 30 à 190 mil- lions de bacilles par gramme de matières fécales. Nous avons dit que, parmi les porteurs chroniques de bacilles typhiques, on trouve aussi des individus n'ayant jamais eu la fièvre typhoïde. De ceux-ci, les uns ont été en contact avec des typhiques, d'autres ont peut-être eu un ictère ou un embarras gastrique comme seule manifestation clinique de l'infection de leur organisme par le bacille typhique, lequel bacille persiste dans leur vésicule biliaire et parfois dans leur vessie. En tout cas, le nombre de ces porteurs chroniques de bacilles typhiques, n'ayant jamais eu la fièvre typhoïde, n’est pas très élevé, puisque, sur 1.700 sujets bien portants qui se sont trouvés en contact avec des typhiques, Klin- ger n'en à trouvé que 11 ayant des bacilles typhi- ques dans leurs selles. Il nous reste à ajouter que ces porteurs chro- niques de bacilles, anciens malades ou non, ne s’observent pas que dans la fièvre typhoïde. Des faits analogues, sinon identiques, sont connus depuis longtemps en ce qui concerne la diphtérie (persis- tance des bacilles diphtériques dans la gorge), depuis quelque temps en ce qui concerne le cho- léra, la dysenterie. La présence des pneumocoques dans la salive, celle des méningocoques dans le mueus nasal, chez des individus n'ayant jamais eu de pneumonie ou de méningite, sont des faits de connaissance vulgaire. Dans tous ces cas, il s’agit de porteurs chroniques chez lesquels les bacilles continuent à végéter dans la gorge (diphtérie), dans la cavité buccale (pneumocoque), dans le nez (méningocoque), dans l'intestin (vibrion cholé- rique, b. dysentérique), dans la vésicule biliaire (b. typhique). S 2. — Rôle épidémiologique des porteurs chroniques de bacilles typhiques. Point n’est besoin d'insister sur ce fait que tous les modes d'infection et de contamination que nous avons passés en revue dans le chapitre précédent peuvent être réalisés par les porteurs chroniques de bacilles typhiques, d'autant plus aisément que n'étant pas alités, ne se croyant pas et n'étant pas malades, ils mènent la vie de tout le monde. Ils réalisent effectivement ces modes d'infection, en raison de ce fait que les bacilles qu'ils éliminent gardent souvent entière leur virulence. La virulence de ces bacilles a été prouvée de la facon classique par des expériences d'inoculation à des animaux. Mais elle apparaît encore mieux à la lumière des enquêtes faites à l'occasion de certaines épidémies et endémies de fièvre typhoïde. Ces faits sont aujourd'hui très nombreux et semblent calqués les uns sur les autres. Dans un asile, un hospice ou un hôpital (Klinger, Nicter et Liefmann, Ledingham, Hamond, Scheler), dans une caserne (Pollak), dans une ferme ou un domaine agricole 'Scheller, Bauman, Forster), parmi les clients d’une laiterie (Kayser, Kossel, L. Mar- tin et Vaudremer, Scheller) ou d'une boulangerie (Kayser), la fièvre typhoïde apparaît inopinément et revêt la forme endémique ou épidémique. L'enquête montre alors que, dans la collectivité atteinte ou parmi les personnes avec lesquelles elle est en con- D: R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOIDE 291 tact, existent un ou plusieurs porteurs chroniques de bacilles. On les isole, et l'épidémie ou l'endémie ne tardent pas à s'éteindre. Il serait trop long de passer en revue chacun de ces faits. Nous ne citerons que les plus typiques. Dans une ville allemande, jusqu'alors indemne, la fièvre typhoïde apparait et frappe un certain nombre de personnes. L’enquêle montra que tous ces typhiques se fournissaient de lait provenant d'une ferme du voisinage. Les conditions de salu- brité dans cette ferme ne laissaient rien à désirer. Mais, parmi le personnel, on découvrit un domes- lique porteur chronique de bacilles typhiques, «u'on occupait parfois pour la traite des vaches. I] fut isolé, et l'épidémie cessa. Elle reparut au bout de quelque temps, et une nouvelle enquête montra que le domestique bacillifère avait de nouveau été affecté à la traite des vaches (Kossel). Dans une autre ville allemande, l'attention des autorités sanitaires se trouve attirée sur ce fait très singulier que les garcons et les employés d’une boulangerie contractent la fièvre typhoïde peu de temps après qu'ils y sont occupés. L'enquête fait découvrir que la patronne de cette boulangerie, qui a eu la fièvre typhoïde dix ans auparavant, est restée porteuse chronique de bacilles et continue à les éliminer avec ses matières fécales (Kayser). — Dans un asile d’aliénés, en Angleterre, la fièvre typhoïde s'implante à l’état endémique; on procède à l'examen des matières fécales, et parmi les pen- sionnaires sains On trouve trois porteurs chro- niques de bacilles (Ledingham). Particulièrement intéressantes à ce point de vue sont les endémies familiales de fièvre typhoïde. Nous avons cilé tout au début l'observation de Hug- genberg, où, dans l’espace de trente ans, on note dans une famille treize cas de fièvre typhoïde du fait de la maîtresse de la maison, restée porteuse de bacilles après une fièvre typhoïde. Les observa- tions de ce genre (Soper, Irwin et Houston, Scheller) sont aujourd’hui en grand nombre. Non moins nombreuses sont les observations où ces endémies familiales sont entretenues par des domestiques, principalement par les cuisinières. C'est ainsi que, dans l'observation de Soper, une cuisinière, qui, dans l'espace de dix ans, a changé 8 fois de place, a pro- voqué, en tant que porteuse chronique de bacilles, 27 cas de fièvre typhoïde avec 2 morts dans sept familles. $ 3. — Contagiosité numérique et modes de contamination. Dans toutes les enquêtes provoquées par des épi- démies ayant amené la découverte du porteur chro- nique, on a essayé de déterminer la part qui leur revenait. Les chiffres que donnent à ce sujet les auteurs (Früsch, Rosenau, Forster, Kayser, Schu- macher) sont très variables et oscillent entre 5 et 14 °/,, c'est-à-dire que, sur 100 typhiques, le nombre de ceux qui ont été infectés par des porteurs chro- niques de bacilles serait compris entre 5 el 44. L'analyse de ces statistiques par Sacquépée aboutit cependant à cette conclusion que la fréquence de ces contagions, c'est-à-dire la « contagiosité numé- rique » des porteurs chroniques de bacilles, est comprise entre 8 et 12°/,. Il n’est point nécessaire d'ajouter que la conta- giosité des porteurs chroniques de bacilles s'exerce par les mêmes modes que ceux des typhiques alités. Leurs matières fécales et leur urine bacillifères peuvent souiller directement ou indirectement l'eau potable; transformées en poussière bacillifère, elles peuvent pénétrer dans les logements, se déposer sur les aliments, la vaisselle, flotter dans l'air qu'on respire; les bacilles éliminés peuvent être trans- portés par des mouches; et la contamination par le contact est tout aussi possible que chez le typhique malade. On saisit non moins aisément la facon dont les cuisinières, éliminant chroniquement des bacilles, contaminent les personnes de leur entourage. Dans cette classe sociale et dans d’autres encore, l'habi- tude de se laver les mains chaque fois qu'on à vidé son intestin ou sa vessie n’est guère connue. Il est dès lors facile de reconstituer les étapes que le bacille parcourt avant d'arriver sur la vaisselle ou les aliments, quand il a quitté l'intestin ou la vessie de la cuisinière. Citons encore comme exemple pos- sible de cette contamination le cas signalé par Chantemesse : une marchande de fruits, ancienne typhique, qui avait repris son métier depuis un mois, et dont les matières fécales contenaient tou- jours des bacilles typhiques. «Combien de fois, écrit à ce sujet M. Chantemesse, cette brave revendeuse, dont le souci de propreté des mains était médiocre, a-t-elle eu occasion de déposer sur les fruits qu'elle vendait à ses clients quelques bacilles typhiques? » Il est enfin un mode de contamination sur lequel Remlinger a attiré tout dernièrement l'attention : c’est la contamination au cours de rapports sexuels avec une porteuse chronique de bacilles. «Il est permis de se demander, lit-on dans sa communica- tion à la Société de Biologie, si la grande fréquence de l'élimination du bacille typhique chez la femme possédant tous les attributs de la santé n'est pas susceptible de créer, au cours des rapports sexuels, de sérieux risques de contage. Il est inutile d’in- sister sur les différents modes de pénétration du bacille dans l'organisme : contamination directe au cours de certains entrainements passionnels, indirecte par l'intermédiaire des mains, d'objets de toilette, etc. On conçoit aussi que l'élimination du 292 D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE bacille typhique par les urines serait ici, le cas échéant, tout particulièrement dangereuse ». $ 4. — Porteurs de bacilles et autogénèse de la fièvre typhoïde. Deux mots seulement au sujet des rapports entre les porteurs chroniques de bacilles et la théorie de l'autogénèse de la fièvre typhoïde, théorie défendue par Kelsch, à l'Académie de Médecine, dans deux longues communications. Cette théorie, soutenue par Kelsch, admet notam- ment que le bacille typhique, à l'instar d'autres microbes, peut vivre à l'état de saprophyte dans l'organisme. Sous l'influence de certaines condi- tions d'encombrement, de fatigue, d'alimentation insuffisante ou défectueuse, de climat, sa virulence s'exalterait et il réaliserait alors la fièvre typhoïde. Ainsi s'expliquerait la genèse de certaines épi- démies ou endémies, dans lesquelles les conditions ordinaires et habituelles de contagion et de conta- mination n'interviennent pas. Les faits que Kelsch a cités à l'appui de cette théorie sont très suggestifs. Ils s'expliquent cepen- dant par l'hypothèse de l'existence, dans les collec- tivités éprouvées, de quelques porteurs chroniques de bacilles typhiques, anciens ictériques, anciens hépatiques ou gastropathes, dont les bacilles éli- minés s'implantent facilement dans l'organisme de leurs compagnons, organisme affaibli précisément et devenu moins résistant de par les conditions ci-dessus énumérées. IV. PROPHYLAXIE COLLECTIVE ET DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE. INDIVIDUELLE Les facteurs étiologiques que nous avons étudiés dans le chapitre précédent offrent un trait commun qu'il importe de souligner avant d'envisager la pro- phylaxie de la fièvre typhoïde. Qu'il s'agisse d'eau potable, d'huitres ou de lait souillés, qu'il s'agisse de bains dans une eau infectée, ou de poussières bacillifères, ou de mouches véhiculant des germes typhiques, ou d'infection par contact, dans tous ces cas c'est par les voies digestives que, dans l'énorme majorité des cas, le bacille d'Eberth pénètre dans l'organisme. On peut donc dire que la fièvre typhoïde est presque toujours d'origine alimentaire ou, pour généraliser encore davantage, d'origine digestive. La prophylaxie de la fièvre typhoïde consiste done, schématiquement, à protéger, avant tout, notre tube digestif contre la pénétration du bacille typhique par une des voies ci-dessus indiquées. S 1. — Prophylaxie individuelle. On sait en quoi elle consiste : 1. Stérilisation des aliments et de la vaisselle par la chaleur. — Ne boire que de l'eau bouillie et élendre cette mesure au lait, ne pas manger des huitres quand on n'est pas sûr de leur provenance, renoncer à certains fruits (fraises), aux salades crues qui proviennent de terrains d'épandage en attendant que celui-ci soit prohibé, avoir soin de laver ou de peler les fruits, toujours couverts de poussière qui peut être bacillifère, telles sont les mesures qui sont scrupuleusement suivies par toutes les personnes qui possèdent des notions élé- mentaires d'hygième. A ces mesures, il faut ajouter l'usage d'une eau bouillie pour les soins de la bouche, et celui de l'eau bouillante pour le lavage de la vaisselle, assieltes, verres, carafes, couteaux, fourcheltes, ete., le bacille typhique étant instantanément tué à 400° et, en cinq minules, à 65°. Au cours d'un récent voyage en Chine, pays d'une saleté proverbiale, Lannelongue a été frappé de la rareté de la fièvre typhoïde, et cette rareté, confirmée par les méde- cins qu'il a interrogés, tiendrait, à son avis, à ce que le Chinois ne boit que de l'eau bouillie (infusion de thé) et a soin de laver le bol dans lequel il mange à l'eau bouillante. « Aussitôt qu'il a achevé de prendre sa nourriture dans son bol, qui est d'un usage presque exclusif pour recevoir les aliments, le Chinois, coolie, ouvrier, artisan, etc., plonge son récipient plusieurs fois dans l’eau bouillante et ne l’essuie pas. » 2. Lavage des mains. — Une autre mesure de simple propreté, et aussi d'une grande valeur pro- phylactique, qui mériterait de s'implanter dans nos habitudes, ce serait de ne jamais toucher à un aliment, de ne jamais se mettre à table avant de s'être lavé les mains. Il suffit de se rapporter à ce que nous avons dit plus haut au sujet du rôle étio- logique des poussières bacillifères, des bains dans l'eau souillée, de l'infection par contact, pour com- prendre jusqu'à quel point et dans quelle mesure ces facteurs étiologiques seraient neutralisés par le lavage des mains au savon avant les repas. Ce lavage devrait encore être de règle après chaque évacuation de la vessie et après chaque exonération de l'intestin. Si, dans les classes culti- vées, cette habitude est régulièrement suivie, elle est absolument inconnue dans les milieux ouvriers. Or, nous avons vu de quelle facon les porteurs de bacilles occupés dans les laiteries ou préposés à la confection des aliments (cuisiniers et cuisinières) sèment les bacilles qui peuplent leurs intestins. Nul doute que, si les porteurs de bacilles avaient l'habitude de se laver les mains chaque fois qu'ils vident leur vessie ou vont aux cabinets, ils conta- mineraient moins souvent les personnes de leur entourage. Dans cet ordre d'idées, on à eu raison D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 293 d'insister, au cours de la discussion à l'Académie de Médecine, sur Putilité qu'il y aurait d'apprendre à l'enfant à aller proprement aux cabinets: « En habituant, dès son âge tendre, l'enfant à aller proprement aux cabinets et en lui inculquant quels dangers au point de vue de la santé la malpropreté peut faire courir, on pourrait faire quelque chose d'utile et pratique » (Benjamin). 3. Lutte contre les mouches. — Elle est du do- maine de la prophylaxie individuelle, car il ne sau- rait être question de l’organiser à la facon dont est conduite la lutte contre les moustiques et la mouche tsé-tsé. Les moyens bien connus de là destruction des mouches seront donc utilisés dans chaque logement. Peut-être serait-il indiqué de les imposer dans les industries alimentaires (épiceries, charcuteries, laiteries, ete., ete.). $ 2. — Prophylaxie collective. Si chaque typhique pouvait être isolé dès le début de sa maladie, et si ses matières fécales ainsi que son urine pouvaient être désinfectées avant «d’être transportées au dehors, la question de la prophylaxie collective serait radicalement résolue. Mais il suffit de se figurer une ferme à la cam- pagne ou, à la ville, un logement ouvrier pour se dire que nous n'en sommes pas encore là. Même la désinfection des linges et des objets souillés par le typhique est, à l'heure actuelle, encore chose impossible dans l'énorme majorité des cas, faute d'une organisation convenable, et c’est là l’excuse des médecins qui, pour plusieurs autres raisons, ne font pas la déclaration qu'exige la loi. On a préconisé, à l'Académie de Médecine, en tant que mesure de prophylaxie, l'éducation hygié- nique des populations, un enseignement sommaire sous forme de conférences à l’école ou à la mairie, par des médecins qui signaleraient les modes de transmission de la fièvre typhoïde (et d'autres maladies contagieuses), le danger des matières fécales et celui de l’urine, celui des mains souillées par les excreta, celui de l’épandage, des salades crues, elc. Des notices contenant cet enseigne- ment seraient insérées dans le livret de mariage, les livrets d'ouvriers, ete. Mais cette éducation hygié- nique est une œuvre de longue haleine, et, pour le moment du moins, elle n'intervient qu'en seconde ligne dans la prophylaxie de la fièvre typhoïde. 1. Surveillance de l'eau potable. — On sera peut- être étonné d'apprendre qu’elle est encore presque entièrement à créer. « Sauf dans l’armée, où toutes les eaux de boisson sont soumises à l'analyse périodique et sont aussitôt interdites dès la con- statation de leur insalubrité, 11 n'est exercé une surveillance bactériologique que sur un cerlain nombre des eaux de boisson destinées à l’alimen- lation des villes. Dans les campagnes, l'expertise pre que On saisit toute l’impor- bactériologique n'est, on peut le dire, jamais faite » (Vincent). tance de cette lacure. Et, pour montrer ce que celte surveillance de l’eau potable devrait être, on nous permettra d'esquisser rapidement les bases sur lesquelles elle a été organisée, pour la Ville de Paris, par Roux et Duclaux. Dès qu'un cas de fièvre typhoïde est signalé sur le territoire des bassins de l’Avre, de la Dhuys, du Loing, de la Vanne, il est tout de suite signalé, par le médecin traitant, au chef des Services techniques de la Ville de Paris. La prophylaxie qui suit cette déclaration est aussitôt organisée en rapport avec la forme de la maladie, la situation locale, la nature du sol, la distance des eaux superticielles ou sou- terraines, les conditions sociales, etc. Les excreta de toutes natures sont recueillis au moment de leur émission et désinfectés. S'il n'y a pas de fosses d'aisances, on apporte immédiatement sur place une tinette mobile dont le contenu, désin- fecté, est transporté ultérieurement en un point choisi d'après sa nature géologique, de manière qu'aucune infiltration dangereuse ne souille le sol. Les linges sont recueillis égalementet bouillis sans essaugeage préalable, ou désinfectés avant toute manipulation. Grâce aux laboratoires locaux que la Ville de Paris possède dans chacun des bassins de sources, on analyse journellement les eaux, on pratique le séro-diagnostic et l’'hémoculture des cas suspects, ainsi que l'examen bactériologique des matières fécales et de l'urine des malades et des convales- cents. Grâce au concours dévoué de soixante à soixante-dix médecins de ces régions, qui font partie de cette organisation, on est arrivé à étendre ces recherches aux personnes de l'entou- rage du malade ainsi qu'aux militaires convales- cents de fièvre typhoïde, venant en permission des corps d'armée de France ou d'Algérie. Disons tout de suite que c'est la réalisation du dépistage des porteurs de bacilles, sur lequel nous aurons à revenir dans un instant. 2. Périmètre de protection des puits; interdic- tion de l’'épandage. — Peu de villes possèdent une telle organisation. En attendant, il y a lieu d'amé- liorer dans la mesure du possible ce qui existe. Et, dans cet ordre d'idées, il faut s'occuper avant tout des puits qui fournissent l’eau potable aux popu- lations rurales. Voici ce qu'on lit à ce sujet, dans le Rapport de Vincent, qüi a provoqué la discussion à l'Académie de Médecine : « Dans le plus grand nombre des cas et dans la D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE population rurale ou celles des petites villes où ce | longues années, restait à l’état endémique en West- | o T mode d'alimentation est fréquent, ce sont les puits qu'il faut rendre responsables de la diffusion de ce germe pathogène. Chaque puits devrait avoir un périmètre de protection, largement assuré contre la pollution exogène, loin des fumiers, des latrines, des bergeries, des porcheries, des amas de ga- doues, ete. Il y aurait lieu également d'instituer une surveillance des puits communaux et d'exiger aussi pour eux un périmètre de protection. « Certaines grandes villes ont interdit, avec raison, l'usage de l’eau des puits. Pareille mesure devrait être étendue à toutes les villes, surtout à celles qui ne sont pas dotées du tout-à-l'égout, à cause de la souillure inévitable de la nappe d'eau souterraine par les fosses d'aisances. Il va de soi que, si l'analyse bactériologique décelait l'insalu- brité de l’eau, la seule solution qu'il conviendrait d'adopter serait la fermeture du puits. Elle s'im- pose, dès à présent, pour les puits des hôtels, res- laurants, auberges, cafés, bars, dont l’eau serait reconnue contaminée. » Cette mesure ne peut, naturellement, avoir d'effet que si l’on proserit en même temps l’épandage, du moins l'épandage fécal humain, sur les terrains maraichers où l’on cultive les légumes consommés crus (salades, radis, concombres, persil, cresson, tomates), ainsi que les fraises etles arbres fruitiers. Il existe à ce sujet un certain nombre d’arrêtés; mais ils sont restés lettre morte, tellement la pratique de l'épandage est ancrée dans les habitudes de nos populations rurales. 3. Laboraloïires de recherches épidémiologiques et bactériologiques ; casier sanitaire des communes et des maisons. — En résumant l'organisation de la surveillance de l’eau potable que recoit la Ville de Paris, nous avons vu le rôle que les laboratoires locaux jouent dans la prophylaxie de la fièvre typhoïde. On à donc eu raison de demander que des laboratoires analogues ou, plutôt, des Instituts bactériologiques fussent établis dans les régions particulièrement éprouvées par la fièvre typhoïde. Il est certain que ces Instituts rendraient les plus grands services dans les enquêtes et seraient seuls capables de neutraliser les facteurs étiologiques que ces enquêtes arriveraient à mettre en cause. Ils pourraient assurer l'examen bactériologique de l’eau, du lait, des légumes, examiner les selles et les matières fécales des malades et des convales- cents, pratiquer le séro-diagnostic et l'hémo-cul- ture dans les cas douteux; ils imprimeraient, en un mot, une direction scientifique à la lutte contre la fièvre typhoïde. Ces laboratoires ont été créés, en Allemagne, à de la fièvre l'occasion typhoïde qui, depuis de phalie. Leur utilité et les services qu'ils ont rendus découlent de ce fait que le nombre des typhiques, qui était de 3.48% en 1904, est tombé successive- ment à 2.552 en 1903, à 2.401 en 1906, à 4.979 en 1907. Ce sont ces Instituts encore qui pourraient établir le casier sanitaire des communes et des maisons, réclamés par Vincent. On sait que ce casier, qui existe dans quelques villes pour la tuberculose, a permis de constater l'existence des maisons à tuber- culose. On devine de quelle utilité serait la connais- sance des maisons ou des groupes de maisons ou des agglomérations éprouvés d’une facon endé- mique par la fièvre typhoïde. On découvrirait aisé- ment la source de cette infection permanente ou répétée, et rien ne serait plus facile que de la faire disparaitre. 4. Surveillance médicale du personnel des indus- tries alimentaires. — Cette surveillance, réclamée avec beaucoup de raison par Sacquépée, serait encore du ressort des Instituts bactériologiques dont il vient d’être question. Il est certain, comme le fait observer Sacquépée, que l'hygiène publique a le droit et le devoir de se préoccuper des aliments livrés au publie. Or, nous avons vu que le lait, pour ne parler que de cet ali- ment, est parfois infecté par le personnel lorsqu'un cas de fièvre typhoïdese déclare à la ferme ou quand, dans ce personnel, se trouve un convalescent de fièvre typhoïde. ; Il est certain que, dans les mêmes conditions, d'autres aliments, pain, gäteaux, beurre, sucre, chareuterie, etc., peuvent être infectés de la même facon. Serait-ce donc une atteinte à la liberté que de s'assurer de temps en temps de l'absence des bacilles typhiques dans les déjections et l'urine des personnes qui participent à la manipulation ou à la manutention des substances alimentaires? Sacquépée ne le pense pas et estime qu'on pourrait demander que nul patron ne puisse embaucher un ouvrier culinaire sans avoir au préalable fait constater, par les services compétents, que cet embauchage ne présente aucun danger éventuel pour les consommateurs. 5. Lutte contre les porteurs chroniques de bacilles. — Cette question, qui a suscité des discus- sions innombrables et fait couler des flots d'encre, se présente, en somme, d'une facon fort simple. Un convalescent de fièvre typhoïde ou untyphique guéri depuis quelque temps, ou encore une personne de l'entourage de ce malade ou de ce convalescent, présente une élimination continue de bacilles tvphiques. D' R. ROMME — L'ÉMOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOIDI 205 Tout ce que nous avons dit sur l'étiologie de la fièvre typhoïde et sur le rôle épidémiologique de ces porteurs de bacilles nous à montré que les bacilles qu'ils éliminent constituent un danger et contri- buent à la dissémination de la fièvre typhoïde. Des mesures doivent donc être prises contre ces por- teurs de bacilles. Mais quelles mesures? Avant de répondre à celle question, il importe d'établir deux points, concernant: l'un, le dépistage des porteurs de bacilles; le second, la fréquence avec laquelle on rencontre ces porteurs chroniques de bacilles. En ce quiconcerne le dépistage par l'examen des matières fécales chez les convalescents de fièvre typhoïde et chez les personnes de leur entourage, nous avons vu qu'il ne rencontre pas de difficultés insurmontables, même dans la population rurale : celte possibilité de dépistage, nous l'avons indi- quée en résumant la facon dont à été organisée par la Ville de Paris la surveillance de l’eau potable. Il va de soi que ce dépistage offre encore moins de difficultés quand il s’agit d'une collectivité : caserne, asile, hôpilal, pensionnat, ete. Nous avons également dit que la proportion des porteurs de bacilles est évaluée à 4 ou 5 °/,. Mais, dans la moitié des cas, l'élimination de bacilles cesse au bout de 10 à 12 semaines; dans environ 1°/, des cas, elle se prolonge pendant 1 à 3 ans et même davantage. Cela étant, il est permis d'évaluer à près de 2,5 ‘/, la proportion des porteurs chroni- “ques dangereux. Admettons qu'une enquête découvre un de ces porteurs dangereux, que va-t-on en faire? Dans l’état actuel de la science, il faut renoncer à l'idée de le débarrasser de ses bacilles. Tout ce qui pouvait être essayé à cet effet a été tenté. Cholagogues, purgatifs, antiseptiques intes- tinaux, opothérapie biliaire et hépatique, salicylate de soude, collargol n'ont donné que de très rares succès, ce qui fait penserque lamédication instituée n'a été pour rien dans ce succès, dans cette dispa- rition des bacilles. Dans l'idée, parfaitement exacte du reste, que, chez les porteurs chroniques, des bacilles se cantonnent très souvent dans la vésicule biliaire, celle-ci a été réséquée ou drainée (Dehler, Grimm) : ces interventions chirurgicales n'ont eu aucun SuCCès ou qu'un succès passager. Si l’on ne peut obtenir, médicalement ou chirur- gicalement, la disparition des bacilles, il ne reste donc qu'à isoler le porteur chronique. Cette mesure peut se faire à la rigueur dans une collectivité; mais, même dans une collectivité, elle seraitinapplicablesi cetteélimination persistait pendant desannées. Dans ces cas, et surtout dans les cas de la vie courante, il ne reste qu'à faire l'éducation hygiénique du porteur de bacilles, lui faire connaitre le danger qu'il constilue pour lespersonnes de son entourage, la nécessité dans laquelle il se trouve de veiller à la désinfection de ses matières fécales et de son urine, l'obligation qui lui incombe de se laver les mains chaque fois qu'il videra sa vessie ou évacuera son intestin. C’est précisément en pareil cas que la surveillance médicale du personnel des industries alimentaires rendrait de grands services. 6. Vaccin anti-lyphique. — Nous avons dit que si, au sortir de l'intestin ou de la vessie, le bacille typhique pouvait être eueilli et détruit, le problème de la prophylaxie anti-typhique n'existerait même pas. La situation serait la même si nous possédions un vaccin convenable et éprouvé contre la fièvre typhoïde. C'est ce point qu'il nous reste à envisager. Dès 1888, Chantemesse et Widal ont montré qu'on pouvait vacciner les animaux contre la fièvre typhoïde au moyen de cultures typhiques stérilisées par la chaleur. On sait que plus tard Chantemesse est arrivé à obtenir un sérum qui, chez les typhiques de son service, lui a donné une mortalité de 5 °/, au lieu de la moyenne qui, comme on sait, est, à-Paris, deMYace Mais les vaccinations proprement dites, les vacci- nations chez l'homme, ont été faites, au laboratoire, par Pfeiffer et Kolle, en 1896, et, plus tard, par Wright, qui les a fait entrer dans la pratique cou- rante. À l'heure actuelle, nous possédons trois vaccins ayant été essayés chez l’homme : 1° le vaccin de Pfeiffer et Kolle, qui est une culture sur gélose, stérilisée par la chaleur; 2° le vaccin de Wright, qui est une culture sur bouillon, stérilisée par la chaleur; 3 le vaccin de Besredka, qui s'obtient au moyen de cultures typhiques soumises, pendant vingt-quatre heures à 37°, au contact du sérum anti-typhique. Un quatrième vaccin à élé tout dernièrement préparé par Vincent : c'est un autolysat en eau physiologique à 37° de bacilles vivants, prélevés sur gélose en culture de vingt- quatre heures, autolysat centrifugé, puis stérilisé par la chaleur. Ce vaccin n’a pas encore élé essayé chez l’homme, Tous ces vaccins se montrent très actifs chez l'animal. Les résultats qu'ils donnent chez l'homme peuvent être déduits des statistiques suivantes, collationnées par Netter : Dans l'armée anglaise de l'Inde, en 1899 et 1900, la répartition des cas et des décès de fièvre typhoïde a été : 83.1 1.388 cas et 370 décès. 1.5 96 — 17 — 35 non-inoculés . DIBNOCUIESR EN Dans les troupes d'Egypte et de Chypre, en 1900, pour : 1) 1 fl CS cas et 10 décès. 41 2 non-inoculés 7 inoculés . . . de 1 — 1 — 296 Dans la colonne de Lord Methuen, à Modder River, en quatre mois : 10.981 non-inoculés. PRE PU L' 27939 ANOCUIES 5 1. APN NER20 Pendant la campagne contreles Herreros, l'effectif allemand comprenait 16.564 hommes, dont 7.287 ont été vaccinés. La proportion des cas de fièvre typhoïde pour 1.000 a été de 51 chez les vaccinés, de 99 chez les non-vaccinés. La mortalité a été de 4 pour 15 chezles typhiques ayant été vaccinés, de 1 pour 8 chez les typhiques qui n'avaient pas été vaccinés. Une statistique publiée en 1909 par la Commis- sion anglaise fournit des renseignements sur un effectif de 7.879 hommes ayant séjourné dans des régions infectées, et dont 3.667 ont été vaccinés. Chez les non-vaccinés, la proportion des cas de fièvre typhoïde a été, pour 1.000, de 44,4 et celle des décès de 6,1. Chez les sujets vaccinés, la proportion des cas, pour 41.000, tombe à 6,4, et celle des décès à 0,51. Ajoutons que 3.193 qui avaient été inoculés avec un nouveau vaccin de Wright (chauffage à 53° au lieu de 62) n’ont eu que 8 cas de fièvre typhoïde et aucun décès, soit une morbidité de 2,56 °/, et une mortalité de 0 °/,. L'efficacité de ces vaccinations ressort très nette- ment de ces statistiques. Le vaccin offre cepen- dant des inconvénients : l'inoculation provoque une douleur locale, de la fièvre, des accidents généraux ; en outre, elle fait apparaître, avant l'établissement de l’immunité, une « phase néga- tive », d'une durée de deux ou trois semaines, pen- dant lesquelles le sujet vacciné reste hypersensible à l'infection par le bacille typhique. Ce sont ces deux faits qui limitent pour le moment la générali- sation de ces vaccinations. V. — ConcLUSIoNs. Dans les lignes qui précèdent, on a pu voir tout ce qui reste à faire à côté de ce qui a été fait en matière de prophylaxie de la fièvre typhoïde. La discussion à l’Académie de Médecine a eu précisé- ment ce grand avantage de montrer jusqu’à quel point la défense du pays contre la fièvre typhoïde D' R. ROMME — L'ÉTIOLOGIE ET LA PROPHYLAXIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE laisse encore à désirer, est encore à établir et à parfaire. Il est déjà passablement triste qu'au début du xx° siècle l'hygiène à la campagne, dans la patrie de Pasteur, se soit à peine ressentie des découvertes faites dans le domaine de la Médecine et de l’'Hygiène. Mais quelles réflexions faire au sujet des villes, grandes ou petites, nombreuses encore, qui ne possèdent ni égouts convenables, ni fosses d’aisances étanches, ni eau potable à l'abri de la contamination ? Les laboratoires de recherches épidémiologiques, le dépistage des porteurs de bacilles, la surveillance du personnel des industries d'alimentation courent le risque de se montrer peu efficaces tant que les égouts manquent, que l'eau de bonne qualité fait défaut, que les water- closets restent ce qu'ilsétaient il y a cent ansetque. sauf pour quelques grands centres, l’organisation des services de désinfection n'existe que sur le papier. L'Académie de Médecine a eu le courage de mettre cette plaie à nu ; elle a en même temps indiqué ce qu'il fallait faire. Malheureusement, la réalisation des mesures de prophylaxie ne dépend pas d'elle. D' R. Romme, Ex-préparateur à la Faculté de Médecine de Paris. Au moment de donner le bon à tirer de ce numéro, nous apprenons le décès de notre fidèlë collaborateur, le D' Romme, après une très courte maladie. L'étude qu'on vient de lire, et qu'il nous remettait il y a trois semaines à peine, est sans doute l’une des dernières qu'il ait rédigées. D'origine russe, mais venu très jeune en France, Romme y avait fail ses études médicales; puis, par un travail opiniâtre, il avait conquis une place en vue dans le journalisme scientifique ; il était depuis de longues années le secrétaire de rédaction de La Presse médicale. Nos lecteurs n'ont certaine- ment pas oublié les importants articles qu'il à publiés ici même sur la lutte ‘contre la tuberculose et contre l'alcoolisme, l’anaphylaxie, etc. La Revue adresse à sa famille l'expression de sa plus vive sympathie. JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOUGIE 297 REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE DEUXIÈME PARTIE: I. — LA RÉCURRENCE DES PHASES GLACIAIRES PENDANT LES TEMPS GÉOLOGIQUES. Le problème de la récurrence des phases gla- ciaires pendant les temps géologiques a donné lieu à de nombreux et remarquables travaux, qui ont été communiqués au Congrès géologique interna- tional de Mexico. L'un de ceux-ci, dû au Professeur T.-W. Edgeworth David”, a fourni des renseigne- ments précieux et complets sur la série des glacia- tions constatées en Australie, ainsi que sur celle de certains continents. Les résultats obtenus méritent d'être pris en sérieuse considération. Nous en exposerons les résultats principaux, en les complétant par des données empruntées à quelques études parues depuis lors. Une phase glaciaire anté-cambrienne a été cons- tatée dans l'Ontario (Canada), particulièrement aux environs de Cobalt, par M. P. Coleman. Un examen des conglomérats de base du Huro- nien inférieur de cette région a permis à cet auteur de les assimiler à de la moraine de fond durcie. Les blocs de ces conglomérats présentent des faces aplanies couvertes de stries parallèles. Le ciment qui les unit est identique comme composition à celui des argiles à blocaux (tillite) connues dans d’autres régions. MM. J.-W. Gregory‘ et Garwood ont également cru pouvoir établir l'existence de dépôts glaciaires au Spitzberg, et, d'après M. Rogers, on les retrou- verait dans l'Afrique du Sud. Toutefois, on ne constate dans ces régions que la présence de con- glomérats deblocs glaciaires, et l’âge anté-cambrien des formations n'est pas établi avec certitude. La glaciation cambrienne inférieure parait démontrée ; elle a laissé des dépôts de cette nature dans l'Australie du Sud, dans le bassin du Yang-tse (Chine), dans les Plaini-beds de l'Himalaya du Punjab, ainsi que dans le Varanger-fjord en Norvège. Dans toutes ces contrées, sauf pour les couches des Blaini de l'Inde, on rencontre, outre l'argile à blocaux, une striation très marquée non ! Voir la première partie dans la Æevue du 30 mars 1910, t. XXI, p. 246 et suivantes. ? T.-W.-E. Davin : Conditions of climats at different gelo- gical epochs with special reference to glacial epochs. (C. R. Xe session du Cong. géol. Mexico.) * A. P. Coceuax : The Lower Huronian Ice Age. (Jour. of Geology, t. XI, 1908.) #J. W. Grecory : causes. (C. 2e fasc.) Climatic variations, their extent and R. de la Xe session du Congrès de Mexico, seulement sur les blocs, mais encore sur le plan- cher raboté par les glaciers. — De même, dans l'Afrique du Sud, d'après W. Rogers, une glaciation d'âge cambrien se signalerait par la présence d'argiles à blocaux, de blocs glaciaires polis, striés, el par une plate-forme polie et moutonnée. Dans l'hémisphère septentrional, le D' Reusch indique en Norvège l'existence d’une plate-forme striée recouverte d’une épaisse couche de « Boul- der-clay », mais nous devons dire que l’âge de ces couches aélé contesté parle Professeur Tochern;j- chew, qui les attribue à la période dévonienne. Une glaciation d'âge dévonien à été reconnue dans le sud-ouest de l'Afrique, dans la série du « Table Mountain sandstone », et cela grâce à la présence d'une argile à blocaux, dont les éléments sont polis et striés. La glaciation de la période anthracolitique a été bien étudiée et permet d'émettre des conclusions très importantes. Des traces nombreuses et incon- testables ont été relevées en grand nombre dans l'Inde, en Australie, dans l'Afrique du Sud, dans le nord de la République Argentine et dans le sud du Brésil. Quant à celles qu'on a signalées en Europe, elles doivent être accueillies avec réserve. En Tasmanie, à l’ouest et au centre; en Austra- lie, au sud, à l’est et à l’ouest, toutes les roches de la période anthracolitique présentent des mani- festations glaciaires sous la forme de plates-formes striées de roches moutonnées et de couches d'ar- giles à blocaux que séparent des lits de sable, des conglomérats ou des schistes ardoisiers. Des blocs erratiques, parfois considérables, sont disséminés dans cette argile, qui est désignée sous le nom de « tillite de Bacchus Marsh ». Il semble probable que le centre d’où partaient les transports glaciaires se trouvait sur une portion d'un continent ayant disparu sous la mer, et qui était situé au sud-est de l'Adélaïde et au sud-ouest de la Tasmanie. Les glaciers descendus d’un plateau peu élevé rencontrèrent, dans leur marche en avant, des vallées dirigées est-ouest, dont les deux versants ont été rabotés et striés. Plus au nord, les glaces ont rencontré la Médi- terranée permo-carbonifère (mer à Fusulines), dont les dépôts ont été constatés dans les îles de Timor et de Rothi. Insistons sur un fait important, celui de la dis- parition de l’ancienne flore paléozoïque à l'époque 298 de la glaciation anthracolitique, et à son remplace- ment par une flore nouvelle caractérisée par les types Glossopteris et (rangamopteris. La flore an- cienne à cependant persisté dans certains districts situés au nord de la région glacée et, en d’autres points, on a constaté le mélange des deux flores. Les modifications de la faune terrestre sont égale- ment profondes, et c'est dans le district du Karoo africain qu'elles peuvent se constater. Les Reptiles prennent un grand développement et des types nouveaux semblent s'adapter de plus en plus à la vie terrestre. Les traces glaciaires sont non moins nettes et non moins nombreuses dans l'Afrique australe. Elles s’observent dans toute la région connue sous le nom de Karoo. Au nord, elles s'étendent jusqu'à la ligne qui rejoint Prétoria à Delagoa-Bay, et méme jusqu'à la jonction de la rivière Eland avec la rivière Olifant. L'argile avec blocs striés repose sur une plate-forme rabotée : c'est la «tillite du Dwyka », très épaisse dans la colonie du Cap et s'amincissant au nord, de facon à ne plus former qu'une couche de 9 mètres. Le centre de radiation des glaces occupait un plateau comprenant l'an- cienne république d'Orange, le Transvaal et le sud de la Rhodésia. On peut présumer également que la glaciation anthracolitique s'étendait sur le pourtour du pôle Sud. On a constaté la présence d’une phase gla- ciaire dans le sud du Brésil, à Minas, dans la pro- vince de Santa-Catarina. La « tillite d'Orléans » du continent brésilien correspond également à celle du « Dwyka », à celle du « Bacchus Marsh » et à celle du Talschir. Elle s’en distingue par sa flore qui est composée à la fois par les types nouveaux de la flore à Glossopteris et par ceux de l’ancienne flore carboniférienne. La phase glaciaire permo-carbonifère occupait aussi une grande partie de l'Inde; les traces s’en retrouvent dans les régions s'étendant, d'un côté, depuis le fleuve Godavery et le fleuve Mahonadi, à l’ouest de Calcutta; de l'autre côté, jusqu'à Jaisalmer et, au nord, jusqu à la Salt Range. Les formations glaciaires, séparées actuellement par de grandes étendues, paraissent n'être que les lambeaux con- servés jusqu'à nos jours d'une surface glaciaire que recouvrail la « lillite de Talschir », contempo- raine du Glaciaire antarctique. La glaciation anthra- colitique à donc régné aussi bien au nord qu'au sud de l'Équateur; elle s’en est rapprochée jusqu'au latitude sud et au 18° latitude nord. Les glaces descendues du continent de Gondwana alteignaient sur la ligne de la Salt Range la mer à Méditerranée permo-carbonifère), qui occupait la région constituée aujourd'hui par les chaines parallèles s'étendant depuis l'Himalaya 240 Fusulines JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE jusqu'au Kuen-Lun; cette mer communiquait par le Japon, l'Indo-Chine et l'Italie avec l'océan Paci- fique. Une mer très étendue existait donc au nord du continent de Gondwana. Dans ces conditions, il parait admissible que les neiges aient lraversé l'Équateur pour se déposer sur le versant septen- trional du plateau, les eaux qui le baignaient devant contribuer à sa glaciation. Nous pouvons conclure que la phase glaciaire anthracolitique à été très intense et très longue et qu'elle a eu une influence considérable sur les organismes contemporains. Elle constitue un des principaux événements de l'histoire géologique du globe et a joué un rôle considérable dans l'évolu- tion des êtres. Les formations de l'ère secondaire ne présentent nulle part de traces indiscutables de climats gla- ciaires. Nous devons cependant noter que le Pro- fesseur J.-W. Gregory considère les « blocaux » accompagnant la Craie en Angleterre comme des blocs erratiques. De plus, le Professeur Garwood aurait lrouvé un galet strié, du même âge, au Spitzberg. Toutefois, ce n'est que vers la fin de l’époque tertiaire que l’on constate une nouvelle phase gla- ciaire. La phase de glacialion pléistocène est trop connue pour que nous jugions ulile de l'étudier à nou- veau. Nous nous contenterons d'insister sur l’im- mense extension qu'elle aprésentée dans unegrande. partie du globe. Dans un article publié ici même’, et consacré au « Diluvium » de l'Amérique du Sud, M. Steinmann à signalé ces formations sur une très grande partie du haut plateau bolivien, puis dans une partie du Pérou et même dans le Chili et l'Argentine. « Nous pouvons conclure aujour- d'hui, d'une facon certaine, écrivait-il, que des traces de l’époque glaciaire s'étendent sur tout le trajet montagneux du cap Horn (56° latitude sud) jusqu'à la Sierra Névada de Santa Marta (14° lati- tude nord). » Dans la Cordillère, les divers types de l'hémisphère nord se répètent sous des condi- tions orographiques et climatiques semblables. Dans ces régions ‘de l'Amérique du Sud, ajoute notre confrère, il n’est pas douteux qu'il n'ait existé plusieurs glaciations. Certains dépôts peuvent même être synchronisés avec les vieux graviers des pla- teaux (Deckenschotter). Quant au læss ou lehm de la pampa, il possède comme le læss d'Europe une très grande extension; l’auteur arrive à une conclusion intéressante : c'est « qu'il existe entre les bassins de læss de l'Argentine et de la région 1 G. SreiMans : Le Diluvium de l'Amérique du Sud (Æer. gén. des Sciences, n° du 15 août 1907, p. 626.) JOSEPH RÉVIL -— REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 299 du Rhin supérieur une concordance stratigraphique étendue, qui serait inexplicable si le læss des deux domaines ne s’élait pas formé de la même façon et simultanément ». En résumé, el comme esquisse provisoire, le Professeur David présente le tableau suivant 20 Gla- ciation cambrienne inférieure démontrée; 3° Gla- ciation dévonienne démontrée; 4° Glaciation an- thracolilique démontrée; 5° Glaciation crétacée supérieure douteuse; Glaciation pléistocène dé- montrée. Par suite de ces récurrences, la signification des phases glaciaires est extrèmement importante; il serait utile de résoudre le problème de la genèse de ces révolutions climatiques. Nous devons avouer qu'aucune des solutions proposées ne parait absolument plausible, et qu'à ce sujet nous en sommes réduits à des hypothèses plus ou moins défendables, les règles de la circulation océanique élant insuffisamment connues, el certains pro- blèmes géographiques n'étant pas définitivement résolus, Comme les modifications terrestres ne semblent pas expliquer complètement ces abaissements de température, certains auteurs ont cru pouvoir recourir à l’action de l’astre central sur notre sys- tème planétaire. Toutefois, dans cette voie-là encore, des résullats suffisamment précis n'ont pas été fgurnis, et nous n'en sommes qu'aux tàätonnements. La question reste entière et ne parait pas à la veille d'être définitivement résolue. 4 Glacialion anté-cambrienne probable; II. — La « NAPPE RUÉTIQUE » DANS LES PRÉALPES SUISSES. En terminant, dans notre précédente revue”, l'analyse du Mémoire de M. F. Jaccard « Sur la région Rubli-Gummfluh », nous nous demandions si la « nappe rhétique », signalée pour la première fois en 1905 par M. G. Steinmann, n'était pas représentée dans les massifs charriés de la Suisse. Nous engagions vivement nos confrères de Lau- sanne à élucider ce nouveau problème. Ils ont répondu à notre attente et viennent de nous en donner la solution, en établissant l'existence de cette nappe dans les Préalpes vaudoises, bernoises el fribourgeoises. Dans le Flysch préalpin, consistant en schistes et grès micacés, de la zone syncelinale d'Ayerne ! J. Révic : Revue annuelle de Géologie. (Rev. gén. des Sciences, n° du 15 mai 1909, p. 423.) ? G. STENMANx : Geologische Beobachtungen in den Alpen. Die Schardtsche Ueberfaltungstheorie. U.S. A. C. (Ber. nat. Ges. Freiburg-i. B., t. XVI, sept. 1905.) Préalpes vaudoises), M. Alphonse Jeannel® à signalé un complexe de sédiments complétement différents et n'ayant aucun rapport tectonique aves lui. Ces sédiments consistent en Jurassique supé rieur (Malm), développé sous forme de /fadiolarite, en Néocomien sous forme de calcaires blanchâtres à Aptychus, enfin en Cénomanien consistant en calcaires gréseux et brèches fines à Orbitolines. Ces assises sont englobées dans des schistes noirs, dont une partie est d'âge crétacé. Cet ensemble tectonique devant être indubitablement rattachée à de terrains constitue une unité la « nappe rhétique »; sa présence dans le synclinal d'Ayerne montre que celte nappe n'est pas néces- sairement liée au grand pli couché de la Brèche du Chablais, dont le bord frontal est en arrière. Æ/1le à done débordé en avant de la Brèche. Des constatations analogues ont été failes dans les Préalpes bernoises et fribourgeoises par M. F. Rabowski*. Dans le Bas-Simmenthal, il a pu recon- naître l'existence de lambeaux considérables d'une nappe supérieure, « nappe rhétique », en recouvre- ment sur le Flysch. Ces lambeaux consistent en : 1° « Radiolarite » rouge ou verte (Jurassique supé- rieur), passant vers le bas à des calcaires siliceux gris brun; 2% Calcaire gris blanc à Aptychus et à Radiolaires, pouvant appartenir au Jurassique tout à fait supérieur et au Crétacé inférieur; 3° Cal- caires à Entroques avec Orbitolina concava (Céno- manien); 4° Schistes et calcaires à Globigérines (Crétacé supérieur). Des affleurements d'ophite ont encore été observés au sud du Jaunpass. Partout, dans le synclinal du Simmenthal, les terrains qui sont attribués à la « nappe rhétique » reposent sur le Flysch préalpin, bien que locale- ment ce dernier puisse être renversé sur les terrains appartenant à cette nappe. L'auteur ajoute aussi que sa présence n'est pas liée à celle de la Brèche. Où se trouve la racine de la « nappe rhétique »? s'est demandé M. Argand'. Des formations ana- logues, nous dit-il, ne se rencontrent que dans l'intérieur de la chaîne, sur territoire italien, dans la région du Bas-Canavese, au nord de Turin. Dans tout le secteur alpin compris entre le Mallone à l'Ouest et la Doire Baltée à l'Est, se montrent des roches éruptives auxquelles s'associent d’autres roches en partie mésozoïques : calcaires et brèches dolomitiques, schistes siliceux bariolés décrits sous le nom de « diaspres » et de « phtanites », dans 1 A. JEANNET : La nappe rhétique dans les Préalpes vau- doises. (C. R. Ac. Sec. de Paris, 25 janvier 1909.) 2 F. Rasowsxr : Sur l'extension de la nappe rhétique dans les Préalpes bernoises et fribourgeoises. C. /{, Ac. des Sc. de Paris, 25 janvier 1909. 3 G. ArGanD : Sur la racine de la nappe rhétique. (Sepa- ratabdruck aus den Milteilun gender schweizerischen geolo- gischen Kommission.) 300 lesquels ont été trouvés des Radiolaires. Ces ana- logies, et notamment la présence démontrée de Radiolaires, permettent de formuler l'hypothèse que les racines de la nappe doivent être recherchées dans cette zone, que M. Argand appelle « zone du Canavese ». Elle sépare, ajoute-t-il, deux unités tectoniques importantes : au Nord-Ouest, la zone pennine ou zone du Piémont, au Sud-Ouest la zone d'Yvrée. Entre les racines pennines et austro- alpines, il existerait une « étroite cicatrice » ayant pour siège cette zone de Canavese et renfermant la racine de la nappe rhétique. D'autres observations de notre confrère viennent à l'appui de sa manière de voir : c’est, en premier lieu, l'intensité des phénomènes mécaniques; c’est ensuite l'allure d'ensemble des couches dues à des répétitions isoclinales serrées; c'est enfin la pré- sence, dans la masse, de phtanites rouges et verts formant le versant septentrional du Becco Filia, ainsi que l'existence d'un redoublement d'assises occasionné par une charnière fermée au Nord. L'hypothèse formulée semble done bien répondre aux faits constatés et mérite d’être prise en sérieuse considération. M. Haug était, d’ailleurs, arrivé pré- cédemment à des conclusions à peu près analogues. Dans une Note présentée à l’Académie des Sciences, le 2% mai 1909, il avancait que la racine de la nappe VIII (nappe rhétique) doit se trouver en arrière du bord sud-est de l’anticlinal du Grand- Saint-Bernard et, par conséquent, se trouver dans la zone du Piémont. Elle mériterait, ajoutait-il, le nom de « Nappe du Piémont ». III. — STRUCTURE GÉOLOGIQUE DE LA CHAINE PENNINE CENTRALE. En 1905, MM. Lugeon et Argand' communi- quaient à l’Académie des Sciences de Paris une Note géologique d’une portée considérable, que nous résumions, l’année suivante, à l'intention des lecteurs de cette Æevue”. Nos confrères de l'Uni- versité de Lausanne annonçaient que la structure des Alpes pennines et de la moitié septentrionale des Alpes grées est produite par un empilement de grands plis couchés (nappes), poussés vers l'extérieur de l’Are alpin; sept nappes superposées, plus ou moins digitées et déversées vers l'exté- rieur, avaient pu être reconnues. Le territoire auquel ces vues s'appliquent s'étend à l’ouest de la dépression du Simplon, sur environ 8.000 kilo- ‘ M. Luceon et E. ARGAND : recouvrement de la zone du Piémont. (C. AR. Lt. CXL, p. 1364, mai 1905.) 2? J. Réviz : La synthèse géologique du système alpin. Revue générale des Sciences, n° du 30 juillet 1906. Sur les grandes nappes de Acad. Sc., JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE mètres carrés, jusqu à la ligne des deux Val-Ferret et aux sommets du Grand-Paradis. Ces conclusions ont eu un immense retentisse- ment; elles ont été acceptées par un grand nombré de géologues; d'autres ne les ont adoptées que partiellement; d’autres enfin les ont ouvertement combattues. Afin d'en montrer le bien fondé, M. Emile Argand à entrepris des recherches dé- taillées sur la chaîne pennine centrale. A la suite de nombreuses explorations, poursuivies de 1905 à 1908, il à publié une carte au 1/50.000 de la partie septentrionale du massif de la Dent-Blanche ‘. Avec l'autorisation de la Commission géologique suisse, il a fait paraître dans le Pulletin de la Société vau- doise des Sciences naturelles* une Note prélimi- naire servant de texte explicatif à cette carte. Les résultats obtenus confirment entièrement les con- clusions précédemment émises ; ils méritent d’être connus. Commeces auteurs l'avaient dit, le massif pré-tria- sique de la Dent-Blanche est un /ambeau de recou- vrement taillé dans la plus élevée des nappes. Le complexe de roches anciennes que M. Argand réunit sous la dénomination de pré-triasique repose sur les terrains secondaires. Entre ce complexe et son substratum, le passage se fait soit par interca- lations répétées, soit par transitions lithologiques, soit même par combinaison des deux modes de passage. Il y a absence de limite tranchée entre les terrains secondaires et le grand pli couché, ce qui démontre que celui-ci n’est pas une masse étrane gère, mais fait encore partie de lazone du Piémont. Il s'agit d'un pli couché de très grande dimension, mais développé à l’intérieur même de la zone. La nappe de la Dent-Blanche n'a pas été décollée de son substratum, mais en est restée solidaire. On doit admettre qu'une partie des terrains se- condaires de ce substratum, c'est-à-dire celle qui est restée au voisinage immédiat de la masse recouvrante, en formait autrefois la couverture normale. Le substratum de la nappe de la Dent-Blanche ou « zone mésozoïque du Grand-Combin » est uni- quement formé d'assises d'âge secondaire. On y distingue trois groupes : un groupe inférieur ou couverture secondaire normale de la nappe du Grand-Saint-Bernard, un groupe moyen formé de plis couchés venus du Sud-Est, un groupe supérieur comprenant le flanc renversé de couches secon- daires de la nappe de la Dent-Blanche. Les terrains de ce dernier groupe supportent sans limite tran- 1 Matériaux pour la Carte géologique suisse, nouv. série XXII, carte spéciale, n° 52. ? EuiLe ARGaND : L'exploration géologique de la chaine pennine centrale. Bull. Soc. vaudoise Se. nat., vol. XLV no 166, 1909. JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DÉ GÉOLOGIE J01 —————— ——— chée le noyau prétriasique du grand pli couché supérieur, Le groupe inférieur est constitué de bas en haul par des quartziles, du Trias calcaire et des schistes lustrés,. Le groupe moyen « git » en repos anormal sur le groupe inférieur. Il consiste en plis couchés venus du Sud-Est. La série secondaire est encore formée par des quartzites, des calcaires et des schistes lustrés. L'auteur cite ici un fait intéres- sant: c'est la présence de minces noyaux triasiques, qui 2agent dans des masses beaucoup plus consi- dérables de schistes lustrés. Ces petits paquets de plis couchés plantent leurs charnières anticlinales vers le Nord-Est, dans le sens de la poussée. Le groupe supérieur est également en repos anormal sur le précédent. Il diffère des deux autres groupes par la moindre fréquence des quartzites et des calcaires, et par le développement des roches éruptives basiques. Lesterrains pré-triasiques dela masserecouvrante se subdivisent en deux formations : la série d'A rolla ou division supérieure etla série de Valpel- line ou division inférieure. La première consiste en schistes vert sombre, micaschistes, gneisschlorito-séricitiquesetgranites. La mise en place de ces granites a été d'une grande complexité et s'est effectuée aux dépens d'une série concordante dans laquelle sont représentés des horizons élevés du Primaire. Cette mise en place est antérieure à la formation des grands plis couchés. I faut noter que l'appareil granitique est retourné à l'envers et qu'il repose sur les schistes qui lui servaient jadis de calotte. La série de la Valpelline est formée de gneiss fins, souvent associés à des schistes verts basiques, alternant avec des lits et des bancs calcaires detoute extension et de toute épaisseur. Cet ensemble est traversé de roches de consolidation profonde parmi lesquelles dominent les granites à deux micas. Ces données stratigraphiques exposées, l’auteur arrive à la Tectonique. 11 à reconnu un grand nombre de charnières, ce qui lui permet d'émettre l'importante conclusion que « le grand pli couché de la Dent-Blanche se résout en un certain nombre de plis couchés d'ordre inférieur, encore en parfaite continuité structurale réciproque, et empilés les uns sur les autres ». A l'intérieur des plis couchés, on n'observe pas, entre les deux séries pré-triasiques, de ligne de démarcation absolument franche; ces séries se relient par transitions graduelles. Les emboitements de charnières observés dans la série de Valpelline se propagent dans celle d'Arolla. En résumé, conclut M. Argand, dans sa partie septentrionale, le massif de la Dent-Blanche appa- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. rail comme un pli couché au Nord-Ouest, résoluble en plusieurs plis d'ordre inférieur empilés el cou- chés dans le mème sens. L'ensemble repose sur des assises secondaires par l'intermédiaire d'un flanc renversé el aminci, mais non pas, le plus souvent, complètement supprimé. La structure du Matterhorn est particulièrement intéressante. Au-dessus d'une grande lentille d'eu- photide formant le anticlinal la d'Arolla. Ces assises s’y montrent ployées par une noyau d'un se développent des assises appartenant à série charnière synclinale colossale, compliquée de replis anticlinaux secondaires très accentués. Cette charnière est tournée au Sud-Est, et le pli s'ouvre vers « l'avant-pays alpin ». Sur ce synelinal com- plexe reposent sans limite tranchée des formations appartenant à la série de Valpelline, et constituant la pyramide terminale du Cervin. Les types lithologiques valpelliniens se trouvent, non seulement dans la pyramide, mais dans des bandes qui en forment le prolongement et se conti- nuent au Sud sous les « Jumeaux de Valtour- nanche ». Ils forment donc un /ambeau de recouvrement dépendant d'un anticlinal couché, reposant sans limites tranchées sur la série d’Arolla. Un autre lambeau de même nature forme le sommet du Stockje. Le bord externe de la nappe subit dans sa pro- longation d'importants changements, que l’on doit attribuer au voisinage du massif du Mont- Blanc. Au point de vue de ces influences exté- rieures, deux régions peuvent être distinguées l’une, au Sud-Ouest, comprenant la plus grande partie du massif de la vallée de Zinal aux environs d'Aoste, où la nappe a été gènée dans sa marche en avant; — l'autre, au Nord-Est, où les plis couchés s'étalent librement et où leur marche a été facilitée par l’abaissement de la barrière résistante entre le massif de l’Aar et celui du Mont-Blanc. M. Argand termine sa savante notice en signa- lant des « plis en retour » dans la région com- prise entre le Mettelhorn et Zermatt (rive gauche de la Visp). Des terrains de la zone pré-triasique du Grand-Saint-Bernard forment une charnière anticlinale fermée au Sud-Est. Le Trias qui con- stitue la charnière anticlinale de ce pli pénètre dans les schistes lustrés sous forme d’anticlinal couché. Les résultats des campagnes d'exploration géo- logique de notre confrère de Lausanne sont très intéressants. Nous attendons avec impatience le mémoire détaillé qu'il nous annonce; nous avons la conviction que, s'il répond aux notes publiées par le même auteur, il recevra le meilleur accueil des géologues alpins. JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE IV. — TECTONIQUE DES MONTS PÉLORITAINS (SICILE). La catastrophe du 28 décembre 1908, qui a détruit la ville de Messine et produit de si grands désastres en Calabre, a rappelé l'attention sur la géologie de ces régions qu'ont étudiées de nom- breux savants: Cortese, Stefani, Seguenza, elc., ete. Ce dernier a jelé les bases de la Stratigraphie et, grâce à d'abondantes récoltes de fossiles, est arrivé à des conclusions précises, surtout en ce qui con- cerne l’âge des formations secondaires. Par contre, la Tectonique n'en avait pas été exa- minée à la lumière des nouvelles théories, et toutes les anomalies de structure en étaient interprétées à l’aide de grandes failles se croisant dans tous les sens. Cependant, dès 1906, MM. Maurice Lugeon et Emile Argand', par l'examen des cartes géologi- ques el à l’aide de considérations théoriques, avaient cru pouvoir avancer que « tout l'ensemble de l’are cristallin de la Calabre doit être considéré comme un are de charriage ». Gel arc, ajoulaient-ils, qui se prolonge vers l'Ouest par les monts Pélorilains, se continue au nord de la Sicile et va peut-être rejoindre les masses cristallines du nord de VAI gérie. Comme nous le faisions remarquer, la même année”, ces vues nouvelles répondent bien à celles de l'illustre savant E. Suess, qui — cherchant à définir les lignes directrices du système alpin — indiquait les chaînes de la Sicile comme se conti- nuant par celles du nord de l'Afrique, chaines présentant comme elles leur bord externe au midi, et où les plis sont refoulés dans la même direction. Les idées émises par nos confrères de Lausanne viennent d'être confirmées dans leurs traits prin- cipaux par les recherches récentes de M. Miesilas Limanowski”, élève de M. Lugeon, qui vient de consacrer un travail des plus intéressants à l'étude des environs de Taormina (Sicile). Get auteur a pu arriver à la conclusion que les monts Péloritains font partie d'une gigantesque nappe provenant du Nord, plongeant vers l'Etna, et que les ellipsoïdes de la Calabre sont des « nappes » comme celles des Alpes centrales. On sait que la pointe extrême de l'Italie est constituée par un « l’'Aspromonte », qui se continue en Sicile par les monts Péloritains. Ces derniers forment la pointe massif de roches anciennes, 1 M. Luceon et E. ArGanp : La racine de la nappe sici- lienne et l’arc de charriage de la Calabre, (C. R. Ac. Se., 44 mai 1906.) * J. Kéviz : La synthèse géologique du système alpin. (Hevue générale des Sciences, n° du 30 juillet 1906, p. 640.) 3 M. Limaxowsk1: Sur la tectonique des monts Péloritains. (Bull. Soc. vaudoise Sc. nat., vol. XLX, n° 160, 1909.) nord-est de l'ile et sont séparés de la péninsule par l’étroite dépression du détroit de Messine. . L'étude de la structure du massif sicilien amène M. Limanowski à le considérer comme formé de quatre plis couchés superposés, auxquels il donne les noms de : 1° pli de Taormina ; 2 pli de la Marica ; 3° pli du cap Saint-Andréa; 3° pli du Monte-Golfa. 4° Pli de Taormina. — Les dépôts calcaires d'âge secondaire qui se développent aux environs de Taormina paraissent, au premier abord, n'être qu'une simple couverture des phyllades paléo- zoïques. Un examen approfondi montre qu'il n'en est rien et que les couches présentent d’étranges complications. C'est ainsi que, près de Mola, on voit des phyllades d'âge ancien reposer sur lIn- fralias. Is représentent le flanc inverse d'un pli couché dans lequel la série secondaire est très réduite. Ces phyllades constituent un Zambeau de recouvrement. En outre, sur les flancs occidentaux du « Monte Venere », par places, et de dessous les phyllades, sortent les calcaires du Toarcien et du Tithonique. : À partir de la Sirina el jusqu’au torrent Santa Venere, ces phyllades apparaissent entre la Mollasse et le Secondaire constituant le pli couché. Is forment une sorte de /ame séparant les deux ter- rains; ils appartiennent au flanc inverse d'un grand pli, dont ils sont ici le prolongement vers le Sud. Le grand pli couché de Taormina s'élève lente- ment par ondulations du cap de Taormina jusqu à Monte Venere. Ayant une largeur aujourd'hui visible de 4, 5 kilomètres, après sa formation, il a été ondulé dans diverses directions. Certaines de ces ondulations se terminent par de véritables failles, mais qui n'ont qu'une impor- tance locale et restreinte. 2% Pli couché de la Marica. — Sous le pli couché de Taormina, en apparail un autre plongeant vers l'Ouest. C'est le pli couché de la Marica, qui forme le flanc occidental du Monte Ziretto. On voit nette- ment les phyllades paléozoïques enfermer com- plètement les roches moins anciennes du Verru- cano(Permien). Celui-ci forme done une charnière, un faux anticlinal. Cette charnière prouve incon- testablement que les plis couchés de Taormina appartiennent à des replis d'une série renversée, d'une « nappe de recouvrement » charriée du Nord, plongeant vers l'Etna et les montagnes de l’Alcantara. 3° Pli couché du Cap S. Andrea. — Les ter- rains secondaires et tertiaires du Cap $S. Andrea plongent sous des phyllades d'âge primaire qui supportent l'Infralias du Belvédère. Ces terrains appartiennent à un pli couché inférieur à celui de la Marica. À la Spienata del Tondo, on voit les cal- caires infraliasiques reposer sur le Bartonien JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 303 (Eocène supérieur) et former un lambeau du flanc renversé du pli. Cette constatation à une grande importance, car elle prouve indubitablement que les plis couchés de la région de Taormina se sont formés après l'Eocène et que le Bartonien est le dernier terrain ayant pris part au charriage. % Pli couché du Monte Galfa. — Le Monte Galfa appartient à un pli couché superposé à celui de Taormina, pli couché qui est aujourd'hui morcelé par l'érosion et qui recouvrait autrefois la région. L'existence du pli nous est prouvée par la pré- sence, sur la route conduisant de S. Alessio à Forza de Agro, de lambeaux de Verrucano repo- sant sur les calcaires infraliasiques. Ce Verrucano forme la charnière d'un synclinal s'ouvrant du côté du sud-ouest. La « nappe » que nous venons d'étudier — et nous devons insister à ce sujet — est plissée trans- versalement. Ce bombement transversal, dont Taormina montre un bel exemple, commencé peut-être avant l’enroulement de la nappe, s'est continué après les charriages et se continue encore aujourd'hui. D'anciennes excavations, produites par l'action des vagues sur les rochers jurassiques au bord de la mer, démontrent que le rivage émerge. Celle émersion est plus accentuée du côté de la terre ferme, ce qui parait une preuve de la conti- nuilé du phénomène. Au Sud, le bombement de Taormina fait place à une vaste ondulation synclinale, le long de laquelle on peut constater des affaissements. Iei s'observent des mouvements opposés à ceux de Taormina, démontrant que le rivage entre Torre d'Archirafi et Riposto se submerge. Plus au loin, au Sud, le rivage d'Aci-Reale émerge comme à Taormina. M. Limanowski indique la fameuse langue du port de Messine comme étant sur l'axe d’un bom- bement. Cette ligne de Messine, dit-il, passe par Bagnare et Scilla, où les phénomènes d'émersion sont très nels. Il faut ajouter que ces axes de bombement se déplacent et que, dans chaque endroit, il y a chan- gement de signe après un lemps plus ou moins long. Les points du rivage subissent des oscilla- tions. « C’est ensuite, conclut l’auteur en terminant, la somme de loutes les vitesses avec signe négatif, moins la somme de toutes les vitesses avec signe positif, qui marque le mouvement total par rapport au rivage de la mer. » Pour le rivage oriental de la Sicile, ce mouvement serait aujourd'hui négatif”. ! Depuis la rédaction de cet article, nous avons eu com- munication d'un travail très important de M. l'Ingénieur Franchi intitulé : « Il terremoto del 28 dicembre 1908 à Messina, in rapporto alla natura del terreno ed alla riedifica- zione della cita » (Bolletino del B. Com. geol. d'Italia, 1909, fasc. 2). D’après notre confrère, il semblerait qu'un abaisse- ment du sol aurait été constaté non seulement dans les Ces conclusions méritaient d'être connues ; elles apportent une contribution précieuse à l'étude des mouvements épirogéniques, dont le rôle à été si longtemps méconnu. V. — GÉOLOGIE DES TERRES DE GRANHAM. Les terres de Graham, secteur américain des régions antarctiques, sont restées presque entière- ment lerra incognila, au point de vue géologique, jusqu'à la fin du siècle dernier. Ce n’est qu'en 1899, par l'expédition de la Zelgica, dirigée par le Com- mandant Adrien de Gerlache, que furent obtenues des données générales sur la pétrographie de la région. Ces données sont dues à M. Arctowski. Postérieurement, ces territoires ont été visités par une Expédition suédoise, dirigée par le D' Otto Nordenskjold, qui y séjourna de janvier 1902 à novembre 4903. Ce savant fut vivement frappé de la parenté des roches éruptives de ces massifs avec celles de l’arête montagneuse américaine s'étendant de l'Alaska aux Andes chiliennes. Le continent de Graham (s. str.) fut considéré par lui « comme une aire sédimentaire plissée avec pointements érup- tifs ». Ces pointements percent presque tous lIn- landsis et laissent couler entre eux des fleuves de glaces dans leurs vallées glaciaires. Il est juste de dire que ces conclusions avaient été pressenties par M. Arctowski, qui, dès 1895, écrivait : « Les terres de Graham se rattachent à la Patagonie par une chaîne sous-marine qui forme un grand are de cerele entre le cap Horn et les îles Shetland, et la chaîne tertiaire des Andes réappa- raît de nouveau dans les terres de Graham". » D'autres données non moins importantes ont élé recueillies par M. J. Gunnar Anderson, attaché à l'expédition Nordenskjold, qui, en 1906, publiait un intéressant travail dans le Bulletin de l'Institut géologique d'Upsal*. Nous en ferons connaitre les principaux résultats. Les observations géologiques, nous dit l’auteur, ne sont pas toujours faciles, car un manteau de parties basses de la ville, mais encore dans la plaine du chemin de fer s'étendant de la station des « Ferry-Boats » au pont de « la Zaera », ainsi qu'à la tour de « San- Raineri » édifiée sur des conglomérats gréseux. 11 s'agirait bien d'un abaissement général et non d'un affaissement d'un sous-sol constitué de matériaux détritiques. Nous avons encore recu un intéressant ouvrage de vulga- risation de M. l'abbé Th. Moreux : « Sur les tremblements de terre », où sont longuement étudiées les catastrophes de Messine et de la Provence, ainsi que les théories qui ont été émises pour l'explication de ces phénomènes. 1 Arcrowski : Observations sur l'intérèt que présente l'exploration géologique des terres australes (Bull. Soc. géol. de France, 1895, p. 589. 2 J, Guxnar AnpgrsoN : On the geology of Graham land. (Bull. of the Geol. Inst. of Upsala, vol. VII, 1906.) 304 JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE glace soustrait presque partout à l'œil et au marteau du géologue la constitution du substratum. Quatre territoires (« Hope-Bay », « Orkney méri- dionales », « Snow-Hill », « Ile Seymour ») peuvent être étudiés de facon plus précise. A Hope-Bay, une mince bande côtière libre de glace permet de constater l'existence de grau- wackes et de sparagmites, à stratification peu nette. Le mont Flora qui domine la baie présente à la base de son escarpement des conglomérats non stra- tifiés, à blocs volumineux arrachés aux grau- wackes sous-jacentes. À la partie supérieure, se montrent des schistes bruns avec conglomérats fossilifères (flore et faune d’eau douce). Viennent ensuite des tufs volcaniques. Quant au continent de Graham, qu'a visité Nordenskjold, les moraines de ses langues glaciaires abondent en granite, quartz, diorite, porphyre el porphyrites analogues à ceux de la Patagonie. Les iles Orkneys du Sud ont été visitées en 1903 par H. H. Pirie, géologue de l'expédition Bruce. Il a retrouvé dans l'ile Laurie des grauwackes tra- versées de roches éruptives, et pu reconnaitre que l’axe de ces iles est le prolongement incurvé des Shetlands. A Snow-Hill et dans la partie sud-ouest de Seymour se montrent des assises appartenant au Crétacé supérieur (Sénonien). Dans la partie nord- est de cette dernière ile affleurent des couches ter- tiaires, d'âge oligocène supérieur et miocène infé- rieur. Le sol de Snow-Hill consiste en couches d’un grès tendre à grain fin, souvent désagrégé en arènes. On y rencontre des concrélions gréseuses plus gros- sières, parfois riches en glauconie. Des nodules renferment des corps organiques. Ce substratum crétacé se montre encore au sud- ouest de l'ile Seymour, à Cokburn el au cap Hamilton, Dans cette dernière localité, il est moins riche en fossiles. Les espèces recueillies par M. Anderson ont été déterminées par MM. W. Kilian et P. Reboul!, de l'Université de Grenoble. Les groupes représentés consistent en Nautiloïdés, Ammonoïdés et Bélem- noïdés. Le trait caractéristique de la faune est l'épanouissement et la transformation du groupe des Xossmaliceras, dans lequel les auteurs ont établi les groupements suivants Madrasites, Gunnarites, Jacobites, Grahamites, Grossouvrites, Seymourites. Cette faune possède une physionomie bien nette par le rôle qu'y jouent les formes spéciales de la province indo-pacifique. Le nombre considérable 4 W. Kizrax et P. Resouz : Les Céphalopodes Néocrétacés des iles Seymour et Snow-Hill. Stockholm, 1909. des Xossmaticeras en constitue un des caractères les plus frappants. De plus, les formes de ce groupe permettent de constater des phénomènes de con- vergence” fort curieux, ainsi que la récurrence de types d'ornementation rappelant des genres plus anciens. En outre, on voit des Lytocératidés des groupes Gaudryceras et Tetragonites s'y déve- lopper et s'y épanouir. D'après nos deux confrères, les formations cré- tacées comprenant les espèces qu'ils ont étudiées correspondent exactement dans leur ensemble au Sénonien (sensu lato) du district de Trichinopoly, dans l'Inde, avec lequel on peut les synchroniser. Certains gisements (couches rouges de la loca- lité 2 et calcaires noiràtres de la localité 6) ont un cachet un peu plus ancien, tandis que d’autres (localité 8) paraissent être un peu plus élevés. Il faut ajouter encore que cette faune offre des ana- logies avec celle des côtes pacifiques de l'Amérique du Nord. Dans l’Amérique du Sud, la faune de Quinquirina (Chili) est également du même äge. Des faunes du même type ont été rencontrées au Japon, ainsi qu'à Madagascar. Ces assises, concluent les auteurs, correspondent à la grande fransgression sénonienne, qui parait avoir atteint Bornéo et la Nouvelle-Zélande. Elles ont quelques affinités avec la faune du Crétacé supérieur de Tunisie, si bien étudiée par M. Pervin- quière. La partie nord-est de l'ile Seymour présente des couches tertiaires en succession régulière au Cré- tacé. La roche prédominant dans ces couches est un grès à ciment calcaire à aspect tuffeux et à fragments d'augite et de porphyrite. Les roches ont été étudiées par le D' Nordenskjold et la flore par le Professeur Nathorst. Les Fougères, nous dit ce savant, sont assez communes el appar- tiennent à plusieurs espèces différentes. Une feuille isolée semble être une Araucaria assez voisine de l'Araucaria brasiliensis. Quant aux feuilles de Dico- tylédones, elles sont généralement petites et pré- sentent le même facies que celui de certaines flores tertiaires de l'Europe méridionale. Enfin, comme fait intéressant, il y a lieu de signaler des feuilles de Fagus. Les coquilles recueillies dans ces couches ont été examinées par le D' Wilckens, qui y à reconnu : Lahilia angulata Ph. sp., Cucullwa alta Sow., Modiola Ameghinoi Ih., Ostrea sp., Cominella obesa Ph. sp., Zurritella ef. exiqua Ortm., Natica, Struthiolaria. 4 Dans les Ammonitidés, ces phénomènes de convergence se manifestent par le retour périodique, dans des familles d'origine différente, des mêmes types d'ornementation, de formes générales et de lignes suturales. (W. Kizran : C. R. Ac. Sc., 17 janvier 1910.) JOSEPH RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 305 Ces assises peuvent être synchronisées avec les « Mollasses patagoniennes », qui sont considérées comme appartenant à POligocène supérieur et au Miocène inférieur. Mentionnons encore des conglomérats à Pecten qui, à l'île Cokburn, se superposent à des tufs d'origine volcanique. Ils appartiennent au Tertiaire supérieur ou au Qualernaire inférieur et présentent les plus grandes affinités avec les couches du même âge de la Patagonie. M. Anderson résume de la facon suivante l'his- toire des territoires qui ont fait l’objetde ses études : Pendant le Jurassique, écrit-il, la région était exondée et couverte d’une végétation due à un cli- mat doux et uniforme, Sur l'emplacement de « Hope Bay » existait un bassin d’eau douce, où les débris de cette végétation vinrent se déposer. Nous ne savons rien de bien certain sur le Crétacé inférieur, mais pendant le Cénomanien et le Sénonien se constituèrent de puissants dépôts fossilifères. La pointe orientale de Graham fut alors occupée par un haut fond. L'affaissement progressif de sa surface fut compensé par la sédimentation, dont l'épaisseur et les caractères restèrent inaltérés pendant la for- malion des dépôts du Crétacé supérieur (Sénonien). Quelques débris de végétaux s'y rencontrent, mais Ja plupart des fossiles appartiennent à une faune marine riche en Ammonites, du type Indo-Paci- fique. Les dernières couches crétacées ne con- tiennent pas d'Ammoniles, mais une faune de Bivalves et de Gastéropodes, dont les plus proches parents se retrouvent en Patagonie. Après le dépôt de ces dernières assises, il y a dans la succession des sédiments un hiatus jusqu’à l'Oligocène supérieur ou au Miocène inférieur. Durant cette période la région fut soulevée, et c’est vraisemblablement d'alors que date la ON de la chaîne montagneuse. Le long d'une ligne courbesillonnant ces régions du Sud-Ouest au Nord-Est sortirent de puissantes masses de magma dioritique, donnant lieu, par la différenciation de leur solidification, à une série de roches éruptives à étroite parenté : granite, dio- rite, gabbro. A l'Oligocène supérieur ou au Miocène inférieur, la mer envahit la partie basse sud-est non plissée de la chaîne. L’affaissement et la sédimentation sem- blent s'être strictement contrebalancés pendant les temps miocènes. La faune de ces couches est inti- mement liée à celle du Miocène marin de Patagonie. Au Miocène supérieur, après le soulèvement, le Tertiaire et le Crétacé supérieur furent presque totalement arasés, laissant à nu le Sénonien infé- rieur. C'est sur cette aire dénudée que de violentes éruptions subaériennes entraînèrent des nappes de tufs basaltiques. Au Pliocène, une nouvelle transgression déposa sur ces tufs des conglomérats à Pecten. Il semble hors de doute que ces lufs et les conglomérats à Pecten couvrirent une surface supérieure à celle des terres actuellement émergées et que les canaux « Crown-Prince Gustav », « Amiralty Sound », « Sidney Herbert Sound » et « Frithiof Sound » sont postérieurs à sa formation. On peut supposer que ces vallées furent, au moins sur une grande étendue, séparées des terri- _loires que recouvraient les tufs par les agents du modelé terrestre, à une époque où la région était plus élevée qu'aujourd'hui. Ces phénomènes durent se produire pendant le Pliocène ; il est très pro- bable que les grandes glaciations continuèrent le ravinement et l'ablation des matériaux, repris ensuite par l'érosion fluviale et les autres agents atmosphériques. Cette conception d'une région de plus grande altitude, à l’époque pré-glaciaire, coïncide avec le fait que, sur la côte nord-est de la terre de Graham, ont été observées les traces d’un fleuve de glace qui remplissait autrefois le détroit de Gerlache, à une profondeur de plus de 600 mètres au-dessous du niveau de la mer actuelle. La présence de ce glacier ne peut guère s'expliquer que par une suré- lévation de la région au-dessus de son niveau de base. Un autre fait important, relatif à la première glaciation, est qu’elle était plus étendue qu'aujour- d'hui. Quant aux oscillations du niveau de base pendant les périodes glaciaires, elles restent à l’état de problème, surtout en ce qui concerne l’île Sey- mour. Par contre, l'étude du Post-glaciaire permet de conclure à un léger soulèvement de « Graham- land ». L'auteur termine en insistant sur les analogies des terres de Graham et de l'Amérique du Sud. Avec Arctowski, Frickler, Nordenskjold et Wil- ckens, il conclut que l’orographie et la structure des deux régions sont symétriques, que les trans- gressions et régressions y sont synchroniques. Les points de ressemblance y sont si nombreux que l’on peut dire d’un continent qu'il est la représen- tation de l’autre. Joseph Révil, Président de l'Académie des Sciences, Belles-lettres et Arls de Savoie. 306 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Desmons (R.), /ngénieur. — L'équilibre des aéro- planes. — 1 hroch. in-8° de 56 pages, avec fiqures. (Prix : 4 fr. 50.) L. Vivien, éditeur. Paris, 1910. Les éléments fondamentaux des aéroplanes, en deñors des surfaces portantes, sont le moteur et les organes de stabilisation de l'équilibre dynamique. Dans diverses conférences, M. Painlevé a élégamment présenté au grand public le fonctionnement de ces derniers organes, c'est-à-dire les moyens de s'opposer au tangage, au roulement el au festonnage des appa- reils d'aviation, et d'autre part, dans de belles et savantes leçons, il a discuté, avec toute la précision possible, les difficiles questions de Mécanique posées par la mise en œuvre de ces moyens. En attendant que l’'éminent académicien réunisse ses divers exposés en une œuvre qui rendra tout autre travail similaire inu- tile, on aurait tort d’en vouloir aux « ingénieurs », qui, comme M. Desmons, font prendre patience aux personnes curieuses de prendre quelque idée des pro- cédés automatiques ou commandés dont on use pour maintenir la stabilité longitudinale et transversale. Mais que les lecteurs ne se fassent pas illusion : les choses sont plus complexes que l’auteur ne le laisse entendre. A. BOULANGER, Professeur à l'Université de Lille. Bellot (André), Capitaine d'Artillerie détaché au Ser- vice géographique de l Armée. — Carte de l’île de Délos au 1/10.000°, avec un Commentaire expli- catif. (/ntroduction à l'Exploration archéologique de Délos faite par l'Ecole Française d'Athènes.) —1 vol. in-4° de 44 pages, avec 6 fig., 9 tableaux et 2 cartes. Fontemoing et C, éditeurs, k, rue Le Goff. Paris, 1910. L'Ecole française d'Athènes a poursuivi activement, depuis quelques années, l'exploration archéologique de l’île de Délos, dans l'archipel des Cyclades, où se trouvait dans l'antiquité le sanctuaire le plus fréquenté et la ville maritime la plus florissante de la Méditer- ranée orientale. Les résultats des fouilles entreprises méthodiquement depuis 1903, grâce à la générosité du duc de Loubat, ont été considérables. M. Holleaux, directeur de l'Ecole francaise d'Athènes, s’est proposé de les faire connaître au public savant, dans une grande publication, abondamment documentée, et pré- sentant, dans toute la mesure du possible, ce caractère complet et définitif que réclame la science archéolo- gique contemporaine. Estimant que l'indispensable prélude d'une telle publication était l'établissement d’une carte exacte de l'ile, M. Holleaux à demandé en 1906 à M. le Ministre de la Guerre, et obtenu de lui, qu'un officier du Service géographique de l’Armée fût chargé de l'exécution de ce travail. Le capitaine Bellot, de la Section de Géodésie du Service géographique, et qui avait appartenu anté- rieurement à la Section de Topographie de ce service, mis dans ce but à la disposition de l'Ecole française d'Athènes, a fait à Délos deux séjours d'environ cinq mois chacun, en 1907 et en 1908. Au cours de ses mis- sions, il a établi une triangulation complète, mesuré une base, déterminé les coordonnées astronomiques fonda- mentales, et levé une carte précise de l'île, à l'échelle du 1/10.000°. La gravure et le tirage de cette carte ont été exécutés au Service géographique. L’exposé de l’ensemble des travaux géodésiques et astronomiques ainsi que des procédés de levé forme, avec la carte elle- même, le premier fascicule de la publication projetée. L'Ecole française d'Athènes s’est conformée ainsi, et ET INDEX avec juste raison, à l'usage, répandu surtout à l’étran- ger, de joindre aux documents cartographiques pro- prement dits l'exposé technique des levés. Il était d’au- tant plus justifié de se conformer à cet usage pour la carte de Délos qu'elle se distingue des cartes à la même échelle par diverses particularités qui lui donnent une originalité propre. La région à lever, d'une faible étendue, mais d’une topographie extrêmement com- pliquée, demandait à être représentée avec une très grande précision, se conciliant autant que possible avec une figuration à l'effet; les méthodes normales, eu égard à ces conditions spéciales, ont dû subir des modifications, ou plus exactement des adaptations qu'il était nécessaire d'expliquer. Il convenait, en outre, de joindre, à ce commentaire, les tableaux et rensei- gnements numériques constituant, pour ainsi dire, le dossier scientifique de la carte, afin qu'on pûüt appré- cier exactement la précision avec laquelle les opéra- tions géodésiques, astronomiques, topographiques ont été exécutées. Ce travail fait le plus grand honneur au capitaine Bellot, ainsi qu'aux méthodes géodésiques et topogra- phiques employées au Service géographique de l'Armée. Il est tout à l'honneur de la science française. C1 R. BourGEois. Chalon (Paul-F.), /ngénieur-conseil des Mines. — Manuel du Mineur. Recherches des Mines et leur exploitation.— 4° édition. —14 vol. in-12de633 pages, avec 95 figures. (Prix : 12 fr. 50.) Ch. Bérenger, éditeur. Paris, 1910. : Quel art intéressant el complexe, celui de l’ingé- nieur des mines! Il faut, pour le pratiquer dignement, être géologue, afin de savoir où l’on a chance de trouver le minerai cherché, minéralogiste pour le reconnaitre, chimiste pour l’analyser. Et toutes ces connaissances délicates et variées resteraient insuffisantes si l’ingé- nieur n'était guidé dans la prospection — la partie assurément la plus difficile de son œuvre — par un flair spécial. Le minerai une fois découvert, soit par des affleu- rements, soit par les résultats d'un sondage heureux, reconnu assez riche pour être fondu, il faut, pour dé- cider s'il donnera ou non lieu à une exploitation ré- munératrice, apprécier l'importance du gîte, les diffi- cultés techniques de l'exploitation, les conditions économiques qu'il rencontrera sur le marché. La mise en valeur reconnue possible, il faut foncer des puits, percer des travers-bancs, aménager l’exploi- tation, abattre la roche, la transporter jusqu'à la recette du puits, l’élever au jour, la préparer mécani- quement pour la rendre utilement transportable et fusible. Et, à côté de ces services essentiels de la mine, que de services accessoires, indispensables pour rendre possibles les premiers : l'éclairage si délicat, pour peu qu'il y ait du grisou dans la mine, l'épuisement de l'eau, l’aérage des galeries, le remblayage des parties exploitées, le transport des ouvriers! Autant de bran- ches d'une importance capitale, au point de vue de la sécurité de ces derniers! A côté des connaissances techniques nécessaires pour diriger tous ces services, l'ingénieur doit encore avoir des notions très précises sur la législation. Il trouvera tous ces renseignements condensés avec méthode et sans sécheresse dans le manuel de M. Cha- lon, qui en est à sa quatrième édition revue et consi- dérablement augmentée : elle mérite de retrouver le succès de ses ainées. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 307 2° Sciences physiques Chwolson (0. D.), Professeur de Physique à l'Uni- versilé de Saint-Pétersbourg. — Traité de Phy- sique (Traduit sur les éditions russe et allemande par M. E. Davaux, /ngénieur de la Marine). Tome IT, fascicule À : Thermométrie, Capacité calorifique, Thermochimie, Conductibilité calorifique. — 1 vol. in-8° de 408 pages, avec 126 fig. (Prix :13 fr.) A. Hermann et fils, éditeurs. Paris, 1909. Le Tome II du Traité de Chwolson débute par l'étude de l'énergie calorifique, que l’auteur définit comme celle du mouvement uniformément inorganisé des corps, produit par les chocs continuels des molé- cules entre elles. Ce mouvement inorganisé s'établit de lui-même; c'est la forme la plus probable de mou- vement des molécules, et tout mouvement non calo- rilique de la matière a une tendance à se changer en mouvement calorifique. La première notion de l'énergie calorifique nous est donnée par une sensation de nature particulière, pro- duite par les corps que nous touchons ou qui se trouvent près de nous. Ces sensations se rangent, d'après leur intensité, en une suite continue, partant pour ainsi dire d’un certain zéro et s'étendant dans les deux sens. Le degré d’échauffement d'un corps s'appelle température, et l’auteur étudie d'abord les moyens de déterminer cette température, c'est-à-dire les méthodes de la thermométrie. Les parties les plus nouvelles de ce premier chapitre se rapportent à la mesure des températures très élevées (pyromètres) et très basses. Une variation dans la provision d'énergie calorifique d'un corps entraîne le changement de presque toutes les propriétés de ce corps; le changement le plus apparent est celui du volume ; aussi l’auteur aborde-t-il ensuite l'étude de la dilatation, dans les trois états solide, liquide et gazeux. - La chaleur élant une forme de l'énergie, comme telle elle est quantitativement invariable ; mais elle peut avoir pour origine la transformation d’autres formes de l'énergie, et inversement disparaitre elle- même en tant que chaleur pour prendre de nouvelles formes de l'énergie. La chaleur qui apparaît ou dis- parait, de même que celle qui passe d'un corps à un autre, représente une grandeur physique que l’on peut comparer quantitativement à une autre grandeur de même espèce ; il faut choisir à cet effet une unité déterminée de quantité de chaleur et établir des méthodes pour la comparaison d’une quantité de chaleur donnée avec cette unité. C'est le but du cha- pitre suivant de cette partie, où l’auteur, après le choix d'une unité pratique de chaleur, la calorie, décrit les méthodes, dites calorimétriques, qui servent à déterminer la capacité calorifique des corps, dont il distingue la capacité calorifique d’une substance déterminée ou capacité calorilique d'un corps formé de cette substance et possédant l'unité de poids. Un cas particulier où la chaleur est produite à partir d’autres formes de l'énergie est celui où l'éner- gie chimique se transforme en énergie calorifique : il s'agit alors des phénomènes thermochimiques, dont l'étude fait également l'objet d’un chapitre particulier. Le phénomène inverse de la transformation de la chaleur en d'autres formes d'énergie a été ou sera abordé dans d’autres volumes de l'ouvrage; l’auteur envisage seulement ici le phénomène du refroidisse- ment des corps, qui est en partie une transformation de la chaleur en une autre forme d'énergie, l'énergie rayonnante, et qui est lié d'autre partaux phénomènes de convection et de conduction calorifique, lesquels constituent le sujet de dernier chapitre du présent fascicule. L'auteur à évité d'introduire le terme de chaleur rayonnante, celle-ci n'étant pas autre chose que l'énergie rayonnante infra-rouge, qui a été étudiée en détail dans le tome IT. Tel est le contenu du présent fascicule, qui reste à la hauteur des précédents par la logique et la clarté du mode d'exposition. Loppé (F.), Zngénieur des Arts et Manufactures. — Emploi des accumulateurs. — Un fascicule in-8° de T4 pages, avec 4ÿ figures, de l'Encyclopédie élec- trotechnique. (Prix : 2 fr.) Geissler, éditeur. Paris, 1910. La théorie des accumulateurs, la pratique de leur fonctionnement et de leur installation sont présentées par M. Loppé avec méthode et clarté. La compétence de l’auteur, la précision de son style lui ont permis de condenser en quelques pages ce qui est dilué souvent dans de gros volumes. C’est une réelle qualité, et cet opuscule mérite d’être recommandé. G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. Hollard (A.), Docteur ès Sciences, et Bertiaux (L.), Essayeur du commerte.— Analyse des métaux par électrolyse. Métaux industriels, alliages, mine- rais, produits divers. — 2° édition entièrement refondue et augmentée. — À vol. in-8° de 256 pages. (Prix : 9 fr. 50.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Nous ne pouvons que répéter, pour cette nouvelle édi- tion, ce que nous disions de la première il y a trois ans (/tev. Gén. des Se.,1906, p. 948). Ecrit par un auteur fortement spécialisé, théoriquement et pratiquement, dans l'analyse des produits métallurgiques, ce livre à obtenu le succès sur lequel il était en droit de compter et que nous lui prédisions alors. Gette seconde édition est la consécration de ce succès. C. MARIE, Docteur ès Sciences, 3° Sciences naturelles Walle (Paul). — Au pays de l'or noir (Para, Ama- zonas, Matto-Grosso). —%1 vol in-8° de 244 pages, avec fig. (Prix : 4 fr. 50.) Æ. Guilmoto, éditeur, 6, rue de Mézières. Paris, 1909. Ouro preto, l'or noir, c'est le nom donné par les Brésiliens à l’une des plus précieuses richesses natu- relles de leur pays : le caoutchouc. Cette gomme est produite par divers végétaux, dont le plus important est l’Hevea brasiliensis, arbre qui se rencontre en abondance dans tout le bassin de l’Amazone. Aussi cette région est-elle par excellence la région produc- trice de caoutchouc : en 1907, elle en a exporté pour 38.000 tonnes (plus de la moitié de la production mon- diale), représentant à cette époque une valeur de plus de 400.000.000 de francs. M. Paul Walle, qui a visité récemment le Brésil, s'est proposé de donner dans cet ouvrage ses observations et impressions sur l'Amazonie et sur l'exploitation du caoutchouc dans cette région. Les trois Etats brésiliens qui se partagent ce vaste territoire sont ceux de Para, à l'embouchure de l'Ama- zone, d'Amazonas, comprenant tout le haut cours du fleuve jusqu'aux Andes, et de Matto Grosso, à cheval sur le haut cours des affluents de droite de l’'Amazone et sur celui du Paraguay et du Parana. L'auteur en donne une description générale, trace un tableau de la vie de leurs capitales : Bélem ou Para, Manaos et Cuyaba, et insiste surtout sur leurs voies de commu- nication, instruments indispensables de l'exploitation du pays. L’Amazone et ses affluents constituent heu- reusement un réseau fluvial incomparable, puisque sur le cours principal les grands transatlantiques remontent sans rompre charge jusqu'à Manaos, à envi- ron 1.550 kilomètres de l'embouchure, et des navires de tonnage un peu moindre vont jusqu'à Iquitos, à la frontière du Pérou, et que les affluents sont navigables 308 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX sur une longueur totale d'à peu près 18.000 kilomètres pour des navires de 3.000 tonnes. Seul le Matto-Grosso est isolé de ce vaste bassin par les rapides de la Madeira et ses exportations se font actuellement par le sud; mais un chemin de fer en construction entre la Madeira et la Mamoré mettra bientôt en communication facile le nord du Matto-Grosso avec l'Amazone. Le roi des arbres à caoutchouc du Brésil, comme nous l'avons déjà dit, est l'Hevea, dont il existe un grand nombre d'espèces dans le bassin de l’'Amazone ; il donne la meilleure gomme, appelée seringa. À côté de lui poussent de nombreuses autres plantes à gommes: les Castilloa, qui donnent un produit appelé caucho; des Euphorbiacées du genre WMicrandia, des Apocynées du genre Aancornia, fournissant le produit appelé mangabeira, enfin, le Manihot Glaziowii, donnant le caouchouc de Ceara, et plusieurs autres Ficus et Lan- dolphiées. L'exploitation des arbres à caoutchouc est faite, dans toute l'Amazonie, selon le mode suivant : Tout particulier ou Société qui désire s'assurer la jouissance d'une certaine superficie de terrains renfermant ces arbres adresse au gouverneur une demande de conces- sion, Cette concession, divisée en un certain nombre de lots ou seringaes, est exploitée par des seringueiros et leurs familles, engagés par les propriétaires et venant du Ceara ou du Para; lorsqu'ils le peuvent, un certain nombre d'entre eux acquièrent un seringal et tra- vaillent alors à leur compte. Les seringueiros recon- naissent d'abord les arbres exploitables, qu'ils relient par un sentier, puis les incisent avec une hachette pour faciliter la sortie du latex et placent des godets au-dessous des incisions. Chaque jour, avec un seau en fer-blane, ils vont recueillir le contenu des godets. Puis le latex est coagulé par fumigation sur une pelle plate au-dessus d'un feu de bois vert el mis sous forme de boules. La récolte achevée, qui est en moyenne de 00 kilogs par seringueiro, est dirigée sur Manaos ou Para, chez les commissionnaires qui la réexpédient en Europe ou aux Etats-Unis. Les procédés d'exploitation des arbres à caout- chouc sont encore très rudimentaires dans la plus grande partie de l’Amazonie; les producteurs intelli- gents se sont préoccupés de les améliorer et leurs efforts ont porté surtout dans deux directions : mode d'incision des arbres et coagulation du latex. Une solu- tion satisfaisante de ces deux questions aura pour effet à la fois une augmentation de la production et une amélioration de la qualité. Les réserves naturelles d'arbres à caoutchouc de l'Amazonie sont considérables; mais une exploitation trop intensive, provoquant la mort des arbres, arrive- rait sans doute assez vite à les épuiser. En prévision de cette éventualité, on à tenté depuis une quinzaine d'années la culture de l’Hevea à Ceylan, dans les Etats malais et les iles de la Sonde. La production actuelle n’est pas encore très importante, mais le caoutchouc de plantation se vend déjà à des prix légè- rement supérieurs à ceux du para fin. Malgré cela, M. Walle ne croit pas qu'il détrône jamais le caoutchouc naturel, qui, d'après lui, possède une supériorité indiscutable. Etant données les conditions climatéri- ques qui font de l’Amazonie la patrie par excellence des bons arbres à caoutchouc, la création de planta- tions d’Hevea s'impose dans cette région à mesure que les forèts s'épuisent; elle lui permettra de garder le premier rang dans la production. D'ailleurs, le sort du bassin de l’Amazone n'est pas absolument lié à la prospérité de l'exploitation du caoutchouc, et M. Walle montre, en terminant, que diverses cultures pourraient y devenir rapidement prospères, comme celles de la noix du Brésil, du cacaoyer, du tabac, du manioc, de diverses plantes médicinales; enfin, l'élevage, déjà florissant dans l'ile de Marajo, pourrait également être la source de gros prolits. L. BruNET. Delage (Yves), Membre de l'Institut, Professeur à la Sorbonne, et Me Goldsmith, Secrétaire de l Année biologique. — Les Théories de l’Evolution. — 4 vol. in-18 jésus de 371 pages de la Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix : 3 fr. 50.) E. Flam- marion, éditeur. Paris, 1909. Dans cet ouvrage, les auteurs passent en revue les différentes théories relatives à l'évolution des êtres, depuis les débuts de l'idée transformiste (à la fin du xvin® siècle), jusqu'à la période contemporaine; ils retracent, pour ainsi dire, l'origine, le progrès et la décadence de chacun des facteurs explicatifs proposés. Le plus célèbre d’entre eux, la sélection naturelle, invoqué par Darwin et Wallace, apparaît d'abord comme inséparable du transformisme, et il faut bien dire que celui-ci ne s’est imposé que parce qu'il était, pour la première fois, accompagné d’une explication au moins vraisemblable; puis, il devient exclusif avec les néo-darwinistes comme Wallace et Weismann, pour être ensuite ramené à une importance secondaire par les néo-lamarckistes comme Cope et Eimer. La théorie de la sélection sexuelle, imaginée par Darwin pour résoudre la question d'origine des caractères propres à un sexe, a été l'objet de si nombreuses cri- tiques qu'elle n’est pas loin d’être tout à faitabandonnée. Les théories sur l'Hérédité sont considérées succes- sivement au point de vue spéculatif (gemmules de Darwin, pangènes de De Vries, déterminants de Weis- mann), et au point de vue statistique et expérimental (loi de Galton et règles de Mendel); les conceptions biomécaniques de Roux (lutte des parties et excitation fonctionnelle), bien que relatives surtout à l’ontogé- nèse, sont étudiées dans ce chapitre, comme s'oppo- sant aux théories microméristes. Les discussions théoriques et l'exposé des observa- tions et expériences touchant l'hérédité des caractères acquis tiennent une grande place, et à Juste titre, car c'est peut-être sur ce point que les divergences, au moins entre les zoologistes, sont les plus notables : il y a, en effet, contradiction entre ce que la plupart des observations pures permet de regarder comme vrai- semblable, et les résultats des expériences tentées. Les auteurs n'ont pu se défendre de prendre parti; ils acceptent que certains caractères acquis par l'usage (callosités et bosse des Chameaux), le non-usaxe, la pression (observations de Hyatt sur la loge primaire des coquilles de Céphalopodes), l’action de la lumière (expérience de Cunningham sur la face inférieure des Poissons plats), ete., sont transmissibles, bien qu'il soit actuellement bien difficile de comprendre le méca- nisme de cette hérédité; par contre, d'autres carac- tères acquis, tels que les mutilations, qui ne produisent aucun changement qualitatif dans le sang, ne seraient pas héréditaires. Deux chapitres sont consacrés à l'or- thogénèse d'Eimer, et aux mutations de De Vries; les auteurs ne considèrent pas la théorie de De Vries comme une explication générale de l'évolution, pou- vant remplacer les autres hypothèses existantes, mais simplement comme l'indication d’une des voies pos- sibles de cette évolution: il est, en effet, vraiment incompréhensible que des biologistes mal informés aient cru y trouver une doctrine opposable à celle de Darwin, alors que De Vries lui-même n'y voit qu'une précision et une extension des idées darwiniennes. M. Delage et Mie Goldsmith lui reprochent de ne pas fournir une explication générale du fait important et général de l'adaptation; il est juste de dire, cepen- dant, que De Vries et bien d'autres biologistes, Mor- gan, Davenport, et moi-même, ont indiqué comment on pouvait concevoir l'adaptation; c'est le milieu qui exerce un triage entre les différents biotypes, ne lais- sant subsister que les formes adaptées préalablement aux conditions ambiantes, ce qui donne l'illusion d'une adaptation effectuée après coup ; il reste à rechercher, il est vrai, les voies et moyens par lesquels elle se perfectionne. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX En somme, aucun des systèmes examinés ne fournit une solution générale absolument satisfaisante du pro- blème de l'évolution ; mais, sans doute, les facteurs auxquels chacun d'eux fait appel jouent tous un rôle, qu'il est, à l'heure actuelle, difficile de préciser, parce qu'ils interfèrent inextricablement les uns avec les autres. Il est possible qu'il n’y ait plus rien à décou- vrir de vraiment neuf et que la solution réside sim- plement dans l'attribution rigoureuse à chacun des facteurs déjà connus de la part exacte qui lui revient; c'est à cette manière de voir que les auteurs sont enclins à se rallier. Le lecteur trouvera dans ce livre, non pas une doc- trine homogène et complète, exposée ex cathedra, et résolvant ou prétendant résoudre toutes les difficultés, mais une exposition admirablement claire et exacte de théories et de manières de voir qu'il est très difficile de résumer sans les déformer, accompagnée d'une cri- tique simple et souvent saisissante; peut-être pour- rait-on adresser aux auteurs le léger reproche d'avoir accueilli, dans leur souci d'être impartial et complet, des hypothèses périmées ou très peu vraisemblables, comme par exemple celle qu'un philosophe bien connu, M. Le Dantec, a émise à propos de l'hérédité mendé- lienne; mais, après tout, ces hypothèses ont leur place dans l'histoire des idées, L'ouvrage de M. Delage et Mie Goldsmith comblera, dans la littérature scienti- fique de langue française, une lacune très regrettable, et il n'est pas douteux qu'il rendra les plus grands services aux étudiants en Biologie, qui ne peuvent que difficilement se reporter aux ouvrages originaux ; ils ne sauraient trouver un tableau plus fidèle, ni une critique plus compétente des théories sur l'évolution des espèces. L. Cuénor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Fleig (D: C.) (de Montpellier). — Les eaux minérales, milieux vitaux. Sérothérapie artificielle et Bal- néologie tissulaire par leur injection dans l'orga- nisme.— 1 vol. in-8° de 513 pages, avec 16 figures dont 45 Lors texte. (Prix : 10 fr.) Maloine, éditeur. Paris, 1910. Cet ouvrage, considérable, expose el semble des recherches poursuivies par plusieurs années relativement à la l'emploi des eaux minérales naturelles comme sérums arlificiels (milieux vitaux). Il à été manifestement inspiré par les travaux très connus de M. Quinton rela- tifs à l’eau de mer. La première partie est consacrée surtout à la genèse de cette étude et à la revendication d'une priorité qui semble justifiée d’après les documents reproduits. La deuxième partie examine les conditions essen- tielles que doivent remplir les diverses eaux minérales pour pouvoir être utilisées comme sérums artificiels (eaux « à minéralisation banale », eaux « à minérali- sation spéciale », concentrations moléculaires, stérili- sation, conservation, etc.). Ici interviennent des considérations fort suggestives, relatives à la tonomé- trie comparée des « humeurs » et des eaux miné- rules. La troisième partie apporte la démonstration ex- périmentale de la conception des eaux minérales naturelles considérées comme milieux vilaux. Cette démonstration s'appuie sur les trois groupes de faits suivants : 4° leur injectabilité en quantités énormes et par les diverses voies possibles, chez l'animal et chez l’homme : 2 les effets de leurs transfusions après des saignées massives chez l'animal et chez l’homme ; 30 les faits de survie et de reviviscence d'organes ou d'éléments cellulaires isolés du corps dans les eaux minérales (organes à fibres lisses, organes à fibres striées, globules rouges, spermatozoïdes, etc.). La quatrième partie traite des effets physiologiques condense lFen- l'auteur depuis possibilité de 4 309 provoqués par les injections d'eaux minérales (phéno- mènes réactionnels ; action sur le sang et la circula- tion ; coagulation, rénovation globulaire, pression sanguine, contraction cardiaque; excrétion et nutri tion). Elle semble démontrer que leur action est sou vent plus puissante que celle du sérum physiologique ordinaire. La cinquième partie, enfin, est consacrée à l'exposé des déductions et applications thérapeutiques. D'après l'auteur, et d'une facon générale, on devra songer à l'emploi des injections d'eaux minérales dans les cas où les injections de sérum artiliciel ou d'eau de mer isotonique sont indiquées et dans ceux où l'on croira avoir intérêt à appliquer une cure hydrominérale devant réaliser le maximum des conditions d'activité. Diverses observations cliniques favorables sont citées au cours de ce travail, telles que : adénites tubercu- leuses, ostéites, certaines formes de tuberculose pul- monaire, lymphatisme, asthénies, anémies, paludisme, diabète, rhumatisme chronique, ulcères, eczémas, psoriasis, syphilis grave, ete. Celle partie est, évidemment, beaucoup moins étoffée que la partie expérimentale, et les indications des injections des eaux des divers groupes d'eaux minérales ont besoin, pour bien se préciser, de nom- breuses études cliniques; mais, dès aujourd'hui, on peut affirmer que le champ de ces applications cli- niques est extrèmement étendu. Les résullats dès maintenant obtenus sont riches de promesses. D' ALrnen MARTINET. 5° Sciences diverses Solvay (Ernest). — Energétique sociale et poli- tique positive. lievue économique internationale. — Bruxelles, janvier 1910. « La politique ne serait-elle pas arrivée à un tour- nant de son évotution ? Les méthodes qu'elle met en œuvre sont-elles bien encore de notre époque? » Telles sont les questions, d'un passionnant intérêt, puis- qu'elles mettent en jeu l'avenir même des sociétés, que se pose l'éminent fondateur des Znstituts Solvay, et il est aisé de deviner la réponse qu'il y apporte. Ce n’est pas en France, certes, qu'il est nécessaire de faire longuement le procès de l'élu et de l'électeur, ainsi que du Parlement, fidèle représentation de l'un et de l’autre. M. Solvay va plus loin : plus encore que les hommes, il met les principes en accusation, et il s'attaque surtout au principe de liberté, entendu dans le sens de non-déterminisme scientifique. Au principe de liberté, son but est de substituer le principe de la détermination scientifique des éléments vitaux el Sociaux. Mais il ne pense pas, et nous croirions lui faire injure en l'en félicitant, qu'il suffise d'un coup de baguette pour que surgisse le progrès : « Il faut tenir compte de l’ordre de choses établi et que l'on ne peut brusquer. » Il s'agit moins de faire œuvre révolution- naire que d'entreprendre un travail de redressement, travail dont l’accomplissement demandera évidemment un certain nombre d'étapes. : Alors, à l'esprit logique et précis de M. Solvay, qui envisage le côté des applications au même titre que le côté théorique, une conclusion s'impose : « Il faut tenter effectivement d'introduire la méthode scienti- fique dans l’art d'organiser et de faire évoluer les groupes humains. » Et, avec la générosité qui lui est habituelle, avec une clairvoyance égale à sa générosité, il met au concours un certain nombre de questions relatives à la législation fiscale, à l'instruction, au désar- mement progressif, ete., concours auquel il consacre une somme de 50.000 francs en vue de stimuler les re- cherches et de récompenser les meilleurs travaux. La Revue générale des Sciences, qui a l'honneur de compter M. Solvay parmi ses collaborateurs, ne peut que souhaiter bon succès à sa noble entreprise. 310 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 14 Mars 1910. M. Ch. Lallemand est élu membre de la Section de Géographie et Navigation, et M. W. Hittorf, Associé étranger. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Riesz présente ses recherches sur certains systèmes d'équations fonc- tionnelles et l’approximation des fonctions continues. — M. L. Rémy démontre que les surfaces algébriques de degré donné d représentables sur la surface de Kummer sont en nombre limité : elles peuvent se déduire de cette surface par des transformations bira- tionnelles exprimées par des polynomes de degré infé- rieur à Xd, À désignant une constante numérique. — M. J. Larose communique ses recherches sur l’équa- tion des télégraphistes. — M. J. Boussinesq étudie la propagation verticale, aux grandes profondeurs, du mouvement des ondes par émersion dans les cas d'un canal ou d'un bassin horizontalement indéfinis. — MM. J. Baillaud, J. Chatelu et Giacobini ont décou- vert, à l'Observatoire de Paris, une nouvelle petite pla- nète, de grandeur visuelle plus faible que 13,5. — M. Ch. Nordmann déduit de ses recherches qu'Aldé- baran a une atmosphère au plus équivalente, au point de vue de son absorption générale, à quatre atmo- sphères solaires, et que Véga émet par unité de surface au moins 12 fois plus de lumière que le Soleil et au moins #3 fois plus qu'Aldébaran. — MM. H. Deslandres et P. Idrac ont étudié le spectre de la comète 1910 a obtenu à Meudon avec le spectrographe à fente le 29 janvier. Il présente les spectres complets des hydro- carbures et du cyanogène. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Nodon à constaté, depuis plusieurs années, qu'il se produit à certaines époques déterminées des variations brusques et rapides dans la direction et dans l'intensité du magnétisme terrestre, qu'il a mises en évidence à l'aide d’un magné- tomètre spécial. — M. H. Arctowski a reconnu qu'aux Etats-Unis les aires d’écarts positifs et d’écarts négatifs des variations des moyennes annuelles de la pression atmosphérique sont distribuées par zones qui se dépla- cent d'année en année d'un mouvement lent. — MM. H. et J. Becquerel et H. K. Onnes ont étudié la phos- phorescence des sels d'uranyle aux très basses tempé- ratures (14° absolus). La conclusion de leurs recherches est que l'explication de la phosphorescence de ces sels doit être recherchée dans des mouvements contenus dans l'atome de l'uranium lui-même et dans la struc- ture des molécules qui le renferment. — MM. P. Weiss et H. K. Onnes ont déterminé l'intensité d’aimanta- tion à saturation du nickel, du fer et de la magnétite à 20° absolus avec un champ de 20.000 gauss. L’aug- mentation, par rapport à la température ordinaire, est respectivement de 1,0546, 1,0210 et 1,0569. — Les mêmes auteurs ont reconnu que le manganèse, le vanadium et le chrome restent très faiblement magné- tiques à 14° absolus. Toutefois, du manganèse pulvé- rulent, très pur et paramagnétique, est devenu ferro- magnétique après fusion au four électrique. — M. P. Vaillant montre que, quand un liquide s'évapore dans un vase cylindrique indélini, la surface d'évaporation étant à une grande distance au-dessous du bord du vase, la vitesse d'évaporation ne devient jamais cons- tante et reste inversement proportionnelle à la racine carrée du temps. — M. E. Estanave : Obtention simul- tanée du relief stéréoscopique et de l'aspect changeant dans l’image photographique (voir p. 313). — M. Ch. Féry présente un nouveau réflectomètre utilisant une surface réfringente sphérique, facile à employer pour les liquides. M. L. Bloch a reconnu que l'ionisa- tion par voie chimique (humide) est, comme l’ionisa- tion par barbotage, un phénomène superficiel, lié à la formation de bulles. — M. O. Boudouard à utilisé l'étude de l'amortissement des mouvements vibratoires de l'acier pour caractériser ce métal; les résultats sont encourageants et vont être élendus à divers métaux ayant subi des traitements thermiques différents. — M. M. Vèzes montre que l'analyse des essences de térébenthine par l'étude de leurs courbes de miscibi- lité avec l’aniline doit être précédée d'une distillation fractionnée de l'essence pour éviter certaines causes d'erreur. — M. Lecogq a obtenu par voie électrique une solution colloïdiale d’arsenic métalloïdique pur, stable en milieu neutre ou acide, de couleur brun-rouge foncé, qui s'oxyde immédiatement en présence de H*0* en milieu alcalin. — MM. A. Haller et Ed. Bauer ont constaté que les cétones aliphatiques R.CH*.CO.CIF, R.CH2.CO.CH°R, R2CH.CO.CH?R, R?CH.CO.CHR® peuvent échanger l’'H des résidus hydrocarbonés voisins de CO avec des radicaux alcooliques quand on les traite par l'amidure de Na et des carbures halogénés; les termes ultimes de la réaction sont des hexalkylacétones. Celles- ci se dédoublent, au sein du carbure aromatique, en un carbure aliphatique et une amide de la série grasse dans le cas d'une cétone symétrique, et en deux amides et deux carbures quand il s’agit de cétones non symé- triques. — M, J.-B. Senderens à soumis un certain nombre d'acides organiques à l’action catalytique de la thorine vers 430-4500. Ceux où COOI est uni direc- tement au noyau aromatique ne donnent pas de cétone symétrique; ceux où COOH se relie au noyau par l'in- termédiaire d'une chaîne forménique donnent une cétone symétrique. — M. F. Couturier montre que les cétones non saturées R.CO.CH* (où R présente un groupement éthylénique) donnent, par condensation avec l’éther formique, des cétoaldéhydes instables, formant des sels de cuivre bien cristallisés, d’où la cétoaldéhyde ne peut être isolée sans décomposition. — M. G. Darzens, en condensant le tétrahydrobenzène avec le chlorure d'acétyle en présence d’AICI dans CS*, et décomposant le produit de la réaction par la diéthyl- aniline, a obtenu la tétrahydro-acétophénone. Cette synthèse de cétones non saturées est générale; elle a lieu aussi en présence de SnCl'. — M. G. Malfitano et M': A. Moschkoff ont constaté qu'en congelant une solution colloïdale de fécule de pomme de terre, après fusion la plus grande partie de la substance amylacée forme un coagulum filamenteux; le liquide conserve les matières minérales de la fécule. — M. Bieler-Cha- telan à observé que l'extraction des terres par l’eau carbonique donne, mieux que les autres procédés d’at- taque, une mesure de la potasse assimilable du sol sensiblement conforme aux données de l'expérience culturale. 3° Sciences NATURELLES. — M. J. Tissot à reconnu que, lorsque la proportion d'oxygène dans l'air inspiré décroît, la ventilation pulmonaire tend à compenser cette diminution par un accroissement du débit respi- ratoire; la quantité totale d’O consommée par l'orga- nisme s'accroît par suite de l'augmentation du travail physiologique jusqu'au moment où les moyens de défense naturels contre l’anoxyhémie deviennent impuissants. — M. F. Maignon a observé que les injections de suc testiculaire déterminent chez les cobayes mâles une augmentation notable du glycogène musculaire, tandis que les femelles ne sont pas L a ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 11 influencées : la castration des cobayes mâles abaisse la teneur en glycogène. — M. Ranjard a traité un certain nombre de sourds par la sirène à voyelles; ses vibra- tions ont une action prépondérante sur la fonction des centres de la sensation auditive, qu’elles développent en totalité ou en partie. — MM. H. Dominici, G. Petit et A. Jaboin ont constaté une radio-activité persis- tante de l'organisme chez un cheval ayant reçu une injection intraveineuse d'un sel de radium insoluble (sulfate); cette radioactivité peut avoir une action thérapeutique. — M. J. Nageotte montre que la gaine de myéline des nerfs n’est pas un isolant inerte, mais une substance vivante, caractérisée par sa richesse exceptionnelle en graisse, différenciée en vue de fonc- tions végétatives ou accessoires. — M. P. Hachet- Souplet indique comment on peut employer le dressage des animaux comme moyen de recherche psycholo- gique : pour l'étude des facultés sensorielles, des lois des associations et de l'intelligence. — MM. A. Rodet et Lagriffoul ont traité 27 malades atteints de fièvre typhoïde par un sérum obtenu par injections intra- veineuses de bacilles vivants. Dans 62 °/, des cas, il y a eu amélioration immédiate; il n’y a eu que 2 décès. — M. H. E. Sauvage a observé chez le Phrynosome cornu un gros sanglion de forme grossièrement cordiforme, à pointe dirigée en dehors, fusion du ganglion d'Andersh et du ganglion du pneumogastrique. — M. L. Bordas présente quelques considérations générales sur les tubes de Malpighi des larves de Lépidoptères. — M. P. de Beauchamp a reconnu que, chez le Dinophilus, l'existence de la parthénogénèse naturelle est liée au dimorphisme sexuel; mais cette parthénogénèse ne peut que suppléer pendant quelques générations à l'absence des mâles et entraîne en se prolongeant la dégénérescence de la lignée. — Mie Cernovodeanu et M. V. Henri ont constaté que les rayons ultra-violets produisent dans le protoplasme des microbes des trans- formations chimiques et physiques qui modifient com- plètement toutes ses réactions de coloration. Cette action est bien différente de celle de la chaleur, de H°0* et des fixateurs ordinaires. — MM. A. Trillat et Sauton ont reconnu que les atmosphères viciées, en petite quantité, ont une action favorisante sur le développement des microbes, tandis qu'en plus grande proportion elles ont un effet antiseptique. — M. L. Ravaz a fait de nombreuses expériences sur la vigne relativement à l'influence spécifique réciproque du sujet et du greffon, et jamaisil n'a pu la mettre en évi- dence. — M.G. André distingue dansle développement d'une plante bulbeuse deux périodes : la première, ou période germinative, où les organes aériens bénéficient d’une partie des réserves des organes souterrains, et la seconde, où la plante fonctionne comme une plante ordinaire. — MM. P. et N. Bonnet signalent l'existence du Trias et du Mésojurassique aux environs de Djoulfa (Transcaucasie méridionale). — MM. C. A. Ktenas et Ph. Négris ont constaté la présence de couches à Ellipsactinia aux monts Vardussa et sur la zone orien- tale du Flysch d'Etolie en Grèce. Ces faits ne sont pas d'accord avec l’âge éocène admis jusqu'à présent pour ce Flysch, à moins d'admettre des phénomènes de charriage. — M. Alb. Michel-Lévy montre que les pechsteins de l’Estérel ne se présentent pas en veinules aberrantes dans la masse des pyromérides, mais consli- tuent localement la base des coulées ou les salbandes des dykes. Leur genèse est en rapport avec un refroi- dissement brusque du magma de ces roches. Séance du 21 Mars 1910. M. C.-Th. Albrecht est élu Correspondant pour la Section de Géographie et Navigation. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Haag présente ses recherches sur quelques nouvelles familles de Lamé. — M. À. Chatelet décrit une nouvelle méthode de transformation des fractions continues arithmé- tiques, au moyen de laquelle il démontre le (héorème : Si, à partir d’un certain raug, certains quotients F- incomplets d’un nombre 4/6 se reproduisent périodi- quement, et si les autres, tout en augmentant indéfini- ment, ont, relativement à tout module entier, des restes se reproduisant périodiquement, la même pro- priété est encore vraie pour toute transformée homo graphique de x/6 à coefficients entiers et de détermi- nant différent de zéro. — M.J. Hadamard poursuit ses recherches sur les ondes liquides en envisageant un liquide non indéfini, mais limité par des parois solides données. — M. J. Guillaume présente ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le 4° trimestre de 1909. L'aire totale des taches a presque doublé par rapport au trimestre précédent. — M. B. Galitzine a appliqué à 12 tremblements de terre de 1909 sa méthode de détermination de l’épicentre d'après les données d'une seule station sismique et a obtenu un accord très satisfaisant. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. Cotton et H. Mou- ton ont constaté qu'en divisant les valeurs observées pour la biréfringence électrique des liquides aroma- tiques par les valeurs de la constante diélectrique, on obtient des nombres sensiblement proportionnels aux biréfringences magnéliques. — M. Ch. Maurain à observé que l’aimantation ordinaire du fer, correspon- dant à un champ magnétique très faible, s'accroît beau- coup quand la température s'élève et atteint un maxi- mum très accentué à une température voisine du point critique. L'aimantation anhystérétique, très grande dès la température ordinaire, éprouve des variations plus faibles jusqu'au voisinage de la température critique. — M. Robin a constaté qu'à la température ambiante la hauteur du son principal émis par des barres de fer de dimensions égales semble varier en sens inverse de la teneur en carbone. Lorsque la température croît, le son s'éteint complètement vers 100°, pour reparaîitre vers 150°, passer par un maximum et s'éteindre définitive- ment au rouge naissant. — M. J. Meunier montre que l'incandescence catalytique, dans la combustion à marche convergente, est en rapport avec l'intensité explosive du mélange gazeux. — MM. J. Ville et W. Mestrezat ont essayé l'hydrolyse fluorhydrique de la cellulose. À 30 °/,, l'acide agit faiblement ; à 40-50 °,,, le rendement en glucose est plus élevé, mais HF exerce une action destructive assez rapide sur le produit de l'hydrolyse. — M. M. Holderer a observé que la cala- lase de pore, la pepsine et l'émulsine d'amandes préci- pitée traversent les bougies de porcelaine en les alca- linisant de facon que la réaction soit neutre à la phtaléine. — M. J. Giaja à reconnu que, dans l'hydro- lyse de l'amygdaline par le suc d'Helix pomatia, il se forme un biose non réducteur, qu'il a pu isoler à l’état sirupeux ou sous forme de poudre amorphe. Chaufté par les acides minéraux dilués, il se transforme en glucose. — MM. L. Moreau etE. Vinet ont constaté que la quantité d’arséniate de plomb restant sur les grappes après traitement des vignes est relativement élevée ; elle s'élimine en partie au cours de la végétation. Les auteurs n'ont pas retrouvé d’arséniate de plomb dans le vin; il est éliminé dans les lies et mares. 30 ScreNcEs NATURELLES. — M. E. Metchnikoff, en füi- sant ingérer à un chimpanzé des matières fécales humaines riches en bacilles typhiques, a produit une fièvre typhoïde comparable à la maladie humaine, avec hypertrophie considérable des plaques de Peyer. — MM. Lagriffoul et Roger ont reconnu que la fièvre de Malte s'observe fréquemment dans l'Hérault et le Gard et existe même à Paris. Le sérum des malades conserve longtemps son pouvoir agglutinatif vis-à-vis du d/cro- cocens melitensis. — M.et Mn: L. Lapicque montrent que le phénomène de l'addition latente dans le muscle dépend essentiellement du rapport entre la durée de l'excitation et la constante de temps ou chronaxie qui caractérise l’excitabilité de chaque lissu. — M. M. Doyon a constaté que le foie isolé et lavé, puis soumis au passage du sang artériel normal, sécrète de l'anti- thrombine. En effet, ce sang est incoagulable et empêche in vitro le sang normal de coaguler. — 312 M. H.-E. Sauvage a observé dans la partie thoracique du grand sympathique chez les Sauriens un gros gan- glion, composé de deux renflements de forme ovalaire dont l’un possède un filet récurrent pénétrant dans la moelle. — M. L. Blaringhem montre que la mutilation (section des tiges au ras du sol au début de la florui- son) fait apparaitre les caractères anormaux de fruits fasciés ou dissociés de la lignée ANigella damascena polycephala, et de crêtes stigmatiques sur le dos des carpelles de N.d. cristata. —M.L. Lindeta reconnu que le rafraichissement des levains a moins pour but de fournir à la levure un nouvel aliment que de lui per- mettre de lutter contre la fermentation bactérienne ou acide et de diluer une substance toxique qui se forme aux dépens des protéides de la farine. — M.Ph. Glan- geaud à étudié l'architecture de la partie centrale des monts du Forez. Ce territoire semble formé par un anticlinal dissymétrique de direction N.-0. et à grand rayon de courbure, dont les flancs seraient découpés en une série de voussoirs effondrés vers les régions syneli- nales de la Dore et de la Loire. — M. V. Roussanof signale l'existence d'affleurements de glaces fossiles dans la Nouvelle- Zemble, restes de lambeaux de gla- ciers pléistocènes. — M.J. Repelin montre qu'il existe une concordance remarquable entre les courbes sis- misques relatives au tremblement de terre du 41 juin 1909 en Provence et le tracé des principales disloca- tions post-miocènes de la région. — M. M. Boule a déterminé quelques ossements fossiles du Dräa-el- Djérid, au sud de la Tunisie. Ils sont d'âge mio-plio- cène et offrent une curieuse association de types afri- cains et de types asiatiques. — MM. Nouaïlhac-Pioch et Edm. Maillet ont étudié les crues de la Seine de janvier-février 1910. Le maximum atteint a été de 82,42 au pont de la Tournelle, à Paris, le 28 janvier. Il a été dù à la coïncidence de l'arrivée des maxima de la Marne et de la Haute-Seine et d'une seconde crue du Loing. — M. J. Charcot adresse un résumé de son expédition vers le pôle Sud avec le Pourquoi Pas? ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 15 Mars 1910. M. Lucet est élu membre de l’Académie dans la Sec- tion de Médecine vétérinaire. MM. F. Raymond et H. Claude rapportent l’obser- vation d’un enfant de dix ans ayant présenté, trois ans auparavant, des signes de tumeur cérébrale. Pen- dant plus de deux ans, la maladie resta stationnaire et présenta mème des rémissions remarquables; puis, brusquement, les accidents reprirent leur évolution: l'hydrocéphalie devint manifeste, la cécité se produi- sit en quelques semaines. En outre, on constata un développement physique anormal du sujet, une adi- posité accusée ; des poils apparurent au pubis et sur la face. L'hydrocéphalie progressant, les membres se paralysèrent, l'intelligence s'engourdit et, pendant les derniers mois, le sujet resta dans un état de torpeur et d'asthénie absolues: l'amaigrissement apparut et l'enfant mourut d'infection broncho-pulmonaire. A l’autopsie, on trouva une grosse tumeur de la glande pinéale, de nature gliomateuse; l'hypophyse était ré- duite, les capsules surrénales présentaient de l'hyper- épinéphrie. — MM. Oui et Paucob présentent un tra- vail sur la mortalité infantile dans le milieu ouvrier de Lille. — MM. Courtois-Suffit et Beaufumé adres- sent un travail sur une épidémie de fièvre typhoïde par porteur de bacilles et par contagion. Seance du 22 Mars 1910. MM. Delagenière et Monprofit sont élus Correspon- dants nationaux dans la Division de Chirurgie. M. E. Kirmisson présente un Rapport sur un tra- vail de M. Ch. Nélaton, relatif à deux observations de greffes musculaires employées à combler des cavités osseuses créées par l’évidement chirurgical dans le traitement de l’ostéomyélite. Ce procédé convient ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans tous les cas où l’on ne peut employer le plom- bage de Mosetig et il est susceptible de fournir les ré- sultats les plus - avantageux. — M. Chauffard présente un Rapport sur un (ray ail de Sir D. Duckworth, rela- üf aux particularités de la diathèse arthritique. Cette diathèse comprend la disposition, dans la jeunesse, à l'infection rhumatismale, et, plus tard, aux manifesta- tions goutteuses. Alors que le rhumatisme est consi- déré comme infectieux et d'origine exogène, la goutte reste une maladie endogène, neuro-humorale, due à des troubles de la nutrition. — M. G. Marinesco pré- sente un travail sur la radiothérapie de la paralysie générale. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 12 Mars 1910. MM. A. Mayer, F. Rathery et G. Schaeffer ont re- connu que les granulations ou mitochondries du foie existent à l’état normal; elles ne paraissent subir aucune variation appréciable d'aspect ou de nombre au cours des différents régimes. — MM. Ed. Rist et H. Béclère ont noté l'apparition en masse de myélo- blastes non granuleux au cours de la leucémie myé. loïde, coïncidant avec une aggravation de l'affection- — M. E. Massonnat signale un nouvel hôte du Lynchia imaura : le grand-duc, ce qui confirme sa règle de la dispersion des parasites en raison directe de l'impor- tance des organes alaires. — MM. C. Vaney et C. Conte montrent que l’enroulement des chenilles d'Epichnopteryx helicinella n'est pas une acquisition secondaire ; il résulte de la pression exercée sur tous les tissus larvaires pendant la longue période d'hiber- nation par les substances inertes accumulées dans le corps. — M. J. Sarthou confirme l'existence, dans le lait, d’une anaéroxydase soluble, traversant les parois poreuses. — MM. Tanton et E. Combe ont reconnu que la réaction de Porges pour le séro-diagnostic de la syphilis, tout en étant moins sensible que celle de Wassermann, est beaucoup plus simple et aussi spéci- fique. — M. P. F. Armand-Delille a observé qu'en employant comme antigène le cerveau de chien on obtient chez le lapin l’anaphylaxie qu’on ne peut obte- nir avec le sérum ; c'est le contraire chez le cobaye, — M. E. F. Terroine a constaté que l'addition de sels biliaires accélère considérablement la vitesse d'hydro- lyse des corps gras par le suc pancréatique et modifie aussi la valeur de l’état final de cette hydrolyse. — M. L. Launoy, en colorant au bleu de Giemsa des cel- lules hépatiques préparées, a observé des granulations vertes, identiques à celles qui, sur des dissociations fraiches, se colorent intensivement par le bleu crésyl brillant. — MM. Javal et Boyet ont reconnu que la conductibilité électrique des sérums sanguins progresse assez régulièrement en même temps que leur richesse en chlorures. — MM. C. Levaditi et J. Me Intosh montrent que les cellules hépatiques et leurs dérivés, débarrassés des globules rouges, transforment l'atoxyl en trypanotoxyl : la présence d'hématies, au lieu de favoriser cette transformation, la diminue légèrement. — M. M. Weinberg montre que l'absence d'anticorps spécifiques dans le sérum de certains porteurs de kyste hydatique, signifie que le liquide hydatique n'a pas traversé la paroi du kyste en quantité suffisante pour donner lieu à la formation d'anticorps. — M. R. Lépine confirme que la production de sucre par le foie n'est nullement nécessaire à la glycosurie phlorizique, contrairement aux conclusions d’'Erlandsen. — MM. L. Karwacki et C. Szokalski ont constaté que, chez la sangsue nourrie avec du sang à spirochètes, les para- sites passent à travers les parois intestinales et vont se localiser dans le mésenchyme autour des organes. — M. M. Doyon à reconnu que, dans certaines circons- tances, le foie sécrète de l’antithrombine en dehors des influences connues dans les laboratoires pour provo- quer le phénomène. — MM. M. Doyon, J. Mawas et A. Policard ont observé que la bile de bœuf en injection ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mésaraique chez le chien détermine l’incoagulabilité du sang et la mort rapide, à la suite d’une congestion énorme du foie. — MM. À. Robin et N. Fiessinger si- gnalent un cas de ladrerie chez l'homme avec de nom- breux kystes à cysticerques, dont le liquide présentait une toxicité intense, entourés d'une barrière d'éosino- philes. — MM. N. Fiessinger et L. Lyon-Caen ont étudié les modifications etaltérations du chondriosome chez les Mammifères. — M. P. Georgevitch présente des recherches sur la formation et la germination des spores du Jacillus thermophilus Jivoïni. — M. D. Roudsky a constaté que l’inoculation à la souris de cultures ou de sang de rat riches en formes de multipli- cation de 7. Lewisi n'est pas suivie, en général, de l'apparition de trypanosomes dans le sang de la souris; cependant, dans certains cas, le sang de rat s'est mon- tré infectant pour la souris. — M. J. Camus a obtenu de bons résultats dans le traitement du tétanos expéri- mental du chien à la période de contracture par l'injec- tion d’un mélange d’émulsion encéphalique de cobaye stérilisé et de sérum antitétanique. — M. J. Nageotte montre que, dans la nécrobiose du cylindraxe, le spon- gioplasma se coagule et forme de la graisse osmio-ré- ductrice, puis se redissout; l’hyaloplasma se rétracte en abandonnant une sérosité et se fragmente sans se coaguler ; il ne paraît pas capable de donner naissance à de la graisse. — M. L. Calvet a reconnu que la Dia- tomée bleue, en milieu quelque peu humide comme celui de la coquille des huîtres, possède une vitalité relativement grande, rendant possibles les ensemence- ments des bassins à verdir au moyen d'huîtres prove- nant de bassins en verdeur même éloignés. — M. $. Marbé a observé que la mort des animaux hyperthy- roïdés et infectés avec le bacille d'Eberth coïncide avec la destruction de leurs leucocytes, spécialement des polynucléaires. M. A. Dastre est élu président de la Société pour cinq ans. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 4% Mars 1910. M. J. Chaine a observé qu’en Charente-Inférieure les Termites attaquent quelques arbustes et les plantes d'ornement et potagères les plus variées. — M. G. De- nigès montre que les acides diacétique et B-oxybuty- rique sont les principaux signes urinaires de l'acidose. La réaction de Legal est la meilleure dont nous dispo- sions pour rechercher l’acidose, La distillation de l'urine permet la diagnose certaine et le dosage facile de l'acétone urinaire totale (libre et potentielle dans l'acide diacétique). — M. J. Gautrelet a constaté que les extraits hépatiques et génitaux d’Astéries ren- ferment au moins une substance provoquant une action hypotensive marquée et durable chez l'animal atropiné. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 4 Mars 1910. M. Ch. Féry présente un spectrographe à prisme à faces courbes et un spectrophotomètre à verres absor- bants. Dans une note de chronique, la Fevue reviendra prochainement sur ces deux intéressants instruments. — M. Pierre Weiss : Sur la mesure de l'intensité d'aimantation à saturation et la loi d'approche vers la saturation. L'intensité d’aimantation à saturation des métaux ferro-magnétiques et de la magnétite est connue avec une assez faible précision. Cela tient en partie aux difficultés inhérentes aux mesures dans les champs intenses, en partie à ce qu'on n'a pas tenu compte suffisamment de ce que la détermination de la loi d'approche est un complément indispensable de cette mesure. Enfin, dans bien des cas, on n’a pas remarqué que l’aimantation des pièces polaires des électro-aimants n’est pas rigide, mais est influencée par le déplacement du corps à étudier. La méthode employée par M. Weiss consiste à relirer un ellipsoide de Ja substance d'un petit solénoïde très exact placé dans l'axe de l'entrefer d’un électro-aimant puissant et à mesurer au balistique la quantité d'électricité induite. Une application de la théorie des images ma- gnétiques, analogues aux images électriques de Lord Kelvin, permet d'enfermer l'erreur relalive provenant du retentissement de ce déplacement de matière ma- gnétique sur les pièces polaires dans les limites étroites de + 0,001. Les résultats de ce travail sont exprimés, en appelant 5 l'intensité d'aimantalion spécifique et H le champ, par les formules suivantes : Fer (Kohlswa). Nickel pur a || Cobalt pur, état doux. 6 | fé LES | [à L—, à È (! Manet ic 90,72 (1-5) Pour le fer, le nickel et la magnétite, la loi d'approche est hyperbolique. Pour le cobalt, la distance entre la courbe et l’asymptote est un infiniment petit en 1/H%, L'intensité d’aimantation à saturation, rapportée à l'unité de volume, est à la température ordinaire pour ces quatre substances : 1706; 476,5; 1412; 476,5. — M. E. Estanave : Jinages changeantes à deux ou trois aspects sur plaques autostéréoscopiques. Les plaques photographiques utilisées présentent, sur l’une de leurs faces, l'émulsion sensible habituelle et, sur l’autre, un système de lignes parallèles opaques de même largeur et équidistantes avec rapport convenable entre l’épais- seur du trait et l’espace transparent intercalaire. Pour une position appropriée de l'objectif photographique, la plaque, présentée par sa face rayée, n’enregistre de l’image projetée que des bandes parallèles non join- lives, assez rapprochées d'ailleurs pour être confon- dues à la distance de vision distincte et donner l'illu- sion d’une image continue. Après enregistrement d’une première image, l'objectif peut être décentré perpen- diculairement à la direction des lignes du réseau et amené en position telle que précisément il projette son image sur celles des régions de l’'émulsion qui, lors de la première pose, étaient protégées par les bandes opaques. Dans ces conditions, après dévelop- pement, inversion et développement à nouveau, l'œil placé successivement à l’un ou à l’autre des deux centres de projection verra chaque fois une seule image; de même lorsque les deux yeux sont sur une parallèle aux traits du réseau passant par l'un des centres de projection. En fait, un très léger bascule- ment de la plaque autour d'un des traits du réseau pris comme axe permet de voir alternativement les deux images, d'où possibilité d’une sorte de cinémato- graphe à deux phases. On peut, en réglant convenable- ment les conditions opératoires, enregistrer ainsi, puis voir successivement trois images distinctes. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION CANADIENNE Séance du 14 Janvier 1910. M. T. L. Crossley examine trois points importants dans les relations des fabriques de pâtes de bois avec les papeteries : [a propreté, la teneur en humidité et les qualités de blanchiment de la pâte de bois, et montre comment les desiderata des papeteries peu- vent être réalisés. SECTION D'ÉCOSSE Séance du 23 Novembre 1909. MM. R. R. Tatlock et R. T. Thomson présentent leurs recherches sur l'analyse et la composition des 914 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cafés et chicorées et des essences de café et de chicorée. Séance du 18 Janvier 1910. MM. R. W. Roberts et A. Fraser décrivent un pro- cédé commode pour la détermination de l’eau dans le pétrole ; il consiste à ajouter du carbure de calcium au pétrole et à mesurer la quantité d’acétylène qui se dégage. SECTION DE LONDRES Séance du 17 Janvier 1910. M. E. Hatschek présente ses recherches sur la séparation directe des émulsions par la filtration et l'ultra-filtration. Elles ont eu pour point de départ le désir de séparer l’eau des condensateurs des machines à vapeur de l'huile, employée pour la lubréfaction des cylindres, qu'elle contient à l’état d’émulsion. L'auteur a reconnu que, si l’on filtre cette eau à travers une couche de carbonate de magnésium très fin déposée sur un filtre, l'huile est entièrement retenue et l’eau passe claire. Le carbonate de magnésium coûteux peut être remplacé par celui de calcium, qui permet égale- ment la séparation d’un grand nombre d’autres émul- sions. L'auteur s'est, d'autre part, adressé aux ultra- filtres employés par Bechhold pour la filtration des solutions colloïdales et il a constaté qu'ils peuvent servir à la séparation des émulsions huileuses ; toute- fois, ils ne semblent pas susceptibles actuellement d’un usage industriel. — MM. R. Robertson et B.J. Smart ont étudié la signification de l'essai calorifique d'Abel pour le coton-poudre et la nitro-glycérine. 4° Quand les papiers pour l'essai calorifique d’Abel sont exposés à une quantité non limitée d'air contenant du peroxyde d'azote, le temps nécessaire pour produire une teinte type est inversement proportionnel à la concentration de Az0* ; 2° pour les papiers d'essai types actuellement préparés à Waltham Abbey, le produit du temps en minutes par la concentration en mgr. de AzO? par c.c. est égal à 31X 10-65; 3° la quantité totale de AzO° absorbée par un de ces papiers pour prendre la teinte type est de 135 X 1075 mgr.; 4° il est possible de cal- culer l'essai calorifique d’un explosif dont la vitesse de décomposition à une température donnée est connue ; 5° l'essai calculé pour le coton-poudre à diverses tem- pératures et avec des quantités variables concorde très bien avec les résultats de l'expérience ; 6° cette concordance montre que, dans le cas du coton-poudre, l'essai d'Abel représente la décomposition durant l’es- sai du coton-poudre lui-même et n’est pas dû à des impuretés dissoutes ; 7° comme l’essai calorifique d’un coton-poudre n’est qu'une mesure de sa décomposition initiale, il ne peut être regardé comme une indication absolue de sa stabilité; 8° quand la nitroglycérine est essayée à la chaleur, l'essai obtenu est beaucoup plus élevé que celui qu'on déduirait de sa vitesse de décom- position. — M. A. F. Joseph détermine le fer dans les solutions ferriques en acidifiant avec HCI, ajoutant quelques grammes de KI et titrant l’iode libéré par le thiosulfate ; si la substance à analyser est insoluble dans l’eau, on la traite par HC]I concentré avec quelques grammes de HCIO* et évapore ensuite presque à siccité. La méthode esttrès rapide et d’uneexactitudesuffisante. Séance du T Février 1910. M. A. Colson fait un exposé de l’état présent et de l'avenir de l'industrie de la soude à l’'ammoniaque. Après avoir montré les progrès réalisés dans les diffé- rentes phases de la préparation de la soude, l’auteur ne pense pas qu'on soit arrivé à la perfection, et il estime que de nouveaux progrès pourraient être réali- sés par la substitution au chlorure de sodium du nitrate de sodium comme matière première. Le résidu des opérations serait alors constitué par un mélange de nitrates de calcium et de sodium ayant une valeur égale comme engrais à la matière première; en l’éva- porant au moyen des chaleurs perdues, on réaliserait donc un bénéfice sur le procédé actuel. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 5 Janvier 1910. (Séance jubilaire à l’occasion du 65° anniversaire de la Société.) M. O. Martienssen rend compte de ses expériences sur /4 décharge oscillatoire lente d'un condensateur de 1.000 microfarads. Les récentes applications indus- trielles des condensateurs électriques en ont réduit le prix de facon à permettre l'emploi, dans les labo- ratoires de Physique, d'unités considérablement plus grandes qu'auparavant et à faire la démonstration directe et commode de phénomènes reconnus autrefois par voie détournée. L'auteur choisit comme exemple la décharge oscillatoire d’un grand condensateur à travers une self-induction considérable. Le conden- sateur de 1.000 microfarads dont il se sert se compose de 500 unités du type employé dans les centrales télé- phoniques, disposées en parallèle. La self-induction est une bobine de réaction d'environ 1.000 henrys et d'une résistance d'environ 50 ohms. En chargeant ce condensateur par une différence de potentiel de{410volts, on produit des décharges oscillatoires très lentes, d'une durée de vibration graduellement décroissante en rai- son de la moindre aimantation correspondant à un courant plus faible. L'énergie électrique se décharge dans la bobine de réaction, où elle se convertit en énergie magnétique, pour retourner dans le conden- sateur sous la forme d'énergie électrique. Comme, pendant ce jeu sans cesse renouvelé, le fil de la bobine est chauffé par le passage du courant, une partie de l’énergie est absorbée sous la forme de cha- leur, Ces alternances de flux et de reflux se conti- nuent jusqu'à ce que l’ensemble de l'énergie se soit transformé en chaleur. — M. W. Jacobi communique une note sur les anomalies qui se présentent dans l'inversion des raies du sodium, dans un bec de Bunsen- Beckmann, coloré par le carbonate ou le chlorure de sodium, Ces anomalies ne se réduisent point à une inversion spontanée visible au spectromètre. Suivant l'intensité du bec de Bunsen, l'inversion se présente à des endroits différents des images élargies. C’est ainsi qu'on l’observe d’abord sur les bords des deux images jaunes, de façon que, pour une intensité lumineuse donnée de la source de lumière blanche (lampe de Nernst réglable, etc.), quatre raies noires et fines se présentent dans le spectre continu; d’autres fois, c'est le milieu des deux images qui s'intervertit d'abord, ou bien la portion noire intervertie présente des asymé- tries. L'auteur se propose d'étendre ses observations aux flammes différemment colorées par des substances différentes et d’en approfondir le mécanisme. — M. H. Siedentopf donne lecture d’un Mémoire sur un nou- veau progrès en ullra-microscopie. Il décrit un nouvel ultramicroscope d'une grande Juminosité et sa mani- pulation. Ce dispositif est bien plus simple que les premiers ultramicroscopes. L'éclairage uniforme est réalisé au moyen de deux condensateurs à champ obscur, à savoir le condenseur paraboloïdique ou le condenseur cardioïdique. La propriété que possède ce dernier d’assurer une concentration aplanétique des rayons est déduite d’une propriété jusqu'ici inconnue de la cardioïde. La supériorité de ce dispositif est due encore à l'emploi de chambres de quartz spéciales et d'objectifs nouveaux. L'auteur rend compte ensuite des observations nouvelles qu'il vient de faire avec cet appareil sur les mouvements browniens. Dans le cas des particules petites et des solutions diluées, il con- state une allure essentiellement translatoire de ces mouvements, tandis que, dans les solutions plus gros- sières et plus concentrées, le mouvement oscillatoire l'emporte. D’autres observations sont relatives à la forme des particules métalliques ultramicroscopiques. Une nouvelle méthode de mesure permet de démontrer la nature optiquement isotrope des particules d’or produisant des colorations rouges ou bleues. L'auteur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES TE indique ensuite une nouvelle méthode simple pour provoquer artificiellement, par la pression, un di- chroiïsme ordonné des particules d'or ou d'argent. Ce dichroïsme est mis en rapport très intime avec celui du sel gemme coloré comprimé et avec les caractères des particules d'argent et d'or, comprimées en lumière transparente aussi bien qu'en lumière diffractée. Une troisième série d'observations se rapporte aux réac- tions microchimiques. L'auteur distingue deux stades dans la conversion des solutions d’or rouge en solutions d'or bleu, à savoir la production soudaine d’un effet d'absorption, et ensuite l’union des différentes parties. La grande luminosité du nouvel ultramicroscope donne lieu, dans le foyer, à d'innombrables réactions photo- chimiques inconnues pour la plupart. Ces réactions qui sont soit des réductions, soit des oxydations, ren- dent probable l'hypothèse d’une décomposition de l'eau, etc., se produisant par points sous l’action de la lumière. Un fait d'un intérêt spécial pour la théorie des phénomènes photographiques, c’est que l'appareil donne la possibilité d'étudier la décomposition pho- tochimique des sels halogénés d'argent avec un gros- sissement considérable. Cette décomposition fournit d'abord des particules d'argent isolées rouges et jaunes, ensuite de nombreuses particules vertes, et enfin des particules d'un violet bleuàtre. La conver- sion dans un point donné ne semble pas exercer d'influence temporaire sur la conversion dans un point voisin, éloigné seulement de 0,3 y. Cette dernière expérience, grâce à sa simplicité, se prête parfaitement à une démonstration efficace des phénomènes d’ultra- microscopie. ALFRED GRADENVWITZ, ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 29 Janvier 1910. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. D. J. Korteweg pré- sente au nom de M. H. J. Beth : Les oscillations autour d'une position d'équilibre dans le cas d'une relation linéaire simple entre les nombres de vibra- tion. Première partie. En 1897, M. Korteweg a fait connaitre (Archives Néerlandaises, t. V, p. 229-260) les développements en série des coordonnées princi- pales d’un mécanisme arbitraire à plusieurs degrés de liberté, exécutant de petites oscillations autour d’une position d'équilibre stable. De ces développements on pouvait déduire qu'il est possible en certains cas que quelques vibrations d'ordre supérieur, possédant en général, par rapport aux vibrations principales, une intensité très faible, parviennent à une intensité anor- malement grande; cela arrive s'il existe entre les nombres de vibration ,, »,, ete., des vibrations prin- cipales une relation de la forme pn; + qn, + ...—p, où p, 9, etc., sont des nombres entiers positifs ou négatifs, tandis que le résidu ? est petit par rapport à »,,n,, etc. De plus, M. Korteweg trouva que ses développements en série perdaient leur validité, pour p—0, si la somme S des valeurs absolues de p, q, etc., restait au-dessous de 5, de telle sorte qu’on doit se servir d'une autre méthode si l’on veut savoir ce que devient le mouve- ment dans les cas spéciaux en question. Dans sa com- munication, M. Beth donne les résultats de ses recher- ches se rapportant à un mécanisme à deux degrés de liberté. L'auteur choisitcomme base le cas simple d'un point matériel se mouvant sans friction sous l'influence de la pesanteur sur une surface donnée à la proximité du point le plus bas. Chaque fois qu'un des cas S<5 a été examiné, l’auteur passe à un mécanisme arbitraire à deux degrés de liberté. 1. Introduction. 2-3. Mouve- ment sur le fond d’une surface. 4-5. Cas S— 3, p—0. 7. Courbes osculatrices. 8. Enveloppe des courbes osculatrices. 9-12. Cas particuliers. 13. Mécanisme arbitraire. Dans une seconde partie, l’auteur traitera les'cas S—2 et S—% 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. A. Lorentz : Sur la dispersion de la lumière par les molécules. Pour la première fois, Lord Rayleigh a remarqué qu'un fais- ceau de lumière peut être dispersé en toute direction non seulement par les particules planantes de Ja matière, mais aussi par les molécules dont se compose le milieu. Ce savant trouva (Phil. Mag., t. XLVII, p. 375) en 1899 que la lumière est affaiblie dans le rapport de 1 à e—" quand elle parcourt la distance /, où Je coefficient d'induction Z d'un gaz, par exemple, 327 (4 —1 )° 3NA* de réfraction, À la longueur d'onde et N le nombre des molécules contenues dans l'unité de volume. Cette relation a été déduite par le calcul direct de l'énergie émise en toute direction par les molécules dans le faisceau de lumière, les particules participant à la vibration, en remarquant que la quantité d'énergie émise entre deux sections parallèles équivaut à la différence de ce qui passe dans la direction des rayons lumineux entre la section antérieure et la section postérieure. Cependant, on peut se servir d’une autre méthode. Un affaiblissement du faisceau lumineux ne peut avoir lieu qu'à cause d’une certaine résistance contre les vibrations des particules, et en partant de la résistance de la radiation (différente de celle qui donne lieu à l'absorption et au développement de chaleur) on peut calculer tout aussi bien le coefficient d'extinction. D'après la théorie des électrons (comparez Lorentz : Math. Encyclopädie, t. V, p. 14, $ 20), on doit chercher or ee s Scan” Où repré- sente la charge de l’électron, € la vitesse de la lumière dans l’éther, tandis que le vecteur y fait connaitre en grandeur et en direction la vitesse variable de l’élec- tron. Comme l'a démontré M. L. Natanson (Zull. de l'Acad. de Cracovie, déc. 1909, p, 915), on retrouve d’après cette méthode l'expression de Lord Rayleigh. Dans cette communication, M. Lorentz approfondit la théorie nouvelle en quelques directions. — M. P. Zee- man présente en son nom et au nom de M. B. Wi- nawer : La décomposition magnétique de raies d'ab- sorption en relation avec le spectre des taches solaires. Première partie. D'après la connexion intime entre l'émission et l'absorption, il faut qu’à la décomposition magnétique des lignes d'émission corresponde une variation équivalente des lignes d'absorption. Les raies obscures d’un spectre continu d’un faisceau de lumière blanche traversant une flamme absorbante sont décom- posées et polarisées par un champ magnétique de la même manière que les lignes d'émission. Dès les pre- mières expériences, celte correspondance entre les lignes d'émission et d'absorption sous l'influence de forces magnétiques se manifesta. Mais, tandis que notre connaissance des spectres d'émission dans un champ magnétique s'est élargie considérablement, l'étude de l'effet inverse, c’est-à-dire de la décomposi- tion magnétique des lignes d'absorption, n'a pas fait des progrès aussi importants. Après les premières expériences de M. Zeeman, la variation des lignes d'absorption dans un champ magnétique a été étudiée par MM. Kônig, Cotton, Righi, O0. Lodge, Davies; de plus, M. Voigt a basé ses théories magnéto-optiques sur la considération de l'effet inverse, tandis que les recherches de M. Lorentz sur la décomposition magné- tique, dans le cas où l'angle entre la direction de l'observation et les lignes de force magnétique est quelconque, traitent de même de cet ellet. Enfin la théorie indique plusieurs points qui peuvent être touchés par l'expérience. Pour la physique du Soleil, l'effet inverse est devenu d'une importance particulière depuis que M. G.E. Hale a découvert en 1908 que les raies obscures du spectre des taches solaires présentent les phénomènes caractéristiques de la décomposition ma- gnétique. Dans cette communication, illustrée par trois planches, les auteurs font connaître les résultats se rapportant à la décomposition des deux raies du sodium. Quelques-uns de ces résultats, déjà publiés par d’autres savants, sont répétés ici. Les résultats est défini par l'expression » où p estl'indice l'action en question dans la force 316 ACADÈMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES nouveaux contribuent puissamment à l'explication de plusieurs phénomènes dans le spectre des taches solaires. — M. H. E. J. G. du Bois présente en son nom et au nom de M. Kôtaro Honda : Les propriétes thermomagnétiques des éléments. En 1895, M. P. Curie a formulé les lois suivantes : 1° La susceptibilité spéci- fique des matières paramagnétiques est inversement proportionnelle à la température absolue. 2° Au con- traire, celle des matières diamagnétiques ne varie pas sensiblement avec la température. 3° Pour les der- nières, même des changements d'état d'aggrégation n'exercent souvent pas d'influence. 4° Il en est de même des modifications d'état chimique (allotropie). L'un des auteurs, en 1900, a désigné la première de ces lois thermomagnétiques sous le nom de /or de Curie et introduit la constante :(0 4273) sous le nom de constante de Curie. En 1905, M. P. Langevin pu- blia, dans une théorie électronique du magnétisme, une représentation cinétique de la loi de Curie. Seule- ment, comme les expériences de Curie ne se basent que sur l'examen d'un nombre relativement petit de matières, les auteurs se sont imposé la tâche d'exa- miner les propriétés thermomagnétiques d’un plus grand nombre de matières Les résultats de ces expé- riences, quils publient dans cette communication, démoutrent qu'après tout la loi de Curie admet un nombre considérable d'exceptions. — M. P. van Rom- burgh présente au nom de M. F. M. Jaeger : Æludes sur le tellure. 1. Sur la conduite mutuelle des éléments sodium et tellure. Depuis que Dumas placa le tellure dans le groupe de l'oxygène comme premier homo- logue du sélénium, ce qui créa la difficulté bien connue pour le système périodique, de date plus récente, relative à la place du tellure par rapport à l'iode, la question de la relation entre le tellure d'un côté, le sodium et le sélénium de l’autre, est d'une actualité importante. Car on sait maintenant que le poids atomique du tellure est 427,6 et surpasse donc celui de l’iode. D'un autre côté, la différence entre le tellure et les deux autres éléments est tellement pro- noncée que Retgers a préféré placer le tellure dans le groupe du platine. De plus, la constitution divergente de lacide tellurique H°Te0f et l’hydratation entière- ment différente des tellurates comparés aux sulfates et aux séléniates s'opposent à la position donnée au tellure par Dumas. Quoi qu'il en soit, l’auteur à jugé opportun de chercher plus de données sur la question de la place du tellure. Dans cette première partie, se rapportant à la relation entre le tellure et le sodium, il prouve que : 1° les éléments Te et S ne forment pas de composés, mais des cristaux de mélange ; 2° les élé- ments Te, $e et S se comportent de la même manière par rapport aux sulfures des métaux alcalins et alca- lino-terreux ; 3° la place attribuée par Dumas au tellure dans le groupe du sodium comme premier homologue du sélénium est entièrement justifiée par la conduite mutuelle de ces deux éléments, le sodium, le sélénium et le tellure formant une triade naturelle d'éléments plus rapprochés l'un de l'autre qu'un quelconque d’entre eux par rapport à l'oxygène. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. W. Beyerinck présente : 1° La viscosaccharase, un enzyme trans- formant le sucre de canne en une émulsion. Le phéno- mène émulsionnaire. Il est causé par un enzyme. Pendant l’action de cette substance, la viscosaccharase, une substance réductrice est engendrée à côté de l'émulsion. La viscosaccharase est un enzyme d'action synthétique. Les bactéries Bacillus mesentericus et Bacillus emulsionis n.sp. 2 La variabilité du Bacillus prodiqiosus. La méthode pour maintenir l’invariabilité des cultures. La génération des variations en général. Aperçu des variations engendrées. Table généalogique des variations. — M. J. W. Moll présente au nom de M. E. Reinders : Sur le rôle des éléments vivants du bois dans le courant de transpiration des arbres, et au nom de M. K. Zylstra : Sur le mouvement de l'eau dans les plantes. Les feuilles des arbres exhalent de l’eau, les racines l’absorbent; elle doit être transportée de celles-ci à celles-là à travers le tronc. La quantité d'eau transportée de cette manière est assez considé- rable : on a calculé qu'un hectare de bois de hêtres en fait évaporer 30.000 litres par jour. Cette transpiration Joue un grand rôle dans la vie des plantes. D'abord elle les protège contre une trop forte insolation, puis elle les rend capables de s'emparer de la nourriture inor- ganique dont elles disposent seulement sous forme d'une solution fort diluée. Il est singulier que des trois étapes du procès : l'absorption de l’eau, son transport etson exhalaisou, on ne connaisse le mécanisme que de la dernière. La seconde, surtout, a été depuis long- temps l’objet de beaucoup de recherches et de discus- sions. Malgré le grand zèle des physiologistes, on ne sait pas encore indiquer précisément la force motrice qui fait monter la sève jusqu’à la cime des plus hauts arbres. On ne sait pas même s’il faut chercher cette force dans les tissus vivants du bois ou si des forces purement physiques sont chargées de cette tache importante. M. Strasburger a tâché de résoudre cette question en faisant mourir des arbres coupés à la racine au moyen de solutions toxiques colorées. Il vit que ces solutions montent jusqu’au sommet aussi bien que l’eau dans les troncs vivants. De là, on conclut que l'aide des tissus vivants peut être considérée comme superflue, mais il y a toujours des botanistes qui ne sont pas d'accord avec cette conclusion. Tout récem- ment, M. Reinders prouva, au contraire, que les élé- ments vivants du bois exercent, en effet, une force hydromotrice. Pour le prouver, il partit de la considé- ration suivante : La cause immédiate de tout mouve- ment d’eau réside dans des différences de pression. Si, dans les troncs de nos arbres, l’eau monte au moyen de forces purement physiques, il faut que les pressions suivent les règles simples de l'Hydrodynamique, c'est- à-dire qu'elles diminuent graduellement et assez vite à mesure que la hauteur augmente. Cette diminution régulière n'a pas été constatée; les manomètres qu'on a souvent appliqués à un même tronc, mais à diffé- rentes hauteurs, montrent, au contraire, un cours absolument irrégulier : tantôt ce sont les manomètres placés le plus haut, tantôt ceux qui sont placés le plus + bas qui indiquent une plus forte succion. Cette dévia- - tion apparente de la loi hydrodynamique peut avoir deux causes : d’abord il est possible que les mano- mètres n'indiquent pas la vraie pression qui existe dans le tronc; puis on pourrait supposer que les tissus vivants du bois influent sur cette pression, c'est-à-dire qu'ils ont une fonction hydromotrice. Dans le dernier cas, l'irrégularité doit disparaître aussitôt qu'on fait mourir la partie du tronc qui se trouve entre les mano- mètres, car alors l'influence supposée des tissus vivants doit cesser subitement. En effet, l'expérience confirma celte supposition, et ainsi la question peut être considérée comme résolue dans le sens indiqué. En outre, M. Zylstra publia un fait qui donne un appui appréciable aux conclusions de M. Reinders. Il fit monter dans des branches coupées une solution colorée d'une teinture qui ne nuit pas aux tissus vivants. Quelques-unes de ces branches étaient vivantes, les autres avaient été tuées de manières différentes. M. Zylstra constata que, dans les branches mortes, la teinture prit une tout autre route que dans les branches vivantes. Quant aux expériences de M. Strasburger citées ci-dessus, les investigations de MM. Reinders et Zylstra prouvent qu'on les considère à tort comme preuves de l'absence de la participation des tissus vivants. Dans la question présente, elles n’ont aucune valeur, car il importe peu que dans les troncs morts l’eau monte ou non. La seule question importante est de savoir si, dans les arbres vivants, ce sont des forces vitales ou physiques qui déterminent l'ascension de l’eau. P.-H. SCHOUTE. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N°8 30 AVRIL 1910 r LA kRevue générale d DCI ° 14 pures et appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Solennités scientifiques Le prochaiïn centenaire de la naissance de H. Victor Regnault. — Henri-Victor Regnault est né le 21 juillet 1810. Avant que la reconnaissance des physiciens rende un pieux hommage à la mémoire du savant dont la rare habileté de main, mise au service d’une intelli- gence éminemment claire, ingénieuse et primesautière, a porté à un degré de perfection inconnu jusqu'alors la science expérimentale française, j'ai pensé qu'on lirait, avec intérêt, une lettre inédite, envoyée par J.-B. Dumas, secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences, à son confrère et ami Henri Sainte-Claire Deville qui s'était rendu près de Regnault, pour lui prodiguer les soins qu'exigeait l'état de sa santé, définitivement compromise. Il me semble utile de donner, avant de transcrire cette lettre, un aperçu des malheurs qui accablèrent, coup sur coup, l’'éminent physicien, surtout dans ses dernières années. Le père de V. Regnault, capitaine au corps des ingé- nieurs géographes militaires, était mort en 1812 de ses blessures dans la campagne de Russie ; sa veuve, épuisée de douleur, s'éteignait peu après, laissant deux orphe- lins, Victor Regnault et sa sœur, sans famille et sans ressources. Ils furent recueillis par un frère d'armes de leur père, le capitaine Jean-Baptiste Clément, et par sa femme, fille d'Alexandre Duval, qui fut pour eux une seconde mère. V. Regnault fut placé très jeune dans une maison de nouveautés, rue Richelieu, où, jusqu'à dix-huit ans, il remplit les fonctions les plus modestes. Il profita du voisinage de la Bibliothèque nationale pour y passer ses heures de loisir et, ayant reconnu que les éléments des Mathématiques ne lui offraient aucune difficulté, il en poursuivit l’étude. Ses parents adoptifs n’hési- tèrent pas à le placer dans une institution prépara- toire à l'Ecole Polytechnique. Il entra à vingt ans dans ‘ Ces indications ont été empruntées, presque textuelle- ment, à l'Eloge historique de Regnault, lu par J.-B. Dumas dans la séance publique annuelle de l'Académie des Sciences du 14 mars 1851. REVUE GÉNÉRILE DES SCIENCES, 1910, cette Ecole et en sortit élève ingénieur des mines. Dix ans après, des travaux de Chimie d’une remar- quable précision, dont certains rectifiaient des asser- tions d'illustres savants étrangers, le firent entrer dans la Section de Chimie de l’Académie des Sciences. Bientôt la demande officielle d’un travail sur la détermination des données qui entrent dans le calcul des effets des machines à vapeur changea l'orientation de ses recherches, qu'il consacra presque exclusive- ment à la mesure des constantes physiques. Elles durèrent trente années, pendant lesquelles il édifia le monument le plus important et le plus solide que la science expérimentale ait jamais produit. Mais, en 1866, Victor Regnault perdait sa femme, et peu après, la mort de Mm° Clément, sa mère adoptive, et celle de deux de ses parentes, qui l’entouraient de leur affection, laissaient désert et désolé son foyer jadis si vivant et si animé. Regnault avait cherché dans les travaux du labora- toire, et il avait trouvé dans les éclatants succès de son fils Henri quelque distraction à sa douleur. Survint la guerre de 14870. Pendant le siège de Paris, une main brutale anéantissait dans son laboratoire, à Sèvres, occupé par l'ennemi, toutes ses notes et ses instruments de mesure. Rien ne semblait changé, dans cet asile de la science, et tout était détruit. On s'était contenté de casser la tige de ces thermomètres et de briser les tubes de ces baromètres et de ces mano- mètres, devenus, par leur participation aux plus importantes expériences du siècle, de véritables mo- numents historiques. Les registres et les manuscrits, réunis en tas, avaient été livrés aux flammes et réduits en cendres. Ce malheur, qui ne frappait que le savant, n'était rien à côté de celui qui atteignait le père au cœur. Au milieu du grand désastre de la capitulation de Paris, la population tout entière ressentit un élan nouveau de douleur en apprenant la mort d'Henri Regnault, tué à Buzenval, d'Henri Regnault, demeuré le symbole tou- chant du talent, de la jeunesse, du patriotisme et du malheur. Accablé de toutes parts, la première pensée de V. Re- gnault, devant cet écroulement des espérances de sa vie, fut de fuir Paris et de se confiner dans une demeure 8 318 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE isolée, à Lassigneu, non loin de Genève. Il s’occupait à reconstituer son laboratoire et même à reprendre ses travaux, lorsque survint la catastrophe finale. Sa sœur, Me Laudin, cette fidèle compagne de ses peines et de ses joies, étant venue lui porter quelques secours, à peine arrivée, ie cœur brisé de douleur, tombait morte dans les bras de son frère. Terrassé par ce nouveau malheur, une attaque de paralysie le condamnait, au même instant, à cette longue agonie de plusieurs années, dont son ancien collaborateur De Reiset et Mile Serais, une amie dévouée de la famille, luttant de dévouement, ont essayé d’adoucir la tristesse. C'est dans ces tristes circonstances que H. Sainte- Claire Deville, parti pour Genève, reçut la lettre de J.-B. Dumas. Elle montre à la fois l'intérêt et l'affection que les membres de l'Académie des Sciences voulaient témoigner à leur illustre et malheureux confrère. D. Gernez, Membre de l'Académie des Sciences. INSTITUT DE FRANCE ACADÉMIE DES SCIENCES Paris, le 2 décembre 1873. Le Secrétaire perpétuel de l Académie. Mon cher confrère et ami, L'Académie des Sciences me charge de vous témoi- gner toute sa reconnaissance au sujet des soins dont vous entourez notre illustre confrère M. Regnault. Elle n’oubliera jamais les marques de dévouement que vous lui donnez et dont elle prend sa part, comme vous en étant personnellement obligée. Elle connaît si bien votre grand zèle pour tout ce qui intéresse l'illustre malade qu'elle n'hésite pas à vous demander d'aller lui porter de sa part l'expression de toutes ses sympathies et celle du souhait que chacun de ses mem- bres forme pour son prompt rétablissement, à l'occa- sion de la nouvelle année. M. Regnault a subi de grandes épreuves; la Provi- dence ne lui en à épargné aucune; espérons que nos vœux seront accomplis et qu'elle le rendra bientôt à nos prières. La France a besoin de sa gloire ; l'Aca- démie ne peut se passer de son génie; la jeunesse aspire à recueillir les conseils de son expérience sans égale et de son grand sens; tous nous tournons nos espérances vers Celui qui tient en ses mains les plus hautes destinées. Quant à moi, ai-je besoin de vous faire connaitre les sentiments qui m'animent et la part que je prends à l'accomplissement de votre mission? Il y a plus de qua- rante ans que j'ai appris à connaître, à aimer et à res- pecter M. Regnault. Personne n'a su, mieux que moi, apprécier ce qu'il y a de chaleur dans ce cœur qui aime à se couvrir d'un voile, et mon seul regret c’est de n’avoir pu écarter de lui une seule des douleurs de sa vie, après avoir tant cherché à lui procurer une existence digne de ses grands talents et de la rare élé- vation de son caractère. Soyez donc auprès de lui, mon cher confrère et ami, l'interprète des sentiments de l’Académie et des miens, ainsi que celui de nos vœux les plus profonds. : J. Dumas. $ 2. — Nécrologie Alexandre Agassiz (1835-1910). — Avec Alexan- dre Agassiz disparaît une des figures les plus significa- tives dela Zoologie, durant le dernier demi-siècle. Fils de Louis Agassiz, il a su continuer dignement elaugmenter pour sa part l'illustration scientifique de son nom. L'Amérique, où son père avait émigré, semble l'avoir marqué de son sceau, en lui communiquant une activité supérieure et le sens pratique de la réalisation, sans lui avoir ôté celui de l'idéal. Il avait commencé sa carrière par l'industrie et s’élait acquis une grosse fortune dans des mines de cuivre; cette fortune mit entre ses mains des moyens d'action importants, dont il fit largement usage pourle progrès de la Science. Sa vie scientifique s’est écoulée à l'Université Harvard à Boston (Mass.), où il dirigea le Museum of Compara- tive Zoology, et ce musée, déjà rendu célèbre par les richesses qu'y avait accumulées son père, est devenu l’un des plus importants du monde, surtout pour les collections d'Invertébrés marins. Al. Agassiz, en effet, appartient à la génération qui s’est adonnée à l'étude de la faune marine. 1l a con- sacré d’abord de nombreuses recherches à l'Embryo- génie, mais, dès que les premiers documents firent connaître l'existence de la faune abyssale, ce fut surtout vers l'exploration de celle-ci qu'il tourna ses efforts. Il fut l’un des protagonistes de ce mouvement et en est le principal représentant aux Etats-Unis. Compagnon de Pourtalès à ses débuts, après la mort de celui-ci, il a, pendant quarante ans, multiplié les expéditions de dragages abyssaux et d’océanographie, notamment à bord du Blake, puis de l'A/hatross, explorant l’Atlan- tique, au voisinage des Etats-Unis et surtout des Antilles, et le Pacifique. Cette série d'explorations a donné des collections considérables et d'un intérêt primordial; conservées au Musée Harvard, elles ont fourni et four- nissent encore des matériaux de travail à un grand nombre de zoologistes. Ces campagnes ont contribué aussi, soit par l'impulsion propre d’Agassiz, soit par celle de ses compagnons, au progrès de maints pro- blèmes d’Océanographie et à celui de l'outillage des expéditions de cet ordre. Agassiz a été l’un des pre- miers à faire connaître les traits généraux de la faune abyssale (Three cruises of the « Blake », Bulletin of the Museum of Comparative Zoology, t. XIV et XV). Parmi les questions d'ordre général qui ont particu- lièrement retenu sa curiosité, il faut mentionner spé- cialement la genèse des récifs coralliens. Agassiz à exploré personnellement, au cours de ses expéditions, à peu près toutes les grandes formations coralliennes actuelles : les Bermudes, la Floride et la mer des An- tilles, les divers archipels océaniens, l'Australie, les récifs de l'Océan indien (Maldives, Laquedives, etc.), cela en vue de contrôler la théorie de Darwin sur l’ori- gine des atolls, et il est arrivé à des conclusions diffé- rentes, rejetant,au moins comme explication générale, : l'hypothèse de l’affaissement. Les publications zoologiques d’Agassiz sont fort nombreuses et portent sur des groupes très variés de la faune marine; il ne peut être question de les passer ici en revue. L'activité d’Agassiz semble avoir pour caractéristique principale un effort vers la compréhension globale de grands phénomènes naturels, dans le vaste champ d'expériences et d'observations qu'offre l'ensemble du globe. Les nécessités matérielles, à défaut de particu- larités de la personnalité, confinent en général les naturalistes dans leur laboratoire ou dans un coin restreint de la science et de l'univers. Agassiz aimait à s'attaquer aux grands espaces de la Nature. Les res- sources qu'il s'était acquises et par lesquelles il contri- buait à l'organisation de ses expéditions scientifiques lui permettaient cette ampleur de champ. Il assurait aussi matériellement, en grande partie, la publication des résultats dans la magnifique collection que consti- tuent le Bulletin et les Memoirs of the Museum ot Comparative Zoology at Harvard College. Ainsi, par l'orientation de sa carrière el par son genre d'activité, il réalisait bien le caractère mondial de la science; c'était un citoyen de l'univers; il l'était réellement par le théâtre varié de ses expéditions ou de ses voyages. Dans ces dernières années, malgré l’âge, il avait conservé cette aisance à se déplacer; on le voyait fréquemment à Paris; l'Académie des Sciences l'avait, il y a quelques années, nommé membre associé. C’est au retour d’un voyage en France qu'il est mort, à bord du paquebot qui le ramenait aux Etats-Unis. M. Caullery, Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 319 Hans Landolt. — Le 14 mars, à l'âge de 78 ans, s'est éteint à Berlin le Professeur Hans Landolt, dont le nom était universellement connu dans les milieux physico-chimiques, grâce à ses travaux et surtout grâce à ses œuvres d'érudilion. Ce qui caractérise les recherches de I. Landolt, ce qui dominetoute son œuvre scientitique expérimentale, c'est le souci de l'exactitude Ja plus rigoureuse, dont on trouve une manifestation caractéristique dans le travail publié en 4889 au Zeitschrift für physikaliseche Chemie sur la détermination du point de fusion des substances organiques. Depuis, ces qualités se sont affermiesmagistralement dansles travaux considérables entrepris pour démontrer l’invariabilité de la masse dans les réactions chimiques, et qui, poursuivis pen- dant de nombreuses années, ont été réunis récemment et publiés par les soins de la Deutsche Bunsen-(resell- schalt. Mais c'est surtout en Optique que les travaux de H. Landolt ont été nombreux; ils ont porté, en particulier, sur la constance de la réfraction spécifique avec la température (1864), les applications de la mesure des indices de réfraction à l'analyse des mélanges (1865), la technique des mesures polarimétriques et leur utili- sation pour la détermination indirecte des substances qui, sans être douées du pouvoir rotatoire, agissent sur celui des corps qui le possèdent (1888). Parmi les œuvres d’érudition, il suffit de citer l’ou- vrage considérable publié sur le pouvoir rotatoire : «« Das Drehungsvermôügen der organischen Substan- zen », et surtout les Tables physico-chimiques, dont les premières éditions, rédigées en collaboration avec R. Bôrnstein, ont fait connaitre le nom de Landolt dans tous les laboratoires. Ces quelques lignes permettent de se rendre compte de l'importance scientifique de l'œuvre du savant disparu. C. Marie, Docteur es sciences. Richard Abegg. — Le lundi # avril, un atterris- sage malheureux du ballon Sellesien, parti de Breslau, a coûté la vie au Professeur R. Abegg, l'une des per- sonnalités les plus en vue de la Physico-Chimie alle- mande. En dehors du cercle des physico-chimistes, Richard Abees était connu dans les milieux de la Chimie pure par son Âandbuch der anorgamisehen Chemie, dont il avait entrepris la publication depuis quelques années. La Chimie minérale et la Chimie physique sont de plus en plus étroitement liées et le Handhuch est le premier ouvrage où tous les résultats obtenus dans cette direc- tion sont systématiquement classés. 11 est à souhaiter que le travail soit à l'heure actuelle suffisamment avancé pour que la publication puisse être continuée par le Professeur Auerbach, dont le nom était associé à celui de R. Abegg pour les deux derniers volumes parus. Depuis l’année dernière, Richard Abegg représentait l'Allemagne comme délégué permanent au Comité international des Tables annuelles physico-chimiques?. Une étroite collaboration de plusieurs mois et les réu- nions que l'organisation de ce travail considérable avait nécessitées nous avaient permis d'apprécier les qualités de travail de notre collègue et la loyauté de son caractère; c'est avec une grande tristesse que nous avons dit adieu à ce bon ouvrier de la première heure, auquel son talent promettait un si brillant avenir. Le Professeur Abegg n'avait que quarante et un ans. C. Marie, Secrélaire général du Comité international des Tables physico-chimiques. ? H. Laxoozr : Ueber die Erhaltung der Masse bei chemi- -schen Umsetzungen. Halle, 1909. ? Rov. gén. des Sciences, 1909, p. 615 et S32. $ 3. — Physique Un nouveau système de microphone Li nouveau microphone', breveté par une maison berli- noise (C. Lorenz), se distingue de tous les systèmes jusqu'ici préconisés par l'emploi d’une matière r sistante à la chaleur et bonne conductrice du courant électrique, laquelle présente de grandes variations de résistance électrique, même aux oscillations minimes de pression. On sait que, de tous les solides connus qui se prêtent à la confection des contacts microscopiques, le charbon à donné les résultats de beaucoup les meil- leurs. Or, l'emploi du charbon présente un inconvé- nient sérieux, à savoir que, sous l'action du courant électrique, les contacts sensibles se réduisent graduel- lement en cendre, de facon que les microphones à charbon perdent leur efficacité après un temps plus ou moins court ou même deviennent tout à fait inutili- sables. Cet inconvénient est particulièrement gênant au passage des courants intenses. Aussi le charbon n'a-t-il pu être utilisé jusqu'ici pour la construction des microphones à courants de grande intensité que grâce à l'emploi de réfrigérants spéciaux et encore dans des limites plutôt modestes. Or, dans le nouveau système de microphone, le charbon pur jusqu'ici en usage pour la confection des contacts sensibles est remplacé par un charbon chimi- quement modifié, suivant un procédé spécial. L’expé- rience a fait voir que le charbon silicié (silundum), obtenu par l’incandescence du charbon au sein de la vapeur de silicium fortement chauffée, se prête particu- lièrement bien à cet emploi. Ce charbon silicié pré- sente, en effet, une résistance bien plus grande à la combustion que le charbon pur ordinaire. Aussi cette matière permet-elle de réaliser une transmission bien plus efficace de la parole que les dispositions ordi- naires. L'effet microphonique du silundum resterait continuellement bon, même au passage des courants extraordinairement intenses; cette matière peut donc servir non seulement pour la fabrication des micro- phones ordinaires, mais pour celle des microphones à courants intenses. Grâce à la facilité avec laquelle cette matière se réduit en poudre, grains, globules, baguettes, le pro- cédé de fabrication d’un contact sensible devient parti- culièrement commode, d'autant plus que la membrane du microphone se prépare facilement avec la même matière. $ 4. — Physiologie Sur labsorption de la sécrétine. — Lorsque le chyme gastrique, traversant le pylore, pénètre dans le duodénum, les éléments acides qu'il contient agis- sent sur une substance contenue dans la muqueuse duodénale, la prosécrétine, pour la transformer en sécrétine. Celle-ci, résorbée par les vaisseaux san- guins qui rampent dans les parois du duodénum, est amenée par la circulation sanguine au contact des cellules du pancréas dont elle provoque la sécrétion. Ce sont là faits aujourd'hui classiques. Mais la sécrétine ainsi formée est-elle directement résorbée sans avoir été déversée dans la cavité du duodénum, ou ne passe-t-elle dans le sang qu'après avoir été englobée dans le suc duodénal et par lui entrainée dans l'intestin? La question n'était pas ré- solue. Les uns, comme Bayliss et Starling, comme Fleig, estimaient que la sécrétine est résorbée direc- tement en son lieu de formation, s'appuyant sur l'ab- sence d'action sécrétoire de la sécrétine neutre intro- duite dans la cavité du duodénum; les autres, comme Wertheimer, pensaient que celte sécrétine, dont ils constataient la présence dans la cavité duodénale à la suite de l'introduction d'acide chlorhydrique dilué 1 Der Mechaniker, n° 3, 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE dans celle-ci, ne pouvait guère ne pas y être résorbée. Wertheimer et Duvillier viennent de soumettre cette question à l'investigation expérimentale *. On sait que l'introduction d'acide dilué dans l'extré- mité inférieure de l'iléon, au voisinage du cæcum, ne provoque pas de sécrétion pancréatique. Si l’intro- duction, dans cette même région, d’une solution acide ayant préalablement séjourné dans le duodénum engendre une sécrétion pancréatique, c'est évidem- ment que la muqueuse iléale peut résorber la sécré- line; si elle n'engendre pas de sécrétion pancréatique, c'est que la muqueuse iléale ne résorbe pas la sécré- tine ou ne la résorbe que lentement. Voici, d'après Wertheimer et Duvillier, une expé- rience typique : « Chez un chien curarisé, on intro- duit une canule dans le conduit pancréatique et on isole, par trois ligatures immédiatement au-dessus du cæcum, deux anses intestinales, longues chacune d'environ 30 centimètres. On commence par injecter, dans la saphène, 1 centimètre cube d'une solution d'acide chlorhydrique à 5 °/, qui a séjourné la veille 30 minutes dans le jéjunum d’un autre chien: cette injection a pour but de mettre à l’épreuve l’acti- vité de la solution. On obtient 5 à 6 gouttes de suc pancréatique par minute. Au bout de 15 minutes, la sécrétion s’est fortement ralentie et une goutte met 2 min. 40 secondes à tomber. On injecte alors 25 cen- timètres cubes d'une solution d'acide chlorhydrique à 5°/ dans celle des deux anses de l'iléon qui est la plus éloignée du cæeum, afin de voir si l'acide seul ne serait pas capable, mème en cette région, d'accélérer exceptionnellement la sécrétion pancréatique. Mais, après cette injection, une première goutte met 5 min. 15 secondes à se former, une seconde 7 min. 50 se- condes. On introduit alors dans l’anse sous-jacente 25 centimètres cubes de la solution de sécrétine essayée au début de l'expérience. Durée de la forma- tion des gouttes : 6 min. 35 secondes; 2 min. 2 se- condes ; 4 min. 30 secondes ; 4 min. 6 secondes; 1 mi- nute; { min. 5 secondes; 59 secondes, etc. » Les résultats ne sont d'ailleurs pas toujours aussi nets qu'ils le sont ici; parfois même le résultat est nul. Les expériences de Wertheimer et Ducellier établis- sent donc la possibilité d’une résorption de la sécré- tine par la paroi intestinale, mais elles démontrent aussi, et c’est là le résultat le plus important, que la sécrétine, malgré son abondance dans le contenu duodénal, ne joue qu'un rôle minime ou nul dans la sécrétion pancréatique quand elle à été entrainée par le suc duodénal. Le véritable agent de la sécrétion pancréatique est la sécrétine directement absorbée par les vaisseaux sanguins en son lieu de production. La civilisation bouddhique préislamique au Turkestan chinois et dans la Chine cen- trale : les Missions Stein et Pelliot. — Il yaune vingtaine d'années seulement que, pour la première fois, furent signalées, au Turkestan chinois, des traces d'une civilisation bouddhique antérieure à l’époque où l'Islam s’implanta dans ce pays. C'est de l'Inde, son berceau, que le bouddhisme, entraînant avec lui toute — Géographie et Colonisation la culture hindoue, était venu au Turkestan, et c’est de là : sans doute qu'il avait progressé vers la Chine propre- ment dite. La Mission Pelliot a apporté une très impor- tante contribution à la connaissance de cette civilisa- tion reculée. Ce fut en 1889 qu'un Anglais, le capitaine Bower, rapporta de Koutchar, où il l'avait acheté, un premier manuscrit en écriture hindoue. Quelques années plus tard, Fernand Grenard, le compagnon de l’infortuné Dutreuil de Rhins, trouva à Khotan le plus ancien ma- nuscrit hindou connu. D'autres documents de même 1 C.R. Soc. biol., 19 mars 1910, p. 535-537. nature furent réunis aussi par le consul russe à Kachgar, Petrovski. Puis, Sven Hedin, en 1895, exhuma, en plein désert du Taqlàä-makan, des vestiges de villes mortes *. La première Mission purement archéologique fut organisée en 1897 par l'Académie des Sciences de Saint- Pétersbourg et confiée à M. Klements, qui, parti en 1898, opéra du côté de Tourfan, où il trouva de nombreux manuscrits et des grottes ornées de fresques, qui ser— vaient de sanctuaires *. En 1900-1901, le D' Stein, envoyé par le Gouverne- ment des Indes, trouva à la limite méridionale du Taqlàä-makan, dans la région de Khotan, de nombreux textes en diverses langues de l'Inde et des monuments et objets d'inspiration gréco-bouddhique *. A cette époque, une impulsion nouvelle fut donnée à ces recherches par la création d'une Association internationale pour l'exploration historique, archéolo- gique, linguistique et ethnographique de l'Asie centrale et de l'Extréme-Orient, décidée au Congrès des Orien- talistes de Rome en 1890, organisée après celui de Hambourg en 1902, et ayant un comité central à Saint Pétersbourg et des comités nationaux. L'Allemagne chargea, en 1902, le Professeur Albert Grünwedel, qui s'était déjà fait connaître par une mythologie du bouddhisme #, d'aller poursuivre à Tourfan les recherches du D' Klements; elles furent continuées ensuite par M. von Le Coq, assistant de M. Grünwedel au Musée d'Ethnographie de Berlin, en 1904-1005 *. L'ensemble de ces explorations fit découvrir dans tout Je Turkestan du Nord, au pied du Tien-Chan, et particulièrement dans les régions de Tourfan et de Koutchar, de curieux monuments de style gréco- bouddhique et des manuscrits d'écrilures diverses, indiens, syriaques, sogdiens, ouisours, etc., intéres- sants surtout pour les vine et 1x° siècles. De son côté le D' Stein, parti en 1906, fit une nou- velle exploration qui donna aussi d'importants résultats. Nous avons déjà signalé les découvertes effectuées dans la première partie de son voyage jusqu'au Lob-nor°. En février 1907, il entreprit une nouvelle expédition qui le conduisit du Lob-nor à Cha-tcheou ou Touen- houang, dans le Kan-sou, par la route, longue d'environ 500 kilomètres, qu'avaient jadis suivie le pèlerin Hsuan- tsang, au vue siècle, puis Marco Polo’. Le D" Stein effectua en dix-sept jours ce trajet qui en avait exigé vingt-huit pour Marco Polo. Le voyageur constata que la dépression du Kara-nor se remplit au printemps d'une forte rivière qui coule vers l'Ouest et va se perdre dans les sables tout près des mares salées qui prolongent à l’est le Lob-nor. Au sortir de ce détilé, il rencontra les ruines de tours de guet reliées entre elles par une muraille et se prolon- 1 Svex Heniw: Die geographisch-wissenschaftlichen Ergeb- nisse meiner Reisen in Zentralasien, 1894-1897. Petermanns Ergänzungshelt, n°131, Band XXVII, Gotha, Justus Perthes, 1900. 2 Nachrichten über die von der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften zu Saint-Petersburg im Jahre 41898 ausgerüstete Expedition nach Turfan. Saint-Petersbourg, in-80, Heft I, 1899. 3 M. Aurez Stein : Ancient Khotan. Londres, 1907, 2 vol. in-40. % ALBERT GRÜNWEDEL Mythologie des Buddhismus in Tibet und der Mongolei. Leipzig, 1900, in-80: traduit de l'allemand par Yvan Gorbscumiot (Paris, E. Leroux, 1900, in-80). 5 re von Le Coo : Berichl über Reisen und Arbeiten in Chinesisch-Turkestan. Zeitschrilt fur Ethnologie, XXXIX, 1907, p. 509-525. s Revue générale des Sciences pures et appliquées, 30 oc- tobre 1907, p. 816. — Voir aussi : The Geographica! Journal, janvier 4907. p. 31-35; juillet 1907, p. 71-77. — Sur l’ensemble du voyage : M. Aurez STEIN, Explorations in central Asia. The Geographical Journal, juillet 1909, p. 5-36; septembre 1909, p. 24-271. — Du même : Exploration géographique et archéo- logique en Asie centrale, 1906-1908. La Gréographie, 15 sep- tembre 1909, p. 137-154. F 7? The Geographical Journal, novembre 1907, p. 503-507. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 321 geant ainsi jusqu'à Ngan-si (An-shi); cette ligne fron- lière daterait du nesiècle avant notre ère et avait dû se rattacher à la Grande Muraille du Kan-sou. De nom- breux objets datant de cette époque reculée y furent (trouvés. Au sud de l’oasis de Cha-tcheou, M. Stein étudia les grottes des «Mille Bouddhas», temples souterrains signalés par Prjevalsky lors de son troisième voyage, en 1879-1880, et dont les belles fresques et les stucs sculptés, remontant aux vin® et x° siècles de notre ère, attestent l'éclat dont brilla à cette époque l’art bouddhique, importé de l'Inde par les routes du Tibet et de l'Asie centrale. Ayant appris qu'il existait dans l’une des grottes un grand dépôt de manuscrits anciens, il put se la faire ouvrir et il y vit des liasses s'élevant, sans aucun vide, jusqu'à 3 mètres de hauteur. Il y avait là des textes bouddhiques, des manuscrits sanscrits et tibétains, d'autres en turc ouigour, des documents chinois, lettres, comptes, de monastères, etc. Moyen- nant une généreuse offrande, l'explorateur put em- porter 24 caisses de manuscrits et 5 de peintures qu'il envoya à Londres. Le Dr Stein entreprit alors l'étude des massifs occi- dental et central du Nan-chan!. Dans un défilé creusé par la rivière de Ta-chi à travers la deuxième rangée du Nan-chan, il trouva une intéressante série de temples bonddhiques creusés dans le roc, de la même époque et du mème style que ceux de Touen-houang, mais moins grands. Le voyageur explora les trois chaines septentrionales du Nan-chan, dont les sommets atteignent de 5.500 à 5.800 mètres. Un des résultats les plus intéressants du voyage de M. Stein fut la constatation des aspects divers qui caractérisent les trois parties du Nan-chan : roches nues à l'Ouest, prairies au centre, forêts à l'Est. Les itinéraires parcourus par le voyageur dans cette traversée, de Cha-tcheou à Kan-tcheou, dépassent 650 kilomètres et les levés effectués par son topographe hindou couvrent plus de 60.000 kilomètres carrés. Parti de Kan-tcheou en septembre 1908, pour une seconde campagne d'hiver dans le bassin du Tarim, le D: Stein, au lieu de passer par le Lob-nor, prit cette fois la grande route des caravanes par Hami et Tourfan, visita les ruines de ces deux localités déjà explorées par MM. Grünwedel et von Le Coq et arriva en dé- £ étain blanc), ils sont métastables par rapport à l’étain nonécroui, au-dessous de 18° aussi bien par rapport à celui-ci que vis-à-vis de l’étain gris. La connaissance de ces faits‘permet maintenant d'étudier de plus près un grand nombre de phéno- mènes connus depuis longtemps, spécialement importants pour la technique. Avant de les exami- ner, je ferai remarquer d'abord qu'il paraît moins opportun, maintenant que la cause des phénomènes décrits par von Hasslinger ainsi que par moi esl découverte, de les réunir sous la désignation d'une « nouvelle forme de peste de l’étain », car il n’y a aucun rapport entre cette maladie infectieuse de l’étain et la peste de l’étain. Comme elle est attri- buable à l'effort auquel le métal a été exposé pen- dant le travail, le nom de maladie d'écrouissage serait plus convenable. Il reste maintenant à rechercher si d’autres métaux subissent aussi la maladie d’écrouissage. Les récentes recherches que j'ai entreprises avec le Professeur Katsuji Inouye, et dans les détails desquelles je ne puis pas entrer ici, montrent que c'est en réalité le cas. Pressé par le temps, je dois me borner, et pour terminer j'indiquerai quelques exemples quise rapportent à des cas dela technique. Il y a quelques années, je recus de la fabrique de lampes Ehrich et Grætz, à Berlin, la communi- cation suivante : «Dans la fabrication des lampes à pétrole qui sont préparées avec du laiton en feuilles laminé (62,5 °/, de cuivre, 37,5 °/, de zinc), il arrive fréquemment que des lampes nouvelles ou usagées présentent après quelque temps une forte corrosion, qui les rend inutilisables. La cohésion du métal disparaît; il se forme des fentes et des trous ». La maison Ehrich et Grætz fut assez aimable pour mettre à ma disposition plusieurs récipients ainsi corrodés, qui, lui étaient parvenus de diverses parties du monde. La figure 19 représente un de ces récipients, qui après trois années (à la tempé- rature de la chambre), était arrivé à l'état que montre la photographie. Mais des récipients neufs présentent aussi, peu de temps après la fabrication (par exemple deux mois), un commencement de 336 ERNST COHEN — LES MALADIES CONTAGIEUSES DES MÉTAUX corrosion. Le métal reste alors tout à fait brillant; l'analyse montre qu'il est composé de 62,5 °/, de cuivre et 37,5 °/, de zinc. Sur là préparalion de ces parties de lampes, Fig. 19. — Récipient en laiton corrodé par la maladie de l'écrouissage. M. E. Elias, de la fabrique de laiton de Marienfelde, près Berlin, que nous remercions ici de ses rensei- gnements détaillés, nous a appris ce qui suit : les feuilles de laiton employées, possédant la composi- lion ci-dessus, sont laminées à froid, chauffées aussitôt dans un four à cornues, refroidies à l'air et laminées de nouveau. De cette facon, la trempe créée par le laminage à froid des feuilles est annulée; les feuilles de laiton sont ensuite mises sous la forme désirée par écrouissage sous presse. Tandis qu'autrefois on travaillait avec précaution el qu'on comprimait la feuille peu à peu, aujour- d'hui le récipient est formé avec une feuille de 0,48 d'épaisseur par deux manipulations sous la presse. La substance est ainsi travaillée à un haut degré, et avec un travail plus grand, la tendance à un élat plus stable augmente. La substance corrodée présente sous le micros- ;. 20. — Microphotographie d’une feuille de laiton décapée. cope la même structure que la feuille de laiton décapée (fig. 20), tandis que les parties saines ont l'aspect du laiton fraïchement laminé. La recristal- lisation qui s'est produite, le passage de l’état métastable à un état plus stable, à provoqué par places la corrosion complète de la substance. D'autres observations des fabricants sont en complète concordance avec la conception déve- loppée ci-dessus : des lampes, qui se sont bien conservées à basse température (par exemple au dehors), se corrodent lorsqu'on les emploie dans des chambres chauffées. L'accélération par la tem- pérature est ici évidente. Le fait que le phénomène a élé observé plus fré- quemment dans ces dernières années trouve son explication en ceci que le travail de la substance, dans l’écrouissage par les procédés de fabrication: actuellement employés, est beaucoup plus grand qu'autrefois. La poignée de porte représentée par la figure 21, d'après une photographie, nous offre un autre: exemple de la maladie d’écrouissage (sur le laiton). Ici, le métal écroui est déjà fortement corrodé. Signalons encore un cas pour termi- ner. Dans la Chemi- ker-Zeiltunçg, une fabrique allemande d'acide sulfurique communiquaitce qui suit il y a quelques : « L'été der- montrèrent années nier se sur une de nos ins- tallations à acide sul- furique, sur le toit de la chambre princi- pale, qui n'élait en fonctionnement que depuis un an, des en- droits humides en grand nombre, augmentant par- ticulièrement après les journées chaudes. En ces. points, le plomb était fout à lait cassant, mais pas du tout attaqué chimiquement, ce qui serait d’ail- leurs impossible en si peu de temps avec une marche des chambres non forcée. L'analyse ne donne aucun renseignement. À notre avis, les cre- vasses sont attribuables à une faute dans le lami- nage, ce que toutefois le fabricant conteste com- Fig. 21. — Poignée de porte cor— rodée par la maladie de l'é- crouissage. plètement. » Cette fabrique d'acide sulfurique, sur ma de- mande, m'a appris que la température des toits de: plomb était de 40 à 60°, et m'a envoyé à l'époque (1902) quelques morceaux de ces toits. Je ne par- vins pas alors à trouver une explication du phéno- mène. À la lumière de mes nouvelles recherches, l'explication devint claire : la température de 40 à 60° était très favorable à une recristallisation. Comme la substance en question n'existe plus, et que la fabrique d'acide sulfurique n’est plus en état de m'en procurer d'autre, un examen définitif de KARL FRED. KOLDERUP — LES FJORDS DE NORVÈGE 337 «elle-ci ne peut malheureusement plus être fait. Comme on le voit, s'ouvre ici, et spécialement les phénomènes de cette nature qui se passent avec le fer invitent à un ‘examen approfondi. J'espère l’'entreprendre bientôt, “ar je suis convaincu de la vérité des paroles pro- un domaine intéressant noncées un jour par votre célèbre compatriote Francois Arago : Croire tout inventé n’est qu'une erreur profonde, C'est prendre l'horizon pour les bornes du monde, Ernst Cohen, Professeur de Chimie physique à l'Université d'Utrec LES FJORDS DE NORVÈGE ET Si, après un voyage à travers les hauts plateaux «le la Norvège, on s’avance assez loin vers l’ouest pour apercevoir une des profondes vallées occi- «dentales de la région (fig. 1), on ressent immédiale- ment l'impression que l’on se trouve en face d'un nouveau trait du relief de ce pays. Quand on des- end le long des parois de rochers abruptes et qu'on suit le cours de la vallée, on constate que le sol, en s'abaissant progressivement, s'enfonce finalement sous la surface de la mer; la vallée se prolonge par un fjord. C'est làun phénomène général dans l'ouest de la Norvège, et l'on ne peut pas envisager séparé- ment la formation «es vallées et celle des fjords, mais on doit les consi- Von SPEE : Arch. f. Anat. u. Phys., Anat. Abth., 1889. — PaLaniNo : Arch. ilal. Biol., t. XXXI, 1899. — MARCHAND : Anat. Hefte, \. LXVII, 1903. — Horgauer : Verh. Anat. Ges., 1904. # MaLassez et Moxon : Arch. de Phys., ASTS. CELLULES GÉANTES 375 vent être extrêmement nombreux, et ce nombre atteint dans les plus gros éléments plusieur centaines. La distribution des noyaux est des plus variables. Tantôt les noyaux sont épars dans tout I corps cellulaire. D'autres fois, ils se localisent soil au centre, soit à la périphérie ou à l'un des pôles de la cellule géante. La situation marginale des noyaux (type de Langhans") avait été considérée à tort(Baumgartenetd'autres*) comme caractéristique de la cellule géante du tubercule, car on l'observe dans n'importe quelle cellule géante irritative, mais elle est tout au moins très fréquente dans le tuber- cule. En réalité, dans les cellules géantes des tuber- eules et d’autres, dont la partie centrale a subi une dégénérescence caséeuse, cette partie centrale dégé- nérée apparait dépourvue de noyaux, soit que les noyaux qui s'y trouvaient aient dégénéré eux aussi, soit qu'ils aient émigré dans la zone périphérique. Le type de Langhans s'observe aussi dans les cellules géantes qui se forment autour de corps étrangers (Krückmann, C. Mayer‘). Les noyaux d’une cellule géante irritative ne sont pas tous semblables. Par exemple dans un cas de syphilis congénitale du foie, Binder‘ en décrit divers types : la plupart sont grands, clairs, vési- culeux; d’autres sont plus foncés, tout en étant plus petits et très colorés (hyperchromatiques) ; d'autres sont hypochromatiques, quelques-uns si päles qu'ils sont à peine distincts du protoplasma. Quelques cellules géantes peuvent être complète- ment privées de noyaux : privation qui est le signe d'une nécrose déjà consommée, ou prochaine. La diversité des noyaux dans une cellule géante doit faire songer à la possibilité d'une origine différente. Elle laisse supposer ou bien que la cellule géante, si elle n’est pas formée au début de cellules de pro- venances diverses, peut plus tard recevoir un con- tingent cellulaire de source extérieure, ou bien à phagocyté des éléments étrangers dont les noyaux sont seuls reslés distincts. $ 3. — Division. On à observé dans les diverses espèces de cellules géantes tantôt la division directe où amitose, tantôt la division indirecte où mitose. Arnold et Werner” ont admis encore deux autres modes de division, qu'ils nomment « fragmentation directe » et « frag- mentation indirecte ». Mais Denys et Demarbaix” Rs 4 LanGnaws : Virch. Archiv, t. XLII et XLIX, 1868 et 1870. 2 BauMGARTEN : Lehrb. der pathol. Mykoloyie, 1890. 3 KrucKMaNx : Virch. Archiv, t. CXXXVII. — C. MAYER : Ziegler's Beitr., t. XII. 4 Bmnoer : Virch. Archiv., t. CLXXVII, 1904. 5 Arxozn : Virch. Archiv., t. XCIII et CII. — WERNER : Ibid. t. CNI, et Arch. f. mikr. Anat., XXXI, 1858. 6 Denys : La Cellule, t. I, 1886, et t. V, 1889; Anat. Anz., t. ILL. — Demarsaix : La Cellule, t. V, 1889. en attribuent les images à des dégénérescences nu- cléaires par hyperchromasie ou même à des défauts de fixation. La division des cellules géantes multinucléées ne peut évidemment être qu'une division nucléaire, une caryodiérèse, non suivie de eloisonnement du protoplasma, de plasmadiérèse, si la cellule demeure une, reste cellule géante. Mais il se peut que la cellule multinueléée se partage totalement en don- nant naissance à plusieurs cellules nouvelles et dis- tinctes. De unanime des auteurs, la division nucléaire des cellules géantes multinucléées et particulièrement des cellules géantes irritatives se fait par le mode direct. Arnold, Marchand, Welcker, Binder, Faber' n’ont pu y observer de figures mi- totiques. Au contraire, dans les cellules épithé- lioïdes qui entourent la cellule géante du tubercule, les mitoses sont fréquentes. Podwyssotzky*, produi- sant expérimentalement des cellules géantes, à observé au début de leur formation la division indirecte seulement et plus tard exclusivement la l'avis division directe. Mentionnons que, dans des symplastes très étendus (plasmodiblaste de l'embryon des Mammi- fères), on ne rencontre aucune figure de division nucléaire, ni amitotique ni mitotique; tous les noyaux existant dans le symplaste, celui-ei les recoit tout formés de la couche cellulaire (cyto- blaste) sous-jacente (Maximow). II. — PROPRIÉTÉS ET FONCTIONS DES CELLULES GÉANTES. Nous n'examinerons pas les fonctions particu- lières que telles ou telles cellules géantes peuvent remplir dans des localités et dans des circonstances déterminées; nous n'éludierons pas la question détaillée du rôle que jouent les ostéoclastes dans la résorption osseuse, les cellules géantes du tuber- cule dans la destruction bacillaire. Mais ces fonc- tions supposent elles-mêmes de la part de ces élé- ments une vitalité que l’on à mise en doute. Que faut-il penser de la vitalité des cellules géantes? Est-elle exallée ou atténuée et même nulle; les cellules géantes représentent-elles des formations progressives ou régressives, au contraire? La ques- tion ne s'est pas posée pour les myéloplaxes des qui entendu, des formes s'acheminant pas vers la dégéné- rescence et la mort, tout au contraire. Mais elle sarcomes, sont, bien vivantes, ne 4 AunOLD : Arch. f. mikr. Anat., t. XXX, 1887. — Mar- cuano : Zieglers Beitr., t. IV, 1889. — \WWEeLCkER : Ziegler's Beitr., +. XVIII, 1895. — Fager : Journ. of Path. and Bact., t. D, 4893. ? Popvyssotzky : Roussky Vratch, 1909. A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES peut déjà être soulevée à propos des ostéoclastes, et elle a élé très débattue en ce qui concerne les cellules géantes irritatives. Si, à la suite de Külliker, Wegner, Morison, Pom- mer’, on admet que les ostéoclastes sont des cellules douées d’une grande vitalité, capables de phagocyter ou de détruire, par sécrétion de certains sues, la sub- stance des os normaux ou pathologiques, d’autres auteurs, s'appuyant sur cerlains caractères de dégé- nérescence des ostéoclastes, sur l'état des noyaux notamment, ont voulu voir dans ces éléments des formes dégénératives des cellules médullaires. Pour les cellules géantes irritalives, la question à recu, il y a longtemps déjà, de Weigert et de Metchnikoff une réponse opposée. Dans le cas de la cellule géante du tubereule, celle-ci n'est-elle que la victime des bacilles et bientôt ne sera-t-elle plus qu'un cadavre? Ou bien est-elle le défenseur sinon victorieux, du moins plein d'énergie et plus énergique que tout autre, que l'organisme oppose à la maladie bacil- laire? La seconde alternative suppose l'existence, dans la cellule géante irritative, de propriétés affirmant sa vitalité et capables de lui assurer le succès. Deux propriétés ou l’une des deux seule- ment sont pour cela nécessaires. Pour détruire tout corps étranger, inutile ou nuisible à l'organisme, la cellule géante dispose de deux moyens : la sécré- tion destructrice et la phagocytose. C'est surtout à une sécrélion corrosive qu'on à attribué le pouvoir des ostéoclastes dans la résorp- lion osseuse (Külliker, Pommer); ils détruiraient lentement, grâce à certains sucs, la matière orga- nique et les sels calcaires. La phagocytose suppose elle-même la mobilité des cellules géantes. Cette mobilité à été constatée par beaucoup d'auteurs, mais niée par quelques-uns. Les observations anciennes de Langhans” ont mis -hors de doute que les cellules géantes, particu- lièrement celles qui se forment autour des corps étrangers, peuvent émettre des prolongements ami- boïdes; il a suivi, notamment, les mouvements des cellules géantes qui s’amassent autour des extra- vasats et les résorbent. Lieberkühn, Rustizky, Arnold, Friedländer* ont fait des observations analogues sur des cellules géantes obtenues dans d’autres conditions. Par contre, Laulanié, sur des cellules géantes formées à la suite d'injection intra péritonéale de poudre de lycopode, n'a observé Loc. cit. — Wecxer : Virch. Archiv, t. NI, Edinb. med. Journ., 1873. — PouMER : Wien, t. LXXXIII, 1881, et Virch. 1 KÔLLIKER : 1873. — MOoRISON : Silz. d. Kaïs. Akad. Arch., &. XCLUL, 1883. 2 LanGHANs : Virch. Archiv, t. XLIX. # Lieperkuux : Ueb. Bewegungserscheinungen thierischer Zellen. Marburg, Leipzig, 1870. — Rusrizky : Virch. Archiv, t. LIX, 1874. — Arozo : Arch. f. mikr. Anat., t. XXX, 1881. — FrieoLanver : Virch. Archiv, t. LX. A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES ————— aucun mouvement, pas même après excilation électrique, et Welcker n'a pas été plus heureux. Metchnikoff conclut à l’amiboïsme des cellules géantes par la forme de ces cellules, qui poussent des prolongements dans le tissu ambiant. Mais Weigert' lui objecte que la présence des prolon- gements ne prouve pas le caractère amiboïde des cellules géantes; car les leucocytes, bien que doués d'amiboïsme, sont arrondis quand ils sont fixés. D'ailleurs la phagocytose, c'est-à-dire l'englobe- ment de corps variés (microbes ou cellules de l'organisme, corps inertes) par les cellules géantes et les formes vivantes analogues, à été constatée soit directement par l'observation du phénomène même de l’englobement, soit indirectement par la présence des corps englobés dans l'élément phago- eyte. Ce n’est pas le lieu de faire ici une énuméra- tion facile, mais longue, de tous les faits de pha- gocytose connus. Nous rappellerons seulement que Metchnikoff*, avant de faire de la phagocytose l'application que l’on sait à la défense de l’orga- nisme humain contre les microbes pathogènes et à la théorie de l’immunité, avait débuté plus hum- blement, étant naturaliste d’origine, par la consta- tation de la phagocytose chez les Invertébrés. Il avait observé que les phagocytes unicellulaires, pour englober des proies considérables ou particu- lièrement résistantes, unissent en quelque sorte leurs efforts en se fusionnant en cellules géantes ou en plasmodes. Ainsi, au contact d'une proie vivante, l’épithélium intestinal d'un Turbellarié (Mesostomum Ebhrenbergii) se transforme en un vaste plasmode doué d’un pouvoir phagocytaire très actif. En injectant des grains de carmin, des hématies humaines dans les tissus de Phyllirhoe, de larves Bipinnaria, les phagocytes unicellulaires et mobiles se confondent en cellules géantes autour des grains les plus volumineux. Des échardes, enforcées dans les Lissus de Zipinnaria, Téthys, Terebella, Ascidia, sont bientôt entourées d’ami- bocytes phagocytes qui confluent en un plasmode autour de ces corps étrangers. Dans la lutte des Daphnies contre leur parasite, le Honospora bicus- pidata, les phagocytes, sans détruire les spores du parasite, les entourent de cellules géantes. Le plus souvent, la phagocytose et la digestion du corps étranger par ces cellules géantes ou ces plasmodes suivent l'investissement. La phagocytose exercée dans des conditions pathologiques par les cellules géantes irritatives a été fréquemment observée. L'introduction sous la peau ou dans la cavité péritonéale de corps étran- 1 Weicerr : l'ortschr. d. Med., t. VI, 1888. ? Mercunikorr : Arb. a. d. zool. Inst. Wien, t. V, 1883: Virch. Archiv, t CXIT, 1888; Leçons sur l'inflammation, Paris, 1892. gers variés donne lieu à l'accumulation, aulour de ces corps, de nombreuses cellules qui se confondent en cellules géantes; celles-ci phagocytent el résor- bent les corps étrangers. La question de savoir si, dans la lutle contre les microbes pathogènes et notamment contre le ba- cille tuberculeux, les cellules géantes interviennent comme phagocyles actifs a élé vivement débaltue, particulièrement entre Metchnikoff' et ses élèves, d’une part, et Weigert constaté que la partie centrale de la cellule géante , d'autre part. Koch” avait ne renferme que peu ou point de bacilles; ceux qu'on y trouve sont mal ou point colorables, parce qu'ils sont morts à l’intérieur de la cellule hospitalière, Weigert* et d'autres lui, Baumgarten notamment, interprétèrent l'observa- tion de Koch de la facon suivante : Le bacille exerce une irritation qui provoque la division des noyaux, mais qui est impuissante à entrainer celle du pro- toplasma : car le protoplasma subit, sous l'influence du bacille, un affaiblissement qui le conduit à la nécrobiose. Aussi voit on les bacilles limités à la zone périphérique, nucléée de la cellule, tandis que la partie centrale anucléée est pauvre en bacilles ou en est dépourvue, le terrain nutritif étant épuisé dans la région centrale. La cellule géante subit donc une nécrose partielle d’abord, totale ensuite, et meurt de bacillose. Metchnikoff, au contraire, ses élèves et ses adeptes, expliquent tout autrement le fait constaté par Koch et l’emploient à la défense de la vitalité et de la fonction phagocytaire de la cellule géante. C’est sous l'action phagocytaire et destructrice de la cellule géante que les bacilles sont morts dans la région centrale du corps cellulaire. Les bacilles morts sont incolorables ou encapsulés et finissent par disparaitre. [ne reste alors que leurs capsules, qui prennent un aspect brillant et jaunätre, et qui, en se fusionnant, donnent des amas vermiformes caractéristiques. Stschastny, Soudakewitsch, Ruffer* confirme- rent les vues de Metchnikoff, en montrant la pha- gocytose des fibres élastiques et des bacilles de la lèpre par les cellules géantes. Foà, Klebs, Faber, Daels *, et beaucoup d'autres, acceptèrent l'idée de la fonction phagocytaire des cellules géantes. observaleurs avec 1 Mercaxixkoer : Ann. Inst. Past., {. 111, 1889. 2 WeicerrT : Virch. Archiv, t. CXIII, 1888. 8 Koca : Mith. a. d. Kaiserl. Gesundheitsamt, t. I]. 4 WeicértT : Deutsch med. Woch., 1885; Fortschr. der Med., 1889. — BAUMGARTEN: loc. cit. et Baumgarten's Jahr- bericht, 1888. 5 SrscnastTNy : Virch. Archiv, t. CXV, 1889, et Ann. Inst. Pasteur, 1889. — SounakewirsCu : Ann, Inst. Pasteur, t. V, 1891.,et Virch. Archiv,t. CXV, 1889. — Rurrer : British med. Journ., 1891. 6 Foa : Arch. ital. de Biol.,t. XXIX. — Kcess : Die allgem. Pathologie, t. Il, 1889. — Daecs : Presse médicale, 1907. 318 IV. — GENÈSE DES CELLULES GÉANTES. Celte question comporte elle-même plusieurs problèmes : le mode de formation des cellules géantes ; leur distribution et les circonstances de leur production; l'origine des cellules géantes, c'est-à-dire la nature histologique des cellules qui peuvent les fournir; les conditions de la genèse. $ 1. — Mode de formation. Il n'y à que deux facons de se représenter le mode de formation d'une cellule géante multinu- cléée, à protoplasma indivis. Ou bien la cellule géante à une origine unicellulaire ; elle provient d'une cellule dont le noyau s'est multiplié sans que le cytoplasme se cloisonne. Ou bien elle a une origine pluricellulaire ; elle nait de plusieurs cel- lules qui se sont fusionnées, ou d’une cellule qui en à incorporé d'autres. Beaucoup de ces cellules multinueléées, souvent accidentelles et erratiques, qu'on a rencontrées dans les organes les plus divers, et que nous avons éliminées de la liste des cellules géantes, doivent leur origine à la division nucléaire, directe ou indirecte, d'une seule cellule. Mais en est-il de mème pour les véritables cellules géantes? On admet, avec Kôülliker ‘, que les ostéoclastes proviennent d’une seule cellule, soit d'un ostéo- blaste (Kôülliker), soit d'une cellule médullaire quelconque (Pommer). Pour les cellules géantes des tumeurs et pour les cellules géantes irritatives, l'origine unicellulaire a élé aussi aussi soutenue par beaucoup d'auteurs (Koch, Weigert, Baumgarten, Werner, el en partie par Metchnikoff, Welcker, Yersin). Les deux pro- cédés de division directe et de division indirecte ont été invoqués. Cette dernière se fait fréquem- ment selon le mode multipolaire, qu'ont constaté Arnold, Martin, Waldstein, Mayzel, Cornil, Siegen- beck van Heukelem, Tizzoni et Poggi, Krompe- cher”, etc. Dans le cas du luberecule, la cellule géante est due à la division amitotique (Weïgert) ou mitotique (Baumgarten) d'une cellule épithé- lioïde, c'est-à-dire de l’une de ces cellules qui, dans le tubercule adulte, formeront une sorte de cou- ronne autour de la cellule géante. Mais l'idée de l’origine pluricellulaire a rencon- * KôüLuikER : Handbuch, 1889, et Erinnerungen aus seinem Leben, Leipzig, 1899. ? ArNOLD : Virch. Archiv,t. LXXVIII, 1879. — MARTIN : 1bid., t. LXXXVI, 1881. — Wacosreix : Zbid., t. XCI, 1883. — MawzeL : Festschriftf. Hoyer,18$4.— Corxic: C. R. Acad. des Se.,t. CITE, 1887. — SIEGENBECK VAN HEUKELEM : Virch. Archiv, t. CVIT, 1887. — Trzzont et PoGcr : Riv. clin. di Bologna, 1886. — KROMPECHER : Virch. Archiv,t. CXIII': Kün. Ungar. Akad. d. Wiss. et Die mehrfache indirecte Kernteilung, Wiesbaden, 1895. A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES tré plus de partisans. La cellule géante peut, du reste, se constituer de deux facons différentes aux dépens de plusieurs cellules. Ou bien il existe d’abord une cellule, privilégiée en quelque sorte et douée d’une vitalité plus grande, qui incorpore d'autres cellules, différentes ou non d’elle-mème, et qui, au lieu de les détruire, les assimile si bien que ces cellules incorporées et phagocytées deviennent avec elle parties constitu- tives d’une cellule géante multinucléée et pluriva- lente. On trouve une esquisse imparfaite et transitoire de ce processus dans le cas bien connu de la forma- tion de l'œuf des Hydraires. Bien que cet œuf ne soit pas une vraie cellule géante, ce cas est intéres- sant au point de vue de l'Anatomie générale et pré- pare, d'ailleurs, assez bien le suivant. On sait que l'œuf des Hydraires incorpore plusieurs cellules germinatives, qui en sont les nourricières, et qui, une fois incorporées, figurent dans le corps cellu- laire de l'œuf ce qu'on a appelé les ?seudozellen: les noyaux de ces cellules finissent par dégénérer et disparaitre *. Un processus curieux et inédit de genèse des cellules géantes à été observé par Guieysse-Pellis- sier®. Il a constaté, chez le Cobaye, dans le cas dela formation de cellules géantes autour de corps étran- gers, qu'un gros leucocyte mononucléaire, privilé- gié par sa taille et capable de fonctionner comme macrophage, incorpore d’autres globules blanes plus petits. En suivant la destinée de ces leucocytes englobés, il a vu qu'ils n'étaient pas détruits, mais se maintenaient vivants à l'intérieur du phagocyte: L'addition des corps cellulaires des leucocytes pha- gocytés au corps cellulaire du phagocyte avait augmenté le volume de ce dernier. Les noyaux de ces mêmes leucocytes, ajoutés à celui du phago- cyte,avaient fait de celui-ciune cellule multinueléée. Une cellule géante typique s'était ainsi formée. Guieysse à eu alors l'idée d’injecter chèz le Cobaye des spermatozoïdes, espérant qu'ils seraient pha- gocytés d'abord par les gros mononucléaires et qu'après phagocytose, échappant à la régression, ils auraient une aussi brillante destinée que les leu- cocytes. Son espoir n’a pas élé décu. Malgré l’éloi- gnement histologique très grand de ces deux es- pèces cellulaires, le leucocyte et le spermatozoïde, malgré la haute différenciation de ce dernier, il a observé les faits suivants. Les spermatocytes étaient englobés par le macrophage; leurs queues demeu- raient un certain temps visibles et finalement se dissolvaient dans le cytoplasme du phagocyte; les ! Bibliogr. in DorLen : Zeitschr. f. wiss. Zool., t. LXII, 1896. — GrôN8ERG : Zool. Jahrb., t.-XI, 1898. 2 GuiEYSSE-PELLISSIER : C. R. de Biol., 1908, et C. R. Assoc. Anat., 1908. Soc. A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES ———_—_—…………………—…—…———————…——…——————— têtes des spermatozoïdes se gonflaient, reprenaient la structure d’un noyau ordinaire, tout comme il arrive lors de la fécondation au noyau du sper- matozoïde, quand il se transforme en pronucléus mâle; finalement ces noyaux ne pouvaient plus se distinguer de celui du phagocyle. Guieysse a donné à cet intéressant phénomène le nom de « caryoana- biose », c'est-à-dire réviviscence du noyau (fig. 5). Il est possible que certaines cellules géantes irri- tatives prennent naissance à la suite d’un processus analogue. Ce qui disposerait à le supposer, c’est la variété des noyaux trouvés dans certaines cellules géantes; elle ferait croire que quelques-uns d'entre eux appartiennent à des cellules étrangères. Cepen- dant certains auteurs, qui, comme Josué”, ont vu des leucocytes pénétrer dans la cellule géante, en ont aussi constaté la rapide dégénérescence. Mais c’est autrement que par une heureuse évolu- tion d'éléments phago- cytés qu'on comprend l'originepluricellulaire de la cellule géante. Elle se forme par la fusion de plusieurs cel- lules équivalentes et de même nature, se fu- sionnant d'égale à égale. Cette opinion est si répandue qu'il l'excès les exemples et les citations. Nous avons relalé plus haut les faits ob- servés par Metchnikoff et d'autres sur divers Invertébrés, c'est-à-dire la coalescence d’amibocytes en cellules géantes ou en plasmodes. Quelques auteurs, comme Morison, ont admis que les ostéoclastes sont dus à la fusion de plusieurs cellules. Dans la formation des cellules géantes autour des corps étrangers, c'est aussi à la fusion de cel- lules que l'on a affaire, d’après les observations concordantes de Langhans, Marchand, Arnold, Büngner, Hammerl, Werner, Faber*. Pour les cellules géantes irritatives qui se for- ment dans diverses réactions inflammatoires, no- tamment dans la tuberculose, c'est aussi la fusion de cellules qu'invoquent Arnold, Metchnikoff, Gaule, Friedländer, Tripier, Krauss, Kiener, Kostenitch et Wolkow, Yersin, Josué, Borrel, Binder*. Fig. 5. — Cellule géante con- tenant des spermatozoïdes en caryoanabiose (d'après Guieysse-Pellissier). 1 Josué : Thèse de Paris, 4898. 2 WWVERNER : Arch. f. mikr. Anat.,t. LXI, 1903. 3% ArNOLD : Virch. Archiv, t. LXXXVIII. — METCHNIKOFF : Ann. Inst. Pasteur, 1888. — YERsSiN : Zbid. — KiENER : Arch. faudrait multiplier à ! 379 En ajoutant à une trace de culture charbonneuse un peu de lymphe de Grenouille, Metchnikoff à assisté à la formation de cellules géantes aux dé pens des cellules lymphatiques. Le même auteur à observé chez ses animaux d'expériences favoris, le Spermophile et le Meriones, tous les stades de la formation de la cellule géante par fusion des leuco- cyles mononucléaires autour de bacilles tubercu- leux. Borrel à suivi pas à pas la production de Ja cellule géante du tubercule par confluence de leu- cocytes mononucléaires. Bien que la presque una- nimité des anatomo-pathologisies reconnaissent aux cellules géantes irritatives une origine pluri- cellulaire, quelques-uns ont été plus éclectiques et ont admis des cas différents. Ainsi Krückmann et Fürst prétendent que celles qui ont des noyaux diffus sontsans doute dues à la confluence d'éléments distincts, tandis que celles où les noyaux affectent le type de Langhans ou bien le type müriforme sont issues d’une seule cellule; mais Binder estime qu'il n’y à, au point de vue de l’origine, aucune différence entre les cellules à noyaux diffus et les cellules à noyaux localisés. Les cellules géantes peuvent donc se former par fusion de cellules. Ce mode de genèse est d'autant plus vraisemblable que c'est d’une facon analogue que se produisent les symplastes, proches parents des cellules géantes. Rappelons que les plasmodes des Myxomycètes se forment à la suite de la coales- cence de cellules d’abord isolées et libres, les myxa- mibes. Le syncytium des Eponges provient, d'après Delage, de la fusion de groupes polynucléés pre- nant naissance eux-mêmes par l'incorporalion de cellules ciliées aux cellules amiboïdes. S 2. — Distribution des cellules géantes et circonstances de leur production. On trouve les cellules géantes dans les cas les plus divers. Elles ne font même pas défaut dans le règne végétal. Tischler‘ les a décrites dans les tissus des galles de certaines plantes, et surtout de Circaea luleliana, c'est-à-dire dans des lésions inflammatoires ; elles s'y présentent avec des carac- tères semblables à ceux des cellules géantes irri- tatives des animaux. Chez ces derniers, laissant de coté les cellules multinucléées qu'on voit se produire partout, dans tous les tissus et tous les organes, et qui ne sont pas de vraies cellules géantes, négligeant parmi Physiol., t. VII, 1880. — Kosrexrrsen et Wozkow : Arch. de Méd. expér., 1892. — Kraus: Virch. Archiv, 1895.— BORREL: Ann. Inst. Pasteur, 1893, 1894. — Tririer : Traité d'Anat. Virch. Archiv,t. LXIX. — FRIEDLANDER : : Virch. Archiv, t. CXXX. — pathol. — GAULE : Ibid.,t. LXVIII. — KRrüCKMAN: Fürsr : Ziegler's Beitr., {. XXIV, 1598. 1 TiscaLer : Ber. d. deutsch. bot. Ges., t. XIX, 1901. 380 A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES ces dernières les ostéoclastes dont la localisation est sous-entendue dans leur dénomination même, il reste les cellules géantes des tumeurs et les cel- lules géantes irritatives. Parmi les tumeurs, une place à part doit être faite à celles que Robin et Nélaton ont décrites sous le nom de « tumeurs à myéloplaxes », parce qu'elles reproduisent sans doute à l’état patholo- gique les myéloplaxes ou ostéoclastes de la moelle des os normale ou enflammée. Malassez et Monod les ont nommées « sarcomes angioplastiques », parce que les cellules multinueléées, analogues aux myéloplaxes qui les forment, ne sont pour eux que des cellules vaso-formatives anormales. Ils ont appuyé leur interprétation sur les résultats du râäclage de ces tumeurs, qui donne entre autres éléments des cellules géantes multinueléées bordant des cavités vasculaires et creusées souvent de logettes qui renferment des hématies et des leuco- cytes. Paget a autrefois appliqué le terme de cellules géantes à certaines cellules des tumeurs ostéoïdes ou ostéosarcomes. Elles y sont extrêmement fré- quentes et s’y multiplient activement par division directe et par mitose bipolaire et multipolaire. Les déciduomes sont des tumeurs d'origine pla- centaire. Elles contiennent, entre autres éléments, soit des cellules géantes multinucléées issues des cellules déciduales de la caduque utérine, soit de vrais plasmodes reproduisant le syncytium des villosités choriales. ‘On peut donc penser que ces tumeurs ont une origine à la fois maternelle et fœtale. On peut trouver des cellules géantes au voisinage ou dans l'intérieur de tumeurs très variées. On en a donné deux interprétations différentes. Les uns les ont considérées comme propres à la tumeur, et, dans le cas d’un épithélioma, par exemple. comme de nature épithéliale. Les autres croient qu'elles sont étrangères à la tumeur. Ribbert'! les regarde comme de nature tuberculeuse, comme le résultat d'une association de la tuberculose et du cancer; Audry et Constantin? admettent en général dans les néoplasies, à côté de cellules multinucléées qui sont de même nature que les éléments de la tumeur, d’autres cellules géantes irritatives qui ne sont qu'une production réactionnelle banale vis-à-vis des cellules de la tumeur agissant comme éléments parasilaires ou étrangers. Les cellules géantes irrilatives se produisent dans toutes sortes de circonstances, dans les tissus el les organes les plus divers. On sait que de nombreux auteurs (Langhans, ! Rissert : Lehrb. der pathol. Anal. Bonn, 1896. ? Aupry Er CONSTANtIN : Arch. prov. de Chirurgie, 4898. B. Heidenhain, Ziegler, Weiss, E. et F. Marchand, Senftleben, Laulanié, Büngner, Hammer, Podvys- sotzky, Faber, etc.) ont déterminé la formation de cellules géantes irritatives par introduction de corps étrangers, résorbables ou non (chevilles d'ivoire, lames de verre, fragments d'éponge, che- veux, fils de soie, calgut, agar-agar, poudre de lycopode, diatomées et spicules d'éponge) dans la cavité péritonéale, sous la peau ou dans d’autres points du corps. Podvyssotsky a vu se former au- tour de valves de diatomées et de spicules d’éponge une telle profusion de cellules géantes que celles-ci se confondaient presque en une sorte de tissu con- tinu, qu'il propose d'appeler « gigantome » ou « granulome giganto-cellulaire ». On peut rattacher à ce groupe de cellules géantes celles qui se forment autour de corps étrangers. naturels, au voisinage des extravasats (Langhans, B. Heidenhain) et des trombus (Stilling)*, autour de cristaux de cholestérine dans des foyers athé- romateux, de poils, de vésicules graisseuses, etc. dans diverses circonstances pathologiques”. La régénération des lissus et des organes et celle des épithéliums notamment s’accompagnent de phénomènes irritatifs au cours desquels des cellules géantes peuvent se former (L. Loeb, Branca)*. L'inflammation de divers organes donne lieu à une réaction à la faveur de laquelle des cellules géantes se produisent souvent; il en est ainsi pour l'inflammation de la séreuse péritonéale (Cornil et Ranvier), de la cornée, de la conjonctive et d’autres organes. Dans un grand nombre de maladies infectieuses et parasitaires, la tuberculose, la lèpre, la syphilis, la variole, l’actinomycose et d’autres mycoses, les sporotrichoses, les échinococoses, etc., des cellules géantes se développent dans les foyers d'infection et autour des parasites el englobent les agents microbiens et parasitaires de la maladie (fig. 3 et6). Elles forment fréquemment le centre d’une granu- lation arrondie, à laquelle on peut donner le nom générique de tubercule. Les cellules géantes de la tuberculose sont les plus connues et ce sont elles qu'on prend pour type de la cellule géante irrita- tive, bien qu'elles soient plutôt atypiques que ‘ B. Hermbenuain : Ueb. die Verfettung fremder Kôrper in der Peritonealhôble. /n. Diss., 1872. — ZreGLer : Experim. Unters. über die Herkunft der Tuberkulelemente. Würzburg, 4855. — Weiss: Vireh. Archiv, t. LXVIII, 18176. — Senrr- LEBEN : Jhbid., t. LXXVII, 1879. — E. MarcHAND : Virch. Archiv, t XCUI, 1883. — K. Marcuanp : Ziegler's Beitr., t. XIX, 1889. —- Fager : Journ. of Path. and Bact., t. 1, 1893. — Vox Büncner : Zicgler's Beilr., &. XIX, 1896. — HaumerLz : Zbid. — Ponvyssorzki : Æussky Vratch, 1909. — 2 Sun : Zeitschr. 1. Chirurgie, t. VII. 3 Bibl. in Boum : Virch. Archiv, t CXLIV, 1896. 5 L. Lors : Arch. f. Entwickl. Mechanik, {. VI, 1898. — Branca : Journ. Anat. el Pliys., 1899. A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES ————————— 381 typiques. Les cellules géantes de la syphilis" ont | complexe épithélioïde, s'y fusionner méme en une été considérées par la plupart des auteurs comme dues à l’action du virus syphililique même, ou tout au moins comme banales el communes à loute granulation, tuberculeuse, actinomycosique ou syphilitique. Pour d’autres (Baumgarten, par ex.), elles ne seraient pas spécifiques, mais seraient dues à une tuberculose compliquant la syphilis; elles affecteraient, en effet, le type de Langhans, à noyaux marginaux, qui sera caractéristique de la tuberculose. $ 3. — Origine des cellules géantes. On comprend que la diversité des circonstances, la variété des organes el tissus où les cellules géantes se dévelop- pent aient fait naître l’idée que toutes sor- tes histologiques de cellules peuvent leur donnernaissance.De fait, les recherches sur l'histogénèse des cellules géantes dans la tuberculose, dans les tumeurs et au- tour des corps étran- gers ont donné lieu aux opinions les plus variées. Toutes les espèces de cellules ont été regardées comme le point de départ des cellules géantes : des glo- bules blanes, des cel- lules mésodermi- ques embryonnai- res, des cellules con- jonctives fixes, des cellules endothéliales vasculaires, des cellules épi- théliales de toutes provenances *. Il paraît donc logique de conclure à la prove- sance banale des cellules géantes. Eprouvons à l’aide de quelques exemples la valeur de cette con- elusion. La participation des globules blancs est prouvée par les expériences d'Arnold. En introduisant dans le sac lymphatique dorsal de la Grenouille de petits fragments de moelle de sureau, il a vu des globules blancs affluer dans les cavités cellulaires de la moelle, s'y fixer, s’y accoler en une sorte de site. éé © 4 Bibl. in HerxEIMER : Syphilis, in ÆZrgebn. f. Path. u. path. Anat., 1907. 2 Bibl. in Binper : Virch. Archiv, t. CLXXVII, 1904: Broscu : Zbid., t. CXLIV, 1896; Josué : Thèse de Paris, 1898. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. CRE à® PAT ee, Q 9 Fig. 6. — Granulation tuberculeuse du foie (d'après Tripier). — eg, cg, deux cellules géantes formant le centre de la granulation; ce, cellules épithélioïdes; e, petites cellules dont l'ensemble cons- titue la zone périphérique de la granulation tuberculeuse; ch, cellules hépatiques appartenant au parenchyme hépatique dans lequel la granulation est plongée. masse plasmodiale multinucléée. Dans le cas de granulations, telles que la granu- lation tuberculeuse, dans celui des corps étran- gers, le début de la réaction inflammatoire est marqué par l’afflux de cellules. Celles-ci se fixent, grossissent, se lassent les unes contre les autres el se transforment en « cellules épithélioïdes », c'est- à-dire en cellules ayant l'aspect et non la nature de cellules épithéliales (fig. 6). La cellule géante se forme ensuite (voir plus haut) soit par division de l’une de ces épithélioïdes, soit par la coalescence de plusieurs d'entre elles. Mais la autour d’un corps étranger ou qui sont le point de nature des cellules qui s'amassent départ d'une granu- lation tuberculeuse, par conséquent la nature aussi des cel- lules épithélioïdes sont très discutées. Si l'immense majo- rité des auteurs con- sidèrent les épithé- lioïdes comme cellules migratrices fixées, comme des globules blancs hy- pertrophiés, d'au- tres, comme Mar- chand, Podvyssots- ky, n'admettent pas cette origine leuco- cytaire, et certains croient que les cel- lules épithélioïdes naissent in situ, par exemple de cellules fixes du jonctif, ou plus gé- néralement de cellules quelconques de la région en- flammée (Baumgarten, Weigert). Il est certain que des cellules géantes et des amas plasmodiaux peu- vent se former sur place aux dépens de cellules fixées. Les cellules de Kupffer du foie, par exemple, se fusionnent dans diverses circonstances en ré- seaux plasmodiaux ; nous l'avons observé chez les Batraciens, lorsque les cellules de Kupffer, à la suite d'une hématolyse intense, doivent faire les frais d’une phagocytose exagérée. L'opinion de l’origine endothéliale des cellules géantes est fondée sur plusieurs faits. Ces cellules ressemblent à des tronçons de vaisseaux qui ont subi une oblitération inflammatoire et dont l’endo- thélium a proliféré. Les noyaux de la cellule géante sont disposés fréquemment en une ou deux cou- Cl des ‘x ® ete tissu con- 382 ronnes concentriques, comme ils le sont dans les tuniques d’un petit vaisseau. Les cellules géantes occupent souvent l'emplacement de vaisseaux de nouvelle formation. Mais il faut bien dire qu'aucune preuve décisive n'a élé fournie en faveur de la pro- venance endothéliale et vasculaire des cellules géantes. Quant à l’origine épithéliale, il est bien évident que les cellules géantes qui se forment dans un épithélium en voie de régénération, que les sym- plastes tels que celui de l’ectoplacenta proviennent des éléments épithéliaux. Mais une semblable pro- venance devient problématique pour les cellules géantes rencontrées dans les épithéliums d'organes enflammés et dans les tumeurs épithéliales. Dans les premiers, il est toujours difficile de faire la part de ce qui revient en fait de tissus enflammés à l'épithélium d'une part, aux cellules conjonetives et aux globules blancs d'autre part. Dans les tumeurs, il faut également, comme on l’a vu plus haut, distinguer entre des cellules géantes multi- nucléées produites par hypertrophie de cellules épithéliales de la tumeur, et des cellules géantes dont l'origine est étrangère à l’épithélium. Est-il possible, d'après ce qui précède, de con- clure à l’origine et, par suite, à la nature des cellules géantes ? La production de cellules géantes dans des cir- constances et des localités si diverses éveille tout de suite l’idée que res éléments naissent fortuite- ment aux dépens de cellules quelconques des tissus sains ou malades, et qu'ils peuvent dériver aussi bien de cellules épithéliales, endothéliales, conjonetives et lymphatiques. Mais l'hypothèse d'une origine univoque n'est pas exclue par la diversité des circonstances et des lieux. Dans toutes les conditions, dans toutes les localités où se pro- duisent les cellules géantes irritatives, affluent des globules blancs ou bien se trouvent des vaisseaux sanguins néoformés. Il est donc possible que, dans tous les cas connus, les cellules géantes aient pour point de départ soit des cellules endothéliales vas- culaires, comme le soutient Brosch, soit des leu- cocytes migrateurs, ainsi que le pensent Metchnikoff et la plupart des auteurs. $ 4. — Conditions déterminantes de la production des cellules géantes. 11 nous reste à examiner les conditions détermi- nantes ou tout au moins favorisantes de la pro- duction des cellules géantes, ayant en vue surtout les cellules géantes dites irritatives. L’épithète mème par laquelle elles sont désignées indique la condition essentielle qui préside à leur dévelop- pement. C'est une irritation, c’est l'inflammation produite par un corps étranger, par des microbes, A. PRENANT — LES CELLULES GÉANTES par des éléments dégénérés, ou même par un changement dans le milieu. Si l'on abandonne le terrain solide de la causalité pour s'engager sur celui de la finalité, on dira que les cellules géantes se produisent alors pour lutter contre ces microbes, pour débarrasser l'organisme de ces éléments dégé- nérés, de ces corps étrangers, el qu'aucune cellule ne remplirait mieux qu'une cellule géante, qu'une masse plasmodiale le rôle défensif de l'organisme. Il est manifeste que c'est à l’occasion d’une irrilation que se développent les cellules géantes et les plasmodes. C’est à la suite de l’ingestion d'une proie vivante que l’épithélium intestinal d'un Turbellarié se transforme en syneytium (Met- chnikoff). Lors de l’envahissement de l'ectopla- centa dans les tissus maternels, c'est seulement aw moment où, les cellules glycogéniques vaso-adven- tices qui entouraient les vaisseaux utérins s'étant écartées les unes des autres, le sang s'épanche dans le tissu conjonctif materrel et arrive jusqu à. l'ectoplacenta fœtal que les cellules ectoplacentaires se confondent en un plasmode (Maximow). L'in- fluence irritalive qu'exerce un corps étranger et qui détermine la formation d'une cellule géante est des plus évidentes. La production de cellules géantes multinueléées succède à des irritations consistant en des changements de milieu; les expé- riences de Nemec, Gerassimoff, von Wisselingh sur des végétaux, celles de J. Lœb, Norman sur les œufs de divers animaux, celles de Fürst, de Werner et de L. Lœb! sur l'épiderme montrent qu'un traumatisme de milieu, produit par le re- froidissement éthéré, par des conditions hyperto- niques, par l'absence d'O, est capable de proyo- quer l'apparition de cellules multinueléées. L'irritation agit sans doute en déterminant une: inflammation avec apport exagéré de matériaux nutritifs dans le point irrité ou enflammé, au début au moins. Cet apport conditionne certainement la formation de cellules géantes par division bipolaire répétée ou par division multipolaire d’une cellule unique (Krompecher). Quand le nombre des noyaux formés excède trois ou quatre, la division cellu- laire ne se fait plus (Martin, Schottländer*), et l'on obtient une cellule géante multinucléée. On peut supposer qu'une baisse des conditions de nutrition rend ensuite définitive l'absence de division cellu- laire. La différence des conditions irritatives détermi- nantes d'une gigantogenèse influe évidemment sur la destinée des gigantocellules. Produites par une excitation modérée, capable de multiplier les noyaux mais non de diviser le protoplasma, por- 2 ER 1 L. Lors : Arch. f. Entwickl. Mechanik, t. VI, 1898. 2 Mau : Virch. Archiv, t. LXXXVI, 1881. — SCHOTrLAN- DER : Arch. f. mikr. Anat., t. XXXI, 1888. I A. BRESTER. Lant en elles, dès leur naissance, les marques de l’'anomalie et de la dégénérescence, presque mort- nées, les cellules géantes du tubercule sont, pour Weigert, vouées à une régression falale. Dévelop- pées, au contraire, sous le coup d'une irrilalion intense, formes cellulaires hyperplasiques et hyper- trophiques à la fois, les cellules géantes apparais- sent à Metchnikoff comme débordant de vilalité, employant leur énergie exubérante à la phagocy- tose régulatrice el protectrice de l'organisme sain ou malade. Du point de vue de Anatomie générale et de l'Histologie comparée, la seconde conception paraitrail plus acceptable. Mais si l’on se refusait à choisir entre ces deux interprétalions, si, fortement impressionné par les destinées si différentes, progressives ou régres- sives, qui attendent la cellule géante d'un ostéo- sarcome et celle d'un tuberecule, on voulait expli- quer celle différence de destinée, ce n’est pas dans une opposition de leur nature première qu'il fau- drait en chercher l'explication, mais dans les con- ditions extérieures différentes où ces cellules se sont formées et continuent d'exister. La plupart des histo-pathologistes, ainsi Charcot et Gombault, Malassez, Straus', en France, ont accentué l’op- position entre cellules géantes, celles des tumeurs et des tubercules par exemple. Y a-t-il donc deux espèces de cellules géantes, celles qui ont et celles qui n'ont pas le type de Langhans, celles dont le centre n'est pas ou est caséeux et dégénéré? — NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES N'existe-t-il pas tout au plus deux races et moins encore deux sortes de gigantocellules, les fortes et les faibles, dont la force et la faiblesse résultent de conditions extérieures bonnes ou mauvaises? C'est la causalité, non la finalité, qui permet de déterminer la nature d'une cellule d'un être vivant. [rritation de tissu, modérée ou intense peu im- porte, telle est, dans tous les cas sans doute, la cause de la genèse des cellules géantes. Monstres cellulaires par excès de matière et défaut d'organi- sation, telle est Évolution ou leur nature commune à toutes. involution, ce sont les destinées opposées d'éléments primitivement semblables et semblablement formés : tantôt formations progres- sives, comme les cellules géantes des tumeurs, et celles qui, développées autour des corps étrangers, sont capables d'édifier des tissus nouveaux et du- rables; tantôt, au contraire, productions régres- sives et vouées à une dégénérescence fatale, comme les cellules géantes des tubercules et fréquemment celles des corps étrangers. 11 n’y à pas lieu d'op- poser les unes aux autres. Dans tous les cas, on a affaire, comme Ziegler le disait il y a plus de vingt ans”, à des cellules formatrices, mais hypertro- phiques et anormales, qui, selon les conditions de milieu et de nutrition, auront une évolution pro- gressive ou subiront une involution régressive. A. Prenant, Professeur d'Histologie ‘à la Faculté de Médecine de Paris. NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES L'hypothèse que le Soleil contient, tout comme la Terre et les aérolithes”, des substances radio-actives et que, vu sa température énorme, il en contient encore plus”, n'a sûrement rien de hasardé et est excessivement féconde. Ayant déjà expliqué ici même, dans le numéro du 30 août dernier, comment cette hypothèse peut nous porter à considérer les protubérances comme autant de lueurs électriques entièrement analogues à nos aurores polaires et tranquilles comme celles-ci, je ne reviendrais pas aujourd'hui sur cette explication si je n'avais hâte de faire voir combien grand est le nombre des phé- nomènes terrestres avec lesquels s'accorde cette explication. Avant de faire ressortir cet accord, j'ai encore à 1 Srraus : La tuberculose et son. bacille. Paris, 1895. ? SrkurT : On Radium in the Earth's Crust and the Earth's internal heat. Pror. R. S., t. LXXVII A: * Makower : Proc. R. S., t. LXXVII A, p. 141. — P. Curur : OR tIOXXXVIIT, p.151: rappeler un argument nouveau qui prouve que dans les protubérances, tout comme dans nos aurores, la matière est relativement en repos, les électrons seuls étant en mouvement. Cet argument a été développé par M. Schuster, qui vient de prouver que les vitesses prodigieuses que les ou- ragans et les éruptions solaires demanderaient sont mille fois plus grandes que les plus grandes vitesses théoriquement concevables et que, par conséquent, de telles vitesses sont impossibles comme vitesses de la matière et ne peuvent être attribuées qu'au déplacement des ions ”. Si, d'ailleurs, ces déplacements énormes des raies des protubérances n'étaient pas dus à des ions seulement, mais bien à des ouragans de 1 E. ZxeGLer : Verhandl. d. Würzburger phys. med. Ges., 1876, t. X, et Unters. über pathol. Bindegewebs und Gefäss- neubildung, Würzburg, 1876. ? Scnuster : À suggested explanation of the high velocities on the solar surface. AVat., 29 oct. 1908, 384 A. BRESTER. — NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES matière incandescente, il serait impossible que les raies du spectre solaire ne montrassent pas aussi ces mêmes déplacements énormes. Or, tout le monde sait que ces raies sont généralement immo- biles. Cette immobilité ne se concoit, Lout comme l'absence de l’hélium et du coronium du spectre, que si la luminosité des protubérances et celle de la couronne sont entièrement électriques. Car les expériences de Hittorf et de Cantor ont démontré” qu'un gaz électriquement lumineux n'a aucun pouvoir absorbant sensible sur la lumière qui le traverse. Ces expériences donnent, par conséquent, à mon explication électrique des protubérances une belle confirmation et sont en désaccord complet avec l'explication courante. Avec mon explication électrique des protubé- rances, nous restons aussi sur le terrain ferme des observations terrestres. Car la même cause, qui, d'après moî, produit les protubérances du Soleil, existe aussi près des trous de la croûte terrestre et y produit des protubérances analogues. Cette même cause émane de la matière radio-active, qui, se trouvant, en vertu de sa grande densité, sur le Soleil au-dessous de la photosphère et sur la Terre, d'après les recherches de MM. Elster et Geitel?, surtout dans les cavités de la croûte ter- restre, a besoin, dans les deux cas, de trous pour pouvoir lancer ses émanalions, ses produits de transformation et ses rayons 6 et y au dehors. Sur le Soleil, avec sa photosphère nuageuse, ces trous s'ouvrentetse referment facilement et forment incessamment sur toute la surface des protubé- rances éphémères. Mais, sur la Terre avec sa croûte résistante, des trous plus ou moins considérables ne se forment que difficilement et sont le plus souvent l'effet de forces volcaniques. Or, depuis six mois que j'ai émis l’idée des protubérances ter- restres, j'en ai déjà trouvé des exemples nombreux. C'est ce que je tâcherai de faire voir dans cel article. I. — PROTUBÉRANCES TERRESTRES LES PLUS ORDINAIRES. Les protubérances terrestres les plus ordinaires sont nos aurores polaires, qui, généralement causées par mêmes solaires de rayons $ et qui, d’après ma théorie, causent aussi les protubérances du Soleil”, abondent surtout dans les régions polaires, où, d'après Nordenskjüld, les faisceaux elles sont même permanentes * 1 Hrrrorr : Wied. Ann., t. VII, p. 553 (1839). — CanroR : Versuch über die Absorption des Lichtes in electr. leuch- tenden Gasen. Ann. d. Physik, 1900, p. 462. 2 RurnerroRD : Radioactivity, 1904, p. 357, etc. 3 Revue gén. des Sc. du 30 août 1909, p. 690. # NorpeNskJOLD, cité par M. Weinstenn : Himmel u. Erde, t. III, p. 418. — EKamwa : AJb. d. Natuur, 1887, p. 60. Comme elles se montrent aussi à l'équateur !, elles entourent qnelquefois toute la Terre (comme par exemple le 4 février 1872) d’une chromosphère complète”. Quelquefois, on a vu l'aurore sous la forme de flammes ou de bouffées de fumée qui montaient du sol. Des protubérances planétaires analogues causent probablement la lueur que nous montre souvent le côté non éclairé de Vénus. Nos aurores polaires ne sont, d’ailleurs, pas toujours d'origine solaire. Notre Terre peut les faire naître aussi. Ce qui fait ressembler aussi nos aurores polaires aux protubérances et à la couronne du Soleil, c’est leur spectre. D'après M. Arrhenius*, M. Stassano aurait démontré que 2/3 des raies de nos aurores polaires, que 44 des raies observées par MM. Des- landres et Hale dans le spectre des protubérances et que plus de 270 raies coronales sur les 339 que M. Humphreys à photographiées en 1901, appar- tiennent au krypton et aux autres éléments du groupe zéro. Si ces observalions de M. Stassano se confirment, ce seraient donc les mêmes éléments qui, d'après moi pour la même raison, produiraient autour du Soleil et de la Terre la même lumière. Il. — PROTUBÉRANCES CAUSÉES PAR DES TRAINÉES MÉTÉORIQUES. Ces protubérances sont surtout très lumineuses lorsqu'elles sont produites durant une aurore polaire”. D'après M. Trowbridge, ce sont des nuages phosphorescents, qui, formés à une hauteur de 72 à 104 kilomètres et remplis de poussière météorique, ont quelquefois un volume de plusieurs kilomètres cubes. Sur 53 de ces trainées ayant une durée de plus d’une minute, il y en à 6 qui restent lumineuses de quarante à soixante minutes”. Franklin eroyait que le brouillard lumineux de 1783, dont nous reparlerons plus loin, avait été produit par une traînée pareille”. ILI. — PROTUBÉRANCES CAUSÉES PAR DES TREMBLEMENTS DE TERRE. Les tremblements de terre produisent toutes sortes de protubérances lumineuses électriques. Lors du tremblement de terre de Provence durant la nuit du 41 juin dernier, M. Dragon et un grand nombre de personnes qui se trouvaient en pleine Re 1 Lrais : L'Espace céleste, p. 456. 2 Aranentus : Lehrb. d. Kosm. Physik, p. 904. 3 Brro : Journ. Br. À. A., January 1907. — Eau : Het poollicht in de Kara zee. Ab. d. Natuur, 1887, p. 61. 4 ARRHENIUS : loc. cit, p. 911. 5 Von Huwsozor : Cosmos, {. I, note 45. 5 L'Année scientifique, 1908. 1 ArAGo : Ann. 1532, p. 279. A. BRESTER. — NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES 385 campagne ont vu, entre les secousses, de grandes elartés monter du sol et former ainsi comme une aurore boréale intermittente”. C'était là clairement une protubérance éruptive, due à des rayons f el y échappés d'une crevasse nouvelle. Le caractère électrique du phénomène étail prouvé par des aigreltes, qui couraient sur les fils de la canalisa- tion électrique durant les secousses. Lors du tremblement de Mexico le 4% août 1907, on a observé aussi, au moment d’une forte secousse, une production subite d'éclairs qui illuminèrent tout le ciel?. Des phénomènes lumi- neux ont caractérisé aussi le tremblement de terre de la Calabre en 1905°, de Laibach en 1895 et d’Aschaffenburg en 1837. Et, après le tremblement de terre de la Belgique en 1878, M. Terby vit à Louvain une aurore boréale”. Durant la nuit du tremblement de terre de Tacna au Pérou, le 13 août 1868, la population fut épouvantée par l'apparition subite d'une lumière éclatante éclairant tout le ciel, et qui, après avoir duré quelques secondes, se ral- luma encore durant quelques instants". De Hum- boldt a signalé aussi plusieurs tremblements de terre qui, comme ceux de Lisbonne en 1755, de Messine en 1780 et de Cumane en 1797, étaient accompagnés de flammes, qui sortaient de cre- vasses nouvelles 7; mais il semble douteux que ces flammes aient été tout simplement, comme la pro- tubérance d’Aix, des décharges électriques. Les phénomènes électriques et les tremblements de terre sont d’ailleurs tellement concomitants que, dans les pays où des mouvements du sol se pro- duisent fréquemment, il n'est pas rare que des bruits souterrains précèdent l'explosion de la foudre *. Remarquons en passant que l'électricité qui, durant les tremblements de terre, sort des cavités de la croûte terrestre ne cause pas seulement des phénomènes lumineux, mais aussi des perturba- tions magnétiques, physiologiques et atmosphé- -riques énormes. M. Gaston Planté nous racontait que, d’après le directeur de l’Artillerie de Nice et le D' Onimus, qui s'est livré à un examen médical complet, un gardien de batterie, occupé de la cor- respondance télégraphique, a recu une commotion terre de * Bulletin de la Soc. astr. de France, juillet 1909, p. 306. * Bulletin de la Soc. belge d'Astronomie, juin 1907, p. 237. # Ibid., p. 237. * D. Riecez : Pogg. Ann., t. XLVI, p. 655. Elmsfeuer u. Erderschütterung in Franken. Himmel u. Erde, 1899, p. 462. ÿ G. Pcanré : La Lumière électrique du 25 févr. 188$. Sur lelectricité considérée comme une des causes des tremble- ments de terre, p. 353. R. Fars: Von den Umwälzungen im Weltall, 1890, DAT: ? von Humsorpr : Cosmos, Tome I, p. 217. $ Lrars : L'Espace céleste, p. 377. électrique violente au moment précis du tremble- ment de terre du 23 février 4887'. Durant ce même tremblement de terre, M. Hubert Vitalis vit la bous- sole comme affolée, le pôle austral déviant jusqu'à 88°”. Comme les particules B surtout sont des centres actifs de condensation aqueuse, il n'est pas étonnant que, lorsqu'un tremblement de terre les fait sortir en masse hors des crevasses du sol, des orages à pluies torrentielles en soient le résultal ordinaire *. C’est ce qu'on a expérimenté de nouveau l'été dernier et ce qui explique que, d’après l'échelle des anciens baromètres, il n'y à jamais de temps plus affreux que durant les tremblements de terre. IV. — PROTUBÉRANCES CAUSÉES PAR DES ÉRUPTIONS VOLCANIQUES. Tout comme nos tremblements de terre, nos volcans sont aussi une source abondante d'élec- tricité et de protubérances électriques lumineuses *. Leurs éruptions sont généralement accompagnées d'éclairs incessants formidables, souvent en forme de boules. Sur le pont d’un navire, dans le voisi- nage du Krakatau en éruption, on vit de ces boules rouler avec vitesse et disparaître dans l’eau. Tous les agrès se montraient garnis aussi du feu Saint- Elme”. Quelquefois les volcans jettent aussi au dehors, comme le Vésuve en 1794, une poussière fine phosphorescente® et contribuent peut-être à former ces brouillards secs lumineux que nous considérerons dans le paragraphe suivant. V. — PROTUBÉRANCES FORMÉES PAR DES BRUMES ET DES NUAGES LUMINEUX. En 1873, il y a eu un brouillard sec qui, s’éten- dant depuis l'Afrique jusqu'en Suède, atteignit les plus hautes sommités des Alpes et dura plus d'un mois: Il était tellement lumineux qu'à minuit il éclairait l'atmosphère comme la Lune en son plein. En 1831, un brouillard analogue a recouvert l'Eu- rope, l'Asie, l'Afrique et l'Amérique. Grâce à lui, on £ PLANTÉ : loc. cit., p. 355. — C. R., 4 avril 1887. PLANTÉ UOC. CIE D 502. % QueTELET, cité par M. PLANTÉ : 1. e., p. 353. # Le mois dernier, j'ai trouvé dans le journal anglais The Globe un télégramme de Rome, daté du 9 décembre et mentionnant comme « le Mystère de l'Etna » que ce vol- can, quoique en repos, était entouré chaque nuit d'une lueur rougeätre, tandis qu'un phénomène ressemblant à l'aurore boréale était visible dans le ciel. Comme cette nouvelle répondait parfaitement aux prévisions de ma théorie, j'ai prié aussitôt M. Ricco de m'écrire si cette nouvelle était vraie. Mais, à mon grand regrel, M. Ricco m'a répondu que la nouvelle était fausse et que ces lueurs avaient été causées, d'après lui, par le lever et le coucher du Soleil et par une fumée que des cendres et du sable entraïnes rendaient rougeâtre. 5 Van Sannick : In het Ryk v. Vulcaan, p. 65. $ ARAGO : Ann. 1838. Notice sur le Tonnerre, p. 384. ©2 [w2) [ep] A. BRESTER. — NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES pouvait lire à minuit les plus petites écritures "!. Il colorait, tout comme le brouillard du Krakatau en 1883, le Soleil en bleu et en vert?. Ces brouillards lumineux ont été interprétés quelque temps comme occasionnés par des queues de comètes ; mais Arago a clairement démontré que cette interprétation était impossible et devait être remplacée par une explication volcanique *. Ces brouillards lumineux étaient d’ailleurs le foyer de fréquents orages. C'est ainsi qu'il arrive aussi quelquefois que des nuages orageux sont continuellement lumineux sans qu'on ait le droit d'en chercher l'explication dans de petites fulguralions, sans cesse renouvelées f. Arago a fait ressortir aussi que jamais à minuit l'obscurité n'est aussi forte en plein-air que dans un appartement sans fenêtre, et il en conclut que tous les nuages sont plus ou moins lumineux par eux- mêmes. Mais pour nous, qui savons, depuis les recherches de MM. Elster et Geitel, que le sol est toujours excessivement riche en émanations radio- actives, la luminosité nocturne ne vient pas seu- lement d'en haut, mais aussi d'en bas. La raie principale de l'aurore est souvent visible, d’ailleurs, dans l'atmosphère entière. M. Lemstrüm l'a même observée dans l'air qui le séparait d’une maison à quelques mètres de distance”, Dans les régions polaires, des protubérances sous la forme de brumes lumineuses tout près du sol ne sont nullement rares. D'après Liais, on les ren- contre aussi dans le voisinage du pôle magnétique sur la surface de la mer. On les considère souvent comme des lueurs aurorales. Pendant l'expédition danoise à Godthaab en 1883, M. Paulsen a eu quel- quefois l’occasion de les observer. M. Steenstrup les a vues aussi en Islande près du mont Esia, qu'il en vit recouvert, non à gauche, ni à droite, mais seu- lement au milieu’. Le major Sabine a signalé aussi un nuage incessamment lumineux sur le sommet d'une des montagnes de l'ile de Sky et produisant de temps en temps des jets semblables à ceux de l’aurore boréale”. Ce ne sont donc pas seulement des nuages orageux, mais aussi des nuages auro- raux, qui se montrent quelquefois comme des pro- tubérances lumineuses. M. Butler vient de décrire 4 Ar4Go : Ann. 1832. Notice sur les Comètes, p. 275. 3 AraGo : Ann. 1832, p. 274. R. A. v. Sannick : loc. cit., p- 139. 3 AraGo : Ann. 1832, p. 278. Arago chercha l'explication dans les émanations que les tremblements de terre avaient projetées dans notre atmosphère. Franklin la chercha soit dans une trainée météorique, soit dans une éruption formi- dable du M° Skaptar Jôkul en Islande. * Dezuc : Idées sur la Météorologie. — Ar4AGo : Ann., 1838, p. 283. * ARAGO : Ann. 1838, p. 285. 5 WEINSTENN : /immel u. Erde, t. 1, p. 243. 7 PauLseN : Bull. de la Soc. belge d'Astr., octobre 1906, p- 391. “ ARAGO : Ann. 1838, p. 385. encore un tel nuage dans le numéro du 9 décembre dernier du journal anglais Nature. De Saussure à vu aussi quelques sommets des Alpes devenir lumineux tout à coup‘. M. P. Marty, à Caillac, a vu souvent les plateaux volcaniques du Cantal recouverts de nuages lumineux et de neige phosphorescente. Le 12 novembre 1898, il y vit se développer deux larges colonnes très lumineuses rougeätres, qui durèrent environ douze secondes et qu'il a figurées dans le Zulletin de la Société astronomique de France de février 1899 (p. 92). Dans ces jets de lumière, M. Marty crut reconnaître une sorte de frémissement analogue à celui des aurores polaires. Durant les orages, non seulement on observe sou- vent le feu Saint-Elme et de la pluie, de la grêle et de la neige, qui deviennent lumineuses en arri- vant sur le sol, mais on voit aussi quelquefois des globes bleuàtres de feu et des flammes hautes de plusieurs mètres, qui disparaissent à la suite d'une explosion, soit dans le lieu où elles sont nées, soit après un déplacement plus ou moins rapide”. Même lorsque le ciel ne semble pas orageux, on a vu sur la surface de la mer des protubérances lumineuses, qui en rencontrant des navires y causèrent soit des explosions désastreuses, soit, comme l'ont heureu- sement expérimenté le major Sabine et le capitaine James Ross, simplement une courte illumination fantastique‘. Une protubérance lumineuse ana- logue, qui magnétisa tout à bord, a été rencon- trée aussi en mer en 1904*. VI.— PROTUBÉRANCES FORMÉES PAR DES FEUX-FOLLETS. Comme un dernier exemple de nos protubérances terrestres, nous citerons ces flammes qu'on voit voltiger quelquefois au-dessus de nos marécages el de nos cimetières et qu'on nomme des feux-follets. L'astronome Bessel en a vu plusieurs centaines à la fois le 2 décembre 1807 au-dessus d’une tour- bière près de Brème”. Souvent très pelites, elles sont quelquefois hautes de plusieurs mètres et ressemblent alors à ces protubérances déjà décrites plus haut comme ayant été rencontrées en mer. Ce qui distingue surtout ces flammes, c'est que, tout comme Je feu Saint-Elme, elles ne produisent aucune chaleur sensible. M. Arrhenius cite des per- sonnes qui mirent la main dans ces flammes sans 1 \VEINSTENN : J. C., p. 243. 2 Araco : Ann. 1838, p. 369. — Pogg. Ann., t. XLVI, p. 659. 3 ArAGO : 1bid., p. 372. 4 Bulletin de la Soc. astr. de France, décembre 1904, p. 548. 5 Bessez : Pogg. Ann., 1838, p. 366, « Giebtes Irrlichter ? Als Zeugniss von ihren wirklichen Vorkommen wird das Gegenwärtige hinreichen ». A. BRESTER. — NOS PROTUBÉRANCES TERRESTRES 387 en éprouver le moindre effet”. De Humboldt nous raconte aussi qu'à Cumane on voit souvent de grandes flammes voltiger au-dessus des prairies sans que l'herbe sèche S'y enflamme?. Plusieurs fois on a observé aussi, comme en 1855 à Kelder en Saxe et en 1885 à Giersdorf, qu'un grand nombre de flammes verticales se réunissaient pour prendre la forme d'une gerbe de blé”. Les déplacements de ces flammes, quelquefois très vagabondes', ne répondent nullement aux mouvements de l'air; car les professeurs Reimann et Knorr nous assurent qu'il est généralement impossible de les déplacer en soufflant et qu'elles se meuvent souvent avec des vitesses énormes, alors que notre atmosphère est parfaitement tranquille’. Quelquefois les feux- foliets sont intermittents et on les voit alors, à des intervalles d’une minute, par exemple, s'allumer en bas et s'éleindre un peu plus haut*. Les feux-follets n’ont jamais encore recu une explication généralement acceptée. On les à bien interprétés souvent comme dus à la combustion de carbures et de sulfures spontanément enflammés par de l'hydrogène phosphoré’; mais, comme ils sont sans chaleur, sans odeur et sans fumée, cette interprétation manque de fondement. N'est-il pas beaucoup plus probable que ce soient des aigrettes électriques dues à des émanations radio-actives venant d'en bas? Déjà Volta les considéra comme des phénomènes électriques”. Très souvent on voit d'ailleurs les feux-follets succéder aux orages. Et c'est ainsi aussi qu'après une journée orageuse M. Brakenhoff et cinq autres personnes ont vu, la même nuit, au commencement des feux-follets et plus tard des feux Saint-Elme”. VIT. — ConcLusion. Il résulte des considérations précédentes, qui ne sont d’ailleurs que le complément de mes articles dans cette Revue du 15 juin et du 30 août dernier et de ma théorie entière : 1° Que, s'il est certain que l'interprétation fan- tastique courante des prolubérances solaires doit être rejetée, notre propre atmosphère est riche en phénomènes lumineux électriques qui, comme nos © ARRHENIUS : J. c., p. 879. ? ARRHENIUS : L. e., p. 819. # Dr REIMANN : Das W’etter, 1896, Heft 9. Zur Irrlicht Frage. # REIMANN : /. ©. — Meteor. Zeitschrift, 1900. Bulletin de la Soc. belge d'Astr., janvier 1901, p. 20-21. 5 Bulletin de la Société belge d'Astr., janvier et février 1901 et janvier 1902. $ REIMANN : L. c. 7? La Nature, 11 décembre 1909. Le feu-follet, 8 Album der Natuur, Ast afl. van 1897, p. 24. ° W. Müzcer : Bulletin de la Soc. belge d'Astr., février 4901, p. 52-53. — ARRHENIUS : 1. c., p. S80. aurores polaires surtout, nous montrent en pelil ce que les protubérances du Soleil nous montrent en grand, et que c’est donc l’élude de nos protubé- rances terrestres qui nous conduira un jour à l'explication véritable des protubérances du Soleil; 2° Que les amateurs de vitesses prodigieuses ne perdront rien à cette explication véritable. Car déjà Celsius nous a informés que les rayons de l'aurore s'allongent souvent si vite qu'il est impossible de les suivre à l'œil", et nous savons que les raies de l'aurore accusent souvent des déplacements sur- prenants, qu'il est difficile d'attribuer, vu l’habileté de la plupart des observateurs, à des mesures inexactes, mais qui semblent plutôt répondre à des vitesses énormes dans le rayon visuel*. Si, par conséquent, le Professeur Fenyi vient nous assurer que, dans une protubérance qu'il a observée le 23 septembre dernier”, il a constaté des déplacements spectraux différant de 25,5 unités d'Angstrom et des vitesses qui différaient de plus d'un million de mètres par seconde, nous accep- tons ces vitesses prodigieuses sans la moindre diffi- culté, car nous les attribuons à des ‘ions qui tra- versent la matière tranquille. Et si, près de la raie C, il observa des plaques éclatantes d'hydrogène sau- tant, tantôt à droite, tantôt à gauche de la raie dont elles restaient toujours très éloignées“, cela ne nous étonne pas du tout, car nous savons que M. Stark a déjà fait voir le même phénomène dans un tube rempli d'hydrogène”. A. Brester Jz, Docteur ès sciences. P.-S. — Depuis la rédaction de l’article précédent, trois nouveaux exemples de tremblements de terre accompagnés de fortes protubérances lumineuses sont parvenus à ma connaissance : 1° On a observé le 4% juin 1909, sur l’île de Plata au Chili, 36 se- cousses de tremblement de terre suivies d'éclairs qui illuminèrent le ciel durant dix minutes sans produire le moindre bruit° ; 2 M. Frank T. Bullen a donné une belle description d’un tremblement de terre sous-marin qu'il a observé, remplissant tout le ciel d’une lueur éclatante, éltincelante et mettant 1 WEINsTENN : Das Polarlicht. Himmel u. Erde, t. 1, p. 241. 2 Lockver : The Meteoritic Hypothesis, p. 71. — ARRHE- ius : Z. c., p. 910. — Scneixer : Die Spectralanalyse der Gestirne, p. 336. M. Gyllenskiold a fait voir comment vingt-six observatenrs différents ont trouvé pour la raie principale de l'aurore des longueurs pour la plupart entière- ment différentes. 3 J. Fenvr : Erscheinungen auf der Sonne und magn. Stôrung am 25 Sept. 1909. Memorie d. Soc. degli Spettrose. italiani. # Voir la figure à 9 h. 59 m. 5 STARK : Astroph. Journ., décembre 1906, p. 362. $ Télégramme de l'Agence Reuter du 2 juin 1909, e. a. dans le journal De Nieuwe Courant de La Haye (3 juin 1909). 383 ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE la boussole hors d'usage! ; 3° Dans la nuit du 19 au 20 mars dernier, à minuit et demi, un grand nombre de personnes ont observé en Bretagne une forte secousse sismique, qui à été précédée par l'apparition dans le ciel d’une grande clarté bleuâtre *. Quoique ces personnes, — bien loin d'attribuer cette lueur à des matières radio-actives qui, emprisonnées dans des cavités, sont mises en liberté par le sisme qui brise leurs prisons, — aient attribué cette lueur à l'explosion d’un bolide gratuitement supposé et ayant coïncidé avec le tremblement de terre, il n’est pas douteux, toute- fois, que cette lueur soit un exemple de plus de la luminosité électrique qu’on voit si souvent former des protubérances près des trous à la surface du Soleil et de la Terre. A. B. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE I. — LA DÉSAGRÉGATION DE L'ATOME CHIMIQUE PAR LE RADIUM. Depuis l'époque très rapprochée où le radium a fait son apparition dans la science, une véritable pléiade de chercheurs a essayé de découvrir les propriétés mystérieuses de ce corps. Nous avons décrit l’an dernier les résultats extraordinaires trouvés parSir William Ramsay surla désagrégation de l'atome de cuivreet la polémique scientifique qui avait eu lieu avec M Curie. Les événements ont marché depuis cette époque et nous avons à enre- gistrer cette année un grand nombre de faits nou- veaux qui sont tout à l'honneur de l'éminent chimiste anglais. Au moment de sa découverte, on décrivait que le radium possédaitla propriété d'émettre trois espèces de rayons, que l’on désigna sous le nom de rayons a, B, y. Les rayons «, peu pénétrants, semblent consti- tuer la plus grosse partie du rayonnement. Ils possèdent la propriété d'être légèrement déviés par un champ magnétique intense, mais en sens inverse des rayons cathodiques. Les rayons $ sont moins absorbables dans leur ensemble que les rayons «. Contrairement à ceux- ci, ils sont déviés par un champ magnétique de la même manière et dans le même sens que les rayons cathodiques. Enfin, les rayons y sont de tous points compara- bles aux rayons de Rëntgen. Ils sont pénétrants et ils ne subissent aucune action de la part des champs magnétiques. Ils peuvent traverser des épaisseurs variables de plomb sans être absorbés. L'étude approfondie du radium a montré que cet élément nouveau donne naissance à un gaz chimi- ! Idylls of the Sea and other Marine Sketches, by Fraxk T. Buiex. Thomas Nelson and Sons, London. — A Subma- rine Earthquake p., 54-60. * Bulletin de la Soc. Astron. de France, avril 1910, p.196. * Revue gén. des Sciences du 30 juin 1909, p. 548. quement inerte, l'émanation. Quelle est la nature physique de ce gaz, dont la destruction libère une quantité énorme d'énergie, susceptible de décom- poser l’eau avec formation de néon et d’hélium ? L'étude de ce nouveau gaz a été faite par Ruther- ford, Ramsay et Gray. Le Gouvernement autrichien ayant mis à leur disposition les gisements de pech- blende radifère, ces savants ont pu isoler une quantité notable de radium. Le produit de la destruction de ce radium, l'éma- nation, à été liquéfié à l’aide d'air liquide. On a obtenu un corps dont le point d'ébullition serait de — 62°, d’après Ramsay, et de —65°, d'après Ruther- ford, sous une pression de 76 centimètres. Solidifiée, l’'émanation fond à — 71°. En outre, elle présente un phénomène curieux : elle devient phosphorescente lorsqu'elle est à l'état liquide ou. solide ; elle ne possède plus cette propriété à l'état gazeux. | Puisque ce corps se comportait comme un élé- ment nouveau, il fallait lui assigner une place dans la classification périodique de Mendéléef. Ramsay, ayant cherché son poids atomique, est arrivé au nombre 216. La place du nouveau venu se trouve tout naturellement dans la nouvelle famille des gaz inertes de l’air à valence nulle, à côté de l’hélium, du néon, de l’argon, du krypton et du xénon. La fluidité de son liquide, son point d'ébullition concordent bien dans la liste de ces nouveaux gaz, ainsi que le montre le tableau suivant : POIDS POINT POINT FLUIDITÉ GAZ atomique d'ébullition de fusion du liquide HéliumEse 4 — 2699 non solidifié » Néon. 20 — 220 — 2500 » Argon 39,9 — 1$6 — 188 1,2 Krypton . 82 — 151 — 169 219 Xénon . 128$ — 110 — 140 350 Emanation . 216 — 65 — T1 5 La nature de l’'émanation était ainsi fixée. Mais ce nouvel élément est d’une très grande instabilité ; il se décompose très rapidement en donnant nais- sance à de l’hélium ; il fautenviron 4 jours pour que ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE cette destruction s'effectue. C'est là un fait nette- ment établi par les expériences de Rutherford. Avant de se transformer en hélium, l'émanation passe par une série de phases, les unes très rapides, d'autres plus longues, et dont chacune constituerait peut-être un élément nouveau. La première étape de la transformation condui- rail à un corps solide émettant seulement des rayons « ; ce corps, que l'on à désigné sous le nom de radium A, serait volatil vers 4.000°; il se dissout dans les acides forts en donnant des sels stables. La durée de la demi-transformation de l’'émanation en radium À serait de 4 jours. Puis, ce radium A produirait en trois minutes du radium B, plus volatil que le précédent (630° envi- ron) ; il est soluble dans les acides forts, comme le radium A. Il est précipité par le baryum de la solu- tion de ses sels, et, contrairement au radium A, il n'émet aucune sorte de rayons. En 21 minutes, ce radium B se transforme en une troisième espèce de radium ou radium CG, soluble dans les acides et émettant les trois sortes de rayons &, B, y. A son tour, il passe à l'état de radium D, qui n'émel aucune sorte de rayons. Celui-ci a une vie plus longue ; il mettraitenviron A0 années à passer en une nouvelle phase, le radium E,, puis en radium E,. Celui-ci est volatil au rouge et émet des rayons 6 et y. Enfin, le radium E, deviendrait en 5 jours du radium F, émettant des rayons x, lequel se détruirait définiti- vement en 445 jours en produisant de l'hélium. Nous voilà bien loin de cet élément, le radium, que l’on s'habituait déjà à considérer comme un élément simple, ayant quelques propriétés curieuses et un peu surprenantes. De tous ces produits de transformation, peu d'entre eux ont été vus. Ramsay et Cameron auraient obtenu le radium D sous forme d'un dépôt à l'extrémité d'un tube capillaire très fin. Ce corps, d'aspect métallique, gris, brillant, ressemblerait fortement au plomb par ses réactions. Lorsqu'on essaie de le séparer des minéraux radio-actifs conte- nant du plomb, il se précipite sous forme de chlo- rure, en même temps que le chlorure de plomb, et c'est par des cristallisations fractionnées de ces chlorures qu'on peut le séparer partiellement du plomb. Quant à la dernière étape de la transformation, le radium F, on à pensé qu'il constituait le polo- nium, cette substance voisine du bismuth qui accompagne ce dernier dans la pechblende et se précipite avec lui dans toutes les séparations. Malgré les nombreux efforts qui ont été faits en vue de l'isoler et de le caractériser comme élément chimique, on n'y élait pas encore parvenu. Cepen- 389 dant, si le polonium représente le dernier terme radio-aclif de la série des dérivés du radium, tel que l'a indiqué Rutherford, il y avait un intérêt puissant à l’isoler, pour voir si, à son tour, il se détruirait en fournissant de l'hélium. Dans une Note récente, parue aux Comples rendus de l'Académie des Sciences du 14 février 1910, M": Curie et M. Debierne sont parvenus à isoler le polonium de quelques tonnes de résidu de minerai d'urane. En traitant ce minerai par une solution chaude d'acide chlorhydrique assez concentré, on dissout tout le polonium, sans toucher au radium. De la solution acide ayant subi un grand nombre de traitements trop longs à décrire ici, le polonium a été extrait par électrolyse. L'activité de plusieurs tonnes de minerai a été ainsi concentrée sur 2 milli- grammes de produit. L'activité de ce nouvel élé- ment a été mesurée, son spectre a été examiné, el le poids atomique fixé à 200. En outre, il ne donne lieu à aucune production de radio-activité induite et il produit seulement des rayons x. Une partie dela solution contenant le polonium a été introduite dans un tube de quartz, placé lui- mème dans un appareil complètement purgé d'air. On constate que l'eau se décompose. Et du faible résidu gazeux, il a été retiré 1,3 millimètre cube d'hélium, parfaitement caractérisé par son spectre. Il en résulte que le polonium produit de l'hélium. Si réellement la dernière étape de la transforma- tion du radiumi, le radium F, est du polonium, cette expérience vérifie pleinement les idées de Ruther- ford qui admet que ce radium F fournit l'hélium. L'hélium est-il le résidu inactif de l'atome d'éma- nation qui est arrivé à sa désagrégation finale? Rutherford ne le pense pas. D'après lui, les rayons & seraient des atomes d’hélium en mouvement, ayant une vitesse extraordinaire, environ le dixième de la vitesse de la lumière. La désagrégation spontanée des éléments radio- actifs est un phénomène exothermique, libérant une grande quantité d'énergie. Ramsay l’a utilisée pour essayer d'effectuer la transmutalion des élé- ments. Et l’on sait qu'il a obtenu du lithium à partir du cuivre. En se basant sur une vieille observation faite dans ses études sur la production d'hélium à partir du thorium, observation qui l'avait conduit à admettre que les solutions de nitrate de thorium engendrent de l’anhydride carbonique, Ramsay s’est demandé si le carbone ne provenait pas de l'action de l'émanation dégagée par le thorium sur le thorium lui-même. Or, le thorium est l'élément le plus lourd de la famille du carbone dans la elas- sification périodique. Cette famille, de valence 4, comprend, par ordre croissant de poids atomiques : le carbone (12), le silicium (28), le titane (48), le 390 germanium (72), le zirconium (90), l’étain (119), le plomb (206), le thorium (232). Si réellement ce dernier se transforme en car- bone, l'élément le plus léger de la famille, sous l'influence de l'émanation du radium, il était vrai- semblable que les métaux de poids atomique plus faible que le thorium devaient subir la même trans- mutation. Ramsay et Usher ont soumis à l’action de l'émanation des solutions de nitrate de thorium, de nitrate de zirconium, d'acide hydrofluosilicique et de chlorate de plomb. Ces solutions étaient placées dans de petits ballons de verre, complète- ment purgés d'air. Dans chaque ballon, on intro- duisait lémanation provenant de la destruction pendant huit jours d'une solution de bromure de radium contenant 0 gr. 2111 de radium métallique. Après un contact variant de 2 à 3 mois, les gaz ont été extraits des ballons et soumis à l'analyse. Dans tous les cas, on a constaté la présence d’une certaine quantité d'anhydride carbonique. Ja solution d'acide hydrofluosilicique SiF°.2HF, soumise à l’action de 0 c.c. 0724 d’émanation, a fourni 0 c.c. 063 de CO*. La solution de sulfate de titane (SO‘)Ti, traitée par 0 e.c. 0912 d'émanation, a donné naissance à 0 c.c. 054 de CO°. Avec les solutions de nitrate de zirconium (AzO')‘Zr, et de nitrate de thorium (AzO*)Th, un double essai a été fait. Il a conduit aux résultats suivants : QUANTITÉ d'émanation CO? trouvé Su NN LENESSE 0cc,0692 Occ,116 A ti Rce Occ,124 1AosuTph À 1% essai. 0cc,1120 Occ,551 OESNT DES Occ 124 Enfin, le chlorate de plomb en solution aqueuse a fourni 0 c.c. 007 d'anhydride carbonique, sous l’action de 0 c.c. 0649 d'émanation. De tous les métaux de la famille, c’est le plomb qui fournit la plus faible quantité d’anhydride car- bonique. Comme tous ces essais ont été faits en dehors de tout gaz carboné et que, de plus, les auteurs ont pris toutes les précautions pour qu’il ne s'en pro- duise pas pendant leurs expériences, il faut con- clure nécessairement à une dégradation des élé- ments de la famille du carbone, qui tendent tous vers le premier terme. Ce second succès Ramsay, et il s'attaqua immédiatement à la famille de l'azote. Il soumit à l’action de l'émanation une solution de perchlorate de bismuth. Au bout d’un certain temps, l'analyse des gaz révéla la présence d’anhydride carbonique, sans qu'on ait pu constater la moindre trace d'azote. La dégradation n'avait pas lieu vers encouragea ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE la tête de la famille du bismuth; elle semblait se produire vers le carbone. Faut-il arriver à une sem- blable conclusion? Ramsay ne le pense pas. De nombreux travaux doivent exécutés pour arriver à la manifestation complète de la vérité. Bien qu'ils soient très délicats à effectuer, ils ne sont pas au-dessus du génie de Ramsay. L'émanation du radium effectue aussi très sim- plement un grand nombre de réactions chimiques : l'eau est aisément décomposée en hydrogène et oxygène; on aurait même obtenu la formation d’eau oxygénée : 24°0 = H°0° + H°. L'anhydride carbonique est partiellement décom- posé en oxygène et oxyde de carbone ; l'acide chlorhydrique est scindé en hydrogène et chlore, l’anhydride sulfurique en SO* et oxygène; l’am- moniac en azote et hydrogène. Dans tous les cas, la décomposition serait strictement proportionnelle à la quantité d'émanation désintégrée dans un même temps. ètre II. — Pois ATOMIQUES ET NOUVEAUX ÉLÉMENTS. Les poids atomiques constituent en Chimie des constantes d’une importance primordiale. Toutes les analyses quantitatives sont basées sur l'emploi de ces nombres. Et la connaissance exacte des poids atomiques des différents éléments rendrait de grands services à l'analyse chimique. Cependant, aujourd'hui encore, nous ignorons leur vraie valeur. Depuis Slas, de nombreux chimistes ont essayé d'arriver à une détermination exacte de ces nombres, par des méthodes analytiques précises. Si l’on compare les résultats obtenus, ils varient d'une expérience à une autre. Et, chaque année, nous voyons modifier de nouveau le tableau des poids atomiques des éléments par la Commission internationale qui est chargée de le reviser. Nous trouvons en 1909 plus de 30 poids ato- miques modifiés. Pour certains, la correction atteint seulement la seconde décimale : ainsi le brome a son poids atomique fixé à 79,92, au lieu de 79,96; celui du calcium est 40,09 au lieu de 10,10, ete. Pour d’autres, c'est la première décimale qui est atteinte, et pour un assez grand nombre c'est le chiffre des entiers qui est changé; le poids atomique de l’erbium a été fixé à 167,4 au lieu de 166, celui du gadolinium à 157,3 au lieu de 156, celui du krypton à 83 au lieu de 81,8, celui du xénon à 430,7 au lieu de 128, celui du thulium à 168,5 au lieu de 171, etc. On a fixé le poids ato- mique du tellure à 127,5. Ce nombre est supérieur au poids atomique de l'iode, 126,92. Il en résulte- rait que l'iode prendrait place avant le tellure dans la classification périodique des éléments. Mais des expériences de Browning et Flint ont montré que ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 391 ce poids atomique du tellure variait entre 126,5 el 128. La question n'est donc pas définitivement résolue. Dépuis la découverte du lutécium en 1908, un nouvel élément, le néoytlerbium, a été isolé par Auer von Welsbach; c'est un élément voisin du précédent. On à fixé leurs poids atomiques à 174 (lutécium) et 172 (néoytterbium). Ils trouvent leur place dans la classification périodique entre le cérium, de poids atomique 140, et le tantale (183), au milieu de cette pléiade de métaux de la gadoli- nite sur lesquels la lumière n'est pas faite. Le chimiste japonais Ogawa a constaté que la molybdénite et la thorianite renferment un nouvel élément allié au molybdène et doué des propriétés suivantes : il forme un sel avec le molybdate d'ammoniaque; il donne un hydrate blanc par pré- cipitation de ses sels avec l’ammoniaque, en pré- sence d'un excès de chlorure d'ammonium. Séché à 1000, cet hydrate devient presque noir; le sulfure d'ammonium donne dans la solution de son chlo- rure un précipité noir verdàtre, insoluble dans un excès de réactif. Son chlorure donne une raie caractéristique dans la partie vert-bleu du spectre. A cet élément, il a donné le nom de nipponinm:; son poids atomique est égal à 100. Il se placerait entre le molybdène (96) et le ruthénium (101). En dehors du nipponium, la thorianite semble contenir encore deux autres éléments, dont l'un fournit un oxyde radio-actif. On voit que la liste des nouveaux éléments s'accroit tous les jours. Faudra-t-il y ajouter la longue liste des corps radio-actifs provenant de la désintégration du radium, du thorium et de l’acti- nium? Nous ne citerons pas ici de nouveau les produits du radium qui sont au nombre de 8. Le thorium, dont l'emploi est très répandu au- jourd'hui pour la fabrication des manchons à incandescence, et l’actinium, substance radio-active caractérisée par M. Debierne dans la pechblende où il accompagne certains corps du groupe du fer, subiraient aussi la désagrégation atomique et pas- seraient par les transformations suivantes : Thorium — mésothorium 1 —> mésothorium 2 —- radio- thorium —- thorium X —- émanation —- thorium A —- tho- rium B—- thorium C. Actinium — radioactinium —- actinium X —- émanation —+ actinium A — aclinium B — actinium C. Danne, ayant cherché à isoler de l'uranium un nouvel élément, l'uranium X, a été conduit à la découverte d’une nouvelle substance qu'il a nommée le radio-uranium. Le radium C, ce produit relative- ment stable de la destruction de l'émanation, ne serait pas un corps simple, mais un mélange de deux éléments. Ce serait done près de 25 éléments nouveaux qu'il faudrait ajouter à la liste des corps simples Bien entendu, sauf pour quelques-uns, les pro priélés physiques et chimiques de ces corps sont inconnues, On peut les caractériser par leur radio- activité particulière, et ils se distinguent entre eux par les rayons qu'ils émettent au moment de leur décomposition en libérant une énergie considérable. IT. — MÉraALLOïDES. Depuis trois ou quatre ans, la Chimie organique possède dans l'ozone un réactif précieux qui permet de préparer aisément un certain nombre de corps, difficiles à obtenir par d'autres voies, et de déter- miner la constitution de différentes substances. On connait la puissance d'oxydalion de l'ozone, qui l’a fait utiliser industriellement pour la fabri- cation du camphre artificiel, de la vanilline, de la soie artificielle, ete. Dans un article « État actuel de l'Industrie de l’ozone », paru dans la /tevue géné- rale des Sciences en 1908, M. de la Coux en a décrit la préparation industrielle et l'utilisation dans l’industrie. M. Harries a montré que l'ozone réagit aisément sur les composés organiques non saturés, et les transforme en des composés auxquels il a donné le nom d'ozonides. Ces ozonides résultent simplement de la fixation de trois atomes d'oxygène, c'est-à-dire de la molécule d'ozone, sur la double liaison du composé organique d'après le schéma suivant : RK AR O=OMMR R'! Ü= / = NC—C R'/ NRu! Ü R | | Nr’! 0 0 KZ 0 Ces ozonides ne présentent pas une très grande stabilité; ils explosent le plus souvent, et parfois avec violence. Néanmoins, on a pu les isoler, les purifier, les analyser et en déterminer le poids moléculaire. Mais, en raison de leur grande insta- bilité, il est nécessaire de les préparer à basse tem- pérature. D'autre part, ces composés sont très facilement détruits par l'eau en aldéhydes ou cétones avec for- mation d'eau oxygénée : R ta R, RS Se HO —H°02 + ÿCO + co RAIDE R'/ R!" 0 0 7 Dans le cas où un des résidus R, R', R", R”, serait de l'hydrogène, il se fait de l’aldéhyde. Comme conséquence de cette destruction, on voit que les ozonides ne pourront pas être préparés en présence d'eau. Les composés organiques à transformer devront être rigoureusement anhydres 392 el mis en dissolution dans certains solvants, tels que le chloroforme, l'hexane, le tétrachlorure de carbone, que l’on chasse ensuite après la formation de l’ozonide. Lorsque l'ozone réagit sur un composé organique à double liaison, possédant une fonction carbo- nyle CO, cette dernière est peroxydée par l'ozone, qui y fixe un atome d'oxygène. C'est le cas des aldéhydes, des acétones, des acides. Dans ces cas, il y a deux actions simultanées bien distinetes : for- mation de l’ozonide et formation d'un peroxyde. Harries a donné à ces corps le nom d'ozonides- peroxydes. L'eau détruit la fonction peroxyde ainsi créée, en fournissant de l’eau oxygénée. Les deux réactions suivantes, portant sur la méthylhepté- none, rendent compte de ces faits : CH:C: CH. CH?.CH=.CO.CH* + 20° | CH* 0 AN 0 0 El — CH*C— CH.CH°.CH?C0: 0 + O0? | | CH* CH* 0 VA 0 0 el CHSC— CH.CH?.CH®.C: 0 : 0 + 2H°0 | | CUS CH* — 2 H°0? + CHS.CO.CH* + COH.CH?.CH?.CO.CHS. On obtient ainsi un mélange d’acélone ordinaire el d’aldéhyde lévulique. Disons en passant que c’est là le meilleur moyen d'obtenir ce composé. Lorsque les doubles liaisons qui unissent deux atomes de carbone se trouvent dans un composé cyclique, l'ozone réagit de la même manière que sur les composés acycliques incomplets. Il y à fixa- tion de O° sur chaque double liaison. Les ozonides ainsi obtenus sont encore décomposés par l'eau bouillante, et la chaîne se coupe à la place de la double liaison. Le cyclopentène : AR. CHÈ— CH fournit l'ozonide : /CH* — CH OK SO, CH | CH° — CH — 0 qui, détruit par l'eau, donne COH.CH*.CH°.CH°.COH, la dialdéhyde glutarique. Le noyau benzénique n'échappe pas à la réaction. Le benzène, sous l'influence de l'ozone, fournit un triozonide C°H°.30°. C’est une masse gélatineuse, translucide, qui, sous le moindre choc, produit une délonation. Sous l'action de l’eau, il se détruit en donnant trois molécules de glyoxal COH.COH. Cette réaction semble démontrer que la formule ! 1 ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE proposée par Kékulé pour le benzène, c’est-à-dire le noyau hexagonal ayant trois doubles liaisons, est la seule possible, Harries a essayé d'utiliser cette importante réac- tion à la détermination de la constitution chimique du caoutchouc et de la gutta-percha. Il à obtenu, par action de l'ozone sur les solutions chlorofor- miques de ces matières, des ozonides qui, détruits par l’eau, fournissent de l'acide lévulique. L'ozone constitue un réactif très important, qui pourra rendre de grands services dans les labora- toires pour déterminer la constitution d’un corps, ou pour préparer certains composés très difficiles à obtenir. ! Dans les revues antérieures, j'ai eu l’occasion d'insister plusieurs fois sur la tendance qu'ont les chimistes à reprendre des questions qui leur pa- raissent mal établies. Il en est résulté des travaux nouveaux qui ont mieux précisé un certain nombre de faits. Cette année, nous signalerons les travaux qui ont été entrepris sur les sulfures d'hydrogène, l'acide hypophosphorique, l'acide de Caro. Depuis 1777, époque à laquelle le persulfure d'hydrogène fut découvert par Scheele, de nom- breux auteurs ont essayé d'isoler le composé défini H°S°, analogue à H°O*. Hoffmann avait obtenu un composé de formule H°S", contenant un atome de S de plus. En 1885, Sabatier montra que c'est seule- ment par distillation du sulfure brut dans le vide qu'il était possible d'arriver au persulfure H°S. Il obtint ainsi une huile de composition H'S’, c'est- à-dire HS ayant entrainé mécaniquement, par la distillation, une faible proportion de soufre. Et il décrivit les propriétés de ce corps. Or, c'est préci- sément par l'emploi de la méthode de Sabatier — distillation du persulfure d'hydrogène brut dans le vide — que MM. Bloch et Haehn sont parvenus à isoler le composé IS. Ces auteurs ont entrepris une étude rationnelle de ces persulfures. Ils ont pré- paré d'abord un polysulfure H°S", en dissolvant à chaud dans un courant d'hydrogène des quantités variables de fleur de soufre (environ 250 grammes) dans 500 grammes de sulfure de sodium hydraté, Na’S.9H°0. En ajoutant de l’eau au produit obtenu, il s’est formé des polysulfures de sodium. On a fait couler en mince filet, à l'abri de l'air, 1 litre de ces solutions dans un excès d'acide chlorhydrique étendu, refroidi entre — 10° et 0°. Il s’est précipité une huile jaune, qui, séchée sur le chlorure de cal- cium, possède une densité comprise entre 1,625 et 1,697. C'est H°S". Cette huile, soumise à la distillation dans le vide sous une pression de 2 millimètres, laisse dégager de l'hydrogène sulfuré à 69°, puis la température monte et il distille lentement, régulièrement, une ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE huile jaune pâle, à odeur piquante désagréable rap- pelant le chlorure de soufre. Cette huile, soumise à l'analyse, correspond au composé H°S". Sa densité à 15° est 1,496. Elle émet des vapeurs irrilantes, se congèle par refroidisse- ment en amas radiés fondant à 52°, en donnant un liquide incolore. Ce trisulfure d'hydrogène est très altérable au contact des alcalis et des autres agents de décomposition; il explose au contact d'alcool amylique. Les solutions sont assez stables dans l'éther, le benzène, le sulfure de carbone. Dans la distillation précédente, pendant le départ de l'hydrogène sulfuré, il passe un peu au-dessous de 70° un liquide jaune très pâle, mobile comme de l’eau, à odeur irritante. L'analyse a montré que c'était le composé IFS. C'est le composé de Saba- tier qu'ils ont isolé en évitant l'entrainement du soufre. Il est très inflammable et beaucoup plus facilement décomposable que le trisulfure. Il dis- tille cependant en partie inaltéré à 74-15° à la pression ordinaire. Sa densité est 1,376. Il prend naissance constamment lors de la distillation du bisulfure dans le vide. On à ainsi retiré de 100 cen- timètres cubes de polysulfure d'hydrogène brut, 30 à 33 centimètres cubes de trisulfure H°$° et 10 à 15 centimètres cubes de H°S°. Nous voilà done en possession de deux corps nouveaux bien définis : 1° le trisulfure H°$, ana- logue au trioxyde d'hydrogène H°0*, qui se forme- rait, d'après Berthelot, dans l'action à basse tem- pérature (— 12°) du permanganate de potassium sur l’eau oxygénée et qui se détruirait par échauf- fement de la liqueur; 2° le bisulfure d'hydrogène H°$°, analogue à H°0*°. Depuis les travaux de Salzer et Joly, on admet que l'acide hypophosphorique a pour formule P°O°H*. La préparation des quatre séries des sels de potassium et de sodium semble donner créance à cette constitution. Mais la connaissance d’un certain nombre d’autres sels de cet acide, savoir un cin- quième sel de potassium, un cinquième sel de sodium, faisait écrire cette formule d'une manière plus complexe. Il fallait élucider la question de savoir si l'on avait affaire à un acide tétrabasique ou à un acide pentabasique. La question semble avoir été résolue par Cornec, qui à étudié la conduc- tüibilité du sel neutre de sodium, et fait la cryoscopie de l’acide et de ses sels. On arrive à ce résultat qu'il faut conserver à l’acide hypophosphorique la formule P°O‘H*. Un grand nombre d'auteurs ont étudié le sous- oxyde de phosphore PO. Ce composé, qui serait dû à une destruction de l’oxyde phosphoreux P?0, sui- vant la réaction 2P°0 = P'0 + O, a été considéré par Michaelis comme l'anhydride de l'acide hypo- 393 phosphoreux, auquel il serait revenu par hydrala- ton de P‘O. Des travaux récents accomplis sur cel oxyde montrent que ce n’est pas un corps défini, el que ses propriélés sont identiques au phosphore rouge. Si le corps est soigneusement purifié, il y a plus de phosphore que celui qu'exige la formule P'O. Ce corps doit être rayé de la chimie. On sait que l'étude de l'acide monopersulfurique SO'H*, ou acide de Caro, est loin d’être complète. Baeyer et Villiger, qui ont fixé les conditions de formation de cet acide, lui ont attribué la formule SOI, et Armstrong la formule SO'H*. L'analyse des sels de cet acide ne permet pas de décider entre ces deux formules. Mais l'étude des combinaisons acylées, qui se comportent comme des peroxydes mixtes acylpersulfuriques et sont des acides mono- basiques, fait pencher vers la formule SO. La pré- paration de l'acide de Caro se fait en triturant 20 grammes de persulfate d'ammonium avec 11 e.c. d'acide sulfurique concentré; en refroidissant le mélange, il se forme des prismes. Par addition à 0° de l'acide de Caro à du chlorure de benzoyle, on obtient un dépôt cristallisé d'un sel neutre, peu coloré, de benzoylperoxysulfate de potassium, efflo- rescent dans le vide, qui à l'état sec détone par le simple frottement. Traité en solution éthérée par un alcali, il s'hydrolyse en fournissant de l'acide monopersulfurique et de l’aldéhyde benzoïque, selon la réaction : O.SO'H CSHSCO.OSOH + H.OH — | OH + C'HSCOH. Au contraire, les acides le dédoublent en acide sulfurique et acide benzoïque : CSHSCO.OSOSH + H.OH — SOI CH°COOH. De la même manière, le chlorure de sulfobenzène C'HSO*CI, ajouté à basse température au réactif de Caro en solution étendue, fournit de beaux prismes détonant par la chaleur ou par le frottement : CSHSSO?CI + SOSH? — HCI + CSHSO?.0.0S0H. Ce sel s'hydrolyse à la manière du précédent, en régénérant par les alcalis l'acide monopersulfurique SO'H”; par les acides, il donne de l'acide sulfurique. La composition et le poids moléculaire des deux sels acylés ainsi obtenus montrent bien que la for- mule de l'acide de Caro est SO'H° et qu'on doit le considérer comme dérivé de H°0* par remplacement d'un atome d'hydrogène par le résidu sulfoné SO'H. Nous devons signaler une réaction intéressante Oo obtenue par Briner et Wroczinsky en soumettant des gaz à l’action de hautes pressions. En compri- mant à 300 atmosphères, dans un tube en verre vert et à l’aide d’une pompe Cailletet, un mélange ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE composé de 3 volumes d'oxyde azotique AzO et de ! volume d'acide chlorhydrique, ils ont obtenu du chlorure de nitrosyle AzOCI. Cette réaction parait inexplicable, si elle n'est pas précédée d'une des- truction préalable de l'oxyde azotique. C'est pour vérifier cette dernière manière de voir que les auteurs ont soumis l’oxyde azotique seul à la com- pression; il s'est formé un liquide bleu, l'anhydride azoteux Az°0°, selon la réaction : 3AzZ0 — A7°0° + Az. Il en résulte que, dans la première expérience, l'anhydride azoteux ainsi formé a réagi sur l'acide chlorhydrique selon la réaction : Az203 + 9 HCI — 2 Az0CI + H20. Une réaction de même nature se produit entre l'oxyde azotique et l'anhydride sulfureux. Il y a for- mation d'anhydride sulfurique, par suite de la réduction de AzO : SO? + AzO — SO? + A7. Ces décomposilions montrent qu'il est inutile d'étudier à un point de vue purement physique les compressibilités de certains gaz ou mélanges gazeux, à moins de s'assurer au préalable s'il n'in- tervient aucune réaction chimique aux pressions élevées auxquelles on les soumet. Nous signalerons, pour terminer, le corps inté- ressant découvert par Moureu : le sous-azoture de carbone. De même qu'en partant d'un composé organique, l'acide malonique ou le malonate d'éthyle, Diels avait découvert le sous-oxyde de carbone C'0°, de constitution : CO tOMEe même en parlant d'un composé organique, la butine-diamide COAZH-.C=C.CO.AzH°, Moureu a obtenu par déshydratation le sous-azoture de car- bone C'Az° : AzH°CO.C = C.COAzH? — 2H°0 + AzC —C—=C— CA7. En dehors du cyanogène C'Az°, découvert par Gay-Lussac, en 1815, on ne connaissait pas d’autres composés bien définis qui soient exclusivement formés de carbone et d’azote. Le nouveau corps se présente en fines aiguilles blanches, fusibles à 20°,5 — 21°. 11 bout à 76° sous 153 millimètres de pression. Il rappelle le cyano- gène par son odeur ainsi que par les propriétés violemment irrilantes de sa vapeur. Très aisément combustible, le d'un corps en l'allume instantanément. Sa vapeur prend feu spontanément à l'air vers la température de 130. C'est une propriété analogue à celle, bien connue, du sulfure de carbone C$*, dont le point d’inflamma- contact ignition tion à l'air est voisin de 150°. La densité du sous- azolure de carbone est Cu 0,9703 ; la densité de Sa vapeur montre qu'il correspond à la formule C'Az:. IV. — Méraux. Si l’on examine les travaux effectués sur les mélaux, on trouve un très grand nombre de mé- moires ou notes relatifs le plus souvent à un fait isolé. Il est impossible de les relater ici. Ce serait une énuméralion fastidieuse et sans intérêt, Nous nous bornerons à signaler quelques travaux pou- vant être de quelque utilité dans les laboratoires. Nous trouvons d'abord une nouvelle méthode commode et élégante de chloruration des oxydes métalliques et métalloïdiques, un peu analogue à celle de Bourion signalée dans la revue précédente. Elle consiste à faire réagir les vapeurs de tétrachlo rure de carbone CCI' sur l'oxyde chauffé à une tem- pérature déterminée. Cette méthode n’est pas nou- velle; elle à déjà été signalée par Meyer et Demarcay en 1887. Camboulives a généralisé cette étude, qui conduit à une méthode pratique de préparation des chlorures métalliques et métalloïdiques. 11 a décrit les chlorures préparés par cette voie : chlorures d'arsenic, d'antimoine, de vanadium. de tantale, d'étain, de tungstène, d'uranium, de lanthane, de praséodyme, et des métaux des terres rares: il a déterminé pour chaque oxyde la tempérituré à laquelle l'attaque a lieu. Cette température, d’ail- leurs très variable, est comprise entre 213° et 580. Ce n'est qu'exceptionnellement (acide niobique, oxydes de thorium et de tungstène) que l'on con- state la formation d'un oxychlorure. Chose remarquable, la silice n’est atlaquée à aucune tempéralure par le tétrachlorure de car- bone, landis que les silicates sont détruits avec for-- mation de chlorure de silicium. Il en résulte que ce réactif permettra de faire des séparations analy- tiques très commodes lorsqu'il s'agira de doser dans un minerai la silice libre en présence de silicates. Dans cette réaction, le tétrachlorure de carbone fournit, par sa destruction en présence de l'oxyde métallique, de l'anhydride carbonique CO?, de l'oxychlorure de carbone COCF et, lorsque la tem- pérature est trop élevée, du chlorure de Julin, CCI. On sait que jusqu'à présent les sels cuivreux d'acides oxygénés n'ont pas pu être isolés. Lorsqu'on essaie de les produire, ils se détruisent instantanément en mettant du cuivre en liberté. Recoura est parvenu cependant à isoler le sulfate cuivreux SO'Cu* en provoquant sa formation en milieu organique à l'abri de l'humidité. On chauffe à 160°, dans un petit ballon muni d'un tube à déga- gement se rendant sur la cuve à mercure, 2 grammes d'oxyde cuivreux et 20 centimètres cubes de sulfate de méthyle, en agitant constamment le mélange. Lorsque le dégagement de gaz cesse, on arrête | l'opération; on lave le résidu à l'éther anhydre. On | | f | r + ! L ii ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE obtient le sulfate cuivreux SO'Cu*. Ce sel est immé- diatement décomposé par l'eau en cuivre et sulfate de cuivre: des traces d'humidité suffisent pour provoquer cette destruction. La réaction qui pro- duit le sulfate cuivreux est une réaction de double décomposition qui donne naissance à de l'oxyde de méthyle : SOL(CHP + Cu?0 — CH*.0.CHF + SO'Cu*. Depuis plusieurs années, M. Delépine étudie les métaux du platine, en particulier le platine et l'iridium. Cette étude a eu peut-être son point de départ dans ses travaux de Chimie organique. Il avait constaté que, dans les dosages d'azote par la méthode de Kjeldahl, la mousse de platine que l'on ajoute pour régulariser l'ébullition provoque des pertes d'ammoniac très fortes el mème totales. Ayant fait bouillir de l'acide sulfurique contenant du sulfate d’ammoniaque avec de la mousse de platine ou des feuilles de platine, il observa une perte d'azote d'autant plus grande que l'expérience était plus prolongée. Le platine n'ayant pas changé de poids, on avait affaire à une réaction cataly- tique qui faisait disparaitre l'azote sous forme de gaz : SOL (AZH*) + 2 SOU — A7 + 3S0? + 6 H°0. Il en résulte qu'il ne faut jamais utiliser le platine dans la méthode de Kjeldahl. Delépine, ayant traité le platine par l'acide sul- furique bouillant, constata que l'on peut dissoudre environ 2 grammes de platine dans 100 centimètres ‘cubes d'acide. Le platineiridié à 10 °/, d'iridium est aussi attaqué très rapidement par l'acide sulfurique bouillant. En précipitant le platine de cette disso- lution par addition de sulfate d'ammoniaque, on obtient un liquide coloré en vert contenant tout l'iridium. Ce liquide, étendu de 1 à 2 volumes d'eau, fournit, au bout d'un temps variable avec la richesse en iridium, un dépôt de petits cristaux vert foncé, tandis que le liquide prend la teinte brun olivätre. Ce dernier, à son tour, laisse séparer, par addition d'alcool, un précipité floconneux qui est noir après dessiccation. Ni l'un, ni l’autre de ces deux corps ne précipitent par le chlorure de baryum. Ge sont des sels d'ammonium d'acides iridosulfuriques complexes. Delépine a essayé de préparer directe- ment ces composés, et d'obtenir en même temps les iridosulfates des différents métaux. Pour cela, il a fait bouillir une solution de 3 grammes de chloroiridite d'ammonium IrCl (AzH'} dans 20 grammes d’eau, avec 50 c.c. d'acide sulfurique concentré. Il a obtenu un sel ammoniacal vert auquel il attribue la formule complexe : OH°)0H- IrZSOi— |(AzH. NSOi— En ajoutant un excès d'ammoniaque à ce sel vert, la teinte passe au rouge-brun et, par addition d'alcool, on obtient le sel rouge-brun de formul Ces deux sels correspondraient à deux acides, OU)? ” so! SO! Lune l'un formule), l'autre tribasique (2e formule). On passerait aisément du premier au bibasique (1" second par un excès de base, et du second au pre- mier par action d'un acide. Ce changement de (OH*)OH en (OH), ayant un hydrogène acide de plus que le premier, serait une véritable tautomérie minérale comparable aux transformations tauto- mères bien connues en Chimie organique, là où le milieu crée la fonetion. En versant à froid la solution d'iridodisulfate d’ammoniaque vert dans un excès d’une base, on obtient les iridodisulfates métalliques correspon- dants, sels rouges, du même type que le sel rouge ammoniacal et ayant la même constitution. En soustrayant à ces sels rouges une cerlaine quantité de base, à l'aide d’un acide, on obtient les sels verts, analogue à celui d'ammoniaque. Nous sommes done en possession de deux nou- velles classes de sels irido-sulfuriques, non précipi- tables par le chlorure de baryum; ces sels sont différents du sel vert-bleu obtenu par Lecoq de Boisbaudran en 1883 et qui est précipité par le chlorure de baryum. Enfin, dans la série de l'iridium, MM. Vèzes et Dufour ont préparé une autre série de sels com- plexes : les iridochloro-oxalates, par double décom- position entre le chloroiridile métallique et l'oxa- late correspondant. Il suffit de mélanger les solutions chaudes des deux sels et de laisser déposer. Ces sels, de formule : rCF(C°0"M".H°0 (où M est du potassium, argent, rubidium, sodium, lithium, ammonium, thallium), sont intermédiaires entre le chloroiridite métallique IrCFH° et l'irido- oxalate Ir(C0*)K°. En traitant l’irido-oxalate d'ar- gent IrCF(C'0‘)/Ag*.3H°0 par l'acide chlorhydrique, on obtient l'acide irido-oxalique IrCF(C*0*"H°.4H°0 en aiguilles rouges arborescentes, agissant sur la lumière polarisée, très solubles dans l’eau et déli- quescentes. C'est un acide tribasique, qui fait efler- vescence avec les carbonates en donnant les irido- dichloro-oxalates. Cet acide est un exemple à ajouter à la liste, encore très restreinte, des corps minéraux qui agissent sur la lumière polarisée. D'autres travaux viendront bientôt s'ajouter à ceux-ci et compléteront d’une manière heureuse la chimie de l'iridium. Alph. Mailhe, Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Toulouse. 396 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Cosserat (E.), Professeur à la Faculté des Sciences, Directeur de l'Observatoire de Toulouse, et Cos- serat (F.), /ngénieur en Chef des Ponts et Chaus- sées, Ingénieur en Chef à la Compagnie des Chemins de fer de l'Est. — Théorie des corps déformables. — À vol.in-8° de 226 pages. (Prix: 6 fr.; Hermann, éditeur. Paris, 1910. Un physicien expérimentateur qui parcourrait le présent ouvrage, reproduction d'un appendice à la traduction française du T'raité de Physique de Chwolson, et qui jugerait de cette belle Encyclopédie par l’appen- dice, se tromperait fort. Bien lèche, est en effet, le lien qui rattache le travail de MM. Cosserat à un Traité où le point de vue expérimental est surtout envisagé, si tou- tefois l’on n'observe qu'un essai de synthèse aussi puissant est partout à sa place. D'ailleurs, à un tel lecteur, effrayé par de longs développements de calcul dont il n'apercevrait pas lintérèt immédiat, on demande d'attendre les applications que les auteurs feront de leurs vues à la théorie de la Chaleur et de l'Electricité. Seul, enfin, l'aspect de l'exposition est rébarbatif, car tout le livre n'est que la mise en œuvre, systématiquement répétée, d’une même idée, simple et féconde, appliquée à des cas de plus en plus complexes. A la méthode inductive qui a présidé au développe- ment historique de la Mécanique, MM. Cosserat pro- posent de substituer un système énergétique purement déductif, plus général que celui d'Helmholtz et basé sur la notion de groupe: cette notion implique celle d’invariant, laquelle parait correspondre avec exacti- tude à l’idée intuitive de mesure. On sait que, dans l’étude du mouvement des milieux continus, deux choix de variables sont possibles, celui de Lagrange et celui d'Euler. Avec le premier choix, une ligne déformable peut être considérée comme un ensemble continu de trièdres à un paramètre, une surface déformable comme un ensemble à deux para- mètres, un milieu déformable comme un ensemble à trois paramètres : à ces paramètres s’adjoint le temps, s'il s'agit d’un problème de mouvement. Cela posé, soit W une fonction -de deux positions infiniment voisines, dans le temps et dans l’espace, du trièdre mobile ; envisageons l'intégrale: = 4 SWdudi, où dy est l'élément du milieu, où l'intégration S$ est étendue à une portion quelconque du milieu et l'inté- gration f à l'intervalle de temps qui sépare les instants tet t, [cette dernière intégration étant supprimée s'il s’agit de la statique du milieu]. L'intégrale À est dite l'action de déformation et de mouvement entre les instants {, et {,, et W est la densité de l'action. Déter- minons la forme de W pour que l'action A soit eucli- dienne, c'est-à-dire pour qu'elle reste invariante quand on soumet l'ensemble continu des trièdres mobiles, obtenu en faisant varier les paramètres propres au milieu et le temps, et pris dans son état déformé, à une transformation quelconque du groupe des dépla- cements euclidiens : ceci équivaut à déterminer W de manière que sa variation infinitésimale soit nulle pour toute transformation euclidienne infinitésimale; on est ainsi conduit à prendre pour W une fonction dont les arguments sont, outre les paramètres, des éléments à interprétation cinématique simple. La variation infinitésimale Ja plus générale àA de l’action, pour ce ET INDEX choix de W, peut être transformée, par application du théorème de Green, et posée sous une forme qui met en évidence certains éléments vectoriels : on est ainsi naturellement conduit à définir la force et le moment extérieurs, l'effort et le moment de déformation exté- rieurs, l'effort et le moment de déformation en un point donné, et aussi à définir l'énergie de transforma- tion et de mouvement par l'intermédiaire de la notion de travail. L'invariance de A dans le groupe euclidien, entrainée par celle de W, nous mène alors à établir, entre les éléments qu'on vient de définir, d'importantes relations qui sont les équations mêmes de la Mécanique du milieu envisagé. Diverses spécifications de la fonc- tion W permettent de retrouver le plus aisément tous les résultats traditionnels. MM. Cosserat ont étudié successivement la statique de la ligne déformable, la statique de la surface défor- mable et la dynamique de la ligne déformable, Ja statique du milieu continu et la dynamique de la surface déformable, la dynamique du milieu continu. L'ordre inverse, à partir du milieu à trois dimensions, pour en déduire, par passage à la limite, le milieu à deux et à une dimension, ne pouvait être suivi : selon une remarque fondamentale qui leur est personnelle, la valeur zéro des paramètres évanouissants est, en général, une singularité critique essentielle. Les derniers chapitres du livre sont consacrés l’un à l'étude des milieux non continus, en vue de rattacher à la théorie de l’action la Mécanique statistique, — l’autre à l'examen du point de vue eulérien laissé antérieurement de côté. Le reproche de nominalisme, les auteurs l'ont prévu : leur système est cependant singulièrement compréhensif ; il évite toutes les difficultés et tous les tâtonnements de la recherche inductive, dont il éclaire même certaines contradictions. C’est une belle œuvre de synthèse purement mathématique. L'exécution typographique de l'ouvrage est très correcte, malgré l’extrème variété des symboles; mais la maigreur des caractères jointe à la nature du papier est une cause de fatigue pour le lecteur. A. BOULANGER, Professeur adjoint à la Facullé des Sciences de l'Université de Lille. Marehis (L.), Lauréat de l'Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. — Le Navire aérien (architecture, équilibre, stabilité). Lecons faites à la Faculté des Sciences de Bordeaux. — 1 vol. in-8° lithographié de 990 pages, savec270 fiqu- res. (Prix : 27 fr. 50.) Dunod et Pinal, éditeurs. Paris, 1909. M. Marchis s'est déjà fait connaître par de nombreux travaux fort remarqués sur les sujets les plus variés : la Thermodynamique, la vapeur d'eau surchauffée, les moteurs à essence pour automobiles, la voiture auto- mobile, le froid, les gaz pauvres, etc. Dès l’année 1904, il publiait ses premières « Lecons sur la navigation aérienne », professées à la Faculté des Sciences de Bor- deaux, prélude de l'ouvrage important et considérable qu'il nous donne aujourd'hui. « Le Navire aérien » est certainement l'œuvre la plus complète qui existe sur la question,devenue si passionnante, de la conquête de l'air. Tout ce qui a été réalisé jusqu'ici en Aéronautique, soit comme expériences de laboratoire, soit comme épreuves sportives ou militaires, y est relaté avec une précision et une richesse de documentation remarquables. Les théories si nouvelles et si délicates de l'équilibre et de la stabilité des navires aériens y sont exposées avec une BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 9397 clarté et une méthode qui les rendent facilement assi- milables. Tout d'abord, dans une longue introduction, l'auteur passe en revue les divers genres d'appareils qui ont été construits pour naviguer dans l'air : ballons libres, bal- lons dirigeables, aéroplanes. ete. Il examine en même temps les conditions générales de la sustentation et de la direction. Toute l’histoire de l'Aéronautique, de Montgolfier au colonel Renard, de Lilienthal aux frères Wright, délile sous les yeux du lecteur, qui est initié à la fois aux difficultés du problème et aux différentes manières dont il a été résolu. Le chapitre | est consacré à la statique du ballon « à volume maximum constant »; c'est un chapitre d'aéros- lation pure. Nivellement barométrique, force ascen- sionnelle des gaz, lois des déplacements verticaux des aérostats où « lois de Meusnier », telles sont les princi- pales questions traitées dans cette partie de l'ouvrage. Il convient de signaler en particulier la méthode élé- gante imaginée par M. Marchis pour calculer la hauteur de la zone d'équilibre d’un bällon, en tenant compte des variations de température de l'air qui l'entoure et du gaz qui y est renfermé. Dans le chapitre If, l'auteur expose les lois fonda- mentales de l’Aérodynamique : résistance de l'air sur un plan orthogonal, sur un plan incliné, sur les sur- faces courbes inclinées et enfin sur les carènes. Il relate nolamiment les expériences récentes exécutées par M. Eiffel sur les plans, les résultats obtenus par Lilien- thal sur les voilures courbes et par le colonel Renard sur les corps de révolution. Le chapitre IT nous ramène aux ballons libres, dont les mouvements sont étudiés cette fois au point de vue dynamique, en appliquant les lois de la résistance de l'air qui permettent d'en déterminer la vitesse et la durée. Le chapitre IV traite du ballon « à volume maximum variable », autrement dit du ballon à ballonnet: l’auteur y expose les avantages du ballonnet à air, imaginé dès 1:83 par le général Meusnier et dont le mode d'emploi a été étudié dans tous les détails par le colonel Renard, en 1881. Le chapitre V à pour objet l'étude de la préparation des gaz utilisés en aéronautique, c'est-à-dire du gaz d'éclairage et surtout de l'hydrogène. Pour ce dernier, les principaux procédés de fabrication examinés sont: La décomposition de la vapeur d'eau par le fer chauffé au rouge ; L'action de l'acide sulfurique sur le fer ou sur le zinc ; L'attaque de l'hydrure de calcium par l’eau ; L’électrolyse de l'eau et, comme corollaire, l'emploi de l'hydrogène comprimé. Les deux derniers chapitres, les plus importants du volume, sont consacrés aux engins les plus modernes de la navigation aérienne : aux ballons dirigeables et aux aéroplanes. Dans le chapitre VI (Ballons dirigeables), l'auteur étudie : Les méthodes de détermination de la vitesse propre des dirigeables ; La coupe des enveloppes de ballons allongés ; Les dispositions d'ensemble d’un ballon dirigeable ; ! Les lois qui régissent ses mouvements (vitesse cri- tique, tangage, action des gouvernails de sustentation et de direction, évolutions dans le plan horizontal) ; Les diverses tentatives de dirigeabilité des ballons. Ce chapitre contient, en particulier, la théorie géné- rale de la dynamique du dirigeable due au capitaine Crocco el d'où découlent les diverses conditions de stabilité (stabilité longitudinale, stabilité de route), les effels des gouvernails horizontaux suivant qu'ils sont placés à l'avant, au centre ou à l'arrière du ballon, les particularités des virages, etc. La dernière partie du chapitre VI est une étude très complète des divers types de dirigeables français (Le- baudy, Ville de Paris, Zodiac) et étrangers (Zeppelin. Parseval, Gross, dirigeable militaire italien, etc.) REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, Le chapitre VIT (Aéroplanes) comprend : Les résultats expérimentaux sur les valeurs de la force de sustentation et de la résistance à l'avancement des voiiures ; L'étude du mouvement de régime d'un aéroplane d'après la théorie de M. Soreau, des différentes « allures » correspondant, soit au minimum de l'effort de traction, soit au minimum de là puissance motrice ; L'examen des conditions de stabilité longitudinale et transversale, de l'influence des quilles et des plans de dérive ; L'étude des virages ; La relation des récentes performances des aéroplanes avec la description de chacun d'eux. Enfin, de nombreuses annexes complètent le volume : ce sont, soit des tables numériques, soit les tableaux des ascensions des principaux dirigeables, ceux des essais des aéroplanes Antoinette, Bleriot, Voisin, Wright, de leurs caractéristiques et de leurs records, soit enfin le récit détaillé de la grande semaine de Champagne. Une annexe spéciale est consacrée aux expériences, entièrement nouvelles et tout particulièrement inté- ressantes de M. Rateau sur les surfaces se présentant obliquement à l'air. Une aussi sèche énumération ne peut évidemment donner qu'une faible idée de l'importance de l'ouvrage de M. Marchis, qui se présente comme une véritable encyclopédie de la science aéronautique et de ses applications, et comme une mine de renseignements des plus précieuse pour tous ceux que passionnent les immenses progrès de la navigation aérienne, Pourtant il y manque un chapitre, et non des moindres, celui relatif aux propulseurs. Mais ce n’est là qu'un oubli apparent de la part de l’auteur, qui, pré- cisément en raison de l'intérêt tout particulier de cette question et des développements qu'elle comporte, avait résolu d’en faire prochainement l'objet de son cours à la Faculté de Bordeaux. Souhaitons que la nomi- nation si justifiée de M. Marchis à la chaire d'avia tion de la Sorbonne ne soit pas une entrave à la réalisation du travail projeté, et qu'un Traité des pro pulseurs aériens vienne bientôt couronner l'œuvre re- marquable consacrée par le savant professeur au déve- loppement de l’'Aéronautique sous toutes ses formes. CouMANDANT VOYER. 2° Sciences physiques Brunswick |E. J.), /ngénieur des Arts et Manufac- tures, Ingénieur en Chef de la Maison Bréguet. — L'Electricité dans les Mines.-— Applications diverses. — Extraction. — 4 vo/. 1n-8° de 248 pages, avec 68 figures, Gauthier-Villars, éditeur. Pa- ris, 1910. M. Brunswick, qui, au Congrès international des applications de l'Electricité, tenu à Marseille en 1908, avait présenté un rapport sur l'Equipement électrique des Mines, a jugé intéressant de traiter dans un ouvrage cette question spéciale, en faisant surtout une étude détaillée du problème de l'extraction électrique. L'auteur a résumé les renseignements recueillis soit auprès des constructeurs, soit dans les publications techniques les plus récentes, les a contrôlés lui-même au cours de visites dans la plupart des installations décrites et les a classés avec méthode. Il a cherché surtout, ainsi qu'il le dit lui-même, à faire « une étude consciencieuse et indépendante », et il y a pleinement réussi. Aussi cet ouvrage sera-t-il consulté avec fruit par tous ceux qui touchent de près ou de loin à notre grande industrie minière, et dont les recherches seront ainsi facilitées. G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles de Paris. 9 398 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Monier (F.), Procureur de la République près le Tri- hunal de la Seine, Chesnay (F.), Juge d'Instruction au Tribunal de la Seine, et Roux, Chef du Service de la Répression des Fraudes au Ministère de l'Agri- culture. — Traité théorique et pratique sur les Fraudes et Falsifications. — 2 vol. in-8° de 653 et 558 pages. (Prix : 20 fr.) Larose et Tenin, éditeurs. { Paris, 1910. Depuis la promulgation de la loi du 1°* août 1905 sur la répression des fraudes dans la vente des marchan- dises, une douzaine de volumes ont été consacrés à l'étude de ce sujet ; mais le livre que nous examinons est plus particulièrement intéressant, parce qu'il est l'œuvre des trois personnalités les plus compétentes et les plus qualifiées : deux hauts magistrats et un tech- nicien, tous trois chargés de l’application de la loi sur les fraudes. Ce volume est écrit surtout pour les magistrats, mais il doit être consulté aussi par les techniciens, chimistes administratifs et experts, et sa lecture intéresse tous ceux qui s'occupent, d’une manière générale, des ques- tions d'hygiène publique, La loi de 1905 n’est pas, en réalité, une loi d'hygiène; c'est une loi de probité commerciale. Elle a eu, dès l'origine, pour objectif la protection des produits agri- coles el elle a voulu empêcher la concurrence déloyale que faisaient aux produits naturels et purs les pro- duits fraudés. C’est donc surtout une loi d'ordre écono- mique. Si elle intéresse l’hygiéniste, c’est parce que celui-ci trouve dans la protection du produit naturel le moyen d'entraver les manipulations frauduleuses de toute nature, et, par conséquent, celles qui peuvent causer un préjudice à la santé publique. Nous trouvons dans le volume de MM. Monier, Ches- nay et Roux (livre IV) une exposition claire et précise des conditions dans [lesquelles s'effectue la recherche des fraudes. Le prélèvement des échantillons de boissons et de denrées alimentaires est le premier acte du service admi- nistratif chargé d'appliquer la loi. L'importance en est considérable ; il est la base de l’action future : il est donc nécessaire que ce prélèvement soit valable au point de vue légal et au’ point de vue technique. Il semble qu'il eût été rationnel de confier à des techni- ciens, tout au moins à des spécialistes ayant reçu une instruction 44 hoc, le soin d'effectuer ces pré ‘lèvements. Mais l’organisation d’un tel service et sa généralisation à toute la France entrainaient des dépenses considé- rables, ce qui y à fait renoncer. Le prélèvement est donc opéré par des agents administratifs n'ayant pas de connaissances spéciales. On a constaté que ce s tème donne pratiquement d'assez bons résultats. I faut bien reconnaître, d’ailleurs, qu'un grand nombre de fraudes ne peuvent être décelées par un examen super- ficiel. Le prélèvement doit encore réaliser deux conditions : 10 il doit être effectué de manière que les quatre échan- tillons, prévus par le règlement, soient bien homo- gènes et représentent réellement la moyenne du pro- duit prélevé; 201] doit être conservé dans des conditions telles qu'il ne subisse ni altérations, ni modifications, rendant l'expertise chimique impossible ou Jui enle- vant toute valeur. Il y a là, pour certains produits ali- mentaires, de grosses difficultés dans la pratique. Après le prélèvement, vient l'analyse chimique celle-ci est effectuée dans les laboratoires officiels agréés par le Ministère de l'Agriculture. Une des inno- vations du règlement actuel est d'avoir séparé très net- tement le Service administratif du Service technique. Ce dernier reçoit les échantillons, munis simplement d'un numéro d'ordre et des renseignements qui lui sont nécessaires, mais il ignore les noms des prélevés et agit ainsi en toute indépendance. Les laboratoires agréés par l'Etat effectuent les ana- lyses suivant des méthodes uniformes élaborées par une Commission technique fonctionnant au Ministère de l'Agriculture. Leur rôle est d'effectuer un classement en échantillons bons et en échantillons suspects. Ces derniers sont transmis à l'autorité judiciaire qui se livre à une enquête, puis fait procéder à l'expertise. Ici se place une des innovations les plus importantes de la loi du 1° août 1905 : l'expertise con- tradictoire, réclamée depuissilongtemps par Brouardel. L'expertise est confiée à des chimistes qui doivent avoir non seulement des connaissances scientifiques étendues, mais aussi une grande expérience. Ces chi- mistes ne sont malheureusement pas très nombreux ; aussi a-t-on pensé à en former en instituant un ensei- gnement complémentaire spécial, ainsi qu'un diplôme. Ce projet est pendant devant le Sénat. Le rôle des experts est différent de celui des chi- mistes administratifs. Ces derniers font un triage des échantillons qui leur sont soumis et, pour cela, ils prennent comme base les données analytiques moyennes que fournissent les produits alimentaires de bonne qualité; leur travail a nécessairement une allure un peu mécanique; ils passent à un crible uniforme les données analytiques auxquelles ils ont été conduits, et leur travail consiste à séparer les produits réellement bons des produits suspects. Le rôle de l'expert est alors de rechercher si ces produits suspects sont des produits fraudés ou simple- ment des produits purs qui, par suite de certaines cir- constances naturelles, présentent des anomalies de composition. S'il se bornait à faire un travail méca- nique analogue à celui du chimiste administratif, c'est-à-dire à le repasser à un crible plus fin (les minima de composition des produits purs au lieu des moyennes), il méconnaîtrait ses devoirs. 11 doit examiner attenti- vement les pièces du dossier qui lui sont soumises, rechercher les causes des anomalies de composition qu'il a constatées et voir si ces causes sont naturelles ou résultent d'une manœuvre frauduleuse. On conçoit que ce travail exige une grande expérience. A la suite de l'expertise qui établit les faits, il appar- lient aux juges de se prononcer en tenant compte de tous les éléments de la cause, et l’un des principaux est la preuve de la mauvaise foi de l’inculpé. Telle est, dans ses grandes lignes, l’organisation de la répression des fraudes en France. L'ouvrage de MM. Monier, Chesnay et Roux permet de l’envisager’ avec détail et exactitude. Xavier RocQuEs, Chimiste expert des Tribunaux de la Seine, Membre de la Commission technique permanente pour la répression des fraudes. Sciences naturelles Van den Broeck(E.), Martel(E.-A.),etRahir(Ed.). Les Cavernes et les Rivières souterraines de la Belgique (étudiées spécialement dans leurs rap- ports avec l’hydrologie des calcaires et avec la question des eaux potables). — 2 vo/. grand in-8 de 4.850 pages, illustres de 26 planches et de 435 simi- ligravures, cartes, plans et coupes. (Prix : 25 fr.) I. Lamertin, éditeur. Bruxelles, 1910. Les touristes qui parcourent la Belgique ont visité les grottes si renommées de la région du bassin de Dinant. Il suffira de mentionner la principale, la grotte de Han, pour rappeler aux visiteurs la majesté de ces accidents souterrains. Le livre que MM. E. Van den Broeck, E.-A. Martel et Ed. Rahir viennent d'éditer contient une description détaillée de toutes les grottes connues de cette région, description non seulement pittoresque, mais encore scientifique. Le but de ces auteurs n'est pas seulement de raconter dans un livre les beautés de ces grottes sou- terraines ; ils se proposent de montrer les consé- quences hydrologiques des explorations spéléologiques. L'un des auteurs, notre savant spéléologue francais E.-A. Martel, avait émis l'avis, il y a une dizaine MAP BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 399 d'années, que toutes les eaux souterraines issues des , lui, loute présence de glucose en quantité même calcaires ne pouvaient avoir subi de fillration sufli- sante pour être déclarées potables et qu'elles devaient ètre tenues pour suspectes. Dans le présent ouvrage, cette aflirmation de M. E.-A. Martel se trouve forte- ment atténuée. S'il existe, en effet, des calcaires dont les sources donnent des eaux suspectes, il ne faudrait pas exagérer cette conclusion et l'étendre à tous les terrains calcaires. On trouve dans le calcaire carbo- nifère tournaisien des eaux très pures. Les auteurs donnent une explication de celte pureté, due, d'après eux, à la nature même des calcaires, formés par des débris de très nombreux crinoïdes. La nature spa- thique de ces débris de crinoiïdes en rend l'attaque par le gaz carbonique très difficile; ils résistent à la dissolution par les eaux souterraines et constituent un terrain détritique, formé de particules très fines, qui vient se mettre dans les fissures et les combler. Les eaux filtrent alors à travers ce sable crinoïdique et se débarrassent de leurs impuretés. Cette théorie est exposée longuement par les auteurs. Comme elle est nouvelle et non encore admise par tous les hydro- logues, ils se sont efforcés, en multipliant les exemples, de faire admettre leurs idées par le lecteur. Quant à nous, nous admetlons fort bien les explications déve- loppées dans ces deux volumes; toutefois, il existe en France des sources, issues de terrains calcaires non cri- noidiques, donnant des eaux (très pures et exigeant une autre théorie pour en expliquer la parfaite épura- tion. Cet ouvrage, qui est édité d’une façon particuliè- rement luxueuse, sera lu avec satisfaction par tous les hydrologues qui suivent avec tant d'intérêt les tra- vaux de M. Martel. C’est la réhabilitation de certaines sources des calcaires, et, au point de vue de l’alimen- talion en eau potable des petites agglomérations, cette réhabilitation sera très précieuse. La suspicion vis-à-vis de toutes ces eaux était telle que certaines municipalités reculaient devant la dépense de stérilisation des eaux souterraines et ne voulaient pas non plus capter des eaux de sources qu'on leur déclarait mauvaises. Devant cette alternative, elles ajournaient tout projet d'adduc- tion d’eau. Pour les personnes qu'une lecture de 1.850 pages éffraierait, les auteurs ont inséré des tables idéolo- giques très détaillées résumant le texte figurant sous chacune des rubriques, même les moins importantes de l'ouvrage, et qui sont au nombre de trois cent qua- rante. Grâce à ces tables spéciales, annexées aux tables ordinaires, toute la matière de chacun des deux tomes se trouve synthétisée respectivement en seize et en dix-neuf pages. F. DIénerT, Chef du Service de Surveillance des Eaux d'alimentation de Paris. Pavy (F.-W.), Médecin honoraire de King Edward Hospital, médecin consultant-de Guy’s Hospital. — Les Hydrates de carbone, leur transformation ; étude de Physiologie pathologique. Considéra- tions sur le diabète et son traitement. Ouvrage traduit par M. le D' DoucLas-AiGre. — 1 vol. in-8° de 153 pages, avec 8 planches photomicrographiques. J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1910. On sait que, depuis longtemps, Pavy a consacré sa science à des recherches cliniques et expérimentales sur le diabète. On comprend, par suite, l'intérêt de ce petit volume, où l’auteur à exposé ses idées person- nelles sur cette maladie et les expériences sur les- quelles elles sont fondées. Pavy n’admet point l'existence de la fonction glyco- génique du foie basée sur les expériences de Claude Bernard. Il ne croit point que le glucose passe en nature dans les vaisseaux sanguins, ni dans la veine porte, ni dans les veines sus-hépatiques. Il n’admet point cette demi-imperméabilité du rein qui ne laisse- rait passer le sucre dans l’urine qu'à partir du moment où son taux dans le sang dépasserait 1,5 °/%. Suivant minime dans le sang s’aécompagnerait d'une glycosu- rie correspondante. Il appuie cette opinion sur les expériences d'injections intraveineuses et hypoder- miques de divers sucres (saccharose, maltose, lactose, dextrose, lévulose, galactose) chez des animaux. Quand on fait une injection intraveineuse de sucre à la dose d'un gramme par kilogramme de poids chez des lapins, on voit que, dans l'espace d'une heure, l'urine élimine: Saccharose injecté 9684 Lactose — ; re ERNST NI Maltose _— 56,5 Galactose — 28,9 Lévulose — 20,9 Glucose _ 15,6 Ainsi ce sont les sucres les moins assimilables qui s'éliminent en plus fortes proportions. En même temps, le sang offre une hyperglycémie qui, très intense au moment de l'injection (5,54 à 6,53 °/60), Va en diminuant et n’est plus, au bout d'une heure, que de 1,33 à 2,33 °/6. Si l’on injecte les solutions sucrées sous la peau, à la dose de 1 gramme par kilogramme, on voit aussi apparaître une glycosurie qui varie avec la nature du sucre injecté. Avec le saccharose, 55 °/, du sucre est éliminé par l'urine ; avec le lactose, 40 0/, ; avec le glucose, 4,5 °/, et avec le maltose, 6°/, environ, C’est- à-dire que les sucres les moins assimilables, comme le saccharose, sont rejetés à peu près comme de simples corps étrangers, tandis que les sucres voisins de l'état assimilable, comme le glucose, sont utilisés pour une bonne part. Pavy en conclut que tout sucre introduit directement dans la circulation, sans avoir été modifié par le tube digestif, se comporte comme un corps étranger peu assimilable et donne lieu à une glycosurie; si celle-ci ne se produit point dans les conditions physiologiques d'alimentation, c'est que les sucres qui pénètrent dans la circulation ont été modi- fiés par le tube digestif et sont dans un état de combinaison avec les matières protéiques qui leur permet d'arriver au contact des tissus sans filtrer à travers le rein. D'ailleurs, Pavy admet qu'il y a toujours une petite quantité de glucose libre dans le sang et que cela explique la glycosurie minime qu'il considère comme constante chez l’homme sain, glycosurie que l’on ne peut arriver à déceler qu'au moyen du réactif ammo- niaco-cuprique. Pour démontrer l'existence de celte combinaison du sucre avec les albumines, Pavy s'est efforcé d'extraire des hydrates de carbone en traitant les matières pro- téiques par de la potasse où de l'acide sulfurique: il a vu ainsi que les albumines du sang et de l'œuf et les mucines contiennent des hydrocarbonés dans la proportion de 20 à 30 2/,,, et qu'elles méritent le nom de gluco-protéides. Reste maintenant la question de savoir comment les hydrocarbonés sont transformés par le tube digestif. Les recherches de l’auteur sur lintestin du lapin à jeun ou à l’état de digestion lui ont fait admettre que cette transformation se fait au niveau des villosités, sous l'influence des lymphocytes qui yaffluent. Ceux-ci absorbent le‘glucose et se l'assimilent en formant des gluco-protéides, qu'ils transportent par le canal thora- cique dans la circulation sanguine et dans les divers organes de l’économie. En même temps, les cellules épithéliales des villosités se chargent de granulations graisseuses, que Pavy croit être le résultat de la syn- thèse des graisses aux dépens des hydrocarbonés effectuée par la cellule vivante. Grâce à ces transfor- mations et ces combinaisons, les hydrates de carbone seraient apportés aux tissus sans se trouver à l’état libre dans le sang et, par suite, ils ne subiraïent point d'élimination. Ces idées sont fort intéressantes; malheureusement 400 elles sont passibles d’un certain nombre de critiques. Tout d'abord l'élimination des divers sucres injectés dans les veines ou sous la peau n'est pas nécessaire- ment due à ce que le sucre passe en nature dans le sang ; elle s'explique mieux par l'hyperglycémie qui résulte de l'injection. Pour ce qui est de l’absorp- tion des hydrates de carbone par les lymphocytes, cette opinion ne repose point sur une démonstration rigoureuse ; Pavy invoque sans ce-se la lymphocytose digestive ; or, celle-ci est fort minime, puisque l'hyper- leucocytose de la digestion est modérée, et qu'elle s'accompagne non point d'une lymphocytose, mais d'une légère polynucléose. Enfin la synthèse des graisses dans les cellules épithéliales des villosités n’est nullement prouvée; les graisses que l’on trouve dans ces cellules proviennent vraisemblablement de l'absorption des graisses qui existent en quantité notable dans la farine d'avoine, employée par Pavy dans ses expériences. D' MarceL LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine, Médecin des Hôpitaux de Paris. 4 Sciences médicales Actas y Trabajos del Tercer Congreso médico latino- americano (Montevideo, 17-24 mars 1907). — 5 vol. in-8° avec un grand nombre de figures. Imprenta « E1Siglo illustrado ». Montevideo, 1908-1909. Le IIIe Congrès médical latin-américain s'est réuni à Montevideo en 1907, groupant plus de 500 médecins des différentes républiques de l'Amérique latine. Plus d’une centaine de communications diverses y ont été présen- tées: elles sont reproduites 17 extenso, avec les procès- verbaux des séances et les discussions auxquelles elles ont donné lieu, dans les cinq gros volumes d’actes et tra- vaux qui ont paru au cours des deux dernières années. Parmi les plus importantes, nous signalerons, dans la Section de Médecine, celles des Dr Elizalde, Bach- mann et Acuna sur la leucocytose, celle du D° Llambias sur la question encore obscure de la pancréatite suppurée, celles du D° A. Alfare sur la ponction lom- baire, du Dr Sisto sur la défense de l'enfant débile, etc. La Section de Chirurgie fut une des plus actives. Le traitement de l’appendicite fut le thème, très discuté, de quatre communications des D'° Arrizabalaga, Vasallo, Viale et Repetto. La maladie hydatique, dont les progrès dans les républiques de La Plata sont alar- mants, donna heu aux travaux des D'S Oliver, Arce et Varsi. Le D' Bottaro signala le résultat de son expé- rience de l'incision de Pfannenstiel dans les laparo- tomies gynécologiques, le D° Canton celui de ses opé- rations césariennes conservatrices; le D° Magalhaes -exposa ses idées sur l'origine placentaire des toxémies gravidiques, et le D M. B. Nieto le résultat de sa pra- tique des blessures thoraco-abdominales, en particulier du cœur. La Section d'Hygiène a été le théâtre de vives discus- sions, amorcées par les Rapports sur : la lutte contre la tuberculose dans l'Amérique latine, du D' Emilio Coni, qui en est le principal organisateur; lalutte contre la maladie hydatique, du D: Llovet; les problèmes de l'hygiène scolaire, des D'° Morquio, S. Rodriguez, Sisto et B. Martinez: la mortalité infantile, des D'° Morquio et Montero. Enfin la discussion du travail du D' B. Carvalho sur l’étatsanitaire de Rio-de-Janeiro a montré la louable émulation qui existe entre les divers pays de l'Amérique latine pour ne pas se laisser dépasser dans l'organisation de l’'Hygiène publique. Les Sections de Chimie et Pharmacie et d'Odonto- logie, quoique moins favorisées par le nombre des communications, n'en ont pas moins été très ani- mées. On voit qu'il existe un mouvement médical très intéressant parmi les républiques latines de l'Amérique du Sud, mouvement qui s'est déjà manifesté par trois congrès importants et qui va s'affirmer encore au prochain congrès de Rio-de-Janeiro. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 5° Sciences diverses Maxwell (J.), Docteur en Médecine, Substitut du Procureur général près la Cour d'Appel de Paris. — Le Crime et la Société. — 1 vol. in-18 de la Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1910. M. J. Maxwell vient d'écrire un ouvrage des plus inté- ressants sur « Le Crime et la Société » dans une col- lection qui en compte déjà plusieurs de premier ordre. Dans la première partie, l’auteur étudie le sujet du crime, c'est-à-dire le criminel, avec les tendances posi- tives qui le poussentaucrimeetlestendances inhibitives ou névatives qui peuvent l'en écarter. C'est l'occasion pour lui de traiter avec une compétence et une érudi- tion toutes particulières la question de la « volonté criminelle », de « l’aliéné criminel » et de « la res- ponsabilité ». Dans la seconde partie, l’auteur étudie « l’objet du crime », c'est-à-dire l'infraction en elle-même ; il envi- sage d'abord l'aspect social de la criminalité et montre sans peine le caractère purement relatif de la notion de crime; puis il expose une classification des cri- minels qu'il divise, suivant les données les plus géné- ralement admises de l'anthropologie criminelle, en criminels d'habitude et criminels d'occasion. Pour classer ces derniers, il à utilisé la division psycholo- gique des besoins humains et sérié les criminels d'après l'urgence du besoin qui provoque l'infraction. Dans la troisième partie, la plus personnelle et sans contredit la plus originale, M. Maxwell s’est occupé de « la réaction sociale contre le crime » ou, d’une façon plus simple, de la prophylaxie sociale et de la peine. Sur ces deux questions, il doit à ses fonctions, comme à ses recherches théoriques, une information de premier ordre et, comme il juge notre système de prophylaxie et de défense tout à fait insuffisant, il propose les réformes qui lui paraissent indispensables pour le mettre en harmonie avec les données les plus récentes de la criminologie ; on ne lui reprochera cer- tainement pas de manquer de hardiesse quand on saura que, sans préconiser précisément, dans l’état actuel de nos mœurs, la mutilation des incorrigibles, il cite avec sympathie l'exemple des pays qui, comme . l'Etat d'Indiana, ont pris l'initiative de ces mesures de prophylaxie. Toute cette dernière partie, avec les cri- tiques qu'elle formule et les réformes qu'elle propose, est à méditer par nos législateurs, et si quelqu'un reproche à M. Maxwell de trop oser et de trop demander, il pourra se répéter comme le D Wylm pour lequel il professe une sympathie aussi justifiée que manifeste : « La science sera un jour de mon avis, la science impartiale sereine, la qui est comme la nature, ignorante de toute fausse pitié, esclave de la justice et de la vérité. Elle dira, elle dit déjà que la liberté humaine a des limites, qu'elle doit ètre res- pectée dans la mesure où elle n’est pas nuisible. » C'est un livre excellent, savant et utile, que nous à donné M. le D' Maxwell. Dr G. Dumas. Sella (E.), Professeur d'Economie politique à PUni- versilé de Pérouse.— La Vitta della Ricchezza (LA Vis DE LA RICHesse). — 1 vo/. iu-8° de 252 pages. (Prix : 6 fr.) Bocca frères, éditeurs. Turin, 1910. L'Economie politique classique étudie, du point de vue économique pur, la production, la transformation et la répartition des richesses. Mais la richesse n'a-t- elle pas une vie propre; est-il interdit de penser que cette vie est d’abord régie par des lois qui ne sont pas des lois purement économiques, et qu'elle peut être considérée comme un cas particulier de la vie des sociétés, auquel s'appliquent, par conséquent, les mé- thodes de la Biologie et des Sciences naturelles? Tel est l'objet de la remarquable étude de M. Sella, que nous sommes heureux de signaler à l'attention des économistes. LR: C: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES io! ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 41 Avril 1910. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Bratu présente ses recherches sur certaines équations intégrales non linéaires. — M. P. Lévy a retrouvé, par une voie diffé- rente de celle de M. Schmidt, les résultats de ce dernier sur les équations intégrales non linéaires. — M. B. Ga- litzine décrit un appareil spécial, basé sur l'application d'un ressort plat en acier, destiné à la détermination de l'ébranlement des édifices. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Dussaud décrit un dispositif, basé sur l'emploi du cinématographe, pour comparer des sources lumineuses à surfaces réduites, employées normalement ou obliquement, à une source lumineuse fixe et connue. — M. F. Charron à constaté que le coefficient de frottement des solides diminue progressivement à mesure que la vitesse augmente Jusqu'à s'annuler pour une certaine vitesse critique ; celte diminution de frottement tient à une couche d'air qui s'interpose entre les corps. À mesure que l'on raréfie l'air dans le récipient, le frottement varie de moins en moins avec la vitesse. — M. E. Haudié à reconnu que, pour tout générateur ou récepteur, la présence d’une branche dérivée détermine une trans- position complète de la loi du rendement électrique: ce n'est plus pour des intensités de plus en plus faibles que le rendement s'approche d’un maximum ; au con- traire, il atteint ce maximum pour une intensité délinie. — MM. C. E. Guye et A. Tcherniavski pré- conisent la mesure des très hauts potentiels au moyen des électromètres sous pression; elle présente les avantages suivants : suppression des effluves, des aigrettes et du vent électrique; constante de l'appareil à peu près indépendante de la pression du gaz; amor- tissement facilement réglable. — M. G. Urbain propose d'employer la détermination du coefficient magnétique à l'analyse des mélanges de terres rares; cette méthode permet de déterminer la composition d'un mélange de deux terres voisines à 2 ou 3 centièmes près. — M. W. Louguinine a déterminé les quantités de cha- leur dégagées lors de l'addition du brome à quelques substances non saturées. Pour les carbures cycliques éthyléniques, les nombres trouvés sont notablement plus forts que ceux relatifs aux carbures gras corres- pondants. — M. L. Vignon a obtenu des phénomènes de transportélectrique très nets avec toutes les matières colorantes en solution colloïdale, c'est-à-dire en granules non dissous : ces granules possèdent donc des charges électriques appréciables. — M. E. Kohn- Abrest à constaté que l'aluminium en poudre, chauffé à l'air au-dessous de 800°, fixe simultanément O et AZ, Az étant déplacé par action prolongée de l'O de l'air. En atmosphère d'azote, on obtient un azoture gris foncé, contenant plus d’'Az que AzAl; chauffé à l'air, ce dernier se transforme en oxyde différent de Al°05. — M. L. Grenet à observé que des aciers ne se cémen- lant pas pratiquement dans le charbon de bois se cémentent, au contraire, très bien dans les produits cyanurés. — M. Vournasos montre que les formiates alcalins exercent une action réductrice sur l'azoture de bore et la plupart des composés métalliques en donnant le métal pur. — M. F. Couturier, en faisant réagir sur la pinacoline des éthers-sels, tels que l'éther acétique et l'éther oxalique, a obtenu des produits de conden- sation dont les propriétés, nettement caractérisées, les rattachent aux séries des B-dicétones et des éthers pyruviques. — M. E. Darmoïs à reconnu qu'il est pos- sible de préparer, sous les deux formes droite ef gauche, du camphre synthétique fortement actif ; cha- cun de ces camphres est mélangé à une faible quantité de son inverse, — MM. Ch. Dhéré et M. Gorgolewski ont préparé de la gélatine complètement déminérali- sée, soit par dialyse, soit par congélation. Cette gélatine est électropositive, très opalescente en solution à 2°/, etse gélilie, quoique moins bien qu'en présence d'élec- trolytes. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Weinberg a observé que l’athérome spontané se rencontre surtout chez certains animaux herbivores; au fur et à mesure que l'on se rapproche de la classe des carnivores stricts, les lésions athéromateuses deviennent de plus en plus rares. — MM. H. Stassano et A. Daumas ont reconnu que le calcium intervient à deux moments différents du phénomène complexe de la coagulation du sang et de la lympbe : 1° dans la formation du fibrinferment, à très petites doses, en agissant sur ses deux généra- teurs albuminoïdes ; 2° dans la formation de la fibrine, à dose forte. — MM. V. Henri, A. Helbronner et M. de Recklinghausen ont réalisé la stérilisation, par les rayons ultra-violets, de grandes quantités d’eau avec une dépense maximum de 36 walt-heures par mètre cube. — M. J. de Lapparent montre que la bordure de roches grises de Saint-Quay-Portrieux (Côtes-du- Nord) peut être considérée comme des diorites; elle est due à l'action des éléments des pegmatites sur le magma en voie de cristallisation qui devait donner la roche noire, beerbachite ou gabbro à hypersthène. — M. Ph. Glangeaud a reconnu que les plissements hercyniens avec direction varisque se poursuivent dans le Massif central jusque sur le versant occidental des monts du Forez. Ces derniers présentent les traces d'au moins cinq grands efforts orogéniques. — M. W. von Seidlitz à étudié les granites écrasés (mylonites) des Grisons, du Vorarlberg et de l’Allgäu. Il y a deux nappes dont la base est formée partout, ou presque partout, d’une lame de roches cristallines écrasées : la nappe des klippes et la nappe austro-alpine. — M. J. Thoulet, de l'étude d’un grand nombre de sédi- ments marins, particulièrement d'échantillons profonds très éloignés des côtes, et de leur indentité avec la poussière de clochers, conclut à leur origine éolienne indiscutable. Séance du 18 Avril 1910. M. le Secrétaire perpétuel annonce à l’Académie le décès de M. Julius Kühn, Correspondant pour la Sec- tion d’Agronomie rurale. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Tzitzeica pré- sente ses recherches sur une nouvelle classe de sur- faces. — M. A. Blondel indique certaines conditions dans lesquelles on peut résoudre l'équation fonction- nelle linéaire. — M. A. Petot étudie le mode d'action dés roues motrices. Il montre que le châssis d'une locomotive est, à chaque tour de roues, alternative- ment poussé et retenu par l'ensemble des essieux moteurs et accouplés. Il faut éviter le dispositif qui consiste à articuler les bielles d'accouplement aux extrémités de deux manivelles spéciales, calées à 4809 des manivelles motrices. — M. A. R. Hinks a calculé la parallaxe solaire d'après les observations micromé- triques d'Eros faites en 1900-1901. 1l trouve la valeur 8,806 + 0,004, qui s'accorde absolument avec le résultat des observations photographiques. — M. Gia- cobini a observé le 17 avril la comète de Halley à l'Observatoire de Paris. Sa grandeur est actuelle- ment comprise entre 2 et 2,5; elle a la forme d'une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES nébulosité circulaire; on ne distingue aucune queue. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. C. E. Guye et H. Schap- per ont étudié le frottement intérieur des métaux aux basses températures. Cu et Zn ont des coefficients d'amortissement franchement décroissants avec la température ; Au montre un relèvement à la tempéra- ture de l’air liquide. — M. Menneret a étudié les oscillations d'une colonne liquide dans un tube en U et l'écoulement uniforme d'un liquide dans un tube rec- tiligne et il donne les lois de ces mouvements. — M. L. Bloch, en pulvérisant des liquides en très fines goutte- lettes au moyen du pulvérisateur Gouy, a obtenu des effets d'ionisation très nets avec tous ceux qui s'ionisent également par barbotage. — MM. V. de Broglie et Bri- . Zard ont observé que, si l’on fait barboter un gaz en bulles très fines à travers un liquide actif surmonté d'une mince couche superficielle d’un liquide plus léger, une enveloppe du liquide inférieur accompagne les bulles à travers le milieu supérieur et retombe après l'éclatement. — M. L. Dunoyer a observé, dans un tube à vide fonctionnant dans les conditions ordi- naires, mais dont la paroi intérieure a été recouverte d'un mince dépôt de métal alcalin, la production sur cette paroi d'un grand nombre de petites taches fluores- centes vertes, très brillantes, indice de rayons catho- diques très intenses. — M. H. Baubigny considère l’äcide dithionique comme un acide disulfonique HSO“. SOSH, dérivant de l'hydrogène H?, tandis que l'acide sulfureux serait le dérivé monosulfonique de ce même hydrogène H.SO*H. — M. F. Garrigou indique un pro- cédé sûr et prompt pour reconnaître dans une eau minérale la présence en bloc de métalloïdes etde métaux : évaporation à siccité, traitement par l’eau régale, pré- cipitation par HFS, puis par (AzH‘}S. — M. M. Guerbet a étudié la constitution des alcools résultant de la con- densation des alcools secondaires avec leurs dérivés sodés. Une molécule d’eau s’élimine entre OH d’un des alcools réagissants et CH* voisin du groupement fonc- tionnel de l’autre alcool : R.CHOH.CH* + CH°.CHOR.R' — R.CH (CH). CH?.CHOH.R' + H°0. — M. E. Léger à étudié l’aloinose, sucre provenant du dédoublement des aloïnes. Il est incristallisable ; son pouvoir rota- toire [xp — — 570,3 à — 58°,5. C'est un pentose. — M. L. Brunel, en faisant agir 1 et HgO en présence d’eau sur l’éther éthylique du A°?-cyclohexénol, a obtenu une iodhydrine, qui, saponifiée, fournit deux cyclo- hexanetriols isomères CSH* (OH). L'un, «, fond à 108° ; l’autre, $, à 124, — M. A. Berg, en faisant réagir l’oxyde d'argent humide sur l’élatérine au réfrigérant à reflux, à obtenu une substance quinonique C*°H*07, qu'il nomme élatéridoquinone. — M. E. Fourneau à étudié l’alcaloïde retiré du Pseudocinchonia africana. Chauffé avec l’éthylate de Na, il fournit un acide C*°H°* Az°0*, fondant au-dessus de 300°. — MM. Ch. Dhéré et Gorgolewski, en soumettant le sérum de cheval à la dialyse électrique pendant soixante-dix-neuf heures, l'ont purifié de la plupart de ses électrolytes ; sa con- ductibilité, due presque exclusivement aux albumi- noides, est du même ordre de grandeur que celle des colloïdes minéraux les plus purs. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. S. P. Thompson, en plaçant sa tête dans une bobine parcourue par des courants très puissants, a observé, dans l'obscurité ou en fermant les yeux, une lumière faible et vacillante, incolore ou bleuâtre, qui s'étend sur tout le champ visuel. — M. A. d'Arsonval annonce qu'il a déjà signalé le même phénomène en 1893 et 1896. — MM. J. Bridré et L. Nègre ont constaté que le sérum des animaux atteints de lymphangite épizootique renferme une sensibilisatrice, laquelle manifeste son action aussi bien en présence d'une levure qu'en présence du para- site spécifique; ce dernier serait donc de nature blas- tomycélienne. — MM. E. Lesné, R. Debré et G. Simon ont recueilli au moyen de l’aérofiltre les germes patho- gènes en suspension dans l'air des salles d’hôpitaux ; le dépôt était injecté dans le péritoine de cobayes. Tous sont morts au bout d’un temps plus ou moins long; chez quelques-uns on a retrouvé le bacille de la diphtérie. — M. E. Bataillon a réussi à provoquer l'embryogénèse complète chez les Amphibiens par piqüre de l'œuf vierge; cette piqûre peut se faire indif- féremment avec un stylet de verre, de manganine ou de platine, ce qui exclut l'action d’un catalyseur ou d'une substance chimique. — MM. L. Blaringhem et P. Viguier ont trouvé dans les Pyrénées une espèce de Bourse-à-pasteur, dont les fruits, au lieu d'être plats, triangulaires, à deux carpelles, présentent quatre valves et ressemblent en petit à des fruits de fusain. Cette mutation, apparue spontanément, qu'ils nomment Cap- sella Viguier1i, s’est reproduite par la culture jusqu'à la 3° génération. Séance du 25 Avril 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Russyan pré- sente la méthode de Jacobi généralisée d'intégration du système d'équations différentielles partielles du premier ordre en involution dans la forme qui n’admet aucun Cas exceptionnel. — M. J. Marty montre l'existence de solutions singulières pour certaines équations de Fredholm. — M. M. Fekete communique ses recherches sur les séries de Dirichlet. — M. Ouivet indique une nouvelle application des transformations birationnelles. — M. H. Vergne présente ses recherches sur les changements canoniques de variables. — M. B. Galitzine a étudié l’ébranlement des édifices au moyen de son nouvel appareil. Dans le voisinage immédiat d'un moteur Diesel, les vibrations verticales sont prédominantes ; pour un édifice plus éloigné, les mouvements verticaux et les mouvements horizontaux sont à peu près du même ordre de grandeur. — M. H. Deslandres a déterminé la distribution des filaments dans la couche supérieure de l'atmosphère solaire. Les filaments voisins d’un pôle se groupent, en général, sur une courbe qui entoure ce pôle; entre la courbe polaire et l'équateur se trouvent ordinairement les filaments les plus noirs et les plus longs. Le réseau total des filaments et des alignements est parfois très régulier et a l'aspect d’un polyèdre sphérique. — M. P. Lowell décrit un nouveau procédé de photographie planétaire employé à Flagstaff, consistant dans l'emploi d'un écran spécial associé à des plaques convenable- ment choisies, de telle sorte que les rayons jaunes voisins de la raie D sont seuls à agir Sur la plaque. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. Ch. André a relevé les dégâts causés par la grèle dans les stations grêlifuges du département du Rhône de 1881 à 1900 et de 1901 à 1908 ; il conclut que les tirs n’ont eu sur les orages à crêle aucun effetni en bien ni en mal.— M. C. Chéne- veau décrit un dispositif simple pour la mesure d’un champ magnétique, basé sur la dénivellation de la surface de séparation de deux liquides, l’un para- magnétique, l’autre diamagnétique, de densités très voisines. — M. P. Vaillant a constaté que l'évapora- tion d'un liquide dans un vase qui ne communique avec l'extérieur que par un orifice en mince paroi suit une loi analogue à la loi de Stéfan entre certaines limites de dimensions de l'orifice. — M. H. Ollivier a observé un phénomène de réaimantation spontanée du fer, particulièrement net sur de gros électro-aimants droits. — M. P. Pascal décrit une méthode de mesure des susceptibilités magnétiques des corps solides, basée sur la détermination à l’aide de la balance de la pression exercée par le champ magnétique à la surface du corps. — M. U. Schoop décrit un procédé nouveau pour obtenir des dépôts métalliques: il consiste à projeter du métal fondu et pulvérisé sur les surfaces à recouvrir, au moyen de buses appropriées et de gaz ou vapeurs sous pression. — M. Pariselle, en fixant Br et HCIO sur l’éther éthylique de l’allylcarbinol, a obtenu un dérivé dibromé CH?Br.CHBr.CH°.CH*0C?H5, Eb. 98° sous 13 millimètres, et une chlorhydrine CH?CI.CHOH.CHE.CH*OC°H*, Eb. 880-900 sous 12 milli- mètres. — Mie P. Lucas, en faisant réagir CH°Mgl sur la triphénylacétophénone, a obtenu le méthylpseudo- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES hutylphénylcarbinol, Eb. 146°-117° sous 15 millimètres. C‘H5MgBr réagit sur la triméthylacétophénone pour donner le diphénylpseudobutylearbinol, Eb. 179°-180° sous 11 millimètres. — M.J. Bertheaume a préparé les chloroplatinates et les periodures de di et de triméthyl- amine ; la solubilité des deux premiers est peu diffé- rente ; les deux derniers sont presque insolubles, Ces sels ne peuvent donc servir à la séparation des deux bases. — MM. A. Haller el A. Lassieur montrent que le beurre de coco doit son odeur particulière à une essence dont les deux constituants principaux sont la méthylheptylcétone et la méthyInonylcétone, et quise rapproche de l'essence de rue. La méthylnonyl- cétone, hydrogénée en présence de Ni réduit à 250°-300?, se transforme partie en un carbure C'H°, partie en une pinacoline C**H#0. — M. M. Delépine a reconnu que l’essence de criste-marine contient sûrement du d-pinène, du paracymène, du dipentène, du thymate de méthyle et de l’'apiol d'aneth. — M. H. Agulhon a étudié l'influence de la réaction du milieu sur la formation des mélanines par oxydation diastasique. Les acides forts diminuent les rendements; les acides et sels neutres à l’hélianthine sont inactifs; les sels neutres à la phtaléine et alcalins à l'hélianthine sont favorables à la formation de ces corps. — M. J. Che- valier a constaté que la spartéine se produit rapide- ment pendant la première période de végétation du genêt à balais et qu'elle diminue brusquement au moment de la floraison et de la formation du fruit, où elle se localise. — MM. H. Colin et J. de Rufz ont étudié l'absorption du baryum par les plantes; il se localise à peu près exclusivement dans la racine, où il est renfermé dans des granulations. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Sauvage a étudié la partie abdominale du grand sympathique chez les Sauriens. — M. L. Marret signale la présence de plantes alpines aux basses altitudes dans le Valais central. Leur origine remonte aux phases climatiques de chaleur et de refroidissement postérieures à la dernière époque glaciaire, qui les ont mêlées aux plantes steppiques. — M. J. Beauveriée a cherché à déterminer la nature du champignon Ambrosia qui revêt les galeries creusées par le Tomicus dispar dans le bois. Il semble devoir être rattaché au genre Macroplioma des Fungi imperfecti. — MM. C. Eug. Bertrand el F. Cornaille ont étudié les caractéris- tiques de la trace foliaire botryoptéridienne. Elle est composée de deux pièces : une pièce principale, qui forme la branche médiane d’un w, et une pièce réceptrice, dont les moitiés symétriques forment les branches latérales. — M. L. Joleaud a étudié l’hydro- graphie quaternaire dans la région de Constantine ; les anciens bassins fermés de cette région ont été successivement captés par des cours d’eau tributaires de la Méditerranée. — M. A. Ricco a observé l’éruption de l’Etna du 28 mars. Le point de sortie des laves est situé au-dessus de celui de l’éruption de 1892, sur une fente radiale du versant méridional, La coulée la plus longue a environ 10 kilomètres. — M. A. Nodon a constaté que l’eau de la source chaude des thermes d'Hammam-Salahin, près de Biskra, est à la fois radio- active et ionisée positivement. — M. G. Vallet a reconnu qu'il est possible, avec une seule lampe en quartz à vapeur de mercure de 110 volts, de stériliser une eau très polluée, sous un débit voisin de 10 mètres cubes à l'heure, en opérant dans certaines conditions, He particulier en donnant une limpidité parfaite à eau. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 Avril 1910. MM. Pestalozza (de Rome) et Martin (de Genève) sont élus Correspondants étrangers de l'Académie. M. H. Roger lit une élude sur les oosporoses. — M. le D' Marfan donne lecture d'un travail sur la né- phrite chronique primitive de l'enfance. — M. le Dr 403 Babinski lit une étude sur la craniectomie décom- pressive. Séance du 26 Avril 1910. MM. J. Courmont, Lannois et Dufourt signalent le cas d’un malade, colporteur, ayant contracté la lèpre indirectement en 1904, aprèsavoir travaillé au nettoyage d’une ancienne léproserie en Colombie. Il présente des lésions cutanées, mais surtout nasales et pharyn- siennes, qui fournissent des excrétions fourmillant de bacilles de Hansen. Une fois sorti de l'hôpital, ce ma- lade constituera un danger de contagion des plus redoutables. Aussi les auteurs demandent à l'Académie d'émettre un vœu sur la nécessité d'isoler véritable- ment les malades atteints de certaines affections con- tagieuses dès le début de la maladie et jusqu'à la fin de la période contagieuse. — M. le D' Achard lit un tra- vail intitulé : Modification des propriétés leucocy- taires pendant l’anesthésie chirurgicale. — M, le Dr Gilbert-Ballet donne lecture d’une étude sur les actes délictueux commis par les paralytiques généraux sous l'influence de l’affaiblissement du sens moral antérieur à l'apparition des symptômes avérés de la maladie. — M. le D'Guisez lit un travail intitulé : Nouveaux ré- sultats cliniques et thérapeutiques dus à l'œsophago- scopie. Us SOCIÈTE DE BIOLOGIE Séance du 16 Avril 1910. M. E. Hédon a reconnu que la section de la moelle cervico-dorsale ne modifie en rien les résultats habi- tuels de la dépancréatisation chez le chien : apparition du diabète. — MM. Ch. Porcher et L. Panisset mon- trent qu'il est contre-indiqué de rechercher H*S dans les distillats de cultures bactériennes; il s'en forme par distillation de la peptone des cultures, alors même que le microbe étudié n’en fabrique pas. — M.S. Ohkubo a observé que la pyocyanase possède une action trypanocide et spirillicide, qui doit être rap- portée à ses substances lipoides. — MM. O. Josué et H. Paiïllard ont constaté que l'injection d’adrénaline dans les veines ne modifie pas le pouvoir opsonique du sérum. — M. Borrien a décelé l’hydrobilirubine dans les matières fécales sous forme de sel alcalin. — MM. A. Sézary et J. Tinel ont observé des lésions dégénératives des fibres de la substance blanche, indépendantes de tout processus de myélite ou de myélomalacie, chez des sujets morts de méningites cérébro-spinales et tuberculeuses. — M. J. Talarico montre l'influence favorisante exercée par la cuisson sur la digestibilité de l’albumine par la trypsine. — MM. C. Levaditi et V. Stanesco ont constaté que les singes qui ont survécu à la période aiguë de la polio- myélite restent paralysés ; ils présentent surtout des lésions de la moelle lombaire et de la région bulbo- protubérantielle. — M. E. F. Terroine a reconnu que le mode d'activation du suc pancréatique par les sels biliaires est essentiellement le même, quelle que soit la composition du corps à dédoubler. — M. Th. He- ryng à construit un appareil pour la stérilisation du lait par chauffage de quelques secondes à 75°-80° et refroidissement immédiat, ce qui permet de conserver intacts ses ferments. — M. M. Doyon a constaté que le foie, isolé et lavé, puis soumis au passage du sang artériel normal, sécrète de l’antithrombine, même vingt-quatre heures après le lavage. — MM. G. Linos- sier et G. H. Lemoine estiment qu'il existe une toxicité normale des aliments albuminoïdes frais, toxicité que la conservation aseptique ou septique peut augmenter, mais ne crée pas. — M. P. Chaussé a déterminé la teneur des produits pathologiques en bacilles tuberculeux : elle peut varier de 0 à 500.000 par milligramme de substance, alors que celle des cultures est de 35.000.000 à 40.000.000 de bacilles par milligramme. — MM. E. Maurel et Arnaud ont com- paré les doses de HgCI° pouvant donner la diarrhée au lapin avec celles qui rendent ses urines albumineuses; 104 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la diarrhée n'apparaît que lorsque la fonction rénale à été troublée. — M. A. Conor à constaté que le mouton peut être infecté expérimentalement par la fièvre mé- diterranéenne. Le Micrococcus melitensis peut passer de la mère au fœtus chez la brebis infectée. — MM. J. Camus et M.Nicloux ont reconnu que la lipaséidine, substance végétale isolée du cytoplasma de la graine de ricin, transportée dans l'estomac d’un mammifère, y digère la substance grasse en proportion notable. Séance du 23 Avril 1910. M. G. Weiss a constalé que, chez les hétérothermes, le glucose, utilisé sans élaboration préalable, ne produit aucune hausse des combustions; il en est tout autrement de la viande. -— MM. O. Josué et H. Paillard ont reconnu qu'on peut utiliser l'adréna- line et les extraits surrénaux pour relever l'énergie de l'appareil cardio-vasculaire daus les maladies infectieuses sans risquer de nuire aux propriélés opsoniques du plasma. — M. A. Vanney montre que le précipito-diagnostic de la morve n'a pas une valeur spécifique et peut s'obtenir avec du sérum de cheval sain. — M. F. Arloing a observé que, si le bacille de Koch en culture homogène à perdu une grande partie de son pouvoir tuberculigène, il exerce, au-dessus d'une certaine dose, une action très nocive sur les Vertébrés usuels. — M. P. Paris à constaté que la glande uropygienne des oiseaux peut être considérée comme une glande à parfum; en outre, la sécrétion de cette glande facilite dans une certaine mesure le nettoyage du plumage. — M.G. Finzi montre que, si les divers bacilles tuberculeux considérés comme antigènes sont susceptibles de fixer de l'alexine en présence d’un même sérum anti, tous n'offrent point cette aptitude à un égal degré. Il en va de même de l'aptitude à l’agglutination. — MM. J. Renaut et G. Dubreuil ont reconnu que le fait de renfermer des fibrilles, de petites ou de grosses fibres collagènes en leur substance fondamentale, n’est pas un caractère essentiel, mais au contraire absolument contingent des structures osseuses. Les ostéoblastes n’élaborent que de l’osséine amorphe. — M. G. Linossier montre que l'ovalbumine se dissout d'autant plus lentement dans le suc gastrique que sa cuisson a été plus longue. — MM. P. Remlinger et O. Nouri ont constaté que l'entrainement du bacille de Koch des eaux d'égouts à la surface des tiges et des feuilles des plantes poussant dans les champs d'épandage ne semble pas s'effectuer dans les conditions de la pratique. — MM. J. Camus et M. Nicloux ont observé que la digestion des graisses dans l'intestin grêle en présence de la lipaséidine, et en dehors de l’action du suc pancréatique et de la bile, est sensiblement plus intense que la digestion intra-duodénale normale. — MM. R. Demanche el J.-P. Ménard montrent que le procédé de Hecht modifié pour le séro-diagnostic de la syphilis donne en pratique des résultats aussi exacts que la méthode de Wassermann et peut lui être substitué à cause de sa simplicité. — M. Ph. Russo a constaté que NaCI agit sur les albumines en les rendant plus filtrables ; il empêche le groupement ultérieur des micelles qui tend à se produire à la longue dans les albumines naturelles et leur donne les caractères ultra-microsco- piques des albumines à noyau métallique. — M. Laf- forgue a reconnu que certaines pleurésies, dites rhumatismales, apparaissant au cours d’un rhuma- tisme franc, sont d'origine luberculeuse. — M. G. Moussu à observé que, dans certaines circonstances, l'extrait éthéré de fougère mâle à une influence sur l'évolution des maladies causées par les cysticerques de ténias; mais cette influence ne se fait sentir que sur des lésions jeunes et en période d'évolution. — MM. Gilbert et Parturier ont trouvé, sur 100 vésicules biliaires, 55 saillantes, 18 affleurantes, 16 en retrait et {1 pourvues d’un méso. — M. A. Ponselle présente des compresseurs conjugués pour prise de sang sur les artères des petits animaux. — MM. L. Meunier et C. Vaney décrivent un nouveau procédé de fixation du plaukton, basé sur l'emploi d’une solution de qui- none à 2 ou # °/,, qui colore les noyaux en brun foncé. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 5 Avril 1910. MM. Ch. Mongour et Darrasse ont confirmé la va- leur de la méthode de diagnostic de la tuberculose pulmonaire de MM. Roger et Lévy-Valensi, basée sur la présence d’albumine dans les crachats. —MM. R. Lau- tier et G. Grégoire ont reconnu que le signe de la ligne blanche, indiqué par M. Sergent, ne peut con- stituer un signe d’insuflisance surrénale non plus qu'un phénomène d'hypotension. — MM. E. et J. Gau- trelet donnent les résultats de l'analyse de l'excrétion urinaire du lapin normal. — M. Lafite-Dupont décrit deux processus qui concourent au développement de la paroi des sinus veineux des Poissons carlilagineux. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 8 Avril 1910. M. F. Bourion indique les applications qu'il a faites des propriétés chlorurantes du chlorure de soufre, d'une part à l'analyse des composés de l'acide tung- stique, de l’autre à la séparation quantitative du tho- rium d'avec ie cérium, et du cérium d'avec le thorium et le glucinium. Dans le groupe du tungstène, il à montré que le mélange chlorurant de chlore et de bichlorure de soufre permet la séparation quantitative de la silice et de l'acide tungstique, soit dans l'acide silicotungstique ou ses sels, soit dans des mélanges synthétiques des deux oxydes en toutes proportions. Il à fait voir, en outre, que ce mélange chlorurant peut être ulilisé avec avantage pour l'analyse des tungstates et des minéraux du tungstène, wolfram et scheelite. En faisant agir le réactif chlorurant sur un mélange en toutes proportions d'oxyde cérique et de thorine, à la température de 7009, on à pu faire la sépa- ration quantitative des deux éléments, le chlorure de cérium étant fixe et le chlorure de thorium volatil, dans cesconditions. A la même température, on sépare: quantitativement le cérium du glucinium et du tho- rium en faisant agir le chloreetle bichlorure de soufre sur le mélange de thorine, de glucine et d'oxyde cérique ; le thorium et le glucinium sont séparés dans les produits distillés, en profitant de la solubilité de la glucine dans la soude. — M. H. Copaux a étudié divers corps doués du pouvoir rotatoire cristallin, en particulier le chlorate de soude et le silicotungstate de potassium. Il montre que les deux formes, droite et gauche, sous lesquelles se présentent de semblables corps, ne sont pas identiques entre elles, comme on l'admet en général, mais qu'elles se distinguent expé- rimentalement l’une de l’autre par la vitesse de disso- lution ou, réciproquement, par la vitesse de cristalli- sation. La différence est très faible pour le chlorate de soude, mais extrêmement nette pour le silicotungstate de potassium, d’où la conclusion que les deux variétés, droite et gauche, d'un corps doué du pouvoir rotatoire cristallin sont assimilables à deux variétés dimor- phiques, très voisines l'une de l'autre, quoique à des degrés d’approximation variables, suivant les com- posés. — M. H. Copaux présente un modèle de cen- trifugeur, fonctionnant dans le vide. La priorité de cette disposition revient à M. Hildt, qui fit breveter en 1902 une écrémeuse tournant dans le vide, pour éviter l'émulsion causée par la présence de l'air, mais l'emploi du vide a été adopté par M. Copaux dans un autre but, c'est-à-dire pour augmenter la vitesse de rotation, par suppression de la résistance de l'air. L'appareil présenté par M. Copaux est constitué par un moteur à courant continu, dont l'axe, tournant ver- ticalement, supporte 6 tubes de 50 centimètres cubes de capacité. Sous une tension de 90 volts, il tourne ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 105 à 4.000 tours, à pression ordinaire, el à 6.000 tours, dans un vide de 5 centimètres, avec une dépense d'énergie de 1/3 de cheval dans le premier cas et de 1/4 de cheval dans le second. — M. J. Bougault à établi la constitution des acides junipérique C0" et sabinique CÆ#H#0*, précédemment obtenus, par lui et M. Bourdier, par saponification des étholides de cires de divers Conifères. L'acide junipérique est l'acide oxy-16-palmitique CH*OH.(CH2)#.COH, et l'acide sabi- nique, l'acide oxy-12-laurique CH*OH.(CH*).CO*H. Ces formules sont étayées sur les faits suivants : les acides junipérique et sabinique sont convertis, par réduction, respectivement en acides palmitique et laurique, el, par oxydation, en acides bibasiques contenant autant d’atomes de carbone que les acides générateurs. M. J. Bougaull montre, en outre, que lacide bibasique CO*H.(CH°,'4.CO2H dérivé de l'acide junipérique est identique à l'acide thapsique du T'hapsia Gorgonica L., ce qui fixe la constitution de ce dernier acide. —M. M. Delépine à constaté que les éthers sulfocarboniques RS.CS.OR,, les éthers sulfocarbamiques (R,R,)A7.CS.OR, et le sulfocarbonate diméthylique CS(OCH*? émettent à l'air des fumées qui sont lumineuses dans l'obscurité. Ces cas de phosphorescence ont ceci d'intéressant qu'ils sont présentés par des substances organiques ayant le groupement atomique constant S— C<,,_. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 17 Février 1910. SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Geiger à poursuivi ses recherches sur l'éparpillement des particules & par la matière. Le dispositif expérimental employé est à peu près le même que précédemment; il consiste à obser- ver la répartition de la scintillation produite par un faisceau de particules 4 sur un écran de sulfure de zinc avant et après l’interposition de feuilles minces de différents métaux. On peut ainsi déterminer l'angle dont les particules « ont été déviées par leur passage à travers les feuilles métalliques. Voici les résultats obtenus : 4° L'angle probable de déviation augmente, pour une faible épaisseur, à peu près proportionnel- lement à la racine carrée de l'épaisseur de la substance traversée par la particule x; pour les épaisseurs plus grandes, l'angle de dispersion augmente plus rapi- dement ; 2° L'angle probable dont une particule «& est déviée en passant à travers un atome est proportionnel au poids atomique; la valeur de cet angle dans le cas de l'or est d'environ 1/200° de degré; 3° L'angle pro- bable de dispersion augmente rapidement avec la diminution de vitesse de la particule «, étant à peu près inversement proportionnel au cube de la vitesse. — M. H. Geiger : L'ionisation produite par une par- ticule x. I: Relation entre l'iontsation et l'absorption. L'auteur a déterminé la vitesse des particules 4 émises par le radium C après avoir traversé diverses épaisseurs de feuilles de mica, ainsi que l'isnisation qu'elles pro- duisent. Il arrive aux conclusions suivantes : 4° La vitesse d'une particule « émise par le radium C décroit rapidement vers la fin de sa trajectoire; 2° La vitesse avec laquelle les particules « sont expulsées par les atomes de radium C est constante dans la limite des erreurs expérimentales (0,5 °/,); en passant à travers l'air, les particules « prennent une vitesse légèrement différente; 3° L'ionisation produite par une particule « est, en chaque point de sa trajectoire, proportionnelle au degré suivant lequel elle perd son énergie : 4° La perte d'énergie est inversement proportionnelle à la vitesse. — M. A. O. Rankine a déterminé /es viscosités des gaz du groupe de l’argon au moyen de la méthode et de l'appareil qu'il a décrits précédemment®. Il n'employait pas plus de G c.c. de gaz. Les résultats obtenus pour l'hélium et l'argon concordent bien ! Voir la Revue du 15 octobre 1908, p. 795. ® Voir la Revue du 928 février 1910, p. 174 avec ceux des précédents expérimentateurs. Les cinq gaz du groupe sont plus visqueux que l'air; voici les valeurs des rapports ngar/fnir : He, 1,086; Ne, 1,721: Ar, 1,221; Kr, 1,361; Xe, 1,234. La viscosité du néon à la température ordinaire plus élevée que celle d'aucun gaz connu. Lorsque le poids atomique aug- mente, la viscosité croit et diminue alternativement. Mais, si l’on calcule les trajectoires libres moyennes d'après la formule de Maxwell, elles diminuent régu- lièrement à mesure que le poids atomique augmente. — M. H. C. Greenwood à étudié l'influence de la pres- sion Sur le point d'ébullition des métaux. W a utilisé un four électrique placé lout entier à l'intérieur d'une enceinte dans laquelle on produisait les variations de pression désirées; les températures étaient mesurées optiquement. Voici les résultats obtenus au-dessous et au-dessus de la pression atmosphérique : esl POINT MÉTAUX PRESSIONS “Dre D EBULLITION Pressions en mm. \ 102 1.2000 DISQUES EC REL 287 1.310 Rs \ 100 1.980 uivre. dl 257 2.180 { 105 1.315 Plomb. ROUE 1 410 pa { 103 1.660 Argent. NE) 1.780 Etni { 4101 1.970 At 1.262 2.100 Pressions en atmosphères. ( Il 4.592509 Plomb. : 6,3 1.870 Ü 11,7 2.100 ( Il 1.420 ù 6,3 .740 Bismulh. LE n7 ES l 16,5 2.060 ( 6,3 1.120 _. y 1.230 Zinc. . } 21.5 1.280 (53 1.510 Février 1910. 1° SciENGES PHYSIQUES. — MM. A. Harden et W. a. Young : Le ferment alcoolique du sue ne levure. V La fonetion des phosphates dans la fermentation alcoo- lique. Les auteurs ont proposé précédemment de re- présenter la marche de la fermentation alcoolique par le suc de levure au moyen de deux équations : 49 20H 1206 2POHR?—2C0? + 2C2H°0 2H20 + CH O‘(PO'R?}° : 20 CSH20#{(PO'R?)? + 2H°0 — CH 05H 2PO: HR°. Pour vérifier cette réaction, les auteurs ont pro- cédé à de nouvelles expériences dont ils tirent les conclusions suivantes : 1° Quand du glucose ou du fructose est ajouté au suc de levure en présence d’un excès de phosphate, on observe une période de fer- mentation accélérée, pendant laquelle le sucre ajouté subit la réaction (1), une molécule de CO: étant déga- gée par molécule de sucre ajouté. 2 Quand le phos- phate utilisable d'un mélange de ferment, co-ferment et sucre est très réduit, la fermentation totale est très faible. L'addition d'une petite quantité d'un phosphate à un tel mélange produit une assez forte augmentation de la fermentation. 3° Un phosphate d'hexose, digéré avec le suc de levure, est hydrolysé par une enzyme avec production de phosphate libre et de sucre capable d'être fermenté par la levure. 20 SCIENCES NATURELLES. — Sir W. de W. Abney : La cécité des couleurs et la théorie trichromatique de la vision colorée. Dans la théorie trichromatique de la vision colorée, les trois sensations de rouge, vert et bleu sont chacune totalement distinctes, et, dans la cécité complète pour le vert ou le rouge, l'une de ces deux sersations, le vert ou le rouge, est totalement absente. Si cette théorie est autre chose qu'une hypo- thèse de travail, la courbe de luminosité de l’aveugle Séauce du 24 406 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pour le rouge, ajoutée à celle de l’aveugle pour le vert, doit donner la courbe de luminosité de la vision colo- rée normale, avec en plus une courbe de luminosité de la sensation bleue. Mais, comme cette dernière est très faible comparée aux deux autres, l'addition des courbes de l'aveugle pour le rouge et de l’aveugle pour le vert sera très proche de la courbe de vision normale. Or l’auteur a eu l’occasion de déterminer les courbes de luminosité de deux personnes atteintes de cécité des couleurs, l'une pour le rouge, l’autre pour le vert. Il les a réunies, et la courbe complexe concorde sensi- blement avec la courbe de vision normale, ce qui jus- tilie la théorie trichromatique. — MM. W. Cramer et H. Pringle ont déterminé /e métabolisme azoté total de rats porteurs de tumeurs malignes, en opérant avant et après transplantation d’un sarcome à celluies en fu- seau à croissance rapide. Les résultats montrent qu'il faut moins d'azote pour construire un certain poids de tissu de tumeur que pour un poids égal de tissu soma- tique de l'hôte. Les auteurs n'ont obtenu aucune preuve que les cellules de la tumeur aient une affinité plus grande pour la substance nutritive que les cellules en état de croissance de l'hôte, ni qu'elles sécrètent des substances ayant une action toxique sur le méta- bolisme azoté de l'hôte. Ils concluent que les cellules de la néoformation se procurent la matière azotée né- cessaire pour l'édification du nouveau tissu par une économie dans le métabolisme des protéines, de sorte qu'une partie plus faible est utilisée comme source d'énergie et une partie plus grande pour la construc- tion du nouveau tissu. — Les mêmes auteurs ont étu- dié La distribution des substances azotées dans les tis- sus de tumeurs et somatiques. Les résultats, qui con- firment les précédents, montrent que le °/, d’Az des tumeurs à croissance rapide est plus faible que celui des tissus de l'hôte ou des tissus d’un animal normal. Cette diminution est due au fait que, poids pour poids, le tissu cancéreux contient seulement les trois quarts de la quantité de substances protéiques présente dans les tissus de l'hôte. Toutefois, les produits azotés abiu- rétiques du métabolisme de la cellule sont présents en quantité légèrement plus grande dans le tissu cancé- r'eux. Séance du 3 Mars 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Mercer développe la théorie des séries de fonctions normales de Sturm- Liouville comme une branche de la théorie des équa- tions intégrales. 20 ScIëNCES PHYSIQUES. — M. T. G. Bedford a déter- miné /a dépression du point de congélation en solutions aqueuses très diluées. D'après la théorie de l’ionisation, la dépression du point de congélation et la conductivité d'une solution d'un électrolyte sont en relation avec l'ionisation de la substance dissoute. On a la relation d —{(A —Gà)/à(i — 1), où « esl le coefficient d'ionisation, A la dépression moléculaire, à la dépression molécu- laire limite qu'on observerait pour une grande dilution S'il n'y avait pas d’ionisation et 7 le nombre d'ions dans lesquels se dissocie la molécule. Les expériences de l'auteur ont montré que, pour KCI, KMn0*, MgSO!, les dépressions moléculaires en solutions très diluées atteignent la valeur 3,72 correspondant à l’ionisation complète en deux ions. Pour BaCI* et H?SO#, la dépres- sion moléculaire atteint la limite 5,58, correspondant à l'ionisation complète avec résolution de la molécule en trois ions. Pour le ferricyanure et le bichromate de K, la dépression moléculaire s'approche de 7,44, ce qui correspondrait à l’'ionisation en quatre ions; mais les résultats sont entachés de certains doutes. — M. L. N. G. Filon: Mesure des indices absolus de réfraction dans le verre déformé. Si la lumière est transmise à travers un barreau de verre, soumis à une tension T, dans une direction perpendiculaire à la ligne de l'effort, elle est divisée en deux composantes, polarisées dans des plans perpendiculaire et parallèle à la ligne de l'effort, Si y est l'indice de réfraction du verre à l'état non déformé, les indices de réfraction correspon- dant aux deux composantes ci-dessus, à l’état déformé, seront p + CT et uLC,T respectivement. L'auteur a déterminé les coeflicients CG, et C,, par une méthode décrite antérieurement, sur deux verres d'Iéna, l’un borosilicaté, l’autre « ultra-violet ». Il a trouvé qu'ils sont tous deux négatifs, de sorte que les deux rayons sont accélérés par la tension ; mais l'effet est beaucoup plus grand pour C,, c’est-à-dire pour le rayon polarisé dans la direction de l'effort. 11 est probable que les deux indices de réfraction dus à la tension sont affectés localement par des périodes libres des constituants du verre, causant des irrégularités dans les courbes de C, et C, similaires à celles que présente la courbe de l’in- dice de réfraction dans la dispersion anomale. — M. A. von Antropoff a mesuré la solubilité du xénon, du krypton, de l'argon, du néon et de l'hélium dans l'eau à diverses températures. Voici les valeurs obtenues : t Xe Kr, Kr, Ar Ne He 0° 0,2189 0,1249 0,1166 0,0561 0,011% 0,0134 100 0,1500 0,0965 0,0877 0,0438 0,0118 0,0100 200 0,1109 0,0788 0,0610 0,0319 0,0147 0,0138 300 0,0900 0,0762 0,0597 0,0348 0,0158 0,0161 400 0,0812 0,0340 0,0561 0,0338 0,0203 0,0191 500 0,0878 0,0823 0,0610 0,0343 0,0317 0,0226 Excepté pour He et Ne, la solubilité s'élève avec l'augmentation du poids atomique. La solubilité du xénon est plus grande que celle d'aucun autre gaz ne formant pas de composé avec le solvant. Tous les gaz rares présentent un minimum distinct de solubilité : pour Xe et Ar, il est à 40°; pour Kr entre 30 et 49°; pour He, à 10°, et pour Ne probablement à 0°. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 8 Avril 1910. M. B. $S. Cohen : Démonstration des courants télé- phoniques dans les lignes chargées et non chargées. A l’aide des formules de Kennelly, il est possible de cal- culer la relation entre les courants envoyés et reçus dans les lignes téléphoniques pour toutes les cordi- tons rencontrées dans la pratique. Quatre choses sont essentielles pour les expériences de l’auteur : 4° un courant comparable au courant de parole téléphonique ; celui-ci a été obtenu au moyen d’un interrupteur à fil vibrant, donnant une onde avec une oscillation fon- damentale d'environ 100 vibrations par seconde, à laquelle se superpose une oscillation amortie d’en- viron 800 vibrations par seconde; 2° une ligne télé- phonique avec ou sans sa charge sous forme de bobines d'inductance; 3° un appareil terminal; les lignes étaient terminées par des récepteurs et des bobines d’induction tels qu'on les emploie en pratique dans le travail avec batterie locale; 4° des mesureurs de cou- rant; dans ce but, on a employé des barralters arrangés comme ampèremètres à courant alternatif. La première expérience montre les relations entre le courant reçu et envoyé pour diverses longueurs de câble type non chargé. La deuxième illustre la variation de courant envoyé quand l'extrémité réceptrice est à circuit ouvert ou fermé et quand on fait varier la longueur du câble. La troisième montre la distribution de courant le long du càble chargé en insérant un barretter en différents points du câble. Les essais confirment les calculs. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 3 Mars 1910. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Rothe : Sur la dépendance linéaire des produits mélangés de trois facteurs. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Me H. Souczek a déter- miné la quantité totale de substances pauvres en rädium qu'on obtient dans le traitement de 9.740 kilogs de résidus de minerai d'urane de Saint-Joachimsthal ; 21 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 107 oo elle correspond à une quantité de chlorure de radium anhydre de 0,26 gramme. — MM. C. Doelter et H. Zirk ont déterminé la radioactivité d'un certain nombre de minéraux : leszircons verts purs sontactifs, les rouges et les bruns non; la monazite n’est proba- blement pas active, mais elle est souillée par de la thorite active; le rutile, la baryte, ete., sont inactifs. — M. M. Pfannl a constaté que des éthers à radical alcoolique R chauffés avec un alcool absolu à radical R' ne réagissent pas. Mais, si l'on ajoute KOÏH ou C*H° ONa, il y à transposition quantitative des radicaux R et R'. Il en est de même pour un éther à radieal R'etun alcool à radical R. Les phénomènes sont donc réver- sibles et soumis à l’action de masse. — M. E. Spæth a observé que le 2:4:6-trinitrobenzaldéhyde additionne l'anhydride acétique plus difficilement que les autres aldéhydes aromatiques; cela tient à l'influence de la double substitution en ortho. — M. O. Morgenstern a préparé des combinaisons d’une molécule d'acide 3 :5- dinitro-p-oxybenzoïque avec une molécule d'acénaph- tène, de naphtalène, de pyrène, de quinoline, et de deux moléeules du même acide avec une molécule de fluorène, de rétène, de phénanthrène et d'oxyde de biphénylène. — M. T. Komnenos : Sur les produits secondaires résultant du remplacement de l’alkyle dans le malonate d'éthyle. — MM. Zd. H.Skraup et J. Prig- linger ont obtenu des quantités appréciables de dimé- thylpyrone en faisant bouillir de l’anhydride acétique avec de l'acide sulfurique concentré ou P?0°. La dimé- thylpyrone est transformée directement et quantitati- yement en lutidone par l’action de AzH° concentré en tube scellé. — M. G. Mossler, par action de H°0* sur la brucine et sur la strychnine, a obtenu des combi- naisons C*#H*°Az°0°.H°0 et C*H*Az°0*.2H°0, apparte- nant à la classe des aminoperoxydes, dissociables en H°0* et amino-oxydes. 30 SoiRNcEs NATURELLES. — MM. R. Kraus, E. Ranzi et H. Ehrlich ont constaté que les corpuscules rouges du sang de l'homme ou des mammifères sont, dans les processus pathologiques, plus lentement ou plus rapi- dement dissous que les corpuscules normaux par une quantité déterminée de venin de cobra. Les animaux porteurs de tumeurs sont aussi en état que les animaux sains de former des anticorps. Des sérums hétérolo- gues, portés dans la circulation des animaux normaux et porteurs de tumeurs, se laissent déceler dans le sérum dans le même temps par la réaction de précipi- tation. Une tumeur sous-eutanée ne produit qu’une immunité locale; une tumeur péritonéale produit une immunité de l'organisme entier. — M. F. X. Schaffer a étudié la faune des bivalves d'Eggenburg (Basse- Autriche). Il y a reconnu 154 formes, dont 76 nouvelles et dont 50 ne sont que des variétés de formes actuel- lement vivantes. Les formes éteintes ont des affinités Aie celles de l’Indo-Chine, des Philippines et de lAus- tralie. ACADEMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 26 Février 1910. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. D. J. Korteweg pré- sente au nom de M. L. E.J. Brouvwer : Sur des distri- butions continues de vecteurs sur des surfaces. Seconde communication (pour la première, voir Rev. génér. des Sciences, L. XX, p. 564). 1. Les courbes de contact à distribution finie, uniforme, continue de vecteurs, à nombre fini de points singuliers dans un domaine intérieur à connexion simple d'une courbe fermée. 2. La structure du champ dans les environs d’un point non singulier. 3. La structure du champ dans les envi- rons d’un point singulier isolé. Premier cas principal. 4. Second cas principal. 5. Réduction d’un point singu- lier isolé. 6. Remarques sur les courbes de contact et les points singuliers sur la sphère. — Ensuite M. Kor- teweg présente au nom de M. H. J. E. Beth : Les oscillations autour d'une position d'équilibre dans le cas d'une relation linéaire simple entre les nombres de _—_ vibrations. Seconde partie (pour la première, voir {ter génér. des Sciences, t. XXI, p. 315). 14-16. Cas S 4 17. Courbes osculatrices. 48. Cas particuliers, 19, Méca nisme arbitraire à deux degrés de liberté où S— #4. 20-23. Cas S— 2. 24-26. Courbes osculatrices, 27, Ca particuliers. 28. Enveloppe des courbes osculatric: 29, Mécanisme arbitraire à deux degrés de liberté où S—2. — M. J. de Vries : Sur des couples de poin associés à une cubique plane. Deux points U, V sont associés à une cubique c’, s'ils forment avec un point quelconque de leur droite de jonction un triple de l'involution 1*, dont les points d’intersection de c* ave cette droite sont trois points triples. Les couples asso ciés sont en correspondance (2, 2); c* est courbe de coïncidence de cette correspondance. Le lieu des couples associés en ligne droite avec un point donné D est une hiquadratique nodale d,; cette d, peut être engendrée à l’aide d’un système de coniques à indice deux et un faisceau projectif de droites, etc. — M. P. H. Schoute présente au nom de M° A. Boole Stott pour les Mémoires : « Geometrical deduction of semire- gular from regular polytopes and spacefillings » (Déduction de polytopes semi-réguliers et réseaux de polytopes semi-réguliers de polytopes réguliers et ré- seaux de polytopes réguliers). Sont nommés rappor- teurs MM. Schoute et J. Cardinaal. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Kamerlingh Onnes présente en son propre nom et au nom de M. Pierre Weiss : ltecherche sur la magnétisation à des tempc- ratures très basses. L'extension de la théorie cinétique du magnétisme à l’ensemble des phénomènes ferroma- gnétiques à l’aide de l'hypothèse du champ moléculaire a augmenté l'importance de l'épreuve des résultats de la théorie par les données expérimentales. Les premiers résultats de cette comparaison ont été très encoura- geants. Dans quelques cas, on obtient un accord remarquable. Ainsi la courbe calculée pour l'intensité de la magnétisation dans le cas de saturation en fonc- tion de la température s'accorde très bien avec celle trouvée pour la magnétite à des températures surpas- sant la température ordinaire. Ensuite la loi de la sus- ceptibilité au-dessus du point de Curie, d’après l'hypo- thèse du champ moléculaire, a été reconnue exacte sur un domaine de température de plusieurs centaines de degrés par les expériences de Curie et par des expé- riences nouvelles qui paraîtront bientôt. Enfin les sauts de la chaleur spécifique au point de Curie correspondent aux valeurs déduites des données magnétiques. Mais, par contre, d'autres expériences ne s'accordent pas aussi bien avec la théorie. Les courbes du nickel, du fer et du cobaltmontrent des déviations de plus en plus grandes. Ainsi l'hypothèse du champ moléculaire à besoin d’une correction. Il n’est pas probable que cette modification ruinera le rôle attribué à l'énergie ciné- tique comme réaction contre la force orientatrice du champ, ou bien qu’elle entrera en conflit avec la manière dont on se sert de la loi de distribution de Maxwell- Boltzmann. 1: But et résultats des expériences. 2. Mé- thode et appareils. 3. Marche des expériences. #. Cor- rections et contrôles, déterminations auxiliaires. 5. Détails. Le travail est illustré par deux planches. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M.J.J. van Laar: Quelques remarques sur la réponse de M. Kohnstamm (voir Rev. genér. des Sciences, t. XXI, p. 268). M. À. F. Holleman présente en son propre nom et au nom de MM. F. van der Linden et J. J. P. Valeton : Sur une méthode d'analyse quantitative de mélanges ternaires. Si les trois substänces P, Q, R n'admettent ni cristaux de mélange, ni composés, la surface de fusion (fig. 4) a sa forme la plus simple. Le point A représente un mélange liquide homogène des trois substances. Si la température s’abaisse, la substance P se solidifie en B et la constitution du fluide correspon- dant se déplace suivant la ligne d’intersection PBC de Ja surface avec le plan BPP,, normal à la base P,QRo suivant PBoC, jusqu'à l'arête E, D en C. En C la seconde substance Q se solidifie et ensuite le point 408 indiquant la constitution suit l’arête CE jusqu'au point eutectique D. M. Holleman montre comment MM. van der Linden et Valeton ont résolu le problème de la détermination quantitative des constantes dont dépend A P me ; PER 7 \ \ CS PES oO la surface de fusion, — Ensuite M. Holleman présente au nom de M. Valeton: La surface de fusion du système des trois nitranilines isomères, d'après l'équation ! f ME X — y) de van Laar. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker Les chambres silencicuses du Laboratoire physiologique d'Utrecht. Exposé des trois conditions nécessaires de construction, et de la manière dont l'auteur à essayé d'y satisfaire. — M, J. W. Moll présente au nom de M. C. van Wisselingh : Sur l'existence da tanin dans la plante vivante et sur sa Signification. D'après l'auteur, les bolanistes ne sont pas d'accord sur Je tanin. Il embrasse l'opinion de ceux qui croient qu'il y à des substances végétales qui se distinguent des autres sub- stances carbonées par des propriétés caractéristiques communes, comme celle de transformer la peau ani- male en cuir, de former avec de l’albumine des com- posés insolubles dans l'eau, le goût astringent, la pos- session de plusieurs groupes hydroxyle de phénol dans la molécule, la faculté de précipiter des alcaloïdes de solutions aqueuses, elc., ce qui justifie leur réunion dans un groupe spécial, Il croit aussi qu'il est très possible d'étudier l'importance physiologique de ces substances, quoiqu'on n'en connaisse qu'incomplète- ment la composition chimique. I fixe l'attention sur le désaccord des hotanistes par rapport à la signification physiologique des tanins et sur l'incertitude de leurs conclusions sur ce point. En particulier, il démontre l'insuffisance des arguments qui ont mené à la réfuta- tion de l'opinion que les tanins peuvent jouer le rôle de matériaux de croissance; sous ce rapport, il indique plusieurs facteurs dont on doil tenir compte dans l'étude du problème physiologique des tanins, surtout dans le cas de plantes d'organisation supérieure, chez lesquelles on à étudié le problème jusqu'à présent. L'auteur à essayé d'obtenir des données plus positives pour la solution du problème en question par l'étude de plantes d'organisation inférieure. Particulièrement propre à mener au but désiré lui ont paru les espèces les plus épaisses du genre Spirogyra, dans le liquide ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ; +, ————— " Îÿ#— “ cellulaire desquelles plusieurs réactifs accusent des quantités considérables de tanin. Avant d'entrer en matière, l'auteur s’est imposé la condition d'avoir à sa disposition une méthode par laquelle il pourrait déter- miner à des époques différentes, chez la même cellule, la teneur en tanin avec une exactitude permettant d'en constater un accroissement ou une décroissance sans nuire à la constitution de la cellule. Comme aucune des méthodes employées jusqu'à présent ne satisfait à celte condition, l'auteur à dù en créer une nouvelle et il a eu le bonheur d'y réussir parfaitement. Il s'est servi d'une solution aqueuse d'antipyrine à 4 0}, et d'une solution aqueuse de caféine à 0,1 °/,. Ces sub- stances pénètrent facilement dans les cellules et y précipitent le tanin. Le précipité se compose de petits globules en mouvement continu. En mettant ensuite de nouveau les lilaments de Sprrogyra dans l'eau de source ou dans l’eau distillée, le précipité disparait entièrement en dix minutes el ces filaments montrent le même aspect qu'avant l'expérience. Si l’on maintient les fila- ments de Spirogyra dans les solutions, les globules se réunissent en sphères plus grandes parfaitement inco- lores. Plusieurs données montrent que le précipité, plus lourd que l'eau, est visqueux. Le chlorure ferrique colore les sphères en bleu, l'acide osmique en noir. A l'aide de ces réactifs, on démontre que l'antipyrine et la caféine précipitent tout ou presque tout le tanin des cellules. Par des expériences de comparaison avec d'autres réactifs sur le tanin, on peut constater que la quantité des précipités d'antipyrine et de caféine cor- respond bien à Ja quantité de tanin dans les cellules. La quantité de ces précipités fut déterminée de diffé- rentes manières. L'auteur observa si le noyau, les fila- ments suspenseurs et les chromatophores étaient encore visibles après la précipitation du tanin et daos quelles cellules le précipité se montre le premier. A l'aide d'expériences comparatives, l’auteur a étudié l'influence nuisible de l'antipyrine et de la caféine. Il a trouvé que des solutions diluées ralentissent, que des solutions de la concentration indiquée arrêtent la croissance, Un séjour journalier de dix minutes dans les dernicre# solutions, suflisant pour l'examen de la teneur en tanin, n'exercait cependant aucune influence nuisible soit sur la croissance, soit sous d'autres rapports. A l'aide de sa méthode, l'auteur à trouvé des faits qui indiquent que; chez le Spirogyra, le lanin joue un rôle important dans la formation de la paroi des cellules, qu'il est consommé pendant ce processus et qu'ainsi très probablement il Joue le rôle de matériel de construction. Entre autres, les expériences de l’auteur ont trait à la copulation el à la formation de la paroi transversale. Dans le cas des cellules copulantes, les cellules où la croissance laté- rale et la confluence mutuelle étaient terminées mon- traient une teneur moindre en tanin que celles où la croissance latérale ne venait que de commencer, tandis qu'autrementces deux espèces de cellules ne montraient pas la moindre différence. Aussi pendant la formation de la paroi transversale, une décroissance de la teneur en tanin a été constatée, De plus, l'opinion de l’auteur est affirmée par l'observation que la formation de la paroi transversale fut arrêtée où mème prévenue par une fixation temporaire du tanin par l'antipyrine ou la caféine, la caryocinèse procédant normalement. Au contraire, dans le cas du C/adophora, algue dépourvue de tanin, le transport dans la solution d'antipyrine ou de caféine ne produisait pas de stagnation dans la for- mation de la paroi transversale. — M, Van Bemmelen présente au nom de M. H. Van Cappelle : « Bijdrage tot de kennis van de landijsvormingen in de provincie lriesland en van het oude fluviatiele dilivium in den ondergrond van Nederland ». (Les formations glaciaires terrestres dans la Frise et le diluvium fluvial ancien du sous-sol] des Pays-Bas.) P. H. Scuoure. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIvIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette, 21° ANNÉE N° 10 30 MAI 1910 Revue générale D | Cienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne ln rédnotion à M. L, OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Æevue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris In Suède Ia Norvège et 1…n Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 8 1. — Nécrologie Edouard Van Beneden. — Edouard Van Be- neden s'est éteint à Liége, le 28 avril dernier, succom- bant après quelques jours de maladie aux atteintes d'une polynévrite infectieuse. Ce fut un jour de deuil pour l'Université de Liége, pour la Belgique et pour le monde savant tout entier. Ed. Van Beneden était né à Louvain le 5 mars 1846. Fils de l’illustre zoologiste P.-J. Van Beneden, il avait été élevé au milieu des collections d'Histoire naturelle accumulées dans cette demeure archaïque, le Collège du Hoï, où son père était logé. Cependant, fait assez singulier, sa vocation scientifique, que tout semblait concourir à développer, ne se manifesta que lardive- ment et d’une façon imprévue. Il n'eut jamais, étant enfant, le goût de collectionner des papillons, des coléoptères, des coquilles, comme l'ont fait tant d'autres futurs zoologistes. Il avait même commencé des études d ingénieur et était sur le point de passer son second examen, quand il eut un jour la fantaisie d'examiner au microscope des vers parasites, des Cysticerques, que son père s'occupait à dévaginer pour en faire des pré- parations. Il fut surpris et charmé par l'élégance esthé- tique de la couronne de crochets des Cysticerques et voulut en préparer lui-même. Cet incident fixa sa des- tinée et fut comme son chemin de Damas. Il abandonna les Mathématiques et entreprit avec ardeur les études de Biologie. Il passa le doctorat en sciences à l'Univer- sité de Louvain, puis poursuivit ses études en Alle- magne, notamment à Heidelberg. Après avoir débuté par plusieurs Notes sur l'embryo- logie des Crustacés, il publiait en 1869 sa première œuvre importante, les Æecherches sur la composition et la Signification de l'œuf, qui furent couronnées par l'Académie des Sciences de Belgique et fixèrent immé- diatement sur lui les regards du monde savant. A cette époque, la chaire de Physiologie devint acante à l’Université de Louvain. Ed. Van Beneden se mit sur les rangs, mais on lui préféra le D' Masoin, actuellement secrétaire perpétuel de l'Académie de Médecine de Belgique. Quelques mois plus tard, en 1870, il était nommé professeur de Zoologie à l'Univer- sité de Liége, en remplacement de l’entomologiste REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. F.-Th. Lacordaire (frère du célèbre prédicateur) qui venait de mourir. Il dut se contenter, au début, d'un laboratoire fort modeste : ce n'est qu'en 1888 qu'il alla occuper les splendides locaux du nouvel Institut de Zoologie, construit sur ses indications. De ces deux laboratoires sont sortis une série de travaux de premier ordre sur la division cellulaire, la fécondation et les premières phases du développement embryonnaire, travaux qui ont jeté un nouveau lustre sur un nom déjà célèbre. Ces travaux, en dehors de leur mérite intrinsèque, sont remarquables par la tendance éminemment philoso- phique qui les imprègne. La place de l'homme dans la Nature, sa descendance étudiée au point de vue onto- génique et phylogénique, voilà le problème fonda- mental auquel se ramènent, pour ainsi dire, toutes les recherches d'Edouard Van Beneden, Malgré sa diver- sité apparente, son œuvre présente ainsi un singulier caractère d'unité. Essayons d'en donner une idée. On sait que toute cellule vivante contient un »oyau qui joue un rôle important dans la division cellulaire. Ce noyau contient un certain nombre (constant pour toutes les cellules d'un même organisme) de corpuscules allongés, ayant la forme d’anses et appelés chromosomes, à cause de leur propriété de retenir les matières colorantes. Lorsqu'une cellule-mère se divise pour donner nais- sance à deux cellules-filles, on voit le noyau se diviser d'une facon particulière. Chaque chromosome se dédouble par division longitudinale et donne naissance à deux chromosomes nouveaux qui passent respective- ment dans les deux noyaux des deux cellules-lilles, Ed. Van Beneden a étudié ce phénomène dans tous ses détails : il a montré qu'il y à ici non division, mais dédoublement des chromosomes, ces éléments conser- vant leur individualité propre à travers les multiplica- tions successives des cellules. L'importance des chro- mosomes est capitale, car ce sont les supports des propriétés héréditaires de l'organisme. ,d. Van Beneden a donné une explication de ce phénomène de dédou- blement des chromosomes et de leur séparation en deux groupes constituant les deux noyaux des cellules- filles. IL a découvert dans la cellule, en dehors du noyau, un organe bien défini, la sphère attractive avec 10 110 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE son corpuscule central. Cet organe se multiplie par division chaque fois que la cellule elle-mème se divise. Les deux sphères attractives qui en résultent sont formées de filaments rayonnants, contractiles, qui se fixent aux chromosomes etsollicitent les anses jumelles, nées du dédoubiement longitudinal des chromosomes primaires, à se séparer pour former les deux noyaux des cellules-filles. Une partie importante des phéno- mènes de division cellulaire a donc sa cause non pas dans le noyau, mais en dehors du noyau. Ces recherches d'Ed. Van Beneden démontrent ainsi l'existence dans le corps cellulaire d'un mécanisme actif qui préside à la division cellulaire, tout comme notre système mus- culaire préside à nos mouvements externes et internes, et ce mécanisme se transmet lui-même par voie de division, de cellule à cellule. Tout aussi capitales sont les découvertes d'Ed. Van Beneden dans le domaine de la fécondation et de la première segmentation de la cellule-œuf. Il y précise le rôle que jouent l’ovule et le spermatozoïde dans le phénomène de la fécondation. Les spermatozoïdes, comme les œufs, sont des éléments cellulaires qui perdent respectivement la moitié deleurs chromosomes, c'est-à-dire la moitié de leur noyau, avant de s'unir. La fécondation se présente ainsi comme l'union de deux demi-noyaux (le demi-noyau femelle de l'œuf mur et le demi-noyau mâle du spermatozoïide) pour la reconstitution du noyau complet de la cellule que représente l’œuf fécondé. Il y a non pas fusion des deux demi-noyaux, mais juxtaposition où addition des chromosomes provenant de chacun d'eux, car ces chromosomes ne perdent pas leur individualité dans les noyaux au repos. Ces chromosomes sont au nombre de quatre dans les cellules ordinaires de l’Ascaris megalocephale, un grand ver parasite du cheval qui a fourni le matériel d'élection de ces importantes recherches. Au moment de la maturation de l'œuf, deux seulement des chro- mosomes du noyau de la cellule-œuf sont conservés : de même, le spermatozoïde qui fécondera cet œuf subit la même réduction et ne lui apporte que deux chromo- somes paternels. A leur tour, les quatre chromosomes de l'œuf mür et fécondé se diviseront chacun en deux pour former les noyaux des deux premières cellules de division et ainsi de suite. Les chromosomes dérivant du demi-noyau maternel et leur postérité la plus reculée dans les divisions cellulaires successives sont les porteurs de l’hérédité maternelle, de même que les chromosomes dérivant du spermatozoïde représentent le substratum matériel de l'hérédité transmise par le père. On comprend le jour éclatant que ces faits ont jeté sur le problème obscur de l'hérédité et l'importance qu'ils présentent au point de vue de la notion philoso- phique de la descendance. La fécondation, qui amal- game des tendances héréditaires différentes, et les phénomènes de réduction de moitié du nombre des chromosomes dans l’œuf et dans le spermatozoïde constituent deux causes essentielles de variabilité chez les êtres vivants. Le père et la mère ne passent pas chacun tout entier dans leurs enfants : la moitié des souvenirs de famille s'est perdue dans le germe paternel ainsi que dans le germe maternel, et, comme les enfants des mêmes parents ne se ressemblent pas com- plètement entre eux, il faut en inférer que les chro- mosomes qui se perdent ne sont pas les mêmes pour les différents germes que produit un organisme. Les organismes mettent de cette manière au monde des rejetons de caractères très variés, et cela constitue pour eux un avantage considérable dans la lutte pour l'existence, car, de cette manière, il se trouve ordinai- rement parmi ces descendants des individus suscep- tibles de s'adapter aux conditions nouvelles qui pourraient être faites à l'espèce : celle-ci est assurée de l’immortalité. De nombreux travaux, dus à des chercheurs de tous pays, sont venus attester et confirmer la portée géné- rale des faits signalés d'abord dans l'œuf de l'Asearis. Ainsi les découvertes d'Ed. Van Beneden sur un humble ver parasite nous ont ouvert des horizons nouveaux d’une portée immense. Lui-même a d'ailleurs étendu ses recherches embryo- logiques à plusieurs groupes zoologiques : Crustacés, Tuniciers, Vertébrés, etc., ce qui lui a permis de pré- ciser les relations qui existent entre les Vertébrés et l’'Amphioxus d’une part, entre l'Amphioxus et les Tuniciers d'autre part. Un sait qu'il a découvert en même temps que Mathias Duval le rôle prépondérant que joue l’ectoblaste embryonnaire dans la formation du placenta. Mais ce n’est pas ici le lieu d'analyser ces travaux. Je veux cependant signaler deux séries de recherches qui ont eu un grand retentissement. En 1876, il publiait une monographie consacrée aux Dicyémides, animaux inférieurs qui vivent en parasites sur les corps spon- gieux des Céphalopodes et que l’on avait considérés soit comme des Infusoires, soit comme des Grégarines, soit comme des vers dégradés. Il reconnut que ce sont des êtres pluricellulaires formés par une couche de cellules ectodermiques entourant une ou plusieurs cellules endodermiques, sans mésoderme. Les Dicyé- mides doivent, selon lui, être considérés comme les survivants actuels d'un embranchement intermédiaire entre les Métazoaires et les Protozoaires, pour lequel il créa le nom de WMesozoaires. Dans son Mémoire de 1897 sur les Anthozoaires pélagiques de l'expédition du Plankton, il remanie complètement la classification de ce groupe animal. Il arrive à la conclusion que c'est une forme voisine des Cérianthides actuels qui doit ètre considérée comme la souche des Métazoaires segmentés et, par conséquent, des animaux supérieurs et de l’homme. La plupart des travaux d'Ed. Van Beneden ont été publiés dans les Archives de Biologie, qu'il avait fondées avec Ch. Van Bambeke, de Gand, en 1880. Cette publication est à son vingt-sixième volume. Ajoutons que c'était un professeur hors ligne, qui sut inspirer le feu sacré de la science à de nombreux élèves, parmi lesquels nous citerons J. Fraipont, Ch. Julin, P. Francotte, P. Nolf, Fættinger, Cerfon- taine, J. Masius, Damas, H. de Winiwarter, Marc de Selys. Ed. Van Beneden était correspondant de l'Institut’ de France, membre des Académies de Berlin, Bruxelles, Copenhague, Lisbonne, Munich, Rome, Saint-Péters- bourg, Vienne, docteur honoris causa des Universités de Bruxelles, Cambridge, Edimbourg, lena, Leipzig, Oxford. Léon Fredericq, Professeur à l'Université et Directeur de l'Institut de Physiologie à Liége. $ 2. — Météorologie La radio-activité de la rosée. — Plusieurs savants ont étudié, dans ces dernièresannées, la radio- activité des dépôts atmosphériques. Dans un récent travail, M. C. Negro, professeur à l'Université de Bologne, examine à ce même point de vue une forme très spéciale de ces dépôts : la rosée, qu'il recueille sur des plaques de verre enduites d’une couche de vernis. L'auteur expose ces plaques vers huit heures du soir au contact immédiat du sol, en ayant soin, pourélimi- ner toute influence due aux différences de composition, de choisir un sentier d'humus, à l’abri du feuillage des arbres voisins. Après avoir retiré vers 7 heures du matin toutes les plaques exposées la veille, l’auteur en fait une pesée exacte, pour les introduire ensuite dans le cylindre de . dispersion d’'Elster et Geitel. Il est intéressant de remarquer que, dans tous les cas étudiés par l’auteur, la vapeur d’eau se dépose exelu- sivement sur la surface tournée vers le sol, tandis que ! Phys. Zeitschr., n° 5, 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE A1 la surface opposée, même sous un grossissement convenable, ne présente jamais la moindre trace de liquide. Ses résultats font voirque, d'une façon analogue à ce que l’on observe pour la pluie et la neige, l'acti- vité de la rosée disparait presque complètement après un délai qui ne dépasse pas de beaucoup une demi- heure, Lorsque, d'autre part, on procède immédiate- ment aux mesures électro-statiques, le maximum s’observe, non pas immédiatement après l'introduction des plaques dans l'appareil, mais quelques minutes plus tard. C'est dire que le facteur ionisateur n’atteint pas son intensitémaximum immédiatement après qu'on a enlevé les plaques. Ce phénomène, qui n’a jamais été observé pour la pluie et la neige, doit, semble-t-il, être attribué à un effet immédiat du sol. D'une facon générale, on peut affirmer que le pou- voir radio-actif diminue de moitié après un peu plus d'une demi-heure, pour continuer ensuite sa décrois- sance avec une vitesse un peu moindre. La déperdition négative est toujours plus grande que la positive. Les écarts les plus importants s'observent toujours au commencement de la pose. Les facteurs météorologi- ques sont sans influence sur ces phénomènes. $ 3. — Chimie L'influence de l'azote sur les propriétés des aciers. — On sait quelle prodigieuse influence exercent sur les propriétés des aciers les moindres variations de leur composition chimique et de leur traitement thermique ou mécanique. A l’une des der- nières séances de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, M. G. Richard a signalé une nou- velle influence qui entre en jeu ou, plus exactement, dont on se préoccupe actuellement avec un grand intérêt, l'influence de l'azote. D'après M. Stromeyer, cette influence de l'azote serait, en ce sens qu’elle rend les aciers extrèmement fragiles, de cinq à dix fois plus active que celle du phosphore. Des tôles de chaudières ne contenant que 0,047 °/, de phosphore, mais aussi 0,0123 d'azote, se sont montrées, aux essais, extrême- ment fragiles. Une addition de 0,01 °/, d'azote augmen- terait d'environ 5 kilogs par millimètre carré la téna- cité des aciers ; et, detrès nombreux essais, M. Stromeyer en arrive à conclure que la somme de la teneur en phosphore et de cinq fois celle en azote ne devrait jamais dépasser 0,08 °/, dans les tôles livrées comme acier doux. D'où vient la présence de l'azote dans l'acier? Pro- bablement de l'azote de l'air soufflé dans les hauts fourneaux et les cornues Bessemer; mais comment? Car on n’a pas encore pu combiner directement l'azote au fer en les chauffant l’un en présence de l’autre. Cette combinaison se produit, au contraire, très bien en chauffant du fer dans une atmosphère d’'ammoniaque. Il n’y a pas d’ammoniaque dans les cornues Bessemer, mais les cokes peuvent en introduire dans les hauts fourneaux. Et, une fois l'azote ainsi entré dans le fer, comment l'en enlever? La chaleur n'y parvient pas; il faut un réactif. La découverte de cristaux d'azoture de titane dans un haut fourneau des forges de Farnley en démolition à fait penser au titane. L'addition de minerai de titane au haut fourneau, et de ses alliages à l'acier ou à la fonte en fusion, n'a pas donné de résultats sérieux; mais il n'en est pas de même de l'addition, à ces fontes et aciers, de titane pur, qui, en outre, diminue les soufflures des lingots. Dans un cas, l'addition de 0,2 °/, de titane à une fonte à 0,0064 °/, d'azote a réduit cette teneur à 0,0045 °/,. Dans un autre cas, on aurait ainsi débarrassé complètement d'azote des aciers Bessemer, rendus de cette manière excel- lents pour les tôles de chaudières. Cette question de l'azote n’est pas encore définitive- * Iestitution of Naval Architects, réunion de mars 1910, “et Times Engineering, supplément, 30 mars. ment tranchée; mais elle est, on le voit, des plus importantes, $ 4. — Zoologie Les taupes et les taupinières. — La taupe est un animal si commun dans nos champs qu’on pourrait croire que tout a été dit sur ses mœurs et, en parti- culier, sur les habitations qu'elle construit. En réalité, nous savons peu de chose sur ce sujet, comme le Fig. 1. — Premier stade de la forteresse vu en coupe, — R, R, passage de la taupe au-dessous de la surface: H, H, chapeau de terre rejetée. montre une récente étude de M. Lionel E. Adams, parue dans le journal anglais ÆVature, d'où nous extrayons les renseignements suivants : Pendant l'hiver, on ne peut s'empêcher de remarquer ici et là dans les champs des taupinières beaucoup plus grandes que les autres. C’est l'habitation d'hiver de la taupe mâle; mais jusqu'à présent nous ne savons pas si elle y vit seule, ou avec sa femelle, ou même si la femelle construit ces « forteresses ». Il est probable que le mâle seul et que les femelles édifient des for- teresses de construction plus simple et de dimensions plus petites. Si l’on prend une bêche et que l’on enlève soigneu- sement le sommet d’une forteresse, on trouve plusieurs tunnels ou passages creux, qui peuvent être ouverts et suivis jusqu'à la base de la forteresse, d’où ils partent H Fig. 2. — Deuxième stade de la forteresse vu en coupe. — N, cavité du nid; B, passage d'évasion; H, chapeau de terre rejetée. pour conduire dans le champ. En creusant davantage, juste au-dessous du niveau du sol, on tombe sur une 41), remplie d’une botte grande cavité circulaire (fig. c'est le nid de la taupe, d'herbe ou de feuilles mortes : dans lequel elle dort. F Si on enlève le nid et qu'on examine la cavité, on constate qu'elle a environ un pied de diamètre et qu'elle est lissée par le mouvement continuel de la taupe, lorsqu'elle entortille son nid autour d'elle, car c’est là sa méthode de se coucher. Deux ou plusieurs tunnels conduisent de la cavité du nid dans le champ. L'un deux est particulièrement digne d'être noté, car on le trouve dans presque chaque forteresse : cette sortie part du fond du nid perpendiculairement vers 412 le bas sur un trajet d'un pied environ; puis, tournant vers le haut, elle rejoint un autre passage (fig. 2). Son origine et son emploi sont incertains; mais elle est généralement considérée comme une sorte de porte de fuite et elle est connue sous le nom de bolt-run (pas- sage d'évasion). Il est extrèmement peu probable que la taupe choi- sisse délibérément l'emplacement de sa forteresse, car Fig. 3. — Vue en coupe de la forteresse terminée. — T,T, tunnels formés en CRpent de la terre du dehors pour rendre le nid imperméable à l'eau. elle est pratiquement aveugle; probablement, elle com- mence le travail là où l'impulsion la prend, et elle pro- cède de la manière suivante : Elle commence par élargir la cavité de son nid, en rejetant par un trou du toit, au moyen de petites secousses de sa tête, la terre qu'elle a détachée avec ses puissantes griffes. L'observateur tranquille peut voir une masse de terre en forme de saucisse sortir de dessous le sol en quatre ou cinq saccades; puis, après une ou deux minutes d'intervalle, quand la taupe a recueilli une nouvelle quantité de terre détachée, une autre saucisse apparaît, et ainsi de suite jusqu'à ce que le travail soit terminé. Après la cavité du nid, vient l'excavation du passage d'évasion; finalement, pour rendre l'habitation sûre et à l'abri de l’eau, la taupe entasse une masse de terre sÿlevant souvent à une grosse charge de brouette au moyen de tunnels entourant la base de la taupinière (fg. 3 et 4). Ces tunnels s'ouvrent souvent les uns dans lesautres et parfois dans la cavité du nid, de façon à a forteresse terminée vue par-dessus avec les tunnels TT à découvert. former un labyrinthe qui a donné lieu à beaucoup de spéculations erronées dans le passé. Une forteresse est souvent complète en une seule nuit; les jeunes ne naissent pas dans la forteresse d'hiver, mais dans une habitation séparée construite par la femelle seule. Elle est bâtie sur le même plan et uénéralement plus simple et sans passage d'évasion. La femelle ne donne qu'une portée par an, et les petits, qui naissent de la fin d’avril à la fin de mai, sont au nombre de deux à six. Sans poils, aveugles et rosés, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ils deviennent couleur de terre en dix jours; après deux semaines, un pelage gris velours est visible, lequel devient noir à la fin de la 3° semaine, quand les yeux s'ouvrent. Les oreilles s'ouvrent le 17e jour. Les essais d'élevage des jeunes à la main se sont mon- trés jusqu'à présent sans succès, car, quoiqu'ils sucent libremeut des morceaux de flanelle ou de coton trempés dans du lait chaud, ils dépérissent et meurent le 3° ou le 4e jour. On a beaucoup discuté sur la puissance de vision de la taupe. La dissection a nfontré que la dimension de l'œil est plus grande chez l'embryon que chez l'adulte, ce qui indique que la vue de la race a baissé. Par de nombreuses expériences, M. Lionel E. Adams s’est convaincu que la taupe adulte est pratiquement aveugle. Des taupes rencontrées pendant le jour n’ont pas con- science d'une personne agitant la main près de leur front; pendant la nuit, elles ne donnent pas signe de vision d'une lumière mue devant leur nez; mais, si l’on produit le plus petit bruit, elles présentent instan- tanément la plus grande excitation. Il est vrai qu’à la moindre excitation, le pelage s'irradie autour du petit œil, mais il s’agit probablement là d'une action méca- nique retenue, mais devenue sans usage. M. Lionel E, Adams a souvent posé des vers devant une taupe captive pour éprouver la vision. Tout de: suite la taupe est au courant de la présence du ver, mais la manière dont elle le cherche avec son museau montre clairement qu'elle est guidée par l'odorat, et peut-être par l’ouïe, mais non par la vue. Quand, après une recherche pressée et hésitante, le ver a été trouvé, la taupe le prend avec ses pattes de devant et le mange d'un bout à l’autre avec des coups de dent saccadés. Quand le grand appétit de l'animal est enfin satisfait. et qu'on lui fournit encore des vers, la taupe les mord souvent pour les mettre hors d'état d'agir, puis les enterre, probablement pour les conserver en vue d’un usage futur. Les sens de l’odorat et de l’ouie doivent être très aigus chez la taupe pour lui permettre de localiser des nids de faisan ou de perdrix au-dessus de son passage souterrain; des garde-chasse ont, en effet, affirmé à M. Adams que ces nids sont enterrés en creusant des- sous et les œufs mangés par la taupe. Il est surprenant de constater combien rapidement une taupe captive se laisse prendre avec la main et caresser; il faut, toutefois, éviter tout mouvement brusque. $ 5. — Géographie et Colonisation La forme du continent antaretique. — Le lieutenant Filchner, explorateur allemand déjà bien connu par ses voyages sur les hauts plateaux de l'Asie centrale, se propose d'entreprendre une expédition dans l'Antarctique. Il a récemment développé ses plans à une réunion de la Société de Géographie allemande à Berlin. Ceux-ci ont été soutenus par le Professeur CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Penck, qui a exposé, à cette occasion, des vues très intéressantes sur la forme du continent antarctique ‘. Les résultats des expéditions antarctiques de ces dernières années ont amassé un grand nombre de preuves en faveur de l'existence d’un continent au pôle Sud. L'océan, au voisinage du cercle antarctique, devient partout moins profond; des terres surgissent de l’eau, couvertes d'une énorme masse de glace venant de l'intérieur, au-dessous de laquelle se projette seu- lement une mince bande de sol non recouvert. Cette terre couverte de glace est une région de haute pres- sion atmosphérique, balayée par des vents d'est carac- téristiques le long de son bord oriental, de la Terre Victoria au Gaussberg, tandis qu'à l'occident les vents d'est ne sont qu'occasion- nels, et mème inconnus à Snow Hill, où Nordenskjüld n'a noté que des vents du sud-ouest pen- dant son hiver- ////ÀTerres explorées » Supposées nage. Ce fait semble indi- quer l’exis- tence, au sud- est, d'une aire de basse pres- sion, d’une mer. Déjà, en 1823, Weddel a pénétré pro- fondément danscettemer; mais les essais postérieurs ont échoué, parce qu'en général ils ont porté sur le côté oc- cidental de la mer de Wed- dell. Là, la glace semble s'étendre régu- lièrement jus- qu'à 65030! S. et des vents violents souf- flent du pôle. Des condi- tions différen- tes existent du cûté oriental. Là, en 1904, l’'Expédition antarctique écossaise, dirigée par le D' Bruce, put avancer jusqu'à 74° S. vers la Terre de Coats, qui offre maintenant un point de départ qui parait facilement accessible pour une explo- ration antarctique plus complète. C'est de là que les prochaines Expéditions écossaise et américaine comptent partir; mais, tandis qu’elles désirentatteindre le pôle, le lieutenant Filchner place au premier plan un autre problème, celui des relations entre l’Antarc- tique de l'Est et de l'Ouest. On peut s'imaginer que la ligne côtière s'étend de la Terre de Coats, au sud de la mer de Weddell, jusqu'à Ja Terre de Graham, et de la Terre Alexandre [°* jusqu'à la Terre Victoria par celle d'Edouard VII. Mais on ne doit pas oublier que la barrière de glace découverte par Ross entre la Terre Edouard VIL et la Terre Victoria est une portion détachée d’une masse de glace flottante, 0 500 1000 1500 2000km. RE — 2 —— 1 Zeitschrift der Gesellschaft für Erdkunde, 1910, n° 3; The Scottisch Geographical Magazine, 1910, n° 5, p. 262. Fig. 1. — Carte du continent antarctique, d'après les vues du Professeur Penck. 180° 13 comme l'a montré le capitaine Scott. Elle s'élève el s’abaisse avec la marée et possède une surface remar- quablement plane, qui s'élève seulement graduellement vers le sud. Aussi loin que Scott s'est avancé sur la surface de cette masse de glace (jusqu'au 82° parallèle), il l’a considérée comme flottante, et près du 8%e paral- lèle, à 650 kilomètres de la côte, Shackleton a trouvé sa hauteur de 150 mètres seulement, tandis qu'au loin à l’ouest la terre s'élève brusquement jusqu'à une hauteur d'environ 3.000 mètres, La paroi abrupte de la côte, à l’endroit où Shackleton fit l'ascension de la glace intérieure, s'étend vers le sud-est, — c'est-à-dire dans la direction de la Terre de Graham; — mais sa direction générale pointe vers la Terre de Coats, et les vents vio- lents du sud qui retardè- rent la marche de Shackleton semblent indi- quer que le tra- jet de sa route ardue vers l'in- térieur est tou- jours au voisi- Trayet propose de avensssssass J Expédition Filchner nage de cette barrière ter- restre élevée. Si cette théo- rie est cor- recte, le péle Sud doit être situé dans l'Antarctique de l'Est, et la forme de ce dernier conti- nent doit être considérée comme celle d’un bouclier de terre s'a- baissant gra+ duellement vers l’hémi- sphère orieñ- tal, mais se ter- minant par un versant abrupt vers l’hémi- sphère occi- dental” La mer de Weddel, d'un côté,et la mer de Ross, de l’autre, peu- . vént être con- sidérées comme des portions inondées de la côte au pied de la falaise abrupte, et entre elles on peut pré- sumer l'existence de glace à niveau bas analogue à celle qui descend vers la mer de Ross dans la Grande- Barrière. Dans ce cas, l’Antarctique de l'Ouest serait une île faisant face à l'Antarctique de l'Est et séparée d'elle par un détroit gelé reliant les mers de Weddell et de Ross. Cette interprétation de nos connaissances géogra- phiques sur l'Antarctique est naturellement une hypo- thèse, mais elle n’a rien d'irrationnel. C’est pour la vérifier que le lieutenant Filchner s'est proposé d'en- treprendre une expédition qui partirait de la mer de Weddell, au sud de la Terre de Coats, pour atteindre la Terre Victoria en suivant la grande muraille supposée. Une expédition auxiliaire partirait de la Terre Victoria pour établir des depôts de provisions sur l'extrèmité du trajet de l'expédition principale. Cette audacieuse traversée de l'Antarctique, si elle réussit, sera l’une des plus remarquables explorations de notre époque. V7 ULETe V77% Barrière de glace infranchissable. AMANNEN 414 LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE L'HORLOGERIE MECANIQUE I. — LES ORIGINES. La mesure du temps a été un des premiers besoins de l'humanité : le gnomon, le sablier, la clepsydre, le cadran solaire ont successivement ou simultanément servi pendant de longs siècles à la division du jour en heures égales ou inégales. La clepsydre, en particulier, a été l’objet de nombreux perfectionnements. Elle a souvent emprunté le se- cours des roues dentées, qui furent, dit-on, connues d'Aristote, et l’on connaît des horloges d’eau fort compliquées, telle celle qui fut envoyée en hom- mage à Charlemagne par Haroun-al-Raschid. Mais l'horloge mécanique proprement dite, à poids et à régulateur, paraît bien être une inven- tion tout à fait moderne. Bien qu'on ait essayé d'en faire honneur au pape Silvestre Il, qui vivait à la fin du x° siècle, ou même à l’archidiacre Pacificus de Vérone, de cent cinquante ans plus ancien, on ne trouve, en réalité, pas d’horloges à poids et à régulateur avant le x1v° siècle. Et il serait bien surprenant qu'une découverte aussi mémorable et aussi utile fût restée trois siècles durant sans la moindre application, alors surtout que la période comprise entre 1370 et 1420 à vu une véritable floraison d’horloges mécaniques s'épanouissant de lous côtés. Dans l’état actuel de nos connaissances, il paraît exact de fixer aux environs de 1350 l'apparition des premières horloges mécaniques et de recon- naître que leur inventeur (ou leurs inventeurs) nous est encore absolument inconnu *. La première horloge publique connue en France est la fameuse horloge du Palais de Justice, que Charles V fit construire par l'artiste allemand Henri de Vic, en 1370. Cette horloge existait en- core dans son état primitif au commencement du xvin® siècle, puisque Julien Le Roy en a donné la description et le plan à cette époque. Si Charles V crut devoir faire appel aux lumières ! On a dit, d'après Huet, évêque d'Avranches, que Caen possédait une horloge publique en 1314, parce que, sur un pont de cette ville, se trouvait une cloche portant l’inscrip- tion suivante : « Puisque la Ville ainsi me loge « Sur ce pont pour servir d'auloge, « Je ferai les heures ouir « Pour le commun peuple esjouir. « Beaumont m'a faict, 1314, » Non seulement il serait hasardé d'affirmer qu'il y avait pour actionner cette cloche une horloge mécanique, mais on pourrait même conclure tout le contraire. Si, en effet, la cloche de Beaumont devait servir d'horloge, c'est qu'il n'existait pas d'horloge. chronométriques d'Henri de Vic, c'est que cet artiste avait déjà fait ses preuves avant 1370. IL serait toutefois téméraire de conclure de ce fait que la France fût alors dépourvue d'horlogers. En tout cas, dix ans après, elle en possédait d'habiles. C'est, en effet, par Jean Jouvance que Charles V fit construire, en 1380, l'horloge de son château de Montargis. En 1378, la ville de Lille possédait une horloge publique, puisque ses comptes font à cette date mention d'une somme payée à Maistre Pierre Demmilleville, fèvre, pour se poursongnier et appointier le orloge de la Ville. En 1379, la ville de Troyes faisait réparer son horloge par De Saint Marc Pierron, demorant à Chalon. Lorsque le due de Bourgogne fit transporter à Dijon, en 1382, l'horloge à jaquemarts de la ville de Courtrai, il est certain que cette horloge existait depuis plu- sieurs années déjà. D autre part, il semble assez difficile d'admettre que la fameuse horloge planétaire de Jacques de Dondis, exécutée en 1344 à Padoue, et qui de- manda, dit-on, seize ans de travail à son inventeur et au constructeur, ait été une horloge mécanique avec régulateur, dans le sens que nous attachons à cette expression. Philippe de Maizières, dans le Songe du Viel Pélerin, dit, en effet, que cette ma- chine comportait une multitude de roues qui ne se pourraient nombrer bonnement sans défaire lins- trument, et il ajoute qu'elle était cependant gou- vernée par un seul contrepoids. Or, si nous em jugeons par ce que nous savons de la construction des roues d'horloge au xiv° siècle et les renseigne- ments que nous a laissés à leur sujet Julien Le Roy, ce poids aurait dû être fantastiquement lourd ‘! Il nous parait, en tout cas, rationnel de situer aux environs de l’an 1350 l'apparition des pre- mières horloges mécaniques proprement dites. II. — LES PREMIERS PAS. Pendant trois siècles, les horloges de tour se construisirent sur les mêmes principes. La son- nerie, limitée aux heures dans les toutes premières. années, n'avait pas tardé à s'étendre aux quarts. On attribue la construction de la première horloge à quarts à Jehan de Félains, qui l’établit, en 1389, pour la ville de Rouen. Cette horloge existe encore aujourd'hui à peine modifiée dans la tour dite du 1 L'horloge du Palais, qui n'avait cependant que trois roues au rouage de sonnerie, avait besoin d'un poids de 1.500 livres! - LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE 115 Gros Horloge. Elle a été restaurée, il y a quelques années, par la maison Chateau frères, de Paris. L'organe régulateur des mouvements fut, jus- qu'aux dernières années du xvn° siècle, l'échappe- ment dit à roue de rencontre que l'on voit encore fréquemment dans les montres anciennes. La roue laillée de champ et en rochet donnait l'impulsion alternativement aux deux palettes de la verge, dont le balancier, portant le nom de /oliot, était cons- tilué par une tringle dentée sur les dents de laquelle pouvaient se mouvoir deux petits poids appelés régules et servant à régler l'horloge à l'avance ou au retard. Les rouages étaient disposés en hauteur, ce qui à fait donner à ces horloges anciennes le nom de verticales, et dans de fortes cages de fer. Dans son 7raité d'Horlogerie, Moinet a donné, d’après Julien Leroy, le dessin du mécanisme et du régulateur à foliot de l’ancienne horloge du Palais. L'application du pendule à l'horlogerie fut consé- cutive aux travaux de Huyghens, dont les premiers remontent à 1657, année de la publication de son premier mémoire, écrit en hollandais. Mais ce n'est guère qu'après la publication, en 1673, du De Horologio oscillatorio que le pendule commença effectivement à remplacer le vieux régulateur. Dans Ja première moitié du xvin° siècle, une importante modification fut apportée à la cons- truction des horloges publiques, qui devinrent horizontales. La cage incommode des mouvements verticaux fut réduite à un simple cadre, et les rouages disposés côte à côte purent désormais être démontés séparément, ce qui facilita beaucoup l'entretien. Les arbres ne tardèrent pas à rouler dans des paliers mobiles en bronze qui améliorèrent encore le rendement mécanique. Julien Le Roy parait être le premier qui fit des horloges horizontales. Il décrivit leurs avantages dans l'édition qu'il donna, en 1737, de la ÆRégle artificielle du temps, de son ami Henri Sully. Quatre ans après, Thiout, dans son Traité d'Horlo- gerie, parlait des horloges horizontales qu'il attri- buait à un autre horloger, Roussel. Quoi qu'il en soit, la forme horizontale est de- venue la forme définitive des horloges publiques. Les premiers mécanismes d’horlogerie avaient des roues taillées à la main de manière fort impar- faite. Les résistances étaient énormes et les poids monstrueux. 300 kilogs sur un mouvement, 500 ki- logs sur une sonnerie étaient courants. Et les rouages débitaient de la corde au point que, dans les premiers temps, il fallait remonter à grand renfort de musele plusieurs fois par jour. Au cours du xviu siècle, l'horlogerie francaise, qui, jusque-là, avait été sensiblement inférieure à l'horlogerie anglaise, prit définitivement le dessus. Les Le Roy, les Lepaute, établirent des mécanismes extrêmement soignés et qui pourraient servir de modèle à beaucoup de contemporains. C'est dans les premières années de ce beau siècle horloger que furent imaginées et construites les premières machines à diviser et à fendre les roues. Le maître mécanicien Pierre Fardoil a le premier appliqué, en 1715, la vis tangente à la division du cercle. IT. — D£& L'HORLOGE À LA MONTRE. — LES PRINCIPES DE LA CHRONOMÉTRIE. Toutes les branches de l'horlogerie firent, dans ce xvin° siècle, de merveilleux progrès, aussi bien que l'horlogerie monumentale, dont elles sont d’ailleurs une simple réduction. Aussitôt que les fêvres eurent mis sur pied leurs volumineuses et pesantes machines, ils s'ingéniè- rent à en diminuer les dimensions afin de les faire pénétrer dans l'intérieur des habitations particu- lières. Le régulateur, la pendule proprement dite, l'horloge de table et la montre marquent les étapes de ces diminutions successives. C'est en 1500 que les historiens de l'horlogerie placent la date appro- ximative de l'apparition de la montre proprement dite, qui, à vrai dire, ne constitue pas une inven- tion, ses organes étant, pièce pour pièce, les mêmes que ceux des grosses horloges, à la grandeur près. Les premières montres, que l’on dit originaires de Nurenberg et œuvre de l'Allemand Peter Hein- lein, à qui l'on vient récemment là-bas d'élever un monument commémoratif, avaient comme régula- teur le foliot et la roue de rencontre comme la grande machine d'Henri de Vic. Comme force motrice, ils utilisaient le ressort, antérieurement connu. Ces montres, gros cylindres, puis masses ova- laires, ne donnaient naturellement que des heures fort approximatives. Elles ne commencèrent à prendre un peu de justesse qu'avec l'invention de la fusée. Organe compensateur de l'inégalité de tension du ressort, la fusée a franchi sans encombre les quatre siècles qui nous séparent de son intro- duëtion dans les pièces de petit format et, si elle à * disparu des montres proprement dites avec Lépine, elle est restée, bravant tous les assauts, à sa place dans les chronomètres de marine. Nous ne con- naissons malheureusement pas le nom de l’inven- teur de cette pièce capitale, sur laquelle on enrou- lait primitivement une corde à boyau. Nous savons seulement que, vers 1588, un Genevois du nom de Gruet‘ imagina de remplacer cette corde à boyau par la chaine métallique. 1 D'autres le nomment Clouet. LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE Lorsque, en 1674, Huyghens eut introduit dans les pièces portatives un nouvel élément de précision avec le spiral réglant, la montre fit en avant un pas important. Ce progrès fut complété par les géniales découvertes de Pierre Le Roy, /e plus illustre des horlogers français", qui posa vers 1750 les vrais principes de la chronométrie moderne. Fils ainé de Julien Le Roy, lui-même horloger éminent, Pierre Le Roy imagina en 1748 le premier échappement libre, celui-là même dont quelques perfectionnements et modifications ont fait l'échap- pement encore en usage dans nos chronomètres de marine. Il en fit une application à sa montre marine terminée en 1766. Berthoud chercha en vain à lui ravir l'honneur de cette importante découverte *. En 1766, il formula une autre découverte, celle de l'isochronisme du spiral réglant. Noici ses propres expressions : « Il y a, dans tout ressort d'une étendue suffisante, une certaine longueur où toutes les vibrations, grandes ou petites, sont iso- chrones. Cette longueur trouvée, si vous raccour- cissez ce ressort, les grandes vibrations seront plus promptes que les petites. Si, au contraire, vous l’allongez, les petits arcs s’achèveront en moins de temps que les grands. » Une conséquence de cette découverte se trouva être tout naturellement qu'une fois l’isochronisme d'un spiral obtenu, on ne devait point, pour com- penser les effets de la chaleur et du froid sur la régulation des montres, agir directement sur ce spiral pour en modifier la longueur, comme le faisait précisément Harrison, le champion de la chronométrie de marine anglaise. La logique de celte conséquence amena Pierre Le Roy à imaginer la compensation par le balancier lui-même et à créer des balanciers à lame ou serge bimétallique, coupée et garnie de masses. Il utilisa même les vis réglantes. C'est ainsi que les trois grands principes de la chronométrie moderne de précision : la liberté de léchappement, Visochronisme du spiral et la com- pensation du balancier se trouvent avoir été for- mulés et appliqués incontestablement par le même horloger, un horloger bien francais, fils lui-même d'un autre horloger français à qui les horloges publiques doivent leur forme actuelle. Pierre Le Roy mourut en 1785 à l’âge de soixante- huit ans, et la plupart des horlogers français ignorent les services qu'il a rendus à leur art! IV. — LE RÉGIME DES ANCIENS STATUTS. Depuis le commencement du xvi° siècle, les hor- I! ! Et probablement « de tous les horlogers ». ? Les Mémoires de FAcadémie des Sciences pour 1718 consacrent d’une manière irréfutable cette découverte. logers formaient en France une communauté spé- ciale dotée de statuts par François 1%. Il paraît difficile de ne pas attribuer à cette organisation, malgré tous les défauts qui s’y glissèrent, une part importante dans le maintien des bonnes traditions qui aboutirent à la magnifique floraison de l'horlo- gerie scientifique au xvir° siècle. Sans ces statuts, qui maintenaient en dehors de la communauté hor- logère, sauf quelques exceptions, la foule des inca- pables et des marchands qui encombrent aujour- d’hui cette profession, il est probable que les grands artistes comme les Le Roy, les Berthoud, n'auraient pu suivre les nombreuses expériences auxquelles ils se livrèrent au profit général et qui démandaient des dépenses souvent considérables. La profession d’horloger est, en effet, tout à fait spéciale. Celui qui veut être vraiment digne de ce titre doit réunir à l'habileté manuelle un bagage sérieux de connaissances techniques et scienti- fiques. Autrefois, il lui fallait encore par-dessus le marché être un artiste. Ecoutons ce que disait de lui Pierre Dubois en 1858’ : « Les rouages ne se faisaient pas alors comme on les fait aujourd'hui avec des découpoirs, des scies mécaniques, des laminoirs et autres machines très commodes. On ne trouvait pas non plus comme à présent des calibres ou plans de montres et d'horloges tout préparés, des échappements prêts à mettre en action. Chaque ouvrier suivait sa propre inspira- tion; il tracait son plan sans s'occuper de celui des autres, souvent même sans vouloir se souvenir de ceux qu'il avait faits précédemment, car il aurait été honteux de se copier servilement, et à plus forte raison de copier les œuvres de ses émules ou de ses confrères. L'horloger tracait donc un plan de montre ou d'horloge, puis il forgeait ou faisait forger par ses apprentis les plalines de cuivre ou d'acier et les autres pièces accessoires : il leur donnait avec le tour ou la lime la forme voulue, creusait le barillet ou tambour propre à loger le ressort moteur, taillait les pas de la fusée pour recevoir la corde à boyau, fendait les dents des roues et des pignons, etc. L'échappement, qui est l'organe le plus délicat et le plus important de la machine, demandait des soins tout particuliers, car de sa bonne ou mauvaise construction dépend la régularité de la marche du rouage. Après ce travail venait celui de la partie décorative du mouvement, qui comprenait la gravure et la ciselure du coq, des piliers, de la potence, de la contre-potence, du porte-guide-chaine, ete., puis enfin la dorure des pièces de cuivre et le polissage de celles d'acier. Les ! La collection archéologique du prince Pierre Soltykoff : Horlogerie. LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE 117 organes du réveil-matin, de la sonnerie se faisaient de la même manière, loujours à la main, et moti- vaient une augmentation de gravures, de cise- lures, etc. Les boîtes de formes diverses étaient ouvrées avec le goût le plus exquis... » Ce tableau de la fabrication est absolument exact. Les outils à la disposition des horlogers étaient, on peut le dire, fort rudimentaires. On peut s'en rendre compte en consultant les 66 planches d'horlogerie de l'Æney- clopédie de Diderot et d'Alembert, ou celles du très intéressant — quoique bien mal écrit — Traité de Thiout. La machine à diviser et à fendre les roues était la machine la plus compliquée dont se servait l'artiste. Mais, en revanche, tout cela était d’une méticuleuse propreté, astiqué avec un soin minu- tieux et presque luxueux. V. — L'APPARITION DE L'HORLOGERIE MÉCANIQUE. C'est avec ces moyens rudimentaires que les hor- logers du xvin‘ siècle produisirent non seulement des grosses horloges et des montres, mais encore une quantité de pièces compliquées et de régula- teurs merveilleux dont nous pouvons admirer des échantillons à notre Conservatoire des Arts et Métiers et dans presque tous nos musées. Mais, dans ces conditions, il était impossible de produire beaucoup et surtout de produire des méca- nismes à un prix abordable pour le commun des mortels. C'est encore à un Français qu'est due l'initiative de la fabrication des montres et des pendules par procédès mécaniques. Ce Francais, c'est Frédéric Japy, dont le génie, grâce à sa ténacité et à sa patience, créa, avec les moyens les plus faibles, la première usine horlogère, usine dont la prospérité n’a fait que s'accroîitre jusqu'à nos jours. Frédéric Japy, plus heureux que Palissy, auquel on pourrait le comparer, eut la satisfaction de voir se développer son œuvre sous ses yeux. En 1787, il était déjà suffisamment connu pour que le grand- duc Paul de Russie fit une tentative auprès de lui en vue de lui faire transporter sa fabrique à Saint- Pétersbourg. Il est le véritable créateur de l'horlogerie dite par procédés mécaniques, qui à abouti à l’inter- changeabilité des pièces, que les machines améri- caines ont amené depuis à une si haute perfection. Le Journal des Arts et Manufactures, de ger- minal an Il, signalait l'usine Japy comme pouvant produire 1.000 à 4.200 mouvements par décade. Il rappelait que cette fabrique, fondée en 1770, occu- pait 400 ouvriers et que Japy était lui-même l’in- venteur de plusieurs machines intéressantes. Parmi ces machines, nous citerons seulement les emporte- pièces à roues et à balanciers, les outils à percer droit et à fendre les Lêles de vis. Voici une preuve assez curieuse de l'importance des premiers résultats obtenus par Frédérie Japy dans la voie où il était entré. Nous venons de voir qu'il produisait 1.000 à 41.200 par dizaine de jours. Cela représente en fin d'année un mouvements total de 40.000 mouvements. C'est exactement dix fois ce que la Manufacture de Ferney, installée en 1730 par Voltaire sous la direction de Lépine, put produire au maximum dans le même temps avec deux fois plus d'ouvriers. VI. — L'HORLOGERIE MODERNE DE CLOCUHER. L'horlogerie de mentale, constitue clocher, ou horlogerie monu- une branche un peu à part de l'horlogerie générale. Elle se rapproche davantage de la grosse mécanique, et les horlogers propre- ment dits y sont souvent d'une parfaite incompé- tence, bien que les principes généraux soient les mêmes que ceux qui régissent la montre, le régu- lateur ou la pendule. Mais les pièces sont trop grosses pour des gens habitués à travailler à l’éta- bli, assis, et la loupe à l'œil. La grosse horlogerie ne peut d’ailleurs pas se fabriquer en séries considérables comme les mon- tres et les pendules. La considération directrice de la puissance d’un mouvement d'horlogerie est la force des cloches sur lesquelles il doit faire frapper des marteaux de poids proportionnés. Pour frapper convenablement sur une eloche de 3.000 kilogs et l'utiliser au mieux, il faut un mouvement énorme. Pour frap- per sur une cloche de 15 kilogs, un tout petit méca- nisme sera suffisant. Dans la pratique, chaque constructeur fabrique un certain nombre de types numérotés, d’après la grandeur des roues chargées d'opérer le soulèvement des queues de marteaux. Chacun de ces types est capable de frapper à peu près normalement sur les cloches de poids compris entre deux limites déterminées. On comprend que, si un fabricant possède, par exemple, dix types différents, il ne peut avoir en magasin un nombre considérable de chacun de ces types! La physionomie générale des horloges ordinaires de elocher est celle imaginée par Julien Le Roy. Les bâtis sont généralement en fonte, et les roues en cuivre ou en laiton, les pignons en acier. Il y a cependant des constructeurs qui établissent des horloges avec toutes roues en fonte. Elles sont un peu moins chères. Enfin, il existe une fabrication mixte dans laquelle les rouages de sonnerie, les plus gros, sont en fonte et les rouages de mouve- ment, les plus délicats, en cuivre. Les rouages de cuivre avec pignons d'acier A18 LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE taillés sont évidemment plus solides et plus con- lortables que ceux de fonte. Certains constructeurs préconisent pour la fabrication l'emploi du cuivre rouge, plus solide que le laiton, appelé tout simple- ment cuivre par nombre de personnes. Le cuivre rouge n'a aucun avantage sur le laiton, lorsque ce dernier à été préalablement travaillé et écroui. Un laiton bien travaillé, martelé et écroui, peut devenir aussi dur que l'acier. Fig. 1. — Une horloge de luxe moderne : L'horloge de l'Hôtel de Ville de Paris, par Henry En tout cas, l'effort du construeteur doit porter sur la réduction au minimum du poids moteur, le plus grand ennemi de la durée des mécanismes quand ceux-ci sont convenablement abrités contre les intempéries. C'est déjà sur ce point que Julien Le Roy appelait l'attention des horlogers dans les Mémoires lus à la Société des Arts, et imprimés à la suite de la Règle artificielle du temps de son ami Sully. VII. — L'HORLOGERIE MONSTRE. Dans les conditions où se présente la fabrication de la grosse horlogerie mécanique, on comprend qu'elle ne nécessite pas d'outillage spécial. On le comprendra mieux encore lorsque nous aurons donné quelques chiffres relatifs aux dimensions que peuvent atteindre les grandes horloges. L'église Saint-Gervais, à Avranches, possède une horloge construite par M. Gourdin, de Mayet. Elle mesure 4,15 de longueur, 1,90 de largeur, et 2,40 de hauteur. Le poids des mécanismes est de 2.000 kilogs. Elle a quatre corps de rouages, un Lepaute. pour les quarts, et le dernier pour un Carillon de 23 cloches. Les heures sont frappées sur un bour- don de 6.500 kilogs. La basilique d'Albert a été dotée par M. Lussault d'une horloge monumentale dont les heures sont frappées sur un bourdon de 7.500 kilogs par un marteau de 150 kilogs. À Rennes, enfin, l'arrière-grand-père de M. Gour- din à installé une horloge dont les chevilles sont chargées de lever un marteau d'heure de 200 kilogs. De 1889 à 1900, on à pu voir à la Galerie des Machines une horloge également monstrueuse, élablie par la maison Chateau frères, mesurant LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE 119 3 mètres de longueur sur 2,40 de hauteur et dont | de Courtrai après la bataille qui lui livra leur ville les roues de chevilles, chargées d'opérer le soulève- | en 1382. Ce sont deux grossiers personnages fai S: $ ages fai- ment des leviers des marteaux, mesuraient 61 cen- | sant simulacre de frapper sur les cloches placé: à $ S acees il timètres de diamètre, avec une épaisseur de 6 cen- tinètres. Le record de la grosse horlogerie paraît bien ap- partenir aux colossales horloges jumelles du pa- lais de Mafra (Portugal), construites sur l'ordre du roi Jean V. Les deux mar- teaux d'heure pèsent cha- cun 280 kilogs. Et, en ad- ditionnant ensemble les poids des mécanismes el des 114 cloches installées dans les tours pour servir aux sonneries horaires el à celles des carillons, on arrive au chiffre fantas- tique de 217.000 kilogs de métal ! On concoit qu'en face de pareils monuments el de pareilles machines, l'horloger qui travaille sur la montre et la pendule hésite à reconnaitre ces géants pour les ainés des pygmées mécaniques, 0b- jets journaliers de ses in- vestigations. NIII. — LES HORLOGES COMPLIQUÉES : AUTOMATISME, CARILLONNAGE, ETC. Il arrive fréquemment que les horloges monu- mentales sont accompa- gnées de complications. La première qui parait leur avoir été ajoutée — elle est, on peut le dire, contemporaine de l’appa- rilion de l’horloge méca- nique — consiste dans les automates ou jaque- marts, pour la jouissance f TR n C1 DLTOUCHE i 9 T : + Ë pe Fig. 2. — Une belle horloge moderne : L'horloge du Conservatoire des Arts et Métiers, construite par Détouche. — Le grand cadran est à 55 mètres du mécanisme; le poids qui entretient la marche du pendule est de 50 grammes. e l'œil. La seconde réside dans le carillon, chargé | leur portée. Un serrurier dijonnais, nommé Saunois, de réjouir l'oreille. leur donna un enfant pour frapper les quarts. Parmi LE plus célèbres des automates, figurent Le mécanisme de ces jacquemarts n’est pas plus ceux de l'horloge de Dijon, de cette horloge que | compliqué que celui des marionnettes. Il se réduit le duc Philippe de Bourgogne enleva aux habitants | à un jeu de tirages. 420 LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE Il en va différemment des automates, parfois fort compliqués, que l’on rencontre dans certaines hor- loges astronomiques comme celles de Lyon, de Strasbourg, de Besancon, de Beauvais. La seconde complication, par ordre chronolo- gique, qui ait été adaptée aux grandes horloges, réside dans les carillons. Le carillon consiste essentiellement en un rouage supplémentaire fai- sant tourner un gros cylindre garni de picots, comme ceux des boîtes à musique. Ces picots déter- minent le soulèvement de cloches correspondantes souvent énormes. À des heures déterminées, par- fois tous les quarts, le mouvement proprement dit de l'horloge déclanche le rouage de carillon. Fré- quemment, il est ajouté à ce système mécanique un clavier à main. Dans le principe, ces claviers furent très rudimentaires. C'élaient de gros leviers de bois sur lesquels le carillonneur s’évertuait à frapper à coups de poing et de pied pour jouer un air populaire. Il fallait être à la fois un virtuose et un athlète pour jouer convenablement d'un carillon comme le carillon de Bruges pendant une demi-heure ! Les carillons ont particulièrement été populaires dans les Flandres, où l’on en trouve encore un très grand nombre plus ou moins restaurés. La ville d'Alost revendique l'honneur d’avoir eu le premier carillon, et réclame l'invention du cylindre automatique en faveur d'un de ses en- fants, Barthélemy Coeke, qui aurait fait cette découverte en 1487. Dunkerque, de son côté, pré- tend avoir eu un carillonneur, et par suite un carillon dès 1476. Ces prétentions sont aussi erro- nées l’une que l’autre, et l'invention du cylindre est certainement antérieure à 1476, comme la démontré une savante étude le D° Van Doorslaer. dans J'ai relevé les notes et les poids d’un très grand nombre de carillons encore existants. J'en citerai quelques-uns des plus importants pour donner une idée de ce que sont ces systèmes colossaux. Celui à qui revient, je crois, la première place dans la classification en poids, est le double carillon du palais royal de Mafra. Il y a là deux séries de 48 cloches chacune, dont les deux plus grosses pèsent 10.000 kilogs pièce, et les deux plus petites 30 kilogs seulement. Les cylindres sont au nombre de quatre. Ils sont en bronze et mesurent 1",80 en diamètre sur 2,40 en longueur. Les poids moteurs pèsent 800 kilogs. Tout le monde connait — au moins de réputa- tion — le carillon de Bruges. Il comprend 47 cloches pesant ensemble environ 26.000 kilogs, la plus grosse atteignant presque 7.000 kilogs. Le cylindre de Bruges est célèbre. 11 mesure 2",16 de longueur sur près de 2 mètres de diamètre et son épaisseur est de 3 centimètres. Il est percé de 30,500 trous carrés. Le carillon de la tour de Saint-Germain-l'Auxer- rois, à Paris, est beaucoup moins connu, et nombre de Parisiens ignorent qu'il existe et qu'il fonc- tionne effectivement. Il a élé restauré il y a une dizaine d'années par la maison Chateau frères, et compte 38 cloches, dont la plus grosse pèse 2.000 kilogs. Cet appareil présente cette particula- rité unique d'avoir un moteur à poids spécial pour chacune de ces 38 cloches. Chacun de ces moteurs fait fonctionner quatre marteaux. La même note peut être ainsi répétée jusqu’à cinq fois par seconde. Ce carillon, dont les mécanismes ont été imaginés et exécutés par Collin, et les cloches fournies par Hildebrand, a coûté près de 200.000 francs à la Ville de Paris. Un des plus beaux carillons qui existent au monde est celui de Malines. Un grand nombre de ses 45 cloches, dont le poids total est d'environ 35.000 kilogs, dont près de 9.000 pour le gros bourdon, ont été fondues dans les ateliers de Pierre Hémony, d'Amsterdam, le roi des fondeurs de cloches, qui les fit en 1679. Pendant la belle saison, le carillonneur actuel de Malines, M. Denyn, donne des concerts très appréciés et dont le programme illustré est adressé aux amateurs de musique campanaire. Le carillon qui compte le plus de cloches — mais non pas les plus grosses — est celui de la cathé- drale de Chälons-sur-Marne. Il en à 56, dont la plus grosse pèse 2.723 kilogs et la plus petite 11 seulement. Bien que moderne — il date de 1863 — il est muni d'un clavier de l'ancien système à coups de poing, au lieu d’avoir, comme celui de Saint- Germain l’Auxerrois, un clavier genre piano à déclanchements. Aujourd'hui, on a recours de préférence à l’élec- tricité pour actionner les marteaux des eloches musicales. À titre d'échantillon, je citerai le carillon installé il y a une dizaine d'années aux Établisse- ments Dufayel par MM. Chateau frères et celui que vient de placer à l'Hôtel de Ville de Munich la maison Mannhardt. IX. — COMPLICATIONS SAVANTES. Indépendamment de ces grosses complications, on en trouve une infinité d’autres plus délicates. Les quantièmes, les lunaisons, les mouvements planétaires, les marées, les calendriers perpétuels, l'équation du temps, sans parler de la distribution électrique de l'heure et de la remise à l'heure électrique, constituent des accessoires qu'on ren- contre encore de nos jours associés ensemble, ou isolément. LÉOPOLD REVERCHON - L'horloge astronomique de la cathédrale de Besancon possède à elle seule 73 cadrans, donnant ensemble 422 indications différentes. Construile par Vérité, horloger célèbre à qui l'on doit égale- ment l'horloge de la Cathédrale de Beauvais, il y a juste cinquante ans, elle porte le mouvement jusqu'aux grands cadrans à quantièmes et à lunaison de la tour du clocher, en même temps qu'elle indique sur de petits médaillons, par d’ingénieuses combinaisons, la hauteur exacte des marées par l'élévation et l’abaissement automatique de petites lames représentant les vagues. L'horloge de Strasbourg, entièrement refondue par Schwilgué, — qui n'a conservé de l'ancienne horloge historique que le buffet, — est un des plus remarquables types de complication savante. A L'HORLOGERIE MÉCANIQUE 121 offre meubles beaucoup plus simples. Mais, en revanche, | poussée aux dernières limiles, nous des ses régulateurs astronomiques présentent de si faibles variations qu'il paraît bien difficile de les réduire encore. Les pièces dont M. Fénon a doté les observaloires sont, on peut le dire, des pièces sans défaut. X. — La PENDULE ET LE RÉVEIL. Si nous descendons l'échelle de Ja taille, nous trouvons, avant d'arriver à la montre, la pendule de cheminée, de cartel et de voyage, puis le réveil. Dans cette partie, où la vente est abondante el suivie, la fabrication mécanique s'est fortement implantée et d'importantes usines se livrent exclu- Fig. 3. — Une usine moderne de montres : La fabrique des Billodes, au Locle (Suisse) en 1910. — En bas, les anciens bâtiments. En haut, les nouveaux. titre de comparaison, nous pouvons ciler l'ancienne horloge astronomique de Saint-Jean, à Lyon, restaurée par Chateau frères en 1894. A l'encontre de celle de Strasbourg, la restauration de Lyon a conservé intégralement tout ce qui n'était pas absolument hors d'usage. Cette curieuse pièce à 100 ans d'existence. Au xvire siècle, on s'ingénia à faire marquer et même sonner aux horloges le temps vrai au lieu du temps moyen. De ce siècle qui produisit tant de merveilles datent d'innombrables horloges, régula- teurs, montres et pendules à équation. Tous les grands artistes tinrent à honneur de présenter à l'Académie au moins un type d'horloge ou de pendule à équation. Notre Conservatoire renferme de nombreux échantillons de cette époque, dans lesquels on ne sait vraiment qu'admirer davan- tage, du fini des mécanismes ou de l'élégance des enveloppes. Le xIx° siècle, qui vit sur sa fin la précision sivement à la fabrication des pièces ébauchées ou blanes, tandis que d’autres produisent les échappe- ments qui seront ensuite montés sur ces blancs garnis de leurs ressorts. La fabrication du réveil, dont les pièces sont généralement découpées, est plus concentrée que celle de la pendule, et cet article se fabrique, comme la montre, intégralement dans la même usine. Il nous vient surtout d'Allemagne, où la Forêt-Noire est peuplée de grosses usines à pendules de tous genres. La plus importante de ces usines alle- nandes est celle de Schramberg, appartenant à la firme Junghans et Haller et occupant environ 3.000 ouvriers. Les machines employées dans toutes ces usines ne présentent d'ailleurs rien de spécial : décou- poirs, perceuses, machines à diviser, à tailler, à fraiser, poinconneuses, machines à bois n'ont, en effet, pas à travailler sur le presque infiniment petit, comme dans les usines à montres. XI. — LA MONTRE MÉCANIQUE. Nous avons dit que la montre n'était pas à 22 LÉOPOLD REVERCHON — L'IORLOGERIE MÉCANIQUE déraisonnable, demander à une bonne montre de faire moins de quinze secondes d'écart en vingt- | quatre heures. Aujourd'hui les montres qu'on proprement parler une invention originale, mais appelle chronomètres de poche ou montres de l'aboutissant d'une série d'efforts ten- dant à la réduction progressive des di- mensions des ma- chines horaires pri- mitives. Jusqu'au premier quart du xix° siècle, malgré le talent des artis- tes qui la travaillè- rent et la perfection- nèrent, on ne peul pas dire qu’elle con- nuût la précision. Pour se faire une idée de ce qu'était > TTC HET) une montre en 1821, il suffit de lire les lignes suivantes qu'écrivait cette année-là, dans son Manuel chro- nométrique, le merveilleux artiste que fut Antide Janvier : « J'ai dit qu'en général une montre était bien réglée torpilleurs ne font quelquefois pas cet écart en six mois. Et ces pièces sont souvent construites par des gens qui ne connaissent rien à l'horlogerie! Et la bonne montre de Janvier vaut 5 fr. en 4910! Expliquons-nous. L'évolution de la fabrication de Ja montre,en poussant à l'extrême la divi- sion du travail el l'emploi des machi- nes-outils, à pro- duit ce résultat que, dans une grande fabrique, chaque ouvrier passe son existence à surveiller la production des mêmes pièces idendiques et interchangeables, sans avoir besoin de con- quandelle n'a- vancait ou ne retardait que d'une minute en vingt-qua- tre heures. Si elle est mé- diocre, on doit être con- tent si l'er- reur n'excède pas deux ou trois minutes. Il n’en est pas de même d’une bonne, surtout lors- qu'elle à été nettoyée nou- vellement. En ce cas, elle naître à quoi peuvent bien servir ces piè- ces, dont une montre ordi- naire ren- fermeenviron 150, La préci- sion des ou- tils est telle que toutes les mesures peu- vent être don- nées au cCin- quantième de millimètre el que,parexem- ple, un foret chargé de per- cer des trous ral 1 a = : : 5 : : x à n pourrait bien EF ig. 5.— Un atelier de mécanique dans une grande fabrique de montres. — On y cons- de 13 ou 14 aller à une de- truit les machines-outils servant à la fabrication de toutes les pièces de la montre. centièmes de mie ou un quart de minute près par jour dans l'été. Mais, en hiver, il faudrait lui passer la minute et peut-être plus dans les fortes gelées. » Ainsi donc, en 1821, on ne pouvait pas, sans être millimètre en peut faire quelquefois une dizaine de mille sans casser ! On concoit que, dans ces conditions, toute] la partie proprement mécanique de la montre peut LÉOPOLD REVERCHON étre considérée comme ayant atteint la perfection pratique. L'introduction, comme organe réglant, de l'échappement libre à ancre a, d'autre part, permis, avec les spiraux modernes si parfaitement élastiques, de réaliser facile- ment un ré- glage qui au- rait fort éton- né les Le Roy, les Berthoud, les Janvier el les Bréguet. Pour faire une idée de ce qu'est nous actuellement la fabrication mécanique de la montre, transportons- nous dans une des usines les L'HORLOGERIE MÉCANIQUE 15 et on en invente. Seulement, chaque ouvrier ne fait qu'une toute petite parcelle de travail. Et de toutes ces peliles parcelles il sort des pièces qui peuvent affronter les épreuves très dures exigées pour l'ob tention bulletins de premiere des cla sse, qui constituent en quelque sorte les Li- A: | | ; tres de no- 4] 54 blesse, les j WA parchemins d’un vrai- chronomë- tre! Voici d'a- bord l'aspect de l'usine avec ses der- niers bâti- ments : par- plus perfec- Fig. 6. — Le mécanicien calibriste d'une grande fabrique d'horlogerie. — C'est lui qui tout de l'air tionnées qui fabrique sur les dessins de l'ingénieur les étalons de toutes les pièces de la montre. et de la lu- existent pour mière. J'ai la fabrication de la bonne montre : l'usine des Bil- lodes, au Locle (fig. 3), que nous pouvons prendre comme:type puisqu'elle a remporté l’an dernier le plus éclatant suceès aux concours du vieil Obser- vatoire neufchâtelois. Dans cette usine, on pratique la fabrication inté- Fig. 7. — Presses et découpoirs pour la fabrication des pla- tines, des ponts, des cuvettes de montres. — Le métal est fourni en longs rubans aux découpoirs qui en font des rondelles et des pièces aux contours les plus divers à raison de milliers à l'heure. Les cuvettes recoivent des des balanciers leur forme générale. grale, tout comme jadis chez un des artistes dont Pierre Dubois évoquait le souvenir. On fabrique même les machines-outils(fig.5), on les perfectionne parcouru ces ateliers en plein été. On n'y est nul- lement incommodé par la chaleur. Une force motrice de 150 chevaux actionne 36 moteurs différents, qui donnent la vie à toute une forêt de grosses, de moyennes, de petites, de minuscules machines. Certaines de ces ma- chines aident ment le travail de l’hom- lui évitant simple- me en des manipulations compli- quées et en laissant libre toute son attention. D'au- tres sont semi-automa- tiques. De temps à autre, la main du surveillant intervient pour accom- plir telle ou telle ma- nœæœuvre. D’autres, enfin, auto- sont absolument matiques. On leur livre une tringle de d'acier, ou l’on fer ou charge leur magasin d'une série — Jl découpe toutes sortes de petites pièces avec préci- sion et propreté. de pièces, puis on les Fig. 8 — Ziampeur. abandonne à elles-mé- mes et elles livrent, jus- qu'à épuisement de la matière, des vis, des arbres, des pignons, des ron- delles absolument identiques. Les gravures qui accompagnent cet article et 424 LÉOPOLD REVERCHON — L'HORLOGERIE MÉCANIQUE que nous devons à l’obligeante communication de | page des plaques ou disques devant former les MM. Favre-Jacot, propriétaires de l'usine des Bil- | platines (fig. 7), sur lesquelles la plaque-mère per- lodes, nous permettront de ne pas pro- longer trop longtemps une promenade qui demanderait plusieurs journées et un volume tout entier pour en rendre compte. La pièce capitale après le bureau du chef technique, l'âme de la maison, est celle où sont réunis les calibres Lypes, pièces modèles de tout genre, les prototypes de tout ce qu'on fabrique, de tout ce dont on peut avoir à se servir (ig. 6). C'est le bureau inter- national des poids et mesures de l'usine. Chaque fois qu'on a besoin d’un de ces types pour la fabrication ou la comparaison, le préposé le délivre en échange d'un jeton qui permettra de suivre sa trace sans difficulté. Fig. 9. — Perceuses de platines. — Chacune de ces perceuses peut faire 18.000 trous dans sa journée et gagner ÿ francs. mettra de marquer la place de tous les trous dont elle- même est percée. Le laiton et le nickel sont découpés avec la plus parfaite aisance et la propreté la plus méticuleuse par des découpoirs, tandis que d’autres machines semblables découpent les ponts qui, par leur assemblage, : formeront l’autre côté de la. cage de la montre, celle qu'on voit en l’ouvrant. Platines et ponts sont livrés aux outils proprement dils. Parmi ces outils, les uns'per- ceront les trous aux places indiquées par‘ un: poin- tage préalable et aux dimensions requises; d’autres creuseront dans la masse les noyures destinées à Le plus important de ces types est la plaque-mère, qui con- stitue le calibre fon- damental de la mon- tre. C'est un disque d'acier percé de tous les trous nécessaires au passage des axes et pivots des roues el pignons constituant la montre. La plaque- mère est unique. Les ouvriers l'appellent lirmament, à cause de l'aspect qu'elle pré- sente lorsqu'on la re- garde contre le jour. Une équipe de mé- caniciens calibristes est occupée, sous la direction de l'ingé- nieur, à traduire sur l'acier toutes les in- dications données sur le papier par le bu- reau technique. L’ate- ATTINGERMS0, loger certaines piè- ces,commelebarillet, _dont l'épaisseur ren- drail trop forte celle de la montre; d'au- tres encore réduisent la platine à l'épais- seur exigée par le mi- cromètre. Les perceuses de platines, que l’on voit sur la figure 9, font des trous qui revien- nent à moins d'unsou la grosse. À ce tarif, ces dames peuvent gagner 5 franes par jour. C'est dire que chacune d'elles perce quelque chose comme 18.000trouspar jour! Dans ces trous vont se loger les extrémi- tés des axes des roues et pignons consti- tuant le mouvement, depuis le barillet qui lier des calibres est le temple de l’ordre. Les métaux em- ployés dans la fabri- cation entrent à l'u- sine sous la forme de planches, de bandes, de lames ou de tringles. La première opération consiste dans le décou- Fig. 10. — Machines automatiques à décolleter les vis, tiges, etc. = Le travail du surveillant consiste à fournir aux machines le lai- ton ou l'acier qu'elles transforment inlassablement. Telle machine produit 4.400 vis par jour; telle autre 400 tiges de pendant. renferme le ressort moteur jusqu’au ba- lancier dont les oscil- lations, parfaitement égales, permettent aux aiguilles d'indiquer l'heure avec une précision digne d'un régulateur à poids. Les roues, d’abord découpées sans dents, sont LÉOPOLD REVERCHON — ensuite embrochées par quantités variant de une à cinq douzaines et bloquées sur l'outil dont la fraise donnera automatiquement aux dentures le protil voulu. de soixante roues, chaque Sur un paquet déplacement longitudinal découpesoixante dents en ligne, chaque déplacement radial amène le paquet en position pour le tail- lage de la ligne de soixante dents sui- vantes. Lorsque le travail est fini, la ma- chine s'arrête, et on lui offre en pâture 60 nouvelles roues. Les pignons présentent une difficulté beaucoup plus grande que les roues au laillage. Ils doivent, en effet, être de bon acier. Pendant longtemps la fa- brique d'horlogerie s’est servie d'acier cannelé au profil des pignons dont elle avait besoin. Aujour- d’hui, les grandes usines taillent leurs ‘pignons comme leurs roues. Aux Billodes, l'acier arrive d'Angleterre en [tringles. Ces tringles sont découpées par une première série de machines, une seconde les taille avec rectitude, une autre les polit. Entre temps, ils ont subi la trempe qui leur permettra de durer et de remplir leurs fonctions vis-à-vis des roues de laiton ou de nickel. La trempe se fait avec une très grande pré- cision. Le courant électrique est chargé d'amener le liquide à la tempéra- ture exacte requise par l'ingénieur et il le fait avec une telle exactitude que le trempeur, sans même avoir besoin de consulter son pyromè- tre, peut déterminer, à 5° près, cette tempéra- ture à la simple inspection des ap- pareils de mesure électrique. Le pivotage est des opéra- tions les plus dé- licates de la fabri- Fig. 11. une Fig. 12. — La polisseuse de boîtes, protégé e contre la poudre impal- ation: pr'a pable du rouge à polir par un CaHOon c'est de aspirateur. lui plus encore que de la préci- sion des dentures et de l'engrènement que dépend la parfaite mobilité de l'appareil horaire enfermé dans la boîte de montre et chez lequel la faiblesse L'HORLOGERIE af ME -à tailler ‘quant des pignons pour les © à = 139 elle agit à peine sur la levure /’ombe, qui est sen- sible à la macération de la levure I. Les moisis- sures envahissent les macérations. Le poison des levures diffère des toxines ordinaires par sa vola- tilité; il traverse les bougies de porcelaine; la température de 100° le détruit. $ 2. — Champignons et insectes. Les galeries creusées dans le bois de pin par un Bostriche (Xylotretus lineatus) sont tapissées d'un Champignon chargé de formes conidiennes des types Monilia et Graphium. M. Neger! rattache ces formes au Ceratostomella Pini. Ce Champi- gnon donne au bois de pin une belle couleur bleue, ainsi qu'il ressort des recherches antérieures de M. von Schrenck. D'après M. Münch*, le bois bleu garde ses qualités économiques; peut-être est-il plus exposé à l'attaque d'autres Champignons. Sa couleur le recommande aux industries d'art. Le Ceralostomella se développe déjà dans. l'arbre vivant. Le rôle des insectes dans sa propagation mérite d'attirer l'attention. Les galles produites par un grand nombre d’es- pèces d'Asphondylia sont constamment tapissées de Champignons. M. Neger' a réussi à déterminer quelques espèces de ces Cryptogames qui se rat- tachent aux genres /homa et Macrophoma. Les larves ne souffrent pas de leur présence; souvent elles s'en nourrissent. M. Petri‘ a pu culliver un grand nombre d'espèces de Champignons et de Bac- téries qui pullulent dans les galles produites par le Phylloxera sur les feuilles de Vigne. Il espérait, comme M. P. Baccarini *, rencontrer dans le nombre quelques organismes capables d’enrayer le déve- loppement du redoutable insecte. Effectivement, on trouve quelques œufs noircis et quelques larves envahies par les filaments d’un Acremonium, d'un Hormodendron, du Cladosporium herbarum, du CI. Aphidis et de l’'Oospora ovorum, quand ils sont placés en contact avec les cultures ; mais il en reste toujours un certain nombre d'inaltérés. Il donc à présumer que les Champignons des galles de Phylloxera sont en général inoffensifs et ne détruisent que les insectes déjà malades. Cependant l’agriculture renoncé à chercher des auxiliaires parmi les Champignons insecticides. MM. Rolfs et Fawcett°, considérant que le climat humide et chaud de la Floride est éminemment favorable à leur extension, établissent esl n'a pas 1! Centralblatt f. Bakter., [2], t. XX, 1908. 2 Naturw. Zeitschr. {, Land, uw. Forstwirthschaft, t. NI, 1908. 3 Berichte deutsch. Botan. Gesellschaft, 1908. — Naturw. Zeitschr. f. d. Land u, Forstwirthschaft, &, VI, 190$, * Annales mycologici, t. VII, 1909. 5 Bull. Soc. botan. ital., 1908. 5 Florida Agr. Exp. Stat. Bull., t. XCIV, 1908. avec soin la liste des Champignons parasites des Coccides. Les Champignons tirent un profit plus certain de l'assistance des insectes, qui préparent le parasi- tisme des espèces indifférentes à la vie ou à la mort de leur substratum. Les insectes leur facilitent l'attaque des végétaux, soit en les disséminant, comme c'est le cas pour une larve rouge de Céci- domyide qui se nourrit des Champignons des rouilles et des blancs d'après M. Laubert', soit qu'ils entament les végétaux par leurs morsures ou leur succion. Dans un bois de Pins protégé par un anneau de goudron autour de chaque tronc, M. Thierman* vit les chenilles se rabattre sur les Myrtilles et amener une extension extraordinaire des Selerotinia sur ces plantes. Le Dactylopius vitis est par lui-même inoffensif pour la vigne; mais il est-suivi de divers Acariens qui rongent les petites plaies résultant de sa succion; il nuit surtout par les Champignons qu'il introduit. Selon M. Petri”, le Capnodium salicinum devient parasite de la Vigne en Sicile grâce au Dactylopius. $ 3. — Circonstances favorisant le passage du saprositisme au parasitisme. Divers Champignons lignivores s’introduisent dans les plaies produites par la taille ou par une rupture accidentelle : ce sont des parasites de blessures. L'apoplexie de la vigne, caractérisée par la mort subite d'un grand nombre de ceps dans certains vignobles, est préparée de longue date par la nécrose du bois consécutive à la pénétration, à travers les sections non goudronnées, de Champi- gnons qui, livrés à eux-mêmes, se contenteraient de bois mort. Tel est le Polyporus igniarius dans un cas rapporté par M. Ravaz*; tels sont le Poly- porus versicolor et surtout le Stereum hirsutum dans les observations de M. Vinet*. Le ARostrella Cofteæ des chancres du Caféier est aussi un para- site de blessures, selon M. F.-C. von Faber*. M. E. Münch? s'est livré à une enquête appro- fondie sur les conditions qui favorisent l'extension des Champignons de blessures dans le bois des essences forestières. Il s'est préoccupé surtout de la quantité d'air contenue dans les tissus; son absence constitue le principal obstacle au développement du mycélium. Certaines espèces se contentent d'une faible aération, sans qu'il soit prouvé qu'aucune d'elles soit franchement anaérobie; parfois les fila- ments eux-mêmes introduisent l'air à leur suite. ————_—_—_— 1 Deutsche Landwirthseh. Presse, t. XXXIV,:1907. ? Annales mycologici, t. VI, 1908. 3 Centralblatt f. Bakt., [2], t XXI, 1908. 4: Progrès agricole et viticole de Montpellier, na 45, 1908. 5 Revue de Viticulture, t. XXXIT, 1909. 6 Centralbl. f. Bakter., [2], t. XXXIH, 1909. 1 Naturw. Zeitschr. f. Land. u. Forstw.,t. VII, 1909. 40 P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE L'excès d'hydratation arrête la progression des Champignons en rendant le milieu irrespirable. Le Botrytis cinerea, véritable protée, est aussi, d'après M. Th. Wulff’, un parasite de blessures. Aux environs de Stockholm, il gagne les jeunes pousses de AÆibes aureum en pénétrant par les plaies de l'écorce. C'est encore un Botrytis qui, germant dans la goutte de liquide qui sourd des stomates aquifères, cause une maladie des feuilles de Ribes rubrum et de Ribes Grossularia. Dans la vallée de l'Elbe, selon M. Neger*, il provoque la fonte du contenu des marrons d'Inde. Le Botrytis cinerea étudié par M. Brooks * n'envahit les Laitues que si les cultures sont affaiblies par défaut d'un aliment essentiel ou si les feuilles commencent à jaunir à la suite d'une blessure. Dans un travail ultérieur, l’auteur se demande pourquoi le Botrytis pénètre dans les feuilles jaunissantes et non dans les feuilles vertes. Trois explications sont possibles : ou bien les feuilles jaunes produiraient une substance positivement chimiotropique, ou bien les feuilles vertes laisseraient diffuser à travers la cuticule des substances capables de neutraliser les poisons sécrétés par les tubes germinatifs, ou enfin le ralen- tissement de l’activité des feuilles jaunes diminue- rait la résistance mécanique des parois superti- cielles. C’est à l'expérimentation à décider laquelle des trois hypothèses est fondée. Le chimiotropisme parait bien être en jeu dans l'envahissement des feuilles de poirier par le /’hy£ losticta, étudié par M.E.-W.Schmidt*. Il est invoqué par M. Noël Bernard pour expliquer l'attraction des endophytes vers les points de passage localisés à la surface des plantules des Orchidées, soit au niveau du suspenseur, soit à la base des poils radi- caux. Dès qu’un Champignon a répondu à cet appel, le chimiotropisme disparaît ou devient négatif; la plantule ou, tout au moins, la région de passage est vaccinée; elle est réfractaire à de nouvelles inva- sions, aussi bien quand le premier occupant est un parasite dangereux que lorsqu'il est apte à favoriser le développement de la plantule. L'attraction chimique est souvent contrebalancée par la résistance mécanique opposée à la progres- sion des mycéliums par les membranes de la plante hospitalière. Dans sa remarquable thèse sur le développement des Champignons à thalle subeuti- culaire, M. Ducomet® voit le mycélium confiné définitivement ou transitoirement, soit dans l'épais- seur de la euticule, soit sous la cuticule, soit dans | 1 Arkiviür Botanik, t. VIII, 1908. 2 Tharandt. forst. Jahrbuch, t. LX, 1909. 3 Proc. Cambridge philos. Soc., t. XIV, 1907. Botany, t. XXII, 1908. 3 Zeitschr. f. Pflanzenkrankh., t. XIX, 1909. 5 Annales Se. nat. Botar., 9e s., t. 1X, 4900. 5 Thèse de la Faculté des Sciences de Paris, Rennes, 1907. — Annals of Vus re à P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE 111 l'épaisseur des assises sous-jacentes à la cuticule. La forme du thalle est sous la dépendance des obstacles qui entravent sa progression el des moyens dont il dispose pour les surmonter, en digérant les membranes et en les corrodant au voisinage de ses extrémités en voie de croissance. La corrosion est toujours accentuée au début, tandis que le mycélium progresse rapidement dans toutes les directions : c'est la phase d'exploration; puis vient la phase de prise de possession, pendant laquelle des ramificalions naissent dans les points favorables. Vient enfin la phase d'occupation géné- rale, caractérisée par le remplissage et le recouvre- ment du domaine envahi. Selon l'espèce et les cir- constances, le thalle reste diffus, donne des lames, des cordons, des stromas, des renflements coral- loïdes. La substance des membranes est loin de suflire à cet accroissement; des échanges osmo- tiques s'établissent entre le contenu des cellules sous-jacentes et les Champignons qui restent en dehors d'elles. Les conditions de la nulrilion restent essentiel- lement les mêmes quand les Champignons envoient dans les cellules végétales des sucoirs ou des fila- ments. Le proloplasme du parasite reste alors séparé du protoplasme hospitalier, non seulement par la membrane du sucoir ou du lube mycélien, mais souvent aussi par une gaine dépendant de la membrane de la cellule envahie. Le parasite n'est pas proprement intracellulaire ; il est transcellu- laire, pour me servir d'une expression que j'emploie depuis longtemps pour désigner les relations d'un Champignon avec une cellule qu'il traverse et qu'il ranconne sans jamais entrer en contact immédiat avec son protoplasme. Les excroissances de la membrane signalées en 1884 par M. Schaarschmidt dans les tubes des Vaucheria ne sont autre chose, d'après les recherches de M°° Brüllowa', que les gaines protectrices fabriquées par l'Algue contre les Champignons qui ramollissent et refoulent la membrane sans parvenir à la perforer. En dehors des conditions mécaniques et chi- miques, diverses circonstances moins exactement analysées confèrent à des Champignons générale- ment inoffensifs l'aptitude au parasitisme. Dans les expériences de M. Issatschenko *, le Sterigmalo- cysUs nigra envahit des plantes aussi variées que le Maïs, le Chou, l'Helianthus, le Tilleul, maintenues sous cloche, surtout si les feuilles sont couvertes de miellée ou aspergées d'eau légèrement sucrée. Les plantes résistent si l'atmosphère confinée contient 2 ‘/, d'acide carbonique. M. Bubak* a ———————— 1 Bolezni rastenij, Saint-Pétershourg, t. 11, 1908. ? Bolezni rasteni), Saint-Pétersbourg, t. IF, 1908. ® Zeitschr. landw. Versuchswesen Œsterreich, Wien, 1909. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 4910. attribue au Ahizopus nigricans la pourriture des hampes florales d'AJelianthus annuus en Bulgarie Pour M. F. Krüger', la maladie du pied des céréales esl causée par des Champignons variés (Leplo sphæria, Ophiobolus) pénétrant seulement dans les pieds affaiblis par le froid ou d'autres facteurs. Au nombre des influences qui, en affaiblissant la résistance de la plante, l'exposent aux attaques de faut compter l'action des parasites obligés tels que les Péronosporées. Le Æusariun Solani, qui d'ailleurs peut à lui seul, d'après MM. Wehmer, Smith, Swingle, Pethybridge, $S. Champignons généralement saprosites, il Longman”, causer la pourriture sèche de la pomme de terre, envahit, d'après Delacroix et M. Maublanc*, les tubercules des pieds épuisés par le /Aytophtora infestans. Ce sont parfois les Bactéries qui achèvent l'œuvre des mildew : tels sont les Bacilles fluorescents qui causent la pourriture humide de la pomme de terre et, d’après M. von Tubeuf*, les taches noires des radis dont le feuillage est altéré par le Peronospora pärasitica. M. Trabut * observe en Algérie une pour- riture bactérienne des têtes d'Artichauts consécu- tive à l'invasion des feuilles par un Æamularia. Ailleurs, ce sont les animaux qui préparent les voies aux Champignons. Dans les forêts humides de Gascogne, l'Armillaria mellea, au rapport de M. Ducomel”, donne le coup de grâce au Chéne- liège dont les racines sont altérées par l'Heterodera radicicola. Un Nectria envahissant les nodosités phylloxériques sous la forme Æusarium devient, selon M. L. Petri, l'insecte dans la vigne. un puissant auxiliaire de destruction des racines de la S 4. — Oscillations entre la symbiose et le parasitisme. La symbiose entre un Champignon et une plante verte, permettant aux deux organismes qui s'en- trepénètrent de vivre ensemble sans se nuire ou même en se prétant un mutuel appui, n’est pas l’'ex- pression d'une harmonie préétablie. Qu'il s'agisse des mycorhizes assurant la persistance des arbres dans les sols pauvres en nitrates ou des endophytes nécessaires à la germination et à la végétation des Orchidées humicoles, le Champignon est un para- site héréditaire devenu tolérable, puis nécessaire { Arbeiten aus d. K. biol. Anstalt 1. Land. u. t. VI, 1908. ® Journal l.inn. Soc., t. XXXIX, 1900. * Maladies parasilaires des plantes cultivées. Encyclopédie agricole. Paris, 1909. 4 Naturw. Z. f. Land. u. Forstw., t. VI, 1908. $ Bulletin agrico!e de l'Algérie et de Ja Tunisie, t. XIV, 1908. 5 Bull. mens. office Renseiïgn. agrie., t. VII, 1908. 7 Studi sul marciume delle radici nelle viti filosserate, Roma, 1908. Forstw., 10** 412 par suite des réactions qu'il a provoquées et qui ont rétabli l'équilibre entre les deux êtres affectés de modifications corrélatives. L'équilibre du sym- bion est précaire et souvent rompu aux dépens d'un des conjoints. Les circonstances extérieures peuvent réveiller l'antagonisme du Champignon et lui donner l'allure des parasites qui compromettent la santé. Les mycorhizes endotrophiques de l'Olivier, élu- diés par M. L. Petri”, sont faiblement développés, tant que la plante végète dans des conditions nor- males. IIS prennent une extension exagérée dès que l'Olivier souffre, soit de la sécheresse, soit de maladies causées par des parasites des feuilles, tels que le Stictis Panizzei. La révolte des Champignons des mycorhizes ectotrophiques explique à M. G. A. Nadson” l’anéan- tissement des chênes d’un ou deux ans dans le gouvernement d'Ekaterinoslaw. Dans les plantules malades, le Champignon de la gaine superficielle envoie des filaments dans l’intérieur des cellules sous-jacentes. Cette explication aura-l-elle un meil- leur sort que la théorie analogue formulée par M. Camora-Pestana à maladie de l'encre du Chätaignier? L'avenir nous l’apprendra. D'après M. Ducomet”, le trouble introduit dans la nutrition du Chène-liège par l’Anguillule des racines nel ces organes à la merci du Champignon des mycorhizes. M. L. Petri assigne le mème rôle au Champignon des mycorhizes endotrophiques dans les vignes phylloxérées. La prospérité des Champignons des mycorhizes par rupture d'équilibre aux dépens des arbres offre parfois un avantage économique et peut être favo- risée par la culture. C'est sur ce principe que repose l'élevage rationnel des Chênes truffiers. Les procédés préconisés par M. Zacharewicz' pour l'établissement des truffières artificielles dans le département de Vaucluse consistent à tailler les Chênes blanes et les Chênes verts, à travailler le sol par des cultures intercalaires transitoires, par propos de la des engrais chimiques, par des arrosages métho- diques, éventuellement par des amendements cal- caires ; ils ont pour effet d'amener une abondante production de truffes et d'augmenter la fertilité du Champignon, tout en réduisant le développement de la portion aérienne des arbres. Le Champignon des mycorhizes des Chènes n’ap- partient pas nécessairement au genre Tuber. Il semble que les Chènes qui ont donné des Truffes une modification recoivent de cette association 4 Jendiconti R. Accad. Lincei, t. XVII, 1908. ? Bolezni rastenij, t. WU, 4908. * Annales Ecole nat. Agric. Rennes, |. “ Revue de Viticulture, t. XXIX, 190$. IT, 1908. P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE intime qui les accoultume à vivre avec les Truffes de préférence aux autres Champignons, et que cette propriété acquise soit héréditaire. Aussi, pour faire un semis de Chènes truffiers, M. Zacharewiez recommande de semer les glands provenant d'un Chène bon producteur et ayant produit jeune. Comme toute culture onéreuse, celle des Truffes ne peut prospérer que si les profits sont assurés à celui qui en supporte les frais. M. Mattirolo * pense que les truffières artificielles ne pourront être éta- blies en Italie que si les bois truffiers sont protégés par des dispositions analogues au droit de réserve de chasse. Parmi les grands Champignons susceptibles de faire concurrence à la Truffe en formant les my- corhizes de Chênes, on peut citer le Russula emetica, le 7richoloma transmutans, le Boletus speciosus qui, d’après M. Pennington *, forment très proba- blement les mycorhizes du Chène rouge d’Amé- rique, le Scleroderma verrucosum qui, selon M. Puttemans ‘, se montre le fidèle compagnon du Chêne pédonculé, introduit d'Europe au Brésil, aux environs de Sao Paulo. M. Macchiali', ayant fail des expériences de germination sur des graines conservées depuis trente-cing ans, a obtenu un insuccès presque constant lorsqu'il les semait dans un sol stérilisé. Elles ne germent que grâce à l'assistance des Bac- téries du sol, qui suppléent à l'incapacité des vieilles graines de sécréter les enzymes nécessaires pour transformer les matériaux de réserve. L'intervention des Champignons est souverit exigée par les graines récentes, probablement par suile d'une accoutumance à un parasitisme primi- tivement accidentel. M. Brizi® publie un nouvel exemple de Champignon fatal aux graines qu'il habite, à la facon du parasite bien connu de l'Ivraie enivrante. En Italie, notamment dans les provinces de Milan et de Crémone, le Blé germe en faible proportion. Dans les grains stériles, extérieure- ment sains, on trouve un mycélium qui, lors de la germination, pénètre dans l'embryon et tue la radicelle. Les Orchidées nous offrent l'exemple classique de plantes qui ont recours à l'assistance des Cham- pignons dès leur germination. La question des rapports des Orchidées avec ces Cryplogames a fait l’objet de travaux considérables de la part de * Annali R, Acc. di Agric. di Torino, t. LI, 1908. ? Beport of the Michigan Acad. of Sc., t. X, 1908. % Revista da Sociedade Scieutilica de S. Paulo, 1907. * Bull. Sc. botan. ital., 190$. 5 Rendiconti del R. Ist. Lomb. di Sc. e Lett., [2], t. XLI, 190$. E P. VUILLEMIN — REVUE M. H. Burgefl ‘et de M. Noël Bernard”. Ces derniers se distinguent par le souci de diriger les expé- riences et de grouper les observations en vue de la solution des hautes questions biologiques; elles mérilent de nous arrêter. Chez les Orchidées ter- restres qui forment notre population indigène, la symbiose réalise un parfait équilibre, constamment nécessaire dans les conditions naturelles; les Cypri- pédiées et les Ophrydées étudiées n'ont germé qu'à la laveur d'une infestalion précoce. La végélalion se poursuit par l'activité combinée de la plante et d’une espèce déterminée d'endophyte rattachée par M. N. Bernard au genre Æhizoclonia: telle Orchidée exige le Ah. lanuginosa, telle autre le Fh. muco- roides. La plupart ont pour associé le AA. repens. Si, par aventure, la plante est envahie par un - Champignon qui ne lui convient pas, — de tels acci- dents peuvent être délerminés par l’expérimenta- + teur, soit que le semis soit mis en présence d’une ‘espèce étrangère, soit que l'espèce habituelle de - Champignon ait été modifiée par la culture, — les - deux êtres n'arrivent pas à s'accorder; l'Orchidée détruit l'envahisseur ou périt elle-même, parfois après une période de croissance excessive ou . monstrueuse; la symbiose à fait place à un anta- ! Zur Biologie der Orchideen mycorrhiza. Diss. lena, 1909. — Die Wurzelpilze der Orchideen, ihr Kultur und ihr Leben in der Pllanze. lena, Fischer, 4909. 2 La cullure des Orchidées dans ses rapports avec Hi Sym biose. Gand, 190$. — Annales Sc. nat., Bot., 9 série, L IX, 1909. — Bulletin Instilut Pasteur, &. VI, 1909. ANNUELLE DE MYCOLOGIE 143 gonisme réciproque, par suite duquel chacun des associés se comporte comme un parasite nuisible. Chez les Orchidées épiphytes, Épidendrées el Vandées, la symbiose reste imparfaite; elle esl intermittente el renouvelée chaque année par un envahissement lemporaire des racines. M. N. Ber- nard relève un curieux parallélisme entre le degré d'harmonie symbiotique et l'élévation des Orchi- dées dans la série phylogénétique admise par M. Pfizer. Chez le Bletilla hyacinthina, qui occupe dans la famille un rang des plus inférieurs, les graines peuvent germer sans Champignon; chez les Cattleyées plus évoluées, l'embryon livré à lui-même se transforme en une sphérule verte, mais ne germe pas. L'auteur attribue aux progrès de la symbiose l'apparition, chez les Orchidées, d'un protocorme aboutissant à la constitution d'un bulbe, d'une tige rampante, et finalement à une végélation franchement arborescente. Ces consta- tations, bien que limitées à la famille des Orchi- dées, conduisent M. N. Bernard à l'hypothèse que la symbiose à dû jouer un rôle considérable dans l'évolution de toutes les Phanérogames. Dans un deuxième article, nous passerons en revue les travaux qui ressortissent à la Mycologie spéciale. P. Vuillemin, lrolesseur à la Faculté de Médecine de l'Université de Naucy. BIBLIOGRAPHIE — Le ra ra ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Poinearé (Henri), Membre de l’Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Leçons de Mécanique céleste professées à la Sorbonne. Tome 11, 2 partie : Théorie de la Lune. — { vol. gr. in-8° de 137 pages. (Prix:5 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. De tous les astres appartenant au système solaire, la Lune est celui dont le mouvement est le plus difficile à étudier au point de vue mathématique. Aucun problème n'a donné autant de soucis aux astronomes et ne les à mis aux prises avec des complexités aussi grandes. Depuis Newton, les recherches poursuivies en vue de prévoir son déplacement dans l'espace ont été sans cesse s’'accumulant, les théories se sont perfectionnées sous l'effort continu d'intelligences supérieures; néanmoins, des obstacles dont l’origine est encore mystérieuse sub- sistent toujours et s'opposent à la représentation con- venable des observations. Dans l’état actuel de nos connaissances sur la constitution du système solaire, il semble que la loi de la gravitation ne puisse suftire, à elle seule, pour faire connaïtre, en fonction du temps, la position exacte de la Lune sur la voûte céleste. En fait, aux développements de la Mécanique céleste, il a été nécessaire d'adjoindre des termes empiriques notables, pour obtezir des éphémérides exactes de notre satellite. A quelle cause faut-il attribuer cette mise en échec, apparente très certainement, de la loi de Newton? Peut- ètre à des masses inconnues circulant autour du Soleil, à l’état de poussières invisibles, dans une orbite inté- rieure à celle de Mercure, masses dont Leverrier a déja dû admettre l'existence pour expliquer le mouvement du périhélie de cette planète. Quoi qu'il en soit, les efforts tentés en vue d'arriver à une explication satis- faisante du mouvement de la Lune ont fait éclore des théories dont la perfection ne semble guère pouvoir être dépassée désormais. Les plus importantes sont celles de Hansen, de Delaunay et de Brown. Dans la méthode de Hansen, les coefficients des développements qui interviennent dans le calcul des positions de notre satellite ne sont pas représentés par des expressions algébriques. Hansen s'est proposé d'en obtenir directement les valeurs numériques, en par- tant des éléments connus de l'orbite lunaire. Il y est parvenu, grâce à une rare puissance de calcul; ses tables sont, d'ailleurs, encore employées à notre époque. La méthode de Delaunay est, au contraire, purement analytique. Tous les coefficients sont exprimés par des séries algébriques ; aussi les formules ne sont-elles pas, en principe, uniquement applicables à la Lune comme celles de Hansen. Malheureusement, cette méthode, si remarquable au point de vue théorique, présente pratiquement l'inconvénient d'exiger le calcul d'un nombre considérable de termes, à cause de la len- teur de la convergence de certaines séries procédant suivant les puissances du rapport des moyens mouve- ments de la Terre et de la Lune. Cette difficulté est évitée dans la méthode de Brown. Cet astronome, s'inspirant après Hill d'une idée émise autrefois par Euler, rapporte la Lune à des axes mobiles entraînés avecune vitesse de rotation uniforme, dépendant du moyen mouvement de notre satellite, parfaitement déterminé par l'observation. Tous les développements convergent ainsi suffisamment vite; aussi l’approximation peut-elle être poussée notable- ment plus loin que par les autres méthodes. ET INDEX C'est à l'exposition de la théorie si parfaite de Brown que M. Poincaré consacre presque entièrementla seconde partie du tome II de ses Leçons de Mécanique céleste. Il étudie en détail la grande inégalité lunaire connue sous le nom de variation, le mouvement du périgée, celui du nœud et la détermination des termes d'ordre supérieur. Puis il expose comment on arriverait, en suivant une voie qui lui est propre, à obtenir le développement analytique des coefficients, en fonction du rapport des moyens mouvements de la Terre et de la Lune, plus simplement que ne l’a fait Delaunay. Pour terminer, M. Poincaré consacre quelques pages à la détermination des accélérations séculaires et à celle des perturbations de la Lune causées par les planètes, sujet qui a été très complètement étudié par M. Radau. Comme tous les livres de M. Poincaré, cet ouvrage est remarquable par une concision qui n'exclut d'ailleurs aucunement la clarté. On ne saurait dessiner, mieux que ne l’a fait l'illustre auteur, les traits généraux de la méthode de Brown, qui est appelée, dans un avenir prochain, à supplanter toutes les autres théories de la Lune. Maurice Hauy, Membre de l'Académie des Sciences, Astronome à l'Observatoire de Paris. Micciollo (A... — Qualités que devront posséder les aéroplanes et les hélicoptères de l'avenir. — 1 vol. 1u-8° de 196 pages. (Prix : 3 fr. 50.) L. Vivien, éditeur, Paris, 1910. Dans une brochure antérieure, divigeable plus lourd que l'air, l'auteur à préconisé un système d'hélicoptère qu'il regarde comme le meilleur pour arriver à la solution pratique du problème de la navigation aérienne. Désireux de rencontrer « un homme à la fois riche et intelligent » qui fera siennes ses idées, M. Micciollo reprend point par point l'exposé du système dont il a fait breveter les dispositions prin- cipales : agréables causeries où l'on rencontre, ça et là, des vues et des critiques qui ne manquent pas de jus- tesse. A. BOULANGER. 2° Sciences physiques Bouasse (H.), Professeur à la Faculté des Scrences de Toulouse. — Cours de Physique, conforme aux programmes des certilicats et de l'agrégation de Phy- sique. Tome VI: Etude des symétries. — { vol. grand in-8° de 424 pages. (Prix : 14 fr.) Ck. Dela- grave, éditeur. Paris, 1910. Le rôle important que jouent les questions de symé- tie et de dissymétrie dans les propriétés de la matière et dans les manifestations physiques qui en dérivent ne pouvait qu'engager M. Bouasse à condenser dans un volume spécial de son Cours de Physique leur étude générale, au lieu de la disséminer dans les divers cha- pitres particuliers que ces questions intéressent direc- tement. Cette étude est divisée en deux parties bien distinctes. La première, tout à fait abstraite, envisage les symé- Lries à un point de vue purement géométrique ; elle est destinée à fournir une base solide sur laquelle pourront s'appuyer plus tard les discussions relatives à la struc- ture physique des divers milieux. Elle comprend l'examen détaillé des diverses opérations susceptibles d'être effectuées sur les figures pour préciser la notion de symétrie, puis l'étude des polyèdres symétriques, intitulée Aëéronel BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 145 des réseaux, des groupes de déplacement, pour aboutir enfin à la symétrie des systèmes cristallins. La deuxième partie du volume transporte dans le domaine de la réalité physique l’ensemble des considé- rations précédentes : elle à pour objet l« étude phy- sique des symétries ». Les premiers chapitres sont consacrés aux circons- tances de formation et d'accroissement des cristaux, el à celles de leurs propriétés qui se manifestent de la facon la plus immédiate comme conséquences des caractères de symétrie de leur structure, Après avoir exposé les particularités qui caractérisent les groupements cristallins, mâcles, etc., et les pro- priétés de polymorphisme, homéomorphisme, syncris- tallisation, l'auteur étudie les déformations homogènes (dilatation, compression, glissements..….), la polarisation électrique et magnétique, puis la conductibilité ther- mique et électrique des milieux cristallisés. La déformation des milieux cristallins, soit par voie mécanique, soit par voie thermique, à pour consé- quence la production des effets connus sous le nom de piézoélectricité et pyroélectricité. Un chapitre spécial est consacré à ces curieuses propriétés des cristaux, dans lesquelles Curie a su trouver le principe d'une méthode permettant d'obtenir une quantité connue d'électricité. C'est surtout par les phénomènes optiques, souvent si brillants, que les milieux cristallisés révèlent leur structure spéciale. C'est par l’action de ces milieux sur les rayons lumineux qu'ont été faites les découvertes fondamentales qui ont donné une base si ferme à la théorie des ondulations lumineuses. Aussi, une large place leur a-t-elle été faite. La double réfraction, la pola- risation rotatoire dans les cristaux proprement dits et dans les milieux actifs pseudo-isotropes, la polarisation rotatoire magnétique avec la symétrie correspondante du champ magnétique, sont l'objet d'une étude appro- fondie. Le volume relatif à l'étude des symétries est le dernier de ceux qui doivent constituer le Cours de Phy- sique de M. Bouasse. Le plan original adopté, le mode d'exposition tout spécial font de ce Cours de Physique un tout très homogène, entièrement différent des ouvrages connus jusqu'à présent sous le même titre. Sa publication fait le plus grand honneur à l’auteur. E. COLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin, Frick (J..Physikalische Technik. 7° édition, revue et augmentée par M. O.Lehmann, Professeur à l'Ecole technique supérieure de Carlsruhe. — Tome 11, 4'e partie. 1 vol. in-8° de 762 pages, avec 1.443 fiqures. Vieweg uud Sohn, éditeurs, Brunswick. Nous avons parlé en son temps du premier volume de cet important ouvrage. Par suite d’une circonstance fortuite, le présent article a été fort retardé, ce dont nous prions nos lecteurs et l'éditeur de nous excuser. La {'° partie du tome II est consacrée aux expé- riences d'électricité. Comme les précédents, ce volume se recommande par une documentation abondante et une illustration des plus riches. Les nombreuses figures sont très claires et, le plus souvent, peuvent suppléer à l'intelligence complète du texte, pour un lecteur qui ne posséderait pas à fond la langue alle- mande. Non seulement on y trouve la description d'une quantité d'appareils vendus par les constructeurs, mais aussi, ce qui est souvent plus précieux, beaucoup d'in- dications pratiques permettant de construire, dans un laboratoire à peu près outillé, de nombreux appareils de démonstration ou de manipulation. Je me permettrai de signaler une omission dans le chapitre des oscillations électriques, où j'ai été surpris de ne pas voir décrites les expériences sur l’arc chan- tant, pourtant fort intéressantes, et aussi de formuler une critique de détail : Page 490, est représentée une roue de Barlow, dont toute la surface est comprise dans l’entrefer de l’aimant. Ce dispositif ne me paraît pas heureux, car les courants de Foucault qui se développent dans la partie supérieure de la roue, en dehors du circuit principal, doivent contrarier la rotation. Marcez LAMOITE, Professeur adjoint 1 l'Université de Clermont-Ferrand Post (J., Professeur honoraire à l'Université de Goettinque, et Neumann (B.), Professeur à la Tecl- nische Hochschule de Darmstadt. — Traité complet. d'Analyse chimique appliquée aux essais indus- triels. — Deuxième édition française enticrement relondue, traduite d'après la troisième édition alle- mande et augmentée de nombreuses additions par MM. Fezcer (M.) et Cuenu (G.), /ngénieurs. — Tome second, deuxième fascicule : Sucre de betterave, Sucre de canne, Amidon et Fécule, Dextrine, Glu- cose. — 1 vol. in-8° de 496 pages, avec 120 figures. (Prix : 8 fr.) Hermann, éditeur. Paris, 1910. Ce nouveau fascicule comprend des monographies très complètes et très soignées, quant à la forme et quant au fond. On y trouve un certain nombre de méthodes et de tours de main très en honneur dans les fabriques allemandes et que les chimistes français auront intérêt à connaître. Les distingués traducteurs ont su, d’ailleurs, compléter le texte original par l'addi- tion de quelques méthodes françaises passées sous silence. Ils ont également ajouté un chapitre sur le sucre de canne, qui n'existe pas dans l'ouvrage alle- mand, ainsi que des documents officiels concernant les produits alimentaires sucrés. L'analyse chimique se spécialise tellement que la parenté du sucre et du glucose ne suffit plus pour que ces matières soient présentées par le même auteur. Le D' R. Frühling, en traitant le sucre de betterave, reste dans sa spécialité, comme le D' E. Parow dans la sienne en parlant du glucose. Ce sont évidemment là des conditions excellentes pour que ce livre présente des garanties d’exactitude peu ordinaires. A. Hozrarp, Docteur ès Sciences, Chef du Laboratoire central des Usines de la Ci française des Métaux, 3° Sciences naturelles Centre industriel du Brésil. — Le Brésil, ses richesses naturelles, ses industries. — Tome Ier : Introduction. Industrie extractive. Tome Il° : In- dustrie agricole et élevage. Voies et moyens de communication. Industrie manufacturière. — 2 vol. in-4° avec figures, graphiques, planches en couleurs et 1 carte. Aillaud, éditeur. Paris, 1910. Cette publication, si richement documentée et illustrée, est extraite de l'ouvrage O Brazil, suas riquezas naturaes, Suas industrias et publiée par le Service d'expansion économique du Brésil. C’est donc une œuvre de vulgarisation scientifique et économique, où l’on trouvera, aux points de vue agricole, industriel et commercial, une masse de renseignements et de statistiques, tirés des publications officielles. L'illus- tration est très abondante; on rencontrera, presque à chaque page, des photographies très caractéristiques et qui rendront de grands services dans l’enseignement de la Géographie, par exemple. La partie ethnogra- phique est la moins développée, mais il fallait s'y attendre dans un ouvrage économique avant tout. Le Brésil occupe une superficie de 8.524.776 kilo- mètres carrés, qui s'étend du 5° lat. N. au 33° lat. S. C'est un vaste plateau de 300 à 1.000 mètres d'altitude, bordé d’un bourrelet montagneux sur le versant atlan- tique oriental. L'abondance des précipitations l’a doté d'un réseau hydrographique très étendu et très puis- sant. Le climat y est des plus variés, équatorial au nord et tempéré à partir du sud de l'Etat de Sao Paulo. De 1872 à 1906, la population a plus que doublé, 746 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX passant de 9.871.341 habitants à 21.461.100. Cet accrois- sement, comme dans tous les pays neufs, est dû en partie à l'immigration, qui est loin d'atteindre, pour- tant, les chiffres des Etats-Unis et de l'Argentine. De 1881 (11.054) à 1891 (216.659), l'immigration était en croissance ; elle a décru dès lors jusqu’en 1907 (67.787), pour se relever en 1908 (95.695). De 1820 à 1907, 2.541.472 émigrants sont arrivés au Brésil, parmi lesquels on compte 1.213.167 Italiens, 634.485 Portugais, 288.646 Espagnols, 93.065 Allemands, 56.892 Autri- chiens, 54.593 Russes, 19.269 Francais, etc, La forêt brésilienne, la grande sylve équatoriale, renferme des richesses immenses et encore mal connues et peu exploitées, à l'exception du caoutchouc et du maté. Le caoutchouc est, après le café, le prin- cipal produit d'exportation; de 1827 à 1905, la produc- tion s'est élevée de 31.000 kilogs à 35.320.000; elle représente plus de la moitié de la production mondiale (65 millions de kilogs) et comprend les meilleures qualités. Le maté, qui aurait les avantages du thé sans en avoir les inconvénients, est exporté en quantités considérables dans les autres Républiques sud-améri- caines (52.000 tonnes en 1907). Cette boisson est encore à peu près totalement inconnue en Europe, où cependant son bon marché devrait attirer l’attention. On commence à peine à exploiter les immenses réserves de bois de construction, d'ébénisterie et de teinture, les arbres à cire, à huile, à tanin, à gomme, les plantes médicinales. La grande culture brésilienne est le caféier. C'est un arbre qui exige une température moyenne de 15 à 27, beaucoup de soins, pas de pluies pendant la floraison et la récolte. Il est concentré surtout dans l'Etat de Sao Paulo, puis dans celui de Rio. Tandis que la con- sommation des pays étrangers est gènée par des droits d'entrée très élevés, la production brésilienne n’a pas cessé d'augmenter, passant de 6 millions de sacs (de 60 kilogs) en 1882, à 12 millions en 1907. Il en est résulté une baisse des prix qui a provoqué une véri- table crise et que l’on a cherché à enrayer par l’expé- rience dite de la valorisation. Le- Brésil occupe le sixième rang dans le monde pour la production du coton (234.000 balles), le cin- quième rang pour le sucre de canne (275.000 tonnes) et le premier (en 1907) pour le cacao (24.528.000 kilogs). La première et la dernière de ces cultures ont devant elles un grand avenir; l’industrie cotonnière redoute toujours le manque de matière première et ses hauts prix; quant au cacaoyer, il exige beaucoup moins de main-d'æuvre et de frais que les autres cultures colo- niales, il réclame également moins de capitaux et donne actuellement de gros bénéfices. Parmi les autres cultures qui alimentent l’exporta- tion, il faut citer encore le tabac, le manioc, l'arrow- root, l'ananas et la banane. A côté de ce développe- ment intense des cultures industrielles, les cultures vivrières sont très négligées, et c'est là le point faible de la prospérité brésilienne. La culture du blé a été presque complètement abandonnée, et cependant les provinces du Sud lui sont très favorables. La produc- tion du riz et du maïs est insuffisante; celle du vin ne représente qu'une faible part des importations, malgré les encouragements de l'Etat. L'élevage n'a pas non plus l'importance qu'il lui est possible de gagner, grâce à la vaste étendue des campos. Il n'y a guère que le gros bétail qui commence à être l’objet d’une exploitation rationnelle; les charqueadas — équivalent des saladeros argentins — préparent déjà des con- serves et de la viande sèche en grande quantité. Le Brésil possède de très grandes richesses mi- uières. La production annuelle de l'or varie entre 3.500 et 4.000 kilogs (3.779 en 1907), et l'on évalue à 700.000 kilogs l'apport du Brésil depuis le commence- ment de l'extraction. Les pierres précieuses abondent, mais ce sont les diamants qui ont le plus d'impor- tance. Signalés dès 1727, ils n’ont été exploités qu’en 1844: la production a baissé depuis la découverte des champs de l'Afrique du Sud, plus riches et d'une extraction plus facile que les gisements d’alluvion bré- siliens. Le Brésil livre surtout les carbonados, dia- mants noirs recherchés pour les usages industriels. La plupart des métaux usuels ont été signalés, mais, à l'exception du cuivre (1.463 tonnes en 1907), l’exploi- tation est encore peu avancée, même pour le fer. Quant à la houille, d'importantes réserves ont été reconnues, mais l'extraction est très faible. L'industrie manufacturière s'est surtout développée depuis 1889 ; elle a bénéficié de l'élévation des droits de douane, de la hausse du change, de l’abondance même excessive du papier-monnaie et de la présence des matières premières. C'est surtout dans le district fédéral et dans l'Etat de Sao Paulo que les manufac- tures sont les plus nombreuses. Par ordre d'importance, on relève les filatures et les tissages de coton et de laine, les sucreries, les minoteries, les fonderies, les scieries, la fabrication des chaussures, des savons et bougies, les brasseries, etc. En 1907, on comptait 3.120 établissements, occupant 149.018 ouvriers et pro- duisant pour plus d’un milliard de francs. La construction des chemins de fer a débuté en 1854 et s’est développée surtout depuis 1888; la longueur exploitée dépasse aujourd'hui 47.340 kilomètres. L'Etat a racheté la plus grande partie du réseau, mais il pré- fère affermer plutôt que d'exploiter directement. De nombreux projets sont à l'étude pour étendre la péné- tration vers l'intérieur. Le Brésil travaille à l'accroissement de l'effectif de sa marine, nécessaire pour desservir une longue étendue de côtes et pour utiliser son immense réseau fluvial. De 1903 à 1907, le tonnage total des navires entrés et sortis des ports brésiliens a passé de 411 mil- lions de tonnes à 16 millions et demi, et le nombre des navires de 16.068 à 19.410. Le commerce extérieur du Brésil a suivi le dévelop- pement général. En 1907, il atteignait près de 3 mil- liards de francs (5.970 millions), dont 1.270 millions aux importations et 1.700 millions aux exportations. Les importations comprennent les produits manufac- turés les plus variés; nous n’occupons que le cinquième rang parmi les fournisseurs du Brésil, ne sachant pas profiter de l'influence intellectuelle que nous occupons dans ce grand pays de culture latine. Plus de la moitié: des exportations sont représentées par le café(897 mil- lions de francs en 1907); viennent ensuite : le caout- chouc (348 millions), les cuirs et le coton (45), le cacao, le maté et le tabac. Cette prospérité commerciale, basée sur la monoculture du café et sur la cueillette d'une plante épuisable comme le caoutchouc, exige que l'Etat brésilien, pour sauvegarder l'avenir, déve- loppe rapidement les cultures vivrières, l'élevage, base plus stable de toute économie nationale. PIERRE CLERGET, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. Viala (P.) et Vermorel (V.). — Ampélographie. — T vol. comprenant 3.200 pages de texte, 500 plan- ches en chromo, 10 planches en phototypie, 840 gra- vures noires. (Prix : 600 fr.) Masson et Cie, éditeurs, Paris, 1910. L'important ouvrage : Ampélographie, de MM. P. Viala et V. Vermorel, dont les deux derniers volumes (tomes I et VIT) viennent de paraître, est la plus com- plète et la plus luxueuse publication viticole de ces dernières années. La plupart des belles publications ampélographiques qui ont été éditées au cours du xiIx° siècle sont l’œuvre d'un seul viticulteur:; les cépages ont été décrits et étudiés, le plus souvent, d'après les collections et non dans le vignoble. Si les caractères ampélographiques sont faciles à déterminer dans une collection de vignes, un cépage ne peut être bien connu, dans ses propriétés culturales et ses produits, que par le viticulteur qui l'a observé et vinifié pendant plusieurs années dans des BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 447 ——————— plantations importantes et dans la région normale de sa culture ; la collection apporte seulement un complé- ment pour l'étude ampélographique comparée, La publication de l'Ampélographie à eu comme base cette idée première. Les vignes ont été étudiées dans les divers vignobles du monde, d’après un plan uni- forme, par des viticulteurs qui avaient une connais- sance ancienne et complète des cépages de leur région. Sur les sept volumes que comprend l'Ampélographie, cinq volumes, les tomes I à VI, sont consacrés aux monographies des cépages les plus importants des vignobles dela France et de l'Etranger. Tous les cépages d'ordre secondaire, ou d’un intérêt purement botani- que, ont été décrits dans le tome VII, dans le Dietion- naire ampélographique. Dans le tome I sont traitées toutes les questions d'Ampélographie générale : étude de la famille des Ampélidés, du genre Vitis et de ses espèces, des vignes américaines, de la biologie (mor- phologie et physiologie) de la vigne et des faits géné- raux relatifs au cépage (caractères, variations, création de variétés). Le projet de l'Ampélographie a été conçu, tel qu'il est réalisé, en 1883, il y à 27 ans; l'exécution, com- mencée en 1900, n'a été terminée qu'en 1910. I à fallu dix années pour l'édition des sept volumes in-folio qui forment cet ouvrage et qui comprennent 570 planches, 840 gravures et 3.200 pages de texte. On ne s'étonne pas que la belle impression typographique de ce livre et la complexité de Ja rédaction aient nécessité ce long délai. Massonnat (Em.), Docteur ès Sciences, Préparateur à Ja Faculté des Sciences de Lyon. — Contribution à l'étude des Pupipares. — l/1 vol. in-8° de 347 pages avec 112- figures et 2 planches. Annales de lPUni- versité de Lyon. (Prix : 10 fr.) Baillière et fils, éditeurs, Paris, 1910. Sous le titre modeste de Contribution à l'élude des Pupipares, M. E. Massonnat publie un travail fort im- portant, non seulement par les nombreux faits, très précis, qu'il apporte au sujet de ces Diptères, mais par les conséquences plus générales qu'on en déduit; la méthode rigoureuse suivie par l’auteur peut servir de type pour les travaux de ce genre. L'ouvrage est divisé en trois parties relatives à la Morphologie, à l’Anatomie et à la Systématique. Le groupe des Pupipares, créé par Latreille en 1802, réunit des Insectes ectoparasites des Mammifères et des Oiseaux, et qui doivent être rattachés aux Diptères, plus particulièrement aux Muscides. Tous leurs carac- ères morphologiques montrent les effets de l’adapta- tion à un parasitisme plus ou moins accentué : les séries obtenues par l'étude de chaque région du corps ou de chaque organe — (tête, thorax, abdomen, ailes, griffes, pièces buccales, système pileux, etc.) — sont très sensiblement parallèles. En suivant le degré crois- sant de dégradation, ce sont, à quelques interversions près, les genres ÆHippobosea, Lipoptena, Melophagus, Nycleribia, pour les parasites des Mammifères, et, pour ceux des Oiseaux, Ornitheca, Olfersia, Ornitheza, Lynchia, Ornithomya, Stenopterix et Cratærina. D'une manière générale, à mesure que l'ectopara- sitisme devient plus complet, on observe les caractères suivants : 1° Un allongement de la tête, dont la cause est moins peut-être le développement des organes de succion — le régime est identique pour tous — que l'adaptation à l'hôte lui-même : la tête s'enfonce dans le thorax et s’y abrite ; le système pileux protecteur se développe, rude ou soyeux, suivant que l'hôte est un Mammifère ou un Oiseau : l'antenne se raccourcit dans le premier cas, s’allonge dans le second. La trompe est plus longue chez les parasites des Mammifères, ayant à traverser une peau plus épaisse. 2° Le thorax subit une régression liée à celle des ailes et des muscles correspondants. Les ailes, déve- loppées chez les espèces qui volent bien, deviennent caduques (Lipoptena), où rudimentaires (Cralærina), quoique ce dernier vive sur les Oiseaux; enfin, chez le Melophagus, elles se réduisent à deux moignons transformés en organes des sens. Quant aux pattes, tout en restant des organes de locomotion, elles sont principalement des agents de fixation : celle-ci est évidemment moins pour l’insecte qui possède des ailes el qui peut se porter sur tel ou tel hôte, ou rattraper celui qu'il a quitté momentanément. Toutefois, l'article terminal du tarse possède des griffes acérées, à deux dents, dont l'importance augmente, chez les Pupipares para- sites des Mammifères, dans le même sens que la fixa- tion. Chez les parasites des Oiseaux, elles deviennent tridentées, avec de faibles variations du tarse. 3° L'abdomen subit un allongement considérable, lié au développement des organes génitaux, comme cela a souvent lieu pour les animaux parasites; il est ici accentué, chez les femelles, par la pupiparité, lorsque la larve remplit et distend l'utérus maternel. — Toute l'Anatomie microscopique est étudiée avec grand soin ; nous en retiendrons les principaux points: chez les Hippoboscidés, la trompe est un organe à structure bien définie et homogène pour tout le groupe; cette constance de structure est en rapport avec un mode de vie identique. le processus de succion du sang restant le même. L'analogie est assez complète avec les pièces buccales des Muscides, avec celte diffé- rence que les palpes maxillaires sont bien développés chez les Pupipares et servent de gaine protectrice aux autres pièces, dont l'ensemble forme une aiguille per- foratrice. Les grosses cellules péricardiales, en rapport avec les muscles alaires et le vaisseau dorsal, ne sont pas des cellules nerveuses, comme l'avait supposé Lowne pour le Calliphora : ce sont des éléments conjonctifs de soutien. Les muscles sterno-dorsaux n'existent pas dans l’imago, et les muscles dorsaux seuls suffisent à assurer le vol nécessaire à la recherche de l'hôte. — La Systématique se réduit presque uniquement à celle des Hippoboscidés, qui forment la famille la plus importante du groupe. Les Nyctiribiés, parasites des Chauves-Souris, sont uniquement étudiés au point de vue morphologique et anatomique. Quant aux Braulidés, ils sont représentés par le Braula cœæca, parasite ou plutôt commensal de lAbeille, et particulièrement des reines. C'est un type aberrant, sans doute à cause de son mode de vie spécial. Il est aptère, aveugle, bien que deux points oculaires, sans facettes et presque totalement dépourvus de pigment, attestent une très forte dégradation parasitaire; cepen- dant, l'animal se déplace avec agilité sur ses hôtes. Son principal organe des sens est constitué par des cellules bien développées à l'extrémité des antennes, relativement longues, et dont la structure montre un intermédiaire entre les Muscides et les Pupipares. Le Braula se rapproche encore de ces derniers par son thorax excessivement court, son abdomen énorme, son système pileux très développé, par sa muscula- ture pharyngienne (quoique réduite), enfin par la pré- sence d'un réservoir alimentaire, tout à fait considé- rable. En revanche, les appendices buccaux ne sont pas ceux d'un insecte piqueur — ce qui prouverait bien qu'ii est plutôt commensal que parasite véritable ; son abdomen présente, comme celui du Nycteribra, une segmentation nette : enfin, sa pupiparité n'est pas démontrée. Revenons aux Hippoboscidés ; l’auteur montre que les caractères éthologiques ne peuvent pas servir à une classification rigoureuse ; un même hôte peut avoir plusieurs parasites, tandis qu'un même parasite peut vivre sur des hôtes différents. La localisation sur un hôte déterminé ne s'observe que pour des espèces à ailes rudimentaires ou aptères, et encore n'est-elle point absolue : il n'existe, en général, qu'un hôte de prédilection. Les ailes, leur nervation, les griffes et les necessaire 418 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX a ——_—————— —————" "— ]—]—_—_—_—]—_—_—_]——]——]——"— —.—_—_——. ocelles offrent de meilleurs critériums pour la classi- fication. La question de la pupiparité est également intéres- sante, On sait aujourdhui que d'autres Diptères, entre autres le G/ossina morsitans", sont pupipares, el mème, occasionnellement, le Wusea vomitorra. La pupi- parité ne constitue donc pas un caractère, bien qu'elle ait servi à former un groupe très naturel. L'ectopara- sitisme y montre une tendance à la dégradation encore incomplète, même chez les formes les plus fixées, ce qui permet de supposer que cette adaptation est rela- livement récente. L'étendue des variations qu'on y rencontre prend dès lors comme un caractère d'actua- lité qui leur donne un intérêt spécial. Nous avons déjà dit que le travail de M. Massonnat avait une valeur particulière par la méthode employée, qui est celle d'une Biométrique rigoureuse. Les com- paraisons ne sont pas établies par de simples diffé- rences, qui ne donnent jamais que des évaluations qualitatives, insuffisantes pour établir de véritables lois, — mais par des rapports numériques, par des indices établis avec soin. Toutes les mensurations ont élé faites et contrôlées dans les mêmes conditions, sur des échantillons conservés de la même manière alcool à 70°), au moyen d'un micromètre au 4/10 de millimètre : l'observation élait faite avec une loupe binoculaire ou au microscope. Les insectes étaient divisés en lots d'après l'espèce et le sexe : l'auteur établissait, au moyen d'un grand nombre d'individus, les longueurs moyennes de cha- que espèce, L, L', L’, puis, pour chaque espèce, les dimensions moyennes des divers organes /, 4!, l', ete. De nombreux tableaux consignent les rapports ) CSS URL! longueur de l'organe k T’L’L' ou Rec - TU GS qui donnent les rap- OU ongueur du corps ne il ports moyens caractéristiques; les rapports tels que 7 sont également notés. L'ouvrage est ainsi une véritable mine de documents, non seulement pour une étude spéciale, mais pour celle des questions plus générales se rapportant aux limites des variations dans les groupes homogènes. Il serait à désirer que tous les morphologistes entrassent dans £ette voie vérilablement scientifique; ils appor- teraient ainsi de précieux matériaux pour l'étude rationnelle des questions relatives à l’évolution. C'est pour cela que, tout en regrettant peut-être que M. Massonnat n'ait point, dans ses planches, figuré tous les genres qu'il décrit (Nycteribia), et que ses dessins ne portent pas certaines indications qui eussent mis immédiatement en évidence les conclusions du texte, on peut considérer son étude si documentée comme une importante contribution, non seulement à la con- naissance des Pupipares, mais à la Biologie générale, J. ANGLAS, Docteur ès Sciences et Docteur en Médecine. 4° Sciences médicales Maurel (D' E.), Médecin principal de réserve de la Marine, Professeur à la Faculté de Médecine de Tou- louse. — Traité de l'Alimentation et de la Nutri- tion à l'état normal et pathologique. — T'ome 111. 1 vol. in-8° de 700 pages. (Prix : 44 fr.) Octave Doin et fils, éditeurs, Paris, 1910. M. Maurel poursuit dans ce volume la série de ses remarquables études sur la nutrition. Le premier cha- pitre est consacré à l'alimentation durant la grossesse : les conelusions de l'auteur reposent sur des expériences qu'il a faites chez des lapines et des cobayes;il montre que la mère fait en général, dès le début de la gros- sesse, des réserves dont elle se sert pour l'accroissement du fœtus; le supplément alimentaire indispensable à D tr Non, li: | “ E. Rousaun : La Biologie et l'Histoire des mouches Tsé-{sé. Bevue gén. des Sc., 30 novembre 1909, p. 916-923, la constitution des tissus fœtaux est très minime, de sorte que la suralimentation que beaucoup de mères s'imposent durant la grossesse est au moins inutile et souvent nuisible. L'auteur étudie ensuite, toujours sur une base expé- rimentale, l'alimentation des nourrices. {1 montre que l'augmentation de la ration doit porter principalement sur les albumines et sur les graisses, que, par suite, les deux meilleurs alimentsdesuralimentation pour la nour- rice sont le lait et les œufs. Avec 500 à 1.000 grammes de lait, la femme suilit à tous les besoins du nour- lissage. Pour la ration de travail, M. Maurel admet qu'elle est augmentée proportionnellement au travail méea- nique produit, et que le supplément doit se composer pour 8/10 au moins d'aliments hydrocarhonés, dont les meilleurs sont le riz, le pain, réuni au vin, et le sucre. A l'égard du travail intellectuel, M. Maurel, revenant sur son opinion d'autrefois, admet qu'il n'augmente pas les dépenses des albuminoïdes et des substances lernaires dans des proportions telles que l’on puisse en tenir compte. Dé ses recherches, et de celles de M. Lefèvre, l'au- teur conclut que la ration totale doit varier dans des proportions notables suivant la température du milieu ambiant, et qu'elle doit être réduite durant l'été et dans les pays chauds; il en est de même pour le besoin d'oxygène et le besoin d'eau. Sur l'action du vent, M. Maurel a fait des recherches expérimentales très intéressantes : le vent modéré augmente les dépenses de l'organisme, mais il excite en même temps l'appétit, si bien qu'en définitive il favorise l'accroissement: il n'en est plus de même avec un vent trop violent, qui fait maigrir. Plus loin, l'auteur étudie les divers aliments usuels et les modifications qu'ils subissent sous l'influence de la conservation ou de la cuisson. Il nous donne une série de renseignements pratiques sur la valeur alimentaire comparée des diverses viandes, crues on cuiles, houillies, rôties ou grillées, sur celle des ali- ments végélaux, légumes frais et légumes secs, fruits et tubercules, boissons fermentées. I y a dans ce volume une foule de renseigne- ments inédits, el un exposé très scientifique des ques. tions alimentaires primordiales. On y retrouve à chaque ligne les qualités maîtresses de l’auteur : la sincérité, l'esprit critique, la précision qui ont tou- jours présidé à ses remarquables travaux. D° MarcEL LABBÉ, Professeur agrégé à la Facullé de Médecine, Médecin des Hôpitaux de Paris. 5° Sciences diverses : Formulaire des Centraux. — 3° édition. À petit vol. in-18 de 464 pages avec nombreuses figures. Prix : 7 fr, 50). H. Dunod et E. Pinat, éditeurs, Paris, 1910. Ce petit volume donne, par ordre alphabétique de matières, le résumé des cours et projets de l'Ecole Centrale des Arts et Manufactures. Sous une forme très commode à consulter, il renferme une foule de renseignements pratiques, et il deviendra le vade- mecum indispensable aux élèves de l'Ecole et aux ingénieurs qui en sont sortis. Nansouty (Max de. — Les trucs du théâtre, du cirque et de la foire. — 1 vo/. 5-8 éeu avec 50 gra- vures.(Prix : 4 fr. 50.) A. Colin, éditeur, Paris, ÂMO. Tout le monde, aujourd'hui, s'intéresse au théâtre. Que de fois ne nous sommes-nous pas extasiés devant la splendeur d’un spectacle ou l'ingéniosité d’un truc dont nous ne pouvions saisir l'agencement? Tous ces miracles d'adresse, où la science intervient pour nous donner l'illusion et dérouter nos sens, sont expliqués. dans l’amusant livre de M. de Nansouty. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 149 ACADEMIES ET SOCIETES SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2 Mar 1910. M. le Secrétaire perpétuel annonce la mort de M. Ed. Van Beneden, Correspondant pour la Section d'Anatomie et Zoologie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, C. Guichard indique un mode, différent de celui de M. Darboux, de généra- tion des systèmes triple-orthogonaux à lignes de cour- bure sphériques dans un seul système, — M. J. Haag recherche tous les systèmes triple-orthogonaux qui correspondent à l’un quelconque des réseaux sphéri- ques pouvant servir de représentalion sphérique com- mune à toutes les surfaces d'une famille de Lamé, — M. P. E. Gau a étudié l'intégration, par la méthode de M. Darboux, des équations aux dérivées partielles du second ordre de la forme s=— a (x, y, z) p + b{x, », 2) g+c(x, y, 2). — M. A. Chatelet présente ses recher- ches sur la sommation des fractions continues arithmé- tiques. — M. Jean Chazy ajoute quelques remarques aux travaux antérieurs de M. Borel sur les équations différentielles déduites de certains invariants des formes linéaires. — M. S. Lattès à éludié la convergence des relations de récurrence, -- M. L. Lichtenstein pré- sente quelques observations sur la définition générale des fonctions analytiques. — M. E. Esclangon à observé la comète de Halley le 27 avril à l'Observatoire de Bordeaux. La partie la plus brillante du noyau était très approximativement de 7° grandeur; la forme para- bolique du contour limitant l'astre vers son sommet est maintenant très accusée. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Violle critique les conclusions négatives de M. André relatives à l'effica- cité du tir contre la grêle el estime qu'elles provien- nent de sa méthode de caleul. La statistique du Syn- dicat du Beaujolais fait ressortir, au contraire, des résultats encourageants. — M. A. Léauté démontre le théorème suivant : Lorsqu'on ferme une ligne indus- trielle souterraine au moyen d'un interrupteur de tableau sur un transformateur sans capacité, les sur- tensions et surintensités qui se produisent ont très sensiblement la même période que si la ligne était ouverte à son extrémité, — M. Eug. Bloch considère les ions de l'effet [lertz, une fois produits aux dépens des électrons qui sortent du métal éclairé, comme ramenés partiellement vers lui par la diffusion, ce qui diminue le courant qu'on peut extraire du gaz. Les formules auxquelles on est conduit concordent remar- quablement avec les résultats expérimentaux. — M. M. de Broglie montre que l'ionisation des gaz, par action mécanique de division des liquides, présente les mêmes caractères quel que soit le procédé employé et met toujours en évidence les deux catégories de liquides actifs et inactifs déjà signalées, l'activité étant peut-être liée à la présence de l’eau dans les corps qui offrent cette propriété. Quant à l'origine de l'électrisa- tion, elle se rattache à la rupture des surfaces liquides. — MM. À. Besson et L. Fournier, en soumettant à l'action de l’effluve CHCP et CGI' en présence d'H, ou CH°CI, ont obtenu deux séries de produits, les uns se rattachant à la série saturée (C*HCI° et homologues supérieurs par CHCI), les autres à la série éthylénique et différant des précédents par HCI en moins. — M. G. Dupont à séparé quelques y-glycols acétyléni- ques en leurs isomères : CCI*.CHOH.C : C.CHOH,CC, F. 135° et 1170,5-118°; C‘H5.CHOH.C : C.CHOH.C‘Hr, F. 142° et 103°-104°: C‘HY(CH*)COH.C : C.COH(CH*)C'H;, F. 1639 et 125°-127°, — MM. H. Gault et G. Thirode ont condensé l'éther y-bromodiméthylacétylacétiqu avec diverses amines secondaires, [ls ont oblenu des éthers y-diméthylaminé, Eb, 4189 sous 1# mm., el y-éthylaniliné, Eb. 189 sous 13 mm., qui, par ébulli tion avéc HCI, donnent des dérivés de la méthylisopro pylcétone. — MM. J.F. Thorpe et G. Blanc ont cons taté que l'éther dicétocamphorique de M. Komppa con tient un enchainement de 9 alomes de carbone; on ne comprend pas comment la réduction d'un tel corps peut conduire à l'acide camphorique, qui esten C', M. G. Vavon a reconnu que les pinènes x et8 donnent le même hydrure CIS; ce sont les deux seuls consti- luants de la fraction 155-1659 de l'essence de téré- benthine. L'hydrogénation des essences droites on gauches montre que le $-pinène gauche y est contenu en quantités massives. — MM. A. Arnaud et S. Posternak, en réduisant par Zn les dérivés monoiodhydriques des acides de la série stéarolique, ont obtenu : avec l'acide stéarolique, l'acide élaïdique; avec l'acide tlaririque, un nouvel acide, l'acide tarélaidique, F, 529,5; avec l'acide béhénolique, l'acide brassidique. Les dérivés monoiodhydriques existent tous sous forme de deux isomères. — MM. G. Bertrand el M. Rosenblatt on! trouvé chez les végétaux des variétés de lyrosinases dont la température mortelle est très différente, Les Lyrosinases d’origine mycologique sont les plus fra- giles; les plus stables proviennent des végélaux supé- rieurs. — M. Biéler-Chatelan a constaté que, dans les terres riches en micas, les racines tirent une partie de la potasse nécessaire de la réserve, censée inso- luble. que recèlent ces micas, ce qui rend souvent l'emploi des engrais potassiques superflu. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Sérègé a établi, par l'expérimentation sur le chien, la spécificité d'action sur le foie, sur l'acidité urinaire, sur la nutrition géné- rale, des différentes sources thermales de Vichy. — M. A. Moutier montre que la facile excitabilité de la paroi artérielle est la cause de variations dans la men- suration de la tension artérielle suivant le procédé employé de contre-pression globale ou de contre-pres- sion localisée. — MM. H. Vallée et L. Guinard onl étudié les propriétés physiologiques des précipités obtenus par l'action du sérum de cheval hyperimmun sur les bouillons de culture du bacille de Koch et les diverses tuberculines. Ces produits se montrent inof- fensifs pour l'organisme tuberculisé à doses détermi- nées. — M. L. Launoy a constaté qu'il existe toujours normalement dans la cellule hépatique du lapin adulte des corpuscules particuliers, différents des mitochon- dries, qu'il nomme corps lipoides pigmentés. — M. J. Boussac donne une interprétation tectonique du Elysch dit autochtone de la Suisse centrale et orien- tale. — M. F. Grandjean montre que le siphon des Ammonites et des Bélemnites était en phosphate de chaux chez l'animal vivant; à la paroi siphonale venaient s'attacher de minces membranes également en phosphate de chaux. Séance du 9 Mai 1910. M. J. Bosscha est élu Correspondant pour la Section de Physique. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux pré- sente ses recherches sur une classe particulière de systèmes triple-orthogonaux. — MM. A. Bernard et P. Idrac ont photographié à diverses reprises le spectre de la comète de Halley à l'Observatoire de Meudon depuis le 7 janvier. A l'origine, le cyanogène, repré- senté par la bande À — 388, dominait nettement les autres corps; puis il a été en diminuant, tandis que les 450 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES bandes des hydrocarbures augmentaient fortement, — M. Coggia transmet ses observations de la comète de Halley, faites à l'Observatoire de Marseille. — M. J. J. Landerer confirme ses recherches sur la polarisation de la lumière lunaire et montre que l'étude de la pola- risation par diffusion ne peut êlre réalisée avec succès que sur des surfaces considérables, telles que nous les offre notre satellite. 20 SCtENCES PHYSIQUES. — M. P. Pascal a fait l'analyse magnétique de quelques groupements chromopho- riques. L'existence d’une coloration marquée est presque toujours corrélative d’une structure quino- nique, au moins dans les corps à fonction oxygénée. — MM. D. Berthelot el H. Gaudechon ont étudié les effets chimiques des rayons ultra-violets sur quelques corps gazeux. L'acétylène et l'éthylène se polymérisent en donnant : le premier un corps jaune fauve, le second un liquide cireux. Le cyanogène donne du paracyanogène, l'oxygène de l'ozone. — M. P. M. Strong à examiné à l'ultramicroscope les solutions aqueuses des acides chromopolysulfuriques et de l'hydrate sulfochromique et a reconnu qu'on se trouve en présence de solutions colloïdales. — MM. V. Gri- gnard et L. Zorn ont étudié l’action du chlorure de thionyle sur les combinaisons organomagnésiennes. Avec les organomagnésiens aromatiques, il se forme des sultinones SOR*; avec les organomagnésiens ali- phatiques, on peut obtenir soit des hydrates de sulltines R'SOH, soit un sulfure à côté d'un alcool ou d’un hydrocarbure éthylénique. — M. M. Tiffeneau est par- venu à préparer des acétates vinyliques en soumettant les &-glycols primaires tertiaires à l’action de l’anhy- dride acétique : RR'COH.CH?0H —E (CH*CO)*0 — RR'C : CH(OCOCH*)+ CHCOH. La déshydratation des &-glycols bisecondaires fournit des acétones : R.CHOH.CHOH.CH* —> R.CH°CO.CH*. — M. P. Freundler, en chlorant directement l’anthranilate de méthyle et condensant le produit obtenu avec le nitrosobenzène, à obtenu l'acide chlorchenzène-azobenzoïque, un produit jaune renfermant un atome d'O en plus et de l’azoxybenzène. — M. V. Volmar, en traitant les trialcoylacétonaph- tones par AZH?Na, a obtenu une réaction de dédouble- ment; avec les isomères «, ce dédoublement s'est produit comme dans le cas des trialcoylacétophénones, landis qu'avec les isomères £ il s’est produit surtout en sens inverse. — M. C. Gerber montre qu'il existe une relation très étroite entre la présence de la lactal- bumine et de la lactoglobuline et la résistance du lait cru à la caséitication par les présures du lait bouilli. Ces deux protéines ne sont pas à proprement parler des antiprésures, mais semblent protéger la caséine contre une attaque des présures. — M. R. Combes montre que, quand les pigments anthocyaniques se forment, de l'oxygène est retenu par les organes végétaux en voie de rougissement; il y à donc à ce moment augmentation des phénomènes d'oxydation. Quand les pigments anthocyaniques disparaissent des organes, ceux-ci perdent de l'oxygène. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Marage montre que, pour augmenter l'énergie de la voix, après avoir aug- menté par des exercices respiratoires le volume d'air qui s'échappé des poumons, il faut en augmenter la pression en fortifiant les muscles de la paroi abdomi- nale et en forcant les cordes vocales à se joindre sur la ligne médiane au moyen d'exercices sur les voyelles E et EL — M. A. Dehorne a étudié la division longitudi- nale des chromosomes dans les spermatogonies de Sabellaria Sspinulosa Leuck. Elle est extrèmement précoce; elle se réalise au imoment même de la recon- stitution du noyau-fille aux dépens des chromosomes de l’anaphase; elle est intimement liée au fait de l'entrée du chromosome au réseau. — M. V. Boulet à rencontré constamment des mycorhizes endotrophes chez plusieurs arbres de la famille des Rosacées. L'endophyte paraît se comporter comme un parasite; les effets de ce parasitisme sont généralement bénins. — M. L. Lutz a étudié la formation de la gomme adragante dans la racine des Tragacanthoides. La gom- mose commence dans le liber, pour se propager plus tard aux rayons médullaires. — M. H. Coupin a cultivé un certain nombre de moisissures dans l'huile; leur végétation s'y rapproche beaucoup plus de la végétation dans l’eau que dans l'air. — M. G. Baudran à préparé un excellent milieu de culture pour le bacille de Koch avec des glycérophosphates de soude, potasse, chaux et magnésie, du citrate de soude, des albumoses Byla et de l'eau. On peut ajouter à ce milieu du fer et du man- ganèse, à la dose maxima de 3 °/,5. — M. J. P. Bounhiol à déterminé les caractéristiques principales du régime thermique de la Méditerranée littorale algé- rienne en vue de recherches sur la reproduction de la sardine. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 3 Mai 1910. M. E. Kirmisson présente un Rapport sur un travail de M. P. Delbet relatif à l'ostéotomie dansle traitement de Ja maladie de Little. L'auteur a obtenu de bons résultats par l'ostéoltomie sous-trochantérienne trans- versale chez une jeune fille ayant déjà subi la section des adducteurs de la cuisse et des tendons d'Achille avec un résultat incomplet. — M. P. Reclus recom- mande le traitement des plaies de la main par le simple badigeonnage avec la teinture d'iode, sans le brossage, le décapage et le lavage de la plaie; ces soins préparatoires ne sont pas seulement inutiles, mais nocifs, à cause de la dissémination des germes pathogènes, puis parce que le lopique mord moins bien sur la peau saturée de liquide. La teinture d'iode doit être neuve; après huit joufs, elle ne vaut plus rien. M. Léon Labbé rappelle que Boinet avait déjà préconisé, il y a un demi-siècle, l'emploi de la teinture d'iode en chirurgie. — M. P. Marie lit une étude expé- rimentale sur le cancer desradiologistes. — M. J. Brault donne lecture d'un travail sur une variété rare de syphilis hépatique. — M. le D' Teissier lit une étude sur les troubles du cœur dans la scarlatine. — M. A. Borrel donne lecture d’un travail sur le cancer expérimental et le cancer spontané. Séance du 10 Mai 1910. M. M. Letulle présente un Rapport sur un travail de MM. L. Rénon, E. Géraudel et Monier-Vinardintitule : L'hépatome, lumeur primitive du foie. Les auteurs considèrent l'adénome du foie, l'hépatome, comme une tumeur distincte, spéciale, comme la tumeur spécifique de la cellule hépatique; ce ne serait ni un adénome, ni un cancer : ce serait un mode de reviviscence du processus normal de développement hépatique. — M.F. Widal à reconnu que le sérum des actinomyco- siques, dépourvu de pouvoir agglutinatif sur le mycé- lium de l'Actinomycees, produit la co-agglutination des spores du Sporotrichum Beurmanni, la réaction de co- fixation avec les cultures de ce même parasite. Ces deux réactions peuvent être utilement employées au séro-diagnostice de lactinomycose. — M. G. Massol à fait l'analyse des dépôts des eaux minérales sulfureuses d'Uriage (Isère). Après avoir enlevé le soufre par le sulfure de carbone, il à pu caractériser les métaux suivants : As, Pb, Ag, Cu, Fe, Mn, Al, Zn; il n'a trouvé ni F,niSe, ni Ba. — M. le D' Variot donne lecture d’un travail sur le traitement des formes graves d’atrophie et d'hypertrophie infantiles par l'emploi de la méthode des laits surchauffés ou homogénéisés. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 30 Avril 1910. M. G. Weiss a reconnu que, quand la production d'énergie chez la grenouille n’est pas troublée par la ré- gulation de température, l'énergie potentielle apportée par le glucose ne donne lieu à aucun déchet notable, tandis que celle qui est fournie par les albuminoïdes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 151 nécessite des transformations inutiles à l'organisme, au point de vue du fonctionnement même de cet orga- nisme. — M. R. Moulinier à pris le cardiogramme d'une jeune fille atteinte de cyanose congénitale ; il se caractérise par la forme anormale de la systole ventri- culaire et la valeur exagérée du flot de l'oreillette. — M. J. Chevalier a étudié l'action pharmacodynamique du Myrica gale, employé dans l'ouest de la France comme abortif. L'essence détermine la mort du cobaye par paralysie généralisée au bout de # ou 5 heures; la résine est encore plus toxique et se conduit comme un éméto-cathartique. — MM. C. Levaditi et K. Land- steiner ont constaté que le permanganate de potasse, H°02 et aussi le menthol peuventêtre employés comme antiseptiques dans la prophylaxie de la poliomyélite aiguë épidémique. — MM. Ch. Achard et H. Bénard ont reconnu plusieurs causes d'erreur dans leurs re- cherches sur les leuco-réactions spécifiques et se pro- posent de les reprendre sur de nouvelles bases. — M. F. Battelli et Mle L. Stern ont observé que divers tissus animaux, en l'absence d'oxygène, possèdent la propriéié de dédoubler l'aldéhyde éthylique en acides volatils et alcools. — MM. A. Laveran et A. Pettit montrent que certaines hémogrégarines, comme l'/7. agamæ, peuvent envahir les leucocytes aussi bien que les hématies, et qu'un classement basé sur leur siège n'a pas de raison d’être. — MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez signalent deux cas de polyglobulie, l’un avec une augmentation considérable du nombre des pla- quettes sanguines, l’autre sans augmentation. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre ont reconnu que la destruction des cellules muqueuses débute par la fonte de leur hyaloplasma et finit par la désagrégation de leur réticulum. — M, A. Fava a observé que les lapins sporotrichosiques supportent très bien l'iodure de po- tassium injecté par voie sous-cutanée, qui à chez eux une action curative. Les lésions expérimentales dues au Sp. Beurmanni aboutissent à la guérison. — M. M. Doyon à déterminé la formation de l’antithrombine hépatique chez le chien dans des conditions nouvelles, sous la seule influence du sang artériel, sans addition de substances étrangères. — M. E. F. Terroine estime que l’action activante des sels biliaires sur la lipase pancréatique, impossible à expliquer par une action physico-chimique sur les corps à dédoubler, doit être rapportée à une action directe sur le suc pancréatique. — M. L. Alquier a observé, dans le lobe laissé en place après thyroïdectomie unilatérale chez le chien, une augmentation de nombre des petites vésicules, avec présence d’un certain nombre de vésicules anormale- ment grandes. — M. Alb. Berthelot, par hydrolyse alcaline ménagée de la viande, a obtenu à peu de frais un milieu bien plus riche en substances nutritives que le bouillon de viande non peptoné. — M. E. Bertin a constaté que le pouvoir alexique du sérum semble peu influencé par la syphilis à ses différentes périodes, sauf peut-être au moment de l'accident primitif. — M. Em. Berger à étudié l'emploi du stéréoscope pour le mélange binoculaire des couleurs dans les diffé- rentes parties, spécialement dans les moitiés homo- nymes du champ visuel commun. — M. G. Rosenthal montre que l’ensemencement simultané du bacille bulgare et de différents germes microbiens en milieu mixte (lait et lait cacheté) obéit aux mêmes lois que l'ensemencement en symbiose du bacille bulgare et de chacun des germes étudiés. Séance du 7 Mai 1910. M. Em. Feuillié montre quelaréaction deMeyern'est pas applicable aux urines. — MM. A. Railliet et A. Henry ont étudié plusieurs Thélazies, nématodes parasites de l'œil; ce sont la Th. lacrymalis, la Th. leesei et une nouvelle espèce, trouvée sous le corps clignotant d'un chien, qu'ils nomment T4. callipæda. — MM. Aug. Lelièvre el Ed. Retterer montrent que l'expulsion du fœtus, chez le cobaye, est suivie non seulement du fassement des éléments figurés et du départ du plasma de la paroi vaginale, mais de la frag- mentation ou de la caryolyse de nombreux noyaux, ainsi que de la raréfaction et de la résorption du eyto- plasma périnucléaire. — M. F. Battelli a extrait la thrombokinase de divers organes par précipitation avec l'acide acélique, neutralisation, puis séchage dans le vide. La poudre brunâtre ainsi obtenue reste active pendant plusieurs mois; c'est un hémostlatique très énergique. — M. A. Grigaut propose un procédé colo- rimétrique de dosage de la cholestérine dans l'orga- nisme basé sur la réaction de Liebermann (coloration par H*S0* concentré après dissolution dans l'anhy- dride acétique tiède). — M. S. Ohkubo a reconnu que le liquide amniotique, qui doit être considéré comme un transsudat, ne contient pas de compléments. MM. R. Legendre et H. Minot décrivent le dispositif qu'ils ont employé pour conserver hors de l'organisme (dans divers liquides) les cellules nerveuses des gan- glions spinaux. — M. L. et Mvt M. Lapicque montrent qu'après avoir déterminé la décharge du condensa- teur qui donne le seuil de l'excitation avec un voltage double du voltage rhéobasique, on obtient la chronaxie (en seconde) en multipliant par 0,37 le produit de la capacité (en farad) par la résistance (en ohms). — M. E. Bugnion estime que l'asymétrie des pattes chez le Pagure cénobite doit être considérée comme un caractère acquis au cours du développement phylogé- nétique, ensuite d'adaptation à un genre de vie spécial. — M. A. Frouin et M"° Pozerska ont observé que les fistules de Thiry pratiquées sur les dernières portions de l'intestin, iléon ou cæcum, peuvent s'oblitérer spontanément, transformant les anses isolées en cavités closes. — M. A. Frouin à reconnu que dans les milieux organiques de constitution très simple la présence du phosphore est nécessaire pour le dévelop- pement des microbes. — MM. Laignel-Lavastine el Lasausse, par l'analyse chimique du liquide céphalo- rachidien des paralytiques généraux, ont mis en évi- dence, à côté de la choline, une autre base organique qui possède quelques-uns des caractères de la trimé- thylamine. — M. M. Nicloux décrit une méthode qui permet de suivre la destinée du chloroforme dans l'organisme; elle est basée sur l'arrêt de la vapeur de chloroforme par l'alcool à 900-95o, RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 19 Avril 1910. M. C. Gerber poursuit l'étude de l'action des sels mercuriques, argentiques et cuivriques sur la coagu- lation du lait par les ferments protéolytiques. — MM. Fayet el L. Raybaud, au cours de recherches sur une dermatose du cheval, ont isolé un Hyphomycète saprophyte, qui se rapproche, par ses caractères mor- phologiques, de la forme Monilia du champignon du muguet. — M. L. Raybaud à reconnu que les radia- lions ultra-violettes, même lorsqu'elles sont mortelles à la plante développée, permettent la germination des graines. La mort de la plantule survient après la for- mation de la chlorophylle. — M. Ed. Hawthorn à essayé «le sensibiliser le bacille de Koch par le sérum d'animaux tuberculisés expérimentalement et résis- tant à l'infection. Il n'a obtenu de résultats positifs qu'avec un échantillon de culture homogène Arloing. — M. S. Costa a trouvé plusieurs porteurs de ménin- gocoques dans l'entourage immédiat de divers soldats atteints de méningite cérébro-spinale. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 Avril 4910. M. C. Chéneveau : Sur un goniomètre-réfractomètre autocollimateur. L'auteur rappelle qu'il est arrivé, dans son étude des propriétés optiques des solutions, à cette conclusion que l’ionisation ne paraissait avoir aucune influence sur le pouvoir réfringent du corps dissous. Les expériences n'ayantété faites que pour des concen- 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES trations dont les limites ont varié de 30 à 500 grammes par litre, des expériences sur des dissolutions très étendues ont montré que la loi s'étendait jusqu’à des concentrations de 0 gr. 5 par litre, Pour voir si la loi s'étend jusqu'au corps non dissous, il fallait pouvoir faireles mesures de réfraction surle corps non dissous, au besoin à l'abri de l'air, et sur une solution assez concentrée, dans les mêmes conditions de précision. Pour réaliser, par la suite, cette expérience, l’auteur à imaginé un appareil autocollimateur qui permet de mesurer les propriétés optiques, réfraction et disper- sion, des solides, dans l'air ou dans un liquide, et des liquides ou solutions. Le liquide est placé dans une cuve fixe, disposée au centre de la platine du gonio- inètre et fermée, du côté de la lunette autocollimatrice, par une bonne glace de verre. Un prisme de verre, par exemple, de 30° environ, tourne dans le liquide, sa face antérieure restant dans le plan de symétrie de l'appareil; le mouvement de ce prisme est solidaire du mouvement du vernier qui glisse sur le cercle divisé complètement protégé, sauf à l'endroit où se trouve le vernier. Une vis micrométrique à règle et tambour divisés donne une plus grande précision pour des mesures différentielles. On annule, en somme, ainsi la déviation produite par le prisme solide d'angle cons- tant par celle due à un prisme liquide d'angle variable. En appliquant tout simplement la loi de la réfraction, on peut done facilement déduire l'indice du solide ou du liquide suivant que l’on connaît l’un ou l’autre. L'appareil se prête aux mesures d'angle, d'indices et de dispersions de corps solides et liquides, de pouvoirs dispersifs de verres. Il peut même être employé comme spectroscope. — M. C. Chéneveau : Sur une méthode simple pour la mesure d'un champ magnétique. Etant donnée la petite dénivellation qu'on obtient en placant un liquide magnétique, par exemple, dans un champ magnétique, on peut penser gagner en sensibilité en plaçant dans le champ le niveau de séparation de deux liquides de densités voisines, l’un magnétique et l’autre diamagnétique, disposés dans deux gros réservoirs reliés par un tube fin. On peut ainsi obtenir une déni- vellation qui permet déjà de voir nettement, sans instrument d'optique, ou de projeter dans un cours, sans dispositif spécial, cet effet appréciable du champ. Pour avoir une mesure exacte du champ, au point où se trouve le niveau, si le champ est supérieur à 1.000 gauss, on peut mettre en communication le dis- positif des deux tubes précédents, d’une part avec un petit compresseur, d'autre part avec un manomètre différentiel, et comprimer l'air jusqu'à ce que le niveau soit revenu au même point et à l'équilibre. En d’autres termes, on compense la pression due au champ par une pression, due au compresseur, qui est mesurée par la dénivellation 2 du manomètre différentiel. On peut ainsi multiplier par 130 environ l'effet produit dans le champ, c'est-à-dire observer 6 cm. 7 de déni- vellation au manomètre au lieu de 0 em. 05 dans un champ de 2.800 gauss. L'intérêt de cet appareil, qui ne nécessite pas un dispositif de mesure très précis, est de donner le champ H par une formule simple H— 4 Vh, où kÆ est la constante de l'appareil, et de mesurer un champ d’une étendue excessivement petite ou en une région très étroite, qu'il soitou non uniforme, continu ou alternatif. — M. Jean Perrin attire l’atten- tion sur les résultats qu’on peut obtenir en réfléchissant à la répartition d'équilibre que prennent, sous l’in- fluence d'une force constante (gravitation, force cen- trifuge, etc.), les ions et les molécules d'une colonne de solution parallèle à la direction de la force. Il suffit d'appliquer la formule générale : Fr TU CO RT où Cet c désignent les concentrations en deux niveaux différents, W le travail nécessaire pour faire passer la molécule-gramme de l'espèce considérée de l’un à l'autre de ces deux niveaux, R la constante des gaz parfaits, T la température absolue. Pour les molécules neutres, et dans le cas de la pesanteur, W se réduit au produit M (1— x) gh, h étant la différence des niveaux et « un coefficient inconnu qui exprime ce que devient la poussée d'Archimède à l'échelle de la molécule (par exemple, dans l’eau, pour une molécule d'eau, ce coefficient est égal à 1). Pour un ion, à ce travail de la pesanteur, s'ajoutera en général un travail contre des forces électriques; l'ion le plus inerte, en s'accumulant dans les couches profondes, entraine en effet avec lui un excès de charge de son signe, jusqu'à ce que la force électromotriee par là développée empèche l'arrivée de nouvelles charges du même signe. Si l’on élimine la hauteur À entre les trois équations de répartition rela- tives aux molécules neutres et à chaque sorte d'ions, onobtient: d'une part, la loi de variation d'ionisation en fonction de la profondeur, et, d'autre part, l'expression de la force électromotrice de gravitation (qui n a aucun rapportavec ladifférence de potentiel réalisée en régime variable, selon la théorie de Nernst, entre deux solu- tions inégalement concentrées d’un électrolyte). La loi de variation d'ionisation se trouve identique à la for- mule empirique proposée par Rudolphi et Van’t Hoff pour représenter la loi de dissociation en ions d’un sel en fonction de sa concentration. — M. A. Collot : NVou- velle balance à pesées très rapides. Cette balance est du type à deux colonnes et possède un dispositif spécial pour opérer une pesée complète sans ouvrir la cage. Les gros poids de 1 à 50 grammes sont placés dans un même plan horizontal et se posent sur un plateau spé- cial placé en dessous de l'étrier ordinaire. Ceux de 1 et 2 grammes sont formés par des petits cylindres avec cavités coniques en dessous; ceux de 5 à 50 grammes, par des anneaux concentriques les uns aux autres. Tous ces poids peuvent être soulevés en tournant des boutons placés à l'extérieur de la cage; ces boutons indiquent zéro lorsque le poids est placé sur le plateau, et sa valeur lorsqu'il est enlevé. Les décigrammes sont formés par quatre cavaliers manœuvrés, également en dehors de la cage, par des boutons portant aussi le chiffre zéro ou la valeur du poids. Le total de tous ces poids est de 100 grammes, portée de la balance. Un amortisseur donne directement les centigrammes, les milligrammes et fractions de milligrammes. Il est chiffré zéro au milieu et 100 à chaque extrémité; ces chiffres sont précédés du signe + ou du signe —. Une tare de 100 grammes est toujours placée sur l’étrier de gauche, et le total des poids sur celui de droite. Pour effectuer une pesée, l'opérateur vérifie d'abord l’équi- libre de sa balance, pose ensuite le corps dans l'étrier, où naturellement il forme surcharge, puis manœuvre les boutons pour enlever une combinaison de poids équivalante à cette surcharge; les chiffres qui parais- sent en indiquent la valeur. Une simple lecture sur les boutons, pendant que les oscillations s'amortissent, donne donc le poids du corps à 4 décigramme près; il suffit, pour l'obtenir au 1/10 de milligramme, d'ajouter ou de retrancher, suivant qu'ils sont précédés du signe —+ ou du signe —, les milligrammes et leurs fractions lus directement sur le micromètre. Il est facile de se rendre compte immédiatement des avantages obtenus avec un appareil ainsi disposé. Plus de manœuvre des poids avec les mains. Les poids, étant toujours dans l’intérieur de la cage, ne se détériorent pas. La cage reste complètement close pendant toute la pesée. Aucune erreur n'est possible dans la totalisation des poids, puisque les chiffres ne paraissent que lorsqu'ils composent la masse du corps. La pesée est faite par la méthode de la double pesée. En effet, elle résulte bien de la substitution, du méme côté de la balance, de poids marqués au corps à peser. Toutes les pesées sont faites sous la charge maximum, donc sensibilité absolument constante, condition indispensable dans les balances à lecture directe des derniers poids. En résumé : rapi- dité extrême pour l'exécution des pesées avec résultats aussi rigoureusement exacts que possible. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 3: SOCIÈTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 10 Mars 1910. 10 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. J. T. Sewell a étudié l'extinetion du son dans une atmosphère visqueuse par de petits obstacles de forme cylindrique et sphérique. Les résultats obtenus ne sont valables que pour des obstacles dont les dimensions sont faibles, comparées à la longueur d'onde du son incident. Pour des cylindres ou des sphères dont le rayon n’est pas infé- rieur à 10—5% centimètre, le rapport de l'énergie perdue à l'énergie incidente sur l'obstacle est au moins de l'ordre de 10 —*; c'est une proportion beau- coup plus élevée que celle qu'on obtient dans le cas d'un ais non visqueux. Les résultats obtenus pour un seul obstacle s'étendent sans difficulté au cas d'un grand nombre d'obstacles, mais seulement si l’espace oceupé par les obstacles est faible comparé au volume total. Dans le cas d'obstacles sphériques, si chaque petit obstacle à un rayon de 10 —* centimètre eb s’il y en à 10° par centimètre cube, un son d’une longueur d'onde de 50 centimètres aura son intensité diminuée dans le rapport 1 : 2 après avoir passé par une épais- seur de moins de 12 centimètres de ce milieu. Les formules, appliquées aux brouillards denses, montrent qu'ils n’interfèrent pas d’une facon appréciable avec la propagation du son, ce qui est conforme aux obser- vations de Tyndall. — M. R. D. Kleeman a déterminé le degré d'ionisation produit dans différents gaz par les rayons $ de l'actinium. Les résultats montrent que les ionisations relatives dues à ces rayons sont pra- tiquement les mêmes que celles qu'on obtient avec les rayons B de l’uranium, quoique les pouvoirs de pénétration des deux sortes de rayons soient diffé- rents. — MM. H. E. Armstrong et E. Horton : Æ/udes sur l'action des enzymes. XII : Enzymes du type de l'émulsine. Les auteurs ont montré antérieurement que l’'émulsine des amandes douces contient au moins trois enzymes distinctes : l’amygdalase, dédoublant l'amygdaline en glucose et glucoside de Fischer; une B-glucase, hydrolysant les 6-glucosides, et une gluco- lactase, qui hydrolyse le sucre de lait. Dunstan, Henry et Auld, dans leurs recherches sur l’enzyme du Pha- seolus lunatus, sont arrivés à la conclusion que celle-ci contenait une «-enzyme, similaire, sinon identique à la maltase de la levure, et une £-enzyme similaire ou identique à l’émulsine. MM. Armstrong et Horton ont repris les expériences de ces derniers. Ils ont reconnu que le glucoside du Phaseolus est invariablement hydrolysé par l’'émulsine d'amandes, quoique à un faible degré. D'autre part, l’enzyme du Phaseolus n'agit pas sur l’amygdaline, de même qu'elle n’agit ni sur le méthyl-+-glucoside, ni sur le maltose; donc elle ne renferme pas d'x-enzyme, ni d'amygdalase. 20 SCIENCES NATURELLES. — MM. C. G. Douglas et J. S. Haldane ont étudié les causes de l'absorption de l'oxygène par les poumons. La méthode de Haldane et Lorrain Smith, appliquée à la souris, leur a donné les résultats suivants : 1° Quand on lui fait respirer un très faible pourcentage de CO, de sorte qu'aucun besoin d’oxygène ne se produise dans le corps, la pression artérielle de l'oxygène est légèrement infé- rieure à la pression alvéolaire de l'oxygène. Apparem- ment, donc, l'absorption de l'oxygène se fait par diffu- sion seulement, conformément aux expériences de Fredericq et Krogh et à la plupart de celles de Bohr; 2° Quand on fait respirer un pourcentage beaucoup plus élevé de CO (0,2 °/, ou plus), la pression de l'oxygène dans le sang artériel s'élève à presque le double de celle de l'air alvéolaire et bien au-dessus de celle de l'air extérieur. Il est donc évident que, si l'absorption de l'oxygène a lieu seulement par diffu- sion dans les conditions normales, le manque d'oxy- gène dans les tissus met en jeu une activité sécrétoire supplémentaire par laquelle loxygène est absorbé activement de l'air alvéolaire dans Île sang. Ce procédé est probablement le même que celui par lequel l'oxy- gène à une pression partielle s’élevant quelquefois à 100 atmosphères au-dessus de celle qui existe dan l'eau de mer est sécrété dans la vessie nataloire des poissons de mer abyssqux. — M!ie M. P. Fitzgerald à recherché l’origine de l'acide chlorhydrique dans les petits tubes gastriques. Au moyen de la méthode de Claude Bernard modifiée (emploi du citrate de fer el d’ammonium au lieu du lactate de fer), elle à vérifié que les cellules engagées dans la formation d'HCI sont les cellules dites pariétales, l'acide étant contenu dans le cytoplasme, soit à l’état libre (ionisé), soit à l'état masqué (non ionisé) — MM. V. H. Veley et A. D. Waller ont étudié l'action de la nicotine et d'autres bases pyridiques sur le muscle et l'antagonisme de la nicotine et de la curarine. La nicotine, soit libre, soit sous forme de tartrate, produit une action caractéris- tique sur la contraction du muscle isolé. Son effel toxique sur le muscle est environ le tiers de celui de la quinine, le triple de celui de la strychnine et le sextuple de celui de la curarine. L'effet caractéristique de la nicotine sur le muscle n'est pas produit par la pyri- dine, ni par Ja picoline, ni par la pipéridine, bases d'ailleurs moins toxiques. L'effet de la nicotine sur le muscle est aboli par la curarine, la proportion de cette dernière étant de 2, de 30 ou de 160 molécules à 1. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 Mars 1910. Assemblée générale annuelle. La Société procède au renouvellement de son bureau, qui est ainsi cons- titué : Président: M. H. B. Dixon; Vice-presidents : MM. J. N. Collie, J. J. Dobbie, M.-O. Forster, F.-S. Kipping, A. Liversidge el J. Walker ; Trésorier : M. Al. Scott; Secrétaires : MM. A. W. Crossley et G.T. Mor- san; Secrétaire pour l'étranger : M. H. T. Brown. Séance du 21 Avril 1910. MM. B. Flurscheim et Th. Simon, par nitration de la m-nitroaniline, de la 2:3- et de la 3:4-dinitro- anilines et de leurs dérivés, ont obtenu la tétranitro- aniline en cristaux jaunes, F.212°. Le groupe m-nitré est instantanément éliminé par l’acétate de soude en solution ‘acétonique agueuse, avec formation d'un trinitroaminophénol, F. 174-1750. — M. A. G. V. Har- court décrit une méthode pour la détermination approximalive de petites quantités de plomb, basée sur la comparaison de la coloration produite dans la solution par un excès de H?S avec celle d'une série de solutions types dont la teneur en plomb est connue. — MM. G. L. Blanc et J.F. Thorpe ont reconnu que la substance F. 85°-88° considérée par Komppa comme le dicétocamphorate de méthyle est, en réalité, un éther O-méthylique. — MM. Al. Me Kenzie et G. W. Clough ont résolu l'acide r-phénylméthylglv- colique en ses isomères optiquement actifs et ont préparé également les acides d- et Z-4-chloro-«-phényl- propioniques. — MM. A. Slator et H. J.S. Sand exposent leurs recherches sur le rôle de la diffusion et des courants de convection dans la fermentation du sucre par les cellules de levure ; ils ont déterminé les conditions limites dans lesquelles les courants de convection commencent à devenir un facteur de’con- trôle sur la vitesse de la réaction. — M. G. S. Walpole a préparé une série de p-hydroxyphényléthylalkyla- mines en partant de la p-méthoxyphényléthylamine par acylation, puis alkylation, puis saponification ménagée. La p-hydroxyphényléthylméthylamine fond à 1300, la p-hydroxyphényléthyléthylamine à 457°-158°. — MM. F.-G. Pope et H. Howard, en condensant l’anisaldéhyde avec le résorcinol, ont obtenu le 2: 4- 454 ACADÉMIES ET SOCIETÉS SAVANTES dihydroxy -4'-méthoxybenzhydrol. — M. J. A. N. Friend critique l'interprétation donnée par Skrabal quant à l'influence des persulfates sur la détermina- lion de H°0? avec le permanganate de potasse. M. W. F. Russell montre que la conversion des thio- amides en amido-oximes par l’action de l'hydroxyla- mine est restreinte aux thio-amides du type R. GS. AzHR, celles de formule R. CS. AzRR étant à peine attaquées par l’hydroxylamine dans les mêmes condi- lions. — M. O. Ch. M. Davis à constaté que la réac- tion entre les chlorures d'acyles, les aldéhydes et la solution aqueuse de KCAz, avec formation de dérivés acylés des aldéhydo-cyanhydrines, est générale pour tous les types d'aldéhydes; elle ne se produit pas avec les cétones, sauf pour l'acétone. — M. E. G.J. Hart- ley, en chauffant le ferrocyanure de K sec avec le sulfate de méthyle à 80-900, a obtenu du méthylsulfate de K et une substance impure, qui, par chauffage ou conservation dans le vide, dégage du sulfate de méthyle et se convertit en une substance très stable (CH°)° Fe (CAz)". (CH#)SO%.HES0!, cristallisant de l'alcool méthy- lique. — MM. À. E. Dixon et J. Taylor ont calculé que la valeur réfractive moyenne du groupe SCAz dans les sels métalliques est de 26 environ, au lieu de 23,3 dans les composés organiques. La valeur réfractive du groupe C:0 est à peu près la mème dans le sel de K (21,6) et dans l’éther méthylique (21,8). Celle du groupe SO‘ est de 16,89 dans ses sels, de 17,53 dans divers sulfates d'alkyle et de 18,91 dans le sulfate d’éthyle. — M. T. E. Hull décrit une méthode de détermination du carbone dans le fer, l'acier et les alliages de fer par combustion directe. Le métal en fine tournure est pesé dans une nacelle d’asbeste recouverte d'une couche d'oxyde d'argent préalablement calciné. On chauffe dans un courant d'oxygène à 900°-9609, dessèche les gaz par passage dans l'acide sulfurique concentré et absorbe CO* dans KOH à 30 °/. M. W. L. Hicks à condensé la salicylamide avec l’acé- taldéhyde en présence de HCI à 809 avec formation de 2-méthyl-1 : 3-benzoxazine-#-one ; cette dernière se seinde sous l'influence de NaOÏ en solution pyridique en syn-éthylidènesalicylamide. — MM. W. Hayhurst et J. N. Pring ont déterminé les quantités d'oxyde d'azote el d'ozone dans l'air à diverses altitudes. Les oxydes d'azote sont toujours présents, en quantités variant avec le temps; la quantité d'ozone est infé- rieure à 0,003 milligramme par 10 mètres cubes entre 0 et 8.000 pieds ; au-dessus, on trouve des quantités d'ozone allant jusqu'à 0,02 milligramme dans 0,1 à 0,3 mètre cube d'air. — MM. E. de B. Barnett el S. Smiles, en mêlant CH?I avec la thiodiphénylamine en présence de Hgl*, ont obtenu l'iodure de méthyl- sulfonium, qui réagit avec Ag’O pour donner le S- méthylphénazothionium. — M. M. B. Richards, en faisant réagir la benzoine sur la méthylaniline en présence de ZnCl°, a obtenu le 2: 3-diphényÿl-1-méthyl- indol : cette réaction s'étend à toutes les arylamines secondaires pour donner des diphénylindols substitués. — MM. D. L. Chapman el P.S. Mac Mahon on étudié l'influence inhibitrice de l'ozone et de CI0* sur l'action de H et de CI à la lumière. — MM. E. G. Davis et S. Smiles ont constaté que l'acide thiosalicylique, en présence d'agents oxydants convenables, peut être condensé directement avec des substances aromatiques en donnant la thioxanthone ou ses dérivés avec un rendement de 80 à 90 °/,. — M. A. W. Titherley el Mie E. Worrall, en faisant réagir PCF sur la dibenza- mide, ont obtenu l’a-chloro-Az-benzoylbenzimide C'H°. CCI : Az. CO. CH, qui se décompose au-dessus de 400 en chlorure de benzovie et benzonitrile. L'ac- tion lente de l’eau froide ou celle de H*SO* concentré le transforme en dibenzamide. — M. J. K. Wood poursuit ses recherches sur les oxydes métalliques amphotères par ceux de Pb, Zn et GI. L’hydrate de plomb est à la fois le plus fort acide et la plus forte base ; l'hydrate de glucinium est la base la plus faible et l'hydrate de zinc l'acide le plus faible. Il estime que le plumbite de sodium possède la formule Pb (OH) ONa, le zincate de sodium la formule Zn (ONa)°; il y aurait deux glucinates de Na correspondant à ces deux for- mules. — M. A. A. Boon, en condensant la tertiobu- tylcétone avec la benzoïne en présence de KCAz, à obtenu une y-dicétone C#H#O0*, F, 1400-1119, qui se condense avec la phénylhydrazine pour donner un dérivé du pyrrol. — MM. A. A. Boon, K. Me Kenzie et J. F. Reid ont constaté que les aldéhydes se con- densent avee la diméthylpyrone en donnant des bases colorées, qui forment des sels d'oxonium très colorés avec les acides. Avec la furaldéhyde, la base fond à 2000 ; avec la benzaldéhyde à 169°, — M. T. P. Hilditch, après examen polarimétrique, conclut que les disul- foxydes qui contiennent des groupes alkyles identiques existent sous la forme symétrique R. SO. SO. R, tandis que ceux qui renferment deux groupes R, R' non identiques peuvent exister sous la forme thiosul- fonique R. SO®.S.R/ (quand R est très différent de R') ou sous forme symétrique (si R est très voisin de R'). — M. R. W. L. Clarke à étudié l'action de PCF sur J'acide pipéronylacrylique, l'acide cinnamique, l'acide phénylpropiolique et l'acide crotonique. — M. W. H. Perkinjun.arésolu l'acide d/-1-méthyl-A'-cyclohexène- 3-carboxylique au moyen de ses sels de brucine ; l'acide droit bout à 142° sous 20 millimètres et donne œln —+ 70°. Son éther éthylique réagit avec CH#Mgl pour former le d-dihydrocarvestrénol ou A'-m-men- thénol-8, Eb. 108°-111° sous 30 millimètres. Cet alcool tertiaire est optiquement inactif; il n’en constitue pas moins l'isomère droit, car, traité par HCI, il fournit le dichlorhydrate de d-carvestrène, F, 720, [al = +220, identique avec le dichlorhydrate de sylvestrène de Wallach. Le sylvestrène est donc la modification droite du carvestrène. — M. A. H. Salway à réalisé la syn- thèse de la cotarnine en partant de la myristicine par une série de réactions sur lesquelles il reviendra. — M. H.S. Redgrove montre que, dans le calcul des chaleurs moléculaires de combustion et de formation, le nombre et la sorte de liaisons d’affinités fermées ou brisées doivent être pris en considéralion. SOCIETE ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 26 Janvier 1910. M. S.R. Trotman à conslalé que de petites quantités de sels neutres (chlorure et sulfate de sodium, sels d'alumine et de fer, sulfates de calcium et de zinc) empêchent l'action de la soude dans l'ébullition du coton avec cette dernière pendant l'opération du blan- chiment. Ainsi s'expliquent les mauvais résultats obtenus parfois dans cette opération; ils proviennent sans aucun doute de la présence de sels neutres à l'état d'impuretés dans la soude employée. SECTION DU YORKSHIRE Séance du A7 Janvier 1910. M. J. W. Cobb: La synthèse du vernis des poteries, du verre et d'autres silicates complexes. I : Action de la chaux sur la silice et sur l'alumine : 4° L'action de la chaux sur la silice commence à 800°, Quelle que soil la proportion des deux corps, il est probable que 2Ca0.Si0? se forme d'abord. En élevant la tempéra- ture, la réaction varie. Dans un mélange tel que 3Ca0 + Si0®, le composé 2Ca0.S10? persiste ; avec Ca0 +Si0*, le composé formé finalement est CaO.Si0?. Avec de plus grandes quantités de silice, comme dans les mélanges CaO + 3S10* et CaO + 10Si0*, le inème com- posé CaO.Si0® est formé. Il ne se forme aucun silicate de chaux qui contienne plus de chaux que 2Ca0.Si0*, ou plus de silice que Ca0.Si0*, et l’on n'obtient aucun silicate insoluble. Avec un grand excès de silice et à haute température, un peu de silice el de chaux com- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 455 binées deviennent lentement solubles, ce qui indique une solution solide dans la chaux environnante, La réaction de la chaux sur la silice a lieu sans fusion; 20 L'action de la chaux sur l’alumine commence entre 850° et 900° C., quelles que soient les proportions du mélange. Avec les proportions Ca0 + AlO#, la réaction est rapide à 4.100° et presque complète à 1.300; il se forme un aluminate soluble Ca0,Al0%, Quand il y à plus d'alumine, GaO,A10* peut se former jusqu'à 4.100, mais au-dessus de cette température on obtient un alu- minate plus lentement soluble Ca0.2AP0" et aussi, à partir de 1.1009, un aluminate insoluble, contenant pro- bablement plus d'alumine, le premier diminuant et le second augmentant à mesure que la température s'élève. Quand on emploie plus de chaux que dans A0! +4 Ca0, on n'obtient pas de composé renfermant plus de chaux que Ca0.AFO", Séance du 21 Février 1910. M. H. R. Procter : Les problèmes de l’industrie du cuir. La Æevue publiera prochainement une traduction de cette importante communication. — M. J. W. Cobb : La synthèse des vernis de poteries, du verre et d'autres silicates complexes. HT: La réaction des oxydes solides. L'auteur réfute complètement la généralisation de Bou- douard que la température de formation d'une scorie et son point de fusion au cône sont pratiquement identiques. La fusion n’est pas nécessaire pour la réac- tion des constituants d’un mélange de silicate ou d'aluminate; une telle réaction peut être presque com- plète sans fusion. Le mode de réaction indique qu'aux hautes températures supérieures à 8009 C. le contact des particules solides d'une poudre lâche est transformé, par l'élévation de température, en un contact molécu- laire effectif, permettant aux forces sélectives puis- santes de l'aflinité chimique de gouverner le commen- cement el la suite de la réaction. ACADEMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 6 Janvier 1910. M. G. Frobenius donne lecture d'un Mémoire sur les matrices interchangeables. I déduit par voie ra- tionnelle le nombre de matrices linéairement indé- pendantes, susceptibles de se substituer à une forme donnée, ainsi que le nombre de matrices symétriques el alternantes qui transforment une forme donnée en la forme conjuguée. Chaque matrice peut se décom- poser en deux matrices symétriques, et chaque substi- tution orthogonale en deux substitutions orthogonales symétriques. — M. H. Rubens adresse un Mémoire sur les mesures qu'il à faites en collaboration avec M. H. Hollnagel sur /a partie à grandes longueurs d'ondes du spectre. On sait quels précieux services sa méthode des rayons résiduels a rendus pour étudier le spectre infra-rouge extrême. Or, tandis que, dans les déterminations antérieures des longueurs d'ondes de ces systèmes de rayons, isolés par réflexion sélective, on s'était servi de réseaux de diffraction, les auteurs, grâce à l'emploi d'un nouvel interféromètre (compor- tant une couche d'air prismatique limitée par de minces lames de quartz et dont l'épaisseur mesurable peut être variée à volonté), réussissent, non seulement à augmenter la précision des mesures dans la région des grandes longueurs d'ondes, mais à avancer vers des longueurs d'ondes bien plus considérables. Cette méthode permet d'utiliser des quantités d'énergie très faibles. Les auteurs étudient la longueur d'onde moyenne et la distribution d'énergie des rayons rési- duels du sel gemme, de la sylvine, du bromure de potassium et de l’iodure de potassium. La longueur d'onde moyenne des rayons résiduels de l'iodure de potassium, à savoir À — 96,7 4, peut être parfaitement mesurée. Les rayons résiduels des trois autres com- posés comportent deux bandes d'intensités différentes, Il en est probablement de même des rayons résiduels de l'iodure de potassium. Le coefficient de réfraction correspondant à À = 82,3 y est encore du même ordre de grandeur que dans le spectre visible. Séance du 13 Janvier 1910, M. O. Struve donne lecture d'un Mémoire : Les trajectoires des satellites d'Uranus suivant les obser- valions récentes. Il y rend compte de sa rédaction des séries d'observations faites, pendant ces dix der- nières années, avec les grands réfracteurs des Obser- valoires de Lick, d'Yerkes et de Washington ; il commu- nique les résultats préliminaires de recherches relatives à la masse planétaire et au déplacement moyen des satellites. Séance du 3 Février 1910. M. Zimmermann rend compte de ses recherches sur la détermination de la résistance à la rupture des barres de cadres. Il fait voir que le problème admet une solution simple et rigoureuse dans le cas où il n'existe de raccords transversaux qu'aux extrémités de la barre; il développe la condition de rupture y rela- tive. Séance du 10 Février 1910. M. A. Martens donne lecture d'un Mémoire sur Les variations d'état des métaux dues aux eflorts méca- niques. La résistance des métaux utilisés dans l'indus- trie dépend à un haut degré du traitement mécanique qu'ils ont subi. C'est ainsi que la vitesse de déforma- tion influe beaucoup sur les qualités mécaniques de la matière, dont les particules ultimes subissent des dé- placements continus jusqu'à ce que l'équilibre s'éta- blisse, le plus souvent après des semaines ou des mois, sous l’action du frottement intérieur. Dans le zinc, l'influence de la vitesse peut aller jusqu'à 50 °/,, tandis que dans le fer elle n'est que de 4,5 °/,, c'est-à-dire négligeable pour les emplois techniques. En raison des effets résiduels, l'ingénieur ne peul presque jamais admettre l'existence d'états donnés, l'expérience don- nant seule les tensions-limites admissibles. L'auteur fait la démonstration des effets résiduels qui se pré- sentent dans la charge et la décharge de plusieurs barres échantillons. — M. Branca présente un Mémoire de M. W. Gotham sur des recherches relatives à l’orr- gine des gisements de houille du Lias, près de Fünf- kirchen, en Hongrie. On ignorait jusqu'ici l'origine des charbons mésozoïques, peu répandus en Allemagne. Or, l’auteur, en découvrant les couches rudimentaires dans la houille liasienne de Fünfkirchen, vient démon- ter l’origine autochthone de ces charbons. Dans la partie est du bassin de Fünfkirchen, à Vasas, on trouve fréquemment des éboulis de charbon dont la pro- duction s'explique par un éboulement véritable sur- venu à une époque où la roche su trouvait encore, non pas à l’état de houille cassante, mais à celui de tourbe. La découverte d'éboulis de charbon pareils dans un gisement de houille de la Haute Silésie, où des éboulis de pierresse trouvent simultanément et exceptionnelle- ment, semble démontrer la justesse de cette façon de voir. Séance du 17 Février 1910. M. W. Nernst donne lecture d'un Mémoire décrivant des recherchesfaites, en collaboration avec MM. EF. Koref et F. A. Lindemann, sur les chaleurs spécifiques aux basses températures. Le calorimètre dont il se sert se compose d'un bloc de cuivre d'environ #00 grammes, comportant une cavilé allongée pour recevoir la sub- stance chauffée ou refroidie. Grâce à sa bonne con- duction calorifique, le bloc de cuivre présente toujours une température sensiblement constante dans toutes ses parties. L'isolement thermique du calorimètre est amélioré par l'insertion dans un vase à vide; la tempé- rature est appréciée à l’aide d’une pile thermo-élec- trique. Les deux méthodes de détermination des cha- leurs spécifiques des solides et des liquides dont l'auteur rend compte conviennent particulièrement pour les températures très basses; la première, qui n'est qu'une eh à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES modification du procédé de mélange bien connu, ne fournit que la chaleur spécifique moyenne pour un intervalle de températures donné; la seconde permet, au contraire, de déterminer la chaleur spécifique vraie aux différentes températures. Grâce à ces méthodes, qui se complètent l’une l’autre, les expérimenta- teurs ont réussi à établir, pour bon nombre de sub- stances, l'allure des chaleurs spécifiques jusqu’à envi- ron — 2009, avec une précision plus grande que leurs devanciers. Le résultat le plus général, d'accord avec les travaux antérieurs de Behn, Dewar, etc., c'est que la chaleur spécilique, aux basses températures, décroit rapidement, de facon à produire l'apparence de tendre vers zéro (comme le veulent les éxigences de la théorie d'Einstein). Ce résultat s'applique aux corps cristallisés aussi bien qu'aux corps amorphes. Des expériences faites à la température de l'hydrogène bouillant déci- deront,semble-t-il, définitivement ce problème. D'autre part, les auteurs soumettent le nouveau théorème thermo-dynamique énoncé par Nernst à un examen plus approfondi que cela n'avait été possible jusqu'à ce jour. — M. H. Müller-Breslau présente les résultats de ses recherches sur les barres articulées soumises à une pression excentrique. Il expose le calcul des défor- mations et des fatigues mécaniques des barres à cadre et des étançcons exposés à l’action d’une pression excentrique. — M. K. Schottky adresse un Mémoire sur la théorie géométrique des fonctions d’Abel du genre 3°, Il y donne la déduction géométrique, sur la base des notions algébriques fondamentales de Rie- mann, de certaines équations que lui avait fournies la méthode de Güpel lors d’investigations antérieures sur les fonctions d'Abel à trois variables. A. G. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE 9 Séance du 7 Janvier 1910. M. S. Téréchine adresse un Mémoire sur /es rela- tions qui existent entre la densité et le degré de dis- socialion des solutions salines aqueuses. L'auteur y reprend la discussion d’une relation due à M. Heydweil- ler, dont il avait auparavant donné une déduction basée sur l'hypothèse de l'existence d’enveloppes entourant chaque ion et chaque molécule non dissociée et qui se se composeraient de dissolvants de densité modifiée. Le nouveau traitement dont ce problème vient d’être l'objet de la part de M Heydweiller‘ lui donne l'occa- sion de signaler certaines relations gouvernant les modules de densité. Les modules des ions élémentaires se rangeraient{ suivant les groupes du système de Men- deléieff. D'autre part, il existerait une relation linéaire entre les modules de densité des ions élémentaires d'un groupe donné et leur poids atomique. L'hypothèse de l'auteur permet aussi de prévoir une relation entre les mobilités et les modules des ions. — M. R. Ladenburg adresse un Mémoire sur l'émission et labsorption des raies spectrales. Tandis que les lois du rayonnement des corps solides, en tant que rayonnement de tempé- rature, sont connues avec une précision assez grande, grâce aux recherches des quinze dernières années, nous ignorons à peu près complètement les lois du rayonnement des vapeurs et des gaz lumineux dont les spectres se composent de raies. L'auteur étudie les bandes spectrales ou « lignes spectrales isolées de largeur finie ». Il observe que la largeur de ces bandes dépend : {1° des conditions d'excitation électrique, 2° de la pression, 3° de la longueur de la couche luisante. Dans le cas d'une faible tension d'hydrogène (4 milli- mètre) et d'une couche lumineuse d'hydrogène de 250 millimètres de longueur, les milieux de bandes H, et H: sont plus lumineux et les bords plus sombres que le spectre continu, la position des nicols étant con- venablement choisie. Le phénomène inverse se produit dans le cas d’une tension d'hydrogène élevée (environ 25 millimètres) et d'une couche d'hydrogène lumineuse 1 Ann. de Phys., 1. XXX. p. 813, 1959. de 55 millimètres, c'est-à-dire que, dans ce cas, la ligne d'absorption est considérablement plus étroite que la bande d'émission. Comme, à l’intérieur d'une bande spectrale, le quotient E: A subit de fortes variations, À notion de température ne s'applique plus au cas donné. Séance du 21 Janvier 1910. MM. H. Rubens et H. Hollnagel rendent compte de leurs expériences relatives aux rayons calorifiques à grandes longueurs d'ondes. Grâce à une nouvelle méthode d’interférence, les auteurs ont réussi à aug- menter la précision des mesures de longueurs d'ondes dans le spectre à ondes longues et à pénétrer plus loin qu'autrefois dans le domaine de ces rayons. Le spectre connu comporte désormais dix octaves entières, dont deux sont situées dans l’ultraviolet, une dans la région visible et sept dans l’infra-rouge. Son étendue corres- pondrait à peu près à celle de la région des ondes acoustiques auxquelles l'oreille humaine est sensible. — M.F. Kiebitz donne lecture d'un travail sur cer- taines expériences relatives aux vibrations rapides des ares voltaiques, expériences qui fournissent une saisis- sante démonstration de l'allure des vibrations de Paul- sen. — M. H. von Wartenberg adresse un Mémoire sur les constantes optiques de certains éléments. Bien que n'ayant d'abord que l'intention de déterminer le pou- voir réflecteur de quelques métaux, dont Ja tempéra- ture de fusion noire à été mesurée par voie optique, de façon à pouvoir calculer les points de fusion vrais, l'auteur comprend dans ses recherches un grand nombre d'autres éléments, dontles constantes optiques étaient jusqu'ici Imconnues, — MM. H. Konen el W. Jungjohann presentent les résultats de leurs études relatives à l'émission des gaz. Dans ce premier mémoire, ils exposent des points de vue gouvernant les mesures d'énergie dans les spectres gazeux. Dans une seconde communication, ils se proposent de traiter des propriétés de plusieurs sourceslumineuses usuelles, et, dans une troisième, de résumer les résultats de mesures photométriques. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 10 Mars 1910. 1° SciENCES PuYsIQUES.— M. A.-E. Haas : Sur la signi- fication électromagnétique de la loi de rayonnement de Planck et sur une nouvelle détermination de la quantité élémentaire d'électricité et des dimensions de l'atome d'hydrogène. — M. A. Bolland : Etudes microchimiques. IV : L'indice de réfraction des indi- vidus chimiques cristallins d'après la méthode d’inclu- sion. — M. A. Kirpal montre que les chlorures des éthers isomères de l'acide quinolique, comme ceux de l'acide cinchoméronique, donnent deux acides cé- toniques isomères par traitement avec le benzène et AICF. Cette réaction est done générale. Avec l’anhy- dride quinolique, la réaction de Friedel et Crafts ne donne qu'un acide 5-benzoylpicolique, tandis qu'avec l'anhydride cinchoméronique il se forme deux acides cétoniques. — M. F. Ballner : Sur la différenciation des albumines végétales par la réaction de déviation du complément. 20 SCIENCES NATURELLES.—M. F. Steindachner décrit : une nouvelle espèce de Loricaria (L. jaraguensis) du bassin du Jaragua et du Ribeira dans les Etats de Saint-Paul et de Santa-Catarina, une espèce d'Aneis- trus (A. barræ) très voisine de l'Ancistrus aculeatus, trouvée dans le Rio San Francisco, une nouvelle espèce de Corydora (C. ehrhardtii) du Jaragua, et étudie les différences sexuelles extérieures du Corydoras kroneiï. — M. A. Weichselbaum : Sur les modifications du pancréas dans le diabète sucré. a ——_—]_ Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. EE Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 11 15 JUIN 1910 Revue générale des Méiences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aäresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLJVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suÿde la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Bernard Brunhes. — Le 10 mai dernier, nous apprenions avec une douloureuse surprise la mort de Bernard Brunhes, professeur de Physique à l’Université de Clermont-Ferrand et directeur de l'Observatoire météorologique du Puy-de-Dôme, enlevé en quelques heures à l'affection des siens et à l'estime du monde savant. k Bernard Brunhes était né à Toulouse, le 3 juillet 1867. Après de brillantes études secondaires, au lycée de Toulouse d'abord, puis au lycée de Dijon, ville où son père avait été appelé comme professeur de Physique à la Faculté des Sciences, il était admis, en 1886, à l'Ecole Polytechnique avec le n° 11, à l'Ecole Normale avec le n° 2 et optait pour cette dernière. En 1889, il était classé premier au concours de l'agré- gation des sciences physiques et entrait comme agrégé- préparateur au Laboratoire d'Enseignement de la Sor- bonne, sous la direction de M. Bouty. En avril 1893, il conquérait le grade de docteur avec une thèse très remarquée sur la réflexion cristalline interne. Au mois de novembre suivant, il était nommé maitre de conférences de Physique à l'Université de Lille et chargé d’un cours d’Electrotechnique à l’Institut indus- triel du Nord de la France. En 1895, il succédait à son père, en qualité de chargé de cours à l’Université de Dijon, et en 1897, lorsqu'il eut atteint l’âge légal, il était nommé titulaire de la chaire. En 1900, il était appelé à l'Université de Clermont, pour occuper la chaire de Physique et assumer la direction de l'Observatoire du Puy-de-Dôme. Sa carrière a donc été exceptionnellement rapide; mais on peut dire que, pour cette fois, le hasard, qui joue un si grand rôle dans le sort des universitaires, a été moins aveugle que d'ordinaire. Doué d’une intelligence supérieure, d'une rare faci- lité d'assimilation, d'une activité infatigable, Bernard Brunhes à apporté sa contribution à l'œuvre scienti- lique dans toutes les branches de la Physique. Il s'était occupé tout d'abord d'Optique physique et avait choisi comme sujet de thèse le problème délicat de la réflexion cristalline interne, sur lequel il revint REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. ensuite à plusieurs reprises. Il a publié des Notes ou Mémoires nombreux sur des sujets très variés, sur le principe d'Huygens, sur la théorie électromagnétique de la lumière, sur les phénomènes électrocapillaires, sur les relations entre l'absorption du son et la con- ductibilité calorifique, sur la durée d'émission des rayons de Rüntgen, sur l'étude thermodynamique des moteurs à explosion. Ses leçons d'Electrotechnique, professées à l'Institut industriel du Nord, ont été imprimées en un volume sous le titre de : Cours élémentaire d'Electricité: lois expérimentales et principes généraux, et ont été jus- tement appréciées. È A Clermont-Ferrand, sans délaisser les études de Physique proprement dite, il consacra surtout ses efforts au développement de l'Observatoire du Puy-de- Dôme et aux recherches de Météorologie et de Phy- sique du Globe. Bernard Brunhes à été, on peut le dire, le second fondateur de l'Observatoire, à travers des difficultés, tant morales que matérielles, qui eus- sent rebuté bien d'autres. 11 faut avoir vécu à ses côtés pour se faire une idée de la prodigieuse dépense d'activité que représentent ses dix années de direction. Rien ne lui coûtait pou atteindre le but qu'il s'était proposé. Travaux scienti- liques, voyages, démarches sans cesse renouvelées auprès des Pouvoirs publics et auprès des particuliers, il menait tout de front avec une ardeur inlassable. Son enthousiasme et sa persévérance avaient fini pai avoir raison de toutes les indifférences, de tous les scepticismes. Il avait obtenu l'achèvement de l'Obser- vatoire de la montagne, suivant les plans primitifs, qui n'avaient été exécutés qu'en partie. Il y avait créé les essais d'exploration de l'atmosphère par les cerfs- volants et les ballons-sondes, installé un sismographe. Il efectuait des recherches sur l’aimantation réma- nente des roches volcaniques, sur le magnétisme ter- restre, dont il décelait les curieuses anomalies locales dans la région des Puys, sur l'électricité atmosphérique, sur les courants telluriques. Au milieu de ces multiples travaux, il trouvait encore le temps d'écrire ce livre sur la Dégradation. de l'Energie, où il exposait avec tant de clarté et de bonheur d'expression ces questions fondamentales, 11 458 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE qui forment en quelque sorte les assises de la Physique. Il se préoccupait aussi du reboisement des mon- tagnes, et apportait son active collaboration à tous les groupements qui luttent pour réaliser cette œuvre, si importante pour la région. A plusieurs reprises, il prit part à des Congrès scien- tifiques à l'étranger, notamment à Innsbruck et à Liége, et y tint une place aussi honorable pour lui que pour la science française. Et l’on ne saurait se faire une idée exacte de cet énorme labeur, sans tenir compte des conditions dans lesquelles s’effectuaient la majeure partie de ces tra- vaux. Le promeneur qui, par une belle journée d'été, se fait tranquillement transporter par le chemin de fer au sommet du Puy-de-Dôme, sans autre souci que de ne rien perdre du panorama qui s'étale sous ses yeux, peut être tenté de considérer l'Observaloire comme une agréable villégiature. S'il revenait en hiver, quand la montagne est recouverte d’un mètre de neige ou plus, que le vent est si violent qu'on à peine à se tenir debout, qu'il faut deux ou trois heures pour faire le trajet du col au sommet, au lieu destrois quarts d'heure qui suffisent dans la belle saison, son impression serait sans doute tout autre. Aucun de ces obstacles maté- riels n’arrêtait notre regretté ami. En tout temps, en toute saison, il n’hésitait jamais un seul instant à se rendre à l'Observatoire, dès qu'il y jugeait sa présence nécessaire ou seulement utile. Il méprisait la fatigue physique comme la fatigue intellectuelle, violentant souvent la nature. Mais la pature est impitoyable et se venge un jour ou l'autre. Le moment est venu où Bernard Brunhes a été trahi par ses forces et où son existence si remplie a été bru- talement tranchée, avant qu'il ait pu jouir de son œuvre. A ses remarquables qualités intellectuelles, Bernard Brunhes joignait des qualités du cœur qui le rendaient sympathique à tous. Je ne me souviens pas de lui avoir jamais entendu prononcer une parole malveillante pour qui que ce fût. Tout au plus, entre intimes, acquiesçait-il d’un sourire à une appréciation défavo- rable si elle était justifiée. Ce n'était pas chez lui manque de clairvoyance, car son jugement était sûr, mais bonté naturelle. Aussi sa disparition prématurée a-t-elle été, pour tous ceux qui l’entouraient, une douleur d'autant plus vive que rien ne la faisait prévoir. Marcel Lamotte, Professeur adjoint à l'Université de Clermont-Ferrand. $ 2. — Astronomie Un dernier mot sur les canaux de Mars. — Lors de son deruier passage à Paris, l’astronome amé- ricain Percival Lowell a demandé au Bureau des Lon- gitudes d'être admis à lui présenter un exposé de ses recherches planétaires. A cette occasion, il fut longuement question des fameux « canaux » de Mars, et plusieurs membres du Bureau, notamment M. Charles André, adressèrent à M. Lowell diverses objections qui ne laissèrent pas de l’'embarrasser quelque peu. L'éminent directeur de l'Observatoire de Lyon a bien voulu nous envoyer, de cette discussion, l’intéressant résumé que voici : « Dans sa séance du 27 avril dernier, le Bureau des Longitudes a entendu une longue communication de M. P. Lowell, fondateur de l'Observatoire de Flagstafr dans l’Arizona, sur ses études des surfaces planétaires en général et de celle de Mars en particulier. On le sait, M. Lowell est le réinventeur des canaux de Mars, canaux qui sont, pour ainsi dire, son œuvre et son bien, bien de fort peu de valeur, suivant un grand nombre d’astronomes. Il était donc intéressant d’en parler avec lui. D'abord séduisant, grand, élancé, haut en couleur et en verbe, au ton toujours affirmatif, M. Lowell est un causeur agréable. Mais a-t-il apporté à l'appui de sa thèse des arguments décisifs ? Pour le savoir, suivons- le quelque peu. « D'abord, éloge enthousiaste du climat de Flagstaff : tout y est parfait, le ciel presque toujours pur, le calme le plus profond y règne en maître, la vapeur d'eau, cet ennemi juré des astronomes, en est bannie, l'humidité moyenne n’y étant que de six centièmes. On va donc, dans ce paradis des astronomes, pouvoir employer les instruments les plus puissants. Quelle erreur! A votre grande surprise, pour obtenir les meilleurs résultats (pour M. Lowell cela veut dire sans doute obtenir des canaux), on doit réduire l’ouverture de l'instrument de près de moitié (de 0®,52 à 030); cette obligation de diaphragmer tient, paraît-il, à des vagues aériennes de longueurs diverses qui sillonnent l'atmosphère de Flagstaff : parmi ces vagues, il faut choisir la moins gènante et y accommoder le diamètre de l'objectif; ce qui est surtout vague là-dedans, c’est l'explication même. « Mais, demande-t-on à M. Lowell, séparez-vous les étoiles doubles un peu serrées plus aisément avec l'ouverture de 0,32 ou avec celle de 0,52? La sépara- tion est plus facile avec la moindre ouverture qu'avec la plus grande, telle est la réponse absolument surpre- nante : et, à l'appui, M. Lowell fait un dessin d’un sys- tème stellaire double serré, tel qu’il le voit à FlagstafT. Eh bien, chose renversante pour tout astronome, les images focales des étoiles y sont d’autant plus petites, s'y rapprochent d'autant plus d'un point lumineux, que l'ouverture est elle-même plus petite. Décidément, Flagstaff possède un ciel bien étrange, et les milliar- daires américains feront bien de ne pas y envoyer leurs instruments géants. « Pour arriver aux photographies de Mars, on parle à M. Lowell de son illustre compatriote, le célèbre astrophycien Hale, qui a découvert en son Observatoire du Mont-Wilson le phénomène spectroscopique si délicat causé par le champ magnétique des taches solaires, découverte démontrant nettement toute l'excellence de cette station, et on lui demande com- ment il explique que, dans les photographies de Mars que Hale y à faites, en suivant d'ailleurs la même technique que lui, et qui, de l'avis général, sont les plus nettes et les plus riches en détails qu'on ait obte- nues jusqu'ici, il n'ait jamais constaté de canaux, mais toujours un fond lumineux parsemé d’une foule de détails, de taches sombres, isolées et séparées. « Cela tient, dit M. Lowell, à l’infériorité du ciel du Mont-Wilson par rapport à celui de Flagstaff, infério- rité bien constatée, ajoute-t-il, par le Service Météoro- logique des Etats-Unis. Cela tient peut-être aussi, lui suggère-t-on, à ce que Hale employait un instrument de 12,52 d'ouverture et qu'il se gardait bien de le dia- phragmer. Comme la grande lunette d'Yerkes, l’instru- ment de Hale était trop puissant peur les canaux. « Silence éloquent. « Passant maintenant à l'observation directe, on prie M. Lowell d'expliquer pourquoi son autre compatriote Barnard, si célèbre par la découverte, auprès de l'écla- tant Jupiter, du très faible point stellaire qu'est son cinquième satellite et le dédoublement d'un très grand nombre d'étoiles doubles très serrées, pour- quoi, dis-je, Barnard n'a jamais vu de canaux sur Mars soit avec la lunette de 0,91 de l'Observatoire Lick, soit avec celle de 4",04 de l'Observatoire Yerkes, mais toujours une foule de petites taches sombres, séparées par des espaces non teintés. Oh! l'explication est bien facile et résulte de deux causes distinctes : Tout d’abord, la plupart des canaux de Mars sont choses fort difficiles à voir ; il faut un apprentissage long, durant plusieurs années, une sorte de préparation de l'œil pour arriver à un bon résultat. Barnard n'avait pas été soumis à cet entraînement canaliforme, ce qui a, en partie, causé son malheur. : « Car, ainsi qu'il a été dit plus haut, il y a encore autre chose, d’après l'astronome américain; et cette CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE autre chose, la voici : Les différents yeux ont non seulement une acuité différente, mais des aptitudes différentes pour l'observation de ces fameux canaux. Comme on le sait, les éléments essentiels de l'activité visuelle de la rétine sont les cônes et les bâtonnets, les premiers plus sensibles que les autres. Eh bien, suivant la proportion relative de ces deux éléments dans les couches supérieures de la rétine, l'œil aura une apti- tude toute spéciale pour observer des lignes ou des points. Il y a des yeux linéaires et des yeux pointus; et — car il faut bien personnilier tout cela — il y a par vonséquent des astronomes linéaires et des astro- nomes pointus. Les premiers voient sur les surfaces planétaires toutes les lignes qui ÿ existent, mais les seconds ne les verront jamais ; quand elles y existent, ils les résolvent en points séparés. M. Barnard, qui est la crème des astronomes, est cependant un astronome pointu : aussi n’a-t-il jamais vu de canaux sur Mars ; et n'en verra-t-il jamais, le pauvre! Il s'en console en découvrant aux planètes, de nouveaux satellites, en enrichissant le monde stellaire de nouveaux soleils multiples, et en pensant que, s'il n'a jamais vu de canaux sur Mars, il en à fabriqué plusieurs dans l'expérience célèbre qu'il a entreprise à la demande de l'illustre Newcomb, qu'en conséquence il n'est pas aussi pointu que parait le croire M. Lowell. « Æt nune erudimini gentes et laissons au lecteur le soin de conclure. » Ch. André, Directeur de l'Observatoire de Lyon, Correspondant de l'Académie des Sciences. S 3. — Météorologie Conservation des grêlons et étude de leur: microstructure. — L'étude de la microstructure des grélons, en été, étant très difficile, sinon impos- sible, j'ai concu l'idée de construire un appareil pour les conserver jusqu'en hiver. Cet appareil (fig. 1) con- Fig. 1. — Appareil pour la conservation des grélons. — A, cylindre rempli de glace: B, cylindre rempli de glace et d'un mélange de sulfate de cuivre; C, espace renfermant les grèlons, siste en trois cylindres coaxiaux: l’espace intérieur € est destiné aux grèlons; dans l’espace intermédiaire B, on met un mélange de glace et de sulfate de cuivre (approximativement dans la proportion qui correspon- drait à l’eutectique, {—— 1°,6), et l’espace extérieur À sert pour la glace et forme une sorte de manteau pro- tecteur. Pendant les étés de 1908 et de 1909, je n'ai eu qu'une 159 seule fois la chance de voir gréler c'était Île 2/15 août 1909, en mer, dans le trajet d’Aland à Saint- Pétersbourg. La grêle dura environ trois minutes. Les grèlons étaient très petits (2 à 3 millimètres de dia- mètre); j'eus le temps d'en recueillir 200 à 300 grammes et de les mettre dans des cylindres en verre contenant, pour empêcher la congélation, un mélange, en parties égales, de benzène et de toluène, que je supposais avoir lamème densité que les grêlons, mais qui se trouva plus = léger. Ces grèlons furent transportés ensuite à Tomsk(Si- R bérie), puis, en dé- cembre, à Moscou, au XIIe Congrès des naturalistes et mé- decins russes. Ainsi est prouvée] la pos- sibilité de conser- veret de transpor- ter des grèlons. Cet essai montra aussi qu'il serait préfé- rable de conserver quelques dizaines de grélons, bien séparés les uns des autres, plutôt que d'en conserver un nombre beau- coup plus grand, mais congelés en partie, surtout dans les couches inférieures. Pour atteindre ce résultat, les grélons doivent être plongés dans un liquide ayant une densité qui leur soit à peu près égale, mais très visqueux (huile à cylindres, vaseline, huile de ricin). Pour l'étude de la microstructure d'un grêlon isolé, M. W. Dudecki et moi, nous avons fait une plaque mince en polissant d’abord un côté quelconque au papier à l’émeri, ou en le fondant à la chaleur du doigt. Ce côté était mis sur un porte-objet et fixé ensuite par la congélation, après avoir frotté pendant quelque temps l’autre côté du porte-objet avec le doigt. L'autre côté était ensuite poli de la même facon Jusqu'à ce qu'on eùt atteint l'épaisseur voulue. Ces opérations furent faites à l'air libre à des températures assez basses. Néanmoins, nous avons trouvé qu'il est pos- sible de polir les grélons dans le laboratoire aux tem- pératures ordinaires, si l'on refroidit au préalable les porte-objets, le papier à l’'émeri, elc., dans des vases à parois doubles contenant des mélanges réfrigérants. Pour l'étude optique des plaques minces, nous nous servions à l'air libre d’un microscope polarisant et au laboratoire d’une lanterne de projection. Dans ce dernier cas (fig. 2), la plaque mince fut posée dans un vase à parois doubles et à fond double formé (pour empêcher la condensation de la vapeur d'eau de l'air ambiant) par deux plaques de verre plan-parallèle; l'espace entre les parois contenait un mélange de glace et de NaCI. L'image réelle de la plaque mince fut ensuite projetée sur un écran ou sur une plaque photographique « autochrome ». La plupart des grèlons étaient formés d’un seul indi- vidu cristallin. La même structure se manifestait chez les « grèlons artificiels », gouttes d'eau congelées dans un mélange d'huile de canelle et d'huile de lin, de densité correspondante. Les grélons composés de plu- sieurs individus cristallins ne montraient aucune régularité ni dans la forme des surfaces des individus cristallins, ni dans les angles entre ces surfaces, ni dans les directions de leurs axes, qu'il s'agit des directions des axes des individus cristallins voisins, ou du noyau laiteux du grélon. Ce noyau se montrait dans les plaques minces comme une agglomération de bulles d'air de différentes dimensions. Je serais heureux que ma tentative pût provoquer des recherches du même genre, et que l’on eût la chance de conserver ou d'étudier des grélons plus gros ou d'une structure plus particulière que ceux qui ont été recueillis par moi C'est, à mon avis, un des meil- » Fig. 2. — Appareil pour l'étude des grélons en plaques minces. — L, lanterne; P, polarisateur : M, miroir; R, vase réfrigérant: O, objectif : A, analyseur, 460 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE leurs moyens de compléter nos connaissances bien insuffisantes sur l'origine de la grèle et sur les particu- larités de sa formation. Boris Weinberg, Professeur de Plysique à l'Institut technologique de Tomsk. S 4. — Chimie physique Recherches ultra-microscopiques sur le mécanisme de lélectrolyse. — Vu l'extrême importance qu'aurait, pour délinir la nature de l’élec- tricité, une connaissance plus complète des phéno- mènes électrolytiques, M. J. J. Kossogonoff, professeur l'Université de Kieff, s'est attaché à trouver une Fig. 1. — Examen de l'électrolyse à l'ultra-microscope. — F,L,,Sp, L:, L,.M, parties de l’ultra-microscope ; Z, cuvette électrolytique ; P, filtre calorifique. méthode qui permette l'observation visuelle immédiate de ces phénomènes. L'ultra-microscope, qui, comme on le sait, révèle l'existence de particules d'une extrême petitesse (jusqu'à environ 5 y de diamètre), lui a donné sur ce point des résultats absolument remarquables, que nous résumerons ainsi : Dans la disposition représentée par la figure 1, F, L,, L., L, et M sont les parties usuelles de l'ultra-micro- scope; Z, la cuvette électrolytique: P, un vase, conte- nant une solution de AzHCI, qui sert comme filtre calorifique. Le microscope M est pointé sur la couche liquide, traversée par la portion la plus étroite du cône lumineux. Dans la même région du liquide, se trouvent les extrémités des électrodes A et K du voltamètre (Hig. 2. Dans les parties immergées dans le liquide, les électrodes sont recouvertes d’une couche isolante (paraffine pure, de préférence), laissant libres les extré- mités opposées des électrodes. Or, en observant l’électrolyte à l'aide de l'ultra- microscope ainsi disposé, l’auteur remarque par-ci, par-là, dans le champ de vision, des particules lumi- neuses qui exéculent pres- que toujours des mouve- ments vibratoires (brow- niens). Ces mouvements se compliquent souvent de déplacements le long des rayons lumineux, dépiace- ments dus aux courants de convection thermique, mais qu'on élimine complète- ment en insérant le filtre calorifique. Cet état de choses change du tout au tout, au pas- sage du courant électrique. Immédiatement après la fermeture de ce dernier, on voit, en effet, les points lumineux s'acheminer vers l'électrode négative. Les trajectoires de ce mouvement, à peu près perpendicu- laires aux rayons lumineux, coiïncident, semble-t-il, avec les directions des lignes de courant reliant les électrodes. En intervertissant ces directions, l'on change aussi le sens du mouvement. Les phénomènes observés par l'auteur l’autorisent, sans contredit, à considérer les points lumineux comme preuves de l'existence, à ces endroits, de véhicules d'électricité (ions). Il suffit, en effet, de suivre avec arele Es Z Fig. 2 — Electrodes À, K, du voltamètre Z. attention l'ensemble de ces phénomènes, pour écarter toute hypothèse relative à l'existence de poussière ou d'autres impuretés. Or, si ces vues sont correctes, les vitesses de mouve- ment des particules, vues à l’ultra-microscope, doivent évidemment être du même ordre de grandeur que les valeurs déterminées par Kohlrausch, sur la base des nombres de transport et des conductivités des électro- lytes. Pour élucider cette question, l'auteur a fait une série de déterminations de la vitesse absolue des par- ticules lumineuses, pendant le passage du courant, en mesurant les temps pris par une particule donnée pour passer à travers un certain nombre de divisions du micromètre oculaire. La distance apparemment tra- versée fournit la distance vraie, et cette dernière, de concert avec le temps, donne la véritable vitesse du mouvement. Or, ces résultats, réduits au gradient de potentiel de 1 volt-centimètre, concordent parfaite- ment, quant à l'ordre de grandeur, avec les vitesses de Kohlrausch. En se basant sur ces phénomènes, l'auteur n'hésite pas à affirmer que les particules lumineuses en question présentent d'étroites relations avec les ‘ions, à moins qu'elles ne soient identiques avec ceux-ci ou des groupes d'ions. Cette facon de voir se trouve confirmée par de nom- breuses observations ultérieures, dont nous ne résu- merons que les plus importantes. C'est ainsi que les particules en question éprouvent, sous l'action d'un champ magnétique, une déviation due aux charges électriques qu'elles portent. D'autre part, aussitôt que la tension appliquée aux électrodes dépasse une cer- laine valeur critique, il se produit subitement, à proxi- milé de la cathode, des particules extrèmement nom- breuses (jusqu'au nombre de 10 sur une superficie de Omm? 001 dans une couche étroite; parallèle à la surface des électrodes, dont le côté tourné vers la cathode est éloigné d'environ 0,05 à 0,08 millimètre). Entre la couche et la cathode, l’on n'observe pas le moindre point lumineux. D'une facon analogue aux tubes de Geissler, il existe ici un espace cathodique obscur, qui se maintient aussi sous l’action de (ensions élevées, Dans l'électrolyse de l'eau distillée, l'auteur observe un phénomène analogue à celui de l'espace cathodique obscur secondaire. Enfin, dans l'électrolyse d'une solution aqueuse de sulfate de cuivre (0,01 normale), il se produit, pour une différence de potentiel supérieure à la différence cri- tique, un phénomène d’une rare beauté. Immédiate- ment après la fermeture du courant, il se forme, en effet, sur la cathode, une démarcation bleuûtre claire, composée des particules les plus fines produites par l'électrolyse. Le long de cette surface de démarcation, la couche cathodique est séparée de sa couche limite par l’espace cathodique obscur. Les particules de la couche cathodique exécutent des mouvements de vibration rapides et irréguliers. Il ne nous semble guëre douteux que ces particules ne se déplacent de la couche cathodique vers la couche limite : vu l'impos- sibilité où il est de les observer pendant leur passage à travers l'espace obscur, l'auteur incline à penser que ces particules (pourvu qu'on soit fondé à les assimiler à des ions) dégagent leurs charges à la limite de l'espace cathodique, de facon à devenir invisibles. A part les considérations théoriques soulevées par ces expériences, nous nous trouvons donc en présence d'une méthode nouvelle et extrèmement intéressante pour examiner les électrolytes par l'observation visuelle immédiate. Les phénomènes caractéristiques que nous venons de résumer permettent, entre autres, de déterminer facilement les tensions de décomposi- tion. $S 5. — Océanographie Plan de travaux océanographiques à exé- euter dans les stations maritimes de Ia Méditerranée. — La Commission de la Méditer- ranée, réunie à Monaco à l'occasion de l'inauguration d'ensemble CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE du Musée océanographique, ayant, dans sa séance du 30 mars 1910, recu plusieurs projets relatifs à l’orga- nisation d'un plan de travaux à exécuter en commun dans les stations riveraines de la Méditerranée!, a chargé les auteurs de ces projets de les coordonner et de s'entendre pour les fusionner en un seul. En conséquence, MM. le Professeur Joubin, du Muséum de Paris, le Professeur Nathansohn, de l'Uni- versité de Leipzig, le D' Richard, directeur du Musée de Monaco, se sont réunis et ont préparé un travail nouveau qui a été soumis à la Commission de la Médi- terranée, dans une séance tenue le 1er avril, à laquelle avaient été convoqués les directeurs ou délégués de stations maritimes présents à Monaco. La discussion du projet à abouti à l'adoption du texte définitif suivant : Déclaration préliminaire. — 11 est entendu que chaque station conserve, comme par le passé, sa com- plète liberté pour ses recherches et ses publications. Mais il est désirable qu'en outre de ses travaux parti- culiers une entente permette l'exécution de travaux sur un programme commun, dans la mesure des moyens de chaque station. La présente entente a pour but de coordonner et de synchroniser certains travaux d’un intérèt général, de facon à ce que, le but, les méthodes, les instruments étant autant que possible identiques, les résultats soient comparables. On arrivera ainsi à une connais- sance plus précise de la zone littorale de la Méditer- ranée et à la solution d'un certain nombre de pro- blèmes importants bien définis. Il va sans dire que, si des stations non méditerra- néennes acceptent de travailler, pour d’autres mers, à la réalisation de ce plan, la Commission ne peut qu'approuver et encourager cette décision qui est vive- ment à désirer. S. A. S. le prince de Monaco consent à centraliser au Musée de Monaco les résultats de ces travaux. Article 1%, — Chaque station établira une carte bathymétrique de sa région, à l'échelle de 1/50.000, sur le modèle de celle qui a été publiée par le Dr Richard, dans le n° 160 du Bulletin de l'Institut Océanographique de Monaco. Artiele 2, — Chaque station établira la carte litho- logique de sa région en se servant des instructions données par le Professeur Thoulet (Bulletin de l'Ins- titut Océanographique, n° 169) et en employant, de préférence, le sondeur Léger. Article 4. — Chaque station étudiera les conditions hydrologiques de sa région d'après la méthode géné- rale adoptée à la station de Monaco (établissement de «eux points de repère tixes en mer, où l’on fait toutes les semaines, à jour fixe, des prises de température et des prises d'eau à la surface et à diverses profon- deurs). Article 4. — Chaque station entreprendra l'étude de la distribution géographique de cinquante espèces d'animaux dont la liste sera arrêtée par une entente ultérieure entre les stations. On se servira de la carte n° { pour indiquer la distribution des êtres sédentaires adultes ou immatures et la marche des animaux migrateurs. Article 5. — A chacun des points d'étude déter- minés à l’article 3, on fera des prises hebdomadaires verticales du plankton par des méthodes aussi voisines que possible de celles qui sont usitées à Monaco. Article 6. — Les mémoires relatifs à l'Océanogra- phie seront complétés par un court résumé, fait autant que possible par l’auteur, qui sera publié dans le Bul- letin de l'Institut Océanographique de Monaco. . Article 7. — 11 y a lieu d'entreprendre la publica- tion par fiches séparées, analogues à celles de la 1 Voir la FRevue du 15 mai 1910. Paleoniologia Universalis, d'un Atlas de la de la flore de la Méditerranée. Article 8. — Les diverses cartes partielles obtenues dans les stations devront être fusionnées pour stituer des cartes d'ensemble relatives aux sujets de travaux proposés. Article 9. — On demandera aux Gouvernements riverains d'autoriser leurs agents maritimes à fournir à l'Institut Océanographique les renseignements utiles pour les recherches ci-dessus indiquées. Note. — Les directeurs de stations et les personnes compétentes sont priés d'envoyer leurs propositions relatives aux cinquante espèces d'animaux et de plantes à étudier, conformément à l'article 4, à M. le Professeur Joubin, 55, rue de Buffon, à Paris. Une liste définitive, résultant de la fusiondes listes envoyées, sera établie et communiquée à tous les directeurs de stations. faune el con- divers $ 6. — Enseignement et Sociétés Personnel universitaire. — M. J. Guinchant, maître de conférences à la Faculté des Sciences de Caen, est nommé professeur de Physique expérimen- tale à la Faculté des Sciences de Bordeaux. M. Bénard, maître de conférences à la Faculté des Sciences de Lyon, est nommé professeur de Physique générale à la Faculté des Sciences de Bordeaux. La Société de secours des Amis des Sciences. — La Société de secours des Amis des Sciences vient de renouveler son bureau. Son prési- dent. est M. Darboux, secrétaire perpétuel de l’Aca- démie des Sciences; son vice-président est M. Picard, président de l’Académie des Sciences; le secrétaire général est M. Joubin, professeur au Muséum. Cette Société vient en aide aux veuves, aux orphe- lins des savants, des inventeurs tombés dans la misère, aux savants eux-mêmes vaincus dans la lutte pour la vie, car presque jamais ils ne savent tirer profit de leurs découvertes et ils meurent sans avoir pu assurer l'existence de leur famille. Que de gens, d'industriels, de sociétés, plus prévoyants ou plus adroits, ont su s'enrichir du labeur des savants sans qu'ils en aient eu leur part! C'est à ces heureux que la Société fait appel pour secourir les savants malheureux. Près de 90 veuves, plus de 70 enfants lui doivent l'existence; elle entretient, en outre, 20 des plus âgés à la maison de retraite Galignani. Ses fondations par- ticulières lui permettent de secourir une trentaine d'autres déshérités. Mais tout cela est insuflisant en présence des misères qui — le public l'ignore trop — abondent dans ce monde pourtant si méritant. La Société de secours des Amis des Sciences demande à tous de l'aider dans son œuvre de charité scientifique. Il est si facile de lui envoyer 10 francs tous les ans ou 200 francs une fois pour toutes. Le secrétaire, M. Jou- bin, professeur au Muséum, 55, rue de Buffon, à Paris, se tient à la disposition de tous ceux qui voudront bien lui demander des renseignements et s'intéresser à cette œuvre si profondément humaine et répara- trice. Le Congrès scientifique international amé- ricain de Buenos-Ayres. — A l’occasion des fêtes du centenaire de l'indépendance de la République Argentine, un Congrès scientitique international amé- ricain, organisé par la Société scientifique argentine, se tiendra à Buenos-Ayres du 10 au 25 juillet. M. E. Herrero Ducloux, professeur à l'Université de Buenos- Ayres, vice-directeur du Musée de La Plata, a accepté d'écrire pour la Revue un compte rendu de cette réu- nion, qui promet d'être une manifestation très inté- ressante du mouvement scientifique latin-américain. & 12 PIERRE DUHEM — LA MÉCANIQUE EXPÉRIMENTALE LA MÉCANIQUE EXPÉRIMENTALE A PROPOS D'UN LIVRE RÉCENT: « Les Anglais, écrivait il y a dix ans M. Henri Poincaré*, enseignent la Mécanique comme une science expérimentale; sur le continent, on l’expose toujours plus ou moins comme une science déduc- tive et a priori. Ce sont les Anglais qui ont raison, cela va sans dire ; mais commenta-t-on pu persévérer si longtemps dans d’autres errements? Pourquoi les savants continentaux qui ont cherché à échapper aux habitudes de leurs devanciers, n'ont-ils pas pu le plus souvent s’en affranchir complètement?» A cet usage que l'on à pris, en nos chaires de Facultés, de traiter la Mécanique comme une science abstraite, déductive que l’Arithmétique, M. Poincaré cherche une explication tirée de la nature même des principes de la Mécanique. À mon humble avis, l'explication n'est pas là; mais ilest, je pense, infiniment heureux que le grand algébriste l'ait adoptée, car, pour la développer, il a soumis les postulats de la Mécanique à une eri- tique très pénétrante qui a, tout aussitôt, vivement altiré l'attention de tous ceux qui aiment à philo- sopher sur les fondements de la Science. Pour ma part, ce n'est pas à une profonde épi- stémologie que je demanderais l'explication du phé- nomène signalé par M. Poincaré, mais à quelques remarques psychologiques bien simples. aussi Si l'enseignement de la Mécanique a pris, en France, la forme étrange que signalait l’illustre analyste, il le doit, je pense, à la tournure d'esprit de ceux qui sont chargés de le donner. [ls sont mathématiciens et ils sont professeurs de Faculté ; ils ont done marqué leur cours de Mécanique des caractères gravés en leur intelligence par les ten- dances des mathématiciens et par les routines des Facultés. « Les Mathématiques, M. Bouasse en écrit excellemment un article récent”, sont non pas 4 II. Bouasse, Professeur à la Faculté des Sciences de Tou- louse : Cours de Mécanique rationnelle et expérimentale, spécialement écrit pour les physiciens et les ingénieurs, conforme au programme du certificat de Mécanique ration- 2elle. 1 vol. gr. in-8°, 692 p. Paris, librairie Ch. Delagrave, 4910. (Prix : 20 fr.) 2 Henri Poincaré: Sur les principes de la Mécanique (Biblio- thèque du Congrès international de Philosophie. WI. Lo- gique et Histoire des Sciences, Paris, 1901). Reproduit dans : Hexr1 Poincaré, La Science et l'Hypothèse, p. 110. 3 H. Bouasse : Développement historique des théories de la Physique (Scienza, vol. VIF, p. 281, 1910). mais l’ensemble des formes abstraites de raisonnement nécessitées par les autres. » On ne saurait mieux dire que les Mathématiques doivent être non pas un but, mais un moyen, quelles doivent être cullivées et déve- loppées non pour elles-mêmes, mais pour l'usag des Sciences de la Nature. De la fin du xvi° siècle jusqu'au milieu du xix° siècle, les grands géomètres paraissent avoir presque tous entendu de la sorte le rôle des Mathé- matiques. Mais, depuis, la tendance de l'esprit des algébristes a singulièrement changé d'orientation : la plupart d'entre eux sont devenus absolument sourds à la voix de la Physique criant à leur science l'énoncé de problèmes nouveaux dont l'étude de la Nature attendait anxieusement la solution ; exelu- sivement soucieux de rendre leur analyse toujours plus générale, loujours plus rigoureuse, ils n'ont plus cherché, en la Géométrie, que l’occasion de montrer l'extrème pénétration et l’extrème sou- plesse de leur sens logique. On leur avait confié l'arsenal où se devaient construire les croiseurs puissants, rapides, maniables dont l'esprit humain avait besoin pour explorer en tous sens l'immense océan de la Physique; ils n'ont construit que de gracieux modèles, bijoux finement ciselés qui se peuvent admirer derrière les vitres d'un musée, mais que gàlerait irrémédiablement le moindre contact avec les flots de la réalité. C'est à ces mathématiciens que l’on a contié l'enseignement de la Mécanique. Leurs yeux, de- venus sans regard pour le monde extérieur, et comme tournés en dedans, n'ont apercu aucun des mille mouvements qui, au ciel et sur terre, atten- daient qu'on en diseutât les lois et qu’on les mit en équations; ils ont simplement cherché comment les notions de vitesse, de masse, de force, amenées au plus haut degré d’abstraction, vidées de tout contenu réel, pourraient servir à composer d'une manière tout arbitraire des problèmes que l’ana- lyse sût élégamment résoudre. Mais ces hommes n'étaient pas seulement mathé- maticiens; ils enseignaient en des chaires de Facultés des Sciences ; ils avaient donc senti passer le souffle desséchant qui a stérilisé et exténué l'en- seignement des Facultés. Nos amphithéâtres ne sont plus les lieux où la pensée désintéressée se manifeste et se proclame, d'où elle se propage de proche en proche, faisant germer sur son passage le pur amour de la Science; ce sont des salles où une science comine les autres, PIERRE DUHEM — LA MÉCANIQUE EXPÉRIMENTALE un instructeur prépare systématiquement un cer- {ain nombre de jeunes gens à des examens qui leur doivent assurer un traitement déterminé. L'examen n'est plus l'épreuve par laquelle le disciple se montre instruit des idées du maître ; c'est un exer- cice dont la forme est arrêtée d'avance, et l’ensei- gnement est disposé de telle sorte que l'étudiant, assoupli, puisse, sans effort, se mouler en celte forme. On a donc enseigné la Mécanique, dans nos Fa- cultés, non pas de telle manière que nos élèves sussent analyser les mouvements et les forces qu'ils verront jouer sous leurs yeux lorsqu'ils entreront dans un laboratoire de Physique ou dans une usine, mais de telle sorte qu'ils fussent en état de traiter, en un temps déterminé, les problèmes qu'il est d'usage de poser à la Licence ou à l'Agrégation. « J'admire, écrit M. H. Bouasse', que les can- didats à l’Agrégation de Mathématiques résolvent les merveilleux rébus offerts à leur sagacité. Géné- ralement sur un gyroscope se promène un hyper- boloïde, qui glisse sur un tore, lequel est astreint à rouler et à pirouetter sur un hélicoïde, ..….; l'énoncé remplit une page de papier ministre. Ces jeunes gens résolvent le problème en sept heures, comme qui plaisante. Je n'ignore cependant pas qu'en les placant devant une machine d'Atwood, on les embarrasserait forl. » C'est qu'en effet, les étudiants qui ont suivi dans les Facultés un cours de Mécanique rationnelle n'ont jamais vu aucun instrument, n'ont jamais manipulé aucun appareil. « Soient M la masse d'un corps et I le moment d'inertie de ce corps par rapport à l'axe Ox..... », dit le professeur de Mécanique. Si l'étudiant s'avisait de demander ce que sont cette masse M et ce momert I, « ce sont des nombres », lui répondrait-on. « Voici un corps déterminé, mon encrier, mon cahier, la table qui est devant vous; comment puis-je connaître les nombres que, pour appliquer votre formule à ce corps-là en particulier, il faut substituer à M et à 1? » — «Je n'en sais rien et, d’ailleurs, cela ne me regarde pas; mon collègue de Physique vous l’apprendra. » Ainsi, comme, en aucun cours de Mécanique rationnelle, on n'apprend à se servir d’une balance ni à mesurer un moment d'inertie, on condamne les élèves à n'apprendre que des formules purement littérales, sans qu'ils puissent deviner comment les diverses grandeurs qui y figurent se concrélisent en nombres en chacun des cas particuliers aux- quels il y a lieu d'appliquer ces formules. Il y a quelques années, la réforme qui a clivé en une multitude de certificats nos trois anciennes { IH. Bouasse : Cours de Mécanique rationnelle et expéri- mentale. Avant-propos, p. 1. 153 licences scientifiques, a prescrit que chacun de ces certificats, le certificat de Mécanique rationnelle comme les autres, comporterail un exercice pra- tique. Certains physiciens — j'en étais — s'imagi- nèrent avec joie que les étudiants en Mécanique allaient enfin franchir le seuil du laboratoire, qu'ils verraient osciller un pendule et vibrer un diapason, qu'ils mettraient des poids dans les plateaux d'une balance. Le temps de l'examen arriva. A des jeunes gens munis de papier blanc, on dicta : « Un corps de telle figure et de telle grandeur est rempli d'une matière homogène de densité £; calculer son mo- ment d'inertie par rapport à lel axe. » C'était le texte de l'exercice pratique ! En faisant de la Mécanique non pas seulement une discipline abstraite, mais un exercice tout artificiel, en la réduisant à n'être qu'une collection de recettes propres à résoudre les problèmes posés aux examens, les mathématiciens qui ont mission d'enseigner cette science n'ont pas seulement rendu leurs lecons vaines et illusoires; ils ont encore gravement compromis un enseignement tout proche du leur, celui de la Physique. Les physiciens avaient bien entendu dire que la Mécanique était la première des Sciences physiques, parce qu'elle est la plus simple d’entre elles et le fondement de toutes les autres; mais ils se sont pris à douter de cette vérité lorsqu'ils se sont aventurés à connaître ce que l’on donnait dans les Facultés pour Mécanique rationnelle ; comme cette Méca- nique-là ne pouvait ètre d'aucun usage à qui n'était candidat ni à la Licence ès sciences mathéma- tiques, ni à l'Agrégation de Mathématiques, ils ont ignoré qu'il existät une autre Mécanique, vraiment physique, celle-là, et utile, et riche en apercus sur le monde extérieur. Et l’on vit alors maint physicien enseigner l'Électricité ou l'Optique sans avoir ja- mais oui une lecon sur l'Attraction newtonienne, ni sur l'Hydrodynamique, ni sur l'Élasticité. Théo- rie de l’Attraction newtonienne, cependant, Hydro- dynamique, Élasticité, ce sont là les matériaux avec lesquels se doivent construire les théories de l'Élec- tricité et de l'Optique, si l’on croit que, dans le monde, des corps, tout se réduit à la figure et au mouvement ; et si l’on ne croit pas à cette réduction de toute la Physique au Mécanisme, ces sciences-là n'en demeurent pas moins les types simples que celles-ci, en leur complexité toujours croissante, doivent imiter. Lorsqu'un physicien délaisse la Mécanique, il offense la Logique; or, la Logique offensée se venge toujours, et durement. Privés de ce qui devait être leur fondement naturel, les enseignements de Phy- sique ne présentent plus à la raison rien quisemble solide et affermi. Aujourd'hui, on à perdu jusqu'au souvenir de ces théories solides, claires, bien or- = = PIERRE DUHEM — LA MÉCANIQUE EXPÉRIMENTALE données, harmonieuses qui ont fait la gloire de la Physique francaise au temps où les physiciens de France étaient passés maîtres en Mécanique. Il En nos Facultés done, les cours de Mécanique et de Physique souffrent d'un malaise profond et que certains peuvent croire mortel. Cependant, si le mal est grand, les hommes de bonne volonté ne manquent pas, qui souhaiteraient de le conjurer. J'ai connu des mathématiciens, chargés de profes- ser la Mécanique, qui voulaient que leur enseigne- ment reprit contact avec la réalité. J'ai connu des physiciens qui voulaient apprendre la Mécanique, mais une Mécanique qui fût utile à leurs études. Les uns et les autres se trouvaient en un embarras extrème. Comment connaître, disaient les premiers, les problèmes non de licence ou d’agrégation, mais de Physique ou d'industrie, auxquels il convient d'appliquer les théorèmes que nous enseignons ? Nous faudra-t-il, pour cela, avant de monter en notre chaire, faire un stage de plusieurs années en des usines ou des laboratoires ? Comment apprendre, disaient les seconds, les parties de la Mécanique dont nos théories physiques ont à faire usage? Quel labeur sera le nôtre, s'il nous faut pour cela, sans guide ni conseil, dépouiller une foule de livres et de mémoires écrits en toutes les langues de l'Europe ! Les doléances des uns comme des autres venaient toujours se résoudre en ce souhait : Qui done nous donnera un traité français de Mécanique physique et expérimentale, de Mécanique réelle, de Méca- nique utile !…. Ce traité, le voici. L'auteur n’est pas un mathématicien; c'est un physicien, qui vit au laboratoire, qui imagine, construit et manipule des appareils, encore que cet expérimentateur soit docteur ès sciences mathéma- tiques et qu'il n'ait pas délaissé l’Algèbre au lende- main de sa soutenance de thèses. L'auteur est professeur en une Faculté des Sciences; mais s'il est quelqu'un, parmi nous, qui ait résolument rompu avec nos routines et nos pré- jugés, s'il en est un qui ait jeté au feu l'idole des examens à laquelle beaucoup d’entre nous sacrifient avec trop de dévotion, c'est assurément lui. Les déplorables habitudes nées du « bachot » et du « bachotage » ont été combaitues par lui! avec une rudesse qui est la sainte colère du bon sens exaspéré. Donc, après avoir écrit un cours de Physique dont les six volumes nous offrent le tableau complet de cette science immense, — est-il en France un 4H. Bouasse: Bachot et bachotage. Paris, 1910. autre professeur qui eût osé entreprendre une pareille œuvre et qui, l'ayant entreprise, l’eût menée à bonne fin? — M. Henri Bouasse, professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse, vient de nous donner un Cours de Mécanique rationnelle et expé- rimentale, spécialement écrit pour les physiciens et les ingénieurs, conforme au programme du cer- tilicat de Mécanique rationnelle. Analyserai-je cet ouvrage? C’est inutile. Le titre, un peu long, que je viens de transcrire, nous dit très exactement ce que le livre veut être; il veut être ce traité qu'ingénieurs, professeurs de Mécanique, physiciens, réclament depuis si longtemps; lorsque j'aurai déclaré qu'il tient très fidèlement les pro- messes formulées par le titre, j'aurai dit, je crois, que la librairie Ch. Delagrave à publié un des livres les plus utiles qui aient paru depuis bien des années. Cher collègue, professeur de Mécanique ration- nelle à la Faculté de **, qui me lisez, vous allez vous empresser d'acquérir le Cours de Mécanique de M. Bouasse. Mais à peine l’aurez-vous recu que vous vous écrierez : Qu'il est volumineux! Qu'il est dense! Jamais je ne pourrai exposer tout cela dans mon cours! Jamais mes élèves ne pourront emma- gasiner tant de connaissances! Assurément, le traité de M. Bouasse donne l'impression d'une masse imposante ; assurément, le nombre des faits inécaniques qui se trouvent comprimés en ces 100 pages est extraordinaire. Le professeur dont le cours réciterait purement et simplement ce traité produirait, sur ses auditeurs, l'effet d'une assom- mante massue; l'étudiant novice qui croirait le devoir absorber page par page se trouverait bientôt gorgé à refus. Mais ce n’est ni pour un lel profes- seur, ni pour un tel élève que M. Bouasse a écrit; il ne fait pas aux étudiants l'injure de les prendre pour des perroquets ni à ses collègues l’insulte de les assimiler à des phonographes. Il les suppose les uns et les autres doués d'intelligence et de libre arbitre, partant capables de choisir; et, pour que leur choix füt plus indépendant, il à réuni en leur faveur une collection d’une extrême richesse. Possesseur de cette multitude de faits, le professeur pourra décider à loisir quels sont ceux dont il illustrera, en son cours, les principes généraux qu'il expose, quels il recommandera à la lecture de ses auditeurs, quels il transformera en problèmes propres à exercer leur sagacité; alors, bien loin de reprocher à M. Bouasse l’opulente plénitude du Cours de Mécanique, il le remerciera de lui avoir rendu si facile l’art de varier ses leçons. Plus encore, il remerciera le professeur de Tou- louse de nous avoir montré comment la Mécanique peut, dans nos Facultés, reprendre son rang de science expérimentale. Non seulement, au cours de l'ouvrage, de nombreuses expériences viennent H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR 165 servir de vérifications aux théorèmes que les équa- tions ont démontrés, mais, à la fin du livre, un chapitre entier est consacré à l'installation des manipulations. Après avoir lu ce chapitre, quel professeur de Mécanique rationnelle ne voudra pas rendre digne de son litre l'épreuve pratique de l'examen de licence? Quel est celui qui ne souhai- tera pas ardemment d’avoir un laboratoire où, sous la direction d’un préparateur expérimenté, les étu- diants s'exerceront chaque semaine au maniement des instruments qui mesurent les grandeurs étu- diées en Cinématique, en Statique, en Dynamique ? Non, il voudra mieux encore. Désireux d'affirmer la continuité parfaite qui unit la Mécanique à la Physique, soucieux d'une sage économie qui craint les inutiles doubles emplois, il souhaitera que le laboratoire de Physique ait ses salles de Méca- nique, ses manipulations de Mécanique. En nos Facultés, où tout semble organisé en vue de bafouer la Logique et d'insulter au bon sens, les diverses sciences sont jusqu'ici comme sans lien avec l’objet et la méthode des sciences enseignées si chacune d'elles avait son objet sa méthode, voisines ; tandis que la Science tend de jour en jour plus parfaitement à réaliser un organisme dont les diverses parties soient étroitement solidaires les unes des autres, nos lecons isolent ces parties au point que nos élèves ne puissent jamais rajuster les fragments épars de ce jeu de patience. En reprenant une forme expérimentale, en tendant une main à la Physique tandis que, de l'autre, elle continuera à embrasser l'Analyse mathématique, la Mécanique reformera l’un des liens qui ont élé si malencontreusement dénoués. Nous avions mis en pièces le miroir de la Vérité; M. Bouasse nous apprend à souder les uns aux autres quelques-uns des fragments épars. Pierre Duhem, Correspondant de l'Institut, Professeur de Physique théorique à la Faculté des Sciences de Bordeaux. LES PROBLÈMES DE Quoique la technologie de la fabrication du cuir soit l'une des plus anciennes, et qu'elle ait été for- tement développée par l'expérience accumulée des âges, elle est actuellement moins influencée par les connaissances scientifiques que beaucoup d'autres industries. Ce fait est dû moins à une ignorance ou à une résistance spéciale des tanneurs qu'aux diffi- cultés extraordinaires des problèmes qu'elle pré- sente el aux risques et aux frais des expériences. Dans ces dernières années, cependant, on à fait beaucoup pour jeter Ja lumière sur l'obscurité régnante, et le progrès a été hâté par l'introduction de nouveaux agents de tannage, comme les sels de chrome et les aldéhydes, qui sont si éloignés des anciennes méthodes qu'ils ont rendu sans valeur la plupart des expériences précédentes, et qu'ils ont forcé à adopter de nouvelles méthodes et à en étu- dier les principes directeurs. Les peaux des animaux se présentèrent naturel- lement à nos ancêtres comme propres à l'habille- . ment et à d'autres usages; mais, humides, elles étaient soumises à une usure rapide, tandis que, sèches, elles devenaient dures comme de la corne et, par conséquent, mal adaptées à la plupart de leurs emplois. Conserver la douceur tout en préser- vant les peaux par le séchage fut le premier pro- blème qui se présenta, et ilfut résolu de diverses L'INDUSTRIE DU CUIR | facons aux temps préhistoriques, plutôt probable- ment par accident que par expérience raisonnée. Ainsi les peaux qui étaient huilées et tendues pen- dant le séchage restaient douces et flexibles et devenaient résistantes à l'humidité et à la décom- position. On constata que la fumée de bois, qui devait toujours être présente pendant le séchage dans les habitations primitives, aidait à cette pré- servation, et certains fruits et écorces, peut-être employés d'abord comme colorants, eurent un effet encore plus marqué. Il est possible que l’alun, qui, dans quelques contrées, est une efforescence natu- relle des schistes contenant de l’alumine et pyrites, ait été d'abord employé comme substitut du sel, dont les qualités préservatives étaient con- nues depuis longtemps. Le poil, détaché d'abord accidentellement par putréfaction, fut ensuite enlevé plus commodément par l’action de la chaux, et des perfectionnements dans la teinture le finissage furent introduits graduellement, de sorte que, même dans l'ancienne Egypte, « l'Art et Mys- tère » du tanneur avait atteint un haut degré de développement dans le détail, quoique les principes, alors et presque jusqu'aujourd'hui, fussent ceux du sauvage primitif. Même pendant le siècle dernier les améliorations ont consisté plutôt dans la substi- tution de la machinerie au travail à la main que dans un abandon radical des idées anciennes. Pour discuter les problèmes qui se présentent aujourd'hui, il sera bon de donner un bref apercu des et 466 H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR des méthodes actuelles. Tandis que les premiers consommateurs de peaux s’efforçaient probable- ment de conserver le poil et la laine, ceux-ci sont devenus inutiles pour la plupart des usages présents du cuir, et les premiers stades de la fabrication moderne sont généralement consacrés à les enlever. Dans quelques cas, spécialement dans l'enlèvement de la laine des peaux de mouton, où la laine a plus de valeur que la peau, la méthode primitive de putréfaction est toujours employée, quoique dans de meilleures conditions, les peaux étant suspen- dues dans des chambres d'humidité et de tempéra- ture soigneusement réglées et le progrès de l'opé- ration étant étroitement surveillé. La laine et le poil, quoique croissant en apparence de la vraie peau (corium), sont en réalité le produit d'une couche extérieure mince de tissu cellulaire (épi- derme), qui non seulement couvre la surface entière, mais entoure le bulbe du poil et lui forme une gaine. Les cellules molles de cette couche sont ‘ rapidement désintégrées par la putréfaction, et ainsi le poil est détaché. Tandis que la peau elle- même est composée de fibres blanches de collagène, Substance qui se transforme immédiatement en gélatine par chauffage avec l'eau, l’épiderme et le poil consistent en kératine, qui est proche parente de l’albumen coagulé. Aussi l'effet des réactifs chimiques sur les deux couches diffère grande- ment. Tandis que la fibre gélatineuse est surtout gonflée et découpée en filaments plus fins par l'action des alcalis, l'épiderme est amolli et finale- ment dissous. La chaux est généralement employée dans ce but, non seulement à cause de son bas prix, mais parce que sa solubilité limitée permet de l'ajouter en excès sans former une solution dange- reusement concentrée; car, à mesure qu'elle est consommée par la peau, elle est immédiatement remplacée aux dépens de la portion non dissoute. Pratiquement, le processus a lieu dans des fosses où les peaux sont placées dans un lait de chaux, d'où elles sont relirées à des’ intervalles d'un ou deux jours; la liqueur est brassée, et, s’il est néces- saire, on y ajoute plus de chaux avant deles replacer. L'opération nécessite une à trois semaines suivant le caractère des peaux et l'usage en vue duquel on les traite. La suspension et l'agitation mécanique dans la liqueur calcique hâtent le processus en assurant un renouvellement rapide de la solution saturée, mais elles sont plus fréquemment emplovées sur le continent qu’en Angleterre. Quoique la chaux soit le principal agent utilisé, l’action en est fréquemment accélérée par l'addition desulfure desodiumou, occasionnellement, d'autres sels alcalins. L'action des sulfhydrates solubles est particulière et complètement différente de celle des bydrates, gonflant très peu le corium et dissolvant rapidement les structures en kératine. Toutefois, Stiasny" a montré qu'en l'absence complète d'ions hydroxyle, cette action solvante n'a pas lieu; la condition la plus favorable est la présence d'ions SH et OH à égale concentration. Cette condition est remplie quand le sulfure de sodium est dissous dans l'eau, dont il prend un équivalent pour former une solution équi-moléculaire d'hydrate et de sulfhy- drate de sodium; mais des proportions plus faibles de sulfhydrate accélèrent matériellement l’action de la chaux, en conservant la valeur du poil, qui est complètement attaqué et détruit en solutions concentrées. Les solutions de chaux fraiche sont pratiquement stériles; mais, lorsqu'elles se char- gent de matières organiques dissoutes, elles devien- uent capables de supporter une grande variété de vie bactérienne, quoique, par la présence d'un excès de chaux, leur alcalinité reste inaltérée, excepté en ce qui concerne l'ammoniaque. Tandis que les chaux stériles ont peu d'effet solvant, mais un grand effet de gonflement sur la fibre de la peau, les bactéries ou leurs produits augmentent le premier et diminuent le dernier, et en même temps accroissent l'action solvante sur l'épiderme, et hâtent l'épilation. Aussi c'est un axiome, dans le tannage du cuir pour semelles, où l'on désire le poids et la solidité maxi- num en mème temps que le volume, d'employer des chaux neuves plutôt que vieilles; mais, comme les chaux tout à fait fraiches épilent très lentement, si ce n'est pas du tout, il est usuel de commencer le processus dans des liqueurs qui ont déjà été em- ployées pour un ou deux tas de peaux, en finissant dans de la chaux presque fraiche. Dans le cas de peaux et de cuirs mégis, où l'on désire une certaine solution de la substance inter-fibrillaire, on se sert généralement de l'effet solvant plus accentué des vieilles chaux. La théorie du processus n’est nulle- ment élucidée complètement, et, jusqu'à ce que cela soit fait, le contrôle chimique complet est impos- sible, l'effet des divers constituants n'étant pas bien connu. Même la détermination de la substance-peau dissoute est difficile, parce qu'il est impossible jus- qu'à présent de distinguer les produits de l’épiderme de ceux du corium. Une fois le passage à la chaux terminé, le poil est enlevé mécaniquement, soit à la main avec un couteau émoussé à deux poignées, soit à la machine, ou quelquefois, quand la peau à été traitée par les sulfures, par une simple friction dans un tambour tournant. La graisse et le tissu cellulaire détachés sont également grattés du côté de la viande, et, dans le cas du cuir pour semelles, la peau est enroulée en gros morceaux et restes qui sont ltannés séparément. 1 Gerber, 1906: Journ. of the Soc. of Chemical Ind., 1907, P- 25. H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU Avant le tannage, il est nécessaire d'enlever la chaux, dont la peau retient environ 3 °/, de son poids humide et qui causerait la décoloralion el détruirait le tanin, où au neutraliserait l'acidité des liqueurs dans lesquelles on l'intro- duirait. Dans le cas du cuir pour semelles, on désire conserver la peau à l’état gonflé, et autrefois elle était fréquemment portée dans les liqueurs après un seul lavage léger à l'eau, qui n'enlève qu'un peu de la chaux absorbée parce que les alcalis sont retenus obstinément par la substance moins peau, peut-être à l’état de combinaison chimique: qui est lentement hydrolysée. Aujourd'hui, même dans le tannage du cuir pour semelles, une partie au moins de la chaux est généralement enlevée par le traitement acide, car, avec les matières tannantes maintenant en usage, spécialement avec les extraits et le lannage rapide, la fermentation produit peu d'acides. L'emploi des acides pour la purge de chaux n'est, toutefois, pas aussi simple qu'on le supposerait à première vue, car l'affinité de la peau pour les acides n'est pas moindre que pour les alcalis, et le gonflement qu'ils produisent à un effet d'autant plus pernicieux sur le cuir qu'il n’est pas neutralisé par les liqueurs, qui doivent posséder .elles-mèmes une réaction acide. 11 est donc essen- tiel, si l’on utilise des acides forts, qu'il n'y ait pas d'excès sur la quantité nécessaire pour neutraliser la chaux, car l'acide est absorbé par la peau à saturation, même de solutions très diluées. Avec des acides faibles, l'opération est plus aisée, car leur faible concentration hydrionique prévient un gonflement excessif, par suite de l'hydrolvse du composé de l'acide et de la peau; un acide aussi faible que l'acide borique peut être employé en grand excès sans préjudice, et les acides acétique, lactique et même formique requièrent beaucoup moins de précautions que les acides minéraux plus forts. IT Dans le cas des cuirs légers employés pour la partie supérieure des bottines et pour d'autres usages où la douceur et la flexibilité sont requises, il est essentiel que le tannage commence avec la peau non gonflée; aussi, comme même les acides minéraux forts à une grande dilution sont fréquem- ment employés pour enlever la majeure partie de la chaux, le processus est généralement complété par l’une ou l'autre des méthodes de fermentation usitées depuis un temps immémorial. La plus simple de celles-ci est le trempage au son, dans lequel du son est infusé dans de l’eau chaude et soumis à la fermentation ; il se produit des acides lactique et acétique aux dépens des glucoses, formés par l’action d'un ferment inorganisé, la CUIR 167 céréaline, présent dans le son, sur l'amidon qu'il contient, Les glucoses sont ensuite fermentés pa des bactéries, toujours présentes dans les cuves, el dont l’action est inhibée par un petit excès d'acidité de sorte que le processus est en réalité un simple « rabattage » d'acide, dans lequel, aussi longtemps que les bonnes bactéries sont seules présentes, l'acidité se règle elle-même automatiquement. En mème lemps, des quantités considérables d'hydro- gène et d'acide carbonique sont dégagées, ce qui fait flotter les peaux dans la liqueur". Malheureusement, il est impossible de travailler dans des conditions bactériennes déterminées; les bactéries putréfactives et butyriques sont toujours présentes et peuvent prendre le dessus en produi- sant des effets désastreux. Ce risque ne peut être diminué qu’en portant une grande attention à la température et aux autres conditions, telles que la quantité de glucose, l'acidité et l'âge des liqueurs qui favorisent le développement des organismes normaux, et en s'approvisionnant, quand nécessaire, d'une bonne quantité d'organismes fermentatifs dans une infusion travaillant norma- lement. Un nettoyage fréquent des récipients avec de l'eau chaude et le maintien d’une température constante d'environ 21° GC. sont des précautions utiles. c'est Les bactéries putréfaclives ne prospèrent pas aussi longtemps que le bain reste acide, et le plus grand danger provient des organismes formant l'acide butyrique qui, par son action puissante de gonflement et de dissolution, peut détruire comple- tement les peaux en quelques heures. Quoique, à cause de sa simplicité, j'aie d'abord mentionné le procédé de trempage, il est rarement employé seul, mais en général seulement pour compléter l'enlèvement de la chaux après passage dans les confits, qui sont des méthodes de fermen- tation d’un caractère tout différent, dans desliquides contenant des matières azotées et de réaction alcaline. Les effets chimiques causés par les fermentations bactériennes sont dus non pas tant aux changements directs produits dans les organismes, mais plus généralement à l’action des ferments digestifs ou zymases qu'ils sécrètent dansle liquide. Ces ferments inorganisés, comme la pepsine de notre estomac, ne sont pas des êtres vivants, mais possèdent le pou- voir de causer un changement chimique dans les substances sur lesquelles ils agissent, sans être eux- mêmes détruits. Ce sont, en fait, des agents cataly- tiques. Le confit désigné en Angleterre sous le nom de 1 Woop : 1893, p. 422; p- 123. Jouran.of the Soc. of. Chem. Ind., 1890, p. 21; 4897, p. 510. British Assoc. Reports, 1893, H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR hate est une infusion en fermentation de fiente de pigeon ou de poule, et il est usuellement employé pour les cuirs mégis lourds, tandis que le puer, fait de même avec des excréments de chien, est employé pour les cuirs plus fins et plus minces destinés aux chaussures légères, aux gants et à la reliure. Quoi- qu'ils diffèrent tous deux par leur effet et leur mode d'emploi, ils dépendent d’un principe commun : l'utilisation de la fermentation azotée, surtout anaérobique, et de ses produits; mais, dans les deux cas, les organismes actifs diffèrent et il n'est pas certain si, dans chaque cas, ils dérivent réelle- ment des bactéries intestinales ou constituent des ferments accidentels et étrangers, pour la crois- sance desquels les excréments dilués forment un milieu convenable. Le confit de fiente de chien a été étudié à fond par J. T. Wood‘ et aussi par Popp et Becker. Wood trouva que la liqueur de fiente de chien, filtrée et débarrassée des bactéries, a un effet spé- cifique considérable, et que la présence d'organismes vivants n’est pas essentielle. Même après ébullition, qui non seulement détruit la vie, mais coagule les zvmases présentes, cet effet, quoique très diminué, n'est pas entièrement absent; et Wood a attribué ce qui en restait aux sels des amines et des amino-acides formés par la décomposition de la peau. En substituant du chlor- hydrate de phénylamine aux sels d'amines naturels, et en ajoutant des zymases précipitées par l'alcool de la liqueur du confit, on a obtenu un effet satis- faisant en l'absence de vie, mais toutefois à un prix trop élevé pour l'utilisation technique. Prati- quement, Wood, en collaboration avee Popp et Becker, à produit le succédané du confit de fiente de chien nommé érodine, qui consiste en un milieu de culture de tissu gélatineux peptonisé avec une culture mixte spéciale de bactéries choisies, capable d'attaquer les structures de kératine, mais non de liquéfier la gélatine ; il a été largement employé et avec succès dans quelques branches de la fabrica- tion du cuir, quoique dans d’autres, spécialement dans la fabrication du chevreau chromé, il nait pas pris la place du produit naturel. Bien qu'il soit plus sûr dans son aclion que ce dernier, à cause du caractère défini des ferments utilisés et sentimenta- lement moins répugnant, il n’est pratiquement pas moins odorant que l'original, — qui, sans doute, tire son nom du vieux verbe francais puer, — et il est un peu plus compliqué comme emploi. On à suggéré que l’action spéciale des excréments est causée par l'excès de ferments digestifs qu'ils contiennent. Wood a montré que cette action n'est ‘ Journ. of the Soc. of Chem. Ind., 1894, p. 218; 1895, p. 419; 1898, p. 856 et 1010 ; 1899, p. 117 et 990. pas due à la pepsine, qui agit seulement en solu- tion acide, mais que le ferment pancréatique trvp- sine possède plusieurs des qualités requises, agissant en solution alcaline et non seulement dissolvant les albuminoïdes, mais émulsifiant les graisses; par expérience, il trouva que la trypsine possède des propriétés de confit marquées, quoique le fait qu'elle constitue une nourriture excellente pour les bactéries rende très improbable son exis- tence sans changement dans les excréments de chien, qui doivent toujours subir une fermentation de plusieurs semaines avant usage. Cette idée a été développée par Rühm et Haas, en Allemagne, qui ont produit un confit artificiel sous le nom d'oropon, contenant des produits pancréatiques et du chlo- rure d'ammonium, qui agit aussitôt sur la peau sans fermentation préalable et qui, expérimentale- ment et pratiquement, donne des résultats pleins de promesses, car, en même temps, il enlève la chaux et rend le trempage inutile. On ne peut pas dire, cependant, que le problème du passage en confit ait recu une solution chimique délinitive. Les propriétés requises sont non seule- ment l'enlèvement de la chaux, qui n’est accompli qu'imparfaitement par le passage en confit, s'il n'est pas accompagné par le trempage, mais l’enlè- vement de la graisse par émulsification et la solu- tion des structures épidermiques cellulaires qui restent toujours dans la peau. Une légère solution de la fibre de la peau elle-même, ou du moins de la substance intra-fibrillaire, est également requise en général pour adoucir le cuir, mais elle doit être controlable et très modérée. La liqueur de confit de fiente de chien est tou- jours employée chaude (26° à 32° C.), et son action est très rapide, les peaux minces étant complète- ment réduites en une heure. Cette action rapide la rend tout à fait impropre pour les cuirs épais, dont les surfaces seraient digérées et dissoutes avant que le centre soit pénétré ; on a donc recours à l'action plus douce du confit de fiente d'oiseaux, employé froid pendant quatre ou cinq jours. Non seulement le milieu est ici beaucoup moins azoté, mais les bactéries sont très différentes : elles appa- raissent comme des chaines, en forme de rosaire, de petites cellules sphériques (Streptococcus), qui croissent à basse température, tandis que les bactéries du confit de fiente de chien requièrent presque la chaleur du sang pour se développer. Wood a aussi fait ressortir que la fiente d'oiseaux contient les constituants urinaires qui sont excrétés séparément chez les animaux. On a consacré moins d'études scientifiques au procédé du confit de fiente d'oiseau qu'à celui du confit de fiente de chien; mais il n’y a pas de doute qu'un succédané du premier, analogue à l'érodine, pourrait être H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR 169 préparé par sélection de bactéries convenables et avec un milieu de culture approprié. Il n'y à d'ail- leurs aucune raison pour que tous les effets néces- saires, soit du confit de fiente de chien, soit du confit de fiente d'oiseau, ne puissent être atteints finalement par un traitement purement chimique, sans le risque et l'incertitude qui s'attachent tou- jours à l'action des bactéries et des ferments. III La conversion de la peau préparée en cuir n'est pas moins riche en problèmes non résolus que les processus qui l'ont précédée. Au point que nous avons atteint, nous sommes en présence d'une structure fibreuse gélatineuse plus où moins puri- liée, en réalité une gelée organisée, toujours sus- ceptible d'une putréfaction destructive rapide et devenant par dessiccation une feuille translucide ressemblant à de la corne. Nous pouvons nous de- mander quel est le caractère général du change- ment en une matière sèche,imputrescible et pliable, qui se produit par des agents aussi différents de caractère chimique que les sels de chrome, les lanins végétaux et les aldéhydes. Knapp° a ré- pondu à la question d’une façon générale en 1858, quoique, à vrai dire, sa réponse suggère seulement de nouvelles recherches. Knapp, en effet, dit que la peau brute consiste en fibres gélatineuses gonflées par l'eau qui, par la seule dessiccation, adhèrent et se contractent en une masse presque homogène analogue à de la corne, et que l'essence du tannage est de traiter ces fibres de telle facon qu'elles se dessèchent sans adhérer et qu'elles soient rendues incapables d'ab- sorber de l’eau et de devenir de nouveau adhérentes. Essentiellement, l'explication, un peu grossière, qu'il donne du changement, c'est que les fibres se couvrentsuperficiellement de la substance tannante el deviennent ainsi isolées et imperméables. Cette hypothèse n'est pas très convaincante et n'est pas susceptible de preuve directe ou par l'observation de la couche protectrice; dans le cas de la formal- déhyde, elle est tout à fait insoutenable, et en ce qui concerne le chrome elle est improbable, étant données les faibles quantités d’hydrate de chrome qui suffisent à effectuer le changement. L'hypothèse encore plus ancienne de Sir Humphry Davy, que le cuir est un composé chimique direct, de la nature d'un sel, entre la gélatine et le tanin végétal, ne rencontre pas moins de difficultés; parmi celles-ci, on peut citer la composition très variable, non seu- lement du cuir, mais de la lanno-gélatine précipitée directement. 4 Nalur und Wesen der Gerberei. Braunschweig, 1858. À la lumière de nos connaissances modernes, il semble plus sûr de conclure que, dans les diverses méthodes, des causes différentes chimiques physiques et mécaniques — sont à l'œuvre pour produire l'isolement et la non-absorption des fibres gélatineuses, et qu'il n'est pas nécessaire d'assumer une unité de cause, malgré des similitudes appa rentes dans le résultat final. Ainsi Knapp à pu produire un cuir blanc (qui, d'ailleurs, retournait à l'état de peau par trempage dans l'eau) par la sim- ple déshydratation de la peau avec de l'alcool, qui isolait d’abord les fibres en remplaçant l'eau située entre elles, et les déshydratait ensuite, de telle sorte qu'elles n'étaient plus capables d'adhésion. Par l'emploi de l'alcook contenant une trace d'acide sléarique en solution, les fibres isolées étaient re- couvertes mécaniquement d'une faible quantité de cette substance, qui augmentait sensiblement la souplesse du cuir et sa résistance à l'eau. Un cas plus complexe de production du cuir nous est donné par le procédé du picklage, dans lequel la peau brute est d'abord légèrement gonflée par l'acide sulfurique, généralement avec addition de sel pour contrôler le gonflement, puis traitée avec une solution saturée de sel commun dans laquelle elle devient mince, blanche et imputrescible, et par dessiccation forme un cuir blanc parfait qui est permanent aussi longtemps qu'il reste sec. J'ai étudié très complètement ce cas et j'ai montré avec une grande évidence que la substance peau, qui est amphotère (c'est-à-dire en même temps acide et basique, par suite de la présence simultanée de groupes carboxylés et aminés), forme composé chimique avec l'acide, qui est semi-per- méable au sel et déshydraté par sa pression osmo- tique. De ce procédé on passe facilement au tannage à l’alun et au chrome. L'aluminium et le chrome forment des bases faibles dont les sels ont une réaction fortement acide par suite de leur hydrolyse partielle, en solution dans l’eau, en acide libre et sel basique. En présence de la fibre de peau, l'acide libre est absorbé et fixé, et l'hydrolyse est poussée si loin que le sel basique devient colloïdal et inso- luble dans l’eau ; dans cet état, il forme un revète- ment ou peut-être un composé d'adsorption ou un composé chimique avec la fibre, qui est aussi dés- hydratée par addition de sel et ainsi empèchée de se gonfler ou d’adhérer. Dans le procédé moderne au chrome basique à un seul bain, l'hydrolyse du sel normal de chrome dans la liqueur est toujours poussée aussi loin que possible sans précipitation d'un sel basique insoluble, de sorte que la fixation de petites quantités d'acide par la peau provoque aussi la fixation de quantités relativement grandes de sel de chrome basique, l'acide résiduel étant alors un A70 H.-R. enlevé et le sel de chrome rendu toujours plus ba- sique et insoluble par le lavage subséquent et le lraitement avec le borax ou quelque autre sel alea- lin, opération généralement connue sous le nom de neutralisation. On n’a pas encore délerminé d'une facon défini- tive dans quelles conditions le chrome existe dans la peau : comme oxyde, hydrate ou sel très basique ; mais, quoique la quantité d'acide puisse être réduite presque indéfiniment dans le cuir sans détruire sa qualité, un élat alcalin le rend aussitôt corné et appareminent sous-tanné. La méthode de tannage au chrome à deux bains ne diffère de la précédente qu'en ceci: le sel basique, au lieu d’être immédiatement formé dans la liqueur, est produit dans la peau mème par la réduction de l'acide chromique avec un thiosulfate. On ne sait pas encoce si l’effettannant du chrome, qui est partagé en partie par le fer, l'aluminium et d'autres mélaux formant des sels basiques, est dû à l'absorption et au revétement de la fibre par de l'oxyde de chrome colloïdal dans un état insoluble irréversible, ou à quelque autre sorte de combi- naison plus intime. Le tannage avec les aldéhydes, spécialement avec l'aldéhyde formique, parait être une réaction chi- mique plus définie. Les aldéhydes possèdent un pouvoir particulier d'union avec une grande variété de substances pour former de nouveaux composés souvent insolubles ; d'autre part, il est difficile de s'imaginer comment une substance volatile comme l'aldéhyde formique peut former une couche résis- lante sur des fibres, qui les empêche d’adhérer et les rende imperméables à l'eau et imputrescibles, surtout quand elle est présente en quantité aussi faible que celle qui est nécessaire pour opérer un tannage à l'aldéhyde. La conclusion s'impose qu'au moins les surfaces des fibres sont altérées de telle facon par l’action de l’aldéhyde qu’elles deviennent elles-mêmes insolubles et non adhérentes. L'hypothèse que, dans un tannage pratique à l'aldéhyde, les surfaces seules sont affectées est supportée par le fait que le surtannage rend là fibre entière cassante el délicate, et que, même avec de très petites quantités d'aldéhyde, cet effet se produit ultérieurement si l'on ne détruit pas toute la formaldéhyde en excès non combinée (par réaction avec l’ammoniaque), dès quele tannage est terminé. Le tannage à l'huile ordinaire ou chamoisage du cuir lavable et du cuir de buffle à été un embarras pour les chimistes. Pour le cuir lavable, le côté intérieur des peaux de mouton, après une prépa- ralion convenable pour le débarrasser de l'excès de chaux, est battu avec de l'huile de poisson jusqu'à ce que l'eau soit remplacée par de l'huile, qui est réchauffement alors soumise à l'oxydation par PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR spontané en piles après exposition à l'air. Seules, les huiles avec plus d’une paire de liaisons non salurées sont capables de produire cet effet, et, quoique les huiles marines soient employées inva- riablement en pratique, Fahrion ‘ a montré que des effets similaires peuvent être produits par l'huile de lin, ou même, à un moindre degré, par l'huile de sait que cette dernière est utilisée dans la fabrication du euir blanc japonais, si employé pour les bretelles. L'explication la plus évidente du processus du chamoisage serail celle du revètement mécanique des fibres par les produits analogues au vernis d'oxydation des huiles; mais elle est apparemment exelue par le fait que les cuirs huilés peuvent être el sont habituellement lavés sans danger avec des solutions alcalines, dans lesquelles ces produits huileux sont très solubles et par lesquelles ils sont rapidement enlevés des fibres végélales. Il est clair que l'union de la fibre du cuir avee l'huile, qu'elle soit physique ou chimique, doit être plus intime qu'une simple adhérence superficielle ; et Fahrion a montré que, par saponification, on peut extraire du cuir une portion d'huile qui ne peut être enlevée par aucun solvant. J'ai moi-même suggéré autrefois la théorie que le tannage à l'huile est en réalité un tannage à l'aldéhyde, produit par l'aldéhyde acry- lique qui se dégage de la glycérine pendant le chauffage: mais cette idée, quoique peut-être partiellement correcte, paraît être repoussée comme explication complète par l'observation de Fahrion que les acides gras eux-mêmes sont capables de produire le tannage à l'huile, puisque, dans ce cas, l'aldéhyde acrylique est absente: il est vrai que des aldéhydes peuvent provenir de l'oxydation et de la rupture de la chaine acide elle-même et il est très possible qu'elles se combinent alors chimiquement avec la fibre de la peau. navette ; on IN Quoique l'emploi des tanins végétaux soit encore probablement le moyen leplus important de produe- tion du cuir, la nature actuelle de leur action est loujours un sujet de discussion. Les progrès de la Chimie colloïdale ont prouvé que plusieurs solutions apparentes ne sont en réalité que des émulsions ou des suspensions extrémement fines, dans lesquelles la présence de particules séparées peut être décelée aujourd'hui par l’ultra-microscope, quoique aucune ligne définie ne puisse être tracée entre des solutions comme celles du sucre dans l'eau et des suspensions certaines comme la graisse du beurre dans le lait * Sur les phénomènes de la formation du cuir. Z. f. angew. Chem., 1909, nos 43-45. H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR 171 ou l'argile dans l'eau trouble. Dans tous ces cas de suspension colloïdale, on sait que les particules possèdent des charges électriques quelque peu simi- laires à celles des ions en solution électrolytique, el que, si ces charges sont enlevées ou neutralisées, la suspension se clarifie immédiatement. charges, comme celles des ions, peuvent être posi- tives ou négatives par comparaison avec le liquide ; si une suspension à particules posilives mélangée avee une autre à particules négatives, les deux se neutralisent mutuellement et sont précipi- tées ensemble d'une facon qui ressemble de près à la formation d'un composé chimique, tel que le sul- fate de baryum par l'union de + Ba! et —(S0")°. On sait que la gélatine et le lanin forment tous deux des solutions contenant des particules ultra- microscopiques, négatives pour la première el positives pour le second, et l'on eroit maintenant d'une facon générale que leur précipitation mu- tuelle est une réaction colloïdale et non purement chimique (ionique), quoique le progrès de la pensée scientifique tende aujourd'hui à rompre toute ligne de démarcation claire entre les deux idées. Chimique ou non, le précipité formé n'est pas posi- tivement quantitatif, et il semble n’y avoir pas de limite à la proportion de tanin qu'on peut en retirer par lavage à l’eau chaude". D'autre part, l’idée de Knapp que l'action est confinée à un simple recouvrement superficiel des fibres n'est pas supportée par l'évidence; mais il . est très probable que l’action est d'abord superti- cielle, même si ultérieurement elle s'étend à travers les fibres. Quand un solide est amené dans une solution (soit ionique, soit colloïdale) dans laquelle le solide et le corps dissous ont des potentiels électriques opposés, le corps dissous est attiré par le solide et se concentre à sa surface ; cette con- densation superficielle (connue sous le nom d’ad- sorplion) conduit dans quelques cas à une action chimique véritable ou à une union physique étroite qui rend la combinaison permanente et irréversible. Dans les cas ordinaires, la surface du solide est si limitée par rapport au liquide environnant que la quantité fixée est relativement faible; mais, là où la surface s'étend presque indéfiniment par la divi- sion du solide en une émulsion ou suspension fine, ou par une structure poreuse ou fibreuse, elle peut ètre considérable. Cette dernière condition est celle de la peau par rapport à la liqueur tannante ou à toute autre solu- tion pouvant donner lieu à: l’adsorption, et il est clair que la division des fibres relativement gros- sières en fibrilles microscopiques, causée par l’ac- tion de la chaux, est d’une grande importance, non Ces est 4 Woon : Journ. of the Soc. of Chem. Ind., 1908, p. 384. seulement ên ce qui concerne la rapidité du tan- nage, mais par rapport au poids de substance tannante adsorbée et ultérieurement fixée. En fait, la peau non gonflée donne toujours un cuir mince el maigre, el quoique, sous ce rapport, le gonfle- ment par les acides puisse remplacer le gonflement par la chaux, c'est un axiome qu'à une certaine étape du procédé les fibres doivent être fendues si l'on veut obtenir un cuir bien tanné et satisfaisant. Un point important qui concerne l’adsorption, au moins tant qu'elle reste réversible, est que la quan- tité adsorbée présente une relation définie avec la concentration de la solution; de sorte que, consi- déré comme un processus d'adsorption, le tannage le plus solide sera donné par les liqueurs les plus fortes, fait d'accord avec l'expérience. Avant que l’adsorplion puisse avoir lieu sur les parties internes de la peau, la solution tannante doit les atteindre, et, avec la méthode ordinaire de mise en liqueur, cela ne peut se produire que par diffu- sion à travers les portions extérieures. Tandis que toutes les solutions cristalloïdes ou vraies diffusent avec rapidité, les solutions colloïdales, celles de tanin en particulier, diffusent extrêmement lente- ment; ainsi les solutions d’alun ou de chrome (pas trop basiques) pénètrent la peau la plus épaisse en quelques heures ou au plus en quelques jours, alors que les solutions tannantes végétales peuvent prendre des mois pour produire le même effet. La diffusion ne peut avoir lieu que d’une solution plus concentrée à une solution moins concentrée, et le tannage doit cesser quand la concentration à l'in- térieur de la peau est égale à celle du dehors; de là l’axiome que la force des liqueurs tannantes doit être constamment accrue à mesure que le tannage avance. La règle suivante, d'après laquelle le tan- nage doit commencer dans des liqueurs faibles, est en partie un corollaire de la première, mais dépend également du fait qu'il faut accorder beaucoup de temps à la diffusion pour obtenir un effet uniforme etéviter un tannage trop rapide de la surface avant que l’intérieur ne soit pénétré, car la surface tannée devient plus ou moins imperméable au passage subséquent du lanin. On peut se demander s'il n'est pas possible d'em- ployer des moyens physiques et mécaniques pour hâter la diffusion et raccourcir le temps considé- rable nécessaire pour le tannage des cuirs épais. La diffusion est accélérée par la chaleur, mais celle-ci ne peut être employée qu'à un degré limité. Il y à quelques années, on a beaucoup préconisé l'électricité comme moyen effectif, mais l’accélé- ralion observée du processus élait due beaucoup plus au mouvement mécanique qu'au courant em- ployé. Il est possible toutefois que l'électricité se montre plus tard d’une valeur pratique, et le pro- 412 H.-R. PROCTER — LES PROBLÈMES DE L'INDUSTRIE DU CUIR a ———————_—_—"—"—"—"—"———"——— cédé de L. À. Groth, en parliculier, n’esi pas sans base scientifique. Cet auteur suspendait les peaux dans des fosses entre deux électrodes reliées à un générateur de courant alternatif. Cet arrangement supprime les perturbations provenant de l'électro- lvse des sels contenus dans la liqueur, dont les produits détruiraient les tanins, quoi qu'ils ne soient probablement pas eux-mêmes des électro- lytes. | Quand un courant électrique passe à travers un diaphragme poreux, il cause également un flux de liquide dans l'une ou l'autre direction, suivant la charge positive où négative du diaphragme par rapport au liquide: c'est la cataphorèse électrique ; quelques expériences de S. Rideal semblent mon- trer une augmentation d'absorption pendant le temps où le courant passe. Il est toutefois douteux que, dans de telles conditions, le courant traverse ou contourne les peaux, et que le gain de rapidité, S'il y en a un, soit d'une valeur commerciale suffi- sante pour payer l'augmentation des frais. Un des procédés électriques à été essayé dans des tambours tournants fermés, et l’on a observé qu'avec ou sans courant, on obtient un tannage extrèémement rapide, des peaux épaisses élant complètement tannées en trois ou quatre jours. Cette observation a été la base de plusieurs procédés pratiques de tannage rapide, qui sont mis en œuvre dans des lambours avec des liqueurs concentrées, mais sans électricité. v Une des questions les plus importantes et aussi les plus embarrassantes du tannage végétal mo- derne est celle de l'influence des acides sur le pro- cessus. Dans le tannage du cuir pour semelles, une acidité considérable des liqueurs tannantes est essentielle pour la production d'un cuir ferme et nourri, pour lequel une peau gonflée est nécessaire ; inéme pour le cuir mégis, il faut une réaction acide distincte, car la peau est généralement trempée à l'état alcalin, et les liqueurs alcalines ne tannent pas. Les acides naturels sont dérivés principalement de la fermentation des sucres contenus dans les matières tannantes; mais le procédé moderne opère avec des matériaux concentrés, et il est relative- ment si rapide qu'il n'y a qu'une faible fermentation et qu'une acidification artificielle est souvent néces- saire. D'après une recherche exécutée en ce moment par un de mes élèves, il semble que de faibles traces d'acide ralentissent d'abord l'absorption du lanin; mais un minimum est bientôt atteint, au delà duquel de nouvelles quantités augmentent l'absorption. En apparence, l'acide contenu dans la peau gonflée est partiellement, mais non entière- ment déplacé par le tanin lorsque le lannage pro- gresse. Dans le procédé ordinaire de tannage du cuir pour semelles, les peaux rasées sont d'abord suspendues dans des liqueurs faibles et presque épuisées, d'acidité suffisante pour enlever les der- nières traces de chaux et pour remplacer le gonfle- ment alcalin antérieur par un gonflement acide. Ces liqueurs sont graduellement enrichies en tanin et usuellement aussi en acide par passage des peaux à travers une série de fosses dans lesquelles les liqueurs circulent en sens inverse; la suspension dure généralement environ dix jours, quoiqu'elle puisse être plus longue. Pendant cette courte période, et malgré la faiblesse des liqueurs, au moins les 25 °/, du tannage total s'accomplissent, car la peau verte absorbe le lanin avec une grande avidité. I faut prendre grand soin d'enlever complètement la chaux et d'assurer un gonflement uniforme sans contraction irrégulière ou resserrement du grain, qui résulterait de liqueurs trop astringentes; la couleur qui se produit alors a généralement une influence déterminante sur celle du produit ter- miné. L'emploi de liqueurs vieillies et usées est non seulement prescrit à ce stade par raison d'éco- nomie, mais parce que leur emploi antérieur a enlevé les tanins les plus astringents, laissant seu- lement ceux qui ont une moindre affinité pour la peau, avec les sels neutres et les matières non {an- nantes qui produisent une action plus douce. S'il devient nécessaire d'ajouter des matières tannantes . fraiches à ce stade, on choisira naturellement des substances douces comme le gambier et les myro- balanes. En gros, les tanins sont divisés chimiquement en dérivés du phénol dihydrique catéchol et dérivés du phénol trihydrique pyrogallol. Chacune de ces classes contient au moins plusieurs individus dif- férant de caractère pratique et de constitution, probablement dans quelques cas par l'addition d'autres phénols à la molécule, comme, par exemple, le phloroglucol. Il n’est pas du tout certain qu'il y ait des tanins réellement acides, quoiqu'ils se com- binent avec les alcalis, peut-être par suite d'une structure lactonique ou phénolique. Une des prin- cipales causes des différences pratiques des tanins à l'usage dépend de la quantité et du caractère des produits solides auxquels ils donnent naissance par décomposition lente dans les liqueurs; la plupart des tanins au catéchol produisent plus ou moins de « rouges » insolubles ou phlobaphènes, tandis que plusieurs tanins au pyrogallol sont associés avec un corps qui dépose de l'acide ella- gique jaune pâle et très insoluble. Alors que ces produits solides jouent un rôle important dans les derniers stades du processus en donnant du poids P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE ESS 1 et de la solidité, ils ne sont pas désirables pendant le premier stade, celui du vrai lannage; et l’une des raisons de l'emploi des vieilles liqueurs est que la plupart de ces corps insolubles sont déjà déposés. Après la suspension, les peaux sont posées à plat dans des liqueurs de forces graduellement croissantes dans lesquelles elles sont remuées d'abord chaque jour; finalement, elles sont portées dans des liqueurs très concentrées avec des couches intermédiaires de substances tannantes solides. Elles en recoivent trois ou quatre pendant une durée augmentant d'une à trois ou quatre semaines, la liqueur finale ayant souvent une densité de 1,1 et étant surtout composée de bois de chêne et d'autres extraits concentrés dans le vide. Ces liqueurs non seulement assurent le tannage absolument saturé du cuir, mais ajoutent matériel- lement à son poids par les matières solides de la liqueur absorbées mécaniquement et desséchées finalement dans le cuir. Avant ce dernier stade du processus, le tannage doit être presque complel, et ce qui se produit est surtout le recouvrement mécanique des fibres et le remplissage de leurs interstices avec des rouges insolubles et de l'acide ellagique, suivant les idées de Knapp. Ce dernier traitement n'est pas seulement profitable au tan- peur dans le sens d’un gain de poids, mais il aug- mente la durée et la résistance du cuir à l'eau. Les principes du tannage du cuir mégis ne dif- fèrent pas de ceux qui ont élé précédemment décrits, mais les peaux sont amenées dans la fosse à tanner à l'état non gonflé, et les liqueurs sont d’acidité assez faible pour éviter le gonflement. Le dépôt de matières solides est aussi beaucoup moindre, par suite de l'emploi de liqueurs plus faibles et généralement plus vieilles, du choix dif- férent des matériaux et de la durée plus courte du processus. VI Tels sont, en résumé, quelques-uns des pro- blèmes les plus importants présentés par l'industrie du cuir. Plusieurs points ont élé entièrement négligés, mais j'ai pensé qu'il était préférable de consacrer l'espace limité que j'avais à ma disposi- tion aux questions d'intérêt saillant de la théorie générale. H.-R. Procter, Professeur de Technologie du cuir à l'Université de Leeds. REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE DEUXIÈME PARTIE Dans une première partie", nous avons traité des #uestions de Mycologie générale ; nous allons main- tenant passer en revue une série de travaux d'un intérêt plus spécial. I. — Myxorss. L'embranchement des Myxobes s'est constitué autour d'êtres primilivement confondus avec les Lycoperdons, parce que leurs formes de repos, leurs fructifications, pour employer l'expression consacrée, ressemblent à des Champignons. Pen- dant leur période d'activité, ils se déplacent à la facon des Amibes; la mollesse et la plasticité de leur corps leur à valu des noms tels que Myxomy- cètes, Phytomyxinées, Myxobactériacées, Myxo- chytridinées. L'un de ces quatre groupes a été récemment sup- primé. Les Phytomyxinées sont, pour M. Lotsy, une subdivision des Myxogastrés ou Myxomycètes proprement dits. M. Lotsy inscrit les Phytomyxinei 4 Voir la Revue du 30 mai 1910, t. XXI, p. 432 et suiv. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. MYCOLOGIE SPÉCIALE avant les £umyxogasteres, sans décider si leur simplicité est primitive ou déterminée par une réduction parasitaire. Le nom même des Phyto- myxinées doit disparaître, car, selon la remarque de MM. Maire et Tison*, il n'existe aucune affinité entre le genre Phytom}yxa et les genres qu'on en a rapprochés. Le genre Phytomyxa, créé par Schroe- ter pour l'organisme qui détermine les renflements tuberculiformes des radicelles des Légumineuses, fait double emploi avec le Rbizohbium Frank, ratta- ché à tort aux Mycétozoaires. On y reconnaît au- jourd'hui soit des Bactéries, soit des Champignons morcelés en corps bactériformes. C'est aussi du côté des Bactéries que l'on croyait trouver la parenté des Ærankia, d'abord classés au voisinage des Phytomyxa, et qui causent les nodosités radi- cales de l’Aune et des Zleagnus. M. Zach* vient de démontrer que les Frankia Sont des Hyphomycètes à filaments cloisonnés, très fins, lerminés par des renflements. Les aspects plasmodiaux ou bacté- 1 Conférence à la Société anglaise de Chimie industrielle. 2 Annales mycologici, t. VIL, 1909. # Sitzungsber. K. Akad. Wiss. Wien, t. CXVIF, p. 1, 1908. 12 re 1 ras P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE riens résultent soit de la rétraction du contenu par les réactifs, soit de leur digestion partielle dans les cellules envahies. Le groupe décapité des Phy- tomyxinées se réduit à une simple famille de Myxo- gastrés parasites, les Plasmodiophoracées. Nous avons à signaler quelques récents progrès réalisés dans la connaissance cytologique et biolo- gique de la classe des Myxogastrés ; puis, nous exa- minerons les arguments nouvellement apportés au rattachement des Myxobactériacées et des Myxo- chytridinées aux Myxobes. $ 1. — Myxogastrés. En dehors de deux grandes publications qui intéressent l'ensemble des Myxogastrés : les Myxo- mycetes exsiccali de M. Jaap, dont les livraisons se succèdent, et le synopsis des espèces connues de Myxomycètes, dont la rédaction en français est achevée par M. Torrend', les travaux les plus importants concernent trois familles : les Didymia- cées, les Cératiomyxacées et les Plasmodiopho- racées. 1. Didymiacées. — M. Bruck® à constaté que les plasmodes d'espèces différentes, ceux par exem- ple d'un Zidymium et d’un Chondrioderma, ne se mélangent pas entre eux. Par contre, les plas- modes d'une même espèce se fusionnent aussi bien quand ils proviennent de deux fructifications dis- tinctes que lorsqu'ils sont issus d’une seule spore. Pourtant, tous les plasmodes d’une même espèce ne sont pas également aptes à se fusionner. M. Pinoy*, ayant obtenu sur gélose à la graine de lin des cultures pures mixtes de Didymium nigri- cans semé avec le Bacillus luteus dont il se nourrit, remarqua dans certains tubes des plasmodes d’un jeune plus ou moins orangé, dans d’autres des plas- modes d'un noir violacé par transparence, dans une troisième série des plasmodes dont la teinte grisätre semblait intermédiaire aux précédentes. Supposant que ces derniers provenaient du mé- lange des plasmodes jaunes et des plasmodes noirs, il réunit ces deux derniers sur un même support; mais chaque plasmode garda ses caractères propres sans aucun alliage des jaunes avec les noirs. Ayant observé que les plasmodes gris donnaient seuls de vraies fructificalions, tandis que les autres produi- saient seulement des organes de vie latente ou sclé- rotes, M. Pinoy fut amené à supposer que la difré- rence de coloration des plasmodes était liée à une différence sexuelle de même ordre que l'hétérothal- lisme découvert par M. Blakeslee chez les Mucori- nées. L'expérience confirma cette hypothèse. Des ‘ Broteria, t. VII, Seria botanica, 190$. = Zeitschr. fur allg. Physiol., {. VII, 1908. ! Soc. de Biologie, 11 avril 1908. fragments de sclérotes provenant respectivement de plasmodes jaunes et de plasmodes noirs furent se- més dans des tubes distincts. Le liquide de conden- sation renfermant des myxamibes, c'est-à-dire la forme initiale adaptée à la vie aquatique, fut pré- levé dans chaque tube à l'aide d'une pipette et les liquides furent mélangés dans un troisième tube. La fusion des myxamibes donna naissance à des plasmodes gris couverts de fructifications au bout de dix à douze jours. Le dichromisme des plas- modes jaunes et des plasmodes noirs indique ‘une opposition sexuelle dans laquelle nous n'avons aucune raison pour assigner le sexe mâle ou le sexe femelle à l’un plutôt qu'à l'autre. M. Pinoy, à l'exemple de M. Blakeslee, désigne les sexes contraires par les signes () et (—) dont l’attribu- tion reste arbitraire; il considère les plasmodes gris et fructifères comme des corps bisexués cumulant les deux signes (+). C'est un nouvel et remarquable exemple d'opposition sexuelle physiologique où dynamique sans différenciation morphologique répondant à la notion anthropo- morphique de sexe màle et de sexe femelle. Le caractère amorphe de la sexualité chez les Myxobes ne doit pas être invoqué pour resserrer les liens usés qui ont enchaîné longtemps aux Champignons proprement dits ces êtres qui vi- vent, pendant leur période active, à la facon des protistes animaux. Il nous apparait plutôt comme un type très répandu chez les êtres inférieurs d'affinités diverses. 2, Céraliomyxacées. — Le genre Ceraliomyxa semblait ètre, par ses spores externes, conidi- formes, un type aberrant de Myxogastrés. M. Jabn avait cru d'abord qu'il se distinguait, en outre, par une double mitose précédant l'apparition des spores, tandis que, chez les Myxogastrés endos- porés, une seule milose s'accomplit au même stade. Une étude approfondie de l’évolution nucléaire vient de montrer à M. Jahn' que le Ceratiomyxa rentre dans la règle générale. La période de la fruetification semble s'annoncer par une caryogamie qui s’accomplit dans le bois avant la formation des plasmodes. Les noyaux se rapprochent par paires et des syncaryons résultent de l’enveloppement d'un noyau par l’autre; les noyaux demeurés sans conjoint dégénèrent. Tandis que le coussinet primitif émet des prolongements en forme de cornes, il se forme des synapsis comme dans les noyaux sexuels des Métaphytes et des Métlazoaires ; puis, on assiste à une division réduc- trice ramenant à 8 le nombre des chromosomes porté à 16 par la caryogamie : la caryomixie est 1 Berichte deutch. Botan. Gesellschatt, &. XXVI, 1908. P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE accomplie. Dans le pavage d’amibes d'où procède- vont les spores, chaque masse plasmatique contient un noyau normal parfois accompagné d’un noyau dégénéré. Deux mitoses successives s'accomplis- sent dans la spore. Chacun des quatre noyaux se divisera ultérieurement pour se répartir entre 8 zoospores. M. J. Johnson‘ range au voisinage des Ceralio- myxa le Spongospora subterranea (Wallr.) Lager- heim, l’un des agents de la gale de la pomme de terre les plus répandus en Europe et en Amérique. Ce parasite à longtemps défié la sagacilé des systé- maliciens. M. G.-H. Pethybridge” vient de résumer les péripéties de son histoire. Décrit d’abord en 1842 par Wallroth sous le nom d’Ærysibe sub- terranea, et la même année par Martius sous celui de Protomyces tuberum solani, il fut redécouvert par Berkeley qui en fit, en 1846, le Tubercinia sca- bies, puis transféré par Fischer dans le genre voisin Sorosporium. M. Brunchorst, le premier, en 1887, reconnut ses affinités avec les Mycéto- zoaires ; mais, ne soupconnant pas son identité avec les parasites décrits dans la même maladie comme des Ascomycètes ou des Ustilaginées, il crut avoir affaire à une espèce nouvelle qu'il nomma Spon- gospora solani. M. de Lagerheim étudie, en 1891, la gale des pommes de terre aux environs de Quito. Reconnaissant la justesse de l'appréciation de M. Brunchorst et la priorité du nom spécifique proposé par Wallroth, il lui impose entin l’appella- tion correcte de Spongospora sublerranea. D'après M. Johnson, les spores sont réunies en réseau par des ponts plasmatiques. Chacune d'elles renferme un grand noyau accompagné d'un ou plusieurs noyaux dégénérés. Le grand noyau en donne huit par bipartition répétée et chacun de ces derniers s’isole dans une zoospore piriforme qui s'agile aussitôt dans l’intérieur de la spore. Le pro- cessus évolutif du Spongospora rappelle essentiel- lement celui que M. Jahn a reconnu chez les ('eratiomyxa. Plasmodiophoracées. — MM. Maire et Tison, dans le Mémoire mentionné précédemment, se livrent à des considérations générales sur les affi- nités des Plasmodiophoracées. Cette famille leur paraît dériver plus ou moins directement des Fla- gellates et prendre place entre les Sporozoaires et les Mycétozoaires. N'oublions pas toutefois la remarque de M. Lotsy : les conditions de la vie parasitaire, commune à tous ses représentants, laissent planer une grande incertitude sur sa filiation. 1 Economie Re R. Dublin Soc. ie 5 ? Jrish Nat., t. XVIII, 1909. 1908. DE MYCOLOGIE Les trois genres qui constituent la famille après l'exclusion des Phytomyxa se distinguent par le groupement des spores, boules rassemblées en relativement grandes chez les Sorosphæra, unies les Plasmodiophora. Le Tetramyxa Triglochinis, ré- cemment découvert par M. Molliard' dans les axes d'inflorescence renflés du Triglochin en tétrades chez les Tetramyxa, isolées chez en fuseau palustre, parait établir une transition entre les genres Tetramyxa el Plasmodiophora, car, si les spores sont séparées à la maturité comme dans ce dernier, leurs rudiments étaient groupés en tétrades comme dans le premier. L'évolution nucléaire est suivie avec par MM. Maire et Tison chez le Sorosphæra Veronieæ Schr. Aucun indice de conjugaison ne s’est révélé à aucun stade; il ne semble même exister aucune fusion, soit entre les myxamibes uninucléées, soil entre les corps plus volumineux qui en dérivent après division répétée du noyau. Ces corps peuvent d'ailleurs être multiples dans chaque cellule hospi- talière, comme cela se passe chez le P/asmodio- phora brassicæ où ils constituent de vrais plas- modes. Cette multiplicité est augmentée par la fragmentation de chaque amibe plurinucléée en mérontes qui se comportent comme la myxamibe primitive. Les divisions nucléaires qui s’accom- plissent durant cette période de croissance sont d'un type mixte, dans lequel mitose et amitose se combinent. Tout se passe à cet égard comme chez les Plasmodiophora étudiés antérieurement par M. Nawaschin et par M. Prowazek*. La chromatine se partage en trophochromatine, qui se morcelle par amitose, et en idiochromatine ou chromatine génératrice, qui subit la division indirecte. La for- mation des spores s'accompagne de deux mitoses probablement différentes : l’une hétérotypique, l’autre homotypique. L'espèce la plus célèbre de la famille, le P/asmo- diophora Brassicæ, qui cause la hernie du Chou, ayant fait l'objet des premières études concernant la eytologie de la famille, a été envisagée surtout, dans ces derniers temps, au point de vue écono- mique. M. Külpin Ravn* signale sa présence sur 42 espèces différentes de Crucifères et dresse des cartes de sa répartition. M. Saul‘, s'inspirant des idées de M. Podwissotzki, se demande si l'agent du cancer du Chou donne le cancer aux animaux. Ses inoculations au Cobaye, à la Souris blancheet autres animaux prédisposés aux tumeurs, ont produit des tumeurs kystiques, des adénomes, des cancers alvéolaires, etc. Ces résultats ne dif- soin Bulletin Soc. botanique de France, t. LVT, 1909. Arbeiten aus d. K. Gesundheïtsamte, t. XXII, 1905. Tidsskrift for Landbrugets Planteav., t. XV, 1908. Soc. méd. Berlin, 8 déc. 1909, — Semaine médicale, 1909. » © vw » 476 fèrent guère de ceux que l'on a signalés comme effet de l’inoculation des tumeurs malignes. Ils nous laissent perplexes sur la spécificité attribuée à ces derniers et sur la cause réelle de ces évolu- tions morbides. L'auteur se demande s'il ne faut pas y voir l'effet de l’action des lipoïdes qui, d'après M. Tallqvist, déterminent la prolifération épithé- liale et dont l'abondance chez les PJasmodiophora semble indiquée par l’action noircissante de l'acide osmique. On classera provisoirement au voisinage des Sorosphæra un parasite découvert par M. L. Léger” dans les tubes de Malpighi d’un Ténébrionide, l'Olocrates ahhreviatus, et dont l'auteur reconnait la parenté avec les Plasmodiophoracées. Chez le Peltomyces hyalinus Lég., la période active se caractérise par des corps amiboïdes plurinucléés qui se divisent à plusieurs reprises, mais ne semblent pas s'unir en plasmodes. Les spores pro- cèdent d'une caryogamie et sont rassemblées, au nombre de 4 à 12, dans des sporontes à paroi fra- gile parsemée de noyaux dégénérés. MM. L. Léger et E. Hesse” ont trouvé dans des conditions analogues, dans les tubes de Malpighi du Doreus parallelipipedus, le type d'un genre dif- férent, l'Ophryomyces Dorci, qu'ils inclinent à classer parmi les Mycélozoaires, sans préciser davantage sa position systématique. Les corps plasmodiformes s'unissent deux à deux pour don- ner une spore unique après fusion de deux noyaux inégaux fournis par chaque conjoint. Ce nouveau senre offre un mimétisme remarquable avec les Schizogrégarines du genre Ophryocystis : il à même forme et même mode d'implantation dans l’épithélium au moyen de prolongements radici- formes. Les adaptations convergentes qui avaient amené à inscrire les Myxomycètes parmi les Cham- pignons, à l'époque où l'on connaissait seulement les Myxogastrés qui vivent sur les débris végétaux à la manière des Champignons, se traduisent en . sens inverse chez les parasites des animaux. Il est donc probable que des recherches aussi délicates que celles de M. L. Léger allongeront la liste des Myxobes aux dépens de formes perdues dans d’autres groupes d'animaux inférieurs. $ 2. — Myxobactériacées. Les Myxobactériacées n'ont pas plus d'aftfinité avecles Bactéries que les Myxogastrés n'en ont avec les Gastromycètes. Je faisais prévoir cettesépa ration lorsque j'exposais ici même’, il y a seize ans, la récente découverte de ce groupe par M. Ro- ————————_—_——…————— ‘ C. R. Acad. Sc., 19 juillet 1909. ? C. R. Acad. Sc., 26 juillet 1909. * {tevue générale des Sciences, 15 août 1893. P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE land Thaxter'. Les Myxobactériacées sont aussi éloignées des Mucédinées, avec lesquelles elles avaient été confondues d'après l'apparence exté- rieure de leurs fructifications. M. Karl Vahle* vient de se livrer à l'étude de plu- sieurs Myxobactériacées, dont il précise la mor- phologie, la microchimie, la physiologie. Il arrive à les classer parmi les Myxobes. Tandis que les anciennes Phytomyxinées épurées se rangent dans la classe des Myxogastrés, les Myxobactériacées constituent l'unique famille d'un ordre rattaché à la classe des Sorophorés (Acrasiées), dans laquelle, les corps amiboïdes, au lieu de se fusionner en vrais plasmodes, constituent des pseudoplasmodes par simple juxtaposition. La famille des Myxobacté- riacées est voisine des Guttulinacées et des Dic- tvostéliacées. La myxamibe, très plastique dans cette dernière famille, présente une forme beau- coup plus fixe chez les Guttulina, dont les dépla- cements s'accompagnent de déformations compa- rées par M. Fayod à celles d’une limace. Les bätonnets des Myxobactériacées n'ont pas de mem- brane distincte et élastique ; la couche superficielle alloplasmatique épouse toutes les formes impri- mées par la contractilité de la masse fondamentale. Cette contractilité explique les déformations et les déplacements observés par M. Thaxter. Le célèbre naturaliste américain a vu les extrémités, aiguës pendant la période d'activité, s'arrondir quand les bätonnets meurent; il a décrit des mouvements de flexion par lesquels les bätonnets sont projetés comme un ressort quand ils prennent un point. d'appui sur une extrémité”. La progression linéaire s'effectue sans le secours d'aucun appendice flagel- liforme. Les spores se forment et germent comme celles des Sorophorés. Le développement de la fructifica- tion et sa différenciation en sporocyste et cysto- phore, dont M. Vahl découvre les premiers rudi- inconstants chez le J/yxococcus ruber, suit la même marche chez les Chondromyces et chez les Dictyostelium. Chez les Myxobactériacées, la forme bacillaire de l'élément actif est une modification secondaire d'un corps amiboïde, dont les déformations sont très restreintes sauf dans une direction : en sorte que la forme primitivement déréglée de la myxamibe passe à la forme vermiculaire rappelant les Bactéries. M. E. de Kruvff‘ a découvert à Java, sur le ments 1 Botanical Gazette, décembre 1892. 2 Centralblatt 1. Bakteriologie, [2], {. XXV, 1909. 3 Cette contractilité du corps, disais-je dans une commu- nicalion à la Société des Sciences de Nancy, le 15 mars 1899, rappelle, quoique afaiblie, celle des Myxomycètes et nous engage à distraire les Myxobactéries de la masse des mi- crobes. * Centralblatt f. Bakteriologie, [2], t. XXI, 1908. P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE 477 fumier d'étable, une nouvelle espèce de Myxobac- tériacée à pseudoplasmodes bien caractérisés. La spore du Myxococceus javanensis, qui mesure 1u6, serme par extension de la couche membraneuse et donne directement un corps bacilliforme. Les bâtonnets restent longtemps unis par une gelée pseudo-plasmodiale qui se déplace lentement à la surface de la gélose comme les pseudo-plasmodes des Sorophorés. Dans les fructifications arrondies ou oblongues qui se dressent à la surface, les bâtonnets prennent une ou deux cloisons, et dans chaque compartiment se forme une spore. Les spores restent longtemps groupées en chaïnettes de deux ou trois. $ 3. — Myxochytridinées. Parmi les Champignons inférieurs confondus sous le nom d’Archimycètes, M. Lotsy trouve les bases d'une première subdivision dans l'absence ou la présence d'une membrane autour du corps protoplasmique ou énergide qui constitue le stade initial. L'énergide nue caractérise les Myxochytri- diacées, opposées aux Mycochytridiacées. La dési- nence de ces noms de groupes pourrait faire supposer qu'ils constituent des familles naturelles. Telle n’est pas la pensée de M. Lotsy, car il place dans les Myxochytridiacées deux familles, les Monolpidiacées et les Mérolpidiacées, comprenant elles-mêmes, la première du moins, des genres rattachés à des lignées indépendantes. Le nom de Myxochytridinées, employé par M. Serbinow, est préférable. Le nombre de fouets moteurs des zoospores n'est pas constant chez les formes rattachées par M. Lotsy aux Myxochytridinées. Le genre bi- flagellé Pseudolpidiüum aurait, à son avis, plus d’affinité avec les Saprolégniées et les Péronospo- rées, issues, comme les Algues siphonées, des Flagellates isocontes, qu'avec les autres Myxochy- tridinées. Celles-ci tireraient leur origine d'orga- nismes moins parfaits que les Isocontes, tels que les Monades uniflagellées. M. Lotsy réserve la question des affinités, appa- remment multiples, des Myxochytridinées uni ou biflagellées. Les Synchytrium, formant la famille des Mérolpidiacées, rappellent les £ndosphæra par l'existence d’un cénobe éphémère dans lequel les cellules-filles, avant même l'apparition des organes moteurs, s'entourent d’une membrane et deviennent des zoocystes. Mais ils en diffèrent, non seulement par l'absence de chlorophylle, mais aussi par les z00spores monotriches du type chytridinien. M. Serbinow”, qui n'examine, parmi les Myxochy- tridinées, que des genres biflagellés tels que les ! Scripta botanica Univ. Petropol., t. XXIV, 1907. Pseudolpidium, Rozella, Woronina, leur dénie tout parenté avec les Mycochytridinées monotriches Dès 1881, de Bary soupconnait le diphylétisme des Chytridinées, confinant d'une part aux /’roto coccoidales par les Synchytrium, d'autre part au Peronosporales par les penres pourvus d'un myce lium. Toutefois, s'il contestait déjà les affinités des deux groupes dont on à fait les Myxochvtridinées et les Mycochytridinées, il n'a pas songé à rappro- cher le premier des Mycélozoaires. M. Atkinson’ considère les Champignons sipho- nés comme dérivés des Rhizidiacées, c'est-à-dire de Mycochytridinées, par l'intermédiaire des Ancylis- tacées. Il leur refuse toute connexion directe avec les Algues siphonées ; les preuves manquent pour les rattacher, soit aux Algues très simples, telles que les Protococcales, soit aux Monadinées z00- sporées. En tout cas, ce savant se défend de consi- dérer les Chytridinées comme une série simple ; il réserve implicitement la question de l'existence des Myxochytridinées. M. Butler?, lui non plus, n'aborde pas directe- ment ce problème ; mais il donne à entendre que les corps protoplasmiques nus des Chytridinées pourraient provenir d'une réduction parasilaire. Avant décrit les corps plasmodiaux des Pseudol- pidium, Woronina, Rozella, et remarquant l'impos- sibilité où l’on est souvent de distinguer le proto- plasme parasitaire du protoplasme hospitalier, il reconnait une complète analogie entre ce mélange intime etle mycoplasma d’Eriksson. On sait que le savant suédois admet chez les Urédinées l'exis- tence d’un stade de la vie parasilaire durant lequel le Champignon des rouilles est réduit à un plasma nu, confondu avec le protoplasme des céréales. Si celte théorie est exacte, en dépit des dénégations de M.Klebabn, il en résulterait que, sous l'influence du parasitisme, un Champignon supérieur pour- rait prendre une structure aussi simple que celle des plasmodes des Myxobes. On ne saurait donc affirmer sans contestation que l'absence de membrane chez les Chytridinées parasites est l'indice d’une affinité avec les types animaux plutôt que d'une dégradation parasitaire. Tout ce que nous pouvons dire, c'est qu'on n'a pas de preuve de leur parenté avec les Mycochytridinées et que le passage de la vie animale des Myxobes à la vie végétale des Champignons n’est pas démontré. M. Kusano*, dans deux notes publiées en japonais et que nous connaissons par un résumé français de M. Ikeno, signale chez le Synchytrium Puerariæ 1 Annales myvcologiei, t. VII, 1909. 2 Memoirs of the Department of Agriculture in India, {. I, 4907. 3 Botan. Magazine, Tokio, n° 245, 4907; n° 257, 1908. ‘ Revue générale de Botauique, t. XXI, 1909. 478 P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE un corps ressemblant à un centrosome et participant à la formation la membrane nucléaire : il le nomme caryodermatoplaste. M. Stevens "en décrit un semblable chez le S. decipiens. M. Griggs* con- firme son rôle dans la production de la membrane nucléaire. Nous devons à M. H. von Gultenberg* une étude approfondie des modifications cytologiques pro- voquées dansles feuilles de Mercuriale, d'Anémone, d'Adoxa, par le parasitisme des Synchytrium Mercurialis, Anemones, anomalum. Les cellules épidermiques envahies deviennent des cellules géantes à membrane épaisse et fenêtrée. Le noyau appliqué à la spore du parasite grossit au point d'atteindre 50 ou 60H; mais, en mème temps, la chromatine diminue ét paraît consommée par le Synchytrium. Les courants qui s’établissent entre les deux êtres amènent la formation de canaux parcourant toute la masse du noyau et convergeant vers un collecteur qui débouche au contact du parasite. Finalement, le noyau devient lobé ; mais les lobes ne se détachent pas. Les divisions nucléaires des Synchytrium eux- mêmes ont fait l'objet d'une étude de M. Griggs*. Entre les mitoses du noyau primaire et celles qui préparent la formation des spores, on distingue une période où les divisions sont, pour la plupart, amitotiques. On distingue deux types d'amitose : l’une par gemmation, l’autre par hétéroschizis. Dans ce dernier, la membrane nucléaire disparaïitet les chromosomes dispersés se groupent en nouveaux noyaux. de II. — SIPHOMYCÈTES. $ 1. — Saprolégniacées. M. P. Claussen* demande à l'étude du Sapro- legnia monoica la solution de trois points contro- versés de la cytologie et de la biologie de la famille. Les noyaux de l’'oogone présentent une seule mitose, ce qui donne raison à M. Davis contre M. Trow; l’organelle décrit comme cénocentre par M. Davis est un véritable centrosome visible dès l'origine dans le noyau ovulaire; enfin la fécondation s'accomplit normalement dans cette espèce, car chaque oosphère recoit un noyau provenant du tube anthéridien de ses rameaux. La réduction chromatique ne suit pas immédiatement la fusion des noyaux des deux sexes ; elle n’est pas encore réalisée dans les oospores âgées et doit s'accomplir seulement dans l'oospore germante. M. M. Mücke soumet à la même épreuve l’Achlya ou d'un 1 Annales mycologici, L. VI, 1907. ? The Ohio Naturalist, t. VIII, 1908. S Jahrbücher wissensch. Botanik, t. XLVI], 1908. 4 Botanical Gazette, t. XLVII, 1909. 5 Berichte deutsch. Botan. Gesellschaft, t. XXVI, 1908. polyandra et arrive à des résultats semblables”. M. C.-H. Kauffman* applique aux Saprolégniacées les méthodes de culture préconisées par M. Klebs. Il confirme les conclusions de ce savant sur l'influence du milieu alimentaire sur la végétation et la reproduction. Il démontre ce fait intéressant, que les anthéridies typiques, habituellement absentes chez le Saprolegnia hypogyna, apparaissent dans une solution d'hémoglobine additionnée de phos- phate de potasse, de nitrates de potassium et de calcium. Toutes les espèces examinées se sont montrées, tantôt monoïques, tantôt dioïques suivant les conditions de culture. Les caractères auxquels les systématiciens attachent la plus haute impor- tance n’échappent pas à une certaine inconstance. M. Kauffraan retire de son étude l'impression que l'on distingue plus facilement chez les Sapro- légniacées des espèces élémentaires diversement combinées que des espèces au sens linnéen, et qu'il est plus essentiel de déterminer les limites de. la variabilité que le type de l'espèce. Il ne croit pas improbable que le déterminisme du sexe soit subordonné aux influences extérieures. $ 2. — Mucorinées. Pour déterminer l'action des circonstances ambiantes sur l'apparition des organes sexuels ou des sporocystes indépendants de la sexualité dans l’ordre des Mucorinées, M. Wisniewski' s'est adressé au Zygorhynchus Moelleri Nuillemin, espèce qui se distingue de la plupart des cham- pignons de ce groupe par la fréquence des zygospo- res. La présence exclusive des sporocystes s'observe dans les milieux très pauvres, tels que l'eau distillée. La lumière, les basses températures, la concen- tralion exagérée agissent dans le même sens, tant qu'elles n'arrêtent pas toute végétation. Les divers substratums amènent d'amples varia- tions dans l'aspect des cultures et des principaux organes. Aussi les cultures, faciles à réaliser dans ce groupe, deviennent-elles la base des grandes revisions systématiques. M. Hagem° les utilise largement dans l'étude des Mucoracées isolées du sol et de l'air en Norvège; M. J. Dauphin”, dans une importante monographie des Mortiérellées, juge des limites des espèces d’après les renseigne- ments qu'il a tirés de la biologie du Mortierella polycephala soumis aux influences les plus diverses d'ordre physique et chimique. Parmi les agents peu étudiés antérieurement, citons les rayons de Rœæntgen et les corps radio-actifs, dont le rôle est ! Berichte deutsch. Botan. Gesellschaft, &. XXVI, 190$. ? Annals of Botany, 1. XXII, 1908. 5 Bulletin Acad. Sc. Cracovie, 6 juillet 1908. # Videnskabs Selskbs. Skrilter., t. VII, 1908. 5 Annales Se. nat.; Bol., 9 série, t. VIII, 1908. P. VUILLEMIN — REVUE nuisible ou tout au moins entravant. En ce qui la lumière, le sensible à l'intensité qu'à la longueur des ondes des radiations, à l'exception des rayons violets el concerne Champignon est plus ultra-violets qui sont indispensables. M. Raybaud', étudiant lumières monochromatiques sur la croissance du Fhizopus nigricans, avait obtenu le maximum dans la lumière jaune, le minimum dans lalumière verte. La même Mucoracée, mieux encore le Phycomyces nitens, el d'autre part des Ascomycètes tels que le Sterigmalocystis nigra, fournissent à M. Raybaud”* l'action des diverses un véritable spectre biologique. Sur une plaque de gélatine nutritive sur laquelle est étalé le spectre d'une lumière produite par un puissant are au mercure, les poussent restent chétives sur des régions correspondant en partie aux bandes noires dessinées par le même spectre sur un papier photographique. La concor- dance entre le spectre photographique et le spectre biologique est particulièrement nette dans la zone moyenne ultra-violette. La cytologie de la fécondation a fait un pas déei- sif avec les recherches histologiques de M. À. Lend- ner‘ sur les zygospores de Sporodinia grandis. Lorsque les progamètes se rencontrent, on remarque souvent que l’un d'eux pénètre plus ou moins dans l'autre. Il y a là une différence de forme qui est peut-être l'indice d'une sexualité. Peu après que les deux parois séparant les gamètes de leur suspenseur (tympans) sont formées, la résorp- tion de la membrane mitoyenne s'effectue du centre à la périphérie. De petits noyaux sont encore dissé- minés dans les deux gamètes; sur les coupes réussies, il n’est pas rare ‘de rencontrer deux noyaux plus volumineux à deux chromosomes, disposés symétriquement de chaque côté de l'empla- cement de la membrane mitoyenne; plus tard, ils se touchent, puiss'unissent au centre de la zygospore. Dans le syncaryon, on apercoit tantôt quatre, tantôt deux chromosomes et finalement on ne distingue plusqu'un corpuseule autour duquel le protoplasme rayonne. Les petits noyaux ne se rapprochent pas, mais se divisent; à la fin, ils s'accumulent vers la périphérie (zonation de M. Gruber) et participent à la formation de la membrane très différenciée. Le Sporodinia se comporte sensiblement comme le Peronospora parasitica. Dans un travail d'ensemble sur les Mucorinées da la Suisse, M. Lendner* signale des observations encore incomplètes sur le Zrgorhynchus Moelleri. Il n’a pas distingué de noyau central dans la zygos- moisissures ne pas ou 1 C. R. Soc. Biologie, 16 juin 1908. ? C. R. Acad. Se., 18 octobre 1909. 3 Bulletin Herbier Boissier, 2e série, t. VIII, 190$. * Les Mucorinées de la Suisse. Berne, Wyss, 1908. ANNUELLE DE MYCOLOGIE LE 179 pore. S'agit-il d'une pluralité des œufs où d'ur apogamie ? C'est ce qui n’est pas décidé. Toutefois ces remarques parlent en faveur d'une diversité dans le mode de fécondation des Mucorinées,. $ 3. — Entomophthorinées. Le genre Basidioholus est maintenu provisoire- ment dans les Siphomycètes à cause de ses affinités évidentes avec les Æntlomophthora, M. Lotsy l'ait éloigné de ceux-ci dans une famille des Pasidiobolesæ en raison de sa structure cellu- laire. Poursuivant ses recherches sur le Zasidioholus Ranarum, M. Raciborski' remarque un arrêt plus ou moins complet de l'allongement dans les milieux acides, tandis que les divisions cellulaires ne sont pas ralenties, du moins au même degré. Une faible alcalinité remet en train la croissance. L'auteur bien que précise la distinction qu'il à établie antérieure- ment entre les deux gnés par les termes « Bewegungswachstum » et « meristische Wachstum », par lesquels il oppose en quelque sorte la croissance vers l'extérieur et la croissance localisée dans l'intérieur du l'évolution et l’involution. modes de croissance dési- Corps, III. — URÉDINÉES. Les Urédinées sont généralement rattachées à la classe des Basidiomycètes. Elles diffèrent des Usti- laginées, avec lesquelles elles constituaient naguère la classe des Hypodermées, beaucoup plus que des Trémellinées. Comme ces dernières, elles ont des phragmobasides, c’est-à-dire des sporophores qui, à la suite de la fusion de deux noyaux à » chro- mosomes, se cloisonnent transversalement, puis émettent de chaque compartiment un stérigmate portant une spore à 2 chromosomes. MM. Saccardo et Traverso subdivisent la classe des Basidiomy- cètes en deux sous-classes fondées sur la baside indivise ou cloisonnée, les Zubasidiæ et les P’rofo- basidiæ. Us comprennent dans les Protohasidie deux ordres, les Zremelloidales et les Uredinales. Le nom de Protobasidiæ n'est pas suffisamment justifié, ear il n’est pas prouvé que la phragmoba- side soit le prototype de la baside. Les Urédinées ont d’ailleurs un ensemble de caractères propres qui en font le groupe le mieux circonserit parmi les Champignons, ayant au moins la valeur d’une sous-classe des Basidiomycètes. Les découvertes de M. Blackman et de M. Christ- man, confirmées dans leurs traits essentiels par M. E.-W. Olive*, ont établi que l'acte primitif de Ja 1 Bulletin Acad. Sc. Cracovie, 190$. ? Annals of Botany, L. XXII, 1908. 480 P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE fécondation, caractérisé par l'association de deux noyaux provenant de cellules d'abord distinctes, s'accomplit à la base de l’écidie. Les deux noyaux rapprochés par la fécondation ont chacun » chro- mosomes (2 — 2 dans le cas particulier des Urédi- nées). Ils ne se confondent pas en un noyau à 2 n chromosomes ou syncaryon typique ; ils forment néanmoins un syncaryon physiologique, car le couple primitif produira par mitoses conjuguées une longue lignée de couples semblables caracté- risant la diplophase ou syncaryophyte des Urédi- nées. Le thalle à noyaux conjugués produit les spores écidiennes, urédiniennes; il garde son caractère propre jusqu’au moment où la caryomixie se complète par la fusion intime des deux noyaux de chaque couple et la régénération de l'haplophase, caractérisée par des noyaux indépendants à 2 chro- mosomes issus des deux noyaux conjugués qui avaient ensemble 2 » chromosomes. La caryomixie s'accomplit dans la jeune baside des Coleosporium, dans la téleutospore de la plupart des Urédinées. La téleutospore marque la fin du parasitisme et le prélude de la formation des basides qui, déve- loppées en liberté, enverront leurs spores à la recherche d'un nouvel hôte. L’étroite connexion de la téleutospore avec la baside l’a fait nommer pro- baside par M. Van Tieghem. Les téleutospores, les urédospores, les écidio- spores ont une structure compliquée qui leur assure une grande fixité et qui, jointe à leur fréquence, permet d'en faire la base solide des déterminations. Aussi ces organes tiennent-ils la première place dans tous les anciens ouvrages consacrés à la clas- sification des Urédinées. Toutefois, ils représentent des acquisitions récentes adaptant les Urédinées aux conditions variées du parasitisme et de lhétéro- xénie. La carvogamie qui s'accomplit à l'origine des écidies et la caryomixie qui annonce l'apparition des basides sont des caractères d'ordre plus général et de plus haute valeur taxinomique. Tel est le principe qui a conduit M. J.-C. Arthur” à faire passer dans la distinction des genres les caractères de l’écidie avant ceux de la téleutospore. Il n’est pas certain que ce nouveau point de départ conduise à un système conforme aux affinités natu- relles. Sans doute, on à reconnu dans un petit nombre d'espèces l'acte sexuel dans les rudiments de l'écidie ; mais, chez les nombreuses Urédinées dépourvues d'écidies, cet acte paraît s’accomplir, d'après M. Blackman, dans l’urédo et, à son défaut, dans les téleutospores ou dans diverses parties du thalle. Rien ne prouve que la cupule écidienne soit autre chose qu'une formation secondaire, et en tout Journal of Mycology, t. XII, 4906. — Annales mycolo- gici, t. VI, 1908. cas sa diversité d'aspects, qui peut servir aux dis- tinctions génériques, n'a pas de lien avec le phéno- mène sexuel qui marque souvent son apparition. Le bouleversement introduit dans la nomencla- ture par M. Arthur n'a que des avantages probléma- tiques au point de vue théorique; il ferait naître dans la pratique une déplorable confusion. Selon la remarque de M. P. Dietel', les fructifi- calions de même forme ne caractérisent pas néces- sairement des stades équivalents du développement. Le stade écidien des Phragmidium rappelle l'aspect de l’urédo du même genre; le téleutosore des Ændo- phyllum a l'apparence d’une écidie; les urédos des Coleosporium et des Chrysomyxa ne sont qu'une seconde forme d’écidie dépourvue d’enveloppe péri- dienne. M. Dietel explique par des vues originales com- ment la famille des Pucciniacées s'est formée aux dépens des Mélampsoracées. Les urédos de Melam- psora paradoxa renferment à la fois des téleuto- spores réunies en croûle et caractéristiques du genre, des urédospores, des paraphyses et des spores à paroi plus épaisse, rappelant les téleutospores de divers genres de Pucciniacées. Il voit dans ces der- nières un produit de transformation des paraphyses habituellement stériles. Chez d’autres Melampsora, téleutosores normaux sont distincts des urédos, ceux-ci contiennent parfois des paraphyses dont la cellule supérieure et le pédicelle ont toute la complication des téleutospores du genre Uro- myces. Gelte différenciation atteint le plus haut degré dans les urédos du A/elampsora Helioscopiæ, où j'avais décrit les paraphyses sporiformes sous le nom d'Uromyces verrucipes. MM. H. et P. Sydow, à qui j'ai communiqué cette nouvelle interpréta- tion, reconnaissent également des paraphyses de Melampsora dans l'Uromyces Euphorbiæ connatæ Speschn. Pour M. Dietel, ces téleutospores diffé- renciées aux dépens des paraphyses présentent sur les téleutospores agglomérées l'avantage d’une dis- persion facile et ont pu entrainer la disparition des téleutospores primitives, devenues superflues. Ainsi se serait réalisé le type des Pucciniacées aux dépens des Mélampsoracées. MM. H.et P. Sydow*, continuant la monographie des divers groupes d'Urédinées, viennent de faire la revision du genre Uromyces. Ils ne relèvent pas. moins de 53 formes rapportées à ce genre, à titre d'espèces ou variétés, et qui sont en réalité, soit des états transitoires d'Urédinées différentes, soit des Puccinia mal observés, soit des Mucédinées, soit des Chytridinées du genre Urophlyctis, soit des synonymes; tel est l'{romyces Lamii qui est un où les ! Hedwigia, t. XLVIII, 190$. ? Monographia Uredinearum, vol. IN, fase. 1. Uromyces. Berlin, Bornträger, 1909. — (renus P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE 181 __—_—__—_—__———_—_—————————.—..—….——…—…—…—…—“——r parasite de l'Euphorbe déposé par le vent sur les feuilles de Lamier. Les points les plus intéressants de l'histoire des Urédinées viennent d'être résumés par M. P. Ha- viol’ dans l'Encyclopédie du D' Toulouse. Le succès de ce petit livre est assuré par la compétence de l'auteur, non moins que par l'intérêt qui recom- mande les Champignons des rouilles à l'attention des agriculteurs comme des botanistes et des biolo- gistes, M. E. Foex* consacre une importante étude à la rouille des céréales. La gravité des ravages occasionnés par les Uré- dinées engage M. P. Sorauer” à préparer une stalis- tique internationale des rouilles des Céréales. L'au- teur examine les questions suivantes : 4° Circon- stances qui modifient l'intensité de la maladie dans une même station; 2 Mode de propagation des rouilles; 3° Rapports de la maladie avec les con- ditions météorologiques; 4° Influences topogra- phiques et géologiques; 5° Action de la culture; Ge et 7° Réceptivité de chaque espèce et de chaque race aux diverses rouilles. Il conclut que le pro- blème des rouilles tend à se réduire à une question de culture. Les agronomes suédois ont tenté de nombreux essais dans cette voie. M. E. Henning' en expose les résultats. 11 se demande incidemment si l'Epine- Vinette, hôte complémentaire du Puccinia Gra- minis, considéré jadis comme le fléau des céréales, n'a pas été trop complètement absous par M. Eriks- son. Get auteur, on le sait, défend une théorie, dite du mycoplasma, d'après laquelle le parasite se con- serve dans les grains et passe d’une génération à l'autre sans l'intermédiaire d'un hôte différent. Ces formes bien adaptées aux céréales seraient pratiquement plus importantes que les spores qui viennent des Z'erberis en quantité restreinte et dans des circonstances assez rares. La théorie du mycoplasma n'est pas rigoureuse- ment démontrée. Elle n’est pas, d’ailleurs, la seule qui rende compte de la réinfection des Graminées sans l'entremise des porteurs d'écidies. Les urédo- spores adhérentes à la semence peuvent hiverner; le mycélium lui-même résiste dans certaines Gra- minées et peut au printemps produire de nouveaux urédos qui ensemencent les jeunes céréales. M. von Tubeuf® a étudié la persistance des rouilles chez les plantes vivaces. Sur des poiriers attaqués par la rouille grillagée, il a vu des spermogonies et des écidies apparaître sur les pousses nées à l’aisselle ! Les Urédinées (Rouiiles des plantes). 190$. ? Rouilles des Céréales. Montpellier, Coulet, 190$. 3 Zeïtschrift f. Pllanzenkrankheiten, t. XIX, 1909. “ K. Landthruks Ak. Handlingar, Stockholm, 1909, 5 Naturw. Land. u. Forstw., t. V, 1907. Paris, O. Doin, des feuilles rouillées l'année précédente ; mais, un an plus tard, tous les rameaux envahis étaient morts, en sorte que le parasite s'élait trouvé sacrifié ave les portions dont il s'était rendu maitre. Il ne semble donc pas que les champignons des rouilles se maintiennent indéfiniment à l'état végélatif. M. Eriksson fait un nouvel appel à la théorie du mycoplasma pour expliquer les ravages persistants de la rouille américaine sur les divers Groseillers d'Europe. Certaines Urédinées se montrent exclusives dans le choix de leur hôte, ou de leurs hôtes quand elles sont hétéroxéniques. Il en est d'autres qui ont un hôte commun sur lequel on ne parvient à les distin- guer par aucune différence morphologique, mais qui complètent leur développement sur des hôtes différents. Ainsi l'Uromyces Veratri (D. C.), qui, semé par M. Tranzschel sur l'Adenostyles alpina, avail donné des écidies, n'a pas envahi cette espèce dans les expériences de M. E. Fischer, qui, par contre, a obtenu des écidies sur l'Homogyae alpina. Par conséquent, les spores, en apparence iden- tiques, semées par les deux auteurs, diffèrent par la propriété biologique d'infester, l'une l'Adenostyles, l'autre l'Homogyne. L'Uromyces Veratri comprend deux similespèces ou états isomorphes : U. Adeno- stylis et U. Homogynes. Les botanistes ont mul- tiplié leurs recherches sur la spécialisation du parasitisme chez les Composées. Arrèlons-nous seulement au genre Hieracium, particulièrement étudié, à la suite de M. E. Jacky, par M. Hasler” el par M. Probst*. Ici tout le développement s'accom- plit sur un seul hôte. On admettait primitivement que le Puccinia Hieracii envahit indifféremment divers genres de Chicoracées. En réalité, les spores recueillies sur un /ieracium ne se développent que sur certaines espèces de ce genre. M. Probst y distingue même deux espèces reconnaissables à la position des pores germinatifs sur l'urédospore. Ceux-ci sont rapprochés du sommet chez les para- sites des Zuhieracium et caractérisent l'espèce qui doit garder le nom de Puccinia Hieraci; is sont au niveau de l'équateur chez les parasites des #/1e- racium de la section /’rlosella et caractérisent une nouvelle espèce, le Puccinia Piloselloidarum. Cha- cune de ces espèces comprend plusieurs similes- pèces, dont l'une n'attaque qu'une partie des Hiera- cium de la section correspondante. Il existe un certain parallélisme entre la spécialisation des Puccinies et le degré de parenté des espèces qui 1 Prakt. BI. f. Pllanzenbau u. Pflanzenschutz, À. VI, 1908. 2 Mitth. d. Naturf. Gesellsch. in Bern, 1908. — Central- blatt f. Bakter., [2], t. XXI, 1908. 8 Centralblatt f. Bakter., [2], t. XXI, 1908. 4 Annales mycologici, t. VI, 1908. — Céntralblatt f. Bakter., [21, t. XXII, 1909. 182 P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE leur conviennent. Toutefois il arrive que la spécia- lisation des parasites va plus loin que les distinc- tions établies par les botanistes descripteurs les plus avertis entre les formes des Hieracium. Telle spore, recueillie sur une variété d'A. Pilosella, refuse de se développer sur des exemplaires en apparence identiques dans une autre station. Il semble donc que les similespèces des Urédinées dénoncent à leur tour des similespèces parmi les Phanérogames. Par des expériences analogues, M. Juel' recon- nait quatre espèces et divers états spécialisés dans l'Uromyces Dactylidis Otth. Tandis que certaines Urédinées restreignent de plus en plus le cercle de leurs hôtes, il en est d'autres qui s'accommodent de plantes nourricières nouvelles. Nous en trouvons la preuve dans l'attaque des plantes indigènes par les rouilles introduites ou des plantes importées par les rouilles du pays. Ainsi le ÆRibes sanguineun importé d'Amérique subit, d’après M. Neger *, les attaques du Peri- dermium Strobi, qui ne se transmet pas en Europe aux Groseillers indigènes. M. W. Krieg° cite une série d'exemples analogues dans lesquels une Uré- dinée envahit des plantes appartenant à d'autres espèces, voire à d’autres familles que leurs hôtes habituels. À son avis, ces nouveaux régimes S'ex- pliquent parune mutation du Champignon. M. Ed. Fischer* fait intervenir la mutation pour expliquer les observations de M. Probst sur les Hieracium; mais, dans ce cas, c’est la mutation des hôtes qui entrainerait celle des parasites. IV. — BaAsIDIOMYCÈTES. Les recherches concernant la cytologie des Basi- diomyeètes sont entrées dans une période de repos après les grands travaux des dernières années. M. L. Dufour * indique les tendances imprimées à la systématique de cette classe par les découvertes de MM. Patouillard, Brefeld, Juel, Maire pour les Hyménomycètes, de Schræwter pour les Gastro- mycètes. M. Marryat ‘ ajoute le genre ?leurotus à la liste des Agaricacées à chlamydospores. La culture du Champignon de couche fait l'objet d'une note de M. Biers”, résumant une conférence de M. L. Mangin. M. Schræder* réussit à propager en forêt une espèce comestible rare, le Craterellus nucleatus. M. Mayr” rapporte les procédés usités au 1 Svensk Botanisk Tidskrift, t. Il, 1908. Naturw. Zeitschr. f. Land. u. Forstw., t. VI, 1908. * Naturw. Wochenschrifr, Neue Folge, t. VIS. Arch. Sc. phys. el nat. Genève, t. XXVI, 1908. levue génér. Botanique, t. XX, 1908. New Phytologist, t. VIX. 1908. Bulletin Soc. mycol. France, {. XXIV, 1908. Centralblatt 1. gesamte F'orstwesen, t. XXXIV, 1908. * Naturw. Zeitschr. Forst. u. Landw.,t. NIT, 1909. on « + E Japon et répétés en Europe pour cultiver sur du bois l'Agaricus Shitake. Parmi les espèces lignicoles non comestibles, le Polystictus versicolor a été cultivé en milieux sté- riles depuis la spore jusqu'au réceptacle par M. Bayliss”". M®° Rumbold* a obtenu en fiole des fructifications de plusieurs Agarics destructeurs de bois. M. Molliard *, en poussant fort loin la culture du Crucibulum vulgare, de V'Hydnum Auris- calpium, du Dasyseypha virginea, à démontré qu'ils digèrent la lignine sans l’aide des Bactéries. Les Champignons destructeurs de bois, parti- culièrement ceux qui menacent la solidité de nos habitations, ont fait l'objet de publications étendues. M®° Rumbold en a cultivé de nombreuses espèces et elle à trouvé chez plusieurs d'entre elles les caractères microscopiques, tels que les boucles ramifères, considérés par M. Wehmer comme propres au Champignon des architectes (Jerulius lacr vmans). Néanmoins, l'aspect des cultures, leurs préférences pour certains milieux, ainsi que la comparaison des multiples particularités liées à la structure permettent d'arriver à une détermination précise. L'auteur fait ressortir également les condi- tions favorables au développement de chaque es- pèce. M. Beauverie* précise la cytologie du Weru- lins lacr Ymans; il y signale notamment des sortes de tubes criblés facilitant le transport des liquides. M. Mez' publie un volume destiné surtout à mettre à la portée des praticiens les travaux con- cernant les divers Champignons des maisons. M. Schorstein® critique certains détails de ce livre, par exemple la synonymie, et relève des inexaeti- tudes dans les renseignements sur les dimensions des spores. Il fournit, d'autre part”, des données sur les caractères microscopiques des Champignons lignivores, leur besoin variable d'oxygène, ete. M. Wehmer” revient sur les différences des cul- tures de Merulius lacrymans, Coniophora cere- bella, Polyporus vaporarius. M. Bitimann” s'oc- cupe plus spécialement des Champignons qui attaquent le bois en forêt ou en magasin. Enfin, M. À. Moeller” réuniten trois volumes les questions économiques et juridiques afférentes aux ravages causés par les Champignons domestiques. M. L. Legué" vient de décrire un spécimen de ‘ Journal of Economic Biology, 1. HI, 1908. ? Naturw. Zeitschr. Forst. u. Landw., t. VI, 1908. * Bulletin Soc. botan. France, t. LVI, 1909. * Soc. Biol., 22 mai 1909. * Der Hausschwamm und die übrigen holzzerstôrenden Pilze der menschl. Wohnungen. — Dresden, R. Lincke, 1908. ® (Esterr. bot. Zeitschrift, &. LVIHII, 1908. ? Zeitschr. der ôsterr. Ingen.-u. Architekten-Ver., 1908. “ C'entralb]l. 1. Bakteriologie, [2], t. XXII, 1909. ° (Esterr. Jagd. u. Forstzeitung, t. XXVIT, 1909. 10 Hausschwammforschungen. Lena, Fischer, 1907-1910. “ Bulletin Soc. mycol. France, &. XXV, 1909. P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE 183 Collyhia velutipes dont le chapeau est creusé sur toute sa surface d'alvéoles qui rappellent ceux d’une petite Morille, avec cette différence, loutefois, que le fond de leurs cavités est souvent tapissé d'un réseau de veinules. La déformalion morchelloïde des Agaries n'est pas aussi rare que le laisse sup- poser la pénurie des documents bibliographiques. M. Patouillard à remarqué antérieurement que le genre Stylobates Fries est fondé sur une semblable anomalie. M. F. tions polyporoïdes dans lesquelles les alvéoles, au lieu d'envahir la face supérieure du chapeau, tiennent la place des lamelles. Les genres P{ero- phyllus Lév., Rhacophyllus Berk. sont, le premier des Pleurotes, le second des Coprins de forme inso- lite. Accidentelle dans les pseudo-genres précé- dents, la présence de pores hyménifères est fixée dans la section Dictyoploca du genre Marasmius, dans les genres Zentodium, Favolus qui ont, à part l'hyménium alvéolé, tous les caractères des Agari- cinées. Il est reconnu que la vieille distinction mor- phographique entre les Lamellés et les Porés ne répond pas aux affinités. Les Bolets se relient aux Agarics par l'intermédiaire des Paxilles, où les lamelles sont réunies par un réseau limité à leur base. M. Ludwig montre, d'autre part, que les chapeaux accidentellement superposés chez divers Hvdnum, Lactaria, Russula, Boletus sont une réplique de la forme habituelle du genre Merisma, que l’on peut définir un Polypore polycéphale. Ce qui fait le grand intérèt du mémoire de M. Ludwig, c'est de montrer, sinon comment, par quel mécanisme ces formes nouvelles se sont pro- duites et se produisent encore, du moins pourquoi elles ont pu se maintenir et se fixer en réalisant de nouveaux types génériques. M. Falck avait dé- montré que la croissance rapide de l'hyménium s'accompagne d’un dégagement de chaleur qui, en élevant la température de l'atmosphère confinée entre les lamelles des Agarics et surtout dans les tubes des Bolets, provoque des courants d'air qui entrainent les spores au dehors. M. Ludwig vérifie cette découverte. Chez le Boletus felleus, la tempé- rature des tubes dépasse de 10° C. celle de l'air ambiant. Dans une chambre close, les spores sont projetées sur toute la surface d’une table et sont retenues aux aspérités des parois verticales. Ludwig” s'occupe des déforma- V. — ASCOMYCÈTES. Les Laboulbéniacées constituent dans la classe des Ascomycèles un groupe à part comme les Uré- dinées parmi les Basidiomycètes, comme les Ento- ! Festschrift der Wetterauschen Gesellschaft f. gesamte Naturkunde zu Hanau zur Feier des hundertjährigen Bre- stehens. Hanau, 1908. mophlhorinées parmi les Siphomycèles, Par suile d'un parasilisme fixé dès une époque très reculée, les Laboulbéniacées ont gardé à l’élal de pureté des caractères profondément remaniés chez la plupart des Champignons; elles offrent notamment un type primitif de sexualité qui, joint à diverses particu- larités de structure, marque nettement leurs affi- nités avec des Floridées, Dans une suite à la sensa- tionnelle monographie qu'il a publiée en 1896, M. Roland Thaxter' porte à 500 le nombre des espèces el variétés, à 50 le nombre des genres décrits dans cette sous-classe. M. EF. ments sur la biologie de ces parasiles, leur propa- Picard® à fourni d'importants renseigne- gation et les raisons de leur fréquence relative chez les divers insectes d’après les mœurs de ces ani- maux. Comparant l’action du Laboulhenia marina n. Sp., qui n'attaque pas la chiline, à celle des Tre- nomyces, qui envoient des rhizoïdes jusqu’au corps adipeux, il pense * que les ectoparasites, comme les espèces perforantes, n'empruntent aux insectes que des matières grasses. Le problème de la sexualité chez les autres Asco- mycètes est toujours à l'étude. M. Guilliermond ‘ résume les vues diverses émises à ce sujet et les applications qu'on en a faites à la phylogénie de la classe. Chez l'Endomyces Magnusii, lasque tétra- sporé se forme, d'après M. Ludwig, au niveau de l'anastomose de deux rameaux. M. Guilliermond” reconnait la formation d'une cellule mâle au som- met du rameau le plus grèle et la conjugaison du noyau anthéridien unique avec le noyau unique de l'oogone, et la formation d'un syncaryon qui devient directement le noyau primitif de l’asque. Le genre Monascus, dont la position systéma- tique a donné lieu aux interprétations les plus con- tradictoires, est rattaché par M. W. Schikorra® à la famille des Aspergillacées. Par le mode de dévelop- pement des périthèces, il se comporte comme les Aspergillus et Penicillium. Dans une espèce pro- bablement nouvelle, l’auteur a reconnu la péné- tration des noyaux de l’anthéridie dans l’ascogone surmonté d'un trichogyne et la pénétration des noyaux conjugués issus de la fécondation dans les branches ascogènes. Le noyau primaire de l’asque provient de la fusion des deux noyaux d’un couple descendant par mitoses conjuguées d'un couple sexuel. Chez l'Aspergillus repens, par Miss E. Dale”, comme chez l'A. herbariarum anté- rieurement suivi par M. Dangeard, Miss Fraser et étudié ! Memoir Americ. Acad. of Arts. and Sc., t. XIII, 1908. ? Feuille des Jeunes Naturalistes, t. XXXIX, 1er déc. 190$. 1 (!. R. Soc. Biologie, t. LXV, 21 novembre 1908. # Revue géner. Botanique, t. XX, 1908. 5 C. R. Acad. Sc., 1909. Zeitschr. {. Botanik, t. 1, 1909. 5 Annales mycologici, t. VII, 1909. 2 184 P. VUILLEMIN — REVUE ANNUELLE DE MYCOLOGIE Miss Chambers, les organes mâles ne fonctionnent plus; ce sont les noyaux mêmes de l’ascogone qui s'associent deux à deux. Le même procédé de fécondation réduite ou d'apogamie est décrit par Miss Fraser‘ chez l'Aumaria rutilans. Ici Voogone lui-même n'est plus différencié et les noyaux con- jugués apparaissent dans le peloton de filaments qui constitue l’ascocarpe. Dans ce travail et dans une ultérieure faite en collaboration avec M. Welsford* où l'Otidea aurantia et le Pustularia resiculosa sont spécialement examinés, l'évolu- lion nucléaire est suivie au moment de la forma- tion des asques. Le nombre des chromosomes à l'haplophase est 8 chez l'Humaria, 4 chez le Pus- tularia,2 chez l'Otidea.Les auteurs pensent observer une double réduction numérique, la première dans le synapsis qui apparait un peu avant la carvo- inixie des jeunes asques, la seconde à la troisième mitose dans laquelle les chromosomes en V ne se divisent pas, mais se rendent par moitié à chaque pôle. Cette interprétation est apportée à l'appui de l'idée d’une fécondation redoublée, représentée par une première fécondation à l’origine du périthèce et une seconde à l’origine du novau de l’asque. Il nous semble plus probable qu'il n'y a qu'un acte sexuel prolongé, débutant par la caryogamie dans les rudiments du périthèce, s'achevant par la carvo- mixie dans l’asque. note M. Guilliermond® cherche dans les divers degrés de la transformation des processus sexuels la carac- téristique des étapes phylogénétiques conduisant de l'£ndomyces Magnusii et del Æremaseus fertilis aux espèces apogames, et finalement aux Saccharo- myces où toute trace de sexualité est inconnue. M. Dombrowski abonde dans le même sens. M. F.-G. Kohl*, dans un volume consacré aux Levures, considère leurs affinités comme inconnues et en donne une classification purement morpho- graphique. Les sacs asciformes jouant toujours un grand rôle dans la détermination des Levures, nous signalerons un milieu favorable à leur formation : M Gorodkowa "les oblient rapidement à 28°C. sur gélose inclinée contenant pour 100 d'eau : gélose 1, peptone 4, extrait de viande 0,5, chlorure de sodium 0,5 et glycose 0,25. Sans nous arrêter aux nombreux travaux con- cernant la description et la classification des Asco- mycèles, nous attirerons l'attention sur les champi- gnons tubériformes dont le développement affirme des affinités récemment soupconnées. Les morpho- ‘ Annals of Botany, t. XXII, 1908. ? Annsls of Botany, t. XXII, 190$. (!. R. Acad. Se., 44 décembre 190$. — C. R. Soc. Bio- logie, 5 et 149 juin 4909. # (, BR. des travaux du Laborat. de Carlsberg, t. VII, 1909. * Die Hefenpilze. Leipzig, 1908. * Bull. Jardin i. botan. Saint-Pétersbourg, t. VI, 1908. graphes opposaient d'abord la Truffe à la Pézize comme des types extrèmes caractérisant des ordres irréductibles, les angiocarpes et les gymnocarpes. G.. Massee * voit dans les Tubéracées un groupe primitif dont les Discomycètes sont dérivées par l'intermédiaire de genres à péridium perforé, tels que les Genea. M. Ed. Fischer fait également des Genea un groupe nodal, qui, avec les Gyrocratera, touche de près aux Pézizées. Mais le sens de l'évo- lution parait être inverse de celui-que suppose M. Massee. L'épithécium qui recouvre les asques résulte de la confluence de paraphyses encore libres chez les Pézizes, et c'est par des complications pro- gressives de l'appareil protecteur que l'on passe des Genea aux autres Eutubérinées qui forment la série couronnée par le genre Tuber. L'insuffisance des données concernant le développement des Dis- comycètes ne permet pas de décider si cette série dérive des Pézizes plutôt que des Rhizinacées. M. C. Rouppert*, dans une revision du genre Sphæ- rosoma, communément rattaché à cette famille, en fait le pivot autour duquel rayonnent, d'une part les Eutubérinées, d'autre part les Pézizacées, et dans une troisième direction les Helvellinées, y compris les Rhizinacées. D'accord avec Schræter, M. Ed. Fischer‘ distingue soigneusement des Eutubéracées les Plectascinés hypogés, c'est-à-dire les Champignons tubériformes dont les asques sont disséminés dans la trame au lieu d'être rangés en hyménium. M. Fischer croit à tort que je ne partage pas son avis”. Je suis convaineu, au contraire, que la séparation des Plectascinés et” des Hyméniés est de la plus haute importance phy- logénétique. J'ai seulement observé que, chez les Hypogés, l'hyménium est parfois disloqué secon- dairement au point que de véritables Hyméniés peu- vent être confondus avec des Plectascinés. Cette re- marque, qui ne touche en rien au principe, trouve sa justification dans une récente note de M. Bucholtz*. L'étude attentive du développement du Choiromyees meandriformis à démontré que ce genre, compris par M. Fischer parmi les Plectascinés, est une vraie Tubérinée, voisine des Piersonia et des Genabea. On voit que, maniées avec prudence, l'histologie et l'organogénie amènent d'incessants perfection nements à la systématique des Champignons. P. Vuillemin. Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. ! Annals of Botany, 1. XXII, 1909. 2 Borichte deutsch. Botan. Gesellschaft, t. XXVIT, 1909. # Bulletin Acad. Se. Cracovie, juin 1909. 4 Botanisehe Zeitung, (1, t. LXVI, 1908. 5 Botanisches Centralblatt, t. OX, 1909. 5 Annales mycologici, L. VI, 1908. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 485 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Lowell (Percival), Directeur de l'Observatoire de Flagstall (Etats-Unis). — Mars et ses Canaux. — Traduction française de M. MarcEz Moye. — 1 vol. in-8° de 366 p., avec lig. et planches. (Prix: 5 fr.) Edition de la « Revue Blanche ». Paris, 190. Il nous faut rendre hommage tout d'abord à l'habi- leté avec laquelle M. Marcel Moye a su, dans un fran- cais très élégant, rendre l'anglais pittoresque et coloré de M. Lowell. Ceci dit, nous n'en sommes que plus libre pour avouer que la lecture de cet ouvrage n'a pas changé, en ce qui concerne les canaux de Mars, l'opinion que nous exposions ici même, il y a quelques mois, en ana- lysantle très beau livre sur « Les planètes» de M. Charles André. L'ouvrage de M. Lowell est divisé en deux grandes parties, qu'il a lui-même intitulées : « Configurations martiennes naturelles » et « Configurations non natu- relles ». En ce qui concerne les premières, qui sont relatives aux grandes taches sombres qui parsèment la surface de Mars, comme aussi aux calottes polaires et à leurs variations saisonnières, l'exposé de M. Lowell est bien fait, encore que trop souvent entouré de con- sidérations extra-scientifiques. Dans cet ordre d'idées, et en ce qui concerne en particulier les changements des calottes polaires avec les saisons, M. Lowell a mème apporté, par ses observations personnelles, diverses contributions nouvelles. Mais il convient cependant de ne pas oublier que c'est Huyghens qui, au xvue siècle, découvrit les calottes polaires; toutes les grandes lignes de leurs configurations et de leurs changements ont été exposées, il y a près d'un siècle, par Tœær et Madler. Sous le nom de « Configurations non naturelles », M. Lowell étudie ensuite les « prétendus canaux de Mars ». La lecture de ces pages sera très attachante et agréable pour ceux qui se plaisent aux spéculations romanesques sans bases positives; mais je suis obligé de reconnaitre qu'elles ne changent nullement la posi- tion de la question, telle que l'a si bien définie l'émi- nent directeur de l'Observatoire de Lyon dans « Les planètes », et qui lui faisait conclure avec l'illustre Newcomb : « Rien de ce qui a été imaginé pour décrire le mode de vie des prétendus habitants de la planète Mars ne repose sur le moindre fondement de réalité. » Le lecteur ne sera pas peu surpris, en lisant ces pages de M. Lowell, de constater que celui-ci paraît ignorer à la fois toutes les expériences de Cérulli, Newcomb, Pickering, Barnard, Maunder et tant d'autres. Ignorer ou ne pas discuter des objections et des expériences, lorsqu'elles sont l'œuvre d'hommes de science aussi éminents que ceux que nous venons de nommer, est peut-être un artifice littéraire ; mais ce n'est certainement pas un procédé véritablement scientifique. D'ailleurs, les observations de la dernière et récente opposition martienne, qui sont postérieures à l'appa- rition de cet ouvrage dans sa langue originale, n’ont fait que confirmer entièrement le scepticisme ré- gnant en Ce qui concerne les fameux canaux, et dont nul mieux que M. Charles André n'a exposé les irréfutables raisons: tandis, en effet, qu'en France l'excellent observateur qu'est M. Antoniadi, étudiant Mars à la grande lunette de l'Observatoire de Meudon, était amené à proclamer l'inexistence complète du réseau géométrique des canaux (alors qu'observant ET INDEX Mars les années précédentes avec des instruments beaucoup moins puissants, il lui était arrivé d'aperce- voir des apparences canaliformes), d'Amérique nous arrivaient des observations nombreuses et peut-être encore plus convaincantes : les plus remarquables sont celles que M. Hale à faites dans l'atmosphère idéale du Mont Wilson, à l’aide du télescope de 60 pouces (le mème instrument qui, naguère, lui permit de décou- vrir l'existence du phénomène de Zeeman dans les taches solaires). M. Hale à obtenu de nombreuses photographies de Mars avec cet instrument, dont les qualités optiques et le pouvoir séparateur sont sans égaux dans le monde (le pouvoir séparateur en est, en particulier, # à 5 fois plus grand que celui de l’instru- ment de M. Lowell); or, ces photographies, qui sont incomparablement supérieures à toutes celles qu'on avait obtenues jusque-là (tous les astronomes qui les ont vues peuvent en témoigner), ne montrent nulle trace du réseau géométrique des canaux, mais, au contraire, elles manifestent l'existence d'une foule de petites taches extrêmement irrégulières et nombreuses à la place des prétendus « canaux ». En résumé, et sans vouloir revenir ici sur une discussion qui à été longuement poursuivie dans les revues astronomiques, il semble aujourd'hui complètement démontré que les fameux « canaux » ne sont pas autre chose que des phénomènes de diffraction produits, comme M. Charles André l’a si bien expliqué, par l'ouverture insuffisante des instruments généralement employés. En tout état de cause, l'ouvrage de M. d'une lecture agréable pour fantaisies amusantes écrites resque. Ce volume ne dépare pas la collection des romans étrangers que la /tevue Blanche s'est fait une spécia- lité de porter à la connaissance du public français. CHARLES NORDMANX, Astronome de l'Observatoire de Paris. Lowell sera ceux qui aiment les dans un style pitto- Lebon (Ernest), Agrégé de l Université, Correspon- dani de l Academie royale des Sciences de Lisbonne. — Savants du jour : GASTON DARBOUx. — 1 vol. 1n-8° de vru-80 pages. (Prix : 7 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. Par cette publication consacrée à M. Darboux, M. Ernest Lebon continue la série de ses belles mono- graphies relatives aux grands savants du jour. On trouvera, dans ce nouvel opuscule, avec une intéres- sante biographie de l'éminent géomètre, une liste complète de ses Notes, de ses Mémoires et de ses ouvrages. Une telle publication fait mieux connaitre encore la valeur de l’œuvre de M. Darboux et tous les services qu'a rendus à la Science l'illustre Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences. 2° Sciences physiques Léauté (André), Ancien Ingénieur des Mines. — Recherches sur la décharge des condensateurs. {T'hèse de la Faculté des Sciences de Paris). —1 vol. in-4° de T2 pages. Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1910. Malgré plus de cent cinquante années de recherches ininterrompues, l'étude de la décharge des condensa- teurs ne semble pas sur le point d'être épuisée; nous en trouvons la preuve dans la thèse, du plus haut intérêt, soutenue par M. André Léauté et intitulée : «Recherches sur la décharge des condensateurs ». On sait que Helmholtz, Kirchhoff et W. Thomson 486 BIBLIOGRAPHIE — À ALYSES ET INDEX furent les premiers à établir la théorie mathématique de la décharge d’un condensateur. Helmholtz obtint l'équation de la décharge dans un circuit sans capacité en égalant les forces électromotrices. W. Thomson, se limitant aux mêmes circonstances, montra que le cou- rant est une fonction sinusoidale du temps, dont la période est : T =2r VOL. Kirchhoff, enfin, n'envisageant que le cas où deux points quelconques du circuit, séparés par une longueur finie de fil, ne peuvent être à une distance infiniment petite l'un de l'autre, et excluant, par suite, le cas où la décharge traverse une bobine, établit que le courant en un point quelconque du circuit est formé par la superposition d'une infinité de courants oscillants élé- mentaires. M. André Léauté, reprenant la question, démontre dans sa thèse que la capacité des bobines de self-induc- tion usuelles n'est pas, en général, négligeable, qu'elle joue souvent, au contraire, un rôle capital dans le phé- nomène et qu’elle est susceptible de donner naissance, dans le courant de décharge, à ce qu'on a appelé, à tort peut-être, des harmoniques. Il établit alors une théorie qui, tenant compte de la capacité de la bobine, complète la théorie de Kirchhoff, laquelle ne pouvait s'appliquer que dans le cas de circuits constitués par des fils droits. Le travail de M. A. Léauté a pour point de départ cer- laines expériences très curieuses de M. Hemsalech. Ce dernier, en étudiant l'étincelle de décharge d'un con- densateur à travers une bobine, à constaté, mais sans chercher à en expliquer l’origine, la présence de stries dans les différentes oscillations constitutives de l’étin- celle. Ces stries, que MM. Batelli et Magri attribuaient à des expulsions irrégulières de vapeurs métalliques provenant des électrodes, sont dues, M. A. Léauté l’a démontré d'une facon élégante, à la capacité de la bobine employée par M. Hemsalech. M. A. Léauté à, en effet, reproduit entièrement les phénomènes des stries en faisant passer la décharge à travers deux circuits montés en parallèle et dont chacun comprend un condensateur et une self-induc- tion sans capacité. Pour compléter la démonstration, il restait à établir que, dans une bobine de self à plu- sieurs couches, il existe effectivement un circuit dérivé présentant de la capacité. Or, deux couches voisines d'une bobine jouent, l'une par rapport à l'autre, le rôle des armatures d’un condensateur, et il s'accumule sur elles d'autant plus d'électricité que leur différence de potentiel est plus élevée; M. A. Léauté, pour étudier ce phénomène, a réalisé toute une série d'expériences ingénieuses, qui lui ont permis de mettre en évidence dans tous ses détails le rôle que joue pendant la décharge la capacité de la bobine de self-induction. Ce point capital expérimentalement établi, il était né- cessaire, pour aller plus avant et pour déterminer d'une facon plus précise la relation qui existe entre la pré- sence des stries dans les étincelles et la capacité des bobines de self, de faire la théorie mathématique de ces phénomènes ; nous résumerons rapidement ce chapitre important. de la thèse. M. A. Léauté considère une bobine à deux couches, de résistance ohmique négligeable. Si l’on appelle V(x la différence de potentiel entre deux points, situés à la distance x des deux bornes de la bobine, I(x) l'intensité du courant en ces points, y et À la capacité et la self par unité de longueur, 2d la longueur du fil de la bobine el F la capacité du condensateur, les équations de pro- pagation s’écrivent : al eV eV sal ==; 2; ox ot ox at enfin l'on suppose, pour plus de généralité, qu'à l'instant initial I et V doivent représenter deux fonc- lions quelconques de x. Reprenant la méthode employée par Fourier dans sa théorie mathématique de la chaleur, l’auteur établit que V(x) et I(x) sont de la forme : ml y t RE MT CN RS) ( js vt t VX = SA co Ron e e NT DES = 2 2 V)yd les sommations qui figurent aux deuxièmes membres s'étendant à toutes les racines v de l'équation : cotg y — hy —0, (2 Tr 5) ; Les coeflicients À et B sont déterminés de façon qu'au temps {—0, I{x) et V(x) représentent deux fonctions données de x. M. A. Léauté établit que les séries I(x) et V(x) sont convergentes et que, par conséquent, elles fournissent bien la solution générale du problème. Si l'on désigne par v, et v, les deux premières racines positives de l'équation cotg zv— lv =0, il résulte de ce qui précède que le courant de décharge est la superpo- sition d'un courant sinusoidal, dit fondamental, de D + » ——; et d'un courant correspondant à un 4VXyd terme plus compliqué, admettant très sensiblement la fréquence Va 4Vyd Après avoir montré que les formules de Thomson peuvent être déduites des égalités (1), dont elles ne sont qu'un cas particulier, M. A. Léauté, pour vérilier période ee es sa théorie, compare les valeurs des rapports = qu'elle V 1 lui fournit à celles auxquelles conduisent les mesures de M. Hemsalech; comme les différences relatives entre les deux séries de ces nombres ne dépassent jamais 40/,, on peut dire, si l'on tient compte des erreurs d'expérience, qu'il y a accord absolu entre la théorie et l'expérience. Enfin, il est intéressant de comparer la fréquence du fondamental à la fréquence que donne la formule de Thomson; le calcul montre que le rapport de ces deux fréquences est généralement très voisin de l'unité; il en résulte que, dans un certain nombre d'applications, la théorie de Thomson reste suffisante et qu'il n’est nécessaire de recourir à celle de M. A. Léauté que lorsqu'on étudie des phénomènes dans lesquels la pré- sence de stries a été constatée. Le travail de M. André Léauté constitue ainsi un chainon important dans lasuitedestravaux qui, de Helm- holtz et de Kirchhoff à W. Thomson et à M. Hemsalech, ont permis d'approfondir la décharge des condensa- teurs; grâce à l'emploi heureux qu'il a su y faire simul- tanément des méthodes expérimentales et des théories mathématiques, l'auteur à apporté une nouvelle et vive lumière dans cette intéressante question. E. CAUDRELIER, Ingénieur des Ponts et Chaussées. Lewkowitseh (J.), Zngénieur-chimiste. — Techno- logie et Analyse chimiques des Huiles, Graisses et Cires. Traduit de l'anglais par EmiLE Bonroux, Ingénieur-chimiste. Tome III. — 1 vol. gr. in-8° de x11-530 pages avec 98 fiqures.(Prix :47 fr.50.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Ce volume termine la traduction française de l’im- portant traité de M. Lewkowitsch, sur lequel nous avons à deux reprises attiré déjà l'attention de nos lecteurs ?, 1 Voir la Zevue des 30 avril 1908, p. 332, et 30 juin 1909, p. 556. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 487 L'auteur divise les industries des huiles el graisses en trois grands groupes : A. Industries ayant pour objet le raffinage des huiles et graisses, dans lesquelles il distingue les huiles et graisses comestibles, les huiles d'éclairage et lampantes, les huiles siccatives, les huiles de graissage et lubrifiantes, les huiles d’ensimage, les huiles et graisses émulsionnées; B. Industries dans lesquelles les glycérides subissent une modification chimique autre que la saponification : huiles el graisses bromées, iodées, chlorées, soufrées; huiles polymé- risées, huiles cuites, huiles oxydées, huiles vulcanisées, huiles nitrées, huiles sulfonées ; C. Industries basées sur la saponification des huiles et graisses ; ce sont les plus importantes, puisqu'elles comprennent l'industrie des bougies, l’industrie des acides gras, l'industrie des savons et l'industrie de la glycérine. Ge chapitre se termine par quelques pages sur la technologie des cires. La dernière partie de l'ouvrage est consacrée à la technologie des huiles, graisses et cires régénérées, telles que les crasses de coton, les graisses d'abattoirs, d'os, de peaux, d'équarrissage, le dégras et le moellon, les graisses régénérées des cuirs, la graisse et la cire de suint. Le volume se termine par un appendice qui incor- pore à l'ouvrage tous les travaux ct documents récem- ment publiés sur les matières grasses et met ainsi complètement à jour les deux premiers tomes. L’en- semble constitue l'œuvre la plus complète et la plus autorisée qui ait été écrite sur la matière. 3° Sciences naturelles Rousiers (Paul de). — Les grands Ports de France, leur rôle économique.— 1 vol. in-16. (Prix :3 fr. 50.) Librairie A. Colin, éditeur. Paris, 1909. Nos ports ont actuellement un regain d'actualité. Il ne faut pas s'en plaindre. Bien des questions impor- tantes les concernant sont encore à l'étude. C'est d'abord l'autonomie administrative qu'il s'agirait d'ac- corder, dans une certaine mesure, à quelques-uns d'entre eux, et grâce à laquelle des travaux urgents pourraient ètre accomplis plus vite. C'est ensuite la concession d'une zone franche qui leur permettrait de mieux sup- porter les inconvénients du régime protectionniste. C'est le perfectionnement de leur outillage, c'est aussi l'élargissement de leur hinterland par l'amélioration des voies fluviales d'accès (Loire, Rhône) ou l'établis- sement de canaux. M. Paul de Rousiers, si compétent dans ces différentes questions, vient de leur consacrer un livre extrème- ment documenté et vivant. Dans une introduction syn- thétique, l'auteur analyse la triple fonction du port moderne régionale, industrielle et commerciale. Grâce à l'extension des voies de communication, le port actuel est appelé à desservir les besoins d'une région (hinterland) de plus en plus vaste et qui n’est limitée que par l'extension des ports concurrents et par les tarifs des voies d'accès. D'où l'importance des voies fluviales, dont les taxes de transport sont moins élevées. D'autre part, la facilité d'obtenir à bon compte les matières premières exotiques a naturellement développé la fonction industrielle, capable de fournir en retour du fret d'exportation. La fonction commer- ciale est favorisée par les deux précédentes et entravée par le régime protectionniste. La création d’une zone franche peut y remédier partiellement. On sait le rôle qu'elle joue dans le développement de Hambourg, en particulier. M. Paul de Rousiers consacre ensuite une étude spé- ciale à chaque port en déterminant ses fonctions éco- nomiques. Dunkerque est avant tout un port régional, qui pourrait étendre son hinterland jusqu’à la région de Briey, en améliorant les canaux. C'est également la fonction régionale qu'il faut développer au Havre et à Nantes, dont le sort est lié à l'amélioration de la Loire. Rouen est principalement l’avant-port de Paris, tandis que La Pallice est surtout une escale. Bordeaux gag rait surtout par l'extension de ses industries, Quant Marseille, qui doit lutter contre l'attraction des percé: transalpestres, son avenir réside dans l'accroissement de son rôle industriel, en utilisant, en particulier, li rives de l'étang de Berre, le long du futur canal d jonction, et d'autre part, dans l'élargissement de sa fonction régionale, en profitant de son avantage na- turel sur 'Gënes, de la présence du Rhône et de la Saône. Pierre Clerget, Professeur à l'École supérieure de Commerce de Lyo Beauverie (J.), octeur ès Sciences, Chargé dur Cours de Botanique appliquée à la Faculté des Science de l'Université de Lyon. — Les Bois industriels. 4 vol. in-A8 jésus de 420 pages, cartonné toile, avec 54 figures. (Prix : 5 {r.) O. Doin et fils, éditeurs. Paris, 1910. La Bibliothèque de Botanique appliquée de l'£ney- clopédie scientifique publiée sous la direction du Dr Toulouse vient.de faire paraître un nouveau volume, dû à M. J. Beauverie, et consacré à l'étude des Bois industriels, indigènes et exotiques. M. Beauverie, dans un premier chapitre, rappelle les faits généraux concernant la structure, les pro- priélés physiques et la composition chimique des bois, qu'il est nécessaire de connaitre avant d'aborder l'étude des diverses essences utilisées dans l'industrie. Comme l'ouvrage vise avant toutun but pratique et qu'il est spécialement destiné aux techniciens, l’auteur décrit ces essences, non dans l’ordre de la classitica- tion botanique, mais suivant les groupements usités dans le commerce, qui distingue dans les bois indi- gènes les bois durs, les bois blancs (à tissu plus tendre), les bois fins (généralement colorés et à texture serrée) et les bois résineux; de même, pour les essences exotiques, M. Beauverie, sans se soucier des aflinités botaniques, les classe simplement — et avec raison — sous {rois rubriques : bois exotiques d'ébi- nisterie, bois exotiques de service ou de construction et bois de teinture. Pour chaque espèce, M. Beauverie décrit méthodi- quement les caractères anatomiques du bois, les carac- tères physiques du bois et de l'écorce, les qualités et les usages. Les caractères anatomiques, auxquels se réfèrent la plupart des figures, sont décrits avec détail et précision; l’auteur y insiste parce que la connais- sance de la structure examinée au microscope donne des indications précieuses sur la famille ou le genre de maintes essences exotiques, importées seulement sous leurs noms indigènes, le nom botanique étant inconnu ou incertain; parce que, en outre, elle permet de prévoir ou d'expliquer les propriétés physiques des bois et les usages auxquels ils peuvent servir. Le dernier tiers du livre est consacré aux bois exo- tiques dont nos forêts coloniales fourniront à la métro- pole des provisions de plus en plus importantes à mesure qu'elles seront mieux connues el scientili- quement exploitées. Car il est bien reconnu qu'il n'\ a de forêts vraiment productives que celles qui sont régulièrement aménagées. Que n'imitons-nous Îles Anglais, qui viennent d'organiser une administration forestière aussi complète que celle des Etats européens dans leur colonie du British East Africa, tandis qu'en face la France laisse dans le plus déplorable abandon les richesses forestières de Madagascar ? Cependant peu à peu, grâce aux efforts de nos com- mercants, certains bois de nos colonies arrivent à trouver une utilisation en France : exemple : l'acajou et l'ébène du Sénégal, les bois de fer du Dahomey, le teck de l'Indo-Chine, le liem du Tonkin, etc. M. Beauverie mentionne toutes les essences qui ont élé essayées en France pour la construction, lébé- nisterie, le pavage, la teinture, le tannage et indique le peu que l’on en sait actuellement. Son livre, très clairement écrit, très bien ordonné, accompagné d’un index bibliographique, d'une table % 488 alphabétique des matières et des noms d'auteurs, rendra certainement service à tous les techniciens qui s'occupent des applications industrielles du bois. E. Henry, Professeur à l'Ecole nationale des Eaux et Forêts. Coupin (Henri), Docteur ès Sciences. — Animaux de nos pays. — 1 vo/. in-8° de 500 pages avec 660 fig. et 46 tableaux, de ia Bibliothèque de Dictionnaires manuels. (Prix relié: 6 fr.) Librairie Armand Colin. Paris, 1909. Cet intéressant ouvrage, qui renferme la description des animaux les plus communs de France, de Belgique et de Suisse, est divisé en deux parties : jo L'étude des Vertébrés, c'est-à-dire des Mammi- fères, des Oiseaux, des Reptiles, des Batraciens et des Poissons, où l’on trouvera la description de toutes les espèces de nos pays ; 20 L'étude des Invertébrés, c'est-à-dire des insectes, vers, mollusques, etc., dans laquelle l'auteur a dù limiter ses descriptions aux espèces les plus com- munes, en s'étendant parfois sur quelques particula- rités de leurs mœurs. De nombreux tableaux de classification et d’excel- lentes gravures permettent la détermination relative- ment facile des animaux. Un index alphabétique détaillé, contenant les noms vulgaires des principales espèces, donne à l'ouvrage son caractère de diction- naire. Ce livre rendra service aux chasseurs, aux pêcheurs, aux agriculteurs, aux instituteurs et à leurs élèves; il tiendra une place honorable dans l’intéressante collection de « dictionnaires-manuels illustrés » de la Librairie Armand Colin. 4 Sciences médicales Le Gendre (D° Paul), Médecin de l'Hôpital Lariboi- sière, et Martinet (D' Alfred), Axcien Interne des Hôpitaux de Paris. — Les Régimes usuels. — 1 vol. in-80 de 435 pages. (Prix : 5 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Ce livre fait suite à un ouvrage sur les Aliments usuels du D: Martinet. Après avoir étudié la composi- tion et la préparation des aliments, les auteurs nous montrent aujourd'hui la facon de les grouper en vue de constituer des régimes pour l’état normal et pour les états pathologiques. En ce qui concerne la quantité optima d'aliments à faire entrer dans la ration normale de l’homme, les expérimentateurs ne sont pas d'accord, et l’on ne peut guère viser qu'à une évaluation très approximative, d'autant plus que tous les calculs sont basés sur la valeur calorimétrique absolue brute des aliments, et que cette notion est quelque peu faussée au point de vué diététique, où la valeur calorimétrique relative à l'individu devient prépondérante. Néanmoins, il y a là un certain nombre d'indications précises dont il faut tenir compte pour évaluer le régime à donner à un individu normal. Si la quantité totale d'aliments n'est pas exactement déterminée, on est encore moins fixé sur la composition optima de l'alimentation. En parti- culier, la teneur en albumine nécessaire dans un régime a été très diversement appréciée. Les auteurs admettent que, pour un travail modéré, la dose moyenne est de 4 gr. 50 d'albumine par kilogramme et par jour, et cependant les expériences de Chittenden, de H. Labbé et Morchoisne ont montré que l'alimentation pouvait ètre réduite à 0 gr. 50 d’albumine par kilo- gramme et par jour, et même maintenue au-dessous de ce chiffre. : Un point important dans la prescription du meilleur régime est la répartition des repas dans la journée. Les auteurs estiment que la coutume la plus rationnelle est celle qu'ils nomment anglo-hollandaise et qui com- prend trois repas : un moyen le matin avant le travail, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX un petit vers midi pendant le travail, un copieux le soir après le travail, de telle sorte que le repos général coïncide avec le travail digestif et le repos digestif avec le travail général. Les auteurs établissent les divers régimes de l'homme adulte, de la femme adulte, de la femme enceinte et nourrice, du vieillard, de l’enfant et de l'adolescent ; ils ne se bornent pas à donner pour chaque cas la quantité globale de calories ou même de chaque variété chimique d'aliments : ils donnent des exemples concrets s'appliquant à chaque cas particulier et précisant la quantité et la nature des aliments qui doivent com- poser les repas. Après le régime normal, les auteurs étudient les régimes systématiques anormaux que l'on obtient en faisant varier les constituants du régime normal : régimes hyper ou hypoazotés; hyper ou hypograisseux ; hyper ou hypohydrocarbonés; hyper ou hypominé- ralisés; et,enfin, hypohydriques. Chacun de ces régimes systématiques trouve une application, et les auteurs reprennent la question en envisageant successivement les régimes à prescrire dans les diverses maladies : à propos des maladies de l'estomac, de l'intestin, du foie, des reins, des poumons, de l'appareil circulatoire, on trouve le régime convenable permettant de réaliser pratiquement, par des menus appropriés, l'indication théorique. C'est surtout dans les maladies de la nutrition que le régime prend une importance capitale; aussi les auteurs insistent-ils particulièrement sur la diététique de l'obésité, de la goutte, du diabète et de l'arthritisme. Enfin, des annexes nous donnent les équivalents calorimétriques et la composition des aliments, toutes notions qui sont indispensables aujourd'hui au méde- ein praticien. Pour qui connait le sens clinique et le talent d'expo- sition de MM. Le Gendre et Martinet, nul doute que leur livre ne soit appelé à avoir beaucoup de succès. Dr M. LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin des Hôpitaux. 5° Sciences diverses Saladin (Henri), Architecte, Membre de la Commis- sion archéologique de l'Afrique du Nord : Tunis ec Kaiïirouan.— Cagnat (René), Wembre de l'Institut: Carthage, Timgad, Tébessa et les villes antiques de l'Afrique du Nord. — Peyre (Roger) : Padoue et Vérone. — Gusman (P.): Venise. — # rol. in-4° illustrés de la Collection des villes d'Art célèbres. Chaque volume : 4 fr. H. Laurens, éditeur. Paris. Ecrits par les savants les plus qualiliés, ces quatre volumes, ornés d'une belle et abondante illustration, continuent une collection qui rend à tous les artistes et à tous les voyageurs cultivés les plus précieux ser- vices. Peu d'ouvrages évoquent mieux le passé que le livre de M. Cagnat sur les villes antiques de l'Afrique du Nord, ou rendent mieux la physionomie d’un art ou d'une ville que les volumes de MM. Saladin sur Tunis et Kairouan, Roger Peyre sur Padoue et Vérone, Gusman sur Venise. Le succès qu'obtient auprès du publie lettré cette belle collection artistique, si variée et si vivante, doit être pour l'éditeur un encouragement à la continuer. LR CE Pirenne (Henri), Professeur à l'Université de Gand. — Les anciennes Démocraties des Pays-Bas. — 1 vol. de la Bibliothèque de Philosophie scientilique. {Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1940. L'étude des anciennes démocraties peut être une source d'enseignements précieux pour le sociologue et l'homme politique. On verra, en ce livre, comment furent résolus, jadis, des problèmes presque iden- tiques à ceux qui s'agitent aujourd'hui. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 439 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 Mai 1910. M. le Président annonce la mort de M. St. Canniz- zaro, Correspondant pour la Section de Chimie. — M. Blaserna est élu Correspondant pour la Section de Physique. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux fait connaître deux nouvelles méthodes de récurrence dans la théorie des systèmes orthogonaux. — M. G. Tzitzeica complète des résultats de ses recherches sur une nou- velle classe de surfaces. — M. M. Fréchet complète une proposition de M. Riesz sur les fonctionnelles con- tinues. — M. E. Ouivet étudie l'équation différentielle du mouvement d'un projectile sphérique pesant dans l'air et signale quelques cas particuliers nouveaux d'intégration. — M. E. Esclangon adresse ses observa- tions de la comète de Halley, faites à l'Observatoire de Bordeaux. Le 11 mai, la queue atteignait une longueur de 250, le 16 mai une longueur de 65°, bien supérieure à la distance du noyau à la Terre le 19 mai, — M. Bor- relly présente ses observations de la même comète faites à l'Observatoire de Marseille. Le 13 mai, son noyau brillait comme une étoile de 1° grandeur et mesurait 11!” de diamètre. — M. Iñignez adresse des photographies de la comète de Halley obtenues à l'Ob- servatoire de Madrid. — M. J. Comas Sola confirme l'aplatissement de Lo, le premier satellite de Jupiter, qui peut aller jusqu’à 1/4. 11 semble attribuable à l’at- traction de la planète sur son satellite. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Herrgott décrit sous le nom de thermophile des tissus, tapis, tricots chauffant par l'électricité et caractérisés par le fait que les fils électrothermiques (en nickel pur) sont tissés en même temps que les fils textiles. — MM. A. de Gramont et M. Drecq ont observé l'apparition des bandes dites du cyanogène dans le spectre du carbonate de sodium exempt de cyanure soumis à l’action de l'étincelle très chaude d'un transformateur; si ces bandes sont bien attribuables à la présence simultanée de C et Az, elles n'impliquent pas nécessairement celle du cyanogène. — M. L. Houllevigue a déterminé la dimension des éléments matériels projetés par les cathodes dans les tubes à vide et montre qu'ils ne diffèrent pas essen- tiellement des granules des métaux colloïdaux. — MM. A. Besson et L. Fournier, dans l’action de l’ef- fluve sur l’aldéhyde éthylique en présence de l'hydro- gène, n'ont obtenu que de l’eau, des acides (acétique et homologues) et des corps cétoniques (propanone, butanone, etc.). — MM. P. Sabatier et A. Mailhe, en dirigeant sur une traînée d'oxyde de thorium, chauffé entre 300° et 360°, un mélange d'H°S et de vapeurs d'alcools, ont obtenu avec un assez bon rendement les thiols correspondants. — MM. F. Bodroux et F. Taboury, en faisant réagir les nitriles C°H°.CHR.CAz sur l’amidure de sodium, et le dérivé formé sur un hydrocarbure gras monohalogéné, ont obtenu les nitriles C°H5.CRR’.CAz. Les nitriles C°H5.CR?.CAz ont été préparés de même à partir du cyanure de benzyle. — M. G. Darzens, en faisant réagir HCI et HBr sur les éthers glycidiques, a obtenu des dérivés «-oxy-B-halo- génés; avec HI, il y a séparation d'I et formation d'un éther non saturé af. — MM. A. Arnaud et S. Poster- nak, en décomposant par KOH le dérivé diiodhydrique de l'acide stéarolique, ont obtenu, en plus de l'acide stéarolique primitif régénéré Toro, deux nouveaux isomères de cet acide avec triple liaison déplacée d'un carbone à droite et à gauche Ts, F.470,5, et Tio:n, REVUE GÉNÉRALE DES SCIFNCES, 1910. F.47°. — MM. M. Godchot et J. Frezouls, en traitant l'aldéhyde hexahydrobenzoïque par HCAz, puis saponi- fiant le nitrile formé, ont obtenu l'acide hexahydro- phénylglycolique, C°H'.CHOH.CO®H, F.130°-131°, peu soluble dans l’eau. — M. C. Beys décrit un nouveau procédé pour le dosage de l'acide tartrique dans les matières premières naturelles. — M. J. Bertheaume indique une nouvelle méthode de dosage des trois méthylamines et de l'ammoniaque mélangées. L'action du chloroforme sur les chlorhydrates sépare une partie insoluble, contenant AzH°* et la méthylamine, qui sont séparées par la méthode de M. Francois, et une partie soluble, contenant la di- et la triméthylamine, qui sont dosées par un procédé basé sur les propriétés des periodures. — M. M. Nicloux a constaté que, chez le chien, au cours de l’anesthésie et pendant la période de retour, le chloroforme fixé par le sang et les tissus est décomposé dans une proportion d'environ 50 °/,. — M. G. Seliber a reconnu que, dans les mêmes condi- tions de culture, le Bacillus butyricus produit les acides butyrique et acétique, le B. perfringens les acides acétique et formique, le Z. putrificus des acides gras supérieurs. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Strohl a déterminé le poids relatif du cœur chez deux espèces de Lago- pèdes habitant l’une les Hautes-Alpes, l’autre les plaines de la Laponie. Chez la première, on constate une hypertrophie dextro-ventriculaire compensatrice, qui doit être considérée comme une adaptation spécifique au séjour dans la haute-montagne. — M. H. Coutière a reconnu qu'il existe une très proche parenté entre les Hippolytidae tels que les Saron, Nauticaris, Alope, et les A/pheidae inférieurs tels que les Athanas, Betaeus æquimanus, les derniers constituant la suite naturelle et comme l'épanouissement des premiers. — M. P. Dop a étudié la distribution des trois groupes de Strychnos (à fleurs brévitubes, intermédiaires et lon- gitubes) dans l'Asie orientale. La flore de l’Indo-Chine est mixte, composée d’une part d'éléments indiens et chinois, de l’autre d'éléments malais. — M. G. Boyer montre que la truffe mélanospore est en relations étroites avec les racines des arbres dits truffiers. L'ap- pareil fructifère une fois formé présente une croissance et une maturation lentes, pouvant s'étendre du début de l'été à la fin de l'hiver. — MM. L. Nègre et J. Bridré ont reconnu que le sérum de l'animal à lym- phangite épizootique se comporte comme un sérum antilevure et le parasite de la lymphangite épizootique comme une levure, ce qui consolide l'hypothèse de la nature blastomycélienne de cette maladie. — M. L. de Launay déduit de la loi de Rosenbusch que l’oxyda- tion première dont résulte la croûte silicatée terrestre s’est faite sur un magma métallique dont le poids ato- mique moyen était à peu près de 28,9 (voisin de celui du silicium 28,4). — M. A. Lacroix a constaté que les phosphorites francaises sont constituées par l'associa- tion d’un élément cristallisé, qui est la dahllite ou la francolite, avec un produit isotrope auquel il donne le nom de colophanite. — M. J. Boussac a rencontré, dans le Nummulitique autochtone de la Suisse orien- tale, la même succession de zones que dans toutes les Alpes suisses transversalement à la chaîne, mais avec un retard considérable vers l'Est. — M. M. Filliozat a établi paléontologiquement la correspondance des assises abyssales de la craie de Blois avec les assises subpélagiques de Vendôme et de Villedieu. — M. L. Gentil a reconnu, dans l'Atlas marocain, les traces d'une chaîne hercynienne, contemporaine de la chaine carbonifère de l'Europe, qui fut arasée ensuite et TE 490 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES transformée en une pénéplaine primaire. Le Haut- Atlas a été envahi par les mers Jurassiques, puis a émergé de nouveau au début du Crétacé. Séance du 23 Mai 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Féjer présente ses recherches sur les sommes partielles de la série de Fourier. — M. A. Blondel adresse ses observations de la comète de Halley faites à l'Observatoire de Toulouse le 8 mai. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. H. Deslandres fait res- sortir la possibilité d’une action à distance des comètes sur l'atmosphère terrestre et l'utilité d'une étude physique complète de celles-ci, en particulier de leur spectre. — M. A. Angot signale que les variations du magnétisme terrestre et de l'électricité atmosphérique observées dans la région de Paris pendant la nuit du 18 au 19 mai, époque du passage de la comète de Halley, n'ont pas présenté de caractères inaccoutumés. — MM. C. Limb et T. Nanty ont fait la même constata- tion à l'Observatoire de Fourvière, à Lyon. — M. G. Claude a liquéfié les gaz inertes peu condensables de l’atmosphère terrestre au moment du passage de la comète de Halley et a reconnu que la composition des résidus ne différait pas de la composition ordinaire. — M. J. A. Lebel a observé une diminution importante de l'iouisation de l’air en vase clos au moment du passage de la comète de Halley, analogue à celle qui précède l’arrivée des dépressions barométriques venues du Nord. — M. de Kérillis considère l'aurore boréale comme un phénomène produit par l'action combinée du magnétisme terrestre et de l'induction solaire et signale un certain nombre de faits qui viennent à l'appui de sa théorie. — MM. P. Villard et H. Abraham montrent que, pour un système donné d'électrodes, il existe deux potentiels explosifs. Le premier, ou poten- tiel d’aigrette, peut accidentellement faire éclater une élincelle disruptive. Le second paraît être le potentiel explosif normal, même le seul qu'on doive observer dans certains gaz purs. Pour toute tension comprise entre ces deux limites, ils’établit un régime de décharge silencieuse et continue, caractérisé par la lumines- cence épipolique de l’anode. — M. G. Sagnaec a étudié les interférences produites par deux faisceaux super- posés en sens inverses le long d’un circuit optique de grandes dimensions. — M. A. Chassy à déterminé l'absorption d'énergie par le passage d'un courant alternatif dans un gaz à la pression atmosphérique. La proportionnalité de la chaleur dégagée à l'intensité du courant doit être considérée comme une loi limite vers laquelle on tend lorsque le courant total croît. — M. P. Jégou a réalisé un détecteur électrolytique très sensible, fonctionnant sans f.6.m. auxiliaire, — M, P. Sève décrit un nouveau modèle de balance pour la détermination des champs magnétiques, basé sur le principe de l'équilibre par des poids de l’action élec- trodynamique exercée par le champ sur un élément de courant. — M. A. Lafay montre que l'utilisation de rugosités convenablement disposées permet d'atténuer l'effort néfaste dû à la zone de dépression qui se déve- loppe sur la face inférieure des corps animés d'une translation parallèle au sol. — M. G. Meslin indique comment on peutlever l'indéterminalion quise présente dans l'emploi de certains dispositifs à pouvoir dispersif considérable pour l'étude de la structure des raies spectrales. — M. C. Chéneveau à reconnu que, dans la mesure des susceptibilités magnétiques, la balance de Curie, avec des champs peu intenses, donne une précision au moins équivalente à celle des méthodes utilisant des champs puissants. — M. L, Malclès a constaté que, jusqu'à une tension de 800 volts, on peut être certain qu'une nappe diélectrique solide ou liquide, placée en contact par une seule face avec un métal, n'est pas pénétrée par l'électricité du conducteur adjacent. — M. Barre a étudié la solubilité du sulfate d'argent dans les sulfates alcalins. Les courb?s obtenues présentent un maximum, mais pas de poir t anguleux. 11 y a formation de cristaux mixtes. — MM. E. Briner et A. Wroczynski ont observé que l’oxyde de carbone, chauffé à 320°-330° sous une pression de 400 atmo- sphères, se décompose notablement en donnant CO*et un dépôt formé soit par du carbone très divisé, soit par un sous-oxyde de carbone. — MM. D. Berthelot et H. Gaudechon ont constaté que, sous l'influence des rayons ultra-violets : AzH* est décomposé en Az et H, qui est oxydé en eau; l'acétylène est oxydé par O avec formation de CO, C0? et acide formique; il en est de même pour l’éthylène. — M. P. Clausmann a reconnu que CO est directement transformé en CO? par l'ozone; la lumière active cette oxydation,sans être absolument ‘nécessaire; une trace d'humidité favorise la réaction. — MM. W. Louguinine et G. Dupont ont déterminé la chaleur de fixation de HBr à quelques composés éthyléniques ; elle paraît être beaucoup plus élevée lorsque la double liaison est voisine d'un carbone tertiaire. — M. H. Gault, en condensant l'éther oxalique avec l'éther tricarballylique en présence d'éthylate de sodium sec, a obtenu un mélange d'éther monoxaltricarballylique et d’éther dicétopentaméthy- lène-tricarbonique, F. 127° — M. H. Pariselle, en traitant l’oxy-1:2-butène-3:4 par l'eau et quelques gouttes d'H?S0*, a obtenu le butène-diol ou érythrol; ce dernier, traité par le permanganate de Ba, a fourni l'érythrite naturelle. — M. J. B. Senderens a préparé, par sa méthode catalytique, à un grand degré de pureté, une série de cétones dérivées du mélange de l'acide benzoïque ou de l'acide phénylacétique avec un acide gras. — MM. H. Cousin et H. Hérissey, en faisant agir une solution diluée de FeCl sur une solution aqueuse et froide de déhydrocarvacrol, ont obtenu le déhydrodicarvacrol, F.165-166°, soluble dans les alcalis concentrés, l'alcool, l’éther. — MM. A. Haller et A. Comtesse ont constaté que l'anthraquinone et la B-méthylanthraquinone forment, avec les p- et 0- anisols, des dérivés de substitution analogues à ceux qui prennent naissance quand on fait agir C°HS Mg Br sur ces quinones. Les diols ainsi obtenus sont facile- ment réduits en dérivés yy-substilués de l’anthracène. — M.F. Garrigou montre que la grande majorité des eaux potables, de la montagne et de la plaine, ren- ferment, quelquefois en quantités très notables, des métalloïdes et des métaux des groupes II à VI. — M. G. Denigès a analysé les résidus incrustant un récipient en verre trouvé à Bordeaux dans un sarco- phage du r°* siècle. Ils sont constitués par de la crème de tartre, provenant sans doute de l’évaporation d’un vin contenu dans le récipient. — M. M. Chercheffsky indique un moyen de déterminer la provenance d’un naphte ou d’un de ses dérivés, basé sur l'examen d’une série de tableaux de caractères moyens. — MM. H. Bierry et A. Rance ont observé que la lactase d'Helix hydrolyse la lactosazone, la lactose-aminoguanidine, la lactose-urée en mettant toujours en liberté du galac- tose, le glucose restant lié à la phénylhydrazine, à l'aminoguanidine et à l’urée. — M. et M"* M. Rosen- blatt montrent que, dans la fermentation alcoolique, le sucre protège la levure contre l'action des acides; cette action, d'autant plus grande que la quantité de sucre est plus forte, ne devient appréciable qu'à partir d'une certaine dose d'acide. — M. C. Gerber a reconnu que les sels de Cu, Ag, Hg, Au, Pt, qui empêchent la caséification du lait bouilli, agissent non pas sur la diastase protéolytique qu'ils détruiraient, mais sur la caséine qu'ils rendent très résistante aux présures du lait bouilli, en se combinant avec elle. Ce sont des retardateurs, non des anticorps. — M. M. Javillier à constaté, sur les greffes mixtes de tomate sur belladone, le passage très net de l'alcaloïde de la belladone- sujet ou de la belladone-greffon à travers le bourrelet. 39 SaiENCES NATURELLES. — M, R. Robinson préconise la résection des veines affluentes de la crosse de la veine saphène interne pour le traitement des varices; il a obtenu des guérisons surprenantes. — M. Hallo- peau montré que, contrairement à l'opinion générale- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ment admise, l'évolution du tréponème pâle dans l'organisme humain, dans sa période primaire, est presque exelusivement localisée à la région infectée, à ses lymphatiques et à ses ganglions. Les tréponèmes se multiplient par auto-inoculations. — M. E. Fauré- Frémiet a constaté que la chromatine du noyau normal des cellules in vivo se trouve à l’état de solu- tion colloïdale, passant de l'état de gel à celui de sol et vice-versa suivant la réaction alcaline ou acide du miheu. Cette solution est précipitée par les réactifs lixateurs. — MM. J. Capus et J. Feytaud ont expéri- menté avec succès une méthode de traitement contre la Cochylis et l'ÆEudemis de la vigne, basée sur l'appli- cation de bouillie cuprique nicotinée ou de chlorure de baryum mélassé avant. la naissance des chenilles. — M. E.-F.-L. Marchand à constaté que le Plasmodio- phora Brassieæ, parasite du chou, peutinfecter d'autres plantes maraïchères, comme le melon, le céleri et l'oseille-épinard, — M. Smoluchowski montre que la théorie mécanique de l'érosion glaciaire, établie par M. de Martonne, conduit, si on la pousse jusqu'au bout, à des résullats qui ne paraissent plus en accord avec l'observation. — M. J. Thoulet détermine la couleur des vases marines actuelles et anciennes par compa- raison avec celle d’un disque blanc tournant sur lequel on dispose un nombre variable de secteurs noirs, jaunes et rouges. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 17 Mar 1910. M. R. Blanchard publie la fin de l'observation du cas de chromidrose qu'il à signalé autrefois à l'Aca- démie. Le jeune garcon, âgé aujourd'hui de seize ans et demi, semble définitivement débarrassé de son affection, ce que l’auteur attribue à l'influence de la puberté, qui amène toujours une profonde modifica- tion physiologique de l'organisme. M. Blanchard signale cinq autres cas de chromidrose, dont deux observés par lui. — MM. R. Savignac et R. Blanchard décrivent l'observation d’une femme ayant présenté de nombreux vomissements de sang pendant 5 mois en 1908, parmi lesquels on à trouvé une grande quan- tité de petits vers oligochètes, appartenant à la famille des Enchytræidés. Ces vers n'étant pas parasites de l'homme ni des animaux, leur présence (à supposer qu'ils n'aient pas été ajoutés au sang vomi) ne peut s'expliquer que par voie d'introduction fortuite dans l'estomac, probablement par suite de géophagie ou d'autre perversion du goût. On se trouve donc en pré- sence d’un cas de simulation. — M. le D' Reynès donne lecture d'un travail sur le lever précoce des laparotomisés. Séance du 2% Mai 14910. M. Gaucher est élu membre titulaire dans la Sec- tion de Pathologie médicale. M. Ed. Schwartz présente un Rapport sur un tra- vail du D' Picqué relatif à la méthode chirurgicale en médecine mentale. L'auteur montre que certains troubles mentaux sont en rapport avec des lésions Somatiques et que l'intervention chirurgicale peut rompre ce lien une fois qu'il a été bien établi. Il a obtenu ainsi des guérisons rapides chez des malades internés depuis longtemps. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 1% Mar 1910. MM. Argaud etG. Billard ont constaté l'existence d'un très grand nombre d'hématies nucléées chez les ani- maux qui viennent d'être mordus par des vipères. — M. F. Battelli et Mlie L. Stern ont observé que les alcools et aldéhydes de la série grasse, mis en contact avec les organes in vitro, subissent une oxydation dont l'intensité présente un certain parallélisme avec 491 la richesse de l'organe en catalase, — MM. F. Arloing et P. Stazzi ont reconnu que le pouvoir toxique des cultures homogènes de tuberculose domine le pouvoir tuberculigène ; à côté des lésions toxiques, elles pro- duisent des lésions dérivant des bacilles; ces dernières consistent tantôt en lésions inflammatoires banales, tantôt en tubercules qui n'évoluent jamais vers la caséification, mais vers la transformation fibreuse, c'est-à-dire la guérison. — MM. J. Teissier et L. Thé- venot montrent que le sérum de veine rénale de chèvre paraît neutraliser partiellement, mais très net- tement, 2n vivo, l'action néphrolytique d'un sérum de brightique vis-à-vis du lapin. — M. Em. Berger à déterminé l'étendue du champ visuel binoculaire à points identiques ou correspondants des deux rétines, — MM G. Roussy et J.Clunet signalent l'intégrité des parathyroïdes dans deux cas de myxædème congénital par agénésie du corps thyroïde. — M. Ch. Richet montre que l’état anaphylactique amène une sensibilité plus grande de l'organisme aux poisons en général, et non pas seulement aux poisons qui l'ont anaphylactisé. — MM. H. Bierry et V. Henri ont constaté que l'ac- tion des radiations ultra-violettes rend réductrices les solutions de saccharose, genlianose, raffinose et sta- chyose, — M. M. Nicloux a reconnu qu'au cours de l'anesthésie et pendant la période de retour le chloro- forme fixé par le sang et par les tissus est décomposé dans une proportion d'environ 50 °/,. — MM. L. Mas- sol et V. Grysez montrent qu'il ne faut pas conserver une alexine liquide plus de trois ou quatre jours. Les alexines sèches, qui se conservent plus facilement, peuvent rendre des services; mais l’alexine fraîche est toujours préférable, — M. A. Grigaut décrit un pro- cédé de dosage colorimétrique de la cholestérine dans l'organisme. — MM. G. Mouriquand et A. Policard ont étudié le mécanisme de formation et la significa- tion clinique de quelques cylindres urinaires. Cylin- dres à axe granuleux à petites granulations : altéra- tions peu considérables du segment à bordure striée ; cylindres à axe granuleux à grosses granulations : al- térations profondes du même segment; cylindres à axe hyalin : altération du tube urinaire à partir du segment grêle. — MM. P. Carnot et G. I. Slavu ont constaté que l’adrénaline paraît susceptible de favo- riser la réparation osseuse el de raccourcir la consoli- dation du cal dans les fractures. — M. Et. de Rou- ville a observé que les extraits des deux paires de glandes salivaires de l’£ledone moschata sont toxiques pour le crabe ; ils ont une action puissante sur le sys- tème neuro-musculaire. — MM. A. Gilbert et E. Cha- brol montrent que les injections de toluylène-diamine ne sont suivies d’abord d'aucune modification du sang. Après quelques heures apparaît une cholémie, d’abord légère, qui s'accentue ensuite brusquement; alors apparaît la fragilité des globules, suivie d'un retour rapide à la normale. La cholémie ne disparait que quelques jours plus tard. — MM, R. Legendre et H. Minot ont pu conserver pendant plusieurs heures, sans modifications morphologiques apparentes, des cellules nerveuses ganglionnaires dans le sang du même animal défibriné, oxygéné et stérile, à la tempé- rature du corps. Séance du 21 Mar 1910, MM. A. Netter et C. Levaditi ont constaté que le pouvoir microbicide du sérum vis-à-vis du virus de la poliomyélite, conféré par une première atteinte de paralysie infantile, n’est pas illimité et s’épuise avec le temps. Les formes abortives de la maladie peuvent conférer au sérum sanguin le pouvoir microbicide. — M. E. Gley présente une série de lapins ayant subi la thyroïdectomie et offrant de l'exophtalmie, — M. G: Fano énonce une hypothèse sur les conditions déter- minant la vitesse énergétique dans les organismes vivants. — MM. J. Camus et M. Nicloux montrent que, chez des animaux dont on a lésé expérimentalement le pancréas et les voies biliaires, et dont la capacité diges: 492 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tive vis-à-vis des graisses est, de ce fait, très réduite, la lipaséidine est capable de relever d'une part la digestion, d'autre part l'absorption des matières grasses. — MM. M. Loeper et G. Legros ont reconnu que le cartilage, à l'inverse du rein et du foie, contient une très faible quantité de ferment uricolytique, ce qui explique la prédominance des précipitations d'acide urique à leur niveau. — M. V. Pachon montre que l'étude des variations des valeurs maxima et minima de la pression artérielle peut constituer un excellent critère pratique de l’état actuel d'entrainement d’un individu à un exercice déterminé. — M. P. Mulon a observé les mitochondries de la surrénale du cobaye ; il a vu les gros bâtonnets mitochondriaux s'hypertro- phier, se déformer et se fusionner pour donner des taches sidérophiles. — M. F. Villemin indique les précautions à prendre pour préparer un extrait de corps jaune très actif en injections intra-veineuses. — MM. Mosny et A.Javal décrivent une méthode pour la recherche et le dosage des pigments biliaires dans le liquide céphalo-rachidien des ictériques. — M. Et. de Rouville a constaté que l'extrait des glandes sali- vaires postérieures d’Eledone moschata est très nette- ment toxique pour le lapin; les glandes antérieures, quoique moins actives, sont toxiques aussi. — M. H. Busquet a reconnu que la grenouille mâle possède dans sa moelle cervicale un centre présidantà la copu- lation et susceptible d'entrer en activité, par un artifice approprié, à toute période de l'année. Ce centre n'existe pas chez la femelle et n'apparaît chez le jeune mâle qu’à un stade assez avancé de son développement. — M.S.Marbé montre que l'injection d'extraits d'ovaire produit chez les femelles une augmentation brusque de l'indice opsonique, chez les mâles une diminution progressive. Le corps thyroïde produit une augmenta- tion plus persistante. — MM. G. Paisseau et L. Tixier estiment qu'il n’y a pas lieu de prendre en considération la théorie leucopathique de l’albuminurie. L'existence des néphrites congestives et dégénératives repose, au contraire, sur des constatations indiscutables. — MM. R. Legendre et H. Minot ont constaté que les ganglions spinaux placés hors de l'organisme, dans du sang plus ou moins dilué, présentent des altérations très variables. Ceux conservés dans du sangadditionné de son tiers d'eau ne diffèrent pas de ceux conservés dans du sang pur. — M. Lafforgue montre qu'il y a des pleurésies séreuses contemporaines du rhumatisme articulaire aigu que l’on serait tenté d’étiqueter rhuma- tismales et qui, en réalité, sont tuberculeuses. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 3 Mai 1910. M. J. Feytaud a reconnu que les sexués essaimants du Termite lucifuge sont capables de fonder de nou- velles colonies. Toutefois, leur évolution peut être accélérée ou retardée suivant les conditions de milieu. — MM. A. Pitres et R. Brandeis ont étudié l'urine, le sang et le liquide céphalo-rachidien d’un homme attemt de narcolepsie. L'examen hématologique rap- proche le sang de celui des asphyxiques. —M. R. Bran- deis montre que les angio-sarcomes endo- ou péri- vasculaires ne doivent pas être rayés de la classification des tumeurs du rein ; il rapporte un cas de néoplasie péri-vasculaire qui décèle bien son origine mésoder- mique par la naturé franchement sarcomateuse du noyau de récidive évolué après néphrectomie. — MM. G. Fieux et P. Mauriac ont constaté que le sang de la femme enceinte contient au début de la grossesse un anticorps spécifique de la villosité choriale jeune ; il est très net du 2° au 3° mois et disparaît après le 4°. Il pourrait servir au séro-diagnostic de la grossesse du 2° au 4° mois. — M. J. Chaine a étudié les caractères de l'invasion des plantes vivantes par les Termites. Ceux-ci creusent leurs galeries à l’intérieur du bois, qu'ils détruisent complètement en ne laissant qu'une mince enveloppe extérieure; souvent on ne s'aperçoit de leur présence qu'au moment où la plante va mou- rir. — M. Lafite-Dupont décrit un appareil pour la ponction du labyrinthe par la fenêtre ronde. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 6 Mai 1910. M. Paul Bary : Force électromotrice due à la gravi- tation au sein des électrolytes. Quand, dans un élec- trolyte, les deux électrodes ne sont pas au même niveau, deux effets peuvent se produire : 4° un effet direct, qui provient du transport matériel qui s'effectue de bas en haut ou de haut en bas, et qui se traduit aux électrodes par une certaine force électromotrice; 20 un effet indirect, qui est causé par les différences de concentration de la solution qui s’établissent lentement du fait de la pesanteur; les deux électrodes plongent alors dans des milieux distincts et présentent une dif- férence de potentiel. L'auteur s’est proposé de mesurer la grandeur de l'effet direct en prenant une solution de SO‘Cu et deux électrodes de cuivre. L'expérience directe, faite de diverses manières, a donné des nom- bres compris entre 17 X 10-56 et 24 »7 106, c'est-à-dire 6 à 8 fois plus grands que le calcul ne l'indique; les erreurs d'expériences, bien que relativement grandes, ne peuvent permettre d'expliquer cet écart. — M. Eug. Bloch : Ætude de lelfet photoëlectrique de Hertz pour des radiations de longueur d'onde bien définie. Les essais qui ont été tentés par divers expérimentateurs pour classer les métaux par ordre de pouvoir photo- électrique décroissant n’ont pas donné, jusqu'ici, de résultats concordants. Il faut en voir la raison en premier lieu dans la variabilité du phénomène de Hertz avec les conditions extérieures (pressionetnature du gaz environnant, champ électrique, température, degré de poli de la surface) et surtout dans la variation de l'effet avec le temps, ou fatique photoélectrique. D'autre part, la nature de la radiation employée paraît devoir jouer aussi un rôle important, et c'est ce que l’auteur s'est efforcé de rechercher. La source employée a été l'arc au mercure en quartz, dont les radiations sont décomposées par un spectrographe à prismes et lentilles de quartz. On isole au moyen d’une fente celle. des radiations qu'on veut recevoir sur le métal chargé négativement. Les métaux étudiés ont été le zinc, l’a- luminium, le fer, le cuivre, l'argent, le nickel, le lai- ton, à des degrés très divers de poli. Les raies aux- quelles on s'est surtout attaché sont celles de longueurs d'onde 254, 265, 280, 313 (en uy). Voici quelques-uns des principaux résultats qui ont été obtenus : 1° Si, aussitôt après le polissage, on étudie, pour une raie déterminée, la variation de l'effet en fonction du temps, on constate, suivant les cas, une fatigue progressive, ou, au contraire, un accroissement spontané de leflet, suivi ultérieurement d'une fatigue. Ce dernier fait, observé à titre exceptionnel sur le zinc amalgamé par Buisson et van Schweidler, existe en réalité pour le zinc, le cuivre, le fer, etc., frottés avec un émeri pas trop fin. On n'a pu l’observer pour l'aluminium ; 2° Les variations de l'effet en fonction du temps où du degré de poli pour un métal donné sont extrêmement dilfé- rentes pour les diverses raies. En d’autres termes, le rapport des courants photoélectriques fournis par deux raies déterminées, loin de rester constant pour un même métal, peut osciller entre des limites très éloi- gnées. Ainsi, pour le zinc et les deux raies 280 et 313, ce rapport peut aller de 6 (et mème plus) à 0,50 envi- ron. On en conclut que, dans un groupe de raies, Ja raie la plus active sur un métal donné n'est pas toujours la méme ; 3° Si maintenant on compare pour les mêmes raies deux métaux différents, on constate que les rap- ports observés pour l’un et pour l'autre ne sont nulle- ment égaux, ni même compris entre les mêmes limites. Ainsi, pour le zinc, la raie 254 est 2 à 3 fois plus active que la raie 265; pour le cuivre, elle l’est au moins 3, 5 à 4 fois. Il en résulte cette importante conséquence que l’ordre de deux métaux dans la liste des pouvoirs ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 193 photoëlectriques peut fort bien Ss'inverser quand on passe d'une longueur d'onde à une autre. I a été pos- sible, par exemple, de réaliser deux échantillons d'a- luminium et de zinc, tels que, à un moment donné, le premier fût plus photoélectrique que le second pour la raie 313, et moins photoélectrique pour la raie 280. — M. L. Décombe : Sur la mesure de l'indice de ré- fraction des liquides au moyen du microscope. La méthode suivante dérive de la méthode de Brewster pour la mesure de l'indice des liquides, mais elle est beaucoup plus précise. Une lame de verre à faces pa- rallèles, sur laquelle repose une lentille plan-convexe, est disposée au-dessus d'un point lumineux A. Le liquide à étudier a été introduit entre la lame et la lentille. Au moyen d'un microscope, on pointe succes- sivement les images 0’ et A’ que le système donne : 4° du point de contact O de la lame et de la lentille; 2 du point lumineux A. Soient A le déplacement du microscope, y l'indice du liquide. On trouve : v= A — B/A, A et B désignant deux constantes positives qui, dans le cas particulier où A est à l'infini, ont pour valeurs respectives AN, B=R, N et R désignant l'indice et le rayon de courbure de la lentille. Le coef- ficient A —N, préalablement déterminé par les mé- thodes goniométriques, peut être supposé exactement connu, ainsi que l'indice v, d’un liquide déterminé qui servira à calculer B. La précision dépend surtout du second pointé. Pour le perfectionner, on pourra em- ployer, au lieu d’une lame plane et d’un verre plan- convexe, deux verres courbes d'indice différent, en contact par leurs sommets, et déterminer les rayons de courbure et les indices de ces verres de manière à rendre minima, ou même, s’il se peut, à annuler com- plètement les aberrations sphériques moyennes. Le réglage effectué, un seul pointé suffit pour la mesure de l'indice. La méthode n’exige d’ailleurs qu'une tres petite goutte de liquide et la petitesse de l'épaisseur traversée la rend applicable aux liquides translucides. — M. L. Décombe présente un dispositif à contacts électriques régis par la rotation d'un organe mobile autour d'un axe fixe. Le problème suivant se rencontre sous une forme plus ou moins particulière dans la mesure de la vitesse angulaire d’un axe, l'émission des signaux commandés par un organe en rotation, le remontage automatique des mouvements d'horlo- gerie, etc. : Etant donné un organe animé d'une rota- tion autour d'un axe uniforme ou variable, fermer le circuit d’une pile sur des appareïls déterminés, à des intervalles de temps et pendant des durées proportion- nelles à la vitesse de rotation de l'organe. Le dispositif adopté par M. Décombe pour résoudre le problème est le suivant : Un disque dont la circonférence a été découpée de manière à présenter des arcs de courbe AA', BB', CC, …, tous inclinés dans le même sens, sur les rayons du disque, est fixé sur l'axe de rotation supposé horizontal. Les arcs AA, BB', .…., se raccordent angulairement entre eux par de petits fragments de droites dirigés suivant des rayons, de telle sorte que le passage d’un arc au suivant se fasse par une chute radiale brusque. La pente croissante des arcs est d’ail- leurs dirigée en sens inverse de la rotation. Deux leviers, mobiles chacun autour d'un axe fixe parallèle à l'axe de rotation, reposent simplement, en vertu de leur poids, et par le moyen d'une goupille en ivoire mobile le long de chacun d’eux, sur la périphérie du disque. Les choses sont disposées de telle sorte que l’une des goupilles échappe le sommet de l’un des arcs un peu avant que l'autre échappe le sommet de l'arc consécutif. Un courant s'établit à ce moment entre les deux leviers et ce contact dure jusqu'à ce que la seconde goupille échappe à son tour. Si l’on donne aux arcs AA’, BB’, ., la forme de spirales logarithmiques, la charge de l'axe demeure constante pendant la rotation. Les dimensions sont telles que cette charge ne subisse pas non plus de variation au moment où le premier levier vient reposer sur le second. On peut, enfin, faire varier la durée du contact entre des limites relative- ment étendues par le déplacement des goupilles le long des leviers correspondants. Ce dispositif très simple permet de réaliser un contact satisfaisant aux conditions exigées ; son fonctionnement est très régu- lier et sans influence perturbatrice sur le mouvement parfois délicat de l'organe mobile en rotation, — M. Louis Dunoyer : Méthode de mesure d'un champ magnétique en yrandeur et direction; dygographe. La méthode dont il s’agit consiste à mesurer l'angle que font entre eux deux équipages magnétiques de longueur 21 et de même moment, placés l’un au-dessus de l'autre à une distance verticale 2 dans le champ, et mobiles autour d'un axe perpendiculaire au champ passant par leur milieu. Si le champ est très grand, l'action mu- tuelle des deux équipages est négligeable et ils pren- nent la direction du champ; si le champ est nul, ils se mettent en opposition dans une direction quelconque ; pour un rapport convenable entre le champ et leur moment magnétique, ils font entre eux un certain angle 24; par raison de symétrie, cet angle est bissecté par la direction du champ. Si le rapport 2/21 est supé- rieur à 2, on constate que le champ est rigoureusement proportionnel à cos &, à la condition que le champ soit suffisamment uniforme. Deux petits barreaux de 1°" de longueur, suspendus à des fils de cocon sur la même verticale à 4°% l’un de l’autre, permettront de mesurer, avec la précision du millième, les champs inférieurs à 0,3 C.G.S. On peut étendre beaucoup le champ d’ap- phication de la méthode en compensant le champ à mesurer par un champ connu et en employant le dis- positif des deux équipages pour vérifier, et alors avec une très grande précision, que la compensation est effectuée. Le dispositif se prète à des applications très variées. L'auteur étudie actuellement un appareil d'enregistrement qui donnera à la fois la grandeur et la direction de la composante horizontale du champ terrestre. L'appareil, qu'il a appelé dygographe, parce qu'il trace les courbes auxquelles l'usage maritime a donné le nom de dygogr'ammes, fournit aux navires, pour tous les cas où la force directrice moyenne est suffisante, le moyen d'effectuer la compensation de leurs compas en un lemps minimum, et sans observa- tions extérieures. De plus, le dygogramme obtenu et daté est un document complet et faisant image pour l'histoire magnétique du navire. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 22 Avril 1910. M. A. Kling publie une nouvelle méthode de dosage de l'acide tartrique basée sur la précipitation de cet acide à l’état de racémate de chaux insoluble dans l'eau. Le réactif précipitant est constitué par une solu- tion d'un tartrate gauche alcalin, dont on ajoute un excès à la solution tartrique droite à précipiter, en présence d’acétate de chaux. Le racémate, recueilli sur filtre, est lavé, puis dissous dans l'acide sulfurique étendu; dans cette solution chaude, on détermine la quantité d'acide tartrique qui y est contenue par un dosage volumétrique à l'aide de MnO'K. Cette nouvelle méthode, appliquée au dosage de l'acide tartrique dans les vins, a donné d'excellents résultats. Aussi l’auteur se réserve-t-il de l'adapter au dosage de l'acide tar- trique dans les divers produits alimentaires, les tartres et les lies. — M. E. Léger apporte une contribution nouvelle à l'étude de l’aloïnose ou sucre d'’aloïne. Les réactions de ce sucre sont celles des pentoses. Son pouvoir rotatoire : &n —— 570,3 à — 589,5, permet de le considérer comme un sucre nouveau, bien qu'il ait été impossible jusqu'ici de l'obtenir cristallisé. La for- mation d’une matière sucrée dans le dédoublement de la barbaloïne montre clairement que, malgré l'opinion contraire exprimée par divers auteurs, la barbaloïne doit être considérée comme un glucoside. Il en est très probablement de même de toutes les autres aloïnes. — M. Maurice Nicloux décrit la méthode qu'il a imaginée pour arrèter de petites ou de grandes 194 quantités de vapeur de chloroforme dans l'air en vue de son dosage ultérieur. Cette méthode consiste essen- tiellement à faire circuler l'air, même à des vitesses considérables (100 litres à l'heure), dans un tube de verre rempli de billes de verre, constamment imbibées d'alcool venant goutte à goutte de la partie supérieure. L'air chloroformé circule en sens inverse de bas en haut; il est complètement débarrassé de son chloro- forme, comme le montre une série d'expériences de contrôle. SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Seance du 22 Ayril 4910. M. W. A. Scoble a fait de nouveaux essais de maté- riaux fragiles sous des tensions combinées. La sub- stance choisie a été l'acier fondu trempé, parce qu'il obéit à la loi de fracture de Hook. Les spécimens avaient 3/4 de pouce de diamètre et 30 pouces de longueur effective et étaient soumis à la flexion et à la torsion combinées. Comme il n’était pas possible d'assurer que les barreaux trempés étaient exactement de même résistance, un barreau était d’abord rompu sous la charge combinée, puis une portion était essayée sous flexion seulement, l’autre sous torsion simple. Ni la tension de cisaillement maximum, ni la déformation maximum, n'étaient constantes au moment de la frac- ture; mais les résultats indiquent que la tension prin- cipale maximum est le meilleur critérium de résistance pour une substance fragile sous tensi®n combinée. En général, la trempe n'affecte pas la résistance d'un barreau à la flexion, mais elle double le couple néces- saire pour provoquer la fracture. ——- M. C. Chéneveau présente la balance magnétique de Curie et Chénevean. Cette balance sert à la détermination du coefficient de magnétisation spécifique, de susceptibilité et de per- méabilité des corps faiblement paramagnétiques et diamagnétiques. Le corps en expérience est suspendu à l’un des bras d’une balance de torsion qui mesure la force exercée sur le corps quand il est placé dans le champ non uniforme d’un aimant permanent. La ba- lance de torsion est formée par un barreau horizontal suspendu à un long fil de platine et portant à l'une de ses extrémités un crochet où la substance examinée peut être suspendue dans un petit tube de verre. A l’autre extrémité du bras de torsion, on fixe un sec- teur de cuivre qui se meut entre les pôles d’un aimant auxiliaire de façon à assurer un amortissement suffi- sant. On place également un second bras pour rece- voir des contrepoids destinés à équilibrer la substance. La suspension porte un miroir et les mouvements sont lus sur une échelle transparente comme d'habitude. Le champ magnétique est celui d’un gros aimant cir- culaire permanent, monté de telle façon que la cou- pure verticale puisse décrire un demi-cercle de rayon égal à la longueur du bras de torsion. Un tube vide est d'abord monté sur la balance, et l’on obtient la déviation maximum des deux côtés du zéro en portant l’aimant de chaque côté du spécimen. Le tube est ensuite rempli jusqu'à une marque fixée avec une quantité connue d'eau distillée pure, et l’on observe les variations comme précédemment. L'eau est alors remplacée par une masse connue de la substance à examiner occupant le même volume ou la même hau- teur verticale, et l’on répète les mesures. De ces obser- vations, on déduit la valeur de K. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 5 Mai 1910. M. H. $. Shelton attire l'attention des analystes sur la nécessité d'établir une corrélation entre les analyses de roches et d'eaux de rivières. Ainsi, on observe une grande différence entre la forte quantité de sulfates trouvée dans les analyses d'eaux de rivières et la très faible proportion de soufre que contiennent les roches en général. L'auteur cherche à expliquer cette diffé- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES rence. — M. S. $S. Pickles a abandonné l'isoprène à la polymérisation spontanée lente et a obtenu un com- posé blanc analogue au caoutchouc, qui donne des dérivés semblables à ceux du caoutchouc naturel, en particulier le tétrabromure (C!‘H!‘Br'} et le nitrosite. — M. H. Rogerson à préparé un extrait alcoolique des fleurs du trèfle incarnat. La portion de cet extrait soluble dans l’eau contient : un sucre donnant de la d-phénylglucosazone, des acides benzoïque et salicy- lique, du pratol, de la quercétine et un nouveau glu- coside de cette dernière, C#H*0'°.3H°0, F.242°-2450, que l’auteur nomme incarnatrine. La portion inso- luble dans l’eau contient un alcool C#H®%®OH, F, 72°- 74, nommé alcool incarnatylique, de l’hentriacon- tane, un phytostérol C*H#O, F.135°-136°, du trifolia- nol C*H#O*(OH®, F.295°-300°, et un mélange d'acides gras. — MM. M. O. Forster et R. Muller, en chauffant l'azide du triazoacétyle, provenant de l’action du chlo- rure de triazoacétyle sur l’azide sodé, ont obtenu le triazométhylcarbimide, AzCH?.47:C:0, Eb. 449-450 sous 32 millimètres, qui se transforme rapidement en isocyanurate de tristriazométhyle, F.153°, — M. J. E. Purvis à observé qu'une solution alcoolique N/1.000 de nicotine présente une bande d'absorption dans l’ultra-violet, montrant ses relations avec la pyridine ; par contre, la vapeur de nicotine ne présente aucune des séries de bandes étroites trouvées pour la pyridine. Les solutions alcooliques N/10, N/100 et N/1.000 de coniine ne présentent pas de bandes d'absorption sélective dans l’ultra-violet, de même que celles de pipéridine. Les solutions alcooliques N/1.000 de quino- line présentent trois bandes dans l’ultra-violet; sa vapeur n'e pas de bandes étroites. — MM. F. G. Pope et H. Howard ont obtenu des dérivés de la fluorone par oxydation des dérivés de l’hydroxyphénylxanthène en solution alcaline par un courant d'air. — M. J. R. Partington poursuit ses recherches sur l'équilibre ionique dans les solutions d’électrolytes. — MM. H. Marshall et D. Bain ont préparé les succinates de sodium suivants, dont le dernier est nouveau : NaHC* H°04,3H°0 ; NaHC#H#0#; Na°C'H'0°.6H20 et Na?C#H*0*.H°0. Un diagramme de solubilité du système Na*°C*H‘0*- H2C#HSO5-H°O a été tracé. Quoiqu'on n'ait pas isolé de sel superacide correspondant au sel de potassium KH3(C*H:04}, les résultats semblent indiquer la forma- tion d’un peu de ce sel en solution. — MM. A. D. Mit- chell et J. F. Thorpe montrent que les mononitriles ayant un groupe carbéthoxyie en position à par rap- port au groupe nitrile se transforment facilement en dérivés iminés du cyclopentane. Ainsi l’on obtient le 2-iminocyclopentane-1:3-dicarboxylate d’éthyle par condensation du sodiomalonate d'éthyle avec le 4-cya- nocyclopropane-1-carboxylate d'éthyle. — M. J. Moir décrit un nouvel essai très sensible de l'acide cyanhy- drique. Le réactif est obtenu en ajoutant de faibles quantités d’acétate de cuivre et d’acide acétique à une solution chaude d'hydrocærulignone dans une grande quantité d’eau et filtrant après quelques heures. La solution à essayer est rendue légèrement acide avec de l'acide acétique et traitée par le quart de son volume de réactif. En solutions plus fortes que 4/400.000, on obtient immédiatement un précipité cristallin de cœru- lignone rouge; avec des solutions plus faibles, une coloration rouge-brique. — M. H. M. Dawson a déter- miné les changements de volume qui se produisent dans la formation des solutions diluées d’iode et de naphtalène dans une quinzaine de solvants à 18°. Pour ces solvants, le volume de solution d’une molécule- gramme d'iode varie de 67,2 à 50,5 centimètres cubes, et celui d'une molécule-gramme de naphtalène de 125,3 à 412,9 centimètres cubes. Il ne semble pas Y avoir de rapport entre la pression interne du solvant et le volume de solution moléculaire du corps dissous. — M. F. P. Dunn a repris l'étude de la réaction de l'iodoforme sur le sulfure d'argent, qui, d’après De- ninger, donnerait du monosulfure de carbone. En ! réalité, l'iodoforme est décomposé par la chaleur en ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 195 iodure de méthylène, qui agit sur Ag’S avec formation de sullure de méthylène. — MM. W. J. Pope el J. Read montrent que la résolution d'un acide (ou d'une base) extérieurement compensé par cristallisation avec une base (ou acide) optiquement active donne lieu à trois cas : 4° Les deux sels 4B4A et ABJA capables de se former sont facilement séparables par cristallisation et ne montrent pas de tendance à former des solutions solides de l'un dans l’autre; 2° les deux sels se com- binent pour former un composé partiellement racé- mique ; dans ce cas, il n'y a pas de résolution; 3° les deux sels forment des solutions solides lun dans l'autre, et la séparation par cristallisation fractionnée est lente et incomplète. La résolution de l'acide campho-r-sulfonique par la strychnine représente Île premier cas; celle de l'acide 1-méthyleyelohexylidène- 4-acétique par la brucine est un exemple du troisième. — M. J. F. Spencer et M!° M. K. Harrison ont reconnu que les métaux des 6°, 7° et 8 groupes n'ont aucune tendance à réagir sur les iodures d’alkyles pour former des composés du type RM'X. Ces métaux réagissent sur l'iodobenzène avec formation de diphé- nyle. PR SOCIÈTE ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 10 Février 1910. M. Al. E. Tucker présente ses recherches sur /a /or- mation des argiles. 1 a constaté : 1° que le feldspath pulvérisé est décomposé en dix jours à la température ordinaire, sous l’action de HCI très dilué (en solution à 0,075 °/,), en une substance laiteuse blanche qu'on ne peut distinguer en apparence de l'argile à porcelaine du commerce; 2 que, dans cette action, le feldspath donne des écailles de nature micacée; 3° que l’action ci-dessus a lieu également avec le granit et la pierre à porcelaine; l'action sur le granit n'est pas aussi rapide que sur le feldspath pur, mais daus tous les cas le feldspath qu'il contient est finalement décomposé ; 4° cette action a lieu aussi, à la température ordinaire, avec les acides nitrique, sulfurique et fluorhydrique ; 5° enfin l’action a lieu également quand le feldspath et les granits sont exposés à l'effet de l’eau tenant CO* en suspension. Cette dernière constatation semble élucider tout à fait l’origine des argiles par décomposition des roches ignées à l'air humide en présence de CO?. L'auteur indique, pour terminer, une méthode d'ana- lyse des argiles. SECTION CANADIENNE Séance du 17 Février 1910. M. W. P. Kaufmann décrit les produits dérivés du mais et la fabrication de l'amidon de maïs au Canada, SECTION D'ÉCOSSE Séance du 22 Février 1910. M. H. O'Connor étudie les divers systèmes de cornues employés pour la fabrication du gaz d’éclai- rage. Avec de petites charges, la séparation du carbone a lieu si énergiquement que les tuyaux d'ascension sont constamment bouchés et que le coke doit être enlevé avant d’être complètement brûlé; une forte charge, par contre, est plus également distribuée qu'une mince, et la décomposition, avec les cornues pleines, est évitée, ce qui permet d'employer des tem- pératures de carbonisation plus hautes, Le remplissage des cornues donne un goudron qui est manipulé plus aisément et à fait disparaître Ja plupart des ennuis des fabricants. La surface de chauffe, comparée au poids de la charge, est une bonne indication du rendement relatif, mais seulement pour les cornues verticales et complètement remplies. Des essais ont montré qu’en plaçant des tuiles et de l'amiante sur le fond des cornues horizontales ordinaires, on améliore la qualit du gaz. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 9 Mars 1910. M. Ch. Al. Keane rétrace quelques services rendus par la Chimie à la Pharmacothérapie moderne. Il décrit la fabrication : des antipyrétiques dérivés du p-amtno phénol, des hypnotiques dérivés de la malonylurée, des anesthésiques locaux dérivés de la cocaïne et des composés voisins. SECTION DE LONDRES Séance du 7 Mars 190. M. A. W. Onslow a éludié l'application du gaz à haute pression au chauffage des fours. Le chauffage habituel avec du gaz pris sur une conduite et brûlant dans une espèce de bec Bunsen gaspille inutilement du gaz, donne des températures très variables et est sujet à des explosions. L'auteur l’a remplacé par le chauffage au gaz sous pression; celui-ci est amené dans un compresseur rotatif à telle pression constante que l'on désire, puis amené aux becs où il donne une température toujours la même pour une pression con- stante. La flamme est beaucoup plus petite et il n'y a pas autant de chaleur perdue qu'avec la flamme longue des becs ordinaires. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 24 Février 1910. M. G. Frobenius adresse une seconde note sur le théorème de Fermat, note où il donne une démonstra- tion élémentaire du résultat de M. Mirimanoff(Comptes liendus, 1910). Séance du 3 Mars 1910. M. A. Penck donne lecture d’un Mémoire sur un essai de classification climatérique à base physio-géo- graphique. En se basant sur le sort des dépôts atmo- sphériques tombantsur la contrée étudiée, il distingue les climats continentaux nival, humide et aride. Il sub- divise chacune de ces régions (sous le même point de vue) en plusieurs districts climatériques, au nombre total de huit, à savoir les districts nival et semi-nival, polaire, sous-nival, humide et semi-humide, aride et semi-aride. Alfred Gradenwitz. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 17 Mars 1910. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. V. F. Hess à fait, sur une île du Danube aux environs de Vienne, pendant l'été de 1908, des déterminations absolues de la teneur de l'atmosphère en induction de radium. Dans la grande majorité des cas, il ne se dépose primairement que du radium A sur l’électrode négativement chargée; dans quelques cas seulement, on observe un dépôt primaire de radium B. La moyenne des observations donne, pour le courant de saturation que les atomes de Ra contenus dans un mètre cube d’air peuvent produire, la valeur e— 3,45 X 10 —5 unité électrosta- tique. La teneur en induction présente une variation diurne, qui est l'inverse de celle des variations baro- métriques avec un déplacement de phase d'environ une heure. L'induetion produit environ 30 ?°/, de l'ionisation mesurée dans l'atmosphère. — M. E. Do- mek : Le spectre d'émission de l’oxyde de fer dans l’are électrique. — M. ©. Tumlirz : La contraction de volume, le maximum de densité et la pression de liaison des mélanges d'alcool éthylique et d’eau. — MM. G. Goldschmiedt et E. Zerner montrent que la compositon de la scutellarine correspond à la formule CH #0": elle est dédoublée par hydrolyse en seutella- réine et acide glucuronique. La scutellaréine possède la formule CH05 et doit être la 1:2:3;:4 — ou la 496 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1:3:4:4 — tétraoxyflavone. La sculellarine doit être considérée comme le semi-acétal de l'acide glucuro- nique et de la scutellaréine. — MM. Chr. Seer et R. Weitzenbæck : Sur les aminoanthraquinones et anthraquinone-mercaptans acylés et leur façon de se comporter avec les fibres végétales. Action du chlorure de benzoyle et de l'acide monochloracétique sur les aminoanthraquinones. — M. W. Pauli présente un résumé des recherches accomplies sous sa direction sur les modifications d’état des corps albuminoïdes. Il suppose que les corps albuminoïdes, par addition d'acides ou de lessives alcalines, forment des particules électropositives ou électronégatives, qui, comme la plupart des ions, subissent une forle hydratation ou un conflement, tandis que leur neutralisation électrique produit de nouveau la déshydratation. Les particules fortement hydratées se dénotent par une élévation considérable du frottement intérieur de la solution albuminaïde, la neutralisation électrique par sa chute. 20 ScIENCES NATURELLES. — M. A. Elschnig a étudié la résorption des antigènes à l'intérieur du globe oculaire. Dans tous les cas, l'injection de corpuscules sanguins à l'intérieur de l'œil a été suivie de l'appa- rition d'ambocepteurs hémolytiques; toutefois, l’action antigène de l'œil est inférieure à celle qui suit l'injec- tion sous-cutanée de la même dose de sang. L’injection d'émulsion ou d'extrait de bacilles cholériques donne lieu aux mêmes phénomènes; une seconde injection dans le même œil ou dans le second œil intact produit une augmentation sensible de la teneur en anticorps. Séance du 21 Avril 4910. 40 Sciences PaysiQues. — M. F. M. Exner présente un essai d'explication des inégalités verticales et du glissement relatif des couches d'air dans l'hypothèse que les modifications de la pression barométrique sont produites par un déplacement horizontal de colonnes d'air de températures inégales. Il établit une équation différentielle de la pression et une règle de prévision du temps, nécessitant des ascensions quotidiennes de ballons-sondes en plusieurs endroits. — M. A. Defant montre que, lorsque les lignes d'écoulement de l'air vont d’une région de chute à une région d’élévation de la température, il y a une augmentation de pression dans cette dernière région, qui est d'autant plus grande que la différence isallothermique des deux régions est plus élevée. Si, par contre, les lignes d'écoulement de l'air vont d'une région d'élévation de la température à une région de chute, la pression s’abaisse à l'extrémité de la flèche. Les régions d’élévation et de chute de la pression, lesisallobares, ont donc une cause thermique. — M.F. M. Exner signale certains facteurs de correc- tion à apporter aux mesures antérieures de la teneur de l'atmosphère en induction du radium. — M. F. Ehrenhañft décrit une méthode de mesure des plus petites quantités d'électricité. Pour cela, il détermine microscopiquement la vitesse de chute de particules métalliques pulvérisées dans l'arc galvanique, dans le champ de la pesanteur, et la vitesse avec laquelle ces mêmes particules électriquement chargées se déplacent contre la pesanteur dans un champ de tension connue. Les résultats montrent qu'il existe dans la nature des quantités d'électricité inférieures à la charge admise pour l'électron ou l'ion H monovalent et considérée jusqu'ici comme la plus petite possible. — M. H. Sirk : Sur le rapport qui existe entre l'indice de réfraction d’un gaz, la trajectoire libre mcyenne de ses molécules et les forces qui agissent entre elles. — M. K. Auer von Welsbach : Etude chimique des résidus de prépa- ration du radium contenant de l'actinium. [. — M.R. Kremann a étudié la vitesse de formation de l’éther éthylique aux dépens de l'acide éthylsulfurique et de l'alcool à 4009, 4259 et 435°. La formation d'éther a lieu d'après l'équation (4) : CH°SOH — C'H°OH —(C'H° 0 + HS0*; mais en même temps, l'acide éthylsulfurique se reforme d'après (2) : H?SO* + C?H°OH — C*H5SO‘H — H°0, réaction pratiquement instantanée dans les conditions de l'expérience. La constante de vitesse de l'équation (1) a été calculée par deux procédés; elle est diminuée par l’action catalytique inhibitrice sur la réaction (1) de l'eau formée dans la réaction (2). — M. T. Komnenos : Action de l'éthylate et de l’amylate de sodium sur l’acétylacétate d’éthyle. — M. M. Kohn a observé que les solutions alcalines d'hydroxylamine réagissent sur le 1:2:#4-dinitrotoluène en remplaçant un groupe nitré par H avec formation d'’o-nitrotoluène. — Le même auteur, en faisant réagir les solutions de Grignard sur l'isatine, a constaté qu'un seul groupe carbonyle réagit; on obtient des dioxindols substitués avec OH tertiaire, solubles dans les alcalis chauds, d'où les acides les reprécipitent. — M. F. Faltis montre que la position des deux groupes CH°0 de la berbérine n’est pas celle quia été adoptée par Perkin ou Gadamer et que la berbérine présente une analogie de constitu- tion complète avec l'hydrastine. — M. J. Zellner a analysé la rouille du maïs (Ustilago Maydis); il con- firme la présence de triméthylamine et d'acide scléro- tique, mais non d'ustilagine; il a trouvé, en outre, des corps ersostériques, de l'acide oléique, des acides gras fixes et volatils, de la lécithine, de la glycérine, deux résines, du phlobaphène, de la mannite, de l'érythrite, du glycose, etc., et deux ferments. — Ie même auteur résume ses recherches sur les rapports chimiques entre les champignons parasites supérieurs et leur sub- stratum. Peu de substances passent inaltérées de l'hôte au parasite. La composition chimique des champignons parasites dépend en première ligne de leur position systématique, ensuite de leur substratum, et finale- ment de circonstances sporadiques. On n'a pu déceler de différences chimiques essentielles entre les parasites etles saprophytes. Les champignons parasites éliminent des excréments, tantôt indiflérents, tantôt vénéneux, ces derniers pouvant occasionner des phénomènes de croissance pathologiques. — M. W. Sigmund : Sur un ferment dédoublant l’esculine et sur un ferment lipo- lytique dans l’Aesculus hippocastanum. 29 SCIENCES NATURELLES. — M, V. von Ebner montre que la sous-cuticule des Gordiides est formée de fibrilles cylindriques, isolables, parallèles dans une même couche, mais faisant un angle de 120° dans des. couches successives. Il a constaté, d'autre part, que, dans les os, seule la substance calcaire cimentante constitue une masse cohérente parsemée d'espaces creux, tandis que la substance qui se gélatinise tra- verse cette masse sous forme de fibrilles. — M. E. von Daday a observé que le plankton d'été du Nil est très maigre; dans quelques mares, toutelois, on a trouvé des formes plus abondantes, en particulier six Ostra- codes nouveaux Le plankton d'hiver est beaucoup plus abondant; on y a trouvé jusqu'à 78 espèces. — Mile TJ. Menz présente ses recherches d'anatomie comparée sur le genre A//ium et les Allioïidées. Au point de vue de la structure anatomique, les Allioidées présentent de grandes analogies avec les Amaryllidées. Ainsi les genres Agapanthus et Brodiæa ont des faisceaux de raphides comme ces dernières. — M. R. von Gutten- berg : Sur le mécanisme de projection des fruits de Cyclanthera explodens. — M. H. Iltis : Sur une proli- fération intracarpellaire causée par la rouille chez le Zea Mays. — M. H. von Handel-Mazzetti et M!eJ. Witasek donnent la description, le premier des Asclé- piadéeset Apocynées, laseconde des Solanées rapportées par l'Expédition botanique dans le sud du Brésil en 1901. — M. F. Zach : Recherches cytologiques sur les taches de rouille du blé et la théorie du mycoplasma d'Erikson. — M. J. Brunnthaler envoie un rapport sur son expédition botanique dans l'Afrique orientale, le pays du Cap et le Natal. L. BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 12 30 JUIN 1910 Revue générale des Sciences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et Ja traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède la Norvège et …n Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Stanislas Cannizzaro. — La mort du grand chimiste italien, survenue le 10 mai dernier, sera vive- ment ressentie dans le monde scientifique, car avec lui disparaît le dernier des combattants qui, à la suite ou à côté de Laurent, Gerhardt, Wurtz, Williamson, Kékulé et tant d’autres qui aujourd'hui appartiennent à l'histoire, luttèrent pour soutenir la théorie atomique. Né à Palerme le 13 juillet 1826, Cannizzaro fit ses premières études chimiques à Pise, dans le laboratoire de Piria, où il apprit tout d'abord à connaître les idées de Dumas. Quelques années plus tard, ayant été obligé de quitter son pays pour des raisons d'ordre politique, nous le retrouvons à Paris, fréquentant le laboratoire de Chevreul et suivant les leçons de Regnault au Col- lège de France. C’est pendant ce séjour qu'avec Cloez, en 1851, il préparait la cyanamide, à peine entrevue auparavant par Bineau, et ses homologues supérieurs, en faisant agir le chlorure de cyanogène gazeux sur une solution éthérée d'ammoniaque ou d’éthylamine. Un peu après, en 1853, Cannizzaro découvrait les alcools aromatiques en traitant l'aldéhyde benzoïque, ses homologues ou les hydrocarbures benzéniques chlorés en chaine latérale par une solution alcoolique de potasse. C’est ainsi que l'alcool benzylique, l'alcool toluique et l’alcool anisique furent préparés pour la première fois, de même que l’oxyde de benzyle et l'oxyde mixte de benzyle et d’éthyle. C'était montrer que la série aromatique possède les mêmes fonctions que la série grasse avec les mêmes caractères géné- raux : fait capital qui fut alors très remarqué. Son dernier travail important est relatif à la santo- nine, dont, seul ou avec l’aide de ses élèves, il décou- vrit un grand nombre de dérivés, accumulant ainsi des matériaux pour l'établissement définitif de sa for- mule de constitution ; en 4894, nous le voyons encore revenir sur ce sujet délicat et, à propos d'une Note de M. Klein, défendre ses idées avec une ardeur toute juvénile. Ces travaux sont tous de premier ordre; cependant, quelle que soit leur importance, ils ne suffisent pas à donner une idée exacte de ce que fut l’auteur. Cannizzaro, en effet, se fit remarquer peut-être plus REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 490, encore par son enseignement que par ses recherches originales. Professeur à l'Université de Gênes en 1855, il fut successivement appelé à Palerme, en 1861, puis à Rome, en 1871, et, dans toutes ces situations, il n'hésita pas, partisan convaincu, à se lancer et à entraîner ses auditeurs sur la voie qui venait d'être ouverte par ses illustres devanciers. La trace qu'il y a laissée est inef- facable. Dès 1858, il avait fondé à Gênes un cours de Piloso- phie chimique, dans lequel il passait en revue toutes les doctrines que l’on enseignait alors et s’efforçait de concilier les idées nouvelles avec les données expéri- mentales que certains leur opposaient ; aussi lui doit-on, dans le domaine de la théorie, de nombreuses et importantes innovations. C’est lui qui, le premier, a fait voir qu'il convient de doubler l'équivalent d'un grand nombre de corps simples et, en particulier, celui des métaux alcalino-terreux, qui deviennent ainsi divalents. C’est lui qui, l'un des premiers, a nettement distingué le poids moléculaire du poids atomique. C'est lui qui, avec Wurtz, a le plus contribué à faire admettre l'hypothèse d'Avogadro et d'Ampère, en montrant que la méthode des densités de vapeur est la seule qui permette d'établir avec certitude la véritable grandeur moléculaire des corps volatils sans décomposition ; d’après lui, la loi de Dulong et Petitest d'une application moins sûre et doit être réservée aux seuls éléments. Un pareil enseignement ne pouvait manquer d'être fructueux : Cannizzaro laisse à son pays, comme Wurtz a laissé au sien, de nombreux élèves qui poursuivent avec succès l’œuvre du maitre. Vénéré de tous, on aimait à le voir dans les grandes réunions de chimistes où il tenait à se rendre; ses élèves et ses amis avaient fêté son jubilé à Rome, en 4896; dix ans plus tard, à l'âge de 80 ans, il était pré- sident d'honneur du Congrès international de Chimie à Rome. C’est en 1892, au Congrès de Genève pour la réforme de la nomenclature, que nous avons eu l’hon- neur de le rencontrer pour la dernière fois. Cannizzaro avait été nommé sénateur en {871 ; l'Aca- démie des Sciences l’accueillit en 1894 comme membre correspondant, en remplacement de Marignac; elle en conservera pieusementlesouvenir, commeelle conserve celui de tous les hommes qui ont consacré leur vie 12 498 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE entière à l'étude, à l’enseignement et aux progrès de | la science. | L. Maquenne, veloppement pris par la fabrique bisontine sous l'heureuse et active impulsion de M. Lebeuf. Nous négligerons ce qu'on appelle les chronomètres de de l'Académie des Sciences, Professeur au Muséum. | seconde et troisième classe, pour ne considérer que | les pièces de précision, de première classe. $S 2. — Art de l'Ingénieur Dans le premier de ces tableaux, nous avons relevé, La chronométrie française en 1910. — L'année chronométrique s’est terminée à Besançon le {7 mai. Elle a été particulièrement brillante. L'Obser- vatoire a recu et examiné dans le cours de l'exercice 1.19% pièces, dont 3 chronomètres de marine, 303 chro- nomètres de poche de première classe, 203 de seconde classe et 684 de troisième classe. Deux pièces ont subi ce qu'on appelle des épreuves additionnelles. La première pièce classée obtient le chiffre, record en France, de 267,4 points’. Et, pour la première fois, nous enregistrons un constructeur et un régleur avec un lot de cinq chronomètres d’une moyenne supérieure pour les Observatoires de Besancon et de Genève, le nombre des chronomètres déposés en première classe, le nombre des bulletins délivrés, le nombre des pièces ayant obtenu plus de 200 points sur 300 et le chiffre maximum de points enregistré par le premier chrono- mètre classé de chaque année. De 1885, année de l'ouverture de l'Observatoire, à 1893, aucun chronomètre n'atteignit le chiffre de 200 points sur les 503 pièces qui furent présentées aux épreuves. En l’année 1907, a été attribuée pour la pre- mière fois à Besancon une récompense exceptionnelle : la coupe chronométrique. Dans le classement des chronomètres, quatre critères TABLEAU |. — Résultats des concours chronométriques de Genève et de Besançon. BESANÇON ANNÉES Nombre de Bulletins Dépôts Pièces au-dessus de 200 points Nombre de Maximum Maximum Pièces au-dessus de 200 points Dépôts Bulletins 198 199 154 185 94 133 160 101 82 09 1909 . 1908 . 1907 . . 1906 . - 1905 . 1904 . 1903 . 1902 . 1901 . 1900 . 1899 . 1898 . 1897 . 1896 . 1895 . 1894 . à 250 points. Genève, qui a eu également une année 1909 fort brillante, n'a que deux lots de cette qualité. La fabrique bisontine, à force d'énergie et de téna- cité, a donc réussi non seulement à sortir du marasme | qui caractérisa les dix années de 1885 à 4895, mais à prendre définitivement place à côté de ses rivales gene- voise et neuchâteloise. Le directeur de l'Observatoire de Genève, M. R. Gau- s6 68 87 103 125 s1 64 47 108 95 D SIDE R interviennent : l'écart moyen de la marche diurne, l'écart moyen pour un changement de position, l'erreur de la compensation et la reprise de marche. Le plus im- portant de ces critères est l'écart moyen de la marche diurne. Le tableau suivant indique pour lesquatorze der- nières années les plus faibles écarts moyens de marche diurne enregistrés à Besancon et à Genève : tier, a rendu hommage à l'horlogerie de précision fran- ANNÉES RS SE çaise dans le Rapport qu'il a présenté le 21 février der- ITR er FU nier sur les concours de réglage de chronomètres 1909 - 0:29 seconde LEE GENE observés dans l'établissement qu'il dirige avec une CE NE én Le 53 haute compétence. Et, si l'on constate encore une dif- 1906 : ETS 0310 — férence sensible entre les résultats moyens des deux 1905. . . Vo 0,288 — observatoires, elle tient essentiellement, comme le ANDER CN 0,43 — ENT = faisait remarquer récemment M. Lebeuf, à « l’antério- 19032 0,46, — 0,306 — rité du Service chronométrique genevois, organisé. par 1902. . 0,55 — 0,325 Ce des astronomes éminents sous l'impulsion desquels — 1901 De F ie E et gràce aux ressources d’une instruction profession- se ‘e = + Æ nelle admirablement comprise — la Classe de Com- 1898 | 043 = 0 376 — merce et d'Industrie de la Société des Arts a su grouper 1897. | Do 03360 une pléiade d'artistes qui ont fait la réputation légitime 1896. 0,59 — 0,358 — de l'horlogerie genevoise et donné un éclat exceptionnel à ses concours annuels ». Voici deux tableaux qui donneront une idée du dé- RER EN TT 2 RRoul * Elle sort des ateliers de M. Louis Leroy. Ces chiffres, qui représentent des moyennes, in- diquent d'une manière nette que la valeur d'ensemble des chrohomètres bisontins se rapproche de plus en plus de celle des chronomètres genevois. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE On remarquera que c'est surtout depuis cinq ans que la fabrique bisontine s'est décidément lancée en avant. Ce progrès se fait voir principalement dans la liste des pièces ayant obtenu des bulletins. Elles se suivent maintenant de beaucoup plus près, à de faibles frac- tious de points, au lieu de laisser entre elles, comme autrefois, des intervalles quelquefois fort larges qu'on ne trouvait pas à Genève. Nous n'avons pas encore enregistré de résultats comme celui de Genève (1903), où la célèbre maison Patek, Philippe et Ci fit classer 22 cAronoméètres aux 22 premières places, ni comme celui de 1900, où M. Marius Favre obtint les douze premières places pour un lot de 12 chronomètres qui donnèrent une moyenne dont le record n'a pas été dépassé. Mais nous marchons bon train sur la route qui con- duit à de semblables résultats, grâce aux bonnes mai- sons qui se sont chargées de maintenir le drapeau chro- nométrique français : Louis Leroy et Cie, Antoine, parmi les vétérans, Lipmann, Geismar parmi les jeunes fabriques. On ne peut souhaiter mieux. Léopold Reverchon. $ 3. — Physique Le passage des rayons £ à travers la ma- tière. — Dans un récent Mémoire, M. H. Schmidt! indique une règle des mélanges qui permet de calculer le pouvoir réflecteur et le pouvoir de pénétration des rayons $, sur la base de deux constantes universelles caractéristiques de ces rayons et de la constitution chimique de la substance irradiée. Les formules qu'il indique ne comportent que ces deux constantes, le poids atomique et le nombre d’atomes constituant la molécule. Les valeurs de pénétrabilité des liquides par rapport aux rayons $, déterminées avec un appareil spécial, concordent parfaitement avec les valeurs cal- culées par cette règle des mélanges. Les résultats de ces recherches font voir que, pour le passage des rayons f, toutes différences spécifiques de la matière disparaissent, les deux constantes et le poids atomique de la substance traversée étant seuls en jeu. Comme ces résultats théoriques ont été réalisés sur la base d'hypothèses relativement simples, par rap- port au mécanisme des effets mutuels entre l’électron volant et l'atome au repos, l'accord entre l'expérience et la théorie confirme inversement la justesse de ces hypothèses. Il va sans dire que la validité générale de ces lois devra être établie, par des recherches ulté- rieures, Sur un nombre aussi grand que possible de substances. $ 4. — Chimie industrielle Les procédés modernes pour l'extraction de l'or. — Les trois méthodes les plus employées actuellement pour l'extraction de l'or sont : la méthode par gravité, basée sur la grande densité de l'or compa- rativemeut à la gangue; la méthode par amalgamation, où le métal précieux est recueilli à l’aide du mercure; la méthode chimique, dans laquelle le métal est dissous dans des solutions d'où il est ensuite précipité par différents procédés; le dissolvant le plus fréquem- ment employé est le cyanure de potassium, mais il en existe d’autres. La première méthode ne permet de recueillir que des parcelles d’or relativement grosses; elle laisse échapper les tailings et les slimes; dans tous les placers où elle est en usage, la valeur des tailings varie entre 1 fr. 25 et 5 francs par tonne; de plus, il y a, sur le versant du Pacifique notamment, d'immenses dépôts de sables aurifères, ayant une valeur moyenne de 5 francs par tonne, et dont l'épaisseur est inconnue, qui ne peuvent être exploités par cette méthode. Avec l’amalgamation, il est possible de recueillir une 4 Physik. Zeïlschr., n° 7, 1910. 199 grande partie des parcelles qui seraient perdues si l'on opérait par le procédé simple; mais elle n'est pas non plus d'une efficacité suffisante et l’on a cherché à en rendre l'application plus généralement possible par de nombreuses dispositions accessoires. La grande difli- culté provient de ce que seul l'or libre et propre s'amalgame facilement, et encore avec du mercure également propre; d'une facon générale, l'or des slimes ne s'amalgame pas; l'or associé au soufre, à l'arsenic, au plomb, au zinc, au fer, ete., ne s'amalgame que peu ou point: avec beaucoup de minerais, le tra- vail n’est possible ni par le plateau, ni par la cuve; l’'amalgamation n’est pas praticable, par exemple, avec les minerais américains, bien quelle soit utilisée couramment en Australie. La lixiviation présente également de grandes diffi- cultés et son emploi est beaucoup plus limité qu'on le pense généralement; c’est ainsi qu'il y a dans l'Idaho des centaines de mines dontle minerai ne peut absolu- ment pas être traité par cette méthode; aussi, bien qu'il paraisse idéal, à première vue, le procédé par cyanu- ration souffre en pratique de la même insuffisance que les autres. Il n'est pas non plus susceptible d'une application uniforme à tous les minerais ; d’ailleurs, les installations de cyanuration sont relativement chères; leur service n’est pas aisé; elles ne permettent jamais de recueillir plus de 85 °/, du métal existant dans les minerais traités. Le procédé par cyanuration n'en a pas moins rendu des services précieux. La solubilité de l'or dans les solutions de cyanures est connue depuis une centaine d'années; mais il n’en fut fait d'application pratique qu’en 1887, à la suite des recherches de MM. Mac Arthur et Forrest, de Glasgow. Ceux-ci, ayant observé que, finement divisés, des minerais pauvres peuvent être économiquement traités par le cyanure de potassium en solution diluée, prirent un brevet pour l'utilisation de cette découverte et for- mèrent une société qui délégua des métallurgistes en Australie, en Nouvelle-Zélande, aux Etats-Unis, au Mexique, dans l'Afrique du Sud, etc., avec mission d'y mettre à l'expérience la nouvelle méthode. C'est dans le Sud africain que les démarches aboutirent en pre- mier lieu; une petite installation qui y fut établie donna des résultats tellement avantageux que la Com- pagnie Wernher-Beit adopta immédiatement le procédé pour toutes ses mines; c'est à cette innovation que le Rand a dû de devenir le premier producteur d’or; la découverte de MM. Mac Arthur et Forrest a constitué le progrès le plus marquant réalisé dans la métallurgie de l'or (et de l'argent); elle a provoqué un relèvement général de la production mondiale au moment même où, au contraire, cette production tendait à fléchir. Il est intéressant de constater qu'au point de vue chimique les procédés de cyanuration, tels qu'ils sont habituellement appliqués aujourd'hui, ne se diffé- rencient pas de ce qu'ils étaient au début; par contre, le matériel a été considérablement modilié. Les cuves de cyanuration, qui étaient précédemment en bois, sont formées à présent de grands réservoirs en acier et en béton, munis d'appareils de chargement et de déchargement mécanique perfectionnés. Pour le broyage, il est fait usage de machines très diverses : bocards, meules, moulins à billes, tubes broyeurs, etc.; ces derniers sont les plus employés ; ils ont généralement 4 mètres à 5,5 de longueur et de 4 mètre à 1,35 de diamètre et reçoivent une charge de 2.500 à 3.000 kilogs de cailloux; ils tournent à une vitesse de 40 à 50 tours par minute; la force nécessaire pour les mettre en mouvement est de 20 chevaux en moyenne. Comme c’est surtout le revêtement intérieur qui s'use, on a cherché à le rendre aussi durable que possible et, en même temps, à en faciliter le renouvel- lement; on le fait en fer en Australie (Kalgoorlie); dans la Nouvelle-Zélande, il est constitué de segments de fonte présentant des alvéoles où sont encastrés des blocs de quartz scellés au ciment de Portland; une disposition à peu près semblable est employée au 500 Mexique, mais le garnissage de pierres est soutenu par des cercles de fer. Les mélangeurs ont aussi été beaucoup modifiés ; on utilise, par exemple, des distributeurs-mélangeurs, introduisant le liquide en tournant sur eux-mêmes; pour les grands récipients, l’agitateur à air est fréquem- ment utilisé parce qu'il assure à la fois la mise en mouvement et la bonne aération du liquide; au Trans- vaal, on applique le procédé Adair-Usher, avec des réservoirs de cyanuration disposés en cascade; la solution de cyanure de potassium arrive dans les vases par des distributeurs radiaux, placés à proximité du fond, et s'écoule, par le trop-plein, dans le récipient suivant; la « pulpe » circule en sens contraire. Ces diverses méthodes permettent de traiter très rapide- ment de grandes quantités de slimes finement divisées. La filtration se fait le plus souvent au moyen de filtres Moore ou de filtres à aspiration Ridgway. Les premiers ont jusqu'à 300 et 400 tonnes de capacité et sont desservis au moyen de grues; la formation des gâteaux de slime demande approximativement vingt- cinq minutes pour une épaisseur de dépôt de 4 centi- mètres; la durée totale de l'opération est d’une heure et demie. M. Butters a établi des appareils à filtres fixes permettant de traiter 600 tonnes de matière par jour et comprenant 150 à 200 diapbragmes. Le filtre Ridgway, dû à un ingénieur de la mine Great Boulder, de Kalgoorlie, est un filtre rotatif con- tinu; les diaphragmes y sont suspendus à des bras rayonnants, au-dessus d'un bassin cylindrique divisé en trois compartiments; le premier de ceux-ci contient la solution aurifère ; le second est le compartiment de lavage; dans le troisième, s'opère la séparation du gâteau. L'appareil tourne lentement; chaque filtre reste approximativement treize secondes dans le com- partiment à pulpe et trente dans celui de lavage; les bras de suspension communiquent avec la conduite centrale et c’est par celle-ci que se fait l'aspiration; le gâteau de slime est détaché par refoulement. Les appa- reils ordinaires permettent de traiter 25 tonnes de slimes par jour; un homme peut desservir 15 à 20 filtres. Si ces perfectionnements d'outillage ont donné à la méthode de cyanuration le maximum d'économie, ils n'en ont cependant pas élargi la portée technique; à ce point de vue, il semble que les procédés les plus intéressants soient les procédés électro-chimiques, qui paraissent appelés à de nombreux usages. Les phénomènes sur lesquels ces procédés s’ap- puient sont connus depuis quelques dizaines d'années et, cependant, ce n’est que tout récemment que l’on a su en tirer parti; une petite expérience permet de les mettre en lumière d’une facon instructive. Versons quelques centilitres de mercure dans un plateau de verre ou de porcelaine et remplissons celui-ci d'eau salée ou acidulée; mettons en contact avec le mercure l'extrémité d'un fil métallique relié au pôle négatif d'un élément de pile; plongeons le fil relié au pôle positif de cette source dans l’eau du plateau; instantanément, nous voyons la surface du mercure se nettoyer complètement. Broyons du mercure avec du soufre ou de l'huile dans un petit mortier et recom- mençons l'expérience ; nous remarquerons de nouveau que le mercure se sépare rapidement des impuretés e ique les gouttes s’en rassemblent promptement. Enle- vons le métal; versons dans le plateau un peu d’eau additionnée de bichlorure de mercure; plongeons les conducteurs de notre pile dans la solution ; nous obser- verons en très peu d'instants un dépôt de mercure à la cathode. Cette expérience constitue en quelque sorte le fon- dement de la science de l'extraction électrochimique de l'or; l'idée de l’employer pour cette opération a été énoncée dès 1859 par H. Brevoort, de San Francisco, qui, dans un brevet de celte année, décrit une méthode où l’'amalgamation est intensifiée par des moyens élec- irochimiques. Trois ans plus tard, elle a été reprise par CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Davis, qui fit breveter un procédé où une action gal- vanique est provoquée dans le bain; Frank Dibber, vers la même époque, imagina un électro-amalgama- teur à tambour; J. H. Rae, en 1867, obtint un brevet pour un procédé d'électro-cyanuration; enfin, en 1882, Breakel et Haycraft expérimentèrent une méthode de ce genre en Australie. A partir de cette date, de multiples brevets sont dis- tibués pour des méthodes plus ou moins semblables. Le procédé d'amalgamation électrochimique permet de traiter les minerais rebelles aux autres méthodes ; déjà appliquée dans l'exploitation de quelques placers et dans les travaux par excavateur, cette méthode permet de recueillir l'or des sables les plus fins que l'on abandonnait autrefois; le rendement est de 95 °/,. environ et la dépense qu'occasionne l'application du procédé est insignifiante ; dans des mines où l’on ne parvenait à extraire que 50 °/, au maximum de l'or contenu dans les minerais traités, on arrive à recueillir 90 °/, de cet or et les recettes nettes s’en trouvent presque doublées. Il ne faut pas confondre l'amalgamation électrochi- mique avec la lixiviation électrochimique; dans la pre- mière opération, les métaux précieux sont recueillis directement sousforme d’amalgame; dans la seconde, le courant électrique a pour objet d’aviver l’action de la solution sur le métal précieux et de déposer celui-ci sur des cathodes convenables, en plomb, en alumi- nium ou en mercure. L'amalgamation électrochimique peut être réalisée avec les différentes formes d'outillage en usage dans le procédé ordinaire; lorsqu'on travaille avec les pla- teaux, ceux-ci jouent le rôle de cathode et les anodes sont suspendues au-dessus d'eux, de manière à effleurer le courant d’eau et de pulpe; on peut aussi suspendre des anodes dans les sluices. Dans le Sud-Africain et em Californie, on est arrivé à de très bons résultats avec des « mercury wells » équipées pour permettre l’amal- gamalion électrochimique; les installations amendées de cette façon ne demandent pas de main-d'œuvre spécialement éduquée; elles permettent de travailler avec des slimes qu'aucune autre méthode ne saurait employer. Dans tous les cas, il est bon d'ajouter à l’eau un peu de sel ordinaire; les opérations sont de la sorte sensiblement plus aisées. La lixiviation électrochimique est basée sur ce fait que l'attaque du métal par la solution est rendue plus active par le courant électrique, de sorte que le liquide dissout des particules qui échapperaient sans cet arti- fice; en outre, l'opération est activée, ce qui se traduif par une plus grande production de l'installation; d’ail- leurs, l'électro-déposition et le lessivage se font en une seule fois; comme le cyanogène naissant a une grande affinité pour l'or, le rendement est élevé. L'opération se fait de la façon suivante : les parcelles les plus grosses sont retenues par amalgamation, em dehors des électrolyseurs; ceux-ci sont formés de réservoirs profonds, dont le fond est couvert de mer- cure jouant le rôle de cathode, et le liquide y est agité, pendant une heure ou deux, par les mélangeurs. Ce- séjour équivaut à un parcours de plusieurs kilomètres. dans des sluices à mercure; les particules métalliques. s'amalgament directement ou bien se dissolvent, pour être précipitées par l'électrolyse; on récupère environ 97°/, de l'or présent dans les bains; tous les minerais peuvent être lraités économiquement de cette façon. Il est à présumer que la méthode fera, dans l'avenir, l'objet de sérieuses applications et que les appareils seront bientôt améliorés de manière à devenir auto-- matiques et continus; les installations comprendront alors une série de bassins, placés les uns à la suite des autres, la pulpe arrivant continuellement au sommet et les tailings s'écoulant par le bas; en fait, on a déjà dressé le projet d'appareils de ce genre; au surplus, l'électrocyanuration a été employée pendant quelques mois, avec succès, dans l'Idaho. Comme dans l’'amalgamation électrochimique, il est CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 501 bon d'ajouter, à la solution employée dans l'électro- eyanuration, du sel ordinaire dans la proportion de quelques kilogrammes par tonne de pulpe traitée; on ajoute aussi avantageusement, soit à l’eau, soit à la s0- lulion, du bichlorure de mercure; les réactions secon- daires auxquelles ces sels donnent lieu favorisent les réactions principales ". H. Marchand. $ 5. — Physiologie Venin de cobra et curare. Sérothérapie anticobraïque. — Les auteurs qui ont cherché le mécanisme de la mort par le venin du Cobra (Naya tripudians) et des autres serpeuts venimeux du groupe des Colubridæ admettent que la substance toxique agit sur le centre respiratoire pour le paralyser. C'est Popinion de Calmette, qui désigne la substance toxique sous le nom de neurotoxine (toxine agissant sur les éléments nerveux); c’est aussi l'opinion de Rogers : « L'action primitive du poison, dit-il, est la production d'une paralysie respiratoire par action directe sur le centre respiratoire. » M. Maurice Arthus, professeur de Physiologie à l'Université de Lausanne, vient d'étudier cette ques- tion et de donner le résumé de ses observations à FAcadémie des Sciences (6 juin 1910). Il démontre que le venin de cobra n'agit pas primitivement sur le centre respiratoire, car l'examen attentif de la respi- ration des animaux intoxiqués pendant la période des accidents qui précèdent immédiatement la mort révèle l'existence de dyspnée et non d’apnée. Or, si l’apnée correspond à une diminulion de l’excitabilité et de l'activité du centre respiratoire, la dyspnée révèle une suractivité de ce centre. Le venin de cobra agit à la périphérie et détermine l'arrêt respiratoire par para- lysie des muscles respiratoires. Cette paralysie est équivalente à la paralysie cura- rique ; elle respecte, en effet, lacontractilité propre des muscles; le poison porte son action sur les plaques terminales motrices : au moment de la mort, l’excita- tion des nerfs moteurs ne provoque de contractions musculaires que si elle est réalisée par des courants intenses; l’excilation directe des muscles donne lieu aux réactions normales. On peut d'ailleurs établir un parallèle rigoureux entre la curarisation et l’envenimation. Les deux poi- sons agissent sur les terminaisons nerveuses motrices des muscles volontaires et déterminent la mort par paralysierespiratoire périphérique entrainantl'asphyxie et conséquemment l'arrêt du cœur. Les deux poisons respectent la sensibilité des animaux qu'ils ont immo- bilisés, et on le manifeste soit chez la grenouille, soit chez les mammifères soutenus par la respiration arti- licielle. Les deux poisous provoquent dans la période prémortelle les mêmes troubles respiratoires, circula- toires et cardiaques. Les deux poisons ajoutent leurs actions toxiques quand ils sont injectés simultané- ment, comme s'ils agissaient sur les mêmes éléments anatomiques et de facon équivalente. Le venin de cobra est donc bien un curare, et les quelques différences signalées (différence de la durée de la phase d'incuba- tion, différence d'action des fortes doses sur le cœur) ne sauraient ébranler celte conclusion. Eu pratiquant chez les animaux envenimés la respi- ration arlificielle, on entretient aussi longtemps qu'on le désire les contractions cardiaques et la vie, comme chez les animaux curarisés, pourvu, toutetois, que la dose de venin inoculée ne soit pas trop considérable (les quantités de venin qu'un cobra peut inoculer à un 1 Electrical Review, Londres, 5 novembre 1904, p. 757; Re- vueuniverselle des Mines, décembre 1907, p.283 : Revue indus- trielle, 29 août 1908, p. 343; £lectrical Review, New-York, 20 février 1909, p. 358; Congrès de Chimie appliquée, Londres, 2 juin 1909; Brevets américains. A.S. Bnowx: The Engin. Mayazine, septembre 1909, p.960. E. E. Carey : T'he Engiu. Magazine, décembre 1909, p.335. homme adulte ne dépassent jamais celles contre les- quelles on peut agir avec eflicacité par la respiration artificielle); et l'on assiste, pendant celle respiralion artificielle, à l'élimination ou à la destruction du venin, extrêmement lente, il convient toutefois de le recon- naître. Le sérum antivenimeux de l'Institut Pasteur de Lille empêche l'apparition ou arrèle le développement des accidents d'envenimation par le venin de cobra selon la dose injectée et le moment de l'injection. Toutefois, il n'est plus aple à arrêter l'évolution des accidents quand il est injecté tardivement. Me Boleslawa Staw- ska, assistante de Physiologie à l'Université de Lau- sanne, à montré que, dans l'intoxication aiguë par iniection intraveineuse de 2 nulligrammesde venin de cobra dans les veines de lapins de 2 kilogs, le sérum n'empêche l'apparilion des accidents et la mort que s'il est introduit dans les veines moins de 5 mi- nutes après le venin; dans l'intoxication subaigué, telle qu'elle est réalisée dans le cas de morsure de cobra chez l'homme, on dispose, pour pratiquer la sérothérapie, d'un temps beaucoup plus long sans doute, 3 ou 4 heures, par exemple; mais, les accidents s'aggravant, un moment arrive toujours où le sérum est ineflicace. Il en est tout autrement, comme le démontre M. Maurice Arthus, quand on associe à la sérothérapie la pratique de la respiration artilicielle; celle-ci entre- tient les battements du cœur assez longtemps pour permettre au sérum de détruire ou de neutraliser le venin fixé sur les plaques motrices terminales et assurer le retour des mouvements et de la respiration spontanée. Il y à plus. Telles circonstances peuventse présenter, et la chose n'est pas rare dans les régions où vivent les cobras, où l’on n’a pas à sa disposition le sérun,. antivenimeux et où il ne serait possible de l'obtenir que trop tardivement pour sauver le malade. C'est ici que la méthode de traitement proposée par M. Maurice Arthus peut rendre des services : la respiration artiti- cielle permet d'entretenir les contractions cardiaques aussi longtemps qu'il le faut pour agir avec le sérum; elle pourrait même, à elle seule, permettre le retour à la motilité et à la respiration spontanée, mais elle demanderait alors à être pratiquée pendant des heures et des heures, peut-être même pendant plus d’un jour. L'injection intra-veineuse, ou même sous-cutanée, du sérum antivenimeux abrège considérablement cette période. Nombre de personnes s’effraient à l'idée de pratiquer pendant des heures la respiration artificielle, considérant que la chose est irréalisable. C'est là un sentiment inacceptable. Un tube de caoutchouc intro- duit dans la trachée par les voies naturelles, ou adapté à une canule à trachéotomie fixée dans la trachée. et percé latéralement d'un trou pour l'évacuation de l'air d'expiration, et un pelit soufflet à main, voilà tout ce qu'il faut pour pratiquer, aussi longtemps qu'on le veut et commodément, la respiration artificielle. Les expériences de M. Maurice Arthus comportent ainsi une application pratique importante; elles com- portent évalement des indications théoriques. Elles démontrent avec une rigueur géométrique l’action exercée par une antiloxine sur une toxine fixée sur les éléments anatomiques, et, bien que cette conclu- sion ne puisse être immédiatement généralisée, elle ne manque pas d'intérêt pour les biologistes. M. Maurice Arthus fait remarquer qu'en tout cela il s’agit du venin de cobra et de Colubridæ, c'est-à-dire de venins curarisants, et nullement du venin de la vipère et plus généralement des Viperidæ, et il attire l'attention de ceux qui songeront à utiliser la méthode de traitement — respiration artificielle ou la méthode mixte respiration artificielle-sérothérapie — sur la nécessité de réchauffer artificiellement les malades, qui se refroidissent rapidement et énormément par suite de l'insuffisance de leur thermogénèse, consé- quence de la résolution musculaire. ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE’ Messieurs, permettez-moi de remercier vivement le Conseil de votre Société de l'honneur qu'il m'a fait en m'invitant à parler devant cet auditoire de savants d’un pays qui, à commencer par Lavoi- sier, a donné au monde tant de chimistes distin- gués. La tâche d'exposer ici mes recherches sur la fermentation alcoolique du sucre était très attrayante pour moi; j'étais certain, en effet, de pouvoir compter sur l'intérêt général, non seule- ment par le fait que, dans cette terre de France, premier pays viticole du monde, les procédés de la fermentation ont atteint depuis les temps les plus reculés une grande importance pratique, mais aussi parce que ce sont principalement des savants francais qui ont fait faire de grands progrès à la connaissance des effets qui résultent de la fer- mentation et qui, par là, ont éveillé l'intérêt gé- néral sur ces problèmes compliqués. Payen et Persoz, les premiers, réussirent à isoler la subs- tance active des grains d'orge en germination, la diastase, en précipitant ses solutions par l'alcool. L'introduction dans la science de ce nouveau type de substances fut un fait de haute importance. L'acceptation unanime de la syllabe « ase », comme terminaison servant à caractériser tout le groupe des enzymes, en est une preuve. Je ne saurais trop insister sur les mérites inoubliables de Pasteur dans ce champ de travail. Pendant une période de plus de dix années d'activité infatigable et bril- lante, il parvint à faire accepter d’une manière générale ce que Cagniard-Latour, Schwann et Kützing avaient déjà rendu probable, mais ce qu'ils n'avaient pas pu prouver : c’est-à-dire qu'il ne se produit jamais de fermentation dans la Nature sans la présence de micro-organismes. Les faits démon- trent clairement que les savants français étaient munis des connaissances nécessaires pour attaquer de telles questions et que le terrain scientifique était bien préparé pour y semer de nouvelles idées. Je me rappelle avec grande satisfaction que, tandis que mes premiers travaux furent soumis à une sévère critique en Angleterre et même dans mon pays, ils trouvèrent un accueil bienveillant en France”. Voici dans quels termes E. Duclaux s’est exprimé à ce sujet : « Le mémoire où sont indi- qués ces premiers résultats. réclame de nom- ‘ Conférence faite devant la Société chimique de France le 43 mai 1910. ? Sur les premières expériences de l’auteur, voir l’article 3errRaNp : Le mécanisme de la fermentation alcoo- lique et les expériences de Buchner, dans la levue géné- rale des Sciences du 15 décembre 1898. de G. breux éclaircissements. Mais, tel qu'il est, il semble probant et marque un événement considérable: dans l’histoire de la science. » Avant de vous entretenir en détail des derniers. résultats de mes recherches, qu'il me soit permis, de résumer d’abord en quelques mots les expé- riences antérieures, afin d'en dégager un apercu général. Le point de départ de mes recherches fut le désir de connaître ie contenu des cellules de levure. Ce désir était probablement une consé- quence des idées qui préoccupaient le groupe des disciples de Nägeli. Pendant le cours d’une prome- nade, feu mon frère, le bactériologiste Hans Buchner, et moi, nous fûmes saisis par l'idée que, pour parvenir au but désiré, il serait nécessaire de: déchirer les cellules de levure et par là d'éliminer la membrane cellulaire. Des expériences que j'entrepris immédiatement prouvèrent déjà en 1893 que, par l'addition de sable, il est facile de rompre même les plus petits micro-organismes dans un mortier ordinaire. Mais des circonstances extérieures interrompi- rent les essais, qui ne furent repris, et alors sur une plus vaste échelle, qu'en 1896, après la nomi- nation de mon frère comme directeur de l’Institut hygiénique de Munich. Après avoir broyé des kilo- grammes de levure, à l’aide de la presse hydrau- lique, sous une pression de 90 kilogrammes par centimètre carré, après addition de terre d'infu- soires, procédés proposés à cet effet par l'assistant de mon frère, M. le Professeur Martin Hahn, on réussit à avoir, en peu de temps et avec de bons rendements, autant de suc de levure que l’on en désirait. On trouva plus tard qu'en 1846 Lüdersdorff, à Berlin, avait déjà broyé de la levure en très petite quantité et que de semblables expériences avaient été faites aussi avec d’autres micro-organismes par M° von Manasseïn, par A. Mayer, par À. Fernbach et par d’autres. Mais on n'avait encore jamais entrepris d'essais sur une échelle étendue. Le suc de levure, liquide jaunâtre, limpide, pré- sente, quelque temps après l'addition de sucre, des phénomènes de fermentalion. Des bulles de gaz anhydride carbonique se dégagent; simultanément, il se forme de l'alcool éthylique et le sucre disparait peu à peu. Je dois mentionner ici comme fait important et très heureux que, lors des premiers essais, on employa de la levure basse des brasseries ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU de Munich, qui donne du suc particulièrement actif. On découvrit bientôt qu'il était possible de filtrer le suc de levure à travers une bougie Berkefeldt et une bougie Chamberland sans anéantir complète- ment l’action fermentative. Les quelques cellules vivantes contenues encore dans le suc ne pouvaient done pas être la cause de la fermentation; d’ailleurs, leur nombre minime exeluait une telle explication. C'est donc à bon droit qu'on pouvait parler d'une fermentation sans cellules. Comme agent du sue, j'ai admis déjà, dans mon premier Mémoire, une enzyme fermentative spé- ciale, soluble, mais non dialysable à travers la paroi cellulaire. Je l'ai nommée « zymase », me servant d'un mot employé autrefois comme équiva- lent d’invertase, mais tombé en désuétude. J. Lafar, de Vienne, et, d’autres encore propo- sèrent la dénomination d’ « alcoolase ». Mais, puis- qu'il n’y a pas d’objections importantes, je prie de conserver le nom que j'ai proposé. Plusieurs expériences permettent de rejeter l'objection de l'existence de parcelles vivantes de protoplasme dans le suc comme cause de la fermen- tation. Citons d'abord celles qui sont relatives à l'influence exercée par les agents antiseptiques. On trouva, en faisant des expériences parallèles, que l'addition du toluène réduit, en effet, à son mini- munm l’action fermentative de la levure vivante, ce qui n’a pas lieu pour la fermentation par le suc de levure. Cependant des fragments de protoplasme dénudés, vivants, privés de l'enveloppe cellulaire protectrice, devraient être plus sensibles que les cellules elles-mêmes. De plus, on peut évaporer le suc de levure en un sirop dans le vide à basse température, et finale- ment le faire sécher complètement. Le suc de levure sec, ainsi obtenu, est une masse ayant une forte ressemblance avec l'ovalbumine sèche, développant, si on l’arrose d’une solution de sucre, toute l’acti- vité effervescente primitive. Une autre preuve évidente, s'opposant à l’accep- tation de la présence de fragments vivants de pro- toplasme comme agents de fermentation dans le sue, réside dans la précipitation, d’après la méthode Payen et Persoz, par l'alcool ou par l’acétone. Par l’addition de solution de sucre aux poudres qu'on obtient, on retrouve plus tard régulièrement toute l’action fermentative. Comme j'attache une grande importance à cette expérience, je désire vous la montrer. Je verse 100 centimètres cubes de suc de levure, que j'ai emporté de Breslau en état de congélation, dans un mélange de 1.200 centimètres cubes d'alcool (une quantité douze fois plus grande) et de 600 centi- mètres cubes d’éther. SUCRE 503 Nous allons mettre en mouvement l'appareil- agitateur et nous laisserons tomber goutte à goutte le suc de levure dans le mélange d'alcool et d'éther Le liquide se troublera immédiatement. Il se déposera des flocons, que nous enlèverons en fil- trant à la trompe et que nous dissoudrons dans l’eau ; après l'addition de sucre, il devra se produire une effervescence. D'autres expériences pour obtenir de la levure tuée, mais encore effervescible, ont parfaitement réussi. On parvient à tuer la levure sans en détruire les enzymes, en ayant soin de la dessécher d'abord à une température très basse, par évaporation; plus tard, on peut atteindre jusqu’à 110°, surtout dans un courant d'hydrogène. On obtient alors une préparation qui n'est plus capable de développe- ment; si on l’ajoute à des solutions alimentaires, il n'y à plus de végétation : la levure est donc morte. Cette préparation, que j'ai nommée lauerhefe (levure persistante), est cependant encore en état de déterminer la fermentation des solutions de sucre. On peut aussi tuer la levure en la versant dans de l'alcool et de l’éther ou en la versant dans de l’acétone, méthodes qui ont été découvertes par mes collaborateurs R. Albert et R. Rapp. Par ce dernier moyen, on obtient la préparation connue dans le commerce sous le nom de Zzymine. Dans une levure persistante, reconnue stérile, il n'existe plus du tout de protoplasme vivant, car elle n'est plus apte au développement; toutefois, elle peut encore transformer la solution de sucre. Ce fait me paraît être une preuve évidente contre l'hypothèse que la présence de parcelles de protoplasme vivant serait la cause de la puissance effervescente du suc de levure. Cette méthode permettant de tuer rapidement la levure et de la faire passer à un état stable peut aussi être appliquée à d’autres micro-organismes. Voici, par exemple, des bactéries persistantes de l'acide lactique (Dauermilchsäurebacterien) et du vinaigre (laueressighacterien). Donc les fermen- tations lactique et acétique ne dépendent pas non plus de la présence des microbes vivants en ques- tion, mais elles doivent être ramenées aussi à la présence de substances chimiques, c'est-à-dire à la présence d'enzymes. Il est particulièrement intéressant de savoir de quelle manière on parvient à tuer la levure par ce procédé. On ne peut admettre une transforma- tion chimique des matières essentielles du con- tenu des cellules, vu que les enzymes, pourtant si instables, se conservent. De plus, il n'yapas, par ce procédé, de coagulation proprement dite des ma- tières albuminoïdes; ceci est prouvé par la propriété des précipiltés du sue de levure de se dissoudre de 50% ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE nouveau dans l’eau presque sans laisser de résidu. D'autre part, on peutdémontrerfacilement que, dans l'acétone passée à travers le filtre après la précipi- tation et dont la couleur est brunâtre, bon nombre de substances se sont dissoutes. Pour les Citromy- cètes, H. Wüstenfeld a pu démontrer dans la solu- tion acétonique la présence de la mannite, qui doit bien être comme une substance de réserve. On n'est pas encore parvenu à prouver la même chose pour la levure de bière. Par contre, nous avons trouvé, au moyen d'un alcali, des graisses saponifiables, et, en outre, des substances cholestériques, sur lesquelles il restera toutefois définitives. Les résultats obtenus jusqu'à présent nous font admettre que la perte de la vie des cellules est produite par l'éloignement de ces membranes hypothétiques qui, d’après Overton et H.-H. Meyer, isolent les uns des autres les petits ateliers intérieurs des cellules. “Après ces expériences, exposées dans leur en- semble, il n'y a plus de doute que seule la théorie des enzymes, édifiée par M. Traube, en 1858, pos- sède encore de l'autorité; d'après cette théorie, il s'agirait simplement dans les processus de fer- mentation d'une action des enzymes. Les savants les plus distingués de la France et de l'Allemagne, Berthelot, Claude Bernard, Schôünbein, Hoppe- Seyler et surtout Liebig, avaient adhéré à cette opinion. Mais les preuves faisaient défaut. Au- jourd'hui, on sait qu'il y a une classe spéciale d'enzymes, les endo-enzymes, qui sont destinées à agir seulement à l'intérieur des cellules et qui, bien que solubles dans l’eau, sont pourtant retenues par la membrane cellulair> ou par la membrane protoplasmique. À cause de cela, tous les essais considérée encore à faire des vérifications directs d'extraction étaient restés sans succès. C'est en ceci que l'agent effervescent se distingue, en principe, de l’enzyme de la fermentation de l’urée, reconnue en 1890 par P. Miquel dans le filtrat des cultures des bactéries de l'urine. C'est certaine- ment par suite de la grande différence des actions chimiques que personne n'a osé tenter un rappro- chement entre la cause de la fermentation de l'urée et la cause de la fermentation alcoolique du sucre. Les communications d'Emil Fischer et P. Lindner sur la maltase de la levure de bière et sur l’inver- tise du Wonilia candida dans les cellules desséchées et modérément broyées ne sont pas en rapport direct avec la découverte de la fermentation sans cellules; elles prouvent seulement que des pro- blèmes semblables étaientétudiés en ce temps-là de plusieurs côtés. I1 La question de haut intérêt qui se pose mainte- nant est de savoir de quelle manière la zymase opère la scission de la molécule de sucre. Nous pos- sédons deux moyens de recherche. Le premier consiste dans un examen minutieux du suc de levure, de ses propriétés et de ses corps actifs. Il était à prévoir dès le début qu'on rencon- trerait une grande quantité d'espèces très diffé- rentes de ces enzymes, puisque le sue de levure constitue le contenu liquide total des cellules d'organismes. Si les opinions que nous allons ‘exposer plus loin au sujet de l'apparition d'un pro- duit intermédiaire se soutiennent, il faut consi- dérer, en outre, comme certain que l'agent fermen- tatif proprement dit n’est pas unique, mais qu'il est formé de deux enzymes distinctes, au moins, dont la première dédouble le sucre en un terme de pas- sage, et la seconde dédouble ensuite ce terme de pas- sage en alcool et en gaz carbonique. Le nom de zymase ne sera considéré à l'avenir que comme terme collectif. Mais des observations directes, con- firmant cette vue, n’ont pas élé faites jusqu'à ce moment. Nous maintenant entretenir des enzymes qui interviennent dans le processus de la fermentation, soit pour le retarder, soit pour le häter. Si on expose du sue de levure frais à la tem- pérature ordinaire, il perd après un ou deux jours sa puissance fermentative; cela s'opère par l'effet d’une enzyme protéolytique ou digestive, ainsi que M. Hahn l’a démontré par l'action du sue de levure sur la gélatine. L'opinion que cette endotryptase serait préc'sément responsable de la destruction de la puissance fermentative s'appuie sur diffé- rents arguments. Mais nous n'examinerons pas cette question de plus près. Harden et Young ont fait connaître un autre agent du suc de levure, de plus grande importance dans le processus de la fermentation, et très dif- férent de ceux que nous venons d'étudier. Ils ont introduit le sue de levure dans un filtre extrême- ment fin, un filtre de gélatine construit d'après Martin, et l'ont décomposé en deux parties, un résidu et un liquide filtré. Le résidu était sans activilé fermentalive et, par conséquent, fut désigné comme résidu inactif. Mais le suc filtré se trouva être de même sans influence sur le sucre. La fermentation ne se produisit de nouveau qu'après la réunion des deux parties. Les savants anglais ont,.en outre, montré que l'on peut encore rendre actif ou régénérer le résidu inactif par un autre moyen, c'est-à-dire par le suc bouilli. On obtient ce dernier en portant à l’ébullition du sue de levure ou simplement en faisant cuire de la levure dans de l’eau. D'autres savants, comme Pottevin (1903) et Magnus (1904), ont déjà travaillé avec des sucs bouillis obtenus d'une manière ana- logue. Harden et Young émirent, de plus, l'opinion allons nous ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE 505 que, dans le sue de levure bouilli, il devait y avoir une substance spéciale dialysable et non détruite par la chaleur, indispensable pour la fermentation, c'est-à-dire une co-enzyme ou un co-ferment. G. Ber- trand à fait usage le premier de cette dénomination pour désigner une substance minérale qui forme avec une substance organique el très altérable par la chaleur le système d'enzyme véritablement actif. J'ai pu contrôler, avec l'aide de W. Antoni, R. Hoffmann, F. Klatte et H. Hachn, que ces expé- riences des chercheurs anglais avec les levures hautes réussissaient aussi avec la levure basse ber- linoise. Nous arrivämes de même à décomposer, simplement par passage à travers du papier-parche- min ordinaire, le suc de levure en deux parties. efficaces du suc bouilli. Il se trouva que le sue bouilli perd sa puissance régénératrice vis-à-vis du sue de levure conservé, soit par l'incinération, soit déjà par une ébullition prolongée; il la perd encore sous l'influence d'une émulsion de lipase préparée avec des graines de ricin et enfin par un contact prolongé avec du carbonate de potassium. Par contre, on trouva qu'une solution de tryp- sine ne l'altère pas. Ce sont donc évidemment les lipases du suc de levure pressée qui déterminent l’action et modifient la co-enzyme. Toutes ces expé- riences s'accordent avec l'opinion que la co-enzyme représente une combinaison organique phosphorée facile à saponifier, mais du type des éthers-sels, stable à l'égard de la trypsine, qui décompose les Tagceau I. — L'addition de suc bouïlli au suc de levure préserve la zymase et les substances proteiques coagulables pendant la conservation. DURÉE POUVOIR DE FERMENTATION PRÉCIPITATION DES PROTÉIQUES NUMÉROS ORIGINE de la Expériences capilales : 5 c.c. suc de levure + 5 c. c. suc bouilli {après la conservation addition de 4 gr. de sucre + 0,2 c.c. to- luène) fournirent CO, en gr. des de la conservation en expériences| levure basse jours 0,41 0,31 Berlin. 0,10 O7 & UO 1N9 Expériences témoins : (après A Expériences capitales : | Expériences témoins : 5 c.c. suc de levure + 5 c.c. eau la conservation addition de 4 gr. de sucre + 0,2 c. c. to- luène) fournirent CO, en er. Protéiques oagulables de 10 c.c. suc de le- vure + 10 c. c. bouilli en gr. Protéiques coagulahles de 10 c.c. suc de le- suc| vure+-{Ù c.c.eau en 0,26 0.00 0.00 0,66 0,66 0,00 0,48 0,04 (l DIT ou So : Es Breslau. | 0,95 0,99 0,74 Chacune en elle-même était inactive; réunies, elles se trouvèrent être de nouveau capables d'opérer la fermentation du sucre. Nos expériences prouvèrent encore, et ceci est un fait singulier, que l'on peut régénérer avec le sue bouilli du sue de levure pressée qui, par suite d'une trop longue conserva- tion, a perdu son efficacité fermentative. Des deux agents indispensables, de la zymase et de la co- enzyme, la co-enzyme disparaitrait d'abord du sue de levure. La zymase est plus stable. L'anéantisse- ment de la force fermentative par la conservation n'a d’ailleurs aucun rapport avec le processus de fermentation lui-même. Nous avons aussi obtenu quelques éclaireisse- ments sur la nature de la co-enzyme. Harden et Young avaient déjà observé que des phosphates alcalins ordinaires, ajoutés au sue de levure, perdent la précipitabilité par la mixture magné- sienne. Ils déduisirent de ce fait qu'il pourrait y avoir formation d'une combinaison organique phosphorée, en rapport immédiat avec les agents substances albuminoïdes sans pouvoir hydrolyser les éthers-sels. Des essais plus récents ont permis de distinguer, en outre, une autre particularité du suc bouilli. En ajoutant, dès le début, du suc bouilli à du sue de levure, l’action fermentative, qui disparait rapide- ment sans cette addition, se maintient entièrement pendant plusieurs jours. Le suc bouilli préserverait done la zymase contre l'influence nuisible de l'enzyme protéolylique. Tout d'abord, nous étions disposé à attribuer ce rôle protecteur à la co- enzyme. Bientôt, cependant, il fut reconnu que l’adjonction du suc bouilli préserve non seulemen la zymase de la destruction par l'endotrypsine, mais aussi les corps protéiques coagulables du sue de levure. Le tableau I représente une série d'expé- riences, les unes faites avec de la levure basse de Berlin, les autres avec de la levure de Breslau. Le côté gauche du tableau montre que la zymase dis- paraît dans le suc de levure conservé, mais qu'elle peut être préservée par une addition préalable de 506 ED. BUCHN IR — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE ————_——_—_—_—_—_—_—_—_—]… — — ————E—aEa_—LaELELE_L__———— suc bouilli. Le côté droit du tableau représente un fait identique pour les corps protéiques coagu- lables du suc de levure; sans addition du sue bouilli, leur poids diminue déjà sensiblement le premier jour, et ils disparaissent presque entière- ment dans l’espace d'un à sept jours. Par contre, si on conserve du suc de levure additionné de suc bouilli, on aura, même après sept jours, une fort petite diminution des corps protéiques à grandes molécules. Après deux semaines, cependant, on constate aussi dans ce cas une forte diminution et finalement une disparition complète de ces corps L'addition du suc bouilli protège ainsi pendant un certain temps contre l'influence protéolytique de l'endotrypsine. Je peux vous montrer directement l'influence du suc bouilli sur la conservation des corps protéiques coagulables dans le suc de levure. Si l’on chauffe du suc frais dans l’eau bouillante, il se coagule complètement. Si l’on opère le même essai sur du sue conservé sept jours à la tempéra- ture de 22°, il se dépose tout au plus quelques flocons, parce que les substances protéiques sont digérées par l’endotrypsine. Enfin, si l’on échauffe le même suc de levure, conservé après l'addition d'un volume de sue bouilli, il se forme une grande précipitation des substances coagulables qui avaient été protégées contre les enzymes protéolytiques. Le suc bouilli préserve aussi la gélatine. Si on verse du suc de levure vieux, dont l’activité fer- mentative à cessé, sur de la gélatine solidifiée, celle-ci sera liquéfiée en peu de temps à la surface, comme l'a démontré M. Hahn. Cependant, nulle liquéfaction de la gélatine ne sera remarquée si l'on a fait agir le suc vieux sur de la gélatine soli- difiée avec du suc bouilli. Plusieurs de ces expé- riences sont rassemblées dans le tableau IL. Le suc bouilli protège donc la zymase, les sub- stances protéiques et la gélatine des influences protéolytiques. Ces corps appartiendraient ainsi au même groupe, puisqu'ils se tiennent de près par leurs propriétés. De là, nous pourrons conclure avec probabilité que la zymase appartient à la grande classe des substances protéiques. En outre, le suc bouilli préserve la gélatine non seulement contre l'endotrypsine du suc de levure, mais aussi contre la pepsine et, bien qu'à un degré plus minime, aussi contre la trypsine. Il s’agit done de la présence d'une substance protectrice générale contre les enzymes protéolytiques, que nous distin- guerons sous le nom d'antiprotéase. Des expé- riences minutieuses ont prouvé qu'il est possible de détruire la co-enzyme du suc de levure bouilli, sans anéantir l'antiprotéase. On parvient à ce résultat en soumettant le sue à une cuisson de plu sieurs heures. Le suc ainsi traité présente encore une activité protectrice vis-à-vis de la gélatine et de la zymase du sue de levure conservé: il renferme donc une antiprotéase. Par contre, ce suc n'a plus la capacité de régénérer le suc de levure conservé, vu l’absence de la co-enzyme. Les deux agents sont détruits par le chauffage sous pression, par l'inei- nération ou par les lipases de ricin. L'antiprotéase n'est pas produite pendant la pré- paration du sue bouilli, c'est-à-dire par l'influence de l’eau à la température de l’ébullition: sa pré- sence peul, au contraire, être démontrée dans l'extrait de levure persistante acétoné, préparé à froid par la méthode de L. Iwanoff; cette levure persistante renferme à l’état presque inaltéré le contenu des cellules vivantes. L'antiprotéase joue TaBLEAU I. — Le suc bouiïlli préserve la gélatine contre la liquéfaction par l'endotrypsine. GÉLATINE LIQUÉFIÉE GÉLATINE CHLOROFORMÉE RES û en centimètres cubes après riences Teneur Ê n Q en gélatine : 4 ë dissolvant : » jours | jours 0], jours eau. suc bouilli concentré. eau. suc bouilli concentre. eau. sue bouilli concentré. un rôle remarquable dans la vie de la levure, attendu qu’elle règle les fonctions digestives. La zymase, la co-enzyme, l'endotrypsine et l’anti- protéase sont done de la plus haute importance dans l’acte de la fermentation. Le nombre des agents de cette nature est-il épuisé maintenant, ou bien serons-nous obligés d'en supposer d'autres à l'avenir? I1 semble que nos connaissances actuelles ne soient pas encore assez avancées pour rendre possible une simplification aussi désirable desidées. Nous pouvons maintenant achever l'expérience que nous avons préparée. En faisant tomber goutte à goutte du suc de levure dans de l'alcool et de l’éther, il s’est déposé un précipité qui a été recueilli à la trompe, lavé deux ou trois fois à l'alcool et finalement à l'éther. La poudre ainsi obtenue — pour 100 centimètres cubes du sue de levure, à peu près 14 grammes — se dissout quand on la triture avec du sucre et de l’eau dans un mortier. On obtient une solution épaisse jaunätre; on la verse ED. dans un tube à essai que l'on plonge ensuite dans l'eau à 40°. Après quelque temps, la masse mous- sera et augmentera sensiblement de volume, ce qui prouvera la puissance fermentative existant en germe dans la préparation stérile. III Un second moyen, entièrement différent, pour élucider le processus de dédoublement du sucre, emploie des méthodes d'investigation purement chimiques. C'est en collaboration avec J. Meisen- heimer que j'ai entrepris des recherches dans cette voie depuis plusieurs années déjà. Si une molécule de glucose se divise en deux molécules d'alcool éthylique et deux molécules d'anhydride carbonique, la chaine à six chaînons doit être rompue en trois points. Une réaction com- plète de cette nature ne se fera fort probablement pas directement, mais au moyen de produits inter- médiaires. Pour des raisons théoriques, A. von Baeyer a déjà supposé, en 1870, la formation tem- poraire de l'acide lactique au moyen du dépla- cement des groupes hydroxyles par oxydation ae quelques atomes de carbone et réduction de quel- ques autres. Une transformation du glucose en acide lactique s'obtient par les moyens chimiques les plus sim- ples. En chauffant avec de l’aleali, et, selon M. Mei- senheimer, même déjà après un contact prolongé avec une lessive de soude diluée, on obtient 50 °/, et plus du poids du sucre sous forme d'acide lac- tique. L'opinion que l'acide lactique se divise, pendant une seconde phase de la fermentation, en alcool et en anhydride carbonique ne présente pas non plus de difficultés théoriques. Get acide est un dérivé carboxylé de l'alcool; sa décomposition dans cette direction à été opérée par A. Fitz au moyen de bactéries, par P. Mazé au moyen des moisissures et, plus récemment, elle a été réalisée par H. Schade à l'aide de moyens purement chimiques, catalyti- ques, en passant par les produits intermédiaires : aldéhyde acétique et acide formique. Des expériences de E. Duclaux se trouvent peut- être en rapport plus immédiat avec la fermenta- tion; ce savant réussit à décomposer le glucose en solution alcaline, sous l'influence de la lumière solaire : par la présence d'hydroxyde de baryum, en formant 50 °/, d'acide lactique; par la présence de lessive de potasse, en formant de l'alcool et de l'anhydride carbonique. Nous avons pu contrôler cette dernière observation et montrer que l'in- fluence de la lumière n'est pas nécessaire. Ces faits et d'autres encore, qu'il serait trop long de rapporter ici, nous firent accepter, d'accord avec d’autres savants, parmi lesquels P. Mazé, la grande BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE 507 probabilité de la formation de l'acide lactique comme intermédiaire. Le fait que Pasteur n'avait jamais observé dans la fermentation de la levure vivante celte substance intermédiaire pouvait provenir d'un processus d'assimilation; nous employämes, pour celte raison, la fermentation sans cellules. Pendant cette fermentation, ou bien la petite quantité d'acide lactique présente dans le suc de levure (jusqu'à 2°/,, en général) augmente (maxi- mum observé 0,47 °/,), ou bien elle est complè- tement détruite; dans ce dernier cas, on peut aussi faire disparaître un peu de l'acide lactique ajouté (maximum de la quantité ajoutée et détruite 0,30 °/.). Malgré de nombreux essais, il n'a pas été possi- ble d'établir un rapport entre les quantités de sucre transformé et d'acide lactique formé ou dis- paru; de plus, on n'est pas parvenu à prouver, dans les cas de disparition de l'acide lactique, que celui-ci s'était transformé en alcool et anhydride carbonique et, de même, on n'a pas réussi à expli- quer pourquoi ily avait tantôt diminution et tantôl augmentation de l'acide lactique. Probablement, la cause dépend de l’état physiologique de la levure. Malgré cela, on devra s’en tenir au fait que l'apparition de l'acide lactique dans la fermentation sans cellules provient du sucre et ne dérive pas de produits de transformation des substances protéi- ques, comme cela a lieu pour la formation des alcools supérieurs et de l'acide succinique, d’après les beaux travaux de F. Ehrlich, car les enzymes qui provoquent cette décomposition des acides aminés n'ont pas pu être trouvées dans le suc de levure. Puisque, en général, on présume que les produits intermédiaires sonteux-mêmes soumis à la réaction en question, nous avons aussi examiné notre hypo- thèse en étudiant la réaction de la levure vivante sur l'acide lactique. Les recherches antérieures sur ce sujet ne peuvent pas être considérées comme définitives, à cause de la difficulté du dosage de l'acide lactique. Malgré de nombreux essais, nous n'avons jamais réussi à faire disparaitre l'acide lactique introduit dans une solution acidulée, neu- tre ou ammoniacale. On a toujours pu le retirer, même après avoir hâté la fermentation par l'ad- jonction immédiate de sucre. Un fait qui s'oppose également à considérer l'acide lactique comme un produit intermédiaire résulte de la chaleur de combustion de ce corps. La différence entre les valeurs calorifiques du sucre et de l'acide lactique, d'une part, du suere et de l’anhydride carbonique plus l'alcool, d'autre part, est telle (comme l’a démontré déjà A. Wohl) | que la transformation de l'acide lactique en alcool 508 ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE et anhydride carbonique devrait s'effectuer avec une légère absorption de chaleur. En résumé, done : toute la quantité de chaleur produite par la décomposition du sucre dans la fermentation alcoolique et même un surplus se dégage déjà quand le sucre se transforme en acide lactique. A la suite de ces explications, il faut laisser tom- ber l'hypothèse qui ferait considérer l'acide lactique comme un produit intermédiaire de la fermentation alcoolique. Par contre, il devient très vraisemblable qu'une étape antérieure à l'acide lactique jouerait ce rôle de terme de passage : il s'agirait donc d’un corps qui, dans des circonstances données, pour- rait facilement se transformer en acide lactique, mais qui, généralement, se dédoublerait directe- on le voit dans la partie supérieure, par suite de l'élimination d’eau, un produit intermédiaire avec double liaison entre deux atomes de carbone, qui se transformerait en une forme cétonique; celle-ci subirait alors une scission, de même que l’aldol. D'après cette formule, il se produit une molécule d'aldéhyde pyruvique à côté d’une molécule d'aldé- hyde glycérique. Il est toutefois indifférent de con- naitre laquelle des trois substances antérieures à | l'acide lactique se forme en premier lieu, vu que, probablement, elles se transforment facilement l'une | dans l’autre : l’aldéhyde pyruvique, par réaction | inverse de son mode de formation, en aldéhyde glycérique, et celle-ci, par l'influence d'un alcali | dilué, comme dans la transformation du glucose en Tauceau IE — Décomposition du glucose, d’après A. Wodl. COOI COOH | CHON | COI > | CHONH CH | COOH Terme de passage. | COOII , tartrique. CHO | CHOH | | CHOH CH° coon CIE Re CooH Ac.oxalacétique. Ald. pyruvique. CHO Co | CH° CHO CHO | | CH CHS CHOH CH5 Butyrardol. C0 | CUS Ald. acétique. Ald. slycérique. CO CHO COH CHOH | | CH* CH°OH | | | CUOH CHONH CHOH | CHOI CH°OH | | CHOH CHOIT | CHOH Glucose. CHOT CHO | CHONH | CIFON Ald. glycérique. CON NaOH | —;- 10) CHO COOH | CHOH | CH Ac. | CHS Ald. pyruvique. CTEOH Dioxyacétone. lactique. ment en alcool et en anhydride carbonique. Parmi ces substances qui possèdent déjà les trois chainons carbonés, trois peuvent entrer en considération; ce sont: l'aldéhyde pyruvique, l'aldéhyde glycérique el la dioxyacétone. A. Wobhl à donné une explication théorique du processus par lequel ces substances pourraient peut-être dériver du glucose. Ce savant a fait remarquer que, d'après ses propres observa- tions, l'acide tartrique, sous l'influence des agents de déshydratation, se transforme à une très basse température, en passant par la forme énolique de l'acide oxalacétique, en cette dernière substance et que le dédoublement du butanolal en deux molé- cules d'aldéhyde acétique s'effectue avec une très grande facilité, deux réactions qui sont mises en formules dans le tableau I. D'après Wohl, la décomposilion du glucose s'explique très facilement, d'une manière analogue, comme le montre la partie inférieure du tableau. En premier lieu, il se produirait, toul à fait comme | fructose d'après Lobry de Bruyn et van Ekenstein, en dioxyacétone. Finalement, l’aldéhyde pyruvique en solution alcaline se change probablement sans difficulté en acide lactique. Ces réactions sont aussi indiquées sur le Lableau III. A la suite de ces considéralions, l'apparition de la glycérine, comme produit constant complémen- taire de la fermentation, mérite une plus haute importance, surtout depuis que nous l'avons lrou- vée dans la fermentation sans cellules avec un ren- dement supérieur (3 à 8 °/, du sucre) et sans aucun doute dérivant du sucre. La glycérine, substance contenant aussi trois chaïnons carbonés, peut se former entièrement par réduction de l'une quel- conque des trois substances antérieures à l'acide lactique. On a fait bon nombre d'expériences pour décider laquelle de ces trois substances isomères doit être considérée en première ligne comme produit inter- | médiaire de la fermentation. D'abord l'aldéhyde ED. BUCHNER LA FERMENTATION ALCOOLIQUE JU SUCRE 509 pyruvique est, contrairement aux deux autres substances, entraînable par la vapeur d'eau; nous avons opéré plusieurs fois une fermentation sans cellules dans le vide, à 30°, en condensant l'eau qui distillait. Dans le distillat, nous avons cherché avec la semicarbazide le corps en question, mais en vain. Il ne se forme done pas d'aldéhyde pyru- vique, même passagèrement. Les deux autres substances qui restent, à-dire l'aldéhyde glycérique et la dioxyacétone, se c'est- tant la dioxyacétone que les deux autres substances isomères sont maintenant faciles à préparer à l'état pur. Par là, la manière dont elles se comportent avec le suc de nous avons pu Comparer directement levure pressée et nous avons aussi fait des expé- riences avec de la levure vivante. Nous nous sommes servis de la méthode volumétrique très simple dans laquelle les liquides fermentescibles, additionnés d'un antiseptique, sont introduits dans un eudio- On peut alors évaluer le mètre sur le mercure, distinguent entre elles en ce que cette dernière | volume du gaz dégagé. TaBLEau IV. — Les aldéhydes pyruvique et glycérique et la dioxyacétone vis-à-vis du suc de levure pressée. NUMÉROS SUC DE LEVURE BASSE des expériences Origine Nature Produits a: Aldéhyde pyruvique Berlin. Me suc bouilli. Al déhyde pyruvique . Munich Aldéhyde glycérique Glucose (té. moin) . lee arr | Aldéhyde glycérique sans Berlin. suc bouilli. Berlin. Glucose LEE) À Aldéhyde glyc érique avec Street Glucose Péo) 4 Berlin. Aldéhyde glycérique Munich. Glucose (témoin) . sans ne Doi. } Gluee (témoin) = Munich. Dioxyacétone . Munich. Glucose (témoin) Dioxyacétone . . . Glucose (témoin) . avec — — Dioxyacétone . . Glucose (témoin) . Munich. uc bouilli. Munich. Dioxyacétone . Glucose (témoin) . Munich. 2 \ l \ ? \ l ne nur ioxyacétone . | } ) | ADDITION A EEE, (témoin (témoin) : CO? EN CENTIMÈTRES CUBES après EE °] 3 heures | 6 heures [24 heures| A la fin = KML CET > Re + > DN = WIN = Le 1 19 _ SNS SSS2SS CU nm an = substance est symétrique, tandis que l’aldéhyde glycérique présente un atome de carbone asymé- trique. L'aldéhyde glycérique, comme produit inter- médiaire de la décomposition du glucose, condui- rait probablement encore à la formation de l'acide lactique optiquement actif, tandis que, par la fer- mentation sans cellules, nous n'avons jamais rencontré que la modification racémique de cet acide. Ces déductions rendent probable que le pro- duit intermédiaire est un corps symétrique et que la dioxyacétone est la substance en question. Un autre moyen encore nous affermit dans notre Opinion. Grâce aux excellents travaux de Gabriel Bertrand et aux études systématiques de A. Wohl, Un grand nombre d'essais de ce genre ont été faits. Le tableau IV ne reproduit que les plus typiques qui sont, en outre, presque tous des moyennes de deux expériences parallèles concordantes,. Il a été nécessaire d'établir chaque fois, par une expérience spéciale, la grandeur de la fermentation spontanée du suc de levure pressée produite par le glyco- gène dont la proportion était variable avec chaque levure. Les expériences 1 et 2 prouvent que l’aldéhyde pyruvique, dans une solution à 1,4 °/,, non seule- ment ne fermente pas bien elle-même, mais qu'elle réduit encore la fermentation spontanée du suc. Comme le liquide se colore bientôt en jaune 510 ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE a ——— foncé par l'addition de cette substance, qu'ensuite apparaît un précipité brun jaunàtre et que, finale- ment, il se produit une coagulalion complète, il faut admettre une influence chimique de l'aldé- hyde sur les substances qui composent le suc de levure. Les expériences avec l’aldéhyde glycérique sont rapportées sous les numéros 3 à 6; elles ont donné un résultat positif ; mais la fermentation se produit lentement et n'est pas complète; enfin, après l'addition de suc bouilli, on réussit à faire bien fermenter 10 à 25 °/, du triose. Cependant, les quantités de gaz obtenues ne répondirent pas à celles qu'on trouva dans les expériences témoins, faites avec la même quantité de glucose. Les essais avec la dioxyacétone (n° 7 à 14 du tableau) ont démontré que cette substance fermente bien en solution à 2°/, avec du suc concentré quand on ajoute du sue bouilli ; on à réussi, dans les cas favorables, à faire fermenter 80 à 90 °/, de la substance. Outre la formation d'anhydride car- bonique, on a aussi prouvé l'apparition d'alcool. Le volume de gaz formé a atteint, dans plusieurs cas, le même volume que par l'addition d'une quantité égale de glucose. Le fait que des concen- trations plus élevées de dioxyacétone ne donnent plus d’anhydride carbonique doit ètre rapporté à une influence nuisible qu'aurait cette substance. La couleur brunâtre que prend le liquide après quelques jours et le précipité qui se forme en sont une preuve. Probablement une partie de la dioxya- cétone se transforme graduellement en aldéhyde glycérique et celle-ci fait naître les phénomènes mentionnés. Le temps limité dont je dispose ne me permet pas de m'étendre davantage ici sur d’autres expé- riences qui ont eu pour but le dosage analytique de la fermentation avec le suc de levure et le dosage volumétrique de la fermentation avec de la levure vivante; elles ont toutes donné le même résultat. L'extraordinaire puissance fermentescible de la dioxyacétone, comparativement aux deux autres termes de passage, atteignant, dans quelques essais, tout à fait la puissance du glucose, nous a fait accepter, pour démontrer le mécanisme de la décomposition du sucre, comme étant la plus pro- bable l'hypothèse que ce corps serait le produit intermédiaire. li faut mentionner ici que, d’après une commu- nication préliminaire, P. Boysen-Jensen aurait réussi à démontrer la formation de la dioxyacétone pendant la fermentation alcoolique du sucre. Mais celui qui connaît les qualités peu avantageuses de ce corps estimera qu'on doit attendre l'apparition de la communication détaillée pour apprécier l’exac- titude de cette observation. | IV Messieurs, permettez-moi, pour terminer, de tenter au moins de jeter un coup d'œil dans l’ate- lier où travaillent les agents de la fermentation alcoolique et de mettre en relation les phénomènes fermentatifs produits par la zymase avec les réac- tions des autres enzymes. Dans ses études importantes sur les oxydases, groupe d'enzymes dont le mode d'action peut être très facilement saisi et même reproduit par des procédés chimiques, G. Bertrand a dirigé l’atten- tion sur les prétendues impuretés ou substances minérales qui accompagnent les enzymes; par exemple, dans le cas de la laccase, la présence presque constante de manganèse. « Dans les oxy- dations effectuées par la laccase, il entre en jeu un système de deux substances complémentaires : l’une, représentée par le manganèse, suffit à pro- duire la réaction considérée et pourrait, à cause de cela, être appelée la complémentaire active (ou autrefois co-ferment); l’autre, de nature organique, altérable par la chaleur, est la complémentaire activante. » Il est vrai que maintenant d'autres oxydases ont été découvertes, qui ne contiennent pas de sels de manganèse ou de fer. Il devrait donc y avoir encore un autre moyen pour produire des réactions oxydantes dans les organismes. Mais celui qui repose sur l’aide des sels de manganèse est pourtant le plus compréhensible. Le voile cou- vrant le secret qui environne la subslance activante semble aussi se soulever. D'après les expériences faites par Euler et Bolin avec l’oxydase de edi- cago, il suffit déjà du mélange des sels de calcium de plusieurs acides organiques hydroxylés pour accélérer les phénomènes d’oxydation par les sels de manganèse. En toul cas, l'explication de ces effets les plus primitifs est si séduisante dans leur simplicité que Gabriel Bertrand invite avec pleine justice à examiner si de pareilles réflexions sont aussi possibles pour les actions des autres enzymes. Recherchons maintenant comment cette relation a lieu dans les enzymes de la fermentation alcoo- lique. D'abord, les expériences mentionnées prou- vent que, dans ce cas également, la séparation en deux substances complémentaires peut être effec- tuée, que la réaction disparait par cette séparation et que l'une des substances, contrairement à l’autre, est dialysable et supporte la cuisson. De quelle nature serait ici la complémentaire active? D'in- nombrables cas sont là pour prouver l'importance extraordinaire de la réaction chimique des solu- tions pour les enzymes. Indiquons seulement les travaux récents de A. Fernbach et J. Wolff. Il n'y a donc pas de doute que la réaction alcaline favo- rise la décomposition du sucre. ED. BUCHNER — LA FERMENTATION ALCOOLIQUE DU SUCRE 511 ———————_—— D'après nos expériences, l'addition de carbonate | qu'elle augmente Paction du manganése. Elle de potassium et de phosphate de sodium accélère sensiblement la fermentalion sans cellules, surtout si on ajoute encore du suc bouilli, pour compenser le dommage fait à la co-enzyme. Mais aussi sans enzyme la molécule de glucose est facilement altérable par la présence des alcalis. Qu'on se rap- pelle le changement du glucose en fructose el la décomposition graduelle qui se fait en formant l'acide lactique. D'après nos expériences, déjà à la température ordinaire, 10 grammes de glucose, dissous dans la lessive de potasse à 5 °/,, avaient presque complètement disparu après onze mois en donnant 15 °/, d'acide lactique et des traces d'alcool. Par contre, une solution de glucose, soi- gneusement stérilisée dans un tube scellé, s'est conservée pendant cinq ans. Le suc de levure pressée ainsi que le suc bouilli présentent une réaction faiblement acide. Contien- draient-ils passagèrement de l'aleali libre qui, par la formation d'acide carbonique, se lierait immé- diatement de nouveau ? Dans le suc de l'estomac, il se forme de l’acide chlorhydrique libre, et une espèce de limace, la Dalium yalea, élimine de l'acide sulfurique à 4 °/,. Les deux acides minéraux tirent leur origine pro- bablement du sel marin et du sulfate de calcium. Cela prouve que les substances protéiques peuvent scinder des sels neutres. Pourquoi ne seraient-elles pas une fois capables d'isoler des bases? De même que les acides aminés acquièrent, selon Soerensen, aprés la fixation du groupe aminé par l’aldéhyde formique, de fortes propriétés acides, ne pourraient-ils pas aussi une fois, vice versa, jouer le rôle de bases, après neutralisation du groupe carboxylique par éthérification ou par for- mation des peptides? Et ces bases pourraient alors agir elles-mêmes assez activement ou décomposeraient des sels neutres par la présence des ions hydroxylés. La grande influence pernicieuse des lipases montre le rôle que les substances de la nature des éthers-sels jouent dans la fermentation alcoolique. Pour redoubler l’activité de minimes quantités d'alcalis, la complémentaire activante pourrait aussi servir à la fermentation de la même manière donne à celui-ci, à cause de sa nature colloïdale, une grande capacité d'action en le répartissant sur une énorme surface, comme le suppose P. Thomas dans une étude nouvelle remarquable sur les enzymes. Jde me rends bien comple de la hardiesse de ces hypothèses et ne les considère nullement comme dé- montrées. «Le réel est étroit, le possible immense », dit Lamartine. J'espère cependant que ces hypo- thèses stimuleront les recherches de tous côtés el dans toutes les directions. Mais, admettant pour un moment que ces sup- positions dussent se confirmer, elles n'éclairciraient point encore tout le processus de la fermentation. La spécificité des enzymes de la fermentation reste encore entièrement à éclaircir, de même que le rôle joué par l'acide phosphorique, à l'explication duquel Harden et Young, L. Iwanoff et A. von Lebedew sont occupés. Il y aura bien une phase où il faudra accepter l'entrée en action d’une com- binaison du sucre avec un des agents fermentatifs, puisque, d'après Emil Fischer, les antipodes optiques réagissent différemment à la fermentation. Jusqu'ici, nous avons atteint la preuve que, dans la fermentation, il ne s'agit pas de fonctions vitales directes et que, pour celles-ci, la cellule de levure n'est plus nécessaire après la formation des agents, mais qu'une série d'enzymes prennent sa place. Comme l'a dit avec justesse E. Duclaux : les enzymes « ont détrôné la cellule ». Il reste encore à voir si l'espoir nourri par Claude Bernard et par Liebig se réalisera, c'est-à-dire si l’on parviendra, par l'explication des phénomènes de la fermen- tation, à expliquer aussi ceux des manifestations de la vie. Nous ne devrons pas nous étonner si de nouveaux problèmes, non résolus, surgissent de tous côtés. Avec autant de droit que Turgot, votre grand homme d'Etat, a dit : « Moins on sait, moins on doute », nous pouvons dire inversement : « Plus on sait, plus on doute; plus on a découvert, plus on voit ce qui reste à découvrir. » Ed. Buchner, Professeur de Chimie à l'Université de Breslau. 512 G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA L'Orient et l'Egypte — disions-nous en 1892 | avec laquelle on savait passer d’une figure à une dans nos « Lecons sur les origines de la Science | semblable par variation proportionnelle des dimen- grecque » — ont transmis aux Grecs un ensemble | sions; le papyrus de Rhind nous en avait déjà de connaissances praliques qui ont servi de base à leur science; mais celle-ci leur appartient bien véritablement par son caractère théorique et ra- tionnel. Il ne s'est pas fait depuis, à ma connais- sance, de découverte capable de changer l'esprit général de cette conclusion. Mais sur un point précis nous sommes mieux renseignés. S'il reste vrai — du moins nous continuons à le croire — que les Grecs ont donné à la mathématique sa forme rationnelle, la matière de cette mathéma- tique qui venait de l'Orient semble décidément avoir été plus riche qu'on ne le pensait jusqu'ici. D'une part, Moritz Cantor, en 1905, a appelé l'attention sur un fragment de papyrus qui venait d'être découvert à Kahun*, datant de la douzième dynastie, et qui mentionne les égalités suivantes : (ÿ-(9 Il n'y est pas explicitement question de la rela- tion qui lie les carrés de 4, de 3 et de 5, mais le document n'en est que plus significatif à cet égard, car on voit bien, sans aucun doute, que les nom- bres proviennent chaque fois de 4, 3, 5, par divi- sion ou multiplication proportionnelle, et l'absence d'une mention spéciale peut naturellement résulter, comme le pense Cantor, et quoique nous n’ayons ici en apparence que des relations arithmétiques, d'une connaissance courante et usuelle du fameux triangle. Nous savions déjà qu'en Chine cette con- naissance pouvait remonter au moins à mille ou onze cents ans avant J.-C. Nous ne pouvons guère douter désormais qu'elle n'ait appartenu aussi aux Égyptiens, comme Cantor l'avait soupconné, et depuis une époque beaucoup plus reculée encore. On en conclurait aisément, même sans documents supplémentaires, que tous les peuples d'Asie ont manié le triangle 3-4-5 dès la plus haute antiquité. Nous trouvons, en outre, confirmée ici la facilité 1 Extrait des premières lecons de mon cours de cette année : La pensée mathématique de Thalès à Euclide. 2 Archiv der Mathematik und Physik, 1905. avertis, mais il était moins ancien; le document nouveau importe surtout par sa date. IT En second lieu, on savait depuis longtemps, ne fñt-ce que par le travail de Thibaut”, que les vieux livres hindous consacrés à la construction des autels, les Sulvasutras, contenaient des informa- tions curieuses sur les connaissances géométriques de leurs auteurs, mais on persistait à ne pas leur attribuer une ancienneté très reculée et l’on avait une tendance à mettre sur le compte de l'influence grecque tout ce qu'on pouvait y trouver d'intéres- sant. Or, voici que M. Bürk* a publié il y a quel- ques années, sur les Sulrasutras d'Apastamba, une étude fort importante, d'où il résulterait : 4° que la rédaction de ce traité est certainement antérieure à la conquête d'Alexandre; 2% qu'une partie, au moins, des connaissances dont témoigne Apas- tamba remonte au delà du vu‘ siècle avant l'ère chrétienne. On s'est, en général, incliné devant ces conclusions, et Cantor lui-même, le plus chaud partisan de l'influence grecque, s'est rendu. Il semble bien alors qu'il faille accepter décidément qu'une certaine géométrie est née et s'est dévelop pée en Orient, indépendamment des travaux des Pythagoriciens, et même peut-être — nous y re- viendrons plus loin — antérieure à Pythagore. Et le traité d'Apastamba, qui peut nous donner une idée de cette géométrie, prend du coup, pour l'his- toire des Mathématiques, une importance considé- rable. Thibaut en avait traduit l'essentiel en 1875; Zeuthen * l'a résumé dans une étude qu'il a donnée au Congrès de Philosophie de Genève; Heath”, dans. ses Éléments d'Euclide, à propos de la proposi- tion 47 du livre I, présente un exposé bref, mais substantiel, du contenu du traité hindou et des. 1 Journal of the Asiatic Society of Bengal, 1875. 2 Zeitschrift der deutschen morgenländischen Gesell- schaft, années 1901 et 1902. # Théorème de Pythagore, origine de la Géométrie scien- tifique. Congrès international de Philosophie, Genève, 1914. 4 T. L. Heatn : The thirteen books of Euclid's Elements, 3 vol., 1908. Je ne saurais trop appeler l'attention sur l'ex- cellente publication de M. Heath. C'est en même temps que la traduction anglaise d'Euclide, d'après Heiberg, une précieuse encyclopédie relative à tous les problèmes philo- logiques, mathématiques, historiques, philosophiques, que soulèvent les Eléments. id G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA commentaires auxquels celui-ci donné lieu. Entin dans le travail de Bürk déjà signalé, la traduction complète des Sul vasutras d'Apastamba avec une série de notes expli- calives dues à d'anciens commentateurs hindous. Ce qu'il convient d'y relever d'abord, c’est l'em- ploi systémalique, dans diverses constructions, de triangles rectangles à côtés entiers, et, cette fois, non plus seulement du fameux triangle 3, 4, 5, ou «le triangles semblables (12, 16, 20 — 45, 20, 25), inais encore des triangles suivants : et surtout nous avons, 15, 36, 39 SAS, 12, 35, 37, (et 5, 12, 13) æ'est-à-dire en lout, abstraction faite de ceux qu'on peut en déduire par variation proportionnelle des côtés, de quatre triangles à côtés entiers. L'un, d'après les conclusions de Bürk, se présente comme très anciennement connu, et comme revêlant un caractère sacré, à savoir le triangle 15, 36, 39. Apaslamba croyait-il nommer les seuls triangles rectangles à côtés entiers? Il le semblerait d'après la façon dont il s'exprime, quoiqu'il paraisse peu probable qu'il n'eût pas su au moins faire corres- pondre à chacun d'eux tous ceux qui s’en dédui- sent par similitude. Mais, en tout cas, quand il fait abstraction de toute condition restrictive sur la nature particulière des côtés, il considère comme générale la relation qui existe entre les carrés des côtés d’un triangle rectangle. L'une des premières propositions qu'il énonce est, en effet, celle-ci : « Le carré construit sur la diagonale d’un rectangle est la somme des carrés construits séparément sur le plus long côté et sur le plus petit. » Et cette propo- sition est presque aussitôt suivie de celle que four- nit le rectangle à côtés égaux : « Le carré construit sur la diagonale d'un carré est le double de celui- «Ci. » Après quoi, en très peu de mots, Apastamba ändique pour la diagonale d’un carré la curieuse construction que voici : « Prolonger le côté de son tiers, celui-ci de son quart et retrancher le trente- quatrième de ce quart. » Ce qui donne, en fonction à A 1 1 du côté pris pour unité, la valeur 1 + 3 _ su Trade approximation très remarquable de 4/2. La règle est ensuite utilisée dans la construction rapide d’un carré de côté donné. Puis l’auteur en vient à des applications géné- rales du grand théorème : Former un carré égal à la somme de deux carrés donnés (ce qui, en parti- culier, conduit à construire 41/3 comme diagonale d'un rectangle de côtés à et 4/2), et construire un carré égal à la différence de deux carrés. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 513 Cela fait déjà un ensembl®imposant de propo- sitions porlant sur le théorème de Pythagore et ses applications, dont, il y à dix ans, on n'aurait ordi- nairement pas soupconné la connaissance au v° ou au 1v'° siècles chez d'autres que chez les Grecs. Elles se complètent par deux problèmes qui nous font nous élever plus haut encore. C'est d'abord la transformation d'un rectangle en carré (la transfor- malion inverse est essayée, mais non réalisée), el ensuite la transformation d'un carré en un plus grand, par prolongement du côté, ou la mise en évidence de la formule (a + b} = 4° + ° +9 ap. Ce n'est là qu'une partie du traité d'Apastamba. Il contient, en outre, des constructions de angles semblables à un rec- rectangle donné, des règles curieuses pour transformer un cercle en carré et réciproquement, etc. Mais, en somme, nous avons indiqué les propositions les plus impor- tantes, celles qui nous font atteindre le point eul- minant de la science hindoue, el qui posent vrai- ment la question de la valeur de cette science. I] nous faut revenir maintenant sur cet ensemble de connaissances et nous demander comment elles pouvaient être établies. Le traité d'Apastamba, tel que nous le présente la traduction de M. Bürk, ne ressemble en aucune façon aux Eléments d'Euclide. Il ne contient, pour chacune des propositions ou des problèmes suc- cessifs, que l'énoncé du théorème, ou celui des règles à suivre, des constructions à effectuer. Il arrive que ces énoncés ne sont accompagnés d'au- cune figure explicative. Quand une figure vient éclairer le texte, qu’elle appartienne à Apastamba lui-même, ou à quelque commentateur ancien, ou simplement au traducteur à qui elle est suggérée par le texte, ce n’est pas pour servir de support à une suite d'idées plus ou moins logique, compa- rable au contenu d’une démonstration euclidienne, mais pour mettre en évidence aux yeux du lecteur la vérité de la proposition à établir, pour que le lecteur la trouve exprimée par la figure, dans le langage direct de l'intuition spatiale. Ainsi les questions relatives au nombre d'unités carrées que représente l'aire d'un carré ou d'un rectangle, de côtés donnés, — plus généralement quantité de propositions ou de règles où interviennent des comparaisons de surfaces de triangles, de trapèzes, de rectangles, — ne demandent une justification qu'au procédé très simple qui consiste à décom- poser les figures ou parties de figures en petits carrés ou en petits rectangles, par deux séries de lignes parallèles, comme si l'on songeait chaque fois aux nombres de briques dont pourraient se recouvrir les surfaces à comparer. Il est naturel de penser avec Cantor, Zeuthen, Bürk, — et comme le soupconnaient déjà quelques anciens historiensdes 12* 514 G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA Mathématiques tels que Hankel et Allman, — que ce mode de démonstration intuitive est le seul auquel les Hindous aient eu recours. Peut-on, du moins, d'après cela, essayer d'expliquer leurs connaissances relatives au théorème de Pythagore? Très vraisemblablement, ils ont commencé par constater la propriété fondamentale sur quelques cas particuliers, et le ALES premier, comme le plus ASS simple, fut sans doute N celui qu'Apastamba in- s _ diquedansla cinquième proposition du chapi- FX tre 1, c'est-à-dire le cas S du triangle rectangle *S isocèle. L'énoncé (d’a- près lequel le construit sur la diago- nale d’un carré est le double de ce carré) est accompagné, dans la tra- duction de Bürk, d’une figure 1 due au traducteur, mais qui à bien des chances de rappeler celle de l’auteur lui-même, et qui rendait inutile tout raisonnement et tout commentaire. Il suffirait, d’ailleurs, de modifier légèrement cette figure, en doublant le côté du carré primitif, et en inscrivant dans le grand carré le carré de la diagonale, pour obtenir la démonstration intuitive que Platon fera mettre, par Socrate, sous les yeux de l’esclave, dans son dialogue du Menon (fig. 2). La vieille tradition se sera conservée jusque-là : en réalité, les Éléments d'Euclide eux-mêmes en auront gardé des traces nombreuses. in dehors de ce cas si simple, c’est très proba- blement le triangle 3-4-5 qui fut connu le premier. Les témoignages fort anciens recueillis en Chine et en Egypte, joints à la grande sim- plicité des nombres qui mesurent les cô- tés, en sont un gage suffisant. Faut-il croire que l’expé- rience seule intervint ici? Oui, sans doute, tout d’abord, et dans des temps extrême- ment reculés, des arpenteurs ou des ingénieurs, habitués, comme le montre Apastamba lui-même, à manier le cordeau et à fixer des piquets, purent s'apercevoir que le triangle 3-4-5 a deux côtés perpendiculaires l’un à l’autre. Mais les Sulvasu- ras donnent l'impression d'une culture un peu plus relevée; l’auteur, certainement, veut voir s'éta- carré Fig. 4. Fig. 2. ler à ses veux la proposition générale et abstraite ce d'après laquelle le carré construit sur 5 contient exactement les deux autres carrés construits sur et sur 4. Plusieurs hypothèses sont ici possibles; la plus vraisemblable me semble être celle que défend Zeuthen, et qui s'exprime dans la figure 3 : ABCD est le carré construit sur 7 unités de longueur; il comprend manifestement le carré construit sur 4, le carré construit sur 3, et deux rectangles de côtés 3 et 4. Mais, en regardant d'une autre ma- nière, on voit que le carré EFGII, formé par les diagonales de quatre rectangles 3, 4, laisse en dehors de lui-même leurs quatre moitiés, c’est-à- dire l'équivalent de deux rectangles; il représente donc la somme des carrés construils sur 3 et sur 4, et contient 9 16—95 petits carrés. Qu'on ne se hâle pas de juger ces vues trop savantes. Cantor, et après lui Zeuthen, ont appelé l'attention sur des figures qui, d'après Biot (Journal Asiatique, 181), se trouveraient dans le très vieux traité chinois où est mentionnée la propriété du triangle 3-4-5. « Dans les trois figures, dit Biot, dans une note de la page 601, on voit un grand carré divisé en 49 parties, dans lequel est inscrit un autre carré divisé en 23 parties. Ce second carré est divisé, dans la première figure, en 4 triangles rectangles, plus un carré intérieur; dans la seconde, il contient un carré de 9 parties: dans la troisième, il contient un carré de 16 parties. » Cette description est loin d'être claire. Mais il est impossible de ne pas rapprocher de la démonstra- tion précédente celle que le vieil auteur chinois voulait mettre en évidence avec ses trois figures. Et nous l’attribuerons plus volontiers encore aux Hindous, sinous songeons que ce mode de démons- tration, mème pour le théorème général, est resté : dans leurs traditions bien des siècles après que les Grecs avaient substitué leur mathématique ration- nelle à la géométrie intuitive des Orientaux. Cantor, en effet, mentionne chez Bhaskara (du G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA x siècle après d.-C.) la curieuse démonstration du théorème de Pythagore qu'offre la figure 4°. ABCD est le carré construit sur l'hypoténuse du triangle rectangle, lequel se trouve 4 fois reproduit. Bhas- kara se contente de demander au lecteur de regarder. A 8 Avec un peu d'atten- lion, celui-ci voit % demi-rectangles,ou 2 rectangles formés avec les côtés de l’an- gle droit, plus le carré construit sur la différence de ces cô- tés, ce que Bhaskara sait être égal à la Fig, 4. somme des carrés des deux côtés. Quoi qu'il en soit, les anciens Orientaux pas- saient-ils par une audacieuse induction de deux cas particulièrement simples à tous les triangles rec- langles? Apastamba eût été peut-être capable de montrer encore directement par quelque figure ingénieuse la propriété fondamentale de tel ou tel triangle rectangle. Mais peut-être aussi la possibi- lité de voir clair dans les deux cas privilégiés suffi- sait-elle, si l’on songe que l'expérience avait pu dès longtemps faire soupconner le théorème général par de simples mesures effectuées sur le terrain. Et dès lors les anciens Hindous, liant invariablement dans leur esprit la propriété géométrique et la relation numérique, avaient dù s’en remettre, pour la recherche des triangles à côtés entiers, à de faciles calculs d’arithmétique. Rien ne nous dit que ce ne soit pas ainsi, c'est-à-dire par le calcul des carrés des nombres entiers successifs, et par des essais d’addition conduisant encore à des carrés, qu'on était parvenu depuislongtemps aux quelques triangles mention- TZ 7 nés et utilisés dans 779 les Sulvasutras. 7 Peut-être aussi, cependant, est-il permis de penser ici à un autre genre de démonstration. Apastamba utilise plusieurs fois ce que les Grecs appelle- ront un ÿn0mOn, c'est-à-dire, quand il s'agit d'un carré, celte sorte d'équerre de macon qui entoure le carré primitif (fig. 5), lorsqu'on pro- longe son côté, comme le fait l’auteur hindou lui- même, pour se rendre compte de la manière dont 1 Vorlesungen, t. I, p. 656. 515 s'accroit le carré. Il paraît très vraisemblable comme l'ont indiqué, les premiers, Bretschneider e Treutlein", que c'est la génération des carrés par la superposilion des impairs successifs comme gno mons qui conduira Pythagore et Plalon aux for mules générales donnant des triangles rectangles à côtés entiers. Nous savons, en effet, par Proclus quelles sont ces solutions. Celle de Pythagore peut s'écrire : n élant impair; celle de Platon : 2n, n°—1, n°+1i. On tombe aisément sur la première solution, si, considérant un carré qu'entoure un gnomon impair, on exige que cet impair soit un carré, # ; le côté ARE : n° —1 du carré primitif était alors —> 1° 4-1 > y » el le côté du carré résullant est . Le carré construit sur n° +1 9 = apparait manifestement comme la somme de »°et de =)" Quant à la solution attribuée à Platon, on l’obtiendra en composant le gnomon de deux nombres impairs consécutifs, dont la somme soit un carré. Il ne saurait assurément être question d'attribuer à l’auteur des Sulvasutras rien qui ressemble à ces formules toutes générales. Mais pourquoi ici, comme parfois ailleurs, les Grecs n'auraient-ils pas seulement généralisé, par des méthodes plus abs- traites, ce que les Orientaux auraient très bien pu constater dans quelques cas particuliers? Soit un carré de côté 4 (fig. 6). Apastamba sait que, s’il prolonge le côté de 1, le carré s'augmente du gno- mon 4 X 2 + 1, c'est-à-dire 9 ou 3°. Il sait aussi, ou plutôt il voit alors sur sa figure, que le carré agrandi n'est autre que le carré de 5. Ce qui est une vue intui- tive directe de la relation arithmétique : 5° = 3 +4. Après 9,le premier im- pair carré est 25. C'est au- tour du carré de côté 12 (car) 25 —12X 2 +1) que nous devons le disposer en gnomon, si nous voulons une relalion analogue à la précédente. Comme le côté du carré agrandi est alors 13, la figure nous donne immédiatement l'égalité 143 = 1% + 5°. C'est le triangle 5, 12, 43, a Fig. ‘ Voir dans Heath, L. 1, p. 356-360, l'historique complet de la question. 516 Cr. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA ou, — si nous multiplions tous les côtés par 3, — 15, 36, 39, c'est-à-dire justement, qu'on le remar- que, le triangle que Bürk nous désigne comme connu bien antérieurement à la rédaction d'Apas- tamba. Et cette rencontre me semble significative. Les deux autres exemples cités dans les Sulvasu- tras (8, 15, 17 et 192, 35, 37) auraient-ils été trouvés sur des figures formées par les carrés de 15 et de 35, entourés chacun d'un gnomon double (31 + 33 — 64, pour l’un, et pour l’autre 71 + 73 — 144) selon une construction qui sera généralisée plus lard ? Ou faut-il s'en remettre à deux essais heureux de caleul numérique ? Ce qui est hors de doute en tout cas, c'est que le traité hindou ne porte la trace d'aucune méthode régulière ni d'aucune formule générale quelconque pour la découverte de pareils triangles à côtés entiers. C'est certainement lâtonnant, soit dans les calculs, soit dans la cons- truction des figures, que les Orientaux avaient trouvé les quelques triangles qu'ils utilisaient pré- en cieusement. III Que faut-il penser, d'autre part, de la valeur don- née pour la diagonale ou, si l'on veut, pour V2? On « essayé assez souvent de reconstituer un procédé de calcul qui pût conduire à cette expression, et lon a abouti chaque fois à une suite d'opérations analogues à celles que les Grecs, du temps de Héron tout au moins, savaient effectuer, ou même ressem- blant à celles que nous effectuons aujourd'hui pour Vextraction de la racine carrée. Mais, quand ce n'était pas trop rajeunir la rédaction des Sulvasutras et s’en remettre à l'influence grecque, n'était-ce pas attribuer gratuitement aux anciens Hindous une technique numérique trop subtile et trop savante?” Avec Heath, je préfère l'explication que Thibaut donnait déjà il y a trente-cinq ans, et qui est la suivante : Quand le côté d'un carré est 4, le carré de la diagonale est 2; quand le côté est 2, le carré de Ja diagonale est 8, etc. On essayait de continuer ainsi jusqu'à ce qu'on trouvät pour ce dernier nombre un carré : cela arrive à très peu près lorsqu'on essaie le côté 12, car le carré de la dia- gonale est alors 144 X 2— 288, et 289 est le carré de 17. Or, d'après la manière mème dont Apastamba parle de l'agrandissement d’un carré, on passe du earré 289 au carré 288 en diminuant le premier d'un ! Léon Rodet, par exemple, qui ne s'était pas mépris sur la date des Sulyasutras, reconstitue ainsi le procédé. Après chaque élément trouvé pour la racine, on divise le reste par le double de la partie déjà obtenue ou par le double plus 1. Dans le premier cas, on a une valeur approchée par défaut, dans le second, par excès. (Bulletin de la Société mathéma- tique de France, tome V : Sur une méthode d'approximation des racines carrées connue dans l'Inde, antérieurement à la conquéle d'Alexandre.) gnomon de valeur1, lequel, si l'on néglige un tout - : dues 1 : pelit carré, a pour épaisseur DA En d’autres termes, le côté du carré 288, ou la diagonale du carré de 1 ou Il suffit, pour passer de ce ré- sultat à la valeur de la diagonale du carré de côté 1, de le diviser par 12, et comme on peut côté 12, est 17 de 1 l'écrire 1244 +41— 37 la valeur cherchée est 1 Il l 1 + 3 +- 3x 343%" La substitution à des nom- bres donnés de nombres plus commodes, puis, à la fin, la variation proportionnelle desrésultats, c'est-à- dire, en somme, la méthode « de fausse position », qui subsistera si longtemps dans tous les traités arithmétiques du Moyen-Age, se trouvait déjà, comme l’a remarqué Rodet, employée couramment dans le papyrus d'Ahmès. Elle implique un certain sentiment de la similitude qui doit être aussi ancien que les premiers lätonnements de la pensée hu- maine, et n'a rien pour nous surprendre. Du moins, l’auteur des Sulvasuiras se rend-il compte de la non-exactitude rigoureuse de son expression? Ce qu'on peut assurer, c'est qu'il n'en est pas gêné. C'est au point qu'à la place de cons- tructions géométriques qui supprimeraient à cet égard toute difficulté, il conseille de s'en servir pour la construction de triangles rectangles. A plus forte raison ne parait-il pas troublé par la grave question que soulève le problème auquel il s’est attaqué : Existe-t-il des procédés qui, au besoin avec de la patience, feraient parvenir à une expres- sion rigoureusement exacte de la diagonale? La question n'est même pas posée. IN Enfin, pour en venir au problème le plus savant, à coup sûr, parmi tous ceux auxquels D (Ce touchent les Sulva- sutras, la transfor- H . ; Lr----- ne de mation d'un rec- : tangle en carré est | ce : E traitée comme il Kr---- suit. (Je traduis à , très peu près Bürk, ; ; qui lui-mêmeparla ; TE figure, les lettres et ! quelques additions indispensables de mots ne fait qué- clairer le texte.) « Soit à transfor- e mer le rectangle ABCD en un carré G. MILHAUD — ‘LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA porté le petit côté sur le plus long, en AF, retran- chons du rectangle le carré ABEF, et partageons en deux parties égales par la ligne GI le rectangle qui reste, FECD. Ajoutons ces parties au carré ABEF le long des côtés EF et AF, puis remplissons l’es- pace vide versle sommet F par l'addition d'un mor- ceau (le carré KFHL). La soustraction de ce mor- ceau est chose que l’on sait faire". » L'auteur hindou à déjà montré, en effet, qu'on peut aisément construire un carré qui soit la difré- rence entre deux carrés donnés par simple appli- cation du théorème général sur le carré de la diagonale d’un rectangle. Dèslors, ses derniers mots signifient : Construisons, comme nous savons le faire, un carré qui soit la différence entre le grand carré LGBJ et le petit carré LHFK. En d'autres termes, on peut dire que pour transformer le rectangle en carré, il en dispose la surface sous la forme d’un gnomon (x 8 y). \ A ces indications, qui sont loin, nous l'avons dit, d'épuiser la matière du traité hindou, mais qui peu- vent donner une idée suffisante de la science qu'il suppose, nous voudrionsajouter quelquesréflexions, d'une part pour marquer la distance où il est de la Géométrie grecque, et d'autre part pour noter toute l'importance de son contenu. Lorsque, au vi° siècle, commencent vraiment les travaux originaux des Grecsen Mathématiques, c'est une mélhode nouvelle qui se trouve inaugurée, celle même que nous pouvons connaitre par la lecture d'Euclide. Car noussavons bien aujourd’hui que les Éléments représentent en réalité l'effort de trois siècles de recherches, et qu'ils ont été consti- tués, tant pour la forme que pour la matière, par une série continue de géomètres qui remonte jusqu'à Pythagore. Les fragments les plus anciens, quelques démonstrations attribuées aux Pythagoriciens, un fragment d'Hippocrate de Chios, un autre d’Archytas, pour ne citer que les principaux, ne permettent pas de douter que, du premier coup, la méthode des démonstrations n'ait été arrêtée dans sa forme essentielle. Or, ce qui la caractérise, c’est la ten- dance à imprégner de logique la pensée mathéma- tique, à substituer le plus possible les concepts définis aux images concrètes et sensibles, à tâcher de constituer des raisonnements indépendants de l'intuition. Les résultats furent de deux sortes (et c'est là, me semble-t-il, le sens des remarques de Zeuthen ?). D'unepart, impossibilité de rien énoncer qui ne fût rigoureusement exact. (Nous serons loin ! Articles cités, année 1902, p. 333. : ? Congrès de Genève, p. 835. 017 avec les Grecs des constructions approchées d'Apas- tamba, telles, par exemple, que celle qui résouL à ses yeux le problème de la quadralure du cercle). D'autre part, possibilité d'élargir d'un coup et déme- surément le champ de la connaissance malhé malique par la généralité à laquelle il est permis d'atteindre, par la brusque extension, au delà des limites de l'intuition sensible, des vérités que concoit et élablit la raison. J'aicité, chemin faisant, les formules fameuses de Pythagore et de Platon donnant d'un coup des séries infinies de triangles rectangles à côtés entiers, à la place des quatre exemples soigneusement conservés el utilisés par les Orientaux. Je voudrais insister encore, pour m'en tenir à l'origine même de la mathématique grecque, sur les deux l'unanimité des témoignages attribue à Pythagore : celui qui, dans l'histoire de la science, porte préci- sément son nom, et celui qui pose l’incommensu- rabilité de la diagonale et du côté du carré. Pour le premier, qu'Apastamba énonce vraisem- blablement sous la suggestion de l'expérience, ou peut-être par une induction hardie fondée sur quel- ques cas simples, nous ne pouvons dire avec certi- tude quelle fut la démonstration de caractère général que toutel’Antiquité a attribuée à Pythagore- Nous avons le choix entre un genre de preuve mettant plus ou moins en évidence sur une figure, par comparaison de surfaces, l'équivalence d'un carré à la somme des deux autres, et, d'autre part, une preuve fondée surla considérationdes triangles semblables et sur les propriétés des proportions. Celle que donne Euclide à la fin du premier livre des Eléments rentre dans le premier genre ; mais précisément nous savons par Proclus qu'elle est due à l’auteur des Eléments lui-même. Pourquoi donc, puisqu'il existait depuis Pytha- gore une démonstration connue et probablement devenue classique, pourquoi donc Euclide voulut-il y substituer la sienne? Paul Tannery, le premier, je crois, a appelé l'attention sur l'importance de ce détail et en a donné une explication que la plupart des historiens semblent adopter aujourd'hui. La découverte des incommensurables, arrêter sans doute la spéculation des géomètres sur les rapports et proportions, avait pourtant fait naitre dans l'esprit des mathématiciens, — de ceux parti- culièrement qui se préoccupèrent de présenter la suite des vérités mathématiques avec une rigueur logique qui défiât toute objection, — le soucinaturel d'éviter dans les raisonnements l'écueil de l’incom- mensurabilité. Eudoxe, contemporain de Platon, conçut dans ce dessein une théorie qui supprimait désormais toute difficulté : c'est celle qu'expese Euclide dans lelivre V. Si simple qu'elle fût, elle se présentait comme relativement savante, et, dans La théorèmes fameux que sans 518 G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA pensée de l’auteur des Eléments, ne devait intervenir qu'après les quatre premiers livres. (Exactement comme, aujourd'hui même, quoique les théories sur les nombres irrationnelsaient depuisun certain temps pénétré dans l’enseignement, on ne songerait pourtant pas à les introduire dans les premières lecons d’arithmétique qui s’adresseraient à des débutants.) Dès lors, il fallait faire disparaître de l'exposé et des démonstrations des propriétés élémentaires des polygones et des cercles toute allu- sion à la notion de rapport, et mettre son ingénio- sité à y suppléer par des procédés différents. C'est là déjà une forte présomption pour que la preuve pythagoricienne, qu'on a voulu remplacer par une nouvelle, reposât sur les rapports et proportions. Heath en suggère une seconde, qui à sa valeur. Le raisonnement d’Euclide consiste à montrer que chacun des carrés construits sur les côtés de l'angle droitestéquivalent au rectangle forméavecl'hypoté- nuse et la projection sur celle-ci du côté de l'angle droit. Or, c'est exactement ainsi que procède la démonstration fondée sur les triangles semblables, de sorte que, dans l'hypothèse que celle-ci remonte aux Pythagoriciens, Euclide n'avait qu'à la repren- dre, en suivre le plan, et modifier seulement la manière de montrer l'équivalence de chaque carré au rectangle correspondant. Enfin, cette hypothèse est confirmée par tout ce que nous savons de l’ardeur avec laquelle les Pytha- goriciens ont étudié el manié les proportions, par lesquelles surtout ils voyaient s'établir un lien étroit entre l’Arithmétique d’une part, et, d'autre part, la Géométrie et la Musique. Bref, en l'absence de tout témoignage direct, il est extrêmement probable, peut-on dire au moins, que les premiers géomètres grecs ont d’un coup sub- stitué aux tâtonnements des Orientaux, sur une question qui se posait à eux depuis si longtemps, la démonstration si simple, si claire et si aisée que nous donnons nous-mêmes, en quelques mots, par la considération des triangles semblables, du théorème de Pythagore. A Pythagore également, c’est-à-dire aux toutes premières démarches de la Mathématique grecque, est attribuée par une tradition unanime la décou- verte de l’incommensurabilité de la diagonale et du côté. On sent ici tout particulièrement quelle était l'impuissance de l'expérience ou de l'intuition isolée : il aurait fallu qu'on püt les étendre à l'in- fini pour oser affirmer en leur nom que non seule- ment aucune partie aliquote de la diagonale jus- qu'ici essayée n’est contenue un nombre exact de fois dans le côté, mais encore qu'aucune autre ne le sera jamais. Et c'est pourquoi les Orientaux, \paslamba lui-même, ne se sont jamais élevés jus- qu'à cette idée qu'il est des grandeurs dont l’une ne peut servir à mesurer les autres. La méthode rationnelle et logique des Grecs, dès ses premières applications, les conduisait à dépasser par la notion de l’incommensurabilité toutes les vues mathéma- tiques de l'Égypte et de l'Orient. Et, si nous en croyons une information d'Aristote, la démonstra- tion avait atteint du premier coup la simplicité de celle par laquelle nous prouvons nous-mêmes qu'aucune fraction ne peut avoir 2 pour carré. Je ne parle que de l'œuvre initiale des géomètres grecs : comment ne pas rappeler au moins que, de Pythagore à Apollonius, trois cents ans suffirent pour élever l'édifice colossal de la Mathématique ancienne sur les quelques matériaux qu'avaient péniblement accumulés, pendant tant de siècles, les Orientaux et les Égyptiens? VI Mais pourtant, — et c'est le dernier point sur lequel je veux présenter quelques remarques, — ces matériaux étaient décidément plus importants et plus riches qu'on ne le soupconnait encore géné- ralement il va une dizaine d'années. Quoique les Sulvasutras d’Apastamba aient été écrits cent ou cent cinquante ans après que vivait Pythagore, il est fort douteux, nous l'avons déjà dit, qu'ils se ressentent de l'influence grecque. Faut-il admettre qu'il y ait eu séparément dans l'Inde et en Grande Grèce développements simul- tanés et parallèles de la Géométrie? Tel n’est pas mon sentiment. Si nous devons penser désormais que les connaissances dont témoigne le traité hindou ne venaient pas des Grecs, il n’y a plus de raison pour les dater du temps où écrivait Apas- tamba, et pour ne pas admettre que ces connais- sances étaient déjà anciennes, sinon toujours dans l'Inde, au moins quelque part en Orient ou en Égypte, où Cantor nous a montré, deux mille ans avant J.-C., la mention de triangles se déduisant par similitude du triangle 3-4-5. Le même Cantor, d'ailleurs, a suffisamment justifié — comme essayait déjà de le faire Bailly, pour son hypo- thèse du peuple primitif disparu, mais avec beau- coup plus de documents positifs — des communi- calions fort anciennes, sur le terrain scientifique, entre Égyptiens, Chaldéens, Hindous et Chinois. D'Égypte le passage en Ionie et en Grande Grèce nous paraît naturel, et nous comprenons mieux que l'œuvre des Pythagoriciens se présente comme la suite des travaux que le traité d'Apastamba lui- même nous aide à connaître. Reste à faire voir alors quelle idée nouvelle et désormais plus exacte il nous donne de l'héritage transmis par l'Orient à la Grèce, et le mieux pour cela est de montrer en germe, dans les richesses qu'il contient, quelques- G. MILHAUD — LA GÉOMÉTRIE D'APASTAMBA des idées directrices fondamentales de la Mathématique future. Il est d’abord fort intéressant de constater que le premier effort de Pythagore et de ses disciples ait eu pour objet de reprendre, en la fondant assuré- ment sur de nouvelles bases, ce qu'on peut appeler la géométrie du triangle rectangle, qui formait déjà le fond essentiel du traité hindou. Établissement rigoureux du théorème sur la relation qui unit les carrés des côtés, — formules générales pour la recherche des triangles à côtés entiers, — démons- tration de l'irrationalité de la diagonale, — tels sont les premiers résultats fondamentaux qui constituent comme le noyau autour duquel se déve- loppera la Mathématique grecque. Le souvenir de ce rôle historique joué par le théorème de Pythagore se retrouve dans les Élé- ments, où, selon la remarque de Proclus, tout le premier livre semble converger vers la démonstra- unes A C B D tion de ce théorème, qui dominera d’ailleurs toute la suite. Mais ce n’est pas le seul rapprochement avec les origines de la Géométrie que suggère la lecture d'Euclide. Ouvrons le second livre et qu'y trouvons-nous? Une série de propositions algébri- ques exprimées pour la plupart dans le langage intuitif d'une figure qui rappelle celles d’Apastamba. La plus simple de ces propositions est l'égalité (a+ b} = + 17 +2ab, présentée de la manière même dont l’auteur hindou montrait l’agrandisse- ment d'un carré. Moins simples, plus savantes, mais non moins intéressantes du point de vue où nous nous placons (on le verra bientôt), sont les propositions 5 et 6 de ce livre second : Étant donnée une droite AB dont le milieu est G, si D est un autre point quel- conque de AB, le rectangle de côté AD, BD, est égal à la différence des carrés construits sur CB et sur CD. Pour être plus précis et plus clair, bornons-nous au cas (prop. 6) où D est extérieur au segment AB. La démonstration se fait sur la figure 8, où le rec- tangle AD X BD, est aisément remplacé par le gnomon «By, et où il est alors manifeste que le rectangle en question est la différence des deux carrés de l'énoncé. 519 Qu'on se reporte à la construction d'Apastamba qui permettait de transformer un rectangle en carré: on sera frappé non pas seulement de la ressem blance, mais de l'identité des idées, Or, que l'on y prenne garde: cette construction est celle qui donnerait pour Euclide la résolution de l'équation du second degré. Paul Tannery, le premier, a forte- ment appelé l'attention sur ce point. D'ailleurs Suclide lui-même, dans les data, reprend la ques- tion en l’'énoncant autrement, et en demandant de trouver deux longueurs dont on connait l'aire du rectangle qu'elles forment, en même temps que leur somme ou leur différence (ce serait ici la diffé- rence AD-BD). L'aire du rectangle étant donnée par celle d’un carré /”, la longueur AB étant a, et x dési- gnant BD, l'équation du problème est ax + x? = hi. C'est donc en réalité la solution géométrique du problème équivalent à la résolution de l'équation du second degré qui sortira tout naturellementavec les Grecs de la construction d'Apastamba. Et c'est même, peut-on dire, notre résolution actuelle de l'équation, car (Zeuthen l'a observé depuis long- temps) la construction d'Euclide (et celle d'Apas- tamba par conséquent) met en évidence ce que montre aussi notre caleul, àsavoir, que le rectangle AD X BD, ou la quantité ax + x°, doit être mis d'abord sous la forme d’un gnomon ou différence de deux carrés : Enfin, le théorème euclidien peut être considéré comme un cas particulier et particulièrement simple d'un problème qui sera traité d'une facon plus générale au VT livre: je veux parler du fameux problème de l'application des aires. Il s'agira de construire sur une droite donnée un parallélo- gramme d’aire connue et présentant en excès ou en défaut un parallélogramme semblable à un paral- léllogramme donné. Le cas particulier est celui où le parallélogramme est un rectangle, et où le paral- lélogramme en excèsou en défaut doit être un carré, La figure 8 correspond à l'application avec excès, ou en hyperbole, et donne immédiatement la solu- tion du problème, c'est-à-dire l’inconnue BD, ou, ce qui revient au même, l'inconnue CD, comme côté d'un carré égal à la somme du carré construit sur CB et du carré équivalent à l'aire du rectangle ou du gnomon. Mais de bonne heure, on le sait, peut-être au temps de Platon, ces problèmes de l'application des aires, que Proclus, d'après Eudème, déclare remonter aux Pythagoriciens, recurent une signifi- cation nouvelle, en apportant les caractéristiques 520 COMMANDANT JEAN RONCAGLI — LA PRIME RATIONNELLE A LA NAVIGATION quantitatives des sections du cône. Si donc on se rappelle la fameuse construction d'Apastamba, et son idée de la transformation d'un rectangle en gnomon, il est permis de dire que de ce germe, se développant continûment de Pythagore à Apollo- nius, sortira toute la théorie des sections coniques elle-même. VII Ces remarques pourraient se prolonger. Elles suffisent, me semble-t-il, pour montrer ce qu'il y avait de riche et de fécond dans les matériaux que les géomètres orientaux avaient transmisaux Grecs, et tout ce qu'il y avait de préformé, si l’on peut dire, comme par instinct, dans l’ébauche d'où la pensée hellène allait faire sortir la rationnelle. En même temps se dégage de semblables leçons de l’histoire, plus peut-être (ou en tout cas d’une manière plusdirecte) que desapplications heureuses réservées aux spéculations des géomètres, le sen- tüiment que la spontanéité et le libre élan des science conceptions mathématiques laissent pourtant sub- sister, sous la variété des formes, une matière fon- damentale, une sorte de courant continu qui en ait l’objectivité. Quand l’ancienne étude des cont- ques permettra un jour de fonder l'Astronomie moderne et la Mécanique céleste, Képler et Newton prouveront à leur manière qu'Apollonius et ses prédécesseurs ne devaient tout de même pas se livrer uniquement à un jeu élégant et subtil; mais peut-être plus fortement encore ce sentiment nous sera-t-il suggéré par la permanence de l’objet qui, à travers les algorithmes différents, caractérise une chaîne continue de travaux, depuis, par exemple, les tâätonnements, vieux de quatre mille ans, sur le carré de l'hypoténuse d’un triangle rectangle, ou depuis l'idée géométrique du gnomon hindou, jusqu’à la solution moderne de tous les problèmes géométriques et algébriques qui dépendent du second degré. G. Milhaud, Professeur à l'Université de Paris LA PRIME RATIONNELLE À LA NAVIGATION La protection de la marine marchande est devenue de nos jours une des questions qui inté- ressent le plus les nations maritimes. Les appli- cations multiformes du progrès scientifique à la navigation, la lutte acharnée des peuples pour le domaine colonial des pays d'exploitation, ont amené une vraie révolution dans l'économie des transports par voie de mer. La concurrence des pavillons devient de jour en jour plus intense; des nations entières telles que l'Allemagne, n’ayant presque pas d'histoire maritime, ont lancé, d'une facon résolue, des flottes ultra-puissantes sur les océans; une vraie stratégie commerciale vient d'être inaugurée et réclame toute l'attention des savants, des hommes d'Etat et des entrepreneurs maritimes en général. L'époque de la véritable liberté de la mer et du commerce maritime semble être close à jamais, car, si la voie maritime demeure libre dans le strict sens de l'accessibilité aux navires de toute nation, par contre la tendance vers la forme hégémonique d'exploitation de cette voie devient de plus en plus accentuée. D'une pareille situation ressort la nécessité de la protection de l'Etat. Les formes de la protection, ou plutôt les diffé- rentes expériences qui ont été faites jusqu à pré- sent chez les principales nations maritimes sont assez connues. [l n'est donc pas nécessaire de les rappeler dans cet article. Notre but n’est nullement de tracer l’histoire de cette branche de l’activité économique des nations civilisées, mais unique- ment d'exposer une théorie générale, concernant une forme de protection maritime dont l’appli- cation pourrait amener à une solution rationnelle du problème, au double point de vue des intérêts de l'Etat et de l'industrie des transports. En Italie, comme en France, la prime à la navi- gation n'eut jamais d'autre base que la jauge et le parcours. La contribution payée par l'Etat n'étant d'aucune manière liée à des conditions de trafie réel, elle n'eut presque d'autre résultat que celui d'encourager deux spéculations également étran- gères à l'intérêt général du commerce maritime, sinon en opposition avec cet intérêt même. L'exploi- tation des vieux navires poussée à la dernière limite possible, la navigation sur lest ou à peu près trouvèrent, dans la prime à la navigation, leur plus grande protectrice. Tout armateur pou- vant disposer de quelques dizaines de mille francs découvrait toujours sur le marché international la vieille carcasse qui lui convenait, pour la lancer, à des frais fort modestes, à la conquête de la prime. Trouverait-elle de la cargaison dans quelque port? COMMANDANT JEAN RONCAGLI — LA PRIME RATIONNELLE A LA NAVIGATION 321 —————————.—————— “a : — Tant mieux. N'en trouverait-elle pas? Peu importe, car la prime n'avait rien à voir à cela. Ce qu'il lui fallait, c'était des milles et des milles de navi- gation : l'industrie des transports maritimes res- semblait aux régates, sans relation avec le véri- table commerce maritime. La prime à la jauge et au parcours payait largement le capital, et per- mettait à la spéculation de se développer à l'abri de tout risque : à quoi bon, donc, se préoccuper du commerce, lutter pour gagner du fret? Telles étant les conséquences de cette forme de protection, on ne tarda pas à s’apercevoir de l'erreur, et à comprendre qu'il fallait subordonner tout octroi de prime à des conditions de trafic réel. La jauge et le parcours ne regardant que le phénomène technique de la navigation, il était nécessaire de leur associer un troisième élément, pour qu'il fût possible de considérer — au point de vue de la prime — le phénomène économique du transport qui s'accomplit par la navigation. Le lancement de cette nouvelle idée éveilla tout d'abord l'opposition de la spéculation, qui se sentit menacée; en même temps, un certain sceplicisme en salua l'entrée dans le monde des études. Tout en admettant que l’idée était excellente, on doutait fort de la possibilité de l'appliquer. La question se présentait sous une forme tellement compliquée, qu'il était impossible d'en entrevoir une solution pratique satisfaisante. Les variétés innombrables de la cargaison et du fret, celles des principes mêmes d'application de ce dernier (poids, volume, valeur, ete.) semblaient justifier à tel point le scep- ticisme que l'idée parut devoir être abandonnée dès sa naissance. Mais ses quelques apôtres ne perdirent point courage. Il s'agissait de trouver un moyen rationnel d'évaluation uniforme du transport maritime, au double point de vue du navire et de la cargaison ; de découvrir, en d’autres termes, l'unité de mesure, par rapport à laquelle toute comparaison entre les transports les plus différents deviendrait possible. IT La méthode que je vais avoir l'honneur d'exposer aux lecteurs de la Aevue générale des Sciences est le résultat d'une orientation tout à fait inédite de l'étude du phénomène économique du transport maritime. Elle se fonde sur la nécessité de remonter aux origines du phénomène, c'est-à-dire aux con- ditions nécessaires à sa production. Tant que nous nous bornons à examiner le transport maritime au point de vue des résultats tangibles auxquels il donne lieu, tels que la qualité et la quantité des choses transportées, aucune voie ne se présente pour nous amener à la sortie du labyrinthe. Au contraire, si nous remontons à l'étude des condi tions auxquelles je viens de faire allusion, la solu tion générale du problème se présente rmmédiate ment et sous une forme aussi simple el aussi naturelle que l'on peut désirer. Les conditions génétiques du phénomène du transport ne sont en substance que deux. La pre mière est que l'armateur soit en mesure d'engager dans son industrie une certaine somme d'énergies de différente nature, morales et matérielles (science, intelligence, prévoyance, activilé, ete., et surtout moyens financiers). La deuxième consiste en ce que l'emploi de cette somme d'énergie soit dûment récompensé. Les deux conditions sont intimement liées, car tout emploi industriel d'énergie appelle une rémunération assurée, ou du moins très pro- bable. Dans le champ des transports maritimes, comme d'ailleurs partout où il s'agit d'entreprise tendant à un gain, la partie impondérable de l'énergie employée, c'est-à-dire la somme des fac- teurs moraux, exerce une grande influence sur les résultats, car il est évident que la même somme de moyens matériels peut amener des résultats bien différents, suivant l'utilisation qu'on en sait faire. Une fois cette vérité admise, si nous appelons ellort de tralic le rapport entre les dépenses et les recettes de l'exercice industriel du transport mari- : 3 DAS ; D time, la comparaison entre différents « efforts » É caractérisant différents exercices, devient possible et nous permet d'apprécier d'une façon uniforme la relativité des différents effets produits, ce qui ne serait nullement possiblesi l'on opérait directement sur ces effets, comme je disais tout à l'heure. Cela lient à ce que le rapport susdit exprime en réalité le prix payé par l'armateur pour produire l'unité de recette brute. Voici comment on peut démontrer cette vérité et parvenir à déterminer l'unité d'effort : Tout navire possède une certaine capacité de transport, que l’on appelle portée si on l’évalue d’après le poids, Jaugeage net lorsque cette évalua- lion se fait d'après le volume. Si nous appelons C la capacité de transport, quel qu'en soit le moyen d'appréciation, S la dépense journalière due à l'exercice de la navigation, /out compris (c'est-à-dire la dépense totale de l'année, partagée d’une manière uniforme sur chaque jour de navigation effective), y la vitesse normale de navigalion (par heure), le rapport : S 24 Cv représente le « prix unitaire de production du trans- port », base principale du fret unitaire. Ce prix est indépendant de la csrgaison, car il demeure inva- 522 riable pour chaque navire, quelles que soient la nature et la quantité des objets embarqués. Q Si Q est la cargaison prise à bord, le rapport Û mous dit quelle fraction de l'unité de capacité a été utilisée par le transport de la cargaison Q. Nous appellerons ce rapport index de cargo. Le rapport : SO S 24 Cr: û nous dit à son tour combien a coûté le transport de l'unité de cargo par mille marin; et nous l'apelle- rons index de prix. Si nous appelons N le fret total correspondant au transport de la cargaison Q pour un parcours de m Qm de l'unité de cargo par mille (de la tonne-mille, si la mesure de la cargaison a été faite d'aprèsson poids). Jappellerai ce rapport index de rendement. Le quotient de l'index de prix par l'index de rendement, qui prend la forme : milles, le rapport exprime le rendement brut Sr 24 vN° nous donne /a mesure de la dépense que l'on à du supporter pour obtenir l'unité de recette (brute). En effet, si nous appelons È la dépense totale de l’année, le nombre des jours de navigation effec- : AR Le m1 tive, qui équivaut au rapport 9 y ” NOUS pouvons établir l'équation : SANS DxVN NN D : Ce rapport NL est évidemment autre chose que l'expression algébrique de l'unité d'effort qu'ils'agis- sait de déterminer, car il répond exactement à la définition que nous en avons donnée, et son inter- prétation arithmétique nous fournit, dans son extrème simplicité, la démonstration de la vérité énoncée. Il est utile d'observer que la formule de l'unité d'effort est indépendante de la qualité et de la quanlité de la cargaison. Cela tient à ce que ces deux agents exercent directement leur influence sur les valeurs de X et de N dont l'origine et la for- mation, par rapport à la détermination de l'unité d'effort, nous sont parfaitement indifférentes. III Par rapport à l’économie générale d'une nation, “Q et C étant exprimés en fonction de la même unité de mesure. COMMANDANT JEAN RONCAGLI — LA PRIME RATIONNELLE A LA NAVIGATION les transports maritimes exercent deux différentes fonctions : 1° Satisfaction d’une nécessité dynamique de la vie, telle que celle des échanges par la voie maritime ; 2° Production de richesse. La première de ces fonctions engendre la néces- sité, pour l'Etat, d'aider sa marine marchande, en vue de la lutte qu’elle doit soutenir incessamment, l'Etat lui-même ne pouvant s’y substituer. La deuxième doit être considérée comme un titre que l'industrie des transports maritimes acquiert à la reconnaissance publique, car cette richesse qui se produit sur mer entre évidemment dans la circulation générale, au profit de la nation. Il est vrai que l’industrie dont il s'agit n'est pas la seule productrice de richesse ; mais il est tout aussi vrai qu'elle est la plus exposée aux risques et au hasard. Et, puisqu'il est du plus grand intérêt pour l'Etat que le capital national soit dirigé vers l’industrie maritime, le seul moyen d'encourager celle-ci paraît être précisément d'en récompenser la naissance en mer, c'est-à-dire d'octroyer une prime qui soit en quelque sorte liée à la production de richesse à travers l'industrie de la navigation. Soulenir et encourager, oilà donc les deux principes qui doivent servir de base à l'étude d'une fornre de protection rationnelle. L'expression algébrique de l'unité d'effort sert à l'application du premier des principes. Quant à l'encouragement, il est évident que la base nous est fournie par l'expression N—È du profit net de l'industrie. Y Mais, de même que l'adoption du rapport isolé N risquerait d’altérer la fonction subsidiaire de l'Etat {car l’armateur n'aurait aucun intérêt à accroître la valeur de N,en poussant son activité au maximum), un encouragement strictement proportionnel au profit net amènerait évidemment à l'absurde, c'est-à-dire à encourager des entreprises n'ayant aucun besoin d'être encouragées. L'intégration du principe du soutien par l’encou- ragement du capital peut se faire pourtant de manière à éviter tous inconvénients à la fois. Si l’on appelle P la quantité algébrique résultant de cette association, l'intégration peut prendre la forme : (1) P=X z étant un facteur à déterminer sous les conditions suivantes : 1° Les variations de P devront se produire tou- jours dans le même sens que celles de N etde N—©; % Les variations de la fonction &« (N—È) devront se produire dans le même sens que celle du fac- COMMANDANT JEAN RONCAGLI — LA PRIME RATIONNELLE A LA NAVIGATION 523 teur N—X2, mais suivant une /oi différentielle décroissante. La première de ces condilions fait naitre pour l'armateur la nécessité d'augmenter son profit réel par le trafic; elle agil ainsi comme stimulant de son activité. La deuxième, tout en tenant compte du principe qu'un encouragement supérieur doit être réservé à une plus grande production de richesse, évite l'absurdité et l'injustice à laquelle évidemment donnerait lieu toute concession qui serait faite sur la base d’une proportionnalité arithmétique. La détermination de x n'est qu'une question d'Analvse. Les conditions que je viens d'énumérer sontreprésentées parle système suivant d'inégalités différentielles : aP aP du EN SNS ms X; a >> D. Il est ainsi possible de choisir autant de couples différents de coefficients que l'on peut désirer, pour salisfaire les exigences de la pratique, comme nous verrons tout à l'heure. IN La quantité algébrique P ne représente pas la mesure absolue de la prime; elle n’est qu'un nombre en proportion duquel on devra calculer la prime elle-même par rapport à une somme fixe disponible. J'appelle ce nombre l'index de la prime. Les exemples qui suivent démontrent mieux que tout raisonnement la simplicité de la méthode : 1° Supposons un cargo-boat de 7.000 tonneaux et de la valeur de 950.000 francs, ayant fait dans un an huit voyages aller et retour entre Gênes et Car- diff. Chaque voyage exige environ vingt jours de navigation et vingt-cinq de port et amène une dépense de 45.000 franes tout compris. Contre cette dépense, on a une recette brute de 52.000 fr., | venant du fret de 6.400 tonnes de charbon à | 7 1/2 shillings la tonne. D'après ce qui vient d'être exposé nous avons E=S X 45.000 = 360 (en milliers de francs N—8 X 52.000 = 416 -- = 0,86538; N—Y 56 ( Z1t4 et choisissant pour à et h les valeurs. a —0,01; b=— 0,009 qui répondent aux conditions imposées, on aura : p> S—= 0,66 + aN - :,16 5,02 — DE = — 3,24 P— 4,78 En pratique, ces calculs, si simples qu'ils soient, pourront être évités au moyen de tables. 2° Supposons maintenant cinq navires ayant chacun droit à la répartition d’une prime globale ou dotation de 200.000 francs, qui aurait été constituée au profit d’une ligne donnée de navi- gation, ou d’un marché maritime donné (méthode proposée en 1904 par M. l'amiral Bettolo. V. Nuova Antologia). Les différentes valeurs de P seraient : P,— 1,78: P, — 1,83: P,— 146: D,— 1,95: P, —1,62. Si l’on pose : ZP—P,+P,+P,+P,+P,—8,64, évidemment on obtient la prime absolue p due à chaque navire d’après l'expression : P p = 200.000 SP — 231448 15 XP, de sorte qu'il en résulte : Pa = Fr. 41.203 70 = 42.361 11 pi — 33.196 63 Da — 45.138 89 DE — 37.500 00 ÈP— Fr. 200.000 33 La formule (2) donnant la valeur de P permet tout aussi bien d'appliquer un régime différent aux différents trafics, le cas échéant. Il se peut, en effet, qu'il soit nécessaire d'établir des différences, au point de vue de la prime, entre l'importation et l'exportation, les navires de construction natio- nale et ceux de provenance étrangère, les services réguliers et ceux qui ne le sont pas, etc. Il suffira dès lors de choisir, en vue de ces distinctions, diffé- rents couples de coefficients a et , ce qui ne dépend que de quelques opérations d’arithmétique fort simples. Ladite formule ne contient d’ailleurs d'autres Br 19 = ) éléments que les deux termes constituant le bilan. Il en résulte qu'elle est générale et ne dépend en aucune facon de la nature et de la quantité de la cargaison ; quil s'agisse de charbon payant un fret de 8 shillings par tonne, ou de passagers payant 2.000 francs leur cabine de luxe, la méthode pro- posée répond également et d’une facon rigoureuse aux conditions du problème, et son application est des plus simples. Il faut, pourtant, à ce sujet, se rendre compte de la manière dont on pourra se procurer les élé- ments X et N. Quant à ce dernier, il nous sera toujours fourni par Jes documents commerciaux du transport (connaissements, bons de passage régulièrement épuisés, registre de la cargaison, etc.). Il n'y a donc pas de difficulté à cet égard. Mais quant à à, c'est-à-dire à — sa valeur ne dépend que de celle de $, soit de la dépense journalière, telle que je l'ai définie auparavant, m et v étant des agents connus ou que l’on peut contrôler avec une extrême facilité. Il ne serait évidemment ni prudent ni pratique d'accepter pour S des valeurs dénoncées par les armateurs. Il sera donc nécessaire que l'État lui- même fixe des valeurs unitaires de S pour chaque type de navire. Cela ne présente, d’ailleurs, aucune difficulté, car, de nos jours, il est tout à fait pos- sible de classer les différents types d'après des caractéristiques bién définies; et la spécialisation des types, par rapport au genre de trafic qu'ils COMMANDANT JEAN RONCAGLI — LA PRIME RATIONNELLE A LA NAVIGATION doivent assurer, devient de jour en jour plus évi- dente. Il en est de même pour les variations des prix de la construction et du charbon, c'est-à-dire des principaux éléments constituant la valeur de S. Si l’on suppose que la distribution de la prime se fasse, par exemple, une fois par an, avant d'y procéder on fera la révision des valeurs officielles de S pour chaque type, ayant égard principalement au prix du charbon. Quant au prix de la construction (ou de l'achat), duquel dépendent d'autres éléments, tels que l'intérêt au capital, l'amortissement, l'assu- rance, elc., il suffit d'en tenir compte une fois pour toutes, au moment de l’inseription dans le registre matricule des navires admis à la prime. On enre- gistrera ainsi chaque élément devant servir à la fixation de la valeur courante de S. Tout ceci sera fait, bien entendu, sur la base d’un type rationnel d'administration maritime, fixé par l'État, d'accord avec des représentants de l'industrie des transports maritimes. VI Toute conclusion serait superflue, car le lecteur qui a bien voulu nous suivre est en mesure de la tirer lui-même. La base de la méthode proposée paraît être rationnelle; l'application en est des plus simpies ; l'expérience, si jamais elle est faite, dira le dernier mot. Commandant Jean Roncagli, Secrétaire général de la Societi Geograñica Ltaliana. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES [ET INDEX 123 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX placé en tête de l'ouvrage et qui est un modèle de style 1° Sciences mathématiques André (Désiré). — Des Notations mathématiques; Enumeration, Choix et Usag'e.— 1 vol. gr. 1n-8° de xvui-501 pages. (Prix 16 fr.) Gauthier- Villars, éditeur, Paris, 1910. Voilà déjà plusieurs mois que cet ouvrage est entre les mains du public. Il n'est pas trop tard cependant pour en donner une analyse, car ce n’est pas un livre dont on puisse s'assimiler la substance rapidement, comme s'il s'agissait d’un roman à la mode; et le succès qui l'attend ne sera pas un succès éphémère. Ce qui fait la suprême originalité de cette œuvre remarquable, c’est que le sujet si important dont elle traite n'a jamais été traité par aucun auteur. Depuis des siècles qu'on fait des mathématiques, qu'on accumule les algorithmes les plus variés, qu'on use des notations les plus diverses, il n’est venu à la pensée de personne de se livrer à une étude précise de ces notations. Il est permis de s’en étonner ; mais, quand on y réfléchit bien, cette surprise est remplacée par une autre. On se dit que, si cela n'a pas été fait, c'est que cela semblait impossible à faire, et qu'il y avait lieu de reculer devant l’énormité de la tâche et les difficultés qu'elle présentait. Il fallait effectivement, pour la mener à bien, des conditions multiples qui se trouvent rarement réunies : une érudition considérable, un esprit critique très sûr et très affiné, une patience inlassable, et, pour compléter le tout, un talent d'exposition peu commun. Au milieu des occupations professionnelles, il était matériellement impossible d'écrire un tel livre. Et, d'autre part, il ne pouvait guère être utilement écrit que par un membre de l’enseignement. On devine que M. D. André l'a préparé pendant de très longues années, et qu'il lui eût été impossible de le publier avant d'avoir atteint l'heure de la retraite. Mais, pour des esprits de cette trempe, « retraite » ne veut pas dire « inactivité ». Il y a bien longtemps qu'on a dit : « L'Algèbre estune langue ». Rien n’est plus exact. Mais une langue, si simple et si logique soit-elle, implique des règles, une grammaire, une syntaxe; elle implique également l'idée de style. On sent que des notions identiques pourront être exprimées d'une facon claire ou confuse, avec élégance ou lourdement, suivant l'habileté qu'on aura mise à user des signes destinés à traduire la pensée. Or, en Mathématiques, ces signes, ce sont les notations. Etsouvent, hélas! nous les voyons apparaître d’une façon tellement désordonnée, elles changent tellement d'un auteur à un autre, ou d’un professeur à un autre, que l'obscurité se fait dans l'esprit là où la clarté devrait apparaître; comme conséquence, les élèves prennent le dédain des notations, n'apportent ‘qu'un soin médiocre à la présentation bien ordonnée «les sujets à traiter; et l’enseignement, au point de vue des résultats, subit de ce fait de grands dommages. Tout ce que nous venons de dire était nécessaire pour faire comprendre quel immense service a rendu M. D. André, non seulement à la science mathématique, mais encore, mais surtout peut-être, à l'enseignement de cette science, par la publication de son livre. Il est impossible de donner dans un simple article l'aperçu un peu complet de ce que contient cet ouvrage ; mais, pour que le lecteur puisse entrevoir au moins le plan général, pour qu'il se reude compte du but visé, nous ne saurions mieux faire que de repro- duire quelques passages du « Discours préliminaire » scientifique, de précision et de clarté. « L'ouvrage, dit M. D. André, se compose de trois parties : énumération, choix et usage. La première est la science des notations; la deuxième, l'art de les choisir ; la troisième, l’art de les employer. « Dans la première, nous faisons connaitre Jes notations actuellement usitées, la manière de les écrire, de les disposer, de les rendre absolument correctes. Nous nous occupons seulement des notations usitées couramment dans les Mathématiques des divers ordres, ne nous arrêlant point à celles qu'on n'emploie qu'à titre exceptionnel. C'est, pourrait-on dire, l'exposé des notations contemporaines. « Dans la deuxième et la troisième partie, nous donnons les règles simples et nettes qui doivent présider au choix et à l'usage des signes. Ces règles sont fondées sur ce principe évident qu'il faut s'inspirer de l'énoncé de la question, c’est-à-dire de la nature des objets étudiés, de leurs propriétés, de leurs analyses, de leurs différences, de leurs rapports, des divers modes de classification dont ils sont susceptibles. Frappés des avantages que nous offrent les formules et équations symétriques, plusieurs auteurs recom- mandent de chercher la symétrie. Principe trop étroit, puisqu'il ne vise qu'une qualité, et souvent inapplicable, puisque bien des expressions veulent être dissymétri- ques. Pour nous, il ne faut chercher en particulier ni la symétrie, ni la dissymétrie, ni aucune autre qualité spéciale. Ce qu’il faut chercher toujours, avant tout, c'est la vérité des notations. » Pour bien mettre en lumière les règles qu’il énonce, l’auteur s’est attaché à produire de très nombreux exemples, montrant, soit des notations bien faites et bien employées, soit des infractions qu'il fait ressortir, et dont beaucoup, malheureusement, sont devenues d'une pratique courante. « Quelques-unes des fautes que nous condamnons — ajoute-t-il — paraîtront peut-être à plusieurs très légères, pour ne pas dire insigniliantes ; elles ne seront, à leurs yeux, que des minuties indignes de nous arrêter. Mais certaines minuties sont d’une grande importance. » C'est là une remarque d’une grande justesse, et qui ne manquera pas de retenir surtout l'attention des lec- teurs appartenant à l’enseignement. Si l'écriture trop hâtive, le manque d'une attention suffisante conduisent trop souvent à une confusion qui fait naître l'obscurité, c'est toujours regrettable. Mais lorsqu'il s'agit de la présentation de la science à des esprits qui ne la pos- sèdent pas encore, cela devient désastreux. Cette obs- curité rebute et décourage; on attribue les difficultés à sa propre infériorité intellectuelle, alors que la seule faute vient de l’ordre défectueux qui a présidé à l’ex- posé ou aux écritures. En outre, un pareil exemple est bien néfaste, et les élèves arrivent trop fréquemment à s'imaginer qu'en matière mathématique l'ordre des écritures et le choix des dispositions judicieuses sont choses accessoires. Il nous serait impossible, sous peine de surcharger inutilement ce compte rendu, de donner ici les titres des nombreux chapitres dont se compose l'ouvrage. Nous nous bornerons à dire que M. D. André n'a laissé de côté aucune des parties de son sujet. Aussi bien en Géométrie qu'en Arithmétrique, en Algèbre qu'en Cal- cul infinitésimal, toutes les branches des Mathéma- tiques pures ou appliquées ont été étudiées par lui avec une attention scrupuleuse, avec un soin minutieux et une connaissance approfondie de la question. 526 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Ajoutons que, préchant d'exemple, et recommandant le bon style mathématique, il a employé dans ce but un style littéraire clair, simple et d’une véritable élé- gance. La lecture en est attrayante, malgré la gravité des matières; et même parmi les élèves, dans l'élite tout au moins, il se rencontrera certainement des jeunes gens qui voudront s'initier à cette littérature mathématique, nouvelle tout au moins dans là forme. Ce sera un grand avantage pour la formation ulté- rieure de leur esprit. « Je voudrais — écrivait un correspondant à M. D. André — que votre ouvrage devint classique à l'Ecole Normale et, en général, obligatoire dans toutes les Facultés où l’on aspire à former des professeurs. » Modifiant très légèrement cette formule, je crois pou- voir dire en terminant, sans risquer d'être mauvais prophète : Ce livre deviendra classique dans tous les milieux où l’on croit que l’enseignement doit contribuer à per- fectionner l'intelligence et à mettre plus de clarté dans les cerveaux. C.-A. Laisanr, Examinateur d'entrée à l'Ecole Polytechnique. 2° Sciences physiques Ariès (Lieutenant-Colonel E.). — L'Electricité consi- dérée comme forme de l'Energie. I. Les notions fondamentales. Le potentiel et la quantité d’élec- tricité. 1 vol. in-8°, 58 pages. (Prix : 2 fr. 50.) — II. Electrostatique. Première partie. | vol. in-8°, 176 pages. (Prix : 5 fr.) A. Hermann, éditeur. Paris. L'Électrodynamique de Maxwell a été établie à l’aide de plusieurs fautes de raisonnement; la preuve en a été faite si souvent et si complètement qu'il est peut- être inutile de répéter cette affirmation. L'illogisme qui est à la base de la théorie se manifeste surtout lorsque l’on tente d'établir un passage entre cette Electrodynamique et l'étude de l'électricité statique et du magnétisme; en son célèbre Traité, Maxwell s'est contenté d’une juxtaposition qui, M. Henri Poincaré l’a montré depuis longtemps, n’a rien d'une continuité. Cette continuité, des hommes comme Hertz et Boltz- mann se sontefforcés de la rétablir; mais l’un et l'autre ontdüavouerqu'ilsn’yétaientpasentièrementparvenus. En France, nul n’a fait, pour incorporer logiquement l'Electrodynamique de Maxwell en une théorie d'en- semble de l'électricité, d'efforts plus puissants ni plus pénétrants que Vaschy; mais il ne semble pas, non plus, que ces efforts aient été couronnés d’un plein succès. En particulier, lorsque Vaschy traite des pro- positions que la Thermodynamique fournit à la science des phénomènes électriques, des lois de la pile voltaique ou des courants thermo-électriques, par exemple, il est visible qu'il délaisse insensiblement les doctrines maxwelliennes pour reprendre d'anciennes notions. L'œuvre de Vaschy est assurément celle qui a le plus influé sur le lieutenant-colonel Ariès; visiblement, celui-ci a cherché à reprendre et à parachever ce qu'avait ébauché le savant ingénieur des télégraphes ; et en cette tentative, dont les deux premiers fragments sont sous nos yeux, les aperçus ingénieux abondent, témoignant d'une perception très nette du but à atteindre et d'une grande sagacité dans le choix des voies propres à y mener. Le point de départ de M. Ariès est nettement thermo- dynamique. Guidé par l’analogie que beaucoup d'auteurs ont signalée entre la fonction potentielle électrostatique et la température, l’auteur développe des raisonne- ments tout à fait analogues à ceux que l’on expose ordinairement au sujet du principe de Carnot ; il par- vient à une égalité semblable, en sa forme, à celle qui exprime ce principe; en cette équation-là, la quantité d'énergie électrique et la valeur de la fonction poten- tielle absolue jouent les rôles qui sont attribués, en cette équation-ci, à la quantité de chaleur et à la tem- pérature absolue; c’est de cette égalité que M. Ariès tire la définition de la quantité d'électricité. Toute cette analyse est extrèmement ingénieuse et met en évidence d’intéressantes analogies. Mais il nous semble qu'une restriction d'une rigide: étroitesse en vient singulièrement resserrer la portée. La justesse des raisonnements, comme la recevabilité des résultats, exige impérieusement que tous les corps électrisés dont on discourt soient homogènes,de même- nature, de même température; en sorte qu'il ne paraît pas que les définitions données par l’auteur permettent de dire ce que signifient ces mots : différence de niveau potentiel entre deux corps, quantité d'électricité cédée: par un corps à un autre Corps, dans le cas où ces deux corps ne sont pas de même nature, ou bien encore dans le cas où, formés de la même substance, ils sont portés à des températures différentes. Peut-être l’auteur pos- sède-t-il le moyen de briser le cercle qui enserre et restreint l'étendue même de ses toutes premières défi- nitions, mais nous n'avons pu entrevoir quel serait ce moyen et nous n'avons trouvé aucune indication qui nous aidât à le deviner. Une autre restriction, et bien gênante pour le progrès. de la théorie, vient encore arrêter la portée des pre- mières définitions. L'Electrostatique de M. Ariès com- mence en ces termes (Æ/ectrostatique, chapitre I, S 14, .6): « Si étendu qu'on puisse imaginer le champ stable créé dans un diélectrique par des corps conducteurs. fixes et maintenus à potentiels constants, il importe de considérer ce champ comme limité par une frontière de potentiel invariable K,, au contact de laquelle le diélectrique sera encore à l’état que l’on appelle l’état neutre ou l'état naturel... » Or, les définitions des Notions fondamentales nous ont bien fait connaître ce qu'il convenait d'appeler niveau potentiel E d’un corps conducteur électrisé ; mais elles n'ont assigné aucun sens aux mots : poten- tiel en un point d'un diélectrique. Il nous semble donc que la cassure apparaît très nettement là même où l'auteur tente de raccorder les premiers principes tirés de la Thermodynamique à une Electrostatique qu'il développe à l’imitation de Maxwell et de Vaschy. Cette Electrostatique, nous ne la résumerons pas ici; nous nous bornerons à attirer l’attention sur le cha- pitre (chapitre VIII) intitulé : Les lois de Laplace et d'Ampère en Electrostatique. En ce chapitre, M. Ariès, guidé par l’analogie, propose d’adjoindre, aux actions électrostatiques connues et admises par tous les phy- siciens, des actions nouvelles qui sont de deux espèces. Il considère, en premier lieu, l’action d’une masse scalaire (charge électrique ponctuelle) sur une masse: vectorielle (moment d'un élément diélectrique pola- risé); à cette action, il impose une loi de même forme que la loi, dite de Laplace, qui régit l’action d'un pôle d'aimant sur un élément du courant. Il admet, en second lieu, une action mutuelle de deux masses vectorielles, et cette action, il la suppose soumise à une loi toute semblable à la loi d'Ampère relative aux actions mutuelles des éléments de cou- rant. Si M. Ariès avait remplacé les masses vectorielles. par leurs dérivées par rapport au temps, ces dernières. actions se fussent transformées en celles dont Maxwell postule l'existence entre les éléments des courants de déplacement. Mais les forces dont l’auteur admet la réalité et affirme les lois n’ont jamais avant lui, du moins à notre connaissance, été prises en considération par aucun physicien. Or, ces actions seraient, d'après les formules proposées, exactement du même ordre de grandeur que les forces électrostatiques connues et étudiées depuis longtemps; leur intervention aurait donc pour effet de bouleverser de fond en comble toute l'Electrostatique reçue jusqu'ici. Or, comme cette Elec- trostatique semble s'accorder d’une manière satisfai- sante avec les faits, qu'aucune expérience n'a Jamais révélé aucun phénomène qui parût attribuable aux forces imaginées par le lieutenant-colonel Ariès , force nous est de penser que ce physicien s’est laiss e entrai- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ner trop loin, et d’une manière quelque peu impru- dente, par son amour de l'analogie mathématique. Pierre Dune, Correspondant de l'Institut. Professeur à l'Université de Bordeaux. Woilk (D' Daffy), Zngénieur-Clhimiste 1.C.B. — Con- tribution à l'étude de l'azoture d'aluminium et de l'azoture de baryum. 7hése pour le grade de Doc- teur de l'Université de Nancy. — 1 vol. in-8 &e 58 pages. Albert Barbier, Nancy, 1910. Le petit travail que M. Wolk vient de présenter comme thèse pour le doctorat de l'Université de Nancy contient une étude bibliographique très complète, la plus complète qui ait été faite jusqu'ici sur l'azoture d'aluminium. À ce point de vue elle constitue un document historique intéressant. Dans le domaine expérimental, l'auteur a repris la méthode de prépa- ration de l'azoture en chauffant la poudre d'aluminium dans le gaz ammoniac; il s’est attaché à opérer dans des conditions de température bien déterminées et a précisé ainsi le mode opératoire. Dans la deuxième partie de sa thèse, M. Wolk a repris l’action de l'azote sur l'amalgame de baryum chauffé dans une nacelle en fer; il a montré que, si l'on évite la fusion du produit pendant l'attaque, on obtient un azoture qui n'est pas souillé par le fer. L'intérêt pratique qui paraît devoir s'attacher aux azotures fait de cette thèse un travail de pleine actualité. C. MATIGNON, Professeur au Collège de France. 3° Sciences naturelles Lacroix (Alfred), Membre de l'Institut, Professeur de Minéralogie au Muséum d'Histoire naturelle. — Minéralogie de la France et de ses Colonies : Des- CRIPTION PHYSIQUE ET CHIMIQUE DES MINÉRAUX : ÉTUDE DES CONDITIONS GÉOLOGIQUES DE LEURS GISEMENTS. Z'ome III, 2 fascicule. — À vol. gr. in-8° de M6 pages avec figures. Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1910. Les minéralogistes salueront avec plaisir la reprise de cette belle publication’. Le présent fascicule, illustré comme les précédents de très nombreuses figures, dont beaucoup de photographies d'échantillons parfai- tement réussies, traite à la fois des hydroxydes, des azotates, des carbonates anhydres, chlorocarbonates, carbonates hydratés, oxalates et mellates. Les princi- pales espèces décrites sont : brucite, hydrocuprite, nitratine, nitre, nitrocalcite, nitromagnésite, calcite, giobertite, mésitite, pistomésite, sidérite, dialogite, smithsonite, dolomite, ankérite, aragonite, withérite, strontianite, cérusite, ctypéite,hydrozincite, aurichal- cite, malachite, chessylite, dawsonite, bismuthite, phos- génite, thermonatrite, natron, trona, nesquéhonite, whevellite, mellite. Sur les 416 pages qui composent le fascicule, 176 ont trait à la monographie de la calcite et forment à elles seules un véritable livre. On peut dire avec l’auteur : « Je pense que la lecture de cet ouvrage, plus encore peut-être que celle des volumes précédents, montrera combien notre sol national renferme de richesses minéralogiques en partie inconnues jusqu'ici ». L. BourGgois. Aynaud (D° M.), Préparateur à la Faculté de Méde- cine de Paris, Ancien Interne des Hôpitaux. — Le globulin des Mammifères — 1 vol. in-8° de 232 pages. G. Steinheil, éditeur. Paris, 1910. « Ce travail représente la première monographie con- sacrée au troisième élément du sang. Malgré son éten- due considérable, il n’a nullement la prétention de présenter une étude complète du globulin. Ses visées sont plus modestes. La première, c'est de justifier son pair notamment Revue gén. des Sciences, t. XIII, 1902, p. : ET INDEX 527 titre et de montrer que le globulin existe... La deuxième, c'est d'apporter une technique permettant d'observer in vitro l'élément décrit par Bizzozero, Éberth et Schim melbusch, de l'observer à loisir, d'expérimenter sui lui, de le compter, en un mot d'établir, pour le globulin, des procédés d'investigation analogues à ceux qui sont utilisés pour les autres éléments du sang. » Ains s'exprime M. Aynaud dans son avant-propos, et c« résumé de son ouvrage est assurément fort exact. Sous le nom de thrombocytes, d'hématoblastes, ete. on a décrit des objets si variés que beaucoup d'auteurs nient l’existence du troisième élément du sang ; après avoir lu l'ouvrage de M. Aynaud, ils ne pourront plus raisonnablement le faire. « Autant d'auteurs, autant d'opinions différentes sur la morphologie, les dimen- sions, les réactions colorantes du globulin. Sur la signi- fication même de cet élément, on peut dire que toutes les opinions ont été émises, puisqu'on en a fait tantôt un élément indépendant et autonome, tantôt un dérivé, un fragment des autres éléments du sang (hématies, leucocytes, endothélium, précipité albumineux).….. » Telle est la conclusion d'une revue historique sur le globulin. Et pourquoi cette discordance ? Parce qu'au lieu de chercher le globulin dans le sang, dans le vrai sang, c’est-à-dire dans le liquide qui circule à l'intérieur des vaisseaux, beaucoup d'hématologistes ont voulu l’obser- ver dans le mélange impur de sang, de lymphe, de suc des tissus, fourni par une plaie cutanée, mélange auquel on applique bien improprement le nom de sang. On peut voir les globulins dans le sang circulant. M. Aynaud examine au microscope, à cet effet, les capillaires de l’épiploon de jeunes lapins de 600 à 800 grammes, de fælus de cobayes de 5 à 11 centimètres, de rats blancs nouveau-nés, en les protégeant contre les traumatismes, le refroidissement, la dessiccation. Il constate l'existence, dans ces capillaires, à côté de nombreuses hématies et de rares leucocytes, de fuseaux très allongés, véritables bâtonnets, beaucoup plus pâles que les globules blancs, de longueur égale et même quelquefois supérieure à celle des globules rouges, moins nombreux que les hématies, mais infiniment plus nombreux que les leucocytes ; ce sont là les glo- bulins. On peut les voir aussi dans le sang extrait de l’orga- nisme, à condition d'examiner du sang pur, non mo- difié. A cet effet, M. Aynaud introduit, par simple piqûre dans une veine, un trocart intérieurement et extérieurement vaseliné, qu'il enfonce profondément, et recueille le sang qui s'écoule dans des vases ou sur des lames vaselinés. Le plasma de sang d'âne donne d'excellents résultats quand on l’examine en gouttes pendantes : ce plasma, facile à obtenir presque débar- rassé d'hématies par simple repos de quelques minutes du sang en vases paraffinés, renferme de nombreux globulins non dissimulés par les hématies. En opérant à 38-40°, on voit une multitude de bâtonnets 4 à 6 fois. plus longs que larges, les plus grands atteignant et pouvant dépasser en longueur le diamètre des globules rouges, les plus petits atteignant à peine le tiers ou le quart de ce diamètre. Sous l'influence des variations de température, ces globulins présentent des variations de forme: à 42-43°, ils deviennent plus päles, et prennent une forme dis- coïde; quelques-uns s'agglutinent en amas plus ou moins volumineux, se fusionnent en plaques; les autres deviennent moins réfringents, prennent une teinte grisâtre et une structure granuleuse; sous l'influence du refroidissement à 10°, ils s'arrondissent aussi, mais ce changement de forme, à l'encontre de ce qui se produit à 42°, est seulement temporaire : réchauffés à 38-40°, les globulins reprennent leur forme de bâtonnets. Examinés à 38-40° dans du plasma frais, les.globu- lins sont animés de légères oscillations sur leur grand axe; parfois on les voit se déplacer, s'ineliner, s'avan- 528 cer à droite et à gauche; parfois on les voit tourner en rayon de roue; ce ne sont pas des mouvements ami- boïdes, mais des déplacements en masse sans modifi- cations morphologiques; ce sont des mouvements propres se faisant dans tous les sens, rigoureusement liés à l'intégrité anatomique de l'élément, ne se mani- festant pas en milieu refroidi ou surchauffé, présentant leur maximum à 38-40°, cessant de se produire sous l'influence du chloroforme, de l’éther, de la cocaïne, de la quinine. Ce sont assurément ces premiers chapitres qui représentent la partie la plus importante de l’ouvrage de M. Aynaud; mais les autres chapitres sont remplis de renseignements au moins fort intéressants. Signa- lons l'étude de l’action exercée sur les globulins par les agents anticoagulants (citrate, oxalate, fluorure, venin de cobra, extrait de sangsues) et divers agents chimi- ques et pharmaceutiques, — des conditions de l’agglu- tination des globulins, — de leur coloration vitale, — de leur structure histologique. Ce sont ensuite des observations très intéressantes au point de vue phy- siologique sur le phénomène de la disparition tempo- raire des globulins dans le sang 2n vivo et de leur accumulation dans le foie à la suite d’injections de peptone ou de substances agglutinantes, — sur l’action les sérums hétérogènes, — sur la numération des globulins avec données numériques nombreuses, — sur les rapports des globulins avec la coagulation du sang et la rétraction du caillot, — sur l’origine et la morphologie du globulin. Nous ne saurions trop louer la clarté et la précision de l’exposé, ainsi que l'esprit scientifique qui a présidé à l'élaboration de cet ouvrage. M. Aynaud ne s'est pas attardé à accumuler hypothèses sur théories, et théo- ries sur hypothèses, comme le font tant d'auteurs avides d’une gloire facile à acquérir; il a fait œuvre d’observateur rigoureux et habile, œuvre d'expérimen- lateur ingénieux et précis. Son ouvrage est incontes- tablement la première monographie du globulin, et cette monographie devra être consultée par tous ceux qui voudront observer et étudier le troisième élément du sang. MAURICE ARTHUS, Professeur de Physiologie à l'Université de Lausanne. 4 Sciences médicales Roger (D' G.-H.), Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Medecin de l'Hôpital de la Charité. — Digestion et Nutrition. — { vo/. 1n-8° de 624 pages avec fiqures. (Prix : 10 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Ce volume, qui est le texte du cours de Pathologie expérimentale et comparée professé à la Faculté par M. Roger, fait suite au volume sur A/imentation et Digestion publié il y a deux ans. Dans ce livre, M. Roger étudie la nature et l'action «des ferments, les principaux aliments, hydrocarbonés, gras etalbumineux, les transformations qu'ils subissent dans l'organisme normal, et les déviations pathologi- ques de ces transformations aboutissant au diabète, à l'obésité, à la goutte, c'est-à-dire, en somme, la nutri- tion normale et pathologique. L'auteur établit d'abord que la majorité des transfor- mations qui se font dans l'organisme résultent de l’ac- tion des ferments. Depuis le moment où les matériaux alimentaires pénètrent dans la bouche jusqu'au moment où les produits de déchet ressortent par les émonc- loires, aux différentes phases de l’évolution se retrouve le rôle des ferments. Ceux-ci sont innombrables et répandus partout. Leur pouvoir est lié à un état parti- culier de certaines substances minérales et ils sont formés par l'union de deux composantes : une sub- stance zymotique, minérale, stable, s'usant peu; une sensibilisatrice, instable, qui s'use facilement. Leur action est soumise à un certain nombre de lois que M. Roger expose en mème temps que le rôle activant BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX des kinases et le rôle empêchant des antiferments. Après cette étude très complète et très lumineuse du rôle des ferments dans l'organisme, M. Roger aborde l'étude des aliments et de leurs transformations. Il montre : l’origine des hydrates de carbone dans le règne végétal; leur constitution chimique ; les digestions que leur font subir la salive, le séjour dans l'estomac, le suc pancréatique, le suc intestinal, le gros intestin ; puis les transformations successives que les microbes de la bouche, de l'estomac et de l'intestin leur impri- ment; enfin l'absorption de ces aliments dans les por- tions diverses du tube digestif. Suivant alors la destinée ultérieure des hydrates de carbone, M. Roger expose la théorie de la glycogénie et de la glycolyse. A ce propos, il sort de la Physiologie pour entrer dans la Pathologie et nous énumère les mécanismes si nombreux de la glycosurie, nerveuse, toxique, infectieuse, glandulaire, etc. L'étude du diabète se termine par une lecon fort intéressante sur le coma diabétique. Dans les leçons suivantes, M. Roger étudie les matières grasses, leur constitution, leur valeur alimen- taire, leur digestion, et leur métabolisme ultérieur, les déviations pathologiques de leur évolution, ce qui nous mène à l'obésité et à ses diverses théories. Enfin, l’auteur étudie la question si compliquée de la constitution et de l'évolution des albuminoïdes, le rôle des diverses sécrétions digestives dans la transforma- tion des aliments albumineux, le métabolisme des nucléoprotéides et l’origine de l'acide urique. Il consacre une leçon très intéressante à la mucine, au mucus, à la mucinase, et à leur rôle dans les bron- chites et les entérites mucomembraneuses, élucidé par ses travaux personnels. Il étudie la putréfaction des matières protéiques dans l'intestin grêle et le gros in- testin; pour expliquer la production des sulfo-éthers et de l’indican, it se rattache à la théorie de la putré- faction intestinale, fortidiscutable cependant. Ces questions extrêmement complexes ont provo- qué, depuis quelques années, des travaux innombra- bles et d’ailleurs contradictoires. Il reste bien peu de faits définitivement acquis, bien peu de faits expéri- mentaux qui aient leur application clinique. Ainsi, ies diabètes d’origine pancréatique, nerveuse. hépatique, sont soumis à une revision qui laisse subsister très peu d'observations certaines; les théories pathogé- niques de l'obésité, hier encore admises par les au- teurs classiques, ne résistent pas à la discussion. On peut regretter qu: M. Roger se soit montré trop indulgent à des théories surannées et qu'il n'ait pas toujours fait un usage assez sévère de la critique scien- tifique. Mais peut-être, au point de vue didactique, a-t-il raison? Quand on connaît les qualités d’ensei- gnement si séduisantes de l’auteur, on conçoit tout l'intérêt qui résulte de la lecture de son livre. Dr M. LAB, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin des Hôpitaux. 5° Sciences diverses Roux (Paul). — La Crise agraire enlItalie (Le Lati- fondium romain). — 1 vol. in-16 de 267 pages. (Prix : 3 fr. 50.\ Alcan, éditeur. Paris, 4910. Cette étude est certainement l’une des meilleures et des plus complètes qui aient été publiées sur les ques- tions agraires. Le problème du latifondium est posé depuis vingt-cinq siècles. M. Paul Roux en a envisagé les multiples aspects, tant au point de vue agricole qu'au point de vue social, et il reste bien peu de chose à ajouter à sa magistrale description économique de la Campagne romaine. Si l'auteur n'apporte pas une solution définitive au grave et séculaire problème, — à aucun moment, d'ailleurs, il n'a eu cette préten- tion, — il a du moins écrit une étude dont nous ne pouvons que conseiller la lecture à tous ceux que préoccupent les questions agraires. L. R.-C. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 929 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 30 Mai 1910. M. le Président annonce la mort de M. R. Koch, Associé étranger, el de Sir William Huggins, Corres- pondant pour la Section d'Astronomie. — M. Ch. Pérez est élu Correspondant pour la Section d’Anatomie el de Zoologie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. E. Gau démontre que, si l'équation s=— f(x, y, z, p, g) forme avec deux équations distinctes un système en involution, elle admet une intégrale intermédiaire et, par conséquent, peut s'intégrer par la méthode de M. Darboux. — M. S. Lattès présente ses recherches sur les séries de Taylor à coefficients récurrents. — M. J. Le Roux démontre que la torsion mécanique d’une fibre trans- versale quelconque est égale, au signe près, à la moyenne arithmétique entre la torsion mécanique des fibres longitudinales et la torsion géodésique de la fibre transversale considérée dans la section droite déformée. — M. H. Larose indique deux suites de solutions de l'équation des télégraphistes. — M. Em. Marchand déduit de ses observations, faites à l'Obser- vatoire du Pic du Midi, que des poussières très ténues, d'origine cosmique, se sont répandues du 18 au 19 mai dans l'atmosphère terrestre. — M. K. Popoff a observé la queue de la comète de Halley, le 48 mai, à l'Obser- vatoire de Sofia. — M. D. Eginitis a fait de belles observations de la comète de Halley à l'Observatoire d'Athènes. Le passage de la Terre dans la queue de la comèle n'a pas eu lieu dans la nuit du 18 mai; la cour- bure très forte de la queue l’a considérablement re- tardé, si elle ne l’a pas rendu impossible. — MM. J. Baïllaud et G. Demetresco ont photographié, les 23, 24 et 28 mai, le noyau de la comète de Halley; il avait la forme d’une ellipse et possédait le 23 une conden- sation lumineuse qui a disparu le lendemain. 2° SCtENCES PHYSIQUES. — M. E. Bouty montre que la détermination de la cohésion diélectrique peut servir de méthode précise d'analyse quantitative des gaz rares, comme le néon, mélangés avec l'air, CO?, H, etc. — M. M. de Broglie à constalé que les ions libérés par action chimique et haute température dans la com- bustion de l’oxyde de carbone et ceux que produisent les rayons du radium ont des mobilités très voisines et sont probablement identiques. — MM. W. Duane et A. Laborde, pour calculer en gramme-seconde d'6- manation de Ra la quantité d'émanation de radium qui à produit un courant initial mesuré de | unités électrostatiques, emploient la formule : x—1/f5,19 (1—0,517S/V)], où S est la surface intérieure et V le volume du condensateur. — MM. L. Boutan et J: Fey- taud indiquent un procédé de photographie stéréosco- pique en couleurs, à l'aide de plaques autochromes, d'animaux plongés dans l’eau ou dans l'alcool. — M. A. Gautier estime que, porté au rouge blanc à 1300°, à la pression ordinaire, dans des tubes de por- celaine et à l'abri de toute matière organique et de tout métal, l'oxyde de carbone ne subit pas de disso- ciation sensible mettant du charbon en liberté. — M. de Forcrand montre que la chaleur de formation du peroxyde du cæsium Gs?0* à partir de Cs°0 est de + 58,76 cal. Elle explique pourquoi la cæsine hydra- tée du commerce ne peut être déshydratée complète- ment lorsqu'on la chauffe à l'air vers 450°, au creuset d'argent, sans qu'il se forme un peroxyde. — M. Driot n’a pu mettre en évidence, par l'étude de la solubilité des oxychlorures de Zn dans des solutions de chlorure, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 4910. Lie que deux composés définis : ZnCl°.4/2n0.6H°0 et AnCE.Zn0.1,5120, ce dernier nouveau. — M. P.-L. Vi- guier, en condensant l’aldéhyde a«-bromocrotonique avec l'acide malonique, à obtenu l'acide bromosorbi- que, F.133°; en condensant la même aldéhyde avec HCAz et saponifiant le nitrile formé, on obtient l'acide bromangélactique CH°*.CH:CBr.CHOH.COOH, F.123°- 1249, — M. F. Reverdin, en nitrant à deux reprises la benzoyl-p-anisidine, puis saponifiant le corps obtenu, a préparé une trinitro-p-anisidine, F.1270-128°, ren- fermant un groupe nitro facilement mobile. — M. G. Vavon montre que les deux pinènes & et 6 donnent le même chlorhydrate solide et avec un rendement iden- tique. — MM. L. Tchougaeff et W. Fomin, en décom- posant le cholestérylxanthogénate de méthyle, ont obtenu deux carbures isomères, qu'ils nomment x- el $-cholestérylènes, de formule C*7H%, K.77 et 599, tous deux lévogyres. — MM. J. Courmont, Th. Nogier el Rochaix n'ont trouvé aucune trace d'H°0? dans l'eau soumise pendant 20 minutes à l'action des rayons ultra-violets. Ce n’est donc pas à l’action de H°0* que ces rayons doivent leur pouvoir stérilisant. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. P. Girard montre que le mécanisme de l'hémiperméabilité, qui n'est jamais que relative, d’un tissu vivant aux électrolvtes est essentiellement électrostatique. — M. Lioret présente un appareil permettant de transformer.en courbes, par un levier amplificateur, les tracés en creux du phonographe. On obtientainsi pour les voyelles parlées des tracés analogues à ceux de M. Marage. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier ont constaté que la saignée pratiquée 24 heures avant l'injection d’urohypotensime crée une résistance marquée à lintoxication. — M. J. Chaine montre que, dans le redressement du bassin chez l’homme, le sacrum, par suite de sa fixité aux autres parties du squelette, a pris une situation obli- que, et que c'est cette position qui, à son four, a été la cause efficiente de la formation de la courbure lom- baire. — M. A. Dehorne a constaté que le nombre des chromosomes chez les Batraciens est de 12 seulement, et qu'il est de 6 chez les larves parthénogénétiques de grenouille. — MM. L. Cuénot el L. Mercier ont reconnu que les différences de pourcentage, dans la prise des greffes de tumeur cancéreuse sur des lots de souris qui paraissent identiques, correspondent à des diffé- rences dans le patrimoine héréditaire des souris. — S. A. S. le Prince de Monaco donne quelques rensei- gnements sur la douzième campagne scientilique de la Princesse-Alice et sur les travaux océanographi- ques exécutés au Musée de Monaco. — M. L. Fortineau à constaté que les lapins vaccinés contre le bacille pyocyanique sont réfractaires au charbon; la toxine pyocyanique, injectée au mouton 24 heures après une culture charbonneuse, possède un pouvoir curatif contre le charbon. — M. A. Besredka à reconnu qu'un cobaye anaphylactisé passe rapidement à l'état d’an- tianaphylaxie si on lui injecte une très faible dose de sérum sous la peau, dans le péritoine ou dans les veines. — M. A. Quidor a observé que, chez les Ler- næopodidae, tout au moins pour les genres Anchorella, Brachiella et Lernæopoda, le même animal est succes- sivement mâle et femelle; il désigne cette évolution sexuelle sous le nom de protandrie. — M. A. Muntz montre que l’activité vitale n’est possible que là où l'équilibre hygroscopique entre le milieu inerte et le germe auquel il sert de support est rompu par l'apport d’une quantité d’eau telle que la limite de saturation du milieu soit dépassée. — M. Lecoq de Boïisbaudran a constaté qu'une truffe noire arrachée, puis remise 12% 530 dans la terre, peut continuer à se développer jusqu’à maturité. — M. P. Becquerel a reconnu que les spores de Mucorinées et d'Ascomycètes desséchées, puis con- servées pendant 25 mois dans le vide, dont 24 jours entre — 180 et — 2539, puis ensemencées sur milieux appropriés, se sont mises à germer, malgré cette lon- gue suspension des phénomènes vitaux. — MM. M. Boule et R. Anthony ont étudié l’encéphale de l’homme fossile de La Chapelle-aux-Saints. Par l’é- tendue de ses lobes frontaux et occipitaux, il se place parmi les anthropoïdes el s'éloigne des hommes actuels. Il ne devait probablement posséder qu'un psy- chisme rudimentaire. — M. F. de Zeltner décrit cinq grottes décorées de peintures paraissant remonter à une époque assez ancienne, qu'il a découvertes dans les massifs montagneux de la haute vallée du Sénégal. — M. L. Gentil montre que l'Atlas marocain, bien qu'of- frant des analogies avec les Pyrénées éogènes, s’en écarte au point de vue de son àge pour se rapprocher des Alpes, de formation néogène, et que la séparation du continent africain de l’Archipel des Canaries est de date encore plus récente, de la fin du Pliocène ou du Quaternaire. — M. A. Lacroix a reconnu que le minéral à structure optique enroulée constituant les phos- phorites holocristallines du Quercy est la calcédonite à enroulement. Séance du 6 Juin 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Marty présente ses recherches sur les valeurs singulières d’une équa- tion de Fredholm.— M. A. Chatelet montre comment on peut classer un système de tableaux équivalents entre eux et, par suite, équivalents à l'un d'eux. — M. L. Zoretti indique les principales propriétés des lignes cantoriennes et montre la possibilité d'étendre à l’espace les définitions cantoriennes. — M. Sal- tykow étend le théorème de Lie aux équations par- tielles contenant explicitement la fonction inconnue. — M. E. Barré a obtenu une série de solutions des équations de l'élasticité de Lamé dans un milieu homo- gène et isotrope. — MM. Luizet et J. Guillaume dé- crivent les diverses apparences présentées par la comète de Halley du 13 décembre 1909 au 26 mai 1910. — MM. P. Cirera et Ubach ont déterminé l'ionisation atmosphérique à l'Observatoire de l'Ebre au moment du passage de la comète de Halley; ils ont observé une conductibilité forte, une mobilité petite et un nombre d'ions remarquable; le magnétisme terrestre a présenté une perturbation peu intense. — M. J. Comas Sola à étudié la comète de Halley à l'Obser- vatoire Fabra (Valence) et a observé le 31 mai et le 2 juin une bouffée très brillante, à 4! du noyau et à l'opposé du Soleil. — M. Giacobini a constaté à l'Obser- vatoire de Paris que la comète de Halley s’est dé- doublée, depuis le 2 juin, en deux tronçons compor- tant chacun une nébulosité à peu près ronde avec un noyau. — M. J. Mascart à observé le passage de la comète de Halley dans la nuit du 18 au 49 mai à l'Observatoire du Pic de Teyde; à part une très belle lumière zodiacale du matin, il ne s'est produit aucun phénomène spécial. — M. H. Poincaré annonce que, depuis le 23 mai, le poste de la Tour Eiffel envoie chaque nuit à minuit une série de signaux horaires par télé- graphie sans fil, destinés aux navires en mer. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Th. Rosset décrit un nouvel inscripteur du son, consistant dans l'inscription simultanée du mouvement du levier d’un phonographe sur le cylindre de cire et, par transmission optique au moyen d’un miroir attaché au levier, sur un cylindre recouvert d'un papier photographique.—M. P. Pascal, en réponse aux appréciations de M. Chéneveau, estime que les méthodes qu'il a préconisées pour la mesure des susceptibilités magnétiques ont donné entre ses mains une sensibilité au moins deux fois plus grande que celles où l’on utilise une balance de torsion. — M. A. Perot a étudié l’arc au mercure dans le vide, produit dans un ballon. Si l’on introduit de la vapeur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d’eau, on voit le ballon devenir complètement obscur. On constate un déplacement des centres lumineux dans le sens du courant, de l'anode à la cathode. — MM. D. Berthelot et H. Gaudechon ont vérifié que l'azote et l'oxygène secs ne se combinent pas sous l'influence des rayons ultra-violets; par contre, ces rayons déter- minent la peroxydation de Az°?0 et AzO, ainsi que celle de SO?. — M. J. O. Serpek rappelle que M. Fichter et lui-même ont déjà préparé l’azoture d'aluminium décrit par M. Kohn-Abrest. — M. P. Mahler a constaté que la houille, soumise à l’action d’un courant d'air atmo- sphérique, est oxydée avec production de CO et de CO?; l'humidité retarde cette réaction. — M. G. Dupont, en oxydant par le permanganate les y-glycols acétylé- niques RR/C(OH).C : C.C(OH)RR', a obtenu les acides- alcools &« RR'C(OH)CO*H. Les rendements sont mé- diocres par suite de l'oxydation plus avancée en cétones RR'CO ; aussi est-il avantageux de transformer d'abord les glycols en éthers-oxydes ou éthers-sels. — MM. A. Arnaud el S. Posternak ont reconnu qu'en décomposant par KOH l'acide iodostéarique obtenu par fixation de HI sur l'acide oléique il se forme au moins 4 corps différents : l'acide élaidique ordinaire As:, l'acide élaïdique As.9, l'acide oxystéarique et de l'acide oléique régénéré A9-10. — M. L. Brunel montre que, dans l'hydrogénation catalytique des phénols pos- sédant une chaîne ramifiée, comme le thymol ou le carvacrol, celle-ci n’est pas modifiée. — MM. A. Haller et Ed. Bauer, en condensant les chlorures des acides benzyldialcoylacétiques en présence d'AICF, ont obtenu des 2:2-dialcoylindanones-1, qu'on peut préparer éga- lement en traitant l'indanone-1 par AzH°Na et les iodures alcooliques. Les dialcoylindanones redonnent facilement l'amide de l'acide benzyldialcoylacétique. — MM. Stæœcklin et Crochetelle ont constaté la pré- sence accidentelle de sulfocyanure de fer dans le lait. Après enquête, on reconnut qu'il provenait de vaches nourries avec des tourteaux de crucifères ou falsifiés avec des crucifères, lesquels contenaient de l'essence de moutarde qui s'était transformée en sulfocyanures dans l'organisme. — M. R. Combes a constaté que le dégagement simultané d'O et de CO? n'est pas parti- culier aux plantes grasses; il peut également se pro- duire chez les végétaux dans lesquels des pigments acides (comme l’anthocyane) sont en voie de dispari- tion. — M. G. Seliber a reconnu que, dans les cultures symbiotiques bacille butyrique Æ B. perfringens, l'acide butyrique se trouve en plus grande quantité que dans les cultures symbiotiques bacille butyrique + B. putrificus. — M. J. Bielecki a observé que le pouvoir protéolytique de la bactéridie charbonneuse va en augmentant dans les cultures successives alternées en milieu Fraenckel et en milieu peptoné. 3° ScIENCES NATURELLES. — MM. A. Chauveau et feu Ch. Contejean ont reconnu que, dans le cas de jeùne, la formation des déchets azotés dus à l'accroissement de la désintégration des albuminoïdes de l'organisme ne précède que de très peu leur élimination. Il en résulte que tout acte physiologique qui s’accomplit sans modifier en rien la marche de l’excrétion azotée n'emprunte pas à ces désintégrations l’énergie néces- saire à son exécution. — M1° B. Stawska : Etudes sur le venin de cobra et le sérum antivenimeux (voir p.501). — M. A. Contamin montre que les tumeurs greffées de la souris, en voie de résorption sous l'influence des rayons X, subissent une évolution pseudo-kystique. — M. Fougerat montre, par l'étude des homologies des muscles du membre postérieur des Reptiles, que la division du travail est le facteur essentiel déterminant l'homologabilité. — M. Rose a étudié chez les Daphnies l'héliotropisme (positif), la sensibilité lumineuse et thermique différentielle (la loi de Weber s'applique), le thermotropisme (net), le galvanotropisme (à peu près nul). — M. H. Jacob de Cordemoy a constaté que, dans les mêmes conditions de milieu, les caractères et la disposition de l'appareil sécréteur de la tige et de la feuille des Clusiacées peuvent contribuer à la détermi- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 531 nation anatomique des genres. Mais, si les conditions de milieu varient, la constitution de cet appareil offre parfois des variations considérables. — MM. P. Ter- mier et J. de Lapparent ont éludié la monzonite de Fontaine-du-Génie, près Cherchell (Algérie); elle est un peu moins sodique el plus potassique que la plu- part des monzonites. Aux environs se trouvent des micromonzonites de même composition chimique et minéralogique. — M. R. Zeiller déduit de ses études sur quelques plantes wealdiennes du Pérou que les frondes du Werchselia reticulata devaient être des frondes tripennées, à pennes primaires subopposées, et que l’Æquisetites Peruanus ne représente autre chose que des tronçons de leur rachis primaire. — M. V. Roussanof attribue les schistes argileux plissés de la Nouvelle-Zemble au Silurien inférieur ou peut- être mème au Cambrien. Puis il a trouvé des couches fossilifères appartenant au Silurien supérieur, au Dévo- nien inférieur et moyen et au Carbonifère. — M. A. Doby à découvert un banc fossilifère très riche dans le Muschelkalk de Bourbonne-les-Bains. — M. J. Boussac sépare le Nummulitique helvétique, qui appartient bien effectivement à la nappe du Wildhorn, d'une masse considérable de Flysch qu'il faut rat- tacher au groupe inférieur des nappes préalpines. — M. Roman distingue, parmi les Rhinocéridés oligocènes d'Europe, cinq rameaux, dont le premier apparait au début du Stampien pour s'éteindre sans laisser de des- cendants dans le Stampien supérieur, et le dernier débute seulement dans les assises de passage de l'Oli- gocène au Miocène. — M. Fournier a trouvé, à l'inté- rieur des nodules à Ammonites triasiques de Mada- gascar, une cavité entourée d'une gangue siliceuse formée d'un nombre incalculable de minuscules Ammonites, Il considère l'organisme ayant donné naissance à la cavité comme un flotteur ayant sup- porté les œufs, sur lequel les jeunes évoluaient jusqu'à un certain stade. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 31 Mai 1910. MM. Régis (de Bordeaux) et Collignon (de Cher- bourg) sont élus Correspondants nationaux dans la Division de Médecine. M. J. Lucas-Championnière présente un Rapport sur une observation de M. Tuffier relative à l'extraction d’une balle de revolver mobile dans le liquide céphalo- rachidien lombaire. Cette balle fut localisée par la radiographie au niveau de la quatrième lombaire dans la position debout, mais deux opérations successives ne permirent pas de la trouver. Une radiographie en position couchée montra que la balle remontait dans le liquide céphalo-rachidien jusqu'au niveau de la douzième lombaire, où enfin elle put être extraite. — M. A. Netter montre que la paralysie infantile est apparue sous forme épidémique à Paris et dans sa ban- lieue en 1909; de juin les cas ont été en augmentant jusqu'en septembre, puis ils ont décru jusqu'en décem- bre. Le contage paraît avoir été puisé à l’école. Des épidémies analogues ont été observées en ces dernières années en Suède, en Norvège, en Allemagne, en Autri- che et aux Etats-Unis; elles ont sévi surtout pendant les mois d'été et d'automne. La maladie paraît moins souvent transmise par les malades que parles personnes saines ayant approché les malades. Il y aurait lieu d’en demander la déclaration obligatoire. — M. H. Hallo- peau indique les bases d’un fraitement abortif de la syphilis en trente jours, basé sur ces deux idées que la maladie demeure presque exclusivement localisée pendant toute sa période primaire et qu'il est possible de détruire le tréponème dans ses localisationsinitiales. La méthode consiste en un traitement local intensif, mis en œuvre à partir des vingt premiers jours d'une syphilis à sa période primaire, — consistant en injec- tions d'hectine à la dose quotidienne de 20 centi- grammes ou d'oxycyanure de mercure à la dose de 2,5 à 5 milligrammes, combiné avec un traitement général également très actif par des injections sous- cutanées de benzoate de mercure et d'iodure de polas- sium. Avec ce traitementcontinué pendant trente jours, on enraie complètementet, selon toute vraisemblance, définitivement l’évolution de la syphilis; cent qua- rante et une observations en font foi, sans aucun fait négatif, — M. le D' Ménétrier lit un travail sur un cas de salpingite amibienne. — M. le D' Legry lit une étude sur un cancer du rein avec volumineux kyste hématique. 1910. M. le Président annonce le décès de M. Trolard, correspondant national, et de M. R. Koch, associé étranger. : M. E. Kirmisson présente un Rapport sur un travail de M. Chastenet de Géry relatif à la possibilité d'uti- liser la peau de certains poissons, tels que l'anguille et le congre, pour la préparation des fils chirurgicaux résorbables. La peau est décapée, raclée sur ses deux faces, puis divisée en lanières plus ou moins fines, qui sont mouillées et tordues seules ou par deux. Elles sont ensuite stérilisées par passage de trente-six heures dans une solution alcoolique d'iode, une solution d'acide chromique ouune solution-iodurée avec adjonc- tion de formol ou de glycérine. Les fils sont conservés dans l’éther. Les expériences faites sur les animaux, puis sur l'homme, ont montré qu'ils sont complètement résorbables. — M. G. Dieulafoy signale deux cas remarquables de pachypleurite avec liquide pleural Séance du 7 Juin jusqu'ici intarissable. L'une de ces pleurésies dure { Ï depuis dix ans, l’autre depuis vingt ans ; dans les deux cas, on à dû pratiquer plus de cent fois la thoracentèse, et dans les deux cas on a retiré une quantité totale de liquide dépassant 200 litres. Chez l’un, la pleurésie est purulente et fétide, chez l'autre, séro-fibrineuse, puis sanguinolente, et stérile. L'état général des deux malades est resté bon. Malgré cela, la décortication paraît le traitement de choix de cette affection. — MM. A. Poncet et R. Leriche montrent que, de toutes les causes de sclérose ovarienne, la tuberculose est l’une des plus fréquentes. Or, la sclérose ovarienne ou l’im- prégnation toxique du follicule de de Graff peut entrainer l’infantilisme, l'hypoplasie génitale, l'amé- norrhée, la dysménorrhée et la tendance aux avorte- ments répétés. Dans ces cas, il faut songer à une tuberculose latente et la chercher par tous les moyens possibles. — M. A. Pinard estime que les femmes qui vomissent pendant la gestation sontdes femmes intoxi- quées. Il n’y à pas deux sortes de vomissements. Le vomissement est le premier symptôme apparent d’une intoxication, dont l'organisme triomphe le plus sou- vent, mais aussi pouvant entrainer la mort, après avoir déterminé des symptômes multiples et variables en rapport avec la réaction individuelle, et dont le plus constant et le plus grave est l'accélération du pouls. L'origine de cette toxémie gravidique résiderait dans l'insuffisance hépatique. Le traitement doit con- sister dans un régime lacto-végétarien ou lacté absolu. S'il échoue, il faut de suite interrompre la grossesse dès que le nombre de pulsations s'élève à plus de 100 par minute, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 28 Mai 1910. M. Belin montre que la sensibilisation de la mère cobaye avant ou pendant la gestation produit chez le fœtus la formation de toxogénine qui se fixe en partie sur les cellules de l’encéphale. Il y a production du poison anaphylactique aussi bien avec le sérum homo- logue qu'avec un sérum hétérologue. — MM. Ch. Richet fils et A. Grigaut ont constaté que la bron- chorragie, évidente ou minime, est de règle dans les affections de l'arbre respiratoire. Cette tendance à l’'hémorragie est encore plus accentuée pour la 532 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES muqueuse buccale. — M. F. Battelli et Mlle L. Stern ont reconnu que l'échange continu du sang avec un chien normal, par la circulation croisée, ne suffit pas pour prolonger la vie d'une manière appréciable chez un chien privé de capsules surrénales. — M. G. Billard a observé que, chez les grenouilles plongées dans l’eau salée, la rapidité de l'absorption de l’eau par la peau est fonction de l'activité vitale des animaux. — M. H. Busquet a constaté qu'en dehors de l’époque du frai le cervelet exerce, vis-à-vis du centre médullaire de la copulation chez la grenouille, une action inhibi- trice constante. Le fonctionnement de ce centre chez l'animal adulte est indépendant de toute influence testiculaire. M. Al. Cawadias à reconnu que le sérum sanguin humain normal est pour le cobaye un poison faible, mais réel. Il détermine la mort d'un animal de 500 grammes à la dose de 70 centimètres cubes. Il a une action nécrosante locale et modifie pro- fondément la nutrition en provoquant la cachexie. — M. A. Frouin recommande pour la culture du bacille tuberculeux un nouveau milieu contenant de la gluco- samine et de la sarcosine. — M. M. Aynaud a observé que le métaphosphate de soude protège les globulins du sang non seulement contre l'agglutination par le suc des tissus, mais aussi contre les autres substances agglutinantes. — M. P. Mulon montre que, dans la surrénale corticale du cobaye, du fait de l'élaboration et de la transformation des mitochondries, il y a charge de certaines cellules en substance sidérophile, substance qui contient un acide gras libre ou facile- ment libérable, — MM. CI. Gautier et Th. Nogier ont constaté que les rayons ultra-violets détruisent le chromogène scatolique de l’urine et la couleur qui en dérive. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier ont observé que la saignée, pratiquée vingt-quatre heures avant l'injection d'urohypotensine, crée une résistance marquée à l’intoxication. — Mie J. Weil à reconnu que l’action de la fatigue sur le muscle semble suivre la loi générale d’après laquelle la grandeur de l'addition latente varie avec la chronaxie. — M. et Me L. Lapicque et M. G. Filon ont constaté que l'influence de la température sur les vitesses d'exci- tabilité des museles est considérable et du même ordre que l'influence de la température sur les vitesses de réactions chimiques; mais elle s'écarte notablement de la loi de Van’t Hoff. — M. V. Pachon montre que l'observation seule du pouls est absolument insuffisante pour juger de la valeur fonctionnelle, c’est-à-dire de l'endurance d'un organisme en cours de production de travail, tandis que l'étude sphygmomanométrique constitue manifestement, au contraire, un critère très sensible de la valeur fonctionnelle individuelle. — M. M. Doyon à observé que le foie isolé, soumis au passage du sang artériel additionné d’eau distillée, sécrète de l'antithrombine.— M. J. Talarico a reconnu que la cuisson à 100° diminue considérablement la digestibilité du tissu musculaire; cet effet inhibiteur disparaît par la cuisson à 140°. Séance du 4 Juin 1910. MM. A. Mayer et G. Schæffer présentent un appareil à contention pour lapins. —MM. A. Laveran et A. Pettit ont trouvé chez plusieurs lérots le trypanosome décrit par Brumpt sous le nom de 7r. Blanchardi ; il est probable que sa transmission a lieu par l’intermé- diaire d’une puce nouvelle, trouvée sur cet animal, le Ceratophyllus Laverani. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre montrent que l’ébauche de l'appareil hyoïdien du chien est identique à celle du squelette des membres ; les nodules cartilagineux, puis osseux, y apparaissent de facon semblable; les articulations s’y développent d'après le même processus. — M. H. Telmon estime que la modilication qu'il à apportée à la réaction de Meyer dans son application à l’urine lui donne son maxioum de sensibilité et la rend, dans les cas de destruction globulaire partielle par hypotonie ou hémolyse, plus sensible même que la recherche microscopique. — M. Amédée Bonnet décrit une nouvelle méthode de fixation des algues par une solution de quinone fraîchement préparée à 40/5. — M. H. Mathieu a étudié l’hydrolyse de la gélatine et de la caséine par le suc pancréatique ; les courbes sont très régulières, quoique d'allure différente dans les deux cas. — M. G. Billard déduit de ses recherches sur la grenouille‘que toute méthode qui, pour apprécier la tension osmotique des tissus, sera basée sur la résistance de ceux-ci dans les solutions de NaCl, doit être considérée comme inacceptable. — MM. A. Gilbert et E. Chabrol, dans les intoxications faibles par la toluylène-diamine, ont observé une fragilité globulaire légère et de courte durée; dans les intoxications fortes, on obtient non seulement de la fragilité globulaire, mais encore et surtout de l'hémoglobinémie. — MM. R. Legendre et H. Piéron montrent qu'il n’y a en aucune manière augmentation de la densité, de la viscosité et de la tension osmotique du sang, ni diminution de la teneur en eau du cerveau lorsque se manifeste le besoin impératif de sommeil chez le chien. — M. G. Bohn à reconnu que la fermeture des Actinies au moment de la baisse de la merest déterminée par une augmentation de l’éclairement, et non par une modi- fication dans l'état mécanique, physique ou chimique de l'eau. — MM. Hallion el Alquier, après ingeslion prolongée d'extrait surrénal chez le lapin, ont constaté des modifications nettes des thyroïdes et des surré- nales qui semblent correspondre à une diminution de fonctionnement. — M. P. Desroche montre que le Vaucheria terrestris Lyngb.etle V. Geminata Walz sont, en réalité, deux formes d'adaptation d’une même espèce capable de vivre à l'air ou dans l’eau. — MM. R. Demanche et G. Détré concluent de leurs recherches sur 76 enfants que la réaction de fixation peut être utilisée avec profit pour le diagnostic souvent difficile de l'hérédo-syphilis. — M. C. Fleig a étudié les divers agents sensibilisateurs de la réaction à la phénol- phtaléine pour la recherche du sang dans l'urine. L'alcool acétique donne les meilleurs résultats. Les alcools tartrique, lactique, formique, nitrique, chlor- hydrique sensibilisent aussi à des degrés divers. — M. Ozoux a trouvé à la Réunion, dans le cul-de-sac sous-nictitant du dindon, une filaire identique à celle du paon (Oxyspirura Mansoni).— M. L. Morel présente une goutlière métallique pour opérations sur le chien. — M. Al. Cawadias a constaté que les effets de l'injection du sérum d'urémique chez le cobaye sont comparables à ceux que produit l'injection de sérum normal ; il n'y a qu'une différence de degré. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 17 Mai 1910. M. C. Gerber a éludié l'action des sels auriques, platiniques et palladeux sur la coagulation du lait par les ferments protéolytiques. — MM. J. C. Gauthier et A. Raybaud confirment le fait que les puces du rat, le Ceratophyllus fasciatus et le Ctenopsylla musculr, piquent l'homme. — Les mêmes auteurs ont constaté que le Ceratophyllus fasciatus, infecté de peste par succion du sang d’un rat pesteux, et placé ensuite à basse température, survit comme la puce saine et conserve pendant toute sa survie le virus dont il s'était chargé. — MM. Oddo et Monier ont observé chez les tuberculeux l'apparition d’une lymphocytose après les hémoptysies; il y a également polynucléose si la poussée hémoptoïque est suivie d’une aggravation de l'état pulmonaire. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 27 Mai 1910. M. G. Blane communique, au nom de M. J. F. Thorpe et au sien, le résultat des recherches entre- prises en vue de vérifier la constitution de l’éther dice- tocamphorique de M. Komppa. Il montre que cet éther ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES n'a point la constitution que ce dernier auteur lui attribue. Sa véritable formule de structure : CH‘ CH! 7 C C3, CO?, CH GC. CO? CI alu XOCH) est démontrée par le fait suivant, Traité par la potasse aqueuse à froid, il est intégralement converti en éther dicélo-apocumphorique. Ce dernier, au sein de la disso- lution alcaline, subit une hydrolyse partielle avec for- mation d'acides oxalique et 6.$-diméthylglutarique. II ne se forme pas la moindre trace d'acide aff-trimé- thylglutarique. Dans ces conditions, MM. Thorpe et Blanc ne comprennent pas très bien comment M. Komppa à pu, par réduetion d’un corps qui possède un enchaînement de 9 atomes de carbone, obtenir l'acide camphorique qui, lui, en contient 10. — M. G. Urbain expose les recherches qu'il a entreprises en commun avec MM. Blondel et Obiedoff sur le traite- ment des blendes germanifères, en vue de l'extraction du germanium. A cet effet, la blende pulvérisée est attaquée par son poids d'acide sulfurique concentré. Les liqueurs sont traitées par la quantité de sulfure de sodium nécessaire pour précipiter tout le germanium. Dans ces conditions, le précipité obtenu renferme sur- tout du zinc et représente seulement une matière pre- mière plus riche en germanium que la blende primitive. Les sulfures sont calcinés et les oxydes sont attaqués par l'acide sulfurique. Les liqueurs sont additionnées d'une forte quantité d'acide et traitées par H°S. Dans ces condilions, le germanium précipite en même temps que tous les métaux des deux premiers groupes ana- lytiques. Le précipité renferme surtout du cadmium, 11 a été attaqué par l'acide nitrique. Les liqueurs sont précipitées par l’ammoniaque en ménageant la préci- pitation. Le germanium précipite dans ces conditions avant le cadmium. Le précipité est dissous dans l'acide sulfurique et traité par un excès d’ammoniaque. La liqueur filtrée renferme le germanium avec de larsenic, du molybdène, du zinc, du cadmium. Par l’ébullition, le sermanium s’accumule dans les premiers précipités. Ceux-ci sont dissous dans l'acide sulfurique et la liqueur est additionnée d’un tiers de son volume d’HCI à 220. La précipitation par l'hydrogène sulfuré donne un précipité jaune renfermant de l’arsenic et du ger- manium. Le précipité est dissous dans l’ammoniaque sans excès. En neutralisant la liqueur avec ménage- ment, on précipite d'abord larsenic. L'addition d’un excès d'acide et la saturation de la liqueur par l'hydro- gène sulfuré donnent alors un précipité blanc de sul- fure de germanium. Les résidus insolubles dans les acides qui se forment dans ce traitement abandonnent aux alcalis le germanium qu'ils renferment. Les liqueurs sont traitées par un excès de sulfure de sodium et en- suite par un excès d'acide. Les sulfures ainsi obtenus sont traités ensuite par l’ammoniaque en vue de la séparation du germanium d'avec l’arsenic. Ce traite- ment a porté sur 550 kilogrammes d’une blende ren- fermant environ un cent-millième de germanium. — MM. M. Cousin et H. Hérissey indiquent une méthode de préparation facile du déhydrodicarvacrol, composé isomère du dithymol. Ils décrivent les propriétés de ce corps, ainsi que la préparation et les propriétés de ses éthers méthylique, acétique et benzoïque. Le carvacrol, traité par le ferment oxydant des champignons, ne donne pas lieu à la formation de déhydrodicarvacrol, contrairement au processus observé antérieurement par les mêmes auteurs dans l'oxydation du thymol, de l’'eugénol et de l’iso-eugénol. — M. E. André a éludié la préparation des cétones à fonction acétylénique. Ces combinaisons, déjà préparées par l’action des chlorures d'acides sur les carbures acétyléniques sodés, ont été obtenues par l’auteur dans des conditions beaucoup meilleures en substituant l'emploi des bromures 533 d'acides à celui des chlorures. C'est ainsi que le ben- 20yIphénylacétylène, difficilement obtenu jusqu'ici, a élé préparé avec un rendement de 55 ? De même l'acétyl et le butyrylphénylacétylène ont été obtenus avec des rendements améliorés dans le rapport de 30 à 53 °/,. Appliquant aux alcools secondaires à fonction acétylénique la méthode d’oxydation par l'acide chro- mique en solution acétique, M. E. André a préparé, à partir du benzaldéhyde-phénylacétylène de MM. Moureu el Desmots, le benzoylphénylacétylène. Il est intéres- sant de voir dans ces conditions l'oxydation porter sur la fonction alcool, sans toucher à la fonction acétylé- nique. L'auteur poursuit l'étude de cette réaction, qu'il compte appliquer à d’autres alcools de la même famille. — M. G. Bertrand présente une note de Me Z. Gru- zewska sur l'oxydation et l'hydrolyse du glycogène sous l'action du peroxyde d'hydrogène. Cette réaction, appliquée aux hydrates de carbone, dans diverses con- ditions bien déterminées, permet de caractériser ces derniers avec une grande facilité. — M. M. Javillier, à propos de recherches physiologiques, a étudié les silicotungstates de conicine, de spartéine et d’atropine. Il donne leur composition et leurs principales pro- priétés, et indique dans quelles circonstances ils peuvent être avantageusement appliqués à la technique analytique. — M. L. Nomblot a déposé une note sur les dérivés nitrosés des acidylhydrazobenzènes. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 14 Avril 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. N. da C. An- drade : Le {lux visqueux des métaux. Les expériences ont porté sur des fils soumis à une tension constante continue. L'augmentation de tension qui se produit par suite de l’amincissement, lorsque le fil est tendu par une charge constante, est évitée en donnant aux poids tenseurs la forme d'hyperboles de révolution et en les faisant plonger dans l’eau lorsque le fil s’allonge ; les dimensions de ces poids peuvent être choisies de facon à maintenir constante la charge par unité de surface de section. Les métaux expérimentés ont été le plomb et un alliage plomb-étain; les résultats ont été analogues. Avec une charge convenable, on observe un écoulement initial rapide, faisant graduellement place à un écoulement tranquille, dont la vitesse par unité de longueur d'écoulement de fil est constante jusqu'à la rupture. L'extension du fil peut être repré- sentée par la formule : 2=7](1<+84/3)ert, où & est la mesure du flux initial rapide (flux £) et K la mesure du coefficient de traction visqueuse. & tend à devenir constant lorsque la tension augmente ; dans une série d'expériences sur le plomb à 1600, 8 tend vers la même valeur constante que dans les expériences à la tempé- rature ordinaire. Il est probable que & mesure un effet physique défini, dépendant de quelque structure géo- métrique. Pour l’alliage, le flux £ est relativement très faible. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M. Clive Cuthbertson el M'ie Maude Cuthbertson : La réfraction et la dis- persion de l’argon et les redéterminations de la di<- persion de l'hélium, du néon, du krypton et du xénon. L'indice de réfraction de l'argon a été déterminé pour sept points du spectre avec des appareils perfectionnés: les auteurs ont fait aussi des redéterminations soi- gnées de la dispersion des quatre autres gaz inertes, de façon à les amener au même degré de précision. Les réfractivités sont exprimées sous la forme : u—1 —C/{m,— n°), et les constantes de ces équations, calculées d’après les observations, par la méthode des moindres carrés, sontindiquées dans la table suivante : no? X 10—27 Biément te HEURE U 34.991 ,7 NÉOTSSRACRTE NN 35.916 ,2 Argon. 17.008 ,9 Krypton . 12.767,9 Xénon. 8.977,9 534 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ZE ——— ——_ —_—_—_—_—— ———_—_— Les valeurs des réfractivités qui découlent de ces équations s'accordent généralement avec celles trou- vées expérimentalement à un ou deux points près du cinquième chiffre significatif. C'est une satisfaction de trouver que les valeurs de n°, obtenues maintenant par ces mesures plus précises ne diffèrent que de 2 °/o de celles publiées par les auteurs en septembre dernier. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. J. O. W. Barratt L'action de la radiation du bromure de radium sur la peau de l'oreille du lapin. L'auteur a exposé l'oreille de lapin à l’action de la radiation de 4 milligramme de bromutre de radium, étendu sur une surface circulaire de 7 millimètres de diamètre et il a étudié la pigmen- tation résultante de la peau. Il a trouvé que le pigment se dépose le plus abondamnent vis-à-vis du bord du disque de sel de radium. Lorsque le dépôt est examiné sous un faible agrandissement, il présente une appa- rence réticulaire caractéristique. Les plus grands espaces enfermés par le pigment, qui sont plus ou moins polygonaux, contiennent des groupes de folli- cules pileux, mais les plus petits espaces en sont exempts. Une certaine quantité de pigment est aussi disposée d’une manière diffuse, principalement vis- à-vis ou un peu en dehors du bord du disque. Ce dépôt, lorsqu'il est accentué, obscurcit quelque peu la forme réticulaire. Le dépôt du pigment n'est pas tout à fait uniforme, mais tend à prendre une forme poin- tillée. Il se produit une dépigmentation variant de degré vis-à-vis du centre du disque du sel de radium, quoique, en même temps, on puisse quelquefois noter ici et là une faible quantité de pigment, disposée sous une forme réticulaire imparfaite. La pigmentation se produit principalement dans l'épiderme, la peau vraie étant moins affectée. La dépigmentation affecte aussi à la fois l’épiderme et la peau vraie; mais, cependant, elle est plus frappante dans la dernière que dans le premier. On n'a observé aucun changement dans la pigmentation des tiges de poils. Dans un lapin blanc dont les pupilles présentent un réflexe rouge, une exposition prolongée à l’action du bromure de radium a causé l'apparition d'un dépôt réticulaire excessive- ment faible, vis-à-vis de l'applicateur. A part cette exception, tous les lapins employés étaient noirs ou noirs et blancs. On a fait des essais pour obtenir la pigmentation de la peau humaine par l'action du radium, mais ils n'ont pas réussi. — M. Silvanus P. Thomson : Un eflet physiologique du champ magnétique alternant. Si, dans une pièce sombre ou avec les yeux fermés, on place Ja tête dans un champ magnétique alternant d'une intensité suffisante, on aperçoit sur toute la région visuelle une faible illumination vacil- lante, incolore outeintée légèrement en bleu. La période de vacillement n'est pas bien définie. Elle ne paraît pas être la même sur tout le champ visuel à la fois, ni être également claire. Même au jour avec les yeux ouverts, on à conscience d'une sensation de trem- blottement superposée sur la vision ordinaire. Il n’a pas été encore définitivement établi si quelque relation existe entre la direction de l’axe du champ et la posi- tion du crâne. On n’a observé aucun effet postérieur d'aucune sorte. Le champ magnétique alternant, dont l'intensité (moyenne carrée) était d'environ 4.000 unités C.G.S., était produit par l'envoi d'un courant d'en- } viron 480 ampères à travers une bobine de 32 tours | de forme cylindrique d'à peu près 9 pouces de dia- mètre intérieur, le courant ayant une fréquence de 50 périodes par seconde. On n'a observé aucun effet sur le sens de l’odorat, du goût et de l’ouïe. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 4 Avril 1910. M. Ph. Schidrowitz trace le tableau de l’industrie du caoutchouc. Il décrit successivement : les plantes productrices de latex, leur exploitation naturelle, leur plantation, la récolte du latex, la coagulation, les qua- lités des diverses espèces de caoutchouc, la chimie du caoutchouc et la question de sa synthèse, la fabrication des objets en caoutchouc et la vulcanisation, les succé- danés du caoutchouc, l'industrie des déchets et la récu- pération du caoutchouc. SECTION DE NEW-YORK Séance du 25 Kévrier 1910. M. L. Ottinger expose un procédé d'imprégnation des arbres vivants. Une incision est faite autour du tronc où d'une branche d’un arbre vivant, suffisante pour permettre l'introduction d’une substance colorée placée dans une rigole qui entoure le tronc. La matière colorante est appliquée aussitôt après la dis- jonction des fibres, avant que le flétrissement du feuil- lage ait arrêté la circulation; la matière colorante monte avec la sève dans les fibres du bois d'une façon régulière. Le cœur seul de l'arbre reste inaltéré. En sectionnant le tronc au-dessus de l’incision, on observe une série d’anneaux colorés. Comme matières colo- rantes, on peut employer la plupart des couleurs d’ani- line, des agents oxydants ou des extraits d'écorces. Séance du 25 Mars 1910. MM. J. E. Crane et CI. M. Joyce ont préparé de nouveaux dérivés de la cellulose à faible teneur en azote au moyen d’un mélange nitrant formé de 65,5 °/4 H2S0:, 9 o/, HAzO® et 25,5 /, H°0. On obtient ainsi des nitro-celluloses gélatineuses, se rapprochant de la composition moyenne C‘#H°0%Az (qui contient 3,55 °/o d’Az). Elles sont insolubles dans tous les solvants des nitro-celluloses, mais très solubles dans les alcalis caustiques. Le mécanisme de la réaction paraît être le suivant : L'acide sulfurique dissout la cellulose en for- mant des éthers sulfuriques, qui sont décomposés par l’eau en hydrates, puis convertis en nitrates par l'acide nitrique. — M. F.-E. Ives décrit un nouveau procédé de photographie trichromatique, qui constitue une simplification du procédé qu'il à déjà décrit en 1881. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 23 Mars 1910. MM. J. T. Wood et D. J. Law indiquent un procédé pour déterminer le chrome dans les liqueurs de tan- nage au chrome à un bain au moyen du colorimètre. On se sert comme étalon d’une liqueur épuisée dont la teneur a été déterminée par l'analyse; les liqueurs sont simplement filtrées pour enlever la matière orga- nique. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 21 Mars 1910. M. J. W. Cobb : Synthèse des vernis de poteries, verres et autres silicates complexes. IV : Action de la soude sur la silice et l'alumine. L'action de la soude à l’état de carbonate) sur la silice commence à 700», A S50° le carbonate fond. Avec les proportions Na°0 SiO?, la réaction est complète, et il se forme à 950° un silicate solide non résistant aux acides, qui devient un liquide mobile à 1.150° et se solidifie en un verre par refroidissement. Avec les proportions Na°0 + 10Si0*, il se forme à 1.150° un silicate non résistant correspondant au verre soluble Na°0.4Si0* et également un silicate plus résistant contenant plus de silice. L'action de la soude (à l’état de carbonate) sur l'alumine commence à 710°-720°. Avec les proportions Na*O + AIO, elle est complète à 1.150° en donnant un aluminate non résistant Na°0,A1°0%, Au-dessus de cette température, l’aluminate est graduellement décom- posé sans trace de fusion. Avec les proportions Na*O — 10A1°0%, toute la soude forme un aluminate non résistant Na°0.A1°0* jusqu'à 1.000°, lequel se dis- socie complètement à 4.150; il n’y a pas de signe de formation d'un aluminate insoluble. | | 1L "4 — ae "> ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 10 Mars 1910. M. W. Branca donne lecture d'un Mémoire sur l'état actuel de nos connaissances au sujet de l'homme fossile. Il fait remarquer que rien n’oblige à admettre que le type inférieur du crâne de Neanderthal se soit présenté en Europe, à l'époque diluvienne, plus tôt que le type supérieur el qu'il ait 66 l'ancêtre direct de ce dernier. Le développement du type inférieur peut, en eflet, s'être produit bien avant dans l'époque tertiaire et en dehors de l'Europe. De sérieuses objections doivent aussi être formulées contre l'hypothèse de l'origine de l'hormme à partir d’anthropomorphes identiques à ceux de nos jours. Séance du 17 Mars 1910. M. M. Rubner donne lecture d’un Mémoire sur /a compensation et l'addition des performances fonction- uelles du corps. La détermination expérimentale exacte des performances fonctionnelles se heurte à des diffi- cultés dues à leurs relations mutuelles. Tout en le cédant à la fonction d'un organe donné, l'importance des fonctions concomitantes n'estaucunement négligeable. Or, à côté des fonctions concomitantes positives, il y en à quelquefois d’un effet négatif, l'action d’un organe entraînant la mise hors de fonction d’un autre (refroidissement de la peau à basse température ambiante, accompagné d’une décroissance du méta- bolisme dans celle-ci et d'un accroissement dans d’autres régions, etc.). On ne réussit qu'incomplètement à décomposer une fonction organique donnée en ses composantes. D'autre part, on sait que l'absorption de nourriture augmente l'échange d'énergie, par rapport à l’état de jeûne, d'une quantité qui dépend de la qualité et de la quantité de la nourriture. Ce phéno- mène, que l’auteur désigne sous le nom d°’ « effet dynamique spécifique des substances alimentaires »,ne se produit librement qu'aux températures ambiantes élevées. Par contre, aux températures abaissées graduellement, disparaissent d’abord les effets des hydrates de carbone, après ceux des graisses et enfin ceux des albumines, de facon que la différence entre l'échange d'énergie de l'animal nourri et celui de l'animal jeûnant finit par disparaître. On est donc en présence d'une compensation très marquée de deux fonctions, à savoir : l'effet stimulant de la nourriture (effet constant pour une alimentation constante) et le réglage de chaleur chimique en fonction de la chaleur ambiante. L'auteur a voulu étudier par des expériences sur l’homme si les augmentations de la consommation d'énergie après l'absorption de nourriture et pendant le travail musculaire sont, dans le cas d’une action simul- tanée, des fonctions additives ou partiellementcompen- satoires. Les expériences faites sur un homme assez vigoureux, d’un poids de 61-63 kgs, font voir à l'évi- dence qu'il s’agit bien d'une addition. Alfred GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du & Février 19M0. M. H. Baerwald adresse un Mémoire sur l'absorption des rayons cathodiques au sein des gaz. Les recherches de M. A. Becker', d'accord avec les déterminations antérieures de M. Lenard*, avaient démontré la vali- dité, pour l'absorption des rayons cathodiques dans les corps de densités variables, d'une loi de propor- tionnalité des masses. En raison, toutetois, de l'incer- titude existant jusqu'ici quant aux valeurs absolues des coefficients d'absorption, l'auteur détermine ces valeurs par une méthode directe, indépendamment pour chaque gaz, en basant ses mesures sur le rayon- * Ann. der Physik (4), t. XVII, p. 381, 1905. 2 Wied. Ann., t. LVI, p. 255, 1895. 535 nement secondaire engendré par les rayons catho- diques dans l'air à pression atmosphérique. Ses ré sultats présentent un accord aussi parfait que possible avec ceux de M. Becker, tout en contirmant une fois de plus la proportionnalité entre les intensilés des rayonuements primaire et secondaire. Incidemment, M. Baerwald indique la possibilité d'utiliser l'absorp- tion des rayons cathodiques comme critère de la constante électrique des gaz. — M. E. Wiedemann communique une note sur l'invention de la chambre obseure. Dans un mémoire publié dans un recueil photographique, l'auteur a démontré que, longtemps avant Levi ben Gerson (1345), la chambre obscure à été utilisée par Ibn al Haïtam (vers 1039). Le premier s'en est servi pour observer les éclipses de Soleil etde Lune; ce dernier n’a réussi qu'à observer les éclipses de Soleil. Une théorie très détaillée de la chambre obscure, appliquée aux conditions terrestres, à été donnée par Muhammed Ibn a] Hasan Kamäl al Din Abu'l Hasa (Hosein) al Fârisi (Æ vers 1320) dans un Mémoire dont l’auteur présente une traduction partielle. Séance du 18 Février 490. M. F. Breisig rend compte de ses expériences sur /a détermination absolue de l'amortissement des circuits téléphoniques. La transmission de l'énergie sous la forme de courants continus s'accompagne d’une dimi- nution de la tension; l'intensité du courant, abstrac- tion faite des pertes, en général peu importantes, dues aux défauts d'isolement, reste au contraire cons- tante. La transmission à distance des courants alterna- tifs donne lieu à des phénomènes bien plus compliqués, dus à la production et à la disparition des champs magnétiques et électriques. Comme les courants de charge nécessaires pour produire le champ électrique modifient l'intensité du courant d’un endroit à l’autre du circuit, le courant subit un affaiblissement croissant à mesure que l’onde avance dans les conducteurs. On désigne ce phénomène sous le terme d'amortissement local du courant alternatif. Or, cet amortissement peut être calculé en fonction de deux facteurs com- plexes, à savoir la constante de propagation y et la caractéristique Z. Le premier de ces facteurs est déter- miné par le fait que le rapport des intensités de cou- rant ou des tensions, à deux endroits, distants de /, d'un conducteur illimité prend la valeur e *{. La carac- téristique Z, qui possède les dimensions d’une résis- tance, est indépendante, dans un conducteur homogène, de la longueur de ce dernier; sa valeur numérique dépend du système d'unités électro-magnétiques qu'on choisit. D'autre part, la technique téléphonique désire vivement pouvoir caractériser par un accord interna- tional le rendement des circuits téléphoniques de longueur considérable. L'auteur préconise à cet effet la comparaison, par des expériences téléphoniques, du circuit à examiner avec un circuit étalon. Entre deux appareils téléphoniques, disposés dans des salles suffi- samment éloignées, on opère l'échange immédiat des deux circuits; le circuit étalon étant susceptible de certaines graduations, il s'agit de déterminer le point pour lequel les deux transmissions téléphoniques pro- duisent une même impression acoustique. L'auteur se sert, comme circuit étalon, d'un câble artificiel comportant deux résistances d'une valeur identique à celle du câble à imiter et entre lesquelles la capacité du câble se trouve répartie sous la forme d'un nombre de condensateurs identiques. L'appareil, construit suivant les indications de l’auteur par l'usine Siemens et Halske, se prête aussi à des recherches d'un ordre purement physique; il permet, en effet, de soumettre les transmissions acoustiques de la parole à des modi- fications données quelconques. — M. A. Pflüger adresse une note sur /es phénomènes d'absorption et d'inversion dans l'hydrogène lumineux. Suivant une récente assertion de M. R. Ladenburg, les expériences de ce savant ne seraient représentées que par une valeur variable de E/A dans la région d’une raie spec- 236 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES irale et, par conséquent, démontreraient l'inadmissibi- lité de la théorie considérant le rayonnement de l'hydrogène lumineux comme rayonnement de tempé- rature. Or, l’auteur fait voir que cette façon de voir est inexacte, l’ensemble des expériences en question étant parfaitement expliqué sur labase d’une valeur constante de E/A. Il indique une expérience susceptible de décider définitivement la question de la variabilité ou non de E/A. — M. R. PohletP. Pringsheiïm adressent un Mémoire sur /a sensibilité photo-électrique des métaux alcalins en fonction des longueurs d'onde. On sait que la sensibilité photo-électrique d’un métal est définie comme la quantité d'électricité (réduite à l'unité de lumière incidente) qu'on observe pendant l’irradia- tion du métal dans des conditions de pression gazeuse, potentiel, etc., données. Les auteurs observent que cette sensibilité, dans le cas de l’alliage KNa, s'accroît continuellement (de même que pour les autres métaux jusqu'ici examinés), à mesure que décroît la longueur d'onde de la lumière, pourvu que celle-ci arrive sous une incidence normale. Lorsque, au contraire, l'angle d'incidence à la surface miroitante est oblique, la sen- sibilité présente dans le spectre visible un maximum pratiquement absolu. Ce phénomène s'explique par ce que le facteur de proportionnalité entre l'absorption lumineuse et l'effet photo-électrique pour la composante vectorielle électrique, oscillant dans le plan d'incidence, est une fonction de la longueur d'onde, qui présente un maximum au voisinage de À—400 gg et dont l'allure indique l'existence d’un phénomène de réson- nance., — M. W. Haken donne lecture d'un résumé de sa thèse inaugurale, présentée à l’Université de Berlin, sur les propriétés thermo-électriques des alliages métalliques. L'examen des systèmes tellure-antimoine, tellure-étain, tellure-bismuth, tellure-plomb, anti- moine-argent et cuivre-phosphore, lui démontre que la détermination desforcesthermo-électriques constitue un réactif très sensible quant à la présence de com- posés chimiques dans ces séries d’alliages. L'allure des courbes, entre les composantes et les composés, est continue; la formation des cristaux mixtes semble se manifester par une courbure particulièrement pro- noncée, tandis que, dans le cas où la miscibilité à l'état solide n'existe pas, l'allure se rapproche davan- tage d’une ligne droite. La détermination de ces forces thermo-électriques peut, par conséquent, servir dans bien des cas à confirmer les conclusions de l'analyse thermique des alliages, les mesures étant faites immé- diatement sur la matière congelée, tandis que les déterminations de la conductibilité électrique se trouvent rendues assez difficiles par l’état cassant de la plupart desalliages.— M. M. Otto adresse un Mémoire, résumé d’une thèse présentée à l'Université de Halle, sur les investigations magnétiques comparatives des anneaux de fer et d’alliages fer-silicium. Il examine, pour quatre alliages fer-silicium (à 0, 0,61, 1,94, 4,55 de silicium. la relation entre les conditions magné- tiques et le nombre de stages du procédé d’aimanta- tion ainsi que la viscosité magnétique (effet résiduel). Incidemment, il détermine, en valeur relative, la force coercitive et la perte d'hystérèse. ALFRED GRALENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 28 Avril 4910. SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Behacker remplace, dans le calcul du champ terrestre, l'hypothèse de la mobilité constante des ions par celle de mobilités variables, qui correspond avec les faits, et donne une table des forces du champ à diverses hauteurs au-dessus du sol, qui montre une influence distincte de cette variabilité sur la répartition du potentiel. — M. K. Przibram à appliqué la méthode microscopique de Millikan, pour la détermination de la charge des ions dans les brouillards provenant de l'expansion, aux brouillards qui se forment spontanément dans l'oxygène électrolytique fraîchement préparé. Les valeurs obtenues pour la charge des particules montrent des lieux d’accumula- tion ; les maxima de la courbe de répartition se suivent dans des espaces réguliers correspondant à une diffé- rence de charge de 3,5 X 101 unité électrostatique quand le poids spécifique des gouttelettes est posé égal à 4.— MM. Zd. H.Skraup, E. Krause et A. von Biehler ont constaté que, dans l’ascension capillaire des acides organiques dans le papier buvard comme dans celle des acides minéraux, les acides forts sont plus fortement adsorbés que les acides faibles. L’ascension est plus faible pour l'acide trichloracétique que pour l'acide acétique, pour l'acide dibromosuccinique que pour l'acide succinique, etc. Pour les acides minéraux, on a trouvé quelques exceptions : l'acide pyrophospho- rique monte très haut, l'acide ortho- et l'acide méta- phosphorique anormalement peu. — M. H. Suida à préparé une série de dérivés aromatiques non symé- triques de l’oxamide R.Az.H.C0.CO.AzH.R'. La saponi- fication de ces substances par KOH alcoolique diluée donne lieu à quatre réactions fournissant les produits R.AzH.CO.COOTN et R'AzH?, R'AzH.CO.COOH et RAzH°, et COOH.COOH. La vitesse relative de ces quatre réac- tions dépend du caractère plus ou moins positif ou négatif des radicaux R et R'. — M. J. Dollinger a préparé dix nouveaux produits d’addition de phénols et d'amines et étudié leurs réactions avec FeCF et les matières colorantes. Séance du 6 Mar 1910. 1° ScieNCEs PHYSIQUES. — M. F. Hasenohrl a calculé la résistance que subitle mouvement de petits corpus- cules dans un espace rempli par un rayonnement, en supposant que les molécules sont petites par rapport à la longueur d'onde. Il montre que cette résistance est excessivement faible et que les lois ordinaires des gaz ne doivent pas être modiliées pour cette cause. — M. E. Rumpf a constaté que les métaux Hg, Ag, Pb, PL et Pd, employés comme cathodes dans HESO', possèdent la propriété d’absorber de grandes quantités d'hydrogène. A l'exception de Pd, ces métaux absorbent dans le même temps des quantités à peu près égales de gaz. Les surfaces d’abord brillantes deviennent mattes, par pénétration de l'hydrogène à l’intérieur du métal, sauf pour Hg. La polarisation de H varie et la différence du potentiel s'élève avec le temps, mais l'augmentation de surface produite par la désagrégation du métal tend d'autre part à abaisser la différence de potentiel. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. B. Wahl termine ses recherches sur la structure des Turbellariés parasites de la famille des Dalyellides (Vorticides). 11 décrit la nouvelle espèce Collastoma minuta, trouvée dans l'intestin du Phymosoma granulatum à Naples. — "M. H. Hoefer explique les plissements sans fractures par la durée de la déformation et la pression de la masse reposant sur les terrains considérés. 1l explique également les prétendues « gouttes de pluie fossiles » comme des cicatrices laissées par des bulles gazeuses s'échappant d’une substance molle. L. BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91° ANNÉE N° 15 15 JUILLET 1910 Revue générale des ACIenCes pures et appliquées DIRECTEUR !: LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Robert Koch. — Né à Clausthal, dans le Harz, le 41 décembre 1843, Robert Koch fit ses études de médecine à l’Université de Gôttingue, où il eut en par- ticulier comme maitre le célèbre anatomiste Henle, qui fut l'adversaire de Virchow et un des partisans avant la lettre du rôle des microbes dans les maladies infec- tieuses. Conserva-t-il de cet enseignement quelque empreinte ? Il ne semble pas. Quelques années plus tard, médecin à Wollstein, dans la province de Posen, où le charbon sévissait, Koch eut l’idée d'étudier cette maladie. Il retrouva dans le sang la bactéridie de Davaine et sut en conduire l’étude si bien qu'il décou- vrit sa propriété, après s'être multipliée, de donner des spores dans un milieu artificiel, l'humeur aqueuse. Il put ainsi la faire passer par huit gouttes successives et, au bout de ces cultures, la bactéridie ou sa spore étaient encore en état de reproduire la maladie charbonneuse. Le sang desséché n'était virulent qu'autant qu'il ren- fermait la spore. On n'en demanderait pas plus aujourd'hui pour croire au rôle causal de la bactéridie. Mais, à ce mo- ment, l'idée d’un virus non figuré était si ancrée dans les esprits qu'il fallut la démonstration de Pasteur (cul- tures pures indéfiniment répétées, à tel point que la goutte de sang initiale était noyée dans un volume plus graud que celui de la Terre) pour imposer la conviction. Le travail de 1876, où Koch annonça ses découvertes sur le charbon, celui de 1878, où il établit, par des recherches sur les souris et les lapins, l'étiologie de l'infection des plaies, sont des mémoires fondamentaux de la Bactériologie médicale. Par cette œuvre d’auto- didacte, Koch s'annonçait comme un novateur génial. Il eut bientôt comme émule Pasteur qui, lui, entrait dans la même voie, dominant dès l’abord son sujet où l'avait conduit la suite naturelle de ses travaux sur le rôle des êtres microscopiques dans tant de manifesta- tions de la vie : fermentations diverses, maladies des vins et de la bière, et surtout maladies des vers à soie, pour lesquelles il avait magistralement posé les prin- cipes qui allaient régir l'hygiène humaine. Pasteur, en abordant ce nouveau domaine où il allait acquérir la suprême gloire et la popularité, REVUE GÉN:RALE DES SCIENCES, 1910. savait faire des cultures pures, et ses premiers pas, en compagnie de Joubert, de Chamberland, de Roux, furent ceux qu'on devait attendre d'un tel homme : isolement et cultures pures et irdéfinies des microbes pathogènes, bientôt suivis de la géniale découverte de l'atténuation des virus. Koch, lui aussi, devait conti- nuer à marquer puissamment son empreinte, en ima- ginant les milieux solides de culture, les méthodes de coloration différentielles par les couleurs d'aniline (dont il devait la première idée à Weigert), en un mot, en contribuant à un tel degré aux progrès de la technique que des découvertes capitales lui devinrent possibles : celles du bacille de la tuberculose (1882), du vibrion cholérique (1884). Pourquoi faut il qu'il y ait eu, entre les deux fonda- teurs de la Bactériologie médicale, autre chose qu'une noble émulation ? Pasteur, à Londres, en 1881, derant les nouvelles méthodes de Koch, lui avait rendu jus- tice : « C’est un grand progrès », avait-il dit. Il ne fut pas payé de retour. Koch nia l’atténuation des virus et s’en fit, pour un temps, le détracteur. La polémique des deux illustres savants n’eut heureusement pas de lendemain. Les bactériologistes comprennent toutes les diffi- cultés surmontées dans la découverte des microbes de la tuberculose et du choléra, en songeant que le pre- mier pousse avec une extrême difficulté sur les milieux Grdinaires et que des méthodes de coloration spéciales sont nécessaires pour le mettre en évidence; que le second doit être isolé de la flore si complexe du canal intestinal. Tout le monde se rend compte de l'impor- tance de ces deux découvertes äu point de vue de l'évolution de nos connaissances. Avec le bacille tuber- culeux surtout, les partisans de l’ancienne doctrine des virus, ceux qui avaient combattu les conceptions de notre compatriote Villemin, étaient irrémédiablement atteints et devaient s'avouer vaincus. Car Koch appor- tait à la fois le microbe, la facon de le cultiver et de le colorer, la reproduction de la maladie par son inocu- lation chez les animaux de laboratoire. Tout est resté de ce Mémoire sur l’étiologie de la tuberculose, et il sera toujours le plus grand titre de gloire de Koch; les membres de l'Institut carolin de Médecine ne s'y sont pas trompés en décernant à l’auteur, en 1905, le prix 15 238 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Nobel de Médecine et de Physiologie « pour son travail sur la tuberculose ». La tuberculose est d'ailleurs restée l'étude de prédi- lection de Koch et, s'il a abordé presque tous les domaines de la Microbiologie, il n'a jamais cessé de penser à la tuberculose. On se rappelle — et même il y en a qui de l’œuvre de Koch ne se rappellent que cela — le bruit fait par l'annonce, en 1890, d'un remède contre la tuberculose. On voulut, dépassant les prévisions du savant, l’appli- quer aussitôt aux formes les plus graves et les plus avancées de la maladie, et ce ne fut bientôt qu'une explosion de déceptions trop motivées. L'humanité, qui déjà s'était crue affranchie d’une de ses plus grandes misères,en conçutune révolte contre l'homme que les savants commencçaient à lui faire connaître comme un de ceux auxquels elle doit le plus. On sait maintenant ce qu'il y eut d'injustice dans ce retour, et que la « lymphe » de Koch, la tuberculine, rend, bien maniée, les plus grands services pour le dia- gnosticchez les Bovidés et même chezl'homme. On peut, au dire d'un grand nombre de médecins, en tirer des bénéfices sérieux dans le traitement de la tuberculose humaine. Cette substance reste l’une de celles que l’on étudie le plus dans les laboratoires, et le nombre de travaux auxquels elle donne lieu chaque année montre bien l'importance qu'on y attache. Koch ne s’en est jamais désintéressé et il a cherché, à plusieurs reprises, à perfectionner la préparation de cette substance où il avait vu, trop hâtivement sans doute, un des remèdes les plus utiles à l'humanité. En 1901, à Londres, Koch a encore excité l’atten- tion des savants en affirmant que la tuberculose bovine et la tuberculose humaine sont deux maladies abso- lument distinctes et que l’homme n'a rien à craindre de la tuberculose des Bovidés. Rigoureusement vraie, cette formule faisait caduques une partie des règles de la prophylaxie tuberculeuse, et Koch ne craignait pas de tirer les conséquences logiques de son affirmation. L'avenir a montré que, si le fond de la thèse de Koch est vrai, s'il y a bien, comme l'avait déjà dit Th. Smith, un type humain et un type bovin de bacille tubercu- leux, les conclusions sont en partie erronées; mème ses élèves reconnaissent qu'un pourcentage important des tuberculoses de l'enfance est du type bovin. On ne saurait songer à lever les règles rigoureuses de la prophylaxie. Marquons d’un mot la part prise par Koch dans la conception de la contagiosité de la lèpre et du rôle du mucus nasal, dans l’idée que la fièvre typhoïde se prend souvent par contact direct, et arrivons à la phase de la vie scientifique de Koch que l’on peut qua- lier d’exotique. C’est vers la cinquante-cinquième année qu'il fut pris du désir de voyager et d’aller dans les pays tropicaux y étudier les maladies infectieuses. Déjà, en 1883, il avait été en Egypte et aux Indes à la poursuite du vibrion cholérique, et, en passant, il avait vu le rôle des amibes dans la genèse de la dysenterie, et, paraît-il, entrevu celui des moustiques dans la pro- pagation du paludisme. De 1897 à 1908, il a visité le Japon, diverses parties de l'Océanie, l'Afrique australe, et surtout l'Afrique orientale allemande et touché, on peut dire, à toutes les maladies tropicales. Depuis longtemps convaincu du rôle des moustiques dans l'étiologie du paludisme, il avait tout combiné pour en faire la démonstration, lorsque parut le tra- vail de Ross; le premier après lui, il s’astreignit à suivre l’évolution de l'hématozoaire des Oiseaux chez le Cousin. C'est à Koch que l’on doit d’avoir insisté sur la fréquence de l’hématozoaire de Laveran dans le sang des enfants indigènes des localités palustres; l’établis- sement de l'index endémique par l'examen du sang des enfants a été universellement adopté. En Afrique australe, Koch a lutté d'abord, et avec succès, contre la peste bovine, puis contre la plus ter- rible des piroplasmoses, celle dite de la « Côte orien- tale », qui tue jusqu’à 95 °/, des Bovidés atteints. Peu après les savants anglais, il étudiait la fièvre récurrente africaine ou fièvre à tiques, en précisait l'étiologie et la prophylaxie. Mais c’est surtout la maladie du sommeil qui, dans ces dernières années, a retenu l'attention de Koch. Là encore son rôle n’est guère connu du public que par une histoire de crocodiles, inexactement rapportée d'ailleurs, et par un prétendu bluff au sujet de l’atoxyl. En fait, Koch n’a jamais prétendu avoir « découvert » l'atoxyl,et,s'ilamis quelqueemballement à le « lancer », on ne saurait trop le lui reprocher, puisque, malgré cinq ans de recherches assidues, on n’a pas encore trouvé mieux comme médicament. Koch a recommandé les camps d'isolement des malades du sommeil : la gé- néralisation de cette mesure, aussi utile au point de vue du traitement qu'au point de vue de la prophylaxie, en prouve la valeur. Les relations des trypanosomes et des glossines ont particulièrement occupé l'esprit de Koch et, s'il a commis des erreurs, il n’en faut pas moins lui rapporter le mérite d'avoir été l'initiateur des mémorables expériences par lesquelles son lieute- nant Kleine a définitivement établi le rôle exact des tsé-tsés dans l’étiologie des trypanosomiases. Malgré l'importance de l'œuvre « coloniale » de Koch, elle est éclipsée par la trinité : charbon, cho- léra, tuberculose, — tuberculose surtout, — qui fait de lui, sans conteste, le plus grand des bactériologistes et des hygiénistes, après Pasteur. La Bactériologie n'est d'ailleurs qu'une partie de l’œuvre de Pasteur, qui demeure incomparable. L'Allemagne a su rendre justice à son illustre fils. Appelé en 1880 à l'Office sanitaire allemand, en 1885 à l'Université et à la direction de l’Institut d'Hygiène, Koch vit créer pour lui en 1891 l’Institut pour les mala- dies infectieuses, dont il abandonna volontairement la direction en 1906, mais où il ne cessa de travailler. Le jubilé de 1903 et le titre d’Excellence octroyé il y a deux ans étaient venus apporter un couronnement à cette glorieuse carrière. A l'étranger, ses rares mérites étaient appréciés. Nous avons dit qu'il fut un des lauréats du prix Nobel. En France, il était Associé de l’Académie des Sciences et de l'Académie de Médecine. Enfin, il avait la joie — une des plus grandes pour un savant — d’avoir pro- duit une nombreuse phalange de disciples, la gloire de la Bactériologie allemande : Læffler, Gaffky, Behring, H. Kossel, R. Pfeiffer, Wassermann, Kleine, ete., le Japonais Kitasato. Ce travailleur infatigable, cet homme d'une forte carrure, qui paraissait si solidement bâti, portait en lui une tare. Par une sorte de revanche de la Nature, il était depuis longtemps atteint de tuberculose. Il le savait, et le bien-être qu'il retirait de ses séjours dans les pays tropicaux, en particulier sur les hauts pla- teaux de l'Afrique, n'a pas peu contribué à faire de lui un voyageur et un microbiologiste tropical. Esprit lucide, Koch écrivait avec une clarté, une simplicité, qui imposaient l'attention et donnaient une force particulière à ses démonstrations. Nous avons rappelé ses démêlés avec Pasteur. Dans ses affirmations, ses théories, Koch dépassait parfois la vérité scientifique. Une sorte de logique implacable le conduisait souvent à tirer des conséquences extrêmes de faits qu'il avait bien observés. Cela ne saurait empè- cher, et nous avons le sentiment de n'y avoir pas manqué dans cette Notice, de reconnaître la grandeur de son œuvre. On a d’ailleurs su, suivant la tradition de Pasteur lui-même, lui rendre justice dans notre maison; et lorsque, en 1904, il vint à Paris, il trouva, parmi nous, les sentiments de déférence et d’admira- tion qui lui étaient dus. Aussi est-ce avec empresse- ment que le signataire de ces lignes a répondu au désir exprimé par le Directeur de cette Revue, que jus- tice fût rendue au grand bactériologiste par un élève de Pasteur. Félix Mesnil, Professeur à l'Institut Pasteur. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 2. — Physique La conductivité de l'électricité à travers de chlorure d'argent solide. — MM. Le Blanc et EF. Kerschbaum! viennent de faire, sur la conduction électrique du chlorure d'argent solide, des observations entièrement inattendues el qui, semble-t-il, se rap- portent à un ordre de phénomènes tout nouveau : Deux électrodes de platine d'une surface de 49 mm? chacune, ayant été disposées en regard, à 3-4 milli- mètres de distance, leur intervalle étant rempli de chlorure d'argent solidifié, l'enlèvement du chlorure d'argent en excès sur les côtés et derrière les électrodes a donné un cylindre solide, aux deux extrémités duquel étaient scellées les électrodes de platine. Le chlorure d'argent avait été obtenu en précipitant du nitrate d'argent pur par de l'acide 'chlorhydrique et en rincant soigneusement; il avait été fondu dans un creuset de porcelaine. Les auteurs ont eu soin d'éli- miner l'action de la lumière du jour. Or, en appliquant aux fils de platine amenant le courant une tension de 10 volts, on observe, sur un galvanomètre sensible, un courant de 3 à 4 X 107 am- père, correspondant à une résistance de plusieurs millions d’ohms. Quelque temps (une ou plusieurs heures) après, la déviation du galvanomètre augmente toutefois, lentement d'abord et ensuite de plus en plus rapidement, jusqu’à ce que le galvanomètre doive être remplacé par un milli-ampèremètre, tout en intercalant une résistance de 93 ohms. La tension aux électrodes finit par tomber à 2,1 volts, correspondant à une résistance d'environ #0 ohms, c'est-à-dire la millionième partie de la résistance initiale. Si la tension initiale est plus considérable, l'accroissement de la conductivité a lieu encore plus rapidement. D'autre part, lorsque le chlorure, amené à l'état de bonne conductivité, est essayé avec du courant alter- natif, il présente d'abord une conductivité très appro- ximativement égale à la valeur correspondant au cou- cant continu. Peu de temps après (le plus souvent au bout de quelques minutes), la résistance commence toutefois à s’accroitre, et bien souvent ne tarde pas à atteindre une valeur extrèmement élevée, correspon- dant à peu près à l'état original du chlorure d'argent. On pourrait croire que le chlorure d'argent a repris ses propriétés originales, si l'application d'un courant con- tinu ne rétablissait pas très rapidement la haute con- ductivité de la substance. Il résulte de cette expérience quele chlorure d'argent pur et transparent, c'est-à-dire un sel typique, pré- sente, déjà sous l'influence d’une faible chute de potentiel, une conductivité qui finit par s'élever à des valeurs énormes, sans qu'on puisse constater la moindre trace de décomposition. Cet état de bonne conductivité peut disparaître rapidement (les mesures de courant alternalif en font foi), mais se rétablit presque instantanément aussitôt que la même tension continue est appliquée de nouveau. En abandonnant la substance à elle-même pendant la nuit et en la chauffant jusqu'à proximité du point de fusion, on ne change rien à ces phénomènes. Les auteurs se proposent de continuer l'examen du chlorure d'argent et d'étendre leurs recherches à d'autres sels et mélanges de sels; ils s'attendent à constater un intervalle de températures dans lequel la conduction électronique etla conduction électrolytique seraient susceptibles de coexister. $ 3. — Chimie industrielle La synthèse industrielle de lammoniaque. — On sait qu'en prévision de l'épuisement progressif des dépôts de nitre chiliens, on s’ingénie depuis assez longtemps à préparer par voie artilicielle des engrais azotés analogues. Grâce aux efforts incessants de nom- ! Zeitschrift f. Elcktrochemie, n° 7, 1910. breux savants et ingénieurs, le problème de la fixation de l'azote atmosphérique a reçu pendant ces dernière années des solutions assez satisfaisantes, mais qu n'intéressent que les pays disposant de forces hydrau- liques à bon marché. Aussi, dans l'intérêt même di l’agriculture, doit-on se réjouir de voir des résultats analogues obtenus par voie différente. M. L. Haber, professeur à l'Ecole Polytechnique de Karlsruhe, a, en effet, effectué la synthèse directe di l'ammoniaque à partir de ses éléments, azote et hydro- gène; et, comme le coût de production de ces élé- ments n’est qu'une petite fraction du prix commercial de l’ammoniaque, ce nouveau procédé se trouve placé dans des conditions économiques excessivement avan- tageuses. En dehors de son importance pour l’agricul- ture, il présente, du reste, un intérêt scientifique peu ordinaire par les énormes tensions gazeuses qu'il ut lise, tensions qui dépassent de heaucoup toutes les pressions jusqu ici employées dans l’industrie. Si l’on avait jusqu'ici désespéré de préparer l'ammo- niaque par synthèse directe, c'est que l'azote, réfrac- taire aux réactions chimiques avec d'autres éléments aux températures basses, présente, mème aux tempé- ratures élevées, une aftinité chimique très faible pour l'hydrogène. Bien que l'emploi de pressions très fortes semblàt permettre une combinaison directe des élé- ments, les expériences antérieures n'autorisaient guère à compter sur une vitesse de réaction suffisante dans des vases d’un volume nécessairement limité par des raisons de solidité. D'autre part, il était douteux que les catalysateurs indispensables pour activer une réaction pareille gardassent continuellement leur efficacité. # Or, l'expérimentateur, en collaboration avec M. Ro- bert Le Rossignol, vient de réfuter toutes ces objec- tions, en démontrant que la réaction se produit à une vitesse suffisante pour permettre l’utilisation technique du procédé. , Il est vrai que l'ammoniaque, même aux tensions énormes employées par M. Haber (environ 200 atmo- sphères), ne se forme que graduellement, et qu'elle doit être éliminée au fur et à mesure de sa formation, au moyen, par exemple, d’une circulation gazeuse à pres- sion élevée permanente. Pour cela, on relie le vase de réaction, en cycle fermé, avec le vase se dégagement et une pompe centrifuge. L'ammoniaque, liquéfiée dans le vase de dégagement par un refroidissement modéré, peut être éliminée, soit sous la forme de liquide, soit à l’état gazeux. Les résidus non utilisés d'azote et d'hydrogène restent en circulation. Lors d’une conférence récemment faite à la Société des Naturalistes, à Karlsruhe, M. Haber à montré ce dispositif à circulation sous haute pression, construit pour l’Institut de Chimie physique de l'Ecole Polytech- nique, et qui, sous une tension de 185 atmosphères, fournit en service continu, et sans la moindre inter- ruption, 90 grammes d'ammoniaque liquide par heure. Le vase de réaction peut être pourvu d’un régénéra- teur thermique, ce qui est particulièrement important aux températures de réaction élevées. L’ammoniaque peut être dégagée aussi au moyen d'absorbants. La réaction, nous l'avons dit, est fortement activée par la présence d'un catalysateur, comme dans la combinaison de l'oxygène et de l'hydrogène, amorcée et accélérée par la présence de la mousse de platine. Comme les dépôts d’osmium du monde entier n'excè- dent guère 400 grammes, l'expérimentateur a dû renoncer à l'emploi de cet élément hautement actif; en continuant ses recherches à ce propos, il a fini par arrêter son choix sur l'uranium, qui, suivant le sys- tème périodique des éléments, présente avec le chrome peu efficace une relation analogue à celle de l'osmium par rapport au fer, dont on connait depuis longtemps les effets catalytiques. L'urauium, produit(dans l'arevoltaique, par exemple) par la réaction de l’oxyde d'uranium avec le carbone, se désagrège, dans un mélange de gaz soumis à une CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE pression élevée, en absorbant de l'azote de facon à former une poudre très fine, dont les effets cataly- tiques, très prononcés, ont pu être mis en évidence à une température inférieure à 5009. Les résultats obtenus par M. Haber fournissent, sans contredit, la base de la synthèse industrielle de l'am- moniaque. Comme la dépense d'énergie que néces- sitent la compression et le déplacement des gaz est faible et que les échanges de chaleur, dans le cas d'un choix convenable des limites de températures, ne présentent qu'une importance secondaire, tout porte à croire que ce procédé sera appliqué surtout dans les pays qui disposent de dépôts de charbon abondants pour la production de l'hydrogène, tout en manquant des grandes forces hydrauliques indispensables pour la fabrication du nitre atmosphérique. La Badische Anilin-und Soda-Fabrik, à Ludwigshafen, s'est chargée du développement technique de ce pro- cédé. Alfred Gradenwitz. $ 4. — Chimie biologique La classification biochimique des matières albuminoïdes. — À la suite de l'établissement de l'entente universitaire franco-hispanique, une Mission de professeurs de l'Université de Madrid est venue donner à l'Université de Bordeaux une série de confé- rences au commencement de Juin. En particulier, le Professeur J.-R. Carracido, bien connu par un gros traité de Chimie biologique en espagnol que la Æievue à analysé autrefois, a exposé ses idées sur la classification biochimique des matières albuminoïdes. | Protamines. | Histones. Albumines. Globulines. Fibrines. Protéines... par évolu- tion pro- gressive.. | Glycoprotéides. 5 | Phosphoprotéides. Protéides.. Chromoproléides. ALBUMINOÏLES PRODUITS collagènes. Albumoïdes . kéraliniques par méta- morphose« Acidalbumines. Alcalialbumines. Albumoses. Pepiones. Polypeptides par hydro- INSÉSÉEPERS r'égressive Pour lui, il y à une différence entre classification chimique et classification biochimique. La première doit être fondée seulement sur les relations de consti- tution, el la seconde doit tenir compte de l’ordre de succession dans le cours des processus biologiques et de la manière d'agir dans les éléments organisés. Ainsi, l'acide B-oxybutyrique, l'acide acétylacétique et l'acétone doivent être étudiés en différents groupes de la Chimie organique; mais, dans la Chimie biolo- gique, ils doivent être placés comme termes successifs d'un processus de transformation matérielle, de la inméme manière que les lipoïdes forment un groupe naturel au sens biologique, malgré leur grande difié- rence de constitution. En d'autres termes, la classification purement chi- mique des albuminvuides est celle qui tient compte seulement de la qualité, du nombre et de la place des amino-acides faisant partie intégrante de leurs molé- cules, tandis que la classification biochimique est celle \ Ho qui, en outre, lient compte de leur processus de for- mation dans l'organisme et du rôle qu'ils y jouent. D'après cette manière de voir, M. Carracido a dressé le tableau ci-dessous de classification biochimique des matières albuminoïdes. Dans cette classification, on voit d'une manière claire la complexité moléculaire allant en progressant des. protamines jusqu'aux protéides; et, dans ceux-ci, elle continue à être très claire dans la constitution du groupe prosthétique corrélativement à son rôle physiolo- gique. Les albumoïdes sont des substances fondamen- tales intercellulaires qu'on peut supposer produites par un fractionnement des protéines, d'où vient aussi la prépondérance des groupes cycliques etsulfurés dans les kératiniques et des acycliques dans les collagènes. Comme terme de transition des albuminoïides d’évo— lution progressive à ceux de métamorphose régressive se place l'hémoglobine, qui résulte de la dégénération du noyau de l’érythroblaste par disjonction dela matière lipoide phosphorée qui enveloppe l'érythrocyte. $ 5. — Biologie Les résultats et les méthodes des recher- ches limnobiologiques en Danemark : l'œu— vre de Wesenberg-Lund. — Notre pays na fourni qu'une faible contribution aux nombreuses recherches effectuées dans ces vingt dernières années sur la biologie du plancton d’eau douce, et les résultats. importants auxquels elles ont conduit y sont malheu- reusement peu connus, même des zoologistes de pro fession. Il n’est donc point inutile d'appeler iei l’atten- tion sur l'ouvrage considérable‘ où C. Wesenberg-Lun& { Phc »sphoprotéines. Lécithiprotéines. RE à Cytéines. Cytoprotéides.…. Protéicytéines. protaminiques.… Nucléines.…. : histoniques. globuliniques.… Nucléoprotéides.« l Protéinucléines. Glycoproteinueléines. en a donné une synthèse complète, fondée sur dix années de recherches personnelles dans les lacs dw Danemark; l'idée directrice qui en relie les diverses parties et qui, bien qu'émise depuis dix ans à peine, s'est montrée remarquablement féconde, lui appartient d’ailleurs en propre. Il s'agissait d'expliquer la variation saisonnière qui transforme complètement la taille et l'aspect de la plupart des organismes pélagiques (Péridiniens, Roti- fères et Cladocères surtout), de l'hiver à l'été, et qui à conduit longtemps à une multiplication prodigieuse des espèces (on réunit aujourd'hui en une seule une centaine d'espèces pélagiques de Daphnies réparties au- trefois en trois sous-genres). Il eut l'idée d’invoquer les. changements dans l’état physique de l’eau qui rendent la suspension au sein du liquide de plus en plus difli- WesexsenG-Luno : Plancton Investigations of {he Danislu Lakes. Copenhague, 2 vol. in-4°, 1904 et 1908. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 541 cile à mesure que la température s'élève (Wolfgang Ostwald à corrigé son interprétation primitive en mon- trant que, plutôt que la densité, c'est la viscosité, le coeflicient de frottement interne, dont la diminution intervient). En conséquence, les organismes qui vivent facilement en pleine eau l'hiver et dans les régions froides (on rencontre alors beaucoup de formes litto- rales au milieu des lacs) sont obligés, l'été venu, de diminuer leur taille et de passer d'une forme globuleuse à une forme plus ou moins allongée, ce qui revient à accroître la surface par rapport au poids, et de déve- lopper des crêtes, épines, aspérités, qui ont toutes le même rôle : augmenter le frottement sur l'eau etralentir la chute‘. C'est précisément ce qu'on observe dans les groupes cités plus haut, et ce que l’auteur illustre par des croquis et des diagrammes résultant d'innom- brables mensurations micrométriques (il ne faut point oublier, à côté des siennes, l'étude magistrale de Lau- terborn sur l'Anurœæa cochlearis). Cette variation, qui s'opère en quelques semaines au printemps (el en sens inverse à l'automne), se fait d'une façon un peu diffé- rente dans chaque collection d'eau et aboutit ainsi à des variétés locales distinctes, qui pourtant reviennent chaque hiver à la même forme souche. Il est inutile de faire remarquer toute la portée de <10—", voisine de la valeur connue. — M. Nicolau présente ses recherches sur la variation dans le mouvement de la Lune. — M. J. Comas Sola communique ses observations de la comète de Halley faites à l'Observatoire Fabra, à Barcelone. Il a vu en particulier une série de globes phosphorescents commencer à se séparer du noyau à partir du 31 mai. — M. J. Boussinesq expose ses idées sur les principes de la Mécanique et sur leur applicabilité à des phé- nomènes qui semblent mettre en défaut certains d’entre eux. — M. Paul Renard indique la facon de parcourir en aéronef un itinéraire rectiligne avec une dépense minima de travail total. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Bouty a fait une nou- velle mesure de la cohésion diélectrique de l'argon; il a obtenu le nombre 38, valeur sensiblement double de celle de l'hélium. — M. G. Gouy montre qu'aux vides élevés, lorsque des charges négatives sont reliées (ou près de l'être) par des lignes de force magnétique, elles produisent une action de nature inconnue qui est mise en évidence par un abaissement extrême du potentiel explosif et par la production de la lumière inter-cathodique. — M. B. Szilard a constaté que les métaux, lorsqu'on établit un contact entre eux, donnent naissance à une action à distance sur le cohé- reur en présence du courant alternatif. — M. F. Croze a photographié dans le rouge extrême et la première région de l'infra-rouge le spectre de bandes des com- posés oxygénés du carbone et celui qui est attribué au cyanogène. — MM. Ch. Fabry et H. Buisson ont con- staté que les deux spectres de l'arc au fer, l'un à la pression atmosphérique, l’autre sous une pression de quelques millimètres, paraissent absolument iden- tiques; c’est donc à la différence des conditions élec- triques qu'il faut attribuer la variation du spectre, de l'arc au tube à vide. — M. G. Sagnac présente un inter- féromètre à faisceaux lumineux superposés inverses, donnant en lumière blanche polarisée une frange centrale étroite à teinte sensible et des franges co- lorées étroites à intervalles blancs. — M. L. Dunoyer : Sur une méthode de mesure d’un champ magnétique en grandeur, direction et sens (voir p. 493). — M. L. Houllevigue montre que les parois des tubes à vide qui peuvent se métalliser par projection cathodique sont celles qui possèdent une charge positive; les rayons cathodiques, qui transportent des charges négatives, s'opposent à la formation des dépôts dans les régions qu'ils traversent. — M. A. Perot a observé l'existence d'une chute de potentiel à lanode en même temps que d’une surpression anodique dans l'arc au mercure dans le vide. Les deux phénomènes sont en connexion intime. — MM. E. Baud et L. Gay ont reconnu que l'abaissement du point de congélation des mélanges binaires est proportionnel au logarithme de la-concen- tration moléculaire du dissolvant et à la température absolue de cristallisation. — MM. D. Berthelot et H. Gaudechon ont réalisé les réactions fondamentales de l'assimilation chlorophyllienne en l'absence de chlorophylle sous la simple influence des radiations de la lampe à vapeur de mercure : synthèse des hydrates de carbone aux dépens de CO* et de la vapeur d’eau; synthèse de l'amide formique par combinaison de CO et AzH*. — M. E. Léger montre que l'aloinose est identique au d-arabinose. La barbaloïne est donc un glucoside dédoublable en aloémodine et d-arabinose; l'isobarbaloine est un isomère de position. — MM. G. Austerweil et G. Cochin ont constaté que l’odeur de rose du citronellol accompagne la fonction alcoolique ; elle dépend encore de la chaine à 8 atomes de carbone et de la présence d’une double liaison dans celle-ci. — MM. A. Etard et A. Vila séparent les produits d'hydro- lyse des matières protoplasmiques comme suit : les acides aminés par leurs combinaisons cupriques, les di-acides aminés par le méthylate de Ba, les composés basiques par l'acide sulfurique, puis par l'acide ferro- cyanhydrique. — M. G. Seliber a constaté que certains champignons (Fusarium, Cephalosporium) donnent des colorations rouge et violette en milieu alcalin, jaune et rouge en milieu acide. — M. H. Arsandaux montre. que la latérisation résulte essentiellement d’une hydra- tation des feldspaths, aboutissant à un scindement de l’alumine de ceux-ci en deux portions, l’une à l’état silicaté, l’autre à l’état d'hydroxyde, les formes ultimes respectives de ces deux états correspondant à la kao- linite et à l'hydrargillite. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Chauveau et feu Ch. Contejean établissent solidement que le rein enlève simultanément au sang les uréides et l’eau qui doivent en être éliminés, sans que ces deux actes soient unis l’un à l’autre par le lien d'une solidarité quelconque. Chez le sujet en état de jeune, les varia- tions de la quantité d'urine sécrétée n'introduisent donc aucun trouble dans la signification des excréta azotés entrainés avec l'urine. — MM. V. Pachon et Em. Perrot ont reconnu que l'extrait physiologique de café vert exerce une action cardio-vasculaire dépressive, se manifestant par un léger ralentissement cardiaque, une chute profonde de Ta pression caroti- dienne et du volume du rein. — M. A. Magnan a con- staté que les oiseaux possédant une alimentation animale ont la plus petite surface d'intestin par rap- port à la surface du corps et que les végétariens ou les omnivores présentent la plus grande surface. — M,R. Combes montre que les fortes intensités lumineuses provoquent, chez les végétaux, l'accumulation des com- posés nutritifs élaborés dans les parties vertes et favo- risent, par conséquent, la formation des organes de réserve, tandis que les éclairements faibles déter- minent, au contraire, l'utilisation des substances nutri- tives et accélèrent la production des organes de vie active. — M. Noel à étudié les infiltrations sur le massif du Zaghouan (Tunisie) d'après le débit de la source de la Nymphée. ACADÉMIE DE MÉDECINE Seance du 1% Juin 1910. MM. Th. Guilloz (de Nancy) et Florence {de Lyon) sont élus Correspondants nationaux dans la Division de Physique et Chimie médicales et de Pharmacie. M. G. Meillière présente deux Rapports sur les tra- vaux des stagiaires aux eaux minérales et sur les demandes d'autorisation pour des sources d’eaux minérales. Séance du 2 Juin 1910. M. H. Vincent a préparé, par autolyse des bacilles vivants, un vaccin antityphique qui ne provoque, chez les sujets inoculés, aucun des symptômes douloureux que déterminent les vaccins bacillaires. Le sérum des sujets vaccinés possède un fort pouvoir bactéricide vis-à-vis des bacilles typhiques. —- MM. P. Reynier et P. Masson signalent trois cas de tumeurs inflamma- toires produites par certains pansements ayant laissé dans les plaies des fragments de fibre végétale; ceux-ci sont entraînés dans les vaisseaux lymphatiques, où ils donuent lieu à un processus de défense phagocytaire ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES et scléreux. — M. X. Vidal a constaté que, depuis un temps fort long, quoique indéterminé, la brachydac- tylie symétrique, ainsi que d'autres manifestations tératologiques, sont héréditaires dans une famille. La transmission de ces vices de conformation parait avoir épargné toute une génération composée de 8 enfants. Après ce temps d'arrêt, la brachydactylie et les autres désordres osseux ont reparu, mais surtout dans la branche mâle. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 11 Juin 1910. M. G. Billard a constaté que le lérot après hiberna- tion et le blaireau possèdent une immunité naturelle contre le venin de vipère. — M. M. Lisbonne a reconnu que la salive mixte humaine normale contient de l'in- vertine; celle-ci est d’origine microbienne et ne pro- vient pas de l'adaptation des glandes salivaires à l’in- gestion de sucre. — M. A. Sézary à décelé le Trépo- nème dans les parois d'une artère sylvienne atteinte d'inflammation syphilitique. — MM. Aug. Lelièvre et Ed. Retterer ont étudié les variations de l'appareil hyoïdien des Mammifères. — M. G.Seïllière a observé que le kapok, le duvet entourant la graine des sali- cinées, la moelle de sureau, renferment des quantités importantes de pentosanes, et donnent par hydrolyse diastasique des sucres où domine le xylose. — MM. C. Géssard et G. Loiseau ont préparé les toxines téta- nique et diphtérique par précipitation avec le phos- phate de chaux et extraction du précipité avec le sérum de cheval chauffé une heure à 60°, — M. G. De- meny préconise le mouvement continu et complet en direction et en étendue suivant des trajectoires curvi- lignes pour le développement musculaire et l'éduca- tion des centres nerveux de coordination. — MM. P. Carnot et G. I. Slavu montrent qu'on peut, par addi- tion d'HCI, éviter les accidents anaphylactiques d’un sérum sans modifier ses propriétés thérapeutiques. — M. L. Nègre a trouvé un kyste de protozoaire dans le tube digestif d’une souris dont les matières fécales avaient, par ingestion, infecté de sarcosporidiose tout un lot de souris saines. — M. Paul Desroche a reconnu que, dans certaines conditions de nutrition, le rameau sexuel à croissance limitée des Vauchéries peut avoir une croissance illimitée; le sexe d’un bourgeon n’est pas absolument déterminé. — M. T. Yamanouchi a constaté que le sérum d’un sujet humain, sensibilisé au sérum de cheval, transmet au cobaye l’état d'ana- phylaxie au sérum de cheval; le sérum de chimpanzé sensibilisé a des propriétés analogues, mais non celui des singes inférieurs. — MM. L. Bousquet et E. Der- rien établissent la présence constante de l’acétone dans le liquide céphalo-rachidien des acétonémiques. — MM. L. Martin, Al. Prevot et G. Loiseau ont étudié le pouvoir agglutinant chez des chevaux immunisés par voie sous-cutanée avec des toxines diphtériques vieilles et avec des toxines fraîches, etaprès une injec- tion intra-péritonéale de bacilles vivants. — M. et Mme L. Lapicque ont reconnu que l'action du curare est la même sur tous les muscles; elle se manifeste essentiellement par le ralentissement du processus d'excitation; elle est d'autant plus marquée que le muscle est normalement plus rapide. — M. Ch. Pérez montre que, comme chez la généralité des Insectes, la rénovation de l'intestin moyen des Polistes se ramène à un processus de mue et de rénovation épithéliale. — M''e A. Drzewina signale l'abondance des éosinophiles dans la muqueuse ou la sous-muqueuse de l'intestin de certains Téléostéens de la famille des Labridés. — MM. R. Legendre et H. Piéron concluent de leurs recherches sur les phénomènes respiratoires d’ani- maux soumis à l’insomnie que le besoin de sommeil n’est pas dû à une autonarcose carbonique. — MM. M. Weinberg et Jonesco-Mihaiesti ont appliqué la réac- tion à la méiostagmine d’Ascoli au liquide hydatique et au sérum syphilitique avec des résultats négatifs. — REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 569 Mis G. Filon etJ. Weill ont constaté que la puissance d'addition latente du muscle varie sous l'action de la température dans le même sens que la chronaxie, quoique d'une façon moins marquée.— MM. Lagriffoul, Bousquet et Roger décrivent un cas de pyocyanit généralisée ayant revêtu les allures d'une lièvre typhoïde adynamique, avec éruption abondante de taches rosées. — MM. Villard et Tavernier ont trans- planté un rein de chien sur une chèvre; malgré une circulation absolument correcte réalisée au bout de trois jours, le rein greffé ne sécrétait absolument rien. Séance du 18 Juin 1910. M. J. P. Langlois indique les dispositifs généraux d'une série de recherches qu'il vient d'entreprendre avec divers collaborateurs pour déterminer comment les mouvements de l'air, tels qu’on les observe dans les milieux miniers, peuvent influencer les différentes fonctions de l'organisme. En voici les résultats : MM. Routhier et Marcou ont constaté une légère baisse de la pression artérielle au repos sous l'influence de la ventilation. MM. Routhier et Boussaguet onl noté que, sous l'influence d'une ventilation oscillant entre #% et 6 mètres par seconde, l'élévation de pression artérielle due au travail est sensiblement di- minuée. MM. Garrelon et Desbouis ont reconnu que l'influence de la ventilation disparaît complètement avec l’anesthésie générale. — MM. F. Battelli et M'e L. Stern ont observé que les rayons visibles du spectre détruisent rapidement la catalase, en présence ou en l'absence de l'oxygène. L'alcool, l'aldéhyde, les formiates protègent la catalase contre cette destruction. — MM. C. Fleig et P. Sangouard ont étudié la réaction de Meyer, sensibilisée ou non par les alcools acides, dans divers liquides organiques; un résultat positif peut relever soit d'une action peroxydasique vraie, soit d’une action simplement peroxydante. — M. G. Ro- senthal a préparé un vaccin de Wright et un sérum contre le Bacillus perfringens; ce dernier possède un pouvoir préventif marqué contre l'infection suraiguë du cobaye par le bacille. — M. E. Maurel montre que, pour chaque agent thérapeutique ou toxique, les élé- ments anatomiques se placent dans des ordres de sen- sibilité et de toxicité donnés qui restent les mêmes dans toute la série des Vertébrés. — M. C. Gessard décrit un nouveau milieu de culture solide préparé à froid. Il consiste à recevoir du sang dans de l’eau salée, à laisser déposer les globules, et à coaguler le liquide par l'addition d'eau pouvant tenir en solution divers principes. — MM. J. Renaut et G. Dubreuil signalent, sous le nom de morcellement résorptif, un nouveau mode de disparition du tissu cartilagineux survenant dans certains modèles primitifs en cours d’ossification primaire. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre rap- portent aux mouvements des muscles hyoïdiens et à leur travail inégal les variations si diverses qui se pro- duisent dansles connexions des segments squelettiques de l'hyoïde. -— M. P. Portier montre que le seul liquide capable d’envahir le système trachéen et de tuer les larves de Gastrophilus est la bile. Il signale ce fait remarquable que les seuls animaux chez les- quels on ait constaté la présence habituelle de ces larves (Equidés, éléphant, rhinocéros) ne possèdent pas de vésicule biliaire. — M. Em. Berger indique quelques expériences sur le contraste binoculaire des couleurs, successif et simultané. — MM. G. Billard et Vaquier ont constaté que les racines de laïtues sont perméables aux solutions de NaCI jusqu'à 15 ou 20 °/00 les tiges jusqu'à 6 ou 7 °/,,. — M. M. Aynaud décrit une méthode de numération des globulins chez l'homme. Il a trouvé une moyenne de 216.000 au mil- limètre cube. — M. Ch. Pérez montre que l’évolution nymphale du corps gras chez les Polistes concorde dans ses traits généraux avec les processus décrits chez les mouches. —M. N. Bettencourt a observé qu'on peut vérifier la présence d'anti-corps dans le sérum des échinococciques en employant le système 13** 570 hémolytique lapin-homme. — M, J. Nageotte a con- staté des phénomènes de sécrétion dans le protoplasma des cellules névrogliques de la substance grise qui semblent indiquer que la névroglie est une glande interstitielle annexée au système nerveux. — M. L. Hallion présente un chronomètre-avertisseur pour laboratoires, rappelant au chercheur les moments où il doit faire telle ou telle observation. —MM. Ed. Lesné et L. Dreyfus montrent que l'absence d'anaphylaxie par inoculation intra-stomacale ou intra-intestinale ne paraît dépendre ni du foie, ni de la paroi digestive, mais probablement de l'intervention des sucs digestifs. — M. E. Choay a constaté que l'extrait pancréatique digère les produits de la protéolyse gastrique avec une activité quatre fois plus grande qu’en agissant directe- ment sur la fibrine ; il a surtout un rôle de dégrada- tion, tandis que le suc gastrique a plutôt un rôle solu- bilisant. — M. S. Marbé a reconnu que le corps thyroïde d'un animal châtré présente une activité beaucoup plus stimulante sur la phagocytose que celui qui provient d’un animal normal; le testicule présente une action très stimulante quand il est injecté aux mâles. — MM. R. Legendre et H. Piéron ont injecté à des chiens du sérum ou des émulsions cérébrales d’autres chiens manifestant le besoin impératif de sommeil; ces injections ne paraissent pas provoquer l'insomnie. — MM. C. Levaditi et S. Mutermilch ont étudié le mécanisme de la phagocytose ; ils distinguent deux phases : celle de l’attachement de l'objet phago- cytable sur le leucocyte, qui n’exige pas la vitalité du globule blanc, et celle de l’englobement et de la des- truction du corps phagocyté, qui est essentiellement un phénomène vital. — M. P. Wintrebert a étudié la structure dissemblable de la base du crâne chez les Protritonidés et les Urodèles ; d'après lui, les Urodèles descendent en ligne directe des Branchiosauriens, dont ils ne sont que des formes dégénérées. — M. H. Mathieu a suivi par la réaction de Siegfried l'hydrolyse des peptones de Witte et des albumoses par le sue pancréatique. — M®° Z. Gruzewska a trouvé, parmi les produits d’hydrolyse de l’amidon sous l’action de H*0° : une érythrodextrine, une achroodextrine et du maltose. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 23 Mai 1910. MM. Ch. Garnier et F. Villemin décrivent les nerfs supérieurs du corps thyroïde; les uns émanent direc- tement du sympathique cervical; les autres n’ont avec lui que des rapports indirects. — MM. G. Etienne et H:Dauplais ont trouvé, chez une ostéomalacique très avancée, deux foyers de calcification locale : l'un constitué par un athérome aortique intense à topogra- phie intéressante, l’autre par un myome utérin calcifié. — M. L. Hoche a observé que certaines tumeurs épi- théliales de la glande mammaire se présentent avec un aspect microscopique tout à fait comparable à celui de tumeurs des glandes sudoripares, salivaires ou Jacry- males. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 7 Juin 1910. M. J. Chaine décrit les symptômes présentés par les plantes envahies par les Termites. — M. H. Cumia montre qu'on ne peut accorder aux surrénales de ana temporaria une forme fixe; celle qui a été décrite par Gruby n'est qu'un cas particulier. — M. R. Lautier a constaté que, dans un même. liquide organique, il n’existe aucune relation fixe entre les divers caractères cyto-physico-chimiques; entreliquides différents, seule la réaction de Rivalta peut permettre une distinction. — MM. A. Pitres et J. Gautrelet ont obtenu une amélioration rapide et considérable de l’asthénie chez un addisonien soumis au traitement par le glucose et l'extrait surrénal. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 Juin 1910. MM. de Broglie et L. Brizard : L'ionisation des gaz par voie chimique. M. de Broglie expose les résultats, des recherches qu'il a poursuivies avec M. Brizard et qui les ont conduits à conclure qu’en général le bouleversement moléculaire dù à la réaction chimique, quand il n'entraîne pas de phénomènes secondaires (haute température, incandescence, éclatement de sur- faces liquides ou solides, etc.), n’a pas tendance par lui-même à produire l’ionisation du gaz environnant. Un très grand nombre de réactions ont été examinées au moyen des procédés suivants : condensateur plan dans un espace clos, condensateur cylindrique à cou- rant gazeux et surtout dispositif ultra-microscopique en présence d'un champ électrostatique. L'expérience a montré que les réactions à froid entre gaz et vapeurs, qui produisent en présence de l’eau humide les fumées des chlorures de métalloïdes, du gaz chlorhydrique, des acides fumants et de l'anhydride sulfurique, ne mettent en jeu aucune charge électrique et qu'il en est de même pour les actions sur l'ammoniac du chlore, de l'acide chlorhydrique (fait antérieurement connu, mais qui est absolument général), de l'acide azotique et même de l'ozone, ainsi que des décompo- sitions par voie sèche qui se produisent sans élévation trop grande de température et sans éclatement de cristaux. Au contraire, les réactions accompagnées d’incandescence, haute température, déchirement de surfaces cristallines ou de liquides actifs par barbo- tage, donnent naissance à des centres chargés; cer- taines réactions, comme la formation de l'acide sulfurique à partir de l’anhydride, sont nettement accompagnées ou non d'ionisation suivant qu'elles se produisent où non dans les conditions indiquées. A propos de lionisation par combustion, l’auteur signale, en outre”, qu'il a mesuré le rapport des mobilités des ions produits par la flamme de l’oxyde de carbone et des ions produits par le radium; ce rapport, égal à 1,21 pour les ions + et à 1,70 pour les ions —, tandis qu'il est de l’ordre de 1000 pour les flammes hydro- génées, conduit à regarder les agglomérations envi- sagées comme identiques. — M. A. de Gramont expose sommairement les résultats généraux qu'il a obtenus dans ses travaux sur es spectres de dissociation, recherches dont les premières publications remontent à 1894 et qui portaient alors sur la région visible du spectre seulement, et qu'il a continuées depuis par la photographie dans tout l’ultra-violet. Plus récemment, grâce à l'emploi des plaques panchromatiques, il a contrôlé et repris l'étude de toute la région visible par la photographie jusqu'à À T0uy environ dans le rouge. L'étincelle de décharge d'une capacité donne, comme on le sait, un spectre de lignes du métal ou des métaux de l’alliage entre lequel elle jaillit, M. de Gramont a reconnu que l’étincelle du secondaire d’une bobine d'induction dans lequel est intercalée une capacité de 0,003 à 0,015 microfarad, éclatant entre des minéraux conducteurs ou volatilisables, des pro- duits métallurgiques on des sels fondus, fournit de véritables spectres de dissociation, où, non seulement les métaux, mais aussi les métalloïides sont repré- sentés par leurs spectres de lignes individuels. Il a pu, par cette méthode, obtenir, à l'air libre et sans l’em- ploi de tubes de Plücker, les spectres des métalloïdes, par l’étincelle directe, soit sur ceux-ci sans les enflam- mer, comme pour le soufre, le sélénium, l’arsenic, soit sur leurs sels fondus, comme pour le phosphore, le chlore, l'iode, etc. En supprimant la condensation, les spectres des métalloïdes disparaissent, et seules quelques raies brillantes des métaux subsistent; dans ! Voir Comptes rendus, 1 juin, 22 novembre 1909; 18 avril 1910. ? Voir Comples rendus, 30 mai 1910. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 574 les composés solides, elles se détachent sur un fond lumineux dû à l'incandescence des pôles; dans les sels fondus, elles peuvent être accompagnées fde bandes dues à la molécule du sel lui-même, non ou incom- plètement dissocié. L'addition d’une self-induction dans le circuit de décharge produit une élimination analogue dans le spectre, mais les lignes persistantes restent très brillantes; pour la plupart, ce sont celles de l'arc; aussi les spectres de la majorité des métal- loïdes, ne donnant pas de spectres d'arc, disparais- sent-ils dans l’étincelle oscillante. — MM. A. Cotton et H. Mouton : Sur la biréfringence magnétique des liquides aromatiques. Depuis leur communication de 1907, où ils ont signalé qu'un certain nombre de liquides organiques purs deviennent biréfringents dans le champ magnétique, MM. Cotton et Mouton ont pour- suivi leurs recherches sur ce phénomène. Ils décrivent d'abord sommairement le dispositif expérimental qu'ils emploient actuellement. La partie essentielle est un gros électro-aimant Weiss, construit par les Ateliers d'OErlikon, dont les noyaux ont 17 cm. 5 de diamètre, instrument particulièrement précieux pour les re- cherches dont il s’agit, où il faut le plus souvent avoir un champ à la fois intense et étendu dans une direc- tion. Avec ce dispositif, MM. Cotton et Mouton ont étudié d’autres liquides que ceux qui leur avaient servi dans leur premier travail. Dès à présent, on peut dire que ces expériences confirment un résultat déjà indiqué. Tous les liquides organigues étudiés, dont la molécule renferme un ou plusieurs noyaux benzé- niques ou des noyaux analogues avec doubles liaisons, présentent une biréfringence magnétique, à l'encontre de ce qu'on observe avec les composés de la série grasse, par exemple, et la biréfringence est toujours positive. Cette influence de la structure chimique, ainsi que la proportionnalité de la biréfringence au carré du champ, constituent les deux premiers faits qu'une théorie de ce phénomène doit expliquer. M. Voigt a été conduit, comme on sait, à prévoir comme un fait général l'existence de la biréfringence magnétique. Mais la théorie qu'il a proposée ne rend pas compte, sous sa forme actuelle, du rôle prépondé- rant joué dans ce phénomène par la structure molé- culaire: Aussi, MM. Cotton et Mouton admettent de préférence l'explication d'après laquelle cette biré- fringence est due à l'orientation moléculaire. Chaque molécule, anisotrope, serait soumise à un couple pro- portionnel au carré du champ, auquel viendrait s'op- poser le mouvement thermique tendant sans cesse à déranger cette orientation. Pourquoi alors les com- posés aromatiques se distingueraient-ils à ce point de vue? Ce serait, ou bien que leurs molécules s’orien- tent mieux que celles des composés de la série grasse, ou bien que leur anisotropie optique est plus marquée. Comme les cristaux, même des substances appartenant à la série grasse, s'orientent dans le champ magné- tique, c'est plutôt l'anisotropie optique qui paraît devoir jouer le rôle principal. Sur quelques corps con- venablement choisis, l'étude qui a été faite d’abord de la manière dont le phénomène varie avec la longueur d'onde, puis de l'influence de la température, a apporté des faits d'accord avec l'explication proposée. Lon- queur d'onde. La biréfringence magnétique du nitro- benzène subit d’un bout à l'autre du spectre une variation représentée par une courbe régulière, ana- logue à celle qu'on obtient pour le quartz, mais un peu plus rapide du côté des petites longueurs d'onde. Or, cette varialion est la même que celle de la biré- lringence électrostatique. 1 existe une relation, au moins une relation approchée, entre cette variation commune des deux biréfringences avec la longueur d'onde et la variation correspondante de l'indice de réfraction n mesuré en dehors du champ magné- ‘ Le sulfure de carbone est toujours le seul corps non organique pour lequel on ait observé une biréfringence, et elle est négative. tique. D’après cette relation, proposée par Havelock, la différence n'— n" des indices principaux de la sub- stance devenue biréfringente est proportionnelle à 2 LU l'expression : = ; , où nest l'indice, pour les mêmes radiations, de la même substance prise à l’état iso tropé. Havelock avait été conduit à cette formule par une théorie où il admettait que la biréfringence était causée par un changement dans la distribution de articules supposées isotropes. Cette hypothèse sou- ève des difficultés qui se rapportent au signe même des biréfringences observées. Mais on arrive à la même relation par des calculs presque identiques en admet- tant, au contraire, que les molécules sont isotropes, mais qu'elles s'orientent; certains arguments donnés par Lorentz et Larmor, d'autres tirés des propriétés des cristaux liquides de Lehmann, montrent bien que l'arrangement des particules élémentaires ne joue pas un rôle essentiel dans la biréfringence. Température. L'étude du nitrobenzène entre 6° et 54°, celle du salol fondu ou surfondu entre — 17° et + 50v, celle du bétol.. | ont montré que la biréfringence décroît nettement quand la température s'élève, que la loi de variation n'est pas la même pour tous les corps, que cette loi n'est pas modifiée lorsque le corps devient très vis- queux, et qu'enfin un corps à l’état vitreux possède encore la biréfringence magnétique. Ici encore l'étude correspondante du phénomène électrostatique à été faite pour le nitrobenzène. Sa variation thermique est plus rapide encore que celle de la biréfringence magnétique du même corps; mais, si l’on tient compte de ce que la constante diélectrique, très élevée pour | le nitrobenzène, décroit rapidement quand la tempé- rature s'élève, on trouve, en utilisant les résultats | d’Abegg et Seitz, que le parallélisme entre les deux phénomènes paraît se poursuivre encore à ce point de vue. Les recherches sur la biréfringence magnétique peuvent donc, d'une part, rendre quelques services aux chimistes, et, d'autre part, elles paraissent fournir un argument sérieux pour cette hypothèse de l’orien- tation moléculaire par un champ directeur que plu- sieurs physiciens avaient déjà envisagée à propos de questions analogues. — M. E. Estanave : /mages stéréoscopiques à aspect changeant. Les communica- tions précédentes ont montré que l’on pouvait obtenir sur une même plaque soit l'effet stéréoscopique, soit l'aspect changeant (attitudes différentes d'un même sujet), suivant que le réseau tracé sur la face opposée à l'émulsion a ses raies disposées verticalement ou horizontalement. L'auteur a été amené à combiner ces deux effets sur une même plaque photographique munie d'un réseau quadrillé, à lignes horizontales et verticales; pour une position convenable de l’obser- vation, les lignes verticales font le triage des deux images de chaque couple stéréoscopique, chaque œil ne percevant que l'image qui lui correspond; une légère oscillation de la plaque autour d'un axe horizon- tal permet de substituer l’un à l’autre les deux aspects différents successivement enregistrés sous forme de couples stéréoscopiques, l'observateur voyant ainsi une image stéréoscopique et cinématographique à deux phases, d’un très curieux aspect, particulièrement applicable à la publicité lumineuse, d'autant plus que, dans des conditions appropriées, elle se prête à la projection sur un écran spécial. Dans les spécimens présentés, il a été fait usase d’une trame à 40 lignes au centimètre donnant pour la surface utilisée (8 X10 centimètres) le nombre de 128.000 cases, à chacune desquelles correspondent # éléments d'image, soit 512.000 éléments. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 10 Juin 1910. M. S. Posternak expose, au nom de M. A. Arnavd et au sien, les résultats de leurs recherches sur l’iso- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mérisation des acides oléique et stéarolique par dépla- cement de la double ou de la triple liaison sous l’in- fluence de l'addition et de l'enlèvement de l'acide iodhydrique. En fixant sur l'acide oléique 1 mol. Hlet en traitant le dérivé iodé par la potasse alcoolique, on n'obtient pas un mélange composé uniquement par de l'acide oléique régénéré et par un isomère solide, dif- férent de l'acide élaïdique et ayant sa double liaison en À2:3, comme l'avaient indiqué MM. Saytzeff, mais un mélange très complexe, où l’on a pu caractériser quatre corps définis : l'acide élaïdique ordinaire A°:1, l'acide élaïdique Af:°, l'acide oxystéarique C'H*0*, fusible à 83-840, et de l'acide o/éique régénéré. Il semble y avoir encore d'autres substances dont l'étude n'est pas ter- minée. La fixation d’une molécule HI sur l'acide stéa- rolique donne naissance à deux isomères monoiodé- laïdiques : CH*.(CH?)".CHT.(CH°)".COO0H, fusible à 23-240, et CHS.(CH°)7.CHL.(CH°}$.COOH, fondant à 39°. Traités par la potasse alcoolique, ces acides régénèrent quan- titativement l'acide stéarolique primitif. Par contre, les dérivés diiodhydriques de l'acide stéarolique four- nissent, en plus de l'acide stéarolique ordinaire régénéré T°:10, deux nouveaux isomères de cet acide avec triple liaison déplacée, d’un carbone, à droite et à gauche TS:9 et T0, À côté de ces produits cristallisés, il se forme une certaine quantité d'huile monoiodée, com- posée très probablement par un mélange d'acides monoiodoléiques, qui ne se laissent pas désioder même à 4600. Ces faits ne sont pas spéciaux aux acides oléique et stéarolique, mais s'appliquent également aux autres membres des séries correspondantes. Ils ouvrent la voie à la préparalion de nombreux isomères de ces acides, sipeu accessibles jusqu'à ce jour. — M. J. B. Senderens expose un nouveau procédé de préparation de l’acroléine, fondé sur la déshydratation catalytique de la glycérine par le sulfate d'alumine et mieux par le bisulfate de potassium cristallisé. Il suffit d'introduire 10 grammes de ce dernier sel dans 200 centimètres cubes de glycérine à 28° pour recueillir un liquide d’où l’on peut extraire par distillation de 34 à 38 centimètres cubes d'acroléine. M. J. Hamonet et M. R. Lespiau font observer que l’ancien procédé au bisulfate peut être sensiblement amélioré par l'emploi d'un appareil distillatoire en fer, et que les rendements diminuent quand on réduit la proportion de bisulfate prescrite. M. Senderens estime que sa méthode est plus pratique parce qu’elle est plus rapide et qu'il nese forme pas de mousse en quantité notable. Ces résultats ont été contrôlés dans le laboratoire de M. Delépine. — M. M. Delépine dépose une note sur la phosphorescence par oxydation des composés organiques sulfurés suivants : CH*O.CS.CI, C:H*0.CS.CI, CH°0.CS.CH* et CSCP. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 21 Avril 4910. 19 SC(ENGES MATHÉMATIQUES. — M. K. Pearson : Sur l'improbabilité d'une distribution au hasard des étoiles dans l'espace. L'auteur discute certaines distributions statistiques des étoiles et arrive par différentes voies à cette conclusion que les étoiles, sans égard à leur dimension ou à leur éclat intrinsèque ne peuvent pas ètre considérées en moyenne comme uniformément distribuées à travers l’espace. Le seul moyen de con- server une telle hypothèse serait soit de supposer un univers limité, de forme non sphérique, soit d'admettre que la lumière est absorbée pendant sa transmission. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Lord Rayleigh a étudié l'incidence de la lumiére sur ,une sphère transparente de dimensions comparables à une longueur d'onde, en se basant sur la théorie électromagnétique; il suppose que la sphère transparente possède une constante diélectrique différente de celle du milieu environnant. Dans ses calculs numériques, il adopte 1,5 comme in- dice de réfraction et donne au rapport de la circonfé- rence avec la longueur d'onde les valeurs 1, 1,5, 1,75, 2 et 2,25. Quand ce rapport est faible et que la lumière incidente n’est pas polarisée, la lumière diffusée est polarisée dans toutes les directions, excepté celles qui sont parallèles au rayon incident; la polarisation est complète à angle droit avec le rayon primaire. Quand le rapport augmente, les choses changent : la polarisation maximum se trouve maintenant dans une direction oblique, inclinant en arrière. Des expériences sur les particules de soufre précipitées d'une solution diluée et acidiliée d'hyposulfite montrent que le passage de la lumière rouge à la lumière bleue peut renverser la polarisation, quoiqu'il n’y ait de changement ni dans le liquide, ni dans la direction de l'observation. — M.R. D. Kleeman a déterminé l’ionisation totale pro- duite dans différents gaz par les rayons cathodiques émis par les rayons X. Les résultats sont résumés dans le tableau suivant, où l’auteur a fait également figurer les ionisations lotales obtenues par Bragg avec la particule à : RAYONS cathodiques PARTICULE & AUDE UE ME PAGE 1,00 1,00 Anhydride carbonique 1,08 1,08 Ether (C*H5}°0 . SM RAS 4:32 Pentanede NE CU TEE AFS 1,35 Benzene Need A2 0 1,29 Chlorure d'éthyle. 1,33 1,32 Choroforme PRE SE 1,29 On voit que les deux séries de valeurs, rapnortées à l'air, sont à peu près les mêmes. L'énergie dépensée pour produire un ion ne semble donc pas dépendre d'une facon marquée de la nature de l'agent ionisant. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. J. Cole : La percep- tion du son clrez le Gammarus pulex. L'auteur a cons- taté que le Gammarus répond d’une façon frappante et énergique aux stimulus sonores en fléchissant sous son corps sa première paire d'antennes. Une réponse peut être obtenue après enlèvement de la seconde paire d'antennes, mais non après enlèvement de la première. L'instrument généralement employé pour produire les sons était un trombone ténor. Le Gammarus est sur- tout sensible au bémol au-dessus du do moyen, et son intervalle de sensibilité tonale est si limité qu'il peut être donné comme exemple d'animal spécialement sensible à une note. Un faible pourcentage d'animaux répondaient, et, probablement par suite de fatigue, le pouvoir de réponse disparaissait bientôt. Séance du 28 Avril 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. B. Sangster: Le caractère rotatoire de quelques perturbations ma- gnétiques terrestres à Greenwich, et leur distribution diurne. Le mémoire débute par une recherche sur les changements de direction de la ligne de force magné- tique totale à Greenwich, le 12 octobre 1903, de 18 heures à 22 heures, alors qu'un trouble magnétique considérable était manifeste. L'auteur a pris les me- sures des enregistrements publiés des trois composantes de la force à des intervalles de temps équivalant à envi- ron cinq minutes, avec lesquels il a obtenu un dia- gramme représentant la variation de la composante de la force perpendiculaire à la ligne de force totale. Le diagramme indique qu'il y a eu un mouvement rota- toire presque complet du vecteur de perturbation trans- verse, la trace consistant en six enroulements distincts de dimensions très variables, progressant tous en sens inverse des aiguilles d'une montre. L'auteur a examiné en détail plusieurs autres perturbations pen- dant la période de 1900 à 1907 et il montre qu'un caractère rotatoire de droite à gauche, dans le mouve- ment du vecteur de perturbation, se produit assez fré- quemment, tandis qu'un changement de gauche à droite a lieu assez souvent aux environs de minuit. Il trouve aussi que la même direction de rolalion persiste souvent pendant plusieurs heures, et il fournit des tables de distribution diurne de trouble rotatoire sur la droite et sur la gauche pour montrer que ceux de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES droite sont entièrement absents de 4 à 9 heures du soir, tandis qu'au contraire les rotations à gauche sont très puissantes et atteignent un maximum important à 8 heures du soir. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. D. Orson Wood: La libération de l'hélium des minéraux par l'action de la chaleur. Des expériences ont été faites pour déterminer de quelle façon le volume de l'hélium libéré des miné- raux radio-actifs par l'action de la chaleur dépend de la température et du temps pendant lequel cette tem- pérature est maintenue, en particulier en vue de l'emploi futur de la chaleur pour mettre en liberté tout l'hélium contenu dans les minéraux qui ne sont pas facilement traitables par des méthodes chimiques. Les minéraux expérimentés sont la monazite et la thoria- nite, l'un comparativement pauvre et l'autre très riche en hélium. Les minéraux broyés sont chauffés électri- quement dans le vide, dans des tubes de verre d'Iéna ou de quartz, par un dispositif consistant en une bobine simple de fil de nickel, à des températures allant jus- qu'à 1.200° C., mesurées par un thermomètre à résis- tance de platine ou par un thermocouple Pt/Pt-Rh. Le gaz dégagé est puritié en l’amenant à travers des tubes à KOH et P*05, et finalement au moyen d'électrodes Na-K. Le volume a été mesuré dans une jauge modifiée de Mc Leod, construite spécialement pour mesurer les volumes sur un large intervalle (1 ce. à 1 mme.). L'au- teur trace des courbes pour montrer le volume de l'hélium libéré avec le temps à des températures cons- tantes (250°-1.000° C.) et aussi le pourcentage du contenu total qu’il est possible d'obtenir après un chauf- fage prolongé à des températures différentes. Il dis- cute la façon dont le gaz est supposé être retenu dans le minéral pour s'accorder avec les résultats obtenus, et il conclut : 1° que la chaleur peut être employée pour la libération complète du gaz si on atteint une température suflisamment élevée (environ 900° C.); 2° que les résultats concordent avec l'hypothèse qu'une faible quantité de gaz est diffusée dans le minéral et que le reste est concentré dans de minuscules cavités à l'intérieur. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Swale Vincent : Les tissus chromophiles et la moelle adrénale. L'auteur donne un aperçu de l'anatomie générale et de l'histo- logie des tissus chromophiles chez les Mammifères et spécialement chez le chien. Il fournit des descriptions et des dessins des groupes de cellules du ganglion sympathique et des corps chromophiles dans d'autres régions et il fait des comparaisons entre leur structure et celle de la moelle adrénale. Un extrait du corps chromophile abdominal du chien a précisément le même effet puissant sur la pression sanguine qu'un extrait de la moelle adrénale. Il semble qu'il n'y a pas de raison pour ne pas admettre l'hypothèse que toutes les cellules chromophiles ont une sécrétion interne, quoique cette sécrétion s'élabore plus complètement dans les gros corps chromophiles et dans la moelle adrénale. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 21 Mai 1910. M. W. H. Eccles : Sur un détecteur d'oscillations actionné seulement par les variations de résistance dues à la température. L'auteur estime que, dans les détecteurs constitués par un contact lâche, l'énergie du courant oscillatoire à travers le contact est trans- formée en chaleur au contact et chauffe la matière suffisamment pour modifier sa résistance électrique, et par conséquent le courant continu qui traverse l'instrument indicateur. A l'appui de cette hypothèse, l'auteur présente un détecteur du type cristallin, d’où la possibilité des effets thermo-électriques a été éliminée. Il consiste en un contact lâche entre deux morceaux de galène, substance à grand coefficient négatif de changement de résistance avec la température. La courbe de courant constant obtenue en portant en 573 abscisses les f.6.m. appliquées et en ordonnées le courant à travers le détecteur, s'élève d'abord lente- ment, puis rapidement, puis de nouveau lentement ; s'il n'y à pas d'autre résistance dans le cireuit que celle du contact, la courbe peut même posséder un gradient négatif au point d'inflexion. La courbe de sensibilité et la courbe de puissance ont élé également déterminées. L'auteur montre que les propriétés de ce détecteur cristallin sont précisément celles qu'on peut logiquement déduire de son hypothèse. — M. À. Eagle présente un transformateur à résonance. C'est pratiquement une bobine de Rowland; la capacité shuntée à travers le secondaire est choisie de telle façon que la résonance est obtenue avec le courant alternatif fourni au primaire, La condition pour cela est que (L — M/N) Cp* —1, où L et N sont les self- inductions du secondaire et du primaire, M l'induction mutuelle entre elles, C la capacité et p est égal à 2x fois la fréquence. De cette facon, de gros condenseurs peuvent être chargés économiquement à un haut potentiel ; ils forment alors une charge non inductive. A côté &e la grande économie de courant, il y a aussi une économie d'énergie due au fait que le courant du secondaire n’a pas la tendance à s'écouler à travers la coupure à étincelle sous forme d'une décharge d'arc comme dans le cas ordinaire. Le principal avantage du transformateur à résonance réside dans le caractère des étincelles, qui se suivent à des intervalles de 1/4 10ge (Vm/Vm — Vs), où Vsest le potentiel d'étincelle et 1/k la constante de temps. — M. S. W. J. Smith montre, par la théorie etl'expérience, qu'iln'y a aucun intervalle, à une température quelconque, dans lequel la f. 6. m. d'une pile Weston soit absolument indépen- dante du pourcentage de Cd dans l’amalgame. Même si les matériaux sont tout à fait purs, l'existence de l'énergie superticielle doit causer une variation. Dans l'intervalle où la f. é. m. est généralement considérée comme constante, elle s'élève très lentement quand la teneur en Cd augmente. Le degré varie, mais il ne dépasse pas quelques millionièmes de voll pour 1 °/, de Cd. I1 semble que les irrégularités soient dues à des effets de membrane électrolytiques provenant du manque d'uniformité de composition des grains super- ficiels. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 26 Mai 1910. MM. F.B. Power et Ch. W. Moore ont délerminé les constituants des feuilles de Prunus serolina. Par macération dans l’eau, elles donnent environ 0,0086°/, d'HGAz. Les feuilles contiennent un peu de glucoside du /-mandélonitrile et une enzyme qui hydrolyse les 5-glucosides. Le principal constituant est une résine verte, insoluble dans l’eau, formée d’hentriacontane, de pentatriacontane, d'alcool cérylique, d'acides pal- mitique, stéarique, linolique et isolinolénique, d'un peu d’ipuranol et d'une nouvelle substance cristalline, le prunol, C**H#02{0H}°, F. 275°-2770, La portiun de l'extrait alcoolique soluble dans l'eau contient de l'acide benzoïque, de la quercétine et un nouveau glu- coside de la quercétine, C*‘11#0:°.3H°0, KE. 2450, Ja sérotrine. —M. S. Smith a constaté qu'à 338° l'addition de KCI0* pulvérisé à H*S0! concentré bouillant produit une vive effervescence, avec une production de CI,0 et HCIO* ; le volume d’O correspond à 90 °/; du KCIO® employé. En diminuant la température, l’action est de plus en plus vive ; à 120, il y a une violente explosion; au-dessous de 1209, la violence diminue graduellement. — M. H. T.Tizard montre que les changements tau- tomériques ne paraissent dans aucun cas se produire par l'intermédiaire des ions de la substance dissociée, quoique leur vitesse puisse être influencée par un fac- teur qui agit aussi sur l'ionisation. La substance qui se transforme est toujours la molécule non dissociée. — M. F. P. Burt, en sublimant le sulfure d'azote jaune Az'S! sur une toile d'argent dans le vide, a obtenu une 574 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES petite quantité d’une substance bleue ayant la même composition que le sulfure primitif. — MM. W. E.S. Turner et E. W. Merry ont étudié par la méthode de Ramsay et Shields la complexité moléculaire, à l’état liquide, d’un certain nombre d’amides, d’anilides, de nitriles et d'amines. Tous les amides examinés sont dans un état d'association; parmi les nitriles, seuls ceux de la série aliphatique sont dans le même cas. Les amines primaires sont légèrement associées ; dans les amiues substituées, la valeur de la constante de Ramsay et Shields augmente avec le nombre des atomes d'H substitués et le poids du groupe substituant. — MM. G. Barger et H. H. Dale ont isolé de l’ergot de seigle un troisième principe actif, celui qui produit la contraction de l'utérus isolé non gravide du chat. On l’obtient en précipitant par le nitrate d'argent, puis la baryte, l’ergot dialysé ; son picrate fond à 2200-2306. Il s'agit d'un dérivé de lhistidine, probablement la B-iminazolyléthylamine qui en dérive par perte de CO*?. — M. H.V.Krishnayya détermine le manganèse dans les minerais en combinant la séparation du fer par l'acétate basique avec la titration du manganèse par le permanganate. — M. T. N. Das décrit une méthode de détermination volumétrique du cuivre, basée sur le fait que les sulfures cuivreux et cuivrique se dissolvent dans H*S0* dilué par ébullition avec un excès de chlo- rate de K. — MM. V. J. Harding et Ch. Weizmann, en condensant le chlorure d’acétyle avec l'éther dimé- thylique de lhomocatéchol, ont obtenu la 4 : 5-dimé- thoxy-0-méthylacétophénone qui, oxydée par le per- manganate alcalin, donne l'acide 6-carboxy-3 : 4-di- méthoxyphénylglyoxylique. — M. H. T. Brown se range aux idées de MM. Slator et Sand sur le rôle de la diffusion dans la fermentation par les cellules de levure. — MM. W. H. Perkin jun. et R. Robinson ont résolu la gnoscopine (d/-narcotine) en ses constituants actifs par cristallisation fractionnée de son d-bromo- camphosulfonate dans l’acétate d'éthyle. On obtient d’abord le sel de /-narcotine, puis des eaux-mères le sel de d-narcotine. Les pouvoirs rotatoires des bases actives coïncident avec celui de la /-narcotine retirée de l’opium. — MM. R. Meldola et F. Reverdin ont constaté que les 2 : 3: 5 et 2:3:6-trinitro-p-anisidines isomères perdent toutes deux le groupe 3-nitré par diazotation en donnant naissance à des quinone- diazides, donnant des dérivés avec le B-naphtol. — MM. B. D. W.Luff, W. H. Perkin jun. et R. Robinson ont réalisé comme suit la synthèse de l'acide m-hémi- pinique en grandes quantités. L’éther méthylique du créosol est nitré et le produit de la nitration réduit par Sn et HCI en # : 5-diméthoxy-o-toluidine, F. 409. Cette dernière est convertie par la réaction de Sand- meyer en diméthoxy-0-tolunitrile, F. 81°, donnant par hydrolyse avec la baryte l'acide diméthoxy-c-toluique, qui est oxydé quantitativement par le permanganate en acide -hémipinique.Accessoirement, la diméthoxy- o-toluidine a été oxydée par FeCl* en 4-méthoxy-2 : 5- toluquinone, F. 4709-1729, qui est réduite par SO* dans le quinol correspondant, F.123°; ce dernier est converti par le sulfate de diméthyle en 2:4:5-triméthoxyto- luène, F. 55°, qui est oxydé par le permanganate en acide asaronique. — MM. H. J. Page et S. Smiles montrent que les chlorures des dérivés les plus simples du phénazothionium sont convertis par l’action de HCI chaud en composés chlorés correspondants de la thiodiphénylamine. — M. W. E. S. Turner critique la méthode de Landsberger-Sakurai pour la détermina- tion des poids moléculaires par l'ébullioscopie et montre les perfectionnements et corrections qui doi- vent y être apportés. Il confirme la valeur 39,0 récem- ment donnée par Beckmann pour l'élévation molécu- laire du point d’ébullition du chloroforme. — M. J. J. Fox a préparé divers sels de la 8-hydroxyquinoline ; ils se dissolvent un peu dans le benzène et le chloro- forme. L'examen spectrographique en solution alcoo- lique montre que la couleur jaune de ces sels est due à l'extension des bandes de la substance originale dans la région visible. — M. A. V. C. Fenby décrit un appareil pour la démonstration de la composition volumétrique des gaz. — MM. J.A.Smythe et A. Fors- ter, en saturant de SO® et HCI une solution de benzyl- mercaptan dans l'acide acétique glacial, ont observé la réaction quantitative suivante : 4C°H°.CH°SH + SO? — (C°H5.CH?)S°—E (CSH5.CH2)S" + 2H°0. Le trisulfure de benzyle fond à 49°. L'action du chlorure de soufre sur le benzylmercaptan a lieu d’après l'équation : 20H. CHSH + SCI —(CSH5.CHE}S: HE 2HC]; le tétrasul- fure de benzyle fond à 49°-509. — MM. T. S. Price et D. F.Twiss montrent que le premier résultat de l’ac- tion d'un alcali sur le disulfure de benzyle est la for- mation de benzylmercaptan et d'acide benzoïque. — MM. W. H. Perkin jun., H. D. Garäner et H. Watson ont préparé une série d'acides carboxyliques des cétones cycliques en traitant celles-ci, en solution éthérée, par la sodamide et CO®. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 14 Avril 1910. MM. A. R. Warnes et W. S. Davey : La corrosion des appareïls industriels en fer. Les auteurs signalent une série de cas qu'ils ont observés dans leur pratique. Les liqueurs ammoniacales froides ne sont pas un sérieux corrosif pour le fer. Le goudron peut corroder les tubes à distillation, surtout par suite du chlorure, du sulfure, du sulfhydrate et du cyanure d'ammonium qu'il contient; ces composés se dissocient et leurs pro- duits de dissociation agissent ensuite sur le fer. Les parties des tubes qui sont soumises à une déformation inégale par suite de dilatation et de contraction se corrodent le plus rapidement. SECTION DE MANCHESTER Séance du 4 Mars 1910. M. S. H. Higgins donne une description des écoles de teinture dans différents pays et de l'organisation de l’enseignement. Séance du 1° Avril 1910. MM. R. Ross et J. Race : L’extraclion des com- posés sullurés du qaz d'éclairage. Les auteurs ont d’abord recherché la cause des différences trouvées dans la détermination iodométrique des composés sulfurés du gaz; certains gaz, qui ne contiennent pas trace de soufre, réagissent cependant sur l’iode; les auteurs ont reconnu que ce fait est dû à la présence de cyclopentadiène. La purification par la chaux éteinte est le meilleur mode d'absorption des gaz sulfurés; la chaux absorbe H°S avec formation de sulfhydrate, qui absorbe à son tour CS? avec dégage- ment d'un peu de H?S. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 23 Février 1910. M.S. R. Trotman étudie la préparation de la colle au moyen des cartilages. Il montre que, si l’on enlève d’abord la mucine par agitation avec la chaux, on peut préparer avec les cartilages une colle normale ou géla- tine; la colle ne contient jamais de chondrine, mais seulement de la mucine, qui est la cause de la forma- lion d’écume. Séance du 23 Mars 1910. M. H. R. Procter décrit une: nouvelle méthode de mesure de la couleur des extraits tannants. Elle con- siste à faire varier la profondeur d’une solution d'extrait de force connue jusqu'à ce que sa couleur soit aussi foncée que celle d'un étalon de couleur; celui-ci est ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 575 obtenu par la combinaison de 10 unités de Lovibond, jaunes ou rouges. Séance du 27 Avril 1910. M. J. T. Wood présente ses recherches bactériolo- giques dans l’industrie du tannage du cuir. Pour éviter la décomposition bactérienne des peaux fraîches par les bactéries putréfactives, le mieux est de les dessé- cher aussi complètement que possible. Dans le trem- page des peaux, de nouvelles bactéries putréfactives apparaissent; on peut en empêcher l’action par l’ad- dition d'un peu de soude ou de sulfure de sodium. La dépilation, qui suit, paraît être l'œuvre d’un autre bacille anaérobie, qu'on peut retrouver dans les vieilles liqueurs calciques. Les bacilles jouent un rôle très important dans le passage en confits de fiente de chien ou d'oiseaux; on en a isolé un très grand nombre et l'on a même préparé des cultures pures de quelques- uns d’entre eux (érodine, etc.), pour servir directe- ment au tannage. Dans le trempage au son, on a éga- lement isolé une bactérie, le B. furfuris, qui joue un rôle spécifique. Enfin, de nombreuses bactéries existent encore dans les extraits tannants et participent à leur action. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du & Mars 1910. M. W. H. Westphal donne lecture d’un Mémoire sur l'allure des potentiels à proximité immédiate de la cathode dans la décharge par effluves. Malgré les nom- breuses investigations jusqu'ici faites pour élucider le mécanisme des décharges cathodiques, on n'était qu'insuffisamment renseigné sur les conditions qui régissent le potentiel de décharge et surtout sur la signification de la chute cathodique dite normale. On savait néanmoins que la partie essentielle de la décharge est celle qui s'étend de la cathode à l’effluve positive, c’est-à-dire la première couche d'effluve et l’espace obscur de Crookes. L'auteur décrit une nou- velle méthode par réduction à zéro, pour mesurer les potentiels des décharges cathodiques. Il constate que les véhicules de charges positive et négative effectuent à la même vitesse la charge d’une sonde introduite dans l’espace obscur de Crookes. Le saut de potentiel à la surface de la cathode est dans la décharge par effluve, indépendant de la pression et, par conséquent, de la densité de courant, pour une combinaison donnée de gaz et de métal d'électrodes et à chute cathodique nor- male. Ce saut («saut cathodique normal ») se présente donc comme une constante caractéristique, à côté de la chute cathodique normale, avec laquelle il semble présenter une certaine affinité. À une chute cathodique normale croissante correspond aussi une augmentation du saut. C’est la seule relation entre les deux phéno- mènes qu'on puisse jusqu'ici constater. Il semble pro- bable que le saut catholique est dû à une exigence énergétique, peut-être dans le sens de l'hypothèse de Skinner, en servant à amortir les ions positifs réflé- chis par la cathode. — M. 3. Franck adresse un Mémoire sur la mobilité des ions au sein de l'argon et l'influence de faibles quantités d'oxygène sur cette grandeur. Dans un travail antérieur‘, l’auteur avait établi l'accord avec les résultats de l'expérience de la théorie de Sutherland, relative à la mobilité des atomes radio-actifs résiduels. Dans le présent Mémoire, il étudie la mobilité des ions dans un mélange de gaz mono-atomique et bi-atomique, par une méthode indiquée par lui-même en collaboration avec M. Pohl (modification de la méthode des courants alternatifs de Rutherford). Il produit sur l'une des plaques d’un condensateur une ionisation superficielle unipolaire, en faisant entrer à travers une toile métallique, dans le condensateur de mesure, des ions de signe voulu, venant d’une chambre d’ionisation séparée. C'est ainsi Ne tr © 4 Verh. d. D. Phys. Ges., t. XI, p. 397, 4909. "A que les ions sont saisis par un champ alternatif, dont l'intensité varie, de façon que les ions, pendant une demi-période, parcourent précisément la distance entre les plaques du condensateur. Ce point est indiqué par un électromètre sensible à quadrants, relié au conden- sateur, et qui alors commence à se charger. La gran- deur du potentiel, la distance des plaques et le nombre de périodes permettent de calculer simplement la mobilité. Les résultats font voir que les mobilités des ions négatifs au sein de l’argon sont extrêmement grandes et d’un autre ordre de grandeur que celles qu’on à jusqu'ici observées dans les gaz, aux tempéra- tures ordinaires et à la pression atmosphérique. Les impuretés pénétrant dans le vase ou se dégageant des parois exercent une très grande influence sur ce facteur. Ainsi, à mesure qu'augmentent les impu- retés, les courbes de courant s'aplatissent de plus en plus. Cette sensibilité des ions négatifs rappelle la sensibilité analogue de l'azote par rapport aux additions de faibles quantités d'oxygène. C'est pour- quoi l’auteur a recherché, avec des résultats affirma- tifs, si l'oxygène constitue, dans ce cas aussi, l’impu- reté essentielle. Ces remarquables phénomènes sont peut-être dus à l’inertie chimique de l’argon et à sa position exceptionnelle comme gaz précieux et au point de vue électrique. Pour élucider ce problème, l’auteur se propose de faire des mesures de contrôle sur l'hélium. — M. E. Meyer adresse un Mémoire sur les fluctua- tions de courant dans l'ionisation par chocs. On sait que le nombre de particules rayonnantes émises par unité de temps, par un corps radio-actif homogène, abstraction faite même de la loi de décroissance expo- nentielle, est sujet à des fluctuations, prédites par M. E. von Schweïdler: et que de nombreux auteurs ont étudiées par voie expérimentale. L'auteur, lors d’une investigation de ces fluctuations faite par la méthode de Rutherford-Geiger, a observé, au lieu des résultats simples auxquels il s'attendait, l'intéressant phéno- mène suivant : Lorsque l’air intermédiaire entre deux électrodes, amenées au voisinage de leur potentiel de décharge, est ionisé par un corps radio-actif, le cou- rant ainsi produit, loin d’être constant, se trouve être sujet à des fluctuations, qui se superposent aux fluctua- tions de Schweidler, c’est-à-dire à celles du corps radio- actif lui-même, et que l’auteur mesure en fonction du courant et de la pression. M. Meyerétablitune théorie de ce phénomène, sur la base de simples considérations appartenant à la théorie cinétique des gaz. En tenant compte des limites de précision de la théorie et des expériences, on constate un accord satisfaisant, au moins quant à l'allure qualitative, entre les valeurs observées et la théorie. Si cette interprétation se trou- vail être correcte, on serait en présence d’un cas per- mettant d'étudier, à l’aide de nos instruments inertes, les écarts qui se produisent, par rapport aux lois des moyennes, dans la théorie cinétique des gaz. Séance du 18 Mars 1940. M. Von Pirani adresse un Mémoire sur /a mesure de la température vraie des métaux. On sait les incon- vénients que présente, dans les recherches faites sur les métaux aux températures élevées, la différence entre les températures « vraie » et « noire », cette der- nière étant seule accessible aux déterminations. L’au- teur s’est posé la tâche d'étudier les relations qui exis- tent entre ces deux températures, surtout dans le cas des filaments entrant dans la construction des lampes à incandescence économiques au tantale et au tungstène. Pour constater la différence entre les températures vraie et noire, il se sert d’une constante indépendante de la surface de la matière, à savoir de la résistance spécifique, dont il détermine graphiquement la relation avec la température. Après avoir ensuite déterminé les températures noires correspondant aux mêmes résistances, il possède tous les éléments nécessaires pour établir ces différences. Les méthodes préconisées par l’auteur pour déterminer les résistances spécifiques 576 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES aux températures élevées comportent un chauffage, soit extérieur, soit intérieur, par le courant de mesure. Les deux formules empiriques établies par M. von Pirani permettent d’extrapoler les résultats de l’obser- vation. Dans le cas d'une lampe à double filament de platine, la différence entre les températures est, à 1.250, de 55°; à 1.550°, de 65°, et de 115° au point de fusion (1 788°). Pour une lampe à filament de tantale, l’auteur trouve une différence de 209, à la température de 1.100°, et de 145°, à une température vraie de 1.806°. Dans le cas d'une lampe à filament de tungstène, les résultats sont représentés par plusieurs courbes. Les valeurs numériques données dans ce Mémoire ne s'ap- pliquent évidemment qu'à des échantillons donnés. — MM. R. Pohl et P. Pringsheim adressent un second Mémoire sur la sensibilité photo-électrique des métaux alcalins en fonction de la longueur d'onde. Suivant les recherches des auteurs, il existe, chez les métaux alcalins, des régions de longueurs d'onde « critiques », dans lesquelles le courant photo-électrique, suivant une composante du vecteur électrique perpendiculaire à la surface du métal, subit une augmentation abrupte. L'état liquide, optiquement miroitant ou cristallin, n’exerce aucune influence sur ces phénomènes. Les maxima des régions critiques se placent à environ 480uu pour le rubidium, à 440uy pour le potassium, et à 320uu pour le sodium. Le maximum correspon- dant à un alliage KNa, à 69, 4°, de K, se place à envi- ron 390uu; il est trop bien marqué pour pouvoir être dû à la superposition des maxima de K et de Na. Comme d'autre part, K et Na, dans leurs alliages avec le mercure, ne présentent pas de régions à longueurs d'onde critiques, les auteurs croient être en présence de phénomènes de résonance ayant lieu dans les régions critiques, et qui dépendraient de la liaison moléculaire des atomes alcalins. Ils continuent du reste leurs recherches à ce sujet. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 Mars 1910. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries : Sur les figures polaires par rapport à une cubique plane. L'équation a4%—0 de la cubique. La conique (abc) &xayerc-byb:—0 des points Z pour lesquels les trois polaires Pays Prss Pys les points X et Y étant donnés, sont concourantes. Le triangle des diagonales d'un quadrangle pelaire est un triangle polaire. Pour un point Y donné, (abc) dx2,b°e,? représente les trois tan- entes par Y à la Cayleyenne. L'équation tangentielle (abc) (acë)(bct)(abE) —0 de la Cayleyenne, etc. —M.H. de Vries presente au nom de M. J. Bruin : Sur les sur- faces dont les lignes asymptotiques se déterminent à l'aide de quadratures. L'auteur étend les recherches de M. À. Buhl (Nouv. Ann. de Math., 1908, p. #33, et 1909, p. 337) en résolvant la question : « Quelles sur- faces z—# (1',f) )ouü—f(r,z) ou r=f (7,0) admettent des lignes asymptotiques qui se déterminent par des quadratures ? » Il énumère plusieurs groupes de cas. — M. D. J. Korteweg présente au nom de M. L. E.J. Brouwer : Sur la Structure des ensembles parfaits. 1. Ensemble de points et de segments. 2. Le théorème principal de Cantor et ses extensions. 3. La structure des ensembles de segments parfaits. 4. Les groupes du type géométrique €. 5. La pseudo-addition dans le type d'ordre géométrique €. — M. P. H. Schoute pré- sente au nom de M. W. van der Woude : L'involution cubique du premier rang dans le‘plan. L'auteur se res- treint au cas de l'involution cubique (1,) de triples de points caractérisée par la propriété qu'un des sommets d’un triangle d'involution parcourt une droite, si le côté opposé tourne autour d’un point. La conique double ,. Le lieu « des couples de points formant des triples avec les points d'une droite donnée. Les dix points singuliers et les dix droites singulières formant une configuration (10,, 10,). La courbe rationnelle «° de ramification. Rapport de ces résultats de la géomé- trie plane avec la géométrie de l’espace : le faisceau de cubiques gauches par cinq points et leurs points d’in- tersection avec un plan quelconque, etc. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. A. F. Holleman présente au nom de M. A. Smits: Une nouvelle théorie de l’allo- tropie. A l'aide de la solidification, l'étude de la tauto- mérie a montré que les phases fluides de substances tautomères consistent en deux espèces différentes de molécules. De plus, d’autres recherches ont mené au résultat qu’en général la phase fluide d'une substance se compose d'espèces différentes de molécules (les ions compris). D’après Bancroft et Bakhuis Roozeboom, l'explication que plusieurs substances se présentent ne contenant qu'une seule espèce de molécules (sub- stances unaires) tient à ce que les points de fusion, d’ébullition, le point critique, etc., de ces substances ont trait à une position d'équilibre d'espèces différentes de molécules. En effet, MM. Carveth, Soch et Cameron ont montré que souvent il est très facile de faire con- naître dans quelques cas particuliers le caractère binaire de substances unaires à l’aide d’un refroidisse- ment soudain. D’après l’auteur, il est très remarquable que jusqu’à présent personne n'ait remarqué les résul- tats surprenants auxquels on parvient si l’on part des deux vérités suivantes : Durant la solidification se for- ment toujours des cristaux mixtes; l'équilibre intérieur de la phase fluide se continue dans la phase solide. Ces deux vérités mènent à une connexion entre les allo- tropies hétérogène et homogène, etc. Introduction. Les courbes d'équilibre intérieur. Constatation expérimen- tale. Applications. — M. H. Haga présente la these de M. A. Aalderink : « Thomson-effect bepalingen in ijzer bij verschillende temperaturen » (Déterminations de l'effet Thomson dans le fer à des températures diffé- rentes). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker présente le second fascicule du tome premier de son « Leerboek der Physiologie » (Traité de Physiologie). — Ensuite M. Zwaardemaker présente au nom de M. A. K. M. Noyons : La sclérométrie physiologique. Dans une communication précédente (Aev. génér. des Sciences, t. XIX, p. 636), l'auteur a fixé l'attention sur la dureté physiologique des muscles. Il y remarquait que la dureté est une notion collective, comprenant au sens minéralogique une somme de propriétés telles que cohésion, élasticité, plasticité, glissement, clivage, rupture. Pour les buts physiologiques, les trois pre- mières qualités sont prépondérantes. I.e rebondissement d'un marteau frappant le muscle donne une mesure de la dureté: l'auteur étudie à l'aide d’un instrument, le scléromètre ballistique,se basant sur ce principe : 1° le nombre des rebondissements; 2° la forme et la hauteur de chaque rebondissement; 3° la somme des hauteurs de tous les rebondissements; #° la manière dont le marteau pénètre dans l'objet de recherche. Les expériences de l’auteur, se rapportant à la dureté du muscle gastrocnémien de la grenouille et de la cornée de l'œil du cochon, montrent qu'on doit distinguer entre la dureté relative et la dureté absolue. Cette dis- tinction est en rapport intime avec cette question : laquelle des trois propriétés, l’élasticité, la plasticité et la cohésion est prépondérante en chaque cas particu- lier? L'auteur espère pouvoir indiquer plus tard le rôle essentiel de chacun de ces trois facteurs. — M. C. H. H. Spronck présente au nom de M. J. G. Sleeswyk : Contribution à l'étude de l'anaphylaxie du sérum. IN. Pour les parties précédentes, voir Jtev. génér. des Serences, t. XX, pp. 344, 388, 564. P. H. Scaoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91° ANNÉE Ne — 30 JUILLET 1910 Revue générale DS Sciences pures el appliquées DiRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Élection de deux Associés étrangers à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans ses dernières séances, l’Académie des Sciences de Paris a procédé à l’élection de deux Associés étran- gers en remplacement d'Alexandre Agassiz et de Ro- bert Koch, décédés. Sir William Ramsay et M. Ray Lankester ont été élus. Les travaux qui ont valu aux deux illustres savants anglais une si haute distinction sont trop connus de nos lecteurs pour que nous ayons besoin de les rap- peler ici. La Revue leur adresse en cette occasion ses plus vives félicitations. La Médaille Albert de la Société Royale des Arts. — La Médaille Albert de la Société Royale des Arts de Londres — instituée en 1862 en souvenir du prince Consort, et conférée annuellement aux per- sonnes de mérite dans les arts, l'industrie ou le com- merce — vient d'être attribuée pour celle année. à Mve Curie pour sa découverte du radium. M#° Curie est la seconde femme qui ait recu pareille distinction, la première ayant été la reine Victoria, en 1887. $ 2. — Art de l'Ingénieur A propos de la formation des ingénieurs en France et à l'Etranger. — Nous recevons de M. L. Aguillon, inspecteur général des Mines, la lettre suivante : « Monsieur le Directeur, « Permettez-moi de faire appel à l'esprit de large impartialité qui inspire la Æevue géntrale des Seiences, pour vous prier de vouloir bien accueillir une réponse, malheureusement un peu tardive, à quelques-unes des allégations contenues dans l'article sur la « Formation des ingénieurs en France et à l'Etranger » publié dans votre numéro du 15 avril dernier. « Je me garderai bien de reprendre la question de l'Ecole Polytec hnique ou de suivre M. André Pelletan techniques » et le déroulement de ses «cycles » d'en- seignement, ne voulant pas encourir le reproche que l'on nous fait assez souvent en France parler ou écrire sur des sujets que nous Connaissons peu en y mettant d'autant plus d'assurance que nous les igno- rons davantage; proclamer que tout chez nous est archaïque ou gangrené, qu'il faut tout renouveler en nous inspirant de ce que l'on fait à l'Etranger. « Je ne voudrais retenir de cet article que deux points que je crois un peu connaître, après une car- rière près de se clore et qui a pas mal duré : je veux parler du personnel de directeurs et d'ingénieurs que nous formons pour les mines et la métallurgie et du Corps des Mines. « Voilà plus d'un quart de siècle que je fréquente assidument chez les premiers, les ayant quasiment tous connus, depuis les directeurs des plus grandes alaires jusqu'au plus modeste subordonné; je ne crois pas que pendant ce longum æ&vi humani spatium, il y ait affaire de quelque importance concernant les mines et la métallurgie où l'Administration ait eu à intervenir — et Dieu sait si elle se mêle de tout — dont je n’aie eu à m'occuper. Au Corps des Mines, j'ai passé par tous ses services et j'ai eu à en suivre tous les membres; j'ai dû regarder au delà de nos frontières pour savoir ce qui se fait dans les exploitations comme dans les administrations de l'Etranger. « Je crois donc pouvoir parler de ceci et de cela avec quelque pertinence et j'y apporte le désintéressement facile à qui n’a plus rien à attendre de la vie. Bien que je veuille éviter, je l'ai dit, tout ce qui pourrait être de discussion générale sur la formation des ingénieurs; bien que je ne veuille pas rappeler les difiérences dont il faut tenir compte sur ce sujet entre pays différents au point de vue de la mentalité, de l'organisation sociale et surtout des ressources nalu- relles, tout homme de bon sens concédera, je le pense, que le changement n'est pas un but par lui- -même ; ce n'est qu'un moyen. On ne transforme pas simplement pour complaire à des idées pré concues, pas toujours très désintéressées. On change quand on a besoin d'obtenir un progrès et que l'on sait que ce change- ment doit l'apporter. Or, on peut hautement affirme dans ses observations générales sur les « hautes études | que, par le système général actuellement suivi chez REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, 1% CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nous, abstraction faite des améliorations de détail dont il a toujours été et dont il est encore susceptible, nous avons, dans nos usines métallurgiques et encore plus dans nos mines, en nombre et en capacité, un personnel de directeurs et d'ingénieurs qui répond à tous nos besoins et peut être comparé, s'il n’est même supérieur, à celui de tous les pays. Si j'avance aussi carrément une pareille affirmation, ce n’est pas seule- ment parce que c'est ma conviction personnelle, mais parce que l’on retrouve cette appréciation dans les Rapports officiels de la Commission prussienne «sur les éboulements de mines », dont la traduction est bien connue de tous ceux qui s'occupent de l'industrie extractive. « Faudra-t-il attendre que les étrangers nous aient pris nos méthodes pour que nous les réintroduisions chez nous? Aussi bien, l’on est frappé, lorsque l’on cause avec ceux qui paraissent devoir être les plus intéressés, les directeurs de nos grandes affaires minières et métallurgiques, d'entendre les améliora- tions qu'ils réclament pour la formation de leurs ingé- nieurs, je ne dis pas de leurs contremaîtres : ils se préoccupent peu qu'ils aient fait ou non du travail manuel, qu'ils aient ou non manié dans les écoles des machines qui ne seront jamais celles de l’industrie; ils demandent qu'on donne, si possible, à leurs futurs collaborateurs plus de culture générale, et beaucoup, j'ose à peine le dire, voudraient plus de culture litté- raire ; et j'ose aussi lâcher le grand mot, qu'ils sachent « faire un rapport», ce qui veut dire exposer un sujet avec ordre et clarté : on en a toujours besoin dans la vie. La pratique du métier, quand on est intelligent et que l’on a reçu à l'Ecole spéciale une complète prépa- ration générale dûment appropriée, s’apprend vite et bien, à l'usine et à la mine plus qu'à l'Ecole. On ne commande pas dès le premier jour. « Au regard du Corps des Mines, il est utile, tout d’abord, de rectifier les attributions que lui confère un peu trop inexactement M. André Pelletan, qui est par là amené à proposer incidemment un mode de recru- tement par les fatigués ou les rebuts de l’industrie. J'accorde très volontiers que les attributions du Corps des Mines sont assez multiples et disparates pour étonner : s'occuper simultanément de contrôler les mines et les chemins de fer,-les appareils à vapeur et les autos, sans oublier les eaux minérales, c’est sans doute beaucoup. Si l'Administration en est arrivée là, c'estapparemment qu'elle ya trouvé sonintérêtet qu'elle ne s’en est pas mal trouvée. Je ne discuterai pas ce mélange d’attributions. Je passe notamment sur ce qui concerne les chemins de fer, me bornant à dire que, si l’on veut bien compter parmi les directeurs et les prin- cipaux chefs de service des Compagnies privées et de l'Administration des Chemins de fer de l'Etat, les membres du Corps des Mines y ont toujours été et y sont encore dans une proportion qui montre qu'on les apprécie et que leur formation a été suffisante. Je m'arrête encore moins à la surveillance des appareils à vapeur; beaucoup de pays ne l’effectuent pas par des inspecteurs administratifs : les chaudières ne sautent ni plus ni moins ici et là. Le contrôle des mines est de tout autre ordre dans des pays qui, comme le nôtre, pratiquent la séparation de la mine et du sol et font ainsi de son institution, de son fonctionnement écono- mique et de sa déchéance éventuelle des questions administratives d'intérêt général et de portée considé- rable. Les refusés, les rebuts de l'industrie n’y seraient guère à leur place, pas mème dans la surveillance technique et courante des travaux. La mine est, en effet, un perpétuel recommencement. La surveil- lance administrative n’a pas seulement pour objet, comme dans les autres industries, de veiller à l’appli- cation littérale de règlements rigides. Il faut conti- nuellement de la part des contrôleurs administratifs, comme de la part des exploitants, pour l'assiette de nouveaux travaux ou la modification de travaux actuels, un esprit d'initiative particulier. « A ce Corps des Mines, dontil me fallait tout d'abord rectifier le rôle, méconnu par M. André Pelletan, que reproche-t-il? D'avoir trop de ses membres à l’Institut et de ne pas en avoir un seul qui se soit signalé par des travaux sur l'Art des mines. « Je souhaite, sans trop l’espérer avec les exigences diverses de la vie actuelle, que le Corps des Mines compte toujours un nombre aussi considérable des siens à l’Institut. Ce n’est pas seulement pour lui une parure brillante. C’est d'une grande utilité pour l'Admi- nistration. Ces membres de l'Institut n’y sont pas tous arrivés par leurs connaissances dans les Mathématiques pures, mais encore et surtout par leurs travaux dans des sciences telles que la Géologie et la Chimie indus- trielle qui sont indispensables à la pratique et au développement de l'Art des Mines et de la Métallurgie. Il est singulièrement utile à l'Administration qui doit s'occuper de ces industries de pouvoir éventuellement demander le concours de pareilles autorités. Sans doute, elle le trouverait, au besoin, dans des personnes étrangères à son personnel. Qui ne voit la différence pour une administration et, partant, pour le bien publie de s'adresser à celles-ci ou à celles-là ? « Les travaux dans l'Art des Mines peuvent s'entendre de travaux intellectuels tels que ceux résultant de publications sur cet art, ou de travaux matériels comme ceux que constituent la direction et la conduite des entreprises mdustrielles. « Je ne voudrais pas exposer ici la bibliographie des publications faites par les membres du Corps des Mines, et notamment dans tant de revues où ils écrivent sur ces sujets; je me bornerai à rappeler que les traités réputés classiques et à coup sûr les plus répandus sur l'exploitation des mines, depuis celui de Combes en 1843, en passant par celui de Calbon, jusqu'à celui de M. Haton de la Goupillière, qui en est à sa 3° édition, sont dus à des membres du Corps des Mines: et j'ajouterai que, dans les publications spéciales que je signalais tout à l'heure, il serait aisé de relever, dans l’ordre d'idées où je me place, des « travaux » qui ont été des dates pour l'Art des Mines, comme la découverte du retard à l'inflammation du grisou de Mallard et Le Chatelier, d'où ces savants ont tiré les principes fondamentaux de cette question si capitale des explosifs de sûreté, ou qui ont apporté aux mines des éléments singulièrement précieux comme le gri- soumètre de M. Chesneau ou comme les divers engins mécaniques d’une si haute ingéniosité de M. Rateau. « Dans la direction et la conduite des entreprises industrielles, les membres du Corps ne peuvent inter- venir directement tant qu'ils restent dans nos cadres, puisqu'ils sont des contrôleurs et non des exécutants. Mais ici se présente une particularité intéressante. M. André Pelletan voudrait que l'Etat prit ses inspec- teurs des mines dans les refusés de l’industrie; celle-ci préfère emprunter des membres du Corps des Mines pour les mettre à la tête de ses principales entreprises et ils y font des travaux qui mérient d'être signalés dans l'Art des Mines. « De tout temps, le Corps des Mines à ainsi fourni ses membres aux plus grandes entreprises que l’in- dustrie française poursuit sur notre territoire ou à l'Etranger; cet exode est encore plus marqué aujour- d'hui que jamais, au point qu'il préoccupe l'Adminis- tration, qui voudrait empêcher les cadres d'activité de se vider de la sorte. C'est ainsi que les deux plus grandes entreprises minières du Nord et du Pas-de- Calais ont à leur tête des ingénieurs du Corps des Mines; il en est de mème pour les deux principales mines du Centre et du Midi et pour la principale de nos exploitations africaines. Sans entrer dans d’autres détails analogues, qui pourraient ètre allongés, je relève, en parcourant notre annuaire, que, contre 86 membres qui figurent dans les cadres de l’activité avec les affec- tations les plus diverses dans les services publics, il y en à 32 dans les cadres de la disponibilité occupant tous de hautes situations dans la vie industrielle active, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 579 el, sur ce nombre, 17 sont dans des entreprises mi- nières et métallurgiques des plus importantes; et je laisse de côté ceux qui, par suite de convenances ou de règles administratives, ont quitté nos cadres. On me concédera qu'il est préférable pour l'Etat d'avoir des inspecteurs recrutés et formés de telle sorte que lin- dustrie privée y vienne prendre ses chefs, au lieu de demander à celle-ci de lui laisser ses rebuts. « Aussi bien, un fait récent paraîtrait montrer à quel point les travaux des membres du Corps des Mines sont appréciés. La grande Société de l'Industrie miné- rale qui, dans ses 1.200 membres, compte tout ce qui s'occupe de Mines et de Métallurgie, qui, soit dit en passant, fut fondée par un membre du Corps des Mines, Louis Gruner, un maitre de la métallurgie moderne, et a toujours été présidée par des membres du Corps des Mines, fêtait dernièrement son cinquan- tenaire, el, à cette occasion, elle a distribué des mé- dailles d’or à ceux de «ses collègues qui ont, au cours des cinquante dernières années, le plus contribué au développement des arts des Mines et de la Métallurgie ». Sur 9 médailles qu'elle à ainsi attribuées, j'en relève # pour des membres du Corps des Mines. « On pensera sans doute que, soit qu'on les prenne dans leur fonctionnement administratif dont l'Etat parait se louer, soit qu'on les suive dans les occupa- tions que l'industrie privée leur confie, les membres du Corps des Mines n'encourent pas les griefs que teur adresse M. André Pelletan, et, au point de vue notam- ment de l’art des Mines et de la Métallurgie, de la vie de ces industries, ils montrent les excellents résul- tats donnés par un recrutement et une formation qu'il ne faudrait donc songer à modifier de fond en comble qu'avec beaucoup de circonspecton. « Il se peut que les appréciations sévères de M. André Pelletan lui aient été inspirées par le cas de quelques membres du Corps, si rares, il est vrai, qu'on peut vite les compter, qui sont connus pour n'avoir jamais fait grand'chose, que la loi de l'ancienneté a parfois poussés Jusqu'aux plus hauts sommets et ne doivent qu'à une situation ainsi acquise une autorité qui peut tromper le public mal informé. Ce n'est pas sur de telles excep- tions qu'il faut baser des appréciations générales à moins de tomber dans des erreurs manifestes. « Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, etc. » L. Aguillon, , Inspecteur général des Mines, Vice-Président du Conseil général des Mines. S 3. — Chimie physique La décomposition chimique de l'eau sous l’action des rayons « du polonium.— Le phé- nomène, observé pour la première fois par M. Giesel', qu'un dégagement gazeux considérable se produit dans les solutions aqueuses de radium, est resté jusqu'ici peu élucidé. Il est vrai que Ramsay et Soddy?, ayant déterminé le rapport de l'oxygène à l'hydrogène dans le mélange détonant qui se forme, l’ont trouvé égal à 1: 2,6; mais la cause du déficit d'oxygène n'a pas été élablie. à Il s'agissait surtout d'étudier si l'énergie des rayons a, qui sont uniquement en jeu, ne sert qu'à décomposer l’eau ou exerce d’autres effets. Dans ce but, M. K. Bergwitz®, dans un récent travail, utilise, pour la décomposition de l’eau, un produit de polonium très pur, émettant un rayonnement « exces- sivement intense. L'expérience est continuée, dans un cas pendant deux cent quarante heures, et dans un autre pendant,quatre-vingt-seize heures. L'auteur incline à penser que le déficit d'oxygène est dû, soit à une faible oxydation de la tèle de cuivre portant le polo- nium, soit à la formation de peroxyde d'hydrogène. 5 Ber. D. chem. Ges., t. XXXV, p. 3605, 1902. = Proc. Roy. Soc., t. LXXI, p. 204, 1903. * Phys. Zeilschr.. n° 7, 1910. La comparaison du courant de saturation théorique avec un courant de saturation directement mesuré fait voir que 1/10 seulement de l'énergie de radiation est utilisé pour fournir du travail chimique. Les 90 °/, qui restent sont probablement employés à chauffer l'eau $ 4. — Chimie appliquée Nouveau procédé pour stériliser l'eau par le permanganate de potasse. — Les procédés chimiques pour purifier l'eau sont fort nombreux. Un des plus anciens est certainement celui qui consiste à utiliser l’alun, comme on le fait depuis très longtemps en Chine, au Tonkin, au Cambodge, etc.; on n'obtient d'ailleurs, par ce moyen, qu'une stérilisation fort incomplète, car il s’agit plutôt d'une précipitation et d'une décantation des produits terreux et organiques qui entrainent les microbes. On a proposé le chlorure de chaux, donton neutralise l'excès avec du sulfite de soude, ou bien encore une addition à l’eau que l’on veut purifier de perchlorure de fer, puis d’eau de chaux ou de carbonate de soude en solution. On à également préconisé, mais princi- palement contre les bacilles du choléra, l'acide citrique ou l'acide tartrique. II faut encore citer le traitement de l’eau par le permanganate de chaux, qui serait, paraît-il, très efficace et n'exige ensuite qu'une filtra- tion très simple sur un bloc composé de coke de cor- nue et d’oxydes inférieurs de manganèse. Cependant, l'un des procédés chimiques les meilleurs et les plus efficaces est incontestablement celui dans lequel l’eau est traitée par le permanganate de potasse. C'est en 1893 que M. Chicandard préconisa ce traite- ment : l'oxyde de manganèse était précipité par l’'adjonction d’un peu de poudre de café, de kola, de réglisse, d'écorce dechêne ou de quinquina. A la même époque, M'e Schipiloff, également partisan du per- manganate de potasse, conseillait de précipiter l’oxyde de manganèse avec un peu de sucre ou d'alcool et de filtrer ensuite le liquide pour avoir de l’eau potable. Cependant, pour que la stérilisation soit convenable- ment opérée, 1lest nécessaire que la coloration rose de l'eau persiste pendant une demi-heure; pour neutra- liser l'excès de permanganate que l'on est donc obligé d’avoir, il faut ajouter, en quantité suffisante, de l'hyposulfite de soude, du carbonate de soude, ce qui altère quelque peu la qualité de l'eau. Récemment M. Debuchy a proposé plus simplement la résorcine comme réducteur : la manipulation nécessaire est facile, rapide et ne met en jeu que des quantités très faibles de réducteur. Pour 25 centigrammes de perman- ganate de potasse dans un litre d'eau, il suffit de 5 centigrammes de résorcine, c'est-à-dire de 25 cen- timètres cubes d’une solution à 2 °/, de résorcine dans l’eau, pour que la réduction complète de permanganate soit obtenue après un délai de quelques minutes. Il n°; a plus qu’à filtrer sur papier ou sur coton hydrophile pour séparer les oxydes précipités et avoir une eau claire, limpide, sans traces de manganèse, absolument neutre au tournesol. Pour précipiter tout le perman- ganate, il a donc suffi de 20 °/, de son poids de résorcine. Cette quantité de résorcine sera encore plus faible dans la pratique, quand il n’y aura plus lieu de précipiter que l'excès de permanganate. ; Si l’on veut purifier une eau de qualité moyenne, il faut lui ajouter 3 centigrammes de permanganate par litre, laisser reposer deux ou trois heures, puis ajouter 4 milligrammes de résorcine. Le permanganate en excès est précipité en l’espace de cinq minutes au maximum, ce qui est indiqué par la couleur jaune- brun que prend la solution,et il n'ya plus qu'à filtrer. Pour une eau particulièrementimpure, ilfaut employer de # à 5 centigrammes de permanganate par litre et augmenter en proportion la quantité de résorcine. On a ainsi un moyen eflicace et rapide pour trans- former en eau potable une eau douteuse ou même malsaine. Louis Serve. 580 $S 5. — Sciences médicales The Rockefeller Institute for medical re- search, — Poursuivant la série d’études que nous avons entreprise pour la Revue générale des Sciences, nous sommes amené à parler de l'Institut Médical Rockefeller, fondé à New-York, et qui est l’une des plus significatives innovations de l’intelligent mécè- nisme dont savent témoigner plusieurs des « empe- reurs » yankees de la finance et de l’industrie. C’est une création du célèbre milliardaire, M. John D. Rockefeller, qui, en 1901, eut l’idée de grouper un certain nombre de médecins en Comité de patronage pour accorder des subventions assez élevées à certains chercheurs qui sembleraient intéressants. Le « Roi du Pétrole » songeait à essayer de doter ainsi son pays d'une sorte d’/nstitut Pasteur, permet- tant aux Américains de rivaliser, dans le domaine des découvertes thérapeutiques, avec les savants du Vieux- Monde, et de prècher d'exemple devant les médecins leurs compatriotes, dont la plupart, on peut bien le dire, ou sont encore mal guéris de l’empirisme, ou se montrent par trop aventureux, — victimes, dans les deux cas, d’une éducation professionnelle hâtive, et où nulle place n'est faite aux éléments primordiaux de la culture générale. Le « Board of Directors » fut composé de MM. les Drs Wm. H. Welch, président; T. Mitchell Prudden, vice-président; L. Emmett-Holt, secrétaire; Christian A. Herter, trésorier; Theobald Smith, Herman M. Biggs, et le directeur des laboratoires, Simon Flexner. Pendant les années 1901, 1902 et 1903, le Comité se contenta de ces simples fonctions; mais. dès la fin de la première année, le Rapport annuel des administra- teurs demandait une construction spéciale, appropriée aux besoins des travailleurs en cause. M. Rockefeller se laissa facilement convaincre, et on choisit à New-York l'emplacement nécessaire; mais, avant d'entreprendre l'édification de l'Institut, les administrateurs durent faire un grand voyage d’études en Europe, afin de rechercher quel serait le meilleur plan à adopter. Ce ne furent évidemment pas les éta- blissements français qui fournirent les meilleurs mo- dèles’; leur visite ne dut servir que d'indication pour ce qu'il ne fallait pas faire. En attendant que les plans fussent élaborés, l'Ins- titut fut installé provisoirement dans un immeuble de l'avenue Lexington, à l'angle de la 50€ rue, et le D Si- mon Flexner y installa provisoirement ses services, avec neuf travailleurs. Les travaux durèrent deux ans, et l'Institut fut dans ses meubles en 1906, dans la 66° rue-East. Il se compose de quatre bâtiments bien distincts : I. Le bâtiment des laboraloires, tout en acier et briques, composé d'un rez-de-chaussée en sous-sol, el de cinq élages. Il y a là les laboratoires de Chimie, de Physiologie et Pathologie expérimentales, de Bactério- logie, de Protozoologie, de Pharmacie, de Photogra- phie, — laboratoires nombreux et vastes, copieusement éclairés et venlilés, installés, enfin, comme ils peuvent l'être lorsqu'on n'a pas à regarder à la dépense de quelques dizaines ou vingtaines de milliers de francs de plus ou de moins. L'édifice comprend, en outre, quatre salles de bibliothèques, el un amphithéätre utilisé pour les réu- 1 Il semble cependant que l'Institut Pasteur de Paris, qui a élé la matrice d'où tous les laboratoires microbiologiques du monde entier sont sortis, eût pu fournir un modèle à imiter. D'ailleurs, on oublie trop souvent que les bâtiments, la disposition, plus ou moins heureuse, des salles de tra- vail ne sont vraiment rien au prix du reste : crédits pour l'achat immédiat de tout objet dont l'expérimentateur à besoin: et, plus encore, science, mentalité et moralité du chercheur. 1 importe infiniment plus de former des âmes de savant, sensibles à la beauté de la science et ardentes à la découverte, que d'édifier des palais. NOTE DE LA DIRECTION.) CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nions hebdomadaires de l’Institut, et prêté à des sociétés savantes. Sur le toit du bâtiment se trouve une vaste maisonnelte en fer, comprenant plusieurs niches à chiens, avec, pour chaque niche, une courette entourée de treillage métallique. IL. Le deuxième bâtiment, The animal House, est relié au précédent par une galerie couverte. Il comprend, au rez-de-chaussée, de vastes écuries pour chevaux, des étables pour moutons et chèvres, des salles pour les singes et les serpents. Au premier étage, il y a des salles pour les chats, les lapins, les cobayes, les oiseaux, les grenouilles, les souris et les rats. f IT. Près de l'Animal House est le crématoire pour les animaux morts IV. Près de New-York, dans le New-Jersey, l'Institut possède une ferme de quarante hectares; c'est là que sont envoyés en convalescence les animaux opérés, et c'est là aussi que sont parqués les chevaux à sérum, et principalement ceux à sérum antiméningilique. Une construction nouvelle s'élève près du premier bâtiment : c'est un hôpital qui comprend cinquante chambres de malades, plus un pavillon d'isolement à deux étages. ‘ L'enseignement est réparti en départements : Pathologie. Directeur : le D' Simon Flexner et dix travailleurs, dont un Japonais (D' Noguchi) et deux femmes (miss Barker el miss Wollstein). Physiologie et Pharmacologie. Directeur : D' S;.-I. Meltzer et trois travailleurs. Chimie. Directeur : D' P.-A. Levene, et sept lravail- leurs. Photographie. Directeur : D' Leaming. Soit, en tout, vingt-quatre travailleurs appointés, ayant en plus la fourniture gratuite des animaux, appareils et substances nécessaires à leurs travaux. En dehors des travailleurs de lInstilut, il y a qua- rante-cinq chercheurs subventionnés dans les labora- loires de l'étranger. Les principaux travaux auxquels se livrent les membres de The lockefeller Institute sont les re- cherches de sérum curateur du cancer, de la tubercu- lose, de la trypanosomiase. On y étudie aussi la flore bactérienne de l'intestin, la transplantation des organes, l’automalisme du canal gastro-intestinal, la physiologie du cœur, l'influence des agents mécaniques sur la fermentation. Tout le travail fait tant à l'Institut qu'au dehors est publié chaque année dans un in-8° de 300 pages: Studies from the Rockefeller Institute: dix de ces volumes ont déjà paru. Ils sont envoyé gratis à toutes les bibliothèques d'Universilés ou de Sociétés savantes qui en font la demande. L'Institut publie, en outre, un périodique, le Journal of experimental Medicine. Louise Chaboseau-Napias. $S 6. — Géographie et Colonisation Départ de deux expéditions polaires. — Deux expéditions polaires viennent de se mettre en route dans le courant de juin. L'une, celle du capi- taine Amundsen, à bord du Fram, se dirige vers San- Francisco par le cap Horn; de là elle gagnera la mer de Behring pour s'engager dans les glaces, suivant le plan d’abord suivi par Nansen. Le capitaine Amundsen espère être entrainé très près du pôle Nord et débou- cher en eau libre, entre le Groenland et le Spitzherg, en 1915 ou 1916. !l emporte des provisions pour 7 ans. Au cours de ce voyage, de nombreuses observations océanographiques seront faites dans le bassin polaire. L'autre expédition est celle du capitaine Scott, qui se rend à bord de la T'erra Nova, d'abord à la Nouvelle- Zélande, puis de là dans l'Antarctique. Une partie de l'Expédition s'établira dans le détroit de Mc Murdo pour y passer l'hiver et préparer des relais pour un voyage vers le sud. L'année suivante, le capitaine Scott espère atteindre le pôle. LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 581 ALEXANDRE ETARD S'AANLE EC ES TRAVAUX (1852-1910 Le 4% mai dernier est mort à Paris le chimiste Alexandre Étard, l’un des plus anciens collabora- teurs de la Revue générale des Sciences, lun des hommes dont le concours nous à le plus aidé à la fonder. Nous remplirons un pieux devoir en disant ici ce qu'il fut et en résumant, à l'intention des lecteurs non spécialisés dans l'étude de la Chimie, les parties maitresses de son œuvre. Les belles découvertes qu'il à réalisées sont aujourd’hui incorporées au système général de la Science, et bientôt, peut-être, y deviendront ano- nymes. Mais qu'importe? Si de bonne heure lui vint la renommée, il la savait chose passagère, el elle ne fut jamais ce qu'il chercha. Il demandait au travail son produit immortel, le seul bien que le savant puisse répandre dans le monde : un accrois- sement de vérité; et, plus jaloux d'innovation créatrice que de succès retentissant, c'est vers les grands problèmes d'ordre doctrinal que l'orienta son abnégation. Il rencontra ces questions dans tous les départements de la Chimie, et sa fertile imagination lui fournit les moyens d'en aborder quelques-unes. A celte tâche, il se donna tout entier, esprit et cœur, avec la pensée libre, les hautes et sereines passions qui firent de lui dans la vie un modèle d'humanité. Son apport à la science est trop intimement lié à sa personnalité morale pour que nous puissions négliger de marquer les traits saillants de sa men- talité, de son caractère et de ses goûts. En le sui- vant à travers les milieux où s'exalta sa sensibilité et puisa son esprit, nous verrons le savant d'abord se former, puis agir. Î. — LA FORMATION DE L'ENFANT. Étard était d'origine paysanne. Toute sa lignée avait beaucoup travaillé. Son père exerçail aux environs d'Alençon le métier de jardinier-pépinié- riste. C'était un homme énergique : à vingt ans, il eut le courage d'apprendre à lire. Lors d’une visite à son chef-lieu, les hasards d'une recherche dans le magasin d’un brocanteur mirent sous ses yeux les dix-sept volumes de la Géographie mathé- matique, physique et politique de toutes les parties du Monde, publiée par Malte-Brun. Il acheta l’ou- vrage el s'en nourrit toute sa vie. Sa journée faite, c'était son bonheur de se griser d'exotisme, de respirer dans la chaude lumière des Tropiques, au pied des manguiers et des pamplemousses, le par- fum de fleurs énormes. Un soir qu'en un demi- sommeil sa pensée suivait les rives des grands fleuves équatoriaux, on lui apporta un journal. La feuille annoncait que le Gouvernement chilien, désireux de créer des pares et des squares à l'instar du Vieux Monde, faisait appel à un horticulteur francais. Le lendemain même il se rendait chez le consul du Chili, qui, charmé d'un tel empresse- nent, l'engagea séance lenante. Et voici notre homme en route pour l'Amérique avec sa femme, le jeune Alexandre, alors âgé de trois ans, et la Géographie de Malte-Brun. La capacité dont il tit preuve dès son arrivée (1855) lui gagna vite la confiance du Président : il eut sous ses ordres une petite armée de travailleurs, perca de longues avenues l'épaisseur des forêts, dessina des massifs et groupa des feuillages. Libre d'associer selon son goût les essences et les couleurs, il puisa dans la flore somptueuse et bâtit son rêve. Nos plus belles plantes d'Europe s'entremêlèrent aux végé- taux indigènes pour composer des kiosques de verdure ou des parterres de fleurs, et, du haut des palais, escaladés par nos roses de France, de longues guirlandes d'orchidées dévalèrent jusque dans les jardins. ; Le petit Alexandre errait dans cette beauté, allègre et léger comme un papillon. D'intéressantes chevauchées à travers la campagne le transpor- taient en des sites grandioses, déroulant sous ses regards des paysages de féerie. Au sein de ces magnificences, l'enfant vivait délicieusement heu- reux, et déjà s'implantait en son àme ce goût pas- sionné de la Botanique, cet amour de la Nature et, par conséquent, des voyages qui, par la suile, devaittant contribuer à élargir sa science el sa men- talité. Brusquement, cette évolution fut menacée : dans une chute de cheval, il fut blessé à la hanche, et une coxalgie se déclara: durant plusieurs années, elle le maintint étendu sur une petite voiture de malade. Opéré, il demeura, pour le reste de ses jours, affligé d'une elaudication pénible. Mais trop vaillant était son jeune esprit pour que cette cruelle épreuve l'accablät. 11 accepta le mal physique et conserva, avec la paix du cœur, sa native gaieté. Vers sa dix-septième année, son père jugea pru- dent de l’éloigner des charmes alliciants qui, dans ce Chili si fertile en fleurs tentantes et vénéneuses, menacaient alors l'insouciante jeunesse. S'étant 582 lui-même résolu à un prochain retour en France, il expédia son fils au lycée d’Alencon (1868). Ce ne fut pas sans regret qu'à bord d'un grand navire, l'adolescent vit disparaitre la splendide Nature qu'il avait aimée. Mais d’autres spectacles devaient bientôt l'enchanter. Les glaces et les tempêtes de Magellan, les montagnes et les fjords de la Terre de Feu, la baie de Rio-de-Janeiro, l’une des mer- veilles du Monde, vinrent enrichir sa pensée de nouvelles Lorsqu'il débarqua à Saint- Nazaire, il fut saisi d'étonnement : au lieu des petites maisons basses, aux murs de terre, que la fréquence des séismes imposait au Chili de son temps, des édifices à cinq ou six étages s'élan- caient vers le ciel: les dames ne trainaient pas des loilettes de soirée dans les rues; aucune n'allait nu-pieds. Il lui sembla entrer dans un monde fan- lastique, et ce contraste l’incila à réfléchir sur les hommes et sur les choses, à regarder ce que l'habi- tude de voir nous empêche d'examiner. Si nous nous sommes quelque peu étendu sur ces circonstances, c'est qu'elles paraissent avoir grandement influé sur la personnalité seientilique d'Étard. Elles développèrent en lui ce don de l'observation originale el sagace qui fut le charme de sa conversation et le levain de tous ses travaux. Dès le lycée, son aptitude à tout comprendre le servit : malgré l'ignorance où l'avaient laissé les petites écoles du Chili, il eut vite fait de rejoindre les élèves de son âge. Cependant, il ne semble pas que l’alma mater lui ait procuré des joies intellec- tuelles très intenses. Les fails et gestes de ses camarades de classe l'intéressèrent infiniment plus que ceux des auteurs décédés avant notre ère. Quand, en 1870, ses parents, fixés à Paris, le rap- pelèrent près d'eux, il pouvait paraître aussi mal préparé à la vie que la plupart de ses condisciples. visions. IT. — LA FORMATION DU SAVANT. Des événements tragiques allaient contribuer à môrir sa pensée. L'armée allemande avait envahi notre territoire. Enfermé avec les siens dans la Capitale investie, il connut les angoisses du siège, puis les incendies de la Commune. Ainsi, celte belle et généreuse nation vers laquelle, des rives du Pacifique, il avait vu converger les sympathies des peuples, cette grande France de Henri IV, de Louis XIV et de Napoléon avait pu être vaincue! Au sein même de la plus haute civilisation du Monde s'étaient développés des germes de mort! Toutes ses de collégien sur la culture humaine recevaient de la brutalité des faits la plus profonde atteinte. L'ordre rétabli, il lui tarda de décider de son avenir par le choix d'une profession. Mais, encore idées Ps LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD désorienté dans ce grand Paris où il manquait de relations, il ne put d'abord qu'y fläner. De temps à autre, son regard errait sur les enseignes, en quête d'une suggestion heureuse. Passant, un jour, devant l'Ecole municipale de dessin, il crut y découvrir sa vocation. Pendant plusieurs mois, il peina sur l’étude des formes, et peut-être se serail-il obstiné en cet ingrat labeur, si l’un de ses maîtres ne lui avait rendu le service de lui dire : « Mon ami, faites donc autre chose. » De nouveau, il déambula à la recherche d’un métier. Une affiche du Muséum le frappa. Il y lut que M. Frémy, de l'Académie des Sciences, enseignait gratuitement la Chimie. Qu'étail-ce, au juste, que cette science? Rarement, il en avait entendu parler. Elle n’était guère, pour lui, que la cuisine, un peu cabalistique, où s'élaborent diverses substances utilisées dans les arts. Le mystère de ses pro- cédés l’attira. Il se rendit au Muséum et demanda M. Frémvy. L'illustre condescendit à le recevoir : « Jeune homme, lui dit-il, vous désirez entrer dans mon laboraloire? Les prémisses de notre science vous sont done familières? » L'aspi- rant néophyte sentit toute son audace s'effondrer. &« Du moins », reprit Frémy, «le grand nom de Lavoisier ne vous est point inconnu? » Le visiteur baissa les yeux. Le professeur hésita; mais, comme il était large et miséricordieux, il accueillit l'im- pétrant. savant En face de son laboraloire de recherches, Frémy dirigeait un laboratoire d'enseignement où, sous la surveillance d'un c« aide-naturaliste » et de deux assistants, ses élèves apprenaienl à préparer les corps usuels. La plupart se destinaient à l'industrie, et nombre d’entre eux y ont acquis des situations fort enviables. La chimie qu'ils pratiquaient n'était pourtant pas spécialement excitante. De la théorie pure, des lois de la science et des méthodes fondées sur ces lois, ils s'inquiélaient moins que des recelles techniques et de l’empirisme des manipu- lations. On produisait de la chaux vive, du chlore, de l'hydrogène phosphoré ou de l'acide sulfureux ; on faisait cristalliser du sulfate de soude ou de l'alun; on distillait des spiritueux, et, comme cou- ronnement, les « forts », les « anciens » abordaient l'analyse. Avec entrain, Élard calcina, précipita, lillra, pesa, sublima et pensa. Toute initiation au système général des réactions lui manquait; aucun ouvrage didactique n'était à sa disposilion; seuls, quelques répertoires de constantes s'offraient à sa curiosité. Peut-être cette absence de toute orienta- tion, qui eùt déconcerlé un apprenti ordinaire, lut-elle pour lui un bienfait. Pour quiconque réflé- chit, l'observation directe possède une vertu édu- calive incomparable. Chaque jour, le jeune travail- leur accueillait la réalité avec une surprise nouvelle dl Cr LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 583 el un enthousiasme grandissant. À mesure qu'elle étalait devant lui ses richesses, elle stimulait son esprit avide d'explication. Il classait les faits, notait les énigmes qu'ils imposent à nos médita- tions, s'appliquait à surprendre entre les corps mis en œuvre et les substances obtenues leurs rapports de filiation. Mais la « redécouverte » con- damnerait l'humanité au sort misérable de Sisyphe, si elle n'était judicieusement guidée. Elle amena Étard aux bouquins. Il s'y plongea, sans s'y asservir. Le commerce assidu des faits l'avait pré- servé à jamais de la déformation que fait subir une science trop exclusivement livresque. Armé de quelques manuels dont les descriplions avaient pour lui un sens que ne peuvent y découvrir les candidats ordinaires au baccalauréat, il se prépara tout seul à cet examen, et le passa avec honneur. Dès lors, partagé entre le laboratoire, où l'on observe de ses propres yeux, et les ouvrages clas- siques, qui ne vous font voir la Nature qu'à travers les yeux des autres, il ne cessa de donner le pas à l'activité personnelle sur l'érudition. Quand, sur un sujet quelconque, il s'était instruit de ce que les savants avaient découvert ou concu, pour juger leur œuvre, il répétait leurs expériences. Il acquil ainsi, avec un savoir considérable, une critique plus affinée et une habileté opératoire si remar- quable qu'elle appela sur lui l'attention de ses camarades et de ses maitres. Bientôt son talent de manipulateur lui valut d'entrer dans la Maison Billaut et Billaudot, qui, pour obtenir en gros cris- taux des composés encore rares, avait besoin d'un chimiste exercé. Dans ces nouvelles fonctions, ses succès mêmes élendirent sa notoriété naissante, el. lorsqu'en 1872 Cahours, professeur de Chimie à l'École Polytechnique, s’enquit, près de son vieil ami Frémy, d'un préparateur versé dans la tech- nique des réactions, le nom d'Étard fut le premier prononcé. Ce fut là, pour le jeune savant, l’événe- nement décisif de sa carrière. Cahours était, en même temps qu'un chimiste de haute valeur, un homme excellent. Il aimait les « jeunes » qui tra- vaillaient à ses côtés, et, non content de les associer en nom à ses recherches personnelles, encourageait leurs propres investigations. Il s’intéressait à leurs iniliatives, les aidait de ses conseils et les conviait amicalement à sa table. Il avait depuis peu dans son laboratoire son élève, ancien polytechnicien, Eugène Demarçay, qu'une solide culture et une profondeur de pensée peu commune semblaient déjà désigner pour les premiers rôles de la Science. Comme Cahours, cet éminent esprit découvrit tout de suite dans Étard une âme d'élite. Épris de science et de beauté, les deux jeunes gens se lièrent d'une amitié qui grandit jusqu’à la mort. Chose curieuse, ils eurent d'emblée le sentiment qu'ils se compléteraient l'un l'autre, et, dans l'ordre du progrès intellectuel, ils associèrent leur deslin Demarçay, plus largement instruit el de logique plus serrée, sentait surtout dans les phénomènes naturels leur extrême complexité et leur mutuelle dépendance. Par une laborieuse analyse, il Ss'eflor- çait de les pénétrer. Il admirait principalement chez Étard la clarté de l'esprit et le prime-saul des idées. Il lui reconnaissait une finesse exquise d'observation, et, dans le domaine de la Chimie pratique, un savoir qu'il n'eut bientôt plus à lui envier. Mais, s'il apprit de son ami une bonne part de la technique de leur science, il lui rendit en retour un service de prix : il l'initia aux rap- ports de la Chimie avec la Physique, la Méca- nique et les Mathématiques elles-mêmes, lui ou- vrant ainsi un univers insoupconné. Étard n'oublia jamais cette influence de Demarcay sur l'enver- gure de sa pensée, et il lui en garda une gratitude impérissable. Éclairé sur les lacunes de son éducation scienti- fique, ilse mit en devoir de les combler : il retourna, pour en poursuivre l'étude, aux x, déjà lointaines, du baccalauréat, et, dans la mesure où le lui per- mettaient ses obligations professionnelles, courut aux lecons de la Sorbonne. Les exigences de la vie restreignaient singulièrement ses loisirs : le soir, il traduisait — à coups de dictionnaire — des Mémoires allemands pour le Bulletin de la Société Chimique, et c'est ainsi qu'autodidacte, il apprit une sorte de contrefacon de la langue de Gœæthe: le jour, une partie de son temps était consacrée au contrôle chimique de la fabrication dans l'usine de faïencerie Boulanger, à Choisy-le-Roi; et il s’ac- quittait de sa tâche avec un zèle dont témoignent l'invention du vert qui porte son nom et la substi- tution de la craie à la traditionnelle poudre de coquilles d'huîtres dans toutes les couvertes. Malgré l'avancement que ces deux progrès lui valurent, il souhaitait une besogne moins assujettissante. Comme, à l'École Polytechnique, il n’était encore que préparateur-adjoint, Demarcay lui céda géné- reusement sa place de préparaleur en titre. Cette situation mieux rémunérée lui permit de poursuivre plus activement ses recherches de Chimie orga- nique déjà commentées, et de son travail se déga- gèrent des résultats aussi importants qu'inat- tendus. Cahours et Demarcay lui conseillèrent d'en faire la matière d'une thèse inaugurale; mais, pour se présenter au doctorat, il lui eût fallu être licencié. Cette considération s'ajouta à sa curiosité naturelle pour le pousser à étudier la Physique, la Minéralogie et, à cet effet, les Mathématiques supé- rieures. Il s'y donna avec ardeur, enleva la licence et, tout de suite après, le doctorat (1880). Il avait apporté à la science une méthode et une fonction D84 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD chimique nouvelles Cahours » rayonnail. Le vieux Maitre avait perdu tous les siens : sa femme et ses deux fils. À côté de Demarcay, Étard vint éclaircir le profond deuil de son cœur. Tous les samedis, on dinait chez le « patron », le plus souvent avec Grimaux, avec Léauté, avec le vieux Bréguet, toujours amusant et frétillant, avec Gal, à la voix de rogomme, aux instincts pratiques, qui, sans déchainer l'envie en ce petit cénacle, y tenait le rôle modeste du savant satisfait. L'astro- nome Faye, le général Perrier, créateur de la Géodésie, le paléontologiste Gaudry, le mécanicien Résa], l'historien Camille Rousset, l'industriel Japy, étaient aussi, avec Charcot, avec Larrey, avec quelques ingénieurs sortis de Polytechnique ou de Centrale, les familiers de la maison. Dans ce milieu charmant où, vu l'âge des maitres, floris- sait l'anecdote, l'appréciation des hommes et des choses, des faits courants de la science et du talent des auteurs s'entremélait aux joyeux récits, et, à bâtons rompus, une grande variété d'idées se faisait jour. Celles qui avaient allumé les jeunes continuaient, jusque dans la rue, à entretenir leurs discussions; puis les deux plus noctambules du groupe, dont Étard, allaient ensemble se réfugier au café. Beaucoup de science était remuée autour des bocks : parfois jusqu'à 2 heures du matin, les questions soulevées par des découvertes récentes étaient en cause. Étard eut toujours beaucoup de goût pour ces réunions très intimes où, dans la chaude atmo- sphère de l'amitié, on peut exprimer son sentiment sur toute chose et risquer les hypothèses les plus hasardées. Dans tous les milieux que lui fit tra- verser sa Carrière, il recueillit des amis qui devin- rent les confidents de sa pensée, bénéficièrent de son savoir et concoururent aussi à l'extension de ses vues sur la science. Moissan, auquel il demeura toujours très attaché, contribua beaucoup par ses entretiens avec lui à relever à ses yeux l'intérêt d'une correction raffinée et d'une méticuleuse pré- cision dans les expériences. Parmi les savants étrangers à sa profession, le physicien Curie, le minéralogiste Michel, les physiologistes Charles Richet, Eugène Gley, Paul Langlois sont de ceux dont il goûta le plus la collaboration intellectuelle et la vive affection. En suivant leurs travaux, il sentit sa passion pour la Chimie s'élargir : sollicité à la fois par la Physique et la Biologie, il passa du domaine organique, qu'il avait cultivé avec éclat, aux grands problèmes de la Chimie générale, et, enfin, s'orienta plus spécialement vers les réactions qui sont en jeu dans la vie; il étudia la Médecine et suivit les cliniques. il était célèbre: le « père Entre temps, il herborisait, rapportait au labo- ratoire des plantes adaptées à des milieux divers et cherchait jusque dans le sol l'explication de leurs particularités fonctionnelles. Cette étude ramenait souvent sa pensée sur les liaisons de la Géologie avec sa science favorite. Il tenait notre Globe pour le seul creuset d'où toute la gamme des réactions minérales puisse sortir. Sachant que les combinaisons ou décompositions des corps dépen- dent, non seulement de leur nature, mais aussi de des températures auxquelles ils sont soumis, il ne doutait point que la Terre renfermäàt en ses entrailles une chimie inconnue, des processus de formation et des équilibres dont nos petites expériences de laboratoire ne nous donnent aucune idée. Aussi accordait-il une extrême importance à l'étude de ses matériaux. Il voulail que le chimiste, non con- tent d'analyser les sédiments, les minerais, les gemmes des filons, les roches éruptives et les pro- duits volcaniques, allät les observer sur place dans leurs connexions avec l'ambiance où ils se sont produits. Partout où, durant les vacances, l’en- trainait son humeur voyageuse, il s’enquérait des grands phénomènes telluriques, descendait dans les mines et explorait les gisements. Dans les ré- gions montagneuses, malgré sa mauvaise jambe qui l'empéchait d’enfourcher les montures, il se faisait hisser sur la première bête de somme ren- contrée, et, cramponné au cou de l'animal, arrivail à destination. La facilité avec laquelle il s'adaptait à tous les modes de locomotion et à tous les régimes lui per- mellait, à l'étranger, des excursions auxquelles s'aventurent rarement les touristes. Aussi bien dans les villes que dans les campagnes, il se mélait à la vie populaire, et, plus encore par le contael du petit monde que par la fréquentation de l'élite intellectuelle, il pénétrait dans l'âme du pays. Il par- courul toute l'Europe centrale, l'Allemagne, l'Au- triche et la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, la Serbie, la Bosnie, l'Herzégovine, la Dalmatie et le Monténégro; il visita la Grèce, la Suisse, l'Italie et la Sicile, l'Espagne, dont il parlait couramment la langue, la Belgique et la Hollande, les Canaries, Madère, quelques ports du Maroc et le littoral tuni- sien. En tout lieu, le paysage, les industries, la vie économique lui apparaissaient liés à la structure | profonde de la contrée; le plus souvent, il vovail en ces effets la conséquence du chimisme interne Terre. Il suivait les produits d'extraction jusque dans les usines, où, pour les transformer, il trouvait encore à l’œuvre sa science de prédilec- tion. Curieux de la technique de tous les métiers, en particulier de ceux où la Chimie intervient, il | connut toutes les industries de l'Europe, spéciale- | ment la métallurgie, la grande industrie chimique, de la leurs masses, des pressions qu'ils supportent el LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 185 la verrerie, la céramique, la fabrication des pro- duits pharmaceutiques, des parfums et des matières colorantes. La fonetion d'inspecteur des Établisse- ments classés, qu'il exerca pendant quelques années dans la banlieue parisienne, étendit encore ses con- naissances pratiques : elle lui fit voir en détail les dessous de la vie alimentaire de la Capitale, toute la petite cuisine qui métamorphose en substances encore utilisables les déchets variés de la grande ville, Tant en France qu'en dehors de nos frontières, sa réputation l'avait mis en rapport avec la plupart des chimistes en renom. Au cours de ses voyages, il se plaisait à aller visiter ses confrères étrangers. Ayant appris l'anglais pour lire les Mémoires écrits en cette langue, il s'enhardit à le parler et, sur les instances d'un ami, se rendit à plusieurs congrès d'outre-Manche. La mentalité anglaise lattira. 11 aimait à se pénétrer de la pensée d'un Ramsay, d'un Roscoe, d’un Perkin, qui ne considèrent pas tout à fait sous le même angle que nous la façon de comprendre et surtout d'attaquer les problèmes de la science. Ces savants lui faisaient les honneurs de leurs laboratoires et discutaient avec lui leurs méthodes. Il admirait beaucoup leur scepticisme à l'égard des doctrines et leur aptitude à en faire usage. Il estimait avec eux que des théories logi- quement inconciliables peuvent contenir chacune assez de vérité pour soutenir la recherche et guider l'expérience. Il ne pensait pas que les lois de la Nature, du moins sous la forme où nous en enfer- mons l'expression, sont absolues. Mais il mainte- nait que, dans la mesure où elles traduisent la réa- lité, il serait déraisonnable de se priver de leurs services. Cette idée l'avait conduit dans sa jeunesse à adopter la notation alomique et les figurations de Kékulé, plus tard celles de la Stéréochimie. Mais jamais il ne vit dans cette manière de formuler les molécules autre chose qu'un moyen de les dési- gner par un bref rappel de leurs fonctions. Il se réjouit de trouver, parmi ses confrères anglais, des savants du plus grand mérite qui professaient ce même éclectisme et croyaient à l'utilité d'hypo- thèses en contradiction avec les théories régnantes. L'exemple de leurs hardiesses souvent fécondes l'encouragea dans sa tendance à s'affranchir du joug classique pour penser. Il était, d’ailleurs, de ceux qui croient que les différentes facons d'envisager la Nature concourent chacune à l'éducation du savant. Sous ce rapport, l'histoire des sciences lui paraissait d’une telle importance qu'il s'était astreint à étudier le passé de la Chimie, non dans des ouvrages de seconde main, mais en allant lui-même aux sources. De côté el d'autre, chez les bouquinistes et les antiquaires, à la foire au pain d'épice — sanctuaire peu connu de l'érudition il se procurail de vieux livres La bibliothèque qu'il s'est ainsi composée comprend à peu près toutes les œuvres de valeur qui, depuis fondé la Chimie, On v trouv le xvn siècle, onl dans leur intégrilé des ouvrages rares Comme ceux de Rouelle le Jeune et de Lavoisier. I se reportail souvent à celle précieuse collection, et l'on peut dire que, des rayons où il la conservait, elle élait passée dans sa tête. Mais sa curiosité débordait de beaucoup le champ habituel de ses investigations personnelles. Toutes les questions d'origine latli raient : il avait lu Lamarck, Darwin, Wallace, tous les grands fondateurs de l'évolutionnisme, s'élarl inilié à la linguistique et suivait de près le progrès de l’ethnographie. Depuis quelques années, après avoir pérégriné, sous la conduite spirituelle de Renan, à travers Israël et Juda, il se laissait guider par les écrits de Maspero dans les arcanes de la vieille Égypte. Le trésor de science et de philosophie qu'Étard avait ainsi acquis avait fait de lui l'un des hommes les plus instruits et les plus cultivés de sa généra- lion. Dans le cadre même de sa profession, l’uni- versalité de son savoir technique était pour ses confrères, d'ordinaire plus étroitement spécialisés, un sujet d'admiratif étonnement, car c'est au do- maine entier de la Chimie que sa compétence s'éten- dait. Il embrassait sa science depuis le monde miné- ral, où elle puise ses matériaux les plus simples, jusqu'aux étres vivants, où s'achèvent ses plus subtiles réactions, depuis le laboratoire, où elle éelôt, jusqu'à l'usine, où on l’applique. La part considérable qu'il prit à ses progrès lui valut d'être nommé successivement : Répétiteur adjoint à l'École Polytechnique (1882), Répétiteur titulaire à la même École (4884), Professeur de Chimie générale à l'École de Physique et de Chimie de la Ville de Paris (1885), Examinateur de sortie à l'École Polytechnique (1899). En 1901, Duclaux, sentant bien que l'essor de la Microbie dépendrait désormais de l'avancement de la Chimie, voulut adjoindre à l’Institut Pasteur, qu'ildirigeait, deux grands laboratoires pour l'étude chimique des diastases, poisons et principes immé- . diats en cours d'activité. Il fit appel à Étard. Entrer, en qualité de Chef de Service, dans ce grand Éta- blissement où flottera, tant que vivront ses murs, la gloire immortelle du Maitre, fut pour notre ami l'une des plus hautes joies de sa vie. Bien avant que de telles récompenses vinssent couronner sa carrière, l'Académie des Sciences avait voulu lui marquer sa particulière estime. En 1883, elle lui avait décerné le prix Jecker, destiné à hono- rer non pas un travail isolé, mais toute une vie de découvertes. Quoiqu'il n'eüt alors que trente- et un ans. l'Académie jugea que les recherches 86 LOUIS OLIVIER —— ALEXANDRE ÉTARD dont nous allons maintenant parler valaient, à elles seules, l’œuvre de loute une existence de savant. II. — L'œuvre D'ÉrARD EN CHIMIE ORGANIQUE. De 1875 à 1909, Étard n’a cessé de publier des travaux originaux. Le nombre de ses Communica- tions aux sociétés savantes dépasse la centaine. Nous ne saurions donc songer à les énumérer ici. Laissant de côté les problèmes particuliers auxquels ses recherches ont apporté une solution, nous nous bornerons à attirer l'attention sur les questions dominantes que Son labeur à résolues ou éclairées. $ 1. — Mécanisme de l’'Oxydation. L'une des premières qu'il entreprit d'élucider compte parmi les plus importantes de toute la Chimie. Il voulut savoir ce qui se passe dans le jeu profond des alomes quand on oxyde des composés organiques. Lorsqu'en 1877 il se posa cette ques- lion, elle était tellement obscure qu'aucun expéri- mentateur n'avail entrevu le moyen de l'aborder. C'était, pourtant, pratique courante d'oxyder les corps soil pour produire de nouvelles espèces chi- miques,soit pour jeter quelque lumière sur la struc- ture des molécules en détachant d'elles des radicaux stables. Mais, dans tous les cas, les chimistes ne tenaient en main que l’origine et le terme ultime de l'opération. Les réactions intermédiaires entre le point de départ et le point d'arrivée leur échap- paient, et peul-être n'avaient-ils guère la curiosité de les chercher : le fait même de l'oxydation leur était trop familier pour ne point rentrer dans la catégorie des phénomènes qui nous semblent porter en eux-mêmes leur explicalion. L'agent suroxygéné cède-t-il directement au composé organique oxY- gène, 0Zone Ou eau oxygénée, ainsi que, sur les seules apparences, on s'était inconsciemment accou- lumé à l’admettre? Ou bien, au contraire, comme se le demanda Étard, ce réactif forme-til avec la molécule traitée ou ses composants soit une combi- naison, soit une série de combinaisons définies, liées entre elles par une filiation régulièrement ordonnée? L'ignorance sur ce point était absolue. Il eût, cependant, été du plus haut intérêt pour la philosophie chimique de dépister, dans toute la continuité de son enchainement effectif, le pro- cessus qui relie à l'état initial le résultat final. 1. Emploi du réactif chlorochromique. Cas du Toluène. — Plus attentif à la réalité objective qu'aux opinions traditionnelles, Étard eut le mérite de sentir, derrière le fait banal qui n'étonnait per- sonne, un problème en cause. Il venait de découvrir une méthode d'oxydation qui, à l'inverse des pro- cédés usuels, lui parut, en l'espèce, susceptible d'une application heureuse. En étudiant les sels de chrome et leurs colorations, il avait été frappé du grand pouvoir oxydant de acide chlorochromique, et il avait reconnu que l'action de cet acide sur un composé organique additionné d'eau aboutit à fixer sur ce composé une fonction réductrice oxydée. C'est ainsi que, sous l'influence de ce traitement, il avait vu le toluène (benzine monométhylée) se con- vertir en aldéhyde benzoïque. En vue d'éliminer l'un des facteurs possibles de ce résultat, il réussit, par un ingénieux artifice, à faire agir le même acide sur le même hydrocarbure à see. Dans ces conditions, aucune trace d'aldéhyde ne se forma; mais un corps nouveau apparul, où l'ana- Lyse révéla, comme seuls constituants, les éléments d’une molécule de toluène unis à ceux de deux molécules d'acide chlorochromique. Le nouveau corps représentait donc un stade de combinaison intermédiaire entre le toluène et le dérivé aldéhy- dique de ce carbure. Traité par l'eau, il reproduisit celle aldéhyde. Une telle découverte (1879) eut lout de suite un retentissement considérable. C'était la première fois que, suivant l'expression même de l'auteur, « le mécanisme d'une oxydation avait pu être élabli par la séparation de produits intermédiaires purs » et « la transformation ultérieure » de ces produits « dans le dernier terme » de la réaction. 2. Généralité du mécanisme de loxydalion. — Bientôt l'habile chimiste montra qu'il s'agissait là non d'un cas parliculier, mais d'une loi géné- rale (1880. Il expérimenta sur des composés très variés : hydrocarbures, saturés ou non saturés, de la série grasse el dérivés de ces corps; composés aromatiques réduits à leur noyau ou porteurs de chaines latérales plus ou moins complexes et plus ou moins nombreuses. Dans tous les cas, les étapes des réactions étaient les mêmes : deux molécules d'acide se combinaient d'abord à une molécule du corps traité; puis cette combinaison complexe et bien définie, qu'il isolait, subissait, sous l’action de l'eau, une seconde transformation. $ 2. — Fixation de Fonctions oxydées réductrices. Ce travail tranchait l’une des questions les plus générales de la science. Mais il offrait encore un autre genre d'intérêt : sur tous les corps de la Chimie organique, il allait permettre de greffer une fonction oxydée en prévoyant, d'après la consti- lution du corps choisi, la spécificité aldéhydique, cétonique, quinonique ou hydroquinonique de celte fonction. 1. Spécilicité des fonctions grellées. — Élard établit, en effet, les lois suivantes : 1° Dans les carbures dits creliques à chaine la- LOUIS OLIVIER — térale méthylée, simple (toluène,, où multiple | (xylènes, mésitylènes, cymènes, ele. le groupe méthylique terminal qui est allaqué, ce qui conduit à une aldéhyde; % Dans les carbures normaux de la série jrasse, comme l'hexane, c'est uniquement sur les chainons intercalaires que porte l'oxydation, ce qui mène à une acélone: 3° Dans les Aydrocarbures cycliques exempts de chaine méthylée, le eyele subsiste, el c'est une dicétone qui s'y incorpore. C'est ainsi que de la benzine on peut obtenir la quinone correspondante ; % Des phénols, le même traitement dérive des hydroquinones. Ces indications valent surtoul à litre de direc- lrices; et, sans doute, nous trahirions la prudente pensée d'Étard en les présentant comme des re- cettes qu'on puisse, dans tous les cas, appliquer sans discernement. Les groupements atomiques relèvent de trop de variables indépendantes pour que, dans une même famille comprenant des corps de com- plexités très diverses, le mode d'altération de Fun d'eux puisse loujours être déterminé jusque dans le dernier détail d'après les réactions de ses proches. Étard lui-même nous donnait, à ce sujel, l'exemple de la réserve nécessaire lorsqu'il signa- lail comme une variante du type ordinaire de l'oxydation des phénols le cas de l'anéthol : la molécule de ce corps, offrant une lacune, se rompt en ce point sous l'influence du traitement el engendre, par suite, au lieu d'une hydroquinone, une aldéhyde (l'anisique. Il citait aussi ce fait curieux de l’aldéhyde bromobenzoïque qui, conti- uuant de s’oxyder dans le milieu même où elle se forme, s'y convertit d’elle-mème en acide. Loin d'infirmer, en ce qu'elle a d'essentiel, la règle qu'il sut dégager des faits, ces particularités contribuent à faire comprendre la facon de l'emplover. c'es 2. Exothermie des réactions. — L'ensemble de | ces lois avait été particulièrement difficile à établir, en raison du caractère fortement exothermique des réactions. Pour se mettre en garde contre les risques d’explosion qu'elles présentent, l'auteur avait dû inventer un dispositif opératoire tout spé- cial. Il imagina de diluer les agents de la réaction dans des milieux inactifs et, finalement, trouva que les bains de tétrachlorure de carbone et de chloro- forme écartent tout danger. S 3. — Constitution des Composés terpéniques et Chimie des Parfums. La méthode étant ainsi fixée dans son principe général et sa technique, Étard l’appliqua, en difré- rentes circonstances, à déterminer la constitution de corps mal connus. ALEXANDRE ETARD 4. Nature du Cymène. Dès 1878, alors qu'il n'avait pas encore achevé ses recherches sur l'ox\ dation, il en utilisa les premiers résultats pour éclairer la nature, jusqu'alors ignorée, du cyniène en unissant ce carbure à son réactif oxydant, il oblintune substance nouvelle que, par hydralation, il convertit en une huile à fonction aldéhydique. Par l'ensemble de ses propriétés, y compris son point d'ébullition, cette huile semblait trés proche parente de l'essence de cumin ou aldéhyde cumi- nique. En 1880, Étard établit qu'elle correspond exactement à l'aldéhyde d'une benzine à la fois méthylée et propylée; ce qui permellait de cons- truire le cymène, en réservant simplement les rap- ports mutuels du méthyle et du propyle dans sa molécule. 2, Nalure du Camphène. — Ce fut là l'origine des belles études que vers 1890 Étard entreprit sur la classe entière des Terpènes. Ces corps jouent un rôle important dans la Nature : étant à la base de presque tous les parfums, ils sont très répandus chez les plantes. Malgré tout leur attrait, ils étaient, cependant, demeurés rebelles à une dissection systémalique. C'est qu'en général les procédés ordinaires d'oxydation décomposent leur molécule en fragments trop simples pour porter la marque d'aucun groupement antérieur. Tel est le cas du camplène, que jusqu'alors l'oxydation n'était par- venue qu'à détruire ou, comme l'avait vu Berthelot, à convertir en camphre. Sachant que l'acide chlo- rochromique respecte, dans son dessin général, l'architecture de l'édifice moléculaire pour se porter de préférence sur les chainons hydrocarburés des chaînes arborescentes ou sur les groupes méthylés latéraux des cycles, Étard pensa pouvoir le faire agir utilement sur ce terpène. Il lui fallut d'abord, pour obtenir ce corps en suffisante abondance, inventer un nouveau procédé de préparation ; puis iltenta l'expérience. Elle lui donna une aldéhyde alors inconnue : l’a/déhyde camphénique, qui, par oxydation spontanée à l'air, produisit un acide éga- lement nouveau ; de cet acide, il put former des sels stables, résultat qui tout de suite le conduisit à de nouveaux apereus sur la constitution du camphène. En décelant en ce corps un dérivé hydrocyménique, Étard venait de rattacher la classe des Terpènes au dérivé hydrogéné de l'un des éléments de l'atropine. 3. Relations du Carvacrol et des Camphres. — A cette époque, la chimie des camphres, hérissée de difficultés, semblait devoir défier pendant long- temps encore l'effort des plus habiles praticiens. Bien que les formules brutes de ces composés n'eussent point été précisées, c'était, d'après quel- ques réactions, la tendance générale des chimistes de leur attribuer un noyau hexagonal. Étard fit les 588 premiers pas dans la voie où, une quinzaine d'an- nées plus tard, devait être trouvée la solution du problème. La production du carvacrol (C°H"0) dans la réaction du chlorure de zinc sur le camphre chloré le conduisit, en effet, à l'hypothèse de cycles pentagonaux pour ces deux composés. ° de lTÆEssence de Térébenthine. Parmi les autres terpènes ou dérivés terpéniques qu'il étudia, on doit citer un produit végétal très répandu dans la Nature et dont il importait d'autant plus de bien connaitre les propriétés fonction- nelles que de nombreuses industries et la technique chimique elle-même l'utilisent en abondance. Excrétion d'un groupe particulier de plantes, l'es- sence de térébenthine avait jusqu'alors gardé le secret de ses relations de fanilie. Etard éclaira sa parenté en montrant que, sous l'influence de son précieux réactif oxydant, elle donne naissance à une aldéhyde terpénique. #. Nature >. Découverte du Pyropentylène el du Dipyro- pentylène. — La profusion marquée des essences de cette sorte et de leurs résines chez les Gymno- spermes actuelles le porta à penser que ces corps avaient dû jouer un rôle encore plus considérable dans les flores anciennes où cette classe de végé- taux avail atteint l'apogée de son développement. Peut-être les grands bassins de schistes bitumi- neux où tant d'espèces disparues ont accumulé leurs débris détiennent-ils encore quelques témoins de leurs antiques productions. Les huiles extraites de ces schistes sont, dans l’industrie du gaz com- primé, soumises à une pyrogénalion qui dégage, outre des hydrocarbures gazeux connus,des liquides qui n'avaient pas encore été étudiés. En collabo- ration ayec son ami Pierre Lambert, Étard y dis- cernà une petite quantité d'huiles à points d'ébulli- lion élevés. Pendant la distillation à 167°, l'une d'elles donne naissance à un liquide de formule C'H°, qui bout à 42°. Ce pyropentylène, ainsi que le nommèrent les auteurs, a été, depuis lors, iden- tilié en Angleterre à un carbure terpénique : le cyclopentadiène. Élard Lambert observèrent que, par polymérisation spontanée à froid, ce com- posé reproduit en peu de lemps son générateur. Ayant ainsi obtenu ce dernier corps à l’état pur et el cristallisé, ils constatèrent qu'il répond à la for- mule C"H® et que c'est par dédoublement qu'à 1679 il avait fourni l'huile plus fusible. Cette décou- verte du pyropentylène et du dipyropéntylène enri- chit de deux corps particulièrement intéressants la famille, encore peu explorée, des Terpènes. 6. Méthode générale d'obtention des Aldéhydes des Terpènes. — Dans tout ce groupe de composés organiques, les travaux d'Étard sont de ceux qui LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD ont le plus contribué à l'avancement de nos con- naissances sur la chimie des parfums. En imposant à ces corps une oxydation ménagée, il les a reliés à une foule d’essences qui élaient demeurées réfrac- aires à tout classement. Si le détail des faits que, dans cet ordre de recherches, il a mis au jour ne peut trouver place ici, nous espérons, néanmoins, faire sentir, à côté de la portée théorique, l'intérêt pratique de sa méthode, en indiquant qu'elle a per- inis non seulement à lui-même, mais aussi à divers savants d'oblenir, des terpènes, de nombreuses aldéhydes ; appliqué à l'isoeugénol, son procédé à conduit à un mode de préparation artificielle d'une substance particulièrement précieuse: la vanilline. 7. Complexilé des Parfums. — Par le détour des terpènes, la Chimie avait ramené Étard à ce monde des fleurs que, sous la direction paternelle et dès son enfance, il avait appris à connailre et à aimer. Toutes les plantes à odeurs qu'il recueillait en her- borisation ou se procurait chez les horticulteurs fournirent à ses recherches. Comme il avait soin de soumellre leurs organes odorants à un système d'épuisement inoffensif pour les parfums eux- mêmes, il réussit à séparer les divers principes associés dans la matière odorante et à déterminer, en même temps que la structure, la fonction parfu- mante d'un certain nombre de ces corps. Sa part à été considérable dans les découvertes qui depuis une vingtaine d'années nous ont montré, dans les parfums les plus délicieux comme ceux de l’hélio- trope et de la rose, des mélanges d'espèces chi- miques nauséabondes. ar S 4. — Préparation des Amylènes. Les observations qui l'avaient amené à ces con- fins de la Chimie organique et de la Chimie biolo- gique dataient, comme nous l'avons vu, du début mème de sa carrière de savant. A des époques diverses,elles l'aiguillèrentvers quelquesrecherches latérales que nous ne saurions passer sous silence. Dès 1878, expérimentant sur les hydrocarbures, il avait voulu étendre des têtes de chacune des diverses séries à des termes plus élevés ses re- cherches sur le processus de l'oxydation, et il avait désiré expérimenter sur l’amylène. Ce corps était alors considéré comme très rare. On le préparait en déshydratant l'alcool amylique par une longue digestion avec le chlorure de zinc fondu. Mais, dans ces conditions, l'hydrocarbure se polymérisait à mesure qu'il se formait, et on n’en oblenait qu'une quantité infime. Étard présuma que cette faible quantilé représentait uniquement la petite portion produite au moment de la distillation finale, et il imagina de dissocier le phénomène : faisant réagir l'alcool goutte à goutte sur le déshydratant fondu, LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 589 il prit soin d'entrainer continüment dans un réfri- gérant, avec l'alcool en excès, l'amylène naissant. Une simple distillation séparait ensuite du produit le reliquat du générateur. L'auteur obtint ainsi à bas prix eten quantité considérable un mélange d'amylènes isomères, sensiblement exempts de polymérisation. La complexité de ce mélange cor- respond à celle de l'alcool employé. En toute évi- dence, ce procédé était susceptible de nombreuses applications. Le Bel et Greene en ont fait usage pour préparer bulylènes et propylènes. Il n'est point douteux qu'en maintes circonstances la tech- nique chimique ait profil à y recourir. $ 5. — Action du Brome sur les Alcools de la série grasse. Beaucoup plus tard, alors qu'il avait donné à ses travaux sur la formation des aldéhydes un dévelop- pement considérable, Étard eut l'idée d'étudier les phénomènes de substitution chez les corps où ils aboutissent à des fonctions aldéhydiques, et ce lui fut une occasion de constater à quel point, en science, nous vivons parfois sur des préjugés. En Chimie organique, des réactions observées sur un ou deux des premiers termes d’une série sont souvent tenues à priori pour communes à ces termes el à tous les autres. Selon sa remarque, il est à peine croyable que, jusqu'en 1892, date à laquelle il porta son attention sur ce sujet, les réactions du chlore et du brome sur l'alcool éthylique, qui donnent le chloral et le bromal, aient paru le modèle néces- saire de toutes les réactions des mêmes métalloïdes sur les autres alcools de la série saturée. L'expé- rience lui apprit, au contraire, que le produit de la réaction du brome sur l'alcool propylique est, non un tribromal, mais, si l'alcool est primaire, une aldéhyde bibromée, accompagnée d'acide bromhy- drique, qui éthérifie une partie de cet alcool. Si l'alcool est secondaire, c'est-à-dire isopro- pylique, l’action du brome donne du hromure d'isopropyle et de la fribromacétone à l'état de pureté. Il était particulièrement intéressant d'ob- tenir ainsi d'assez grandes quantités de ces sub- stances, parce qu'elles permettent de réaliser des synthèses organiques en fixant sur les molécules des groupes complexes à fonctions aldéhydiques et cétoniques. Tout en rectifiant une extrapolation abusive et en incilant, par suite, à des vérifications analogues dans tous les districts de la Chimie, ce beau Travail apportait donc à cette science de nou- veaux instruments de recherche. $ 6. — Constitution des Alcaloïdes vegétaux. Longtemps avant de poursuivre jusqu'à ce Lerme cet ensemble de recherches, Étard avait eu la bonne fortune d'aborder avec son maitre Cahours l'étudi d'un groupe de corps tout différent, celui des Alea- loïdes. Au début de sa carrière scientifique, il y à une trentaine d'années, les chimistes n'avaient su cette classe de substances que des vues étroitement limitées et, à beaucoup d'égards, incertaines, On savail que ces corps renferment, outre du carbone et de l'hydrogène, de l'azote et se comportent comme des bases. Ces deux faits avaient conduit à les rapprocher de l’'ammoniaque et à leur imposer le nom qu'ils portent encore aujourd'hui. Mais, quant à leur constitution, il était rare qu'on füt renseigné. Si quelques-uns de ces composés, telle la collidine, avaient livré le secret de ce que, faute d'un meilleur nom et sans être dupe de cette simple image, on appelle communément leur « structure », les aptitudes de combinaison de la plupart demeu- raient si mystérieuses que la place même de ces corps dans les cadres de la Chimie organique res- lait, en grande partie, indéterminée, 1. Structure de la Nicotine. — En 1879, cette grande lacune de la science incita Cahours à entre- prendre l'étude de l’un des alcaloïdes les plus énig- matiques : la zicotine. Ce liquide n'avait, en effet, été rattaché à aucun groupe chimique défini. Pour cette recherche, Cahours s'adjoignit son jeune el déjà brillant élève Étard. Après quelques tâtonne- ments, les deux savants conslatèrent un fait qu'ils eslimèrent tout de suite gros de promesses : à tem- pérature élevée (140°), le soufre réagit sur la nico- tine ; il lui ravit : d'une part, de l'hydrogène, quise dégage sous forme d'acide sulfhydrique ; d'autre part, de l'hydrogène, du carbone et de l'azote qui lui demeurent associés en combinaison unique. Les expérimentateurs soumirent ce composé à une série de réactions qui décelèrent, autour du soufre, des groupements particuliers, débris probables de la molécule primitive. La désulfuration du nouveau corps avait done chance d’assembler ces fragments complexes sur le plan de la nicotine el de constituer ainsi une espèce chimique ne différant de celle-ci que par une moindre quantité d'hydrogène. Ainsi futeffectivement découverte l’isodiprridine ou nice- tyrine, C'HAZ, qui, par fixation de quatre atomes d'hydrogène, reproduisit la nicotine C"H'"Az°. Les auteurs allèrent plus loin : que la distillation sèche décompose partiellement cet alcaloïde et que, parmi les corps engendrés, se trouve, comme produit dominant, une collidine à cycle hexagonal en C° et Az, avec chaine propylé- nique. Ils relevèrent, d'autre part, que le sélénium se comporte à l'égard de la nicotine un peu autre- ment que son frère le soufre : ils reconnurent il lui enlève, sous Laiblin avait étudié l'acide avait pas décelé la constitution. nicolianique, mais n'en 290 forme de sélénhydrate d'ammoniaque, à la fois de l'hydrogène et de l'azote, soustraction qui fait appa- aitre de l'hydrocollidine. Ainsi se trouva démontré qu'une notable portion de la molécule de nicotine est construite selon l'architecture connue de la col- lidine, base importante de la série pyridique. Étard prouva ensuite que la nicotine ne présente aucune fonction aminée, mais contient un groupe AH. L'obtention de ces résultats avait exigé un labeur expérimental considérable, des dispositifs ingé- nieux, une multitude d'analyses et, par-dessus tout, une rare sagacité d'observation. C'est, en effet, en cherchant, dans tous les corps recueillis au cours réactions, des indices de leur récent passé, c'est en considérant leurs analogies avec des molécules ou des débris de molécules connus que les auteurs étaient arrivés à ordonner leurs inves- des tigations. Ce beau Travail, accompli de 1879 à 1882 avec ce vieux routier de la Chimie organique qu'était alors Cahours, avait beaucoup contribué à assouplir Étard aux acrobaties de sa profession. L'expérience particulière qu'il y acquit des composés azotés lui permit dès 1881 de se livrer à des investigations plus personnelles sur divers corps de ce groupe. 2, Fixation de Fonctions pyridiques sur des radieaux hydrocarburés. — Cherchant, non plus tant à définir des alcaloïdes existants qu'à éclairer par voie de synthèse la constitution de ces corps, il tenta de greffer des fonctions pyridiques sur des radicaux hydrocarburés. C’est ainsi que, par distil- lation de la glycérine sèche avec le chlorhydrate d'ammoniaque, il construisit une base diazotée, la glycoline, dont la naissance même révéla la formule. Par la synthèse encore, il obtint un homologue d'un composé de la même classe, la pelletiérine. Vers la même époque, la pyrogénation de la benzy- lène-orthotoluidine, par soudure, lui donna une base monoazoïque d'une remarquable fixité : le phén ylindol. produite ÿ 7. — Produits de dislocation des Albumines animales. Composition des Ptomaines. Plongé tous les après-midi dans celle chimie del’azote organique, Étard passait alors ses matinées dans les amphithéâtres de dissection de la Faculté de Médecine ou dans les salles d'hôpital: et, des alcaloïdes des plantes supérieures, sa pensée allait à ceux qui apparaissent dans la fermentation des albumines animales ou qu'élaborent en activité normale ou pathologique les animaux el l’homme. Ces préoccupations devaient bientôt l'amener à partager l'honneur d’une grande découverte : celle de la composition des ptomaïnes. LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 1. Décomposition des Albuminoïdes. — Depuis un temps immémorial, on savait que l’ingestion de chairs putréfiées peut entrainer la mort. Mais, Pasteur ayant établi le rôle actif de divers micro- organismes d'une part dans la décomposition, en apparence spontanée, des albuminoïdes, d'autre part en cerlaines maladies, il était devenu difficile de décider si le botulisme résulte d’une infection ou d'une intoxication directe. En 1872, un chimiste qui prenait déjà rang parmi les maitres, Armand Gautier, éclaira soudainement cette question : dans la putréfaction naturelle de tissus empruntés à des animaux sains, il découvrit des alcaloïdes véné- neux. Quatre ans plus tard, le physiologiste italien Selmi réwssil à extraire des poisons de sujets tués par lraumatisme. C'était donc bien de la substance même cles êtres vivants, lransformée aprèsla mort, que procédaient ces plomaïnes. L'action patho- génique de ces corps les montrait très différents de la matière protéique qui les avail engendrés, el, bien que leur composition n'eûtl point été précisée, leurs allures alcaloïdiques les faisaient considérer comme beaucoup plus simples. Si done la Biologie et, en particulier, la Médecine se trouvaient grande- ment bien connaître, c'était aussi, pour la Chimie organique, un problème capital de les définir et de les rattacher à leur origine : on ne pouvait douter qu'en suivant, depuis le tissu frais jusqu'au dernier stade de la putridité, la dégradation des albuminoïdes, on ne recueillit sur la constitution de ces supports de la vie des indications précieuses. Celle étude tenta simullané- ment Étard et Gautier, et, pour la mener à bien, en 1880 ils associèrent leurs talents. Opérant sur de grandes quantités de matières, les auteurs ne pouvaient recourir à des cultures pures. Dans des tonneaux distinets, ils entassèrent de la chair musculaire de bœuf et de la chair de scombre. La première, qui est acide, donme d'abord, en fermentant, de l'acide lactique, de l'acide butyrique, avec abondant dégagement d'acide carbonique et d'hydrogène à peu près purs ; puis, de nouveaux agents microbiens intervenant, la réaction devient alcaline, l'hydrogène cesse de se dégager, et une quantité considérable d'azote apparait dans les gaz expulsés. Après quoi, l'œuvre de la pourri- ture est terminée : il n'y a plus trace de tissu orga- nisé dans le magma nauséabond, complètement hydrolysé, et la malière albuminoïde elle-même a disparu. La chair de poisson se comporte un peu autre- ment, parce qu'elle est d’abord alcaline. Elle se délite sans passer par la phase acide, et sans libérer de l'hydrogène, mais dégage de l'acide carbonique accompagné de pelites quantités d'acide sulfhy- drique et d'hydrogène phosphoré. En moins de intéressées à les LOUIS OLIVIER ALEXANDRE ÉTARD o91 deux mois, 60 kilogrammes de muscles de scombre sont totalement liquétiés. Dans les deux cas, la putréfaction, telle qu'elle se révèle à l'odorat et à la vue, correspond à un processus d'hydratation, durant lequel la matière albuminoïde se décompose. La chair de bœuf se résout, en partie, en leucines et leucéines, exacte- ment de la facon que Schützenberger avait observée après avoir traité celte chair par lhydrate de ba- ryte à chaud el sous pression. Ainsi tombait, pour le dire en passant, l'objection si souvent opposée aux conclusions que le célèbre chimiste alsacien tirait de ses expériences. La violence avec laquelle il attaquait l'édifice délicat des albuminoïdes avait pu, craignail-on, en dissocier les atomes, puis les grouper en petits assemblages sans rapport avec la molécule primitive; la série des corps qu'il obte- nait n'apportait donc, aux yeux d’un grand nombre de ses confrères, aucun renseignement valable sur la matière albuminoïde elle-même. Les constata- tions d'Étard et Gautier ruinèrent cette critique. 2, Isolement et délermination de la composition et de la nature des Plomaines. — Mais là ne s'ar- rêta pas leur travail. En se fluidifiant, la bouillie de scombre avait fini par perdre jusqu'à sa dernière parcelle de substance protéique, et, à la fin de la fer- mentation putride, le récipient où elle s'était opérée ne contenait plus qu'une huile fétide surmontant un liquide aqueux qui ne s'altérait plus. L'huile dé- cantée, les auteurs acidultrent la solution aqueuse afin de libérer de leurs combinaisons avec l'ammo- niaque et les méthylamines les acides gras, notam- ment l’acide bulyrique, qui saturaient ces bases; par distillation à la vapeur d’eau, ils entrainèrent ces acides, en même temps que du phénol, du scatol et de l’indol. Restèrent alors les substances non vola- tiles : acide succinique abondant, principes extrac_ tifs analogues à ceux du bouillon Liebig et sels de ptomaïnes. Ces derniers sels furent enfin isolés par alcalinisation du milieu, puis épuisement au chlo- roforme. Et c'est ainsi que les auteurs eurent en mains la première pltomaïne définie C'H®Az, base liquide bouillant à 210°, douée d’une odeur péné- trante d'aubépine et d'un pouvoir toxique consi- dérable. Cette découverte allait bientôt susciter, dans le monde chimique et dans le monde physiologique, des études d'une fécondité singulière. Activement recherchés dans tous les tissus, non seulement post morlem, mais aussi chez le malade et le sujet sain, les alcaloïdes d'origine animale ont déjà enrichi la Chimie d’un grand nombre de corps inté- ressants pour elle-même ! ; ils ont décelé dans l’acti- ! La structure de ces corps à été, depuis. l'objet de recherches qui ont permis de la préciser. vité glandulaire un mécanisme fonctionnel long lemps insoupeconné, doté entin la Physiologie di procédés d'analyse d'une finesse extrême, la Théra peutique et l'Hygiène d'agents curatifs ou préventif d'une puissance inespérée. [I ya plus encore : le Travail que nous venons de résumer montrait à quel point peuvent différer les unes des autres des substances albuminoïdes de provenances diverses, et, par les relations qu'il mettait au jour entre elles et leurs nombreux débris, il amorçait la série des recherches que poursuivent aujourd'hui sur l'évolution chimique des protéides des hommes comme Fischer et Kossel. Dans l’ordre pratique, Étard réalisa, avec la col- laboralion de Richet, médicale importante de cette chimie de l'azote organique. En 1883, ces savants montrérent, en effet, que, dans les états pathologiques où, indé- Charles une application pendamment de l’urée et de l'acide urique, l'urine se charge de substancesextractives azotées, on peul apprécier l’état d'asphyxie relative des tissus par la mesure du pouvoir rédueteur de ce liquide et de ses sédiments. En abordant incidemmentees questions, Étard empiétait déjà sur ce domaine de la Chimie biologique, où il ne devait pas tarder à affirmer sa maitrise. IV. — L'ŒUVRE D'ÉTARD EN CHIMIE BIOLOGIQUE. Servie par une remarquable puissance d'inven- Lion, la large curiosité d'Étard l'avait, dès ses pre- niers pas dans la science, entrainé à mener de front des investigations très variées. En huit ou neuf ans, de 1876 à 188%, autrement dit entre sa vingt-quatrième et sa trente-deuxième année, il avait remué la plupart des idées dont le dévelop- pement oceupa ensuite toute sa vie. A l'époque (1880) où, avec Armand Gautier, il se proposa d'assister à la dislocation progressive des albumi- noïdes, il achevait sur les composés cyméniques les expériences qui devaient plus tard l’acheminer vers l'étude approfondie des lerpènes. Si recherches sur ces corps ont, dans" notre exposé, pris place à la suite de la découverte fondamentale ses de sa jeunesse sur le processus de l'oxydation, c’est qu'un lien logique les y rattache étroitement. Mais, en fait, les ayant commencées en 1877, il ne les reprit qu'en 1890, et nous devons les ranger parmi les travaux auxquels, depuis cette date jusqu'à ces dernières années, il consacra une forte part de son activité. Vivant alors dans un commerce quotidien avec les plantes, et depuis longtemps exercé à ne traiter qu'avec une délicatesse extrême les principes immédiats des êtres vivants, il se résolut à aborder un problème dont l'importance capitale et les difti- 292 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD cultés exceptionnelles n'avaient jusqu'alors cessé de le tenter et de l'effraver. Après Armand Gautier, après Hoppe-Seyler, après tant de savants illustres que l'énigme de la chlorophylle avait suecessive- ment attirés et rebutés, Étard osa s'attaquer au vert des feuilles, à cette substance myslérieuse grâce à laquelle le protoplasme capture une partie de la radiation solaire et opère, avec le carbone minéral, l'azote ammoniacal et les éléments de l'eau, la synthèse même de la vie. $ 1. — Extraction et séparation des Principes immédiats solubles des cellules à chlorophylle. 1. Principe de la recherche. — Pour expéri- inenter sur ce léger pigment, il était nécessaire de l'isoler sans l’altérer. Les procédés usuels d'extrac- lion pouvaient-ils servir? En lisant les Mémoires des chimistes qui s'étaient adonnés à l'étude des principes immédiats chez les végélaux, Étard fut frappé de ce fait qu'en vue de faciliter l'obtention de l'un quelconque de ces com- posés, les auteurs s'étaient résignés à lui sacrifier toutes les autres substances. Il pensa qu'il pouvait être dangereux de ne point viser à extraire aussi ces dernières, seul moyen de s'assurer qu'aucune d'elles ne reste incorporée au produit que l'on se propose de définir. Et, malgré toute la compli- cation de travail que sa méthode allait lui imposer, il imagina de recueillir, puis de séparer, en même temps que la matière colorante, tous les principes qui, lui étant associés dans la cellule, en sont enlevés avec elle par des dissolvants. 2. Procédé d'extraction. — Une doubie précau- tion lui parut utile : 4° diminuer, avant l'extraction, la fragilité des divers composés en déshydratant, par une lente dessiccalion de la plante à l'ombre, le milieu qui les renferme; 2° ne pulvériser que grossièrementles organes, afin d'éviter lesréactions que risquerailt de provoquer l'écrasement excessif des tissus. Quant aux solvants, il relégua au second rang, dans la succession des opérations, l'alcool et l'éther, ordinairement employés dès le début de toute extraction, et leur préféra comme premier agent un autre liquide neutre : le sulfure de carbone. Dans l'alcool et l'éther se noient, en effet, une multitude de corps qu'aucun procédé analytique ne réussit ensuite à séparer. Au contraire, le sul- fure de carbone n’enlève aux organes qu'une caté- gorie limitée de substances, laissant dans les tissus des matières très différentes, que l'alcool à chaud leur ravira. D'où, après distillalion du sulfure, puis de l'alcool, deux lots d'extraits. Les extraits du premier lot ou extraits sulfoear-- honiques se répartirent en trois groupes : 4° Partie insoluble dans l'alcool formant une masse päteuse verte, qui, lavée à la benzine et à l'éther acétique avec noir animal, donna des cristaux incolores, faciles à séparer, de carbures solides, binaires ou faiblement oxydés: 2% Partie soluble dans l'alcool, qui, après alcalinisation, diffuse dans l'éther alcaloïdes, alcools, et chlorophylles: 3° Résidu de l'opération précédente, qui, après. acidification, passe aussi dans l’éther : acides gras tels que le palmitique et l’oléique. : De même, en soumettant au jeu méthodique de divers solvants (alcool froid, solution potassique très étendue, éther) les extraits alcooliques du deu- xième lot, l’auteur arriva à les distribuer en quatre groupes bien distinets : 1° glucoses, lanuins, sels: 2° chlorophylle encore un peu impure; 3° chloro- phrile à peu près pure; 4° matières azotées très voisines des chlorophylles. Les abondants matériaux que cette longue suite d'analyses immédiates avail livrés à l'analyse élé- mentaire allaient bientôt éclairer les biologistes sur la richesse du contenu cellulaire chez les plantes et élargir les cadres de la Chimie organique. D'ores et déjà en ressortaient des conelusions importantes. S2.— Structure etproprietés des Verniset des Cires. 1. Naluredes extraitssulfocarhoniques insolubles dans l'alcool. — Certaines des substances cristalli- insolubles dans l'alcool, qu'Étard avait obtenues de ses extraits sulfocarboniques, s'étaient déjà montrées dans des expériences antérieures à ses recherches ; mais, non épurées, elles avaient alors conservé la couleur verte du résidu qui les avait fournies, et cette couleur lesavait fait prendre pour de la chlorophylle cristallisée ou des consti- tuants de cette matière : d'où les noms de chloro- phyllane ou d'hypochlorine sous lesquels elles avaient été décrites. Etard montra qu'en réalité ce des traces de chlorophylle entraînées qui teignent ces cristaux et que, pour les en purger complètement, il suffit de les soumettre, au cours du lavage, à l'action du noir animal : après ce trai- tement, tous ces corps, cristallisés ou amorphes, se révèlent absolument incolores. sées sont 2, Constitution des Vernis et des Cires. — En déterminant la composition centésimale, puis le poids moléculaire de ces différents corps, l’auteur éprouva la surprise de trouver parmi eux des carbures ternaires faiblement oxygénés, cerlains polyterpènes, voire des paraflines, Lous corps doués de points de fusion et d'ébullition singulièrement élevés. II montra, notamment, que foliacés contiennent: des hydrocarbures supérieurs de la série saturée, telle la Lrronane C"H°, sorte de les organes o LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 593 paraffine cristallisée, fusible à 69°, bouillant à 400°, qu'il découvrit dans la bryone; des alcools mono- atomiques saturés, comme le /oliol C"H"O, le porrol C*H"O, l'avénol CO, l'hordéol C'H°O (isomère), le triticol C'HŸO (isomère), le populol CSH%0, le néopopulol C'HŸO, qu'il tira de l'ivraie, du poireau, de l'avoine, de l'orge, du blé cultivés et du peuplier helvétique; des monoalcools non saturés, tels le 17/01 C'H*O, matière cireuse cris- tallisée, fusible à 74°, l'aspidiol (C"H®0)", le canna- binol C°H"O, le trifoliol C“H"O, le médicagol C"H%O, fusible à 76° et bouillant à 4009, respective- ment fournis par la vigne, la fougère, le chanvre, le trèfle incarnat et la luzerne; des glycols comme le vitoglycol C*H'*\OH}, extrait de la vigne; des glycérines plus ou moins désaturées, comme le viscol C*H"O*, du Viscum Salivum. Dans des feuilles d'autres espèces el certains fruits, Étard découvrit, enfin, des alcools polyatomiques, tels que le picéol C"H®0*, liré de la feuille du pin maritime, et l'œænocarpol C“H"(OH) + HO, corps cristallisé, fusible à 303°, quil obtint du péricarpe du raisin. 3. Propriétés des Vernis et des Gires. — Le grand intérêt chimique et biologique de ces résul- tats ne pouvait échapper à la sagacité, toujours en éveil, de l’auteur. À mesure qu'il les obtenait, il admirait que la plante construisit des édifices ch1- miques « de la plus haute stabilité, caractérisés par une cristallisation parfaite et un point d'ébullition jusqu'ici inconnu, qui exclut toute idée de mé- langes » ; il observait que tous ces corps, élaborés par le corpuscule chlorophyllien, constituent, les uns seuls, les autres associés, les enduits — vernis et cires — qui, étalés à la surface des épidermes, les protègent contre l’eau et les dissolvants. Grâce à ce revêtement imperméable, « s'il y a des stomates », écrivait Étard, « la plante est close et n'admet que ce qu'elle veut d'eau el de gaz. Les plantes ter- restres, comme les oiseaux plongeurs, ne se mouil- lent pas. Si les cellules superficielles n'étaient pas à l'abri de l’eau. elles deviendraient un champ de culture microbien et se défendraient moins qu'elles me font contre les parasites ». Les végélaux aqua- tiques « défendent l'intégrité de leur parenchyme par le même moyen » ‘. Les conferves elles-mêmes lui fournirent des cires. Ajoutons qu'à cette famille de corps se rattachent probablement les substances visqueuses qui empoissent certaines algues marines telles que les fueus (varechs). Pour éprouver la résistance de ces carbures aux liquides digestifs, Étard fit, avec le concours de M. P. Adam, professeur à Alfort, l'expérience sui- vante : Pendant plusieurs jours, un cheval fut 1 A. ErarD : La Biochimie et les Chlorophylles. 4 vol. Paris, Masson, 1906. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. nourri de luzerne. Dès le sixième jour, les excrela furent recueillis; les jours suivants, ils formérent un résidu d'espèce pure. Dix kilogrammes de matière excrémentitielle sèche furent alors traités exactement comme la luzerne primitive, el Lout se passa « dans le même ordre ». Réfractaire à toutes les diastases, à tous les ferments digestifs, le médi cagol traversa intact l'estomac et l'intestin de l'animal. Il était naturel de se demander d'où procède cette extraordinaire stabilité. C'est, en effet, écrivait Étard, « une chose remarquable de voir ces corps organiques associés à la Vie résister au feu arriver, comme, par exemple, le médicagol, jusqu à 76° sans fondre, jusqu'à 400°, presque au rouge, sans se décomposer. Ici, pensait-il, « ce n’est que CH° qui subit l'effort; bien qu'elle soit polymérisée seize fois, c'est la maille qui agit comme un élément résistant, aussi bien que (CH°}, l'éthylène, le gaz des pyrogénations ». L'existence de matières organiques de cette sorte chez les végétaux soulevait, d'autre part, une ques- ion embarrassante. A priori, la formation de corps tellement stables qu'ils cristallisent sponta- nément de leurs solutions, peut, en effet, paraître incompatible avec le constant inéquilibre et le perpétuel mouvement de la vie. Bien que le loisir lui manquät pour instituer un ensemble de re- cherches systématiques sur ce problème, Étard ne pouvait, cependant, le frôler sans lui accorder quelque attention; et, là encore, il semble que sa perspicacilé ait amorcé la méthode à suivre. Au lieu de se borner à l'étude chimique de l'organe adulte, il en considéra l’évolution. A l’occasion de ses expériences sur la feuille du peuplier, il con- stata que, « dans les premiers âges, il n’est pas possible de faire cristalliser très nettement les alcools » ; plus tard, au contraire, « la feuille verte d'été contient sa cire », alcool du type saturé, dont il est, cette fois, Lrès aisé de préparer les cristaux. D'où cette remarque : « Grimaux a déjà écrit que, loin du début de la vie, les colloïdes perdent de leur complication et passent aux cristalloïdes. Ier, pendant la vie d’une feuille caduque, j'ai observé la complexité du bourgeon et de la feuille, et, vers la fin, la simplicité relative de la cire ». Une pré- cieuse moisson de faits parait assurée au chimiste qui reprendra cette étude en s'inspirant des vues du Maitre. $ 3. — Rôle physiologique de l’Acide palmitique chez les végétaux terrestres. En dehors de la classe des vernis et des cires, nous avons vu l'analyse immédiate mettre au jour une grande variété de corps de toutes les fonctions. Arrêtons-nous un instant sur l'acide palmitique. 14° Qt rs Cet acide fait son apparition dans la feuille et dans le fruit bien avant que ce dernier ait accumulé ses réserves. Il semble qu'on le trouve chez tous les végétaux terrestres. D'où celte idée, émise pour la première fois, croyons-nous, par Étard, que, chez ces végétaux, riches, comme on sail, en potasse et à peu près fermés à la soude, l'acide palmitique facilite l'introduction de la potasse, puisqu'il forme avec elle un composé soluble, et, au contraire, barre la route à la soude, le palmitate acide de sodium étant un des rares sels de soude insolubles. S 4. — Nature et Propriétés des Chlorophylles. Tout en lui faisant de plus en plus vivement sentir avec quel succès sa science pouvait inter- venir dans les grands problèmes de la vie, cette série de découvertes avail amené l’auteur bien près du but dominant de son travail : les deux ou trois lots de poix épaisses dont il avait si méthodiquement éliminé tous les corps précédemment désignés ne pouvaient plus contenir que des chlorophylles à un élal assez voisin de la pureté. 1. Proportion de la matière verte. — Ces poix se trouvaient réduites à une bien petite masse, et l'expérimentateur pouvait se féliciter de la bonne idée qu'il avait eue d'opérer sur des quantités énormes de matière vivante. Rarement, il avait pratiqué des analyses sur moins de 100 kilogs de plante fraiche, soit qu'il ait traité le végétal entier, comme dans le eas de la luzerne ou celui du cres- son, soit qu'il ait employé seulement le péricarpe ou la feuille, comme il avait fait pour la vigne. Les rendements pondéraux en matières chlorophyl- liennes épurées oscillent, en effet, le plus souvent, entre trois et quatre pour mille. Ce fait lui apprit que, dans un hectare de luzerne qui donne cinq tonnes de récolte fraiche, le poids de la matière verte est d'environ 20 kilogs. Mais, comme c'est uniquement la partie superficielle des plus hautes feuilles qui confère au champ cultivé sa colora- tion, Étard caleula qu'à celle d'un hectare suffisent 180 gr. de pigment. C'est, à peu près, le taux du pouvoir tinctorial des colorants industriels. 2. Pluralité des chlorophylles. — Ces indica- lions acquises, l'ouvrier se trouvait, en quelque sorte, à pied d'œuvre, devant 300 ou 400 grammes de matière d'un vert extrèmement foncé. Dans le cas du traitement de la luzerne, cette masse, bien lavée au pentane bouillant, finit par ne plus rien céder à ce liquide: et, ne livrant plus rien, non plus, aux solvants incapables de la dissoudre entièrement, elle put être considérée comme de la chlorophylle pure. Étard l’appela médicagophylle-s. C'est un corps cristallisé, insoluble dans l'eau pure, très soluble dans le sulfure de carbone et dans une LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD lessive de potasse mème diluée, où il réduit le nitrate d'argent ammoniacal en donnant, à la façon des aldéhydes, un miroir continu sur le verre. Calciné, il laisse seulement 0,88 °/, de cendres*. Il répond à la formule C*H®Az0*. Étard s’'assura que cette composition n’est pas celle d’un polymère, la détermination du poids moléculaire par la cryvos- copie vérifiant celui qu'exige la formule. Cette chlorophylle n’est pas la seule que renferme la luzerne. Epuisée par le sulfure de carbone, cette plante rend à l'extraction alcoolique une nouvelle masse chlorophyllienne, dont l'extrait éthéré fournit la médicagophylle-8 C*H®Az0", matière odorante, soluble dans l’eau alcalinisée, où, comme la médi- cagophylle-+, elle donne naissance, avec le nitrate d'argent ammoniacal, au phénomène du miroir. Chez les autres plantes, on observe pareille plu- ralité des chlorophylles dans la même espèce. Dans l'ivraie (Lolium perenne), Étard obtint, des extraits sulfocarboniques, deux /olioph ylles distinctes, et, des extraits alcooliques postsulfocarboniques, quatre autres loliophylles. L'une d'elles, appelée n° 4, a pour formule C*H*"AzO" ; le n° 6, C“H°Az0". Le chanvre (Cannabis) lui donna trois cannabi- phylles solubles et trois autres insolubles dans l'alcool; la fougère (Aspidium filix fœmina), une chlorophylle (aspidiophylle-1) CHW°FAz0”, inso- luble dans l'alcool, et deux solubles dans ce liquide. Ces quelques exemples de formules font voir combien grands sont aussi, d'une espèce végétale à une autre, les écarts de composilion entre les diverses chlorophylles. Quelles qu'elles soient cependant, toutes manifestent par leurs réactions « la présence de la fonction réductrice des aldéhydes ou des composés peu stables qui sont les plus aptes aux transformations chimiques ». 3. Les moléeules chlorophyllienues. — Le con- traste entre le petit nombre des espèces chimiques élémentaires qui constituent les chlorophylles et leur richesse en atomes de carbone et d'hydrogène appelait l'attention sur une question que la Chimie biologique sera désormais obligée de se poser L'analyse décèle dans la substance même de ces chlorophylles de l'oxygène et de l'azote, mais tou- jours en quantité infime: et c'est pour comprendre ce peu d'oxygène, surtout ce peu d'azote dans les formules, qu'on est conduit à attribuer une valeur si élevée aux nombres qui y représentent le carbone et l'hydrogène. Si la notion de molécule, telle que nous la concevons en Chimie minérale et dans le train ordinaire de la Chimie organique, s'applique, ‘ Ce chiffre est inférieur d'environ moilié à celui que Hoppe-Seyler avait obtenu, ce qui montre bien que, sous le nom de chlorophylle, il n'avait eu en main que des pro- duils très impurs. | ; 1 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD sans modification, à loule malière en activité dans la vie, il est évident qu'il faut se résigner à ces formules singulières, tellement différentes de celles auxquelles nous sommes habitués que leur physio- nomie même nous déroute; il faut, par suite, accepter les énormes poids moléculaires qu'elles exigent, el qui dépassent d'une facon extraordi- naire ceux des corps non polymérisés étudiés jusqu'à ce jour. Mais la grandeur même de l'ano- malie constatée ne doit-elle pas nous mettre en garde contre nos inductions? Il y à des chloro- phylles où l'azote, bien qu'incorporé à elles, représente une valeur pondérale en apparence insi- gnifiante, voisine de celle de quelques métaux el métalloïdes, fer, cuivre, soufre, qui sont constants en quelques-unes de ces substances. Si l'on élablis- sait les formules en tenant compte de ces éléments, à quelle élévation n’atteindraient-elles pas et quelle signification pourraient-elles offrir?Sionlesélimine, pourquoi ne pas décompter aussi l'azote? On obtien- drait ainsi des formules relativement simpies, sous-multiples des précédentes, à l'azote près. Avons-nous le droit d'agir ainsi? Étard, qui posait ce dilemme, inclinait à le résoudre en ce dernier sens. « En considérant la dislocation d’une albu- mine par les alcalis, comme l'a fait Schutzen- berger, ou par la fermentation putride, comme l'ont fait A. Gautier et A. Étard, on est », disait-il, « amené à penser qu'autour d'une molécule azotée s'accumulent de nombreuses pièces peu azotées, comme dans une zooglée moléculaire. Je prends la liberté de mettre en avant cette hypothèse que de faibles quantités d'azote indispensables pour con- slituer une espèce organique, surtout d'origine organisée, ne doivent pas nécessairement être exprimées par des formules chimiques molécu- laires ». Conséquemment, il tendait à croire qu'à l'encontre des albumines, les molécules chlorophyl- liennes ne sont pas toutes forcément azotées et, sans entendre les classer d'une manière fixe, il rappro- chait des graisses les chlorophylles peu oxygénées que le sulfure de carbone enlève à la plante sèche. L'existence même de deux classes de chloro- phylles douées de propriétés diverses, allant les unes vers les corps insolubles dans l’eau, les autres vers les substances solubles dans ce liquide, lui suggérait l'hypothèse qu'elles sont affectées à des travaux différents. Agents de deux types distincts de synthèse organique, elles se comporteraient chacune à sa facon comme intermédiaires entre leurs produits directs et les milieux à desservir. Les moins oxygénées, écrivait-il, « peuvent être en contact avec les graisses, essences et cires et lancer ces substances dans le milieu aqueux, où il parait surprenant de les trouver ». Les autres, relative- ment riches en oxygène, qui dérivent des extraits alcooliques et que ne dissout pas le sulfure de carbone, S'orientent vers des états glucosiques. « Déjà miscibles à l'eau », elles tendent, « en se dédoublant, à produire les hydrates de carbone, les tannins et les extraits el à les disséminer dans les organes riches en eau ». Dans cette variation de leur organisation chimique et de leurs fonctions, les chlorophylles ne font, en somme, que mani- fester leurs propriétés d'êtres vivants. « Les Equi- sélacées », remarquail Etard à ce propos, « se chargent de silice ». « Quelques Viola prennent du zinc. I n'y à pas « la chlorophylle », et les chlo- rophylles se saturent des éléments qui leur convien- nent. Afin de connaitre le pouvoir de saturation spécifique, il faudrait remonter l'arbre généalogique des espèces et savoir dans quel bassin géologique chargé de minéraux prépondérants, elles sont nées dans un lointain passé ». 4. Spectres des chlorophylles. — À quelque hau- teur qu'il s'élevât, Étard ne perdait jamais de vue l'observation positive. Toujours son imagination aboutissait à l'expérience. Ayant établi la pluralité des chlorophylles, il se demanda comment chaque type de ces substances se comporte à l'égard de la radiation. S'il y a plusieurs chlorophylles, elles doivent, pensait-il, présenter des spectres d’absorp- tion différents. Le spectre d’une feuille doit être la somme des spectres de ses chlorophylles. Pour vérifier ces prévisions, il fallait instituer une mé- thode d'examen qui rendit comparables entre eux les résultats des diverses expériences : tenir compte de ce fait que « chaque réactif modifie d'une facon spécifique le spectre d'une chlorophylle déter- minée », donc observer toujours dans le même solvant et sous même épaisseur; « partir d’une espèce pure et l'observer en liqueur fitrée, en fai- sant varier les concentrations ‘. Seules, les liqueurs très concentrées laissent voir les bandes les plus faibles qui ont souvent échappé »; en réduisant les concentrations, « on verra les détails des ban- des larges et noires qui paraissaient opaques, et il sera possible de fixer la longueur d'onde de l'axe de ces bandes, réduites à leur limite ». L'application de ces principes a pleinement corroboré les données de l'analyse. Sur les nom- breuses espèces chlorophylliennes qu'il a soumises à l'examen spectroscopique, Étard reconnut que les bandes, — régions qui correspondent, comme on sait, à des absorptions de radiations déterminées et au travail actif de la synthèse organique, — se réduisent, se décomposent et voient leurs axes se déplacer quand la chlorophylle observée en solution passe du milieu alcalin à un milieu acide. Il eut la ! Un tube en T tamisait les radiations à travers une même épaisseur de liquide, 596 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD patience de déterminer la position des axes pour des chlorophylles différentes, soit de la même plante, soit d'espèces végétales diverses, et il constata que, chaque fois que l'analyse avait établi un écart de composition entre les colorants, la spectroscopie le confirmail. Etant données des conditions fixes d'expérimentation, chaque espèce chlorophyllienne est caractérisée par la posilion numérique (en À) des axes de sa bande fondamentale et de ses bandes accessoires. Cette localisation des axes est telle- ment spécifique qu'elle suit parfois les chlorophylles jusque dans les organes des animaux qui se sont nourris des feuilles où ces colorants se sont formés. En broyant avec de l'alcool l'abdomen ou le corselet de cantharides desséchées, Étard put retrouver dans cette bouillie le spectre des feuilles de frêne, dont des témoins gisaient encore, à l’état de dessic- cation, dans le tube digestif de ces Coléoptères. Est-ce à dire que, dans toules ces expériences chimiques et optiques, il ait eu en main des chlo- rophylles rigoureusement identiques aux chloro- phylles vivantes? Il se füt gardé de l'affirmer. « 11 nous est impossible, disait-il, de disséquer in situ les chlorophylles en vie; mais, si nous pou- vons en isoler, avec certitude, de mortes, il ne peut être contestable qu'elles ne soient les pièces dont étaient faites les vivantes”. » Ainsi : méthodes nouvelles instituées; décou- vertes positives solidement établies; mise au jour de nombreuses espèces chimiques précédemment inconnues; fixation de leur composition, de leurs propriétés, de leurs rapports, et, en plusieurs cas, de leur rôle dans les phénomènes dominants de la vie; aperçus pénétrants de philosophie chimique et biologique.telS furent, résumés à grands traits, les principaux résultats de ce travail gigantesque. Étard avait fourni à cette tâche plus de quinze années d'efforts presque continus; et c’élait toute une vie de méditations sur la physiologie des végélaux qui l'avait poussé à l’entreprendre. Dès sa première initiation à la Chimie, il avait rêvé d'appliquer cette science à la Botanique. Tout enfant, il avait vu couler des grandes Euphorbiacées épineuses des Tropiques leur lait vénéneux, leurs piquants frapper de mort subite l'imprudent qui s’y écorchait; ül avait senti la sève généreuse de la terre monter sous les écorces et gonfler les bourgeons; l'âme du sol s'épandre dans les sombres frondaisons des forêts, s'illuminer dans la fleur et rayonner des parfums. Partout où, ensuite, il avait passé, son regard s'était porté sur la flore, évocatrice, pour lui, des grands problèmes de la vie; et il lui avait semblé que la Chimie, la science par excellence des ‘ Voyez à ce sujet : La Biochimie et les Chlorophylles, déjà cité, où l'auteur a résumé l'ensemble de ses recherches sur les extraits des cellules chlorophylliennes. | mutations de la matière, devait aider les hommes à passer du monde, en apparence immobile, de la pierre au monde capricieux et souple et toujours changeant de la plante. Aussi, ses belles décou- vertes sur les alcaloïdes, sur les terpènes et les camphres, sur les chlorophylles et leurs succé- danés, sur les cires, sur les composés si variés qu'il trouva dans les végétaux, lui apportèrent de très douces joies. Elles n'étaient cependant, à ses veux, que les prémices de recherches qu'il espérait pouvoir poursuivre et développer encore longtemps. V. — L'ŒUVRE D'ÉTARD EN CHIMIE MINÉRALE. Dans toutesles investigations que nous venons de résumer, Elard avait pris pour guide la théorie atomique, telle que l’enseignait chez nous l’ardent apôtre francais de cette grande doctrine, Adolphe Wurtz, telle que la propageaient, aux côtés du Maître, tous les coryphées de sa glorieuse École. Pénétré des services qu'elle rend aux chercheurs, il s'efforca d'en étendre le bénéfice à tout un grand département de la science pour lequel elle n'avait point été créée. $ 1. — Complexité des Molécules inorganiques et de leurs réactions. Cette idée le hantait, en effet, qu'il ne saurait y avoir deux Chimies : l’une pour les corps minéraux, l’autre pour les produits de la vie, ainsi que ten- dait à le faire inconsciemment admettre, parmi les chimistes, leur distribution effective en deux groupes qui s'ignoraient mutuellement. En général, les « organiciens » avaient apprécié le secours des formules dites de constitution, où s'expriment les fonctions chimiques, et abandonné la notation en équivalents, ignorante des volumes gazeux. Au contraire, presque tous les spécialistes de la Chimie minérale s’obstinaient à repousser la notation ato- mique par misonéisme ou tyrannie d'École, et aussi parce que, dans la pratique des réactions de leur ressort, elle leur était moins utile. Ceux d'entre eux qui demeuraient d'accord avec eux-mêmes n'em- ployaient que des formules brutes ou simplement binaires comme au temps de Lavoisier et de Guyton de Morveau. Voyant à tort dans l'adoption de l'écriture atomique un acte de foi aux principes de la théorie nouvelle, beaucoup se refusaient à l'apprendre. Aussi étroits en leurs vues, quantité d’« organiciens » se condamnaient, de leur côté, à ne point lire les Mémoires publiés en équivalents. De sorte que, si, pour un petit nombre d’esprits, c'était un jeu de passer d'un système à l’autre et de se tenir au courant du progrès en chaque camp, la plupart des praticiens n’apercevaient aucun pont entre les deux domaines, aucune analogie entre LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 597 les combinaisons d'apparence simples observées en Chimie minérale, et les corps à facteurs multiples et complexes, dont les réactions comportent des ruptures de mailles, des substilutions de radicaux, des attelages de chaînes et des greffes de fonctions. Ce fut le mérite — et l’une des grandes origina- lités — d'Étard de soupconner chez tous les êtres qu'étudie la Chimie une certaine unité de plan, et, dans les phénomènes auxquels ils donnent lieu, une communauté de mécanisme. El, ce qui est aussi très remarquable, c'est que cette conception ait germé dans son esprit dès sa jeunesse, au début même de sa carrière de savant. À peine élait-il sorti du laboratoire de technique minérale de Frémy pour s'initier, sous la direction de Cahours, à |" « Organique », que déjà le contraste des deux Chimies, loin de l’enlizer dans l'opinion courante, l'incitait à se méfier d'une apparence qui pouvait être trompeuse. Il s'avisa de penser que la diversité des aspects masque peut-être des similitudes profondes de ré- gime; et, tout de suite, parallèlement à ses expé- riences sur les fonctions oxydées, il s'ingénia à sur- prendre, dans la formation des composés minéraux, des processus à l’image des réactions organiques". 1. Cas des Sesquisulfates. — La connaissance qu'il avait acquise d’un grand nombre de prépara- tions minérales permettait à sonregard de seporter, même en dehors du monde de la vie, sur une mul- litude de corps. Il chercha parmi ces substances celles dont les formules s'écartent quelque peu du type habituel ou offrent, du fait de leur complexité relative, une physionomie insolite. Envisageant d’abord les combinaisons du premier groupe, il écrivit, en regard de leurs formules développées, les variantes qu’autorise à priori la théorie ato- mique, puis il s'efflorçca de faire apparaître, par l'invention de composés nouveaux, les structures qui correspondent exclusivement à ces variantes. Les sels bibasiques des sesquioxydes, tels que le sulfate d'alumine, lui parurent spécialement dési - gnés pour ce genre d'investigation. Dans la formule couramment adoptée (S0*)" Al, une molécule d'acide sulfurique épuise, en effet, sa double action sur un seul atome plurivalent, alors que, {héoriquement, rien n'empêche de doubler la formule pour avoir en (SO“)'Al un sel où une molécule d'acide satisfait ses valences sur deux atomes plurivalents distincts. En 1878, Étard montra la fécondité de cette hypo- thèse en produisant des composés mixtes qui ne peuvent s'expliquer que par elle: le disesquisulfate de fer et d'aluminium : Fe* (SO‘)'AF ; le disesqui- sullate de magnésium et d'aluminium : AF(SO‘)Mn'; ‘ C'est principalement de 1817 à 1884, époque de sa vie la plus féconde en idées, qu'Étard accomplit ces recherches. enfin, toute une série de disulfates de sesquioxvdes, également nouveaux : Fe*(SO‘)Cr?; Al(SO‘)' Cr, Fe”(SO‘)'Mn”; Cr’(SO’)'Cr”, différent de 2 [Cr*(S0*)"}. Par leur solubilité, leur couleur, leur tout stabilité, ces sels s'écartent notablement des sesqui- sulfates simples, ce que l’on ne peut attribuer qu'à une différence de structure‘. 2. Cas des Sulfates de protoxyde. — Le succès encouragea l’auteur à des recherches analogues sur les sels de protoxyde. On connaissait le sulfate de protoxyde de cobalt anhydre : SO'Co. I fit le sul- fate (SO*Co”, qui est véritablement un autre sel: un disulfate. Comme en Chimie organique, les molécules de ces substances minérales présentent donc arrangements internes, des constitutions dépendent leurs propriétés, même physiques. des d’où 3. Cas des Sulftes. — La tendance de l'acide sulfureux à former des sels acides, le fait qu'il donne deux degrés de combinaison avec le cuivre, par suite, avec cet élément, un composé d'une étonnante complexité et d'une stabilité très faible (sel de Chevreul : SO*Cu”,S0'Cu + 2H°0), portèrent Etard à penser qu'il aurait chance d'obtenir de cel acide une série nombreuse de sels où les transfor- mations apparaîtraient analogues aux réactions compliquées de la Chimie organique. En 1878 et 1879, ses expériences établirent que le sel de Chevreul « ne résulte jamais de l’action directe et primitive de l’acide sulfureux sur un sel de cuivre ». Comme dans la production des aldé- hydes par oxydation des hydrocarbures, il se forme en deux temps, l'apparition d'un sel déjà connu, le sel de Péan de Saint-Gilles, s'intercalant entre les composants et leur produit final. Étard décou- vrit que le sel intermédiaire fonctionne comme acide et renferme huit atomes d'hydrogène substi- tuables. Il s’appuya sur ce fait pour prouver que le sel de Chevreul est non seulement un sel double, mais aussi un sel acide, susceptible de perdre de l'acide sulfureux et de l’eau, et qu'enfin il exige une formule polymérique. Enfin, il s'inspira de cette donnée pour composer avec l'acide sulfureux des sels très complexes. Ainsi, chez ces substances minérales, la simpli- ! Encore une fois, c’est dans le sens le plus large et non dans la signification littérale et uniquement statique, que nous employons le mot structure. Que [a « Structure » repre- sente des rapports de vicinité entre les atomes d'une même molécule, ou des rapports soit d'attirance, soit de mouve- ment, ou d'autres relations dont nous n'avons aucune idée, elle exprime des alliances et des correspondances, et c'est pour cela qu'il est pratiquement utile de la considérer. La notion de « structure » offre, pour le chimiste, un intérêt analogue à celui des notions de « molécule » et d'« atome », qui ne préjugent rien sur la nature réelle de la molécule et de l'atome. 598 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD ——————Z—ZEZ—Z—Z_—_]_—_—_—]-—-—_—_—_]—— — — — cité n'est qu'apparente. Au fond, leur structure est comparable à celle des corps organiques, et l'on doit admettre dans leur molécule des groupements semblables à ceux de ces derniers corps, puisque le jeu réel de leurs réactions réclame, pour s'expri- mer, des figurations de même allure. A l'appui de cette thèse, l’auteur produisit encore, par l’action du cyanure de potassium sur l'acide sulfureux, un sel nouveau : SO*CAzZK,H°0 cyanosul- lite qu'on ne saurait prendre pour un sel double et chez qui les réactions décèlent « un lien particu- lièrement étroit entre le cyanogène et le soufre ». $ 2. — Constitution des Composés du Cyanogène. Quelques années plus tard, en 1884, il se trouva ramené aux questions de ce genre en essayant d'établir entre les nombreux dérivés minéraux du cyanogène une classification conformeauxexigences de la théorie atomique. La composition de tous ces corps présentait alors des difficultés d'interpré- tation analogues à celles qui avaient un moment arrêté et déconcerté l'un des premiers fondateurs de la théorie des substitutions, Gay-Lussae, lorsque l'illustre savant vit le cyanogène, corps composé, prendre en certaines molécules laplace d'un atome de chlore. Depuis cette découverte, la chimie du cyanogène s'était grandement développée, et quan- lité de combinaisons où ce corps figure avaient été étudiées. Cependant, les cyanures, les ferri et les ferrocyanures, les cobalticyanures continuaient de défier tous les essais tentés en vue d'expliquer par l'architecture de leurs moléeules les contrastes de leurs propriétés respectives. Les cyanures sont très toxiques. Beaucoup de leurs dérivés mélalli- ques doubles ne le sont pas : les ferrocyanures et les cobalticyanuresse comportent à cetégard comme s'ils ne contenaient pas de cyanogène. Avec son préparateur et ami Bémont, Étard examina ces anomalies et s'efforca d'en rendre compte. Il cherchaäétablir une formule développée de l’acide ferrocyanhydrique qui permit, selon sa propre expression, « de systématiser l'étude des nombreux ferrocyanures connus et de prévoir des composés nouveaux ». 1. Hexacyanures, Pentacyanures et Tétracya- nures. — Les deux savants démontrèrent que, si le ferrocyanure de potassium, introduit dansl'éther, s'y dépose, ce n’est pas qu'il y soit, comme on l'avait pensé, insoluble; c'est simplement qu'il forme avec l'éther une combinaison véritable, insoluble dans ce liquide; et ils établirent que cette combinaison comprend un noyau d'hexacyanure. Is virent, d'autre part, qu'à 440°, à l'abri de l'air, l'acide ferrocyanhydrique perd de l'acide cyanhydrique et forme un cyanure de fer, qui est un penlacyanure., À la mème température, dans le vide, le nitroferricvanure de soude, en-qui Gerhard voyait un pentacyanure, perd du cyanogène, de l'eau et du bioxyde d'azote et donne un f{étra- cyanure. Ainsi fut découvert que « plusieurs degrés de polymérisation » du cyanogène « sont également possibles pour les cyanures doubles de fer ». 2. Réactions de sels doubles. — On savait, d'au- tre part, que la réaction du chlorure d’ammonium sur les ferrocyanures produit des sels doubles. Bémont et Etard démontrèrent que ces sels peu- vent être de plusieurs types, selon les conditions de milieu, de température et de temps. Chacun d'eux à son équilibre particulier, influencé par la variation de ces facteurs indépendants. — Tout en éclairant selon les règles de la doctrine atomique la constitution des divers composés du cyanogène, ce Travail eut donc le grand mérite de montrer t 1° Que ces composés se comportent, dans leurs réactions, exactement de la même façon que les molécules organiques ; 2° Que la théorie atomique, entendue comme itinéraire dans le monde des atomes et des molé- cules, exige, pour autoriser des prévisions valables, le concours de déterminations dynamiques. Dans sa pensée, Étard généralisait ces conclu- sions. Il était convaincu que les combinaisons minérales qui ne manifestent pas à nos yeux les modes de réaction habituels aux substances orga- niques les cachent dans leur profondeur. Et, d'autre part, attentif à toutes les voix de la science, il ne doutait pas de la nécessité d’unir aux sugges- tions, pour ainsi dire graphiques, de la doctrine atomique, la considération mécanique des dépenses d'énergie et des équilibres qui interviennent dans les réactions pour les provoquer ou en régler le cours. VI. — L'ŒUVRE D'ÉrARD EN CHIMIE GÉNÉRALE. Des recherches si élevées et d'ordres si divers avaient, dès leur apparition, atliré l'attention des esprits philosophiques. Elles ne pouvaient impres- sionner aussi vivement le gros des travailleurs, parqués à moindre altitude en des champs plus restreints. Même instruit, d'ailleurs, le public est simpliste : l’œuvre qui le frappe est celle qui se rattache directement à ce qu'il sait et peut se résumer en un mot. Aussi était-ce sans souci de l'opinion qu'Étard s'était livré à ses études si va- riées. Il ne se dissimulait pas les inconvénients d'une dispersion même modérée, et se rendait bien compte que la notoriété est le plus souvent la ré- compense d'une longue fidélité à un sujet unique. Une étroite spécialisation, même si elle est le fait d'une myopie voisine de la cécité, rive, pour un on LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD temps, dans le souvenir des hommes, la personne du chercheur au grain de vérilé qu'il a su trouver. Mais la perspective de culliver à mi-côte un toul petit domaire pour avoir, en mourant, le droit de lui léguer son nom n'eûl inspiré à Étard que la Chercheur d'avant-garde, il d'autres le soin d'élargir les sentiers qu'il avait paresse. laissait à frayés, et, après chaque découverte, plutôt que de se prélasser dans le développement, courait àux idées nouvelles el aux séductions de l'inconnu. C'est ainsi qu'après avoir brillé dans la chimie des corps organiques, des réactions biologiques el des composés minéraux, il résolut d'aborder les questions les plus générales de sa science : il voulut savoir comment les sels se dissolvent. $ |. — Solutions saturées des sels. Dès avant la création de la Chimie positive par Lavoisier, le phénomène physique de la dissolution avait cessé d’être confondu avec le phénomène chimique de la combinaison. On distinguait même les solutions étendues, c'est-à-dire non arrivées à saturation, et les solulions saturées. Plus près de nous, les belles expériences de deux savants fran- cais, le chimiste Lecoq de Boisbaudran et le phy- sicien Gernez, avaient fait voir qu'à l'équihbre stable de la solution saturée peut, en certains cas, s'ajouter un degré supérieur de concentration du corps dissous : l'équilibre instable de sursaluration. D'autre part, l'observation vulgaire avait depuis longtemps appris qu'en général, lorsqu'une sub- stance se montre soluble dans un liquide, elle l'est plus ou moins selon la température. L'intérêt de ce fait avait été, en quelque sorte, deviné par Lavoi- sier : constatant une analogie d'aspect entre la liquéfaction d'un solide par la chaleur et l’appa- rence de liquéfaction que ce même corps manifeste en se dissolvant, l’illustre fondateur de la Chimie inclinait à penser que, par rapport à un même solvant, plus près le corps soluble se trouve de la température où il fuse, plus considérable est son aptitude à se dissoudre. En 1819, Gay-Lussac reprit cette idée et construisit des courbes de solu- bililé qui, pour l’eau et un certain nombre de sels, exprimaient, en fonction de la température, les poids respeclifs du solvant et du corps dissous à saturation. Ses lables furent, par la suite, enrichies de données relatives à de nouveaux corps et à de plus grands écarts de lempérature. Mais, quel qu'ait été le mérile de ces travaux, ils n'avaient point abouti à formuler les lois du phénomène étudié. On ne pouvait s’en servir pour prévoir. I y a une vingtaine d'années, d'autres méthodes ont surgi qui ont paru plus fécondes. La découverte récente du phénomène physique de l’isotonisme dans les poils staminaux d’un 7radescantia par le 099 botaniste Hugo van Vries venait de conduire Van L'Hoff à énoncer les lois de la pression osmotique. Bientôt Arrhénius émettait sa Lhéorie, maintenant célèbre, de la dissociation électrolytique. On pul croire que ces nouveautés allaient changer la face de tout le problème. D'après elles, dans les solu- tions salines étendues, les sels dissous seraient décomposés en leurs éléments ionisés, el ceux-ci se comporteraient à la facon des molécules d'un gaz comprimé dans un récipient. Cette théorie cinétique met-elle directement sous nos yeux la réalité naturelle, ou ne fait-elle que la traduire par une image utile? Le fait est qu'elle rend compte de toutes les particularités constatées et que, jusqu'à présent, aucune de ses prévisions n'à été infirmée par l'observation. Tout autres apparaissent les solutions saturées. Il semblerait à priori que, par simple voie mathé- malique, on généraliser jusqu'à elles, comme à un cas-limite, les lois qui s'appliquent aux solutions efforts tentés dans ce but par les plus éminents représen- lants de la Chimie physique n'avaient encore pu, écrivait Étard en 189%, aboutir « à tracer une ligne de solubilité, même très simple ». Cette impuis- sance des maîtres de la science devant le problème depuis si longtemps posé ne devait pas en détour- ner notre collaborateur. La méthode de composi- tion à laquelle ils avaient eu recours suppléait par quelques hypothèses à l'insuffisance des données positives; si peut-être elle convenait pour dégager de la vérité acquise certains corollaires, il n'y avait pas lieu de s'étonner qu'elle ne réussit point à l'étendre. L'analyse expérimentale pouvait, au contraire, aspirer à établir les principes. Etard lui était fermement attaché, et ce fut encore à elle qu'il se fia. « Dans les questions de solubilité à saturation, disait-il, on ne connait suffisamment que la quantité de sel en fonction de la tempéra- ture. Si l’on veut constituer une théorie satisfai- sante, il sera indispensable d'ajouter à cette rela- tion » des valeurs physiques qui manquent actuellement » : la chaleur spécifique et la chaleur latente, « la courbe des tensions de vapeur don- En attendant puisse étendues. Cependant, les nant la pression osmotique ». — que le travail considérable que de telles mesures exigent » füt réalisé, il se mit en devoir de recher- cher dans les faits eux-mêmes leurs relations fon- damentales. Il avait trente-deux lorsqu'il entreprit cette étude. Parallèlement à d'autres investiga- tions, elle le retint durant dix années. Sa patience n’en fut pas surprise, l'œuvre qu'il s'était proposée lui ayant, dès le début, paru énorme et presque disproportionnée à ses forces : il voulait préciser, par rapport à l'eau et à d’autres solvants, à des ans 600 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD intervalles de température très rapprochés et entre des limites thermiques aussi éloignées que pos- sible l'une de l'autre, les conditions de solubilité d'une multitude de sels, minéraux et organiques, en solution saturée; et il entendait, de plus, déter- miner l'état des corps dissous à chaque stade de la dissolution. Deux mesures préliminaires lui pa- rurent nécessaires : 1° Perfectionner le mode de représentation des faits; 2° clarifier et enrichir la technique opératoire. 1. Mode de représentation des faits. — Les tables des coefficients de dissolution dressées sous forme graphique depuis Gay-Lussac chiffraient en poids le pourcentage du corps dissous et du sol- vant. Aux sels peu solubles correspondaient des lignes assez nettes et de même allure, voisines de la droite; aux autres, des ares non définis et de courbures diverses, qui, tendant vers un terme lointain, eussent exigé, pour s'inscrire entre des limites thermiques suflisantes, des grandeurs d'échelle impraticables. Deux gros inconvénients en résultaient : la comparaison de lignes aussi dif- férentes devenait impossible; en outre, des seg- ments de ligne qui se confondaient sensiblement avec des droites appartenaient, en réalité, à des branches d'hyperboles, ce qui rendait illusoire toute induction fondée sur leur direction. En vue de parer à ces difficultés, Étard imagina, les tem- pératures continuant de s'inscrire en abseisses, de porter en ordonnées le pourcentage pondéral du corps dissous par rapport, non plus au solvant, mais à la solution saturée elle-même. Soit, à une certaine température, p le poids du sel dissous, r celui de la solution saturée, le pourcentage sera 100 p D pP+T p+T faisait remarquer l’auteur, celle qui, dans l'acte de la dissolution, s'établit d'elle-même entre le sel et le solvant. À mesure, en effet, que le sel disparait dans le liquide, c'est, non plus dans le solvant pri- mitif, mais dans une solution graduellement chan- geante qu'il se dissout. Dans ces conditions, les graphiques de solubilité sont, comme va nous le montrer l'expérience, des droites dont l’inclinaison p PH T Si, pour simplifier la formule, on représente ce rap- port par b, et l'ordonnée de solubilité à l’origine par a, l'ordonnée générale est: yy = a + 6. Ce système offre done l'avantage d'exprimer une rela- tion naturelle, de comprendre tous les graphiques en un même tableau, sans changement d'échelle, de rendre ces graphiques comparables entre eux et très aisément calculables. - La relation est, en somme, comme le sur l'axe des abscisses dépend de la valeur 2. Manuel opératoire. — Quant au manuel opéra- toire, il importait de le préciser par la critique des phénomènes qui se produisent au cours des mani- pulations. Très simple en son schéma, l'expérience se compliquait, en effet, dans le détail de l’exécu- tion, et de nombreuses causes d'erreur risquaient d'en vicier le résultat. Théoriquement, il convenait de mettre en présence le solvant et un excès de sel à une température connue, de facon à saturer le sol- vant, puis de procéder à l'analyse de la solution décantée et pesée. Répétée à intervalles thermiques très voisins entre la température la plus basse et la température la plus haute que l’on puisse atteindre, cette expérience fournirait, dans chaque cas d'um solvant et d'un sel déterminés, tous les éléments que le caleul exige pour construire, en quelque sorte point par point, le graphique cherché. Mais la prévention des refroidissements ou des échauf- fements des récipients au cours des dissolutions, la distribution uniforme de la température dans les mélanges, l'obtention de températures élevées avec indication exacte de leur valeur, l'élimination des perturbations dues à des condensations de vapeur dans le liquide qui, après avoir été porté à haute température sous pression, revient à la tem- pérature et à la pression ordinaires, l'appropriation de la nature chimique des vases à celle du contenu devaient être sévèrement codifiées. Etard se livra à ce travail préliminaire avec un soin scrupuleux, régla la forme, les dimensions, surtout l'épaisseur des éprouvettes à mélanges, le choix des bains réfrigérants ou caléfacteurs, la disposition des réci- pients affectés à ces derniers, et, enfin, inventa un tube recourbé et scellé, qui permet d'obtenir, à la température ordinaire et dans une même branche de l'instrument, l’ensemble du liquide et du sel qui ont formé à haute température et sous forte pression une solution saturée. Il rendit ainsi aussi exacts que possible et propres à une compa- raison ultérieure les résultats de toutes ses expé- riences. 3. Sels étudiés. — Pour les solvants et les sels sur lesquels on peut opérer notablement au- dessous de zéro et à des températures élevées, il abaissa jusqu'à — 125° et poussa jusqu à + 330° les limites thermiques des observations. En solu- tion aqueuse, il étudia spécialement les Azotates et Chlorates, les Chlorures, Bromures et Iodures, les Sulfates, Séléniates et Chromates; en d'autres sol- vants (alcools, acétate d'éthyle, etc.) : les sels de Mercure et les sels de Cuivre; en certains liquides organiques : le Soufre et divers Corps organiques ; puis il s'occupa des solubilités des sels en mélange. 4. Analyse des graphiques. Lois des phénomènes. — Ce grand travail l’amena à introduire dans la science des idées qui n'y avaient pas cours. Tout LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD 601 d'abord, il montra que, s'il y a des sels dont les solubilités eroissent en fonction de la température, d'autres existent dont les solubilités demeurent constantes entre des limites thermiques étendues ; et il établit que, chez les premiers, la gradation de la solubilité depuis sa valeur originelle est, sauf en certains points criliques dont nous parlerons bientôt, régulière. La droite qui l'exprime mène à un point limile de saturation qui coïncide avec la fusion ignée du sel pur. C'est là une loi très pré- cieuse, puisqu'elle révèle, conformément au pfes- sentiment de Lavoisier, un lien entre l'aptitude à la dissolution et l'aptitude à un changement d’étal. Une conséquence importante résulta de cette orientation des lignes de solubilité. La direction de ces graphiques permet, en effet, de trouver la limite à la solubilité de corps qui ne se liquéfient qu'au rouge vif. L'interpolation n'a aucune part à celle détermination, puisqu'elle est uniquement fondée sur une mesure physique, celle de la fusi- bilité. « Dans ce cas », faisait remarquer Étard, «il ne s'agit pas toujours d'une réalité objective, les solutions » aqueuses « devant passer avant 400° par la température du point critique de l'eau, mais de la limite vers laquelle tend une ligne expéri- mentalement observée ». Pour divers sels, il arrive cependant qu’en cer- tains points de l'échelle thermique, le graphique de solubilité, qui s'était montré rectiligne, change brusquement d'orientation, puis reprend une direc- tion droite. Considéré dans toute son étendue, il consiste alors en une ligne brisée dont les segments se raccordent entre eux par des angles vifs ou des coudes arrondis. Aux sommets de ces angles et à ces coudes correspondent respectivement des points ou espaces critiques de solubilité caractérisés, en fait, par un changement dans la constitution du . corps dissous. Étard découvrit ainsi, au sein même des dissolutions saturées, des phénomènes d'hydra- tation et de déshydratation graduelles des sels en fonction de la température. Ces modifications se produisent sous l'influence de très faibles variations de l’état thermique. L'ingénieux expérimentateur en prouva l'existence soit en réussissant à isoler du milieu saturé les sels ou les hydrates qui s'y étaient formés, soit en constatant, dans les mé- langes, des changements de coloration caractéris- tiques d'états particuliers d'hydratation des sels expérimentés. À la lempérature ordinaire et jus- qu'à + 30°, la solution aqueuse saturée d’iodure de cobalt à six équivalents d'eau (Col, 6H°0) est grenat et jusqu'à ce degré thermique la ligne de solubilité est une droite; au delà de 30° et jusqu'à près de 40°, la liqueur se teinte d’une nuance olive, et le gra- phique se relève en arc; après quoi, la liqueur, devenue franchement verte, conserve cette couleur, et le graphique est une droite. Or, la signification du changement de coloration est très netle : en dehors de toute solution, à l'état solide, Le sel à six équivalents d'eau est grenat; et, quant au sel qui donne la teinte verte à la solution, Etard réussit à l'isoler sous la forme d'un hydrale vert à quatre équivalents d'eau. Même observation sur la solu- elle est rose jusqu'aux abords de 40°, point jusqu'à l'ap- tion saturée du chlorure de la même base : proche duquel le graphique de solubilité est une droite ; elle devient violette jusqu'à 50°, alors que le graphique se courbe; puis elle passe au bleu, tandis que le graphique se poursuit en direction rectiligne. Ici encore la teinte rose et la teinte verte caractérisent deux états différents d'hydratation du sel. Pareillement, l'iodure de sodium à deux équivalents d'eau donre une droite continue de 0° à 80°; puis en ce point le sel se déshydrate dans sa solution, et c’est alors un graphique recti- ligne de direction nouvelle qui se développe. Pour rendre sa démonstration plus saisissante, Étard tâächa de rendre perceptible à la vue la formation ou la dissociation des hydrates au sein même de la solution. Opérant sur le chlorure de strontium SrCE, 6H°0, il réussit à vorr et à ire voir la cause de la perturbation que la droite de solubilité de ce corps aceuse autour de 60°. « Avant 40° », dit-il, « sous le régime de la droite, les solutions ne déposent » par un faible refroidissement « que des dquilles » du sel à GH°O. « Entre 90° et 100°, elles ne déposent, par une légère chute de température, que des lamelles ayant l'aspect » du chlorure de baryum à deux équivalents d'eau. « Mais, entre 50° et 90°, dans la région où se produit le point culmi- nant entre deux courbures, on voi! se déposer à la 1ois les deux hydrates », les uns en aiguilles et les autres en tables. L'auteur de ces belles expériences les varia de facons très diverses et en prenant pour matière des sels très différents. Dans tous les cas, les lignes de solubilité traduisirent, en leurs points singuliers, l'équilibre variable d'hydrates plus ou moins dissociés. Il rencontra des phénomènes du mème ordre chez les sels dont la solubilité en fonction de la tem- pérature peut être constante entre certaines limites, puis décroissante. Depuis longtemps, les chimistes savaient que, considérable à froid, la solubilité du sulfate de soude dans l’eau décroit quand la solu- tion s'échauffe. Mais cette anomalie, qu'ils n'avaient päs pu ne pas apercevoir parce qu'elle se passe aux températures usuelles, leur avait paru isolée et inexplicable. Opérant à des températures élevées, Étard montra qu'elle est la règle chez les sulfates et, en général, chez les sels d'acides bibasiques, et il en donna la raison : pour de très légères varia- tions thermiques, ces sels modifient leurs degrés 602 LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD d'hydratation. On peut n'introduire dans le solvant qu'un sel anhydre à l'état solide, et, à mesure qu'à partir d'un certain degré croit la température, voir la ligne de solubilité se prolonger parallèlement à l'axe des abscisses, puis enfin s'abaisser et rejoindre cet axe. Il se dépose alors, non pas un sel de nature chimique différente, mais un hydrate particulier : celui d'un isomère (probablement polymérique) du corps dissous. Tel est le cas du sulfate de manga- nèse. C'est ainsi que, pour un même sel déposé anhydre, on obtient parfois deux lignes de solu- bilité et même davantage. Alin de se rendre comple du degré de généralité de tous ces faits, l'auteur varia le plus possible ses expériences. Citons notamment celles où il prit pour solvant, non plus de l’eau, mais du sulfure de carbone et des liquides organiques de fonctions diverses, purs ou en mélange avec l’eau : alcool méthylique et eau, alcool éthylique absolu, alcool propylique, acétone, formiate et acétate d'éthyle, acide acétique dilué, éther ordinaire, butol, ete. Il y étudia la solubilité de divers chlorures, spéciale- ment du chlorure de mercure et du chlorure de cuivre. Il constata que, dans ces milieux, ces sels donnent lieu, entre certains degrés de tempéra- ture, à des solubilités constantes, comme dans le cas des sulfates et par le même mécanisme. En raison des dangers dont elles menacent continuel- lement l'opérateur et aussi des limites qu'imposent à ses expériences soit la bassesse des points d’ébul- lition de certains de ces liquides, soit leur décom- position aux températures élevées, les recherches sur ces solvants ne purent acquérir la même am- pleur que les précédentes. Elles témoignèrent néanmoins que les phénomènes y sont de même sens. Cet ensemble de résultats offrait un haut intérêt. Il contredisait formellement les idées déjà répan- dues par les physico-chimistes qui avaient espéré pouvoir créer par synthèse une théorie purement physique de la dissolution. Saisissant vite la portée doctrinale de ce désaccord, Étard s'employa immé- diatement à agrandir sa découverte par une minu- üieuse analyse des faits qu'il avait reconnus. « Au sein d'une solution saturée », écrivait-il en 41899, « non seulement l'eau est saturée de sel, mais encore le sel » est saturé « d'eau, comme dans un composé défini, et de faibles influences peuvent rompre l'équilibre établi, faire passer de l’eau d'une solution, qui devient déshydratante, à une autre. C'est ainsi que les solutions » aqueuses « saturées de chlorure de calcium ou de chlorure de magné- sium, bien qu'ayant pris autant de dissolvant que possible lors de leur formation, tendent à en prendre encore et peuvent déshydrater d'autres liquides saturés ». L'auteur signalait là une chimie spéciale aux échanges de eau de dissolution, qui. selon sa remarque, n'avait encore fait l'objet d’au- cune étude. « Les solutions roses, Iméme diluées, de chlorure de cobalt à six équivalents d'eau pas- sent immédiatement, à froid, à la teinte bleue des sels anhydres par l’action d'une solution saturée froide de magnésium ou de calcium. A froid, les solutions, concentrées ou non, de chlorure de baryuim sont complétement. précipitées par celles de chlorure de calcium à saturation. Le chlorure de calcium dissous prend l’eau qui tenait en solution le chlorure de baryum à «deux équivalents d’eau, el celui-ci se dépose. En dehors des actions chi- iniques ordinairement en jeu, deux sels de même série, qui ne sauraient réagir » l'un sur l’autre, « se précipilent ainsi à titre de solutions comm des combinaisons faisant la double décomposition : « CaCl2,6 H?O + Aqg)+ ..... :BaCEË,2 H°0 + Ag! = — | CaCI£, 610 + Ag + Ag']-+ BaCI?,2 1120 ». Pour étudier ces transports d'Aqgua, Étard exa- mina le cas des solutions aqueuses saturées de deux sels. Il choisit divers couples, el notamment le couple chlorure de potassium KCI et chlorure de sodium NaCl, sels réputés inactifs à l'égard lun de l’autre. Il trouva que, ia solubilité de chacun d'eux étant rectiligne, leur somme est aussi formée de droites ou de segments droits. Dans les régions thermiques où, selon Ja nature des sels, leurs droites varient en sens inverse, il y a compensation pour la somme, laquelle demeure rectiligne. Il ne paraît pas exagéré de dire que tout un cha- pitre de la science chimique naissait de ces fines observaiions. Si l’on veut bien remarquer qu'elles s'étendirent sur une échelle thermique d’une extrême ampleur, qu'elles portèrent sur un nombre considérable de sels et sur des solvants très variés, que, notam- ment dans le cas des sels à solubilité constante ou décroissante en fonction de la température, comme sont les sulfates en solution aqueuse et divers sels en solution organique, il réussit à obtenir des ligues de solubilité complète, suivant le sel depuis le point de congélation du mélange jusqu'à son point d'insolubilité, on accordera, sans doute, aux lois d'Étard un haut degré de généralité. Il ne les estimait pas, néanmoins, suffisantes pour établir théorie valable de la dissolution saturée, puisque, dans l’état actuel de la science, les varia- lions d'hydratation ou de dissociation électroly- lique du sel, qui modifient la composition des mélanges, ne peuvent être prévues. une $ 2. — Dissolution des Anélectrolytes. Alin de réduire ces incertitudes, il imagina de considérer le cas où les deux éléments de la solu- LOUIS OLIVIER tion — corps solubles et solvants — ne sont pas des électrolytes, et il étudia notamment la disso- lution de la diéthylamine et de divers hydrocar- bures dans l'hexane ; celles de la diphénylamine, de la triphénylamine, de la naphtaline, de l'anhy- dride phtalique dans le sulfure de carbone et de la naphtaline dans le chloroforme. I obtint alors, non plus des graphiques absolument rectilignes, mais des courbes simples, plus ou moins rappro- chées de la droite en certaines de leurs parties, et qui — c'est là le fait capital — aboutissaient, comme limite supérieure de solubilité, au point de fusion du corps dissous. Mais, toute saisissante qu'elle fût, cette concordance avec les résultats trouvés pour les sels minéraux dont la solubilité croit avec la température, ne le satisfit pas plei- nement. Il remarquait que le point de fusion du corps dissous ne saurait être, à priori, la seule limite propre à la solubilité, comprise d'une facon générale. « Dans une solution, disait-il, l'usage seul distingue un dissolvant et un corps dissous ; il s'agit, en réalité, de deux matières homogènes, en état d'équilibre physico-chimique sous la forme liquide. Si le point de fusion de la substance dis- soute est une limite, le point de fusion du dissol- vant » doit jouer « ce rôle au même titre », et il en peut être de même des points « d'ébullition et de congélation de l'un des éléments de la solution ». Elard éprouva la joie de voir cette prévision véri- liée par l'expérience. Ce furent les derniers gra- phiques dont nous venons de parler qui lui en fournirent la démonslralion : dans le sulfure de carbone, qui fuse vers — 118°, les lignes de solu- bilité de l’anhydride phtalique, de la naphtaline, de la triphénylamine, établies expérimentalement point par point, passent à cette basse tempéra- ture par la valeur 0. A — S0°, point de fusion de l’hexane, la diéthylamine cesse d'être soluble, de même qu'au voisinage de Æ 100° où ce corps entre en fusion, le graphique atteint son terme. Dans ces belles expériences, où les lignes de solu- bilité s'étendaient sans interruption entre leurs limites théoriques, elles apparaissaient donc comme /e lieu des points de fusion des mélanges du corps dissous et du solvant. $ 3. — Extension possible des resultats expérimentaux. il serait superflu d'insister sur le mérite d'un tel Travail. 11 représente l'un des apports les plus considérables que la Chimie générale, aujourd'hui si vivante, ait recu depuis une lrentaine d'années. Indiquons seulement que la méthode employée par Etard pour exprimer ses résullats se prête à tous les calculs qui pourront être faits en vue de mettre en évidence dans les solutions saturées les rap- ALEXANDRE ÉTARD 603 ports moléculaires entre le solvant et le sel dissous Tandis que l'infatigable chercheur accumulait la multitude de faits traduits en ses graphiques, un jeune métallurgiste, notre collaborateur Georges Charpy, éludiait, dans la dissolution saturée de certains sels, non le pourcentage pondéral des corps en présence, mais les relations numériques entre les molécules du sel et celles du solvant. En inscrivant à pelile échelle ses résultats en fonction de la température, il vil ses graphiques prendre, la forme dans le cas des sels minéraux, Mais la contradiction méme d'ares. n'est qu'apparente entre ses courbes et les droites d'Elard, puisque les lignes de ces deux auteurs expriment des rapports différents. Il semble que la conversion systéma- tique de tous les résultats d'Etard en rapports moléculaires ajouterait encore à l'intérêt de son œuvre en en dégageant tout un groupe important de relations chimiques qui s'y trouve virtuellement contenu. Si riche est cette œuvre en faits précis el bien observés, en données rares et d'obtention laborieuse, que tous les chimistes voués à l'étude de la solubilité auront longtemps encore profit à s'y documenter. VII. — L'ENSEIGNEMENT D'ÉTARD. L'homme qui possédait un savoir assez étendu, une imagination assez vive el un esprit assez souple pour conduire simultanément des recherches pro- fondes et inventer des méthodes en Chimie géné- rale, en « Minérale », en « Organique », en Chimie biologique, tenait, à un degré éminent, d'une telle science et de dons si précieux une partie des qua- lités nécessaires au professeur. Mais cette grandeur intellectuelle, servie par une parole alerte et bril- lante, n'eût cependant pas fait d'Étard le remar- quable éducateur qu'il fut, si, à côté du savant, il n'y avait point eu aussi en lui un sincère ami des hommes. Doué d'une grande délicatesse de cœur, il ambitionnait d'être utile à ceux qui l'appro- chaient, spécialement aux jeunes gens qu'il avait mission de diriger. Sa lecon faite, il ne se croyail pas quitte envers eux : bien qu'à l'Ecole de Phy- sique et de Chimie, ses élèves fussent nombreux, il entendait connaitre chacun d'eux en particulier. En vivant fanilièrement avec eux au laboratoire, il se rendait compte, mieux que par des examens officiels, de leurs aptitudes et de leurs progrès. Son passage subit du Chili en France à une époque où ces deux pays offraient, quant à la composition sociale et aux habitudes de vie, des différences très marquées avait beaucoup contribué à attirer son attention sur les hommes, et la promptitude avec laquelle il les pénélrait n'avait d'égales que la finesse et la sûreté de son jugement. Parmi ses 60% LOUIS OLIVIER — ALEXANDRE ÉTARD élèves, nombreux sont ceux qu'il a révélés à eux- | grins qui, depuis quelques années, n'avaient cessé mêmes, puis aiguillés sur la voie où devaient fruc- tifier leurs talents. Dissuadant les incapables d'une persévérance stérile, il encourageait les intelli- gents et les laborieux et les entourait de sa solli- citude, comme s'ils eussent été ses enfants. Il aimait, selon sa pittoresque expression, « tendre la perche » à ces vaillants jeunes gens qui, le plus souvent issus de silualions très modestes, accé- daient, par un dur travail, au bénéfice de la science. Il ne leur demandait pas si le grand nom de Lavoisier retentissait dans leurs souvenirs de famille, mais il leur apprenait l'œuvre de ce grand homme et les rendait, en quelque manière, ses disciples et ses fils. Bien qu'il se rattachât principalement à l’École atomique, c'est la science chimique dans son ensemble et sous tous ses aspects qu'il prenait soin d'enseigner. Le lumineux petit volume qu'en 1898 il publia sur Les nouvelles Théories chimiques‘ n'était que le résumé de notions qu'il avait déve- loppées dans son cours comme suite à l'exposé des doctrines classiques. Ses articles au Dictionnaire de Wurlz, ceux que, plus récemment, il consacra au Thorium et à l'Or dans le Traité de Chimie minérale de Moissan, étaient sortis aussi de la matière même de ses leçons. Mais ilne se bornait pas à l'enseigne- ment oral ou écrit : il contrôlait jusque dans le détail les travaux pratiques de ses élèves, exigeant d'eux des appareils bien montés, des préparations et des analyses irréprochables. Sous sa surveillance, les plus habiles ont constitué une riche collection de substances organiques rares, obtenues pures, et ce petit musée rend aujourd'hui service à leurs successeurs. Après avoir ainsi fait de la plupart de ses élèves des hommes instruits et d'excellents praticiens, le Maître pouvait, en loule conscience, à ieur sortie de l'École, les recommander au public. I] n'était point alors de démarche qu'il ne s'imposätl en faveur de ceux qu'il estimait dignes d'appui; et, quand l'un d'eux obtenait une bonne place dans l'industrie ou y affirmait sa valeur par une invention heureuse, quand tel autre, entré dans la carrière scientifique, ajoutait par quelque découverte à la somme de nos connaissances, il éprouvait un véritable enchante- ment. En ces derniers temps, le succès de jeunes savants qui, à l'Institut Pasteur, travaillaient sous sa direction adoucit un peu l’amertume des cha- ‘ A. ÉrarD : Les nouvelles Théories chimiques. À vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire. publiée sous la direction de H. Léauté; G. Masson et Gauthier-Villars, éditeurs. — On trouve notamment dans ce livre un exposé remarquable de la Pression osmotique. de la conslitution des Electrolytes, de la Dissolution électrolytique, de la Cryoscopie, des relations entre les indices de réfraction et la constitution moléculaire, en général des rapports entre les propriétés physiques et les attributs chimiques. de l'assaillir. VIII. — LEs DERNIÈRES ANNÉES D'ÉTARD. Après avoir longtemps mené une existence fort paisible, Étard payait alors son tribut aux tour- ments de la vie. En dehors de son foyer, où, jusqu'à la mort de sa fille, régna le pur bonheur, ses senti- ments d'affection avaient eu à pâtir d'ingratitudes indicibles, et de ceux-là mêmes pour lesquels se prodiguait encore sa bonté, il ne recevait que témoignages injurieux. Il en avait éprouvé une affliction profonde. Puis, Demarcay mourut (1903) ; puis Curie (1906). Lamême année, un coup plus rude encore le frappa : l'un de ses deux enfants lui fut enlevé. Peu après, il perdit Moissan (1907). Du bon Étard, jadis si vaillant et souriant, il ne resta plus qu'une ombre. Ses amis retrouvaient toujours en lui la fidèle affec- tion du vieux temps, et, dans leur intimité, il oubliait parfois sa détresse. Mais, courts étaient ces éclairs de joie. Dans la sombre désolation de son àme, ils n'illuminaient que le regret du passé : il se souvenait avec tristesse des jours écoulés dans la douceur de la vie de famille, des heures bénies où il avait goûté à plein cœur les enthousiasmes du savant. Il savait que, ces jours radieux, il ne les reverrail plus et que la douleur désormais serait son lot. Malgré le soin qu'il prenait de la renfermer en lui-même, elle se trahissait par le désarroi de tout son être. Eut-il le sentiment qu'après avoir enfanté dans l’allégresse, il n’apporterait plus à la science qu'une pensée alanguie ? Laboratoire et enseignement mis à part, il voulut s'affranchir du souci des besognes périodiques. Dès 1902, il avait cessé de nous donner ces revues annuelles de Chimie pure dont nos lecteurs se rappellent les brillants débuts ; et si, depuis cette époque, il fit paraître, à ses heures, quelques rares opuscules, Mémoires techniques ou synthèses rapides de travaux plus anciens, ce fut parfois sans s'imposer, d'un bout à l’autre de sa rédaction, toute la conten- tion d'esprit qui assure sa vraie place à chaque fait et à chaque idée. Peut-être cette distinction qu'il faisait, à part lui, entre l'observation positive et les apereus qu'à touthasardelle suggère, n'apparait-elle pas d’abord assez soulignée dans son livre sur les chlorophylles. On manquerait cependant de justice envers lui en liant l'œuvre expérimentale qu'il y a consignée au sort des considérations qu'il ne s'y est point interdites. Les hypothèses sont le plus souvent transitoires et beaucoup mêmes qui ne mènent pas longue vie rendent service à la science. Étard eut toujours le courage de dire celles qui l'avaient excité à l'action et pouvaient être utiles à d’autres. -à L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE Ces hypothèses avaient traitaux conditions plané- | {aires de la vie. Il les avait concues en des circons- tances diverses, à l'occasion de ses lectures, de ses expériences de laboraloire el de ses excursions géologiques et botaniques dans des régions très variées; et l'intérêt qu'il avait pris à les combiner amenait souvent sa pensée vers les sources qui les lui avaient fournies. C'est ainsi que, pendant la dernière période de sa maturilé, qui devait être aussi la dernière de sa vie, il tenta de se soustraire un peu à ses peines el de rénover ses idées par quelques changements d'ambiance. Aux fêtes de Pâques de cette année, il se rendit en Tunisie. À Gabès, il heurta un banc dans une embarcation et tomba si lourdement qu'il se brisa un fémur. Ramené à Paris, il disait ne plus souffrir, el sa fracture paraissait en voie de guérison lorsque, dans la nuit du 30 avril au 1° mai, soudainement il gémit et, au même instant, ferma les yeux pour toujours. C'en était fait de ce puissant et généreux esprit qui avait si noblement vécu dans le culte de la vérité et le respect des hommes! 605 La Science impersonnelle, que cette /evue ambi- tionne de servir, plane de trop haut au-dessus de nos douleurs pour permettre à l'amilié d'exhaler ici sa tristesse et ses regrets. Mais, chez le savant même, l'intelligence n'est pas tout; et qui n'aperce- vrait dans l’œuvre scientifique d'Etard qu'un fruit de sa pensée, n'en connailrait point le plus pré- cieux, Il y avait porté, avec l'esprit pénétrant et inventif qui y éclate, la fougue inlassable de son splendide idéalisme. Loin d'émousser sa sensibi- lité, la philosophie d'Auguste Comte, qu'il avait beaucoup médilée dans sa jeunesse, avait orienté ses facullés et tendu son courage vers les énigmes du Monde accessibles à nos prises. Il voyait dans la Science la grande libératrice des hommes, dans l'avenir de l'humanité le but de toute existence humaine. La parfaite conformité de ses actes à cette conviction fit à la fois la fécondité de son labeur et la beauté de sa vie. Louis Olivier. LA RÉGION D'INONDATION Dans son ouvrage sur le sous-sol de la ville de Vienne, Suess a comparé le cours du Danube à une guirlande dont les points de suspension seraient les vallées transversales taillées par ce fleuve dans les chaînes montagneuses qui séparent les grandes dépressions où il roule ses eaux. Le cours inférieur du Danube, le dernier segment de la guirlande, est compris entre le défilé des Portes-de-Fer et le pas- sage de Galatzi, point où le fleuve, franchissant ce défilé, entre dans son delta. Malgré le rôle important qu'a joué, depuis l'An- üquité, au point de vue historique, le plus grand fleuve de l'Europe centrale, c'est seulement au cours du siècle passé que le Danube a élé l’objet de quel- ques études scientifiques. Encore celles-ci se rédui- sent-elles, pour la plupart, à des observations pas- sagères de géologues ou de géographes. Une mention spéciale doit cependant être faite des beaux travaux de la Commission européenne du Danube, exécutés sous la direction de Sir Charles Hartley, premier ingénieur en chef, et de M. Charles Kühl, son adjoint et successeur. Malheureusement, ces travaux se limitent à l'hydrographie de la partie du fleuve com- prise entre Galatzi et les embouchures du Danube et seulement dans la mesure où celle-ci présente quelque importance pour l'amélioration de la voie navigable. Cette année, M. Gr. Antipa, directeur du Musée DU DANUBE EN ROUMANIE d'Histoire naturelle de Bucarest el inspecteur géné- ral au Ministère de l'Agriculture et des Domaines, a publié une monographie sur la région d'inonda- tion du Bas-Danube et son delta’. Avec la compé- tence résultant de 17 années d'étude de ces régions, il y traite non seulement les questions de morpho- logie et de morphogénie les plus diverses, pour la plupart nouvelles, concernant le régime des grands fleuves, mais encore les questions se référant à la biologie du Danube et à l'économie générale des eaux et des terres inondables. Il nous à paru intéressant de donner ici un aperçu des principales conclusions qui se dégagent de ce remarquable travail. I. — DESCRIPTION GÉNÉRALE DE LA ZONE INONDABLE DU DANUBE. La surface inondable de la vallée du Danube sur le territoire roumain est de 891.232 hectares, dont 427.187 appartiennent à la Valachie, sur la rive gauche du fleuve, et 463.615 à a Dobrogéa. Cette surface peut être groupée en :41° 432.187 hectares de lacs et forêts de roseaux ; 2° 459.045 hectares de terres inondables proprement dites, qui ne sont couvertes par les eaux que pendant une partie ‘ Regiunea inundabila a Dunarii. Slarea ei actuala Si-mij- loacele de a 0 pune 10 valoare. 1 vol. in-$S0 de 320 p. avec 3 cartes, 106 fig. et 23 pl. Carol Gübl, Bucuresti, 1910. 606 L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE de l’année; 362.395 hectares de ces terres sont silués sur le territoire cis-danubien ; le reste, soit 96.650 hectares, rentre limites de la Dobrogéa. L'Etat roumain est le plus grand pro- priétaire dans la zone inondable, où il possède 740.977 hectares, dont 449.361 hectares de lacs et forêts de roseaux. La région inondable du Bas-Danube, la Balta ou Lunca Dunarii, constitue sur le territoire roumain une bande dont la largeur moyenne varie entre 5 et 6 kilomètres et qui est dominée par la falaise de la Plaine Roumaine. Le maximum de largeur est de 12 kilomètres dans la Balta Mare. Cette région inondable s'élargit en général sur toute son étendue au fur et à mesure que l'on descend le fleuve. On distingue cependant une succession de parties très larges, suivies de rétré- cissements de la plaine inondable. Ces derniers sont lormés parfois par de véritables presqu'iles où des villes ont été généralement bâties. Cette disposition occasionne une division naturelle de la zone en régions plus ou moins isolées. IL. dans les — TERRAINS DE LA ZONE INONDABLE DU DANURBE. Les formes des terrains de la région inondable du Danube, depuis les Portes-de-Fer jusqu'à la mer, nous sont présentées pour la première fois dans leur ensemble par l'ouvrage de M. Antipa. Ce sont: les alti permanente, à proprement parler des lacs permanents; les gärle des canaux: des laiches, des roseaux, les japse, des petits lacs et élangs ; et, enfin, des surfaces immenses de terres inondables seulement pendant les grandes crues. Toutes ces dépressions sont entourées, traversées ou serrées par des digues naturelles, les grinduri, nom que l’on donne à toute élévation dans la Balta ou le Delta, comme, par exemple, le sont les alluvions anciennes qui s'élèvent dans le chaos pittoresque d’eau libre, de marais et de terre ferme. Il y a une certaine distinction à faire entre les formes morphologiques que l'on rencontre dans le Delta et celles qui se dessinent dans la dépression du Bas-Danube proprement dit. ILexiste, en réalité, une différence profonde entre le caractère et le développement de ces formes dans les deux parties du cours du Danube, différence également impor- tante tant au point de vue scientifique qu'au point de vue économique. C’est pourquoi je m'eflorcerai de grouper les éléments de la division morpholo- gique que donne M. Antipa en : 1° Formes de ter- rains, elc., du Bas-Danube: ® Formes du Della. $ 1. — La région inondable du Bas-Danube et ses formes. 1. Les grands lacs du Bas-Danube. — Leur fond est en général au-dessus de l'étiage du Danube. Ils peuvent se diviser en deux types, entre lesquels existent toutes les formes de passage intermé- diaires : Jacs sur les rives du Danube qui sont ou simples et isolés, où groupés en lacs composés. Les lacs simples sont en communication directe avee le fleuve par leurs propres canaux. Les groupements de lacs sont formés par un nombre variable de lacs, grands et petits, dont les eaux se versent générale- ment dans un canal collecteur commun s'ouvrant dans le Danube. Ilest intéressant de suivre la genèse de ce type de lac, très répandu dans la région d'inondation. Dans certaines parties du Danube, des îles se forment, séparées par les bras du fleuve, très large. Par le déplacement du thalweg, par l'alluvionnement continu, la quantité d'eau dans les bras diminue. Ceux-ci se transforment dans des canaux peu larges, des verige, qui se bouchent, se rétrécissent et se transforment en culs-de-sac, les zalon, etc., des pêcheurs. Les contours des iles se rapprochent ainsi et se confondent avec la rive encadrant les dépressions des lacs. Les anciens bras du fleuve sont généralement transformés en lacs et canaux à contours et régimes des plus variés, dont les nuances, indistinctes pour notre œil, ont donné cependant naissance à une nomenclature des plus intéressantes créée par les habitants. 2. Les lacs des iles du Danube. — Is sont peu profonds; leur fond se trouve en général au-dessus de l'étiage du Danube; leur alimentation est variable et très comp''quée. 3. Les canaux. — Un réseau de canaux, gärle, encadrés dans leurs digues, couvre la région inon- dable. Leur rôle, en général, consiste à régulariser le reversement des premières grandes eaux du Danube et à drainer vers la baisse l'eau des parties inondées. L'étude de ces artères est d'un intérêt particulier. C'est d'elles et de leur rapport avec les lacs que dépend en grande partie le développe- ment naturel et économique des régions inon- dables. Grâce aux recherches de M. Antipa, ces artères nous sont très bien connues. En résumé, on peut dire qu'en général les lacs sont desservis par deux canaux ; l’un, qui se trouve en aval, est l'émissaire naturel du lac: l'autre, en amont, est le canal d'alimentation. En réalité, c’est seulement quand les eaux ont dépassé un certain niveau dans leur montée que ce dernier canal com- mence à fonctionner, car aussi bien son ouverture dans le Danube que son embouchure dans le lae sont barrées par des banes de limon. Lors des crues, l’émissaire, le premier des deux canaux qui fonctionne, sert de canal d'alimentation, et c'est alors qu'il se forme une barre à ses ouver- tures, dans le lac et dans le Danube. L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE Ces barrages jouent un rôle très important dans le régime des lacs, parce que la barre de l'émissaire du côté du lac empêche celui-ci de former un canal de desséchement pendant une période de très basses eaux, landis que la barre formée dans son embou- chure du côté du Danube est de nouveau balavée par le courant pendant la baisse des eaux. De l'étude de ces phénomènes se dégage la loi énoncée par M. Anlipa que les grands lacs se délendent contre le processus de colmatation et de desséchement par les barres qui se forment aux ouvertures de leurs canaux; ce sont de véritables verrous à l'aide desquels ils s’isolent, au moment voulu, de la circulation et établissent par là même un parfait état d'équilibre. %, Diques. — Un autre élément important dans le régime des eaux, ce sont les digues naturelles des eaux, le grinduül malului, qui encadrent aussi bien le fleuve et ses bras que les canaux et les lacs. Les digues naissent par alluvionnement des rives du fleuve au moment du reversement des grandes eaux. Leur profil montre une forte pente vers les eaux el une inclinaison, souvent à peine appré- ciable, du côté de la dépression de la terre ferme, qui, grâce à ces cordons, est soustraile aux inonda- tions trop fréquentes. Les embouchures des canaux apparaissent dans le développement de la digue comme des coupures profondes. Les grinduri sont les régulateurs de la hauteur des eaux lors des inondations. $ 2, — Le Delta et ses formes. Nous trouvons les données les plus intéressantes du livre de M. Antipa aux chapitres consacrés à l'étude du Delta. À peine atteint dans son déve- loppement par la manie de régularisalion de l'homme, le Della se montre dans toute sa puis- sance el toute sa beauté naturelle, fier témoin des forces du Danube, qui, contrebalancçant un affais- sement général de la côte, a su encore conquérir des surfaces considérables sur la mer. Intéressante est la définition morphologique du Delta : « Toute celte région représente une dépression générale dont le fond est approximativement de 1,80 au-dessous du niveau de la Mer Noire. Il corres- pond très probablement au fond de l'estuaire du fleuve, ou même de la mer. Cette dépression est coupée dans toutes les directions par des digues naturelles. » C'est donc une région couverte par les eaux, un immense lac, divisé en grands el petits comparti- ments — comme les polders hollandais — par un système de grinduri; de ces digues, les unes; grandes, très élevées, sont dirigées du Nord au Sud, perpendiculairement aux bras du Danube: les 607 autres, très hautes, encadrant les cours d'eau, sont dirigées généralement de l'Est à l'Ouest. L'origine de ces deux espèces de digues est tout à fait différente. Les premières sont d'anciens cor- dons littoraux et des dunes marines, conquis el englobés par l'avancement du Delta. Leur origine marine est non seulement démontrée par leur faune et par tout leur développement, mais aussi par des bancs de coquilles franchement marines, comme les Solen, Venus, Ostrea, Pecten, etc., qu'on à ren contrées leur masse. cordons, l'étendue est très grande, sont limités par les bras actuels du Danube. Le grindul Letea, avec ses ramifications el ses prolongalions, a plus de 25 kilo- iètlres de longueur. Ils dominent lé Della et ne sont jamais complètement submergés pendant les grandes crues, ce qui fait qu'ils sont très peuplés et couverts en partie par de grandes forêts de dans Ces dont chênes. D'une origine différente est le grindul Chiliei ; il est le prolongement vers le Sud de la terrasse plio- cène de la Bessarabie, séparé de celle-ci par le Bras de Chilia. Cet éperon, que l'on peut suivre depuis Chilia sur une distance de 10 à 12 kilo- mètres, a été retrouvé à une dizaine de kilomètres au Sud grâce aux travaux de la Commission euro- péenne du Danube. Les grinduri de mal, dans lesquels nous devons distinguer tout d’abord ceux qui bordent les bras actuels du Danube, se forment dans des conditions identiques à ceux de la région d'inondation du Bas- Danube. Entre ces digues, dont les longitudinaux bordent les bras du fleuve et une partie des innombrables canaux, se trouvent les bassins d’eau dont le fond est à 4,50 à 2°,50 au-dessous du niveau de la mer. Une immense forêt de roseaux, en majeure partie des roseaux flottants, le plaur, couvre ces eaux, où, cà et là, scintillent des places non couvertes, les nombreux lacs, grands et petits, du Delta, qui forment comme autant de fenêtres. Le plaur, le plus beau phénomène de végétation que l'on puisse admirer dans le Delta, a été étudié par M. G. Antipa dans tous ses détails; il est ce- pendant regrettable que l'auteur n'ait pu nous en donner qu'une esquisse: néanmoins, telle quelle, cette esquisse nous dévoile tout le phénomène ainsi qu'il se présente dans toute sa grandeur et seule- ment dans le Delta du Danube. Le plaur est formé en première ligne de Phrag- mites communis, auxquelles il faut ajouter les dif- férentes espèces de Massettes (7'ypha latifolia, T. an- qustifolia), des Carex, des /ris et d'autres plantes hydrophiles. La surface occupée par les roseaux sur le grind ainsi que sur les bords des lacs à rives de terre est 608 L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE petite comparativement à celle des roseaux flot- | C'est de celte manière que se forment les les flot- tants. Le plaur, dont l'épaisseur moyenne est de 90 cen- timètres, est formé des roseaux réunis par un tissu serré de leurs radicules, qui constituent ainsi un corps plus ou moins compact. Sur le soubassement flottant se développent dif- férentes plantes xérophiles, dont les restes four- nissent une mince couche de terre végétale formée presque entièrement par des produits humiques. Le plaur gagne donc ainsi en épaisseur, et une belle et riche végétation croît sur ce sol flottant; ce sont surtout des fougères, et aussi : Felix telipteris, Solanum dulcamara, Convolvulus sepium, Ranun- culus sp., Myosolis palustris, ete. Sur sa face inférieure, le plaur subit un processus d'humification et de putréfaction intense. Les racines et radicules se transforment en une masse noire, compacte, et les rhizomes montrent souvent tous les signes d'une carbonisalion ou houillifica- tion très nette. Le plaur se développe seulement dans les lacs profonds des plaines inondables. Fixé à la terre ferme par les roseaux des marais, il couvre à peu près les trois quarts de la surface de la partie infé- rieure du Della du Danube. Toute cette forêt flot- tante, dont les jones atteignent en automne une hauteur de 5-6 mètres, monte et descend suivant les crues ou décrues des eaux du Della. L'eau sur laquelle s'étale le plaur est limpide; elle provient d'infiltrations latérales du bassin, ou elle vient par d'autres voies après avoir été préalablement décantée. Il arrive parfois, lorsque la dépression n'est pas très profonde, que pendant les eaux basses le plaur touche le fond. D'autre part, aux très grandes crues, les eaux peuvent se reverser un peu sur le plaur, le recouvrir de limon et de sable, et il prend alors absolument l'aspect de la terre ferme. La vie sur le plaur est intense. Outre d'innom- brables espèces d'oiseaux aquatiques, on y ren- contre le loup des roseaux, le renard et surtout le sanglier, qui, grâce à la nourriture abondante qui lui est fournie par les rhizomes des Phragmites, se développe beaucoup. C'est le lieu de refuge de ces animaux pendant les hautes eaux, car le plaur n'est jamais inondé. Les pêcheurs v construisent sou- vent leurs huttes el cabanes. La vie est encore plus intense sous le plaur, car les grands poissons y cherchent un refuge, l'ombre et la fraicheur pen- dant les grandes chaleurs. En hiver, les fenêtres du plaur, les lacs, peuvent geler. Il se produit nécessairement des fentes dans la glace qui se prolonge dans le plaur gelé. Elles s'élargissent en crevasses qui détachent avec une tantes, qui se trouvent en grand nombre dans ces régions. Après le dégel, poussés par les vents dans les lacs, arrivent à l'embouchure des canaux, qu'ils obstruent souvent, empêchant ainsi la seule voie de communication dans cette forêt. Les grands et petits canaux forment dans le Delta tantôt des faisceaux qui entourent et enve- loppent un des bras principaux du Danube, tantôt un réseau irrégulier. Ce sont, en partie, d'anciens bras du Danube; d’autres sont créés par des cir- constances inhérentes au développement du Delta; d'aucuns, enfin, sont artificiels, taillés par les pé- cheurs dans le plaur pour faciliter l'accès des lacs et leur alimentation. L'équilibre de la circulation dans le Delta a été rompu par endroits par les travaux entrepris pour faciliter la navigation; les lacs ainsi créés ont été parfois isolés, leur alimentation est nulle ou insuf- fisante. La putréfaction des matières organiques dans ces eaux stagnantes cause un appauvrisse- ment général de la vie el la dégénérescence des ils espèces. Une élude très détaillée du plaur et des phéno- mènes morphogéniques qui nous sont révélés par M. Anlipa s'impose, car ces faits sont de la plus haute importance pour la science. Le botaniste, le géographe, le géologue et le zoologiste y trouve- raient certainement quantité de questions entière- ment nouvelles. Le plaur ne semble-t-il pas présenter pour le géologue la forme de végétation dans les condi- tions que l'on suppose être nécessaires à la forma- tion des gisements de charbon? Cette forêt flottante de roseaux, qui porte une flore analogue à celle qu'on rencontre dans les gisements de charbon, s'étend sur des surfaces immenses. Par des changements produits par des mouve- ments négalifs de la mer ou par un riche alluvion- nement, ou encore par une colmalation rapide du Delta, le plaur peut ancrer. Il se fixe dans ce cas au fond de l'ancien lac, qui a passé à l'état de marais. Un alluvionnement puissant peut combler ce der- nier el couvrir la couche végétale humifiée. Il est certain que cette brève explicalion du mé- canisme de la formation de la houille ne se base que sur des hypothèses, qui devront être vérifiées par une étude minutieuse du plaur. Mais il me parait certain que le plaur du Delta du Danube est : 1° une forme de la végétation des plantes hydro- philes qui à pu et peut se développer à toutes les époques géologiques et partout où des condi- tions analogues à celles du Delta du Dänube ont existé et existent; 2° que beaucoup, sinon la ma- jeure partie des gisements de charbon, sont du netteté remarquable des épaves de glacons à plaur. | plaur houillifié. L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE 609 III. — CRUES DU DANUBE D'INONDATION. Les DANS LES PLAINES Le développement des régions inondables du Danube et leur vie dépendent avant tout du régime annuel des eaux. M. Anlipa donne une synthèse admirable de ces conditions, fondée à la fois sur ses observations personnelles et celles qui ont été recueillies par la Commission européenne du Danube pendant une période de trente ans. Les oscillations des eaux du Danube montrent deux hausses : Zes crues du printemps et celles d'automne, auxquelles on doit ajouter /es débäcles. La durée de la crue joue un rôle important. La crue du printemps est la principale, due sur- tout aux masses d'eau venant des régions situées en amont du Bas-Danube. La durée est habituelle- ment de mars à fin juin, mais elle se prolonge par- fois de février jusqu'en août, et cela surtout lors- que le printemps et l'été sont lardifs. Pendant les crues, les eaux du Danube se déversent par les canaux dans les lacs et, quand la crue est très forte, elles débordent de leur lit et inondent les plaines. Les crues d'automne sont petites; les eaux ne dépassent pas la hauleur des rives. Les débicles, plutôt rares, sont importantes parce qu'elles produisent des refoulements d'eau puissants, dus à ce fait que le dégel commence dans le Bas-Danube habituellement en amont. La cause en est que le vent dominant en cette saison, venant du nord-est, est très froid et qu'il retarde ou arrête la débâcle; son influence se fait surtout sentir sur le cours inférieur du Bas-Danube, ainsi que cela résulte, d’ailleurs, de la position géogra- phique de ce dernier. Les conclusions suivantes ont pu être tirées des faits : la hauteur du niveau des crues s'élève au fur et à mesure qu'on remonte le fleuve; tandis qu'à Turnu-Severin la moyenne des maxima est de 6,05, à Tulcea (ville qui est au sommet du Delta) elle est de 22,95 et à Sulina de 0®,49. La distance qui sépare la ville de Sulina — qui se trouve à l'embouchure du bras du même nom dans la mer — de Turnu-Severin, située à la sortie du fleuve des défilés des Portes-de-Fer, done à son entrée en Roumanie, est de 931 kilomètres, ce qui prouve que la courbe de ces moyennes s'abaisse rapidement dans le cours inférieur du fleuve. En réalité, entre Galatzi (en amont de Tul- cea) et Turnu-Severin, la différence est de 1,16 pour 781 kilomètres; enlre Galatzi et Sulina, de 4%,40, pour une distance de 150 kilomètres. C'est précisément l'immense bassin du Delta mar- qué par le plaur qui engloutit les plus grandes REVUE GÉNLNALE DES SCIENCES, 1910, quantités d'eau, causant une brusque baisse de la courbe. La durée de l'inondation est de la plus grande importance pour le développement de la faune el de la flore aquatiques, car, d'une part, la quantité d'eau qui est reversée, d'autre part, le temps qu'elle couvre les plaines règlent le phénomène de l'abon- dance de la vie et constituent ainsi un facteur économique très important. M. Antlipa donne dans son travail une grande attention au mécanisme du reversement des eaux, car c’est là que la main de l'homme doit interve- nir pour régler le fonctionnement de ces immenses champs et bassins de production pour obtenir les maxima el oplima de production. L'inondalion présente cerlaines variations, selon que l’on a affaire aux régions du Bas-Danube ou à celles du Delta, selon que l'inondation se produit dans les lacs isolés ou dans les lacs en groupements, le long des rives du fleuve ou dans les lacs des iles. Lorsque l’eau est arrivée dans le Bas-Danube à la hauteur du niveau du lac, elle pénètre d'abord dans l'émissaire, qui est plus profond que l’affluent; les lacs s'étendent, augmentant leur surface, puis les canaux qui se trouvent en amont commencent à fonctionner. Si les crues sont très fortes, les lacs gagnent du terrain sur les champs et, à un certain moment, le fleuve, ses bras, les canaux et les lacs débordent successivement. Les digues et quelques autres élévations, ainsi que les hautes branches des forêls de saules, émergent seuls de l’eau. Quand les eaux se retirent, un fin limon fertilisant couvre les plaines; les digues, modifiées par places, sont légèrement exhaussées. Les japse, restes d'anciens canaux et lacs comblés par alluvionnements, res- tent les seuls témoins de l’inondation, isolés par places, de ci, de là, groupés par endroits autour des grands lacs. Ce sont, en grande partie, des petits étangs, souvent de vie éphémère, qui dispa- raissent par l'évaporation el l’infiltrationen général. Pendant les crues des eaux, des barres se forment dans les canaux ; les deux ouvertures de l'affluent se bouchent les premières et restent dans cet état Jusqu'à une nouvelle inondation, tandis que la barre de l'embouchure de l’émissaire est lavée par le courant pendant le retrait des eaux. IV. — LA MISE EN VALEUR DE LA ZONE INONDABLE DU DANUBE, Très intéressantes et d'une très grande importance économique sont les données sur les pécheries du Danube, dont le principe d'exploitation se base sur une élude approfondie de la biologie ‘des poissons. Les pêcheries du Bas-Danube et du Delta ne sont pas seulement les plus grandes pècheries d'eau 14° 610 L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE douce de l'Europe — excepté peut-être celles du Volga — mais aussi les mieux étudiées et les mieux administrées de toutes les grandes pêcheries conti- nentales. Ce n’est pas seulement le fleuve qui donne l'énorme quantité de poisson que l’on pêche et dont les variétés les plus recherchées sont expor- tées jusque dans l’ouest de l’Europe, mais encore les étangs et les lacs des régions d'inondation. Des études scientifiques très approfondies ont démontré que la quantité de poisson est fonction de la surface sur laquelle s'étendent les eaux durant la crue et de la durée de cette inondation. En général, le lit du fleuve même et la masse d’eau qui S'y écoule ne jouent qu'un rôle moins important au point de vue de la production, quoique les poissons se rassemblent dans les cours d'eau à certaines époques de l’année. En réalité, le poisson entre dans les lacs avec les grandes eaux et il y fraie; l'alevin s'y trouve dans d'idéales conditions de développement : d'une part, des eaux peu profondes, s'échauffant rapidement aux rayons du soleil ardent de l’été de Roumanie, ‘après un printemps très court; d'autre part, une pourriture très abondante. La migration des poissons vers les lieux où la Nature leur assure le maximum de reproduction possible devient très difficile, parfois même impos- sible, lorsque la hauteur des crues du printemps n'est pas suffisante pour que les eaux puissent balayer les barres qui ferment les canaux d'alimen- tation des lacs. Les conditions les plus favorables se produisent lorsque les eaux débordent même sur les digues du fleuve. Une certaine durée des inondations est nécessaire pour que toutle poisson, autant que possible, ait le temps de frayer et l’alevin le temps de se développer suffisamment. Quelques exemplés démontreront ces lois de la Nature. L'année 1904 s'est distinguée par une crue mini- male du printemps : les eaux ne débordèrent pas ; l’année 1907, au contraire, excellait par. une crue très forte et de très longue durée; non seulement la région des élangs, mais encore absolument tout ce qui était inondable, se trouva sous l'eau. Aussi les étangs, lacs, canaux, etc., de la Balta de Braïla n'ont donné pour l’année financière 4904-1905 qu'une production de 920.725 kilogs de poisson, tandis qu'en 1907, où la durée de l’inondation fut de cent vingt-huit à cent cinquante-quatre jours, la production s'est élevée à 6.447.793 kilogs. Un autre exemple du même genre est la production de la région d'inondation comprise entre les villes de Macin et Isaccea, en Dobrogea, où la production a été pour les mêmes années de 1.539.157 kilogs et 1.177.838 kilogs. Grâce aux études scientifiques faites el aux mesures prises pour faciliter la reproduction du poisson sans | rompre l'équilibre du régime des eaux du Bas-Danube et du Delta, les revenus des pêcheries de l'État se sont élevés en peu d'années de 700.000 lei à plus de 5.000.000 de lei et sont en augmentation continue. Mais, outre les régions qui ne peuvent donner un rendement qu'en restant couvertes par les eaux, les plaines d'inondation présentent les meilleures conditions pour l'agriculture, si les eaux, dont les malières en suspension ont fertilisé le sol, se sont relirées à temps, car un long séjour des eaux sur ces plaines fait baisser sensiblement la production agricole. On a obtenu des rendements allant jus- qu'à 472 lei par hectare dans les bonnes années agricoles, tandis qu'en 1897, par exemple, année si favorable pour le développement du poisson, la production agricole (pâturage) n'a donné qu'un re- venu de 8-10 lei par hectare. De ces quelques observations il résulte indubita- blement que, pour obtenir le maximum de rende- ment de toutes les dépressions de la vallée du Danube et de son Delta, il faut, comme le fait remarquer fort judicieusement M. G. Antipa, éludier avant tout leur production actuelle, le poisson, les forêts de saules, les champs de roseaux, et la nature des plaines inondables. Une fois ces études minutieusement faites à tous les points de vue, on pourra élaborer un programme permettant de développer la production sur des bases ration- nelles. Dans une thèse très documentée et pleine d'intérêt scientifique, le savant naturaliste qu'est M. Antipa examine la question de la nécessité de l'existence des lacs et étangs. I démontre d’abord la grande influence qu'ont ces immenses étendues d'eau sur le climat local. « Sécher les étangs ou même diminuer leur surface », dit-il, « sans les remplacer par d’autres sources d'humiditéau moins égales, serait produire un déséquilibre dans l'économie de la Nature, ce qui aurait pour conséquence des effets très dange- reux, autant pour l'avenir de l’agriculture de ces régions que pour leur climat et tout ce qui en dépend. » Le rôle de ces lacs et étangs est, en outre, celui d'un régulateur naturel des déversoirs du fleuve. En emmagasinant les eaux des grandes crues du fleuve, ils modèrent les eflets des inondations et alimentent plus tard le fleuve aux basses eaux. Ce sont donc des facteurs importants, appelés à main- tenir l'équilibre, dans certaines limites, du niveau du fleuve, d'une part, en empêchant l'inondation et, d'autre part, en maintenant le fleuve navigable pendant les basses eaux. Les nombreuses reeliti- cations faites dans le cours moyen du Danube et de ses affluents en Hongrie, en Autriche, elc., se L. MRAZEK — LA RÉGION D'INONDATION DU DANUBE EN ROUMANIE 611 sont fait déjà ressentir à ce point de vue en Rou- manie également. Leur conséquence se traduit, par exemple (1908), par des crues de printemps très “apides, mais de pelite durée, et par une baisse des eaux, en automne, jusqu'à 60 em. au-dessous de l'étiage. Il s'est done produit une rupture dans l'équilibre du régime des eaux si sagement établi par la Nature, car il se forme un drainage forcé et successif de certaines régions, ayant comme con- séquence une croissance dans l'activité érosive du fleuve et un changement du climat local et de la végétation. L'incrimination que l’on a faite aux lacs et étangs d'être la cause principale des fièvres paludéennes, de la malaria, en Roumanie, est détruite par les stalistiques mêmes du Service sanitaire du pays, d’après lesquelles on peut facilement se convaincre que les districts dans les limites desquels entrent les plus grandes surfaces d'eau sont précisément ceux où le nombre des malades atteints de la ma- laria est le plus petit. Les terrairs marécageux pro- prement dits seuls, avec les petits étangs et les flaques d'eau temporaires, présentent des incon- vénients au point de vue de l'hygiène; mais, pour ceux-ci, M. Antipa propose de les dessécher com- plètement ou de les transformer en bassins de pis- ciculture. V. — LA POLITIQUE DE L'ETAT POUR L'AMÉLIORATION DE LA ZONE INONDABLE DU DANUBE. Dans le chapitre se référant à la politique éco- nomique que l'Etat doit suivre, M. Antipa pro- pose et esquisse le programme à exécuter : avant tout, il faut conserver les lacs et les étangs per- manents et les aménager systématiquement pour la pisciculture rationnelle, afin d'éviter autant que possible la rupture de l'équilibre que s’est créé le grand fleuve et dont la fonction primordiale est la surface d'eau — fleuve et lacs. Pour mettre en valeur les terres inondables pro- prement dites, l'auteur propose un système tout original, un sys{ème rotatif avec cultures alter- nantes. Au lieu de garantir constamment ces ter- rains contre l’inondation, ainsi que cela se fait Jusqu'à présent en Europe par la rectification de dif- férents grands cours d’eau (Po, Tisza, Rhône, ete.), — et par là on empêche le dépôt du limon, qui est un excellent engrais, d'une puissance fertilisante extraordinaire pour ces terrains, — l’auteur pro- pose de faire pour chaque région une grande digue de défense sur la berge du Danube; la région ainsi séparée se divisera en plusieurs compartiments par des digues transversales. De cette facon, chaque compartiment formera un bassin qu'on laissera pen- dant quelques années soumis à l'inondation par la crue du Danube et qui sera fertilisé par le limon. Chaque année, l'un des bassins servira à la pisci- culture de la carpe combinée avec la culture du riz, les autres restant à l'agriculture. L'année suivante, on laissera inonder un autre bassin, et ainsi de suite d'année en année, L'eau accumulée dans un com- partiment servira en même temps pour irriguer pendant les grandes sécheresses de l'été les cul- tures faites dans les autres compartiments. Avec ce système, on fera ce que font les grands proprié- taires d'Autriche, d'Allemagne et d'autres pays, qui, de temps en temps, laissent inonder leurs em- blavures pour l'élevage de la carpe; puis, au bout d'une série d'années, ils y refont de l’agriculture. Ce système résout un problème de grande impor- tance et concilie en même temps deux intérêts diamétralement opposés : la rectification du cours des rivières et la pisciculture. Ce problème se pose aujourd'hui à chaque recli- fication du cours d’une rivière. D'un autre côté, par ce système on accroit la superficie d’eau, ce qui a une grande influence sur le climat local et la végétation, et évite le péril de voir les terres menacées de rester avec le temps au-dessous du niveau du fleuve et de devenir par là marécageuses, ainsi que cela est arrivé à d'autres rivières. De l'étude de M. Antipa, il ressort done claire- ment, et le savant naturaliste pose d'ailleurs ceci comme un principe fondamental, que l'homme ne doitintervenir dans le régime des fleuves de ce genre que comme facteur participant et régulateur des grandes lois naturelles dont dépendent l'existence du fleuve et la vie qui y est développée. On doit se borner à suivre la voie tracée par la Nature et la perfectionner autant que faire se peut pour en lirer le maximum de rendement, et non pas vouloir créer une loi artificielle pour lutter contre la Nature, qui, d’ailleurs, reprendra tôt ou tard tous ses droits. Le devoir de l'Etat est de faire des lois basées sur ce principe immuable. 11 doit, en outre, régler par les voies légales les rapports juridiques entre les différents propriétaires, faciliter la formation de syndicats obligatoires d'amélioration, comme cela existe déjà dans beaucoup de pays. L'Etat devrait encore favoriser et contrôler la création d’une banque spéciale d'amélioration ; cette banque devrait accorder des crédits en prenant comme base de ses opérations les plus-values qui seront for- cément produites par les travaux d'amélioration à entreprendre. Cette plus-value sera constatée dans chaque cas particulier par un service spécial de l'Etat, le Service des améliorations foncières. C'est là une esquisse sommaire de ce bel ouvrage dont les conclusions scientifiques et économiques sont de la plus haute portée non seulement pour la 612 PIERRE SALET Roumanie, mais pour tous les pays qui jouissent de régions inondables semblables. M. Antipa à orné son ouvrage d'une série de prolils, cartes, elc., et de nombreuses photogra- phies de la région d'inondation et du Delta. Ces vues nous font admirer des paysages presque inconnus ailleurs. Il y a certainement peu d'endroits si agréables et dans lesquels défilent devant les yeux des paysages aussi variés dans leurs détails et riches en motifs pittoresques que dans le Delta du Danube. Des canaux serpentent parmi les forêts SPECTRES MULTIPLES ET Lorsque l'analyse spectrale fut fondée, vers 1860, on élait loin de prévoir la complexité prodigieuse que cachait son apparente simplicité. On croyait alors communément que les différents corps simples donnent toujours le mème spectre caractéristique, quel que soit son mode de production, et qu'on pou- vait ainsi faire l'analyse chimique du Soleil ou des éloiles avec autant de facilité et de certitude que celle d'un minerai quelconque dans le laboratoire. C'est ainsi qu'on annoncait la présence d'un élé- ment dans le Soleil quand une de ses raies coïnei- raies noires de Fraunhofer et qu'on disait, au contraire, qu'un autre corps n'existait pas dans le Soleil quand au- cune de ses raies habituelles n'apparaissait dans le dait sensiblement avec une des spectre solaire. Mais, après les travaux de Plücker et Hittorf, en 1865, il fallut reconnaitre qu'un même corps simple, suivant les conditions de son illumination, peut donner des spectres complètement différents. Un des premiers et des plus beaux exemples de ces spectres multiples fut celui de l'azote, qui donne, suivant sa pression el la tension de l'élincelle, un spectre de bandes et un spectre de lignes qui n'ont aucun point commun. Dans certains cas, le passage d'un spectre à l’autre est très brusque; mais, dans d'autres cas, la variation est plus ou moins pro- gressive quand on fait changer les conditions de l'expérience; parfois cette variation aboutit à un spectre complètement différent du premier, mais souvent certaines lignes restent toujours présentes, de telle sorte qu'il est difficile de distinguer les véritables spectres multiples, qui n'ont aucune raie commune, des variations progressives d'un spectre unique. Lorsqu'il fut impossible de douter de la réalité de ces variations spectrales, on chercha à en donner des explications théoriques. Les spectres varient plus ou moins brusquement avec les con- SPECTRES MULTIPLES ET VARIATIONS SPECTRALES de saules, dont les troncs velus émergent de l’eau, ou parmi des murs de roseaux dont les cimes se balancent harmonieusement: au souffle tiède de la brise du large. Un charme inconnu nous enveloppe quand, dans ombre des jones serrés de roseaux, le canot glisse silencieusement sur les fleurs de la riche végélation aquatique couvrant la voie d’eau. L. Mrazec, Professeur à l'Université de Bucarest, Membre de l'Académie Roumaine. VARIATIONS SPECTRALES ditions physiques de leur production ; mais ces con- ditions sont extrêmement nombreuses. Ce sont, pour ne ciler que les principales, la densité, la pression, la température, l'intensité ou la tension du courant électrique; ces conditions sont d'ail- leurs généralement impossibles à séparer complèe- tement ; à quelle cause devra-t-on attribuer le chan- gement de spectre? Les premières théories firent intervenir surtout l'effet de la chaleur. Une des premières expériences apprenait, en effet, que, dans un tube à gaines, c'est-à-dire à électrodes extérieures, on peut obtenir les deux spectres du soufre par un simple changement de température (G. Salet) ; il était donc naturel, lorsqu'un courant électrique changeait d'intensité, d'attribuer les variations spectrales au changement de tempé- ralure concomitant plutôt qu'au phénomène élec- trique lui-même. Aujourd'hui, certaines expériences tendent à prouver que non seulement les changements de spectre, mais le phénomène même de la production d'un spectre de lignes, ne sont pas généralement un phénomène thermique; les nouvelles théories sur la constitution de la matière et sur la production de la lumière conduisent aussi à donner de plus en plus d'importance aux considérations électriques ; il en résulte une nouvelle tendance dans l’expli- cation qu'on donne aujourd'hui des variations spectrales. Sans doute, il est encore impossible d'en donner une explication satisfaisante, car une pareille explication supposerail une connaissance complète de la constitution de la matière ; mais les différentes théories que l’on a proposées sont, en tout cas, intéressantes parce qu'elles reflètent la marche des conceptions que l’on s’est fait successi- vement sur les phénomènes lumineux. Ce sont ces théories concernant les spectres multiples et les variations spectrales que nous allons rapidement passer en revue. PIERRE SALET — SPECTRES MULTIPLES ET VARIATIONS SPECTRALES Un des premiers essais d'explication des spectres multiples est dû à Züllner et à Wäüllner., On sait que, d'après Züllner, la loi de Kirchhoff permettrait d'expliquer les changements d'intensité et de lar- seur des raies spectrales avec la pression et la température. Si l'on suppose, en effet, que la loi de Kirchhoff s'applique à une radiation d’une lon- gueur d'onde quelconque, il est facile de se rendre comple que le pouvoir émissif d'une couche de gaz incandescent de densité donnée, pour une certaine longueur d'onde, augmente avec l’épais- seur de la couche et se rapproche du pouvoir émissif qu'aurail un corps noir à la même tempé- rature et pour la même longueur d'onde. Les pou- voirs émissifs de deux raies se rapprochent done, quand l'épaisseur augmente, des pouvoirs émissifs des parties correspondantes du spectre du corps noir ; le spectre de lignes devient, à la limite, une sorte de découpure de ce spectre continu; le rap- port d'intensité de deux raies doit donc changer quand l'épaisseur augmente. Schuster a fait remar- quer que, si les deux raies sont du même côté du maximum d'intensité du spectre du corps noir, ce changement ne peut avoir lieu naturellement si la plus forte est la plus près du maximum. L'effet d'une augmentation de densité et, par suite, d’une augmentalion de pression est le même que celui d'une augmentation d'épaisseur, du moins si le rapprochement des molécules n'introduil. pas des changements nouveaux, notamment par leur com- binaison. L'effet de la température sera de faire varier l'éclat relatif des différentes parties du spectre continu du corps noir et, par suite, l'inten- sité relative des raies des spectres de lignes. Züllner à même expliqué ainsi l'élargissement des raies. Il suffit de supposer que le pouvoir émissif d’un gaz n'est pas rigoureusement nul dans le voisinage d’une raie brillante, qui ne serait ainsi qu'un point de maximum d'intensité; alors une augmentation d'épaisseur, de densité ou de pression doit avoir pour effet d'élargir la raie lumineuse et même, à la limite, de donner un spectre continu, celui du corps noir à la température considérée. Mais ces déductions sont très hypothétiques, en ce sens que la loi de Kirchhoff ne semble pas s'appliquer en dehors de cas très spéciaux. Les spectres de lignes, quelle que soit l'épaisseur de la couche gazeuse, ne semblent avoir aucun rapport avec des fragments du spectre continu du corps noir ; la loi de Kirchhoff semble même certainement inexacte pour les bords des raies, sans quoi les doubles renversements observés dans le Soleil se- raient impossibles (Meslin). Les variations d’inten- sité et de largeur sont donc difficiles à expliquer 613 ainsi, d'autant plus que l'élargissement devrait alors dépendre de la forme de la courbe d'intensité de la raie et devrait être le même pour les raies de même apparence, ce qui n'a pas lieu. Quant à la produce tion d'un spectre continu par une couche de gaz d'épaisseur suffisante, c'est une pure supposition car On n’a jamais observé un pouvoir émissif sen sible et attribuable surement au spectre de lignes en dehors des raies spectrales, même pour des masses énormes comme on en trouve dans les né- buleuses. Quant à l'influence de la température, elle ne semble pas non plus suivre toujours les lois déduites par Züllner. Il est vrai que l'élévation de température est généralement accompagnée d'une augmentation dans l'éclat relatif des radiations les plus réfrangibles (Lecoq de Boisbaudran) ; mais, dans le cas de l'hydrogène phosphoré, par exemple, la variation à lieu en sens inverse (G. Salet), et même parfois l'intensité diminue quand la tempé- ralure augmente, la quantité de matière restant la même (Schuster). Quoi qu'il en soit, Züllner et Wäüllner ont basé sur ces considérations une explication des spectres multiples. Ils croyaient d'abord que les spectres de lignes ne sont donnés que par la partie capillaire des tubes de Geissler et les spectres de bandes par la partie large; ils essayèrent donc d'expliquer l'existence de deux spectres par l'influence de l'épaisseur de la couche gazeuse. Mais cette opinion élait évidemment insoutenable : les protubérances donnent un spectre de lignes, landis qu'on peut obtenir des spectres de bandes dans un tube de Geissler. On fut ainsi obligé de supposer, de plus, que le pouvoir absorbant change avec la tempé- rature et présente des maxima et des minima qui, pour les deux spectres, peuvent se produire à différentes températures. Il est clair qu'alors la considération de l'épaisseur devient inutile et que nous arrivons à une explication purement lher- mique des variations spectrales. Il est clair aussi qu'on peut ainsi expliquer toute espèce de change- meni dans un spectre; aussi cette théorie fut-elle appliquée fréquemment en Astronomie. C'est ainsi qu'Hasselberg expliqua le fait que le maximum d'intensité des bandes des spectres cométaires n'est pas au bord de la raie, comme dans les expériences de laboratoire, en invoquant une variation du pou- voir absorbant avec la température, variation qui n'aurait pas été la même pour les différentes parties d'une même bande. Au point de vue philosophique, on peut se de- mander si ces théories sont des explications ou plutôt la simple constatation que certaines raies apparaissent dans certaines conditions. Tant qu'on applique la loi de Kirchhoff et la loi de Planek à des spectres de lignes au lieu de les appliquer à des 614 PIERRE SALET — SPECTRES MULTIPLES ET VARIATIONS SPECTRALES spectres continus produits par un phénomène pure- ment thermique, on risque sans doute d'arriver à des résultats inexacts; il y a cependant une ten- tative d'explication, puisqu'on cherche à ramener des phénomènes inconnus à des lois connues; mais. si l'on est obligé d'admettre que le pouvoir absorbant varie avec la température suivant une loi arbitraire, cela revient à dire que, parmi les différentes conditions physiques, on attribue spé- cialement la variation spectrale à la température. De plus, une fonction varie, en général, progres- sivement avec sa variable indépendante ; aussi cette considération du pouvoir émissif, qui passe par des maxima à certaines températures, con- corde assez mal avec les changements de spectre qui se font parfois très brusquement. Ce sont ces changements rapides qui ont en- gagé à chercher la cause des spectres mul- tiples dans un changement analogue aux transfor- mations chimiques, qui s'opèrent brusquement à une température donnée, et c'est cette idée qui à donné naissance à la théorie de la dissociation que nous allons examiner maintenant. Il L'idée que les spectres doubles sont dus à un état allotropique des molécules, mais non à leur décomposition, a été énoncée d’abord par Plücker et Hittorf'. L'idée que le spectre de bandes est dû à la molécule et le spectre de lignes à l’atome a été émise pour la première fois en 1875". Dans le cas de l'iode, notamment, cette idée a été confirmée par le changement de densité de vapeur avec la température. Lockyer admit que les molécules peuvent être dissociées et que cette dissocia- lion est la cause des variations spectrales. Il montra que la chaleur fait apparaître les raies du spectre de lignes d'un élément dans son spectre cannelé de basse température; de même, la chaleur fait apparaître les lignes des éléments constituants dans le spectre de bandes d'un corps composé. Lockyer en conclut très justement « qu'il est aussi logique de nier l'existence du composé que celle de différents degrés de complexité moléculaire ». L'existence des spectres multiples s'explique donc facilement par une dissociation moléculaire. Lockyer étendit ensuite cette idée à beaucoup d'autres variations spectrales. Une de ses expé- riences les plus célèbres, connue sous le nom d'expérience des raies courtes et longues, montre que les conditions physiques du centre de l’are font apparaître certaines raies ; Lockyer admit que ce fait est produit par une dissociation et 4 Phil. Trans., 1865. # G. Sacer : Congrès de Nantes. Î que cette dissociation a pour cause la chaleur. Il est à remarquer que, si l'on opère sur un mé- lange, on n'obtient pas les raies courtes caracté- ristiques du centre de l'arc; la production de ces raies n'est donc pas une simple question de tem- pérature, puisqu'on ne peut invoquer aucune action chimique qui ait pu la faire varier. C'est pour échapper à cette difficulté que fut créée la théorie dite « théorie des chocs moléculaires », d'après laquelle les raies courtes ne pourraient être don- que par le choc de molécules de même nature, tandis que les autres pourraient être pro- duites par le choc de molécules de nature différente. Il est clair que c’est encore là une hypothèse qui explique à la fois trop et pas assez et qui n'avance pas beaucoup notre connaissance du phénomène. Lockyer étudia ensuite le spectre de l'étincelle électrique et, dans une série d'expériences remar- quables, montra l'apparition dans ce spectre de certaines lignes qu'il appela les raies renforcées. Il admit que ces raies sont dues à une dissocia- tion, et que cette dissociation est encore produite par la chaleur. Aujourd'hui, il est difficile d'affirmer avec certi- tude que les raies renforcées sont l'indice d'une température très élevée. On a trouvé parfois ces raies dans des flammes, et même elles disparais- saient quand la température augmentait(Hemsaleeh et de Watteville); on les à vues dans l'arc élec- trique (Fabry et Buisson), et mème elles sont apparues en placant l’are dans l'eau, ce qui sans doute n’augmentait pas la température (Hartmann et Eberhard). En général, comme nous le disions plus haut, les phénomènes des spectres de lignes semblent de moins en moins assimilables à des phénomènes thermiques. Sans doute, l'expérience de King tend à prouver que le spectre du sodium est purement thermique; mais pour les gaz, en lout cas, on n'a pu produire un spectre de lignes par une élévation de température, et une expérience due à Hittorf montre que la chaleur semble, au contraire, empé- cher ces spectres de se produire. Remarquons, de plus, que les spectres semblent parfois rester très constants malgré les variations de température; le sodium, par exemple, donne les mêmes raies depuis quelques centaines de degrés jusqu’à la tempé- rature des étoiles; on ne voit pas certaines raies dans la flamme de Bunsen, simplement à cause de la faiblesse de la lumière; l'oxygène liquéfié donne les bandes de l'oxygène gazeux (Liveing et Dewar); l’eau donne les mêmes bandes infra-rouges à l’état de glace qu'en vapeur à 100° (Saunder). L'attribu- tion des variations spectrales à la chaleur est donc hypothétique, et il se peut bien plutôt que cette variation soit due à la décharge; on ne peut done nées me TT nil PIERRE SALET plus tirer de l'existence des raies renforcées aucune conclusion certaine concernant la température. Les raies renforcées sont données par le centre de l'étincelle; mais les raies de basse température, données par la partie extérieure, se mêlent tou- jours à elles, de telle sorte qu'il est difficile de dire si le spectre du centre de l’étincelle est formé, en réalité, des seules raies renforcées. Lockyer admil qu'il en est ainsi et que, dans un milieu sufti- samment chaud, c'est-à-dire dans les étoiles, on doit trouver des spectres formés uniquement des raies renforcées. Lockyer considère done l’ensemble des raies renforcées, ou {est-specltrum, comme représen- tant le spectre d'un produit de dissociation, qu'il appelle proto-métal, et il chercha à montrer dans les astres ce spectre caractéristique. C'est ainsi qu'il trouva que le spectre de la chromosphère du Soleil n'est autre que le spectre du proto-fer, c'est-à-dire un spectre comprenant uniquement les raies renforcées du fer. Il fut ainsi obligé de sou- tenir que la couche qui produit les raies noires de Fraunhofer n’est pas la couche renversante, comme on l’admet généralement, mais se trouve au-dessus de la chromosphère, à un endroit où l’on ne voit pas de raies brillantes pendant les éclipses, tandis que la couche renversante, « pour une raison ou pour une autre », ne donne pas de traces sensibles dans le spectre. Lockyer trouva aussi que le spectre de l'étoile x-CGygne est celui du proto-fer. Depuis, MM. Hemsalech et de Watteville l'ont trouvé ana- logue, au contraire, au spectre de flamme du fer, qui est formé des raies ultimes et ne comprend pas les raies renforcées. Lockyer avanca aussi que les raies H et K du calcium, qui sont seules visibles dans la chromosphère, correspondent à une dis- socialion du groupement moléculaire qui donne à la fois ces raies et la raie bleue 4227; mais Huggins montra qu'une simple variation de den- sité permet d'expliquer l'absence de celte der- nière raie dans la chromosphère. Bref, l'existence de spectres formés uniquement de raies proto-mé- talliques dans les astres semble encore douteuse. Mais supposons même que le centre de l'étincelle, el lui seul, donne un spectre formé uniquement des raies renforcées ; la présence de ce spectre dans un astre ne prouvera rigoureusement qu'une chose : les conditions physiques sont les mêmes dans la couche renversante de l'étoile considérée et dans le centre de l’étincelle. Si une autre étoile ne pré- sente pas les raies renforcées, cela pourra provenir simplement, d'après les travaux de M. de Gram- mont, d'une densité plus faible de l'élément con- sidéré dans la couche renversante et non d'une différence de température. En résumé, le fait que l’on a trouvé les raies SPECTRES MULTIPLES ET VARIATIONS SPECTRALES 615 renforcées dans des sources relativement froides et qu'elles sont parfois absentes dans les sources chaudes enlève à ces raies une grande partie de leur valeur pour l'évaluation des températures. Lockyer, de même que Vogel ou Janssen, a admis, d'autre part, que la longueur du spectre continu dans l'ultra-violet permet de ranger les étoiles suivant l'ordre de leurs températures. Si cet ordre se trouve précisément le même que celui qui esl donné par l'importance relative des raies renfor- cées, ce fait remarquable ne sera pas un rapport direct de cause à eflet, puisque la présence ou l'absence des raies renforcées ne caractérise pas la température, et ce sera la longueur du spectre dans l’ultra-violet qui aura seule servi à évaluer les lempératures stellaires. III Mais, si l’on peut faire des réserves sur l’origine thermique des variations spectrales, la théorie de Lockyer n’en est pas moins très importante en ce qu'elle soulève la question de la désagrégation des molécules et, par suite, de la transmutation pos- sible des corps simples. Il semble, en effet, difficile d'expliquer certains faits autrement que par la séparation des molécules en parties distinctes et indépendantes. Le fait le plus caractéristique a été indiqué par Lockyer et consiste dans le déplace- ment différent par l'effet Doppler-Fizeau de certains groupes de raies d’un même élément dansles taches solaires ou dans les protubérances; ce fait est tel- lement important qu'il serait intéressant de le voir vérifié et séparé des autres variations, comme l'effet Zeeman ou l'influence de la pression, au moyen des mesures si précises qu'on peut faire maintenant avec le spectromètre interférentiel de MM. Pérot el Fabry. On peut aussi invoquer comme preuve directe d'une dissociation l'expérience de Schuster, d’après laquelle il semble que les centres qui émettent différentes raies se déplacen' avec des vitesses inégales dans l’étincelle. Nous ne pouvons que signaler les autres preuves qu'a données Lockvyer et qui semblent moins pro- bantes. Par exemple, les preuves tirées de l'effet Zeeman ou des séries ne prouvent pas que les centres qui émettent les différentes raies soient dis- tincts et indépendants; le fait que les raies d'un spectre ne sont pas toutes affectées de même par les agents physiques ne prouve pas qu'elles pro- viennent d'une désintégration moléculaire. On peut aussi faire intervenir des considérations théoriques. La théorie de Lorentz donne une valeur du rapport entre l'indice de réfraction d’un corps, pour une vitesse de vibration donnée, et le nombre et la charge des ions qui vibrent avec cette vitesse. 616 PIERRE SALET — SPECTRES MULTIPLES ET VARIATIONS SPECTRALES Partant de là, Thomson a cherché le nombre d'ions qui, dans l'hélium, doivent vibrer avec la vitesse correspondant à la raie D,; le nombre trouvé est bien inférieur au nombre total des molécules, et l'on peut en conclure qu'il n’y a qu'un petit nombre de celles-ci qui émettent la lumière de la raie D.. Mais il ne faut pas oublier que ces théories sont des explications el non des faits d'expérience, el que, d'ailleurs, elles sont sans doute assez souples pour éviter celte difficulté. On s'expliquerait aussi facilement, par des agrégations d'atomes dont le nombre serait proportionnel à la pression, le fait que l'intensité des bandes non résolubles de l'oxy- gène est proportionnel non à la pression, mais au carré de cette pression (Janssen). Il y a donc des raisons de penser, comme l'a affirmé Lockyer, qu'il existe pour un même corps différents degrés de complexité moléculaire. Quant à l'opinion d’après laquelle les produits de la dis- sociation par la chaleur de tous les corps seraient l'hydrogène et l'hélium, elle est séduisante au point de vue philosophique, mais bien hypothétique. L'exemple du Soleil nous montre que la couche renversante ne représente qu'une partie minime de l'astre; les corps de poids atomique élevé se trou- vent sans doute au-dessous de cette couche, et l'hélium et le coronium qui se trouvent au-dessus ne donnent pas de traces dans le spectre. Lorsque la couche renversante d'une étoile ne donne que les raies de l'hydrogène et de l'hélium, il est done plus simple d'admettre que les métaux, pour une raison ou pour une autre, ne se trouvent pas dans cette couche en densité suffisante, plutôt que de sup- poser qu'ils ont été mélamorphosés en hydrogène. IV Aujourd'hui, on est plus porté à admettre que les variations spectrales sont dues à un phénomène électrique plutôt qu'à un phénomène thermique. Une des premières preuves à l'appui de cette idée est due à Nutting, qui a montré que, dans des tubes à partie capillaire plus ou moins large, on peut obtenir à volonté les deux spectres. Il semble donc que ce soit la densité de courant, d'après cette expérience, qui produise le phénomène des spec- tres multiples. Les expériences de MM. Fabry et Buisson tendent à prouver que les raies renforcées sont dues à un phénomène électrique; ils ont trouvé que deux points brillants tout près des électrodes de l'arc au fer donnent les raies renforcées; la température doit sans doute être sensiblement la même que dans l'arc lui-même; les raies renforcées semblent donc dues à la chute rapide de potentiel qui existe près des électrodes. Les expériences de Stark et de Lenard montrent le rapport étroit qui existe entre les phénomènes électriques et l'émission lumineuse. On sait que, d'après Stark, les spectres de lignes seraient émis par des ions positifs, les spectres de bandes, au contraire, par le phénomène de reconstitution de l'atome neutre; et, en effet, Stark a trouvé que la vapeur émettant le spectre de lignes est déviée par un champ électrique, contrairement à celle qui émet le spectre de bandes. D'après Lenard, l’are électrique est formé de flammes creuses qui s'emboitent les unes dans les autres et dont chacune n’émet que l’une des séries spectrales du métal employé. Dans la flamme de Bunsen, on à un phénomène analogue, et les régions émettant les différentes séries ne sont pas déviées de même par un champ électrique; les gaines inté- rieures qui produisent les séries secondaires sont seules entrainées vers le pôle négatif, tandis que l'enveloppe extérieure qui donne la série principale n'est pas déviée. Les centres qui produisent les séries secondaires semblent donc des particules positives qu'on appelle des atomions. Lenard estime que cet enlèvement d'électrons, qui change les atomes neutres en -atomions, n’est pas produit par la chaleur, au moins directement. Nous voyons donc apparaître une nouvelle expli- cation des spectres multiples, des séries et peut-être aussi d’autres variations spectrales. Ces phéno- mènes seraient dus à la mise en liberté ou à une disposition particulière des électrons. Ce phéno- mène de nature électrique aurait. généralement pour cause le phénomène même de la décharge, bien plutôt que les effets thermiques qui l’'accom- pagnent ; on ne pourrait donc en tirer aucune con- clusion concernant la température. La théorie de la dissociation de Lockyer est peut-être inexacte au point de vue chimique et au point de vue de l'évolution thermique des étoiles, en ce sens qu'il n'y a peut-être pas de désintégra- tion des atomes des corps simples en particules matérielles distinctes, et que la dissociation n'est peut-être pas, en tous cas, un phénomène ther- mique; mais cette théorie reste vraie en ce sens que les variations spectrales semblent correspondre à la séparation de quelque chose dans l’atome; ce quelque chose semble maintenant de l'électricité plutôt que de la matière. On voit que nous sommes loin de pouvoir donner une théorie certaine de la multiplicité des spectres. Kayser estime que nous manquons encore de bases expérimentales suffisantes, et qu'avant de tenter une pareille synthèse, il faudra avoir étudié pour chaque ligne des différents spectres l'effet des différents agents physiques. Pierre Salet, Docteur ès sciences. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Fabry (E.), rofesseur à l'Université de Montpellier. — Problèmes et Exercices de Mathématiques générales. — 1 vol. gr. in-8° de 420 pages. (Prix : 40 fr.) À. Hermann et fils, éditeurs. Paris, 1910. M. Fabry a publié, l'an dernier, un Traité de Mathé- matiques générales, à l'usage des chimistes, physiciens et des élèves des Facultés des Sciences". Cet ouvrage renferme, sous une forme très concise, tout ce qu'il est important de connaître, dans le domaine des Mathé- matiques supérieures, pour ceux qui se destinent plus spécialement aux études expérimentales. Ce qu'il leur faut, en effet, c’est l'intelligence complète des princi- pales théories mathématiques et la possession des mé- thodes ordinaires de calcul. Ce dernier point est plus particulièrement l’objet direct des Problèmes et Exer- cices de Mathématiques générales, que M. Fabry vient de publier, en complément de son Traité. Il faut tout d'abord louer la belle ordonnance de ce recueil de 739 exercices et problèmes qui témoignent à la fois de la grande érudition de l’auteur et de remar- quables recherches personnelles. L'ouvrage est divisé en deux sections : Enoncés et Solutions. Celles-ci, très concises, sont cependant suffisamment claires. Le champ parcouru, suivant de très près les matières du Traité, est divisé en quatre parties : Algèbre, Géomé- trie analytique, Analyse et Mécanique. L'ouvrage rendra servicenon seulement aux étudiants qui s'occupent principalement de Physique, de Méca- nique, d'Electricité et ne se spécialisent pas dans l'étude des Mathématiques, mais aussi à tous ceux qui voudraient s'initier rapidement aux principes généraux des Mathématiques supérieures et à leurs plus impor- tantes applications géométriques et mécaniques. Evo. Demouis, Professeur à l'Ecole professionnelle de Genève Boulvin (J.), Directeur des Constructions maritimes de l'Etat belge. — Cours de Mécanique appliquée aux Machines, professé à l'Ecole spéciale du Génie civil de Gand; 5° fascicule : Etude organique des Machines à vapeur. 2° édition. — 1 vol. 1n-8° de 566 pages, avec 12 planches et 438 figures dans le texte. (Prix : A5 fr.) L. Geisler, imprimeur-édi- teur. Paris, 1910. M. Boulvin poursuit la réédition de son cours de Mécanique appliquée, que l’Académie des Sciences à honoré du prix Plumey, et dont les fascicules s'épui- sent avant d’avoir eu le temps de vieillir, ce qui est une heureuse condition pour un ouvrage technique. Le savant professsur à complètement remanié l'étude organique de la machine à vapeur à piston, en la complétant par la description des distributions les plus modernes, dont des épures exactes permettent d'ap- précier le fonctionnement; les constructeurs de Gand, Van den Kerchove, Carels et le Phénix, ont fourni à l’auteur des documents inédits, d'un intérêt incontes- table. Les condenseurs éjecteurs, le condenseur Wes- tinghouse-Leblance et les autres condenseurs centri- fuges, font l'objet de considérations nouvelles très développées. Mais c'est le chapitre consacré aux tur- bines qui a reçu le plus de remaniements dans cette nouvelle édition : la théorie en avait déjà été donnée dans le 3° fascicule, et il n'y avait pas à y revenir, mais il restait à exposer les méthodes générales de 1 Voir Zevue gén. des Sciences du 28 février 1909. ET INDEX calcul, ce que M. Boulvin a fait d'uné manière rermar- quable, en les appliquant à quelques-unes des tur- bines les plus répandues, notamment à une turbine A.E.G avec deux chutes de vitesse par élage, une turbine multicellulaire Rateau de 2.000 chevaux et une Parsons de même puissance. Il ne faudrait évi- demment pas attribuer une valeur trop absolue aux chiffres de rendement pris comme points de départ, l’auteur le déclare lui-même, mais on arrive néan- moins à serrer la réalité d'assez près, et l'utilité de ces calculs est incontestable. En somme, cette seconde édition présente d'intéres- sants compléments, qui seront très appréciés des lecteurs, et qui portent la marque du maître éminent, toujours précis dans ses exposés, clair dans ses descrip- tions, rigoureux dans ses déductions ; ce volume, qui est le premier sorti des presses des Chatelles, depuis que M. L. Geisler a pris la direction de la Librairie des Sciences et de l'Industrie, fait d'autre part honneur à l'éditeur, qui mérite d'être félicité de cet heureux début. AIMÉ Wirz, Ancien Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille, Correspondant de l'Institut. 2° Sciences physiques Pécheux (H.), Professeur à l'Ecole nationale d'Arts et Métiers d'Aix. — Le Pyromètre thermo-elec- trique pour la mesure des températures élevées. — À vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aide- Mémoire. Gauthier-Villars et Masson, éditeurs. Paris, 1910. Un grand nombre de phénomènes physiques, sus- ceptibles de mesure, dépendent de la température et fournissent, en principe du moins, un moyen de la définir et de la mesurer; mais il s'en faut de beaucoup que tous soient équivalents quand on les examine au point de vue pratique. La variation de pression d'un gaz sous volume con- stant a été utilisée pour définir l'echelle centigrade des températures; elle à conduit à la construction du {her- momètre normal à gaz, qui est susceptible de mesurer les températures entre de très larges limites. Mais la complication de la manœuvre de cet appareil volu- mineux et encombrant, les causes d'erreur qu'il com- porte, les longs calculs qu'il exige, lui enlèvent toute valeur pratique, en particulier dans le domaine indus- triel. C'est à peu près exclusivement aux pyromèlres thermo-électriques que l’industrie s'adresse aujourd'hui pour la mesure des températures élevées. Après les nombreux travaux dont ils ont été l’objet, on sest accordé à reconnaître en eux les appareils les plus pratiques pour l'évaluation des températures dans toute l'étendue de l'échelle thermodynamique. C'est l’ensemble de ces travaux que M. Pécheux résume dans la première partie de son livre, avec le rappel des principes fondamentaux servant de base à la pyromtréie thermo-électrique. Malgré sa simplicité apparente, le pyromètre thermo- électrique comporte de nombreux éléments dont la détermination doit faire l’objet d’une discussion appro- fondie. Le choix des métaux du couple, celui du gal- vanomètre et des tils de jonction, la réalisation pra- tique des soudures, la vérification de l'homogénéité des fils, la protection du couple et du cireuit pendant les opérations, sont autant de points d'une grande importance pratique. L'auteur les étudie d'une manière 618 très complète. Cette discussion, jointe au mode de gra- duation des couples et au choix des points fixes, forme, d’ailleurs, la partie la plus importante de l’ou- yrage. La troisième partie du volume est consacrée à la description et à l’usage de quelques couples pyromé- triques. À ceux qui sont déjà connus et employés, tels que le couple platine-platine rhodié, l'auteur ajoute ceux dont il a fait une étude spéciale qu'il a présentée lui-même aux lecteurs de la Revue. Rappelons que les couples platine-platine iridié, nickel pur-cuivre, cons- tantan-cuivre, sont susceptibles d’être employés avan- tageusement, tant pour la constance de leurs indica- tions que pour l’approximation des résultats qu'ils fournissent. La clarté et la simplicité des explications données par l’auteur, la préoccupation constante du côté pra- tique de la question recommandent la lecture de ce petit volume à tous ceux qu'intéresse la mesure un peu précise des températures élevées. E. CoraroEau, Professeur au Collège Rollin. Loppé (F.), /ngénieur des Arts et Marñufactures. — Essais des machines électriques. Mesures méca- niques. — Un fascicule in-8° de 109 pages, avec 101 figures, de l'Encyclopédie électrotechnique. (Prix : 2 fr.) Geisler, éditeur. Paris, 490. M. Loppé reproduit dans ce fascicule les conférences qu'il a été chargé de faire depuis quelques années à l'Ecole supérieure d'Electricité, sur la partie méca- nique des essais de machines électriques. Ces quelques pages contiennent notamment des renseignements sur les nouveaux dynamomètres de transmission basés sur le principe de la torsion : ces appareils, très pré- cis, sont malheureusement encore peu connus et appréciés en France, et il faut savoir gré à l'auteur de chercher à les vulgariser. : G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polylechnique, Professeur à l Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. Granger (Albert), Professeur de Technologie céra- mique à l'Ecole d'application de la Manufacture gätionale de Sèvres. — Fabrication et emploi des matériaux et produits réfractaires utilisés dans l'industrie. — 1 vol. in-8° de 374 pages, avec 172 figures. (Prix : 15 fr.) Ch. Béranger, éditeur. Paris, 40. é La question des matériaux réfractaires est certaine- ment la question la plus importante de toute la Chimie minérale, aussi bien dans l'ordre purement scienti- fique que dans le domaine de la technique. En dehors de l’action électrolytique des courants, le moyen d'ac- tion le plus puissant que nous ayons à notre disposi- tion pour agir sur la matière minérale est celui de la haute température. Malheureusement, si la résistance et l’arc électriques ont permis d'élargir considérable- ment nos procédés de chauffage, il se présente tou- Jours dans la pratique une grosse difficulté : celle de réaliser des vases et appareils susceptibles de résister à ces hautes températures et de permettre de faire des opérations dans des conditions où les mesures quanti- latives soient possibles. Pratiquement, la mise au point d'une réaction industrielle ou scientilique, à tempéra- ture élevée, se ramène toujours à la recherche et à l'utilisation de matériaux réfractaires susceptibles de résister à la double influence de la haute température et des matières réagissantes en contact avec eux. Tout ouvrage fournissant des renseignements com- plets sur les produits réfractaires, leur fabrication, les conditions de leur emploi, la limite de leur résis- tance, etc., est donc appelé à rendre le plus grand service aux ingénieurs et chimistes de l'industrie miné- rale. C’est précisément le cas pour le livre que vient de publier M. Granger qui, depuis longtemps déjà, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX s’est spécialisé dans ces questions, tant par son ensei- gnement et par ses recherches personnelles que par des articles publiés dans diverses revues. Une première partie d'ordre général est consacrée au traitement mécanique des matières premières, à leur façonnage, à leur dessiccation et à leur cuisson. On y trouve la description des différents appareils utilisés pour le lavage, la pulvérisation, le tamisage, le moulage, le filage, les différents modes de séchage et de cuisson, soit des matières naturelles initiales, soit des produits fabriqués. A signaler, en passant, l'esquisse de différents fours utilisables au laboratoire pour toutes les études préli- minaires qui doivent précéder la mise en marche d'une fabrication : fours Deville perfectionnés, appa- reils Schlæsing et Flechter, fours électriques à résis- tance et à arc. L'étude générale des matières réfractaires entraîne nécessairement l'étude des procédés de mesure de la température. M. Granger y consacre un chapitre important, dans lequel il expose longuement l'usage des montres Seger, l’utilisation de la pince Le Chate- lier et du pyromètre de Féry. Il donne aussi la des- cription d'appareils moins connus, comme les pyro- mètres à résistance électrique et le pyromètre optique de Wanner. Ce dernier, dont j’ai eu l'occasion de faire usage assez récemment pour la première fois, est un instrument d'un maniement extrèmement simple, qui fournit des mesures rapides et précises. L'auteur consacre la deuxième partie de l'ouvrage à l'examen particulier de chaque type de produit réfractaire : produits argileux, alumineux, siliceux, magnésiens, magnésiens-calcaires, chromeux, car- bonés, sans oublier les produits plus rares à base d carborundum, de zircone, de thorine, etc. É Après quelques digressions d'ordre théorique sur les relations entre la fusibilité des produits réfractaires et leur composition chimique, M. Granger termine judicieusement son traité par l'exposé des méthodes d'analyse applicables aux matériaux qui entrent dans la confection des produits réfractaires et par l'examen des différents essais qui renseignent sur la valeur du produit fini. Dans les quatre cents pages de son excellent ouvrage, M. Granger n'a pas eu la prétention d'embrasser la question dans toute son étendue, mais il a voulu donner une idée de ce qu'est actuellement l’industrie des matériaux réfractaires et des ressources dont elle dispose. II me paraît avoir complètement rempli le but qu'il voulait atteindre. CAMILLE MATIGNON, Professeur au Collèce de France. Coffignier (Ch.), Rédacteur en Chef de la Revue de Chimie industrielle. — Nouveau Manuel du Fabri- cant de couleurs. — 1 vo/. 1n-8° de 340 pages. (Prix : 10 fr.) Bernard Tignol, éditeur. Paris, 1910. La presque totalité de l'ouvrage est consacrée à l'étude des nombreuses couleurs minérales dont l’au- teur donne la composition, les propriétés, les procédés d'extraction ou de préparation. Quelques chapitres, au début et à la fin du volume, sont, en outre, consacrés aux théories de l'Optique, aux laques, à la préparation des peintures diverses. L'auteur, à la fois publiciste technologique et direc- teur d'usine de couleurs, était spécialement qualifié pour mener à bien un tel travail; on ne peut écrire un ouvrage de ce genre, ayant quelque valeur, qu’en joi- gnant à l'indispensable besogne de compilation l’expé- rience acquise dans la pratique de la spécialité. Ainsi, M. Coffignier donne, au cours de l'ouvrage, de nom- breux résultats d'analyses personnelles, des renseigne- ments pratiques qui en font une source de renseigne- ments indispensables aux techniciens de la fabrication des couleurs. Nous lui ferons cependant — et justement à cause des qualités de son œuvre — un reproche. Il existe un BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX tel nombre de couleurs minérales, certains des pro- duits fabriqués (céruse, bleu d'outremer...) ont une telle importance industrielle qu'à en réunir l'étude en un in-8° de moins de 350 pages, on doit forcément être incomplet. M. Coffignier a heureusement modernisé les volumes de ses prédécesseurs de l'Encyclopédie Frémy et de la Collection Roret; mais il n’a pas été plus com- plet. Et en comparant son ouvrage à la récente édition du Lehrbuch der Karbenfabrikation, que vient de publier, en le remaniant complètement, le D' Buntrock, force est de reconnaître que nous n'avons en français, sur le même sujet, aucune œuvre aussi complète, aussi bien établie, aussi richement documentée que celle dont vient de s'enrichir la littérature technologique allemande. Aussi souhaitons-nous qu'étant donné l'intérêt de la fabrication des couleurs et les qualités de l'œuvre nou- velle, la première édition soit rapidement épuisée. Et nous espérons qu'alors M. Coffignier pourra nous donner une monographie beaucoup plus complète, où l'exposé de la fabrication des couleurs les plus impor- tantes sera suffisant pour éviter de recourir aux autres publications spéciales, où la documentation bibliogra- phique, cette fois trop étroitement limitée aux ouvrages français, sera étendue aux publications aliemandes et aux divers brevets étrangers. Mais ceci ne doit pas nous faire oublier ce que nous disions tout d’abord : tel qu'il est, l'ouvrage est de valeur et sera lu avec intérêt, non seulement par tous les techniciens spécialistes, mais par tous ceux qu'inté- ressent les multiples et curieuses applications de la Chimie. HENRI Rousset. 3° Sciences naturelles Thomas (Philippe. — Essai d'une descrintion géologique de la Tunisie, d'après les travaux des Membres de la Mission de l'Exploration scientifique de 1884 à 1891 et ceux parus depuis. 2 partie : Stratigraphie des terrains paléozoïques et mésozoiïques. — 1 vol in-8°, p. 223-728. Paris, lm- primerie Nationale, 1909. Le Ministère de l'instruction publique avait chargé Philippe Thomas de grouper et de résumer tout ce qui a été publié sur la géologie de la Tunisie, pour servir de cadre aux observations personnelles de cet éminent géologue. Malgré l’immensité de la tâche, celui-ci s'était mis à l’œuvre avec enthousiasme, consacrant à la géologie les loisirs que lui créait sa mise à la retraite. Un fascicule à paru en 1908 et a été analysé dans ces colonnes ; il est consacré à la géographie physique de la Tunisie. Avec le deuxième fascicule, l’auteur aborde l'étude des terrains sédimentaires. Des terrains paléozoïques, il y a peu de choses à dire, puisqu'ils n’affleurent que très loin au sud, dans lHinterland tunisien. Quelques pages sont consacrées aux marnes bario- lées salifères, généralement attribuées au Trias, attri- bution que n'admet pas l’auteur. L'étude du Jurassique est un peu plus développée, mais la majeure partie de l'ouvrage traite du Crétacé qui à une extension considérable en Tunisie, où tous ses étages sont représentés. L'auteur entre dans les plus grands détails à ce sujet; aussi son ouvrage constituera-t-il une mine inépuisable de renseignements ; on comprendra cependant que je ne puisse en donner une analyse détaillée, car cela m'entrainerait trop loin. Ce second fascicule paru, Philippe Thomas aborda la rédaction du troisième. Hélas ! la mort ne lui a pas per- mis de réaliser son rêve! Il laisseson œuvre inachevée. Il nous manque précisément la partie qui nous eût le plus intéressé, l'étude des terrains tertiaires; c’est eux, en effet, qui recèlent ces immenses gisements de phosphate de chaux découverts par Thomas dans la région de Gafsa et retrouvés ensuite par lui en divers autres points de la Tunisie et de l'Algérie. Cette décou- 619 verte fut l'aurore d'une ère de prospérité pour la Tunisie, que les phosphates ont doté d'un important réseau de chemins de fer et de revenus important Aussi est-ce à juste titre que Philippe Thomas à pu être qualifié de « bienfaiteur de la Tunisie ». L. PERVINQUIÈRE. Chef des Travaux du Laboratoire de Gte à la Sorbonne Piéron (Henri), Maitre de Conférences à l'Ecole de Hautes-Etudes. — L'Evolution de la Mémoire. 1 vol. de la Bibliothèque de Philosophie scientilique, 360 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur, Paris, 1910. La thèse de M. Piéron est l'étroite parenté des phé- nomènes mentaux de l'Homme et des Animaux, la profonde identité des mécanismes du haut en bas de l'échelle des organismes, au point de vue des phéno- mènes associatifs et de la mémoire; l'auteur laisse de côté les tropismes, qui, du reste, si l'on tient à la stricte définition de Læb, paraissent différer par leur nature des associations. La mémoire,motrice ou sensorielle, est une influence persistante du passé, un effet consécutif d'événements disparus sur l’activité ultérieure des êtres; partant de cetfe définition, qui, si large qu'elle soit, semble exacte, M. Piéron, après un court chapitre sur la mémoire (? inorganique (phénomène d'hystérésis, aimantation par induction d'un barreau d'acier, qui persiste quelque temps après que le champ magnétique est annulé), trouve chez les êtres inférieurs des phénomènes de mémoire; il leur rapporte la plupart des rythmes, par exemple le rythme des feuilles de l'Acacia lophanta et des Actinies qui ne s’épanouissent que la nuit, le rythme de marée des Convoluta, le rythme saisonnier des animaux hibernants ou migrateurs, les rythmes organiques du sommeil, de l’oscillation thermique journalière, ete. Il est possible qu'il y ait dans ces rythmes quelque chose d'intrinsèque, d'héréditaire, mais le plus souvent c’est une pure acquisition indi- viduelle, un phénomène de mémoire organique, qui s’efface peu à peu lorsque la cause disparait. Une excellente méthode d'étude est celle de l’acqui- sition expérimentale d'habitudes, utiles ou non : lors- qu'une excitation est répétée, l'acte qu'elle provoque peut, ou bien diminuer d'énergie et mème cesser tout à fait de se produire (Actinie qui ne se rétracte plus après des attouchements répétés, ou qui, après avoir été trompée par du papier imbibé de jus de viande, ne réagit plus à l'approche de celui-ci), où bien la réac- tion peut s'effectuer avec une énergie croissante (Pecten qui reste fermé de plus en plus longtemps à la suite d'excitations répétées). C'est dans cette caté- gorie de recherches que se rangent les intéressantes expériences des labyrinthes ou des boîtes compliquées, où, après un nombre d'essais variables, des Rats, des Ecrevisses, des Crabes, apprennent à suivre un chemin déterminé pour trouver leur nourriture. Chez des animaux inférieurs, il est beaucoup plus difficile d'établir l'existence des phénomènes de mé- moire sensorielle qu'il ne l'a été pour la mémoire motrice; cependant l'étude de l'orientation fournit des indications précieuses : elle permet d'affirmer l'existence de souvenirs tactiles et musculaires très précis chez les Patelles, elle nous prouve l'existence d'une mémoire visuelle singulièrement développée chez les Hyménopières d'une part et les Oiseaux d'autre part, qui, sous ce rapport, sont certainement supérieurs à la majorité des Mammifères. Chez les Mammifères, les expériences ont montré qu'ils pou- vaient se souvenir des formes, des couleurs, des bruits, etc.; du reste, il n’est pas douteux que certains d’entre eux ont des rêves, voire des cauchemars, ce qui implique des hallucinations visuelles. Chez l'Homnie, les apprentissages moteurs semblent être très comparables à ceux des animaux (dactylo- graphie, apprentissage des sports); la supériorité du 620 premier dans l'acquisition des habitudes se manifeste surtout par une rapidité plus grande des progrès lors- qu'ils impliquent des associations complexes. Une telle comparaison n’est plus possible pour la mémoire sensorielle, en raison de l'intervention de l'intelli- gence. Le chapitre consacré par M. Piéron à la mé- moire humaine, où il résume les récents travaux sur ce sujet, est l’un des plus intéressants : il passe suc- cessivement en revue l'acquisition, la reconnaissance, l'évocation, le phénomène des oublis nécessaires (la mémoire paraissant être limitée à un nombre donné d’acquisitions), le processus de schématisation et de mathématisation qui groupe une multitude de faits en une formule qui les embrasse tous. L'intelligence, dont l’évolution est indépendante de la mémoire, remédie à la limitation fatale de celle-ci en la rempla- cant par des substituts sociaux, l'écriture, l’impri- merie, qui permettent l'accélération fantastique du progrès mnémonique dans les sociétés modernes. Il est curieux de comparer le livre de M. Piéron avec un autre sur un sujet très analogue, dû à M. Bohn, paru dans la même collection et dont nous avons donné une analyse ici même (voir Revue générale des Sciences, 20° ann., n° 19, 1909, p. 824); au fond, les deux frères ennemis ne sont pas d'un avis très diffé- rent, mais l’un d'eux, au moins, ne veut pas en con- venir. Pour l’un, l'intelligence ne peut naître que là où il y à déjà un pouvoir de former des associations excessivement complexes (Fourmis, Abeilles, Verté- brés); pour l’autre, l'intelligence se différencie à partir de phénomènes d'anticipation (mémoire associative); cest bien à peu près la même chose. En maints en- droits, les différences qui séparent les deux auteurs sont purement verbales. La concurrence, âme du commerce, l’est-elle aussi de la Psychologie comparée ? L. CuÉNoT, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4 Sciences médicales Galtier-Boissière (D'). — Hygiène nouvelle. — 1 vol. 1n-12 de 376 pages avec 396 fig. (Prix: 3 fr. 75.) Librairie Larousse, 13-17, rue Montparnasse. Paris 1910. La Librairie Larousse a entrepris d'éditer une série d'ouvrages populaires sur différents sujets. Pour exposer l'hygiène moderne, elle s'est adressée au D' Galtier- Boissière, dont le talent de vulgarisateur est bien connu et qui a écrit sur cette question un livre facile à lire, au courant des travaux les plus récents et rédigé avant tout dans un esprit pratique. Citons, parmi les matières abordées : un exposé très complet des voies d'introduction et du rôle des microbes, l'indication de procédés simples et peu coûteux pour la désinfec- tion, les moyens d'employer sans danger l’eau de puits et l'eau de pluie, une étude des différents procédés d'éclairage et de chauffage au double point de vue du rendement et de la dépense, un tableau comparatif de la valeur nutritive et de la valeur vénale des ali- ments, etc. L'hygiène de l'exercice est traitée d'une façon très neuve, ainsi que l'hygiène du nouveau-né et de l’écolier. De nombreuses gravures, dessins et reproductions photographiques, d'une exécution très soignée, illustrent cet intéressant volume. » 5° Sciences diverses Annuaire de la Vie internationale (1908-1909). — 1 vol. 1n-8° de cLxxx1-1.370 pages. (Prix relié : 20 fr. Oflice central des Institutions internationales, 3, rue de la Régence, Bruxelles. Le phénomène de la coopération internationale s'affirme de jour en jour davantage dans tous les domaines. On n’a, pour s'en convaincre, qu'à feuilleter la volumineuse encyclopédie dont, sous le nom d’An- nuaire de la Vie internationale, l'Office}central des Institutions internationales publie aujourd'hui le BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4° volume. C'est à l'initiative de M. A. Fried qu'est due l’idée de cette publication, dont, avec le concours de l'Institut international de la Paix, à Monaco, il fit paraitre trois volumes en 1905, 1906 et 1907. La fon- dation de l'Office central des Institutions internatio- nales, auquel l'Institut international de Bibliographie et de Documentation a apporté son concours, à permis de donner à cette œuvre un développement considé- rable, en rapport avec l'importance du mouvement dont elle s'était donné pour mission de suivre et de décrire la marche. L'Annuaire à pour but de présenter sous une forme synthétique l'ensemble des institutions, congrès, unions et associations à caractère international, Cet ensemble se divise en une double série : à la pre- mière, qui à un caractère public et officiel, se ratta- chent les conférences diplomatiques intergouverne- mentales et les institutions relatives à l'administration internationale, au droit de la guerre, au droit pénal international, au droit privé international, à la juri- diction internationale et à l'arbitrage; la seconde englobe les innombrables manifestations de la vie internationale privée, dans les domaines philosophique, religieux, social, philologique, scientifique pur et appliqué, artistique, historique et géographique. Dans la mesure du possible, un ordre méthodique a été suivi dans l'exposé des renseignements réunis sur chaque institution. Chaque notice a été subdivisée en alinéas consacrés respectivement à un court histo- rique, au but, à l’organisation (statuts, conseil d'admi- nistration, bureau), au siège (adresse), à la situation financière, aux travaux (actes, publications, collec- tions, décisions, vœux), aux institutions affiliées ou connexes. Pour faciliter les recherches, l'Annuaire est com- plété par diverses tables : une table méthodique, don- nant l’ensemble des institutions ou congrès dont il est question dans l'ouvrage; une table décimale, permet- tant à ceux qui sont familiarisés avec la classification documentaire internationale de retrouver rapidement les questions spéciales qui peuvent les intéresser; une table alphabétique comprenant tous les mots sous les- quels des recherches pourraient être faites. Ces tables sont complétées par deux listes : l’une consacrée à l’'énumération des noms des personnes citées au cours de louvrage, l’autre à l'énumération chronologique des congrès internationaux. Il ressort de l'accumulation des renseignements réa- lisée dans ce volume quelques données qu'il importe de signaler. Tout d'abord, l'origine récente du mou- vement qui pousse l'humanité vers une organisation unitaire et la rapidité avec laquelle ce mouvement s’est développé. Si l’on songe que deux tiers de siècle à peine nous séparent du premier Congrès interna- tional réuni à Londres en 1843, on peut émettre sur l'avenir de l'internationalisme les espoirs les plus audacieux. Les quelques sessions modestes et spora- diques des années 1840 à 1860 se sont transformées en d'innombrables assemblées, au nombre de 645 pour la dernière décade du siècle qui vient de finir, chiffre que celui de la première décade du xx° siècle dépasse déjà notablement. Ce qui est aussi de nature à montrer l'ampleur et la profondeur de la tendance internationalisatrice, c'est le nombre des institutions au sujet desquelles il a été possible de récolter quelque renseignement. Le total en dépasse 300, et l'on a écarté de la nomenclature tous les groupements à caractère financier ou commer- cial et la plupart des organismes sportifs. La publication de l'Annuaire de la Vie internationale répondait donc à un besoin. Des volumes successifs viendront compléter chaque année les renseignements recueillis, et l'Office central des Institutions interna- tionales fait appel aux bonnes volontés pour perfec- tionner d'année en année ce guide au travers d'un domaine magnifique, peu exploré jusqu'à ce jour par le grand public. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 621 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 27 Juin 1910. Sir William Ramsay est élu Associé étranger, en remplacement de M. Al. Agassiz, décédé. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Boussinesq montre que le mouvement vibratoire lumineux dans les corps transparents semble, quand on y oublie le rôle de la matière pondérable, mettre en défaut de plusieurs manières le principe de la constance de la masse. — M. L. Letombe étudie géométriquement la distribution des machines à distributeurs séparés et donne le moyen de déterminer la longueur des leviers et des bielles constituant le mécanisme de trans- mission de mouvement. — M. J. Baïllaud a pris 5 clichés photographiques de la petite planète qu'il a récemment découverte, dont #4 avec le même centre. Ilen déduit de nouvelles coordonnées équatoriales plus exactes. — M. Ch. Nordmann à constaté que la répar- tition de l'énergie dans le spectre du noyau de la comète de Halley est sensiblement la même que dans le spectre solaire ; cela tend à prouver que la lumière du noyau est presque exclusivement. sinon entièrement de la lumière solaire réfléchie. — M. A. Angot signale l'enregistrement, au Parc Saint-Maur, d'un tremble- ment de terre le 24 juin 1910. Celui-ci a affecté l’Algé- rie, principalement les régions d’Aumale et de Blida. — M. B. Galitzine présente un nouveau type de sismo- graphe pour la composante verticale, construit sur le principe de l’apériodicité complète du mouvement propre de l'appareil au moyen d'un fort amortissement magnétique et de l'enregistrement galvanométrique à distance. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. A. Hemsalech à déterminé les durées d'émission des raies spectrales par les vapeurs lumineuses dans l’étincelle électrique. Pour les raies du fer, les durées semblent être proportion- nelles aux intensités, avec quelques exceptions. La durée se prolonge avec l'augmentation de la capacité. — MM. G. Sizes et G. Massol montrent que le fil métallique jouant le rôle d’amplificateur de vibrations dans l'étude des vibrations du diapason n'a pas de mouvements propres susceptibles de modifier sensible- ment les vibrations des corps sonores.— M.Edm Bauer a reconnu que, dans l'expérience imaginée par Prings- heim pour démontrer que l'émission des gaz est un phénomène de luminescence, les raies disparaissent, non pas lorsque les effets de réduction cessent, mais lorsque la paroi de porcelaine a absorbé toute la vapeur de sodium présente dans le tube; le phénomène essentiel est donc une diffusion vers la paroi absor- bante. — M. E. Henriot a constaté que le rayonnement des sels de potassium est proportionnel à leur teneur en métal ; il est indépendant de la température. Il semble done qu'on se trouve en présence d’une propriété atomique du potassium. — M. H. Larose étudie la pro- pagation d’une discontinuité sur une ligne télégra- phique munie d’un transmetteur. — M. A. Debierne «à fait une nouvelle détermination du poids atomique du radium d'après sa densité, mesurée en comparant la vitesse d'écoulement de l’'émanation à travers un petit trou percé dans une paroi mince à celles de différents gaz. La moyenne des résultats est de 220. — MM. A. Besson et L. Fournier ont étudié l’action de l'hydro- gène sur SCI et sur SOCF sous l'influence de l’effluve électrique ; le premier est totalement réduit en S; le second donne SO°CI:,SCIE,SOZ,S et HCL — M. W. Bro- niewski a déterminé la constitution des alliages Al-Ag d'après leurs propriétés électriques. Il met en évidence l'existence de deux composés AlAg* et AlAg". — MM. G. Urbain, M. Blondel el Obiedoff : Extraction du germanium des blendes (voir p.533). — M. A. Gau- tier montre que la décomposition de l'aldéhyde for- mique au rouge (600° à 700) se fait très sensiblement suivant l'équation : CH?0 — CO +. HE, — M. R. Lespieau a hydrogéné les glycols acétyléniques avec un excellent rendement par l’action de l'hydrogène en présence de noir de platine, le glycol étant en solution alcoolique. — M. A. Béhal, en hydrogénant le terpinéol fusible à 35° par Het le nickel réduit, a obtenu un menthol ter- tiaire, Eb. 206°-208°, qui est transformé par l'acide sulfurique ou oxalique en menthène, d’où l'on passe facilement à la menthone. — M. A. Meyer, en conden- sant la phénylisoxazolone avec l’éther mésoxalique, a obtenu un mésoxalate d’éthyle-bis-phénylisoxazolone, F. 1870, donnant des sels métalliques définis. — M. C. Gessard à constaté que la fibrine formée à l'écart des éléments figurés du sang (dans le plasma obtenu par centrifugation au sortir de la veine, dans le sang de cheval abandonné à la coagulation spontanée) n'a pas de propriétés catalytiques et ne se dissout pas dans les solutions salines. — M. M. Nicloux montre que la décomposition du chloroforme dans le sang se passe comme si elle était due à une hydrolyse alcaline ; à côté des chlorures alcalins, on peut affirmer la production d'oxyde de carbone. Si des formiates se forment, ce n'est qu'en petite quantité. Le sang est sans doute le siège de cette décomposition. ; 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. Ch. Nicolle et E.Con- seil ont reconnu qu'il est possible d'infecter avec succès le Macacus sinicus et le Nacacus rhesus directement avec le sang des typhiques sans passage par le chim- panzé. — M. A. Marie a isolé du cerveau, par le moyen de l'acide acétique, une substance albuminoïde douée de propriétés antirabiques parfois assez prononcées ; cette substance est thermostable. — MM. M. Caullery et À. Lavallée ont étudié les phases initiales de l’infec- tion expérimentale d'une Ophiure (Amphiura squamata) par un Orthonectide (/#hopalura Ophiocomæ). L'infec- tion des Ophiures a lieu par pénétration des larves de l'Orthonectide dans les fentes génitales. — M. Ph. Van Tieghem donne une classification nouvelle du groupe des Inovulées. Les Inovulées innucellées ou Loranthi- nées sont divisées, d’après la structure du pistil, en 4 alliances, renfermant ensemble 14 familles ; le groupe des Inovulées nucellées ou Anthobolinées ne renferme qu'une famille. — MM.R. Maire et A. Tison ont étudié de nombreuses tumeurs produites par le Tetramyxa parasitica sur le Ruppia rostellata ; cet organisme a des affinités étroites avec le Plasmodiophara Brassicæ etle Sorosphæra Vernonicæ. Is ont aussi trouvé le Tetra- myxa Triglochinis sur le Triglochin marilimum, où 1l paraît se conserver sans former de spores. — MM. P. Viala et P. Pacottet ont cultivé le /toesleria de la vigne en milieux liquides et solides et ont obtenu des organes de reproduction très particuliers, non encore signalés. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 28 Juin 1910. M. le Président annonce le décès de M. J. Pick, cor- respondant étranger. — M. H. Roger est élu membre titulaire dans la Section d’Anatomie pathologique. M. Duguet présente le Rapport de la Commission qui a été nommée pour examiner les dossiers de l'enquête ouverte sur les résultats de l'emploi des composés 622 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES arsenicaux en agriculture. Cette enquête a porté sur un temps tropcourt pour quelesrésultats aientquelque valeur. La Commission demande que cette enquête, essentiellement médicale, soit reprise et porte sur deux années consécutives. — M. J. Courmont, en fai- sant ingérer à des chiens des matières de typhique, a retrouvé pendant quelques jours le bacille d'Eberth dans leurs matières fécales, sans que les chiens éprou- vent aucun symplôme. Le chien peut donc se compor- ter comme un porteur de bacilles et disséminer la fièvre typhoide. — M. Béclère montre que, dans le cas où la radiographie fait découvrir un calcul du côté droit de l'abdomen, alors même que les troubles fonc- tionnels sont ceux de la lithiase urinaire, il faut pen- ser à la possibilité d'un calcul biliaire, et en cas de doute recourir à un procédé de diagnostic différentiel qu'il décrit en détail. — M. M. Letulle montre qu'en réalité la pachy-pleurite est bien plus une pleurésie subaiguë en évolution prolongée qu'une inflammation chronique stationnaire. Les caractères de la coque pleurale, fibroïde, si mal disposée pour la résorption du liquide, donnent la clef du problème; le tassement du poumon en collapsus, la gène circulatoire énorme imposée aux voies lymphatiques, tant pleurales que parenchymateuses, s'opposent à la résorption ; le pro- cessus inflammaloire, non éteint à la surface de la néo-membrane pleurétique, explique les inondations réitérantes de la cavité pleurale. La pachy-pleurite est, dans Ponetbe nt majorité des cas, une lésion tu- berculeuse en évolution. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 25 Juin 1910. M. V. Pastella apporte de nouveaux arguments en faveur de l’origine endothéliale des mononucléaires du sang; pour lui, les lymphocytes seraient le résultat de la pycenose dégénérative des mononueléaires. — M. G. Finzi a reconnu qu'il est possible de transmettre la réaction à l’'endotoxine du bacille tuberculeux d’un cheval sensibilisé à des animaux neufs, et que le phé- nomène d’anaphylaxie passive vis-à-vis de cette endo- toxine est plus évident chez le cobaye que chez le lapin. — M. G. Dubreuil a retrouvé sans discontinuité, dans la lignée cellulaire allant du Ilymphocyte aux cellules connective, cartilagineuse et osseuse, une formation intra-cellulaire mitochondriale toujours constante, d'autant plus développée que l'activité sécrétoire rhagiocrine estplus intense. — M. G. Billard a constaté que, chez les larves de grenouille, l’accrois- sement et une augmentation pondérale déterminée s'obtiennent avec un apport d'albumine moindre par ingestion d'albumines spécifiques que par ingestion d’albumines étrangères. — MM. Sicard et Salin ont étudié les ré factions méningées aseptiques provoquées chez l'homme par linjec tion rachidienne de liquides anesthésiques. — M. Sicard a traité avec succès cer- tains symptômes du tabes inférieur par des injections arachnoïdiennes lombaires d'eau chlorurée à 8 °/5, associées avec le traitement général classique mercu- rie], — MM. R. Legendre et H. Piéron ont observé, chez le chien, des phénomènes de somnolence accen- tués à la suite de l'injection intra-occipilo-atlantoïi- dienne de liquides provenant d'animaux insomniques. — M. A. Besredka et Ml! $. Lissofsky ont conslaté que la vaccination par petites doses proposée par l’un d'eux pour éviter les accidents anaphylactiques se montre efficace aussi lors des injections du sérum dans la cavité rachidienne. — M. F. Aronssohn à reconnu que les membranes élaborées par la larve de l'abeille avant la dernière métamorphose sont consti- tuées par une substance particulière azotée, non sul- furée, ayant des caractères chimiques spéciaux. — MM. M. Nicolle et E. Pozerski confirment, par de nouvelles expériences d’anaphylaxie avec le suc pan- créatique inactif, que l'hypersensibilité est due à la présence d'anticorps spéciaux appartenant au groupe des lysines. — M. G. Bohn présente ses recherches mettant en évidence l'intervention de la vitesse des réacüons chimiques dans la désensibilisation des orga- nismes par la lumière. — M. P. Girard pense que "le déterminisme de l'absorption des solutions salines par les tissus vivants est purement physico-chimique, mais qu'il faut faire intervenir un facteur important : la dif- férence de potentiel du tissu d’une face à l’autre. — M. P. Godin a constalé que la croissance norm male du corps humain, dans le sexe masculin, entre treize et dix-huit ans, est soumise à des alternances, indépen- dante des saisons et subissant une influence prédomi- nante de la part de la puberté. — M. M. Nicloux: Faits relatifs à la décomposition du chloroforme dans l'organisme (voir p. 621). — M.L. Blaizot a éludié la toxicité pour les lapins neufs dE sang de lapin ana- phylactisé au sérum de cheval. La toxicité du sang défibriné disparaît après 3/4 d'heure de séjour à la température du laboratoire. — MM. L. Martin, Al. Prevot et G. Loiseau montrent que la production de l’antitoxine diphtérique est influencée : par le mode d'immunisation (la méthode américaine est plus rapide), par la réaction individuelle et par la qualité de la toxine employée. — M. Ch.-A. François-Franck a constaté l'existence d'une déformation spéciale des artères scléreuses en présence des contre-pressions maxima, qui conduit à surestimer de beaucoup la pression systolique. M. Marchoux est élu membre titulaire de la Société. Séance du 2? Juillet 1910. M. Ch. Richet a constaté qu'on peut transfuser à un chien environ 10 °/, de son poids vif du sang d'un autre chien sans déterminer la mort. Une seconde transfusion du sang du même chien ne produit pas de phénomène anaphylactique. — M. G. Finzi a déterminé le pouvoir antitryptique, isolytique et hétérolytique du sérum d'animaux atteints de tuberculose et d’entérite chronique. — M. E. Maurel indique une série de lois complémentaires qui paraissent régir l’action générale des agents thérapeutiques et toxiques. — MM. M. Ni- colle et &. Loiseau montrent que le sérum antidiphté- rique médicinal est peu ou pas toxinolytique et très toxinocoagulant. — MM. A.Briot el Dopter ont observé des acc ide nts graves au cours de l’immunisation des chevaux contre le méningocoque ; ils les attribuent à la mise en liberté d’une loxine par les corps micro- biens sous l’action d'une lysine qui se produit dans le sérum après l'injection. — MM. A. Briot et Dujardin- Beaumetz signalent des accidents analogues à la suite dell injection répétée de bacilles pesteux chez les che- vaux producteurs de sérum antipesteux; il y à une véritable anaphylaxie, qui semble due aux mêmes causes. — Mile W. Szezawinska a repris lesexpériences de M. Rosenthal et reconnu que le procédé de culture des anaérobies en lait à colonnes progressivement décroissantes dans des tubes profonds ne peut pas les transformer en microbes aérobies, capables de pousser en surface. — M. V. Borrien signale la présence de l'hématoporphyrine dans le M ÉConT UE — MM. Ed. Retterer el Aug. Lelièvre montrent que l'hématie des Mammifères adultes n'est que le noyau d'une cellule. Cette cellule n’est pas isolée : elle fait partie d'un complexus de cellules anastomotiques dont les noyaux, après avoir subi la transformation hémoglo- bique, deviennent libres par fonte du cytoplasma. — MM. J. Serin et R. Gaillardot atiribuent les pertes de poids considérables subies par les animaux ayant reçu des sérums toxiques à l’exhalaison de vapeur d'eau par la surface pulmonaire, suite de la polypnée — MM. A. Gilbert el E. Chabrol montrent que la toluylène-diamine suscite dans l'organisme l’évolution d'un double processus : hémolyse, d’abord dans cer- tains organes, puis dans le sang circulant, et hypersé- crétion Diliaire. — M. A. Morel et Mie M. Bellion ont reconnu que, dans le sang de l’escargot, les sucres réducteurs sont principalement, et parfois exclusive- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ment, à l'état de combinaisons albuminoïdes, — M. A. Frouin à conslalé que l'antitoxine télanique existe en quautité un peu plus faible dans le sérum de la lymphe que dans le sérum sanguin des animaux immunisés; elle n'existe sensiblement pas dans la bile et le suc pancréatique, — MM. C. Mathis el M. Léger ont trouvé trois nouveaux parasites sanguicoles chez un passereau du Tonkin, l’Zxus Hainanus : un leucocyto- zoon, un trypanosome el une microlilaire., — M. A. Lécaillon à observé que, dans les noyaux contenus dans le germe de l'œuf non fécondé de la poule, le nombre de chromosomes est le même que dans les noyaux somaliques normaux. Dans les miloses qui s'observent vers la fin de la segmentation de l'œuf non fécondé, ce nombre éprouve une variation désordonnée. — M. P. N. Bernard a préparé une endotoxine soluble avec le Microcorcus melitensis, qui a pour la cellule uerveuse une affinité bien nette. Elle est assez résis- tante à la chaleur. — M. L. Cruveilhier a appliqué avec succès au bacille diphtérique, chezlachèvre, le procédé des vaccinations subintrantes de Besredka. — MM. P. Armand-Delille et L. Launoy sont parvenus à stabi- liser les globules rouges de mouton, de bœuf ou de cheval par des solutions très diluées de formol. Les globules stabilisés sont en tous points comparables aux globules frais. — M. F. Dévé, dans un cas d'échi- nococcose primitive expérimentale du pore, a observé la présence de kystes hydatiques dans les capsules surrénales. MM. J. E. Abelous et E. Bardier montrent que l'administration de nucléinate de soude aux animaux crée en eux une résistance manitestement plus grande à l’intoxication par l'urohypotensine, due à la leucocytose consécutive aux injections. — M. J. Mawas à reconnu que les cellules névrogliques pré- sentent une activité sécrétoireet forment une immense glande diffuse dans tout le système nerveux. MM. L. Lapicque et H. Laugier ont étudié les modi- lications produites dans l’excitabilité du nerf par une striction progressive. Il se produit d'abord des crises de contraction, avec rhéobase abaissée et chronaxie augmentée; puis les contractions s'arrêtent, el ja rhéobase devient très élevée, alors que la chronaxie à repris sa valeur primitive. — M. H. Telmon montre que laréaction de Meyer-Telmon ést applicable à toutes les urines, sauf dans quelques cas exceptionnels. — MM. J.-P. Langlois el Garrelon ont observé que, chez les cobayes, jusqu'à 23° en milieu relativement sec, le travail forcé élève peu la température. Au-dessus, il y à loujours hyperthermie, et d'autant plus que l'air est plus humide. Les suites des fortes hyperthermies sont des plus graves chez le tuberculeux. — MM. J.-P. Langlois et Boussaguet ont déterminé les pertes d'eau pendant le travail suivant les variations du milieu ambiant. — MM. J.-P. Langlois et Routhier ont reconnu que, dans un milieu à température voisine de 25° au thermomètre mouillé, un courant d'air venant frapper le travailleur avec une vitesse de 1 mètre à la seconde augmente très sensiblement son rendement. — MM. L. Martin, Al. Prévot et G. Loi- seau ont constaté que le pouvoir antitoxique des sérums antidiphtériques n’est pas parallèle au pouvoir agglutinant et que l’on peut préparer des sérums très antitoxiques qui ne sont pas agglutinants. —M.A.Chap- pelier a retrouvé chez les femelles de certains Frin- CMS un organe qui paraît un reste du canal de 4e) . SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 Juin 1910. M. G. Sagnac : Sur les interférences de deux fais- ceaux superposés en sens iuverses le long d'un circuit optique de grandes dimensions. Les expériences de l'auteur ont eu pour but de rechercher une petite dif- férence de vitesse de propagation entre les ondes lumi- neuses qui parcourent un circuit optique et les ondes lumineuses qui parcourent le même circuit dans le sens opposé et interférent avec les premières. Le cn cuit optique a été étendu, autant que la salle d'expé- riences l'a permis, jusqu'à 30 mètres de contour et 35 mètres carrés de surface ; la précision de pointé des franges dans ces conditions atteignait le milliéme dé la largeur de l'interfrange. Voici en quoi consiste le premier dispositif employé par l'auteur. La figure 1 montre comment la lumière issue d'un collimateur © se divise sur l’argenture transparente aa! d'une glace argentée de Michelson en vibrations transmises (ampli- tude relative T) et vibrations réfléchies (amplitude Ki qui se réfléchissent sur les miroirs M,, M,, et parcou- rent en sens inverses un même circuit optique d'ori- gine et d'extrémité 1; la vibration deux fois transmise par l’argenture aa! (amplitude TT’) et la vibration deux fois réfléchie (RR') se superposent pour rentrer dans Fig. 1, la lunette L, qui permet d'observer les franges locali- sées lorsqu'on la pointe sensiblement à l'infini. La superposilion des faisceaux de retour Tl'et RER! est réalisable en position comme en direction lorsque le circuit renferme un nombre pair de miroirs M (circuit triangulaire ou pentagonal), que le circuit soit ou non symétrique; les franges sont alors très nettes. Pour agrandir les franges, sans grossir les fils du micro- mètre oculaire autrement que par l’oculaire de la lunette, on place un diaphragme rond D (3 millimètres de diamètre) en avant (à 1,50) du trou rond du colli- mateur (1",4 de diamètre); les franges supposées peu nombreuses deviennent non localisées et conservent leur netteté assez loin du plan focal de la lunette, où elles apparaissent plusieurs fois agrandies quand on dépointe l’oculaire (interfrange de 1 ou 2 millimètres dans le plan des fils du micromètre oculaire). Avec un circuit à quatre miroirs, on obtient, dans les condi- tions précédentes, des anneaux non localisés en rem- plaçant l’un des miroirs plans, près de la glace, par une surface convexe; l’image du diaphragme auxi- liaire D est faite par l'objectif du collimateur au centre de cette surface convexe pour l'un T des deux fais- ceaux, tandis que l’autre faisceau R ne rencontre cette surface qu'au retour et la couvre alors largement. Les anneaux observés dans la lunette sont une 1mage non localisée des lignes de niveau de la surface, si les autres surfaces sont planes; en général, ils dépendent des courbures des diverses surfaces à l'exception de la surface du miroir le plus rapproché du milieu du cir- cuit où les deux faisceaux se recouvrent exactement. La mesure du diamètre du premier de ces anneaux permet de reconnaitre par ses variations une différence variable de vitesse de propagation des vibrations 624 inverses T et R. La glace argentée introduisant plu- sieurs causes d'erreur, l’auteur a imaginé un interféro- mètre sans argenture transparente qu'il décrira ulté- rieurement. — M. A. Rosensthiel : Du role de la cohésion et de la force osmotique dans la teinture (Voir la Revue du 15 août 1909, p. 683). — M. Pierre Sève présente à la Société une balance destinée à Ja mesure en valeur absolue des champs magnétiques où l'uniformité peut être réalisée sur quelques centi- mètres. Elle utilise le principe imaginé par M. Cotton; il consiste, comme on sait, à équilibrer par des poids l'action électrodynamique exercée sur un élément de courant de longueur et d'intensité connues, placé dans le champ étudié perpendiculairement aux lignes de force : pour éliminer l’action électrodynamique sur les portions de courant voisines de l'élément utilisé, on constitue les conducteurs d’amenée et de sortie par des arcs de cercle concentriques ayant pour axe le couteau de la balance. L'auteur indique les méthodes employées pour mesurer les éléments géométriques de l'instrument et la technique de son emploi, — M. Ch.-Ed. Guillaume : À propos de la comète de Halley. Les prises d'air effectuées à l’époque du pas- sage de la Terre dans la queue de la comète de Halley n'ont révélé aucune modification dans la composition de l'atmosphère, que l'examen de celle-ci ait été fait sur des échantillons pris à grande hauteur au moyen de ballons-sonde, ou qu'il soit résulté de détermina- tions exécutées sur les résidus de la liquéfaction de l'air. En particulier, M. George Claude, dans la mesure quil a faite de la densité du mélange hélium-néon issu d'appareils à liquéfaction traitant 350.000 litres d'air à l'heure, n'a trouvé aucune différence par rapport aux nombres fournis par des expériences faites dans les jours précédents, alors, par exemple, que de petites quantités d'hydrogène introduites dans l'appareil pro- duisent immédiatement un changement appréciable de la densité du résidu. Il reste, pour M. Claude, à sou- mettre à un examen détaillé la portion facilement liquéliable de l'air, laquelle contient le krypton, le xénon et les petites quantités d'acide carbonique et de vapeur d’eau échappées à la première purification de l'air, ainsi que des traces d'hydrocarbures de grais- sage, etc. Le résultat négatif trouvé sur la portion déjà examinée était, par avance, très probable. En effet, si l’on adopte la théorie cinétique de la conservation des atmosphères, il est probable que, dans ses précédents passages au périhélie, la comète de Halley a perdu tous ses gaz très volatils et de faible masse moléculaire, et n'a conservé que les gaz facilement liquéfiables. Si donc l'atmosphère terrestre à capté au passage des traces de gaz cométaires, c'est dans le résidu liquéfié de la distillation de l'air que l’on a quelques chances de les trouver. Comme, au surplus, ces gaz sont en très faibles proportions, c'est seulement dans les appa- reils industriels, traitant de grandes quantités d'air, que l'on peut espérer en trouver la trace. Si le résultat de l'expérience est négatif, on pourra assigner, à la quan- tité des gaz abandonnés par la comète, une limite extre- mement basse. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 2% Juin 190. M. D. Wolk, après avoir rappelé les travaux des divers auteurs qui se sont occupés de l’azoture d'alu- minium, annonce qu'il a réussi à préparer un azo- ture d'aluminium qui contient de 32-33,2 °/, d'azote théorie 34,06), et cela sans aucune addition, ni de car- bone, ni de métaux. D’après ses expériences, la tem- pérature favorable serait de 810-850°. II à pu ainsi, dans des conditions bien déterminées (par exemple dans le vide et à température convenable), produire en grand l’azoture d'aluminium, ce qui présente un grand intérêt pour l’agriculture. — M. A. Gautier, poursui- vant l'étude des phénomènes volcaniques, montre que le gaz CO peut être porté à 1.300°, température des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES laves fondantes, sans se décomposer ni donner de char- bon. S'il contient même des traces d'hydrogène, il se fait toujours un peu d’eau et d'acide carbonique. IL n'apparait ni acide formique, ni acide oxalique, ni sous-oxydes C?0 ou C*O0*. En présence d’un excès d'hydrogène, la réduction de CO commence déjà à 200e avant le rouge. La formation de l’eau augmente avec la température jusqu'à 1.200° et au delà. L'acide carbo- nique, simultanément produit, passe par un maximum vers 900-1.000°, puis décroit, réduit qu'il est par l'hydro- gène. En même temps, l’eau et l'acide carbonique formés dans cette réaction sont accompagnés du gaz méthane dont la quantité peut s'élever jusqu'à 8 °/, du gaz CO circulant vers 800 à 900. Une trace de formol accompagne à 600-700° l’acide carbonique et le méthane. Il ne se fait pas d'acide formique. Ainsi s'explique la présence constante de CO*,C0,H?0,H°,CH: et, par l’action de la vapeur d'eau sur les sulfures et les chlorures, H?S,S0* et HCI, dans les fumerolles volcaniques les plus chaudes. — M. Ch. Moureu mentionne, à propos de la communication de M. A. Gautier, qu'il a trouvé, dans les gaz de diverses sources thermales, des gaz combustibles; à Luchon notamment, on peut déceler jusqu'à 6 °/, de méthane. — M. A. Gautier donne lec- ture d’une lettre de Sir W. Ramsay dans laquelle ce dernier annonce qu'il a pu déterminer la densité de l'émanalion en opérant sur 0,1 millimètre cube de gaz el avec une balance permettant de peser le demi-mil- lionième de milligramme. De cette densité, M. Ramsay a pu déduire le poids atomique 224; il en résulterait que le radium (p. at. 228) serait composé d’un atome d'hélium (p. at. #) uni à un atome d'émanation. — En portant à six mois la durée de l'expérience d'OEsterle action d'un mélange d’alcool à 95° et de HCI sur les aloïnes), M. E. Léger a pu obtenir le dédoublement de la barbaloïne et de l'isobarbaloïne. Du produit de la réaction, M. Léger a pu isoler l'aloïinose cristallisé en passant par sa benzylphénylhydrazone. L'étude de ce sucre à conduit à le considérer comme identique avec l’arabinose d. Les deux aloïnes fournissent le même sucre. Comme, d'autre part, elles dérivent de la même trioxyméthylanthraquinone, la conclusion qui s'impose est que ces deux aloines sont des isomères de position. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 2 Juin 1910. Sir J. Dewar et H. ©. Jones ont constaté que les vapeurs de nickel-carbonyle et de sulfure de carbone réagissent à la température ordinaire suivant l'équa- tion : Ni(CO)' Æ CS? — NiS + 4C0 +. CS; cette réaction est incomplète et elle est complètement empêchée par la présence d'oxyde de carbone à une concentration suffisante. — M. J. Phelps à étudié les erreurs pro- bables dans l'essai des lingots d’or; en opérant avec soin, elles ne doivent pas excéder 0,1 °/6. — M. H. E. Armstrong donne le résumé d'une série de recherches faites par ses élèves, concernant l'effet de l’altération de la structure moléculaire chez les dérivés benzé- niques sur la forme cristalline. Ces résultats con- firment pleinement la théorie de Barlow-Pope. — MM. R. T. Colgate et E. H. Rodd ont étudié au point de vue morphologique les dérivés sulfoniques des com- posés 1 : 4-dihalogénés du benzène. Tous ces dérivés peuvent être arrangés dans l’une ou l’autre de deux séries, l’une dérivée du mode hexagonal, l'autre du mode cubique d’empilement de sphères égales, — les deux modes alternatifs que Barlow et Pope ont montrés possibles dans le cas des unités benzéniques. Ces résultats prouvent le maintien d'une structure benzé- nique dans les molécules. — MM. J. Ch. Philip et H. R. Courtman ont déterminé la conductivité des solutions de deux sels ayant un ion commun (iodure de tétréthylammonium et iodure de potassium) dans divers solvants organiques à 25°. Ils concluent que la relation de deux sels ayant un ion commun dans un solvant organique ionisant est très analogue à celle qui: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES existe entre les mêmes sels dissous dans l'eau, ce qui permet de calculer la conductibilité de la solution par la méthode de Barmwater. — M. T. P. Hilditch rap- pelle que, dans un composé optiquement actif compié- tement symétrique par rapport au centre géométrique de sa molécule, et contenant en même temps des radi- caux non saturés adjacents, il existe généralement un degré très anormal de rotation optique. Cet effet, avec celui qui est dû à la conjonction dans l’espace de deux uroupes non saturés, parait expliquer en quelque mesure l'écart avec l'hypothèse de Guye fréquemment observé dans les pouvoirs rotatoires des isomères de position optiquement actifs. — M. Y. Shibata à étudié l'action du réactif de Grignard sur les éthers campho- riques et isocamphoriques. Le camphorate de dimé- thyle, éther de l'acide ers, donne un campholide, tandis que l'isocamphorate de diméthyle, éther de l'acide trans, donne l'éther non condensé de l'acide diphényl- hydroxyisocamphorique. — M. P. May, en nitrant le noyau benzénique de la triphénylstibine, a obtenu un dérivé trinitré bien cristallisé, K.1919, qui, par réduc- tion avec Zn et l'acide acétique, donne le dérivé aminé correspondant. Une très petite quantité de tri-p-ami- nophénylstibine a été également obtenue par l’action de Na sur une solution de SbC/ et de p-chloroaniline dans le benzène. — MM. J. C. Irvine et Ch. S. Garrett montrent que la condensation du fructose et de l’acé- tone peut donner lieu à trois fructose-monoacétones, dont deux se condensent avec une seconde molécule d’acétone pour donner les æ- et &-fructose-diacétones de Fischer. — M. A. G. G. Leonard a étudié les spectres d'absorption du 1 : #-dihydronaphtalène et du 1 : 2: 3 :4- tétrahydronaphtalène; les courbes sont similaires et occupent une position intermédiaire entre celles du naphtalène et de l’o-xylène. Les spectres sont ceux d’un noyau benzénoïde modifié par la présence d’un anneau aliphatique. — MM. AI. T. Cameron et B. Ch. Mc Ewan ont constaté que la méthode de Durand pour la titra- tion de l'acide malonique par le permanganate ne donne pas de résultats nets, à cause de la lente oxyda- tion de l'acide formique formé. Ils la remplacent par l'oxydation complète de l'acide malonique en CO: et H°0, effectuée par le permanganate d'abord à 80-90° en solution sulfurique, puis en solution alcaline, et en acidifiant de nouveau à la fin par H°SO et l'acide oxa- lique, l'excès de ce dernier étant déterminé par l'addi- tion d’un peu de permanganate. — MM. W. A. Bone et H. F. Coward ont obtenu un rendement de 95 °/, en méthane en chauffant 0,03 gramme de charbon de sucre très pur dans un courant d'I sec à 1.450° pendant vingt-cinq heures. — MM. A. E. Dunstan et F. B. Thole ont poursuivi leurs recherches sur les rapports de la viscosité et de la concentration pour diverses solutions de composés actifs et racémiques. Les acides d-, 1- et r-mandéliques ont la même viscosité en solu- lions aqueuses et pyridiques; mais, dans un solvant non dissociant, comme l'acétate d’amyle, il y a une différence entre les formes active et inactive. — M. S. J. M. Auld a constaté que l’Osyris abyssinica renferme, comme l'O. compressa, de l'osyritrine (vio- laquercitrine), et un tannin un peu plus foncé que celui de l'O. compressa. — M'!° I. Smedley a déterminé les réfractions moléculaires d’une série de cétones non saturées. Placées à l'extrémité d’une chaine de liaisons éthénoïdes conjuguées, les liaisons cétoniques et éthé- noïdes ont en apparence le même effet d'exaltation du pouvoir de réfraction. Interposé dans une chaîne de liaisons éthénoïdes, le groupe carbonyle diminue l’exaltation. — Le même auteur déduit des propriétés physiques des $-dicétones qu'elles ont une structure hydroxy-cétonique ; il n’est pas nécessaire de supposer l'existence d’une forme diénolique. — M. J. C. Brown présente un appareil pour la distillation des graisses et des acides gras dans le vide de la lumière cathodique. — MM. G. T. Morgan et A. Bramley ont préparé la 2-p-tolyInaphtylène-1-diazo-2-imine, F.165-166°, par l'action de l'acide nitreux sur la 2-p-tolyl-1 : 2-naphty- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910, lènediamine, et son isomère, le 2-p-tolyl-1 : 2-naphta- triazol, K,149°, en oxydant la p-toluène-az0-6-naphtyl amine par l'acide chromique. — M. G. T. Morgan, Mie F,. M. G. Micklethwait et M. G. S. Whitby, en nitrant la triphénylstibine, ont obtenu un dérivi mononitré, F.190°, donnant par réduction une amine diazotable. Ils ont également préparé un produit tri- nitré et un produit trisulfoné. SOCIÉTÉ ANGLAISE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DU YORKSHIRE DE Séance du 25 Avril 1910. M. J. W. Cobb : La synthèse des vernis de poteries, verres et autres silicates complexes. N : Les mélanges ternaires de soude, chaux, alumine et silice, Le mélange Na°O + CaO H AÏ°O* donne entre 1.100° et 1.300° une masse complètement soluble dans HCI. Le mélange Na°0 + CaO + 10Si0° donne à 800 un silicate un peu soluble, mais une partie de la chaux et presque la moitié de la soude sont devenues insolubles. A 1.150°, presque toute la soude et la chaux forment un silicate insoluble. Le mélange Na*O—H A0 10$Si0* donne aussi à 800° un peu de silicate soluble, mais vers 1.150 presque toute la soude et l’alumine sont engagées dans un silicate insoluble. Enfin le mélange Ca*sO*-E AlO* + 10 Si0? donne d’abord un silicate de chaux so- luble à 1.200°, puis un composé triple insoluble à 1.300°. Dans aucun des trois derniers cas, la fusion n'a été nécessaire pour la formation du composé lernaire insoluble. — MM. W. M. Gardner et H. H. Hodgson : La production d'acide sulfurique aux dépens des colo- rants sulfurés et du soufre libre. Les auteurs rappel- lent que les cotons teints avec des noirs sulfurés se « pourrissent » souvent, surtout quand ils sont exportés dans les pays chauds. L’affaiblissement de la fibre a lieu en un temps variant d’une semaine à une année. Les opinions'les plus diverses ont été émises pour expliquer ce phénomène. Les auteurs ont d’abord reconnu que les colorants sulfurés du commerce con- tiennent des quantités relativement importantes de soufre libre, qui peut être extrait par l’éther, et que le coton teint avec ces colorants en peut contenir lui- même jusqu'à 1,5 °/,. IS montrent ensuite que ce soufre libre s’oxyde très facilement en acide sulfurique et que cette oxydation est accélérée par l’action cata- lytique de certains sels métalliques, tels que ceux qui sont employés dans la fixation des colorants sulfurés sur le coton. D'autre part, si une pièce de coton teinte est exposée à l'air humide chaud pendant un certain nombre de jours, puis lavée à l’eau, l’eau de lavage renferme de l’acide sulfurique. Si le coton teint est d’abord extrait à l’éther pour enlever le soufre libre, la production d'acide sulfurique est plus lente et moins abondante, mais elle persiste toutefois. La cause du « pourrissage » du coton réside donc dans le dévelop- pement d’acide sulfurique, à l’air chaud humide, aux dépens du soufre libre et de la molécule même des colorants sulfurés. — MM. L. L. Lloyd et G.W. Parr ont comparé différents types de calorimètres pour la détermination du pouvoir calorifique des combustibles solides. Le calorimètre à bombe Bryan Donkin donne de bons résultats pour les charbons finement pulvérisés, moins bops pourle coke. Lecalorimètre Lewis Thompson donne de bons résultats pour Les charbons bitumineux. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 28 Mars 1910. M. J. Würschmidt adresse un Mémoire sur l'exeita- bilité des ampoules de décharge à cathodes incandes- centes et la possibilité de les appliquer à la télégraphie sans fil. Lors de ses recherches sur les spectres des gaz lumineux contenus dans les tubes de décharge à 14* D Lo © cathodes Wehnelt, l’auteur à eu l'occasion d'observer qu'en leur appliquant une tension de 440 valts,une faible décharge, du même aspect que les décharges effectuées sans cathodes incandescentes par une pile de haute tension, se présente à la pression de 1#,5; à un vide plus avancé, d'environ 0w%,75,une décharge très lumi- neuse se produit subitement, l'intensité du courant étant de 3 ampères. Des phénomènes analogues se pro- duisent pour des tensions de 220 ou de 110 volts. Pour amorcer ces décharges, où peut se servir (en dehors de l'application d'un potentiel supérieur au potentiel statique) de différents procédés : variations d'un champ électrique extérieur, ionisation par les rayons X ou rayons du radium, ou, enfin, action des ondes élec- triques. C'est surtout la décharge très lumineuse qui se prête à démontrer d'une façon très frappante la présence des ondes électriques et, par conséquent, à servir d'indicateur d'ondes pour la télégraphie sans (il. — M. E. Goldstein adresse un Mémoire sur un type particulier de spectres d'émission discontinus des corps solides. Dans un travail antérieur”, l'auteur avait fait voir que les composés aromatiques solides ou soli- difiés par refroidissement présentent, en général, aux basses températures, sous l'influence des rayons catho- diques, trois spectres lumineux nettement différents, à savoir les spectres préliminaire, principal et de solution, chacun commençant au rouge sombre. Le spectre préliminaire, très lumineux, surtout dans les premiers moments de l'irradiation, finit par pâlir for- tement, en même temps que se présente le spectre principal, particulièrement caractéristique de chaque substance. Le spectre de solution se présente en ixTra- diant une solution (ou fusion) de la substance dans un milieu différent, à l'état solidifié. Tandis que les spec- tres principaux s'éteignent sensiblement en même temps que cesse l'irradiation, la luminosité des spec- tres de solution se continue souvent assez longtemps après que l'irradiation a cessé. Or, les substances aro- matiques à deux ou plusieurs noyaux, surtout les suh- stances « condensées » (groupes du naphtalène, de la quinoline, de l'anthracène, etc.) donnent lieu à des spectres de solution discontinus, nettement différents des spectres préliminaire et principal de la substance et qui correspondent à des émissions totales différem- ment colorées (vert, jaune verdâtre, bleu, etc.) du mé- lange. L'allure des spectres de solution est très variable et la distribution de leurs bandes individuelles ne pré- sente bien souvent aucune régularité apparente. L'au- teur incline à attribuer ces phénomènes à la tendance de polymérisation que présentent les aldéhydes et les cétones. — M. H. G. Môller donne lecture d’un Mé- moire sur Le caleul des courants de Foucault dans le fer. La connaissance de l'allure des courants de Fou- cault est nécessaire pour résoudre de nombreux pro- blèmes techniques, tels que la séparation de l'hysté- rèse et des pertes par courants de Foucault ou bien la détermination de la perméabilité moyenne correspon- dant aux formules du courant alternatif. D'autre part, les physiciens se refuseront à reconnaître l'importance scientifique d'une formule représentant les courants de Foucault aussi longtemps qu'ils ne se seront pas convaincus de la nécessité d'étudier les courbes ma- gnétiques dynamiques pour pénétrer plus loin dans notre connaissance de l'état magnétique. Après avoir précisé le problème et évalué qualitativement l'allure du courant de Foucault et de l'induction dans le fer, l'auteur traduit ses considérations en langage analy- tique. Ses résultats font voir que les courbes d'aiman- tation dynamiques peuvent être calculées quantitative- ment en tenant compte des courants de Foucault, lorsqu'on se base sur l'hypothèse la plus simple, celle où l'induction du fer suivrait instantanément le champ appliqué. Toutes les déformations compliquées qui autrefois faisaient croire que l’aimantation dépend de L Feport of Brit. Assov., Meet. 1909. et Phys. Zoitsehr., n° 10. p. 173, 4909. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la vitesse ne sont dues qu'aux courants de Foucault. Les recherches expérimentales de MM. Ch. E. Guye et B. Herzfeld * ainsi que les expériences de l’auteur con- firment cette théorie de l'instantanéité de lPaiman- lation. Séance du 29 Avril 1910. M. E. Lampe rend comple de ses recherches théa- riques sur la forme d'équilibre de la surface d'un liquide renfermé dans une sphère creuse, tournant à une vitesse uniforme autour de son diamètre vertical. Il signale particulièrement les propriétés géométriques du paraboloïide de rotation. — M. G-. Gehlhoff présente une Note préliminaire sur /a chute cathodique au sein de l'argon sur les cathodes de potassium et sa réduc- tion par l'effet photo-électrique. En exposant une pile à cathode de sodium-potassium, remplie d'hydrogène, à l'action de la lumière visible, l'auteur? avait observé une réduction très considérable de la chute cathodique normale et une faible augmentation d'une chute catho- dique fortement anormale. Dans le présent travail, il vérifie ces phénomènes sur une cathode de potassium au sein de l’argon. Une lampe de quartz à vapeur de mercure fournissait le rayonnement frappant la ca- thode, sous une incidence d'environ 45°, à travers un tube de verre à fenêtre en quartz de 2 centimètres de diamètre. L'action de cette lampe de quartz réduit la chute cathodique de 54 volts à 38,5 volts, en même temps que l'intensité du courant s'élève à 1,2X 40 ampère. En insérant une plaque de verre d'environ 2 millimètres de diamètre entre la fenêtre et la lampe de quartz, on réduit la chute cathodique de 5# à 17 volts. Lorsque, au contraire, l'intensité du courant est augmentée jusqu'à production d'une chute catho- dique fortement anormale, on voit l'effet inverse se présenter sous l’action du rayonnement, la chute cathodique augmentant de 8-10 volts, en même temps que l'intensité du courant diminue très peu. Tous ces phénomènes sont parfaitement réguliers. — MM. E. Gehrcke et O. Reichenheim adressent un Mémoire sur le spectre magnétique et le spectre de Doppler des rayous-canal. Les recherches de M. W. Wien” et plus tard celles de J. J. Thomson“ ont fait voir que les rayons-canal dans l'hydrogène renferment deux es- pèces de particules à charge positive, pour lesquelles em serait respectivement de 10‘ et de 5 X 10*. Suivant l'hypothèse énoncée par Thomson, les premières par- ticules seraient des atomes d'hydrogène, et les autres des molécules d'hydrogène combinées chacune à une charge élémentaire. La vitesse des rayons atomiques est plus grande que celle des rayons moléculaires. Dans l'hélium, une troisième éspèce de rayons, à e/m—2,5 X 10° et qui correspondrait à l'ion d'hélium monovalent, vient s'ajouter à ces deux espèces de rayons, qui se retrouvent dans tous les cas étudiés par Thomson. Il résulte de ses observations que les rayons ioniques positifs de l'oxygène, de l'azote, etc., s'ils existent, sont d'une perception plus difficile que les rayons de l'hydrogène. Or, les auteurs ont tâché de perfectionner les dispositifs d'observation de ces rayons, en abrégeant la distance entre la cathode et l'écran fluorescent et en choisissant une ampoule de décharge aussi grande que possible, D'accord avec la théorie de conversion de M. W. Wien, ils effectuent la déviation magnétique par un champ magnétique aussi court que possible et, en rapprochant l'écran fluorescent du champ magnétique, renforcent la luminosité des {aches fluorescentes. En dehors des deux taches de fluorescence déviable que M. Thomson attribue à l'hy- drogène, les auteurs ont observé, au sein du fer et de l'oxygène, une troisième tache fluorescente moins dé- viable, disposée entre la tache non déviée du rayon RE ———— Comptes rendüs, p. 951-959, 1903. Verh. d. Phys. Ges., t. VII, p. 264-267, 1906. 4 2 3 Ann. d. Phys. (4, t. VHI, p. 463, 1902. # Phil. Mag. (6), &. XHI, p. 573; p. 624, 1907. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES neutre et les deux taches d'hydrogène et qui, semble- t-il, sont dues à l'oxygène. Le rapport des intensités de ces taches fluorescentes est-modifié en variant la pression et les conditions de décharge. En dehors des couches magnétiquement déviables, on observe à l'occasion une tache dont la déviabilité magnétique n'est que d'un tiers environ de celle de la tache attri- buée à l'oxygène. Cette tache est peut-être due aux rayons de Hg. Ces spectres magnétiques présentent une frappante analogie avec les spectres de Doppler, surtout lorsqu'on tient compte du rapport variable de leurs intensités respectives. C'est pourquoi les auteurs énoncent l'hypothèse que les deux maxima principaux du spectre de Doppler des rayons-canal d'hydrogène sont dus à ce que les atomes aussi bien que les mo- léeules de l'hydrogène empruntent leur vitesse aux mêmes effets accélérateurs. Comme, d'autre part, sui- vant les recherches de Goldstein et de W. Wien, ce ne sont que les rayons magnétiquement déviables qui émettent de la lumière, il ne reste qu'à conclure que les particules d'hydrogène incandescentes ont perdu toute charge antérieure en recevant leur vitesse. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mars et Avril 1910. 4° SGrENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Volterra : Défor- mation d'une sphère élastique, assujettie à des tensions données, dans le cas héréditaire. — Observations sur les équations intégro-différentielles et intégrales. — Sur les fonctions permutables. — M. E. Lauricella : Sur quelques potentiels logarithmiques. — M. E. Almansi: Action exercée par une masse liquide en mouvement sur un corps rigide. — M. F. Borgatti : Sur la résistance qu'éprouvent les surfaces planes mobiles dans l'air. — M. V. Cisotti : Sur les con- guences rectilignes solénoïdales. — Mouvements d’un liquide qui laissent sans altération la distribution locale des pressions. — M. G. Fubini: Le théorème d'Osgood dans le calcul des variations des intégrales multiples. — M. C.-A. Dell’Agnola : Sur une propriété des polynomes sphériques. — M. M. Pannelli : Sur une propriété des transformations birationnelles dans l’espace ordinaire. — M. F. Sibirani s'occupe de quelques propriétés des intégrales de certaines classes d'équations intégrales. — M. E. Zondadari: Sur des transcendantes particulières qui se rallient à la théorie des nombres. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Ricco: Observations astrophysiques et photographiques de la comète 1910 «, exécutées à l'Observatoire de Catane. — M. L. de Mar- chi: Les anomalies de la gravité sur les côtes, et la théorie élastique de l'isostase. — M. O.-M. Corbino s'occupe d’une façon particulière, et dans un but critique, de l’origine des anomalies qui ont été récemment observées dans l'étude du phénomène de Zeeman. — M. L. Tieri étudie le phénomène de Majo- rana dans les champs magnétiques produits par des décharges oscillatoires. Il s'occupe en outre de la biré- frangibilité du fer dialysé, et applique ce phénomène à l'étude de l'écoulement d'un liquide dans le liquide même. — M. E. Oddone s'occupe des accéléromètres à liquide. — MM. G. Ciamician et P. Silber envoient leur quinzième note sur les actions chimiques de la lumière; dans cette note, ils s'occupent des mélanges d'acétone avec les alcools méthylique, éthylique et benzylique. — MM. F. Ageno et E. Barzetti ont fail des préparations de bore colloïdal dont ils décrivent les propriétés. — M.G. Gallo à fait un essai de pré- parätion des composés oxygénés du fluor, et il en donne la description. — MM. G. Pellini et M. Ama- dori : Sur la nature des sels doubles entre caféine et sels alcalins. — Sur les composés complexes entre caféine et composé sodique en solution. — Sur la facon dont se comportent quelques ureïdes et sub- Stances puriques avec les solutions de benzoate ds; 627 sodique. — M. L, Mascarelli à étudié l'action de la lumière sur l'aldéhyde benzoïque en présence d'iode, 39 SCIENCES NATURELLES. — M. OC. de Stefani pour- suit et complète son étude du profil géologique du Simplon. — M. F. Stella Starabba envoie une des cription des caractères géologiques de l'éruption de l'Etna du 23 au 31 mars 1910. — M. R. Almagià Lans met les observations morphologiques qu'il à faites dans le haut bassin du Noce (région de la mer Tyrrhé- néenne), étudiant les éboulements et leurs consé- quences. — M. E. Repossi décrit des cristaux d'anda lousite qu'il a trouvés à Musso (lac de Como). — M. A. Berti a fait une série d'expériences sur l'action locale de la température sur les vaisseaux du sang, expé- riences qui prouvent que, pour une température de peu supérieure à la normale, il y a une dilatation de ces vaisseaux, suivie, pour un petit changement de la température, par une constriction. A chaque degré de température correspond un diamètre particulier des vaisseaux. — MM. U. Gabbi et F. Lacava envoient une notice sur le premier cas de « bouton d'Orient ; observé en Italie. — M. Gabbi étudie et décrit, en outre, des cas de kala-azar chez des sujets jeunes et adultes, — M. G. Brunelli s'occupe de la reconstitution du nucleus, qu'il a eu l’occasion d'étudier en observant la division indirecte des cellules spermatogonoïdales et somatiques de Tryxalis. — M. $. Baglioni expose ses recherches sur les effets de l'alimentation mai- dique; il a étudié l'action du suc gastrique sur la zeïne et sur la gliadine du maïs. — M. F. Dorello: Observa- tions sur la segmentation du rhombo-encéphale dans les embryons de Plecotus. — MM. G. Galeotti et E. Levi décrivent les micro-organismes qu'ils ont trouvés sur les glaciers du Mont Rose, jusqu'à des altitudes de 4.573 mètres; les espèces de ces microor- ganismes varient de temps en temps, probablement avec les changements des conditions météorologiques et des vents qui dominent dans les différentes saisons. — M. C. Acqua expose ses recherches préliminaires sur le lieu où les plantes dans leur intérieur utilisent l'azote des nitrates, et donne des détails sur la méthode employée et sur les premiers résultats obtenus avec le blé et les haricots. — M. L. Petri ajoute d’autres observations sur le processus de destruction des tubérosités phylloxériques. — Mle E. Mameli et M. G. Pollacei ont exécuté des recherches qui démontre- raient l'assimilation directe de l'azote atmosphérique libre par les végétaux. — M. E. Pantanelli poursuit sa description des maladies qui attaquent les vignes américaines de la Sicile. — Le même auteur, avec M. G. Faure, a fait des expériences sur la condensa- tion enzymatique des sucres. ERNESTO MAnNGINI. ACADEMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 2 Avril 1910. 19 SGIENCES MATHÉMATIQUES. — J. de Vries : Sur des groupes polaires linéaires par rapport à une quadrique plane. L'équation at —0 de la courbe y*. Les points collinéaires satisfaisant à a4:4,2-a,—0 forment une involution biquadratique I! du troisième rang dont les points sur y‘ sont les points principaux (éléments qua- druples). L'involution neutrale 1,%. Le cas d'un couple neutre. La courbe de la sixième classe dont les tan- gentes coupent y‘ en quatre points harmoniques. Les points d'inflexion de y* comme points de coïncidence d'un couple neutre. Le lieu y des couples neutres, osculant y! aux points d'inflexion. Un autre lieu y", osculantyaux pointsd'inflexion et passant par les points de contact des 28 tangentes doubles de y‘. — Ensuite M. J. de Vries présente au nom de M. J. van Uven : Itération inlinitésimale de fonctions réciproques. L'auteur s'occupe du cas n—? du « problème de Bab- bage », c'est-à-dire de la solution de l'équation fonc- tionnelle e,(x)—v}e(x)} = x, livrée par les fonctions y—(x) liées à x par une relation symétrique S(x, y) — 0. lei il se propose de construire ces fonctions réei- f 628 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES proques à l'aide de l'itération infinitésimale. L'équation symétrique du second degré peut être mise sous la forme (x) +4(y)— 24 à l'aide d'un nombre infini de transformations projectives; dans le cas de l'équation symétrique cubique, le nombre de ces transformations est fini, etc. M. J. P. van der Stok présente au nom de M. C. Braak : 1° La marée lunaire bidiurne, cal- eulée à l'aide des enregistrements du séismographe astatique; 2 Détermination de l'épicentre de tremble- ments de terre à laide des enregistrements à une station unique. Depuis le commencement de décembre 190$, un séismographe astatique de Wiechert de 1.000 kilogrammes environ a fonctionné à l'Observa- toire de Batavia. Comme cet instrument est très sen- sible à de petites variations de pente, l’idée se présen- tait d'examiner à quel degré la marée terrestre (la déformation de la Terre sous l'influence du Soleil et de la Lune) pouvait être déduite des diagrammes de Balavia, où cette marée surpasse de beaucoup celle de Potsdam. Après avoir obtenu par des expériences pro- visoires des résultats satistaisants, l’auteur a utilisé les enregistrements réguliers de la composante est-ouest de la marée lunaire double durant la demi-année juillet-décembre 1909. Dans la première communica- tion, l'auteur fait connaître les résultats de ses expt- riences. Dans la seconde, il démontre comment l'azi- muth de l'épicentre d'un tremblement de terre peut être déterminé assez exactement à l’aide du quotient des deux composantes. 20 ScreNces PHYSIQUES. — M. À. F. Holleman présente au nom de M.F. E. C. Scheffer : La pression maximum et la pression minimum d'équilibres hétérogènes à une température constante. La figure tridimensionale d'un système binaire, à miscibilité parfaite dans l'état fluide, à démélange parfait dans l'état solide et où les deux tensions de vapeur vont en décroissant de x = 0 jusqu'à x=1, lait voir deux lignes à trois phases où une des deux composantes coexiste dans l’état solide avec fluide et gaz. Tandis que les valeurs de la pression croissent continuellement avec la température sur la courbe à trois phases de l'une des deux composantes, la.courbe à trois phases de l’autre composante se com- porte autrement. Bakhuis Roozeboom présumait que cette courbe admeltait toujours un maximum dans sa projection (P,T). Plus lard, M. Kohnstamm démontra que ce maximum ne se présente pas toujours. lei l'auteur examine cette question de plus près. — M. P. Zeeman présente en son nom et au nom de M. B. Wi- nawer : La décomposition magnétique de raies d'ab- sorption en relation avec le spectre des taches solaires. Seconde partie (pour la première voir Aev. génér. des Seiences, &. XXI, p. 315). Considérations de M. H. A. Lorentz sur le problème en question. Les prédictions déduites de la théorie de Lorentz qui doivent être vérifiées par l'expérience, aussitôt qu'on laisse de côté l'effet purement transversal où purement longitudinal, sont : 1° les axes des ellipses de vibration des compo- santes extérieures s'inclinent par rapport à la verti- cale ; 2° les vibrations de la composante moyenne peu- vent être, selon les circonstances, ou bien linéaires et non pas horizontales, ou bien elliptiques à axe non horizontal; 3° il y a un angle qui sépare les domaines de l’eflet longitudinal et de l'effet transversal. Les auteurs ont constaté la position oblique des ellipses de vibration des composantes extérieures des deux raies D et mesuré l'inclinaison de ces axes; de plus, ils ont déterminé l'obliquité des vibrations des composantes moyennes des quatre composantes de la raies D,. Ap- plication des résultats à l'étude des taches solaires. — M. H. E. J. G. du Bois présente au nom de M. St. Loria : L'effet magnéto-optique de Kerr chez les com- posés et les alliages ferro-magnétiques. Le phénomène découvert par Kerr en 1876 dépend d'une manière assez compliquée de l'orientation de la surface réflé- chissante par rapport aux vecteurs magnétiques, de l'angle d'incidence, et de la position du plan de pola- risation des rayons incidents, comme l'ont montré les travaux successifs de Kerr lui-même, et de Kaz, Righi, Kundt, Sissingh et Zeeman. Dans le cas le plus impor- tant, et à la fois le plus simple, de la magnétisation polaire et de l'incidence à peu près normale de la lumière polarisée normalement ou parallèlement au plan d'incidence, la rotation du grand axe de l’ellipse en question pouvait être une fonction de la longueur d'onde et de la magnétisation. D'après les recherches de du Bois, la dispersion de cette rotation est soumise à certaines lois. Dans les cas du fer, du cobalt, du nickel, la courbe de dispersion se trouvait dans le domaine des valeurs négatives; au contraire, la courbe de la magnétite se trouva dans le domaine des valeurs positives. Malheureusement, l'étude du phénomène n'a plus fait de progrès parce qu'il n'y à que quatre substances ferro-magnétiques; cet obstacle a disparu récemment par la construction artificielle de ces substances. L'auteur fait connaître les résultats provi- soires de ses recherches magnéto-optiques sur ces substances nouvelles. — M. W. H. Julius : Sur l'ex- plication des spectro-héliogrammes et les déplacements des raies, et sur la dispersion anomale de la lumière. Au lieu de combattre l'hypothèse d'absorption, émise par MM. Hale et Ellerman dans un mémoire récent (Proc. Roy. Soc., janvier 4910), l'auteur fait voir que leur objection contre une explication à l’aide de la dispersion anomale est mal fondée et que les résultats obtenus jusqu'à présent ne sont nullement moins pro- pices à la théorie qui attribue les « flocculi » dans l'atmosphère solaire à la dispersion anomale qu'à celle qui n'y voit que des effets d'absorption. — M. H. Ka- merlingh Onnes présente en son nom et au nom de M. A. Perrier : liecherches sur la magnétisation de l'oxygène solide. 4. Introduction. Oxygène fluide I. 2, Méthode des hauteurs d’ascension. Appareil d’as- cension. Marche d'une série d'observations. Résultats des expériences et des calculs. Oxygène fluide I. 3. Détermination d'après la méthode du couple maxi- mum exercé sur un ellipsoïde. Marche des observations. Sources d'erreurs, difficultés, corrections et contrôles (le champ magnétique n’est pas homogène, la magné- tisation comme fonction de l’azimuth n’est pas cons- tante, influence de l'azote contenu dans l'oxygène, cali- bration des ressorts, vibrations). Résultats des expé- riences. Oxygène solide. #4. Ellipsoiïde d'oxygène solide. Erreurs, corrections, mesures auxiliaires, ete. — Ensuite M. Kamerlingh Onnes présente au nom de M. C. A. Crommelin : /sothermes de qaz monoatomi- ques et de leurs mélanges binaires. IV. Remarques sur la préparation de l'argon. V. Tensions de vapeur au-dessus de 140°, température critique et pression critique de l’argon. — M. W. Beyerinck : Lévulane d'é- mulsion comme produit de l'action de la viscosaccharase sur le sucre de canne. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. I. Zwaardemaker présente au nom de M. F. J. J. Buytendijk : Sur l'é- change de gaz par les animaux à sang froid par rapport à leur grandeur. L'auteur continue ses recherches (voir Rev. génér. des Sciences, t. XX, p. 564) en pas- sant des Poissons aux Amphibies et aux Reptiles. 11 trouve ici la mème loi : proportionnellement, Le petits animaux ont besoin de plus grandes quantités d'oxy- gène. — Rapport de MM. G. A. F. Molengraaff et H. E. de Bruyn sur le mémoire de M. H. van Cappelle : Les formations glaciaires terrestres dans la Frise et le diluvium fluvial ancien du sous-sol des Pays-Bas sep- tentrionaux. L'étude paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. — Présentation d'un mémoire de M. C. U. Ariëns Kappers : « The migration of the motor cells of the Trigeminus, Abducens and Facialis in the series of vertebrates and the differences in the course of their root-fibres ». Sont nommés rapporteurs MM. C. Winkler et J. W, van Wijhe. P.-H. ScHoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 15 15 AOÛT 1910 Revue générale DS DCiences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M, L, OLIVIE publiés dans la Æevue ront complètement interdites en F R, 16, rue Chauvonu-Lagarde, Paris, — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux rance et dans tous les pays étrangers y compris ln Suède ln Norvège et …n Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie G. V. Schiaparelli. — Giovanni Virginio Schiapa- relli, qui vient de mourir, le # juillet 4910, était né en Piémont le 44 mars 1835. C’est là qu'il fit ses premières études jusqu'à l'année 1850. Au mois de novembre suivant, ilentrait à l'Université de Turin pour préparer son diplôme d'ingénieur architecte. Dès sa sortie, il fut nommé professeur de Mathéma- tiques dans un lycée de la mème ville. Ce nouvel emploi ne satisfaisant pas ses goûts d'étude, Schiaparelli obtint du Gouvernement sarde d'aller à Berlin suivre les cours du célèbre astronome Encke, alors dans tout l'éclat de sa gloire. Il en profita pour assister aux leçons de Météorologie données par Dove, aux cours de Mathé- matiques de Weierstrass, de Magnétisme terrestre d'Erman et d'Histoire naturelle de Poggendorf. Au mois d'avril 1859, nous le retrouvons à l'Obser- vatoire de Poulkowa en Russie, où il s'entraînait dans la pratique de l’Astronomie sous la direction d'Otto Struve et Winnecke. Peu après, il était nommé succes- sivement astronome adjoint à l'Observatoire de Brera, à Milan, puis directeur du même établissement à la mort du savant Carlini (1862). L'Observatoire de Milan publiait depuis de longues années des Zphémérides, qui absorbaient, sans résultat utile, toutes les forces vives de ses astronomes. Après avoir lui-même collaboré à leur rédaction, Schiaparelli comprit que la science attendait de son zèle mieux el davantage. Doué d’une imagination ardente, d'un esprit de déduction remarquable, — deux qualités nécessaires pour le vrai savant, — le nouveau directeur se lança dans les études d’Astronomie physique. Il avait déjà publié d'importants Mémoires sur la direction des queues de comètes (1861), sur la distance des étoiles fixes (1866), sur la petite planète Hesperia qu'il avait découverte, etc., lorsqu'en 1866 toute une correspondance s'engagea entre lui et le Père Secchi, alors directeur de l'Observatoire du Collège Romain. Ses lettres Sur l'origine des étoiles filantes valurent à Schiaparelli la médaille d’or de la Société italienne des XL, et peu après le prix de la Fondation Lalande à l'Académie des Sciences de Paris. La théorie de l’as- tronome italien, qui rattache l'origine des étoiles REVUE GÉNÉRALE DES £CIENCES, 1910. filantes à celle des comètes, est devenue classique au- jourd’hui. Elle aurait suffi pour illustrer l'auteur, mais Schiaparelli ne s'en tint pas là. Entre temps, après avoir été nommé professeur de Géodésie à l’Institut technique supérieur de Milan, puis membre de la Commission permanente de l’Asso- ciation géodésique internationale, il avait pris une part active aux travaux de triangulation qui devaient relier l'Italie à la Suisse et à l'Autriche. Mais, ces travaux terminés, Schiaparelli se lança de nouveau dans ses études de prédilection. L'Observatoire de Milan venait d'acquérir une superbe lunette de Merz, dont l'objectif de 22 centimètres d'ouverture était si parfait qu'il sup- portait facilement des grossissements de 700 fois. C'est avec ce bel instrument que le directeur de l'Observa- toire allait faire une des plus intéressantes découvertes dans l’Astronomie planétaire. La mémorable opposition du 7 septembre 1877 à marqué une ère nouvelle dans l'étude de Mars. Pendant que Asaph Hall découvrait les deux satel- lites de Mars, Deimos et Phobos, Schiaparelli tentait un essai de triangulation des points fixes remarqués à la surface de la planète, C’est au cours de son examen que l'astronome découvrit un phénomène nouveau el tout à fait curieux. Les grandes taches que les astro- nomes avaient observées, et qui avaient recu le nom de mers, étaient reliées entre elles par une multitude de lignes fines. Schiaparelli les appela /Jeuves tout d'abord, puis canaux, en raison de leur tendance à affecter des lignes droites. Cette première tentative de dessiner la planète Mars d'une facon aussi complète représente un travail çon- sidérable, Les nouveaux détails, quoi qu'on en ait dit, avaient bien une existence réelle, puisque, depuis, ils ont été revus et identitiés par tous les astronomes qui se sont occupés sérieusement de l'étude de la planète. Pendant l'opposition suivante, Schiaparelli les voyait de nouveau et pouvait repérer 114% points fondamen- taux, presque le double de ceux qu'il avail notés en 1877. Il ne les vit pas cependant de la même façon : les canaux plus minces étaient devenus plus rectilignes. Dans une troisième carte, publiée en 1881, presque tous les canaux sont des lignes droites; quelques-uns atteignent une longueur de’5.900 kilomètres. 15 630 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Enfin, dans sa carte générale publiée en 1890 et où | de mème pour Vénus. Ces deux conclusions n'ont pas il résume l'ensemble de ses travaux de 1877 à 1888, tout semble tiré au cordeau et à l’équerre; on dirait un réseau artiliciel enserrant complètement la planète. On sait le parti que Lowell a tiré de ces observations. Mais là ne devaient pas s'arrêter les découvertes du célèbre astronome italien. Les canaux droits nous montraient déjà une planète bien curieuse; les nou- velles constatations transformèrent le sol martien en un monde le plus étrange qu'on puisse imaginer. Entre décembre 1881 et février 1882, les canaux se dédoublèrent, c'est-à-dire qu'à l'endroit où l'observa- teur avait primitivement apercu un canal unique, il vit un second canal courant parallèle- ment au premier, avec, entre Îles deux. un inter- valle de 300 à 650 kilomètres. En fait, les travaux récents-Sur ce même sujet n'ont été que la con- tinuation des ob- servations de Schiaparelli. Ces découvertes sont d'autant plus remarquables que la situation de l'Observatoire de Brera n’est pas ex- ceptionneïlle, à beaucoup près. Placé au milieu d'une grande vil- été acceplées avec le même enthousiasme par les astro- nomes, et la rotation de Vénus est tout à fait incertaine. Les études stellaires faites par Schiaparelli sont nom- breuses et nous ne poufons citer que ses mesures d'étoiles doubles serrées, au nombre de 11.000. Ce travail a été effectué à l’aide d'un équatorial de Merz de 11 mètres de distance focale, installé en 1887 sous une coupole mue électriquement. L'œuvre de Schiaparelli est donc considérable. Mais, il faut le dire, l’astronome italien n’a pu la réaliser qu'au prix d’un travail continu et acharné. Il nous à donné un merveilleux exemple de ce que peut la vo- lonté lorsqu'elle est secondée par l'intelligence et l'enthousiasme. Puisse cette courte notice ètre un hommage à ce- lui qui, plus d'une fois, m'a fait l’hon- neur de me com- muniquer ses re- marquables tra- Vaux. Abbé Th. Moreux, Directeur de l'Observatrire de Bourges- a Physique Les vitesses de chute fina- le, la plus indus- trielle de litalie, dans une agglo- mération où l'é- clairage artificiel est très intense, cet établissement est aussi mal situé que possible. D'après le Pro- fesseur Celoria, le directeur actuel, l'air n'est réelle- ment calme que peuaprèsouavant le coucher du So- leil, ce qui rend l'utilisation des instruments diffi- cile. Ajoutons que l'excellence de l'objectif de Merz pour les observa- tions qui l'ont rendu célèbre est due à ce fait que, par suite d’un défaut de construction, les verres sont mieux corrigés pour les radiations rouges du spectre que pour toutes les autres. En tout cas, il est intéressant de remarquer que les meilleures et les plus complètes observations de la planète Mars nous viennent à la fois d'un instrument moyen mal situé, et d'une lunette de 18 mètres de longueur focale placée dans l’Arizona, à l'Observatoire Lowell, dont l'altitude atteint 2.000 mètres! Schiaparelli a encore attaché son nom à la détermi- balion des rotations de Mercure et de Vénus. Pour la première planète, il conclut à une durée de rotation égale à celle de révolution ; Mercure tournerait donc toujours la même face vers le Soleil. Il en serait Fig. 1. boite A: R,a — Dispositif pour mesurer la vitesse de chute finale des petites parti- cules tombant dans l'air. — À, boite contenant la poudre : B, tube de chute : CC, bande de papier noir, tendue par les poids W et W'; D. tambour chro- nographique ; P, P', stylets inscripteurs. — En haut, à droite, détails de la ge contenant la poudre avec un fond treillagé S; U, trai- neau plat, mü par les liges TT: V, diaphragme perforé ; X, les des petites sphères tom- bantdanslair. — La formule de Stokes, qui ex- prime la résis- tance opposée par le milieu ambiant à la chute d'un corps sphérique (dans l'hypothèse où toutes les au- tres résistances seraient négligea- bles et où aucun glissement ne se produirait à Ja surface limite), à été employée pen- dant ces derniè- res années pour déterminer les di- mensions desphè- res minuscules, sur la base de leur vitesse de chute mesurée dans l'air. Dans un récent Mémoire‘, MM. J. Zeleny et L. W. Me Keehan vérifient la validité de cette formule dans le cas de l'air. Les échantillons dont se servent les auteurs sont desspores microscopiques, produites par cer:aines plantes, telles que les Lycopodium, Lycoperdou et Poly- trichum, et dont ils apprécient les dimensions à l'aide d’un micromètre oculaire. Les densités sont mesurées, d'abord avec le voluménomètre de Regnault, et plus tard avec un voluménomètre perfectionné à baro- manomètre. Les vitesses finales moyennes sont mesurées à l’aide du dispositif représenté par la figure 4. La poudre de RE Zeitschr., n° 3, 1910. M pointe flexible. 1 PJixS TK CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE lycopode, tombant de la boîte A, vient frapper, après avoir traversé Le tube B, une bande de papier noir C C. Cette bande de papier, tendue par les poids W W", est mue uniformément par le tambour chronographique D. D'un côté de la bande de papier noir, on a collé un mor- ceau de papier blanc, recevant les repères de deux res- sorts PP, qui servent à fixer les temps : l’un de ces res- sorts enregistre les secondes données par la pendule ; l'autre inscrit le moment où la poudre est lâchée. Le tube de chute se compose de deux tubes concentriques G, H, dont l'extérieur protège l’autre contre les varia- tions de température. La figure permet de reconnaitre le trou mince L, traversé par les particules, après leur chute sur le papier, sans être entrainées par les parti- cules métalliques se trouvant en dessus. La poudre de lycopode est placée au-dessus du milieu du tube de chute, dans l'auge métallique R, dont le fond est constitué par de la soie S fortement tendue. Les tiges T T', qui se meuvent dans les tubes, portent le traineau plat U, effleurant le bord supérieur du cylindre V, où se trouve un diaphragme perforé. Au- dessus d'un trou pratiqué au milieu du traineau, se trouve un cylindre court, fermé par un petit couvercle perforé au centre. Sur cette perforation, se projette la pointe flexible X, attachée au bord de ce même cou- vercle. En plaçant le traineau à droite, on fait effleurer légèrement le fond de soie par cetle pointe, de facon à insérer quelques particules de poudre de lycopode dans le tube de chute, à travers le petit trou du traineau. Or, à ce moment, la pointe Z établit avec Y un con- tact électrique actionnant le ressort P. En continuant son mouvement au delà de sa position centrale, le traineau referme l'extrémité supérieure du tube de chute. Les vitesses finales des poudres de Lycopodium, Lyco- perdon et Polytrichum, déterminées ainsi par l'expé- rience, se trouvent être bien inférieures aux valeurs correspondantes calculées par la formule de Stokes. D'autre part, des expériences analogues, faites avec des sphères artificielles de cire noire, de mercure ou de paraftine, donnent, dans de larges limites de leurs dimensions, des vitesses finales concordant bien avec la formule théorique, dont la validité se trouve ainsi démontrée dans les conditions de l'expérience. Les auteurs sont incapables d'expliquer le désaccord observé dans le cas des globules végétaux. Ils indiquent cependant l'hypothèse suivant laquelle le mouvement turbulent du fluide serait excité plus facilement par les corps approximativement sphériques que par ceux qui le sont parfaitement. S 3. — Chimie industrielle L'emploi du soufre pour la fabrication de l'acide sulfurique. — Il y à quelques années, un chimiste italien, M. G. Oddo, professeur à l'Université de Pavie, avait proposé l'emploi des minerais de soufre de Sicile, à la place de la pyrite, pour la fabrication de l'acide sulfurique. Dans un récent article’, il revient sur celte importante question, et, après avoir donné les analyses d'un très grand nombre d'échantillons de minerai de soufre, il discute les avantages et désavan- tages relatifs, aux points de vue économique et tech- nique, du procédé qu'il préconise. Plus d'un quart de la production totale des dépôts de soufre de Sicile et d'Italie consiste en une matière contenant au moins autant de soufre combustible que les pyrites (40 à 50 °/,), mais la teneur est très variable, même à l'intérieur d'un seul dépôt. Pour concurrencer efficacement les pyrites, il serait nécessaire de préparer des conglomérats ou briquettes de minerai ayant une teneur uniforme en soufre, par exemple 50 °/,. Comme le soufre et la gangue diffèrent par leur friabilité, il serait possible, par broyage et concentration, de les séparer en deux portions, l'une plus riche, l'autre plus Gazzella chim. ilal., 1910, t. XL, [1], 217-312. 631 pauvre en soufre. D'autre part, les portions ies plus riches des déblais peuvent être chauflées sans perte jusqu'au point de fusion du soufre, et, par compression et refroidissement, donner des masses facilement transportables. Il serait ainsi possible, en mélangeant des iportions de minerai de diflérentes teneurs en soufre, de préparer des briquettes ou des conglomérats de richesse voulue. En vendant annuellement 600.000 tonnes de conglo- mérats de minerai (50 °/, de soufre), correspondant à une production d'environ 900.000 tonnes d'acide sul- furique (un peu moins du quart de la production totale), l'ensemble de la surproduction annuelle du soufre de Sicile pourrait être écoulé, et méme, dans l'espace de six ans, tous les stocks actuellement invendus. Mais, pour faciliter l'établissement de celte industrie, les tarifs de transport par chemin de fer et les charges des ports devraient ètre réduits, comme le Gouvernement italien l’a, d'ailleurs, déjà fait pour les anthracites du Val d'Aoste, et certaines modifications dans les arrangements financiers entre les proprié- aires de mines et le Consortium seraient également nécessaires. M. Uddo suggère même l'établissemeut de fabriques d'acide sulfurique près des mines de soufre, ce qui conduirait probablement, dans l'avenir, à la création d'autres usines, comme celles pour la fabrication des superphosphates. $ 4. — Chimie biologique La théorie des oxydases. — M. G. Bertrand & émis l'hypothèse que le manganèse, fonctionnant à la fois comme activateur et transmetteur de l'oxygène, constitue le seul principe actif des oxydases. A la suite de la découverte d’oxydases ne contenant pas trace de manganèse, mais renfermant du fer, cette hypothèse a dù ètre élargie en ce sens que le fer, appartenant à& la même famille chimique que le manganèse, pouvait au même titre que celui-ci fonctionner comme activa- teur et transmetteur de l'oxygène. Mais, même élargie, cette hypothèse cadrait mal avec les faits. En particulier, le fait que la peroxydase, dont la parenté étroite avec l’oxydase est incontes- table, ne contient ni manganèse ni fer, pouvait laisser supposer que ces deux éléments ne constituent pas la cause déterminante du phénomène oxydasique, c’est à-dire de la fixation et de l'activation de l'oxygène libre. M. Bach a cherché à résoudre ce problème par l'expérience’. Il s'agissait de purifier l'oxydase sufli- samment pour éliminer le manganèse et le fer, mais sans détruire la fonction oxydasique. En partant de 42 kilogs de champignons (Lactarius vellerens), 1 à obtenu, au bout d’une longue série de purifications par précipitation à l'alcool, 0,987 gramme d'oxydase très active et qui ne contenait plus trace de manganèse, mais renfermait encore du fer Ayant acquis la certitude que la méthode usuelle de purification était insuffisante pour éliminer le fer de l'oxydase, M. Bach a fini, après nombre d'essais infruc- tueux, par trouver une méthode appropriée. Elle con- siste à traiter le sue ou l'extrait végétal par 5 à 10 °/, de sulfate de magnésie età le soumettre ensuite diree- tement à la précipitation fractionnée par l'alcool. Aw moyen de cette méthode, M. Bach a pu préparer des oxydases très actives et qui ne contenaient ni fer, nù manganèse, prouvant par là que ce n’est pas à ces éléments qu'il faut attribuer l'action oxydasique, comme le veut la théorie de M. G. Bertrand. Dans une seconde série de recherches, M. Bach s'est occupé de l'influence des sels métalliques sur l'action des oxydases. Il arrive à la conclusion que les sels de Fe et de Mn accélèrent l'action des oxydases exacte- ment comme le sulfate ferreux accélère l’action oxy- LE 1 Archives des Sciences physiques el naturelles, 4° sér., t. XXIX. p. €49. 632 dante du peroxyde d'hydrogène. Les oxydases étant des corps facilement oxydables qui forment des peroxydes au contact de l'oxygène libre, il y a entre les deux catégories de phénomènes un parallélisme incontestable. $ 5. — Zootechnie L'élevage du renard à fourrures. — Les ani- maux à fourrures ont été, depuis quelques années, traqués avec un tel acharnement que la destruction de certaines espèces est imminente. Aussi a-t-on songé à remplacer l'animal sauvage par un animal domestique dont on pourrait protéger la reproduction et s'assurer les produits. Malheureusement, les ani- maux à fourrures sont généralement d'espèces féroces et insociables, qui se plient mal à la domestication. Cette difficulté n'a cependant pas empêché des essais d'élevage en domesticité d’être tentés sur divers points, spécialement dans les îles Aléoutiennes, au Canada et aux Etats-Unis. En particulier, l'élevage du Renard bleu et du Renard argenté semble être entré dans une voie prospère, ce qui à engagé le Bureau d'études bio- logiques du Ministère de l'Agriculture des Etats-Unis à entreprendre une enquête sur cette question. Les résultats en ont été consignés dans un récent Rapport, que M. P.-A. Pichot analyse dans un des derniers numéros du Bulletin de la Société nationale d'Accli- natation de France (1910, p. #{ et suiv.), auquel nous empruntons les détails suivants : Les localités favorables à l'élevage du renard à four- rures occupent une zone qui s'étend à travers l’'Amé- rique du Nord, parallèlement à la zone climatérique du Canada, du Maine au Dakota. Il n’est pas nécessaire, d’ailleurs, que l'emplacement sur lequel on veut éta- blir un ranch, ou ferme à renards, reproduise exacte- ment les conditions d'habitat qu'affectionnent ces ani- maux. Il faut seulement éviter les enclos trop étendus, où les animaux resteraient trop sauvages, et le voisi- nage des agglomérations, qui tiendrait les renards dans un élat d’agitation constante. Une surface d’un hectare sera amplement suffisante pour organiser un élevage important. Le terrain sera divisé en parquets de 42 mètres de côté, dont chacun sera affecté à un couple d'animaux auxquels on don- nera pour abris des niches ou des tonneaux où les renards pourront pénétrer par un caniveau en planches formant un coude, à l'instar des terriers qu'ils se creusent naturellement. Ils se chargeront eux-mêmes de récolter la litière nécessaire pour meu- bler leur appartement. Les clôtures seront en gril- lages métalliques de dix pieds de hauteur, enfoncés en terre de deux pieds, pour que les captifs ne puissent pas s'évader en fouillant à la base ; comme les renards sont de hardis grimpeurs, un bavolet, maintenu par des potences, sera disposé de facon à rejeter à l’inté- rieur l'animal qui voudrait escalader. Une des condi- tions de réussite est que les animaux jouissent d’un calme complet; le gardien devra seul pénétrer dans l'enceinte pour donner à ses pensionnaires les soins dont ils ont besoin. A l'état sauvage, les renards ont une nourriture variée ; ils mangent des souris, des lapins, des oiseaux et des insectes ; à certaines saisons, ils consomment une grande quantité de baies. La viande proprement dites n'entre que pour une faible part dans leur ali- mentation naturelle. L'éleveur devra donc éviter d'en donner trop. La ration normale d’un renard en capti- vité est de 125 grammes de viande, poisson, pâtée de farine et un quart de litre de lait écrémé. Il faut lui distribuer cette pâture d’une façon régu- lière, tous les jours à la même heure, ce qui con- tribue à l’apprivoiser et à le familiariser avec son gar- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE dien. On mettra de l’eau bien pure à sa disposition. Les renards n’ont qu'une portée par an : elle varie de 2 à 8 petits, la moyenne pour les animaux adultes étant de 5. C’est alors qu'il importe de laisser les reproducteurs bien tranquilles, sans quoi la mère, inquiète pour la sécurité de ses jeunes, passera son temps à les transporter d’un point à l'autre de son enclos avec l'idée de les mieux cacher, et finira par les faire périr. Le grand objectif de l’éleveur de renards est d’obte- nir par la sélection les fourrures les plus foncées. Elles ne se rencontrent que d’une facon exceptionnelle à état de nature et réalisent les plus hauts prix sur le marché. Le renard argenté, dont toutes les nuances vont du gris clair au noir le plus pur, n’est, en effet, qu'une variété locale du renard rouge d'Amérique, et, quoique chez les renards élevés en captivité il y ait quelquefois des rappels de la couleur primitive, les renards argentés se reproduisent pareils dans les fermes des Etats-Unis. On peut juger des profits que pourront réaliser les fermes à renards qui seront arrivées à fixer la nuance recherchée dans le commerce par ce fait qu'un ar- genté, même de couleur claire, a une valeur mar- chande de 500 francs; les noirs purs valent de 2.500 à 10.000 francs. La demande augmentant considérable- ment tous lesans, il n’y a pas à craindre que, de long- temps, les fourrures produites en captivité puissent faire baisser la cote, et les prévisions de gain sont assez fortes pour engager les éleveurs qui se trouvent dans des conditions favorables à persévérer dans leur entreprise. $ 6. — Physiologie La valeur comparative des divers modes d'éclairage au point de vue ophtalmolo- gique. — Au récent Congrès de la Société française d'Ophtalmologie, le Professeur Gariel a présenté sur cette question un volumineux Rapport que nous ne pouvons résumer, mais dont il nous semble intéres- sant de citer les conclusions, appuyées sur une dis- cussion détaillée de tous les faits connus : 1° Les lampes à vapeur de mercure re conviennent pas pour l'éclairage, sauf dans des cas très particu- liers. 2 Les lampes électriques à are conviennent à l’é- clairage en plein air et à celui des salles de grandes dimensions. Elles doivent être placées à une distance de plusieurs mètres des points où peut se trouver le public. Ces lampes seront enfermées dans des globes diffusifs ou holophotes, de dimensions suffisantes pour que le pouvoir éclairant spécifique ne soit pas trop élevé. Il peut y avoir avantage à donner une colo- ration jaune à ces globes. Dans les salles de dimensions restreintes, les lampes à arc peuvent être avantageusement employées pour produire l'éclairage par diffusion sur plafond blanc qui est très satisfaisant. 3° Les lampes électriques à incandescence peuvent être utilisées dans tous les cas; elles constituent lé- clairage de choix pour les pièces de dimensions res- treintes; il peut y avoir avantage à employer des ampoules en verre jaune ou entourées d’un globe ou manchon en verre jaune. 4° Dans les classes, études et ‘dans les ateliers où s'exécutent des travaux délicats, l'éclairage minimum doit être de 15 lux. 5° Dans les cas d'hyperesthésie rétinienne, il con- vient de prescrire l'emploi de verres colorés. Les verres jaunes, dont il existe en France de nombreux types convenablement gradués, sont actuellement à recom- mander. JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE 533 UNE MISSION SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE A TÉNÉRIFE Sous les auspices de l'Association Internationale contre la Tuberculose, dont le président est M. Léon Bourgeois, le Secrétaire général honoraire de cette Association, le Professeur Pannwilz, à organisé une Mission scientifique dans l'ile de Ténérife. Le programme de l'expédition était très large el com- portait l’'élude de toutes les radiations qui traver- sent l'atmosphère terrestre : bien entendu, la plus grande part des recherches dépendait d’un ordre physiologique; mais, comme l'occasion était favo- rable, on à bien voulu nous demander de venir éludier la comète de Halley dans une station de montagne et rechercher si les conditions climaté- riques de l'ile se prêteraient à des observations régulières, soit au point de vue météorologique, soit au point de vue physique el astronomique. La Mission se composait de MM. Zuntz et Neu- berg, de Berlin ; Durig et von Schrütlter,de Vienne; Barcroft et Douglas, d'Oxford; enfin, un artiste francais, M. Plasse, était joint à l'expédition, pour prendre tous les documents nécessaires à l'illus- tration, au contrôle et à la description conforme des instruments et des expériences. Pourquoi avait-on fait choix de l'ile de Ténérife ? et quels sujets d'étude devaient être abordés? C'est ce que nous allons essayer d'exposer ici briève- ment. L'ile de Ténérife avait été choisie en tant que station de montagne et, à cet égard, il faut recon- naître que sa situation est parfaitement favorable. Dans la plaine, dans la vallée d'Orotava, le climat est remarquablement tempéré : la température oscille entre 18° et 24° environ entre la nuit et le jour, climat qui convient parfaitement aux malades el, mieux encore. aux convalescents. Puis, immédialement et sans transition, domi- nant directement la mer, se dresse le Pic de Teyde à l'altitude de 3.700 mètres, c'est-à-dire surpassant la plaine tout comme le mont Blanc domine les vallées environnantes. Sans doute, d'importantes expériences de physiologie furent déjà faites dans les stalions élevées de montagne, au mont Blane, au mont Rose, par exemple ; mais les saisons sont alors courtes et difficiles, le beau temps est éphé- mère : au contraire, le Pic de Teyde est accessible très facilement toute l’année; le régime normal au point de vue météorologique comporte un banc de nuages entre 4.000 et 1.500 mètres d'altitude, tan- dis que les parties supérieures continuent à jouir d'un ciel presque inaltérable. Dans ces conditions, on voit l'avantage de pouvoir, en loute saison, dans un climat facile, faire des expériences constantes el rapides entre les allitudes de 0 et de 3.700 mètres. C'est assez dire l'importance que peut offrir, déjà, l’île de Ténérife au point de vue scientifique : examinons maintenant les problèmes qui y furent étudiés. Î. — MÉCANISME DE LA RESPIRATION. MM. Zuntz et Durig étudiaient, en premier lieu, le mécanisme de la respiration en tenant compte des deux facteurs suivants : le soleil et l'altitude. Connaissant, dès le point de départ, les éléments normaux expérimentés constamment en labora- toire, il fallait poursuivre l'étude de ce mécanisme et faire les expériences en mer sur le navire, à terre au niveau de la mer, et aux différentes hauteurs. Pour cela, on va étudier la respiration dans un état de tranquillité corporelle absolue, par exemple tout de suite après le lever. L'opérateur aspire l'air libre, pendant un quart d'heure, en s'efforçant de donner à sa respiration l'allure la plus calme et la plus normale : c'est sur l'air expiré que vont porter les mesures, car, de la quantité d'azote, d'acide carbonique et d'oxygène expirée pendant la respi- ration, on peut déduire le volume total de l'air inspiré. Tout d'abord, pour mesurer le volume total de l'air expiré, on le fait passer dans un compteur à gaz ordinaire, dit compteur sec, composé de ballon- nets de cuir réunis par des plaques métalliques : bien entendu, on mesure les températures des gaz, à l'entrée et à la sortie, et on note la pression baro- métrique, pour avoir tous les éléments nécessaires au calcul des volumes absolus des gaz sur lesquels on opère. Pour étudier les produits de l'expiration, on fera, pendant l'expérience, un certain nombre de prises normales : les gaz destinés à servir ainsi d'échantillons passent dans un tube rempli d'eau acidulée pour empêcher l'absorption de l’acide carbonique par l’eau; on emploie à cet effet l'acide hypochlorique par exemple, ou, plus simplement encore, en campagne, le vinaigre. Si donc l’on admet que l'étude du gaz expiré ren- seigne exactement sur celui qui à été inspiré, on conçoit aisément que, ayant compté le nombre total des inspirations, on puisse en déduire le volume absolu d'une inspiration moyenne, calme et régulière. 634 JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE Muni des prises moyennes d'échantillons, c'est un appareil spécial qui va servir à mesurer avec précision le volume d'air inspiré en se basant sur l'azote expiré. On chasse la prise dans un tube vertical gradué (situé à droite de l'appareil), dont on lit le volume à la pression atmosphérique : le tube vertical contigu renferme un volume d'air ap- proché, et sert de tube témoin en ce qui concerne la température et la pression atmosphérique. On reprend le gaz en question, on le chasse et on ab- sorbe l'acide carbonique par la potasse ; on le ren- voie dans le même tube gradué pour effectuer la lecture du volume restant; puis on le chasse à nou- veau en le faisant passer dans une solution alcaline d'hyposulfite de soude pour absorber ce qui reste d'oxygène. On renvoie le gaz restant dans un autre tube gradué, plus fin, et, toujours en tenant compte d'un tube témoin, on en mesure le volume : il ne reste plus alors que l'azote. On à donc, par ce procédé, la composition exacte de l'air expiré en acide carbonique, oxygène et azote. Et, d'après l'acide carbonique expiré, on va pou- voir calculer la quantité d'oxygène utilisé dans l'organisme : en effet, aussi bien d'après les nom- breuses analyses effectuées jusqu'au sommet du mont Rose que d'après les expériences réalisées en ballon à des allitudes encore bien plus grandes, on sait que la composition de l'air est sensiblement constante avec 20,93 °/, d'oxygène, 0,03 d'acide carbonique et le reste d'azote. Ainsi ces expériences vont nous renseigner sur la quantité d'oxygène absorbée par minute, et la quan- lité d'acide carbonique éliminée pendant le même temps — les volumes étant rapportés à la tempéra- ture de 0° et à la pression atmosphérique normale. Si l'on mesure maintenant le rapport entre ces AN (8) raloire, ce rapport va nous permettre d'apprécier la nature des substances brûlées dans l'organisme. Ainsi, par exemple, si l'on mange beaucoup d'hy- deux quantités, le quotient » dit quotient respi- . drates de carbone, le rapport = se rapproche de l'unité : d'après les vieilles expériences de Regnault et Reiset, on peut rappeler que ce rapport est égal à l'unité dans la combustion des hydrates de car- bones. D'autre part, après un jeûne de quinze heures environ, pendant lequel on à brûlé des réserves de graisse, ce quotient respiratoire se rap- proche de 0,7. Mais nous ne pouvons nous étendre davantage sur ce sujet : c'est l'étude détaillée de ce rapport, suivant toutes les conditions extérieures et inté- rieures, soleil, altitude et nourriture, qu'avaient entreprise les Professeurs Zuntz et Durig. II. — VOLUME D'AIR INSPIRÉ. Les mêmes savants se préoccupaient d'étudier, au soleil et aux différentes altitudes, le volume d'air aspiré. Pour bien comprendre l'intérêt et la difficulté de ces recherches, il faut les rapprocher de la « respi- ration de luxe » de Mosso, se rappeler, avec les travaux de Richet, que nous sommes constamment en état de respiration de luxe, et avoir aussi en mémoire les belles expériences de Langlois. Mais il faudrait alors traiter le vaste problème de la « respiration », et nous devons nous borner ici à la description des expériences effectuées. Si le patient fait une station au soleil — et les expériences portent aussi sur des costumes. rudi- mentaires — il semble au début, suivant la hau- teur, que le volume total de l'oxygène nécessaire soit réduit; mais ce n'est pas un fait permanent : bientôt ce volume augmente nécessairement. Cette quantité d'oxygène, que réclament les com- bustions normales de l'organisme, est-elle cons- tante quelle que soit l'altitude? Cela semblerait devoir être à priori. Certes, les éléments sont assez variables avec les individus et avec les circons- tances, et il serait difficile d'établir une loi précise; mais on peut indiquer, cependant, le sens constant du phénomène : le volume d'oxygène nécessaire augmente d'une facon assez sensible avec l'altitude, en ne considérant que la quantite absolue de ce gaz nécessaire à l'entretien de la vie. C'est là un fait connu, el qui résulte notamment des expériences déjà faites au Mont-Rose à 3.000 mètres d'altitude. D'où provient donc cette dépense supplémentaire, cette combustion plus rapide? D'abord, la pression de l'air est moindre. Donc, pour absorber /a méme quantité d'oxygène, on est obligé nécessairement d'utiliser un volume total plus considérable : de ce fait, avec l'altitude, nos organes auxiliaires doivent travailler avec plus d'intensité, plus de fréquence, par exemple le cœur, les muscles respiratoires... Or, toute nécessité nou- velle entraîne un travail supplémentaire — d’où une combustion additionnelle, d’où nouveau besoin d'oxygène. Il est juste de dire, tout de suite, que cette explication apparaît comme grossière et que le processus est encore assez mystérieux : ce travail supplémentaire n'est pas considérable, en effet, et bien insuffisant pour légitimer l'augmentation considérable dans la consommation d'oxygène. Et tout cela peut être soumis à des mesures assez précises, car on sait que chaque litre inspiré en supplément correspond à une consommation de 3 à 8 centimètres cubes d'oxygène, tandis que chaque centimètre cube d'oxygène équivaut à 3 ca- lories; au reste, cette dépense supplémentaire, par JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE nouveaux efforts respiratoires notamment, n'existe pas avec la respiration artificielle telle qu'on la peut pratiquer sur un animal. Parallèlement, aussi, lon doil conditions de la respiration pendant que l'on effectue un certain travail : à cet effet, au lieu d'expérimenter au repos, l'opérateur effectue les mêmes mesures en emportant le gazomètre sur son dos. Ici, encore, la loi résultante est très variable cependant, toujours, on trouve considérer les selon les individus : que la quantité d'oxygène nécessaire pour effectuer un travail donné, un kilogrammètre par exemple, augmente avec la hauteur — et cette augmentation est même très rapide. Cette fois, aussi, la combustion plus rapide avec l'altitude dépend des travaux nouveaux imposés à nos organes auxiliaires, mais cette explication n'est encore que partielle. D'ailleurs, la perte de tra- vail sous forme de chaleur s'effectue très régulière- ment dans les museles : ainsi, par exemple, le froid finit par déterminer un tremblement qui entraine une dépense nouvelle d'énergie. L'expérience est de réalisation facile : dans un bain froid, tant que l'on lutte normalement contre le refroidissement, la consommation d'oxygène reste constante; à partir du moment où l’on se met à trembler, cette consommation d'oxygène augmente très rapide- ment, jusqu'à doubler en peu de temps. Et un phé- nomène tout à fait parallèle se produira dans un bain chaud : la consommation d'oxygène, d'abord constante, subit bientôt une augmentation; le début de cette augmentaliou coïncide avec le travail nouveau imposé aux glandes sudoripares. Hätons-nous d'ajouter que cette explication est la plus simple, mais aussi la plus rudimentaire pour des phénomènes fort complexes : nombre d'auteurs considèrent l’action du bain comme beaucoup plus difficile à élucider et, à cet égard, les expériences de Lefèvre constituent une très importante contribution. D'une manière absolue, le travail de chaque organe n'est pas mauvais et, inversement, chaque organe doit être entrainé à travailler; mais il est nécessaire, cependant, de placer l'organe dans des conditions favorables. Si l'on prend, par exemple, le phénomène de la transpiration, qui peut être obtenu brusquement en modifiant seulement le sang affluant au cerveau, on constate que, pour chaque individu en particulier, la production de la sueur s'effectue à une température à très peu près constante; dans l'air humide, on ne place point les glandes sudoripares dans des conditions favorables à leur travail, et celui-ci augmente sensiblement. Alors, pour le maximum de travail utile, il sera toujours préférable d'opérer dans l'air sec, car, dans le cas de travail intense, les glandes sudoripares ne | | 635 pourront pas suffire à défendre l'organisme contre l'élévation de température d'un air humide, If. — ETUDE DE LA TRANSPIRATION. Ce que nous venons de dire très rapidement montre assez l'intérêt qu'il peut y avoir à étudier le mécanisme de la transpiration, et la nature de sa production, dans le cas de la réalisation d'efforts importants, de travail physique considérable — auquel se prête si aisément l'excursion en mon- tagne : c'est donc encore un sujet d'étude auquel s'élaient consacrés les mêmes savants. Au départ, on pèse le voyageur ainsi que tous ses aliments ; on conserve ses excrétions, et on récu- père encore une partie de sa sueur au retour dans ses vêtements; le rincage de ceux-ci permettra ultérieurement lanalyse chimique de la transpi- ralion, analyse qui, jusqu'à ce jour, n'a pas donné d'indications bien utiles. Il reste à examiner le poids des substances vola- tiles excrétées : acide carbonique et vapeur d'eau, d'origine pulmonaire et autres évaporations, quan- tité qui atteint normalement de 6 à 800 grammes pour vingt-quatre heures. Puis il faut comparer ces excrétions volatiles au poids de l'oxygène absorbé. Mais on peut voir tout de suite que l'absorption par la respiration est minime et négligeable devant la ; : C dépense en vapeur d’eau : en effet, le rapport D” dont nous avons indiqué le minimum à 0,7, ne varie guère, suivant les diverses circonstances, et le poids d'acide carbonique ne surpasse guère journellement celui de l'oxygène que de 60 à 70 grammes; par comparaison, la dépense en eau atteint 3 à 4 kilogs par jour. Les pesées suffiront done pour renseigner sur la dépense lotale en eau. Dans les cas excessifs, comme dans le désert, on à pu enregistrer une perte d'eau de 10 kilogs; mais alors il y à danger réel pour l'organisme; pour les climats européens, le maximum de dépense, pour une marche de cinq à six heures, est de 3 kil. 5 environ. Ainsi, on le voit, il importe d'étudier l'eau éva- porée en fonction des volumes d'air inspiré et expiré, car c’est un facteur essentiel pour le main- tien de la température du corps, et il sied, par suite, de l'étudier, soit pour chaque kilomètre horizontal, soit pour chaque mètre d'élévation. Le Professeur Durig, montagnard éprouvé, s'est joué d'accomplir des raids remarquables dans le massif du Pie de Teyde, afin d'apporter quelque lumière en ces problèmes délicats. Enfin, on peut encore se placer au point de vue de l'élimination, par la sueur, de l’urée et du chlo- rure de sodium : en cas de sueur intense, en effet, 636 JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE 15 °/, au moins de l’excrétion totale proviennent des voies cutanées, soit en marche, soit en station au soleil; et, alors, au point de vue hygiénique, si l’on est dans une station élevée, il y a avantage pour la transpiration à avoir un air sec et un soleil fort — deux conditions admirablement rem- plies dans le massif central de l’île de Ténérife. L'évaporation d'un gramme d’eau équivaut à la perte de 514 calories; le refroidissement corres- pondant est complet dans la hauteur et non dans la plaine, mais il est alors moins grand par la peau elle-même et s'effectue en partie par les vête- ments. Il reste encore à étudier et à analyser l’urée excrétée par la peau, dont la nature est en relation certaine avec la quantité de sueur et, par suite, avec la quantité éliminée par les reins : c’est ce que permettront précisément de faire le lavage du corps el celui des vêtements. Et la question est encore du plus haut intérêt thérapeutique, puisque, dans les cas d'insuffisance ou de simple fatigue du rein, il y a avantage à éliminer le plus de déchets possible par le mécanisme de la transpiration — malgré l'in- suffisance reconnue d'un tel moyen de défense pour l'organisme en ce qui concerne l'élimination, d'autant plus qu'il s'agit des déchets et non unique- ment de l’urée qui, en elle-même, n’estpas Loxique. IV. — ALCALINITÉ DU SANG. Rien n'est plus délicat que cette question contro- versée de l’alcalinité du sang. Certainement le sang contient, mais en très petites quantités, des substances basiques au sens vrai du mot, telles que des bases ammoniacales ou alcaloïdiques ; d'ailleurs, au papier de tournesol et à divers autres réactifs, la réaction du sang est alcaline et correspondrait en intensité à 2 ou 3 grammes de soude caustique par litre, réaction due surtout au bicarbonate et au phosphate de soude du plasma, CO‘NaH et POfN'aH, sels qui ont la propriété de bleuir le tournesol rouge. Mais les sels dont dépend principalement cette alcalinité contiennent encore un H non saturé, remplaçable par un métal, c'est-à-dire possédant encore une fonction acide : c'est pourquoi l’on a pu parler aussi, avec raison, de l'acidité réelle du sang. De nouvelles expériences de Physique sont venues apporter une précieuse contribution à la Physiologie : entre deux solutions d’une même substance (deux solutions contenant un même acide, par exemple), dont la concentration est dif- férente, placées dans deux vases qui commu- niquent par un tube capillaire, il se produit une différence de potentiel proportionnelle au loga- rithme de la concentration; un procédé électro- métrique permet alors la mesure de cette différence de potentiel et, par suite, de déterminer la concen- tration, dans une solution quelconque, des ions H et OH. Suivant les données modernes, on admet que l'acidité vraie d’une solution est représentée par le nombre d'ions H en liberté dans la solution, et l'alcalinité vraie par le nombre d'ions OH en liberté. L'application de cette méthode physico- chimique a fait voir que le sang est un liquide fort près de la neutralité, car la concentration des ions OH est à peu près la même dans le sang ou dans le sérum que dans l’eau distillée. Ainsi, au point de vue de la Chimie pure, le sang ne serait ni acide, ni alealin : il serait à peu près neutre *. Cependant, quelle que soit l'élégance de ces méthodes nouvelles, et l'utilité possible de l’intro- duction des ions en ces matières, il est impossible de négliger les mesures titrimétriques et la réaction au tournesol, sur lesquelles on a basé la notion de l'alcalinité apparente du sang, aussi bien que tous les résultats expérimentaux fort importants qui résultent de l'application des anciens procédés. Ainsi, par l'injection de substances acides dans les veines d'un animal, Claude Bernard déterminait rapidement la mort, et ce fut la première démons- tration de l’incompatibilité de la vie avec l'acidité du sang; d'ailleurs, le même processus peut s'observer avec une simple diminution de la réac- tion d’alcalinité du sang, comme dans les troubles respiraloires dépendant du système nerveux et le coma; el, comme conséquence, même peu de temps avant la mort, on pourra sauver les ani- maux en leur injectant dans les veines du carbonate de soude. Puisque telle est l'influence nocive des acides sur l'organisme, rien d'étonnant à ce que celui-ci s'efforce de maintenir constant le degré d’alealinité du sang, dans tous les cas d'intoxication acide, exo ou endogène : ainsi, l'alimentation la plus acide ne peut rendre le sang acide. Ici intervient, comme souvent dans l'organisme, un mécanisme compensateur : l'organisme peut augmenter, en effet, dans ce cas, la production de la petite quantité d'ammoniaque qui se forme normalement, excès d'ammoniaque qui va saturer les acides et que l’on retrouvera dans les urines à l'état de sels ammo- niacaux; et c'est pourquoi, précisément, les her- bivores, qui ne possèdent point ce mécanisme, succombent beaucoup plus vite à l'intoxication acide. Enfin, il est bon de signaler deux autres particu- larités : le sang veineux présente une alcalinité 1 Cf. LanGLois et H. bE Varieny : Nouveaux éléments de Physiologie, 2° édition; Marnras Duvaz et E. GLeyx : Traité élémentaire de Physiologie, 9e édition, {re partie. Le JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE moindre que celle du sang artériel et l'exercice musculaire diminue notablement la réaction alca- line du sang. Vraie, ou apparente seulement, adoptons donc ici l'idée de l’alcalinité du sang, avec le papier de tournesol pour réactif, puisque ce procédé opéra- loire est à la base des intéressantes expériences que nous avons à décrire, et que nous avons suffi- samment montré les restrictions que l'on doit apporter à cette notion. L'alcalinité du sang diminue avec l'altitude, suivant une observation faite par Galiotti au mont Rose; le fait a été vérifié par MM. Zuntz et Durig qui, naturellement, devaient reprendre et com- pléter cette étude aux diverses altitudes sur le Pie de Teyde. Dans les Cañadas, à l'altitude de 2.000 m., ils ont déjà trouvé une diminution d’alcalinité de 10 °/,. Quelle est, au point de vue physiologique, l'im- portance de cette remarque? et cette diminution est-elle un danger? Il est difficile, actuellement, de répondre complètement à ces questions, mais il semble bien que l'insuffisance d'oxygène que crée directement la hauteur ait des effets, des inconvé- nients plus rapides que la diminution de l’alcali- nité même du sang. Lorsque Crocé-Spinelli mourut, à l'altitude de 8.000 mètres, il y avait sans nul doute défaut d'oxygène; mais, d'autre part, on ignore quelle pouvait être la réaction du sang. Si cependant, expérimentalement, on étouffe un animal, on trouve un défaut d’alcalinité bien avant que le sang ne soit neutralisé ; mais si, au contraire, l'animal fait des efforts musculaires de défense, il peut alors mourir avec neutralisation du sang. Tout ceci rentre dans un système assez logique, car les muscles actifs produisent de grandes quantités d'acides, auxquels il faut pouvoir suppléer par de grandes quantités d'oxygène. La quantité d'oxygène absorbé suffit générale- ment pour brûler totalement les substances dans les organes actifs et éviter ainsi de fâcheuses accu- mulations de résidus ; cependant, d'un autre côté, le travail peut encore continuer si la quantité de sang n’est pas proportionnelle à l'activité des organes : c'est l'expérience de la grenouille dans l'azote, qui travaille encore, mais moins longtemps que dans l'oxygène, — et ceci doit être rapproché de la vie anaérobie, qui produit des substances inter- médiaires entre les substances nutritives et les produits finaux, eau et acide carbonique. Si, alors, l'organisme produit de telles réactions, avec for- mation d'acide lactique, acide butyrique, l’alcali- nité du sang diminue; sans doute, les produits tels que l’acide lactique ne constituent pas un danger immédiat pour l'organisme, car ce sont aussi des produits nutritifs; mais 1l faut en éviter cependant le neutre coïncide avec la mort de l'animal. l'accumulation, car le fait que sang devient Donc, inversement, on pourra en conclure que l'oxygène est insuffisant pour {ous les organes, el les muscles dont la vasceularisation est incompléte donnent des déchets. Comme conséquence sur la respiration, le sang ne peut plus contenir la même quantité d'acide carbonique et la tension de l'acide carbonique diminue : 1° par respiration plus forcée ; 2° par l'existence même de ces déchets. La respiration forcée élimine, en effet, une plus grande quantité d'acide carbonique; d'ailleurs, l'acide lactique agit comme l'acide carbonique er tant qu'excitateur des centres respiratoires. Expéri- mentalement, une injection d'acide lactique à un animal accroît sa respiration ; la respiration d'un air surchargé d'acide carbonique produit le même efet et, d'une manière générale, chaque acide introduit dans l'organisme tend à exciter l'évacua- tion des acides volatils. Il faudrait, d'ailleurs, rapprocher l'ensemble de ces recherches des remarquables expériences de Langlois et Garrelon, notamment sur la polypnée thermique, mais nous devons nous borner à la description des expériences tentées pendant notre expédilion. Nous avons essayé de montrer le soin avec lequel, en se placant aux points de vue les plus divers, les Professeurs Zuntz et Durig s'efforcent d'étudier le mécanisme de la respiration, soit au repos, soit dans les autres états. Avant d'en tirer des conclusions pour la thérapeutique, il est indis- pensable, en effet, de bien comprendre ce qui se passe à l'état normal. L'effet de la nourriture, elle- même, est important: si le dernier repas est digéré et que le sujet soit calme, avec les muscles au repos, l'oxydation est très constante; pendant la digestion, au contraire, l'oxydation augmente elle augmente le plus avec les albuminoïdes (substances azotées); elle est un peu moindre pour lescarbohydrates, moindre encore pour les graisses. Quel est alors le régime le plus avantageux ? question qui se pose notamment d'une façon angoissante dans le cas des tubereuleux : il serait peut-être prématuré de répondre dès à présent à une telle question avec assurance. V.— VOLUME TOTAL DU SANG. Le Professeur Douglas s'était proposé de recher- cher le volume total du sang circulant dans l'orga- nisme, et ses modifications possibles. La méthode employée est celle qu'indiqua Gréhant pour les animaux, il ÿ a une vingtaine d'années, mais qui 638 n'élait pas applicabie à l'homme, métho£e qui fut modifiée depuis par Haldane, d'Oxford. Le principe consiste à uliliser l'association que forme l'oxyde de carbone avec l'hémoglobine : l'affinité de l'oxyde de carbone pour l'hémoglobine est 70 fois plus grande que celle de l'oxygène. Ima- ginons donc, par exemple, que, sur 100 volumes de sang, il soit possible de fixer 29 volumes d'oxygène : si, à l'oxygène utilisé, on ajoute 1/10 d'oxyde de cirbone, le partage avec l'hémoglobine sera fait entre ces deux gaz dans la proportion de 20 à 7. L'expérimentateur prend done une quantité Fig. connue d'oxyde de carbone (200 centimètres cubes par exemple), et les mélange dans un sac de caoutchouc avec une quantité d'oxygène que l'on sait être suffisante pour pouvoir respirer pendant 10 minutes ; il S'abouche avec son sac, en aspire el expire constamment et exclusivement le contenu el, par conséquent, absorbe et fixe à très peu près tout son oxyde de carbone; il a donc maintenant, dans le sang, une quantité connue d'oxyde de car- bone. Gräce à une piqüre et à une prise de sang, il est alors aisé d'avoir le pourcentage en oxyde de carbone par la méthode colorimétrique; si l'on constate que 10) centimètres cubes de sang ren- ferment à ce moment 10 centim?tres cubes d'oxyde de carbone, comme on connait par ailleurs la quantité totale d'oxyde de carbone introduite, on JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE peut en déduire, par simple proportion, la quantité totale de sang du corps. On pourrait croire, a priori, qu'il y ait des incon- vénients à respirer une atmosphère aussi différente de celle à laquelle on est habitué, et privée d'azote. Il n'en est rien : si l'oxygène utilisé est bien pur, on peut ainsi le respirer impunément, sauf cependant au cas où l'expérience devrait durer plusieurs heures, car il en résulterait alors une excilation pulmonaire importante. D'ailleurs, il y à une limite de concentration, et Paul Bert avait déjà constaté des troubles par la respiration 1. — VMoulage réduit de l'ile de Ténérile avec le Pic de Teyde, vu en plan. de l'oxygène sous la pression de 3 atmosphères. Les conclusions d'une pareille recherche ne sau- raient être exposées d’une facon formelle : d'abord, parce que la quantité totale du sang est variable d'un individu à l'autre; puis parce que cette étude méme est délicate : l'intoxication à laquelle on se soumet volontairement n'est pas rapidement pas- sagère, et cela peut intervenir dans les détermi- nalions successives. Rappelons, cependant, que la fixation de l'oxyde de carbone n'est pas définitive, comme on l'a eru pendant longtemps, et ne corres- pond pas à une sorte de destruction de l'hémo- globine : il suftirait de respirer de l'oxygène pur pendant un instant pour purger le sang de l'oxyde de carbone, en vertu même de cette proportionnalité daus les affinités, et ce fait entraîne la technique JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE 639 la plus simple contre les empoisonnements avec le gaz d'éclairage. Mais le problème soulève des questions connexes. La quantité lotale du sang, dans un même indi- vidu, est-elle constante? Question non encore élu- cidée. Quelle quantité est indispensable à un sujet donné, c'est à-dire quelles seraient Ics charges dangereuses, en plus ou en moins? Celle ques- tion, très intéressante aussi, n'est en partie résolue que pour les animaux : on sait alors que l'on peut doubler environ la quantité de sang avec du san de la même espèce, ou bien encore diminuer le torrent de 30 °/, environ de sa valeur. Mais nous ne pouvons insister ici sur ce point. Fig. 2. — Moulage de l'ouest de l'ile de Té On sail que la question est fort complexe : ces additions ou retraits de sang ne peuvent être instantanés et les tissus agissent comme réservoirs d'équilibre, abandonoant sang siignée, en absorbant en cas d’addition, de sorte que le torrent circulatoire, lui-même, n’est guère modifiable, et que d'autres phénomènes inter- viennent. Ainsi, si l'on pratique une saignée chez un adulte, le sang se reforme rapidement : mais si, les jours suivants, on fuit l'énumération des globules d'une part, le dosage de l'hémoglobine de l'autre, on constale que le retour au chiffre normal de ces deux éléments ne se fait pas parallèlement. Incidemment, M. Douglas reconnut ce fait très curieux que, lorsqu'on absorbe ainsi de l'oxyde de carbone, la faculté de distinguer les couleurs dimi- nue quand l’allitude augmente. Les recherches du Professeur Douglas sur le du en cas de a sang ne sarrélaient pas à celle s P quantitative : elles comportaient aussi l'« des globules du sang (corpuscules rouges, suivant la la quest 1 qu l'augmentatior lu hauteur, pour tendre à élucider simple pullulement ou de volume total de ces globules dans l'organisme question longuement controversée, mais non encore résolue la pression de l'acide carbonique dans l'air alvéolaire Le mème physiologiste étudiait également des poumons, en équilibre avec le sang. I trouve un peu plus d'acide carbonique à Urolava, au niveau de la mer, qu'à Oxford; puis il gagne en altitude, et là, de trois heures en lrois heures, érile avec le pie de Tevde, vu en élévation. l'acide carbonique diminue très rapidement, pour prendre son équilibre au bout de vingt-quatre heures — temps d'acclimatalion en quelque sorte. Cette diminution de l'acide carbonique est en con- cordance avec la diminution d'alcalinité que no- aient parallèlement MM. Zuntz et Durig, parce qu'une nouvelle substance du sang, l'acide lactique, excitait l'évacuation de l'acide carbonique. L'oxygène, bien entendu, diminue en même temps beaucoup plus que l'acide carbonique; mais, ici, la diminution est attribuable à la pression extérieure seule. Cette diminution de pression de l'acide carbo- nique n'offre, jusqu'à présent du moins, aucun intérêt pratique; il n'en est pas de même au point de vue théorique, car cette expérience fait com- prendre beaucoup mieux l'ensemble des effets de l'altitude. 640 JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE Entin, M. Douglas étudiait le phénomène de la respiration périodique à différentes altitudes, et après travail musculaire : le contrôle se fait ei, et par des analyses des gaz expirés durant les diffé- rentes phases de la respiration, et par des enregis- trements des mouvements du pouls et du thorax. VI. — DiSSOCIATION D& L'HÉMOGLOBINE. Le Professeur Bareroft étudiait la loi de dissocia- lion de l'hémoglobine, afin de connaître exacte- ment les conditions dans lesquelles elle se joint à l'oxygène aux grandes pressions (dans les pou- mons), et celles dans lesquelles elle s’en sépare aux basses pressions (dans les tissus) afin de fournir l'oxygène aux tissus : la loi de dissociation est-elle constante? variable d’un sujet à un autre? fonction des facteurs climatériques et, notamment, de l'alti- tude? Pour cela, on fait un mélange connu d'oxygène, de volume et pression connus, que l’on agite avec le sang à une température réglée, puis on mesure la quantité d'oxygène contenu dans le sang; après quoi on augmente la quantité d'oxygène, et on modifie la pression, pour répéter la même série d'opérations — et ainsi de suite. Ainsi, à 100 millimètres, pression normale de l'oxygène dans les alvéoles, la saturation est de 9,3 °,; cette saturation augmente encore si l’on augmente la pression, 2 atmosphères par exemple. L'opérateur à pu comparer ainsi les courbes de dissociation obtenues, soit en Angleterre, soit à l'altitude de 2.000 mètres dans le massif du Pic de Teyde; en ce dernier lieu, il constate qu'il faut une pression plus grande pour avoir la même teneur en oxygène — el cela seulement dans les pressions médiocres — de telle sorte, en conséquence physio- logique, que l'oxygène vient plus facilement dans les Lissus. Le procédé opératoire n'est pas entièrement nou- veau. Mais, alors qu'il fallait jadis utiliser une quantité de sang de 10 centimètres cubes environ, comme dans les mêmes recherches du célèbre phy- siologiste Pflüger, ce qui limitait grandement le nombre des expériences, M. Barcroft est parvenu, grâce à des dispositifs fort ingénieux et délicats, à obtenir la même exactitude avec des prises de 0 ce. 2 de sang, et même parfois de 0 ce. 4. On introduit le sang à étudier, sans contact avec l'air, au-dessous d'une solution diluée d'ammo- niaque; un tube témoin renferme du sang abso- lument saturé d'air ; on règle la température et on met les deux tubes en communicalion avec un manomètre différentiel qui, au commencement, indique l'équilibre; puis on met de l'oxygène en liberté par le ferrocyanure jaune de potassium. Le sang pauvre en oxygène absorbe jusqu'à tension de saturation à la pression atmosphérique ; l’autre, déjà saluré, n'absorbe rien, mais ne rend rien, car ils sont tous deux à la pression atmosphérique — en vérilé, il rend peut-être un peu d'oxygène parce que la température était plus élevée. Les expériences sont délicates et précises; mais le grand intérêt du problème légilime les efforts qui ont été faits dans cette direction, et les résultats obtenus sont déjà fort importants. VII. — SENSIBILITÉ DES MATIÈRES ORGANIQUES A LA LUMIÈRE SOLAIRE. Praliquement, presque tous les corps chimiques sont insensibles à la lumière directe et diffuse du Soleil, excepté les sels d'argent qui trouvent l'application de cette propriété dans leur emploi en photographie. Cependant, il y a deux ans, M. C. Neuberg à trouvé que les matières organiques, qui résistent normalement à l’action de la lumière solaire, deviennent photo-sensibles si on leur ajoute de petites quantités de sels métalliques : la réaction parait alors basée sur une action catalytique des rayons du Soleil, et ceci est d'autant plus intéres- sant que, évidemment, sous un soleil très actif, les matières organiques importantes des corps de plantes et d'animaux pourront se transformer plus rapidement. Par exemple, les corps albuminoïdes sont dis- sociés, les hydrates de carbone (sucres et polysac- charides) sont hydrolysés, et les produits de la diathèse sont aussi changés secondairement dans ces transformalions auxquelles sont certainement soumises les plantes; il parait, sans exception, se produire alors des corps carbonyliques, c'est-à-dire des aldéhydes ou des cétones, connus en Chimie pour la facilité de leurs réactions. Des processus de cette nature peuvent sans doute jouer un rôle important sous l'influence de l’inso- lation dans l'organisme des animaux et des plantes ; il est possible, par exemple, que l’action favorable des sels de manganèse sur la fertilité des champs de blé, action découverte par M. G. Bertrand, con- siste en une telle réaction catalytique des rayons solaires; et c'est aussi à des actions de cette nature qu'il faudrait attribuer, entre autres, le rôle de l'héliothérapie dans le traitement de la tuberculose ou d'autres maladies. C'est en se placant au point de vue final de la thérapeutique que M. C. Neuberg est venu faire, précisément, aux diverses altitudes dans le massif du Pic de Teyde, des expériences sur les chan- gements importants que l'on peut attribuer à la solarisation dans les substances biologiques. JEAN MASCART — UNE MISSION SCIENTIFIQUE A TÉNÉRIFE 641 VIII — ACTION PHYSIOLOGIQUE DU SOLEIL. M. von Schrütler, membre de la Commission administrative de la Ligne internationale contre la Tuberculose, est connu par ses mulliples ascen- sions en ballon et ses travaux sur l'influence de la pression barométrique sur la vie, aux grandes alti- tudes. C’est ainsi qu'il à pu confirmer les théories de Paul Bert dans un livre estimé : « L'oxygène comme moyen prophylactique dans les maladies causées par les variations de pression ». M. von Schrôtter a fait également des recherches d'ordre clinique, principalement en bronchioscopie, et il s'élait proposé comme plan d'études une question déjà commencée dans les ascensions de ballon mesure des coefficients d'extinction des rayons lumineux, mesures relatives el comparatives aux diverses allitudes d’après la méthode imaginée par Bunsen. De plus, par l'utilisation d'écrans intermédiaires et variés, ce savant cherchait à déterminer d’une facon exacte la partie du spectre qui cause réelle- ment l'hyperémie solaire et la pigmentation consé- eutive de la peau; la constance avec laquelle on pouvait étudier à Ténérife lPaction solaire, sans interruptions nuageuses, facilitait l'étude de ces divers facteurs, étude qui, dans d’autres circons- lances, n'est guère possible ou du moins beaucoup plus difficile. Si, alors, on effectue des mesures de la radiation totale du Soleil, on voit que ces recherches physio- logiques de l’action sur la peau viennent heureu- sement compléter des travaux lels que ceux de MM. Zuntz et Durig sur la respiration, et permet- tent de baser l’action solaire sur des facteurs connus. D'ailleurs, en même temps, ces divers savants l'ai- saient leurs mesures de respiration et de pression sanguine, s'efforcant de déterminer la nature des radiations qui interviennent dans la production de l'acide carbonique. Tandis que les mesures de l'intensité totale de la radiation solaire s'effectuent toute la journée, on expose au Soleil des régions de la peau protégées par des verres colorés; si, par exemple, on à deux verres, l'un laissant passer les radiations du vert au violet, l’autre du bleu à lultra-violet, on cons- tate qu'il n'y à rien sous le premier, tandis que le second recouvre une brülure réelle; c'est bien la preuve que c’est la partie ulltra-violette du spectre qui agit, et l’on peut même délimiter la région active dans l’ultra-violet. Enfin, le D' Andresen, de Berlin, ayant imaginé un papier sensible au jaune, M. von Schrôtter fit des mesures d’intensités relatives du jaune et du violet aux diverses allitudes — toujours en effec- tuant la mesure des intensités totales auxquelles les deux précédentes doivent constamment être rapportées. IX. — Résumé. En résumé, le principal but de cette expédition, au point de vue médical et physiologique, élail d'étudier l'influence des grands facteurs climato- logiques sur les échanges des gaz dans les pou- mons, sur la circulation, sur la peau, etc. : les facteurs principaux étant le Soleil et l'altitude. Comme conséquence, il peut y avoir lieu à conclu- sions importantes en thérapeutique contre Îles mauvaises dispositions dues à l'hérédité, au sur- menage, à un état tuberculeux, ete.; el, comme on avait la facilité d'étudier ces divers facteurs aux altitudes les plus variées, l'influence de la diminu- tion de pression barométrique devait prendre nécessairement une place importante dans ces recherches. X. — MÉTÉOROLOGIE ET ASTRONOMIE. Pour notre part, nous devions effectuer des observations de la comète de Halley dans le voisi- nage de son périhélie et examiner les conditions propices de la région au point de vue des obser- valions météorologiques el astronomiques : en conséquence, nous avions élabli un campement sur le mont Guajara, à 2.715 mètres d'altitude, sommet le plus élevé après le Pic de Teyde, sur l'emplacement même où Piazzi Smith vint faire ses remarquables études spectroscopiques en 1858. Le lieu est particulièrement favorable : dessus des nuages normaux de Pile, on à partout à sa disposition l'horizon de la mer — sauf un peu au N.-W. vers le pic principal; on voit le Soleil de placé au- son lever à son coucher; il est fort rare que les cirrus viennent entraver les observalions, soit le jour, soit la nuit. Mais, d'autre part, le régime météorologique est très loin de celui dont les ouvrages classiques donnent la description; la sécheresse extrême entraine des exigences, et le nombre des travaux qui pourraient être utilement élucidés en ce point est tel qu'il mérite un exposé détaillé. C'est ce que nous ferons bientôt, en indiquant les résullats de nos recherches visuelles et photo- graphiques sur la comète de Malley elle-même. Jean Mascart, Astronome à l'Observatoire de Paris 642 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE' I. —— ÉVOLUTION DES IDÉES COSMOGONIQUES DEPUIS tubes cathodiques et les corps radio-actifs nous DESCARTES. Les hypothèses scientifiques ont cette destinée singulière que, dans le cours des siècles, elles dis- paraissent, puis surgissent de nouveau, rajeunies : et les protagonistes d'une doctrine, sans se douler de cette loi historique, s'acharnent à ruiner la doc- trine antérieure, au lieu d'y chercher la part de vérité qu'elle renferme toujours. La Cosmogonie n'a pas échappé à cette loi de l'histoire des sciences : Galilée a retrouvé ce que Pythagore avait deviné deux mille ans avant lui; Newton, en découvrant l'attraclion, a cru nécessaire de jeter l’anathème sur les tourbillons de Descartes. Mieux averti, nous ferons revivre l'idée carté- sienne en la modernisant, mais aussi en démon- trant la proposition suivante, qui met fin au duel séculaire où étaient engagées les deux doctrines depuis le xvrr siècle : Tout système sidéral a dans son existence deux périodes succédant insensiblement l'une à l'autre : 1° Ja période tourbillonnaire ou cartésienne, où la loi de Newton ne trouve pas d'application prati- quement appréciable, à cause des vitesses énormes des molécules, d'ailleurs très distantes les unes des la périodenewtonienne, régie par la gra- autres ; 2 vilation universelle. Descartes * avait reconnu l’analogie profonde qui existe entre les tourbillons de nos rivières, entrai- nant parfois autour d'eux des tourbillons plus petits, et les orbes des planètes entourées de leurs satellites ; il avait admis que l’éther remplissant les vides entre ces orbes pouvait, comme l'eau, se former en tourbillons astres de notre système : là seulement était l'hypo- thèse sujette à discussion; mais l'analogie tour- billonnaire, en dehors de cette hypothèse, gardait la valeur d'un fait qu'aucune théorie, même celle de Newton, ne pouvaitentamer. Les physiciens modernes, à lasuite de Michelson, ont admis que l’éther ac/uellement et dans le sys- tème solaire est sans tourbillons, « irrotationnel ». Mais que savent-ils de l'éther à l'origine des mondes, ou dans le lointain des régions sidérales où naissent les étoiles nouvelles ? Au lieu de l'éther, ne peut-on aussi admettre à lourbillonner un de ces ultra-gaz, circulaires entrainant les émanations, milieux corpusculaires, ele., dont les ont révélé les propriétés singulières et les vitesses énormes ? Ainsi, rien dans la Physique moderne ne contre- dit à l'idée de Descartes, qui subsiste entière. Si le philosophe avait analysé le fait tourbillonnaire qu'il mettait en œuvre, il aurait reconnu qu'un tour- billon, pour se former dans un fluide, exige un corps contrariant sa vitesse (rive, pile de pont, bateau), c'est-à-dire, en définitive, un dualisme. Par là, le dualisme aurait eu droit de cité en Cosmogonie depuis trois siècles. Mais, à l'époque de Descartes, l'idée tourbillon- naire avait le grand tort de ne pas se réduire en formules; la puissance de la formule newtonienne fascina Newton lui-même comme ses contempo- rains. Sous une apparente simplicité, elle allait occuper plusieurs générations d'analystes depuis Euler et Clairaut jusqu'à Laplace. Puisqu'elle expliquait si bien tous les phénomènes actuels du systèmesolaire, Newton etses successeurs pensèrent qu'elle devait rendre compte de ses origines : les tourbillons ne pouvaient donc être que ridicules, suivant l'expression de d'Alembert. Newton crut facile de réduire à néant l'idée car- tésienne en relevant une prétendue contradiction entre la troisième loi de Képler et la loi des aires suivie par un tourbillon dont le diamètre varie ‘. Mais son raisonnement, que Faye qualifie de magis - tral*, ne prouve rien contre les tourbillons : ear il contient une lriple pétition de principe en suppo- sant implicitement un seul corps originel, la loi des aires applicable (elle ne l’est pas dans le cas du choc de deux corps) et l'égalité de la vitesse de révolution d'une planète et de la nappe où elle se forme, égalité qui ne saurait exister puisque la planète tourne sur son axe précisément à cause de la différence de vitesse des nappes. Au xvu siècle, la Cosmogonie allait s'éloigner de plus en plus de l'idée cartésienne. Cependant Buffon, si décrié depuis, avait bien compris que: l'attraction ne pouvait tout expliquer sans une impulsion tangentielle primilive, et il admit que les planètes étaient nées d’un choc et d'un dra- lisme, le choc tangentiel d'une comète sur un soleil préexistant dont elle aurait détaché des parcelles. Il était ainsi plus près de la vérité que ses succes- seurs Kant et Laplace, qui voulurent faire sortir le 1? Cet article est extrait d'un Æssai de C‘osmogonie tour- billonnaire, sous presse chez M. Gauthier-Villars. ? Voir H. Parexty : Les tourbillons de Descartes Science Moderne. Paris, 1903. et la | ! Ces deux lois donneraient, pour la durée de révolution T d'une planète située à la distance R du centre, T — R#/2, T— R?, ce qui serait évidemment contradictoire. ? Origine du Monde, p. 110. 7 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE 643 monde solaire d'un systéme monisle, une nébu- leuse sphéroïdale en rotation, constituée par un soleil central entouré d'une vaste atmosphère dont discontinue aurait produit les la condensation anneaux planétaires. Les théories et les faits découverts au siècle der- nier ont entièrement ruiné l'hypothèse de Laplace : des astronomes comme Stockwell, Newcomb, Moulton, Halm, Vogel ont montré les désaccords théoriques qu'on en déduit : le Soleil devrait avoir une durée de rotation de quelques heures au lieu de vingt-cinq jours; la condensation n'aurait pu pro- duire que de petits astres et non de grosses pla- nètes; l'immensité de son orbile n'aurait pas per- mis à Neptune d'être déjà condensée. La perma- nence, depuis l'origine, des seuls anneaux connus, ceux de Saturne, semble contredire l'idée qu'un anneau planélaire doive se condenser en un seul point de sa circonférence. Malgré la tentative d'E. Roche, on ne comprend pas comment les anneaux planétaires provenant d'une même atmosphère ont pu être séparés par des vides immenses. Une pla- nète (Uranus) à son axe couché dans l’écliptique. Il y a des révolutions rétrogrades (Phébé, VIIT de Jupiter) dans des systèmes à révolutions et rota- tions directes. Un satellite (Phobos) tourne autour de sa planète (Mars) en trois fois moins de temps que celle-ci sur son axe. Tous ces faits sont incom- palibles avec l'hypothèse de Laplace. II. — RECHERCHE D'UNE NOUVELLE UYPOTHÈSE COSMOGONIQUE. Le problème que Laplace s'était posé était bien limité, puisqu'il se donnait le Soleil tout formé avec sa rotation; la Science moderne a le droit d’être plus exigeante. En retour des riches matériaux qu'elle nous offre, accumulés depuis cinquante ans par la photographie et le spectroscope, elle peut nous demander d'ériger la Cosmogonie en une discipline véritablement scientifique : trouver les mouvements précis des molécules cosmiques pri- milives, par là arriver à une explication complète, qualitative el quantitative, des particularités du système solaire et des systèmes sidéraux, voilà dans toute son ampleur le problème cosmogonique à résoudre, dépassant de beaucoup en portée l'essai de Laplace. Mais, plus le problème s'agrandit, plus il faut, pour le résoudre, s'affranchir de tout esprit de système, en s'élevant à une hauteur de vues adé- quate à la grandiose harmonie des phénomènes naturels. L'Astronomie actuelle est confinée dans l'étude des conséquences de la loi de Newton; il faut en sortir pour parcourir le cyele des sciences qui peuvent nous éclairer sur l'origine des Mondes. Dans nos laboratoires, l'électricité et la chaleur font naitre des forces incomparablement effets presque toujours négligeables. Pourquoi n'en au plus grandes que l'attraction, dont Îles sont rait-il pas été de même dans le grand laboratoire cosmique d'où sont sortis tous les astres? Par la gravitation, la Terre ne tombe vers le Soleil que de 3 millimètres par seconde, landis que la vitesse orbitale imprimée à ses molécules par les forces primitives inconnues est dix millions de fois plus grande (30 kilom.-sec.). Et cet exemple est encore bien insuffisant; dans un tube cathodique, où la malière très dispersée est dans un vide quasi- sidéral, la physique des radiations à appris à me- surer des vitesses de corpuscules s'élevant jusqu'à = 15.000 kilom.-sec. Qu'on imagine, dans une vaste nébuleuse, des molécules ayant vitesses de 75.000 kilom.-sec., et l'on voit nette- ment que l'attraction ne pourra jouer aucun rôle mesurable dans un tel ensemble. Ainsi, on peut déjà concevoir une Mécanique céleste, applicable aux milieux cosmiques très rares, qui soit sensiblement indépendante de la loi de Newton et qui ait amené les masses primitives jusqu'aux orbites stables où les fixe maintenant l'attraction. La Physique nous apprend encore que, dans la Nature, tout procède de riLrations : lumière, cha- leur, électricité. L'atome chimique est caractérisé par ses vibrations ou longueurs d'onde }; mais, d'après les vues si fécondes de Lorenz, l'atome ne serait qu'un système solaire en miniature: où sont donc les vibrations caractéristiques de l'atome cos- mique qu'est notre système solaire? Or À mesure un /emps défini pour l'atome, puisque À=VT (V vitesse de la lumière); dans le système solaire, les temps T caractérisent les durées de révolution des planètes, ou, par la troisième loi de Képler, leur distance au centre; par suite, les À de vibra- tion des électrons dans l’atome sont corrélatifs de ces distances pour les planètes : en d'autres termes, la mystérieuse loi de Bode est le résultat d'une vibration primitive. Quel enseignement nous donne maintenant l'his- toire naturelle sur la genèse des organismes? A un certain degré de complexité, ils sont toujours en- gendrés par un dualisme. Pourquoi le système solaire échapperait-il à cette loi universelle qui met à la naissance d'un organisme un dualisme et discrètes des un choc? L'observation confirme aussitôt cette induction, puisque les étoiles nouvelles (Novæ) sont bien dues au choc de deux corps, d'après la belle théorie de Seeliger et Halm. Une Nova, dont la lumière subite a bientôt des oscillations périodiques, s'en- toure d'anneaux nébuleux qui s'épanouissent au- 644 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE tour d'elle et ont pu être photographiés dans la Nova de Persée (1901, fig. 1). Cet épanouissement eut lieu avec une vitesse de Zordre de la vitesse de la lumière (en moyenne une seconde d’are en 24 heures). Ainsi, sans effort et sans équations, rien qu'en glanant à travers le cycle des sciences les idées les plus générales sur la Nature, mais surtout en nous évadant du cercle étroit où nous emprisonnait la loi newtonienne, une solution du problème cosmo- gonique apparait, réalisée par les Novæ, qui pré- sentent tous les caractères de la genèse d'un orga- car elles procèdent d’un dualisme et d’un choc produisant des vibrations que la physique des atomes nous invitait déjà à y rechercher. nisme : Fig, 4. — Nchulosités entourant l'étoile nouvelle de Persée, d'après une photographie prise à l'Observatoire Yerkes, 1e 20 septembre 1901. Qu'est-ce done qu'une Nova? Au lieu d'être le cataclysme destructeur de deux astres, comme le croient certains astronomes, serait-ce le fat lux annonçant à l'Univers la naissance d'un monde? Seeliger et Halm pensent qu'une Nova résulte du choc d'an astre éteint sur une nébuleuse; mais, à la vitesse moyenne des nébuleuses et des étoiles qui est d'environ 50 kilomètres par seconde, une telle d'un rencontre n'aurait aucunement le caractère choc : elle ressemblerait au passage de la Terre à travers la queue d'une comète. Arrhénius, qui a vu la difficulté”, suppose le cas, bien improbable, du choc de deux soleils qui se fondent en un astre unique. Mais alors la sphère céleste, depuis des millions d'années, serait dépeu- plée d'étoiles. ! Evolution des Mondes, p. 161 el suiv. Si l’un des termes du dualisme d'une Nova est bien une nébuleuse amorphe animée d’une faible vitesse de translation, quelle peut être l’autre entité cosmique capable de produire un choc et d'intro- duire rotation et vibrations dans le système? La Physique nous apprend que les particules gazeuses et ultra-gazeuses sont susceptibles des plus grandes vitesses, que les surfaces de discontinuité dans les gaz sont le siège de mouvements ondulatoires bien étudiés par Helmholtz, que les jets de gaz dans les milieux raréfiés présentent des ventres et des nœuds équidistants, photographiés par le D' Emden‘(fig.2). Une surface gazeuse à grande vitesse de transla- lion, comme un jet de gaz, mais douée aussi de rotation, répondra donc entièrement à l'entité cos- mique cherchée : on reconnait là un {ube-tourbil lou analogue à une trombe. Les astronomes ont-ils vu dans l'Univers des tourbillons cosmiques ? Assurément : les Pléiades, qui, par leur spectre et leurs masses nébuleuses, ont le caractère d'étoiles jeunes, sont reliées entre elles Fig. 2, — Ventres et nœuds d'un jet de gaz, d'après les photographies du Dr Emden. par des filaments rectilignes et nébuleux. Ceux-ci participent évidemment à la translation et à la ro- talion des étoiles qu'ils traversent : ce sont donc des tourbillons de matière néhuleuse qui, par raison de symétrie, dessinent l'axe des étoiles d’où ils semblent s'échapper. D'ailleurs, le mouvement le plus général constaté dans l'Univers est un mouvement Aélicoidal ou tourbillonnaire, puisque, comme la Terre entrainée par Ja translation du Soleil, tous les astres ont un mouvement de rotation et de translation. La spirale des nébuleuses spirales n’est qu'une hélice dilatée. Nous voici donc au seuil d'une nouvelle cosmo- gonie, qui sera fourbillonnaire. Veut-on, maintenant, une mesure de l'erreur commise par la cosmogonie de Laplace ? Incon- sciemment anthropocentrique, elle n'avait tenu compte que des rotations qui font nos jours et nos en dehors de la Science, aucun sens ne nous révèle la translation du système solaire vers Hercule, et cependant l'énergie cinétique de trans- lation de ee système est, à la vitesse de 20 kilom.- SaAiSONS : 1 Avant lui, H. Parenty (/9c. cit) avait, par des sondages dans les jets de vapeur, reconnu la même distribution pério- dique. ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE 645 see., 200 fuis plus grande que son énergie ciné- tique giraloire. L'erreur est aussi colossale que si, dans l'obus, ou oubliait la translation pour retenir seulement sa rotation sur Son axe. L'étude précédente amène tout naturellement à énoncer les propositions fondamentales de la Cos- mogonie tourbillonnaire : 4° À l'origine du système solaire a existé un tube- tourbillon de matière gazeuse (ou ultra-gazeuse), doué de grande vitesse de translation, dont Paxe BZ (fig. 3) était dirigé vers l'apex (point de la constellation d'Hereule vers lequel se dirige le Soleil) et dont le plan de rotation était parallèle à l'écliptique XOX'”. = \Z frs S &N Fig. 3. — Tourbillon et nappes primitives. — AA, nuage cosmique ; ZZ, tourbillon de rayon à ; B, point de choc de ZZ sur AA!; V, vitesse parallèle à OZ d'une nappe M: g(x—a), sa vitesse d'expansion radiale ; Z», plans des ventres de vibration du tourbillon ZZ ; V,, vitesse relative de AA! par rapport à ZZ au moment où se forment les noyaux S,, di, ; Si, 2e, Sat, profil de la nappe de Saturne : J, x,, Jap, profil de la nappe de Jupiter. L'angle de l'axe du tourbillon avec l'axe de l'écliptique est de 28° après la rencontre en B avec la nébuleuse ; 2° Ce tube-tourhillon a heurté dans un choc ana- logue à celui d'une Nova une nébuleuse amorphe AA'ayantune vitesse de translation faible par rap- port à la sienne ; On sait, d’ailleurs, qu'un tourbillon est perma- nent et ne peut se détruire que par un choc qui, en général, élargit ses spires ; ! L'écliptique, pris généralement comme plan de réfé- rence des orbites, devrait théoriquement ètre remplacé par le plan invariable du système, qui en diffère peu. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 3 Par le choc, le tourbillon primitif, en péné- trant dans la nébuleuse, vibrera de manière à pré- senter, sur sa longueur, des ventres et des nœuds équidistants (comme les jets de gaz): 4° À chaque ventre de vibration du tourbillon, 11 émettra une couche extérieure de sa matière en une nappe évasée sous [orme de tulipe concentrique à OZ et divergeant autour de cet axe. Les nappes émises par les ventres Z,,, Z planétaires. sont les 2appes FE III. — DÉMONSTRATION DE LA LOI EXPONENTIELLE DES DISTANCES PLANÉTAIRES ‘. La mise en équations du problème principal de la cosmogonie tourbillonnaire est maintenant pos- sible : il s’agit de déterminer la surface d'une nappe planétaire et, dans cette nappe, la trajectoire d'une molécule M. On peut d’abord négliger la vitesse U de la nébu- leuse en regard de la vitesse W du tourbillon, sup- posée de l'ordre de la vitesse de la lumière : la : Nr ; vitesse moyenne V — F d'une molécule M, paral- lèlement à ZZ', ne peut être modifiée que par la résistance rencontrée dans la translation à travers la matière, supposée homogène, de la nébuleuse. Si K est le coefficient de cette résistance supposée pro- portionnelle à V°, on aura : d2z e: L'AZNE (1) PK (%) É d'où (u) K! ptet 4 W \ et (2) 2 = ER LWRE + 1). Mais, dans le tourbillon primitif à l’intérieur de la nébuleuse, une molécule décrit une hélice dont le pas est inversement proportionnel à K : (3) (Q azimut de la molécule dans le plan XOY, B coefficient numérique.) Dans la nappe planétaire qui émane du tourbillon et à l’origine lui est tangente, l'équation (3) sera encore satisfaite, mais l'hélice décrite aura un rayon R de plus en plus grand, en raison de la vitesse : : dR d'expansion radiale u — STI D'après la propriété fondamentale du tourbillon, a ——_—_—_— 1 Cette démonstration, plus complète que celles publiées antérieurement (Journal de l'Ecole Polytechnique, 190$, et Comptes rendus du Congrès de l'Association pour l'Avance- ment des Sciences, 1908), donne la signification du coeffi- cient K et permet de calculer les vitesses et les temps. 15° 646 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN CUSMOGONIE il ne peut laisser échapper aucune molécule à la distance à de son rayon; la vitesse v s'annule donc pour R—à et pourra, en général, se mettre sous la forme : (4 Het — 3(R — à). cest homogène à une vitesse angulaire et ne peut différer que par un facteur numérique B, de la vitesse angulaire w en M, car u s'annule avec w et avec V, l'expansion radiale étant due à la force centrifuge w R° et à l'élargissement de la nappe par réaction de la matière nébuleuse qu’elle rencontre animée d’une vitesse — V. En différentiant (3), on trouve bien, en effet : (273 | qui montre que w et V s'annulent en mème temps. On a donc : (6) c—B;0. Les équations précédentes donnent, en dési- gnant par : l'épaisseur du renflement du tourbillon à un ventre : 1 R— a 1) Q = — 1) He = u B R— à {S) re = on 55 (9 © (R — 2) = w,8 € {#, vitesse angulaire initiale de la nappe). L'équation (7), qui peut s'écrire : (1!) R — a — ce8,Q, représente la projection parallèle à OZ sur l'éclip- tique de la trajectoire d’une molécule M dans la nappe : c'est une spirale différant de la spirale loga- rithmique en ce qu'elle à un cercle asymptotique de rayon à au lieu d'un point, et que l'angle & de la tangente avec le rayon vecteur, d’abord égal à 90° près de R—a, diminue jusqu'à cot x, = B, quand R augmente indéfiniment. L'équation de la surface de la nappe est : 10) VE 1— El Son profil dans le plan ZOX est la courbe loga- rithmique obtenue en remplacant R par x dans l'équation (8). Le problème de la trajectoire d’une molécule est donc complètement résolu : il faut maintenant prouver que les masses planétaires ont bien suivi ces trajectoires pour aboutir à l'éclip- tique OX. Puisque les ventres sont équidistants sur le tour- billon, le phénomène ondulatoire se reproduit identique à chaque ventre : le renflemente est donc le inéine pour toutes les nappes; leurs profils sont donc identiques, mais seulement déplacés parallèle- ment à BZ. Si z, est l'intervalle de deux ventres consécutifs, et qu'il y ait un nombre entier n +1 de ventres sur BO, la longueur z,—BO contient 2 intervalles égaux à z, : (11) Zn —= NZ4. Cherchons les distances x,, x,-1, …, x où les nappes issues des ventresz,, Z,_,...,Z, rencontrent l'écliptique. Ce sont les distances où une seule nappe issue de Z, rencontre les plans Z,Z,, ..., Z1-1 parce que les nappes se reproduisent par déplacement parallèle à OZ; (8\ et (11) donneront done : (0) € ou : 12) Xn — a = (X, — a)" ani" Les longueurs x,, x,,e doivent être exprimées avec une certaine unité qui, dans tousles systèmes, est le rayon de l’astre central. Prenons s— 1. La for- mule (12) donne alors avec une précision inespérée les distances des planètes et des satellites de tous les systèmes, comme le montre le tableau I. On obtient par surcroit le théorème suivant : Le rayon d'un astre condensé est égal à lépais- seur 2 du rentlement vibratoire de son tourbillon générateur. Sans reproduire ici les multiples conséquences, publiées ailleurs, de la théorie cosmogonique nou- velle, on peut remarquer que, pour chaque sys- tème, on trouve sans ambiguïté le rayen a de chaque tourbillon générateur. Pour le système solaire, ce rayon aété de 60 rayons solaires ou 0,28 en rayons de l'orbite terrestre. Quelques divergences appa- rentes (Lune, VI-VII de Jupiter, Japet) résultent de ce que ces satellites ne sont pas dans le plan équatorial de leur système, plan où le calcul théo- rique donne leur distance. La Lune n'est que le quatrième satellite de la Terre. La correspondance entre le système solaire et celui de Saturne est telle que les anneaux de Saturne sont en face de l'anneau zodiacal, et Titan en face de Jupiter. Deux exemples suffiront pour montrer que la nouvelle Mécanique céleste a autant de précision que la Mécanique newtonienne et que celle-ci reprend ses droits dès que les vitesses des masses sont ralenties au voisinage de l'écliptique. 1° On pourrait imputer à l'imprécision des for- mules de la nouvelle cosmogonie l'écart, en appa- rence inadmissible (0,6826), entre les distances réelle et théorique du satellite II de Jupiter, Il n'en est rien. Les distances des satellites 1, IH, IN, de Jupiter sont liées par la relation de Laplace : 2432 + 22,32 — 39,38, ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE 647 TaeLxau L — Loi exponentielle de distribution des Planètes et Satellites : X, — a — Système solaire. 914,45 (xXn — 0,28) = 1,883. DISTANCES calculées observées 0 ,2888 0,2965 0,3111 0,3386 0,3904 0 ,4878 Anneau zodiacal?. . cprncpuwius= | = Cérès : p. planètes Jupiter — Système de la Terre. Xn — 0.2 — 2,897. DISTANCES calculées observées 3,097 S.594 2%,52 70,66 60,27 Système de Jupiter. Xn — 0,195 — 1,7175». DISTANCES calculées observées 5.933 9,439 .057 prouramwe | Système de Saturne. Xn — 0,1 = 1,311n. DISTANCES SR calculées observées Anneau GC. : . . . 1,411 B 1,519 2,993 3,054 3.97% Mimas. . . Encelade Téthys Dioné . ouest | > —11—— Titan 12 Hypérion — X . .. PhéDE En (214) Rétro Système de Mars. Xn — 0,13 — 2,57. DISTANCES n calculées observées 2,170 6,74 Phobos . . Deimos . . 1 2 Système d'Uranus. Xn — 4,9 = 1,496n. DISTANCES calculées observées 6,396 1,138 8,245 9.908 12,390 16,105 21,66 Ariel Umbriel. . . Titania Obéron qui permettra, en différentiant,d'ex- primer da, en fonction de da, et da. En faisant le calcul au moyen des distances à,, a, théoriques, on trouve : da, — — 0,6854. Ainsi le satel- lite III s'est rap- proché depuis l'o- rigine de 15,7396 jusqu'à 15,7396 — 0,6854-— 15,0542, distance qui Fig. 4. — Tourbillor lunaire. coïncide presque exactement avec la distance réelle 15,057. 20 La Lune a une excentricité d'orbite e —0,0549 peu variable, ce qui s'explique parce que son orbite coïncide presque avec l’écliptique et que la Lune est seule satellite. Le nombre 0,0549 doit donc remonter à l’origine et pouvoir se déduire de la théorie tourbillonnaire. Au moment où le tourbillon lunaire, né dans la nappe LL, (fig. 4) issue du tourbillon terrestre TZ, s'est arrêté en L (position qui satisfait d’ailleurs aux lois de Cassini), il avait tendance à tourner cireulairement dans cetle nappe autour deT,, centre de gravité du tourbillon terrestre. Mais celui-ci, | avec la même masse, avanca ultérieurement de T, en T dans l'écliptique. L'orbite de L autour de T ne 648 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE pouvait qu'être excentrée de toute la différence entre LT, et LT. On a donc : à < LT TU ET, (4 Tree d'où e —0,0542. ; Ce calcul si précis montre l’interdépendance étroite de tous les phénomènes cosmiques, puisque e dans l'orbite de la Lune résulte des inclinaisons de l'orbite lunaire et de l'équateur terrestre sur l'écliptique. Les excentricités d’orbite dont la cause était inconnue dépendent surtout des inclinaisons d'axe. IV. — Loi DES INCLINAISONS DES AXES PLANÉTAIRES. DIMENSION DE LA NÉBULEUSE PRIMITIVE. DURÉE DE FORMATION DU SYSTÈME SOLAIRE. La figure 3 jouit d'une propriété remarquable : les profils des nappes planétaires ont sur OX etnon où 8 désigne l'angle de l'équateur planétaire avec l'écliptique 1 = 28° et a — 0,28. En donnant au rap- V port— la valeur ‘s le tableau ci-dessous montre avec quelle précision ce seul paramètre permet de déterminer les angles 8. L'équation (8) permet de trouver maintenant les dimensions absolues de la nébuleuse solaire pri- milive. On trouve que l'intervalle z, de deux ventres consécutifs était de 6,228 rayons de l'orbite ter- restre et que la dimension BO de la nébuleuse, soit 13z,, valait 80,96 ou près de 3 fois la distance de Neptune. L'épaisseur totale de la nébuleuse dans le sens BZ devait ainsi être voisine de 160. Par les équations du paragraphe précédent, on peut résou- dre le problème suivant : Puisque toutes les pla- nèles sont, à peu près, dans le plan de l’écliptique, TagLeau II. — Angles des équateurs planétaires avec l’écliptique. DISTANCES PLANÈTES calculé 24010" 21014! 15053! 90 0! 250 6! 121019" 1090 4! Terre . Mars TR LEE 150 petites planètes . Jupiter LE Saturne . (Uranus). . (Neptune) . à OBSERVATIONS réel actuel 23027! 23016! 16040! 20 $' 280 6! 980 12902 Varie de 21059! à 24036!. Lowell (1907). Astéroides les plus rapprochés du Soleil. Caleul par extrapolalion. sur OX la direction des axes des planètes corres- pondantes, comme si des tourbillons s’élaient formés suivant ces axes dans le plan de symétrie ZOX et d'un côté seulement des nappes. Cette difficulté nous arrêla assez longtemps jus- qu'au jour où cette formation des {ourbillons plané- taires dans les nappes put être attribuée à la vitesse U de la nébuleuse, négligée dans tous les calculs précédents. Si, en eflet, cette vitesse U tra- verse le plan ZOX d’arrière en avant du plan de la figure, ilviendra un moment où, près de l'écliptique, les vilesses V des nappes, s'étant réduites, pourront se composer avec elle et donner une vitesse rela- tive U, opposée à la vitesse tangentielle des nappes du côté OX (formation de tourbillons planétaires) et de même sens que la vitesse tangentielle du côté OX". Voilà le mécanisme très simple de l'accumulation des masses des nappes dans des tourbillons plané- laires situés uniquement à droite de OZ. En composant en M les vitesses V el 4 (x—4), on a de suite la direction de la tangente au profil par la formule : V cosi tas — COVH— - FT @{x— à) — V sin:” il a fallu que toutes les nappes parties à des ins- tants différents des ventres Z,, Z.... arrivent en même temps dans le plan OX: quelle condition ce fait impose-t-il aux vitesses W aux différents ven- tres? On trouve que W,—eW,=, (e—2,718)Par suite, W, vitesse initiale de choc du tourbillon pri- mitif, est liée à la vitesse V—20 kilomètres du sys- tème solaire dans l’écliptique par l'équation : W= «1 X 20 kil. = 74.830 kil. sec., soit le quart de la vitesse de la lumière. C'est la vitesse des corpuscules émis dans les tubes catho- diques par différents métaux frappés par les rayons X. B B à l'unité, on peut calculer encore que le temps mis par le tourbillon à parcourir la distance OB— 80,96 n'a pas excédé deux aus : ainsi la Nova solaire à mis à s'épanouir à peu près le même temps que la Nova de Persée 1901. Toutes les planètes sont contemporaines : leurs différences de densité tiennent non à la durée plus ou moins longue de leur condensation, mais aux En remarquant que + doit être très peu inférieur ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE proportions variables qu'elles contiennent de la matière de la nébuleuse et de celle du tourbillon dont les couches successives élaient classées par ordre de densité comme le sont les densités plané- laires de Saturne (0,70 — 1,33 — 3,91 — 5,50) à la Terre. La loi des inclinaisons m'a permis de découvrir dans le système solaire des faits nouveaux insoup- connés : 1° Les petites planètes ne devaient-elles pas pré- senter une inclinaison générale sur l'axe de l'éclip- tique qui fût l’analogue de l'inclinaison d’axe de la planète unique qu’elles remplacent? Cette ineli- naison (16°), calculée pour 150 petites planètes les plus voisines du Soleil, s'est trouvée vérifiée en réalité ; 920 Nous avions prévu qu'à moins d'un balance- ment important de l'axe de Mars analogue à celui de la Terre, cet axe devait avoir une inclinaison voisine de 21°14 que donne la formule, et très dif- férente de 28°51', valeur admise par Herschell. Or, Lowell, en 1907, a trouvé 23°16'; 3° Les tourbillons planétaires dirigés suivant les axes des grosses planètes ne doivent-ils pas avoir laissé leur trace dans notre système sous forme de petites planètes jalonnant leurs trajectoires? Et, en effet, sur une carte perpendiculaire à l’écliptique, les quatre petites planètes de la /amille de Jupiter dessinent une trajectoire à peu près perpendiculaire à l’écliptique comme l'axe Jovien, et les aphélies d'Eros, Adalberta et Hungaria et de Mars dessinent une ligne faisant avec l'axe de l’écliptique le même angle (21°) que l’axe théorique de Mars. Ces trois petites planètes font partie de la /amille de Mars” et la Terre peut aussi avoir, sur le prolongement de son axe primitif, une famille de petites planètes à laquelle semble appartenir WD 1906 (Annuaire 1910). La figure 3 révèle de suite la cause de l’ineli- naison de l’axe d'Uranus couché dans l'écliptique. Lorsque la nappe principale x,,, douée des vitesses de translation et angulaire maxima, monte dans la nébuleuse relativement immobile, elle y détermine un {ore-tourbillon dont les molécules ont leur rotation perpendiculaire à son plan, c’est-à-dire à l'écliptique. Uranus est bien, en effet, à une distance (19,2) supérieure à la distance (17,72) de la nappe X,, qui limite la région des planètes à rotation directe. Toutes les nappes planétaires intérieures ou e xtérieures à la nappe x. ont des vitesses angulaires décroissantes à partir de la distance x,,— 17,72 : dès lors, toutes les planètes formées à l'intérieur de ‘Note de M. E. Belot, présentée à l'Académie des Sciences par M. H. Poincaré, le 28 décembre 1908. la nappe x,, auront leur rotation de sens direct, toutes celles formées à l'extérieur de celle mème nappe auront leur rotation de sens rétrograd Les révolutions rétrogrades (Phœbé et VIT de Jupiter) ne sont pas plus difficiles à expliquer que les rotations rétrogrades, sans avoir recours à une capture invraisemblable d'astre cométaire. Assimi- lons les vitesses wkR et U, d'une nappe planétaire et de la nébuleuse, dont la première est de sens direct et l’autre de sens rétrograde (du côté OX), aux vitesses tangentielles de deux engrenages E E,, l’un intérieur et l’autre extérieur, comprenant un engre- nage satellite S. L'ensemble E,E,S est ce qu'on appelle en mécanique un différentiel : S aura une rotation rétrograde, quelle que soit la vitesse E ; mais sa révolution de la vitesse E, est supérieure à la vitesse E,, et, au con- traire, de sens rétrograde si la vitesse E, de sens direct tombe au-dessous de la vitesse E, de sens rétrograde. Il en sera de même pour un satellite S aux confins d'un système, là où la vitesse sur l’or- bite arrive à être inférieure à la vitesse relative U, de la nébuleuse. On en conclut que la vitesse U, en projection sur l’écliptique vers OY ne devait pas dépasser 3 kilomètres par seconde, et qu'il peut y avoir des planètes à révolution rétrograde au delà de la distance 100 dans notre système. sera sens direct Si V. — Loï DES ROTATIONS ET DES MASSES. APPLICATION A LA FORMATION DE LA TERRE. Une troisième loi du système solaire, non soup- connée jusqu'ici, est celle qui, analogue à la troi- sième loi de Képler pour les révolutions, donne les durées de rotation T des astres'. Le dualisme s’y manifeste encore par les deux termes de la formule additive qui exprime la loi; chacun des termes est relatif à un des genres de matières qui composent chaque astre et qui sont : la matière tourbillon- uaire m du tube-tourbillon, se condensant par les pôles de l'astre, et la matitre satellitaire mr, formant une ceinture équatoriale. Chaque terme de la for- mule est proportionnel à l’une de ces masses qui s'agrègent entre elles en proportions multiples simples, comme les atomes chimiques. Dans le Soleil,m=—8 m!; dans Jupiter 4 m—3 m', dans Saturne m'—2 m. Si l’on s’en tenait à l'idée simpliste que la force centrifuge écarte d’un centre les molécules et les empêche de s'y condenser, les astres similaires de plus grande masse devraient avoir la plus faible rotation; tout au contraire, pour les planètes, les masses augmentent en même temps que les vitesses 1 Note de M. E. Belot (Comptes rendus, 24 décembre 1906). La démonstration est donnée au Journal de l'Ecole Polytechnique, 1908. 650 ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE de rotation : Jupiter sont maxima ; la masse de Vénus (0,787), voisine de celle de la Terre, est donc incompatible avec une rotation lente : la formule donne, en effet, 28 h. 13" pour sa durée de rotation. De même, s'il y a des petites planètes, c'est qu'elles ont manqué de rotation : dès lors, la-position d'un astre par rapport à l'écliptique dépend d'un problème de balistique: les projectiles allongés de la balistique cosmique sont les tubes tourbillons qui se déplacent dans le milieu résistant de la nébuleuse: s'ils n’ont pas de rotation, comme les projectiles sur la Terre, ils manquent leur but, l’écliptique, et se dispersent avant de l’atteindre : de là la dispersion des petites planètes. Un autre résultat important de la loi des rota- | Fig. 5. — l'ormation de la Terre. tions est qu'en partant de données fournies par la rotation des planètes on peut calculer la durée de rotation du Soleil : on trouve ainsi une durée théo- rique de rotation de 26 jours, égale à sa valeur moyenne mesurée à 30° de latitude. Il reste à expliquer pourquoi la vitesse de rotation augmente avec la masse : c'est qu'un tube-tour- billon, formé par le /aminage de deux nappes con- centriques, les déforme en les attirant vers lui; plus grande est sa masse, plus la différence des rayons des nappes qui viennent à son contact pour lui conférer la rotation est grande; par suite, plus ces nappes différent de vitesse tangentielle et plus le tourbillon enserré entre elles tourne vite. L'application des principes qui précèdent à la Terre va donner de sa formation une théorie toute nouvelle, susceptible de vérifications expérimen- tales. Pour la Terre, m— 91 m'; le diamètre de son tourbillon générateur est 0,2 de celui de la planète, etla matière satellitaire arrive à l'équateur avec une vitesse de 8 kilomètres par seconde, soit seize fois la vitesse de rotation et la masse de | plus grande que la vitesse équatoriale actuelle. Le tube-tourbillon de la Terre NS se condense en un projectile plastique traversant le milieu résis- tant AA de la nébuleuse primitive, dont la densité augmente de plus en plus près de l’écliptique A'A' (Hig. 5). Ce projectile prendra donc la forme carac- téristique des masses plastiques se déplaçant dans un fluide : il sera aplati en avant de sa trajectoire océan Arctique), renflé dans l'hémisphère nord (maximum de l'extension continentale en M à 23°,27 du Pôle, c'est-à-dire au cercle polaire), terminé en pointe à l'arrière de la translation (continent an- tarctique dont la hauteur moyenne est de 3.000 m.} et déprimé latéralement dans l'hémisphère sud (océans). Les matières m et n', l'une par N et$, l'autre par l'équateur EE, arrivent en ondes périodiques con- centriques aux pôles et, en effet, la géologie révèle que les plissements anciens (huronien, calédonien, hercynien) sont à peu près concentriques aux pôles. Puisque c'est l'hémisphère nord qui rencontre le premier la résistance AA’ dans sa translation, la rotation Y est diminuée par le frottement plus que dans l'hémisphère sud, où l’énergie giratoire garde son intensité. Il y a donc forsion de la partie S dans. le sens direct. Prenons deux Lubes NS, tournant à frottement doux l’un dans l’autre, et centrons sur leur plan équatorial de séparation une sphère de poix P. Figurons sur un méridien T un alignement de scories primitives par des éléments » contigus. Dans quel sens se produira l’étirage de ces éléments, déterminant plus tard les lignes de fracture de l'écorce terrestre? Il suffit de faire tourner le tube $ dans le sens direct par rapport au tube N; l'alignement T prend la forme d'une hélice sphé- rique TT, : les éléments r se disjoignent et les, maxima de dislocation apparaissent près des pôles (à 20° des pôles, les continents cessent). Pour figurer sur cet ensemble l’action de la matière satellitaire, entourons d'une ceinture mé- tallique l'équateur ÉE et faisons-la tourner dans le sens direct : l’hélice TT, sera déviée en TT.T, reproduisant à s'y méprendre la ligne générale des continents (les deux Amériques, l'Afrique du Sud déviée à l’est de l'Afrique du nord, l'Australie à l'est de la péninsule indo-chinoise). Où seront les maxima de fracture? Le mouvement T, a rapproché de la direction du méridien les éléments r de l'hémisphère Sud (Afrique et Amérique du Sud), mais, au contraire, écarté encore plus ceux de l'hémisphère Nord qui s’'incelinent presque paral- lèlement à l'équateur. En effet, les dislocations maxima avec côtes parallèles à l'équateur sont entre 0° et 20° de latitude Nord (Amérique centrale, ÉMILE BELOT — LES TOURBILLONS ET LE DUALISME EN COSMOGONIE Cuba, golfe de Guinée, côtes de l'océan Indien, iles de la Sonde, ete.): les fosses méditerranéennes reproduisent à une latitude plus élevée des dislo- cations presque parallèles à l'équateur. Si, sur la surface plastique sphérique, on produit une dépression circulaire C semblable à celles que la contraction à produites sur la Lune (mers), la lorsion el la déformation équatoriale transforme- ront C en C,, dont la forme ressemble à celles de l'Atlantique et du Pacifique Nord. Ainsi, sans invoquer aucune théorie tétraédrique, la torsion aulour du pôle S produira des plis espacés périodiquement autour de lui, comme on peut le réaliser sur un ballon de caoutchouc, et les traits principaux du relief terrestre sont repro- duits fidèlement par les expériences précédentes qui traduisent la notion de condensation dualiste bipolaire et équatoriale. VI. — LE SOLEIL, LES COMÈTES, LES NÉBULEUSES SPIRALES, LA VOIE LACTÉE CONCLUSIONS. Le noyau du Soleil primitif est un disque de matière ayant un rayon de soixante rayons solaires, découpé par le tourbillon dans l'écliptique, et ayant son axe perpendiculaire à ce plan. Mais la masse qui, condensée, formera les 8/9 du Soleil provient des frainées TT dirigées vers l'apex et l'anti-apex, suivant lesquelles le tourbillon étire la matière de la nébuleuse primilive, conformément à la belle théorie de Schiaparelli. Ces trainées ont été identiques à celles que l’on voit dans les Pléiades. La condensation des traînées solaires faisant un angle de 28° avec l'axe de l'écliptique oblige l’équa- teur du Soleil à une inclinaison de T°, due en partie à un phénomène de précession. L'origine des nébulosités-sœurs qui, voyageant de conserve avec le système solaire, forment, d'après Schiaparelli, la matière cométaire, devient évidente : les comèêtes sont le résidu non condensé de la nébuleuse primitive; elles proviennent, en majeure partie, des extrémités des trainées solaires, comme l'indique la condensation de leurs périhélies vers les longitudes 90° et 270°*. Le même tourbillon peut rencontrer plusieurs nébuleuses, qu'il transformera virtuellement en autant de soleils, comme dans les Pléiades; ces soleils arriveront ou non dans la sphère d'attrac- tion les uns des autres (étoiles multiples, aligne- ments d'étoiles). Qu'un tourbillon de grande vitesse angulaire rencontre une nébuleuse assez dense, l'expansion des nappes sera rapide, mais elles seront presque ‘ Note de M. E. Belot (Comptes Rendus Ac. des Sciences, 8 janvier 1906). 651 plates, à cause de la difficulté de pénétration dans la nébuleuse; c'est l'inverse de ce qui s'est produit pour le système solaire. Alors les tourbillons secondaires se formeront presque au contact du tourbillon primitif et non après un parcours prolongé dans la nébuleuse; or, les équations données au chapitre IV subsistent toujours : les tourbillons secondaires décrirontalors la spirale de l'équation (7). Voilà l'origine d'une nébuleuse spirale, qui est due à un énorme tourbillon projetant en spires immenses les innombrables tourbillons d'étoiles qui formeront la voie lactée d'un Univers. La concentration de la matière d'une nébuleuse spirale sur deux spires en général reconnait la même cause que celle qui accumule des tourbillons planétaires dans le plan de symétrie ZOX du sys- tème solaire : c'est la vitesse de la nébuleuse pri- mitive. L'unité de plan de l'Univers, que l’on croyait bien descendre jusqu'à l'atome, remonte maintenant d'un système solaire à une nébuleuse spirale, et ces astres, en apparence si différents, sont justi- ciables des mêmes équations et des mêmes lois. Il peut être décevant de trouver qu'il n'y a point à l'origine du système solaire un chaos unique, homogène et isotrope, comme le rèvaient les au- teurs de Cosmogonie; et l'esprit cherche invinei- blement d'où viennent ces deux entités cosmiques : le tourbillon et la nébuleuse amorphe. L'esprit sera en partie salisfait : un tourbillon satellitaire nait dans une nappe 2 issue d'un tourbillon pla- nétaire {'; celui-ci nait dans une nappe n' issue du tourbillon solaire {”; la loi de récurrence est évi- dente : le tourbillon solaire {" est né dans une nappe z" issue d’un tourbillon {’” dont le diamètre peut avoir été égal à la distance des étoiles voisines et avoir formé la nébuleuse spirale de notre Uni- vers, la Voie lactée. L'œil photographique verra-t-il jamais la forme sidérale qui correspond à un éclip- tique d'Univers? Peut-être; mais déjà une ques- tion se pose : en remontant la chaine des mondes dans le temps, le dualisme cosmique paraît iden- tique à lui-même en tant que mécanisme; mais chacun de ses termes, tourbillon et nébuleuse, grandit indéfiniment dans l'espace; leur nombr diminue : il y a plus de satellites que de planètes et de planètes que de soleils. Ainsi, en allant vers les origines, tout tend vers l'unité, mais dans le dualisme : les dimensions des deux entités cosmiques confondent l'imagination, et rien ne fait prévoir comment elles peuvent dériver d’une unité première. Zgnorabimus, répéterons-nous avec Du Bois-Reymond. Mais la science se contente de. marcher à la Vérité par étapes longues et discontinues : voici primitives 652 que l’une d'elles paraît franchie, puisque des clartés nouvelles illuminent le problème cosmogonique. Newton se trompait quand il croyait à un antago- nisme entre les tourbillons et la gravitation uni- verselle : ces deux grandes doctrines se prêtent un mutuel appui. La matière des mondes est agitée en de vastes tourbillons avant de se reposer en des orbites stables sous l'empire de la gravitation; ce repos relatif dissimule l'agitation interne des tourbillons MARCHAND — PROGRÈS RÉCENTS EN RADIOTÉLÉGRAPHIE ET RADIOTÉLÉPHONIE atomiques qui constitue peut-être tout le secret de cette réalité peu intelligible de l'attraction : aux tourbillons d'ensemble, dont l'image se fixe dans les photographies des Novæ et des nébuleuses spi- rales, succèdent les tourbillons invisibles de la molécule chimique, justiciables de l'attraction, et la période cartésienne d'un système sidéral précède sa période newtonienne comme Descartes a précédé Newton. Emile Belot, Directeur des Manufactures de l'Etat, PROGRÈS RÉCENTS EN RADIOTÉLÉGRAPHIE ET RADIOTÉLÉPHONIE Dans un article antérieur (t. XX. p. 732), j'ai donné un aperçu récapitulatif des progrès réalisés en 1907 et 1908 dans les procédés radiotélégra- phiques et radiotéléphoniques, en insistant sur les tendances nouvelles indiquées par ces progrès. Les perfectionnements introduits en 1909 ont accentué ces tendances, qui consistaient principa- lement dans l'adoption de plus en plus générale des ondes faiblement amorties ou entretenues ; nous les analysons sommairement ci-après. I. — PRODUCTION DES ONDES. La méthode du générateur mécanique n’a pas pris d'extension visible, quoique des brevets aient été accordés pour la construction d’alternateurs à haute fréquence à des ingénieurs de la General Electric Company, et que celte question ait été portée devant les délibérations de l'Association des Ingénieurs électriciens américains. Marconi a mis son éclateur à disques en service à la station de Poldhu. D'autre part, M. Balsillie a constitué une Société pour l'exploitation de pro- cédés qui comportent l’utilisation d’un éclateur formé essentiellement d'un cylindre denté, à longues dents recourbées, tournant entre deux rangées de dents jouant le rôle d'électrodes; ce dispositif a une quinzaine de centimètres de lar- geur et une trentaine d'étincelles se produisent de chaque côté; l'intervalle de décharge est très réduit, mais la rotation du cylindre détermine une forte compression entre les dents fixes et les dents mo- biles; l’éclateur est alimenté sous une tension de quelque 15.000 volts. Un éclateur à disque tour- nant est également employé par M. Fessenden, no- tamment aux postes du Département de la Marine des Etats-Unis; la tension de décharge est de 12.500 ou 25.000 volts. Les perfectionnements les plus importants appor- tés aux méthodes dérivées de celles de M. Poulsen sont ceux qu'ont introduits MM. Jeance et Colin, qui ont pu établir des communications télépho- niques régulières à des distances jusqu'alors non atteintes; ces expérimentateurs ont ingénieusement surmonté les difficultés que présente la méthode Poulsen et donné toute leur valeur aux avantages de cette méthode en faisant jaillir l'arc générateur d’oscillations dans un milieu d'hydrocarbure entre une calotte de cuivre refroidie par circulation d’eau et un mince crayon de charbon, l'hydrocarbure étant choisi et s'écoulant de facon que le dépôt de carbone, résultant de sa dissocialion, sur ledit crayon compense exactement l'usure de celui-ci. Dans ces conditions, une fois le réglage initial réa- lisé, le fonctionnement devient parfaitement stable. L'arc est alimenté sous une tension de 200-295 volts approximativement (700 pour trois arcs). D'autre part, M. Collins, en Amérique, continue à utiliser son arc à 2.500 ou 5.000 volts, jaillissant entre deux disques tournant dans un champ magnétique transversal quile souffle et l’allonge; MM. Jeance et Colin n'emploient pas de soufflage de ce genre; ils estiment que le seul effet utile du champ est de fixer la décharge en un point donné des électrodes et cet artifice ne leur est pas nécessaire; le procédé Collins est soumis, avec d’autres, de M. De Forest et de M. Fessenden, à l’Amirauté des Etals-Unis ; l'inventeur compte que son procédé répondra aux conditions imposées (fonctionnement à 160 kilo- mètres de distance, sans réglage pendant cinq mi- nutes au moins); il poursuit en ce moment des recherches étendues sur le phénomène de l’are et étudie un nouveau détecteur thermo-électrique. La Polyfrequenz Elektricitäts Gesellschaft, qui exploite les brevets Peukert, le Wireless Syndicate, propriétaire des procédés von Lepelet Burnstyn, et la Gesellschaft für drahtlose Telegraphie, ont décrit des méthodes qui paraissent présenter beaucoup d'ana- logie et semblent être basées sur le principe indiqué en 1907 par le Professeur Wien, à savoir : l'emploi d'une étincelle courte, dans un cireuit à oscillations très amorties accouplé à un autre circuitne possé- MARCHAND -- PROGRÈS RÉCENTS EN RADIOTÉLÉGRAPHIE ET RADIOTÉLÉPHONIE 653 dant que peu d'amortissement; l'étincelle courte est brisée dès les premières oscillations, de sorte que c’est le circuit secondaire seul qui rayonne l'énergie en donnant des ondes faiblement amorties el uniformes. Pour que le système fonctionne régulièrement, il est nécessaire, d'après M. Peukert, que les élec- trodes soient formées de métaux difficilement vola- tilisables et franchement refroidies, c'est-à-dire douées d’une bonne conductibilité calorifique; elles sont constituées, dans les apparéils de la Polyfre- quenz Gesellschaft, par des disques de cuivre pur, électrolytique, argentés sur leurs faces en regard et placés à proximité l'un de l’autre dans une boîte; on introduit, au besoin, entre eux une goutte d'al- cool; l’électrode supérieure est réglable et peut être facilement séparée de l’autre ; les pièces sont parfois refroidies par une circulation d’eau ou d'air; on peut aussi les faire tourner au moyen d’un élec- tromoteur. Dans l’éclateur Peukert, le diélectrique est nor- malement l'air; dans d'autres cas, on a expérimenté l'emploi d’anneaux de mica pour tenir les élec- trodes à distance; mais il aurait été constaté que ce procédé n'est pas pratique, le mica devenant conducteur électrolytique après quelque temps de fonctionnement. Dans le procédé von Lepel, l'iso- lement des disques est fait au papier; les plaques peuvent alors être empilées l’une sur l’autre et l’on peut employer telle tension que l’on veut et, par conséquent, aussi telle puissance que l’on désire; M. Peukert a cependant préféré conserver des élé- ments indépendants, pour assurer la facilité du démontage et rendre les vérifications plus promptes. Avec un élément travaillant en continu sous 220 volts ou plus, ou en alternatif à quelques cen- taines de volts, il est possible de mettre en œuvre des puissances qui donnent des communications à plusieurs centaines de kilomètres de distance, et, dans les appareils de la Polyfrequenz Elektricitäts Gesellschaft, il est rare que l’on doive aller au delà de deux ou trois éléments; l'alimentation se fait en courant continu ou en courant alternatif indiffé- remment; l'alternatif a toutefois l'avantage de donner plus facilement les tensions nécessaires; lorsqu'on en dispose, il y a donc plus de liberté pour l’utilisation de grandes puissances. Suivant M. von Lepel, il conviendrait qu'avec le courant continu les électrodes fussent dissemblables, par exemple, l’une en bronze(—), l’autre en cuivre (+), et distantes d'une fraction de millimètre. On voit par là que les procédés nouveaux se diffé- rencient totalement des anciens ; ils ont sur ceux-ci des avantages marqués, s'il faut en croire les inventeurs, parce qu'ils rendent possible l'usage de tensions très basses, comparativement à celles qui entrent en jeu dans les autres procédés, d'où résulte une grande simplification de l'ensemble de l'outillage, des bobines de self, des condensateurs, des manipulateurs, etc. Ainsi, la Polyfrequenz Gesellschaft emploie des condensateurs isolés au papier; dans le système von Lepel, les condensa- teurs sont à feuille de mica. D'autre part, le rendement de l'éclateur à étin- celle courte est très élevé; les pertes, dans la trans- formation du courant continu ou à basse fréquence en courant à haute fréquence, seraient inférieures à 40 °/,; le rendement serait donc quadruple au moins de celui donné en pratique par la méthode de Poulsen; ces revendications ont été partielle- ment vérifiées par des expériences faites, en toute indépendance des compagnies exploitantes, par MM. Wasmus, Eccles et Makower, notamment. La dépense d'énergie serait d’ailleurs d'autant plus réduite que, l'étincelle courte s’établissant instan- tanément entre les électrodes, les procédés de tra- vail sont simplifiés et exempts de toute perte. IT. — RÉCEPTION DES ONDES. Dans les procédés qui utilisent des ondes entre- tenues, la réception directe au moyen de l’écouteur téléphonique n’est pas possible, la fréquence étant trop grande pour qu'il y ait production d’un son perceptible et les ondes ne se produisant pas en trains périodiques, comme cela a lieu avec les pro- cédés utilisant l’étincelle ordinaire de léclateur. Couper les ondes recues de facon à déterminer un son dans le téléphone est, comme on le sait, le but du tikker, dont nous avons parlé antérieurement, et rendre celui-ci inutile est l’objet des saillies ménagées sur les disques de l'éclateur Marconi, ainsi que des dispositifs Balsillie, Fessenden, ete. Il y à intérêt à ce que la réception s'effectue sans accessoire, pour que tous les postes puissent entrer en relation l'un avec l’autre; c'est en grande partie parce que ce desideratum n’est pas satisfait, en radio-télégraphie, dans la méthode Poulsen, que celle-ci à rencontré plus d'opposition qu'on aurait pu le croire et qu'elle ne s’est pas généralisée. On peut se dispenser du tikker lorsque, ainsi que cela a lieu dans les méthodes prémentionnées de Marconi, Balsillie, ete., il est fait usage d'un système oscillant dont les ondes présentent des variations périodiques d'amplitude; un moyen sim- ple d'y arriver et qui est utilisé chaque fois que les postes sont assez importants pour le justifier, dans le procédé Peukert, consiste à recourir à un alternateur de fréquence appropriée, 500 par exem- ple, pour que les émissions soient données en ac- cessoires de groupes d'ondes d'amplitude ondula- toire ; le téléphone rend alors un son musical très 654 MARCHAND — PROGRÈS RÉCENTS EN RADIOTÉLÉGRAPHIE ET RADIOTÉLÉPHONIE agréable pour la réception et qui permet de recon- naître facilement les signaux des bruits dus aux influences étrangères. Ce système est aussi employé par M. Fessenden avec l’éclateur rotatif, el les pointes de décharge sont alors disposées de facon qu'il y ait une décharge par alternance du courant. Les récepteurs redresseurs ont continué d'être étudiés, de même que les électrolytiques, et M. Jégou à pu réaliser des récepteurs de ce dernier genre ne demandant pas de pile; on semble accorder beau- coup de faveur, pour la radiotéléphonie, surtout, aux détecteurs thermo-électriques et à ceux basés sur l'effet d'Edison, dansle tube à vide. D'autre part, M. Rossi à imaginé un récepteur électromagnétique d'une grande simplicité — une facon de galvano- mètre à double fil d'Einthoven — et M. De Forest à établi un détecteur à hystérésis multiple, dérivé de celui de Marconi. M. Balsillie, qui emploie égale- ment un dispositif de ce genre, estime qu'ils ont la sensibilité des meilleurs récepteurs connus, tout en possédant beaucoup plus de régularité dans leur fonctionnement et en étant beaucoup moins déli- cats. M. Collins annonce qu'il met au point un détecteur électro-thermique capable de traduire des oscillations d'un cinq-millième d’erg. Il]. — PROCÉDÉS DE TRAVAIL. Si l’on parcourt la liste des brevets relatifs à la radio-télégraphie, on trouve qu'un nombre relati- vement élevé de patentes ontété prises pour divers procédés de travail. Le profane peut s'étonner de cette diversité de méthodes mises en avant pour une partie du problème qui paraît au premier abord devoir être facilemant résolue. Ceux qui ont pra- tiqué quelque peu la radiotélégraphie savent, par contre, que ce n'est point là une question secon- daire : c'est ainsi que, dans les premiers temps de la télégraphie sans fil par procédés Marconi, beau- coup d'échecs en pratique n'ont pas eu d'autre cause que l'imperfection du manipulateur. Avec les procédés employant l'are, comme celui- ci ne s'établit pas instantanément, on ne pouvait contrôler directement son circuit par la clef de transmission et l’on à généralement travaillé en produisant les ondes d'une facon continue, les Signaux élant donnés en modifiant momentané- ment, par exemple, la fréquence des ondes. Pour réaliser ces variations, différentes combinaisons ont été indiquées; nous en connaissons déjà quelques-unes : altération des constantes élec- triques, interruption de l'écoulement de l'hydro- carbure fourni à l'arc, ete.; on peut aussi modilier la composition du mélange. Dans le cas de l'étincelle courte, la solution se simplifie beaucoup, conformément à ce que nous avons dit, et ce n'est pas là une des moindres qua- lités de la méthode dont il s’agit, puisqu'il n'est plus nécessaire de produire les ondes que pendant la durée de chaque signal, au lieu d'user, comme auparavant, de l'énergie électrique d'une facon per- manente. M. Balsillie travaille comme en télégra- phie par fil, le manipulateur agissant directement sur le courant de lransmission el jouant en même temps le rôle de commutateur pour passer de la transmission à la réception el réciproquement. Pour le système à arcs, M. Peukert à imaginé de placer la clef en dérivation sur les arcs, qu'elle shunle au repos: on arrive ainsi au degré de stabi- lité voulue; mais le rendement est faible. En radiotéléphonie, il existe différents procédés permettant d'influencer, à l’aide du microphone, l'oscillation rayonnée. Le plus simple, qui a été employé par MM. De Forest, Fessenden, Poulsen, Majorana, etc., consiste à intercaler le microphone daos l'antenne d'émission, de facon à faire varier la résistance ohmique du circuit antenne-terre; ce procédé n'est toutefois possible que pour des com- munications à très faible distance, utilisant des puissances restreintes, car, à l'exception de quelques types qui ne sont pas encore entrés dans la pra- tique, les microphones actuels supportent difficile ment d'une facon permanente plus de 0,5 à 1 amp. Un autre procédé consiste à faire agir le micro- phone par induction, sur une self intercalée dans l'antenne, en utilisant un circuit accessoire; mais les variations d'amplitude ainsi obtenues sont faibles et ne se prêtent pas à des transmissions à longue distance; on pourrait aussi, d’après une: idée suggérée par l'auteur, établir le microphone en dérivation sur la source et arriver ainsi à moduler de grandes quantités d'énergie au moyen de microphones ordinaires; mais le montage en question ne procurerait pas un rendement satisfai- sant. Des dispositifs spéciaux ont été imaginés par MM. Fessenden, De Forest, Collins, Majorana. MM. Jeance et Colin emploient un système miero- phonique se composant de plusieurs microphones dans la composition desquels n'entre aucune malière combustible et dont un dispositif spécial permet l'attaque par la voix; ces microphones sont placés dans un cireuit relié d’une part à un point convenablement choisi d'un Tesla, dans l'antenne, et d'autre part à la terre; une résistance variable: sans self, une self variable et une capacité réglable servent à régler le courant dérivé sur ce cireuit, de manière qu'il égale le 1/10 de celui dans l'antenne: au moyen d'instruments pouvant supporter 0,8 am-— père, MM. Jeance et Colin n'ont pas éprouvé de difficulté pour moduler l'énergie nécessaire à des transmissions à 250 kilomètres de distance. H. Marchand. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 655 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Foüet (E.-A.), Professeur à l'Institut caiholique de Paris. — Leçons élémentaires sur la Théorie des Fonctions analytiques. Tome 11; 2 édition. Les fonctions algébriques. Les séries simples et mul- tiples. Les intégrales. — 1 vo/. 1u-8° de 265 pages. (Prix :9 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. En signalant la deuxième édition du tome I de cet Ouvrage, nous avons déjà insisté sur la valeur didac- tique de ces Lecons sur la Théorie des Fonctions. Nous avons déjà fait remarquer que l’auteur ne se borne pas à faire réimprimer simplement sa première édition. Il s'efforce de tenir compte le plus possible des progrès réalisés dans ce domaine au cours de ces dernières années, afin de pouvoir amener le lecteur au seuil de théories nouvelles. Tandis que le tome I est consacré aux fonctions en général, celui-ci apporte les notions fondamentales sur les fonctions algébriques et les fonctions délinies par des séries simples ou multiples ou par des intégrales. Après avoir donné un aperçu des méthodes de défini- tion et de représentation des fonctions, M. Foüet étu- die les propriétés des fonctions algébriques et leur représentation géométrique d'après Riemann. Il passe ensuite aux fonctions définies par les séries; il pré- sente d'abord une étude générale des développements convergents (des séries en général, séries entivres, produits infinis, séries trigonométriques, séries diver- gentes), puis il examine les séries classiques définis- sant des transcendantes élémentaires, depuis la fonction exponentielle et les fonctions trigonométriques jus- qu'aux fonctions eulériennes et aux fonctions sphé- riques et cylindriques. En suivant une marche analogue, l'étude des séries multiples et particulièrement celle des séries entières à plusieurs variables conduisent aux transcendantes d'ordre supérieur, telles que les fonctions de Weier- strass, de Jacobi et les fonctions théta à plusieurs argu- ments. ; Dans un dernier chapitre, l'auteur examine les fonc- tions définies par des intégrales, en ayant soin de mon- trer préalablement l'évolution qu'a suivie la notion d'intégrale depuis Leibniz et Newton jusqu'aux concep- tions les plus modernes. Comme dans la première édition, l’auteur a mis en lumière, dans un enchaînement remarquable, les résultats élémentaires de la Théorie des fonctions dans son état actuel. Son exposé contient d'intéressantes remarques, qui seront d'un grand prefit à l'étudiant, et par lesquelles il donne des vues d'ensemble sur l'Analyse et sur la compénétration mutuelle des diverses parties de la Science mathématique. H. Fear, Professeur à l'Université de Genève. Renard (Commandant Paul). —Guide del’Aéronaute pilote. — { vol. in-8° de 224 pages avec 54 figures. (Prix : 4 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Le goût des voyages en ballon libre s'est considéra- blement développé durant ces dernières années, et plusieurs manuels destinés à guider les aéronautes ont déjà été publiés. Celui que vient de faire paraître le Commandant Paul Renard se recommande tout parti- culièrement par la clarté de l'exposition et par la pré- cision des règles données pour la conduite du ballon. Ces règles, établies par le Colonel Charles Renard, il y a environ vingt-cinq ans, sont constamment appliquées ET INDEX par les aéronautes militaires ; elles sont donc aujout d'hui consacrées par une longue expérience. Après avoir rappelé les lois qui régissent les mouve- ments verticaux des aérostats et que Meunier avail énoncées dès 1784, après avoir défini les rôles des différents voyageurs à bord d’une mème nacelle, l'au- teur divise l'ascension libre en cinq phases, qu'il étu- die successivement. La première est le départ, comportant l'arrimage du ballon et de sa nacelle, le choix des cartes et des ins- truments, le pesage, le transport du ballon au point de départ, le làchez-tout et les manœuvres immédiates qui peuvent s'ensuivre. La deuxième phase est la navigation normale, pen- dant laquelle la grande préoccupation de l’aéronaute est d’enrayer les descentes accidentelles par des pro- jections judicieuses de lest : son but, en effet, durant cette période, est de prolonger le plus possible son voyage aérien sans reprendre contact avec le sol. Le Commandant Renard indique les diverses méthodes employées : méthode de l'observation de la vitesse de descente, méthode des rations de lest successives. Quel que soit le procédé adopté, la zone de navigation s'élève à mesure que le lest est dépensé (à moins que le ballon ne soit pourvu d’un ballonnet à air). Il convient d'ail- leurs de ne pas épuiser entièrement le lest en naviga- tion normale, mais d'en réserver une certaine quantité pour les phases suivantes. , La troisième phase est la descente, faite cette fois de propos délibéré pour se rapprocher de terre. Ici, il s’agit, avant tout, de modérer la vitesse verticale de l'aérostat : l'auteur donne la règle usitée pourlimiter cette vitesse à une valeur choisie à l'avance, qui est généralement de 2 mètres par seconde. Le ballon des- cend ainsi jusqu’à ce que le guide-rope touche le sol, et ce dernier, en se déposant à terre, assure l'équilibre de l’aérostat. On passe alors à la quatrième phase, à laquelle le Commandant Renard, usant d'un néologisme peut-être audacieux, donne le nom de guide-ropage. C'est la navigation au guide-rope, pendant laquelle le ballon s'équilibre à chaque instant sur la corde qui traine à terre, suivant les accidents du sol et franchissant les obstacles. L'action du guide-rope est souvent complétée par celle d'un stabilisateur appelé serpent, qui se dépose à son tour lorsque l'aérostat se rapproche da- vantage de laterre. Après le « guide-ropage » vient l'atterrissage, der- nière phase de l'ascension et souvent aussi la plus délicate. Cette phase comporte deux opérations : arré- ter le mouvement horizontal et amener la nacelle au contact du sol. L'auteur examine les diverses méthodes : atterrissage au guide-rope, atterrissage à l'ancre, déli- nit le rôle de la soupape, étudie le mode d'emploi ru- tionnel de la déchirure. Le volume se termine par des considérations géné- rales sur les ascensions libres et par quelques détails sur le dégonflement et les opérations finales. S Peut-être y a-t-il lieu de regretter que les règles principales de manœuvre, longuement exposées dans les divers chapitres et dont l'importance est si grande, n'aient pas été rassemblées à la fin de l'ouvrage dans un résumé concis qui aurait constitué, en quelque sorte, le catéchisme de l’aéronaute. Commandant Voyer. Prayon (Ern.). — Étude sur les Hélices propul- sives, en particulier les hélices aériennes. — 1 broch. de 92 p. Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. 2° Sciences physiques Joly (J.), F. R.S., Professeur de Géologie et Minéra- logie à l'Université de Dublin. — Radioactivity and Geology. An account of the influence of radioactive energy on terrestrial history. — 1 vol. petit in-8° de 287 pages avec figures. (Prix :9 fr. 40.) Archibald Constable, éditeur. Londres, 1910. Mystérieux en eux-mêmes, les phénomènes de la radio-activité nous ont apporté la solution de bien des énigmes. Celle des sources thermales et de leur action thérapeutique en est une, que lon peut considérer aujourd'hui comme complètement éclaircie. Celle de la chaleur interne des astres en est une autre, d’un très puissant intérêt. L'auteur de ce volume fut l’un des premiers, et peut-être le premier à signaler tout le parti que l’on peut tirer de la radio-activité pour l'explication des phénomènes thermiques que présente notre Globe. Il y a peu de temps encore, les physiciens mesuraient très parcimonieusement aux géologues la possibilité de la vie sur la Terre ; ils ne faisaient pas remonter très haut l’époque où la température était devenue assez basse pour que des organismes vivants pussent la supporter, et ils prédisaient pour un avenir relativement peu éloigné le moment où les êtres ne pourraient plus se défendre contre le froid. Mais on a reconnu, dans la désintégration des corps radio-actifs, une source puissante et presque indéfinie de chaleur. Un gramme de radium dégage un vingtième de petite calorie par seconde ; et la durée de la demi- existence de l'uranium, d'où dérive le radium, est estimée à un milliard d'années environ. D'autre part, la radio-activité est très générale sur la Terre; les roches volcaniques en dégagent des quantités qui, ramenées à la présence du radium, correspon- draient à un rapport oscillant autour de 10". Les roches sédimentaires en contiennent un peu moins en moyenne, l'eau de la mer environ cent fois moins, proportion encore suffisante pour permettre d'estimer à vingt mille tonnes le radium contenu dans les océans. Tout ce radium dégage de la chaleur. Et, si on la compare à celle qui s'échappe constamment de la surface de la Terre, et qui nous est donnée par la connaissance du gradient de température et de la conductivité des roches, on arrive à des quantités du mème ordre de grandeur. Même, il y à, en divers endroits, un véritable embarras de richesses; si l’on prend tels quels les nombres fournis par l'expérience, on trouve que la Terre ne perd pas assez de chaleur, et qu'elle doit se réchauffer en certains de ses points. Une telle conclusion ne doit être enregistrée toutefois qu'avec beaucoup de réserve. Les recherches sur la radio-activité des roches sont encore peu nombreuses ; les gradients vrais sont mal connus, en ce sens que les eaux souterraines apportent, par la convection, de sérieuses perturbations au phénomène de la conduction vers l'extérieur; enfin, on connaît mal aussi la con- ductivité des roches. Mais iln’en est pas moins intéres- sant de constater que l’on peut, à l'heure actuelle, admettre pour des temps immenses la conservation de la température terrestre, grâce à la chaleur engen- drée par la radio-activité. L'auteur est fort expert en ces questions. Son livre, où nous rencontrons en maint endroit les noms de J.-J. Thomson, Rutherford, Elster et Geitel, Ramsay, Soddy, Strutt, abonde en documents qui constituent autant de preuves ou d'éléments de preuve des théories qu'il expose : il donne des diagrammes de distribution de la radio-activité dans les roches volcaniques traver- sées par les grandes percées des Alpes, au Gothard et au Simplon; et la comparaison des courbes qui la représentent avec celles du gradient de la température impose d'intéressants rapprochements. Mais il n'entre pas de but en blanc dans ces com- paraisons et dans les conclusions auxquelles elles conduisent; il guide le lecteur dès le début. par une BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX excellente introduction des éléments physiques et géologiques qui permettront plus tard de le suivre jusqu'à l’estimalion de l’âge de la Terre. Celui-ci est naturellement encore très incertain. Cependant une série de phénomènes conduisent à évaluer l'époque géologique, c'est-à-dire celle à partir de laquelle se sont formées les roches actuelles, à quelques centaines de millions d'années. En ce qui concerne la chaleur dégagée par les corps radio-actifs, on pourrait cependant faire une objection. Les expériences de laboratoire ont montré que la radio-activité n'est pas sensiblement influencée par la température et la pression. Mais en est-il de même pour la dernière si, au lieu de s'élever jusqu'à quelques milliers de mégabaryes, on pousse à des centaines de mille mégabaryes? L'uranium, qui se décompose constamment à la surface de la Terre, a dû se former sous l’action de conditions particulières, très différentes de celles dans lesquelles nous pouvons expérimenter ; et il est assez naturel de considérer les très fortes pressions de l'intérieur du Globe comme la cause déterminante de sa genèse. La désintégration radio- active ne devrait donc pas exister à de très grandes profondeurs, non plus que le dégagement de chaleur auquel elle donne naissance ; et cela devrait modifier un peu les conclusions auxquelles on arrive en évaluant les phénomènes produits par une radio-activité dissé- minée dans tout le volume de la Terre. Mais cette restriction, encore hypothétique, ne dimi- nue en rien l'intérêt des recherches dont M. Joly expose l'ensemble, déjà considérable. Son livre apporte un grand nombre de faits bien observés; il fait connaître aussi les lacunes que les chercheurs devront s'efforcer de combler dansune branche annexe de cette science nouvelle qu'illustrent les noms de Becquerel et de Curie, et au perfectionnement de laquelle travaille avec succès une très brillante pléiade de physiciens. Cu.-Eb. GUILLAUME, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. Armagnat (H.), /ngénieur Conseil, ancien Chef du Bureau des Mesures électriques des Ateliers Car- pentier. — Wattmètres. — Un fascicule in-8& de 82 pages avec 46 figures, de l'Encyclopédie élec- trotechnique. (Prix : 2 francs.) Geisler, éditeur. Paris, 1910. Tout le monde connait la haute compétence de M. Armagnat. Les mesures électriques, auxquelles il s'est spécialement consacré, ont été étudiées par lui, dans leur ensemble, dans un ouvrage antérieur qui fait autorité en la matière. Les quelques pages où il traite ici de la question des wattmètres et deleurs plus récents perfectionnements seront lues par tous les électriciens avec l'intérèt qui s'attache aux ouvrages de l’auteur. G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d’Electricité et de Mécanique industrielles. Guichard (M.), Maitre de Conférences à la Sorbonne. — Manuel de travaux pratiques de Chimie minérale. — 1 vol. in-8° de 258 pages. (Prix : T fr. 50.) Hachette et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Le livre que M. Guichard vient de faire paraitre sous le modeste titre de Manuel de Travaux pratiques de Chimie minérale vient combler une lacune dans les laboratoires. 11 existe des traités de manipulations organiques, au courant des travaux modernes. En Chimie minérale, nous possédons encore les vieux traités de manipulations, où sont rassemblées sans méthode un grand nombre de préparations anciennes; c'est à peine si les nouvelles éditions signalent les travaux importants effectués dans ces dernières années. Depuis quelque temps, l'outillage des laboratoires s’est perfectionné; des préparations qui ne pouvaient pas être réalisées autrefois sont devenues très aisées à reproduire, Les mélaux réfractaires, les carbures LAS BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX métalliques, les siliciures métalliques, sont devenus d'un usage courant. I ne faut pas que l'étudiant ignore la technique de leur préparation. Pour la première fois, nous voyons décrire dans un traité de travaux pratiques la préparation du titane, du zirconium, du molybdène, du tungstène, de l'uranium, du siliciure de tungstène, du carbure de zivconium. Il faut souhaiter que, dans une nouvelle édi- tion, un chapitre spécial, plus complet, sera réservé à la préparation d'un plus grand nombre de carbures et de siliciures métalliques. Les travaux récents sur les mélaux alcalins ont mis en évidence la facile obtention de ces métaux dans les laboratoires. Ils ne pouvaient échapper à M. Guichard, qui décrit la préparation du cæsium et du lithium. Il y a là un ensemble de travaux nouveaux qui pour- ront être réalisés aisément par les élèves des Instituts et Ecoles de Chimie. Le nouveau manuel de travaux pratiques est divisé en trois parties. Dans un premier chapitre se trouvent décrites les préparations de la plupart des corps sim- ples. Un second est relatif à l'obtention des dérivés le ces éléments : chlorures, bromures, iodures, oxydes, sulfures. Dans une troisième partie, l'auteur décrit la préparation d’un certain nombre de sels et de quel- ques composés spéciaux récents, Lels que les métaux ammoniums, les amidures alcalins, le chlorhydrate d'hydroxylamine, et le nickel-carbonyle. Pour chaque préparation, M. Guichard indique : 49 le principe et la nature de la réaction qui doit con- duire au corps que l’on veut obtenir; 2 les moyens d'arriver à ce corps, à partir du minerai ou d'un pro- duit industriel ; il met à jour les étapes, souvent péni- bles, par lesquelles passe l’industrie pour obtenir ses produits; 3° un dernier paragraphe est consacré aux recommandations destinées à éviter les accidents. C'est là un fait nouveau dans un livre de Chimie pra- tique. Trop souvent, l'étudiant ne réfléchit pas assez aux dangers des préparations; il est bon de le mettre en garde contre les accidents, en attirant son attention d'une manière tout à fait spéciale sur la nature du travail qu'il doit effectuer. Ce livre est surtout destiné aux étudiants de deu- xième année des écoles de Chimie; mais je crois que les élèves de première année le consulteront avec fruit. Ils y apprendront, au début de leurs études, les nom- breuses difficultés qu'il faut surmonter pour devenir un bon chimiste, les soins et la méthode qu'exige la préparation des divers corps. Je voudrais aussi que les étudiants en licence effectuassent tous les travaux qui y sont signalés. Il suffirait, pour cela, d'augmenter de quelques heures par semaine la durée des épreuves pratiques. Le nouveau Aanuel de Travaux pratiques de Chimie iminérale sera d'une très grande utilité dans les labo- ratoires, où il sera le suppléant indispensable du Chef de travaux. En effectuant les nombreux exercices, judicieusement choisis, qui y sont décrits, les élèves apprendront à aimer la Chimie. Et si la lecture de ce livre et des excellents conseils que l'on trouve dans l'Introduction détermine quelques vocations chimiques, M. Guichard aura rendu un grand service à la Science. ALeH. MAILHE, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Toulouse. Rousset (H.) et Chaplet (A... — Les Combustions industrielles. (Le contrôle chimique de la combus- tion.) — 1 vo/. gr. in-8° de 259 pages avec 68 figures. (Prix:8 fr.) Gauthiers-Villars, éditeur. Paris, 1910. Il faut louer MM. Rousset et Chaplet de l'idée qu'ils ont eue, en écrivant cet ouvrage, d'appeler l'attention des industriels, tous consommateurs de houille, sur les avantages matériels énormes qu'ils retireraient d’une meilleure utilisation de leurs combustibles. L'ensemble ormé par le générateur de vapeur et l'appareil moteur ne donne, on le sait, qu'un rendement déplorable; si ve + 657 les lois théoriques qui régissent les moteurs leur im= posent un maximum de rendement très peu élevé et toujours loin d'être atteint, il n'en est pas de même pour l'appareil producteur de vapeur. Et, cependant, une bonne partie de l'énergie fournie, sous forme de charbon, à ces appareils s’en va, c'est le cas de le dire, en fumée, parce qu'on ne sait pas lutiliser, S'il est vrai, comme le disent les auteurs, que la perte en com. bustible varie entre 25 °/, et 40 0/4, et que, d'autre part, notre pays consomme annuellement #5 milliards de kilogrammes de charbon, on voit de suite quel puissant intérêt nos industriels ont à éviter au moins 10 o/, des pertes ordinaires et à se partager ainsi le gain total annuel de cent millions de francs que réa- liserait le perfectionnement général de leurs appareils et méthodes de chauffage. Le remède est bien simple. Il consiste à faire con- trôler par un chimiste la marche des combustions, el les auteurs indiquent quelles sont les méthodes el appareils que l’on peut employer dans ce but; ils font, en outre, le budget des dépenses supplémentaires que l'industrie aura aussi à supporter : la comparaison avec les économies provenant des pertes « facilement évitables » montre l'intérêt de l'opération. IT est à souhaiter que beaucoup d'industriels lisent l'ouvrage de MM. Rousset et Chaplet et que, surtout, ils s’inspi- rent des excellents conseils qu'ils y trouveront. Une fois le chimiste du contrôle des combustions installé à l'usine, il trouvera bien moyen, tout en accomplis- sant régulièrement sa besogne, de donner quelques bons conseils pour les autres parties de l'usine. Peu à peu s'introduiront dans nos fabriques ce souci du con- trôle, cet esprit de méthode et cette tournure scienti- fique qui font le succès de nos voisins, surtout en Alle- magne, etqui nous font malheureusement trop souvent défaut. L'ouvrage de MM. Rousset et Chaplet dépasse donc l'intérêt — déjà non négligeable — des questions d'économie journalière et il faut souhaiter qu'il soil souvent médité. Si l'on voulait passer à l'examen des détails, on pour- rait sans doute faire quelques critiques; dire, par exemple, que certaines expressions manquent d'une rigueur absolue, que certains chapitres consacrés aux descriptions d'appareils contiennent des lacunes; mais ce sont là des critiques légères; il fallait que l'ouvrage fût d’une lecture facile, qu'il n’eût pas des dimensions excessives, et ceux qui éprouveront le besoin de com- pléter les notions abondantes que contient ce volume le feront aisément par la lecture de gros ouvrages scientifiques ou techniques qui ne manquent point. L'essentiel pour MM. Rousset et Chaplet était de con- vaincre : espérons qu'ils y ont réussi. P. Lemourr, Professeur de Chimie générale à la Faculté des Sciences de Lille. 3° Sciences naturelles Stefanesco (A.). — Coup d'œil sur le Pétrole rou- main. — À 2roch. in-8° de 38 pages. Imprimerie Go- logan, Campina, 1910. Les expériences récentes de l'Amirauté anglaise sur l'emploi des résidus de pétrole comme combustible pour la marine de guerre, et le fait bien connu qu'un certain nombre de locomotives russes et roumaines utilisent le pétrole comme combustible, laissent entre- voir la possibilité de remplacer un jour avec avantage par le pétrole une grande partie du charbon brûlé dans nos engins de transport. L'attention du publie se lrouve ainsi portée sur les régions pétrolifères, parmi lesquelles la Roumanie occupe une place avantageuse, tant par l'importance de sa production que par le haut pouvoir calorifique des résidus de ses pétroles. Les richesses pétrolifères de la Roumanie sont loin d'être complètement exploitées, etce sont surtout les capitaux allemands et anglais qui y ont concouru. M. Stefanesco montre que les capitaux de notre pays pourraient aussi 658 y participer avec fruit. Déjà la France absorbe annuel- lement 32 °/, de l'exportation pétrolifère roumaine; elle aurait, dit-il, tout intérêtà s'approvisionner directe- ment auprès de Sociétés d'extraction à capital français. Izart (J.). — La Belgique au travail. — { vol. in-8° éeu de 272 pages avec 20 planches hors texte. (Prix : 4 francs.) Pierre Roger et Cie, éditeurs, 54, rue Jacob, Paris. Au moment où la Belgique peut montrer avec orgueil, en face de ceux des autres pays, les produits variés de sa puissante industrie, réunis dans les palais de l'Exposition de Bruxelles, il est du plus haut intérêt de lire l'ouvrage que M. Izart vient de consacrer à « la Belgique au travail ». L'auteur nous promène succes: sivement dans les diverses parties du pays : à Mons et à Charleroi, centres de l'extraction de la houille et de la fabrication du verre, à Liége et dans les environs, où se trouvent les plus importantes usines sidérur- giques, comme Cockerill et la fabrique d'armes d Héristal, aux cristalleries du Val-Saint-Lambert, à Verviers, ville de la laine, à Gand, ville des fleurs, à Mulines, ville de la dentelle, à Anvers, cœur du pays avec son port trépidant, à Bruges-la-Morte qui semble se réveiller de son long sommeil depuis que la création d'un port et d’un canal lui permet de recevoir les navires de mer. Partout il nous montre à l’œuvre l'énergie entreprenante, l'esprit d'organisation, l'ini- liative hardie, la prévision de l'avenir qui caractérisent le peuple belge, et l'on ferme le livre avec une impres- sion très vive de l’activité débordante que manifestent nos voisins dans tant de domaines de l’industrie. Branea (A.), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. — Précis d'Histologie. — 1 vol. de la Bibliothèque du Doctorat en Médecine publiée sous la direction de MM. Gicsert Er FOURNIER (2° édi- tion). (Prix: 12 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1910. Nous avons signalé ici mème, en 1906, l'apparition de la première édition de cet ouvrage, et insisté sur les services qu'il rendrait aux étudiants, aux médecins, et à tous ceux qui ont à s'occuper d'Histologie. C'était une revue fort complète de tous les tissus et de tous les organes, très au courant des derniers progrès de la science, ce qui n'excluait pas pourtant la précision et la concision, qualités si estimées aujourd'hui, où l’on veut être bien, mais rapidement informé. Les figures, excellentes, étaient presque toutes la reproduction de coupes originales, empruntées, autant que possible, à l'homme. La deuxième édition, qui vient de paraitre, ne le cède en rien à l'ancienne, bien au contraire. Le livre, malgré ses 755 pages, au lieu de 6#8, n'est pas sensi- blement plus lourd. et pourtant il n'est pas un chapitre qui n'ait été complété, mis au courant des acquisitions récentes, illustré de figures nouvelles, souvent encore meilleures que les anciennes. Ce qui donne une vie particulière à cet ouvrage, c'est précisément la large place que l'auteur y fait à la vie, c'est-à-dire à l'histo- zenèse et à l'histophysiologie. Ce sont elles qui, dans le dernier quart de siècle surtout, ont renouvelé la science histologique et lui ont imprimé une allure nouvelle. Par ses tendances, que reflète bien ce livre, l'Histologie actuelle est encore de la morphologie, mais de la mor- phologie en action, cherchant dans le développement et dans le fonctionnement la raison de la structure, de sorte qu'inversement elle arrive souvent à localiser ou préciser la fonction quand celle-ci est encore mal connue. La première édition clôturait l'étude des organes génitaux par un petit chapitre sur la fécondation. L'auteur y a ajouté cette fois la segmentation, le déve- loppement des feuillets blastodermiques et des annexes, ainsi que données nouvelles, si intéressantes, sur la fixation de l'œuf dans la muqueuse utérine les BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX de la femme. Ainsi se trouve complétée l'histoire de cette muqueuse, si curieuse par ses incessantes et profondes modifications. Dans le cours même du Précis, les glandes, l'histogénèse des éléments du sang, etc., ont été complètement remaniées, et un chapitre nou- veau ajouté sur les Mitoses de maturation. A ce propos, on nous permettra une légère critique. Pourquoi M. Branca et la plupart des auteurs français, d’ailleurs, calquant le mot allemand, mais dérivé du grec, écrivent-ils et prononcent-ils Karyokinèse, alors qu'ils se garderaient bien d'écrire Kinématographe, Karyopse, Karyophyllées? Disons en France Caryocinèse, comme on l’a dit dès le début en Belgique. E. LAGUESSE, Professeur d'Histologie à la Faculté de Médecine de Lille. Loeb (Jacques), Professeur de Physiologie à l Univer- site de Calilornie, Berkeley. — Die chemische Ent- wicklungserregung des tierischen Eies : künst- liche Parthenogenese. (L'EXCITATION CHIMIQUE DU DÉVELOPPEMENT DE L' ŒUF ANIMAL : PARTHÉNOGÉNÈSE ARTI- FICIELLE.) — 1 vol. in-8° de xxIv-259 pages, avec 56 figures. (Prix : 11 fr. 25.) Julius Springer, édi- teur. Berlin, 1909. Ici même, en 1904, dans un article intitulé : « In- fluence du milieu extérieur sur l'œuf! », j'ai rendu compte des premières recherches sur la parthénogénèse artificielle. Depuis les découvertes sensationnelles de Jacques Loeb, et grâce surtout aux recherches de ce biologiste, la question a pris une ampleur considérable et est devenue d'un grand intérêt pour la Biologie générale. Il y à deux façons d'envisager les problèmes de la Biologie, en particulier celui de la fécondation de l'œuf: du point de vue de la Morphologie et de celui de la Chimie physique. Les premiers auteurs qui ont cherché à établir une théorie de la fécondation », Hertwig et Boveri, ont laissé complètement de côté la chimie du développe- ment. Ceci explique que leurs recherches soient restées stériles. Il ressort, en effet, du livre dont je rends compte ici, — et qui est un exposé systématique de toutes les recherches poursuivies par l’auteur depuis de longues années sur la parthénogénèse artificielle, — que le développement de l'œuf est une série de processus chimiques, où les oxydations jouent un rôle essentiel, et au cours de laquelle a lieu une synthèse des suh- stances nucléaires aux dépens du cytoplasma. Or, les oxydations vitales sont particulièrement accélérées par les ions OH, dont l’état de concentration varie dans l’eau de mer. Ces ions seraient les agents les plus actifs des phénomènes vitaux, et avec leur aide on peut réussir à se rendre maître de ceux-ci dans une mesure beaucoup plus large que par tout autre moyen. C'est faute de n'avoir pas suffisamment tenu compte des ions OH que la Chimie organique appliquée à la dynamique des phénomènes de la vie n’a pas donné jusqu'ici plus de résultats. Dans les solutions hypertoniques qui provoquent le développement des œufs vierges, il ya augmentation, non seulement de la pression osmotique, mais encore de la concentration des ions OH; et vient-on à éliminer l'oxygène de ces solutions, l’action excitatrice dispa- rait. Suivant les localités où l’on opère, on obtient des résultats plus ou moins constants, et il est facile de constater que ceci est en rapport avec le degré plus ou moins élevé d'alcalinité de l’eau de mer qui sert à fabri- quer les solutions, c'est-à-dire avec la concentration plus ou moins grande des ions OH. D'autre part, dans les fécondations normales, il se forme, immédiatement après la pénétration du sperma- tozoide, une membrane dite de fécondation. Pendant longtemps, ce phénomène à paru tout à fait accessoire. ‘ Revue générale des Sciences, t. XN, 15 mars 1904, 949-950 10. 3 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 659 Or, Loeb, ayant réussi par un traitement spécial à pro- voquer sa formation autour de l'œuf vierge, a constaté que, de ce fait, le chimisme de l'œuf se trouve consi- dérablement moditié. L'œuf, surtout à température élevée, ne tarde pas à présenter des phénomènes de désagrégation, de « cytolyse », et, pour le sauver de la mort, ilimporte d'activer les oxydations et de le placer dans une solution hypertonique riche en ions OH; les uxydations détruiraient cerlaine substance nuisible à l'œuf. On peut, il est vrai, employer un autre procédé : supprimer, au contraire, momentanément l'oxygène et arrêter ainsi le développement. Ainsi, la formation de la membrane serait un phéno- mène essentiel, mais déterminerait une crise passagère dans la vie de l'œuf; pour faire franchir à celui-ci cette crise, il y a deux procédés : destruction des «“zents nuisibles par suroxydation ou ralentissement des phénomènes vitaux par désoxydation. Une idée féconde de Loeb a été 1a suivante : la for- mation de la membrane n’est qu'une cylolyse commen- cante, eb par suite tous les agents cytlolytiques sont : cupables de la produire et d'entrainer, pir conséquent, le développement de l'œuf. Ainsi la saponine, la solanine et la digitaline, qui ont une action hémolytique pro- noncée, sont d'excellents agents pour la parthénogénèse artificielle ; de mème les savons; de mème encore l’élé- vation de température; de même encore le sang de certaines espèces étrangères. L'action du spermatozoïde peut alors se concevoir assez facilement : il produirait la formation de la mem- brane au moyen d'une lysine, et, en mème temps, il apporterait une substance capable d'inhiber les actions nocives secondaires. Dans le cas où le spermatozoïde féconde un œuf d'une autre espèce, il peut n'y avoir que le premier effet, la lysine pouvant pénétrer alors, par diffusion, sans que le spermatozoïide entre. Ce fait est intéressant à rapprocher du fait que les globules du sang ne sont pas détruits par les lysines contenues dans ce sang, celles-ci ne pouvant pénétrer dans les cellules de la mème espèce. On voit que les recherches sur la parthénogénèse artificielle peuvent avoir un intérêt pour d’autres pro- blèmes de la Biologie. C'est ce que met bien en évidence ce nouveau livre de J. Loeb : les rapports étroits qui unissent le domaine de l'embryologie et celui de la pathologie en ressortent nettement. Les expériences sur l'œuf vierge sgnt susceptibles de jeter une vive lumière sur l'étiologie des tumeurs, sur celle des crises de croissance; elles ant également une importance pour les problèmes relatifs à lhérédité, à la détermi- nation du sexe; enfin, elles sont appelees à fournir des points de comparaison qui faisaient défaut jusqu'ici et qui permettront certainement de pousser plus avant l'analyse des phénomènes quise passent dans le muscle et dans le nerf. Il est donc à désirer que le livre de Loeb se trouve entre les mains de tous les biologistes, et soit pour eux le sujet de méditations fécondes. GrorGes Bonn, Préparateur-Chef à la Faculté des Sciences de Paris. 4 Sciences médicales Landouzy, Gautier, Moureu, de Launay (pro- fesseurs), P. Carnot, Heitz, Lalesque, La- marque (docteurs). — Crénothérapie, Climatothé- rapie, Thalassothérapie. — 1 vol. 1n-8° de 706 pages avec 166 figures et 8 cartes. (Prix : 14 fr.) d.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1910. La simple énumération des noms des auteurs in- dique suffisamment qu'il était impossible de réunir collaboration plus brillante et plus autorisée ‘pour ex- poser les notions acquises actuelles relatives aux cures d'eau et aux cures d'air. Le Professeur Landouzy, qui, depuis vingt ans, au cours de voyages annuels d'étude et d'enseignement, fait connaître et apprécier nos stations thermales françaises, expose les principes généraux directeurs de la thérapeutique thermale. Les origines, les synthèses et la diagnose chimique des eaux minérales francaises font l'objet d'un chapitre du Professeur Armand Gau- üer, de l'Ecole de Médecine. Les questions para-médicales, mais d'un si haut inté- rèt pratique et commercial, relatives à la géologie et au captage des eaux minérales, sont traitées par M. de Launay, professeur à l'Ecole des Mines. La chimie et la physique des eaux minérales (composition chimique et physico-chimique, caractères et constantes physiques, radio-actuvilé et gaz rares, classification, identitication, variations, allérations, conservation) ont été étudiées avec une rare compétence par M. Moureu, professeur à l'Ecole de Pharmacie. L'étude spéciale des diverses stations a été confiée : pour les stations des Pyrénées, de la Montagne Noire, de la Corse, de l'Algérie et de la Tunisie au Dr Henri Lamarque, de la Faculté de Médecine de Bordeaux, pour les stations du Plateau Central, de l’est et du sud- est, du nord et de l’ouest, au Dr Jean Heilz. On y trou- vera exposés avec précision tous les détails relatifs aux modes d'administralion, aux indications et aux contre- indications de chaque station. M. le Dr EF. Lal-sque (d'Arcachon), particulièrement désigné par ses travaux antérieurs consacrés surtout aux cures marines, à rédigé la Climatotüérapie. Il l'a fait avec une compétence éclectique, bienveillante el avisée, à laquelle nous nous plaisons personnellement à rendre hommage. Les généralités elimatothérapiques, les climats, les cures, les stations climatothérapiques marines, les climats, les cures, les stations climatothé- rapiques d'altitude y sont étudiés avec une documen- tation abondante et précise. La thalassothérapie (cures marines), plus spéciale- ment pratiquée par le D' Lalesque, fait l'objet d'un cha- pitre supplémentaire destiné certainement à devenir classique (eau de mer, bains de mer froids, plages de France, sanatoriums marins). La dernière partie est consacrée à l’étude plus spé- cialement médicale des indications et contre-indica- lions, du choix et de la direction des cures hydro-celi- matiques dans des espèces cliniques bien déterminées : tuberculose, syphilis, paludisme, infections, intoxica- tions, diabète, obésité, goutte, arthropathies, cardio- pathies, néphropathies, affections génitales de Ja femme, affections des voies respiratoires, dermopa- thies, névropathies, gastropathies, entéropathies, hé- patopathies. Elle est due à la collaboration du Profes- seur Landouzy et du Professeur agrégé Carnot: c’est assez dire avec quelle compétence elle a été rédigée. D' ALFRED MARTINET. Marie (D° A.), Médecin en chef de l'Asile de Ville- juif. — Les Dégénérescences auditives. — { vol. 1n-16 de 111 pages. (Prix : 1 fr. 50.) Collection de Psychologie expérimentale et de Metapsychie. Bloud, éditeur. Paris, 1910. Travail consacré à l'étude des principales anomalies anatomiques que peuvent présenter les appareils péri- phériques ou ceutraux de l'audition; ces anomalies permettent dans certains cas d'expliquer l'absence ou l'insuffisance des perceptions auditives, indépendam- ment ou conjointement à des lésions centrales encé- phaliques possibles. L'auteur passe en revue les mal- formations du pavillon, de l'oreille moyenne et de l'oreille interne, la surdité corticale, les arrêts de développement auditif physiques et psychiques. L'examen des organes de l’audition chez l'idiot ou le dégénéré ne doit jamais être négligé, car il peut fournir des données intéressantes. C’est ainsi que l'atrésie du conduit auditif externe et de la trompe d’Eustache est directement liée à l'arrêt de développement des parois osseuses, aux asymétries cranio-faciales ou au déve- loppement des végétations adénoïdes fréquentes chez les arriérés. Un examen organique minutieux permet d'instituer une thérapeutique locale appropriée et des méthodes pédagogiques spéciales. Df J. Carcras. 660 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 4 Juillet 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —M.S. Bernstein applique aux équations différentielles ordinaires les méthodes qu'il a développées dans ses travaux sur les équations aux dérivées partielles. — M. A. Korn étudie les mou- vements stationnaires d’un liquide doué de frottement. — M.J. Boussinesq montre que le principe de la constance de la masse s'applique très probablement aux rayons ou courants cathodiques. — M. A. Pérot a reconnu que la variation de longueur d'onde de la lumière solaire au bord du Soleil est un effet de pres- sion ou de densité. — M. D. Eginitis déduit de ses observations de la comète de Halley que les matériaux dont la queue cométaire est composée sont très peu lumineux; ils ne peuvent presque se voir que par la lumière solaire qu'ils réfléchissent. — M. Fr. Iniguez communique les observations de la comète de Halley faites à l'Observatoire de Madrid depuis son passage devant la Terre. — M. L. Montangerand adresse ses observations de la comète de Halley et d’occultations d'étoiles faites à l'Observatoire de Toulouse. — M. Ch. Lallemand examine l'exactitude probable des diverses évaluations de l'altitude du lac Tchad. La cote de 240 mètres, admise par la Mission Tilho, semble la plus proche de la vérité. — M. Ferret a observé le 14 avril à Bonifacio des oscillations du niveau de la mer ayant atteint jusqu’à 1,55 mètre d'amplitude et dues sans doute à un raz de marée. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. F. Ducretet et E. Ro- ger décrivent un appareil pour la réception de l'heure à domicile et à bord des navires par la télégraphie sans fil. — M. P. Beaulard a étudié l'absorption électrique exercée par quelques alcools (méthylique à heptylique, allylique et benzylique). Pour les longueurs d'onde employées (À = 12 mètres à À=35 mètres), la dispersion est anormale (excepté avec l'alcool allylique). — M! L. Blanquies a entrepris diverses expériences pour rechercher s'il existe dans l’activité induite de l'acti- nium une nouvelle substance, de vie très courte, don- nant naissance à l’Ac B ou produite par lui. Aucune ne donne de preuve irréfutable, mais l'hypothèse reste à considérer, — M. A. Dufour a constaté le phéno- mène de Dôppler à l’aide de la rotation de l’are à mercure dans un champ magnétique. Le phénomène observé est la somme d'un déplacement et d’une varia- tion de la longueur optique rendue dissymétrique par la dispersion anomale de la vapeur pour les radiations utilisées. — M. L. Malclès montre que la vaseline pure, isolante à la température ordinaire, mais conduc- trice à l'état liquide, agit comme un milieu chargé d'ions libres des deux signes, dont la mobilité, nulle quand la substance est semi-fluide, ne se manifesterait qu'à l'apparition de parties nettement liquides. — M. Jean Villey décrit un nouveau micromanomètre électrométrique dont la membrane est en collodion très riche en huile de ricin et chargé d’un peu de sel marin. —M. A. Rosensthiel indique le moyen d'obtenir les couleurs d’égale intensité de coloration, qui pro- viennent de la dégradation des couleurs franches, et dont l'association permet de produire des camaïeux parfaits. — M. M. de Broglie signale la présence exclusive, dans les gaz issus de certaines flammes hydrogénées, d'ions tout à fait analogues (comme mobilités) à ceux que produisentles rayons de Rüntgen. — M. D. Gernez démontre que le phosphore noir, obtenu en chauffant le phosphore avec une minime quantité de mercure, n’est pas une combinaison de P et Hg, mais du phosphore coloré fortement en noir à l'état solide par Hg à l’état de très grande division, lequel se redissout quand on liquéfie le phosphore. — | MM. A. Gautier et P. Clausmann ont constaté que CO | réagit sur le fer au rouge en donnant C et des carbures de fer à température suffisante, avec départ de CO:. En présence d'oxydes de fer, il se forme CO*, C et plusieurs | carbures (dont Fe‘*C et Fe*C), et en même temps des oxydes ferreux et ferroso-ferrique. L'action des acides élendus sur les carbures donne H, CH* et un peu de pétrolènes. — M. V. Auger a préparé le manganate de sodium par décomposition du permanganate au moyen de la soude en excès. Le sel anhydre peut fournir trois | hydrates à 4, 6 et 10 H*0. — M. Barre montre que le sel cotonneux obtenu dans l'action de l’eau sur le | sulfate de thorium correspond à la formule ThO(SO“). 3H°0; il se transforme lentement en un sel bien cris- tallisé ThO(SO“).2H°0. — M. L. Vignon a déterminé l'adsorption d’un certain nombre de matières colo- rantes par l'amiante en fibres et le sable du Rhône. Il | n'ya pas de rapport constant entre le pouvoir diffusif et l’'adsorption. L'adsorption se manifeste aussi bien avec les matières colorantes en fausse solution qu'avec celles qui paraissentréellement dissoutes. —M.E. André | a préparé un certain nombre de cétones acétyléniques : 1° en substituant les bromures d'acides aux chlorures dans la réaction sur les carbures acétyléniques sodés; 2° paroxydation desalcoolssecondaires R.C:C.CGHOH.R'. — M. A. Backe a étudié l'isomaltol produit par l’action combinée d'une enzyme et de la chaleur sur l’amidon. Il réduit lentement à chaud la liqueur de Fehling. Avec le diazométhane, il donne un éther méthylique, CH°O* (CH®), F. 102, dont l'hydrolyse fournit de l'acide for- mique. — M. C. Beys décrit une nouvelle méthode de | dosage de la glycérine dans les vins. — M. I. Szreter à constaté que l’action oxydante de H°0? sur l’oxyhémo- | globine donne des produits d'oxydation qui deviennent entièrement solubles sous l’action grolongée d’un excès | de réactif. L'oxydation se produit par addition et n'occa- sionne pas de produits de scission. — M. Em. Bour- quelot et M! À. Fichtenholz ont extrait des feuilles | fraîches du Poirier Carisi un glucoside, F. 1949-1959, | [xl ——60°,38, dédoublable par l'émulsine avec for- mation d'hydroquinone. Ce glucoside serait donc de l'arbutine vraie. — M. Th. Schlæsing fils a étudié la culture du tabac au point de vue de la production de la nicotine. Le maximum d'alcaloide formé à l’hectare parait correspondre à un nombre de 6 feuilles par pied avec 800 kilogs de nitrate à l’hectare. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. H. Alezais et Peyron ont observé, au cours de la sécrétion hypophysaire, la migration du nucléole et sa dissolution dans le cyto- plasme. Le noyau participe donc aux phénomènes de la sécrétion. — MM. J. Teissier et Rebattu ont con- staté que, chez certains tuberculeux à rein absolument sain, le phénomène de la glycosurie phlorizique peut manquer complètement; dans ce cas, on trouve des altérations hépatiques très avancées. La glycosurie phlorizique résulterait donc d'une symbiose hépatica- rénale. — M. M. Arthus : Venin de cobra et curare (voir p. 501). — MM. J.-E. Abelous et E. Bardier ont observé une augmentation de la sensibilité des animaux à l'urohypotensine par l'injection préalable ou le | mélange à cette toxine de l'extrait du cerveau d'un animal tué par l’urohypotensine. — MM. A. Calmette et C. Guérin ont reconnu que, chez les Bovidés neufs, l'injection d'un mélange de sérum d'animal hyper- immunisé et de bacilles cultivés en série sur bile de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 661 bœuf accélère la résorption ultérieure des bacilles virulents d'épreuve. — M. P. Girard conclut de ses expériences que le mécanisme de l'osmose des tissus est électrostatique. M. P. Becquerel montre que l'hypothèse de l'origine cosmique de la vie est forte- ment ébranlée par le fait que les espaces interplané- taires, étant constamment traversés par les radiations ultra-violettes du Soleil, doivent être stérilisants. — M. E.-L. Bouvier a étudié les Pycnogonides recueillis par la première mission Charcot et a reconnu : 1° que certains Pycnogonides ont conservé dans les mers antaretiques leur forme primitive décapode; 2° que les diverses séries de la classe se sont différenciées de très bonne heure, alors qu'elles étaient encore au stade décapode; 3° que ces groupes ou séries sont au nombre de quatre : les Colossendéomorphes, les Nymphono- morphes, les Pycnogonomorphes et les Ascorhynco- morphes, cette dernière étant un peu douteuse parce qu'on n'y connaît pas encore la forme décapode. — MM. R. Perrier et H. Fischer ont constaté que le rôle des bandes ciliées dans la cavité palléale des Bulléens est d'y déterminer le mouvement de l’eau. La branchie est très pauvre en cils vibratiles et ceux-ci ne jouent qu'un rôle insignifiant dans la circulation de l’eau. — M. C. Viguier a observé une larve de Spionide très jeune, correspondantau stade nectosoma, et qui devient sexuée non pas seulement chez les femelles, mais aussi chez les mâles. — M. Aug. Chevalier signale une nou- velle légumineuse à fruits souterrains cultivée dans le Moyen Dahomey;il la nomme Voandzeia Poissoni. Les fruits peuvent être consommés comme les haricots et rappellent nos variétés les plus prisées. — M. Edm. Hitzel a constaté l'existence d’un double pli dans la paroi sud du soubassement de la pointe de Platé, près Chedde (Haute Savoie). — M. L. Cayeux a étudié un calcaire phosphaté, trouvé sur les rives du Sénégal, et renfermant d'innombrables dépouilles de Niatomées. Il est tout à fait semblable à celui du gisement de Gafsa et établirait l'existence de l’'Eocène inférieur au Sénégal. — MM. L. de Launay et G. Urbain ont étudié par la méthode spectrographique la métallo- génie des blendes. Les plus anciennes renferment presque toujours Sn et Bi, souvent Cu. Les blendes tertiaires n'en contiennent pas, mais on y voit appa- raître Sb et Hg et quelquefois Ge. Séance du 41 Juillet 1910. M. le Président annonce la mort de M. G. V.Schia- parelli, Associé étranger, et M. C. Wolf donne lecture d'une notice sur sa vie et ses œuvres. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Study montre que la méthode employée par MM. de Saussure et Bri- card dans leur géométrie des feuillets est identique à une méthode qu'il a déjà exposée en 1903. — M. A. Den- joy montre qu'on peut construire trois domaines (et même une infinité déhombrable de domaines) qui ont tous la même frontière. Si les frontières de deux con- tinuums distincts ont en commun deux points, chacune d'elles est continue entre ces deux points. — M. A. La- fay a déterminé les pressions moyennes supportées par un corps maintenu dans un courant d'air dont la vitesse est irrégulière. Les fortes dépressions aug- mentent plus rapidement que ne le voudrait la loi du carré de la vitesse. — M.P. Puiseux, en présentant le dernier fascicule de l'Atlas photographique de la Lune, signale de nombreux exemples de cirques semblables entre eux, alignés sur un méridien ou contrariés dans leur expansion par un même sillon de l'écorce, ce qui permet d'écarter tout à fait l'hypothèse météorique. — MM. G. Millochau et H. Godard adressent leurs obser- vations de la comète de Halley faites au Pic du Midi. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Amaduzzi rappelle qu'il a observé avant MM. Villard et Abraham la varia- tion de l’aspect de la décharge avec la variation de la distance explosive. — MM. E. Cardoso et G. Beaume ont déterminé les constantes critiques de l’acétylène et du cyanogène. Ils ont trouvé pour C°H°: 4. -=350,5 et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Pe = 61,5 atm.; pour (CAz} : £ 128,3 et p. = 59,6 atm.— Sir W. Ramsay et M. R. W. Gray ont déter- miné la densité de l’'émanation du radium au d'une balance en silice fondue extra-sensible, IIS en tirent la valeur 220 pour poids atomique de l'émanation, qu'ils proposent de nommer niton. — M.J.Bertheaume décrit un procédé pour le dosage des trois méthyla mines mélangées dans une grande quantité d’'ammo- niaque. — M. P. Carré, en faisant réagir le trioxymé- thylène sur le bromure de mésitylmagnésium, a obtenu le mésitylcarbinol, F. 88°-89°, et un peu de l’éther- oxyde correspondant, F. 1489. En réduisant le xylyla- cétate d’éthyle symétrique par Na et l'alcool absolu, l’auteur a obtenu l'alcool xylyléthylique symétrique, Eb. 1340-1359 sous 15 millimètres. — M. A. Perrier à rencontré un certain nombre de micro-organismes, doués d'un pouvoir oxydant considérable, et suscep- tibles de se développer dans un milieu entièrement minéral, ne contenant comme aliment hydrocarboné que de l’aldéhyde éthylique qui est oxydé complète- ment. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. Doyen décrit un dispo- sitif de bain thermo-électrique permettant de détruire la plupart des cellules pathologiques sans altérer les tissus normaux, plus résistants à la chaleur. — M. J. Winter montre que l'étude de la variation de la con- centratios gastrique dans ies repas d'épreuve jermet de déterminer la quantité de sécrétion que contientun mélange gastrique donné. — M. A. Magnan a constaté qu'au régime carné correspond la quantité moindre de pancréas chez les Oiseaux, alors que chez les Insecti- vores etles Piscivores le pancréas atteintson plus grand développement. Les Granivores ont un peu plus de pancréas que les Carnivores. — MM. Radaïs et Sartory ont reconnu que le layin peut être immuni-é contre le poison des Ammanites à phalline par des injections, répétées pendant quatre mois, de doses non mortelles. Un mois après, l’immunité a disparu. — M. M. Hartog appelle mitokinétisme la force duale qui s'exprime dans le fuseau hétéropolaire de la cellule; pour lui, il s’agit d'une force nouvelle. inconnue jusqu'ici en dehors de l'organisme. — M. Leclerc du Sablon estime que la masse liquide renfermée dans l’ensemble des vaisseaux du bois n’exerce pas de pression hydrostatique sur sa base; son poids est entierement supporté par le sté- réome rigide de la plante. La circulation de la sève est en relation avec le pouvoir osmotique des cellules vivantes ; le mécanisme de l'ascension est indépendant de la hauteur des tiges: — M. Ed. Heckel a constaté que le froid arrête définitivement le développement de l'odeur de vanilline ou de pipéronal dans les gousses vertes de vanille etles feuilles de l’Angraecum fragrans, tandis que la chaleur ou l'action des vapeurs d'anes- thésiques l’accélèrent.— M. A. Lacroix montre que les roches volcaniques de Tahiti constituent une même série alcaline de roches grenues, dont l’ensemble pré- sente les caractères typiques qui servent à définir le type atlantique. — M. Vandernottea trouvé, dans une syénite albitique des environs d'Ernée, un cas rare d'altération des micas, le minéral titanifère formé étant presque exclusivement de la brookite. — M. E. Gour- don à trouvé dans l'Antarctique deux gisements de zéolites : l’un dans l'ile du Roi-Georges (stilbite, heu- landite, analcime, apophyllite, mésotype, scolésile, mésolite), l’autre à l’île Jenny.— M. J. Repelin a cons- taté que le calcaire dit de Villandraut (Bazadais), con- sidéré comme un des meilleurs types de l'Aquitanien inférieur lacustre, n'appartient pas à cet horizon. Dans la même région, le calcaire gris est considérablement réduit. — M. A. Briquet a reconnu dans la région gallo-belge plus d’une vingtaine de cycles d’érosion en remontant le cours des rivières. La série de ces cycles correspond à un abaissement progressif du niveau de base de l'érosion; son origine est certainement post- pliocène. Il résulte de là, pour l’époque pléistocène qui embrasse cet ensemble de cycles, une durée très importante. moyen 15 ACADÈMIES 662 ET SOCIÉTÉ S SAVANTES ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 5 Juillet 1910. MM. Pagliani (de Turin) et Filehne (de Breslau) sont élus correspondants étrangers dans la Division de Mé- decine. M. F. Widal présente un Rapport sur un {ravail de M. G. Rosenthal relatif à lasérothérapie du rhumatisme articulaire aigu. Le sérum est préparé par injections hypodermiques,puis intraveineuses,de toxineset de cul- ture de bacilles d'Achalme, d'abord aérobies, puis anaé- robies. Ila donné de bons résultats dans des cas de rhu- matismeayantrésisté au salicylate. L'auteur a également préparé un vaccin de Wright du rhumatisme.— M.Mar- quez propose un nouveau système de déclaration des décès et des maladies qui en ont été la cause, moins indiscrel que celui qui est actuellement employé. Il consiste à employer deux bulletins : l’un, ouvert, don- nant le nom du décédé et la date de la mort, pour ètre remis à l’état civil; l’autre, fermé, donnant le sexe, l’âge, la profession et la cause du décès, sans le nom de la personne, pour être envoyé au maire qui le verse dans une urne qui n’est ouverte qu'une ou deux fois l'an. — M. E. Lancereaux estime que le vin et aussi la bière sont les principales causes de l’affec- lion désignée sous le nom de cirrhose atrophique, cirrhose granulée du foie; ces boissons sont nocives non pas tant par elles-mêmes que par les substances employées à leur conservation. La mortalité résultant de l'abus prolongé de ces boissons, notamment dans les pays d'importation, est grande. Elle pourrait être enrayée par la suppression du plâtrage et du sullitage. — M. A. Chauffard fait connaître un signe nouveau des kystes hydatiques de la convexité du foie : c'est le ballottement sus-hépatique. — MM. Hirtz et Delbet présentent un travail sur le traitement chirurgical de la symphyse médiastino-péricardique. — MM. E. Boi- net et F. Monges signalent un cas de tétanos trau- maäalique, qui s'est manifesté cinq jours après la bles- sure; il est resté localisé pendant une semaine au membre supérieur gauche, puis il a atteint les muscles de la nuque, de la face, les masséters el les muscles des goutlières vertébrales. Il à été guéri au bout d'un mois à la suite de l'injection totale de 790 centimètres cubes de sérum antitétanique, la première injection ayant élé faite par voie sous-arachnoïdienne. Séance du 12 Juillet 1910. M. E. Kirmisson signale un certain nombre de cas dans lesquels la coxalgie à évolué pendant de longues années sans donner naissance à aucun symptôme bien net, et surlout sans attitude vicieuse caractéristique. Dans ces formes frustes ou anormales, tout se bornait à un peu de douleur et à une claudication extrêmement lègère de la hanche. Seule, la radiographie permet de porter un diagnostic précis. — MM. Kelsch, Camus et Tanon ont constaté que l’activité de pulpes vaccinales conservées au frigorifique vers —15° se maintient et se consolide même pendant plus d’une année, landis que l'activité des pulpes témoins conservées en glacière ordinaire vers 50-70 était déjà éteinte au bout de six mois. On possède ainsi le moyen d'établir des stocks de vaccin actif en vue des grandes épidémies. — M. H. Hallopeau signale les résultats obtenus à Bahia par sa méthode de traitement abortif de la syphilis dans les mains du Dr Moniz d’Aragao; sur 127 cas traités, la maladie a loujours été enrayée. Ce résultat à été ob- tenu sans aucune médication générale par le mercure et l'iodure. Le même médecin a également observé dans quelques cas une action préventive des injections locales d’atoxyl à la dose de 25 centigrammes.— MM. C. Levaditi, S. Mutermilch el Comandon : Le méca- nisme «le la phagocytose, avec démonstration cinéma- lographique. — MM. Léopold-Lévi et H. de Roth- schild lisent un (ravail sur l'asthme endo-critique. M. le D' Picqué : Sur la douleur en chirurgie, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 9 Juillet 1910. M. G. Finzi a constaté que l'indice antitryptique du sérum des moutons infectés par le bacille de Preisz- Nocard est constamment diminué; celui des chevaux cachecliques n'est pas augmenté. — M. C. Fleig a déterminé, au moyen de la réaction à la phénolphta- léine, l’activité peroxydasique du sang et des organes de divers Invertébrés à sang hémoglobinique ou hémo- cyanique. — MM. J.-E. Abelous et E. Bardier : Affinité de l'urohypotensine pour la substance cérébrale (voir p. 660). — M.J. Camus présente divers animaux guéris du tétanos expérimental. Tous montrent de la raideur et de l’atrophie musculaire localisées au membre qui a recu l'injection. — M. G. Dubreuil a constaté que l'ostéoclaste a un protoplasma commun rempli d’un nombre incroyable de mitochondries, sans préjudice des vacuoles à lipoides et des vacuoles colorables par le rouge neutre. La cellule de Bizzozero renferme dans son protoplasma quelques rares petits grains mitochon- driaux. — M. M. Aynaud a étudié la variation de nombre des globulins dans divers états pathologiques. Dans l’anémie pernicieuse aplastique, ils disparaissent presque complètement; dans la fièvre typhoïde, il y a une hypoglobulinhémie très marquée. — M. Em. Bour- quelot et Mie A. Fichtenholz : Le glucoside des feuilles de poirier (voir p. 660). — M. P. Wintrebert déduit de l'étude de l'arc ptérygo-palatin que la forme branchiée des Protritons, en dépit de son ancienneté, représente un état moins primitif et plus spécialisé que la forme larvaire actuelle des Salamandridés. — MM. J.-P. Langlois et Garrelon ont observé qu'il se produit une véritable apnée, pouvant dépasser trois minutes, chez le chien soumis aux effets d'injections successives d’adrénaline, — M. J.-P. Langlois a étudié les réac- tions des différentes fonctions de l'organisme aux varia- tions du milieu ambiant. La plus caractéristique est l'élimination de la vapeur d’eau, qui double avec la ventilation et diminue en accalmie humide avec l'élé- valion de la température, provoquant une élévation thermique qui peut atteindre 38°,6 en moins de quinze minutes de travail. — MM. L. Lapicque et J. Petetin ont reconnu que, chez l'£uproctus montanus, la peau Joue le rôle essentiel dans les échanges gazeux et que la cavité bucco-pharyngée, malgré le mécanisme respi- ratoire dont elle est le siège, ne joue qu'un rôle secon- daire et insuffisant par lui-même. — M. J. Jolly à conservé à la glacière dans des pipettes stérilisées du sang de triton prélevé sur le cœur ; au bout de quatre mois et demi, il renfermait encore des leucocytes vivants, doués de mouvements amiboïdes. -- M. A. Frouin présente un chien en bon état de santé ayant subi depuis un mois la section des deux artères rénales. Séance du 16 Juillet 1910. M. C. Fleig montre que le mécanisme des actions oxydasiques et peroxydasiques pouvant relever, soit de l'intervention des protéides respiratoires, soit de celle de substances (diastasiques ou non) fixées dans les tissus, diffère chez les Vertébrés et les Invertébrés, du moins chez les Invertébrés à sang non hémoglobinique. — MM. M. Loeper et G. Béchamp ont observé de l'hypo- calcémie dans les entérites et l'hyperchlorhydrie, et de l'hypercalcémie dans l'ostéomalacie, l’atérome, les néphrites, l'asthme, la pneumonie. — MM. Ed. Ret- terer et Aug. Lelièvre montrent que l’épithélium est L élément originel de toutes les portions qui composent follicule clos et de la bourse de Fabricius et des Fo de Peyer des Oiseaux. — M. E. Cathoire à observé la déviation du complément dans huit cas sur quinze de typhus exanthématique. — MM. G. Guillain et G. Laroche ont constaté que les modalités cliniques des différentes intoxications peuvent résulter de locali- sations électives dissemblables des agents toxiques sur les diverses parties du système nerveux.— MM. N. Fies- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES singer et L. Rovdowska ont retrouvé en dehors de toute altération cadavérique, dans les deux tiers des cas environ, sur les cœurs des typhiques morts avec tachycardie el embryocardie, des lésions fines, très limitées, qui intéressent l'extrémité de la fibre et pré- cèdent la dissociation segmentaire. — MM. J.-E. Abe- lous et E. Bardier estiment que les accidents de luré- mie doivent être considérés, pour la plus grande part, comme le résultat de l'accumulation de l’urohypoten- sine dans l'organisme. — M. A. Lécaillon montre qu'on ne doit pas considérer, en général, les développements parthénogénétiques rudimentaires qui se produisent naturellement comme devant être rattachés à la parthé- nogénèse expérimentale. — M. M. Lambert à reconnu que les variations de poids qu'éprouve une grenouille immergée dans une solution résultent de la relation qui s'établit entre l'absorption et l'élimination. — MM. A. Briot et Dopter ont observé que, lorsque le sérum antiméningococcique est injecté au cobaye après les microbes dans un certain délai, il ne peut exercer son action directe que sur une minime partie des germes injectés, la plupart étant protégés contre elle par les phagocytes qui en ont englobé une certaine quantité. — MM. F. Sarvonat et J. Rebattu ont étudié la miné- ralisation chez le cobaye tuberculeux ; le fait le plus frappant est la décalcification de l'organisme et surtout du squelette. — M. P. Wintrebert poursuit ses recher- ches sur l’are voméro-ptérygo-palatin chez les larves de Salamandres.— M. A. Besredka montre que l’anaphy- laxie passive, tout comme l’anaphylaxie active, est justiciable du procédé des vaccinations subintrantes, à la suite desquelles l'animal anaphylactisé subit une désensibilisation telle qu'il devient aussi indifférent au sérum qu'un animal neuf. — MM. Ch. Achard et Ch. Flandin ont reconnu que le principe toxique qui produit le choc anaphylactique et qui se forme par la combinaison de la substance anaphylactigène avec la toxine réinjectée a pour lieu d'élection les centres ner- veux. — MM. J. Courmont et A. Rochaix estiment que | l’agglutinabilité, à un taux élevé, par les sérums anti- typhiques doit rester le critérium le plus sûr d'identi- fication d’un bacille d'Eberth. — M. M. Belin montre qu'une injection de sérum détermine rapidement la formation d'une protoxogénine, qui se transforme en toxogénine grâce au carbonate et au bicarbonate de soude du sang. La protoxogénine se fixe partiellement sur la substance cérébrale. — M. A. Vanney a constaté que le sérum de Leclainche jouit de propriétés précipi- tantes spécifiques à l'égard des antigènes du rouget. — M. K. Djénab montre que, dans l'expérience de la piqûre diabétique, l’hyperglycémie ne progresse que tant que la moelle cervicale garde ses relations anato- miques avec les origines des nerfs grands splanchni- ques. — M. A. Guillemard a observé que la pression osmotique réagit sur la bactérie, plus généralement sur la cellule vivante, suivant un double mécanisme : la concentration moléculaire détermine une action pure- ment quantitative ; la dissociation électrolytique pro- duit des effets d'ordre spécifique en rapport avec la nature des ions en présence dans la solution osmo- sante. — M. Em. Feuillié a reconnu qu'il n'y a aucun rapport entre l’albuminurie et la lésion des tubuli ; quand une substance albuminoïde filtre au travers du rein, ce ne peut être qu'au niveau des glomérules. — MM. A. Gilbert et P. Descomps ont constaté que le phénoxypropanediol possède une action analgésique marquée. — MM. F. Mesnil et E. Brimont ont trouvé dans le sang d’un fourmilier de la Guyane (T'amandua tridactyla) un trypanosome et une microfilaire nou- veaux, qu'ils nomment Jr. Legeri et M. Mathisi. — MM. U. Monnier et L. Ribereau ont fait l'autopsie dans un cas de fièvre paratyphoïde terminée par la mort; c'est le paratyphique du type A qui était en cause. — M. Al. Cawadias estime qu'il y a dans l'urémie des modifications physico-chimiques des colloïdes du sérum qui expliquent l'augmentation de leur puissance toxique sans nécessiter l'intervention d’une substance étran. 663 gère, — MM. L. Fortineau el L. Ribereau signalent quelques cas de contamination interhumaine dans la fièvre paratyphoiïde., — M. G. Rosenthal répond aux critiques de Mie Szczawinska relatives à ses procédés d'aérobisation des microbes anaérobies. — MM. CI. Gau tier el Th. Nogier ont constaté que le produit bleu que donne l’amidon et le produit brun acajou que donne le glycogène avec le réactif iodo-ioduré sont décolorés par les rayons ultra-violets. — M. E. Maurel à constaté que certains agents thérapeutiques et toxiques peuvent ajouter leur action. Ces agents synergiques doivent se diviser en deux groupes : les uns exerçant leur action sur le même élément anatomique (agents homohis- tiques), les autres sur des éléments anatomiques diffé- rents (allohistiques). — M. H. Roger à retiré des cap- sules surrénales plusieurs substances hypotensives : un pigment rouge dialysable, des graisses solubles dans le chloroforme, une graisse soluble dans l'alcool amylique, un pigment noir non dialysable. -- M. F. Battelli et Mie L. Stern ont reconnu que la transformation de l'aldéhyde salicylique en acide salicylique par les tissus animaux n'est pas due à un ferment oxydant, mais à un ferment dédoublant l’aldéhyde en acide salicylique et saligénine. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 21 Juin 1910. M. A. Joleaud montre que l'ornementation de la coquille de certaines Balanes, attribuée au mimétisme, provient simplement du fait que la base de la paroi a épousé la forme de son support. — M. C. Gerber étudie l'action des plato-sels (PtCIX®), des sels d’iridium, d'os- mium, de ruthénium et de rhodium sur la coagulation du lait par les ferments protéolytiques. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Seance du 1°" Juillet 1910. M. Albert Perrier : Les variations thermiques des hystérèses tournante et alternative; grandeurs magné- üques homologues. L'appareil qui a servi à l’auteur constitue une modification de celui utilisé par P. Weiss et V. Planer dans leurs recherches sur l'hystérèse dans les champs tournants. On observe le couple moyen exercé sur de petits échantillons discoïdes (18 à 34) par un électro-aimant tournant à raison de quelques tours par seconde. La substance esten même temps placée dans l’intérieur d’un four électrique ver- tical permettant d'atteindre commodément 800°. L'en- semble des recherches peut se scinder en deux parties. Il a fallu d'abord consacrer beaucoup de temps à étu- dier tout spécialement les phénomènes d'irréversibi- lité et de viscosité (vieillissement) thermiques qui se sont accusés chez toutes les substances examinées sans aucune exception. Les manifestations de ces phéno- mènes sont fort capricieuses et variables d’un corps à l’autre. L'examen du nickel et de la magnétite artiti- cielle a conduit aux conclusions suivantes : 1° On peut, malgré l'énorme équivoque créée par l'irréversibilité, parler de lois de décroissance définies avec la tempé- rature : ce sont celles correspondant à une variation extrêmement rapide de cette dernière. 2° Irréversibi- lité thermique et vieillissement ne constituent qu'un seul phénomène; tous deux procèdent d'une même cause. Ces essais sur l'irréversibilité étant exécutés, on à pu passer à la deuxième partie du travail, soit à l'établissement et à la discussion des lois elles-mêmes dont les précédentes recherches permettent la défini- tion précise. La plupart des travaux thermomagné- tiques se sont limités aux champs moyens et se sont servis de représentations à champ constant; dans ces conditions, on a enregistré pour le même corps les fonctions les plus diverses suivant la grandeur du champ. M. Perrier a réussi à établir une représenta- tion qui, dans chaque classe de grandeurs, æimanta- tion, hystérèse tournante et hystérèse alternative, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES donne à toutes les courbes (fonctions de la tempéra- ture) d'une même classe une physionomie semblable au sens rigoureux du mot). Le principe de cette repré- sentation est parent de la notion des états correspon- dants de Van der Waals : il consiste à réduire les champs dans une proportion spéciale à chaque tempé- ralure et à prendre comme abscisses pour les courbes thermomagnétiques ces champs Zomoloques, ainsi que l'auteur les désigne. L'expérience fournit plusieurs vérifications importantes de cette manière de voir : 1° Les cycles limites des deux hystérèses, soit le maximum d’hystérèse tournante et celui d'hystérèse alternative (cycle à saturation) en particulier, sont, dans cette théorie, des grandeurs homologues; on peut conclure qu'elles doivent varier suivant les mêmes lois, ce que l'expérience montre, ainsi qu'on peut le voir par diverses courbes et tableaux. 2 Les cycles limites ne sont que des séries particulières d'homo- logues; on pourrait déterminer une infinité d'autres séries, mais la fixation des points correspondants sur les courbes est chose en général malaisée et peu sûre; il est possible de procéder autrement et de facon gran- dement préférable : par des planimétrages convenables, on détermine le rapport des valeurs moyennes de l’une des hystérèses à l’autre pour une infinité de points en même temps. Les résultats montrent combien l'indé- pendance prévue de la température se vérifie dans Ja limite des erreurs d'expérience (1 °/,\. Les courbes accusent d’ailleurs qualitativement déjà très bien ces propriétés. 3° L'application du principe d’homologie à un cas très particulier a permis de fournir une contri- bution intéressante à la question de l'annulation de l'hystérèse lournante à saturation : M. V. Quittner, étudiant la magnétite cristallisée dans des champs s'étendant jusqu'à 4.500 gauss, avait plutôt constaté une tendance de l'hystérèse tournante à demeurer constante qu'à s’annuler. La magnétite isotrope pré- parée artificiellement, elle, sembla, au contraire, se comporter très normalement dans 9.000 gauss (limite accessible); l'hystérèse résiduelle était de 4,4 °/, seu- lement de son maximum: une estimation grossière indique que ces 9.000 gauss appliqués à 450° « corres- poudraient » à environ 13.000 à température ordinaire. Effectivement, on observa de cette façon à 450° une réduction à 0,8 °/, du maximum. Le parallélisme établi des variations des deux hystérèses montrant que la théorie partant du cristal de pyrrhotine donne une bonne représentation des faits observés, on a pu aller plus loin dans cette voie et déduire des observations les liaisons du champ coercitif élémentaire du cristal avec la température. Celles-ci peuvent se déduire de n'importe quelle série d’homologues ; les courbes cons- truites sont tirées de la considération des cycles limites seulement. La comparaison des lois pour le nickel et la magnétite avec la fonction 1 = / (+) (satu- ration) décèle une parenté évidente, sans cependant autoriser du tout l'identification; cette diminution continue du champ coercitif par le chauffage, diminu- lion du même genre que celle de 1, est sans doute une manifestation des liens intimes probables du champ coercitil avec le champ moléculaire. — M. Henri Abraham présente au nom de M. P. Villard et au sien quelques résultats préliminaires obtenus dans l'appli- cation du rhéographe à l'étude des décharges oscil- Jantes. Les premiers clichés projetés en séance montrent la loi de variation du courant dans les expériences suivantes : 1° établissement et rupture périodiques d'un courant permanent dans un circuit comprenant self et résistance (pour le contrôle des réglages du rhéographe); 2° oscillations dans un cir- cuil entièrement métallique (self et condensateur, 1.000 périodes par seconde) par rupture d’un courant circulant dans un circuit indueteur voisin; 3° oscilla- Lions, par rupture sans étincelle, d'un courant perma- nent dans une bobine de self sans fer, reliée métalli- quement à un condensateur (250 périodes par seconde). Les résultats, ainsi qu'on s'y attendait, sont exactement conformes à ce que fait prévoir la théorie. L'amplitude des oscillations décroît régulièrement et tend asymp- totiquement vers zéro. Les recherches ont surtout porté sur les oscillations qui se développent par la décharge disruptive d’un condensateur dans un cir- cuit inductif coupé par l’étincelle. Elles ont montré que l'amplitude des oscillations ne décroit pas indéfi- niment. À un certain moment, /es oscillations s'arré- tent brusquement, la dernière d’entre elles ayant une amplitude encore très notable et de sens d’ailleurs quelconque. Gette extinction prématurée des oscilla- tions doit Jouer un rôle important dans la théorie des expériences de résonance ef des transmissions de signaux par ondes hertziennes. C'est sans doute ce phénomène qui met en défaut, dans l'étude des amor- tissements, les formules dans lesquelles on admet que le résonnateur est soumis indéfiniment à l’action d’os- cillations excitatrices décroissantes, alors qu'en réalité l’action excitatrice cesse brusquement et que la dé- charge du condensateur n’est pas complète. D'autre part, pour les basses fréquences, l’étincelle s'éteint d'une façon pratiquement complète à l'instant du cou- rant nul, pour chacune des oscillations. Toutefois, aux hautes fréquences, au moment du courant nul, l’étin- celle est encore suffisamment éclatante pour impres- sionner la plaque photographique, malgré l'extrême rapidité avec laquelle à cet instant le miroir du rhéo- graphe déplace l'image de cette étincelle sur la plaque sensible (400% par seconde.) Au surplus, la photogra- phie directe de l’étincelle au miroir tournant montre non seulement que la lumière ne s'éteint pas entre les maxima des demi-périodes successives, mais encore qu'après la cessation complète de tout phénomène oscillatoire, 1l subsiste entre les électrodes de l’écla- teur une flamme intense, visible surtout avec des élec- trodes de cuivre. Avec les grandes intensités qui accompagnent les fréquences élevées (plusieurs cen- taines d'ampères), la durée de cette incandescence supplémentaire atteignait le millième de seconde. IL est bien certain que le condensateur continue à se décharger légèrement au travers de cette flamme par un courant continu décroissant et toujours très faible, qui succède aux violentes oscillations. — M. Ed. Bouty : Cohésion diélectrique du néon et de ses mé- langes. Gràce à l’obligeance extrême de M. Claude, M. Bouty à pu disposer de 6! d’un mélange d'environ 3/4 de néon et 1/4 d'hélium, contenant, en outre, un peu d’air et d'hydrogène. En soumettant ce mélange à une série de distillations fractionnées, en présence de charbon de noix de coco refroidi dans l'air liquide, M. Bouty à eu la surprise de constater que la cohésion diélectrique des fractions moyennes, les plus riches en néon, était à la fois inférieure à celle des fractions de tête, riches en hélium, et des fractions de queue, souil- lées d'air. Fort de cette observation, 1l s'est désormais guidé, pour la purification du néon, sur la seule me- sure des cohésions, comme un chimiste se guide, pour l'isolement des terres rares, sur l'observation spec- troscopique. Par exemple, il a été ainsi amené à reconnaitre la présence, qu'il ne soupconnait pas, d'un peu d'hydrogène dans les gaz de tête. Le spectroscope a confirmé cette conclusion. La plus faible cohésion que M. Bouty ait mesurée dans ces expériences était égale à 6,1 (celle de l'hélium pur étant 18,3 et celle de l'air #19). En se fondant sur la loi de décroissance de la cohésion minimum d’une distillation à la suivante, il pense qu'on peut fixer à 5,6 la cohésion limite du néon le plus pur que fourniraient des distillations poursuivies à l'infini. Ce nombre 5,6 est inférieur au tiers de la cohésion de l'hélium. Il y a lieu de remar- quer que, dans la dernière classification de Mendéléeff, le néon se trouve exclu de la série qui va de lhélium à l’argon, au crypton et au xénon. Le néon forme à lui seul une classe à part, ce que confirme la mesure des cohésions. Agité dans une éprouvette sur le mercure, le néon, dès la pression ordinaire et pour les plus légères secousses, émet une belle lueur couleur de feu. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 665 Cette lueur n'apparait qu'à une pression plus faible quand le néon contient une proportion suflisante de gaz étranger. La différence de potentiel produite par le frottement du mercure sur le verre suflit donc à illuminer le néon presque pur à la pression atmosphé- rique, comme elle illumine un gaz quelconque à une pression suffisamment basse, à l’intérieur d'une trompe à mercure. La mesure de la cohésion diélectrique du néon ne fournit pas seulement un contrôle précieux de la pureté de ce gaz; elle donne aussi une méthode d'analyse quantitative que M. Bouty à éprouvée en opérant, par exemple, sur des mélanges en proportion connue de néon et d'air, de néon et d'hydrogène, ou de néon et de gaz carbonique. Les expériences les plus complètes ont été faites sur ces derniers mélanges. Elles ont montré que le gaz carbonique est sept fois plus efficace pour accroitre la cohésion du néon pur que le néon pour diminuer la cohésion du gaz carbo- nique. Une dissymétrie analogue se révèle pour les mélanges de néon et d'un gaz polyatomique quel- conque. En se fondant sur des mesures de cette espèce, M. Bouty évalue à 1/5.000 la proportion d'air contenue dans le néon le plus pur (cohésion 6,1) qu'il ait obtenu. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 8 Juillet 1910. M. A. Béhal expose ses recherches sur un nouveau menthol, l'hydroterpinéol:; il en décrit les éthers acé- tique et bromhydrique et le phényluréthane. Il décrit également le menthène obtenu par déshydratation de cet alcool et il établit que c’est le A1:5-menthène qui, par oxydation, fournit de la propanone, de la p-méthyl- cyclo-hexanone et de l'acide f-méthyladipique. Ce car- bure a été préparé synthétiquement par Wallach et par Auwers à l’aide de la pulégone. M. Béhal l’a transformé en A-menthène sous l'influence d’une foule de réactifs, en particulier l'acide sulfurique à 5 °/,. Traité par le réactif de Bougaut, ce carbure fournit, après action ultérieure de l’azotate d'argent, de la menthone carac- térisée par le point de fusion de sa semicarbazone. Oxydé par le permanganate, il fournit un mélange de glycol et de cétol qui, par l’action de l'acide sulfurique étendu, donne de la menthone caractérisée par sa semicarbazone et probablement une menthénone. — M. V. Auger à préparé le manganate de sodium en chauffant à 125° le permanganate de sodium avec la soude aqueuse concentrée en excès. Ce composé a pu être obtenu anhydre en petits cristaux noirs à reflets mordorés;ilcristallise des solutions aqueusesalcalines, suivant les conditions, avec 10, 6, et # aq. Il forme en toutes proportions des cristaux mixtes avec le sulfate et avec le chromate de sodium. Ce dernier sel est d’ail- leurs très proche parent du manganate, car il cristal- lise de même avec 14, 6, et 4 aq. — M. Paul Claus- mann à constaté que l’oxyde de carbone était direc- tement transformé en acide carbonique par l'ozone. La lumière, activant la décomposition de l'ozone, active aussi l'oxydation du CO. L'humidité favorise aussi la réac- tion. — M. E. Léger signale les difficultés que pré- sente quelquefois le dosage de l'hydrogène dans des composés organiques ne renfermant que 1 °/, etmème moins de cet élément. La méthode qui consiste à effec- tuer la combustion dans un tube ouvert aux deux extrémités, laquelle donne les résultats les plus exacts, n'est pas toujours applicable; c’est ce qui arrive, par exemple, avec les substances dont la combustion s'effectue avec explosion ou déflagration, comme c’est le cas pour certains dérivés nitrés. M. Léger prend alors un tube à baïonnette garni préalablement d’une couche de 8 à 10 centimètres cubes de CuO en grains, retenue par deux tampons d'amiante. Le tout étant parfaitement sec, il introduit dans le tube un peu de CuO fin, puis la substance desséchée dans une nacelle de porcelaine tarée. La nacelle étant poussée, à l’aide d’une baguette de verre, jusqu'à la couche d'oxyde fin, il ajoute de ce même oxyde une quantité sullisante pour recouvrir la nacelle. A l’aide de la baguette de verre, il pousse dans le tube un fort tampon d'amiante calciné, de telle façon qu'il reste un vide de 5 à 6 cen- timètres cubes entre ce tampon et la couche d'oxyde fin, Disposant alors horizontalement le tube, préala- blement bouché, il lui imprime un mouvement de va- et-vient, tout en le tournant entre les doigts. La nacelle, en se déplaçant dans le tube de droite à gauche et de gauche à droite, produit le mélange intime de la substance avec CuO. I n’y à plus qu'à pousser le tam- pon d'amiante de facon à l’amener en contact ave CuO, achever le remplissage du tube et effectuer la combustion à la manière habituelle. M. Léger à ainsi effectué la combustion de deux dérivés nitrés décompo- sables avec déflagration; il a obtenu pour l’un : H °/, calculé 1,33; trouvé 1,68, et pour l’autre : H °/, cal- culé 0,95; trouvé 1,33. — M. E. Léger rappelle les inconvénients bien connus des appareils producteurs de gaz type Deville et Kipp. Il propose de leur substi- tuer un appareil facile à construire dans les labora- toires. Dans un vase de verre cylindrique de 13 cen- timètres de diamètre et de 30 centimètres de hau- teur (ces vases existent dans le commerce, on place un trépied de 12 centimètres de hauteur, formé de baguettes de verre supportant un triangle. Sur ce trépied, on dispose une allonge dont la tige a été coupée à une distance convenable. On introduit dans l'allonge un gros morceau de pierre ponce ou de coke, lequel devra être retenu par les bords de l'orifice inférieur de l'allonge. Par-dessus, on dispose des fragments de verre, et sur ceux-ci la substance à atta- quer (Zn si l’on veut obtenir H). L'orifice supérieur de l'allonge est bouché à l’aide d’un bouchon de caout- chouc dans lequel passe le tube du robinet qui servira au débit du gaz. Pour éviter le contact de l’allonge avec le triangle en verre sur lequel elle repose, on aura enroulé sur les tiges de ce triangle, aux trois points de contact de l’allonge, une petite feuille de plomb. Avec ce dispositif, c'est toujours de l'acide neuf qui vient en contact avec la substance à attaquer. Dans le cas de Zn, on voit ZnCl® descendre, en formant des stries, au travers de l'acide HCI et se rassembler au fond du vase. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 5 Mai 1910. MM. J. Barcroft, G. C. Bourne, A. P. Coleman, F. A. Dixey, L. N. G. Filon, A. Fowler, A. E. Gar- rod, G&. H. Hardy, J. A. Harker, J.T. Hewitt, B. Hop- kinson, A. Lapworth, Sir W. B. Leishman, H. G. Plimmer et F. Soddy sont élus membres de la Société. 4° SctENcEs PHYSIQUES. — M! I. F. Homfray : L'ab- sorption des gaz par le charbon de bois. L'auteur à déterminé les volumes de gaz absorbés par un poids connu de charbon de bois (3 gr.) à des températures définies allant de celle de l'air liquide à celle de l'ani- line bouillante et à des pressions allant jusqu'à 80 cen- timètres de mercure. Les gaz employés ont été He, A, Az, CO, CH“, C°H!, CO*, O* et des mélanges de Az: et CO. Après avoir fait toutes les corrections, l’au- teur a construit les isothermes et déduit les points d’égale absorption, la famille de courbes ainsi obte- nues constituant le diagramme isostérique. La concen- tration pour chaque isostère a été calculée sous la forme C—100 w/(W—+ w), où w est le poids du gaz absorbé et W celui du charbon de bois sans le gaz. La concentration du gaz pur quand W—0 devient ainsi 100 °/,. Deux relations ont été trouvées qui se véri- fient pour tous les gaz, dans la limite des erreurs expérimentales : 1° chaque isostère suit la loi de Ram- say et Young pour les vapeurs saturées (To/T,)—(To'/T,') —R(T-T,/) et est exprimable par la formule des pres- sions de vapeur de Bertrand; 2° à pression constante, dT/d log C—K. Au moyen d'une formule simple, on 666 peut calculer les chaleurs d'absorption à diverses concentrations, et les relations thermodynamiques sont comparables à celles des solutions concentrées. Comme conclusion, l’auteur suppose qu'une phase de solution homogène se forme en équilibre avec la phase gazeuse, la présence d’une forte concentration du charbon de bois augmentant la température d'équilibre du com- posé volatil à une pression donnée. Cette élévation n'est pas constante, comme dans le cas des solu- tions diluées, mais elle est inversement proportion- nelle à la concentration gazeuse. Pour les mélanges de deux gaz, la loi des phases se vérifie, et les rela- tions peuvent être déduites de celles des composants. 20 SCIENCES NATURELLES.—M. H. G. Chapman : Sur le poids de précipité qu'on obtient dans les réaétions de précipitine. Dans l'étude de l’action d’un antisérum sur une protéine homologue, le résultat le plus frappant est la stricte proportionnalité du poids du précipité à la quantité d'antisérum, pourvu que la quantité de protéine homologue excède un certain minimum. Si une quantité de 50 milligrammes de sérum de cheval séché, par exemple, est soumise, en dilution conve- nable, à l’action de 1, 2, 3 et 4 centimètres cubes d'an- tisérum de cheval, les poids des précipités seront dans les rapports de 1, 2, 3 et #4. Ce fait est en harmonie avec les résultats de Welsch et Chapman conduisant à attribuer l’origine du précipité surtout à l'antisérum. La quantité de précipité représente le « contenu préci- pitable » de l’antisérum et son poids est pratiquement celui de la précipitine présente dans l’antisérum. — Sir D. Bruce et MM. A. E. Hamerton, H. R. Bate- man et F. P. Mackie ont poursuivi l'étude du déve- loppement des trypanosomes dans les mouches tsé-tsé: 1° Le Tr. gambiense se multiplie dans l'intestin d’en- viron une (lossina palpalis sur vingt qui se sont nour- ries sur un animal infecté; 2° les mouches deviennent infectées en moyenne 34 jours après leur premier repas; 3° une mouche peut rester infectante pendant 75 jours; 4°les Tr. dimorphon, vivax et nanum peuvent également se multiplier dans la Glossina palpalis, qui doit donc être considérée comme un porteur possible de ces maladies ; 5° la multiplication dans le tube du proboscis est caractéristique du Tr. vivax. Séance au 26 Mai 1910. M. G. Klebs : Changements dans le développement et les formes des plantes résultant du milieu. L'auteur choisit le champignon Saprolegnia comme exemple parmi les plantes inférieures. Ce champignon vit sur des insectes morts et présente trois états distincts dans son développement : 1° croissance végétative du mycé- lium ; 2° reproduction asexuée au ne de zoospores mobiles; 3° reproduction sexuée par les organes mâle et femelle. Dans les conditions ordinaires, ces trois états succèdent l'un à l’autre tout à fait régulièrement jusqu'à ce qu'après la maturité des spores au repes, le champignon meurt. Mais, d’après les conditions spé- ciales de chaque état, il est possible de les produire selon notre désir, et aussi de varier leur succession. Placé dans des conditions très favorables de nutrition, le champignon peut continuellement croître sans se multiplier et sans mourir. De nombreuses plantes inférieures, comme les champignons et les algues, présentent les mêmes rapports vis-à-vis du milieu. Les plantes à fleurs offrent beaucoup plus de difficultés, à cause de leur structure très compliquée. Le Semper- vivum Funckii est pris comme exemple pour montrer combien le développement d’une telle plante dépend du milieu. Le Sempervivum se présente sous forme d'une courte tige couverte d’épaisses feuilles, pleines de sève; nous appelons cette forme une rosette. Les roseltes produisent d'une manière asexuée de nou- velles rosettes-filles, dont chacune fleurit dans des conditions convenables, et meurt après la maturité des graines. L'état d'une plante destinée à fleurir, mais sans rudiments floraux reconnaissables, est appelé prét afleurir. La formation del'inflorescence consiste en trois ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES états essentiels : 4° la croissance de la tige; 2° la pro- duction de plusieurs branches au sommet; 3° la nais- sance des fleurs. Dans des conditions très favorables de nutrition, une rosette prête à fleurir peut être trans- formée de nouveau en une rosette végétative, qui doit toujours se développer sans reproduction sexuée. Dans la lumière bleue, en mars et avril, il se produit un allongement de la rosette prête à fleurir, mais sans floraison. Un tel allongement de la tige est entièrement indépendant de la floraison, parce que toutes lesrosettes, même les plus jeunes, peuvent s’allonger à la lumière rouge. D'un autre côté, les fleurs peuvent paraître sans allongement, lorsque les rosettes sont exposées à une température élevée. On peut empêcher la production des branches à fleurs, l’inflorescence à l'extrémité n'ayant qu'une fleur unique. Dans d’autres conditions, on peut trouver de nombreuses branches sur toute la : tige, même à l’aisselle des vieilles feuilles, en particu- lier à la suite de lésions. L'auteur arrive à une nou- velle série de formes, en remplaçant les fleurs par des rosettes de feuilles, qui peuvent être produites sur toutes les parties de l'inflorescence, même sur les branches en fleurs. Les plantes dont l'inflorescence porte des rosettes ne meurent pas à la fin de l'été, comme cela est normal, mais vivent encore deux ans ou plus, présentant des formes diverses. L'au- teur montre que les fleurs varient à un haut degré dans certaines conditions. Le nombre et l’arrangement de toutes les parties, telles que sépales, pétales, éta- mines et carpelles, peuvent être changés. De nouvelles variations frappantes des formes normales apparaissent dans des fleurs modifiées artificiellement par la trans- formation des sépales en pétales, des pétales en éta- mines, des étamines en pétales et en carpelles. Des expériences ont été faites pour résoudre la question qui consiste à savoir si les altérations des fleurs peuvent être transmises. Pour de telles recherches, on emploie le Sempervivum acuminatum qui produit facilement des graines mûres. Les graines des fleurs artificiellement altérées et auto-fertilisées ont donné naissance à vingt et une jeunes plantes, parmi lesquelles quatre ont présenté des déviations surprenantes dans leurs fleurs. Avec deux jeunes plantes, toutes les fleurs ont été changées et ont présenté quelques altérations de la plante-mère, spécialement la transformation des étamines en pétales. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 10 Juin 1910. MM. W. E. Sumpner et W. C. S. Phillips décrivent un galvanomètre pour circuits à courant alternatif. Il ressemble à un galvanomètre à bobine mobile, excepté que le champ est dù à un électro-aimant spé- cialement construit excité par un voltage alternatif. Ge voltage V est appliqué à un enroulement de m tours de l'électro-aimant, et le flux du noyau N est tel que V— rA + mN, où r est la résistance de l'enroulement et A le courant qui le traverse. La bobine «et l’électro- aimant sont construits de telle facon que, pour des courants des fréquences employées, la valeur de rA est négligeable en comparaison de V. La vitesse de chan- gement de N sera donc à chaque instant une mesure de V, quelle que soit la perméabilité et l’hystérèse du noyau. Si un voltage V est appliqué à l’une des bobines de m» tours du champ, et si on ajoute à celle- ci un enroulement de 2 tours à travers un condensateur de K microfarads, le couple agissant sur la bobine mo- bile sera une mesure de Kn(V/m), c'est-à-dire que la déviation sera proportionnelle au carré du voltage. En choisissant convenablement K, m et », le voltmètre pourra être employé sur un grand intervalle. La dévia- tion est indépendante de la fréquence et de la forme de l'onde si l’enroulement du champ auquel le voltage est appliqué a une résistance négligeable par rapport à son impédance. L'instrument peut être employé avec avantage pour comparer des inductances et des capa- nn ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES cités par les méthodes ordinaires de pont, pourvu que: | 1° le voltage alternatif V appliqué à la bobine du champ | produise aussi le courant dans les conducteurs du | pont; 2 le courant alternatif dans le pont soit accordé en phase avec le voltage V au moyen de résistances non inductives convenables; 3° la bobine mobile soit placée directement à travers le pont. — M. A. E. Garrett expose ses recherches sur l'électrisation positive duc au phosphate d'aluminium chauffé. Le sel, placé sur une feuille de platine, peut être chauffé entre 9009 et 1.300° C. et soumis à une pression quelconque. Quand les électrodes sont placées à 0,5 em: l'une de l’autre, une différence de potentiel de 60 volts est suffisante pour obtenir un courant de saturation avec les ions positifs émis par le sel chauffé. Pendant la première demi-heure, le courant est un peu irrégulier; c'est l'effet de l’eau présente dans le sel. En négligeant cette action préliminaire, la décroissance du courant avec le temps peut être représentée par une courbe de la forme générale : Afe —4t — 6e — dt) E B(1 — e — rt). Après 5 ou 6 heures de chauffe, on n'observe plus de changement du courant obtenu dans des conditions fixes de température et de pression. Pour chaque tempé- rature, il existe une certaine pression à laquelle le courant obtenu est maximum; plus la température est élevée, plus cette pression est faible. Aux très faibles pressions, les ions sont émis avec une très grande vitesse; les plus petits possèdent une masse compa- rable à celle de l'atome d'hydrogène. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 14 Avril 1910. M. T. Liebisch donne lecture d’un Mémoire sur /4 reconstitution de l'état cristallin à partir de l'état amorphe, par le chaullage, chez les minéraux pyrogno- miques. On sait que, dans certains minéraux pyrogno- miques, il se produit, en dehors de l’effritement, une conversion graduelle de l’état cristallin en l'état amorphe, sans que les contours idiomorphes du cristal soient modifiés. D'autre part, en chauffant ces miné- raux, on reproduit avec des phénomènes lumineux l'état cristallin primitif. Les recherches thermomé- triques de l’auteur sur la production de lumière et de chaleur pendant le chauffage de ces minéraux, d'accord avec l'examen optique de ces matières avant et après leur calcination, font voir que la perte d'énergie est liée à la reconstitution de l’état cristallin à partir de l’état amorphe. Séance du 21 Avril 1910. M. H. Rubens rend compte de la suite de ses expé- riences, faites en collaboration avec M. E. Hagen, sur la varialion du pouvoir d'émission des métaux dans le spectre infra-rouge à courtes longueurs d'ondes, pour des températures variables. Tandis que, dans leurs re- cherchesantérieures,les deux expérimentateursavaient étudié ces mêmes phénomènes dans le cas du spectre infra-rouge à grandes longueurs d'ondes, les nouvelles recherches se rapportent essentiellement à la partie voisine de la région visible de ce spectre. Leur résultat le plus important, c'est que la variation du pouvoir d'émission, dans cette partie du spectre (jusqu'à environ À— 24), est très petite pour les six métaux étudiés, et qu'elle est de signes différents. À partir de 2 y, la variation se fait toujours dans le sens corres- pondant à la théorie de Maxwell, atteignant, pour À— 54, la valeur théorique dans cinq cas sur six. Pour les rayons résiduels du spath calcaire (À — 6,654), tous les métaux et alliages étudiés présentent, quant à la quantité et la direction, la liaison du pouvoir d'émis- sion avec la température voulue par la théorie de Maxwell, comme c'était généralement le cas dans les expériences antérieures relatives à la région des très grandes longueurs d'ondes. — M. Nernst adresse une seconde Note de M. G. Eberhardt, de Potsdam, sur les gisements de scandium. Par ses recherches spectro- 667 graphiques, l'auteur a déterminé la teneur en scandium de plusieurs roches et minéraux nouveaux, en contir- mant pleinement les conclusions de son premier Mémoire au sujet de la diffusion universelle du scandium sur la Terre. 11 signale plusieurs nouveaux minéraux riches en scandium. Les études spéciales du granit de Zinnwald et des minéraux associés à celui-ci ont fait voir que cet élément vient abondamment à la surface de la terre sous l’action des processus pneu- matolytiques ou hydro-thermaux qui se présentent habituellement à la suite des éruptions granitiques. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 13 Mai 1910. M. E. Goldstein adresse un Mémoire sur 14 pro- duction des spectres fondamentaux du potassium, du rubidium et du cæsium. En essayant de produire le spectre du fluor d’une façon analogue aux spectres de raies du chlore, du brome et de l'iode, c’est-à-dire en faisant passer le mince faisceau lumineux de la dé- charge d'une bobine d’induction dans un tube à vide rempli d'un sel alcalin, le fluorure de potassium, et en disposant parallèlement au tube de décharge une bou- teille de Leyde, l’auteur a observé une longue suite de lignes très lumineuses, distribuées à distances à peu près égales, jusqu'à la limite de visibilité du spectre, en même temps que la couleur rougeätre de la dé- charge s’est changée en bleu. Une partie de ces raies a pu être retrouvée dans les spectres obtenus par M. Lecoq de Boisbaudran' en utilisant une perle de sel de potassium fondue comme l’un des pôles d'une bobine d'induction. Les recherches de l’auteur font voir qu'elles appartiennent au potassium, dont les séries de lignes sont éteintes et remplacées par des lignes extérieures aux séries, à mesure qu'augmente l'intensité des décharges. Des phénomènes analogues s’ob-ervent dans le cas des sels de rubidium et de cæsium. Dans ces spectres, dits spectres fondamentaux, le nombre de raies s'accroît, comme dans les spectres de séries, à mesure qu'augmente le poids atomique. — MM. A. Wehnelt et J. Franck rendent compte de leurs recherches sur les relations qui existent entre la loi de Faraday et les décharges gazeuses. Ils décrivent un dispositif à l’aide duquel on mesure, à partir d’une certaine pression maxima, un transport gazeux mono- latéral partant de l’anode, comme réduction de pres- sion. Ils établissent les équations qui permettent de calculer le nombre de molécules transportées par le courant J —1 et ils discutent l'influence de l’absorp- tion. Pour J—1 ampère, la quantité de gaz transporté se trouve être 2 —0,815 >x10'8. Dans des limites données, elle est indépendante de la pression gazeuse, de la matière des électrodes, ainsi que, d’après les expé- riences jusqu'ici faites, du volume gazeux. Enfin, la réduction de pression est proportionnelle à l'intensité du courant. En admettant la validité de la loi de Fara- day, les auteurs trouvent que, dans le cas étudié par eux, 1/4 des ions est formé à proximité de l’anode, tan- dis que les 3/4 de l’ionisation totale ont lieu près de la cathode. MM. Wehnelt et Franck examinent enfin plu- sieurs hypothèses qui se présentent au courant de leurs recherches. — M. M. Born donne lecture d'un Mémoire sur l'électrodynamique des corps en mouve- ment. L'auteur s'est attaché à reconstruire la nouvelle théorie du regretté Minkowski, enlevé au cours de re- cherches par lesquelles il se proposait de déduire ses équations fondamentales par une voie analogue à celle de Lorentz, en tenant compte rigoureusement du prin- cipe de relativité. — M. O. Hahn donne lecture d'un Mémoire sur certaines lois régissant l'émission des rayons 6 et l'absorption de ceux-ci par la matière. I apporte une confirmation ultérieure à l'opinion autre- fois énoncée en collaboration avec M'e Meitner, que les 1 Lecoo pe Borssaupran : Spectres lumineux. p. 4$, 1874. 668 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ———]——…—”…”…—…—…—…—…—…—…—…—….…—.———_————.—.—.—.—.—.…-….-…-—.…-_—_ _ _ ————————— éléments radio-actifs émettent des groupes individuels de rayons & à vitesses bien définies. D'autre part, ces expériences nouvelles permettent de déterminer exac- tement la vitesse de certains groupes de rayons $ et de mesurer plus exactement qu'autrefois l'augmentation de la masse apparente pour des vitesses croissantes de ces rayons. Elles donnent aussi le moyen de démontrer l'existence de nouveaux rayons $ fortement absorbés et, par conséquent, d'examiner ultérieurement l'hypo- thèse précédente. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE 12 Mai 1910. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Mertens : Sur la multiplication complexe. I]. a 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. F. Ehrenhañft à poursuivi ses recherches sur les quantités d'électricité élémen- taire portées par différents métaux. La plus petite particule d'or jusqu'à présent mesurée parait porter une charge de l'ordre de grandeur de 5 X 10-* en unités électrostatiques absolues, c’est-à-dire un peu plus que le dixième de la charge de l'ion H, considérée jusqu’à présent comme la plus faible. L'auteur en con- clut qu'il existe dans la Nature, en dehors des charges de grandeur connue portées par les ions mono et poly- valents, des quantités d'électricité qui ne sont qu’une fraction de la charge électronique considérée jus- qu'alors comme indivisible. — MM. J. M. Eder et E. Valenta : Mesures de longueurs d'onde dans le domaine visible du spectre d’are. IV. — MM. J. Pollak et R. Tucakovic décrivent la préparation de la trithio- méthylphloroglucine et de quelques-uns de ses dérivés et de ceux de la trithiophloroglucine. Par l’action de l'acide nitrique concentré sur les éthers méthyliques des deux trithiophénols, les auteurs ont pu y introduire des groupes nitrés. — MM. R. Wegscheider et A. Kle- mene sont parvenus à obtenir l'acide dinitrohémipini- que, F. 163°, par la nitration de l’éther diméthylique de l'acide hémipinique; la nitration directe de l'acide hémipinique a lieu avec perte de CO. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Biedl et L. Braun ont étudié l’artériosclérose produite par la compression de l'aorte intestinale chez le lapin, le singe et le mou- ton. Les altérations des vaisseaux présentent de grandes analogies avec celles de l’artériosclérose humaine. Séance du Séance du 2 Juin 1910. 4° SCcrENGES PHYSIQUES. — MM. F. W. Dafert et R. Miklauz : Note sur des miroirs de verre anti- ques. — M. J. Herzig a reconnu que la galloflavine n’est pas un dérivé du biphényl biméthylolide. Elle possède plutôt la formule CH?04(0H)', et son dérivé tétraméthoxylé se laisse transformer, par saponificalion d'un groupe méthyle, en triméthyloisogalloflavine C2H°0“(0CHS). Cette substance renferme un groupe COOH et un groupe lactonique; l’auteur va rechercher quelle est la fonction du dernier atome d'O. — MM.J. Herzig et F. Schmidinger, en condensant les acides di- et iriméthylogalliques par le persulfate de K en pré-ence d'acide sulfurique, ont obtenu l'acide tétramé- thyloflavellagique. — MM. J. Herzig et Br. Hertal, en faisant réagir CHSI sur une solution alcaline aqueuse de phloroglucine, ont obtenu avec un très bon rende- ment de la penta- et de l'hexaméthylphloroglucine. — MM. A. Kreidl et E. Lenk ont déterminé les hauteurs d'ascension de divers laits de femme et de vache dans le papier à filtrer. Ils ont noté des différences entre les laits de femme et de vache et entre les laits de femme à diverses époques de la lactation, qui ne s'expliquent que par des différences dans la teneur en caséine et dans le mode de suspension de la caséine, ce qui con- corde avec les observations ultramicroscopiques. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Elschnig : L'action antigène du pigment de l'œil. Par injection intrapéri- tonéale au lapin d’une émulsion d'uvéa d’un autre animal, il se forme dans le sang des anticorps qui ne réagissent pas avec le sérum, mais qui empê- chent les essais de liaison du complément avec l’'émul- sion d'uvéa de divers animaux, se combinent avec l'émulsion d'uvéa et possèdent donc la structure d’am- bocepteurs. On peut obtenir des immun-corps analo- gues (isoanticorps) par l'injection d'émulsion d'uvéa de la même espèce. Les hétéro- comme les iso-anticorps donnent la liaison du complément avec le pigment oculaire chimiquement pur. Séance du 9 Juin 1940. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. B. Kalicun : Sur les propriétés des courbes planes : de 5° ordre avec un point quadruple, de 5° classe avec une tangente simple. — M. J. Radon : Sur le maximum de l'inté- grale JE À L'(x,y, 0, x) ds. — M. A. Boltzmann a déter- miné dans un courant de section circulaire la résis- tance à l'air de surfaces rectangulaires (3 X 12cm.) courbées, par pesage et mesure manométrique de la pression. les pesées donnaient directement les compo- santes horizontale et verticale de la résistance à l'air, tandis que l'intégration graphique des observations de pression perméttait de construire la position des résul- tantes des pressions partielles. — M. J. Holetschek communique ses observations sur la clarté et le déve- loppement de la queue de la comète de Halley à son dernier passage. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Dechant : Double arc-en-ciel sur des surfaces d’eau. — M. G. Dimmer : La polarisation dela lumière dansla diffusion interne. II. — MM. Exner et E. Haschek donnent les longueurs d'onde des lignes principales des spectres d'arc et d’étincelle de cinq éléments de la série Gd-Cp, non encore séparés, mais décelables spectroscopiquement. — M. E. Beutel a étudié l’action de l'acide chlorau- rique sur le ferrocyanure de K. des solutions aqueuses de ferrocyanure de K sur le cyanure et l'hydrate d’or, et la solubilité de l'or très divisé dans les solutions de ferrocyanure de K. — MM K.L. Wagner et E.Zerner ont déterminé la solubilité réciproque de la pyridine et du sulfocyanure de potassium et construit leur dia- gramme de fusibilité. — MM. R. Kremann, J. Daimer, F. Gugl et H. Lieb ont déterminé le diagramme d'équilibre solide-liquide des systèmes binaires : phé- nol-diméthyluréeasym., phénol-monométhylurée, phé- nol-diméthylurée sym. Dans les deux premiers, il se forme des combinaisons équimoléculaires, tandis que, dans le 3°, deux molérules de phénol se combinent à une de diméthylurée sym. La substitution asymétrique diminue la tendance à la formation de combinaisons. — MV. R. Kremann, J. Geba el F. Noss ont établi les diagrammes d'équilibre des systemes 0-11-, m-p- et 0-p nitroaniline. Dans les trois cas, la courbe de tempéra- ture est horizontale. Il n'existe donc pas de combinai- sons. — MM. R. Kremann et K. Neumann ont étudié la vitesse de formation de l'acide méthylsulfurique à 40° et à 50° aux dépens de l'alcool méthylique et de l'acide sulfurique. Les constantes de vitesse augmentent for- tement avec la concentration de l'acide sulfurique. Dans les mêmes conditions, les vitesses de formation de l'acide méthylsulfurique sont plus grandes que celles de l'acide éthylsulfurique. Louis BRUNET. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91° ANNÉE N° 16 30 AOÛT 1910 Revue générale des Scien pures et appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser provisoirement tout ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. LOUIS OLIVIER La Revue générale des Sciences est cruellement éprouvée. D'un coup brutal, la mort a terrassé son Directeur en pleine activité, à l'heure même où paraissait le numéro du A5 août. Dans la Revue que Louis Olivier animait de sa féconde activité, il semble que nous ne l'avons vu que pour mieux sentir sa perte. Elle était son œuvre, cette Revue, œuvre qu'il entreprit malgré les conseils d'amis qu'en effrayaient la difficulté et la grandeur. Mais Louis Olivier avait ces deux dons, sans lesquels tous les autres sont stériles : une foi tenace et une inlassable énergie, et il suffit de regarder aujourd'hui, sur les pages qu'il ne lira plus, les noms des collaborateurs, tous devenus ses amis, qu'il sut grouper autour de lui, pour Juger de la perte que fait la Science française. En une touchante allocution, qui est aussi un exceptionnel hommage, M. le Professeur Bouchard, qui présidait la séance du 16 août de l Académie des Sciences, à bien voulu dire en quelle haute estime cette Académie tenait notre Directeur. Esprit encyclopédique, il savait choisir parmi les Mémoires que lui adressaient les savants adonnés aux sciences les plus diverses, et surtout il suscitait le travail du plus compétent sur les problèmes les plus actuels. Ses propres travaux, qu'il dut abandonner pour diriger la Revue et les Croisières de la Revue générale des Sciences, l'avaient déjà classé parmi les chercheurs de premier ordre. A ses Mémoires de Physiologie végétale et de Bactériologie sera consacrée, ici même, une étude approfondie. L'intelrigence et le cœur étaient chez lui ouverts à tous. Et le cœur n'avait qu'un secret : le secret du bien qu'il faisait. Aussi nous est-il donné aujourd'hui d'assister à un beau et réconfortant mouvement de solidarité scientifique. De toutes parts, avec l'explosion de douleur qu'a provoquée cette mort si brutale, nous parvient cel ardent désir : « Que ses œuvres ne disparaissent pas avec lui! » Dès aujourd'hui, nous avons le ferme espoir que ce vœu sera exaucé. Et dans notre affliction il y a aussi de la confiance et de la fierté, à la pensée que la Revue générale des Sciences continuera d'être digne de son fondateur, et que Louis Olivier se survivra dans ses œuvres. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 16 670 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE S 1. — Art de l’Ingénieur La Chronométrie française en 1910. — Le 26 juin, la Commission de l'Observatoire de Besan- con a vérifié et homologué les résultats définitifs de l'année 1909-1910, dont la Revue a indiqué récemment les chiffres globaux. Ces résultats dépassent tout ce qu'on aurait pu prévoir. Les records genevois ont été partout battus. Au classement individuel, M. Louis Leroy a deux pièces classées avec les n° 1 et 2, dont les chiffres de points, calculés au moyen de l’ancienne formule gene- voise encore en usage en 1908, auraient été respective ment de 270 et 270,8, le record genevois étant détenu par M. Huning avec 268 points 4 calculés d'après cette formule. Au point de vue série, M. Louis Leroy obtient une moyenne de 264 points 6 pour ses 5 meilleurs chrono- mètres, le record de série genevois n'étant que de 257 points 3, obtenus en 1900 par M. Marius Favre. Parmi les régleurs, M. Quélos bat également avec 261 points 7 le record de réglage de Genève, enlevé en 1900 par M. Marius Favre avec 257 l 57 points 3. Si maintenant nous comparons les résultats particu- liers de Genève 1909 avec ceux de Besançon 1909-1910, en nous servant de la nouvelle formule genevoise, nous relevons des résultats plus remarquables encore. Aux classements des pièces isolées, la première pièce genevoise, de la maison Patek Philippe, a obtenu S25 points, la première montre française, de la maison Leroy, 872 sur le maximum de 1.000. Au classement par série de 5 pièces, la maison Patek Philippe a obtenu 803 points 4contre S#4 points 5 à la maison Leroy. Le premier régleur genevois Batifo- lier a le premier prix de série avec 799 points. Le régleur bisontin M. Quélos en a obtenu 826,2. Dans ces conditions, il n’est plus exact de dire que Besancon marche bon train pour rejoindre Genève sur la route de la précision chronométrique. Le magnifique effort de 1909-1910 montre que la distance séparant les deux fabriques est largement couverte et que la chro- nométrie bisontine peut désormais, comme son Obser- vatoire, abandonner la timide formule Utinam pour arborer la devise triomphale : Nec melioribus impar! 2. — Physique An L'invention de la télégraphie sans fil, — On s'accorde généralement à attribuer à Marconi le mérite de la première réalisation pratique de la télé- graphie sans fil. Cependant ses travaux avaient été précédés de peu par ceux d’un savant russe, Popoff, décédé depuis plusieurs années, et dont l'importance parait avoir été méconnue. C'est, du moins, ce qu'a pensé la Société physico-chimique russe en nommant récemment une Commission chargée de préciser le rôle dé Popoff dans l'invention de la télégraphie sans fil. Cette Commission, après avoir étudié soigneusement la littérature du sujet et sollicité l'opinion de divers savants autorisés, comme Sir Oliver Lodge, M. Branly et d’autres, vient d'aboutir aux conclusions suivantes : 1° Popoff, durant l’année 1895, avait déjà l'idée de la possibilité d'appliquer les ondes de Hertz aux signaux à une certaine distance, et, en construisant son type de cohéreur, ne pensait pas moins à l'enregistrement des orages qu'à la transmission des signaux à une cer- laine distance à l’aide des oscillations électriques de haute fréquence ; 2° Au printemps de 1896, Popoff a effectué les pre- mières expériences de signalisation à une petite dis- tance dans le jardin de l’École des Torpilleurs à Cron- Stadt; au mois de mars, il utilisait ses appareils pour démontrer ce fait au cours d'une communication pu- blique : Sur la possibilité de la « télégraphie sans fil »; et, peu de temps après, il faisait, avec succès, une expérience de signalisalion au port de Cronstadt, à une distance d'à peu près 600 mètres ; 3° La première description des appareils et du schéma de M. Marconi a paru seulement au mois de juin 1897 dans le journal L'Ælectricien, par consé- quent après les premières expériences de Popoff sur la signalisation à l’aide des ondes de Hertz, expériences. qui avaient été faites avec succès à l’aide d’un appareil de construction originale pour enregistrer les orages. Ce n'est donc pas Popoff qui a imité M. Marconi, mais. bien plutôt le contraire. On peut affirmer que Popoff a emprunté l'idée de la signalisation à l'aide des ondes de Hertz au livre de Lodge, paru en 1894: mais il serait injuste de ne pas. avouer que le premier succès pratique de la télégra- phie sans fil appartient aux expériences de Popoff. En conséquence, il est injuste de nier son droit d’être nommé inventeur indépendant de la télégraphie sans fil, comme M. Righi l’a fait, uniquement parce que Popoff n'a pas indiqué dans son premier article de l'année 1896 l'avantage de l'application d’une antenne au poste transmetteur. Nous savons aujourd'hui que Popoff eut l’idée d'appliquer une antenne au poste transmetteur indépendamment de M. Marconi, comme M. Branly l’a indiqué à la séance du 16 décembre 1898 de la Société française de Physique. La possibilité que plusieurs personnes aient, en mème temps, conçu la mème idée est un fait qui n’est pas bien rare dans l'histoire de la science et de la technique. L'application du droit et du titre honoraire d'inventeur à chacune de ces personnes ne contredit pas à la justice, mais la restitue. Aussi la Commission conclut-elle, en se basant sur tous les faits mentionnés plus haut, que, de toute justice, Popoff doit être consi- déré comme inventeur indépendant de la télégraphie sans fil à l’aide des ondes électriques. $ 3. — Physiologie L'inscription graphique des sons du cœur. — Depuis Donders, dont le dispositif a été amélioré par Martius‘, de nombreuses méthodes ont été préconisées. pour l'enregistrement graphique des sons du cœur. Hurthle®, Einthoven*, Holowinski', se sont servis. dans ce but du microphone, Frank°, d'une membrane de caoutchouc très mince, munie d'un miroir, enfin Marbe®, des anneaux de suie formés, synchroniquement avec les vibrations d'une flamme, sur un ruban de papier. Toutes ces méthodes ont ceci de commun que le dispositif transmetteur se trouve au contact direct de la paroi du thorax. Or, ces parois exécutent des vibra- tions peu fréquentes, susceptibles de faire vibrer les. appareils transmetteurs. Pour utiliser les inscriptions. ainsi obtenues, il fallait évidemment démontrer l'iso- chronisme parfait de ces vibrations avec les vibrations. constituant les sons du cœur. M. Otto Weiss’, professeur à l'Université de Kôünigs- berg, a essayé de résoudre ce problème par une méthode essentiellement nouvelle, qui se passe de toute com- munication rigide entre l'inscripteur et la paroi du thorax. Deutsche med. Wochenschr., n° 4,892. Pfüger’s Archiv, t. LX, p. 263, 1895. Plüger's Archiv, t. CXVII, p. 461-472, 19057. Archives de Physiologie normale, etc., p. 893, 1896. Zentrabl. f. Physiol., t. XVII, p. 647. 5 Phys. Zeitschr., t. VII, p. 543, 1906. 7 Archiv f. d. ges. Physiologie, t. CXXIII, p. 341, 1908. ce &æ © 10 ce CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Le thorax du sujet est appliqué ordinairement à un -entonnoir relié à un tube. Le transmetteur employé par M. Weiss est basé sur le fait qu'une membrane circulaire de solution de savon surpasse les micro- phones, même les plus parfaits, par sa sensibilité aux ondes acoustiques. Pour enregistrer les vibrations d’un système si délicat, l'expérimentateur a construit un appareil spécial, dit phonoscope, qui, en dehors de son emploi direct, se prête à nombre d’autres applications scientiliques. L'une des extrémités d'un mince fil de verre argenté, recourbé en angle, est appliquée au centre de la mem- brane savonneuse; l'autre extrémité est fixée à un support spécial. Les vibrations de la membrane, trans- mises de cette facon à un levier de verre, sont enre- gistrées par la photographie. Le phonoscope consiste essentiellement en une cais- sette prismatique ABCDEFGH (fig. 1 et 2), disposée sur un pied de laiton. La paroi postérieure de cette caissette comporte une fenêtre amovible. La paroi antérieure porte un traineau S qui se déplace entre des guides verticaux, dont le frottement suffit pour le maintenir en une position quelconque. Au milieu de ce traîneau est attaché un tube cylindrique T renfer- mant une douille 1 qui s’y déplace avec une extrême facilité. Cette douille est fermée à son extrémité anté- rieure par une plaque munie à son centre d'un trou circulaire Z de {1 centimètre de diamètre, dont les bords forment un tranchant aigu. C'est ce trou qui reçoit la membrane de savon, tendue sur l'ouverture intérieure. La paroi supérieure de la caissette porte le levier en verre qu'il s'agit d'amener au contact de la membrane. Ce levier est scellé avec de la laque plate à un bâton de verre ab (fig. 2), vertical dans sa portion supérieure. Ce bâton se continue par une section horizontale (nor- male à la surface de la membrane) et qui se termine par un œil circulaire e parallèle à cette surface. Après avoir inséré cet œil circulaire dans la membrane de savon, on l'aju-le de façon à le placer dans son centre. A cet effet, le levier est attaché à un dispositif suscep- tible d’un mouvement universel; les déplacements longitudinal et transversal sont assurés par deux trai- neaux K et L, et les mouvements verticaux par une douille filetée M, combinée à un ressort spiral. Les g = Fig. 1. — Vue en élévation du phonoscope. — ABCD, cais- sette prismatique; S, traineau; T, tube cylindrique; 1, douille; Z, trou circulaire recevant la membrane de savon: R, U, objectifs microscopiques. déplacements de la membrane de savon sont effectués par le traineau ÿ, attaché à la paroi antérieure de l'appa- reil, et le tube T, fixé à son milieu. Un objectif microscopique R, inséré dans un tube, sert à éclairer le levier, dont l'image est projetée par un autre objectif U inséré dans un tube fixé, en regard du premier, à la paroi opposée; les axes op- tiques des deux tubes coïncident dans une même ligne droite, La plus grande difficulté de construction consiste à choisir les dimensions du système vibraloire, dont dépend la sensibilité du phonoscope. Le poids total de la membrane et de son levier n'est, en effet, au maximum, que de 0,00005% gramme. Le dispositif d'inscription est celui de MM. L. Hermann et Gil- demeister’, à fente verticale el à pla- que photographi- que douée d'un déplacement ho- rizontal. D'autre part, on peul rendre les vibra- tions du levier di- rectement visibles sous la forme de courbes; en re- couvrant la fente d'une plaque de verre dépoli à grains très fins, on voit, en effet, le le- vier apparaitre sur celle-ci comme un pointnoir dont les vibrations, dans le miroir tournant de Kôünig, pren- nentl'aspectd'une courbe.C'est ainsi qu'on représente immédiatement les courbes des sons de la parole. La longueur totale du levier de verre est de 18 mil- limètres ; son diamètre est de 0,01 millimètre et, comme le poids spécifique du verre est de 2,5, son poids total n'est que 0,000.0035 gramme. Les inscriptions des sons du cœur faites, simultané- ment avec l'enregistrement des pulsations, à l'aide de l'appareil décrit ci-dessus ont donné les résultats sui- vants : 4° Les sons du cœur présentent le caractère des sons musicaux; leurs fréquences sont intermédiaires entre 66,7 et166,7 par seconde. Souvent, des vibrations plus lentes, d'une fréquence de 20 par seconde, ou même moins, viennent se superposer sur les vibrations plus fréquentes ; 20 L'intervalle entre les commencements des deux sons d’une même période d'activité du cœur, c'est-à- dire la durée de la systole, varie, chez les adultes, entre 26 et 36 centièmes de seconde et, chez le fœtus, entre 17,5 et 18,5 centièmes de seconde; 3° L'intervalle entre le commencement du premier son et l'accroissement de pression dans la carotide est normalement de 6,75 à 7,75 centièmes de seconde. D'autre part, M. E. Herrmann*, en étudiant, au moyen du phonoscope, les sons des instruments à corde, a pu vérifier les analogies entre les sons de différents ins- truments que les musiciens constatent par voie pure- ment acoustique. C'est ainsi que certains sons de la corde /a du vivloncelle ressemblent beaucoup à certains sons de la corde so/ du violon, de même que certains sons de la corde /a du violoncelle ressemblent aussi, par la forme de leurs courbes, aux voyelles À ou Ao, et que certains sons de la corde so] du violon ne sont pas dissemblables, par leurs qualités acoustiques et la forme de leurs courbes, des sons d’un cor de chasse doucement joué. Te 1 Pflüger's Archiv, t. CX, p. 88, 1905. 2 Zeitschrift f. biol. Techn. u. Meth., t. I, p. 59, 1908. Fig. 9. — Vue en perspective de la partie supérieure du phonoscope. — ABHG, couvercle de la caissette rismatique; K, L, traineaux; M, ouille filetée: N, vis micromé- trique; ab, bâton de verre; cde, levier, terminé par un œil circulaire qui se fixe sur la membrane de savon. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE D'autre part, pour vérifier la précision des inscrip- tions obtenues avec le phonoscope, M. Weiss! a cons- truit deux appareils destinés à exciter une membrane téléphonique de facon à obtenir l'accord objectif et acoustique de leurs vibrations avec les vibrations enregistrées. L'un de ces appareils est basé sur l’'induc- tion de courant dans le circuit téléphonique, l'autre sur les renforcements et affaiblissements d'un courant constant traversant le circuit. Ces oscillations de cou- rant dans les deux appareils sont synchrones avec les vibrations de la courbe enregistrée. Le premier de ces appareils, la sirène à induction, comporte deux téléphones se composant simplement d'un aimant et d'une bobine, et qui communiquent par un conducteur avec le récepteur téléphonique. Les pièces polaires des aimants portant les bobines télé- phoniques, suivant un principe indiqué par Siemens, affectent la forme d'une membrane mince, disposée dans le même plan, de façon à assurer le parallélisme de toutes les lignes et surfaces correspondantes. Les deux téléphones sont disposés normalement à un disque de zinc, les pièces polaires étant placées radialement par rapport à ce dernier. Ce disque de zinc est mis en rotation; pendant sa rotation, des tiges de fer viennent passer près des pôles des téléphones, en y induisant des courants qui excitent le récepteur téléphonique. On conçoit sans peine qu'en adaptant les distances mutuelles des tiges de fer aux distances correspondant aux vibrations de la courbe, on reproduise dans le téléphone ces mêmes vibrations, pourvu que la masse des tiges soit graduée d'accord avec les fluctuations d'amplitude. Le second appareil, la sirène à sélénium, est d'un fonctionnement encore plus simple et infiniment plus commode. Une lampe à arc est munie d’un condenseur qui comporte une fente verticale délimitant le faisceau de rayons lumineux. Après avoir traversé l’eau d’un vase réfrigérant, ces rayons viennent frapper une lentille cylindrique, qui projette sur la périphérie d’un disque une mince bande lumineuse radiale par rapport au disque. La périphérie de ce dernier comporte des cou- pures correspondant, par leur nombre et leur hauteur, à la fréquence et à l'amplitude de la courbe acous- tique. Derrière ce disque est disposée, sur le chemin des rayons, une pile à sélénium, qui, suivant les alter- nances d'éclairage produites par la rotation du disque découpé, subit des fluctuations de résistance électrique, déterminant dans le circuit téléphoniques des fluctua- tions correspondantes de l'intensité de courant. Cette reproduction des sons originaux, bien plus exacte que celle que donne la sirène à induction, rend toutes les particularités des courbes acoustiques. Il suffit, à cet effet, de projeter la courbe, avec un gros- sissement convenable, sur le bord du disque et de découper ses contours. Alfred Gradenwitz. $ 4. — Géographie et Colonisation Une Colonie australe : la Terre de Ker- guélen®. — C'est en 1772 que le lieutenant de vais- seau de Kerguélen découvrit l'ile qui porte son nom. Visitée par Cook en 1776 — qui l’appela Terre de la Désolation! — et par Ross en 1840, elle fut oubliée jusqu’en 1893, où un navire de l'Etat en reprit officiel- lement possession au nom de la France. C'est à la même date, et à la suite de plusieurs voyages, que les frères Bossière, du Havre, obtinrent la concession de cette île pour cinquante ans. C'est grâce à leur initia- tive hardie et patriotique que l'attention du public vient d'être attirée sur cette possession lointaine et méconnue. ‘ Zeitschrift f. b'ol. Techn. u. Meth.,t. 1, p. 124, 1908. et Deutsch. Arch. f. klin. Medizin, t. LXXXXI, p. 513, 1910. _? Rexé Bossière : Kerguélen. Bulletin de la Société de Géographie commerciale, janvier 1910. 1 L'heure est particulièrement bien choisie au moment où les terres polaires, tant australes que boréales, prennent une importance économique. À son départ pour l'Antarctide, le D' Charcot signalait un établis- sement de pècheurs norvégiens dans l'ile Déception. Un chargement de charbon de 3.000 tonnes, provenant du Spitzherg, a atteint l’Europe l'hiver 1908, et on y recommence la chasse aux célacés et aux animaux polaires, de même que sur la côte Est du Groenland, comme au pôle opposé, dans la Géorgie, les Orcades etles Shetlands du Sud. Les grandes puissances(Canada, Etats-Unis, République Argentine) se hâtent de prendre possession des terres polaires ®. L'île de Kerguélen se trouve située par 49° de lati- tude sud, sous un climat moins froid que celui de l'Islande ou de Terre-Neuve; la température moyenne de l'été est de + 7,2 et celle de l'hiver de — 20,2. L'eau douce y abonde. Le pays est montagneux et presque toutes les parties basses sont couvertes d'une végétation formée principalement d'Acœna, sorte de pimprenelle. La faune se compose de lapins, importés par un navire anglais, d’otaries et d'oiseaux de mer. Le sol renferme des minerais contenant du nickel et des gisements de charbon à fleur de sol; les nombreuses cascades de l’île pourront fournir de la force motrice. La superlicie totale de Kerguélen et des îlots qui l’en- tourent est de 620.000 hectares, c'est-à-dire un peu moins que celle de la Corse. A l'heure actuelle, l'exploitation de l'ile comprend la chasse des phoques et la pêche des baleines. On compte même sur la présence du phoque à fourrure qui fournit le seal skin. Ce sont surtout les baleinoptères qui abondent; dans la campagne de 1909, une seule baleine franche a été capturée. Mais c'est sur l'élevage du mouton que l’on compte le plus. Un premier essai, entrepris avec vingt brebis et deux béliers, laisse beau- coup d'espoir, d'autant plus que le climat de Kerguélen est le même que celui des îles Malouines et du Sud dela Patagonie où cet élevage réussit très bien. Les Malouines nourrissent 800.000 moutons et la Patagonie plusieurs millions. Grâce à la présence de l'Acœæna, cette pimpre- nelle qui couvrait jadis la Champagne pouilleuse, une terre à moutons aussi, il est permis d'espérer que ces animaux prospèreront à Kerguélen en fournissant une laine abondante — en raison directe du froid à sup- porter — et d'une qualité égale à celle de Patagonie, qui est même plus estimée pour le peignage que les produits de la Plata et d'Australie. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 5. — Enseignement Personnel universitaire. — M. Chassagny, inspecteur d'Académie en résidence à Paris, est nommé inspecteur général de l’enseignement secon- daire (Sciences physiques), en remplacement de M. Lu- cien Poincaré, nommé directeur de l’enseignement secondaire. M. Thovert, docteur ès sciences, maitre de confé- rences de Physique à la Faculté des Sciences de Gre- noble, est nommé, en la même qualité, à la Faculté des Sciences de Lyon. M. le Dr Pachon, maître de conférences au Labora- toire de Physiologie générale de l'Ecole pratique des Hautes-Etudes, est nommé directeur d'un Laboratoire de Biologie expérimentale à ladite Ecole. M. Perrin, chargé d'un cours complémentaire de Chimie physique à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé professeur de Chimie physique à ladite Faculté (Fondation de l'Université de Paris). M. Guichard, professeur de Mécanique rationnelle et appliquée à la Faculté des Sciences de Clermont, est chargé d'un cours de Mathématiques générales à la Faculté des Sciences de Paris (chaire de M. Painlevé). ! Chronique géographique. Annales de Géographie, 15 no- vembre 1903. P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE' Messieurs, En m'invitant à vous exposer les méthodes d'analyse qui m'occupent depuis quelques années, le Conseil de la Société chimique de France me fait un très grand honneur. J’y suis d'autant plus sen- sible que je ne pourrai vous apporter ces considé- rations originales, ces généralisations fécondes qui font l'ordinaire des séances de votre Société. Si je ne quitte pas le terre à terre des manipulations de l'analyse, c'est que la volumétrie physico-chi- mique — dont les principes sont connus depuis longtemps et dont presque toutes les applications pouvaient être prévues par les théories actuelles — vise au but essentiellement pratique : simplifier le plus possible le travail du chimiste analyste. Les réactions utilisées en analyse volumétrique sont celles qu'un changementde couleur ou d'aspect caractérise : changements observés soit direc- tement, soit grâce à l'addition d'une substance intermédiaire qui jouera le rôle d’indicateur coloré de fin de réaction. Bien que le nombre des applica- tions de la volumétrie augmente rapidement et soit déjà considérable, il est cependant limité, plusieurs réactions ne comportant pas l'emploi d'indicateurs colorés. Mais d’autres propriétés que la couleur ou l’opacité peuvent être utilisées comme « indicateur de fin de réaction ». Lorsqu'on ajoute à une solu- tion un réactif formant une combinaison définie avec l'élément de la solution que l’on cherche à doser, toutes les propriétés physiques de la solu- tion varient avec la quantité du réaclif ajouté. Les propriélés considérées pourront être la densité, l'indice de réfraction, le point de fusion, de visco- sité, la conductibilité électrique, le potentiel de la solution par rapport à une électrode métalli- que, etc. Chaque fois que l’une d'elles présentera une valeur caractéristique lorsque la réaction volu- métrique est terminée, elle pourra servir d’'indica- teur de fin de réaction. Nous appellerons volumétrie physico-chimique le procédé volumétrique où l'appréciation d'un virage coloré est remplacée par la détermination d'une constante physique. Les points de fusion des mélanges de deux métaux varient suivant la composition desmélanges, et la courbe qui exprime ces variations présente souvent des points singuliers, correspondant à des combinaisons de composition bien définie. De 1 Conférence faite devant la Société chimique de France, le 12 mars 1910. — Les clichés des figures 1, 2, 19 à 22, 24 et 25 nous ont été obligeamment prètés par la Société. même, la courbe des viscosités de mélanges de liquides purs peut présenter des points singuliers, correspondant aussi à des combinaisons définies. Ces méthodes’ d'analyse sont couramment em- ployées, non pas pour remplacer la gravimétrie ou la volumétrie ordinaire, mais comme moyen d'in- vestigalion, pour fixer la composition de nouvelles combinaisons, Pour que la volumétrie physico-chimique puisse remplacer les méthodes analytiques courantes, il ne suffit pas que la constante physique considérée passe par une valeur caractéristique à la fin de la réaction; il faut encore que la détermination en soit rapide et suffisamment précise pour permettre l'analyse de solutions même très diluées. Aucune propriété ne remplit mieux ces conditions que les conductibilités électriques ou les différences de potentiel. Une expérience de plusieurs années m'a con- vaineu que les titrations volumétriques où ces pro- priétés jouent le rôle d'indicateur sont presque aussi rapides que les titrations volumétriques ordi- naires. Elles sont souvent plus exactes et infini- ment plus souples. Je veux dire par là qu'elles s'adaptent à un plus grand nombre de cas et dans des limites plus étendues de concentration. J'ai la conviction que ces méthodes vont sortir des labo- ratoires des spécialistes pour entrer dans la prati- que courante des laboratoires d'analyse; je crois aussi qu'elles supplanteront la gravimétrie dans beaucoup de ses applications, peut-être même dans la fixation de rapports atomiques. C'est pour cela, Messieurs, que je vous demande la permission de borner cet exposé à la volumétrie physico-chimique avec les conductibilités électriques ou les diffé- rences de potentiel comme indicateur. I. — TECHNIQUE DES TITRATIONS. La technique des titrations suivies par des mesures de la conduetibilité électrique variera sui- vant la précision que l'on cherche à réaliser; elle perdra naturellement en simplicité si l'on veut obtenir des résultats très précis. Dans tous les cas, on déterminera la conduc- tibilité de la solution à analyser initiale, seule d'abord, puis après l'addition de quantités connues d'un réactif titré. Le résultat cherché sera généra- lement obtenu par voie graphique, en portant sur des coordonnées rectangulaires les conductibilités en ordonnées et les volumes de réactifs en abseisses. Les points représentatifs de la conductibilité se 674 P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE placent sur des droites ou des courbes, caractéris- tiques pour chaque opération, et qui peuvent pré- senter un ou plusieurs points d’inflexion. L'absceisse de chacun de ces points d'inflexion fournit un résultat analytique; elle représente le volume du réactif titré qu'il a fallu ajouter à un volume donné de solution pour produire une réaction intégrale. Avec le dispositif le plus simple, la précision réalisée dans les titrations est de 0,5 °/, environ. La solution à analyser (40-80 c.c.) est introduite dans une cuve (fig. 1) munie d'électrodes, platinées ou massives suivant les cas, et d’un thermomètre sensible divisé en di- xièmes. La tempéra- ture du liquide sera maintenue constante, à 0°,1, pendant la durée de la titration, ce qui s'obtient sans difficulté en adoptant une température légè- rement supérieure à celle de la chambre et en réchauffant la cuve à la main lorsque c’est nécessaire. Le réactif est introduit par l'ou- verture latérale à; il est mesuré par une burette de 1 à 2 centi- mètres cubes, divisée en 1/109, et du type de la figure 2. La lecture du niveau du liquide dans la burette peut être garantie à 0,002 centimètre cube lors- que les burettes ont élé calibrées dans des conditions qui seront celles des expériences”. Après chaque addition de réactif, la cuve est agitée pour assurer le mélange, puis replacée sur les godets à mercure qui assurent le contact élec- trique. La détermination de la conductibilité se fait par la méthode de Kohlrausch, avec l'appareil ordinaire du commerce. Il est trop connu pour qu'il soit nécessaire d’insister, sauf peut-être en ce qui concerne la bobine d'induction, car larapidité et la précision de l'opération dépendent beaucoup de la qualité du son que produit l'interrupteur. Les trois facteurs qui déterminent la précision des résultats sont : la température, la mesure des volumes, la détermination de la conductibilité. Fig.1.— Cuve à électrodes pour la mesure des conductibilités des solutions à analyser. ! La quantité de liquide restant adhérent aux parois est plus constante si l'on prend soin de laver de temps en temps la burette avec de l'acide acétique concentré. Chaque dixième de degré provoque une différence de conductibilité — done une erreur — de 0,2 °/, environ. La position de l'index sur le fil calibré d’un mètre estobtenue à1/2millimètre près, même pardes débutants. Chaque 1/2 millimètre d'écart provoque une erreur de 0,2°/, également. Enfin la mesure des volumes est affectée d'erreurs variant de 0,2 à 0,6 °/ environ, suivant la quantité de réactif ajouté. L'erreur totale qui affecte chaque détermination de conductibilité sera donc, au maximum, la somme de ces différentes erreurs, soit 0,7 à 1 °/,. En géné- ral, elle est inférieure. On ne peut pas songer à diminuer les erreurs des mesures du volume par l'emploi de burettes de plus grandes dimensions, l’expé- rience montrant qu'il faut que le réactif soit 50 à 100 fois plus concentré que la solution à analyser. À une augmenta- tion du volume de la burette doit donc correspondre une augmentation du volume du liquide à analyser. Mais il n’y a intérêt à augmenter le vo- lume de la cuve à résistance que si l’on adopte en même temps un dispositif permet- tant d'assurer une tempéra- ture constante à + 0°,01 près. Les conditions de l'expérience sont alors changées ; la mé- thode perd son caractère de simplicité et de rapidité, elle devient plus rigoureuse et permet de fixer des rapports analytiques avec une grande précision. Toutes les analyses mentionnées dans cet exposé ont été effectuées sans thermostat, avec les petites cuves et les burettes de 1 à 2 c.c.; leur précision moyenne, de 0,5 à 0,8 °/,, correspond largement à ce que l’on obtient par les procédés volumétriques ordinaires. Les réactions dont le point final est indiqué net- tement par la courbe des conductibilités sont les neutralisations (saturations), les déplacements, les. précipitations, enfin quelques réactions donnant lieu à la formation de complexes solubles. Il est probable que plusieurs des réactions utilisées en oxydimétrie, en iodométrie ou en chlorométrie, ou basées sur les mêmes principes, pourront égale- ment être suivies par les conductibilités. Fig. 2. — Burctte pour la mesure des réactifs. II. — COURBES DE NEUTRALISATION. L'étude des courbes de neutralisation, c'est-à-dire des courbes qui relient les points représentatifs de P, DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE la conductibilité lorsque la titration est une neulra- lisation, est déjà ancienne. Kohlrausch, puis D. Berthelot (1891) ont signalé la forme qu'affectent ces courbes suivant la nature des acides et des bases en examen. De nombreux travaux ont paru sur le sujet dans ces dernières années”, Cela me permettra d'être bref et de me borner à reproduire les principaux types de ces courbes. A. Neutralisation d'un acide fort monobasique par une base forte, ou vice versa (fig. 3, courbe A'!'BC). Les portions AB et BC sont des droites parfaites en solution diluée. L'angle ABC a la même ouverture, quelle que soit la nature des acides forts, lorsque ceux-ci sont titrés par un même aleali. Il est d'autant plus aigu que la conductibilité limite de l’aleali réactif est plus faible. B. Neutralisa- tion d’un acide faible par une base forte, ou d'une base faible par un acide fort (fig. 3, courbe ABC). Les por- tions AB et BC sont des droites en solution di- luée. Cependant, chez les acides {ou les bases) très faibles, l’an- gle ABC est rem- placé par une courbe continue. C. Neutralisation d'acides de forces différentes pär une base forte, ou vice versa (fig. 3). Les courbes AB, A'B, A"B, AB représentent le passage d’un acide très faible à un acide fort. On réalisera ce passage soit en neutralisant des acides de force très différente à même concentration (acides bo- rique, acétique, glycolique, chlorhydrique, par ex.), soit en neutralisant un acide faible à des dilutions de plus en plus grandes. La courbe ABC se rap- proche de celle de l'acide acétique N/10 par la soude 10 N; la courbe A'BC représente la neutrali- sation de l'acide acétique N/1000 par la soude N/10 et enfin la courbe A"B se rapproche de celle de l'acide acétique N/20.000 par la soude N/200. D. Neutralisation d'un mélange à parties égales d'un acide fort et d'un acide faible (fig. 4). La force de l'acide — qui est proportionnelle à sa conducti- bilité — se lit à chaque instant de la neutralisation Fig.3.— Courbes de neutralisation des acides de force différente par une base forte. 4 Voir en particulier : Dusoux : Thèse Lausanne, 1908; Tarez et RoEMER : Zeit. f, physik. Ch.,t, LXUII, 1908; Mro- LATI : Zeit. f, anorg. Ch., 1. XXII, etc. par la différence des abscisses de la courbe AB el de la droite OB. Une chute brusque dans la force de l'acide indique la fin de la neutralisation de l'acide fort. Cette interprétation graphique n'est pas tout à fait rigoureuse, mais suffit en pratique lorsque la différence de force des deux acides est grande. Les acides dibasiques se comportent toujours comme des mélanges de deux acides monobasiques de force très différente, et de proportions naturel- lement égales. On les reconnaitra facilement à cette caractéristique. La liste de ces exemples pourrait être allongée : les neutralisations d'acides forts ou faibles par une base faible, celle des mélanges de plusieurs acides de force différente, des acides tribasiques, etc., fournissent des courbes tout aussi caracté- C ristiques. Dans A tous les cas, le dernier point d'inflexion cor- respond à la fin de la satura- tion. En pratique la détermina- tion des cour- bes de neutra- lisation estune © opération qui demande d’au- tant plus de temps que les courbes s'écartent davantage de droites; il faudra généralement 8 à 10 points représentatifs pour les tracer. Ces titrations ne sont donc pas parmi les plus rapides qui se puissent effectuer par la méthode des conductibilités (elles demandent 40 à 15 minutes); elles ne remplaceront les opérations courantes avec indicateurs colorés que lorsque cette dernière méthode est en défaut. Voici quelques-uns de ces cas : a) Titration de solutions très diluées. Avec les conductibilités, le point final est aussi net, sinon davantage, en solution très diluée qu'en solution concentrée. Il est encore possible de titrer avec une absolue précision des solutions N/40.000 en acides, ce qui correspond à l'acidité de l’eau distillée ordi- naire des laboratoires. Les colorés cessent pratiquement d'être utilisables à de pa- reilles dilutions. b) Titration d'acides ou de bases très faibles. Des acides aussi faibles que les phénols, l'acide borique, ou des bases aussi faibles que la pyridine, ne se laissent pas titrer avec les indicateurs colorés, Fig. 4. — Neutralisation d'un mélange a parties égales d’un acide fort et d’un acide faible, indicateurs 676 ou bien la titration est compliquée et souvent dou- teuse. Par les conductibilités, ces substances se laissent titrer avec autant de précision que les acides ou bases forts. La méthode n'est en défaut que lorsque le sel formé par la neutralisation est trop fortement hydrolysé. Tant que l’hydrolyse ne dépasse pas 10 à 20 °/,, la titration est possible, mais le point d'inflexion est remplacé par une courbe continue : il faut l’interpoler en prolongeant les parties droites de la courbe. ce) Titration de mélanges d'acides ou d'acides po- lybasiques. Lorsqu'il y à intérêt, pour l'analyste, à posséder sur la solution acide en examen des ren- seignements autres que la seule concentration molé- culaireenacides, Neutralisation de l'acidite la méthode des vo/atile par la potasse 5 0 conductibilités est un guide ex- cellent. Une courbe du type de la figure 3 (ABC) indique toujours un ou plusieurs acides monobasiques forts; une cour- be du type ABC (même figure) ne se retrouve que pour des acides très faibles, etc. gues Conductibilités électri Même lorsqu'il s'agit d'un mé- Hem KOH & 6 re lange de plu- Fig. 5. — Courbe de neutralisation sieurs acides de du distillat du vin. forces différen- tes, un opérateur habitué le reconnaitra souvent du premier coup d'œil et appréciera qualitativement leurs propor- tions et leur nombre, tant que celui-ci ne dépasse pas 3. Le calcul permet aussi, dans les cas simples, de reconnaitre s'il s'agit d'un acide dibasique ou d'un mélange d'acides fort et faible, et, dans ce dernier cas, donnera la proportion des deux acides. A titre d'exemple, mentionnons la neutralisation du distillat du vin, qui renferme des acides acétique et sulfureux. L'abscisse du point B (fig. 5) repré- sente la quantité d’alcali nécessaire à la neutralisa- tion des deux acides ; tandis que l’abscisse des pre- miers points d’inflexion représente la moitié de l'aleali nécessaire pour saturer l’acide sulfureux. Ce dernier acide, dibasique, se comporte lui-même comme un mélange d'acides forts et faibles. Les mélanges d'acides organiques font quelque- fois exception à ces règles, le caleul et l'observation P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE ne conduisant pas à des courbes identiques. L'étude de ces cas spéciaux n’a pas encore été publiée, et ce n'est pas ici le lieu de l’approfondir. III. — COoURBES DE DÉPLACEMENT. Les courbes de déplacement sont celles que l'on obtient lors- que le réactif déplace la substance que l'on veut do- ser. Ainsi l'addition de soude ou de potasse caus- tiqueàuneso- À lution dechlo- rure d'ammo- nium déplace l’ammonia- que; celle d’a- cide chlorhydrique à une solution d’acétate de soude déplace l'acide acétique, etc. Au point de vue théorique, ces courbes se traitent comme les courbes de neutralisation. Il s'agit tou- jours de la répartition d’un acide entre deux bases, ou vice versa. Les courbes de déplacement rentrent dans deux types, suivant la force de l’acide ou de la base déplacés. Quand ceux-ci sont extrêmement faibles, la « courbe » est formée de deux parties droites. La figure 6 représente un cas de ce genre : le dé- placement de la pyridine par la soude caustique de l’acétate de pyridine. La figure 7 représente un second ty- pede courbe: le dépiace- ment par la soude de l'ammonia- que du chlorure d’ammonium. La répartition de l'acide chlorhydrique entre l’ammoniaque et la soude ne s'effectuant pas intégralement sur l’alcali le plus fort, la courbe de déplacement est formée de deux droites, reliées par une partie incurvée. Le point théorique correspondant au déplacement (e Fig. 6. — Courbe de déplacement de la pyridine de l'acétate de pyridine par la soude caustique. oO Fig. 7. — Courbe de déplacement par la soude de l'ammoniaque du chlorure d'ammonium. | | L | | P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE 6577 intégral est sensiblement à la rencontre des deux droites. (Il y a lieu quelquefois de corriger très légèrement la position de ce point, lorsque les solutions sont très diluées.) Les titrations par déplacement sont une des opé- rations importantes de la volumétrie physico- chimique. Quelques exemples le mettront en évi- dence. L'addition de potasse caustique N/1 à une solu- tion N/50 en acide acétique et N/40 en chlorhydrate de pyridine et en chlorure d’ammonium fournit la courbe de la figure 8. Le premier point d'inflexion B correspond à la fin de la neutralisation de l'acide acétique ; le second point C, à la fin du déplacement de la pyridine, et le dernier point D à la fin du dé- placement de l’ammoniaque. Une seule opération permet donc l'analyse complète du mélange en examen. L'in- clinaison de la partie BC pro- vient de ce que le chlorhydra- te de pyridine est remplacé par le chlo- rure de potas- sium, sel plus conducteur. La partie CD estpresque ho- rizontale, le chlorure d'am- monium étant remplacé par du chlorure de potassium de même conduc- tibilité ionique. Cette méthode rendrait certaine- ment des services dans l'industrie de l'extraction des alcaloïdes naturels. L'exemple suivant est tiré de l'analyse physico- chimique des liquides physiologiques. L'addition de soude N/1 à une urine préalablement diluée dans 7 fois son volume d’eau fournit une courbe du type de la figure 9. L'interprétation de cette courbe est facile. De À en B, il y a neutralisation des acides libres de l'urine. De B en C (partie peu inclinée), il y a déplacement d'une base de forte conductibilité ionique, donc d'ammoniaque, seule base faible connue remplissant cette condition. De C en D, il ya enfin déplacement d'une base plus forte que l’ammoniaque. La conductiblité ionique de cette O Fig. 8. — Courbe de neutralisation et de déplacement par la potasse caustique agissant sur une solution d'acide acé- tique et de chlorhydrate de pyridine et d'ammonjiaque. * C'est-à-dire que l'ion K a une vitesse de migration plus grande que l'ion C“HAZ. base est, d'après l’inclinaison de CD, très faible, Cela revient au même de dire que le poids molécu- laire de cette base est très fort. L'expérience confirme cette interprétation. En ajoutant à l'urine des sels ammoniacaux, la partie BC de la cour- be s'allonge de la quanti- té théorique. Le dosage di- rect de AzH°, après distilla- tion dans le vide de l’urine additionnée de Mg0, con- duit aussi aux mêmes va- leurs que la courbe. Par contre, le con- trôle par l’a- nalyse chimi- que du dosage des bases organiques fortes et à gros poids moléculaire semble difficile. Il est probable que la partie CD de la courbe fournira le dosage de la créatinine, mais cela reste à prouver. L'addition d'acide chlorhydrique à l'urine pro- voque une courbe du type de la figure 10. Le point d'inflexion, toujours très net, indique la fin du déplacement des acides fai- bles combinés. Ces derniers exemples mon- trent qu'il suffit de deux titra- tions, suivies par des mesu- res de la con- ductibilitéélec- trique — opé- rations qui prennent vingt à vingt-cinq mi- nutes — pour obtenir quatre résultats analy- tiques : la con- centration mo- léculaire des acides libres, celle des acides faibles combinés, de l'ammoniaque et des bases organiques fortes (créatinine ?). Il serait facile de multiplier les exemples d'appli- cations de ces courbes de déplacement. / Fig. 9. — Courbe de neutiralisation et de déplacement de l'urine par la soude. Fig. 10. — Courbe de déplacement de l'urine par l'acide chlorhydrique. 678 P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE IV. — COURBES DE PRÉCIPITATION. $ 1. — Obtention des courbes. Les courbes de précipitation s'obtiennent lorsque le réactif précipite un ou plusieurs éléments de la solution à analyser. Ces titrations sont les plus importantes qu'on puisse suivre par les conducti- bilités; il parait même singulier qu'elles n'aient pas été appliquées depuis longtemps dans la pra- tique courante, si l'on songe qu'elles permettent d'effectuer en quelques minutes un grand nombre de dosages que les méthodes gravimétriques ne livrent qu'après des opérations beaucoup plus longues et sujettes à plus de causes d'erreur. Le volume de réactif nécessaire pour précipiter entièrement la solution en examen est donné par l'abscisse du point d’inflexion B (fig. 6). Il sera d'autant mieux déterminé : 4° que les deux por- tions de la courbe se rapprochent davantage de droites ; 2° que l'angle « que ces deux droites forment est plus aigu. ù La théorie et l'expérience permettent de poser quelques règles, très générales, qu'il faut suivre pour que ces conditions de sensibilité soient rem- plies : a) Le réactif doit être beaucoup plus concentré que la solution à analyser. Lorsque ce n’est pas le cas, les parties AB et BG deviennent des courbes. Il faut davantage de points pour les tracer, ce qui allonge la durée de l'opération, sans supprimer, du reste, une certaine incertitudesur la position exacte de B. En pratique, le réactif sera, comme cela a déjà été dit, 50 à 100 fois plus concentré que la solution à titrer. b) La solution à titrer doit être diluée. C'est une conséquence nécessaire de la règle précédente ; c'est aussi une nécessité en soi-même. La conduc- tibilité spécifique des solutions salines diluées variant en proportion inverse de la concentralion, les portions AC et BC de la courbe deviennent des droites. Il ne faut pas craindre de titrer par préei- pitation des solutions même très diluées, contenant 1 équivalent-gr. dans 500 ou 4.000 litres, lorsque la solubilité du précipité le permet. La titration sera, dans ces cas, plus précise qu’en solution rela- tivement concentrée. c) La présence de substances étrangères dans la solution à analyser ne nuit pas aux titrations, à condition que ces substances soient sans action sur le réactif. Les titrations sont encore possibles en présence d'un grand excès de sels étrangers; elles sont cependant moins précises. Non pas que l'angle + soit modifié, mais parce que les variations de la conductibilité au voisinage du point À sont déterminées, expérimentalement, avec d'autant plus de précision que la valeur absolue de la conducti- bilité est faible. d) Il est sans importance que l'élément à doser soit engagé dans une combinaison plutôt que dans une autre. Ainsi le dosage du baryum dans un sel de ce métal fournira des inflexions (x) identiques, qu'il s'agisse du nitrate, de l'acétate où d'un autre sel quelconque de baryum. Le seul tempérament à apporter à cette règle est l'hydrolyse possible des sels. La méthode des con- ductibilités ne s'applique pas aux sels hydrolysés des métaux lourds, et il pourra arriver que les sels d'un acide faible soient hydrolysés, tandis que ceux d'un acide fort ne le seraient pas sensiblement. Exemple : la titration de l'uranyle, possible dans le nitrate d'uranyle, ne l’est plus dans l’acétate. De même pour le plomb. e) Le choix du réactif a une grande importance. Il n’est pas indifférent, par exemple, de titrer le baryum avec un sulfate quelconque, comme c'est le cas en volumétrie ordinaire. L'inflexion est d'autant plus accentuée que le radical du réactif n'entrant pas dans la combinai- son insoluble à une faible conductibilité ionique. Les radicaux basiques de faible conductibilité sont le lithium et quelques bases organiques. Les radi- caux acides de faible conductibilité sont seulement les acides organiques. Il en résulte que le réactif du baryum sera le sul- fate de lithium ou le chromate de lithium, tandis que le réactif des sulfates sera l’acétate de baryum, et ainsi de suite. L'expérience montre que l'observation de cette règle, déduite théoriquement, permet d'effectuer des titrations qui seraient peu exactes avec les réactifs usuels. Le seul tempérament à y apporter est de nouveau l'hydrolyse possible du réactif le plus sensible, qu'il ne faut jamais perdre de vue. f) Aucun précipité n'étant absolument insoluble, il faut considérer le cas où cette solubilité n’est pas négligeable. L'expérience montre qu'alors la courbe de précipitation prend l’allure de la figure 11. L'ordonnée RN' représente la conductibilité du sel soluble formé par la réaction, tandis que NN’ représente la conductibilité de la solution saturée | du précipité. Cette solubilité étant diminuée par un | | | er ge de A ee MR excès des ions communs, — excès d'autant plus considérable que l'on s’éloignera davantage du point N, — il en résulte que la courbe de précipita- tion sera formée de deux droites reliées par une partie incurvée. En pratique, lorsque le précipité est un peu soluble, il faut éviter de faire des déterminations de conductibilités dans le voisinage du point final de la titration. On obtient plus exactement le point d'inflexion cherché en prolongeant les parties droites _ ——— P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE de la courbe avant et après l'inflexion. Cette règle est une des plus importantes; elle montre que la méthode des conductibilités permet d'utiliser, pour Li) 5 & 5 © uU at) D = = oc | ne à . [a ï © l O ; !1R cm Réaceif Fig. 11. — Courbe de précipitation avec un précipité légèrement soluble, des analyses volumétriques, des précipités légère- ment solubles qui ne conviendraient pas pour des analyses gravimétriques. g) La netteté du point d'inflexion dépend encore des propriétés adsorbantes du précipité et de la vitesse de précipitation. Tous les précipités sont plus ou moins adsor- bants; ils semblent l'être d'autant plus que leur solubilité est faible. On reconnaitra qu'il y à adsor- ption lorsque, après chaque addition de réactif, la conductibilité variera irrégulièrement avec le temps. Les courbes sont alors mal définies; leur point d'inflexion, peu net, ne correspond pas exactement à la fin de la réaction; la titration exacte n’est pas possible. Ce cas se présente généralement dans la précipitation des hydroxydes, sulfures, ferrocya- nures et quelquefois des carbonates. Les dosages par précipitation que nous avons étudiés jusqu'ici sont ceux des métaux alcalino- terreux, du plomb, de l'argent, du zinc, du cad- mium, du chrome, comme bases, et ceux des chlo- rures, bromures, iodures, cyanures, sulfocyanates, sulfates, carbonates, oxalales, benzoates, chroma- tes, phosphates, fluosilicates, tartrates, ete., comme acides. Les résultats de quelques-uns de ces dosages sont assez intéressants pour mériter d'être brièvement résumés. on 2. — Résultats des dosages. a) Métaux alcalino-terreux. — Isolément, les métaux de ce groupe se laissent titrer facilement. Le calcium : 1° comme oxalate, par un oxalate alcalin (Li, Na ou même K); cette litration est une des plus sensibles; les points représentatifs se placent sur deux droites parfaites; 2° comme sul- % 679 fate, par le sulfate de lithium, en présence de deux volumes d'alcool; ce dosage est un peu moins précis que le précédent; l'addition d'alcool trans- forme les droites courbes légèrement en con vexes par rapport à l'axe des abscisses; 3° comme carbonate, par un carbonate alcalin, en présence d'ammoniaque; c'est la titration la moins exacte el la plus lente, à cause des propriétés adsorbantes de CaCO*. Le strontium : mate de lithium, en présence d'un volume d'alcool 4° comme chromale, par le chro- (excellent); 2° comme oxalate, en présence d'acide acétique; 3° comme sulfate, en présence d'un volume d'alcool; 4° comme carbonate, en présence de AzH° et d'alcool. Cette dernière titration est de nouveau la plus lente et la moins exacte. Le bar pui : 1° comme sulfate, par LiS0*, en pré- sence de 1/2 volume d'alcool lorsque la solution est très diluée; 2° comme chromate, par LiCrO‘; 3° comme fluosilicate, par le fluosilicate de cuivre, en présence d'un volume d'alcool en opérant lente- ment ; 4° comme carbonate. Ces quatre titrations sont excellentes; la dernière est toujours la moins précise, mais les résultats sont cependant meilleurs que lorsqu'il s'agit des carbonates de caleium et de strontium. ; Les solutions contenant les métaux alealino- terreux à doser peuvent être très diluées; elles ne devront en tous cas pas contenir plus de 3 à 4 grammes (de métal) par litre. Les substances étrangères ne sont pas nuisibles tant que leur pro- portion n’est pas trop forte. La séparation des trois métaux du troisième groupe est également possible par titrations. Le Conductibrilité électrique cm Réactif Fig. 12. — Courbes de précipitation d’un mélange de sels alcalino-terreux (Ba, Sr, Ca). point de départ de ces analyses sera, presque tou- jours, un mélange des carbonates obtenus par | précipitation de la liqueur filtrée du deuxième groupe, par le carbonate d'ammoniaque. Les carbo- 680 nates alcalino-terreux sont dissous dans un faible excès d'acide chlorhydrique, puis la solution est diluée dans un flacon jaugé. Une portion aliquote de cette solution, additionnée de deux volumes d'alcool, est titrée par le sulfate de lithium. Cette opération donne la concentration moléculaire totale en Ba + Sr + Ca (fig. 12, courbe I). Une seconde portion de la solution est additionnée d'un volume d'alcool et titrée par le chromate de lithium (fig. 12, courbe II). Cette seconde opération donne la concentration moléculaire en Sr + Ba; elle fournit aussi des renseignements qualitatifs sur les proportions où se trouvent ces deux métaux. Un point d'inflexion B, peu marqué, correspond à la fin de la précipitation du BaCr0*, moins soluble que SrCrO*. La troisième portion est enfin additionnée d'un volume d'alcool et titrée par le fluosilicate de cuivre qui précipite seulement le baryum (fig. 12, cour- be III). En résumé, les trois titrations donnent successi- vement : Ba + Sr + Ca Ba + Sr Ba Le baryum est obtenu directement; le strontium et le calcium par différence. On pourra contrôler le dosage du calcium en précipitant par un oxalate le liquide, préalablement filtré, de laseconde titration. De même, on pourra contrôler le dosage du stron- tium en précipitant par le chromate de lithium le filtratum de la troisième titration. Cette méthode de séparation des alcalino-terreux n'est pas la seule qu'on puisse établir, mais c’est la plus précise de toutes celles que nous avons essayées. Nous avons pu constater que, dans les conditions qui viennent d'être précisées, l'erreur affectant chaque titration n’atteint en général pas 1 °/,. La méthode des conductibilités présente done, dans ce cas particulier, un avantage considérable sur les méthodes gravimétriques : soit en ce qui concerne la précision des résultats, soit aussi comme rapidité et simplicité des opérations. Les trois titrations nécessaires pour faire une séparation complète sont terminées en une demi-heure. Lorsque l’un des métaux existe en très faible proportion, la séparation directe n’est pas possible; il faut d'abord éliminer une partie du métal en trop grand excès. Cela peut se faire par les méthodes courantes (solubilité des chlorures dans l'alcool, la pyridine, etc.), mais plus élégamment — et plus sim- plement aussi — en précipitant, dans la cuve même, une partie du métal en excès par un sel d'argent. Si la solution contient, par exemple, beaucoup de baryum et des traces de calcium, on ajoutera une solution saturée de sulfate d’argent qui préci- ] P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE pite à la fois AgCl et BaSO*. La conductibilité de la solution diminue de ce fait, et le dosage du calcium par un oxalate devient rigoureux. Cette opération, qui paraît singulière au premier abord, est rendue possible par le fait des grandes dilutions auxquelles la méthode des conductibilités est encore applicable. Nous serons prochainement fixés sur la limite à laquelle des traces d’un de ces métaux peuvent être dosées en présence de grandes quantités des deux autres. b) Halogénures. — Les chlorures, bromures et iodures se laissent titrer isolément jusqu'en solu- tion millième normale — et mème plus diluée — par les sels d'argent‘. Les inflexions sont très caractéristiques, même avec le nitrate d'argent employé comme réactif. Les iodures se laissent aussi titrer par le sulfate thalleux, mais pas en Conductibrlites électriques ER cm$ AgAzOSN Fig. 13. — Courbes de précipitation d'un mélange d'halogénures. solution très diluée. Ces titrations sont encore nettes en présence de sels étrangers sans action sur AgAzO”, tant que la quantité de ces sels ne dépasse pas 20 à 30 fois celle des halogénures. La séparation des halogénures est réalisée par deux titrations successives surdes parties aliquotes de la solution. On ajoute à la première portion une quantité connue d’un sulfocyanate alcalin et on précipite par AgAzO*’. La courbe de précipitation prend alors l'allure de la figure 13, courbe I. Le dernier point d'inflexion D, extrêmement net, donne la somme I + Br + CI -L CAYS. Les petites inflexions que l’on observe en B et en C renseignent qualitativement sur la proportion des halogénures. De À en B, l'iodure d'argent — dont la solubilité est de 5 X 10 gr. mol. par litre, à 20° — précipite le premier; de B en C, le sulfo- cyanate et le bromure d'argent, dont les solubilités sont très voisines (8,3 X 107 et 4,5 x 1077) précipi- tent ensuite; de C en D le chlorure d'argent, plus ‘ L'opération est un peu moins rapide dans le cas des iodures: il faut alors attendre 1 à 2 minutes après chaque addition de réactif, jusqu'à ce que la conductibilité devienne constante. P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE soluble (1,06 X 10 *) précipite le dernier. Comme la conductibilité ionique de CAzS est plus faible que celle de I, Br et CI, la disparition du sulfocyanate alcalin provo- que une aug- mentation de conductibi- lité, d'où la légère infle- xion en B et en C. A la secon- de portion de la solution en examen, on ajoute de l'ammoniaque jusqu’à ce que la concentration moléculaire de cet alcali soit 8 à 42 fois celle du chlorure, déterminée approxima- tivement par l'opération précédente. La courbe de précipitation par le nitrate d'argent (fig. 13, courbe Il) présente un point d'inflexion, très net, qui correspond à la fin de la précipitation 1 + Br. La séparation des halogénures par l'ammoniaque en deux groupes, I + Br d’une part et CI de l’autre, est absolument quantitative par cette méthode. Cela paraîtra singulier aux analystes qui savent que le bromure d'argent est légèrement soluble dans l'ammoniaque. Mais AgBr est surtout soluble dans le chlorure d'argent ammoniacal,et ce dernier com- posé n'existe pas encore au point B. De B à C, la solubilité de AgBr dans l'ammoniaque se fait sentir par une inflexion de la courbe; en continuant à ajouter du ni- trate d'argent, ilarrive un mo- ment où AgCl n'est plus solu- bilisé. Lesinfle- xions que l’on observe alors n'ont plus de signification analytique pré- cise. Je mention- nerai encore brièvement le dosage des phosphates par le nitrate d'uranyle. Les figures 14, 15 et 16 reproduisent les courbes de précipitation des phosphates trisodique,*disodique et monoso- dique. Ces titrations sont un peu plus délicates que les précédentes, car elles doivent être effectuées rapidement, et l'inflexion du phosphate monoso- Fig. 14. — Courbe de précipitation du phosphate trisodique. Fig. 45. — Courbe de précipitation du phosphate disodique. dique est peu accentuée. On analysera de préfé- rence des solutions contenant 0 gr. 3 à 0 gr. 6 de P*0° par litre avec le nitrate d'uranyle normal. Ces dosa- ges, comme ceux des mé- taux alcalins, du plomb, des tartrales, etc., seraient inté- ressants à examiner de plus près, mais j'ai hâte de montrer la méthode des conducetibili- tés sous un autre aspect, celui d'un procédé d'analyse « qua- litative » en même temps que quantitative. Fig. 16. — Courbe de précipitation du phosphate mouosodique. V. — ANALYSE PHYSICO-CHIMIQUE DU VIN. Aucun exemple n'illustrera mieux ces applica- tions que celui de l'analyse physico-chimique du vin. La plupart des sels se laissent doser directement dans le vin, sans passer par l'opération ordinaire qui consiste à évaporer le vin, à calciner l'extrait sec et à reprendre le résidu salin par de l'eau. Les chlorures, par exemple, se dosent en ajoutant direc- Neutralisation düu vin per l& baryte y Conductibilités électriques © Rd cm° baryte ra Fig. 17. — Courbe de neutralisation du vin par la baryte. tement au vin du nitrate d'argent N/1. Les dosages sont encore précis quand il n'y a que 20 milli- grammes de NaCI par litre; ils sont infiniment plus rapides que les analyses gravimétriques correspon- 682 P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE dantes, quoique plus précis. Les sulfates, l'acidité, | résultats seront rendus comparables si l'on convient les phosphates, le calcium se laissent aussi titrer directement dans le vin, bien que ces deux derniers dosages soient plus délicats. Un artifice permet de combiner plusieurs de ces dosages; c’est de choisir un réactif capable de donner des combinaisons successives avec les élé- ments du vin. La fin de chaque réaction se lira sur la courbe, qui fournira ainsi plusieurs renseigne- ments analyliques. Ce cas se présente en ajoutantau vin de la baryte N/4. La courbe a l'allure générale représentée dans la figure 17. De À en B, la baryte précipite le sulfate de potassium du vin, en donuant de la potasse qui neutralise les acides libres. En B, la précipitation du BaSO* est terminée; l’alcali satureles acides, et la courbe BC est une courbe de neutralisation compa- rable à celle de la figure 3 (p. 675). En C, le vin est devenu neutre; des déterminations précises, effec- tuées par des méthodes très différentes, ont permis d'établir qu'il n'y a ni excès d'acide niexcès d'alcali à ce point de la saturation; en d’autres termes, la concentration des ions H est devenue égale à celle des ions OH, soit10-7. Le vincontient dessubstances en fausse solution, et il s'en forme encore pendant la neutralisation avec la baryte. Ces substances, stables en solution acide, floculent lorsqu'elles sont plongées dans un milieu neutre, suivant les lois établies par Hardy et par Perrin. La floculation de ces substances provoque une diminution de la conductibilité, d'autant plus accentuée que le gel formé est plus absorbant et qu'un plus grand nombre d'éléments conducteurs sont ainsi éliminés de la solution. En continuant l'addition de baryte, on provoque une floculation plus abondante des substances colloïdales, en même temps que la baryte se combine aux acides faibles à gros poids molécu- laires, comme l'acide tannique, pour former des sels insolubles et gélatineux, et déplace les bases faibles combinées (AzH°). Au point D, la floculation et l'absorption sont terminées; la conductibilité augmente proportion- nellement à la concentration de la baryte ; DE devient une droite. De A en Cet de Det E, on a affaire à des équilibres ioniques instantanés; la conductibilité ne varie pas avec le temps ou l'agitation. De C en D, il s'établit des équilibres d'absorption, qui ne sont jamais instantanés; la conductibilité varie légère- ment avec le temps, l'agitation, et même la manière d'introduire le réactif (par doses massives ou par petites quantités à la fois). Deux observateurs obtiendront toujours des courbes superposables dans les parties ABC et DE, tandis qu'elles différeront légèrement dans les parties CD. Au point de vue pratique, tous les une fois pour toutes du mode d'opérer. D'après ce qui précède, l'abscisse OD représentera lenombre de centimètres cubes de baryte N/Ænéces- saires pour précipiter les sulfates, soit O) X K! — sulfates, en grammes de K*SO” par litre. Le facteur K' dépend du nombre de centimètres cubes de vin soumis à l'analyse : il est de 0,435 pour 50 centi- mètres cubes. L'abscisse Ocreprésente le nombre de centimètres cubes de baryle nécessaires pour « neutraliser » le vin, c'est-à-dire pour qu'il ne contienne ni acide ni base en excès. Par convention, on pose Oc X K° — acidité totale, en grammes de H*SO‘ ou de C‘O0°H° par litre. Chose remarquable, ces deux dosages, bien que rapides, sont plus précis que les dosages or- dinaires par pe- sée du BaSO'ou par virage d'un indicateur loré. Des ana- lyses compara- lives, extrème- ment nombreu- ses, ont permis d'établir que le poids de sulfate de potasse con- tenu dans un vin estfixé avec une erreur Mma- CO= — ximale de Fig. 18. — Courbes de neutralisation 0,02 gramme du vin par la soude et par la baryte. ; par litre, au moyen de la courbe, tandis que la gravimétrie ne permet pas de garantir cette précision dans la plu- part des cas. Quant à l'acidité totale, elle dépend — lorsqu'on la détermine par le virage d’un indicateur coloré — 1° de la nature de l'indicateur ; 2° de l’usage qui en est fait (essais à la touche ou in vitro); 3° d'une équation personnelle très variable. Il est bien connu que ces déterminations sont les plus sujettes à caution et qu'elles diffèrent beaucoup d’un laboratoire à un autre. Par la courbe, les valeurs obtenues par différents observateurs sont toujours très voisines : elles ont aussi une signification chimique précise. Il reste à montrer que l’abscisse ch fournit un troi- sième dosage, soit ch X K°— matières tannantes, en grammes par litre. Cela a été prouvé par bien des méthodes différentes, directes ou indirectes. Une des plus probantes consiste à comparer la neutra- | | lisation du vin par la soude et par la baryte. Pour plus de clarté, ces deux courbes ontété portées sur le même graphique (fig. 18). On constate que les Fig. 19. — Courbes de neu- tralisalion et précipita- tion des vins rouges fran- çais. — I, côte de la Loire: 11, Hérault. abscisses du point H et du point N sont presque identiques. L'inflexion de la courbe de neutralisation du vin par la soude ne se produit pas lorsque la solution est neutre (point C), mais lorsqu'elle est franchement basique : une preuve que le vin contient des acides faibles donnant avec la soude des sels plus ou moins hydrolysés. L'abscisse OA est proportionnelle à la concen- tration moléculaire de tous les acides du vin, l'abscisse Oc est proportionnelle à la concentration moléculaire des acides forts ; la différence Oh — Oe, soit ch, sera proportionnelle à la concentration des acides faibles. Ces acides faibles ont été désignés sous le nom de « matières tannantes », parce qu'ils jouissent de quelques propriétés communes, qui rappellent celles des tannins. La courbe de la figure 17 permet encore d'’effec- tuer un quatrième dosage. On calculera les cendres par la formule approchée suivante : (S + 20)(0a+ 8) 3.330 — cendres, en gramme par litre, où S — 0/0 d'alcool dans le vin ‘, et6 — fonction de la conductibilité, formule dont il serait trop long de donner les bases théoriques. À titre d'indication, il suffit de rappeler que les cendres sont fonction de la minéralisation totale du vin et de l'acidité. L'expérience a montré qu'appliquée au calcul des 1 Voir J. Chim. Anal., 1910. P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE 683 cendres de plusieurs centaines de vins différents, celte formule fournit des résultats presque aussi précis que la détermination directe des cendres par calcination de l'extrait sec, opération dans laquelle on perd les éléments volatils d'origine minérale. On voit, en résumé, qu'une seule opération — très rapide — fournit les dosages quantitatifs de quatre éléments importants du vin. Elle fournit encore des renseignements qualitatifs sur une série d’autres constituants. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les courbes reproduites dans les figures 19 à 22 pour remarquer des différences considérables dans l'inclinaison et les courbures de la partie BG et dans l'allure générale de la partie BD. La recherche des causes qui provoquent ces différences n’est pas aisée et progresse lentement. Jusqu'ici, il est établi que l'alcool, qui augmente la viscosité du vin, diminue la conduetibilité x et, par conséquent, l'angle que forme BC avec l'axe des abscisses. Toutes choses égales, BC sera d'autant plus incliné qu'il y aura davantage d'alcool *. L'acide tartrique en excès provoque une courbure caractéristique de la dernière partie de BC et aussi une inclinaison générale de cette portion de courbe. Les matières en suspension colloïdale qui existent dans certains vins teignent les électrodes, dont 350 Fig. 20. — Courbes de précipitation de vins - T4 blancs. — Algérie — 150 1906; 1J, Tunisie 1908. = elles augmentent.la résistance électrique: La con- ductibilité diminue alors d'une manière frappante. 1 Cette fonction n'est cependant pas linéaire. 684 P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE Ces courbes aplaties n’ont encore été observées que | renseignements qualitatifs qu’elle donne par sur- chez certains vins de croit. raisins secs (fig. 21). Enfin, d'autres sub- VI. — CouRBEs stances — qui ne sont DES DIFFÉRENCES DE PO- pas des tannins — MENTIELS floculent en masse après le point C; la $ 1. — Technique des conductibilité tombe DRÉRAESE brusquement pour re- Il me reste à vous monter ensuite sans parler d’une autre mé- transition. Cette allure thode de volumétrie caractéristique n’a en- physico-chimique qui core été observée que est utile comme indi- chez certains vins de marc (fig. 22). A côté de ces extrêmes, on constate que les vins d’une même région donnent des courbes qui se ressemblent, ete. L'ensemble de ces observations, encore incomplètes, fournit un élément d’apprécia- tion que l’on pourrait com- parer à la dé- gustation. Il ne peut pas se formuler en chiffres, mais guide le chi- miste et lui suggère sou- vent le dosage utile à faire dans les cas douteux. Il serait pré- maturé d’au- gurer quels seront les ser- vices que la Cas A VER à al méthode est EUTT appelée à ren- Hi dre dans cel /] 3. 1 TN | ordre d'idées. <00) L TIT T1 Elle entrera 3e d'abord dans I la pratique 150 Fig. 22. — parce qu'elle Courbes de pré Conduit à des cipitation de vins de marc. dosages quan- titatifs rapi- des; à ce moment, le nombre et la variété des observations faites permettront d'apprécier les Fig. 21. — Courbes de précipitation de vins de raïsins secs. cateur de fin de réac- tion : le saut de poten- tiel se produisant tou- jours au contact d'une lame métallique et d'une solution saline. On sait que la grandeur de ce saut x varie avec la concentration c des ions métalliques de la dissolution suivant la loi de Nernst : = K'— K° log ec, dans laquelle K' et K° sont des constantes dont la valeur numérique est souvent connue a priori. L'addition d'un réactif qui engage les ions métalliques dans une combinaison insoluble ou dans un complexe non dissocié diminue la concen- tration de ces ions et, par conséquent, le potentiel. Si, pour choisir un exemple concret, l’on ajoute à une solution N/1000 de nitrate d'argent — dans laquelle la concentration moléculaire des ions d'argent est l done 10 — la une solution 103 d’iodure, la me concentration Jo" deviendra 107 10—* lorsque 10° les 9/10 du 10° nitrate d'ar- 10" gent auront OFSRQE 5 été précipités, Fig. 23. — Courbe du saut de potentiel dans la précipitation d'une solution de nitrate d'argent par un iodure. 10° lorsque les99/100sont précipités, 10 —° lorsque les 999/1000 sont précipités et enfin 107 lorsque la réaction est intégrale, la solubilité de l’iodure d'argent étant précisément 10 7. Une nouvelle addition de réactif diminuera encore l’ar- gent en solution, d'une quantité qui peut être cal- culée par la loi des masses, mais qui n'offre plus d'intérêt au point de vue analytique. La reproduction graphique (logarithme des con- centrations en ordonnée et volume de réactif en abscisse) donne la courbe ABC (fig. 23). D'après la P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE 685 loi de Nernst, cette courbe doit être identique à celle qu'on obtiendrait en portant en ordonnées les différences de potentiel entre une lame d'argent el la solution. L'expérience montre qu'il en est bien ainsi. Le volume de réactif nécessaire pour préci- piter complètement la solution en examen sera done donné par l'abs- cisse du point de dou- ble inflexion B. Cette méthode a été proposée en 1893 déjà par Behrend, qui à réussi à titrer, avec un dispositif expéri- mental assez compli- qué, les halogénures à l’état de sels d'argent ou de sels mercureux. Elle est aussi fréquemment employée en acidimé- trie. * J'ai été amené à étendre cette méthode au dosage d'autres métaux el d'autres solutions salines, afin de compléter la méthode d'analyse par les conduc- tibilités qui est en défaut lorsque les précipités sont adsorbants. C'est précisément le cas des sulfures, hydrates, ferrocyanures de métaux lourds, aux- ON …te. nent Fig. 25. — Appareil pour la détermination des sauls de potentiel. — R, électrode rotative, en platine, de 2 à 10 cen- limètres cubes, suivant les cas; A, électrode auxiliaire, en platine; N, électrode normale (Hg/HgCI/KCI). La solu- tion contenue dans le tube plongeant est gélatinisée par l'amidon; E, appareil pour mesurer la force électro- motrice. quels la méthode des différences de potentiel sem- blait pouvoir être applicable. Les théories récentes faisaient espérer qu'il serait possible d'obtenir le point final de réaction même REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Fig. 24. — Schema de la méthode de détermination des sauls de potentiel. par la courbe des potentiels d'une électrode inso- luble plongeant dans la solution. Ces prévisions sont réalisées lorsqu'on fait subir au dispositif les modifications essentielles sui- 1° l'électrode insoluble dont on détermine mouvement vantes : le potentiel doit être animée d'un rapide, afin de sup LUI] primer toute pile de concentration. On emploiera donc une électrode rotative ; 2° cette électrode doit pouvoirétre polarisée anodiquement ou ca- thodiquement par un courant de très faible intensité (10-' à 10-* ampère). Les figures 2% et 25 reproduisent le schéma de l'appareil employé. La solution à analyser est placée dans un verre à précipités de dimensions quel- conques; on y plonge l'électrode rotative R, l'élec- trode auxiliaire A et le tube de l’électrode normale. On électrolyse la solution de A en R avec un courant de 10 —* à 10° ampère, en même lemps qu'on détermine, par la méthode de compensation et avec l’électromètre de Lippmann comme instrument de zéro, la force électromotrice de la pile NR, soit Hg/HgCl/KCI gélatinisé/solution à analyser/platine. Ces déterminations sont répélées après chaque addition de réactif. La représentation graphique se fait en portant en ordonnées les valeurs de la force électromotrice de la pile NR et en abscisses les volumes de réactif. Lestitrations suivies par > M des mesures * de différen- $ ces de poten- + tiel sont plus ë B rapides en- .$ È core que cel- à les qui sont cm* ferrocyanure effectuées Fig. 26. — Courbe du saut du potentiel dans la précipitation d'un sel de cuivre par le ferrocyanure de potassium. par la mé- thode des conductibilités; elles exigent une dizaine de mi- nutes. L'appareil semble peu simple au premier abord, mais cette complication est plus apparente que réelle et les déterminations n'offrent pas de difficultés, même pour les débutants. La précipitation des halogénures, cyanures, fer- rocyanures, sulfures, hydrates, de l'or, de l'argent, du mercure, du cuivre, du fer, du plomb et — dans cerlains cas — du cobalt et du nickel, produit des inflexions de la courbe des potentiels. La figure 26 reproduit, à titre d'exemple, la 16* 686 P. DUTOIT — LA VOLUMÉTRIE PHYSICO-CHIMIQUE ———_———————pZLZLUZLUZE À courbe de titration d'un sel de cuivre par le ferro- cyanure de potassium. Bien que les inflexions soient généralement très nettes, elles ne correspon- dent pas toujours au point final calculé d’après les proportions des corps réagissants et l'équation de la réaction. Les écarts peuvent, dans les cas les plus défavorables, atteindre 10 à 45 °/,. Ainsi le point final de la titration précédente, calculé à par- tir de l'équation 2CuS0' + Fe(CAz)'K* = Fe{CAz)"'Cu” L2K°S0*, correspondrait à l'abscisse du point M, alors que la double inflexion, très nette, se produit en B après l'addition d’un excès de réactif. Cela indique que la réaction ne s'effectue pas entière- ment suivant l'équation admise, ou qu'une partie du ferrocyanure est soustraite à la réaction (par absorption, par exemple). Ces deux phénomènes ne sont pas les seuls à compliquer l'interprétation des courbes de précipitation. L'expérience montre que la position du point d’inflexion dépend toujours plus ou moins : 1° De la densité du courant auxiliaire à l’électrode rotative ; 2° De la concentration du réactif et de la solution en examen ; 3 Des substances étrangères contenues dans la solution ; 4 De l’âge du réactif, de la manière dont il esl ajouté, etc. La théorie de ces titrations sera donc compliquée; elle s’appuiera surtout sur la théorie des potentiels d’oxydation (équilibre entre les sels cuivriques et cuivreux, auriques et aureux, etc.). Mais cette théo- rie est insuffisante pour interpréter toutes les observations, dont quelques-unes sont séduisantes par leur imprévu. Quoi qu'il en soit, l'expérience montre que la titration exacte d'un grand nombre de composés est possible lorsqu'on opère dans des conditions bien déterminées. Chaque cas particulier demande à être étudié pour lui-même ; aussi le travail de mise au point des applications de la méthode des sauts de potentiel avance-t-il lentement. S2. — Applications. Je passerai en revue les cas, bien étudiés, où ces litrations semblent plus avantageuses que d'autres opérations analytiques. a) Séparation des halogénures. — La’ courbe de précipitation des halogénures par un sel d'argent à l'allure de la figure 27. L'iodure d'argent précipite de À en B, le bromure d'argent de B en G, et le chlorure de C en D. Le pre- mier et le dernier point d'inflexion sont nets et per- mettent un dosage exact du chlorure et de l’iodure, landis que le dosage du bromure est moins précis. L'inflexion qui se produit après la précipitation de l'iodure est encore nette lorsqu'il n’y a que des traces d'iodure en présence de 50 à 100 fois plus de bromure ou de chlorure ; elle se manifeste aussi bien en polarisant anodiquement ou cathodique- ment l’électrode rotative, tandis que l’inflexion due aux bromures et chlorures ne se manifeste qu'en polarisant anodiquement. Cette méthode se prête à plusieurs applications intéressantes, parmi lesquelles je citerai le dosage des traces d'iodures dans l’urine, dans les eaux iodurées ; la détermination des chlorures dans les chlorates du commerce, etc. b) Dosage de l'or, de l'argent, du cuivre. — Le dosage de l'argent est exact en précipitant la solu- tion par un halogénure, un ferrocyanure, ou un sulfure, tandis que celui de l'or et du cuivre ne sont exacts que par précipitation à l'état de sulfures et 0,7 0.5 Potentiel o CG O,1 A » SO cm 10 20 3 30 40 cm* Nitrate d'argent Fig. 27. — (ourbe des sauts de potentiel dans la préci- vitation des halogénures par un sel d'argent. quoique ces précipités ne correspondent pas à une composition bien définie. En solution modérément diluée, contenant 05,3 à 05,01 de métal par litre, la précision est très grande, ainsi qu'on peut juger par l'exemple sui- vant : COMPARAISON DES ANALYSES DE SOLUTIONS D'ARGENT ET DE CUIVRE 1. — Argent (en gramme par litre). Par électrolyse. Titration par K?S Titration par HCI. 0,1379 0,1378 10... 0,1381 DO RU IS TS 0,1822 0,1822 0e 002701 0,2701 0,2701 II. — Cuivre (en gramme par litre). Par électrolyse, Titralion par K?S. 10 EN 22 0:2006 0,1999 DOME RER ete DAUUE 0,2097 30 NET AT 0,3467 0,3473 On peut prévoir plusieurs applications de ces do- sages à certaines industries métallurgiques, qui trouveraient avantage à utiliser ces méthodes en les adaptant aux besoins de la pratique. J. RÉVIL — UNE NOUVELLE PERCÉE DES ALPES LE PETIT SAINT-BERNARD 687 a ——— — —." c) Dosage de traces des métaux précédents. — La solubilité des sulfures métalliques est si faible qu'il est encore possible de doser, à quelques pour cent près, des quantités de métal de l’ordre de grandeur de 4 mgr. par litre pour l'or, de Over, 3 par litre pour le cuivre et le mercure, et de Omer, 1 par litre pour l'argent. Lorsque les solutions contiennent Owsr,{ à Omer 3 de métal par litre, l'addition d'un sulfure alcalin ne provoque plus aucune coloration, même en observant une grande épaisseur de liquide, Malgré cela, la variation brusque de potentiel se produit après l'addition de la quantité théorique de réactif : observation intéressante à plusieurs points de vue. En pratique, ces dosages de solutions métalliques extrêmement diluées pourront servir à la détermi- nation directe des solubilités de composés peu solubles, ou dans des recherches physiologiques. VII. — Conczusrons. Je conclurai de ce bref exposé que la volumé- trie physico-chimique est à ses débuts et qu'elle est encore bien éloignée d’avoir livré toutes les mé- thodes nouvelles d'analyse qu'on en peut attendre, I n'est cependant pas osé de prétendre que, déjà maintenant, bien des laboratoires d'analyse, scien- tifiques ou industriels, trouveraient une économie de temps par l'emploi de l'une ou l'autre de ces méthodes. J'ajouterai que nous avons été constamment guidé, dans ces recherches, par des considérations théoriques fondées sur la théorie de la dissociation électrolytique. Celles-ci n'étant pas spécialement utiles pour le praticien, j'en ai fait abstraction dans cet exposé; mais elles seront développées tout au long dans des Mémoires détaillés où elles pour- ront être consultées utilement par les personnes qui désirent approfondir la théorie de ces méthodes nouvelles ou travailler à leur développement. Il me reste, en terminant, à remercier mes colla- borateurs, particulièrement MM. les D" Marcel Duboux, Mojoïu et von Weisse, qui, à des titres divers, ont collaboré d'une facon éclairée et dévouée à ces recherches. P. Dutoit, Professeur de Chimie à l'Université de Lausanne, UNE NOUVELLE PERCÉE DES ALPES LE PETIT SAINT-BERNARD Les lignes du Gothard et du Simplon font perdre chaque année au commerce francais des sommes considérables, en détournant de nos lignes de che- min de fer et de nos compagnies de navigalion une partie de leur trafic. En juillet 4900, la Chambre de Commerce francaise de Genève n’estimail pas à moins de 40 à 50 millions par an les sommes sous- traites aux intérêts français par la seule ligne du Gothard'. Il est juste de dire que la primauté de celle ligne se trouve aujourd'hui sérieusement menacée, les percées transalpines se multipliant. Le tunnel du Simplon est ouvert depuis le 1° juin 1906, le Lüchstberg sera probablement achevé en 4949, enfin le tunnel des Tauern, inauguré en juillet 1909, détourne au profit de Trieste le transit de la Bavière et de l'Allemagne du Nord. Il est même question d'un tunnel sous le Splügen, que réclame le canton des Grisons. La Convention de Berne, pour de nouvelles voies d'accès au Simplon, qu'ont votées les Chambres francaises en décembre 1909, ne nous semble être ‘ JarRIN : La question du Simplon et le percement du Petit Saint-Bernard. Annales de Ja Société d'Agriculture, Sciences el Industrie de Lyon, 1905, p. 185. qu'un faible palliatif, et ne remédier que partiel- lement à cet état de choses. Elle a même le grave inconvénient de diriger un courant sur la Suisse, d'y pousser les touristes au lieu de les attirer dans les Alpes francaises. De plus, elle laisse de côté toute la région de la France située au-dessous de la Loire jusqu'aux Pyrénées, qui fournira cepen- dant un trafic important pour l'Italie et l'Orient, à cause de la proximité de ses centres industriels nombreux et prospères. I est donc indispensable de créer une nouvelle voie transversale qui rapproche de l'Italie nos ports et nos centres industriels de l'Ouest, et de leur pro- curer, vers cette contrée et vers l'Orient, des itiné- raires aussi avantageux que ceux dont disposent les régions desservies par le Saint-Gothard et le Simplon. Cette ligne relierait nos ports de Saint- Nazaire, Nantes, La Rochelle, Rochefort, Bordeaux, nos centres industriels du Creusot, de Chalon, Lyon, Saint-Etienne, Grenoble, à Milan par Chambéry, Albertville, Moûtiers, Bourg-Saint-Maurice, le Tunnel du Petit Saint-Bernard, Aoste, Ivrée, Santha, Novare. Cette ligne est construite jusqu'à Moûtiers (Savoie); de Moütiers à Bourg-Saint-Maurice, elle 683 J. RÉVIL — UNE NOUVELLE PERCÉE DES ALPES : LE PETIT SAINT-BERNARD est en construction et sera livrée prochainement à la circulation. Neuf kilomètres à construire l’amèneraient à Sainte-Foy (Tarentaise), lieu de l’ouverture du tunnel du Petit Saint-Bernard. Ce tunnel, de 22 kil. 520 de longueur, n'offrirait, à la différence de tous les autres (Mont-Cenis, Simplon, Saint-Gothard), aucune difficulté d'accès, non plus qu'aucun travail sérieux d'approche. On y arriverail par une pente modérée et uniforme pour déboucher à Derby, dans la vallée de la Doire (Italie), d’où une voie ferrée à construire sur 22 kilomètres le relierait à Aoste, ville reliée elle- même à Milan par une ligne déjà existante. Rencontrerait-on de sérieux obstacles au point de vue géologique? Tout permet d'affirmer que non, et c’est la conclusion à laquelle était arrivé le regretté géologue Charles Lory, dont les travaux sur les Alpes font autorité. À la suile d'observa- tions poursuivies avec l'ingénieur Pinat, ce savant avancçail « que ce projet ne présentait pas, au point de vue géologique, de difficultés qui soient de nature à le faire écarter ». Il signalait « que ce tunnel aurait à traverser des roches moins dures que celles du Mont-Blanc, ce qui pourrait accélérer les travaux et compenser la longueur de la percée ». En effet, la roche cristalline, caractéristique de cette dernière chaîne, est une roche éruptive connue sous le nom de protogine, n'ayant aucun caractère différentiel du vrai granite, et « affleu- rant suivant une ellipse allongée, dont la forme générale est sensiblement celle du massif, mais dont le grand axe est rejeté vers le Nord-Est »'. Du côté du Nord-Ouest, ce granite est en contact avec des schistes cristallins, auxquels font suite les dépôts du Trias et du Lias”. Les premiers consistent en roches dolomitiques et gypseuses, qui néces- sitent des précautions spéciales, les gypses et anhydrites étant fissurés, solubles et se gonflant par hydratation. De plus, ils’y produit fréquemment des venues d’eau qui sont alors chargées en sulfate de chaux et exercent une action néfaste sur les ouvrages en ciment et les maçonneries”". — Enfin, “le développement des alluvions glaciaires dans la vallée de l’Arve ne sera pas sans offrir de sérieuses difficultés. Aucune de ces difficullés ne se pré- sente pour la percée du Petit Saint-Bernard, — C'est * Duparc et Mrazec : Recherches géologiques et pétrogra- phiques sur le massif du Mont-Blanc. Mém. Soc. Phys. ct Hist. nat. de Genève, t. XXXII, Genève (Georg), 1908. 2 Voir la carte du massif du Mont-Blanc des mêmes auteurs. # On sait que des travaux spéciaux ont élé nécessités au tunnel du Simplon, où l'on a traversé des calcaires, du gypse et de l'anhydrite. Dans les gneiss, les venues d'eau ont été insignifiantes ; mais, dans les calcaires et les gypses, on a rencontré des sources vauclusiennes, dont quelques-unes à température élevée; elles ont été une gêne sérieuse pour l’entreprise. à des conclusions à peu près analogues à celles de Ch. Lory que nous ont amené les études géo- logiques qui, sur la demande de M. Gotteland, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées de la. Savoie, nous ont été confiées par le Ministre des Travaux publics, en collaboration avec M. Charles. Jacob, de l'Université de Bordeaux. Les résultats de nos explorations ont été consi-, gnés dans un Rapport détaillé, auquel nous emprunterons les données purement scientifiques. Le tunnel projeté du Petit Saint-Bernard traverse une région montagneuse servant de frontière à la France et à l'Italie, généralement connue sous le nom de « Massif du Ruitor ». Ce massif est limité au Nord par la vallée de la Doire Baltée, au Sud par celle de l'Isère, à l'Est par les vallons condui-" sant au Col du Mont (Val Grisanche et vallon de Mercuel), à l'Ouest par ceux conduisant au Col du Petit Saint-Bernard (vallon de la Thuile et vallon du Reclus). Les vallées de la Doire Baltée et de l'Isère corres- pondent à de grandes coupures transversales, à peu près perpendiculaires à la direction des plis ; elles pénètrent très avant dans l’intérieur des Alpes, et jouent un rôle de premier ordre au point de vue hydrographique. Quant aux vallées condui- sant au col du Mont et au Petit Saint-Bernard, elles sont de moindre importance, mais n’en sont pas moins en relation intime avec leur substratum. Le massif du Ruitor fait partie d’une zone longi- tudinale des Alpes que les géologues appellent zone du Briançonnais. Quatre sous-zones y ont été dis- tinguées récemment par MM. Kilian et Révil'. Ce sont les suivantes : 1° sous-zone des Aiguilles d’Arves; 2° sous-zone Moûtiers-Saint-Julien-Grand- Galibier-Vallouise; 3° sous-zone axiale houillère ;. #° sous-zone Chaberton-Vanoise. — La présence, dans cette dernière bande, de schistes calcaires métamorphiques connus sous le nom de « schistes lustrés » atteste la liaison de la zone du Briancon- nais avec la zone du Piémont, qui lui fait suite plus à l'Est. Au point de vue de sa structure, le trait fonda- Éd mental de la zone du Brianconnais est la disposi-" lion des plis en « éventail composé asymétrique » La portion axiale de l'éventail comprend une zone anticlinale de grès houillers qui, d'après certains. auteurs, ne serait qu'un repli dans un grand plis 1! W. Kiuran el J. Réviz : Eludes géologiques dans les Alpes occidentales. Contribution à la géologie des chaines intérieures des Alpes francaises. Mém. pour servir à lex plication de la carte géologique détaillée de la France, t. Po 1904, Ch. III, p. 295. J. RÉVIL — UNE NOUVELLE PERCÉE DES ALPES : LE PETIT SAINT-BERNARD couché. A l'Est de cette bande, les plis se déversent vers l'Italie, tandis qu'à l'Ouest ils se déversent vers la France. La partie du massif que lraverserait le tunnel appartient à la troisième des sous-zones que nous venons de distinguer, c'est-à-dire à la zone axiale houilière. Les assises comprenant cette sous-zone ont en Savoie un développement considérable. Elles s'étendent entre Saint-Michel et Modane, sur une largeur d'environ 16 kilomètres, formant l'unique élément de tous les reliefs compris entre le col des Encombres et Péclet. Au Nord du Doron de Bozel, la zone s'accidente de synelinaux triasiques et liasiques, supportant la masse plissée des schistes du Mont-Jovet. Elle se suit ensuite vers le Nord par Aime, Macôt et Bourg-Saint-Maurice, pour pénétrer en Italie, au nord de Séez et de Sainte-Foy, et former toute la région comprise entre le Petit Saint-Bernard et le Col du Mont. Elle s'amincit dans les massifs situés au nord de la Doire; elle arrive dans le Valais à l'ouest du Grand-Saint- Bernard, au col Fenêtre, d'où elle peut se suivre jusqu'à Chippis, en traversant les vallées d’'Isé- rables, de Bagnes et d'Entremont, et se termine dans la vallée du Rhône, non loin de Sion. La zone axiale houillère forme un grand ensemble anticlinal accidenté de plis secondaires qui présente aussi une disposition en éventail, à droite et à gauche duquel se sont produits d'importants étire- ments de couches, accidents que Charles Lory, qui en exagéra l'importance, désignait sous les noms de « Faille de Saint-Michel » et de « Faille de Modane ». Nous devons ajouter que le substratum du terrain houiller ne se montre nulle part dans la zone axiale. Les auteurs qui se sontoccupés de larégion ont attribué ce fait à la grande épaisseur de la for- mation. Nouspensons,au contraire, quelapuissance du Houiller, formidable en apparence, est due plutôt à de multiples répétitions par suite du plissement Vers la Doire Baltée (Italie), la zone axiale entre en continuité avec une autre partie de la chaîne, les « Alpes Penniues », sur lesquelles de nouvelles idées tectoniques se sont fait jour récemment. Ces idées, que nous avons exposées, il y a quelques mois, aux lecteurs de la Æevue générale des Sciences”, ont eu pour point de départ la percée du tunnel du Simplon. Le tunnel a révélé que le massif est formé de grands plis couchés (nappes), super- posés de gneiss, qui, provenant de régions plus internes de l'arc alpin, s’empilent les uns sur les autres vers l'extérieur, c'est-à-dire vers le Nord ou le Nord-Ouest; les têtes de nappes plongent vers 1 Voir, sur la structure de cette partie d's Alpes, le para- graphe de notre Revue annuelle de Géologie consacré à la chaine Pennine centrale (numéro du 15 avril 1910, p. 300). 4 689 le front, dans le complexe des schistes lustrés. DuSimplon, l'exploration géologique a progressé en particulier vers le Sud jusqu'à la Doire Baltée, et même au delà jusqu'à Bonneval-sur-Arc en Maurienne; de nouvelles nappes sont venues s'a- jouter à celles qui avaientélé primitivementrecon- nues. Pour la région avoisinant celle que traversera notre tunnel, MM. Lugeon et Argand admettent que les sédiments houillers etles gneiss du Grand Saint-Bernard sont également charriés; par l'inter- médiaire de la zone mésozoïque du Val-Ferret, ils viendraient butter contre les roches et les schistes cristallins du massif du Mont-Blanc. D'autres nappes: nappe du Mont-Rose-Grand-Paradis, nappe du Mont-Mary-Mont-Emilius, nappe de la Dent- Blanche, s’entassent les unes sur les autres et au- dessus de la précédente”. La nappe du Grand Saint-Bernard, qui nous intéresse plus spécialement, passerait sous le col de Rhème; elle éviterait ainsi le Ruitor : c’est du moins ce que semblent indiquer les notes de MM. Ar- gand et Lugeon. Toutefois, si l'on consulte les cartes géologiques actuelles, la bande houillère et permo-carbonifère du Grand Saint-Bernard se pro- longerait dans le Fallère par le massif du Ruitor. Dès lors, en poussant à l'extrême les vues de nos confrères suisses, le déversement des plis du Grand Saint-Bernard entrainerait celui du massif du Ruitor. D'après nous, cette hypothèse se heurte à de graves objections, dont la principale est fournie par le passage progressif des sédiments houillers normaux de la zone axiale à des sédiments méta- morphiques. Ces sédiments houillers normaux continuent tout naturellement ceux de la zone du Mont-Blanc ; l’on assiste dans le Ruitor à une trans- formation progressive vers l'Est tout à fait analogue àcelleaffectant d’autres points de «l'éventail». Nous sommes donc fondés à admettre que les sédiments du Ruitor ne se sont déplacés que fort peu par rapport au Mont-Blanc. Cependant, le massif n'est pas resté absolument étranger à ces phénomènes tectoniques. Le bas Val Grisanche se présente tout à fait comme la tête d’un pli couché d'une « nappe » qui, par l'intermé- diaire d'un synelinal de schistes lustrés, vient buter contre le Ruitor et explique sa structure en éventail. Nous adoptons une hypothèse mixte entre les idées de MM. Lugeon et Argand et celles des géologues italiens, en particulier de M. Franchi, qui se refusent complètement à admettre les déverse- mentsetempilements des plis de la zone du Piémont, 1 On peut suivre ces explications sur la carte italienne des Alpes occidentales : Carta gcologica delle Alpi occiden- ali, Scali di 1/400.000, R. ufficio geologico, Roma, 1908, 690 J. RÉVIL — UNE NOUVELLE PERCEE DES ALPES : LE PETIT SAINT-BERNARD tout au moins pour la partie qui nous occupe‘. Ces explications pourraient paraître superflues, car la région disloquée reste en dehors du tracé projeté. Il était cependant nécessaire de poser les questions qu'elle soulève. Les déboires de la percée du Simplon ont résulté de cel agencement des cou- ches en plis couchés, les masses de gneiss s'entas- sant les unes au-dessus des autres et étant séparées par des sédiments mésozoïques horizontaux, sédi- ments perméables et à faible conductibilité élec- trique, perpendiculairement au plan des couches. A cette disposition furent dues les hautes tempéra- tures en profondeur, les venues d’eau siabondantes, en un mot les principales difficultés pratiques qu'il fallut surmonter. II Dans la zone axiale houillère, à laquelle appar- tiennent les chaines que nous étudions, affleurent des assises faisant partie du système carboni- férien (grès anthracifères des anciens auteurs), ainsi que des roches cristallines (gneiss, mica- schistes et schistes amphiboliques). Ces dernières sont actuellement considérées comme des sédiments houillers et permiens transformés; ils ont recu le nom générique de «sédimentspermo-carbonifères ». Dans le bas Val Grisanche, — nous l'avons déjà fait remarquer, — le Ruitor touche à une partie plus interne des Alpes, « les Alpes Pennines », où se développe une autre formation appelée « schistes lustrés » par les géologues francais et «calschistes » (zone des « pierres vertes ») par les géologues italiens. Donnons quelques indications sur la nature pétrographique des divers terrains dont nous ve- nons de parler et que rencontrera le tunnel projeté. Les roches appartenant au système carboniférien consistent en conglomérats (poudingues), grès el schistes argileux. — Ces trois subdivisions natu- relles répondent à trois facies pétrographiques, mais qui présentent entre eux des termes de pas- sage. L'âge de ce complexe d'assises à pu être précisé grâce aux végétaux fossiles recueillis dans les anthracites. Celles-ci se trouvent intercalées dans les schistes, plus rarement dans les grès. Les conglomérats sont parfois constitués par des débris à peine roulés de roches cristallines identiques à celles affleurant dans le voisinage. Le plus souvent, ils ne renferment que des débris de quartz blanc se détachant sur un ciment noirätre. Les cailloux sont de dimension variable, ordinai- rement pressés les uns contre les autres. — Ces : Sulla tectonica della zona del Piemonte, d'Italia, 4 s., t. VII, 1906, 4 I. FrancHi Bollet. "R. Comitato Geol. p. 118-144. conglomérats sont inégalement distribués, surtout développés à la base et à la partie supérieure du système carboniférien, passant, dans ce dernier cas. et par transition graduelle, aux assises permiennes. Nous ajouterons que la base du Houiller est in- connue dans le Ruitor, où les conglomérats infé- rieurs n'apparaissent pas au jour. Quant aux conglomérats supérieurs, ils sont surtout déve- loppés dans les parties hautes. Ils consistent en roches à éléments quartzeux souvent étirés et en fragments de schistes cristallins, dont le feuilletage et la cristallisation sont antérieurs à la période houillère. Ils constituent un horizon assez net. Malgré la déformation des éléments remaniés et malgré la cristallinité croissante de la pâte, ils n'en sont pas moins reconnaissables, même dans les régions où les phénomènes de métamorphisme se présentent avec le plus d'intensité. Les grès sont gris ou noirâtres, parfois fins et argileux, riches en matières charbonneuses. Ils sont formés de grains de quartz, de paillettes de mica (notamment de muscovite) et de séricite, tou- jours discontinues et parallèles à la slratification, d'un peu de feldspath et enfin d'un ciment siliceux. Les schistes argileux sont plus ou moins mi- cacés (mica détritique), et toujours colorés en noir par une matière charbonneuse. En quelques loca- lités de la Savoie, ils ont été exploités comme ardoises (environs de Cevins, d'Hauteluce et de Brides) et sont souvent associés à des couches d’anthracite. Ces anthracites sont parfois transfor- mées en graphitoide (Malgovert, près Bourg-Saint- Maurice). Elles paraissent localisées à la partie supérieure : environs de Séez en Savoie, environs de la Thuile en Italie. Les roches que nous rapportons au Permo-Car- bonifère, et que les anciens géologues considé- raient comme primitives, consistent en gneiss à mica noir et à grands cristaux d'orthose, en gneiss à nodules de quartz, en schistes amphiboliques, en schistes à séricite, enfin en micaschistes à petits grains que l’on voit passer graduellement par alternance à des grès micacés et à des schistes noirs d'apparence houillère. En certains points s'intercalent quelques roches vertes (serpen- tines, etc.). Comme nous l'avons dit, ce complexe est actuellement regardé comme un ensemble de sédiments rendus méconnaissables par les effets du métamorphisme régional. Toutefois, rien n’auto- rise à le considérer comme correspondant tout à fait au système permien; la limite inférieure parait assez incertaine et, suivant les points, empiète plus ou moins sur le Carbonifère. Ces assises sont sur- tout développées à l'Est du Ruitor; on les retrouve dans le val de Rhême, où on les voit passer à du houiller détritique. | J. RÉVIL — UNE NOUVELLE PERCÉE DES ALPES : LE PETIT SAINT-BERNARD 69) La formation dite schistes lustrés, — sur l’âge de laquelle on à beaucoup discuté et qui, d'après les fossiles recueillis par M. Franchi, doit être rap- portée pour la plus grande partie au Lias, — con- siste en schistes quartz-sériciteux, ordinairement calcarifères avec sécrétions filoniennes quartzeuses el calcaires. Par places, ces schistes contiennent des intercalations de marbres phylliteux, des car- gneules et des gypses identiques à ceux de certains niveaux triasiques. Le plus souvent, il est difficile d'établir si elles sont dues à des plissements ou si elles sont contemporaines de la formation. Parfois les roches schisteuses alternent avec des banes de calcaire gris marmoréen et spathique, que les analyses pétrographiques relient nettement au Lias. Elles présentent souvent des intrusions de roches vertes (serpentines, prasinites, amphibo- lites, schistes chloriteux ou micacés), formant fré- quemment des massifs importants, mais qui, dans la région parcourue par nous, ne sont distribués qu'en lentilles. Le terrain triasique (gypses, cargneules, dolo- mies) n’est indiqué ici que comme complément à cette étude. Il ne se montre, en effet, qu'à la limite occidentale du massif, formant une bande qui longe la route conduisant de Séez au Petit Saint- Bernard et de là à la Thuile. Il existe encore sous forme d'intercalations sporadiques dans les schistes lustrés, limitant à l'Est l'éventail houiller dans le Val Grisanche. Des formations alluviales (glaciaire, fluvio-gla- ciaire, éboulis, cônes de déjections, etc.), déve- loppées dans le bas des vallées, doivent être men- tionnées, bien que leur rôle soit peu important. Les roches que nous venons de citer sont favora- bles à l’élablissement de travaux d'art du genre de celui qui nous occupe. Elles se travaillent facile- ment aux explosifs et «tiennent» bien, sans néces- siter, pour la plupart, de travaux de soutènement. Les terrains de transport font exception ; on ne les rencontrera que vers les entrées et sur une longueur insignifiante. Quant aux terrains triasi- ques, qui ont causé tant de mécomptes dans la percée d’autres tunnels, ils restent en dehors du tracé principal. III Le massif du Ruitor, ainsi que les régions avoi- sinantes du Petit Saint-Bernard et du Val Gri- sanche, sont constitués par un certain nombre de bandes de direction N. 50 à 60° E. —Du Nord-Ouest au Sud-Est, ces bandes se succèdent de la facon suivante : I. — Bande synclinale mésozoïque du Petit Saint- Bernard (schistes lustrés avec roches vertes, dolomies, gypses et cargneules). II. — Bande de Houiller schisteux (schistes siliceux, ardoisiers, noirs, contenant par places du charbon). II. — Première bande de Houiller gréseux (grès siliceux très chargés en mica), avec une intercalation schisteuse vers Derby. IV. — Bande de poudingues supérieurs permo- carbonifères (schistes gréseux très chargés en nodules de quartz blanc et étirés). — Cette bande ne parait représentée que dans les régions élevées". V. — Deuxième bande de Houiller gréseux, submé- tamorphique au Centre et au Nord, passant à l'Est du Grand Assaly, et venant rejoindre la bande II, tant vers la Doire qu'au Sud, dans la direction de l'Isère. VI. — Bande permo-carbonifère du Ruitor (série de micaschistes et de gneiss avec poudingues supérieurs à quartz amygdalaire bien développé). Elle va sans doute au Nord jusqu'à la Doire. VII. — Bande synclinale mésozoïque d’Avise et de Planaval (schistes lustrés, cipolins, gypses, amphibo- lites) plongeant vers le Nord-Ouest, mais se redressant sans doute en profondeur. VIII. — Gneiss permo-carbonifères du val Grisanche (série complexe de gneiss, micaschistes, etc., avec amphibolites à la partie supérieure), formant la tête d’une nappe qui vient buter contre le Ruitor, en y produisant la structure en éventail. Nous ne pouvons songer à aborder ici la descrip- tion détaillée de ces diverses bandes ; nous nous contenterons de dire que le tunnel projeté ne traverse que les assises que nous avons groupées sous les n°° II à VI, laissant en dehors les forma- tions mésozoïques. — Quant aux prévisions géolo- giques que leur étude nous a permis de formuler, ce sont les suivantes : 1° Le tracé principal s'effectue entièrement dans des grès siliceux micacés avec intercalation de quelques lits plus schisteux de banes de poudingues et de micachistes; % Les roches que traverse le tunnel, si l’on excepte les éboulis des entrées, sont des roches très compactes « tenant » très bien, et qui, le plus souvent, n'auront nul besoin d’être maconnées ; 3° Au point de vue de la température, sur un des tracés étudiés, elle ne dépassera guère 40°, tandis que sur l’autre elle pourra s'élever à 50° au centre, et même s'approcher de 60°; % La question des venues d’eau ne sera pas une gène ; les eaux rencontrées n'auront qu'un faible débit; elles neconsisteront qu'en nombreux suinte- ments d'eau froide. En résumé, étant donnée l'expérience acquise dans les grands travaux de ce genre, et surtout étant connues les difficultés qui ontété surmontées pour la percée du Simplon, nous avons pu conclure que le projet soumis à notre examen était non seulement susceptible d'être réalisé, mais que l'exécution en serait relativement facile. J. Révil, Président de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Savoie. 1 Jusqu'ici toutes les couches sont déversées vers le Nord- Ouest. Au delà de l'axe de l'éventail (Pont d'Equilive, Grand Assaly, Chalet de la Louïe), les couches sont déversées vers le Sud-Est. GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE REVUE ANNUELLE D’EMBRYOLOGIE Î. — LES PREMIERS PHÉNOMÈNES DU DÉVELOPPEMENT CHEZ LES MAMMIFÈRES ET LEUR SIGNIFICATION DANS LA PHYLOGÉNÈSE DES VERTÉBRÉS ‘. Le Professeur Hubrecht à apporté, l'année der- nière, les résultats de ses nouvelles recherches et, en se servant de publications antérieures faites par lui ou par d’autres embryologistes, il est venu nous donner une vue d'ensemble sur cette question si importante et encore si obscure de l'embryo- logie des Mammifères. Peu de temps après, Richard Assheton reprenait son mémoire pour en faire une revue critique et, tout en acceptant les grandes lignes de la théorie d'Hubrecht, venait mettre en évi- dence, cependant, les quelques objections insur- montables que présente cette théorie. C'est avec ces deux auteurs que nous allons, à notre tour, présenter un élat de la question que nous nous efforcerons de rendre aussi clair et aussi simple que possible; nous ne ferons ainsi, du reste, que continuer une question traitée déjà dans une de nos précédentes revues d'Embryologie *. 4. Le blastocyste des Euthériens. — La segmen- tation de l'œuf des Mammifères supérieurs conduit promptement à une morula compacte, formée d'une masse de cellules centrales nommée embryonic knob et d'une couche de cellules périphériques appelée par Hubrecht trophoblast; ces deux parties de la morula diffèrent également par la manière de se comporter vis-à-vis des réactifs, les cellules cen- trales paraissant toujours plus claires que les cel- lules périphériques. De très bonne heure, un liquide s'accumule entre quelques-unes des cellules de la morula*, et la larve compacte se transforme ainsi en une sphère creuse contre la paroi de laquelle se voit une masse de cellules isolées, le bouton em- bryonnaïre. Hubrecht repousse l'opinion classique d'après { Nous faisons cette étude d'après les Mémoires de A.-A.-W. Huerecur : Early Ontogenetic Phenomena in Mammals and their Bearing on our Interpretation of the Phylogeny of the Vertebrates. Quarterly Journal of microscopical Science, 1909, t. LIT, p. 14-182, avec 160 figures dans le texte. Ricnaro AssHerTox : Professor Hubrecht's Paper on the Early Ontogenetie Phenomena in Mammals : An Apprecia- tion and a Criticism. /hid., 1909, t. LIV, p. 221-277 avec 5 figures. Ces Mémoires renferment une bibliographie très com- plète de la question. ? Revue gén. des Sc. pures et appliquées, 30 mai 1906, p-. 459 et suiv. ! D'après Assheton, p. 226, ce liquide serait de formation intra-cellulaire chez le cochon et le furet, de formation extra- cellulaire chez le lapin. laquelle le blastocyste des Mammifères serait dérivé des Sauropsidés par un processus consistant en une disparition graduelle du jaune avec conservation des autres particularités du développement de l'œuf des Reptiles et des Oiseaux. Il lui semble douteux, en particulier, que, dans l’Amphioxus et dans l'Homme, les deux extrêmes du phylum des Chor- dates, les deux premières cellules de segmentation, si elles sont séparées l’une de l’autre, puissent, dans des conditions favorables, se développer isolément et donner chacune un nouvel être entièrement constitué”. Pour lui, les Sauropsidés et les Mammifères déri- veraient phylogénétiquement des Protétrapodes qui vivaient à l'époque carbonifère et même avant, et qui, à leur tour, auraient eu, comme ancêtres, des formes aquatiques semblables à des poissons; enfin ces dernières seraient sorties elles-mêmes d'ani- maux vermiformes du type cœlentéré. Le tropho- blaste de la morula des Mammifères (homologue, pour Hubrecht, de la couche épidermique de l'épi- blaste des Amphibiens, du périblaste des Téléos- téens et de certaines couches superficielles de l'em- bryon des Sauropsidés), serait un souvenir de cet état ancestral; ce serait le dérivé phylogénétique d'une membrane larvaire, d'un Æmbryonalhülle comparable aux enveloppes cellulaires temporaires qu'on peut observer encore aujourd'hui dans le développement des Némertes ou des Géphyriens, par exemple dans la larve de Desor ou dans le Pilidium chez les Némertes et dans la larve des Sipunculidés. On sait que la théorie de Hubrecht a été fortement combattue, en particulier par Van Beneden, qui disait en 1899 : « L'hypothèse de Hubrecht se heurte à des difficultés morpholo- giques et physiologiques insurmontables ; elle laisse inexpliquée l'existence, chez les Mammifères pla- centaires, d'une vésicule ombilicale et d’une foule de caractères communs à tous les Amniotes et dis- linctifs de ces animaux. » « Un des premiers points à élucider dans cette question serait de savoir si le trophoblaste se forme par délamination des cellules sous-jacentes, comme le veut Hubrecht, qui se base en particulier sur la différence de colorabilité des cellules superficielles”, ou par le procédé de l’épibolie, comme l'ont décrit 1 Wilson, Morgan et d'autres ont montré expérimenta- lement ce fait pour l'Amphioxus, mais il n'est nullement démontré pour l'Homme, ni pour les autres Mammifères. Disons cependant que Richard Assheton a observé, en 1898, chez le mouton, un cas de gémellité qui parait bien pro- venir d'une division d'un blastocyste. * Dans le cas d'épibolie vraie, dit Hubrecht, il n'y aurait di GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE Van Beneden chez le lapin, Mathias Duval chez la chauve-souris et Assheton chez la brebis. Or, ce dernier auteur, après avoir étudié de près ce point non seulement chez les auteurs, mais encore dans ses propres préparations d'embryon, arrive à con- clure que, dans nombre de cas, one can neither allirm nor deny epibole. Les premiers phénomènes qui accompagnent la formation du blastocyste des Mammifères supérieurs peuvent, en effet, être interprétés de trois facons différentes, même dans le cas d’épibolie nettement apparente : 4° Ou bien il y à une séparation primitive du trophoblaste et une croissance des cellules tropho- blastiques autour du bouton embryonnaire central; 9 Ou bien l'épiblaste croît tout autour de la masse vitelline par glissement d’un bord épiblas- tique « extra-embryonnaire », comme cela se voil sur le jaune de l'œuf des oiseaux; 3° Ou bien, enfin, ce sont les cellules hypoblas- tiques qui croissent sur la masse épiblastique restée temporairement en repos. On le voit, ces deux dernières interprétations supposent que les Mammifères euthériens sont dérivés d’ancêtres à œufs à gros jaune, c’est-à-dire des Sauropsidés. La première alternative, au con- traire, satisfait à l'hypothèse d'Hubrecht, mais elle ne s'accorde pas avec le fait des homologies citées plus haut, où les couches protectrices sont vues se former nettement par délamination. D'autres objections sont faites aux vues d'Hu- brecht, en ce sens que ces vues ne donnent pas une explication satisfaisante du phénomène connu sous le nom d'entypie ou inversion des feuillets, ni du rejet de cellules trophoblastiques par l'aire em- bryonnaire (cochon, lapin, taupe, etc.), tandis que, si on admet la troisième alternative comme le veulent Minot et Assheton, ce rejet est tout natu- rel, puisque le trophoblaste est considéré alors comme formé par l’hypoblaste. Cette troisième hypothèse rendrait compte de l'épibolie comme étant un fait particulier aux Mammifères euthé- riens et dû au déboulement des cellules hypoblas- tiques sur le rudiment épiblastique; ce dernier resterait inactif pendant quelques jours, jusqu'à ce que l’espace nécessaire pour le développement de l'embryon soit formé. L'hypothèse en question expliquerait encore quelques autres points en litige, tels que les connexions fréquentes qui existent entre les cellules de la masse interne et les parois du blastocyste, le fait que les cellules internes peuvent passer dans la couche des cellules parié- tales, comme l’a montré Assheton en 1908, le rejet par l’aire embryonnaire de cellules dans la couche pas les différences de coloration qu'on observe dans les cas de délamination, 693 trophoblaslique. Enfin, cette vue trouverait encore une confirmation dans ce sens que les cellules trophoblastiques ne changeraient pas de fonction; comme les cellules vitellines d'où elles dériveraient, leur rôle serait d'accumuler des nutriments pour l'embryon pendant la période de transition des conditions de l'œuf méroblastique à celles de l'œul holoblastique. Et c'est ainsi que nous revenons, avec Assheton, à l'ancienne conception de l'œuf des Mammifères considéré comme un dérivé de l'œuf à gros vilellus des Sauropsidés. 2. Le blastocyste des Métathériens et des Pro- tothériens. — Après avoir étudié longuement le blastocyste des Mammifères inférieurs, Hubrecht conclut que tous les Didelphes et les Monodelphes observés jusqu'ici montrent que, de très bonne heure, la vésicule didermique de laquelle provien- dra l'embryon est enclose dans une vésicule eellu- laire, le trophoblaste, dont aucune partie n’entrera dans l'organisation embryonnaire. Or, il n'y a jusqu'ici que trois Lypes de Didelphes étudiés : Opossum, Dasyure et Perameles; et, continue Assheton qui fait cette remarque, quand on étudie les feuillets dans la réalité et non dans les inter- prétations de dessins plus ou moins schématiques, comme l’a fait Hubrecht, mais dans les dessins des coupes réelles, on voit que la concordance entre la constitution du blastocyste chez les Métathériens et les Euthériens n’est pas aussi claire que le vient dire Hubrecht. En tous cas, il y a une différence fonda- mentale entre les conditions de la segmentation chez les quelques Métathériens connus jusqu'ici et chez les Euthériens; chez les premiers, dans l'œuf arrivé au stade 4, les blastomères sont disposés sur un seul plan comme chez l’'Amphioxus et la Gre- nouille, alors que, chez les seconds, ils sont placés par paires l'une au-dessous de l’autre; chez les pre- miers encore, la segmentation conduit directement à la formation d'une blastula creuse, alors que, chez les seconds, elle donne une morula pleine. On ne connaît pas encore nettement les phases ultérieures de l'embryologie des Métathériens; mais, d'après ce que Hill nous a fait connaitre des Da- syures et des Pérameles, il semblerait que, dans ces types, on n'observät aucune prolifération ni aucun débordement de l'hypoblaste sur l'aire embryon- naire comparable à ce qui donne naissance, chez les Euthériens, à ce qu'on appelait jadis la « couche de Rauber ». Pour ce qui concerne les Monotrèmes, Hubrecht admet bien que nos connaissances sont encore trop faibles pour pouvoir y discuter utilement la ques- tion du trophoblaste. Il veut pourtant voir une homologie réelle entre le feuillet externe de l'em- bryon de ces animaux (feuillet que Wilson et Hill 69% GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE regardent comme un épiblaste) et le trophoblaste des Euthériens, de même qu'entre l’entoderme de Wilson et Hill et l'embryonic knob des Euthé- riens; il regarde enfin le vitellus contenu dans l'œuf des Monotrèmes comme une accumulation de matières nutritives s'étant faites dans un type ancestral particulier aux Protothériens et non comme un mode dérivé de l'œuf des Sauropsidés. En somme, il y à encore une part trop grande à l'hypothèse et à l'interprétation dans les vues de Hubrecht pour qu'on puisse les admettre d'une façon définitive, et c'est pour cela que nous nous contenterons de renvoyer le lecteur que la question intéresse à la partie de son beau Mémoire intitulée : Theoretical speculations about the origin of the trophoblast (p. 15-19), partie discutée de près, du reste, par Assheton (p. 234-239), de même qu'à ses Reflexions on the phylogeny and the systematic arrangement of Vertebrates (p. 149-171), discutée également par Assheton (p. 271 et suiv.). Il. — ORIGINE DU MÉSODERME. DÉVELOPPEMENT DU CORPS DE L'EMBRYON. CENTRES DE CROISSANCE‘. L'origine du mésoderme est toujours la question qui préoccupe et sépare le plus les embryologistes. La participation de l’entoderme à la formation de ce feuillet n’est pas admise par Külliker, Selenka, | Ziegler, Kiebel et autres personnalités embryolo- gistes; ces auteurs pensent que le mésoderme provient uniquement par bourgeonnement de la ligne primitive et que, pour quelques-uns de ces auteurs, au moins, le système vasculaire et le sang dérivent de la même source. Cette dernière formation, qui a été nettement distinguée du mé- soblaste, sous le nom de mésenchyme, par O. Hert- wig, est considérée, par un grand nombre d’au- teurs, comme n'ayant pas d'importance réelle chez les Mammifères. Bonnet, en particulier, dénie la réalité d'un pareil processus chez le chien, après l'avoir décrit chez le mouton; mais Hubrecht, à son tour, vient affirmer nettement que, chez la musaraigne et chez une chauve-souris d'Asie du genre Tupaia, le mésenchyme provient bien de l’entoderme dans une région limitée qu'il appelle annular zone of mesoblast-producing entoderm. De la sorte, la question est toujours pendante entre les embryologistes. Elle vient d'être magni- fiquement résumée par Rückert et Mollier”, qui arrivent, dans leurs conclusions, à démolir les idées { Huerecar : Loc. cit., chap. Il, p. 26 et suiv. ASSHETON : Loc. cit., p. 240 et suiv. I. : On Growth Centres in Vertebrate Embryos. Anatom. Anzeiger, 1905, t. XXVII, p. 125-127 et p. 156-170, avec 9 fig. ? In Hertwig's Handbüch, vol. I, p. 1244-1260. de Rabl sur la formation du mésoblaste, idées qui avaient été acceptées jusqu'ici par la grande majorité des embryologistes. Hubrecht y revient dans son mémoire pour montrer à nouveau l’im- portance, dans les processus embryologiques, de ce qu'il a appelé la plaque protochordale et la zone annulaire de prolifération. La plaque protochor- dale (Ærgänzungsplatte de Bonnet) est une région isolée de la partie antérieure de l'embryon, où l'entoderme s'épaissit et bourgeonne activement pour donner naissance au mésoblaste; cette zone de différenciation existerait, pour Hubrecht, non seulement chez les Mammifè- res, mais en- core chez les Sauropsidés et les Ichthyopsi- dés. — La zone annulaire de prolifération (Mesoblasthof de Bonnet) est une autre ré- gion proliféra- tive de l’ento- derme qui don- nerait nais- sance au Mméso- blaste; à la vé- rité, ce centre de pro:ifération estniépar Rabl, Keibel et au- tres, mais éner- giquement af- lirmé à nou- veau par Hu- Fig. 1. — Section longitudinale (d'après Hubrecht) d'un blastocyste de Tarsius brecht. dans lequel la plaque protochordale Une troisiè- pp est formée et le coin protochordal (nœud de Hensen) est en voie de for- mation avancée. — Le mésoblaste ventral (m) bourgeonne de l'ento- derme. Le trophoblaste (tr) est indé- pendant. me source des tissus méso- blastiques se- rait l’ectoder- me. Hubrecht montre, en effet, que chez un Lémurien, le Tarsier (7arsius), avant l'apparition du nœud de Hensen (nœud primitif de Bonnet, coin protochordal de Hubrecht) dans le tiers postérieur de l’écusson embryonnaire, un autre champ de prolifération ectodermique a déjà en- voyé dans la ligne médiane, en arrière, une petite masse de cellules qui va se développer en mésoderme ventral (fig. 1). Cette prolifération appa- rait dès que l’entoderme s’est creusé en vésicule sous l’ectoderme embryonnaire, vésicule qui ne remplit jamais toute la cavité du blastocyste, chez or , GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 69% l'Homme, les Singes et le Tarsier, du moins; bien- tôt la prolifération se creuse elle-même d'une cavité qui forme une celle-là, à lin- lérieur du tro- phoblaste; en s'agrandissant, ses parois vien- dront s’appli- quer contre ce dernier,devenu chorion; par là, le blastocyste deviendra di- dermique en même temps qu'on pourra distinguer un mésoblaste pa- : riélal ou soma- tique et un mé- soblaste viscé- ral ou splanch- nique. La croissance de l'embryon des Mammifères a donc, pour Hubrecht, trois centres actifs princi- paux : deux sur l’entoderme, un dans l’ectoderme. Chacun de ces centres prolifère de facon à for- mer, entre les deux feuillets germinatifs, des épaississements cellulaires qui vont marcher l’un vers l’autre et finir par se fusionner inti- mement. Le mé- soblaste ventral, en se dévelop- pant en arrière de l’écusson ec- todermique, pré- sente d'abord une forme plus ou moins en éventail ou en croissant, comme cela se présente chez les Sauro- psidés; mais, l'écusson embryonnaire augmentant lui-même en longueur, ce centre de prolifération est également étendu et alors le croissant méso- blastique prend la forme de deux ailes disposées seconde vésicule, mésoblastique Fig. 2. Fig. 3. Fig. 4. Fig. 5. — Quatre vues en surface d'un écusson embryonnaire de Tarsius (d'après Hubrecht). Dans la figure 2, la concrescence médiane du cône protochordal et de la plaque protochordale s'est formée et la notogénèse à commencé. Dans les figures 3 et 4, la région de la bouche dorsale (ligne primitive) s'est allongée en même temps que la notochorde et le mésoblaste bilatéral apparaissent. Dans la figure 4, on voit la première indication du pore neurentérique qui, dans la figure 5, a reculé considérablement en arrière. Fig. 2 à 5. Fig. 6 à 8. — Section longitudinale de l'écusson embryon- paire de Tarsius correspondant respectivement aux fi- gures 3, 4 et 5 (d'après Hubrecht). — ir, trophoblaste; vmm, mésoblaste ventral; a1/, tube allantoïdien (présent, mais non indiqué dans la figure 7); pp, plaque protochordale:; ach, notochorde; en, ne, canal neurentérique; aa et ap, repli amniotique antérieur et postérieur; per, péricarde: h, cœur. diminuer d'étendue. symétriquement à droite et à gauche d'une ligne verticale qui est l'axe même de l'embryon. Le long de cet axe, l’ectoderme produit librement des cellules qui s'é- tendent à droite et à gauche en- tre les feuillets germinatifs.En mème temps que le blaste ainsi méso- s'étend latérale- ment, le blas- topore se trans- forme en un pli dorsal, la ligne primitive, dont les bords laté- raux vont développer ac- ivement. Il se forme ainsi, en ce point, un nouveau cen- se tre de croissance qui va faire passer l’'écusson em- bryonnaire de la forme arrondie à la forme ovale ou piriforme (fig. 2 à 11). Quand l'embryon a at- teint ainsi une certainetaille,un actif processus de transforma- tion ou de diffé- renciation cellu- laire vient faire apparaître les premiers orga- nes proprement dits de l’em- bryon : la noto- chorde et les somites (fig. 9, 10 et 11). Cette différenciation est d’abord visi- ble en avant, là où l’ectoderme a formé le nœud de Hensen, puis elle s'avance en arrière jusqu à venir s'unir avec la plaque proto- chordale. De ce point, la notochorde s’allonge en arrière en même temps que la ligne primitive va A propos de la croissance de l'embryon, il y a 696 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE en ce moment entre Hubrecht et Assheton une dis- cussion que nous voulons croire autre chose qu'une discussion de mots. Les changements qui suivent immédiatement la délimination de la masse embryonnaire primitive en ectoderme et entoderme, délimination qui re- présente la gastrula des Mammifères, constituent, d'après Hubrecht, un phénomène de développement particulier auquel, dès 1902", il avait donné le nom de otogénèse, parce qu'ils con- tribuent surtout à former la région du de l'em- bryon; les phéno- mènes de dévelop- pement ultérieurs contribuant exclu- sivement à former la partie anté- rieure de la tête peuvent s'appeler dès lors phénomè- nes de céphalogé- nèse. Voici comment, d'autre part, As- sheton résume l'histoire du déve- loppement des Vertébrés. L'orga- nisme embryon- naire est le résul- dos amn chenteron, a été complètement formée (soit par invagination comme dans l’Amphioxus, soit par creusement cellulaire comme chez les Amphibiens et les Amniotes), ou même un peu avant la fin de cette formation, chezles Amphibiens et les Poissons par exemple, un second centre de prolifération cellulaire apparaît el va conduire à un ensemble de formations secondaires qu'Assheton désigne sous le nom de deutérogénèse. Chez les animaux qui ont un blastopore, le centre deulérogénétique est situé dans les lèvres mêmes de cet orifice et tend alors à produire un organisme cylindrique qui va acquérir ultérieurement une symétrie bilatérale. Mais, au bout de peu de temps, l’activité du centre deutérogénétique s'arrête, chez les animaux à blastopores, du côté ventral et le blastopore devient l'anus; elle continue, au contraire, du côté dorsal. Chez les animaux qui n'ont pas de blastopore, on observe également un arrêt de développement de l’aire deutérogé- nétique du côté ventral; c'est là aussi qu'apparaî- tra l'anus, mais comme organe de seconde forma: lion. La région dorsale continue à proliférer pour former la queue. Donc, pour As- sheton, l'embryon, tat d’un centre aussi bien celui de unique de prolifé- Mammifère et ce- ration cellulaire lui d’un Vertébré (la segmentation inférieur, dérive- del'œuf),quimon- rait de deux cen- tre une forte ten- Fig. 9. D EANUR FiEAE tres de croissance dance à la symé- Fig. 9 à 11. — Deux stades plus avancés du développement du Tarsius. nettement déter- trie radiaire, com- me cela se voit, par exemple, dans la blastula de lAm- phioxus, la blastula des Amphibiens, la blastula des Dipnoïques, etc., dans la morula des Mammi- fères et la première phase de segmentation des œufs méroblastiques. Ce centre primaire de croissance conduit finale- ment à la formation d'un organisme (gastrula) constilué par une paroi à deux feuillets et par une cavité. Tel est ce qu'Assheton appelle la protogénèse. Quand la cavité de la gastrula, c'est-à-dire l’ar- disque de cinq somites ‘ Husrecur : Furchung und Keimblatthildung bei Tarsius. K, Akademie v, Wetensch. Amsterdam, 1902, — En 10 et 11, on voit les surfaces dorsale et ventrale d'un blasto- : JVs, repli céphalique vu d'en desssus; amn, repli amniotique; #11, allantoide vue par transparence; a/1.M., orifice du canal allantoidien dans la vésicule ombilicale; ne, pore neurenté- rique. minés le pre- mier, agissant pendant la phase gastrula et phylo- génétiquement le plus vieux, donnerait naissance à l'extrémité antérieure de l'embryon; ce centre pourrait être comparé à la céphalogénèse de Hu- brecht; le second, formant le corps de l'embryon, pourrait être comparé à la notogénèse du même auteur. Cependant, les conceptions de ces deux embryo- logistes sont loin d'être identiques, comme le montre la figure 12. Cette figure, empruntée à Assheton, représente d'abord, dans son milieu, le stade gastréa d’un cœlentéré avec le blastopore en dessous. En haut est le vertébré, d'après la GUSTAVE LOISEL — REVUE conception de Hubreecht; le corps se forme par allongement de la gastrula dans la direction vd; les parois du stomodæum se ferment par concres- cence pour donner naissance à la notochorde, et la surface aborale du cœlentéré devient la surface ventrale du vertébré, tandis que la surface orale devient la surface dorsale. La ‘figure inférieure représente le vertébré, d'après la conceplion de Assheton; le corps se forme ici par allongement de la gastrula dans la direction ap, par l'acti- vité des cellu- É les formant la lèvre du blas- topore; la sur- 7 face aborale de- P: vient ici la par- tie antérieure du corps, tan- d dis que la sur- face orale de- vient la partie postérieure ; plus tard, l’ac- tivité de la par- tie ventrale cesse de se ma- d nifester, alors que la partie dorsale conli- nue son acli- vité cinétique pour former la queue. P Ilest bon d’a- jouter que l’in- terprétation d'Assheton est basée sur de Fig. 42. — Diagramme pour montrer la différence dans la conception de la cé- phalogénèse et de la notogénèse, d'une part, et de la protogénése et de la deutérogénèse d'autre part (d'après Assheton). à LA ; nombreuses ex- La figure du milieu 8 représente Ex is gastrea du stade primitif d'un cœæ- périences très entéré avec le blastopore en bas. DT -J, à La figure ce a représente MUETESSAnIEE le vertébré, suivant Hubecht.Le corps quecetauteura dériverait ici par allonsement de la gastrula dans les directions vd, for- mant un stomodeum actinien allongé et amenant ensuite une concrescence des parois de ce stomodeum pour former la notochorde. La figure inférieure y représente le vertébré suivant la conception d'Assheton. Le corps dériverait ici de l'allongement de la gastrula dans la direction ap, allongement produit par l'activité cinétique de la lèvre blas- loporique; plus tard, l'activité ven- trale s'arrête, la partie dorsale seule continue à se multiplier pour former | la queue. faites sur l’em- bryon vivant’. 1 ASSHETON : Re- investigation of the Early Stages of the Develop- ment of the Rab- bit, Quart.Journ. Micr. Sc., 1894, t. XXXVII. In. : The Primi- tive Streak of the Rabbit, the cau- ses which may determine its shape and the Part of the Embryo formed by its Activity. Zbiïd. 1. : On the Growth in Lenght of the Frog Embryo. Jbid. In. : On Experimental Examination into the growth of ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 697 (II. — IMPLANTATION ET L'OŒUF CHEZ L'HOMME ET Cnez LES MAMMIFÈRES. TROPHODERME ET PLACENTA‘. GESTATION DE Le processus par lequel les ovules de l'Homme, de certains Primates et de quelques autres Mammi- fères, situés plus bas dans la série animale, se mettent en relation intime avec l'utérus dans l'acte de la gestation, vient d'être enfin tiré au clair, après bien des tâtonnements. « Nous devons cet immense progrès surtout aux travaux récents de von Spee et de Burkhardt, sur le Cochon d'Inde; de Selenka, sur un grand nombre de Singes; de Peters, de S. Minot, de Léopold, de Bryce, de Teacher et de nous-même sur l'Homme, ainsi que d'autres chercheurs, trop longs à citer nominalement. Tous ces travaux ont été corroborés tout récemment par Hubrecht et par Grosser.» Le mémoire par lequel Eternod commence ces lignes est une revision et un résumé des nombreux tra- vaux de cet auteur sur la question, en même temps qu'une mise au point très intéressante. C'est pour cela que nous suivrons surtout cet auteur en le complétant ou le modifiant toutefois, s'il y a lieu, d'après les deux autres importants Mémoires de Hubrecht et d’Assheton. S 1. — Implantation de l'œuf chez l'Homme. « Jusqu'à une époque récente, continue Eternod, on s'était imaginé tout simplement, et bien à tort, que l’ovule fécondé, une fois arrivé dans la cavité de l'utérus, ne tardait pas à être entouré par les replis boursouflés de la muqueuse de cet organe; que, de la sorte, l'ovule finissait par être comple- tement enveloppé par ces replis qui se refermaient au-dessus de lui; et que, finalement, par ce méca- nisme, prenaient naissance les trois membranes caduques classiques : à) réfléchie (decidua reflexa), passant par-dessus l'œuf; d) sérotine (decidua serotina), située entre l'œuf et l'utérus; €) vraie (decidua vera), tapissant le reste de la cavité du corps de l'utérus. » Cette conception, que la plupart des manuels et même des traités courants présentent encore aujourd'hui, est maintenant reconnue inexactle. On peut très bien maintenir le terme de membrane A the Blastoderm of the Chick. Proc. Roy. Sue., vol. LX. Ip. : On growth centres in Vertebrale Embryos. Anatom. Anzeiger, t. XXVII, 1905. ! Husrecnr : Loc. cit. — AssnetON :. Loc. cit. A. F. Erenwon : Inégalités de croissance du chorion ovu- laire humain et localisations consécutives en chorion læve et chorion frondosum. C. R. de la Réunion de l'Association des Anatomistes. Nancy, 5-1 avril 1909, 15 p. et fig. Ip. : L'œuf humain. Implantation et gestation. Tropho- derme et Placenta. Mém. publié à l'occasion du Jubilé de l'Université 1559-1909. Genève, 1908, avec 8 pl. hors texte et fig. 698 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE EE ———" —— ——" —"————_— caduque vraie pour la portion qui intéresse la sur- face générale de la muqueuse du corps utérin. Par contre, il y a lieu dorénavant de suivre l'exemple donné par Kollmann, de Bâle, et de dire : membrane caduque capsulaire (decidua capsularis), au lieu de caduque réfléchie, pour la partie de la muqueuse utérine qui passe par-dessus l'œuf; et, enfin, de parler de membrane caduque basale (decidua basa- | lis), à la place de eaduque sérotine, pour la por- une réaction formative intense; le tissu proliféré est sillonné d’un grand nombre de vaisseaux san- guins très dilatés qui possèdent un endothélium de revêtement bien évident. Les glandes utérines sont également hypertrophiées et laissent voir net- tement leurs épithéliums. Voyons maintenant les multiples transformalions que va subir l'ovule humain pour s'adapter, au mieux de ses intérêts, dans cette sorte de nid où il Fig. 13. Fig. 14. Fig. 15. Fig-MA6: Fig. 17. Fig. 13 à 17. — Schémas de l'implantation de l'ovule humain fécondé dans Ja muqueuse utérine (d'après Eternod). Ov., ovule; Æ.u., épithélium utérin; D.ut., derme utérin. lion située entre l'œuf et la paroi utérine. Voici, en effet, comment les choses se passent, chez la femme, lors de la fixation et de l'implantation de l'œuf sur les parois de l'utérus. L'œuf, fécondé dans l'oviducte, arrive dans l’uté- rus en morula ou peut-être même déjà en blastula : par son contact avec l’épithélium utérin, il déter- mine, dans cet épithélium, une petite plaie en forme de boutonnière dans laquelle il s'enfonce; il tra- verse ainsi tout l’épithélium utérin qui se reforme au-dessus de lui, après son passage, et va se loger dans le derme (fig. 13 à 18). Il se trouve alors le.ut. Fig. 18. — L'œuf de Peters déjà implanté (d’après Eternod). —Sy,syncytium (plasmodium)trophodermien: C.s., caillot sanguin; Ÿ.ut., derme utétin; Gl.ul., glande utérine; A.u., artère utérine: Ve.ut., veine utérine; L.s.mat., lac sanguin maternel. comme encapsulé dans une enveloppe caduque (decidua capsularis, nidum ovuli, Einest), formée de tissu conjonctif qui fait tout le tour de l'œuf, sauf en un tout petit point, d'aspect cratériforme, qui marque encore le lieu par où l'ovule est entré dans la muqueuse utérine. Quant à l’épithélium de celle muqueuse, il recouvre complètement la déci- due capsulaire, sauf en ce point de fermeture de la muqueuse utérine par-dessus l'ovule. Sur tout le pourtour de ce dernier, le derme utérin subit alors va vivre en véritable parasite de sa mère. Eternod divise ces transformations en six phases succes- sives : 1° Phase du syneytium avilleux primordial: 2° Phase du trophoderme villeux fruste ; 3° Phase du trophoderme villeux zonaire tran- sitoire; 4° Phase du placenta villeux diffus; 5° Phase du chorion frondosum, chorion læve: 6° Phase du placenta discoidal cotylédoné. 1. Phase du syneytium avilleux primordial. — Il n'a été donné encore à personne de voir l'œuf de l'Homme et des Primates dans ses toutes premières périodes; le plus jeune œuf humain connu jusqu'à ce jour dans la littérature est l'œuf que Bryce, Teacher et Kerr ont étudié et décrit tout récemment avec loutes les ressources de la technique mo- derne'. Cet ovule, entouré de sa coque déciduale, était de forme ovalaire-lenticulaire ; ses dimen- sions prises à l'extérieur étaient en millimètres : 1,95, — 1,10, — 0,95. Il présentait à sa périphérie un ectoderme épais transformé en une sorte de carapace syncytiale poreuse* dans laquelle s'étaient déjà glissés, par- tout, des globules rouges sans noyaux, qui prove- naient de la mère. Le mésoderme était également très épais et se transformait vers l’intérieur de l'œuf en une couche d'aspect gélatineux qui semble être la première ébauche de la cavité dans laquelle aurait apparu plus tard le magma réticulé de Giaccomini. On ne voyait nulle part, dans cet œuf, ANT RASE * H: Bryce, Joux H. Tacaer, Joux M. Muxko Kerr : Contri- butions to {he study of the early development and imbed- ding of the human ovum. I. An early ovum imbedded in the decidua. Il. An early ovarian pregnancy. Glasgow, 1908. * Ce serait le {rophoblaste de Hubrecht (lectoplacenta de Mathias Duval). GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE —————@—— de tendance à la formation d'élevures villeuses ; on avait donc bien ici un chorion avilleux. 9, Phase du trophoderme villeux fruste. — L'œuf de Peters, que nous avons décrit et figuré dans une de nos précédentes revues" et qui est le type de la seconde phase, présente encore une forme générale ovalo-lenticulaire aplatie, mais il a notablement grandi dans tous les sens, car ses dimensions prises à l'extérieur sont en millimètres : 2,18 et 1,8. L'embryon n'est encore représenté, comme au stade précédent, que par la ligne primitive entourée d'un amnios* et par un sac vitellin qui fait saillie dans l’intérieur de l'œuf où le magma réticulé est devenu très apparent; le tout est relié directement au mésoderme de l'œuf par une trainée épaisse de tissu myxomaleux ‘. Le mésoderme commence à envoyer des expan- sions villeuses, très courtes, non ramifiées ou à peine divisées (fig. 18), dans l’ectoderme ou tro- phoblaste; ce dernier s'est d'autant plus épaissi que l'injection sanguine maternelle, à peine ébau- chée au stade précédent, est devenue de véritables lacunes sanguines dans lesquelles viennent se déverser, à plein canal, les vaisseaux de l'utérus. La découverte de cette injection interstitielle du sang de la mère dans l'œuf est un fait capital qui vient simplifier beaucoup la connaissance de l’évo- lution du placenta. Le sang entre tout droit dans le plasmodium syneytial ovulaire, sans qu'il y ait jamais aucune interposition quelconque, ni d’en- dothélium vasculaire, ni de fibrine. C’est done un vrai type de circulation lacunaire; les premières lacunes interstilielles n'auront plus qu'à se dilater pour devenir directement des lacs sanguins ma- ternels. La surface externe de l’ectoderme n’'épouse pas encore la forme des villosités mésodermiques; elle est encore à peu près régulière, mais les cellules qui limitent cette surface envoient des fusées plasmo- diales qui s'enchevêtrent avec les éléments du tissu utérin proprement dit. 3. Phase du trophoderme villeux zonaire, tran- sitoire, — L’œuf grandit toujours en gardant sa ! Rev. gén. des Se., 30 mai 1906, p. 461. ? La première apparition de l'amnios nous est toujours inconnue pour l'Homme comme pour tous les autres Pri- mates. Nous savons seulement que sa cavité apparaît de très bonne heure, non pas suivant le schéma classique, mais bien par un creusement, sur place, dans le complexe cellulaire et en vertu d'un développement tachygénétique extra-con- densé (voir, sur la Tachygenèse, notre Revue d'Embryologie de 1910, n° 2, 30 janvier, p. 87). 5 C'est la première ébauche de cette formation qu'on appellera plus tard, suivant les auteurs, Bauchstiel, Embryo- phore, Pédicüle embryonnaire, P, allantoïdien, P. ombilical, P,amniotique, etc. 20). Ce syncy- 699 même forme lenticulaire et arrive aux dimensions respectives de 6 et 4,5, Les villosités mésoder- miques sont devenues très abondantes; elles se sont notablement allongées et ramifiées, mais, fait curieux, elles apparaissent maintenant groupées en couronne sur tout le pourtour de la lentille ovu- LT TA ie. ; » € . = Q—asy ES laire (fig. 19), tandis que, IDF E sur les deux faces de l’ovule, elles laissent deux sortes de champs glabres et de forme assez circulaire. Cette phase Fig: 19. — Œuf de Jiei- " chert (d'après Eter- est très curieuse et d'autant ni plus intéressante qu'elle rap- pelle un état permanent du placenta des Car- nassiers; mais est-elle bien normale chez l'homme, et les rares faits positifs sur lesquels s'appuie Eternod sont-ils suffisants pour l'établir et la faire rentrer définitivement dans l’histoire de l’évolution du placenta humain? 4. Phase du placenta villeux diffus. — En tous cas, toute la surface de l'œuf se couvre de villo- sités méso- dermiques de plus en plus nombreuses et aussi de plus en plus ramifiées. Chaque tronc villeux, en s’arborisant, ne tarde pas à former une sorte de pin- ceau dont les extrémités distales res- tent soudées au syncytium trophodermi- que ; ainsi se forment les premières vif lositës-cram- pons ou vil- losités-agra- fes (Haftzot- ten des Alle- mands) (fig. Fig. 20. — Œuf long |de 16mm4 (embryon de 2mm,11). econstitution graphique, à la chambre claire, par Superpositions successives : d'un fragment du chorion, d'une villosité choriale arborisée, des crampons ou agrafes, et du trophoderme (grossis. : 40 diamètres) (d'après Eternod). _ V. fœl., vaisseau sanguin du fœtus ; Ect., ectoderme ovulaire; L.s.mat., lacs sanguins maternels; Cr., crampons vil- leux (agrafes); C.tr., coque Hopaouer mienne ; L.e. m6., lame externe (choriale) du mésoderme; Vil., villosités. tium tropho- dermique, l'ancien ec- toderme de 100 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE l'œuf, est devenu une épaisse couche de tissu syney- tial qui, après avoir joué un rôle essentiel, au dé- but, dans la nutrition de l'œuf, va jouer encore un rôle très important, tant au point de vue méca- nique qu'au point de vue fonctionnel. Lorsqu'on examine des œufs humains jeunes, fraîchement expulsés par avortement, et qu’on les débarrasse de leur enveloppe déciduale, la première chose qui frappe, à l'œil nu, et surtout à la loupe, c'est précisément cette coque trophodermienne; elle se présente sous forme d'une couche demi-translu- cide, homogène et résistante; et l’on voit, tout de suite, que c'est elle qui réunit les unes aux autres les digitations villeuses du mésoderme; c'est à sa face interne et à ses dépens que se forment, par allongement, les crampons qui retiennent ces digi- tations et il faut, pour arriver à celles-ci, exercer un effort marqué, faire des tractions fortes avec les pinces et les aiguilles à dilacérer. D'autre part, de nouvelles injections intersti- tielles sanguines sont venues s'additionner aux anciennes, à mesure que les villosités s'allongeaient et s'arborisaient. Enfin, de la face externe de l'œuf, partent maintenant de vrais bourgeons qui vont s'implanter profondément dans le derme de la muqueuse ulérine, de manière à créer des adhé- rences solides entre l'œuf et l'utérus. Et c’est par là, par cet accroissement général en surface, que l'expansion totale de l'œuf va devenir possible. L'œuf a atteint les dimensions respectives de 16, 14 et 42 millimètres; l'embryon à déjà un cœur qui fonctionne comme propulseur général de la circulation fœtale et, dès lors, on voit apparaitre des vaisseaux dans les villosités choriales. Du côté de l'utérus, les décidues sont également différenciées sur tout le pourtour de l’œuf. Elles ont leur tissu propre, formé de grosses cellules proli- férées ; elles sont sillonnées de nombreuses glandes hypertrophiées et de vaisseaux sanguins de divers ordres : artériels, veineux et capillaires. 5. Lhase du chorion frondosum et du chorion læve, — Au stade suivant, celui de chorion lisse (læve) et de chorion villeux (frondosum), les fron- daisons villeuses englobent encore tout le pourtour de l'œuf, mais leur croissance à subi des inégalités marquées : du côté dorsal, sauf au niveau immédiat du point d'insertion du pédicule embryonnaire, elles sont beaucoup plus touffues, plus serrées et plus ramifiées; du côté ventral, elles Sont moins développées, plus clairsemées, moins longues et moins ramifiées, surtout dans la partie centrale de cette face. L'œuf lui-même a une longueur de 160 5, dont 3,5 pour l'embryon, qui a pris la forme d'un double C; son intérieur est encore rempli par un magma réticulé très net; le pédicule de l'amnios (Bauchstiel) et le pédicule de la vésicule ombilicale commencent à se rapprocher, mais ne sont pas encore fusionnés. 6. Phase du placenta discoidal, cotylédoné. — Le stade définitif du chorion avec placenta discoïdal cotylédoné apparaît chez un œuf qui présente les dimensions de 33-37 millimètres. Du côté ventral, c'est-à-dire sur la face qui regarde l’intérieur de l'utérus, les villosités se sont raréfiées alors qu'elles ont notablement augmenté du côté dorsal; il y a donc ainsi nettement d'abord un chorion frondo- sum (dorsal) et un chorion læve (ventral). Ce der- nier va augmenter d’étendue au fur et à mesure du développement, bien que sa surface continue à former encore de nouvelles villosités. 11 y a là un processus assez obscur qu'Eternod résume ainsi : Les villosités nouvellement formées prennent nais- sance au milieu de la sur- face ventrale; au fur et à mesure de l'accroissement inégal de l'œuf, elles vont en s'éloignant de leur po- sition primitive, tournent autour du bord de l'o- voïde ovulaire, puis pas- sent sur la face dorsale et finalement viennents'a- jouter à la périphérie du chorion frondosum. Ce- lui-ci n’est lui-même, à son tour, que l’ébauche du futur gâteau placentaire. De son côté, l'embryon a pris une forme spira- loïde; il a achevé sa rotation (culbute) autour du pédicule de l’'amnios qui s'est rapproché énormé- ment de la vésicule ombilicale (sac vitellin), de facon à fusionner bientôt leurs deux mésodermes. Le pédicule de cette dernière s'estconsidérablement allongé; par places, le long du cordon ombilical, il s'est même fragmenté en segments distinets; quant au corps même de la vésicule vitelline, il est logé et serré intimement entre les membranes amnio- tique et choriale; ce sont là des rapports qui per- sisteront jusqu'au moment de la parturition. L'amnios a pris sa forme globuleuse; il s’est étendu de plus en plus dans la cavité exo-cælo- mienne de façon à se rapprocher du chorion; l’exo- cœlome a, pour ainsi dire, entièrement disparu; il s'est réduit à l'état d'un simple espace virtuel, mais les deux assises mésodermiques, celle qui recouvre l'amnios et celle qui double le chorion, ne sont pas encore complètement fusionnées : il est toujours facile de les séparer l’une de l’autre, par de légères tractions. A mesure que les eaux de l’amnios s'accumulent et que le fœtus s'accroît, l'œuf se dilate de plus \ 4 ÿ ill Fig. 21. — Phase du pla- centa discoïdal cotylé- doné (d'après Eternod). GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 701 eu plus : celle dilatation se fait excentriquement, surtout du côté du chorion læve qui cesse bientôt de produire de nouvelles villosités. Le gâteau pla- centaire (chorion frondosien) s'accroil aussi, mais dans des proportions beaucoup moindres. Ainsi, finalement, nous avons (fig. 21) : 1° Du côté de la paroi ulérine (ancienne face dorsale, devenue ventrale depuis que le fruit de la conception à culbuté) : le placenta, avec le cordon ombilieal inséré dans son centre; 20 Ju côté de la cavité ulérine (ancienne face ventrale, devenue maintenant dorsale) : le chorion définitif. La cavité du corps utérin, d’aplatie qu'elle était lors de l’arrivée de l'œuf fécondé, s’est dilatée gra- duellement et, finalement, est devenue ovoïde. En même temps, les parois utérines continuent à réagir, surtout au contact du chorion frondosum; le tissu décidual qui s’est formé dans la muqueuse utérine prolifère de manière à envoyer des expan- sions dans ce chorion et à le découper ainsi en une série de parties ou de lobes appelées cotylédons. De cette facon, on arrive à constituer définilive- ment le placenta discoïdal cotylédoné, tel que nous le voyons dans l'espèce humaine et dans quelques rares Primates. Avant de considérer les différentes facons de fixation de l'œuf dans les différents ordres de Mammifères, voyons quelles sont les circonstances qui ont pu amener les diverses fluctuations de développement du chorion que nous venons de passer en revue. D'après Eternod, il faudrait les chercher avant tout dans les trois principales causes suivantes : 4° Variations de rutrition; 2 Variations dans les efforts (pressions, lions, ; 3° Phénoinènes d'hérédité (phylogénie). 1. Les échanges nutritifs qui se font dans l'œuf varient certainement beaucoup de conditions aux différentes périodes de son évolution. Tout au début, l'œuf est baigné pour ainsi dire directement : d'abord dans la lymphe, ensuite dans le sang de la mère; il est donc soumis à une action hypernutri- tive intense qui amène une prolifération de sa péri- phérie, d'où une transformation de l’ectoderme en une épaisse couche syncytiale*. Dans le stade suivant, deux grands lacs sanguins maternels tendent à se former du côté ventral et du côté dorsal de l'œuf, d’où une nutrition locale intense du chorion dans ces deux régions et la formation d'une couronne villeuse circulaire. EE ! Eternod suppose ici que cette prolifération ectoder- mienne amène tout au début un commencement d'inver- sion blastodermienne (entypie), comme chez les Rongeurs. trac- R:VUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Ensuite, l'ensemble de l'utérus devient plus vasculaire, plus mou; il en résulle que les lacs sanguins et les villosités peuventse distribuer plus régulièrement, sur tout le pourtour ovulaire. Enfin, du côté maternel et sur la face dorsale, la plus voisine de l'utérus, c’est-à-dire la plus vascu larisée, la nutrition devient plus intense encore ; en même temps,les vaisseaux fœtaux apparaissent d'abord dans le chorion, puis dans les villosités. Ces deux moments combinés favorisent certaine- ment la production, à cet endroit, de frondaisons villeuses abondantes. 2. Les efforts, les pressions que subit l'œuf varient également au cours de son évolulion. Au début, l'œuf est un corps mou qui se développe dans un utérus relativement rigide el compact: de là, sa déformation lenticulaire et les inégalités de. croissance qu'il tendra à présenter, soit sous l'action directe de la pression, soit sous l'influence indirecte des variations nutritives qui en sont la conséquence. Plus tard, à la suite du développe- ment considérable des vaisseaux sanguins, et notamment des veines, la matrice devient plus molle et plus plastique, et c'estelle qui, finalement, se moulera sur l'œuf, en voie de croissance. 3. Quant à l'influence de l'hérédité, il est encore très difficile de dire dans quelles proportions des survivances phylogénétiques interviennent dans les transformations successives de l'œuf. Quand on compare l'œuf humain à l'œuf des autres Pri- mates, on se sent redoubler de prudence et l'on est même amené à se demander si toutes les fluctua- tions de l'œuf humain ne sont pas l'œuvre d’aequi- sitions relativement très récentes, et, par consé- quent, sans aucune valeur phylogénétique réelle. $ 2. — Implantation de l’œuf chez les Mammifères autres que l'homme. Eternod, modifiant un peu la classification que Hans Strahl a donnée dans son excellente mono- graphie du placenta’, caractérise ainsi les divers modes de placentation des Mammifères. 4. PLacenras vrais. — L'œuf détruit l'épithélium utérin à son contact. a) Chorion à implantation totale et à placenta discoidal. C'est le type humain qu'on a rencontré encore chez un singe anthropoïde, un Gibbon, l'Hylobates concolor, et chez le Cobaye. b) Chorion à implantation partielle dans le derme. Ici l'œuf détruit bien l’épithélium utérin en certains points de son contact, mais il ne le traverse pas complètement comme dans le cas pré- ‘ Die Embryonalhüllen des Säuges und die Placenta. O. Hertwig's Handb. der Embryolog., Bd. I, 1% Teil, 1906, p. 233-368. 168 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE cédent. Trois cas sont, du reste, à distinguer : ou bien une seule face de l'œuf (la face dorsale par rapport à l'embryon en voie de formation) s'est implantée dans l’une des deux faces de la cavité utérine ; c'est l'implantation discoïdale simple que l’on trouve chez un singe voisin des Cercopithè- ques, le Cercocebus cynomolqus. Ou bien il y a deux placentas discoïdaux qui occupent les deux faces de l'œuf, dorsale et ventrale, par rapport à l'embryon en voie de formation; c’est l'implanta- tion discoidale double que l’on a trouvée chez un autre singe, le Semnopithecus nasicus. Ou bien, enfin, le placenta occupe la zone médiane de l'œuf, sous forme d'une bague plus ou moins large, les deux bouts de l'œuf restant libres et non adhé- rents; c'est l'implantation zonaire que l'on trouve chez les Carnivores. 2. PSEUDO-PLACENTAS. — Simple contact entre le chorion ovulaire et l’épithélium utérin. a) Chorion cotylédoné demi-adhérent. Le chorion se couvre encore de villosités par places (cotylé- dons), et ces expansions s'engagent toujours plus ou moins profondément dans les anfractuosités de la muqueuse utérine. Cependant, lorsqu'on exerce des tractions un peu fortes, il est possible de sépa- rer les cotylédons de la muqueuse utérine. En dehors des champs cotylédonaires, il y a simple contact comme dans les autres cas ci-dessous dé- crits. C’est le cas des Ruminants. b) Chorion avec toulles villeuses non adhérentes. Le chorion se couvre encore de touffes de villosités qui partent d'un tronc commun; mais il n'y à aucune adhérence réelle entre l’ectoderme chorial et l’épithélium utérin, et les échanges nutritifs entre la mère et le fœtus se font par simple contiguité. C’est le type des Equidés que l’on trouve dans les trois derniers cas suivants : c) Chorion villeux diflus non adhérent. Le cho- rion présente à sa surface des replis et des expan- sions villeuses. Exemple: un Lémurien, le Gal/ago agisymbanus. d) Chorion ondulé diflus. Le chorion ne présente plus que des replis onduleux qui s'engagent dans des ondulations correspondantes de la muqueuse utérine un peu congestionnée. C'est le cas des Suidés. e) Chorion lisse. L'œuf garde, jusqu’à la mise- bas, une surface extérieure lisse et uniforme; ni villosités ni plis. C’est le cas des Marsupiaux Cette classification, comme toutes celles qui ont été données jusqu'ici des placentlas, ne peut guère avoir qu'une valeur anatomique, car, pour donner vraiment une suite phylogénétique de la placen- tation, il faudrait avoir étudié ici tous les lypes de Mammifères actuellement vivants et, même alors, on pourrait se demander encore si les placentas des formes disparues pourraient rentrer tous dans la série ainsi obtenue. Si l’on s'en tient à la forme extérieure, surtout, comment rapprocher les uns des autres : le placenta discoidal de la taupe, dans lequel les villosités sont, à la nais- sance, rétractées et rentrées en dedans comme des extrémités de doigts de gant et plus tard résorbées sur place; le placenta discoïdal du qaléopithèque dans lequel, au début, des lacunes énormes sont remplies de sang maternel el qui, plus tard, se trouve entièrement encastré dans les parois uté- rines ; le placenta discoidal du lapin et du tarsier qui, quand il est entièrement développé, est rat- taché à la mère par un pédoncule de diamètre beaucoup plus petit que celui du placenta lui- même; le placenta discoidal du hérisson et de l'homme, le premier avec ses villosités denses et comme treillagées, le second avec ses villosités déliées et flottantes. Il est évident que, dans tout cela, la forme discoïdale n’a aucune valeur si on ne considère pas les affinités respectives de ces diffé- rents types. Et pourtant, après avoir fait ces très justes réflexions, Hubrecht consacre une vingtaine de pages de son grand Mémoire à traiter les ques- tions de la phylogénie du placenta. Il montre que la viviparilé et la placentation se sont développées de pair avec l’allantoïde et l'amnios, et seulement après que ces deux derniers organes sont apparus chez les tétrapodes vivipares de la période pa- léozoïque ; nous renvoyons, du reste, à l’auteur lui- même pour les détails d’une opinion qui nous paraît encore bien théorique. IV. — LA QUEUE ET LE FILAMENT CAUDAL DE L'EMBRYON HUMAIN. LA QUEUE CHEZ L'HOMME. On sait que le corps de l'embryon humain, comme celui de tous les autres Mammifères, se termine en arrière par une véritable petite queue dans l’axe de laquelle s'engagent les dernières vertèbres ou, du moins, l'extrémité postérieure de la corde dor- sale. Dans l'espèce humaine, cette queue embryon- naire continue à grandir jusqu à la fin du deuxième mois de la vie intra-utérine; puis, des six ou sept vertèbres que l’on trouvait de cette queue, deux s'unissent à trois vertèbres lombaires pour former le sacrum'; les autres s'atrophient et forment le COCCYX. On peut suivre le développement morphologique externe de la queue de l'embryon humain dans les figures que nous donnons d'après Bardeen et Lewis fig. 22 à 27) : la figure 23 représente un embryon long de 42,3, âgé d'environ lrois semaines et ! Ceci se passe seulement chez l'homme et les singes anthropoïdes, le sacrum des autres singes n'étant com- posé que de trois vertèbres seulement. GUSTAVE LOISEL — REVUE possédant 27 myolomes; la figure 25 représente un embryon long de 5 millimètres, âgé d'environ trois semaines et demi et possédant 35 myotomes ; la figure 27 montre un embryon de quatre semaines, long de 72,5. Chez un autre embryon de cet âge, His trouve que l'anus est à la hauteur de l’avant-dernière vertèbre coccygienne, de sorte que la queue ne renfermerait plus que deux vertèbres; mais Keibel est venu montrer ensuite que l'anus est situé en réalité beaucoup plus en avant; pour cet auteur, le niveau de la queue commencerait à la limite du bassin. Il distingue avec Ecker, His et Braun une queue interne et une queue externe, la première contenant seule des vertèbres, la seconde ne ren- fermant que les terminaisons de la corde et du canal médullaire. Waldeyer s'oppose, du reste, à cette distinction, disant que ce qu'on appelle queue interne ne peut être considéré comme une queue ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 703 ment plus accentué de la ceinture du bassin et de sa musculature. Avec la réduction de la queue se fait en méme temps la formation du filament caudal. On appelle ainsi la portion lerminale de la queue, celle qui ne renferme pas de vertèbres el qui est recourbée sur le dos, comme le montre la figure 28. A l’âge où nous le prenons, c'est-à-dire vers la cinquième semaine, ce filament renferme la moelle épinière devenue filiforme et avec un canal terminé par une petite vésicule placée sous la peau, la notochorde qui prolonge la colonne vertébrale, les branches terminales de l'aorte et de la veine cave inférieure (artère et veine caudales), et enfin un réseau de tissu mésenchymateux plus dense du côté ventral que du côté du dos. Vers la sixième semaine, chez un embryon long de 14 millimètres de la courbure du cou à la cour- bure du bassin et de 16 millimètres dans sa plus Fig. 22. g. g. 24. Fig. 25. Fig. 26. Fig. 21. Fig. 22 à 217. — Figures d'embryons, grossis environ 5 fois, pour montrer le développement de la queue chez l'Homme (d’après Bardeen et Lewis). — Fig. 22. Embryon long de 4mm,2 {environ 3 semaines). — Fig. 23. Embryon log de 4n»,3 (environ 3 semaines). — Fig. 24. Embryon long de 4x (environ 23 jours). — Fig. 25. £mbryon long de 5m (environ 3 semaines et demie). — Fig. 26. Zmbryon long de Tun (environ 4 semaines). — Fig. 21. Embryon long de 5"®,5 (environ 4 semaines). véritable, car elle a perdu la caractéristique essen- tielle de la queue, qui est d'être en relation avec la peau. C’est pourquoi Rodenacker, suivant ce der- nier ordre d'idées, vient proposer de remplacer les mots externe et interne par les expressions queue découverte et cachée (cauda aperta et cauda oc- eulta). A l'âge de cinq semaines, alors que l'embryon a une longueur de 11 millimètres, la queue est dans tout son développement; puis, peu de temps après, au stade de 12 millimètres pour Fol, un peu plus tard pour d’autres, on voit la région externe com- mencer à se réduire, par suite de la transformation de la corde en une petite nodosité et de la dispa- rition des autres parties. La région interne de la queue, celle qui contient les vertèbres, se montre encore pendant quelque temps sous la forme de tubérosité coccygienne; puis cette tubérosité dis- parait peu à peu elle-même par suite, d'une part, de la courbure de plus en plus grande du coccyx et du sacrum et, d'autre part, par suite du développe- grande longueur, c'est-à-dire à l'époque même où cet embryon va revêtir les caractères spécifiques de l'espèce humaine et prendre alors le nom de fœtus, la portion vertébrale de la queue s’est agrandie, alors que le filament caudal est devenu plus court, plus recourbé encore en haut et parait s'ètre rétréci; pourtant, il renferme encore les mèmes organes que précédemment. Dans les stades sui- vants, la moelle épinière, puis la notochorde vont régresser de plus en plus jusqu'à finir par dispa- raître complètement; le filament caudal ne va plus renfermer alors qu'un ensemble de faisceaux con- jonctifs qui unissent la terminaison de la colonne vertébrale à la face profonde du derme; il se pro- duira même parfois, en cet endroit, une dépression infundibuliforme que les auteurs appelleront fosse coccygienne (fovea coccygea) (fig. 28): Dans cette figure, qui concerne un embryon long de 147", la portion interne de la queue a commencé elle-même à entrer en régression, car les quatre dernières : vertèbres, qui étaient séparées antérieurement, sont 704 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE déjà très fusionnées entre elles ; de plus, on ne trouve plus, dans le filament caudal, aucune trace de la corde, qui finit ici dans le dernier segment vertébral. Chez un embryon long de 2,5, on ne voit plus que les trois dernières vertèbres caudales qui, par- fois, ne font que commencer ici à se fusionner, ce qui montre que la régression de la queue varie avec les individus. L'artère terminale et l'artère sacrée moyenne inérilent loujours, comme précédem- ment, le nom d’artère caudale, car celle-ci est très grosse el se termine par plusieurs branches dans le mésenchyme du filament caudal. Le canal cen- tral de la moelle épinière finit dans le cône médul- Fig, 28. — Région caudale d'un embryon de 14%, combinée de plusieurs coupes sagittales (grossis. : 91 fois) (d'après Harrison). — An, anus; A0, aorte caudale (A. sacralis media); Ca.{il., filament caudal: Ch., notochorde: Med., cordon médullaire: S.ug., sinus urogenitalis; V.32., lroi- sième vertèbre coccygienne; #6, seplième verlèbre coccy- gienne; V.c.i., portion caudale de la vena cava inferior. (V. sacralis media). laire, qui est creusé en cavité ampullaire très irré- gulière; mais la moelle se continue toujours en bas, par un tractus fibrillaire plein et parsemé de pelils groupes de cellules. Chez un embryon de 4,5, les vertèbres cau- dales, non seulement ne sont pas réduites, mais encore ont fortement grandi. Le filament caudal, qui s'est recourbé en avant, ne se compose plus que de tissu conjonetif; mais il présente loujours à sa pointe un complexus cellulaire dans lequel finis- sait auparavant la moelle, restée maintenant loin en haut, dans le canal vertébral agrandi (fig. 29). Ce filament commence à devenir peu distinet chez un embryon de 9 centimètres ; il disparait complè- tement peu après. En conclusion, Unger et Brugsch s'expriment ainsi : 4. Le filament caudal de l'homme doit son exis- tence à des processus régressifs, Il renferme de la moelle, un reste de mésoderme non segmenté, les branches terminales de l’artère sacrée moyenne; il représente donc bien le rudiment d'une queue. 2. La régression de la queue de l’homme présente à considérer deux stades distincts : a. La formation d'une tubérosité caudale, c'est- à-dire la réduction réelle de la queue de l'embryon, qui se fait en même temps que l'union des derniers segments du corps; D. La formation de la tubérosité du coccyx. 3. La formation du filament caudal se produit pendant le premier stade, par suile du raccourcis- sement des derniers seg- ments. 4. La formation de la tubérosité coccygienne doit être expliquée par la courbure en avant des trois dernières vertèbres. La cause de celle cour- résiderait dans la croissance plus grande de bure la colonne vertébrale cau- dale par rapport à la crois- sance de la peau et de la moelle dorsale. Cettecause amènerait seulement la disparition de la plaque épithéliale subcaudale et non pas celle de la masse Fig. 29. — Coupe sagittale à travers l'extrémité in- férieure du tronc d'un embryon humain long de 4cm 5 (grossis. : 40 fois) (d’après Unger et Brugsch). — 1, moelle épinière; k.R., reste de la moelle caudale; fe. filament caudal. mésodermique postanale. 5, 6. Des restes du fila- ment caudal se trent encore au stade de rencon- la formation coccygienne; ils sont réunis par du tissu conjonctif à la pointé du coceyx. Ce tissu conjonectif provient du reste mésodermique dont nous avons parlé en 1; c'est dans son intérieur qu'on trouve également les branches terminales de l'artère sacrée; sous celte forme, il constitue le ligament caudal des anatomistes. 7. C'est chez des embryons longs de 5,5 que l'artère sacrée recoit les rameaux terminaux du sympathique. La queue de l'homme doit done avoir disparu complètement dans la première moilié du troisième mois de la grossesse’; mais, dans certains Cas d'arrêt de développement régressif, elle peut don- EE RS 1 Au 4° mois, la forme embryonnaire du coccyx est encore celle d'un appendice pointu (Ecker). Et Gerlach a encore trouvé à cet àge des restes de notochorde. GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE ner naissance, d'après l'opinion classique d'Ierman et Tourneux, à des kystes coccygiens, à des tu- meurs, à des touffes de poils; de même, la forma- tion de fistules en cette région serait due, pour ces auteurs, à l'action du filament caudal. Dans d’autres cas anormaux, la queue du fœtus humain, au lieu d'entrer en régression au troisième mois, pourrail, au contraire, persister dans son intégrité et se retrouver, après la naissance, chez le petit enfant, ou même chez l'homme, sous forme d'appendice caudal véritable. La question s'étend alors, car elle touche à l'histoire et à l'an- thropologie. Nous ne ferons donc que rappeler, pour ceux que cela intéresse, Pline, Ctésias et Pau- sanias, qui décrivent une race d'hommes à queue; Marco-Polo, qui parle de « la queue si grosse comme celle des chiens » des habitants de Sumatra; Struys, qui vit un indigène de Formose porteur d'une queue « longue de plus d’un pied, loute couverte de poils roux et fort semblable à celle d'un bœuf »; quel- ques voyageurs modernes dont il faut encore accepter les dires sous bénéfice d'inventaire, à cause des illusions de costume dont ils ont pu avoir été l'objet‘, enfin les médecins, surtout les médecins militaires grecs, qui trouvent sur le coceyx d'un grand nombre de soldats de petites touffes de poils rappelant l'aspect que les sculp- teurs antiques donnaient à la queue de leurs salyres, de leurs faunes et de leurs agipans. Nous lais- serons de côté également tous les mémoires ou ouvrages faits par les savants avant 1875 : ceux d'Ecker (1851-59), de Quatrefages (1868), de Wyman (1869), de Cavestrini (1870), de Darwin (4871) et de Coste, dans lesquels on trouve les premières recherches suivies sur la queue de l'homme. Nous nous contenterons de dire égale- ment que c'est Rosenberg, le premier, qui, en 1875, a étudié anatomiquement l’appendice caudal à la naissance et, tout en renvoyant le lecteur à la bibliographie à peu près complète que nous don- nons plus loin, nous résumerons, avec Bartels, la question anatomique de la queue après la naissance, chez l'homme, de la facon suivante : 1° Il faut distinguer si les queues contiennent des os ou non. S'il y à des os, on pourra expliquer le phénomène par de l'atavisme. Mais il n'y à pas un seul cas probant jusqu'ici de cette anomalie. 20 I] y a des queues avec des os, mais ces os ne sont autre chose que les vertèbres du coceyx qui ont augmenté de volume; quelquefois, il y à une hypertrophie du tissu qui sépare les vertèbres. Dans un de ces cas, on observa même, malgré l'existence d’une queue, une vertèbre de moins (l'os coccyx LR à © 2 © à EE 1 Voir, par exemple, un article de Guillaume Lejean sur la queue des Nyams-Nyams (Le Tour du Monde, 1861, t. I, p. 181). 705 étant formé de trois vertèbres au lieu de quatre On peut admettre, pour l'explication des queues molles, qu'une irritation a dû exister pendant la période embryonnaire. Si la queue rentre alors dans le corps, ce qui arrive souvent, nous avons ce que l’on appelle la protubérance coccygienne, et ce que Bartels nomme queue adhérente parce qu'elle est fixe et ne se laisse pas relever. 3° Il y a des queues embryonnaires qui sont décrites comme appendices cutanés. On peut donc distinguer, en définitive : Les queues courtes en forme de moignon (S/um melschwænze); les queues de cochon, qui sont produites par lhyperplasie du tissu embryon paire ; les protubérances coccygiennes persistantes; les queues contenant des os, sans augmentation du nombre des vertèbres coccygiennes; les queues contenant des os, avec augmentation du nombre des vertèbres coccygiennes (atavisme). L'existence de cette dernière variété n'est pas démontrée. Il faut ajouter à ces divers cas de Bartels le cas des queues renfermant des muscles et pouvant alors se remuersous l'influence de la volonté ou de toutautre excitant. Tel est celui de ce petit Américain ägé de six mois qui fut étudié par Harrison. Ce petit garçon était venu au monde avec une queue longue de 41,5; à l'âge de deux mois, sa queue dépassait 5 centimètres, à sept mois, elle atteignait 7 centi- mètres, et il est certain qu'elle aurait encore grandi si un chirurgien ne l'avait enlevée à celle époque. Elle était couverte de poils très fins et renfermait des muscles à son intérieur; aussi pouvait-elle remuer et se contracter en télescopant sa pointe ; sa couleur et sa forme donnaient un peu alors, en effet, l'aspect d'une petite queue de cochon; ces mouvements de la queue se produisaient surtoul quand l'enfant était irrité, quand il criait ou lous- sait, Une section transversale de cette queue mon- tra que sa masse élait composée de tissu aréolaire contenant beaucoup de graisse; au centre se trou- vaient des vaisseaux sanguins, des nerfs el des faisceaux de muscles striés dont quelques-uns en dégénérescence; il n'y avait plus aucune trace de notochorde ni de moelle épinière. Gustave Loisel, Directeur du Laboratoire d'Embryologie générale à l'Ecole pratique des Hautes Etudes. RE —— ————————————— 4 BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE DE LA QUEUE HUMAINE, — Faite en partie d'après R. G. Harrison, UNGER et Brucscs, en partie d'après nos propres fiches. C. R. Banogen et Warkex Hanuox Lewis : Development of the Limbs Body-Wall and Back in Man. The Amer. Journ. of Anatomy, 4904, t. I, p. 1-35, 27 fig., et J pl. Max Banrecs : Ueber Menschenschwanze. Arch. f. Anthro- pologie, 1880-81, t. XII. In. : Die geschwänzten Menschen. Arch. f. Anthrop., 1884, Tex: 706 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE JuLrax Berry : Baby with a Tail. Memphis Medical Journ., 1894, t. XIV. F. Bzux : Die Schwanzmuskulatur des Menschen. Anat. Heft, t. XIII, p. 449. Braun : Ueber rudimentare Schwanzbildung bei einem erwachsenen Menschen. Arch. f. Anthrop., 4881, t. XIII. Ip. : Entwicklungsvorgänge am Schwanzende bei eini- gen Säugelieren mit Berücksichtigung der Verhältnisse beim Menschen. Archiv für Anatomie u. Physiologie (Anat. Abt.), 1882, p. 207-241 avec 2 pl. TH. Brucsca : Voir Unger et Brugsch. Caxesrrini : Origine del uomo. Sec. ediz. Milano, 1870. Darwix : The descent of man, ete. Vol. I. London, 1871. Drekisox : À child with a Tail. Brooklyn Medical Journ., 1894, t. VIII. Pauz D'Exioy : L'appendice caudal dans les tribus Moi. L'Anthropologie, 1896, t. VII, p, 531. EckerT : Icones physiologicae, AS50-59. Leipzig (pl. 30, fig. 2). In. : Ueber gewisse Ueberbleibsel embryonaler Formen in der Steissbeingegend beim ungeborenen und erwachsenen Menschen. Archiv für Anthropologie, 1819, n° 1. In. : Der Steisshaarwirbel { Vertex coceygeus), die Steiss- beinglabze (Glabella coccygea) und das Steisshbeingrübehen (Foveola coccygea) als wabrscheinliche Ueberbleibsel em- bryonaler Formen in der Steisshbeingegend beim ungebo- renen, neugeborenen und erwachsenen Menschen. Archiv für Anthropologie, t. XII, 18S0. Ib. : Beiträge zur Kenntnis des äusseren Formen jüngster menschlicher Embryonen. Archiv für Anthropologie und Physiologie (Anat. Abt.), 1880. Ib. : Besitzt der menschliche Embryo einen Schwanz? Archiv f. Ana. u. Physiol, (Anat. Abt.), 1880. I. : Replik und Compromis-sätze nebst Schlusserklärung von W. His. Archiv [. Anat. u. Physiol. (Anat. Abt.), 4880. G. Favaro : Il canale caudale nell'uomo. Nota preventiva. Anat. Anz., 1906, t. XXIX, p. 638-639. Fcesca : Ueber das Schwanzende der Wirbelsäule, Phy- * sikalische medizinische Gesellschaft in Würzburg, t. VI, 1878. For : Sur la queue de l'embryon humain. €. R. Acad. des Sciences, Paris, 8 juin 1855, t. C, p. 1469- C. GEGENBAUER : Lehrbuch der Anatomie d Leipzig, 1896, Band II. lo. : Lehrbuch der vergleichenden Anatomie. L. Gercaca : Ein Fall von Schwanzhildung bei einem menschlichen Embryo. Morphol. Jahrb., AS880,t. VI. R. GR. Harrison : On the occurence of tails in man, with a description of the case reported by Dr Watson. The Johns Hopkins Hospital Bulletin, 1901, t. XII, nos 121, 122, 123. C. Hexnic et A. Rauger : Ein neuer Fall von geschwänztem Menschen. Virchow's Archiv, 1886, t. CV. 0. HerrwiG : Urmund und Spina bifida. Archiv für mikr. Anat,t. XXXIX, 1892. 10. : Lehrbuch und Entwicklungsgeschichte des Menschen und der Wirbeltiere, VI. Auflage, Iena, 4898. HERMaNx : Voir Tourneux et Hermann. W. His : Anatomie menschlicher Embryonen. [. Embryo- nen des ersten Monats. Leipzig, 1880. lo. : Ueber den Schwanzteil des menschlichen Embryo. Archiv für Anatomie u. Physiologie (Anat. Abt.), 1880, p. 431-440, 1 pl. Max Hortezs : Archiv für Anthr., 1880, p. 1. Jacossox : Beiträge zur Kenntniss der fütalen Entwicklung der Steissdrüse. Archiv für mik. Anat., t. LI. F. Ketger : Ueber den Schwanz des menschlichen Embryo. Anatomischer Anzeiger, A891, et Archiv für Anatomie u. Physiologie (Anat. Abt.), 4891. In. : Ueber die Entwicklung des Urogenitalapparates beim Menschen, Archiv für Anatomie u. Phys., 1896 (Anat. Abteïil). Kasrxer : Allgemeine Entwicklung der Rumpfmuskulatur, Archiv für Anal. u. Phys., 1892 (Anat. Abt.). J. H. F. KouzskuGGE : Schwanzhildung und Steissdrüse des Menschen und das Gesetz der Rückschlagsvererbung. Natuurkundig Tijdschrift voor Nederlandsch-Indië, Deel LVII, 1898. 412. es Menschen, A. von Kozurker : Grundriss der Entwicklungsgeschichte des Menschen und der hôheren Wirbeltiere. Leipzig, 1884. Le Bret : Notice sur l'existence d'une race d'hommes à queue. Archiv génér. de Médecine, 1855, t. 1 (8 pages). P. Mar : The development of human cœlom. Journal of Morphology, t. XII et XIV. R. Meyer : Ueber einige Abnormitaters am Schwanzende menschlicher Foeten. Virchow's Archiv, 1905, t, CLXXX, p. 334-316, avec 1 pl. Muizer : Medical and surgical Reporter, 1881. Myers Hazsren : A caudal Appendage. Proceedings of the New York Pathologieal Society (4893), 1894. ORxsTEIN : Schwanzhildung beim Menschen. Arch. f. Anthrop., 1881, t. XIII. J. S. Pyarnrrskr : Sur la question de la formation d'une queue chez l'Homme et des queues humaines en général d'après la littérature et des recherches personnelles. Disser- tation inaug., S.-Pétersbourg, 1893 (en russe). PETERSEN : Archiv für Anatomie u. Phys., 1893 (Anat Abt.). C. Pnisaux : Etude d’un embryon humain de 10 milli- mètres. Archiv de Zool. expér., 188$, 2e série, t. VI. QUATREFAGES : Rev. des cours scient., 5e ann., t. XXXIX, Paris, 1868. Er. Rasauo : L'appendice caudal chez l'Homme. Le Natu- raliste, 1889, p. 53 avec fig. Ropexacker : Ueber den Säugethierschwanz mit beson derer Berücksichtigung der caudalen Anhänge des Men- schen. Zaaug. Diss. Freiburg-i -Br., 1898. : E. RosenserG : Ueber die Entwicklung der Wirbelsäule und das centrale carpi des Menschen. Morphologisches Jahrbuch, t. 1, 1816. Os. ScuaErrer : Beitrag zur Ætiologie des Schwanzbil- dungen beim Menschen. Archiv f. Anthropol., 4892, t. XX. SCHEBOLDAYEEF : Homme à queue. Zemsk. Vrach, 1893, t. VI (en russe). STEINgACKk : Die Zahl der Kaudalwirbel beim Menschen. Inaug. Diss., Berlin, 1889. À Grar vox SPEE : Archiv für Anatomie u. Physiologie, 1889 (Anat. Abt.). SrrepA : Stenogr. Bericht über die Versammlung der deutschen anthropol. Gesellschaft in Berlin, August 1880. J. SzawLowski : Ueber einige seltene Variationen an der Wirbelsäule beim Menschen. Anat. Anz., 1902, t. XX, p. 305- 320, avec 6 fig. Tourxeux et Heruanx : Sur la persistance de vestiges mé dullaires coccygiens pendant toute la période fœtale chez l'Homme et sur le rôle de ces vestiges dans la production des tumeurs sacrococcygiennes congénitales. Journ. de l'A- natomie et de la Physiologie, 1887, t. XXIII, 498, 529, 2 pl. Waznever : Sitzungsbericht der kgl. Preuss. Akad. der Wiss., 34, 1896. W. T. Warsox : Exhibition of a threemonths’ Infant with a caudal appendage. Proc. J. H. H. Med. Soc., Johns Hop- kins Hospital Bulletin, 1900, t. XI. E. Uncer et Ta. BruGscu : Zur Kenntniss der fovæa und fistula sacro-coccygea s. caudalis und der Entwicklung des Ligamentum caudale beim Menschen. Arch. f.unikr. Anat., 4903, t. LXI, p. 151-219, 2 pl. et. 2 fig. Vircaow : Virchow's Archiv, 1880, t. LXXIX. In. : Schwanzbildung beim Menschen. Deutsche med. Wo- chenschr., Jahrg. 1884. Vixocrapow : Sur les queues humaines. Vrach, 1894, t. XV (en russe). Wyman : Proced. Americ. Acad. of Arts and Sciences, Vol. IV, Boston, Cambridge, 1860. Zarorowskr : Les Hommes à queue. Derniers travaux. Etat de la question. Congrès de l'Ass. franc. pour l'avance- ment des Sc., 1882, p. 615-619. In. : Les hommes à queue. Bullet. Soc. d'Anthrop.,7T janv. 1897, p. 28-32. Orro ZreTzscaManx : Ueber Rückbildungsvorgänge am Schwanzedes Säugethierembryo mit besonderer Berücksich- tigung der Verhältnisse am Medullarrobre. Arch. f. Anat. u. Physiol. (Anat. Abth.), 4902, p. 225-272, avec 1 pl. (Voir dans ce mémoire une étude de la régression de la queue chez les Mammifères.) BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 707 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Lechalas (Georges). — Etude sur l'Espace et le Temps. 2° édition. — 1 vol. in-8° de la Bibliothèque de Philosophie contemporaine. (Prix :5 fr.) F, Alcan, éditeur. Paris, 1910. C'est la deuxième édition de l'ouvrage de même titre paru en 1896, édition passablement augmentée, comme l'indique à première vue la transformation du format in-12 en in-8°. Les changements consistent d’abord en . l'addition de deux chapitres (sur les Géométries non métriques et sur la Géométrie métrique), et plus généralement, tout au long du livre, en un grand nombre de remarques provoquées par les discussions et publications récentes. Le plan général et les thèses restent les mêmes. La première partie (1-129) est consacrée aux problèmes qui touchent à la « Géométrie générale ». On sait quelle attitude a prise M. Lechalas en ce qui concerne les caractères euclidiens ou non de notre espace. Logiquement, rien ne nous autorise à choisir, pour en aftirmer la réalité, l'un des trois espaces qui correspondent à la géométrie de Lobatchewsky, à celle de Riemann, ou à celle d'Euclide. Ils ont également trois dimensions et font concevoir un espace à quatre dimensions où ils seraient tous trois inclus. C’est leur ensemble quai est pour notre auteur, comme il l'était pour Calinon, l’objet naturel de la Géométrie générale. L'expérience seule peut nous montrer que l’espace où nous vivons, etoù se forment les images qui répondent aux exigences de notre sensibilité, est l’espace eucli- dien. Mais notre conception de la Géométrie générale et la possibilité rationnelle de la construire ont cette très grave signification de nous instruire sur le caractère contingent de notre vieille géométrie. Et le rationalisme de M. Lechalas se trouve renforcé sur ce point de toute l’aide qu'il tire des travaux des logis- ticiens contemporains. Dans les autres études, — augmentées seulement d'emprunts à quelques ouvrages nouveaux, comme ceux de Duhem, de Poincaré, de Georges Cantor, ou de réflexions relatives à des discussions récentes, — nous retrouvons les autres thèses chères à M. Lechalas : possibilité, dans l'étude des lois de l'Univers, de fixer un choix naturel de repères, système d'axes coperniciens pour les mouvements, rotation terrestre pour la mesure du temps ; — impossibilité de distinguer deux mondes semblables, par rapport au temps et à l'espace; que la seule Mécanique peut servir de base à la notion d'un temps irréversible; — application du principe du nombre à la solution des antinomies mathématiques ; — caractère occasionnel des causes et conception du temps comme une forme de notre sensibilité qui revêt d'une apparence subjective la relation de cause à effet ; etc. Cette énumération des quelques thèses principales suffit à faire deviner quel est l'intérêt du livre. Sous une charmante modestie, et sous la courtoisie la plus aimable à l'égard de ses contradicteurs, M. Lechalas montre les plus fermes convictions, qu'il essaie, d’ailleurs, de justifier par une critique minutieuse et serrée. Géomètre et savant, au courant des travaux les -plus récents, il reste au fond métaphysicien, apparenté aux logisticiens contemporains, mais en même temps disciple de Renouvier, et plus encore de Malebranche. Aucune de ses études ne laisse indifférent. Pour ma part, sije ne peux me mettre à l'unisson de sa pensée en ce qui touche les conséquences philosophiques de ET INDEX la Géométrie générale, comme en ce qui concerne les problèmes de l’intini, je me sens bien près, sur quelques autres points (notamment sur la question des repères pour le mouvement et pour le temps), de son rationa- lisme qui s'oppose avec tant de mesure à un relativisme outré, où à un pragmatisme vraiment trop simpliste. G. MILHAUD, Professeur à l'Université de Paris. 2° Sciences physiques Turpain (Albert), Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Poitiers. — Notions fondamentales de Télégraphie. — 1 vol. in-8° de 172 pages, avec 122 figures. (Prix: 5 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. L'auteur s'est proposé de décrire dans ce livre les appareils actuellement employés dans la télégraphie électrique terrestre. Renonçant à l'étude rétrospective de dispositifs précurseurs qui ne peuvent plus satisfaire aux besoins modernes et n’ont plus qu'un intérêt historique, il laisse de côté toutes les parties auxiliaires telles que lignes, càbles, appareils protecteurs, etc., pour ne retenir que les appareils de transmission et de récep- tion proprement dits. La rapidité de travail sera la caractéristique qui servira à les classer par ordre, puisqu'ils doivent maintenant répondre à des exigences sans cesse croissantes, dues au développement écono- mique de notre société. Le premier appareil en liste sera donc le Bréguet à cadran, qui ne subsiste plus guère que dans quelques gares de chemins de fer pour assurer la transmission des dépêches de service. {1 ne peut expédier que 45 télégrammes à l'heure environ, et a le grand inconvénient de ne point laisser de traces des dépê- ches. Vient ensuite l'étude du Morse, qui introduit le langage en signes convenus. Cet appareil, très répandu encore, — notamment pour la télégraphie militaire qui fait l'objet d'un chapitre spécial, — restera long- temps le système simple et pratique, donnant des télé- grammes imprimés et à l'usage des trafics peu intenses, car il ne permet guère que l'échange de 25 dépêches environ à l'heure. Mais la vitesse de transmission n'est pas seulement fonction de la sensibilité du mécanisme des appareils; elle dépend de la propagation du courant électrique temporaire dans la ligne; aussi l’auteur consacre-t-1l un chapitre à l'étude de cette propagation, en faisant intervenir la résistance, la capacité et la self-induc- tion, mais par une méthode absolument élémentaire. Cette étude démontre qu'il faut subordonner les émis- sions de courant à certaines précautions. Nous voici sur la voie de la télégraphie rapide : nous abordons le Wheatstone automatique. Le soin de transmettre la dépêche n'est plus confié à un employé, mais à un mécanisme opérant bien plus vite, à l’aide de bandes de papier perforées à l'avance suivant un code spécial. De plus, l'influence retardatrice de la ligne est corrigée par le courant dit de compensation, qui réduit les émissions successives à leur période utile. On arrive ainsi à 420 télégrammes à l'heure. Le rendement du système Hugues, minutieusement décrit dans la suite, n’atteint pas ce résultat, car cet appareil ne donne que 70 dépèches environ à l'heure ; mais, mettant à profit le synchronisme de deux mou- vements d'horlogerie, il donne des télégrammes direc- tement imprimés par le récepteur en caractères connus. 708 BIBLIOGRAPHIE — Al ALYSES ET INDEX Tous ces systèmes atteignent la rapidité grâce au per- fectionnement de la transmission par un seul appareil ; mais il est une autre Solution qui consiste à faire passer par uue seule ligne les signaux de plusieurs appareils, en utilisant avec l’un les espaces de temps perdus par les autres, d’où la télégraphie dite multiple : le Duplex, d'abord, qui permet l'expédition simultanée de deux dépèches en sens inverse, enfin le Baudot. Cet appareil est, à proprement parler, un répartiteur qui distribue l'usage d'une ligne unique entre plusieurs transmetteurs opérant successivement et à intervalles très petits. Cette magistrale application du synchro- nisme est longuement étudiée dans tous les détails de construction et la pratique du fonctionnement. L'’ap- pareil peut transmettre jusqu'à 10.500 mots à l'heure avec une installation sextuple. Tous les systèmes décrits jusqu'ici ne sont au fond que des dérivations du Morse, et n’emploient en l'espèce que des émissions successives de courant judicieuse- ment triées et réparties. Il appartient aux multi-com- mutateurs de réaliser la véritable propagation simul- tanée. Le principe découle de la superposition, sans altération, des petites oscillations électriques et de l'analyse de ces oscillations par les accords acous- tiques. Prenons, par exemple, un diapason donnant le la et entretenu électriquement ; il crée un courant électrique vibré de période correspondant à cette note. Transmettons des signaux Morse avec ce cou- rant. Opérons de même avec d’autres diapasons don- nant d’autres notes, so/, si, ete., et faisons passer le tout simultanément dans la même ligne; les courants vibrés vont se propager sans altération. A l'arrivée, faisons passer le courant Lotal dans une série d’électro- aimants placés devant des plaques accordées, et sus- ceptibles de vibrer, l’une au /a, l’autre au so/, une autre au si, etc.; la plaque /a vibrera aux signaux émis par le diapason /a, et à ceux-là seulement, de même la plaque so/, etc. On entrevoit tout de suite le procédé de sélection et le principe découvert par M. Mercadier, le célèbre ingénieur des télégraphes, qui, pour complé- ter sa brillaute invention, a imaginé encore son relais monotéléphonique : ce relais permet, à l’aide des cou- rants vibrés analysés à l’arrivée, de mettre en marche des récepteurs ordinaires de Hugues, etc. Bien plus, tout en transmettant ces courants vibrés, on peut transmettre des émissions de courant continu quel- conque ; de sorte qu'avec un seul fil on a pu obtenir le résultat paradoxal suivant : télégraphier à l’aide de six appareils Hugues et un Baudot sextuple. Tellss sont les énormes proportions dans lesquelles on est parvenu actuellement à accroître le rendement d'une ligne. L'avenir laisse entrevoir d'autres mer- veilles : l’auteur passe en revue les derniers systèmes imaginés, tels le Pollak Virag, qui transmet 50.000 mots à l'heure en utilisant au départ des bandes perfo- rées d'avance, et donne au récepteur des dépèches en caractères connus. Enfin la téléphotographie est aussi une télégraphie ; aussi l’auteur étudie-t-il en der- nier lieu les ingénieuses applications qu'a faites des curieuses propriétés de résistance du sélénium le pro- fesseur Korn dans son téléphotographe, puis l’utilisa- tion du synchronisme dans le télautographe de M. Car- bonnelle, le teléstéréographe de M. Belin, et les phototélégraphes de MM. Berjonneau, Senleck et Tival. Ces études, enrichies de figures remarquables de netteté, sont claires et ultra-complètes : dépourvues de toute préoccupation théorique, elles sont absolument vécues; la description du Baudot, par exemple, est parfaite, et la tâche était difficile. Mais l’auteur a appartenu jadis au corps des Postes et Télégraphes : il a pu pénétrer tous les mystères des mécanismes; les critiques qu'il formule sont celles d'un praticien, et il a su expliquer à tous, dans un langage simple et précis, le fonctionnement d'appareils dont la vue seule déroute le profane. MARCEL VALLÉE, Ancien Élève de l'École Polytechnique, Ingénieur à la Société Industrielle des Téléphones. Mauraiïin (Ch.), Professeur à la Faculté des Scrences de Caen. — Les Etats physiques de la Matière. — 1 volume de la « Nouvelle collection scientifique », publiée sous la direction de M. E. Borel. (Prix : 3 [r. 50.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1910. Voici un petit volume dont on peut recommander la lecture aux personnes désireuses de se mettre au cou- rant des conceptions modernes sur les états physiques de la matière, de celles, notamment, qui caractérisent l'état solide et nous apparaissent aujourd'hui comme beaucoup plus complexes qu'on ne le supposait il y a une trentaine d'années. Le sujet est traité d'une facon claire et précise, avec une excellente documentation bibliographique tenant compte de tous les travaux récents les plus importants. L'énoncé des principaux chapitres suffira, au sur- plus, pour donner une idée du plan suivi par l'auteur : Ltat gazeux et ions, état liquide, cristaux et état cris- tallin, structure générale des corps solides, change- ments d'état des solides, anisotropie produite par des actions extérieures; cristaux mous, cristaux liquides, liquides cristallins; propriétés des couches superfi- cielles; mélanges homogènes, mélanges hétérogènes ; état colloïdal. Px. A. Guyr, Professeur de Chimie à l'Université de Genève. Euler (H.), Professeur de Chimie à l'Université de Stockholm. — Grundlagen und Ergebnisse der Pflanzenchemie (FONDEMENTS ET RÉSULTATS DE LA CHi- MIE VÉGÉTALE). Il. Die allgemeinen Gesetze des Pflanzenlebens (Les Lois GÉNÉRALES DE LA VIE DES PLaxres). III. Die chemischen Vorgæng'e im Pflan- zenkürper (LES PHÉNOMÈNES CHIMIQUES DANS LE CORPS DEs PLANTES). —- 1 vo/. in-8° de 300 pages.(Prix:8 fr. T5.) Vieweqg und Sobhn, éditeurs. Brunswick, 4910. Nous avons déjà rendu compte dans cette Revue de la première partie du travail de M. Euler, et fait res- sortir à la fois l'intérêt de ce travail et le soin scrupu- leux avec lequel il a été exécuté. La lecture de la deuxième et de la troisième partie de l'ouvrage, réunies en un second fascicule et consacrées respectivement aux lois générales qui régissent la vie de la plante et au chimisme végétal, est venue confirmer l'impression que nous avait produite le fascicule précédent, en ce qui concerne l'utilité et la valeur de cette publication. Les phénomènes osmotiques, si importants au point de vue des mécanismes de la vie, sont étudiés dans leurs rapports avec le fonctionnement de l'organisme végétal. Ensuite sont envisagés les phénomènes de dissociation, de dissociation électrolytique, de solubi- lité, la question des colloïdes, les actions catalytiques si puissantes et d'un caractère d'actualité si particu- lier. Mais le chapitre le plus important, celui qui, d’ail- leurs, méritait, on peut le dire, le plus de développe- ment, est le chapitre consacré aux enzymes, à ces agents qui opèrent, par des mécanismes si variés, les métamorphoses à la fois les plus délicates et les plus profondes. Et c’est par une étude relative à l'influence de la lumière sur les réactions chimiques, à l’isomérie et à l'activité optique, que l’auteur termine la seconde partie de son traité. La troisième partie, consacrée aux multiples phéno- mènes chimiques qui se produisent au sein de l’orga- nisme végétal, est certainement la plus intéressante et la plus instructive du travail de M. Euler. L'auteur vétudie toutes les questions, si attachantes, de l’assimi- lation des éléments, de la formation, de l’évolution et de la signification physiologique des principes immé- diats des plantes, en faisant ressortir les relations qui existent entre les métamorphoses chimiques s'’opérant au sein de la cellule et les manifestations essentielles de la vie végétale. En lisant attentivement cet ouvrage. on pourra, avec toute la clarté que comporte l’état actuel de nos con- naissances, se faire une idée d'ensemble de ces méca- nismes merveilleux qui concourent à l’accomplisse- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ment de cette chose encore mystérieuse qu'est la vie. : car ce nom — lorsque encore elle en à un — Nous ne voulons pas dire par là que le livre de M. Euler ne laisse subsister aucune lacune. Quel est l'ouvrage qui n’en présente point? Certains sujets spé- ciaux, celui qui à trait aux composés odorants, par exemple, ne sont pas complètement au point. Néan- moins, on peut conclure que, envisagé dans ses grandes lignes, l'auteur nous à donné un bon livre. EUGÈNE CHARABOT, Docteur ès Sciences, Membre du Conseil supérieur de l'Enseignement technique Esceard (Jean). — La Fabrication électrochimique de l'Acide nitrique et des Composés nitrés à l’aide des éléments de l'air. Deuxième édition. — 1 vol. in-8° de 115 pages, avec 52 fiqures. Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Cette nouvelle industrie a une portée considérable; elle intéresse des problèmes économiques et sociaux de la plus haute importance. En effet, la culture intensive des céréales exige des quantités toujours plus grandes d'engrais azotés, que les gisements naturels des nitrates ne pourront bientôt plus fournir. La situation mena- cait de devenir très critique; on avait bien cherché à capter, à l'état de combinaisons solubles, l'azote qui se trouve en quantité inépuisable au-dessus de nos têtes; mais les résultats obtenus étaient maigres et pas pratiques. Aujourd'hui, le problème est résolu et l’in- dustrie obtient artificiellement l'acide nitrique et les nitrates avec des rendements très satisfaisants. L'excel- lent exposé de M. Jean Escard donuera une idée très netle de cette nouvelle industrie et de la variété de ses méthodes (arc, étincelle, effluve, électrolyse). Nous aurions aimé trouver, dans la description des appareils, l’élégant four de M. Ph. A. Guye, où plusieurs ares sont montés en tension entre des électrodes à cornes, ce qui donne au système une remarquable stabilité, chaque arc servant d’auto-régulateur aux voisins. L'agriculture ne sera pas seule à profiter de cette synthèse nouvelle; l'industrie chimique va pouvoir uliliser économiquement l'acide nitrique à des réac- tions qui eussent été trop coûteuses jusqu'ici. Les procédés chimiques d'absorption de l'azote de l'air — sans le secours de l'électricité — terminent la plaquette de M. Escard : absorption de l'azote par le carbure de calcium (cyanamide); fixation de l'azote par le magnésium ou l'aluminium (azoture de magné- sium ou d'aluminium) ; nitrières à haut rendement. On voit par cet exposé que les composés de l’azote ne sont plus près de disparaître, que l’industrie, au contraire, nous prépare une production intensive de ces produits. A. HozLarn, Docteur ès Sciences, Chef du Laboratoire central des Usines de la Cie francaise des Métaux. 3° Sciences naturelles De Wildeman (E.), Docteur ès Sciences, Conserva- teur au Jardin Botanique de Bruxelles. — Sciences biologiques et Colonisation. — 1 roch. in-8° de 40 pages. Castaigne, éditeur. Bruxelles, 4910. Personne ne saurait contester et, en fait, tout le monde admet la nécessité de connaître et de mettre en valeur, par des études méthodiques, les ressources de nos colonies; mais il est encore quelques esprits qui pensent que ce résultat peut être atteint sans l'in- tervention de la science pure. Par la seule pratique, disent ces opposants, on peut réussir à assurer le développement agricole et l'exploitation des ressources naturelles d’un pays; et il est parfaitement oiseux, notamment, d’affubler toutes les plantes économiques, spontanées ou cultivées, d’un nom latin « qui n’a d'intérêt que pour les spécialistes ». Dans la brochure que nous signalons, M. de Wildeman démontre la faus- seté et le danger d’une telle théorie. Non, une espèce n'est pas suffisamment précisée par son nom indigène, 109 s'ap- plique presque toujours, en même temps, à d'autres plantes qui, à côté d'un caractère commun, peuvent avoir des propriétés secondaires plus où moins diffé- rentes; puis ces dénominations, pour une même plante, varient dans une même contrée, d'une localité à l’au- tre. Si le même nom s'applique à plusieurs espèces, il peut en résulter des mécomptes dans l'utilisation des produits, dont les caractères paraîtront inconstants; si le nom d’une espèce unique n’est pas toujours le même, il faudra recommencer sur le produit autant d'études et d'essais qu'il y aura de dénominations, puisqu'on ignorera qu'il s'agit d'une matière première déjà connue. Il est beaucoup de caféiers, 1es uns inté- ressan(s, et les autres, au contraire, sans intérêt aucun; et tous ceux qui sont utilisables ne donnent pas le même café et n'ont pas les mêmes exigences climati- ques et culturales; il faut bien classer toutes ces espèces, ce qui n’est possible que par une étude bota- nique qu'il faut bien accompagner d'un nom distinctif. Il est aussi divers vanilliers. Quant aux « lianes à caoutchouc », point n'est besoin d’avoir une connais- sance approfondie de la question pour ne pas ignorer qu'elles sont aussi innombrables que diverses, ne se ressemblant ni par les qualités du caoutchouc qu'elles fournissent, ni par les conditions de végétation, ni par le mode d'exploitation qui convient le mieux à chacune. Il est de toute nécessité de les cataloguer. Ce n’est que lorsque ce premier travail préalable est fait pour une contrée qu'il devient possible d'établir une répartition de ces plantes dont on connaît alors le nombre exact, enfin de faire leur histoire. Il est vraiment triste qu'il faille encore aujourd’hui démontrer à quelques-uns — qui, en réalité, d’ail- leurs, ne sont aussi dédaigneux de ces questions que parce qu'ils en sont ignorants — des vérités aussi évi- dentes. M. de Wildeman a su, en tout cas, dans sa bro- chure, grouper tous les arguments et exposer claire- ment toutes les raisons susceptibles de réagir contre une aussi fâcheuse mentalité. Il rappelle ensuite tout ce qui, pour y remédier, à été tenté depuis quelques années (écoles coloniales, instituts et musées colo- niaux) en France et à l'Étranger. En voyant ce qui à été fait, on se rend compte de ce qu'il reste encore à faire dans cet ordre d'idées. Ce petit livre est ainsi à la fois un plaidoyer et un enseignement; il sera lu avec plaisir par tous ceux qui s'intéressent à l'avenir de la colonisation. , HENRI JUMELLE, Professeur à la Faculté des Sciences de Marseille. Steensby (D' Phil. H.-P.). — Meddelelser om Dan- marks Antropologi (Contributions à l’Anthropo- logie du Danemark). — Publication du Comité anthropologique, t. 1, 3° partie. — À fasc., p. 215- 375, in-8°. Æ.-C. Gad, éditeur. Copenhague, 1910. Nous avons donné dans cette Revue mème! le résumé des travaux contenus dans les deux premiers volumes de l'intéressante publication dont nous venons de transcrire le titre. Dans le troisième volume on trouve d'abord la continuation du travail de M. C. Burrau : Korrelationen mellem legemshojden, etc. (Corréla- tions entre la taille et les dimensions de la tête.) Prenant pour base de ses calculs les mensurations anthropométriques du Dr Soren Hansen sur 2.000 Danois et 2.000 Danoises, M. Burrau arrive à cette conclu- sion qu'il existe une relation assez constante, la même dans les deux sexes, entre la taille et les dimensions de la tête; mais que, par contre, il n’y à aucun rapport entre la taille et la forme de la tête et notamment l'indice céphalique, qui évalue en chiffres et approxima- tivement cette forme. Ce travail bat donc en brèche la tendance actuelle de quelques anthropologistes alle- mands à considérer l'indice céphalique comme dépen- dant de Ja taille. Pour ces anthropologistes, les doli- SE 1 Hevue gén. des Se., t. XX, 15 avril 1909, p. 331. 710 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX chocéphales devraient être fatalement grands, et les brachycéphales petits. D'ailleurs, les calculs et les con- clusions de M. Burrau concordent pleinement avec les faits que nous avons constatés nous-même, depuis près de vingt ans : à savoir qu'il existe des populations entières unissant la brachycéphalie à la grande taille ou la dolichocéphalie à la petite taille. Ainsi dans la moitié ouest de la presqu'ile balkanique, dans le Tyrol, en Alsace-Lorraine, prédomine la race brachy- céphale et de grande taille que nous appelons race adriatiqué, comme il existe aussi une autre race, petite et dolichocéphale, dénommée par nous race 1béro- insulaire, et qui est répandue en Espagne, au Portugal, dans le sud-ouest de la France, en Italie méridionale et dans les trois grandes îles de la Méditerranée occi- dentale. Le second travail qui clôt le volume en question est celui du D' Soren Hansen : Om haarets og ojnenes farve, etc. (Sur la couleur des cheveux et des yeux en Danemark.) M. Soren Hansen prend pour base de ses calculs les listes des observations faites par les institu- teurs et les institutrices en 1893, d'après la méthode de Beddoe, améliorée par P. Topinard, sur 300.000 enfants de deux sexes, de six à quatorze ans, dans toutel’étendue du royaume. En faisant des catégories d’après le lieu de naissance et les âges, le savant danois arrive aux conclusions qui suivent : D'une façon générale, les Danois sont du type dit «clair» ou «blond ». La pigmen- tation augmente avec l’âge : ainsi, plus de la moitié des enfants de six ans ont des cheveux blonds, tandis que parmi les enfants de quatorze ans un tiers seulement est dans le même cas. Pour les yeux clairs, mème différence, quoique un peu atténuée : un tiers ont les yeux clairs à six ans, six dixièmes à quatorze ans. Le nombre de cheveux roux est insignifiant et indépen- dant de l’âge. En combinant la coloration des yeux avec celle des cheveux, on trouve qu'un tiers des enfants environ ont les cheveux blonds en même temps que les yeux clairs, qu'un sixième ont des cheveux et des yeux dits « moyens » et plus d'un cinquième des cheveux «moyens » et des yeux clairs. Il est à noter que les enfants aux cheveux foncés ont les yeux de toutes les couleurs, tandis que les enfants aux cheveux blonds ont rarement des yeux moyens et très rarement des yeux noirs. En ce qui concerne la répartition géographique, la pigmentation claire suit la même règle que la taille des adultes (dont on a un aperçu dans le travail de Mackeprang publié dans le premier volume du recueil que nous analysons). La population scolaire du sud du Jutland est plus claire, tandis que celle du sud et de l’ouest du Seeland est plus foncée que dans le reste du Danemark. Mais les différences ne sont pas très sen- sibles de district à district, ce qui dénote une grande homogénéité de la population danoise, d’ailleurs dé- montrée déjà par les études sur la taille et sur l'indice céphalique. En effet, si l’on désigne respectivement par 1, 2,3 et 4 les pigmentations claire, moyenne, foncée et noire, on aura comme pigmentation moyenne en Danemark les chiffres de 1,72 pour les garcons et de 1,77 pour les filles. On remarquera que les filles sont en général légèrement plus pigmentées que les garcons; cela tient probablement en grande partie à leur développement plus précoce. J. DENtRER, Bibliothécaire du Muséum d'Histoire naturelle de Paris. 4° Sciences médicales Imbert (L.), Professeur de Clinique chirurgicale à l'Ecole de Médecine de Marseille, et Fiolle (J.), Chef de la Clinique chirurgicale. — Les Sutures vasculaires. Monographie clinique sur les questions nouvelles en Médecine, en Chirurgie, en Biologie. (Prix: 1 fr. 25.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1M0. La chirurgie des artères n’a été longtemps repré- sentée que par la ligature en cas de plaie. Cette chi- rurgie à fait un considérable progrès le jour où l’on a osé pratiquer l’extirpation des sacs anévrismaux; de nos jours, avec les progrès de l’asepsie, elle s’est lancée dans plusieurs directions. D'une part, elle a cherché à devenir conservatrice; en cas de plaie de grosse artère, on a essayé de substituer à la ligature la suture de la plaie artérielle; en cas d’anévrisme, on a tenté de reconstituer le vaisseau après résection du sac. D'autre part, les chirurgiens modernes ont tenté de s'attaquer à des lésions qui, jusqu'alors, avaient échappé à leur action. On a essayé d'extraire le caillot dans les cas de thrombose ou d'embolie, de pratiquer des anastomoses artério-veineuses dans les cas de gangrène sénile. Enfin, on a tenté de pratiquer des transplantations d'organes. Dans leur intéressante monographie, MM. Imbert et Fiolle exposent l’état actuel de la question. Ils étu- dient d'abord l'anatomie et la physiologie- patholo- gique des vaisseaux à suturer; ils montrent que la condition première de toute suture vasculaire, c’est l’asepsie absolue, la plus petite faute d’asepsie expo- sant à la formation d'un caillot, et l'emploi des anti- septiques déterminant, à coup sûr, la coagulation. Les auteurs passent ensuite aux indications des sutures vasculaires, chapitre encore mal délimité, mais qui s'enrichit chaque jour de nouveaux faits. Des pages excellentes sont consacrées à la technique proprement dite de la suture vasculaire, technique délicate, certes, mais qui ne présente pas de difficultés sérieuses pour des chirurgiens exercés. Cette tech- nique paraît aujourd'hui bien réglée, au moins dans les lignes principales ; la grande majorité des opéra- teurs a adopté les sutures directes. La monographie de MM. Imbert et Fiolle, très clai- rement écrite et illustrée, intéressera non seulement les chirurgiens, mais également les physiologistes qui trouvent dans les anastomoses vasculaires un champ immense d'expérimentation et de recherches de tout ordre. D' P. DEsFosses. Debove (G.-M.), Doyen honoraire de la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l Académie de Méde- cine; Pouchet (G.), Professeur de Pharmacologie à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de T Académie de Médecine, et Sallard (D° A.), ancien Interne des Hôpitaux de Paris. — Aide-Mémoire de Thérapeutique. 2 édition. — 1 vol. gr. in-8° de 911 pages. (Prix: 18 francs.) Masson et C*, éditeurs. Paris, 190. Le succès si grand et si légitime qu'a obtenu la ire édition de cet important ouvrage a nécessité une nouvelle édition. Il ne s’agit pas d’une simple réim- pression : nombre d'articles sont nouveaux ou ont été remaniés; l'ensemble a été rendu conforme au Codex de 1908. C'est dire que cette seconde édition, vade- mecum indispensable au médecin praticien, sera ac- cueillie avec non moins de faveur que la précédente. 5° Sciences diverses Marquez (D: Miguel), Directeur général de l'Ensei- gnement primaire et de l'Institut scientifique et lit- téraire de l'Etat de Chihuahua. — I. Album de l'Enseignement primaire; II. L'Institut scienti- fique et littéraire de l'Etat de Chihuahua. Chihua- bua, 1910. En commémoration de la visite du Président Porfirio Diaz à l'Etat de Chihuahua, M. le D' Miguel Marquez, à qui l’enseignement mexicain est redevable de tant de progrès, a publié ces deux intéressantes monographies. Elles permettent de suivre, par l'exemple de ce qui a été fait dans l’un des Etats du Mexique, l'importance qu'ont prise dans la jeune république américaine les questions d'enseignement et d'éducation, importance qui fait le plus grand honneur au Mexique et à ses hommes d'Etat. a] ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 18 Juillet 1910. M. Ray Lankester est élu Associé étranger en rem- placement de M. Robert Koch, décédé. 49 SGIENGES MATHEMATIQUES. — M. Jules Drach pré- sente ses recherches sur le problème logique de l'inté- gration des équations différentielles. — M.S$. Bernstein généralise les résultats qu'il à précédemment obtenus sur les équalious différentielles ordinaires de la théorie classique du calcul des variations. — M. $. Janiszewski démontre quelques théorèmes nouveaux sur les en- sembles continus dans l'espace à 7 dimensions. — M. L. Zoretti, à propos de la communication précé- dente, précise les résultats analogues auxquels il est arrivé dans ses recherches sur le continu.—M.J.Chazy signale une équation différentielle du troisième ordre qui a ses points critiques fixes. — M. René Garnier résente ses recherches sur une classe d'équations dif- férentielles dont les intégrales générales ont leurs points critiques fixes. — M. W. Jarkowski démontre quelques théorèmes sur les sustentateurs : Le minimum du poids actif d'un hélicoptère sera atteint quand le poids des hélices et le poids du moteur correspondant seront dans le rapport de 3 à 5. Le poids actif d'un hélicoptère augmente plus rapidement que la capacité ascensionnelle et, pour une certaine valeur de ce poids, l'hélicoptère ne pourra plus se soulever. — M. A. Ta- nakadaté est parvenu à photographier le courant d'air produit par le mouvement d'une hélice. On voit nette- ment l'aspiration vers l'axe de l'hélice qui donne lieu aux tourbillons. — M. Schuthof établit deux proposi- tions nouvelles concernant les inégalités de la longi- tude de la Lune, quisimplifient grandement la construc- tion des tables. — M. E. Esclangon, étudiant le pas- sage de la Terre dans la queue de la comète de Halley, conclut que la Terre a pu toucher seulement la limite inférieure de la queue, et que la région de la queue qui est passée au voisinage de la Terre a cessé d’être visible au moment du passage. 29 ScrENCES PHYSIQUES. — MM. E. Mathias et H. K. Onnes montrent que la déformation de la surface de l'oxygène, quand la température critique s'abaisse, laisse intacte la forme rectiligne du diamètre critique de ce gaz. — MM. A. Perot et J. Bosler montrent com- ment on peut théoriquement déduire la vitesse des centres lumineux de l'arc au mercure dans le vide de celle. des porteurs électriques, en admettant que l'émission des raies spectrales par les porteurs élec- triques est extrêmement faible, sinon nulle, et que cette émission est due à des atomes mercuriels ionisés et mis en vibration par le choc des porteurs élec- triques. — M. G. A. Hemsalech a constaté que les durées relatives des raies d'arc du calcium sont à peu près proportionnelles aux intensités; quant aux raies d’étincelles, leurs durées accusent un amortissement plus rapide des vibrations atomiques auxquelles elles sont dues. — MM. H. Buisson et Ch. Fabry ont reconnu que, pour maintenir la stabilité de l'arc entre tiges de fer sous pression réduite, il faut recouvrir l’électrode négative d’une couche d'oxyde. Quand la pression devient très faible, la différence de potentiel diminue très rapidement. — M. Rouch communique ses obser- vations d'électricité atmosphérique faites à l’île Peter- mann pendant le séjour de l’Expédition Charcot. Le champ présente une variation annuelle très nette, avec un minimum bien accentué en juin et un maximum probable en février. La variation annuelle de la con- ductibilité spécifique de J'air est inverse de celle du champ. — M. W. Duane décrit une méthode d'enre- gistrement photographique des particules x projetées à travers un petit trou de dimensions connues. M. M. Guichard a déterminé l'absorption de l'iode par divers corps solides et noté une grande variabilité du pouvoir absorbant suivant les circonstances de la pré- paration du solide considéré. Celle-ci proviendrait du plus ou moins grand vide entre les particules. — M. Barre à constaté que le sulfate de thorium, en solution dans l’eau, présente une résistance spécifique et un point de congélation d'accord avec les lois de Bouty et de Raoult. La mesure des conductibilités et des points de congélation des solutions renfermant 1 °/, de SO'K® conduit à admettre l'existence d'un sel double stable en solution. — M. F. Bodroux, en faisant agir, en présence d’éther anhydre, les éthers-sels des acides gras monobasiques sur le dérivé monosodé du cyanure de benzyle, a obtenu avec un bon rendement les com- posés C°H°.CH(CAZ).CO.R. — M. A. Tian a reconnu que les radiations ultra-violettes ne paraissent pas agir sur la gélatine ou ses solutions étendues. Elles détruisent les gelées en déterminant leur liquéfaction ou, en pré- sence d’eau, leur dissolution. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Ch. Nicolle et E. Con- seil sont parvenus à infecter le Macacus sinicus et le M. rhesus directement avec le sang des typhiques. L'infection de quelques animaux a été en tout iden- tique à la maladie humaine; dans un cas, elle a déter- miné la mort. — M. Lucet signale la présence de Spi- rochètes dans un cas de gastro-entérite hémorragique du chien. — M. J. Chatin a observé la chondrification de la sclérotique sur de nouveaux Reptiles appartenant au groupe des Sauriens. — MM. R. Perrier et H. Fis- cher décrivent quelques points particuliers de l'ana- tomie des mollusques du genre Acera, qui nous les montrent comme un type remarquablement adapté à la vie limicole et à des conditions d'existence très désavantageuses en apparence. — MM.Jammeset Mar- tin ont étudié le rôle de la chitine dans le développe- ment des Nématodes parasites. Elle représente une barrière, jamais entièrement close, interposée entre l'œuf et le milieu extérieur. Elle s'ouvre de plus en plus à mesure que la température s'élève, ce qui cor- respond, dans les conditions naturelles, à la rencontre de l'hôte définitif. — MM. Am. Delcourt et E. Guyé- not ont observé que le Drosophila ampelophila se nourrit, au moins en partie, des levures existant dans les milieux naturels. Dans les conditions convenables, il n’a aucunement besoin de diastases étrangères. Il est possible, par des purifications graduelles, de l'élever et de suivre ses lignées en milieu défini. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont éludié les kystes de multiplication endogène de l'{æmogregarina Sebaï; ils sont sujets à de grandes variations au point de vue du siège, des dimensions et du nombre des mérozoïtes. — MM. L. Maquenne et E. Demoussy ont déterminé la toxicité des sels pour les feuilles vertes par le noir- cissement produit lorsqu'on plonge les feuilles coupées dans leurs solutions. Les sels ammoniacaux sont très nocifs, le chlorure de calcium indifférent, le sel marin peu actif. — M. Gard a étudié 860 hybrides binaires de première génération dans le genre Cistus. Les paires de caractères dont l'un est dominant et l'autre récessif, au sens mendélien, sont rares. Plus fréquents sont des couples de caractères dont l’un pourrait être appelé prédominant, le second simplement dominé. — M. Eug. Collin a examiné micrographiquementune mèche de lampe punique trouvée dans des fouilles à T2 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Mahdia et a reconnu qu'elle était composée de fibres de lin. — M.B. Sauton a reconnu que le fer est néces- saire à la lormation des spores de l'Asperqgillus niger. Si on le supprime, le champignon se développe mal et le mycélium formé ne sporule pas. — M. H. Pénau a constaté que l'Endomyces albicans possède les deux éléments figurés mis en évidence par Guilliermond dans les levures : le corpuscule métachromatique et le noyau, ce dernier petit et de coloration délicate. — M. P. Marty a poursuivi ses recherches sur la flore fossile du Cantal. Les zones de végétation du Cantal pliocène étaient semblables à celles d'aujourd'hui, sauf qu'elles se sont abaissées d'environ 609 mètres, fait où se révèle un refroidissement climatérique de 4° C. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 Juillet 1910. MM. P. Spillmann (de Nancy) et L. Testut (de Lyon) sont élus Associés nationaux. M. Le Dentu présente un Rapport sur un travail de MM. L. Imbert et Dugas relatif au pronostic éloigné des luxations de l'épaule. Les auteurs, sur une petite série, il est vrai, ont constaté 7,5 °/, de périarthrites plus ou moins sérieuses à la suite de la luxation de l'épaule. ILest probable que, pour les luxations réduites dans un délai de moins de vingt-quatre heures et trai- tées méthodiquement, les résultats sont, en général, plus favorables. — M. Le Dentu présente un autre Rapport sur un travail de M. Tuffier relatif à la migra- tion des caleuls du bassinet et de l’uretère par effraction des parois. L'auteur en a observé personnellement trois cas. Deux fois sur trois, la paroi urétérale semble s'être cicatrisée immédiatement après l'issue du caleul. — M. Kelsch, Teissier, Camus, Tanon et Duvoir ont fait une série d'expériences nouvelles pour trans- former la variole en vaccine, mais les résultats, comme les précédents, ont été entièrement négatifs. Au con- traire, chez trois génisses sur quatre, scarifiées avec de la glycérine seulement, ils ont vu survenir une érup- tion reproduisant, sous une image réduite, les éléments éruptifs de la vaccine. — MM. A. Chantemesse el F. Borel ont étudié la marche du choléra en Europe de 190% à 4910 et montrent, par les exemples de l'Alle- magne, de la Hollande et de la Belgique, qu'on peut instituer une méthode défensive efficace contre le choléra dont les foyers se réveillent avec activité en ce moment en Russie. —- MM. G. Weiss et L. Bull ont réalisé une installation modèle de galvanomètre à corde à l'Institut Marey pour l'enregistrement des bruits du cœur et demandent aux médecins de leur envoyer des sujets présentant des cas types. — MM. Chéron et Rubens-Duval lisent un travail sur le traitement des cancers inopérables du col de l'utérus et du vagin par l'utilisation massive du rayonnement ultra-pénétrant du radium. Séance du 26 Juillet 1910. M. Bazy donne lecture d’un travail sur l’ablation des calculs du rein par la pyélotomie. — M. et M"! Fil- dermann décrivent une méthode de traitement des caries pénétrantes des dents, avec mortification de la pulpe, par l'aspiration et l'injection d'oxygène et de vapeur chauffée de formol, suivie d’une injection de paraffine chauffée à environ 100. La guérison aurait lieu en une seule séance. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 23 Juillet 1910. MM. W. Mestrezat et F. Sappey ont constaté que l'électro-mercurol agit sur un processus de méningite chronique existant chez la plupart des tabétiques en provoquant une méningite thérapeutique. — MM. Aug. Lelièvre el Ed. Retterer ont observé que la bourse de Fabricius débute à l’état de diverticule du cloaque. Aux dépens de l’épithélium de revêtement de ce diver- ticule se développent des bourgeons qui s’enfoncent dans le derme ou chorion de la muqueuse et repré- sentent le premier stade des follicules clos. — M. P. Wintrebert montre que l'établissement de l’arcade ptérygo-palatine chez les Urodèles comprend deux phases distinctes, séparées par l'apparition du maxil- laire; le premier arc osseux apparu dans l’ontogénèse présente un caractère pisciforme primordial. — MM. A. Briot et Dopter ont constaté qu’en injectant tout d'abord aux chevaux une dose d'émulsion méningococ- cique incapable de provoquer des accidents graves, on peut, une heure après, injecter impunément le complément de la dose totale destinée à produire la vaccination antiméningococcique. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont éludié les formes de multiplication endogène de l'Hæemogregarina platydactyli. — MM. M. Loeper et G. Béchamp ont déterminé la rétention calcaire dans diverses maladies. La quantité de chaux retenue dans les grands épanchements est considérable et plus forte dans les exsudats inflammatoires que dans les transsudats. — M. L. Blaizot a observé que les lapins anaphylactisés sont désensibilisés par l'injec- tion de sang anaphylactique. — MM. L. Ribadeau- Dumas et P. Harvier ont reconnu que le bacille d'Eberth et les paratyphiques se fixent surtout dans la rate, le foie, l'appendice, et paraissent s'éliminer, en ce qui concerne la voie intestinale, au niveau de l'appendice et du duodénum. — MM. J.-E. Abelous et E. Bardier sont parvenus, par des injections répétées d'urohypotensine, à immuniser les animaux. Le sérum des animaux immunisés, mélangé 1n vitro à la toxine, possède une action antitoxique spécifique manifeste. — M. H. Roger a extrait du tissu des capsules surré- nales par l'alcool, le chloroforme et l'alcool amylique une série de substances hypotensives. — M. A. Lécaillon estime que c'est dans l'existence des phé- nomènes de parthénogénèse naturelle rudimentaire qu'il faut chercher l'origine de la parthénogénèse naturelle totale. — M. G. Dubreuil a trouvé dans les ostéoblastes et cellules osseuses jeunes : des grains de ségrégation envacuolés, des chondriocontes et des vacuoles à lipoïdes : dans les ostéoclastes : des mitochondries et des vacuoles à lipoides. — M. L. Launoy a observé, chez le cobaye, que les injections préventives de phénoxypropanediol exercent une action antagoniste contre une dose rapidement mor- telle de sulfate de strychnine.— M. C. Fleig décrit une nouvelle réaction à la fluorescine pour la recherche du sang, en particulier dans l'urine, cette substance passant à l'état de fluorescéine par peroxydation en présence d'hémoglobine et de H°0*. — M. J. Legendre a découvert un bacille acido-résistant, parasite des larves de Stegomyia fasciata; il est sans action sur le cobaye. — M. E. Maurel montre que l'action des agents antagonistes homohistiques, constatée dans l'administration simultanée,se maintient comme action curative et se retrouve comme action préventive. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 5 Juillet 1910. MM. J. Kunstler et Ch. Gineste ont observé chez le Chilomonas paramæcium un ensemble d'éléments fibrillaires reliés les uns aux autres et constituant une sorte de charpente générale qui maintient en place les éléments du corps. — M. J. Gautrelet a étudié l'action sur la pression sanguine des extraits d'hépato-pancréas et de glanges génitales de tourteau, d'araignée de mer et de langouste. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 12 Juillet 1910. MM. H. Alezais et Peyron ont observé la présence de globules rouges nucléés dans les vaisseaux sanguins de l'hypophyse, au voisinage des parois endothéliales. — Les mêmes auteurs ont étudié les caractères cyto- . 4L4CRE ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 113 logiques de la cellule chromaffine dans les paragan- gliomes surrénaux; les phénomènes de chromaticilé y sont des plus marqués. — MM. Peyron el Pezet ont observé une lésion dégénérative localisée au cortex surrénal chez une aliénée. — M. E. Boinet signale un cas d'anévrysme syphilitique de l'artère vertébrale gauche. — M. C. Gerber à étudié l'action des sels de nickel, de cobalt, de zinc, de cadmium et de chrome sur la coagulation du lait par les fermen's protéo- lytiques. — M. P. L. Simond décrit un dispositif simple pour apprécier la production de gaz par une culture microbienne en milieu liquide. — MM. H. Ale- zais et Peyron ont observé deux paragangliomes mé- dullo-surrénaux avec involution épidermoiïde au début. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 2 Juin 1910. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Eustice : L’écou- lement de l'eau dans les tuyaux courbes. l'auteur à fait des expériences sur un tube flexible dans le but de déterminer l'accroissement de résistance à l'écou- lement dù au mouvement curvilinéaire de l’eau dans des spirales de diamètre uniforme. Pour séparer les effets de la courbure de ceux du changement de la section transversale, l’auteur employait un appareil spécial pour faire varier la section du tube droit de la forme circulaire à la forme ovale. Les comparaisons étaient faites entre l’écoulemeut dans le tube droit et l'écoulement dans le tube enroulé, les deux tubes ayant la même forme et la même surface de section. Les résultats obtenus montrent que : {1° l'écoulement dans un tube flexible droit de section circulaire suit les lois de l'écoulement dans les tubes métalliques établies par Osborne Reynolds ; la vitesse à laquelle la perturbation commence est donnée par la formule de Reynolds ; 2° la vitesse critique, qui est si bien marquée pour l'écoulement dans un tube droit, paraît faire complètement défaut quand le tube est enroulé; autrement dit, la loi de l'indice pour les tubes droits n’est plus valable pour les tubes courbés ; 3° l’accrois- sement de résistance dû à la courbure du tube est représenté par la formule (AV/V)"—C/R, où AV est la perte de vitesse due à la courbure du tube, V la vitesse dans un tube droit de même forme et surface de section, R lerayon du tube et C une constante pour une vitesse donnée V; mais zetC varient avec V. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. R. D. Kleeman a cher- ché à déterminer la direction du mouvement d'un électron émis par un atome sous l'influence de la lumière ultra-violette. Pour cela, l’auteur mesure la quantité de radiation cathodique d’une lame de pla- tine déposée sur une plaque de quartz dans un tube à décharge, suivant que la lame fait face à la source de lumière ultra-violette ou à la direction opposée. Si l'intensité du pinceau de lumière employé est prise égale à l'unité, l'intensité de Ja lumière après passage à travers la plaque de quartz et la lame est de 0,55; si l'on prend comme unité l'intensité de la radiation ca- thodique de la lame quand elle fait face à la source de lumière, l'intensité de la radiation quand la lame fait face à la direction opposée est de 1,15. Comme l'inten- sité de la lumière décroit lorsqu'elle traverse la plaque de quartz et la lame de platine, il en résulte que la perte plus grande dans le dernier cas que dans le pre- mier naurait pas lieu si les rayons cathodiques étaient émis également dans toutes les directions, mais s'explique s'ils ont une composante dans la direc- tion de propagation de la lumière. — Sir W. Crookes poursuit ses recherches sur le scandium". IN en a pré- paré une nouvelle série de sels organiques assez complexes, comme l'af-dibromopropionate (CH*Br. CHBr.CO0)Sc H (CH?Br.CHBr.COO)ScOH , le citrate (CSH:O7FSc'.6H20, le métanitrobenzoate [C‘H#(Az0®) COOSc.4H*0, le phtalate C‘H‘{CO0)ScOH.H°0, le its 4 Voir la Revue, t. XIX, p. 722, ett. XXI, p. 219. 2-nitrophényl-#'-tolylamine-#-sulfonate, l'octaméthyl- tétraminodihydroxyparadixanthylbenzènetétracarboxy late. L'emploi d'acides organiques aussi compliqués avait pour but de trouver un moyen de scandium d'autres terres rares, mais les résullats n4 sont pas suffisamment délinis. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Dendy et G. E. Ni- cholls : Présence d'un repli mésocælique durs le cer- veau humain. Les auteurs ont trouvé dans le cerveau humain adulte une petite cavité, bordée par un épi- thélium columnaire caractéristique, englobée dans la voûte de lier au fond de la commissure postérieure, et, en relation étroite avec elle, une autre cavité 1rré- gulière, qui représente apparemment les restes d'une communication avec la lumière de ler. Chez le fœtus de cinq mois, celte communication est encore largement ouverte, et la cavité en question est évi- demment une partie d'une structure située au-dessous de la commissure postérieure et correspondant au sillon épendymaire des Vertébrés inférieurs. Pour cetle structure, les auteurs proposent le nom d'organe sub- commissural. N consiste, chez le fœtus humain, en deux bandes d’épithélium columnaire à noyaux très profonds, invaginées postérieurement dans la voûte de l'iter pour former un repli mésocælique comme chez certains Vertébrés inférieurs. Chez l'homme adulte, il n'y a plus qu'un vestige, représenté par le repli méso- cœlique seul. Chez le chat et la souris, l'organe sub- commissural est bien développé; il est en relation avec une fibre de Reissner. Celle-ci fait très probable- ment défaut chez l'homme; elle aurait une fonction mécanique et non nerveuse, et, en connexion ave l'organe sub-commissural. elle formerait un appareil réglant automatiquement la flexion de la colonne ver- tébrale, fonction qui s'est perdue avec la position droite. — MM. L. S. Dudgeon, P. N. Panton et H. A. F. Wilson: /nfluence des endotoxines bacte- riennes sur la phagocytose. Des extraits des organismes pathogènes les plus communs ont été préparés en les broyant en présence de verre où de sable stérile et ajoutant une quantité définie de solution saline stérile; puis on à centrifugé à grande vitesse et employé la couchesurnageante commeendotoxine.Lesexpériences n'ont pas montré d'action directe des endotoxines sur les leucocytes. Par contre, elles sont capables d'exer- cer une action spécifique sur le sérum dans un grand nombre de cas. Les endotoxines ne sont pas affectées par la chaleur. Leur dilution diminue leur effet toxique sur le sérum; mais, dans quelques cas, à l’état dilué, elles paraissent jouer le rôle de stimulines, de sorte que le degré de phagocytose est plus élevé que dans les expériences de contrôle. — MM. H. E. Armstrong et E. F. Armstrong : L'origine des ellets osmotiques. 111: La fonction des hormones consistant à stimuler les changements enzymatiques dans la narcose. On saitque, quand une feuille de laurier-cerise esl exposée aux vapeurs d'un anesthésique, elle dégage de l'acide cyanhydrique. Le même effet est produit par la plupart des vapeurs organiques, par l'ammoniaque el les solu- sions des acides organiques. Les auteurs proposent de diviser les substances autres que les colloïdes en deux sous-classes, suivant qu'elles traversent où non les septa différentiels comme ceux de la feuille de laurier ou de la graine, et d'appliquer aux premières le nom d'hormones introduit par Starling. Les changements produits par les hormones sont attribuables surtout au fait qu'elles provoquent des modifications de la concentration des fluides à l'intérieur de la feuille, suivies de variations de l'état osmotique ; des enzymes sont mises en liberté et attaquent les divers hydro- lyles conservés dans la cellule. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 46 Juin 1910. MM. T. M. Lowry et W. T. John étudient les chan- gements isomériques réversibles du type A pag B Se Es sépare le T14 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans lesquels le composé intermédiaire B est formé en quantités comparables à celles des substances initiales et finales A et C. Ils trouvent que la courbe reliant la concentration au temps dans le cas du composé C est infléchie, la position du point d'inflexion dépendant des quatre constantes de vitesse correspondant aux quatre flèches de l'équation ci-dessus. — MM. W. H. Glover et T. M.Lowryont préparé la camphocarboxy- amide, F. 1189, et son dérivé monobromé, F. 114, et la campho-carboxypipéridide, F.106°, et son dérivé mono- bromé, F. 132. — M. F. D. Chattaway a préparé très simplement le tétranitro-méthane par l'action de l'acide nitrique sur l’anhydride acétique à basse tem- pérature. L'acide trinitroacétique d'abord formé se décompose en C0* etnitroforme, qui se convertit immé- diatement en tétranitrométhane. — MM. G. T. Morgan et W. Godden ont cherché à déterminer la constitution des ortho-diazo-imines produites par l'action de l'acide nitreux sur les ortho-diamines. D'après la préparation des benzènesulfonyl-naphtylènediazoimines, ils arri- vent à la conclusion que les o-diazoimines et leurs dérivés acylés sont représentés par la formule : A7? Ar « | AZH(R). — MM. G. T. Morgan et E. G. Couzens ont reconnu que l'apparition de la couleur chez les sels de diazo- nium aromatiques n'estpas due à un changement dans le résidu diazoïque, mais à une augmentation de com- plexité dans le noyau aromatique avec lequel ce groupe est associé. — M. A. Clayton a étudié l'action des alcalis sur les dérivés nitrés de la coumarine. Les cou- marines 3-nitrées sont converties en aldéhydes salicy- liques correspondantes. S'il y a aussi un groupe méthyle en #, il se forme de l’w-nitro-x-méthylstyrène. — MM. E. C. C. Baly et W. B. Tuck et Mike E. G. Marsden confirment, par l'étude des spectres d’absor- ption, le fait que les sels alcalins des nitrobenzène- azophénols possèdent une structure quinonoïde. Leurs dérivés carboxylés donnent des selsalcalins colloïdaux, quisont précipités de leurs solutions par les sels métal- liques. — MM. W. P. Bloxam el A. G. Perkin décri- vent un procédé pour la détermination quantitative de l’'indirubine dans l'indigo, basé sur l'extraction de cette substance par la pyridine dans un appareil Soxhlet. — M. A. Clayton monlre que la couleur des dérivés aminés de la coumarine et de ses homologues est indépendante de la position du groupe aminé et n’est pas due à la présence d'un atome d'H mobile. Il suppose que la couleur est engendrée par la rupture et le rattachement continus de liaisons entre le groupe aminé et le groupe -0. CO- non saturé présent dans l'anneau lactonique. — M. W. C. Ball montre que le sodium peut être déterminé en présence d'une grande quantité de potassium par précipitation à l'état de bismuthi-nitrite de cæsium et de sodium, filtration, séchage à 1009 et pesée. — Mie O. E. Ashdown et M.J. T. Hewitt ont constaté que l'alcool produit par la fermentation du dextrose ou de substances formant du dextrose renferme de nombreux sous-produits, en particulier de l'acétaldéhyde dont la quantité peut être diminuée par l'addition de petites quantités de for- miates. — M.J. E. Mac Kenzie, en traitant par PCI5 la phényl-p-tolylcétone, K. 56-570, a obtenu un dichlo- rure CH°.CSH#.CCE.C'H5, qui, traité par un poids équi- valent de CIFONa dans l'alcool amylique, donne le diméthoxy-p-tolylphénylméthane, Eb.186° sous 26 mil- limètres. Cette substance, placée sur l'acide sulfurique dans un dessiccateur, perd de l’éther méthylique en régénérant la cétone. — M E. P. Frankland, en addi- tionnant de l'acide cyanique à l'acide «6-diaminopro- pionique, puis déshydratant le composé formé, a obtenu l'acide tétra-hydro-urique, F. 2160. — M. P. C. Ray, en faisant réagir le nitrite mercurique sur le nitrite de tétraméthylammonium, aoktenu deux nitrites doubles: Hg(Az0*).Az(CH°)*AzO®.H°0 et Hg(AzO?}°. 2Az(CH°)‘Az0:. — MM. P. C. Ray et S. C. Mukherjee ont déterminé l'ionisation d'un certain nombre de nitrites par la méthode cryoscopique. Ceux de K et Na, d'une part, de Ca, Sr et Ba, d'autre part, présentent des degrés égaux de dissociation, donc se conforment à la règle générale. — MM. E.G. Davis elS. Smiles ont préparé la thioxan- thone en chauffant l'acide o-carboxybenzène sulfinique ou l'acide o-thiolbenzoïque etle benzène avec de l'acide sulfurique concentré. — MM. T. P. Hilditeh ets. Smiles ont obtenu l'o-sulfoxyde de diphénylméthane par l'action de H°0* sur le thioxanthène; ce corps est oxydé par le permanganate en diphénylméthane-0- sulfone. Le sulfoxyde se transforme par fusion en thio- xanthydrol. — MM. A. W. Titherley et E. Ch. Hughes, en chlorant la phénylbenzo-métoxazone, ont obtenu un dérivé G6-chloré, K. 214°, que la pyridine et les alcalis transforment en son isomère à chaîne ouverte, la syn-benzylidène-5-chlorosalicylamide, très labile. — M. R. M. Caven décrit une méthode pour la sépara- tion des métaux du groupe de l’étain; c'est une modi- fication de celle de Walker. — MM. A. F. Campbell et J. F. Thorpe montrent que le B-imino-:-cyanoglu- tarate d'éthyle réagit tout à fait comme un composé aminé et ne parait pas posséder de phase imine. C’est donc un glutaconate d’éthyle substitué et les auteurs ont trouvé que dans plusieurs de ses réactions il se comporte comme l'acide glutaconique. — M. J. J. Fox a préparé des dérivés p-hydroxyazoïques de la quino- line, tels que la 5-p-amino-benzèneazo-8-hydroxyqui- noline, ayant le groupe OH en ortho par rapport à l’Az dans le noyau quinolique. Ces composés ne peuvent donner de dérivés acylés ou alkyloxylés. — M. D. Thomson, en traitant la tanacélone (G6-thuyone) par CH'Mgl, a obtenu deux alcools homothuyyliques : l'un solide, F. 840, [ain ——30°,5; l’autre liquide, Eb. 204, (æn——+35°. L'acide thuyacélonique est décomposé par ébullition avec HCI à 20 °/, en donnant un hydro- carbure non saturé rappelant le dihydro-s-cumène. L'acide &«-thuyadicarboxylique, préparé par oxydation du précédent, a donné une série d’éthers. — MM. E. Hope et W. H. Perkin jun. ont préparé aux dépens des 7-cyano-#-et 8-méthylglutarates d’éthyle sodés, par traitement avec le bromacétate d'éthyle, digestion avec H°S0*, éthérification, puis hydrolyse, les acides pen- tane- et isopentane-26è- tricarboxyliques, EF. 158° et F. 1549-1560. — M. J. A. N. Friend décrit une expé- rience montrant d’une facon simple et claire que l’eau pure e{ l'air seuls sont incapables d'effectuer la corro- sion du fer et de l’acier purs. — MM. F. L. Pymanet W. C. Reynolds désignent sous le nom de pavine la 1: 2-dihydropapavérine. De l’Az-méthylpavine se forme avec de la laudanosine par la réduction des sels méthylés de papavérine et peut être également obtenue par méthylation de la pavine. — MM. F. H. Carr et W.C. Reynolds ont déterminé le pouveir rotatoire spé- cifique de Ja /-hyosciamine pure dans l'alcool à 50 e/, (-222) et celui de son ion basique en solution aqueuse (-329,5). I] n'y a pas de racémisalion ; mais la rotation de l'hycsciamine et de plusieurs autres alcaloïdes diffère considérablement de celle de leurs ions basiques respectifs. — MM. Al. Mc Kenzie et H. Wren ont résolu l'acide «-hydroxy-$-phénylpropionique racémi- que en ses constituants actifs, puis ont converti ces derniers l’un dans l’autre au moyen de l’inversion de Walden. — MM. T. Kametaka et A. G. Perkin ont reconnu que la carthamine, matière colorante du safran bâtard, possède la formule C**H#0#%, Elle cris- tallise avec 2H°0, donne un composé heptabenzoylé amorphe, F. 2300-2320, un composé d'addition avec l'aniline, F.276°-278°, et un autre avec la 5-naphtyla- mine, F. 2660-2680. Traitée par l'acide nitrique, elle fournit de l'acide picrique; digérée avec KOH à l’ébulli- tion, elle donne de l'acide p-coumarique et de la p-hydroxybenzaldéhyde. — MM. Ch. W. Moore et F. Tutin, en méthylant l'acide gynocardique par Ag°0 et CHI, ont obtenu le pentaméthylgynocardinate de méthyle, C#H#40*(0CH°)°.CO?CH', Eb. 250° sous 15 mil- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 715 limètres. La gynocardine possède de faibles propriétés acides et donne des composés avec les alcalis. — M. Ch. W. Moore montre que la quercitrine possède bien la formule de Brauns, C*#H*%041,2H°0 ; son point de fusion correct est 1839-1850, et le point de fusion de la substance anhydre 2509-2520, En ajoutant à une solu- tion alcoolique de quercitrine un excès de C*H'ONa, il se précipite un dérivé trisodé C#HO!Na. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN : Séance du 12 Mai 1910. M. Branca communique un Mémoire de M. H. Bücking, professeur à l’Université de Strasbourg, sur les basaltes et les phonolites du Rhoen, leur diffusion et leur composition chimique. Ce Mémoire forme la conclusion des recherches sur l’ensemble des miné- raux volcaniques du Rhoen, faites sous les auspices de l'Académie. — M, Orth adresse un Mémoire de MM. J. Wohlgemuth et M. Strich sur leurs recherches rela- üves aux ferments du lait et à leur origine. Dans la première partie de ce Mémoire, les auteurs font voir que le lait renferme un ferment peptolytique qui, tout en étant extrêmement sensible aux températures, n'est que peu attaqué par le suc pancréatique. Il n’est pas impossible que la digestibilité plus grande du lait eru soit due à ce ferment. La seconde partie s'occupe de l'origine des ferments du lait. Pour l’un de ceux-ci, la diastase, les auteurs démontrent que, bien qu'il puisse y avoir un passage du sang, il s’agit essentielle- ment d'un produit de la glande lactifère. Séance du 2 Juin 1910. M. E.-E. Schulze donne lecture d’un Mémoire sur les bronches saccales («bronchi saccales ») et le méca- nisme de la respiration des oiseaux. Chez les oiseaux, l'échange gazeux entre l'air et le sang pulmonaire, loin d’être effectué par l'inspiration et l'expulsion simples de l'air extérieur, — comme dans le cas des Mammifères, dont les poumons comportent des alvéoles se terminant en cul-de-sac, — se complique du passage de l'air absorbé à travers les alvéoles res- piratoires, qui communiquent les unes avec les autres jusqu'en leurs extrémités ultimes, ainsi que d’un échange régulier avec l'air contenu dans les grands sacs pneumatiques. Les bronches rétrogrades ou sac- cales découvertes par l'auteur et qui, chez presque tous les oiseaux étudiés, se trouvent sur les trois paires de sacs pneumatiques postérieurs, sont d'une importance essentielle pour ce dernier processus. Le sac pair antérieur manque de bronches de ce genre. Bien que le mécanisme de la respiration diaphragma- tique, si développé chez les Mammifères, soit d'une importance secondaire en raison du moindre dévelop- pement des muscles en question, il ne fait pas défaut chez les Oiseaux. Il est vrai que le diaphragme des oiseaux forme, non pas une voûte en dôme, comme chez les Mammifères, mais une voûte à tonnelle, dont les bords d'appui, pour chaque poumon, se trouvent sur le côté ventral de l’épine dorsale d'une part, et la ligne d'origine de la série des muscles diaphragma- tiques, d'autre part. La contraction de ces muscles produit l'extension et l'aplatissement du diaphragme, en élargissant le poumon fixé par sa surface dorsale au thorax fortement voûté. L'effet des muscles du dia- phragme se fait sentir surtout quand la pression de l'abdomen enfonce fortement la surface ventrale du poumon et que, dans l'extension du diaphragme, l'air des sacs pneumatiques est forcé dans le poumon à travers les osties correspondantes. La dilatation des poumons se fait toutefois bien plus fortement que par toutes ces dispositions, grâce à l'élargissement du thorax tout entier. Le rétrécissement du thorax qui détermine l'expiration est réalisé, pendant la respira- tion tranquille, presque exclusivement par l'élasticité du thorax, lequel, après sa dilatation active, retourne vers sa position de repos. Pendant la respiration acti- vée, elle peut être renforcée par certains muscles abdominaux et le recul des côtes. Séance du 9 Juin 1910. M. H. Rubens adresse un Mémoire de M. E. Meyer, privat-docent à l'Ecole polytechnique d’Aix-la-Cha- pelle, sur /a structure des rayons y. Les considérations théoriques font voir que les fluctuations dites de Schweiller du courant de saturation, qui se produisent dans un condensateur à air frappé par des rayons +, doivent être différemment modiliées par l'interception partielle de ces rayons, suivant que ceux-ci possèdent le caractère quantitatif, ou qu'ils sont dus à des impul- sions se propageant dans l’éther d'après la théorie ondulatoire de la lumière. Les résultats de nombreuses mesures de fluctuations faites avec des rayons diffé- remment interceptés semblent confirmer le caractère quantitatif des rayons 7, tout en laissant ouverte la question relative à la nature matérielle ou immaté- rielle de ces quantités. ALFRED GRADENWI1Z. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 Mai 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries : Une involution biquadratique du plan et une involution cubique qui en dépend. Etude de l'involution biqua- dratique (P)* des quadruples de points d’intersection des coniques &*, f* faisant partie de deux faisceaux donnés {«), (8) aux points de base Az, Bx (41, 2,3, 4). La courbe de coïncidence est une C° passant par les huit points de base, la courbe de ramification est une C4 passant quatre fois par ces huit points. Les courbes C5 et C! se touchent aux quinze points triples de l'in- volution et se coupent en dehors des points de base en huit points, formant quatre couples de points de coïncidence. La courbe C/°, lieu du couple de points appartenant à un même groupe, situé sur une droite / tournant autour d'un point T, au point triple T. L'enveloppe E, de la droite { joignant deux points de coïncidence de (P)‘. Lieu C’ des triples de points complétant les points d’une droite / à des quadruples de (P}. L'involution (D) des points diagonaux des quadruples de (P)‘. La courbe de coïncidence de (D}° coïncide avec la courbe de coïncidence C° de (P)', la courbe de ramification de (D) est une C'* passant deux fois par les huit points de base et une fois par les quinze points triples de (P)‘. Cas particuliers (coinci- dence de A, et B,, etc.) — MM. P. H. Schoute et J. Cardinaal : Rapport sur le Mémoire de M“ A. Boole Stott : « Geometrical deduction of semiregular from regular polytopes and space fillings » (déduction de polytopes et de réseaux de polylopes semiréguliers de polytopes et de réseaux de polytopes réguliers). Dans son Mémoire : « Sulle reti di poliedri regolari e semiregolari », publié en 1905, M. A. Andreini a déduit tous les réseaux tridimensionaux de systèmes de po- lyèdres réguliers et semiréguliers; à cet effet, il déter- minait, pour chacun de ces polyèdres, les angles dièdres sur les arêtes et les angles solides aux sommets, et ainsi il trouvait comment on doit juxtaposer ces espèces de polyèdres autour d'une arête commune el autour d'un sommet commun pour remplir tout à fait l'espace tridimensional. La considération des figures stéréos- copiques de M. Andreini a conduit M“ Stott à une méthode extrèmement simple à l’aide de laquelle elle a pu étendre sans aucune détermination préalable d'angles les résultats de M. Andreini à l'espace E, à # dimensions. Ainsi elle a trouvé tout naturellement un groupe de polytopes qui peuvent être considérés comme des formes correspondant aux polyèdres semi- réguliers de l’espace E, en tant qu'ils jouissent comme ceux-ci de la propriété de n'admettre que des sommets de la mème espèce et des arêtes de la même longueur, raison pour laquelle ces polytopes s'appellent poly- topes semi-réguliers. De plus, cette méthode lui pro- curait teut de suite les moyens d'indiquer sans aucune 716 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES détermination d’angles comment ces polytopes rem- plissent l’espace E, qui les contient. Les opérations dont se sert Me Stoit sont empruntées à la Nature; elles s'appellent expansion et contraction. Contrairement à l'expansion et la contraction physiques, ces opérations s'appliquent à des groupes déterminés d'éléments limi- tants. Si l’on indique par (/,) le système desarêtes, par(/,) le système des faces, par (/,) le système des polyèdres limitants, etc., d'un polytope régulier, chacun de ces systèmes pour soi peut former le sujet de la contrac- tion. Alors chacun des éléments limitants de ce sys- tème (/,) se meut parallèlement à lui-même, le centre M de cet élément poursuivant la droite qui joint le centre O du polytope à la position originale du centre M, et ce mouvement simultané de tous les éléments du groupe (/) est continué jusqu’à ce que deux som- mets de deux éléments limilants différents, qui coïnci- daient auparavant, se trouvent à une distance l’un de l'autre égale à la longueur de l’arête ; alors les sommets de l’ensemble des éléments /, dans leur position nou- velle forment les sommets du nouveau polytope. Ainsi l'expansion du cube d'après les faces fait naître un polyèdre limité par six carrés (les faces du cube éloi- gnées du centre O), par douze autres carrés (d’origine d'arête)et par huit triangles équilatéraux (d’origine de sommet). Ce nouveau polyèdre à 26 faces est représenté par le symbole e,C, où C représente le cube et e, l'expansion suivant les éléments /, (faces). Indica- tion sous quelles conditions les opérations e,, e,, 0,,... sont commutatives. L'opération de contraction c. L'expansion et la contraction partielles. Les réseaux mixtes, etc. Le travail de Mae Stott fait connaître une méthode excellente, illustrée par des figures très claires, menant à une série de résultats importants nouveaux; il paraitra dans les Mémoires de l'Académie. — M. W. Kapteyn présente au nom de M. M. J.van Uven: Jtéra- Lion inlinitésimale de fonctions réciproques. Seconde communication (pour la première, voir Rev. génér. des Sciences, t. XXI, p. 627). Ici l’auteur démontre que les conditions sous lesquelles la fonction symétrique de l'ordre m — 1 aux deux variables x, y peut être mise sous la forme Ÿ(£)Æb(r)—24 sont comprises parmi celles qui expriment la même propriété pour la fonction symétrique S(x, y) de l’ordre m. — M. D. J. Korteweg présente au nom de M. L. E. J. Brouwer : Sur des distributions continues de vecteurs sur des surfaces. Troisième communication (pour les communications précédentes, voir Atev. génér. des Sciences, t. XX, p. 564; t. XXI, p. 407). 1. Le champ écoulant sur la sphère. Théorème 1 : Un champ écoulant divise la sphère dans un nombre fini de champs d'écoulement, chacun desquels environne entièrement un des points- source. 2. Le champ le plus général à un nombre fini de points singuliers. Théorème I : Un champ fini et continu de vecteurs sur la sphère à un nombre fini de points singuliers peut être divisé, à l’aide de limites singulières consistant en ares tangents, en un nombre fini de champs d'écoulement et un nombre fini de champs de rotation. 3. Le théorème du point invariant sur la sphère. 4. La relation dès points singuliers augmentée du nombre des secteurs elliptiques surpasse de quatre le nombre des secteurs hyperboliques. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Pseudo-association ou entassement de molécules. 1. 6 ; RT alle, CA L'équation p=——©—"; n est pas satisfaisante pour V— D V£: l'état fluide, si l’on y suppose 4 et b indépendants de T, et b une fonction du volume. II. La supposition que les paramètres a et D sont des fonctions de T ne sufiit pas à expliquer la déviation. IL. Deux formules empi- riques pour la détermination de la densité du fluide et de la vapeur dans le cas de phases coexistantes. IV. Les quantités critiques. V. La pseudo-association. VI. Détermination de la valeur x, v et T étant données. VII. Valeurs possibles de ». VIIL. Relations entre x, et v., T étant donnée. IX. Relations approximatives entre x, et x,, T étant donnée (à suivre). — M. P. van Rom- burgh présente au nom de M. H. R. Kruyt : L’équi- libre solide-fluide-qaz dans les systèmes de cristaux mixtes binaires. — M. A. F. Holleman présente au nom de M. I. J. Rinkes: Sur la mono-halogénation du phénol. — M. S. Hoogewerff présente la thèse de M. J. F. B. van Hasselt : « Bijdrage tot de kennis der cons- titutie van het bixine » (contribution à la connaissance de la constitution de la bixine). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. K. F. Wenckebach : Sur l'influence de la respiration sur le pouls (pulsus paradoxus). — M. H. J. Hamburger : l'influence de petites quantités de calciuin sur le mouvement des pha- gocytes. Dans le Zeitschrift für Balneologie (Journal de Balnéologie) du 15 août 1909, le Ministère des Cultes, de l'Instruction et des Affaires médicales de la Prusse pose à l’Institut impérial sanitaire la question suivante : « Une eau minérale, formant d'après les recherches de M. Hamburger, à cause d’une teneur de 1°/,, en CaCl,, une solution isotonique de sel de cuisine, peut-elle être censée ajouter au corps des substances capables de provoquer dans le sérum la digestion des bactéries et d'accroître sensiblement la phagocytose? Est-il recom- mandable de faire faire des expériences avec une eau minérale satisfaisant aux conditions chimiques indi- quées dans les instituts gouvernementaux ? » Dans son Rapport, M. H. Kionka souligna l'extrême utilité de telles expériences. Encouragé par l'intérêt du côté balnéologique, l'auteur a fait des expériences avec une eau minérale contenant une quantité assez considé- rable de Ca, l’eau de la source Virchow à Kiedrich, près d'Ellville (Wiesbaden). De plus, l’auteur à élargi le domaine de ses recherches dans une seconde direc- tion en cherchant à pénétrer plus loin dans le caractère de l'influence remarquable du calcium. Résumé 1° Par des quantités minimes de calcium, la chémo- taxie est favorisée énormément. 2° Ces recherches chémotactiques démontrent que l’action des phago- cytes est augmentée considérablement par le calcium, non seulement « in vitro », mais aussi dans l'organisme vivant. 3° L'augmentation de l’action des phagocytes n'est pas à attribuer à un accroissement de l'intensité des contractions des cellules; elle est causée par une accélération du mouvement amæboïde. 4° On doit s'imaginer qu'ici le calcium agit par une propriélé biochimique inconnue jusqu'à présent. — M. A. À. W. Hubrecht présente aux noms de MM. J. Boeke et K. W. Dammerman : Le saceus vasculosus des poissons, organe infundibulaire, n'est pas une glande. L'organe infundibulaire {Rabl-Rückhard) réagit après certaines irritations. — MM. W. Beyerinck présente aux noms de Ml: J. van Amstel et de M.G.van Iterson Jr: Sur l'optimum de température des processus physiologiques: Il s'agit de l'anéantissement caractéristique de l'agent actif à des températures élevées, en relation avec un mémoire de Blackman (« Optima and limiting factors », Annals of Botany, 1905), où les vitesses de l'assimilation de l'acide carbonique sont calculées à l’aide de l'ex- trapolation suivant laloi de Van ’t Hoff, d'après laquelle chaque augmentation de la température par 10° mul- tiplie la vitesse de réaction par 2 ou par 3. En 1909, M. J. Kuyper (Rev. génér. des Sciences, t. XX, p. 976) appliqua la théorie de Blackman au processus de la respiration des plantes; le résultat fut satisfaisant; seulement l'extrapolation devait être un peu forcée pour trouver des valeurs concordantes. C'est à cause de l'incertitude sur la validité des résultats obtenus à l’aide de lextrapolation que les auteurs ont institué de nouvelles recherches. I. Levure alcoolique. I. L'in- version du sucre de canne. III. Conclusions : La théorie de Blackmann est à rejeter; la loi de Van ’t Hoff exige des corrections. — M. P.van Leersum : Sur la teneur en alcaloïde des feuilles des Cinchonae. P. H. Scnoure. EE ————— a Le Gérant : Louis BRUNET. Paris. — L. MARETHEUX. imprimeur, 1, rue Gassotte. 21° ANNÉE N° 17 15 SEPTEMBRE 1910 r y ll kRevue générale d SCI e » pures ef appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser provisoirement tout ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE : N L'iniüateur mathématique. — Nos lecteurs n'ont, sans doute, pas oublié l’ouvrage de M.C.-A. Lai- sant que nous leur signalions il y a quelques années : L'initiation mathématique, et qui fit une petite révo- lution pédagogique en insistant sur la nécessité de l'emploi de méthodes concrètes pour enseigner aux enfants les premiers rudiments de la Mathématique. Pour matérialiser plus efficacement que par le simple dessin les opérations qu'il indiquait, M. Laisant se servait de bâtonnets, de haricols, de jetons; mais la nécessité d'un matériel mieux adapté aux méthodes qu'il préconisait se faisait sentir. Cette lacune vient d'être comblée de la facon la plus heureuse par M. Jacques Camescasse, au moyen de son zniliateur mathématique?. Préoccupé des mêmes questions que M. Laisant, M. Camescasse avait réalisé, pour l'instruction de ses enfants, des tables de Pythagore mobiles avec des cubes de 2,5 centimètres d'arête, du matériel Frœbel. En cherchant à perfectionner ce système, il vit tout de suite l'avantage qu'il y aurait à prendre, comme unité, un cube de dimensions métriques. Le cube de 1 centi- mètre était tout indiqué pour conduire à l'intelligence du système métrique et habituer l'œil de l'enfant aux dimensions métriques. Il chercha ensuite, pendant plu- sieurs années, le moyen de lier les cubes en bandes de dix, en tranches de cent, etc. La solution par une réglette métallique entrant à frottement doux dans des rainures pratiquées dans l'épaisseur des cubes lui parut la meilleure et la plus simple (fig. 1). L'initiateur mathématique secompose donc essentiel- lement d'un certain nombre de cubes, blancs et rouges (en général 600 de chaque espèce, pour permettre au 1. — Mathématiques 1 Voir la Æevue du 30 juillet 1906, p. 665, et du 30 octobre 1906, p. 877. ? J. Camescasse : Notice sur l'initiateur mathématique, 1 brochure oblongue de 32 pages avec 15 figures et 1 planche en 2 couleurs. (Prix : 1 fr.) Librairie Hachette, 79, boulevard Saint-Germain, Paris. Le jeu lui-même, comprenant 1 caisse avec 1.280 cubes, blancs et rouges, et 144 réglettes, est en vente à la même librairie au prix de 42 francs. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. I moins la constitution d'un décimètre cube), portant sur deux faces opposées deux rainures de 5 millimètres de profondeur et de 0,8 millimètre de largeur, dont les directions se croisent à angle droit. Ils ont théorique- ment un centimètre sur chaque dimension, mais en pratique un peu moins, afin qu'assemblés par dix ils ne dépassent pas 10 centimètres à cause des joints. L'ini- tiateur comprend, d'autre part, un certain nombre de réglettes métalliques, de 92 millimètres de longueur, 4 millimètres de largeur et 0,8 millimètre d'épaisseur, permettant d’assembler 10 cubes bout à bout, et éven- Fig. 1. — Mode d'assemblage de l'«Iniliateur mathéma- tique» au moyen des réglettes métalliques. à 9 {| tuellement des réglettes de longueur moindre. La ma- nipulation en est très facile. L'initiateur mathématique se prête à un grand nombre d'applications, dont voici quelques-unes d’après l’auteur : 4° Education maternelle. — Les cubes de l’initiateur se prêtent d'une façon fort utile, et tout à fait conforme au programme des Ecoles maternelles, aux jeux dits carrelages et mosaïques. Des foules de combinaisons, de dessins, centrés ou non, symétriques ou non, peuvent être imaginés (fig. 2). Avec un peu de patience, on arrive à des résultats surprenants. Il est certain que, par ce moyen, diverses lois numériques doivent entrer dans la tête des bébés. Ils sauront donc en quelque sorte compter par les mains et par les yeux avant de savoir dire ou écrire les noms des nombres, 17 718 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 20 Numération décimale. — L'éducateur qui veut enseigner et faire comprendre la numération décimale distribue quelques réglettes et une poignée de cubes de chaque couleur à chacun des enfants; ceux-ci ap- prennent très vite à placer sur chaque réglette autant de cubes qu'ils ont de doigts. Hs apprennent ensuite à comp- ter ces cubes, puis à compter de même des dizaines de cubes. L'assemblage des dizaines se fait, pour constituer une centaine, en introduisant deux réglettes dans deux des rainures restées libres sur la face opposée des cubes. Lasim- ple superposition de dix plaquettes constitue un nou- veau cube qui, arithmétique- ment, représente le nombre 1.000, ou 10 centaines, ou 100 dizaines. Les enfants ont ‘ ainsi une concep- Fig. 2. — Exemple de dessin fait avec tion entièrement les petits cubes de l'Initiateur. objectivée de ces nombres. 3° Opérations ct théorèmes arithmétiques. — Les opérations arithmétiques et leurs théories peuvent être facilement matérialisées par l'emploi de ces cubes. L'initiateur permet même de rendre concrets certains théorèmes de géométrie, d'algèbre et d’arithmétique, tels que ceux qui donnent le carré de la somme et de la différence de deux nombres, le carré de la somme de trois nombres (fig. 3), la somme des » premiers nombres entiers consécutifs, etc. 40 Système métrique. — De mème que le système de numération décimale est éclairé par ses rapports avec les formes géométriques élémentaires, l'étude du système métrique est préparée, et sa connaissance est extrèmement fa- cilitée par l’em- ploi de l’iniliateur mathématique. Ayant appris à compter par di- zaines, centaines, milliers, etc., au moyen de cet ins- trument, l'enfant n'aura qu'une adaptation instau- tanée et, pour ain- si dire, purement verbale à faire pour nommer « centimètre cu- be » son unité en forme de cube, et savoir qu'un déci- mètre cube le con- tientmille fois,etc Bien d’autresap- plications peuvent être tirées de l'initiateur mathématique par les maîtres ou par les enfants, dont l'esprit inventif pourra se don- ner libre carrière. On ne peut que souhaiter de le voir se répandre dans les familles et les écoles; il permettra de substituer à l’action anti-éducative de méthodes, ou plutôt de procédés, où tout n'est qu'abstraction et mémoire, — procédés quitoujours fatiguent les enfants, et souvent les dégoûtent de tout travail, — des méthodes objectives que d'autres peuples pratiquent avec succès et qui, seules, rendent l'étude attrayante et fruc- tueuse. Fig. 3. — Démonstration objective, au moyen de l’Initiateur, de la formule du carré de la somme de 8 nombres : atb+c—a 2ab+2 ac + b? + 2be + ci. ÿ 2. — Physique L'orientation magnétique dans une agglo- mération de petits aimants. — M. Lucien de la Rive et M. Ch.-Eugène Guye se sont proposé de repren- dre et de développer, avec diverses modifications, les expériences bien connues de nos lecteurs ‘, qui permi- rent à Ewing de montrer les analogies entre un corps aimanté et une agglomération de petits aimants sufli- samment rapprochés les uns des autres. Les expériences de MM. de la Rive et Guye® diffèrent de celles d'Ewing sur deux points. En premier lieu, les aimants peuvent être soustraits complètement à l'influence du magnétisme terrestre, ce qui permet d'augmenter saus inconvénient leurs distances rela- tives. En second lieu, les positions de ces aimants sont enregistrées photographiquement, de manière à mettre sous les yeux du lecteur les résultats mêmes de l'expérience. Le dispositif qui permet d'annuler la composante horizontale du magnétisme terrestre est celui de la boussole d'Helmholtz, qui donne, comme on sait, un champ uniforme dans des limites assez étendues. A ceteffet, un bäti de bois porte deux chässis verticaux réunis à mi-hüuteur par une tablette horizontale. C’est sur cette tablette que sont disposés les systèmes d'aimants étudiés, tandis que les deux châssis portent chacun un enroulement circulaire de 4 mètre de rayon, comprenant 4 spires. En lançant dans ces enroule- ments le courant d’une batterie d'accumulateurs, on peut, au moyen d’un rhéostat de réglage, obtenir un champ uniforme convenable dans la partie médiane de la tablette et annuler, si on le désire, la composante horizontale du champ terrestre. Les petits aimants dont l’agglomération donne lieu à ce que l’on pourrait appeler le champ moléculaire sont des boussoles sous verre de 17 millimètres de dia- mètre, dont l'aiguille aimantée a 13 millimètres de longueur. Lorsque ces boussoles sont au contact, la plus courte distance entre les pôles de deux aiguilles est donc de # millimètres. La forme même des aiguilles est dissymétrique, de façon à distinguer aisément les deux pôles. Après avoir vérifié que le champ dans lequel se trouvent placées les boussoles était uniforme à quel- ques °/ près, les auteurs ont procédé à un ensemble d'expériences dont nous résumons ci-après les conclu- sions principales. En premier lieu, l'action mutuelle des boussoles diminue très rapidement lorsque la distance des centres dépasse une limite qui, dans le cas particulier des expériences, est à peu près celle du contact des boîtes (soit 17 millimètres). 11 en résulte que le champ dû à l’ensemble se réduit sensiblement à l’action mutuelle de deux pôles voisins lorsque les aiguilles sont à peu près dans le prolongement l’une de l'autre. Lorsqu'on fait agir une force extérieure de façon à ce que les aiguilles voisines soient déviées et cessent d'être parallèles, elles changent brusquement d'orientation pour retomber dans un autre état d'équilibre stable, dû à une autre chaîne d’aiguilles. Ces expériences sont la confirmation de celles d'Ewing. Mais les dessins reproduits par la photographie montrent que l'orientation se produit toujours suivant les lignes de plus courte distance entre les centres. En outre, lorsque le champ terrestre est annulé, l'orienta- tion sur les bords de la surface couverte par les bous- soles est en moyenne dirigée parallèlement à ces bords (aimantation tangentielle, action extérieure nulle). Enfin, les orientations à l’intérieur se produisent indifféremment suivant des lignes quelconques de plus courte distance. i Voyez dans la Revue du 30 novembre 1891, l'article de M. Ewing sur l'induction magnétique et les phénomènes moléculaires. 2 Archives des Sciences physiques el naturelles, t. XXVIII. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Lorsque les centres sant disposés suivant un réseau égulier, les considérations qui précèdent s'appliquent encore, mais prennent une signilication particulière, au point de vue de la conception des champs molécu- laires dans les corps cristallisés. Les figures ci-contre représentent l'une des expérien- ces les plus caractéristiques décrites dans ce mémoire. Les boussoles sont disposées régulièrement aux sommets des triangles équilatéraux qui, par leur 4% GA Fig. 4. à 4. 719 Enfin, la figure # montre le changement brusque d'orientation qui s’est produit en continuant li vement de rotation du carton au delà de 30°, En faisant effectuer un tour complet au carlon, on constate ainsi six changements brusques d'orientation, correspondant à 3 directions principales entre elles un angle de 60. Ces variations brusques ont été rapprochées par les auteurs! des propriétés de la pyrrhotine, qui est, comme mou- laisant JSISAE SSL IUSUSS — Orientation magnétique dans une agglomeration de petits aimants. carton de moins de 300, Fig. 1. — Disposition des aiguilles quand 1: champ terrestre est annulé. Fig. 2. — — — — agit suivant H. Fig. 3. — — on à fait tourner le Fig. 4 — — — — juxtaposition, forment le réseau hexagonal cristallo- graphique de Bravais. La figure 1 représente la dispo- sition des aiguilles lorsque le champ terrestre est -annulé ; on voit que les orientations sont à peu près quelconques et que les lignes d'aimantation sont tou- jours tangentes à la périphérie. Dans la figure 2, le champ terrestre agit suivant la direction H ; presque toutes les aiguilles ont pris cette -direction, qui est en même temps celle de la plus courte distance des pôles. ? Dans la figure 3, l'on a fait tourner le carton hexa- -gonal sur lequel sont placées les boussoles d'un angle -de moins de 30° dans le sens des aiguilles d'une montre; les orientations relatives des diverses aiguilles n'onf pas changé. ; * — de plus de 30°. on sait, un sulfure de fer magnétique cristallisant dans le système rhomboédrique. $ 3. — Zoologie La photographie des oiseaux en liberté et les mœurs du jeune coucou. — A l'une des dernières séances de la Société vaudoise des Scien- ces naturelles, M. Ad. Burdet a présenté une série de photographies d'un très grand intérêt, représen- tant des oiseaux -en complète liberté, c'est-à-dire près de ou sur leur nid, ou encore nourrissant leurs petits. Elles ont été faites en Hollande, dans ces trois 4 Voir à ce sujet C. R.. 18 janvier 1:09. 720 dernières années, à l’aide d'un appareil photogra- phique (stéréoscopique) ordinaire, placé à une distance moyenne d'un mètre du nid et relié au poste d’obser- valion par un tuyau de caoutchouc de 8 à 10 mètres (exceptionnellement 20 mètres). Un certain nombre, cependant, ont été prises à l’aide du téléphot, système Vautier-Dufour ‘, qui a rendu de précieux services, particulièrement sur le Bass-Rock (Ecosse), pour pho- lographier des guillemots, des mouettes tridactyles et des macareux moines perchés contre des parois de rochers inaccessibles. L'obtention de ces photographies a permis à M. Burdet de faire mainte observation pittoresque sur les mœurs des divers oiseaux. Citons en particulier les suivantes? : Un des clichés de l’auteur représente un nid de tarier ordinaire, construit à terre, dans les broussailles ; un petit couloir conduit au nid qui contient cinq œufs bleus, dont l’un est légèrement plus gros et plus clair que les quatre autres. Après l’éclosion des cinq œufs, il se trouva un seul petit oiseau au fond du nid; c'étail un jeune coucou : peau noire, ratatinée, sans aucun duvet, les yeux encore fermés, bouche orange énorme; à 10 centimètres du nid, on voyait les corps entassés des quatre jeunes tariers, peau rosée, couverte d'un léger duvet. Pour contrôler ce qui s'était réellement passé, M. Burdet remit dans le nid, à côté du jeune coucou, deux des jeunes tariers qui vivaient encore. Au bout de dix minutes environ, le coucou, qui n'avait pas l'air trop réjoui du retour de ses compagnons, com- mença à se remuer et à se tasser au fond du nid, de manière à placer sur son dos large et plat l’un des jeunes tariers; dès qu'il le sentit en équilibre, il se mit à marcher à reculons, se servant de ses rudiments d'ailes comme de bras pour sortir du nid et porter son fardeau à une distance double environ de l’endroit où il l'avait d'abord déposé. Puis, toujours les yeux fermés, il retourna vers le nid dans l'intention bien évidente d'expulser de même l'autre jeune tarier. L'observateur ne lui en laissa pas le temps. Il trans- porta les deux petits êtres encore vivants dans un autre nid de tarier du voisinage, où se trouvaient déjà quatre petits éclos depuis environ quatre jours. Les parents tariers adoptèrent ces deux orphelins, les soi- gnèrent, les nourrirent et les élevèrent comme leurs propres petits. Le coucou fut nourri par les parents des tariers qu'il avait lui-même chassés de leur nid. Les observations précédentes, ainsi que plusieurs autres, permettent d'affirmer que : 1 L'œuf de coucou déposé par la femelle dans le nid d’un oiseau plus petit que lui est couvé par ce der- nier seul; les parents coucous ne s'inquiètent plus de leur progéniture ; 20 A J'éclosion des œufs, c'est le jeune coucou lui- même qui jette hors du nid (et cela dans les dix pre- mières heures de son existence) ses jeunes camarades, enfants légitimes des propriétaires du nid, ou les œufs qui ne sont pas encore éclos; 3° Les parents adoptifs du coucou ne semblent pas s'inquiéter du meurtre de leurs propres enfants; ils soignent et nourrissent le jeune monstre resté seul dans le nid. Les parents coucous n’apportent pas de nourriture à leur petit. Celui-ci croît avec une éton- nante rapidité; au bout de huit à dix jours, il est déjà si gros qu'il remplit complètement le nid. Au bout de quinze jours, le nid, devenu trop petit, est abandonné ; le coucou se tient perché sur une branche voisine, ou bien reste à terre; ses cris d'appel se font entendre incessamment, et les parents adoptifs continuent à le nourrir avec une remarquable sollicitude, alors que le coucou à atteint une taille trois ou quatre fois plus grande qu'eux-mêmes. _ A l'appui de ces conclusions, M. Burdet a encore CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE présenté une photographie montrant un jeune coucou, seul dans un nid de rossignol de muraille ou rouge- queue, construit à terre; à côté se trouvent deux cadavres de jeunes rouges-queues et trois œufs non éclos. Les mêmes faits relatés au sujet du coucou dans le nid de tarier ont dû aussi se produire ici dans ce nid de rouge-queue. S 4. — Géographie et Colonisation Le chemin de fer du Cap au Caire’. — Le projet d'une voie ferrée transafricaine fut une des idées maitresses de Cecil Rhodes, qui voyait en cela une grandiose manifestation de l'impérialisme anglais. Le créateur de la Rhodésia n’a pas eu le temps de réaliser son idée, c'est-à-dire de fondre en une seule les lignes d'intérêt local qui se sont soudées bout à bout, tout en étant administrativement et financièrement distinctes. A l'heure actuelle, le prolongement vers le Nord se fait sans plan défini, simplement par création de branches nouvelles, s'inclinant à l'Est ou à l'Ouest sui- vant la situation du trafic qui la justifie. Jusqu'ici, ce sont les richesses minières qui dirigent la construction. En 1905-1906, la mise en exploitation des mines de Broken-Hill a amené le rail au nord du Kafoué, affluent de gauche du Zambèze ; actuellement, la ligne vient de traverser la frontière du Congo belge, à 3.539 kilomètres du Caire; elle se dirige vers le Katanga, riche en gisements de cuivre et d'étain. Il est fort probable que ces minerais seront transportés en Europe par une voie ferrée transversale plutôt que par le fleuve Congo, qui nécessiterait trois ou quatre doubles transbordements sur les railways qui tournent ses rapides. Le climat tropical, d'autre part, ainsi que la faible densité de la population ne sauraient pousser à la con- struction d'un long chemin de fer sur territoire con- golais. D'où la préférence que l’on semble marquer pour l’utilisation des grands lacs. Il est actuellement question de relier la frontière du Congo belge à Fort- Abercorn, au point extrême sud du lac Tanganika (660 kilomètres); de là, on irait par bateau jusqu'à Ujiji ou Usumbara, d'où l’on gagnerait par un nouveau railway (#15 kilomètres) le lac Victoria-Nyanza. Deux autres troncons seraient encore nécessaires pour réunir ce lac à l'Albert-Nyanza (215 kilomètres) et ce dernier à Fort-Berkeley (300 kilomètres), terminus de la navigation sur le Nil blanc, qu'il est possible d’at- teindre facilement depuis le Caire par voie ferrée et bateau à vapeur. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lycn. EC N 5. — Enseignement. Nominations universitaires. — M. Gilbert, professeur de Thérapeutique à la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Clinique médicale à ladite Faculté. M. Roule, professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse, est nommé professeur de Zoologie (Reptiles et Poissons) au Muséum d'Histoire naturelle de Paris, en remplacement de M. Vaillant, admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite. M. Marfan, agrégé de la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Thérapeutique à ladite Faculté. M. Pruvot, chargé d'un cours d’Anatomie comparée à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé profes- seur de Zoologie, Anatomie et Physiologie comparées. M. Carrus, chargé d'un cours de Caleul différentiel et intégral à la Faculté des Sciences de Besancon, est nommé professeur de Calcul différentiel et intégral à la- dite Faculté. ‘ Voir la Revue du 15 mai 1903, €. XIV, p. 476. = Archives des Sciences phys. et nat., 4° sér., t. XXIX, p. 661 et suiv. ‘ Cf. sur l'ensemble des chemins de fer africains : A. Fock : La conquête économique de l'Afrique par les voies ferrées. Revue générale des Sciences, 1904, p. 251-265. G. BLANC — LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. SON Lorsqu'en 1903 la nouvelle se répandit qu'une compagnie américaine avait découvert un procédé de fabrication synthétique du camphre, capable de concurrencer avantageusement le produit naturel, elle ne causa pas la moindre surprise. Car, en effet, la Chimie organique à enfanté bien d’autres merveilles; pour ne citer qu'un exemple, celui de l'indigo artificiel, il apparait que, même au point de vue industriel, les savants sont arrivés maintes fois à imiter la Nature et même à faire mieux qu'elle. Au surplus, tout le monde se doutait bien que le nouveau corps synthétique s'obtenait à partir de l'essence de térébenthine, et l’on sait que le passage de l'un à l'autre s'opère, au moins en théorie, par un processus extrêmement simple. Depuis, les années se sont écoulées, il est apparu des brevets en nombre considérable... et les demandes de camphre naturel sont restées ce qu’elles étaient auparavant. On parle beaucoup du camphre synthétique et l'on continue à ne voir sur le marché que du camphre japonais. Est-ce à dire que le produit artificiel soit un mythe? Rien ne permet de le dire, et rien ne permet non plus d'affirmer le contraire. C'est ce que nous allons tenter d'exposer dans cet article. Mais, auparavant, il est utile d'éclairer le lecteur sur la situation du marché du camphre asiatique, afin de faire ressortir les conditions dans lesquelles les adversaires, d'un côté le corps naturel, de l’autre le corps artificiel, ont à lutter. Le camphre est une matière première qui fait l’objet d’un commerce très actif et dont les débou- chés sont principalement la pharmacie, la dro- guerie et surtout la fabrication du celluloïd (80 °/, de la production). On l'utilise, parait-il, dans la fabrication de certaines poudres sans fumée; si cela est vrai, ce ne peut être qu'en très minime proportion. Le camphre s’extrait du Laurus Camphora, arbre qui croit dans l'Asie Sud-Orientale, principalement à Formose, et dans les provinces du Sud de la Chine et du Japon. L'extraction de plus simples et des plus barbares. L'arbre abattu est découpé en petits fragments et soumis sur place à la distillation avec de la vapeur d’eau dans des appareils extrêmement primitifs. Le camphre, en même temps qu'une huile essentielle (huile de carmphre), est entraîné, et, après un essorage som- ce corps est des SON AVENIR INDUSTRIEL AVENIR INDUSTRIEL maire, on obtient le produit brut, qui est expédi aux usines où on le raffine. Au Japon (Formose et Vieux Japon), le commerce du camphre est monopolisé. Le producteur esl tenu, de par une loi récente (17 juin 1903), de livrer intégralement le camphre qu'il fabrique dans ses propriétés ou dans sa concession à l’Administralion du Monopole. Celle-ci le lui prend à un prix fixé d'avance et, après une manipulation convenable, le met sur le marché par l'intermédiaire d'agents commerciaux. Si l'on considère la moyenne des quatre ou cinq dernières années, la production totale du Japon a été environ de 6.000.000 de kins (4 kin — 600 gr.) par an, dont les 4/5 pour Formose et 1/5 pour le Vieux Japon. Quant au camphre chinois, sa production esl extrêmement irrégulière; elle a atteint en 1908 environ 500.000 kilogs, contre plus de 1.000.000 en 1907. D'ailleurs, le mode d'extraction du camphre chinois, plus primitif encore qu'au Japon et à Formose, les difficultés du transport à la côte, font que les revendeurs de ce produit sont obligés de subir les cours imposés par les Japonais, sans pouvoir eux-mêmes les faire varier en quoi que ce soit. En somme, le gros producteur et le maitre du marché est le Japon. Cette situation prépondérante n'a pas été sans susciler de nombreuses tentatives d'émancipation de la part des acheteurs européens et américains. N'y a-t-il, en effet, vraiment qu'au Japon et à Formose que le Laurus Camphora puisse croilre dans de bonnes conditions ? De toutes parts on a fait des essais de culture : en Californie, aux Indes, à Ceylau, au Tonkin, dans l'Afrique allemande, en Algérie et même en Italie, on a reconnu que cet arbre précieux pouvait se développer. Malheureusement, les conditions de lutte avec le Japon demeurent bien défavorables. Car, si cet empire dispose d’un héritage séculaire qui lui permet de traiter des arbres àgés parfois d'une centaine d'années, ses concurrents se voient forcés de travailler sur des jeunes plants dont le rendement à l'hectare est insigniliant. Pour cette raison, cette production ne peut, à l'heure actuelle, entrer en ligne de compte. Il faudra seulement compter avec elle le jour où les vieux arbres auront disparu (et ce jour viendra certainement bientôt, étant données les demandes qui deviennent de plus en plus fortes) et où l'on sera obligé d'avoir recours à leurs rejetons. Donc, sur ce terrain, le Japon reste le vainqueur incontesté, fort d'un patrimoine quil finira par 1 19 19 dissiper, à la vérité, mais qui lui assure, pour quelque temps encore, la maitrise de la situation. II Voyons à présent comment, sur l'arène com- merciale, se présente le camphre synthétique et quelles sont ses chances de réussite. La question esl, en somme, extrêmement claire. On sait, depuis bientôt un siècle, que le pinène, carbure cyclique de formule C°H”", additionne les éléments de l'acide chlorhydrique pour fournir un composé solide, C'H".CIH, ayant l'aspect du campbre, le monochlorhydrate de pinène, ou chlo- rure de bornyle, appelé par les anciens chimistes « camphre artificiel ». Ce produit, ainsi que Berthelot l’a montré il y a bien longtemps, peut, sous l'influence de certains sels (stéarates, par exemple) et d’une température convenable, perdre son acide chlorhydrique pour donner un carbure C°H qui n’est plus le pinène, mais un isomère solide, le camphène. Ce camphène, soumis à l’action de certains oxydants (Berthelot), se transforme en camphre : C°H" + O0 = C"H'"O. Voilà done un premier moyen de faire du camphre synthétique. D'un autre côté, Bertram et Walbaum ont fait voir que ce même camphène peut, lorsqu'on le mélange avec certains acides organiques et une trace d'acide sulfurique, donner un éther de l’iso- bornéol, alcool secondaire dont l'oxydation donne du camphre. Après Berthelot, différents auteurs ont montré que l’on peut, à partir du monochlorhydrate de pinène, obtenir à la fois du camphène et unéther de l’isobornéol lorsqu'on traite ce monochlorhydrate par un acide organique en présence de certains sels. Enfin, il y a déjà longtemps que l'on sait, depuis les travaux de Bouchardat, que le pinène seul, traité par certains acides organiques, donne des éthers de l’isobornéol. Toute la synthèse industrielle du camphre re- pose donc sur la série de transformations que nous venons d'indiquer et qui peuvent se résumer ainsi : Pinène ——> Monochlorhydrate de pinène Ÿ ue Camphène | SE | Y = \f Isobornéol > Camphre Toutes ces transformations sont, répétons-le, depuis longtemps connues et devenues classiques. La question industrielle, la seule qui nous intéresse G. BLANC — LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. SON AVENIR INDUSTRIEL ici, consiste à les opérer dans les meilleures condi- tions possibles de rendement et avec les dépenses minimum en appareils, produits accessoires et main-d'œuvre. À ce point de vue, il convient de diviser en deux classes les brevets ayant pour objet la fabrication du camphre synthétique : 1° Brevets qui revendiquent la transformation du pinène en monochlorhydrate, et l’utilisation de celui-ci à la fabrication des éthers de l'isobornéol en passant, où non, par l'intermédiaire du cam- phène. 2° Brevets qui revendiquent la transformation directe du pinène en éthers de l’isobornéol. Examinons successivement chacun de groupes. ces III La transformation du chlorhydrate de pinène em éthers de l’isobornéol en passant, ou non, par l'intermédiaire du camphène, comprend deux séries. de procédés : a) On fabrique un éther de l’isobornéol et acces- soirement du camphène; D) On fabrique intentionnellement et exclusive- ment du camphène, qu'on transforme ensuite en. isobornéol. a) Ilest bien connu, depuis Würtz, que les dérivés: chlorés des carbures ne peuvent pas, sous peine de donner des composés incomplets, être saponifiés. directement en alcools par les alcalis caustiques;. mais, si on les transforme préalablement en acétates,, la transformation devient possible. Il est donc évident qu'en théorie il suffira de chauffer un mélange de chlorhydrate de pinène (chlorure de- bornyle), d'un acétate et d'acide acétique, qui tient lieu de solvant, pour obtenir de l’acétate d’iso- bornyle. C'est le point de départ des procédés brevetés par : la Clayton Anilin Company (Br. fr. n° 319.687) : acétate de soude et acétate de zinc, ce dernier sel mélangé au premier en petite quantité; la C/ayton Anilin Company (Br. fr. n° 386.552) : acétate de: zine naissant, obtenu en mettant en présence, dans. le mélange réagissant, de la poudre de zinc et de. l'acide acétique; les Farben-Fabrik vorm. Fr. Baeyer (Br. fr. n° 375.590) : acétate de chaux; la Badische Anilin und Soda-Fabrik (Br. fr. n° 375.444) : acétate de zinc; MM. Béhal, Magnier, Tissier (Br. fr. n° 349.896) : acétate de plomb. Von Heyden (Br. fr. n° 365.814), pour varier un peu, utilise l'acide formique et le formiate de zinc, de cuivre ou de fer. Dans un ordre d'idées un peu différent, la Clayton Anilin Company (Br. fr. n° 315.077) pré- tend que le chauffage du chlorhydrate de pinène, de l'acide acétique avec des traces de sels de zinc G. BLANC — LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. SON AVENIR INDUSTRIEL 123 conduit au résultat cherché, l'acide chlorhydrique étant éliminé peu à peu. Bien entendu, les brevets ne aucun détail sur la façon exacte dont il convient d'opérer; mais, d’après les exemples donnés, il est certain qu'il faut employer un énorme excès d'acide acétique. Par exemple, dans le Brevet Baeyer (n° 375.590), il faut 500 d'acide contre 172 de chlorhydrate de pinène traité. De plus, il faut opérer en vase clos à une tempé- rature élevée, donc à une pression considérable, ce qui exige une malériel coûteux qui ne résiste pas toujours. D'un autre côté, l'acide acétique coûte cher, il ne peut être récupéré intégralement, et il ne faut pas oublier que le produit final, le camphre, ne vaut pas actuellement plus de 4 fr. 50 le kilog. D'ailleurs, le rendement, dont on ne parle pas, ne doit pas être élevé. Une partie du chlorhy- drate de camphène est bien transformée en acétate d'isobornyle, peut-être pour 25 à 30 °/,; le reste passe à l’état de camphène et d’autres carbures qu'il faut séparer de l'acide acétique par des fraction- nements qui ne peuvent être sans pertes. Déjà, à partir du pinène, le même chlorhydrate ne se fait, dans les meilleures conditions, qu'avec un rende- ment qui ne dépasse pas 80 °/,, et il reste encore à saponifier l’acétate d'isobornyle et à l’oxyder. Pour qu'une série d'opérations aussi longue, ayant pour but la fabrication d'un produit à 4 fr. 50 le kilog, puisse présenter des chances de réussite, il faudrait que chaque transformation se fit pour ainsi dire intégralement. Nous en sommes, hélas! bien loin: il faudrait également que les produits intermédiaires fussent à bon marché par rapport au produit final et qu'on püt les récupérer sans frais et sans perte, ce qui n’est pas encore le cas. Nous laissons intentionnellement dans l'obscu- rité, d'où ils n'auraient jamais dû sortir, plusieurs brevets se rattachant à ce sous-groupe 4). Nous ne pourrions pas en parler sans sortir du terrain exclusivement scientifique sur lequel nous nous sommes placé. D) La transformation classique du chlorhydrate de pinène en camphène a fait l’objet d’une quantité de brevets. En principe, il suffit de chauffer à haute lempérature avec des bases alcalines, ou alcalino-terreuses, ou des sels de certains métaux, ou encore avec des bases organiques. Citons les principaux brevets : Von Heyden (D. R. P. n° 184.635) utilise les sels organiques du zine, du fer et du cuivre, avec ou sans addition de chlorure de zinc. Schmitz (Br. fr. n° 384.905) emploie la soude aqueuse à la température de 200°. Sandoz (Br. fr. n° 386.928) chauffe le chlorhy- donnent drate de pinène avec des alcalis, de l'eau et le sel de sodium de l'acide paratoluène-sulfonique (on ne voit pas bien pourquoi, d'ailleurs). La Clayton Anilin Company (Br. am. n° 896.962 emploie la pyridine; Koch (Br. fr. n° 377.311) se sert de phénolate de chaux; Baseler (Br. am. n° 875.137), de stéarate de plomb; la Société pour la fabrication des matières plastiques (Br. fr. n° 349.815), de nicotine. Plus sérieux, sauf le dernier, sont les brevets Schéring : Chemische Fabrik auf Actien (Br. fr. n,9321:851"et 321-854, D. RP. n° 449.791 «et 154.107), préconisant l’action du chlorhydrate de pinène sur l’ammoniaque gazeuse et en solution alcoolique, et l'emploi du savon de soude, d'une part, et de certaines bases pyridiques et quino- léiques, de l’autre. La Clayton Anilin Company (Br. fr. n° 369.449) a breveté également l’action de la quinoléine. Enfin, la PBadische Anilin-und Soda-Fabrik (Brev. fr. n° 368.170) utilise le phénolate ou le naphtolate de soude avec excès d’alcali. Il ne parait pas douteux qu'on puisse, à partir du chlorhydrate de pinène, obtenir du camphène avec un bon rendement et dans des conditions économiques acceptables. Il ne faut pas prendre au sérieux les procédés qui utilisent des agents de transformation chers comme les bases pyridiques, quinoléiques, la nico- tine (!), qu'on ne peut manipuler sans pertes et sans risques de voir augmenter le prix de revient. Au contraire, le brevet Schering, n° 321.851, à l’ammoniaque gazeuse, qui conduit à un rende- ment de 90 °/, (soit 72°}, à partir du pinène), doit être considéré comme très intéressant. Malheureu- sement, il utilise un outillage assez délicat. Tout irait bien, néanmoins, si l'on pouvait trans- former à bon compte le camphène en camphre. Si la méthode Bertram-Walbaum (conversion en isobornéol) fournissait des résultats industrielle- ment intéressants, le problème serait résolu; mais cela ne parait pas être le cas, puisqu’un brevet (Br. fr. n° 383.557, de Verley, Urbain, Feige) revendique un perfectionnement de cette méthode, perfectionnement qui apparait, d’ailleurs, comme un bluff intense. Schmitz (Br. fr. n° 385.341) propose l'hydrata- tion du camphène par l'acide sulfurique étendu. La dissolution du carbure dans l'acétone, chauffée à 100° en autoclave, fournirait, paraît-il, de l’isobor- néol. Cela est des plus douteux. Quant au brevet Baseler (Br. am. n° 876.310), qui préconise l'hydratation par l’acide oxalique en pré- sence d'une petite quantité d'acide sulfurique, il ne peut être, lui aussi, pris en considéralion. Bref, il n'existe pas de brevet solide et bien G. BLANC — LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. SON AVENIR INDUSTRIEL établi pour la transformation du camphène en camphre. Existe-t-il une méthode (perfectionne- ment du procédé Berthelot, par exemple) qui serait susceptible de fournir directement du camphre par oxydation du camphène? Cela n'est pas impossible, et il se peut qu'un industriel prudent l'ait exploi- tée à une certaine période où les cours étaient en hausse, tout en gardant un secret absolu. Pour nous en tenir strictement à la discussion des brevets, il ne paraît pas probable que la méthode 2) (monochlorhydrate de pinène —+ cam- phène _+ isobornéol —> campbhre), bien que pro- bablement supérieure à la méthode a) (monochlor- hydrate de pinène —+ acétate d'isobornyle — iso- bornéol —>+ camphre), constitue encore un procédé de choix. Il y a trop de transformations successives par lesquelles ilfaut passer, qui nécessitent chacune leur matériel, et dont le rendement individuel est trop éloigné de la théorie. Nous ne pouvons pas quitter le monochlorhy- drate de pinène sans parler de deux procédés fort intéressants en théorie, mais industriellement impraticables (Hesse, D. R. P. n° 182.943, et Chemische Fabrik aul Actien, Br. fr. n° 359.547). Ils consistent tous deux à préparer le magnésien du chlorhydrate de pinène et à l’oxyder par un courant d'air; on oblient ainsi de l’isobornéol. La cherté du magnésium, la dépense énorme d'éther que la méthode comporte, sont des obstacles absolus à sa mise en pratique. IV Passons au deuxième groupe, celui des brevets qui revendiquent la transformation directe du pinène en isobornéol ou en éthers de cet alcool. Les conditions dans lesquelles le pinène peut se transformer en isobornéol n’ont jamais été étudiées scientifiquement. Bouchardat a signalé autrefois cette transformation, qui, dans ses expériences, ne se fait qu'avec un très faible rendement. Les brevets que nous citons onttousla prétention de résoudre le problème au point de vue industriel. Zeitschel (Br. fr. n° 379.430) traite le pinène par es acides organiques à 2009. Austerweil (Br. fr. n° 392.159) est plus modeste que le précédent et se contente de revendiquer l'acide benzoïque. Weitz (Br. fr. n° 392.247) entend perfectionner le brevetprécédentpar l'addition au mélange de poudre de zinc. Von Heyden (Br. fr. n° 339.504) utilise l'acide salicylique ; on chaufferaitpendantcinquante heures le mélange acide salicylique et pinène, en allant progressivement jusqu'à 130. L'Ampère Electrochemical Company (Br. amé- ricain n° 833.095) chauffe un mélange d'acide oxalique sec et de pinène à une température quine doit pas dépasser 120°; on obtient ainsi du formiate d'isobornyle, qu'on isole par fractionnement et d'où il est aisé de retirer l'isobornéol. La Chemische Fabrik auf Actien (Schering) (D. R. P. n° 179.086) améliore le brevet précédent en portant à une très douce température (inférieure à 50°) le mélange de pinène et d'acide oxalique sec, étendu préalablement de CCI‘ et additionné d’une petite quantité de chlorure d'aluminium. Comparée à la méthode qui nécessite la transfor- mation préalable en chlorhydrate de pinène, cette méthode montre, de prime abord, une supériorité incontestable, de par le moins grand nombre de réactions successives et la simplicité ées appareils. En particulier, le procédé de la Chemische Kabrik auf Actien doit être pris en très sérieuse considéra- tion. Si l’on admet un rendement probable de 40°}, à partir du pinène, tous les procédés signalés précé- demment doivent lui céder le pas. Il est assez difficile de se faire une idée exacte du prix de revient du camphre fabriqué par ce procédé. Bien que très simple, il nécessite cependant un certain matériel (agitation pendant la réaction, fractionne- ment des produits, saponification des éthers, ete.); en supposant l'essence de térébenthine à 100 francs les 100 kilogrammes, le camphre ressortirait encore à 5 à 6 francs le kilogramme. Nous n'avons parlé jusqu'ici que de la transfor- mation du pinène en isobornéol; il reste à oxyder celui-ci en camphre. À bien réfléchir, il ne semblerait pas qu'il soit nécessaire de prendre des brevets pour utiliser les oxydants usuels (mélange chromique, permanga- nate, acide nitrique, ete.…..). C'est pourtant ce que nombre d'industriels ont fait, et c'est ce qui montre clairement le but d'inti- midation que la plupart de ces brevets poursuivent. MM. Verley, Urbain et Feige (Br. fr. n° 383.558) emploient le mélange chromique. Schmitz (Br. fr. n° 387.053) oxyde l'isobornéol par la pyrolusite à la température de 250°. La Société pour l'Industrie chimique à PBäle (Br. fr. n° 387.539), Glaser (Br. am. n° 875.062) font de l'oxydation électrolytique dans un milieu indifférent (benzène, toluène). Boehringerund Sühne(D.R.P.n°177.290et D.R.P. n° 179.738), Schmitz (Br. fr. n° 383.149), Hertkorn Br. am. n° 901.718), la Société PBäloise (Br. fr. n° 362.956) utilisent l'action du chlore ou des hypochlorites dans des conditions variées. La Société Bäloise (Br. fr. n° 377.926), Bæhringer und Sühne (D.R.P. n° 182.300), Von Heyden (Br. fr. n° 365.974) emploient l'acide nitrique avec ou sans mélange de vapeurs nitreuses. G. BLANC — LE CAMPHRE SYNTHÉTIQUE. SON AVENIR INDUSTRIEL 725 Schmitz (Br. fr. n° 385.342) oxyde les alcoolates métalliques de l'isobornéol (isobornéolate de soude, par exemple) dans un courant d'air sec. Schering, Chemisehe Fabrik auf Actien (Br. fr. n° 353.919), oxyde l'isobornéol par l'ozone; la même firme {même brevet) revendique l’oxydation catalytique par le cuivre et, dans les brevets n° 349.398 et 341.513, l'oxydation par le mélange chromique acélique et le permanganate en solution aqueuse. Tout cela n'est guère sérieux. D'ailleurs, ce côté de la question n’a aucune importance; il y a beau- coup de bons procédés pour faire facilement du camphre en partant de l'isobornéol et aucun n'est brevetable. Toute la difficulté réside, comme nous l'avons exposé, dans l'obtention de cet alcool. Tel est, très brièvement résumé, l'élat de la question du camphre synthétique. A notre avis, le seul procédé qui permette de pro- duire ce corps est actuellement celui qui est décrit dans le brevet Schering n° 179.086, brevet qui est lui même un perfectionnement de celui de l'Ampere Electrochemical Company (Br. am. n° 833.095). Ce procédé et peut-être aussi le procédé décrit aux brevets n°% 321.851 et 321.854 et D. R. P. n° 149.791 et 154.107, ont du être exploités avec bénéfices au moment des hauts cours du camphre. Il y a fort à penser qu'aujourd'hui toute exploitation a cessé. Il ne faut pas perdre de vue, d’un autre côté, que la fabrication intensive du camphre artificiel déter- minerait une absorption d'essence de térébenthine proportionnelle, absorption dont ne manquerait pas de profiter le marché de ce produit. Sa situation calme est tout à fait significative à cet égard. \ Nous sommes arrivé à cette conclusion qu'au- dessous d'un certain cours, le camphre synthétique ne peut lutter avec le camphre naturel; et le jeu du monopole japonais est évidemment de maintenir les prix suffisamment bas pour obliger toutes les usines allemandes à interrompre leur fabrication, et même à disparaitre, car on ne peut, sous peine de faillite, laisser chômer un matériel coûteux qui comporte des frais d'amortissement élevés. A l'époque où la guerre russo-japonaise, en ren- dant l'exportation des produits japonais difficile, a contribué à une hausse énorme du camphre (15 francs le kilogramme), il est à peu près certain que le produit artificiel a pu se fabriquer en don- nant des bénéfices; mais cette situation n'a pas duré, et aux cours actuels (4 fr. 30) nous estimons qu'il n'y à aucune concurrence possible. Combien de temps cel état de choses peut-il durer, c'est ce qu'il est très difficile de présager. Beaucoup d'évé- | nements peuvent le modifier. En première ligne de produire le camphre. Pour son extraction, en effet, vient la difficulté croissante pour les Japonai on abat des arbres extrêmement âgés, qui ne repoussent naturellement pas. On repeuple, il est vrai, et on favorise le reboisement, mais ces Jeunes plants ne seront productifs que dans une trentaine d'années. Les immenses forêts de Formose ne sont pas près d'être épuisées, c'est vrai; mais toute la côte est à peu près déboisée, et l’on ne pénètre à l'intérieur qu'avec de grandes difficultés, et pour se trouver aux prises avec les terribles chasseurs de tètes dont l'activité rend toute exploitation extré- mement périlleuse. Il arrivera donc un moment où, les vieux arbres ayant disparu, ou étant devenus d’un abord difficile, on se trouvera en face de Jeunes plants qui seront eux-mêmes rapidement détruits. Cette conjecture fâcheuse pourrait, paraît-il, être évitée en se bornant à cueillir les feuilles, riches en camphre (cette richesse est environ le double de celle des rameaux). Mais, outre qu'on ne voil pas bien comment cette cueillette pourrail se faire à bon compte, l'arbre ne doit pas pouvoir résister longtemps à un pareil traitement. Il faut done s'attendre, à un moment donné, à une hausse dont l'industrie du camphre synthé- thique pourra peut-être profiter. Il est à craindre qu'à ce moment-là le camphre ait cessé d'être un produit intéressant. Nous avons dit plus haut que son principal débouché était la fabrication du celluloïd. Déjà on a essayé, sans grand succès d'ailleurs, de le rem- placer par des succédanés, dont le très grand nombre (plus de 400) indique suffisamment que pas un seul n'est réellement bon. Mais rien ne prouve qu'on ne trouvera pas un jour la solution. Enfin, le celluloïd lui-même est un produit telle- ment dangereux qu'il peut être, d'un moment à l'autre, l'objet de mesures prohibitives. Les recherches actuelles sur les acétates de cellulose peuvent, dans un avenir très proche, lui porter un coup fatal. Résumons-nous done en deux mots : à l'heure actuelle, le camphre synthétique ne peut faire con- currence au camphre naturel. Il y a toutes proba- bilités, d'autre part, pour que la production du produit naturel soit aux prises sous peu avec des difficultés qui auront pour conséquence une hausse permettant la concurrence du produit synthétique. Mais, à ce moment, l'industrie du celluloïd aura peut-être complètement disparu et toute la question sera devenue sans aucun intérêl. L'avenir nous apprendra si ces prédictions ont quelque valeur. G. Blanc, Docteur ès sciences. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS LA GENÈSE DES INSTINCTS ESCLAVAGISTES ET PARASITAIRES CHEZ LES FOURMIS PREMIÈRE PARTIE : LES FAITS On s'est préoccupé bien davantage, jusqu'ici, dans les conceptions évolutionnistes, de la genèse des formes que de la genèse des fonctions ; et, dans la genèse fonctionnelle, le mode de se comporter des organismes, leurs instincts, offrent des pro- blèmes dont on a fait, pour le transformisme qu'on enterre tous les jours, mais qui ne s’en porte jusqu'ici pas plus mal, des pierres d’achoppement insurmontables. Aussi doit-on porter toute son attention sur les très nombreux travaux qui ont, en ces dernières années, renouvelé la question de l'esclavagisme chez les fourmis, dont Darwin avait donné une interprétation très plausible, mais toute hypothétique, relativement à ses origines. Nous tâächerons de rapporter exactement les con- ceptions que Wasmann, Wheeler, Émery, Santschi, se font à l'heure actuelle de cette question, et de mettre en lumière aussi bien ce qu’on peut considé- rer Comme provisoirement acquis que ce qui reste inexpliqué et inconnu, de déterminer ce qui appa- rait clairement aussi bien que ce qui reste obscur encore. Mais, avant d'examiner les théories, nous devons résumer les faits connus qui leur servent de bases, et dont certains, établis depuis peu, ont justement renouvelé les conceptions théoriques. L'exposé de ces faits constituera donc la première partie de cette étude. On ne doit pas oublier que, à côté des mâles qui sont à peu près négligeables, les femelles de fourmis peuvent être spécialisées, soit pour la reproduction proprement dite, pour la ponte, soit pour les soins collectifs aux larves, avec des formes intermédiaires entre la femelle véritable et l’ou- vrière, improprement appelée neutre, formes qu'on appelle, selon la prédominance morphologique, femelles ergatoïdes, ou ouvrières gynécoïdes. Mais, les origines des fourmilières variant selon les instincts, les capacités des femelles, il est utile de distinguer, dans l'exposé des faits, ce qui relève de ces dernières et ce qui estle propre des ouvrières de même espèce, car diverses combinaisons d'instincts se peuvent rencontrer, et aux mêmes instincts apparents des femelles ne correspondent pas nécessairement les mêmes instincts des ou- vrières. ' I. — LEs FEMELLES. (LA FONDATION DES COLONIES.) $S 1. — Fondation d'un nid nouveau par une femelle isolée. La fécondation s'opère généralement chez les fourmis au cours d’un vol nuptial qui se produit à un moment donné, le même, la plupart du temps, pour les nids d’une certaine espèce dans une région, et déterminé par des facteurs météorologiques encore mal connus. A la suite de ce vol, mâles et femelles retombent. sur le sol pour ne plus le quitter. Les premiers meurent; les secondes perdent leurs ailes, qu'elles arrachent au besoin elles-mêmes, avec une grande facilité. Dès lors, chez certaines espèces, les femelles vont s'occuper aussitôt de creuser un abri pour leur descendance ; elles établissent un nid et y pondent, puis élèventleurs larves. C'est le cas, par exemple, chez les Camponotinæ, du Zasius niger, la petite fourmi noire commune des jardins, et de ses diverses races, du ZLasius flavus, de la Formica fusca, extrèmement répandue également, et de ses races cinerea, qagates, rufibar- bis,etce., enfin des Camponotus d’une facon générale ; chez les Wyrmicinæ, d'un grand nombre d'espèces, en particulier des Myrmica, de certains Leptotho- rax et Temnothorax, du Cremastogaster seutellaris, du Tetramorium cæspitum, du Messor bar barus et enfin des A{{a*. ‘ Cf. BLocamann : Ueber die Gründung neuer Nester bei Camponotus ligniperdus Latr. und anderen einheimischen Ameisen. Zeitschr. {ur wissenschaftl. Zoologie, t. XLI, 4885, p. 719-797. A. Forez : Origine d'une fourmilière de Camponotus ligni- perdus Latr. Ann. de la Soc. entomol. de Belg., t. XLNI, 1902, p.180-182 et p. 294-296. — Einige biologische Beobach- tungen des Herrn Prof. Dr E. Gœældi an brasilianischen Ameisen. Biolog. Centralblatt,t. XXV, 1905, n° 6, p. 1170. Ca. Janet : Etudes sur les fourmis, 3° note. Bull. de la Soc. zool. de France, t. XVII, 1893, p. 168-471. — Observa- tions sur les Fourmis, 1904, p. 33-35 (Fondation de colonies nouvelles). E. Emery : Sur l'origine des fourmilières. C. VIe Congrès internat. de Zoologie, 1904, p. 459-461. Von Burrec-REEPEN : Sociologisches und Biologisches von Ameisen und Bienenstaat. Wie entsteht eine Ameisenkolo- nie. Archiv {ur Rassen-und Gesellschaftbiologie, t. 11, H. 1, janv.-fév. 1905, p. 41. Az. Mrazek : Gründung neuer Kolonien bei Lasius niger R., du HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS Celle fondation ne va évidemment pas sans diffi- culté, car la reine fondatrice, isolée dans le nid qu'elle se creuse, ne peut trouver que bien difficile- ment des aliments pour se nourrir et pour nourrir ses larves. En ce qui concerne les matériaux alimentaires qui servent à la formation des œufs, la femelle parait les trouver en elle-même par une véritable métamorphose éludiée par Charles Janet"; elle vit aux dépens des énormes muscles thoraciques alaires qui n’ont servi que quelques heures et sont devenus définitivement inutiles. Les Afta possèdent, en outre, un moyen de se pro- curer assez vile des aliments pour les larves : Von Ihering a constaté que les femelles d’Afta sexdens, en quittant leur colonie maternelle, emportent dans leur hypo-pharynx une boulette de filaments mycéliens du champignon cultivé par cette espèce, un Æhoziles ; en fondant leur nid nouveau, elles crachent leur dépôt et le cultivent en employant leurs excréments, et même, en certains cas, instinet bien curieux qui aurait été observé par Gældi sur Zeïtschr. für wissensch. Inseklenbiologie, 1906, t. II, 3-4, p. 109-111. W. H. Sourncomee : Formation of a new Nest by Lasius piger. Trans. Ent. Soc. London, 1907, p. LXXV-LXXVII. Mayer : Das Leben und Wirken unserer einheimischen Ameisen, 1864. G. Lincecuu : The agricultural Ant. American Naturalist, t. VII, 1874, p. 514-515. — On the agricultural Ant of Texas. Proc. of. Ac. of Nat. Sc. Philadelphia, 1866, t. XVII, p. 323. Me Cook : The Natural History of the Agricultural Ant from Texas. Philadelphie, 1879. — How a Carpenter Ant found a colony. Procced. Philad. Acad. of Natur. Science, t. XXV, 1883, p. 303. WugELErR : À new agricultural Ant from Texas, with remarks on the known North American Species. Amer. Natural., t. XXXII, févr. 1902, p. 94. — On the founding of eolonies by Queen-Ants. Bulletin of the Amer. Museum of Natural History, t. XXII, 1906, p. 33-105. Goecpt : Beobachtungen über die erste Anlage einer neuen kolonie von A/ta cephalotes. C. R. du VIe Congrès intern.de Zoologie, 1904, p. 457-458. H. von Ierino : Die Anlage neuer Kolonien und Pilzgär- ten bei Af{a sexdens. Zoologischer Anzeïger, 1898, t. XXI, p. 238-245. Jakos Huger : Ueber die Koloniegründung bei Att{a sex- dens. Biologisches Centralblatt, 1905, t. XXV. E. Wasuwanx : Ursprung und Entwickelung der Sklaverei bei den Ameisen. Biol. Centr., 1905, n° 18, p. 606-619, et n°49, p- 625-635. — Weitere Beiträge zum sozialen Parasitismus und der Sklaverei bei den Ameisen. Biolog. Centralblatt, t. XXVIIL, avril-juillet 1908. H. Prérox : Fourmis bâtisseuses, fileuses et agronomes. Revue Scientifique, 1905, t. IV, p. 310-312. — La genèse de l'instinct esclavagiste de certaines espèces de fonrmis. Ibid., p. 820-823. — Sur la fondation de nouvelles colonies d'Aphænogaster barbara nigra. Bull. de la Soc. entom. de France, 1907, n° 16, p. 280-282. * Cn. Jaxer : Remplacement des muscles vibrateurs du vol par des colonnes d’adipocytes, chez les fourmis, après le vol nuptial. C. R. de l'Ac. des Se., t. CXLIT, 1906, p.1096. — Histolyse, sans phagocytose, des muscles vibrateurs du vol chez les reines des Fourmis. /d.,t. CXLIV, 1907, p. 393. — Histogénèse du tissu adipeux remplacant les muscles vibra- teurs histolysés après le vol nuptial chez les reines des Fourmis. /d., t. CXLIV, 1907, p. 1070. les mêmes A//a milieu de sexdens, en fournissant comme culture véritable premiers œufs broyés : une purée de leurs dans tous les cas, les œufs servent bien de milieu de culture, car Jacob Huber, par ses observations continues, appuyées de fort belles photographies, a montré que la femelle se nourrissait de ses propres œufs et déposait les exeréments sur les champignons’. Ainsi les œufs, qui se développent aux dépens des museles alaires et représentent des parcelles de la substance propre de la femelle, peuvent, chez cette espèce et chez bien d'autres, aux instincts moins compliqués, ser- vir à l'alimentation directe de larves épargnées se développant aux dépens de leurs sœurs”, non sans que la femelle, participant à ce festin, ne réabsorbe quelques-uns des produits de sa ponte. Mais, malgré tout, c’est une période difficile à passer et en somme un long jeüne, de plus d'un mois dans tous les cas, à subir pour la femelle isolée ; les premières ouvrières qui naissent de son élevage, comme Émery l'a constaté chez le Cremas- togaster scutellaris et de Lannoy chez le ZLasius niger”, ne sont pas sans pätir de cet état de choses; leur taille est bien moins grande que celle de leurs cadettes ultérieurement développées, et que leur activité permettra de nourrir de facon plus satis- faisante. Cette fondation par la femelle seule se rencontre chez des espèces qui paraissent justement avoir la plus grande ancienneté : La Formicsa Flori Mayr, seule espèce de Formica trouvée dans l’ambre de la Baltique, du Tertiaire inférieur (Éocène), ne se dis- tingue par aucun signe net de la Formica fusea ; c'est une fusca. De la même époque datent des Myrmica voisines des nôtres, et un ZLasius, le L. Schiefferdeckeri, qui est une forme ancienne du L. niger *. Mais il n'y a pas lieu de s'étonner que d'autres modes de fondation des colonies nouvelles puissent 1 J. Huger a fait des observations, soit dans la nature, soit en nid artificiel; il a constaté que le développement de la colonie exige quarante jours pour l'apparition des premières ouvrières; jusque-là, la femelle ne se nourrit pas du champignon et ne s'en sert pas pour nourrir ses larves, à qui elle donne des œufs comme aliments; au contraire, les premières ouvrières utiliseront le champignon et en nourriront la femelle. 2 11 y a là un fait analogue à celui qu'on constate dans l'embryologie végétale, où l'embryon des Phanérogames se développe aux dépens d'un tissu nourricier, l'albumen, qui n’est autre que le résultat du développement du sac em- bryonnaire, frère de l'oosphère devenue œuf par féconda- tion, développement dù également à une fécondation par un des deux anthérozoïdes mèles. 3 F. pe Lannoy : Notes sur les mœurs du Lasius niger. Ann. de la Soc. entom. de Belgique, {. L, 1906, p. 45-46 : Les premières ouvrières apparaissent au bout d'un à deux mois. 4 Mayr : Ameisen des baltischen Bernsteins, p. 32. — WageLer : Comparative Ethology of the European and North American Ant. Journal für Psychologie und Neurologie, t. XIIL, 4908 (Festschrift Forel), p. #10. -1 19 (w°] HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS ètre apparus, plus favorables que ce mode primitif; nous allons les examiner successivement, en signa- lant seulement la possibilité, en certains cas, de l'association de diverses femelles pour la fondation du nid {Messor, par exemple) ou, au contraire, la rivalité et la lutte des femelles se terminant par la mort de l’une d’entre elles, comme c'est le cas chez le Zasius niger. On peut done trouver, dans ce stade primitif, soit une tendance à l'association, à la collaboration pacifique, soit une tendance à la lutte et à la violence, chez les femelles capables de mener à bien, sans secours et sans aide, la fondation d'une colonie et d'un nid nouveau. $ 2. — Fondation d’une colonie nouvelle dans un nid préexistant. Normalement, on rencontre une tendance à uti- liser, chez les femelles qui creusent un nid, des petites cavités constituant déjà un abri; mais on voit fort bien les femelles de J/essor creuser la terre battue des sentiers et v faire un trou qui ne deviendra d'ailleurs que bien rarement l'abri d'une fourmilière. La tendance à profiter d'ébauches de nids peut être poussée plus loin, et certaines femelles s'ins- tallent dans un nid d'espèce différente pour y fon- der une colonie par leurs propres moyens, si le nid est abandonné : Les constructions des Pogonomyr- mex sont utilisées par des Dorvmyrmexpyramieus, des Forelius fwtidus, des Formica sanguinea en Amérique, d'après Wheeler et Mc Cook: en Europe, les nids de nos fourmis des forêts peuventse trouver | occupés par des Lasius, des Myrmica,des Tetramo- riun. Il y a des espèces qui se contentent d'établir leur nid au voisinage immédiat du nid d'une espèce voisine. Les choses se passent ainsi, par exemple, pour les petites Solenopsis fugax, qui ont fréquemment leur nid tout autour de celui des grosses Messor barbarus dans le sud-ouest de la France; d’étroits couloirs, percés par les Solenopsis, permettent à celles-ci de s’introduire dans le nid des H/essor où elles vont piller les greniers à provisions, sans pou- voir être poursuivies bien loin, leur couloirs exigus ne pouvant permettre le passage des Messor. Mais ces dernières ne tolèrent pas les rapts de leurs voi- sines, qui s'y livrent à leurs risques et périls. Les Solenopsis s'installent ainsi autour des nids de Formica sanguinea, de F. fusca, de F. rufibarbis, de F. pratensis, de Polverqus, de Lasius alienus, de diverses Myrmica, des Tetramorium, ete. C'est là un mode de vie appelé cleptobiose par Wheeler, lestobiose par Forel, et qui se rencontre chez d'autres Solenopsis, comme le S. orbula Em., le S. latro For , et le S. oraniensis For. dans le nord de l'Afrique, ou leS. debilis en Amérique, et même, dans lenouveau Continent, chezdesespèces d'autres genres : une espèce de Wonomorium, une de Stru- migenys, ainsi que chez les Pheidole lamia Wh.'. D'autres espèces s'installent directement à l'inté- rieur de nids encore occupés par leurs hôtes; mais alors il faut que la femelle, pour s'installer ainsi, soit tolérée par les premiers occupants : il y a là un fait nécessaire. Or, ce fait a élé mis en doute par miss Fielde d'une facon absolument générale* : une femelle introduite dans un nid d'une autre espèce serait toujours, et sans exception, attaquée et mise à mort. Les observations de miss Fielde étaient exactes, mais elle a eu la très grande imprudence d’universaliser ses résultats : la facon de se com- porter des fourmis est extrèmement variable, et les observations ne valent que pour les espèces sur lesquelles elles portent et les circonstances dans lesquelles elles sont faites. Or miss Fielde a exa- miné des espèces non symbiotiques, intolérantes, alors que d’autres manifestent une tolérance plus ou moins grande. Les objections théoriques de miss Fielde sont d'ailleurs sans valeur, étant donné que l'acceptation de femelles par des ouvrières étrangères est un fait qui a été constaté maintes fois et dans des circonstances très précises. En particulier, ilexiste des espèces qui acceptent une communauté de vie très complète avec des espèces différentes ; ce sont, par exemple, le Stig- matomma pullipes, le Pogonomyrmex malefaciens, l'Eciton Schmitti, le Leptothorax emersoni, la Myrmica brevinodis, peut-être même l’Atta sex- dens, d’après Wheeler. La tolérance s'étend alors aux ouvrières adultes elles-mêmes. Sans aller jusqu'à la symbiose, certaines espèces : en sont sur la voie, en présentant ce que Forel a appelé de la « parabiose »; ce qui signifie que, vivant dans des nids distincts, elles ont cependant des rapports de bon voisinage et ne se battent jamais. Que le passage de la parabiose à la sym- biose puisse s'effectuer, Forel en a donné une démonstration effective : il obligea les hôtes de deux nids établis dans des branches de noyers, des Dolichoderus quadripunctatus et des Colobopsis truncata (espèce caractérisée par la présence de soldats à tête tronquée pouvant fermer exactement l'ouverture du nid), à une cohabitation dans un bocal où se trouvait une branche de noyer; après ! \WV8eeer : The Compound and Mixed Nests of American Ants. Americ. Natural., 1901, t. XXXWV. A. Forez : Observations sur les mœurs de Solenopsis fugax. Mittheil. der Schweiz. entomol. Gesellschaft, 4869, t. III. — Fourmis termitophages. Lestobiose. Ann. de la Soc. entomol. de Belgique, 1901, p. 392. ? Miss Freuve : The progressive odor of Ants. Biological Bulletin, déc. 4905, t. X, n° 1, p. 1-16. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 129 une période de légère hostilité, les individus des deux espèces vécurent dans un mélange complet, mais en gardant une vie entièrement indépen- dante; il n'y avait que le local de commun. C'est à une telle origine que peuvent évidem- ment se rapporter les nids mixtes accidentels, comme celui de lolichoderus et de Cremasto- gaster que Forel' trouva installés côte à côte en Colombie dans une fourmilière, où ceux de Campo- uotus, Cr yptocerus et Cremaslogaster que Wheeler observa dans les feuilles repliées de 71/landsia, au Mexique. L'indépendance des éléments composants de ces nids mixtes accidentels ne se rencontre pas en général chez les fourmis symbioliques, et il arrive que les individus d'une espèce deviennent plus ou moins complètement parasites de l'autre, vivant aux dépens des provisions de leurs associés, ou même se faisant nourrir par ces derniers. Les espèces ainsi tolérées et soignées par d'autres, mais gardant leur indépendance, sont dites myrmé- cophiles, par analogie avec les hôtes variés et nom- breux tolérés dans les fourmilières et qui sont ainsi nommés. Mais, dans ces espèces, la femelle fonde sa colonie par ses propres moyens sans s'associer aux premiers occupants ; elle est tolérée, et c'est tout; elle n'est donc pas véritablement parasite. Tel est le cas pour la femelle du #ormicoxenus nilidulus, qui s'installe dans un nid de Æormica rufa ou de F. pratensis, et celle de Formicoxenus Ravauxi, dans un nid de Leptothorax unifasciatus ; celle de Symmyrmica chamberlini, qui abrite sa couvée chez des Wyrmica mutica, celle de Lepto- thorax emersoni et de sa variété glarialis que tolère la Myrmica brevinodis, et peut-être celle de Xeno- myrmex stolli trouvant l'hospitalité dans un nid de Camponotus abscissus*?. La très grande tolérance des Leptothorax, d'une facon générale, a été constatée par de nombreux auteurs, tels que Wasmann, Forel, Adlerz, Wheeler, chez le Z. acer vorum, le L. muscorum, le L. tube- rum, en Europe, le Z. canadensis, le L. petiolatus, 4 A. Forez : La parabiose chez les fourmis. Bull. de Ja Soc. vaud. des Sc. naturelles, 4901, t. XXXIV, p. 380-384. — Faune myrmécologique des noyers dans le canton de Vaud. Zd., 1903, t. XXXIX, p. 83-94. — Sklaverei, Symbiose und Schmarotzertum bei Ameisen. Mittheil. der Schweiz. entom. Gesellschaft, 1905, t. XI, p. 85-89. ? Ce. C. Emerx : Ueber den Ursprung der dulotischen, parasitischen und myrmekophilen Ameisen. Biolog. Cen- tralblatt, t. XXIX, n° 11, {+ juin 1909, p. 351. A. Forez : Etudes myrmécologiques. Ann. de la Soc. entom. de Belgique, 1886, t. XXX. GoTTFRIED AbLERZ : Myrmecologiska Studier. 1. coxenus nitidulus Nyl. Stockholm, 1884. W.-M. WareLer : Notes on a new guest-ant, Leptothorax glacialis, and the varieties of Myrmica brevinodis Em. Bull. Wisc. Nat. Hist. Soc., t. V, n° 2, 1907, p. 11-85. Formi- le L. emersoni var. glacialis, le L. curvispinosus en Amérique, etc." I n'est done pas étonnant qu'il y ait, dans les espèces de ce genre, une tendance très générale à la myrmécophilie, soit en jouant le rôle d'hôte adopté (de « Wirt »), comme le Leptothorax emersoni, soit en jouant le rôle d'hôte adoptif, d'amphitryon (de « Gast »), comme le ZLeptothorax unifasciatus et les autres Zcplothorax européens, ou le Z. cur- rispinosus d'Amérique. S 3. — Fondation d’un nouveau nid avec l’aide d'ouvrières de la même espèce. Toutes les femelles ne fondent pas toujours de nouveaux nids ; il ÿ en à qui peuvent retourner à leur ancien nid et contribuer à le perpétuer: c’est ce qui se passe, par exemple, pour un certain nombre de femelles de Formica fusca, retombant après le vol nuptial dans les environs du nid et y retournant, soit spontanément, soit ramenées par des ouvrières ; peut-être même y en a-t-il qui sont ainsi ramenées dans des nids voisins. Le même cas parait pouvoir se présenter pour les Formica rufa dites «acervicoles », à cause des dômes qui surmontent leurs nids, bien connus des éleveurs de faisans qui vont en ravir les nymphes et les larves. Mais, tandis que la femelle de Æormica lusca peut fonder seule un nouveau nid, la femelle de Formica rufa en est incapable ; si elle ne revient pas à son nid primitif, il lui faut du moins l'aide d'ouvrières adultes pour en fonder un nouveau: des ouvrières de son propre nid, celui-ci étant lrès peuplé, peuvent suivre la femelle fécondée et constituer ainsi une colonie de scission s'élablis- sant dans un nid nouveau. C'est là, du moins, un fait extrèmement probable, bien qu'il ne soit pas démontré par des observations précises. Mais le cas le plus général, pour la fourmi rousse des forêts, c’est la chute de la femelle, après le vol nuplial, auprès d'autres nids que son nid d'origine ; et la fondation de la colonie se fait dès lors avec l’aide d'ouvrières étrangères de même espèce. Il y à adoption de la femelle par des ouvrières d'une autre colonie ; mais le nid constitué ne per- met pas de retrouver sa genèse, puisque la colonie nouvelle est une colonie pure de #. rufa ; on s'aper- - coit seulement de l’aide nécessaire apportée à la femelle, toujours entourée, aux stades de début, par de vieilles ouvrières prenant soin des larves. 4 E. Wasmanx : Die zuzammengese{zten Nester und gemi schten Kolonien der Ameisen, 1891. Neues über die. AJ/g. Zeitschr. fur Entomologie, 1901 et 1902, t. VI et VII et à part, in-$8° de 78 pages. Forez : Fourmis de la Suisse, 1874, p. 154. AoLerz : Myrm. St., t. II, p. 111. WageLer : Ethological observations on an american Ant (Leptothorax emersoni Wh.). Journ. für Psychologie und Neurologie, 1903, t. Il, p. 1-31. 130 HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS $S 4.— Fondation d’une nouvelle colonie avec l’aide d'ouvrières d'une autre espèce. Cette même femelle de F#. rufa peut, exception- nellement, retomber sur une zone de terrain où il n'y ait pas de colonie de fourmis rousses; elle périra alors sans fonder de nid, à moins d'être adoptée par des ouvrières d'autre espèce. Mais une telle adoption est-elle possible ? Malgré les doutes élevés par Emery, la réalité des faits a été démon- trée par certaines observations de Wasmann. Cet observateur arencontré, en effet, des nids mixtes de F. rufa et de F. fusca, ne pouvant s'expliquer qu’en tant que la femelle rousse a été adoptée par des ouvrières de Æ. fusca, soit que celles-ci aient creusé un nouveau nid, soit, ce qui est infiniment plus probable, qu'elles aient accueilli dans leur propre nid, sans doute privé de reine, la femelle étrangère : les larves de fourmi rousse, élevées par les hôtes, donnèrent des ouvrières, en sorte que se constitua une colonie mixte. L'adoption de la femelle fécondée de F. rufa peut même se faire dans des colonies non dépourvues de reines, car Wasmann a trouvé une femelle rousse dans une colonie de #. pratensis où se trouvaient de nombreuses reines. Il y a là un fait contre lequel ne peuvent prévaloir les expériences où les femelles, placées dans une colonie en nid artificiel, sont mises à mort, les faits négatifs ne pouvant s'opposer aux faits positifs; d'ailleurs, il est bien certain que, pour la femelle de #. rufa, l'adoption est exceptionnelle et la mise à mort est la règle, ce qui n'est pas le cas, comme nous allons le voir, avec des femelles d’autres espèces ; aussi ne doit-on pas s'étonner qu'on ne réalise pas facilement, dans des expériences, les conditions qui peuvent, de temps en temps, dans la Nature, permettre une adoption. Enfin, pour faciliter les expériences, on a généralement fait appel à des femelles artificiel- lement désailées pour les introduire dans des colo- nies étrangères, en supposant que l'attitude des ouvrières devait être la même devant une femelle privée d'ailes, qu'elle fût ou non fécondée. Or cette supposition parait contredite par les faits, et les femelles effectivement fécondées sont toujours mieux accueillies que les femelles simplement désailées. Wasmann l’a nettement signalé; cela semble indiquer qu'un caractère spécial, attitude, odeur, ou tout autre, distingue la femelle fécondée, et c'est une observation à rapprocher de certaines autres". ‘ C'est ainsi que, chez des Chalcidiens parasites des Zygènes observés par E. Rabaud, les mâles qui, sortis les premiers du cocon, attendent les femelles pour s'accoupler avec elles et en féconder plusieurs successivement, ne reconnaissent les femelles qu'une fois sorties du cocon, mais a ils passent sans s'arrêter auprès de celles qui ont En tout cas, les femelles de }. rufa peuvent être adoptées par des ouvrières d'autre espèce, des F, fusca où des F. pratensis, mais c'est un fait rare ; en revanche, ce fait, qui se rencontre aussi à titre exceptionnel chez les femelles de #. pratensis et plus fréquemment chez celles de #. exsectoides For. en Amérique, devient larègle chez les femelles d'un très grand nombre d'espèces, dites pourvues : d'instincts parasitaires ou esclavagistes. C'est ainsi que la femelle de Formieca truncicola Nyl. cherche, après le vol nuptial, des ouvrières de F. fusca pour fonder sa colonie et se fait très faci- lement adopter comme reine par celles-ci ; il en est de même pour la femelle de 7, exsecta Nyl., et l’adop- tion de la femelle très voisine de }°. exsectoides, qui ne serait pas aussi constante, se fait chez la variété américaine subsericea Say de la même F. fusca”. L'adoption régulière se rencontre chez toute une série d'espèces américaines éludiées par Wheeler : la femelle de Formica difficilis Em. var. con- socians Wh. est adoptée par les ouvrières de FF, Schaufussi Mayr, var. incerla Em., qui adoptent aussi la femelle de F#. montigena Wh., cependant que les ouvrières de #. subsericea, qui peuvent adopter à l’occasion des femelles de #. exsectoïdes, accueillent parfaitement celles de #. dakotensis var. Wasmanni Em. et parfois même celles de deux variétés américaines de la Formica sanguinea Latr., les aserva For. et les rubicunda Em. En Europe, les Æ. sangrinea Q trouvent leurs auxiliaires, mais sont difficilement et rarement adoptées, chez les F. fusca Ÿ ; c'est encore une variété de ces dernières, la variété argentata Nh., dont les © adoptent les © de #. microgyna Wh. Parmi les yrmicini, on rencontre en Amérique la © de Stenamma tennesseense Mayr. adoptée par les © de St. fulvum Rag., parmi les Dolichoderini, c'est chezle Pothriomyrmex meridionalis Em. et chez sa race Atlantis For. que l’on rencontre des Q se faisant adopter par des © d'espèce difré- rente, ici le Zapinoma erraticum Latr. et sa variété nigerrimum Nyl. d’après des observations faites en Europe, et par Santschi dans le nord de l'Afrique. La femelle même des fourmis Amazones, bien qu'elle accompagne parfois les ouvrières dans les expéditions, sans d’ailleurs participer elle-même déjà subi l'accouplement, tandis qu'ils agrippent celles qui sont encore vierges ». E. Ragaup : Notes biologiques sur Monondotomerus dentipes Dalm, parasite de Zygœæna occita- nica. — Bull. de la Soc. entom. de France, 1910, n° 3, p. 56-59. 1 Certaines observations de De Lannoy, qui à rencontré des Lasius mixtus dans des nids de L. fuliginosus, ont con- duit cet auteur à admettre que la dernière espèce utilise comme auxiliaires le L. mixtus. — Cf. F. ne Lanoy : Notes sur Lasius niger et sur Lasius fuliginosus. — Ann. Soc. cutom. de Belgique, t. LIN, 1908, p. 41-53. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 731 aux rapls de nymphes', ne parait pouvoir fonder une colonie que si elle est adoptée par des ouvrières des espèces qui fournissent les esclaves des ama- zones; les observations d'Emery, qui avait cru auparavant que les choses se passaient de façon différente, ne laissent plus de doute à cet égard* : une © de Polyergue, mal accueillie d'abord par les © de 7. fusca, fut tolérée, et bientôt soignée par ces dernières”. Le fait de l’adoption des femelles parait bien être absolument général encore pour les Strongy- lognathus, le Str. Christophi Em. var. rehbinderi Forel, du Caucase, le Str. Huberi For., méridional, peut-être aussi pour les Sf. afer Em. de l'Afrique du nord et Str. cœæcilia For. d'Espagne, et certai- nement pour le Str. teslaceus Schenk, vivant avec le Tetramorium cæspilum; il vaut aussi pour le Myrmoxenus gordiagini, adopté en Sibérie par les espèces du Leptothorax*. Enfin, ce fait semble universel chez toutes les espèces ne possédant que des individus sexués et dépourvues de la caste des ouvrières, espèces dont le nombre s'accroit beaucoup depuis que l'attention a été attirée sur leur existence. C'est d’abord l’Anergates atratulus, trouvant l'hospitalité chez le Tetramorium cæspitum comme les Strongy- lognathus; c'est ensuite la Wäceleriella (Whee- leria) Santschii For., rencontrée en Algérie dans les nids de Monomorium Salomonis L. et de ses variétés ; c'est l’Æpixenus andrei de Palestine, qui se trouve chez un autre JMonomorium, le M. venus- tum; c'est la Myrmica myrmicoxenus, rencontrée en Suisse chez la Myrmica lobicornis ; c'est la 1 Forez : Les Fourmis de la Suisse, p. 299. ? C. Eueny : Osservazioni ed Esperimenti sulla Formica Amazzone. Rendie. Acc. Sc. Bologna, 1907-1908, p. 49-62. Nuove Osservazioni ed Esperimenti sulla Formica Amazzone. Id., 1908-1909, p. 31-36. — Cf. aussi VreamexeR : Zur Kolonie- gründung der parasitischen Ameisen. Biologisches Central- blatt, 1908, n° 4, p. 18-32. Viehmeyer a constaté même que, chez la femelle de la Sanguine, il pouvait y avoir adoption par les ouvrières au lieu de rapt, avec meurtre seulement de la femelle hôte, ce meurtre pouvant même parfois n'être pas consommé, ce qui implique une fondation par alliance, telle qu'on en constate — nous le verrons — chez le Strongylognathus testaceus, l'Anergates, ete. (Vieameyer : Beobachtungen und Expe- rimente zur Koloniegründung von formica sanguinea. Zeitschrift für wissenschaftliche Insektenbiologie, Bd V, H. 11 et12, novembre-décembre 1909, p.353-336 et p. 390-394.) * Le Polyergus rufescens Latr. trouve en Europe ses esclaves chez la Formica fusca, la F. rufibarbis, exception- nellement la Æ. pratensis; en Amérique, la sous-espèce lucidus Mayr à pour esclaves des F. nitidiventris Em. ou des F. pallide-fulva Latr.; la sous-espèce breviceps Em., des F, fusca de la variété subsericea et des F. pallide-fulva de la variété Schaufussi Mc Cook ; enfin la sous-espèce bicolor Wasm. ainsi que sa variété Foreli Wh.,des F. fusca de la variété subænescens Em. * A. Forez : Strongylognathus Huberi et voisins. Bull. de la Soc. entom. suisse, 1900, t. X, p. 273-282. Ruzsky Neue Ameisen aus Russland. Zool. Jahrb., Systematik, 1902, t. XVII, n° 3, p. 476. Pheidole symbiotica Nasm., hospitalisée chez les Ph. pallidula en Espagne; c'est enfin, en Amé- rique, la Sympheidole elecerebra recue chez la Pheidole ceres, et V'£pipheidole inquilina, chez la Ph. pilifera; enfin l Epæcus(Leptothorax ou Diplo- thorax) pergandei recu chez le Monomorium mini- mum”, Cela montre combien est fréquent et répandu le mode de fondation d'une colonie nouvelle par. une femelle avec l’aide ou d'ouvrières d’autres espèces. mieux les soins exclusifs Mais tous les cas réunis dans ce paragraphe présentent des détails fort différents et conduisent à des résultats très hétérogènes ; la facon de se comporter des ouvrières peut en particulier, comme nous le verrons, s'y montrer très variée. On comprend d’ailleurs très bien qu'une série de cas puisse se présenter suivant les conditions d'adoption : 1° Les ouvrières isolées peuvent creuser un nid pour la femelle ets'y installer avec elle ; 2° Il peut y avoir adoption dans un nid privé de reine ; 3° L'adoption peut se faire dans un nid possé- dant une reine, mais que la femelle adoptée met à mort; 4° L'adoption peut se faire enfin dans un nid possédant unereinerespectée par la femelle adoptée, mais qui disparait sans être remplacée, soit qu'elle s'enfuie, soit que ses propres ouvrières la meltent à mort; 5° Enfin, l'adoption peut se faire de même, mais la reine persiste et sa succession peut être assurée par une autre femelle de même espèce. De ces divers cas, le premier ne paraît jamais se présenter, bien que c’ait été l'hypothèse d'Adlerz pour le cas de l’Anergates*. Le second casest probable, bien quenon démontré, et Santschi tend même à le considérer comme très fréquent, ce qui est bien hasardeux en l'absence de confirmation. Le troisième cas a élé l'objet d'observations précises : Emery a pu constater que la © de Polyergue, introduite dans un nid de #. fusea, el accueillie amicalement par la reine, avait au bout de vingt-quatre heures assassiné cette dernière, qui portait dans la tête des trous que seules les man- dibules acérées de l'amazone avaient pu faire. Santschi, de son côté, a assisté aux luttes des Q de 1 Wugecer : Three new Genera of Inquiline Ants from Utah and Colorado. Bull. Amer. Mus. of Nat. History, 1904, t. XX, p. 1-17. — A new type of social parasitism among Ants. {bid., p. 347-3175. A. Forez: Mœurs des fourmis parasites des genres Whee- leria et Bothriomyrmex. Revue Suisse de Zoologie, 1906, t. XIV, 1, p. 53-69. ? Anerz : Myrmecologiska Studier, 11. Stockholm, 1886. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS Bothriomyrmex avec les reines de Tapinoma erra- tieum qui, bien que plus grosses, cherchent à fuir, et sont décapitées par leurs adversaires qui les sai- sissent à la nuque et finissent par séparer la tête du tronc sans que les ouvrières interviennent*. Wasmann a constalé aussi le meurtre de la reine de F. fusca par la F. rufa adoptée et croit que c’est ainsi que s'explique également la mort de la reine de #. fusca, après adoption, d'une F#. trunceicola Q. La fuite de la reine est possible en certains cas, et, en nid naturel, Santschi la considère comme pro- bable pour le Tapinoma lorsque pénètre une femelle de Bothriomyrmex, qui se met aussitôt à la pour- suite de la reine; mais il n’y à pas d'observation. En revanche, Santschi a constaté que les AMonomo- rium Salomonis, qui acceptent l'introduction d'une © de Wheeleriella et tolèrent même plusieurs de celles-ci, s'empressent d'exécuter leur propre reine et de soigner à sa place la ou les femelles parasites. Et c'est un fait qui paraît se rencontrer chez un cerlain nombre d'espèces. Enfin, c'est le cinquième cas possible, les femelles introduites peuvent vivre en bonne intelligence avec la ou les reines de leurs hôtes, et ne provoquer aucune révolulion sanglante; les générations peu- vent parallèlement évoluer; c'est le cas, par exem- ple, pour le Strongylognathus testaceus, toujours trouvé en colonies mixtes avec le 7Zetramorium cæspilum. En ce qui concerne l'évolution des colonies, celle- ci va dépendre, non seulement de ces diverses con- ditions préalables, mais encore de la présence et de la facon de se comporter des ouvrières : Lorsque la reine des hôtes reste vivante et est remplacée comme dans le dernier cas, l’évolution de la colonie n'est pas modifiée par l’adjonelion de l'espèce parasite, que celle-ci comprenne seulement des males et des femelles — qui paraissent alors se féconder à l'intérieur du nid — ou comprenne aussi des ouvrières parasites comme chez les Strongylo- guathus testaceus. Lorsqu'il n'y a plus de reine dans l'espèce adoptrice, pour quelque raison que ce soit, la colonie comprenant des ouvrières de celte espèce est vouée à l'extinction; mais alors, ou bien l'espèce adoptée n'a pas d’ouvrières, comme Wheecleriella, et alors c'est la suppression complète de la double colonie qui se produit nécessairement, el les nouvelles femelles de WAeeleriella, pour vivre après avoir été fécondées, doivent stériliser et supprimer de nouvelles colonies de onomo- rium; ou l'espèce adoptée a des ouvrières, et deux cas peuvent encore se présenter chez les ces ouvrières ‘ F. Saxrscur : Mœurs parasitiques temporaires des four- mis du genre Botbriomyrmex. Ann. de la Soc. entom. de France, 1906, t. LXXV, p. 363-392. | vont perpétuer seules la colonie jusqu'à la mort de la reine, ou elles vont ravir au fur et à mesure de leur disparition des auxiliaires et continuer à vivre en colonie mixte jusqu'à ce que la reine disparaisse. Dans tous ces cas, la mort de la reine entraîne la fin de la colonie; les colonies ne sont perpétuelles que quand de nouvelles reines, comme chez la For- mica fusca, reviennent dans le nid maternel, Mais on voit que le sort des colonies dépend moins encore des instincts de la femelle que de ceux des ouvrières. $S ». — Fondation dune nouvelle colonie par conquête de nymphes. On s'attendait à ce que, chez une fourmi escla- vagiste comme l’amazone, la femelle manifestâät cet instinct en ravissant des nymphes de futures esclaves ; orla Polyergue Q est simplement adoptée. En revanche, une autre fourmi esclavagiste, bien que moins spécialisée à cet égard, la sanguine, manifeste une fondation violente par « dulosis » suivant l'expression des auteurs, par dol”. La tendance à la violence se manifeste chez les femelles d'un assez grand nombre d'espèces; c’est ainsi que les Lasius niger © se battent jusqu'à ce qu'une seule reine persiste, comme l'ont noté Von Buttel-Reepen et Mrazek. Les Formica consocians Q peuvent vivre en bonne harmonie; mais, lorsqu'on les met avec les © de l’espèce qui fournit leurs auxiliaires adoptrices, des Æ. incerta, elles se battent furieusement. La Bothriomyrmex ®, qui poursuit et tue la reine de Tapinoma, montre bien là un instinct violent, ce qui ne l'empêche pas de se laisser tirailler passive- ment par les ©, et de les gagner par la douceur comme la plupart des ® adoptées, même la Polyergue qui assassine pourtant aussi la reine de ses hôtes. Chez la Formica rufa®, très rarement adoptée par des © d’autre espèce, il y a encore des instincts de lutte très manifestes en présence de celles-ci. Chez la Formica sanquinea, qui est parfois adoptée égale- ment, ces instinets de lutte sont très développés; et, dans l'immense majorité des cas, il n'y a pas d'adoption, mais la femelle entre en conquérante dans le nid de ses futures esclaves, se bat, tue et met en fuite les ouvrières et la reine, et s'assure la conquête des nymphes d'où sortiront des jeunes ouvrières dociles qui lui permettront de fonder avec succès sa propre colonie. Ce paraît toujours être le cas chez les variétés américaines acerva, subintegra et rubicunda observées par Wheeler*. 1 Ce mot, déformé d'ailleurs sous la forme dulosis, alors que l'origine est fournie par le substantif latin dolus et le Goos, paraît assez mal choisi, puisqu'il exprime plutôt la ruse que la violence. 2 WugeLer : The ant of Cusco Bay, with Observations on HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 73 C'est done là un fait très général chez la sanguine; äül est exclusif, semble-t-il, chez le Tomognathus {Harpogoxenus) sublævis étudié par Adlerz' : la femelle fécondée s’installe dans un nid de Zeplo- thorax et en met à la porte sans facon les occupants légitimes; les larves se développent et donnent des ouvrières, des mäles et des femelles, dont les pre- mières soignent les larves de Tomognathus, en sorte qu'un nid mixte durable se constitue avec les deux espèces. Ce que l'on appelle le rapt de nymphes n’est donc pas en réalité dénommé de facon très exacte; c’est beaucoup plutôt l'expropriation d'un nid, avec adoption par les ouvrières consécutivement écloses, et ce cas se rattache aux précédents : la femelle a pu, ou être adoptée passivement par la colonie d'hôtes, et coexister avec la reine si celle-ci n'est pas tuée par ses propres ouvrières, ou ètre adoptée par les ouvrières, mais tuer ou chasser la reine indigène; un pas de plus, et elle chasse ou tue les ouvrières déjà écloses, et se trouve adoptée par les ouvrières qui éclosent ensuile. Il y a toujours adoption, et, d’une facon générale, l'adoption est d'autant plus facile que la femelle se trouve en présence d'ouvrières plus jeunes; elle est aussi facilitée par l'absence de reine; la violence préalable assure donc, par suppression de la reine, les condi- tions optima d'adoption ultérieure. En réalité donc, il y a toujours adoption de la femelle quand celle-ci ne fonde pas un nouveau nid par ses propres moyens; mais il y a des variations dans l'attitude préalable à l'adoption de la femelle, tantôt plus passive et plus douce, tantôt plus agres- sive et plus violente. Dans tous les cas, il paraît bien y avoir utilisation, par la nouvelle colonie, d'un nid préexistant de l'espèce adoptrice, d'où économie d'effort. Il. — LES OUVRIÈRES (LA PERPÉTUATION DES COLONIES). un 1. — Perpétuation grâce aux ouvrières sans auxiliaires. Dans les espèces où les femelles réussissent à fonder, par leurs propres moyens, une nouvelle colonie dans un nouveau nid, les ouvrières satis- font aux multiples tâches qui leur incombent, et se montrent interchangeables, peut-on dire, sans spé- cialisation aussi nette que chez les abeilles. Ces tâches concernent leur propre nutrition, les EE ——— ———] — ‘wo races of Formica sanguinea. Bull. of Amer. Mus. of Nat. Hist., 1908, t. XXIV, p. 619-645. ! Gorrrrieo ApLerz : Myrmecologiska Studier. III. Tomo- gnathus sublævis Mayr, Stockholm, 1896. — VIEumEYER : Beiträge zur Ameisenfauna des Künigreiches Sachsen. Abh. Naturw. Gesellschaft Isis, Dresde, 1906, p. 55-69. Biolo- gisches Centralblatt, 190. REVUE GÉNÉRAIE DES SCIENCES, 1910. soinsaux reineset aux larves etnymphes, l'ouverture des cocons pour la sortie des jeunes chez Les espèces dont les nymphes ne sont point nues, l'entretien el l'agrandissement du nid, les récolles des réserves nutritives, etc., sans parler des besognes spéciales à certaines espèces qui ont des nids de feuilles cou- sues ou de cartonnages agglomérés, ou qui cultivent des champignons ou élèvent des pucerons; enfin, il y a une besogne générale de défense et de lutte, de protection et parfois d'attaque. Pour cette dernière tâche, il y a fréquemment des individus qui présentent une spécialisation morpho logique dans la caste des ouvrières el possèdent en particulier des mandibules très développées; on les appelle des soldats, mais, soit qu'il y ait des types intermédiaires entre l'ouvrière la moins armée el le soldat le plus menaçant, soit que les deux types soient bien distincts, la spécialisation des instincts ne parait pas toujours nette : les soldats de Phei- dole, par exemple, participent à certains travaux, et les ouvrières sont extrêmement agressives. Ce caractère, de pouvoir satisfaire à toutes les besognes, est extrêmement répandu chez les four- mis, qui sont susceptibles, à la différence des abeilles, de vivre longtemps isolées, la vie sociale n'élant pas d'une nécessité absolue pour la conti- nuation de la vie individuelle. Mais nous allons voir de nombreuses exceptions à cette règle; et les quatre catégories d'instinets, de nutrition, d'élevage, de construction et de protec- tion ou d'attaque, vontse trouver l’objet de diverses dissociations. $ 2. — Perpétuation grâce aux ouvrières avec appui passager d'auxiliaires. Lorsque les femelles fondent seules une colonie dans un nouveau nid, les ouvrières se chargent de la perpétuation de cette colonie, et il en est de même quand les femelles reviennent au nid maternel ou utilisent le secours d'ouvrières de même espèce, appartenant ou non à la colonie maternelle, pour établir le nouveau nid. Mais que se passe-t-il quand la femelle fécondée fait appel à des ouvrières d'autre espèce, soit excep- tionnellement comme chez la Formica rufa, soit régulièrement comme chez la F. truncicola, la F. consocians,etc.? Dans ce cas, lesouvrièresétrangères remplissent leurs fonctions comme si elles avaient affaire à leur propre reine, et bientôt éclosent des ouvrières descendantes de la femelle adoptée; les unes et les autres vaquent alors aux occupations habituelles en bonne harmonie, el l’on a une colo- 1 Au sujet des colonies mixtes, on peut consulter, outre les divers auteurs cités, G. Louis Dusezix : Natural and arti- ficial mixed nests of ants. Scientif. Amer., t. XCVII, 1907, p. 310. 734 HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS nie mixte, qui parut anormale aux premiers obser- vateurs, à Forel, à Wasmann, tant que le mécanisme de la fondation ne fut pas connu. Mais, peu à peu, les ouvrières de la première heure disparaissent, et, au bout de trois ans au maximum, il n’y a plus que des individus appartenant à la descendance de la femelle; après le stade mixte, la colonie est redevenue une colonie pure, indifférenciable d'une colonie qui aurait été fondée par la femelle seule el aidée seulement d'ouvrières de même espèce. L'appel aux ouvrières étrangères est dû unique- ment à l'incapacité relative de la femelle, et non à celle des ouvrières, qui n’ont nul besoin d'auxi- liaires quand elles sont écloses, mais qui en ont besoin pour éclore. Seulement, il est un fait curieux et extrêmement important à noter au point de vue des interpréta- tions théoriques : c'est que les ouvrières, qui ontété ainsi élevées par des étrangères, manifestent une propension, une tendance à adopter à leur tour des larves, des nymphes de cette espèce étrangère, el même à aller en ravir pour les élever. Ce fait a été mis en évidence par Wasmann en nids artificiels chez les Formica truncicola et F. exsecla et même chez la F#. rufa. | On sait que l’on attribue souvent à un phéno- mène de mémoire la tendance des femelles d'insectes à retourner pondre sur les lieux, sur les plantes, ou les organismes animaux, où s'est faite leur évolution comme larve ; il y aurait là un phénomène analogue. En tout cas, des #. rufa qui se trouvent avoir été élevées par des Æ. fusca ont toujours, même au bout de deux ou trois ans, des dispositions à contracter alliance avec des jeunes Æ. fusca qui éclosent, ce qui ne se manifesterait jamais chez des F. rufa élevées par d’autres fourmis rousses. Or, comme, dans les colonies privées de descen- dance ou appauvries, il existe un instinct de recher- che de larves, de rapt de nymphes dans des colo- nies voisines, plus riches, plus prolifiques, il n'est pas étonnant que cet instinct puisse conduire des ouvrières à aller quérir des larves et nymphes, méme d'une autre espèce, lorsque leurs propres nourrices étaient justement de cette espèce. Et, de fait, la tendance au rapt des nymphes, et même la tolérance et l'adoption des larves et des nymphes, ne se manifestent que dans des nids où les colonies ne sont pas extrêmement populeuses. Après le stade mixte d'adoption, chez la Formice runcicola, la colonie, redevenue pure, peut, d'après les observations de Wasmann en nid artificiel, redevenir une colonie mixte, de rapt cette fois, une « Raubkolonie », si elle est très pauvre en indi- vidus. Mais c’est un fait exceptionnel chez cette espèce. En revanche, chez la Formica Wasmanni, il y a presque toujours une période où, alors que les ouvrières sont encore peu nombreuses, elles complètent leur effectif en allant chercher des. nymphes de la mème Formica subsericea qui à fourni leurs mais bientôt elles de- viennent assez nombreuses et se suffisent à elles- nourrices ; mêmes. Chez la Formica sanquinea, ce qui est un instinct exceptionnel chez la Æ. truncicola, un instinct régulier, mais très passager chez la #. Wasmanni, apparait comme un instinct à la fois régulier et durable ; aussi, cette espèce est-elle connue comme esclavagiste, parce que les colonies mixtes sont de beaucoup les plus fréquentes, environ quarante contre une. Mais, lorsque les colonies sont parti- culièrement populeuses, les #. sinquinea renoncent à ravir des nymphes de leurs auxiliaires, la }. fusea par exemple, et constituent des colonies pures. On ne peut donc dire que l’appel à des auxiliaires soit permanent chez celte espèce ; il n’est, en tout cas, pas nécessaire; on peut concevoir que le déve- loppement complet d'une colonie la mène à un point où, le nombre des ouvrières devenant très grand, elle se constitue en colonie pure après appel passager à des auxiliaires, après « esclavagisme » passager, si l'on emploie la terminologie courante, peu exacte et assez dangereuse. Il peut d'ailleurs arriver que, dans la colonie mixte, les auxiliaires prennent la place principale et se constituent en colonie pure, comme dans l'histoire de ce nid, observé par Wasmann, où des F. sanguinea, ayant comme auxiliaires des 7°. fusca, puis des Æ. pratensis, perdirent leur reine ; les F. pratensis ramenèrent alors au nid une reine fécondée de leur espèce, et bientôt le nid ne contint plus qu'une colonie pure de cette espèce. Dans tous ces cas, les ouvrières sont toujours capables de remplir toutes les fonctions qui leur incombent, et travaillent à côté de leurs auxiliaires, quand elles en ont. Il n’en sera plus de même dans les cas que nous allons examiner maintenant. $ 3. — Perpétuation avec des auxiliaires de nutrition (Myrmécophilie:. Parmi les nids mixtes que l’on rencontre, il em est, comme ceux que nous venons d'examiner, où des ouvrières de deux espèces soignent et élèvent des larves d'une seule reine; il en est aussi où il n'existe qu'une communauté d'abri, et où les indi- vidus de chaque espèce, indifférents les uns vis- à-vis des autres, vaquent à leurs propres affaires, soignent la descendance de leur propre reine et s'ignorent en quelque sorte réciproquement. Mais il en est où cette indépendance n'est pas absolue, malgré la présence de deux reines diffé- rentes et de leur progéniture; ici encore, les soins sont donnés aux larves par les ouvrières de leur SC LR HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 735 , propre colonie, il n'y à pas de confusion d’altribu- tions, et les territoires réservés à chaque colonie dans le nid commun sont bien délimités, mais les ouvrières d'une des deux espèces ne pourvoient pas elles-mêmes à leur propre alimentation : elles sont, non seulement tolérées, mais encore nourries par leurs voisines. On sait qu'un certain nombre de parasites très variés sont tolérés dans les fourmilières, et que certains sont même soignés par certaines espèces de fourmis, comme les Zomechusa strumosa, hôtes des Formica sanguinea, les Atemeles emarginalus, hôtes des Æormica lusea, ele. ; il y a là de curieux instincts inutiles des fourmis vis-à-vis de ces para- sites appelés « myrmécophiles ». C'est un phéno- mène identique de myrmécophilie qui parait être présenté, à côté des Lépismides, des Staphylinides, des Araignées, des Isopodes, etc., par certaines petites fourmis, comme les ZLeplothorax emersoni, parasites nutritifs des J/yrmica brevinodis. À côté du parasitisme violent des Solenopsis, qui vont ravir les provisions de leurs voisins, il y a là un parasi- tisme amical, d'adoption, et tel que les Leptothorax ne savent plus se nourrir eux-mêmes et périssent, quand ils n'ont plus leurs hôtes pour leur donner la becquée en leur dégorgeant de la nourriture. Il y a là une dépendance constante vis-à-vis des auxiliaires, mais dépendance partielle, puisque les soins à la reine et aux larves continuent à être assurés sans secours étranger. Parmi les quatre catégories d'instincls, celle-là seule parait vrai- ment conservée; la construction du nid est rendue inutile par l'installation chez des hôtes; l'instinct de recherche individuelle de la nourriture à dis- paru, supplan!é par un instinct de quémandage parasite, de mendicité peut-on dire; et l'instinet de lutte est peu développé, la tolérance privilégiée dont jouit cette espèce rendant inutile la violence. $ 4. — Perpétuation grâce à l'intervention ininterrompue d’auxiliaires. Les Æormica sanquinea, qui sont des fourmis dites esclavagistes, peuvent, nous l’avons vu, se passer d'auxiliaires, et, si les instincts de lutte prennent une place prépondérante, les autres n'ont pas disparu : les ouvrières peuvent travailler au nid, chercher les proies qui servent à leur nourri- ture, soigner les larves, etc. Chez les Polyergus rufeseens, chez les Amazones, c'est l'instinct de combativité qui parait seul persister ; comme chez les myrmécophiles, on constate l'incapacité absolue, chez les ouvrières, de se nourrir elles-mêmes; et, en plus, l'incapacité non moins absolue de soigner leurs larves : les ouvrières sont toutes réduites à une caste unique de soldats; leurs mandibules sont devenues acérées, el ne constituent plus qu'une arme extrémement dangereuse, mais né pouvant jouer rôle d'outil; et la spécialisation psycholo- gique est plus complète encore que la Spécialisa tion morphologique. Il ne peut donc y avoir de colonie pure de Polver- gues ; n'avant que des soldats, ces fourmis doivent se procurer des ouvrières chez d'autres espèces ; aussi le rapt, qui est une règle susceptible d'excep- tion chez les sanguines, devient ici une condition stricte d'existence; et la perpétuation de la colonie fondée par adoption chez des Formica lusca, des F. rulibarbis, ete., ne peut se faire que par le renouvellement continu, au moyen d'expéditions ravisseuses, des ouvrières auxiliaires, des esclaves. Chez les Myrmicini, des faits analogues sont présentés par deux espèces esclavagistes unique- ment guerrières, les Strongylognathus Christophi Em. et les Str. Huberi For., vivant aux dépens des Tetramorium. Le rapt est nécessaire parce que, dans ces coloines mixtes, il ne survit que la reine de l'espèce esclavagiste, et qu'ainsi le renouvelle- ment des auxiliaires ne se fait pas à l’intérieur du nid. é Si la reine de la colonie qui adopte la femelle fécondée de l’autre espèce n'était pas tuée, il y aurait un nid mixte avec double progéniture évo- luant parallèlement, mais où les soins seraient assurés par une seule espèce, à la différence des colonies de myrmécophiles. Or ce cas est réalisé dans la nature par un autre Sfrongylognathus, le Str. testaceus, dont les ouvrières ont perdu tous leurs instincts, même les instincts de lutte; ce ne sont plus, ni des ouvrières, ni des soldats, ce sont des neutres parasites, qui ne jouent plus aucune espèce derôle. Leur nombre est très faible d'ailleurs, et cette espèce continue la décroissance numérique des neutres, constatable chez les esclavagistes ne possédant que des soldats. S5.— Perpétuation enl'absence complète d'ouvrières de l'espèce. Que la caste des ouvrières puisse disparaitre, cela n'a rien de surprenant quand on a constaté qu’elle pouvait être absolument inutile. Et, de fait, il y a de nombreuses espèces de fourmis parasites où tous les individus sont sexués. Aussi a-t-on été long à en découvrir l'existence, la détermination des femelles et des mâles étant difficile et se faisant, en général, à l’aide des ouvrières qui les accom- pagnent dans les nids. L'espèce la plus ancienne que l’on connaisse à cet égard est l’'Anergales atratulus, Vivant, comme les Strongylognathus, dans des colonies de Tetra- morium cæspitum. Depuis, nous le rappelons, Wheeler a signalé l'absence de la caste des ouvrières Chez l'Epæcus pergandei, parasite du Wonomorium 736 D: CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE minulum, chez la Sympheidole elecerebra et V Epi- pheidole inquilina, parasites des Pheidole ceres et Ph. pilifera, en Amérique; Santschi a découvert et étudié avec succès les mœurs de la Wheeleriella Santschii, parasite du Monomorium Salomonis, à laquelle il faut ajouter l'£pixenus andrei, parasite du Monomorium venustum. Enfin, on peut citer la Myrmica myrmicoxenus, parasite de la Ayrmiea lobicornis, et la Pheidole symbiotica, parasite du Pheidole pallidula d'après Wasmann. Chez toutes ces espèces, lorsque persiste une reine de la colonie qui adopte la femelle fécondée et sa descendance sexuée, mullipliée en général par des fécondations à l'intérieur du nid, la colonie mixte peut persister; mais lorsque, comme c'est le cas pour les hôtes de Weeleriella, les Monomo- rium, la reine est tuée par ses propres ouvrières, la colonie est frappée à mort; les WheeleriellaQ vont s'introduire dans de nouveaux nids de Honomorium, et, partout où elles sont adoptées, il se produit comme une forme sociale de la castration para- sitaire de Giard, une stérilisation de la colonie parasitée, par suite du déclanchement chez les neutres d'un instinct éminemment nuisible à l'espèce. Henri Piéron, Maitre de Conférences à l'Ecole pratique des Hautes-Eludes. LA PATHOGÉNIE DU Parmi les grands problèmes médicaux dont la solution est encore pendante, celui que soulève la pathogénie du goitre endémique est l’un des plus obscurs. C'est aussi l'un des plus anciens. Dès l'Antiquité, on avait reconnu à certaines sources la propriété d'altérer profondément le physique et le moral de ceux qui buvaient leurs eaux... .… Sunt qui non corpora tantum Verum etiam animos valeant mutare liquores (Ovive.) Hippocrate, Aristote, Galien, Celse, Pline, Vi- truve ont longuement disserté sur les vertus mys- térieuses de ces sources strumigènes. Is ont men- tionné celles des Apennins, de la Phrygie, de Chio, de la Crète. À aucune époque, cette énigme ne cessa d’inté- resser les esprits curieux des choses de la Nature. La seule énumération des écrits qu'elle a inspirés tiendrait de longues pages. Citons seulement, à l'époque de la Renaissance, les noms de Paracelse, d'Arantius, et, plus près de nous, les travaux de Simler, de Platner, de Scaliger, de Wagner au xvir siècle; ceux de Saussure dans la vallée d'Aoste (1779), de Malacarne à Turin (1789), de Fodéré, dans la Maurienne et en Alsace (de 1790 à 1822), de Coindet et Maunoir à Genève (de 1815 à 1825), de Rambuteau, préfet de l'Empire, dans le Valais, d'Iphofen en Saxe, de 1810 à 1818. Toutefois, ce n'est que vers le milieu du siècle dernier que l'importance sociale de la question fut officiellement reconnue. Le Gouvernement sarde, en 1848, et le Gouvernement francais, en 1864, émus des ravages que l’endémie goitreuse exercait dans les provinces alpines, instituèrent chacun une Commission, chargée de rechercher la cause et GOITRE ENDÉMIQUE le remède du mal. Ces Commissions, après plusieurs années d'enquêtes, élaborèrent des Rapports qui, s'ils n'apportèrent pas précisément des lumières nouvelles, eurent du moins le mérite de bien mettre en relief l’origine hydrique du goitre et d'établir comme une vérité scientifiquement démontrée ce qui n'élait encore qu'une croyance populaire. Non moins importants furent les travaux dus à l'ini- tiative privée vers la même époque : Saint-Lager, H. Bircher, Kocher et bien d'autres consacrèrent au goitre de consciencieuses monographies et émirent, quant à la nature de l'agent goitrigène, des hypo- thèses variées, sans pouvoir en faire accepter défi- nitivement aucune. Depuis lors, le silence, un silence qu’on pourrait peut-être interpréter comme un aveu d'impuis- sance, s'élait fait autour de la question. Il semble qu'elle va entrer dans une nouvelle phase d’acti- vité. Les Pouvoirs publics, du moins dans quelques- uns des pays les plus inléressés, se préoccupent de nouveau d'une situation dont la gravité ne dimi- nue guère, en dépit des progrès de l'hygiène géné- rale. En 1908, la Suisse a créé une Commission du goitre,- présidée par M. Schmidt, directeur du Bureau fédéral d'Hygiène, à Berne. L'Italie vient de suivre son exemple. Ces deux Commissions ne paraissent pas devoir se borner, comme leurs devancières, à rassembler des documents; elles sont entrées dans la voie de l'expérimentation, et la Commission suisse a déjà publié quelques résultats, non dépourvus d'intérêt, quoique négatifs. En France, l'Institut Pasteur s’est depuis long- temps intéressé au problème de la pathogénie du goitre. Dès l’année 1895, et, depuislors, à plusieurs reprises, nous avons recu la mission d'étudier l’en- | démie goitreuse sur place, notamment en Savoie. D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE Nous nous étions mis au travail, guidé par la | croyance que la propriété goitrigène de l'eau pou- vailètre due à la présence d'un microbe spécifique. Mais, au contact des faits, nos idées se modifièrent du tout au tout, et nous fûmes bientôt amené à une conception tellement éloignée aussi bien de la théorie microbienne que de toutes celles qui avaient eu cours jusque-là, qu'il ne pouvait être question de la produire avant d'avoir réuni tout au moins les premiers éléments d'une démonstration. C'est cette conception que nous demandons la permis- sion d'exposer ici. Les arguments que nous allons faire valoir ne remplacent assurément pas la preuve décisive, que seule l’expérimentation pourra four- nir. Mais, s'ils ne suffisent pas à emporter la con- viction, nous espérons qu'ils pourront du moins servir à orienter les recherches dans une direction nouvelle. Î. — LES EAUX MINÉRALES. Pour dire tout de suite notre pensée, nous con- sidérons les eaux goitrigènes comme des eaux minérales d'une espèce particulière. Des eaux minérales? Voilà un terme qui, proba- blement, n'éveillera dans l'esprit de beaucoup de lecteurs que des idées confuses. Sans doute, ils entendront bien par là que nous écartons l'hÿpo- thèse d’un contage vivant; mais ils ne saisiront peut-être pas nettement en quoi notre conception se différencie de l'opinion des auteurs qui attribuent la propriété goitrigène à certains éléments miné- raux dissous dans l’eau : sels de fer, de chaux, de magnésie, etc. Et, en effet, qu'est-ce au juste qu'une eau minérale? Où est le critérium qui permet de reconnaître une telle eau, de la distinguer d’une eau simplement chargée de sels? Les médecins, les géologues, les chimistes, les physiciens qui se sont attachés, chacun dans sa sphère, à l'étude des eaux minérales, ne sont parvenus, ni les uns ni les autres, à nous en donner une définition adéquate. Cependant, en synthétisant leurs travaux, nous pouvons énoncer les propriétés les plus caractéris- tiques de ces eaux, et c’est assez pour la démons- tration que nous avons en vue. Les médecins sont les premiers qui aient senti la nécessité de faire une place à part à certaines eaux dont les vertus thérapeutiques ne sont point en rapport avec leur composition chimique. En effet, ils savent très bien qu'une préparation ferru- gineuse quelconque leur réussira tout aussi bien que l’eau d'Orezza, qu'avec du sulfate de magnésie ils obtiendront les mêmes effets qu'avec un verre d’eau de Sedlitz; mais ils savent aussi qu'une solu- tion de bicarbonate de soude ne remplacera pas l'eau de Vichy. C'est ce sentiment quasi-instinelif qu'ils expriment lorsqu'ils font deux classes d'eaux minérales : les accidentelles, — celles qui sont assi- milables à de simples solutions salines, et les autres, — les seules vraies, qui renferment quelque chose de plus que ce que la balance peu y démontrer. Dans l'appréciation de la valeur thé- rapeulique de ces eaux minérales vraies, il entre sans doute un peu d'arbitraire et parfois peut-être d'illusion; mais la réalité de leur action physiolo- gique ne saurait être niée : elle est attestée, non seulement par le tableau symptomatique, mais par le bilan urinaire et par le thermomètre. Il serait bien intéressant de savoir exactement en quoi con- siste cette action. Nous devons nous contenter de dire que, dans les cas les mieux caractérisés, elle se traduit par une accélération des échanges et une activation des combustions; c'est ainsi qu'elle amène la résorption des concrétions uriques, l'atté- nuation des troubles arthritiques, etc.; si on la laisse s'exercer sans ménagement, elle peut même dépasser le but, aller jusqu'à la fièvre thermale et jusqu'à ce que Trousseau a appelé la cachexie alca- line. Retenons done, comme une première caracté- ristique des eaux minérales, leur propriété d'influer sur le métabolisme général, propriété d'autant plus digne d'être notée qu'elle n'appartient à aucun autre agent médicamenteux. Les géologues, à l'opposé des médecins, se sont longtemps refusé à reconnaitre aux eaux minérales une individualité réelle. Longtemps ils n'ont voulu voir dans les manifestalions thermominérales que de purs accidents géologiques. Une source débite de l'eau chaude? C’est que cette eau, venant des pro- fondeurs où règne une température élevée, remonte à la surface par une voie directe et rapide qui ne lui laisse pas le temps de se refroidir. Telle autr source est salée, magnésienne, sulfatée caleique Cherchez le Trias et ses dépôts lagunaires. Cette doctrine, qui est celle des fondateurs de l'hydro- logie souterraine, les Elie de Beaumont, les Dau- brée, s'appuie sur quelques observations inconles- tables. Ainsi, pour plusieurs sources thermales, on a pu reconnaître le bassin où elles s’alimentent par l'infiltration des eaux météoriques et reconstituer le trajet suivi par ces eaux jusqu'au point où elles réapparaissent au jour; leur circuit ne diffère donc de celui d'une source artésienne ordinaire que parce que la branche ascendante du siphon, au lieu d'être constituée par une couche poreuse enfermée entre deux strates imperméables, est représentée par une cheminée béante, dans laquelle la veine d'eau peut prendre une grande vitesse ascension- nelle. On a voulu généraliser cette doctrine. M. de Launay, notamment, lui a donné sa forme la plus achevée. De l'étude approfondie des fissures de 138 D° CH RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE l'écorce terrestre et des relations qui existent entre ces fissures et le phénomène thermo-minéral, il a tiré des lois d’un grand intérêt, dont nous aurons à faire l'application aux sources goitrigènes. Il à montré : 1° que les sources thermo-minérales se groupent sur le trajet des géoclases, c'est-à-dire des grandes lignes de fracture de l'écorce terrestre; 2° qu'il en est de même des filons métallifères, qui, bien souvent, ne sont autre chose que des sources minérales obstruées par leurs propres dépôts; 3° que, par suite de la tendance naturelle des fail- les à se refermer avec le temps, c'est seulement sur les dislocations les plus récentes que se ren- contrent les émergences thermo-minérales. Il semble que ce rapprochement entre les sources minérales et les sources métallisantes aurait dû, étant donnée la provenance bien certainement cen- trale des métaux, induire l’auteur de ces importants travaux à chercher plus profondément le point de départ des eaux minérales. Il n’en a rien été. M. de Launay et les géologues qui partagent sa manière de voir restent fidèles à la théorie artésienne plus ou moins élargie. Ils maintiennent une barrière étanche entre la zone relativement superficielle où circulent les eaux souterraines et les régions in- ternes où les phénomènes plutoniens entrent en jeu. Ils pensent que la porosité des roches, d'une part, la force expansive des gaz et des vapeurs, d'autre part, suffisent, dans la grande majorité des cas, à expliquer la descente des eaux de surface et leur remontée. Donc, aux yeux de la majorité des géologues, les sources minérales étaient sans mystère. Pourtant, un jour vintoù l'un d'entreeux,et non des moindres, E. Suess, s'avisa que les sources de Carlsbad, qui débitent environ 1 million de kilogrammes de sels alcalins par an, ne peuvent les emprunter aux roches granitiques encaissantes , puisque ces sels sont principalement sodiques, alors que le granite de la région renferme surtout de la potasse. Il éta- blit aussi, par le calcul, que les quantités d’eau exhalées au cours de certaines éruptions volea- niques sont beaucoup trop considérables pour admettre une origine externe. Il conclut que, dans ces deux cas, l'eau doit prendre naissance dans les entrailles de la Terre. Par quel mécanisme se formerait cette eau native, comme il l'appelle? Ce serait, selon Suess, par syn- thèse, par combinaison directe de l'oxygène et de l'hydrogène. C'est là qu'est le point faible de sa théorie, car, s'il est acquis que les roches incan- descentes dégagent une forte quantité d'hydrogène, on répugne à admettre que l'oxygène atmosphé- rique puisse, comme le voudrait Suess, aller à la rencontre de cet hydrogène à travers l'épaisseur de la lithosphère. M. Armand Gautier a donné une explication plus rationnelle de la genèse des eaux natives. Dans une série de travaux qui ont la portée d’un véritable traité d'Hydrologie expérimentale, il a fait voir d’abord que toutes les roches renferment, indépen- damment de l’eau dite de carrière, qui est déjà chassée vers la lempérature de 200”, de l’eau de combinaison qui n’est mise en liberté qu'au rouge sombre, au moment où la constitution chimique de la roche commence à s’altérer sous l'influence de la chaleur. Le granite, l’un des minéraux qui en contient le moins, fournit par kilogramme plus de 7 grammes de cette eau de combinaison. Quan- tité insignifiante, direz-vous peut-être. Comptez un peu et vous trouverez qu'un kilomètre cube de granit tient en réserve plus de 26 millions de mètres cubes d’eau, c'est-à-dire un volume qui suffirait à alimenter, pendant plus d’une année, l’ensemble des sources thermo-minérales de France, à raison de 48.000 litres à la minute. Voilà déjà un chiffre qui donne à réfléchir. Représentez-vous maintenant ce qu'est un kilomètre cube en regard des masses que les mouvements géologiques mettent en jeu et vous conviendrez qu'il n'est pas nécessaire de chercher plus loin l’origine de ces eaux natives dont Suess jugeait l'intervention nécessaire. Elles préexistent dans les roches cristalliniennes qui forment partout le substratum des terrains sédi- mentaires et qui reposent elles-mêmes sur le magma igné. Qu'une assise de ces roches vienne à se réchauf- fer vers le rouge, et il s'en dégagera des flots de vapeurs qui s'infiltreront dans tous les interstices de la carapace terrestre, s'y condenseront et viendront ruisseler à la surface. Or, la réalité de semblables réchauffements partiels n'est rien moirs qu'hypo- thétique. L'abaissement de certains rivages, le relèvement de certains autres démontrent que la rétraction de l'enveloppe rigide s'opère irréguliè- rement; il y a des portions qui sont en retard, d'autres qui sont en avance et dont le soubasse- ment doit, par conséquent, subir une refonte. Les eaux ainsi exhalées ne sont plus à propre- ment parler des eaux de synthèse, mais ce sont des eaux éruptives, des eaux qui sortent d'un creu- set où se passent toutes sortes de réactions qui seraient impossibles à la température ordinaire. M. Armand Gautier a reproduit un grand nombre de ces réactions ; il a montré comment l’eau, aus- sitôt libre, attaque les matériaux des roches, peroxyde ces composés en dégageant de l'hydro- gène accompagné de divers autres gaz, transforme le sulfure de fer en oxyde magnétique avec mise en [liberté d'hydrogène sulfuré, etc. Bref, il a re- constitué de toutes pièces les principaux types d'eaux minérales, y compris leurs composants les D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE 139 plus inattendus, comme l'ammoniaque, le méthane, les goudrons, l'acide formique, ele. Devant des arguments aussi topiques, il n'y à qu'à s'incliner. Mais les considérations développées par M. de Launay ne perdent pas pour cela leur valeur; le rôle des failles reste nécessaire; elles sont les pores par lesquels l’exsudation de la zone infracorticale est évacuée au dehors. Il faut seulement admettre que, pour remplir cette fonc- tion, les fractures doivent pénétrer jusqu'au voisi- mage de la zone incandescente et, par conséquent, intéresser toute l'épaisseur de la couche solide. Cela implique qu'elles se rattachent à des effon- .drements de vaste envergure, portant sur des pans entiers de l'écorce terrestre, et cela fait bien com- prendre pourquoi ce sont seulement les failles maîtresses, les directrices des grands axes de dis- location, qui engendrent des sources minérales, tandis que les fissures superficielles, si nombreuses soient-elles, sont sans influence à cet égard. Il est d'ailleurs loisible de concilier, dans une certaine mesure, les idées de M. A. Gautier et celles de M. de Launay, en admettant que les fractures pé- métrantes peuvent aussi servir à la descente des eaux de surface et, en le faisant, on se rapprochera très probablement de la vérité. Quant aux physiciens, on sait comment, à la suite des découvertes de Curie, ils ont été amenés à s'occuper des eaux minérales. Dès qu'on fut en possession des méthodes qui permettent de déceler les substances radio-actives, on reconnut la grande diffusion de ces substances. L'émanation du radium et celle du thorium imprègnent le sol, les eaux et l'air atmosphérique. Comme ces corps n'ont qu'une durée très limitée, il doit exister quelque part une réserve où ils se renouvellent incessamment. Cette réserve, on l'a trouvée dans les roches primitives ‘qui renferment constamment, en proportions rela- tivement élevées. de l'uranium, du radium, du thorium et, par conséquent, toute la gamme des dérivés radio-actifs. Il était, dès lors, indiqué de chercher ces mêmes substances dans les eaux minérales, prises comme type des eaux d'origine profonde. On les y a trouvées en telle abondance que l'on a été amené à regarder ces eaux comme le véhicule naturel et l'agent de distribution de la radio-activité à la surface du globe. Au voisinage -du foyer interne, les émaniums, ainsi que les gaz inactifs : argon, néon, krypton, hélium, abandon- nent les minéraux qui les retenaient à l’état ocelus et sont entrainés par le torrent des vapeurs ascen- .dantes. Il s'y joint même parfois du radium en nature. C’est ainsi que non seulement les eaux filoniennes ont pu être assimilées à de véritables gisements de gaz rares, mais encore ce sont ces æaux qui, aux époques géologiques, ont donné naissance aux dépôts uranifères et radifères que l’on rencontre intercalés dans des terrains récents, où leur présence serait autrement inexplicable. Sans doute, on trouve de la radio-activité dan toutes les eaux de surface et jusque dans l'eau de la mer, mais comme on y trouve de l'or, à l'état de traces. Dans les eaux minérales, l'index radio-aclif est d’un autre ordre de grandeur; par là même, il acquiert une autre signification : c'est, en quelque sorte, l'extrait de naissance de ces eaux, plus sûr que la minéralisation elle-même. Cela porte à trois le nombre des attributs que l'on peut considérer comme caractéristiques des eaux minérales. Résumons-les : 1° Une action physiologique sui generis, difficile à définir, mais dont on fait assez bien comprendre la nature en disant qu'elle affecte le métabolisme général ; % Le mode de gisement des émergences qui, invariablement, jalonnent les grandes et récentes lignes de fracture de l'écorce terrestre; 3 Un index radio-actif élevé, inséparable d’une origine profonde. Si nous établissons que cette triade d'attributs leur est commune avec les eaux goitrigènes, ce sera assez, je crois, pour nous autoriser à conclure que les unes et les autres appartiennent à une même famille, celle des eaux hypogènes, des eaux natives, des eaux éruptives, comme on voudra les appeler. II. — ACTION PHYSIOLOGIQUE DES EAUX GOITRIGÈNES, Le goitrisme — je m'excuse de ce néologisme, mais, en vérité, il est nécessaire — a fait l'objet de maintes descriptions classiques dont les grands traits sont connus de tous. C’est le début insidieux, par une tuméfaction de la thyroïde, si anodine qu’elle ne mérite même pas le nom de maladie ; puis la métamorphose lente de ce goitre charnu en goitre kystique où atrophique, c'est-à-dire la disparition progressive du parenchyme thyroïdien, travail qui se fait en silence jusqu'au moment où il est presque achevé; enfin, l'entrée en scène des symptômes d'hypothyroïdie, le ralentissement des fonctions psychiques, l'hébétude, la somnolence, avec déjà quelques troubles trophiques. Généra- lement, lorsque le goitre a été acquis à l'âge adulte, les choses ne vont pas plus loin. Mais, s'il s'agit d'enfants goitreux, venus au monde avec une thyroïde déjà rudimentaire ou absente, le développement de tout l'organisme est entravé et l'on voit se dérouler, à mesure que ces malheureux avancent en âge, le tableau lamentable du créti- nisme : des êtres nains, difformes, inertes, réduits aux fonctions organiques, des populations entières 740 frappées d'une déchéance si profonde qu'elle ravale l’homme au rang de l'animal, plus bas encore : à celui de la plante (fig. 1)". Il y a donc, dans l’évolution du goitrisme, deux périodes bien tranchées : avant et après la destruc- tion du parenchyme thyroïdien. La seconde période ne nous intéresse pas plus que ne nous intéresse- rait l'étude des accidents strumiprives post-opéra- toires. Ce qu'il nous importe de rechercher, c'est par quel mécanisme un sujet devient athyroïdien sous l'influence des eaux goitrigènes. Nous allons le faire en nous aidant des données anatomo-patho- logiques et physiologiques que nous possédons. Sur une coupe de la thyroïde pratiquée au début du goitre, on constate que l’épithélium glandutaire est intact, mais que les acini turgescents , gonflés par sont ce colloïde qui constitue mucus la sécrétion de la glande indice que cette tion est plus abondante _ quenormale- ment, et que sécré- les lympha- tiques, qui sont sa seule voie d’éva- cuation, ne suffisent plus à la résorber au fur el à mesure de sa production. À côté de ces anciens follicules dilatés, apparaissent des follicules de nouvelle formation, organisés aux dépens des amas résiduels de cellules embryonnaires répandus dans toute la glande, et qui sont, eux aussi, le siège d'une sécrétion active. C’est principalement à cette prolifération qu'est imputable l'accroissement de volume. Hypersécrétion, hyperplasie, telle est donc la formule qui résume l’état de la thyroïde goi- treuse à ce stade : c'est celui de la glande mam- maire pendant la lactation; c'est aussi, à un degré plus marqué, celui de la thyroïde pendant la grossesse. Si la thyroïde était une glande en grappe, cet ‘ Figure extraile des Maladies du corps thyroïde, par Léon Bérard, in Nouveau Traité de Chirurgie. Paillière et fils, éditeurs Fig. 1. — Groupe de crétins de Ja Franconie (d'après Virchow). D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE état de suractivité fonctionnelle pourrait se pro- longer indéfiniment sans menacer son intégrité. Mais c'est une glande à sécrétion interne, qui, du fait de l'hypersécrétion dont elle est le siège devient assimilable à une glande en grappe dont le conduit excréteur serait oblitéré. C'est pourquoi nous allons. voir se succéder les altérations inévitables en pareil cas : la distension des culs-de-sac glandulaires, l'atrophie des cellules épithéliales, l'amincissement et la rupture des cloisons conjonctives, et finale- ment la transformation de la glande en une grande poche kystique, qui refoule vers la périphérie les. vestiges du parenchyme. Cette tendance fatale vers l'athyroïdie, qui domine toute l'évolution du goi- trisme et dé- cidedelades- tinée du goi- treux, nous apparait done comme une Cconsé- quence de: la structure spéciale de la glande thy- roïde et nul- lement com- me l'œuvre des eaux goi- trigènes. Ce qui appar- tient en pro- pre à celles- là, c'est l'hy- persécrétion et l'hyper- plasie de la : première pé- riode, — période qui peut du reste se prolonger autant que la vie. Il est déjà très remarquable d'avoir à constater que l'agent goitrigène se comporte de la sorte vis- à-vis de la thyroïde. Par là, il se sépare absolument de tous les poisons connus. Les intoxications peu- vent provoquer des désordres et des lésions va- riées : la nécrose, la dégénérescence graisseuse, l'atrophie, la cirrhose; il n’en est aucune qui abou- üsse à la prolifération des cellules sensibles. Un autre sujet d'étonnement, c'est que le porteur de cette thyroïde hypertrophiée ne présente aucun signe de basedowisme, alors que la simple irrita- tion de la glande, de nature tuberculeuse ou syphi- litique par exemple, s'accompagne des troubles fonctionnels qui sont le cortège habituel de l'hyper- thyroïdisme. La situation du goitreux est done anormale à un double titre. D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE 741 Les recherches de Baumann et de À. Kocher vont nous donner la clé de cette anomalie. A Fribourg (Suisse), où le goitre est fréquent et où les glandes thyroïdes sont généralement volu- mineuses, Baumann trouva que, sur 26 thyroïdes d'adultes, 7 ne contenaient que des traces d'iode el la quantité moyenne par glande était de 2 milli- grammes; landis que, sur 27 glandes thyroïdes provenant d'habitants de Hambourg, 10 contenaient plus de 4 milligrammes d'iode et la moyenne était 3 milligr. 1/4; qu'à Berlin, 4 glandes thyroïdes d'adultes fournissaient de 5 à 8 milligrammes, et qu'à Lyon, Monéry obtenait comme moyenne de ses analyses 4 milligr. 1/2 par glande. A. Kocher, opérant non plus sur des glandes normales, mais sur des goitres endémiques paren- chymateux, constata, malgré l'augmentation de volume de l'organe, une diminution de la quantité d'iode dans la proportion de 4 à 6 et même à 10. S'il s’agit, au contraire, de goitre exophtalmique, l'analyse révèle une augmentation phénoménale du taux de l’iode. Pour interpréter ces données, rappelons-nous le rôle de l’iode dans l’économie. Ce métalloïde se concentre dans la thyroïde ou, plus exactement, dans le principe actif de la sécrétion thyroïdienne, dans la thyroiodine (Baumann); il parait tenir dans la composition de cette substance, qui se rapproche des enzymes, la même place que le manganèse ou le fer dans celle des oxydases. Pour que les échanges s’accomplissent réguliè- rement, la thyroiodine doit être déversée dans le sang en quantité déterminée. Si elle est en excès, soit par suite d'une sécrétion surabondante, soit pour y avoir élé introduite artificiellement, les phénomènes de désassimilation prennent le dessus, comme l’attestent la fonte des tissus adipeux et albuminoïdes, la fièvre et les autres troubles tro- phiques qui caractérisent l'hyperthyroïdisme; si elle fait défaut, on observe des symptômes tout contraires : le ralentissement des combustions, l’abaissement de la température, la torpeur intel- lectuelle, le myxædème. Lorsque, chez un sujet, on constate une raréfac- tion de l'iode, on doit en inférer que l'économie en consomme davantage pour se maintenir dans l’état d'équilibre normal. Le phénomène primordial du goitrisme est donc, suivant nous, une déviation de la nutrition qui nécessite, de la part de la thyroïde, pour y parer, la sécrétion d’un suc plus riche en thyroiodine. Or, l’iode n’est apporté par l’alimen- tation qu'avec parcimonie. Tant que les besoins de l'organisme ne sont que légèrement accrus, une utilisation plus complète de l'iode dont il dispose suffit à les salisfaire : tel est le cas des habitants de Fribourg qui, sans être goitreux, accusent néan- | moins l'influence goitrigène ambiante par le déficit de leur réserve d'iode : c'est du goitrisme /arvé. Mais que les exigences de l'organisme viennent à augmenter encore, la glande thyroïde va manquer de la matière première nécessaire pour élaborer un suc aussi riche en thyroiodine qu'il le faudrait; elle va s’efforcer de suppléer à la qualité par la quantilé en sécrétant sous un plus grand volume ce suc trop pauvre; de plus, comme tout organe sur- mené, elle va réagir par l'hypertrophie, qui pourra atteindre ici des proportions exceptionnelles, grâce aux éléments embryonnaires non utilisés dont la glande est pourvue. Le goitreux en expectative passe à l'état de goitreux confirmé. Maintenant, faites prendre à ce goitreux de pe- tites doses journalières d’iode : l’activité de son suc thyroïdien va remonter et, dès lors, tout rentre dans l'ordre ; la glande reprend son volume primitif, la santé générale redevient parfaite, rien ne trahit plus une perturbation dans l'économie. L'influence qui tend à provoquer cette perturbation s'exerce toujours sourdement, mais elle est efficacement combattue, grâce au renfort que l'iode, ajouté à la ration alimentaire, apporte à la glande thyroïde. Voilà comment l’iode est le spécifique souverain du goitrisme, aussi longtemps que le parenchyme thyroïdien n’est pas complètement anéanti. Ce que nous décrivons ainsi, ce n’est que l'aspect extérieur des phénomènes. Pour pénétrer dans leur intimité, il faudrait savoir exactement quel est le rôle de la thyroiodine dans le chimisme cellulaire. Les physiologistes ne sont pas encore fixés là-dessus. Cependant, on doit à Blum et à Kishi quelques expériences qui indiqueraient que la thyroiodine a pour mission de neutraliser un nucléoprotéide provenant du noyau des cellules de l'organisme -ou de celui des cellules ingérées; ainsi, chez les animaux éthyroïdés, les accidents acquièrent d'autant plus de gravité que la viande tient une plus grande place dans l'alimentation. Cette expérience est bien d'accord avec un fait clinique depuis longtemps connu, à savoir que, chez les descendants de goitreux, nés athyroïdiens, les stigmates du créti- nisme ne font leur apparition qu'avec le régime carné. Pour faire tenir dans une courte formule toute la physiologie pathologique du goitrisme, on peut dire que l’action des eaux goitrigènes est, directe- ment ou indirectement, l'antagoniste de la fonction thyroïdienne. Cette fonction, quelle que soit l'obseu- rité dont elle reste entourée, est bien certainement une fonction de régularisation du métabolisme géné- ral. Nous sommes donc en droit d'affirmer que l'action des eaux goitrigènes et l’action des eaux minérales sont de même nature. Il est vrai que l’on est habitué à considérer les 742 D: CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE eaux minérales comme des agents bienfaisants par définition et que la notion d'une eau minérale nocive surprend un peu. Pour peu qu'on y réflé- chisse, la différence est sans valeur. Est-elle même entièrement fondée en fait? Puisque l'usage des eaux goitrigènes tend à annihiler les effets de la thyroiodine, ne serait-il pas rationnel d'en faire la base d'une médication dirigée contre l'hyper- thyroïdisme, c'est-à-dire contre le goitre exophtal- mique? Nous en sommes depuis longtemps persuadé. Le Professeur Willms (de Bäle)‘ vient précisément de rapporter l'histoire d'un basedowien -qui se trouve amélioré toutes les fois qu'il séjourne dans une localité goitrifère. La voie est ouverte. Le jour n'est peut-être pas éloigné où les eaux goitri- gènes prendront place dans l'arsenal de la physio- thérapie, et ce jour-là, sans doute, personne ne songera à leur contester la qualification d'eaux minérales. III. — CONDITIONS DE GISEMENT DES SOURCES GOITRIGÈNES. Ce qui frappe tout d’abord, lorsqu'on examine les rapports de l’'endémie goitreuse avec la géographie, c'est la sédentarité absolue dont cette endémie fait preuve depuis les temps les plus reculés. Toutes les autres endémies sont sujettes à se déplacer suivant le hasard des circonstances qui favorisent la propagation de l’agent infectieux ; ainsi le palu- disme, relativement fixe aussi, suit pourtant dans leurs transgressions et leurs régressions les nappesmarécageuses. Rien de semblable nes'observe avec le goitrisme ; il reste immuablement cantonné sur les mêmes emplacements ; on dirait qu'il fait partie intégrante du sol. Les auteurs parlent de goitre sporadique. N ne faudrait pas que cette expression fit croire que le goitrisme est capable de faire des incursions hors de son domaine habituel. On dit que le goitre est sporadique, là où les cas sont très espacés. Le petit nombre des goitreux n'indique pas que la masse de la population est soustraile à l'influence goitrigène, mais seulement que cette influence est discrète, atténuée, et que, seuls, les sujets prédisposés réagis- sent. Il n’est peut-être pas d'affection, en effet, dans laquelle la prédisposition individuelle joue un rôle aussi important que dans le goitre endémique. Chez la femme, beaucoup plus sensible que l'homme, le gros cou est à ce point fréquent, surtout pendant la grossesse, qu'il est très difficile de faire la part de ce qui est pathologique et de ce qui est physio- logique. En réalité, la distinction est convention- nelle et, comme on a pu en faire la réflexion # Wizus : Communication au XXXIX: Congrès de Chirurgie allemande. à la lecture du chapitre précédent, la tumeur thyroïdienne est moins une affection autonome que la résultante de l’exagération d'une fonction normale. L'existence de contrées à goitre sporadique, qu'on peut considérer comme des zones de tran- sition, n'empêche pas que l'aire de l'endémie goitreuse ne soit nettement circonserite, et cela est d'autant plus frappant qu'elle affecte la forme de bandes relativement étroites, capricieusement con- tournées, qui serpentent à travers les continents de l'Ancien et du Nouveau-Monde. En Europe, le domaine du goitre embrasse les parties montagneuses de la péninsule Ibérique, notamment les monts de Cantabre et les Pyrénées. De là, en passant par l'Auvergne, il gagne le massif alpin, où il s’épanouit largement, non seulement dans la chaine principale, mais aussi dans les contreforts qui la flanquent au nord et au sud : le Jura, les monts de Souabe et de Franconie, les Apennins et les Alpes Dinariques. Il se poursuit par les Alpes de Transylvanie, les Balkans, le sud de la Crimée, englobe le Caucase et ses chaînes latérales, pousse un prolongement vers l'Oural ; puis, par les montagnes de la Perse et de l'Afgha- nistan, arrive jusqu à l'Himalaya. Tout le massif himalayen, qui a été méthodiquement exploré sous ce rapport par les médecins militaires anglais, est un des principaux boulevards du goitrisme, qui déborde en outre sur le plateau Thibétain au nord, sur la plaine et le delta du Gange au sud. Malgré la pénurie de documents en ce qui concerne l'Extrême-Orient, nous savons que le goitre est répandu dans les montages de la Birmanie, au Yunnan et surtout dans le haut bassin du fleuve Bleu. L'endémie règne à Formose, au Kamtchatka, probalement aussi au Japon, mais sur ce dernier pays nous manquons de renseignements précis. Vers le sud du continent asiatique, une ramifica- tion s'étend sur la Malaisie, les iles de la Sonde, particulièrement Java et Sumatra, et plusieurs iles de l'archipel Océanien. En Afrique, le Riff et l'AUas sont connus de toute antiquité comme des pépinières de goitreux. Nous savons aujourd'hui qu'il faut y joindre l'Abyssinie, la région du Kilimandjaro, celle des Grands-Lacs, le Zambèze, le nord du Transvaal et de Madagascar. L'Amérique n'est pas moins éprouvée que l'Ancien Monde, mais la répartition de l’endémie y est moins complexe. Elle épouse le parcours de la longue chaine de montagnes qui borde le continent arné- ricain du nord au sud du côté de l'Océan Pacifique, sous le nom de Montagnes Rocheuses, puis de Cor- dillère des Andes. C'est en Colombie que se trouve le rio Magdalena, dont les riverains, à l'époque de D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE la conquête espagnole, furent trouvés dans un tel élat de déchéance physique et morale que les mis- sionnaires jésuites refusèrent de leur reconnaitre une âme et qu'il fallut une bulle du pape Paul TT pour qu'ils consentissent à les évangéliser. C'est également dans l'Amérique centrale que Humboldt et Boussingault recueillirent les matériaux de leurs mémoires sur les causes du goitre. Cette rapide énumération est forcément incom- plète et néglige un certain nombre de foyers d'im- portance secondaire; mais, dans son ensemble, elle donne une image fidèle de la distribution de l’'endémie goitreuse à la surface du globe. Cherchons le fil conducteur qui nous permettra d'expliquer une configuration qui n'est évidemment pas le fait du hasard. Sera-ce le climat? Toutes les latitudes sont également ENDÉMIQUE 743 remontant à une quarantaine d'années) à besoin d'être complétée. « Au sud de cette ligne (la ligne de plissements alp-himalayenne), dit M. de Launay, un axe de dislocation non moins remarquable, mais nord-sud, part du nœud volcanique de l’Armé nie, suit la Mer Morte, rejoint le Kilimandjaro el les grands lacs Africains par les volcans d'Abyssi- nie et raccorde peut-être entre eux les cratères des Comores, de Madagascar, des Mascareignes, etc. » Rétablissez cette ligne sur la carte de Neumayr, et vous rendrez du même coup la symétrie parfaite entre les deux tracés. Si suggestive que soit cette vue d'ensemble, nous ne devons pas nous en tenir là. Si la connexilé que nous apercevons entre les solutions de continuité de l'écorce terrestre et les venues d’eau goitrigène est réelle, elle intéressées. Se- ra-ce la race ? Toutes les races sont égales de- vant le goitris- me. Ne serait-ce pas plutôt l'alli- tude? Certes, la prédilection du goitre pour les hautes terres est manifeste, mais “lle n’a rien d'ex- clusif. Nous avons déjà cité le delta du Gange; nous pouvons y ajouter le golfe du Saint-Laurent, Trieste, Ceylan, les Acores, Nau- plie, l'ile d'Arran en Ecosse. Le fil conducteur, le voici. Jetez les yeux sur le planisphère représenté par la figure 2 et, dans le tracé des zones teintées, vous reconnaitrez la phy- sionomie générale des zones goitrifères, telles que nous venons de les décrire. Or, savez-vous ce qu'a voulu figurer Neumayr, l’auteur de cette carte? Il a voulu figurer les axes des dislocations les plus ré- centes du globe. A l'exemple de M. de Launay, qui a pu, rien qu'en reproduisant cette carte, donner une idée précise de la topographie hydrominérale, nous n'avons qu'à la mettre sous les yeux du lec- teur pour illustrer la loi qui régit la répartition mondiale de l'endémie goitreuse. Il est un point, cependant, où la concordance semble en défaut. Nous avons mentionné en Afrique un fuseau goitri- fère étendu du nord au sud, depuis l'Abyssinie jus- qu'au Transvaal, et la carte de Neumayr est muette en ce qui concerne ces régions. Eh bien, c'est que la carte (elle est déjà un peu ancienne, Fig. 2. — Carte des zones influencées par les derniers plissements terrestres (d'après Neumayr). doit ressortir avec plus d’évi- dence encore d’une analyse plus serrée. Fau- te de place, nous limiterons cette étude à la région la mieux connue sous le double rapport de la no- sologie et de la géologie, à l'Eu- ropeoccidentale. Voici d'abord (fig. 3) une carte, dressée par H. Bircher en 1883, de la répartition du goitre dans les contrées qui nous occupent. Cette carte offrait quelques petites lacunes en ce qui concerne la France; nous les avons comblées, d’après les données de Poncet et Mayet', par l’adjonction d’un centre goitrigène erratique dans le département de l'Orne et la pro- longation vers Bayonne et Dax de la grande forma- tion pyrénéenne. Un reproche, peut-être plus grave, que l’on pourrait adresser à la carte de Bircher, c’est qu'elle donne une idée fausse de la densité relative des agglomérations goitrifères. Les Pyrénées et les Alpes devraient présenter une surface comparativement bien plus chargée que le Plateau Central, les Vosges et surtout la Picardie. Peu importe : cette carte a, du moins, l'avantage de n'avoir pas été dressée pour les besoins de la cause, et c'est une raison pour que nous la lais- sions telle qu'elle est. 1 Poncer et Mayer : De la répartition géographique actuelle du goitre en France. Bull. de l'Académie de Médecine, 1900. Æ Lol D: CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE A l'inspection de cette carte, vous reconnaîtrez d'abord trois tronçons qui font partie du grand système alp-himalayen : le groupe pyrénéen, le groupe alpin avec ses annexes des Apennins et du Jura et, servant de trait d'union entre les deux précédents, le groupe auvergnat, escorté de ses satellites du Morvan, du Limousin et du Vivarais. Ces trois groupes principaux sont si visiblement superposés aux trois massifs correspondants que toute insistance serait superflue. Au nord de ce premier système et suivant une direction générale sensiblement parallèle, s'étend une autre trainée plus clairsemée. Partant du dé- partement de l'Orne, où se trouve le petit foyer signalé par Pon- complètement aplanie par l'érosion, dans sa partie « occidentale surtout, cette chaîne a pourtant laissé des traces de son existence. Sur ses flancs se creu- saient de grands synelinaux où sont venus s'entas- ser les débris de l’exubérante végétation carboni- férienne ; de là, ce chapelet de houillères qui se succèdent à travers l’Artois, les Flandres, la Lor- raine, la Westphalie. Enfin, en Angleterre, vous apercevez l'esquisse d'un troisième système, composé seulement de quelques essaims épars, disséminés dans le pays de Galles, les monts Grampians et les bassins houillers du centre et du sud de l'Angleterre. Sur l’autre rive de la mer du Nord, on retrouverait cet et Mayet, elle À! montre presque ANS aussitôt une la- cune, mais pour reprendre en Pi- cardie, où exis- taient naguère d'assez nom- breux centres goitrigènes/{Sois- sons, Noyon, Reims), aujour- d'hui presque ré- duits à l’état de souvenir, grâce à d'opportunes ad- ductions d'eau. De là, la zone goitrifère, par le aussi quelques Vases, districts goitri- é fères dans les montagnes de la Scandinavie. Ces foyers septen- trionaux dépen- dent d'une autre chaine de monta- gnes,encoreplus ancienne que la chaîne hercy- nienne, la chaine calédonienne. Ainsi étagées surtroiséchelons du nord au sud, les trois constel- lations que for- Vienne! nord de la Cham- pagne et la Lor- raine, passe en Allemagne, où elle s'étend sur les massifs monta- gneux qui s'appellent l'Eifel, le Westerwald, le Taunus, le Vogelsberg, puis s’amineit de nouveau pour se terminer par l'Erzgebirge et le Harz. Où est, demanderez-vous, la directrice géologique de cette seconde zone goitrifère ? on ne la voit pas. Il serait plus exact de dire qu'on ne la voit plus. Mais elle n’en existe pas moins. A l'époque carbo- niférienne, une chaine de montagnes dressait ses sommets à plus de 4.000 mètres de hauteur, là où nous voyons aujourd'hui les plaines de la Norman- die, de l’Artois et de la Champagne; c'est la chaine hercynienne ou armorico-varisque. Des environs de Rennes, cette chaîne se dirigeait vers l’est à travers la Normandie, était coupée par le bassin de Paris, réapparaissait vers la Picardie et le nord de la Champagne, puis, par les Ardennes, le Taunus et les monts de Thuringe, se prolongeait jusqu'au Harz, qui lui a donné son nom. Presque Fig. 3. — Répartition géographique du goïtre en Europe (carte de Bircher/. me le groupe- ment des sources goitrigènes sont d'importance très inégale devant la statistique. La plus méridio- nale renferme dans son périmètre les trois quarts des goitreux de l'Europe occidentale; les deux autres sont beaucoup plus clairsemées; ce sont surtout des régions de goitre sporadique. M. de Launay, à propos des sources thermo- minérales, a enseigné la raison de cette inégalité. Les fractures récentes, nous dit-il, peuvent seules donner passage aux eaux ascendantes, et, par fractures récentes, il faut entendre les fractures d'äge tertiaire ou quaternaire. Dans les Alpes el même dans les Pyrénées, la plupart:des failles satisfont à celte condition. Dans la chaine her- cynienne, ou plutôt dans les racines encore subsis- tantes de cette chaine, on trouve deux systèmes distinets de fractures. Les unes sont contemporaines de la surrection de la chaine et parallèles à la direc- tion de cette chaine; les autres sont dues à la répereussion des chocs qui ébranlèrent l'avant- di D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE pays hereynien lorsque le pays méditerranéen vint le heurter comme une vague, au moment de la formation des Alpes; elles décrivent des ares de cercle concentriques à la courbure de la chaîne alpine. Ce deuxième système est naturellement beaucoup moins développé que dans la chaîne alpine elle-même. Enfin, sur le territoire de la chaîne calédonienne, on ne retrouve qu'un écho encore plus affaibli des cataclysmes alpins; aussi n'y a-t-il en Angleterre qu'un très petit nombre de sources minérales et quelques cantons goitrifères disséminés çà et là. Mais, pour bien comprendre la loi qui préside à la distribution des sources goitrigènes, il est néces- saire d'entrer quelque peu dans le détail des phé- nomènes orogéniques: Les chaînes de montagnes ne sont point, comme on l’a cru longtemps, le résultat d'un soulèvement, d'une poussée verticale de bas en haut. Leur mode de formation est plus complexe. Le refroidissement progressif du noyau terrestre à pour conséquence une diminu- tion du rayon moyen et de la surface de la planète. Le revêtement solide est donc obligé, pour s'adapter à la contraction de son support, de se rétrécir. Mais ce revêtement est inhomogène : c'est une marqueterie composée de compartiments rigides, encadrés par des zones de moindre résistance. La rétraction de l’ensemble a pour effet de rapprocher deux voussoirs contigus; la zone flexible inter- posée se trouve ainsi serrée comme entre les mà- choires d’un étau : elle s'incurve, se gonfle, s'érige sous la forme d’un pli exhaussé, dont les deux versants, archoutés l’un contre l’autre, sont privés de soutien et, en quelque sorte, suspendus en l'air. Des affaissements, des effondrements se produi- sent, déterminant tout le long de ces talus des fractures parallèles à l'axe de la chaîne, fractures totales, traversant l'épaisseur entière de la croûte solide et formant ainsi des évents tout préparés pour livrer passage aux vapeurs qui se dégagent des roches refondues sous l’action du feu central’. Précisément, toutes les conditions se trouvent réunies pour que les processus de métamorphisa- tion et de vaporisation soient particulièrement actifs dans le sous-sol des massifs montagneux. D'abord, les isogéothermes se reièvent, sous les montagnes, plus vite que la valeur moyenne du ‘ Il est à peine besoin de dire que, dans la réalité, les choses ne se sont pas passées avec cette simplicité toute schématique, qui nous est imposée par notre sujet. La sur- rection des Alpes a comporté de nombreux épisodes, répartis sur de longues périodes géologiques, et s’est compliquée d'importants phénomènes secondaires, tels que les trans- ports par charriage. On trouvera un lumineux résumé des théories orogéniques modernes dans l’article de M. J. RÉvi : La synthèse géologique du système alpin, paru dans cette Revue, 1906, p. 644. degré géothermique ne permettrait de le prévoir: on l’a bien vu lors du percement du tunnel du Simplon. En second lieu, sous la surcharge des sédiments accumulés, le support primitif, déjà faible, fléchit de plus en plus et s'enfonce par sa base dans le magma igné. Il est constant qu'en Suisse, dans le cours d'une vie humaine, des vil- lages sont devenus visibles de points où on ne les apercevait pas auparavant, preuve qu'il se produit dans la région alpine des dénivellations locales bien’ plus marquées que celles que l’on peut relever ailleurs. En somme, une chaîne de plissement, avec son soubassement que le réchauffement gagne de proche en proche, avec le système de fissures dont ses flancs sont criblés, ouvertes d’un côté sur le foyer interne et de l’autre sur l’atmosphère, nous appa- rait comme une sorte d'appareil évaporatoire, fait exprès pour favoriser les venues d'eaux éruplives. D'autre part, et en raison même du mécanisme qui à présidé à son édification, une telle chaine se décompose en trois Zones bien distinctes : la zone centrale ou culminante estune zone de compression ; les deux zones deborduresontdeszones detassement, des champs de fractures, suivant l'expression de certains géologues. M. de Launay a fait voir que les sources minérales sont absentes sur le bour- relet central, tandis qu'elles pullulent sur les deux versants. Il en est absolument de même des sources goitrigènes ; les champs de fractures sont en même temps des champs de qgoitre. Saint-Lager a, le premier, fait la remarque que, dans les Alpes, l’endémie sévit sur les deux ver- sants, mais respecte le cœur de la chaîne. Sur la route de Paris à Turin, on aperçoit les premiers goitres à Aix-les-Bains, les derniers à Modane; tous les villages de la Haute-Maurienne : Bramans, Lans-le-Bourg, Termignon, sont exempts de goi- treux et offrent sous ce rapport un contraste frap- pant avec ceux de la Moyenne et de la Basse- Maurienne. Dans la vallée de la Durance, le goitre ne commence qu'au-dessous de Briancon et s'étend jusqu'au débouché de la rivière dans la plaine provençale. 11 n'y a pas de goitre à Chamonix, à Servoz, à Sixt, mais il y en a sur tout le versant du Chablais qui regarde le lac Léman. Le versant italien, en général si abrupt et si rétréci, ne se prête pas aussi bien à la vérification de cette loi. Cepen- dant, là où il s'élargit, la situation est la même. Voyez la vallée d'Aoste : celte vallée est connue comme étant l'une des plus éprouvées des Alpes par le goitre et le crétinisme ; malgré cela, le goitre est inconnu à Courmayeur, au pied du Mont- Blanc. Mais c'est surtout en Suisse que l’affinité des sources goitrigènes pour les zones d’effondrement 746 D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE ressort avec évidence. H. Bircher a dressé, pour ce pays, une carte spéciale et très détaillée, que nous aurions voulu pouvoir reproduire intégralement ; le défaut de place nous oblige à nous contenter d'une réduction (fig. 4). Il y a en Suisse, comme on le voit, deux champs de goitre distincts. L'un, fort restreint, est limité à la haute vallée du Rhône, c'est-à-dire à cette profonde, mais étroite incision du Valais qui, pénétrant entre le Mont-Rose et l'Oberland bernois, scinde en deux parties le massif alpin; l’autre, beaucoup plus vaste, couvre toute la plaine suisse, depuis les premiers escarpements de l'Oberland jusqu'au Jura et depuis le lac de Genève jusqu’au lac de Constance; c’est, sans con- tredit, la formation goitrifère la plus compacte qui soit en Europe. tale de ce plateau, le même phénomène d'effondre- ment s'est produit, quoique sur une échelle plus réduite, en raison du relief moins accentué de la chaine. « Devant la dépression de la Saône, dit de Lapparent, le massif jurassien s'abaisse brusque- ment en un versant très disloqué... C'est la région du vignoble, bien dessinée à Arbois. » Ecoutons maintenant les auteurs qui ont fait du goitre dans le Jura une étude spéciale : « Le dépar- tement du Jura, dit Bergeret', présente dans sa configuration trois zones très distinctes : la plaine, les plateaux de la montagne et, entre ces deux zones, celle des coteaux et vallées, où l’on ren- contre la culture de la vigne. C'est dans cette partie du Jura, sur une largeur moyenne de cinq à six kilomètres, Or, la plaine suisse, n'est-ce pas le type même de ces bassins d'efondrement qui se creusent au pied des chai- nes plissées? Son histoire en fait foi. Avant l’épo- que tertiaire, l’'emplacementde la future chaine alpine était oc- cupéparunezone que le goitre se montre d'une ma- nière à peu près exclusive. » A l'appui de son assertion, Berge- ret donne le rele- vé des exemp- tions pour goitre de 1840 à 1850. Un autre obser- vateur local, Monnier”, n'est pas moins caté- gorique : « La de moindrerésis- zone du vignoble, conclut-il, ren- lance, un grand synclinal qui al- lait toujours en creusant da- vantage à mesure que la sédimentalion tendait à le combler et dont le fond finit par descendre jusqu'à 3.000 mètres au-dessous du niveau de la mer. Après l'Oligocène, commença le mouvement de compres- sion latérale qui, venu du sud, refoula le bord méridional de cette cuvette vers le bord septentrio- nal, adossé à l’avant-pays hercynien. Le fond du synclinal se trouva donc plissé et relevé à la fois. Mais, aussitôt que les forces tangentielles se relà- chèrent, la faiblesse originelle de la croûte recom- mença à se faire sentir; le sols’affaissa de nouveau sur tout le bord convexe de la chaine, si bien qu'un bras de mer mit en communication le golfe du Lion avec la plaine de Vienne, elle-même submergée. C'est cette mer qui déposa la mollasse à laquelle se la plaine suisse doit son facies actuel. Au delà de la fosse où coule l'Aar, commence le Jura, autre ridement tertiaire formé de la juxtapo- silion de nombreux plis parallèles dont l'ensemble simule un plateau. Le long de la bordure oceiden- ferme 21 fois plus de goitres que la zone montagneu- se et 25 fois plus que la zone de la plaine ». Cette zone du vignoble, qui s'étend sur une longueur de 65 kilomètres, depuis Salins jusqu'à Beaufort, n'est pas autre chose qu'un talus fortement incliné dont le mode de formation se comprend aisément : quand la poussée venue du sud-est eut épuisé son action, après avoir plissé et surélevé le Jura, la plaine de la Bresse, qui avait participé au soulèvement, retomba à plat et reprit sa place à 400 mètres plus bas; la cassure, décomposée en plusieurs failles très rapprochées, a l'aspect d'une série de gradins, au niveau desquels affleurent, mises à nu comme par une coupe verticale, les couches du Lias et du Trias qui, partout ailleurs, sont recouvertes par des terrains plus récents. Tout le long de cette en Suisse (d'après H. Bircher). 1 D' BERGERET : 1864. # Monxer : Observations topographiques et statistiques pour servir à l'étiologie du goitre dans le Jura. Annuaïre du département du Jura, 1853. Le goitre dans le Jura. Lons-le-Saunier, D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE fracture, des sources goitrigènes ont jailli, Landis que, d'autre part, les argiles salifères du Trias, ramenées à la surface, occasionnaient la salure des eaux — d'origine profonde ou superficielle — avec lesquelles elles se trouvaient en contact et don- naient naissance à ce chapelet de sources chloru- rées (Salins, Arbois, Poligny, Voiteur, Montmoral, Grozon, Lons-le-Saunier, etc.), qui s'entremélent avec les sources goilrigènes. Le même accident tecto- nique provoquait ainsi, par un mécanisme différent, l'apparition de deux sortes de sources minérales. Nous pour- massif ne représente-t-il pas l'un des nœuds de consolidation de l'hémisphère boréal, un de ces boucliers, comme dit Suess, très anciennement émergé et très stable, comme en fait foi le niveau immuable des rivages de l'Atlantique? Les disloca- tions qui l'ont ébranlé remontent à l'époque her- cynienne, et ses fractures, presque toutes injectées par des filons de quartz, ne se sont pas rouvertes pendant les temps tertiaires. Aussi les eaux hypo- gènes, aussi bien thermo-minérales que goitri- gènes, y font-elles entièrement défaut. finir Pour en rions multiplier les exemples. En nous transpor- lant en Auver- gne, nous (rou- verions touteune série de ceseffon- drements à plat, qui firent au Pla- teau Central une ceinture de lacs tertiaires (la Li- magne, la vallée de la Sioule, Brioude, le Puy, Yssingeaux, Au- rillac, Saint- Flour, Malzieu), et nous verrions encore les sour- ces goitrigènes localisées au voi- à La Roëhelle JA IOUX FA CES Fe ) \ = > nt [ S: . arseille \ éulouse 7 , « f É— J* e) x#40 do avec l’associa- lion topographi- que de ces deux sortes desources, nous voulons mettre sous les Garis yeux du lecteur ] un document qui ' k a bien son élo- ans quence (fig. 5). Le ae C'est la carte hy- ne \° drographique de FÈ France, annexée \ au Traité des Eaux minérales de MM. Jacquot et Willm. Pour obtenir une base de comparaison rationnelle, nous avons dû effacer de cette carte les sinage des failles Le || sources minéra- qui circons- A 5 Puriqrr les accidentelles, crivent ces eflon- = qui ne sont ma- drements. Mais Fig. 5. — Distribution du goilre en France. nifestement pas nous devonsnous borner. Un mot seulement sur ce petit ilot goitrifère de l'Orne, si intéressant par son isolement même. Il se trouve dans la même région que la source alcaline de Bagnoles, l'unique source minérale de tout l'Ouest de la France, région particulièrement tour- mentée, comme le prouve l'existence, près de Saint- Rémy, d'un petit dépôt crétacique recouvert de Silurien (de Launay). S'il y à des territoires qui semblent attirer et fixer à demeure l’endémie goitreuse, il en est d’autres qui jouissent à cet égard d'une immunité bien établie. De ce nombre sont, en France, la Bretagne et le Cotentin. On ne connait, dans ces provinces, ni le goitre endémique, ni le goitre sporadique, ni même le gros cou chez la femme. Cette immunité trouve son explication toute natu- relle dans la tectonique du massif armoricain. Ce d'origine profon- de, telles que les sources salées alimentées par des infiltrations de l’eau de la mer, les sources ferrugi- neuses et les sulfatées calciques. Ceci fait, ne reconnaissez-Vvous pas un aspeel qui nous est déjà familier? Ces quatre groupes d'eaux thermo-miné- rales : pyrénéen, alpin, auvergnat, vosgien-juras- sique, ne rappellent-ils pas les groupes goitrifères de la carte de Bircher? Et ils seraient plus nettement dessinés encore, siles innombrables sources sauvages que l'on rencontre à chaque pas dans les Pyrénées et les Alpes étaient pointées sur combien cette carte. L'étude des sources en elles-mêmes, de leurs conditions de gisement, fournit aussi des indica- tions importantes. Il est notoire d'abord que les eaux de surface, les émissaires des glaciers, les ruisseaux alimentés 148 D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE par le drainage des terrains détritiques ou des cou- verts forestiers, ne sont jamais goitrigènes. A ce propos, nous ferons remarquer incidemment que l’une des causes qui contribuent à la diffusion du goitre dans les Alpes, c'est que les torrents qui descendent des glaciers ne tardent pas à perdre leur pureté au contact des bancs schisteux qui affleurent en maints endroits. Leurs eaux, qui seraient inoffensives, recoupe quelque part l'une des déchirures que l'érosion a creusées dans le massif, l’eau fait irrup- tion en ce point, qui marque la limite supérieure du niveau hydrostatique local. C’est pourquoi, dans chaque vallée, les sources goitrigènes s’alignent en série, à flanc de coteau et généralement à une faible hauteur au-dessus du thalweg. Dans la vallée de l'Arc, on pourrait compter par douzaines les sources répondant à sont tellement trou- bles qu'elles cessent d'être potables et que les riverains sont for- cés de recourir aux sources, quoiqu ils n'ignorent pas le dan- ger auquel ils s’ex- posent. Lorsque, par exception, l’eau d'un torrent est limpide, on peut être assuré d'avance que la vallée est indemne de goitre (exemple : la vallée :È de la Valloirette). Ce fait a même donné lieu à une méprise de la part de quelques auteurs, qui, trompés par une observation superficielle, ont cru pouvoir incriminer la souillure des torrents alpins comme cause du goitre. Pour en re- venir aux eaux goi- trigènes et à leur mode de gisement, il faut se rappeler que le système circula- toire des eaux souter- raines affecte, dans son ensemble, une forme arborescente. Les fractures principales, qui plongent jusqu'au tréfonds, se ramifient en se rap- prochant de la surface et s’abouchent avec les innombrables fissures d'ordre secondaire, failles, décrochements de plis, diaclases et simples joints de schistosité. De là la physionomie particulière aux émergences des eaux filoniennes, physionomie variable suivant qu'il s’agit d’une région monta- gneuse où d'un pays plat. Dans une aqueuses restent emprisonnées dans des chenaux région montagneuse, les veines étroits, ménagés entre des roches imperméables. Aussitôt que le réseau de la circulation bathydrique Fig. 6. — Une source qoitrigène en Maurienne. centre de la figure, le sommet du cône de déjection, qui mesure plus de 20 mètres de hauteur. (Photographie de M. Truchet.) cette description en- tre Modane et Aigue- belle; le griffon est toujours situé sur une fissure dont la direc- tionserapproche plus ou moins de la verti- cale et il est souvent possible de rattacher cette. fissure à une faille importante pas- santdansle voisinage. Dans ces condi- tions, aucun mélange n'est possible entre les eaux filoniennes et les eaux superli- cielles. Qu'elles ali- mentent des sources ou des puits creusés dans le roc, comme il en existe un petit nombre en Maurien- ne, les eaux goitri- gènes restent vierges de toute dilution : nouvelle raison, qui s'ajoute à celles que nous avous déjà énu- mérées, pour quel'en- démie goitreuse ac- quière dans ces ré- gions son maximum de gravité. Dans un pays de relief moins accentué, dont les strates sédimentaires les plus récentes sont restées en place, il arrive, au contraire, fréquemment que les eaux hypogènes rencontrent des couches per- méables dans lesquelles elles s'épanchent horizon- Elles donnent ainsi à des nappes phréatiques et, éventuellement, à des sources d'’affleurement (bassins de Vichy, Pou- gues, etc.). Mais alors l'infiltration des eaux météo- riques est inévitable, le pouvoir goitrigène baisse d'autant; les formes graves du goitrisme font place aux formes légères, au goitre sporadique, au gros cou. On apercoit, au talement. naissance D: CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE 749 IV. — PROPRIÉTÉS PHYSICO-CHIMIQUES DES EAUX GOITRIGÈNES. L'analyse chimique des eaux goilrigènes à été faite bien des fois, sans que l'on ait pu y découvrir un composant auquel il fût permis de rapporter, avec quelque vraisemblance, leurs propriétés phy- siologiques si particulières. Au cours de nos pre- mières campagnes en Savoie, nous avions eu Soin de faire évaporer plusieurs litres d'eau de diffé- rentes sources goitrigènes el de remettre les sédi- ments à M. de Gramont, qui voulut bien se charger de les soumettre à l'examen spectroscopique; aucun indice d'un élément rare n'y fut découvert. En revanche, si l'on s’en tient aux constituants vul- gaires, il est incontestable que les eaux goitrigènes présentent une unité de composition remarquable : ce sont toujours des eaux très chargées de carbo- nates de chaux et de magnésie. Il n’y a même pas besoin de recourir à l'analyse pour s’en convaincre. Dans les Alpes, les sources goitrigènes se signalent de loin par les dépôts calcaires dont elles s'en- tourent. Tantôt ce sont de curieuses gouttières aux bords surélevés, véritables aqueducs construits par le ruisseau lui-même; tantôt des cônes de déjection (lig. 6) édifiés au bas des cascades, ou bien encore des bancs tuffeux d’une grande puissance qui masquent l'orifice des sources et ne laissent suinter l’eau qu'à travers leurs interstices. Dans le Puy-de-Dome, dans l'Oise aux environs de Noyon, les sources goi- trigènes que nous avons visitées étaient également des sources incrustantes. Assurément, il n’est pas possible d'admettre que la chaux ou la magnésie suffisent, en dehors de quelque autre influence encore obscure, à provoquer l'apparition du goitre. Combien n'y a-t-il pas de localités, notamment aux environs de Paris, où le goitre est inconnu, bien que les eaux des puits soient fortement séléniteuses et marquent un degré hydrotimétrique comparable à celui des sources goitrigènes! En tout cas, l'excès de sels calcaires et magnésiens tenus en dissolution par les eaux goitrigènes prouve que ces eaux sont saturées d'acide carbonique, et c’est là un nouvel indice de leur origine profonde qui a sa valeur, surtout dans des régions qui ne présentent aucune trace de volcanisme. A part cela, nous ne voyons guère à signaler que la pauvreté des eaux goitri- gènes en matières organiques; il est fréquent d'en trouver qui ne troublent même pas le chlorure d'or. Plus caractéristiques sont leurs propriétés phy- siques. Notons d’abord que l’activité des eaux goi- trigènes, de même que celle des eaux minérales, est essentiellement fugace. Elle ne résiste pas à l'ébullition, la chose est depuis longtemps connue; elle a été souvent mise à profit par des personnes avisées, obligées de résider dans des pays goitri- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. gènes et désireuses de se soustraire aux atteintes de l’endémie. Le chauffage n'est même pas indispensable pour rendre les eaux goitrigènes inertes; le temps el rot l'exposition à l'air y suffisent. Un ruisseau est g trigène à sa source; il ne l’est plus à quelques kilo mètres plus bas. On ne compte plus les exemples qui viennent à l'appui de cette assertion, Maintes fois des communes, pour se procurer de l’eau potable, sont allées chercher au loin des eaux lim- pides, mais notoirement goilrigènes; pourtant ces eaux, après avoir séjourné dans des citernes et par- couru des conduites suffisamment longues, arri- vaient aux robinets de distribution dépouillées de toute nocivité. Lors de notre passage à Hermillon en 41895, il n'y avait dans le village que deux maisons dont aucun des hôtes ne fût goitreux : la maison du maire et celle du curé; ces maisons s'approvision- naient d’eau à la fontaine commune, mais on ne la consommait qu'au sortir de filtres à sable où elle séjournail assez longtemps. Le fait le plus significatif est peut-être celui de Cunéo. Dans cette ville du Piémont, 40 °/, des effectifs de la garnison étaient devenus goitreux en l’espace de cinq ans. Or, la population civile, qui buvait la même eau, restait indemne; mais elle recevait cette eau dans de vasles réservoirs de décantation dont le dernier était muni d’une prise à sa partie supérieure. En 1903. on appliqua le même dispositif aux eaux des casernes : aussitôt l'épidémie de goitre prit fin (Théa, cité par Bérard). On a voulu attribuer l'assainissement de l’eau à la séparation des particules terreuses; nous verrons plus loin ce qu’il faut en penser. La désactivation spontanée des eaux goitrigènes fut le premier indice qui nous mit sur la voie d'un rapprochement entre ces eaux et les eaux miné- rales. Lorsqu'eurent été signalées les propriétés radio-actives de ces dernières, nous fûmes naturel- lement amené à les chercher dans les eaux goitri- gènes *. En 1908, M. Danne voulut bien se charger d'examiner deux échantillons d'eaux goitrigènes prélevés par nous à Villard-Clément, près de Saint- Jean-de-Maurienne. Le résultat fut positif : la radio-activité était, pour l'une des deux sources, égale à celle de Contrexéville et, pour l’autre, égale à celle de Dax. Une source de ruissellement des mêmes parages ue montra pas trace de radio- activité. À la suite de cette première constatation, nous entreprimes une série de recherches métho- diques dans la Maurienne et dans l’Oisans. Quatorze sources furent examinées, ainsi que deux puits 1 Cu. Rérin : Sur la radio-activité de quelques sources goi- trigènes. C. R. de l'Ac. des Sc., 17 août et 19 octobre 1908. 1 750 creusés dans le roc. Toutes ces eaux furent trouvées plus ou moins radio-actives, et la courbe de décroissance de la radio-activité induite (diminu- tion de moitié en onze heures) montra que l'acti- valion était due au thorium, au moins pour la plus grande part. Il est à noter que c’est dans la même région que se trouve Echaillon, la source thermale et chlo- rurée sodique dans laquelle le radiothorium a été découvert pour la première fois par M. Blanc. Comme toutes les sources d'origine profonde de celle partie de la Maurienne, sans exception, sont goitrigènes; nous considérons Echaillon comme une source goitrigène accidentellement salée et thermalisée. Le lecteur fera peut-être ici la réflexion que, si les eaux goitrigènes et les eaux minérales sont tellement proches parentes, il doit exister des eaux mixtes, c'est-à-dire des eaux à qui leur minéralisa- tion vaut d’être exploitées médicalement et qui sont capables de donner le goitre. La chose se voit, en effet ; nous tenons de notre ami le D' Bayeux le cas d’une jeune fille qui prit le goitre à Paris, dans une famille où l’on ne buvait que de l’eau d’une source faiblement minéralisée, mais très appréciée comme eau de table. On changea l’eau et le goitre rétrocéda aussitôt. De tels faits seraient probablement plus fréquents si les eaux minérales étaient ingérées sur place à des doses plus élevées et durant un temps plus long que les trois semaines de la cure classique. Quant aux eaux exportées, elles ne sauraient, étant donnée la perte d'activité qu'elles subissent du fait du transport, avoir d'effet que sur des sujets exceptionnellement prédisposés. Les consommateurs d'eaux minérales de table auraient donc tort de s’alarmer. V. — (GOITRE ÉPIDÉMIQUE. Avant d'en venir à la conclusion de cette étude, nous voulons dire quelques mots de ce qu'on appelle le goitre épidémique. Le mot d’épidémie éveille l'idée d’une contami- nation accidentelle des eaux, qui est en opposition directe avec la thèse que nous soutenons. Nous ne saurions donc nous dispenser d'examiner de près les faits que recouvre cette rubrique. Ils sont très disparates. Un bon nombre n'ontrien à voir avec le goitre endémique. Telles sont les thyroïdites infectieuses greffées sur une épidémie de grippe, de fièvre typhoïde ou d’oreillons (Lyot) ; ou bien encore les congestions a frigore, subite- ment apparues chez des soldats après avoir bu de l'eau des glaciers. À cette catégorie appartient la première en date de ces prétendues épidémies, D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE reproduite par tous les auteurs : Forster raconte que, sur le navire de la seconde expédition de Cook, en 1772, pendant que l’on naviguait entre des icebergs, des glacons furent recueillis et mis à fondre dans une futaille pour obtenir de l’eau douce; les matelots qui burent de cette eau glacée virent leur cou grossir. D'autres fois, le goitrisme est réellement en cause, mais ce n'est que par un abus de langage que l’on peut parler d’épidémie. Ainsi, il est arrivé souvent que, dans une agglomération située en pays goitrifère, une caserne, une communauté, un pensionnat, des nouveaux venus ont contracté le goitre en forte proportion; il n'y a là aucune infrac- tion à la règle de la fixité de l’endémie goitreuse. Passons maintenant à un ordre de faits qui n'infirment pas davantage cette règle, mais qui rappellent, par certains côtés, l'allure des maladies contagieuses. Nivet a, le premier, attiré l'attention sur les oscillations que présente (ou plutôt présen- lait au siècle dernier, car les améliorations appor- tées aux services d'eaux ont bien modifié cet état de choses) la courbe du goitrisme dans certaines localités, au premier rang desquelles il faut citer Briancon et Clermont-Ferrand. Cette courbe était affectée régulièrement d'un maximum marqué en mai et juin, d'où le nom de goitre estival donné par Nivet à cette recrudescence de l'endémie. On ne voit guère à ces faits qu'une explication possible : c'est que le pouvoir goitrigène des eaux soit susceptible de varier, dans certaines limites, suivant la saison. Cette explication n’est nullement incompatible avec l'hypothèse de l'origine profonde des eaux goitrigènes. On sait, depuis les recherches métho- diques poursuivies par Schmidt à Kurtz et à Marien- brunnen, par Hauser à Teplitz, que la radio-activité des eaux minérales varie dans de larges proportions suivant l'époque de l’année. MM. Dienert et Bous- quet ont retrouvé les mêmes écarts en ce qui con- cerne l'eau de l'Avre ; en 1906-07, le taux de la radio-activité s'est trouvé augmenté de 40 ‘/, pen- dant le mois de mai. Sans préjuger en rien du rôle de la fonction radio-active, on peut interpréter ces résultats comme une preuve que la composition des eaux hypogènes, à leur émergence, peut subir d'importantes variations saisonnières, soit par suite de déviations des courants souterrains, soit pour toute autre cause encore inconnue. I n'y a pas plus de difficulté à expliquer les varia- tions de l’endémie goitreuse lorsqu'elles portent sur de longues périodes. Baillarger constatait qu'entre 1830 et 1865 l'endémie se montrait en progression dans 26 départements, en régression dans 47. Kocher, en 1880, notait une aggravation manifeste dans certains pays allemands. En Amérique, à D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE 751 Mariquita et sur le plateau de Bogota, les goitreux, après avoir diminué au xvin* siècle, redevenaient plus nombreux au xIx°. Bien des causes extérieures et difficilement appréciables peuvent contribuer à ces changements, mais les modifications dans le régime des eaux souterraines peuvent aussi y avoir leur part. Nous en sommes encore à chercher, dans la litté- rature, le premier exemple authentique d'une source ou d'un puits devenu soudainement goitri- gène. Si jamais l’on nous apportait cet exemple, nous ne serions cependant pas pris au dépourvu. Nous nous souviendrions que les secousses sis- miques ont coutume d'amener des perturbations dans le débit des sources minérales, parfois d’en faire naître de nouvelles (Allevard, 1791 ; Castello Alfieri, 1755), et nous chercherions le séisme res- ponsable de ce phénomène. VI. — DisCUSSION DE QUELQUES THÉORIES PATHOGÉNIQUES. Sans nous arrêter aux quarante-deux éléments étiologiques qui, suivant le compte de Saint-Lager, ont été invoqués pour expliquer la pathogénie du goitre, nous examinerons sommairement les trois ou quatre théories dignes de retenir l'attention. Mais, auparavant, nous avons à verser aux débats une pièce importante. La production expérimentale du goitre chez l'homme ou chez les animaux a été souvent tentée. Elle réussit facilement toutes les fois que l'on fait ingérer de l’eau goitrigène en nature; d’ailleurs, l'histoire des conscrits qui se procuraient un cas d'exemption en faisant une « saison » d’eau goitrigène n'a-t-elle pas la valeur d'une expérience cent fois répétée ? Par contre, lorsque l’on a voulu administrer isolément un des constituants des eaux goitrigènes, — et on l’a fait à peu près pour tous, — on a toujours échoué. Pour la première fois, E. Bircher, de Bàle, vient de réussir à faire prendre le goitre à des ani- maux dans des conditions qui nous apprennent quelque chose de plus que ce que l’on savait précé- demment. Ces expériences ont porté sur huit singes, sept chiens, vingt-deux rats blancs; l’eau goitri- gène, provenant de Rupperswiil ou d’Aarau, était transportée à Bâle tous les dix-quatorze jours. Dix animaux (trois singes, cinq rats, deux chiens) ont absorbé de l’eau chauffée à 80-100° ; aucun n'a pris le goitre. Vingt-deux animaux (quatre singes, treize rats, cinq chiens) ont bu l’eau à l'état naturel; vingt et un ont pris le goitre dans un laps de temps de six mois en moyenne. Eofin, une part de l'eau a été filtrée soit sur bougie Berkefeld, soit sur une épaisseur de douze feuilles de papier ; cette eau passée par le filtre a été donnée à un singe, qui est devenu goitreux. Le dépôt resté sur les filtres a été absorbé, en mélange avec du lait, par des rats, dont aucun n'a pris le goitre. Ces résullats, qui méritent pleine confiance, car ils sont appuyés sur des mensurations, des pesées et des examens histologiques, confirment que le principe goitrigène, comme on l'avait déjà reconnu empiriquement, est détruit par le chauffage à une température même inférieure à 100°; ils établissent en outre — et c'est le côté original du travail de Bircher — que ce même principe traverse le filtre Berkefeld sans altération. Ainsi, l'assainissement de l'eau dans les citernes de Cunéo ou dans les filtres de ménage d'Hermillon n'était pas le fait de l'épu- ration mécanique : d’autres facteurs intervenaient, sans doute le temps et l'exposition à l'air. Il ya lieu dès maintenant de tenir grand compte de ces notions dans l'appréciation des diverses hypothèses que nous allons passer en revue. $S 1. — Théorie chimique. D'après cette théorie, l'agent goitrigène est une substance minérale, l’un des sels qui entrent dans la compostion des eaux. On a même été jusqu'à pré- ciser son mode d'action : il aurait pour effet de précipiter, sous une forme inactive, l’iodothyrine dissoute dans le sang (L. Dor). L’embarras com- mence quand il s’agit de désigner la substance en question. En fait de matières minérales constam- ment présentes dans les eaux goitrigènes, il n°y a guère que la chaux; mais on la rencontre dans toutes les eaux, et combien d'eaux extrêmement calcaires ou séléniteuses ne sontaucunement goitri- gènes! La magnésie, les silicates, les sels de fer sont encore assez bien connus physiologiquement pour que la propriété goitrigène n'ait pu passer inapercue, si elle leur appartenait réellement, et ils manquent souvent dans des eaux goitrigènes authentiques. Enfin, quel que soit l'élément minéral mis en cause, même, si veut, un élément hypothétique ayant jusqu'ici échappé à toutes les recherches, cet élément ne serait pas détruit par le chauffage. L'explication purement chimique est donc insuffisante. l'on $ 2. — Théorie géologique. Un certain nombre d’'observateurs ont cru pouvoir affirmer que c'est la nature des terrains qui fait les sources goitrigènes. Ils ne s'expliquent pas sur la manière dont se traduit l'influence du terrain : ce ne pourrait être, semble-t-il, que par l'intermédiaire de quelque substance chimique, comme dans le cas précédent; mais ici ce point est laissé dans le vague et l’on se contente d'avancer, comme un fait d'observation, que la propriété goitrigène est communiquée à l'eau par certains terrains d’affleurement. Ainsi présentée, cette manière de voir est incon- ciliable avec celle que nous défendons. Pour qu'elle fût acceptable, il faudrait d'abord que ses partisans se missent d'accord sur l'étage ou sur la formation géologique à laquelle ils attribuent le rôle princi- pal dans la genèse des eaux goitrigènes. Or, ils sont en contradiction formelle les uns avec les autres. Pour Grange, le goitre ne se montre que sur la dolomie; pour Billiet, sur les argiles tria- siques; pour Tronchin et Bouchardat, sur le gypse; pour Kocher et Bircher, sur la mollasse. En réalité, chacun se fait une opinion d'après ce qu'il a sous les yeux, etles uns et les autres seraient fort désorientés s'ils se transportaient aux Acores, où le goitre est également endémique (Bullar), mais où ils ne ver- raient autour d'eux que des laves et des basaltes. Saint-Lager est peut-être le seul qui ait songé à élargir le cercle de ses investigations. Laissons-lui la parole : « Après un premier voyage, dit-il, j'étais resté sous l'impression de l'abondance du sulfate de chaux et des sels magnésiens dans les contrées à endémie goilreuse. À mon retour, j'administrai pendant six mois du plâtre et du carbonate de magnésie à deux chiens; les résultats furent complètement nuls. Un second voyage dans les régions où le goitre se montre parmi les populations qui vivent sur les graniles, gneiss, micaschistes, porphyres, me fit reconnaitre le peu de fondement de mon premier soupcon. Un troisième voyage, suivi d’une enquête approfondie sur la dissémination géogra- phique de l'endémie goitreuse, me conduisit à la conclusion précédemment indiquée (influence des gisements de sulfure métallique et surtout de pyrites de fer). » Donc, de ses recherches sur les rapports du goitrisme avec la géologie, Saint-Lager ne retenait finalement comme constant qu'un seul fait, l'association des sources à goitre avec les filons métallifères. Il est d’ailleurs presque fatal qu'un observateur, qui se confine dans une région restreinte, aboutisse à découvrir une localisation du goitre sur un niveau géologique donné. Nous sommes loin de contester les relations intimes de la topographie du goitrisme avec la structure du sol, mais nous soutenons que c'est à la tectonique et non à la stratigraphie qu'il faut en demander la signification. $. 3 — Théorie microbienne. La dernière hypothèse, dans l’ordre chronolo- gique, est celle d'un contage vivant. Cette idée devait séduire beaucoup d’esprits à une époque où les découvertes de Pasteur projetaient une soudaine lumière sur l'histoire de tant d'autres endémies. »2 D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE Nous y avons cru nous-même, et nous n'avons rien négligé, au début de nos recherches, pour la vérifier. Nous avons posé, au griffon de plusieurs sources savoisiennes, des filtres qui ont été laissés en place pendant plus d'une semaine; au bout de ce temps, la boue obtenue par raclage de la surface filtrante fut soumise à desexamens microscopiques et ensemencée sur différents milieux ; non seule- ment aucun microbe spécial ne put être découvert, mais il fallut reconnaître que ces eaux étaient pra- tiquement stériles. Ce résultat négatif a été confirmé par la suite toutes les fois que l’on a eu soin de faire les prises au griffon même et de se mettre à l'abri de la contamination par l’air. Il est vrai que ces précautions n'ont pas toujours été observées et il en est résulté que quelques microbes aquicoles vulgaires, notamment des fluorescents, ont posé, un peu à la légère, leur candidature au titre d'agents goitrigènes. On a cherché aussi le microbe, avec persévérance, dans la tumeur thyroïdienne elle-même; on n’a ramené que des staphylocoques. On pourra dire que les recherches infructueuses ne tranchent pas la question. C’est vrai; mais il y a autre chose : il y a l'expérience de Bircher, qui prouve que le principe goitrigène n’est pas retenu par le filtre. En vain objecterait-on que les virus ultramicroscopiques passent à travers la bougie Berkefeld : si un certain nombre de cellules fran- chissent le filtre, il en reste aussi beaucoup à la surface, surtout lorsqu'elle se trouve colmatée, comme dans l'expérience de E. Bircher, par du limon ; or, ce limon s’est montré incapable de don- ner le goitre. Forcés d'admettre que le principe goitrigène se comporte comme une substance soluble, les parti- sans de la théorie microbienne ne l’abandonnent pas pour cela. Is tournent la difficulté en suppo- sant que l’eau goitrigènenerenfermepaslemicrobe, mais seulement une toxine sécrétée par celui-ci. C’est à cette conception que s'arrêtent E. Bircher et le Professeur Wilms, sous l'inspiration de qui le travail analysé plus haut a été exécuté. En se pla- cant sur ce terrain, on est évidemment dispensé de montrer le micro-organisme pathogène, lequel, bactérie, algue ou amibe, est censé ne pas quitter le sol qui est son habitat naturel. Mais on n'échappe pas à l'obligation de montrer la toxine qui, si elle existe, doit pouvoir être saisie au passage dans l'eau goitrigène. L'épreuve du chauffage ne prouve rien à l'encontre de la thèse que nous soutenons, parce que la chaleur désactive aussi les eaux minérales. Il faudrait au moins que la neutralisa- tion du principe goitrigène fût obtenue avec l'un des réactifs qui précipitent les matières orga- niques; cet essai n’a pas été tenté. Et puis, pour héberger ce micro-organisme, il faut des terrains D' CH. RÉPIN — LA PATHOGÉNIE DU GOITRE ENDÉMIQUE 753 meubles, des couches poreuses baignées par l'eau. Il est possible que cette condition soit réalisée dans la plaine suisse ; mais nous pouvons affirmer qu'il en est tout autrement dans les vallées de la Mau- rienne et de la Tarentaise; là, les sources goitri- gènes jaillissent le plus souvent du sein de roches dures, qui ne sauraient être soupconnées de don- ner asile à la moindre colonie microbienne. NII. — CoNcLUSIoN. Dans le problème de la pathogénie du goitre endémique, il y a un certain nombre de données fondamentales qui doivent dominer toute la discus- sion. Ce sont : d’une part, la connexité des sources goitrigènes avec les dislocations géologiques de date récente; d'autre part, le fugacité de la fonc- tion goitrigène, qui se comporte comme si elle avait pour substratum une matière soluble, thermola- bile, volatile et spontanément destructible; enfin, le mode de réaction de l'organisme vis-à-vis du principe goitrigène, qui lui assigne une place tout à fait en dehors du cadre des agents toxiques ou infectieux que nous connaissons. Toute théorie qui ne s'accorde pas avec ces faits précis ne peut être que fausse. Ne füt-ce que par élimination, le rapprochement des eaux goitrigènes avec les eaux minérales s'imposerait ; et, quand on procède à un examen approfondi, on reconnait bien vite que l’analogie est réelle et complète : le facies des gisements, les propriétés physico- chimiques et physiologiques, tous les traits carac- téristiques des eaux goitrigènes se retrouvent dans les eaux minérales. Voilà pourquoi nous disons que les eaux goitri- gènes ne sont pas autre chose qu'une variété d'eaux minérales. Nous entendons par là, avec M. A. Gautier, que ce sont des eaux natives, ou tout au moins des eaux qui se sont trouvées en contact avec le foyer interne, dans un milieu où les vapeurs aqueuses, les fumerolles minérales, les dérivés radio-actifs, les gaz rares prennent part à un cycle de réactions d'où résulte, sous l'apparence d’une simple solution aqueuse, un complexe que l’on n'a pas encore su analyser. Si l’on voulait donner à cette théorie une déno- mination pour la différencier des autres, on pour- rait la qualifier de fhéorie plutonienne. Dans ce complexe, qu'on appelle une eau miné- rale, à quel élément appartient le rôle essentiel? Les constituants minéraux y conserveraient-ils une instabilité passagère, qui aurait pour effet d’ac- croître leur aptitude à entrer en combinaison ? Pour continuer le parallèle entre les eaux goitri- gènes et les eaux minérales proprement dites, il est certain que l’on pourrait dire que la dominante des eaux goitrigènes est la chaux, comme la soude est celle des eaux alcalines. L'énergie rendue disponible par la désintégra- tion des corps radio-actifs serait-elle appliquée à quelque travail biochimique anormal ? Ou, plus simplement, l’un des gaz rares, sur lesquels nous ne savons rien, serait-il doué de pro- priétés physiologiques spéciales? Ce sera l'œuvre de demain d’élucider ces ques- tions. Pour: aborder cette tâche, l'eau goitrigène sera un matériel d'étude précieux, indispensable même. Ses eflets sont mesurer ; ils se prêtent à des expériences qui ne nets, faciles à suivre et à seraient guère réalisables avec les autres eaux minérales. L'intérêt scientifique n'est pas seul en jeu. On répèle souvent que le goitre endémique est en voie de disparition. Il est vrai que les villes de quelque importance, celles que visitent le touriste et le voya- geur, ont été effectivement très assainies grâce à des adductions d'eaux ; et aussi que les statistiques des conseils de revision sont beaucoup moins chargées aujourd'hui qu'autrefois, parce qu'au lieu de réformer les conscrits goitreux, on préfère, avec raison, les incorporer et les guérir. Mais des docu- ments précis montrent que l'amélioration n’est pas aussi considérable qu'on pourrait le croire. En Suisse, Kocher jun. trouve en 1908 sensiblement les mêmes chiffres qu'en 1886, soit un pourcentage de 6 à 7 °/, de goitreux parmi les recrues et un total de plus de 100.000 dans l’ensemble de la population. D’après Kolle, en Autriche, en decà de la leitha, les crétins seuls atteindraient le chiffre de 12.815. En France, la dernière statistique géné- rale date de 1873 ; on comptait 370.400 goitreux et 120.000 crétins. On voit par là que l’endémie goi- treuse est un fléau qui mérite toute la sollicitude des hygiénistes. Nous touchons à un moment où, pour continuer la lutte contre le goitrisme, il devient de plus en plus nécessaire d'être fixé sur sa pathogénie. Le système onéreux des adductions d'eaux, applicable seulement aux agglomérations urbaines, a donné tout ce qu'il pouvait donner. Pour préserver les habitants des campagnes, il faudrait désactiver les eaux goitrigènes sur place, au moyen d'un procédé simple, économique et d’une efficacité suffisam- ment prouvée pour vaincre l'indifférence et le scepticisme des populations. C'est là un travail de longue haleine. Pour le mener à bien, une coopé- ration internationale, analogue à celle que l’on à réussi à créer pour l'étude de la tuberculose, du cancer ou de la lèpre, serait des plus désirables. D: Ch. Répin, de l'Institut Pasteur. 1 © = BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Roy (Louis), Préparateur à l'Ecole supérieure d'Elec- tricité. — Recherches sur les Propriétés thermo- mécaniques des Corps solides. (J'hèse soutenue devant la Faculté des Sciences de Paris). — 1 vol. in-8° de 70 pages. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. Lorsqu'on chauffe un corps solide, il subit des défor- mations du même ordre de grandeur que celles que produitl'application, à température constante, d'actions mécaniques extérieures : un même phénomène est donc tributaire de deux théories, celle de la propaga- tion et des effets de la chaleur dans les solides et celle de l’élasticité. La première de ces théories a été établie par: Fourier, la seconde par Navier ; mais elles étaient restées indépendantes l’une de l’autre et ne présen- taient aucun point de pénétration réciproque. Duha- mel a,le premier, cherché un lien entre elles; il fallait, pour cela, compléter la théorie de Fourier en tenant compte des déformations du milieu, et celle de l'élas- ticité de façon à lui faire rendre compte des défor- mations thermiques. Le résultat de cette étude condui- sait à la théorie des phénomènes thermo-mécaniques : M. Roy a repris cette théorie en suivant les méthodes de l'Énergétique. Le savant travail qu’il a présenté comme thèse de doctorat à la Sorbonne ne s’analyse pas aisément, et nous devons nous contenter de faire connaître les grandes lignes de ce mémoire, essentiellement mathé- matique. L'auteur établit d'abord que les équations de l’équi- libre ou du mouvement d’un système de corps ne su- bissent aucun changement de forme, du fait que la température est variable, si ce n’est que les relations entre les pressions et les déformations contiennent un terme dépendant de la température. Il étudie ensuite la théorie des plaques homogènes et isotropes, et celle des tiges droites. Il convenait de faire l'application de la théorie à un cas particulier : M. Roy a choisi celui d’une tige et cherché à quelles conditions les vibrations calorifiques, qui en accom- pagnent le refroidissement, pourraient constituer un son perceptible. Il aborde ensuite le problème inverse et étudie la loi de variation de la température dans une tige, primitivement au zéro thermométrique, et mise en mouvement par des actions mécaniques. Le calcul conduit à une conclusion importante. Le mouvement vibratoire d’origine mécanique n'a pas d'influence sensible sur la température de la tige, et il en est de même a fortiori pour le mouvement vibratoire d'origine calorifique. On n’a donc pas à s'occuper de l'influence exercée directement sur le refroidissement par le mouvement de contraction qui l'accompagne ; mais il en résulte un accroissement fictif de la capacité calorifique du solide, qui peut entraîner une diminu- tion de la vitesse du refroidissement. AIMÉ WiTz, Correspondant de l'Institut, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille, Hopkinson (B.), Professeur de Mécanismes et de Mécanique appliquée à l'Université de Cambridge. — Vibrations of Systems having one degree of free- dom (VIBRATIONS DES SYSTÈMES AYANT UN DEGRÉ DE LIBERTÉ). l'ome 1 des Cambridge Engineerings Tracts. — 1 broch. in-8° de 54 pages avec fig. (Prix: 3 fr. 15.) Cambridge University Press, 1910. 2° Sciences physiques Paquet (N.-A.) et Docquier (A.-C.), Zngeénieurs des Mines, anciens professeurs d'Ecoles industrielles, et Montpellier (J.-A.), Rédacteur en chef de VElectri- cien. — L'Electrotechnique, exposée à l'aide des Mathématiques élémentaires. Tome 11: Produc- tion de l’énergie électrique. — 4 vo/. in-8° de 584 pages, avec 546 fiqures. (Prix : 15 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. C'était une tâche difficile que de faire un Cours complet d'Electrotechnique avec le secours unique des Mathématiques élémentaires. Les auteurs ont compris combien, pourtant, un traité basé sur ces principes pourrait rendre de services. L'industrie électrique compte, en effet, comme collaborateurs beaucoup de praticiens distingués, ayant Certaines connaissances mathématiques, mais n'ayant pas abordé l’Algèbre su- périeure ni le Calcul différenciel et intégral. La com- préhension des ouvrages d'Electrotechnique était donc pour eux chose impossible. Il y avait là une lacune importante à combler. Malgré les difficultés, MM. Paquet, Docquier et Mont- pellier ont pu mener cette œuvre à bonne fin, sans rien sacrifier à la rigueur de la théorie électrotechni- que. On doit leur savoir gré d’avoir réussi dans une généreuse entreprise, où beaucoup auraient échoué. G. DE LAMARCODIE, Ancien Élève de l'École Polytechnique, Professeur à l'École d'Electricité et de Mécanique industrielle. Nœælting (F. A. M.) — Contributions à la connais- sance des Oxyaldéhydes. L’orthovanilline et l’al- déhyde orthoveratrique. (J'hèse de doctorat pré- sentée à l'Université de Bäle.) — Une brochure ii-8° de 140 pages. Vve Bader, éditeur. Mulhouse, 1910. Cette thèse est consacrée à l'étude de l'aldéhyde B-métaméthoxysalicylique, que l’auteur appelle très justement orthovanilline. Ce corps : /Nocx: {on CHO se rencontre dans les résidus de la préparation de la vanilline, que les Usines de Thann fabriquent en grand par un perfectionnement du procédé classique Tie- mann-Ræmer. En purifiant ces résidus par entraine- ment à la vapeur, on isole facilement l’orthovanilline. Ce corps est très différent de son isomère, la vanil- line-1 : 2: 4, tant par ses propriétés physiques que par ses propriétés chimiques. Ainsi, c'est un colorant qui teint la laine et la soie en bain acétique. La coloration obtenue est jaune franc ; elle est peu solide, d’ailleurs. M. Nœlting a divisé l'étude de ce corps en deux parties: 1° Propriétés dues au groupe OH ; 20 Propriétés dues au groupe CHO. Les propriétés dues au groupe phénolique OH sont montrées par la formation d'un sel de sodium, qui donne avec les sels métalliques des précipités de cou- leurs variées. L’éther benzoïque : OCH* CSH—O0COCHS CHO BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX s'obtient par la méthode classique; le dérivé méthoxylé : OCH* C‘H1—OCH* SCHO se prépare par méthylation au moyen du sulfate de méthyle. L'auteur le nomme aldéhyde ortho-vératrique. Il était indiqué, surtout pour le descendant de l'il- lustre professeur de Mulhouse, d'essayer de copuler ces deux aldéhydes, orthovanillique etorthovératrique, avec des dérivés diazoïques et d'étudier les matières colorantes formées. On obtient ainsi des substances de formule on CH*0// \Cuo NY Az—Ar—R qui sont des matières colorantes intéressantes, sinon au point de vue industriel, du moins au point de vue spéculatif. Les réactions aldéhydiques de l'orthovanilline se traduisent par la formation de dérivés bisulfitiques, hydrosulfitiques, d’oxime, d'hydrazine, d’aldazine, d'azométhine. L'aldéhyde orthovératrique donne des combinaisons tout à fait analogues. Enfin, la condensation de ces aldéhydes avec la diméthylaniline et l'oxydation subséquente forment des colorants du groupe du triphénylméthane. Ces colorants, dont la leucobase correspond aux formules : nus (ni H: 0 Se /0CH | Jon CH CH 7 EN 7 à / Xe F) NX JAN AN RAIN ee el NEA NA NZ NCA A Az(CHS) Az(CH:}° Az(CH*)* Az(CH°)} sont d’un vert vif, peu différent du vert malachite. G. Banc, Docteur ès sciences. 8° Sciences naturelles Aubin (Eugène). — En Haïti. Planteurs d'autrefois, nègres d'aujourd'hui. — 1 vol. in-18 de 348 pages, avec 32 phototypies et 2 cartes en couleurs hors texte. (Prix : 5 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 4910. Sous le pseudonyme d'Eugène Aubin, qui cache le nom d'un diplomate distingué, l’auteur, qui a déjà écrit des livres estimés sur les Indes et l'Égypte, sur le Maroc, sur la Perse, nous donne dans ce volume un aperçu très intéressant sur la république d'Haïti, où ses fonctions l'ont appelé à résider de 1904 à 1906. Il à profité de ce séjour pour visiter la plus grande partie d'Haïti el, si l’on excepte les missionnaires, il y à sans doute peu de blancs qui aient depuis longtemps par- couru d'aussi longs itinéraires dans celte ancienne possession française; c'est presque toujours à cheval, accompagné de domestiques noirs, quil a voyagé. Il s'est particulièrement attaché, au cours de ses excursions, à rechercber les anciens vestiges de l’occu- pation française et il à fait d’intéressants rapproche- ments entre l’état du pays à cette époque et sa condi- tion actuelle; il a montré l'influence dominante de la civilisation française sur la société haïtienne. Dès le premier chapitre, nous avons un exemple des transformations opérées. Dans la plaine du Cul-de-Sac, où les Francais s'étaient établis dès leur arrivée à Saint- Domingue, on comptait 80 sucreries en 1775; elle devait sa richesse aux travaux d'irrigation grâce aux- quels les eaux étaient distribuées dans ses diverses parties. La Révolution survint; elle fit disparaître les colons et détruisit toute cette prospérité. Aujourd'hui, il ne reste plus que des traces des anciens barrages et les trois quarts de la plaine sont incultes et livrés à Ja végétation des acacias et des cactus. C'est souvent au milieu des vestiges de l'habitation coloniale de jadis que s'élève la maison de bois du propriétaire actuel. La population nègre, qui vit aujourd'hur sur cette terre et y a été transportée de divers points de la côte d'Afrique, depuis la fin du xvut siècle jusqu'à la Révo- lution, présente, mêlés aux croyances chrétiennes, de singuliers restes de superstitions africaines dont le cuite du Vaudoux, avec ses sortilèges pour conjurer les mauvais esprits, est une manifestation. M. Eugène Aubin ne s’est pas contenté de fréquenter l'aristocratie noire, qu'une culture française souvent très soignée a élevée au-dessus de la masse ; il a pénétré dans tout l'intérieur du pays, a visité les villages, est entré dans les demeures des paysans et dans les do- maines agricoles. 11 à pu ainsi donner de curieux détails de mœurs et montrer avec précision les efforts faits par les propriétaires noirs pour mettre en valeur leur pays, et, par suite, l’état de l’agriculture, du commerce, de l'industrie. Il nous apprend que les Etats-Unis prennent la plus grande part de l'importation en Haïti; néanmoins, la France fournit presque exclusivement un certain nombre d'articles. GUSTAVE REGELSPERGER. Lindner (Prof.-D' P.), Chef de la Division des Cul- tures pures à l’Institut des Fermentations de Berlin. — Atlas der mikroskopischen Grundlagen der Gæhrungskunde. (ATLAS DES BASES MICROSCOPIQUES DE LA FERMENTATION.) — 2° édition revue et aug- imentée. — 168 planches avec 578 fiqures. Paul Parey, éditeur. Berlin, 1910. L'importance de cet Atlas, sa nouveauté et l'autorité de l’auteur, un des fondateurs de la Zymologie, nous autorisent suffisamment, croyons-nous, à le présenter au public français. L'ouvrage comporte 578 figures réparties en 168 planches; toutes sont des reproductions photogra- phiques de «cultures adhésives vivantes» (méthode instituée par l’auteur), de macrocultures, ou de prépa- rations étalées sur le porte-objet. Cet Atlas apporte la plus riche documentation graphique existant sur la question des fermentations. Il reproduit non seule- ment les micro-organismes qui en sont les agents, mais encore les organes, intéressants au point de vue de la technique, des plantes supérieures qui en con- stituent le plus souvent le substratum nécessaire. Cet ouvrage sera utile à la fois aux praticiens qui s'occupent de fermentations et à tous les microbiologistes. Il leur apportera des documents de première main sur des organismes qu'ils doivent connaître et leur facilitera les déterminations. Le but de ce livre est encore de familiariser les débutants de la science avec les micro- organismes de la fermentation, qu'ils ne peuvent tou- jours avoir sous la main. Un texte, aussi sommaire que possible, précède les planches; il renferme les explications nécessaires à l'intelligence des figures. La plupart de ces photomi- crographies, notamment celles des levures, sont de tout point admirables et telles qu'on ne saurait désirer mieux. Lorsqu'il s'agit de micro-organismes dont l’adhérence au porte-objet n'est pas aussi parfaite, les contours deviennent moins nets, ou bien, lorsque cer- tains détails sont trop ténus, ils arrivent à se perdre dans les mailles du fâcheux, mais inévitable réseau de la similigravure. Il est certain que ce procédé n'a pas toujours la précision, la clarté un peu schématique du dessin ordinaire, Avec celui-ci, l’auteur met en re- lief, parfois à son insu, ce qu'il considère comme essentiel: cette clarté a son écueil dans ce fait qu’elle dépend trop de l'observateur. On pourrait étendre au dessin du micrographe le mot célèbre qui a servi à 756 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX qualifier l'art du romancier : « la nature vue à travers un tempérament »; l'observateur dessinant ne fera jamais abstraction des idées préconçues qu'il peut avoir sur les faits qu’il observe, son œuvre sera tou- jours une démonstration en même temps qu'une ob- servation. Il y a là à la fois des avantages et des incon- vénients. Mais, lorsque la microphotographie — et sa reproduction par l'imprimerie — aura atteint toute sa perfection, elle sera incontestablement le meilleur moyen de relater les faits. L'Atlas de Lindner le montre déjà pour un grand nombre de cas, et il donne assurément la mesure de ce qu'on peut actuellement ire de mieux dans cette voie. faire de mi d J. BEAUVERIE, Chargé d'un Cours de Botanique appliquée à la Faculté des Sciences de Lyon. Travaux de l'Association de l’Institut Marey. Tome IL. — 1 vol. de 338 pages, avec figures. (Prix : 10 fr.) Masson et Ci, éditeurs. Paris, 1910. Le second volume des Travaux de l’Association de l'Institut Marey, qui vient de paraître, comprend deux parties : les travaux exécutés à l’Institut Marey, et les travaux de technique physiologique présentés à l'As- sociation. Dans son Mémoire « Sur le mouvement des cylindres enregistreurs », M. L. Bull, après avoir rappelé les irrégularités de la rotation des cylindres mus par des poids, des ressorts ou des moteurs électriques, indique comment il a pu obtenir, à l’aide d’un moteur élec- trique synchronisé par le diapason, une régularité presque idéale. M. P. Noguès étudie « l'Odographe », en décrit le mécanisme et en indique l'application à l'étude des fréquences de la respiration et du pouls. « Actionner l'odographe par les battements du cœur et par les mouvements respiratoires, avait écrit Marey, tel est le moyen véritable de connaître les variations de fré- quence de ces mouvements pendant une longue période de temps... Nulle patience ne pourrait atteindre à de pareilles déterminations, qui, au contraire, se feraient toutes seules, et dans des conditions parfaites d’exac- titude, au moyen des appareils inscripteurs..… La manière dont se comportent la fréquence du pouls et celle de la respiration dans les maladies est très importante à connaître; les médecins ont, à cet égard, accumulé des observations sans nombre; mais toutes sont insuftisantes, parce qu'il n’est pas possible à la patience humaine de suivre, sans repos ni trève, les phases de ces variations.» Pour réaliser ce programme de Marey, M. P. Noguès a imaginé un explorateur de fréquence respiratoire et un explorateur de fréquence du pouls, combinables avec l’odographe. La méthode chronophotographique, appliquée par Marey à l'analyse des mouvements rapides, n'est utili- sable que si ces mouvements ne sont pas extrêmement rapides. Dans son Mémoire sur la chronophotographie des mouvements rapides, M. L. Bull décritune méthode plus délicate, applicable à l'étude des mouvements des ailes des insectes, qui sont, comme on le sait, parmi les plus rapides qu'on puisse observer dans le monde animal. Ce sont encore des études de chronophotographie que M. J. Carvallo a faites et qu'il décrit dans ses deux Mémoires Méthode radio -chronophotographique ; application de cette méthode à l'étude des mouve- ments du tube digestif, et Chronophotographie du tube digestif isolé. La lecture de ces Mémoires, qui paraîtra peut-être pénible à beaucoup de biologistes non familiarisés avec la technique de précision, présente, pour qui veut réfléchir, un très grand intérêt. À une époque où l’on abandonne volontiers les recherches très précises pour se contenter d'à peu près, où l’on veut aller vite pour aboutir à un résultat approximatif, il est bon de prendre connaissance de ces travaux, poursuivis par des hommes animés d’un tout autre esprit,ayant pris pour devise : Faire bien et faire précis. Quand on considère les résultats admirablement précis auxquels peut con- duire la méthode d'enregistrement convenablement ins- tituée, on se prend à regretter bien vivement que tous ceux qui se livrent aux études biologiques n'aient pas subi une initiation à ces méthodes : ils auraient peut- être pris goût à la précision, et la littérature biologique ne serait sans doute pas encombrée d’inutiles et déso- rientants Mémoires. Dans la seconde partie de l'ouvrage, sont exposés les travaux de technique physiologique présentés à l'Association. M. Athanasiu, de Bucarest, décrit un ergographe double à bille, présentant, pour l'étude et la mesure de la contraction musculaire, des avantages incontes- tables sur les ergographes actuellement en usage de Mosso, de Trèves, de Stein, de Fick, de Schenk, d'Ivory- Franz, de Hough, de Binet et Vaschide, etc. M. Joseph Barcroft expose une méthode différen- tielle d'analyse des gaz du sang qui ne relève pas de la technique d'enregistrement. M. Einthoven, dans un Mémoire très étendu, étudie le galvanomètre à corde. M. Hürthle fait connaître des faits intéressants relatifs à la structure des fibres mus- culaires striées de l’'Hydrophile à l’état de repos ou d'activité. MM. Noguès et Richet ont fait des expé- riences sur le vol des pigeons à ailes rognées. M. le D: Ries résume ses recherches sur la chronophotogra- phie de la fécondation et de la segmentation, et Mme Im- chanitzky réalise la reconstitution cinématographique de séries de coupes. M. J. Tissot expose une nouvelle méthode de me- sure et d'inscription du débit et des mouvements res- piratoires de l’homme et des animaux, méthode incom- parablement supérieure à celles dont on dispose ac- tuellement. Cette méthode permet, en effet, d'inscrire le débit et les mouvements respiratoires en évitant l'application de tout appareil sur le thorax de l'homme, d'inscrire la résultante de toutes les actions des muscles respiratoires, et, en même temps, d'effectuer une détermination des coefficients respiratoires. Les courbes obtenues donnent des indications toujours proportionnelles entre elles et proportionnelles au volume d'air inspiré ou expiré, et permettent de con- vaître le volume d'air inspiré ou expiré et la forme du mouvement respiratoire. Le travail de M. Waller, la balance chloroformique, instrument pour l'inscription continue du pourcen- tage dans l'air de la vapeur de chloroforme (ou d’éther) employée pour produire l’anesthésie, est la réalisation d'un vœu exprimé par Marey : c'est la transforma- tion en méthode graphique de la méthode élaborée antérieurement par l’auteur pour titrer le chloroforme dans l'air, par la différence de poids accusé par un ballon rempli de mélange et le même ballon rempli d'air atmosphérique. M. G. Weiss décrit la technique qu'il a adoptée pour étudier les échanges gazeux de la grenouille et déter- miner l'influence qu'exercent sur ces échanges divers facteurs. L'ouvrage se termine par un important Mémoire d'Otto Weiss et Gerhard Joachim sur l'enregistrement photographique et la reproduction des bruits du cœur de l'homme. Tous les physiologistes n'ont pas compris, dès l’ori- gine, l'Institut Marey, et beaucoup se sont désintéres- sés de ses destinées, le considérant comme une œuvre sans vitalité. Le second volume des travaux de l’Asso- ciation de l’Institut Marey les ramènera assurément à une conception plus exacte de son importance et de son rôle. Il ne représente pas seulement un labora- toire d'études précises, mais encore un centre vers lequel se sentiront de plus en plus attirés tous ceux qui connaissent l'importance d’une technique délicate dans les études de Biologie. MAURICE ARTHUS, Professeur de Physiologie à l'Université de Lausanne. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ——————— 4 Sciences médicales Legrain (D'), Médecin en Chef des Asiles d'aliénés de la Seine. — Les Folies à éclipse. — 1 vol. in-16 de 120 pages. (Prix : 4 fr. 50.) Collection de Psycho- logie expérimentale et de Métapsychie. Bloud, édi- teur. Paris, 4910. Il est des individus qui, après avoir présenté un état délirant plus ou moins accentué, se calment progres- sivement et donnent bientôt l'impression d'un sujet maître de lui. Que l'on questionne alors le malade, on s'aperçoit qu'il ne parle plus de son délire que comme d'une chose passée ; mais il y croit fermement encore, il y croira toujours, el toujours il en parlera passive- ment, en un langage stéréotypé. Le délire n'est pas rectifié, il s’est éclipsé dans le subconscient. Ces délires à éclipse sont constitués par un système généralement assez simple et transitoire d'idées mélancoliques, mys- tiques, ou ambitieuses, d'idées de persécution ou de jalousie. 11 s’agit le plus souvent de scènes terrifiantes d'origine polyhallucinatoire à prédominance auditive. Dans certains cas, le malade rectifie une partie de son rêve morbide, mais une partie seulement; les halluci- nations visuelles sont habituellement appréciées à leur juste valeur et rejetées; les hallucinations de l’ouie, au contraire, entraînent une conviction profonde et iné- branlable. Ces folies à éclipse ne s'observent guère que chez des faibles d'esprit; elles peuvent renaître plus tard; l’auteur consacrera un nouveau livre à l'étude de ces reviviscences d'anciens délires. Get ouvrage, écrit avec verve et clarté et illustré de nombreuses observations, apporte une contribution importante et pittoresque à l'étude de l'inconscient; il éclaire la marche et le pronostic de plusieurs espèces morbides ; il fournit d’intéressants aperçus médico-légaux, théra- peutiques et prophylactiques. Dr J. CapGras. Tuffer (Th.), Professeur agrégé à la Faculté de Mé- decine de Paris, Chirurgien de l'Hôpital Beaujon, et Desfosses (P.), ancien Interne des Hôpitaux de Paris, Chirurgien du Dispensaire de la Cite du Midi. — Petite Chirurgie pratique. 3° édilion re- vue et augmentée. —1A vol. in-12° de 510 pages avec 325 gravures. (Prix: 10 fr.) Masson et GleNedite, Paris, 1910. Les auteurs se sont proposé d'écrire à l'usage des infirmières, des étudiants et même des médecins un manuel renfermant tout ce qui est nécessaire et suffi- sant à la pratique de la petite chirurgie et à l'assis- tance de la grande. Leurs descriptions, résolument modernes et rigoureusement concrètes, élaguées üe toute érudition fastidieuse et inutile, sont aussi pré- cises et minutieuses que possible; ils n’ont pas craint d'entrer, le cas échéant, dans les détails, d'être très élémentaires, convaincus, avec raison et par expé- rience, que ce sont ces éléments qu'ignorent les étu- diants à leur début et souvent à leur fin d’études. Ils ont, de plus, complété leurs descriptions par de nom- breuses et excellentes figures; l'œil doit jouer, en effet, le rôle prépondérant dans l’enseignement de la Chirurgie. La première partie est consacrée aux soins à donner aux malades. L'observation du pouls, de la tempéra- ture, l’organisation d'une chambre de malade, au point de vue soins et préservation, l'alimentation, l’admi- nistration des drogues courantes, la pratique des agents physiques usuels, les soins banaux (lavages de bouche, lavements, injections vaginales) y sont exposés avec soin. La deuxième partie a trait aux petites interventions courantes : injections hypodermiques, ventouses, mé- thode de Bier, cautérisation ignée. On y trouvera un excellent chapitre relatif aux bandages, ceintures, bas élastiques, pessaires, et un très substantiel exposé des soins à donner en cas de syncope, d asphyxie, d’em- poisonnement, d'hémorragie. La troisième partie, capitale, expose l'essence même de la Chirurgie moderne, — traite de l'asepsie et de la préparation du matériel chirurgical : asepsie du chirurgien et de ses aides, asepsie du malade, asepsie des instruments, asepsie des matériaux de pansement. L'anesthésie locale et générale fait partie du chapitre suivant; elle a été exposée avec un soin particulier par les auteurs dont les travaux sur l'ansethésie, par voie intra-rachidienne et sur les accidents graves post- anesthésiques sont classiques. Les pansements, — et on sait quelle est leur impor- tance en chirurgie, — la petite chirurgie journalière (furoncles, abcès chauds, panaris, ponctions explora- trices, thoracentèse, paracentèse, ponction lombaire, saignée) forment la substance de la cinquième partie. L'immunisation est traitée dans la sixième partie, du moins dans ses applications journalières (vaccina- tion, traitement antirabique, sérum antidiphtérique, sérum antiméningococcique, tuberculino-diagnostic). Les derniers chapitres sont consacrés à la petite chi- rurgie spéciale (oculaire, auditive, dentaire, urinaire), aux appareils plätrés pour fractures et pour orthopédie, et enfin à un exposé clair et succinet de la kinésithé- rapie (principes généraux, gymnastique chirurgicale, massage). A signaler un index bibliographique parfaitement sélectionné, qui permet au lecteur de compléter, s’il le juge convenable, sa documentation technique par la lecture d'une monographie spéciale. Que cet ouvrage ait parfaitement atteint son but, c'est ce que démontrent suffisamment les deux faits : qu'il en est à sa 3° édition et qu'il en existe une tra- duction allemande. on peut dire qu'elle D' ALFRED MARTINET. 5° Sciences diverses Delfino (Victor). — Anuario cientifico é industrial, año 1909. — 4 vol. in-8° de xxiv et 1.192 pages. Mauci, éditeurs, Buenos-Aires et Mexico, FE. Gra- nada. Barcelone, 1910. Les Républiques latines de l'Amérique entrent l’une après l’autre dans le domaine de la recherche scienti- fique. Leurs premiers efforts, cela était inévitable, s'étaient confinés dans le développement commercial et industriel, qui amène la richesse. Mais celle-ci, à son tour, apporte le loisir et les moyens d'étudier. M. Victor Delfino cherche sinon à créer un milieu qui existe déjà dans la République Argentine, du moins à augmenter considérablement le nombre des per- sonnes instruites qui s'intéressent aux progrès et à la philosophie de la science. Son Annuaire, le premier d'une série qui sera longue, est une œuvre de haute vulgarisation; il s'adresse non-seulement aux gens du monde, mais à tous les spécialistes qui, cultivant leur jardin scientifique, veulent avoir une idée de ce qui se passe dans les autres jardins. Il traite environ cinq cents questions de Cosmologie, Astronomie, Météoro- logie et Physique terrestre, Physique, Chimie, Histoire naturelle, Médecine, Physiologie, Hygiène, Agriculture, Arts industriels, Géographie et Géodésie. M. Victor Delfino n'est pas un simple observateur; il suit le mouvement des idées les plus modernes. Il rend done à son pays un réel et grand service; son œuvre mérite quelque chose de plus qu'un banal encouragement. Souhaitons-lui seulement le succès auquel il a droit : ce sera suffisant. E. DurAND-GRÉVILLE, Vice-Président de la Société astronomique de France. 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES EE ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 25 Juillet 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Paul Dienes donne une réponse suflisamment complète à une question dont le problème d'Abel sur la série de Taylor n'est qu'un cas très particulier. — M. Et. Mazurkiewicez démontre, sans faire usage de la théorie des nombres transfinis, le théorème : Soit G un continu, p et 4 deux de ses points; il existe au moins un continu irréduc- tible pq, sous-ensemble de C. — M. A. Korn poursuit l'étude du problème biharmonique et du problème fondamental dans la théorie de l’élasticité. — M. J. Guillaume présente ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le premier trimestre de 1910. La surface totale des taches a diminué de moitié sur le trimestre précédent; celle des facules a peu varié. — MM. H. Deslandres et J. Bosler dédui- sent, des apparences présentées par la queue de la comète de Halley lors du passage du 19 mai dernier, que la Terre semble avoir effectivement repoussé cette queue, probablement par suite d'une répulsion élec- trique. — M. J. Mascart présente quelques photo- graphies de la comète de Halley prises à l'énérife, sur le mont Guajura (2.715 m.). La comète n’est pas très actinique; cependant, elle a donné de belles photo- graphies. — M. D. Eginitis conclut de ses observa- tions de la comète de Halley, faites à Athènes, que, de même que la queue, la tête ne pouvait être purement gazeuse et devait contenir des corps solides d'ordre inconnu. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. P. Villard et H. Abraham montrent que le régime de décharge par gaine anodique peut se produire même avec les vol- tages très rapidement variables des transformateurs et bobines d’induction. L'existence des deux régimes : aigrettes et gaine anodique, explique les divergences parfois considérables qu'on relève dans les mesures de potentiels explosifs. — M. E. Pringsheim montre que, dans ses expériences sur l'émission des gaz, l'hy- pothèse d’une diffusion vers la paroi absorbante doit être absolument écartée.— MM. G. Sizes et G. Massol ont reconnu que les instruments à tube en cuivre peuvent donner un plus grand nombre d’harmoniques que ne prévoit la théorie des tuyaux ouverts et que l’ensemble de leurs manifestations vibratoires est régi par une loi générale analogue à celle qu'ils ont précé- demment établie pour les diapasons. — M. L. Hack- spill à mesuré la résistance électrique des métaux alcalins (Co, Rb, K, Na) sur des tubes de verre pleins de métal, munis de 4 électrodes de platine; il a trouvé des nombres inférieurs à ceux de MM. Guntz et Bro- niewski. — M. A. de Gramont à constaté que, pour les corps dont le spectre possède une série principale, leurs raies ultimes appartiennent toujours à celle-ci; pour ceux où l’on n’a encore reconnu que des séries secondaires, les raies ultimes ne figurent pas parmi celles-ci. — M. D. Gernez a constaté que les solutions incolores d’iodure mercurique dans divers solvants, refroidies de manière à amener la solidification de leur dissolvant incolore, prennent une couleur jaune, qui passe successivement au saumon, à l’orangé rouge et finalement au rouge vif, couleur de la forme stable de Hgl®. — M. A. Ladenburg, par l'étude des points de fusion de la pipécoline inactive, contenant des quantités variables de d- ou de /-pipécoline, a mis en évidence l'existence de pipécoline racémique liquide, contenant des quantités égales de d- et de /-pipécoline. — M. G. Reboul a observé que les métaux alcalins, en s'oxydant à l'air humide, émettent des charges des deux signes avec prépondérance de eharges négatives. — M. A. Buguet a étudié cryoscopiquement les mé- langes d'« et 5-naphtylamine avec divers dérivés ben- zéniques nitrés et halogénés et a reconnu l'existence de composés d'addition. — MM. E. Briner et A. Wroc- Zynski ont constaté que le cyanogène, soumis à l’ac- tion combinée de la température et de la pression, se transforme en paracyanogène et peut même se décom- poser en ses éléments. — M. M. Kernbaum, en faisant agir l’aigrette sur la vapeur d’eau saturée, a observé une décomposition en H° et H°0*; cette réaction paraît ètre un eflet de l'ionisation produite par le rayonne- ment cathodique. — MM. G. Friedel et F. Grandjean ont reconnu que les liquides anisotropes de Lehmann n'ont en aucune façon ni la structure ni les propriétés des cristaux. Les phénomènes optiques observés sont dus à ce que la lumière traverse successivement trois milieux : deux pellicules superficielles et le liquide interposé,ce dernier n'étant pour rien dans les limites de plages. — M. D. Wolk montre que le gaz ammo- niac n'a pas d'action spécifique sur l'aluminium. — MM. H. Bierry, V. Henri et A. Rance ont constaté que, sous l'influence des rayons ultra-violets, la molé- cule de d-fructose subit une dégradation profonde Jnsqu'à formation d’aldéhyde formique et d'oxyde de carbone. — MM. G. Bertrand et G. Weisweiller montrent que le vicianose, obtenu par dédoublement diastasique de la vicianine, est un disaccharide formé par l'union d’une molécule de d-glucose avec une molécule de /-arabinose. -— M. L. Mangin a observé que la callose, qui constitue la membrane des Cham- pignons comme le Bornetina Corium, se distingue de la cellulose, dont elle possède la composition élémen- taire, par son insolubilité dans la liqueur de Schweizer et sa solubilité dans la glycérine à 300, Elle ne se colore pas par les réactifs iodés, mais bien par les bleus de triphénylméthane trisulfonés et les couleurs de benzidine. — M. V. Grignard a reconnu que les dérivés organo-magnésiens mixtes possèdent une action dédoublante sur les éthers-oxydes de phénols, avec formation intermédiaire d’un composé oxonium. — M. A. Lacroix a déterminé quelques minéraux formés par l’action de l’eau de mer sur des objets métalliques romains trouvés en mer au large de Mahdia (Tunisie). Sur le plomb, on a trouvé de la cotunnite et de la phosgénite, sur le cuivre de la covellite et de la chalcosite, 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Calmette et L. Massol montrent que les précipités formés dans les mélanges tuberculine + sérum de sujets tuberculeux ou d'animaux hypervaccinés ne sont constitués ni par de la tuberculine en nature, ni par de la tuberculine sensibilisée ou neutralisée, la totalité de la tubercu- line mise en œuvre restant intacte dans le liquide surnageant. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier ont pu, par des injections répétées d’urohypotensine, im- muniser les animaux ; le sérum des animaux immu- nisés, mélangé in vitro à l’urohypotensine, possède une action antitoxique manifeste. — M. E. Gley signale un nouvel excitant de la sécrétion pancréati- que : c'est la peptocrinine, produit de la macération de la muqueuse duodéno-jéjunale dans une solution de peptone de Witt. — MM. E. Tassilly et R. Cambier ont constaté que les rayons ultra-violets d’origine chi- mique, provenant de la flamme de CS? brûlant dans l'oxyde azotique, détruisent 68 °/, au moins des bac- téries contenues dans l’eau de l'Ourcq. — MM. de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 759 Drouin de Bouville et L. Mercier signalent l'appari- tion de la furonculose à l'Etablissement de Pisciculture de Bellefontaine, près Nancy. C’est la truite pourpre qui a été surtout attaquée; on a isolé des poissons atteints un bacille identique au A. Salmonicida. — MM. O. Duboseq et B. Collin ont observé la reproduc- tion asexuée d’un protiste parasite des Tintinnides. — M. Audebeau Bey rend compte d'expériences effec- tuées en Egypte en vue de déterminer l'influence de la nappe souterraine du Delta sur la culture du coton. Le rendement en coton s’est constamment montré pro- portionnel à la profondeur de la nappe souterraine, tandis que la chute des capsules, après la floraison, était en raison inverse de cette profondeur. — M. Le- clere du Sablon montre que les mutations de l'Oeno- thère de Lamarck peuvent ètre considérées comme la conséquence de la nature hybride de cette plante. — M. Hue a reconnu que, dans le genre Solorina, des espèces sont constituées et fructilient à laide de go- nidies phycochromacées, d’autres avec des gonidies chlorophycées, et l'une d'elles en employant en mème temps ces deux sortes de gonidies. — M. J. Virieux a constaté que, parmi tous les rôles qu'on a attribués aux gaines et aux mucilages des Algues d’eau douce, seul celui de réservoir d’eau est général. Les autres fonctions, ou bien sont problématiques, ou bien n'in- téressent qu'un nombre fort restreint de types. — M. A. Briquet montre que les formes du relief conti- nental dans la région gallo-belge s'expliquent, étant données les conditions de structure géologique propres à chaque partie de la région, par l'érosion effectuée au cours de la série de cycles décrite par lui précédem- ment. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 9 Juin 1910. SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. A. Gray présente ses recherches sur la distribution de la vitesse des rayons B émis par une substance radio-active. Il trouve que les rayons $ qui sont absorbés suivant une loi exponen- tielle ne sont pas homogènes; les rayons & doivent diminuer de vitesse en traversant la matière, car, si cela n’était pas le cas, le coefficient d'absorption d'un mélange quelconque de rayons devrait décroître lorsque les rayons traversent la matière. — M. W. Wilson a étudié la diminution de vitesse des particules & en traversant la matière. Ses expériences montrent que la vitesse des particules Best réduite d'une façon appré- ciable lorsqu'elles traversent la matière et que la gran- deur de cette diminution est telle qu’elle peut résulter d'une loi linéaire d’absorption. — M. J. N. Brown a déterminé la vitesse d'émission des particules « par l'uranium etses produits. Il a reconnu que le nombre de particules « par seconde et par gramme d'uranium en équilibre avec ses produits est de 7,36 X 404, — M. T. S. Lattey a recherché l'effet de petites traces d'humidité sur les vitesses des ions engendrés par les rayons Rôntgen dans l'air. Il a observé que, tandis que l'enlèvement complet de la vapeur d'eau n'a qu'un faible effet sur la vitesse des ions positifs, la siccité complète multiplie la vitesse des ions négatifs par un facteur s'élevant jusqu'à trente pour les intensités faibles et pouvant être plus considérable pour de grandes intensités. — M. B. Hopkinson : La radiation dans une explosion gazeuse. L'auteur a mesuré la quantité de chaleur rayonnée par un mélange de gaz d'éclairage et d'air soumis à l'explosion dans un vase recouvert intérieurement d'argent bien poli ou noirci. Avec l'argent poli, la chaleur reçue pendant le premier quart de seconde après l’explosion est les trois quarts de celle reçue par l'argent noirci pendant le mème temps, les pressions étant identiques. Au moment de la pression maximum (1/20 de seconde après l'explosion), la cha- leur radiée n'est que de 3°/, de la chaleur de combus- tion ; au bout d'une demi-seconde après l’isnition, il y a 22°/, de chaleur radiée. — M. R. J. Strutt poursuit ses recherches sur l'accumulation de l'hélium pendant les époques géologiques. La quantité d'hélium trouvée dans les roches archéennes conduit à leur attribue une antiquité d'environ 700 millions d'années. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 14 Avril 190. M. J. C. Mann rappelle les méthodes employées pour l'essai de la créosote du goudron de houille et qui ont pour but de déterminer la teneur en eau, en phénols, en naphtalène et en huiles lourdes de gou- dron. La méthode employée pour déterminer le pour- centage du naphtalène à 150,5 est très peu satisfaisante et l'auteur la remplace par une méthode nouvelle, basée sur la détermination de l'élévation de tempéra- ture due à la chaleur latente de cristallisation des corps contenus dans le distillat fourni à 3159. SECTION DE LONDRES Séance du 2 Mai 1910. M. E. J. Read a cherché à déterminer par l'examen microscopique la nature des produits cristallins qui se forment parfois au cours de l'hydratation du ciment de Portland. Il a trouvé deux catégories distinctes de cristaux : ceux d'aluminate tétracalcique et ceux de sulfo-aluminate calcique, qui peuvent se présenter soit séparément, soit dans quelques cas simultané- ment, et auxquels viennent s'ajouter, vers la fin, de larges cristaux irréguliers d'hydrate de calcium. Séance du 6 Juin 190. M. R. Meldola revendique en faveur de l'Anglais Henry Hennel, en 1826-1828, la priorité de la synthèse de l'alcool éthylique par l’action de l’acide sulfurique sur l’éthylène et la décomposition par chauffage de l'acide sulfovinique formé avec production d'alcool éthylique. — M. J. L. Foucar décrit un appareil de distillation différentielle consistant essentiellement en une cloison hélicoïdale traversant l’espace annulaire entre deux cylindres concentriques. Cet appareil peut fonctionner comme une colonne de distillation ordi- naire, sans condensateur à reflux, ou peut servir à séparer une série de constituants d'un mélange. — MM. C. T. Kingzett et H. C. Woodcock ont analysé un dépôt considérable de matière cristalline qui s'était formé dans un réservoir en fer galvanisé servant à conserver de l'essence de térébenthine russe oxydée à l'air et l'ont trouvé constitué presque exclusivement par du formiate de zinc. Les auteurs ont vérifié en- suite que l'oxydation de l'essence de térébenthine à l'air en présence d’eau donne des acides formique et acétique. — M. S. H. Blichfeldt décrit une méthode pour la détermination de la graisse de beurre et de coco dans la margarine, basée sur le rapport entre les sels d'argent solubles et insolubles des acides volatils. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 18 Mai 190. M. J. M. Wilkie propose une modification de la méthode de détermination de l'acide phosphorique par le nitrate d'argent normal. Il opère en présence d'une petite quantité d'acétate de soude, neutralise la solution à la phénolphtaléine et ajoute une quantité déterminée d'acide sulfurique ou nitrique déci-normal. On précipite l'acide phosphorique par un excès de nitrate d'argent, rajoute un peu d’acétate de Na, neu- tralise à la phénolphtaléine par la soude décinormale, rajoute 2 c. c. d'HSO*N/10, filtre le phosphate d'argent et titre l’excès d'argent par la méthode de Volhard. — Le même auteur décrit une méthode d'analyse des phosphates commerciaux, qui se base sur une double 760 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES détermination : celle de l'acide phosphorique libre par titration au méthylorange et celle de l'hydrogène non déplacé par précipitation avec le nitrate d'argent en présence d'acétate de sodium. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 23 Mar 1910. M. J. W. Cobb : Syuthèse des vernis de poteries, des verres et autres silicates. IN : Le mélange qua- druple d'oxyde de sodium, chaux, alumine et silice. Le mélange Na°C0* + CaCO* + A1°0* H 10Si0? commence à réagir avant 8009, et donne à 1150° une masse fondue dont les 97 °/, sont insolubles; le chauffage à 1300°- 44009 augmente l’insolubilité jusqu’à 99 °/,, et la fusion est complète. Le mélange feldspath-chaux-silice se comporte un peu différemment du précédent; une plus haute température est nécessaire avant que la chaux ne devienne insoluble, mais ensuite les deux mélanges deviennent semblables. En résumé, les qualités essentielles d'un vernis ou d'un verre sont attachées à la composition chimique. Aucun mélange double d’oxydes, ni aucun mélange triple d'oxydes sans silice ne donne de composé possédant ces qualités. Les mélanges triples de chaux, alumine et silice don- nent un composé non volatil et résistant aux acides, mais insuffisamment fusible, tandis que les mélanges triples contenant silice et soude et alumine ou chaux donnent des corps non volatils et fusibles à chaud et résistant aux acides à froid. Le mélange des quatre oxydes fournit des composés encore plus fusibles et réunissant plus complètement les trois qualités essen- tielles. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 16 Juin 1910. 1° SGIENCES PHYSIQUES. — M. J. Stark a mesuré le nombre des centres d'émission lumineuse etle rapport d'intensité des divers ordres d'interférence pour les lignes du mercure À4359 et 14047. Il a trouvé, pour les deux lignes, que ce rapport croît d’abord lente- ment, puis rapidement, avec le nombre d'ordre. Il y a donc dans les ordres élevés d’interférence, par rapport aux faibles, d'autant moins d'énergie lumineuse que le nombre des centres d'émission est plus petit. — M. E. Zerner a fait réagir le cyanure de potassium sur la dichlorhydrine dans le but de réaliser la syn- thèse du 1:5-diaminopentanol. — M. S. Jaroschy a étudié l'influence de la concentration, de la tempéra- ture et, en partie, de l'excès d'acide sur le cours de l’acylation de la phénylhydrazine avec les acides for- mique, acétique, propionique, butyrique et isobuty- rique. 29 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Tandler a reconnu que, chez le renne, la formation des bois est indépen- dante de la possession des glandes sexuelles. Le renne castré, mâle ou femelle, renouvelle son bois annuelle- ment de la même façon que l’animal en pleine posses- sion de ses glandes sexuelles. Le bois des rennes est donc un caractère spécifique indépendant des glandes sexuelles. Séance du 30 Juin 1910. 19 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Schræœdinger à élu- dié la résistance de divers isolateurs à la conduction superficielle à l’air humide ; ils se rangent suivant la série: paraffine, soufre, ambre, ébonite, verre. — M. E. Kielhauser a reconnu, d’après ses observations d'électricité atmosphérique faites à Trieste le 19 mai, que la chute de potentiel n’a pas éprouvé de perturba- tion du fait de l'approche de la comète de Halley. — M. K. Przibram a mesuré les charges de particules de brouillard formées dans l'oxygène électrolytique, par l'étincelle dans l'air humide, par l’action de l'air humide sur le phosphore, etc. ; on constate une accu- mulation des charges mesurées autour de 4 X 10 10, raleur bien inférieure à celle de la quantité élémen- taire d'électricité. — M. H. Sirk a observé que, dans l'électrolyse d’une solution d'acétate de plomb radi- fère, la quantité de RaE, déposée sur la cathode d'argent est proportionnelle à la durée de l'électrolyse pour une même intensité de courant, mais augmente plus lentement, pour une intensité croissante, que ne l’exigerait la proportionnalité entre l'intensité et la quantité de RaE, déposée. — MM. W. Pauli et M. Samec ont reconnu que les solutions d’albumine ionisées présentent un grand accroissement du pou- voir de rotation optique par rapport aux solutions électriquement neutres. Les solutions acides et basi- ques de l’albumine donnentdescourbespolarimétriques qui présentent toutes les particularités caractéristiques des courbes de frottement. — MM. Zd. H. Skraup, A. von Biehler, R. Lang, E. Philippi et J. Priglin- g'er ont exécuté une série de recherches sur l’ascen- sion capillaire des sels, simples et complexes, sur les mélanges de deux sels, sur les mélanges de sels avec des acides et des bases, qui confirment leurs conclu- sions précédentes. — M° $S. Hillebrand : Sur la cons- tüitution chimique des groupes de la sodalithe et de la néphéline. — M. O. Antulisch a préparé la p-anisi- dylrhodamine et ses produits de condensation avec diverses aldéhydes aromatiques. — M. R. Andreasch a préparé le dithiocarbamine-acétate d’ammonium et la combinaison analogue d’alanine, et transformé cetie dernière en acide rhodaninepropionique, dont il a obtenu divers produits de condensation aldéhydique. — M. E. Langstein montre la structure asymétrique de l'acide pyrénique par la préparation de deux éthers acides isomères. Réduit par HI et P, l'acide pyrénique donne l’'anhydride péritriméthylènenaphtalique ; l'acide correspondant fournit par distillation le péritriméthy- lènenaphtalène. — M. E. Zerner a constaté que la dibenzoyleuxanthone est incolore, contrairement aux indications de la littérature, tandis que la 7-mono- benzoyleuxanthone est colorée en jaune. — M. F. Zmerzlikar montre que l'«-pyrocrésol découvert en 1882 par son père est le 3:6-diméthylxanthène ; son oxyde est décomposé par fusion avec KOH en acide 1-oxy-3-méthylbenzène-2-carbonique et m-crésol. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. F. Siebenrock à étudié les tortues rapportées du sud et du sud-ouest de l'Afrique par MM. Pôch et Brunnthaler. Ce sont des Testudo oculifera, formant phylogénétiquement avec le T°. geometrica un sous-groupe naturel, des T. ber- geri, et des Homopus. — M. F. Steindachner décrit quelques nouvelles espèces de Characinées, provenant de l’Orénoque et du Surinam supérieur : Curimalus bolivarensis, C. helleri, C. surinamensis, Leporinus lalofasciatus et L. pellegrinii. — M. H. Rebel a décou- vert au Portugal une nouvelle race locale de Melitæwa dejone, qu'il nomme #. d. rosinæ; elle se distingue de la forme souche par sa grosseur, son coloris plus sombre et ses dessins noirs plus forts. Louis BRUNET. Le Gérant : Louis BRUNET. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 18 30 SEPTEMBRE 1910 Revue générale D. SCiences pures el appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser provisoirement tont ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Eugène Rouché. — Eugène Rouché, membre libre de l'Académie des Sciences, vient de mourir à Lunel, à l’âge de soixante-dix-huit ans. Voici en quels termes M. Emile Picard, président de l’Académie, a apprécié, dans une des dernieres séances, la vie et l'œuvre de son confrère disparu : « Eugène Rouché était entré en 1852 à i'Ecole Poly- technique; mais, dès sa sortie de l'Ecole, il prenait la résolution de se consacrer à la science et à l’enseigne- ment. Plusieurs de ses travaux dénotent un réel talent d'analyste. Son beau Mémoire consacré à la série de Lagrange fut justement remarqué, et on lui doit d'in- téressantes recherches de Mécanique analytique sur des sujets qui avaient occupé Joseph Bertrand. « Le Calcul des Probabilités, qui demande tant de pénétration, fit aussi l’objet d'ingénieuses études de Rouché, particulièrement dans le problème de la ruine des joueurs quand le jeu n'est pas équitable. « Dans la plus grande partie de l’œuvre de Rouché, la part du savant et celle du professeur sont insépa- rables. Sa discussion générale d'un système d'équations du premier degré est aujourd'hui classique dans l’en- seignement de nos lycées. Les travaux de Géométrie moderne de Poncelet, de Chasles, de Plücker et d'autres attirèrent de bonne heure l'attention de Rouché et il résolut de publier, avec la collaboration de Charles de Comberousse, un Traité où seraient exposées, en oulre des parties classiques, ces décou- vertes qui n'avaient pas encore pénétré dans l’ensei- gnement élémentaire. Il réussit pleinement dans son dessein et éleva à la Géométrie un véritable monu- ment, dont on à pu dire qu'il avait acquis une répu- tation universelle, ouvrage précieux non seulement par son texte et sa documentation, mais aussi par l'in- térêt et l'abondance des exercices proposés. « Rouché fut successivement professeur au Lycée Charlemagne, à l'Ecole Centrale, au Conservatoire des Arts et Métiers; il a laissé partout le souvenir d’un professeur entraînant et d'une remarquable clarté. Des ouvrages de Statique graphique et de Stéréotomie furent le fruit de quelques-uns de ces enseigne- ments. » REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. $ 2. — Art de l’Ingénieur Les locomotives à essence. — Dans un récent numéro de La Technique Moderne, M. Varinois signale l'apparition en Allemagne de locomotives mues par des moteurs à essence, qui ont donné jusqu'à présent d'excellents résultats. Les locomotives à essence présentent plusieurs avantages sur les locomotives à vapeur : elles sont mises en route immédiatement; elles peuvent être conduites par un manœuvre après un très court ap- prentissage; la consommation de combustible pendant les arrêts est nulle; il n’y a pas d’explosion à redouter, vu la suppression de chaudière sous pression; enfin, le poids mort transporté est minime, à cause de la grande richesse calorifique des combustibles liquides, et de l'inutilité d’une grande consommation d’eau. Par ailleurs, les frais d'installation sont moindres que ceux qui correspondent à l'établissement de la traction électrique par trolley, et l'on évite les dépenses et les difticultés inhérentes à la pose d'une canalisation aérienne. Ces machines, extrêmement intéressantes et encore peu connues en France, sont déjà assez répandues en Allemagne, où leur fabrication offre un débouché assez vaste aux constructeurs d'automobiles. $ 3. Lesnouveaux succédanés des caoutchoues et les caoutchoues de synthèse. — Toutes les industries sont sous l'étroite dépendance de circons- tances économiques diverses, qui en règlent souvent la prospérité. Le prix des matières premières joue sur- tout un rôle de haute importance, et l’on n'a pas oublié que, lors de la grande crise cotonnière d'il y a quelques années, quantité de filatures durent chômer par suite des prix élevés et de la rareté des fibres textiles. Nous assistons en ce moment à une crise analogue qui, si elle ne produit pas les mêmes effets, n'est dépassée, quant à la formidable hausse des cours, par aucune autre. Le caoutchouc « para », le plus estimé, qui valait en 1908 de 9 à 14 francs le kg. sur le marché de Londres (régulateur des prix du monde, 18 — Chimie industrielle 162 comme le prix du para règle les prix, plus ou moins inférieurs, des autres gommes), fut coté en 1909 de 4% à 25 francs. Les prix oscillent maintenart autour de 30 francs. Ce n'est pas la première fois que se suivent des hausses persistant plusieurs années ; mais jamais on n'avait vu de tels cours; chaque fois, en effet, que se produisit une demande plus active par suite de nouveaux débouchés de consommation, il y eut toujours découverte de nouveaux centres de pro-: duction de matière première. De même, nous assistons actuellement à plusieurs phénomènes qui amèneront évidemment une baisse plus ou moins prochaine et qui, cette fois, sont d'intérêt surtout technologique. On est parvenu, après de longs essais, à épurer les caoutchoucs résineux, autrefois de valeur très inférieure (cf. la chronique de la Revue générale des Sciences, 1908, p. 800). On s'efforce de mieux utiliser les vieux caoutchoucs : c’est ainsi que le nouveau procédé récemment imaginé par M. Rou- xeville diffère heureusement des anciens moyens de régénération des vieilles gommes. Au lieu de pulvé- riser les produits vulcanisés pour les incorporer à des caoutchoucs vierges, ce qui donne des masses hétéro- gènes à particules fixées simplement mécaniquement, ce technicien les allie à un dérivé polymérisé de l’es- sence de térébenthine, qui dissout véritablement les déchets et que l'on peut ensuite vulcani-er en obte- nant des masses parfaitement homogènes. Des essais effectués par les experts des Laboratoires du Conser- vatoire des Arts et Métiers et du Ministère des Finances ont absolument confirmé les résultats obtenus par l'inventeur, et le procédé commence à être appliqué industriellement. D'autre part, les divers végétaux à latex caoutchou- tifère donnent des produits inférieurs au Para, et tous les centres d'exploitation étant maintenant explorés, on à créé un peu partoat : au Brésil, au Congo, en Malaisie, des plantations d'Aevea pour parer aux besoins à venir. Comme, d'ailleurs, la plante ne peut donner de récoltes utilisables que dans sa septième année de végétation, toutes ces cultures ne fournissent encore que peu ou pas de résultats; les financiers n’en ont que plus beau jeu à spéculer sur toutes ïes valeurs de plantations qui, depuis une année, envahis- sent les marchés de Londres et de Paris. Depuis la hausse des caoutchoucs, quantité d'actions de ces sociétés exotiques ont doublé, triplé, quintuplé de valeur ; pareil engouement ne s'était pas vu depuis la période d’agio sur les mines d'or de l'Afrique australe. Toutefois, l'avenir de ces affaires paraît bien compro- mis depuis que les chercheurs qui, depuis des années, étudient la question si complexe de la constitution des terpènes en général et des gommes élastiques en par- ticulier, sont parvenus — cette année — à obtenir du véritable caoutchouc de synthèse. Après Heinemann, qui obtint une sorte de caout- chouc synthétique en partant d’un mélange d'éthylène et d'acétylène et en passant successivement par le divinyle et l'isoprène qui est finalement polymérisé, les techniciens des célèbres Farbenfabriken Bayer, où travaillent plus de deux cents chimistes, ont récem- ment réussi à préparer des produits semblables aux gommes naturelles. Des déclarations faites dernière- ment au Conseil d'administration de cette firme, il résulte, d'ailleurs, que l'invention n'est pas encore pratiquement applicable. Et il se peut qu'elle ne le devienne qu'après des années de recherches : plus de quinze ans se passèrent avant que la Badische Anilin und Soda Fabrik pût fabriquer en grand l'indigo arti- ficiel dont elle acheta les premiers procédés de pré- paration au Professeur Baeyer, de Munich. Toutefois, cet exemple même témoigne du succès probable des chercheurs de la synthèse industrielle du caoutchouc. Car, après avoir travaiilé des années, construit et démoli plusieurs usines d'essais, dépensé des millions, les chimistes de la Badische virent leur œuvre couronnée d'un succès tel que maintenant, après CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE quelques années de lutte, les planteurs d'indigo de l'Inde ont dù réduire leurs cultures de plus de moitié. Comme est disparue la garance, l’indigo naturel dispa- rait : ne doutons pas que les usines de caoutchouc artificiel ne compromettent d'ici quelques années le succès des exploitations d'Aevea et permettent d'obtenir à bien moindres frais un produit de qualités plus égales et régulières, pour le plus grand avantage de toutes les industries où l'on manufacture ou utilise caout- chouc et gutta-percha. H. Rousset. e $ 4. — Chimie biologique Pôle des acides aminés dans l'organisme. — On sait, depuisles travaux de Fischer et de sesélèves, que les substances albuminoïdes sont constituées par l’'enchainement réciproque, avec déshydratation, d’un grand nombre de molécules d'acides aminés, comme la leucine, la tyrosine, la lysine, la cystine, etc. D'autre part, les diastases du tube digestif, surtout celles du suc pancréatique, ont pour effet de produire une disloca- tion progressive des albuminoïdes, consistant en un départ successif d'acides aminés divers; il semble bien que l'absorption intestinale a lieu sous cette forme simple et que les amino-acides passent tels quels en grande partie, sinon en totalité, dans le sang de la veine porte qui les amène au foie. M. Delaunay‘, en utilisant l'excellente méthode de dosage au formol de Sürensen, s'est proposé de suivre le sort des acides aminés, et a obtenu quelques résul- tats intéressants : il pense que le foie possède une fonction régulatrice de la circulation des amino- acides, c'est-à-dire qu'il ne laisse passer dans le sang qu'une quantité minime et constante de ces corps (1 à 3 milligrammes pour 100 centimètres cubes de sang), et qu'il détruit le reste (fonction amino-acidolytique). Il désamine les amino-acides et forme de l’urée avec l'ammoniaque qui est mise en liberté; quant aux acides ou oxy-acides qui résultent de cette désamina- tion, ils seraient brûlés ou mis en réserve sous forme de glycogène, ou peut-être de graisse. Les amino- acides en circulation auraient pour rôle de réparer l'usure azotée des tissus, en s’accolant aux molécules albuminoïdes complexes ; en somme, ils représente- raient la forme active et voyageuse de l'albumine, tandis que l’albumine du plasma aurait la significa- tion d’une réserve stable." Chez les Invertébrés, divers tissus renferment des quantités notables d'azote sous forme d'acides aminés : par exemple, le foie des Crustacés et des Céphalopodes, les cæcums radiaux des Astéries en contiennent jus- qu'à 15 à 20°/, de l'azote total, ainsi que les muscles, riches en taurine, léucine, tyrosine, etc. Il est à noter que les Céphalopodes, animaux d'une remarquable activité, et carnivores, ne possèdent que peu ou pas de glycogène dans le foie et dans les muscles, tandis qu'ils sont très riches en amino-acides; on peut se demander si ce n’est pas dans ceux-ci que l'animal puise son énergie mécanique, comme un Vertébré dans son glucose; il n'y à théoriquement aucune raison qui s'y oppose, puisqu'un amino-acide désa- miné renferme du carbone, de l'hydrogène et de l'oxygène dans des proportions sensiblement égales à celles du glycogène. $ 5. — Géographie et Colonisation Un nouveau percement des Vosges?. — Les Vosges sont actuellement traversées par les deux lignes Paris-Strasbourg, au nord, et Paris-Mulhouse, au sud, de telle sorte que, entre les stations-frontières d’Avri- court et de Montreux-Vieux, c'est-à-dire sur un espace 1 Contribution à l'étude du rôle des acides aminés dans l'organisme animal. Thèse de médecine, Bordeaux, 1910. 2 £. Levasseur et L. Coquer : La percée des Vosges. Revue économique internationale, 15-20 mai 1910. c CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 763 de 150 kilomètres, aucune voie ferrée ne permet de franchir les Vosges. Des bourgs, distants de 10 kilo- mètres — comme Bussang et Krüth — etsilués respec- tivement sur les versants français et alsacien, sont séparés par une distance de 247 kilomètres si l’on veut faire usage du chemin de fer. Les premiers projets de percement remontent avant la guerre de 1870; une Commission spéciale d'enquête avait été constituée en 1867 par le Conseil général du Haut-Rhin, sous la présidence de M. Jean Dolfus. La guerre, puis la tension politique qui a suivi ont empè- ché jusqu'ici l’idée de se réaliser. Le Comité commer- cial franco-allemand, fondé à Paris, en 1908, avec un groupe correspondant à Berlin, le Deutschi-Franzo- sischer Wirtschaltsverein, à vepris la question, et il estactuellement saisi de neuf projets, dontles deux plus importants relient Saint-Dié à Sainte-Marie-aux-Mines et à Saales. Tous ces projets sont facilement réalisables au point de vue technique; le plus coûteux ne dépasse pas 27 millions (à double voie. Leur nombre montre l'im- portance du point de vue régional et il a l'avantage de permettre aux deux Gouvernements français et alle- mand de se mettre d'accord au point de vue straté- gique, car la question militaire a toujours été le grand empêchement à la réalisation de la percée des Vosges depuis 1870, bien que tous les projets comportent des tunnels et des ouvrages d'art, dont la destruction en cas de guerre réduirait à néant le nouveau moyen de communication. Le nouveau percement permettra en premier lieu d'améliorer les relations de voisinage entre la France et l’Alsace, dans une sphère qui s'étend, d'un côté, à toute la Lorraine et au Nord-Est francais, et, de l'autre côté, à la partie sud du duché de Bade et du Wurtem- berg et jusqu'à Bäle. Il serait, en outre, possible _ d'abréger le trajet de Paris-Vienne, en améliorant cer- taines parties de voie actuellement inaccessibles aux grands express, et même le trajet Paris-Trieste en uti- lisant la nouvelle ligne directe Salzhourg-Trieste par les Tauern'. Ce dernier point a d'autant plus d'impor- tance que la Compagnie du Lloyd autrichien construit des bateaux rapides qui doivent faire le trajet de Trieste à Alexandrie en deux jours et demi, ce qui réduirait à trois jours et demi le parcours Paris-Alexandrie par Salzbourg. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole superieure d2 Commerce de Lyon. $ 6. — Enseignement La Société des « Amis du Muséum ». — Cette Société a tenu récemment son assemblée générale sous la présidence de M. Léon Bourgeois. Le directeur du Muséum, M. Edmoud Perrier, tout en célébrant le relèvement de cet établissement scientifique, a rappelé tous les malheurs qui s'abattirent sur l'infortuné Muséum au moment des inondations : la plus grande partie des bâtiments submergée, y compris les annexes de la rue de Buffon, les laboratoires de Chimie, de Cryptogamie, de Physique végétale, les sous-sols du laboratoire d'Anatomie comparée, l'atelier de moulage, presque toutes les pépinières, l'Ecole de Botanique, la ménagerie envahis par les eaux; une girafe, plusieurs antilopes, des lièvres de Patagonie, des oiseaux noyés, des moules brisés, tout un matériel détérioré. Malgré cette véritable catastrophe, dit M. Perrier, c'est bien à la renaissance du Muséum que se sont voués les amis de cet établissement. Déjà le Muséum leur est redevable d'acquisitions précieuses, comme l'étonnant Ichthyosaure qui vient d'être placé dans la galerie de Paléontologie, la collec- tion des dessins originaux de l’entomologiste Geotfroy, l'herbier des Algues de M. Bornet. Après avoir souhaité ‘ Cf. notre chronique : Les récents percements des Alpes autrichiennes. {crue générale des Sciences, 15 mai 1908. que celte œuvre de relèvement ne s'arrête pas, M. KEd- mond Perrier a raillé « les ermites de la célèbre tour d'ivoire qui se sont quelque peu effarés à l'idée qu'un établissement d'instruction publique pouvait songer à tirer parti de son savoir, de ses productions, de se richesses, c'est-à-dire de faire travailler son capital pour se mettre en mesure de mieux remplir sa tâche d'utilité et de progrès ». Laissons dire, a conclu M. Perrier, et faisons notre bonne besogne. Cette besogne est immense. Sans énumérer ave détails les travaux exécutés au cours de la dernière année, on peut noter que le professeur de Botanique, M. Lecomte, n'a pas eu à classer moins de 12.700 plantes; que M. le Professeur Joubin s'est trouvé en présence de 12.000 mollusques ou zoophytes,et M. Bou- vier avec 40.000 insectes, etc. Et cependant il faut loger tout cela et bien d'autres choses encore! Une conférence de M. Mesnil, de l'Institut Pasteur, avec vues micro-Ccinématographiques sur les Trypano- somes et les maladies qu'ils engendrent, à terminé la réunion. Nominations universitaires. — M. Topsent, maitre de conférences de Zoologie à la Faculté des Sciences de Caen, est nommé professeur de Zoologie et Physiologie animale à la Faculté des Sciences d, Dijon. M. Grignard, chargé d'un cours de Chimie organiqu. à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé pro- fesseur de Chimie organique à ladite Faculté. M. Wahl, chargé d'un cours complémentaire de Chimie industrielle à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé professeur de Chimie industrielle. M. Guyot, maître de Conférences de Chimie appliquée à la Faculté des Sciences de Nancy, y est nommé professeur de Chimie industrielle appliquée à la tein- ture et à l'impression. Conseil de l'Université de Paris. — Le Con- seil de l'Université de Paris a décidé que l'Université se ferait représenter en octobre au cinquantenaire de l'Université de Jassy. Il a été informé que les négocia- tions pour la création, à frais communs par l'Univer- sité de Paris et l'Université Columbia de New-York, d'un enseignement qui serait donné chaque année, dans cette dernière université, par un professeur soit de l’Université de Paris, soit de grands établissements scientifiques de Paris, soit des Universilés des dépar- tements, sont ierminées. C'est M. Brunot, professeur d'Histoire de la langue francaise à la Faculté des Lettres de Paris, qui sera chargé pour la première fois de cet enseignement. Le Conseil a ensuite attribué les bourses et subven- tions de la fondation Commercy, les bourses de la fon- dation Carnegie (bourses des Curie), les bourses Rothschild, les bourses de voyage autour du monde de la fondation Albert Kahn, et les dix bourses de séjour à l'étranger fondées l’an dernier par un anonyme. Ont été nommés litulaires des bourses de voyage autour du Monde : MM. Bernot, agrégé des lettres, professeur au lycée de Saint-Omer ; Reynier, agrégé de philosophie, professeur au Iycée de Chambéry; Mites Poulin, agrégée d'histoire, professeur au lycée de jeunes filles de Bordeaux; Allard, agrégée d'histoire, professeur au lycée de jeunes filles de Grenoble. Le généreux bienfaileur de l'Université, M. Albert Kahn, fait une nouvelle offre de subvention pour l'en- tretien, pendant cinq ans, à la Faculté des Lettres, d'un cours sur « les littératures modernes comparées » et, à la Faculté des Sc es, d'un cours sur « la théo- rie des nombres ». Le Conseil à accepté avec recon- naissance cette libéralité. Enfin, le Conseil accepte l'offre de M. Carlos Cruz, de l'Université de Buenos-Aires, de faire à la Faculté de Droit une série de conférences sur « la formation constitutionnelle de la République Argentine et le fonctionnement de ses principales institutions ». 76% GEORGES BOURREY — LA FORMATION DES INGÉNIEURS LA FORMATION DES INGÉNIEURS ET L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE SUPÉRIEUR ' Parmi les questions qui figurent au programme du Congrès international de l'Enseignement tech- nique supérieur, il en est plusieurs qui touchent aux méthodes mêmes de formation des ingénieurs. Elles intéressent tout particulièrement l'enseigne- ment technique francais, où diverses tendances se sont manifestées au cours de ces dernières années, sans aboutir à une orientation bien nette de l'ensei- gnement technique supérieur. Il est presque superflu d'affirmer que, parmi les causes de la prospérité industrielle et commerciale d'un pays. la formation de son état-major tech- nique constitue un des facteurs les plus impor- tants. Si l'Allemagne, par exemple, a acquis depuis vingt ans un développement économique considé- rable, elle le doit, en grande partie, aux progrès réalisés dans son enseignement technique. Il est curieux de constater que les principes sur lesquels repose cet enseignement en Allemagne, en Amé- rique et dans la plupart des autres nations indus- trielles, sont diamétralement opposés à ceux qui régissent l'enseignement technique français en gé- néral; les méthodes employées dans la formation des ingénieurs sont, par suite, très différentes : alors que l'enseignement dans la plupart des pays industriels est spécialisé et pratique, l'enseigne- ment technique supérieur, en France, ést encyclo- pédique et théorique. L'enseignement encyclopédique a été et est en- core en honneur dans la plupart des écoles fran- caises. Si l’on admet qu'un enseignement technique proprement dit doit reposer sur une instruction scientifique générale, les avis sont, au contraire, partagés sur la nécessité de la spécialisation dans la formation des ingénieurs. I y a un fait qui semble cependant indiscutable : c'est qu'il faut, avant de spécialiser les futurs ingé- nieurs, leur donner à tous une solide instruction scientifique ou, plus exactement, une éducation ! Rapport présenté au Congrès international de l'Ensei- snement technique supérieur de Bruxelles (septembre 1910). La Aevue a récemment publié sur la même question : H. Marcuan» : Les tendances nouvelles de l'enseignement technique et professionnel aux Etats-Unis (n° du 30 jan- vier AY0). \. Pecueran : La formation des ingénieurs en France et à l'Etranger (n° du 45 avril 1910). scientifique. On confond trop souvent éducation et instruction, et c'est, je crois, à l'éducation que doit revenir la première place dans la formation de l'in- génieur. C'est, en effet, le rôle de l'éducation de donner au futur ingénieur l'esprit scientifique qui: l'habitue à l'observation, à la réflexion, à la mé- thode et qui le prépare aux études techniques pro- prement dites. Une spécialisation prématurée pré- senterait de plus graves inconvénients qu'une: instruction encyclopédique, car elle pourrait res- treindre l'esprit en restreignant le champ des. connaissances générales indispensables à tout ingénieur. Si le futur ingénieur ne peut embrasser- toutes les connaissances scientifiques et techniques, il doit, au moins, posséder des notions suffisantes. sur les différentes branches de la science entre les— quelles on ne peut établir une démarcalion bien tranchée : il serait, semble-t-il, difficile d'admettre. qu'un ingénieur-électricien püt se passer de la Mécanique ou qu'un chimiste ignoràt la Physique, car ces sciences se pénètrent intimement les unes. les autres. La formation scientifique générale ne consiste pas, comme on pourrait le croire, à charger la mémoire d’un plus ou moins grand nombre de connaissances encyclopédiques, ce qui aurait pour résultat de paralyser le plus souvent, dans une cer- taine mesure, le développement des qualités essen- tielles de l'ingénieur : l'originalité, l'initiative, la faculté d'invention, mais à développer le plus. possible ces qualilés, et c'est précisément le rôle éducatif d’un bon enseignement scientifique. Aux. États-Unis, l'éducation prime l'instruction, et, si. les ingénieurs américains sont moins instruits, au, sens propre du mot, que les ingénieurs francais, par exemple, ils leur sont cependant supérieurs: sur le terrain industriel. On leur à appris à l'École à exercer, non pas leur mémoire, mais leur activité intellectuelle, non par des cours oraux, mais par des travaux personnels et des exercices pratiques. dont la valeur éducative est bien supérieure à celle des lecons apprises « par cœur » en vue d’un exa- men, parce qu'ils enseignent à l'élève à tirer parti des connaissances que lui a données une instruction scientifique. Entre ceux qui veulent réserver, dans l’enseigne- ment supérieur, la plus grande place à la haute- culture scientifique générale, et ceux qui vou- draient l’expulser des programmes des écoles des- tinées à former des ingénieurs, pour se cantonner- GEORGES BOURREY — LA FORMATION DES INGÉNIEURS 765 dans une technique déterminée, il y à un juste milieu à prendre : c'est de donner aux futurs ingé- mieurs une éducation scientifique générale orientée vers l'instruction technique qu'ils recevront plus tard. Nous aurons, du reste, l’occasion de revenir sur ce sujet lorsque nous examinerons plus loin la part qui doit être faite à l'enseignement théorique et à l'enseignement pratique dans les écoles tech- niques supérieures. Disons tout de suite que cet enseignement scientifique approprié doit consister mon pas à décrire en détail toutes les méthodes et tous les instruments, mais à étudier les lois qui régissent les phénomènes, les principes sur lesquels reposent les différentes méthodes et les principaux appareils, en ayant soin de développer le sens criti- que des élèves; on y arrive, par exemple, en leur mon- trant, par l'exposé de la genèse d'une découverte, les difficultés que l’on rencontre dans la pratique des sciences abstraites et expérimentales. Comme l’a dit si justement un de nos ingénieurs les plus répu- tés, M. Henry Le Châtelier : entre la science pure, essentiellement abstraite, qui isole, dans les diffé- rents phénomènes naturels, chacun des points de vue auxquels ils peuvent être envisagés, et l'ensei- gnement dit « pratique », qui est purement des- criptif et documentaire, il y a place pour ce qu'on a appelé « la science industrielle », qui, elle, n’est pas abstraite, mais synthétique, et groupe les différents phénomènes qui jouent un rôle dans une opération industrielle donnée. Il est donc nécessaire que l’enseignement tech- nique spécialisé repose sur un enseignement géné- ral seientifique et même de technique générale, comme nous le verrons plus loin. L'enseignement encyclopédique, si en faveur dans nos écoles fran- caises, ne peut donner que des résultats médiocres dans la pratique industrielle, car la plupart des ingénieurs sont appelés à rester « ingénieurs subal- ternes », cantonnés dans une spécialité pour laquelle il leur faudra plus de « savoir-faire professionnel » que de « savoir scientifique »; ils doivent donc se contenter du rôle qui leur à été assigné et pour lequel ils ont été spécialement préparés. Pour les autres, les « ingénieurs supérieurs », qui consli- tuent une élite, l'avantage d'une haute culture scientifique et encyclopédique est incontestable, puisqu'elle leur permet d'accéder aux situations les plus élevées, telles que celles de directeurs, d’ingé- nieurs en chef, etc.; c'est évidemment la haute cul- ture générale qui forme les élites, mais il ne faut pas perdre de vue que, pour un homme de juge- ment général, l'industrie réclame un nombre con- sidérable d'ingénieurs spécialisés. La spécialisation nous apparait donc comme une nécessité qu'il est difficile de ne pas admettre et, comme l'a dit très justement M. Dalemont, « l'étude approfondie d’une spécialité technique ne saurait nuire à la forma” tion de l'esprit et rendrait le jeune homme beau coup plus apte à exercer utilement, à sa sortie de l’école, une fonction industrielle nécessairement spécialisée ». Il pourra, du reste, changer de « spé- cialité » au cours de sa carrière, car la formation technique générale et la méthode de travail qu'il aura acquise par une éducation technique spéciale lui permettront de se mettre rapidement äu courant d'une autre spécialité. ? Avec le développement illimité de la science et de ses applications, il faut préparer à l'industrie, qui les réclame, des ingénieurs praticiens spécialisés. En France, il faut reconnaitre que les Ecoles"d’Arts et Métiers forment un certain nombre d'ingénieurs « secondaires », excellents mécaniciens, munis de connaissances techniques et de sens pratique. On a peut-être eu tort de donner récemment aux élèves de ces écoles le titre d'ingénieur sans faire suivre ce titre de celui de mécanicien : cela paraît avoir déterminé, chez les jeunes hommes qui en sortent, une certaine tendance à s’abstraire de leur milieu pour prétendre à des fonctions autres que celles pour lesquelles ils ont été préparés, sans se rendre compte du rôle plus modeste, mais aussi utile, qu'ils ont à jouer dans l'industrie et dans la société. Un ingénieur éminent, M. Blondel, a écrit très jus- tement que l'idéal pour l’enseignement technique serait de proportionner aux besoins de l'industrie en ingénieurs « secondaires » et en ingénieurs « supérieurs » la production des ingénieurs par les différents établissements d'instruction : je crois que c'est là précisément un point sur lequel on ne sau- rait trop appeler l'attention de ceux qui créent des écoles techniques sans trop s'inquiéter des débou- chés que peut leur offrir l'industrie. IT La spécialisation des élèves appelle logiquement la spécialisation des maîtres, qui devraient être choisis parmi les ingénieurs les plus savants au point de vue à la fois scientifique et technique et exerçant effectivement leur profession dans l'in- dustrie, de facon à pouvoir enseigner la technique en techniciens-praliciens et maintenir leur ensei- gnement au courant des derniers progrès. Ces pro- fesseurs seraient assistés de « privat-docents », recrutés dans les différentes industries, pour traiter les sujets spéciaux dans lesquels leur spécialisation même les aurait rendus des plus compétents. Le corps professoral de l’enseignement technique serait alors véritablement capable de préparer des ingé- nieurs techniciens, et l’on ne verrait plus — comme on le constate aujourd'hui dans certains établisse- ments d'enseignement soi-disant supérieur — -1 [er] [er] des professeurs enseigner une série d'industries des plus disparates dont ils n'ont « pratiqué » aucune. À l'École Centrale, le corps enseignant est,en prin- cipe, recruté sur des bases analogues ; mais malheu- reusement les professeurs y restent trop longtemps (à vie!), y vieillissent et perdent contact avec l'in- dustrie ; leur enseignement, ainsi « décalé » de plu- sieurs années sur les progrès réalisés, est alors plus ou moins suranné. Si les maîtres doivent être des spécialistes et des praticiens, il est indispensable que les inspecteurs chargés de contrôler tel ou tel enseignement soient aussi spécialisés et capables de se rendre compte de la valeur de cet enseignement. Cela n'empécherait pas qu'à côté de ces « inspecteurs spéciaux », on laissât subsister des inspecteurs généraux, chargés surtout de contrôler l'organisation administrative des différents établissements d'enseignement tech- nique. Cette organisation éviterait aux inspecteurs de juger de la valeur d’un enseignement quelconque dont ils ignorent, le plus souvent, les premières notions. III La spécialisation dans l'enseignement technique s'impose donc aussi bien pour les maîtres que pour les élèves; mais, pour les uns comme pour les autres, elle doit reposer sur les bases solides d’une culture générale à la fois scientifique et tech- nique. Si, en France, l'enseignement technique supérieur est trop encyclopédique et pas assez spécialisé, il est aussi trop fhéorique et pas assez pratique. Il n’est pas douteux qu'il faille accorder à l'ensei- gnement théorique des sciences la part qui lui revient, mais il est non moins indiscutable qu'il faut développer, chez le futur ingénieur, le sens pratique par l'étude de la technique. Il ne faut pas confondre science et technique, a fait très justement remarquer M. Blondel : la science se propose la recherche désintéressée de la vérité dans un ordre quelconque de connaissances ; la technique a pour but, au contraire, la recherche des moyens pratiques, des procédés industriels qui permettront de réaliser un résultat matériel de la facon la plus économique; à la science revient l'idée créatrice, à la technique la réalisation : autrement dit, la technique se dis- tingue de la science en ce qu'elle apprend à tenir compte des faits. Cette conception permet de distinguer trois phases dans la formation des ingénieurs : Une première phase, consacrée à l'étude des sciences pures ; Une deuxième phase de technique générale, réservée à la science industrielle ; Une troisième phase de technique appliquée, GEORGES BOURREY — LA FORMATION DES INGÉNIEURS consacrée à la pratique industrielle qui doit se faire dans les usines. Nous allons envisager rapidement chacune de ces phases. A. Phase scientilique. — C'est la période prépa- ratoire par laquelle doivent passer les futurs ingé- nieurs, sans distinction. Cette préparation scienti- fique, très développée en France, accorde une place: prépondérante à la méthode déductive, c'est-à- dire aux sciences mathématiques, qui, si elles ne développent pas le jugement, ont au moins l'avan- tage d'accroître la faculté d'analyse, la puissance du raisonnement, le sens critique; mais elle ne néglige pourtant pas la méthode inductive, que: réclament les sciences physiques. Bien qu'un tel enseignement ait pour but de donner à l'élève des connaissances scientifiques générales, il doit être, cependant, orienté, dans les établissements d'en- seignement technique, vers les applications qui intéressent surtout le futur ingénieur. Il serait bon d'élaguer, comme l'a proposé M. Pelletan, sous- directeur de l'École Supérieure des Mines de Paris, nombre de sujets transcendants d'enseignement supérieur, pour ne conserver que les théories utiles et accorder une large place aux Mathématiques élémentaires, notamment au Calcul, aux méthodes graphiques, à la Mécanique, ete. C'est l'opinion. de mathématiciens des plus éminents, notamment des Hermite et des Appell. Quant aux sciences physiques et chimiques, elles constituent une excellente préparation aux études. techniques, à condition, bien entendu, que ces. sciences « expérimentales » soient enseignées « expérimentalement » dans des laboratoires. Cet enseignement scientifique pourrait être confié à des professeurs de Faculté, car c’est à l'Université qu'incombe la mission de cultiver læ science pour elle-même, tamdisqu'à l'enseignement technique revient la tâche « de discerner les résul- tats » susceptibles d'applicalion ou d'améliorer la pratique industrielle. C'est pour répondre à ce double objectif qu'il faut confier l'instruction des futurs ingénieurs à des maîtres de catégories diffé- rentes : les professeurs « scientifiques » et les pro- fesseurs « techniques ». B. Phase de technique générale. — Mais, avant de: spécialiser le futur ingénieur qui possède des con- naissances scientifiques générales, il faut aussi lui donner des connaissances lechniques générales par l’enseignementdessciencesappliquées,ou plusexac- tement, suivant l'expression de M. Le Châtelier, par unenseignement consacré à la«scienceindustrielle», qui fait appel aux connaissances acquises anlérieu- rement pour expliquer la nature des phénomènes, GEORGES BOURREY — LA FORMATION DES INGÉNIEURS 767 mis en œuvre dans les appareils et procédés indus- triels, sans entrer dans la description détaillée et inutile des nombreux types d'appareils ou des multiples variétés des différents procédés. La science pure est essentiellement abstraite; la science industrielle est, au contraire, synthétique, dit M. Le Châtelier, car elle reprend chacune des sciences abstraites pour les grouper autour du fait étudié, en accordant à chacune d'elles une place proportionnée à sa part réelle dans le résultat final. Cette phase doit done comprendre notamment l'enseignement de la Mécanique expérimentale et appliquée, de la Physique industrielle, de la Résis- tance des matériaux, de la Chimie appliquée, de la Métallurgie générale, de l'Economie politique et sociale. Cet enseignement pourrait être confié, comme il a été dit précédemment, à des ingénieurs connaissant l’industrie et possédant une culture scientifique élevée et des aptitudes à l’enseignement. Pour être profitable aux élèves, un tel enseigne- ment devrait être donné non seulement à l'amphi- théâtre par le professeur, qui complèterail par des explications et des exercices numériques le cours autographié remis aux élèves, mais surtout dans des laboratoires bien outillés, où chaque élève s'habituerait à se servir des instruments de mesure, à enregistrer les phénomènes, à vérifier les méca- nismes, à essayer les machines, à contrôler les appareils. 11 pourrait y étudier, par exemple, la physico-chimie des alliages, s'exercer aux mesures calorimétriques, à l'analyse chimique, etc... Cet enseignement pratique dans le laboratoire a été longtemps négligé en France, etmême, actuellement dans nos écoles techniques, nous ne possédons pas encore, comme l'Allemagne, les Etats-Unis, la Bel- gique, des laboratoires de Mécanique, d'Electricité, de Métallurgie, de Machines à vapeur, d'Hydrau- lique, d'Essais des matériaux, aussi bien outillés et aussi nombreux que ceux des écoles, des insti- tuts et facultés de ces pays. Il faut développer les travaux de laboratoire, car seuls ils peuvent apprendre au futur ingénieur à observer les phénomènes, à se rendre compte des difficultés que l’on rencontre dans la pratique et qu'un exposé théorique ne laisserait même pas soupconner, à rechercher les questions nouvelles, à les étudier méthodiquement par analogie avec les essais anciens qu'il aura répélés el contrôlés lui-même, à associer la science pure aux applica- tions, à savoir, en un mot, tirer de l'expérience des faits l'interprétation scientifique. C. Phase technique. — C'est après avoir acquis cette instruction technique générale, indispensable à tout ingénieur, que l'élève doit se spécialiser dans telle ou telle branche de la technique. L'enseignement général est, en effet, forcément plus ou moins superficiel; s'il permet de prétendre à toutes les carrières, il ne prépare à aucune. Il est donc nécessaire de fournir à l'industrie, de plus en plus spécialisée, des jeunes gens qui aient approfondi une « spécialité déterminée ». La spé- cialisation est, en effet, aussi nécessaire à l’ingé- nieur que la division du travail l’est à l'industrie, Il paraît bon de grouper autour de chaque « spécia- lité » des connaissances accessoires permettant aux spécialistes de se rendre compte des progrès réalisés dans les industries voisines, car les différentes branches de la Technique, comme celles de la Science, se pénètrent intimement l'une l'autre. La période consacrée àun enseignement technique spécialisé (Mécanique, Electricité, Hydraulique: Métallurgie, Chimie industrielle, Electrochimie, Mines, Chemins de fer, Génie maritime, Construc- tions civiles, etc...) constitue la phase profession- nelle proprement dite. On a objecté que le choix d’une « spécialité » pour un jeune homme de vingt ans est problé- matique, car il ne peut prévoir dans quelle in- dustrie il fera sa carrière. Cette argumentation est presque puérile, car on admet bien qu'un homme de 20 ans soit en mesure de discerner s’il à plus d'aptitude pour la Mécanique que pour la Chimie, pour les Mines que pour les Chemins de fer; il peut donc parfaitement opter, avec connais- sance de cause, en présence de plusieurs divisions techniques. Dans cette phase professionnelle, il faut laisser se développer, chez le jeune ingénieur. toute son initiative, se manifester toutes ses apti- tudes, et lui laisser la plus grande liberté dans le choix des courstechniques, suivant sesconvenances personnelles. Cette liberté d'action peut donner à l’enseignement technique une grande souplesse: plus les écoles « professionnelles » offriront de conférences sur des sujets spécialisés, faites par de nombreux « privat-docents », plus les élèves seront en mesure d'acquérir des connaissances approton- dies sur les industries vers lesquelles ils se sentent attirés. Il est inutile d'ajouter que cette liberté n'exclut pas l'intervention du professeur, qui à mission de guider l'élève dans son choix, d'orien- ter ses aptitudes, de préciser ses aspirations, d'éclairer son jugement. IV L'enseignement professionnel de l'ingénieur nécessite un apprentissage manuel au sens propre du mot. Il faut que le futur ingénieur prenne con- tact avec l’industrie et, par suite, avec l'industriel et l'ouvrier. En Allemagne et en Amérique, par exemple, il accomplit, suivant sa spécialité, un 168 REORGES BOURREY — LA FORMATION DES INGÉNIEURS stage plus ou moins long comme ouvrier (même parfois comme contremaitre) dans les ateliers de construction, les usines métallurgiques, les exploi- tations minières, les différents services des chemins de fer, etc. Ce stage, d'une durée variable (en Alle- magne ce stage est, en général, d'un an), ne peut être comparé au stage illusoire — et encore peu répandu — qu'accomplissent ordinairement, pendant les vacances, les élèves de certaines écoles techniques francaises. En Allemagne, par exemple, le stagiaire est rigoureusement astreint à la même discipline que l’ouvrier salarié; parfois, du reste, il est lui- même rétribué. À l'Ecole des Mines d'Aix-la-Cha- pelle, me disait un jeune ingénieur très distingué, M. Arnou, qui, au sortir de l'Ecole Polytechnique, était allé travailler en Allemagne, le Professeur Wüst exige du candidat ingénieur-métallurgiste un stage de six mois comme ouvrier dans les usines, avant d'entrer à l'Ecole, puis un nouveau stage d'égale durée au cours de ses études. Le candidat ingénieur-mécanicien doit également passer un certain temps dans les ateliers de construction, où il lui faut travailler successivement à l’étau, au tour, à l'ajustage, au montage. Ces stages professionnels s’accomplissent donc d'une facon très sérieuse, grâce à l'attention des directeurs d'usines et aux chefs des différents ser- vices, qui veillent à ce que leurs jeunes camarades fassent, avec profit, leur apprentissage manuel, Il ne serait peut-être pas trop ambitieux de penser qu'en France les industriels puissent prêter volon- tiers un concours intelligent et désintéressé à l’en- seignement technique supérieur, malgré les ennuis que les « stagiaires » peuvent souvent leur occa- sionner bien involontairement. En tout cas, l'utilité de l'enseignement profes- sionnel acquis dans les établissements industriels est indiscutable; c'est le seul moyen, comme nous le disions précédemment, de faire prendre au futur ingénieur contact avec sa profession. Je n'envisa- gerai pas ici les avantages et les inconvénients qu'il y aurait à ce que ce stage eùt lieu avant, pendant (système sandwich pratiqué en Angleterre) ou après l’école; cette question est, du reste, très contro- versée et fait l'objet, actuellement, de nombreuses discussions au sein des Sociétés d'ingénieurs el d'industriels, soit en Allemagne, soit en Angleterre, soit aux Etats-Unis. Le point important, c'est que ce stage soit exigé des élèves de toutes les écoles techniques : c'est une excellente préparation à la carrière d'ingénieur proprement dite, car ce n'est que plus tard, lorsqu'il entrera définitivement dans l'industrie, seul milieu favorable à la formation complète du technicien, qu'il pourra parachever son instruction professionnelle. L'enseignement techni- que ne doit pas, à mon avis, émettre la prétention de former des élèves qui, au sortir de l'école, puis- sent immédiatement rendre des services à l’indus- trie, mais simplement de préparer, par une éduca- tion et une instruction bien adaptées, de jeunes : hommes capables de se mettre rapidement — en quelques mois — au courant de leur métier et d’uti- liser les connaissances scientifiques et techniques qu'ils ont acquises à l’école. C'est là, je crois, le but que doit se proposer l’enseignement techniquesupé- rieur et ce n'est certes pas là un résultat négli- geable, sil est obtenu, quand on songe que des jeunes gens nullement préparés, ou mal préparés par une mauvaise éducation technique, mettent des années à apprendre, aux dépens de ceux qui les emploient, la technique de leur métier. ÿ Telles sont les idées qui, à mon avis, doivent diriger l’enseignement technique supérieur destiné à former, pour l'industrie, des ingénieurs plus ou moins spécialisés : ingénieurs « secondaires » ou « subalternes », comme nous les avons désignés, pourvus de connaissances scientifiques suffisantes et de connaissances techniques bien spécialisées, ingénieurs « supérieurs » ou en chef, possédant une culture scientifique très élevée et des connaissances techniques beaucoup plus générales, leur rôle étant de diriger non seulement un service, mais plusieurs ou même la totalité des services. Les premiers correspondent (si l’on compare, comme on l'a fait souvent, l’armée industrielle à l'armée de la défense nationale) aux officiers de troupes; les seconds sont, au contraire, appelés, comme les officiers généraux, à exercer un commandement en chef plus ou moins étendu. La méthode qui accorde à la science et à la tech- nique, à la culture générale et à l'instruction spé- cialisée, la juste part qui leur revient dans la for- mation de l'ingénieur, parait être celle qui est appelée à donner les meilleurs résultats dans la pratique industrielle. Mais il ne suffit pas de former de bons ingénieurs, capables de rendre des services ; il faut aussi pou- voir les utiliser dans l’industrie. Il ne suffit pas de Jeter sur le marché des centaines de jeunes gens pourvus de connaissances scientifiques et techni- ques, sans s'inquiéter si on pourra leur procurer les situations auxquelles on les à destinés. Quand on ne limite pas la production d'un pays en ingé- nieurs en conséquence de ses besoins industriels, c'est-à-dire de sa richesse économique, on crée une sorte de prolétariat intellectuel auquel l'industrie n'offre plus assez de débouchés. Il faut done pro- portionner non seulement le nombre des ingénieurs aux situations qu'on peut leur offrir, mais encore HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS la qualité de ces ingénieurs, en formant plus d'in- génieurs secondaires spécialisés que d'ingénieurs supérieurs à haute culture générale: ne faut-il pas, dans une armée, beaucoup plus d'officiers subal- ternes que d'officiers généraux? Il ne suffit pas, non plus, pour faire un bon ingé- nieur, de lui donner une instruction scientifique et technique appropriée à sa carrière; il faut encore et surtout, comme on l’a vu précédemment, faire l'éducation de l'esprit et du caractère, c'est-à-dire, développer, chez lui, les qualités intellectuelles et morales qui font la valeur de l'individu : l'activité, l'imagination, la persévérance dans l’action, et, en 769 particulier, le sens pratique. Dans la carrière d'in- génieur, on ne doit pas seulement tenir compte de la valeur lechnique, il faut aussi considérer si le jeune ingénieur possède bien sa « profession d'homme »; autrement dit, s'il a les qualités d'ordre moral indispensables pour réussir dans l'industrie et qui sont peut-être plus importantes encore que les qualités d'ordre intellectuel, ce qui a permis de dire à un de nos plus savants ingénieurs" : « Le caractère prime la science. » Georges Bourrey, Inspecteur de l'Enseignement Technique, Directeur de La Technique Moderne. LA GENÈSE DES INSTINCTS ESCLAVAGISTES ET PARASITAIRES CHEZ LES FOURMIS DEUXIÈME PARTIE : LES THÉORIES. — EXAMEN CRITIQUE 1. — Les THÉORIES. En 1905, à quelques semaines de distance, et de facon entièrementindépendante, le père Wasmann, du Luxembourg, et l'Américain Wheeler publièrent, l’un dans le Piologisches Centralbiatt, l'autre dans le Bulletin du Muséum américain d'Histoire naturelle, des conceptions extrêmement voisines de l’évolution générale des instincts esclavagistes chez les fourmis, et permettant de remanier entiè- rement l'hypothèse a priori de Darwin. Nous allons exposer très sommairement ces théories, en insis- tant sur celle de Wasmann, qui a recu de son auteur le plus de développements à l'appui, et en disant quelques mots aussi des conceptions un peu dif- férentes de Santschi et d'Emery. Nous pourrons ensuite confronter ces théories et les faits et dis- cuter les hypothèses. Mais nous rappellerons d'abord les idées émises à cet égard par Darwin. $ 4. — Conception de Darwin. Il n’y a rien de mieux, je crois, que de laisser la parole à Darwin lui-même, qui a exposé sa théorie avec une extrême concision*. « Ainsi que je l'ai observé, dit-il, les fourmis non esclavagistes emportent quelquefois dans leur nid des nymphes d’autres espèces dissimulées dans le voisinage, et il est possible que ces nymphes, ! Voir la première partie de l'article dans la Æevue du 15 septembre 1910, t. XXI, p. 726 et suiv. ? Ca. Darwin : L'origine des espèces. Trad. Ch. VIN. Barbier. emmagasinées dans le principe pour servir d'ali- ments, aient pu se développer ; il est possible aussi que ces fourmis étrangères élevées sans intention, obéissant à leurs instincts, aient rempli les fonc- tions dont elles étaient capables. Si leur présence s'est trouvée être utile à l'espèce qui les avait cap- turées, — s'il est devenu plus avantageux pour celle-ci de se procurer des ouvrières au dehors plutôt que de les procréer, — la sélection natu- relle a pu développer l'habitude de recueillir des nymphes primilivement destinées à servir de nour- riture, etl'avoir rendue permanentedans le but bien différent d'en faire deseselaves. Un tel instinct une fois acquis, fût-ce même à un degré bien moins prononcé qu'ilnel’est chez la Formica sanguineaen Angleterre, — à laquelle, comme nous l'avons vu, les esclaves rendent beaucoup moins de services qu'ils n'en rendent à la même espèce en Suisse, — la sélection naturelle a pu accroître et modifier cet instinet, à condition, toutefois, que chaque modi- fication ait été avantageuse à l'espèce, et produire enfin une fourmi aussi complètement placée sous la dépendance de ses esclaves que l’est la #ormica rufescens ». $ 2. — Théorie de Wasmann. Wasmann a consacré à la question toute une série de longues études très documentées”, au cours 1 M. Henry Le Cuatezter : Conférence faite à l'Université de Liége en 1906. 4 E. Wassanx : Ursprung und Entwickelung der Sklaverei bei den Ameisen. Biologisches Centralblatt,t. XXV, n° 4-9, 45 février-ier mai 1905, p. 117-127, 129-144, 161-169, 193-216, desquelles son point de vue s'est affermi, rectifié, complété. Nous partirons de son exposé systéma- tique initial. Pour Wasmann, la clef de l’esclavagisme se trouve dans le mode de fondation des fourmilières. Lorsque les femelles, retombant toujours aux alentours de leur immense nid, sont constamment aidées par leurs ouvrières dans les premiers stades de fonda- tion d'une descendance nouvelle, elles perdent la capacité de réussir seules une telle fondation; qu'un changement de vie se produise et qu'après le vol nuplial elles ne trouvent plus leurs ouvrières pour les aider, elles seront amenées à rechercher l'appui d'ouvrières étrangères, d’autres nids et même d'autres espèces, et à fonder ainsi des colonies mixtes d'adoption. Ce qui est exceptionnel chez la Formica rufa devient ainsi la règle chez la F. trun- cicola. Ensuite, il peut arriver que les ouvrières, par une sorle de mémoire olfactive, aillent recher- cher des nymphes de l'espèce qui les a élevées, et cet instinct esclavagiste de rapt, très faible chez la F. truncicola, se développe et apparait constam- ment chez la #. sanguinea. La colonie de rapt est un produit de la colonie d'adoption primitive et en dérive directement. Et l’aide constante de fourmis auxiliaires entraîne une dégénérescence des ins- tincts de travail, parallèlement au développement des instincts « dulotiques ». La dégénérescence est plus complète chez les Myrmicini, dont les instincts esclavagistes seraient plus anciens que chez les Camponotini, et l’on a des parasites passifs chez le Strongylognathus testaceus qui nous montre que l'esclavagisme ravisseur, encore constatable chez le St. Huberi, mène tout droit, par la dégénéres- cence, la dégradation qu'il entraine, au parasitisme complet, déjà net chez le Polyergue, qu'avait si bien étudié à cet égard Pierre Huber. Enfin, le dernier stade, c'est la disparition de la caste inutile des ouvrières, comme on le constate chez l'Anergates. Ainsi l'adoption de la femelle dans une colonie étrangère entraine le développement conséculif d'instincts ravisseurs chez les ouvrières, provo- quant une dégradation psychologique conduisant au parasitisme de plus en plus vil; telle est la conception qu'exposa d'emblée Wasmann, déga- 256-270 et 273-292, — Nochmals zur Frage über die temporäar gemischten Kolonien und den Ursprung der Sklaverei bei den Ameisen. /d., t. XXV, n° 19, 4er octobre 1905, p. 644. — Weitere Beiträige zum sozialen Parasitismus und der Skla- verei bei den Ameisen. /d., t. XXVIII, nes 8-13, 15 avril- 4er juillet 1908, p. 251-211, 289-306, 321-333, 353-382 et 415-441. — Nachtrag zu Weitere Beiträge, etc. Ja. & XXVIII, n° 22, 145 novembre 1908, 726-331. — Ueber den Ursprung des sozialen Parasitismus, der Sklaverei und der Myrmekophilie bei den Ameisen. Zd., t. XXIX, n° 19-22, 4er octobre-15 novembre 1909, p. 587-604, 619-637, 651-663 et 683-703. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS geant de la Nalure comme une lecon de morale. Mais, par la suite, il dut modifier et rectifier un peu sa théorie, exposée déjà comme classique par Escherich dans son ouvrage sur les fourmis*. En effet, la femelle de Formica sanguinea ne se fait pas adopter, mais, comme le constate Wheeler, conquiert des nymphes par la violence, et se fait aider des jeunes ouvrières qui éclosent, esclaves nées, tout comme celles que les sanguines iront ultérieurement conquérir. C’est alors que la fonda- tion violente dérive de l'adoption, et, comme des difficultés théoriques sont élevées au sujet d'une telle dérivation, Wasmann montre que la souche commune des deux processus divergents se trouve chez la fourmi rousse, où la femelle, si elle se fait adopter, présente pourtant une propension à la vio- lence ; le développement de la violence conduirait à la sanguine, puis, par dégénérescence, à l'amazone, où la fondation se refait par adoption; l'évolution de la passivité dans l'adoption mènerait à l'atti- tude des F. truncicola et de toutes les fourmis amé- ricaines dont le comportement est identique. Le caractère un peu trop linéaire de l’évolution primitivement esquissée est modifié, et les rami- fications vont se multiplier. Tout en maintenant que l'esclavagisme mène au parasitisme social, Wasmann admet que le même résultat, par un phénomène de convergence, peut être produit par des évolutions très différentes : le parasitisme s0- cial peut être la conséquence, soit de la fondation par adoption passive, soit de la fondation violente comme chez la sanguine; il peut être dû à une exagération de la myrmécophilie qu'on constate chez les Leptothorax; il peut encore être amené par la fondation violente de la colonie, conséquence des instincts de vol par voisinage manifestés par les Solenopsis, et les Harpagoxenus (Tomognathus) nous montreraient une forme d'esclavagisme en- gendré par la juxtaposition des nids et le dévelop- pement des larcins chez une espèce. Le parasitisme social excessif comporterait dans tous les cas la perte de la caste des ouvrières ; mais ce dernier stade pourrait être réalisé d'un seul coup : il suffirait que, dans une espèce, il se pro- duisit, par mutation, une variation imporlante de certains individus sexués, variation transmise, pour que, par suite de ce polymorphisme, apparüt une espèce nouvelle dépourvue d'ouvrières et para- site dès lors de l'espèce souche; Wasmann tend à admettre cette explication pour sa Pheidole symbio- ticaet les nouveaux genres de ?’heidole de Wheeler, pour l'Epixenus, la Myrmica myrmicoxenus, ete. C'est une hypothèse qui avait été émise par Von ‘“ R. Escaericu : Die Ameise. Schilderung ihrer Lebens- weise, 4 vol. in-8°. Braunschweig, 1906. — Cf. aussi Escne- RICH : Ameisensklaverei. Aus der Natur, 1907, H. 1-2. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS Hagens‘ pour le cas du Strongylognathus, auquel elle ne s’appliquerait pas. Mais toutes ces reconstitutions d'évolutions pos- sibles sont des constructions abstraites, ne repo- sant que sur des points de repère peu nombreux, et souvent sans aucun fait à l'appui, il ne faut pas l'oublier, et d’ailleurs Wasmann le rappelle dans son dernier travail. Mais c'est la théorie générale de cet auteur et il pique les faits connus sur les lignes ramifiées de son évolution hypothétique. $ 3. — Théorie de Wheeler. Pour Wheeler*, qui publia son travail un peu avant Wasmann, c'est aussi le mode de fonda- tion des colonies qui peut donner la clef des ins- tincts esclavagistes, et il insiste sur cette idée que les instincts des ouvrières doivent trouver leur origine et leur explication dans les instincts des femelles ; il retrace, lui aussi, une évolution théo- rique passant par le Polyergue et conduisant à l'espèce sans ouvrières, à l’Anergates atratulus, en passant par les dégénérescences progressives des Strongylognathus. Ultérieurement, il précise sa pensée et se différencie davantage de Wasmann ; il considère, comme celui-ci, que le point de départ général de l'évolution est fourni par le stade où la femelle devient incapable de fonder seule la colonie nouvelle, mais il fait alors diverger immédiatement trois stades possibles : d'un côté, la fondation violente de Formica sanguinea, avec l'esclavagisme consécutif, accentué chez les Polyergues; d'autre part, l'adoption passive avec résidence dans la colonie qui a adopté la femelle, laquelle tue parfois la reine de ses hôtes, et cela entraîne le parasitisme social permanent des Sérongylognathus, des Tomo- gnathus, puis des Anergates et des Wheeleriella sans ouvrières ; enfin l'adoption passive, mais dans une colonie sans reine, soit de même espèce, soit d'espèce différente, ce qui constitue alors un para- sitisme social temporaire, la colonie mixte rede- 4 Vox HaGexs : Ueber Ameisen mit gemischten Kolonien. Berlin. entomolog. Zeitschrift, 4867, t. XI, p. 101-108. 2 Wiciam Morron Warerrr : An interpretation of the Slave-making Instincts in Ants. Bull. of the Amer. Mus. of Nat. Hist., 1905, t. XXI, p. 1-16.— Some Remarks on tempo- rary social Parasitism and the Phylogenv of Sklavery among Ants. Biologisches Centralblatt, t. XXV, no 19, 4er octobre 1905, p. 637-644. — How the queens of the parasitic and slave-making Ants establish their Colonies. Amer. Mus. Journal, t. V, n° 4, octobre 1905, p. 144-148. — On the founding of Colonies by Queen-Ants, with special reference to the parasitic and slave-making species. Bull. of the Amer. Mus. of Nat. Hist., 1906, t. XVII, p. 33-405. — The Polymorphism of Ants, with an account of some singular abnormalities due to Parasitism. Zd., 1907, t. XXIII, p. 1-93. — The origin of Slavery among Ants. Popular Science Monthly, 1907, t. LXXI, p. 550-559. — The Ants of Cusco Bay, Maine, with observations on two races of Formica sanguinea. Bull. of Am. Mus. of Nat. Hist., 1908, t. XXIV, p. 619-645. venant pure par migration ou extinction des ou- vrières adoptrices. Ces trois branches de l'évolution seraient tout à fait indépendantes, et en particulier l'esclavagisme et le parasitisme social temporaire n'auraient aucune connexion ontogénélique ou phylogénétique; c'est là la grande différence avec Wasmann,et Wheeler déclare qu'il ne peut admettre une fondation violente dérivée d’une fondation pas- sive, parasilique. S 4. — Conception d'Emery. Emery', après examen des faits et des théories de Wheeleretde Wasmann, s'oppose encore davantage à ce dernier et considère que le premier stade, tronc commun des branches ultérieurement divergentes de l’évolution, doit être un stade de fondation vio- lente, analogue à celui qui caractérise la sanguine. Dans ce premier stade, la femelle pénétrerail dans un nid étranger, tuerait et mettrait en fuite les ouvrières, se nourrirait de larves et nymphes, élè- verait quelques-unes d’elles, et profiterait de l’aide des ouvrières écloses; l'interprétation de Darwin, à très peu de chose près, serait exacte à ce stade hypothétique (« Einmieterzustand »). Puis il y aurait divergence, et passage au stade ravisseur (« Raubzustand ») de la sanguine, ou au stade pa- rasitique (« Parasitische Zustand'») de la Formica truncicola, avec un stade intermédiaire, sub-para- sitique, où la femelle serait simplement dispensée, par la fuite des adversaires, d'un combat meurtrier. Émery, qui croyait que la femelle de Polyergue fondait sa colonie par la violence, fut étonné el embarrassé par le fait, qu'il découvrit, de la fonda- tion par adoption ; il admit que la perte du pouvoir de se nourrir seul entraine le parasitisme. Ensuite, d'accord avee Wasmann, il suit la dégé- nérescence évolutive sur les Strongylognathus, mais il refuse à la « dulosis » la responsabilité de la dégénérescence que Wasmann lui impute, en quoi, dit Émery, ce dernier se montre « un écrivain de la période romantique du darwinisme à ses débuts »° Et l'absence d’ouvrières, d'après Émery, serait due à ce que, les femelles parasites étant plus petites que les reines de leurs hôtes, dont elles prennent la place, et ayant beaucoup moins d'œufs, les ouvrières peuvent mieux nourrir les larves, et cet excès de nourriture amène le développementsexuel, l'absence d’une nourriture suffisante entrainant seule l'avor- tement des organes génitaux femelles caractéris- tique des ouvrières. Enfin Émery signale que, sauf chez les Myrmé- 1 C. Every : Ueber den Ursprung der dulotischen, parasi- tischen und myrmekophilen Ameisen. Biologisches Central- blatt, t. XXIX, n° 41, 4er juin 4909, p. 352-362. — 11 Polimor- fismo e la Fondazione delle Società negli Insetti sociali. Scientia, 4910, t. VII, n° 44, p. 336-349. — nt 19 HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS TABLEAU Ï1. — Rapports des fourmis parasites ou dulotiques avec leurs espèces hôtes ou esclaves et le genre dont elles dérivent, d'après Emery. ESPÈCE OU GENRE PARASITE OU DULOTIQUE rufa . exsecla . etc. Bothriomyrmex . ADAÆNOTASICTEERENENCEC RCE (Stenamma) Tenessensis . . Formica Parasitisme temporaire. sanquinea dakotensis . etc. ROVER ISERE ECC Strongylognathus . . . . . Harpagoxenus ( sublævis. (Tomognathus) | americanus. Mvrmoxenus gordiagini . Formica Esclavagisme et Parasitisme permanent. Sympheidole elecerebra . Epipheidole inquilina . Wheeleriella santschii . arasitisme ; 1 Parasitisme Epixenus andrei . . .. avec perte des ouvrières. Myrmica myrmicoxenus . . Anergales atralulus . . Epæcus (Diplothorax pergandei. GENRE DONT : Lu F ESPÈCE HÔTE OU ESCLAVE L ESPÈCE DERIVE ‘| ( fusca. .t l'ormica. Formica $ pallide fulva. \ etc. Tapinoma. Tapinoma erraticum. Aphænogaster. Aphænogaster fulva. | = k ( fusca. \ lormica. Formica ; F tete: Tetramorium. Tetramorium cæspitum. ‘cervorum. curvispinos us. serviculus. Leptothorax. Leptothorax cel'es. pilifera. j salomonis. | venustum. Monomorium minutum. Myrmica lobicornis. Tetramorium cæspitum. Pheidole. Pheidole } Monomorium. Monomorium ? Monomorium. Myrmica. 9 cophiles, où l'évolution est due à des rapports de voisinage, les espèces esclavagistes « dulotiques » et les espèces parasites ont comme auxiliaires ou comme hôtes des formes proches parentes dont elles descendent directement, et il donne un tableau justificatif à. cet égard (Tableau 1), qui paraît, en effet, probant, au sujet du moins de l'existence d'une parenté assez proche, sinon de la dérivation même, beaucoup plus douteuse. & & $ 5. — Conception de Santschi. Santschi ® adopte, dans ses lignes générales, la théorie de Wheeler, mais avec quelques modifica- tions ; il ne paraît pas éloigné d'admettre, d'après certains faits, que le parasitisme social permanent aurait d’abord dû être précédé d’une phase esclava- giste.Maisexplicitementil déclare quele parasitisme temporaire conduit à l'esclavagisme complet, d'une part, lequel entraine des modifications anatomiques telles que l’esclavagiste est subordonné à l’esclave, et, d'autre part, au parasitisme social permanent Colakobiose de Wheeler), dans la mesure où la reine de l'espèce auxiliaire persiste à côté de la femelle étrangère adoptée, avec réduction et disparition de la caste ouvrière. Pour Wasmann, d'un stade mixte d'adoption dérivent l’esclavagisme et le parasitisme social permanent d'un côté, le parasitisme provisoire et le parasitisme permanent de l’autre; pour Wheeler, d'un stade mal défini dérivent l'esclavagisme d’un 4 F. Saxrscur : A propos des mœurs parasitiques tempo- raires des fourmis du genre Bothriomyrmex. Ann. de la Soc. entom. de France, 1906, t. LXXV, p. 363-382. côlé, le parasitisme temporaire, d'un autre, et d’un troisième le parasitisme permanent ; pour Santschi, du parasitisme temporaire dérivent l’esclavagisme d'un côté et le parasitisme permanent de l'autre ; la divergence s’effectua entre le parasitisme tutélaire des espèces de mœurs douces, dont la femelle recherche la tutelle d'’ouvrières hôtes âgées pour l'élevage des jeunes, et le parasitisme pupillaire des espèces d'humeur agressive dont la femelle parasite s'empare de cocons privés de leurs parents pour les élever, et faire élever par les jeunes ouvrières écloses sa propre progéniture. Les divers stades hypothétiques de l'évolution du parasitisme pupillaire sont ainsi résumées : 1° La femelle d'une espèce ne sait plus faire de nid à cause d'une adoption régulière par les ou- vrières dans cette espèce. Elle peut être amenée à pénétrer dans un nid étranger et y être adoptée ; 2° La reine parasite recherche l’immunité sur le corps de la reine hôte, qu'elle tue ; 3° La reine hôte s'enfuit et il y a développement chez elle de l'instinct de poltronnerie ; elle est sui- vie par un certain nombre d'ouvrières ; # Les ouvrières cherchent à emporter avec elles le couvain : alors la femelle parasite s'y oppose; il y aura lutte et développement des instinets agres- sifs chez la parasite, qui assure de plus en plus son succès et la fuite des hôtes ; 5° On arrive alors à la fondation extrême par dulosis (attribué à tort aux Polyergues), à l'escla- vagisme complet avec fondation violente par con- quête du couvain. ; Santschi a surtout cherché à faire dériver du pa- HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 113 rasitisme temporaire l'esclavagisme, et à montrer que la violence pouvait dériver d'un stade d'adop- tion passive, ce que ni Wheeler ni Émery n'ac- ceptent dans l'hypothèse de Wasmann, que Santschi parait avoir moins bien connue que celle de Wheeler. II. — EXAMEN CRITIQUE. Il paraît nécessaire, dans cette vasle question génétique, de distinguer deux catégories de pro- blèmes : la première concerne une question de fait, sur ce qu'on peut savoir de l'évolution « histo- rique », peut-on dire, de la succession réelle des instincts; la seconde est une reconstitution hypo- thétique, théorique, de ce que peut être une évolu- tion complète, fondée sur un mécanisme génétique donné. Le premier problème pourrait fort bien n'être pas abordable: et, de fait, il ne l’est pas chez les Myrmicini; en revanche, il semble que l'on puisse, comme a tenté de le faire Wasmann, retrouver l’évolution réelle des Camponotini. S 1. — Le problème de l’évolution des instincts chez les Formica. 1. Le stade primitif. — Les fourmis de l’Ambre de la Baltique sont extrémement voisines, comme nous l'avons rappelé, des formes actuelles chez les- quelles la femelle fonde seule le nouveau nid; ce sont des A/yrmica en particulier, un ZLasius et la Formica flori qui est une #ormica fusca. Cette dernière peut être considérée comme une forme ancestrale du genre Formiza. Et son extrême diffu- sion géographique, car elle est répandue à profu- sion dans les deux mondes et sous des climats variés, la multiplicité de ses races (F#. cinerea, F. gagates, F.rulibarbis, F. subsericea), tout s'accorde à démontrer le caractère primitif de cette espèce. C'est d'elle que la dérivation doit se faire, et c’est son stade, correspondant à la fondation par la femelle seule, qu'on est en droit de considérer comme primitif, et tous les auteurs s'accordent maintenant à le faire *. 2. Le stade d'adoption. — Si l'on admet, comme critère d'ancienneté des espèces, ainsi que le fait Wasmann, l'extension géographique et la multipli- cité des formes, c'est la Formica rufa qui paraît dériver d'abord de la Æ. fusca; elle est commune aux deux continents, où elle est représentée par des formes variées et nombreuses ; son extension est beaucoup plus grande que celle des F. sanguinea ou des }. truncicola. “ Huger admettait, au contraire, l'adoption comme mode normal, primitif, de la fondation des colonies. Chez cette fourmi, on constate, nous l'avons vu, l'absence du pouvoir de fondation d'un nid par la femelle seule, qui est adoptée par des ouvrières de même espèce, mais qui peut se faire adopter exceptionnellement par des ouvrières d'autre es- pèce, chez qui elle manifeste parfois des disposi tions belliqueuses. 3. Stades esclavagistes. — La limitation pro- gressive du nombre des races et de l'extension géographique indique que la sanguine doit être postérieure à la fourmi rousse, et que l’amazone est sans doute la dernière apparue; mais cette dif- férenciation se fit avant la fin du Tertiaire, parce que l’on a des représentants dans les deux conti- nents de ces deux genres, tandis que la F. pallide- lulva, Spéciale au continent néarctique, paraît s'être différenciée, postérieurement, de la #. fusca, dont elle ne se distingue pas nettement au point de vue de ses instincts. D'autre part, la morphologie confirme la genèse des formes venant de la fusca à la sanguinea par l'intermédiaire de la rufa, ou du moins d'une forme ancienne dont la fourmi rousse actuelle constitue- rait la descendante la moins modifiée. La sanguine est très semblable à la fourmi rousse, mais possède une échancrure du bord antérieur du clypéus, ce qui facilite beaucoup le transport des nymphes tenues dans les mandibules et logées ainsi dans la concavité du bouclier céphalique. Et l’ama- zone montre une dérivation morphologique nette par rapport à la sanguine, avec accentuation de l'échanerure et suppression des denis mandibu- laires, diminuées chez la sanguine. Le stade de fondation violente avec, conséeuti- vement, les instincts de rapt des ouvrières, consta- table chez la sanguine, paraît donc faire suite au stade d'adoption de la fourmi rousse; et le stade de fondation par adoption parasitaire du Polyer- gue, avec accentuation des instincts de rapt des ouvrières et disparition des autres instincts encore nettement constatables chez la sanguine, doit sue- céder au précédent; on peut noter, corrélative- ment, la diminution très nette du nombre des ouvrières, de la fourmi rousse à la sanguine, et de la sanguine à l'amazone, et, chez l'amazone seule, la réduction de la taille de la femelle. 4. Stades parasitaires.— La fondation par adop- tion régulière, sans violence, chez des ouvrières d'autre espèce, se rencontre chez une série de four- mis qui paraissent bien morphologiquement déri- ver directement de la fourmi rousse, tout comme la sanguine. C'est,en Europe, la Formica truncicola qui paraît n'être même qu'une race de la #. rufa, tant elle en est voisine; c’est la Æ. exsecta, reliée à -1 =! = HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS la fourmi rousse par la F. exsectoïdes; c'est, en Amérique, la Æormica dakotensis, très voisine de la rufa, et, appartenant au même groupe, les F. diflicilis var. consocians, F. montigena, F. micro- gyna, F. nevadensis, F. impexa, F. nepticula, chez lesquelles on constate la réduction considérable, comme chez le Polyergue, de la taille de la femelle. 5. Succession des stades. —11 semble bien qu'on doive, avec Wasmann, donner comme succession réelle des stades chez les Formica, suivant l'évolu- tion morphologique et psychologique à la fois, l'échelle suivante : 1. Fondation sans secours (F, fusca). 11. Fondation par adoption (7. rufa). III. Fondation par violence, | HI Lis. Fondation par adop- instincts permanents tion parasitaire, in- de rapt des Ÿ (/". san- stincts exceptionnels guinea). de rapt des © (F°. trun- cicola,-onsocians, ete.). IV bis. Fondation par adop- tion parasitaire, in- stincts réguliers, mais passagers, de rapt des G (F. Wasmanni). 1V. Fondation par adoption parasitaire, instincts permanents de rapt des 5. Perte des autres in- stincts (Polyergus). $ 2. — Le problème général de la genèse des instincts esclavagistes et parasitaires. 1. Du danger des tentatives d'explication géneé- tique univoque. — Wasmann, au fur et à mesure de ses travaux, a été amené à concevoir toute une série de mécanismes génétiques susceptibles de converger vers des slades analogues; et il est de fait que tous les phénomènes d’esclavagisme et de parasitisme ne peuvent s'expliquer d'une seule facon. Aussi la plupart des théories se heurtent-elles à des objections de fait, et doivent-elles être aban- données comme théories générales, dans la mesure où elles ne sont pas en accord avec les données positives. La conception darwinienne sur le développement accidentel et heureux des nymphes emmagasinées comme réserves alimentaires ne peut plus être retenue. En effet, on ne connaît aucun fait d'escla- vagisme chez nombre de fourmis qui ont l'instinct d'aller ravir, pour s'en nourrir, des nymphes et larves d’autres espèces, comme les Æciton et les Anoma; et, inversement, le rapt esclavagiste peut apparaitre chez des espèces qui ne procèdent jamais à des expéditions alimentaires de cet ordre, comme la Formica Wasmanni. EL, d’ailleurs, il arrive bien que des nymphes placées artificiellement dans un nid d'espèce différente donnent naissance à des jeunes ouvrières; mais alors celles-ci sont impi- toyablement mises à mort et généralement dé- vorées. Dans ce qu’elle a de propre, la théorie de Wheeler implique des données qui ne sont pas vérifiées : la fondation par adoption du Polyergue, au lieu de la fondation violente qu'il croyait être le mode normal, montre qu'on ne peut opposer entièrement ces deux sortes de fondations; le parasilisme social n'est pas nécessairement lié à la fondation passive qu'il attribue au Tomognathus, alors que la femelle de cette espèce procède comme la sanguine; et on n'est pas fondé à séparer entièrement le Polyergue du Strongylognalhus, puisque certaines espèces de ce dernier genre se comportent d’une façon identique à l'amazone. Emery se met en désaccord absolu avec les don- nées positives quand il veut faire, d’une fondation violente analogue à celle de la sanguine, le premier stade fondamental de la fondation avec auxiliaires; et son explication de la disparition des ouvrières par simple excès de nourriture des larves paraît bien simpliste, et peu en accord avec la complexité des faits. L'hypothèse de Santschi, expliquant la tendance agressive de la femelle dulotique, comme chez la sanguine, par la nécessité de retenir les nymphes que des ouvrières voudraient emporter dans leur fuite, ne parait fondée sur aueun fait probant, et la facon dont se comporte la femelle de Æ. san- guinea ne paraît même pas en accord avec cette conception. Toutes les théories générales sont done insuffi- samment fondées. Il vaut mieux se borner à re- chercher le mécanisme génétique de stades dont on connait la succession réelle. 2. La prolongation théorique de la succession réelle des stades de Formica. — Cette succession réelle s'arrête, chez les Formica, à l'amazone. Mais, comme un stade identique est présenté chez des espèces de Myrmicini, chez des Strongylognathus, on est en droit théoriquement d'admettre que, si l'évolution se continuait à partir du Polyergue, elle pourrait donner les stades que l’on est à même de suivre à partir de certains Strongylognathus avec vraisemblance, comme si l'évolution de ces der- niers était plus avancée que chez les Camponotini ; on se trouve ainsi avoir à expliquer la genèse des stades constatés de la Formica fusca au Polyergus rufescens, puis du S{rongylognathus Huberi, qui correspond au Polyergue, au S{rongylognathus testaceus, et de là sans doute à quelques espèces privées d'ouvrières comme les Anergates et les WAceleriella. On à ainsi le début de l’évolution chez les Camponotini, et la fin chez les Myrmicini, où quelques stades se rencontrent qu'on ne peut invoquer, soit qu'ils se trouvent au début de l’évo- lution menant au Strongylognathus, soit qu'ils se trouvent sur des voies plus ou moins éloignées, mais convergentes. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 115 3. L'explication génétique du comportement suc- cessil des femelles. — L'attitude des femelles qui ne fondent pas seules leur nouveau nid revêt une des trois formes suivantes : ou l'adoption amicale sans violence, ou l'adoplion amicale mais avec assassinat de la reine des hôtes quand il en existe, ou enfin l'intrusion violente avec mise en fuite ou carnage des ouvrières anciennes et adoption, par les ouvrières nées postérieurement, des nymphes du nid. Lorsqu'il y a retour, comme cela arrive parfois, de la Æ. /usca © fécondée dans la colonie mater- nelle, l'attitude est évidemment amicale de part et d'autre. Mais comment s'expliquer la perte du pou- voir de fondation propre du nid chez la Æ. rufa, nécessitant l'adoption par des ouvrières de la même colonie ou de la même espèce? Le principe du défaut d'usage peut être invoqué, avec Wasmann: chez les fourmis acervicoles à colonies extrêmement étendues, la femelle retombe toujours dans une zone où elle rencontre des auxi- liaires; n'ayant plus occasion de se débrouiller seule, elle perd le pouvoir de le faire. Si les circon- stances l’amènent à retomber après le vol nuptial en dehors de la zone de sa colonie, elle recherchera l'aide d’ouvrières de même espèce, ou à la rigueur d'espèce différente, vis-à-vis de qui elle se mon- trera amicale si elle n’est pas houspillée, mais se défendra vivement si on l'attaque. Le développement de l'agressivité entrainerait, chez certaines races, des luttes plus fréquentes, et, corrélativement, par adaptation fonctionnelle, une taille plus grande et plus de vigueur chez la femelle, ce qui nous mènerait à la F. sanguinea. Pourquoi l'agressivité se développerait-elle ? A cause d’un changement de régime, répondra Was- mann : les #. rufa se nourrissent surtout de débris végétaux et rarement d'insectes; certaines races s’adaptant à la vie, non plus dans des forêts, mais dans des landes arides, comme les landes de bruyères, où se rencontrent les #. sanguinea juste- ment, auraient dù recourir à une alimentation surtout carnivore, assurée en particulier par le rapt des larves et des pupes des autres espèces, ce qui aurait entrainé, cela est très vraisemblable en effet, un développement des instincts agressifs. Ce serait le contraire qui se serait passé avec d'autres races d'où seraient dérivées les #. truncicola et les autres espèces à fondation parasitaire. Il y a là une genèse très vraisemblable si l’on admet que la F. sanguinea dérive bien de la Æ. rufa; que ce dernier point puisse être mis en doute, cela est certain, comme on peut mettre en doute toute dérivation phylogénétique; mais on admettra diffi- cilement qu'on objecte à cette généalogie qu'elle entraîne justement comme conséquence la dériva- tion d'instincts dulotiques à partir d'instinels semi- parasitaires, comme paraît le faire Viehmevyer", car une répugnance subjective et toute 4 priori à admettre cette dérivation ne peut certes pas consti- tuer un argument. Il est d'ailleurs moins difficile d'expliquer l'ap- parition de la dulose que sa disparition lorsqu'on passe de la sanguine au Polyergue. Qu'est-ce qui à pu amener la perte des instincts agressifs? I] est très bien de parler avec Wasmann d'action dégénérative de la dulose; mais, si cela explique la variation morphologique adaptative des Polyer- gues, avec accentuation de l’'échancrure clypéale constatée chez les sanguines et transformation des mandibules en poignards acérés susceptibles cependant de maintenir, sans les meurtrir, des nymphes dans l'échancrure du bouclier, il y a bien là une explication de certaines incapacités corré- latives du développement de l'instinct de lutte ; mais cet instinct de lutte, voilà que son exets même le fait évanouir chez la femelle du Polyer- gue ! lei nos explications ne peuvent être que bien vagues et bien incertaines. Peut-être l'incapacité de se nourrir, progressivement survenue par défaut d'usage des instincts, a-t-elle facilité l'adoption la plus rapide possible, c'est-à-dire non plus par des ouvrières à venir, mais par des ouvrières adultes? Seulement il reste l'instinct de mise à mort de la reine dans la colonie adoptive. Il en est de même chez le Strongylognathus Huberi et chez le Str. Christophi var. rebhinderi. Mais l’évolution dégénérative peut se poursuivre ; car, chez le Str.. testaceus, il n'y a même plus mise à mort dela reine dans la colonie adoptive, et les deux reines vivent côte à côte : le parasitisme est complet. Dans l’autre voie évolutive qui s'ouvrirait à par- ür de la fourmi rousse, nous ne trouvons pas de stade équivalent à celui de la sanguine ; l'adoption est la règle; mais nous ne trouvons pas non plus l'adoption nettement passive du Strongylognathus testaceus : la femelle adoptée par les ouvrières paraît, comme chez l'amazone, tuer toujours la reine de la colonie adoptrice; c’est l'attitude acci- dentelle de la femelle de fourmi rousse, avec un peu plus de passivité, qui persisterait sans chan- gement ; il n'y aurait plus à cet égard d'évolution. Et cette absence d'évolution est un problème, car les femelles adoptées, que ce soit ou non par des ouvrières de même espèce, devraient, par défaut d'usage, subir une dégénérescence des ins- tincts et peut-être une dégénérescence morpholo- gique parallèle. Mais il est certain que la Nature { H. Vieumeyer : Bemerkungen zu Wasmann's neuester Arbeit : Ueber den Ursprung des sozialen Parasitismus, etc. Zoologischer Anzeiger, 15 février 1910, t. XXXV, n°S 44-15, p. 450-457. 776 nous met en présence de faits de stabilité éton- nants, dans des conditions de milieu qui entraînent parfois, par ailleurs, des variations rapides, et notre ignorance est complète des facteurs qui peuvent rendre compte de l'une ou l’autre alternative, le hasard des mutationnistes ne pouvant être consi- déré comme uneexplication, mais justement comme un aveu d'ignorance. 4. Le problème de la genèse des instincts escla- vagistes ou parasilaires des neutres. — Si nous ne connaissions que les instincts esclavagistes des sanguines, la genèse de ces instincts chez les ouvrières serait facile à expliquer : il s'agirait d'une transposition des instincts de fondation violente rencontrés chez les femelles. Ce fut l'explication tout naturellement donnée quand on croyait à la fondation violente chez les amazones. Mais le fait inverse concernant ces dernières et surtout le développement d'instinets esclavagistes plus ou moins durables chez des espèces à fonda- üon par adoption rendent l'explication singulière- ment plus complexe. A vrai dire, Wasmann montre avec raison que ce n'est pas un instinct nouveau que celui de rapt de pupes : la plupart des espèces manifestent l'ins- tinct de rechercher des nymphes dans une autre colonie quand une raison quelconque a appauvri à l'excès l'effectif des habitants d'un nid ou fait dis- paraitre la couvée, parfois avec la reine: il va de pair avec l'instinct de ravir même des femelles fécondées. Que des fourmis, élevées par des four- mis d'autre espèce, recherchent des nymphes de ces dernières dont elles ont en quelque sorte le souvenir olfactif, il n'y a peut-être rien là non plus d'extraordinaire. Mais cet instinct peut-il alors se développer ? C'est cela que Wasmann ne songeait même pas au début à expliquer, car les ouvrières ne s’engendrent pas les unes les autres. EtEscherich, à sa suite, a donné l’esclavagisme permanent des san- guines comme un stade plus avancé de l’esclava- gisme exceptionnel de #. truncicola ou de l’escla- vagisme régulier, mais transitoire, de #. Wasmanni sans concevoir la quasi-impossibilité d’une telle genèse. La question, en réalité, ne se pose plus lors- qu’on met tout à fait à part l’esclavagisme des sanguines : il n'y aurait pas de développement, justement, des instincts esclavagistes dans l’autre branche évolutive : il y a une tendance chez les ouvrières au rapt des nymphes de l'espèce adop- | trice, alors que la colonie est encore très pauvre en individus ; c'est un instinct constant qui ne donne et ne peut donner naissance à l’esclavagisme permanent, qui est bien alors du à l'instinct de fondation violente de la femelle : l'instinct batailleur HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS et paresseux de la femelle des sanguines entraine chez les ouvrières le développement d'un instinet analogue, rendant permanent l'instinct de recherche des pupes dans le but de compléter la colonie; en même temps, on peut admettre la variation mor- phologique adaptative conduisant au Polyergue, chez qui la fondation dut alors être violente tout d'abord. Puis la dégénérescence se produisit chez la femelle : l'instinct d'agressivité se manifesta moins, devint latent, tout en se transmettant encore aux neutres : il faut, en effet, admettre une inhibition génitale de certains instincts, transmis par les femelles, mais ne se manifestant plus que chez les ouvrières. Le sommet de l'évolution de l'agressivité précède, chez les femelles, celui qu'on trouve chez les ouvrières. Pour les premières, il se rencontre chez les sanguines; pour les secondes, chez les amazones. Si nous reprenons maintenant, chez les Myrmi- cini, l'évolution au stade des Polyergues, avec les Strongylognathus Huberi, nous constatons que la dégénérescence constatée chez les femelles, et qui s'accentue jusqu'à la complète passivité, se pro- duit aussi chez les ouvrières; chezle Str. testaceus, les ouvrières sont entièrement parasites et ne pro- cèdent plus à aucun rapt. Est-ce la conséquence de la dégénérescence instinctive de la femelle se fai- sant peu à peu sentir? Est-ce dû à l'alliance de la femelle adoptée avec la reine adoptrice, rendant inutiles les rapts, puisque cette dernière reine fabrique des esclaves sans interruption, ou au con- traire l'alliance des femelles est-elle provoquée par l'incapacité des ouvrières à ravir les nymphes, ou enfin n'y a-t-il aucun rapport génétique entre les deux faits? Est-ce un fait d'influence directe du milieu ? Cette dernière hypothèse, qui est celle de Was- mann, n'est pas la moins probable. La chaleur parait très nécessaire aux Polyergues, et Wasmann y voit une probabilité pour la différenciation de celte espèce à une époque sèche et chaude de la fin du Tertiaire. Quoi qu'il en soit, les expéditions ne se font qu'aux heures chaudes du jour, et dans la période de l'été. Une adaptation à des climats plus froids entraine une réduction des expéditions, et, si l'adaptation peut se faire, même dans des zones assez froides, il s'ensuit la suppression complète des expéditions et de l’esclavagisme. Il est de fait que le Strongylognathus testaceus vit dans des ré- ‘ Tous les instincts des ouvrières doivent, en effet, se rencontrer chez les femelles, puisque celles-ci les donnent à leurs descendantes à sexualité avortée. Il peut bien y avoir des œufs parthénogénétiques d'ouvrières susceptibles de transmettre des variations instinctives, sans passer par les femelles; mais c'est certainement un fait rare. Le même problème se pose d'ailleurs pour la transmission des varia- tions morphologiques. HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCTS CHEZ LES FOURMIS 111 U gions relativement froides, landis que les autres espèces du même genre, dont les ouvrières mani- festent encore des instinctsesclavagistes, se trouvent dans des régions nettement plus chaudes". Et il n'y a peut-être nul lien génétique entre la perte de l'instinct de mise à mort de la reine de la colonie adoptrice et cette perte de l'instinct escla- vagiste des ouvrières. On ne peut dire que, si l'une n'avait pas compensé l'autre, l'espèce aurait dis- paru ; en effet, il y a mille manières dont la perpé- tuation des espèces s'effectue, et aucune de ces manières ne peut être dite nécessaire. Les es- clavagisies peuvent, en effet, étre remplacées dans leurs expéditions par leurs propres esclaves. D'autre part, il y a des exemples, chez les Wheeleriella, de colonies où l'espèce parasite est adoptée par les ouvrières sans reine, tout sim- plement parce qu'elles tuent elles-mêmes cette der- nière ; ira-t-on dire, dès lors, que la perte de l’instinet de tuer la reine chez la femelle parasite s'explique par sélection, parce que, si elle la tuait, n'ayant pas d'ouvrières, les colonies s'éteindraient vite et l’es- pèce disparaitrait? Les faits montrent le danger de tels raisonnements, puisque les colonies s'éteignent vite, mais que l'espèce ne disparait pas. On sait, en particulier, qu'une simple augmentation de fécon- dité suffit pour préserver l'espèce la plus mal dé- fendue contre toutes les causes imaginables de destruction, et le cas de la sardine ou du hareng peut être instructif à cet égard. Les explications utilitaires à priori, qui, dans les théories sélectionnistes, transposent les anciennes explications finalistes, sont donc encore extrême- ment dangereuses sous cette nouvelle forme et doivent être tenues pour suspectes. 5. Le problème de la genèse des instincts d'aide et de tolérance. — L’échec de telles explications utilitaires, fondées sur la perpétuation des espèces, paraît être complet en ce qui concerne, non plus les instincts des esclavagistes, mais la question, presque loujours absolument négligée, des instincts des auxiliaires, des esclaves. Pour qu'une femelle puisse être adoptée par une colonie d'espèce étrangère, il faut qu'il se trouve chez cette dernière espèce une tolérance active, en quelque sorte, puisque la femelle pourra être objet de soins tout comme si elle était la reine véri- table de la colonie. Le fait que les espèces adoptées sont proches parentes des espèces adoptrices rend plus expli- ! Au delà, l'évolution conduirait à la suppression de la caste devenue inutile des neutres et réduite en nombre au fur et à mesure du développement de l'instinct esclavagiste dégénéré en instinct parasitaire, mais cela ne ressortit plus à l'étude génétique des instincts. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. cable le fait de l'adoption; la parenté ne fait pas de doute, effectivement, mais sans qu'on puisse toujours, avec Emery, considérer l'espèce adoptée comme dérivant directement de l'espèce adoptrice. Il peut y avoir des intermédiaires plus ou moin: nombreux, mais alors ces intermédiaires paraissen! ètre également adoptés par l'espèce souche, comme les Formiea rufa © et F. sanguinea Q sont adoptées par la Æ. fusca, lout comme les Polyerqus ©. En effet, les ouvrières adoptent facilement les femelles de leur propre colonie après le vol nuptial, et peuvent même les rechercher; privées de reines, elles montrent une tendance plus nette encore à l'adoption ou à la recherche !; elles peuvent alors être moins difficiles et accepter des femelles d'es- pêce voisine. Mais il ne peut y avoir de progrès dans ces instincts, puisqu'il n'y à pas de trans- missibilité possible chez ces ouvrières isolées, qui disparaissent dans la colonie mixte où l'espèce adoptée vit seule, si elles ne sont pas remplacées par des produits de rapts. Le progrès de la tolérance doit donc tenir à une évolution caractéristique des espèces adoptées seu- lement : on constate, en effet, chez les femelles de ces espèces, une réduction de la taille, et on a noté parfois du mimétisme de l'espèce adoptrice. Le fait qu'une petite femelle est facile à nourrir explique- t-il la plus grande propension à l'adoption chez les ouvrières hôtes? Il serait peut-être imprudent de donner trop de valeur à cette explication anthro- pomorphique. Le mimétisme olfactif, qui parait devoir être beaucoup plus important chez les insectes que le mimétisme visuel, joue sans doute un rôle : il n'y a peut-être là d'ailleurs qu'une accentuation de la similitude d’odeur chez une espèce proche parente d'une autre; en tout cas, et bien que ce mimétisme soit très difficile à constater parce que nos sens sont à cet égard d'une insuffi- sance notoire et que nous n'avons pas d'appareils objectifs pour l'enregistrement quantitatif ni sur- tout qualitatif des odeurs, Santschi a été frappé de l'odeur caractéristique de Zapinoma qu'exhale la femelle de Bothriomyrmex. En outre, les manœuvres, qui paraissent mysté- La recherche des femelles fecondées peut aller de pair avec la recherche de larves et nymphes, qui est, nous l'avons indiqué, à la base de l'instinct proprement esclava- giste ; aussi ne faut-il pas s'étonner que les ouvrières dites esclaves puissent aller chercher des nymrphes de leur espèce lorsque leur nombre diminue, quand elles se trou- vent dans des colonies où leurs hôtes ont perdu leurs instincts esclavagistes, comme les Strongylognathus testaceus ; ce sont les Tetramorium qui vont alors en expédition, tandis que les Strongylognathus Huberi y vont eux-mêmes. Santschi indique même comme possible que les futures esclavagistes aient simplement accompagné les ouvrières qui les avaient élevées dans des expéditions où ces dernières allaient chercher des nymphes de leur espèce. Mais c’est une supposition gratuite. 18* 718 HENRI PIÉRON — LA GENÈSE DES INSTINCITS CHEZ LES FOURMIS rieuses à Santschi, des femelles adoptées, qui re- | nuisible à la perpétuation de l'espèce, mais qui cherchent, dit-il, leur immunité, soit sur le couvain, soit sur le corps de la reine tuée par l'intruse, sont sans doute destinées à une imprégnation par l'odeur propre de la colonie, analogue à celle à laquelle on doit soumettre une nouvelle reine d'abeille lorsqu'on l’introduit dans une ruche dont Ja vieille reine a disparu. Quant au fait que les ouvrières ne défendent pas leur propre reine, ce n’est qu'un cas particulier de l'absence absolument générale de solidarité dans la lutte qu'on peut constater chez les fourmis. Mais ce qui est bien difficile à expliquer, c'est que l’adop- tion d’une femelle étrangère puisse être assez com- plète pour conduire au résultat paradoxal et trou- blant que les ouvrières tuent leur propre reine! Et elles ne le font pas parce qu'elles n'acceptent qu'une seule reine, puisque plusieurs des femelles intruses peuvent être simultanément tolérées et soi- gnées dans une colonie ! Ce dernier fait montre, d'ail- leurs, que l'explication qui se base sur la faible taille de la femelle étrangère adoptée, plus facile à nourrir que la reine indigène, n’est pas acceptable, car, dans ce raisonnement de Forel, une seule reine eùût été plus facile à nourrir que plusieurs intruses. Il apparaît donc là un instinet nettement nui- sible, nuisible à coup sûr à l'espèce adoptrice, au Monomorium, dont la colonie, frappée de stérilité, ne tarde pas à disparaitre, et nuisible aussi à l'espèce adoptée, à la W'heeleriella, qui ne possède pas d’ouvrières et qui voit s'éteindre très vite sa colonie, en même temps que les dernières ouvrières adoptrices, à l’inverse des Anergates, parasites de colonies durables de Tetramorium, grâce à la per- sistance de la reine de l'espèce adoptrice. On dit alors que c’est une perturbation pathologique de l'instinct, et l’on cherche quelque cause immédiate à cette perturbation ; Santschi, qui se demande si l'immunité de la femelle adoptée ne s’acquiert pas sous forme de quelque vibration (?) percue par un sens inconnu, suppose aussi l’action d'une odeur, d’un corps toxique, ou d’un attouchement d'an- tennes (?), provenant de la femelle adoptée et pro- voquant la perturbation, comme le sublimé en poudre affecte les fourmis au point de les faire se battre entre elles. Évidemment on répugne telle- dans conceptions sélectionnistes, à admettre des instincts nuisibles, qu'on en fait des perturbations pathologiques. Mais on doit se rappe- ler qu'il existe chez un grand nombre d'espèces un instinct du mâle, et parfois même de la femelle, à dévorer sa progéniture *, qui est essentiellement ment, nos ! J'ai déjà opposé cette existence d'instinets nuisibles aux définitions finalistes de l'instinct. (Cf. H. Piéron : Les pro- blèmes actuels de l'instinct. Bull. et Mém. de la Soc. d'Anthr., 1908, p. 504-538.) | persiste, parce qu'il ne suffit pas à empêcher com- plètement cette perpétuation *. Cet instinct matricide des fourmis ne peut d’ail- leurs être objet d'évolution et de perpétuation, puisqu'il entraine l'extinction de la colonie où il se manifeste. En revanche, il peut y avoir des évolutions d'ins- tincts, sinon toujours nuisibles*, du moins tout à fait inutiles: ce sont ceux des espèces myr- mécophiles adoptrices. Iei l'espèce adoptée n'est nullement proche parente de l'espèce qui la tolère: et qui la soigne et en est souvent fort éloignée ; et cela n’a rien d'étonnant, car le cas de l'espèce adop- tée est le même que celui de tous les insectes, de familles si variées, présentant la même myrméco- philie. Seulement, chez un grand nombre de ces. insectes, les soins donnés ne le seraient pas sans, avantage réciproque, justifiant ce que Wasmann a appelé la sélection amicale : une sécrétion, un exsudat agréable caractériserait les espèces sym- philes, caressées et léchées par les fourmis ; ce serait un cas analogue à l'élevage utilitaire des pu cerons ou des cochenilles par les Zasius et même. des champignons par les Lasius, les Atfa, ete. *. Mais le fait est-il universel et s'applique-t-il aux espèces myrmécophiles, aux Æormicoxenus, hôtes de Formica rufa, aux Leptothorax, hôtes de Myr- mica, etc. ; il ne le semble pas jusqu'ici, et l'origine. de l'instinct, plutôt nuisible pour l'espèce adoptrice, qui la pousse à nourrir ses parasites familiers, nous échappe alors tout à fait. Ce n’est, en tout. cas, point la conception sélectionniste qui pourra rendre compte de cette genèse, même si quelque exsudat agréable récompense la fourmi de ses soirs, car il n'y a point là une condition nécessaire ni même utile pour le développement de l'espèce. III. — Conxczusron. S'il y a une donnée à retenir de ces tentatives d'interprétation génétique d'instinels, et qui se dé- ‘ On ne peut identifier cet instinct avec celui de la femelle de fourmi qui dévore une partie de ses œufs, et nourrit avec de nouveaux œufs les premières larves écloses: cet instinct peut être utile, en eflet, à la fondation de la colonie; et l'on peut dire, presque sans ironie, que la femelle « conserve une mère » à sa progéniture ainsi réduite. 3 L'instinct de symphilie est nettement nuisible quand la fourmi élève des Loméchuses ou des Atemeles qui, comme récompense, dévoreront ses propres larves et entraineront la disparition de sa colonie. 3 Cet exsudat existerait mème chez les larves de termites, en sorte que les soins donnés aux larves s'expliqueraient par un avantage égoiste des ouvriers, d'après Nizs HOLMGREN (Termiten Studien, t. 1, p. 4, 1909). Cela est à rapprocher de la conception de Giard sur l'origine également utilitaire de l'amour maternel. (A. Grarp : Les origines de l'amour maternel. Bull. de l'Inst. gén. psvchol., 1905, n° 4, p. 3-33.) D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE gage des faits actuellement établis, c’est la faillite de toute tentative d'explication d'allure finaliste, en ramenant à une telle tentative toutes les inter- prétations utilitaires sélectionnistes, analogues à l'explication darwinienne dont il ne peut rien res- ter, ni dans le détail, ni surtout dans l'esprit. C'est une opinion très répandue, mais tout à fait inexacte, que, seules, les variations utiles persistent; les variations inutiles peuvent à coup sûr persister, et même les variations nuisibles, si cette nocivité n'entraine pas ipso facto l'extinction totale de l’es- pèce, d'autant que la variation nuisible peut être compensée par d'autres rétablissant l'équilibre. Et surtout, dans l’évolution, on n'est pas en droit de parler de progrès dans le sens d'une amélioration des conditions de vie de l'espèce, d'une augmentation des chances de perpétuation. Nous nous sommes justement trouvés en présence d'une évolution qui paraît bien caractér sée par le fait inverse, la perpéluation des espèces étant rendue plus difficile et plus précaire. En effet, au fur et à mesure de l’évolution de l'esclavagisme, on constate que les espèces sont moins répandues, que les colonies sont plus rares; c’est l'espèce souche des Formica, la F. fusca, qui est de beaucoup représentée par le plus grand nombre de colonies et d'individus, tandis que les Polyergues sont véritablement rares. Et on ne peut parler de progrès lorsque l'espèce, devenant para- site, dépend de ses hôtes et disparaît quand leur concours n'est plus possible. Les espèces sans ouvrières ont des conditions de vie encore plus précaires, et la perpétuation des Wheeleriella nécessite des conditions favorables bien rarement remplies. Dira-t-on que la vie sociale entraîne des consé- quences évolutives particulières aussi bien chez les insectes que chez les hommes, avec prédo- minance dans le progrès de la vie individuelle aux dépens de la vie de l'espèce et de la perpétualion naturelle ? Mais la vie individuelle même devient précaire chez les esclavagistes, incapables de se nourrir seules, ou chez les myrmécophiles, à qui leurs hôtes doivent donner la becquée. Il est vrai qu'on peut considérer cela comme un fait de dépen- dance vis-à-vis d'une forme donnée de vie sociale, et l'abeille isolée de la ruche est incapable de sur- vivre. Seulement, il bien y avoir des faits analogues en dehors des insectes sociaux, et les espèces les plus répandues, celles qui se perpétuent le mieux, ne paraissent pas être, d'une facon générale, les plus récentes, les plus évoluées. Et d’ailleurs l'évolution, au sein des sociétés animales, et je dirai même des sociétés humaines, est un fait naturel comme les autres, et que les théories évolu- tionnistes n'ont pas le droit de négliger. Or, il y a, dans les faits que nous avons exposés, des obstacles qui s'opposent nettement aux théories qui veulent faire de la sélection utilitaire des variations fortuites le pivot essentiel des explica- tions génétiques. C'est dire que nous considérons comme valables surtout les explications basées sur l'action du milieu, suivant les principes lamarckiens, bien que nous ne soyons guère encore en mesure d'élu- cider le mécanisme exact de cette action dans la plupart des cas, le fait général de l’évolution parais- sant bien, en tout cas, hors de doute”. parait Henri Piéron, ; Maitre de Conférences à l'École pratique des Hautes-EÉtudes, REVUE ANNUELLE D’AGRONOMIE J. — ACTION DES SELS DE POTASSE SUR LA VÉGÉTATION DE L'AVOINE ET DES FOURRAGES. On a, depuis longtemps, tenté de prévoir l'influence exercée sur les récoltes par des fumures minérales. A cet effet, l'agronome procède à l'ana- lyse chimique du sol; il constate la présence et la quantité de telle ou telle substance utile à la plante, comme l'acide phosphorique, la chaux, la potasse, et, lorsque les proportions de ces éléments par kilog de terre sèche sont inférieures à la moyenne trouvée dans les terres fertiles, il conclut volon- tiers à la nécessité d'une fumure capable d'ajouter au sol une dose nouvelle de la substance qui paraît faire défaut. Cette conclusion raisonnable et logique est souvent en contradiction avec les résul- tals de l'expérience. Sur une terre réputée riche en potasse, on peut notamment constater que l'emploi des sels de potasse exerce une influence heureuse. Nous avons relevé, il y a plusieurs années déjà, les chiffres relatifs à des essais de grande cul- ture qui ont mis en évidence des faits de ce genre, et il nous parait utile de les reproduire. 1 Au moment de mettre sous presse, nous recevons de M. H. Piéron une note complémentaire à son article; elle paraîtra dans la chronique de notre prochain numéro, N. d. 1. Réd. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONONIE S1. — Expériences sur l’emploi du chlorure de potassium comme fumure additionnelle. Les essais dont nous parlons ont porté sur Femploi du chlorure de potassium comme fumure additionnelle, et les cultures pratiquées étaient celles de l’avoine ou de la luzerne. 1° Culture de l'avoine. — La surface consacrée à cette céréale était de 50 hectares, divisés en 16 par- celles d'une étendue moyenne de 3 hectares environ. Le sol appartenait, pour une partie, aux grandes masses d'argiles à meulières, et, pour une partie également, aux sables etgrès dits de Fontainebleau. La terre arable était, d’ailleurs, partout meuble pour que les travaux de culture y fussent faciles. et toute la surface sur laquelle avaient porté assez les expériences était drainée. Quant aux variétés d'avoine étaient désignées sous le nom d'avoine grise et d'avoine noire de Bernay. Le Tableau I indique la nature et les résultats des fumures de chlorure de potassium qui ont été employées : cultivées, elles Tapzeau 1. — Action de KCI1 sur la culture de l'avoine. NOMBRE CHLORURE RECOLTE de potassium à l'hectare paille bottes de 6 kilogs grain expérience hectolitres F er groupe 1 (A) noyenne. groupe # (B) moyenne. 3e groupe 5 (C) moyenne. Pour compléter les indications de ce tableau, il faut dire qu'aux sels de potasse employés, on à toujours, et sur toutes les parcelles indistinetement, ajouté environ 300 kilogs de plâtre par hectare. Ce plâtre, mêlé aux engrais chimiques, en rendait la répartition plus facile et plus uniforme. Si nous cherchons maintenant à nous rendre compte des renseignements fournis par ce tableau d'expériences, nous voyons, tout d'abord, que la récolte en paille et grain est à peu près proportion- nelle à la dose de chlorure de potassium employée. D'autres causes étrangères auraient pu, d'un autre côté, influer sur le résultat : 4° addition d'engrais chimiques autres que le chlorure de potassium ; 2° action des cultures antérieures. La première cause doit être écartée. Si les par- celles (A) et (C) ont recu des superphosphates, c'est en quantités égales-pour chacune d'elles ; les | parcelles du groupe (A) auraient même, à ce point de vue, été favorisées. Les parcelles du groupe (B) ont seules reçu d'une facon générale des super- phosphates à la dose de 200 kilogs à l'hectare. Or, nous voyons, cependant, que leur rendement est notablement inférieur à celui des parcelles du groupe (C). Enfin, l'influence des cultures antérieures doit être également éliminée, car trois parcelles seule- ment sur seize avaient porté des fourrages l’année précédente; les treize autres avaient porté du blé. Ajoutons que les (rois pièces ayant donné des fourrages se trouvaient réparties entre les trois groupes, ce qui exclut leur importance au point de vue du calcul des moyennes générales. C'est donc bien à la potasse, et à la potasse seule, qu'il faut, croyons-nous, attribuer les différences observées entre les rendements Maintenant l'influence heureuse de la potasse s'explique-t-elle par son absence dans le sol, ou s'exerce.t-elle malgré la présence d'une quantité notable de cette base? Les analyses du sol de toutes les parcelles vont nous permettre de répondre. En premier lieu, constatons que l’on rencontre partout la potasse en quantité appréciable. La par- celle la plus pauvre en contient 73 grammes par 100 kilogs de terre sèche, chiffre assez considérable si l’on calcule le poids correspondant de cette base par hectare. En admettant le chiffre habituel de 4 millions de kilogs pour la couche arable d'un hectare sur 0%,30 d'épaisseur, le poids de potasse serait, en effet, de 292 kilogs. En second lieu, la parcelle qui renferme la plus forte quantité de potasse (264 grammes par 100 ki- logs de terre) fait précisément partie du groupe (C), contenant les pièces où les sels de potasse, ajoutés à haute dose, ont permis d'obtenir des rendements maxima. Une parcelle contenant seulement 73 grammes de potasse par 100 kilogs de terre sèche fait, au contraire, partie du groupe (A), correspondant aux pièces sur lesquelles aucune dose de potasse n'avait été ajoutée. En résumé, nous sommes donc fondé à affirmer que les sels de potasse ont fait sentir leur action sur la végétation et la fructification de l'avoine, malgré la présence dans le sol d’une quantité déjà notable de l'élément qu'ils y apportaient,. 2 Culture de la luzerne. — Dans la ferme où les expériences ont été faites, la luzerne occupait 70 hectares environ; le propriétaire attachait une très grande importance à la réussite de cette cul- ture, et les essais dont nous avons été témoin étaient destinés à élever les rendements. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 781 La pièce de luzerne dont nous allons parler avait une étendue de 4 hectares; elle était divisée en « planches » de 7 à 8 mètres de largeur sur toute la longueur du champ. L'âge de la luzerne était de trois ans. Plâtrée chaque année à la dose considé- rable de 600 kilogs de plâtre cru à l'hectare, la légumineuse avait recu, en outre, au mois de fé- vrier, 350 kilogs à l'hectare de l’engrais suivant : Acide phosphorique (soluble dans le citrate CHI OMANUE)E ee elec - MOn0)/0 Acide phosphorique non soluble . . . . . 1 HGTRSS CAN RE CE Re AE Soude #, 048 la VAL OMAN OP POP EME NICE) CHEUSRRE NE NME TE AMENER CUIR 20) Enfin, à titre d'essai, on répandit, vers la même époque, 230 kilogs par hectare de chlorure de potas- sium sur la moitié du nombre des planches ou sil- lons, en alternant, de facon qu'une planche pour- vue d'un supplément de polasse succédät à une planche non pourvue de cet engrais. L'effet du chlorure de potassium ajouté en sur- plus fut très remarquable. On put distinguer bientôt à l’œil la différence de vigueur que présentait la plante dans deux planches voisines. La planche plus favorisée en sels de potasse offrait un bien meilleur aspect. A la première coupe, les résultats, recueillis avec soin, furent les suivants, en rame- nant à l'hectare les rendements constatés : Planches traitées au chlorure . . 1.078 bottes. Planches non traitées . . . . . . . M5 — Différence . . . . 163 bottes. En comptant la botte à 5 kilogs, la différence accusée serait, pour la première coupe, de 815 kilogs. La deuxième coupe a donné, toutes proportions gardées, les mêmes résultats. Il nous à paru intéressant de mettre en regard l'analyse chimique du sol, faite l'année qui a pré- cédé celle de l'expérience : Substances contenues dans 100 kilogs de terre sèche. Acide phosphorique. . S1 gr. 6 OTASSE ME Met > 160 DODUE A TAA CNE et ce RAIN EG COOL CU ice and MENÉS RER A tele np OI RAONEN (OA RE à D CO Cette analyse nous donne une idée précise de la composition du sol; elle nous fait voir, en particu- lier, que la terre était déjà assez riche en potasse, puisqu'elle en renfermait (par hectare à une pro- fondeur de 0",30) 640 kilogs. I y a donc là un exemple qui peut servir à prouver qu'un élément minéral ajouté à titre d'en- grais donne des résultats satisfaisants malgré la présence d'une quantité notable de cet élément dans le sol sur lequel on le répand. Il est assez dif- ficile d'expliquer ici le succès des engrais potas siques, à moins de supposer que la quantité de cette base laissée à la disposition des plantes n'était pas suffisante. S2. — Expériences de Macheiry et Colovrex. Des circonstances spéciales peuvent, au con- traire, justifier l'emploi des sels de potasse, mal- gré la présence, en quantité notable, de cette base dans le sol. Des expériences instituées récemment auprès de Genève’ justifient nos conclusions géné- rales, comme dans l’exemple cité plus haut, et per- mettent, en outre, de fournir une explication rai- sonnable de l'efficacité des fumures potassiques. A Macheiry et à Colovrex, près Genève, deux prairies voisines, quoique situées sur des sols presque identiques de marne glaciaire (nommée diot dans la région), ont été assez différemment influencées par l’engrais potassique. Les excédents de récolte dus à la potasse étaient en moyenne (fourrage sec à l'hectare) : A Macheiry 417 °/o A Colovrex. 6 ENHSETSE A LS ERIG D'après ces chiffres, on serait tenté de croire que la terre de Macheiry, où les excédents sont trois fois plus forts qu'à Colovrex, est la plus pauvre en potasse. Or, l'analyse chimique montre justement le contraire. Elle décèle : POTASSE SOLUBLE dans dans l'acide HCI l'eau carbonique AMNaCheIrv - 1,9 ANCOÏOVIES- EN Ce RO 0,108 0,090 La terre de Macheiry se montre done mieux pourvue de potasse que celle de Colovrex, et pour- tant c’est elle qui a le plus bénéficié de l’engrais potassique. Voilà une contradiction bien énigma- tique, dont l'analyse chimique ne nous donne pas la clef, mais que des observations faites sur le ter- rain nous permettent d'expliquer. On remarque, en effet, que la prairie de Macheiry occupe une sorte de cuvette au bas d'une pente où l'eau s'accumule et s'écoule difficilement, faute de drainage. Il en résulte que cette terre, déjà fort compacte de sa nature, souffre de l'excès d'humi- dité et du manque d'aération. La nitrification paresseuse, la circulation pénible de l'air et de l’eau font que les principes nutritifs solubles, notamment la potasse, s’assimilent lentement et mal. On concoit, dès lors, qu'il faille en quelque sorte suppléer à cette nutrition défectueuse en donnant aux plantes une nourriture artificielle sous forme d'engrais potassique. 1 BtéLER-CHATELAN : C. R. Acad. d. Se. du 4 avril 4910: A Colovrex, au contraire, la situation est plus favorable. La prairie est à flanc de coteau, au fond d’un ravin où l’eau trouve un écoulement facilité par le drainage. De plus, elle succède à une vigne, dont le sol était fréquemment ameubli. Il en résulte que la terre est moins compacte, plus perméable -et plus saine qu'à Macheiry. Elle est aussi plus productive. L'air et l'eau y circulent facilement, favorisant l'assimilation de la potasse soluble par les racines. Les plantes profitent ainsi mieux de ce que le sol lui-même contient, en sorte que le besoin d'un engrais potassique s'y fait bien moins sentir qu'à Macheirv. En résumé, il semble bien qu'il y ait là un effet manifeste du drainage. Celui-ci, en créant dans le sol une circulation d'air et d’eau, active et renou- velle l'assimilation des principes solubles, sans compter que les racines s'enfoncent davantage et peuvent ainsi utiliser un plus grand cube de terre. Cet exemple est non seulement intéressant en soi, mais encore il montre que l'analyse chimique à elle seule ne saurait résoudre, dans tous les cas, le problème de la fertilité du sol. L'analyse donne, il est vrai, des indications fort utiles, mais elle n’est pas un critère infaillible et demande à être contrôlée par l'expérience en plein champ. Pour l'interpréter sainement, il faut l’étayer sur l'examen des conditions topographiques et physiques du sol en place : orientation, pente, profondeur du terrain, approvisionnement et écou- lement de l'eau, texture, surface d'attaque, per- méabilité de la terre, etc. Il est bien évident, par exemple, qu'à dose égale de substances assimi- lables, une terre profonde, où les racines peuvent s'étendre à leur aise, sera plus productive qu'un sol superficiel, ou bien qu'une terre perméable se montrera plus fertile qu'une terre trop “pacte, etc. com- $3. — Expériences de M. Biéler-Chatelan. Enfin, dans une Note insérée récemment dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences”, M. Biéler-Chatelan donne une autre explication de l'action exercée par les sels de potasse dans des terres qui paraissent riches lorsqu'on en fait l'ana- lyse. Les acides minéraux employés dans les labo- ratoires pour déterminer la richesse du sol en potasse dissolvent, dit l'auteur, des quantités de principes fertilisants qui ne sont pas en rapport avec les doses réellement assimilables et mises, dans la terre arable, à la disposition des végétaux. comment M. Biéler-Chatelan a exposé le dispositif et les résultats de ses essais : Etant donné, dit-il, que les racines puisent, Voici, d'ailleurs, ———_—_—_————— +. des Sc., 1910, 4er sem., p. 716. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE sinon la totalité, du moins la plus grande partie de leur nourriture minérale dans les dissolutions très étendues qui imprègnent le sol, comme M. Schlæsing fils l’a fort bien montré pour des plants de maïs, il serait plus rationnel de consi- dérer comme assimilables, avant tout, les prin- cipes solubles dans l’eau et d'employer celle-ci comme dissolvant. M. Biéler-Chatelan a voulu se rendre compte jusqu'à quel point le mode d’extrac- tion déjà employé en 1852 par Verdeil et Risler, et préconisé depuis successivement par M. Schlæsing fils et par À. Mitscherlich (Kônigsberg), est capable de renseigner praliquement sur les besoins du sol en tels ou tels principes fertilisants. À cet effet, l'auteur a analysé les terres d'un certain nombre de prairies naturelles, où la Station agronomique fédérale de Lausanne avait expérimenté l'action des engrais phosphatés et potassiques. D'une part, on a dosé la potasse soluble dans l'acide chlorhydrique concentré froid après qua- rante-huit heures de contact (procédé Petermann) ; d'autre part, la potasse soluble dans l’eau saturée de gaz carbonique aux température et pression ordinaires, soit par agitation, soit par déplace- ment; puis l’on a comparé les résultats de l'analyse avec les chiffres exprimant l'influence de l’engrais potassique sur les rendements en fourrage see à l'hectare. Le Tableau 11 donne les résultats. Comme on pouvait s'y attendre, il n’y a guère de proportionnalité entre les doses de potasse soluble dans HCI et les chiffres qui expriment l'effet de la fumure potassique. Ainsi la terre VI, où l’engrais potassique à mani- festement agi, se trouve être plus riche en potasse soluble dans HCI (1,14 °/,,) que la terre XI, où son effet est négatif (1,08 °/). En revanche, les doses de potasse soluble dans l'eau carbonique forment des séries croissantes (colonnes V'et VI) sensiblement inverses de la série décroissante de la colonne IT. Autrement dit, plus la dose de potasse soluble dans l’eau augmente, moins l'effet de l’engrais potassique est sensible. De ces recherches, quant au sol de prairies naturelles, il semble légitime de tirer les conclu- sions suivantes : 1° Mieux que les procédés d'attaque par les acides concentrés ou dilués, en moins de temps et avec moins de peine, l'extraction des terres par l'eau carbonique donnerait une mesure de la potasse assimilable du sol sensiblement conforme aux données de l'expérience culturale ; 2° Sauf cas exceptionnels (terres riches en micas potassiques, terres fortement calcaires, sols placés dans des conditions anormales d'aération et de drainage), dans les terres de prairies naturelles qui dosent moins de 0,15 °/,, de K°O soluble dans D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 783 l’eau carbonique par agitation, ou moins de 0,20 °/, par déplacement, on peut s'attendre à un effet sensible de l'engrais potassique répandu en plus de l'engrais phosphaté nécessaire. Dans les terres plus riches, les fumures potassiques produiraient peu d'effet, du moins tant qu'on n'épuise pas la réserve de potasse assimilable par des fumures incomplètes; 3° Les terres plus ou moins calcaires livrent proportionnellement un peu moins de polasse à l'eau carbonique que les sols non calcaires; %° Contrairement à une opinion courante, ce ne sont pas toujours les terres argileuses qui sont le mieux pourvues de potasse. Certaines terres légères se montrent parfois plus riches. Les essais de M. Biéler-Chatelan ont été analysés d'équilibres tendant à en entretenir, dans une terre donnée, un taux à peu près constant. En outre, des expériences répétées ont établi que ces minimes quantités, convenablement renouvelées, pouvaient suflire, dans des cullures en milieu artiliciel, à l'obtention de très belles plantes, et enfin que dans la Nature, lout se passe — ou du moins tout s'est passé dans les essais effectués — comme si une très grande proportion, parfois la presque totalité, de l'acide phosphorique et de la potasse assimilés était venue aux racines à l'élat dissous ou, plus exactement, avait été prélevée sur le stock de ces principes existant dans le sol à l’état de composés capables de se dissoudre dans l'eau. « Tout en admettant encore une contribution à la nutrition minérale attribuable à l’attaque directe, Tagzeau IL. — Comparaison de l'influence de la potasse sur la culture avec les divers modes d'analyse des sols. III INFLUENCE IV \£ VI POTASSE POTASSE POTASSE NATURE DU SOL de la potasse sur les rendements soluble dans l'acide chlorhydrique soluble dans l'eau carbonique déplacement) soluble dans l'eau carbonique {agilation) à ne 34 deg 95 23 20 18 11 + Argilo-siliceux, humifère Argileux Id. Mat. Argilo-calcaire, humifère . Silico-argileux ADANLO-SUICEUXE ES Limoneux, silico-calcaire . . . Argilo-siliceux. . . . . Limoneux, humifère. Argilo-calcaire. Argilo-siliceux. LUI ++++44 et commentés par M. Schlæsing fils, dans une Note présentée à la Société nationale d'Agriculture et il est intéressant de reproduire les conclusions de cet habile chimiste : « M. Biéler-Chatelan, dit M. Schlæsing, touche à ‘une question qui mérite de retenir l'attention: celle de la nutrition des plantes par les solutions extrè- mement diluées qui imprègnent le sol. On a long- temps admis, presque sans conteste, que, pour se procurer de l'acide phosphorique et de la potasse, principes considérés comme insolubilisés dans le sol, les racines devaient attaquer avec leurs sucs acides et dissoudre les combinaisons solides où ces principes sont engagés. On négligeait, pour leur alimentation, les minimes quantités d'acide phos- phorique et de potasse existant en dissolution. Mais, dans ces dernières années, il a été bien dé- montré, je crois,que ces quantités, toujours minimes à un moment donné et ne représentant qu'une petite fraction de ce qu'exigent les récoltes, étaient susceptibles de se renouveler sans cesse, en vertu —_— 9/00 0,06 0,09 0,08 0,08 0,09 0,06 0,15 0,23 0,2% 0.29 par les racines, de principes du sol non dissous, contribution pouvant parfois être fort importante et même dominante, on voit, par ce qui précède, le grand rôle joué le plus souvent par les principes solubles à l'eau, alors même que leur solubilité serait toujours très faible et de l’ordre des millio- nièmes, et l'on comprend que l’on cherche à déter- miner l’approvisionnement du sol en potasse soluble à l'eau, en particulier, pour y mesurer en quelque manière la potasse assimilable. « C'est ce qu'a fait M. Biéler-Chatelan. Pour avoir la potasse soluble, il a employé, comme solvant, l'eau saturée d'acide carbonique. Il a opéré sur les sols d'un certain nombre de prairies naturelles dont l'histoire lui était connue d'autre part, etila montré que leurs besoins en engrais potassiques variaient en sens inverse de leur teneur en polasse soluble. Il a déduit de ses recherches des règles qui permettraient de reconnaître, d'après le taux de potasse soluble à l’eau, si des sols recevraient avec profit des additions de ce principe. Il est inutile 784 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE —————]_—]—]—]—]———————————————————.—. d'insister sur l'intérêt pratique que peuvent pré- senter des règles semblables. » Il. — L'ÉCIMAGE DES CÉRÉALES. L'écimage, comme l'indique l'origine de ce terme, consiste à couper la cime ou la sommité des plantes. Depuis fort longtemps, on pratique l’écimage des maïs, notamment dans le sud-ouest de la France, et nous parlerons plus loin des avantages ou des inconvénients de ce traitement spécial. Les céréales du Nord, le blé, le seigle, l'orge, l'avoine et le Sarrasin, n'ont été qu'exceptionnellement soumises à l'écimage; et l’on ne possédait guère, jusqu'ici, de données précises sur les conséquences culturales de cette pratique. Un des agriculteurs les plus dis- tingués de Seine-et-Marne, M. Bachelier, de Mor- mant, ancien lauréat de la prime d'honneur, a fait dernièrement des essais précis qui ont porté sur les avantages de l’écimage par rapport à la verse des céréales. Bien que la culture des plantes sar- clées et l'emploi des engrais phosphatés aient réduit le nombre des cas de verse, on est encore exposé aux dangers que comporte cet accident. La céréale couchée mürit mal, les grains sont moins développés et partant moins pesants; la récolte, plus difficile, devient également plus coûteuse; bref, la verse doit être prévenue, et M. Bachelier pense précisément que l'écimage des céréales avant l'épiage, Surtout quand il s'agit du blé, peut per- mettre de donner à la tige une rigidité qui s'oppose à la verse. « Autrefois, dit M. Bachelier, on coupait à la faux la sommité des tiges; mais ce procédé est devenu d'une application difficile, faute de faucheurs. En outre, il à l'inconvénient d'être irrégulier et trop lent. « Il est irrégulier parce que la faux, maniée par l’homme, engendre une surface qui n’est pas paral- lèle à celle du sol : certaines tiges sont coupées trop bas, alors que d’autres sont à peine atteintes ; il est trop lent, car il importe de ne pas toucher l'épi, ce qui rend très limitée l'époque durant laquelle l'écimage n’est pas dangereux. C'est pour avoir été fauchés trop tard et trop bas que des blés écimés ont donné de petits épis. « Lorsqu'il s’agit d'avoine, le moment opportun est encore plus délicat à saisir, la végétation de cette plante étant très rapide à l'approche de l'épiage. « L'écimage à la faux était encore, cependant, le seul mode employé, lorsqu'un constructeur mit en vente une sorte de tondeuse à cheval destinée primitivement à l'essanvage ‘ des céréales de prin- Ce terme sert à désigner la pratique de la destruction des sanves (Sinapis arvensis) qui infestent les champs de céréales. temps. Cet appareil se compose essentiellement d'une lame de faucheuse pouvant agir à une hau- teur de 15 à 25 centimètres au-dessus du sol, par le jeu d’un levier placé dans la main du conducteur, et c'est en se servant de cette machine comme essanveuse qu'on eut l’idée de l'utiliser pour l'éci- mage. « Dans les terres compactes et un peu froides de la Brie que je cultive, la végétation, d’abord très lente, devient très active lorsque le sol s'échauffe ; des feuilles très larges se développent, chargeant d'une facon excessive une tige d'autant plus faible qu'elle s'est allongée plus rapidement. Grâce à l'écimage, qu'il convient de pratiquer dans les der- niers jours d'avril ou au commencement de mai, la plante est soulagée de son excès de feuilles, l'air et la lumière pénètrent entre les lignes, en forti- fiant la plante; la récolte s'égalise, les brins les plus faibles n'étant pas atteints et profilant de l'arrêt momentané des plus forts. « J'écime chaque année sans exception tous mes blés de luzerne, et leurs rendements sont compa- rables à ceux de mes meilleurs blés de betteraves. La verse n'est pas toujours et certainement con- Jjurée, mais elle est rarement complète; les blés conservent « du dessous » et la récolte se fait beau- coup plus aisément. « L'an dernier, j'ai écimé une pièce de 25 hectares de blé semé après luzerne, en évitant de passer la machine sur une bande de 10 mêtres de longueur située au milieu du champ. J'ai tracé dans la lon- gueur du rayage trois groupes de deux carrés d’un are chacun, ayant un côté commun. Dans chaque groupe, un carré était situé dans la partie écimée, l'autre dans la partie non écimée, la végétation étant bien égale de part et d'autre au moment de l’éci- mage. « Onse rappelle les pluiestombées depuisle 15 juin jusqu’à la moisson; il m'a paru d'autant plus inté- ressant de noter les rendements obtenus dans les divers carrés. La récolte et les pesées opérées avec le plus grand soin, le battage effectué au fléau, voici les constatations qu'il m'a été permis de faire (désignons les trois groupes par les numéros 1,2, 3, et rapportons les quantités constatées à l'hectare) : GRAINS en plus dans la en moios dans læ partie écimée partie écimée PAILLE quintaux quintaux GROUPEMENT 4,50 % Groupe n° 2, Na né 4,50 î GYOUREMOBER RE ON T0 A0 Moyennes. . . 6,33 7 « Ilestà remarquer que la différence de 4 quint. 50 de grains, constatée dans les deux premiers groupes, atteint 10 quintaux dans le troisième. Cela tient à D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE ce que, dans celte partie du champ, le blé était beaucoup plus fort el plus chargé de feuilles, de sorte que le carré non écimé a versé à plat au pre- mier orage; il a donné un grain défectueux. « Voyons maintenant quel a été le prix de revient à l'hectare du travail d'écimage. « La machine que j'emploie coûte 450 fr. ; son en- tretien est presque nul, car la scie se meut assez loin du sol pour ne jamais rencontrer d'obstacle (j'ai eu 14 fr. de frais d'entretien en 7 ans); elle permet d'écimer par jour 4 hectares, à l'aide d'un homme et d'un cheval. « Le prix de revient peut donc se calculer ainsi à l'hectare : Main-d'œuvre et traction . . . . . . . . 2fr. 50 Amortissementet entretien de lamachine. 41 50 OLA JU 4 fr.» « Cette dépense, jointe à la valeur de 7 quintaux de paille récoltés en moins, est largement compensée par la diminution des frais de moisson et la qualité supérieure des produits. « Le dommage causé à mon champ de blé par l'été pluvieux a donc été atténué, du fait de l'écimage, dans une notable proportion, représentée par la valeur de 6 quint. 33 de blé à l'hectare, soit, en prenant pour base le prix de 23 francs le quintal, 145 fr. 60. » Ici, l'écimage agit en prévenant la verse, c'est-à- dire un accident qui réagit ensuite sur la matu- rité, le développement et le poids du grain. Cette opération, faite avant l’épiage, exérce, en outre, une action favorable sur la formation même de l'épi et sur la vigueur générale de la plante. Mais l'écimage pratiqué après la formation de l'épi — comme cela se passe pour le maïs — peut avoir, au contraire, une action nuisible sur le rendement en grain. Dans le sud-ouest de la France, en effet, on coupe la partie terminale des tiges lorsque les longs fils ou styles qui sortent des enveloppes de l’épi de maïs, après la fécondation, ont pris une coloration brune. M. F. Berthault, professeur à l'École de Grignon, nous a fait connaitre les résultats de plusieurs essais précis etconcluants qui ont été obtenus par de bons obser- vateurs, et qui se rapportent à l'influence de l'éei- mage sur les rendements en grains. Ainsi, à Saint- Sulpice-sur-Lèze (Haute-Garonne), M. de Séverac a constaté, durant deux années consécutives, que le poids de grain était réduit par l’écimage. Sur une ligne de maïs non écimé, on a obtenu, une première année, 165 kilogs de grains, contre 148 kilogs seu- lement sur une ligne de maïs écimé. La différence, représentant la perte due à l’'écimage, serait donc de 16 kilogs 500. Quant au fourrage, voici le caleul de M. de Séverac. Les cimes coupées et fanées ont 785 donné 49 kilogs de fourrage, mais en diminuant la récolte de grains d'un poids de 16 kilogs 500, En outre, les cimes restées sur les maïs non écimés nt sont point perdues, mais seulement dépréciées cause de leur dessiccation. M. de Séverac évalue au tiers celte perte de valeur comme fourrage. Le poids des cimes non coupées avant la récolte de grains étant égal à 29 kilogs, elles ne vaudraient que l'équivalent (1/3 en moins) de 19 kilogs. En somme, l'écimage ne donnerait donc que 49 — 19—= 20 kilogs de fourrage, coûtant 16 kilogs de grains (puisque la récolte a diminué), ce qui équivaut à 2 francs, si l’on évalue à 9 francs l'hec- tolitre de maïs pesant 72 kilogs. En tenant compte des frais de main-d'œuvre nécessités par l'écimage (> francs par hectare), on arrive à prouver que le fourrage obtenu par l'écimage revient, tous comptes faits, à 8 francs le quintal, ce qui est cher. L'année suivante, les mêmes calculs ont permis d'obtenir le chiffre de 8 fr. 25 comme un prix de revient de ce mêmefourrage provenant de l'écimage. Enfin, un troisième essai, portant sur deux par- celles d'un demi-hectare chacune, adonné les résul- tats suivants : Les maïs non écimés ont produit 272 kilogs de plus que les pieds écimés sur la même surface, et le prix de revient du fourrage ressort alors à 43 francs les 100 kilogs, somme qui est trop élevée pour que l'on ne condamne pas immédiatement la pratique de l'écimage du maïs dans de pareilles conditions. M. F. Berthault fait, en outre, observer que l'éci- mage réduit la récolte de grains d'une facon d'autant plus marquée que l'opération est faite plus tôt. Ainsi, dans la Haute-Garonne, l’auteur à constaté les coïncidences suivantes : Écimage au 20 août : poids de grains, 276 kilogs: écimage au 8 septembre : poids de grains, 301 ki- logs; écimage au 26 septembre : poids de grains, 409 kilogs. On voit que le poids de grains récollé augmente à mesure que l'époque de l'écimage se trouve plus tardive. Enfin, la diminution de récolte due à l'écimage est encore mise très clairement en évidence par les expériences de M. Vène, à Lautrec. Vingt lignes de maïs ayant été choisies pour sujets de ces essais, on à trouvé : Sur les 10 rangs non écimés, une récolte de 500 kilogs; sur les 10 rangs écimés le 25 août, 400 kilogs. Le 24 octobre, comme contrôle, on coupait 42 bandes voisines des premières et écimées. Elles ont donné 41 sacs de beaux épis, plus un tiers de sac de maïs inférieur, le tout pesant 480 kilogs, soit 100 kilogs pour les 10 rangs, résultat conforme au 786 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE précédent. La différence en moins de 100 kilogs pour la partie écimée ayant été obtenue sur 235 m. X 8 — 18 ares 80, on trouve, en ramenant à l'hectare, 532 kilogs. Certes, cette diminution est assez considérable pour justifier une conclusion très nette. Il apparait clairement que l'opération de l’éci- mage à pour résultat de réduire sensiblement les rendements en grains du maïs. Cette pratique serait seulement justifiée par trois raisons Ou circonstances que l’on peut ainsi résu- mer : 1° Lorsque la maturité est facilitée par cette opé- ration, notamment au nord de la limite géogra- phique de la culture du maïs; 2° Lorsque les grands vents menacent de coucher ou de déraciner les pieds de maïs non écimés, alors que la section des parties hautes de la tige réduit le nombre des tiges cassées ou renversées; 3° Lorsque, le fourrage étant tout à fait rare, il devient indispensable de s’en procurer à tout prix. III. — LA CULTURE DU BLÉ ET DES CÉRÉALES EN PAYS SECS. Il s’agit à ce propos d'essais et de conclusions du plus sérieux intérêt qui visent la culture — en général — dans les pays secs. Le mot « sec » est, d’ailleurs, presque toujours mal défini, et mal com- pris. Dans une région où la hauteur d’eau tombée durant toute l’année est considérable, la terre arable peut êlre sèche précisément lorsque les végétaux ont besoin d'y trouver de l’eau. Il suffit pour cela que les pluies soient très abondantes pendant quelques mois, ou quelques semaines, et à peu près nulles ensuite. En un mot, c’est la répartition des chutes d'eaux de pluie, plus encore que la hauteur totale constatée par les météorologistes, qui inté- resse l’agriculteur. Or, dans les pays dont la sécheresse — ainsi com- prise et définie — est dangereuse pour les récoltes, il est possible, sinon facile, d'imprégner le sol pro- fondément, d'y constituer, en quelque sorte, des réserves d'eau à des profondeurs dépassant un et d'assurer le développement plantes cultivées, celui des céréales notamment. On sait, en effet, que le blé, pour ne parler que de lui, a des racines qui s'enfoncent très profondé- ment dans le sol, d'autant plus profondément même que l’année est plus sèche et la couche superficielle mètre, des du sol moins gorgée d’eau. Enfin, il ne faut pas seulement constituer, dans le sous-sol, les réserves d'eau dont nous venons de parler; il est encore nécessaire de limiter les pertes dues à l'évaporation de l’eau par capillarité à la surface du sol. C'est ce qu'a très bien vu M. Sutton, chargé récemment par le Gouvernement australien de recherches agronomiques relatives à la culture du blé en pays secs. La Gazette de la Nouvelle-Galles du Sud, dans ses numéros de mai à novembre 1909. et février 1910, a publié un résumé des études de M. Sutton, et celles-ci méritent une mention spé- ciale parce que leurs conclusions intéressent à la fois les cultivateurs du midi de la France et ceux de l’Algérie-Tunisie. M. Sutton dit avec raison que les efforts des agri- culteurs, dans les régions sèches, doivent tendre à conserver l'humidité du sol. L'eau de pluie est rare, les chutes sont irrégulières, et, si le sol est abandonné à lui-même, l'eau tombée est perdue. « Dans les régions peu pluvieuses, ajoute-t-il, le cultivateur doit avant tout considérer le sol comme un réservoir d’eau; il doit, par suite, adopter des méthodes de culture qui augmentent l'absorption de l’eau par le sol, et qui, une fois qu'elle a été absorbée, retiennent cette eau le plus longtemps possible, et avec le minimum de perte. » Le fait qu'une culture appropriée peut conserver dans le sol l’eau de la pluie sans grande déperdi- Lion est si connu aujourd'hui qu'il se passe d’argu- ments. Malheureusement, les cultivateurs austra- liens ne s'appliquent pas encore à tirer de la pluie le maximum d'effet utile. Leurs procédés de culture ne mettent pratique- ment à la disposition de la céréale que l’eau de pluie qui tombe pendant la durée de sa crois- sance. Aussi, lorsque celte période ne reçoit qu'une quantité insuffisante de pluie, la récolte est-elle déficitaire, alors qu'à l’aide de méthodes culturales rationnelles il eût été possible de l'obtenir bonne, en la faisant profiter des pluies tombées avant l'époque des semailles. M. Sutton ajoute qu'il ne faut attribuer qu'à l’ab- sence de méthodes rationnelles l’état précaire de la culture du blé dans les districts les plus sees de la colonie. Le succès y dépend, dans une certaine mesure, de la pluie qui tombe avant la période de croissance du blé. Le sol devrait être faconné de telle sorte que l'humidité s'y conservàt jusqu'à la période où les semences sont mises en terre, afin qu'elles n’aient pas à attendre la pluie pour germer. Les pluies qui tombent pendant la période de croissance du blé ont une importance indiscutable. Néanmoins, il ne faut pas compter sur elles seules pour obtenir de bonnes récoltes, et c'est en mettant le sol en état de conserver de l'humidité jusqu'aux semailles que l’on obtiendra des succès perma- nents. Cet état favorable du sol ne peut être obtenu qu'en commencant à le préparer longtemps avant l'époque des semailles. En d’autres termes, on aura D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE recours à une jachère cullivée longtemps avant l'époque de plantation Suivant M. Sutton, qui appuie ses dires sur les expériences entreprises dans les fermes expéri- mentales, l'application d'une rotation comportant un système approprié de jachère est la condition essentielle du succès de la culture du blé en Aus- tralie. Le système qu'il importe de mettre en pralique doit conserver dans le sol en jachère tout ou partie de la pluie d'une année, pour permettre à la cé- réale, semée l’année suivante, de l'utiliser au cours de la végétation. La jachère que pratiquent beaucoup de fermiers australiens consiste à labourer la terre dans l'hiver qui précède les semailles de printemps, ou au prin- temps qui précède les semis d'automne, puis à ne plus s'occuper de leur labour jusqu'à l'époque des semailles. Cette pratique a le bon côté d'ameublir le sol, de l'aérer, d'augmenter sa capacité comme réservoir d'eau de pluie et d'accroitre l'absorption de cette dernière. Mais elle a le défaut de ne prévenir ni la perte, ni le gaspillage de l'eau par l’évaporation. Or, les pays où les pluies sont rares (quoique par- fois très abondantes) et qui présentent des condi- tions favorables à la culture du blé, sont précisé- ment sujets à une évaporation intense. Un labour de printemps ordinaire n’atténue pas plus celle-ci que l’inculture, avec laquelle l’eau de pluie emma- gasinée présente un effet plus utile, puisqu'elle sert à fournir un pacage. Quant aux conditions dans lesquelles l'évapora- tion se produit, elles sont désormais bien connues, et M. Dehérain a traité celte intéressante question dans son beau Traité de Chimie agricole". Dans les conditions ordinaires, a soutenu M. Sut- ton, le sol et le sous-sol absorbent les eaux de pluie, puis, à mesure que le soleil et le vent en dessèchent la surface dépourvue de toute protee- tion, une force naturelle, l'attraction capillaire, ra- mène à la surface l’eau emmagasinée qui se perd par évaporation. Dans un sol tassé, permettant à la capillarité de faciliter l'ascension de l'eau souterraine, Dehérain avait noté que la perte d'humidité était plus forte que pour une terre meuble. Sur de faibles étendues, on atténue les effets de cette évaporalion en recouvrant le sol de paille, ou, comme font les maraichers, de fumier. Mais ce ne sont pas là des pratiques réalisables dans les grandes fermes à blé des régions sèches. Cependant, on à constaté, par bonheur, qu'une ! P. P. DÉHÉRAIN : Traité de Chimie Agricole. Paris, Mas- son, 1907. Voy. p. 426 et suiv.: Ascension de l’eau dans les terres meubles et tassées. 187 certaine épaisseur de sol sec et meuble agit de la même facon ; l'allraction capillaire s'y trouve éga lement rompue. De la sorte, si l’on ameublit, et si l’on favorise la dessiccalion, au moyen de facons culturales aäppro- priées, d’une couche d’une épaisseur donnée de la surface du sol, celle-ci agit comme couverture iso- lante, protégeant l'humidité contenue dans le sol. Cette partie meuble du sol est appelée, par les Aus- traliens, « couche », par analogie avec le paillis des jardiniers. La protection de la « couche » n'est pas absolue; aussi ses effets varient-ils avec la nature du sol. Un sol riche en matières organiques constitue une couche beaucoup plus efficace qu'un sol argileux. Le Professeur King!, qu'en cent jours une « couche » de 75 millimètres du Wisconsin, a démontré d'épaisseur a conservé, dans un sol humifère, 56 °/,, et, dans un sol argileux, 63 °/, de l'humidité qui, sans elle, eût été gaspillée par l’évaporation. Une jachère, constamment travaillée et ameu- blie, met le sol dans les conditions les plus favo- rables à l'absorption et à la conservation de l'hu- midité. Ce n’est pas seulement l’évaporation qu'atténue l’ameublissement du sol; il favorise également la rapidité d'absorption de la pluie par le sol et peut doubler sa capacité d'absorption par rapport à un sol compact. L'ameublissement du sol constitue done un obstacle précieux au ruissellement dans les pays secs à averses abondantes. Mais M. Sutton estime qu'il ne faudrait pas dé- duire, de ce que la « couche » est capable de retenir l'humidité, qu'elle est capable d’en produire. Néanmoins, les méthodes rationnelles de culture mettront le fermier en état de tirer le maximum d'effet utile de faibles pluies. En maintenant le sol de la jachère à l’état meu- ble, en lui donnant avec le « cultivateur » ou la herse des facons légères qui brisent la « croûte » du sol, on s'oppose au tassement el, par suite, à l’évaporalion par capillarité. De cette façon, pense M. Sutton, les travaux que l'on a fait subir à la jachère ont pour résultat de mettre le sol dans un état parfait pour la réception des semences. On aura préparé, pour recevoir le grain, un sol parfaitement propre, dont la partie supérieure sera très meuble et la partie inférieure assez compacte pour provoquer une ascension àac- tive (par capillarité) de l'eau souterraine emmaga- sinée. La germination, d'une part, et la crois- sance des plantes seront ainsi assurées. 4 Voir dans les Annales Agronomiques, t. XXII (1896), Paris, chez Masson, la traduction d'un important travail de King sur « l'Eau du Sol ».(Tenth annual Report of the Agri- cultural Station of the Univ. of Wisconsin, 1894.) 188 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE Telles sont les idées directrices du Mémoire de M. Sutton. La méthode qu'il préconise suppose, bien entendu, l'emploi de la jachère, et c’est sur- tout dans le pays où le sol a une faible valeur lu- crative que ce système de culture peut être suivi. L'agronome australien admet toutefois que l’on peut adopter un « assolement » (succession des cultures) ainsi réglé : = Blé. Jachère non cultivée avec les facons d'ameublissement plus haut décrites. Cultures fourragères. Première année. Deuxième année . Troisième année . De cette facon, la terre resterait improductive une année seulement sur trois. IV. — INFLUENCE DES ENGRAIS COMPLÉMENTAIRES MINÉRAUX SUR LA COMPOSITION DES GRAINES DES CÉRÉALES. Cette série très importante de recherches ex- périmentales est due à la collaboration de MM. Pa- turel, directeur de la Station agronomique de Saône-et-Loire, Raynaud, directeur, et Brunerie, chef de culture à l'Ecole pratique d'Agriculture de Fontaines. Les résultats, consignés dans un intéres- sant mémoire‘, Méritent de fixer l’altention des agronomes. M. Paturel remarque que les nombreuses analyses faites par lui à la Station agronomique de Cluny ont permis de préciser déjà l'action des engrais chi- miques sur Ja composition des foins. L'accroisse- ment de richesse de ces fourrages sous l'influence de fumures minérales appropriées s'élève à 20 °/, pour les matières azotées et à 39 °/, pour l'acide phosphorique. M. Paturel et ses collaborateurs ont voulu savoir si des modifications semblables peu- vent être constatées lorsque d'autres cultures, et notamment les céréales, recoivent des engrais chi- miques. 1. Expériences relatives au blé. — Les essais avaient pour objet de rechercher l'influence des engrais sur la composition chimique du grain et, en particulier, sur les matières azotées et l'acide phosphorique. Les cultures expérimentales ont été faites dans le domaine de l'École de Fontaines : sol argilo-siliceux, peu calcaire, sur lequel les engrais phosphatés et potassiques ont donné depuis quinze ans des résultats marqués. Quatre parcelles de 10 ares, semées en blé, ont reçu chacune les doses suivantes d'engrais par hectare : Parcelle n° 1, témoin. . . 0 30.000 kilogs de fumier. — none. ‘ Publié dans le Bulletin de l'Union agricole de Chalon- sur-Sane. Même dose de fumier + 500 ki- logs de superphosphate. Mêmes doses de fumier et de superphosphate + 200 kilogs de chlorure de potassium. Parcelle n° 3. — n° 4. Le blé semé à l'automne appartenait à une va- riété (rouge d'Alsace) qui est fort appréciée dans la région. Comme particularités, durant les essais, on a remarqué que la végétation du blé, arrêtée pendant l'hiver, a recommencé faiblement er mars, mais que le développement normal à été entravé par la sécheresse du printemps et le froid de lété, en sorte que la maturation n’a été complète que vers la fin de juillet. Sur les parcelles qui avaient recu de l'acide phosphorique et de la potasse, il à d'ailleurs été constaté que le blé avait été mür plus tôt. Au moment de la moisson, on a délimité sur chaque parcelle une surface de 2 mètres carrés, dont la récolte a été coupée séparément, et les grains ont été pesés, puis analysés, après criblages et vannages. Voici les résullats obtenus : POIDS MATIÈRES du grain azotées récoltésur2m? % de grain ACIDE phosphorique % de grain 1 ARE ONE EE COST 10,50 0,92 2ANUNIET EN AERE NENT NN 50 10,75 0,99 3. Fumier, superphos- phates. . . . . . 680 10,00 0,98 4. Fumier, superphos- phates, potasse . 792 10,43 1,00 M. Paturel résume ainsi ses conclusions : « On constate tout d'abord une augmentation presque régulière du rendement en grain, à mesure que la fumure est plus complète. Les chiffres ci- dessus, relatifs aux parcelles 3 et 4, correspondent à des rendements de 34 qxm. et 39 qxm. 6 à l'hec- tare, résultats extrêmement élevés pour notre ré- gion. Rappelons que ce même blé a fourni cette année en grande culture, sur une pièce de 1 hect. 50, un rendement de 25 qxm. 75 de grains à l'hectare. « Quant aux résultats fournis par l'analyse chi- mique, on peut en tirer les conclusions suivantes : « 1° La teneur du grain en matières azotées n'a pas été accrue par l'apport des engrais phosphatés et potassiques. Cetle teneur est la plus élevée dans la parcelle à fumier seul, et légèrement inférieure dans les deux suivantes; « 2° La mème conclusion s'applique à ce qui con- cerne la richesse des grains en acide phosphorique. Bien que cet élément soit plus abondant dans les parcelles fumées, les engrais complémentaires n'ont déterminé aucune augmentation appréciable dans la teneur du grain. « Ces résultats sont conformes à ceux obtenus il y D. ZOLLA — REVUE a quelques années par un de nos collègues, M. Vua- flart, directeur de la Station agronomique du Pas- de-Calais. Dans une série d'expériences ayant porté sur trois variétés de blé, l’auteur a constaté que la richesse du grain en acide phosphorique et en po- tasse parait légèrement accrue par les fumures phosphatées et potassiques, mais que l'influence de ces dernières sur la richesse en azote semble nulle. » le croyons utile de rappeler, à propos de ces essais, les expériences faites par M. Lindet', pro- fesseur à l'Institut national Agronomique. M. Lindet avait étudié l’action exercée par des engrais chimiques azotés (sulfate d'ammoniaque et nitrate de soude) sur la teneur en azote des blés et ANNUELLE D'AGRONOMIE 789 « De ces deux séries d'expériences qui se complé- tent, il reste acquis que les engrais, en augmentant diminuent la production des grains à l'hectare, quelquefois, mais d'une facon légère, au détriment du boulanger et du consommateur, la teneur en gluten des farines, mais que, dans tous les cas, la quantité de gluten formé à l'hectare est toujours plus considérable, » 2. Expériences relatives au maïs. nons de voir que M. Paturel, MM. Vuaflart et Lindet, action exercée par les engrais minéraux sur la teneur des de blé en matières azotées. — Nous ve- comme du reste n'avait pas constaté une grains Chose curieuse, les résultats relatifs à la culture TagLeau HI. — Action des engrais azotés sur la richesse en gluten des farines. Bordeaux (Champeaux) : ATEMOin Sulfate d' ammoniaque Nitrate . ARE Japhet (Noisy-le-Roi) : Témoin . Tir Sulfate d'ammoniaque. Nitrate . pe Dattel (Trilport) : Témoin. Sulfate d’ ammoniaque. : NUITATEE RER : Dattel et Bordier (Boïs-dn-Boïs) ë Témoin. . Sulfate d' ammonique. Nitrate . dk Ê RENDEMENT en grains à l'hectare 2.890 3.240 3 3.200 GLUTEN sec de la farire GLUTEN GLUTEN GLUTEN sec dans à l'hectare à l'hectare le témoin dans le témoin kilogs kilogs -140 -000 -580 .200 -100 -600 -000 -100 .200 farines, et plus spécialement sur la richesse en glu- ten de ces dernières. Le Tableau III donne les résul- tats des cultures faites et des analyses exécutées. M. Lindet formule ainsi les conclusions qu'il tire de ces données d'expériences : Les résultats consignés dans ce tableau mon- trent que les sels azotés ont eu, dans certains cas (Champeaux et surtout Noisy-le-Roi), une heureuse influence sur la teneur des farines en gluten ; que, dans d’autres cas (Trilport et Bois-du-Buis), l'in- fluence a été contraire. Mais, dans les quatre expé- riences, et par le fait de l'augmentation du rende- ment en grains, la teneur en gluten à l'hectare a augmenté d'une facon constante; c’est là la conclu- sion que M. Vuaflart a dégagée des expériences qu'il a faites avec les engrais potassiques et phos- phatés. ‘ Bulletin des Séances de la Société Nationale d'Agri- culture, année 1909, juin, p. 546. du maïs sont fort différents. En disposant les expé- riences de la même facon et avec les mêmes doses d'engrais semblables, M. Paturel a obtenu, pour le maïs jaune d'Auxonne, les chiffres suivants : POIDS MATIÈRES ACIDE . du grain azotée P hosphorique récolté sur2m? 9% de grain v de grain 1. Témoin. 163 gr. 10,5 0,70 2. Fumier . 293 10,0 0,75 3. Fumier, superphos- phate . 248 10,9 0,84 4. Fumier, super phos- phate, potasse. . 352 13,0 0,95 Ainsi, dans les conditions où se sont placés les expérimentateurs, les engrais chimiques complé- mentaires ont exercé une action visible et des plus importantes sur la composition des grains de maïs, en ce qui touche les matières azotées et l'acide phosphorique. L'engrais complet (fumier, phosphates et chlorure de potassium) a donné des résultats très frappants. 790 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE ———_—_— M. Paturel et ses collaborateurs ajoutent avec raison : « Ces expériences, si elles se trouvent confir- mées, présentent pour notre région une importance de premier ordre; elles montrent, en effet, que les engrais complémentaires, phosphatés et potassi- ques, agissent d'une facon favorable sur la compo- sition du grain du maïs, augmentent dans une mesure sensible sa richesse en principes nutritifs essentiels. « Cest là une constatation intéressante pour l'éle- vage et il serait utile que de nouvelles expériences de ce genre fussent entreprises dans le but de contrôler l'exactitude de ces importants résul- lats. » V. — TRAVAUX DE LA STATION DE PATHOLOGIE VÉGÉTALE DE PARIS. Parmi les travaux les plus remarqués qu'ont publiés notre collègue Ed. Griffon, directeur de la Station”, et son assistant, M. Maublance, nous pou- vons citer une. étude nouvelle sur la maladie appelée la pourriture du cœur de la betterave: c’est une maladie grave surtout durant les années sèches; elle peut causer parfois de très sérieux dommages aux récoltes. On était assez mal renseigné Jusqu'ici sur l'agent ou les agents de cette maladie, car la véritable pourriture du cœur de la betterave peut être confondue avec une altération des jeunes feuilles sur lesquelles on voit apparaître des moi- sissures noires. La véritable pourriture est due au /?Aoma tabilica qu'ont étudié MM. Prillieux et Delacroix. Quant aux moisissures des jeunes feuilles, elles seraient dues au (Cladosporium, et cette forme de la maladie est bien moins grave. La présence simultanée du Phoma et du Cladosporium a été mise en évidence par MM. Griffon et Maublane, qui les ont cultivés séparément *, La question toujours agitée et controversée de l’Ayhridation asexuelle à été également l’objet de nombreux essais et travaux de la part de M. Ed. Griffon. On sait qu'il est généralement admis que l'hybri- dation” n'est pas possible en dehors de la repro- duction sexuée. Certains Darwin autres, ont pensé que la grefle permettait de mé- langer les caractères de deux variétés, de deux auteurs, entre espèces ou deux genres, en faisant naître des bour- geons susceptibles de donner des pousses hybrides, ! Rue d’Alésia à Paris. * Bull. de la Soc. Mycol., 1910, p. 126. * Voir article « hybridation » dans le Dictionnaire de Physiologie de Ch. Richet, Paris, Alcan, 1910. L'auteur de l'article est M. Gridon. Il yaurait donc une greffe. M. Daniel, depuis une quinzaine d'années‘, a notamment tenté de montrer que l'influence du sujet sur le greffon a pour résultat un mélange de caractères. Les expériences faites par cet auteur ont porté sur les plantes herbacées prises comme porte-gretfes (sujets) ou comme greffons. De 1905 à 1910, M. Griffon a repris les expé- riences de M. Daniel et les a soumises à un contrôle rigoureux. On trouvera dans le Bulletin de Ja Société Botanique de France? le détail des travaux de l'auteur. Nous nous bornerons à citer ici ses conclusions, dont la précision est digne de re- marque : « Il résulte de tous nos essais que, cette année encore, aucun phénomène d’Lyhridation asexuelle n'est apparu dans mes greffes, pourtant nombreuses el variées. « Les changements observés dans les greffes, pomme de terre sur tomate, soleil sur topinam- bour notamment, s'expliquent très bien par de simples varialions de nutrition et n’affectent nulle- ment les caractères spécifiques des plantes asso- ciées. « Faut-il répéter encore, en terminant, que les résultats négatifs obtenus pendant cinq années d'essais sur des milliers de plantes ne prouvent point d'une manière irréfutable que l'hybridation asexuelle consécutive au greffage est une chimère? Comme je le disais au début, la question est vaste et fort complexe; elle doit être envisagée sous ses. divers aspects. Je ne l'ignore pas. Je sais égale- ment qu'en Biologie les faits positifs ne peuvent être infirmés par des faits négatifs: je sais encore que nier les faits, quelque contraires qu'ils soient à une théorie, n'est pas une solution. Seulement il faut que ces faits positifs soient bien tels, ou encore qu'ils ne puissent s'expliquer plus simplement par uneautre théorie que celle de l'hybridation asexuelle. Je ne nie nullement l'existence du Néflier de Bron- vaux, ni celle du Cytisus Adami ; je cultive depuis plusieurs années ces plantes; j'ai observé le pre- mier sur place et le second en bien des points déjà. Je cherche depuis quelque temps, mais en vain, à les reproduire. J'ai parcouru les jardins du Midi et de l'Italie à la recherche des soi-disant fameux Bizarria. Je ne parle pas, pour le moment, des autres hybrides ligneux de greffe, beaucoup moins caractéristiques. J'ai dit également en com- mençant qu'il faudrait se remettre à la très vieille question de la contagion de la panachure et conti- nuer l'étude des modifications chimiques qui vient ‘ La variation spécifique dans le greffage (Congrès de Lyon, 1901). ? Quatrième série, t. IX. 1909. hybridation asexuelle ou par D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE ————— d'être si heureusement reprise par M. Guignard. « J'ai étudié jusqu'ici la greffe des plantes her- bacées au point de vue morphologique ; mes essais d'une part, la discussion des résultats obtenus sous ce rapport par Vôüchting, par Daniel lui-même, par Laurent et autres, me conduisent à dire: on n'a pas encore mis en évidence, d’une facon formelle, l'influence réciproque morphologique et spéeilique du sujet et du greffon chez les plantes herbacées. Rien de plus, rien de moins. « J'ajoute que si, contrairement à ce que je pense, une pareille influence pouvait se manifester chez ces plantes, mes expériences, celles de beau- coup d'autres auteurs, montreraient au moins que l'hybridation asexuelle serait un fait exceptionnel, sans autre importance pratique que celle de donner, très rarement, des types nouveaux, bons où mau- vais, sur lesquels la culture aurait à se prononcer. Or, jusqu'à présent, malgré des promesses déjà vieilles de plus de quinze ans et sans cesse renou- velées, je ne connais dans le commerce aucune graine ou bouture de plante herbacée se rapportant à une variété nouvelle obtenue indubitablement à la suite du greffage. Attendons. » Enfin, dans une récente communication parue sous forme de note dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences {mars 1910), M. Griffon ajoute encore : « Pour ma part, je suis convaincu que, si l’on voulait bien, à propos de chaque cas, faire les dis- tinctions qui viennent d'être envisagées ci-dessus, ne pas tenir compte des expériences et observa- tions fausses ou non démonstratives (et il y en a plus d'une); si l’on voulait bien ne pas généraliser des exceptions et ne parler que de plantes dont on connaît à fond les variations, la culture et les pro- duits, on finirait par se mettre d'accord sur cette question si vivement controversée du greffage. « Quoi qu’il en soit, je puis affirmer qu’au cours de cinq années consécutives de recherches sur les plantes herbacées (Solanées, Légumineuses, Com- posées, Crucifères), avec des milliers de greffes et de témoins, les variations morphologiques et bio- logiques ont été peu nombreuses et pas très mar- quées. En aucun cas, je n'ai observé d'influence spécifique du sujet et du greffon, d’altération des caractères fondamentaux d'espèce ou de variété, d'hybridation asexuelle. » VI. — LA LUTTE CONTRE LA GRÊLE ET LES MOYENS DE DÉFENSE. Il est à peine besoin de dire combien sont désas- treuses les chutes de grêle. Pour la viticulture, notamment, elles constituent un fléau. Non seule- ment les raisins meurtris. déchirés, sont envahis D'AGRONOMIE 191 par la pourrilure, mais encore les sarments sont blessés, se dessèchent, l'aoûtement se fait mal et la récolte suivante est gravement compromise Comment lutter nuages, empêcher la formation même de la grêle ?.. contre la grêle, chasser les On a cru remarquer depuis longtemps que les explosions violentes et répétées exercaient une action sur les nuées, les chassaient ou détermi- naient la chute de pluie, de grésil, d'eau glacée, à la place de la grêle tant redoutée. Vers 1896, des essais faits en Autriche par Stiger parurent con- cluants, el l’on crut pouvoir affirmer que le tir au canon dirigé contre les nuages préservait les ré- coltes en chassant ces nuages, ou en s’opposant à la formation des grélons. Les « tirs contre la grêle » parurent également réussir en Italie, et, dès 1899, on comptait dans ce pays 2.000 stations pourvues de canons spéciaux destinés à produire un ébran- lement des couches d'air, ébranlement capable de prévenir la chute des grêlons. En France, notam- ment dans le Beaujolais, les tirs contre la grêle ont été considérés depuis 1900 comme exerçant une influence mal définie, mais certaine. Aux canons, on a substitué successivement des fusées, des marrons, des bombes, etc. Des sociétés nom- breuses, fondées dans notre pays, ont recueilli des adhésions, des fonds, établi des postes — plus de 6.000 — et organisé la lutte. On compte, d'après. M. Guillon ‘ : 261 Sociétés employant des fusées. 65 — — des canons. A4. _ — = des bombes ou pétards. 268 — — à la fois ces divers engins. Quelle est l'efficacité réelle des tirs? Le Service de l'Hydraulique et des Améliorations agricoles du Ministère de l'Agriculture a constitué une Commis- sion d’études scientifiques qui a précisément pour rôle de résoudre ce problème. Le président d'une section spéciale de cette Commission, M. Violle, professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, s'est occupé de préciser l’action des différents engins. Dans une communication faite à l'Acadé- mie des Sciences en 1908 (2 mars), il rendait compte de ses expériences : « J'ai poursuivi, disait-il, les recherches entre- prises avec les engins grélifuges. L'action d'un engin peut être considérée soit au point de vue mécanique, soit au point de vue électrique. « Dans certains cas paraît se produire un effet mé- canique analogue à celui du vent. M. Léger, insti- tuteur à Fontaines (Saône-et-Loire), m'écrit que, il y à quelques années, étant à Varennes-le-Grand en promenade avec des parents sur la grand'route, 1 Voir l'étude publiée par cet auteur dans la Æevue de Viticulture, 26 mai 1910. 192 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE d'un point élevé il vit, du côté de Saint-Genoux, un orage se dirigeant vers Tournus. Quelques minutes après, il entendles tirs de Tournus et des environs. Immédiatement le nuage s'arrête, semble hésiter, puis il prend la direction de Varennes, marchant sur eux à grande vitesse. Effrayés, ils se sauventen courant vers leur maison et, bien qu'elle füt dix fois plus près d'eux que ne l'était alors l'orage, ils étaient à peine arrivés que la grêle tombait en abondante sur Varennes où, dit-il, il ne grélait presque jamais jadis, tandis que Tournus était éprouvé presque tous les ans. « Je pourrais citer d’autres faits semblables, voire mème des réclamations de propriétaires se préten- dant lésés par des tirs qui auraient envoyé des orages sur leurs terres. Toutefois, cet effet méca- nique du tir n'est possible que par temps calme, et, en tous cas, il n'amènerait qu'un déplacement et non la suppression de la grêle. Je sais bien qu'on a attribué aux engins grélifuges, particulièrement au « Lore » gazeux ou fumeux lancé par le canon, une action mécanique spéciale, d'autant plus efficace que plus mystérieuse, vu surtout la disproportion des masses en présence. « Ainsi que je lai déjà dit, je serais plutôt porté à considérer les tirs comme formant en quelque sorte des paralonnerres constitués essentiellement par une colonne verticale de gaz chauds et ionisés, ou par une masse de tels gaz produite au sein même du nuage. « De toutes façons, il importe d'abord de savoir : d'une part, la hauteur à laquelle se trouvent les nuages orageux ; d'autre part, celle qu'atteignent les engins. » Tout dernièrement, M. Ch. André, directeur de l'Observatoire de Lyon, dans une autre communi- cation à l'Académie des Sciences (séance du 25 avril 1910), concluait, au contraire, à l’ineffica- cité des tirs contre la grêle. Peu de temps après, M. Violle montrait que les chiffres cités par M. André n'avaient pas été inter- prétés comme il le fallait, et il signalait les résul- tats obtenus par le Syndicat du Beaujolais. Pour seize communes témoins dans lesquelles la défense avait été organisée, le total des pertes, de 1901 à 1909, ne s'était élevé qu'à 2.700.000 francs, tandis qu'il atteignait 23 milllons pendant les dix années précédentes, alors que les tirs n’avaient pas eu lieu. M. Violle disait en terminant: « Pendant six années (1901-1906), les dégâts sur le champ de tir considéré ont été les 0,24 de ce qu'ils étaient antérieurement. Dans tout le départe- ment (du Rhône), pendant le même temps, ils ont été les /,76 de ce qu'ils avaient été dans les vingt années précédentes. « Il serait imprudent de tirer de ces nombres aucune conclusion formelle. Peut-être, cependant, y trouvera-t-0n quelque sujet d'encouragement. « Nous devons souhaiter qu'une expérience qui à déjà coùlé tant d'efforts généreux ne soit pas arrêtée par certaines divergences d'interprétation el qu'elle se poursuive encore assez longtemps pour aider à la manifestation de la vérité. » De son côté, M. Guillon, directeur de la Station viticole de Cognac, conclut ainsi en terminant une étude sur cette question si controversée : « Chaque année je me trouve, toujours à des époques où la période est dangereuse, sur les con- fins du Beaujolais, dans le vignoble de la Côte, au bord de la plaine de Roanne. Les vignes placées sur le flanc des coteaux que dominent les mon- lagnes granitiques de la Madeleine sont très sujettes à la grêle. Dès que le temps est orageux, canons et fusées sont employés concurremment. J'ai bien des fois été surpris par l'effet salutaire que produisent les fusées sur les nuages menacants. Malheureuse- ment, les phénomènes se succèdent avec une telle rapidité et à une telle distance qu'il est bien diffi- cile d'être absolument affirmatif sur la part exacte qu'on doit attribuer aux engins grélifuges. Ce qui m'a toujours frappé, c'est la confiance de tous les viticulteurs, qui ne poursuivraient certainement pas la lutte s'ils ne se croyaient pas certains d'obtenir un résultat pratique. Il faut donc les encourager à poursuivre leurs recherches, comme le fait le Mi- nistère de l'Agriculture. Tous ceux qui ne sont pas prévenus peuvent s'associer aux observations très sages qu'ont présentées MM. Chatillon et B. Blane, dans leur dernier Rapport à la Société régionale de Viticulture de Lyon: « Nous pensons toujours quele difficile problème de l'efficacité du tir n'est point encore résolu. Nous admettons que nos expériences n'ont pas assez duré et nous demandons seulement qu'on nous fasse crédit pendant quelques années encore. Qu'on nous prenne au sérieux, que les savants soient moins méfiants, qu'ils contrôlent nos expériences, et que tous ceux qui ne sont point de parti pris s'inclinent un jour devant l'évidence des faits, en tenant compte des résultats, quels qu'ils soient, que nous aurons mélhodiquement et pa- tiemment recherchés. » D. Zolla, Laurét de l'Institut, Professeur à l'Ecole Nationale d'Agriculture de Grignon et à l'Ecole Supérieure d'Agriculture coloniale. ‘ Revue de Viticulture, n° 858, 26 mai 1910. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Salet (P.), Aide-astronome à l'Observatoire de Paris. — Sur l'étude de la Polarisation en Astronomie. (Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris pour obtenir le grade de Docteur ès Sciences phy- siques.) Gauthier- Villars. Paris, 1910. La thèse de M. Salet est un exposé d'ensemble des applications auxquelles peut donner lieu l'emploi de la lumière polarisée en Astronomie. C'est un véritable traité dont chaque chapitre débute par un historique de la question, suivi d’une partie théorique et änaly- tique, et par les recherches personnelles de l'auteur qui apportent à celle-ci, le plus souvent, un contrôle ou une vérification intéressante, ou une solution nou- velle. Débutant par la polarisation atmosphérique, M. Salet est amené à présenter une méthode permet- tant d'augmenter la visibilité des étoiles en plein jour et d'améliorer les observations méridiennes pour la détermination des latitudes, en éteignant la lumière polarisée de l'atmosphère par un nicol. Après avoir développé la théorie de l’oculaire polarisant, il est amené à examiner comment varie la sensibilité de l'œil quand le diamètre de la tache produite sur la rétine diminue, et il conclut, contrairement à l'opi- nion d'Arago, que la valeur de la sensibilité de l'œil déduite des mesures photométriques ne s'applique pas aux objets très petits : l'œil serait environ cin- quante fois moins sensible quand la source a un dia- mètre très petit. [l trouve, d'autre part, que, dans les conditions les plus favorables, un instrument armé d'un nicol est supérieur à un instrument d'ouverture double. Cette conclusion est appuyée sur des vérifications expérimentales, notamment en observant facilement la polaire à deux heures trente minutes de l’après- midi, alors qu'on la soupçonnait à peine sans nicol, et même des étoiles de grandeur 5,3 comme 1 Céphée. On peut aussi augmenter la visibilité des étoiles en plein jour en se servant d’un verre rouge, car la lumière du ciel est surtout riche en rayons de courte RARE d'onde, et l’auteur déduit de la théorie de Rayleigh que le rapport de l'intensité de l'étoile à celle du fond du ciel est à peu près doublé par ce moyen. L'emploi du nicol augmente l'intensité relative de la raie verte 5570 attribuée au krypton dans les aurores polaires, dont la lumière n’est pas polarisée; on pourra donc en profiter pour déterminer l'heure du maximum diurne de fréquence des aurores, et con- trôler les relations de celle-ci avec les différentes variations météorologiques. M. Salet a étudié la polari- sation atmosphérique pendant l’éclipse du 30 août 1905, en employant deux polariscopes de Savart fixés sur le corps même d’une lunette équatoriale; il a constaté que la lumière du ciel était polarisée dans le voisinage du Soleil, le plan de polarisation étant vertical ou horizontal. A propos de cette même éclipse, il a indiqué une méthode nouvelle pour la mesure de la hauteur de l'atmosphère. Dans le chapitre consacré au Soleil, M. Salet rap- pelle que, dès 1905, il avait avancé que le Soleil devait avoir un champ magnétique dirigé à peu près suivant son axe et produit par la rotation des particules élec- trisées qui l'entourent. Cette hypothèse a été confirmée par la découverte de Hale de l'effet Zeeman dans le spectre des taches, en prouvant l’électrisation de la surface du Soleil. M. Salet cherche à évaluer la gran- deur du champ solaire d’après la valeur de celui des REVUE GÉNÉRAIF DES SCIENCES, 1910, ET INDEX taches mesuré par Hale, et il la trouve au moins de dix fois le champ terrestre. La troisième partie traite de la polarisation de la couronne solaire et des protubérances; après avoi fourni un intéressant exposé de la théorie de la pola- risation coronale, M. Salet donne les résultats des études qu'il a faites au moyen du polariscope de Savart lors de l’éclipse du 30 août 1905. Il a reconnu que la polarisation est maxima à quelques minutes du bord, et s'étend sur la couronne intérieure en dimi- nuant d'intensité jusqu'au bord même de la Lune, où elle est faible, mais nettement visible; une position favorable d'une protubérance a permis d'établir que la lumière des protubérances n'est pas polarisée. Certaines contradictions observées entre la polari- sation de la lumière de la couronne intérieure et l'apparence continue de son spectre, l'absence de raies de Frauenhofer, et la position du maximum d'intensité, ne paraissent pouvoir être expliquées que par la théorie de Wood, qui suppose que la lumière de la couronne serait due à des vapeurs métalliques rendues fluorescentes par le rayonnement solaire. On aurait ainsi des spectres de bandes superposées et donnant une apparence continue; la raie verte du coronium serait, en réalité, une ligne de fluorescence d'une substance connue. Or, les vapeurs fluorescentes mé- talliques fournissent de la lumière polarisée, et dans les mêmes proportions que celle de la couronne. Les observations de M. Salet peuvent être considérées comme un appui donné à cette théorie. L'auteur pro- pose ensuite d’éteindre, en plaçant un nicol devant la fente du spectroscope, la lumière polarisée du fond continu : les raies brillantes seront plus visibles et l'on peut espérer y trouver des radiations nouvelles. Dans le quatrième chapitre est discutée la théorie ionistique des queues cométaires, et les conclusions de l’auteur sur la valeur du champ magnétique so- laire confirment cette explication de l'orientation électrostatique des particules constituant la queue des comètes. La dernière partie est une critique, bien suivie, de la question de la polarisation par réflexion à la surface des planètes : elle montre toute l'incertitude des con- clusions généralement admises. La thèse de M. Salet est fort intéressante, riche en documents, auxquels elle ajoute un certain nombre de méthodes ou d'observations nouvelles. Elle trace le programme d'importantes recherches pour l'avenir, et nous formons le vœu de les voir accomplir par l’auteur à l'occasion des prochaines éclipses. A. DE GRAMONT, Docteur ès sciences. 2° Sciences physiques Barbillion (L.), Professeur à la Faculté des Sciences, Directeur de l'Institut électrotechnique de Grenoble, et Ferroux (G.), /Zngénieur, chargé de Cours à cet Institut. — Les Compteurs électriques à courants continus et à courants alternatifs. — Un vol. in-24 de 226 pages avec 126 figures. (Prix : 3 fr. 25.) Gau- thier- Villars, éditeur. Paris, 1910. La multiplicité des systèmes de compteurs électriques fait que l'étude de ces appareils constitue maintenant une véritable branche de la science électrique. M. Bar- billion, aidé de la collaboration de M. Ferroux, étudie avec soin les types les plus récents, négligeant ceux qui, selon sa propre expression, «vont orner les vitrines des musées rétrospectifs ». C'est une étude conscien- 18** 2] 794 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX cieuse, et l'actualité du sujet, la compétence des auteurs sont, pour ce petit ouvrage, des garants de succès. G. DE LAMARCODIE, , Ancien Elève de l'Ecéle Polytechnique, Professeur à l'École d'Electricité et de Mécanique industrielle. Bohm (D: C.R.).— Die Fabrikation der Glühkôrper für Gasglühlicht. (La FABRICATION DES MANCHONS A IN- CANDKSCENCE.) — 1 ol. in-8° de 454 pages avec 431 fig. (Prix : 27 fr, 50.) Wilhelm Knapp, éditeur. Halle a. S., 1910. Pour le profane, rien ne paraît plus simple que la pré- paration du manchon éclairant, et quelques pages suffiraient, semble-t-il, pour décrire cette industrie. L'important livre du Dr Bühm sur la fabrication des manchons à incandestence nous révèle, au contraire, dans le développement rapide d'une industrie née d'hier, les efforts àes chercheurs, savants et industriels. Grâce à la documentation remarquable de ce bel ou- vrage, nous pouvons voir quels progrès ont été réalisés dans l'élaboration des matières premières : nitrates de thorium, de cérium, de glucinium; dans le traitement des textiles : coton, ramie, soie artificielle, amiante. Le tissage des tissus, leur lavage, leur imprégnation, sont traités dans les chapitres suivants. Il convient de signaler en particulier l'étude des différents oxydes au point de vue de leur action sur le pouvoir éclairant des manchons, la fabrication des anneaux de magnésie, la comparaison entre les différents modes de calcination et surtout la transformation automatique des manchons imprégnés et séchés en manchons collodionnés prêts à être livrés au consommateur. La description du labo- ratoire nécessaire pour l'examen des matières pre- mières et des produits fabriqués termine cet ouvrage, qui rendra les plus grands services à l’industrie de l'in- candescence. BON: Douzal (Etienne), /ngénieur de la Société FOxy-élec- trique. — Production électrique de 1Ozone et applications à l’industrie, l'hygiène, la thérapeu- tique. — 1 vol. 1n-8° de 115 pages avec 52 figures. (Prix : 45 fr.) Béranger, éditeur. Paris et Liége, 1910. Cette monographie, très claire et complète à beau- coup d'égards, des propriétés de l'ozone et de ses divers modes de préparation a évidemment pour prin- cipal objectif de faire connaître les appareils de l’auteur. En effet, les seuls producteurs électriques de l'ozone qui soient décrits sont ceux de M. Douzal. Ce sont peut-être les meilleurs, mais il eût été plus scien- üfique, peut-être même plus habile, de décrire d'autres appareils électriques. L'ozone a des propriétés stérilisantes de premier ordre, c'est incontestable; mais ce qui surprendra peut-être les chimistes, c'est d'apprendre que «les car- bonates et les sulfates alcalino-terreux, qui rendent l’eau lourde et indigeste, sont partiellement précipités par l'ozone »! L'ozone est à peu près le seul stérilisateur qui ne laisse pas de sous-produits derrière lui, ce qui lui con- fère des avantages énormes. Mais il ne faut pas en con- clure qu'en agissant sur le lait il n’a d'effet que sur les toxines microbiennes et qu'il n’agit pas sur la com- position du lait (p. 105), dont, au contraire, il détruit les diastases réductrices. A. HozLann, Docteur ès sciences. 3° Sciences naturelles Duc d'Orléans, — Croisière océanographique accomplie à bord de la Belgica dans la mer du Grônland (1905). — 4 vol. grand in-8° de 573 pages, accompagné de 80 planches, Imprimerie scientifique Charles Bulens, éditeur. Bruxelles, 4907 (distribué fin 1909); Ce superbe volume, accompagné de nombreuses cartes et illustrations documeñtaires d’une exécution parfaite, renferme l'exposé des résultats scientifiques de l'expédition entreprise en 1905 par le duc d'Orléans à bord de la Belgica, dans la mer du Grünland. Grâce à un état des glaces très favorable, cette expé- dition put explorer une région demeurée jusque-là impé- nétrable, À une latitude à laquelle elle n’avait jamais été franchie (76° de latitude), la Belgica réussit à traverser la banquise qui couvre la partie occidentale de l'océan ouvert entre le Spitsberg et le Grünland, et parvint ensuite, le long de la côte orientale de cette dernière terre, à 167 milles au delà du point extrême précé- demment atteintvers le nord par une expédition seien- tifique à bord d'un navire. Pendant cette croisière, les travaux scientifiques ont été effectués par des océanographes expérimentés: le commandant A. de Gerlache, le savant explorateur des régions antarctiques, et M. Einar Koefoed, attaché à la Direction des Pêcheries de Noryège; puis, au retour, les collections ont été étudiées et mises en œuvre par des spécialistes dont le nom fait autorité. Dans ces condi- tions, la Croisière océanographique dans Ja mer du Grônland, publiée grâce à la libéralité du duc d'Orléans, constitue un document scientifique de premier ordre. Ce volume comprend onze Mémoires : 4° /?elation suc- cinete du voyage, par M. A. de Gerlache; 2° Extraits du journal de bord, coordonnés par M. A. de Gerlache; 3° Cartes synoptiques du temps pour la période juillet et août 1905, dressées par M. le D' Dan la Cour, chef du Service du temps à l'Institut météorologique de Dane- mark; 4° Géologie, par M. O0. B. Bôggild, du Musée minéralogique de Copenhague; #° Botanique, par M. le Dr C. H. Ostenfeld, inspecteur du Musée botanique de l'Université de Copenhague; 6° Journal des stations, Compte rendu par station des observations océanogra- phiques ; 7 Hydrographie, par MM. B. Helland-Hansen, directeur de la Station biologique de Bergen, et Einar Koefoed ; 8° Le plaukton de la mer du Gronland, par M. D. Damas, uttaché à la Direction des Pêcheries de Norvège, et E. Koefoed; 9 J7eduses, par le Professeur C. Hartlaub, de la Station biologique d'Helgoland; 10° Poissons, par M. Einar Koefoed ; 11° /nyertébrés du fond, par M.J. Greig, conservateur au Musée de Bergen. Signalons, dans la partie météorologique, une très heureuse innovation. Au lieu de publier simplement lesobservations exécutées pendantl'expédition, comme on le fait généralement, le D' Dan la Cour a eu Fexcel- lente idée de les employer concurremment avec celles d’autres navires et de stations fixes à dresser des cartes synoptiques du temps durant la croisière. Grâce à ces graphiques, il devient possible d'étudier les relations si intéressantes qui lient les variations atmosphériques dans la zone arctique à celles qui se produisent simul- tanément dans le nord-ouest de l'Europe, et leur étude permet d'acquérir une connaissance plus complète du temps dans les régions considérées. Les chapitres consacrés à l'Océanographie constituent le morceau capital de l'ouvrage. A la mer, les opérations et, au retour, toutes les analyses d'échantillons ont été conduitessuivantles méthodes employéesparle Conseil permanent interuational pour l'exploration de la mer. De cette décision on ne saurait trop louer l'état-major scientifique de la Belgica. En Océanographie, comme en Météorologie, on ne peut espérer arriver à la con- naissance des lois de la circulation qu'en réunissant le plus grand nombre possible d'observations compa- rables entre elles, c'est-à-dire exécutées suivant les mêmes règles. Le Mémoire de MM. Helland-Hansen et Koefoed met en évidence ce fait très important, à sayoir que la topo- graphie sous-marine exerce une influence considérable sur les conditions océanographiques au nord du 75° de latitude. Dans cette région, d’après les observations de la Belgica, l'étendue du courant polaire qui longe la côte orientale du Grünland paraît, en effet, comman- dée par les dimensions du plateau continental de cette terre. Sur ce socle, au nord du 75° parallèle, la salinité à la surface a été partout trouvée inférieure BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 195 à 32 9/60, tandis qu'au-dessus des fosses ouvertes, plus à l'est, elle est supérieure à cette valeur, Pareillement, à toutes les stations faites sur le plateau, la téempéra- ture, à la profondeur de 50 mètres, était sensiblement inférieure à 0, alors qu'à l'ést elle était plus élevée. Par suite, en dernière analyse, la position de la limite de la banquise polaire que véhicule le courant de la côte orientale de Grünland se trouve déterminée par le relief sous-marin, tandis que l'étendue de la nappe de « glace de baie »' qui la précède du côté de l'est dépend de conditions différentes. Sur l’autre rive de la mer du Giünland, c'est-à-dire le long du Spitsberg, on rencontre une large zone d'eaux atlantiques, en d’autres termes, d'eaux possédant une salinité supérieure à 35 °/«. Suivant vers le nord le plateau continental du Spitsberg, ce courant se partage, vers %89-799 de latitude, en plusieurs branches; une première dérive vers l'ouest et le sud-ouest, une seconde parait filer vers le nord-ouest, le reste pénètre dans le bassin polaire en contournant la pointe nord-ouest de l'archipel. Entre ces deux nappes d'eaux polaires et atlantiques s’écoulant en sens inverse l’une de l'autre le long des bords ouest et est de la mer du Grünland, la partie centrale de ce bassin océanique parait soumise à la sur- facé à un ou plusieurs circuits tourbillonnaires. La profonde indentation ouverte, vers l’ouest, que présente au nord de Jan-Mayen, vers 75° de latitude, la nappe de « glace de baie », en avant de la grande banquise polaire, serait engendrée par un de ces circuits cyclo- niques. En dessous de là nappe superficielle, qui estalfectée de température négative sur tout le profil en large de la mer du Grünland tracé par la Belgica, sauf dans le voisinage immédiat du Spitsberg (voir la pl. LXVI), on rencontre d'abord une couche d'eau, épaisse par endroits de plusieurs centaines de mètres, caractérisée par des températures positives et des salinités supé- rieures à 34 0°), et, plus bas, l «eau de fond » à tem- péralure négative et à salinité élevée (34,92 9/60). D'après MM. Helland-Hansen et Koefoed, la « couche intermédiaire à température positive » serait composée d'eaux atlantiques, diluées d’abord au cours de leur passage à travers la mer de Norvège, où elles se sont mélangées à les eaux de précipilalion et ensuite dans la mer du Grünland, au contact du courant polaire. Quant à | « eau de fond », elle serait formée d'eaux superficielles, de salinité voisine de 34,9 °/44, refroidies pendant l'hiver et qui, en raison de l’augmentation de densité qu’elles éprouvent par suite de ce refroidisse- ment, sont tombées au fond. Une des questions les plus intéressantes qui se rat- tachent à l'exploration de la mer du Grünland est celle du seuil sous-marin, que Nansen suppose exister entre le Spitsberg et le Grünland. L'expédition du duc d'Orléans n'a pu sonder dans cette région; toutefois la discussion des observalions océanographiques conduit MM. Helland-Hansen et Koelfoed à croire qu'à cette latilude une crèle sous-marine sépare la mer du Grünland du bassin polaire, laquelle serait située entre 300 et 800 mètres de profondeur. Cet ouvrage est non seulement un document très important, mais encore un livre d'éducation scienti- fique. Il initiera, en elfét, aux méthodes actuelles de l'Océanographielesuaturalistes français qu'attire l'étude de la mer et qui trop souvent paräissent iguorer les idées directrices de cette science telles qu'elles sont accéptées par l'unanimité des océanographes élrangers. A l'œuvre accomplie par les savants de la Belgica, Nansen a d'ailleurs rendu un éclatant hommage. « Leurs observalions, écril ce maitre incontesté, sont les plus précises qui aient jatnais été efféctuées dans n'importe quelle partie de l'Océan. Parsuite, la portion de là mer du ‘ Glace beaucoup moins épaisse que la glace polaire, et généralement plate, Elle se forme en hiver sui la mer du Grônland, Grônland, précédemment complètement inconnue, qui a été explorée par cette expédition, est-elle celle pour laquelle nous possédons aujourd'hui les observations les plus exactes et les plus dignes de confiance, et est- elle devenue la mieux connue, » Cannes Ravor, 4’ Sciences médicales Martinet (D' Alfred), Ancien Interne des Hôpitaux de Paris. — Thérapeutique usuelle des Maladies de l'appareil respiratoire.—1 vo]. 11-16 de 296 payes avec 36 figures. (Prix : 3 fr. 50.) Masson et Cie, édi- leurs. Paris, 1910. Le livre que vient de faire paraître M. le D' Martinet constitue un excellent exposé des connaissances ac- tuelles les plus pratiques concernant le traitement des affections de l'appareil respiratoire. C'est un guide précieux permettant au praticien de ne point s'égarer dans le dédalé des multiples médications proposées pour la cure de ces maladies. Sous une forme claire, précise, dépouillée de toute prolixilé oiseuse, ce livre intéresse non seulement par ses très utiles indica- tions thérapeutiques, mais encore par la forme rai- sonnée et scientilique qui préside au choix de celles-ci. Toutes les données y sont classées avec beaucoup d'ordre, c'est ainsi que l’auteur étudie méthodique- ment le traitement des différentes variétés de bron- chites, de l'emphysème, de l’asthme, de la pneumonie, de la tuberculose pulmonaire, de la coqueluche, des pleurésies, et des congestions pulmonaires. Chacun de ces chapitres est traité avec tout le développement scientifique désirable; poussant aussi loin que pos- sible — sans dépasser les limites d'une brièveté voulue — l’exposé des diverses méthodes curatives, tout en les accompagnant des considérations physio- logiques, éliologiques el anatomo-pathologiques né- céssaires, l’auteur fournit un ensemble de renseigne- ments thérapeutiques vraiment utiles, et dont la connaissance est précieuse pour le médecin praticien. Thérapeutique médicamenteuse, thérapeutique p y- sique, thérapeutique chirurgicale, chacune y a la part qui lui revient et clairement discutée, Mentionnons surtout le chapitre de la tuberculose pulmonaire auquel le D° Martinet à donné, en raison de l’impor- tance capitale de cette affection, un très grand déve- loppement. Outre les diverses méthodes curatives médicamenteuses généralement employées, l'auteur y traite la question des sanatoriums, la elimatothérapie, Jes différents régimes propres aux tubereuleux, la zomothérapie, la cure de reminéralisation, etc. Nous regrettons cependant qu'il n'ait pas accordé une place, si minime füt-elle, à la question du traitement de la tuberculose pulmonaire par les tubereulines, ou pro- duits provenant du bacille tuberculeux. Partant du principe qu'il n'existe pas encore, à l'heure actuelle, de traitement spécifique de la tuberculose pulmonaire, l’auteur ne parle pas de ce genre de cure; et cepen- dänt on né peut nier que certaines tuberculines ont donné des résultats nettement favorables, voire même la guérison de certains cas de tuberculose pulmo- naire. En admettant que cette cure ne constitue pas uñ träitement spécifique, il eût été toutefois utile pour le praticien de trouver exposé dans ce chapitre un plan, un schéma indiquant la marche à suivre pour instituer une cure par la tuberculine. Cette petite réserve faite, nous ne pouvons qu'ap- prouver hautement le livre du D' Martinet; les diverses formules officinales y sont largement représentées et le médecin peut facilement faire un choix judicieux. L'ou- yräge se termine par un chapitre spécial, dù au Dr P. Desfosses, consacré à la gymnastique respiratoire, méthode importante et qui peut être d’un grand secours 1 B. HezLano-Hawxsen and Frintior NansEN : The Norwegian Sea. Its Physical Oceanography based upon the Norwegian Researches, 1900-1904, Bergen, 1909, p. 22. 796 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX dans le traitement des maladies du poumon. On y trou- vera avec plaisir ce qui concerne les indications de celte gymnastique, ses bases physiologiques, ainsi que les différentes manières de réaliser cette méthode : autant de données utiles que les grands traités de Thérapeutique passent trop souvent sous silence, et qui se trouvent ici développées clairement, tant par le texte que par des figures très démonstratives. Dr J. MEURICE, Assistant à l'Université de Gand. 5° Sciences diverses James (William), Professeur à l Université Harvard. — Philosophie de l'Expérience. Traduit par MM. E. Le Brun et M. Paris. — { vol. in-12 de 368 pages de la Bibliothèque de Philosophie scienti- fique. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1910. Sous ce titre inexact vient de paraître, agréablement traduit, le dernier ouvrage de l'illustre philosophe américain dont nous déplorons aujourd'hui la mort: le Pluralisme, de William James. Il est destiné à com- battre le monisme, particulièrement le monisme idéaliste, et à instaurer une nouvelle métaphysique qui, fondée sur un «empirisme radical », refuse de synthétiser en un unique absolu les réalités ondoyantes et diverses que nous fournit l'expérience. « Chaque système, dit James, est la vision qu'impose à un homme son caractère complet, son expérience complète » : le matérialisme serait le fruit d'un tem- pérament railleur, n'éprouvant pas le besoin de vivre intimement avec les choses, les considérant du dehors; — le théisme populaire, qui conçoit un Dieu sur le modèle de l'homme, est le fruit d’un tempérament sentimental; mais il réussit mal à faire communier les êtres, puisque son Dieu transcendant est extérieur au moi;— le monisme idéaliste y réussit mieux, puisque l’absolu, dans celte philosophie, est la seule réalité, les êtres individuels n'étant que des pensées de Dieu. — Mais cette doctrine est insoutenable. De cet Absolu on ne peut rien dire; il est si vide, si abstrait, qu'on ne reconnait en lui aucune des réalités qui, suivant ses partisans, lui seraient immanentes. En outre, cette doctrine conduit à d’inextricables diffi- cultés : d'où viennent les individualités? d'où vient l'erreur? le mal? Quel malheureux sort que celui de ce pauvre Absolu, dont la pensée doit être chargée de toutes nos puérilités, de tous nos sophismes! — Or, cette doctrine repose sur un postulat qui est le postulat commun de toute doctrine intellectualiste : la connais- sance sensible est fausse, parce qu'elle est contra- dictoire; le changement, qu'elle nous révèle, est une absurdité; il n'y a de logique que l'identique et le permanent : une chose est ce qu'elle est et ne peut pas être autre. « L'homme est homme, le raisonnable est raisonnable. » Voilà tout ce qu'on peut dire, sans ajouter : « L'homme est raisonnable », proposition qui tendrait à identifier des contraires! — Mais ce postulat, continue James, ne peut pas tenir contre les données immédiates de l'expérience; toute la logique s'écroule devant la réalité. Chaque chose est à la fois elle-même et autre chose. À la place de la discontinuité immobile que présentent les concepts, il y a, dans le monde réel, une continuité changeante que nous fournit l'expérience pure; les conjonctions sont données comme les disjonctions, les relations comme les termes. Dès lors, inutile de nier la multiplicité et le changement, de tout réduire à un unique Absolu. Tenons-nous-en, comme Bergson, au donné; négli- geons les concepts, utiles pour la pratique, mais impuissants à nous faire connaitre le réel: le réel, c’est l'intuition seule qui peut nous le faire saisir. Ne concevons pas le monde comme un système clos, où régnerait un inflexible déterminisme, régi par la loi de la conservation de l'énergie; l'Univers est une chaîne d'éléments multiples, en nombre indéterminé, où la contingence peut régner. Ne concevons pas Dieu comme l'Absolu, mais comme la conscience surhumaine, mais finie, qui embrasse en elle nos con- sciences, de même que notre conscience embrasse en elle des pensées qui conservent leur individualité. Les dédoublements de personnalité, les phénomènes spi- rites, diverses « expériences religieuses » rendent vraisemblable cette hypothèse d'une conscience surhumaine. Cela suffit. L'originalité de W. James consiste à refuser, pour la métaphysique religieuse dont il est l’adepte, le concours ordinaire du rationalisme, et à lui amener un allié imprévu dans la personne de son adversaire traditionnel, l'empirisme. L'Absolu des rationalistes est l'ennemi de Dieu; ceux qui sont ivres de Dieu sont des athées, voilà le paradoxe de James; Dieu n’est pas l'Absolu; Dieu est fini, Dieu ne se prouve pas par une dialectique conceptuelle; il relève de l'expérience. Nous ne nous insurgerons pas contre le traitement ironique et sévère que James fait subir à l’idéalisme moniste des Hégéliens, de Green, de Bradley ou de Royce. Mais, voulant leur porter des coups décisifs, James s'attaque au rationalisme tout entier, à Socrate et à Platon comme à Descartes, à Leibniz ou à Hegel. A-t-il été bien inspiré en portant la guerre sur un si vaste terrain? A-t-il le droit de dire que toute philo- sophie intellectualiste supprime !e changernent? nie le multiple? refuse de reconnaitre des relations entre les concepts? L’effort d'un Aristote ou d'un Leibniz n'est-il pas, au contraire, de prendre pour donné le changement et d’en tenter l'explication? La logique classique a beaucoup plus de souplesse que ne l’ima- gine W. James. C'est seulement chez les sophistes ou les éristiques (abstraction faite des hégéliens contem- porains) qu'on trouve ces affirmations singulières « L'homme est homme », « le blanc est blanc »; impossible de dire : « l’homme est blanc ». Précisé- ment, parce qu'il affirme qu’ «une chose est ce qu’elle est en même temps et sous le même rapport », le prin- cipe d'identité entend réserver la possibilité de l’alté- ration, de la complexité, la possibilité d’être autre sous un autre rapport. Par une étrange méprise, lames voil dans cette formule un principe d'inertie et de mort. C'est le contraire de la vérité. Les concepts ne sont pas des essences fermées et séparées les unes des autres par des abimes. C'est une caricature de la logique conceptuelle que James s’est amusé à peindre et à railler. Inversement, on demeure surpris de voir un savant aussi méthodique conserver pour l'intuition brute, la donnée immédiate, tant de confiance. M. Bergson n'accorde cette confiance qu'aux données immédiates de la conscience, et prend des précautions pour s'as- surer de leur valeur; il sait que le corps 2st un ims- trument d'erreur, ou tout au moins de partialité et d'oubli. James, au contraire, a confiance dans la sen- sation physique comme dans l'intuition psychologique; il a confiance dans ces « expériences religieuses » qu'il nous à jadis longuement décrites, sans pouvoir nous convaincre qu'elles ne sont pas de simples hallucina- tions. Bref, quel que soit le jugement qu'on porte sur l'idéalisme moniste de Green, Bradley ou Royce, il ne semble pas qu'on doive nécessairement abandonner la méthode intellectualiste pour l'intuitionnisme sans critique de William James. Se ralliera-t-on à son plu- ralisme? Admettra-t-on son Dieu fini? son monde ouvert sinon à toute nouveauté et à tout hasard, du moins à des créations et à des révolutions inexplica- bles? Il nous semble, en tout cas, que ces diverses assertions auraient besoin de preuves plus solides que celles que nous apporte notre auteur. Pauz LaApie. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 197 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1°" Août 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Th. de Donder présente ses recherches sur le théorème de Poisson et sur les invariants différentiels de Lie. — M. Paul Lévy étudie quelques équations délinissant des fonctions de lignes. — M. H. Bohr démontre plusieurs théorèmes sur la convergence des séries de Dirichlet. — M. A. Sainte-Laguë : La représentation proportionnelle et la méthode des, moindres carrés. La /evue publiera prochainement un article de l'auteur sur cette ques- tion. — MM. E. M. Antoniadi, F. Baldet et F. Qué- nisset communiquent leurs observations de l’occulta- tion de n Gémeaux par la planète Vénus faites à l'Obser- vatoire de Juvisy. La variation d'éclat de l'étoile s'explique le mieux en supposant que sa lumière à été absorbée en traversant l'atmosphère de la planète. — M. Coggia adresse l'observation de la même occulta- tion, faite à l'Observatoire de Marseiile. — M. J. Comas Sola signale la découverte, le 6 juin, d'une petite planète, présumée nouvelle, dans la région de la comète de Halley. — Le même auteur a étudié une bouffée émise par la comète de Halley les 6 et 7 juin; son accélération augmentait à mesure qu'elle s'éloi- gnait du noyau, ce qui peut s'expliquer par l’accroisse- ment de la surface exposée à la force répulsive solaire. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. E. Bouty présente un Rapport sur un mémoire de M. Schwoerer relatif aux phénomènes thermiques de l'atmosphère. L'auteur y montre surtout le rôle essentiel joué par la vapeur d’eau dans l'équilibre adiabatique de l'atmosphère. Par l'étude de la détente sèche, il arrive à la valeur 431,97 kilogrammètres pour l'équivalent mécanique de la grande calorie. — M. B. Brunhes a étudié les cou- rants telluriques entre des points situés à différentes profondeurs dans le sol. Il a trouvé, dans un puits de mines à Messeix, entre les niveaux 54 et 150, un point qui est au même potentiel que la surface du sol et, entre ce point el la surface, un point correspondant à un minimum de potentiel. — M. G. Gaiffe décrit un procédé de radiographie stéréoscopique et cinémato- graphique qui consiste à photographier des écrans phosphorescents sous l'action des rayons X et donnant des rayons violets au lieu de faire agir directement les rayons X sur la plaque photographique. — M. W. Duane a reconnu que, dans un mélange de radium et d'un sel phosphorescent, ce dernier ne modifie pas d’une manière appréciable le dégagement de chaleur du radium. — M. H. Leroux à mesuré la chaleur de combustion de quelques dérivés hydronaphtaléniques. Il en déduit que l'addition de H au naphtalène se pro- duit avec un apport d'énergie pour la formation du naphtanetétrène et avec un minimum de dégagement de chaleur pour celle du naphtanediène. — MM. A. Gautier et P. Clausmann ont fait agir des mélanges de CO et H ou de CO et H sur les oxydes de fer ou le fer au rouge; ils ont obtenu de petites quantités d'hydro- carbures, analogues à ceux qui se dégagent des terrains volcaniques. — M. P. Jolibois montre, par les courbes de tension de vapeur et par l'étude des points critiques du phosphore, que le phosphore pyromorphique est stable au-dessous de 450°,le phosphore rouge ordinaire entre 450° et 6109, et que le phosphore blanc est la variété en équilibre au-dessus de 6109. — M. Ed. Chau- venet a constaté que le chlorure de thorium anhydre peut fournir avec AzH* trois séries de combinaisons : 1° des composés d’addition avec #4, 6, 7, 12 et 18 AzH"; 20 des chlorhydrates de thorium-tétramide plus ou moins ammoniés; 3° des composés d'addition des pré- cédents. Seul Th (AzH*Cl)* existe au-dessus de 1209, — M. G. Charpy a reconnu que l'écrouissage préalable du fer augmente dans une très forte proportion la vitesse de cristallisation par recuit. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe ont observé que la thorine, agissant sur un mélange de vapeurs d'un phénol et d'un alcool, produit par catalyse l’oxyde mixte issu de ce phénol et de cet alcool. Il se forme en même temps un peu d'éther-oxyde du phénol. — M. J. B. Senderens à reconnu que le sulfate d'alumine favorise catalytiquement la prépara- tion de l'éthylène par l'action de H*S0* sur l'alcool; cette action catalytique s'étend à la préparation du propylène et de l’isobutylène. — MM. D. Berthelot et H. Gaudechon ont étudié l'action des rayons ultra- violets sur les solutions de divers sucres à 10 °/,. Le glucose donne des volumes sensiblement égaux de CO et de CH; le lévulose donne environ dix fois autant de CO que de CH'. — MM. G. Bertrand et A. Compton ont constaté que la cellase et l'émulsine s'accompagnent en proportions très variables suivant les plantes, ce qui démontre d'une manière très nelte l’individualité de chacune de ces deux diastases. — M. N. A. Barbieri a observé que les corps gras proprement dits peuvent être entièrement enlevés au jaune d'œuf à l'aide de solvants neutres; par saponification, ils donnent seulement la glycérine et les acides gras correspondants. Ils tiennent en solution des principes azotés qui peuvent en être séparés par simple dialyse, sans aucune hydrolyse. Le phosphore n'est pas uni à la glycérine sous forme de lécithine, car il passe à la dialyse. 3° SGiENGES NATURELLES. — M. H. Labbé décrit une auto-observation qui montre qu'en ün temps très court l'ingestion azotée de valeur moyenne peut être abaissée de près de moitié etamenée ainsi à un chiffre bas, voisin du minimum azoté, avec conservation de la santé, du poids et obtention de l'équilibre azoté. — MM. Et. et Edm. Sergent ont reconnu que les canaris acquièrent, après une première infection paludéenne, une immunité relative comme les hommes paludéens. IL est possible d'éviter les risques que fait courir l'infec- tion primitive inoculée par la trompe des moustiques en inoculant aux sujets des sporozoïtes conservés in vitro. L'infection vaccinante est alots très faible ou nulle. — M. A. Piédallu à découvert dans le tannage à l'huile une nouvelle moisissure, différente du A/onascus purpureus et du M. Barkeri, à laquelle il donne le nom de 47. olei. Séance du 8 Août 1910. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M.G. Darmois présente ses recherches sur les correspondances à normales concourantes et énonce le théorème suivant : Quand un segment My», de longueur constante, se déplace de facon que les surfaces trajectoires des points M et m aient leurs normales qui concourent en un pointw, les surfaces trajectoires de tous les points de la droite Mm ont leurs normales qui concourent en w. — M. H. Larose étudie au point de vue mathématique le problème du câble avec transmetteur. — MN. H. Des- landres a poursuivi l'observation des courbes polaires de filaments du Soleil : elles sont très variables, plus ou moins voisines du pôle, plus ou moins inclinées sur les parallèles et déplacées constamment d'un pôle à l’autre. Elles semblent se retrouver dans les planètes (bandes noires de Jupiler). — M. A. Perot a déterminé la rotation de l'hydrogène dans l'atmosphère solaire en opérant sur la raie C. La vitesse équatoriale de H 198 est de 09,8 plus grande que celle de la couche renver- sante (Fe, Ni); à la latitude de 35°,45/, le ralentisse- ment de H est de 0°,6, tandis que celui de la couche renversante est de 1°,1. 2° ScieNCES Physiques. — MM. G. Sizes et G. Massol, en attaquant successivement avec l’archet un diapason dans le plan parallèle aux branches, puis dans le plan perpendiculaire, ont produit des vibrations tournantes. L'analyse de ces vibrations donne l'explication de la présence de seize sons dont les rapports musicaux avec ul paraissaient très compliqués ; ils proviennent de la vibration perpendiculaire s1%. — MM. G. Friedel etF.Grandjean montrent que lesliquides de Lehmann, aussi bien les liquides à noyaux que les liquides à cônes, doivent être considérés comme représentants «d'un état nouveau de la matière, aussi différent de l’état cristallisé que de l’état liquide isotrope ordinaire. — MM. G. Austerweil et G. Cochin ont observé que la mème chaine que dans le citronellol, avec deux doubles liaisons, comprenant le groupement fonc- tionnel — CH.CRROH, semble être une cause de l'odeur géranique. — M. H. Hérissey a préparé l’arbutine vraie aux dépens de l’arbutine commerciale par préci- pitation avec KOH et traitement du précipité par l'acide acétique. — M. C. Tanret estime que la callose de M. Mangi, insoluble dans les alcalis, doit être un corps plus complexe que la fongose soluble, qu'elle est susceptible de reproduire par hydrolyse ménagée. 3° SCIENCES NATURELLES. — M: R. Bayeux a constaté que la quantité du glycose et le pouvoir glycolytique du sang diminuent à haute altitude et augmentent par le retour à l'altitude inférieure. Les animaux dont le pouvoir glycolytique à diminué de 60 °/, ne survivent pas. — MM. C. Jouan et A. Staub ont préparé des plasmas de poule et d’oie, tout à fait incoagulables, qui renferment autant d'alexine ou complément que le sérum de la même saignée. — MM. Ch. Nicolle et E. Conseil ont constaté que le sang dans le typhus exanthématique est virulent pendant toute la durée de la période fébrile ; il l'est encore aux premiers jours de la convalescence. Une première attaque de typhus ne confère l'immunité que si l'infection produite a été grave. Le magot est sensible à l’inoculation du virus exanthématique. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre montrent que les follicules clos des plaques de Peyer ont, chez l'oiseau, la même origine et la même évolution que chez le mammifère; ils proviennent de la prolifé- ration et des transformations des cellules épithéliales. — M. A. Dehorne à reconnu que le cas du Zoogonus mirus n'est pas plus favorable que celui du Sabellaria à la théori: de la conjugaison parallèle des chromo- somes. — MM. A. Laveran el A. Pettit ont étudié une épizootie sévissant sur les truites d’un établissement piscicole français et qui paraît être identique avec le l'aumelkrankheit de Hôfer. Cette maladie est due à un parasile qui présente des affinités avec les Protozoaires du sous-ordre des Haplosporidies. — M. Ch. Lalle- mand donne les résultats des travaux de l'Institut géographique militaire italien relatifs aux affaissements du sol causés par le tremblement de terre de Messine. Ils alteignent leurs maxima (0,60) au voisinage de Messine ou de Reggio; la grandeur des affaissements diminue très vite lorsqu'on s'éloigne des côtes pour s'enfoncer dans l’intérieur. Les courbes d'égal affaisse- ment présentent une remarquable analogie d’allure avec l’ellipse d'égale a-célération sismique de 2 mètres par seconde. — M. Alfred Picard présente le Rapport de la Commission des inondations nommée à la suite de la crue de la Seine de janvier-février 1910. La Com- mission propose un ensemble de travaux destinés à protéger Paris et les environs contre les conséquences du retour d’une pareille crue. Séance du 16 Août 1910. M. le Président annonce le décès de M. Louis Olivier, directeur de la Æevue générale des Sciences, et se fait l'interprète des regrets de l’Académie. ÿ ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Guillaume, M. Coggia et M. Borelly adressent leurs observations de la comète 1910 d Metcalf, faites respectivement aux Observatoires de Lyon et de Marseille. — M. R. Bour- geois communique les résultats des observations du mouvement diurne du sommet de la tour Eiffel. L'écart entre les deux positions diurnes extrêmes de la projection du paratonnerre varie, suivant les conditions atmosphériques, entre 3 et 17 centimbtres. Il est produit par l'influence de la chaleur solaire. La position moyenne du paratonnerre par rapport au repère fixe n'a pas varié sensiblement depuis 1896, même à la suite de la grande crue de la Seine de janvier-février 1910, ce qui prouve la solidité des fondations. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Wertenstein à cons- laté que les particules de radium B projetées par le radium À traversent dans la proportion de 60 °/, des couches d'argent d'une épaisseur voisine de 10 y. Le parcours de la projection du radium B dans l'hydro- gène est inversement proportionnel à la pression. — M. W. Duane à mis en évidence l'énergie des rayons du radium par deux méthodes reposant sur emploi, l'une d’un thermomètre différentiel à gaz, l'autre d’un calorimètre sensible. — MM. E. Mathias et H. K. Onnes ont reconnu que le diamètre de l'oxygène est rectiligne à un haut degré d’approximation. La densité critique A—0,4292. — M. P. Langevin montre que le phénomène de Kerr et la biréfringence magnétique des liquides s'expliquent complètement d'une manière quantitative par l'hypothèse de l'orientation molécu- laire. Le pouvoir rotatoire magnétique est dû à une cause différente : il dérive de l’action du champ ma-. gnétique sur les électrons en mouvement dans la mo- lécule. — MM. D. Berthelot el H. Gaudechon ont étudié la décomposition des alcools, aldéhydes, acides et cétones sous l'influence des rayons ultra-violets. Les alcools donnent H° et CO, les aldéhydes un hydro- carbure, H°, CO et CO*, les acides de même, les cétones un hydrocarbure et C0. — MM. J. Wolff et E. de Stæcklin ont reconnu que l'oxyhémoglobine est douée de propriétés peroxydasiques très énergiques, à con- dition qu'on la fasse agir dans un milieu convenable, tel qu'une solution de phosphate monosodique ou de citrate disodique. — M. Bresson montre qu'il existe dans la levure haute une diastase spécifique du mé- thylglucose «, nettement distincte de l’invertine et de la maltase par ses effets et par sa température opli- mum d'action. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Mirande a étudié l’action d’un très grand nombre de vapeurs organiques sur les feuilles de laurier-cerise. La plupart produi- sent des phénomènes de noircissement; pour üun cer- tain nombre, le noircissement s'accompagne du déga- gement d'acide cyanhydrique. Séance du 22 Août 1910. M. le Président annonce le décès de M. Eug. Rouché, membre libre de l'Académie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Fekete généra- lise un théorème de M. Landau relatif aux droites de convergence dés séries de Dirichlet. — M. J. Guil- laume adresse ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le 2° trimestre de 1910. La surface totale des taches a diminué d'un peu plus que la moitié sur le trimestre précédent; les facules ont aussi diminué. — M. Schaumasse présente ses observations de la comète Metcalf faites à l'Observatoire de Nice avec l’équatorial coudé de 02,40 d'ouverture. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Maltézos montre que l'image réelle de Purkinje se forme à l’intérieur du cristallin et à la distance de 0,79 mm. de sa surface antérieure. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe ont pré- paré les oxydes phénoliques par déshydratation directe des phénols au contact d’oxydes métalliques anhydres, tels que l'oxyde de thorium. En élevant la tempéra- ture; la produetion d'oxyde phénolique s'accompagne de celle d’un oxyde diphénylénique. ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 199 39 SCIENCES NATURELLES. — M. E. Roubaud a observé au Dahomey que les guêpes du genre Bembex chassent les Glossina longipalpis, qu'elles tuent en les perçant de leur aiguillon. — M. Ed. Hesse à découvert une nouvelle espèce de Trypanoplasma, qui vit en parasite dans le vagin de la sangsue, et qu'il nomme 7r. vagi- nalis. — MM. L. Fondard et F. Gauthié ont déterminé la composition des œillets à tiges souples et à tiges rigides. La teneur en matière sèche des tiges rigides est beaucoup plus élevée que celle des tiges molles et souples ; la teneur en Az, P*05 et K?0 est également plus forte chez les tiges rigides, mais c'est l'inverse pour la teneur en chaux. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 30 Juillet A910. M. J. Leclereq à reconnu, à l’aide des sérums préci- pitants, que le carbonate de chaux jone un rôle impor- tant au cours de la putréfaction des cadavres dans le sol; il accélère d'autant plus la décomposition des tissus qu'il est en quantité plus grande dans le milieu. — M. P. Wintrebert montre que le recul du bassin, admis par Crednerchezle Branchiosaurus amblystomus, ne cadre pas avec les faits. — MM. M. Labbé et P. Thaon ont constaté que l'alimentation carnée chez les herbivores produit une augmentation considérable du nombre des îlots de Langerhans. — M. M. Langeron a reconnu que le son bouilli et très humide constitue un milieu excellent pour l'élevage artificiel des larves de Muscide+. Les Stomoxes peuvent pondre au voisinage immédiat des lieux habités, dans des détritus végé- taux peu fermentés. — MM. Ch. Nicolle et L. Blaizot, en inoculant aux singes inférieurs des fragments de tissu lépreux, ont obtenu, aux points inoculés, des lésions semblables aux lépromes humains. — MM. G. Blanc et M. Rollet signalent la présence, dans l'appa- reil uro-génital de Fhomme, du Tarsonemus hominis Dabhl. — M. J. Giaja montre que l’amygdaline est hydrolysée par le suc d’Helix en deux temps, avec formation intermédiaire d'un sucre biose non réduc- teur qu'il est parvenu à isoler. — M. A. Frouin à reconnu que, chez les animaux éthyroïdés depuis plu- sieurs mois et en bonne santé, le pouvoir hémolytique du sérum n’a pas diminué. Chez ces mêmes animaux, la production de l'antitoxine tétanique est aussi abon- dante que chez les animaux normaux. — MM. W. Mes- trezat et F. Sappey ont observé que les injections intra-rachidiennes d'électro-mercurol chez les tabéti- ques provoquent une méningite, qui crée une per- méabilité méningée pouvant permettre à certains agents (anti-corps) de venir agir sur la moelle. — M. E. Cathoire a constaté que le sérum des porteurs sains de méningocoques à un pouvoir opsonisant vis-à-vis des méningocoques nettement plus marqué que celui des témoins. — MM. R. Bénard el Ed. Jol- train décrivent une méthode simple et pratique, dérivée de celle de Hecht, pour le diagnostic de la syphilis. — M. P. Portier montre que, la matière vivante étant peu compressible, ses propriétés physio- logiques sont peu sensibles aux variations de pression : toutefois, elles se manifestent dès qu'on s'adresse à des moyens assez puissants. — Mi® G. Callery et M. P. Portier ont reconnu que, au delà de 300 atmo- sphères, lapression extérieure du liquide a une influence manifeste sur les phénomènes osmotiques des cellules qui y sont plongées. — M. F. Marino a observé que les microbes anaérobies sont capables de se développer en symbiose avec l'Amylomyces liouxii et ayec l’'Aspergillus orvzae. — MM. M. Weinberg et J. Bromfenbrenner ont appliqué avec succès le procédé de Noguchi à l'étude des sérums hydatiques. — MM. H. Stassano et J. Talarico ont constaté que la digestibilité tryptique augmente sensiblement du lait cru au lait cuit ; Cette augmentation est très rapide pour une courte cuisson; elle devient nulle après une cuisson de 8 heures. La cuisson à 100° retarde la caséification du lait, jusqu'à l'empêcher complètement elle se prolonge pendant des heures; la cuisson à 550-659 accélère, au contraire, la caséification. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 9 Juin 1910 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. O. Rankine «à déter- miné la variation avec la température des viscosilte des gaz du groupe de l'argon. Le rapport de la visco- sité à la température de la vapeur à la viscosité à la température ordinaire à été déterminé pour chacun des cinq gaz. On a trouvé pour ce rapport les valeurs suivantés : He, 1,195; Ne, 1,185; Ar, 1,226; Kr, 1,245; Xe, 1,272. Au moyen de l'équation de Sutherland n — K17/2{1+ C/T), on a calculé les valeurs de €, constante dépendant de l'attraction entre les molé- cules. C est minimum pour le néon; c’est la valeur la plus basse qui ait été enregistrée pour un gaz; il en résulterait que le néon est le gaz le plus parfait connu. On a constaté que C est, pour Ar, Kr, et Xe, propor- tionnel à la température critique : (suite). He Ne Ar kr Xe (CE 70 56 142 188 252 FEES — [631 155,6 210,5 288 c/C”. — [1,42] 1,10 1.42) 4,44 A l'exception de l'hydrogène et de lhélium, la même règle se vérifie pour tous les autres gaz. — M. W. G. Duffield : Zilet de la pression sur Le spectre d'are. IV : Or. Toutes les lignes du spectre d'arc de l'or sont plus larges à haute pression qu'à la pression atmosphérique; l'élargissement augmente avec la pres- sion; il est différent pour les diverses lignes; il est symétrique ou asymétrique; quand il est asymétrique, il se fait surtout du côté du rouge. Outre l'élargisse- ment, il y a un déplacement de lignes à haute pres- sion, qui se fait dans la direction de plus grande longueur d'onde. On n'a constaté aucun renversement de ligne sous l’action de la pression. L'éclat de l'arc augmente considérablement avec la pression de l'air environnant. Séance du A6 Juin 1910. SCIENCES NATURELLES. — Mie F. M. Tozer ei M. C.Ss. Sherrington : {técepteurs et aférents des troisième, quatrième et sixième nerfs craniaux. L'examen des divers muscles extrinsèques du globe oculaire chez le singe, le chat et le lapin montre que ces muscles con- tiennent, outre les terminaisons nerveuses motrices, un grand nombre d'extrémités réceplives (sensorielles), à la fois dans la partie charnue et dans les tendons. Tous ces organes terminaux récepteurs, ainsi que les extrémités motrices, dérivent leurs fibres nerveuses destroisième, quatrième et sixième paires de nerfs. Ces nerfs craniaux ne sont donc pas purement moteurs, comme on le croyait, mais sensoriels et moteurs. Le nombre de fibres nerveuses afférentes qu'ils contien- nent est très considérable. — MM. C. Todd et R. G. White exposent leurs recherches sur Ja reconnais- sance de l'individu par les méthodes hémolytiques, qui les amènent aux conclusions préliminaires suivantes : {o L'immunisation du bœuf avec les corpuscules san- guins rouges d'autres bœufs donne lieu à la formation d'un ambocepteur hémolytique dans le sang des ani- maux immunisés ; 2° L'ambocepteur ainsi formé est une isolysine, non une autolysine; 3° La race de l'animal semble avoir peu d'influence sur les hémolysines résul- tantes : 4° Le sérum d'un animal ainsi traité agit très différemment sur les corpuseules rouges sanguins de divers bœufs; 5° Les sérums de divers bœufs immu- nisés de Ja même manière diffèrent l'un de Pautre dans leur action sur les corpuscules de différents individus; 6° Sile sérum d’un animal immunisé est « épuisé » ayec un excès de corpuscules d’un autre individu, il perd son pouvoir d'hémolyser les corpuscules de cet indi- vidu, mais il garde le pouvoir d’hémolyser les cor- 800 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES puscules de plusieurs autres individus ; 7° Si un sérum polyvalent est préparé en mélangeant les sérums d'un grand nombre d'animaux immunisés, et que ce sérum soit épuisé avec les corpuscules d’un individu quel- conque, le sérum perd entièrement son pouvoir d’hé- molyser les corpuscules de cet individu, mais il reste fortement hémolytique pour tous les autres individus qui ne sont pas en relation étroite avec le premier; 8o Les corpuscules sanguins rouges d’un individu quel- conque sont donc caractérisés par une individualité définie qui leur appartient en propre, et peuvent être distingués de ceux d’un autre individu de la même espèce. — MM. R. Ross et D. Thompson ont étudié un cas de maladie du sommeil par des méthodes énu- mératives précises. Ils ont constaté que le nombre de Trypanosoma qambiense dans le sang du malade subit des variations périodiques remarquables environ tous les sept à huit jours. Ce fait ne semble pas encore avoir été mis en lumière, — Sir D. Bruce, MM. A. E. Hamerton, H. R. Bateman et F. P. Mackie : Les maladies à trypanosomes des animaux domestiques dans l'Ouganda. 1 : Trypanosoma pecorum. Les auteurs ont constaté que le 7rypanosoma pecorum est un important agent de trypanosomiase chez les animaux domestiques dans l’Ouganda. Il est analogue, comme morphologie, action sur les animaux et caractères culturaux, au Zrypanosoma dimorphon de Laveran et Mesnil, et au trypauosome de Zanzibar du Dr Edington, excepté que le Tr. pecorum n’est pas pathogène pour le cobaye. Le porteur du parasite est inconnu; mais c'est probâblement un T'abanus et non un Stomoxys. — Les mêmes auteurs ont fait des expériences pour rechercher si le bétail peut agir comme réservoir du virus de la maladie du sommeil. Is montrent que tel est bien le cas et que des animaux sains peuvent être infectés par le bétail au moyen de la G/ossina palpalis. Ils ont constaté également que le bétail, dans l’aire de la mouche, abrite naturellement le Tr. Gambiense. — M. D. Thoday : /techerches expérimentales sur lassi- milation et la respiration végétales. NI : L’assimila- tion à l'air libre. L'auteur a reconnu qu'à l'air libre de grands degrés d’assimilation peuvent se présenter, malgré la faible concentration de CO? présent dans l'air. Dans les expériences sur l'Helianthus annuus, qui concordent toutes, des feuilles qui restent turgides, el conservent ainsi leurs stomates largement ouverts, ont présentéuneaugmentation moyenne de {7milligrammes par heure sur le poids sec par décimètre carré. Le résultat que Sachs a obtenu dans une expérience ana- logue avec des fewilles détachées (16,5 mgr.) est donc confirmé. Comparé à l'Helianthus, le Catalpa bigno- nioides assimile beaucoup plus lentement (5 à 6 milli- grammes dans les mêmes conditions), fait qui est en relation avec l'absence de stomates à la partie supé- rieure des feuilles. Il n'est pas certain que des feuilles restant attachées à la tige assimileraient avec la même rapidité. — MM. C.et E. M. Reïd ont étudié les dépôts de lignite de Bovey Tracey et leur flore. Ils y ont trouvé un grand nombre de plantes, la plupart iden- tiques avec les plantes du lignite de Wetterau, géné- ralement classé dans l’Oligocène supérieur. Le Vitis britannica de Heer n’est pas autre chose que le Vitis teutonica. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 8 Juillet 1910. M. H. L. Callendar présente sa radio-balance thermo-électrique pour la mesure absolue de la radia- tion. Dans cet appareil, la chaleur fournie par la radia- tionest directement compensée par l'absorption Peltier de la chaleur dans une thermo-jonction à travers laquelle passe un courant électrique mesuré. L'appa- reil se présente sous deux formes : l’une dans laquelle ia radiation tombe sur un petit disque de cuivre, et qui peut servir à la mesure de la radiation du Soleil et des fortes sources; l’autre dans laquelle le disque est remplacé par une coupe en cuivre et quisert à mesurer la chaleur dégagée par de faibles quantités de sub- stances radio-actives. — M. A. Russell présente ses recherches sur la convection de la chaleur d’un corps refroidi par un courant de liquide. Il vérifie diverses formules de M. Boussinesq et donne la solution de quelques problèmes nouveaux. — M. S. P. Thompson montre que les boucles d'hystérèse du fer et de l'acier soumis à des cycles de magnétisation peuvent être analysées par une méthode simple qu'il a donnée autre- fois et ramenées à une série harmonique de courbes closes correspondant aux divers termes de l'analyse de l'onde de courant. — M. W. H. Eccles a étudié expérimentalement, par trois méthodes différentes, les propriétés physiques de quelques détecteurs employés en télégraphie sans fil : détecteur électroly- tique, rectificateurs à zincite et à carborundum, détec- teur thermo-électrique à contact graphite-galène. Le principal fait mis en lumière est que les courbes de puissance de tous les détecteurs sont des lignes droites, ce qui suggère que tous ces détecteurs sont fondamen- talement thermiques dans leur action. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LIVERPOOL Séance du 13 Avril 4910. M. R. Ellis étudie Ja séparation de l'huile de l'eau des condensateurs par l'électrolyse. Le séparateur | Davis-Perrett, généralement employé dans ce but, opère l’électrolyse de l’eau des condensateurs avec des électrodes de fer, avec addition d'un peu d’électrolyte (Na°C0*) pour augmenter la conductibilité de l’eau. L'auteur montre que la fonction essentielle de tout séparateur électrolytique est de précipiter dans l’eau un sel ferreux basique, qui entraîne les globules d'huile. On peut arriver au même résultat en ajoutant à l’eau de condensation divers milieux filtrants, tels que les hydrates de Fe, Al, Cr et Ca, le carbonate de Ba, etc. SECTION DE LONDRES Séance du 2? Mai 1910. M. J. G. Parker expose les principes actuels du tan- nage. — M. G. N. Huntly a recherché quelle exactitude on peut obtenir dans /a calorimétrie des combustibles. 1° La limite d’exactitude dans la comparaison des valeurs calorifiques des combustibles est de O1 à 0,3 °/,, et elle ne peut être obtezue qu'après une étude soigneuse du thermomètre et du calorimètre, et l'appli- cation de nombreuses corrections. 2° Si les petites cor- rections sont négligées, les erreurs peuvent atteindre 1207639 Les chaleurs de combustion des substances types employées pour la détermination de l'équivalent d'eau du calorimètre ne sont pas certaines à 0,5 °/, près. 4 Les erreurs dues à l’échantillonnage à la main ne peuvent pas être réduites avec certitude à moins de 0,5 °/, et peuvent facilement atteindre 1,5 à 2 2/4. En résumé, au moins pour le coke, il est plus impor- tant actuellement de réduire les erreurs d'échantillon- nage que d'augmenter l’exactitude de la détermination calorimétrique. SECTION DE NEWCASTLE Séance du 17 Mars 1910. M. A. Short expose les progrès récents de la fabri- cation du coke. Il décrit les nouveaux fours horizon- taux et verticaux, les fours régénérateurs, les cornues verticales, les dispositifs de chargement et de déchar- gement des fours, le traitement des sous-produits. Le Gérant : Louis BRUNET. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Gassetie. 21° ANNÉE N° 19 15 OCTOBRE 1910 Revue générale Des Scien pures et appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser provisoirement tout ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CROISIÈRES DE LA ‘REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES ” Tous les lecteurs de la Revue générale des Sciences connaissent les Croisières de la Revue, ne lül-ce que pour avoir lu ici méme les savantes études auxquelles ont donné lieu plusieurs de ees voyages. Aussi, au lendemain même de la mort prématurée de notre regretté directeur, nombre d'entre eux ont-ils demandé ce qu'allaient devenir ces Croisières, qui, avec notre drapeau, ont tant de fois porté à l'étranger l'élite de notre nation. Nous sommes heureux de pouvoir leur annoncer que celte œuvre française, à laquelle Louis Olivier s'était dévoué tout entier, ne dispa- raitra pas avec lui. Elle est continuée par sa famille et ses collaborateurs habituels, avec le concours scientilique, aussi précieux qu'autorisé, de M. Charles Diehl, Professeur à la Sorbonne. C'est dire que les Croisières conserveront le caractère qui en est la marque propre. La Croisière des Vacances de Päques 1911 visitera les grands sancluaires religieux et archéologiques de l'Orient méditerranéen; elle conduira ses touristes aux berceaux mêmes de la Foi et de TArt : la Palestine, la Syrie, Athènes. Celle des Grandes Vacances mènera les voyageurs aux rives enchanteresses de l'Adriatique : elle leur fera voir les merveilles de Pltalie byzantine et de lltalie de la Renaissance, les siles admirables de la Dalmatie, de la Bosnic- Herzégovine et du Montenegro. Toutes deux, sous la direction de savants éminents, permettront d'étudier ces pays, objets des regards de la diplomatie, qui attirent aujourd'hui l'attention de tous les esprits cultivés. Les Croisières restent organisées avec le concours de l'une de nos pre- mieres Compagnies de navigation, la Société générale de Transports maritimes à vapeur, ef, comme par le passé, elles auront lieu à bord d'Ile-de-France, magnifique et robuste navire de plaisance dont tous les passagers connaissent le parfut confort et l'excellente tenue à la mer. Ceux de nos lecteurs que ces voyages pourraient intéresser trouveront les renseignements nécessaires à l'Administration des Croisières de la Revue générale des Sciences, 18, rue Chauvear- Lagarde, à Paris. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 19 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE S 1. — Solennités scientifiques Le Jubilé du Professeur van Bemmelen.— L'Université de Leyde se prépare à fêter, dans les premiérs jours du mois de novembre, les quatre- vingts ans d'un maitre. qui a longtemps professé la Chimie, M. J. D. van Bemmelen. M. van Bemmelen, né à Almelo le 3 novembre 1830, étudia de 1847 à 1852 en cette Université de Leyde où il devait, plus tard, achever sa carrière de professeur. Ce fut à Groningue, comme assistant du Professeur van Kerkhoff, qu'il débuta dans l’enseignement. En 1856, il prit le grade de docteur ès sciences. A partir de ce moment, nous le voyons successivement : pro- fesseur à une école industrielle et à une école d’Agri- culture (1856-1864); directeur du Hoogere Bur- gerschool (lycée) à Groningue (1864-1869), puis à Arnheim (1869-1873); enfin, en 1872, professeur à l’Université de Leyde. La carrière scientifique parcourue, pendant la durée de son professorat, par M. van Bemmelen a été singu- lièrement féconde. C’est, d'abord, à des recherches de Chimie agrono- mique que s'adonna le jeune professeur; en 1877 et 1878, puis, de nouveau, en 1888, il publia ses travaux sur les phénomènes d’adsorption des terres végétales. Ces travaux le conduisirent à des études de Physico- chimie sur l'adsorption de la vapeur d'eau par la silice gélatineuse et d’autres substances colloïdales; le premier Mémoire de M. van Bemmelen sur cette question porte la date de 1880 et le dernier celle de 1910; c’est dire avec quelle patience et quelle persévé- rance l’auteur a étudié ce sujet. Ces longues et minu- tieuses recherches ont, d'ailleurs, mis en évidence une vérité capitale : Lorsqu'un colloïde s'hydrate, puis se déshydrate parce que la tension de la vapeur d'eau augmente, puis diminue et revient à sa valeur primi- tive, ce colloide garde une hydratation rémanente; il y a donc, en cette opération, une hystérésis d’un genre particulier dont M. van Bemmelen est parvenu à démêler les lois expérimentales, en dépit de leur extrème complication. L'œuvre d’un professeur ne se réduit pas aux mé- moires scientifiques qu'il écrit; elle comprend aussi les disciples qu'il forme. Par là, aussi, l’œuvre de M. van Bemmelen a été d'importance; des premiers, il a introduit en son enseignement l’exposé de la Méca- nique chimique; il a ainsi grandement contribué à la formation de cette Ecole physico-chimique hollan- daise qui a rendu à la Science de si grands services; ce que éett- Ecole lui doit, nous en aurons donné une idée lorsque nous dirons qu'il a eu pour disciples le regretté H. W. Bakhuis Roozeboom, et M. Schrei- nemakers qui occupe aujourd'hui, à Leyde, la chaire laissée vacante par la retraite de son maître. L'Université de Leyde à donc voulu fêter le jour où M. van Bemmelen aura accompli sa quatre-vinglième année; cette fête, elle en a confié l’organisation à un Comité dont le président est l'illustre physicien de Leyde, le Professeur H. A. Lorentz. Leyde a également fourni le trésorier, qui est le D" P. J. Montagne, le secrétaire, qui est le Dr W. P. Jorissen, et bon nombre de membres : MM. J. Boeke, J_ Bruining, W. Nolen, H. Kamerlingh Onnes, G. M. Rutten, et F. A. H. Schrei- nemakers. Des autres villes de Hollande, divers savants sont venus faire cortège à leurs collègues de Leyde; à leur tête, nous saluons le vénéré J. Bosscha, puis MM. J. Aronstein, de Delft, J. Hissink, de Wageningen, A. F. Holleman, d'Amsterdam, F. M. Jaeger, de Gro- ningue, E. GC. J. Mobr, de Buitenzorg, P. van Romburgh, d'Utrecht, G. Romijn, de's-Hertogenbosch, et W. Stor- tenbeker, de La Haye. La science étrangère est égale- ment venue apporter son hommage avec MM. H. E. Boeke, de Leipzig, G. Bredig, de Zürich, W. B. Hardy, de Cambridge, R. Lorenz, de Francfort sur-le-Mein, J. Sack, de Paramaribo, W. Spring, de Liége, et G. Tam- mann, de Gœttingue; le signataire de ces lignes s'honore de représenter la Science francaise au sein de ce Comité. Pour rendre longuement durable le souvenir de cette fête jubilaire, il a été convenu que l’on deman- derait à divers savants de donner chacun un travail relatif aux questions qui ont sollicité les efforts de M. van Bemmelen. L'appel lancé à cet effet par le Comité a été accueilli avec une extrême faveur; soixante Mémoires, presque tous relatifs aux sub- stances colloïdales, forment le volume jubilaire’ qui sera remis le 3 novembre à M. van Bemmelen; tout ce que la Mécanique chimique compte d'illustrations en Europe et en Amérique figurent parmi les signataires de ces articles; leur ensemble constituera un monu- ment précieux que devront consulter tous ceux qui s'intéressent aux curieuses et énigmatiques propriétés des colloides; ce monument formera, en quelque sorte, le pendant de celui que M. van Bemmelen a élevé. Pierre Duhem, Professeur à la Faculté des Scienc s de Bordeaux. Correspondant de l'Institut. $ 2. — Chimie L'isolement du radium métallique. — Le radium, qui n'était connu jusqu'à présent que sous forme de sels, vient d’être isolé à l’état métallique à la suite d'une longue série d'opérations très délicates menées à bien par Mt P. Curie et M. A. Debierne®. Les deux savants se sont servis de la méthode décrite par M. Guntz pour l'obtention du baryum métallique et qui consiste essentiellement dans la préparation d'un amalgame du métal, dont on chasse le mercure par distillation dans des conditions convenables. L'amalgame de radium a été obtenu par électrolyse d'une solution de 0,106 gramme de chlorure de radium parfaitement pur avec une cathode de mercure et une anode de platine iridié. Il est liquide, aécumpose l'eau et se montre très altérable à l'air. Séché, ilest rapi- dement transporté dans une nacelle en fer, placée dans un tube de quartz, et l'on fait le vide dans l’appa- reil. La distillation a été effectuée dans l'hydrogène pur. La plus grande partie du mercure distille à 270°, puis la température s'élève el l’amalgame devient solide. Vers 700, il ne se dégage plus de mercure, et le résidu blanc brillant, qui fond subitement à 700°, peut être considéré comme du radium sensiblement pur. Le radium noircit immédiatement à l'air, probable- ment par suite de la formation d'un azoture. Il décom- pose l’eau énergiquement et se dissout en grande par- lie, ce qui indiquerait que l’oxyde est soluble. Les premières mesures montrent que l'accroissement de l'activité du métal se fait bien suivant la loi de pro- duction de l’'émanation et que la radio-activité limite du métal doit être à peu près normale. La formation des chimistes dans les Uni- versités. — Un des plus importants facteurs de l'étonnante prospérité des industries chimiques d’outre- Rhin est certainement le développement des services de recherches où travaillent un grand nombre de chercheurs formés par les Universités et Instituts de 1 Ce volume, dont le prix sera de 12 à 14 francs, paraïitra le 3 novembre au Helder (Hullande), chez M. C. de Boer Jr. 2 C. R. Ac. Se., 1. CLI, p. 523-525; 5 sept. 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tous genres. Des entreprises comme la Badisehe Anilin und Soda-Fabrik, les Farbenfabriken Bayer, les Farbwerke de Hüchst, n'occupent pas moins de 150 à 200 chimistes, non compris les ingénieurs ou techni- ciens divers, dont les découvertes, protégées par brevets, assurent à ces établissements de fructueux monopoles. Aussi, après Schutzenberger à Paris et Haller à Nancy, nos professeurs organisèrent-ils de toute part des Instituts de Chimie capables de former des chimistes en nombre suffisant pour répondre aux besoins des industriels français; nous possédons maintenant plus d'une douzaine de ces écoles. Tout en reconnaissant l'importance des services rendus, on leur reproche parfois leur enseignement trop théorique : malgré leurs diplômes d’ingénieurs- chimistes, conférés peut-être d'ailleurs un peu trop facilement, les étudiants qu'on y forme sont en général d'excellents chimistes, mais de bien médiocres ingénieurs. C’est pourquoi il convient de féliciter M. Thomas, de la Faculté des Sciences de Clermont- Ferrand, qui vient de prendre l'initiative de la création d’un enseignement de Chimie appliquée, où Génie civil et Mécanique occupent une place comparable à celle de la Chimie. A côté, en effet, de cours de Chimie pure et de Chimie appliquée, d'Analyse générale qualitative et quantitative, d'essais de produits industriels et com- inerciaux, qui sont suivis pendant les deux premières années d'études, il existe de nombreux cours de sciences appliquées à l'art de l'ingénieur. Pendant la seconde et la tro sième année de présence à l’Institut, les futurs chimistes industriels doivent étudier la résistance des matériaux, le dessin, les générateurs de vapeur, les machines motrices, le matériel et l'appa- reillage industriel, les machines-outils, les applications de l'électricité (trois cours), la construction et l'instal- lation des usines. La troisième et dernière année d'études est consacrée non seulement au génie, mais à un enseignement comprenant la comptabilité, la législation et l'hygiène industrielles; en outre, on y fait des travaux de Chimie ne consistant pas à suivre des cours, mais à élaborer un travail original, où l'élève déjà formé peut mieux faire montre de ses connais- sances et exercer son initiative. L'enseignement théo- rique est doublé de nombreux exercices pratiques, tels que manipulations au laboratoire (vingt-quatre heures par semaine), dessin (deux heures), conduite de ma- chines et visites d'usines. Ce nouveau programme diffère notablement de tous ceux des Instituts universilaires de Chimie, et il est à souhaiter qu'il soit généralement adopté. On peut cependant en critiquer quelques points. — C'est un non-sens que d'avoir situé cet établissement dans une contrée et dans un centre si peu industriels; et, comme il n'y a pas de concours d'entrée ni même de bacca- lauréat exigible {chose d’ailleurs excellente en soi), ne sera-t-on pas tenté, pour faciliter un recrutement difficile, d'admettre trop facilement des étudiants insuflisamment préparés, ce qui ne pourrait manquer d'abaisser le niveau des études ? — Il est regrettable de voir les Instituts français de Chimie continuer tous à former dans un mème moule futurs chimistes de recherches, analystes, ou chefs de fabrication, dont les rôles différeront plus tard du tout au tout, dont les aptitudes et les formations doivent êLre si différentes. En Amérique, en Allemagne ‘, on forme dans les Ecoles de Chimie, non des chimistes omniscients, mais des techniciens bien spécialisés : ingénieurs chimistes, analystes, électro-chimistes, chimistes hygiénistes, chimistes organiciens.… — Enfin, on peut craindre qu'un tel programme, par cela même qu'il est fort bien établi, très complet, trop complet même, puisqu'il ne comporte pas de spécialisation, soit difficilement applicable. 1 Cf. par exemple les études de PELLErAN : 1 Rev. Gén. des Sciences, 1910, et Fagre : Rev. Gén. de Chimie, 1M0. #03 Peut-on, en trois années, apprendre {ant de choses, d’une facon suffisamment solide, à des jeunes gens de seize à dix-huit ans”? Au lieu de livrer à leurs propres forces des chimistes de vingt ans qui devront débuter dans des conditions plus que modestes pour achever leur formation, si « pratique » que soil le nouvel ensei gnement, ne ferait-on pas mieux de les garder un ou deux ans encore ? Evidemment, c'eût été un bier mau- vais moyen d'attirer à Clermont-Ferrand les futurs chimistes que de leur montrer une telle perspective ; et certains instituts ont même, dans un but de suren- chère, abaissé à deux années la durée des études, Mais, si nous adoptons des programmes aussi chargés, ce qui est, nous le répétons, nécessaire, augmentons en conséquence la durée des études, ce qui est logique, et ce qui serait bon tant pour le chimiste que pour l’in- dustriel. Nous ne pouvons mieux conclure qu'en repro- duisant à ce sujet l'opinion de l'éminent professeur Meldola (Con/érenee au Congrès de Chimie de Londres, 1909) : « Un eyele total de cinq années d'études ne me semble pas exagéré, ru égard à la nature des besoins de l’industrie chimique ; il faut bien sept ans pour faire un bon médecin et cinq ans pour former un légiste. » Henri Rousset, $ 3. — Biologie La genèse des instincts parasifaires et esclavagistes chez les fourmis. — Nous avons reçu de M. H. Piéron, trop tard pour l'insérer à la fin de la deuxième partie de son article parue dans notre dernier numéro, la note complémentaire suivante : « Depuis l'impression de ce travail ont paru de nouvelles études sur les problèmes envisagés, études qui n'apportent, d’ailleurs, guère d'éléments nouveaux : « Wasmann ‘ a donné une classification des faits de pléométrose (présence de plusieurs reines de même espèce ou race dans une colonie) et d'a//ométrose (présence de plusieurs reines d'espèces ou races diffé- rentes), distinguant la pléométrose primaire du For- mica fusca et du Lasius niger (alliance de fondation) et secondaire, par retour de reines après fécondation chez les F. rula, pratensis, Sanquinea, fusca, le Tapi- noma erratieum, les Myrmica seabrinodis et lævinodis et le Prenolepis longicornis de l'Inde ?, par adoption chez les F. f'usca, rufa, rufibarbis* et sanguinea, et par alliance de deux colonies chez la Æ. fusea; on pourrait ajouter les cas de fécondation à l'intérieur du nid, d’après les observations de Brun; Wasmann distingue parallèlement l'allométrose primaire (alliance entre femelles de diverses espèces, comme le Strougylogna- thus etle Tetramoriun, les Formica sanguinea et rufa, ou de diverses races, chez les Æ. rufa, pratensis el truncicola, pour la fondation d'une colonie nouvelle), et l'allométrose secondaire (adoption de femelles étran- gères comme des Polyerqgus ou des F. rufa chez la F. fusea, des Wheeleriella chez les Monomorium). «Il n'y à là, d’ailleurs, qu'une question de vocabu- laire. « En revanche, Wasmann discute les observations toutes récentes de Viehmeyer et finit par admettre avec cet auteur l'existence de trois modes possibles de fondation des colonies chez la Formica Ssanguinea”: _ ‘ 1 Waswanx : Nachträge zum sozialen Parasitismus und der Sklaverei bei den Ameisen. Biologisches Ceutralblatt, t.XXX. nos 43-45, 4 juillet-1 août 1910, p. 453-464, 475-496 el 515-528. * Assuurn : Einige Notizen über Prenolepis longicornis Ltr. Zeiischr. für Insektenbiologie, 1907, p. 10-12. % SCGHIMMER Beitrag zur Ameisenfauna des Leipziges Gebietes. Sitzungsber. Naturlorsch. (Gesellschaft, Leipzig, + XXXV, 1908, p. 11. 4 Rupozr Brun : Zur Biologie und Psychologie von For- mica rufa und anderen Ameisen. Biol. Centr., t. XXX, n°S 15- 16, 1°r-15 août 1910, p. -528, 529-545. 5 Vremmeyer est encore revenu depuis sur la question sans apporter rien de bien nouveau (Ontogenetische und phylo- 804 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE le rapt de nymphes, le plus fréquent, l'adoption ami- cale, et enfin l'alliance des femelles; il en décrit, en outre, un quatrième qu'il à pu observer, une femelle de Sanguine ayant trouvé des nymphes, qu'elle n’a pas eu, dès lors, besoin de ravir de force. Et, à ce propos, il note un cas où les esclaves habituelles des Sanguines, les Æ. fusca, mirent à mort à leur naissance, au lieu de les soigner, les jeunes sanguines en train d’éclore ! « Wasmann revient aussi sur la fondation des colo- nies chez la £, rufa, à propos de nouvelles observations, faites en Suisse même, de Wheeler ‘. Cet auteur, qui a observé, en effet, des colonies mixtes de Æ. rula- fusca, a considéré comme obligatoire la fondation des colonies de rufa par parasitisme des femelles chez la F. lusca. « C'était conclure bien vite, et Wasmann rappelle avec raison que, loin d'être nécessaire, ce mode de fondation n'est même pas le plus fréquent, et il se trouve en parfait accord à cet égard avec Brun, dont lesobservations furent faites d'une facon indépendante?. « Wasmann attire encore l'attention sur le parasi- tisme social temporaire chez les Lasius, que nous avons déjà signalé, renvoyant à un travail qu'il y a consacré *, notant les observations de Crawley ‘ sur le Zasius umbratus et rappelant celles de Wheeler sur les colonies mixtes, en Amérique, de Lasius myops ou de L. latipes avec L. americanus. « Enfin, rappelant un travail de Mrazek?, qui signale avoir trouvé une femelle de Tetramorium dans une colonie de Strongylognathus, ce qui implique l'alliance des deux reines, fait rare, Wasmann décrit le mâle de la Pheidole symbiotica qu'il a découvert, et une espèce parasite nouvelle, la Myrmica myrmecophila, femelle ergatoïde qui dériverait, par mutation aber- rante, du 47. sulcinodis. « Forel, de son côté, a décrit un nouveau genre para- site, l’Hagioxenus Schmitzi, de Palestine, Myrmicide qui vit chez un Dolichodéride, le Tapinoma erraticum, ce qui constitue une exception à la loi de dérivation d'Emery; une nouvelle espèce de Weeleriella a été trouvée dans l'Inde, la WA. Wroughtoni, vivant chez la variété 2ndicumm du Monomorium Salomonis ‘. « On peut encore rappeler que Wheeler ? considère comme parasite des autres Cremastogaster le sous- genre Oxygyne, dont les mandibules en faux, comme chez les Polyergues, faciliteraient le meurtre des reines légitimes. senetische Betrachtungen über die parasitische Koloniegrün- dung von Formira Sanguinea. Bioloq. Centr., t. XXX, n° 17, ter septembre 1910, p. 509-580). Il considère les trois modes de fondation comme des phénomènes d'adaptation aux eir- constances (colonie faible rencontrée, avec nymphes : rapt: colonie forte : adoption: colonie jeune sans nymphes : alliance). Les trois modes ne dériveraient nullement les uns des autres, et il n'y aurait jamais eu de stade d'adoption. L'esclavagisme et le parasitisme social viendraient du carac- tère ravisseur des fourmis. Le stade d'adoption du Æ, rufa est inférieur et l'instinct des sanguines n'en doit donc pas dériver. Viehmeyer proteste d'ailleurs que, dans son refus d'admettre que des parasites puissent devenir des ravisseurs, il s'est basé sur des faits et non sur des idées a priori. 1 WugeLer : Observations on some european Ants. Jour- nal of N. Y. Entomological Society, décembre 1909, t. XVII, no 4, p. 112-187. 2 R: BRUN : Lor. ei. %ÆE. Wasmanx : Ueber gemischle Kolonien von Lasius- Arten. — Zool. Arzciger, t. XXXV, n°° 4-5, novembre 1909, p. 129-441. # W. C. CrawLey : Queens of Lasius umbratus NYl. accep- ted by colonies of Lasius niger L. Entomological Month]; Magazine, avril 1909, p 94-99. 5 Ac. Mnazecx : Zur Biologie der gemischten S/rongyln- ynathus Tetramorium Kolonien. Acta SocietauiS entomolo- yieæ Bohemiæ, 1908, t. V, H. 4, p. 144-146. ° A. Forer : Glanures myrmécologiques. Ann. de la Soc. enfom. de Belgique, 1910, t. LIV, n° 1, p. 8. 7 WueeLer : The ants of Cusco Bay, Loc. cit. « On voit donc se généraliser et s'étendre le phéno- mène du parasitisme chez les fourmis, l’esclavagisme n'en étant qu'un cas, et les faits nouveaux paraissent bien se ranger maintenant dans le cadre qui a pu être établi d'après les nombreuses données connues déjà. » H. Piéron, L Maïtre de Conférences à l'École pratique ces Hautes-Études. $S 4. — Géographie et Colonisation Le Bulletin de l'Union franco-persane. — Nous avons annoncé, l'année dernière, la fondation de l’Union franco-persane, destinée à resserrer les liens qui unissent la France et la Perse, Aujourd'hui, l’Union à décidé de faire paraitre um Bulletin dans lequel la plus large place sera consacrée à l'étude des intérêts de toute sorte que les deux pays ont en commun. Par la sympathie séculaire qui lui est acquise, la France jouit en Perse d’une situation pri- vilégiée. L'Union franco-persane etson Bulletin accom- plissent donc une œuvre des plus utiles, et nous sou- haitons que le succès couronne leurs efforts. N 5. — Enseignement. L'Office national des Universités et Ecoles françaises. — L'Office qui vient de se constituer sous ce titre à pour but de faire connaître à l'étranger les ressources en enseignements de tout ordre qu'otire notre pays, et d'organiser une propagande active en faveur de nos Universités et de nos Ecoles. Parallèle- ment, cet Oflice recueillera au dehors tous les éléments d'information utiles pour favoriser l’action des divers Comités de patronage et des œuvres d'expansion française. L'Association qui à constitué cet Office et qui com- prend tous les recteurs des Universités francaises, les directeurs des grandes Ecoles, les présidents des Comités de patronage et un grand nombre de person- nalités du Parlement et du monde savant, a élu son Comité de direction qui se trouve ainsi composé : Président : M. Paul Deschanel, membre de l’Institut ; Vice-président : M. Appel, mesnbre de l'Institut, doyen de la Faculté des Sciences de Paris, et M. Lyon, recteur de l’Université de Lille ; Commissaires : MM. Messimy ; Paul Doumer ; Anatole Leroy-Beaulieu, membre de l’Institut; Adam, recteur de l'Université de Nancy ; Jean Gout, sous-directeur aw Ministère des Affaires étrangères; Marcel Reymond, président du Comité de patronage des étudiants étrangers de l'Université de Grenoble, Le D' Raoul Blondel, directeur du Bureau des Ren- seignements de l'Université de Paris, a été chargé des. fonctions de Directeur de l'Office national. Provisoirement, en attendant que l'Office soit mis en possession de son local, ses services seront installés. à la Sorbonne (Bureau des Renseignements). Bureau des Longitudes. — M. Carpentier, membre de l'Institut, est nommé membre titulaire dw Bureau des longitudes, en remplacement de M. Gau- tier, décédé. M. Andoyer, professeur d'Astronomie à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé membre titulaire du Bureau des longitudes dans la section d'Astronomie, en remplacement de M. Bouquet de la Grye, décédé. Fcole centrale des Arts et Manufactures- — M. Dejust, chargé du cours de Construction de machines, est nommé professeur titulaire de ce cours. M. Arnaud, chargé du cours de Constructions civiles, est nommé professeur titulaire de ce cours. JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR 805 PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR SON EMPLOI COMME ISOLANT ÉLECTRIQUE L'air atmosphérique est généralement considéré comme un isolant; mais, du fait même qu'il est constitué par un gaz, ses propriétés diélectriques varient dans d'assez grandes proportions sous de multiples influences : pression, humidité, tlempéra- ture, tension électrique, ete. Il ne peut done rendre de réels services dans l'industrie électrique que si l'on subordonne ses emplois à ses qualités et non en en sacrifiant certaines au profit des autres. La sécurité des lignes, de même que le rendement des usines génératrices, ne peut, en effet, être assurée que si l'on tient compte de tous les facteurs capa- bles de les influencer. Les deux principales qualités que doit posséder l'air considéré comme isolant sont: d'une part, une très grande résistivité, c'est-à-dire un pouvoir d'isolement maximum, et, d'autre part, une rigidité élertrostalique aussi élevée que possible. Cette dernière propriété mesure la résistance de l’isolant à l’action des hauts voltages capables de le perforer par la formation d'étincelles de rupture; pour cette raison, on la désigne encore sous les noms de « ré- sistance à la perforation » ou de « résistance à la rupture ». ÏJ. — PRINCIPAUX FACTEURS POUVANT MODIFIER LE POUVOIR ISOLANT DE L'AIR. $ 1. — Influence de l'humidité et de la température. L'air chargé de vapeur d’eau perd, en général, une grande partie de ses propriétés isolantes. Les physiciens ne sont cependant pas d'accord sur la manière d'interpréter ce phénomène, les uns admettant que l'air humide n'est conducteur qu'autant qu’il est chargé de poussières, les autres cherchant à l’expliquer par la seule présence de gouttelettes d'eau finement divisées. Il paraît cependant aisé de se mettre d'accord sur ce point par les considérations suivantes : Mélangé à une certaine quantité de vapeur d'eau très éloignée de son point de liquéfaction, l'air forme avec elle un mélange de deux gaz, tous deux non conducteurs et l'ensemble constitue un milieu parfaitement isolant. Si la vapeur d'eau est, au contraire, saturée, c’est-à-dire prête à se transformer partiellement en gouttelettes liquides, les deux corps en présence forment un milieu semi-conduc- teur, les propriétés isolantes de l'air étant diminuées par la présence de l’eau, corps semi-conducteur. Cette diminution de résistivité est encore plus sensible si l'air est chargé de poussières conduc trices, ainsi que l'ont démontré les expériences récentes de Warbur et Nahrwold. L'expérience suivante permet de mettre en évidence la conduetibilité acquise par l'air sous l'influence de l'humidité : On fait traverser, à l’aide d'une pompe, une masse d'eau à de l'air provenant d'un réservoir à gaz : la résistivité de l'air devient dix fois plus faible que celle qu'il début. Cet air conserve sa conductibilité nouvelle pendant quarante-huit heures environ, mais il redevient d'un possédait au à l’action courant le soumet isolant si on Fig. 1. — Arcs disruplifs produits sur les isolateurs 8 12e à haute tension. électrique ; il retrouve sa conductibilité si on le fait circuler dans un tube chauffé au rouge, bien que des températures ne dépassant pas 200° à 300° l'influencent très peu. Enfin, un tube saturé d'acide sulfurique concentré dans lequel on fait passer ce gaz lui fait perdre sa conductibilité : dans ce dernier cas, c'est l'action hygroscopique de l'acide sulfu- rique qui, concentrant l'humidité de l'air dans sa masse, lui restitue ses propriétés isolantes. D'après M. Langevin, ilexisterait, au voisinage du sol, des ions de grande dimension, considérables comme nombre par rapport aux ions ordinaires et d’une mobilité extrême. L'origine de ces gros ions semble due à ce fait que l'air renferme toujours des particules qui servent de germes pour la formation des gouttes dans une atmosphère légère- ment sursaturée de vapeur d'eau. M. Aitken à pu, en se basant sur ces observations, mesurer le nom- bre de ces particules, peut-être derniers résidus de gouttelettes évaporées : il l'a trouvé, au voisinage du sol, comme se rapprochant sensiblement de 100.000 par centimètre cube d'air. C'est à la présence de l'humidité atmosphérique S06 JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR et surtout à la pluie qu'il faut attribuer les phéno- mènes de disruption produits sur les isolateurs à haute tension. On sait en quoi consistent ces phéno- mènes : sous l'action d'une différence de potentiel élevée, le diélectrique (air) qui entoure l'isolateur est perforé par la décharge provoquée par une rigidité insuffisante de l'air, en établissant ainsi un ou plusieurs ares (fig. 1) entre le fil conducteur et le support de l'isolateur. On constate ainsi qu'un isolateur qui, par un temps très sec, résiste à 100.000 volts, laisse la disruption se produire à 60.000 volts seulement par une forte pluie. L'humidité atmosphérique ne doit cependant pas être seule invoquée pour expliquer ces phéno- imènes : l'isolateur peut, en effet, être assimilé lui- même à un véritable condensateur, dont les arma- tures sont constituées par le fil et le support, et dont le diélectrique est formé par l'air et la masse de l'isolateur ‘. La disruption se produit après les premières décharges d'essai, sortes d'effluves qui fraient, pour ainsi dire, un chemin aux étincelles de rupture et facilitent la décharge; elle est, en outre, aidée par la présence d’une capacité et d'une self dans le circuit. Il est clair que les décharges d'essai sont facilitées par l'humidité et la malpropreté des surfaces, en diminuant leur résistance superficielle eten tendant ainsi à les mettre au même potentiel que les conduc- teurs avec lesquels elles sont en contact. Les traces de vapeur d’eau qui entourent les isolateurs à haute tension finissent par se transformer en véritables gouttes qui, en tombant deleur surface supérieure vers les parties conductrices (supports), forment entre celles-ci et le fil autant de lignes conductrices qui facilitent la disruption. Dans les isolateurs aériens, c'est surtout la forme de la cloche qui a de l'importance ; elle doit être telle que les gouttes qui tombent des bords de la cloche ne puissent jamais atteindre le fil pendant leur chute. MM. Villard et Abraham ont, en outre, récem- ment montré que, pour une mème différence de potentiel, les étincelles de disruption ne se mani- festent pas de la même facon dans l'air libre et dans l'air sec dépouillé de son acide carbonique”. La différence de potentiel qui, à l'air libre, produit d'ordinaire une étincelle disruptive peut, dans le second cas, ne donner naissance qu'à une aigrette positive parfois à peine visible. Lorsque le voltage augmente, cette aigrette est remplacée par une gaine lumineuse anodique silencieuse, qui, aux nm mmaeUaUaUUUUU ! Guino SEMEN?A : Sur les isolateurs (Rapport au Congrès international des Applications de l'électricité de 1908, t. T, p. 71. Gauthier-Villars, éditeur, Paris, 1909). 2 P, Viccano et H. Agranau : Sur les potentiels explosifs (Comptes rendus, 25 juillet 4910). | voltages très élevés, aboutit à une étincelle. Ces phénomènes restent vrais qu'on expérimente avec une machine électrostatique, ou avec un transfor- mateur, ou encore avec une bobine d'induction. L'action exercée par la température sur la conductibilité de l'air se démontre en faisant jaillir un arc électrique entre deux cglindres de charbon ou entre deux tiges métalliques séparées par une mince couche d'air (1 ou 2 centimètres). A la température ordinaire, l'arc ne peut prendre naissance dans ces conditions: l'air est doncisolant. On peut l'amorcer, au contraire, en placant entre les deux extrémités cylindriques en regard la flamme d'un brüleur Bunsen : l'arc jaillit tout de suite et continue à passer même quand on éloigne la flamme. L'air à done acquis par la seule présence de cetle der- uière, c'est-à-dire par l'élévation de température en résultant, une conductibilité suffisante, d'abord pour amorcer l'arc et laisser passer le courant, et ensuite pour permettre à la flamme électrique de demeurer stable. $ 2. — Influence de la pression. De même que l'oxygène et l'acide carbonique, l'air devient conducteur lorsqu'on le fait sortir brusquement d'un récipient dans lequel il est resté pendant un certain temps sous pression. Avec l'air comprimé à 5 kilogs par centimètre carré, on constate d'abord que le gaz détendu porte des charges positive et négative, mais qu'il met en mouvement un excès de chaïge négative. Le phé- nomène est ceréndant assez irrégulier, car, même à débit constant, les courants recueillis sont très variables. Si l'on compare à ce point de vue l'air, l'hydro- gène et l'oxygène, on remarque que l'hydrogène, le moins isolant des trois gaz aux pressions élevées, devient le plus isolant aux basses pressions. L'acide carbonique est celui qui perd le plus son pouvoir isolant aux basses pressions. Étant donnée la mobilité extrême des ions positifs et négatifs, on ne peut admettre comme cause du phénomène le transport des charges par des pous- sières. D'après M. Bloch, la conductibilité ainsi acquise par les gaz et l'air en particulier serait due à la mobilité des ions eux-mêmes et au barbotage de ceux-ci à travers l’eau condensée à l’orifice de détente. D'après MM. Bouty et Wolf, on peut représenter par une équation simple les rapports existant entre la pression et la différence de potentiel nécessaire pour faire jaillir l’étincelle entre deux électrodes séparées par un milieu gazeux. Cette équation serait la suivante : y=a + bp, JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR 807 dans laquelle y désigne la tension de perforation | pagné d'un dégagement de chaleur. De méme, il (ou voltage de rupture), p la pression, à et » deux | en résulte un accroissement très sensible de la constantes : d est lié à la nature du gaz, a à celle | déperdilion d'énergie par la surface du conduc- des électrodes. teur, surtout dans le cas de courants alternatifs. Pour des pressions comprises entre 3 el 15 atmo- sphères, on à aussi indiqué la formule empirique suivante : v = 20 + 25,6p, qui exprime la relalion existant entre le voltage de perforation y et la pression p. S 3. — Influence de la tension. Champ critique. La conductibilité acquise par l’air à des voltages élevés a été spécialement étudiée par Ryan, Stein- metz, Scott et Merthon. Au delà d’une certaine limite, on constate, en effet, que la décharge disrup- tive se produit à travers l'air atmosphérique. Sui- vant le voltage, le courant de perte peut se mani- fester sous deux états : à l'état d'are et à l'état d'aigrette. Le dispositif de Ryan comprend en principe Fig. 2. — Dispositif de Ryan pour l'etude de la conduc- tibililé de l'air sous l'influence des voltages élevés. — ab, fil de cuivre; M. tube en tôle galvanisée; T, trans- formateur. (fig. 2) un fil de cuivre ab de 1"*,24 de diamètre, tendu suivant l'axe d’un tube M en tôle galva- nisée ayant 38 centimètres de diamètre et 4%,4 de longueur. Un transformateur T permet d'établir entre le fil et le tube une différence de potentiel pouvant atteindre 80.000 volts. On observe alors le moment où l’aigrette est visible dans l'obscurité et, d'autre part, on étudie la courbe du courant au moyen d’un tube de Braun. On constate ainsi que, jusqu'à 23.000 volts en- viron, il n'y à pas trace de conduction à travers l'atmosphère du cylindre ; mais, si l’on fait croître la tension, une légère déformation se produit dans la courbe de charge du fil : elle correspond à un accroissement du courant à l'instant où il passe par zéro. Une fois l'atmosphère devenue conduc- trice, c'est-à-dire la disruption accomplie, la défor- mation devient très notable, et à 48.000 volts, les courbes de charge du fil et de la tige n'ont plus de partie commune. Ces considérations présentent une grande impor- tance au point de vue industriel, l'air cessant de se comporter comme un isolant au voisinage des conducteurs traversés par des courants à haute tension. Celui-ci apparait alors comme entouré d'une gaine lumineuse, et le phénomène est accom- Le dégagement de chaleur ainsi produit peut s'ex- pliquer par la circulation, à travers la gaine lumi- neuse devenue conductrice, de courants de capacité. Cependant, l'arc ne peut pratiquement s'amorcer entre conducteurs que lorsque la tension électrique est devenue telle que sa valeur critique soil dé- passée pour toutes les parties de l'atmosphère gazeuse qui les sépare. Dans ses études sur les limites de l’état élec- trique, M. Bouty avait déjà établi que, si l’on soumet un gaz à un champ électrique intense, il devient conducteur". L'expérience qui permet d'arriver à celte conclusion est la suivante : On place entre les plateaux d’un condensateur un corps conducteur, un ballon rempli de mercure par exemple, et l'on fait traverser le condensateur par un champ élec: trique quelconque on constate que sa #4 —- DE c d capacité augmente, | PE 5 - — 6 Sn comme si l'on avait Z=P rapproché d’une cer- SRE taine quantité ses 6 deux plateaux. On ré- L « ù < l'os 7 3 ï Fig. 3. — Dispositif simple pète la même expe- démontrant l'existence du re % L champ critique. — à, b,c, d, rience avec un tube électrodes; P, pile; G, trans- à gaz raréfié, et l’on formateur. charge de nouveau le condensateur à des différences de potentiel va- riables : on remarque alors que, pour un tube donné et pour des diflérences de potentiel inférieures à une certaine limite, le tube à gaz demeure absolu- ment sans effet vis-à-vis du condensateur; il se comporte donc comme un isolant parfait. Au con- traire, pour des différences de potentiel élevées, il se comporte comme le ballon plein de mercure et livre passage à l'électricité : il est donc devenu conducteur. La limite des potentiels correspondant au passage évident du pouvoir isolant à la conduc- tibilité porte le nom de « champ critique ». On peut encore vérifier les faits précédents par une expérience fort simple : Une ampoule sphérique (fig. 3), munie de quatre électrodes à, b, e, d, communique, d’une part avec une pile P et un galvanomètre G établissant un circuit entre ec et d, et d'autre part avec deux fils ES 1 E. Boury : Les gaz envisagés comme diélectriques (Revue générale des Sciences, 15 janvier 1901) et Recherches sur la cohésion diélectrique des gaz {Bulletin de la Société francaise de Physique, 18 janvier 1901). — Voir également : Maurice LegLanc : Tubes à gaz raréfié de grande conducti- bilité (Bulletin de la Société internationale des Electriciens, 2e série, t. V, n° 45, année 1905). 808 JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR établissant un champ électrique entre a et D, à l'aide d’une source électrique extérieure. Dans les conditions ordinaires, aucun courant ne passe entre € et d; mais, si l'on établit une différence de potentiel croissante entre à et , il arrive un moment où l'aiguille du galvanomètre G est déviée, indiquant ainsi la présence d'un courant entre € et d. Cette aiguille revient au zéro de la graduation dès qu'on interrompt le passage du premier cou- rant entre à el ». Le phénomène est très net : il se manifeste même si le voltage de la pile P n’est que de { volt. Il découle de ces expériences que l'air placé dans un champ électrique inférieur à une certaine limite critique isole et que, dans un champ supérieur à cette limite critique, il conduit le courant électrique. Les recherches de M. Chassy, effectuées à l'aide d'un condensateur à gaz', ont abouti aux mêmes conclusions. $ 4. — Influence de la nature du courant et de la constitution des électrodes. Le coefficient de rigidité électrostatique de l'air, c'est à-dire la valeur maxima de la pression élec- trique pouvant être atteinte sans qu'il se produise de rupture, peut être mesuré d'une facon assez exacte par l'emploi de la décharge disruptive entre deux sphères d'égal diamètre. A la suite d'essais effectués avec du courant continu et du courant alternatif, Russell a été ainsi conduit à admettre que ce coefficient est de 38.000 volts environ par centimètre. Ce chiffre ne peut cependant pas être regardé comme définitif, attendu que la forme des électrodes exerce, elle aussi, une influence assez marquée sur les résultats obtenus, principalement aux basses tensions. Les chiffres que nous donnons ci-dessous se rapportent à une série de mesures effectuées à l'aide de sphères. Pour une épaisseur d'air comprise entre 0 et 1 millimètre, on a les résultats suivants: ÉPAISSEUR VOLTS EFFICACES DRE AN STE Elu pe 400 DAS RE An ie et ee ne TS ee s00 0mm,26. . 1.200 (ENST EE NS 1.500 Omm,53, . . 2.000 Onmm,68. . . 2.600 Oum Br nl a er 800 La figure 4 donne la valeur de la rigidité électro- statique de l'air entre 0 et 25.000 volts. On remar- quera que la courbe D, qui concerne un essai effectué à l’aide de pointes, est très différente de la courbe a, qui se rapporte à un essai effectué au moyen de ‘ A. Cuassy : Sur la conductibilité d'un gaz à la pression almosphérique sous l'influence d'une haute tension alter- native (Comptes rendus, 5 juillet 1909). boules de 10 millimètres de diamètre, et de la courbe c, relalive à un essai effectué entre deux plaques métalliques. La figure 5 donne les voltages de perforation jusqu'à 100.000 volts. Aux tensions élevées, les 25000 20000 15000 VOIES 10000 5000 [e) 5 10 15 20 25 30 Millimètres + Fig. 4. — Rigidité électrostatique de l'air entre O0 el 25.000 volts. — a, entre boules: b, entre pointes; c, entre plaques. courbes semblent se rapprocher; la courbe à se rap- porte à une mesure effectuée entre deux sphères ayant 10 millimètres de diamètre, les deux autres à des essais entre pointes métalliques (b, d'après Walter; L', d'après Benischke). Pour les voltages très élevés, les mesures ne sont guère possibles que par l'emploi de bobines d’in- duction”. Voici les réultats obtenus entre 400.000 et 100 000 CAE ne 80 000 20 000 Centimètres L 5. — Vollages de perforation jusqu'à 100.009 volts. — a, entre sphères; b, b', entre pointes. Fig. 200.000 volts par Voege et par l'American Institute ol Electrical Engineers : DIFFÉRENCE DE POTENTIEL en volts LONGUEUR = de l'élincelle Voege Amer. Institute 20 millimètres . . 119.000 122.000 2ù — rte. 10140:600 146.000 30 — 165.700 170.000 35 — 190.900 193.800 ——_—_—_—_—————— 2 VorGe : Sur la relation entre la distance explosive et la tension (Drude's Annalen, n° 13, année 1903). JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR La concordance est très satisfaisante. La figure 6 montre les principales formes d'élec- tredes que l’on peutemployer dans ce genre d'essais. Quelle que soit cependant la forme adoptée, il est essentiel d'en prendre note à la fin de l'essai et de ne comparer entre elles que les mesures effectuées dans des conditions identi- ques. Parmi les nom- breuses causes capa- bles de différencier les résultats obtenus avec un même gaz, il convient de signaler, en effet : 1° l'action des poussières en sus- pension dans l'air ou déposées sur les élec- trodes ; 2° l’action des aigrettes et des efflu- ves qui donnent tou- jours naissance à une certaine quantité de lumière ultraviolette si les électrodes ne sont pas protégées par des écrans convenables ; 3° les transformations physiques et chimiques apportées continuellement à la surface des électrodes et aux points de départ des étincelles ou des effluves. Signalons enfin les essais effectués comparative- ment avec du courant continu et avec du courant alternatif. Par l'emploi du courant continu (plaque et pointe), les distances d’éclatement sont beaucoup Fig. 6. — formes d électrodes employées pour mesurer la ri- gidité électrostatique de l'air. plus grandes lorsque c'est la pointe qui constitue 60 000 50000 40 000 — “ 30 000 Volts Z0 000 0 20 #0 60 80 100 120 140 Millimetres —— Fig. 7. — Distances d’éclatement en courant coutinu el en courant allernatif avec diverses sortes d'’électrodes. l'électrode positive (fig. 7). On constate, en outre, que les voltages de rupture sont plus faibles avec le courant continu qu'avec le courant alternatif; ces derniers résultats peuvent s'expliquer facilement, attendu que, dans le cas du courant alternatif, les élincelles de décharge sont produites par la tension 809 maximum (supérieure à la lension efficace, alors que, dans le cas du courant continu, ces deux len- sions peuvent être considérées comme confondues $ 5. — Influence des émanations radio-actives L'étude de la conductibililé acquise par les gaz, en particulier par l'air, sous l'influence des émana- tions radio-aclives a eu pour point de départ les premières éludes faites par Becquerel sur lura- nium. C'est ce physicien qui a montré, le premier, comment les rayons émis par cetle substance sont capables de décharger un électroscope chargé d'électricité ; tous les rayons du radium pro- duisent aussi ce phénomène, qui a été ulilisé jusqu'ici avec succès pour mesurer l'intensité des radiations émises par les substances actives. L'air rendu conducteur par l’action du radium laisse passer la décharge ou le flux électrique, en amenant, par suile, une dispersion de l'électricité autour de sa masse. Il est une expérience que l'on peut réaliser faci- lement etquimé- rite d'être signa- hit —# lée ici, parce al = Ë qu'elle fait partie n intégrale du su- DER RE jet qui nous oc- on cupe : —0< = 9 On prend un ” fragment dre M5, Paie démons dium et on l'in- actives sur la conductibilité de l'air. rod danse Lin ele One dehors kortf; pp', circuit secondaire; m, voisinage de m', éclateurs. deux métaux sé- parés par une couche d'air, puis on relie les mé- taux à un électromètre; on voit alors celui-ci indi- quer la présence d'une force électromotrice, qui dure lant que le radium exerce son action et qui provient du couple formé par ces mélaux et Fair devenu conducteur. Une autre expérience, aussi concluante que la précédente, permet de mettre en évidence d'une facon très nette cette propriété. On se sert pour la réaliser d'une bobine de Ruhmkorff de taille moyenne B (fig.8); son cireuit primaire est traversé par le courant d'une batterie de piles ou d'accumu- lateurs À, et son cireuit secondaire pp' disposé de facon qu'il puisse livrer passage à l'étincelle par deux chemins différents m et m', c'est-à-dire qu'il existe deux dérivations sur le cireuit secon- daire. Ces deux chemins, tels qu'ils sont offrent la même résistance à l'étincelle, et, en effet, dès qu'on fait fonetionner la bobine, on voit l'étin- celle passer indifféremment par chacun des deux chemins m ou m'. L'air interposé entre les deux disposés, 810 pôles de chaque circuit présente donc la même résistance. Mais, si nous approchons de l'appareil un petit tube contenant un sel de radium et si nous le placons sur l'un quelconque des deux chemins que peut suivre l'étincelle, en m! par exemple, immé- diatement nous voyons l’étincelle éclater toujours de ce même côté. C'est donc que le chemin en est devenu plus conducteur du courant, et en fait l'étincelle ne jaillit plus en m. Si nous disposions le tube à radium en m, nous verrions de même l’étincelle se déplacer et jaillir de ce côté-là : elle suit donc à chaque instant le chemin le plus conduc- teur. Le rayonnement du corps actif facilite ainsi le passage de l'étincelle électrique dans Pair en diminuant la résistance de ce gaz. On peut modifier légèrement cette expérience en disposant simplement sur le circuit secondaire de la bobine de Ruhmkorff, et en série avec lui, un tube de Geissler et un éclateur d'’étincelles (fig. 9). On fait d'abord fonctionner la bobine, mais on la dispose de facon que l'étincelle ne puisse jaillir, Fig. 9, — Modification de l'expérience de la figure 8. — a, b, éclateurs. les boules des éclateurs a et D étant séparées par un espace d'air suffisant. Si l’on place ensuite, entre les deux extrémités des tiges de l’éclateur b, un tube contenant quelques cenligrammes de bromure de radium, immédiatement le courant passe, illu- mine le tube, et l’étincelle jaillit au travers de l'air interposé entre les deux bornes libres de l'écla- teur. L'air n’est, du reste, pas le seul gaz qui puisse ainsi jouir de cetle conductibilité accidentelle l'hydrogène, l'oxygène, l'acide carbonique présen- tent la même propriété. On admet généralement qu'elle est due à des centres chargés d'ions positifs et négatifs. Certains corps autres que les substances radio-actives proprement dites peuvent, du resle, produire le même effet; le phosphore, en particu- lier, rend conducteurs l'air et quelques autres La cause de ce phénomène doit être attribuée à la propriété que possèdent les ions gazeux de servir de noyau de condensation à la vapeur d'eau celle-ci amène ainsi, par sa seule présence, un accroissement de la conductibilité des corps sur lesquels elle se concentre et facilite l’action des décharges au travers des gaz réputés isolants. JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR II. — EMPLOI DE L'AIR COMME ISOLANT ÉLECTRIQUE. $ 1. — Air à la pression ordinaire : càbles à isolement par l'air. Ê Il résulte des considérations précédentes que: l'air peut être tenu pour un très bon isolant lors- qu'il est convenablement desséché, exempt de poussières ou de vapeurs conductrices et soustrait 7 Z 2222 7 A Fig. 10. — Conducteur à perles isolantes. — c, conducteur; A, perles en bois, verre ou porcelaine; #», enveloppe extérieure. à l’action des hautes températures et des champs électriques intenses. Dans ces conditions, son emploi est très avantageux pour l'isolement des, fils et câbles et il convient tout aussi bien que la plupart des isolants solides actuellement utilisés dans l'industrie. Isoler un câble par l'air consiste, en principe, à disposer concentriquement le conducteur et l'en- veloppe protectrice en les séparant par une couche d'air d'une épaisseur appropriée à la nature du mélal el au voltage du courant employé. En pra- tique, on ne procède jamais autrement, mais on. adopte des dispositifs différents suivant l'emploi réservé au càble. Ur des procédés les plus simples consiste à enfiler sur le conducteur des perles isolantes qui permettent la libre circulation de l'air autour des fils. Comme le montre la figure 10, l'âme conduc- trice c est protégée par une suite ininterrompue de perles rondes ou cylindriques A en bois, en verre où en por- celaine; ces perles ,€ =) M T T isolent ainsi les fils de l'enveloppe extérieure 2» et per- mettent la circula- tion de l'air. Plu- sieurs fils peuvent être placés côte à côle dans une même enveloppe protec- trice, sur laquelle on dispose une ou plusieurs enveloppes de plomb. Pour diminuer la capacité des càbles télépho- niques et les mettre en contact avec la plus grande quantité d'air possible, Ferranti a donné à l'âme du conducteur une forme zigzaguée {fig. 11, a et b) ou ondulée (fig. 11,6), telle qu'il y ait le moins possible de points de contact entre elle et son. enveloppe extérieure. On peut également donner à l'âme du càble une forme rectiligne et la munir Fig. 11. — Conducteur à äme en zigzag (a, b) ou ondulée (ec). JEAN ESCARD — PROPRIÉTÉS DIÉLECTRIQUES DE L'AIR eee de supports empêchant tout contact avec l'enve- loppe. Pour cela, après avoir formé une sorte de carcasse creuse autour du conducteur central, on entoure celle-ci d'une bande de papier de largeur appropriée, et sur cette bande on en enroule une ou plusieurs autres semblables en formant ainsi un tube dont l'axe correspond au fil conducteur. Pour placer plu- GO ‘D «D Fig. 42. — Coupe de conducteurs tordus en hélice. sieurs de ces tu- dans une méme envelop- pe, on les tord bes en hélice ; en sec- tion, ils présentent alors la disposition de la figure 12, 2; à l'aide d'une filière, on peut ensuite leur donner facilement les formes représentées par la figure 12, b et c. Plusieurs cäbles peuvent, enfin, être réunis dans une même enveloppe de manière à présenter la disposition des figures 13 et 14. Un autre procédé intéressant consiste à ménager, parallèlement au câble central et sur toute sa longueur, des espaces d'air suffisants, en plaçant de petites cloisons isolantes tout le long du fil; ces cloisons sont généralement conslituées par du papier. Dans une autre méthode, on entoure les diffé- rents conducteurs de feuilles de papier portant des saillies ou des gaufrages ; on diminue ainsi la capacité du cäble et les phénomènes d'induction dont il pourrait être le siège. Les conducteurs € (lig. 13) sont entourés de bandes de papier À à saillies pointues ou pyramidales, et ces bandes, en se recouvrant l’une l’autre en spirale, forment des parties renforcées qu'on dispose les unes contre les autres lorsqu'on désire fabriquer un càble m» à plusieurs conducteurs. Ce dernier procédé présente l'avantage de ne mettre en contact l'isolant et l'âme métallique conductrice que par un très grand Fig. 14. Fig. 15. Fig. 13, 14 et 15. — Cäbles à plusieurs conducteurs. nombre de pointes fines. La circulation de l'air entre les deux constituants du câble est ainsi assurée d’une facon parfaite tout autour des fils centraux, et les contacts sont réduits à leur mini- muIm. Dans ce genre de fabrication, il est essentiel de disposer l’isolant et le conducteur de telle sorte s11 sieurs fils n'aplatisse pas les enveloppes de papier et ne réduise pas à une valeur presque nulle les espaces réservés à la circulation de l'air. Les qua lités du papier à employer sont les suivantes : il doit être uniforme comme épaisseur el couverture et composé de fibres allongées; il faut également qu'il soit très résistant et exempt de particules métalliques. Le cäble doit être séché à une tempeé- ralure maximum de 410° C., après avoir été posé el préparé à recevoir l'enveloppe de plomb; celle dernière doil pouvoir supporter une pression de 5 kg. 3 environ par centimètre carré el, comme l'humidité peut nuire considérablement à l'effet utile de ces cables, il faut avoir soin d'examiner la feuille de plomb pendant l'opération; elle doit être totalement exempte d'impuretés et de brisures. $ 2. — Emploi de l'air comprimé. Outre l'air à pression normale, on peut em- ployer l'air comprimé comme isolant, dans certains dispositifs d'expériences ou d'essais. En effet, si l'air provenant d’une détente subite à la sortie d'un réservoir d'air comprimé possède une conductibi- lité appréciable par le seul faii de cette détente, par contre l'air maintenu sous pression peut êlre con- sidéré comme un isolant. D'après M. Ryan, on peut utiliser cette propriété pour isoler de nombreux appareils employés comme généraleurs à haule tension. Ceux-ci sont alors enfermés dans un réci- pient capable de résister à des pressions élevées ; pour accroitre l'isolement, on introduit l'air dans le récipient à l'aide de pompes et de compres- seurs, jusqu à ce que la pression correspondant à la tension que les appareils doivent supporter soit obtenue. Ce procédé est particulièrement applicable aux transformateurs statiques, étant donné qu'à une pression voisine de 8 atmosphères le pouvoir isolant de l'air se rapproche très sensiblement de celui de l'huile; à 18 atmosphères, il est égal à celui de la micanite (mica aggloméré), et à 40 at- mosphères à celui du papier huilé. avantageusement $ 3. — Air liquide. La rigidité électrostatique de l'air liquide a été mesurée par M. Jona à l'aide d'un dispositif formé d'une pointe métallique et d'un plateau placés en regard l'un de l’autre. En plongeant l'appareil ainsi constitué dans un bain d'air liquide, on peut mesurer aisément les distances explosives cor- respondant à des voltages déterminés et crois- sants. Les chiffres ci-dessous expriment, en milli- mètres, les longueurs d'étincelle correspondant à que la pression résultant de l'association de plu- | différentes tensions exprimées en volts : 812 VOLTS DISTANCES EXPLOSIVES 10.000 . 1mm 20.000 . 9umm 50.000 . gum 2 50.000 . . {$mm 100.000 . . 24;wm Ces chiffres montrent que l'air liquide possède une rigidité électrique très élevée. Comme isolant, il est même de beaucoup supérieur aux huiles de lin, de colza et d'olive et peut être comparé, à ce point de vue, au toluène, au xylène et au benzène. Mais l'air liquide possède aussi une autre pro- priélé; par suite de sa très basse température, il diminue considérablement la résistivité des fils que l'on immerge dans sa masse. Done, si l'on place des transformateurs ou autres appareils à haute tension dans un bain d'air liquide, non seu- lement l'isolement sera parfait, mais il en résultera également une grande diminution dans la résis- tance ohmique du cireuit. Elihu Thomson s'était fondé sur ces considéra- tions pour démontrer qu'il serait possible de LE BLANC L'attention des forestiers est tenue en éveil par l'extraordinaire progression de l'Oidium du Chêne, champignon qui, depuis 1907, ravage les jeunes sujets en France et dans presque toute l'Europe: gagnant le Maroc, l'Algérieet Madère. S'agit-il d'une invasion d'origine américaine, comme pour l'Oidiun: de la vigne, ou d'uneaggravation insolite dela viru- lence d'une espèce indigène? Dans l’état actuel de n0s connaissances sur les flores mycologiques, on peut être surpris qu'une question de ce genre cause de l'embarras. Ne suflit-il pas de déterminer exac- tement à quelle espèce appartient le parasite? Malheureusement, cette détermination est fort délicate, parce que l'agent de la maladie actuelle ne forme que des fructifications accessoires ou appareils conidiens. Celles-ci, avec les filaments parasites dont elles émanent, permettent d'assurer qu'il s'agit d'un champignon de la famille des Erysiphacées; mais les genres classiques entre lesquels on à réparti les membres de cette famille sont fondés sur les caractères des périthèces, dont la recherche sur les Chênes malades est jusqu'ici restée vaine. En compulsant les collections et les ouvrages anciens, on trouve plusieurs mentions d'Erysi- phacées sur les Chênes européens. Ainsi que le PAUL VUILLEMIN — LE BLANC DU CHÊNE réduire dans une très forte mesure les quantités énormes de cuivre actuellement utilisées pour la transmission de l'énergie électrique. Si la pratique le permettait, l'évaporation produite en pure perte par l'air liquide emmagasiné dans des conduites spéciales autour des câbles conducteurs ne serait même pas à envisager à côté de la grande économie ainsi réalisée sur le poids du cuivre. Bien que loin d'être réalisée, cette idée ne perd pas de sa valeur théorique et semble confirmer l'hypothèse formulée il y a près d’un siècle par Ampère, d'après laquelle les espaces intermolécu- laires des corps seraient la seule cause de leur résistance au passage du courant. L'expérience semble, du reste, en rapport avec cette manière de voir, Car, à la température de l'hydrogène liquide (point d'ébullition : — 252), les pertes dues à la résistance d'un fil de cuivre sont cent fois moindres qu'à la température ordinaire. Jean Escard, Ingénieur civil. D LCHÈNE ) rappelle M. Boudier!, l'£rysiphe Quercus Mérat est signalé aux environs de Paris depuis soixante ans passés. Le champignon de Mérat diffère du parasite de l'épidémie actuelle. La description de Mérat ne mentionne pas d'appareil conidien, mais seulement des périthèces qui semblent appartenir au genre Phyllactinia. On connaît sur le Chêne une espèce de ce genre, le Phyllactinia corylea, signalé par M. Salmon sur les feuilles de treize espèces du genre Quercus. Selon une remarque de M. O. Kirchner’, on observe aussi sur les feuilles de Chêne des périthèces détachés des feuilles de Noisetier et déposés par le vent sur les Chênes du voisinage. M. Pâque” est disposé à incriminer le PAyllac- tinia cor ylea, dont il a récolté les périthèces sur les Chênes malades. Cetteopinion ne se soutient pas, car tous les Phyllactinia connus présentent des conidies bien différentes de celles qui forment les efflorescences du blane du Chêne. Celles-ci ant la forme de tonnelets, celles-là ont une forme de massue bien décrite parles frères Tulasne ‘, MM. Patouillard et Hariot*, M. Salmon”. La distinction est si frap- pante que MM. Patouillard et .Hariot ont créé un C. R. Acad. Se., t. CXLVII, 31 août 190$. Naturw. Zeitschr. f. Land. u. Forstw.,t. VII, 1909. Bulletin Soc. R. botan. Belgique, t. XLV, 1908. Selecta Fungorum Carpologia, t. 1. Journal de Botanique, 1900. + eu + & © » Annales mycologici, t. VII, 1904. PAUL VUILLEMIN — LE BLANC DU CHÊNE genre Ovulariopsis pour la forme conidienne des Phyllactinia, opposée aux Oidium. M. Neger' insiste sur une autre différence lirée du mycélium : dans l'Oidium du Chêne, les filaments végétatifs restent superficiels au lieu de pénétrer par les stomates el d'envoyer dessucoirs dansles cellules du mésophylle. L'Erysiphe Quercus Mérat et tous les Phyllac- Linia se 'ouvent done exclus du débat. Un autre genre d'Erysiphée, le genre Wicro- spluera, est représentésur les Chênes européens par le Microsphæra quercina Schw., généralement rattaché au Microsphiera Alni (Wallr.) qui s'atta- que à diverses essences ligneuses. Le mycélium et l'appareil conidien de ce Wicrosphæra ne présen- tent pas, à l'égard du blanc du Chêne, le contraste mentionné à propos des PAyllactinia. M. Hariot* ne relève même aucune différence. D'autre part, M. Mayor’ avait découvert à Genève, avant l'épi- démie actuelle, un Aicrosphæra sur les Chênes avec la forme Oidium qui caractérise le blanc. Mais, selon la remarque de MM. Griffon et Mau- blanc‘, les Aunes se montrent indemnes au milieu de Chênes atteints du bläne. M. Trotter ‘en conclut que le Microsph:ra quercina est confondu à tort avec le Microsphæra Alni, malgré la ressemblance morphologique des deux espèces. MM. Neger”, O. Kirchner’, E. Fischer”, ont songé à l'importation possible d’un parasite étranger, par exemple du Wicrosphæra extensa Cooke et Peck, comaun dans l'Amérique du Nord sur les Quercus rubra, coccinea, ete. Cette espèce diffère peu du Microsphæra Alni; elle en constitue, pour M. Sal- mon, une simple variélé locale. Si l’on admet que c'est une race spécialisée aux Chênes américains, une nouvelle difficulté surgit, car d'après les obser- vations simultanées de MM. Bureau”, Guinier‘°, La- peyrère"", Hariot®, les Chènes importés d'Amérique sont généralement respectés par l'épidémie actuelle, ou n'offrent que des taches limitées sur les jeunes pousses. Le mycélium et l'appareil conidien du blane du Chêne offrent quelques différences, entrevues par M. Ducomet”, avec le Microsphæra Alni (y compris M. quercina et M. extensa). M. Ferraris'* signale 1 Naturw. Zeitschr. f. Land. u. Forstw., t. VII, 1909. ? Bulleiin Soc. mycol. France, t. XXII, 1907. * Bulletin Soc. neuchät. Sc. nat., t. XXXVI, 1909. : * C. R. Acad. Se., 24 août 1908. — Bulletin Soc. mycol. France, t. XXV, 1909. # Bollet. Soc. botan. ilal., 190$. 5 Naturw. Z.f. Land. u. Forstw., t. VI, 1908. 7? Naturw.Z.f. Land. u. Forstw.,t. VII, 1909. Schweiz. Zeitschr. f. Forstwesen, 1909. " C. À. Acad. Sc., 28 sept. 1908. 1° Feuille des Jeunes naturalistes, t. XXXIX, 1908. 2PThIo. 8 12 C. R. Acad. Sc., 2 nov. 1908. 1% Annales Ecole n. Agric. Rennes, t. 11, 4908. LE] Annales Mycologici, t. VI, 1909. #13 | des renflements gemmiformes formés aux dépens du mycélium, capables de résister aux rigueurs de l'hiver et de suppléer à l'absence de périthèces, I estime que ce caractère légitime la création d'un nom de variélé et propose d'appeler 44 interim l'agent de la maladie du Chêne Oidium quercinum var. gemmiparum. MM. Griffon et Maublanc' cons- latent que les conidies des Microsphæra ont des bouts arrondis et non tronqués comme dans l'Oj- dium du Chêne, pour lequel ils proposent un nou- veau nom spécifique, (idium alphitoides. De constatations, on peut conclure que les essais tentés pour rattacher le blane du Chêne à une Erysiphée définie par ses fructifica- ces intéressantes tions supérieures, par ses périthèces, n'ont pas abouti. 11 semble en résulter, de plus, que l'impor- tation récente d'un parasite des Chènes américains est peu probable. Cependant la d’un nouveau nom de variélé ou d'espèce ne suflit pas pour nous con- vaincre que l'affaire est définitivement classée, et que nous ne saurons jamais d'où vient le redou- table parasite du blanc du Chêne. Est-ce une espèce autochtone où d'importation plus ou moins loin- taine? Est-ce un parasite primitif du Chêne ou une Erysiphée vivant d'habitude sur d'autres plantes et d'autant plus redoutable que son hôte accidentel n'a pas l'habitude de supporter ses exigences et de réagir de façon à rendre tolérable la vie commune, insi que le font tant de plantes en présence d'un parasite héréditaire? Telles sont les nouvelles hypo- thèses qui se posent et que nous allons examiner. création II Mesnier signala, en 1877, en Portugal, aux envi- rons de Coïmbre, une Erysiphée du Quercus race- mosa qui fut décrite et publiée l'année suivante par von Thümen, sous le nom d'Oidium quercinum. Cette espèce est souvent considérée comme iden- tique à la forme conidienne du Wicrosphiera quer- cina. MM. Griffon et Maublanc® croient apporter une preuve décisive en faveur de cette opinion par l'examen des spécimens conservés dans l'herbier de von Thümen. Malheureusement, cet examen n’a fourni aucun renseignement sur le mycélium ni sur les conidiophores. Toute l'argumentation porte sur la forme des conidies, arrondies aux extrémités et relativement moins larges, non renflées. D'ail- leurs, la description de MM. Griffon et Maublanc concorde avec celle de von Thümen, qui, selon la re- marque de M. Ferraris*, convient à l'espèce actuel- lement en cause lorsque celle-ci est peu développée. 4 Bulletin Soc. myvcol. France, t. XXVI, 1910. 2 Bulletin Soc. mycol. France, t. XXVI, 1910. 3 Annales mycologici, t. VII, 1909. 814 PAUL VUILLEMIN — LE BLANC DU CHÊNE Un éminent mycologue portugais, M. Torrend", ne croit pas possible de rattacher l'échantillon de von Thümen au Microsphicra Alni, attendu que cette espèce est inconnue en Portugal, notamment dans Ja région de Coïmbre qui a fait l’objet des explora- tions et des études des maitres de la Mycologie : Henriques, À. Müller, von Thümen, Niessl, Winter, Berlese et Roumeguère, Bresadola, Saccardo. En somme, l'Oidium quercinum von Thümen n'est probablement pas un Wicrosphæra. W n'est pas prouvé qu'il diffère du parasite actuel. M. Maire”, M. A. Trotter * sont disposés à l'identifier avec ce dernier. Mais les preuves morphologiques sont insuffisantes. Quoi qu'il en soit, cette observation indique la présence relativement ancienne, en Europe, d'un Oidium du Chêne, qui à pu être négligé des bota- nistes, parce qu'il se présente sans périthèces et, par suite, n'est pas facile à identifier. Reste à faire appel à l'expérience des agriculteurs qui, sans se soucier de la détermination bota- nique, ont remarqué, avant l'épidémie actuelle, des Chênes plus ou moins largement attaqués par le blanc. Au rapport de M. Couffon*, le blanc du Chêne a causé de sérieuses inquiétudes dans la Mayenne à diverses reprises et pour la dernière fots en 1903. L'enquête poursuivie en Portugal par M. Torrend° fournit des résultats plus précis. La maladie a été reconnue depuis 8, 11 et même 16 ans, dans la province de Beira. À Ceia, la ma- ladie invélérée ne limite plus ses attaques aux feuilles des branches inférieures; elle atteint les Chènes bien formés et s'élève jusqu'aux branches supérieures. Sans revenir sur l'identification épi- neuse de l'Oidium quercinum, remarquons que les échantillons de Thümen provenaient de Coïmbre, ville de la province de Beira Le foyer qui s'est étendu avec une rapidité fou- droyante à partir de 1907, vers l’est de l'Europe et vers l'Afrique, était done allumé depuis de longues années au voisinage de l'Atlantique, en Portugal et en France. Les débuts de l'épidémie étaient lents et localisés ; mais déjà le blanc du Chêne était une maladie sérieuse, s'aggravant progressivement. La brusque exacerbation du fléau et son allure tout à coup envahissante n'en marquent pas moins un phénomène nouveau, dontil faut rechercher la cause dans les circonstances extérieures au Chêne et à l'Oidium. Dans ses célèbres recherches sur les constitutions épidémiques, Sydenham parle d'une année néfaste von 1 Broteria. Ser, botan., L. VII, 3, 1909. * Bulletin Soc. mycol. France, t. XXIV, 1908. * Bollet. Soc. botan. ital., 1908. * J‘euille des jeunes naturalistes, t. XXXIX, 1908. 5 Broteria. Sér. botan., t. VILS, 3, 4909. pour la santé humaine, caractérisée par des pluies incessantes et par l'apparition de la rouille des feuilles, dont il avait maintes fois remarqué la coïn- cidence avec les épidémies. L'origire cryptogamique de la rouille n'était pas soupconnée au xvr° siècle; ses connexions avec l'humidité, pépinière de mala- dies, n'en étaient pas moins relevées par le mer- veilleux esprit d'observation d'un médecin doublé d’un mathémalicien el d'un naturaliste. Nous retrouvons en 1907 une constitution épidé- mique analogue. M. Gard” insiste sur [a prospérité de tous les (idium en France en 1907. M. Päque” attribue aussi à des conditions atmosphériques exceptionnellement favorables aux Erysiphées l'extension subite de la maladie du Chêne. La ma- ladie ne parait pas sévir avec intensité en Allemagne avant 1908. M. Rübsaamen, au rapport du Profes- seur Paul Magnus”, l'avait signalée à Remagen sur le Rhin en octobre 4907; puis M. Geisenheyner la trouve à Kreuznach en juillet 1908. Cette même année, diverses observations attestent la prospérité d'autres espèces d'Üidium : des périthèces sont observés par M. Bubak# sur le Sphærotheca mali, généralement réduit aux appareils conidiens; en méme temps, M. Laubert’ constate en Allemagne l'abondance exceptionnelle des périthèces sur le Podosphæra leucotricha (El. et Ev.). Le blanc du Chêne apparait comme une extension rapide d'une maladie primitivement localisée dans l'Europe occidentale, principalement en Portugal et en France. Comment s'est constitué ce foyer ini- tial? M. Paul Magnus” suppose que l'Oidium du Chène est une espèce indigène vivant normalement sur une plante différente et devenue accidentelle- ment parasite de l'arbre. Il'cite à l'appui de cette opinion le fait que le Lilas, exempt d'Erysiphées dans l’ancien continent, sa patrie, est attaqué, dans l'Amérique du Nord, par l’£rysiphe Syringeæ Schweinilz, considéré par M. Salmon comme une forme du Microsphæra Alni. Un changement d'hôte analogue aurait pu faire de nos Chênes la proie du même icrosphsera ou d'une espèce voi- sine. M. Torrend® croit aussi à un changement d'hôte. Mais, à son avis, l'hôte primitif n’est pas indigène. Le Portugal a été peuplé d’une foule d'essences provenant des colonies à des dates souvent recu- lées. L'histoire nous fournit en foule des exemples de parasites exotiques qui, dans leur nouvelle ‘ Journal de Botanique, t. XXI, 1908. ? Bulletin Soc. R. botan. Belgique, 1. XLV, 1908. 3 Socicté Naturalistes luxembourgeois, t: IN, 1910. * Zeitschr. landw. Versuchswesen (Œsterreicbs, 1909. 5 Deutsche landw. Presse, t. XXXV, 1908. “ Soc. Naturalistes luxembourgeois, t. I, 1910. 7 Broteria. Sér. botan., t. VIII, 3, 1909. Wien. PAUL VUILLEMIN — LE BLANC DU CHÊNE 815 patrie, disparaissent de leurs hôtes primitifs, tandis qu'ils envahissent des espèces indigènes qui leur offrent une proie facile et un milieu de plus en plus propice à leur développement exubérant. Tel est le phylloxéra américain, fatal aux vignes euro- péennes. Le Sphærotheca mors-uvæ, importé d'Amérique, est plus nuisible aux Groseilliers d'Eu- rope qu'à ceux de son pays. En Allemagne, d'après M. Meyer, les Groseilliers indigènes résistent au Peridermium Strobi du Pinus monticola, landis que la rouille de cet arbre européen attaque le Ribes sanquineum, originaire d'Amérique. M. Torrend émet l'hypothèse que l'Oidium quer- cinum, dont la patrie et l'hôte primitif sont incon- nus, s'est d'abord développé accidentellement et chétivement sur les Chênes d'Europe, que des cir- constances climatériques exceptionnelles, relevées ‘dans ces dernières années, lui ont donné une vigueur subite sur son nouvel hôte, peut-être à la suite de la formation de quelques périthèces. Si les germes primordiaux viennent de colonies éloignées, il n’en résulterait pas nécessairement qu'ils fussent d'importalion récente. L'existence de périthèces, du moins dans les foyers actuellement ravagés par le blanc du Chène, ne repose jusqu'ici sur aucune observalion. Au reste, beaucoup d'espèces se propagent lofgtemps ‘par les moyens purement végélatifs. La dissémina- tion est amplement assurée par les conidies. Au point de vue de la résistance pendant les phases de repos, les chlamydospores mycéliennes signalées par M. Ferraris pourraient suppléer à l'absence de périthèces. Chez les espèces voisines qui s'attaquent à d'autres végétaux que le Chêne, on a signalé des formes hivernantes dépendant du mycélium. Selon M. Appel, les sucoirs épaissis de l'Oidium de la Vigne persistent dans l'écorce d’une année à l'autre, M. Wortmann admet la survie du mycélium ordi- paire. L'Ordium du Pommier se trouve dans le même eas : M. C. von Tubeuf*, ayant conservé en serre des Pommiers plantés dans des caisses, vit les bourgeons débourrer au commencement de mars par üne température de 4° R. environ. Toutes es feuilles de certains bourgeons se couvrirent aussitôt d'une efflorescence blanche formée de coni_ dies. 11 était évident que le mycélium avait hiverné dans ces bourgeons. On ne voyait, en effet, aucune trace de périthèces dans le voisinage. L'absence de périthèces dans l'Oidium du Chêne, observée jusqu'ici, n’est qu'un résultat négatif, dont on ne saurait inférer que cette espèce est incapable d'en former, où qu'elle a perdu celte propriété en 4 Naturw. Zeitschr. Forst. und Landwirthschaft, t. NII, janv. 1910. l changeant d'hôte. De longues années ont précédé la découverte des périthèces de l'Oidium de la Vigne, qui n’en est pas moins considéré comme un parasile propre à ce genre. Une récente remarque de M. Voglino' ouvre uni nouvelle piste aux recherches concernant la patrie et l'hôte primitifs de l'Oidium du Chêne. Les men- suralions qu'il a effectuées sur les conidies de ce dernier fournissent les chiffres de 30-40 sur 16-22 y, qui concordent avec ceux que M. Harkness ! assigne aux conidies de l'Oidium ventricosum Markness, soit 34-38 sur 20-22 y. Celle espèce à été trouvée en Californie sur la face inférieure des feuilles de Quercus agrilolia et rapportée au Sphiærothoca lanestris Harkn. Le Quercus agrilolia, où quelque autre plante américaine l'Oidium pourrait avoir été introduit autrefois en Portugal Mais ce point reste obscur. hébergeant veutricosum, III En résumé, diverses données concordent pour établir que le blanc du Chène est déterminé par une Erysiphée importée en Europe avec un hôt différant des espèces de Chêne les plus répandues, soit en Europe, soit en Amérique. Cette Erysiphé n'apparlient, sans doute, ni au genre /Lyllactinia, ni au genre Jicrosphæra. Elle pourrait représenter la forme conidienne d'un Sphærotheca et parti- culièrement du Sphærotheca lanestris Harkness. L'introducteur n’est pas nécessairement un Chêne. Le foyer inilial de la maladie semble s'être établi en Portugal depuis longtemps, peut-être avant la découverte de l'Oidium quercinum 1877). Ce der- nier pourrait être le parasile actuel au début de son acclimalation au Chène. Mais nous pensons qu'il faut garder la réserve sur son identification. Au point de vue épidémiologique, nous assistons à une crise qui n'est pas sans analogie avec les grandes invasions de peste ou de choléra. La popu- lation de nos forêts européennes et africaines esl neuve à l'égard de l'agent parasitaire. Mais celui- ci ne provient pas d'un domaine où il exercait de temps immémorial de semblables ravages, comme le microbe dans les terres classiques de la peste et du choléra indien. La virulence de l'Oidium est neuve comme la réceplivité du Chène, et tout porte à croire qu'elle est née du conflit également nou- veau des deux organismes. Nous distinguons deux élapes bien nettes dans la marche du fléau. La première est caractérisée par la formation d'un foyer d'endémicité dans l'Europe occidentale, foyer d'abord circonscrit à quelques points du Portugal 1 Annali R. Accad. di Agricollura di Torino, t. LIT 4940. 816 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE et des côtes francaises de l'Atlantique. Le parasite, venu de l'Amérique, où il vivait en paix avec des hôtes habitués à le nourrir, s'est implanté, sans doute péniblement et lentement, sur des espèces de Chênes qui lui étaient jusqu'alors étrangères, et peu à peu s'est fortifié au point d'éveiller des inquiétudes passagères chez les agriculteurs de Portugal et de France. La seconde période, caractérisée par une exten- sion subite et une gravité qui a jeté l'alarme dans l'Europe entière, est la période épidémique préparée par la période endémique. Ce brusque changement d'allure de la maladie du Chêne à été déterminé par un changement climatérique. On ne connait aucun remède pralique à tenter contre le blanc du Chêne, et la prophylaxie n’est guère mieux armée. Nous pouvons du moins espérer, avec M. E. J. Klein ‘, que les germes rede- viendront inoffensifs et que l'épidémie s'éteindra quand l'Oidium du Chène ne sera plus sous lin- fluence des circonstances qui l'ont fait sortir de son caractère naturellement bénin. Paul Vuillemin, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Universilé de Nancy. RECHERCHES SUR LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE PREMIÈRE PARTIE L'ensemble de nos connaissances actuelles sur la structure de l'écorce cérébrale est dù à l'emploi des différentes méthodes qui mettent en évidence certaines particularités de fine anatomie. Les unes, telle la méthode de Nissl, nous montrent la dispo- sition des cellules en couches et la forme des cor- puseules décrits simultanément par ce savant et par M. Babès; elle nous permet d'étudier la cyto- architectonie. D'autres, comme, par exemple, celle de Weigert, nous font voir la myéline et les modi- fications que celle gaine éprouve dans les différents territoires de l'écorce. À l’aide de cette méthode, nous pouvons constituer la myélo-architectonie, et c’est grâce à son application au névraxe d'em- bryons humains que Flechsig a pu établir le trajet et le mode de développement des différents fais- ceaux de la substance blanche du névraxe. On connaît la théorie retentissante des centres d'asso- cialion, à laquelle est arrivé Flechsig à la suite de ses recherches sur la myélogénie. Enfin, les méthodes plus récentes de Cajal et ce Bielschowsky montrent là constitution histologique des axones, c'est-à-dire la fibrilo-architectonie. Dans le travail présent, je m'occuperai à peu près exclusivement de la cyto-architectonie, guidé dans cette recherche par les études si intéressantes de Campbell, de Brodmann et O. Vogt. Mais, avant d'arriver à l'exposé des résuilats que j'ai obtenus au point de vue de la cyto-architectonie, je ferai un court résumé de l'historique de la question. Je renvoie le lecteur désireux de faire plus ample connaissance avec les données anatomiques de l'écorce aux traités de Retzius, Obersteiner, Edinger, M. et M"! Dejérine, et au livre de M. Jules Soury. J. — HISTORIQUE DE LA QUESTION. Déjà en 1840, Baillarger comptait six couches alternatives, blanches ou opaques, et grises ou translucides, dané l'écorce cérébrale. Puis vinrent les recherches de Remak (1841), celles de Külliker (1850), qui décrivirent un nombre plus ou moins grand de couches. Cette question de stratification entra dans une nouvelle phase lorsque Berlin employa un réactif colorant, le carmin, pour les coupes de l'écorce fixée par les sels de chrome. Cet auteur a décrit six couches du dedans au dehors. Clarke, en 1863, fut, d'après Henle, le premier auteur qui étudia pour elle-même la strue- ture des couches sans chercher à la rattacher à la stratification macroscopique. Meynert a eu le mérite de montrer que la difé- renciation des couches dépend de la forme des cellules nerveuses. Les cinq couches de Meynert sont les suivantes : La première est constiluée par un tissu fondamental, non nerveux, et par un petit nombre de cellules anguleuses, irrégulières. La deuxième s'appelle couche des petites pyramides, très serrées les unes contre les autres, ayant 10 & de hauteur. La troisième est constituée également par des cellules de forme pyramidale, mais plus espacées, dont le calibre augmente de la superficie jusqu'à la profondeur de la couche. où elles attei- gnent jusqu'à 40 y. Ces grandes cellules sont par- ticulièrement nombreuses et développées dans la corne d'Ammon. Les cellules de la quatrième couche, dite granuleuse (Kürnerformation), res- semblent à celles de la couche granuleuse interne ‘ Société des Naturalistes luxembourgeois, t. II, 1910. de la rétine et de la substance gélatineuse du triju- G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 817 de Golgi, en montrant le trajet et le mode de termi naison du cylindraxe de la plupart des cellules meau ; elles sont très serrées et leur diamètre varie de 8 à 10 &. Les cellules de la cinquième couche, particulièrement celles de son élage profond, sont en forme de fuseau et possèdent des prolongements latéraux. Betz, en 1874, à admis la division de Meynert en cinq couches; mais il a, en outre, signalé comme . caractéristique de la zone motrice l'existence de pyramides géantes au niveau de la quatrième couche, cellules qui avaient échappé à l'attention de Meynert. Dans un travail ultérieur, Betz recon- naît que ces cellules n'existent que dans la frontale ascendante et dans une partie de la pariétale ascen- dante, là où cette circonvolution se continue avec le lobule paracentral. Bevan Lewis, seul (1879-1880) ou en collaboration avec Clarke (1878), développa et précisa les idées de Betz sur les variations structurales régionales du cortex, qu'il divisa en deux régions : l’une anté- rieure, motrice; l'autre postérieure, sensitive. Dans la première, les pyramidales profondes ou « cellules ganglionnaires » sont réparties en petits groupes dans l'épaisseur de la couche granuleuse : il n'y a donc que cinq couches. Dans la région rétro-rolandique de l'homme et du singe, ainsi que dans la région homologue de plusieurs autres Mammifères, elles forment une assise continue ; le nombre de couches est alors de six. Hammarberg! a contribué puissamment à élargir nos connaissances sur la structure du cerveau. Il à utilisé la méthode de Nissl et admis deux types fondamentaux de stratification : un type moteur et un type sensitif. Le premier serait caractérisé par l'absence de la quatrième couche de Meynert et la présence de grosses cellules motrices à sa place. Il a trouvé les cellules de Betz localisées dans la fron- tale ascendante et surtout dans le versant pariétal de celle-ci, de même qu'à la limite de la première et de la seconde frontale, là où elles se continuent avec la frontale ascendante, Dans la pariélale ascendante, l’auteur distingue deux régions diffé- rentes : l'une, représentée par les 5/6 inférieurs de la circonvolution, offre une structure spéciale ; la seconde, représentée par le sixième supérieur, a la même structure que la frontale ascendante. Parmi les auteurs qui ont le plus contribué à élargir le champ de nos connaissances sur la struc- ture fine du cerveau, il faut citer en première ligne Ramon y Cajal”. C’est lui qui a, plus que personne, poussé loin l’investigation à l’aide de la méthode C. HaumargerG : Studien über Klinik und Pathologie der Idiotie, nebst Untersuchungen über die normale Anatomie der Hirnrinde. Upsala, 4895. 3? S. Ramon y Casaz : Textura del sistema nervioso del hombre y de los vertebratos. Madrid, 1904. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. corticales. C'est encore à lui qu'on doit la découverte de plusieurs lypes de cellules nerveuses dans la première couche corticale. Il a, de même, constaté la continuation de l’axone des pyramides petites moyennes et grandes avec les fibres de la substance blanche et la pénétration des axones des pyramides dans le corps strié. Il a découvert ensuite l'exis- tence des cellules à axone ascendant ressemblant à celles de Martinotti et dont l'arborisation terminale n'arrive pas jusqu'à la couche moléculaire. C'est également à Cajal que nous devons les plus amples connaissances sur les variations de structure dans les différentes régions du cerveau, de même que c'est lui qui a insisté pour la première fois sur les particularités de structure qui caractérisent la frontale et la pariétale ascendantes. Cette consta- tation a élé confirmée, depuis, par tous les auteurs qui se sont occupés de la question. Du reste, nous aurons l’occasion de revenir souvent sur les faits nombreux découverts par Cajal à propos de la structure des cellules corticales et de leur morpho- logie. Cajal décrit, dans l'écorce cérébrale de l'homme el des animaux gyrencéphales, sept couches cellulaires, à savoir : 1° couche plexiforme (zone pauvre en cellules de Meynert, moléculaire des autres auteurs); 2 couche des petites pyramides ; 3° couche des cellules moyennes et grandes pyra- mides externes; 4° couche des pyramides naines el des cellules étoilées (grains des auteurs); 5° couche des cellules grandes pyramides profondes ; 6° cou- che des pyramides moyennes profondes; 7° couche des cellules triangulaires et fusiformes. Campbell” décrit les couches suivantes : 1° couche plexiforme ; 2 couche des petites pyramides ; 3° couche des moyennes pyramides ; 4° couche externe des grandes pyramides ; 5° couche des pe- tites cellules étoilées ; 6° couche interne des grosses pyramides; 7° couche des cellules fusiformes. Comme on le voit, la classification adoptée par cel auteur ne diffère pas essentiellement de celle de Cajal. En ce qui concerne la couche externe des grosses pyramides, l’auteur maintient son indépen - dance et croit qu’elle contribue à la formation de la strie de Baillarger. Campbell, en se basant sur la structure et la dis- position des cellules et des fibres nerveuses dans l'écorce, admet les zones suivantes (fig. 1) : 4° zone préfrontale, représentée par le pôle antérieur; 2% zone frontale, représentée par la partie moyenne des 1°, 11e et III° frontales ; 3° zone intermédio-pré- centrale, constituée par le pied des trois frontales ; 1 Campeecz : Histological studies on the localisation of cerebral function. Cambridge, 1905. 19° 818 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 4 zone précentrale, représentée par la frontale as- cendante ; 5° zone post-centrale ou pariétale ascen- dante ; 6° zone intermédio-post-centrale ; 7° zone pariétale ; 8° zone visuo-psychique ; 9° zone visuo- sensorielle, correspondant à la scissure calcarine ; 10° zone temporale; 11° zone audito-psychique ; 12° zone audito-sensorielle; 13° zone lymbique ; 14° zone olfactive. Elliot Smith! s’est appliqué également à dresser une carte topographique de l'écorce cérébrale chez l’homme en faisant usage de matériel frais qu'il a étudié à l’œil nu. Il a pu constater que l'épaisseur, Vogt*, à son tour et avant que Brodmann eût in- dividualisé ses quarante-sept types de l'écorce céré- brale de l'homme, s’est appliqué à décrire les carac- tères architectoniques de certaines régions du cerveau, telles que le gyrus supramarginalis, la seconde frontale, la circonvolution occipitale moyenne, les première et troisième temporales, le gyrus fornicatus et le cuneus. Vogt remarque qu'il n'existe pas de différence cyto-architectonique entre les zones de Flechsig à myélinisation précoce et à myélinisation tardive. Dans ces dernières, le pro- fesseur de Leipzig avait cru remarquer que les pyra- Postcentral Audito-sensory Jemporal _ Fig. 1. — Face externe de l'hémisphère cérébral gauche, montrant, d'une part, la topographie des champs cyto-architec- toniques d'après Campbell, et, d'autre part, les types de Brodmann, qui sont délimités à l'encre rouge. la couleur, l'arrangement et la densité de la sub- stance médullaire intra-corticale apparaissent avec des caractères différents dans les diverses régions. C'est ainsi qu'il a pu dresser la topographie de 27 zones corticales. Les zones décrites par Smith sont délimitées par des sillons du cerveau ou bien contractent des relations étroites avec ceux-ci. C'est pour cette raison que Smith établit une rela- tion causale entre le trajet de ces sillons et la distribution de ses aires. L'auteur reconnaît, ce- pendant, que les sillons sont très variables d'un cas à l'autre, et que même les scissures princi- pales, telle la calcarine, sont également sujettes aux mêmes variations. 1 E. Surrn: À new topographical survey of the human cerebral cortex. Journ. of Anat. and Physiol., t. XLI, 1907. | | | mides profondes sont rares et isolées, et Vogt montre que, dans la Il° pariétale, la 11° frontale, la IIIe temporale, qui se myéliniseraient tardivement, il existe une couche ganglionnaire distinete consti- tuée par de nombreuses pyramides. Dans une série de mémoires des plus importants, et plus récemment dans son livre sur la doctrine des localisations cérébrales, Brodmann* étudie la cyto-architectonie de l'écorce cérébrale chez les dit- férents représentants des Mammifères (Primates, Macrochiroptères, Rongeurs, Carnivores et Marsu- piaux). Ses études approfondies d'ontogénie et de 1 0, Vocr : Zur anatomischen Gliederung des Cortex cerebri. Journ. of Psych.u. Neurol., t. I, 1903. : K. BRODMANN Vergleichende Lokalisationslehre der Grosshirnrinde. Leipzig, 1909. G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 819 phylogénie l'autorisent à établir que, chez l'homme | Mammifères et dans toutes les régions. La première comme chez tous les autres Mammifères, la struc- ture à six couches représente le type fondamental. Toutes les autres modifications dans la eyto-archi- teclonie de l'écorce, quelque importantes qu'elles soient, ne constituent que des varialions secon- daires qui font leur apparition à un moment donné de la vie embryonnaire. Aussi Brodmann considère l'opinion de Cajal et Haller comme erronée. En effet, ces auteurs ont soutenu que la structure de l'écorce se simplifie à mesure qu'on descend dans l'échelle zoologique, simplification due à l'absence de certaines couches. Les différences régionales d'architectonie re- posent en première ligne, d'après les recherches de Brodmann, sur l'augmentation et la diminution de certaines couches du type fondamental. Ces modifi- cations régionales sont beaucoup plus nombreuses chez l'homme que chez les Mammifères inférieurs. Déjà à partir du sixième au huitième mois de la vie embryonnaire, on peut distinguer dans le néo- pallium du fœtus humain les six couches suivantes : 4° Zamina zonalis; 2 Jamina granularis ; 3° lamina pyramidalis; 4° lamina granularis interna; 5° lamina ganglionaris ; 6° Jlamina multiformis. Mais ce type à six couches n'a pas la même durée sur les diverses régions de l'écorce ni la même apparition. Certains territoires se développent plus rapidement, d’autres, au contraire, lentement, et ce n’est que plus tard que l'écorce évolue vers le type à six couches. Deux phénomènes principaux s’observent à partir du septième mois de la vie utérine : d’une part, la rétrocession de certaines couches, qui a pour consé- quence une diminution de nombre, et, d'autre part, la croissance de certaines couches, à savoir : la division ou le dédoublement, qui a pour conséquence une augmentation de nombre. Comme exemple du premier phénomène, Brodmann rappelle avant tout le type de l'écorce à cellules géantes, qui, dans le cerveau adulte, ne possède pas la IV', c'est-à-dire la couche granu- leuse interne ; comme exemple du second, le type de la calcarine, qui possède, à partir du sixième mois de la vie embryonnaire, huit couches par suite de la division de la couche granulaire interne. Par conséquent, il y a des régions corticales où la stratification à six couches est conservée pendant toute la vie, — ce sont celles que Brodmann appelle formations homotypiques, — et d'autres régions dont le nombre des couches varie, — et désignées pour cette raison sous le nom de formations hétéro- typiques. Brodmann constate ensuite que certaines couches nous apparaissent comme constantes pen- dant que d’autres, au contraire, sont très incon- stantes et variables. La première et la sixième sont des plus constantes : elles existent chez tous les | ne présente que des changements d'épaisseur; ses cellules, de nature non nerveuse pour la plupart, offrent parfois des changements de nombre. La sixième offre aussi des changements d'épaisseur el de densité cellulaire. Dans certaines régions du néopallium (régions occipitale et pariétale ascen- dante), la sixième couche est très réduite, tandis que, dans les régions frontale et temporale, elle est très épaisse. Cette sixième couche est très déve- loppée chez les Mammifères inférieurs, mais ce n'est pas là une règle absolue. Une modification des plus importantes de I sixième couche, c'est que parfois elle se divise em deux : une partie externe, constituée par des cellules. triangulaires ou étoilées, et une interne, composée de cellules fusiformes. Quelquefois, la sixième et la cinquième fusionnent et on ne peut plus les distinguer. Les couches les plus inconstantes el variables sont la deuxième et la quatrième, ow couches granulaires. La couche granulaire externe: est plus développée dans les premiers stades de: l'évolution que dans les cerveaux adultes. Chez ces derniers, on observe une rétrocession, ou bien, dans la majorité des cas, elle n'existe plus comme couche indépendante, mais se confond avec la troisième. Dans certains types hétérogénétiques dur rhinencéphale, les éléments granulaires augmen- tent de volume et changent de forme, de sorte que la deuxième couche apparaît très nette. La quatrième couche subit des modifications encore: plus considérables. C’est la plus variable, et ses- modificationsse présentent sous forme de rétroces- sion complète ou bien de redoublement. Ces varia- tions existent dans toute la série animale. La troisième et la cinquième couche offrent des- variations moyennes. Déjà depuis Meynert, on sait que la couche pyramidale peut être divisée em deux, comme cela s’observe par exemple dans le type occipital. La troisième couche est réduite dans les régions rétro-spléniales. En ce qui concerne la cinquième couche, ou ganglionnaire, la modifica- tion la plus importante est l'apparition des cellules. géantes dans la zone dite motrice. Dans certains types frontaux chez l'homme, il se forme immédia- tement au-dessous de la couche granulaire une- couche particulière de cellules ganglionnaires de volume moyen, de manière que la cinquième couche apparaît divisée en deux. Dans d'autres régions, au contraire, les cellules de la cinquième et de la sixième se confondent. De toutes ces obser— vations, l’auteur tire la conclusion importante que, là où il apparaît des cellules de forme nouvelle, la stratification de l'écorce se modifie et que, d'autre part, le; modifications de l'ensemble architectural entraînent des variations soit dans la morpho- 820 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE logie, soit dans l'histologie de certains éléments. Après avoir fait un grand nombre d'études sur l'écorce de fœtus de l'homme adulte et sur celle des animaux, je me {rattache à l'opinion de Brodmann et Vogt, qui considèrent la stratification à six Æ FtS : Ts A REA r N Il n’y a qu'en ce qui a trait à la stratigraphie de l'archipallium qu'on peut faire certaines réserves. En effet, la disposition, le nombre des couches et aussi la structure des cellules qui les constituent | font de cette écorce protogénétique une région pets S4 4131 FAR ty CET MT] ERPCUTA 21h is: 42 Fig. 2 et 3. — Topographie des types cylo-architectoniques, d'après Brodmann. couches comme type fondamental et les autres ariations de cyto-architectonie comme dérivant de e type. L'ontogénie comme la phylogénie contir- ment cette donnée anatomique. Aussi je considère la question, tout au moins en ce qui concerne le néopallium, comme tranchée. Lout à fait spéciale. Les recherches cyto-architecto- niques de Meynert, Betz, Hammarberg, et surtout celles de Campbell, Brodmann et Vogt, offrent un intérêt considérable; mais il ne faut pas oublier qu'elles reposent presque exclusivement sur des résultats obtenus avec du carmin ou surtout avec G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE s21 la méthode de Nissl, et qu'ainsi elles ne peuvent nous fournir aucun renseignement sur le trajet du cylindraxe ni sur les connexions réciproques des neurones. Cependant, les études de Campbell et O. Vogt ne sont pas passibles de cette objection, car ces auteurs ont fait usage non seulement de la méthode de Nissl, mais aussi de celle de Weigert. Ainsi qu'on vient de le voir, les recherches presque simultanées de Campbell, de Brodmann et de E. Smith, pratiquées d’une facon indépendante par ces auteurs, ont montré qu'on peut démembrer l'écorce cérébrale dans un nombre de zones plus ou moins considérable, dont l’arehitectonie varie d'un type à l’autre. Evidemment, le dernier mot n'est pas dit sur la question, étant donné que Campbelladmet chez l’homme quatorze zones, Smith vingt-huit et Brodmann quarante-sept (fig. 2 et 3). Sans doute les recherches de ce dernier, pratiquées sur un grand nombre de cerveaux coupés en séries provenant de différentes espèces animales, et à l’aide des méthodes les plus perfectionnées, sont celles qui méritent le plus notre attention. Nous allons soumettre à l'analyse histologique les types différenciés par Brodmann dans l'écorce humaine et dans l’ordre numérique établi par cet auteur, mais nous ne pouvons utiliser les études de Brodmann que pour un nombre bien restreint de types. En effet, le savant allemand n'a pas encore publié le résultat de toutes ses études appliquées à l'écorce cérébrale de l’homme, qui nous intéresse tout spécialement. Il n’a donné jusqu'à présent que la description de la zone rolandique et de la seissure calcarine. Néanmoins, il a jeté les bases de la cyto-architectonie de l'écorce humaine en montrant qu'il v a des types d’une homologie par- faite chez l'homme et chez certains animaux (types, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 13, 46, 17, 18, 26, 27, 98, 35, 51), et il a établi les critériums anatomiques qui lui ont permis de délimiter soit dans le cerveau des singes inférieurs, soit dans celui de l’homme, différents types corticaux. IT. — RÉGION ROLANDIQUE. En réalité, cette région est constituée par deux zones absolument différentes, au point de vue mor- phologique, eyto-architectonique et pathologique ; aussi, à l'exemple de Brodmann, nous la divise- “ons en : une antérieure, ou précentrale, et une autre postérieure, ou postcentrale; chacune de ces deux régions est constituée par plusieurs types. Déjà en 1874, Betz avait montré que la scissure de Rolando sépare deux régions histologiques tout à fait distinctes ; une région antérieure, motrice, caractérisée par la présence de grosses cellules pyramidales, et une postérieure, sensible, dans la- quelle prédominent les cellules granuleuses. Plus tard, il a reconnu que les cellules géantes se trou- vent seulement dans la frontale ascendante, en fai sant leur apparition au niveau de la limite supé- rieure du tiers inférieur, pour se continuer jusqu’au lobule paracentral, et à la partie supérieure de la pariétale ascendante, là où celle-ci se continue avec le lobule paracentral. Les études ultérieures de Hammarberg, de Cajal, de Campbell, de Farrar el surtout celles de Brodmann ont achevé de préciser les différences qui existent entre la frontale et la pariétale ascendantes. Smith, de son côté, a décrit également plusieurs zones dans le domaine des circonvolulions centrales. Comme on le sait, cet auteur à étudié des cerveaux à l'œil nu quelques heures après la mort, et, en employant ce procédé si simple, il a pu noter un contraste de structure entre les deux bords de la scissure de Rolando, le bord antérieur élant constitué par une écorce très épaisse et par une structure particulière qui permet de la distinguer de la zone postcentrale. Dans la circonvolution postcentrale, Smith admet deux ou même trois zones qui se prolongent comme deux bandes en croissant à la face interne du lobule paracentral. Mes recherches, commencées il y a bien longtemps, confirment et complètent jusqu'à un certain point de vue celles de Cajal, de Camp- bell, de Brodmann. Les différences de structure histologique entre la frontale et la pariétale ascendantes sont tellement nombreuses et caractéristiques qu'il est étonnant de constater que la doctrine classique de l'identité de fonction de ces deux circonvolutions ait pu régner pendant si longtemps. Tout d’abord, la fron- tale et la pariétale n’ont pas la même épaisseur : le type 4 de Brodmann, qui correspond à la fron- tale ascendante et aussi à la partie antérieure du lobule paracentral, offre, d’après cet auteur, 37,94 d'épaisseur, tandis que la pariétale ascendante, dans laquelle Brodmann distingue trois types, varie entre 1" .86 et 2%,93. Nos mensurations montrent les mêmes différences entre les trois régions de la pariétale ascendante, c'est-à-dire que c'est le sommet de la circonvolution qui est le plus large et que le versant rolandique est plus étroit que celui du côté opposé. Sur plus de 30 men- surations, nous n'avons trouvé qu'un seul cas où le sommet de la pariétale ascendante mesurait 9m® 40 d'épaisseur et le versant rolandique 2 milli- mètres. Dans tous les autres, l'épaisseur du sommet a été au-dessous de ce dernier chiffre. Je dois faire remarquer que non seulement l'épaisseur de la pariétale ascendante varie d’un sujet à l'autre, mais encore qu'elle n'a presque jamais la même épaisseur sur toute son étendue. D'autre part, les différences entre le sommet et les deux lèvres de 822 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE cette circonvolution ne se maintiennent pas, et il n'est pas rare de constater que les deux versants ont à peu près la même épaisseur à mesure que l'on descend vers la partie inférieure. La frontale ascen- dante et la partie antérieure du lobule paracentral correspondant au type 4 de Brodmann constituent, au point de vue de l'épaisseur de la substance grise, les régions les plus larges de l'écorce. En effet, elles atteignent et dépassent 4 millimètres. Les lèvres, cependant, sont habituellement plus étroites que le sommet. Une autre donnée impor- tante qui résulte de nos mensurations, c'est que la même circonvolution, provenant de deux sujets du même âge, n'offre pas la même épaisseur de la substance grise dans les deux cas. Cela ne saurait s'expliquer autrement que par les différences du volume, du nombre des cellules et des fibres qui la constituent. Examinons à présent les types 1, 2, 3 que Brod- mann à décrits dans la pariétale ascendante. Le type 1 correspond à la lèvre antérieure de la parié- tale ascendante et est situé tout près de la seissure de Rolando. La différence de structure de ce type 1 (fig. 4) avec celle du type 4 (fig. 5) est des plus sai- sissantes. En effet, par suite de la réduction consi- dérable d'épaisseur de l'écorce au niveau du type 1, toutes les couches sont extrèmement réduites et la densité cellulaire est beaucoup plus considérable. La seconde couche contient plus de grains que la couche II du type 4. Puis, dans la couche IT, nous rencontrons d'assez grosses pyramides superti- cielles, ayant des corpuscules de Nissl bien difré- renciés, et dont les grosses ont une base élargie. Mais le phénomène structural le plus intéressant, c'est que ces grosses pyramides superficielles sont séparées des pyramides profondes par une couche granuleuse nettement indiquée. Les pyramides profondes, plus rares, de petite taille par rapport aux cellules géantes, sont situées tantôt immédia- tement au-dessous de la couche granuleuse, tantôt dans une strie claire qui sépare la V° de la VI°. Cette dernière, extrèmement mince, est constituée par des cellules polymorphes, de petite taille. Le type 2 siège dans le versant opposé ou la lèvre postérieure de la pariétale ascendanteet se distingue du type 3 par le fait que la couche III D est consti- tuée par des pyramides plus grosses et plus denses. La IV* couche est plus large et la V°, dépourvue de strie claire, contient plus de pyramides profondes que dans le type 3. La VI° couche est plus large et ne contient pas de cellules fusiformes. Le type 1 siège au niveau du sommet de la pariétale ascen- dante; l'écorce est plus large que dans le type précédent. Les pyramides superficielles sont plus développées et la VI: couche, plus large que dans les types 2 et 3, est divisée en deux : une partie superficielle, plus grande et plus dense, et une- partie profonde, constituée par des cellules fusi- formes. Les caractères histologiques de la pariétale ascendante sont d'ordre positif et d'ordre négatif. Dans le premier ordre, nous trouvons, sur toute- l'étendue de la circonvolution, la présence d’une couche granuleuse interne très bien indiquée, qui sépare la IIT° de la V°. Ensuite, nous voyons, à la place des cellules de Betz, de grosses pyramides. isolées à l’intérieur d’une strie claire qui prend naissance au fond de la scissure de Rolando et se continue sur le versant antérieur de la pariétale ascendante, pour s’effacer à peu près dans la ré- gion du sommet et réapparaître ur peu moins- accusée sur le versant opposé. L'existence de cette strie est une caractéristique très imyortante de la pariétale ascendante, car c'est ici que viennent aboutir les fibres du plexus exogène de Cajal, que la méthode de ce savant et celle de Bielschowski mettent en évidence. Chez le nouveau-né, cette- strie est visible sur tout le parcours de la pariétale ascendante. Un des traits essentiels de la pariétale ascen- dante est, comme on l’a vu, l'absence des cellules de Betz et l'existence, à leur place, de grosses pyra- mides qui, tout en présentant une certaine ressem- blance avec les petites géantes, en diffèrent assuré- ment par leur structure et, partant, par leurfonction. Néanmoins, nous ignorons actuellement la signifi- cation des pyramides profondes, quoique certains. auteurs les considèrent en quelque sorte comme équivalentes aux grosses pyramides superficielles. Campbell n'admet pas cette opinion. Après avoir fait des sections sériées du gyrus postcentral, il a constaté que les cellules superficielles sont trois. fois plus nombreuses que les cellules profondes ; mais, d'autre part, il convient que ces dernières ne sont pas identiques à celles de Betz, qui les dépas- sent par leur volume plus considérable. Du reste, elles ne sont pas disposées sous forme de nids comme les cellules géantes. Le même auteur, constatant leur altération dans le tabes et leur conservation dans la sclérose latérale amyotro- phique, leur attribue un rôle spécial. Mes recher- ches sont venues apporter quelque lumière sur ce sujet. J'ai constaté, en effet, que les lésions du. segment postérieur de la capsule interne produi- sent, d'une part, la réaction et l’atrophie des cel lules géantes dans la frontale ascendante et le lobule paracentral (partie antérieure), et, d'autre part, déterminent les mêmes phénomènes dans les pyramides profondes de la pariétale ascendante et de la partie postérieure du lobule paracentral. Brodmann à très bien décrit la cyto-architectonie du type 4, et il ne reste qu'à ajouter bien peu de Fig. 4. — Type 1 de Brodmann. — 1, couche zonale où moléculaire; 11, couche des pe- tites pyramides ; III, couche des moyennes pyramides; IV, couche granuleuse; V, couche des grosses cellules solitaires ; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 5: — Type 4 de Brodmann. — ], couche zonale ou moléculaire: Il, couche des petites pyramides; III, couche des moyennes pyramides; V, cellules de Betz; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 6. — Type 6 de Brodmann. — 1, couche Zzonale ou moléculaire; II, couche des petites pyramides: 111, couche des moyennes pyramides; III», couche des grosses pyramides superficielles : V, couche des grosses pyramides; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 1. — Type 8 de Brodmann. — I, couche moléculaire; 11, couche des petites pyra- mides; III, couche des moyennes pyra- mides ; IV, couche granuleuse: V, couche des grosses pyramides profondes; VI, “couche des cellules polymorphes. Ep) REA y. L 5] 44 OT Ce RU Pa ge 1 LU d DRE J 07 re ." QUE. Naud TER ne NME IDE ,#% EAE Tr Lo 8 je EG DE a D pd NIEUT qi if * 14 a 4 ea ir PR TP LOT , I db ‘ls AE Pie “, w4, KA je 4 À 7 2 ÿ IS ENT h< LA eus Ph : Eu ue pi PS Lu & ACER EU : LT RE TNEE nb LE 6 A 472 4.2 d 4 à (4 5.3 4,5: EE YOFPIE CETTE LME Let | AU AE É ne. À 0% d É SR Ë VE ae: 2 » à Ru ESC me IP ses. | = 824 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE chose à sa descriplion si complète. Ce type corres- pond naturellement à l'écorce, caractérisée par la présence, dans la couche V, des cellules géantes, qui siègent, comme on le sait, dans la frontale ascendante et une partie du lobule paracentral. Voici les caractères essentiels qu’on peut relever sur toute l'étendue de ce type, non seulement chez l'homme, mais aussi chez les singes : 1° L’écorce cérébrale à ce niveau est extrêmement large, et cette particularité nous rend compte des autres caractères cyto-architectoniques de l'écorce du type 4. En effet, la largeur exceptionnelle de ce type à pour conséquence une diffusion des cou- ches; les cellules nerveuses y sont distancées; par conséquent, la densité cellulaire diminuée. Le pas- sage de la substance grise à la substance blanche se fait plus ou moins insensiblement. Toujours à cause de la diffusion cellulaire, on ne peut pas dis- tinguer une couche granulaire interne, laquelle, au contraire, est très nette dans la pariétale ascen- dante. Chez le fœtus de huit mois, cette couche existe bien cependant, de même que dans certains états pathologiques où il s'agit d'un arrêt de déve- loppement de l'écorce. I] ne faut pas conclure de là que, chez l'adulte, cette couche ait disparu; mais il est fort probable que certains de ses éléments ont évolué et que d’autres, les petits granules, sont disséminés dans la II° et la V° couche. Le trait essentiel du type 4, c'est la présence de ces cellules si spéciales que Betz a décrites pour la première fois et qui méritent une description tout à fait détaillée (fig. 5). Il est généralement admis aujourd'hui que les cellules de Betz constituent l’origine des fibres qui excitent les noyaux radiculaires des muscles striés. Tout récemment, deux auteurs d’une grande com- pétence, Brodmann en Allemagne et Horsley en Angleterre, ont révoqué en doute le rôle des cel- lules pyramidales géantes de la zone dite motrice dans le mécanisme des mouvements volontaires. Voici ce qui a déterminé ces auteurs à revenir sur une question qui semblait être un fait acquis pour l'histo-physiologie cérébrale. Brodmann a eu l’occasion d'examiner une por- tion de l'écorce de la circonvolution frontale ascen- dante qui fut excisée par F. Krause et dont l'exci- tation faradique produisait des contractions manifestes dans les doigts et dans la main. Or, il n'y trouva aucune cellule géante, ni même de grosses pyramidales. Brodmann en tire la conelu- sion que la capacité fonctionnelle ne dépend pas assurément de la présence des cellules pyramidales géantes. Horsley, après avoir déterminé, à l’aide des exci- tations électriques, la zone corticale du bras chez un garçon qui présentait des mouvements atétoïdes à la main gauche, enlève cette région de l'écorce cérébrale dans toute l'étendue et la profondeur de la substance grise. Après un certain laps de temps, la paralysie motrice du membre supérieur gauche diminuant beaucoup, l’auteur conclut que les cel- lules de Betz ne sont pas nécessaires pour l’accom- plissement des mouvements volontaires. La réaction de ces cellules géantes, consécutive aux lésions destructives de la capsule interne et principalement du faisceau pyramidal dans son trajet médullaire, prouve iicontestablement, ainsi que je l'ai montré depuis longtemps, que les cel- lules de Betz constituent d?s neurones moteurs corticaux. Du reste, si M. | Brodmann n'a pas trouvé de cellules géantes dans le morceau du cer- veau excisé par F. Krause, éela ne prouve pas du tout qu'au voisinage il n'y a pas eu de cellules géantes ayant donné naissance aux mouvements provoqués par l'excitation produite par le chirur- gien de Berlin. Quant au malade de Horsley, ses mouvements volontaires de la main ne sont pas revenus complètement. Les cellules géantes de Betz n'offrent ni le même volume, ni la même topographie sur toute l'aire désignée par Brodmann sous le nom d’area giganto- pyramidalis. On peut poser en principe que ces cellules sont d'autant plus nombreuses et plus grandes à mesure qu'on se rapproche du lobule paracentral; d'autre part, elles siègent, comme on le sait, dans la V° couche et constituent une espèce de ligne existant sur le sommet et la lèvre rolandiques, au niveau du tiers supérieur de la fron- tale ascendante. Dans quelques cas, cependant, moins nombreuses, elles peuvent peupler égale- ment le versant antérieur de la frontale ascen- dante. À mesure qu'on s'approche du tiers moyen, elles disparaissent du sommet et on les retrouve localisées seulement sur le versant postérieur de la frontale ascendante. Même sur ce versant, elles deviennent plus rares et plus espacées à mesure que l’on descend vers le tiers inférieur, où nous les trouvons disséminées tantôt d'une facon irrégu- lière sur toute l'étendue de ce versant, tantôt n’en occupant seulement qu'une partie; maiselles dispa- raissent complètement à mesure qu'on s'approche de l’opercule rolandique. En ce qui concerne le rapport de ces cellules avec le fond de la scissure de Rolando, nous trouvons également des varia- Lions soit dépendant du niveau de la section, soit individuelles. Si, pour la plupart du temps, elles s'arrêtent juste au niveau du fond de cette scissure, elles peuvent cependant y siéger et même pénétrer dans le bord rolandique de la pariétale ascendante. Contrairement à la doctrine classique et confor- mément à l'opinion de Brodmann, nous avons pu nous convaincre que le lobule paracentral ne cons- G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 825 titue ni une unité anatomique, ni parlantune unité fonctionnelle. En effet, si l'on pratique des coupes soit longitudinales et horizontales, soit vertica- les antéro-postérieures, ou encore transversales, on peut voir facilement que ce lobule est constitué par deux régions distinctes : l'une antérieure, l’autre postérieure, séparées par un sillon, au fond duquel nous trouvons la même structure que dans la scissure de Rolando. L'écorce de la région anté- rieure offre les mêmes caractères que la frontale ascendante, et celle de la partie postérieure est à peu près identique comme structure à la pariétale ascendante. Done, ces deux régions sont distinctes au point de vue histologique, et le passage d’une région à l’autre se fait brusquement et se caracté- rise par l'apparition de la couche granuleuse interne dans la partie postérieure et la disparition des cel- lules de Betz proprement dites, qui sont rempla- cées par d'autres cellules ayant certains caractères morphologiques qui les rapprochent de ces der- nières, dont elles diffèrent cependant par leur vo- lume. Voici, du reste, la moyenne des unes et des autres : cellules de Betz : corps cellulaire, 812,8 X 41#; noyau : 212,8 X 182,8; nucléole : 64,2. Pour les grosses cellules pyramidales profondes, situées au-dessous de la couche granuleuse interne de la pariétale, nous avons pour le corps cellu- laire : 576,2 X 282,6; pour le noyau 182,6 X 13:,8, et pour le nucléole 5%. Ce qui achève encore de trancher ces différences entre les deux régions, c'est que la partie anté- rieure est beaucoup plus épaisse que la partie pos- térieure et que la stratificalion est très manifeste dans la dernière. Au point de vue pathologique, je ferai remarquer qu'après les lésions de la capsule interne, les grosses pyramides profondes de la région posté- rieure du lobule paracentral réagissent, s’atro- phient et supportent la surcharge pigmentaire de la même manière que la région antérieure. Par conséquent, les deux ordres de neurones envoient leur axone dans la capsule interne, mais évidem- ment leur destination doit être différente. Brodmann rattache à la région précentrale le type 6 (fig. 6), qu'il appelle area frontalis agranula- ris, et le considère comme faisant partie intégrante de la zone du type 4, duquel il ne diffère que par l'absence des cellules géantes. Ces deux types 4 et6 diffèrent des autres types frontaux par le fait qu'ils sont agranulaires. Le type 6 occupe une grande étendue et sa topographie est indiquée dans les figures 1 et 2. Campbell étend son intermediate pre- central area à la F,, qui diffère cependant à certains égards du type 6 par des caractères morphologiques dont nous parlerons plus loin. Il est à remarquer que E. Smith divise le type 6 en une région area REVUE GÉNRALE DES SCIENCES, 1910. frontalis supérieure et une autre zone area frontali intermedia. Mais, comme le fait bien remarquer Brodmann, ce qui peut être valable au point de vue de la myélo-architectonie ne repose pas sur des faits indiscutables au point de vue de la cylo- architectonie. Il existe, au point de vue cyto-architectonique, une grande ressemblance entre le type 4, ou area giganto-pyramidalis, et le type 6, ou area frontalis agranularis; mais ils différent précisément par la présence de cellules géantes dans le premier de ces deux types. III. — RÉGION FRONTALE. Cette région, fortement développée chezl'homme, constitue la cinquième partie de l'écorce entière. D'accord avec Brodmann, nous dislinguons chez l'homme au moins 8 types dans la région frontale, à savoir : 8, 9, 40, 11, 44, 45, 46 et 47, mais les zones 44, 45, 47, offrent certaines affinités de structure. Aussi on peut les réunir dans un groupe, qu'on désigne sous le nom de région sous-frontale. La région frontale est constituée par une famille de types présentant des caractères généraux, qui permettent de les distinguer des types d’autres régions, et des caractères locaux, qui nous per- mettent d'une facon générale de les distinguer entre eux. Tout d'abord, il est très facile de distinguer les types de la région frontale de ceux de la région pré-rolandique, par le fait que les deux types qui constituent cette dernière région sont agranulaires, tandis que ceux de la région frontale possèdent une couche granuleuse dont la largeur, la densité et même la constitution varient d'un type à l’autre. En dehors de la présence de cette couche, il existe d’autres signes qui séparent les types des deux régions; par exemple, ceux de la région frontale offrent une stratification de plus en plus marquée, et l'épaisseur totale de la substance grise, tout en se maintenant à un niveau assez supérieur, diminue de plus en plus, diminution qui intéresse beaucoup plus la couche IV-VI. Il est vrai, cependant, qu'à ce point de vue le type 8 (fig. 7) doit être considéré plutôt comme un type de transition entre la région préfrontale et la région frontale proprement dite, car, de par son épaisseur, il peut dépasser dans certains cas non seulement le type 6, mais le type 4 également. II manque de stratifiealion nette; il n°x a qu'une ébauche de IV couche el la VI° est très large. C'est le type 9 (fig. 8) qui présente les carac- tères de la région frontale : stratification nette; la couche pyramidale est constituée par des cellules en général plus petites et plus denses que dans le type 8; l'existence de la IV° ne laisse plus de doute : elle sépare la II° de la V°. La V° contient, par-ci 19** par-là, de grosses pyramides et, vu leur dissémi- nation, les limites entre celle-ci et la VI ne sont pas neltes. Tous les caractères morphologiques de la région frontale s'accentuent dans le type 11 (fig. 9); d'abord, la IV'° s'y élargit un peu plus et la densité cellulaire augmente également; la V° offre quelques critériums morphologiques qui sont com- uns avec le type 47, type également arbitraire. En effet, cette V° couche s'impose par sa densité et la forme de ses cellules; et elle tranche sur la cou- che granuleuse par sa limite supérieure pour se continuer insensiblement avec la VI° couche. Avant d'arriver à la description des types frontaux inférieurs qui constituent la F. 3, nous devons dire un mot du type 46, dont les limites sont imprécises et dont la eyto-architectonie n’est pas des plus carac- téristiques ; néanmoins, on ne peut pas attribuer son territoire ni aux types frontaux supérieurs 9 et 10, ni aux types frontaux inférieurs 44 et 45. Par certains caractères, il se rapproche davantage des types 9 et 10, par d’autres des types 44 et 45. Dans la figure 2, Brodmann décrit, comme nous l'avons dit, les trois Lypes suivants : 44, ou area opercularis, 45, Où area triangularis, et 47, ou area orbitalis. Tous les trois offrent des affinités architectoniques, raison pour laquelle il les réunit en un groupe qu'il désigne du nom de sub regio fron- ‘alis. À propos du type 46, et en cela d'accord avec Brodmann, je pense qu'on pourrait distinguer une moitié antérieure el une moitié postérieure, séparées par le sillon diagonal; malgré cela, ces deux sous- types ne se distinguent que par l'épaisseur de la quatrième couche, qui est un peu plus accusée dans la moitié antérieure. Les trois types 44, 45, 47, sont l'expression de changements morphologiques qu'éprouvent les cir- convolutions frontales en allant d’arrière en avant. La couche granuleuse, peu accusée dans le type 44, s'accentue el acquiert une épaisseur assez consi- dérable dans le type 47, tandis qu'elle à une épais- seur moyenne dans le type 45. Le type #4 possède une II? avec d'assez grosses pyramidales, qui sont plus petites dans le 45 et font défaut dans le 47. Dans le type 44 (fig. 10), par suite de l'exiguité de la IV° couche, les cellules de la IIT et de la V°se continuent. Dans le type 45, la stratification est mieux indiquée que dans le #4, par suite de la présence d’une IV® nettement indi- quée. Les pyramides superficielles sont volumineuses dans le 45 (fig. 11) que dans le 44, el la Ve est plus réduite et ne contient qu'un nombre plus restreint de cellules pyramidales. Aussi, le contraste entre la IL et la V' est encore plus sai- sissant. Si le type 45 diffère du 4%, le type 47 s'écarte encore davantage de ces deux types, et, comme nous l'avons dit plus haut, il se rapproche moins G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE de l’architectonie du type 41. Tout d'abord, dans le 47, il n° y à plus de grosses pyramides superti- cielles; la couche granuleuse est plus large que dans le type 45, et la Ve est constituée presque exclusivement par des pyramides denses, ce qui donne à cette couche un aspect particulier. Dans travail publié en 1908, Niessl von Mayendorf à montré les différences qui séparent la zone de Broca de selle de la portion triangulaire. L'existence d'une {leuxième couche cellulaire accen- tuée et le grand} développement des pyramides moyennes et grosses, l'absence presque complète des cellules polymorphes doivent la faire considérer comme une écorce) motrice, alors que l'écorce de la portion trianguktre, avec sa deuxième couche plutôt étroite, sa couche de cellules pyramidales peu importante, et l'existence d'une volumineuse cou- che de cellules polymorphes, présente le type de l'écorce d'association. C'est pour cette raison que Niess]l von Mavendorf rapproche la région de Broca de la frontale ascendante en tant que région motrice, et, selon lui, P. Marie a raison en disant que la troi- sième frontale n'a rien à voir avec l’aphasie. J'ai le regret de ne pas partager cette opinion de M. Niessl von Mayendorf, car elle est en discordance avec les phénomènes de réaction qui se passent dans les cellules de Betz après les lésions de la capsule interne. En effet, tandis que la destruction de la capsule interne doune naissance à des altérations des cellules de Betz, les pyramides profondes de la zone de Broca restent intacles. Il n'y a pas non plus de lésions de ces cellules dans la sclérose laté- rale amyotrophique à phénomènes bulbaires. un IV. — RÉGION DE L'INSULA. La région insulaire constitue, au point de vue de la morphologie et de la cyto architectonie, un terri- toire bien défini et correspond en général à la fosse sylvienne, mais s'élend aussi sur la face inférieure de l'operculum frontal et temporal. En ce qui con- cerne sa délimitation vers la base, il faut rappeler que déjà Meynert avait considéré l'avant-mur comme une dépendance non pas des noyaux cen- traux, mais de la substance grise corticale, tandis qu'Arnold l'avait rattaché au noyau lenticulaire. Betz en 1881, Hammarberg, Cajal, Brodmann et Campbell ont apporté des contributions intéres- santes à l'architectonie de l’insula. Ce sont surtout les recherches de Campbell et Brodmann qui sont de nature à éclairer la cyto-architectonie de cette région. Le dernier auteur a montré que l’insula pré- sente trois territoires cylo-architectoniques, bien distincts chez l'enfant, et dont l'un, contigu à l'écorce du rhinencéphale et en continuité par sa face profonde avec le claustrum, conserve chez G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 827 < SL EE LE SE & 53 À E.. ‘ “2 e "© . à : ae 4 FT Èe RARES da ie Te Sa EUR S SAUT AT ARE ° “ Ÿ à : NUE & Ÿ è VE x. CR = , a 48 RU) è : RENE è 7 20E 7 TE RNA, Fig. 8. Fig. 9, Fig. 10. Fig. 11. Fig. S. — Type 9 dé Brodmann. — 1, couche zonale ou moléculaire: 11, couche des petites pyramides; II, couche des moyennes pyramides; IV, couche granuleuse; V, couche des grosses cellules sous-granuleuses; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 9. — 1ype 11 de Brodmann. — 1, couche moléculaire; Il, couche des petites pyramides; IIf, couche des moyennes pyramides; IV, couche granuleuse; V, couche des grosses pyramides sous-granuleuses; VI, couche des cellules polymorphes. ï Fig. 10. — fype 44 de Brodmann. — 1, couche zonale ou moléculaire: Il, couche des petites pyramides: IR, couche des moyennes pyramides; Ill», couche des grosses pyramides superficielles; IV, couche granuleuse; V, couehes des . 8rosses pyramides sous-granuleuses; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 11. — Type 45 de Brodmann. — 1, couche moléculaire; Il, couche des petites pyramides; LIL, couche des moyennes re IV, couche granuleuse; V, couche des grosses cellules sous-granuleuses; VI, couche des rellule polymorphes, G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE l'adulte son individualité, tandis que les deux autres (frontal et dorso-caudal) se confondent plus ou moins. Le caractère différentiel le plus net est la division de l’insula par un sillon en deux moitiés distinctes, l’une postérieure granulaire, l'autre antérieure agra- nulaire. À ce point de vue, Brodmann fait un rap- prochement entre les circonvolutions rolandiques, séparées par la scissure de Rolando en deux régions distinctes : antérieure agranulaire et postérieure granulaire ; mais le prolongement de la scissure de Rolando ne coïncide pas complètement avec le sillon central de l'insula. À la partie antérieure de la région agranulaire, Brodmana distingue encore un type rudimentaire, décrit autrefois par cet auteur sous le nom de pars ol/actoria insulæ. Campbell reconnait deux types dans l’insula, séparés approximativement par le sillon central, et occupant chacun les circonvolutions, sauf leurs extrémités, qui servent de zones de transition avec les aires voisines. Dansl’aire antérieure, les cellules de la couche [° ne présentent rien de particulier ; la II° est plus pauvre que dans les autres terri- toires; la couche III* se confond insensiblement avec la couche II[, couche très nette, à cellules nombreuses et fortement colorées, petites, très allongées, à base anguleuse, émettant trois à cinq prolongements délicats; on peut trouver des élé- ments alternants de l'aire intermédiaire précen- trale, cellules grandes et épaisses, au niveau du seuil de l'insula; la IV° est à peine reconnaissable ; la V° contient des cellules comparables à celles de la couche II. Vers le seuil, on trouve de grandes fusiformes à coloration intense, bien différentes comme forme et dimensions des cellules ordinaires de la couche des fusiformes : les plus nettes se trouvent au niveau des gyri breves. La V[ est épaisse, bien fournie, et contient quelques cellules semblables à celles du claustrum. Dans l’aire pos- térieure, les différences portent sur la couche Il’, où les cellules sont moins nombreuses et repren- nent leur forme habituelle, devenant analogues à celle du cortex audito et visuo-psychique ; on trouve encore quelques éléments aberrants du gyrus de Heschl au voisinage de ce dernier; la IV° est distinete, la V° revient au type temporal et perd ses grandes fusiformes chromophiles. Smith, de son côté, admet également deux régions. Cajal voit une grande ressemblance entre la région de l’insula et l'écorce sphénoïdale, surtout parce qu'il a pu déceler dans la première des cellules spéciales acoustiques ; il insiste, en outre, sur la présence de celiules spéciales géantes dont la plupart sont fusi- formes. Enfin, l'illustre histologiste espagnol dit que l'avant-mur représente une dépendance du corps strié. E. de Vries a soutenu récemment, contraire- ment à Brodmann, que l'avant-mur ne dérive pas de la couche multiforme. Mes recherches confirment, en général, les études de Campbell et Brodmann. En effet, la distinction de l’insula en une région antérieure agranulaire et une région postérieure granulaire est facile à constater. Cela ne veut pas dire que, dans la région antérieure, la couche granuleuse soit complètement absente, car j'en ai trouvé une esquisse, tout au moins sur quelques coupes de cette région, mais, en tout cas, plutôt vers la partie postérieure de la zone granulaire, de sorte que le passage de la III° à la V° ne se fait pas d'une manière tout à fait insensible. Mais, en dehors de ce caractère, il y a encore d’autres différences entre les deux régions. La IIl° de la zone agranulaire contient des pyra- mides plus grosses, plus riches en substance chro- matophile que la couche correspondante de la zone granulaire. On peut faire la même remarque pour la V°, qui est constituée par des pyramides volu- mineuses qui font défaut dans la zone granulaire, où les cellules de la V° offrent la morphologie générale de la T'. Puis, la zone agranulaire possède au-dessous de la V° des cellules fusiformes. V. — RÉGION PARIÉTALE. Brodmann rattache à la région pariétale le type 5, qu'il désigne du nom d'area præparietalis. Sans doute, ce type offre quelques caractères mor- phologiques spéciaux, entre autres l'existence, dans la V° couche, de grosses cellules ganglion- naires qui simulent, en quelque sorte, les petites cellules géantes. Mais, assurément, ce caractère n'est pas suffisant pour détacher ce type de la région post-centrale et pour le rattacher à la région pariélale. En effet, au point de vue de la morpho- logie pure, le type 5 appartient naturellement à la pariétale ascendante et, au point de vue de l'histo- logie fine, il n'est qu'une variation du type 2. Ce qui achève encore cette ressemblance, c'est que ces grosses pyramidales profondes dont nous venons de parler réagissent et disparaissent à la suite des lésions de la capsule interne, de même que les cellules correspondantes du type 1 et 2. En réalité, pour nous, le type 5 ne constitue pas un véritable type, et il fait partie intégrante de la pariétale ascendante, comme le lobule paracentral fait partie intégrante du type 4. Au point de vue de la mor- phologie pure et de la cyto-architectonie, il est beaucoup plus voisin des types de la pariétale ascendante que le type 43 que M. Brodmann rat- tache à la regio postcentralis. En effet, si ce der- nier peut être attribué, morphologiquement par- lant, à la région post-centrale, il diffère complète- ment, de par la cyto-architectonie, des types de la G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE région post-centrale. Il manque dans le 43 la couche des grosses pyramides superficielles que nous L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 829 architectonie, entre ces deux types. Le type 39 (fig. 14) n'offre pas de grosses cellules dissémi- nées dans la II1?, comme cela se rencontre dans le avons décrites dans les types 4 et 2; la couche IV est moins épaisse, et la V° ne contient pas de grosses pyramides isolées ou groupées telles qu'on les voit dans la V° des types 1 et 2. C'est là la raison pour laquelle la transition entre la V°et la VI° se fait sans contraste dans le Lype 43. Puis, cette V° est plus fournie dans ce dernier Lype en pyramides moyennes qui, en étant plus denses, constituent aussi une couche plus large. Pour toutes ces raisons, nous croyons que le type 43 appartient à la région pariétale et le type 5 à la région post-centrale. Les types qui constituent la région pariétale sont, à mon avis, les suivants : type 7 de Brodmann, ou area parielalis supérieure, correspondant princi- palement au lobule pariétal supérieur qui pourrait être divisé par le sulcus parietalis supérieur en une partie antérieure et une autre postérieure; puis le type 40, ou zone supra-marginale, correspondant au gyrus supra-marginalis, et enfin le type 39, qui a la mème topographie que le gyrus angularis. Campbell est arrivé à des résultats tout diffé- rents, et son aire pariétale n’occupe qu'une partie relativement petite du lobe pariétal, qui est en grande partie formé par le type temporal. Cet auteur rapproche l'aire pariétale de la circon- volution post-centrale et de l'intermédiaire post- centrale. Il trouve que les cellules y sont moins volumineuses que dans les zones précédentes, et les grandes cellules riches en chromatine moins abon- dantes. La couche IV est analogue à ce qu'elle est dans les régions voisines, c'est-à-dire bien déve- loppée. La couche V contient moins de cellules que la couche IIT?, et ces cellules sont moins volumi- neuses : elles sont, d’ailleurs, moins nombreuses aussi que dans la V° des territoires voisins. La couche VI, bien développée, se divise en deux étages, dont le supérieur contient des éléments plus volumineux et plus triangulaires. Le type 7 (fig. 13) caractérise pour ainsi dire l'écorce pariétale et il se distingue nettement de la structure des types que nous avons décrits dans la pariétale ascendante. Deux caractères permettent surtout de le distinguer facilement des types 1, 3, 5; c'est, d’une part, l'absence des grosses pyra- mides superficielles de la IT’ et, d'autre part, l’ab- sence également des grosses cellules ganglion- naires isolées ou réunies que nous avons décrites dans la couche V de la pariétale ascendante. Puis, l'épaisseur de l'écorce est beaucoup plus forte que dans les types de la pariétale. Le type 40 ne diffère pas beaucoup du type 7; mais, par certains carac- tères, il se rattache au type 39, et par d’autres au type 7; il est intermédiaire, comme situation et type 7; par contre, cette couche est mieux fournie dans le type 40. Au point de vue de la distribution des pyramides dans la couche V, elles se ressem blent; dans les deux types, en effet, on voit un grand nombre de pyramides moyennes disposées en série dans cette couche. En ce qui concerne la largeur de la couche IV, elle est moindre dans le 39 et même parfois, sur un point de ce lype, ses limites supérieure et inférieure ne sont pas bien précises. La V® est mieux individualisée dans le type 7 dans les autres elle se confond avec la VI°. L'examen des types 7, 39 et 40, pratiqué sur plu- sieurs points de leur étendue, montre lout d’abord que la cyto-architectonie n’est pas la même sur tous les points de la coupe. C’est ainsi que, dans le type 40, sur une section de la partie antérieure, nous trouvons des différences entre les cellules pyramidales superficielles, l'étendue de la couche granuleuse et la constitution histologique de la couche V. Sur une région, il manque les pyramides de la IT; la IV° est large, tandis que, sur un autre point voisin, les grosses pyramides de II existent, la IV® y est aussi large, mais moins dense; enfin, , où les cellules sont plus grosses, landis que sur une troisième région les cellules de la 11° sont intermédiaires entre des régions précédentes, de mème que la IV° at double point de vue de la densité cellulaire gt de la largeur. La même varia- bilité, moins acsusée il est vrai, existe aussi dans le type 39. VI. — RÉGION TEMPORALE. Cette région, qui occupe une vaste étendue de l'écorce cérébrale, s'étend des bords postérieurs de l'insula jusqu à l'incisure temporale de Retzius; elle est constituée par un grand nombre de champs architectoniques, dont la structuré est assez carac- téristique et dont la fonction nous est peu connue. Il nous est impossible de faire l'historique complet des opinions des différents auteurs sur l’architec- tonie cellulaire de l'écorce temporale; cet histo- rique à d’ailleurs fait le sujet d'un Mémoire que nous avons publié avec le D' Goldstein. Aussi, ne ferons-nous que résumer ici le résultat des recherches des auteurs récents, tels que Campbell, O. Vogt, Brodmann, Rosenberg, Flechsig et Niessl von Mayendorf. Campbell donne une description détaillée de la cvto-architectonie de cette région. Cet auteur divise tout le lobe temporal en trois types cyto- architectoniques : le type I, qui correspond aux temporales transverses, constiluant son audito-sen- 830 sory area; le type Il, constitué par la première circonvolution temporale, moins les portions antérieures et postérieures : c’est audito- psychie area; et le type III, type temporal commun, constitué par tout le reste du lobe temporal. Comme caractères spéciaux pour les temporales transverses, Campbell écrit : « La couche des moyennes pyramides est deux fois aussi large que dans les autres régions temporales; la couche des cellules pyramidales profondes n'est pas distincte; à la place occupée habituellement par cette couche, on ne voit que quelques cellules pàles; la couche des cellules fusiformes est large (1 millimètre) ». Mais ce qui constitue le caractère distinctif de cette zone, c'est la couche des grandes cellules pyrami- dales. Il y distingue trois types de cellules; petites, son moyennes et grandes; ces dernières mesurent 40 à 50 & de longueur sur 25 à 40 y de largeur; elles sont au nombre de huit à douze dans 1 millimètre carré. C’est, par conséquent, d’après Campbell, une région riche en cellules, avec de nombreuses cellules géantes particulières au-dessus d’une couche granuleuse bien développée. D’après cet auteur, la [°° temporale se distingue des temporales transverses par le fait que, dans la couche des grandes pyramidales, les cellules géantes sont peu nombreuses; on n'en compte plus que trois à cinq dans un millimètre carré. Le type temporal commun, très étendu Campbell, se caractérise par une diminution pro- noncée dans la richesse en cellules de toutes les couches, sans que, cependant, ces dernières soient moins larges. Dans la couche des grandes pyrami- dales, il n'existe plus de cellules géantes; les grandes cellules de cette couche sont le plus souvent piriformes et ne dépassent pas 40 X 20 pi. La couche granuleuse est encore bien représentée. Les cellules pyramidales profondes sont plus abon- dantes et quelques-unes mesurent 30 X 17 uw. Les cellules de la couche fusiforme sont relativement peu nombreuses, Brodmann, dans ses intéressants travaux sur l'architectonie du cerveau, ne donne pas la descrip- tion des circonvolutions temporales transverses ; il ne fait que les indiquer comme constituant deux types distincts (4 et 42 de son numérotage; : area temporalis transversa sive anterior (M), se limi- tant principalement à la circonvolution temporale transverse antérieure, et area lemporalis trans- versa externa sive posterior (42), qui ne se limite- rait pas seulement à Ja II° temporale transverse, mais qui occuperait également une partie de la sur- face libre de la ["° temporale. Dans un travail sur la cyto-architectonie du des singes, Brodmann caractérise la [re temporale (son type 22) de la manière suivante : d’après cerveau G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE la couche IV est plus pauvre en cellules; les couches V et VI ne forment pas des couches dis- tinctes, et le passage vers la substance blanche a lieu par l'intermédiaire d'une zone V[’, constituée par de rares cellules fusiformes. Dans la IT° temporale, Brodmann affirme égale- ment qu'on ne peut pas distinguer la couche V de la couche VI. Il note que la zone III contient des cellules pyramidales grandes. Dans la III° temporale, la couche IV est très développée; la couche V est bien indiquée, mais pauvre en ceilules. Dans la couche des pyramidales grandes, on ne distingue que très difficilement deux zones : II“ et III?; la couche VI est large et diffuse et on peut la diviser en une VI et une VP. Oscar Vogt, en décrivant et figurant une coupe microscopique de la 1'° temporale provenant d’une région située à l'union du tiers moyen et du tiers postérieur, dit que sa structure se rapproche de celle du supramarginalis (type 40 de Brodmann); mais elle s'en distingue par la grande épaisseur de la couche des cellules fusiformes, sans que cette dernière se puisse subdiviser en deux zones VI* et VI. Il ajoute que le nombre de cellules pyramidales est moindre dans la couche V. Cet auteur remarque encore que la couche des cel- lules pyramidales profondes est, par endroits, beau- coup plus pauvre en cellules pyramidales bien pro- noncées que dans la région qu'il figure, et aussi que les pyramidales grandes de la zone III aug- mentent de volume sur le côté de la I® temporale correspondant à la fosse sylvienne, de même que dans les temporales transverses, mais sans qu'il se manifeste aucune autre modification dans la cyto- architectonie de cette région. D'après O. Vogt, la IIIe temporale constituerait le type de passage entre la ['° temporale et le gyrus supramarginalis. Elle ressemblerait à ce dernier par la présence de nombreuses cellules pyramidales grandes dans la couche V, et à la le temporale par l'épaisseur de la couche VI, qui formerait à elle seule un tiers de l'épaisseur totale de l'écorce cérébrale. Rosenberg a examiné la première temporale et les circonvolutions d'Heschl sur quatre cerveaux normaux, et il donne comme principaux caractères distinctifs des dernières : l'absence de la couche des pyramidales profondes, la grande épaisseur de la couche fusiforme et le plus grand nombre de cel- lules pyramidales grandes dans la couche IT. Les quatre premières couches, ensemble, sont moins larges que leurs correspondantes de la F° tempo- rale, ce qui fait que la couche granuleuse est située dans les circonvolutions d'Heschl à l'union du tiers externe avec les deux tiers internes de l'écorce, tandis que, dans la ["° temporale, elle est gyTrus G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 831 Justement au milieu de l'épaisseur de la substance grise. Rosenberg reconnait pourtant que l'absence de la couche des pyramidales profondes, qui consti- tuerail un signe distinclif importance extrême, n’est pas absolue, car les pyramides pro- fondes ne forment pas non plus une couche bien nette dans la 1° temporale, et que, d'autre part, on trouve également, par-ei par-là, des cellules pyra- midales profondes dans les temporales transverses. Cet auteur remarque encore que les différences sont bien moins prononcées sur les bords de la circonvolution et de la scissure qui sépare les cir- convolutions d’Heschl de la 1° temporale; la struc- ture est presque la même pour les deux régions. Rosenberg admet pourtant une différence de structure entre les temporales transverses et la I'° temporale, qui n'auraient pas, par conséquent, la même fonelion et dont l'une ou l’autre sera le champ sensoriel acoustique. Se basant sur le fait que les circonvolutions d'Heschl correspondent au champ de Wernicke, il pense que ces dernières représentent la sphère auditive. Niessl von Mayendorf décrit des différences de structure entre la première et la seconde tempo- rale transverse. La dernière ne ressemblerait pas au type de l'écorce temporale, mais elle consti- tuerait un type de transition. La temporale trans- verse antérieure se remarquerait par la présence de masses de cellules rondes qui s'infiltrent dans les couches IL et IV, en leur faisant prendre un aspect plus dense, et qui sont encore disséminées dans les autres couches. Les cellules pyramidales petites et moyennes y manquent et, à leur place, on voit des cellules d’une grandeur moyenne, irrégu- lièrement distribuées et ayant une forme lancéolée ou polygonale. Les couches, quoique apparentes dans l’image macroscopique,sont moins bien indi- quées au microscope. Cette formation se modifie au delà de la scissure d'Heschl, mais sans que celle-ci constitue une limite précise. Dans ses dernières recherches sur la sphère audi- tive, Flechsig insiste également sur la structure microscopique des circonvolutions temporales transverses. Il reconnait que ces dernières pré- sentent certaines particularités, spécialement en ce qui concerne le nombre et la densité des couches. Cependant, on ne pourrait pas délimiter aussi bien la sphère auditive que la zone visuelle. Chez les nouveau-nés, il dit que l'épaisseur de l'écorce de cette sphère est double de celle des zones voisines. Cette épaisseur est due surtout aux couches profondes, spécialement à celle des cel- lules phymorphes, mais le nombre des autres couches y contribue également. Déjà, de bonne heure, il se montre dans la couche IV des cellules pyramidales grandes, isolées, ressemblant aux cel- d'une lules solitaires de la sphère visuelle et de la pari. tale ascendante. Il n'a pas pu trouver d'élément nerveux particuliers aux temporales transvers Donnons, à présent, les résultats de nos 1 cherches. Dans les circonvolulions d'Heschl (types A1 el 42), la couche IT présente deux caractères prin cipaux qui sont constants peu large (fig. 15). - elle est superficielle et D'autre part, elle ne présente pas une conslitution uniforme. En effet, elle esl constituée par des cellules pyramidales de volume moyen, parmi lesquelles sont disséminées d’autres cellules qui attirent l'attention par leur grand volume et leur forme. La présence de ces cellules ainsi que la superficialilé et l'étroitesse de celte couche font qu'on peut distinguer avec quelque facilité les temporales transverses des autres cir- convolutions de ce lobe. Les grandes cellules dont nous venons de parler sont appelées à tort par cer- tains auteurs cellules yéantes, puisqu'elles sont loin d'atteindre le volume des véritables pyramides géantes de la zone motrice. Ces cellules volumi- neuses ont une forme pyramidale, mais elles sont assez souvent fusiformes, oblongues et elles sont riches en éléments chromatophiles. Elles sont dissé- minées irrégulièrement, et nous ne les trouvons presque jamais à un même niveau. Une autre particularité, mais qui n'appartient pas exclusivement aux temporales transverses, el qui est moins bien indiquée dans la première tem- porale (type 22), consiste dans la présence des cellules polygonales dans la couche IV. La présence, dans les circonvolutions d'Heschl, de la couche des pyramidales profondes a été con- testée par certains auteurs, mais à tort d'après nous. En effet, la couche V est très peu apparente, à cause de la rareté des grandes cellules pyramidales, et, à première vue, elle paraît constituerune couche uniforme avec la VI°. Mais, presque dans tous les cas que nous avons examinés, nous avons pu dis- tinguer une V° couche, constituée par un mélange de pyramides moyennes et petites et par quelques grandes cellules pyramidales, celles-ci très rares. La présence de ces grandes pyramidales est en relation avec beaucoup de variations individuelles; dans certains cas, elles sont moins rares; dans d'autres, elles manquent presque tout à fait. Il est difficile detrouver des caractères distinctifs entre la transverse antérieure (type 41) et posté- rieure (type 42). Il paraît que les grandes cellules de la couche 1ll®dont nous venons de parlerseraient plus nombreuses dans le type 42 que dans le type 41 de Brodmann. La première circonvolulion temporale, dans l'étendue qui correspond au type 22 de Brodmann, se distingue assez facilement des temporales trans- 832 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE Ant si — > ° 4 me: Pat Te ste tee ra ” = CEE De S MEET MS FM PEN , DARTCOA AN ER EEE cl RANELOA 5 4 ss RE SM OLA 4 PU AR US A r 0) TS Fu ki 14 PR euh ee » D "a ÿ) b rer rs Fig. 12. — JInsula postérieure, torres- pondant au type 13 de Brodmann. — 1, couche zonale ou molécu- laire : 11, couche des petites pyra- mides; 111, couche des moyennes pyramides ; IV, couche granuleuse ; V, couche des grosses pyramides sous-granuleuses très peu déve- loppée ; VI, couche des cellules polymorphes. . Fig. 13. — Type 7 de Brodmann. — J, couche moléculaire; I, couche des petites pyramides; III, couche des moyennes pyra- mides; IV, couche granuleuse:; V, couche des grosses cellules sous- granuleuses:; VI, couche des cel- lules polymorphes. Fig. 14 — Type 39 de Brodmann. — 1, couche moléculaire; If, couche des petites pyramides; I, moyennes pyramides; IV, couche granuleuse ; V, couches des pyra- mides sous-cranuleuses; VI, cou- che des cellules polymorphes. Fig. 15. — Tvpe 41 de Brodmann. — Ï, couche moléculaire; Il, couche des petites pyramides; Ile, moyennes pyramides: III, grosses pyramides superficielles; IV,couche granuleuse: V, grosses cellules sous-granuleuses; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 416. — Type 29 de Brodmann. — Ï, couche moléculaire; I, petites pyramides: JII8, couche des moyennes pyramides: 1H, grosses pyramides superficielles; IV, couche granuleuse: V, couche des grosses cellules sous-granu- leuses; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 17. — Tvpe 91 de Brodmann. — 1, couche moléculaire; Il, couche des petites pyramides; Ille, moyennes pyramides; 111», couche des grosses pyramides superfi- cielles; IV, couche granuleuse; V, grosses cellules sous-granu- leuses ; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 48. — Tvpe 20 de Brodmann. — ÏI, couche moléculaire; II, couche des petites pyramides; I, moyennes pyramides; IV, couche granuleuse; V, grosses pyramides sous-granuleuses: VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 19. — Type 37 de Brodmannr. — 1, couche moléculaire ; 11, couche des petites pyramides; III, moyen- nes pyramides; Ib, grosses pyra- mides superficielles ; 1V,. couche granuleuse:; V, couche des grosses pyramides sous-granulaires ; VI, cellules polymorphes. G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE Lure EE ie 4 Len GE LEE ; ; "a 4 plié à: fr 4): 1. , LE 4 Cu DUT DE L'ÉCORCE al j a na 1 1 CÉRÉBRALE 833 Li 834 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE verses. La couche II? (fig. 16) y a une structure plus uniforme ;: elle est plus profonde et les cellules dites géantes sont plus rares. La couche V est un peu mieux indiquée; les pyramides moyennes pré- dominent, quoique les pelites pyramidesn'en soient pas absentes. Les grandes cellules pyramidales y sont un peu moins rares que dans les types 41-42. Cependant, nous n'y trouvons pas non plus une limite précise entre les couches V et VI, quoiqu'il y ait une apparence d'espace clair entre ces deux couches. La deuxième circonvolution temporale (type 21) se distingue nettement des types précédents. On peut dire qu'elle ne possède pas de couche ITF, de sorte que la couche des pyramides superficielles est constituée presque exclusivement par des cel- lules pyramidales moyennes (fig. 17). La couche IV contient beaucoup de grains et peu de pyramides. Dans la couche V, les grandes pyramides sont plus nombreuses et plus riches en substance chromato- phile que dans les types précédents. Donc le contraste entre les couches IT et V n’est plus si manifeste que dans le type 22, dans lequel les pyramides superficielles sont beaucoup plus grandes que les profondes. Nous avons vu que ce contraste est encore beaucoup plus frappant dans les types 41-42. Le pôle temporal (type 38) et la troisième circon- volution temporale {type 20) (fig. 18) présentent une certaine ressemblance par leur constitution générale et se distinguent facilement des types décrits précédemment. La zone 38 se présente comme un type naturel. Nous y remarquons l'absence des grandes pyra- mides de la couche IT? ; la couche IV est un peu diffuse et contient de nombreuses pyramides moyennes el petites. Les cellules pyramidales de la couche V, qui sont déjà très bien indiquées dans ce type, sont denses, plus longues que les pyra- mides superficielles, el, par-ci par-là, on aperçoit des cellules fusiformes. Dans ce type, il n'existe pas non plus une limite précise entre les couches V ete Dans le type 20, les pyramides superficielles sont un peu plus grandes, la couche IIT contient plus de grains que de pyramides, et la couche Vne contient pas de pyramides aussi longues que celles de la couche V du type 38. Le développement des cellules est généralement moindre dans le type 20 que dans le type 38. Le type 37 (fig. 19) présente, pour ainsi dire, une morphologie intermédiaire entre les types du lobe temporal et occipital. La couche III contient des cellules plus grandes que dans les types 38 et 20. La couche IV se remarque par la densité des cel- lules et par sa largeur. Dans la couche V, il y a également beaucoup de pyramides assez volumi- neuses, séparées par d'autres moyennes et petites. Si nous regardons dans leur ensemble les images des types que nous venons de décrire, nous voyons que, malgré les petites variations individuelles, il se dégage un tableau général qui suit des règles bien établies. C'est ainsi qu'en poursuivant l'étude de la strue- ture de l'écorce temporale, en commencant par les temporales transverses et en parcourant la pre- nière et la seconde vers la troisième circonvo- lution temporale, nous remarquons que la couche des pyramides superficielles (II), très bien déve- loppée dans 41-42 et dans 22, — en présentant même des cellules que certains auteurs ont trouvé juste d’intituler géantes, — contient peu à peu des cellules pyramidales moindres lorsqu'on se rap- proche de la troisième temporale. En même temps, cette couche IT devient plus large et plus profonde. L'inverse a lieu pour la couche des pyramides profondes (V). Cette couche est à peine indiquée dans le type 41-42 et dans le type 22, de sorte que son existence à été niée par certains auteurs; elle est constituée presque exclusivement par des cel- lules pyramidales moyennes et petites, se déve- loppe à mesure que nous descendons vers le type 20, aussi bien dans sa formation en couche que comme grandeur des cellules. Le passage d'un type à l’autre se fait insensiblement; il n'existe pas, par conséquent, de limites précises. Les différentes mensurations que nous avons entreprises confir- ment les impressions visuelles en ce qui concerne la largeur des couches et le volume des cellules. Dans une deuxième partie, nous étudierons les régions occipitale, du cingulum, rétrospléniale et de l'hippocampe, et nous exposerons les conclu- sions de ce travail. G. Marinesco, Professeur à la Faculté de Médecine de Bucarest. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 835 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET 1° Sciences mathématiques Borel (Emile), Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Leçons sur la théorie de la Crois- sance, prolessées à la Faculté des Sciences de Paris, recueillies et rédigées par M. ArNAUD-DENIOY, ancien Elève de l'Ecole Normale supérieure, Maïtre de Conférences à l'Université de Montpellier. — 1 vol. in-8° de 168 pages. (Prix : 5 fr. 50.) Grauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. Cet ouvrage est, par son sujet, l’un des plus impor- tants de la collection de monographies sur la Théorie des Fonctions, publiée sous la direction de M. Borel. En effet, comme le dit dans la préface le distingué géomètre, la théorie de la croissance semble devenir le fondement essentiel de la Théorie des Fonctions : elle jouera plus tard, sans doute, par rapport à cette théorie, le rôle d’une introduction dont les résultats seront constamment invoqués. Le but de la théorie de la croissance est de comparer la croissance du terme #, d'une suite ou de la valeur f(x) d’une fonc- tion à la croissance des suites ou fonctions types » et x, quand le rang 2 ou l'argument x croissent indéfi- niment. L'ouvrage commence par une introduction, où l’au- teur précise certaines notions, concernant les limites d'une suite, les extrêmes limites d’une suite et d’une fonction : ces généralités sont indispensables pour introduire certains nombres caractérisant la crois- sance des fonctions, et qui sont définis comme limites de fonctions ou de suites. Le sujet principal du livre est ensuite développé en cinq chapitres, dont les trois premiers concernent la théorie, et les deux derniers sont réservés aux applications. Dans le chapitre I, on envisage cerlains types fon- damentaux de fonctions croissantes, et l’on caractérise par un signe déterminé ce que l’on appelle leur ordre de croissance; ainsi on définira par lentier » l’ordre de croissance de x* (n positif); on désignera par la lettre w l'ordre de croissance de e*, et le fait que x e Mure : à Sr ee Fe est infini avec x se traduit par l'inégalité : w > », quel que soit ». On définit alors des opérations sur les ordres de croissance, permettant de noter par des combinaisons de signes élémentaires les ordres de fonctions formant des classes de plus en plus éten- dues; à chacune de ces combinaisons correspondra une fonction unique et réciproquement. Dans le chapitre IT, on étudie la croissance de fonc- tions plus générales dont les procédés du chapitre précédent ne permettent pas de noter l'ordre, lorsque celte croissance est voisine de celle des fonctions du premier chapitre. Le chapitre IIT est consacré aux modifications que subit l’ordre de croissance d’une fonction par l’inté- gration ou la différentiation. On arrive alors aux applications; comme le fait observer l’auteur dans la préface, les chapitres corres- pondants ont été rédigés de manière que les résul- tats essentiels pussent être compris indépendamment du système de notations exposé dans les premiers chapitres. Le chapitre IV : Applications analytiques, étudie d’abord la croissance dans les séries à termes constants et positifs, puis les formules d'approxima- tion de la fonction l'; à cette occasion, M. Borel pré- sente une intéressante étude de cette fonction. Le chapitre se termine par une comparaison de la crois- sance des fonctions entières à celle de leurs zéros. INDEX Le chapitre V : Applications arithmétiques, est par- ticulièrement intéressant; il a pour objet d'utiliser la notion de croissance pour la classification des nom bres incommensurables. Après avoir réfuté quelques paradoxes de la théorie des ensembles, qui se ratta- chent à certains de ses travaux antérieurs, M. Borel établit une relation entre les nombres incommensu- rables et les fonctions croissantes, qui le conduit à étudier l’approximation des nombres incommensu- rables par les nombres rationnels, au moyen des frac- tions continues; l’auteur expose, à cette occasion, la théorie de ces expressions, qui ne figure plus dans nos programmes d'enseignement; en particulier, il établit le célèbre théorème de Lagrange sur le déve- loppement en fractions continues périodiques des irrationnelles du second degré. Il examine ensuite le problème général de l’approximation des nombres quelconques par les nombres rationnels, puis par les nombres algébriques; le cas particulier du nombre e l'amène à montrer la transcendance de ce nombre, d’après M. Hurwitz, ce qui lui permet de déterminer, pour l’approximation de e par les nombres algébri- ques, une limite qu’on ne peut dépasser. Tel est le résumé sommaire de cette exposition très personnelle d’un sujet difficile et encore peu connu; ce livre avait sa place marquée dans la collection constituée par M. Borel, et si appréciée de Lous ceux qui désirent se tenir au courant des plus récents pro- grès de la Théorie des Fonctions. M. LETIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. 2° Sciences physiques Ostwald (W.), Professeur de Chimie à l'Université de Leipzig. — L'évolution d’une science : La Chimie. lraduit sur la dernière édition allemande, par M. le D' Marcez Durour, Professeur agrege à la Faculté de Médecine de Nancy. — Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix : 3 fr. 50.) Flamma- rion, éditeur. Paris, 1910. Le caractère de cet ouvrage est tout différent de celui des Lecons de Ladenburg' dont M. Corvisy à donné la traduction. Il ne faut pas chercher dans le livre d'Ostwald la multitude des faits qui est néces- saire pour se faire une opinion personnelle; l’auteur n’a pas voulu faire une histoire détaillée de la Chimie et permettre au chercheur, par des notes bibliogra- phiques nombreuses, de se renseigner rapidement et complètement sur une partie de cette histoire; ce petit livre est une étude d'ensemble, un exposé, très sobre de détails, des réflexions inspirées à l'auteur par l'étude de l’évolution de la Chimie; aussi ne trou- vera-t-on notés que les faits historiques les plus essen- tiels et ne s’étonnera-t-on pas de voir la partie biblio- graphique absolument sacrifiée. : Grâce à cette physionomie, ce livre est d’une lec- ture facile et peut être abordé par tous ceux qu'inté- resse le développement de l'esprit scientifique; ce qui ne veut pas dire, bien entendu, qu'il ne sera pas goûté par les chimistes de profession; je crois, au contraire, qu'il vient très heureusement compléter les Leçons de Ladenburg et que la lecture de ces pages si vivantes permettra au lecteur qui ne dédaigne pas l'étude approfondie de l’histoire des sciences, de tirer un plus large profit d'études historiques plus serrées. 1 À. Lavexeur6 : Histoire du développement de la Chimie. Paris, Hermann, 1909. 836 On comprend maintenant pourquoi l’auteur s’est systématiquement écarté de l'ordre chronologique, qui ne lui aurait pas permis de donner à sa pensée des développements aussi brillants, ni de coordonner aussi savamment ses idées pour montrer l’épuration progressive subie par les concepts de la science chi- mique. Comme le fait remarquer M. le D' Marcel Dufour dans l'introduction, l'auteur présente une série de coupes faites à travers l’histoire de la Chimie, de la même façon que, pour étudier une pièce, le morpho- logiste la débite en coupes sériées dont la juxtaposition rend plus facile et plus complète l'intelligence de l’ensemble. L'auteur écrit d'abord l’histoire de la notion d'élé- ment chimique, puis s'occupe de la formation du concept de poids atomique et de celui de poids molé- culaire. Deux molécules formées des mêmes éléments unis dans les mêmes proportions ne sont pas forcé- ment identiques : on est donc amené à l'étude des cas d'isomérie et de la constitution des combinaisons chimiques; les idées émises par Berzélius au sujet du problème de la constitution chimique des corps con- duisent à une étude détaillée des relations qui exis- teut entre les phénomènes chimiques et les phéno- mènes électriques : on portera d’abord son attention sur le phénomène de l'électrolyse et toutes les consé- quences que la Chimie en a tirées, puis sur l'étude de la conductibilité électrolytique et enfin sur les recher- ches relatives à l'origine de l'électricité dans la pile; c'est, enfin, l’histoire de la Mécanique chimique que l'auteur aborde et qu'il terminera par deux intéres- sants chapitres sur la catalyse. Deux chapitres sont consacrés au concept d'élé- ment : l’auteur précise bien la nature de cette notion chez les Anciens; il y a lieu de signaler également des jugements très profonds sur l'alchimie, d'intéressantes pages sur le concept de corps pur, l'histoire très vivante des théories de la combustion : il est seule- ment regrettable qu'on ne fasse pas mention de la découverte de Jean Rey. On lira avec beaucoup d'in- térêt les quelques développements écrits par Ostwald sur la définition actuelle des corps simples et sur la transmutation des éléments. L'histoire des notions de molécule-gramme et d’a- tome-gramme comprend quatre chapitres : Poids de combinaison, l'hypothèse atomique, les lois des gaz et l'hypothèse moléculaire, les lois des gazet les corps dissous. On remarquera, dans le premier de ces quatre chapitres, l'exposé très clair des idées de Berthollet et de celles de Proust sur la composition des combinai- sons chimiques, puis la découverte des équivalents chimiques de Richter et les conclusions qu’en tira plus tard Berzélius. Dans le second de ces chapitres, c'est l'introduction, par les idées de Dalton, de l'hypo- thèse atomique en Chimie; la formation du concept de poids relatifs des atomes. On y voit ensuite comment Berzélius fit accepter la conception atomique des combinaisons chimiques en représentant la composi- tion descorps par des formules. Le chapitre se termine par des apercus très intéressants sur les classifications des éléments. Les deux chapitres suivants sont relatifs à l'histoire du concept de poids moléculaire : l’auteur dit le rôle joué par les lois des volumes de Gay-Lussac, les idées de Berzélius sur la théorie des volumes, l'hypothèse d'Avogadro et d'Ampère el son succès après le célèbre travail de Williamson sur l'éthérifi- cation ; il s'occupe enfin de l'extension du concept de poids moléculaire aux corps non gazeux; il est regret- table que ces chapitres ne contiennent rien sur la fixation des poids moléculaires par la méthode chi- mique. En deux chapitres, l’auteur expose les conceptions relatives au problème de la constitution chimique des combinaisons, qui devint l'objet principal de la Chimie pendant la seconde moitié du xix° siècle : dans le pre- mier chapitre, il étudie les conceptions anciennes; dans le second les formules de structure et la Stéréo- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX chimie. On trouve d'abord la théorie de Berzélius sur la nature binaire des combinaisons chimiques, puis l'introduction, par ce même savant, du concept et du nom d’isomère à la suite des découvertes de Liebig et Wæhler; Dumas, qui émit également l'idée que les mêmes atomes pouvaient être assemblés différemment, signala l’allotropie des éléments et la polymorphie. L'auteur parle ensuite de la théorie des radicaux, puis de la lutte violente que Berzélius engagea contre Dumas à propos de la découverte des phénomènes de substi- tution; Dumas et Laurent eurent enfin la victoire et l'on passa d’un extrème à l’autre : la conception dua- liste fut partout remplacée par une conception uni- taire aussi radicale qu'inopportune. La notion de substitution fut la base de la théorie des noyaux de Laurent, qui fit place à la théorie des types qui portait dans l’ambiguité de ses schémas le germe de sa ruine. Les types de Gerhardt se fondent dans la notion plus générale de la valence des éléments et l’on arrive à la théorie de la structure de Kékulé, Couper et Butlerow (1858); mieux que la vieille théorie des types, elle rendait possible une classification univoque des com- binaisons organiques et elle présentait une image extrêmement frappante des relations d'isomérie anté- rieurement connues ou récemment découvertes. Pour expliquer certains faits, Kékulé futamené à créer deux concepts complémentaires : celui de corps non saturés et celui de combinaisons moléculaires ; mais ces amen- dements enlevaient à la théorie de la structure son principal avantage, la relation univoque entre la for- mule et le corps; malgré cela, cette théorie s'est main- tenue en substance pendant un demi-siècle. Ce fut encore une question d’isomérie qui força les chimistes à élargir leurs conceptions. Van t'Hoff et Lebel, en même temps, mais indépendamment l’un de l’autre, montrèrent que les formules de structure dans l’espace permettent d'expliquer les isoméries quand les for- mules planes n'y réussissent pas : la Stéréochimie fut chaleureusement accueillie et devint l’objet d'une vive attention. L'auteur consacre trois chapitres à l’histoire des relations de la Chimie et de lElectricité : 1° Electro- chimie, effets chimiques du courant; 2° La conducti- bilité des électrolytes; 3° Le siège et l’origine de la force électro-motrice dans la pile. Le premier chapitre rappelle surtout les travaux de Humphry Davy: Le second, après avoir ditun mot de la théorie de Grotthus, passe en revue les idées de Faraday, de Daniell, de Hittorf, les travaux de Kohlrausch, les théories de Clausius et de Svante Arrhenius. Dans le troisième, se trouve l'exposé des idées de Volta, des progrès dus à Faraday, des travaux de W. Thomson et de Helmholtz, enfin de ceux de W. Nernst. En somme, dans les trois directions : préparations électrolytiques, théorie de la conductibilité et théorie des forces électromotrices, les résultats obtenus par l'Electrochimie ont apporté à la Chimie pure l’aide la plus précieuse. La théorie des forces électromotrices permet de comprendre, d’une facon de plus en plus générale, le problème de l'affinité chimique auquel l’auteur con- sacre un chapitre. On trouve d’abord les idées de Stahl et de Bergmann sur l’affinité chimique; Berthollet introduisit dans la question la notion nouvelle des réactions partielles. Viennent ensuite les travaux ther- mochimiques de Hess, de Thomsen, de Berthelot; la Thermodynamique moderne à permis d'apporter les corrections nécessaires en montrant que la fonction caractéristique la plus générale qui décide de l'avenir d'un système n’est pas son énergie interne, mais bien son énergie mécaniquement utilisable; les faits firent abandonner cette théorie thermochimique sans expli- cation pour l'influence de l’action de masse qui s'im- posait de plus en plus; les idées de Bertholiet furent peu à peu remises en honneur, et Guldberg et Waage, à Christiania, en 1867, les présentèrent sous une forme mathématique suffisante pour donner une confirmation quantitative des prévisions théoriques. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Un chapitre, « La Thermodynamique et la Chimie », est consacré au principe de Carnot-Clausius. Les consi- dérations de Carnot s'appliquent à toutes les sortes d'énergies; il y a, en particulier, pour l'énergie chi- mique, un potentiel chimique qui est l'expression exacte de ce qu'on cherchait, sans le bien connaitre, sous le nom d'affinité chimique. L'auteur cite les tra- vaux d'Auguste Horstmann (1870) et réserve un cha- pitre aux travaux de Willard Gibbs, qui a découvert les lois qui régissent les changements d'état physique ou de constitution chimique : sa règle des phases est célèbre. Il est bien regrettable que l’auteur ait oublié de citer la longue et remarquable série de travaux de M. Pierre Duhem. Les lois qui régissent le déplacement de l'équilibre ont changé la face de la Mécanique chimique ; leur histoiie est très compliquée, elle fait l'objet d'un chapitre dans le livre d'Ostwald. Les deux lois les plus importantes en la matière ont été formulées en 1884, lune par M. Van CHoff, l’autre par M. H. Le Cha- telier (non cité par l’auteur). On termine le chapitre par la question de la force des acides et des bases et de l’aflinité réciproque entre acides et bases. Dans le chapitre suivant, l’auteur va s'occuper de l'histoire de la Cinétique chimique. Il passe successi- vement en revue les projets d'expériences de Wenzel, les idées de Berthollet, l'introduction en Chimie de la notion de vitesse de réaction par le travail de Wilhelmy sur la transformation du sucre de canne en ses pro- duits d'hydrolyse, un travail de Lœæwenthal et Lenssen sur le mème sujet, le mémoire classique de Berthelot et Péan de Saint Gilles relatif à l’action des acides sur les alcools, les recherches des Anglais Harcourt et Esson, des Norvégiens Guldberg et Waage et du Hol- landais J.-H. Van 'Hofr. Les deux derniers chapitres sont consacrés aux phé- nomènes Catalytiques. Ce sont d’abord les observations de Kirchhoff, de Thénard, de Dôbereiner, le travail de Mitscherlich relatif à la formation de l’éther par dis- tillation d’un mélange d'alcool et d'acide sulfurique; puis la querelle de Berzélius et Liebig, où Liebig eut d'abord la victoire, et ce fut dommage, car, de son hypothèse des chocs moléculaires, il n'y a pas moyen de tirer des conclusions d'ordre expérimental plus ou moins vraisemblables et dont l'exactitude pourrait être soumise au contrôle de l'expérience. Tout à changé quand on à compris que la catalyse se rattache à un problème de Cinétique chimique. On considère aujourd'hui un catalyseur comme un corps qui modifie la vitesse d’une réaction chimique, sans apparaitre lui-même dans les produits résultant de cette réaction. L'ouvrage est terminé par un appendice de trois chapitres : L'énergétique moderne, la théorie éner- gétique et le monde, l’énergétique et ses applications. Ce sont des articles de revue de M. Ostwald qu'on avait eu déjà l’occasion de publier en français et qu'on a voulu réunir à la fin de ce volume. Cet ouvrage montre que tous les concepts géné- raux subissent une évolution commune : au début, ils renferment forcément des parties inutiles ou mau- vaises, qui tiennent aux conditions dans lesquelles ils ont pris naissance, et ils ne s’en débarrassent qu'à la longue par une lente élaboration rappelant au chi- miste la purification des corps par des cristallisations successives, qui leur enlèvent peu à pen les impuretés apportées par le milieu où ils se sont d'abord formés. L'histoire de la science montre que l'épuration com- plète des concepts est, par essence, un travail d'une durée illimitée, tout comme la théorie indique qu'il est impossible de préparer un corps absolument pur. Nous ne pouvons atteindre l'absolu dans le fini : voilà pour l'auteur un des plus précieux résultats qu'on ait obtenus, en appliquant à la théorie de la counaissance les méthodes de la critique historique. On trouvera dans le livre, à chaque instant, de très fines remarques de l’auteur sur la psychologie des savants; le lecteur se rendra très nettement compte de 837 la façon dont la science se fait; il gagnera beaucoup à voir comment les recherches scientifiques s'enchaf- nent, s'appellent les unes les autres, et il ne sera pas peu étonné de constater que les idées que nous nous sommes accoutumés à considérer comme évidentes ont toujours exigé pour s'établir de longs et pémibles vaux et souvent donné lieu à des discussions passion- nées, parfois violentes. Il ne s'étonnera pas moins di voir quels obstacles apporte quelquefois à la marche de la science l'autorité de certains savants, qui ont provoqué dans leur jeunesse des mouvements scien- tifiques des plus intéressants, mais qui ont le tort bien humain de s'attacher à leurs découvertes au point d'être complètement fermés aux idées nouvelles et de devenir injustes et méchants vis-à-vis de leurs adver- saires. Ce livre dépasse donc vraiment le cercle des chimistes et s'adresse à tous ceux qu'intéresse le développement de l’humanité. Aussi, doit-on être reconnaissant au D' Marcel Dufour d’avoir permis à tous, par une tra- duction pleine de qualités et qui conserve à l'ouvrage toule sa saveur et sa vie, d'apprécier une œuvre si remarquable à tous égards, qui mérite d'être très répandue et très connue. tra- LÉON JALOUSTRE, Ancien Elève de l'Ecole Normale Supérieure, Professeur agrégé de l'Université. 3° Sciences naturelles Duparc (L.), Professeur à l’Université de Genève, Pearce (F.), Professeur extraordinaire, et Tika- nowiteh (M'eM.), Assistant au Laboratoire de Minc- ralogie. — Recherches géologiques et pétrogra- phiques sur l’Oural du Nord. Le Bassin de la Haute-Wichéra. 4% partie. — 1{ vol. in-4 de 210 pages, avec 32 fiq., À carte en couleur, # planches et 40 clichés dans le texte. (Extrait des Mémoires de la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Genève, t. XXXVI, fasc. 1, 1910.) A. Xundiq, édi- teur. Genève, 1910. Depuis plusieurs années, M. Duparc visite les régions peu explorées de l’Oural du Nord, et il à déjà publié dans trois grands Mémoires le résultat de ses observa- tions sur le terrain et de ses recherches très étendues de laboratoire. Le présent fascicule est consacré à la description géologique et pétrographique de la partie du Bassin de la Haute-Wichéra située entre 28° et 29010" de longitude Est du Méridien de Saint-Pétersbourg et entre 60°30! et 61041! de latitude Nord, par conséquent comprise sur le versant européen de l'Oural Les terrains constituant la région sont surtout for- més par des roches métamorphiques infra-dévo- niennes (schistes cristallins, dans lesquels sont interca- lés des marbres, quartzites et conglomérats quartzeux); mais il existe aussi des formations appartenant au Dévonien supérieur et moyen, au Carbonifère et au Quaternaire. Les roches éruptives sont des diabases. A cause de son éloignement, la région semble, à première vue, perdre un peu de son intérêt; mais les auteurs ont décrit avec tellement de soin et de précision la topographie du terrain, les formations géologiques, la composition chimique et minéralogique des roches, les gisements des minerais de fer dont plusieurs sont exploités et dont l'origine et la nature varient d’une localité à l'autre, que la lecture de l'ouvrage est non seulement instructive, mais aussi intéressante. De nombreuses photouraphies et croquis éclairent beau- coup le texte en mettant en évidence les particula- rités de la structure géologique de la région (hautes terrasses). 24 phototypies représentent les plaques minces de diabase, de quartzile, d’ampbhibolite albito- épidotique, de schiste albito-chloriteux, de glaucopha- nite, de gneiss séricitique à albite, de gabbro, etc. Pauz GAUBERT, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle. 838 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ER Gallardo (Angel), Professeur à l'Université de Bue- n0S-A1resS. — Zoologia. — 1 vol. de 474 pages, avec 335 gravures. (Prix : T fr, 50.) À. Æstrada et Gi éditeurs. Buenos-Aires, 1910. Le livre de M. Gallardo correspond au cours de Zoo- logie et d'Anatomie comparée suivi à la Faculté de Médecine de Buenos-Aires par les étudiants de 4re an- née de Pharmacie, et aux programmes de l'Enseigne- ment secondaire, c'est-à-dire à notre P. C. N., qui, à part les travaux pratiques, ressemble beaucoup à l’en- seignement donné dans les classes de Philosophie. Ce livre débute par des notions d'Embryologie et d'Histologie; puis vient une partie zoologique bien dé- veloppée, disposée à peu près suivant la classification de M. Ed. Perrier. L'ouvrage se termine par un chapi- tre de Zoouéographie, dans lequel, comme il est naturel, la faune argentine est examinée avec plus de détails que celle des autres régions. L. Cuéor, Professeur à la Faculté des Sciences de Naucy. 4° Sciences médicales Castaigne (J., Professeur agrégé à la Kacullé de Médecine de Paris, Médecin des Hôpitaux, et Chi- ray (D' M.). — Manuel des Maladies du foie et des voies biliaires (publié sous la direction de MM. De- BOVE, CH. ACHaRD et J. CASMAIGNE). — 1 vol. in-8 de S84 pages, avec 300 figures dans le texte. (Prix: 20 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Ce nouveau volume vient s'ajouter à la série des Traités publiés sous la direction du Professeur Debove. Il est digne des volumes précédemment parus el c'est le meilleur éloge qu'on puisse en faire. Sous la direction magistrale de M. Debove, qui à imprimé à cette importante entreprise les qualités maitresses de son enseignement et de son esprit, c'est- à-dire la science, l'expérience etla clarté, cette collec- tion de Traités, trop modestement intitulés manuels, fait le régal et le profit de ceux qui les lisent. La première partie du « Manuel des maladies du foie et des voies biliaires » comprend des notions géné- rales d'anatomie, de physiologie et de séméiologie du foie et des voies biliaires; 88 pages sont consacrées à l'anatomie macroscopique et microscopique de l'or- gane. Le chapitre IT aborde la physiologie si vaste et si complexe de la cellule hépatique (fonction biliaire, rôle digestif, fonction glycogénique, antitoxique, uréo- poiétique, pigmentaire ; le rôle du foie dans la ther- mogenèse). Enfin, l'étude du foie fatal termine ce cha- pitre et montre ce que l’activité hépatique présente de spécial au cours de la vie intra-utérine. C’est, on le voit, traitée à grands traits toute la phy- siologie du foie. Le champ était vaste, et peut-être eüt-il été bon de donner plus de détails sur certains points trop sommairement étudiés. Mais il ne faut pas oublier que ce livre est un Traité de Pathologie et que, par suite, il était impossible de donner à certaines questions de Physiologie {out le développement qu'elles comportent. Le chapitre IV, qui a pour objet la séméiologie, se divise en deux parties: la première, relative aux symp- tômes de l'insuffisance, et la deuxième, à ceux de l'hyperfonction. Le chapitre V, qui termine la première partie du volume, est consacré à la circulation hépalique et aux syndromes circulatoires hypertension portale et hypotension sus-hépatique. La deuxième partie du Traité comprend l'étude ana- lytique des maladies de la glande : hépatites aiguës el chroniques, les maladies du péritoine hépatique, les troubles de la circulation hépatique, les affections des voies biliaires. Chaque maladie comprend naturelle- ment la symptomatologie, l'anatomie pathologique, l'étiologie, la pathogénie, le diagnostic et le traite- ment. L'œuvre est à la fois complète, claire, méthodique et précise. Elle fait le plus grand honneur en même temps au clinicien éminent qui l’a inspirée et aux savants très distingués qui l'ont menée à bonne fin. J.-E. ABELOUS, Professeur à la Faculté de Médecine de Toulouse. 5° Sciences diverses Binet (Alfred). — L'Année psychologique. Publiée avec la collaboration de MM. LarGurer pes BANceLs, D' Ta. Simox, Beaunis, Bourbon, Bover, MAIGRE, STERN. Seizième année. — À vol. in-8° de 1x-500 pages. (Prix : 15 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1910. Une étude de M. Binet et du Dr Simon sur la définr- tion deS principaux états mentaux de l'aliénation remplit la plus grande partie du volume. Les auteurs se sont efforcés de définir nettement l’hystérie, la folie avec conscience, la folie maniaque-dépressive, la folie systématisée, les démences et l'arriération. Dans beau- coup de ces maladies, remarquent-ils on rencontre des symptômes identiques; pour les distinguer, il est donc nécessaire de mettre l'accent non pas sur les Symptômes, mais sur l'état général de l'intelligence, son « attitude » à l'égard des symptômes eux-mêmes. C'est ainsi que l'hystérique, dont la conscience est « divisée », reste étranger aux phénomènes mentaux qui se produisent en lui — souvent sous des influences extérieures — et qui « aboutissent à une réalisation complète », se traduisant en hallucinations s'il s'agit d'images sensorielles, en mouvements s'il s’agit d'images motrices. — Le trait distinctif de la folie avec conscience (folie lucide, psychasthénie), c’est le « con- fit », la lutte du sujet contre ses impulsions et obses- sions, dont il reconnaît le caractère morbide, mais qu'il ne peut vaincre. — Avec Kræpelin, Binet et Simon réunissent sous le nom unique de « folie maniaque-dépressive » la manie et la mélancolie : ici, les malades ne luttent pas contre leurs idées mor- bides (excitation ou apathie): ils sont, au contraire, « dominés » par elles, et, bien que, à la différence des hystériques, ils en aient conscience, ils sont incapables de les juger et de réagir. — Dans la folie systématisée, le sujet est moins passif; il résiste aux suggestions, il raisonne; il n’est pas incohérent : au contraire, il interprète, dans le sens de son délire, tous les faits qui surviennent; il manque de sens critique; c'estla forme d'aliénation qui ressemble le plus à la passion : comme elle, mais plus qu'elle, elle se caractérise ‘par une “ perversion », une « déviation » de l'intelligence plutôt que par un affaiblissement des fonctions men- tales.—Au contraire, lesdémencessontcaractérisées par cet affaiblissement; et, si l'arriération se distingue de la démence, c'est qu’elle est congénitale au lieu d'être acquise, et qu'on ne retrouve pas chez l’arriéré ces « reliquats » d'une intelligence normale qui appa- raissent chez le dément. A côté de cet important travail, notons un élégant mémoire de A. et A. Binet sur /embrandt (qui a su être un peintre de la lumière, sans employer l’artifice des opposilions violentes, en faisant, au contraire, de chaque objet éclairé un objet éclairant qui illumine les ombres voisines) ; un article de Binet sur /es signes physiques de l'intelligence chez les enfants (conclu- sion : juger l'intelligence d’après ses manifestations intellectuelles, et ne se servir des signes physiques que comme moyen de contrôle); un autre du même auteur sur /e diagnostie judiciaire par la méthode des associations (critique d'une méthode américaine assez aventureuse); des recherches tachistoscopiques, de Bourdon; enfin, une bibliographie qui n'a pas la pré- tention d'être complète, mais qui préfère analyser en détail les ouvrages qui en valent la peine. PauL LaPie, Professeur à l'Université de Bordeaux, ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 Aoùt 1910. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Gonnessiat annonce qu'il vient de retrouver à l'Observatoire d'Alger la comète de d’Arrest, qui n'avait pas été vue à son pas- sage de 1904. 20 SœENcEs PuYsiQues. — M. K. Honda à reconnu que l'effet d'une élévation de la température sur le coefficient d’aimantation d'un élément est pareil à celui d'une petite augmentation du poids atomique de cet élément. — M. G. D. Hinrichs déduit d'un grand nombre de réactions par sa méthode de calcul que le poids atomique de l'oxygène est exactement 16 et celui de l'argent exactement 108. — M. Busigaies, en faisant réagir les solutions de Grignard en milieu éthéré sur la p-éthoxybenzophénone, à obtenu : le p-éthoxydi- phényléthylène, K. 71°; le p-éthoxydiphénylpropène, FE. 54; le p-éthoxyphénylstilbène, F. 93°. Il à préparé les dérivés bromés de ces corps. — M. E. Voisenet à constaté que le bacille de l’amertume des vins fait fermenter la glycérine en donnant le produit de dés- hydratation de celle-ci : l'acroléine, qu'il a dosée dans plusieurs vins. 39 SGiENCES NATURELLES. — M. J. Chatin a constalé que la présence d’une bague scléroticale postérieure est loin d'être constante chez les Phasianides: en outre, quand elle existe, elle présente de nombreuses varia- lions. — M. Z. Skrzynski est parvenu à immuniser le lapin contre divers champignons dermatophytes; le sérum de ces lapins immunisés ne contient pas de sensibilisatrice spécilique. Séance du 5 Septembre 1910. 1° Sciences PHYSIQUES. — Me P. Curie et M. A. De- bierne : Sur le radium métallique (voir p. 802). — M. L. Kolowrat, en chauffant une lame de platine contenant un peu de sel de radium, puis mesurant l'activité à différentes époques après la chauffe, a cons- taté l'existence d'un rayonnement $ peu pénétrant, particulier au radium. — MM. G. Beaume et F.-L. Perrot ont observé, dans l'étude des courbes de fusi- bilité des systèmes oxyde de méthyle-ammoniac et alcool méthylique-ammoniac, un maximum nettement accusé des liquides caractérisant les combinaisons (CH*)0.AzH* et CHSOH.AZH*. — M. J. B. Senderens à constaté que le bisulfate de potassium, chauffé en petite quantité avec la glycérine, agit comme catalysa- teur déshydratant avec production d’acroléine. Cette action catalytique s'explique par la formation tempo- raire d'un sulfoglycérate de potassium. — M. P.Gaubert à reconnu que les cristaux solides de certaines sub- stances peuvent, surtout au voisinage du point de fusion, sous l'influence de la pression, se souder entre eux, et que leurs particules cristallines peuvent être orientées par les lames de verre, leur axe optique devenant perpendiculaire à la lame. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Robinson a observé de nombreuses variations en trajet, nombre, calibre, des vaisseaux de la fourche du nerf médian chez l'homme; elles sont probablement en rapport avec les variations de l'adresse manuelle. Séance du 12 Septembre 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. J. Guillaume et J. Merlin ont observé à Lyon, le 26 juillet, l'occultation de x Gémeaux par Vénus. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Stormer établit, avec les équations générales du mouvement d’un corpuscul: dans un champ magnétique et un champ électrique superposés, des principes analogues à ceux de la moindre action et d'Hamilton. — M. P. Floquet, en opérant sur la paraffine, a comparé différents procédés de mesure de la constante diélectrique : méthode d'os- cillations lentes, méthode purement statique, mesure de la vitesse de propagation des ondes hertziennes. Les résultats sont très concordants. 3° SCIENCES NATURELLES. MM. J. Athanasiu el J. Dragoiu ont constaté que la substance contractile de la fibre musculaire striée de la grenouille et des Mammifères est parcourue, dans le sens transversal, par toute une série de fibrilles élastiques (disques clairs et stries intermédiaires) en continuité avec le sarco- lemme. — M. E. Roubaud a étudié les groupements sociaux des PÆelenoqaster d'Afrique. Ils représentent des associations encore mal définies, sans cohésion, sans division du travail, ni différenciation des femelles, de guêpes qui n'ont point encore perdu définitivement les habitudes ancestrales des solitaires. — M. Ph. de Vilmorin a étudié l'hérédité chezles différentes variétés de Pisum sativum; il confirme pleinement la théorie de Mendel, quoique certains caractères présentent des complications analogues à celles qui ont été trouvées ou expliquées chez d'autres plantes ou animaux. — M. J. Roussel signale l'existence de trois horizons de phosphate tricalcique en Algérie et en Tunisie. Séance du 19 Septembre 1910. A08S0 ES MATHÉMATIQUES. — M. E. Bertin cherche à déterminer par le caleul le temps que mettent les navires à vapeur pour s'arrêter, soit par stoppage, soit par renversement de marche de la machine. L'énor- mité des distances qu'un navire peut franchir sur son erre montre la nécessité où l’on est, pour amortir sa vitesse, de disposer de machines, et même de puis- santes machines, marchant en arrière. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Athanasiu montre que le ressort antagoniste à la force contractile des muscles est autrement puissant dans la fibre striée, où il est placé à l’intérieur même de la substance contrac- tile, que dans la fibre lisse, où il est placé à la surface. — M. Pougnet à constaté que les rayons ultra-violets provoquent rapidement l'odeur dans les plantes à cou- marine et les plantes rendues odorantes par un gluco- side se dédoublant. La cellule est tuée, alors que sur- vivent les ferments qu'elle renferme. — MM. J. Deprat et H. Mansuy communiquent les résullats stratigra- phiques généraux de la Mission géologique envoyée au Yunnan en 1909-1910. — MM. E. Van den Broëck et E. A. Martel montrent qu'en Belgique les calcaires crinoidiques, base du Carboniférien du bassin géolo- gique de Dinant, constamment disposés en bassins ou en plis synclinaux, sont spécialement aptes à fournir des eaux de sources filtrées et potables. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 23 Juin 1910. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. T. H. Havelock présente ses recherches sur /a résistance des navires due à la formation des vaques. Dans un travail anté- rieur, il avait proposé une formule pour cette résistance et trouvé un accord numérique assez bon avec les ré- sultats d'expériences sur des modèles dans des bassins en donnant aux coeflicients de la formule des valeurs numériques convenables. L'auteur a repris plus à fond l'étude des coefficients de cette formule. Il limite la 840 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES discussion aux types pour lesquels la courbe résistance- vitesse montre clairement les bosses et les creux qui sont généralement attribués à l’interférence des sys- tèmes d'ondes naissant à l’avant et à l'arrière, et il illustre ses considérations par l'exemple de la Tur- binia dont les résultats d'essais ont été publiés. L'effet d'interférence mentionné ci-dessus paraît être spécial aux modèles à extrémités pleines, à coefficients cylin- driques élevés. Pour les modèles à extrémités fines, la théorie de l'interférence ne s'applique plus. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. A. Mallock : L'amortis- sement du son par les liquides écumeux. L'auteur recherche pourquoi l'amortissement du son par le brouillard contenant de petites particules de liquide est très faible, tandis qu'il est considérable dans un liquide contenant des bulles gazeuses en suspension. C'est que, dans le premier cas, les compressions et dilatations ont lieu dans le gaz à peu près comme s’il était seul, tandis que, dans le second, les variations de volume provenant du passage d'une onde n'ayant lieu que dans le gaz, la distorsion du liquide autour des bulles dont le volume est variable cause une plus grande dissipation du son. L'auteur montre que, dans un mélange de liquide et de gaz (sous forme de bulles), la vitesse de propagation des ondes est moindre que dans chaque constituant et atteint une valeur minimum pour une certaine proportion des deux corps. Pour des mélanges d'eau et d'air, la vitesse minima est atteinte pour des volumes égaux des deux corps; elle est le 1/14 de la vitesse dans l'air. — M. J. I. Graham : Le spectre d'absorption de la vapeur de soufre et ses rela- tions avec la complexité moléculaire de cet élément. Les photographies prises à pression constante entre 5309 et 900° C. montrent la présence de deux spectres d'absorption distincts, attribuables respectivement aux vibrations intramoléculaires des complexes S* et S?: premier produit une série de bandes d'absorption entre n(—2À-1)2.000 et 7 2.600, tandis que le second, relativement plus léger, produit une série de bandes entre n 2.900 et n 3.820. Comme on ne remarque que deux spectres distincts, l'équation S$— 4$? représente la seule réaction qui ait lieu dans la dissociation de la vapeur de soufre depuis son point d'ébullition jusqu'à 900° C. — M. je V. Bevan a étudié /a dispersion de la lumière par la vapeur de potassium. La dispersion se fait surtout par les lignes d'absorption rouges; elle obéit à une des formules de Sellmaier. On peut con- clure, des valeurs relatives des constantes de la for- mule de dispersion, que le nombre d’'atomes prenant part à l'absorption de la lumière après la première paire de lignes ne doit être qu'une faible fraction du nombre total présent dans la vapeur, et que cette frac- tion diminue avec le nombre de lignes dans la série. L'explication des lignes de séries doit donc être recherchée dans des systèmes qui ne sont pas l'atome pur et simple, mais des atomes auxquels un ou plu- sieurs corpuscules sont attachés. — M. J. W. Gifford a déterminé les indices de réfraction du quartz, de la silice vitreuse, de la calcite et dela fluorite pour 7 nou- velles lignes du spectre, allant de 6708 Li à 4046 Hg. 3° SCIENCES NATURELLE*. — M. E.C. Hort : Aulo-loxemie et infection. Les expériences de l’auteur montrent qu'il y a parallélisme étroit entre les courbes de tem- pérature, les courbes de poids et les valeurs antitryp- tiques des sérums des animaux qui ont reçu des injec- tions d’eau et de ceux qui ont recu des injections de bactéries vivantes ou de solutions de toxines bacté- riennes. Ces faits viennent à l'appui de l'idée émise par l’auteur que, quelque grande que soit la part prise par les micro-organismes et leurs produits à la production du complexe de l'infection, le résultat net est, peut- être en grande partie, un état d'auto-intoxication vraie. — MM. G. Dreyer et W. Ray : Le volume du sang des Mammifères et ses rapports avec le poids du corps el sa surface. Les expériences des auteurs les ont conduits aux résultats suivants : 4° Le volume du sang des Mammifères vivants peut être déterminé très exac- tement en saignant l’animal (d'environ 20 °/, du volume primitif du sang) et en déterminant la chute pour cent de l'hémoglobine au moment où l’ équilibre est atteint. Cette méthode donne des résultats très concordants avec ceux qu'on obtient en vidant le système circula- toire, mais il faut que les animaux n'aient jamais été saignés auparavant; 2° Chez les Mammifères normaux et sains (lapin, cochon d'Inde, souris, le volume du sang s'exprime par la formule B— W° : k, où B est le volume en centimètres cubes, W le poids de l'individu en grammes et À une constante à déterminer pour chaque espèce d'animal. Les animaux les plus petits, qui ont une surface du corps relativement plus grande que les animaux lourds, ont aussi un volume de sang relativement plus grand. Le volume du sang peut donc être exprimé 2n fonction de la surface du corps; 3° La constante k a les valeurs suivantes: lapin, 1,58; cobaye, 3,30; souris, 6,70. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 10 Juin 1910. MM. G. Gehlhoff et K. Rottgardt : Mesures élec- triques et optiques relatives à l'effluve au sein des vapeurs de sodium et de potassium. Les points de fusion et d’ébullition si bas des métaux alcalins sodium et potassium, et la possibilité qui s'ensuit d'obtenir, pour des températures relativement basses, la tension de vapeur nécessaire pour mesurer les chutes cathodiques normales, ont engagé les auteurs à entreprendre le présent travail. Les auteurs observent que les vapeurs de potassium el de sodium, à des températures don- nées, absorbent complètement, sous l'influence du courant électrique, tous les gaz, y compris l’'hydro- gène, les vapeurs de K plus rapidement que celles de Na. L'absorption complète se produit au passage du cou- rant, dans les vapeurs de K, à 175° C., dans celles de Na, à 2900 C. La chute cathodique dans les résidus gazeux et le potentiel total atteignent un minimum au com- mencement de l’absorption, et, dans le cas d’un apport continu de gaz, pendant l'absorption. Elle est, sur le fer, en présence de la vapeur de K, normalement de 80 volts; en présence de la vapeur de Na, d'environ 115 volts. L'émission spectrale diffère pour les diffé- rentes parties de l’effluve; dans l’effluve anodique, ce sont les séries principale et secondaire qui sont émises, tandis que l’effluve positif n'émet que la série princi- pale. Dans l’effluve négatif, l'émission, chez K, com- porte, à des températures relativement basses, la série secondaire; au-dessus de 2309, la série secondaire et le spectre fondamental de Goldstein, tandis qu'au- dessus de 300° C., la série principale se présente à son tour. Dans la vapeur de Na, l'effluve négatif émet les séries principale et secondaire; aux températures élevées, la série secondaire s'évanouit, à à l'exception de la raie verte, en même temps que s'accentue l’auréole. — M. F. Weigert rend compte d’une méthode simple pour construire /es courbes de noircissement des plaques photogranhiques. Cette méthode se base essen- tiellement sur l'exposition d’une plaque photogra- phique sous un photomètre carré à échelle, compor- tant un nombre aussi grand que possible de couches de papier de soie uniformément diaphane. Le négatif développé donne une copie, avec le photomètre original superposé en croix, sur une plaque sensible ou du papier au bromure d'argent, ce qui fournit une limite d'ombre recourbée qui constitue la courbe de noircis- sement voulue. Ce procédé si simple permet, sans l'aide de dispositifs spéciaux pour la détermination des noircissements, de faire avec une précision suffisante de nombreuses mesures importantes pour la théorie des processus photographiques. ALFRED GRADENWITZ. Le Gérant : À. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 20 30 OCTOBRE 1910 r LÀ Revue générale e Le pures et appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser provisoirement tout ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Congrès Le Congrès scientifique international de Buenos-Ayres. — Le sentiment de la solidarité universelle dans le champ de l’investigation scienti- fique ne fut jamais aussi intense qu'aujourd'hui : le travail des solitaires n’est pas de notre époque. Nous en voyons la preuve dans les congrès de toute nature qui tiennent chaque année leurs assises dans les grandes capitales de l'Europe et des Etats-Unis. Mais qu'un congrès scientitique se réunisse avec le caractère international dans une ville de l'Amérique espagnole comptant à peine trente années de vie nor- male, malgré ses 1.300.000 habitants, c'est là un évé- nement tout nouveau. Et si nous ajoutons qu'à l'invi- tation qui leur avait été adressée de se rendre à Buenos-Ayres ont répondu, par l'envoi de nombreux représentants, vingt nations, vingt-huit facultés ou instituts universitaires, treize sociétés scientitiques et quarante-six corporations diverses de tous les pays civilisés du monde, l'événement revêt alors tous les caractères de l'extraordinaire; c'est un fait qui révèle l'existence d'un foyer d'activité intellectuelle méconnu jusqu'à présent, d’un centre de force dont la puissance d'attraction s'est d’ailleurs mise en relief, dans un moment historique, lors de la célébration récente du premier Centenaire de la République Argentine, sœur ainée des républiques d’origine espagnole. En janvier 1909, se réunissait à Santiago du Chili le IVe Congrès scientifique latin américain (1° Pan-amé- ricain) !; à ce Congrès vint se déployer la production scientifique de la République, devant un noyau nom- breux et choisi d'hommes d'étude des deux Amériques, convoqués en assemblée pour la première fois. Et cependant, malgré le bref espace de temps écoulé, malgré les forces dépensées aux Congrès des Améri- canistes et de Médecine et Hygiène réunis à Buenos- ‘ C'était la quatrième réunion du Congrès inauguré à Buenos-Ayres, en 1898, sous la direction de la Société scientifique Argentine, dont le président d'alors, M. le Pro- fesseur Angel Gallardo, avait eu l'initiative. Les trois pre- mières réunions avaient eu lieu à Buenos-Avyres, Montevideo et Kio-de-Janeiro. ; RVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. . Ayres au mois de mai de cette année avec un brillant succès, les onze sections dont se composait le Congrès international récent de Buenos-Ayres se sont vues obligées à des sessions quotidiennes pendant plus de huit jours, afin de pouvoir prendre en considération les mémoires et monographies présentés par les cen- taines d’adhérents, parmi lesquels les Argentins figu- raient en première ligne. Les travaux approuvés dans les diverses sections vont être prochainement impri- més, sous la direction de la Société scientifique Argen- tine,et,. dans ce but, le Gouvernement national a voté un crédit de 40.000 francs !. Que signifie un tel résullat, qui a surpassé les espé- rances mêmes des organisateurs du Congrès, lesquels pourtant connaissaient à fond le milieu ambiant? Il signifie que la République Argentine n’est plus seule- ment un centre florissant de richesses naturelles, que notre nom ne doit pas son prestige en Amérique uni- quement aux gloires militaires du temps passé, et en Europe au progrès économique du temps présent. La science argentine commence à prendre forme, à se consolider, s’orientant à pas ferme dans les sentiers où marchent les nations les plus civilisées: ce n’est plus seulement un pâle reflet de la science européenne, grâce à l'élan donné par lanouvelle génération d'hommes d'étude qui, disciples directs ou indirects des grands maîtres européens, français, allemands, italiens, etce., sans distinction de races, ni de langues, travaiilent dans les cabinets et laboratoires de nos Universités de Cordoba, Buenos-Ayres et La Plata *. Les représentants de la France au Congrès scienti- fique de Buenos-Ayres, parmi lesquels se comptaient tant d'éminents professeurs, MM. Henri Vallée, Henri Lorin, E. Martinenche, Laurent Opin, Georges Courty 1 L'initiative de ce Congrès revient à la Société scienti- fique Argentine, et surtout à son président actuel, le savant Francois P. Moreno, aidé par des Argentins congressistes comme les éminents professeurs Ameghino, Arata, Aguirre, Barabino, Gallardo, Garcia. Mansilla, Candioti, Pinero, Huerso, Gonzalez, Rivarola et Zeballos. 2 La population universitaire de ces trois institutions représente plus de 560 professeurs et près de 7.500 élèves, chiffre. considérable puisque la population de la République est de 6.000.000 d'habitants, 20 842 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE et Lucien Yches, ont pu se convaincre que dans la science argentine revit l'esprit français, la culture française, précieux héritage que nous ont légué Bom- pland, de Moussy, Bravard, Jacques, Larroque, Bœuf, et que Daireaux, Ebelot, Delachaux, Groussac, Duclout, Bialet, Lahille et Simon ont perpétué jusqu'à nos jours,sans parler des livres et des journaux français que par milliers on trouve dans toutes les bibliothèques publiques et privées. Mais,en même temps, ils ont dû se rendre compte, non sans regrets, que l'influence alle- mande se fait sentir chaque jour de plus en plus chez nous, qu'elle s'insinue dans nos écoles supérieures, techniques et militaires, dans nos institutions scienti- fiques, sans que l’on puisse en imputer la faute ni aux gouvernements, ni aux institutions, mais seulement à la difficulté d'obtenir en France l’expatriation tempo- raire ou permanente des éléments intellectuels, comme je l'ai fait observer récemment au Groupement des Universités et Grandes Ecoles lors de mon récent séjour à Paris. Nous sommes les premiers à reconnaitre que la science est le patrimoine du genre humain et plane majestueuse au-dessus de l'idée de nationalité; mais nous désirerions de tout cœur que nos collaborateurs fussent avant tout membres de notre race, possesseurs de nos qualités comme de nos défauts, rèvant les mêmes idéals, parlant des idiomes pour nous plus accessibles et dans l'esprit desquels nous puissions pénétrer plus à fond. Le succès indiscutable du Congrès scientifique international de Buenos-Ayres, révélateur des forces vives de la République Argentine sur le terrain de l’investigation scientifique, doit être*pour les intellec- tuels français un avertissement qu'ils ont tout intérêt à ne pas méconnaître. Qu'à l'instar des capitalistes qui cherchent dans notre pays les gains énormes qu'au- cun autre ne leur pourrait offrir, ils cherchent de leur côté une terre vierge et féconde où mettre en jeu leur activité, contribuant ainsi à la grandeur de ce peuple nouveau et lui apportant quelque chose du glorieux héritage de la nation française, patrie de mes aïeux. E. Herrero Ducloux. Vice-directeur du Muste de La Plata, Professeur à l'Université de Buenos-Ayres, $ 2. — Nécrologie Henri Caro. — L'un des hommes dont le nom incarne le mieux les brillants succès de l'industrie chimique allemande depuis un demi-siècle, Henri Caro, vient de mourir à Mannheim, à l’âge de soixante-seize ans et demi. É Né à Posen, il étudia au Gymnase de cette ville, puis à l'Université de Berlin. Il se destinait d'abord à la métallurgie, mais son attention fut attirée sur la tein- ture et l'impression du coton, et en 1855 il obtint une situation dans cette industrie à Muhlheim-sur-la-Ruhr. En 1859, Caro partit pour l'Angleterre et entra au ser- vice de la maison Roberts, Dale et Cie, de Manckbester, où il travailla avec énergie la question, alors nouvelle, des colorants d'’aniline. 11 inventa un nouveau procédé pour la fabrication de la mauvéine, puis il découvrit les indulines bleues solubles dans l'alcool (1863) et le jaune de Manchester (186#). De retour en Allemagne en 1866, il enseigna d'abord comme privat-docent à Heidelberg; mais, sollicité par la Badische Anilin und Soda-Fabrik, avec laquelle il avait été en relations pendant son séjour en Angleterre, il accepta en 1868 une haute situation dans ses usines. C’est là qu'il découvrit ou prépara pour la première fois industriellement quelques-unes des plus belles matières colorantes du goudron de houille : l'éosine, l'orange d'alizarine, le rouge solide, le jaune de naphtol, le violet cristal, le bleu Victoria, le bleu de méthylène, l’auramine, etc. Il. est aussi l’auteur de recherches importantes sur l’alizarine artificielle, en collaboration avec Graebe et Liebermann; sur les hydroxyanthraquinones, la nitrosodiméthylaniline et le nitrosophénol, en collaboration avec Ad. von Baeyer. En 1884, il était nommé directeur de la Badische Anilin und Soda-Fabrik, fonction qu'il résigna en 4890 pour devenir membre du Conseil de surveillance. Il n'abandonna pas, cependant, ses recherches person- nelles, qu'il continua dans son laboratoire privé. Le fruit de cette dernière activité fut la découverte de l'acide monopersulfurique, réactif d'une très grande valeur,aujourd'hui universellement connu sous le nom d'acide de Caro. Caro fut l'un des principaux fondateurs à la fois de l'Union des Chimistes allemands et de l'Union des Ingé- nieurs allemands. Il jouissait parmi ses compatriotes d'une considération méritée, qui s’est traduite, en particulier, il y a sept ans, lors de la fête jubilaire qui lui fut offerte à l'occasion de son soixante-dixième anniversaire. L. Brunet. $ 3. — Météorologie La propagation des odeurs à Paris et les circonstances météorologiques. — On sait que, d'une façon intermittente, des odeurs très désagréables, dites odeurs de Paris, se répandent sur une grande partie de notre capitale. Elles proviennent de certaines usines de la banlieue, et le Service d'inspection des Etablissements classés, dans le ressort duquel rentre cette question, s'en est vivement préoccupé depuis nombre d'années. Sur sa demande, M. J. Jaubert, chef du Service météorologique de la Ville de Paris, a étudié le rapport qui existe entre la propagation de ces odeurs et les circonstances météorologiques, et il est arrivé aux conclusions suivantes : Ce qui trouble surtout l'atmosphère de Paris, ce sont des brumes flottantes plus ou moins épaisses, qui couvrent la capitale d’un voile ayant de 400 à 600 mètres d'épaisseur. Ces brumes, constituées par un mélange de poussières, fumées et gaz de toutes espèces, qui émanent de l'agglomération parisienne, varient d'inten- sité suivant les vents. Ce sont les courants d’ouest-sud- ouest qui les dissipent et les transportent au loin le plus promptement, car ces vents, dont la vitesse moyenne, à une soixantaine de mètres au-dessus du sol, est de 4 à 5 mètres à la seconde, ont très rapide- ment disséminé loin de Paris les fumées et les vapeurs de la capitale. Il n’en est pas de même pour les vents du nord-est, car ces vents, non seulement circulent avec moins de vitesse (2 à 3 mètres par seconde), mais encore amènent sur la ville toutes les fumées et éma- nations de la partie la moins pure de la banlieue. La banlieue nord-est étant des environs celle qui a le plus d'usines, il en résulte qu'avec les vents nord-est, la majeure partie de Paris est constamment chargée d'épaisses brumes; il convient d'ajouter que les arron- dissements périphériques du nord et du nord-est de Paris possèdent également de nombreuses usines dont les effets, troublants pour l'atmosphère, viennent s'ajouter à ceux de la banlieue. La production plus abondante des fumées, par un temps sec, et c'est le cas lorsque les vents soufflent du nord-est au sud-est, se complique d’odeurs fort désa- gréables qui traduisent vite leur origine. Ces odeurs affectent surtout les quartiers au-dessus desquels planent les nuages fumeux. Ce qu'il importe de connaitre, c'est la proportion des vents qu'on peut appeler odorants; or, ceux-ci sont les moins fréquents; on peut les compter, d'après un demi-siècle d'observations, à environ 35 °/, du nombre total des directions observées; toutefois, il est à remarquer qu'en ces dernières années il y à eu de plus longues périodes de vents des régions est qu'en temps normal. La vitesse des courants de cette direc- tion est en général faible, et, lorsqu'elle prédomine, elle se produit le plus souvent par ciel assez pur ou plutôt avec brumes roussâtres et atmosphère calme, et la pénétration des odeurs avance d'autant plus vers le Dé CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE centre de la ville que la disposition des voies s'y prête mieux : ainsi il est à Paris une voie, la rue Lafayette, qui, par son orientation, facilite la propagation des odeurs jusque vers les quartiers avoisinant l'Opéra; c'est d'ailleurs dans cette rue que l’on a toujours constaté les plus grandes variations météorologiques. Les vents du sud-est amènent parfois des odeurs pereues jusqu'à la tour Saint-Jacques; ces vents sont presque toujours faibles. La température et l'humidité jouent certainement un rôle dans la propagation des odeurs, mais les études ne sont pas encore assez nombreuses sur Ce point, sur- tout en ces derniers mois, pour qu'on puisse en tirer une conclusion. L'action des variations de la pression barométrique est également manifeste; elle est plus sensible au moment de la baisse que de la hausse, et cela princi- palement lorsqu'il y a des courants descendants, phé- nomène que décèle l'observation constante du mouve- ment des fumées. Les brouillards à Paris sont dans certains cas très odorants, et cela surtout lorsqu'ils se déplacent de l’est- sud-est vers le nord-ouest; nous avons étudié tous ceux qui se sont produits en ces dernières années, el dans la plupart des cas il nous a été possible de nous élever au-dessus de la couche brumeuse. Cette couche ne dépasse guère 200 à 250 mètres d'épaisseur, et à sa partie supérieure viennent en quelque sorte s’ag- glutiner les poussières et autres émanations qui s'échappent de Paris : ces particules ne peuvent sortir du brouillard et c'est pourquoi elles forment comme une sorte d'écran noirâtre, lequel va en augmentant d'intensité dans le sens de la marche de la nuée; c’est pourquoi, lorsque le brouillard est odorant, il l'est davantage à l'aval de Paris qu'à l’amont suivant la direction de la nuée. $ 4. — Physique Un solide peut-il être surchauffé®? — On n'a jamais réussi à surchauffer un solide, c’est-à-dire à le chauffer au-dessus de son point de fusion sans qu'il fonde. Malgré ces résultats négatifs, certains savants, en particulier Ostwald', admettent la possibilité de réaliser ce phénomène et attribuent les échecs enre- gistrés jusqu'ici aux conditions défectueuses dans lesquelles on a opéré. Un savant suisse, M. A. Berthoud, vient de reprendre l'étude de cette question®. Il montre d'abord que les conclusions d'Ostwald, basées sur une fausse interpré- lation decertainesexpériences de Frankenheimrelatives au chlorure de sodium hydraté, ne se justifient en aucune manière. Bien plus, il fait voir que son opinion est en contradiction avec la théorie actuellement admise qui attribue les retards aux changements d'état à l’action de la force capillaire. i D'après cette théorie, si la congélation, par exemple, ne se produit pas, en l'absence de germes, au point de solidification, cela tient à ce que les particules très petites qui se forment au début ont une surface très grande par rapport à leur volume et, par conséquent, une énergie superficielle considérable. Leur formation à partir du liquide est ainsi liée à un accroissement de l'énergie libre et, par conséquent, n'a pas lieu. En ajoutant au liquide en surfusion une particule de la substance solidifiée, on supprime la première phase de la transformation, qui ne peut se produire d'elle- même, et on provoque la solidification. Cette théorie admise, il est tout indiqué, si l’on veut expliquer l'impossibilité de surchauffer un solide, de chercher la cause pour laquelle les forces capillaires ne se manifestent pas dans la fusion, Cette cause serait Lehrbuch der allq. Chemie, t. X, tevue de Chimie physique, 1. (25 août 1910). 1 , E P- 994. = VIII, p. 337 et suiv. #13 liée, d'après M. Berthoud, au fait que le liquide qui se forme dans la fusion mouille le solide. Considérons, en effet, un morceau de glace à 0 Une gouttelette d'eau placée à sa surface s'étale, La surface glace-air est ainsi remplacée par une doi surface glace-eau et eau-air. Le phénomène, se produi- sant de lui-même, est lié à une diminution de l'énergie superficielle. En désignant celle-ci par E, on a don: Eglace-nir > Eglnce-eau + Eenu-sir. La formation d’une gouttelette d'eau à la surface d'un cristal de glace à 00 n’est donc pas accompagnée d’un accroissement, mais d'une diminution de l'énergie superficielle, La cause qui, dans la congélation, la vaporisation, etc., s'oppose au changement d'état, à savoir l'accroissement de l'énergie superficielle au début de la transformation, n'existe donc pas dans la fusion. Celle-ci doit donc se produire, sans qu'un amorçage soit nécessaire, dès que le point de fusion est atteint. La théorie capillaire des retards aux changements d'état conduit ainsi à la conclusion, en parfait accord avec les faits expérimentaux, qu'il est impossible de chauffer un solide au-dessus de son point de fusion sans qu'il fonde. Ce phénomène ne serait réalisable qu'avec un solide qui, en fondant, donnerait un liquide ne le mouillant pas. La propagation du son dans les explosions aceidentelles. — Les sources acoustiques de grande intensité sont entourées, dans leur voisinage immédiat, par une région à «audibilité normale », d'une délimi- tation irrégulière, et, en dehors de celle-ci, par une région à « audibilité anormale », bien plus étendue et séparée de la première, dans certains cas récemment étudiés, par une zone « taciturne » large d'environ 100 kilomètres. $ Dans un récent mémoire, M. G. von dem Borne, sur la base de considérations théoriques, propose l’expli- cation suivante de ce phénomène : Dans les régions inférieures de l'atmosphère, où la température décroit vers le haut et où le poids molé- culaire de l’air est sensiblement constant, les rayons acoustiques sontconcaves vers le haut; dans lescouches élevées, ils sont, au contraire, concaves vers le bas, en raison de la part plus grande que prennent, dans la composition de l'atmosphère, les gaz plus légers, de moindre poids moléculaire, et de l'accroissement de la vitesse du son. Le vent n'exercerait qu'une influence secondaire sur ces phénomènes. Les calculs de l’auteur concordent si bien avec les faits que les hypothèses servant de base à ses considé- rations, notamment celles qui sont relatives à la com- position variable de l'air à des hauteurs différentes, doivent être considérées comme assez conformes à la vérité. Une étude plus approfondie de ce phénomène, dans le cas, par exemple, des éruptions volcaniques, serait, paraît-il, susceptible de nous renseigner sur les tem- pératures des couches élevées de l'atmosphère (jusqu'à environ 100 kilomètres), ainsi que sur la part relative de chacun des gaz atmosphériques dans la composition de l'atmosphère, surtout si l’on réussissait à établir avec sécurité les temps d'observation acoustique aux différents endroits. $ 5. — Chimie industrielle L'emploi de la bagasse comme matière première pour la fabrication du papier. — Les tiges de canne à sucre, après avoir été broyées pour en extraire le jus, laissent un résidu connu sous le nom de bagasse, dont on cherche, surtout depuis la crise qui a sévi sur l’industrie du sucre de canne, à tirer parti le plus avantageusement possible. M. W. Raitt vient de se livrer à une étude sur l'emploi de la 5841 bagasse comme matière première pour la fabrication du papier". L'auteur divise les papiers en trois classes : les papiers à écrire de qualité supérieure, fabriqués presque exclusivement avec des chiffons; les papiers à écrire et à imprimer fins et moyens, dont la matière première est surtout le bois (ce groupe représente les 75 °/, du total du papier consommé, soit près de 6.000.000 de tonnes par an); enfin, les papiers gros- siers non blanchis, enveloppes, etc., pour lesquels la matière première est abondante et à bon marché. Ce n'est donc que dans le deuxième groupe qu'on essaie de diminuer le prix de la matière première. Or, la bagasse de canne à sucre contient environ 50 °/, de cellulose utilisable, et l’on peut compter industriellement sur un rendement de 45 °/, de pulpe non blanchie séchée à l'air. Toutefois, il semble que cette matière ne puisse être regardée comme bonne pour la fabrication des papiers du deuxième groupe. Dans beaucoup de plantes, la période du développement où les fibres sont dans les meilleures conditions est celle qui précède immédiatement la maturité des fruits ou des graines. La canne à sucre, qui est exploitée pour son jus, n’a pas atteint cet état de complet dévelop- pement, et ses fibres sont irrégulières : tandis que les fibres situées près de la surface de la tige sont longues et fortes, celles de l'intérieur sont courtes et faibles. Le traitement chimique de la bagasse peut donc ou bien être suffisamment énergique pour isoler et puri- fier les fibres externes, en détruisant en grande partie les fibres internes, ou bien conserver ces dernières, auquel cas les fibres fortes ne sont pas bien isolées. Dans la première alternative, la pulpe est difficile à blanchir, par suite de la présence des produits de décomposition des fibres faibles; dans la seconde, à cause des matières incrustantes laissées dans les fibres fortes. M. W. Raitt se prononce en faveur du type de trai- tement chimique le plus doux, lequel, tout en élimi- nant la bagasse des succédanés possibles de la pulpe de bois pour les papiers européens fins, lui donne un avantage pour les papiers grossiers destinés à la con- sommation locale. L'auteur estime que la valeur de la bagasse comme matière première pour la fabrication du papier est de 50 francs par tonne à la fabrique de sucre, tandis que sa valeur comme combustible n’est, en général, que de 9 fr. 50 par tonne. $ 6. Les récentes explorations de l'Himalaya. — Le formidable relief himalayen se précise de plus en plus, grâce aux explorations et aux travaux savants d'intrépides voyageurs. Nous savons par l’importante étude du colonel S. G. Burrard, chef du Service trigo- nométrique de l'Inde, et de M. H.-H. Hayden, superin- tendant au Service géologique de ce pays, parue en 1907°, qu'il existe dans l'Himalaya 75 pics, que ces auteurs regardent comme appartenant aux cinq pre- mières grandeurs, c'est-à-dire atteignant ou dépassant 24.000 pieds (7.315 mètres). Les deux savants ont coor- donné nos connaissances sur les diverses chaines de l'Asie centrale, dont ils ont étudié la géologie et la glaciation; puis leurs travaux ont été complétés par Sven Hedin qui, par sa découverte du système mon- tagneux qu'il a appelé le Trans-Himalaya*, a opéré le raccord de troncons de chaînes dont les rapports entre eux n'avaient pu être établis. — Géographie et Colonisation ‘ Tropical Agriculturist, 1910, t. XXXIV, [1]. p. 11-12. 2 Col. S. G. Bonraro et IH. H. Haypex : A Sketch of the seography and geology of the Himalaya mountains and Tibet. Calcutta, 4907, 3 fasc. in-40. 3 Revue générale des Scriences, 15 avril 1909, p. 296: et 15 juillet 1910 (Analyse de l'ouvrage : Sven HeDn : Le Tibet dévoilé, traduit et adapté par M. Caanes Ragor. Paris, 1940, 4 vol. in-8o CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Tandis que s'accomplissait cette grande exploration du voyageur suédois, qui dura de 1906 à 1908, d'autres voyages étaient entrepris sur divers points des hautes chaînes de l'Himalaya proprement dit et du Karako- ram. Du côté de Sikkim, deux Norvégiens, MM. Rubenson et Monrad Aas, tentèrent, en octobre 1907, l'ascension du Kabrou, dont ils atteignirent presque le sommet, s'étant arrêtés à 35 mètres seulement au-dessous, à l'altitude de 7.280 mètres environ ‘; c'était àce moment le point le plus élevé qui eût jamais été atteint, l'as- cension de ce même pic par Graham, en 1883, ayant élé contestée ; mais il a été dépassé depuis par le duc des Abruzzes. A l'altitude de 6.700 mètres, la caravane éprouva une température de — 29. C'est plus au centre de l'Himalaya, à l’ouest du Népal, que le D' Longstaff continua la série de ses. explorations, qu'il poursuivit ensuite dans le Karako- ram. Après sa tentative d’ascension du Gurla Mandhata, en 1906*, le D' Longstaff entreprit en 1907, avec le major C. G. Bruce et M. A. L. Mumm, une série d’as-— censions dans l'Himalaya de Garhwal*, principalement dans le bassin supérieur de l’Alaknanda et dans les massifs du Nanda Devi (7.820 mètres), et du Kamet (7.755 mètres); la plus haute cime gravie fut le Trishul (7.134 mètres). Dans le bassin supérieur de l’Alak- nanda, la limite inférieure des glaciers varie de 3.720 mètres à 4.110 mètres; la végétation forestière s'arrête entre 3.600 et 3.750 mètres. Tous les glaciers. de cette région sont en retrait, à l'exception de celuk de Betatoli. Le D' Longstaff signale, sur le glacier de Raikana, plusieurs lacs glaciaires, dont l’un, rempli lors du premier passage de l'expédition, fut trouvé vide trois jours plus tard; c'est un phénomène fréquent dans tous les massifs glaciaires de l'Himalaya que l'existence de semblables réservoirs intermittents. En 1909, le D' Longstaff accomplit une nouvelle exploration particulièrement importante qui porta sur tout le massif montagneux compris entre le col de Karakoram à l’est et celui de Moustagh à l’ouest, vaste étendue de 460 kilomètres à vol d'oiseau, sur laquelle on ne savait rien‘. Parti de Srinagar à la fin de mai en compagnie du D' Neve et du lieutenant A. M. Slingsby, le D' Longstaff aborda la chaîne par un col, celui de Saltoro ou de Bilafond, haut de 5.550 mètres, que nul Européen ni indigène n'avait jamais franchi. Sur l'autre versant, où il se trouvait au milieu de juin, l'explorateur vit un gigantesque glacier qui s'écoule du nord-ouest vers le sud-est et qu'on appelle Teram, au dire des indigènes. Ayant ensuite remonté, au mois de septembre, le glacier de Siachen, celui que les cartes appellent Sai- char, il constata que le glacier qu'il avait précé- demment découvert ne fait qu'un avec celui-ci et que, dans son ensemble, tout cet appareil glaciaire, ayant son débouché tourné vers le sud, vient aboutir dans la vallée de Nabra, affluent de la rivière Shyok. Par suite de cette constatation, le glacier de Siachen, auquel l’Zndian Survey n'attribuait que 32 kilomètres de longueur, se trouve, d'après le D' Longstaff, en avoir 70. Ce serait le plus long glacier actuellement connu dans l'Himalaya; le Baltoro n'a que 65 kilo- mètres. En dehors des glaciers de l'Alaska et des régions polaires, on ne peut comparer, dans l'Asie centrale, au glacier de Siachen que celui d'Inylchek, ! The Geographical Journal, t. XXXI, 190$, p. 102. 2 Revues générale des Sciences, 30 juillet 1907. p. 569. # T, G. Loxcsrarr : À mountaincering expedition 10 the Himalaya of Garhwal (The Geographical Journal, {. XXXI, 1908, p. 361-395). “ The Geographical Journal, septembre 1909. p. 339; Dr Longstaff®s himalayan expedition (Zbid., novembre 1909, in expedition 1909 (/bid., rarr : Glacier exploration juin 1910, p. 622-658): p. 556 1); De Longstaff's himala janvier 1910, p. 64-65); T. G. Lon in the eastern Karakoram (/Zbid., Alpine Journal, février 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 815 dans le Tian-Chan, auquel G. Merzbacher, qui l'a découvert, attribue un développement de 68 à 70 kilo- mètres. Le D' Longstaff constata, en outre, que le Kara- koram est constitué non pas par une seule arête mon- tagneuse, mais bien par deux. Il découvrit, en effet, au nord de la crète que l’on considérait comme la chaine maîtresse du Karakoram, une seconde chaine très élevée, jusqu'ici entièrementinconnue ; c'est cette dernière qui forme la ligne de partage des eaux entre les bassins de l'Indus et du Yarkand-Daria. Sur cette seconde chaiue se dressent de très hauts sommets, dont le plus élevé, situé par 77° long. E. Gr. et 35030! lat. N., le Teram-Kangri, atteindrait, d'après le D Longstafr, une altitude de 27.610 pieds, soit 8.415 mètres. Ce pic, qui appartient à un massif entièrement distinct, avait échappé aux investigations du Survey de l'Inde; il serait, par ordre d'altitude, le cinquième de la Terre. Dans le Karakoram également, le D Workman et Me Fanny Bullock Workman, après avoir en 1906 étudié le massif du Nun-Kun', avec le concours du géologue et topographe Karl OEstreich?, ont entrepris, en 1908, une nouvelle expédition dans la région des deux grands glaciers de Biafo et d'Hispar *; ils étaient accompagnés de MM. Calciati et de Konceza, élèves du professeur Jean Brunhes, de l’Université de Fribourg, qui étaient chargés des levés topographiques. Partis de Srinagar, les explorateurs atteignirent, après un voyage de vingt-cinq jours, le pied du glacier d'Hispar, qui n'avait pas été visité depuis sir Martin Conway en 1892. C'est une mer de glace de 50 à 60 kilo- mètres, hérissée de séracs et bordée de montagnes aux formes fantastiques. A l'extrémité supérieure de l'His- par se dresse un pic abrupt de 6.400 mètres. Me Bul- lock Workman gravit cette cime, à laquelle elle donna le nom de Watershed Peak, ou pic de la crête de par- tage des eaux; pour en atteindre le sommet, elle dut suivre une crète large tout au plus de 50 centimètres, entre d’effroyables précipices. Après avoir franchi le col d'Hispar, la caravane termina la campagne par la descente du glacier de Biafo, long de 40 kilomètres. Arrivés à Askole le 26 août, les voyageurs avaient che- miné cinquante-six jours sur la glace. Les deux gla- ciers d'Hispar et de Biafo, se rejoignant à leurs extré- mités supérieures, forment un ruban glacé d’un seul tenant, dont la longueur n'est pas moindre de 100 kilo- mètres; c'est le plus grand appareil glaciaire qui existe dans les zones tempérées. Les cartographes de l'expédition ont fait un levé de l’Hispar et de ses affluents ; ce levé complète la carte établie par sir Martin Conway, qui, le premier, avait traversé l'Hispar et le Biafo. Enfin, c'est aussi dans le Karokoram que se dirigea, en 1909, une grande expédition conduite par le duc des Abruzzes, qu'accompagnaient son officier d'ordon- hance le marquis Federico Negrotto, le Dr Filippo De Filippi, le photographe Vittorio Sella, et des guides de ! Revue générale des Sciences, 30 juillet 1907, p. 369. — Faxxy BuzLock Workuan and Wiccram Hunter WoRkMA : Peaks and glaciers of Nun-kun (Londres, 1909). = Karc OEsrrercu : Die Täler des nordwestlichen Himalaya (Petérmanns Mitt., Ergzh, n° 155, 1906). * Mrs Faxxy Buzcock Workwan : Further exploration in the Hunza-Nagar and the Hispar glacier (The Gcographical Journal, novembre 1908, p. 495-496): In. : The Hispar gla- cier (Zbid.. février 1910, p. 105-132); L'Ilustration, 12 Juin 1909 (article de M. Cnares RaBor!. Courmayeur'. Partis de Marseille le 26 mars, les voyageurs arrivèrent à Srinagar le 47 avril. Le duc des Abruzzes se proposait alors d'e er de gravir le Chogori ou pic K?, le second somme lu monde, dont l'altitude a été estimée à 8.611 mètres, le mont Everest passant pour avoir 8.840 mètres. On sait qu'en 1902 une tentative d'ascension de cet montagne avait été faite par une expédition com- prenant six alpinistes éprouvés, dont un Suisse, | D'Jacot Guillarmod, qui a été le narrateur du voyage sans avoir pu atteindre le sommet, ils s'étaient élevés jusqu’à 22.000 pieds, soit 6.700 mètres. S'installant en mai sur le glacier de Baltoro au site de Rdokass, à 4.023 mètres, le duc des Abruzzes s'efforca, pendant un mois, de trouver un endroit favorable pour entreprendre l'ascension ; il fit plusieurs tentatives, à l’ouest, au sud et à l’est du pic K°, mais partout la montagne se montra inaccessible. Il avait établi des campements à plus de 5.500 mètres et s'était élevé jusqu'à un col haut de 6.666 mètres. Ces diverses tentatives lui avaient fait explorer tout le glacier Godwin-Austen. Le duc des Abruzzes essaya alors en juin, de faire l'ascension du Staircase Peak, situé à l’est-nord-est du K°; à 6.600 mètres, d'énormes crevasses l’'empéchèrent d'aller plus loin. Renonçant au pic K°, dont heureusement le marquis Negrotto avait pris de nombreux panoramas photo- grammétriques et M. V. Sella de très belles photo- graphies, le duc des Abruzzes entreprit l'escalade du Chogolisa, nom indigène du Bride Peak de Conway, montagne de 7.653 mètres, qui se dresse au sud-sud- est du glacier de Baltoro. Il demeura cinq jours à un camp situé à 5.470 mètres, ayant été surpris par une tempête de neige, puis il campa successivement à 5.819 mètres, 6.604 mètres et 6.850 mètres, et parvint, le 18 juillet, après huit jours d'efforts, à 7.493 mètres, conquérant ainsi le record de l'altitude ; une tour- mente de neige l’obligea à redescendre. Il était à 160 mètres du sommet, Le 11 août, l'expédition rentra à Srinagar. De nombreuses observations scientifiques ont été faites au cours de cette exploration. Un levé complet du glacier Godwin-Austen a été exécuté, des observa- tions météorologiques ont été faites, une collection de plantes rares a été réunie par le D° De Filippi. Jusqu'à 5.000 mètres, aucun membre de l'expédition n'eut à souffrir de la raréfaction de l'air. Au-dessus de cette altitude, il se présenta des cas d’insomnie et de manque d’appétit, et le pouls devint plus fréquent. Ce fut seulement au-dessus de 6.800 qu'on dut ralentir la marche. Le duc des Abruzzes constata que les forces sont assurément diminuées à ces altitudes élevées : il pense que l’on pourra certainement conquérir les plus hautes régions du monde, mais en choisissant les modes d'accès les plus faciles. Gustave Regelsperger. Expedition of H.R. H. the Duke of Abruzzi to Kara- koram (The Geographical Journal, 1. XXXV, mars 1910, p. 330); Esplorazione nei monti del Karakoram, Conferenza di S. A. R. Luigi Amedeo di Savoja, duca degli Abruzai Bollettino della Societa geografica italiana, avril 190, p. 435-469). ? Dr J. Jacor Guircarmon : Six mois dans l'Himalaya, le Karakorum et l’Hindu-Kush (Neuchätel, W. Sandoz). — Revue générale des Sciences, 1903, p. S02 : 1904, p. 661. 846 A. SAINTE-LAGUË — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET MATHÉMATIQUES LA REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET LES MATHÉMATIQUES Le problème de la représentation proportionnelle, posé sous forme mathématique, peut s'énoncer ainsi : On à un certain nombre de partis, pour cha- cun desquels on a lotalisé le nombre des voix obte- nues par les divers candidats du parti; il faut accorder à chacun de ces groupements un nombre de sièges de député, que nous supposons fixé à l'avance, tel que la répartition du nombre total de sièges, que l’on a ainsi à distribuer, soit la plus « proportionnelle », ou, si l’on veut, la plus équi- table possible. Il est impossible de traiter la ques- tion par le calcul tant que l’on n'aura pas indiqué ce que l'on entend par ce maximum de propor- tionnalité : habituellement, on ne précise pas suffisamment ce point, et, pourtant, à chaque façon de concevoir ce maximum correspond un mode différent de répartition. En plus de cette idée d'équité, difficile à préciser, il y à une autre condition presque indispensable au point de vue pratique : la simplicité des calculs à effectuer pour faire la répartition, et la simpli- cité de la théorie qui conduit à la méthode adoptée, afin que cette méthode ne paraisse pas trop mysté- rieuse au grand public. Laissons de côté, pour le moment, cette considération et bornons-nous à étudier le problème posé, en appliquant, autant que possible, les règles de la logique. Désignons par À,B, C, les nombres de voix réunis par chacun des partis en présence. Le lotal des suffrages exprimés est A+B+C+...—S. Soit N le nombre des députés à élire. Ce sont là les données du problème; les inconnues sont les nombres de sièges, &, 8, 7... que l'on devra accor- der respectivement à chacun des partis A; B, C.... de facon à distribuer les N sièges. Une règle de trois donne la valeur théorique de chaque part : les ; É ANGERS A voix de la liste À ont droit à a = + députés; de Fe 3 © même B a droit à »— TG? mais ces nombres ne sont pas entiers en général. Donne-t-on « sièges au parti À, il a en trop « — a, si « est plus grand que à, et en moins à— 4, si « est plus pelit que a. Pour abréger le langage, nous appellerons erreurs com- mises ces différences qui existeront fatalement après la répartition entre les parts exactes et les nombres de sièges accordés; l'erreur commise pour chacun des A électeurs est d’ailleurs A fois plus petite que l'erreur commise pour tout son parti; œ : A — 0 c'est donc ——— ou A chercher à rendre ces erreurs le plus petites pos- —à x suivant le cas. On peut sible ; nous essaierons plus loin de préciser ce que l’on peut entendre par une pareille expression. Il y à une autre facon de présenter la question : tous les députés de la circonscription devraient représenter exactement le même nombre de voix, « ANNE 6 ; S soit ici, avec les notations adoptées, N°0 un député de la première liste, ou liste À, représente — suffrages, puisque cette liste recoit « sièges. D'où = Ê une nouvelle erreur, qui est la différence des SHES nombres X et—;ona des erreurs analogues pour tous les autres députés de la circonscription : on peut chercher à rendre ces erreurs le plus pelites possible. Quel est le meilleur des deux systèmes? Vaut-il mieux rendre le plus égales possible les parts d'in- fluence de chaque électeur de la circonscription; ou faut-il que chaque élu représente des nombres d'électeurs aussi égaux que possible? Il serait agréable de constater que les deux procédés con- duisent aux mêmes résultats: nous verrons que, malheureusement, il n’en est pas tout à fait ainsi; il faut bien se décider à choisir. Bien que ce soit assez difficile, il nous semble qu'il vaut mieux éga- liser les parts de chaque électeur : c'est plus démo- cratique, cela correspond mieux à l'égalité, souvent rèvée, des bulletins de vote : « un citoyen en vaut un autre ». Nous nous déciderons done pour le premier système et nous nous bornerons à donner quelques indications au sujet du second, qui est d’ailleurs d'une étude beaucoup moins aisée. Fai- sons simplement remarquer, pour terminer ces préliminaires, que c'est un argument de sentiment, et non pas de logique, qui nous conduit à adopter l'un des systèmes plutôt que l'autre ! I. — MÉTHODE DES MOINDRES CARRÉS. Nous avons dit que chaque électeur devrait avoir une certaine « fraction de député »; s'il en recoit une différente, on commet une injustice qui peut Gb 163 PE | : TA Ou {5 suivant le cas. Comment rendre’ ces erreurs le plus petites pos- se représenter par ! Nous renvoyons le lecteur, une fois pour toutes, à um article des Annales de l'Ecole Normale Supérieure, dans lequel il trouvera toutes les précisions techniques, qui ne seraient pas à leur place ici. La méthode des « moindres carrés », qui suit, a fait, d'ailleurs, l'objet d'une communi- cation à l'Académie des Sciences {séance du 8 août 1910). A. SAINTE-LAGUÉË — REPRÉSENTATION sible? C'est ici que l'on constate des divergences d'opinion entre les divers auteurs de systèmes; les uns veulent que les électeurs les plus avantagés le soient le plus possible, et acceptent, par contre, toutes les inégalités pour les électeurs n'ayant pas leur part; c'est la règle d'Hondt que l’on obtient ainsi’, règle dont nous rappellerons l'énoncé plus loin. D'autres retournent en quelque sorte le pro- blème et veulent, au contraire, que l'électeur qui n'a pas sa part soit le moins lésé possible, quelle que soit, d'ailleurs, l'influence qu'il faudra attribuer par compensation aux électeurs trop bien repré- sentés; on est ainsi conduit, avec de légères modi- fications, à la rêgle des grands restes, dont nous parlerons plus loin, ou, si l'on veut, aux règles de MM. La Chesnais et Gaston Moch. D'autres, enfin, comme M. Equer, comparant l'électeur le mieux représenté à celui qui l’est le moins bien, essaient de réduire au minimum la différence qui existe entre eux, On peut varier à l'infini les desiderata dans ce genre de questions ; on peut chercher, par exemple, à avoir les erreurs le plus faibles pos- sible sans se préoccuper de savoir s'il s'agit d'élec- teurs trop bien ou trop mal partagés, ete. Il serait évidemment difficile de choisir entre ces divers systèmes, si la question ne s'était pas posée depuis longtemps aux physiciens et aux mathématiciens et n'avait pas élé résolue par eux : lorsqu'un phy- sicien a plusieurs valeurs d’une même grandeur, il prend la moyenne de ces valeurs comme résultat de la mesure; puis, pour apprécier le degré de précision de ses observations, il étudie les diffé- rences entre chaque mesure et la valeur moyenne ; il fait ensuite la somme des carrés de ces diffé- rences, ou, comme l’on dit, de ces erreurs, et dit que les mesures sont d'autant plus précises que cette somme est plus faible ; c'est la Loi de Gauss, ou des moindres carrés, qui est adoptée par la presque universalité des savants. L'analogie semble suffisante avec le problème considéré ici pour que l’on puisse employer le même critérium. $S 1. — Application de la méthode des moindres carrés au premier système. Adoptons donc cette règle et cherchons ce qu'elle donne dans l'étude des injustices commises pour les divers électeurs. Le lecteur trouvera peut-être un peu aride ce qui suit, bien que la démonstra- tion ne fasse appel qu'aux Mathématiques élémen- taires ; il pourra sans inconvénient laisser de côté la démonstration et ne considérer que la conclu- sion. L'injustice commise à l'égard de chaque électeur ! Voir à ce sujet le Supplément du numéro du 25 juin 1910 de la Grande Revue intitulée : Arithmétique et Repré- sentation proportionnelle, par M. Maurice Equer, PROPORTIONNELLE ET MATHEMATIQUES l du —®@ (s à à — OÙ À A quées; dans les deux cas, le carré de celle er est » avec les notalions déjà indi- est le même et la somme de ces carrés pour A électeurs de la première liste est A fois plu a—«) (a — « ou ; c'est la somme A° A des expressions analogues concernant les divers grande soil : A partis qu'il faut rendre minima, par un choix convenable des entiers x, 6, y, Le carré de la différence (4 — ) est formé, comme on le sait, de trois parties : (a— 4) = a° — 244 + n°. ET Î à _N Mais, par délinilion, on à : a = A. OUX—S" et par suite : (a— 04 ME a? N N a —— = —2r.—-+—-—a. = — 20. = + —. A A RE S SAA Si nous addilionnons les quantités analogues, la s : N somme des premiers termes est le produit par <’ qui est constant, de (a+ b+c—...), c'est-à-dire : ä de N; la somme des lermes 27. x et le produit N : 1 \ “ par & de (x+$+y+ ..…) qui est encore N, et cela quelle que soit la répartition adoptée; finalement, la seule partie de la somme qui soit variable est celle qui est fournie par les derniers termes tels 2 E A Sans vouloir insister là-dessus, remarquons que la somme totale mesure, en quelque sorte, la pré- cision avec laquelle on a pu faire la répartition dans la circonscription considérée, et permettra de comparer sous ce rapport les diverses élections. Pour continuer l'étude théorique de la question qui nous occupe, nous sommes ramenés à rendre nr CMS UT Va minima la somme : (& + EG + C + à par un choix convenable des entiers %, £, Y, . appuierons pour cela sur les identités suivantes, que le lecteur vérifiera sur des cas particuliers : que .. Nous nous - (2x — 3) (2x —1)—= 0° identités connues de tous les mathématiciens. La somme à rendre minima, étant formée de termes œ ï re ; tels que + peut être alors considérée comme la somme des fractions du tableau suivant : 1 3 5 1 2x — 3 2x2 —1 A AVANT A A A ANAL NO 261 B B B:i0} B S48 A. SAINTE-LAGUE — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET MATHÉMATIQUES cle Plus on prend de sièges pour une liste, plus il faut prendre de termes sur la ligne qui correspond à cette liste. Il faudra donc prendre pour «, B, 7, … des valeurs telles que les N nombres de ce tableau soient aussi pelits que possible. On peut simplifier encore celte condition, en remplacant tous les nombres du tableau précédent par leurs inverses, et prenant les N plus grands, d'où l'énoncé défi- nitif que nous avions en vue : RÈGLE DES MOINDRES CARRÉS APPLIQUÉE A LA REPRÉ- SENTATION PROPORTIONNELLE : On divise les totaux AE NC; des nombres de voix réunis par chaque parti par les nombres impairs consécutifs : 1,3, 5,7, 9, .…, puis on prend, dans les diverses listes de quotients ainsi formés, tous les plus grands nombres jusqu'à concurrence du nombre N des sièges de député. Chaque parti a ensuite autant de sièges qu'il y a de nombres choisis parmi les quotients qu'il avait fournis. Appliquons cette règle à un exemple simple. Soient 31.500, 21.000, 12.000, 6.000, 2.500, les nombres de suffrages recueillis respectivement par 5 listes en présence A, B, C, Det E, le nombre des sièges élant de dix. On dresse les listes de quo- tients en divisant par 1, 3, 5, 7, ..… les nombres ci-dessus. Parti A. 31.500 19,500 6.300 4.500 3.500 Parti B. 21.000 7.000 4.200 3.000 Parti C. 12.000 4.000 2,400 Parti D. 6.000 2.00u Parti E. 2.500 On a souligné ci-dessus les dix plus forts quo- tients, soient : 31.500 (parti A); 21.000 (B); 12.000 (C); 10.500 (A); 7.000 (B); 6.300 {A) ; 6.000 (D) ; 4.500 (A); 4.200 (B); 4.000 (C). Il est d'ailleurs évident que les nombres qui suivent ceux-là leur sont inférieurs. On donnera donc quatre sièges au parti A; trois au parti B; deux à C, etenfin un seul à D. S 2. — Application de la méthode des moindres carrés au second système. Appliquons maintenant la même méthode aux nombres de voix que représente chaque élu. Nous ne nous occuperons ici que de la méthode des moindres carrés, sans examiner les diverses autres méthodes que l’on pourrait proposer, comme dans le cas où l'on considère la part d'influence de chaque électeur. L'erreur commise pour chaque : À député est la différence entre les nombres x ‘! = h pu B VAE - SE ou 7> elc., … suivant le député considéré. La 5 somme des carrés de ces erreurs pour les « députés S ANS de la liste À est( — 2) + «. C'est la somme des quantités analogues qu'il faut rendre minima par un choix convenable des entiers &, B, y, … Le calcul est ici compliqué et ne conduit à aucune règle simple. Si, cependant, on ne considère que les listes qui ont au moins un siège de député, on trouve que la répartition des sièges se fait entre ces listes en dressant un tableau analogue au pré- cédent, les diviseurs successifs étant ici non plus 1, 3, 5, 7, .…, mais les nombres : 1:19;S28 4% 4,898 …; 6,928 …; 8,944 …; 40,934...: 42,960... 14,966 …, ete.…., très voisins des précédents. IL. — COMPARAISON DES DEUX RÈGLES : D'HONDT ET DES MOINDRES CARRÉS. Tout en restant dans le domaine de la théorie, essayons de comparer la règle des moindres carrés et celle d'Hondt. Rappelons que l'énoncé de cette dernière est identique à celui de la règle des moindres carrés si lon remplace les impairs 1,3, 5,7, par lesentiers consécutifs A2 NI, ARS On voit d'abord que les deux règles sont aussi simples à appliquer l’une que l’autre. Cherchons à nous rendre compte des différences qui peuvent exister entre elles au point de vue des applications. Prenons d’abord le cas de deux listes ayant réuni respectivement À et B suffrages, et appartenant à des circonscriptions peu nom- breuses, ou, ce qui revient au même, repré- seplant, dans des circonscriptions nombreuses, des partis de minorités. Supposons, par exemple, que les deux partis A et B aient deux sièges à se partager; le premier est donné dans tous les cas au parti le plus fort, le parti A si l'on veut. Pour le second siège, il faut savoir s'il sera donné aussi à la liste À ou à la liste B. La règle d'Hondt le donne à B, si = ou B est supérieur Le tandis que la : ; ; A règle des moindres carrés compare B et rad elle avantage donc le parti B. Cela correspond bien au reproche-souvent fait à la règle d'Hondt d'avantager les majorités. Examinons maintenant le cas de deux partis presque égaux, partis que nous supposerons pris dans la majorité d'une circonscription importante : les deux partis À et B ont donc un assez grand nombre de sièges à se partager. On peut facilement voir dans ce cas que, contrairement au précédent, les deux règles donnent des résultats presque iden- tiques. La règle d'Hondt ne change pas, en effet, si lon double tous les diviseurs, qui deviennent alors 2, 4,6, 8, et, sans entrer dans des justifi- cations mathématiques, le lecteur voit bien que, A. SAINTE-LAGUÉ — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET MATHÉMATIQUES pour un grand nombre de sièges, l'emploi comme diviseurs des nombres pairs ou des nombres impairs ne peut pas avoir une grande importance. Cependant, l'avantage est toujours un peu plus grand pour la liste la plus importante, avec la règle d'Hondt, qu'avec la règle des moindres carrés. Si l'on traite le problème de facon plus complète, ce que nous ne ferons pas ici, on peul montrer que le gain moyen d'une liste B plus petite que À est de 1 siège sur 5 élections, si l’on compare la règle des moindres carrés et celle d'Hondt. IT. — COMPARAISON DE LA RÈGLE DES MOINDRES CARRÉS ET DE CELLE DES GRANDS RESTES. Il y à deux règles que l'on peut ranger sous cette dénomination commune de règle des grands restes : celles de MM. La Chesnais et Gaston Moch. Comme elles sont, au fond, identiques‘, il nous suffira de rappeler rapidement comment on opère dans l’une quelconque de ces deux règles : On appelle quotient électoral le quotient de S par N; on donne à chaque liste aulant de sièges qu'elle contient de fois le quotient électoral Q. Les plus grands restes de ces divisions permettent ensuite l'attribution des sièges restants. Nous allons voir qu'on peut retrouver cette règle par une déformation assez curieuse de la règle des moindres carrés”. Nous avons vu que, dans la S 4 Le quotient N s'appelle quotient électoral Q. M. La Chesnais divise À par Q, cequi donne g! comme quotient: on donne, dans la première répartilion, 4! sièges à la liste A; les sièges restants sont donnés aux listes pour lesquelles les restes des divisions sont les plus grands possibles, ou à des listes non encore représentées, si les suffrages qu'elles ont recueillis donnent des nombres plus grands que ces restes. L'égalité qui définit ce reste pour la liste À est la suivante : A— @! Q + ra. 3 M. G. Moch procède comme il suit : il multiplie par N tous les nombres À, B, C, …, puis applique la méthode ci-dessus en prenant, au lieu de Q, le nombre S qui est d'ailleurs N fois plus grand. Si l'on remarque que, dans le et dans , : : - S premier cas, g'est le quotient entier de A par Q — = le second cas de NA par S, on voit que ces quotients entiers sont identiques. Quant aux restes RA de la seconde méthode, ils sont donnés par l'égalité : AN = 9! .S + R1. En comparant cette relation avec celle qui définit r1, on voit que RA—INe-rs. Comme les listes non employées ont eu leurs {otaux mul- tipliés par N, on voit que les classements permettant l'attri- bution des sièges restants sont exactement les mêmes dans les deux cas. Pour être tout à fait rigoureux, faisons remarquer que, dans les applications numériques, on trouve une légère diffé- rence entre RA et N.r1, car, dans la méthode de M. La Ches- nais, Q est le quotient entier de la division de S par N, et non pas le quotient exact, mais cette remarque n'a aucune importance en pratique. >? Cette remarque est due à l'obligeance de M. Zivy, pro- fesseur à Douai, qui a bien voulu nous la communiquer. #19 répartition des sièges, l'erreur commise pour tout le groupe À est 4-4, Où &-à suivant le cas. On peut essayer de rendre ces erreurs aussi peliles que possible, en appliquant encore la méthode des moindres carrés. Dans cette nouvelle facon d'envi- sager la question, on ne s'occupe plus des valeurs plus où moins inégales des influences des divers électeurs ou des nombres plus ou moins différents de suffrages que représente un dépulé, mais on accorde une sorte de personnalité fictive à chaque parti, et l'on cherche à léser le moins possible celle personnalité. On est ainsi conduit, par des raisonnements que nous ne donnerons pas ici, à la règle des grands restes. IN. — SCISSIONS DE LES GROUPEMENTS OÙ V'ARTIS ET LA RÈGLE DES MOINDRES CARRÉS. Il semble, d'après ce qui précède, que la règle des grands restes favorise les minorités plus que la règle des moindres carrés, car, dans la création de pareilles personnalités fictives, on ne s'occupe pas de savoir si le parti considéré est constitué par un seul électeur, ou par trente mille. Sans vouloir chercher si cela est plus ou moins légitime, faisons simplement remarquer que les partis de majorité auront alors intérêt à se scinder en autant de grou- pements distinets qu'ils espèrent avoir de sièges ; le nombre total des sièges ainsi obtenus sera sou vent supérieur à celui qu'aurait eu la même liste présentant à la fois tous les candidats. Inversement, une règle qui favorise les forts groupements, comme celle d'Hondt, conduira à la formation de partis de plus en plus importants. Dans la pratique, les partis électoraux apercevront vite l'importance de ces remarques. Il est curieux de constater que l’on est encore conduit à la règle des moindres carrés, si l'on cherche une règle ne favorisant ni les groupe- ments, ni les scissions. Nous n’exposerons pas ici les détails du calcul, nous bornant à indiquer les résultats: on trouve avec la condition ci-dessus une infinité de règles numériques qui conviennent, mais la plus simple de toutes est la règle des moindres carrés, et en tous cas, les autres règles, telles que, par exemple, la règle d'Hondt, ne con- viennent pas. V. — LE QUOTIENT ÉLECTORAL ET LA RÈGLE DES MOINDRES CARRÉS. Nous allons retrouver encore celte règle des moindres carrés à partir de la notion de quotient électoral, notion déjà donnée ci-dessus et qui est familière à tous les théoriciens de la représentation proportionnelle. La règle des grands restes prend 850 A. SAINTE-LAGUE — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET MATHÉMATIQUES pour quotient électoral Q — =, mais ne donne pas Z| un ainsi lous les sièges, tandis que la règle d'Hondt prend un certain nombre g, toujours inférieur à Q dans la pratique, et tel que tous les sièges soient attribués à la première fois. M. Meyer! à montré que cela revient à majorer toutes les listes d'un certain nombré de suffrages fictifs, ces nombres élant proportionnels à À,B,C... L'auteur en déduit que le système d’'Hondt avantage ainsi systéma- tiquement, dans tous les cas, les partis les plus forts. Prenons maintenant le quotient Q et divisons À, B, CC... par Q; on a des nombres à, b, €, non entiers; soient a’, 8, y’... les entiers les plus voi- sins de à, b, e,.. Par exemple, pour deux listes : a—2,9%5 et b— 4,75, nous prendrons & —2; $ —5. Donnons alors +’ sièges à la première liste, 8° à la seconde, etc. Une telle répartition, analogue à celle de la méthode des grands restes, ne lèse jamais de plus d’un demi-siège chaque parti, et il est certain que c'est la seule répartition répondant à une telle condition. Mais le lecteur verra aisément qu'on distribue ainsi tantôt plus de sièges qu'on n’en a, tantôt moins. Cherchons alors, par analogie avec la méthode d'Hondt, un nombre q, qui remplace Q de facon qu'une telle répartition distribue tous les sièges. On est ainsi conduit, comme nous allons le montrer, à la méthode des moindres carrés. 4, 8, 7, étant, comme nous l'avons dit, les nombres les plus voisins des parts exactes que donne l'emploi de g, au lieu de Q, on est certain que « ne diffère du quotient de À par g que d'une demi-unité au plus; done : 1 A 1 CR Cm 2 (1 2 ou encore : 2x —1 2 _2:+1 A q A comme le lecteur le vérifiera sans peine. On voit, par suite, que tous les nombres : 24 ER 2y—1 ne L 24—1 AN? 9 élant inférieurs à =, sont, à plus forte raison, infé- q 244 HA Ces . déjà donnée rieurs à tous les nombres C2 la définition des nombres 4, f, y... dans la règle des moindres carrés. Si l’on veut reprendre ici les remarques de M. Meyer, on voit que, en ramenant q à la valeur 0, il faudra lantôt majorer, tantôt diminuer nombres À, B, C,... de quantités proporlionnelles à les 1 Revue générale des Sciences, t. XVI, n° 3, pages 111 à 123. nombres; les modifications sont ici moins grandes que dans la règle d'Hondt et, de plus, il est impossible de savoir à l'avance s'il s'agit d’une augmentation ou d’une diminution d'influence. Nous avons tenu à donner cette remarque, qui permet la comparaison de la règle des moindres carrés et des règles basées sur la notion de quo- tient élecloral, mais nous ne cachons pas qu'à notre avis la seule justification réellement valable de la règle des moindres carrés est celle qui est basée sur la considération des injustices commises pour les divers électeurs. ces VI. — APPLICATION DES DIVERSES RÈGLES AUX DERNIÈRES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES FRANÇAISES. Bien que, dans ces questions de répartition de sièges, les exemples numériques ne nous parais- sent pas mériter beaucoup d'attention, nous allons donner sommairement les résultats de l’applica- tion des trois règles : d'Hondt, des moindres carrés et des grands restes aux dernières élections. Nous ne considérerons pas toutes ces élections, et nous prendrons les données, ainsi que les notations, dans le volume publié à ce sujet par M. La Chesnais*. Dans le tableau ci-contre, les premiers chiffres indiquent le nombre de sièges attribués à chaque parti par la méthode des moindres carrés. Les chiffres entre parenthèses (), quand il y en a, correspondent à l'attribution que donne la règle d’Hondt, lorsqu'elle diffère de la précédente. Enfin, les chiffres entre crochets |] correspondent, dans la mème hypothèse, à la règle des grands restes. (La dernière ligne donne la répartition directe des 329 suffrages considérés entre les diverses listes.) Voici les quelques remarques que l'on peut faire. Sur 37 départements, 10 donnent les mêmes résul- tats pour la règle des grands restes, celle des moindres carrés et celle d’Hondt. Dans les 27 autres ! Tableau des Elections législatives, chez Georges Rous- tan, Paris. L'auteur adopte les partis électoraux suivants : P.S. (Parti socialiste), Soc. ind. (Socialistes indépendants), liad. (Radicaux), Æad. et A. R. D. (Radicaux et Alliance républicaine démocratique), Rad. ind. (Radicaux indépen- dants), A. A, D. (Alliance républicaine démocratique), F. A. et A. f. D. (Fédération républicaine et Alliance républi- caine démocratique), F. R. (Fédération républicaine), Æ. R. lib.(Fédération républicaine libérale), Proq. (Progressistes), Lib. (Libéraux), Cons. (Conservateurs). Nous renvoyons le lecteur à l'ouvrage lui-même pour plus de détails. Parmi les diverses élections, M. La Chesnais a cru devoir appliquer à 37 départements seulement (qui comprennent, il est vrai, les plus importants) les règles de répartition; pour les autres, il a adopté une sorte de répartition à deux degrés dont nous ne nous occuperons pas ici. Les statistiques ci-dessous concernent {ous les départements de la première calégorie, pour lesquels l'auteur a supposé les résultats des éleclions assez nets pour permettre l'application des règles de répartition. A. SAINTE-LAGUË — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE ET MATHÉMATIQUES = #51 l soc. RSDMERAT FR; F. KR DÉPARTEMENTS PASS RAD, et A.R.D et F. R. PROG.| LIB ind, A.R. D. ind L.R'D lib, AIN. « RE : » » a) » il » » » » { n La 1 » 2 » 1 » » 1 » » 1 1 Aisne. . Co 3 (1) » (3) » (1) 5 » 1) » » ] . #3 2 (| fl » 1 » » » » 1 h NUS EE . . , (3) (1) (1) “ Fr S ‘ à s (1) < Bouches-du-Rhône ele À 2 2 » » » ’ 3 f 7 * OR CRE » » 1 » 1 » 1 » » 1 2 GalyAUOS: ee VE. !e ’ f » » (1) » (1) » » » » 2 2 e » » 3 » { » » » » » » ” Corrèze... ......) » . fé) " ci ) ; F » » , ARRET SE à » » 1 » 1 » » 3 » | Côtes-du-Nord. sf LA 3 » ” [1] [1] HA] HA] ÿ M] ÿ $ ) i Creuse . . Pet Lan. » 2 » { » » » » » » » DÉPTVTS ( il » 1 2 1 1 » { » » 4 » Finistère . EN) : : (2) (1) (1) L 1) “ à (5 4 Gand. RAP : 2 2 » » $ » é F 5 5 » » 3 » 1 » » » » » 1 » Haute-Garonne . . .., 4 (1) £ (4) ; R < « x & k | * 2 » » » 1 6 » » » » { 1 Gironde. . . se LE (2) » » » (4) (1) » » » » 1 » [2] » » » [1] [5] » » [1 | » [1 1 Ille-et-Villaine. . a ol Le » » » 2 2 » 9 » » » 2 Isère 2 {l 2 » 1 » » 1 » » il » STE TS: ane 3 (2) ; (2) ; (2) > » (1 » » ] ‘ee 1 2 1 » 1 1 » 3 » » » » Loire. . “ | (1) (2) » ; (1) (1) » (4 » ; » ce AT AS \ » » 1 » il 1 » (| À » » 5 Loire-Inférieure, . , . à » » QD » (4) (4) » » » » » î) » » » » » » » » » » » Lot: meer, ; 2] s : ; » : ; : dl ; t : » » » 2 » il » » 1 » 1 2 Maine-et-Loire a. 5 » : . (2) . 5 ï . nm = (1) 3) Mayenne . SR » 1 » » » » » » » 2 1 Ë » » » 1 » 2 » » ; » » 1 Meuse RC 4 » » » » » (3 » » » » » 1) Morbihan. à Ps ANR » 2 » 1 1 » » » » 3 1 9 » 4 » 3 nl » 1 » » 8 » Nord. . te 3 (9) » (5) » (2) » » (1 » ) (9 » El e ÉPNIRs AMONT Een > C2 » s » » » » » » 1 » 1 » » 1 1 Orne . . one LUE 5 . : ; (2 ; > à di 1 à 4 » 1 1 2 2 » 1 » » 3 » Pas-de-Calais . do à (4) N (1) (4) (2) (2) s " : à 4) ) Puy-de-Dôme . CAE A » 3 5 3 ss s 4 o . fs 14 { 2 2 2 » 1 » » 4 » » 1 » Rhône RU (2) (2) » 1) ÿ » (4) » ; 5 » [2 [2] 2] » 1] » » [31 [1] » [1 ) 2 » D] » 2 » » fl » » 1 | oui] Saône-et-Loire. .. ...9. (2) » (3) » (1) » » (1) » » RIRE [2 » 2] [1] 1] » » [1 » » : | : | » » 1 » 3 » » » » Z | SAN CE TOME FRERE ; a (1) , * 3) » » » » 2 5 15 3 8 6 2 3 » 2 1 1 3 RE SEINE. -… (LE) (3) (9) (6) (2) (2 » (2) (1 » 3 7 FE (3] 8] 6] 2] (3 » (2) PI n] 3 3 è hu » 2 » » 4 » 2 » Seine-Inférieure. . . . ) (1) 5 2) o ; (3) » (2) 1) » » (1) Seine-et-Marne . . . . UE) » 2 » 1 » » 1 » 1 ER » 5 » » 1 » 3 » » » 1 Seine-et-Uise . : » » 6) » » » » (3) » » » 1) [1] » [4] » » [l » [31 » » » 1] » ñ ; 2 ÿ » » » ) Deux-Sèvres. - . . . . 3 à £ () D . < : à à 4 2 1 » 3 5 s $ 1 1 : 1 » Somme. . AE à (2) : 4) “ . . K. & ÿ » 1) » à Fe © 1 1 À 1 ÿ ; $ » » » » Vans tee . 3 (3) 5 (4) à: (A) v » » » » » » Vendée #4. .7: SiPNRAE » » 1 1 » » » » 2 1 ie » » 9 » » 3 » » » 1 » » AIDÉRIEL ETATS k À (3) : ; (3) ss . \ » » l 53 14 66 47 32 35 (] 32 5 5 #1 25, Totaux. . .à (58) (12) (12) (16) (29) (35) (l 28 3 3 43 :30 [32] [14] | [63] [18] | [31] [34 (0) | [33 8 ô il [30] Moyennes . . . .| 40 14 67 19 30 36 I 30 9 4 16 33 852 cas, les deux premières règles sont d'accord 18 fois et les deux dernières 3 fois; jamais les règles d'Hondt et des grands restes ne sont d'accord sans que celle des moindres carrés ne donne le même résultat. Les 6 cas restants, où les trois règles sont en désaccord, correspondent aux départements les | plus peuplés. Si on les examine en détail, on verra que (sauf pour le parti A.R.D. en Saône-et-Loire), la règle des moindres carrés donne toujours, pour G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE chaque parti, le mème résultat que l’une des deux autres, ou bien un résultat intermédiaire. La conclusion pratique qui semble découler de ceci est que la nouvelle règle donne des résultats compris entre ceux des deux autres, quand elle ne donne pas les mêmes. A. Sainte-Laguë, Professeur de Mathématiques spéciales au Lycée de Douai. RECHERCHES SUR LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE DEUXIÈME PARTIE Dans un premier article", nous avons passé en revue les régions rolandique, frontale, insulaire, pariétale et temporale de l'écorce cérébrale: nous allons maintenant passer à la description des autres régions. 7 VII. — RÉGION OCCIPITALE. Il existe peu de régions corticales qui aient donné lieu à des recherches aussi nombreuses que cette région, en raison des particularités de struc- ture que présente le type occipital, ou plutôt la région calcarine située au voisinage de la scissure qui porte ce nom. Déjà Gennari, Vicq-d'Azyr et Baillarger avaient attiré l'attention sur Ja strie blanche visible à l'œil nu sur la surface des sec- tions d’un cerveau frais et siégeant à peu près vers le milieu de l'épaisseur de l'écorce, laquelle diffé- rencie du reste de l'écorce un territoire étendu du lobe occipital. Mais c’est Meynert, en 1867, qui à posé les bases de l'homologation des différentes couches de l'écorce du pôle occipital, où, dit-il, ce n’est plus la cellule pyramidale, mais le grain nerveux qui prédomine, Meynert montra qu'au pourtour de la calcarine on rencontre une stratification nouvelle, le type à huit couches; il remarqua, en outre, l’amincissemeut considérable des II°et III° couches et la diminution relative de la taille de leurs cellules les plus profondes, qui ne différent plus qu'à peine des cellules les plus voi- sines de la surface. Aussi Meynert n'a-t-il pas cru devoir individualiser dans le pôle occipital une couche correspondant à celle qu'il a décrite sous le nom de granuleuse externe dans le reste du cortex. Bien plus, Meynert dit, en effet, que la puis- sante formation correspondant à la IV° couche est divisée en deux par l'intercalation de deux couches assez —_—..-—_———— ———————]————…—…————_—_— ‘ Hievue générale des Sciences du 15 octobre 1910, t. XX, p. 816 et suiv. | pauci-cellulaires, contenant des pyramides isolées ou groupées en amas plus de deux fois plus grands que la formation ammonienne. De ces deux couches pauci-cellulaires, la plus voisine de la surface, la quatrième dans la stratigraphie de Meynert, n’est autre que l'étage moyen, qui comprend la presque totalité ou, du moins, la majorité des fibres de la strie de Gennari; la Il° couche interecalaire pauei- cellulaire n’est autre que la couche ganglionnaire représentée par les cellules solitaires. Je cite ces détails, que j'emprunte à la monographie de Charles Bonne, pour montrer que Meynert avait vu juste dans la plupart des détails de structure de la scis- sure calcarine. Je passe sous silence les recherches des autres auteurs qui se sont occupés de cette question pour arriver aux études de Cajal, Bolton, Campbell et Brodmann. Cajal distingue neuf couches dans l'écorce calea- rine, à savoir : 1° couche plexiforme; % couche des petites pyramides; 3° couche des pyramides moyennes; 4° couche des grosses cellules étoïlées; 5° couche des petites cellules étoilées: 6° couche des petites cellules à cylindraxe arqué; 7° couche des cellules géantes; 8° grosses cellules à cylin- draxe ascendant et arqué; 9% couche des cellules triangulaires et fusiformes. Comme le remarque Brodmann, l'existence du dédoublement de la qua- trième couche granuleuse a échappé à Cajal. En effet, Cajal, qui reproduit une coupe provenant des bords de la scissure calcarine, ne figure que la couche granuleuse profonde; mais il faut néan- moins reconnaitre que, dans la description qu'il a donnée de l'écorce visuelle, il s'est basé fortement sur les résultats obtenus par la méthode de Golgi, qui lui a permis de reconnaitre une foule de détails nouveaux et intéressants. Bolton affirma nettement, ce que n'avait pas fait Meynert, l'homologie des couches dérivées de la granuleuse. Il décrit, en effet, et représente la tri- G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE partition de cette dernière sur les limites de l'aire | 6° la VI° couche multiforme, représentée par deux « visuo-sensorielle », ou territoire de la calcarine, et de l'aire visuo-psychique qui l'entoure. Il est vrai que celte description se rapporte au cerveau adulle où, ainsi que le fait remarquer Brodmann, la transition est beaucoup plus ménagée que chez les fœtus du neuvième mois, éludiés plus récem- ment par cet auteur. Le travail de Bolton est d'ail- leurs très sommaire au point de vue histologique. Mais, d'autre part, en s'appuyant sur les résultats fournis par la méthode de Pal-Weigert, Bolton spécifie dans sa nomenclature la concordance stra- tigraphique de certains plexus de fibres avec les couches de cellules, en particulier de la strie de Gennari, équivalente du « plexus nerveux externe ». Enfin, cet auteur a précisé les limites de la zone visuelle chez l’homme. Brodmann confirme les données de Bolton concernant l'étendue du type calcarin, et il fait, en outre, quelques constatations nouvelles concernant la morphologie et la structure de l’area s{riata de Bolton dans la série des Mam- mifères. Il montre ensuite qu'en laissant de côté certaines variations individuelles, l'étendue du type calcarin est celle d’un cône dont la base correspond au pôle occipital. À la face interne, ce type occupe l'écorce de la scissure calcarine ; par sa lèvre su- périeure, il empiète un peu sur le cuneus, et, par sa lèvre inférieure, sur le gyrus lingualis. Le sommet du cône finit là où la seissure calcarine rencontre la scissure pariéto-occipitale. Brodmann reconnait qu'en raison des différences individuelles du type calcarin ses limites ne sont pas encore bien connues. Dans trois cas, il a vu que ce type occupe tout le pôle occipital et même a gagné la face externe, landis que, dans un quatrième, il est limité à la face interne. Le passage du type calcarin (17) au type voisin (18) se fait d’une ma- nière brusque, par le fait que les deux couches granulaires internes (IV? et IV‘) convergent l’une vers l’autre et constituent une seule couche qui devient la IV° du type fondamental; en même temps, la strie de Gennari finit. À ce moment, la IE s'élargit et se divise, par l'apparition des grosses pyramides, en deux couches : IT[*, pyramides moyennes, et IIL, grosses pyramides, qui n’exis- tent pas dans le type calcarin. À leur tour, les deux couches VI‘ et VP fusionnent en une seule assez étroite. Brodmann admet, chez le fœtus comme chez l'adulte, que le type de la région cal- carine est constitué par six couches, à savoir : 1° la couche zonale; 2° la I° couche granuleuse externe; 3° la III couche pyramidale; 4° IV*, couche granuleuse interne superticielle ; IV’, couche inter- médiaire (strie de Vicq-d'Azyr ou de Gennari); IV®, couche granuleuse interne ou profonde; 5° la V° couche ganglionnaire ou des cellules solitaires; l MI, laires, et VI, couche des cellules fusiformes. subdivisions couche des cellules triangu- Dans le lobe occipilal, Brodmann à encore dis- tingué, en dehors du type de la calcarine, deux 18 et 19, dont la topogra- phie est indiquée sur les figures 2 et 3 ({'* partie, autres types, à savoir : p. 820), tandis que Bolton et Campbell n’en ont dé- critquedeux,qu'ilsappellent risuo-sensor yet visuo- psychie areas (fig. 1, p.818), le premier correspon- dant à la scissure calcarine. Il est utile d'ajouter que Smith, en employant sa méthode, est arrivé à des résultats sensiblement identiques à ceux de Brod- mann. En effet, l'examen à l'œil nu du cerveau frais a montré à Smith une troisième aire, qu'il appelle area peristriala, qui parait être homo- logue avec le type pré-occipital ou 19 de Brod- mann. Voici ce que l'observation des types 17, 18 et 19 de Brodmann nous enseigne (je note, en passant, que cet auteur n’a donné, chez l'homme, que la description du premier). Le type 17 (fig. 20, p. 857) attire notre attention par certains caractères fonda- mentaux qui lui appartiennent en propre. C'est, tout d'abord, la densité et la petitesse relative des cel- lules des différentes couches, la stratification très apparente et la présence, comme on le sait, de deux stries claires : l'une superficielle et l’autre pro- fonde. Nous allons passer en revue la structure des différentes couches. La couche I'est plus mince: la couche IT, ou couche granuleuse externe, est diffi- cile à séparer de la couche des pyramides, étant donné que cette dernière ne forme pas une couche distincte, et les pyramides de volume moyen que l’on peut distinguer sont mélées avec les petites pyramides. Au-dessous de la couche IT, on voit une mince lame de granules, mieux indiquée sur les parties latérales; ensuite, la première strie claire, constituée par un mélange de cellules plus grosses isolées et de granules; les premières, dis- séminées dans la bande claire, quoique équivalentes aux pyramides superficielles du reste de l'écorce, sont plus petites, plus ou moins polygonales, trian- gulaires ou bien tangentielles. Cette couche LV2: ou lamina intermedia de Brodmann, correspond, dans les préparations de Weigert-Pal, à la strie de Gennari. Puis succède une couche large granu- leuse, ou la IIl° de Brodmann, constituée essentiel- lement par des granules plus denses dans les deux tiers supérieurs que dans le tiers inférieur. La V°, ou couche des cellules ganglionnaires, est la plus pauvre en cellules, et c'est en elle que siègent les cellules solitaires de Meynert ; elles sont disséminées dans la bande claire, mais siègent de préférence immédiatement au-dessus de la couche VI. Elles ne méritent pas le litre de pyramides 854 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE géantes, car non seulement elles n'atteignent pas le volume des cellules de Betz de la frontale ascen- dante, ne mesurant en moyenne que 0"®,2%, mais encore elles ne sont pas toujours de forme pyrami- dale, mais polygonale. Elles présentent, en outre, certaines particularités qui méritent d'être signalées. En effet, la substance chromatophile, qui se pré- sente sous forme de blocs, de corpuseules ou de bätonnets, ne se manifeste généralement qu'à la périphérie de la cellule, tandis qu'elle fait souvent défaut au centre. Puis, dans les préparations colo- rées par le Nissl, leur grand axe est tangentiel ou oblique, ce qui le distingue des pyramides pro- fondes communes dont le grand axe est le plus souvent vertical. Je considère ces cellules solitaires comme élant des pyramides profondes ayant subi des modifications morphologiques imposées par leurs connexions spéciales. La couche VI est nettement constituée par deux segments : l’un superficiel et plus large, dans lequel siègent des cellules pyramidales assez denses de toute sorte, l'autre profond, constitué par des cel- lules clairsemées à forme oblongue, fusiforme, etc., etc. Les faits avancés par Bolton, Brodmann et Vogt concernant le dédoublement de Ja couche granulaire interne sont indiscutables. En effet, chez l'adulte et, mieux encore, chez le fœtus de 8 mois, on constate que la couche granuleuse interne, au lieu d'être unique, se présente comme les branches d'un diapason dont la branche superficielle est mince et la plus profonde beaucoup plus large. Or, il est curieux de remarquer que la branche infé- rieure, surtout à son origine, est beaucoup plus épaisse que la couche granuleuse interne du type 18, et cette différence se maintient plus ou moins sur toute son étendue. On pourrait dire que, d'une facon générale, la branche inférieure présente une épaisseur deux ou trois fois plus grande que la tige commune. Au contraire, la branche superficielle n'alteint pas même la moitié de l'épaisseur de la couche profonde. On doit, par conséquent, admettre que la couche IV, très large, de la scissure calcarine est divisée en deux segments à la suite de la péné- tration de fibres nerveuses qui constituent la strie de Gennari : l'un relevé en haut, l’autre à un élage inférieur. Dans ces conditions, je ne vois pas la nécessité d'admettre avec Brodmann une couche granuleuse IV}, étant donné que les éléments im- porlants de cette couche sont les cellules étoilées que von Leonova et Cajal considèrent comme appar- tenant en propre à la région de l'écorce calcarine. Quant à moi, je pense qu'il s’agit là de grosses pyramides superficielles, lesquelles, en raison de connexions spéciales qu'elles contractent, ont changé de forme pour s'adapter à des fonctions plus ou moins spéciales, La transition entre les types 17 et 18 se fait brus- quement; il s'opère, en conséquence, une transfor- mation de toute l’architectonie des couches du type 17. Les couches granuleuses, superficielle et profonde, se réunissent, les deux bandes claires dis- paraissent, les grosses cellules étoilées dispa- raissent également et sont remplacées par de grosses pyramides superficielles, lesquelles, à Ja suite de la fusion des couches granuleuses, sont tout d'abord situées plus superficiellement:; mais ensuite, lorsque la couche granuleuse interne subit une descente assez brusque, elles siègent égale- ment à un niveau plus bas. Un changement s'opère aussi, mais en sens inverse, du côté des cellules solitaires. En effet, à la suite de la disparition de la seconde strie, les pyramides profondes, suivant de près la direction de la couche granuleuse interne, montent à un plan plus superficiel que celui des cellules solitaires ; elles s'élèvent encore à mesure que la couche granuleuse décrit une ligne courbe à concavité basse. De pareils phénomènes s’opèrent aussi du côté de la couche VI. Tout d’abord, on constate que la densité des cellules de Ja VI° diminue sensiblement; au lieu de former une masse com- pacte, elles sont plutôt disposées en groupes ou en colonnes, de sorte que le contraste qui existait dans le type 17 entre la VI? et Ja VI: disparait. À cause de cela, on peut dire que, dans le type 18, la couche VI ne paraïil pas segmentée en deux régions : superficielle et profonde. En ce qui concerne le type 18 (fig. 21), ou type occipital de Brodman, qui apparaît immédiatement après la zone de transition que nous venons de décrire, il possède des caractères qui nous per- mettent de le distinguer facilement du type 17. Tout d'abord, il ne possède qu'une seule couche granuleuse interne. La V°, pauvre en cellules ganglionnaires, se continue avec la VI° sans ligne de démarcation précise. Dans cette dernière, comme nous venons de le voir, on ne peut pas distinguer aisément une VI“ et une VI. Si nous considérons la couche pyramidale sus-granuleuse, elle diffère complètement de Ja couche correspon- dante du type 17. Les cellules ne sont pas si denses : à la place des cellules étoilées superficielles, on voit des pyramides d'un volume moyen qui ne se mélent pas avec les petites pyramides. Enfin, l'épaisseur des couches I-IIT est relativement très petite. O. Vogt décrit et figure une coupe passant à peu près par l'union des deux tiers postérieurs de la lèvre antério-supérieure de la scissure pariéto- occipitale, par conséquent correspondant au type19. Sa structure rappelle par plusieurs points celle de l'écorce visuelle, Les deux couches de pyramidales superlicielles sont relativement minces, et l'étage profond de la troisième couche contient quelques G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE pyramidales assez espacées, tranchant nettement sur leurs voisines par leur très grande taille qui dépasse celle des cellules de la couche ganglion- naire, Par leur situation à une assez faible distance de la surface, ces cellules rappellent les grandes cellules solitaires superficielles de Meynert. La granuleuse est compacte et bien distincte, Les pyramidales profondes sont plus grandes el plus serrées que dans les régions avoisinantes du gyrus cinguli, mais plus pelites et moins espacées que dans la lèvre inférieure ou cunéale de la scissure perpendiculaire interne, La couche pro- fonde est relativement mince. L'épaisseur totale de l'écorce est un peu moindre que dans le gyrus cinquli. Le type 19, ou area preoccipitalis de Brodmann, occupe, sur la face externe du lobe occipital, une étendue presque triple de celle du type 18, tandis qu'à la face interne son étendue est plus réduite; il est composé, comme le type 18, d'un segment supérieur et d'un autre inférieur, situés respective- ment au-dessus et au-dessous des deux zones du lobe occipital. Il correspond approximativement à l’area peristriata de Smith, tandis que, dans la carte de Campbell, il fait partie de son aire visuo- psychique. On peut distinguer assez facilement, au point de vue cylo-architectonique, le type 19 du type 18. En effet, ce dernier, en dehors de la parti- cularité que nous avons constatée au point de transition du 17 et du 18, à savoir la présence des grosses pyramides superficielles dans la I’, ne possède pas une couche II si bien fournie que le type 19. Dans ce type, la II’ est constituée par de nombreuses cellules pyramidales, dont quelques- unes se font remarquer par leur volume considé- rable. Leur base élargie donne naissance à de nombreuses dendrites. Puis la couche IT y est plus riche en cellules de forme pyramidale que dans le type 18. La couche IV est plus large, et, dans la couche V, il existe des cellules pyramidales assez volumineuses, la plupart verticales, réunies en petits groupes ou isolées, et plus rarement de forme polygonale. Dans la couche VI, on peut distinguer une région plus large, superficielle, constituée par des pyramides polymorphes dont un certain nombre triangulaires, et une partie profonde représentée par des cellules fusiformes clairsemées. VIII. — RÉçGion pu CINGULUM. Betz avait insisté sur la structure particulière- ment simplifiée de la portion sous-frontale du gyrus cinquli. Cette portion ne serait formée que de deux couches, la 1° et la V°. Au niveau du genou du corps calleux, la couche IT commence à se dif- “férencier. Puis apparaissent la granuleuse et les #55 pyramidales de la couche IT, mais celles sont beaucoup plus petiles qu'ailleurs. D'apres Ham- marberg, la structure du gyrus cinguli est la même que celle des portions avoisinantes de la cir- convolulion marginale. La couche Il est épaisse di 0,30; la IT, formée par de grandes pyramides, a à peu près la même épaisseur; au-dessous, il v à une couche de cellules fusiformes de 0%",70; la granuleuse manque complètement. En approchant du corps calleux, toutes les couches s'amincissent et les cellules diminuent de taille. La couche grise qui revêt le corps calleux est constituée par des cel- lules espacées, sans ordre et placées dans les stries longitudinales. D'après O. Vogt, la portion sous-frontale du grrus cinguli diffère considérablement de sa portion sous-pariélale; la granuleuse n’est pas diffléren- ciée « comme dans l'écorce, décrite par Brodmann, de la partie antérieure de Fa et du pied de F° ». Par contre, dans le quart profond de lamas de cellules qui représentent les III, IV et V° couches, on trouve une série de grandes cellules fusiformes, caractéristiques de ce territoire, et que Flechsig à probablement déjà vues. La VI* couche « est si épaisse qu'elle ne peut être comparée qu'à la couche correspondante de T' ». Le mème auteur a mis en relief les caractères de la portion pariétale du gyrus cinquli. La couche granuleuse commence à se diffé- rencier dès le niveau antérieur du lobule paracen- tral; à ce niveau, l'épaisseur totale de l'écorce est moindre, la taille des cellules granulaires plus con- sidérable et la couche profonde plus mince. Celle-ci est séparée de la précédente par une zone pauci- cellulaire plus nette que dans toutes les autres circonvolutions décrites et figurées par Vogt. Plus en arrière, les cellules sont en général plus serrées dans les Il° et VI° couches et aussi plus grandes. La granuleuse est beaucoup plus dis- tincte; enfin, la V® est beaucoup plus épaisse. La netteté de différenciation de la couche granuleuse tient ici surtout à l'absence de grandes cellules pyramidales, car les IITI° et V° couches contiennent un très grand nombre de grains, non pas surtoul des cellules rondes comme, par exemple, dans la II: occipitale, mais principalement des pelites pyra- midales comme dans les circonvolutions supra- marginales, Il° frontale et 1° temporale. Campbell distingue trois zones dans la région du gyrus cin- guli, y compris la région rétro-spléniale, et n'in- dique pas les différences qui existent entre les ré- gions antérieure et postérieure du gyrus cinguli. Par contre, Brodmann montre que cette région est constituée par six types, à savoir : 23, area Cingu- laris posterior ventralis; 31, area cingularis poste- rior dorsalis: 24, area cingularis anterior ventralis; 32, area cingularis anlerior dorsalis; 33, area præ- 856 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE gennalis; %5, area subgennalis; seulement cet au- teur n'indique que la topographie des types chez l'homme sans en donner la description cyto-archi- tectonique. Je suis arrivé aux mêmes résultats que Brod- mann en ce qui concerne la lopographie des types que cet auteur a indiqués. Je dois faire remarquer, cependant, qu'en ce qui concerne l'étendue du type 24, il paraît être soumis à des variations indi- viduelles assez considérables (fig. 22). Les cel- lules fusiformes qui existent au-dessous de la couche V, dans le type 24, se présentent sous des aspects morphologiques différents. Les unes sont riches en substance chromatophile, les autres beaucoup plus pauvres. Dans le premier cas, la substance chromatophile se présente soit sous forme de blocs plus ou moins bien différenciés, sié- geant aux pôles des noyaux comme des espèces de eapuchons, soit sous forme de filaments ou de bälonnets à l'intérieur du cytoplasma: d’autres fois, elle se dépose à l'émergence des dendrites. Le noyau peut être central ou bien excentrique; dans ce dernier cas, au lieu d’être ovoïde, il est lenticu- laire. Le centre de la cellule est alors pauvre en substance chromatophile et à ce niveau passent les neurofibrilles sous forme de filaments primaires. Les cellules fusiformes, pauvres en substance chro- matophile, sont pâles et ne contiennent que des amas de granulations colorées disséminées à l'inté- rieur du corps cellulaire. Ces cellules, il est inutile de l'ajouter, n'appartiennent pas en propre aux types que nous venons de décrire et l'on en trouve dans certaines régions de l'insula et du lobe fron- tal. Comme l'a déjà remarqué Brodmann chez les singes inférieurs, le type 25 représente une espèce de type de transition entre les types de la région frontale et ceux de la région limbique. Il est vrai que le type 25, chez les singes inférieurs, ne peut pas être considéré comme homologue du même type chez l’homme. Nous avons constaté chez l'homme les particularités suivantes de ce type (fig. 23). La couche IT est mince et constituée plutôt par de petites pyramidales; la ITI°, assez large, ne contient que des pyramides de volume moyen dis- posées en séries longitudinales; il n°y à pas de IV comme dans les types frontaux 8 et 9. Aussi le passage de la II° à la V° n’est pas nettement indi- qué, quoique la V° soit composée par des cellules caractéristiques constituant une couche large el dense. Il s'agit de pyramides plus ou moins oblon- gues, parmi lesquelles on voit quelques cellules fusiformes. La densité de celte couche permet de la distinguer nettement de la II et de la VF. Cette dernière, très large, se perd insensiblement dans la substance blanche. IX. — RÉGION RÉTROSPLÉNIALE. Le mérite d'avoir attiré l'attention et d’avoir bien décrit la région rétrospléniale revient complètement à Brodmann. Les trois types, à savoir 26, 29 et 30, qui constituent cette région, sont représentés par trois croissants concentriques de grandeur progres- sive etcorrespondent à peu près à l’isthme du gyrus cinguli. La figure 3 (1"° partie, p. 820) représente schématiquement la situation de ces types, mais on en a exagéré la largeur pour mieux fixer l’atten- tion sur leur topographie. C'est avec raison que Brodmann considère l’écorce rétrospléniale comme une déformation hétérogénétique; le type 26 ap- partient à l'écorce défective dans le sens de Mey- nert et sa stralification est surtout très réduite. Dans le type 29, on trouve que la couche IV est développée, mais la Il° et la III° sont en rétro- cession, contrairement à ce qu'on voit dans le type 30, où la couche granuleuse interne rétro- grade, tandis que la ITl° et la V°, au contraire, sont fortement développées. L'identification de ces zones offre une grosse difficulté chez l'homme, en raison des caractères architectoniques peu accusés. Aussi Brodmann n’a pu les homologuer qu'après avoir fait des études sur les animaux inférieurs. Le type 26, ou area retrosplenialis, siège à l'extré- milé postérieure du corps calleux et il est caché par le sillon du corps calleux. En dehors, il se perd dans le type 29, ou area retrolimbica granularis. La zone 30 est désignée par Brodmann sous le nom d'arearetrolimbica agranularis. Chezles singes inférieurs, Brodmann a trouvé que le type 30 res- semble au 29 et ne s’en distingue que par l’absence complète de la couche IV, ensuite par une plus grande richesse en cellules de la couche V, qui ne se présente plus comme une strie claire. Puis la couche IT et la couche VI sont plus larges. Le mème auteur à vu ensuite que les types 26 et 29 sont très bien développés chez le lapin, tandis que chez le hérisson ils ne sont pas si accusés que dans d’autres espèces, telles que le 7heropus lupus. Chez ce dernier, comme chez le lapin, la région rétro- spléniale est plus développée que chez les Primates el les Prosimiens, et le type 26 ne se continue pas avec le Lype 27, mais, entre ces deux, il y a un nou- veau Lype, le type 48. Voici ce que notre observation nous permet de constater dans le type 26 (fig. 24). La première couche est large aux points de vue absolu et relatif. Les couches IT, IT et IV sont fondues ensemble et n'offrent pas de individuelle. La couche V, relativement très bien développée par rapport aux autres couches, est constituée essen- Hellement par des pyramides moyennes et par des cellules polygonales, riches en dendrites. La VI® stralification en RE G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 857 2 4 2 Fu fs "es ", . FNAC je ù Te Ca RACE ERA 2: %e CL Dr S & É Re 6 0. « Ce DIE LCA AT CT) VO SUPER Fig. 20. lis. 21. Fig. 22. Fig. 93. Fig. 24. Fig. 20. — Type 17 de Brodmann (area Striala de Bolton). — I, couche moléculaire; 1-III, couche des petites pyramides; IVa-IVb-[Ve, les trois couches granuleuses: V, couche des cellules solitaires : VI®, couche des pyramides triangulaires:; VI», couche des cellules fusiformes. Fig. 21. — Type 18 de Brodmann. — 1, couche moléculaire: I, couche des petites pyramides : III, couche des moyennes £ .1YE Ur" 1 à À mo) pyramides; Ib, couche des grosses cellules superficielles; IV, couche granuleuse: V, couche des pyramides sous- granulaires: VI, couche des cellules polymorphes. Fig: 22. — Type 24 de Brodmann. — I, couche moléculaire: If, petites pyramides: LI + Moyennes pyramides: V, couche de cellules fusiformes; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 23. — Type 25 de Brodmann. — 1, couche zonale: Il, couche des petites pyramides; III V, pyramides profondes; VI, cellules polymorphes. Fig. 2% — Type 26 de Brodmann. — Comme on le voit sur la figure, les couches [ETII-IV sont fort réduites. » moyennes pyramides : REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. AU 858 G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE est mince, comme, du reste, elle l’est partout au niveau de sillons. Au point de transition du 26 et du 29, les couches et l'écorce augmentent d’épais- seur; dans la couche V, on constate quelques grosses cellules arrondies, päles, et la IV* commence à se dissiper, puis s'élargit de plus en plus. Ge qui caractérise le type 29 (fig. 25), ce n’est pas seu- lement la présence d'une couche relativement dif- fuse, mais aussi la réapparition d’une couche Il et d'une couche IIT, quoique, en somme, elles soient encore bien réduites. C'est ce que nous explique le contraste qui existe entre l'épaisseur des couches I-IIL et IV-VI. Puis on voit dans la V° quelques grosses cellules disséminées, claires et arrondies. X. — RÉGION DE L'HIPPOCAMPE. Au point de vue cyto-architectonique, le lobe limbique de Broca est constitué par des zones de régions diverses, parmi lesquelles nous devons considérer en première ligne la région hippocam- pique, limitée en haut par le sillon de l'hippo- campe et en bas par le sulcus rhinalis et l'incisure temporale. Par conséquent, elle occupe, comme le fait remarquer Brodmann, une étendue un peu plus grande que le rhinencéphale des auteurs. La forme, le volume, la disposition des cellules, de même que l'absence d’une couche granuleuse, permettent de distinguer le rhinencéphale du reste du manteau cérébral. Chez le fœtus, il n'existe, dans aucune zone de cette région, une couche gra- nuleuse interne. Donc, à ce point de vue, l’archi- pallium diffère complètement du néopallium, où nous venons de voir qu'il existe une quatrième couche, même dans le type 4. La conclusion géné- rale est que le plan cyto-architectonique de l'archi- pallium est d'origine toute différente de celui du néopallium. Toujours chez le fœtus, on constate que la couche granuleuse externe, continue dans une certaine région, est dissociée plus loin par des amas de cellules polygonales, de sorte qu'on voit deux espèces de nids cellulaires : les uns constitués par des cellules polygonales superficielles, les autres par les granules siégeant au-dessous et entre les premiers. Cette constatation nous suggère l'idée que la couche granuleuse externe qui existe chez le fœtus subit, pendant la vie fœtale, un mouvement d'émigration, en vertu duquel les pyra- mides deviennent superficielles et constituent les nids caratéristique de l'hippocampe. De cette facon seulement on peut comprendre l'existence de grosses cellules pyramidales et polygonales dans la seconde couche de cette région, alors que, dans tout le néopallium et même dans le reste de l’archi- pallium, la seconde couche est constituée, comme on le sait, par les cellules granuleuses externes. D'accord avec Brodmann, on peut distinguer au moins quatre types, qu'il dénomme champs 27, 28, 34, 35, dont la topographie est figurée dans le schéma représenté par la figure 3 (1"® partie, p- 820). Nous avons étudié sur des coupes sériées la stra- tification et la morphologie des cellules des types 98. 27, 35 et 48, et nos recherches confirment dans leurs grandes lignes celles qui ont été publiées par Hammarberg, Cajal et Campbell chez l'homme. Ces types sont homologues avec ceux décrits par Brodmann chez les singes inférieurs. La disposi- tion des cellules n'offre pas de différences chez l'homme et chez le singe. Voici les caractères géné- raux de la cyto-architectonie du type 28 (fig. 26). La première couche est très large et, d'habitude, ne contient pas de cellules qui méritent de nous ar- rêter. Mais la seconde attire notre attention par la morphologie et la topographie des cellules; il s'agit, en effet, la plupart du temps, de nids cel- lulaires séparés par de la substance blanche. Les nids sont constilués par des cellules poly- morphes et d'habitude polygonales ou étoilées, à noyau rond ou ovoïde, et dont le protoplasma con- tient de la substance chromatophile en état de dif- fusion sous forme granuleuse ou corpusculaire. Le nombre de cellules varie d’un nid à l’autre et il s'en trouve qui ne contiennent que à ou 6 cellules, pen- dant que d’autres en ont plus de 40. Entre les gros nids, il s'en intercale d’autres, constitués par quel- ques cellules seulement. Les nids cellulaires s’éta- lent parfois en largeur et constituent alors comme une bande, alors que, d’autres fois, ce sont des amas arrondis ou polygonaux dont les cellules sont éta- gées. La III° couche, assez large, est formée par des pyramides moyennes disposées quelquefois en séries. Il n'y a pas de quatrième, mais souvent on voit une bande large, claire, ne contenant que peu ou pas de cellules. Au-dessous de cette strie claire, on distingue une V° couche très nette, mais peu large, constituée par des pyramides plus grosses que celles de la II et dont le protoplasma, plus riche, contient plus de substance chromatophile, La VI° (tranche sur la précédente par la coloration moins intense de ses cellules, leur volume plus petit; elle ne se divise pas en VI“ et VI?. La lar- geur de ces différentes couches et la disposition de leurs cellules varient d'avant en arrière. Tout d'abord, on peut voir, au-dessus d'une certaine ligne de grosses cellules, par conséquent dans la première couche, quelques rares amas constitués par des grains et des petites pyramides. Cette par- ticularité existe là où le subiculum a fait son appa- rition. Puis, à mesure que le plateau où sont situés les nids de grosses cellules diminue et que le G. MARINESCO — LA CYTO-ARCHITECTONIE DE L'ÉCORCE CÉRÉBRALE 859 type 34 vient à disparaitre, il s'interpose entre ces nids d'autres nids, constitués par de cellules, de sorte-que l'alternance des grosses cellules polygonales et des petites donne à la seconde couche, à ce niveau, un às- pect des plus caractéristiques. Cette alter- nance d'ilots de grandes et de petites cel- lules, considérée par certains auteurs comme structure caractéristique du subi- eulum, ne se voit que sur une zone limitée et elle annonce pour nous la disparition graduelle du type 28. Le type 27, ou area presubicularis, s'étend à partir de l’uncus jusqu'à la queue de l'hippocampe. La structure (fig. 27) se différencie nettement de celle du type pré- cédent. Déjà Betz avait découvert dans la région du subiculum des amas cellulaires parfaitement isolés les uns des autres par de la substance blanche dans la couche des petites pyramides, amas désignés sous le nom de glomérules corticaux. Ober- steiner, Cajal, Déjerine, Calleja, Külliker, ont publié un certain nombre de détails sur ce territoire. Dans le subiculum, Cajal a retrouvé les « glomérules corticaux », découverts par Betz, et qui sont formés de petites pyramides de moins de 7 y de dia- mètre en général. Ces « lots », situés au bas d'une très épaisse couche plexiforme, laissent échapper sur la profondeur des fibres verticales qui gagnent la substance blanche, et qui semblent répartir en grou- pes assez distincts les pyramides de la couche Il. Les trois couches IIT, IV et V sont remplacées par une couche unique de pyramidales assez volumineuses, que ces mêmes fibres verticales font paraitre alignées en séries radiaires. Le type 35, ou area perirhinalis de Brodmann, constitue une zone linéaire correspondant au sillon rhinal. Ce qui ca- ractérise ce type, c'est l'absence de strati- fication manifeste, l'absence d’une IV° gra- nuleuse; aussi la limite entre 35 et 36 est très précise. Il se distingue du type 28 par l'absence des ilots cellulaires de la 11° cou- che et par la présence, à la place de cette dernière, de petites pyramides qui se con- tinuent insensiblement avec la III° cou- che, qui, à son tour, tout en étant cons- tituée par des pyramides assez volumi- neuses, n'offre pas une ligne de démarca- tion très nette avec les cellules de la V°. Le type 35 doit être considéré, suivant toutes les probabilités, comme apparte- nant à l'archipallium, ou tout au plus comme un petites | Lype de transition entre celui-ci et le néopallium. Brodmann se rallache à cette dernière opinion CALE er, er € Le Fig. 25. o Fig. 21. Fig. 25, — Type 29 de Brodmann.— I, couche moléculaire; II, couche des petites pyramides; II], moyennes pyramides: IV, couche granu- leuse; V, couche des grosses cellules sous-granuleuses; VI, couche des cellules polymorphes. Fig. 26. — Type 98 de Brodmann.— I, couche moléculaire: 11, couche de cellules polygonales ou étoilées: 111, moyennes pyramides; V, grosses pyramides. Fig. 27, — Type 27 de Brodmann. — I, couche moléculaire; IH, petites pyramides; V, grosses pyramides; VI, coucheides cellules polymorphes. 860 Ce dernier auteur vient d'individualiser récem- ment un nouveau type (48) ou région rétrosubicu- laire. Ce type a de commun avec le 27 la largeur de la [°° couche et la composition de la Il° couche, constituée par de petites pyramides; mais, au lieu que celles-ci soient disposées en amas isolés, elles forment une bande assez large qui vient se conti- nuer avec la 11° couche du type 27. Puis les deux types, comme le reste du rhinencéphale, manquent de couche granuleuse interne. Mais ce qui les distingue, c'est la disposition et la morphologie de la IE et de la V° couches, qui se font remarquer par le manque de stratification apparente, phéno- mène dû à la raréfaction considérable de leurs cellules. Du reste, la III° est constituée par des pyramides variables comme forme, ayant un volume petit et une intensité chromatique plus faible que celle des cellules correspondantes du type 27. ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE XI. — CONCLUSIONS. Nous avons exposé d’une facon aussi sommaire que possible les études que nous avons faites sur l'architectonie de l'écorce cérébrale humaine. Sans doute, ces études sont incomplètes, mais nous pensons les reprendre et développer certains cha- pitres dans des revues spéciales. Néanmoins, le lecteur avisé a pu remarquer qu'au voisinage de chaque centre de réception sensorielle sont atta- chés d'autres centres qui servent sans doute à l'élaboration et à la synthèse des impressions sen- sorielles. Cette constatation est de nature à jeter quelque lumière sur les phénomènes psychiques et nous permet de mieux saisir le mécanisme de diffé- rents épisodes pathologiques, tels que l’apraxie, l’aphasie, l'agnoscie et l'asymbolie. C'est ce que nous nous proposons de démontrer dans un pro- chain travail. D' G. Marinesco, Professeur à la Faculté de Médecine de Bucarest. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE L'année 1909 a été, comme les précédentes, très fertile en travaux de Chimie organique. Le nombre des mémoires parus est vraiment prodigieux, et il est difficile de relever tous les travaux intéressants qui ont été publiés. Le nombre des composés syn- thétiques s'accroît constamment. Soit par appli- cation des méthodes anciennes que la plupart des chimistes modifient en les rendant plus pratiques, soit par la création de méthodes nouvelles, nous assistons chaque jour à une vérilable éclosion de corps nouveaux. La liste en devient de plus en plus longue, et bientôt les chimistes se reconnaitront difficilement au milieu de tous ces composés. La formule, qui est d’un attrait puissant en Chi- mie organique, joue un grand rôle dans ces créa- tions synthétiques. On fait d'abord un schéma sur le papier et, par l'application bien comprise des méthodes connues, on arrive aisément à faire un nouveau composé. Travail facile et peu intéressant, dira-t-on ! Non; pourle chimiste consciencieux, rien n’est aisé et tout à pour lui un puissant intérêt. Car, il n’est pas bien sûr, malgré tout, que les méthodes sénérales qu'il met en œuvre puissent s'appliquer d'une manière complète à la synthèse qu'il se pro- pose d'effectuer. Ets’appliqueraient-elles, d'ailleurs, quelle n'est pas sa surprise de voir qu'il à passé à côté du composé qu'il cherchait, et de trouver un corps nouveau à sa place. Les migrations d'atomes sont fréquentes en Chimie organique, et changent souvent la nature des réactions. Tous les chimistes ont eu de ces surprises dans le cours de leurs recherches. On poursuit un composé; on en trouve un différent. C'est là le grand intérêt des travaux de laboratoire, et ces surprises sont souvent très fertiles en résultats. Elles éveillent la curiosité du chercheur, et le conduisent à la découverte de méthodes nouvelles ou de corps inconnus. I. — MÉTHODES GÉNÉRALES DE SYNTHIÈSE. Depuis quelques années, ce sont toujours les deux grandes méthodes françaises de Sabatier et Senderens et de Grignard qui réalisent les syn- thèses les plus nombreuses, les plus aisées, les plus élégantes et les plus productives au point de vue du rendement. Il n’est plus un seul laboratoire de Chimie organique dans le monde qui n'applique la méthode organomagnésienne ou les méthodes catalytiques d'hydrogénation ou de décomposition par les métaux divisés. S 1. — Synthèses par les organomagnésiens. La méthode de Grignard à acquis, tout de suite, droit de cité dans tous les laboratoires. Elle est très aisée à mettre en œuvre et conduit sûrement à un résultat positif. Dans les laboratoires des Ins- tituts de Chimie, les élèves font un organomagné- sien avec autant de facilité et de sûreté qu une préparation d'hydrogène ou d'oxygène. Il ne faut pas d'appareils compliqués. Une place restreinte ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE 861 suffit, etles manipulalions sont lrès simples. Peut- on dire, cependant, que la méthode ne comporte pas de surprises? Oui, lorsque l’on réalise la syn- thèse des alcools, des aldéhydes, des acides, etc. Mais, dès que l’on passe à des réactions plus com- plexes, elles ne marchent pas toujours dans le sens attendu, soit que l'organomagnésien réagisse comme corps réducteur, soit qu'il se produise des composés de déshydratation où de polymérisation, soit qu'il y ait des transpositions moléculaires. Cependant, au fur et à mesure que l’on éludie de plus près ces combinaisons organomagnésiennes, on précise davantage les conditions de la réaction et on la dirige dans le sens que l’on veut. Si l’on examine les travaux effectués à l’aide des organomagnésiens, il semble que tout a été fait. Au début, on acondensé timidement les aldéhydes, les acétones pour effectuer la synthèse des alcools. Puis, les premiers résultats étaient à peine publiés qu'une véritable armée de chimistes attaqua le sujet detoutes les manières. On a fait réagir sur les orga- nomagnésiens les corps les plus divers de la Chimie minérale et de la Chimie organique : l'oxygène, le soufre, l’anhydride sulfureux, le chlorure de sul- furyle, l'anhydride carbonique, le sulfure de car- bone, l’acide arsénieux, l’oxysulfure de carbone, l’acétylène, les alcools, les éthers, les acides et leurs dérivés : anhydrides, chlorures, amides, les amines, la quinoléine, les cétones complexes, l'acri- dine, le chloral, le camphre et même l’indigo, etc. En moins de dix ans, le nombre des synthèses effectuées dans tous les laboratoires du monde est devenu prodigieux. Les organozinciques avaient été à peu près complètement détrônés. Il est vrai que leur manipulation est plus délicate. Cependant, les organozinciques mixtes, préparés par deux pro- cédés différents, par Blaise et Bewad, ont permis de réaliser de nombreuses synthèses sur lesquelles je reviendrai plus tard. Il n’est pas possible de décrire à cette place les combinaisons réalisées par cette méthode depuis la publication de la dernière revue. Plusieurs pages n'y suffiraient pas. Nous en relèverons cependant quelques-unes parues dans l’année; elles mon- treront la souplesse des composés organométal- liques du magnésium dans les synthèses orga- niques. Lorsqu'on fait réagir le sulfate de méthyle, SO'(CH'), sur l'iodure de triméthyl-méthane-ma- gnésium, (CH°)CMgl, on obtient, avec un rende- ment de 75 °/,, le {étraméthylméthane, (CH), corps très difficile à obtenir par les méthodes synthé- tiques actuellement connues. C’est une véritable préparation de ce carbure quaternaire. L'acétylène et les composés acétyléniques vrais réagisssent sur les iodures de magnésium-alcoyles, PP RMgl, en donnant un acétylure magnésiurn mixte : ,G=CR! Mg . I Celui-ci se condense facilement avec l'aldéhyde for mique ou le trioxyméthylène, les aldéhydes el les cétones grasses, aromatiques et cycloforméniques, pour donner les alcools acétyléniques primaires, secondaires et tertiaires, du type & : PU—=UR MEKCE + HCOH — RC=C.CH*0H C=CR Mg< + R'COH — RC=C.CHOHR!. N -C= CR /NK Mg< -L R'COR"' — RC=C.COH£ nl R En changeant le formol par l’oxyde d'éthylène, on obtient les alcools primaires du type 8 (lotsich) RC=C.CH*.CH°OH. C'est la seconde synthèse générale de ces alcools acétyléniques; la première, qui passe par l'inter- médiaire des composés acétyléniques sodés, est due à Moureu. Une troisième méthode récente d'obtention des alcools acétyléniques consiste à faire réagir l'acro- léine monobromée sur des organomagnésiens; On fait des alcools éthyléniques bromés en 8 — CH° —CBrCHOHR, qui, par la potasse aqueuse, se changent en alcools acétyléniques : CH = C.CHOHR. Avec l'iodure de magnésium-méthyle, on a l'alcool éthylénique bromé : CH°=CBr.CHOH.CH”, qui fournit le butine-1-o1-3 : CH = C.CHOHCH’, liquide bouillant à 107° sous 760 millimètres et précipitant en jaune le chlorure cuivreux ammoniacal. L'acétylène peut fournir, en présence d'un organo- magnésien, RMgl, en excès, un dérivé dimagné- sien Mg< Mg, NT qui réagit comme une molécule double vis-à-vis des aldéhydes et des cétones. Le trioxyméthylène fournit avec lui le glycol acétylénique biprimaire, CH°OH.C=—=C.CH°OH ; l'acétophénone conduit à un glycol acétylénique bitertiaire CH c'Hs ScoH.C— C.COH£ ce” ‘CHE Il en est de même pour les cyclohexanones et pour le camphre, qui fournissent les glycols bitertiaires correspondants. Le diiodure d'acétylène est un réactif facile à conserver, s'altérant difficilement. Les dérivés di- magnésiens des carbures diacétyléniques vrais réa- | gissent à la manière de deux molécules d’acétylène- 862 dimagnésium. Le dérivé du dipropargyle, CH= C.CH°.CH°.C=CH, fournit, par action directe de l’anhydride carbonique, l’acide octadiine-dioïque CO°H.C = C.CH°.CH°.C = C.CO'H, dont l'hydrogé- nation par le noir de platine et l'hydrogène conduit à l'acide subérique, C‘H"O*, Ce nouveau composé diacétylénique paraît beaucoup plus stable que l'acide hexane-dioïque de Baeyer. Ce dernier fait violemment explosion vers 1717°; l'acide octadiine- dioïque fond à 190° en se décomposant légèrement. Il est vraisemblable que ce composé dimagnésien du dipropargyle pourra être condensé avec les aldéhydes et cétones pour donner des glycols diacé- tyléniques. Les aldéhydes incomplètes peuvent, aussi aisé- ment que les aldéhydes saturées, donner des com- binaisons avec les organo-magnésiens. L'aldéhyde crotonique, CH°.CH — CH.COH, en particulier, con- duit, sans aucune perturbation, à des alcools éthy- léniques. Avec l'éthylbromomagnésium, on obtient l'hexénol-2 : 4, CH°.CH : CH.CHOH.CH°CH" : les homologues supérieurs, propyl, isopropyl, isobu- tyliodomagnésium, fournissent l’hepténol-2: 4, CH*. CH : CH.CHOH.CH.CH”. CH”, le méthyl-5-hexénol- 2:4 et le méthyl-6-hepténol-2 : 4. Ces alcools pos- ! sèdent des points d’ébullition croissant normale- ment et une réfraction moléculaire normale. Ils sont peu stables; la simple distillation suffit pour les déshydrater. Un réaction curieuse et élégante des organo- magnésiens, d'application récente, est fournie par l'action des sels alcalins des acides organiques. On obtient des cétones. La réaction se fait d'après les équations suivantes : /0Mel RCO.ONa + R'Mgl — RC—R' SONa OMgl RC—R' é + 2H20 — Mg + NaOH + RC(OH}°R'. NONa ŸOH Ce glycol est instable et se déshydrate immédia- tementen fournissant l'acétone. L'acétate de soude, CH'CO*Na, opposé aux bromures d’isobutylmagné- sium, d'isoamylmagnésium, de phénylmagnésium, donne la méthylisobutylcétone, CH”. CH(CH*). CH°. CO.CH”, la méthylisoamylcétone, CH°. CH(CH”). CH’, CH°. CO. CH’, l’acétophénone, C'H°COCH”. Le thiophène iodé, CSI, réagit aisément sur le magnésium en présence d’éther absolu. Le composé mixte obtenu se condense avec les acélones pour donner des alcools tertiaires thiophéniques : CH r— CH ait Je.cone”- 2 Ü R' Ces alcools tendent à se déshydrater en produi- | ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE sant le carbure éthylénique correspondant. Le diméthylthyénylcarbinol, C‘H°S.COH(CH), forme des aiguilles fondant à 33°; le carbure éthylénique correspondant, C'H*SC(CH") — CH’, bout à 166°. Les cétones aromatiques se condensent avec l'iodure de thyényl-magnésium à la manière des cétones grasses. Les sels d'ammoniums, qui, sous l'influence des alcalis, se transforment en pseudobases, réagissent sur les solutions de Grignard, en donnant des com- posés substitués. En opposant à l’iodométhylate d’acridine un organomagnésien RMgBr, où R est un résidu gras ou aromatique, on obtient la réaction : CH Br CHR CSH£/ | CH + RMgBr Mg + CH SH, Qu? ] AN Naz CH ATEN CHS l Les iodométhylates de naphtacridine (1) et de méthylnaphtacridine (IT) conduisent, de la même manière, à ses dérivés disubstitués (HI) et (IV) : CH, CH come | css cum | CC Az/ Az 7 CH CH 200 (I) (IT) HR CHR ce CII cons” ScrcHe. NAzCI NAZCHS (IN) {v) Les iodométhylates de quinoléine et d'isoquino- léine donnent des résultats analogues. On voit combien est précieuse cette méthode synthétique, qui permet de réaliser aisément la préparation des acridines et des quinoléines substituées. L'hydrogé- nation de ces dernières conduit, d’ailleurs, aux tétra- hydroquinoléines substituées. Pour ne pas augmenter davantage cette liste de réactions si curieuses et si importantes, je termine- rai par l'action des organo-magnésiens sur l’indigo. L'indigo ayant deux fonctions cétoniques dans sa molécule, on pouvait penser qu'il réagirait aisé- ment sur les composés de Grignard. On constate, en effet, que ces composés dissolvent l'indigo en poudre avec dégagement de chaleur, et il se fait des combinaisons de la forme : R à C— OH CSH#: TETE A7H ” AZH co Scans, qui possèdent des colorations et des points de fusion différents, suivant la nature du résidu R substitué. Si R est du méthyle, l'indigo. substitué est brun; pour l'éthyle, il est orange; le pro- pyle CH le rend jaune; le butyle, l’isoamyle et le phényle forment des indigos substitués rouges. ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE $ 2. — Réactions d'hydrogénation par les métaux divisés. La méthode d'hydrogénation par les métaux divisés n'a pas eu à son apparition le succès des organo-magnésiens. Bien que les composés syn- théliques créés à l’aide de cette méthode fussent des nouveautés scientifiques, les laboratoires français et étrangers restèrent pendant longtemps sans l’appliquer. Née en 1900, en même temps que les organo-magnésiens, elle resta près de cinq ans l'apanage de ses auteurs, malgré les nombreuses publications auxquelles elle avait donné lieu. Cela tient à la nature même de la réaction, qui est très délicate et exige des précautions spéciales pour être mise en œuvre. Elles sont de plusieurs ordres. D'abord, le métal catalyseur doit être privé de cer- laines impuretés qui paralysent complètement son action. De la même manière qu’un ferment orga- nique est tué par certaines substances toxiques, le ferment minéral (métal divisé) est tué par certains corps. Des traces de chlore, de brome, d'iode, de soufre, paralysent complètement son action. La température est un deuxième facteur qui intervient dans la réaction. Si le métal divisé est trop chauffé, il ne réagit pas, ou bien réagit dans un sens diffé- rent : au lieu d'hydrogénalion, on a une décompo- sition. La température de réduction de l’oxyde qui fournit le métal divisé n'est pas indifférente. En troi- sième lieu, l'hydrogène et les produits à hydrogéner doivent être très purs; la présence des halogènes ou du soufre dans ces produits arrête la réaction. Toutes ces conditions, souvent ignorées, ont été la cause des échecs subis dans les différents labora- toires où l’on essayait d'appliquer la méthode. Actuellement, on réalise les hydrogénations cataly- tiques aussi aisément que les décompositions par les métaux divisés. Et l'on voit surgir de tous les côtés des travaux nombreux. A l'actif de cette année, nous en relevons un certain nombre de très intéressants. C'est d’abord l'hydrogénation, à l’aide du nickel divisé, du triphénylméthane (C'H°)'CH, qui a con- duit au tricyclohexylméthane (C°H")CH. Après l’anthracène, hydrogéné antérieurement, on a fait l'hydrogénation de l’acénaphtène, qui a été trans- formé en un tétrahydrure, identique à celui que Bamberger avait obtenu par une autre voie; le phé- nanthrène à donné un dodécahydrure (I), et le fluorène, le décahydrure de fluorène (Il) : CH? _CH® BÉAEUEE CH? CH?/ — NCH* CH? ca NC C/ ces ‘11:/ NS ps None | SR AM EP AL, Gti: lu “lors CH2ACH: CH2CEH: CIE BTE CH: (I) (I) Les amides, les carbylamines et les carbimides 863 s'hydrogènent aussi en présence du nickel divisé en donnant des amines. Les anhydrides d'acides se scindent en fournissant une aldéhyde et un acide : RCO,OCOR “+ H# = RCOH + RCOII Les oximes se transforment de la même manièr en amines, lesquelles, se dédoublant au contact du métal divisé, fournissent la réaction suivante : 2RCHAZHÈR! = AzH3 + [RR'CH}*AzH. En particulier, avec les cétoximes, on obtient les amines secondaires des alcools secondaires, qu'il est impossible d'atteindre actuellement par d'autres voies. Les dicétones grasses changent leurs fonctions cétoniques en fonctions alcooliques. Les célones et les dicétones aromatiques, au contraire, transformées en carbures phénylforméniques C‘H°COCH” + 2H° — HO + C'H°.CH°.CH°; C'H°CO. COC'H° + 4H° — 2H°0 + C'H°CH*CH°C'H°. Les qui- nones (quinone, toluquinone, thymoquinone, para- xyloquinone) fixent H° et fournissent les hydro- quinones correspondantes. Les polyphénols (hydro- quinone, pyrocatéchine, pyrogallol) fixent six atomes d'hydrogène pour former les quinites ou cyclohexane-diols et cyclohexane-triols. Les nitrites alcooliques (éthers nitreux), RO.Az0, se changent en amines RAZH°, subissant vraisem- blablement pendant la réaction le phénomène de la tautomérie en carbure nitré, RAZO®. Enfin les dérivés dinitrés aromatiques, très peu volatils, peuvent être transformés en diamines à l’aide du nickel divisé. Les bases quinoléiques, qui avaient résisté à l'hydrogénation parce que l’on ne se trouvait pas dans les conditions requises, soit par suite de l'activité trop faible du nickel, soit parce que la température était trop élevée, ont été hydrogénées par Darzens. En se servant d'un nickel divisé provenant d'un oxyde réduit à 250°, et en le maintenant à la tem- pérature de 1800, il a obtenu les dérivés tétrahy- drogénés. La quinoléine fournit la tétrahydroqui- noléine; la paraméthylquinoléine et ses homologues fournissent les tétrahydrures correspondants. Dans tous les cas, c'est le noyau pyridique qui fixe les quatre atomes d'hydrogène : sont CH — CH /CH® — CH* | +2H°—CH# lee H CH NT NAZH — CH? AA— Cette méthode paraît être la méthode de choix pour la préparation de ces dérivés. Les rendements sont excellents et comparables à ceux que fournissent les phénols. D'ailleurs, on récupère très aisément la base non hydrogénée. Ipatieff a apporté à cette méthode d'hydrogéna- tion une modification qui parait, au premier abord, 864 ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE assez extraordinaire. Il fait réagir l’hydrogène sur le corps à transformer sous des pressions énormes, variant de 100 à 130 atmosphères, et à des tempéra- tures supérieures à 250°. De plus, d'après ce savant, ce n’est plus le nickel ou le cuivre qui seraient les meilleurs catalyseurs d'hydrogénation, mais bien lesoxydes de ces métaux. Les rendements seraient même, dans bien des cas, supérieurs à ceux que four- nissent les métaux divisés à la pression ordinaire. On ne voit pas très bien l'avantage de cette modi- fication, étant donné que les rendements fournis par la méthode Sabatier-Senderens sont toujours excellents, à la condition d'éviter les causes d’in- succès signalées plus haut. A l'appareil simple et élégant de cette méthode, où l’on voit s'effectuer la réaction directement, Ipatieff substitue un appareil compliqué, qui doit résister aux hautes pressions, et qui, j'en suis certain, n’est pas près d'être adopté par les laboratoires. Si, maintenant, on cherche à donner une expli- cation de la réaction catalytique effectuée à l’aide de l’oxyde de nickel, on n’y arrive pas aisément. On peut bien admettre, cependant, que l’oxyde de nickel est réduit par l'hydrogène, attendu qu'il est porté à une température supérieure à 220°, et qu à cette température l'oxyde de nickel est réduit à la pression ordinaire. Il agirait ensuite à la manière du métal divisé. Quoi qu'il en soit, l’auteur a pra- tiqué l'hydrogénation de la plupart des composés chimiques. Avec l'oxyde de nickel et l'hydrogène comprimé à 125 atmosphères, le benzène et ses homologues sont transformés, vers 250°, en cyclohexanes; l’an- thracène fournit, à 270°, un mélange de tétrahydro, décahydro, et perhydroanthracène; lephénanthrène donne le décahydrophénanthrène; le fluorène, l'acénaphtène et le rétène donnent les perhydrures correspondants. Les phénols et naphtols, l’aniline, la diphénylamine, ont leurs noyaux hexagonaux hydrogénés et on obtient, avec des rendements excellents, les hexahydrures correspondants. La quinoléine se change en tétrahydroquinoléine, si l'hydrogénation n'est pas poussée à fond. Si l'on poursuit l'action de l'hydrogène, on obtient la décahydroquinoléine : CHE — CH? core” H ES NazH— CIE qui bout à 207° et fond à 45°. Ce résultat n’a jamais été atteint avec les métaux divisés. Il serait trop long d'énumérer ici toutes les réac- tions d'hydrogénation ou de décomposition qui ont été décrites par l’auteur et qui sont, d’ailleurs, cal- quées sur les réactions de mème nature produites à l'aide’ des métaux divisés. II. — TRAVAUX DIVERS. Si nous sortons du domaine des deux méthodes dont nous venons de parler, nous pouvons relever, parmi les nombreux mémoires publiés en Chimie organique, quelques travaux importants dont la plupart pourront être utilisés dans les laboratoires. Nous ne pouvons pas faire rentrer dans le cadre trop restreint de cette revue un grand nombre de travaux du plus haut intérêt, par exemple ceux de Semmler sur la constitution des huiles essentielles, ceux de Wallach sur la constitution et les synthèses des terpènes, et enfin ceux de Moureu et Valeur sur la spartéine. Nous laisserons de côté, aussi, les belles recherches sur la fenchone entreprises, quelque temps avant sa mort, par celui qui tenait auparavant celte place. Les travaux de Bouveault pouvaient, à eux seuls, alimenter une revue de Chimie organique. Sa grande modestie l’empêchait de les publier ici. $ 1. — Hydrocarbures. On sait que l'union directe du carbone et de l'hydrogène, sous l'influence de l'arc électrique, donne de l’acétylène, C'H°. Dans les mêmes condi- tions, Berthelot n'avait pu obtenir le méthane CH, et la synthèse de ce carbure n'avait jamais été réalisée par la combinaison directe des éléments. En 1897, Bone obtint de petites quantités de méthane en chauffant du charbon de sucre dans un courant d'hydrogène pur et sec. Cette expérience a été reprise par Bone et Coward, qui ont constaté la formation de grandes quantités de méthane, quand on chauffe moins d'un décigramme de charbon de sucre dans un courant d'hydrogène entre 4.100 et 1.200. Le charbon élait préalable- ment purifié par chauffage prolongé dans du chlore sec et en portant la température de 700 à 1.100. Dans deux expériences différentes, les quantités de formène obtenues ont été de 137 centimètres cubes et de 125,5, mesurés à 0° et à 760 millimètres, pour des quantités de carbone de 0 gr. 0995 et 0 gr. 092. Il se forme donc du gaz méthane dans la proportion de 73 °/,. D'après les auteurs, le reste du méthane serait perdu par une oxydation ou une décomposition inévitables, par suite de la chaleur intense des parois du tube de porcelaine dans lequel le charbon est chauffé. D'autres expériences les ont conduits à produire 422 c.c. de méthane à partir de 0 gr. 306 de charbon. La synthèse du premier carbure forménique, par union directe de l’hydro- gène et du carbone, est ainsi confirmée. On sait que les acétones aliphaliques donnent des produits de condensation bien différents suivant les conditions dans lesquelles elles réagissent. L'acétone ordinaire, par exemple, peut fournir soit ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE 865 l'oxyde de mésityle, soit la phorone, soit un carbure aromalique, le mésitylène. On pouvait prévoir que les acétones cycloforméniques, dont les analogies avec les cétones aliphaliques sont si grandes, pour- raient donner des produits de même nature el conduire à la formation de carbures polyeyeliques. En traitant la cyelohexanone, C'H"O, par l’éthylate de sodium, Wallach à pu obtenir une condensation analogue à celle qui fournit l'oxyde de mésityle. A la réaction de l’acétone: (CH CO + CHE. CO.CH* = H°0 + (CH* EC : CH.COCH*, correspond celle de la cyclohexanone : C0 [RO] arc cæ// Nc: je F one IN H 1» se VA 4 co cit CH cl C ce Nc: ca /N cn: Al | — = HO + N 4 Jcx CIE CH?) ch il Cie Au contraire, en faisant bouillir, pendant dix à douze heures, 100 grammes de eyelohexanone avec 250 grammes de méthanol et 100 grammes d'acide sulfurique, il se forme des cristaux et une huile. L'huile est constituée par ur corps formé par con- densation de 3% molécules de cyclohexanone avec départ de 2 molécules d'eau. Elle est identique à la phorone. Les cristaux, qui fondent à 2329, ne con- tiennent plus d'oxygène. Ils résultent de la conden- sation de 3 molécules de cétone avec perte de 3 molécules d’eau : CH° À CHE SN 2 CHE )CH cæ/N cu cm ces ca ie | lie ca? ° co// Nc: NU de = 0 + I x ; CHIC De RC N ARS CH: HE. AE c'\| Jen: CH° A ce carbure polyphénylique, Wallach a donné le nom de dodécahydrotriphénylène. Il se produit par une réaction identique à celle qui donne le mésitylène, réaction qui sera sans doute susceptible d'être généralisée avec les différentes cyclohexa- nones que l’on obtient si aisément aujourd'hui par hydrogénation directe des crésols et homologues à l'aide des métaux divisés. Elle conduit à la forma- tion de carbures inconnus jusqu'à ce jour. S 2. — Alcools. Le nombre des méthodes synthétiques qui conduisent à des alcools s'accroît constamment. Les chimistes cherchent à produire des alcools par des voies simples et aisées, et à obtenir de très bons rendements. Les belles synthèses de Grignard, de Bouveault et Blanc Guerbet à montré, dans ces derniers temps, que les sont devenues classiques alcools primaires ou secondaires de la série grasse ou aromatique, chauffés avec les alcools sodés de même nature ou de nature différente, fournissent des alcools plus condensés, primaires ou secon- daires. La méthode est d'une très grande géné- ralilé. En chauffant ensemble l'alcool propylique et son dérivé sodé, on forme le méthyl-2-pentanol-1 selon la réaction : CH°.CH?.CH°OH + CHS.CH?.CH2ONa — NaOH + CH*.CH®.CH*.CH.(CH). CH:OH. L'alcool éthylique, chauffé avec l'œnanthylate de sodium, fournit l'alcool nonylique normal : CH*.CH°OH + CH* (CHE) CHEONa —NaOH + CH*(CH°}°CHE.CH?.CH2OH. Les alcools secondaires produisent une réaction identique. Ainsi, l'alcool isopropylique, chauflé avec son dérivé sodé, fournit l'alcool diisopro- pylique : CH°.CHOH.CH* + CH*.CHONa.CH® = NaOH + CH*.CH.(CH:). CH?.CHOH.CHS. Pendant la réaction, ce dernier réagit partielle- ment sur le dérivé sodé en présence pour donner un alcool triisopropylique : CH°.CH.CH?.CHOH.CHS + CH°.CHONa.CH® CH* = NaOH + CHS.CH.CH®.CH.CH°CHOH. CIF. CH CE L'alcool butylique secondaire fournit, de même, l'alcool dibutylique ou méthyl-3-heptanol-5, à odeur de menthe, et de l'alcool tributylique. L'alcool caprylique se comporte de la même manière en présence de son dérivé sodé. Et l’on peut formuler cette réaction générale de la manière suivante : CrH2n+10ONa + CoH2+10H = NaOH EL Cr+rH2+r)+10H. Les alcools aromatiques et leurs dérivés sodés, tels que l'alcool benzylique et le benzylate de sodium, s'unissent aussi pour donner le diphé- nyléthanol secondaire C'H°.CH°.CHOH.C'. Ce dérivé sodé aromatique, condensé avec les divers alcools gras, fournit les alcools aromaliques à chaines de plus en plus complexes : réaction pré- cieuse pour la synthèse de ces alcools. La formation de tous ces alcools condensés peut être ramenée à l'élimination d'une molécule d'eau entre l’oxhydrile de l'une des molécules des alcools réagissants et l'hydrogène du groupe méthyle voi- sin de l'oxhydrile de l’autre molécule. Lorsque les 866 ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE deux alcools secondaires différents sont en pré- sence, l'élimination de l’eau se fait aux dépens de l'oxhydrile de l’alcool le plus riche en carbone. L'emploi du sodium permet de réaliser aussi la synthèse des alcools tertiaires. En l’opposant à un mélange d’un iodure alcoolique et d’une cétone, il y à production d'un alcool. Il est probable que, dans cette réaction, il se forme d'abord un composé intermédiaire, un dérivé organique du sodium qui réagit ensuite sur l’acétone : RI+-Na° — RNa + Nal: RNa + R'COR!" — RR'R'CONa, que l’eau change en alcool tertiaire RR'R"CONH. Mais on concoit que, par suite des réactions secon- daires qui se font, soit par action du sodium sur l'iodure alcoolique, donnant naissance à un carbure forménique RR, soit par la formation d'acétones sodées, ou de carbures éthyléniques provenant de la déshydratation des alcools formés, le rendement en alcool tertiaire ne doit pas être très élevé. Il ne dépasse jamais, en effet, 10 °/,. On peut augmenter ce rendement en modifiant légèrement cette méthode. Bukton avait indiqué, en 1859, que le sodium réagit sur les dérivés organométlalliques du mer- cure pour donner des dérivés alcoyl-sodés, très instables. La formation de ces organosodiques est cependant démontrée par ce fait que les composés organo-mercuriques, en présence de sodium, réagissent sur les cétones el sur les éthers-sels pour donner des alcools tertiaires, et aussi sur les aldé- hydes pour former des alcools secondaires, tandis qu'ils ne réagissent pas lorsqu'ils sont opposés directement à ces mêmes corps (Schorigin). Ici l’in- fluence de l’iodure alcoolique ne se manifeste plus, et l’on évite la formation prépondérante du carbure forménique R-R. Pour effectuer ces synthèses, on dissout le composé organométallique du mercure HgR’, et le composé oxygéné, aldéhyde, cétone ou éther-sel, dans l’éther absolu, et on ajoute le sodium par petites portions, en même temps que l'on fait passer dans le ballon un courant d'azote ou d'hy- drogène. La réaction se manifeste avec violence. Il est nécessaire de refroidir fortement le ballon dans lequel réagissent les composés. On a préparé ainsi : le diphényléthylearbinol (CH) C*H°.COH, avec un rendement de 40 °/,, le phényldiéthylcarbinol (rend. 25 °/,), etc. Cette méthode n'est pas aussi avantageuse que celle de Grignard. Mais elle présente une curiosité inat- tendue. Lorsqu'on dirige dans le mélange de sodium et d'organo-mercurique, dissous dans l'éther, un courant de gaz carbonique, on forme les acides correspondants. Les mercures-diméthyle, diéthyle, diisoamyle, conduisent aux acides acétique, pro- pionique et caproïque. Lorsqu'on remplace comme dissolvant l’éther par le benzène, il se forme une quantité très notable d'acide benzoïque, C°H°.CO°H. Cette production de l'acide à partir du benzène peut s'expliquer par la série des réactions sui- vantes : HgR? + 2Na— 2NaR + Hg: 2NaR + 2 CSH°— 2 RH -- 2 CSHS Na; 2 C'H°Na 2 CO? —2 GHSCO!Na. En changeant le benzène par les carbures homo- logues, toluène, xylènes, éthylbenzène, le grou- pement CO*? se fixe dans la chaîne latérale. On a ainsi une méthode de synthèse des acides benzène- acétique et homologues : C'H°CH® —> C‘H*CH2COPH : CH° CH CSHs — CH: Ncxs NCHECOPH : C°H5.CH?.CHS —> C‘H5.CH°.CH°:CO°H: A côté de ces méthodes synthétiques qui con- duisent à des alcools saturés, nous devons rappeler quelques travaux parus sur la formation des alcools incomplets. On sait que le meilleur moyen d'obtenir ces alcools consiste dans l'emploi des composés organo-mélalliques du zinc. Saytzeff a condensé l'iodure de zinc-allyle avec les cétones cyclohexa- niques (menthone, cyclohexanone, méthyleyclo- hexanone). Il à trouvé que l’action est analogue à celle qui s'exerce sur les acétones aliphatiques. La menthone fournit l'alcool menthylallylique, Eb. 245°; la cyclohexanone donne l'alcool cyelo- hexylallylique, bouillant à 188°, et la méthyley- clohexanone conduit à l'alcool méthyleyelohexylal- lylique. L'oxydation de ces alcools par le perman- ganate de potassium en solution neutre fournit les glycérines correspondantes. L'emploi des organomagnésiens n'a pas permis de préparer jusqu'ici les alcools renfermant le groupe allylique ou un groupement éthylénique. Javorsky a décrit une modification qui conduit au résultat cherché. Il fait agir sur le magnésium, préalablement attaqué par le bromure d’allyle, puis soigneusement lavé à l’éther, un mélange de cétone et de bromure d’allyle. Dans ces conditions, la réaction se produit normalement. Le chlorure ou bromure d’allyle fournit, avec l'acétone ordi- naire, l’aliyldiméthylcarbimol (C°H°)(CH°}COH ; l'a- cétophénone conduit à l’allylméthylphénylearbinol (C'H°) (C'H°) (CH°) COH ; la benzophénone, la men- thone, le camphre, la pulégone, le pipéronal, le furfurol, donnent les alcools allyliques correspon- dants. Le rendement est, dans tous les cas, supé- rieur à 50 °/, et peut atteindre jusqu'à 65 °/,. Réformatsky a modifié légèrement la méthode de Saytzeff. Au lieu de faire réagir les éthers-sels ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE sur l'iodure de zinc-allyle, il emploie les éthers halogénés. Le chlorocarbonate d'éthyle : C'H'O. COCI fournit, avec l'iodure de zinc-allyle, le triallylcar- binol (C'H°)COH, bouillant à 194°. Le chloro ou bromacétate d'éthyle, CH°CI.CO'CH, réagissant sur ZniC'H°, conduit à l’allylméthyldiallylcar- binol. La réaction a lieu suivant les équations sui- vantes : 92al CH°C1.COOC?H5 —- CH. Zn.1 — CH?CI.C—OC*H ; Sans O7nl CHECI,C—OC?H° + C'H5.Zn.1 L NS OZn! CS /| = Zn + CH°CIC—C'H5 ; RE Nos OZn] I CH? N V2 CHC1.C—C'H5 + C'H5.Zn.l—Zn< + | C— CH : Nc SCC SCGHE -O7Znl I CH sus 4 ren : 7 En rIS 71 C'H5,CH?.C— CH + HO = Zn + C'H°.CH?.COHK é Nens OH CSH° L'«-bromopropionate d'éthyle, l'«-bromobutyrate d'éthyle et le bromoisobutyrate d'éthyle réagissent de la même manière pour donner des alcools incomplets. $ 3. — Xthers. Depuis longtemps, on sait que l'éther ordinaire peut fixer deux unités chimiques, grâce aux valences supplémentaires de l'oxygène. Schulzen- berger montra le premier que l’action du brome sur l’oxyde d'éthyle fournit un perbromure, qui, par agitation avec un excès d’éther, forme le dibro- mure (C‘H°)OBr°. Ce composé a été obtenu à l’état pur en 1906, par Mac Intosh. C'est un liquide huileux épais, jaune rougeâtre, non miscible à l'éther, mais très soluble dans le chloroforme, l'alcool, l'éther acétique. Il est stable et ne perd pas de brome. Il réagit vivement sur le zinc, le magnésium, le fer, le nickel et le cobalt. Par contre, son action sur les alcalis et l'iodure de potassium est très faible. En présence d'un organomagnésien C*H°Mgl, il fournit du butane : I + (CH5)20 + CHU, (CH POBr° + 2 CH5Mgl — 2 Mg d N Br L'iodure de propylmagnésium fournirait, de même, de l’hexane. On à préparé de la même manière les bromures des autres éthers-oxydes : (CH°)0Br, (C‘H"ŸOBr°, (CH°) (C'H°)0Br°. On ajoute peu à peu l’éther anhydre à du brome pur et sec contenu dans un ballon refroidi et muni d'un réfrigérant à reflux. La réac- tion se fait avec dégagement de chaleur. On cons- tate que la chaleur de formation du dibromooxyde d'éthyle, 9 cal. 13, est supérieure à la chaleur de #67 formalion du dibromooxyde d'amyle, 8 cal, 75. Le brome n'est pas le seul corps qui se fixe sur les éthers. Les hydracides s’y combinent molécule à molécule, pour donner des composés se solidi- fiant à basse température et dont on à déterminé les points de fusion : CH#}0 HI, fond à — 150 (CH5)°O0.HBr, NE 20) (C*H5)0.HI, — —15 (C?H5}0.NHBr, — —AÙ CH? >0, HI, — —92920 C2H5 CH O.HBr, — —400, c'1/ La méthode générale de préparation des éthers arsénieux et antimonieux consiste actuellement dans la double décomposition entre un alcoolate alcalin et le chlorure d'arsenic ou le chlorure d'an- timoine. Lang, Mac Key et Gortner viennent de décrire une nouvelle méthode de préparation de ces éthers, par éthérificalion directe de l'anhydride arsénieux ou de l’anhydride antimonieux. On chauffe l'alcool au contact de l’anhydride As°O* ou Sb°0°, en employant un condenseur à reflux, muni d’un tube Soxhlet contenant du sul- fate de cuivre anhydre qui enlève l’eau formée dans la réaction : As?05 E 6GROH—2As(0R}) + 3 H°0: Sb?03 + 6ROH = 2Sb (OR) + 3 H°0. Sans la présence du sulfate de cuivre, il s'éta- blirait un équilibre et la production d'éther serait très faible. Sauf dans le cas de l'alcool éthylique, dont l’affinité pour l’eau est très grande, les rende- ments en éther sont très satisfaisants et peuvent atteindre 66 °/,. Les éthers des alcools aliphatiques, aromatiques, et des phénols ont été préparés par cette méthode : Rendement : 34 °/o AS OCR RER — 56 AS (OC EEE — 58 ASSOCIES — 66 As (OCSH#CH*)* 0. m. p. As(OC!H7);. Tous ces éthers, qui ont été préparés en grande quantité, se décomposent par l'eau. Ils sont capa- bles de dissoudre des proportions considérables d'anhydride arsénieux. Les éthers aliphatiques de l'acide antimonieux sont aussi tous liquides. Ils se décomposent quand on les chauffe à la pression ordinaire. Les éthers aromatiques sont solubles, sauf celui du métatolyle. Comme les éthers arsénieux, l'addition d'eau les décompose en anhydride antimonieux et alcool, ce qui indique les conditions de leur préparation. 868 Si les mercaptans, RSH, sont aisés à obtenir par différentes méthodes, il n’en est pas de même des ‘ dérivés séléniés R$SeH, auxquels on donne le nom de séléniomercaptans. L'action du soufre sur les organo-magnésiens conduit dans bien des cas à la formation de mercaptans avec de bons rendements; le sélénium réagit assez mal. Aussi les composés séléniés sont-ils peu connus. Tchugaeff à imaginé une méthode pratique de préparation de ces corps, qui consiste à faire réagir les dérivés halogénés alcooliques sur une solution de séléniure de sodium SeNa’, obtenue en saturant une solution alcoolique d'éthylate de sodium à 10 °/, par l'hydrogène sélénié. La combinaison s’effectue au bain-marie, dans une atmosphère d'hydrogène. L'huile obtenue après séparation par l'eau est dissoute dans la soude à 4 °/,. La solution alcaline est lavée à l'éther et le mercaptan est mis en liberté par addi- ton d’acide acétique. On la fracltionne dans une atmosphère d'anhydidre carbonique ou d'hydrogène. Les séléniomercaptans sont des huiles lourdes, incolores, insolubles dans l'eau. Ils sont doués d'une odeur repoussante. À la manière des mer- captans, ils fournissent avec les sels de mercure et des métaux lourds des séléniomercaptides colorés (RS) Hg. Au contact de l'air, ils s'oxydent et se transfor- ment en diséléniures : 2 C*H5SeH O — H°0 + CH5.$Se — Se.C°H5. Ils réagissent sur les organo-magnésiens de la même manière que les alcools : RSeH -E RMgl = RSeMgl + R'H. Les séléniures R°Se ont été obtenus par action des dérivés halogénés alcooliques sur les sélénio- mercaplans dissous dans une solulion alcoolique d'éthylate de sodium. Le rendement est quantitatif: RCI + R'SeH — HCI+ RSeR'. Les diséléniures consécutifs R.Se — Se.R, dont nous avons vu plus haut la préparation, ne sont pas les seuls que l’on puisse prévoir. On peut con- cevoir aussi la formation de diséléniures de la forme RSe(CH?}"SeR. On les obtient à partir des dérivés sodés des séléniomercaptans, sur lesquels on fait réagir les dibromures (CH°}"Br* : CHFBr.CH?.CH°Br + 2 C?H5Se Na — 2 Na Br + C?H5Se — (CH?) —SeC°H5. Les séléniures R'Se et les diséléniures non consécutifs sont des liquides incolores, distillant sans décomposition. Les diséléniures consécutifs, R.Se— Se.R, sont des liquides de couleur jaune rouge, distillant en se décomposant partiellement, même dans le vide. | ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE $ 4. — Acétones. L'emploi de l'amidure de sodium en Chimie organique à déjà donné lieu à un grand nombre de travaux. MM. Haller et Bauer ont basé sur cet emploi un procédé général de préparation des acétones aromatiques. Il consiste à greffer sur l'acétophénone, C°H°.CO.CH*, des résidus alcoo- liques de plus en plus complexes. Pour cela, on dissout la cétone à alcoyler dans la benzine sèche et pure, et l'on ajoute à cette solution la quantité équimoléculaire d'amidure de sodium finement pulvérisé. Le ballon est ensuite muni d'un réfri- gérant à fermeture à mercure et d'un tube à brome. On fait bouillir au bain-marie. L'amidure de sodium entre en réaction et il se dégage de l'ammoniac, que l'on recoit dans l'acide sulfurique titré. Suivant la cétone employée, la durée de la réation varie entre 1/2 et 3 heures. C'est dans cette solution limpide que l’on fait écouler l’iodure ou le brobume alcoo- lique que l’on veut greffer. La précipitation d'iodure de sodium détermine la réaction. Les premiers termes réagissent vivement sur les cétones sodées, et la substitution s'effectue en peu de temps. Avec les iodures supérieurs, on chauffe trois à dix heures. Lorsque la réaction estterminée, | le produit est traité par l’eau; on sépare la benzine par distillation et l'on rectifie l'acétone sous pression réduite. On peut greffer ainsi, 1, 2 ou 3 radicaux alcoo- liques sur l’acétophénone. Les auteurs ont préparé par ce procédé un grand nombre de cétones, presque toutes inconnues jusqu'ici : le triméthyl- acétophénone ou pivalylbenzène, C°H°COC(CH°)'; l'éthyldiméthylacétophénone, C'H°COC(CH*} (CH) ; la propyldiméthylacétophénone, la triéthylacétophé- none, l'isopropyldiméthylacétophéuone, l'undécyl- phénylcétone CSH*COCH?(CH*)"CH*, la diméthylun- décylphénone, la benzylacétophénone et la diben- zylacétophénone, C°H°CO.CH(CH*°C'H"}, ete. Toutes ces cétones possèdent une réaction géné- rale importante. Lorsqu'on les chauffe pendant 3 à 4 heures avec de l'amidure de sodium (1 mol. 1 2 pour 4 mol. d'acétone), et en milieu benzénique ou toluique contenant un peu d'eau, elles se scindent nettement en benzène et amides selon la réaction : R CH5.CO.C—R! + AzH°Na + H° NR" R\ — HS + R'—C.COAZH? + NaOH. / On a là une méthode de préparation des am1des trialcoylacétiques. Ce sont des feuillets nacrés-se sublimant rapidement, solubles dans le benzène, sauf le premier terme. Les termes supérieurs ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE possèdent des points de fusion plus bas que les termes inférieurs. Ces amides résistent à l’action hydratante de la potasse; mais, par action du nitrite de soude et de l'acide sulfurique ou du sulfate de nitrosyle {méthode Bouveault), on les transforme en acides R.R'R'C.COI. Ces acides trialcoylacétiques sont en général des liquides mobiles, dont l'odeur rappelle peu celle des acides gras. Ils sont à peu près insolubles dans l'eau, sauf l'acide pivalique (CIP)C. COON, et ils distillent sans décomposition à la pression ordinaire. Les acétones diaryliques, telles que la benzophé- none, fournissent une réaction identique aux trial- coylacétophénones. Elles se scindent en milieu organique qui n’est pas absolument anhydre, et en présence d'amidure de sodium, en fournissant l’'amide aromatique correspondante. Toutes ces réactions, du plus haut intérèt, méri- taient d'être signalées ici. $ 5. — Aldéhydes. MM. Guyot et Gry ont fait connaitre récemment un mode intéressant de préparation des aldéhydes. Ils ont constaté que les phénols et les amines aro- matiques jouissent de la propriété de se condenser avec une molécule d'un éther «B-dicétonique quel- conque, la condensation s’effectuant sur l’atome de carbone cétonique « de ces molécules, pour former des éthers acid ylphén ylglycoliques : R.CO oH Sue R.CO.CO.CO2R' + CH, R" = \ s R'CoH4 Nco:r' capables de se seinder au contact de certains réactifs et de donner les aldéhydes correspondantes R'C'H°.CHO. Il suffit souvent, pour produire cette scission, de chauffer légèrement ces éthers avec un excès d'acide sulfurique concentré. Lorsque l’aldéhyde qui prend naissance ne peut supporter sans alté- ration le contact de l'acide concentré, on parvient au même résultat en passant par l'intermédiaire des acides phénylglyoxyliques correspondants R''.C°H°. CO.CO'H ; ces composés, qui se forment par simple ébullition des éthers acidylphénylglycoliques avec une solution aqueuse d’un sel de cuivre, se trans- forment quantitativement en aldéhydes par perte de CO* au contact de certains catalyseurs, en par- ticulier la diméthyl-p-toluidine. Enfin, on peut encore traiter l’éther acidylphénylglycolique par un excès de potasse aqueuse. Bien que n'appartenant pas à la classe des éthers 5-dicétoniques, les éthers mésoxaliques CO*R.CO. CO'R peuvent les remplacer dans les synthèses pré- cédentes, fait important, car les éthers imésoxa- #59 liques sont beaucoup plus accessibles que la plupart des éthers 486-dicétoniques. MM. Guyot et Gry ont ainsi préparé un grand nombre d'aldéhydes nouvelles ou peu connues. Ils ont appliqué leur méthode, en particulier, à la préparation de la vanilline, qu'ils ont obtenue avec des rendements de 70 à 80 °/, en suivant la marche ci-après : condensation du gaïacol avec les élhers mésoxaliques et les éthers 48-dicétoniques; lrans- formation des produits de condensation en acide vanilloylcarbonique; passage à la vanilline par chauffage de l'acide en présence de diméthyl-p- toluidine. On appréciera toute l'importance de ce résultat si l'on se rappelle les difficultés ren- contrées jusqu'alors dans vanilline par synthèse directe : médiocrité rendements, résinification abondante des produits en cours de traitement, formation simultanée d'al- déhydes isomères d'une séparation délicate, ete. les préparations de des $ 6. — Acides. Dans ce paragraphe, je signalerai une réaction assez curieuse que fournissent les acides alipha- tiques et aromatiques lorsqu'on les soumet à l'ac- tion de l'acide sulfurique concentré à chaud. Les acides primaires, RCH*CO*H, ne subissent pas de décomposition notable. Mais les acides secondaires, RR'CH.CO?H, et les acides tertiaires, RR'R"C.CO'H, perdent de l’oxyde de carbone gazeux. La réaction nécessite souvent pour se produire une lempéra- ture assez élevée pour les premiers; elle se fait, au contraire, à basse température avec les acides ter- tiaires. L'acide diphénylacétique (C°H°)CH.CO'II, sous l'influence de l'acide sulfurique à 7°/, d'anhydride, donne, à la tempéralure ordinaire, l'oxyde de benzhydrile : CSH° ÊCH.COPH — CO + (CH CH®O, L'acide triphénylacétique (C°H°)?C.CO'H, donne avec l'acide sulfurique concentré le triphénylear- binol (C°H*)*COH. La décomposition de l'acide triméthylacétique (CH5)'C.CO'H fournit l'alcool tertiaire (CH°}COH, qui se déshydrate immédiatement en donnant l'iso- butylène CH. Les chlorures d'acides tertiaires subissent une destruction analogue sous l'influence de la chaleur. Ils perdent de l’oxyde de carbone très facilement. Le chlorure de triphénylacétyle, (G*H°)COCI, chaufré à 170°, donne le triphénylchlorométhane. Le chlo- rure de paratolylidiphénylacétyle, (C°H*CH°"){CH°F C.COCI, perd à la fois CO et HCI, et fournit un car- bure éthylénique (Bistrzycky). L'acide oxalique étant un produit abondant et 870 que l'on peut obtenir très pur, il semblait que ses dérivés devaient être préparés très aisément. Or, le chlorure d'oxalyle, COCI.COCI, n'a jamais été obtenu pur. La réaction du perchlorure de phos- phore sur l'éther oxalique,effectuée sansprécaution, donne un chlorure souillé d'oxychlorure de phos- phore. En outre, les rendements sont faibles à cause de la production de composés complexes. Staudinger prépare ce chlorure en laissant en con- tact, d’abord à 0°, puis à la température ordinaire, 90 grammes d'acide oxalique sec et 400 grammes de perchlorure de phosphore mélangés intimement. Quand le mélange est devenu liquide, on fractionne. Le rendement est de 45 à 50 ?/,. La formation du chlorure d'oxalyle n’est pas progressive et ne sem- ble pas passer par la phase hémichlorure. C’est un liquide bouillant à 64° et qui se solidifie à — 12° en cristaux incolores. L'hydratation ne régénère pas de l'acide oxalique, mais le scinde en CO, CO? et HCI. En vapeur, il se décompose en oxyde de carbone et chlorure de carbonyle COCF. Le chlo- rure d'aluminium produit la même décomposition en solution sulfocarbonique. Le chlorure de malonyle, COCI.CH*.COCI, son homologue supérieur, se forme directement en chauffant l'acide malonique avec du chlorure de sulfuryle. Lorsqu'on fait agir sur ce chlorure, en solution dans l'éther, des oxydes, comme Ag°O, Zn0O ou PbO, on obtient du sous-oxyde de carbone C'O*: COCI.CHE.COCI + Zn0 — ZnCE + H?0 + CO : GC: CO. La formation de ce sous-oxyde de carbone repose vraisemblablement sur la production d’anhydride malonique, qui perd ensuite de l’eau. Le chlorure de bibromomalonyle, COCI.CBr*.COCI, que l’on obtient par action du perchlorure de phos- phore sur une solution éthérée d'acide dibromo- malonique, traité, en solution dans l’éther ordinaire ou dans l’éther acétique, par des copeaux de zine, fournit le sous-oxyde de carbone avec un excellent rendement. On se trouve donc en possession de deux nouvelles méthodes de formation du sous- oxyde de carbone C*0?. De cette formation du sous-oxyde de carbone, nous devons rapprocher la production de composés nouveaux dont le type le plus simple est le cétène CH°:C:0. De même que, théoriquement, le sous- oxyde de carbone C'0° dérive d’un acide bibasique, l'acide malonique, par déshydratation, de même le cétène CH?:CO dérive d'un acide monobasique, l'acide acétique, par perte d'eau. Les deux réac- tions théoriques sont les suivantes : CO.0H.CH2.C0.0H—2H° 0 + CO : CG: CO CH°CO.O0H = H°0 + CHE : CO, Or, à la synthèse du sous-oxyde de carbone, à ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE partir du chlorure de dibromomalonyle, corres- pond une synthèse identique, à partir du bromure de bromoacétyle, CH°*BrCOBr. Ce bromure, mis en solution dans l’éther ordinaire ou dans l’éther acé- tique, et traité par des copeaux de zine, donne le cétène : CH°BrCOBr + Zn — ZnBr° + CH? : CO, Le rendement est de 12 à 13 °/, du rendement théorique. Le chlorure de chloroacétyle ne réagit pas dans les mêmes conditions (Staudinger). Wilsmore à signalé un mode de préparation du célène qui consiste à faire passer l’anhydride acé- tique sur un fil de platine incandescent. Le célène est un gaz qui peut être entrainé par l'hydrogène et condensé dans l'air liquide, d'où on le sépare par distillation fractionnée de l’éther acétique. Il bout à — 56° et fond à — 1512. Son odeur est insupportable et rappelle à la fois celles du chlore et de l'anhydride acétique. Il est toxique. A l’état gazeux, liquide ou solide, il est incolore comme le sous-oxyde de carbone el se distingue par là des autres cétènes. Le cétène se polymérise facilement, soit seul, soit en présence de sels ou d'acides, tels que ZnCGF, FeCl', SO‘H°. Le produit ainsi polymérisé possède une odeur très piquante, et il accompagne toujours le cétène pendant sa formation. Le cétène ne s'oxyde pas au contact de l'air. Mais il réagit énergiquement sur l’eau en donnant de l'acide acétique : CH?:C0 — H°0 — CH*.CO'H. En présence d'alcool amylique, il forme de l’acé- tate d’amyle, CH°.CO”.C°H". Les solutions éthérées d'aniline fournissent de l’acétanilide. Cette réac- tion constitue une méthode de dosage du cétène, puisque l’on peut peser l’acétanilide formé. Il fixe enfin le brome pour régénérer le bromure de bro- moacétyle. On voit que le cétène se rapproche par beaucoup de ses propriétés du sous-oxyde de carbone de Diels, qui est incolore, non oxydable, toxique, et facilement polymérisable. Mais, landis que le sous-oxyde de carbone n'a pas d'atomes d'hydrogène dans sa molécule, le cétène en possède deux, et l’on pourra prévoir l'existence de cétènes subslitués. De fait, ces com- posés ont été isolés. Les uns dérivent de la substi- tution d'un atome d'hydrogène par un radical ali- phatique ; ce sont le méthylcétène et l'éthyleétène; les autres sont des cétènes disubstlitués par des radicaux aliphatiques ou aromatiques : ce sont le diméthylcétène, le diéthylcétène et le diphényl- cétène. La préparation de ces cétènes est toujours la mème. Elle consiste à faire réagir les bromures ALPH. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE ORGANIQUE 871 d'acides bromés-sur les copeaux de zinc en pré- sence d'éther : CH, CHBr. COBr + Zn — ZnBr° + CHE, CH : CO : CH, CH®, CHBr. COBr + Zn — ZnBr°-+ CH*, CHÈCH : CO : cH° S GBr.COBr + Zn —ZnBr° + (CH9)2C : CO ; cu” (C‘H5)2CCICOCI + Zn = ZnCl° + (C'HS)}4C : CO ; le chlorure diphénylechloracétique réagit parfaite- ment en solution dans un mélange d’éther et d'alcool absolu. Le diméthylcétène et le diéthylcétène ont été préparés aussi en détomposant par la chaleur, jusqu'à 180°, les anhydrides diméthylmalonique et diéthylmalonique : co (eee DO — CO* + (C'H5)°C: CO. Le diméthylcétène et le diéthylcétène sont des liquides jaunes, bouillant respectivement à 34% el 91° sous la pression atmosphérique. Ces cétènes mono et disubstitués sont, comme le cétène, très facilement polymérisables, même en solution éthérée, ce qui diminue le rendement. Ils se combinent avec l'aniline pour donner des acéta- nilides substitués. L'eau, l'alcool, la phénylhy- drazine, les transforment en acides, éthers et phé- nylhydrazides correspondants. Les différences qui existent entre les cétènes monosubstitués et les disubstitués sont dues à l’action de l'oxygène et à l’action des bases ter- tiaires. Comme le cétène, les cétènes monosubsti- tués ne s'oxydent pas à l'air et ne se combinent pas aux bases tertiaires ‘quinoléine, quinaldine, acridine, pyridine, etc.). Les cétènes disubstitués s'oxydent, au contraire, au contact de l'oxygène de l'air, et se combinent avec les bases tertiaires, à rai- son de deux molécules de cétène pour une molécule de base : la diméthylcétène-quinoléine fond à 81°; la diméthylcétène-quinaldine fond à 4119, etc. Enfin, ils fixent la quinone et la benzylidène-aniline pour donner un laclame : (CHP}C : CO + CH. CH : AzC‘HS — (CH3}C — CO co. ln — AzC'HP, réactions que ne donnent pas les cétènes mono- substitués. Le diphénylcétène (C'H°)'C:CO est un liquide distillant à 446° sous 12 millimètres et à 265°-270° à la pression ordinaire, en se décomposant partiel- lement. Comme les cétènes disubstitués alipha- tiques, il s'oxyde au contact de l'air. Dans cette oxydation, il y a production de benzophénone. Il ne se polymérise pas. Il jouit des autres pro- priétés des cétènes disubstitués : il fixe de l’eau à l’ébullition pour donner l'acide diphénylacétique; il fixe le brome, l'acide chlorhydrique pour donner le bromure de l'acide diphénylbromacétique et le chlorure de l'acide diphénylacétique. L'aniline et les bases organiques, quinoléine, acridine, quinal- dine, etc., s'unissent à lui. Une solution éthérée de quinone, ajoutée à une solution de diphénylcétène dans l’éther de pétrole, fournit une lactone du diphénylcarboxyméthyl- quinol : CH CH CH CH Pi — — (C'H5)C : CO + COK DCO— (CH? G—C | )' 00; CR CH ch CHAR qui, chauffée dans le vide, perd CO* et donne le diphénylquinométhane : CH CH (CSH5)?C : « Co: CH CH Ce diphénylcétène se prête à de nombreuses réactions synthétiques qu'il n'est pas possible d'énumérer ici. J'ai voulu simplement mettre en évidence l'existence de corps assez curieux et nou- veaux en Chimie. Alph. Mailhe, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de l'Université de Toulouse. BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Lebon (Ernest), Agrégé de l'Université, Correspon- dant de l Académie royale des Sciences de Lisbonne. — Savants du jour : Emile Picard. — 1 vol. 1n-8° de 80 pages. (Prix : 7 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. La présente monographie, depuis longtemps attendue, continue brillamment la série des Savants du jour. C'est avec le plus vif intérêt qu'on lira la biographie de M. Emile Picard, avec le plus grand profit que l’ou consultera la bibliographie de ses Œuvres. Il est inutile de dire, dans cette /tevue, la haute et exceptionnelle valeur des travaux de l'illustre savant, dont la plupart ont apporté à la Science une contribution définitive. Mais juger M. Emile Picard sur ses œuvres mathéma- tiques, c'est le connaitre insuffisamment. En quelques phrases brèves, M. Lebon a dit excellemment le charme de l'homme, l'indépendance de son caractère, et cette variété d’études et de connaissances qui fait de l’é- minent Président de l'Académie des Sciences l’un des premiers esprits de notre époque. Brillouin (M.), Professeur au Collège de France. — Stabilité des aéroplanes ; surface métacentrique. 1 vol. in-4° de 79 pages, avec fiqures. (Prix : 5 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Formée par la réunion d'articles publiés dans la Revue de Mécanique et dans les Comptes rendus de l'Académie des Scrences, la brochure de M. Brillouin remonte presque, quant à la substance, à 1905. Si elle n'a pas l'attrait de la nouveauté, si elle est connue déjà de tous ceux qu'intéresse l'étude scientifique des pro- blèmes de l'aviation, elle n’en reste pas moins l'un des rares travaux sérieux qu'on possède sur un sujet où la théorie progresse infiniment moins vite que la pratique. L'auteur n’envisage que des surfaces planes, et l’on sait, entre autres, d’après les travaux du Laboratoire de Koutschino, que la notion de plan équivalant à une surface arquée, tout au plus admissible pour la gran- deur de la poussée, est absolument inadmissible au point de vue de la stabilité : cela limite donc la portée de son étude, comme de bien d’autres, encore qu'ac- tuellement on tende de plus en plus à diminuer la cour- bure des ailes d’aéroplanes. De plus, il prend pour point de départ de la loi théorique de Rayleigh relative à un plan d'envergure infinie dans le sens perpendiculaire à la vitesse. Mais il importe de signaler que les cons- tructions et les plans de calculs numériques s'adapte- raient sans peine à toute autre loi de résistance, et c'est précisément par là que le Mémoire de M. Brillouin gardera toujours de la valeur. Considérons un système de deux plans dont les bords el l'intersection sont perpendiculaires au vent relatif; les résultantes de l’action du vent enveloppent une « courbe métacentrique » dont les points jouent le rôle de points d'application des pressions dans les petites oscillations. Aussi y a-t-il intérêt, pour l'étude de la stabilité au tangage, à construire cette courbe, à en rechercher les singularités, les propriétés, les varia- tions de forme selon la direction du vent et l'inclinaison mutuelle des deux plans. C'est ce que fait l’auteur : l'examen géométrique des propriétés de la courbe métacentrique et de son rôle est suivi d'une étude analytique très détaillée. La forme qui correspond à deux plans peu inclinés l'un sur l'autre et très inégaux en surface, et qui possède quatre rebroussements, est la BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX plus importante en vue de l'application aux aéroplanes. La courbe de ce dernier type est utilisée pour déter- miner les limites de stabilité dans le cas d'oscillations extrêmement lentes, pour fixer les conditions de des- cente en air calme sans moteur suivant une route aussi horizontale que possible, et celles de moindre résis- tance à la marche horizontale avec moteur. Ces considé- rations conduisent à deux schémas avantageux aux- quels paraissent répondre les dispositifs de Voisin et de Wright. M.Brillouinse propose,enfin,de formuler desprincipes de construction et de manœuvre del'aéroplane sans mo- teur et avec moteur. Il se trouve conduit à des règles très précises qu'il faudrait signaler toutes, marquant notamment comment doivent se produire les déforma- tions de manœuvre pour que les modifications d’allure ou d’attitude se fassent avec continuité, sans oscilla- tions. Nous en retiendrons d'abord la convenance qu'il y à à placer le centre de gravité de manière à avoir une attitude stable unique (alors qu'il peut y en avoir deux ou trois), et ensuite la nécessité, chez le pilote dépourvu de points de repère, d'une sensibilité spé- ciale aux accélérations angulaires pour obvier instan- tanément aux perturbations qui en résultent : cette acuité dessens peut d'ailleurs êtresuppléée, parexemple, à l’aide du gyroaccéléromètre très délicat, à indications instantanées, imaginé par l’auteur. Nous nous bornerons à cet aperçu : ce n'est pas le lieu de faire une étude critique. Mais, quoi qu'il advienne des résultats expérimentaux nouveaux, si quelques développements ne présentent plus qu'un intérêt'spé= culatif, il faudra conserver du présent Mémoire des idées fécondes et des méthodes précises. A. BOULANGER, Répétiteur à : Ecole Polytechnique. Blancarnoux (Paul), Zngénieur civil. — Théorie et pratique du Chauffage par la vapeur, industriel et domestique. — 1 vol. in-8° de 296 pages avec 52 figures. (Prix : 10 fr.) Lucien Laveur, éditeur. Paris, 1910. La question du chauffage par la vapeur est traitée dans cet ouvrage d'une façon très complète par l'auteur, spécialiste éprouvé, qui n'a négligé ni le côté théorique, ni le côté pratique. Ceux qu'intéresse la question — et ils sont nom- breux — apprécieront cet ouvrage et le consulteront utilement. G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. 2° Sciences physiques Kayser |{H.), Professeur de Physique à l'Université de Bonn. — Handbuch der Spectroscopie. J'ome V. — 1 vol. grand in-8 de 1v-853 pages avec 2? planches et 3 figures. (Prix : 60 fr.) S. Hirzel, éditeur. Leipzig, 1910. Peut-être encore plus que les autres, ce cinquième volume de l'Encyclopédie spectroscopique du Profes- seur H. Kayser servira-t-il au progrès de l'Analyse spectrale, car il constituera, avec le suivant, une précieuse réunion de documents numériques et biblio- graphiques sur les spectres de tous les éléments. Après deux chapitres donnant un exposé sommaire des méthodes d'analyse spectrale qualitative appliquée à la Chimie, et des tentatives encore incomplètes d'analyse quantitative, le savant auteur expose les tra- BIBLIOGRAPHIE — vaux dont les spectres des gaz sortant du convertisseur Bessemer, basique ou acide, ont été l'objet. Le reste du volume est consacré à donner successi- vement pour chaque corps simple, rangé suivant l'ordre alphabétique de son symbole chimique: 19° la bibliographie complète des travaux faits sur le spectre de cet élément ; 2° une critique ou un résumé som- maire des plus importants de ces travaux ; 3° des tables complètes des longueurs d'ondes et des intensités de toutes les raies, visibles ou ultra-violettes, voire même infra-rouges quand elles ont été mesurées, raies obtenues tant dans l'arc que dans l’étincelle; 4° des tables similaires pour les arêtes de bandes des com- posés divers de l'élément, lorsque celui-ci en fournit, ou plutôt lorsqu'on les a étudiées, car cette partie de la Spectroscopie est encore bien mal connue. A la suite du spectre de l'air, on trouvera les diffé- rents spectres qu'on peut y rattacher, comme ceux des éclairs, des aurores polaires, des météoriles et des étoiles filantes. Le tableau des raies de l'aurore est particulièrement intéressant et montre le peu de pré- cision des mesures faites jusqu'ici par les différents observateurs, en grande partie à cause de Ja faiblesse des raies aurorales et des difficultés d'observation, Il en résulte une grande incertitude dans les attributions. Trois lignes seulement paraissent déterminées à une unité d'Angstrüm près : la raie verte du krypton, et deux arêtes de bandes de l'azote (pôle négatif). A l'occasion des tableaux de À du lutécium, signalons l'impartialité de l’auteur qui lui fait reconnaitre l’an- tériorité de la découverte du dédoublement de l'ytter- bium par notre compatriote M. Urbain ; souhaitons que cel exemple soit suivi en Allemagne. A cause du nombre extrêmement considérable de ses raies, le spectre de lignes du fer n’a pas été donné. Qu'il nous soit permis de regretter son absence dans une œuvre aussi importante et aussi complète, d'autant plus que le Professeur Kayser eu a fait à plusieurs reprises des mesures restées classiques. Nous espérons qu'il trouvera sa place à la fin du volume suivant, qui contiendra les corps simples dont le symbole chimique suit la lettre N. C'est, en effet, une étude des spectres de bandes de l'azote qui termine le volume, à la fin duquel on trouvera deux planches de photogravures des spec- tres de bandes de BO*, CuCF, MnCP, et N (pôle positif). Nous recommanderons, avant de faire usage de ce volume comme recueil de À et de références pour chaque élément, de lire attentivement les deux cha- pitres d'introduction et surtout celui qui est intitulé : Qualitative chemische Analyse, où les méthodes les plus pratiques, les plus générales et les plus efficaces sont mises en lumière dans ce qu'elles ont de plus essentiel. À ce propos, l’auteur nous permettra de lui faire remarquer que les « raies ultimes » ne sont pas nécessairement des Hauptlinien, c'est-à-dire les plus brillantes d’un spectre, et que leur sensibilité extrême est caractérisée par leur persistance dans les diverses sources lumineuses de températures et de décharges électriques très variées. Nous croyons que l’auteur a bien atteint son but, celui d'épargner aux travailleurs de longues, fasti= dieuses et difficiles recherches à travers la multiplicité des mémoires d'analyse spectrale, en leur permettant d’avoir là sous la main toutes les données premières qui leur seront nécessaires pour l'identification des éléments par leurs raies, aussi bien pour les recherches de Chimie analytique ou technologique que pour celles d'Astronomie ou de Physique. A. DE GRAMONT, Docteur ès sciences. Wolff (Jules), Docteur de 1 de Laboratoire adjoint à l'Institut Pasteur. — Con- tribution à la connaissance de divers phénomènes oxydasiques naturels et artificiels. — {1 vol. in-8° de 93 pages. Barnéoud et Cie, imprimeurs. Laval, 490. Les recherches expérimentales consignées dans cet ouvrage montrent que l'on peut étendre aux peroxy- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. Université de Paris, Chef ANALYSES ET INDEX #73 diastases (activant l'eau oxygénée) les notions dégagées par l’auteur de ce compte rendu dans l'étude des oxy- dases proprement dites (activant l'oxygène), notions qui ont trouvé asile dans cette Æevue ‘. M ME montre, par exemple (chapitres IE et HN), que certains composés de ler (ferrocyanure de fer colloïdal uvent Jouer, vis-à-vis des polyphénols appropriés et de l'eau oxygénée, le rôle des peroxydiastases, condition toutefois de ménager à la réaction le milieu favorable l'alcalinité faible favorise l'action; l'acidité faible ou la présence de certains sels (Cu, Fe, etc.) l'entrave, et ces sels agissent sur le colloïide de Wolff comme sur la peroxydiastase naturelle. — Une étude intéressante a été consactée par M. Wolff aux propriétés des sucs ou extraits de /tussula delica; il s'agit, on le sait, d'un suc contenant de la « {yrosinase », oxydase proprement dite. M. Wolff fait voir que l'extrait de /ussula delica jouit de propriétés oxydantes vis-à-vis d’autres matières que la tyrosine : l’orcine, l’alizarine sulfo-conjuguée, la cochenille, etc.; pour toutes ces substances enc ore, il existe une réaction de milieu optima qui donne au p hé- nomène sa rapidité; cette réaction est tantôt nettement alcaline (alizarine sulfo-conjuguée, hydroquinone), tantôt un peu acide (hélianthine, hydroquinone). Ces nouvelles propriétés oxydantes du suc de Æussula ne se confondent pas, d'après M. Wolff, avec celles de la tyro- sinase, car elles subsistent quand la macération est chauffée un quart d'heure à 65-70 °/,. Quoi qu'il en soit, ici encore, on retrouve, dans la plupart des cas, l'action favorisante des citrates et diphosphates alca- lins, action que nous avons étudiée en détail, ainsi que MM. Euler et Bolin, dans ses rapports avec l'activité de la laccase. Il reste à M. Wolff, pour compléter cette partie très intéressante de son étude (chap. VIL à X), à reproduire les mêmes phénomènes d'oxydation à l'aide de catalyseurs artificiels, ce qui ne peut manquer d'être réalisable, après ce que nous savions déjà de la laccase, et après ce qu'il nous apprend ici des peroxy- diastases. Cela dit, nous sommes contraint d’avouer que les chapitres IV, V et VI de la brochure de M. Wolff ne peuvent présenter qu'un intérêt de confirmation, car l’étude qu'ils contiennent de la réaction oxydante de l'hydroquinone par les sels manganeux, seuls ou associés, avait été déja méthodiquement poursuivie par nous, et, à notre suite, par MM. Euier et Bolin*. Relevons seulement «l’association catalytique » capable d'oxyder le gaïacol : citrate de soude, sulfate manga- neux, ferrocyanure de fer (et quinhydrome) (p. 54). L'incorporation des « peroxydiastases » au groupe des «associations catalytiques » est donc chose faite, grâce à M. Wolff; la réalité du contenu organique des diastases s’efface une fois de plus, en même temps qu'apparaît le caractère tout secondaire de leur spé- cificité. Ce sont là notions qui s’apparentent bien étroi- tement à celles que nous exposämes ici même; ayant de bonnes raisons de croire que M. Wolff n'ignore pas nos travaux, ne pouvons-nous regretter qu'il n'en fasse point mention bibliographique ? D'autre part, nous ne pouvons cacher qu'il existe dans le livre analysé une contradiction flagrante entre l'introduction historique, les conclusions et les résultats: si l'on admet les résul- tats expérimentaux de M. Wolff, la conception « clas- sique » des oxydases (p. 7-9) doit être modifiée et il faut mettre au premier rang la GÉNÈRE de Trillat qui reconnut le premier le rôle de l'alcalinité dans l'action oxydasique, mais n'en tira pas tout le parti possible. Mais il nous est interdit de rechercher si l'influence catalytique qui empêche M. Wolff d'être logique se confond avec celle qui lui interdit d'être juste. O. Dony-HÉNAULT, Chef de Laboratoire à l'Institut Solvay de Bruxelles. 1 Dony-Héxauzr : Oxydases et diastases. Æevue général? des Sciences, 15 décembre 1909, p. 948-956. > Jp. : Contributions à l'étude méthodique des oxydases, 3 mémoires dans Bulletin de l'Académie royale de Belgique 20%" 874 Pelet-Jolivet (L.), Professeur à l Université de Lau- sanne. — Die Theorie des Färbeprozesses (La THÉORIE DE LA TEINTURE). — 1 vol. iu1-8° de 224 pages avec 14 figures. (Prix : 8 fr. 75.) Th. Steinkopf, éditeur. Dresde, 1910. Bien qu'aujourd'hui nous connaissions parfaitement la chimie des matières colorantes employées en tein- ture, leur constitution et les relations qui existent entre leur structure et leur couleur, nous ne savons encore que peu de chose du mécanisme en vertu duquel elles se fixent sur les fibres textiles. A côté des théories qui cherchent à expliquer la teinture par des phéno- mènes mécaniques où chimiques, à côté de la théorie si suggestive de la teinture par dissolution, toutes théories dont l'insuffisance est maïheureusement trop évidente pour le praticien, s’est développée depuis quel- ques années une interprétation plus satisfaisante, bien qu'encore tres imparfaite, basée sur les propriétés si singulières des substances colloïdales et sur l'étude toute récente des phénomènes d’adsorption et d'élec- trisation du contact. C'est cette interprétation que M. Pelet-Jolivet s’est proposé d'exposer dans son ou- vrage; il nous la présente avec toute la compétence d'un spécialiste bien au courant des travaux déjà nom- breux qu'elle a suscités et dont les recherches person- nelles ont largement contribué à son adoption; toute- fois, l'abondance même des expériences qu'il relate embarrasse le lecteur et il eût été utile, croyons-nous, de résumer dans un dernier chapitre les conclusions précises qui se dégagent de tous ces chiffres. Le prati- cien y trouvera, cependant, quelques indications ca- pables de le guider dans son travail et pourra faire son profit, indépendamment de toute interprétation théo- rique, des nombreux résultats expérimentaux enre- gistrés dans cet ouvrage, Le physicien, l'ingénieur, le chimiste et tous ceux qui veulent se tenir au courant des questions relatives aux colloïdes liront avec intérêt cette ingénieuse tentative d'explication d’un phéno- mène sur lequel repose une de nos industries les plus importantes. A. Guxor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 3° Sciences naturelles Chaiïlley (Joseph). — L'Inde Britannique (Société indigène, Politique indigene : les idées direc- trices). Un vol. in-8° de xvi-512 pages, avec deux cartes en couleur Lors texte. (Prix : 10 fr.) Armand Coiin, éditeur. Paris, 1910. Ce bel ouvrage est le fruit de deux séjours dans l'Inde, de longues études, et aussi de la fréquentation d'Anglais et d'Hindous bien placés pour guider et éclairer une enquête minutieuse. Il doit être mis dans les tout premiers rangs des récents travaux parus chez nous sur les pays de colonisation britannique. Le livre 1, la Société indigène, est l'examen exact et vivant des conditions physiques et humaines au milieu desquelles doit s'effectuer l’œuvre britan- nique dans l'Inde. Pays étendu et varié, c’est, sauf exception, «une contrée sans couleur et sans vie », une « terre de tristesse », au climat dur et amollissant à la fois. Deux époques y vivent côte à côte, personnifiées par le monde des Européens, soldats et fonctionnaires, et par les vieilles cités ou les innombrables villages hindous (lire et comparer les descriptions de Simla et d'Haïderabad). La population augmente peu, malgré le taux très élevé de la natalité (#4 °/60) : l « Indien ne vit pas vieux, et il est vieux de bonne heure ». La masse des habitants, qui paraît énorme d’abord (285 millions), donne dans l'Inde une densité kilométrique moyenne de 213, qui tombe à 92 dans les Etats indigènes, d'après le census de 1901, (Classe des sciences), 1907, p. 537; 1908, p. 105-163; 4909, ). 38 Ï 1-409. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX La variété ethnique et politique est une première grande dificulté du Gouvernement : 447 idiomes tra- duisent à l'oreille le mélange des races. Parmi la dizaine de religions pratiquées, l'hin- douisme (207 millions d’adeptes) et l’islamisme (62,5 millions) se présentent comme deux organisations sociales. La plus étendue et la plus complète, l'hin- deuisme, est aussi la plus envahissante ; elle englobe même une partie des musulmans de dénomination. Autre difficulté : la caste, d'importation aryenne, propagée et défendue par les Brahmanes, fait de nais- sance encore plus que de condition sociale, vraie patrie de l’Hindou, dans laquelle il vit renfermé, ensemble de croyances et de pratiques qui sont un très fort obstacle au progrès. La population de l'Inde, enfin, est difficile à atteindre pour l'Administration. Elle est presque tout entière rurale : 1.265 millions d'habitants sont dans les vil- lages, et plus de 195 millions ne vivent que de la terre. Le morcellement de la propriété est extrême. Ces innombrables paysans, presque tous englobés dans les castes, souvent oisifs, misérables, livrés par lim- prévoyance à l'exploitation des usuriers, ne sont pas moins attachés que les autres Hindous aux vieilles cou- tumes. Ils sont la partie la plus ingrate de la masse qu'essaient de relever les partis indigènes de la Réforme sociale et de la Réforme politique. Comment deux Sociétés aussi différentes que celle-là et le monde britannique pourraient-elles se pénétrer? Les rapports entre Anglais et Indiens demeurent de simples rapports d'affaires. Ils ne sont toutefois, remarque justement l’auteur, ni plus rares, ni plus difficiles qu'entre les Hindous, même de caste à caste. Le livre Il, Ja Politique indigène, est la partie la plus importante de l'ouvrage. C'est surtout une minutieuse et intéressante étude de législation et de droit colo- niaux, à laquelle la compétence générale de l’auteur en pareille matière donne tout son prix, mais dont la complexité ne se prête guère à une analyse succincte. Le but de la politique indigène est plus et mieux que de résoudre les questions de colonisation, d'ex- ploitation, d'intérêts matériels. Il s’agit de prendre pleine connaissance des intérêts moraux de l'indi- gène, de l’ «aider à évoluer dans le sens de sa tra- dition », de l’amener non à subir, mais à accepter la domination étrangère. Le problème est particulière- ment ardu dans l'Inde; les difficultés de main-d'œuvre n'y existent pas plus que celles inhérentes au peuple- ment européen, extrêmement faible; mais il s’agit de donner satisfaction à près de 300 millions d’indigènes. M. Chailley étudie d’abord le procédé et les résultats de la politique indigène pratiquée vis-à-vis des 694 Etats de l'Inde et des Etats birmans : politique de tu- telle patiente, avisée et énergique dans les premiers; politique de pacification et de première mise en valeur économique dans les autres (ps. 166-246). Restent les Hindous sujets, ces innombrables habi- tants des villages de l'Inde britannique, qui relèvent non plus du « political officer » ou des « deputy com- missionners », mais des « collectors ». Villages de petits propriétaires ou « ryots » (ryotwari villages), villages de « zamindars » (grands propriétaires), dans lesquels la terre est considérée comme indivise, et exploitée en partie par des tenanciers, dans tous le personnage im- portant est le prêteur, le « money leader ». L'usure, dont l'existence est liée à celle même de l'impôt de sujétion perçu par le gouvernement anglais (le « land- revenue »), transforme partout la propriété. Si bien que le Gouvernement a dû intervenir et faire dans le Pendjab l'application d'une loi de 1900 restrictive du droit d'aliénation. La plus grosse difficulté de la politique indigène est de légiférer pour cette masse, de manière à donner à la fois satisfaction aux coutumes et au progrès. L'au- teur étudie les tâätonnements à la suite desquels on est arrivé (1833) à l'idée du code anglo-indien s'inspirant surtout des réalités, idée lancée et appliquée par BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Macaulay comme « law-member » du Conseil du gou- verneur. Il décrit les procédés de rédaction, de dis- cussion et de vote de la loi par le Conseil, d’après les pouvoirs délinis en 4861 et 1872; il insiste sur la sou- plesse, la variété des dispositions prises, sur la loyauté avec laquelle on les amende, non sans doute jusqu'à les soustraire à toute critique, mais avec une con- science et un savoir qui forcent l'hommage. Mêmes tâtonnements, au moins jusqu'à la fin de la Compagnie (1858), pour aboutir à l’organisation judi- ciaire. Actuellement la justice, ordinaire, civile et cri- minelle, dépend presque entière du « collector », à la fois administrateur et juge (« collector and magis- trate »), la séparation de pouvoirs n'étant pas encore admise en fait. Difficulté de faire la preuve et d’ob- tenir des témoignages véritables; amour excessif de la procédure et des appels; multiplication des juridic- tions, qualité mêlée et insuffisance numérique du personnel judiciaire, telles sont les causes qui expli- quent la lenteur et l'encombrement des tribunaux. Les deux derniers chapitres (ps. 419-490) traitent du problème de l'éducation des indigènes, et de la part qu'ils prennent à l'administration. L'enseignement primaire, moyen principal de formation, parait avoir échoué jusqu'ici; les écoles, non gratuites et livrées à des maitres peu formés, ne réunissent que 2 millions d'élèves, sur 18 qui seraient en état de les fréquenter. L'enseignement supérieur, médiocre, ne vise guère que les examens. Le secondaire seul est en progrès; c’est lui qui crée cette sorte d'élite hindoue devenue si différente de la masse du peuple indigène, mais si peu nombreuse encore. Pourtant, c’est de l'avenir de l’en- seignement que dépend la question de l'admission plus complète des Hindous au gouvernement du pays. Il faut, dit l’auteur, éviter la formation toute théorique et superficielle; elle mènerait au mandarinat. Ce dont une brève analyse comme celle-ci ne peut donner l’idée, c’est la conscience extrème et la pléni- tude d’information de cet ouvrage, et c'est encore Île souci continuel, qui éclate à chaque page, non d'exposer des documents et des textes, si nouveaux soient-ils chez nous, mais de décrire et de montrer la vie et les personnes, avec leur aspect vrai. Et c'est pourquoi ceux-mêmes qui ne sont pas des juristes et des coloniaux de métier ont beaucoup à apprendre en parcourant des pages si nourries. J. MACuaT, Docteur ès Lettres, Professeur au Lycée Bufon. Le Dantec (F.), Charge de Cours à la Sorbonne. — La stabilité de la vie. Etude énergétique de l'Evo- lution des espèces. — { vol. de 300 pages de la Bibliothèque seientifique internationale. (Prix 6 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1910. Dans ce nouvel ouvrage, M. Le Dantec essaie d'établir une loi physique qui lui parait régir tous les changements biologiques spécifiques, quand ces chan- gements spécifiques se font par la voie lamarckienne de l'adaptation au milieu, procédé qui, pour l'auteur, est, sinon le seul, au moins le plus répandu de ceux qui conduisent à des transformations mérilant vrai- ment le nom de changement d'espèce. C’est la loi de stabilité croissante, qui peut s’énoncer ainsi : 4° une substance vivante est dans un état d'équilibre stable; 2° quand elle subit des variations pathologiques qui n'entraînent pas sa mort, elle peut revenir à l'état stable précédent, et alors il n'y a pas de variation spé- cifique, ou bien elle subit une variation spécifique, et alors e/le passe à un état plus stable que celui qu'elle à quitté. La conséquence de cette loi de stabilité crois- sante, c'est que les espèces deviennent en vieillissant moins capables de variation; les patrimoines hérédi- taires des êtres vivant aujourd'hui ne peuvent être que plus stables, comparativement à ceux qui exis- tient il y a un mullion d'années; il est mème possible que beaucoup d'espèces actuelles aient atteint le maximum de stabilité et ne puissent plus que mourir : 875 quand on veut les plier à de nouvelles conditions d'existence. Un bon tiers de l'ouvrage est consacré à des considé- rations philosophiques sur des questions de Physique, notamment sur le premier principe de Carnot, qui expose la nécessité d'une différence de niveau énergé- tique; et c'est de ces considérations que M. Le Dante: déduit en Biologie sa loi de stabilité. L. CuÉNor, Professeur à la Facullé des Sciences de Nanc] 4° Sciences médicales Zimmern (D' A.), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, et Furechini (S.), Préparateur à la Faculté. Les courants de haute fréquence et la d’Arsonvalisation. — 4 vo/. in-18 de 100 pages avec 22 figures. (Prix : 4 fr. 50.) J.-B. Baïillière et fils, éditeurs. Paris, 1910: MM. Zimmern et Turchini viennent, dans un excel- lent petit livre, d'exposer les applications médicales des courants de haute fréquence. Malgré la limitation des développements, l'ouvrage ne devant, comme tous ceux de la collection des Actualités médicales, dé- passer cent pages, les auteurs ont réussi à donner d'un sujet très vaste une étude résumée très intéressante; ils ont insisté sur les utilisations thérapeutiques directes et locales tout aussi dignes d'attention, et d'efficacité moins discutée que celle des applications générales dont le but est d'agir sur la tension arté- rielle. Pendant trop longtemps on n’a eu en vue que ces derniers effets, alors que les autres étaient plutôt négligés. Le champ d'action des courants de haute fréquence est pourtant bien vaste, leurs effets sont multiples suivant le mode d'application : c'est ce que rappellent les auteurs. Après une étude des courants de haute fréquence au point de vue physique, de leur production, etc., les deux derniers tiers de l'ouvrage sont consacrés à l'étude de leurs propriétés physiologiques et de leur utilisation thérapeutique. Les applications directes dont l'ont partie celles désignées dernièrement sous les noms de thermopénétration, de transthermie, d'é- lectro-coagulation, ont été étudiées dès 1896 par M. d’Arsonval ; oubliées d’abord, elles ont été de nou- veau préconisées durant ces dernières années. En France, dès 1907-1908, MM. Zimmern et Turchini en avaient étudié les actions et préconisé l'emploi dans certains cas. Parmi les applications générales, l’auto-conducteur a, sur la tension artérielle, des effets variables suivant les auteurs, et de l'énumération des opinions émises de côté ou d'autre il ne ressort rien de net; on regrette de ne pas trouver, dans ce chapitre, une opinion bien prononcée des auteurs sur ce sujet, opinion qui aurait eu une véritable valeur étant données leurs grandes qualités critiques et que l’on s'attend à trouver après la lecture de la préface. Le lit condensateur semble cependant être par eux préféré au solénoïde. Les pages où est étudié ce mode d’appli- cation laissent l'impression que l’on a par lui un moyen réellement efficace d'agir sur l'organisme et d'obtenir des effets plus appréciables par la majorité des expé- rimentaleurs. Enfin, le dernier chapitre traite des applications locales; les auteurs y envisagent les divers effets sédalifs, antispasmodiques, révulsifs, destructeurs, etc. On ne peut que regretter la brièveté forcée de ce travail, brièveté qui fait désirer la publication par les mêmes auteurs d’une étude plus complète; il y a tant à écrire, j'allais dire à discuter à propos de la haute fréquence! Néanmoins, le livre de MM. Zimmern et Turchini, exposé très clair de ce que l’on peut demander à ces courants, est une excellente mise au point de la question et la lecture en est à recommander à tous les électriciens-médecins et surtout aux médecins sans épithète. Dr BERGONIÉ, Professeur à la Faculté de Médecine de Bordeaux. 876 ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 26 Septembre 1910. M. le Président annonce à l'Académie la mort de Mu° Louis Pasteur. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin dé- montre le théorème suivant : Supposons qu'une surface variable (S) possédant un point singulier O engendre une famille de Lamé. Nous admettons que le cône tangent relatif au point O est algébrique et irréduc- tible. Deux cas peuvent se présenter : ou bien ce cône n'est pas de révolution, ou bien il est de révolution. Dans le premier cas, le point O est fixe; dans le second, ce point est fixe ou mobile; s’il est mobile, la tangente à la trajectoire coincide avec l'axe de révolution du cône. — M. R. Bourgeois décrit un procédé de com- paraison de deux pendules astronomiques à l’aide de signaux électriques transmis par un càble sous-marin à très longue portée, qui a été expérimenté avec succès entre Brest et Dakar. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Stormer a mis sous f>rme canonique les équations générales du mouve- ment d'un corpuscule dans un champ magnétique et un champ électrique superposés. 3° SCIENCES NATURELLES. —- MM. H. Truc el C. Fleig ont reconnu que les poussières de routes goudronnées provoquent des lésions oculaires beaucoup plus impor- tantes que les poussières ordinaires. Il n’en faudrait, cependant, pas tirer un argument contre le goudron- nage des routes si celui-ci est bien effectué. — MM. H. Guillemard et G. Régnier ont observé que la tempé- rature du corps ne varie pas d’une facon notable quand on passe de l'altitude de Paris à celle du Mont-Blanc. Par contre, la chaleur dégagée augmente sensiblement au Mont-Blanc (d'environ 1/3). — M. A. Laveran a obtenu de bons résultats dans le traitement de diffé- rentes trypanosomiases par l’émétique arsénical et antimonial d'aniline; 15 cobayes infectés ont guéri, dont 4 après une rechute. — MM. Ch. Nicolle et E. Conseil démontrent d’une façon indiscutable l’exis- tence de propriétés préventives et curatives dans le sérum des convalescents où animaux guéris de typhus; mais elles ne se conservent que pendant un temps assez court après la défervescence. — M. J. Roussel estime qu'au moment de leur formation les phosphates tricalciques d'Algérie et de Tunisie se sont constitués d'un mélange intime de phosphate et de carbonate de calcium et se sont déposés dans des mers ouvertes, les uns sans interruption, les autres avec intercalations de sédiments vaseux ou calcaires. Séance du 3 Octobre 1910. M. le Président annonce le décès de M. Maurice Lévy, membre de l'Académie. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Emile Picard présente ses recherches sur une équation fonction- nelle singulière du type de l'équation de Fredholm. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Gay a étudié l’équi- libre osmotique de deux phases fluides. Il trouve une relation étroite, de cause à effet, entre les règles des mélanges de corps normaux énoncées par Baud et Bose et celle de Linebarger et Zawidzki. — M. Ch. Lederer, en faisant réagir TeClt sur les organomagnésiens, a obtenu des composés organiques du tellure tétravalent, tels que l'iodure de triphényltelluronium (C‘H°)Tel, F.2#7-2487, le bibromure (C‘H°)*TeBr?, F.203°-204, etc. — MM. A.el L. Lumière et A. Seyewetz ont constaté que la quinone peut être utilisée en photographie, soit comme affaiblissant succédané du persulfate d’am- moniaque, soit comme renforçateur énergique, soil enfin comme agent de virage pour les positifs sur verre et pour les papiers au bromure. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Godin à reconnu que les asymétries des membres thoraciques existent chez le nouveau-né; elles sont mesurables, tandis que les autres asymétries (cou, tronc, membres pelviens) ne le sont pas. Elles sont donc héréditaires. C'est à dater de l’époque où l'enfant se met debout et com- mence à agir d’une façon continue que les autres asy- métries apparaissent. — M. Ch. Janet, en étudiant la mandibule de l'abeille, a constaté la présence d’un assez grand nombre d'organes sensitifs à ombelles, qui ne paraissent pas avoir été signalés jusqu'ici. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 4 Octobre 1910. M. le Président annonce le décès de M. Farabeuf et de M. F. Raymond, membres de l’Académie, et de M. Fleury, correspondant national. M. G. Weiss présente un Rapport sur un travail du D' Lombard, relatif à un nouveau signe pour dévoiler la simulation de la surdité. L'auteur à remarqué que, chaque fois qu'un appareil à bruit est placé à l’oreille non sourde d’un malade atteint de labyrinthite unila- térale, la voix ordinaire de conversation prend immé- diatement les caractères bien connus de la voix des sourds labyrinthiques bilatéraux. Inversement, l’enlè- vement ou l'arrêt de l'appareil est suivi immédiate- ment du retour à l'intensité vocale habituelle, sans que le malade semble avoir connaissance de ce double changement. — M. H. Hallopeau : L’hectine ou le 606 dans le traitement abortif de la syphilis. L'auteur tire de l'analyse des faits les conclusions suivantes : 4° Le 606, découvert par M. Mouneyrat en 1908 et mis en pra- tique en 1910 par M. Ehrlich, possède, à côté de sa puis- sante action thérapeutique, des propriétés nocives qui peuvent entraîner des dangers; 2 Cette préparation n'empêche pas à coup sûr des récidives à brève échéance et l’on ne peut rien préjuger de ce qui se passera dans l'avenir; 3° Elle ne présente donc pas les qualités requises pour le traitement abortif de la syphilis, qui sont l'absence de récidives et d'action dangereuse; 4 Il en est autrement de l’hectine, qui réunit ces mêmes conditions : tous les malades aux- quels elle à été injectée d’une manière prolongée loco dolenti sont restés ultérieurement indemnes de toute manifestation ; il n'y a pas de fait négatif; 5° On devra rechercher s’il n'y a pas lieu de réduire les doses et le nombre des injections, et de cesser l'administration concomitante du mercure. M. A. Netter prend la défense de la méthode d’'Ehrlich : 51 malades, traités par lui ou dans son service, avec le 606, n’ont présenté aucun accident et ont fourni de beaux résultats. — MM. A. Poncet et R. Leriche montrent que lascoliose, syndrome d'infection atténuée, est une déformation permise par une ostéomalacie vertébrale dont la tuber- culose est fréquemment responsable. La même patho- génie tuberculeuse est naturellement à la base, chez de nombreux sujets, d'autres malformations ostéo- articulaires de l’enfance et de l'adolescence : pieds plats douloureux, genu valqum, crostoses, radius curvus, coxa-vara, etc. — M. J. Boeckel présente une statistique de 76 cas de cancer stomacal; le nombre des cas opérables est des plus restreints. Dans 34 cas, il a pratiqué la laparotomie exploratrice; 10 malades ont succombé à la suite de cette intervention. Dans 9 cas, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 877 il a pratiqué la gastro-jéjunostomie; 3 malades sont morts et 6 ont guéri. Enfin, chez 11 malades il à pu faire la gastrectomie totale on subtotale; il a obtenu 7 guérisons et # morts. Ces résultats, bien que peu brillants, doivent encourager à persévérer dans les tentatives d'opération radicale. M. Th. Jonnesco décrit diverses modifications qu'il a apportées à la technique de sa méthode de rachi-anesthésie générale. Les observations portent maintenant sur 2.963 anes- thésies, dont 1.005 de sa pratique personnelle, sans accidents graves, et 1.958 de ses confrères roumains, avec deux morts seulement, dues à des doses trop fortes. Il y a eu sept fois arrêt momentané de la respi- ration, qui à cédé rapidement à la respiration artiüi- cielle. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 30 Juin 1910. 1° Scexces paysiques. — M. C. J. T. Sewell : La propagation du son dans un brouillard. L'auteur à reconnu que, dans la propagation du son à travers le brouillard atmosphérique, ce sont les ondes de haute fréquence qui souffrent le plus. Si on estime à 0,02 mil- limètre le diamètre des gouttes d’eau dans un brouillard dense et à 4,5 grammes par mètre cube la densité du brouillard, l'intensité d'un son dont la longueur d'onde est de 100 centimètres est réduite dans le rapport 1 : e pour une distance de 100 mètres. Pour une longueur d'onde de 1.000 centimètres, la même réduction n’a lieu qu'après un parcours de 350 mètres.— M. L. Southerns a déterminé /e rapport de la masse au poids pour une substance radio-active, l'oxyde d'uranium, par compa- raison avec la valeur connue pour une substance nor- male, l’oxyde de plomb. D’après sir J. J. Thomson, une substance radio-active peut posséder une masse plus grande que le même poids de substance non radio-active, par suite de la plus grande quantité d'énergie potentielle que la première renferme. Les observations, faites au moyen d’un pendule, ont montré que le rapport masse/poids pour l’oxyde d’ura- nium ne diffère pas de plus de 1/200.000 de sa valeur normale, ce qui exclut l'effet supposé par Sir J. J. Thomson. — M. J. A. Crowther : La dispersion des rayons 8 homogènes et le nombre d'électrons contenus dans l'atome. L'auteur a constaté que, pour des rayons B de vitesse donnée, l'intensité I de la radiation dis- persée contenue dans un cône donné peut être exprimée par l'équation : 1/1,= 1 — e —E!, où {est l'épaisseur de la substance traversée et À une constante dépendant de l'angle du cône. Pour des rayons de vitesse donnée, l'angle d’émergence le plus probable est proportionnel à la racine carrée de l’épaisseur de la substance traversée par les rayons. Le nombre d'électrons contenus dans un atome d’élément est égal à trois fois le poids atomique de cet élément. — MM. F. P. Burt et F. L. Usher ont déterminé es poids atomiques relatifs de l'azote et du soufre par l’analyse du sulfure d'azote. Ce corps est décomposé par sublimation sur de la laine de quartz chauffée au rouge dans un tube de quartz, et les deux éléments sont déterminés séparément. Comme résultat final, le poids atomique du soufre serait de 32,067 si celui de l'azote est 14,009. — Mie F. Isaac a étudié la crislal- lisation spontanée et les courbes de points de fusion et de congélation de mélanges de deux substances formant des cristaux mixtes et possédant un point de congéla- tion minimum ou eutectique. Les expériences ontporté sur des mélanges d’azobenzène et de benzylaniline; ils possèdent un point minimum ou eutectique à 26° pour une proportion de 149 °/, d’azobenzène et 81°/, de benzylaniline et forment une série de cris- taux mixtes sur un côté seulement de l’eutectique, celui où il y a un excès d’azobenzène. C'est un cas- limite du type 5 de Roozeboom. Chaque mélange possède une température définie de cristallisation spontanée. La courbe d'hypersolubilité ou de cristallisa- tion spontanée présente un minimum pour les liquides ayant à peu près la composition eutectique et marche parallèlement à la courbe des points de fusion. M. À. D. Waller décvit une nouvelle méthode pour la détermination de l'acide cyanhydrique dans les tissu végétaux et animaux. C'est une méthode colorimé- trique, basée sur la réaction entre le cyanure de potas- sium et l'acide picrique, donnant une coloration qui est comparée avec une échelle de couleurs établie d'avance. — M. W. B. Bottomley a étudié l'assimi- lation de l'azote par certaines bactéries fixatrices existant dans le sol. Il a constaté que des cultures mixtes d'Azotohacter etde Pseudomonas, ajoutées à un sol chaulé, produisent une augmentation de 35 milli- grammes d'azote par 100 grammes, et de milli- grammes dans un sol non chaulé; cet accroissement n’est pas dû à une substance présente dans la culture, puisque sa teneur en Az est de 6 milligrammes à peine. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. A. B. Macallum à déterminé /a composition inorganique du sang de quelques Vertébrés et Invertébrés et son origine. La composition du sang du Limulus présente un parallé- lisme étroit avec celle de l’eau de mer dans laquelle il vil. Pour le sang du Homard,il y a encore parallélisme, mais avec des différences pour la teneur en SO* el Mg. Il faut remarquer que ces deux constituants sont très toxiques. Le Limulus, qui vivait déjà dans l'océan aux périodes géologiques les plus reculées, a acquis une très grande tolérance pour eux, tandis que le Homard, dont la vie marine ne remonte pas au delà du Juras- sique, possède une moindre accoutumance. Dans Île sérum des Elasmobranches et des Téléostéens, la pro- portion des sels est bien moindre que dans l’eau de mer; la différence notée entre les deux groupes tient aussi à l'époque différente où ils ont commencé à vivre dans l'océan. — Mile M. T. Fraser et M. J. A. Gard- ner : L'origine et la destinée du cholestérol dans l'orga- nisme animal. VII. Les auteurs ont constaté que la méthode à la digitonine pour l'estimation du choles- térol est très exacte et capable de donner de bons résultats avec de faibles quantités de substance. Quand le cholestérol est donné aux lapins avec la nourriture, une partie est absorbée et se répand dans le sang; il y a augmentation à la fois du cholestérol libre et de ses éthers. Quand les añimaux sont nourris avec du phytostérol, cette substance est absorbée en partie etil en résulte une augmentation du cholestérol libre du sang; le phytostérol n'apparaît pas comme tel dans le sang. — MM. V. H. Veley et A. D. Waller ont déter- miné Ja toxicité comparée de la théobromine et de la calëine par leurs effets directs sur la contractilité du muscle isolé. Ils ont trouvé que la toxicité de la théo- bromine, base du cacao, est plus grande que celle de la caféine, base du café et du thé, dans le rapport de 3 à 2: L'introduction d’un second groupe méthyle dans le résidu oxy-purique, c'est-à-dire la formation de caféine aux dépens de la théobromine, diminue donc la valeur toxique, résultat inverse de celui qu'on observe chez les alcools paraffiniques. — M. F. W. Edridge-Green : La relation de la perception lumineuse à la perception colorée. Les cas de cécité colorée peuvent être dus à un défaut de perception lumineuse, ou à un défaut de perception colorée sans défaut de perception lumineuse, ou aux deux simultanément. Pour étudier ces cas, l’auteur emploie un spectromètre de son invention, où les individus à vue normale distinguent six couleurs différentes : rouge, orange, jaune, vert. bleu, violet. Ceux qui ont un défaut de perception lumineuse pour certains rayons, avec une perception colorée normale, se comportent de la même facon que les personnes à vue normale quand on enlève ces rayons ou les réduit à la même intensité. Les individus à perception colorée défectueuse voient dans le spectromètre un nombre de couleurs mono- chromatiques moins grand que la normale et disent qu'il n’y a que 5, #4, 3, 2 ou 1 couleur au lieu de 6. — M. E. C. Snow a déterminé les corrélations principales 878 , ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES entre des collatéraux dans le cas d'une population men- délienne simple se mariant au hasard. Le résultat principal de ses recherches est que, dans la théorie mendélienne de l'hérédité, la similitude entre Îles cousins germains est aussi étroite, ou plus étroite, qu'entre oncle et neuveu. Ge résultat a un grand intérêt au point de vue médical. — M. A. Dendy : La struc- ture, le développement et l'interprétation morpholo- gique des organes pinéaux et des parties adjacentes da cerveau du Sphenodon punctatus. Les recherches ana- tomiques de l'auteur l'amènent à supposer que le sac pinéal et l'œil pinéal sont respectivement les membres droit et gauche d'une paire primitive d'organes des sens, homologues en série avec les yeux latéraux. — Sir D. Bruce, MM. A. E. Hamerton, H. R. Bateman et F. P. Mackie : La nourriture naturelle de la Glos- sina palpalis. 220 Glossines ont été caplturées en divers endroits de la côte du lac Victoria au cours de sept mois; l'examen de leur contenu intestinal révèle le fait que 27 °/, contiennent des restes de sang, en majorité du sang de Mammifères. Dans une seconde expérience, 183 Glossines furent capturées en un endroit fréquenté par des oiseaux et des crocodiles; 60 °/, contenaient des restes de sang, principalement d'oiseaux et de reptiles, surtout des derniers. — Les mêmes auteurs présentent leurs recherches sur la transmission méca- nique de la maladie du sommeil par la mouche tsétsé. Elle n'a lieu que si le transport des mouches de l'animal infecté à l'animal sain est instantané; elle fait défaut s'il y à un intervalle de temps entre les deux piqüres. La transmission mécanique joue un rôle beaucoup plus minime dans la propagation de la maladie du sommeil qu'on ne l'avait supposé. — Mie M. G. Sykes : L'ana- tomie et la morphologie des feuilles et des inflorescences de Welwitschia mirabilis. L'auteur montre que les fleurs mäles et femelles sont homologues; la graine peut être comparée étroitement à celle des Lagenos- toma; lovule présente aussi des points de ressemblance avec celui des Benettites. Le Welwitschia est proba- bleinent relié à la série des Cycadées, avee les Benet- titales et avec l'ancêtre des Angiospermes. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du A6 Juin 1910. M. W. Branca donne lecture d'un mémoire : «Pithie- canthropus et Homo Mousteriensis Hauseri et âge géo- logique du premier ». Dans le moulage en plâtre de l’'Aomo Mousterieusis, en vente chez une maison de Bonn, la mächoire inférieure est considérablement plus courte que la mâchoire supérieure; aussi, la pro- gnathie ne peut-elle avoir été aussi forte que ce mou- lage pourrait le faire croire. D'autre part, la faune de vertébrés de Trinil, associée au Pithecanthropns, pré- sente une allure antique due à ses espèces fossiles. Mais comme le prouve l'allure tout analogue de la faune des Pampas, qui n’en est pas moins diluvienne, l'âge géologique du Pithecanthropus ne doit pas, pour cela, être nécessairement pliocène. Des recherches compa- ratives ultérieures faites à Java devront élucider cette question. Séance du 23 Juin 1910. M. H. A. Schwarz signale un exemple de fonction continue d'argument réel, pour laquelle la valeur limite du quotient des différences, dans chaque partie de l'intervalle, s’annule un nombre infini de fois. L'au- teur avait, déjà au mois de mai 1875, cité cet exemple dans une lettre adressée au regretté P. Dubois- Reymond. Seance du 14 Juillet 1910. M. G&. Frobenius adresse un Mémoire sur les nombres de Bernoulli et les polynômes d'Euler, mémoire où il déduit, par voie élémentaire et d’une façon aussi complète que possible, les propriétés surtout arithmé- tiques. — M. Waldeyer présente une note de M. Hans Virchow, professeur à Berlin, sur la composition, suivant sa « forme propre », de l'échine dorsale du rhinocéros abyssin (Biceros bicornis). La « forme propre » dont il s'agit, loin d’ètre le produit de consi- dérations théoriques ou la forme réelle ou hypothé- tique de l’échine dorsale de l'animal vivant, est la forme de l’échine fraîche, débarrassée des muscles, des côtes et du crâne, c’est-à-dire la forme qu’elle prend alors spontanément sous l'influence des forces élas- tiques contenues dans les disques et les bandes. Après avoir fixé cette forme par un moulage en plätre, on recombine dans ce moulage les os macérés. Séance du 21 Juillet 4910. M. Em. Fischer donne lecture d'un Mémoire sur l'inversion de Walden, où il résume ses observations relatives à ce phénomène, en l'illustrant sur un nou- veau modèle de l'atome asymétrique de carbone. — M. Orth présente un mémoire de MM. J. Morgenroth el L. Halberstadter sur l'influence exercée parla quinine sur l'infection trypanosomique expérimentale. Les auteurs font voir que la quinine, qui, en injection intra-péritonéale, n'exerce aucun effet immunisant contre l'infection des souris par les trypanosomes du nagana, et qui en injection sous-cutanée n’agit qu'im- parfaitement et peu uniformément, possède dans le cas d’une combinaison convenable avec les aliments,, une très grande force prophylactique. Après avoir exposé l'importance de ces faits pour l'explication scientifique de l’action des agents chimico-thérapeu- tiques, les auteurs signalent leur importance possible pour le perfectionnement ultérieur du traitement à la quinine de la malaria. Séance du 28 Juillet 1910. M. O. Hertwig donne lecture d’un second Mémoire sur ses recherches relatives aux effets des rayons du radium sur le développement des œufs animaux. Dans cette seconde série d'expériences, l'auteur se sert, pour fertiliser des œufs normaux, de spermatozoïdes mürs de /tana fusca exposés au préalable, pendant des temps variables entre cinq minutes et douze heures, au rayonnement de produits du radium. Les résultats de ces recherches jettent des lumières nou- velles sur la vie de la cellule et donnent le moyen de modifier la constitution de la substance nucléaire, sans détruire sa faculté de développement. L'auteur fait voir, par l'expérience directe, que l'influence du spermatozoide, après la fertilisation de l'œuf, se mani- feste pendant chaque phase du processus d'évolution. L'action des rayons du radium modifie, d’une facon qui dépend de sa durée, l'allure de l’évolution; c’est le spermatozoide qui, par la fertilisation, communique l'effet du radium à la substance cellulaire de l'œuf. — M. H.-A. Schwarz adresse deux Mémoires : 1° Sur une propriété en apparence inaperçue d'une des trois con- figurations planes (9,,9,); 2° Sur une reproduction con- forme, sur un angle obtus, d'angles et de sommets formés par des sections de lignes analytiques douées, dans tous les points en question, du caractère de courbes algébriques. — M. J.-H. Van ’t Hoff adresse son second compte rendu sur l’activité de l'Association pour l'investigation des dépôts allemands de sels de potassium, compte rendu se rapportant aux recherches spéciales faites par les membres en 1908-1909, ainsi qu'à la position actuelle des grandes entreprises inspirées par l'Association. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 24 Juin 1910. M. A. Wigand adresse un Mémoire sur les observa- tions qu'il a faites à Halle en collaboration avec MM. A. Lonius et B. Hesius, sur /es perturbations de lélectri- cité atmosphérique et du magnétisme terrestre au pas- sage de la comète de Halley. Les variations des con- stantes en question semblent se prêter particulièrement à l'observation d'une modification possible subie par la #2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Terre lors de cet événement tant discuté. Or, le 19 mai, la déclinaison magnétique, à l'Institut de Physique de Halle, a été de 2 à 4' inférieure à sa valeur normale correspondant à cette époque; l'écart maximum était d'environ 9 minutes d'arc. En même temps, la marche normale de l'intensité horizontale du magnétisme ter- restre a subi, du 48 mai au soir au 19 mai à 5 heures, une perturbation consistant en une décroissance d'in- tensité de 2-3 °/. Une anomalie de même sens et de même intensité s'est produite le 19 mai, entre 7 h. 30 et 41 h. 30. La dispersion électrique au sein de l’atmo- sphère a présenté des valeurs remarquablement grandes le 19 mai, entre 5 et 9 heures, pour les charges posi- tives aussi bien que négatives; le quotient des deux vitesses de dispersion indique la présence d’un excès d'ions négatifs à l'époque critique. La chute de tension électrique au sein de l'atmosphère semble avoir subi en même temps une dépression anomale. L'auteur se croit autorisé à admettre une relation de cause à effet entre ces perturbations et le passage de la comète, sans cependant vouloir utiliser ses données expérimentales pour une interprétation quelconque de la nature de la queue de la comète et des phénomènes (oujours si énigmatiques qui s’y rattachent. — MM. H. von Dechend et W. Hammer adressent une Note sur /a scintillation des rayons-canal, Les auteurs ont réussi à observer, aussi dans le cas desrayons-canal, une phosphorescence scintillatoire sur le sulfüre de zinc de M. Giesel, en choisissant l'intensité de courant dans l’ampoule assez basse et en augmentant, par contre, autant que possible, le potentiel de décharge, c'est-à-dire en se servant d'un vide assez avancé pour faire juste passer la décharge, tout en choisissant l'ouverture du canal très petite. Ce phénomène est particulièrement marqué dans le cas où l’on accélère les particules des rayons- canal par un champ électrique intense. En examinant le spectre magnétique, les auteurs constatent que toutes les parties du faisceau de rayons-canal, les neutres aussi bien que les déviables, présentent cette propriété de produire une phosphorescence scintillatoire. Il croit possible d'utiliser ce phénomène pour dénombrer le nombre de particules, comme dans la méthode de Regener. — M. W. Volkmann décrit un index lumineux pour les lectures par projection. Au lieu d'un trait lumineux, il projette sur l'échelle un trait obscur dans un champ lumineux étendu. — MM. J. Kônigsberger et J. Kutschewski rendent compte de leurs observa- tions relatives aux rayons-canal faites en partie avec une machine Mercédès à influence électrique. Les résultats les plus importants de ces expériences sont les suivants : L'émission lumineuse, dans le! cas des rayons-canal, est due aux collisions des atomes et molécules neutres, doués d'un mouvement de transla- tion rapide, avec d’autres particules neutres (molécules immobiles)., En raison de l'ionisation simultanée, il se présente ces trois cas possibles : 4° L’ionisation est un phénomène concomitant accidentel. Dans cette hypo- thèse, l'émission lumineuse émanerait de l'atome neutre ou de la molécule ébranlés, ayant acquis une grande énergie cinétique intérieure. Ces phénomènes se compliquent peut-être d'une dissociation chimique de la molécule; 2° L'émission lumineuse serait due à la mobilisation des ions formée par collision; 3° L'émis- sion lumineuse n'aurait lieu qu'au moment de la scission en ions. — M. R. Ladenburg adresse un Mémoire sur l'émission et l'absorption de l'hydrogène lumineux. Dans un travail antérieur fait en collabora- tion avec M. St. Loria‘, l’auteur avait observé la dis- persion anomale, jusque-là recherchée en vain, au voisinage de la raie rouge de l'hydrogène; d’une façon analogue, il avait pu constater la rotation magnétique anomale du plan de polarisation. Dans le présent Mémoire, il étudie la dispersion des intensités lumi- neuses des raies d'hydrogène dans les spectres d’émis- sion et d'absorption, en projetant dans le spectromètre, ? Verh. d. Deutsch. Phys. Ges., t. X, p. 858, 1908. au-dessous du spectre d'hydrogène, celui d'un filament de Nernst et en comparant photométriquement Ja luminosité d'un assez grand nombre de points des deux spectres, à l'aide d'une fente oculaire étroite. Abstraction faite de l'inversion spontanée, laquelle détermine au maximum une variation de luminosité d'un peu moins de 10 °/,, l'intensité lumineuse se trouve être constante à 5 °/, près, jusqu'à environ 12 unités A de côté et d'autre du milieu; aussi doit-on considérer cette région du spectre comme un spectre continu. Les variations du quotient E/A concordent avec les observations qualitatives antérieures. L'auteur en conclut que la bande d'hydrogène étudiée H, com- porte des centres d'émission à températures diffé- rentes, pourvu qu'on considère comme valable aussi, dans cette région spectrale, les lois du rayonnement de température, en délinissant le quotient E/A comme mesure de la température. M. W. Nernst donne lecture d’un Mémoire sur le calcul thermo-dynamique de la tension de vapeur de l'eau et de la glace. Dans un travail antérieur, il avait établi une équation d'état de la vapeur d’eau, équation qui, entre autres, permet de calculer la tension de l’eau liquide à l’aide de la formule de Clausius-Clapeyron. Dans le présent Mé- moire, l’auteur rend compte du calcul de la tension de l’eau et de la glace, fait en collaboration avec M. Levy, sur la base des constantes les plus récentes. — M. Br. Glatzel indique une nouvelle méthode de production des courants à haute fréquence suivant le principe de l'excitation « par chocs ». On sait que, d'après les recherches de M. M. Wien, les éclateurs à faibles dis- tances explosives (0,1 — 0,3 millimètre) permettent de provoquer un amortissement très fort des vibrations engendrées dans le circuit oscillatoire primaire. En accouplant à un circuit primaire de ce genre un second circuit vibratoire auquel on communique l'énergie primaire, on empêche, par l'amortissement très rapide des vibrations du circuit primaire (et la rupture ainsi produite de ce dernier), l'énergie trans- mise au circuit II de refluer vers le circuit 1. Au lieu des battements d'énergie entre les deux circuits, on voit donc l'énergie totale transmise au cireuit IT y osciller sous la forme de vibrations dont l'amortisse- ment peut être rendu très petit par un choix approprié des éléments de ce circuit. Ce principe d'excitation (dit « par chocs ») s'emploie avec beaucoup de succès dans la télégraphie sans fil. Or, pour augmenter l’amor- tissement des vibrations primaires, en éliminant aussi rapidement que possible les ions conducteurs engendrés par la décharge dans l’éclateur, l’auteur préconise, au lieu d'un refroidissement intense des surfaces des électrodes, le procédé suivant : Pour engendrer des vibrations à l’aide d’arcs à courant continu, c'est une condition indispensable que l'arc représente une carac- téristique descendante, c’est-à-dire que la tension tombe à mesure qu'augmente l'intensité du courant. Dans le cas des vibrations engendrées par le fonction- nement d'un éclateur, ces conditions sont toutes dif- férentes, les vibrations elles-mêmes constituant l'élé- ment primaire, tandis que la décharge n’est provoquée que par l’action des vibrations. Or, l'auteur a déterminé, sur des éclateurs plongés dans une atmosphère d'hydro- gène, l'allure de la caractéristique dans des conditions variables. Chez certains métaux, notamment le platine et le palladium, les résultats sont détériorés par la pulvérisation intense. Les électrodes en or, en argent ou en l’un des éléments du groupe du fer, grâce à la pulvérisation insensible, donnent les meilleurs ré- sultats. Dans une atmosphère d'azote, on obtient des résultats tout analogues, bien que l'excitation « par chocs » ne semble pas y être aussi favorable que dans l'hydrogène. — MM. A. Byk et H. Borck rendent compte de leurs expériences photo-électriques sur l'anthracène. Lors d'une interprétation théorique des expériences relatives à la photo-polymérisation de l’anthracène, M. Byk avait été conduit à attribuer à l'effet photo-électrique un rôle décisif dans cette réac- Ss0 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tion. Les présentes expériences sont destinées à con- firmer les résultats antérieurs. Les auteurs choisissent un dispositif s'adaptant autant que possible à celui de M. Pochettino. Cet expérimentaleur avait soumis de l’anthracène, disposé sur un plateau de cuivre mis à la terre, à un rayonnement de lampe à arc, concentré par une lentille de quartz et un miroir en acier et tra- versant une électrode reliée avec les feuilles d'un élec- troscope. L'électrode étant positivement chargée, le rayonnement provoque une rapide disparition de la charge de l'électroscope, en raison, semble-t-il, de l'émission d'électrons, c'est-à-dire de l'effet photo- électrique de l'anthracène. Les résultats de ces expé- riences établissent avec une sûreté absolue la sensibilité photo-électrique de l'anthracène, malgré les qualités isolatrices de cette substance. C’est ainsi qu'est rendue plausible l'hypothèse énoncée par M. Byk et suivant laquelle l'effet primaire de Ja lumière sur l’anthracène consisterait en un dégagement d'électrons ou, dans tous les cas, en un dédoublement de la molécule neutre en deux parties à charges opposées. Mémoires communiqués pendant les vacances. M. R. Lindemann : Perte d'énergie dans les bo- bines à plusieurs couches, soumises à des vibrations rapides. D'après les expériences antérieures et les considérations théoriquesde M. Wien, il fallaits’attendre à observer un accroissement de résistance propor- tionnel au carré de la fréquence dans les bobines à plusieurs couches, en tenant compte de l'accroissement apparent de résistance dû à la capacité de la bobine. Or, chose remarquable, les recherches de l'auteur mettent en évidence un accroissement bien plus rapide de la résistance, dû, paraît-il, aux pertes diélec- triques qui ont lieu dans la matière isolante entre les couches et les tours de la bobine. En admettant que ces pertes sont régies par une loi simple, suggérée par les mesures de câbles et de condensateurs, l’auteur établit uve formule qui représente d’une facon satisfai- sante les résultats de ses recherches. — M. 9. Franck: Sur la présence d'électrons libres dans les qaz chimi- quement 1nertes à la pression atmosphérique. Dans ses recherches sur la mobilité des ions de l’argon, l'auteur avait observé qu'au sein de l'argon pur lesions négatifs présentent une vitesse près de deux cents fois plus grande que les ions positifs, mais qui tombe immé- diatement à 1/150 lorsqu'on additionne l'argon de 1 °/, seulement d'oxygène. Suivant l'interprétation donnée par l’auteur, les électrons formés pendant l'ionisation de l’argon seraient capables d'exister, soit en perma- nence, soit pendant un certain temps, même à la pression atmosphérique, sans aucune association de matière neutre. L'oxygène, grâce à son caractère électro-négatif, serait susceptible de capter les élec- trons avec une extrême vitesse en les convertissant en ions négatifs. Or, pour établir une relation possible entre les caractères des électrons négatifs et les phé- nomènes décrits ci-dessus, il faut que l'azote présente, bien qu'à un degré un peu moindre, lesmèêmes prapriétés de mobilité des ions que l’argon. Les expériences, faites par la méthode des courants alternatifs de Rutherford, confirment entièrement cette prévision. L’addition d'autres impuretés électro-négatives (chlore, oxyde d'azote, humidité, etc.) provoque une chute analogue de la vitesse des ions négatifs, en s’opposant à l’exis- tence des électrons libres. — M.J. Würschmidt : Sur le gradient de potentiel des décharges très faibles dans les ampoules à cathode de Webnelt. L'auteur se sert d'une ampoule à raccords latéraux donnant accès à cinq sondes en fils de platine. 11 observe que le gradient s'accroît, pour des intensités de courant croissantes, depuis l'ordre de 10 —* ampère, d'abord rapidement, puis plus lentement, pour s'approcher d'une limite constante. L’allure de la courbe est iden- tique à celle des courants dérivés étudiés par M. H. A. Wilson. — M. E. Goldstein : Sur de simples dispo- sitifs pour engendrer les rayons-canal. On sait que les premières cathodes employées pour produire les rayons-canal présentaient des surfaces perforées ou fendues. Aussi, d'après les hypothèses énoncées par la plupart des savants, les particules des rayons-canal seraient engendrées en avant de la plaque cathodique (du côté de l’anode) et, après avoir traversé les échan- crures de la cathode, se manifesteraient au delà de cette dernière comme rayons-canal. Or, l'auteur, déjà en 1902, avait formulé une autre façon de voir, d’après laquelle les ouvertures de la cathode, loin d’être de simples portes de passage constitueraient, par leurs parois, les endroits de formation des rayons. Dans une plaque cathodique circulaire munie d’une fente, ce seraient essentiellement les deux rectangles étroits formant les parois de la fente qui engendreraient les rayons-canal observés. Tout en n'étant pas négligeable, l'influence des deux sections de raccord serait relati- vement peu importante. Dans le présent mémoire, l'auteur décrit plusieurs dispositifs expérimentaux fort simples pour engendrer les rayons-canal, dispo- sitifs qui, tout en confirmant l'hypothèse de Fauteur, simplifient considérablement les problèmes s'attachant aux rayons découverts par lui. Une ampoule sphérique de8-10centimètres de diamètre contient, outre l’anode, deux fils cathodiques parallèles de 10-15 millimètres de longueur reliés entre eux et disposés à 4-6 milli- mètres de distance. L'ampoule étant remplie d’hydro- gène dilué, on peut considérer l'intervalle entre les deux fils comme fente susceptible de produire des rayons-canal. L'expérience confirme cette facon de voir en démontrant que des bandes de couleur rose sortant en haut et en bas de l’espace intermédiaire présentent les formes caractéristiques des bandes de rayons-canal. Ces résultats autorisaient à supposer qu'un fil rectiligne unique suffirait pour donner lieu à la production de rayons-canal. En insérant dans une ampoule cylindrique ou sphérique remplie d’hydro- gène dilué un fil cathodique de platine de 0,4— 1 mil- limètre d'épaisseur, on voit, en effet, partir de ce fil. pour chaque direction de visée perpendiculaire à son centre, une bande de rayons roses présentant les mêmes contours typiques que dans le cas des cathodes doubles et qui, par toutes ses propriétés, concorde avec les rayons-canal. Ces phénomènes, ainsi que ceux que résume la suite du travail, rendent probable que les particules constituant les ravons-canal prennent naissance sur la cathode même. Leur vitesse serait due, non pas à l'accélération produite par le choc de la cathode, mais à l'énergie des rayons S, (première couche de la lumière cathodique), avec lesquels elles semblent présenter les relations les plus étroites (de transformation ou de dégagement). — MM. R. Pohl et P. Pringsheim : WVouvelles expériences sur l'effet photo-électrique sélectif. Les résultats de ce travail font voir que l'effet photo-électrique sur lalliage liquide KNa, et probablementsurles autres métaux alca- lins, se compose de deux parties parfaitement indépen- dantes: l'effet normal et l'effet sélectif. Il est possible de préparer des piles où ce dernier existe presque exclu- sivement. Le maximum de l'effet sélectif dépend, quant à sa position et sa grandeur, de l'angle d’inci- dence; il se déplace, pour des angles d'incidence croissants, d'environ 20 pu du côté des grandes lon- gueurs d'onde. La forme symétrique des courbes pour #— 60° est purement accidentelle; dans le cas d'incidences plus grandes ou plus petites, elle devient asymétrique et l'effet de la lumière bleue, très petit pour une petite incidence, devient relativement très grand pour des angles d'incidence plus considérables. La valeur du maximum, réduite à une énergie absorbée égale, s'accroît continuellement, à mesure qu'aug- mente l'angle d'incidence en s'approchant d’une valeur limite donnée. ALFRED GRADENWITZ. Le Gérant : A. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX. imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N° 21 15 NOVEMBRE 1910 LA , Revue générale . , pures et appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Aûdresser provisoirement tout ce qui concerne la rédaction à M. L. BRUNET, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris 1n Suède , 1n Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET $ 1. — Nécrologie Melchior Treub. — Le monde scientifique vient d'apprendre la douloureuse nouvelle de la mort de M. le Professeur Treub, ancien directeur de l’Institut botanique de Buitenzorg, membre de l'Académie néer- landaise des Sciences, membre correspondant de l'In- stitut de France et de la Société royale de Londres. Treub était Hollandais, quoique sa famille fût d’ori- gine suisse; son arrière-grand-père était Zurichois et s'appelait en réalité Trueb. Melchior naquit le 26 dé- ht 1851 à Voorschoten, petite ville de la Hollande méridionale. Son père, qui était bourgmestre, l’en- voya à l'École moyenne et à l'Université de Leyde, où il étudia la Physique avec Ryke, l'Astronomie avec Kai- ser et la Botanique avec Suringar. C'est là qu'il obtint son doctorat, en 1873; le 22 novembre, il présenta sa thèse sur la nature des lichens. 11 était alors assistant du Professeur Suringar et-il continua à remplir ces fonctions jusqu'en 1880, époque à laquelle le Gouver- nement des Indes néerlandaises l' appela à la direction du Jardin botanique de Buitenzorg, dans l'île de Java. C’est à partir de ce moment que commence sa véri- table carrière. Ce qu'il sut faire de ce jardin botanique, primitivement organisé, comment il sut y attirer l'élite des savants du monde entier, invités à venir y pour- suivre leurs recherches, comment il s'y prit pour en faire un véritable institut où toutes les branches de la Botanique pure et appliquée furent dotées de leur laboratoire, de leur station d'essai et de leur per- sonnel technique, comment il créa encore des écoles d'horticulture et d'agriculture coloniales..., seuls le savent ceux qui ont vu Treub à l’œuvre, qui ont connu sa puissance de travail et qui ont subi le charme de sa personne. Il a su tirer du peuple le plus pratique de la Terre les ressources nécessaires pour organiser une des plus importantes institutions consacrées à la culture des sciences. C'est tout dire. Pour acquérir une pareille influence sur les gouver- nants, il dut consacrer une grande partie de son activité aux applications pratiques de la Botanique. Nombreuses sont les nouvelles cultures qu'il a intro- duites, et si Java contrôle un jour le marché de la 1910. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, CORRESPONDANCE | gutta-percha, comme cela à déjà lieu pour celui de la quinine, c'est à Treub que les Hollandais le devront. Sa patrie reconnut ses éminents services en lui confiant la direction du Département de l'Agriculture des Indes néerlandaises, ce qui faisait de lui, pratique- ment, un ministre pour la colonie. Il occupa ce poste depuis 1905 jusqu'à sa retraite, en octobre 1909. A cette époque, il quitta Java pour rentrer en Europe: il passa l'hiver en Egypte et pensait venir s'établir dans le sud de la France, mais son séjour y fut de courte durée et il est mort à Saint-Raphaël le 3 octobre dernier. Ce qu'il fut comme savant, il est impossible de l’ex- poser ici, tant son œuvre est considérable et impor- tante. Malgré les occupations que lui imposait une administration énorme, il ne s'est pas écoulé d'année, pour ainsi dire, où il n'ait publié des recherches origi- nales. On se rendra compte de leur valeur, si l’on se remémore qu'il découvrit le phénomène de la chalazo- gamie des Casuarinées, puis, chez le Balanophora elongata, la parthénogénèse réelle, qui fut retrouvée ensuite, par lui et par d’autres botanistes, chez diffé- rents groupes de Phanérogames. Jusqu'au ‘travail de Treub, on ne connaissait guère, en fail de parthéno- génèse végétale, que le cas bien peu net du Cælebo- gyne, où les embryons se forment seulement par bour- geonnement du nucelle. — Ce fut Tre ‘ub aussi qui fil la première exploration du Krakatoa après son éruption de 4883; il y observales phénomènes remarquables du repeuplement des terres vierges et le rèle important joué par les algues filamenteuses. Ces dernières années, enfin, c'est grâce à ses publications répétées sur l'acide eyanhydrique dans les plantes que l'attention des botanistes a été attirée sur le rôle important que joue probablement cette substance dans l'assimilation de ! l'azote. Mais il est impossible de tout citer, car son esprit était ouvert à toutes les questions intéressantes, et il les a toutes abordées dans ses travaux, avec une pré- férence marquée, cependant, pour celles qui touchaient à l'embryologie. Puissent ces quelques lignes ètre un hommage à celui qui m'a fait l'honneur de m ‘appeler autrefois pour collaborer à son œuvre et à qui j'avais voué la 21 882 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE plus grande admiration et la plus profonde sympa- thie. D' B. P. G. Hochreutiner, Conservateur du Musée botanique de Genève. $ 2. — Physique du Globe La décomposition de l’eau sous l'action des rayons ultra-violets du soleil. — On sait que, dans la décomposition de l’eau produite par les rayons du radium ou la lumière ultra-violette, il se produit de l'hydrogène et du peroxyde d'hydrogène, à l'exclusion d'oxygène, ce qui distingue ce processus de la décomposition électrolytique. L'hydrogène et le peroxyde d'hydrogène se forment, semble-t-il, en quantités équivalentes, qui, malgré leur petitesse (même dans le cas d'une source de lumière ultra- violette très puissante), semblent jouer un rôle fort important dans l’économie naturelle. Dans un récent mémoire, M. K. Stückl' s’en sert, en effet, pour interpréter certains phénomènes qui se produisent soit sur notre planète, soit dans l'océan atmosphérique. L'action des rayons ultra-violets du Soleil, qui frappent la vapeur d'eau abondante dans notre atmosphère (surtout dans les couches infé- rieures), doit être comparable aux effets de laboratoire observés par M.Kernbaum *,en donnantlieu (bien qu'en quantités minimes) à la formation d'hydrogène et de peroxyde d'hydrogène. La présence de ce dernier composé dans la pluie qui tombe confirme directement cette hypothèse, tandis que l'hydrogène, en raison de sa légèreté spécifique, doit aller s’accumuler dans les parties les plus hautes de l'atmosphère, où les expé- riences spectroscopiques de M. Pickering sur la lumi- nosité, au passage des météorites, des couches atmo- sphériques très élevées (à 200 kilomètres de hauteur ou davantage), ont permis d’entrevoir sa présence. D'autre part, les observations de M. Kernbaum con- firment x posteriori certaines conclusions théoriques énoncées par plusieurs savants, au sujet de la compo- sition de l'atmosphère aux grandes hauteurs (100- 200 kilomètres). M. Hann* a, en effet, calculé comme suit la composition de l’air (en volume) à 100 kilo- mètres de hauteur : 0,10 °/, d'azote, 0,00 °/, d'oxy- gène, 0,00 °/, d’argon, 0,00 °/, d'acide carbonique, 0,00 °/, de néon, 0,45 °/, d'hélium, 99,488 °/, d'hydro- gène. Autrement dit, l'hydrogène, qui, à proximité de la surface de la Terre, n'existe dans l’air qu’en quan- tilés minimes, constitue, à 400 kilomètres de hauteur, la partie de beaucoup la plus grande (plus de 99 °/) de l'atmosphère, à la vérité très diluée, de ces couches. Les calculs de M. W.-J. Humphreys* conduisent à des résultats tout analogues. D'autre part, les recherches de M. Kernbaum jettent un jour tout nouveau sur la théorie du desséchement progressif de la Terre, établie par d'éminents géo- graphes : Si une partie de la vapeur d’eau émise par la Terre est décomposée, bien qu’en traces minimes, au sein de l'atmosphère, par les rayons ultra-violets du Soleil, la totalité de cette eau ne retourne donc pas, par un cycle fermé, à la surface, l'hydrogène formé montant vers les couches élevées. Il s'ensuit que la quantité d’eau recouvrant la surface de la Terre va en dimi- nuant lentement, et que le desséchement de la Terre progresse continuellement depuis les époques géolo- giques les plus reculées de notre planète Jusqu'à nos Jours. ; On observe, en effet, sur la pente septentrionale des Alpes, un recul continu des lacs et la formation pro- gressive de marais. C’est ainsi que le canton de Zurich, il y a deux cent cinquante ans, aurait possédé 1#9 lacs, ———————_—— ! Umschau, n° 24, 1910. ? Le Radium, t. VI, p. 225, 1909. * Han : Lehrbuch der Meteorologie, p. 8. 1906. “ Bulletin of the Manut Weather Observatory, {. IN, (2), p. 66, 1909, dont 76 seulement existent aujourd'hui. Des statis- tiques analogues ont été établies au sujet des lacs du Brandebourg. Bien que ces phénomènes s'expliquent en partie par le déboisement et la mise en culture des terrains, la déperdition de l'hydrogène y joue sans doute un certain rôle. Quant au sort final de l'hydrogène accumulé dans les couches les plus élevées de l'atmosphère, les pro- priétés physiques de ce gaz font admettre qu'il pénètre progressivement, par diffusion, dans l’espace inter- stellaire, de facon à être perdu pour la Terre. $ 3. — Électricité industrielle Un are triphasé à quatre charbons. — On se rappelle les expériences faites en 1904, par M. Mer- canton, sur une lampe à arc triphasé, comportant trois charbons disposés en triangle et reliés aux trois phases du circuit. Les charbons homogènes ordinaires doi- vent, dans ce dispositif, être remplacés par des char- bons dits à effet. D'autre part, MM. Bentivoglio et Siciliani ont étudié trois types de lampes triphasées dans lesquelles le réglage était effectué par deux champs tournant en sens opposés, et qui correspondaient aux cas les plus fréquents de la pratique moderne. Indépendamment de ces étades antérieures (qu'il ignorait au début), M. A. Righi‘ vient d'éludier un nouveau type d'arc triphasé, lequel, sans l'intervention de régulateurs nouveaux plus ou moins compliqués, donne une lumière bien fixe et parfaitement distribuée. Trois charbons d'environ 1 millimètre de diamètre sont disposés verticalement avec leurs extrémités en haut, suivant les arêtes d'un prisme triangulaire à section équilatérale (de 14 à 15 millimètres de côté). Au-dessus de ces trois charbons, reliés un à un aux trois phases du cireuit, se trouve suspendu un qua- trième charbon d'environ 25 millimètres, dont l'axe coincide avec celui du prisme. Comme celte disposi- tion permet le contact simultané du quatrième char- bon avec les trois charbons inférieurs, on établit facilement trois arcs reliés en étoile et à six cratères. Comme ce sont les cratères qui, dans une lampe à arc, exercent la plus grande partie de l'effet lumineux, la lumière de cette lampe triphasée, grâce à la position des trois cratères supérieurs, est essentiellement dirigée vers le bas, sans l'intervention des réflecteurs des lampes monophasées. La tension d'alimentation peut être abaissée, soit avec des impédances en série, soit à l’aide de trans- formateurs, le circuit secondaire étant disposé en triangle ou en étoile. Les connexions avec le régula- teur sont faites de façon que la bobine à gros fil soit traversée par le courant d’une phase; la bobine à fil mince se trouve en dérivation entre une phase et le quatrième charbon ou entre«deux phases, suivant la tension plus ou moins élevée. La construction d'un régulateur à deux champs tournant en sens opposés, proportionnels à la tension et au courant respective- ment, ne présenterait évidemment aucune difficulté bien sérieuse. M. Righi se sert toutefois d’un réglage à la main, à l’aide d'un appareil simple que nous ne décrirons pas. Lorsqu'on amorce d’une façon quelconque les ares intermédiaires entre les trois charbons, en tenant le quatrième suffisamment éloigné pour ne pas être léché par les flammes et en le rapprochant petit à petit jusqu'à ce qu'un dernier mouvement donne lieu à la formation des trois cratères du quatrième charbon, on n’observe pas, pendant le déplacement, une varia= tion bien marquée de laconsommation ni de la lumière. Une fois les trois cratères formés, on observe cepen- dant très souvent une réduction de la consommation, en même temps que la lumière, d’abord fluctuante et mal distribuée, devient fixe et subit une augmentation ———_ —__——_—_—_—_—_——————apaaLL rer 1 L'Elettricista, n° 14, 1910, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE oo très considérable, en se distribuant d’une façon plus appropriée à l'éclairage. Sans vouloir maintenir que ce dispositif encore expérimental doive donner a priori un rendement lumineux plus élevé que les autres lampes triphasées, M. Righi tient à constater que, plus les cratères sont nombreux, plus le rendement lumi- neux est considérable. Un autre fait intéressant et que l'auteur étudie en détail, c'est que le charbon supérieur présente une consommation excessivement faible et que, dans cer- laines conditions spéciales, les cratères sont rem- placés par des tubercules très lumineux pointant vers les charbons inférieurs. L'arc triphasé de Mercanton peut être maintenu à une fréquence minima de 17 alternances à la seconde, ce qui s'explique par le grand rapprochement des trois cratères et le fonctionnement simultané d'au moins deux ares (de facon que les charbons ne se refroidis- sent que difficilement). Comme le dispositifde M. Righi comporte six cratères et une concentration de chaleur encore plus forte, il est à espérer que l'arc pourra se maintenir à des fréquences encore plus basses. Si l’on se rappelle que la limite de fréquence inférieure des arcs monophasés est voisine de 25, et que la plupart des installations de traction triphasées présentent 15 alternances, on comprend toute la portée possible de ce fait. Les expériences faites jusqu'ici pour vérifier la possi- bilité d'un fonctionnement à des fréquences plus basses (en l'absence d’un convertisseur) avec les cou- rants du rotor d'un moteur triphasé asynchrone n'ont pas donné de résultats bien sûrs, la fréquence, variable avec la charge, étant très difficile à maintenir constante. Cependant, l'auteur se propose de reprendre ces expériences aussitôt que des conditions plus favo- rables pourront être établies. $ 4. — Chimie La Table internationale des Poids ato- miques pour 1911. — À la demande du Conseil de la Société chimique de Londres, appuyée par la Société chimique de France, le Rapport du Comité international des Poids atomiques paraïitra dorénavant en octobre de chaque année, à l'ouverture de l’année scolaire, et non plus en janvier. Le Rapport qui vient de paraitre pour. 1911 propose quelques légères modifications à la Table internatio- pale que nous avons publiée antérieurement‘. Ainsi, en se basant sur les travaux de Richards et de Willard, le poids atomique du lithium est fixé à 6,94 au lieu de 7. Celui du strontium est porté à 87,63, d'après les recherches de Thorpe et Francis. Celui du phosphore devient 31,04 (Baxter et Jones) et celui du vanadium 51,06 (Prandtl et Bleyer). D'après les déterminations très soignées d'Archibald, le poids atomique du pla- tine est porté à 195,2. Enfin les poids atomiques des gaz rares deviennent: He, 3,99; Ne, 20,2; Ar, 39,88; Kr, 52,9;Xe, 130,2. L'électrolyse du verre. — MM. A. Heydweiller et F. Kopfermann® ont réussi à introduire électrolyti- quement des métaux lourds dans le verre en employant les sels fondus de ces métaux comme anode. Un petit tube de verre de soude ou de potasse, fermé par le bas, et contenant un mélange fondu de nitrates de sodium et de potassium agissant comme cathode, est immergé dans le sel fondu du métal lourd servant d'anode, et un courant est amené au moyen de fils de platine. De cette facon, on est parvenu à introduire dans le verre les mélaux Na, K, Ba, Sr, Sn, Pb, Cu, Fe, Co et Ag à des températures supérieures à 200° C. ; par 9739 (1909). 9-748; Chem. , Voir Rev. gén. des Se., t. XX, p. 103, 243 73 2 Ann. der Physik, 1910, [4], t. XXXIJ, p. Zentralbl., 1910, t. 11, p. 536. contre, les essais tentés avec Au, Pt et Ur ont un échec, Le métal pénètre dans le verre à létat colloïdal, Ja couleur variant suivant les conditions. Par chauflage, la solution colloïdale se coagule, les métaux les plus nobles se séparant à l'état métallique, tandis que les autres se séparent sous forme d’oxydes. Même sans l'aide du courant électrique, les métaux diffusent de leurs sels fondus dans le verre, mais beaucoup plus lentement que sous l'influence de l’électrolyse. ibouti à $ 5. — Agronomie Une entrave naturelle à Ia maladie du blanc du chêne. — Nos lecteurs ont été mis au courant, par un article de M. P. Vuillemin publié récemment ici même’, de l'existence de la maladie connue, sous le nom de Dlanc du chéne et des pro- blèmes que soulèvent son origine et sa rapide exten- sion depuis 1907. Les procédés onéreux opposés communément aux invasions cryptogamiques sont impuissants contre le champignon, du genre Oidium, qui en est la cause, et l’on pouvait craindre de voir condamnées à disparaitre les plus précieuses essences de nos forêts. Heureusement, les agents naturels qui ont produit le mal semblent engendrer aussi le remède. La maladie a été favorisée par une série exceptionnelle d'hivers doux et d'étés humides. D’après de nouvelles observa- tions de M. Vuillemin, exposées à l’une des dernières séances de l’Académie des Sciences de Paris°®,ces con- ditions météorologiques ont suscité un ennemi naturel à l'Oïdium. Dans le massif forestier qui sépare la Meuse de la Moselle, entre Vaucouleurs et Toul, et dans la Forèt de Haye, près de Nancy, le savant myco- logiste a trouvé, en septembre dernier, un Cicinno- bolus qui détruit l'Oïdium. On trouve cette Sphérop- sidée sur les deux faces de la feuille du Quercus sessiliflora, surtout à la face inférieure. Les plages envahies se distinguent, par un ton gris ou roussâtre, des taches enfarinées caractéristiques du blanc; les appareils conidiens de l’Oïdium sont flétris, couchés; les filaments mycéliens présentent avec une abondance spéciale ces membranes épaissies que M. Ferraris envisageait comme une forme de résistance, mais qui sont des signes de dégénérescence, conformément à l'opinion récemment soutenue par M. E. Foex. Le parasite compromet à la fois la multiplication de l'Oidium par conidies et sa conservation par le mycélium. Il existait sans doute déjà antérieurement à la découverte de M. Vuillemin, car on a remarqué, cà et là, un fléchissement de la maladie, en dépit de conditions météorologiques favorables aux cham- pignons. L'installation spontanée du Cicinnobolus sur l'Oïdiuum du chêne est susceptible de mettre un frein naturel à la propagation et à la persistance de la maladie du blanc. Les forestiers peuvent laisser aux agents naturels le soin d'attaquer de front l’Oïdium, se bornant à les seconder par les mesures hygiéniques qui sont du ressort habituel de la sylviculture. Les qualités combustibles du tabae.— Pour qu'un tabac puisse être considéré comme de bonne qualité, il faut qu'il brûle également, lentement et complètement. Le tabac destiné à la confection des cigares doit, en outre, laisser une cendre blanche ou, au moins, d'un gris très pâle, qui soit très cohérente et ne tende pas à tomber facilement en poussière. Ces propriétés dépendent presque entièrement de la nature des constituants minéraux du tabac, laquelle est en 4 P. Vurzcemx : Le blanc du chêne. Rev. gén. des Se. du 15 octobre 1910, €. XXI, p. S12 et suivantes. 2 C. R. Acad. des Se. de Paris, t. CLI. p. 647 (10 octobre 1910). 884 relation étroite avec le sol où pousse le tabac et les engrais qu'il reçoit. MM. T. A. Henry et S.J. M. Auld' viennent d’analysér un grand nombre d'échantillons de tabacs de toute nature, et les résultats obtenus leur permettent de confirmer le fait que le principal facteur qui influe sur les qualités combustibles du tabac est la quantité de potasse contenue dans la cendre. La chaux et la magnésie sont aussi des constituants importants et invariables de la cendre de tabac: mais leur influence se borne pratiquement à blanchir la cendre, ce qui leur donne ure grande importance pour le tabac destiné aux cigares. Toutefois, un excès de chaux signilie généralement une réduction de la potasse, de sorte que les sols essentiellement calcaires ne conviennent pas à la culture du tabac. Les sulfates et les chlorures sont nuisibles aux qualités combustibles du tabac, el les sols qui en contiennent sont également impropres à la culture de la plante. En ce qui concerne les engrais à fournir aux planta- tions de tabac, la potasse doit être appliquée libérale- ment, à moins que le sol n’en soit très riche; mais les engrais azotés et les phosphates ne doivent être donnés qu'en quantités suffisantes pour assurer une bonne culture. La meilleure forme d'application de la potasse est celle de cendres de plantes ou de bais ou de débris végétaux. La situation prépondérante de Cuba, Java et Sumatra dans l’industrie du tabac pour cigares est probablement due en majeure partie aux grandes réserves de potasse assimilable accumulées dans leur sol par le dépôt des feuilles des arbres des forêts. $ 6. — Sciences médicales La rage dans l’agglomération parisienne de 1904 à 1909. — M. Maurice Letulle vient de présenter au Préfet de la Seine un très intéressant Rapport sur cette question. Dans le département de la Seine, la proportion des animaux mordeurs reconnus enragés a, dans l'espace de ces six dernières années, diminué d’une facon très remarquable. Durant cet intervalle, le Service de la police sanitaire des animaux a reconnu 460 animaux enragés sur un total de 7.660 animaux ayant mordu soit des hommes, soit des animaux. Or, l’année 1902, à elle seule, avait indiqué un total d'animaux enragés (474) supérieur à la somme des six années en question (1904-1909). La diminution est donc saisissante ; au este, elle est régulièrement décroissante, puisqu'en 1909 la statistique a donné 13 cas d'animaux enragés, chiffre plus de 13 fois moindre que celui de 1904 | (172 cas). Les espèces animales qui mordent le plus ont été, par ordre de fréquence, les chiens (6.143), les chevaux (4.379) et les chats (108). Quant aux autres animaux mordeurs « exceptionnels », on relève (sur 30 cas) surtout les ânes, les singes, puis le porc, le renard, voire même un lion. Au cours de cette période sexennale, l'étude com- parative des animaux enragés de Paris et de la banlieue fournit quelques données importantes. Tout d'abord, elle montre une décroissance à peu près parallèle des cas urbains et des cas suburbains ; mais on remarque, en même temps, une proportion plus considérable de la rage chez les animaux suburbains (249 cas en six ans) que chez les animaux parisiens (211 cas). De 190% à 1909, le nombre des personnes mordues par des animaux, dans le département de la Seine, a été, en bloc, de 7.576. Sur ce chiffre global, 307 personnes furent mordues par des animaux reconnus enragés, dont 483 en banlieue etseulement 124 à Paris. La proportion des enfants mordus par rapport aux adultes est beaucoup plus élevée en banlieue (26,8 °/, qu'à Paris (16,9 °/,). Ces 307 personnes ont été traitées à l'Institut Pasteur ; on n'a eu à déplorer qu'un seul 1 Bullet. Imp. Institute, A910, &. NII, p. 142. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE décès en 1904; il n'y en à eu aucun dans les cinq dernières années. Le département de la Seine, qui demeura durant de longues années un foyer redoutable de rage entretenu chez nos animaux domestiques, se libère peu à peu de cette terrible endémie, la plus évitable cependant des maladies infectieuses, et l’on peut prévoir, à l'heure actuelle, la disparition prochaine de la rage à Paris. Ce beau résultat est dû avant tout à la capture des chiens errants, dont près de 300.000 ont été sacrifiés depuis 24 ans dans le département de la Seine. Celle- ci doit être encouragée par tous les moyens et pour- suivie sans un instant de relâche, surtout dans certaines communes de la banlieue comme Boulogne, Saint Ouen, et surtout Vincennes, Saint-Maurice et Charenton, qui semblent conserver des foyers persistants de rage canine. Seule, cette mesure permettra de supprimer le fléau. La taxe est aussi une arme énergique, qui devien- drait très puissante si le législateur décrétait la légalité de la médaille annuelle appendue au collier des chiens avant acquitté l'impôt. T7. — Géographie et Colonisation A Résultats généraux de la seconde Mission Charcot dans FAntaretique. — La librairie Gauthier-Villars vient de faire paraître les Æapports préliminaires sur les travaux exécutés dans lAn- tarctique par la Mission Charcot, de 1908 à 1910. En attendant les publications spéciales détaillées qu'annonce le chef de la Mission, ces résumés per- mettent de se faire une idée générale exacte de l'im- portance des résultats obtenus. On sait que la Mission était partie sous le patronage principal de l'Académie des Sciences et du Muséum d'Histoire naturelle, non dans le but d'approcher le plus possible du pôle Sud, mais pour compléter les découvertes géographiques faites précédemment par le français, au S. W. de la Terre de Danco, et surtout pour exécuter des observations scientifiques de toute nature, dont le programme avait été minutieusement tracé par une Commission spéciale. Le nouveau navire de M. Charcot, le Pourquoi-Pas, construit et aménagé en vue de l'expédition, arriva à l'ile Déception (Shet- lands du Sud) le 22 décembre 1908, et c'est seulement en janvier 1910 qu'il a quitté les glaces australes. Cette campagne comporte donc deux croisières d'été et um hivernage. La première croisière (1908-1909) mena les voyageurs, par le détroit de Gerlache, le long des Terres Graham et Loubet, dont le levé hydrographique fut exécuté par M. Bongrain. Ils reconnurent ensuite les parages de l'Ile Adélaïde, séparée de la Terre Loubet par tout un archipel, et la baie Marguerite qui, au sud de cet ensemble, échancre profondément le continent antarc- tique. L'hivernage, impossible au sud du cercle polaire, eut lieu par 65° lat. S. environ, à l'ile de Petermann, non loin de la station précédente du Français. À leur mouillage de Port-Circoncision, les membres de læ Mission firent des observations variées, très suivies et très précises. Ils tentèrent aussi quelques raids pour en étendre le rayon. La croisière de l'été 1909-1910 leur permit non seulement de longer la Terre Alexandre I, qui fut reconnue comme une f/e, mais de voir vers le sud une terre nouvelle située par 7 0°: les découvertes de Cook et de Bellingshausen se trouvaient ainsi précisées. La banquise fut ensuite longée vers l'ouest, au milieu de glaces flottantes, et jusqu'à 7260 Jong. W. de Paris : le point le plus méridional atteint par les voyageurs cités. et plus tard par la Belgica, fut dépassé au cours de cetie navigation. Les nouvelles découvertes géographiques de la Mis- sion Charcot répondent donc exactement au but que 1 In-50 de 1x-103 p.. juillet 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE l'on s'était proposé : elles fixent jusque vers 7098. le contour occidental de la presqu'ile antaretique opposée à l'Amérique du Sud, et des iles qui la bordent". L'épaisseur de la banquise a empêché de poursuivre cette étude si intéressante plus loin dans la direction de la mer de Ross; mais l'étendue des rivages qui restent à reconnaitre de ce côté n'est plus que de 1.100 kilomètres environ, c'est-à-dire relativement faible. Les difficultés rencontrées ontété les mêmes que dans le voyage du Français : impossibilité d'atterrir sur une côte presque toujours escarpée, et défendue par une bordure quasi-continue de glaces; lutte incessante contre les icebergs; nombreux coups de vent de tem- pète ; souffrances occasionnées par les basses tempéra- tures et par l’anémie polaire. Les appareils emportés, aussi parfaits que possible et très nombreux, ont pu cependant être tous utilisés soit en marche, soit en station. Grâce à la clarté remarquable de l'air en été, le téléobjectif a fourni 150 excellents clichés des côtes. A Port-Circoncision, il n'y avait pas moins de 23 appa- reils installés pour les observalions météorologiques, et tous donnaient lieu à des lectures fréquentes. Les sauts brusques de température, l'oxydation du mer- cure ont malheureusement amené quelques accidents de fonctionnement. En somme, les résultats acquis font le plus grand honneur au courage et à l'endurance des observateurs. Parmi ces résultats, on doit signaler d’abord, au point de vue géographique, la confirmation des faits précédemment observés par la Belgica et par le Fran- çais, en ce qui touche la configuration du sol. Les pics et autres accidents qui hérissent littéralement cette partie de l’Antaretique sont le produit d'éruptions anciennes. De la Terre de Graham, notamment, ont été rapportés des échantillons de diorites gris-clair et de granits roses, dont les bancs sont injectés de filons andésitiques. Dans l'ile Déc-ption se constatent cepen- dant quelques phénomènes de volcanisme actuel, surtout des sources thermales (l'une à 67) et des fumerolles. Les volcans éteints dépassent 2.000 mètres dans la Terre de Graham, dans l'île Adélaïde et dans la Terre Alexandre If", Le relief continental est bordé par une série d’archipels qui s'étendent des Shetlands du Sud à la Terre Alexandre [° : îles, îlots, récifs sont allongés du N.E. au S. W. comme les chenaux qui les séparent, et comme le rivage lui-même. Cette traînée ininterrompue de rochers, les anses en forme de fjords qui les creusent, les terrasses côtières qui ont été remarquées en plusieurs points, tout rappelle le rivage sud du Chili et le « Skiærgaard » norvégien. En ce qui concerne le climat, les observations les plus intéressantes (les résultats des croisières n'ayant pas été dépouillés encore) sont celles qui ont été réunies par M. Rouch pendant l'hivernage à Port- Circoncision (trois cent dix-sept jours). Elles montrent que l'hiver fut relativement doux, mais avec de fortes variations de pression et d'humidité, et des sautes brusques de vent. En février et mars 1909, dominèrent les vents de N.E. et de N., amenant des bourrasques, des chasse-neige, et en même temps des baisses brusques du baromètre (720%%,7 en mars), accom- pagnées de montées du thermomètre (maxim, moy. de mars, Æ50°,95). Dès mars et avril, la hauteur des précipitations devient très considérable (332®,7 en mars, 32,3 en avril); les vents du S. W. commencent à prendre plus d'importance, les minima moyen et absolu baissent, les grands froids s'établissent. La tem- pérature moyenne de juillet tombe à —6°,79, avec un ! Les levés nouveaux s'étendent sur 2.000 kilomètres. 885 | extrème de — 230,9. Le 7 septembre, la moyenne de [a | journée donne encore —19°,20; durant ce mois, malgré la constance assez grande des vents du Sud, les variations barométriques demeurent fortes : la pression descend jusqu'à 705 millimètres, et l'on a des rafales de vent avec des vitesses de 22 à 30 kilomètres l'heure. Conditions des plus pénibles à supporter, | comme on voit. M. Rouch, également chargé (avec M. Godfroy études d’océanographie, a noté la hauteur persistante de la houle, et continué les études au marégraphe commencées sur le français. Les' sondages ont confirmé l'existence d’une forte dépression marine, vers le cercle polaire, à l'ouest des des terres reconnues la sonde, descendue à 2.500 mètres au large de l'Ile Brabant, a donné 4.300 mètres par 699,5 S. et 5.100 mètres par 669,5. Au point de vue des glaces, M. Gourdon à constaté l'importance del’enneigementdessommets, plusgrande qu'il y a cinq ans; de mars à novembre, la hauteur de neige à l'Ile Petermann a été de 2 mètres. Faut-il voir une relation entre ce fait et la recrudescence de pluies qui s'est produite depuis deux ou trois ans à peu près partout? Il explique, en tous cas, que les phénomènes glaciaires aient été trouvés plus impor- tants qu'en 1905, dans tous les endroits visités de nouveau. Aux Shetlands, l'ile Snow était presque com- plètement recouverte par sa calotte de glaces; le cratère immergé de l'ile Déception était aux trois quarts rempli par un épais icefield formé d’icebergs agglomérés. Partout la banquise, souvent recouverte de neige jeune, avait une grande extension. A l'ile Join- ville, la banquise a empêché l'atterrissage en plein été. Plus au Sud, il n’y avait devant la Terre Loubet que des « icebergs », mais le champ de glaces était entier à partir de la baie Marguerite. A la Terre Alexandre, il portait les fronts des glaciers terrestres, et à l’ouest | il s’étendait à perte de vue, sur une épaisseur de 2 mètres, formé de glaces jeunes. MM. Liouvelle et Gain se sont de nouveau consacrés à l'étude de la flore et de la faune antarctique. Les mêmes rares spécimens de flore terrestre ont été trouvés que lors du voyage du Français : l'Aira antarc- tiea et le Colobanthus erassifolius, ce dernier récolté jusqu'à l’île Jenny, par 68° S. L’unique diptère de l'Antarctique (Belgica antarctica) a été retrouvé à l’état complet ou en larve, avec quelques collemboles, acariens et phyllopodes, à Port-Lockroy, à l'Ile Wandell et à l'Ile Petermann. 21 dragages au chalut, poussés jusqu'à 460 mètres de profondeur, des pêches de plankton, la préparation de pièces anatomiques, patho- | logiques, les études de microbiologie donneront évi- demment un grand prix scientifique à ce voyage. Les géographes s'intéresseront, enfin, aux remarques précises faites sur les déplacements des animaux antarctiques. A l'Ile Petermann, les premiers pingouins papous commencèrent à paraître fin juillet, par les passées de vent du N. E., mais pour remonter ensuite vers le N. Dès août furent capturées des femelles de phoques pleines. Fin octobre, à l'Ile Wandell, de nom- breux phoques furent rencontrés avec leurs nouveau- nés, pendant que les « rookeries » de pingouins recom- mencçaient à se peupier et que revenaient la plupart des autres oiseaux. Les pingouins pondent jusqu'en février, époque où la végétation antarctique atteint son maximum d'intensité. En mars, les oiseaux, leur mue achevée, abandonnent les rookeries, les sternes d’abord, les goëlands, les pétrels, les pingouins en dernier lieu. Au contraire, on voit arriver du sud les chionis (en mai surtout) et les cormorans. J. Machat, Professeur de Géographie au Lycée Buffon. SS6 HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉERURGIE I. — FABRICATION. $ 1. — Statistique. Le ler occupe une place prépondérante dans la mélallurgie; c’est le roi des métaux, à la fois par ses propriétés mécaniques et son bon marché 100 francs la tonne, contre 500 francs pour le zinc, le moins cher après lui. Sa production mondiale, considérable, croit avec une rapidité tous les jours plus grande. La statistique de 1908 donne pour sa produetion en millions de tonnes" : PAYS PRODUCTEURS FONTE FER ET ACIER REBNEP LE RS AMIS IE UE 3.4 2.4 AnueletesneRe 5 92 6,5 Allemagne . . : . . . . 40,5 41,2 HEalS UNIS NC 16.0 14,2 ROSSIB IE Sn TEE 2 | DROIT MEME GT EME FO TNE 6.3 3,0 MORALE CE ONE 48.1 39,4 La France arrive donc seulement au quatrième rang el très loin derrière l'Angleterre. Elle possède cependant en Lorraine l'un des plus beaux gise- ments de minerais de fer du monde; elle exploite de nombreuses mines de houille. Mais elle n'est pas une nation industrielle; il y a à cela deux causes : Pour un grand nombre de Francais, l'idéal est d'être bourgeois, c’est-à-dire de ne rien faire, d'avoir une petite propriété près d’une grande ville et de pêcher à la ligne. Aussitôt une petite fortune acquise dans le commerce ou par héritage, on se retire à la campagne en y vivant chichement sans rien produire, pas même d'enfants. Pour d’autres Francais, ne devant jamais avoir les moyens de vivre de leurs rentes, l'idéal est encore d’être pro- priétaires, mais en travaillant dur pour vivre el ayant beaucoup d'enfants pour leur faire labourer la terre. C'est là le paysan francais, la partie la plus saine et peut-être la plus heureuse de notre population. Mais cette culture par petits proprié- taires est peu productive; pour nourrir le pays avec toutes ses bouches inutiles, elle doit réquisi- lionner la majeure partie des bras actifs : il n'en reste plus assez pour l’industrie. $ 2. — Minerais. Les gisements de minerais de fer sont, pour un pays, une grande richesse. Pendant longtemps on en a usé, sans même penser un instant à leur épui- sement final. Le Président Roosevelt, poussé par son ani, le grand industriel et milliardaire améri- 3 Rev. de Mélal., t. VEL bis, p. 430 (1910). cain Carnegie, a, pendant sa présidence, fait des efforts considérables pour s'opposer aux Etats-Unis au gaspillage des richesses naturelles de toutes. sortes. Non content de s'occuper de ses concitoyens, il a provoqué la réunion à la Haye d’une Confé- rence internationale, dans le but d'étendre les mêmes mesures de protection au monde entier. On a décidé de dresser tout d'abord une stalistique des réserves de minerais de fer; le résultat de cette étude vient d'être communiqué au Congrès international de Géologie, tenu à Stockholm dans les derniers jours de juillet”. Les gisements de minerais de fer complètement parfailement connus contiennent 22 milliards de tonnes de minerais, capables de fournir 10 milliards de tonnes de fer. Avec la pro- duction actuelle de 50 millions de tonnes de fonte par an, nous aurions done, en supposant celle pro- duction stationnaire, pour 200 ans devant nous. D'autres gisements connus, mais non encore inventoriés, peuvent renfermer approximalivement 123 milliards de tonnes de minerais, capables de fournir 53 milliards de tonnes de fer. Il y a enfin des pays encore inexplorés, comme une partie de l'Asie, de l'Afrique et même de l'Amérique du Sud, réservés pour de nouvelles découvertes. Ces chiffres se rapportent seulement aux mine- rais riches exploités aujourd'hui, à plus de 35 °/, de fer. Mais arrivera certainement, avec les progrès de l'industrie et les besoins de la con- sommalion, à traiter des minerais descendant à des teneurs de 25 °/, de fer. Les réserves de ces derniers minerais ne peuvent être chiffrées : elles semblent inépuisables. La croûte terrestre, il ne faut pas l'oublier, renferme en moyenne, dans son ensemble, 5 °/, de fer. explorés et l’on S 3. — Fonte. Le plus gros élément du prix de revient de la fonte est la dépense de combustible. Aussi, des efforts incessants sont-ils faits pour réduire la consommation de coke au haut fourneau. Les deux tentatives actuelles les plus intéressantes sont : l'emploi de l'air sec d'après le procédé Gayley*, et l'emploi de l'air enrichi en oxygène fabriqué par le procédé de Linde et de Claude”, L'air sec se répand lentement. En Europe, une seule installation est en marche régulière, celle de ! Rev. de Métal., &. VII bis, octobre (1910). ? Rev. de Métal., t. I, p. 650 (1904) et Rev. gén. des Sc. du 15 déc. 1904, €. XV, p. 1059. 5 Rev. de Métal., t. VIS, p. 368 (1910). HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE 887 Dowlais, dans le pays de Galles, Il y en aura pro- chainement en Allemagne une seconde aux usines Deutsch Kaiser appartenant à la famille Thyssen, les plus grands producteurs d'acier d'Europe. Les frais considérables de premier établissement font hésiter bien des métallurgistes. Il est difficile d’ail- leurs d'expliquer, au point de vue théorique, l’in- fluence de la suppression de la petite quantité de vapeur d'eau contenue dans l'air; d'autre part, l'incohérence des renseignements expérimentaux fournis au début par l'inventeur à laissé une mau- aise impression. L'utilité de l'enrichissement de l'air en oxygène est, au contraire, facile à comprendre. En élevant la température de combustion et en diminuant la masse des fumées, on augmente évidemment la proportion de chaleur utilisée dans le four, mais le prix de revient de l'oxygène est un obstacle sé- rieux. Dans ces dix dernières années, ce prix de revient à déjà baissé dans le rapport de 100 à 1 et la diminution continue. D'après les théories de J. W. Gibbs et de Van Et Hof, il faut, pour séparer de l'air 4 mètre cube d'oxygène, dépenser la quan- tité de travail nécessaire pour comprimer cette quantité d'oxygène de 1/5 d'atmosphère à À atmo- sphère et 4 mètres cubes d'azote de 4/5 d’'atmo- sphère à 1 atmosphère, soit en tout 0,1 cheval- heure. L'usine d'Ougrée, en Belgique, installe en ce moment le procédé Claude, dans le but d'enrichir l'air de l’un de ses hauts fourneaux en oxygène", S 4. — Acier. L'emploi du four électrique est en train d'amener une véritable révolution dans la métallurgie de l'acier. Il ne s'agit plus seulement de vagues espoirs : on est en présence de faits accomplis. Le nombre des fours électriques en fonctionnement dépasse aujourd'hui la centaine ?; leur nombre et leur puis- sance individuelle s’accroissent tous les jours. Présentant en janvier 1905, aux lecteurs de la Revue de Métallurgie, la première description un peu précise des nouvelles méthodes de l’électrosi- dérurgie, je disais * : « La fabrication au four électrique de l'acier fin, de l'acier à outils, a été pratiquement résolue par l'usine de la Praz; elle fabrique et vend couram- ment ces aciers. Cette industrie comportera, semble-t-il, dans l'avenir, des développements plus considérables encore; elle pourra avantageu- sement s'appliquer aux produits demi-fins, c'est-à- ! G. CLauve : L’oxygène industriel. Rev. gén. des Sciences du 30 novembre 1909, E XX, p. 928. 2 Rev. de Métal., t. V, pp. 85, 396, 857 (1908), et t. VI, p. 589 (1909). # Jtev. de Métal., L. II, p. 23 (4905). » dire aux aciers à canons, à blindages, aux lôles de chaudières, Peut-être, en prédisant un brillant avenir à la nouvelle métallurgie de l'acier, sem- blerai-je bien oplimiste; si ces prévisions se réali- sent, il en résultera une révolution dans la métal lurgie, non pas égale certainement, mais au moins comparable à celle de la cornue Bessemer et du four Siemens. » Voilà cinq ans écoulés et ces prévisions sont aujourd'hui pleinement justifiées. A Sheffield, le four électrique remplace le creuset pour la fabrica- tion des aciers à outils ; aux États-Unis, en Angle- terre, en Allemagne, il commence à intervenir dans la fabrication de produits tout à fait ordinaires, comme les rails. Des fours de 15 tonnes, pouvant traiter 250 tonnes par journée de travail, sont com- binés avec la cornue Bessemer acide ou basique. L'emploi du four électrique permet, grâce à la neutralité de son atmosphère, l'élimination com- plète du soufre et de l'oxygène. Avec les minerais les plus impurs, on fabrique aujourd'hui des aciers de premier choix. Les fameux minerais à acier, c’est- à-dire minerais purs et manganésifères, ne seront plus recherchés. $ db. — Force motrice. Pour amener l'acier à des formes appropriées à nos besoins, la dépense de force motrice est un élément important des frais d'élaboration. Dans le plus grand nombre des cas : rails, fers de cons- truction, tôles, cette élaboration se fait par le procédé du laminage. De tous les perfeclionnements récents apportés à ce mode de travail, les plus inté- ressants se rapportent à la généralisation de l'em- ploi de l'électricité pour la commande des lami- noirs. Ce nouvel usage de l'électricité ne paraissait pas, à première vue, bien judicieux; le laminoir recoit des à-coups considérables au moment de la mise en prise du lingot, et les dynamos ne possèdent pas un volant d'énergie accumulé d’une puissance comparable à celle des chaudières à vapeur. Pour éviter à chaque à-coup une perturbation générale de tous les appareils alimentés par la même cana. lisation électrique, on a dû intercaler un relais constitué par une dynamo couplée avec un volant en acier pesant un très grand poids et tournant à grande vitesse ‘; cela entraine des installations horriblement coûteuses. Ce procédé de commande des laminoirs se répand cependant de plus en plus. Les usines à fer ont aujourd'hui à leur disposition des sources de puissance motrice relativement très économi- ques et laissées longtemps sans usage : les gaz des 1 Rev. de Müé!al., t. IV, p. 147 (1907). 888 HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE hauts fourneaux et les gaz des fours à coke, excel- lents pour actionner de grands moteurs à gaz; puis les vapeurs perdues des machines à haute pression et des marteaux-pilons très bien appropriées au fonc- tionnement des turbines Rateau à basse pression ‘: machines qui se prètent parfaitement à faire de l’élec- tricité, mais ne conviennent aucunement pour la commande directe des laminoirs. $ 6. — Aciers spéciaux. Les aciers spéciaux, c'est-à-dire les aciers ren- fermant, outre le carbone, un ou plusieurs autres éléments, destinés à leur communiquer des pro- priétés spéciales, se répandent de plus en plus. Primitivement limités aux militaires canons, projectiles, blindages, ils pénétrèrent ensuile dans la construction automobile et ils reçoivent aujourd'hui les applications les plus variées dans la construction des locomotives, des grands ponts métalliques, etc. Les aciers nickel- chrome* sont toujours les plus employés, le chrome servant à donner de la dureté et le nickel à diminuer la fragilité. Cependant, les aciers chrome-vanadium sont devenus en Angleterre d'un usage très général dans l’industrie automobile. L'addilion de vana- dium aux aciers rapides, à outils, recommandée d’ailleurs par F. W. Taylor, l'inventeur de ces aciers, a permis d'en augmenter considérablement la puissance de travail. Dans aucun cas, les addi- tions de vanadium ne dépassent quelques mil- usages lièmes *. Mais la composition chimique n'est pas tout; la qualité d'un acier dépend dans une aussi large mesure des traitements thermiques : trempe et revenu. On s’astreint de plus en plus, dans les usines, à s'aider des appareils de mesure les plus précis pour conduire ces opérations, abandonnées autrefois au caprice des ouvriers. Ce traitement thermique est devenu un véritable travail de labo- raloire scientifique. En Angleterre, par exemple, Brayshaw * trempe les fraises après un chauffage de 1/2 heure à 8509, suivi d'un retour à 750° etmain- tien de cette Lempérature pendant 1/4 heure. On obtient ainsi une grande dureté sans déformation ni tapures. Mais ce chauffage prolongé ne peut plus être fait à l'air; on décarburerail le métal par oxvy- dation. On doit faire le chauffage dans des bains de plomb ou encore de sels fondus, additionnés de cyanures alcalins pour éviter d’une facon certaine toute action oxydante. ‘ Rev. de Môétal., t. I bis, p. 496 (1904). ? Voir J. Escaro : Les alliages industriels de chrome. Ziev, gén. des Sciences du 15 août 1909, p. 662. * Fev. de Métal., t. IV, p: 432 (4907): 1éey. de Métal., t. VII bis, octobre 1940. s Se — Soudure autogène. L'acier une fois laminé en barres ou en tôles n'est pas encore, le plus souvent, sous la forme définitive d'emploi. La construction mécanique doit le transformer en ponts, -charpentes, chaudières et machines de loutes sortes. Une révolution dans la construction mécanique a été produite par l'emploi des aciers rapides de F. W. Taylor; mais c'est déjà de l'histoire ancienne, il n’y a pas lieu d'y revenir aujourd'hui. Ces aciers ont paru à l’'Ex- position de 1900 et, depuis cinq ans au moins, l'usage en est devenu lout à fait général. Il se prépare en ce moment, dans un domaine plus restreint, celui de la réparation des construc- tions métalliques et des pièces de machines, une évolution très intéressante. La soudure autogène de l'acier, combinée avec le coupage à l'oxygène, permet de faire en quelques heures des réparations qui demandaient autrefois des semaines', On com- prend le bénéfice énorme résultant de ja possibilité de ne plus arrêter une machine, et par suite sou- vent un atelier entier, pour une réparation ou une transformation indispensable. Parmi ces applications, une des plus audacieuses est la réparation des chaudières marines”; on en enlève aujourd'hui les parties avariées, pendant la durée d’escale normale du navire, sans arrêter en rien son service, tandis qu'autrefois il fallait le mettre en cale sèche, sortir les chaudières et les transporter à l'atelier. C'étaient des semaines d'im- mobilisation du navire. Pour tenter cette opéra- uon, M. André Le Chatelier s'est appuyé sur un fait signalé par lui depuis longtemps déjà : l'acier n'est jamais fragile au-dessus de 80°. Les soudures, souvent fragiles à froid, ne le sont jamais à chaud, en supposant, bien entendu, la soudure convena- blement faite. Ce mode de réparation a été violem- ment combattu par des personnes sans doute peu au courant du fonctionnement des chaudières et n'ayant pas eu l'occasion de voir l'état de leurs tôles après un temps de service souvent très court; elles sont criblées de fines fissures, résultant des déformations à chaud, et ces fissures pénètrent parfois très profondément dans le métal: aussi, la soudure la plus mal faite, substiluée aux solutions de continuité de ces fissures, constilue toujours un accroissement notable de sécurité. $ 8. — Méthodes d'essais. Un progrès beaucoup trop lent à se produire concerne l'emploi des méthodes précises pour apprécier les qualités des matériaux. Combien de nos aviateurs se sont Lués faute d’avoir su vérifier Rev. gén. des Sciences du 30 janvier 1904, p. 76 et suiv. Bev. de Métal., t. N, p. 816 (1908). HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGII la résistance des différentes parties de leur machine! La métallurgie du fer est certainement, de toutes nos industries, la moins en retard à ce point de vue. Les essais de dureté, soit par la bille de Brinell, enfoncée dans les métaux malléables, soit par la bille de Shore, rebondissant sur les mélaux durs, donnent aujourd'hui très rapidement, el à peu de frais, le moyen d'apprécier lune des qualités les plus importantes des métaux”. L'absence de fragilité est, avec la dureté, la qualité la plus essentielle des métaux ; elle est mesurée par l'essai au choc sur barreaux entaillés, Ce procédé, proposé il y a vingt ans par M. André Le Chatelier et perfectionné depuis par des ingé- nieurs, tous Français: Frémont, Charpy, Barba, Leblant, Auscher, etc., est entré cette année seule- ment d'une façon définitive dans la pratique indus- trielle. Ce résultat est dû aux ingénieurs allemands ; ils ont fait preuve, en celte occasion, d'un sens industriel remarquable. On se querellait depuis dix ans chez nous sur l'emploi ou le non-emploi de cette méthode, sur le type des appareils ; un beau jour, les laboratoires d'essais et les grandes aciéries allemandes s'entendirent pour s'opposer provisoi- rement à l'adoption prématurée de cette nouvelle méthode, mais en même temps décidèrent d'en faire une étude complète. Il y a un an, un des direc- teurs des usines Krupp, M. Ehrensberger, présen- fait, au nom d'une Commission comprenant les industriels et les savants les plus autorisés d’Alle- magne, un Rapport * tendant à l'adoption définitive de la nouvelle méthode d'essais. Ces propositions ont été ratifiées à l'unanimité par le Congrès interna- tional de Copenhague. Le dispositif d'éprouvettes recommandé a été celui de notre compatriote M. Charpy S 9. — Cahiers des charges. Une des principales applications des méthodes d'essais est de servir de base aux conditions de réception imposées par les consommateurs aux fournisseurs. Il reste à ce sujet encore bien des progrès à réaliser. Un trop grand nombre de cahiers des charges sont remplis de vieilleries, absolument surannées. Constructeurs et fabricants d'acier ont leur part de responsabilité. Les consom- mateurs, trop souvent ignorants des conditions de fabrication et des qualités des matériaux mis en œuvre par eux, croient mieux se défendre en multi- pliant dans leurs cahiers des charges des conditions inutiles, souvent même contradictoires, et le résul- 1 Voir L. Guuuer: Les méthodes modernes d'essais méca- niques des produits métallurgiques. Rev. gén. des Se. du 15 août 1907, p. 615, et du 30 août, p. 664. 2 Rev. de Métal., 1. V, 207 (1908). 3 Rev. de Métal., L. NI, p. 1126 (1909). 89 lat de ces complications inutiles imposées aux fabricants est de diminuer la qualité des produits livrés en augmentant en même temps leur prix d'achat". Beaucoup de fabricants, par contre, se figurent avoir intérêt à maintenir l'ignorance du consommateur el ne font rien pour le guider dans la rédaction de cahiers des charges raisonnables. Il y a là un obstacle sérieux au progrès de l'industrie. Il ne faut pas exagérer pourtant l'im- porlance de celle critique adressée aux mélallur- gistes. D'autres industriels la méritent bien plus encore, par exemple les fabricants de produits réfractaires, de ciment, de papier. Certains fabricants, cependant, soucieux de main- tenir la réputation de leurs usines, comprennent l'intérêt de mettre les consommateurs en mesure de se rendre compte de la qualité des produits ; leur exemple sera peu à peu suivi. Je citerai Lout parti- culièrement dans cet ordre d'idées une fabrique de pièces pour automobiles, celle de M. M. Derihon, près de Liége *. Toutes les pièces fabriquées sont soumises aux deux essais de dureté et de fragilité. Le consommateur recoit avec lout lot de pièces livrées une fiche donnant les résultats d'essais pour chaque pièce fabriquée, y compris les pièces man- quées et rebutées; il peut ainsi juger de la faible pro- portion des rebuts de fabrication ; c’est là une ga- rantie importante pour les pièces livrées. IT. — RECHERCHES SCIENTIFIQUES. $S 1. — Constituants des aciers. Les recherches scientifiques sur les aciers conti- nuent à être toujours aussi actives. Deux de leurs constituants : l'austénite et l'osmondite, ont donné lieu à des conclusions intéressantes. L'austénile est la solution solide de fer et de carbone sous l’état y, non magnétique; elle est normalement stable au-dessus des points de trans- formation de l'acier. Son étude est assez délicate, en raison de la difficulté de la conserver à la tempéra- iure ordinaire. M. Baykofl*, reprenant une méthode due à M. Osmond : attaque au rouge par une (race d'acide chlorhydrique dilué dans un courant d'hy- drogène, a définitivement démontré l'homogénéité absolue de ce constituant aux températures élevées. M. Maurer ‘ a reconnu la possibilité de conserver par la trempe l’état austénitique dans un acier à 2°}, de manganèse et 1,6 °/, de carbone. L'ancienne troostite, aujourd'hui appelée osmon- dite, a été étudiée par MM. Benediks, Heyn et Maurer. Leurs recherches concordantes condæ 1 Rev. de Métal., t. IV, p. 1041 (19909). SV _095 He 2 Rev. de Métal., t. NI, p. 403 (1910). SC € 3 Rev. de Métal., &. VI, p. 829 (1909). QI SRE ANS + Rev. de Métal., t. NI bis, 490 (4909). UIILIBRAR Y Z\ 3 EN 890 à attribuer à l'osmondite la constilution d'une perlite à éléments très fins. La cémentite, un des constituants essentiels de la perlite, serait à un état de finesse comparable à celle des précipités colloï- daux. Cette osmondite serait caractérisée, d’après M. Heyn', par la rapidité de son attaque et par l'intensité de la coloration prise sous l’action des acides. A teneur égale en carbone, les constituants des aciers trempés se classent, d'après l'intensité crois- sante de la coloration d'attaque, dans l'ordre sui- vant : austénile, martensite, osmondite. L'étude des fontes renfermant, outre le carbone, du phosphore ou du soufre, à été recherches actives au Wüst, à lInstitut pelle. Enfin, M. Malweieff* à trouvé, au cours de recherches poursuivies à mon laboratoire un nou- veau réactif pour caractériser le phosphure de fer, la solution bouillante de picrate de soude neutre, sans aclion sur la cémentite, et, pour caractériser l’objet de du Professeur d'Aix-la-Cha- laboratoire métlallurgique la cémentite, l’oxalate d'ammoniaque. S 2. — Classification. des constituants des aciers à donné lieu cette année à de vifs débats. La ques- lion avait élé discutée et tranchée au Congrès international des Méthodes d'essais, réuni en sep- La classification tembre dernier à Copenhague”, mais les conclu- sions adoptées ont été vivement atlaquées par M. Osmond*. Le débat porte sur le point suivant. Un acier trempé de facon à le rendre martensitique, échaufté successivement à des températures croissantes, se transforme progressivement, en partant de la mar- tensite pour arriver finalement à la perlite. Le Congrès a décidé de retenir, dans la gamme de pro- duits intermédiaires, un seul constituant : l'osmon- dite, caractérisée par une vitesse maxima d'attaque aux acides. M.Osmondvoudrait reteniretdénommer trois étapes intermédiaires de la transformation : la {roostite, l'osmondite et la sorbite; il rappelle l'exemple du spectre solaire : au milieu de radia- tions de longueurs d'onde régulièrement variables, on dénomme sept couleurs différentes. Voici la liste arrêtée par le Congrès : Constituants homogènes (métaral) : Ferrile : fer pur ou sensiblement tel. Graphite : carbone pur de densité 2,25. Cémentite : carbure défini, Fe'C. Martensite : solution solide, magné- tique, de fer et de carbone, toujours métastable. # Rev. de Métal, t. V, p. 911 (1908). ? Rev. de Métal., t. VIT, p. 855 (1910). 3 Rev. de Métal., t. NI, p. 1122 (4909). * Rev de Môtal., &. NI, p. 1183 et 1188 (1909). HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE Austénile : solution solide, non magnétique, de fer et de carbone, stable seulement à chaud. Constituants hétérogènes (agréqat) : Perlite : agrégat, généralement résoluble au microscope, de ferrite et de cémentite. Üsmondite : agrégat, non résoluble au microscope, de ferrite et de cémentite. La froostite ancienne est identique à l'osmondite actuelle. M. Osmond proposerait d'appliquer au- jourd'hui le même nom à l’état intermédiaire entre la martensite et l’osmondite. Il conserverait le nom de sorbite à la perlite mal formée ou trop fine pour être facilement résoluble au microscope. $ 3. — Scories. La présence des scories interposées dans l'acier préparé par fusion est une cause sérieuse de dimi- nution de qualité. On voit facilement les scories sur un morceau d'acier poli soumis à l'examen microscopique; leur pouvoir réfléchissant est infé- rieur à celui du métal. La nature chimique de ces scories est très variable. La méthode servant à reconnaitre les sulfures est très élégante”; on applique sur la surface polie du métal une feuille de papier photographique au gélatino-bromure d'argent imprégnée d'une solu- tion acide diluée. L'hydrogène sulfuré dégagé par l'acide colore en noir le bromure d'argent. La feuille de papier ainsi impressionnée est ensuite fixée et conserve une reproduction très fidèle de la répartition du sulfure dans le métal. Des lingols entiers d'acier de 1 mètre et plus de hauteur ont élé ainsi traités au laboratoire du Professeur Wüst. Les impressions obtenues sont affichées sur les murs du laboratoire et mises sous les yeux des élèves; ce sont là des documents extrêmement instruetifs. M. Matweieff *, dans une étude faite à mon labora- toire de la Sorbonne, est parvenu à caractériser les scories formées d'oxydes de fer et de manganèse, celles par exemple du fer puddlé, par l’action réduc- trice de l'hydrogène au rouge. Elles sont ramenées à l'état métallique et prennent alors, par un rapide polissage, un éclat égal à celui de la masse envi- ronnante du métal. Il reconnait les scories des aciers préparés sur sole basique, scories renfer- mant toujours des ferrites de chaux, par l’extinc- lion de la chaux de ces ferrites au moyen d’une solution de carbonate d’ammoniaque chauffée au bain-marie. Les silicates métalliques des aciers Bessemer acides résistent, au contraire, à l’action des différents réactifs. Cette méthode d'examen des scories ouvre un nouveau champ de recherches ‘ Rev. de Métal., t. NII, p. 1098 (1910). 2 Rev. de Métal., t. NII. p. 441 et 848 (4910). : HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE 891 relatives à l’action des différentes scories sur les propriétés mécaniques du métal. $ 4, — Propriétés à chaud des aciers. L'acier possède, aux lempéralures comprises entre 100 et 400, des propriétés très singulières, sans analogies dans aucun autre métal. La ques- tion a élé compliquée par les affirmalions, en apparence contradictoires, employées pour énoncer ces propriélés. Tous les aciers, dit-on couramment, sont fragiles au bleu, c'est-à-dire vers 300°; c'est un fait connu de tous les praticiens. M. André Le Chatelier, par contre, pose en principe qu'aucun acier n'est fragile au-dessus de 100. Les deux affirmalions contraires sont exactes, mais, dans les deux cas, on ne donne pas le même sens au mot fragile. Les bons aciers cassent au bleu avec un travail de ruplure encore nolable, mais, par com- paraison avec leur résistance à la température ordinaire, ils sont fragiles. Les mauvais aciers, par contre, deviennent meilleurs par échauffement au bleu; par comparaison, ils ne sont pas fragiles. Des expériences récentes de M. Guillet® ont singu- lièrement éclairé et précisé ces faits. Tous les aciers doux, par exemple, bons ou mauvais, se cassent au bleu avec une dépense de travail voisine de 10 kilogrammètres par centimètre carré. Les bons aciers doux cassent à froid avec 30 kilo- graminètres environ el les mauvais avec moins de 1 kilogrammètre. Des expériences récentes de M. Charpy? ont précisé une autre propriété non moins singulière de l'action de la chaleur sur les aciers. D'après d'anciennes expériences de M. André Le Chatelier, un acier, légèrement déformé à 300° ou déformé à la température ordinaire et ensuite chauffé à 300°, subit une altération considérable de ses propriétés mécaniques. M. Stead avait reconnu, d'autre part, un développement parfois considérable de la fragi- lité dans certains aciers extra-doux chauffés à 650°. En réalité, tout acier doux déformé à froid, puis chaufté entre 650 et 800°, cristallise très rapide- ment et devient très fragile. Cette observation de M. Charpy donne l'explication de bien des ruptures inopinées, restées jusqu'ici inexpliquées. $ 5, — Viscosité des aciers. En présence des recherches si nombreuses déjà faites sur les métaux, on doit, le plus souvent, se contenter, dans les études nouvelles, de chercher à préciser certaines propriétés déjà connues. M.Guil- let”, secrétaire de la Faculté des Sciences de Paris, vient cependant d'appeler l'attention sur une nou- 1 Rev. de Métal., {. VIT, novembre 1910. ? Rev. de Métal., t. VU, p. 654 (1910). 3 Rev. de Métal., t. VI, p. 885 (1909). velle propriété des aciers, la viscosité interne, En étudiant des diapasons construits avec des métaux différents, il a observé un amortissement du mou- vement vibraloire très variable d'un échantillon de métal à un autre, et, de plus, un accroissement progtessif de cet amortissement au fur et à mesure de la vibraloire. prolongation du mouvement L’allération du métal et sa rupture sont ainsi reconnues el annoncées d'avance. L'étude de cette propriété jettera sans doute quelque jour sur la résistance, très inégale, aux efforts alternatifs des différents aciers employés à la fabrication des bielles et manivelles dans les ma- chines motrices ou des-essieux porteurs dans les véhicules. Wôbhler avait signalé depuis longtemps l'importance de l'essai des mélaux aux flexions alternatives. Les expériences cette voie n'ont pas encore conduit à des conclusions faites dans bien précises; elles sont en effet, avec les mé- thodes actuelles, très longues et, par suite, très coûteuses; aussi n'onl-elles pas été très nom- breuses. La méthode de M. Guillet d'accélérer considérablement la réalisation de ces expériences el peut-être d'en tirer des conséquences sans attendre la rupture définitive. Il suffira de constater une augmentation notable du coefficient de viscosité pour ètre certain de l’altération du métal. En tout état de cause, l'étude d'une propriété nouvelle d'un corps est toujours très intéressante ; il en découlera certainement des conséquences importantes, peut-être pas cependant dans la direc- permettra lion prévue au début. $ 6. — Quelques propriétés chimiques des aciers. Les ferrosiliciums, d’un usage courant dans la métallurgie, ont, à différentes reprises, occasionné des empoisonnements mortels par le dégagement de gaz toxiques. Entre autres, sur un bateau trans- portant une certaine quantité de ces alliages, cinq personnes couchant dans une cabine voisine des barils renfermant la matière périrent asphyxiées. Ces accidents tiennent à des dégagements d'hydro- gène phosphoré et arsénié, provenant d'impuretés des ferrosiliciums. Fait assez singulier, les alliages d'une teneur voisine de 50 °/, sont de beaucoup les plus dangereux, et leur transport a dù être interdit. M. Lebeau', professeur à l'Ecole de Pharmacie, a donné l'explication très simple de cette particularité. Les ferrosiliciums à 50 °/, ont la propriété de se pulvériser spontanément par le fait d'une transformalion dimorphique, et, une fois en poudre, ils offrent à la vapeur d'eau une surface d'attaque infiniment plus considérable. Les 1 Rev. de Métal., t. NI, p. 907 (1909). 892 HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE autres alliages, pulvérisés, sont aussi dangereux, mais ils ne se pulvérisent pas spontanément. La question de la rouille de l'acier fait en ce moment l'objet de recherches très actives dans différents pays. En particulier aux Etats-Unis, le | M. Wologdine’ a poursuivi systématiquement à mon laboratoire des recherches sur tous les pro- duits réfractaires employés aujourd’hui à la con- struction des fours. Le tableau I ci-dessous résume ses résultats principaux : Tagceau |. — Propriétés des produits réfractaires employés à la construction des fours. CONDUCTIBILITÉ ; : en calorie MATIÈRES RÉFRACTAIRES —_————_——__——— 0,003 0,002 0,006 0,015 0,014 à 0,00% à 0,003 à 0,007 à 0,025 à 0,023 Argile réfractaire. Silice Magnésie. Graphite . Carborundum |par 1 centimètre cube pour 1° et 1" PERMÉABILITÉ en centimètres cubes par 1" et 1 centimètre cube sous 1 centimètre d'eau DENSITÉ POROSITÉ apparente Ministère de l'Agriculture, en présence des récla- mations des cultivateurs se plaignant de voir leurs fils de clôture se couper rapidement, insfitua des expériences très développées sur ce sujet; elles ont déjà conduit à des résultats importants. L'altérabi- lité de l'acier, plus grande que celle des anciens fers puddlés, parait tenir à la fois à la présence de manganèse el à l'inclusion de certaines scories ; les sulfures, en particulier, semblent être des centres d'attaque très dangereux. Les chimistes améri- cains” ont, à cette occasion, imaginé une méthode très ingénieuse pour suivre la localisation de la rouille du fer. L'échantillon est noyé dans une gelée d'agar-agar renfermant quelques millièmes de phénolphtaléine et quelques centièmes de ferricya- nure de fer. Les points attaqués donnent lieu à de | larges taches de bleu de Prusse, tandis que les parties indemnes s'entourent d’une auréole rouge. III. — QUESTIONS DIVERSES. $ 1. — Matériaux réfractaires. La fabrication des métaux exige des tempéra- tures très élevées, etil est difficile de trouver, pour es parois des fours ou les sables des moules, des matériaux réfractaires résistant à ces hautes tem- pératures et présentant, en outre, certaines quali- tés accessoires utiles à divers points de vue : par exemple, un faible coefficient de dilatation pour prévenir les fissuralions pendant les changements de température, ou encore une conductibilité calo- rifique suffisamment faible pour réduire les pertes | par rayonnement. Or, dans l'industrie de l'acier, la quantité de chaleur ainsi perdue est bien supé- rieure à la quantité de chaleur utilisée dans l'opé- ration elle-même. ? Rev. de Mélal., À. NIL, p. #33 (1910). J'ai étudié moi-même les sables de fonderie. Le tableau IT donne quelques chiffres obtenus : Tagceau Il. — Propriétés des sables de fonderie. V'ERMÉABILITÉ en centimètres cubes par 1/ et 1 centimètre cube sous { centimètre d'eau RÉSISTANCE à l'écrasement en kilogs par 1 centimètre carré PROVENANCES | calciné Sermaize Indret . : Montceau fin. Emeri et 5 0/,silicate. $ 2. — Education technique. Les problèmes de l’enseignement technique pré- occupent très vivement en ce moment les métallur- gistes étrangers. On vient d'inaugurer à Aix-la- Chapelle un magnifique Institut métallurgique ; sa création est le résultat des efforts persévérants du Professeur Wüst et de la générosité des métallur- gistes, en particulier de la famille Krupp, qui à donné plusieurs millions pour l'érection des bâti- ments. Les achats d'appareils de laboratoire repré- sentent, à eux seuls, une dépense de 200.000 francs. En Angleterre, on s'occupe aussi très vivement de la question, mais sans avoir abouti jusqu'ici à des résultats bien tangibles. Aux Etats-Unis, dotés déjà de magnifiques écoles techniques, les préoccupations sont d’un autre ordre. [l ne s’agit pas de créer de nouveaux insti- donner à leur fonctionnement la tuts, mais de 1 Rev. de Metal., + VI, P- 762 (1909). 2 Rev. de Métal.,t. NI, p. 1256 (1909). 3 Voir L. Marcnanp : Les tendances nouvelles de l'ensei- snement technique et professionnel aux Etats-Unis « Aer. gén. des Sc. du 30 janvier 1940, L. XXI, p. 59 et suiv HENRY LE CHATELIER — PROGRÈS RÉCENTS DE LA SIDÉRURGIE meilleure orientation. Carnegie”, cependant, vient de fonder à Pittsbourg une nouvelle Ecole techni- que. Ses professeurs sont recrutés parmi d'anciens industriels. Les élèves sont astreints chaque année à un stage de trois mois dans une des usines de la région; une entente avec les industriels a permis de donner à cette organisation un caractère entiè- rement pratique. Les élèves sont recus et payés sur le pied des employés ordinaires de l'usine. F. W. Taylor *, le fameux inventeur des aciers “apides, mène une campagne très ardente pour changer l'esprit des universités et écoles techniques supérieures. Elles exercent, à son avis, une action démoralisante sur les jeunes gens en les sous- trayant pendant quatre années à toute discipline. Ils sont ensuite incapables, à leur entrée dans la vie active, de comprendre les nécessités de l’indus- trie moderne. Les affaires industrielles constituent des organismes extrêmement délicats, ne pouvant utilement fonctionner sans une parfaite coordina- tion de tous les mouvements, c'est-à-dire sans une discipline absolue dans les grades inférieurs. $ 3. — Liberté du travail. La question des syndicats des ouvriers est, en ce moment, un des plus graves problèmes de l’indus- trie. Les Américains ont attaqué ce problème par des méthodes différentes, toutes très intéressantes. L'open shop, c'est-à-dire l'atelier où l'ouvrier non syndiqué peut librement travailler à côté de l’ou- vrier syndiqué, est devenu une sorte de drapeau autour duquel se groupent non seulement les indus- triels, mais encore une grande partie de la popu- lation dans les luttes électorales. Le sentiment de la liberté individuelle, bien. plus développé aux Etats-Unis, permet d'obtenir des résultats difficiles à imiter chez nous. Les fondeurs américains ont, pendant près d'une année, arrêté toute fabrication, les grosses usines soulenant les petites de leurs capitaux, et ils ont réussi à faire admettre le prin- cipe de l’open shop par tous les ouvriers fondeurs. Un journal de métallurgie, The Iron Trade Review, a cessé pendant six mois sa publication, sans rien perdre de sa clientèle. Il avait annoncé son inten- tion de reparaitre seulement en open shop. Aujour- d'hui, il met régulièrement ces mots en gros carac- tères sur la couverture de chaque numéro. Ces résultats ont été obtenus de haute lutte, et parfois la guerre a été très dure. Une usine de constructions mécaniques appliquant le système de l'open shop aurait eu, au dire de journaux améri- cains, douze ponts, construits par elle, dynamités. Par contre, F. W. Taylor ‘, toujours prêt à se ‘ Rev. de Métal.,t. VII bis, p. 528, 1910. ? Jev. de Métal., &. VI. p. 64S, 1910. de Métal. {. VIT. octobre 1910. 3 Prev. 893 mellre à la tête des initiatives intelligentes, a entre- pris de résoudre le problème du travail par une voie différente. 11 s'adresse aux syndicals el essaie de les convaincre dela possibilité d'augmenter dans Loutes les usines d'au moins 56 °/, les salaires des ouvriers, à charge pour eux de travailler à pleine production et d'accepter certains perfectionne- ments dans l'organisation du travail. Il serait pos- sible de doubler dans toutes les usines le rende- ment de chaque ouvrier et de chaque machine: ouvriers et patrons ont un intérêt commun à cel accroissement de rendement. e $S 4. — Pierre Martin. Nous terminerons celle revue rapide et trop incomplète des progrès récents de la Sidérurgie en ‘appelant un des grands progrès, bien ancien, celui-là, de la Métallurgie, car il remonte à qua- ‘ante-cinq ans déjà : la découverte des procédés pour la fabrication des aciers sur sole, due à notre compatriote Pierre Martin. Cette découverte a été rappelée cette année à l'actualité par une fête très touchante, offerte au vieil inventeur, âgé aujour- d'hui de quatre-vingt-cinq ans. Le Comité Forges de France avait convoqué les métallurgistes du monde entier à venir rendre hommage à Pierre Martin; M. Millerand, ministre des Travaux Pu- blics, a présidé la cérémonie et a remis à l’inven- teur la croix d'officier de la Légion d'honneur. L'Allemagne était représentée par M. Schrüdter, président de l'Association des Métallurgistes alle- mands, la Belgique par M. Greiner, directeur des Usines Cockerill à Seraing, enfin l'Angleterre par M. Lloyd, secrétaire de l’/ron and Steel Institute. En l'absence du président du Comité des Forges, M. Guillain, alors gravement malade, M. Schneider a très délicatement souhaité la bienvenue à l'illus- tre octogénaire, venu au banquet entouré de tous ses enfants. M. Henry Le Chatelier a retracé l'histo- rique de sa découverte; les représentants des pays étrangers ont successivement pris la parole pour s'associer à l'hommage rendu à notre compatriote, et, enfin, le Ministre des Travaux Publics a clos la série des discours en rappelant les services rendus au pays, non seulement par Pierre Martin, mais par des son père, son grand'père el ses oncles, tous active- ment engagés autrefois dans le développement des chemins de fer et de la métallurgie francaise. Pierre Martin avait depuis trente-cinq ans aban- donné l’industrie et s'était retiré à la campagne. Il y vivait loin de tout contact avec ses anciens colla- borateurs ou concurrents. Son nom était constam- ment sur les lèvres de tous les métallurgistes, mais son existence avait fini par être oubliée. Henry Le Chatelier, Membre de l'Institut, Professeur à la Sorbonne. 894 PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS LA FORÊT ET LES INONDATIONS La récente crue de la Seine à ramené l'attention du publie sur la question du déboisement. De tou temps, la présence des massifs boisés à été consi- dérée comme exercant une influence favorable sur l'alimentation des sources et la régularisation du régime des cours d'eau; les forêts ont été regar- dées, à juste titre, comme offrant une protection contre les inondations, qu'elles préviennent et dont elles atténuent la violence. Il serait, cependant, exagéré de croire que le débordement de la Seine, qui a causé lant de désas- tres dans la capitale et dans sa banlieue, provient de l'absence de forêts dans le bassin de ce fleuve. Les foréts occupent 18,5 ‘/, du territoire dans le bassin de la Seine ; c’est un taux de boisement suffisant pour qu'on n'ait pas à redouter la produc- tion de crues soudaines, comme celles que subis- sent à l'improviste les cours d'eau descendant des versants dénudés des Alpes, des Cévennes et du Plateau central. En réalité, la crue de la Seine est due, d'une part, à une copieuse pluviosité qui à saturé les terrains perméables de son bassin et les a rendus aussi étanches que les terrains imper- méables ‘, d'autre part, à une coïncidence fâächeuse des crues de l'Yonne et de la Marne, dont les eaux, démesurément grossies par des précipitations doubles de la normale, ont amené en même temps à Montereau et à Charenton un volume d’eau con- sidérable”. Toutefois il convient de remarquer que le déboisement a pu jouer un certain rôle dans la crue de 1910. Le bassin du Grand Morin, affluent de la Marne, est constitué par des terrains relative- ment perméables; mais, à la suite de pluies persis- lantes et continues, comme celles qui se sont pré- sentées en janvier dernier, le ruissellement se pro- duit sur ces terrains gorgés d’eau comme sur des lerrains imperméables, et donne naissance à de véritables torrents. La masse d’eau ainsi recueillie met un jour et demi pour arriver à Paris et produit, à elle seule, une hausse de 0,40. Or, ainsi que l’a fait observer très justement M. de Villemereuil au dernier Congrès des Sociétés savantes, le Grand Morin, qui draine précisément, avec son affluent ‘ Sur une surface totale de 79.000 kilomètres carrés, le bassin de la Seine comprend 45.000 kilomètres carrés de lerrains perméables, soit 57 0/9, et 34.000 de terrains à sous-sol imperméable, soit 43 9/0. 2 Le méme fait s'était déjà produit en 1740 et en 1802; les eaux de la Seine s'étaient élevées le 25 décembre 1740 à 1,90 à l'échelle du pont de la Tournelle, soit à 0®,60 au- dessous de la cote observée le 29 janvier 1910; le 3 janvier 1802, elles avaient atteint 7,45. | l'Aubetin, la partie non boisée de la Brie, s'est | signalé par la soudaineté et l'intensité de ses crues, tandis que les autres affluents de la Marne’, qui recueillent les eaux de la partie nord, notablement plus boisée, ont un régime beaucoup plus lran- quille. Il est bien évident que le reboisement d'une partie du bassin du Grand Morin aurait pour effet d'augmenter la capacité de saturation de son sol et de rendre ses crues moins désastreuses*, Notre dessein n'est pas de rechercher ici les causes de l’inondation, dont les funestes consé- quences sont présentes à toutes les mémoires, ni d'examiner si réellement des déboisements impor- | Lants ont été opérés, dans ces dernières années, dans le bassin de la Seine, etsi cette transformation du sol au profit des cultures est l’un des facteurs de la catastrophe dont Paris ressent encore les suites. Prenant la question de plus haut, et à un point de vue plus général, nous voudrions déter- miner quelle est exactement la valeur de la pro- leclion que la présence des forêts peut offrir contre les inondations, préciser le rôle qu'elles jouent sur l'alimentation des sources el le régime des cours d'eau. Des hommes, d'une réelle valeur et dont l'opinion à un certain poids, ont cru devoir mettre en doute leur action sur ce point. Il n’est pas inu tile d'exposer leurs idées à ce sujet el de faire connaître les faits sur lesquels repose l'opinion contraire. L'exécution des travaux de reboisement dans les régions montagneuses, la conservation des forèts existantes, consacrée par la législation des princi- pales nations civilisées, reposent sur cette convic- tion que la présence des forêts régularise le débit des cours d'eau, alténue les ravages causés par les inondations et assure l'alimentation des sources et des rivières. Idées très anciennes d’ailleurs, puisque, bien avant que füt discuté le problème de l'arbre et de l’eau, l'homme adorait l'arbre, sym- bole de fécondité et d’immortalité, vénérait la forêt, | 1 Notamment le Surmelin. ? Dans son Rapport à M. le Président du Conseil, M. Alfred Picard, au nom de la Commission spéciale instituée pour prévenir les inondations de la Seine, préconise le reboise- ment d'au moins 140 000 hectares dans le haut bassin de l'Yonne et d'environ 150.000 heclares dans la Brie, ce qui aboulirait à la reconstitution de la vaste forêt qui couvrait le pays des Meldi, au temps de César, Il estime que les reboisements ainsi créés reliendraient, pendant une période pluvieuse de dix jours, 400 mètres cubes d'eau par hectare, soil au Lotal 64 millions de mètres cubes, PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS mère des sources", Pline l'Ancien, le célèbre nalu- raliste, signalait déjà des inondations causées par des défrichements”. Au xvut siècle, florentin Viviani, disciple de Galilée et de Torri- celli, enseignait, à propos des crues de l'Arno, que la présence des bois complétait l'action des bar- rages, en ralentissant la vitesse des eaux, et préve- nait les érosions. « La destruction des forêts, le manque de sources perpétuelles et l'existence des torrents, écrivait l'illustre Alexandre de Humboldt, sont trois phénomènes étroitement connexes entre eux. » Il ajoutait : « Par suite du déboisement, les eaux coulent sans arrêt, sans avoir le temps de s'inlilltrer; elles entraînent les terres des pentes, se réunissent dans les plis de terrain, y forment des torrents qui ravinent le sol et entrainent une masse de cailloux et de sable sur les terres qu'ils traversent et dans les fleuves où ils débouchent. » Moreau de Jonnès,membre de l'Institut de France, établit, dans un mémoire couronné en 1825 par l'Académie royale de Bruxelles, que les forêts des montagnes entretiennent les sources, grossissent le débit des rivières, et affirme que « la conserva- tion et l'extension des forêts sont, pour les sociétés modernes, des mesures d'économie publique non moins indispensables que l’'embouquement des rivières et le creusement des canaux ». En 1797, l'ingénieur Fabre, dans son Æssai sur la théorie des torrents et des rivières, avait attiré l'attention sur les ravages des torrents et indiqué comme cause originelle de leur formation la des- truction des bois qui couvraient les montagnes. Alexandre Surell, ingénieur des Ponts et Chaus- sées à Gap, publie, en 1841, son magistral ouvrage sur les Torrents des Hautes-Alpes, dans lequel il préconise le reboisement comme le remède efficace des désastres engendrés par leur incessant déve- loppement. C'est lui qui fut le véritable promoteur de l’œuvre du reboisement en France et l’on ne doit pas oublier que les travaux entrepris par les forestiers français, d'après les principes émis par lui, ont servi de modèles aux travaux similaires exécutés en Suisse, en Autriche, en Espagne, en Italie, aux Indes, au Cap, etc. Il semblait donc que l'action régulatricé des forêts sur le débit des cours d'eau, son influence favorable sur la diminution des inondations, comme sur l'alimentation des sources et des rivières, ne devait plus être contestée par personne. Dans un article publié dans la Géographie, M. Charles Rabot se range à une opinion toute différente : « En France, sous l'influence de l'Ecole forestière, ee. li, * Pau Burraccr: Le culte des arbres et les idées des An- ciens sur le rôle des forêts. Rodez, 1907, E. Carrère. * « Plerumque verô damnosi torrentes corrivantur, detracta l'ingénieur #9: dit-il, on attribue aux bois loutes les vertus et on met sur le compte du déboisement Lous les maux. Voici plus de cinquante ans qu'il est admis comme dogme scientifique qu'en raison de leur capacité de rétention des eaux pluviales les forêts ont la pro priélé d’alténuer les grandes crues des fleuves el que le déboisement est la principale cause des inondations ; c'est également à la déforestation que l'on attribue les diminutions progressives des niveaux sourciers et des débits d'étiage, si remar- quables dans ces dernières années. En un mot, nous regardons les forêts comme les régulateurs des écoulements, comme d'immenses éponges recueillant les précipitations atmosphériques, quel- que abondantes qu'elles soient, et les restituant ensuile progressivement. « D'après les Rapports présentés par des hydrau- liciens à la dixième réunion de l'Association perma- nente du Congrès de Navigation, tenue en 1905 à Milan, il faut singulièrement en rabattre de cette influence de la forél sur les cours d'eau et sur les sources". » M. Rabot s'appuie sur les Rapports présentés au Congrès de Milan par MM. Keller, Lauda et Wolf- schütz pour conclure que l'influence de la forèt sur les écoulements des eaux pluviales est nulle en temps de crue, qu'elle est nulle sur le régime des sources, mais qu'elle est capable de retenir les ter- rains en pente, de diminuer le volume des matières entrainées par les eaux de ruissellement, d’atténuer les érosions, d'empêcher les éboulements et les glissements de terrain, sauf le cas de placages gla- ciaires. M. Ch. Rabot ajoute qu'au Congrès de Milan les partisans de la forêt n'ont présenté aucun fait, aucune observation à l'appui de leur thèse, se bornant à des affirmations, fournir de preuves ”. Nous avons démontré ailleurs que ces conelu- sions sont beaucoup trop absolues et qu'aueun des rapporteurs n'a cité des faits ou émis des considé- rations qui permettent de nier l'influence favorable des forêts sur les inondations *. Tous admettent, au contraire, l’action modératrice des massifs boisés sur le ruissellement, tout à fait mécanique, indé- pendant de l’absorption; presque tous constatent que la présence des forêts retarde l’arrivée des crues au talweg dansles régions boisées. M. Wolf- schütz reconnait que le reboisement de quelques sans collibus silva, continere nimbos ac digerere consuela. » PLINE, /Vat. Hist., XXXI, 30. 1 Cn. Ragor : La Dégradation des Pyrénées et le Régime des cours d’eau, in La Géographie du 15 septembre 1907, p. 166 et suiv. 2 Ca. Rasor : Loc. cit., p. 167, 169, 170. 3 La capacité rétentionnelle de la Forèt, son action sur les sources et les cours d’eau. Revue des Eaux et Forêts des 4er et 15 janvier 1909, 896 kilomètres carrés peut « exercer une influence sensible sur le régime eaux de certaines régions limitrophes des forêts en question ou des régions déboisées, sans que cette influence locale et restreinte puisse s'étendre au delà »°'. M. Keller admet que la présence de la forêt sur les pentes des montagnes retarde la congélation du sol, le rend plus perméable et « facilite l’infiltration utile à l'alimentation durable des sources® ». M. Lauda ne nie pas le moins du monde la capacité rétention- nelle de la forêt; il fait observer seulement qu'elle se produit surtout après une période de sécheresse el qu'eile n'agit plus dans le cas de chutes d'eau exceptionnellement abondantes”. M. Rabot a d’ailleurs omis, dans l’article précité, d'analyser le Rapport de M. Lokhtine qui contient des faits extrêmement probants et nombreux rela- lifs à l'action de la végétation forestière sur le débit des sources et des cours d’eau. Voici les conclusions de ce rapport, qui sont à retenir : « Les forêts constituent un facteur bienfaisant, agissant favorablement sur l'abondance d'eau dans un pays en général, et en particulier sur Palimenta- tion des ruisseaux et des rivières : c'est pourquoi la destruction forêts doit étre considérée comme dangereuse”, » Ces conclusions doivent être rapprochées de celles qui terminent le Rapport de M. Lauda, repro- duites par M. Rabot dans la Géographie. « L'utilité de la forêt en général, de même que la qualité précieuse qu'elle possède de protéger le so] contre les glissements, paraissent d'autant plus justifiées qu'elle retient en même temps les éboulis, el ses avantages au point de vue de la diminution des matières charriées par les cours d’eau, notam- ment dans les bassins des sources, sont si impor- lants, que cette raison seule peut motiver l'entre- lien le plus actif possible de la culture forestière? ». des des En réalité, le rôle de la forèl est complexe et il convient de l’étudier pour se rendre compte des contradictions que renferment les différentes opi- nions exposées ci-dessus. La forêt est douée d'une puissance de transpira- lion considérable. Le sol etles feuilles abandonnent peu à peu 3) à 50 °/, de l'eau de pluie dont ils ont élé imprégnés. En outre, loutesles parties aériennes des arbres, mais surtoutles organesfoliacés, expul- sent une grande quantité de vapeur d’eau. Un ! Wozrscnürz : Rapport au Congrès de Milan, p. 9. * KecLer : fapport au Congrès de Milan, p. 15, A6, 17. * LauDA : lapport au Congrès de Milan, p. 31. * Lokunie : apport au Congrès de Milan, p. 11. LauDa : Joe. cit., p. 33. PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS chène isolé de 6,66 de hauteur, portant environ 700.000 rejette dans l'atmosphère un volume de vapeur d'eau égal à 8,3 fois le volume d’eau tombé dans une année (Fr. Pfaff). J. Sachs a constaté qu'une branche de peuplier blanc, portant des feuilles de 27 décimètres carrés d’étendue superficielle, émet en 12 heures un volume de 52 centimètres cubes d’eau. Le colonel Renard, directeur de l'Ecole d’Aéros- tation militaire de Chalais, a constaté que le refroidissement, dû à la présence, au-dessus des forêts d’une certaine étendue, d’un prisme d'air plus humide et plus froid, se traduit par une des- cente bien marquée du ballon, lorsqu'on arrive au-dessus des massifs boisés. Ce fait à été ressenti notamment par nombre d'aérostiers militaires au- dessus de la forêt d'Orléans, qui peut être consi- dérée comme le type des forêts de plaine, lorsque le ballon se trouvait à une altitude d'environ 1.000 mètres. L'influence du refroidissement parait se faire sentir jusqu'à une hauteur d'environ 1.500 mètres”. La présence d'une colonne d'air humide et froid au-dessus des forêts, qui jouent d'ailleurs vis-à-vis des vents le rôle d'écrans, détermine la condensa- tion de la vapeur d’eau et la chute de la pluie. Les observations de M. Fautrat dans la forêt de Halatte ‘Gise), celles de l'Ecole forestière de Nancy, poursuivies sans interruption depuis 1867 dans 3 stations situées dans la forêt de Haye (Meurthe- et-Moselle), sur la lisière et en rase campagne, établissent qu'il pleut davantage en forêt qu'en plein champ et que la quantité de pluie reçue par le sol forestier est supérieure de 43 °/, en moyenne à celle qui tombe sur la terre nue. Mais, si les forêts attirent et provoquent les pluies, il convient d'ajouter qu'elles agissent comme des régulateurs; leur action condensatrice sur les courants d'air qui les traversent, et qui trouvent une température plus basse et un état hygromé- trique plus élevé, tend à rendre les chutes d’eau à la fois plus fréquentes et moins abondantes, de telle sorte que la même quantité d'eau pluviale qui se précipiterait en une seule fois dans une région déboisée, où la condensation ne s'opère que rare- ment sous l'influence des vents froids, tombe en plusieurs fois dans une région couverte de bois, les masses d'air contenues dans la forêt el au-dessus de la forêt’étant plus humides et plus froides que les masses environnantes. Le rôle condensateur de la forêt est, d’ailleurs, compensé par l'absorption d'une partie de l'eau pluviale dans le sol par les racines des arbres, d'où feuilles, ‘ Congrès international de Svlviculture. Paris, 1900, Jmprimerie Nationale, p. 344. PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS 897 elle est envoyée vers les branches et les rameaux feuillés pour être restituée ensuite à l'atmosphère par la transpiration. L'importance de la puissance «d'absorption des massifs boisés est démontrée par l'abaissement du niveau des eaux souterraines (eaux phréaliques, de pcéxe, puits), qui est plus bas, en toute saison, de 0",30 au moins, sous bois que hors bois dans les régions de plaine. Vient-on à faire disparaitre momentanément l'état boisé par suite des exploitations ou autrement, le niveau de la nappe souterraine remonte par rapport au niveau «u'’elle occupe sous la forêt maintenue intacte. La dépression des eaux phréatiques est plus accusée sous les vieux massifs, en pleine force de végétla- tion, que sous les jeunes peuplements; elle est plus marquée sous les climats secs que dans les con- trées où il pleut beaucoup". Aussi le reboisement «des plaines marécageuses (Sologne, Landes, marais Pontins) a-t-il eu comme conséquence leur assè- chement ef leur assainissement; les racines des arbres y ont rempli l'office de drains et absorbé l’eau qui se trouvait en excès. Une partie des eaux pluviales qui tombe dans la forêt est relenue par les cimes et les feuilles des arbres (13 °/, d'après M. Mathieu, 20 °/, d'après Weinberg). Mais c'est surtout à la puissance consi- dérable d'imbibition de la couche de feuilles mortes, de débris végétaux et d'humus, qui garnit la surface du sol forestier, des mousses, des herbes et des végétaux buissonnants qui croissent sous le dôme de feuillage des arbres, dont l'ensemble forme ce qu'on appelle la couverture, qu'il faut attribuer la rétention de la plus grande partie des eaux pluviales et de celles provenant de la fusion des neiges. Ces eaux, retenues à la surface du sol, pénètrent lentement dans le sol au-profit des nappes souterraines qui donnent naissance aux sources. Une grande partie est d’ailleurs absorbée par les racines des végétaux, par suile du mouvement as- censionnel de la sève, et sert à leur nourriture. La capacité rétentionnelle de la couverture a été établie par des expériences effectuées en Alle- inagne et en France avec une grande précision scientifique. L'espace nous manque pour les dé- crire et nous ne pouvons que renvoyer aux ouvrages Spéciaux”, D'après Gerwig,un mètre carré de mousse retient en moyenne 4.466 kilogs d'eau. D’après Ebermayer, J. Calas et Henry, un mètre cube de feuilles mortes de hêtre absorbe deux fois à quatre 1 Voir à ce sujet les recherches et études de MM. Eber- mayer en Bavière, Vermichelf, Khramoff, Ismaïlsky, Bliznin, Vyssotzky en Russie, E. Henry et Ototzky en France, Pearson aux Indes. Annales de la Science agronomique française ct étrangère, 1902-1903, tome 1; Revue des Eaux et Forêts, 1908, p. 339. 2 Egsenmayer: Die Lehre der Waldstreu. Berlin,1876, p. 51, 471. - REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. foiset demie et jusqu'à huit fois son poids d’eau, un mètre cube de feuilles de chêne neuf fois, un mètre cube d'aiguilles d'épicéa et de pin sylvestre une fois et demie à cinq fois. M. Henry, professeur à l’Ecole nationale des Eaux et Forêts, conclut de ses expériences que, sur un hectare, la couverture formée par des aiguilles d'épicéa, d'une épaisseur moyenne de 0,02, est capable de retenir 105.825 ki- logs d'eau, c'est-à-dire une hauteur de pluie de 10,5. Les massifs d'épicéas retenant et évaporant sur leurs cimes la moitié de l’eau pluviale, il fau- drait une couche d'eau pluviale de 21 millimètres pour que le sol commencàt à s'humecter sous la couverture”. Les opinions des hydrauliciens cités par M. Rabot n'infirment en rien la valeur des expériences que nous venons de rappeler. Voici, d’ailleurs, les con- clusions du Rapport de M. Landa, qui s’est livré, en 1903 et 1904, à des observations minutieuses el très précises sur les quantités d'eau tombée et les écoulements observés dans les bassins de deux rivières de Moravie, la Bistritzka et la Seniza. Le bassin de la première renferme 48 °/, de bois: ceux-ci n'occupent que 27 ?‘/, dans le bassin de la Seniza. « La rétention des eaux de précipitation est dans une certaine mesure plus importante dans le bassin le plus boisé que dans le bassin moins riche en forêts. « Pour des averses dont l'importance dépasse certaines limites — par exemple en temps de crue — la rétention devient moins intense dans le bassin le plus boisé que dans le bassin le moins riche en terrains forestiers, c'est-à-dire que, dans ce cas, après obtention d'un certain degré de satu- ration, le surplus d'eau, que retenait précédem- ment la forêt, se dégage d’une facon plus sensible. « Après une période de sécheresse, l'influence des averses se manifesle plus rapidement et d’une facon plus progressive dans le bassin le moins riche en forêts, landis que l'inverse se produit dans le bassin à plus grande étendue forestière *. » M. Lauda ne nie pas le moins du monde la capa- eilé rétentionnelle de la forêt ; il la reconnait, au contraire, formellement, sauf dans le cas de chutes d'eau extrêmement abondantes, où les rôles sem- blent renversés et où le sol forestier saturé d'eau, non seulement ne retient plus les eaux qui tom- bent du ciel, mais encore laisse échapper en partie l'eau qu'il avait retenue précédemment. M. Lauda a constaté le 10 septembre 1904qu'après une période de sécheresse de plus de trois mois, des pluies d'une intensité à peu près égale survin- 1 E. Hexey : Faculté d'imbibition de la couverture morte. Revue des Eaux et-Korëts, 1904, p. 353 à 361. 2 Laupa : Loc. cit. p. 31. 898 PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS rent dans les deux bassins ; mais le grossissement des eaux n'est devenu sensible dans le bassin de la Bistritzka, plus boisé, que deux jours après la crue survenue dans le bassin de la Seniza, moins riche en forêts. Des constatations analogues ont été faites en octobre 1904”. La capacité rétentionnelle de la forêt après une période de sécheresse est donc bien établie et, si elle n'agit pas dans toutes circonstances, cela prouve que l’action de la couverture a une limite, ce qui n'a rien d'étonnant. En retardant la fonte des neiges et en absorbant une partie notable des eaux pluviales (25 °/, d'après Weinberg), la couverture réduit considérablement le volume et la puissance des eaux de ruissellement. Elle augmente, au contraire, la proportion des eaux d'infiltration. Le feuillage des arbres, la couverture des feuilles mortes, l'humus spongieux, éminem- ment perméable el imprégnable, sont les agents de la lente et profonde pénétration de l’eau à l’inté- rieur de la terre et de l'alimentation des sources. Sur 100 millimètres d'eau pluviale qui tombe sur un terrain boisé, il s'en évapore 102%,5; 20 sont arrêtés par le dôme de feuillage et 25 par la cou- verlure; finalement, 44"%,5 parviennent dans les couches supérieures du sol. En terrain découvert, nous avons vu que la tranche d’eau pluviale n'est que de 77 millimètres; l’évaporation, beaucoup plus active que sous bois, en fait disparaitre 68,3 °/,, soit 522,6; il ne pénètre donc que 241" ,4 d'eau dans le sol. Le gain est, en définitive, de 20% 1 pour la forêt. On peut admettre que, par suite de la présence de la végétation boisée, la pro- portion des eaux d'infiltration est augmentée d’en- viron 80 °/,. Cette fonction de la forêt, si précieuse, a été reconnue de tout lemps. On peut donc dire, avec M. Huffel, que « la forêt est la mère des fleuves, comme le déclaraient nos pères », et que « les tra- vaux de la science moderne n'ont fait que con- firmer la parenté, de tout temps et universelle- ment reconnue, qui relie la source à l'arbre qui l’'ombrage * ». Par suite de l'absorption d'une partie de l’eau pluviale par les racines des arbres et des arbris- seaux qui la constituent et par la couverture, la forêt remplit une troisième fonction. Elle diminue la proportion des eaux de ruissellement, c'est-à- dire des eaux qui ruissellent à la surface du sol, entrainant avec elles des matériaux arrachés aux parties instables du terrain, particules terreuses, grains de sable, débris de roches désagrégées, gra- ! Ibidem, p. 26. ? G. Hurrec : Economie lorestière, I, p. L. Lavaur, 124, Paris, 1904, viers et cailloux. Non seulement elle diminue la quantité de ces eaux sauvages, au profit des nappes souterraines, mais elle leur oppose mille obstacles ; d'abord le feuillage de ses cimes, les branches des arbres, leurs Liges, les brindilles, les feuilles mortes, les mousses qui jonchent le sol, enfin l’inextricable lacis des racines. Au lieu d’ar- river directement au sol qu'elles creusent, les gouttes de pluie rencontrent d’abord le dôme des feuilles qui amortit leur choc; l’eau arrive au sol, ayant perdu de sa force, divisée et tamisée. Là, elle rencontre des milliers de barrages minuscules qui divisent sa masse et ralentissent sa vitesse d'écoulement. Tandis que le sol nu estexposé aux affouillements et aux ravinements, la forêt le revêt d’une arma- ture puissante, le rend plus solide et plus résistant, en même temps qu'il devient plus perméable. En outre, elle retarde la concentration des eaux dans les ravins, ce qui est le meilleur moyen de prévenir les inondations. Sur les terrains dénudés, les eaux torrentielles, dont rien ne modère la vitesse, ruissellent à la surface du sol, l’'entamant sans cesse, le décapant, accroissant leur masse de tous les matériaux détri- tiques enlevés par l'érosion. Leur puissance el leur vilesse augmentent au fur et à mesure qu’elles descendent la pente des versants. Elles viennent grossir au bout de très peu de temps le ruisseau qui coule dans la vallée et qui bientôt se trans- forme en un torrent dévastateur. Sur leur passage, les lits des cours d’eau s'en- combrent et s'exhaussent, les berges dépouillées se corrodent et s’affaissent, les pentes s'écroulent, les glaciers glissent, la montagne est entamée, son relief est abaissé”. Au Congrès de Milan, M. Keller a formellement admis que le déboisement peut contribuer à l’éro- sion du sol dans les régions montagneuses, amener la formation de dépôts nuisibles au pied des pentes, et modifier défavorablement l'écoulement des eaux, /outes les fois qu'aucune couverture végétale ne vient remplacer les forêts ou qu'il se produit une régression de la culture *. M. Ponti, dans Son Rapport au même Congrès, reconnait que la présence des forêts est toujours efficace pour consolider des terrains présentant de fortes décli- vités et réduire le volume des matières charriées ; ‘ Il est reconnu, en effet, que la présence de malières élrangères entrainées dans le courant et charriées avec lui trouble profondément le régime des cours d'eau. Leur puis- sance d'affouillement est considérablement augmentée, la surface des eaux présente une forme convexe, la vitesse est moindre au milieu du lit que sur les deux rives, les berges sont détruites, les flots débordent sur les terres voisines, y répandant des dépôts boueux et stériles. 2 KeLer : Rapport au Congres de Milan, p. 15, 16. PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS s99 leur efficacité est d'ailleurs plus grande si le sous- sol est imperméable *, LIT Maintenant que nous avons étudié et précisé les différentes fonctions de la forêt, essayons de voir quelle peut être son action sur les inondations, puisque c'est là le point spécialement débattu. « Les inondations, dit M. Ch. Rabot, ne sont pas la conséquence de l'économie destructive de l'homme ; elles sont engendrées uniquement par des phénomènes météorologiques et par les con- ditions géographiques et géologiques des terri- loires sur lesquels ils s’exercent. Le bassin fluvial est-il constitué par des terrains imperméables, tels que le granit ou l'argile, et présente-t-il de fortes déclivités? S'il recoit des pluies torrentielles, en quelques heures un flot redoutable naïîtra. Telle est l'origine des terribles inondations de la Loire supérieure, de l'Allier, des torrents cévenols et des rapides montées de l'Yonne. Les rivières possè- dent-elles, au contraire, des pentes douces et traver- sent-elles principalement des terrains perméables, comme c'est le cas pour la Seine, l'Aube et la Marne? Elles ont un régime calme, des crues lentes, généralement peu élevées. Si l'hiver der- nier notre fleuve est sorti de son caractère, c'est qu'au moment où des pluies diluviennes sont sur- venues, les terrains perméables se trouvaient déjà saturés par une copieuse pluviosité. Aussi bien, de mème que les zones imperméables, ils ont laissé les eaux ruisseler à leur surface et toute cette masse liquide s'est précipitée vers le goulot de Paris*. » Dans ces quelques lignes, M. Rabot a mis en lumière l'influence de la constitution géologique du sol sur la production des inondations. Mais ce n'est qu'une partie de la question; nous y revien- drons d’ailleurs. Les facteurs qui concourent à la production des crues sont au nombre de trois : les précipitations atmosphériques d'une intensité exceptionnelle, la constitution géologique du sol et la disposition topographique du terrain sur lequel se produisent les écoulement. Il est superflu de dire qu'il n'y aurait pas d'inon- dations s’il ne se produisait des chutes d’eau extré- mement abondantes ou des pluies continuelles pendant une longue période. En janvier 1910, la quantité de pluie recue dans le bassin de la Seine a été de 100 millimètres, alors que la tranche d’eau pluviale à cette époque n'est normalement ! Ponrt : Happcrt au Congrès de Milan, p. 5. 2 Le Matin du !1 Février 1910, que de 50 millimètres environ. Les inondations de la Loire sont dues généralement à des pluies tor- rentielles soudaines, qui se produisent quelquefois au printemps, plus souvent à la fin de l'été et aux approches de l'équinoxe d'automne. On a observé une chute d'eau de 491 millimètres au Puy, les 23 et 2% septembre 1867, de 203 millimètres du 9 au 13 septembre 1875. La crue d'octobre 1421 a été causée par sept jours de pluies continues", D'après M. Wolfschütz, il est tombé 209 millimé- tres d’eau, en 3 jours, dans le bassin du Rhin, en novembre 1882 ; 215 millimètres d'eau en 18 heu- res, le 2 août 1888, dans le Riesenwald; 187 mil- limètres en 24 heures, en 1897: 184 millimètres en 48 heures, en 1897, dans le bassin de la Traun ; 208 millimètres en 2 jours, en 1899 ; 242 millimètres en 24 heures, à Reichenhall et à Alt-Ausse, le 12 septembre 1899 *, L’orage qui a déterminé la lave de Betpouey (Hautes-Pyrénées), dans la vallée de Barèges, le 9 septembre 1906, a donné 30 millimètres d'eau en 2 heures. Une pareille précipitation a suffi pour accumuler dans une sorte d’entonnoir une énorme quantité d'eau (210 hectolitres sur une surface de 10 hectares), qui, en raison de la déclivité du ter- rain, s'est écoulée de suite sans avoir eu le temps de pénétrer dans le sol et a transformé le ruisseau de Soubralets en un formidable torrent qui a noyé le village sous des flots de boue. D'après Arago, il est tombé le 9 octobre #827, à Joyeuse (Ardèche), 792 millimètres d'eau en 24 heures. Le 25 octobre 1822, on a noté à Gênes en un seul jour 810 millimètres d'eau *. En novembre et en octobre surtout, on constate, au voisinage de la ligne de faite des Cévennes, des précipitations atmosphériques d'une telle intensité qu'elles rappellent celles des tropiques. En 5 jours, du 18 au 22 septembre 1890, on a relevé à la station de Cassagnas (Lozère, 837 mètres d'altitude) 718%%, 5 de hauteur de pluie, c'est-à-dire une plus grande quantité d’eau que celle observée pendant toute l'année dans le reste de la France. En octobre 1903, à Villefort (597 mètres d'altitude), on a noté 691 millimètres en 13 jours, soit 57 milli- mètres par jour ; à Vialas (622 mètres d'altitude), 463 millimètres en 16 jours, soit 28%, 3 par jour; à St-Etienne-Vallée-Francaise (267 mètres d'alti- tude), la hauteur moyenne de pluie observée a été de 40 millimètres pendant 12 jours *. Ce sont des ! Ulysse Roucnox : Recherches sur les inondations de la Loire. 2 Wozrscnurz : Rapport au Congrès de Milan, p. 9. % À Purneah, dans l'Inde, on a constaté une chute d'eau de 890 millimètres en 24 heures, et à Ceylan 960 millimètres le 16 décembre 1897. * Paul Burraurcr : Le Reboisement dans la région des Cévennes. Rodez, 1907. E. Carrère, 900 PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS pluies diluviennes de ce genre, tombant pendant plusieurs jours sur des versants à pentes excessives, constitués par des terrains imperméables comme ceux du versant méridional des Cévennes, qui ont causé les inondations par lesquelles a été désolé le Languedoc à l'automne 1907 et à l'automne 1908. Il est évident que l’homme est nécessairement désarmé en face de pareils phénomènes. « Il faut reconnaitre, dit M. Wolfschütz, que l'homme est impuissant à combattre les causes principales des eaux de crue et des averses anormales qui s'abattent”. » Nous ne pouvons agir davantage contre les pré- dispositions aux inondations provenant de la topo- graphie et du relief du sol. Cependant, nous pou- vons les atténuer par le reboisement, qui oppose des obstacles au ruissellement des eaux de pluie, diminue leur force et leur vitesse et retarde l’arrivée de l’afflux des eaux dans les thalwegs. « Les eaux de pluie, dit M. Ponti, emploient certainement plus de temps pour arriver aux rivières quand le terrain est boisé. » Ce retard dans l’arrivée de l'afflux des pluies dans les régions boisées a donc pour effet d'apporter une notable modération des fortes crues dans les terrains imperméables. M. Marchand cite à ce sujet un exemple typique. Le torrent de Weissenbach, dans le canton d'Appenzel (Suisse), s'enflail autrefois, à Weissen- bach, environ 3 heures après que les orages avaient éclaté sur la montagne; à la suite du déboisement partiel de celle-ci, les crues se manifestèrent à Weissenbach une heure seulementaprès l'apparition des orages. La présence des bois avait donc pour effet de retarder de deux heures la manifestation de la crue et d'augmenter de quatre heures la période d'écoulement. Ce retard suffisait à conjurer les plus grands désasires*?. D'après les ingénieuses expériences de M. Van der Mensbrughe, professeur. à l'Université de Lou- vain, lorsque plusieurs cours d’eau se déversent dans un seul et même bassin, il y a perte d'une surface libre considérable et la disparition de chaque mètre carré de surface amène le développe- ment d’une énergie cinétique capable de donner une vitesse de 54,20 par seconde à une couche de 1/20.000 de millimètre d'épaisseur. L'afflux des eaux dans le thalweg engendre donc une énergie de mouvement d'autant plus redoutable que la vallée est plus resserrée et qu'il y a superposition d’un plus grand nombre de couches superficielles, entassées les unes sur les autres dans un lit étroit. Les conséquences fâcheuses de la transformation de l'énergie virtuelle en énergie cinétique dans les 1 Wozrsçuurz : ne. cit., p. 9. ? Marcnaxp : Le Torrent des Alpes et le pâturage, Arboïis, 1832, p. 21: masses d'eau descendues des versants rapides des montagnes dans les vallées sont encore augmentées par la présence d’une certaine proportion de maté- riaux détritiques. Or, d’après ce que nous venons de dire, la forêt, d'une part, retardant, par sa faculté d'absorption et par les obstacles vivants qu'elle oppose au courant, l’afflux des eaux pluviales dans les vallées, d'autre part, protégeant le sol comme une cuirasse vivante contre les phénomènes de ruissellement et de ravinement, exerce une double action, hydrologique et géologique, quia pour résul- tante une atténualion de la violence des crues. La présence de la végétation boisée a pour effet de substituer aux eaux troubles, chargées de matériaux détritiques arrachés aux versants dénudés, qui augmentent leur densité, des eaux elaires et lim-. pides, n'exercant point de ravages dans les vallées el n'enflant pas démesurément le volume des cours d'eau inférieurs. Elle modifie done très heu- reusement les conditions physiques les plus favo- rables aux inondations et rend les crues beaucoup moins désastreuses*. Si l'homme peut atténuer, par l'augmentation de la surface boisée, les conséquences fâcheuses du relief du sol et de son excessive déclivité au point de vue des inondations, il peut encore agir davan- age et par le même moyen pour modifier la consti- tution géologique du sol. Lorsque celui-ci est constitué par des terrains imperméables, le reboi- sement est indiqué pour combattre le ruissellement, le ravinement, empêcher les érosions et diminuer la quantité de matériaux détritiques entraînés par les eaux d'écoulement. Les terrains perméables absorbent généralement toute l’eau pluviale qui tombe à la surface du sol; ils se laissent pénétrer également par les eaux de ruissellement provenant des terrains imperméables voisins, situés à une altitude plus considérable. Tous ces apports concourent à la formation ou à l'accroissement de nappes souterraines qui donnent naissance aux sources et ne présentent aucun ! Dans le Matin du 21 juin 1910, M. Ch. Rabot écrit : « An lieu d'atténuer les inondations, ainsi qu'on l'affirme gra- tuilement, la forêt en aggrave, au contraire, les ravages en montagne. Il arrive,en effet,que les arbres déracinés par le torrent s'amoncellent en travers de son lit en barricades, derrière lesquelles les eaux s'accumulent avec les morceaux de pierres et de boue qu'elles charrient. Vienne une forte poussée : la digue ainsi formée cède, et il se produit une débäcle très violente, plus destructrice que si le flot s'était écoulé Jibrement. » Il faudrait donc arracher les forêts pour diminuer les ravages des inondations. Ne faudrait-il pas aussi supprimer toutes les lignes télégraphiques et téléphoniques, parce que les poteaux qui supportent leurs fils sont fréquemment renversés par le vent et peuvent causer ainsi sur les routes et les voies ferrées les plus ! graves accidents? Les aésronautes allemands ont bien demandé qu'on arrache les arbres dans les campagnes parce qu'un poirier, isolé dans une plaine immense, à causé la catastrophe du Zeppelin 1°". PAUL BUFFAULT — LA FORÊT ET LES INONDATIONS 901 inconvénient au point de vue du régime des cours d'eau de la région, qui reste régulier. Cependant, si les pluies persistent pendant plu- sieurs jours, même si elles ne sont pas très abon- dantes, il peut arriver que la couche perméable soit salurée.« Ses pores ou ses fissures étant gorgés d'eau, le sol oppose à la pluie un obstacle aussi in- surmontable que le ferait un lit continu de l'argile la plus serrée. Dès lors, tout ce qui tombera des nuages à sa surface y ruissellera et, pendant que le sol aura subi la transformation qu'on vient de dire, le régime de la rivière, de son côté, se métamor- phosera et deviendra torrentiel". » La saturation des terrains perméables peut être combattue par le développement de l’évaporation superficielle du sol, résultant de l'augmentation de l'activité végétale. « Tout le monde sait, en effet, dit l’'éminent géologue que nous venons de citer, que les racines des plantes vont chercher sous terre les masses d'eau nécessaires à leur vie et que ce liquide, transporté dans les feuilles par les vais- seaux du liber, s'y exhale pour enrichir la sève élaborée, ce véritable sang botanique”. » L'émission de vapeur d’eau produite par les plantes est consi- dérable, nous l'avons dit plus haul”, et ce phéno- mène de la /ranspiration végétale permet de rendre compte de l’abaissement du niveau moyen des eaux souterraines sous la forêt et du pouvoir asséchant des arbres dans les régions marécageuses. Le reboisement des terrains perméables peut donc encore combattre dans une certaine mesure les effets des inondations. IV D'après ce qui précède, on peut affirmer que la présence des forêts a une influence favorable sur l'alimentation des sources et le débit des cours d'eau”. « Les forêts, dit un savant géographe, jouent un rôle capital dans ie régime des fleuves. Elles retien- nent quelque temps l’eau des pluies, atténuent l'amplitude des crues. Là où les forêts ont été détruites, on à toujours vu le régime des cours ! SranisLas Meunier : La Crue de la Seine. Revue des Deux Mondes, 1°° mars 1910, p. 173. ? Jbidem, p. 176. D'après les calculs de M. Houiller, le débit de la Somme est tombé, dans le cours du xrx! siècle, de 35 mètres cubes par seconde à 27, bien que le régime des pluies se soit maintenu sans variation. M. Stanislas Meunier attribue la cause d'un changement si manifeste au grand développement des cultures intensives et à la sup- pression des terrains en jachère, qui consomment peu d’eau; la quantité d'eau absorbée par les cultures agricoles installées à la place des jachères correspond presque exac- tement à la réduction du débit observée. dei 4e p. 596. # Voir à ce sujet le rapport de M. Lokhtine au Congrès de Milan el notre étude dans la Revue des Eaux et Forêts, 1909. d'eau devenir plus irrégulier, et les inondations croître en nombre et en violence. » L'influence favorable de la végétation pérenne des forêts sur le régime des cours d'eau et sur la violence des crues résulle de nombreuses observations faites sui tous les points du globe par les géologues, les ingé nieurs, les botanistes, les explorateurs et les géo graphes”. Les débordements de la Loire et de la Garonne ont pour cause le déboisement du Plateau central : et des Pyrénées”. Dralet, dans sa Descriplion des Pyrénées, publiée en 1813, atltribuait déboisement du bassin supérieur de la Têt la dimi- nution du débit de cette rivière. « rivières, autrefois flottables ou navigables, écrit-il déjà au Plusieurs dans le même ouvrage, n'ont manqué d'eau dans la belle saison qu'à mesure que les montagnes qui environnent leurs sources ont été dépouillées de leurs päturages et de leurs forêts.— Si l'on consulte la tradition et les anciens titres, dit-il ailleurs, on verra que plusieurs rivières, autrefois flottables dans les vallées, êntcesséentièrementde l'être ou ne le sont qu'après leur jonction avec d’autres rivières dans les plaines; ce malheur est arrivé dans les parties de la chaîne où les habitants ont exécuté d'immenses défrichements, tandis que les fleuves el les rivières ont conservé le volume de leurs eaux dans les vallées dont les forêts ont été respectées. » Les différentes communications faites dans ces dernières années, aux Congrès de Géographie el du S.-0. navigable, n'ont fait que confirmer cette opinion et la corroborer par des preuves histo- riques indiscutables. « Des crêtes chauves, écrit M. le Professeur Flahault, les Pyrénées s’émiettent et s'écroulent en torrents, en innombrables avalanches prètes à s'effondrer sur les habitations des hommes; elles vont obstruer Bordeaux de leurs débris. Michelet déjà, après Dralet, dénoncait cette épou- vante*. » Hanté par les nécessités de l'heure présente, l'homme imprévoyant a souvent rompu l'équilibre des forces naturelles, en détruisant les forêts Il à modifié profondément, sans s'en rendre compte, le climat et le régime des pluies, tari les sources des fleuves, déchainé les torrents dévastateurs qui vont encombrer les plaines de leurs débris et ensevelir les maisonset les champs sous leurs boues stériles. ——— ——————_—_—_———— toujours 1 P. Cauwéxa D'AzueinA : La Terre, l'Amérique, J Austra- lasie. Paris, 1904, Colin, p. 103. 2 Voir notamment /a Géographie, 1,1 sem. 1900, p. 451,et V, 4er sem. 1902, p. 116 et 306, et Juces Hurer : En Amérique, de San Francisco au Canada, Paris, 1905, E. Fasquelle, p. 461. 3 F. Scnraner et L. GazLouéDec : Géographie de la France, p. 143, 159. 5 Cn. Franaucr : Le devoir des botanisles en matière de Géographie humaine. Discours prononcé au neuvième Con- grès international de Géographie. 902 JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE À TÉNÉRIFE «Après avoir détruit la forêt par le fer et par le feu, il en a livré le reste à ses chèvres. Comme si nous ne suffisions pas à consommer notre ruine, il en appelle d'au delà nos frontières; chaque année, d'innombrables troupeaux, que nous ne repoussons pas, viennent chercher chez nous ce qu'ils peuvent encore dévorer. Et pourtant, c'est la patrie qu'ils atteignent dans ses œuvres vives, la patrie dans ce qu'elle à de plus précieux et de plus sacré, la patrie qu'ils frappent en détruisant la terre même qui engendre et vivilie les fortesraces'. » Dès 1830, la Suisse a pris l'initiative de la régéné- ration et du repeuplement de ses montagnes. Aux Etats-Unis, on a compris aussi la nécessité de pro- téger les forêts et d'enrayer le déboisement. En onze ans, le Service forestier de la grande Républi- que américaine a accru le domaine national d’une surface boisée plus grande que la France entière. « Les forêts sont des réservoirs naturels, écrivait le Président Th. Roosevelt dans un Message adressé au Congrès des Etats-Unis, le 3 décembre 1901. En contenant le cours des fleuves éurant la crue, en l'alimentant durant les époques de sécheresse, elles rendent possible l'utilisation de l'eau qui s'épuisait auparavant en pure perte. Elles empêchent que le sol ne soit délayé et protègent ainsi les barrages- réservoirs de la vase qui tend à les combler. Law conservation des forêts est done une condition essentielle de la conservation de l’eau. »Dans le même Message, il ajoute encore : « The forest and water problems are perhaps the most vital internal ques- tions of the United States. Les problèmes de la forêt et de l’eau sont peut-être les questions d'ordre intérieur les plus vitales pour les Etats-Unis. » Ilest donc absolument regrettable de voir nier, en France, l'action favorable des forêts sur le régime des cours d'eau, alors surtout que les hydrauliciens, sur l'autorité desquels on s'appuie, ont pris soin de faire à cet égard les plus expresses réserves, à telles enseignes que l’un d'eux déclare, en propres termes: « Un jugement définitif au sujet de l'influence de la forêt sur le régime des cours d’eau ne peut encore être rendu, les données d'expérience que l’on possède jusqu'ici ne se rapportant encore qu'à une période relativement courte’. » Paul Buffault, Inspecteur des Eaux et Forêts. L’ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE À TÉNÉRIFE Ï. — ACTINOMÉTRIE. Il est peu de problèmes aussi discutés que ceux de l’actinométrie et nous allons nous efforcer d'en exposer les bases avec impartialité. Par définition, la constante solaire A est la quan- üté de chaleur recue, en dehors de l'atmosphère terrestre, par une surface noire de 1 centimètre carré exposée au rayonnement solaire : cette con- slante sera exprimée en calories-grammes reçues par minute. Suivant les uns, un des buts essentiels de l’actinométrie consiste dans la détermination précise de cette constante. D'autres trouvent que c’est là trop limiter le problème, en le précisant, et voici quelle est leur manière de voir : Tous les phénomènes physiques du Globe, vents et ouragans, Courants et vagues de la mer, circulation de l’eau, aussi bien que tous les phénomènes biologiques, tirent leur énergie de la radiation solaire ; il n'y a guère que les phénomènes voleaniqués, sismiques, le flux et le reflux, qui ne rentrent pas dans cette catégorie. Ainsi, dans la balance générale du Globe, l'insolation intervien- drait du côté des recettes, tandis que tous ces ? FLanaurr: Loc. cit. phénomènes figureraient au compte des dépenses ; si l’on veut espérer l'équilibre de ces deux bud- gets, il faut étudier également des deux côtés : dans cette manière de voir, on considère que la détermination de la constante solaire, en elle-même, est un problème plus spécialement astronomique, qui, jusqu'ici, n'est convenablement résolu qu'avec les moyens spectro-bolométriques, moyens inabor- dables pour la plupart des observatoires. D'ailleurs, si l'on s'attache à la détermination de la constante solaire, une difficulté surgit dès le début : d'après la définition elle-même, la surface réceptrice devrait être théoriquement noire pour toutes les radiations, c'est-à-dire avoir les propriétés d'un radiateur intégral. En toute rigueur, ce pro- blème préliminaire n’est pas encore résolu. Ceux qui sont moins attachés à la détermination rigoureuse de la constante solaire ne se préoccupent pas de cette difficulté du radiateur intégral. Ils disent: un corps creux, noir à l'intérieur, fermé de tous côtés, sauf à l'ouverture qui donne passage au rayonnement, présente les propriétés d'un corps noir absolu avec toute l’approximation que l'on peut désirer; admettons, en effet, que le pouvoir un ‘ Lauva : Rapport au Congrès de Milan, p. 32. JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE À TÉNÉRIFI 903 absorbant de la surface intérieure soit 0,9; on | par la mesure de l'énergie électrique nécessaire aura, pour l'intensité e d'un rayon qui à pénétré dans l'intérieur : ADLESS: ral: Pan 0 1 2 3 réflexions L'intensité . . . e 09e 0,99e 0,99 0e et ainsi, après trois réflexions, on a absorption complète à 1/1.000 près de l'intensité. Divers acti- nomètres se servent de cette propriété : parexemple, le Aowing water pyrheliometer de Abbott; l'acti- nomètre à glace, de Michelson qui est, en principe, un calorimètre Bunsen dans l'intérieur duquel les rayons entrent par un diaphragme de dimensions connues; le pyrhéliomètre d'Angstrom, dans la modification de Scheiner. Aussi bien, il importe peu que le pouvoir absorbant soit complet ou non, pourvu qu'on le connaisse : Angstrôm a montré que, pour les pyrhéliomètres, le pouvoir absorbant ne varie que de quelques dixièmes pour cent, et il a introduit le chiffre trouvé dans la formule de son instrument. Mais il est un fait indéniable : le coefficient d'absorption n’est pas le même pour tous les rayons et change un peu avec la longueur d'onde. Ce chan- gement est-il assez petit pour que l'on puisse admettre un coefficient moyen, même en tenant compte de ce fait que la composition de la radiation totale varie suivant la hauteur du Soleil et l’état de l'atmosphère? Les réponses à cette question sont opposées, bien entendu, suivant la position que l'on adopte. Quoi qu'il en soit, divers appareils, appelés acti- nomètres, ont été utilisés pour la mesure de la constante solaire,et,en ne considérant que les acti- nomètres dits « absolus », ces instruments peuvent se diviser en deux groupes : 1° Les actinomètres calorimétriques (le pyrhélio- mètre de Pouillet, qui est le plus ancien, Violle, Crova.…, récemment Abbott),constitués,en principe, par un thermomètre à réservoir noirci : dans ces appareils, on admet que le nombre de calories nécessaire pour élever la température du thermo- mètre est équivalent à celui de l'énergie recue par le réservoir du thermomètre, lorsque celui-ci est exposé au rayonnement solaire. Tous les actinomètres de cette catégorie con- tiennent un liquide de chaleur spécifique connue, savoir : le pyrhéliomètre de Pouillet, de l’eau ; l'actinomètre de Crova, de l'alcool ou du mercure (Abbott); le « flowing water » de Abbott, de l'eau. On mesure l'augmentation de température du liquide en tenant compte du refroidissement; dans l'actinomètre de Michelson, on mesure la glace fondue dans un temps déterminé. 9% Les actinomètres dans lesquels la mesure est faite, non par des procédés calorimétriques, mais pour produire le même effet que le rayonnement solaire : à ce groupe appartiennent l'actinomètre de Angstrüm et celui de Féry. L'instrument de Angstrôm, nommé pyrhélio- mètre ‘, se compose de deux lames identiques, dont l'égalité de température peut être constatée à l’aide de pinces Ecran thermoélectriques (fig. 1) : ces pinces sont disposées de telle manière quele galvanomètre qui 4 leur est relié se trouve au zéro Fig. 1. — Schéma orsque la érature des pin- : Jeu lorsque la température des pin rites ces est la même. L'une des d'Angstrüm. lames est alors exposée au rayonnement solaire, tandis que l'autre reste à l'ombre et, dans cette dernière, on fait passer un courant tel que l'équilibre soit établi au galva- nomètre. Suivant les uns, le principe revient à admettre que le nombre de watts qu'il faut fournir ainsi est équivalent à l'intensité du rayonnement étudié, el cette équivalence même est sujette à bien des ceri- tiques. Selon les partisans de cet instrument, le watt n'entre pas en ligne de compte, parce que le watt (—1N X A) dépend de la tension en volts qui n'entre pas du tout dans la chaleur dite de Joule dont il s'agit ici (eiw*) ; équivalence entre le courant d'intensité ; dans un circuit de résistance w, d’un côté, et l'effet calorifique, de l’autre, n’est sujette à aucune critique et se trouve bien établie par les mesures de Joule et de ses successeurs, avec la relation : w X 0,239— y, où g mesure la quantité de chaleur exprimée en calories. En outre, dans un tel actinomètre, quelques-uns voient encore un point assez aléatoire : les pinces appuient sur les lames, mais en sont séparées par un isolant — et voilà un processus dont le rôle leur semble bien mal défini. Cet isolant est un morceau de papier de soie imbibé de gomme laque. Mais on peut répondre à cette critique: sila conductibilité est la même pour les deux bouts de papier, c’est parfait, parce que l'on constate seulement l'égalité de température des deux lamelles; si elle est différente, l'influence est éliminée en exposant et ombrageant alternative- ment l'une et l’autre des lamelles. Enfin, une objection très sérieuse fut faite par Abbott à la méthode de Angstrüm : la lamelle { Le nom de pyrhéliomètre, inventé par Pouillet, fut aussi adopté depuis par Langley, Abbott. Cependant, jusqu'à présent, le radical pyro fut assez généralement employé pour désigner des instruments destinés à mesurer la tem- pérature d'une source calorique, et non une quantité de chaleur rayonnée — de sorte que le nom de pyrhéliomètre donné à l'actinomètre de Angstrôm peut être considéré comme légèrement impropre. 904 exposée est chauffée par devant, la lamelle ombragée est chauffée de part en part, de telle sorte que : 1° La lamelle exposée est en réalité plus chaude que la lamelle ombragée, bien qu'ayant la même influence sur la pile thermo-électrique ; 2% La lamelle exposée perd plus, en réalité, par rayonnement et par convection, que l’autre. Ces deux défauts concourent pour queles valeurs mesurées avec le pyrhéliomètre de Angstrôm soient trop pelites, et Abbott à trouvé la proportion : Angstrüm Etalon de la Smithsonian Institution 41,092? mais, cela, comme relation constante, ce qui légi- timerait l'emploi de l'appareil Angstrom. Dans l'actinomètre de Féry, c’est au principe de substitution que l’on à recours, et non à la méthode de compensation. Le récepteur (fig. 2) contient une bobine de résistance dans laquelle on peut faire passer un courant qui l’échaufte et il constitue la soudure d'un couple thermo-électrique : ce récepteur est successivement chauffé par le rayonnement solaire, puis amené à une lempéralure identique par l'envoi d’un courant. C'est l'envoi de ce courant qui constitue l’étalonnage même de l'appareil et, s’il est besoin, on restera soumis à cette critique qu'il faut nécessairement aussi admettre l'équiva- lence. Hätons-nous d'ajouter que les procédés électri- ques ont le grand avantage d'éliminer la perte par rayonnement, convection..., landis que, dans les procédés calorimétriques, ces pertes rendent néces- saires de longues et hasardeuses corrections. D'une manière générale, on peut remarquer que, dans tous les actinomètres employés jusqu’à ce jour, le récepteur n'avait pas les propriétés d'un récepteur intégral : défaut grave ou bénin, comme nous l'avons dit ci-dessus, suivant la position que l'on adopte dans la question. Mais, outre les incertitudes expérimentales elles- mêmes, une des plus grandes difficultés de la déter- de la solaire réside l'appréciation et la mesure de l'effet absorbant de rayons —— recepteur Fery Fig. 2. — Schéma du récepteur Féry. mination constante dans l'atmosphère terrestre. Dans les’expériences faites par Millochau et Féry, les mesures, effectuées au Mont-Blanc, étaient en accord avec la loi exponentielle de Bouguer : cette loi fut alors adoptée pour tenir compte de l’absorp- tion atmosphérique. Mais il est bon d'ajouter que le phénomène est loin d’être simple : dans lés indica- tions journalières, les mêmes auteurs constatèrenl également un retard, qui rend la courbe des obser- JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE À TÉNÉRIFE vations dissymétrique par rapport à la position du Soleil. À ce propos, on ne peut manquer de rappeler les. importantes découvertes de Langley et de son École, qui distinguent avec soin entre la diffusion et l'absorption. La diffusion est une fonction de læ longueur d'onde, sans que l’on ait pu jusqu'ici découvrir une loi analytique qui relie ces grandeurs entre elles : les coefficients de transmission varient de 0,48 dans le violet à 0,73 dans le jaune et à 0,92 dans le rouge. L'absorption, elle, dépend surtout de la teneur de la couche d'air en vapeur d'eau, et affecte principalement les rayons dans le rouge et l'infra-rouge. L'étude des coefficients de transmission, faite avec le bolomètre par Langley et ses disciples, a été entreprise cette année par voie photométrique par des astronomes de Potsdam : ils utilisent le photo- mètre Glau-Vogel, dans lequel la lumière solaire et celle de la lampe photométrique sont décomposées par un polariseur suivant leurs deux composantes; sur les quatre images ainsi obtenues, deux sont éliminées en diaphragmant et les deux autres, dont les plans de polarisation sont perpendiculaires, se trouvent juxtaposées. La mesure de la luminosité pour les différentes couleurs est fournie par l'angle dans lequel il faut orienter un prisme Nicol de facon que les parties correspondantes des deux spectres aient la même clarté apparente. Si & est l'angle du nicol, la clarté est proportionnelle à {g'e. Si l’on a soin, au préalable, de comparer la lampe photométrique avec un radiateur intégral (?), on obtient la distribution de l'énergie dans le spectre solaire, hors de l'atmosphère, par rapport au noir absolu : par suite, si l'on admet la loi de Wien- Planck pour la distribution de l'énergie dans le spectre du radiateur intégral en fonction de la tem- pérature, on en peut conclure la température du Soleil. — Nous allons y arriver. Dès à présent, il faut noter que le mème instru- ment, spectro-photomètre, pourrait également servir pour élucider la question du bleu du ciel : pour cela, il faudrait braquer l'instrument sur un point déterminé, par exemple le zénith, pour observer le changement dans la composition de la lumière diffuse avec la hauteur du Soleil et l’alti- tude au-dessus de la mer. C'est encore là une appli- cation importante qu'il ne faudrait pas négliger. Toutes les réserves précédentes élant faites, on peut alors aborder la question de la température apparente du Soleil. Pour cela, il faut une nouvelle définition : si, pour lempérature apparente du Soleil, on adopte celle d’un radiateur intégral qui, substitué à cet astre, produirait la même énergie totale de rayonnement sur la Terre, on peut mesurer celle température. JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE A TÉNÉRIFE La première mesure de ce genre est due à Wilson et Gray, et fut faite à l’aide d’un radiomicromètre, par comparaison avec le rayonnement d'un four, en employant une méthode de zéro. Tout récemment, le télescope pyrométrique de Féry a permis de mesurer la température d’un four avec une très grande précision. Si l'on considère deux radialeurs intégraux R et r (fig. 3), échangeant leur rayonnement par une ouverture de 1 centimètre carré, et placés à 4 centi- mètre de distance, ces radiateurs étant respective- ment aux températures absolues T et £, la loi de Stéfan donne : e= a(T'— (*), e étant l'énergie recue par », a une constante. C'est aussi la quantité d'énergie émise par le radiateur R dans la direction AB (fig. 4), si 4 —0; l'énergie totale émise par le radiateur R dans l’espace à 0° se trouve être, après intégration, E = +e, c'est-à-dire que E = 7aT*. ra à été désigné par 5, de sorte que E— cT*. Le nombre 4,28 X10—* est la valeur trouvée par Kurl- R R À ea ZE À =——> B Fig. 3. Fig. 4 baum pour sexpriméen grammes-calories-seconde": exprimée en watts, on aurait 5,32. Plus récemment, Scheiner a trouvé 1,151 au lieu de 1,28 pour cette valeur; Féry a trouvé le nombre 6, en watts, mais cette valeur est peut-être encore un peu faible, etla vraie valeur paraît devoir être entre 6 et 7. Pointé sur le Soleil, l'instrument de Féry à fourni comme température apparente du Soleil 5.663° en 1906, et 5.555° en 1907. Si, de plus, on con- sidère l'absorption atmosphérique solaire comme étant la cause des différences entre les intensités du rayonnement aux divers points du disque, et que l’on élimine l'effet de cette absorption, on peut en conclure, pour température de la photosphère solaire, des nombres tels que 6.132° pour 1906 et 6.042° en 1907. Or on devrait pouvoir déduire la lempérature apparente à partir de la constante solaire — et réci- proquement — en faisant entrer en ligne de compte la température moyenne apparente de la surface du disque solaire. Et, en effet, on parvient ainsi à la formule : Av = 6Tém tg° |: ‘ 11 faut rappeler ici que l'unité de temps pour la con- stante solaire est la minute, alors que les autres unités sont le centimètre et la calorie-gramme. - FeCOuvre : 205 dans laquelle À, est la constante solaire exprimée en watts; c la constante de Stéfan; T,, la lempéra- ture moyenne apparente du Soleil, et ® le diamètre apparent de cet astre. Suivant les données, on pourra tirer de cette formule la valeur soit de AÀ,,, soit de ç, soit de T,.. La constante ç a été calculée par Kurlbaum en se servant d'un bolomètre comme récepteur — récepteur constitué par un plan noirei : il à trouvé 5,32. Scheiner a obtenu, d'autre part, une valeur du même ordre avec un pyrhéliomètre Angstrüm. Enfin, en comparant les observations de 1907 entre un actinomètre Féry et le télescope, et par application de la formule précédente, Millochau et Féry ont déduit la valeur 6 — 9,4; les résultats, ici, sont corrigés de l'action atmosphérique et la valeur de la constante décroit, comme les mesures elles-mêmes, lorsque l'absorplion atmosphérique les fait diminuer. On en peut conclure que la valeur 9,4 est évidemment trop forte. Outre les mesures de la radiation totale, on peut encore faire des mesures du rayonnement ultra- violet avec le photomètre Elster-Geitel : le principe en est que les rayons ultra-violets, arrivant sur du zinc amalgamé de frais, y libèrent des ions d'élec- tricité positive; la quantité d'électricité positive ainsi produite est mesurée par le temps qu'elle met à neutraliser une charge connue d'électricité néga- tive. Bien qu'il ne s'agisse pas ici de mesures absolues, ces recherches présentent néanmoins un grand intérêt à divers points de vue : la diffusion des rayons à ondes courtes étant beaucoup plus forte que celle des autres, de petites différences dans la diffusion doivent pouvoir y être remar- quées; en outre, c'est particulièrement entre ces mesures et les autres phénomènes optiques de l'atmosphère (polarisation, bleu du ciel...) que l'on peut espérer établir des relations. Nous nous sommes efforcé, ici, de faire con- naître succinetement l'état actuel de la question actinométrique : on voit qu'il subsiste bien des difficultés, et qu'il est encore impossible d’assigner une valeur à la constante & entre les limites 5,32 et 9,4; d'ailleurs, le point essentiel du problème est que tous les actinomètres employés jusqu'à présent ont des récepteurs sélectifs et donnent des résultats qui ne correspondent pas, véritablement, à la définition de la constante solaire. Ainsi, Féry a pu démontrer que les indications fournies par une plaque noircie varient avec le noir qui la cet auteur a même imaginé un actino- mètre à récepteur conique qui, par l'étude du rayonnement d'un four, lui a permis d'obtenir la nouvelle valeur 5 — 6. Angstrüm, lui-même, avait entrepris, dès 1895, des observalions avec son pyrhéliomètre à compen- 906 sation électrique, espérant oblenir des mesures absolues", et la décision de la Commission solaire (à Meudon) à fait adopter partout son instrument comme type. Celle décision est excellente pour l’uniformité des observations et la comparaison des résultats : elle pourrait être dangereuse si elle diminuail le nombre des mesures avec les autres appareils, qui doivent incessamment se contrôler les uns les autres aux altitudes les plus diverses. Car, si les observations sur les courants aériens sont relativement peu nombreuses, on peut dire que les mesures actinométriques sont encore plus rares, — quand elles ne font pas complètement défaut. Or, en raison de la position spéciale du pic de Teyde, il y aurait sans doute quelques faits intéressants à glaner au point de vue de la varia- tion de l'intensité calorifique de la radiation solaire avec la hauteur” : peut-être trouverait-on une con- firmation expérimentale de la théorie de lord Rayleigh, qui n’a été qu'imparfaitement vérifiée par les expériences de Maüz, Nichols, Abney, Festing — el aussi par Angstrom avec son pyrhéliomètre. Enfin, il serait encore fort intéressant d'étudier la variation diurne de cette intensité à différentes allitudes. Présente-t-elle un fléchissement journa- lier entre onze et treize heures, comme on a pu le dire; et ce fléchissement se modifie-t-il, ou dispa- rait-il. à mesure que l’on s'élève dans l'atmosphère? Angstrom, en 1896, a précisément noté au pic de Ténérife que les courbes d'insolalion sont presque complètement symétriques par rapport au midi vrai. Ainsi, on peut le dire, le problème de l'actino- métrie est à peine ébauché et il est malaisé de mesurer l'intensité du rayonnement solaire : alors que déjà quelques mesures sont faites régulière- ment à l'Observatoire météorologique des Cañadas, il serait du plus haut intérêt de profiter des con- ditions très avantageuses du massif de Ténérife pour se livrer à une étude longue et méthodique de cette question fondamentale, en comparant les actinomètres les plus différents. II. — PnÉNOMÈNES DE L'ATMOSPHÈRE. La caractéristique de l'air de la montagne, dans tout le massif, est une sécheresse extrême. Et, si nous citons ce fait en premier lieu, c’est parce que, en dehors de ses répercussions physiologiques, il a ‘ Cf. : Nouvelle méthode pour l'étude de la radiation polaire Nova acla regiæ Socictatii Scientiarum Upsa- liensis, série 4, vol. 1, n° 7. Intensité de la radiation solaire à différentes altitudes. Nova Acta, série 3, vol. xx, 1901. ? Cf. Axcsrrôm : Intensité de la radiation solaire à diffé- rentes allitudes, ainsi que les travaux de Bemporad, qui utilise les données de Angstrôm. — A. Beurorap : L'assor- timento relettivo della Radiazone Solare nell atmosfera terrestre e la sua variazone coll altizza: Rome, 1902. JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE A TÉNÉRIFE une imporlance essentielle dans toutes les recher- ches scientifiques : il est impossible de voir résister un appareil qui renferme des pièces en bois; ainsi, précaution indispensable, on ne pourra travailler qu'avec des instruments métalliques. Le D' W. Marcet rapportait déjà de fort curieuses observations qu'il eut l’occasion de faire au sommet du pic, relativement à l’état d'extrême sécheresse qui règne parfois en ce point : « La grande sécheresse de l'air sur le pic de Ténérife n’est sans doute pas étrangère aux singu- liers phénomènes électriques qui s’y produisent, et dont je fus le témoin en juillet et août 1878 pendant le séjour de trois semaines que je fis à cette époque sur le pic. « À l'altitude de 2.000 mètres, j'observais la nuit, Sous ma tente, de brillantes lueurs élec- triques, qui se produisaient surtout lorsque je frottais avec ma main la surface de mon makinstock. Nous cbservions les mêmes effets en frottant les draps de nos lits... « Le cuir de nos bottes se déchirait et se fendait, les caisses contenant les instruments faisaient en- tendre des craquements, et il s'y produisait de larges fentes par la contraction du bois. « Notre peau, surtout aux mains, s'écaillait par l'effet de la sécheresse. » Cette sécheresse est cause, notamment, que l'on voit fort peu de fumée aux fumerolles — sauf quand le pic est couvert de neige. Pour notre part, aux mois d'avril et de mai, nous avons éprouvé des inconvénients du même ordre : craquements de caisses et de toutes boiseries, au point d'en compromettre la solidité — et de rendre au retour leur utilisation fort malaisée; mise hors de service d'instruments à pièces de bois, notam- ment des appareils photographiques; gereures de la peau et de toutes les muqueuses, notamment à l'intérieur des narines; difficulté de guérir les moindres écorchures qui sèchent et s'étalent; rup- ture des ongles, parfois dans le sens de la longueur, ce qui est assez douloureux; les clous des souliers se délachent d'eux-mêmes, etc. Au point de vue électrique, il nous est arrivé, un jour, en approchant l'œil de l'oculaire de notre lunette, d'entendre une étincelle jaillissant entre celte pièce métallique et notre sourcil : nous la sentimes également, etelle n'était pas négligeable, puisque son bruit fut perçu par un assistant placé à 4 mètres de ce point. Ainsi, en dehors de l'intérêt qu'elle peut présenter par elle-même, cette sécheresse mérite d'être étu- diée à cause de ses relations avec d'autres phéno- mènes. En premier lieu, l'absorption atmosphé- rique doit, de ce fait, se trouver amoindrie, ce qui nous ramène directement aux facteurs auxiliaires JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE A TÉNÉRIFE 907 des observations actinométriques. En outre, nous venons de le voir, il semble exister une relation entre la triques : on peut rapprocher celte étude des inté- ressantes observations que M'° de Harven fit, il y à quelques années, au Canada sur la sécheresse de l'atmosphère et divers phénomènes électriques *. A ce point de vue, Abercromby a effectué des mesures au Pie de Teyde : il en a conclu que l'état du pic est le même, au point de vue électrique, que partout ailleurs. Les observations ont porté sur le mois d'octobre : le potentiel était positif, même aux plus hautes altitudes, mais la tension s'élevait d'une manière considérable en certains points, autour d'une arête de rocher, par exemple. En 1908, Knocke a fait également des mesures de conductibilité électrique sur le Pie : il a trouvé des nombres très élevés. De plus, il reconnut que l'atmosphère était ionisée par les produits de décom- position du radium. Or, ayant fait celte observa- tion que des souris meurent dans un air chargé d'émanations de radium, Knocke erut pouvoir attri- buer à l'intensité particulière de l'ionisation ce fait que, sur le Pic de Teyde, le mal de montagne esl beaucoup plus intense que sur d'autres sommets de même altitude, ou d'altitude plus élevée encore; n'est-ce pas aussi parce que l’on peut monter sur le pic beaucoup plus vite que sur d’autres mon- tagnes? ou pour toute autre cause. Pour lionisalion, à proprement parler, le D' Wenger a fait des observations dans les Ca- ñadas : alors que dans nos régions, avec l'appareil Elster-Geitel, il faut attendre dix à quinze minutes pour obtenir une valeur bien appréciable pour la perte d'électricité, ici l'appareil se décharge com- plètement en quelques minutes, de facon à rendre absolument impossible l'emploi de cet instrument pour faire des mesures convenables ; des résultats de la même importance n'ont été obtenus, jusqu'à présent, que par F. Künigsberger dans le grand Cañon d’Arizona, au Colorado, avec des conditions climatériques tout à fait analogues à celles des Cañadas. Il y a encore d'autres facons d'envisager l'élec- tricité, et il est un point particulièrement intéres- sant à élucider. Discutant la liaison possible des éclairs et de la pression atmosphérique, Küjpen, Less. ont exprimé l'opinion qu'il y a une relation indirecte entre les deux phénomènes : c'est là un domaine fort obseur où tout est à observer de nou- veau et à vérifier. Mais, ici, il serait très malaisé de séparer les changements de pression vrais et les changements produits par les pulsations du sécheresse et les manifestations élec- 4 CT. : Bulletin de la Société astronomique de France, 1904, p. 173, 187 à 191. vent à l'intérieur des bâtiments : des essais tentés à l'Observatoire magnétique de Potsdam ont dû être abandonnés pour celle raison. Enfin, bien que le massif de Ténérife soit, en général, particuliére- ment favorableaux observations, ce point ne doitpas être considéré en particulier comme un sujel de travail régulier; il faudrait, plutôt, être prêt à faire au besoin des observations de cette nature : car les orages 2mporlants avec foudre sont extrêmement rares dans l'ile et, de mémoire d'homme, il n°v à réellement eu de considérable à cet égard que l'orage du 3 janvier 1910. Cependant, Hefner-Alteneck a imaginé un instru- ment— variomètre —pourconslaler quelles liaisons peuvent exister entre les variations dans la pression de l'air et l'éclair ; peut-être le « statoscope » de Richard remplirait-il le même but? Oddone a bien demandé, déjà, si l'on ne pourrait pas étudier les ondes aériennes, aux stations de montagne, par exemple sur le Mont-Rose, au moyen du statoscope ; mais Teisserene de Bort a fait observer que les indications de cet appareil sont sujettes à trop d'influences dont on ne peut pas netlement se rendre compte, et par là-même fort douteuses”. Là, encore, on trouve des points d'actualité à élucider. Ainsi, en dehors des observations courantes de température, pression, vent, il ne manque pas de recherches importantes, déjà, aux points de vue de la sécheresse et de l’état électrique de l'atmosphère, ainsi que de leurs liaisons avec l’actinométrie. Mais il y à mieux encore. Ce n'est pas sans sur- prise que, dans les traités classiques de Météoro- logie, on cherche en vain un chapitre sur les mani- festations les plus diverses de l'atmosphère: lumière zodiacale, lueurs crépuseulaires, polarisation atmo- sphérique. On en donne pour raison que ces phéno- mènes ne sont pas en relation immédiate avec la Météorologie. D'abord il serait étrange qu'une manifestation atmosphérique, quelle qu'elle soit, ne fût pas en relation immédiate avec la Méléoro- logie; de plus, ce n’est qu'un aveu d'incompétence, et l’on devrait, au contraire, s’efforcer d'étudier ces phénomènes avec la plus grande attention. En premier lieu, à cet égard, il y aurait lieu de poursuivre des mesures continues * de la polari- sation atmosphérique. On sait les déplacements étranges observés dans les points Arago et Babinet lors d'éruptions comme celle du Krakatoa, et la marche parallèle avec la période des taches solaires ; des observations de ce genre sont poursuivies à Hambourg, avee une atmosphère peu favorable ; 1 Conférence de Monaco : Procès-verbaux, p. 21. 2 Pour le point Arago, le Dr Wenger a fait des mesures pendant plusieurs mois à l'Observatoire des Cañadas : mais, maintenant, ce point se trouve derrière une montagne Espigon) et les mesures sont impossibles — Nouvelle supériorité de notre installation sur le Guajara. 908 JEAN MASCART — L'ACTINOMÉTRIE ET LA MÉTÉOROLOGIE A TÉNÉRIFE sur le mont Guajara, avec un horizon presque toujours dégagé, on pourrait utilement travailler cette question et élucider peut-être des problèmes totalement inconnus encore. D'ailleurs, cette étude n'est pas isolée, car il semble bien, déjà, qu'il y ait une relation entre les deux phénomènes : intensité calorifique de la radiation solaire et polarisation atmosphérique. D'autres recherches s'imposent encore ici Diffusion, coefficients de transmission, proportion entre la lumière directe et la lumière diffuse, couleur du ciel (à étudier avec le spectro-photo- mètre), teneur de l'air en poussières (à mesurer avec l'appareil d'Aitken) : après que les phénomènes du crépuscule ont été étudiés en Egypte par Mielhe avec la photographie en couleurs, il serait d'un grand intérétdereprendre ces essais à Ténérife, où l’on à l'avantage d'un horizon beaucoup plus propre, lavé par la mer; étude de la lumière pourpre au spectro-photomètre, étude qui ne parait pas avoir élé entreprise jusqu'ici; recherches sur la lumière zodiacale, que l’on voit journellement dans la montagne, intense, à formes et inclinaison, changeantes. Il est inutile d'insister sur l'intérêt considérable que peut encore offrir le massif de Ténérife pour des mesures de magnétisme terrestre. IT. — ASTRONOMIE. Nous sommes allés sur le mont Guajara pour étudier la comète de Halley d'une facon plus parti- culière ; nous en rapportons de nombreux clichés dont la discussion technique serait ici fastidieuse. Puis nous avons fait l'examen suivi de la surface de Jupiter. Mais, dans ce qui précède, nous avons assez montré tous les points connexes à l'Astronomie que l'on pourrait aisément étudier. Nous n'avons noté que ceux qui nous ont le plus frappé, ceux qui sont parfois impossibles à étudier ailleurs: sil fallait les résumer ce serait un cours de Météorologie dans sa forme la plus générale, tout ce qui est visible au ciel, dans ou au delà de l'atmosphère, comprenant le magnétisme et l'astro- nomie. tous, Au point de vue spécial de l’Astronomie classique, la situation est favorable, très particulièrement, pour étudier la scintillation, la réfraction, les surfaces planétaires, la surface du Soleil — et tous les phénomènes de spectroscopie. Le champ est vasle. Si nous nous sommes bien fait comprendre, le mont Guajara présente peut-être une situation unique au monde, favorable au travail : nous espérons pouvoir collaborer, par tous les moyens, à la création, en ce point, d'un centre d'études permanent. Jean Mascart, Docleur ès sciences, Astronome à l'Observatoire de Paris. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 907 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Le chapitre IV généralise également pour l'ordre Blumenthal (Otto), Professeur à la « Technische Hochschule » d'Aix-la-Chapelle. — Principes de la Théorie des fonctions entières d'ordre infini. — 1 vol. in-8° de 147 pages. (Prix: 5 fr. 50.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. Ce volume fait partie de la collection de monogra- phies sur la Théorie des fonctions, publiée sous la direction de M. E. Borel ; il a pour objet là théorie des fonctions entières les plus générales. 11 peut être con- sidéré comme la suite du beau livre de M: Borel, appar- tenant à la même collection : « Lecons sur les fonc- tions entières. » L'élément caractéristique qui sert à étudier et à classer ces fonctions est leur croissance ; à ce point de vue, on distingue trois catégories de fonctions entières, par comparaison avec une fonction exponentielle et, r désignant le module de la va- viable complexe z. La première catégorie : fonctions d'ordre fini et non nul, comparables à e’?, avec 9 fini et =Z 0, a été étudiée, d'abord par M. Borel dans l'ouvrage précité, puis par MM. Lindelôf, Boutroux, Wiman, etc… La seconde catégorie : fonctions d'ordre zéro, de croissance inférieure à et (6 >> 0), a été peu étudiée jusqu'ici. Enfin, la troisième catégorie : fonctions dites d'ordre infini, qui, comme e° par exemple, croissent plus vite que toute exponentielle e’?, fait l'objet du présent vo- lume. M. Blumenthal abandonne les distinctions, faites a’abord, de ces fonctions en sous-catégories, el il expose des procédés s’adaptant à toutes les fonctions d'ordre infini. C'est M. Borel qui, le premier, dans un mémoire des Acta mathematica (1897), a jeté les bases dela théorie; maisson travail comporte certaines restric- tions. Pour créer une théorie sans exceptions, M. Blu- menthal propose un concept nouveau, celui de la fonction-type, développé par M. Kraft (1903). La théorie exposée dans l'ouvrage est, au fond, celle de M. Kraft, mais avec des modifications essentielles et beaucoup de résultats nouveaux. Après une introduction se rapportant à l'historique de la question, l’auteur débute par un premier chapitre sur le mode de croissance des fonctions entières et distingue les fonctions à croissance très rapide et les fonctions à croissance très irrégulière. Dans le chapitre IL, il énonce les lois générales de la croissance, qui condui- sent à distinguer entre les vitesses de croissance ordi- naire et exceptionnelle ; il cherche alors à remplacer une fonction quelconque par une autre ne croissant pas exceptionnellement vite : c'est un problème d'in- terpolation, ou d'ajustement, qui est celui des fonctions types, base de toutes les recherches ultérieures ; l'au- teur résoud ce problème dans des conditions très pré- cises, et mesure le degré d’approximation de la so- lution. Dans le chapitre II, on aborde le problème d'étendre au cas de l'ordre infini la relation entre ce que l'on appelle l'ordre et la densité de la distribution des points du plan des Z où la fonction f (z) prend une valeur déter- minée a (ou distribution [a|). Au moyen des fonctions- types, M. Blumenthal construit une définition de l’ordre analogue à celle du cas de l’ordre fini, etil arrive, pour le nombre des zéros situés à l'intérieur ou sur la circon- férence d'un cercle de rayon assez grand, à une limite supérieure fournie par l'ordre qu'il à défini, et tout à fait analogue à celle que l’on connaissait déjà pour le cas de l’ordre fini. infini les définitions et théorèmes relatifs aux produits canoniques, déjà considérés par M. Borel dans le cas de l'ordre fini. Le chapitre V est consacré à l'examen critique de cette théorie, au point de vue de la préci- sion, et à sa comparaison avec celle qu'a édifiée M. Denjoy (C. 2?., 1903). Enfin, les chapitres VI et VII traitent du problème général des relations entre l'ordre d’une fonction com- plète (c’est-à-dire la plus générale) et une distribution [a] quelconque. L'auteur part de l'extension, due à M. Borel, dans le cas de l’ordre fini, du théorème fon- damental de M. Picard, sur les valeurs qu'une fonction monodrome ne prend pas ou ne prend qu'un nombre fini de fois au voisinage d'un infini essentiel ; il arrive ainsi, dans le cäs de l'ordre infini, à une sorte de dé- composition en deux autres théorèmes, l'un déjà énoncé par M. Borel, l'autre qui paraît être inédit et qui donne la relation exacte entre l’ordre d'une fonc- tion et la distribution de ses valeurs. Cela permet à M. Blumenthal de préciser certains faits relatifs aux distributions, et d'ouvrir la voie à de nouvelles re- cherches. L'ouvrage est complété par deux Notes, l'une qui fait connaître un mode de construction des fonctions- types, l’autre qui a pour objet une proposition nou- velle relative au facteur primaire de Weierstrass, qu'introduit la théorie des produits canoniques. Ce livre est, en fait, un véritable Mémoire original dans lequel M. Blumenthal, avec une ingéniosité et une pénétration remarquables, apporte une contribu- tion des plus importantes à la théorie des fonctions entières; son travail se rattache de la facon la plus heureuse aux recherches récentes sur ces difficiles problèmes. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée el à l'Ecole des Sciences de Rouen. 2° Sciences physiques Battelli (A:), Occhialini [A.), Chella (S.), de lIns- titut physique de l'Université de Pise. — La Radio- activité et la constitution de la Matière. — 1 vol. grand in-8° de 359 pages avec1## figures. (Traduit de l'italien par Mwe Ta. Barrezu.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1910. Il serait difficile de trouver, dans l'histoire des sciences, une découverte ayant mis en mouvement, dans l'espace de dix années, autant d'idées nouvelles et provoqué à un degré aussi élevé l’activité des cher- cheurs, que la découverte des phénomènes radioactifs. Cette activité a engendré de nombreux et volumineux Mémoires, publiés dans toutes les langues et disséminés un peu partout dans les périodiques scientifiques, de sorte que seuls les savants spécialisés dans la question ont pu en suivre les progrès et en percevoir à chaque instant la physionomie exacte. Pour les autres, le besoin se faisait sentir d'un ouvrage résumant le plus simplement possible l'ensemble déjà très imposant des faits acquis et des théories qui en ont été la consé- quence. : C'est cet ouvrage que viennent de publier en colla- boration les trois professeurs italiens : MM. Battelli, Occhialini et Chella. Après une introduction sur la dissociation électrique conduisant à la notion des ons et un aperçu historique sur la découverte de la radio-activité, les auteurs décrivent les modes de séparation des substances radio- actives et les divers phénomènes révélateurs des radia- 910 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX tions qu'elles émettent. Tout cela donne matière à une technique détaillée qui sera particulièrement appréciée de ceux qui s'adonnent aux recherches expérimentales. Viennent ensuite la distinction des divers rayonne- ments, leur classement, la discussion de leur nature et de leurs propriétés. L'étude de l’émanation conduit à la chimie des substances radio-actives, aux analyses qualitatives et quantitatives qui s'y rapportent, au dosage de cette émanation dans les eaux naturelles, etc. Tout le monde sait quelle a été la répercussion de toutes ces découvertes sur les idées relatives à l’évolu- tion et à la constitution de la matière. Désagrégation atomique, structure de l'atome, interprétation de la valence des divers corps, origine de la masse, explica- tion de propriétés physiques variées telles que conduc- tibilités électrique et thermique, phénomènes d'élec- tromagnétisme et d'induction électromagnétique, etc., sont autant de questions sur lesquelles la science ancienne ne comportait que des aperçus très vagues el qui ont été singuhèrement éclairées par les considéra- tions dérivées des phénomènes de radio-activité. C’est à l'exposé de ces diverses théories qu'est consacrée la seconde partie du volume, qui n’intéressera pas seule- ment les physiciens, mais aussi tous les esprits simple- ment curieux de comprendre comment le groupement et l'interprétation de quelques faits physiques peuvent faire subir une évolution grandiose à des conceptions restées jusqu'alors à l'état de timides essais et pourquoi «les aspirations des alchimistes n'apparaissent plus insensées à la lumière des théories modernes ». E. COcARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Grunwald (Jules), Zngénieur, Chef de fabrication aux Usines Japy. — La Technique de l’Emaillerie moderne.— 4 vol. in-8° de 123 pages. (Prix: & fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. L'émaillerie n'a été pendant fort longtemps qu'un métier d'empiriques où l’on se transmettait des recettes et des tours de main. En lisant tous les ouvrages pu- bliés sur ce sujet jusqu’à nos jours, on y voit de suite que les auteurs n’ont aucune notion des sciences les plus élémentaires et que nulle méthode ne préside aux opérations qu'ils décrivent : c'est du moins l'impression que mont donnée les publications que J'ai lues. M. Grünwald nous apporte un ouvrage qui ressort avan- lageusement parmi les travaux de ses devanciers. Il nous indique tout d'abord les matières premières aux- quelles on a recours pour constituer les émaux et les colorer, les tôles qui doivent les recevoir et les houilles qui servent à les cuire. Cette étude générale est suivie de la description des opérations nécessitées par le mé- lange, la fusion et le broyage des émaux, pour le recuit et le décapage de la fonte et l'application de l'émail. Des généralités sur la cuisson des objets émaillés font suite aux chapitres précédents. L'auteur a consacré quelques pages intéressantes à la peinture sur émail et à la photocéramique; il termine son ou- vrage par des données statistiques. Sous forme d'appen- dices nous trouvons aussi trois petits chapitres sur l'histoire des émaux artistiques et de la peinture sur émail, l'histoire de l’'émaillage industriel et les tarifs des douanes francaises. Je dirai tout d'abord que la lecture de l'ouvrage de M. Grünwald est à recommander à tous ceux qui veu- lent savoir ce que c'est que l’émaillage; mais les lec- teurs familiarisés avec l'émaillage, malgré les qualités d'ordonnancement du livre, seront peut-être un peu déçus parce que l’auteur, à mon grand étonnement, a laissé complètement de côté des points qui ont leur intérêt. La question de l'accord des émaux avec le support, étant donnés les résultats acquis dans ces der- nières années, ne peut être passée sous silence. De même, j'aurais préféré plus de détails sur la manière de constituer les émaux, les limites d'acidité entre les- quelles on doit les composer et la manière de les fondre. Un dessin des fours employés pour la fusion, un croquis de mouffles n'étaient pas superflus. Toutes ces questions rentraient plus dans le cadre d'un ou- vrage technique que l’histoire des émaux artistiques, qui devient un hors-d'œuvre en la circonstance, vu le petit nombre de pages du volume. Je crois qu'après avoir lu la Technique de l'émaillerie moderne beaucoup de lecteurs penseront comine moi que l'auteur est un homme habile, connaissant son métier, mais qui n'a bien voulu écrire dans son livre que ce qu'il voulait perdre. A. GRANGER, Chef des Laboratoires d'essai et Professeur de Technologie céramique à la Manufacture de Sèvres. 3° Sciences naturelles Bérard (Victor). — Révolutions de la Perse. (Les provinces, les peuples et le gouvernement du Roi des Rois) — 1 vol. in-8° de 369 pages, avec une carte en couleurs hors texte. (Prix : 4 fr.). Armand Colin, éditeur. Paris, 190. M. Victor Bérard estime qu'il ne doit pas être le seul à qui les affaires persanes semblent le plus inex- tricable des imbroglios, et il cherche à débrouiller les causes et l'enchainement des événements révolu- lionnaires dont la Perse est le théâtre. Mais, pour s'éclairer, c’est à Loti, c'est à Gobineau qu'il se confie de préférence; il les compare à deux phares, qui répan- dent leur clarté sur le chaos des explorations scien- üfiques, des rapports diplomatiques et consulaires, des dépèches et correspondances de Journalistes. Quoi qu'il en dise, il semble cependant avoir beaucoup puisé dans ces livres et ces documents qu'il parait - dédaigner. L'auteur établit d'abord que la Perse n’est ni un Etat ni une nation. C'est un agrégat d'éléments disparates : une anarchie féodale, des tribus nomades, des cultiva- teurs mal fixés au sol. De tout temps, il y a eu une lutte presque permanente entre sédentaires et nomades, et l'histoire politique de l'Iran est tout entière dans le passage de la tiare du Roi des Rois à travers les tribus nomades. M. Bérard nous la montre conquise par les Turcs-Kadjiars à la fin du xviur® siècle. Il en suit le sort et les vicissitudes dans les diverses provinces, et il nous fait assister à l'histoire des ambitions et des empiétements des Russes et des Anglais dans l'Iran, ainsi qu à la lutte engagée entre eux pour s'y assurer la prépondérance politique et commerciale. L'empire du Kadjiar, depuis un siècle, n'avait jamais connu la stabilité ni l'indépendance. Il ne s’est trouvé ni une dynastie, ni un prince, ni une administration pour soutenir les morceaux disloqués de cet empire. Le Roi des Rois a eu, avant tout, une administration fiscale, dont la seule préoccupation n’a cessé d'être le ravitaillement de sa caisse. Il a laissé vivre à sa guise et se débattre entre eux tribus, villes, nomades, cita- dins, gens d'église, villageois, éléments que M. Bérard étudie un à un et dont il montre les tendances, les aspi- rations, les besoins. En somme, l'administration de ce pays a toujours consisté dans l'exploitation des uns par les autres, et rien n'y est prévu pour le service et la défense de la communauté. Ayant décrit l’état social de la Perse, M. Bérard termine son livre par un court aperçu sur la révolution, nous montrant les influences anglaise et russe conti- nuant à s'exercer dans ce royaume délabré, puis les essais de Parlement, le Chah détrôné, enfin la révolu- tion accomplie, mais sans que rien ait été réformé. GUSTAVE REGELSPERGER. Bourcart (Emmanuel), Docteur ès sciences. — Les Maladies des plantes. Leur traitement raisonné et efficace en Agriculture et en Horticulture. — 1 vol. in-8° de 655 pages, avec figures dans le texte. (Prix :9 fr.) Doin et fils, éditeurs. Paris, 1910. Voici un ouvrage qui est le premier essai sérieux de thérapeutique appliquée aux maladies des plantes. II BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX or représente un effort bibliographique considérable, et il n’est pas douteux qu'il rendra de grands services à tous ceux qui s'occupent de Pathologie végétale, th6o- rique ou pratique. Grâce à des tables bien comprises, il sera consulté avec la facilité d'un dictionnaire, dont il a un peu le caractère. Nous ne serions pas étonné que ce livre fût apprécié, mème en dehors des pays de langue francaise. Les ouvrages similaires, améri- cains, allemands ou italiens sont rares, el générale - ment d'une étendue beaucoup plus restreinte. On peut donc féliciter l’auteur du résultat très inté- ressant de sa compilation, aussi bien que de la facon claire, méthodique et précise, avec laquelle il a présenté son travail. Tel qu'il est, pourtant, cet ouvrage pré- sente une lacune bien évidente, et qu'il serait facile et souhaitable de combler: on ne trouve dans ce livre aucune indication permettant de se reporter aux centaines de Mémoires qui ont été compulsés en vue de la rédaction souvent très concise, parfois trop con- cise. À chacune des pages, on peut lire dix à vingt noms d'auteurs, cités sans aucune indication bibliogra- phique. Cette omission rend impossible toute véritica- tion de Ja plupart des expériences ; et, certainement, les milliers d'expériences signalées sont loin de mériter toutes la même créance et ne sont pas toutes défini- tives. La lecture des Mémoires eux-mêmes est néces- saire pour apprécier leur valeur comparative. Le lecteur, qu'intéresse un cas particulier, désire généra- lement connaître les Mémoires originaux et S'y re- porter : il peut être amené à entreprendre certaines expériences de vérification, ou des expériences com- plémentaires. La thérapeutique des plantes est une science en enfance, et qui appelle des recherches de cette sorte. Le mérite scientifique du livre de M. Bour- card serait donc considérablement accru si une liste des Mémoires consultés, classés par noms d'auteurs, était ajoutée en appendice, ou publiée en supplément. Le traité des maladies des plantes de M. Bourcart n'en sera pas moins de grande utilité au point de vue pratique, et les praticiens lui feront un suceès, Com- plété par de la bibliographie, il pourrait devenir le vade-mecum des laboratoires de Pathologie végétale. Eouonp GAIN, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences, Directeur des Etudes Agronomiques el Coloniales à l'Université de Nancy. Reid (G. Archdall). — The Laws of Heredity (Les LOIS DE L'HÉRÉDITÉ). — À vol. in-8 de 548 pages. (Prix : 26 fr.) Methuen and Co, éditeurs. Londres, 1910. Pew-être le titre de ce livre n'est-il pas très bien choisi, car une minime partie est consacré à l'étude de l'Hérédité proprement dite; c'est plutôt un ensemble de réflexions, parfois ingénieuses, parfois banales, sur la Biologie générale, caractères des êtres vivants, répé- tition de la phylogénie par l'ontogénie, doctrine lamarckienne, etc. Une part importante du livre, et certainement la meilleure, est celle qui est consacrée à l'évolution de l'Homme depuis qu'il mène la vie sociale, sous l'influence de la civilisation, cles maladies microbiennes, de l'alcool, etc. Comme il le reconnaît lui-même, l’auteur est un «très extrême darwinien »; pour lui, le mot évolu- tion est synonyme d'adaptation, et, en dernière analyse, toute adaptation résulte de la sélection naturelle de variations favorables : jes variations qui fournissent le matériel pour la sélection sont toutes ou presque toutes de petites variations en plus ou en moins de caractères préexistants, c'est-à-dire des fluctuations, tandis que la sélection artificielle porte principalement sur des mutations. D'autre part, M. Reid repousse absolument les idées lamarckiennes sur l'hérédité des caractères acquis, pour des raisons logiques qui ont déjà ét données maintes fois. Il a également une altitude con- servatrice vis-à-vis des théories mendéliennes, qu'il parail ne pas parfaitement comprendre, el des idées sur les mutations, qu'il croit être synonymes « sports », c'est-à-dire de grandes variations à hérédité | alternative. Quant aux variations transmissibles (qui ont leur base dans un changement du plasma germi- | natif), M. Reid les considère comme spoutances, enten- dant par là que nous ne connaissons pas les processus moléculaires qui se passent dans le plasma germinatif, ni le mode d'action des circonstances de milieu qui provoquent l'apparition de variations nouvelles. . Les chapitres consacrés à l'alcool et autres narco- tiques, et aux maladies microbiennes, sont très inté- ressants (l'auteur est, du reste, médecin); M. Reid peuse que l'alcool et l'opium agissent comme agents de sélection précisément comme les maladies mortelles; ils éliminent certains types d'individus, les plus sen- sibles à l’action du narcotique, de sorte que la race, lorsqu'elle a le temps devant elle, présente une évolu- tion progressive; toute communauté hautement civi- lisée n'existe que parce qu'elle a autrefois passé par le feu, et il en résulte cette conséquence paradoxale que, pour qu'un peuple soit sobre, il faut qu'auparavant il ait compté de nombreux ivrognes; les lois prohi- bitives n’ont aucun effet améliorant. De mème, le seul espoir de réduire d’une facon permanente la mortalité due à la tuberculose se trouve dans la sélection, non pas, au début tout au moins, par une sélection forcée par des pénalités légales, mais due à une opinion publique éclairée qui regardera comme moralement répréhensibles les mariages fertiles des individus tuber- culeux. L. CUÉNOT, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Mignard (D° M.), Ancien Interne des Asiles de la Seine. — La Joie passive. Préface de M. le Dr G. Dumas. — 1 vol. in-16 de xu-276 pages. (Prix : 4 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1910. En dehors des joies d’excitation avec suractivité physique et mentale, il existe une joie passive, qui s'observe chez les individus atteints d'un affaiblisse- ment intellectuel acquis ou d’arriération mentale con- génitale. Le Dr Mignard examine à ce point de vue trois catégories de maladeseuphoriques : les idiots, les para- lytiques généraux, les déments séniles. La béatitude de ces sujets apparaît comme un état de satisfaction paisible, ne se révélant que par un sourire doux et niais, par l’optimisme des réponses et par le ton de la voix. Loin de se traduire par une excitation intellec- tuelle, elle coexiste, au contraire, avec un état de tor- peur cérébrale et d’amoindrissement des fonctions organiques : sensibilité émoussée, motricité, respira- tion, pression artérielle diminuées; chez les para- lytiques généraux, elle coïncide souvent arec lacachexie terminale. La joie passive est caractérisée, au point de vue psychologique, par un monoïdéisme involontaire et sans effort, un état spécial de l'attention comparable aux phénomènes d'extase. Cette béatitude torpide, si différente de la joie déréglée du maniaque, a pourtant avec cette dernière un caractère commun qui explique, dans l'une comme dans l’autre, l'existence du senti- ment agréable; c'est l'absence d'inhibition, la suppres- sion de toute entrave, la liberté de la fonction, le déploiement aisé des tendances. Les béats réalisent dans leur plénitude des tendances diminuées et faciles à satisfaire. Ce livre expose avec clarté et méthode une question jusqu'ici négligée; il apporte un nouvel élément de discussion à la théorie sur l’origine péri- phérique des émotions; à une fine analyse psycholo- gique, il unit une solide documentation clinique. Dr J. Capcras. 942 ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 10 Octobre 1910. M. le Président annonce à l’Académie le décès de M. M. Treub, Correspondant de la Section de Bota- nique, et de M. E. von Leyden, Correspondant de la Section de Médecine et de Chirurgie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Bernstein dé- montre le théorème suivant, dont celui de Liouville n'est qu'un cas très particulier. Si z est une solution de l'équation Ar +2Bs—HCt—0(AC—B*> 0), A,B,C, étant des fonctions (analytiques) quelconques de P, 4,2, X, y, la fonction z ne peut être bornée pour toute valeur réelle de x, y, sans se réduire à une cons- tante. — M. F. Robin a constaté que des cylindres de base c onstante et de hauteur variable présentent une résistance à l’écrasement décroissant lentement quand la hauteur croit (la variation peut être représentée par une hyperbole équilatère); des cylindres de hauteur constante et de base variable présentent une résis- tance à l’écrasement croissant lentement quand la sur- face croît (la variation se traduit par une droite). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Pélabon à constaté que l’antimoine pur et le séléniure d’antimoine, plon- gés dans une solution chlorhydrique de SbCF, forment une pile dont le courant est constant à l'obscurité, mais varie sous l'action de la lumière. — MM. G. Charpy et S. Bonnerot ont reconnu que le carbone solide ne réduit pas l’oxyde de fer au moins jusqu'à 950, tandis qu’on admettait que la réduction panne vers 450°, — MM. P. Malher et J. Denet ont observé la présence d’une petite quantité d'oxyde de carbone dans l’atmosphère des mines de houille ; cette quantité paraît d'autant plus sensible que les mines sont moins grisouteuses. 30 SCIENCES NATURELLES. M. E.-L. Trouessart signale l'intérêt de la recherche et de l’étude des faunes mammalogiques locales dans les divers pays d'Europe; cette étude montre dans quelles larges limites un type spécifique à répartition étendue peut varier sous le rapport de la taille, des teintes du pelage et même des proportions du crâne. — M. Ch. Gravier a exploré les récifs coralliens de la baie de Tadjourah (golfe d'Aden) et déterminé les Madréporaires qui les forment; il a reconnu 64 espèces, dont 6 nouvelles. — M. P. Marchal à constaté que le Chermes piceæ, jus- qu'ici connu comme exclusivement aptère et parthé- nogénétique, peut parfois donner naissance à des ailés présentant les caractères des exupares. — M. Ed. Chatton à trouvé, chez les Copépodes pé slIues, des Dinoflagellés parasites de la cavité Fe décrit comme exemple le Syndinium turbo n.g.n. sp. qui évolue chez le Paracalanus par vus Claus. — M. P. Vuillemin : Sur une entrave naturelle à la maladie des chénes (voir p. 883. — MM. A. Fernbach et E. Vulquin ont reconnu que les substances toxiques des macéra- tions de levûüres et des macérations de céréales sont de nature très différente. — M. H. Douvillé montre que les silex taillés trouvés dans les cailloutis du limon des plateaux représentent l'outillage d’une civilisation datant du commencement de l’époque glaciaire et dé- truite par le changement de climat qui a caractérisé cette époque. Les cailloutis et les limons sont eux- mêmes le résultat des inondations qui se sont produites à la fin de cette période, au moment de la fusion des neiges et quand les glaces remplissaient encore les vallées. — M. A. Briquet explique la morphologie d’un certain nombre de plateaux avec vallées encaissées du nord de la France et de la Belgique par l'existence d'une pénéplaine fossile d'âge assez récent. Séance du 17 Octobre 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Helbronner in- dique les résultats de la 8° campagne de triangulations géodésiques complémentaires des hautes régions des Alpes francaises. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Besson a observé à Montsouris, le 26 septembre, entre 3 h. 25 et 3 h. 35, l'arc bitangent supérieur du halo de 46v, dont l’exis- tence était prévue par la théorie de Bravais, mais qui n'avait pas encore été signalé. — MM. A. Jaquerod et M. Tourpaiïan décrivent un appareil, basé sur le principe d’Archimède, permettant de déterminer les densités des gaz avec une très grande précision par la poussée qu'ils exercent sur un flotteur en verre. — M. G.-A. Hemsalech à mesuré les durées relatives par rapport à la capacité des raies spectrales émises par la vapeur du magnésium dans l’étincelle électrique. Les raies de la série nébuleuse sont plus sensibles aux variations de la capacité que celles des triplets. — M. A. Lafay a étudié l'influence d’un échauffement local sur la valeur des pressions supportées par un corps placé dans un courant d’air régulier. Cette influence est du même genre que celle qu’on obtient en disposant des rugosités dans la région considérée. — M. L. Vignon a reconnu que des matières solides insolubles, mais à fonctions chimiques déterminées, fixent ou ne fixent pas des matières colorantes réelle- ment dissoutes, suivant les fonctions chimiques en présence. 30 SGIENCES NATURELLES. — M. J. Amar a constaté que l'absorption d'oxygène par la machine humaine n’est pas proportionnelle à l'élimination du CO* suivant un taux invariable; il existe une singularité remar- quable dans les variations du quotient respiratoire, se traduisant par son abaissement brusque tout au début du travail. MM. L. Landouzy, H. Gougerot el EH. Salin montrent que les arthrites humaines fluxion- naires relèvent tantôt d’une décharge bacillémique de bacilles tuberculeux vivants ou morts, se fixant sur l'articulation, tantôt d'une tuberculinisation locale de la jointure, provoquée par la sécrétion des bacilles enfermés dans l’épiphyse juxta-articulaire ; tantôt enfin elles traduisent la réaction anaphylactique des articu- lations sensibilisées à la toxémie bacillaire générale. — MM. Ch. Nicolle, A. Conor et E. Conseil commu- niquent de nouvelles expériences sur le virus exanthé- matique, qui viennent à l'appui de l'hypothèse du siège intra-cellulaire du microbe inconnu du typhus. — MM. V. Henri, A. Helbronner et M. de Recklinghau- sen ont réalisé pendant six semaines, à l’aide des rayons ultra-violets, la stérilisation continue d’une eau clarifiée, d’un débit moyen de 25 mètres cubes à l'heure, avec une dépense de 6€0 watts-heure, c'est- à-dire de 26 watts-heure par mètre cube d’eau. — M. Ed. Danois a étudié l'organe à spermaceti du Xogia breviceps Baïinv. Il est homologue à celui du PAyseter et doit être considéré comme une dépendance de la narine droite. — M. E. Daday de Dées décrit un Phyllopode anostracé nouveau recueilli par l'Expédi- tion antarctique du Pourquoi-Pas? à l’île Petermann; il lui donna le nom de Pranchinecta Gaïini. — M. J. de Rufz de Lavison à constaté que la tige des plantes absorbe indifféremment et en même proportion les sels qui lui sont présentés, alors que la plante munie de ses racines exerce, au contraire, une action élec- tive très nette vis-à-vis de certains sels. — M. A. Pecsi ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cherche la cause des plissements et des fractures dans une variation de l'aplatissement et des tensions due à l'accélération du mouvement de la Terre. Séance du 2% Octobre 1910. 49 SCIENGES MATHÉMATIQUES. — M. F. Robin à constaté que la résistance à l’écrasement des aciers est très forte à la température de l'azote liquide. Elle diminue quand la température s'élève, passe par un minimum vers 300%, augmente jusqu'à un maximum vers 5009, puis diminue ensuite d’abord rapidement, puis len- tement jusqu'à la fusion. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Stôrmer à calculé la situation de lazone de fréquence maximum des aurores boréales, d'après la théorie corpusculaire. — M. Ed. Salles a déterminé le coefticient de diffusion des ions gazeux, en opérant sur quatre gaz : air, CO*, Az, O, ionisés par les rayons « du polonium. Il à obtenu des résultats analogues à ceux de Townsend. — M. J. Du- elaux à appliqué le principe des échangeurs de tem- pérature à la production du froid par des mélanges réfrigérants composés de deux liquides, et il est arrivé à oblenir des températures assez basses : — 48° par le mélange de CS? et d'acétone. — M. J. Villey décrit un dispositif de mesure des très petits déplacements au moyen de l’électromètre. — M. J. Carvallo à constaté que SO® liquide déjà très pur est encore considérable- ment purilié par le passage d'un courant prolongé et sous haute tension. Sa conductibilité limite suit, non pas la loi d'Ohm, mais des lois qui rappellent celles de Ja conductibilité des gaz. — MM. P. Nicolardot et G. Chertier, en traitant la viscose par les vapeurs nitreuses en milieu nitrique, ont obtenu un mélange d'éthers nitreux et nitriques de la cellulose. Les éthers nitreux, isolés grâce à leur insolubilité dans l’acétone, sont cassants à l’état sec. Ils sont saponitiés par l’eau à l’ébullition. — MM. A. Haller et A. Lassieur ont {trouvé dans les échappées de beurre de coco deux alcools actifs, le méthylheptylcarbinol, Eb. 1950-1960, [xl — — 30,44", et le méthylnonylcurbinol, [«]n — + 10,24, el une troisième cétone, la méthylundécylcétone, F 29. — MM. A. Fernbach et A. Lanzenberg ont constaté que les nitrates possèdent une action favorisante très nette sur la zymase de la levure dans la fermentation alcoolique, tandis qu'ils nuisent à la multiplication de la levure même. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. Magnan et Perrilliat ont observé, lors d'un accouchement gémellaire au septième mois, à Côté d’un enfant normal, un monstre ayant la forme d'une masse globuleuse, avec deux jambes présentant des malformations, mais sans tête et sans bras. — MM. L. Landouzy et L. Laederich ont constaté des cas indéniables de lésions tuberculeuses et de présence du bacille chez des petits issus de mères tuberculeuses. En outre, un grand nombre de cobayes issus de mères tuberculeuses présentent des malfor- formations congénitales ou sont chétifs et d'un poids inférieur à la normale, — M° V. Henri-Cernovodeanu, MM. V. Henri et V. Baroni ont reconnu que les ba- cilles tuberculeux, exposés aux rayons ultra-violets, sont d’abord atténués, puis détruits. La tuberculine exposée aux mêmes rayons ne donne plus aucune réaction chez les cobayes tuberculeux. — M. E. Rou baud montre que les Trypanosomes sont adaptés à cer- taines conditions de la salive des Glossines, qui varient suivant les influences physiques extérieures : ce sont ces influences qui rendent ou non possible le dévelop- pement d'un même virus chez une même espèce de Glossine et limitent, par suite, son extension géogra- phique. — M. P. Marchal confirme l'existence d'une race biologique spéciale et indigène du Chermes pini dans nos forêts. Les ailés virginipares et les sexupares du Pineus pini sont prédestinés, au moment de leur éclosion, d'après la dimension de leur taille et le nombre de leurs gaines ovigères, à la direction qu'ils doivent prendre. — M. Fabre-Domergue à reconnu que la stabulation des huîtres en eau filtrée pendant REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. huit jours ne diminue ni leur poids, ni leur embon- point, ni leur résistance vitale. — M. H. Douvillé a étudié l’évolution des Lamellibranches au cours des périodes géologiques; elle consiste en une série de modifications rapides ou brusques à la suite de chan gements de milieu également brusques. Séance du 31 Octobre 1910. M. le Président annonce la mort de M. D. Gernez, membre de la Section de Physique. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Coggia présente ses observations de la nouvelle planète Cerulli (KI 1910, faites à l’équatorial d'Eichens de l'Observatoire de Marseille. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Larose étudie l'ex- tinction des discontinuités par réflexion aux extré- mités d'une ligne télégraphique. — M. G. A. Hemsa- lech a constaté que, sous l'influence du champ magné- tique, les durées de presque toutes les raies spectrales du fer sont diminuées, en même temps que leurs intensités (sauf au voisinage immédiat de l’électrode). — MM. G. Friedel et F. Grandjean montrent que les liquides cristallins du groupe de l'azoxybenzoate d'é- thyle sont caractérisés par l'existence, dans leur masse ou à leur surface, de groupes de coniques focales. — M. G. Claude signale qu'il est facile d'obtenir de l’ar- gon dans les laboratoires en partant de l'oxygène fourni par la liquéfaction de l'air, qui contient au moins 3 °/, d’argon; on absorbe l'oxygène par Cu et l'azote par Mg. — M. L. Gay poursuit ses recherches sur l'équilibre osmotique de deux phases fluides, dans le cas où les variations de volume et les effets ther- miques ne sont pas nuls. — MM. G. Darzens et H. Rost, en traitant le cyclohexène par les chlorures d'acides, ont obtenu une série de cétones tétrahydro- aromatiques R.CO.C‘H®, qui sont hydrogénées par Ni réduit en dérivés hexahydro-aromatiques. — MM. Em. Bourquelot et M. Bridel ont isolé du Verhaseum T'hapsus un sucre, qu'ils nomment verbascose, donnant à l'hydrolyse du lévulose, du glucose et du galactose. Ce peut être un isomère du stachyose, dont il diffère par son K. plus élevé (220° au lieu de 170°) et son {xln plus grand (-1690,9 au lieu de <+1480,9) — M. David décrit une méthode d'analyse des corps gras basée sur le fait que les sels ammoniacaux des acides gras concrets sont absolument insolubles, à 130-140, dans un grand excès d'AzH* liquide, tandis que les sels ammoniacaux des acides liquides y sont entiè- rement solubles. 30 ScIENCES NATURELLES. — M. A. Imbert déduit de ses expériences ergographiques que la fatigue muscu- laire vraie n'apparaît que tardivement el disparait assez vite quand le travail n’a pas été excessif. C'est la douleur qui est la cause première de la diminution apparente d'intensité de contraction que semblent révéler les tracés ergographiques. — MM. H. Truc et C. Fleig ont constaté que les poussières de bitume peuvent produire très rapidement chez l'homme des lésions de conjonetivite, de kératite et d'iritis, laissant persister des leucomes plus ou moins étendus. — MM. G. Urbain. Cl. Scal et A. Feige sont arrivés à stériliser intégralement de grandes masses d’eau par les rayons ultra-violels avec une consommation de 20 watts par mètre cube. — M. Ch. Gravier montre que la durée de la vie peut être fort longue chez cer- taines colonies de Madréporaires; mais il faut tenir compte des phénomènes de régénération qui s'obser- vent fréquemment chez ces animaux. — M. P. A. Dan- geard aretrouvé, dans l'un des bacs du Laboratoire de Roscoff, deux Chlorophycées marines rares, le Prasi- nocladus lubrieus et l'£Euglenopsis subsalsa, dont il décrit quelques particularités. —M. H. Pénau accentue le rapprochement déjà signalé entre le réticulum baso- phile des formes levures de l'Endomyces alhicans et le noyau diffus des bactéries endosporées. — M.J.Deprat distingue # zones de terrains bien nettes au Yunnan oriental : la zone paléozoïque bordière du Tonkin; la 2° 914 r r. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES zone triasique ; la zone paléozoïque occidentale; la zone charriée du Haut Fleuve Bleu. — M. L. Gentil donne un aperçu géologique sur le massif des Kebdana (Maroc oriental), où il a observé des phénomènes de charriage indiscutables. — M. E.-A. Martel a exploré dans les Pyrénées 84 abimes, répartis en 7 groupe- ments. — M. J.Schuster a étudié les végétaux fossiles des couches de Lasèm (Java); ils appartiennent au Quaternaire ancien.C'est dans des couches semblables, à Trinil, qu'on a trouvé les restes du Pithecanthropus. — M. H. Douvillé signale quelques cas d'adaptation daus diverses classes d'animaux. Pour lui, l'homme est le produit de l'adaptation du singe aux conditions créées par la disparition des grandes forêts. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 11 Octobre 4910. M. Debove présente un Rapport sur un travail du D' Revillet relatif au traitement de la tuberculose infantile sur le littoral méditerranéen par les cures marine et solaire. Sur les 888 cas de maladies scrofulo- tuberculeuses traitées à Cannes à l'asile Dollfus, le taux des résultats positifs s'élève à 93,67 °/,, celui des guérisons à 52,41 °/,. La mortalité générale a été de 20/,, due à des maladies intercurrentes. Ces résul- tats, supérieurs à ceux des sanatoria d'altitude, tiennent à la pratique des bains de mer, qui peuvent être con- tinués à Cannes au cœur même de l'hiver, à la lumi- nosité de l'atmosphère et à l'air marin. MM. A. Robin, Bouchard el L. Landouzy appuient les conclusions du rapporteur en insistant sur les avantages de la cure d'héliothérapie et de thalassothérapie faite sur la Riviera par les enfants. — MM. L. Landouzy, H. Gou- gerot et H. Salin signalent un cas d’anémie grave et de subictère par fragilité globulaire, chez un phtisique pulmonaire; cette fragilité globulaire paraît être la conséquence de la toxi-infection bacillaire. — M. Ed. Boinet a constaté que la paralysie récurrentielle est une complication indiscutable du rétrécissement mi- tral, mais que sa fréquence a été exagérée. Cependant, au point de vue clinique, il importe d’en tenir d'autant plus compte que le signe d'Ortner-Kraus peut en im- poser parfois pour un anévrisme de l'aorte avec com- pression récurrentielle. Donc, en pratique, si l’on se trouve en présence d'une paralysie récurrentielle, il convient, après avoir éliminé les diverses causes habi- tuelles de compression récurrentielle, de songer au rétrécissement mitral, asystolique ou compensé. Séance du 18 Octobre 1910. M. le D" Picqué lit un travail sur les délires post- opératoires et la stupeur primitive des opérés. — M. le D° Hirtz décrit un signe diagnostique, dans les alfec- tions pleuro-pulmonaires, réalisé par la percussion du thorax en état d'inspiration soutenue. — M. le D' Va- riot lit un travail sur le citrate de soude contre les vomissements des nourrissons. Séance du 25 Octobre 490. M. V. Galippe présente le Rapport sur le concours pour le Prix Magitot en 1910. — M. le D' Dupré lit un travail sur la folie de Charles VI. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 22 Octobre 1910. MM. C. Pezzi el E. Savini ont constaté que les endo-toxines typhique et cholérique ont une action propre toxique sur le cœur isolé du lapin; chauffées à 1209 pendant trente minutes, elles deviennent inac- tives. M. A. Mouchet a déterminé les ganglions dont sont tributaires les collections lymphatiques de l'articulation du coude. Ce sont : 1° au niveau du bras, les ganglions épitrochléens et brachiaux ou huméraux ; 29 au niveau de l'aisselle, deux ganglions du groupe huméral et un ganglion du groupe intermédiaire ou central. — MM. V. Baroni et C. Jonesco-Mihaiesti montrent que l’action des rayons ultra-violets sur le sérum frais de cheval se manifeste par la destruction de sa toxicité pour les animaux rendus sensibles vis- à-vis de ce mème sérum. — M. P. Georgevitch n'a trouvé dans les nodosités des Légumineuses que deux espèces de bacilles (qu’il appelle « et f); il n'y a pas de coccobacilles, mais seulement une espèce d’Arthro- spores, qu'on à prise pour des coccobacilles, — M. et Mme L. Lapicque n'ont constaté aucune influence spé- cifique du milieu marin sur la valeur des chronaxies pour les muscles de divers Mollusques et Crustacés. — M. A. Fava a reconnu que le Sporotrichum Beur- manni peut être inoculé au lapin par la muqueuse lacrymale ou par la peau dans le tissu périlacrymal. — M. F. de Gasperi a préparé une série de sérums hémolytiques et leucolytiques par l'injection de petites doses préventives, d'après le procédé de Besredka. — MM. P. Emile-Weil et G. Boyé ont observé que les extraits d'Ascaris Equorum possèdent la propriété de retarder la coagulation du sang de lapin. — MM. P. Abrami, Ch. Richet fils et Saint-Girons ont essayé de reproduire expérimentalement les pancréatites infectieuses. Il leur a été impossible de réaliser l'infection pancréatique ascendante; ils tiennent donc ce mode d'infection pour exceptionnel. —M. P. Thaon a reconnu que les extraits hypophysaires agissent sur la fonction rénale, non seulement en provoquant la diurèse par élévation de la pression artérielle, mais vraisemblablement aussi par une action directe sur cet organe. — M. T. M. Burrows est parvenu à eul- tiver des tissus d’embryon de poulet, spécialement des nerfs de poulet, en dehors de l'organisme, dans du plasma de poulet adulte. — MM. Al. Carrel et T. M. Burrows ont réalisé la culture, en dehors de l'organisme, des tissus adultes de Mammifères. Les parcelles de tissus et d'organes sont inoculées à un milieu plasmatique provenant du même animal, puis scellées dans des lamelles creuses conservées dans une étuve à 37°. — M. J. Jolly a vu des leucocytes survivre pendant dix mois dans du sang de Batraciens conservé aseptiquement en tubes scellés à la glacière. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier ont constaté que le sang des animaux immunisés n’est pas hémolysé par l’urohypotensine, à l'encontre du sang d'animal normal. Séance du 29 Octobre 1910. MM. Al. Carrel et M. T. Burrows ont cultivé le tissu rénal en dehors de l'organisme dans du plasma d’ani- mal de même espèce et ont constaté que ses éléments se développent activement. — Les mêmes auteurs ont cultivé dans des conditions analogues des fragments de moelle osseuse et de rate. — M. F. Batelli et Me I. Stern ont reconnu qu'un grand nombre de tissus ani- maux possèdent un pouvoir oxydant très énergique vis-à-vis de l'acide succinique; ce pouvoir est dû à l'action combinée de deux substances : l’une soluble dans l’eau (analogue à la pnéine), l’autre qui reste adhérente aux cellales. — MM. A. Laveran et A. Pet- tit ont trouvé, dans le sang des Lacerla muralis, deux espèces d’hémogrégarines : l'A. hicapsulata et l'H. Nobrei, qui est probablement identique à l'A. lacertae. — MM. Hallion et Bauer ont utilisé avec succès l’éva- luation du pouvoir hémolytique naturel des sérums dans le sérodiagnostic de la syphilis par la méthode de Hecht. — M. A. Ponselle a reconnu que l'agglutination el l'immobilisation du Spirillum gallinarum dans le sang de poule conservé in vitro résulte de la dispa- rition, par glycolyse, du glucose contenu normale- ment dans le sang. — MM. N. Fiessinger et L. Rou- dowska ont constaté que la myocardite homogène peut être parcellaire et limitée; elle est alors précoce et même fréquente. — MM. Ch. Dhéré et H. Maurice ont observé que la teneur de la rate en phosphore total est, en général, d'autant plus élevée que les sujets sont plus jeunes. — MM. A. Rochaix el A. Dufourt ont ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 915 isolé d'urines diverses et du purin huit urobactéries, donnant des réactions qui n'avaient jamais été signa- lées dans ce groupe de micro-organismes el qui sont pathogènes, dans certains cas, pour les animaux de laboratoire. — Les mêmes auteurs montrent que toute eau qui donne la réaction complète du neutral-rot est une eau contaminée par les excreta de l'homme ou des animaux. — MM. G. Billard et E. Maublant ont cons- taté que le canard domestique et la chouette (chevêche commune) présentent une immunité naturelle contre le venin de vipère. — M. G. Billard a reconnu égale- ment que l’immunité naturelle du chat contre la neu- rotoxine du venin provenant d'une morsure de vipère est à peu près complète, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Lord Rayleigh : Ondes planes aériennes d'amplitude finie. — M. G. I. Taylor : Les conditions nécessaires pour le mouvement dis- continu dans un gaz. — M. F. W. Dyson : Sur l'im- probabilité d’une distribution au hasard des étoiles dans l’espace. L'auteur reprend et complète les résul- tats de Pearson sur ce sujet. Il ne pense pas que le catalogue des étoiles doubles de Burnham puisse être pris comme base d'une discussion sur la question. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. R. J. Strutt a déter- miné la teneur en radium du basalte. Voici les résultats qu'il a obtenus avec des roches de diverses prove- nances : RADIUM PAR GR. engr. X 107°° Basalle à grains grossiers (Highlown, près BEL PR ER ne ee 0,16 Basalle à grains fins (Oelberg, Siebenge- (MCE) 0 MSN 0,33 Basalle à grains fins (Tobermory, Mull,. . 0,35 — à olivine (Talisker Bay, Skye) . . 0,57 Ces teneurs sont inférieures à celles qu'on avait trou- vées précédemment pour des roches similaires. — Le même auteur a mesuré la vitesse avec laquelle l'hélium est produit dans la thorianite et la pechblende et déter- miné l’âge probable de ces dernières. Voici les résultats obtenus : PRODUCTION D'HÉLIUM par gr. et par année en. c-:*x 100 Thorianite de Galle. : de 3,70 — OLAIMAILE 0e see 2,79 DECRHIEn Te EME CR Ce 3,16 Ces chiffres concordent avec ceux qu’on peut déduire de la teneur en uranium et en thorium de ces miné- raux. La quantité d'hélium trouvée dans le premier échantillon aurait mis 280 millions d'années à s'accu- muler, a? SOCIÈTE ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LIVERPOOL Séance du 12 Janvier 190. MM. F. G. Donnan et T. W. A. Shaw ont déter- miné la solubilité de l'oxygène dans l'argent fondu au moyen d’un appareil de leur invention. Ils ont trouvé que le volume d'oxygène (mesuré à 0° et à 760 milli- mètres) absorbé par 10 grammes d'argent fondu à 1.020°C. sous 751 millimètres est de 20,5 centimètres cubes, nombre qui concorde bien avec celui de Sieverts et Hagenacker. Des mesures exécutées sous différentes pressions montrent que la concentration de l'oxygène dans le métal fondu est proportionnelle à la racine carrée de la pression de l'oxygène sur un grand inter- valle de pressions. Il en résulte que l'oxygène est dis- sous soit physiquement comme oxygène atomique, soit sous forme de monoxyde d'argent. De ces chiffres, on peut déduire l’abaissement du point de solidification de l'argent saturé d'air à la pression atmosphérique ; théoriquement, il devrait être de 109,3; la valeur observée est d'environ 7°, SECTION DE NEW-YORK Séance du 22 Avril 4910. M. H. A. Gardner présente un Rapport sur les essais effectués sur divers points des Etats-Unis, par les soins de l'Association des fabricants de peintures amé- ricains, relativement à la durée des peintures. — MM. S. F. Evans et L. F. Hughes ajoutent quelques détails sur les essais pratiqués à Atlantic City et dans le North Dakota. Séance du 20 Mai 1910. M. G. L. Schaefer à préparé un certain nombre de sels des acides gaïacosulfonique et créosote-sulfonique avec divers aléaloïdes du groupe de l’opium, de la cin- chonine et des Strychnées. SECTION DE SYDNEY Séance du 18 Mai 1910. M. T. Steel signale un cas de forte corrosion d’un tuyau en fonte par l’eau ordinaire. Le fer a été oxydé en un mélange de FeO et Fe*0*, mais la plus grande partie a été dissoute et entraînée, en laissant les autres constituants, excepté le carbone combiné et le soufre, à un état de grande concentration. — Le même auteur a observé la présence d’un sulfate arsénieux cristallisé dans un four à brûler le soufre. Il correspond exacte- ment à la formule As°0#.S0%. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 25 Juin 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. F. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. A. Pannekoek Recherches Sur la structure de la Voie lactée. L'auteur cherche à compléter les résultats de M. J. C. Kapteyn en éludiant trois contrées du ciel: une partie de la grande tache claire entre $ et y du Cygne,une partie de l’autre branche en Aquila et Sagitta entre 10° et 20° de déclinaison, et une contrée de comparaison (ascension droite — 6 heures). Les résultats semblent indiquer qu'il n’y a pas de rapport organique entre la masse considérable des étoiles des grandeurs comprises entre 9 et 11 et les nuages d'étoiles de la Voie lactée. Mais, avant de pouvoir envisager cette possibilité comme un fait sûr, il vaut mieux attendre jusqu'à ce qu'on dis- pose de plus de données. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. P. Zeeman et B. Wi- nawer : La décomposition magnétique des raies d'ab- sorption en relation avec le spectre des taches solaires. Troisième partie. Les expériences publiées dans les parties précédentes (fev. génér. des Sciences, t. XXI, pp. 315, 628) tombent dans le domaine entre 0 — 909 et0— 39°, les directions principales incluses; la pré- sente communication couvre le domaine de 4 — 390 jusqu'à 0 — 0°. Ce dernier domaine est intéressant parce qu'il contient l'angle 6, de Lorentz, séparant l’une de l'autre ïes régions de l’effet longitudinal et de l’effet transversal. L'obiet principal de cette communication nouvelle : de prouver expérimentalement l'existence de cet angle, a été atteint. — MM. A. F. Holleman et F. van der Linden : Sur l'halogénation des benzènes monohalogénés. — Ensuite M. Holleman présente : 4° au nom de M'° A. Prins : Phénomènes critiques dans le syStème ternaire éther-anthraquinone-naphtalène: 2° au nom de M. E. H. Büchner : Æecherches sur la teneur en radium des pierres. 1. Suivant l’auteur, les pierres de Sumatra ont une teneur relativement con- sidérable de 10—® gramme de Ra par gramme de 916 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES substance ; 3° au nom de MM. A. Smits et H. L. de Leeuvw : a) Sur le système unaire, trimoléculaire pseudo-ternaire : acétaldéhyde-paraldeéhyde-métal- déhyde ; b) Sur le système acétaldéhyde-alcool; 4 au nom de MM. A. Smits et W. J. de Mooy : Sur le sys- tème chlore-dioxyde de soufre. — Enfin M. A. F. Hol- leman présente : « Die direkte Einführung von Substi- tuenten in den Benzolkern. Ein Beitrag zur Lüsung des Substitutionsproblems in aromatischen Verbindun- gen ». — M. J. D. van der Waals présente : 1° au nom de M. F. F.C. Scheffer : Sur la connexion continue de la ligne des trois phases faisant connaître les équilibres des deux composantes à l’état solide, respectivement à côté de fluide et de vapeur; > au nom de M. A. Smits : Sur des points terminaux critiques en des systèmes ternaires. Considérations théoriques sur un cas où se présente le phénomène surprenant de la formation, dans un mélange chauffé au-dessus de la température critique, d'un équilibre à trois phases solide-fluide-gaz pendant que le volume s'accroit; le système étudié est : éther-anthraquinone-alcool. — M. J. P. van der Stok présente au nom de MM. W. van Bemmelen et C. Braak : Compte,rendu provisoire de l'examen des couches supérieures de l'air, commencé à Batavia en 1909. 3° SciENCES NATURELLES. — M.C. Winkler etG.A.Ryn- berk : liecherches expérimentales sur linnervation segmentale de la peau du chien. Sixième communica- tion sur la forme et la position des dermatomes des pattes de derrière. — Rapport de MM. C. Winkler et J. W. van Wijhe sur le mémoire de M. C. U. Ariëns Kappers : « The migrations of the motor cells of the Trigeminus, Abducens and Facialis in the series of vertebrates and the differences in the course of their rootfibres ». L'étude paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. — M. L. Bolk : Sur le developpement du palais et la signification de la rangée dentaire. Les recherches de l'auteur prouvent que la formation du palais de l’homme, après celle du palais secondaire, ne se fait pas de la manière simple mentionnée dans la littérature. — Ensuite M. Bolk présente au nom de M. C.-F. van Valkenburg : Sur le nucleus facralis dorsalis, le nucleus trigemini posterior et le nucleus trochlearis posterior. — Enfin M. L. Bolk présente: « De segmentale innervatie van romp en ledematen bij den mensch » (L'innervation segmentale du torse et des membres de l’homme). — M. H. «. Hamburger et M. F. Bubanovic (Croatie) : La perméabilité pour les métaux alcalins et les métaux alcalino-terreux des corpuseules rouges du sang dans des conditions physi logiques. Résultats : Si l’on détruit entre les limites physiologiques l'équilibre de la composition des cor- puscules du sang et du sérum en ajoutant au sérum un peu de NaCI ou d'eau, on fait varier la distribution des matières inorganiques dans les corpuscules et le sérum. Cette variation concerne tout aussi bien les cations que les anions. Quant aux cations, on trouve que l'addition de2°/,, de NaCI au sérum a pour conséquence de faire entrer Na, Mg, Ca et sortir K des corpuscules; en diluant le sérum avec 10 °/, d’eau, Na entre et K, Mg, Ca quittent les corpuscules. De plus, ces réactions influencent les anions : l'addition de NaCl fait pénétrer du chlore dans les corpuseules, l'addition de l’eau le dégage. Donc les corpuscules du sang sont perméables dans les conditions physiologiques tout aussi bien pour les cations que pour les anions, ou si l’on veut pour des métaux et des radicaux acides. Ce résultat est contraire à l'opinion dominante, par rapport aux métaux, se basant sur des recherches de M. Gürber. — M. G. A. F. Molengraaf présente : 1° au nom de M. J. H. Bonnema: lierres erratiques diluviales de l'ile Borkum; 2° au nom de M. CI. Reid et Mn° E. Al. Reid : À further investigation of the pliocene flora of Tegelen. Compte rendu de nouvelles recherches (voir Rev.génér.des Sciences, t. XIX, p.516). — M.J. W.Moll présente au nom de M. C. van Wisselingh : Sur Ja structure du noyau et la caryocinèse du Closterium Ebrenbergii Men. Tandis que la structure du noyau et la caryocinèse du Spirogyra ont toute une littérature, les noyaux de CJosterium n'ont été étudiés qu'occa- sionnellement. On prétend savoir que le noyau au repos de Closterium ressemble à celui d’autres algues, sur- tout à celui de Spirogyra (A. de Bary, 1858; E. de Wil- deman, 1891). Cette opinion n’a pas de valeur, parce que les botanistes ne se sont pas encore formé une opinion définitive sur la structure du noyau de Spiro- gyra. Les communications sur la division nucléaire sont tout aussi rares. Les données les plus importantes sont dues à H. Klebahn (1890); ses études ont trait à des zygotes en germinaison, où il observait la réunion de deux noyaux en un seul, la division mitotique de ce noyau en deux noyaux-filles, la mitose de ces noyaux-lilles, produisant ainsi deux noyaux inégaux. Les figures de Klebahn font voir que les noyaux se divisent mitotiquement avec formation de figures achromatiques. Les divisions nucléaire et cellulaire des cellules végétatives n'ont pas été étudiées, ni par Klebaho, ni par d’autres investigateurs. Ainsi, il n'est pas encore certain même que la division nucléaire se fasse mitotiquement; cela n’est que probable, d’après les résultats de Klebahn dans le cas de zygotes en germinaison et parce que’ les noyaux d’autres Conju- gates se divisent de cette manière. Ainsi jusqu'à pré- sent on ne sait rien de plusieurs points cardinaux de la caryocinèse du Closterium : y a-t-il formation de chromosomes, ou d’un fuseau, et quelles variations subit le nucléole? Il est à peu près impossible d’obser- ver la division nucléaire dans la matière vivante; aussi l’auteur s’est servi de matière fixée par le liquide fixa- teur de Flemming. Afin de rendre visible les figures nucléaires, autant que possible, il se servit d’une solution d'acide chromique; cette méthode a été décrite ailleurs en 1898. Chez le Closterium Ehrenbergii, le noyau se trouve ordinairement au milieu de la plante monocellulaire; il correspond, quant à la forme, à celui du Spirogyra. On y distingue, comme d'ordi- naire, la membrane nucléaire, le réseau nucléaire, le nucléole ou les nucléoles et le liquide nucléaire. Le nucléole à un aspect particulier : il consiste en un système de corps ronds ou polyédriques arrondis, fixés les uns aux autres. Chacun de ces corps peut être cou- sidéré en soi comme un petit nucléole et le tout comme un système de petits nucléoles. Quelquefois un ou deux de ces petits corps sont plus grands que les autres et à peu près sphériques. L'étude de la caryocinèse a montré que la substance de ces nucléoles est fluide. Ils correspondent à ceux qu'on trouve ordinairement, mais non pas à ceux de Spirogyra. Ils ne peuvent être com- parés à de petits noyaux; ils n’ont pas de membrane: de même, le système des nucléoles n’est pas environné d'une membrane; ils ne montrent pas de filaments, mème sous l’action de l'acide chromique. Comme autres particularités caractérisant la caryocinèse du Closterium, l'auteur cite : la distribution des nucléoles dans le noyau, leur confluence en masses arrondies et sphériques, ce qui prouve qu'ils sont fluides, leur expulsion dans le cytoplasme, les grandes plaques nucléaires, le grand nombre (plus de 60) de chromo- somes, etc. De même que dans le cas du Spirogyra, les chromosomes du Closterium sont liés les uns aux autres par des fils très minces. P.-H. Scnoure. Le Gérant : À. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette, 21° ANNÉE N° 22 30 NOVEMBRE 1910 Revue générale DOS Scien pures ei appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. J.-P. LANGLOIS, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. Vingt et un ans seront bientôt écoulés depuis l'époque où Louis Olivier lançait le premier numéro de la Revue générale des Sciences pures et appliquées. Ses amis, que cette audacieuse entreprise avait effrayés au début, ses collaborateurs et ses fidèles abonnés préparaient avec joie une fêle pour célébrer les noces d'argent de la Revue et de son Directeur. Et cette fête eût élé un acte de haute et stricte justice, car ceux-là seuls qui furent intimement méêlés à la vie d'Olivier ont pu apprécier ce qu'il a fallu d'activité intelligente, d'énergie. infatigable et — disons-le — de large désintéressement pour mener la Revue au point où elle est arrivee. Mais la mort brutale a passé et, à l'heure présente, pour glorifier l'ami disparu, nous ne devons plus songer qu'à continuer son œuvre. Dans tous les milieux où la science est honorée et cultivée, la nouvelle de cette mort inattendue a provoqué le même cri d'inquiétude : Que vont devenir les œuvres de Louis Olivier? La Revue générale des Sciences, qui tient une place si haute dans la presse scientifique mondiale, va-t-elle disparaitre? La Revue générale des Sciences survivra à son fondateur. Grâce au concours d'un frère, digne continuateur des conceptions généreuses de Louis Olivier, et d'un ami fidèle à de chers souvenirs, les difficultés matérielles sont aplanies. D'autre part, nous pouvons affirmer que ceux qui assument aujourd'hui la lourde tâche de diriger la Revue tiendront à honneur de ja maintenir dans l'esprit élevé qui l'animait; elle sera toujours la Revue d'Olivier, c'est-à-dire un journal où les progrès incessants de la science dans toutes ses branches: seront exposés par les compétences les plus autorisées; où, sans négliger les hautes recherches spéculalives, large part sera faite aux méthodes et travaux industriels démontrant l'alliance féconde de la science et de l'industrie. C’est pour atteindre ce but que nous avons constitué le Comité de Rédaction inscrit en téle de la Revue. Les hommes éminents qui, en souvenir de notre ami commun, ont répondu à notre appel seront, pour nous, chacun dans sa spécialité, des quides précieux et sürs. Jugeant le maintien de ce périodique des plus utiles à la Science et au Pays, ils nous ont promis un concours effectif. Soutenue par eux, et aidée de tous ceux qui, jusqu'ici, ont apporté leur collaboration au journal, là nouvelle Direction saura maintenir la Revue générale des Sciences pures et appliquées dans la voie tracée par son regretté fondateur. J.-P. Langlois, Rédacteur en chef. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 22 918 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE S 1. — Art de l’Ingénieur Détermination expérimentale de Ia mai- tresse section. — En aviation, la mesure exacte de la maitresse section‘ d’un corps destiné à braver la résistance de l'air s'impose à tout moment dans les calculs. Voici, pour la déterminer, un petit moyen fort modeste, mais qui pourrait peut-être rendre service, du moins en tant qu'il est facile et rapide, et à l'abri des grandes erreurs. Soit, par exemple, à déterminer la maîtresse section du corps de l’aviateur lui-même, debout, et se présen- tant de face au vent. Si je découpe en suivant son contour l’image photo- graphique de cet homme prise de face ou de dos dans cette attitude, la silhouette que j'obtiendrai sera sensiblement égale à la maîtresse section du modèle réduite à l'échelle de l'image. Si je connais exacte- ment la surface de cette découpure de papier, il me suflira, pour en déduire la maitresse section réelle de l'homme, de diviser la hauteur de l'homme par la hauteur de la sil- houette,et de multiplier par le carré du quotient la surface de la sil- houette, puisque lessur- faces de deux figures sont proportionnelles aux carrés d’une de leurs dimensions linéai- res. Mais il est impossible de trianguler exacte- ment une surface aussi irrégulièrement limitée et d'ailleurs aussi ré- duite. Pour tourner l'obstacle, je détermi- ne expérimentalement cette surface d'une ma- nière indirecte : je colle l'image ou j'en décal- que le contour sur un morceau de carton très épais, et je découpe le carton ensuivantcecon- tour. Je possède main- tenant un petit bon- homme de carton d’un poids très appréciable. Dans la même pièce de carton, je découpe ensuite un parallélogramme d'une surface que j'estime, — à l'œil, — un peu plus grande que la surface de la figurine. Posant alors celle-ci sur un des plateaux d'une balance convenablement sensible, et mon parallélogramme sur l’autre, je réduis par des coups de ciseaux successifs la longueur du parallélogramme, de façon à amener son poids à faire exactement équilibre au poids de la figurine. Evi- demment, si j'ai pris d'un bon carton, une structure et d'une épaisseur uniformes, mes deux découpures auront la même surface. Or, s’il est difficile d'appré- cier numériquement la surface d'une figure irré- vulière, la mesure en centimètres et en millimètres carrés de l'aire d'un parallélogramme — la base la hauteur — est une affaire d’écolier. Pour assurer le résultat, j'aurai expérimenté d’ailleurs la régularité ‘ On appelle ainsi « la section la plus grande que l'on puisse faire dans le corps par un plan perpendiculaire au sens du mouvement, lequel, par hypothèse, doit être Fig. 1. — Dispositif inscripteur. — À, ruban de papier; 2, rou- leau tournant; 4, table à rebords; 6, style de graphite; 7, axe: 8, contrepoids; 9, membrane; 10, entonnoir acoustique; 13, levier oscillant autour du point 12; 14, plaque ou prisme appuyant sur le style 6. de densité de mon carton par unité de surface, en en pesant deux copeaux exactement de la même grandeur, et J'aurai pris soin aussi de découper le petit bon- homme et son parallélozramme équivalent tout près l’un de l’autre dans la pièce de carton. La surface de l’aviateur de carton trouvée, je passe à la maïtresse section de l’aviateur réel par le caleul proportionnel indiqué plus haut. Soit dit en passant, il y a là un procédé à signaler aux instituteurs qui initient leurs élèves aux premières notions de géométrie par la « voie intuitive », tant recommandée et à si juste titre par M. Laisant : mesures de polygones et de cercles, carré de l'hypo- thénuse, surface de polyèdres, etc. M. Lefebvre, Docteur ès sciences. $ 2. — Physique Une nouvelle méthode d'inscription pho- nographique. — On sait que le procédé jus- qu'ici en usage pour en- registrer et reproduire les sons consiste à tra- cer dans une plaque, à l’aide d’une pointe, des courbes sinueuses à al- lure latérale ou verti- cale, qui, par l'intermé- diaire d'une pointe re- liée à une membrane, reproduisent les vibra- tions acoustiques origi- nales. M. B. Gwozdz, à Schô- neiche, près Berlin, vient d'inventer un nou- veau procédé où l’ins- cription phonographi- que se fait à l’aide d'un ruban de papier, dé- placé à une vitesse uni- forme et sur lequel une membrane exposée aux sons produit par com- pression un dépôt plus ou moins abondant de graphite. Pour repro- duire les sons ainsi ins- crits, on fait passer le ruban de papier à la même vitesse près de deux contacts électriques dis- posés au voisinage immédiat l’un de l’autre et dont le circuit comporte un appareil de reproduction, c'est à-dire un téléphone ou un électro-aimant agissant sur une membrane, de façon que les deux contacts, touchant simultanément le dépôt de graphite, ferment à travers celui-ci le circuit électrique. Or, comme le dépôt de graphite introduit dans le cireuit une résistance variable suivant sa densité (c'est-à-dire sui- vant les sons enregistrés), l'appareil de reproduction est actionné par un courant dont l'intensité varie d'accord avec cette résistance variable, c'est-à-dire suivant l'inscription acoustique. Le dispositif d'inscription, représenté par la figure 1, comporte le ruban de papier 1, dévidé par le rouleau 2 à une vitesse et à une tension uniformes, en passant parallèle à l'axe de symétrie du corps considéré ». — V. l'article sur l'Aviation par le Commandant Pauz RENARD, dans la Revue, n° du 45 mars 1910, p. 191. , “ns LP F + CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 919 sur une table 4 à rebords prismatiques. Au-dessous de ce ruban de papier, est disposé un style de graphite 6, pénétrant à travers la table # et monté de préférence sur un axe 7 à contre-poids 8. Au-dessus du ruban de papier { se trouve une membrane 9 recevant les sons à inscrire, à l'aide d'un entonnoir acoustique 10 ou d'un électro-aimant inséré dans le cireuit télépho- nique. Cette membrane est reliée à l'extrémité libre d'un levier 13, oscillant autour du point 42 et qui, sur sa face inférieure, porte une plaque ou un prisme 1#, appliqué continuellement contre le style de graphite tournant 6. C'est ainsi qu'un trait de graphite uniforme s'inscrit sur le ruban. Aussitôt que la membrane 9 est mise en vibrations, celles-ci sont communiquées aux leviers 13 et à la plaque 1#, et la pression normale se trouve tantôt augmentée, tantôt diminuée, d'accord avec chaque vibration acoustique. Ces alternatives d'augmentation et de diminution de pression se traduisent par un dé- pôt de graphite plus ou moins abondant, de facon que les différentes portions du ruban de papier opposent des résistances électriques variables. A la station réceptrice (fig. 2), le ruban de papier 1 portant le dépôt de graphite est déplacé à vitesse uni- forme en pas- sant sur un prisme trian- gulaire 25,con- tre lequel vien- nent appuyer deux ressorts de contact 26, 27,insérés dans un circuit qui comporte la source de cou- rant 28 el un appareil de re- production ap- proprié (par exemple, un té- léphone) 29. L'un des res- sorts 26 se trouve immé- diatement au- dessous de l’a- rête du prisme triangulaire sur le ruban de papier; l'autre repose immédiatement sur l’arête à peu de distance du pre- « mier, de façon que le dépôt de graphite établisse le | courant électrique à travers leur intervalle. Or, la résistance du dépôt graphitique, qui, nous l'avons dit, - varie en raison inverse de sa densité, correspond aux - vibrations acoustiques communiquées à la membrane 9 (fig. 1). Aussi l'intensité du courant traversant le cir- - cuit subit-elle des modifications dues à ces variations de résistance et qui, dans le téléphone, rendent les vibrations acoustiques originales. La source de courant 28 fournit du courant continu ou alternatif; dans ce dernier cas, la fréquence doit ètre assez. élevée pour que l'oreille humaine n’entende plus le courant dans le récepteur téléphonique. Fig. 2. 25, prisme triangulaire; 26, 27, ressorts de contact; 28, source de courant; D D L 29, téléphone. 1 $ 3. — Electricité industrielle Le relais téléphonique. — La question du relais téléphonique a sollicité l'attention des inventeurs dès les premiers temps de la téléphonie. Aussitôt que l'on eut constaté la faible portée des transmissions réalisa- bles directement au moyen du téléphone, on songea à constituer un appareil qui pût jouer, vis-à-vis des cou- rants transportant la parole, le rôle des relais employés en télégraphie vis-à-vis des courants télégraphiques, c'est-à-dire qui fût à même de reproduire, en les ren- forçant, les variations de courant reçues. Les conditions à remplir sont toutefois, essentielle — Station réceptrice. — 1, ruban de papier portant le dépôt de graphite; ment différentes pour l'une et l’autre catégorie d'ins- truments, et, bien que l'on possède aujourd'hui des relais télégraphiques d'une sensibilité extrême, répon- dant à des courants infinitésimaux, on n'a pas encore réalisé de relais téléphonique satisfaisant aux exi gences de la pratique. En télégraphie, en effet, qu'il ait pour but de repro- duire les signaux envoyés sur une ligne, soit dans un cireuit local où est inséré le récepteur proprement dit, soit sur une seconde ligne reliée à la première, le relais n'a pas à traduire les variations d'intensité dans les émissions ni à répondre à des courants de plusieurs tonalités. Le tout est que le levier relié à l'armature et qui joue le rôle de commutateur ou de transmetteur pour le circuit où les courants sont relayés, se porte de la position de repos à la position de travail, lorsque se produit une modification de régime déterminée. Dans les conditions les plus simples, par exemple, le relais ne recoit pas de courant au repos, et le travail se fait avec une intensité fixe, ou dont les variations sont faibles et dues, en tout cas, à des causes acciden- telles. De plus, la périodicité des émissions est sensible- ment constante, en ce sens que le relais n’est ordi- nairement ap- pelé à fonc- tionner qu'en- tre des limites de vitesse de transmission relativement rapprochées. Supposons que les signaux soient envoyés sur la première ligne avec une intensité mo- yenne de 10 milliampères : le relais pourra donner des ré- sultats parfaits s’il est réglé pour que le le- vier quitte la position de re- pos avec quel- ques milliampères, par exemple. Si même l’armature est lente à se mouvoir et ne ferme le second circuit que pendant un temps ne correspondant pas à la durée des signaux reproduits, on peut corriger ce défaut sans grande difficulté. F Il en est tout autrement en téléphonie, c'est-à-dire pour la reproduction de la parole, et les propriétés que doit posséder le relais se confondent avec celles qui sont nécessaires pour le téléphone même. Il faut que l'instrument réponde à des courants alternatifs ou ondulatoires de différentes fréquences, jusqu'à 2.000 au moins par seconde, et ilne suffit plus que le con- tact mobile prenne deux positions différentes selon qu'un courant existe ou n'existe pas sur la ligne, mais qu'il ait une position distincte pour chaque intensité et qu'à chaque position corresponde, sur le second circuit, une intensité de courant déterminée, en rap- port avec celle de ce que j'appellerai, pour simplifier, le courant primaire. Un bon relais télégraphique, rapide et apériodique, pourrait, à la rigueur, être capable de « relayer » dela musique, parce qu'ici la hauteur du son est surtout en jeu. Il ne saurait convenir pour la parole, parce qu'in- dépendamment de la hauteur des sons, l'appareil doit rendre complètement et fidèlement le timbre et l'am- plitude. Une autre difficulté se présente si l’on veut réaliser complètement, pour la téléphonie, la combinaison a laquelle on arrive, avec le relais télégraphique, en 920 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE réunissant deux appareils de ce genre, pour former un translateur qui, installé entre deux sections, permet à chacune de celles-ci de correspondre librement avec l'autre, de la mème façon que cela aurait lieu avec une liaison directe. En télégraphie, cette combinaison ne présente aucune complication parce que, l'armature n'ayant que deux positions définies, il est simple de faire en sorte que, pour chaque relais, l’armature relie la sec- tion correspondante au relais dans l’une de ses posi- tions, tandis que l’autre correspond à la pile. Mais, puisqu'en téléphonie chaque position de l’ar- malure est utilisée et doit correspondre à une inten- sité donnée de courant, conformément à ce qui a été dit plus haut, il est clair que la source de courant doit être en ligne d'une facon permanente pour les deux sections. Le montage devient, de ce fait, beaucoup plus complexe qu'en télégraphie. En effet, si l'on ne prend pas les précautions voulues, les deux relais du translateur, maintenus simultanément én circuit, réa- gissent l'un sur l'autre et rendent la translation tota- lement impossible. Heureusement, cetle partie du problème peut être résolue par une disposition appropriée des circuits, en recourant, par exemple, à un schéma qui à été indiqué, en 1889, par M. T. A. Edison (brevet améri- cain, 340.707). M. Fessenden l'a reprise récemment pour la radio- télégraphie et pour la radiotéléphonie!, en vue de soustraire les appareils récepteurs de chaque poste aux effets des courants des instruments transmetteurs du même poste et de permettre ainsi la transmission et la réception simultanées. Cette combinaison, qui est très ingénieuse, n’est pas d'ailleurs la seule réalisable ; à ce point de vue, il ne semble pas qu'il reste beau- coup à faire par conséquent. Quant au relais, la première idée qui soit venue à l'esprit a été de combiner le téléphone et le micro- phone, c'est-à-dire de faire en sorte que la membrane agitsur un système de contactimparfait. Desappareils de ce genre ont été imaginés par Edison (en 1877), Ludtge, Thomson, Houston, Rood (en 1878), Hughes (en 1879), Gilliland (en 1881), ete., mais sans qu'aucun d'eux rencontrât un succès pratique quelconque. La raison de cet échec paraît être dans les imperfections du té- léphone, imperfections qu'aggravent, en s'y ajoutant, celles du microphone. Il est, d'ailleurs, du fait de sa grande sensibilité, très sujet aux perturbations, et tout instrument qui comporte une membrane de grandes dimensions peut être influencé par les mouvements de l'air ambiant. Vainement a-t-on essayé jusqu'ici de remédier à ces inconvénients par des artifices variés. Erdman, en 1897, a, par exemple, imaginé de faire agir le dia- phragme de réception sur une soupape modifiant la vitesse d'écoulement d'un gaz comprimé agissant sur la membrane d'un récepteur. J. S. Stone a placé le système reproducteur dans le vide. Kitsee a supprimé la plaque et employé un système microphonique dou- ble, dans le genre de celui qui existe dans des micro- phones où les vibrations sonores attaquent la plaque des deux côtés; il a aussi utilisé un relais galvanomé- trique. W. W. Jacques a amplifié séparément les cou- rants de basse fréquence et de haute fréquence, pour corriger l'inégale sensibilité des relais vis-à-vis des deux périodicités. J. Trowbridge a essayé un relais à bobine mobile agissant sur deux diaphragmes entre lesquels elle est suspendue. Aucun de ces dispositifs n'a pu satisfaire à l'épreuve de la pratique et beaucoup d'autres n’ont jamais été construits. En fait, l'énergie disponible dans la partie réceptrice du relais est si faible qu'il parait bien difficile d’en tirer un parti utile pour actionner un transmetteur, et c’est pourquoi j'avais préconisé, ily à quelques années, { Proceedings of the American Institute of Electrical Engineers, juillet 1908, p. 1283. lemploi d'une dynamo pour réaliser l’'amplification voulue. Dans ce système, les courants sont reçus dans l'induit; il y à une augmentation directe de l'énergie et l'expérience permet de dire que la multiplication peut être ainsi dans le rapport de 4 à 20. Mais il est extrê- mement difficile de construire une dynamo où la com- mutalion ne présente pas d'irrégularité nuisible, don- nant lieu à des sons parasites. D'après les expériences de M. Fessenden, avec des alternateurs de haute fréquence, ilne serait pas impos- sible, cependant, de réaliser une telle machine qui permit la reproduction parfaite de la parole en radio- téléphonie. L'étude théorique du phénomène de la transmission sur les lignes donne à supposer, par con- tre, que ces courants de haute fréquence ne sauraient être utilisés pour le transport téléphonique. Pour le moment, l'appareil qui offre le plus d'intérêt est un petit relais dû à M.S. G. Brown, et au moyen duquel ce dernier, ainsi que quelques expérimenta- teurs indépendants, sont arrivés à des résultats très encourageants. Cet instrument présente une certaine analogie avec les relais télémicrophoniques primitifs: mais, utilisant les observations de MM. J. Thomson, Earhart, Kinsley et d'autres sur la conductibilité des intervalles micros- copiques pour les courants à faible tension, M. Brown assure le maintien, entre les électrodes du système microphonique, d'un espace d’ailleurs infinitésimal (de l’ordre de 5 X 107 cent.) On sait que si, sur un intervalle de cette sorte, on ferme le circuit d’une source électrique à bas voltage (1-2 volt), il s'établit un courant dont l'intensité varie en raison inverse de la grandeur de l’écartement. Une modilication même très faible de celui-ci se traduit par une variation d'intensité relativement considé- rable, et comme les mouvements des deux parties sont libres puisqu'il n'y a pas de contact entre les élec- trodes, une force très réduite suffit à produire des mouvements sensibles. Il est toutefois très difficile d'assurer le maintien, par des moyens purement méca- niques, de l'intervalle nécessaire; l'originalité du relais Brown est précisément dans le procédé employé pour arriver à un réglage automatique. Voici, pour le surplus, la description de l'appareil, telle qu'elle vient d’être présentée par l'inventeur à l'Institut des Ingénieurs électriciens d'Angleterre‘. Sur les deux pôles d'un aimant permanent en fer à cheval, sont montés deux noyaux verticaux de fer doux supportant eux-mêmes des noyaux plus petits, suivant la construction courante pour les récepteurs télépho- niques. Sur les noyaux sont bobinés deux enroule- ments : l’un, sur les petits noyaux, de fil fin, que l'on relie à la ligne et qui recoit donc les courants télépho- niques à amplifier; l'autre, de fil gros, inséré dans un circuit local comprenant un élément de pile sèche. Les courants téléphoniques, modifiant l’aimantation du noyau, provoquent des déplacements de l’anche qui est de telles dimensions que sa période de vibration propre ne puisse empêcher la reproduction des cou- rants téléphoniques. L'extrémité libre, en regard des pôles, porte un con- act au-dessus duquel arrive l'extrémité d’une vis de contact, réglable avec une grande précision au moyen d'une vis à pas très fin agissant sur l'extrémité du bâti. Le circuit local prémentionné est établi par l'intermé- diaire des contacts en question, contact de l'anche et contact de la vis; c’est son action sur l’électro-aimant qui assure automatiquement le maintien de l'inter- valle. L'enroulement de fil gros est déposé sur une gaine de tôle de cuivre qui, par l'effet des courants de Fou- cault, annule la réaction de l’enroulement intéressé pour les courants téléphoniques. Les points de contact sont en alliage d’osmium et 1 S. G. Browx : A telephone relay. /Znstitute of Electrical Engineers, 5 mai 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 921 d'iridium, l'expérimentateur ayant constaté qu'il con- vient d'employer pour les constituer des métaux aussi durs que possible, et ils sont protégés par une goutte d'huile. Dans un premier modèle de relais établi sur ce principe, le contact mobile était supporté par un disque de fer; mais il a été constaté qu'avec ce sys- tème les vibrations extérieures étrangères influen- caient beaucoup l'instrument. L'anche, étant de petites dimensions, échappe totale- ment aux vibrations sonores de l'air ambiant. Le relais donne les meilleurs résultats lorsque le courant nor- mal est la moitié du courant maximum. L'amplification obtenue au moyen du relais Brown est, paraît-il, excellente; elle se fait dans le rapport de un à vingt el sans que les sons soient déformés le moius du monde. Un écouteur téléphonique de faible résistance, relié aux bornes du système, reproduit avec une grande intensité et une fidélité parfaite des cou- rants à peine perceptibles dans un téléphone mis di- rectement en ligne. Au cours d'essais de l'Amirauté et du Post Office anglais, en radiotélégraphie, en employant deux relais en série, l'amplification était telle que les sons deve- naient perceptibles à plusieurs mètres de distance. Des signaux que l’on ne soupeonnait même pas, avec les appareils ordinaires, ont pu être reçus très nelle- ment au moyen du relais. Au cours d’essais en ligne également, les transmissions ont été bonnes, l'instru- ment doublant approximativement la portée de com- munication réalisable. Si ces résultats se confirment dans la pratique, l'ap- pareil de M. Brown recevra sans nul doute d’impor- tantes applications. En tout cas, on peut espérer qu'il sera avantageusement utilisé en radiotélégraphie. M. Brown en a d’ailleurs appliqué le principe à la cons- titution d’un stéthoscope de grande sensibilité et dont quelques essais viennent de montrer l'intérèt. H. Marchand. $ 4. — Chimie La transformation de la cyanamide eal- cique dans la terre arable. — La cyanamide calcique est fabriquée aujourd’hui en quantités impor- tantes aux dépens de l'azote atmosphérique et son emploi comme engrais se répand de plus en plus. Mais il règne toujours quelque incertitude sur la facon dont l'azote qu'elle contient est utilisé par les plantes. Un savant italien, M. C. Ulpiani, qui a poursuivi de lon- gues recherches sur ce sujet, vient d'aboutir à la con- clusion que la transformation de la cyanamide est, au moins primairement, un processus purement physico- chimique, dans lequel les bactéries ne jouent aucun rôle. D'après lui, il y a deux stades dans la transforma- tion de la eyanamide calcique mise en contact avec le sol : 4° formation d’urée; 2° conversion de l’urée en carbonate d'ammonium. Les micro-organismes ne jouent aucun rôle dans le premier stade pour les raisons suivantes, mises en lumière par M. Ulpiani : 4° La vitesse de formation de l'urée est maximum au commencement et diminue ensuite graduellement; 20 La réaction procède de la même façon avec des concentrations incompatibles avec la vie, et la quan- tité absolue de cyanamide transformée augmente avec la concentration; 3 La transformation a lieu en présence d'antisep- tiques et dans le sol stérilisé, et à une plus grande vitesse à 100° qu'à la température ordinaire ; %° On obtient des résultats analogues en employant du charbon animal stérilisé à la place de sol. La transformation de la cyanamide calcique en urée serait un phénomène de surface, dù aux substances Re RE ne Gazzella chimica italiana, 1910, t. XL, 1re part., p. 613- 100, colloïdales présentes dans la terre. Si les propriétés colloïdales du sol sont détruites par calcination ou traitement avec les acides ou les alcalis, le sol perd la propriété de transformer la cyanamide en urée; mais il la récupère si on le mélange avec un colloïde te que l'hydrate ou le silicate d’alumine gélatineux ou les silicates hydratés (zéolithes). Dans les 45 premières minutes après le contact de la cyanamide calcique avec la solution du sol, une concentration a lieu dans la couche qui sépare la phase liquide et la phase solide, puis les conditions existantes (haute pression, condensation moléculaire, concentration ionique, etc.) déterminent ou accélèrent la formation d'urée par hydrolyse. M. Ulpiani n'a pas encore pu établir définitivement si les micro-organismes jouent un rôle ou non dans le second stade du processus, la transformation de l'urée en carbonate d'ammonium. $ 5. — Botanique Un succédané du thé : le Catha edulis. — C'est M. J. F. Owen, chimiste du Gouvernement afghan, qui vient de rappeler l'attention sur ses propriétés *. Il avait été frappé par l’arome du thé qu'on lui offrait dans certaines maisons afghanes et par le fait qu'il soulageait immédiatement les névralgies. Ce breuvage avait un goût analogue à celui du thé et il était évi- demment préparé avec une plante contenant un prin- cipe voisin de la caféine. Il en demanda un échantillon pour l'analyser et il reconnut qu'il s'agissait du Catha edulis, plante de la famille des Célastracées, déjà signalée comme substitut du thé. Les natifs de l'Afghanistan s'en servent pour effectuer de longues marches de nuit sans ressentir de fatigue, et il augmente considérablement les forces musculaires de l’homme. Les feuilles desséchées sont brisées et bouillies avec de l’eau pendant quinze mi- nutes. L'usage de cette infusion est assez répandu dans l'Afghanistan. $ 6. — Biologie Survie des leucoeytes. — Dans une très courte note, présentée le 22 octobre à la Société de Biologie, M. J. Jolly signale la très longue survie que peuvent présenter, hors de” l'organisme, les leucocytes de Batraciens. Du sang de grenouille (Rana temporaria), puisé dans le cœur, à élé conservé aseptiquement, en tubes scellés déposés à la glacière, sans addition d'aucun réactif. Dix mois après la prise, les leucocytes étaient encore vivants, ainsi qu'en témoignaient les mouve- ments amiboïdes manifestés par ces cellules à la tem- pérature du laboratoire, soit 18°. $ 7. L'anesthésie électrique. — Les expériences de M. Leduc, à Nantes, ont mis en évidence les effets anesthésiques du courant continu, interrompu à de brefs intervalles. La méthode du savant francais a été perfectionnée et modifiée par Mie L. G. Robinovitch, à New-York, dont nous avons eu l’occasion de signaler les recherches dans un fascicule antérieur de la /ievue (n° du 15 octobre 1909, p. 802). Il restait toutefois à démontrer, par un exemple con- cluant, la possibilité d'appliquer cette méthode à la pratique médicale. C’est ce que M"° Robinovitch vient de faire à l’occasion de l'opération décrite ci-après. Un jeune Autrichien, âgé de vingt-trois ans, reçu à l'hôpital de Saint-François à New-York, se plaignait d'engelures aux pieds ; celles-ci s'étant compliquées de gangrène, il fallut procéder à l'amputation de quatre doigts, y compris les deux orteils. RRQ UT 1 Journ. of the Soc. of Chem. Ind., t. XXIX, p. 1091 (30 sept. 1940). — Sciences médicales 923 Ji CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE M'e Robinovitch disposa son appareil électrique sur une grande table placée dans la salle opératoire. Des batteries d'accumulateurs d'une automobile stationnée au dehors, un fil conducteur était relié, à travers une fenêtre de la salle, au rhéostat réglant l'intensité du courant et à deux instruments de mesure du voltage et de l'intensité respectivement. Une petite clef insérée dans le circuit complétait l'équipement de la table. Le malade, les yeux bandés, mais autrement libre de ses mouvements, fut couché parallèlement à la table. Le rhéophore négatif, une électrode de zinc recouverte de coton mouillé, était placé sur les vertèbres sacrales ; une autre cathode, trempée dans une solution saline, était disposée à l'entrée du nerf crural antérieur, daus le triangle de Scarpa. Une première anode métal- lique, recouverte de coton, était fixée sur le nerf tibial postérieur, et une autre anode du même genre sur le nerf tibial antérieur, en dehors de la crête du tibia, à 20 centimètres au-dessus de l'articulation du pied. Cette disposition, on le voit, était analogue à celle dont Mie Robinovitch s’est servie pour la réanimation des sujets en apparence électrocutés. Immédiatement après la fermeture du courant, l'anesthésie de la jambe au-dessous des électrodes étant complète, on pratiqua rapidement l’incision: le malade n’éprouva en apparence aucune douleur. Après l'amputation de l’orteil du pied droit, on transféra les électrodes au pied gauche, où l’amputation de l’orteil et des second et troisième doigts fut également opérée. Pendant toute cette opération, qui dura quarante-cinq minutes, le malade fut d'excellente humeur et conversa d'une façon très animée avec Mie Robinovitch et les chirurgiens qui l'entouraient, en insistant sur l'absence de toute sensation douloureuse dans la jambe opérée, malgré les incisions très profondes qu'on y faisait. L'état physique et moral du malade était tout aussi excellent deux heures après l'opération. Un avantage particulier de cette méthode d'anesthé- sie, c’est l’économie de temps, due à ce que l'incision peut être faite immédiatement après la fermeture du courant principal. D'autre part, les effets ultérieurs, parfois si sérieux, de l’anesthésie ordinaire font entiè- rement défaut. Le courantemployé lors de cette expérience était du Courant continu emprunté à une batterie d'accumula- teurs de 100 ampères, interrom@u 6.000 à 7.000 fois par minute, le temps de passage total du courant étant de 1/10 du temps tout entier. L'interrupteur utilisé est un dispositif spécial imaginé par l'expéri- mentatrice. Les instruments de mesure marquaient 5# volts et 4 milliampères de courant, traversant loca- lement le corps du malade, de la périphérie vers le centre. Alfred Gradenwitz. $S 8. — Géographie et Colonisation La question du Spitzberg ‘. — Le Spitzherg, constitué principalement par trois grandes iles, em- brasse une surperficie d'environ 68.000 kilomètres carrés, à peu près celle de la Grèce. Grâce à l'influence d'un bras du Gulf-Stream, la partie occidentale, en dépit de sa haute latitude, est la terre polaire qui jouit de la température la plus douce. De là, depuis quelques années, un afflux de nombreux touristes. Bien que le Spitzherg soit encore res nullius, beau- coup de nations ont pris part à l'exploitation et à la découverte des terres voisines. Ce furent des marins français qui, les premiers, tentèrent le passage du ! Orro NorpexskioLzp : Le Spitzherg. Revue pour les Français, 25 juin 1910.— X. : La question du Spitzberg. Le Correspondant, 10 mai 4910. — Prccronr: L'organisation du Spitzhberg. Revue générale de droit international public, mars-avril 4909. Nord-Est. Deux Compagnies francaises de pêche ne réussirent pas à se maintenir au Spitzherg contre les Hollandais, qui y gardèrent la prépondérance à partir du milieu du xvne siècle: Smeerenburg, fondé en 1617, dans l’île d'Amsterdam, avait alors, pendant la saison des pêches, une population de 15 à 20.000 habitants, comme aujourd'hui les bourgs des îles Lofoten où se réunissent les pêcheurs de morue. Exterminée par les Hollandais, la baleine se retira en pleine mer: ceux-ci furent alors remplacés par des trappeurs russes, qui vinrentchasserles animaux à fourrure jusque vers 4830. Les chasseurs norvégiens furent désormaisseuls à appa- raitre au Spitzherg, profitant de la proximité de Tromsoe et d'Hammerfest, En 1838-39, Xavier Marmier, qui accompagnait des savants sur le navire La fieclierche, visita les parages du Spitzherg et les décrivit dans ses Lettres sur le Nord. Celles-ci sont à rapprocher des impressions que publia, en 1906, dans le Journal des Débats et Le Gaulois, M. René Bazin, qui avait fait partie d’une des croisières organisées par la Revue générale des Sciences, Les connaissances scientifiques que nous possédons sur le Spitzberg sont dues à Torell, aux Nordenskjôld, à Nathorst, de Geer, Mohn, aux voya- geurs anglais Scoresby et Conway, sans oublier M. Charles Rabot, qui y est allé deux fois et a beau- coup ajouté à nos renseignements sur celle région, en l'étudiant en géographe et en glaciologue *. Le règlement de la question du Spitshberg a été suggéré par des motifs d'ordre économique. Malgré les destructions temporaires auxquels se livrent les pêcheurs, la région restera toujours un des principaux habitats des Cétacés, auquel ils reviennent au bout d’un temps plus ou moins long. Il n’en est plus de même au point de vue des animaux terrestres ; il ny aura bientôt plus rien à chasser au Spitzherg si l'on ne procède pas très vite à une protection efficace des espèces qui y sont encore représentées. L'archipel possède, en outre, une autre source de richessés d'un plus grand prix ; il s'agit de dépôts de houille assez considérables et de qualité satisfaisante. Découverts en 1870, en même temps que des gisements de phospho- rite (Isfjord) et de marbre (Baie de la Recherche), étudiés plus sérieusement depuis 4890, leur exploita- tion à commencé en 1905 pour le compte d’une Société anglo-norvégienne. Malgré les difficultés provenant de la rigueur du climat et de l'absence de vivres, plusieurs chargements ont déjà été dirigés vers l'Europe. D’autres Sociétés se sont formées, et des conflits se sont produits qui rendent nécessaire la création d'une police et d'une administration judiciaire, chargée d'examiner les droits des Compagnies et de fixer l'étendue des concessions. Après 1871, la Suède et la Norvège voulurent annexer le Spitzherg ; la Russie s'y opposa et, en 1872, les trois Etats conclurent un accord qui maintenait l'état de res nullius et qui admettait pour tous les étrangers le droit d'y créer des établissements scientifiques et industriels. La valeur économique du pays n’est pas suffisante pour rému- nérer une métropole ; d'autre part, et pour la même raison, il ne saurait être question d’un partage. La seule solution pratique et avantageuse, préconisée d'ailleurs par Nordenskjüld, doit consister dans l’éta- blissement d'une réglementation internationale s'ap- pliquant aux richesses exploitables. Quant au pays lui-même, ouvert de plus en plus au tourisme et aux recherches scientifiques, il doit rester, suivant le savant explorateur que nous venons de citer, « le grand musée ouvert de la Nature arctique ». Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. Cf. notamment Cn. Rasor : Exploration dans l'Océan glacial arctique. Bulletin de la Société de Géographie de Paris, 1894. CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER 023 LOUIS OLIVIER Depuis trois mois, Louis Olivier repose dans la terre natale, à laquelle le rattachaient de tendres souvenirs. Cruelle à ceux qui l’aimaient, la mort lui fut clémente ; conservé dans la plénitude de ses forces, de sa claire intelligence, de sa superbe volonté, jusqu'à l'heure même qui devait l'enlever à notre admirative affection, il n'a connu ni les souffrances que la maladie apporte, ni l'angoisse des derniers moments, ni même la lassitude de l’œuvre accomplie, qui atteint parfois les plus vaillants. Son labeur quotidien achevé, il s'endor- mit paisiblement, pensant au travail du lende- main ; et, dans la nuit du 11 au 12 août, il passa de la pleine activité à l'éternel repos. Aimant passionnément la vie, cette vie de bienfai- sante action qu'il s'était faite, il eùt choisi cette fin qui, subite, ne fut cependant point brutale. Et ceux qui l’aimèrent et toujours le regretteront puisent aujourd'hui quelque adoucissement à leur peine dans celte pensée que lui, au moins, connut jusqu'à son dernier souffle l’abondante joie de vivre et de lutter sans cesse pour répandre, au près et au loin, toujours plus de vérité, toujours plus de lumière. Louis-Pierre Olivier naquit à Elbeuf le 29 juin 1854, et c'est dans l’active cité normande que s'écou- lèrent son enfance et sa première jeunesse. D'une exceptionnelle vigueur, plein d’une saine et abon- dante curiosité et d’un impérieux besoin de elarté, il meubla de bonne heure son esprit de toutes les choses vues et comprises, constituant ainsi l’en- semble harmonieux et complet que tous nous admi- rions en lui. Dans l’importante manufacture que possédait son père, jeune alors, et qui, le pleurant en silence, vient de s'éteindre chargé d'ans, il saisit les aspects et les nécessités de la vie indus- trielle; sous la direction d'une mère très bonne, au souvenir de laquelle il voua plus tard un véri- table culte, il sentit se développer sa native sensi- bilité et l'enthousiasme qui ne faiblit jamais en lui pour toutes les choses bonnes et belles. Une aisance plus qu'abondante permit que rien ne füt négligé dans l'éducation de Louis Olivier; avec son frère, de dix-huit mois plus jeune, et qui demeura toujours son meilleur ami, il recut d'un précepteur excellemment préparé à l’enseignement des humanités, la solide culture littéraire à la- quelle il dut plus tard de vêtir toujours sa pensée d'élégance et de sobre clarté. Cependant, son esprit déjà indépendant ne pliait pas sous l'aspect conventionnel de l'Antiquité elas Sique ; il admirait, mais avec discernement; sous la littérature, il cherchait à se représenter les réalités ; il avait peine à croire que le miel de l'Hymette, dont le nom seul évoque une infinie douceur aux esprits imprégnés de classicisme, fûl plus délectable que le nectar butiné dans les belles prairies normandes; et, lorsqu'un jour le professeur eut parlé avec lyrisme des danses au théâtre grec, son jeune élève l’invita, non sans malice, à lui en faire la démonstration. C'est ce sens impérieux de la vérité, ce dédain des enthousiasmes artificiels, qui toujours perca en ses appréciations. Profondément épris de beauté, il la voulait vraie et tangible ; il l'acceptait peu de seconde main, déformée par le récit ou consacrée par la convention; il voulait la laisser pénétrer en lui par les portes de sa propre connaissance, et alors il en concut toujours des joies d'enfant. Si l'organisation familiale imposait à Louis Oli- vier une éducation surtout littéraire, il établissait lui-même un contre-poids, et lisait en cachette des ouvrages de science. L'un de ses premiers maîtres par le livre fut Louis Figuier, qui l'initia aux transformations de la Terre, le préparant ainsi aux études de géologie qui le retinrent pendant une période ultérieure de sa vie; puis il s’intéressait aux plantes, aux insectes, et, avec son frère, cher- chait sous chaque brin d'herbe un sujet d'observa- tion. Telle fut cette enfance ensoleillée, cette jeunesse heureuse entre toutes, où l'absence de soucis n'amoindrit point, comme trop souvent, les éner- gies natives. Plus tard, elles se révélèrent intactes et prêtes à la lutte. II A vingt ans, Louis Olivier vint à Paris, où il passa un an, préparant sa licence et commencant les travaux de botanique qui devaient faire l'objet de ses premières publications. Puis le désir de son père le ramena à Elbeuf, et, pendant deux ans, il prit part à la direction du grand établissement industriel qui avait assuré la fortune familiale; rapidement initié aux procédés techniques, il inventait bientôt quelques appareils de contrôle des textiles; mais, surtout, il apprenait le maniement des hommes et la conduite des grandes affaires. Les travaux industriels l'occupèrent ainsi jusqu à sa vingt-quatrième année. Alors, sa passion pour la science le ramena à Paris, où, dans le lumineux 92% sillage de Claude-Bernard, il saisit avec Flahault, avec Vulpian, les aspects divers de la Physiologie ; puis il voulut préparer sa thèse; les recherches interrompues furent reprises, au Muséum d'His- toire naturelle, et durèrent deux ans. Ces recher- ches se rapportaient à l'appareil tégumentaire des racines. De nombreuses coupes reproduites par la microphotographie, expliquées par des dessins d'une remarquable exécution, illustrent le beau travail qui les résuma; et, chose rare pour une thèse, il valut à son auteur un prix important de l'Académie des Sciences. L'Académie avait proposé, en effet, comme sujet du prix Bordin pour l'année 1881, une Æfude com- parative de la structure el du développement du liège, et, en général, du système téqumentaire dans la racine. La thèse de Louis Olivier répondait, au moins pour la partie anatomique, à la question posée. Les formations primaires y sont étudiées, avec les formations secondaires, qui viennent plus ou moins tardivement restaurer le premier appa- reil, après qu'il a été affaibli par des exfoliations. C’est surtout sur l'appareil secondaire que portent les observations nouvelles; Louis Olivier montra que ces formations sont le plus souvent de nature subéreuse, parfois aussi simplement parenchyma- teuses, et qu'elles apparaissent à des profondeurs diverses, selon la situation de la zone primaire qui leur à donné naissance. Les observations embrassèrent un grand nombre de familles, et firent apparaître des différences génériques, parfaitement caractérisées. Nous ne saurions, à trente ans de distance, reprendre l'analyse détaillée de ce beau travail. Louis Olivier y montra des qualités de premier ordre, dans l'habileté expérimentale comme dans la perspicacité mise au service de la découverte des faits généraux. La technique qu'il avait apprise à l’occasion de ces recherches lui servit plus tard à poursuivre des expériences sur la photographie des objets micro- scopiques; les travaux qu'il entreprit pour établir l'influence de la radiation sur la matière pigmentée et les mouvements du protoplasma procèdent encore de la même pensée et utilisent les mêmes méthodes. D'ailleurs, la photographie l’intéressa pendant longtemps. L'invention d'un radiographe, appareil fondé sur le radiomètre de Crookes, rendu enregistreur, mit aux mains des chercheurs un procédé mécanique indiquant les temps de pose et limitant les insuccès. Un an après avoir passé sa thèse, Louis Olivier (it une découverte fort importante : celle de la réduction des sulfates par les êtres vivants ; la suite des recherches, qui devait réunir une double com- pétence, conduisit son auteur à proposer au chi- CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER miste jeune et plein de promesses qu’élait alors A. Étard une collaboration devenue très fruc- tueuse, et qui fut le début d'une amitié solide, source d’une longue et heureuse influence mutuelle. Tout récemment, la mort d'Étard fut, pour Louis Olivier, la cause d’un profond chagrin; le souvenir qu'il consacra, dans la Revue, aux trente années pendant lesquelles il fut l’affectueux spectateur de la vie si bien remplie de son ami, en témoigne éloquemment. Les premières observations avaient été faites sur des algues du genre Pegqiatoa; elles furent bientôt étendues aux espèces Oscillatoria et Ulothrix; il fut démontré que ces plantes enlèvent du soufre aux sulfates, et provoquent le dégagement d'hydrogène sulfuré; elles forment alors la glairine et la baré- gine des eaux sulfureuses; cette action des algues est donc fort utile à connaître, tant pour elle-même que pour les applications thérapeutiques des eaux séléniteuses. C’est même, suivant Louis Olivier, la cause ordinaire de la formation des eaux à hydro- gène sulfuré. Puis la microbiologie l’attira. Elève du grand Pasteur, qui lui témoigna toujours un affectueux intérêt, il entreprit, en collaboration avec M. Charles Richet, resté depuis lors son ami, une série de re- cherches sur les microbes de la lymphe des pois- sons marins, dont M. Richet avait peu auparavant découvert l'existence. À cette époque déjà lointaine, on contestait que les microbes pussent se dévelop- per normalement dans l'intimité des tissus. Les résultats mis au jour par les deux jeunes savants furent en contradiction avec les idées courantes ; de minutieuses expériences faites sur les limandes, les carrelets, les congres, les rougets, ont permis d'observer presque toujours des bacilles soit dans la lympbhe, soit dans le sang. Ces recherches avaienteu pour théâtre la Station maritime de Physiologiedu Havre, que dirigeaitalors Paul Bert, et où il connut le D' Langlois, qui devint bientôt son ami. Après un nouveau stage au Labo- ratoire de Pasteur, Louis Olivier revintau Havre, où, entre temps, la Station maritime avait été transfor- mée, par les soins de M. Dastre, en un laboratoire mu- nicipal de bactériologie. La direction locale du labo- ratoire fut confiée à Louis Olivier, qui rêvait d’en faire à la fois un établissement important de recher- ches et une école pratique de Bactériologie. Son en- seignement réussit admirablement. Sous sa direc- tion, des investigations furent entreprises en vue de découvrir les bacilles de la tuberculose et les bac- léries pathogènes des eaux : eaux de source, eaux d'égout, ete. Une épidémie de fièvre typhoïde qui éclata au Havre fut l'occasion d'études d’une grande importance pratique; l'existence en notable quantité du bacille d'Eberth fut reconnue dans les égouts du CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER 925 Havre et des localités voisines ; on dénonça égale- | réaliser son programine; mais ses intimes seuls ment, comme un agent fréquent de transmission, le | eurent ce spectacle vraiment superbe d'un hormme cidre fabriqué avec des eaux contaminées. franchissant par les seules forces de son intelli- Ce travail fut le dernier que Louis Olivier exécuta | gence et de sa volonté les multiples obstacles aceu- au Havre. Très enthousiaste, comprenant difficile- ment que les intérêts de la science pussent être commandés par des considérations budgétaires — il le montra plus tard à maintes reprises lorsqu'il n'eut à compiler qu'avec ses propres deniers — il trouva trop étroits les crédits mis à sa disposi- tion. Le rapport qu'il rédigea alors pour montrer ce qu'on pourrait faire dans un laboraloire mieux doté marqua les causes d'un malentendu fréquent entre ceux qu'étreint le désir de savoir et les gar- diens de la cassette commune. Ce fut, pour un temps, son dernier contact avec la recherche personnelle; ceux qui l'avaient vu aux prises avec desdifficultés brillammentsurmontéesen concurent un sincère regret, car on pouvaitattendre beaucoup des aptitudes qui avaient établi sa naissante répu- tation. Sa future activité a fait trop oublier ses pre- miers succès, tant il est vrai que l'opinion identifie chacun à son œuvre maitresse, el néglige, dans l’image d'une vie, lout ce qui est passé au second plan. III Ce fut au seuil de la trente-cinquième année que Louis Olivier, solidement armé, mit à exécution un projet auquel il songeait depuis longtemps. Entre les collections spécialisées et les pério- diques de vulgarisation, il existait, pensait-il, une lacune fort importante à combler; il fallait amener les auteurs des découvertes à exposer eux-mêmes leurs travaux sous une forme telle que toutes les personnes cultivées pussent en saisir au moins les grandes lignes, et que, cependant, les spécialistes de même activité trouvassent leur profit à cette même lecture. Ainsi seraient longuement répandus les moyens d’une culture scientifique supérieure et précise. L'entreprise était téméraire. Les vulgarisateurs ne manquent pas, bien que les bons soient rares ; mais on ne faisait qu'exceptionnellement appel aux vulgarisateurs. Les spécialistes, de leur côté, sont légion; mais il en est peu qui, pour être intelligibles à tous, acceptent la pénible élabora- tion que comportent l'exposé des grandes lignes et l'abandon des détails, auxquels tiennent en général, par-dessus tout, les auteurs des découvertes. Tout en encourageant vivement Louis Olivier dans son projet, ses amis ne purent s'empêcher de penser qu'il s’attaquait à un problème à peu près insoluble. Ceux qui ont suivi la Revue depuis ses premiers pas savent avec quelle maitrise son directeur sut mulés sur sa route. C'est alors que toute sa préparation antérieure porta ses fruits; son éducation très soignée, les excellentes humanités qu'il avait faites, la cul- ture étendue qu'il devait à des lectures nom- breuses et faites de recherche dans des domaines contigus, mais cepen- avec méthode, le travail dant d’une étendue assez vaste, l'aspect du labeur industriel et un stage dans l’industrie elle-même constituaient, avec son extrême vigueur el son ferme vouloir, les principaux éléments d'un succès qui, dès le premier jour, fut le prélude certain d'un prochain triomphe. Les hommes de science vivent souvent en dehors des réalités ; le rêve qui les charme et les obsède suffit à leur désir; ils le poursuivent, comme autre- fois les artistes, devenus récemment plus utili- taires ; et, dans l'insouciance de leur valeur sociale, ils vivent l'heure présente, sans penser que le temps aussi possède une valeur, et qu'il s'enfuit; le vague, qui cache encore des mystères, exerce sur eux un puissant attrait; et il en est peu, parmi ceux dont la science seule est le but, qui aient hâte d'aboutir. Une telle hygiène intellectuelle est lar- gement justifiée par les résultats, pour ceux qu'a touchés l'aile du génie; les procédés mystérieux de leur pensée, que n’asservit aucune discipline tangible, engendrent des merveilles. Mais, pour la grande majorité, cette insuffisante administration de la vie ne fait que disséminer l'effort et le rendre infructueux. Combien différente est l'activité des hommes attachés à des problèmes industriels! Conscients des conséquences matérielles parfois désastreuses et toujours onéreuses des hésitations, des atermoie- ments, du flottement dans l'orientation, et le regard fixé sur un but unique, ils vont droit à lui, conso- lidant leur marche à mesure qu’ils progressent. A ceux qui siégé dans des Comités de savants ou d’industriels, cette différence dans le mode de penser et d'agir est très familière; ils quittent les premiers l'esprit sous le charme d'entre- tiens élevés ouvrant de larges horizons, mais con- eluant rarement à l'action immédiate; les derniers ont restent plus près de terre, mais ils aboutissent à des résolutions qui seront aussitôt suivies d'effet. Et, pour peu que l’on ait réfléchi aux conséquences du travail des uns et des autres, on se persuade que beaucoup de savants gagneraient à faire un stage de quelque durée dans des établissements | industriels. Louis Olivier était un brillant exemple à l'appui 926 de cette thèse; il avançait, le regard fixé sur le but ; chemin faisant, il marquait, au fur et à mesure, les étapes franchies, et revenait rarement en arrière; puis, l'esprit en repos sur une question, il en abordait une autre. Cette discipline du travail fut pour beaucoup dans son étonnante produc- tivité. Les éléments abondants de réussite qu'il synthé- tisait n'auraient cependant pas assuré le succès durable de la Revue : il y fallait le nerf de la guerre. Cette nouvelle tribune de haute science ne s'adressait pas au grand nombre; elle restait l'apa- nage et le moyen d'intercommunication d'une élite; elle devait être lente à joindre les deux bouts. Son fondateur le savait; et, circonstance trop peu con- nue, il n'hésitait pas à s'engager seul dans une voie onéreuse, ne se bornant point à donner à la Revue toutes les forces de sa pensée, mais lui consacrant avec joie la fortune qui lui était échue. Un tel exemple d'abnégation complète est peu fréquent: aussi, ceux qui ne connaissaient encore Louis Olivier que superficiellement cherchèrent- ils quelques motifs à côté. Les années passèrent: ces motifs n'apparurent point. On le vit conduire la Revue avec le même entrain, la même activité, sans que jamais se fit jour la moindre lassitude. Alors, avec l'estime grandissante, lui vinrent de solides amitiés partagées ; et peu à peu se cons- litua autour de lui un groupe d'écrivains qui, autant par affection pour l'homme que dans l'estime de son œuvre, lui apportèrent le fruit de leurs méditations. Ecrire dans la Æevue devint un honneur, que recherchèrent les jeunes, et qu'entretinrent les hommes plus avancés dans la carrière. On la savail très indépendante, hospitalière aux seuls travaux de valeur; c'est ce qu'avait voulu son fondateur; la Revue générale des Sciences était définitive- ment classée au premier rang. Un directeur de revue possède rarement une liberté entière. L'éditeur, qu'atteignent les pertes, est légitimement fondé à intervenir s'il estime qu'un article puisse déplaire à une catégorie de lecteurs. Seul responsable des résultats financiers, Louis Olivier se sentait aussi entièrement libre d'accepter ou de refuser des articles, ou d'exprimer ses propres opinions sur les faits du moment. I] le fil parfois en termes d'une belle énergie; ilse créa quel- ques inimitiés, et les supporta sans aucune peine; quelques abonnés l’abandonnèrent et le lui firent sa- voir en des lettres dépourvues d'aménité; sa plume, toujours alerte, leur montra qu'il n'en concevail nul chagrin; recherchant la communion d'idées l'avait réalisée avec ses collaborateurs, il était heureux de la sentir plus complète. avec ses lecteurs comme il l CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER IV On s'est souvent demandé comment, dans la Revue d'Olivier, ainsi qu'elle était familièrement nommée, les spécialistes les plus divers et les moins préparés à la haute vulgarisation exposèrent leurs travaux avec la même clarté. Seuls, les rares spectateurs du travail qu'ac- le Directeur de la Æevue en con- nurent le secret. Il attendait rarement qu'un article vint s'offrir de lui-même; toujours à l'affüt des découvertes ou des mouvements d'idées, il en demandait l'exposé aux auteurs, en rappe- lant ce qu'était la Æevue et en précisant l'esprit dans lequel les sujets devaient y être traités. Pour établir des flux de sympathie scientifique, il faisait de fréquents voyages, suivait les congrès en France ou à l'Etranger, et en rapportait une moisson de promesses, dont bientôt la ÆRevue bénéficiait. Ce rôle d'échangeur dans les idées courantes entre divers pays assura bientôt à la ?evue une impor- tante silualion internationale; mettant à la portée des lecteurs francais des documents de première main recueillis en tous pays, portant au loin la renommée des travaux faits en France, elle entre- tenait un courant d'estime réciproque, profitable aux intérèts les plus élevés de la science. Là ne s'arrêtait point le rôle du directeur, tel que Louis Olivier le comprenait; dans son besoin inné de clarté, il s'instituait le lecteur moyen de tout manus- critreçu, et analysait ses propres sensations.Chezla plupart des lecteurs, celles-ci sont inconscientes ; un article plaît ou déplait; il semble clair ou diffus; pourquoi ? On en a le sentiment très sûr, sans pouvoir en indiquer la cause. Chez Louis Olivier, ce sentiment était, dès le début, fort conscient; et la longue pratique à laquelle il le soumit l'avait sin- gulièrement affiné; les suppressions nécessaires, les transpositions mettant loute chose en place, les phrases explicatives, lui apparaissaient d'elles- mêmes ; et un article dont la forme insuffisante voilait un fond excellent sortait de ses mains paré et pimpant. Mais, même s'il n’y devait pas changer une vir- gule, un article cristallisait dans son esprit. Son bonheur d'apprendre et de comprendre n'ayant été en rien diminué par les années, il acquit un for- midable bagage de toutes les sciences ; et c'était une joie pour l'esprit de le voir, dans des entre- tiens familiers, se manifester en quelque synthèse pleine de hardiesse et de profondeur. complissait V Telles furent les qualités que Louis Olivier mit constamment au service de l'œuvre d'altruisme ‘sources. -dehors de la « plus grande France »; comme CH.-ED. GUILLAUME LOUIS OLIVIER 927 très élevé à laquelle il avait voué sa vie. Suivre au jour le jour le mouvement scientifique, en dégager les grandes lignes, en répandre la connaissance, élait pour lui un bonheur; mais il ne suffit pas long- temps à son activité. Simple spectalrice, la /'evue lui eût semblé amorphe et banale. Il voulait qu'elle eréàt des courants d'idées, et c'est dans ce but qu'il entreprit une série d'enquêtes sur des ques- tions d'intérêt vital, telles que l'Agriculture ou la grande Industrie. Ces enquêtes avaient été suggé- rées par une campagne pour la réforme de l’ensei- gnement chimique, entreprise à la suite d’un article de M. A. Haller, publié en 1894. Et l'on put voir, à partir du mois de janvier 1895, la /evue publier plus d'une centaine de monographies industrielles, dont la plupart sont des modèles du genre. Les remarques dont Louis Olivier accompagna plusieurs d'entre elles montrèrent combien son bref passage dans l'industrie avait laissé en lui la marque pro- fonde attachée à son sens instincetif des réalités. Parallèlement à cette enquête industrielle, la Revue en publia une autre sur le domaine colonial de la France et sa mise en valeur rationnelle. Sur le conseil de M. Alfred Le Chatelier, on décrivit d'abord la colonie du Congo; ce fut, en 189%, une “initiation, qui annonça d’autres études. En 1895 vint le tour de Madagascar, et, l’année suivante, la Æevue donna, par la plume d'une pléiade de savants des plus autorisés, la physionomie générale de la Tunisie et le détail de ses res- Puis des incursions furent failes en l'avait été, en 1900, la Bosnie-Herzégovine, sous les auspices du Gouvernement austro-hongrois, le Maroc devint, en 1903, un sujet d'études auxquelles sont attachés des noms qui font autorité dans les divers domaines de la démologie. Plusieurs de ces études furent ensuite réunies en volumes, et constiluèrent le commencement d'une bibliothèque. Le regret a été plus d’une fois exprimé qu'elle ne fût pas étendue à d'autres pays, ce qui, avec l'esprit de méthode et d'utilisation directe qui avait présidé aux enquêtes d’où étaient issus les premiers volumes, aurait créé une collection inap- préciable. Des raisons budgétaires s'y opposèrent bientôt; le fondateur de la /?evue désirait surtout que l'avenir de cette dernière ne fût en rien compro- mis ; il avait donc le devoir strict de ménager ses ressources, espérant pouvoir reprendre le cours de ces publications. Ce fut un des projets de notre ami auxquels sa mort prématurée mit un terme brutal. A diriger ces enquêtes, Louis Olivier avait acquis une merveilleuse pratique de ce qu'il faut chercher dans une exploration, de la documentation présen- tant un intérêt de valeur vermanente. El c'est pour faciliter la tâche de ceux que passionnent les mèmes problèmes qu'il rédigea des guides el des instructions; leur distribution très large a porté ses fruits; les lecteurs de la Zevue ont eu plus d'une fois la primeur des recherches ainsi con- duites. Vel L'organisation de la /tevue générale des Sciences occupa exclusivement son fondateur pendant plu- sieurs années, et accapara toutes ses pensées. Puis, à mesure qu'elle prenait son assise, et qu'il put ré- partir davantage autour de lui les divers travaux qu'il s'était jusqu'alors imposés pour en établir le modèle, Louis Olivier songea à utiliser le surplus d'une activité toujours aussi dévorante. La Revue nous avait rapprochés; la réciprocité d'amitié était née d'affinités bientôt ressenties; il me communi- quait volontiers ses projets. Les termes d'un entre- tien vieux aujourd'hui de quinze ans me sont restés à la mémoire. « On voyage trop peu, me disait-il, peut-être surtout en France. On semble avoir peur de passer les frontières, de rencontrer des humains parlant d’autres langues, de manquer de confort, que sais-je encore? Et cela est un mal; on vit dans un horizon restreint; on ne connait les autres peu- ples qu'à travers un tissu de conventions ; nous les jugeons mal, et ils nous le rendent; telle est la source de bien des malentendus. Il y aurait un grand intérêt à instituer un échange direct de pensée entre des hommes appartenant à des natio- nalités différentes; il faut aussi faire connaitre les objets que l’on peut acheter ou vendre avec avan- tage: et, pour cela, il faut aller sur place. Ces faits me frappent vivement depuis quelque temps, et je voudrais contribuer pour ma faibie part à y porter remède. Je vais associer à la Æevue des croisières, | qui conduiront des touristes de port en port; nous visiterons des villes, des musées, des établissements | industriels. Sur le bateau, nous aurons une biblio- thèque, des conférences d'où résultera un échange d'idées; et, une fois débarqués, les voyageurs sau- ront aller directement aux choses qu’ils puissent voir avec intérêt ou profit. Et puis aussi, je conduirai ces croisières dans les plus beaux pays du monde, car il faut répandre le goût de la beauté. On ne peut aimer un beau paysage sans qu'un peu de beauté morale nous pénètre; et c'est vers elle que nous devons tendre. » Tel fut le programme qu'un soir il m'exposa, et que peu de temps après il mit à exécution. Depuis lors, les fort recherchées. Elles sont devenues, pour une élite de touristes, ce que la Æevue était déjà alors pour une croisières furent nombreuses et | élite de lecteurs : une nécessité sociale. Les croisières furent d'abord timides; il fallait 928 CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER essayer ses forces. On partit de Dunkerque ou de Marseille pour s'en aller dans la Baltique, à Saint- Pétersbourg, aux beaux paysages de la Finlande ou aux sanctuaires de la Sicile; puis on étendit le cercle des voyages; on visita la Norvège, le Cap Nord, Arkhangel ou le Spitzherg; la Grèce, l'Asie Mineure, l'Egypte, la Palestine, le Maroc et les Canaries, les villes d'Espagne et celles de Tunisie ; on fit le périple entier de la Méditerranée, explorant tous les sites remarquables par leur histoire ou attirants par leur beauté. Pour organiser chaque croisière, un livret soigneusement étudié, décrivant le pays vers lequel on se rendait, indiquant les livres à lire pour se préparer à le bien voir, était distribué aux touristes dès leur inscription, de telle sorte que le voyage constituàt, en même temps qu'un plaisir et un délassement, un profit per- manent pour ceux qui l’'accomplissaient. Certains de ces guides présentent un grand intérêt; celui qui fut consacré à la Sicile étudie, en une série de monographies dont plusieurs sont signées de noms célèbres, les divers aspects de la grande Ile, aussi intéressante par son histoire que par la texture ou les produits de son sol. Louis Olivier désirait aussi que les croisières servissent les intérêts généraux de la science et de l'exploration. A plusieurs d’entre elles il convia des naturalistes; et, lorsque les voyages furent conduits en des pays encore peu explorés, les résultats scientifiques en furent parfois notables. Dans les croisières, l'amitié eut aussi sa large part; et leur directeur avait une façon si charmante et si délicate de proposer un de ces beaux voyages qu'il fallait de bien impérieuses raisons pour y renoncer. « Mon ami, disait-il, vous avez beaucoup travaillé, vous devez être fatigué; venez avec moi, nous ferons ensemble le tour de la Méditerranée, vous verrez l'Egypte et son ciel merveilleux, le Nil, les Pyramides, nous remonterons jusqu'aux Cata- ractes, el vous reviendrez dispos pour votre tâche. Décidez-vous, dites oui, vous ne sauriez croire quel plaisir ce serait pour moi. » Et c’est ainsi que plus d'un homme de science, dont le budget eût diftici- lement comporté un lointain voyage, se trouvait transporté, par l'affection bienfaisante de Louis Olivier, dans le pays du rêve, d’où il revenait l'esprit plein de visions nouvelles, à la fois charmé et mieux armé pour la lutte quotidienne. Plusieurs voyages furent hardis. Deux des croi- sières atteignirent les points les plus septentrionaux du Spitzhberg. Et, peu à peu, l’incomparable sau- vagerie de ces paysages polaires devait s'imposer aux esprits les moins contemplatifs, et faire naître au cœur de tous de profondes et saines émotions. À la Baie de la Virgo, où gisaient encore les débris épars de l'établissement qu'y créa le malheureux Andrée, aux iles lointaines où apparaissent, en des tombes ouvertes, les ossements d'anciens naufra- gés, à tous les petits cimetières qui jonchent la route des difficiles conquêtes, grandissait le senti- ment de l'effort surhumain tenté pour asservir cette nature indomptable. Et que de vivantes lecons demeurent d’un tel voyage! Vers la fin d'une journée de navigation, alors que, le soleil approchant du bas de sa course, l’ancre avait été jetée dans un havre abrité du vent, nous vimes s'avancer une barque que montaient quatre rameurs. Arrivés un mois auparavant avec l'expédition Wellman, ils avaient pris déjà l’em- preinte de l'ambiance; on les sentait sortis des conventions qui nous étreignent. Aux saisons où le soleil évolue sans cesse au-dessus de l'horizon, dans ce pays qui n'appartient à personne, où la terre est au premier occupant capable de la défendre, l’homme n'est astreint ni à la régulière alternance des heures de sommeil et des heures de travail, ni aux mille sujétions que créent l'habitat en commun et le respect nécessaire de la propriété. Débarrassé, en plus, grâce à l'air pur qu'il respire, des germes morbides que, dans nos pays trop habités, chacun porte en soi, il sent pour la première fois la pléni- tüde de vie dont il est capable, et qui, bientôt, en- vahit tout son être. Au havre de la Virgo, nos hôtes d'une lumineuse soirée nous apparurent comme des naturels du Spitzherg; un mois passé en ces terres lointaines avait produit cette métamorphose; et, à l'esprit de ceux qu’elle frappa, cette vision des temps primitifs fut une fructueuse révélation. Regardant en eux-mêmes, plusieurs des passagers d’/le-de-France reconnurent les prodromes d’une semblable libération; et, pour plus d’un parmi nous, les traces en sont restées profondes. Louis Olivier ambitionnait non seulement de conduire une élite dans des pays peu connus; il voulait, d'une facon générale, répandre le goût des voyages. Beaucoup de touristes de la /?evue, familiarisés avec les déplacements, ont entrepris. pour leur compte de lointaines randonnées; c'est par là aussi que les croisières auront une action étendue et durable. VII Comme directeur des croisières, Louis Olivier entrait en relations directes avec les autorités des pays visités; et la sûreté de son commerce, le sérieux, facile à discerner, de l'homme que pas- sionne une œuvre élevée, lui attiraient alors de sûres amitiés. Sa situation à l'étranger grandis- sait en même temps qu'en France; sa connaissance parfaite des pays qu'il avait parcourus fit bientôt germer en lui des idées générales, de mieux em CH.-ED. GUILLAUME — LOUIS OLIVIER mieux assises, sur des communautés de races, d'intérêts ou d'aspirations, qu'il s'attacha à mettre en lumière. Pour répandre les idées qu’il sentait utiles, il réunissait souvent, chez lui ou dans quelque plus vaste enceinte, des amis auxquels étaient exposées des questions actuelles d'exploration, de politique générale ou de démographie. Louis Olivier n’eût pas compris que l’action ne fût pas la conséquence nécessaire d'une conviction profonde. Parmi celles qu'avaient fait germer en lui l'ambiance des voyages et la multitude des observations qu'il synthétisait, se faisait de plus en plus consciente l’idéeque le rendement du travail serait beaucoup augmenté au sein des races latines si l'on réalisait, entre les hommes dirigeants de leurs diverses nations, une intercommunication fortement organisée; et c'est pour réunir dans ce but élevé et tout pacifique les bonnes volontés éparses qu'il provoqua récemment la eréation d'une ligue latine, puis de la Lique franco-italo- roumaine à laquelle s'attacha immédiatement, à l'autre extrémité de la chaîne, la haute influence de M. le Sénateur Xénopol. Au surplus, toutes les entreprises généreuses le passionnaient; à toutes, il apportait l'ardeur d'une conviction que les années n'avaient point affaiblie. Patriote éclairé, il était loin de penser que les ordinaires divergences de vues entre les nations dussent être résolues par la violence; les hommes qui, se sachant, eux et leurs proches, à l'abri des plus gros risques, prêchent les conflits armés, ces hommes toujours prêls à se faire tuer par pro- euration, comme il le disait en son pittoresque lan- gage, ne lui inspiraient ni confiance, ni sympa- thie; et c'est par une conséquence naturelle de ces idées qu'il se rallia de bonne heure à la Société française d'Arbitrage international, au conseil de laquelle il siégeait encore tout récemment. Ses compétences particulières dans les questions de politique internationale, sa sagacité à deviner le sentiment intime des peuples dont ses voyages lui avaient permis de scruter le génie, lui assuraient, dans les discussions auxquelles il prenait part, une autorité dont l’œuvre de la Ligue put mainte fois profiter. C'est ainsi que sa nature si homogène dans sa diversité, si hardie dans la pensée, si vigoureuse dans l’action, sut faire concourir toutes ses forces vives au bien de la communauté humaine. VIII Sans cesse préoccupé des œuvres auxquelles il vouait ses pensées, Louis Olivier avait renoncé à 929 | fonder une famille. Cependant, le bonheur de l'af- NOTE ; + fection partagée lui fut abondamment accordé; dans des retours fréquents aux lieux aimés de son en- fance, il retrouvait les douces heures des joies fami- liales. Auprès du père qu'il entourait d'une respec- tueuse sollicitude, au foyer qu'avait fondé son frère, et où, dans son profond intérêt pour l'enfance, il voyait avec bonheur s'éveiller de jeunes intelli- gences, il revivait les jours passés. Et le cercle de ses amis éprouvés achevait de constituer pour lui le milieu de loyale affection nécessaire à sa nature aimante. Active et généreuse autant que délicate- ment discrète, son amitié ne connut la dissimulation que pour laisser ignorer ses bienfaits. Etendue et toujours active, cette amitié n'avait cependant rien de banal; dans la nécessité de sim- plifier sa vie et d'en éliminer tout ce qui eût pu en entraver l'essor, il éloignait volontairement, et même avec une brusque franchise, ceux qui eussent pu lui faire perdre sans compensation un lemps dont il était forcément très ménager; mais com- bien pour ses amis était affectueux son accueil dans l'intérieur qu'un goût sûr et délicat avait voulu gracieux, pour qu'il y fit bon vivre. Les entretiens y étaient toujours instructifs, les ren- contres, préparées ou forluites, toujours intéres- santes; en un langage dont les termes faisaient image el fixaient à l'esprit des souvenirs précis, il évoquait les paysages dont la beauté l'avait frappé, il exposait les grands courants de la pensée aux- quels s’associait la Æevue, et dont sa prodigieuse culture donnait de saisissants tableaux ; ii expri- mait ses opinions müries sur les hommes et les choses, fruit de longues observations, que fécon- dait une fine psychologie native. Ceux qui con- nurent le charme de ces causeries n'en perdront point le souvenir. Maintenant, Louis Olivier dort en paix le repos éternel; ses œuvres, qu'anima jusqu'au dernier souffle sa multiple et généreuse nature, témoignent éloquemment de sa bienfaisante activité; et ce fut, au milieu d'une douleur subite, l'angoissante ques- tion qui surgit aussitôt : que deviendront-elles privées de celui qui en était l’âme vivante? Indispensables auxiliaires du mouvement intel- lectuel de notre temps, elles ne sauraient lui être enlevées; un pieux hommage de fraternelle affec- tion, auquel s'allie un reconnaissant souvenir d'ami- tié, en assure la durée; les confidents de sa pensée s'eflorceront de perpétuer son souvenir dans les œuvres auxquelles il donna la vie, etqui portent la marque indélébile de sa puissante personnalité. Ch.-Ed. Guillaume. 930 F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 Tandis que nous attendions la publication du | Rapport de M. A. Picard, président de la Commis- sion ministérielle des Inondations, pour en faire le compte rendu à l’intention des lecteurs de la Aevue, notre regretté Directeur, peu d'heures avant sa mort, insistait auprès de nous pour faire connaître à ses lecteurs le rôle que les égouts de Paris ont pu jouer lors de la dernière inondation de janvier 1910. Nous reviendrons prochainement sur le Rapport et les conclusions de la Commission ministérielle des inondations; mais nous nous empressons de rendre un hommage posthume à la mémoire de Louis Olivier en publiant sans retard l’article qu'il avait bien voulu nous demander. I. — LES ÉGOUTS DE PARIS AVANT BELGRAND. Paris n'a pas toujours eu un réseau d’égouts aussi parfait qu'aujourd'hui. L’évacuation des eaux usées se faisait par les caniveaux des rues, lesquels communiquaient par des conduits soit avec la Seine, soit avec les ruisseaux qui descendaient des collines avoisinant Paris et venaient se jeter dans le fleuve. Le grand égout de Ceinture n’était autre que le rû de Ménilmontant, qui, pendant longtemps, coula à ciel ouvert. Vers 1740, Turgot le fit murailler et daller. Par la suite, les particuliers le recouvrirent d'une voûte. Un vaste réservoir de chasse, placé vers la rue des Filles-du-Calvaire, recevait les eaux de Belleville et permettait, par un envoi brusque de 6.000 mètres cubes d'eau, de nettoyer cet égout, qui débouchait dans le fleuve à côté de la prise d’eau de Chaillot. Le plus ancien égout est celui de la rue Mont- martre, construit sous le règne de Charles VI par H. Aubriot. D'autres petits égouts existaient encore avant 1789, entre autres celui de Courtille-Barbette, établi en 1714, qui suivait le tracé de la rue Vieille-du- Temple. Le déversement direct en Seine était plutôt l'exception; au contraire, le grand égout de Cein- ture était l'exutoire de la majorité des eaux usées. Les égouts se déversant directement dans Paris : la Bièvre, qui débouchait au pont d'Aus- terlitz; les Fossés Saint-Bernard, qui débouchaient à la porte de la Tournelle; l'égout Guénégaud, près du pont Neuf; l'égout des Invalides et celui de l'École militaire. étaient Après 1789, on améliore progressivement et len- tement les égouts parisiens, dont la construction, en pierre de taille, était très onéreuse. En 1824, on renonce à l'emploi de cette pierre et de la chaux grasse, qu'on remplace par la chaux hydraulique et les petits matériaux. Lors de l'apparition du choléra en 1832, le réseau d'égouts se développe beaucoup. On reconnait que ceux-ci contribuent à la propreté de la capitale et facilitent beaucoup les mesures contre les épi- démies. Tandis que, depuis longtemps, le rù de Ménil- montant servait d'égout et était couvert, on laissait la Bièvre s'écouler librement. On se décide à murailler le lit de cette dernière de 18928 à 1844, à cause des mau- vaisesodeurs que dégageaient ses eaux. A partir de 1848, mence à uliliser les égouts pour la pose des con- duites d’eau. Letype dé gout était, jus- qu'en 1851, soil la rée, soit la sec- tion ronde. A on cCoIn- section car- Fig. 1. — Profil d'un cgout. cette époque, l'ingénieur Mille rapporte le type ovoïde, utilisé alors en Angleterre. Ce lype est perfectionné par Dupuit (fig. 1), qui établit une cunette médiane avec banquettes. Sur celles-ei on pose un rail servant à la circulation d’un wagon- nel. Le premier égout de ce genre fut celui de la rue de Rivoli. En 1854, Paris possédait 168 kilomètres d’égout pour 423 kilomètres de voies publiques. Il. — LEs ÉGOUTS DE PARIS DEPUIS BELGRAND. L'assainissement de la capitale demandait l'unité de vue dans la construction des égouts, ainsi qu'une évacuation plus facile et plus rapide des eaux usées. Il fallait, en outre, assainir certains quartiers bas de la capitale, et c'est à Belgrand que revient l'honneur d'avoir concu et exécuté ce programme. Ce savant ingénieur profite des boucles que la Seine dessine à l’aval de Paris pour donner à ses égouts collecteurs une pente plus forte. Il fait passer ces derniers en soulerrain sous la Seine et place Où d | F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 leur émissaire à Clichy, à une cote telle que les plus bas quartiers de Paris sont à une altitude supérieure. Paris, au point de vue de ses égouts, peul se diviser en deux zones : la zone nord, qui draine les quartiers hauts et dont l'évacuation des eaux se fail par la gravité jusque sur la plaine de Genne- villiers ou par le collecteur départemental aboutis- SA Usine de Clichy 931 Ce sont des égouts à cunette de 1,20 avec deux banquettes inégales de 0%,50 à 0,70, Au point de vue des inondations, ces égouts n'ont eu à jouer aucun rôle, puisqu'ils évacuent uniquement des eaux provenant de zones nulle- ment inondées. 2. Zones du centre et du sud de Paris. — L'usine = Legende Collecteurs existants Collecteurs à construire Colecteurs à modifrer Bassins desservis parle nouveau collecteur Marceau. Fig. 2. — Plan des collecteurs actuels et des régions qu'ils desservent, avec les modifications de collecteurs proposées. sant à Saint-Denis; la zone centrale et sud, dont les collecteurs aboutissent à l'usine de Clichy. 1. Zone nord. — Les eaux résiduaires des quar- tiers nord et nord-est de la capitale sont recueillies par les collecteurs du Nord et de la Chapelle, qui les évacuent vers Gennevilliers par les collecteurs de Saint-Ouen. Ce sont des égouts à forte pente, construits en maconnerie de meulières avec mor- tier de ciment. La voûte, en plein ceintre, a 3 mètres d'ouverture, et la maconnerie a 0®,30 d'épaisseur. de Clichy recoit les eaux d’égout de Paris par trois collecteurs principaux : le collecteur de Clichy, le collecteur d'Asnières et le collecteur Marceau. Le collecteur de Clichy a été construit en 1895- 1899. II à une section de 6 mètres d'ouverture et 5 mètres de hauleur. La cunette a 4 mètres de largeur et 2 mètres de profondeur. Les banquettes latérales ont 0,90 de largeur. L'épaisseur de la maconnerie est de 0",55 et la pente est de 0®,50 par kilomètre. Le collecteur de Clichy ne draine que les eaux de 932 la rive droite de la Seine et celles de l’île Saint- Louis. 11 traverse Clichy, passe par l'avenue de Clichy, la rue de Clichy, l'avenue de l'Opéra, la rue Saint-Honoré jusqu'au boulevard Sébastopol. Il communique en ce point avec le collecteur des quais, dont nous parlerons plus loin, qui, partant du collecteur d'Asnières au pont de la Concorde, aboutit au bassin de l’Arsenal. Ge grand collecteur ne reçoit qu'un collecteur secondaire, celui des Coteaux, qui part de la place Clichy pour aboutir à la place de la Nation. Ce col- lecteur secondaire n’est pas d'un type spécial. Il est à cunette profonde avec sous-voüles en plein ceintre et avec une pente variable de 0,30 à 1",50 par kilomètre. Les eaux usées du côté du bassin de l’Arsenal ne pourraient s'évacuer par la gravité au moyen de cet égout. Une usine de relèvement, située place Mazas, relève ces eaux et les envoie dans le collecteur des quais par un siphon placé sous le bassin de l'Ar- senal. Le collecteur d'Asnières a une section elliptique, ayant 5,60 d'ouverture et une hauteur de 4 mètres. Sa cunette a 3,50 d'ouverture et une profondeur de 15,35. Les banquettes ont 0,93 de largeur, une pente de 0,26 à 0,56 par kilomètre. Il a été construit de 1857 à 1861. Il traverse Levallois- Perret, entre dans Paris par les rues de Tocqueville et du Général-Foy, et vient passer sous la place de la Concorde. Il traverse la Seine en siphon et prend alors le nom de collecteur de Bièvre. Ce siphon a été établi en 1896-1897 et a un diamètre de 1,80. Son but principal est d'écouler les eaux de la Bièvre jusqu'à Clichy. Le collecteur de Bièvre a une pente de0",30 par kilomètre et une ouverture de 4 mètres. Sa cunette a 2,20 de largeur. Ce collecteur recoit, en outre des eaux de la Bièvre, les eaux usées des V, VI et XIV° arrondis- sements par le collecteur Censier. Le collecteur d’Asnières, avant le siphon de la Concorde, recoit le collecteur des quais, qui longe la rive droite de la Seine jusqu'au pont d'Austerlitz. Sa section est de 4 mètres d'ouverture et sa cunette a 2,20 de largeur jusqu'au Châtelet. Au delà de ce point, sa section n'est plus que de 3 mètres aux naissances et sa cunelte n’a que 1,20 de largeur. La pente de cet égout est de 0,30 par kilomètre. Le collecteur d’Asnières est en communication avec le collecteur de Clichy non seulement par le collecteur des quais, mais encore par le collecteur passant près de la rue Scribe. Le collecteur Marceau ressemble au collecteur de Bièvre comme type. Il passe par Levallois-Perret | et vient aboutir à la place de l’Alma, en passant par la rue de Courcelles, l'avenue de Wagram el F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 l'avenue Marceau. Il passe sous la Seine au moyen du siphon de l’Alma, formé de deux tuyaux de 1 mètre de diamètre chacun, où il se bifurque en trois branches : le collecteur Bas, qui suit les quais et recoit, en outre, les eaux usées de l'ile de la Cité; le collecteur Bosquet, qui draine les quartiers de Vaugirard; enfin le collecteur Rapp, qui traverse la région de Grenelle. Sur la rive gauche de la Seine, le collecteur Marceau recoit les eaux du collecteur Péreire et celles du collecteur Debilly. Cet égout est celui qui a joué le rôle le plus im- portant lors de la crue de 1910. Il draine les quar- tiers très bas, dont les eaux ont besoin d’être relevées par deux groupes d'usines. L'une, celle de la Convention à Grenelle, est submersible lors des crues; l’autre se trouve au quai d’Austerlitz. Le collecteur Debilly, dont les eaux s’écoulent en sens contraire du courant de la Seine, vient d'Auteuil et n’a qu'une très faible pente. Tous ces collecteurs principaux et secondaires Canahsation d'eau MIN Fig. 3. — Branchement particulier. recoivent les eaux d’égouts élémentaires de types assez variés. Ils ont 2 mètres de hauteur et sont construits en maconnerie de meulière hourdée, enduite au mortier de ciment. Leur épaisseur est de 0%,20 et leur pente varie de 0,005 à 0%,03 par mètre. Les égouts publics sont en communication avec les maisons riveraines par les branchements par- ticuliers. Ce sont des galeries en maçonnerie de forme ovoïde, ayant 0®,90 de largeur aux nais- sances et 0%,50 au radier. Ces branchements par- ticuliers sont fermés par un mur en maçonnerie de 0%,30 d'épaisseur à l’aplomb de l'égout public. A travers ce mur passe le tuyau servant à l'éva- cualtion des eaux usées des maisons riveraines (eaux de pluie, eaux ménagères, eaux des cabinets d'aisances). Ce tuyau vient déboucher dans la cunette de l’aquedue (fig. 3). Ces branchements particuliers sont obligatoires en vertu du décret- loi du 26 mars 1852, et leur type est élabli par l'arrêté du 16 juillet 4895. Les arrêtés préfectoraux du 22 juin 4904 et du 10 novembre 1909 règlent les prescriptions relatives à ces branchements et à l'écoulement des eaux résiduaires dans les égouts. Mais, en dehors de ces égouts urbains, il y à encore à Paris quelques égouts particuliers qui se F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 933 déversent directement en Seine. Ce sont les égouts du Palais de Justice, de l'église Notre-Dame, de la Préfecture de police. III, — DÉVERSEMENT DES EAUX DE CES ÉGOUTS. Les eaux de ces égouts se déversent en Seine à l'aval de Paris. Les unes sont envoyées sur les champs d'épuration de Gennevilliers, les autres sur ceux d’Achères, de Mery et de Pierrelaye. Enfin, à certains moments, l'eau d’égout dépassant quel- quefois les besoins de la culture, une partie de celle-ci se déverse directement en Seine, à Clichy. Les égouts collecteurs principaux ont été cal- culés pour écouler en un temps triple une pluie de 0%,006 à l'heure. Lors des orages, il arrive dans les égouts des quantités d’eau plus considérables et telles qu'il a fallu prévoir leur déversement direct en Seine; sinon une partie de ces eaux refluerait, aux points bas, sur la voie publique. Ce sont surtout des eaux de ruissellement des crues, peu chargées de ma- tières fécales, en tout cas très diluées. Les premières eaux écoulées ont lavé l’aqueduc; ensuite viennent des eaux dont le déversement direct en Seine n'a aucun inconvénient grave. Ce déversement direct en Seine a lieu par l'inter- médiaire des déversoirs d'orage. Des ouvertures, pratiquées dans la maconnerie des quais, mettent en communication les égouts avec la Seine. Un muraillement à mi-hauteur empêche le déverse- ment des eaux usées dans le fleuve. Lors des orages, les égouts se remplissent, le niveau de leurs eaux dépasse la crête du mur et celles-ci se déversent en Seine. Pour éviter, en temps de crue, la rentrée des eaux de la Seine par ces déversoirs d'orage, on a muni ceux-ci de portes de flot. Ce sont des portes pleines qu'on ferme et qui bouchent hermétiquement les ouvertures. Une seule de ces portes de flot est difficile à manœuvrer lors des crues : c’est celle du collecteur de Bièvre. Il peut, en effet, se produire une crue de la Bièvre en même temps qu'une crue de la Seine. Si la porte de flot du déversoir d'orage des collec- teurs de Bièvre est fermée trop vite, une partie des eaux de la Bièvre, ne pouvant s'écouler par l'égout, submergera les quartiers qu’elle traverse. Des amé- liorations notables ont été apportées, depuis la dernière crue, à la manœuvre de cette porte pour pouvoir l'ouvrir, s’il le faut, en temps de crue de la Seine et pour arriver à la refermer aussitôt que les eaux de crue de la Bièvre se seront écoulées. Il existe encore, le long des quais de la rive gauche, quelques petites ouvertures servant à éva- cuer directement en Seine l’eau des ruisseaux. La REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. voûle du souterrain du chemin de fer d'Orléans est Lrop voisine du sol pour permettre que les eaux de la rue puissent être dirigées vers l'égout voisin placé de l’autre côté du souterrain. Le seul moyen d'évacuer ces eaux est donc de les envoyer à la Seine. Et, comme ces ouvertures d'évacuation ont été en 1910 à une cote inférieure au niveau de la Seine, l'eau du fleuve a pu inonder les rues voi- sines en passant par elles. On est occupé actuelle- ment à placer des vannes pour étancher ces ouver- tures en temps de crue. IV. — LE TUYAU D'ÉVACUATION DES EAUX USÉES DANS LES MAISONS PARTICULIÈRES. L'évacuation des eaux usées des maisons parti- culières se fait à l'égout, comme nous l'avons dit, par l'intermédiaire d’un tuyau. Aux termes du règle- ment sanitaire de la Ville de Paris, cette conduite d'évacuation doit être bien étanche et suffisamment solide pour supporter une pression au moins égale à celle qui résullerait de son remplissage avec de l'eau jusqu'au niveau du sol de la voie publique vers laquelle se fait l'évacuation. Ces tuyaux peuvent s'engorger et l’on y place des ouvertures spéciales pour les déboucher à l'occa- sion. Ces ouvertures sont, en temps ordinaire, fermées par des tampons plus ou moins hermé- tiques ou plus ou moins solides. On a pris l'habitude d'établir dans les caves des orilices d'évacuation des eaux usées provenant surtout du lavage des bouteilles. Ces orifices d'éva- cuation sont à une altitude supérieure, en lemps ordinaire, au niveau des eaux dans l'égout; mais, aux points bas de Paris, ils sont à une altitude inférieure à celle des eaux dans les égouts en temps de crue. Ces orifices d'évacuation sont défendus; ils sont toutefois tolérés aux risques et périls du propriétaire. Ils ont contribué à l’inondation dans plusieurs caves de Paris. V. — NETTOYAGE DES ÉGOUTS. Pour terminer ce qui est relatif aux égouts de Paris, nous dirons en quelques lignes seulement la facon dont ces égouts sont nettoyés. F En 1882, Durand-Claye installa sur les égouts un certain nombre de réservoirs de chasse alimentés en eau de rivière. Ces réservoirs, de capacité va- riable suivant les égouts, déversent rapidement une quantité d'eau capable d'entrainer facilement vers les collecteurs les matières légères qui se dépose- raient dans les petits égouts. Les matières lourdes sont évacuées de la façon suivante : Dans les petits égouts, au moyen de petits rabots; dans les égouts un peu plus impor- tants, au moyen de vannes mobiles. 92* 934 F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 Le principe de la vanne mobile est le suivant : Si, dans un courant d’eau, on arrive à diminuer la section d'écoulement, l’eau passera à travers l’es- pace étranglé avec une vitesse beaucoup plus grande. En diminuant suffisamment cette section, on peut donner à l’eau une vitesse telle qu'elle pourra entrainer les matières lourdes. En dépla- cant de l’amont vers l'aval ces vannes mobiles, dont le but est de rétrécir momentanément la section d'écoulement dans l'égout, on parvient à faire arri- ver ces matières lourdes dans des chambres à sable où on les extrait facilement au seau ou à la drague. Dans les grands collecteurs, les vannes mobiles sont fixées à un bateau ou à un wagonnet. Les ma- tières lourdes sont ainsi entrainées jusqu'à Clichy. VI. — COMMUNICATIONS ACCIDENTELLES DES ÉGOUTS DE PARIS AVEC LA SEINE OU AVEC LES MAISONS. En tête des siphons ou près des bassins de dessa- blement, il existe des chambres pour faciliter les manœuvres. Ces chambres ont des portes étanches et des fenêtres. Quand le niveau de la Seine monte, l’eau du fleuve peut pénétrer par les fenêtres et se déverser dans les égouts. Ces fenêtres sont au nombre de 12. Le mur-pignon qui sépare les égouts des bran- chements particuliers doit, en principe, êtreétanche. Il laisse passer les tuyaux d'évacuation des eaux usées, les tuyaux d'eau potable, d'air comprimé, ainsi que les fils téléphoniques. Les trous que les entrepreneurs font pour faire passer ces tuyaux et ces fils ne sont pas toujours étanchés, le travail fini. Il en résulte donc des ouvertures par lesquelles les eaux usées peuvent pénétrer dans les maisons quand l'égout est rempli. VII. — FONCTIONNEMENT D'UN ÉGOUT PARFAIT EN TEMPS DE CRUE. Un égout parfait est un canal maconné étanche. Le débit de ce canal dépend de la quantité d’eau qui s'y écoule, de sa section et de sa pente, enfin de la nature des parois. En temps ordinaire, si, pour le débit moyen des eaux d’égout, on relève la cote des eaux tout le long de l'égout, on obtient un profil en long de l'écoulement des eaux. Dans la coupe sché- matique (fig. 4) que nous présentons, il est facile de voir qu'en À existe un petit saut de ce profil en long, qui tient au débouché d'un collecteur. Si, en temps de crue, l'égout arrive à écouler beaucoup d'eau, le profil en long peut, dans la partie B, couper le niveau du sol, et les eaux d’égout viendront sortir dans la rue dont le niveau est trop bas. On ne pourra guère abaisser le niveau de ces eaux d'égout en B qu'en augmentant la pente de l'égout; c'est ce que Belgrand avait obtenu en placant le débouché de ses ouvrages à Clichy et en coupant souterrainement les boucles de la Seine. En 1910, lors de la crue de janvier, on a pu voir sortir de l’eau d'égout dans les fossés des fortifica- tions vers la porte des Ternes, Cela tenait à l'exhaus- sement de l’eau dans l'égout, qui permettait à celle-ci d'atteindre l'ouverture destinée, en temps ordinaire, à recevoir et à absorber les eaux de pluie ruissellant dans les fossés des fortifications. Un égout parfait n'aurait pu, à Paris, recevoir des eaux en abondance qu’en des points particu= liers, par exemple par les bouches des rues ou par les ouvertures pratiquées en Seine. Le collecteur Marceau recut des eaux de la Seine à la place Valhubert et à la rue de l'Université, qui est un point bas de Paris. D'après le plan indiquant les rues inondées de Paris (fig. 5) et d'après la fonc- mi2 00 Fig. 4. — Profil en long d'un égout.— 1, radier de l'égout; 3, voûte de l'égout; 2, niveau des eaux en temps moyen; 4, niveau des eaux en temps de crue; A, débouché d'un collecteur. lion du collecteur Marceau, on peut se rendre compte de l'abondance des eaux que cet ouvrage pouvait recevoir directement par les rues inondées de Paris. D'après ce que nous avons dit précédemment, on voit qu'il peut y avoir submersion de quartiers bas par les eaux d'égouts venant d’autres quartiers inondés. Si l'on avait affaire à des égouts bien étanches, il serait très facile d'empêcher ces afflux d'eau considérables dans les égouts. IL suffirait d’obstruer les ouvertures qui recoivent ces eaux en abondance au moment de la crue, ou, au moyen d'une vanne, de diminuer teraporairement, en temps utile, l'écoulement des eaux dans l'égout aux envi- rons des points où se font ces entrées d'eau. Dans la région du pont d’Austerlitz, le Service des égouts de Paris a l'intention de mettre une vanne destinée à fermer le collecteur des quais lors des inondations. Quaut aux ouvertures pratiquées dans, les quais, il est très facile de les étancher en temps utile, ainsi qu'on se propose de le faire. VIII. — FoNCTIONNEMENT D'UN ÉGOUT NON ÉTANCHE. À Paris, il y a 1.200 km. 372 mètres d'égouts. Cette grande longueur de maconnerie ne peut cer- tainement pas être complètement étanche. Malgré F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 tous les soins qu'on apporte à la construction et à l'entretien, il y a des fissures, par où les eaux s'écouleront quand elles seront baignées à la suile du soulèvement des eaux. Nous avons signalé précédemment que les murs pignons qui séparent les branchements particuliers des égouts publics n'élaient généralement pas étanches à cause des ouvertures non rebouchées, par lesquelles passent les tuyaux d’eau, de l’élec- tricité, du gaz, de l'air comprimé, du téléphone, ete. Par ces ouvertures, les eaux d’égout pourront se déverser en temps de crue. Il en sera de mème par les orifices d'évacualion des eaux usées placés à l'intérieur des caves, ainsi que par les lampons hermétiques, dont l'étanchéité absolue n'existe pas, et qui servent à dégorger les tuyaux d'évacuation des eaux usées des maisons. Nous allons examiner l'influence, utile dans certains cas, nuisible dans d'autres, de toutes ces ouvertures accidentelles. Admettons qu'une crue se produise à Paris. Une partie des eaux du fleuve va submerger un quar- tier. Un autre quartier pourra être inondé à cause de la surélévation du niveau de la nappe locale, due à la surélévation du niveau du fleuve vers laquelle elle s'écoule. Si l’eau du fleuve ou de la nappe sou- terraine dépasse à tout moment le niveau de l’eau dans l’égout, ce dernier recoit ces eaux extérieures par l'intermédiaire de toutes les ouvertures acci- dentelles et remplit l'office de drain collecteur. L'égout évaeuant les eaux qui inondent un quartier contribue donc à ralentir et à diminuer l'inonda- tion. Mais admettons le phénomène inverse : le niveau de l’eau, dans l'égout, augmente plus rapi- dement que le niveau des eaux extérieures (nappe souterraine ou eau du fleuve). Par ces mêmes ori- fices accidentels, l'eau de l'égout se déversera dans les caves ou dans la rue. L’égout est done un ouvrage dont on doit pouvoir régler le fonctionne- ment lors des crues importantes. Il faut, par exemple, éviter les engouffrements abondants des eaux de la Seine qui se déversent directement et viennent inonder un quartier amont par un égout traversant à l'aval un quartier bas, ou encore ralentir le fonctionnement des égouts alimentés par des arrivées abondantes d'eau d'une nappe souterraine. Les concierges des immeubles parisiens connais- sent fort bien le rôle bienfaisant que peut exercer un égout lors d'une inondation de caves. Ils en ont mème abusé lors de la crue de janvier 1910. Quand ils ont vu de l’eau dans les caves, leur première idée a été d'ouvrir le tampon hermétique de la con- duite d'évacuation d'eau usée de l'immeuble. Dans certains cas, ils virent arriver par cette ouverture l’eau d'égout elle-même, qui était à un niveau su- périeur à celui des eaux de la cave et regrettèrent 935 une manœuvre aussi détestable. Dans d'autres quartiers, ce remède fut très efficace. Employé sans renseignements suffisants, ce procédé est donc des plus nuisibles. IX. — FONCTIONNEMENT DES ÉGOUTS PARISIENS PENDANT LA CRUE DE JANVIER 1910. Dans les considérations générales que nous venons d'énumérer, il y à un cas que nous avons laissé de côté, c'est celui de la crevaison de l'égout. Une inondation par l'eau d’égout est alors à craindre. Pendant la crue de janvier 1910, il y eut trois accidents de ce genre. Le plus important fut celui qui se produisit au coin de la rue Richepanse et de la rue Saint-Honoré; un autre eut lieu sur le boulevard Haussmann, près des magasins du Prin- temps, et enfin le troisième se produisit avenue de Suffren. Ces trois accidents n'auraient pas eu lieu si, à la suite de fouilles faites en vue de différents travaux aux environs, il n'y avait eu des glissements de terrains résultant des pluies importantes du mois de janvier et entrainement des ouvrages vers ces fouilles. L'accident de la rue Richepanse se pro- duisit à l'endroit où une galerie était en cons- truction sous l'égout pour recevoir les cäbles élec- triques de la Compagnie des Secteurs électriques, à côté d’une fouille profonde creusée pour une double cave. En général, pendant la crue, la sous-pression exercée sous les voûtes par les eaux d'égout n'a guère été supérieure à 2 mètres. La pression des terres qui surmonte ces ouvrages compensait cette sous-pression. On a seulement constaté une large fissure dans un égout là où l'ouvrage avait été exécuté à l'aide d’un bouclier dans un terrain très dur. La terre ne venait pas se mouler exactement sur la maconnerie et celle-ci n’a pu, par l'adhésion des mortiers, suffire à compenser l'influence de la sous-pression des eaux. Quelques murs pignons, placés à l'extrémité des branchements particuliers, se fissurèrent. La rupture des égouts aurait pu encore avoir, pendant la crue, une influence néfaste autre que l'inondation d’une rue. Dans les égouts passent les conduites d’eau potable. Si les premiers cassent, les secondes se rompent, et les maisons auraient été non seulement inondées, mais encore privées d'eau. Comme cette éventualité ne s’est pas présentée dans les quartiers atteints par l’inondation, les Services compétents ont pu, avant même la visite des ouvra- ges après la crue, affirmer que les égouts avaient supporté l'excès de travail sans rupture. Le fonctionnement des collecteurs eut lieu nor- malement. C’est le collecteur Marceau qui eut à 936 F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L’INONDATION DE 1910 7 LEGENDE ! BR >: 2 2/leurement dans les “ roles publiques ! de : . ie H N \\ \ { MN 1 LES BATIGNOLLES \ C2] Zone d'infiltration dans les caves Zi N VAUGIRARD /O/ . /# AE A >. / | / 4 || | 1) Fig. 5. — Carte des régions envahies par les eaux à Paris F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 \ LA CHAPEL XVII MONTMARTRE NN Li res = D — = ES — LE’ 1 1 1 1 11 == = CHARONN === ER = \ 1 BELLEVILLE pendant Ja grande crue de la Seine de Janvier 1910. 938 évacuer le plus d'eau. Le niveau maximum de l’eau de ce collecteur était à la cote 32%,35 à la place de l’Alma. A l'usine deClichy, c'est-à-direà5.791 mètres, la cote des eaux au débouché des collecteurs était de 30,40. La pente de l’eau de ce collecteur fut done de 0®,34 par kilomètre. Elle ne fut toujours, au maximum de la crue, que de 0",24 par kilo- mètre dans les collecteurs de Clichy et d'Asnières. Cette différence de pente tient à ce fait que le col- lecteur Marceau eut à évacuer des eaux des régions inondées desservies par les collecteurs Debilly, de Javel et Bas. Le niveau de l’eau, dans les rues de Paris, a tou- jours été, pendant la crue, inférieur à celui de la Seine. Certains quartiers bas de Paris n'ont pas été inondés. Quel fut alors le rôle des égouts sur ces quartiers bas? 1. Sur la rive droite de la Seine. — Une cer- taine surface assez basse ne fut pas submergée, par exemple les environs des Arts et Méliers, la rue Montmartre près des Halles, les rues des Pyra- mides, des Tuileries, la rue Tronchet, la rue La- fayette, etc. Le collecteur de Clichy fonctionna d'une facon régulière et de telle sorte que les surfaces inondées se limitèrent à une partie de l'avenue Montaigne et du quai de la Conférence, à une petite zone des Champs-Élysées derrière le Petit-Palais, au carre- four des rues du Faubourg-Saint-Honoré et du Colysée, au carrefour des rues de Penthièvre et Cambacérès, et aux abords de la gare Saint-Lazare. Ce qui se passa aux environs de la gare Saint- Lazareest une démonstration évidente del’influence des collecteurs sur les inondations. Le niveau de l'eau dans les collecteurs d’Asnières et de Clichy, sur le boulevard Malesherbes et la rue Mogador, n'a pas dépassé 31,70. Aussi, sauf aux environs de la gare Saint-Lazare, toutes les chaussées situées dans cette région à une cote supérieure à 31%,95 n'ont pas été inondées. A la gare Saint-Lazare, la submersion de la rue du Havre eut pour cause l'arrivée d’eau en abondance par les souterrains du Métropolitain. Les collecteurs ne drainaient pas le sol suffisamment vite pour évacuer le débit d'eau important arrivant par ces ouvrages. 2. Sur la rive gauche de la Seine. — L'influence des égouts a été moins marquée dans celte région. On constate en beaucoup de points que l’eau dans les rues est à une cote inférieure à celle de la Seine, toutes les bouches d'égout évacuant une partie des eaux arrivant directement du fleuve. Rue de l'Université, les égouts recevaient près de la Lille des eaux de la Seine venant par les ouvertures de la gare d'Orsay. Ces eaux, rue de F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 engouffrées à la cote 32,50 environ, vinrent res- sortir derrière le ministère des Affaires Étrangères en un point situé à la cote 31 mètres. C'est donc un exemple typique d'une inondation produite par un égout, cas déjà indiqué dans le précédent chapitre. Ce qu'on ne peut montrer d'une façon probante, car les observations furent impossibles au moment de l’inondation, ce furent les envahissements des caves par les égouts avant l’arrivée des eaux du fleuve ou de la nappe souterraine. Il aurait fallu suivre au jour le jour le profil en long de l’écoule- ment des eaux dans les collecteurs, l'exhaussement des eaux de la nappe ou l’arrivée des eaux du fleuve. Ce travail eût pu présenter quelque intérêt pratique si, par exemple, on avait été préparé pour modérer lesentrées d’eau du fleuveou de la nappe souterraine, de facon à maintenir toujours l'eau d'égout à une cote inférieure à celle du niveau des eaux exté- rieures. Comme rien n'existe qui permette de telles manœuvres et comme, d'autre part, le personnel manquait pour faire de telles constatations, on ne peut que se baser sur quelques observations isolées. A la Monnaie, par exemple, M. le Prof. Hanriot a constaté à l'analyse une arrivée d'eau d’égout dans sa cave. Probablement, par la suite, les eaux extérieures montèrent et leur niveau atteignit une cote supérieure à celle des eaux des collecteurs. A partir de ce moment, l'égout servit de drain et, au lieu de déverser de l’eau, en absorba. Il serait utile, si une nouvelle crue se produisait, de faire cette étude, à seule fin de prendre des dis- positions pour empêcher à tous moments que les eaux d'égout ne puissent venir submerger les caves situées dans les quartiers bas. Dans cet ordre d'idées, M. l'Ingénieur en chef Colmet-Daage a proposé l'installation de quelques vannes destinées à empê- cher, dans le collecteur, l’arrivée d’eau de Seine engouffrée directement par les égouts. Cette solu- lion empéchera l'augmentation rapide du niveau de l’eau dans ces collecteurs. X. — AMÉLIORATIONS APPORTÉES D'URGENCE AU RÉSEAU DES ÉGOUTS. Une grande partie des inconvénients constatés à fait l'objet d'une étude urgente qui a abouti à des travaux qui sont en cours d'exécution. Ce sont : la fermeture par des vannes, élablies le long des murs de quais et pouvant être manœæuvyrées du haut du quai, des ouvertures pratiquées pour recevoir les branchements de bouches dans les parties où le souterrain du chemin de fer d'Orléans n'a pas permis de diriger ces eaux vers les égouts. Fermeture, par des vannes ou barrages pouvant être manœæuvrés de la chaussée, des collecteurs qui font communiquer les parties de Paris submer- F. DIENERT — LES ÉGOUTS DE PARIS PENDANT L'INONDATION DE 1910 939 ——————————————…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…——…——…———…—————…——……—…—…—………—………—…—…———————————————————————————ZZZo 1, gées directement par le fleuve avec le réseau géné- ral des collecteurs, par exemple à la place Valhu- bert ou au collecteur Rapp. Réfection des portes de flot qui permettent d'étancher les orifices des déversoirs d'orage éla- blis le long des quais. Obturation des fenêtres des chambres de ma- nœuvre qui se trouvent le long des quais. XI. — AMÉLIORATIONS A APPORTER PAR LA SUITE AU RÉSEAU D'ÉGOUTS. Un grand nombre des inconvénients constatés n'avaient pas échappé, avant à la crue, à la sagacité du chef du Service des égouts de Paris. Dans le nouvel emprunt de 900 millions destiné à exécuter les grands travaux de Paris, une somme impor- tante de 43 millions est prévue pour la réfection de certains collecteurs. Le collecteur Debilly évacue lentement les eaux à cause de sa faible pente; le collecteur de la Con- vention est un collecteur bas dont les eaux doivent ôtre relevées par une usine placée dans une région submersible. Enfin, le collecteur Rapp n'a égale- ment qu'une faible pente. Pour assurer une évacuation plus rapide des eaux de ces régions, on a prévu la construction d’un nou- veau siphon sous la Seine, un peu en aval du pont Mirabeau. Ce siphon amènerait les eaux du collec- teur Rapp modifié et du collecteur de la Conven- tion à une usine située sur le quai Debilly, sur la rive droite de la Seine. Le collecteur Debilly abou- tirait à cette usine et verrait sa pente modifiée en sens inverse. L'usine relèverait ces eaux dans un nouveau collecteur Marceau qui aboutirait à l'usine de Clichy. De cette facon, on assurera un écoule- ment plus rapide des eaux et on ralentira leur exhaussement dans les égouts. Probablement, on ralentira tout au moins l'inondation dans les quar- tiers de Grenelle et de Javel, et on remédiera de la sorte en partie à l'inondation des caves dans la période de la crue. En ce qui concerne les branchements particuliers et les ouvertures dans les murs pignons, il est assez difficile à l'Administration d'assurer une sur- veillance suffisamment active pour arriver, en tous les points de Paris, à l'étanchéité complète des ouvertures pratiquées dans ce mur. Il importe tou- tefois de faire connaître aux propriétaires, à l'Admi- nistration des Téléphones, à la Compagnie générale des Eaux et à celle de l'Air comprimé l'intérêt qu'ils ont, pour empêcher la submersion des caves, de veiller à ce que ces ouvertures soient bien refer- mées. Enfin, si les tuyaux d'évacuation des eaux usées sont bien jointés et si l'orifice pratiqué sur cette conduite dans le but de faciliter le dégorge ment des tuyaux est bien placé, on pourrait, en éla- blissant des vannes pour empêcher l'élévation trop rapide du niveau de l'eau dans les égouts, arriver à ne pas être obligé de veiller sur l'herméticité absolue, toujours difficile à obtenir, dela fermeture de ces orifices. Dans son Rapport à la Commission des Inonda- tions, M. l'Ingénieur en chef Colmet-Daage insiste tout particulièrement sur la crainte qu'on doitavoir, en améliorant la situation des égouts sur un point, de l’aggraver sur un autre. On ne pourrait, par exemple, sans danger augmenter le diamètre des siphons de l’Alma et de la Concorde pour diminuer les inondations de la rive gauche sans compro- mettre le fonctionnement des collecteurs de la rive droite, dont le niveau s'élèverait très sensiblement et favoriserait l’inondation des quartiers de la rive droite préservés lors de la dernière crue. XIT. — ConcLusrons De cette étude sommaire, mais suffisante pour se rendre compte du fonctionnement des égouts pen- dant la dernière crue de 1910, il résulte qu'en beau- coup de points ces égouts ont servi de drains, grâce surtout aux défectuosités mêmes de ces ouvrages, et ont ralenti et même empêché l'inondation de cerlains quartiers de Paris. En 1802, pour une crue moindre, le quartier de la gare Saint-Lazare fut beaucoup plus inondé, car le collecteur n'existait pas. C’est donc bien une preuve de l'influence utile, dans certains cas, des égouts en temps d'inon- dation. Mais on a reconnu que, dans le fonctionnement de ces ouvrages en temps de crue, tout n'était pas parfait. Le d'exécution ou devant être exécutés ultérieurement programme des travaux en cours apportera une amélioration notable à l’état actuel et contribuera, dans une certaine mesure, à pré- server certains quartiers bas contre les inondations et également à empêcher, au moins en parlie, les inondations des caves par ces eaux usées. F. Dienert, Chef du Service de surveillance des Eaux d'alimentation de la Ville de Paris. LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD LE CONGRÈS DE SHEFFIELD DE L'ASSOCIATION BRITANNIQUE POUR L’'AVANCEMENT DES SCIENCES L'Association britannique pour l'avancement des Sciences a tenu, cette année, sa réunion habi- tuelle à Sheffield, le grand centre de l’industrie coutelière anglaise. Ce congrès n'a rien cédé en importance et en intérêt aux précédents : les réu- nions de la Pritish Association continuent à être les grandes assises scientifiques de nos voisins d'outre-Manche. A ce titre, il nous parait utile de donner aux lecteurs äe la Aevue, d'après les procès-verbaux publiés par les journaux anglais Nature et Engi- neering, un bref apercu des principales questions qui ont été traitées à Sheffield, TI. — Discours PRÉSIDENTIEL. Le bureau de l'Association britannique avait désigné comme président du Congrès M. T. G Bonney, professeur de Géologie à l'University College de Londres, qui choisit comme sujet d'adresse quelques aspects de l'histoire glaciaire de l'Europe occidentale. A une époque géologique peu éloignée, dit-il, le climat de la partie boréale de la Terre, comme celui de la partie australe, à été beaucoup plus froid qu'aujourd'hui. Il n'est pas certain que les deux périodes glaciaires aient été contemporaines; l'extension et les effets de la glace et l'origine de certains dépôts — qui peuvent être les restes directs des glaciers ou avoir été déposés au fond de la mer par des glaces côtières ou des icebergs flottants — sont encore plus douteux. L'étude des Alpes d'Eu- rope est très instructive à cet égard, parce qu’elles n'ont jamais été submergées pendant l’époque gla- Claire. Une école de géologues, qui a fait de grands progrès numériques en ces dernières réclame pour les glaciers une part importante dans la sculpture de la chaîne alpine. Elle estime que les glaciers n’ont pas seulement creusé les lacs marginaux, mais qu'ils ont aussi taillé des falaises élevées, excavé de grands cirques et appro- fondi d'environ 600 à 700 mètres certaines parties des grandes vallées alpines. L'autre école, tout en admettant qu'un glacier, dans des circonstances spéciales, puisse évider un petit lac et modifier les années, traits des paysages rocheux, déclare que son action est abrasive plutôt qu'érosive, et que la sculpture des arêtes, des escarpements et des vallées a été principalement accomplie, aux époques pré-gla- ciaires, par l’eau courante et les agents atmosphé- riques ordinaires. M. Bonney adopte cetle seconde conception. Il ne croit pas, même avec Penck et Bruckner, que les glaciers de l’époque glaciaire aient beaucoup approfondi les vallées des régions montagneuses. D'après lui, la neige est préservatrice plutôt que destructrice. Les glaciers de Norvège ont abaissé leur bassin d'environ 80 millimètres en mille ans, ceux du Groenland de 421 millimètres, le Vatna- jokul, en Islande, de 647 millimètres. A ce dernier taux, les vallées des Alpes n'auraient été creusées que de 121 mètres durant les 188.000 années de leur occupation supposée par les glaciers. Mainte- nant encore, les effets observés de l’action glaciaire sont faibles, même sous le puissant glacier de la vallée de la Linth. En Angleterre et dans le nord de l'Europe, l’ac- tion de la mer peut avoir coopéré avec celle des glaciers. Les marques directes des glaciers, comme les roches striées et polies, sont rares; on en trouve à Little Crosby, près de Liverpool, et près de Durham, sur la côte est; mais l'extension de la glace terrestre plus au sud ne peut être considérée comme démontrée. Par contre, on trouve au sud, près de Cromer, des dépôts d’alluvions glaciaires, consistant en argile à galets, et en lits de sable et d'argile, extraordinairement contournés au voisi- nage d'énormes blocs erratiques de craie. Des coquilles marines ne sont pas rares dans ces ar- giles; on en trouve jusque vers 400 mètres de hauteur. D'autre part, si les énormes masses de craie de la base de la série glaciaire du Norfolk proviennent des environs immédiats, d’autres blocs erratiques sont originaires de l’Ecosse, du pays de Galles et de la partie nord-ouest du fjord de Chris- liania. Avant d'expliquer ces étranges migrations, M. Bonney cherche à se faire une idée des climats des Iles Britanniques, des Alpes et de la Scandi- navie pendant les périodes les plus froides de l'époque glaciaire. Peut-être la Grande-Bretagne avait-elle la température moyenne du Spitzherg actuel, dont les montagnes s'élèvent à peu près à la même hauteur que les siennes, et la Scandinavie celle du nord du Groenland. Les couches de glace produites dans les Iles Britanniques étaient done plus faibles que celles de la Scandinavie, dont le niveau était, à cette époque, de 550 mètres plus élevé qu'aujourd'hui, d'où résulte la possibilité LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD 941 d'un transport des glaciers suédois vers la Grande- Bretagne. Mais, même si le lit de la mer du Nord avait été exhaussé de la même quantité, il restait encore, le long de la côte norvégienne, un creux de 360 mètres que la glace devait traverser, et il est difficile de comprendre par quelle force la glace aurail été poussée à travers cette rigole. Trois hypothèses ontété proposées pour échapper à ces difficultés et expliquer le phénomène gla- ciaire dans les Iles Britanniques. D'après l’une, les Iles Britanniques étaient à un niveau beaucoup plus élevé pendant toute l'époque glaciaire, et la glace qui les couvrait avait envahi les lits de la mer du Nord et de la mer d'Irlande; les argiles à galets actuelles sont les moraines de ces glaciers, et les sables et galets stratifiés auraient été déposés dans des lacs formés par des rivières barrées par les glaces. Dans la seconde hypothèse, le pays, d’abord situé au-dessus du niveau actuel, se serait graduellement enfoncé sous la mer, particulière- ment à l’ouest; puis une légère élévation aurait suivi cette submersion, pendant laquelle le pays a consisté en un groupe d'iles montagneuses exposées à de fortes marées. La troisième, due à M. Carvill Lewis, est en quelque sorte intermédiaire, mais parait encore plus insoutenable. Les deux hypothèses qui restent soulèvent de graves objections. M. Bonney n'a pu trouver aucune preuve de l'existence de lacs barrés par des glaces. D'autre part, l'épaisseur des couches d'argiles à galets est difficile à comprendre si les malériaux ont été transportés et distribués par la glace flottante. La submersion parait, à plusieurs points de vue, l'explication la plus acceptable; mais M. Bonney reste dans l’expectative. L'étude plus avancée des côtes septentrionales de la Russie et de la Sibérie nous apportera sans doute les données nécessaires pour élucider ce problème. II. — SECTION DES SCIENCES MATHÉMATIQUES ET PHYSIQUES. Le discours présidentiel de M. E. W. Hobson, professeur à l'Université de Cambridge, avait pour sujet : le bat et les tendances des Mathématiques modernes. Aucune science n'a joué un plus grand rôle, en dehors de son domaine propre, que les Mathématiques; mais il n'en faudrait pas conclure, comme certains, que leur seule raison d'être soit de fournir des outils utiles pour la solution des problèmes que posent les sciences physiques, par exemple. Les problèmes mathématiques abstraits ont leur valeur, que défend M. Hobson. Il critique ensuite les définitions formelles des Mathématiques quiontété proposées récemment. Sans méconnaitre l'intérêt philosophique des essais tentés par l'École de Peano et de Russell pour présenter les Mathé- maltiques comme un système de logique déductive, il estime que la méthode purement déducetive est tout à fail de recherche, et il en donne comme exemple le témoi- insuffisante comme instrument gnage de M. H. Poincaré, décrivant le chemin par lequel il est arrivé à ses grandes découvertes. M. Hobson termine par quelques remarques sur l’enseignement des Mathématiques élémentaires, et demande qu'on laisse au professeur une grande liberté de jugement sur les méthodes à employer suivant les cas. :$ 1. — Mathématiques. Il nous est impossible d'analyser ici les travaux purement mathématiques présentés à la Section; nous nous contenterons de mentionner un mémoire de M. H. Bateman sur l'état actuel de la théorie des équations intégrales, qui a recu les honneurs de l'insertion 1n extenso dans les procès-verbaux du Congrès. $ 2. — Physique. Le mémoire capital, parmi les travaux de Phy- sique, à été celui de Sir J. J. Thomson sur les -----cAir LE o JA 9" No cHe HS ; D Fig. 4. rayons positifs, qui confirme complètement les observations présentées l’année dernière dans une communication préliminaire au Congrès de Win- nipeg. L'appareil qui a servi aux expériences con- siste en un tube à décharge dans lequel les rayons- canal sont contraints de suivre un tube très fin placé derrière la cathode, pour se rendre sur un écran de willémite après avoir traversé un champ électrique et un champ magnétique. L'auteur a reconnu qu'il était préférable de faire usage de gros tubes, d'une capacité de deux litres et plus, où le vide peut être poussé plus loin et où l'espace obseur peut prendre de grandes dimensions sans atteindre la paroi de verre. Quand aucun champ n'est excité, les rayons positifs produisent une tache brillante au centre de l'écran. Le champ électrique dévie et élire la tache en une bande horizontale, le champ magnétique en une bande verticale; quand les deux champs agissent simul- tanément, on voit une bande inclinée de rayons positifs, et quelquefois une continuation de cette bande en des rayons négalifs (fig. 1 A). En altérant l'ordre des champs, ainsi que leur intensité et leur longueur, on obtient des arrière, due à « rs 19 bandes anguleuses ou incurvées (fig. 1, B et C). Dans des tubes très grands, à un vide élevé, la bande positive devient faible, et elle est remplacée par des taches lumineuses qui occupent des posi- tions différentes dans différents gaz; quand il y a plusieurs gaz dans le tube, les taches sont dis- posées sur la même verticale (fig. 4 D). Pour expliquer les phénomènes observés, Sir J,. J. Thomson distingue quatre types de radiations : 1° des rayons non déviés, ni par la force électrique, ni par la force magnétique; 2° des rayons secon- daires, produits par les précédents; ceux-ci sont déviés par les forces électrique et magnétique, et ontune vitesse constante d'environ 2 X 10*cm./sec. ainsi qu'un rapport e/m constant et égal à 10°, La non-déviation des rayons (1) est montrée par les trajectoires en partie verticale ou horizontale de la figure 1 B et C; ces rayons passent à travers le tube cathodique et frappent les molécules avec une certaine vitesse minimum en produisant les rayons secondaires (2); ces derniers sont accompagnés de rayons négativement chargés de même vitesse et de mème rapport e/m; 3° des rayons caractéris- tiques des gaz du tube, et visibles seulement aux basses pressions. Leur vitesse dépend de la diffé- rence de potentiel et les rapports e/m sont inver- sement proportionnels aux poids atomiques des gaz. Ces rayons sont donc probablement des atomes de gaz portant des charges unité. Les rayons cor- respondant aux divers atomes peuvent être sé- parés en les déviant par un champ électrique ou magnétique; chaque espèce de rayon produit une sorte de spectre sous l’action simultanée des deux champs. Des quantités excessivement faibles de gaz suffisent à produire le phénomène; 4 des rayons rétrogrades, partant de la cathode dans la même direction que les rayons cathodiques; ils semblent posséder des constituants négatifs des types (1) et (2). M. J. À. Crowther, en se basant sur des expé riences de dispersion des rayons 8 par les éléments, cherche à déterminer /e nombre d'électrons dans l'atome. I arrive à la conclusion que l’électrisation positive de l'atome occupe un volume comparable à celui de l'atome et que le nombre des électrons dans l’altome est égal à trois fois la valeur du poids atomique de la substance. Sir William Ramsay et M. R. W. Gray ont déter- miné /e poids moléculaire de l'émanation du ra- dium. D'après la théorie de la désintégration, il doit être égal à 226,5 —4—222,5, puisqu'un atome de radium, de poids atomique 226,5, se transforme en émanation en libérant une parti- ticule «, identique à un atome d'hélium de poids atomique 4. Toutefois, des particules plus lourdes, non encore découvertes, pourraient se former, ce LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD qui donne une grande importance à la détermina- tion du poids atomique ou moléculaire de l'éma- nation. Par la mesure des éléments critiques et par des expériences de diffusion, les auteurs sont arri- vés antérieurement à des valeurs variant entre 164 et 180, tandis que Debierne, par la mesure de la vitesse d'écoulement à travers une petite ouver- ture, a trouvé 220. Sir W. Ramsay et M. Gray se sont adressés, cette fois, à la détermination de la densité, pour laquelle ïls ont fait usage d'une microbalance de Steele et Grant, à fléau de quartz fondu, sensible à 4/500.000 de milligramme. Après avoir surmonté de nombreuses difficultés, les auteurs sont parvenus à exécuter cinq détermina- tions complètes, portant chacune sur moins de 0,1 millimètre cube d'émanation. Les poids molé- culaires résultants varient de 223 à 215 ; la moyenne est de 221, au lieu de la valeur attendue 222,5. L'émanation du radium, pour laquelle ils proposent le nom de nifon (à cause de sa phosphorescence), appartient donc à la série des gaz inertes dans la table périodique et occupe la seconde place après le xénon. MM. W. Makower, T. Russ et E. J. Evans ont étudié Ja répulsion du radium B par le radium À. Pendant la transformation radio-active qui com- prend l'expulsion d’une particule & dans le vide, le résidu de l'atome d'où cette particule a été expul- sée rebondit dans la direction opposée à celle de la particule. De même, le radium B est repoussé par le radium À et l’auteur a trouvé que RaB est chargé positivement et non négativement. D'après la dévia- tion produite dans un électroscope à rayons & par une feuille recouverte de particules de RaB, on déduit que ce dernier porte une charge atomique d'électricité et que son poids atomique est de 214. Des expériences faites sur la déviation de RaB dans un champ électromagnétique puissant confirment ces conclusions. M.T. II. Havelock a repris l'étude de /a relation entre la densité et l'indice de réfraction. Il estime que l'indice de réfraction dépend à la fois de la structure moléculaire et des conditions physiques température et pression), et qu'on doit tenir compte eu même temps de la force dans la molécule vi- brante et de la force dans les molécules voisines. La formule générale qu’il propose : eal(r® — 1) — ps] (n° — 1) = C, où n est l'indice, & la densité de la substance et @ une constante pour toutes les longueurs d'onde, suppose des observations à deux élats physiques différents, liquide et gazeux. Elle semble s'appli- quer très bien aux liquides et aux gaz, moins bien aux solides. M. H.S. Allen présente une revue critique du LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD problème de la fatique photo-électrique des métaux ou diminution rapide avec le temps de l'activité photo-électrique des plaques métalliques polies. Parmi les diverses théories proposées pour l’expli- cation de ce phénomène, l'auteur considère comme la plus satisfaisante celle de Hallwachs, qui lattri- bue à une modification de la pellicule gazeuse su- perficielle ou du gaz occlus dans le métal. M. W. M, Hicks a poursuivi des recherches sur la relation entre les spectres et la série périodique des éléments. Balmer, le premier, a essayé de repré- senter par une formule simple les lignes du spectre d'un élément. Kayser et Runge, puis Rydberg, ont distingué dans le spectre plusieurs séries de lignes et ont mortré que l’arrangement des lignes dans ces séries présente certaines analogies pour les élé- ments appartenant au même groupe de la table périodique. L'auteur estime qu'il y a dans les for- mules des raies spectrales : un terme commun à tous les éléments; un deuxième terme en relation avec le poids atomique, la forme exacte de cette dernière relation étant encore inconnue; un troi- sième terme en rapport avec le volume atomique y, done avec la densité de l'élément. Ce dernier terme posséderait, pour tous les métaux alealins, la valeur 2 v; dans le groupe Mg, Ca, Sr, Ba, il aurait respec- tivement les valeurs 9r, 8r, 7r el 6r; les mêmes coefficients semblent corrects pour Zn, Cd, Eu et Hg. En se basant sur le spectre de l’europium de Exner et Haschek, on en déduirait que la densité de cet élément est 13,1. Des considérations analogues semblent se vérifier pour Al, Sc, Sn et Bi; pour Ga, In, Gd et TI, les coefficients de v seraient 7, 6, 5 et 4. Divers autres travaux de Physique ont encore été présentés à la section, ainsi que plusieurs appareils de recherche ou d'enseignement. $ 3. — Météorologie et Physique cosmique. Depuis qu'Arrhénius, en 1900, à attiré l’atten- tion sur ce sujet, le rôle de la pression de radiation dans les phénomènes cosmiques a fait l'objet de nombreux travaux. Reprenant l'analyse mathéma- tique de Schwarzschild, M. J. W. Nicholson montre que la pression de radiation d’une lumière mono- chromatique peut atteindre vingt-deux fois la valeur de la gravitation solaire, el que ce maxi- mum se réalise sans doute pour cerlaines parti- cules de la queue des comètes. Si l'on fait entrer en ligne de compte l'effet du spectre continu {au lieu de la lumière monochromatique), on obtient des valeurs de la pression beaucoup plus élevées que les chiffres généralement admis. Une modification de la forme sphérique des particules sur lesquelles agit la lumière, (par exemple; la forme de disque) augmente encore la pression de radiation. 43 M. C. Chree présente un résumé critique de nos connaissances actuelles sur l'électricité atmosphé- rique. M. E. Gold communique le IX° Rapport du Comité pour l'étude de l’atmosphère supérieure, donnant les résullats des ascensions internationales de bal- lons-sondes pendant la semaine du 6 au 11 dé- cembre 1909, À cette époque, il y avait un cyclone sur les Iles Britanniques, et la limite inférieure de la région isotherme fut trouvée exceptionnellement basse, à environ 8 kilomètres de hauteur, landis qu'elle était à 12 kilomètres dans les districts anti- cycloniques au-dessus de l'Espagne. M. W. H. Dines donne le résultat de ses obser- vations sur l'atmosphère supérieure pendant le passage de la Terre à travers la queue de la comète de Halle y, faites au moyen d’ascensions de ballons- sondes les 18, 19 et 20 mai. Les courbes enregis- trées décèlent des variations rapides et inusitées de température et de pression dans l'atmosphère supérieure, sans qu'on puisse raisonnablement attribuer aucun de ces phénomènes à la comète. M. E. Gold a étudié effet de la radiation sur la hauteur et la température de la couche isotherme. Il a reconnu qu'à nos latitudes la couche isotherme de l'atmosphère se trouve à une hauteur d'environ 11 kilomètres et possède une température d’à peu près —64° C.; sous l'équateur, elle semble être située beaucoup plus haut, à environ 17 kilomètres, et posséder une température moyenne de —70° à —80° C. Ces variations peuvent s'expliquer par l’inégale distribution de la vapeur d'eau, combinée avec la présence de régions spectrales pour les- quelles l'atmosphère est presque transparente. M. W. Schmidt signale l'existence d'ondes atmosphériques de courte période, qu'il a mises en évidence par son variographe dans une vallée près d'Innsbruck. Un lac d'air froid se forme dans cette vallée, et le foehn chaud y provoque des ondes. Les unes sont stationnaires et de longue période, les autres progressives et de courte période ; elles sont indépendantes les unes des autres et peuvent inter- férer. En fin, M. Plummer a présenté, au nom de M. J. Milne, le XV° Rapport du Comité de recherches sismologiques. L'auteur, ayant comparé les activités moyennes de groupes de grands tremblements de terre: avec le temps, a trouvé qu'une activité 5 (sur une échelle arbitraire) esl A moyenne de #,: suivie de dix jours de repos, tandis que des groupes d'activité moyenne 5,5 sont suivis de 20 jours de repos; l'activité et le repos sont donc proportion- nels. L'auteur a également commencé, avec son sismomètre, des observations sur la déformation de la surface terrestre due à la charge de l'eau accumulée par la marée. S = LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD III. — SECTION DE GÉNIE CIVIL. Les travaux de celte section se sont ouverts par une remarquable conférence de M. W. E. Dalby sur quelques points relatifs au développement des chemins de fer anglais. Envisageant d'abord le problème de la locomo- tive, il montre la difficulté croissante de faire face aux demandes du trafic, par suite des limites imposées à la construction par la largeur des voies. Il arrive, pour la force en chevaux à développer aux roues motrices, quand on veut maintenir une vitesse de V milles par heure à niveau avec un train pesant W tonnes, à la formule : F — W(V/70 + V°/96.600). Quelle est la puissance maximum qui peut être obtenue d'une locomotive roulant sur les voies anglaises ? La puissance indiquée étant prati- quement proportionnelle à la surface de chauffe, la limite de puissance économique est atteinte quand les dimensions de la chaudière touchent limites conciliables avec le gabarit des voies, la chaudière étant pourvue d’une grille de chauffage telle qu'à la vitesse maximum de travail la consom- mation de combustible tombe entre 70 et 100 livres de charbon par pied carré de grille et par heure. M. Dalby passe ensuile au problème du type de locomotive requis pour un service local à arrêts fréquents, en se basant sur un train pesant 300 tonnes, y compris la machine, et devant démarrer et atteindre une vitesse de 30 milles à l'heure en 30 secondes. Ce problème ne peut être résolu d’une facon satisfaisante par la locomotive : seul, le moteur électrique en donne la solution complète. Ce fut une date mémorable dans l'histoire des chemins de feranglais que celle du 18 décembre 1890, où fut ouvert au trafic le City and South London Electric Railway. Depuis lors, la traction électrique s'est développée graduellement sur les chemins de fer anglais. A la fin de 1908, il y avait dans le Royaume-Uni 204 milles de voie simple exploités uniquement et 200 milles exploités en partie par l'électricité, correspondant à 138 milles de ligne ouverte au trafic. Le nombre total de aux passagers transportés sur ces 138 milles pendant l'année 1908 a été d'environ 342 millions, soit près du tiers du nombre tolal de passagers transportés sur tout le réseau anglais et gallois pendant la même période. Les dépenses moyennes du trafic ont été de 22,3 pence par train-mille et les recettes totales de 38,65 pence, soit un coefficient d'exploi- tation de 58 ° bien inférieurs à ceux de la traction par la vapeur, mais les deux pas exactement comparables, les conditions du trafic étant diffé- .. Les frais sont genres d'exploitation ne sont rentes et la longueur des lignes électriques relative- ment faible. M. Dalby termine par la description des progrès réalisés dans les signaux automatiques qui ont per- mis d'accroitre considérablement l'intensité du trafic. Parmi les travaux présentés à cette Section, nous signalerons d’abord celui de M. G. H. Bryan, pro- fesseur à l'University College de Bangor, sur les principes du vol mécanique. L'auteur, par le traite- ment mathématique, arrive à la conclusion que la stabilité d’un aérodrome pour les oscillations à longue période est indépendante de sa vitesse. Ce résultat est absolument contraire à celui que Lan- chester a tiré de ses méthodes physiques de raison- nement. Cette opposition a donné lieu à un débat assez confus sur le rôle du mathématicien, du phy- sicien et de l'ingénieur en aviation. M. R. A. Fessenden a ramené l'attention sur un problème qui a déjà tenté bien des chercheurs, celui de l'utilisation de l'énergie de la radiation solaire et de la force du vent, dont il s'occupe depuis douze années. La difficulté de cette utilisa- tion réside d’abord dans le fait que l'énergie pro- duite doit pouvoir être utilisée en tout temps et que les sources de force proposées sont intermit- tentes. Un emmagasinage est donc nécessaire. M. Fessenden montre que l'emploi de batteries d'accumulateurs est commercialement imprati- cable ; il propose, par contre, d’emmagasiner l'énergie en pompant de l’eau à une certaine hau- teur, un mètre cube d’eau tombant de 300 mètres pouvant développer un cheval-vapeur par heure. La construction de réservoirs élevés étant trop coûteuse, l’auteur suggère l'établissement d'un ré- servoir à 300 mêtres de profondeur, dont l'eau serait élevée au niveau du sol. En se basant sur une installation de 5.000 chevaux, accumulant de l'énergie pour deux semaines, les frais totaux d'emmagasinage de cheval-vapeur par an seraient de 16 fr. 25, au lieu de 650 francs par le moyen des accumulateurs. Passant à la quantité d'énergie disponible, M. Fessenden déduit, de mesures de la radiation solaire poursuivies pendant plusieurs années par M. Véry, que la quantité moyenne d'énergie recue par une surface de 100 mètres carrés dans diverses régions est annuellement : de 5 millions de kilowatts-heure pour l'Europe cen- trale, de 7,5 millions pour les Etats-Unis du Nord et de 10 millions pour les États-Unis de l'Ouest. La radiation solaire serait utilisée à l’aide d'un grand réservoir peu profond, recouvert de deux épaisseurs de verre et engendrant de la vapeur à la pression atmosphérique; celle-ci alimenterait des turbines à vapeur à basse pression, qui commanderaient les pompes servant à l'élévation de l’eau. Le coût annuel] d’un cheval-vapeur engendré par ce procédé, en tablant sur un rendement thermodynamique LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD de 10°/,, serait de 31 fr. 25. L'énergie du vent serait captée par des moulins à vent el pourrail servir de force additionnelle pour la commande des pompes. Comparant son procédé avec les autres systèmes de production de l'énergie, M. Fessenden trouve qu'il ne peut entrer en compétion avec les installations hydrauliques, dont le prix de revient est un peu inférieur ; par contre, il est beaucoup plus avantageux que la production par le moteur à gaz et la machine à vapeur. L'auteur annonce, en terminant, qu'une installation pour la fourniture de 3.000 chevaux-vapeur est actuellement en cours de construction dans une mine de cuivre; un vieux puits et des galeries abandonnées serviront à l'ins- tallation des pompes et du réservoir souterrain. — Le projet etles chiffres du Professeur Fessenden ont suscité certaines réserves. La tentative n'en est pas moins intéressante; les ressources naturelles de notre globe en combustibles s'épuisent tous les jours et il devient de plus en plus nécessaire de chercher à se procurer d’autres sources d'énergie : ce qui peut paraître encore une utopie aujourd'hui sera bientôt une réalité. M. W. Ripper, professeur à l'Université de Shef- field, propose une nouvelle méthode pour l'essai des outils de tours, qui consiste à déterminer le poids maximum de matière enlevée par l'outil avant qu'il ne se rompe, quand la vitesse de cou- page est augmentée uniformément minute par minute. Cette méthode donne des résultats très uniformes et très concordants. Le même auteur décrit également une nouvelle méthode pour dé- terminer les qualités coupantes des limes. Elle est basée sur l'emploi d'une modification de la machine de E. G. Herbert pour l'essai des limes, destinée à rendre son action plus semblable à celle du limage à la main. M. E. G. Coker, professeur au City and Guilds Technical Coliege de Londres, présente d'intéres- santes recherches sur /a détermination optique des tensions. On sait depuis longtemps qu'un corps transparent soumis à une tension rétablit en partie la lumière éteinte entre deux nicols croisés ; les parties non déformées restent noires, ce qui permet de déterminer le caractère général de la distribution des tensions. Le verre, communément employé dans ces expériences, possédant souvent des tensions initiales, M. Coker le remplace par la xylonite, qui ne présente pas cet inconvénient et peut être obtenue facilement sous forme de plaques d'épaisseur uniforme. Quand une de ces plaques est soumise à des tensions inégales dans des direc- tions différentes, elle acquiert la double réfraction, et un faisceau de lumière plan-polarisée qui la tra- verse est décomposé en deux parties : l’une pola- risée le long de la direction de la tension principale, l'autre le long de la direction de la lension secon- daire. Les deux rayons ont des vilesses différentes, et, après avoir été recombinés, ils peuvent inter- férer en donnant naissance à des bandes colorées quand on les regarde à travers un prisme analv- seur. L'intensité des tensions peut être déterminée d'après ces colorations, par comparaison avec celles d'un échantillon-témoin, soumis à une ten- sion uniforme et connue. Lorsqu'on opère sur des échantillons phénomènes se compliquent par l'apparition d'une incurvés en forme de crochet, les croix noire; mais l'auteur montre que les centres des croix noires se trouvent sur une courbe qui permet de trouver facilement les directions des tensions principales. Les membres de la Section ont exprimé leur admiration de cette très élégante méthode, qui permet de résoudre quantitativement des problèmes de distribution des tensions où les autres procédés et l'analyse mathématique seraient impuissants. M. G Cook a la des cylindres épais et il a trouvé que, contrairement à l'opinion courante, le point de rupture concorde avec celui que l'on déduit de la formule de Lamé, bien pour les ductiles (comme l'acier) que pour les matières cassantes (comme la fonte). M. À. Schwartz a présenté une machine pour l'essai du caoutchouc par le moyen de lhystérèse mécanique. La bande de caoutchouc à essayer est reliée à une balance à ressort par une corde flexible passant autour d'une poulie (fig. 2). Les extrémités supérieures du caoutchouc et du ressort l'une à un tambour et l’autre au déterminé résistance aussi matières sont attachées : style d'une roue d'enregistrement. La charge esl Fig. 2. appliquée à l'échantillon en abaissant la poulie: il en résulte que l’effort sur la pièce d'essai et l'effort sur le ressort sont égaux, bien que les extensions correspondantes soient différentes. Le diagramme obtenu pour un cycle comprenant la charge gra- duelle de l'échantillon et l’enlèvement graduel de la charge présente le caractère de la figure 2. En répétant le cycle, la surface de la courbe d'hys- 946 térèse augmente, l'extension maximum sous la même charge maximum devenant plus grande. Avec les caoutchoucs de bonne qualité, la surface du diagramme d'hystérèse devient pratiquement constante après la sixième répétition du cycle. La détermination du diagramme d'hystérèse constitue une excellente méthode pour l'appréciation de la qualité du caoutchouc. M. E. Coker a cherché à déterminer Les varia- lions cycliques de température à lintérieur des cylindres de moteurs à qaz. Jusqu'à présent, on s'est borné à déterminer les températures des parois des cylindres à l'aide de thermo-couples ; les essais faits à l'intérieur des cylindres ont échoué parce que les fils métalliques employés fondaient sous l'action de la température trop élevée. Après de nombreuses expériences, l’auteur a réalisé un couple platine iridié-platine rhodié qui s’est montré remarquablement stable, même avec de fortes charges du moteur, à 12 millimètres des parois. D’après les courbes obtenues, l’auteur conclut que la température atteinte par les gaz à cette distance des parois est supérieure à 1.850° C. et de peu inférieure à 4.950° C. M. W. E. Dalby décrit une méthode pour / mesure de l'air fourni au cylindre d'un moteur à gaz. L'air passe à travers un orifice conduisant dans une chambre d'une capacité de 50 pieds cubes, intercalée entre cet orifice et la soupape d'aspiration du moteur. Le moteur lui-même est utilisé pour calibrer l’orifice; le volume aspiré à chaque coup de piston est établi exactement. Sa pression est lue sur un indicateur optique, et sa température déterminée avec soir. Avec ces données, on caleule la constante 4 dans la formule : W — 0,418 & AV/4D, où W est le poids d'air pas- sant par l’orifice en livres par seconde, D la densité de l'air, A la surface de l’orifice en pouces carrés et À la pression en pieds produisant l'écoulement. On trouve que la constante + est égale à 0,6. La question de l'explosion des gaz dans les cylin- dres de moteurs a fait l'objet de deux Rapports : l’un lu par le Professeur B. Hopkinson au nom d'un Comité spécial, l’autre dû au Professeur H. Dixon. M. Hopkinson montre d'abord l'importance du rôle joué par la radiation, qui réduit la tempéra- moment l'inflammation mélange tonnant dans le cylindre du moteur à gaz. Si l’on polit soigneusement l’intérieur de la cham- bre de combustion, la vitesse de transfert de la Lure alleinte au de du chaleur aux parois est diminuée et il en résulte aussitôt une augmentation de rendement. L'auteur a réussi à mesurer directement la radiation d’une charge de gaz explosant dans une chambre à com- bustion pourvue d'une fenêtre en fluorite à travers laquelle la radiation tombait sur un bolomètre à | LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD enregistrement continu; il a trouvé que 22 °/, de la chaleur transmise aux parois étaient dus à la radiation. En collaboration avec M. Callendar, M. Hopkinson à reconnu qu'une flamme est, dans une large mesure, transparente à la radiation qu'elle émet. Si deux flammes identiques sont placées l’une derrière l'autre, la radiation recue est à peu près le double de celle d’une flamme simple. Si un grand nombre de flammes sont disposées les unes derrière les autres, la radiation diminue sui- vant une loi exponentielle. Une conséquence impor- tante de cette observation est que, dans le cas d’une très grande flamme, la radiation des parties inté- rieures est absorbée par les couches extérieures, de sorte qu'une grande flamme rayonne propor- tionnellement à sa surface et une petite propor- tionnellement à son volume. M. H. Dixon à enregistré, au moyen de la photo- graphie, l'explosion produite au sein d'un mélange de gaz par sa compression adiabatique dans un tube de verre. Les théoriciens ont prétendu qu'avec une telle méthode d'allumage les gaz sont unifor- mément chauffés et s'allument simultanément en tous les points, en donnant une détonation régu- lière. L'auteur montre que, pour la plupart des gaz, il n'en est pas ainsi : dans ses expériences, l'ignition commence invariablement en un point, puis la flamme se déploie dans tout le tube. La position du point d'ignition peut ètre modifiée en poussant le piston plus ou moins rapidement; dans quelques cas, l’ignition commence tout près du piston; loutefois, le point d'allumage n'est pas très nettement défini. La genèse de la flamme est donc tout à fait différente de celle qu'on observe dans l'allumage par étincelle électrique; il n'y a pas détonation violente, ainsi qu'on peut s’en rendre compte, d’ailleurs, sur le moteur Diesel, qui fonc- tionne d’après ce principe. M. F. Bacon à étudié comparativement l'effica- cité de diverses substances comme isolants calori- liques. Il emploie une méthode électrique à la fois pour engendrer la chaleur transmise et pour enre- gistrer les températures atteintes. Le liège pulvé- risé, convenablement aggloméré, s'est montré le plus efficace des isolants essayés. M. H. Wimperis décrit son accéléromètre pour la mesure de la résistance des routes à la traction et des chevaux-vapeur dépensés. Les expériences faites sur des véhicules, sur rail et sur route, out donné des résultats qui peuvent s'exprimer par les formules suivantes : R=38 +13(V/10) pour les wagons el R=—47411,5(V/10) pour les automo- biles, où R est larésistanceen livres par tonne et Vla vitesse en milles par heure. L'élévation de la résis- tance aux grandes vitesses est surtout due à l'air. La Seclion a encore entendu quelques commu- LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD 947 nications sur l'électricité industrielle. Dans l'une, le Professeur S. P. Thompson a tenté de mettre sous une forme plus systématique les lois déjà connues qui gouvernent les mécanismes électro- magnétiques. I arrive à la loi générale représentée par l'équation W=—CSN, où W est le potentiel du système, C le courant, N le flux magnétique et S le degré d'enchainement. Autrement dit, toul sys- tème électro-magnétique tend à changer de facon à produire le plus grand degré de liaison. MM. W.-H. et E. Wilson décrivent une nouvelle méthode de production des décharges électriques à haute tension. Leur dispositif consiste essentielle- ment en une inductance à (fig. 3), couplée périodi- quement avec une conduite électrique ordinaire f par le moyen d’un interrupteur de contact rotatif e, Ainsi couplée, l'inductance absorbe de l'énergie ; quand elle est « complètement chargée », l'inter- rupteur l'isole de la ligne, et son énergie se rend Fig. 3. dans le condensateur d. Au moment où toute l'énergie a été transmise au condensateur, l'inter- rupteur e met ce dernier en court-circuit avec le primaire d’une bobine » de 25 centimètres d’étin- celle. Le circuit du condensateur comprenant une capacité en série avec une faible inductance, un courant oscillatoire se produit, induisant des cou- rants correspondants dans le secondaire € de la bobine. Ce dispositif peut se brancher sur n'importe quelle ligne de courant continu ou alternatif, et il est très avantageux pour la production des rayons X, parce qu'il élimine la force électromotrice inverse, et pour la télégraphie sans fil. Enfin, M. Ph. Dawson a fait une conférence sur lélectrilication du London, Brighton and South Coast Railway, sur quelques-unes de ses lignes de banlieue les plus chargées. Le système adopté a été celui de la traction électrique monophasée à 6.700 volts avec une période de 5, et il a donné les meilleurs résultats. IV. — SECTION DE CHIMIE. La réunion du Congrès dans un grand centre mélallurgique à influé sur le choix du président de la Section : c'est M. J.E. Stead, le métailurgiste bien connu, qui à été appelé à cetle fonction, et, dans une séance solennelle, l'Université de Sheffield lui a conféré le grade de « docteur en Métallurgie : Lhonoris causa. M. Stead avait choisi comme sujet d'adresse /'in- fluence du soufre et du silicium sur la condition du carbone dans la fonte. On s'accorde générale- ment à reconnaitre que le soufre tend à rendre la fonte blanche en retenant le carbone à l'état com- biné, tandis que le silicium a une influence opposée en décomposant les carbures. Les expériences de M. Stead montrent que le soufre cristallise avec les carbures sous forme d'un composé encore indéter- miné; la proportion du soufre combiné ne dépasse pas un millième du poids du carbure, et c'est cependant cette faible quantité qui rend le carbone plus stable et empêche la séparation du graphite. Il semble que le silicium cristallise aussi primiti- vement avec les carbures de fer, pour former des carbo-siliciures qui sont excessivement instables et se décomposent en graphite et silico-austénite ; c'est la séparation de ce graphite qui rend grises les fontes commerciales riches en silicium et pauvres en soufre. De nombreux autres travaux métallurgiques ont été présentés à la Section. Le Professeur J. O. Ar- nold signale l'existence d'un quatrième point de recalescence de l'acier, qu'on observe au cours du refroidissement entre Ar, et Ar, et qui serait dù à une ségrégation constitutionnelle : le passage de la ferrite et de la hardénite de l'état de solution solide à celui de masses visibles au microscope. Dans un acier à 0,38 °/, de C, ce point de recales- cence se traduit par une élévation de température de 32°,7 C. Le Professeur A. Me William a étudié l'influence de la composition chimique et du traitement ther- mique sur les propriétés de l'acier. Dans les aciers fer-carbone purs, la résistance augmente avec la teneur en carbone jusqu'à 1,25 °/, de C, pour dimi- nuer ensuite; dans les aciers à 1 °/, de Mn, la résistance maximum est atteinte pour 0,75 °/, de C, et dans les aciers à 2 °/, de Cr, la résistance maxi- mum est obtenue avec 0,85 °/, de C. Les effets du traitement thermique (trempe et recuit) sont les plus marqués pour un acier à 0,5 °/, de G et 2}, de Cr, dont la résistance passe de 38 à 114 tonnes par pouce carré. MM. C. Chappell et F. Hodson ont recherché l'influence du traitement thermique sur la corro- sion et la solubilité de l'acier. Bien que ce traite- ment exerce à un haut degré un effet inhibiteur sur la corrosion, il ne peut contrebalancer l’action pernicieuse due à la ségrégation ou à la qualité in- férieure du métal. LOUIS BRUNET — LE (Je) rs a CONGRÈS DE SHEFFIELD La question toujours actuelle des soufilures des lingots d'acier a fait l'objet d’un travaildu Professeur H.M.Howe, de New-York. On dislingue deux sortes de cavités qui se forment par la solidification des métaux fondus : les bulles gazeuses ou soulflures, provenant de la mise en liberté de gaz par le métal sursaturé, et la retassure, ou cavité centrale prove- nant de la contraction du métal. La pratique s'est introduite de favoriser la formation abondante de soufflures, de facon à empêcher la retassure par la compression engendrée dans le métal, puis de faire disparaitre à leur tour les soufflures par laminage à chaud du lingot en plaques. Cette pratique est condamnée par certains métallurgistes, qui pré- tendent que la fermeture des soufflures est impos- sible parce que le gaz reste toujours présent dans le métal, à l'état plus ou moins comprimé. M. Howe rapporte une série d'expériences montrant que les gaz des soufflures sont complètement réabsorbés par le métal, dont les bords se ressoudent. grâce à la haute température et à la pression produites. Cette réabsorption est plutôt l'effet du réchauffe- ment que du laminage direct, et l'exposition pro- longée à une température supérieure au point de soudure du métal facilite la réabsorption. A l'appui des conclusions de M. Howe, M. Stead cite des expériences de M. F. M. Parkin sur le même sujet, prouvant àävec évidence que deux surfaces métal- liques, débarrassées d'oxydes et de substances étrangères, mises en contact et forgées à 1.100- 1.150°, se soudent complètement. Nous avons signalé ici même les accidents aux- quels peuvent donner lieu le transport et la con- servation des ferro-siliciums". M. S. M. Copeman, chargé par le Board of Trade anglais d'une enquête sur cette question, en a communiqué les résultats au Congrès de Sheffield. Ce sont surtout les ferro- siliciums à teneur élevée en Si (50 °/ et plus) qui sont dangereux; ils sont très cassants et se décom- posent rapidement dans une atmosphère humide en donnant des gaz toxiques. L'auteur recommande de concasser le ferro-silicium en morceaux quelque témps avant de l’embarquer sur les navires, d'indi- quer sur chaque tonneau la teneur en Si et la date de fabrication, et d'en exclure le transport par les navires à passagers. M. H. E. Armstrong expose ses idées sur l'emploi rationnel de la houille. Dans l'usage domestique, les premiers stades de la combustion donnent nais- sance à un grand nombre de substances volatiles inflammables qui brülent avec une flamme fumeuse. En cokéfiant la houille à basse température, on pourrait les récupérer, tout en obtenant un com- bustible brûlant aussi bien que la houille et don- 1 Voir la Revue du 15 février 1909, p. 103. nant une température plus élevée sans fumée. Le gaz produit par ce procédé de cokéfaction est très riche et se substituerait avantageusement à celui qui provient de la carbonisation de la houille à très haute température. M. A. Smithells pense qu'il n'est pas sûr que le nouveau procédé soit plus avan- tageux, au point de vue économique, que la fabri- cation actuelle du gaz. Dans une réunion en commun avec la Section des Sciences mathématiques et physiques, M. le Pro- fesseur W. A. Bone a présenté un remarquable Rapport sur la combustion des gaz, dans lequel il a envisagé successivement la température d'ignition et les phases initiales de l'explosion, l'onde explo- sive, les pressions produites, l'influence de l'humi- dité sur la combustion, la combustion des hydro- carbures, l'influence des surfaces chaudes sur la combustion. Il a insisté particulièrement sur ce dernier point, qui à une grande importance tech- nique et a donné lieu récemment à de nombreux travaux. Ceux-ci ont montré que la combustion catalytique en présence de surfaces chauffées dépend d’abord de la condensation ou de l'absorp- tion d’un ou des deux gaz réagissants par la sur- face. Le pouvoir catalysant des surfaces est forte- ment accru par l'exposition préalable au gaz combustible. L'hydrogène a une influence sti- mulante marquée, l'oxygène généralement une influence retardatrice. La vitesse de combustion de CO + O bien secs à 500° C. est doublée sur une surface d'argile à feu. L'auteur conclut par l'hypo- thèse d'une relation probable entre la combustion sur les surfaces et l'émission de particules chargées par les solides chauds. En ce qui concerne la Chimie physique, la Section a entendu un Rapport très étendu de M. J. V. Eyre sur l’état actuel de nos connaissances sur les solu- tions, et trois mémoires importants relatifs à l'asso- ciation moléculaire, dus à M. W. E.S. Turner. Dans le premier, rédigé en collaboration avec M. C. J. Peddle, l’auteur montre que l'association molécu- laire peut se présenter dans l'eau, bien qu'à pre- mière vue on suppose généralement le contraire. C'est un phénomène fréquent parmi les substances aromatiques : ainsi l'acide benzoïque est associé dans l’eau à un plus haut degré que dans le benzène, et tous les acides aromatiques présentent, de même, une association marquée. Dans un autre travail, l’auteur annonce que les composés des halogènes avec les éléments ne présentent d'association molé- culaire que lorsque le composé est un électrolyte. Enfin, un dernier mémoire, en collaboration avec M.E. W. Merry, traite de la complexité moléculaire des nilroso-amines. Les mesures de l'énergie super- ficielle de ces corps montrent que les nitroso-amines aliphatiques sont des liquides associés, tandis que LOUIS BRUNET — LE CONGRES DE SHEFFIELD 049 ———— les nitriles et les composés nitrés aromatiques ne sont pas associés. Le manque de place nous empêche d'entrer dans le détail des nombreux travaux de Chimie orga- nique présentés à la Section. Nous n'en reliendrons qu'une note de M. F. M. Perkin sur /4 formation des éthylates de métaux lourds, par l'action d'un courant d'ozone barbotant dans une suspension alcoolique du métal finement divisé. V. — SECTION DE GÉULOGIE. Le président de la Section, le Professeur À. P. Coleman, en a ouvert les séances par un magistral historique du bouclier canadien. Il n'existe guère, en Géologie, de contraste plus frappant que l'argile à blocaux du Pléistocène reposant sur le gneiss archéen. C'est ce spectacle qu'offre la plus grande moitié du Canada, et le grand géologue autrichien Suess à déjà tenté d’en donner l'explicalion dans son esquisse sur le bou- clier canadien. Reprenant cette tentative en utili- sant les recherches les plus récentes, M. Coleman arrive à se représenter comme suit l’évolution géologique d'un des plus anciens continents du monde. L'histoire du bouclier canadien commence à l'époque pré-kéwatienne par des surfaces terrestres soumises à l'érosion et des mers où se déposaient des boues et du sable. Si la terre à jamais été refondue, ce stade était passé depuis longlemps quand les sédiments de la série de Kewatin se déposèrent, car ils renferment du carbone dérivant probablement de Fucoïdes, qui n'auraient pu vivre dans une mer chaude. Les terres et les fonds de mer pré-kéwatiens ont totalement disparu, au moins en ce qui concerne le Canada; apparemment, ils ont été fondus et transformés dans les gneiss du Laurentien. Le Kéwatien fut une époque de grande activité volcanique, de couches de lave et de roches pulvé- rulentes surpassant en volume les couches épaisses de sédiments. À la fin du Kéwatien, les milliers de pieds de roches volcaniques et clastiques furent soulevés en forme de dômes par la surrection des batholites de gneiss laurentien primitif. Ici se présente une profonde lacune dans nos documents, pendant laquelle les montagnes furent sans doute nivelées en une pénéplaine ondulée. Ce hiatus représente une très longue période d’érosion et de destruction sur une surface terrestre, se ter- minant par l'action glaciaire à grande échelle. Le Huronien inférieur commence par le dépôt d'une argile à blocaux épaisse et très étendue, suivie d'une transgression de la mer durant la- quelle se sont déposés de la vase et du sable, ainsi REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. que du calcaire et des pierres Cornées Après courte interruption, un processus similaire a eu une lieu dans le Huronien moyen. Pendant cette poque ou dans l'intervalle qui la sépare du Huronien Supérieur (Animikien), la formation des monta gnes fut renouvelée sur une grande échelle, plu sieurs synclinaux du Kéwatien et du Huronien inférieur étant pincés entre les batholites montants d’ancien gneiss laurentien. Une large bande cen- trale de Huronien inférieur à toutefois échappé à ce processus et conservé sx position originale sur une base de Kéwatien et de Laurentien. Les sédi- ments animikiens ou huroniens supérieurs, qui reposent sur un substratum aplani de roches huro- niennes inférieures, laurentiennes et kéwatiennes retournées, consiste surtout en ardoises ou schistes cornéens el carbonacés, reposant presque horizon- talement et ayant subi peu de changements. Le Keweenawien suit l'Animikien avec une faible lransgression et comprend des lits de grès et de conglomérats déposés en eau peu profonde, accom- pagnés d'immenses coulées de laves. Le résultat de l'épanchement des laves fut la formation de grands bassins, comme celui du Lac Supérieur. Il est probable que, durant tout l'Animikien et le Keweenawien, la plus grande partie, sinon la tota- lité du bouclier canadien était recouverte par la mer. Le Keweenawien est généralement considéré comme marquant la limite de l'Archéen (ou Algon- kien). Low signale des portions de ces formations comme ayant élé pincées dans le soulèvement des montagnes du lype laurentien au Labrador; mais, en général, elles n'ont pas élé troublées. Pendant les premiers temps paléozoïques, la mer empiéla plus d'une fois sur le bouclier canadien, quoique probablement la plus grande partie de la péninsule du Labrador et peut-être une région au nord-ouest de la Baie d'Hudson échappèrent à cel envahissement. Du Dévonien au bouclier semble être resté à sec, el une partie de la coiffe de arasée pendant cette longue période. La succession Pléistocène, le sédiments ordiviciens et siluriens fut des couches de glace pléistocènes compléta le tra- vail de dénudation, et à la fin de l'époque glaciaire plusieurs milliers de milles carrés des portions inférieures se trouvèrent une fois de plus recou- vertes par la mer. Pour la dernière fois, la région s'est ensuite soulevée, de hauteurs inégales dans ses différentes parties, comme le montre la dis- torsion des baies marines et d'eau douce. La surface de collines basses et de monticules arrondis de gneiss et de schistes au-dessous de l'argile à blocaux du Pléistocène ressemble singu- lièrement à celle qui est au-dessous des schistes plats et des calcaires du Paléozoïque inférieur, ou des sédiments presque horizontaux de l’Animikien, PLU LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD ou même des parties non troublées de l'argile à blocaux du Huronien inférieur. C'est peut-être parce qu'une grande gartie de la surface a été cou- verte par des sédiments et ramenée au jour par l'érosion subaérienne à plusieurs reprises succes- sives. La plus grande partie de cette sculpture semble se placer avant l'Animikien (c'est-à-dire à l'époque pré-cambrienne) et la surface pré-huro- nienne parait aussi müre qu'aucune des plus anciennes. Les conséquences de ce fait quant à la longueur des périodes géologiques primitives sont évidentes. L'époque pré-huronienne comporte le dé- pôl de milliers de pieds de sédiments kéwatiens, la surrection des premières montagneslaurentienneset le nivellement de ces montagnes en une pénéplaine ; elle doit donc être aussi longue que l’époque post- huronienne. Les communications présentées à la Section se rapportaient surtout à la géologie locale ou à celle des colonies anglaises; elles sont, en général, trop spéciales pour que nous les analysions ici. Retenons seulement des observations très intéres- santes de M. G. W. Lamplugh sur la moraine à coquilles du glacier de Sefstrôm, au Spitzberg, glacier qui est sujet à des avances et retraites rapides. Elles montrent que : 1° en peu d'années, une épaisseur de 21 à 24 mètres d'argile coquillière à blocaux peut être accumulée, le glacier déblayant les matériaux du fond de la mer et les poussant devant lui ; 2 des coquilles non brisées se trouvent en abondance dans cette argile; 3° à quelques mètres de l'endroit où s'aceumule cette argile à blocaux, plusieurs formes animales et végétales peuvent se développer. Tous ces points sont très importants pour élucider l'histoire-des dépôts glaciaires. VI. — SECTION DE GÉOGRAPHIE. L'adresse présidentielle du Professeur J. A. Herberison a eu surtout pour thème la classification et la terminologie géographiques, en particulier dans leurs rapports avec la classification génétique des formes de terrains. Le D° W. S. Bruce à présenté le résullat de l'exploration, par une Expédition écossaise placée sous sa direction, de la Terre du Prince Charles, au Spitzherg, pendant les étés 1906, 1907 et 1909. L'objet principal de l'Expédition était l’établisse- ment d'une carte détaillée de cette Terre à l'échelle de 1 pouce pour 2 milles. L'ile a environ 71 kilo- mètres de longueur et de 5 à 12 kilomètres de lar- seur, avec une superficie de 670 kilomètres carrés. Une rangée presque continue de montagnes, les Grampians seplentrionaux, occupe les deux tiers s'élève à 1.150 mètres au Mont Monaco et à 1.000 mètres au Mont Jessie. Les sé- nord de l'ile, et parant des hauteurs de Ross à l'extrémité méri- dionale, on trouve une région basse étendue, les « Foreland Laichs », apparemment un fond marin surélevé. A l'est, une couche de glace presque continue descend des Grampians vers le détroit de Foul, mais l’ouest est libre de glaciers. Une explo- ration bathymétrique du détroit de Foul à montré la présence d'une barre vers l'extrémité septen- trionale, sur laquelle des vaisseaux tirant plus de 3%,75 à 4,50 trouvent difficilement passage. Les roches sont principalement des schistes et des grauwackes, avec une petite poche de roches tertiaires à l’est, près de Port Ferrier. M. W.S. Bruce a exposé ensuite /es plans d'une seconde Expédition écossaise antarctique. I] se propose d'abord de compléter le levé bathymétrique de l'Atlantique méridional entre Buenos-Ayres et le Capetentrele Cap et les Sandwich du Sud. Puis, l'Expédilion se rendra sur la Terre de Coats, où sera établie une base d'opérations. L'élé suivant, le D' Bruce et quelques hommes tenteront de traverser l'Antarctique. via le pôle, jusqu'à la Terre Victoria; un autre groupe restera sur place pour y faire des observations ; enfin, le navire ira explorer la région inconnue entre la Terre de Coats et la Terre Empereur-Guillaume. Après ravitaillement à Mel- bourne, il se rendra à la Terre Victoria pour y chercher le D' Bruce, puis retournera à la Terre de Coats par le cap Horn pour y reprendre le reste de l'Expédition qui y aura passé deux hivers el un été, et finalement il rentrera en Europe. Plusieurs explorateurs anglais ont donné un compte rendu de leurs voyages : le capitaine J. K. Lavis a narré l'expédition du Nimrod de Sydney à Montevideo à la recherche d'iles douteuses, comme les îles de la Compagnie Royale, l'ile d'Emeraude, l'ile Dougherty, etc., dont aucune n'a pu être retrouvée ; le D'T. Anderson a décrit le Matavanu, nouveau volcan qui a fait éruption à Savaii, dans les iles Samoa, en 1905; le lieutenant Etherton a donné la relation d’un voyage des Indes au Trans- sibérien à travers le Pamir, le Turkestan chinois, la Mongolie et la Sibérie. Dans le domaine de la Géographie économique, le Professeur A. Me William a lu un travail sur les industries métallurgiques et leurs rapports avee les formations géologiques de la région avoisinante et il a montré dans Sheffield l'exemple frappant d'une ville dont le développement a été commandé par les circonstances locales. M. J. I. Reed a étudié la répartition géographique de la culture du coton et rappelé les efforts considérables faits par l'Angleterre pour introduire cette culture dans ses colonies tropicales, afin de soustraire son industrie cotonnière à une dépendance trop complète des marchés étrangers. LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD En ce qui concerne l'enseignement de la Géographie, M. W. Wilson à fait l'importance des globes terrestres, dont l'emploi est malheureusement limité par leur prix élevé et leur encombrement. Il a remédié à ces deux construisant, au moyen de _ fuseaux en un globe démontable dont l'emploi est très pratique pour l'enseignement. ressortir ; . inconvénients en carton, VIT: SECTION DE BOTANIQUE. Le discours d'ouverture du Président de la Section, le Professeur J. W. H. Trail, fut surtout un plaidoyer en faveur de la préparation d'une . grande Flore nationale anglaise. On n'est pas encore définitivement fixé sur es voies de lransport des sucres formés dans les feuilles vertes. En employant la méthode de Senft, qui décèle les sucres par la précipitation de leurs osazones, M. S. Mangham a obtenu la preuve défi- nitive que ce sont les Lubes criblés (el non la gaine veineuse parenchymateuse) qui donnent passage aux sucres libres provenant de la lamina de la feuille. Ainsi se trouve confirmée la théorie de Czapek, qui avait été attaquée par Haberlandt et d’autres. Les travaux de M. D. Thoday se rattachent éga- lement à 4 question de l'assimilation et du transport dans la plante. Ses expériences montrent que, dans des feuilles détachées, l'augmentation de poids sec due à l'assimilation est extrêmement faible à la lumière diffuse, comparativement à l'augmentalion en lumière solaire directe. Les feuilles restées atla- chées à la plante présentent une augmentation de poids encore plus faible, fait dû en grande partie au transport de substances. M. F. Darwin a décrit une nouvelle méthode pour observer, sur les feuilles vivantes attachées à la plante, le degré d'ouverture des stomates. Son ins- trument, le poromètre, consiste en une petite chambre de verre, cimentée sur la surface stoma- tale de la feuille, et reliée à un tube de succion et à un manomètre. En diminuant la pression dans la chambre, on induit un afflux d'air à travers les stomates; la vitesse de cet afflux indique la condi- tion des ouvertures stomatiques. L'auteur à fait avec cet instrument l'intéressante observation sui- vante : En comparant les lectures du poromètre avec la perte de poids de la feuille par transpi- ralion, on trouve que les deux courbes s'élèvent et s'abaissent ensemble, la première étant toutefois moins accentuée que la seconde. Dans un travail sur la facon dont les chromo- somes se comportent pendant la mitose, M. Farmer et Mie Digby ont montré que, chez le Gallonia, durant les divisions de l’archéspore, la scission 051 longitudinale commence par une condensalion de la chromatine sur les bords des chromosomes pendant la télophase de la division précédente. De même, dans la division hétérotypique de la milose, la scission longitudinale est préparée pendant la télophase dela dernière division de l'archéspore. MM. analogues chez le Vicia faba. Fraser el Snell sont arrivés à des résullats VIII. — Sous-sEcrIoN D'AGRICULTURE. Les travaux de cette sous-section furent ouverts par une adresse de M. A. D. Hall sur l'éternel et fondamental problème de la fertilité du sol. MM. Crowther et Ruston discutèrent l'influence des impuretés de l'atmosphère des villes sur la végélation. L'eau de pluie tombant dans la partie industrielle de Leeds est fortement chargée de malières minérales et goudronneuses et contient une quantité appréciable d'acide; la pluie qui tombe dans le quartier des maisons d'habitation est beaucoup plus pure, mais pas encore autant que la pluie de la campagne. Des expériences faites sur des plantes en pots et des observations prises dans les jardins et les parcs ont montré que l'effet des impuretés est complexe : les stomates des plantes sont bouchées, surtout si elles sont enfon- cées, comme chez les Conifères: le sol est égale- ment affecté. Ces actions produisent des résultats marqués sur la végétation : des plantes peuvent être tuées; celles qui survivent souffrent. En ce qui concerne le gazon, la pluie impure en diminue la quantité et la teneur en protéine, tandis que la teneur en fibre augmente : la valeur nutritive en est done beaucoup abaissée. | La question de /a cullure de la betterave à sucre présente aujourd'hui une grande importance pour l'Angleterre, Dans ce pays, elle n'a jamais eu l’oc- casion de se développer, par suite des conditions du marché du sucre européen ; mais, depuis que la Conférence de Bruxelles a supprimé les primes à l'exportation, des fabriques de sucre se montées en Angleterre et ont demandé aux agri- culteurs de leur fournir les betteraves nécessaires. M. S. Stein, qui s'est fait depuis plusieurs années l'avocat de cette culture, a résumé devant la sous- section les nombreuses expériences qu'il a exé- cutées et réfuté les objections qui ont été faites contre cette culture. M. G. L. Courthope à traité le côté financier de la question et montré que la nouvelle industrie a devant elle toutes les chances de succès. La question de Za fixation de lazote par les plantes a ensuite retenu l'attention des auditeurs. Le Professeur Bottomley a montré que l'Azoto- bacter, en conjonction avec le Pseudomonas, tous sont 952 LOUIS BRUNET — LE CONGRÈS DE SHEFFIELD deux tirés des tubercules des racines de Cycas, fixent plus d'azote qu'un des deux organismes seul ; mais ces résultals auraient besoin d'être confirmés. M. Golding est parvenu à surmonter les difficultés de culture en milieu artificiel des orga- nismes fixaleurs d'azote et il les a fait passer par tontes les variations qu'ils subissent sur la plante : ‘aments, bâtonnets, forme bactéroïde en Y. Pen- daut la période d'assimilation active de l'azote, il se forme une substance alcaline ; après un certain temps, si les produits formés ne sont pas enlevés, l'assimilation s'arrête, l'alcali disparait et le milieu devient acide. La stérilisation partielle des sols a fourni à MM. Russell et Hutchinson le sujet d’intéressantes expériences, poursuivies à Rothamsted depuis trois ans. Quand un sol est chauffé ou traité par des antiseptiques volatils comme le toluène, sa productivité augmente. Ce fait est attribué à une augmentation d'activité bactérienne, résultant de la disparition d'un facteur qui, dans le sol non traité, limitait le travail des bactéries. Les auteurs arrivent, par une série d'expériences, à reconnaître que ce facteur est un organisme vivant plus gros que les bactéries, mais se développant plus lente- ment, tué vers 50° ou par une sécheresse prolongée. Il peut détruire les bactéries ou former, autour des particules du sol contenant de la matière orga- nique, une couche protoplasmique qui les protège contre l’action des bactéries. IX. — SECTION DE ZO00LOGIE. La réunion récente du Congrès international de Zoologie à Graz et du Congrès international d'Entomologie à Bruxelles affecta quelque peu le nombre des communications présentées à Shef- field ; mais la qualité racheta peut-être la quantité et les séances de la Section se poursuivirent avec un intérêt croissant. Dans son discours présidentiel, le Professeur G. C. Bourne fit entendre un chaleureux plaidoyer en faveur des études de morphologie animale, qui lui paraissent de plus en plus négligées par les biologistes anglais. Sous le titre: Sexe et immunité, M. G. Smith fit connaitre les résultats de ses dernières recherches concernant l'effet du parasitisme du Cirripède Sac- culina sur le crabe araignée Znachus. I avait mon- tré que, l'influence parasite, l'hôte mäle prend les caractères de la antérieurement sous du femelle adulte, d'abord extérieurement, puis, après la mort du parasite, intérieurement aussi, car de gros œufs sont produits dans les testicules. L'effet du parasite sur le jeune crabe femelle est de même nalure : il prend les caractères de femelle adulte à une époque prémalurée. M. Smith présente une très ingénieuse explicalion de ces faits. Il montre que, chez l’/nachus infecté, quel que soit son sexe, les racines de la Sacculine fabriquent un vitellus analogue au vitellus ovarien de l’/nachus femelle normal. Le parasite force ainsi le crabe, mâle ou femelle, à produire dans son sang des substances aux dépens desquelles les racines de la Sacculine peuvent faire du vitellus; dès que ces substances sont produites, la Sacculine les absorbe et, en les fixant, en stimule la production. Ces substances formatrices de vitellus, en saturant les fluides tissulaires des crabes infectés, provoquent le déve- loppement des caraclères sexuels secondaires. Quand le parasite meurt et que ses racines n'assi- milent plus lesdites substances, elles sont absor- bées par les restes de la gonade (réduite et ne fonctionnant plus chez le crabe parasité), qui se mel, en conséquence, à former des œufs. Gette surproduction d'une substance qui est fixée par un parasite est regardée par M. Smith comme tout à fait analogue à la production d'un anti-corps dans l'immunisation. En fournissant à la Sacculine des substances formatrices de vitellus, le crabe se pro- tège contre la soustraction par le parasite d’autres matériaux nutritifs qui sont nécessaires à ses organes vilaux. Le Professeur W. Garstang a étudié l'effet des aliments pauvres en chlorophylle sur la coloration des larves phylophages de Lépidoptères. Les larves d'Æuplexia lucifera, nourries dès leur éclo- sion avec des feuilles internes jaunes de laitue, développent les mêmes pigments verts que celles qu'on nourrit avec des feuilles vertes, tandis que les larves nourries avec les côtes du milieu du chou acquièrent une couleur blanchâtre semi-transpa- rente, très faiblement teintée de vert ou de jaune. Les marques noires superficielles se développent dans tous les cas. D'autre part, les larves de Ha- mestra brassicæ, nourries avec des côtes de laitue ou des carottes, tout en ne produisant pas les cou- leurs vertes normales, présentent un déficit marqué des pigments noirs superficiels caractéristiques des larves nourries avec des feuilles vertes. Plu- sieurs larves nourries sur des côtes étaient prali- quement blanches au moment de la pupation ; les larves nourries sur des carottes étaient un peu plus sombres. M. H.-B. Fantham a présenté ses observations sur le eyele évolutif de l'Zimeria (Coccidium) avum, qui produit une forme d'entérite chez les coqs de bruyère, les poules et les faisans, spéciale- ment chez les jeunes oiseaux. Des oocytes résis- tants du parasite sont évacués avec les fèces des animaux infectés et absorbés par d'autres oiseaux avec leur nourriture. Leur paroi se dissout dans le LOUIS BRUNET -— LE CONGRES DE SHEFFIELD om sue pancréalique, et les sporozoïles mis en liberté pénètrent dans les cellules épithéliales du duodé num où ils se développent, puis se reproduisent, en donnant naissance d'abord à des mérozoïles, plus lard à des formes sexuées qui se conjuguent pour former de nouveau des oocyles, Cette cocei diose est accompagnée d'une augmentation du nombre des leucocytes polymorpho-nueléaires dans le sang de l'hôte et d'une diminution du nombre des érythrocyles. Les jeunes oiseaux sont beaucoup plus sensibles à la maladie que les vieux; mais les vieux oiseaux qui ont la maladie à l'état chro- nique constiluent des réservoirs d'oocyles el des sources constantes d'infection, Le chaulage du sol, qui détruit les oocytes, est le traitement le plus efTectif pour combattre la coceidiose, Bollazzi et d'autres ont fail voir l'intérêt qui s'attache à la délermination de la pression osmo- lique et de ia salinité du sang des poissons marins et du milieu dans lequel ils vivent, Dans celle direction, M. W.-J. Dakin a éludié La biologie des œuls des Téliostéens et des Elasmobranches. montre que la densité des œufs de carrelet peut être allérée en faisant varier la salinité de l'eau actuellement connu dans laquelle ces poissons vivent; le contenu de l'œuf n'est done pas indépendant de l'eau de mer. La salinilé et la pression osmolique du contenu de l'œuf sont beaucoup moindres que celles du milieu où vivent les œufs, et presque les mêmes que celle du sang du poisson adulte, [y a donc un équilibre entre l'eau de mer el le contenu des œufs qui ne consiste pas dans une égalité des pressions o8mo- liques ; la mort du contenu des œufs détruit les conditions qui maintiennent l'équilibre et le con- tenu de l'œuf augmente de salinité; une augmen- lalion correspondante de densilé se produit, el l'œuf perd la capacité de floller, La pression osmolique des œufs d'Élasmobranches est très différente de celle des œufs des Téléostéens, bien qu'ils puissent vivre dans des eaux de même sali- nité, La relation existant entre le contenu de Pœuf du chien de mer et l'eau est la même que celle qui s'observe entre le sang du poisson adulte et le milieu dans lequel il vit. Nous menlionnerons sans nous y arrêter d'autres : du D'J. W. Jen- kinson sur la relation entre les processus de régé- communicalions intéressantes néralion et de développement; du Professeur R.-J. Anderson sur l'os temporal chez les Primates ; du DH, W. M. Tims sur les adaptations analo- miques des phoques à la vie aquatique (d'après l'étude des embryons de phoques rapportés par la Discovery); de M. J. T. Evans sur l'analomie et la physiologie du Calma glaucoides, mollusque nudi- branche vivant sur les œufs des poissons, ele. . SECTION DE PuySiorLocil C'est la question des relations entr ion superficielle et les processus cellulaires qui fournit l'objet de l'adresse présidentielle du Professeur À. B, Macallum. Depuis une vinglaine d'années l'éminent physiologiste s'estallaqué aux problèmes de la Chimie cellulaire, et il a montré d'une facon indiscutable que les sels organiques ne sont pas diffusés uniformément dans la cellule; dans les cellules végétales, ils sont localisés d'une facon rigide, landis que, dans les cellules animales, exceplé celles qui sont voutes à l'absorption et à la sécrétion, — ils sont confinés dans des portions spé- ciliées de la cellule, Leur localisation, si l'on met à part les sels inorganiques de fer, n'est pas due à la formation de précipilés, mais elle est le résultat de conditions créées par la lension superficielle. Seule, celle hypothèse permet d'expliquer la distri- bulion remarquable des sels de potassium dans cerlaines cellules végétales el animales (muscu- laires, par exemple); elle est, d'ailleurs, une consé- quence nécessaire de l'application du principe de Gibbs-Thomson au contenu cellulaire. La tension superlicielle est donc un des prinei- paux facteurs de la vie cellulaire. M, Macallum va plus loin et il estime que l'énergie dégagée dans la contraction musculaire, celle qui est mise en jeu dans la sécrétion el l'excrélion, dans la division nucléaire el cellulaire, et la force engagée par la cellule nerveuse dans la production de l'influx ner- veux, ne sont que des manifestations de la tension cellule vivante serait superficielle, Ainsi la ne machine, transformant l'énergie polen- qu'une Lielle en énergie cinélique où autre, par le moyen de modifications de son énergie superficielle, Nous ne pouvons entrer dans le déluil des faits que l'auteur apporte à l'appui de ces vues. Donnons seulement brièvement ceux qui se rapportent à l'influx nerveux. Le fait connu que, dans la réparation de la fibre nerveuse divisée, le renouvellement de la portion périphérique de Paxone à lieu par un mouvement de matière colloïde venant de la portion centrale de la fibre, est déjà en lui-même une indication nelle que la lension superficielle est basse en cel endroit, et élevée sur le corps cellulaire même. D'autre part, M. Macallum à montré (fait confirmé par Macdonald) que le potassium est abondant le long de l'axone el apparemment à sa surface exté- rieure, tandis qu'on n'en trouve que des traces dans la cellule nerveuse. La condensation excessive ou l'adsorption des sels de polassium dans ou le long de l'axone el leur quasi-absence dans la cellule nerveuse ne sont susceptibles que d'une explication sur la base du principe de Gibbs- LOUIS BRUNET — LE CONGRES DE SHEFFIELD Thomson élevée sur la cellule nerveuse et faible dans l’axone. On voit aussitôt les conclusions qui en résultent. On sait qu'un déplacement ou une perturbation électrique, même minime, se produisant en un point de la surface d'une goutte, abaisse la tension superficielle en ce point. Nous ignorons ce qu'est au fond l'influx nerveux, mais nous savons qu'il est accompagné, sinon constitué par une variation du potentiel électrique, qui se transmet aussi rapi- dement que lui. Quand cette variation passe le long d'une axone, par ses lerminaisons synaptiques, à une autre cellule, la tension superficielle de cette dernière doit être abaissée d’une quantité corres- pondant à la grandeur de la perturbation électrique produite; en conséquence, un léger déplacement des ions potassium se produira en chaque point le long de l’axone. Ce déplacement des ions doit provoquer un changement du potentiel électrique et celui-ci rend compte du courant d'action. — Quoi qu'il advienne des vues de M. Macallum, l'im- portance de la tension superficielle pour l'explica- tion des phénomènes vitaux n'en reste pas moins acquise; des recherches plus avancées sur la microchimie de la cellule permettront de se faire une idée plus exacte du mécanisme de ces phéno- mènes. Une des plus importantes questions présentées devant la Section de Physiologie fut celle de /4 biochimie de la respiration, introduite par M. F.F. Blackman et discutée dans une réunion commune avec les Sections de Chimie et de Botanique. Dans cette question, M. Blackman distingue trois points : 4° la nature de la réaction chimique qui constitue la respiration. C’est une oxydation qui, dans le cas type du glucose, fournit comme produits ultimes CO* et H°0; mais les stades inter- médiaires sont difficiles à suivre. La zymase de Buchner produit de l'alcool et CO* aux dépens du glucose, mais l'alcool ne peut être oxydé par les plantes; avant que la rupture n'ait atteint le stade alcool, il doit donc se produire une autre sub- stance (acide lactique ou dioxyacétone) qui est oxydée. Les oxydases jouent sans doute le prin- cipal rôle dans cette oxydation; > le degré de conformité de la réaction cellulaire aux lois de la Physico-Chimie. De l'étude de l'influence de difré- c'est que la tension superficielle est rents facteurs sur la respiration, l’auteur arrive à la conclusion que la respiration normale consiste en deux processus : une faible respiration prolo- plasmique, qui ne peut être supprimée sans entrainer la mort, et une large respiration flot- tante, qui dépend de la fourniture de combustible et peut être réduile ou abolie par l’inanition; 3° l'influence, sur les progrès de la réaction, du milieu particulier (protoplasma) dans lequel elle se produit. La nature colloïdale du contenu cellu- laire et les propriétés des parois protoplasmiques entrent ici en jeu, mais cette question est encore peu étudiée. Dans la discussion qui suivit, M. H. M. Vernon signala le fait suivant : Si l'on fait agir de la zymase sur le glucose pendant un temps très court, puis qu'on fasse bouillir la solution et qu'on ajoute de l'oxydase et H°0”, il y a une oxydation presque complète en CO et H‘O; les oxydases pourraient donc agir dans la cellule vivante, si les peroxydes organiques sont susceptibles de remplacer H°0°. Les expériences de l’auteur sur la respiration du rein survivant montrent la présence d’oxydases. Parmi les travaux présentés à la Section, nous signerons celui du D' L. Hill sur /a prévention de la maladie des caissons. Les embolies gazeuses provoquées par la décompression trop rapide des ouvriers travaillant dans l'air comprimé sont con- stituées par de l'azote, l'oxygène étant retenu par les tissus. M. Hill recommande, pendant la décom- pression, des inhalations d'oxygène, qui, en abais- sant la pression partielle de l'azote dans les poumons, facilitent son enlèvement du sang, et, d'autre part, un exercice musculaire pour aug- menter la circulation et entrainer ainsi plus rapi- dement l'azote des parties à circulation lente. XI. — SECTION D'ANTHROPOLOGIE. Nous nous bornerons à rappeler en passant cette Section, dont le programme comprenait surtout des travaux archéologiques, présentés pour la plu- part par des membres des Écoles anglaises de Rome, d'Athènes et d'Égypte, et qui sortent plutôt du cadre de cette Revue. Louis Brunet. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 5 BIBLIOGRAPHIE ANALYS 1° Sciences mathématiques Salvert (Vicomte de), Docteur ès Sciences, Proles- seur à la Faculté libre des Sciences de Lille. — Mémoire sur l'attraction du Parallélipipède ellip- soïdal (1° fase.). — 1 vol. in-8° de X11-340 pages, avec ligures. (Prix :7 fr.) Gauthier- Villars, éditeur, Paris. Un parallélipipède ellipsoïdal, volume limité par trois couples de quadriques d’un système homofocal, est rempli d’une matière homogène qui attire un élé- ment matériel extérieur suivant la loi newtonienne. M. de Salvert se propose de calculer l’action totale exercée sur cet élément. i Les projections de la force en question suivant les axes du système sont exprimées par des intégrales triples qu'avec beaucoup d'ingéniosité l’auteur réduit à des intégrales simples. Les résultats s’obtiennent même en termes finis très élégamment dans le cas où l'élément estsitué au centre commun des quadriques; il en est de même, quand l'élément est dans un plan de symétrie, pour la composante normale à ce plan, et, quand il est sur un axe de symétrie. pour les com- posantes normales à cet axe. C'est une nouvelle application des fonctions ellipti- ques, poussée jusqu'on l'exige la mise en nombres; elle est du genre des questions bien limitées qu'affec- tionnait Halphen. Mais M. de Salvert emploie exclusi- vement les notations de Jacobi chères à Hermite. Ce serait un travail profitable pour un candidat au « diplôme d’études supérieures » de reprendre le même sujet en partant des fonctions de Weierstras. Le volume se termine par quelques notes sur la fonction elliptique de troisième espèce. A. BOULANGER, Répétileur à l'Ecole Polytechnique. Marchis (L.), Professeur d'Aviation à la Faculté des Sciences de Paris. — Cours d’Aéronautique. lre- mière partie: Statique et Dynamique des ballons, Résistance de l'air. — 1 vol. in-8° lithographié de 457 pages, avec 121 figures. (Prix : 47 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. Nous avons rendu compte dans la Revue! de l'ou- vrage du même auteur : /e Navire aérien (lecons faites en 1908-09 à la Faculté des Sciences de Bordeaux). Nommé professeur d'aviation à la Sorbonne (fondation Zaharoff), M. Marchis a repris avec plus de détails son cours antérieur : il publie aujourd'hui les dix-huit premières lecons professées dans sa nouvelle chaire. Après une introduction dans laquelle il définit le but de son enseignement, l’auteur traite d'abord du nivel- lement barométrique, donne les formules de Halley et de Laplace, et expose les méthodes employées pour le calcul des hauteurs atteintes par les ballons-sondes. Puis il étudie la force ascensionnelle des gaz, ses variations avec la pression et avec la température. M. Marchis consacre ensuite cinq leçons à la statique du ballon libre : zone d'équilibre du ballon plein, for- mules de délestage, lois des mouvements du ballon flasque, influence des températures de l'air et.du gaz, propriétés des ballons à ballonnet intérieur et des ballons à manche d’appendice courte, telles sont les principales questions développées dans cette partie de l'ouvrage. Nous nous permettrons de signaler un oubli: les lois de la statique du ballon libre, aussi bien que l'invention du ballonnet, sont dues, comme chacun 1 24° année, n° 9, 45 mai 1910. ET INDEX sail, au général Meusnier, qui, dès 1783, les exposail devant l'Académie des Sciences dans un Mémoire rest célèbre; des phrases entières de ce Mémoire se retrouvent dans l'œuvre que nous analysons; or, le nom de Meusnier n'y figure pas. Pourtant, M. Marchis aim à citer ses auteurs, et, d’ailleurs, dans ses précédents travaux sur l'Aéronautique, il avait rendu pleine jus- tice au premier fondateur de cette science : il y a don là, nous le répétons, un simple oubli. Viennent ensuite trois lecons d’un puissant intérêt sur la résistance de l'air, dans lesquelies sont relatées avec tous les détails les expériences les plus récentes de MM. Rateau, Riabouchinsky, Eiffel, sur les surfaces planes ou courbes soumises à un courant d'air; les recherches si remarquables de ces expérimentateurs sur la position du centre de poussée, sur la répartition des pressions aux différents points de la surface, etc. ; enfin les résultats obtenus par le colonel Renard sur la résistance des carènes. Les lois fondamentales de l’Aérodynamique ainsi exposées conduisent naturellement l'auteur à entre- prendre la théorie de l’aéroplane, à étudier son mou- vement de régime, ses diverses « allures », son fonc- tionnement comme planeur. La dynamique du ballon libre fait l'objet des deux leçons suivantes : l’auteur calcule la vitesse verticale que peut prendre un ballon sous l'influence d’une rup- ture d'équilibre déterminée, vitesse différente suivant que le ballon est plein ou qu'il est flasque; la théorie du « ballon-loch » s'y trouve également exposée. Vient ensuite l'étude de la vitesse horizontale des navires aériens à moteurs, résultante de leur vitesse propre et de la vitesse du vent; la théorie de « l'angle abordable »; l'exposé des diverses méthodes, directes ou indirectes, permettant de déterminer la vitesse propre. Enfin, l'ouvrage se termine par trois lecons sur la dynamique des ballons dirigeables. Après avoir défini la « vitesse critique », telle que l’entendait le colonel Renard, et indiqué les résultats expérimentaux obtenus par ce savant officier, l’auteur expose la théorie géné- rale des mouvements du dirigeable due au capitaine Crocco et de laquelle se déduisent les conditions de stabilité, l'influence des plans d’empennage, l'action des divers gouvernails, etc. En somme, M. Marchis, s'inspirant constamment des expériences et des théories nouvelles, enregistrant au jour le jour les résultats acquis, donne à son enseigne- ment une vie particulière; chacun de ses ouvrages est l'image fidèle de l’état actuel de la science aéronau- tique et marque une étape dans ses progrès si rapides. Commandant Voyer. 2° Sciences physiques Turpain (Albert), Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers. — Téléphonie. — 1 vol. in-8. (Prix : 5 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 10. La téléphonie est devenue une des inventions les plus indispensables aux besoins actuels et aux déve- loppements futurs de l’activité humaine : son usage s'est implanté chez nous au même titre que la pratique des habitudes quotidiennes de la vie. L'auteur s’est proposé d'exposer les stades successifs de son déve- loppement, tant dans la disposition des appareils que dans l'organisation des services publics, et de faire ressortir les idées générales qui ont dirigé les ache- minements successifs. 956 Il renonce à la description de tous les appareils employés, qui sont nombreux et peu différents, par de d'une concurrence active entre les constructeurs : la téléphonie repose sur quelques principes expéri- mentaux quil suffit d'étudier; après quoi l’auteur retiendra les modèles d'appareils-types pour montrer dans chacun d'eux l'application de ces principes à la pratique. La téléphonie remonte aux anciennes expériences de Page, de Bourseuil, de Reiss, de Gray et, enfin, de Bell, mais elle ne de vient pratiquement intéressante qu'à partir de l'application du microphone de Hugues, en 1877. Et nous sommes toujours à peu près au même point, car les microphones actuels Berthon, Bailleux, Solid-Back, etc., ne sont dans la pratique que d'ingé- nieux perfectionnements d'un même principe expéri- mental. Peut-on expliquer d'une façon satisfaisante tous ces phénomènes? Bien difficilement : l’auteur passe alors en reyue certaines expériences curieuses qui déjouent tout raisonnement théoIqUE; Se fende-t-on sur les vibrations des plaques? On démontre que l'on peut téléphoner sans leur secours (Laborde). Essaie-t-on de raisonner sur les aimants et les variations de champ magnétique? On démontre que deux électro- mètres à mercure de Lippmann, connectés d'une cer- laine facon, constiluent un système téléphonique fidèle. Que conclure ? Que nous ne savons pas grand chose ; pratiquement, la téléphonie est un cas particulier du problème général de la transmission de l'énergie à distance. Cetle transmission devra donc se faire sous tension élevée; d'où le perfectionnement de la bobine d'induction, substituant sur la ligne, au courant de pile, des courants induits à potentiel plus élevé, et permettant par là même le franchissement de plus grandes distances. Nous connaissons maintenant les éléments consti- tutifs fondamentaux d’une installation : pile, micro- phone, récepteur, bobine d’induction, ligne. Ce matériel simple est encore utilisé dans la téléphonie militaire, qui fait l’objet d'un chapitre spécial. Mais les relations téléphoniques primitivement éta- blies entre postes privés sont devenues publiques, et voici que se pose le problème général de la mise en communication d'un abonné avec un quelconque des autres abonnés d'un réseau. D'où création d’un poste dit central. Celui-ci, à l'origine simple commutateur, a vu se compliquer son organisation: il à fallu, par des dispositifs spéciaux, faciliter et abréger les commuta- tions, — jacks knives, — mont: ges divers, — imonocorde, dic orde, Standard, ete. Ce dernier (Standard), qui est universellement adopté maintenant pour les petites installations (500 lignes au maximum), est l’objet d'une étude approfondie dans ses divers dispositifs d'appel et de commutation. Mais bientôt, avec l'accroissement du nombre des abonnés, il a fallu renoncer à ce dispositif, qui devient d'un maniement trop long et trop incommode au- dessus de 600 abonnés, et recourir à des appareils dits multiples, plus compliqués, plus coûteux (quelquefois plus d’un million de francs), mais d’ un maniement très simple et très rapide. L'auteur s'est contenté de décrire les dispositifs caractéristiques de ces meubles sans en aborder l'étude complète qui sortirait des limites de l'ouvrage : multi- plication des lignes d'abonnés par les jacks généraux, division du travail des opérateurs par (de jac ‘ks indivi- duels, abréviation des opérations par les systèmes de rupture d'appel, et dispositifs divers de test suppri- mant toute perte de temps. Quelques données sur les grands multiples de Gutenberg à Paris, de Bor- deaux, etc., fixent les idées sur l'importance de ces appareils. Mais le poste d'abonné est resté toujours le même, el nécessite, à cause des piles qu'il contient, un entre- tien onéreux. Réunissons donc au central le maximum BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX d'appareils pour ne laisser chez l'abonné que le strict minimum, ne nécessitant aucune visite spéciale; le poste particulier sera plus simple, mais le central devient de plus en plus ORAe Nous arrivons au système dit à batterie centrale, dans lequel l’abonné n'a plus qu'une manœuvre à faire : décrocher son ré- cepteur, pour appeler le central et se mettre en ligne. Le versement des redevances même LES être auto- matiquement réalisé par mécanisme, et il existe de véritables distributeurs automatiques de conversation, à l'instar des appareils variés qui nous donnent sur les voies publiques, pour une pièce de monnaie, un billet, un timbre ou une tablette de chocolat. Voici donc réunis ensemble les abonnés d'une ville; mais cela ne suffit bientôt plus : les villes elles-mêmes doivent être reliées entre elles;les réseaux interurbains sont créés. Dans chaque central, ils deviennent l’objet d'une organisation spéciale, pour des raisons à la fois techniques et administratives, à l'aide de commutateurs distincts, dits tables interurbaines. Tel est l’état actuel de la téléphonie : jetons main- tenant un coup d'œil sur l'avenir. L'énorme organe constitué par un multiple, qui emprunte l'intelligence et l'activité d’un personnel nombreux, n'est-il pas, comme toute machine, susceptible de perfectionne- ments? Ne peut-il pas être soumis à la grande loi de la suppression de la main-d'œuvre au profit de la méc anique ? La réponse est affirmative, et le multiple automa- tique est sinon courant, au moins éludié et réalisé. Il existe des systèmes grâce auxquels un abonué quel- conque peut en appeler un autre et se meltre en com- municalion avec lui uniquement par le jeu de méca- nismes appropriés, sans passer par l'intermédiaire de la téléphonisle, si souvent accusée et critiquée. Une récente exposilion à Paris de ces principaux systèmes a montré que, du moins dans certaines limites, la réa- lisation était satisfaisante : l’auteur décrit le système Strowger, et le Lorimer qui est actuellement, en France, en expérience à Lyon sur un réseau de 200 abonnés Il existe aussi des applications « à côté » de la télé- phonie :les postes avertisseurs d'incendie que tous ont vus sur les voies publiques, le théâtrophone qui permet d'entendre à domicile les représentations théâtrales, le journal téléphoné lui-même, dernière et inattendue application, sont décrits dans leur fonctionnement. Enfin, il ne faut pas oublier que, dans la transmis- sion de la parole, si l'appareil est beaucoup, la ligne téléphonique est aussi importante; aussi M. Turpain étudie-t-il, en terminant, les dispositions qui rendent cette ligne satisfaisante en la mettant à l'abri des causes perturbatrices (induction- -capacité) et en la protégeant contre les défauts et accidents divers (isolement, cäbles téléphoniques). M. Turpain a su dégager l'importance capitale de la téléphonie. Certaines professions en ont fait leur rai- son d'être, toutes l'utilisent et y trouvent avantage: simplification, rapidité, intérêt, car, en supprimant les distances d'une façon plus souple et plus personnelle que la télégraphie, elle agrandit le champ de l’activité individuelle et augmente le rendement des efforts de chacun. Son organisation est donc devenue pratique- ment un des rouages essentiels du mécanisme vital des grandes nations. MarcEL VALLÉE, Ancien Élève de l' cole Polytechnique, Ingénieur à la Société Industrielle des Téléphones. Duhem (Pierre), Correspondant de l'Institut, Profes- seur de Physique théorique à l Univer Sir de Bor- deaux. — Thermodynamique et Chimie. Leçons ÉLÉMENTAIRES. Seconde édition. — 1 vol. gr. iy-8° de 579 pages avec 173 figures. (Prix : 16 fr.) Hermann, éditeur. Paris, 4910. Pendant la majeure partie du xix° siècle, la Chimie, tout en progressant d'une manière remarquable, est restée une science un peu à part, régie par des principes propres et des méthodes spéciales. Elle n'a été que peu BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX influencée par les causes qui ont faitsubir à la Physique, pendant cette période, une évolution si profonde, La découverte de la dissociation par Sainte-Claire Deville a marqué pour la Chimie l'entrée dans une voie nouvelle. La notion de réversibilité pour les réactions chimiques a révélé une remarquable analogie entre les lois qui régissent les réactions réversibles et celles auxquelles obéissent les transformations phy- siques du genre vaporisation. Elle a commencé à amener, entre la Physique et la Chimie, un rapproche- ment qui n'a cessé de s'accentuer depuis lors. En pénétrant dans un domaine auquel elle était d'abord restée étrangère, la Thermodynamique a fait subir à la Chimie une transformation profonde. Elle à fourni aux chimistes une série de règles simplés, susceptibles d'ètre formulées avec rigueur et de les guider d'une manière sûre à travers la confusion résultant de l'accumulation des faits chimiques connus. M. Duhem nous offre aujourd'hui une seconde édition de ses Leçons de Thermodynamique et Chimie, dont la première édition remonte à l'année 1902. Depuis cette époque, les choses ont progressé, et cette nouvelle édition nous permet d'apprécier le développe- ment pris par les recherches physico-chimiques pendant cet espace de huit années. Le plan général de l'ouvrage est resté le même. Après les premiers chapitres destinés à faire comprendre comment la Thermodynamique peut intervenir dans l'étude des transformations chimiques, une bonne partie du volume continue à être consacrée au développement de la « Règle des Phases » de Gibbs, dont l'importance a été si vile comprise et qui est devenue un guide si précieux pour interpréter nombre de phénomènes obscurs et pour débrouiller ce qui, avant elle, n’était que confusion. Mais de nombreuses additions ont été faites aux divers chapitres. Citons, en particulier, celles qui se rapportent à la dégradation de l'énergie, à la liquéfaction des mélanges gazeux, aux travaux de Tammann sur la cristallisation, les changements d’élat, les équilibres entre formes allo- tropiques, etc. Enfin, l'analyse des découvertes les plus récentes a donné naissance à d'importants développe- ments sur les cristaux mixtes, alliages, systèmes eutectiques, faux équilibres apparents ou réels, etc. L'intervention de la Thermodynamique dans une science quelconque entraine ordinairement l'apparition de calculs longs et complexes, qui rebutent nombre de lecteurs non spécialisés avec eux. M. Duhem a eu le talent de simplifier autant que possible les développe- ments mathématiques, sans cependant riensacrifier de la rigueur. Il a su exposer méthodiquement ce vaste ensemble de faits et de théories physico-chimiques avec une simplicité et une clarté qui exeluent toute aridité et qui rendent aussi attrayante que facile la lecture de cet ouvrage. E. COLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Mazé (P.), Chef de Service à l'Institut Pasteur. — Technique Fromagère. — 4 vo/. in-8° de 85 pages avec planches. Paris, 1910. Il n’est plus permis aujourd'hui à un fabricant, sous peine de déchéance industrielle, de ne pas utiliser les connaissances que lui révèlent chaque jour les savants. Si l'industrie fromagère est une de celles qui sont restées le plus longlemps cantonnées dans des habi- tudes routinières, c'est que la Science, avant Duclaux, ne s'était guère occupée d'elle. Je n'ai pas la prétention de dire que l'on ne savait pas faire de bon fromage avant que la Science ait déterminé la nature et les fonctions des microbes qui provoquent sa maturation; nous voyons, au contraire, dans toutes ces industries primitives, en boulangerie, en vinification, en bras- serie, comme en laiterie, l'homme savoir profiter des observations qu'une longue génération d'industriels ont faites avant lui, et l’on est tout étonné de voir, quand on analyse scientifiquement ces opérations pratiques, qu'elles sont conformes à celles que l'étude 957 bactériologique aurait 616 amenée à prescrire, La Science n'a-t-elle donc pour rôle que de confirmer ce qui s'est fait avant elle? Non; elle vient apporter ses procédés de contrôle, réglementer des opérations qui sont quelquefois indécises, et surtout expliquer et prévenir les accidents que l'industriel est trop sou vent obligé de mettre sur le compte de la fatalité. M. Mazé, chef de service à l'{nstitut Pasteur, ingt nieur agronome, s'estattaché depuis de longues années à l'étude de la technique fromagère, et les résullats qu'il a obtenus ont été successivement publiés dans les Aunales de l'Institut Pasteur. M les réunit aujourd'hui dans une brochure fort intéressante. M. Maé appelle l'attention sur le rôle prépondérant, en fromagerie, des ferments lactiques, qui, par l'aci- dité qu'ils produisent aux dépens du laclose, assurent la formation et l'égouttage du caillé, déterminent en outre la production des substances aromatiques et Ja liquéfaction de la caséine, qu'ils ne doivent pas pous- ser jusqu'à la soluhilisation complète; M. Mazé a soin également de fixer les fonctions des moisissures super- ficielles et des ferraents du rouge. La nécessité de régler les fermentations, dont l'en- semble détermine la valeur des fromages, amène l’auteur à conseiller la pasteurisation du lait et l'ense- mencement des pâtes par des ferments purs. C'est d’ailleurs à cette pratique, qui tend à se généraliser, que M. Mazé semble devoir un jour altacher son nom, et l'industrie fromagère lui sera redevable d'un pro- cédé qui lui permet de régulariser sa fabrication et d'éviter des accidents qui se traduisent par des pertes pécuniaires souvent sensibles, et quelquefois par la “perte de la marque que nos fromagers ont tant de L. LiNDET, peine à acquérir. Professeur à l'Institut national agronomique. 3° Sciences naturelles Bonnier (Gaston), Professeur de Botanique à la Sor- bonne, Membre de l Académie des Sciences. — Les noms des fleurs trouvés par la méthode simple sans aucune notion de Botanique. ((uvrage indi- quant les propriétés médicinales des plantes, leurs usages agricoles et industriels, les fleurs recherchées par les abeilles, les noms vulgaires, ete.). — 1 vol. in-16° de 332 pages avec 372 photographies en cou- leurs représentant les plantes au tiers de leur gran- deur naturelle et 2.715 liqures en noir par B. HÉRINCQ et J. Poisor. (Prix cartonne : 5 fr. 50.) Librairie générale de l'Enseignement, 4, rue Dante, Paris, 1910. Ce volume renferme toutes les plantes répandues en France, en Belgique, dans les plaines de Suisse et, en général, tous les végétaux communs en Europe. Cyon (Dr E. von). — Die Gefässdrüsen als regulato- rische Schutzorgane des Zentralnervensystems. Mit einer Vorrede: Herz, Ohrlabyrinth und Hypo- physe, und einem Verzeichnis sämtlicher Werke und Schrilten des Verfassers. (LES GLANDES VASeu- LAIRES, ORGANES RÉGULATEURS DE PROTECTION DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL. A vec une préface : Cœur, labyrinthe de l'oreille et hypophyse, et une liste de tous les travaux et écrits de l'auteur.) — 1 vol. in-8° de xx-358 pages, avec 117 figures dans le texte et 8 planches. Julius Springer, éditeur, Berlin, 1910. Depuis longtemps, les auteurs réunissaient le corps thyroïde, le thymus, les capsules surrénales, l'hypo- physe, ete., sous la dénomination commune de glandes vasculaires. On à dit plaisamment que la principale particularité commune à ces organes était l'insufli- sance de nos connaissances à leur égard et l'ignorance complète dans laquelle nous nous trouvions encore il y à quelques années en ce qui concerne leur rèle phy- siologique. Aujourd'hui, la situation a changé complètement. Il est établi, par de nombreuses expériences pratiquées 958 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX in antina vili, et par des observations cliniques, non moins probantes, que le corps thyroïde, les capsules surrénales, etc., sont des organes indispensables, qui élaborent des produits spéciaux, des Lormones suivant l'expression de Starling, qu'ils versent dans le sang par sécrétion interne. Ces hormones exercent leur action sur différents organes éloignés, notamment sur les centres nerveux du cœur et des vaisseaux. C’est le cas pour l’iodothyrine fabriquée dans le corps thy- roïde et pour l’adrenaline ües capsules surrénales, qui agissent puissamment sur le fonctionnement du cœur et des vaisseaux. Un illustre vétéran de la Physiologie, E. de Cyon, réunit aujourd'hui en volume les études qu'il poursuit depuis 4897 sur ces difficiles et intéressants problèmes. Les résultats auxquels il est arrivé sont de nature à modilier profondément les conceptions classiques. La place nous manque pour analyser ici chacune des monographies dont se compose son nouveau livre. Nous nous bornons, à titre d'exemple, à donner en quelques mots une idée de la théorie de la fonction thyroïdienne, que de Cyon à développée et étayée par de nombreuses expériences. Les composés iodés sont de violents poisons du système nerveux régulateur du cœur. La thyroïde a pour fonction de transformer ces composés en une combinaison organique, l’’odothyrine, qui agit, au con- traire, comme un excitant sur le système nerveux régulateur du cœur et en favorise le fonctionnement. Les composés iodés et l’iodothyrine sont d'ailleurs des antagonistes physiologiques. À l'inverse des iodures, l'iodothyrine exerce une action spécilique des plus salutaires sur l'appareil modérateur du cœur, qu'elle maintient dans un état de {onus physiologique. Elle est également capable de rétablir Fexcitabilité des termi- naisons intracardiaques du vague que l’atropine a momentanément paralysées. Enfin, c'est le cœur lui- même qui règle, par l'intermédiaire de ses nerfs cen- tripètes et des nerfs laryngés, la production d'iodothy- rine dans la thyroïde et qui l’accommode à chaque instant par voie réflexe à ses propres besoins. Il y a là l'exemple d’une admirable autorégulation réalisée à la fois par action humorale et par action nerveuse. Le corps thyroïde remplit encore une autre fonction intimement liée à la première : c’est un régulateur mécanique de la circulation cérébrale. Chaque fois que le cerveau est menacé de congestion, les vaisseaux du corps thyroïde, dont le calibre est énorme et des plus variables, se dilatent et détournent ainsi, par une voie dérivée faisant fonction de court-cireuit, le sang qui affluait en trop grande abondance par les carotides. L'auteur établit par des expériences ingénieuses le mécanisme nerveux de cette régulation. Le rôle de l'hypophyse, de la glande pinéale et des capsules surrénales dans la régulation de la pression artérielle et du travail du cœur et des vaisseaux, est analysé avec la même rigueur expérimentale, ce qui conduit l’auteur à formuler une théorie complète de la physiologie de ces organes énigmatiques. Ici aussi les preuves expérimentales sont constamment d'accord avec les déductions tirées des observations cliniques. Ces travaux ont excité le plus vif intérèt parmi les physiologistes : ils ont donné lieu à des polémiques passionnées; de Cyon y déploie une verve toute juvé- nile, dans laquelle on sent parfois percer la griffe de l'ancien rédacteur du Gaulois. LÉON FREDERICO, Professeur de Physiologie à l'Université de Liége. 4 Sciences médicales Bousquet (L.) et Roger (H.), Chefs de Clinique de la Faculté.de Médecine de Montpellier. — Les Métaux colloïdaux électriques en Thérapeutique. (Euvre médico-chirurgical. À monographie de 31 pages. Prix: 1 fr. 25.) Masson et Cie, éditeurs, Paris, 4910. Cette petite monographie est consacrée à l'exposé clair ei succinet de l’état actuel de la colloïdothérapie. La première partie résume les principales connais- sances que la physique, la chimie, l'expérimentation animale et la clinique mous ont acquises relativement aux métaux colloïdaux. Les auteurs passent plus par- ticulièrement en revue les diverses maladies (infec- tions générales, infections locales, maladies de la nutrition) dans lesquelles ces agents ont été expéri- mentés et les résultats thérapeutiques obtenus. Faisant état des faits ainsi collationnés, les auteurs en déduisent l’action sur les divers éléments morbides (fièvre, échanges nutritifs, symptômes nerveux), sur les lésions locales, sur l’évolution de la maladie, et sont ainsi à même d'en préciser les indications. L'ouvrage se termine par l'exposé des modes d'admi- nistration, et une tentative d'explication du mécanisme probable de l’action pharmacodynamique. Dr ALFRED MAnRTINET. 5° Sciences diverses Direction générale de lInstruction primaire de la République orientale de l’Uruguay. — Catalogue du Matériel scolaire présenté à l'Exposition annexe au Ill Congrès interna- tional d'Hygiène scolaire (Paris, 2-7 août AM0). — 1 broch. in-8° de 84 pages. Imprenta Artistica Dor- naleche, Montevideo, 14910. Pérez (Abel-J.), Znspecteur national de l'Instruction primare de la République de l'Uruguay. — Memoria correspondiente al ano 1908 presentada à la Direccion general de Instruccion primaria. — 2 vol. gr. in-8° de 474 et 373 pages. Talleres A. Bar- reiro y Ramos, Montevideo, 1910. A l'Exposition annexée au Congrès d'Hygiène scolaire qui s’est tenu cette année à Paris, la Direction géné- rale de l’Instruction primaire de la République de l’Uruguay avait tenu à participer d’une façon impor- tante. Elle exposait des plans et vues photographiques d'édifices scolaires, du mobilier et du matériel d'ensei- gnement, du matériel d'hygiène et de premier secours en cas d'accident, enfin toute une série de publica- tions des autorités scolaires supérieures et de livres pour les maîtres et les élèves. Cette exposition a permis de se rendre compte de l'état de développement avancé de l'instruction pri- maire publique dans cette république de l'Amérique latine. L'enseignement y est régi par une loi de 1877, qui a déclaré l'instruction primaire obligatoire et gratuite pour tous les enfants âgés de six à quatorze ans. Depuis sa promulgation, des efforts considérables ont élé faits pour en assurer l'exécution, par la fonda- tion des édifices scolaires nécessaires, surtout dans les campagnes, et la formation d'un corps enseignant à la hauteur de sa tâche. On se rendra compte des résultats obtenus par les chiffres suivants : en 1877, il y avait dans le pays 208 écoles publiques, avec 17.033 élèves ; il y en avait l’année dernière 790, avec 76.042 élèves. En ajoutant à ce chiffre celui des enfants fré- quentant les écoles privées, on arrive à un total de 95.070 élèves, contre 92.901 enfants ne fréquentant aucune école. La proportion des analphabets (42,4 °/,) nous paraitra encore très élevée; c’est cependant la plus faible de tous les Elats de l'Amérique du Sud, et elle sera probablement tombée à 35 °/, à la fin de cette année, par suite de la création de 210 nouvelles écoles rurales. L'Uruguay peut donc être fier de sa situation privi- légiée. Il la doit, entre autres, aux hommes qui se sont succédé à l'Inspection nationale de l’enseignement primaire, et en dernier lieu à M. Abel-J. Pérez, dont le Rapport pour 1908, qui vient de paraître, renferme les renseignements les plus intéressants et les plus encourageants. Louis BRUNET. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 959 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 7 Novembre 1910. 10 Scrences marTnÉmaATIQUES. — M. A. Demoulin pré- sente ses recherches sur certains couples de systèmes triple-orthogonaux. — M. W. Stekloff indique un perfectionnement à la méthode qu'il a donnée pour trouver le développement d'une fonction arbitraire en séries de fonctions fondamentales. — M. A. Petot arrive à la conclusion que le désaxage ne présente qu'un intérêt très restreint, sinon peut-être pour les moteurs fixes à marche lente, du moins pour les moteurs d'automobiles à grande vitesse de rotation. _— M. Bassot signale qu'on a retrouvé la comète de Halley, à l'Observatoire de Nice, les 2 et 3 novembre, un peu avant le lever du Soleil. — M. Ch. Nordmann a déterminé par la photométrie hétérochrome les parallaxes de quelques étoiles du type Algol. Il à trouvé que la distance de à Balance à la Terre est plus de 22 millions de fois supérieure à celle du Soleil, et correspond à environ 355 années de lumière et à une parallaxe égale à 0",009. — MM. L. Favé et L. Driencourt ont observé, au moyen d'un maré- graphe susceptible de fonctionner au large, les marées dans la Manche et la mer du Nord. Par 52°29' N. et O47! E., on à noté une marée d'une amplitude de 60 centimètres; l'inégalité diurne y est plus prononcée que sur les côtes voisines d'Angleterre et de Hollande. 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. Eug. Bloch a reproduit le phénomène signalé par M. Gouy dans la décharge électrique et confirme l'existence d’une position pri- vilégiée et d’un champ magnétique optimum, — M. J. de Kowalski a observé que les solutions alcooliques de différents corps organiques, solidifiées au-dessous de — 135, présentent, sous l’action d'une lumière instantanée, des phénomènes de phosphorescence instantanée, caractérisée par un spectre presque iden- tique au spectre de fluorescence, et de phosphores- cence progressive, caractérisée par des bandes fines, plus durables, dont l'intensité augmente avec la durée d'exposition. — MM. A. Guntz et Galliot ont préparé le strontium cristallisé en chauffant Al avec de la strontiane anhydre dans un tube en acier doux. — M. E. Berger, en nilrant dans certaines conditions l'anhydride acétique, a obtenu le tétranitrométhane © (Az0°)}' avec un rendement de 50 °/,; D— 1,620 à 22°; Eb. 124°-125° sous 750 millimètres. La chaleur de for- mation à partir des éléments n’est que de 4,7 cal. — M. G. Malfitano et Me A. N. Moschkoff sont par- venus à déminéraliser complètement l'amidon en tirant parti de sa coagulation par la congélation des empois. L'amidon exempt d'électrolytes est insoluble dans l'eau froide, se divise par chauffage, donne des liqueurs limpides qui se prennent en une gelée deve- nant opaque. — M. E. Kayser à constaté que la fer- mentation alcoolique est plus complète en présence de nitrate de Mn, mais qu'il semble exister pour chaque race de levure une dose oplima de sel. 30 ScrENGES NATURELLES. — M. Marage à reconnu que les bourdonnements d'oreille ont des origines très dif- férentes ; suivant celles-ci, on peut les faire disparaître au moyen de sons plus graves, de faible intensité, re- produisant les vibrations fondamentales des voyelles (sifflements), ou par les courants de haute fréquence (battements), ou par le massage vibratoire. — M. H. Labbé a soumis l'extrait sec de matière fécale à des épuisements successifs par l'éther, la benzine, Na*CO* et l'acide acétique cristallisable ; la proportion d’Az dissous croît régulièrement du premier au dernier sol- vant. — M. S. Lalou à constaté que les injections répélées de sécrétine permettent d'obtenir pendant de longues heures une sécrétion régulière de suc pancréa- tique. Le suc ainsi obtenu ne conserve pas une com- position rigoureusement constante; son alcalinité etses activités diastasiques (surtout lipasique) diminuent. — M. R. Robinson à observé chez les variqueux une sclé- rose souvent prononcée des veines affluentes de la crosse, provenant de l'hypertension sanguine consécu- tive à l'augmentation de la pression intra-abdominale. — M. P. Chaussé montre que l'ingestion de produits tuberculeux chez le chien normal ne produit pas de lésions macroscopiquement visibles dans le délai de six mois; elle donne, par contre, une tuberculose mé- sentérique occulte, facile à mettre en évidence par l'inoculation au cobaye. — M. Fabre-Domergue à reconnu que, si l'huitre, élevée dans une eau riche en organismes microscopiques vivants (diatomées, infu- soires, etc.), les absorbe avec prédilection, elle n'en est pas moins capable, en milieu impur, d'ingérer à dose massive des détritus d’origine stercorale et par conséquent susceptibles de contenir les £ermes infec- tieux de maladies intestinales. — M. P. Marchal pour- suit ses études sur la biologie des Chermes. — M. A. Quidor montre que, par leurs premiers stades para- sites, les Philichthydæ se rangent dans les Dicheles- tidæ, et par leurs formes libres dans les Lernæidæ auprès des genres Lernæa et Penella ; ils doivent donc former une famille intermédiaire entre les précédentes. — M. A. Muntz a constaté que la graine et la terre où elle est semée se disputent l'eau pour arriver à un équilibre réglé par les affinités spécifiques des deux antagonistes, et ce n’est que quand l’eau se trouve en quantité telle que l’affinité de la terre soit satisfaite que le grain peut arriver à germer. M. O. Mengel a étudié la stratigraphie et la tectonique de l'ilot pri- maire de La Guardia, entre le Sègre et la Noguera Pallaresa. 11 le considère comme constitué par une nappe ondulée, entraînée vers le nord par une poussée venue du sud sur un Trias morcelé par une faille transversale. — M. H. Mansuy a exploré la série sédi- mentaire aux environs de Luang-Prabang ; elle s'étend du Permien supérieur à un horizon liasique qui peut être rapporté au Charmouthien d'Europe. — M. M. Le- riche a déterminé quelques restes de Poissons fossiles provenant du Congo belge (région du Lualaba). L'un est un Peltopleurus, qui caractérise le Trias supérieur ; les autres sont des Pholidophorus et Leprdotus. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 3 Novembre 1910. M. le Président annonce le décès de M. E. Lance- reaux, membre de l’Académie. Séauce du 8 Novembre 1910. MM. Loeffler et Retzius sont élus Associés étran- gers de l'Académie. a © M. Albert Robin montre que la mortalité par tuber- culose en France n'est pas de 150.000 décès par an, comme on l'a prétendu, mais (pour 1908) de 88.412, soit 22,5 décès sur 10.000 habitants, et qu elle a diminué notablement depuis trente ans. — M. A.Gautier rap- pelle qu'il a montré le premier, il y à dix ans, l'acti- vité antisyphilitique remarquable des composés arse- nicaux organiques, dans des Cas où la médication mercurielle n'avait donné aucun résultat. Les cacody- 960 ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES lates et les méthylarsinates se sont montrés parmi les plus actifs et les moins toxiques. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 5 Novembre 1910. M. U. Mello a examiné le sérum de chevaux por- teurs de tumeurs malignes par la méthode d’Ascoli; il a obtenu 21 réactions positives sur 24 cas; les tumeurs bénignes ou mélaniques de petit volume ne donnent qu'une réaction nulle ou très faible. — M. J. Talarico a constaté que, sous l'influence des rayons ultra- violets, la digestibilité tryptique du lait reste d'abord invariable pendant trente minutes, pour diminuer ensuite graduellement et remonter au bout de deux à trois heures. — MM. A. Rochaix et A. Dufourt montrent que le virage du rouge neutre au jaune- canari, dans les cultures microbiennes, est sous la dépendance de la production momentanée d’ammo- niaque. — MM. AI. Carrel et M. T. Burrows ont observé que les cellules d'un tissu cultivé en dehors de l'organisme s'affranchissent, au bout de quelque temps, de l'obligation de vivre en communauté sous leurs règles habituelles. Elles s'échappent donc dans le milieu plasmatique. — M. P. Rous a obtenu la pro- pagation d’un sarcome du poulet, qui a donné lieu à cinq générations de tumeurs et produit des métas- tases considérables. — MM. Al. Carrel et M. T. Bur- rows sont parvenus à cultiver en dehors de l'organisme le sarcome du poulet décrit par l’auteur précédent. — MM. Aug. Lelièvre et Ed. Retterer montrent que l’appendice iléal des oiseaux représente, comme l’appendice cæcal de l’homme, un segment de tube digestif qui, à l’origine, possède la même struc- ture que ce dernier, mais donne naissance, plus tard, à des amas de tissu réticulé élaborant des éléments fluides et figurés qui sont versés dans le sang. — MM. G. Lemaire et Laffont ont reconnu que la réac- tion de précipitation du liquide amniotique employé comme antigène, pas plus que la méthode de déviation du complément, ne semble devoir permettre le dia- gnostic de la grossesse. — M. A. Sézary a observé, dans un cas d’artérite cérébrale syphilitique, des tré- ponèmes sinueux dont beaucoup ont la forme d'une boucle. — M. M. Doyon à constaté que les propriétés anticoagulantes du foie peuvent se manifester, avec une grande intensité, plusieurs jours après l’excision et le lavage de la glande; mais cela ne provient pas d’une accumulation d’antithrombine dans le foie. — M. Ed. Chatton à découvert chez l'Acartia clausi Giesb. un flagellé parasite qu'il nomme Paradinium Poucheti et qui confine aux binoflagellés plasmodiaux. —M. Em. Feuillié a reconnu quil n’y a aucune relation entre les albuminuries et les lésions des tubuli contorti. — M. G. Rosenthal a observé que les cultures vivantes ou mortes de bacille bulgare ne permettent pas le développement du méningocoque de Weichselbaum, à moins que l'acidité ne soit supprimée par addition d’alcalis. — M. H. Triboulet considère que la réduc- tion de la bilirubine en hydrobilirubine-stercobiline est liée en majeure partie à l'influence de la zone |ym- phoïde iléo-cæcale. — MM. M. Klippel et E. Chabrol montrent que, dans les pancréatites tuberculeuses expérimentales, quels que soient la virulence du bacille de Koch et son mode d'inoculation, le fait dominant est la réaction de la trame conjonctivo- vasculaire du pancréas. — MM. C. Mathis et M. Léger ont retrouvé chez un poisson d'Indo-Chine, le Clarias macrocephalus, le Trypanosoma clariæ Montel, et découvert, chez le même animal, un trypanoplasme nouveau, qu'ils nomment Tr. clariæ. — M. H. Isco- vesco décrit un appareil nommé stalagmomètre pour la mesure des tensions superficielles des liquides. — M.S. Marbé a observé que la thyroïde délipoidée a une action de beaucoup plus stimulante sur le pro- cessus de la phagocytose que la thyroïde normale, et Séance du que cette action est due précisément à l'absence des hpoides. — MM. P. Abrami, Ch. Richet fils et Saint- Girons établissent la réalité et l'importance de l'infec- tion descendante du pancréas; ils montrent, en outre, que la systématisation canaliculaire des lésions n'est pas plus pour le pancréas que pour les autres glandes sous la dépendance de l'infection ascendante. Séance du 12 Novembre 1910. M. E. Maurel montre l'importance pour la thérapeu- tique d'une connaissance exacte des ordres de sensi- bilitéetde toxicité des agents pathogènes et de certaines substances médicamenteuses. — MM. AI. Carrel et M. T. Burrows ont constaté qu'il est facile d'obtenir une seconde génération de cellules provenant des cellules produites en dehors de l'organisme par un fragment thyroïdien. — Les mêmes auteurs ont pu cultiver 1n vitro un sarcome humain aussi facilement que le sarcome de poulet décrit dans une note précédente. — MM. Ed. Retterer el Aug. Lelièvre ont observé que le syncytium, d'abord plein, du chorion de l’appendice iléal commence, chez le canard adulte, par se lrans- former en une masse réticulée à mailles vides. Par désagrégation du réticulum et fragmentation des noyaux prennent naissance des kystes dont le contenu linit pas dégénérer et se résorber. — M. F. Battelli et Mi: L. Stern ont étudié l'influence de plusieurs facteurs sur l’énergie de l'oxydation de l'acide suc- cinique par les tissus animaux. C'est en milieu neu- tre que l'oxydation est le plus aclive: la tempéra- ture optimum est de 40° environ. — MM. R. Turro et P. Gonzalez ont constaté que les accidents anaphy- lactiques des cobayes préparés avec du sérum normal peuvent être provoqués par les globulines injectées à l'état de pureté; l'injection de globulines à dose infé- rieure à la dose minima mortelle préserve les animaux des accidents anaphylactiques déterminés par le sérum. — MM. M. Bonnamour, Imbert et Jourdan ont reconnu que, chez le lapin normal, des injections intraveineuses de solution de Ca CE diluée provoquent surement une augmentation de la quantité des urines et des chlorures éliminés, qui dure une douzaine de jours. — M. A. Chappellier a observé, chez les femelles d'un certain nombre de nouveaux oiseaux, un organe peu connu qui semble indiquer une persistance par- tielle du canal de Wolff. — M. P. Ferrier montre l'importance de l'examen desurines dans le traitement recalcifiant de la tuberculose, car les urines reflètent macroscopiquement les variations journalières de la calcilication. — MM. R. Lépine et Boulud ontreconnu qu'une hyperthermie pure, alors même qu'elle atteint 31°C., pourvu qu'elle soit de courte durée, ne modifie que fort peu le taux du sucre du sang, tandis que, s'il y a infection, il se fait une perturbation considérable de la glycémie. — M. P. Chaussé a constaté qu'avec des doses minimes l'infection du chat par inhalation de matière tuberculeuse bovine est extrêmement facile ; son intensité est proportionnelle à la dose de virus pulvérisé. — MM. F. Mesnil et A. Lebœuf ont étudié l'action curative et préventive des sérums de Primates sur les infections à Trypanosomes. Ces sérums se rangent dans l’ordre décroissant qui suit : cynocéphale, homme et, au voisinage, mangabey, mandrill. — M. D. Roudsky à observé que, dans certaines conditions, le Trypanosoma Lewisi peut s'acclimater chez la souris. — M.S. Marbé a reconnu que les lipoides extraits des thyroïdes ont, en général, une influence inhibitrice sur la phagocytose étudiée par la réaction classique de Wright. — M. P.Mulon signale l'existence de graisses antitoxiques dans le rein, les surrénales, la glande interstitielle de l'ovaire et du testicule, les corps jaunes. — M. H. Iscovesco a isolé de la thyroïde du mouton un lipoide provoquant la tachycardie; des convulsions et de l’amaigrissement, et à doses répétées la cachexie et la mort; il existe dans la thyroïde un autre lipoide, soluble dans l’acétone, qui est exophtal- misant. —M.L.G.Simon a trouvé dansun cas de pseudo- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 961 tuberculose du cobaye un bacille identique au bacille de Roger et Charrin, lequel appartient à la grande famille du bacille d'Eberth et du colibacille. — M, M. Doyon à constaté que les propriétés anticoagulantes du foie excisé et conservé ne se manifestent, en général, que lorsque lefoie à déjà été traversé par une certaine quantité de sang artériel, — MM. Marfan et B. Weill- Hallé montrent qu'une réaction diffuse et forte par addition d'eau gaïacolée et de H*0* indique le caractère colostral du lait; elle est anormale passé 4 ou 5 jours après l'accouchement. Une réaction légère et annulaire correspond au lait normal. L'absence de toute réaction estun fait pathologique. — M. G. Rosenthal a reconnu que le vibrion cholérique ne peut supporter la symbiose avec le bacille bulgare et que le lait caillé avec Île bacille bulgare est un aliment prophylactique certain contre le choléra asiatique. — M. K. Dévé signale des faits d'intoxication hydatique post-opératoire qui sem- blent de nature anaphylactique. — MM. F. Dévé et M. Guerbet montrent que la solution de formol à 2 °/, peut être employée sans crainte par les chirurgiens pour le formolage des kystes hydatiques. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. Harden et R. V. Nor- ris : La fermentation du qalactose par la levure et le suc de levure. Les auteurs confirment le fait que la levure peut être accoutumée à la fermentation du ga- lactose par culture dans un milieu contenant ce sucre. Une telle levure habituée donne un suc capable de fermenter le galactose. Un mélange en fermentation de suc de levure et de galactose réagit avec un phos- phate de la même façon que le suc de levure et le glucose. La réaction est accélérée; une quantité sup- plémentaire de CO*, équivalente au phosphate ajouté, est dégagée; puis la vitesse redevient normale. Le phosphate est transformé en un composé organique non précipitable par le mélange de citrate magnésien. La fermentation du galactose par le suc de levure est également accélérée par l'addition de petites quantités d’arséniate de soude. 1 SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 28 Octobre 190. MM. E. et W. H. Wilson : Nouvelle méthode pour produire des décharges de haute tension (Voir p. 947). — M. F. Rogers : Sur la facon dont se comporte l'acier sous des tensions statiques et des chocs combinés. L'auteur a reconnu expérimentalement que l'acier est moins résistant au choc quand il est sous tension sta- tique; dans quelques cas, la diminution de résistance au choc peut atteindre 30 °/,. Ainsi l'énergie absorbée daos la rupture de l'acier est plus élevée quand elle est entièrement appliquée sous forme de choc que lors- qu'elle est appliquée en partie comme choc, en partie sous forme statique. Les résultats sont identiques pour des aciers ayant de 0,16 à 0,45 °/, de carbone. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. MM. W. H. Perkin jun. et O. Wallach ont préparé le Ap-menthénol (8) et le A$:#%)-p-menthadiène aux dépens de l'acide 1-méthyl-A’-cyclohexène-#-carboxy- lique et du 4-acétyl-1-méthyl-At-cyclohexène. — M. J. K. Wood et Mie J. D. Scott ont déterminé les points de congélation d’un grand nombre de mélanges de camphre et de phénol; la forme de la courbe des points de congélation indique la formation d'un composé de camphre et de phénol en proportions équimoléculaires, se congelant à — 18°,6 ; il y a égale- ‘décomposé par H*SO* ment deux mélanges eutectiques à 29,5 et 59,21 cules pour cent de camphre, se congelant à 32°, — M, J. E. Purvis a constaté que la d'aniline a un nombre considérable de bandes d'absorption, qu'on ne retrouve pas dans la vapeur de ses homologues. En solution dans l'alcool, toutes ces substances présentent des bandes d'absorption, dont le type et la position sont réglés par la substitution des groupes alkyliques à l'H du groupe aminé ou du noyau. Aucune de ces substances n'offre de bandes d'absorption à l'état liquide. — M. M. B. Richards à étudié la condensation de la phénanthraquinone aver le malonate d’éthyle et l'acétoacétate d'éthyle. — MM. J.C. Irvine et D. Me Nicoll ont obtenu les anilides du tétraméthyImannose, du tétraméthylsalactose et du timéthylrhamnose à l'état cristallin sous leurs formes mutarotatoires. Ces composés restent inattaqués par traitement avec A#°0 et CHI, ce qui montre qu'ils dérivent des formes y-oxydiques des sucres originaux. — M. $S. Ruhemann, dans le but de préparer Je 1 : 2- dicétohydrindène, a étudié l'action de la p-nitroso- diméthylaniline sur l'a-hydrindone; il trouve que le groupe Az0 attaque les deux groupes CH* de l'hydrin- done. Le produit de condensation vert qui se forme est dilué et fournit l'hydrate de tricétohydrindène incolore : molé- 300,5 et va] eur co GH/ c(on. NC) — M'eI. F. Homfray a étudié l'absorption de CO par le p-azoxyphénétol, substance cristalline qui fond à 138? en un liquide cristallin, se transformant à 165° en un liquide normal isotrope. Il n°ÿ a pas d'absorption par la phase solide; après le premier point de fusion, il y a une légère absorption, qui devient très forte après le deuxième point de fusion ; ensuite l'absorption diminue régulièrement. — MM. M. O. Forster et S. H. Newman ont préparé les azoimides de la série acétoacétique par action des chlorodérivés corres- pondants sur AZNa. — MM. T. Purdie et G. B. Neave ont préparé les éthers méthylique, éthylique et propy- lique de l’acide /-méthoxysuccinique en méthylant les éthers maliques par CHSI et Ag°0. En comparant ces éthers avec les composés obtenus par résolution de l'acide méthoxysuccinique inactif avec un alcaloïde, on trouve des pouvoirs rotatoires très concordants. — MM. T. Purdie et C. R. Young ont préparé divers dérivés des acides /méthoxy et d-diméthoxysuc- ciniques, y compris les anhydrides et les dichlorures. Les rotations moléculaires des premiers sont à peu près la moilié de celles des seconds. — MM. T. Purdie et P. S. Arup ont fait réagir CH*Mgl sur le /-méthoxy- succinate de méthyle et ont obtenu le y-méthoxy- diméthylhexane-fs-diol optiquement actif, qui se déshydrate par distillation en donnant l’oxyde corres- pondant. L'action de C°H°MgBr sur le mème corps fournit un dérivé du dibydrofurane et une triphényl- butyrolactone, F. 1609-1619. — MM. O. L. Brady et S. Smiles ont obtenu les tri- et tétrachlorosulfoxydes de diphénylamine par l’action de H°0? et HCI sur la thiodiphénylamine. Le chlorhydrate du premier est facilement transformé en composé azothionium par chauffage dans certains milieux.— MM. A. C. D. Rivett et N. V.Sidgwick ont déterminé la vitesse d’'hydratation des anhydrides succinique, méthylsuccinique, itaco- pique, maléique, citraconique et phialique, par une méthode de conductibilité. Dans tous les cas, la réaction est unimoléculaire et n’est pas catalysée par les ions H. À l'exception de l’anbydride méthylsuc- cinique, l'ordre des vitesses d’hydratation est le même que celui des constantes de dissociation. — M. J. L. Simonsen, par hydrolyse du 6-méthyl-2-pyrone-3 : 5-di- carboxylate d'éthyle, a obtenu l'acide méthyltrimé- sique, donnant par oxydation l'acide prehnitique. — M. T. C. James a étudié l'action de divers alcalis, bases tertiaires et alcaloïdes sur l'acide a$-dibromo- 962 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES butyrique; ils enlèvent HBr en donnant un mélange d'acides a-bromo et «-bromo-allo-crotoniques, la proportion du premier étant d'autant plus grande que la base utilisée est plus faible — M. J. E. Purvis à constaté que la vapeur du furane présente des bandes d'absorption, ayaut des ee . nces analogues de longueurs d'onde; la vapeur d'aldéhyde furfurique présente également des bandes groupables, mais différentes des précédentes ; les vapeurs de thiophène -et de pyrrol offrent également quelques bandes. Tous ces corps, en solution alcoolique ou à l’état liquide, ne srésentent aucune bande, sauf l’aldéhyde furfurique en solution alc oolique, qui a une bande dans l'ultra- violet. — MM. A. E. Dunstan et A. G. Mussell ont déterminé les viscosités d'un grand nombre d’amides à l’état libre et en solutions aqueuse et pyridique. En solution aqueuse, les amides grasses simples sont très associées, sauf la formamide. À l’état fondu, les amides sont associées. En solution pyridique, les viscosités sont généralement normales. — M. H. M. Dawson à constaté que le changement de volume qui accompagne la formation des solutions diluées d’une substance donnée daus une série de solvants est déterminé par les pressions internes et les compressibilités des solvants, pourvu qu'il ne se produise pas de change- ments dans le degré de complexité du solvant et du corps dissous, ni de combinaison entre eux. L'auteur donne l'équation de ces solutions « normales ». — M.E. P. Frankland a préparé l'acide 1 : 7-dibenzyl- tétrahydro-urique, EF. ue 78°, par l’action de l'acide cyanique sur l'acide a$-dibenzylaminopropionique, provenant lui-même de l'action de la benzylamine sur l'acide a«8-dibromopropiouique. — M. G. G. Hen- derson et Mit M. M. J. Sutherland, en traitant le thymoquinol par la méthode de Sabatier et Senderens, ont obtenu un menthane-2 :5-diol, K. 142°. Chauffé au- dessus de son point de fusion avec KHSO!, il fournit un terpène, Eb. 1790 sous 760 millimètres, qui est probablement le Al't-menthadiène. — MM. G. G. Henderson et E. F. Pollock, en traitant le bornylène par la méthode de Sabatier et Senderens, ont obtenu un dihydrobornylène qui paraît analogue au camphane. Le camphène, dans les mêmes conditions, donne un dihydrocamphène, très différent du camphane. — MM. G. G. Henderson et R. Boyd ont constaté qu'une solution aqueuse à 30 °/, de H?20? est un bon oxydant pour les phénols benzéniques monohydriques; on obtient un phénol dihydrique ou une quinone, quelque- fois un phénol tétrahydrique. Les hydrocarbures benzéniques sont inattaqués par cet agent, mais les hydrocarbures à plusieurs noyaux sont attaqués. — M. D. Tyrer a déterminé la solubilité de substances organiques dans un mélange de deux solvants orga- niques non associants, la substance étant soluble dans le solvant À et insoluble dans le solvant B, qui est miscible avec À en toutes proportions. Dans quelques cas, la solubilité à température constante est une fonction linéaire de la concentration du solvant; mais en général il n'y a pas de relation simple entre ces deux quantités. — MM. J. B. Cohen, H. M. Dawson, J. R. Blockey et A. Woodmansey ont constaté que, dans la chloruration du toluène, la substitution dans la chaîne latérale est favorisée par la lumière et l'élévation de température, tandis que la substitution nucléaire est favorisée par la présence de petites quantités d'eau ou l'addition de nitrobenzène. — — MM. H. Bamford el J. L. Simonsen ont préparé l'acide mellophanique aux dépens du diméthylnaphta- lène ; c'est un acide 1:2:3:4-benzènelétracarboxylique, tandis que l'acide ne est l'acide 1:2:4:5 cor- respondant. — MM. H. Stobbe et F. J. Wilson ont constaté que les deux pipéronylidène-acétones iso- pure s CH? : 0*: C"H5.CH : CH.CO.CH* peuventétre conver- ties l’une l’autre par l'action de la chaleur, de pe tites quantités de HCI ou par la lumière solaire di- recte, avec production d’un état d'équilibre. Ils ont également obtenu la phényl-0-méthoxystyrylcétone CH20.CSH:.Cil : CH.COCH par condensation de l’o-mé- thoxybenzaldéhyde avec lacétophénone. — MM. T. S. Patterson et Al. Fleck ont séparé un méiange de cyclohexane et de benzène en l’agitant avec un peu de tartrate d’éthyle, qui provoque la formation de deux couches. Une plus grande quantité de tartrate d’éthyle ramène le mélange à l'état homogène. — MM. E. B. R. Prideaux a déterminé les pressions de vapeur ét les volumes moléculaires des halogénures de mercure depuis leur point de fusion jusqu à leur point d’ébulli- tion. Les rapports entre les volumes moléculaires des composés liquides et les sommes des volumes atomiques des éléments liquides, mesurés sous des pressions égales de vapeur saturée, sont constants pour toutes les pressions. Il y a une légère expansion au moment de la combinaison. — MM. A. A. Boon et F.J.Wilson ont préparé, par condensation du pipéronal avec la pinacoline, la pipéronylidène-pinacoline, CH? :0°:C°H5: CH: CH.CO.C(CH#)", F.940-950, donnant avec Br un mono- bromure « où 8, F.110-141°, et un dibromure, F. 13$9- 1390. — MM. D R. Boyd et E. R. Marle ont préparé les éthers aryliques de l'«-monochlorhydrine du gly- cérol par action des phénols sur l’épichlorhydrine en présence de NaOH à la température ordinaire. — M. D. R. Boyd, en traitant l'éther phénylglycidique par AzH* alcoolique à 50 °/,, a obtenu une base pri- maire, CH°.0.CH°.CH(OH).CH2.AzH?, EF. 970-980, et une base Ode C°H5.0.CH2.CH(OH).CHE PAzH, F. 1019- 1020, — MM. J. B. Cohen et H. W. Dudley ont déter- miné la rotation des éthers menthyliques des acides benzoïques alkyloxylés et alkylaminés. La substitution en ortho exerce une influence prépondérante sur la valeur rotatoire du groupe actif. La température a une grande influence sur la rotation de ces composés. MM. M. J. Burgess et R. V. Wheeler ont Con que tous les charbons ont un point de décomposi- tion bien défini à une température située entre 700 et 800, qui correspond à une augmentation marquée de la quantité d'hydrogène dégagé. L'éthane, le pro- pane, le butane forment une ‘bonne partie des gaz dé ragés aux basses températures, mais au-dessus %e 700 leur dégagement cesse presque complètement. = MM. E. G. J. Hartley, en faisant réagir le sulfate de méthyle sur le ferrocyanure de potassium en l'absence d'humidité, a obtenu un sel neutre (CH‘)‘Fe(CAz)° (CH*.S0:}®, avec un peu du sulfate acide décrit précé- demment. Le sulfate neutre (CH*)Fe(CAz)°SO: s'obtient en neulralisant le sulfate acide avec Ba(OH}°, et évapo- rant le filtrat dans le vide. On obtient facilement par BaCF le chlorure correspondant, qui, chauffé à 4402 sous pression réduite, se décompose en CH*CI et ferro- cyanure de tétraméthyle. — MM. A. N. Meldrum et W. E.S. Turner ont déterminé la complexité molécu- laire de dix-sept nouvelles amides dans divers solvants organiques. Les résultats vérifient l’ RYpOUÉ SAR Thomson, que l'association du corps dissous tend à s'élever quand la constante diélectrique du solvant est basse et vice-versa. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 7 Juillet 4910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Dolezal essaie de déterminer, d'après les mesures de deux étoiles d'ascensions droites et de déclinaisons connues, au moyen du photothéodolite, par rapport à un temps fixé, leur latitude géographique et l'heure. Il résout ce problème au moyen de la photogrammétrie. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. W. Schmidt a étudié, au moyen du variographe, la marche des divers élé- ments météorologiques pendant un certain nombre d’orages et de « bôen ». Il étudie, d'autre part, le phé- nomène de la pénétration de l'air froid sous l'air chaud. — M. J.von Wiesner décrit une méthode pour la détermination de la direction et de l'intensité de la lumière diffuse maximum d’une surface éclairante nd ir 4 LÉ ARE ÉRS er © ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 963 déterminée. D'après la position de l'ombre formée par | colle, de la leucine et d'autres combinaisons amintes, un bâton horizontal sur la surface, on déduit la hau- teur de l'éclairage diffus maximum; de même, quand on amène le bâton et son ombre à se trouver dans le même plan vertical, on à l'azimut de cet éclairage. Au moyen de ces deux déterminations, on déduit facile- ment la direction de la lumière diffuse maximum. L'auteur à construit sur ce principe un appareil, nommé skioklisimètre, qui permet également de déter- miner l'intensité de la lumière diffuse maximum d'après la méthode photochimique de Bunsen-Roscoe modifiée par lui. — M. V.von Lang a déterminé, pour l’axinite triclinique, l'écartement entre les axes prin- cipaux d'absorption A, B, C, et les axes d'élasticité optique a, b, ce, qui sont différents d'après W. Voigt. Il a obtenu les valeurs Ab — 11024"; Ba —10958/; Ce 308. — MM. C. Doelter el H. Sirk : Influence dif- férente des rayons «, 8 et y sur la couleur des corps solides. — MM. Th. W. Richards et O. Hônigschmid ont procédé à la revision du poids atomique du cal- cium par l'analyse du bromure de calcium, faite d'après deux méthodes : détermination du rapport CaBr*: Ag et du rapport CaBr*:AgBr. La moyenne de toutes les déterminations donne Ca — 40,068 pour Ag— 107,88 et Br — 79,916. — MM. F. W. Dafert et R. Miklauz ont constaté que Li métallique se trans- forme à froid en quelques heures, par l'action de Az pur, en azoture amorphe LiAz*; la présence d'O em- pèche cette réaction. En présence d’H, à 220-250°C., l’'azoture se transforme dans le composé Li*AzH* ou tri- lithium-ammonium, qui, chauffé à 4800, fournit le tri- lithium-amide Li*AzH?. — MM. R. Wegscheider et E. Späth, en faisant réagir l’anhydride acétique et l'acide sulfurique sur l’aldol, ont obtenu le monoacé- tate d’aldol, Eb. S7°-89° sous 18 millimètres, et un dia- cétate de dialdane, Eb. 152°-154° sous 12 millimètres, puis des produits de condensation élevés; par une action plus énergique, il se forme le triacétate d’aldol, Eb. 1438°140° sous 12 millimètres. Par l'action de l’anhy- dride acétique seul sur l’aldol, il se forme surtout du diacétate d’aldéhyde crotonique et un mélange difficile à séparer de triacétate d'aldol et de diacétate de dial- dane. Par l’action du chlorure d’acétyle sur l’aldol ou sur l'aldéhyde crotonique,'on obtient l’acétylchlorure d'aldéhyde crotonique, Eb. 76°-77° sous 18 millimè- tres. — MM. H. Meyer et A. Hub ont préparé les chlo- rures, éthers méthyliques et amides des acides fluoro- benzoïques isomères; ils montrent que la détermination du fluor dans ces combinaisons peut se faire par la méthode à la chaux dans de petits tubes de nickel. — M. A. Kirpal a constaté que l'acide chloracétique réagit sur les acides pyridine-carboniques (sauf les acides ax-substitués), en solution alcaline, pour donner les bétaines correspondantes. Le même réactif, agissant sur les bases pyridiques ax'-substituées, ne fournit pas de bétaines, mais des chlorhydrates. — M. F. Friedl attribue la couleur jaune de l'acide 2: 3-oxynaph- toïque, F. 216°, au chromophore — C:G.CO —. Traité par la benzaldéhyde en présence d'HCI, l'éther méthy- lique de cet acide donne naissance à des produits de condensation halogénés, qui, traités par H°0 les alcools méthylique, éthylique, le phénol, etc., échangent CI contre OH, OCH*, OC°H*, OC‘H°... en donnant des corps faiblement colorés en jaune, en partie énolisés, don- nant une coloration rouge violet intense avec H°SO$ et vert émeraude avec HAzO®. — M. H. Wolf, par conden- sation de quantités équivalentes d'acide anthranilique et d’aldéhydes aromatiques, a obtenu les anilo-acides correspondants. Deux d'entre eux, les acides o-et p-0xy- benzalanthraniliques, existent sous deux modifications, une jaune et une rouge. — M. P. Lux, dans le but de déterminer la constitution du rétène, a transformé la monoxime de la rétènequinone en méthylisopropylbi- phényle. — MM. Zd. H. Skraup et R. Bôttcher ont constaté que la gélatine commerciale contient un groupe méthoxyle et un méthyle lié à l’azote. La géla- tine méthylée par CHI donne à l'hydrolyse du glyco- mais pas de lysineet peu d'histidine et darginine; elle fournit moins d'acide glutamique que la caséine mé- thylée. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. W.Hausmann présente ses recherches sur l'action sensibilisante de l'hémato porphyrine. L'hématoporphyrine constitue à la Jumière un poison puissant pour les Infusoires et les corpus cules sanguins, tandis qu'elle n'agit pas à l'obscurité. Ce phénomène n'est pas dû à la production à la lumière d'un corps toxique; l'hématoporpbyrine représente un sensibilisateur optique, particulièrement actif sous l'influence de certaines radiations, celles qui se trouvent au-dessous et au-dessus de 500 uy. L'auteur distingue trois formes de la maladie causée par l'action photosensibilisatrice de l'hématoporphyrine chez les animaux : une forme aiguë, une forme subaiguë et une forme chronique. — M. J. Szücs à étudié la per- méabilité du protoplasma. La vitesse d'absorption des colorants basiques est proportionselle à Ja chute de concentration de la substance diffusante. La perméa- bilité de l'enveloppe protoplasmiquen'est pas constante. L'absorption par la cellule vivante est empêchée par certains électrolytes. La présence d'ions Ca empèche l’absorption de FeSO*. — M. J. Schaffer présente ses observations sur la chorde dorsale des Mammifères après la naissance. La croissance a lieu (chez la souris) par la division mitotique des cellules dans tout le domaine du segment chordal. — M. H. Balss a recueilli dans la Mer Rouge trois formes de Stomatopodes : le Squilla massavensis, le Pseudosquilla ciliata et le Go- uodactylus chiragra. — M. Ad.Steuer a étudié les Copé- podes planktoniques du port de Brindisi; il a observé un maximum de Diatomées, qui se produit à certaines époques et provoque le trouble et la coloration de l’eau de la mer. — M. $S. Taub à examiné l’éliminatior de l'eau et la formation d'intumescences chez les Urti- cacées. Ces plantes sont caractérisées par une forte pression des racines, qui se traduit, lorsque la transpi- ration est empêchée, par la formation de gouttes à la partie supérieure des feuilles; il y a là un simple phé- nomène de filtration, qui peut coincider avec une transpiration ralentie. L'évaporation des gouttes peut laisser sur les plantes de petites écailles blanches de substances minérales, composées en partie de carbo- nates. — Mie S. Herzfeld : Le développement des fleurs femelles de Cryptomeria japonica.— M. V. Ublig a étudié la faune jurassique et crétacée inférieure des schistes de Spiti dans l'Himalaya. Cette faune ne pré- sente pas d'affinités avec la faune boréale et du nord des Andes, mais bien avec la faune méditerranéo-cau- casique et celle du sud des Andes. Séance du 43 Octobre 1910. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Bohr démontre un théorème sur la droite limite de sommabilité des séries de Dirichlet. — M. G. Majcen signale un théo- rème sur les courbes planes de 4° ordre avec un sommet de 2° espèce. — M. A. Klingatsch : La position la plus favorable des points d’un triangle déterminés par des lieux géométriques en triangulation. — M. G. von Niessl a déterminé les trajectoires de trois météores observés en Autriche en septembre 1905. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. H. Mache a cherché à déterminer la vitesse d’évaporation K de l’eau dans l'hydrogène et l'air. Si b est la pression de l'air, A le coefticient de diffusion de la vapeur dans le gaz, 7 la pression de saturation de la vapeur, on a : K—(B/A A/h— 7), où A et B sont donnés par la relation z— À + Bp, = étant le temps pendant lequel le niveau de l’eau dans un tube s’abaisse d’une quantité déter- minée et / la distance moyenne du niveau au bord du tube. L'auteur a mesuré les valeurs de K dans l'air et dans l'hydrogène à diverses températures. — MM. Th. W. Richards et O. Hônigschmid ont revisé le poids atomique du calcium par l'analyse du chlorure de calcium et la détermination du rapport CaCF : Ag, d'où 964 # ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES ils déduisent pour Ca la valeur 40,074. La moyenne générale de ces observations et de l'analyse de CaBr° donne ponr Ag 40,071. — MM. J. Stoklasa et W. Zdob- nicjy, en faisant agir les rayons ultra-violets sur CO* et H à l’état naissant, ont réalisé la synthèse de l'acide formique, qui, en présence de KOH, se condense en sucres. Ces sucres ne sont pas asymétriques, ni fer- mentescibles par la levure. — M. E. Butscher a pré- paré les produits de condensation de la phénylrhoda- nine avec l’aldéhyde valérique, de l’alloxane avec les phényl-, p-tolyl-, méthyl- et éthylrhodanines, de la phénanthrène-quinone avec la phényl- et l’allylrhoda- nine. Le dédoublement de la p-méthoxylphénylrhoda- nine par la baryte donne l'acide méthoxylsulfhydryl- cinnamique.—MM.R. Wegscheider, H.F.Perndanner et O. Auspitzer ont préparé de l'acide trimellithique : les 1-, 2- et 4-monoéthers méthyliques acides, F.203°,5- 2050,5, 2089 et 1450-1470, le 1 : 2-diéther, F.119°-124°; le triéther, Eb.194° sous 12 millimètres. — MM. H. Meyer et A. Eckert ont reconnu que l'huile grasse des grains de café se compose des glycérides des acides gras suivants : acide carnaubique (10 °/,), acide daturique (1-1 1/2 °/6), acide palmitique (25-28 °/,), acide caprique (1/2 °/.), acide oléique (2 °/,), acide linolique (50 °/,). La cire des mêmes grains est l’éther de l'acide carnaubique et d’un corps de la classe des tannols. Séance du 20 Octobre 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Mertens : Sur les coefficients et l’irréductibilité des équations de transformation des fonctions elliptiques à module sin- gulier. — M. F. Paulus : Sur une délermination immédiate de chaque force de réaction séparée d'un système de points limité d'après les équations de Lagrange de 2° espèce. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M. F. Aigner : Interférences d'ondes dans les résonateurs. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. R. Seeger a étudié l'assimilation chez l'Euphrasia et la transpiration des Rhinanthées. Il a constaté, contrairement aux asser- tions de Bonnier, que l'assimilation du feuillage de l'Euphrasia est très notable. La transpiration des Rhi- nanthées surpasse de beaucoup en intensité celle de toutes les autres plantes autotrophes étudiées. Cette forte transpiration est une adaptation au parasitisme, qui repose surtout sur l'absorption de sels nutritifs inorganiques. — M. V. Vouk présente ses recherches sur le mouvement des plasmodes. Le courant proto- plasmique des plasmodes est un phénomène rythmi- que; le rythme possède deux composantes : un courant progressif P et un courant régressif R, la durée de P étant plus grande que celle de R. La durée du rythme PR est une constante T pour un plasmode déter- miné; elle augmente avec le développement du plas- mode. Le courant rythmique peut être troublé par une excitation mécanique du protoplasma. —MM. V. Grafe etK. Linsbauer ont étudié les phénomènes d'échanges dans l'excitation géotropique. Le degré d'action de la catalase dans les hypocotyles d'Helianthus annuus diminue de la pointe vers la base; les parties de la tige qui prennent part à la croissance présentent la plus forte action catalasique. L’excitation géotropique ne cause aucune différence dans l’action de la catalase. — M. H. Mohr présente la suite de ses recherches géologiques le long du nouveau chemin de fer de la Wechsel. Séance du 27 Octobre 1910. 1° ScrENCES PHYSIQUES. — M. E. Murmann à déter- miné l'origine du chlore dans l’eau de pluie, les sources et les ruisseaux. L'eau de‘pluie ne renferme de chlore que celui qui est apporté de la mer par les particules salines. L'eau courante ne présente une trace de Cl décelable que lorsqu'elle a été en contact avec le sol ou les plantes, même très peu de temps. Un morceau de calcaire primiuf des environs de Wolfsherg ne renfermait que 0,0063 °/, de Cl; mais il est clair que les roches superficielles ont été lavées depuis longtemps. L'eau des sources et des ruisselets ren- ferme toujours plus de CI que la pluie, ce qui prouve qu'une partie de ce CI a été enlevée à la terre. — Le mème auteur a préparé quelques dérivés de l’a-phényl- quinoline. — M. H. Molisch à constaté que l'action de la lumière peut précipiter le fer de quelques-unes de ses solutions diluées, tandis que la précipitation n'a pas lieu à l'obscurité. Certaines plantes aquatiques vertes, vivant submergées, possèdent des propriétés analogues : à la lumière, elles séparent de l’alcali qui, avec le concours de l'oxygène dégagé dans l'assimila- tion de CO?, précipite de l’oxyde de fer en dehors des plantes. Il se forme ainsi des dépôts ferrugineux, qui peuvent jouer un certain rôle dans la Nature. 29 SCIENCES NATURELLE. — M. Ad. Steuer a déter- miné les Copépodes planktoniques recueillis dans l'exploration de l'Adriatique. Tandis que la quantité de ces organismes diminue vers le Sud, le nombre des espèces va en augmentant. On a trouvé parmi eux quelques types boréaux : T'emora longicornis, Pseudo- calanus elongatus et Diaixis pyqmæa. — M. K. von Keissler présente ses recherches sur la périodicité du phytoplankton du lac de Léopoldstein, en Styrie. Les principaux représentants sont les Peridinium, Aste- rionella, Cyclotella et Staurastrum; les Ceratium et Dinobryon sont rares; les Fragilaria, Synedra et Botryococcus font défaut. Le Spirogyra n'apparait qu'en mars, le Conochilus qu'en juillet. Séance du 3 Novembre 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Ad. Hnatek a déter- miné l'orbite définitive de la comète de 1823 en se basant sur plus de 809 positions. Cette orbite est para- bolique et possède les éléments suivants : T—1823 décembre 9,43398 temps moyen de Greenw. m — 28030/17/48 l Q— 3030 3! S"46 équat. moyen de 1824,0. 1 = 10304816" 35 log. q —9,355.531.8. 29 Sciences PHYSIQUES. — MM. M. Samec et A. Jencic présentent un photomètre aulo-enregistreur. Une hor- loge actionne par intervalles un mécanisme qui expose un papier sensible à la lumière pendant un temps réglable à volonté. L'appareil enregistre l’action de la lumière totale, celle de la lumière diffuse et la durée d'apparition du Soleil et permet de trouver l'intensité lumineuse chimique en unités Bunsen. — M. J. Donau décrit un filtre formé d'une feuille de platine en forme de cupule percée en scie dans le milieu et recouverte d'asbeste. Son poids est si faible qu'on peut le tarer sur la microbalance. Il permet de déterminer des quantités de précipité variant de 1 à 3 milligrammes. — M. F. Pilch montre qu'il est possible de faire des déterminations analytiques de petites quantités de substances {1 milligramme et moins) avec quelques centimètres cubes de solutions 1/100° normales: il décrit une burette construite à cet effet. — M. M. Simon à analysé la substance végétale connue sous le nom de balanophorine. Elle correspond bien à la for- mule de Poleck C'°H#0. Ce n'est pas un glycéride, mais une cire. Par fusion avec KOH ou distillation dans le vide, elle se scinde en acide palmitique et en une substance indifférente. Le Gérant : A. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 21° ANNÉE N°23 15 DÉCEMBRE 1910 Revue générale des Sciences É a =) eo , h “0, 0 «\ pures ebappliquées [Sè5+e ee \ L D ob f Mas3 Q Foxpareur : LOUIS OLIVIER OA SAT æ DIRECTEUR : J.-P. LANGLOIS, Docteur ès Sciences. nt Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. J.-P. LANGLOIS, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris In Suède, la Norvège et 1n Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Louis Olivier et le pacifisme. — Dans le der- nier numéro de La Paix par le Droit, M. Ch. Richet a rendu un bel hommage à notre regretté directeur, qui unissait dans une même pensée l’amour de la science et l'amour de la paix. Nos lecteurs nous sauront gré de reproduire ici cette page : « La Société française d'Arbitrage a fait une perte cruelle. Louis Olivier, qui depuis près de dix années était membre de notre Conseil, a été frappé par une mort foudroyante qui l’a brusquement arraché à ses amis et à ses travaux. « Mort prématurée ; car il était jeune encore et de brillante santé. Mort absurde; car nul plus que lui n'était capable de rendre de signalés services à la science, à l'humanité, à la paix. « De bonne heure il avait compris que la science est la grande pacificatrice, et, comme il était passionné pour la science, il s'était épris de paix et de justice internationale. « Je n'ai jamais connu d'homme ayant plus que Louis Olivier l'amour des choses scientifiques. La recherche de la vérité, de la vérité en soi, sans limitation de frontières, d'époques ou de personnalités, c'était pour lui l'idéal de la vie. Et, quoique patriote ardent, il était avant tout un savant qui chérissait la science (ce qui est rare). « Voilà ce qui a fait l'unité de sa belle, féconde et laborieuse existence. Il a fondé, tout jeune encore, la Revue Générale des Sciences, journal de haute vulga- risalion, à la fois accessible à tous et utile aux techni- ciens. Il à institué ces intéressantes croisières pour réunir, sur le pont d'un même navire, les hommes dis- tingués, les femmes aimables et instruites qui désiraient voyager un peu mieux que de banals touristes et culti- ver leur esprit, en même temps qu'enchanter leurs yeux. « C'est parce qu'il aimait la science que Louis Olivier était un pacifiste déterminé. Il savait que la guerre est l’ennemie de la science, comme la folie est l'adversaire de la sagesse. Il savait que les trésors dépensés par les peuples de part et d'autre pour se combattre eussent REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. été mieux employés pour s'entr'aider. Il savait que cette folie allait passer un jour, et il voulait, par sa propagande active et généreuse, hâter ce jour qui mar- quera vraiment l'émancipation humaine. « Tous ceux qui ont fréquenté cet homme loyal et enthousiaste l'ont aimé. Et c'est avec une douloureuse et mélancolique douceur que je viens ici, dans cette Revue pour laquelle il avait tant d'affection, lui rendre ce suprème et attendri hommage. « Scientia pacem fovet, pax scientiam. « Charles Richet. » $ 2. — Mathématiques La fonction {(s) de Riemann. — La question de savoir si la fonction £(<) (introduite par Euler), à l’aide de laquelle Riemann étudie la distribution des nombres premiers, a (comme l’affirme Riemann) toutes ses Ë 1 | : : racines de la forme ++ 1, reste toujours sans réponse décisive. Les idées que l’on peut avoir à cet égard seront forcément plus ou moins modifiées par le récent travail de MM. Bohr et Landau‘. Ces deux auteurs démontrent, en employant, après l'avoir précisé, le célèbre théorème de Landau-Picard, un énoncé très analogue au théorème de M. Picard sur les fonctions entières. Pour à quelconque, l’'équa- tion t{s)—4 admet une infinité de racines dont la partie réelle diffère d'aussi peu qu'on le veut de l'unité : il ne peut y avoir exception que pour une seule valeur de à (tout au plus). Si l’assertion de Riemann était exacte, cette valeur d'ailleurs unique devrait exister et être précisément égale à zéro. Il n'y a d'ailleurs là, bien entendu, rien de rigoureusement impossible. Les raisonnements de MM. Bohr et Landau sont très généraux et s'étendent d'eux-mêmes aux fonc- tions analogues à {(s) qui s’introduisent dans la théorie des idéaux. EEE] … ————_——— 1 Gütt. Nachr., 1910. CHRONIQUE ET CORRESPON DANCE 966 $ 3. — Art de l’Ingénieur La répartition du trafie entre les voies ferrées et les voies navigables‘. — M. Clément Colson, l'éminent économiste auquel nous devons un traité classique en matière de transports, a présenté — de concert avec M. Louis Marlio — au Congrès inter- national des Chemins de fer, qui s'est tenu à Berne en juillet dernier, un très remarquable rapport sur les services comparés de la voie de fer et de la voie d’eau. Tandis que la seconde est limitée dans son développe- ment par le relief du pays et ne peut jouer que le rôle d'une voie d'appoint, le chemin de fer s'étend partout etne connaît plus les obstacles physiques. Il absorbe, en outre, la plus grande partie du trafic voyageurs et messageries et du trafic de détail de la petite vitesse. De telle sorte que, si l’on veut comparer les prix de transport sur les deux voies, il faut prendre des tarifs correspondant aux expéditions par train complet ou tout au moins par rame de plusieurs wagons. On remar- quera, en outre, que, là où les péages sur les voies d'eau sont supprimés, — comme c’est le cas en France, le chemin de fer se trouve handicapé par les dépenses d'entretien de la voie et les charges du capital d'établissement. & La valeur propre de la voie au point de vue tech- nique influe à la fois sur le prix et sur la durée du transport. C'est ainsi que le relief impose générale- ment à la voie d’eau un allongement de parcours, qui va jusqu à 78 °/, entre Paris et Rouen. Une forte pente constitue une entrave à la navigation, et, sur les canaux et les rivières canalisées, elle se traduit par une aug- mentation du nombre des écluses, qui sont une cause de retard, et, partant, d'augmentation du prix de revient. De plus, la petitesse des écluses empêche l'emploi de convois et surtout de grands bateaux qui permettent une économie considérable dans les frais généraux, et, conséquemment, une réduction des taxes. D'autre part, la navigation est interrompue par des chômages, soit volontaires pour permettre l'exécution de certains travaux, soit involontaires, résultant de faits climatiques (glaces, brouillards, basses eaux, crues). Enfin, le délai de transport dépend du genre de traction, très variable et encore très primitif dans l'emploi fréquent de moteurs animés. En conclusion, un bon canal vaut mieux qu'un mauvais fleuve, mais il est très inférieur à un bon fleuve. A côté de la fixité si commode du tarif de chemin de fer, il faut signaler les fluctuations brusques et fré- quentes du fret fluvial qui dépendent de l'offre et de la demande, de la saison, de l’état du bateau, du genre de traction. Si l'avantage d’un prix moins élevé est toujours en faveur de la voie d’eau, le chemin de fer offre, par contre, d'autres avantages au point de vue de la rapi- dité, de la régularité et de la sécurité; aussi, estime- t-on que le détournement ne se produit que si l'écart des prix en faveur de la voie navigable atteint de 10 à 20 °/,. Cette proportion varie, d’ailleurs, avec la valeur de la marchandise qui perd PRES le trans- port l'intérêt du capital qu’elle représente. La lenteur du transport par eau peut influer, en outre, sur la conservation de certaines marchandises : l'humidité prolongée désagrège les combustibles, tels que la houille et le coke, et réduit leur valeur calorifique. Le blé humide, déposé en vrac, est susceptible de fermen- tation. Quant à l'irrégularité, elle impose au commer- cant l'obligation de constituer un stock suffisant pour parer aux éventualités. Par contre, dans le commerce en gros, il peut être avantageux, à certains moments, de se servir du bateau comme magasin flottant. En ! CG. Cozsox et L. Marzro : Influence des voies navigables sur le trafic chemins de fer. Rapport présenté à la 8e session de l'Association internationale du Congrès des Chemins de fer. Berne, 1910. x des outre, à l'importation par mer, et principalement dans les ports en rivière, le transhbordement peut se faire directement en vrac dans la péniche de la façon la plus économique. Le prix du transport est augmenté du montant des charges terminales pour le chargement et le décharge- ment. Or, comme les gares sont mieux outillées que les ports fluviaux, ces frais sont moins élevés sur les voies ferrées. De même, l’usine éloignée de la gare peut s’y relier par un embranchement particulier, plus économique que le camionnage par chevaux. Mais cet avantage disparaît si l’établissement industriel est situé au bord de la voie d’eau, comme c’est souvent le cas. L'influence de ces charges terminales est d'autant plus grande que le parcours à effectuer est plus court; c'est pourquoi la navigation fluviale est d'autant plus avantageuse que les trajets sont plus longs, et c’est surtout dans ce cas que sa concurrence se fait le plus sentir pour les voies ferrées. La nature de la marchandise transportée par voie d'eau dépend principalement de l’organisation com- merciale de la batellerie et de la vitesse de marche des bateaux. Ge sont ces deux conditions qui favorisent le plus la concurrence de la navigation fluviale. Seuls, des services réguliers et rapides lui permettent de lutter avec le chemin de fer pour les expéditions de détail et le service des voyageurs. Mais, là encore, tout dépend des usages du commerce, du montant des com- mandes, de la situation des marchés et des usines par rapport aux voies concurrentes. La répartition du trafic entre les deux modes de transport, dans les conditions que nous venons de rappeler, se trouve modifiée dans les périodes de chô- mage des voies navigables, qui amènent au chemin de fer un supplément de trafic, et dans les périodes de variations de l’activité économique. La puissance de transport de la voie ferrée est plus extensible que celle des voies navigables; les variations de trafie de la première sont donc plus sensibles que celles des secondes. La conclusion de MM. Colson et Marlio est que, tous frais compris, et même pour les transports pondéreux revendiqués par la batellerie comme son bien propre, le chemin de fer reste l'instrument de ARSDORE éco- nomique, dans toutes les régions que la Nature na pas dotées de grands fleuves à faibie pente. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole Supérieure de Commerce de Lyon. $ 4. — Météorologie La déperdition de l'électricité atmosphé- rique au voisinage immédiat du sol. Comme les expériences jusqu'ici faites sur la déperdi- tion électrique au sein de l'atmosphère étaient affec- tées par toutes sortes de facteurs météorologiques, MM. H. Ebert et K. Kurz‘ ont tenu à enregistrer cette déperdition au voisinage immédiat du sol. Une grande plaque horizontale bien isolée, placée en regard ‘du sol, à peu de centimètres de distance, est tenue en communication permanente avec l'une des paires de quadrants d’un électromètre, dont l'aiguille et l'autre paire de quadrants sont reliées, par l’intermé- diaire d'un commutateur, à l’un des pôles d'une batte- rie d'accumulateurs à haute tension; l’autre pôle de cette batterie est mis à la terre. La plaque, le conduc- teur amenant le courant et l'électomètre lui-même sont soigneusement garantis contre les effets d’influences extérieures par des boîtes et des filets de protection. Une fois par heure, un mouvement d'horlogerie met la plaque en communication, pendant quelques minutes, avec la source de tension, de facon à ramener au zéro l'index lumineux du dispositif d'inscription photogra- phique de l'électromètre. Sous l'effet des ions attirés par le champ artiliciel ! Physikal. Zeitschr., n° 9, 1910. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 967 entre la plaque et le sol, la tension de la plaque s'abaisse et les déplacements de l'index lumineux tota- lisent, en quelque sorte, les quantités d'électricité dis- persées pendant une heure. En choisissant la tension de charge suffisamment élevée pour maintenir le courant de saturation pen- dant la durée d’une expérience (1 heure), tous les ions de signe opposé à la charge, formés en attendant dans l'espace intermédiaire entre la plaque et la terre (ou qui y auraient pénétré), contribuent à l'effet de déperdi- tion enregistré par l'appareil. Cette disposition permet avec une sécurilé parfaite de convertir les résultats en mesures absolues, Grâce à une fermeture hermétique temporaire des cavités du sol soumises à l'expérience, les auteurs réussissent à démontrer que les émanations venant du sol, ainsi que leurs ions et leurs produits de décomposition, ont une part importante dans la déperdition enregistrée. En couvrant ces cavités de sable, ils constatent que la con- dition des couches supérieures du sol non seulement détermine essentiellement la valeur totale de la déper- dition réalisée près du sol, mais surtout peut déplacer considérablement le rapport des déperditions positive et négative. C’est ainsi qu'un processus désigné fort à propos sous le terme de respiration du sol concourt à maintenir l'excès normal de charge positive libre dans les couches inférieures de l'atmosphère. Les agents actifs de l'air du sol lui-même sont capables, dans les expériences des auteurs, de former en moyenne environ 330 ions par centimètre cube et par seconde. Les déperditions moyennes, à l'endroit des observations, sont, en été, les suivantes : Déperdition par ions positifs : 2,09 unités absolues d'électricité par heure, pour une superficie de sol de 30 X 40 centimètres carrés et une plaque de dispersion de 20 X 30 centimètres carrés. Dispersion par ions négatifs : 1,96 unités absolues d'électricité. En hiver, on trouve des valeurs du même ordre de grandeur. L'excès d'ions positifs, à la sortie des ions et des agents ionisateurs du sol, est d'environ une unité abso- lue d'électricité par mètre carré et par heure. Cette valeur s'élève à environ 2,5 unités par mètre carré et par heure, pour une couche de sable de 2 centimètres d'épaisseur. Cette déperdilion présente une allure périodique diurne fort prononcée, où il faut distinguer le « type d'été » du «type d'hiver ». Les courbes diurnes des deux espèces d'ions présentent, à côté de certains accords, des écarts considérables, expliqués par leurs différences de mobilité. Les auteurs n'ont pu constater de relation de cause à effet entre la quantité d'ions et la pression atmosphé- rique. Par contre, les courbes diurnes des ions et celles des oscillations de pression atmosphérique présentent les mêmes analogies qu'un objet et son image, avec un déplacement de phase d'environ une heure et demie, la fluctuation de pression atmosphérique précédant la fluctuation d'ionisation, dont elle semble être la cause. D'autre part, les facteurs concourant aux fluctuations de la pression atmosphérique exercent une influence indirecte sur les fluctuations d'ionisation. Les conductivités enregistrées pour les deux signes se trouvent être identiques. Il n'existe donc pas d'uni- polarité. En raison de la diversité des vilesses de transport spéciliques, il faut toutefois admettre l’uni- polarité de la densité ionique elle-même dans le rap- port donné directement par les mesures de déper- dition. $ 5. — Physique Les sources lumineuses discontinues en cinématographie.—]Jusqu'à présent,on s'est servi, pour les projections cinématographiques, de sources lumineuses continues, fonctionnant aussi bien pendant que la pellicule est éclairée que durant le temps où elle est recouverte par l’oblurateur pour permettre son avancement. M. F. Dussaud vient de communiquer à l’Académie des Sciences! de très intéressantes expé- riences, entreprises pour substituer un éclairage dis- continu à l'éclairage habituellement employé en ciné- malographie, Voici comment il a opéré : Il à pris un cinématographe, et, sur l'axe du tambour produisant l'avancement intermittent de la pellicule, il a calé un commutateur électrique. Par le jeu de ce commutateur, la lampe à incandescence qui éclairait la pellicule cesse de recevoir le courant pendant le temps où le tambour produit l'avancement de cette pel- licule. Celle-ci est éclairée seulement pendant ses périodes d'immobilité, et l'on voit sur l'écran une pro jection cinématographique parfaite. Cette source lumineuse discontinue présente trois grandes supériorités. Elle permet : 1° De supprimer l'obturateur et le mécanisme qui sert à le faire fonctionner; 20 De diminuer l'usure de la lampe à incandescence ; 3° D'économiser le courant de l'accumulateur. Comme autres avantages à l'actif de ce système, il faut encore signaler : L'absence d'échauffement du condensaleur, ce qui évite toute félure ; L'absence d’échauffement de la pellicule, ce qui permet des ralentissements ou des arrêts pour l'étude des différentes phases d'un mouvement ou pour le repos de l'œil, sans interrompre le spectacle aux moments où la pellicule ne représente que des objets au repos; cela conduit à supprimer plusieurs mètres de pellicules toutes les fois qu'il s'agit d'objets au repos. Enfin, ayant constaté que les lampes qui sont sou- mises à ce régime discontinu supportent facilement des tensions qui dépassent leur normale, M. Dussaud à fait usage, pour les actionner, d'un courant interrompu par un commutateur calé sur l'arbre d'une minuscule dynamo. Avec un courant de 1,5 ampère et de 8 volts, il a obtenu une lumière suffisante pour une projection cinématographique d'environ 2 mètres de largeur. Le courant était fourni par un aceumulateur de poche absolument étanche ou par une dynamo actionnée au pied et avec un effort si faible qu'il était absolument imperceptible. Ces expériences sont très importantes en ce qu'elles permettent de prévoir une grande extension de la cinématographie partout où l’on ne dispose pas d'une source continue de courant électrique. La conductivité électrique des alliages métalliques liquides. — Le nombre rapidement croissant des procédés de fusion électro-métallur- giques, employant comme conducteurs de courant des métaux liquides, exige une connaissance plus appro- fondie de la conductivité électrique des métaux et alliages à l’état liquide. D'autre part, la possibilité de déterminer. sur la base de la conductivité électrique, la constitution des alliages, et les investigations sans cesse en progrès sur la théorie de la conduction mé- tallique, ajoutent un surcroît d'intérêt aux recherches relatives à ces phénomènes. Ces motifs ont engagé MM. K. Bornemann et P.Müller* à entreprendre, à l'Institut Métallurgique de l'Ecole Polytechnique d’Aix-la-Chapelle, une série étendue d'expériences sur la conductivité électrique des alliages métalliques à l'état liquide. Vu la difficulté que pré- sente la préparation de résistances considérables for- mées par des alliages liquides, les auteurs ont dù adopter une méthode de mesure convenant aux peltes résistances. Parmi les méthodes en présence, ils ont choisi la plus simple, celle de la mesure directe des potentiels. | À L'alliage à étudier est introduit dans un tube com- portant à ses extrémités des électrodes d'entrée et de sortie du courant et, à quelque distance de chaque 1 Comptes rendus de l'Acad. des Se. de Paris,t. CLI, p. 558. 2 Métallurgie, numéro du Congrès, 1910. 968 extrémité, une électrode secondaire destinée aux mesures de la chute de potentiel dans la portion inter- médiaire du tube. Les difficultés les plus grandes rencontrées au cours de ces recherches sont celles qui se rapportent au choix de la forme et de la matière du vase, de la ma- tière des électrodes et du mode de chauffage suscep- ble d'établir, sur une longueur aussi grande que possible, des températures ajustables dans de certaines limites et uniformes autant que possible. Pour les températures inférieures à 250-3:0° C., les bains d'huile conviennent parfaitement, tandis que, aux températures élevées, un four Heraeus de grandes dimensions ou un four à tube de charbon à court- circuit remplissent ces conditions dans une mesure suffisante. Comme ce dernier four permet d'atteindre des températures quelconques, le problème du chauf- fage se trouve résolu de la facon la plus simple. Les températures sont appréciées à l’aide de piles ther- miques. Jusqu'à environ 600°, les auteurs se servent de vases en verre; les expériences relatives aux tem- pératures plus élevées sont faites sur des vases en quartz de la Deutsche Quartz-Gesellschaft, à Beuel-sur- Rhin. Les électrodes se composent, soit de métaux Na K 8 Ê ZT: 200 DIS 7 $ ë = 100 6! ë 150 5 5 200 4 SES Q zx — + O 10 20 30 40 40 60 Fig. 1. — Courbes de conductibrlité électrique des alliages liquides sodium-potassium. —+——— + ———+ 70 80: 90 100 at.K difficilement fusibles, soit de charbon. Pour les tem- pératures auxquelles les électrodes de charbon cessent de fonctionner, on n’a qu'à employer des électrodes refroidies. Les expériences relatives aux systèmes binaires font voir l'absence de toute différence de principe entre l'allure des alliages cristallisés et celle des alliages liquides. Pour les alliages binaires cristallisés, consti- tuant une série continue de cristaux mixtes, la courbe des conductivités descend à partir de chacun des axes d'ordonnées pour atteindre un minimum correspon- dant à une concentration moyenne. Comme le fait voir la figure 1, le premier système liquide étudié à ce point de vue, celui des alliages sodium-potassium, présente une allure tout à fait analogue. D'autre part, les changements brusques de direction dans les courbes des conductibilités prouvent la présence de composés faiblement dissociés et, par conséquent, constituent un critère de leur existence. Les expériences relatives aux alliages liquides dilués font voir que l'addition d'un métal différent produit, dans les métaux liquides à coeflicient de température normal, une décroissance de la conductibilité, tandis que les métaux à très faible coeffici-nt de température semblent présenter une allure opposée, suivant leur iffinité plus ou moins grande pour l’autre métal : une faible addition d'un métal à grande affinité accroît, en effet, la conductibilité du dissolvant, tandis qu'une addition analogue d'un métal de la seconde espèce la | Toutefois, cette règle doit probablement être réduit. énoncée sous la forme plus générale : Lorsqu'une CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE faible addition d'un métal de la première espèce aug- mente la conductibilité d’un dissolvant, un métal de la seconde espèce produit une décroissance de la con- ductivité du même dissolvant et inversement. La suite de ces expériences (dans lesquelles les métalloides, en raison de leur grande facilité de réaction avec les métaux, devront aussi jouer un rôle) fera voir si cet énoncé plus général est admissible. Quoi qu'il en soit, l'existence d'une corrélation entre la constitution et laconductibilité des alliages dilués semble bien établie, Dans les systèmes liquides hétérogènes, la présence de brusques changements de direction dans la courbe de conductibilité permet de déterminer avec une grande précision les températures de séparation des alliages liquides; dans les cas douteux, elle donne même le moyen de décider si une séparation du mé- lange a eu lieu ou non. $ 6. — Zoologie Le gout de vase chez les Poissons d'eau douce. — C'est un fait bien connu de ceux qui con- somment les poissons d’eau douce que certains de ces animaux présentent une saveur particulièrement désa- gréable, qu'on désigne couramment sous le nom de goût de vase, car on y retrouve, en effet, l'odeur que dégagent les dépôts vaseux de certains marais ou étangs. On a d’abord attribué ce goût à l’imprégnation, directe ou indirecte, du poisson par l’odeur plus ou moins putride provenant de la décomposition des matières organiques de la vase; mais il n’en est rien, car des poissons peuvent vivre, même plusieurs mois, dans des bassins vaseux sans contracter le goût de vase. Aujourd’hui, on admet généralement que ce goût tire son origine de plantes organiques du groupe des Characées, en particulier du Chara fœtida qui envahit souvent les étangs et possède, effectivement, une odeur désagréable; mais cette explication n'est pas plus exacte, car les deux odeurs sont très différentes et l’on peut observer un goût de vase très prononcé chez des poissons provenant de bassins dépourvus de Chara. M. Louis Léger vient de reprendre l'étude de cette question, et, à la suite de nombreuses observations et expériences!, il est arrivé à la conclusion que le goût de vase est étroitement lié à la présence, dans les eaux, d’Algues inférieures, très fréquentes, du reste, dans les étangs vaseux, les Oscillaires. En effet : 1° Les Oscillaires dégagent abondamment une odeur sui generis absolument identique à celle qui caracté- rise le goût de vase chez les Poissons; 2° Dans toutes les eaux, stagnantes ou mobiles, où les Oscillaires sont nombreuses, les poissons ont le goût de vase, alors même que les Chara font défaut; 3° Si les eaux ne renferment pas d'Oscillaires, le poisson n'a pas le goût de vase, même s'il existe des Chara; 4° Si l’on place des poissons provenant d’une eau très pure, par conséquent dont la chair est dépourvue de tout goût étranger, dans un bassin hébergeant des Oscillaires, on constate, au bout de quelque temps, que leur chair est fortement imprégnée de l'odeur de vase. Ces observations semblent bien montrer que le goût de vase est le résultat de l'imprégnation, par l'essence d'Oscillaire, de l'organisme du poisson qui vit directe- ment ou indirectement aux dépens de ces Algues. Les Cyprinides (carpes, gardons, lanches, etc.), qui absorbent beaucoup d'algues, en même temps que de menus insectes ou vers pour leur alimentation, sont généralement plus imprégnés que les carnassiers, tels que les perches, les brochets et les truites. Ces der- niers, pourtant, ne sont point exempts du goût de vase, soit qu'ils se nourrissent de poissons herbivores déjà vaseux, soit qu'ils absorbent des touffes d'Oscil- 1 C. R. de J'Acad. des Se. de Paris, t. CLIT, p. 900. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 969 laires avec leurs proies. Les régions glandulaires de la peau et le rein s’imprègnent bien plus fortement que la chair elle-même ; il en résulte aussi que les poissons à peau riche en glandes à mucus (tanches, an- guilles, ete.) prennent toujours fortement le goût de vase. On sait qu'on peut atténuer sensiblement l'odeur de vase en maintenant le poisson plusieurs jours dans de l'eau courante et pure. Pendant ce temps, la plus grande partie de la substance odorante est sans doute éliminée par l'appareil excréteur. Est-il possible de faire disparaître ou de neutraliser plus rapidement cette odeur ? C’est ce que M. Léger s'occupe actuelle- ment de rechercher. En attendant, on ne devra pas oublier, lorsqu'on se propose d'établir des viviers ou des bassins d'élevage aux dépens d’étangs préexistants, que la présence des Oscillaires est incompatible avec la production d'un poisson de bonne qualité. $S T. — Géographie et Colonisation L'étude des bois de la Côte d'ivoire et leur utilisation industrielle. — On sait quelle est la valeur des richesses forestières de la Côte d'Ivoire et quel intérêt s'attache pour l'industrie française à en assurer le bon aménagement et à en commencer l'ex- ploitation régulière ‘. Ce fut la Mission Houdaille qui, la première, à la suite de ses recherches et de ses études poursuivies en 1898 et 1899, donna des rensei- gnements précis sur l'importance des forêts de la Côte d'Ivoire et signala le grand nombre d’essences utili- sables?; mais il n'en fut fait aucune détermination scientifique, la mission ne comptant pas de botaniste parmi ses membres. L'examen des échantillons rap- portés par la Mission, qui figurèrent à l'Exposition universelle de 1900, avait déjà fait entrevoir tout le parti que l’on pouvait tirer même des bois réputés les plus ordinaires ; cependant, aucune tentative indus- trielle n’aboutit. La connaissance exacte, tant scienti- fique que pratique, des bois de la Côte d'Ivoire ne date vraiment que de l'exploration accomplie par M. Auguste Chevalier, en 1906-1907 5. Il ne se borna pas, en effet, comme nous l'avons dit, à étudier la forèt au point de vue botanique; il rapporta sur les divers bois des notions précises dont l'industrie n'avait plus qu'à profiter. Dans sa monographie sur les bois de la Côte d’[voire *, M. Chevalier a fait une étude spéciale de 160 espèces d'arbres, et pour chacune d’elles il donne, avec la des- cription botanique, les noms sous lesquels elles sont désignées par les peuplades indigènes, et il en indique en même temps la valeur commerciale et les possi- bilités d'utilisation. Mais ces espèces ne sont pas les seules ; le voyageur estime qu'il n’y en a pas moins de 600 dans tout l'Ouest africain. et, à la date de 1907, il avait déjà rapporté des documents sur environ 350. Ces documents, consistant à la fois en études et en échantillons qui furent classés au Muséum en diverses séries correspondant aux caractères industriels des bois, furent le point de départ de recherches d'une nature plus exclusivement pratique. Un groupe d'indus- triels s’entendit pour organiser une Mission géodésique ——————————————_—"—— 1 Revue générale des Sciences, 15 janvier 1909, p. 5. 2 Lieutenant MacarRe : La richesse forestière de la Côte d'Ivoire (Revue des Cultures coloniales, t. VI, 20 janvier 1900, p. 33-42): Capitaine Houoarzce: Etude sur les propriétés et l'exploitation des bois de la Côte d'Ivoire (/bid., 5 mars 1900, p. 131-136). 3 Revue générale des Sciences, loc. cit. # Les végétaux utiles de l'Afrique tropicale française. Fascicule V. Première étude sur les bois de la Côte d'Ivoire, par AuG. CnEvaLrER. Paris, A. Challamel, 1909, in-89, 314 pages. et forestière, qui, sous la direction du capitaine Gros, de l'Artillerie coloniale, fut chargée de compléter les travaux de M. Chevalier à ce point de vue, c'est-à- dire d'entreprendre l'étude technique des principales régions forestières de la Côte d'Ivoire susceptibles d'ex- ploitalion ‘. Cette Mission parcourut, en 1908-1909, toutes les contrées boisées que traverse le chemin de fer de pénétration actuellement en construction et celles qu'arrosent les bassins du Comoé, du Bandama, de la Sassandra et du San-Pedro. Elle reconnut, comme M. Chevalier, qu'il y a intérêt à exploiter parmi Îles essences de la zone forestière, non pas seulement des acajous, seuls ulilisés au début, mais aussi beaucoup d'espèces de bois, équivalents à ceux couramment employés dans les diverses branches de l'industrie, bois durs, demi-durs et tendres, et que l’on fait venir aujourd'hui des pays exportateurs de bois. La Mission a rapporté plusieurs centaines de tonnes de ces divers bois, qui ont été débitées et mises en œuvre dans les ateliers de la maison Gillet, à Mon- targis, et dont il a été envoyé des spécimens à l'Expo- sition internationale de Bruxelles, en 1910, sous forme non seulement de planchettes, mais aussi d'objets d'ébénisterie et d’ameublement*. Il est d'autant plus important de bien connaître ces divers bois qu'une exploitation rationnelle ne peut être prospère, comme l'a fait observer le capitaine Gros, qu'à la condition de porter à la fois sur toutes les essences utilisables existant dans une même région. Il convient aussi de modifier certains procédés d’ex- ploitation, par exemple en ce qui concerne la sortie des billestde la forêt; au procédé primitif, qui consiste à les faire glisser sur des chemins de rondins, il fau- drait substituer des procédés mécaniques. Puis, il serait préférable de débiter les billes avant de les expédier, afin de n’exporter que du bois marchand. La main-d'œuvre ne manque pas dans la colonie et on la trouve dans de bonnes conditions. La richesse de la forêt est considérable, mais il est à observer que, lorsqu'on parle d'une zone forestière de 120.000 kilomètres carrés à la Côte d'Ivoire, il faut en défalquer la superficie des cours d'eau, des villages et des plantations qui peut être évaluée à 30 ou 35 QT PA de sorte que l'étendue des massifs de peuplement où existent les arbres réellement utilisables n’est guère que de 60 °/, de la surface totale. Il n'est que temps aussi de prendre des mesures pour que la forêt soit exploitée rationnellement; il faut limiter les zones réservées aux indigènes, consti- tuer un domaine forestier de la Colonie et imposer aux exploitants de remplacer, au fur et à mesure, les arbres abattus par des essences choisies. Aux travaux de la Mission Gros, se sont ajoutés ceux accomplis par M. Chevalier au cours de sa nouvelle campagne de 1908-1910, sur laquelle nous aurons à revenir. Il a étudié encore environ 70 espèces de bois dont il a envoyé en France des échantillons. Le déboisement intensif pratiqué à la Côte d'Ivoire lui fait jeter un cri d'alarme: il est à souhaiter que ces richesses fores- tières soient sauvegardées au plus tôt par une régle- mentation appropriée. Gustave Regelsperger. RE —"—" : Mission géodésique et forestière de la 12-81) ; 1908-1909 Bulletin 1! Capitaine Gros désio Côte d'Ivoire {La Géographie, 15 janvier 1910. p. 1p. Mission forestière à la Côte d'Ivoire, (Société de (Géographie commerciale de Paris, mensuel, mai 1910, p. 289-308). . 2 Exposition internationale de Bruxelles, 1910. Les bois de la Côte d'Ivoire et leur utilisation industrielle, par IL. Counter. Paris, Aug. Challamel, 1910, in-8°, 24 pages. 970 CG. BIGOURDAN — LA DÉCOUVERTE DES LOIS DE KÉPLER LA DÉCOUVERTE DES LOIS DE KÉPLER Ces lois sont celles qui régissent les mouvements des planètes autour du Soleil. On connait bien l'enthousiasme qui transporta Képler lorsque, après de longues et laborieuses recherches, il eut enfin établi que l'orbite de Mars est une ellipse dont le Soleil occupe un des foyers; mais on laisse trop souvent dans l'ombre le procédé simple et génial qu'il employa pour déterminer empiriquemenf la forme réelle de cette orbite, procédé qui, nécessairement, devait conduire tôt ou tard au but, et que nous voulons surtout mettre en évidence. I. — LA PREMIÈRE LOI DE KÉPLER. Après avoir fait des études théologiques à l'Uni- versilé protestante de Tubingue, Képler se vit déclaré impropre au service de l'Eglise Wurtember- geoise. Repoussé de ce côté, il suivit les cours de Mathématiques de Mæstlin, qui lui enseigna les doctrines de Copernic ; et en 1594, âgé de vingt- trois ans, il fut nommé à la chaire de Mathémati- ques de Grätz en Styrie. Là, il publia d'abord un Almanach-conforme au calendrier grégorien, puis son I/ysterium cosmographicum (1596), dans lequel il cherche la loi des distances des planètes au Soleil, et où l’on trouve l'hypothèse de deux planètes inconnues, quiseraientl’uneentre Mercure et Vénus, l’autre entre Mars et Jupiter ; mais il ne s'attache guère à cette idée ; finalement il la repousse « Vous ne trouverez plus ici, dit-il, de planètes inconnues interposées parmi les autres, et je n'élais pas trop content de cette audace... » En somme, la partie la plus utile de ce Jysterium est principalement consacrée à la défense du système de Copernic. Vers 4599, un nouveau gouverneur de la province, moins tolérant que son prédécesseur, expulsa les protestants de Styrie, et Képler accepta les offres de Tycho-Brahé, qui lui-même avait dû méme : quitter le Danemark. Tycho était alors à Prague, occupé à la construc- lion de Tables planétaires qui devaient s'appeler Tables Rudolphines, en l'honneur de son dernier protecteur : alors il s'occupait particulièrement de la théorie de Mars : c'est là que Képler vint le rejoindre définitivement au mois de septembre de l'an 1600, et son premier travail fut de collaborer à la théorie de cette planète rebelle. Mais les doctrines des deux grands astronomes se Tycho faisait mouvoir le Soleil autour de la Terre, tandis que trouvèrent bientôt en opposition Képler suivait l'hypothèse de Copernic. En outre, Tycho, hautain et arrogant, dit-on, payait fort irrégulièrement Képler, qu'on nous représente comme irascible, et qui sans doute était surtout aigri. Que füt-il advenu de ce désaccord : sans doute une rupture complète, que vint prévenir la mort inattendue de Tycho (1601); Képler lui suecéda comme astronome impérial, avec la libre disposi- tion du trésor d'observations de Tycho. Malgré les goûts de l'empereur Rodolphe pour l’Astrologie, Képler ne perdit point de vue la théorie des planètes, particulièrement celle de Mars : c'est par cette planète, dit-il, qu'il faut attaquer les secrets de l'Astronomie planétaire, ou les ignorer toujours; et c'est après neuf années de recherches qu'il put établir enfin, dans son De Stella Martis (1609), la forme ellip- tique de l'orbite de Mars. Avant d'exposer les recherches de Képler, rappelons quelles S idées régnaient alors sur la nature des or- bites planétaires : Depuis deux mille ans, on admettait sans conteste l'idée pythagoricienne que les orbites réelles de toutes les planètes sont des circonférences; mais on sup- posait la Terre en dehors du centre du cercle. Ceux, par exemple, qui faisaient tourner le Soleil S au- tour de la Terre T (fig. 1) supposaient le centre G de l'orbite solaire à une certaine distance CT de la Terre T, et CT était l’excentricité de l'orbite : le Soleil était supposé se mouvoir uniformément autour du centre G, et, par suite, le mouvement ap- parent vu de la Terre T devait être variable, ce qui expliquait le mouvement inégal du Soleil le long de l’écliptique. Pour les planètes proprement dites, on les faisait mouvoir uniformément autour d'un point distinet de C et de T, et qu'on appelait point d’équant (punctum sæquantis), à cause de l'égalité ou unifor- milé angulaire du mouvement autour de lui. Le plus souvent, le point d’équant était en E, symé- trique de T par rapport au centre CG. Képler essaya de représenter le mouvement de Mars dans ces hypothèses, mais ses efforts furent impuissants : il arrivait à représenter les observa- tions en longitude, mais alors les écarts apparais- saient en latitude et atteignaient jusqu'à 8° et 9". Fig. 4. Te G. BIGOURDAN — LA DÉCOUVERTE DES LOIS DE KÉPLER « La bonté divine, s'écrie-t-il alors, nous à donné en Tycho-Brahé un observaleur si exact que celte erreur de 8’... est impossible. Il faut remercier Dieu et tirer parti.de cet avantage: il faut découvrir le vice de nos supposilions .… Ces 8’, qu'il n'est pas permis de négliger, vont nous donner le moyen de réformer loute l'Astronomie. » On dit que Tycho mourant avait fait promettre à Képler de baser les nouvelles tables sur son système géocentrique; Képler ne se déroba pas à celte promesse, car il discute de toutes manières les anciennes hypothèses. Mais, impuissant à leur faire représenter les mouvements de Mars, il va, dit-il, marcher suivant ses propres idées, c'est-à-dire considérer le Soleil comme fixe et faire mouvoir autour de lui toutes les planètes, y compris la Terre. La nouvelle hypothèse le mettait en présence d'un problème doublement difficile, puisque les observations sont alors faites d’un observatoire mobile, la Terre. Il est donc nécessaire de bien connaître d’abord le mouvement de la Terre, et le problème est le même à peu près que celui qu'on cherche à résoudre pour Mars: c'est dans la manière bien simple de lever cette difficulté que se montre le génie de Képler. Soient (fig. 2) : S, le Soleil, supposé fixe ; T,, T,, T,, … l'orbite inconnue décrite par la Terre dans un plan contenant le Soleil; M, un point de l'espace supposé visible de la Terre et fixe comme le Soleil: on suppose, en outre, que l’on connaît les coordonées héliocentriques de ce point M, de sorte que l'on peut en déduire les angles MST,, MST... Dans le triangle MST,, l'observateur, placé en T,, peut mesurer l'angle MTS, et de même dans les . autres positions T,, T,, .… de la Terre. Les divers triangles MST,, MST, … ont un côté commun MS et leurs angles sont connus, de sorte que l’on pourra calculer ST,, ST,, ST,, … rayons de l'orbite de la Terre, en prenant l’un d'eux comme unité. Ainsi, au moyen d'un point fixe tel que M, on Ï 971 pourra connaître empiñquement la forme de l'or- bite de la Terre. Pour ce point M, on peut prendre une planète quelconque. Supposons connue, en eflet, la durée exacte / de révolution de cette planète et observons Sa position dans le ciel à des intervalles qui soient des multiples exacts de £ : il est évident qu'aux époques de ces observalions la planète se retrouve toujours exactement au même point de l'espace, de sorte qu'elle constitue un point fixe tel que M. Quant à /, Képler le connaissait bien pour toules les planètes, puisque Hipparque en avait déjà des valeurs exactes. Képler choisit la planète Mars elle-même, ce qui lui permit ensuite de retourner en quelque sorte le problème, de calculer SM quand il eut construit ses tables du mouvement de la Terre. Il est vrai qu'il y avait bien peu de probabilité de trouver, dans les observations de Tycho, même un petit nombre d’entre elles qui remplit la condi- tion capitale, celle d'être séparées par des multi- ples exacts de {; mais il suffisait que cette condi- tion füt remplie à peu près : on pouvait alors cal- culer, sans erreur sensible, les petites corrections à faire aux observations pour remplir rigoureuse- ment la condition indispensable. Képler forma ainsi, dans l'hypothèse de l’excen- trique à équant, des Tables qui représentaient bien les mouvements de la Terre autour du Soleil, avec l'approximalion que comportaient les observations de Tycho; et dès lors il put calculer, pour une époque quelconque, les rayons vecteurs de la Terre, tels que ST,, ST,,..…. et par suite les rayons vecteurs de Mars, tels que SM. Képler, qui n’a pas encore abandonné l'hypo- thèse circulaire, cherche alors à représenter les observations de Mars dans un cercle excentrique au Soleil : trois rayons vecteurs de la planète, avec les longitudes héliocentriques correspondantes, lui permettent de déterminer les trois éléments de l'orbite de Mars : de la ligne des apsides. rayon, excentricilé el position Mais il trouve ainsi pour ces éléments des valeurs différentes de celles que l’on connaissait, au moins approximalivement; et les écarts étaient trop grands pour être réels. En outre, le même caleul, répété avec d’autres séries analogues de points 3 par 3, conduisait à des valeurs différentes des mêmes éléments. Képler aurait pu conclure que l'orbite de Mars n'est pas un cercle; mais, avant de rejeter cette vieille hypothèse, il voulut encore d'autres confirmations. Par les observations, et en s'aidant des tables de Mars déjà faites antérieurement, il détermine les longitudes héliocentriques de l’aphélie et du péri- hélie; puis, toujours par le moyen qui vient d'être 972 indiqué, il calcule les rayons vecteurs correspon- dants, c’est-à-dire les deux segments de la ligne des apsides; enfin, il admet que l'orbite inconnue est symétrique par rapport à cette même ligne des apsides. Avec ces données, il peut calculer un rayon vecteur quelconque de Mars et le comparer à la valeur empirique obtenue précédemment : il trouve ainsi que les rayons vecteurs calculés dans le cercle sont plus longs que les rayons vecteurs réels. Devant cette nouvelle preuve, il proclame défini- tivement que l'orbite de la planète n’est pas une circonférence, mais qu'elle est plus étroite par les côtés : Itaque plane hoc est: orbita planetæ non est cir- culus, sed ingrediens ad latera utraque paulatim, iterumque ad circuli amplitudinem in perigæo exiens, eujus modi figuram ilineris ovalem appel- litant. Ainsi était renversée l'hypothèse vingt fois sécu- laire des mouvements dans le cercle. Képler crut d’abord que cette ovale est comme la section d’un œuf par un plan mené par son axe; et cette idée dut plaire à l'esprit mystique de Képier. Un instant il rejette l’ellipse, à laquelle il avait d’abord pensé; mais, en déterminant empirique- ment de nouveaux rayons vecteurs de l'orbite de Mars, et les calculant dans l’ovale qu'il avait adoptée, il trouve ces derniers trop petits, tandis que ceux calculés dans le cercle sont trop grands. Nouvelle perplexité! Sa théorie allait, dit-il, en fumée : Æt ecce omnis theoria in fumos abiit. Cette inquiétude le tourmenta longtemps; il craignit d'en perdre la tête i1Saniam. Enfin, il voit que les rayons vecteurs calculés dans l’ellipse s'accordent avec les rayons vecteurs fournis par l'observation et il se trouve en posses- sion d'un cas particulier de sa première loi : L'or- bite de Mars est une ellipse dont le Soleil occupe un des foyers; ensuite il montra qu'il en est de même pour les autres planètes. Diu nos torserat. penê ad IJ. — LA Lor1 DES"AIRES. La loi des aires, d’après laquelle les aires dé- criles par de rayon vecteur d'une planète sont pro- portionnelles au temps, a évidemment lieu dans le cas des mouvements circulaires uniformes. Képler vit que la même loi à lieu aussi, aux environs du périhélie et de l’aphélie, dans l'excen- trique à équant E symétrique de T (fig. 1), où le mouvement angulaire est uniforme autour de ce point E; et cela est facile à démontrer. Soient (fig. 3 C, le centre de l'orbite circulaire de la planète considérée, G. BIGOURDAN — LA DÉCOUVERTE DES LOIS DE KÉPLER S, le Soleil, E, le point d'équant, tel que CE— CS, AA! et PP', les arcs parcourus par la planète dans un même temps assez court, l’un de ces ares étant pris au voi- sinage de l’aphé- a’ lie À et l’autre au voisinage du péribélie P. Parhypothèse, le mouvement angulaire est égal autour du point d'équantE, de sorte que les trois points A', EF Pl ligne droite. En identifiant les ASA’, PSP' à celles de triangles rectilignes rectangles en À el P, on a, en effet : A sont en pP Fig. "3. aires Aire ASA! 1} AS X AAIMMASENAENNAS K PSE ñ ATEN SP) APS ESP EME SSP E SARA s Cela établi, Képler eut une présomption invin- cible que la loi des aires a lieu aussi dans l’ellipse, mais il ne put alors en trouver une démonstration suffisante ; il la donna plus tard dans son Abréyé d'Astronomie copernicienne. Képler avait ainsi atteint son but, qui était d’as- sujeltir Mars aux observations; il veut faire de mème pour les autres planètes, mais ses pensions sont mal payées, et il manque de moyens: c’est ce qu'il expose à Rodolphe IT, dans sa dédicace du De Stella Martis, sous une forme allégorique vieillie, mais qui caractérise bien et l'esprit de l'époque et l'imagination de Képler : « J'amène, dit-il, à Votre Majesté, un noble pri- sonnier, fruit d'une guerre laborieuse et difficile, entreprise sous vos auspices. Et je ne crains pas qu'il refuse le nom de captif ou qu'il s'en indigne, car ce n’est pas la première fois qu'il le porte : déjà autre- fois le terrible dieu de la guerre, déposant joyeu- sement son bouclier et ses armes, s'était laissé prendre aux filets de Vulcain… « Nul n'avait jusqu'ici triomphé plus complète- ment de toutes les inventions humaines; en vain les astronomes ont tout préparé pour la lutte ; en vain ils ont mis leurs ressources en œuvre et leurs troupes en campagne. Mars, se jouant de leurs ten- talives, à détruit leurs machines et ruiné leurs espérances ; tranquille, il s'est retranché dans l’im- pénélrable secret de son empire et a dérobé ses marches savantes aux recherches de l’enremi. Les Anciens l'ont éprouvé maintes fois, et Pline, l'infa- G. BIGOURDAN — LA DÉCOUVERTE DES LOIS DE KÉPLER tigable explorateur des mystères de la Nature, l'a dit: Mars est un astre inobservable…. « Pour moi, je dois avant tout louer l'activité et le dévoüment du vaillant capitaine Tycho-Brahé qui, sous les auspices des souverains de Danemark, Frédérie et Christian, et enfin sous ceux de Votre Majesté, a pendant vingt années successives étudié chaque nuit et presque sans relâche toutes les habi- tudes de l'ennemi, dévoilé ses plans de campagne et découvert les mystères de ses marches. Ses observations, qu'il m'a léguées, m'ont aidé à bannir cette crainte vague et indéfinie qu'on éprouve tout d'abord d'un ennemi inconnu. « Pendant les incertitudes de la lutte, quel dé- sastre, quel fléau n'a pas désolé notre camp? La perte d'un chef illustre, la sédition des troupes, les maladies contagieuses, tout contribuait à augmen- ter notre détresse. Les bonheurs comme les malheurs domestiques ravissaient aux affaires un temps qui m'était dû; un nouvel ennemi, comme je vous le rapporte dans mon livre Sur l'étoile nou- velle, venait fondre sur les derrièrés de notre armée... Les soldats, privés de tout, désertaient en foule ; les nouvelles recrues n'étaient pas au fait des manœuvres, et, pour comble de misère, les vivres inanquaient. « Enfin l'ennemi se résigne à la paix et, par l'in- termédiaire de sa mère la Nature, il m'envoie l’aveu de sa défaite, se rend prisonnier sur parole, et l'Arithmétique et la Géométrie l’escortent sans ré- sistance jusque dans notre camp. « Depuis lors, il a montré qu'on peut se fier à sa parole ; il ne demande qu'une grâce à Votre Majesté. Toute sa famille est dans le ciel: Jupiter est son père, Saturne son aïeul, Mercure son frère et Vénus son amie et sa sœur. Habilué à leur auguste société, il les regrette, il brûle de les retrouver et voudrait les voir avec lui, jouissant comme il le fait aujour- d'hui de votre hospitalité, Il faut pour cela pour- suivre la guerre avec vigueur; elle n'offre plus de périls, puisque Mars est en notre pouvoir. « Mais je supplie Votre Majesté de songer que l'argent est le nerf de la guerre, et de vouloir bien commander à son trésorier de livrer à votre géné- ral les sommes nécessaires pour la levée de nou- elles troupes. » III. — DÉCOUVERTE DE LA TROISIÈME LOI. Comme on vient de le voir, il faut faire remonter à 1609, année de la publication du De Stella Martis, la découverte des deux premières lois par Képler. Quant à la troisième, il ne la découvrit qu'en 1618, après des travaux commencés dans sa jeunesse el poursuivis pendant plus de vingt-deux ans. Il fit connaitre ses premières recherches sur ce sujet en 1596, dans son Mysterium cosmographi- cum, où, dès le commencement de la préface, il expose ainsi son but : « Je me propose, lecteurs, de montrer que Dieu, en créant l'Univers el en disposant les cieux, a eu en vue les cinq corps réguliers de la Géométrie, célèbres depuis Pythagore et Platon, et qu'il a fixé, d’après leurs dimensions, le nombre des cieux, leurs proportions et les rapports de leurs mouve- ments... » Le jeune auteur ne manquait donc pas d'audace. Voici comment il pense que les choses ant été com- binées : « Prenez la sphère de la Terre pour première mesure, dit-il, et circonscrivez-y un dodécaëdre régulier: la sphère qui le contient est celle de Mars. Circonscrivez à celle-ci un tétraèdre régulier, et la sphère qui le contient sera celle de Jupiter. A celle-ci encore circonserivez un cube, et la sphère qui le renferme sera celle de Saturne. « De l’autre côté, dans la sphère de la Terre, inscrivez un icosaèdre, et la sphère inscrite sera celle de Vénus. Enfin, dans celle-ci, inscrivez un octaèdre, et la sphère inscrite sera celle de Mer- cure. » Après avoir choisi l’échelle de cet emboitage, il compare les distances résultantes à celles données par Copernic et conelut ainsi : Mars et Vénus sont bien ; la Terre et Mercure s'écartent peu; Jupiter seul est en désaccord ; mais, à une si grande distance, qui pourrait s'en étonner? Un pareil accord ne peut être l'effet du hasard, el il faut songer que les nombres de Copernic ne sont pas rigoureusement exacts : on peut les corriger de manière à tout concilier. En somme, il est satisfait n'arrive pas à une loi simple. Il revint sur le même sujet dans ses Harmonices mundi..… en cinq livres, publiés en 1619, et où il traite des polygones, de la formation des cinq corps réguliers, des facultés de l’âme, de l'Astrologie, ete. Reprenant les idées de Pythagore, il veut montrer comment l'homme, imitant le Créateur par un ins- tinct naturel, sait, dans les notes de sa voix, faire le même choix et observer la même proporlion que Dieu a voulu mettre dans l'harmonie générale des mouvements célestes. Dans un dernier chapitre, il précise même la nature des accords planétaires : Saturne et Jupiter font la basse, Mars le ténor, Vénus le contralto et Mercure le fausset. Ailleurs, il traite de politique; il veut même prouver que la Terre a une âme qui connait le du résultat, mais zodiaque. C'est du milieu de ce chaos, de ce monde de rêves, que jaillit, dans le dernier livre, la troisième des lois qui portent son nom, et il l'énonce ainsi : L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU CONTINENT ASIATIQUE La proportion entre les temps périodiques de déux planètes est précisément sesqui-altère de la proportion des distances moyennes. Ce qu’il appelle proportion sesqui-altère, c'est celle dont les termes 3 ont l’exposant 5: Ici, contrairement à ses habitudes, Képler ne fait pas connaitre l'histoire de ses idées. Nous savons seulement, par un passage célèbre, qu'il a long- temps cherché, sans doute par des voies analogues à celles qu'il a exposées dans son ysterium cosmographicum, et que la lumière est venue peu à peu. Il avait soupconné la loi dès le 8 mars 1618, mais, trompé par un faux calcul, il y avait renoncé. Il y revint le 15 mai, et alors un calcul plus exact confirma la loi. « Depuis huit mois, dit-il, j'ai vu le premier rayon de lumière; depuis trois mois, j'ai vu le jour; enfin, depuis peu de jours, j'ai vu le soleil de la plus admirable contemplation. Je me livre à mon LA MÉTALLOGÉNIE DU On s'élait généralement borné jusqu'ici à étudier les gites métallifères en eux-mêmes ou dans leurs rapports avec les roches et terrains situés à leur voisinage immédiat. Il m'a semblé depuis long- temps qu'on pouvait aller plus loin et que la dis- lribution des minerais à la surface du globe devait obéir à des lois générales qu'on pouvait se proposer d'établir. J'ai été ainsi amené à l'idée des provinces mélallogéniques, ayant chacune leur type caracté- ristique déterminé par la tectonique et la pétro- graphie de la région considérée, et je me suis allaché, d'abord à classer, puis à expliquer en les comparant les unes aux autres, ces provinces mé- tallogéniques pour l'ensemble de la Terre. Après avoir fait autrefois une première application de celle thèse à l'Afrique, j'ai, dans ces dernières années, étudié à cet égard l’ensemble du continent asiatique. Les principaux résultats ainsi obtenus vont être exposés brièvement ici”. En principe, nous allons voir comment les carac- tères des diverses provinces métallogéniques ou les {vpes régionaux de gites métallifères sont déter- minés par l'âge, la nature et la profondeur origi- nelle des accidents tectoniques que cette province a subis. Nous constaterons l'influence différente des ® Le développement de cette étude forme un ouvrage de 816 pages in-»° sur La Géologie et les Richesses minérales de l'A Paris, Béranger, 1911), On trouvera dans cet ouvrage le détail des observations que nous devons nous contenter de résumer ici en deux mots. enthousiasme; je veux braver les mortels par l'aveu ingénu que j'ai dérobé le vase d'or des Égyptiens pour en former à mon Dieu un taber- nacle, loin des confins de l'Égypte. Si vous me pardonnez, je m'en réjouirai; si vous m'en faites un reproche, je le supporterai. Le sort en est jeté, j'écris mon livre; il sera lu par l’âge présent ou par la postérité, peu importe : il pourra attendre son lecteur. Dieu n'a-t-il pas attendu six mille ans un contemplateur de ses œuvres? » Et il termine son livre par une prière : ago tibi, Creator Domine… Ainsi se trouvaient établies les trois lois qui régissent les mouvements célestes, bien justement appelées lois de Képler : on sait qu'elles condui- sirent Newton au principe de la gravitation univer- selle, base de l’Astronomie moderne. Gratias G. Bigourdan, Membre de l'Institut et du Bureau des Longitudes, Astronome à l'Observatoire de Paris. CONTINENT ASIATIQUE plissements ou des dislocations disjonctives, celle des manifestations éruptives profondes ou super- ficielles, et nous arriverons à l'idée que chaque type de métallisalion correspond à certaines condi- tions de milieu, elles-mêmes provoquées en moyenne par la position, dans une certaine zone verticale localisée, des massifs disloqués ou des chaines plissées. Autrement dit, un type de gise- ment que nous observons dans nos travaux de mines n'est pas destiné à se continuer indéfini- ment en profondeur, de même qu'au-dessus de la surface actuelle il ne se prolongeait pas indéfini- ment, dans les terrains enlevés depuis par l'érosion, Jusqu'à la superficie qui existait au moment où il s'est formé. Au moment où le gisement s'est cons- ütué, il était limité en haut comme en bas. Si nous le constatons rarement d'une manière directe, c’est que la profondeur de nos travaux miniers est insignifiante par rapport aux épaisseurs de 30 à 10 kilomètres sur lesquelles ont pu se répartir au début les métallisations; mais nous arrivons indi- à la même conclusion en comparant deux ou plusieurs régions que nous savons avoir élé diversement érodées et qui, par conséquent, nous offrent, au voisinage du jour, quelque chose comme des sections horizontales de gisements pareils faites à des hauteurs différentes. Cela, c'estla théorie très générale dont n'importe quel pays aurait pu nous montrer la vérification et à laquelle il est étonnant qu'on n'ait pas songé plus rectement L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU tôt. Plus particulièrement, l'Asie nous offrira des conditions favorables : 1° pour manifester le con- traste entre le Lype des mélallisations profondes réalisées par imprégnalion diffuse dans le relour en profondeur qui accompagne les plissements et celui des incrustalions plus superficielles dues à des dis- locations disjonctives ; 2° pour faire ressortir les effets d'un caractère continentalqui a été très ancien- nement aceusé par de vastes parties de ce continent. _pétrographiques Ï. — DISTRIBUTION GÉNÉRALE DES PROVINCES MÉTALLOGÉNIQUES EN ASIE. Restant d'abord dans les généralités, si l'on vou- lait représenter par un schéma grossier la facon dont nous concevons le problème métallogénique en prenant seulement ses exemples en Asie, voici comment on pourrait synthétiser les faits : 1° 11 faudrait d'abord imaginer, à la base d’une ré- gion métallisée, par exemple vers 10 à 30 kilomètres de profondeur originelle, une zone à cristallisations rocheuses de profondeur, par conséquent à (ypes assimilables au granite, avec auréoles de mélamorphisme gneissique. Ce cas, dont l'observation est d'autant plus fréquente que la région considérée a été plus anciennement et plus fortement érodée, trouve donc ses meilleures applications dans les plates-formes primitives, dont les types asiatiques sont le continent de l'An- gara en Sibérie, le continent Gondwana dans l'Inde, le massif sinien de la Corée et du Pétchili, ete. Là, les métallisations affectent égale- ment des types qui, pour nous, sont des types de profondeur : tout d’abord, des imprégnations pyri- teuses extrêmement multipliées, qui, par endroits, ont rempli, de leurs innombrables veinules inter- stratifiées, les terrains schisteux, et qui ailleurs ont pu se condenser en de grandes masses, dont nous àssimilons la cristallisation, homogène sur une grande étendue, à celle des magmas grani- tiques. La présence fréquente de l'or, parfois celle du euivre ou du nickel, dans de lelles provinces mélallogéniques, leur prèle un intérêt particulier. Il peut arriver également que les roches grenues soient accompagnées d'un départ, d'une concen- tration plus localisés, dans leur masse même ou à son contact immédiat : départ ayant exigé une moindre intervention de la vapeur d’eau et des minéralisateurs volatils, « de la pneumatolyse », ayant donc été presque exclusivement un effet de la métallurgie ignée. Ces Lypes, fréquents en Scan- dinavie, sont relativement rares dans les régions asiatiques. Enfin, il est arrivé localementque de tels massifs du anciens aient été redisloqués à une époque ullé- rieure el aient alors donné lieu à des manifesta- CONTINENT ASIATIQUE tions éruplives plus récentes. On doit, le long de ces zones de dislocation, s'attendre à trouver les mémes gisements filoniens qui, dans la période de dislocation en question, pouvaient se multiplier un peu plus loin et dont nous allons voir bientôt la forme. Des dislocations de ce genre, très fréquentes sui les massifs hercyniens, ont, par exemple, donné lieu à certaines zones métallifères tertiaires dans notre Plateau Central. Elles sont plus rares dans les plates-formes primitives de l'Asie, dont la conso- lidation, étant plus ancienne, est plus parfaite. Il en existe cependant des cas dans l'Inde. 2° En second lieu, à une hauteur plus grande dans l'écorce, plus près de la surface, nous admet- tons qu'il s'est produit une abondance spéciale, d'abord de ces roches si caractéristiques, à quartz isolé blanc, auxquelles on donne en France le nom de granulites, puis de granulites exceptionnelles à Llendance microgrenue et à allure filonienne, enfin de microgranulites proprement dites passant, dans les parties encore plus hautes, à des diabases ophitiques, porphy- rites, ete. Ces trois groupes de roches, qui ten- dent toutes déjà à se former en filons ou en dykes intrusifs plutôt qu'en masses continues et homo- gènes, sont particulièrement bien représentés sur toute la longueur des chaines. dites hereyniennes, dont nous trouvons les représentants asiatiques dans l'Oural, la steppe kirghise, l’Allaï, l'Indo- Chine et la Chine sud-occidentale, la presqu'ile de Malacca, et même sur le versant oriental du conti- nent hindou, ete. Aux granulites en masse, que nous considérons comme occupant la base de ce et souvent à mica groupe, sont souvent associés, d'une facon parti- culièrement nelle, les gites d'étain, et le sud-est de l'Asie nous offre à cet égard un champ d'études excellent. Aux granulites microgrenues, qui consti- tuent un cas assez particulier, se relient ailleurs cer- tains gites d’antimoine, abondants dans le Plateau Central francais, dont nous n'avons pas d'exemple bien caractéristique ici. Enfin nous rattachons à la série des microgranuliles plus superficielles, qui passent souvent à des types ophitiques ou meme microlithiques (diabases ophitiques et porphy- riles), le groupe si abondant des filons concré- tionnés complexes plombo-zincifères, plus rare- ment cuprifères, dont, en Europe, la Mesela espa- gnole, le Plateau Central francais, les Vosges et la Saxe fournissent des exemples bien connus. Les types asiatiques correspondants se rencontrent dans la steppe kirghise, la Transbaïkalie, quelques parties du Yunnan, du Sé-tchouan, du Tonkin, ete. Le long de certaines roches de ce groupe, il s'est parfois produit des minerais de contact du type Banat, pouvant êlre associés à des roches d'âge 976 L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU CONTINENT ASIATIQUE tantôt hercynien, tantôt (et plus souvent) tertiaire. Nous retrouvons, par exemple, en Asie, dans le Turkestan russe, de semblables auréoles de con- tact dans une zone où il existe, en même temps, d'assez nombreux filons plombo-zincifères, proba- blement tertiaires. 3° Plus haut dans l'écorce, nous arrivons à ce que nous croyons être la base des chaînes récem- ment plissées, dans une zone où, le long de dislo- cations qui ne sont pas nécessairement associées aux plissements, mais qui ont pu les morceler par endroits, se sont manifestés des épanchements rocheux à types microlithiques. Là apparaissent les grands et dykes d'andésite, tra- chyte, etc. On peut constater, dans une foule de régions étrangères à l'Asie, notamment sur toute la longueur occidentale du continent américain, la richesse en minerais de zones semblables, à la con- dition qu'on n'ait pas affaire à une chaîne simple- ment plissée, mais à une portion disloquée d'une telle chaine plissée, et que l'érosion ait eu le temps de détruire les parties superficielles du plissement ou de l'éruptivité, regardées toutes deux par nous comme stériles. Les chaines dont le plissement remonte à l’époque crétacée, ou au début du ter- tiaire, semblent présenter, à cet égard, des cas particulièrement favorables. On y observe, outre les filons complexes analogues à ceux de la zone précédente, un développement tout spécial de filons auro-argentifères à gangue quartzeuse et de ces filons quartzeux cuprifères qui représentent un départ plus avancé, plus élevé, des filons quartzeux stanno-cuprifères, associés, dans un groupe précé- massifs dent, aux granulites. Les Lypes classiques de ces filons se trouvent au Colorado, au Montana, au Mexique, ete. L’Asie nous fournit d'excellents spé- cimens du type Colorado dans le Japon. Nous ren- controns, en Arménie et dans l’Anti-Caucase, des formes analogues, mais peut-être parfois un peu supérieures dans la coupe de notre schéma (parce que plus récentes) : le [type des gisements cuivreux en connexion avec des diabases, andésites, etc. Anti-Caucase), et le type plus complexe plombo- zincifère, auquel correspondent les gîtes algériens et, plus généralement, méditerranéens. 4° Entin, les chaînes plissées proprement dites, dans lesquelles les dislocations conjonetives, les décrochements et les coulisses d’effondrement ne jouent qu'un rôle insignifiant, se présentent fort ce qui concerne les gites métallifères, surtout si l’on fait abstraction des minerais remon- mal en tant à une phase de cristallisation et de plissement antérieure, qui peuvent reparaître accidentelle- ment, au cœur de Ja chaîne, sur des noyaux ramienés au jour après leur métallisation pro- fonde. L'absence complète de minerais, qui carac- térise notre Jura, se retrouve dans les chaînes analogues à plissements réguliers et rectilignes, qui occupent le versant N.-E. du Caucase et, de même, dans certaines parties de l'Himalaya. La plupart des gisements miniers du Caucase proprement dit se trouvent, comme ceux des Alpes, le long d’un noyau ancien qui occupe la crête. L'Anti-Caucase, au contraire, présente le type des gisements cuivreux associés à des diabases mélaphyriques qui rentrent dans notre troisième groupe. Nous devons également rappeler que les zones à volcans actuels sont, pour une raison pareille, pauvres en minerais, sauf là où ces minerais remontent à une phase éruptive antérieure (comme dans les cas du Japon et de l'Arménie, qui viennent d'être cités). Aucun gisement mélallifère important n'est produit par un volcan actuel. Dans "notre théorie, cela tient à ce que la zone de cristallisation métallifère, qui correspond à un tel volcan, est limitée avant d'arriver à la surface et ne pourra devenir visible qu'ultérieurement, après un travail d’érosion analogue à celui qui s’est produit ailleurs depuis une des phases du Tertiaire. Les axes vol- caniques de l'Asie, si curieusement continus, si bien tracés dans l'Insulinde, sont instructifs à cet égard, comme ils le sont aussi pour nous faire supposer l'absence de relation directe entre le pétrole et un tel volcanisme superficiel. La profondeur originelle, dont nous venons de parler, n’est pas seule à intervenir et seule à difré- rencier des provinces métallogéniques d’après leur äge de formation. Il faut aussi tenir compte de l'évolution qui a pu s’accomplir, avec le temps, dans l'allure des phénomènes orogéniques. Nous insistons sur celle idée que la métallisation est généralement liée, ou à un retour en profon- deur avec prédominance des phénomènes ignés (groupes 1 et, en partie, 2), ou, beaucoup plus sou- vent (groupes 3 et 4), à des accidents de dislocation avec prédominance de phénomènes hydrother- maux (les plissements proprement dits étant sté- riles). Or, nous croyons, d'autre part, que les dislo- cations importantes et étendues sont une forme re- lativement récente des manifestationsorogéniques, ayant eu une tendance à s'accuser de plus en plus à mesure que l'écorce se consolidait davantage et devenait moins apte à se prêter, par un ramol- lissement profond, par une refusion même, aux plissements proprement dits. Nous sommes done amené à penser que beaucoup de gisements, con- salés sur une chaîne de plissement ancienne, y ont élé produits, non au moment de son plissement, mais dans des dislocations ultérieures, résultant d’un,mouvement orogénique, dont la forme plissée s'était localisée ailleurs dans une zone plus étroite: L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU 977 CONTINENT ASIATIQUE en sorte qu'il faut distinguer avec soin, dans le cas de telles zones redisloquées, l’âge de la métallisa- tion de celui de la chaine. Nous avons montré, dans un travail antérieur’, que les sources thermales existent seulement dans les zones de la superticie terrestre où des disloca- lions récentes leur offrent une issue rapide, non encore obslruée, vers le jour. Il à toujours dû se produire quelque chose d’analogue pour les filons proprement dits, qui, même en faisant abstraction de la profondeur érodée, ont dû être rares, dès le début, sur les anciennes plates formes peu dislo- quées, à mélallisation ancienne diffusée dans toute leur masse, landis que leur rôle s'accentuait dans les chaines récentes. Les deux idées se trouvent ainsi nous conduire à une conclusion pareille. Dans tout ceci, il n’a été question encore que des gites non altérés, tels qu'ils se sont primitivement déposés sous leur forme originelle. Si nous exami- nons maintenant le rôle des alférations el des remises en mouvement, qui a souvent exercé, sur toute la partie haute, seule praliquement accessible, des gisements, une influence si considérable ?, nous pouvons également établir une certaine relation entre l'intensité de cette altération et la répartition des gites par provinces métallogéniques, tout à l'heure considérées. Celte altération, sous sa forme récente, dépend, en effet, de ia position actuelle du niveau hydro- statique, qui, lui-même, est fonction directe du relief lopographique. fl faut donc, en principe, pour que cette altération prenne une réeile importarce, que le relief du sol soit encore très accidenté et, par conséquent, dans la majeure partie des cas, que son origine soit récente. Les zones de plisse- ment tertiaires, ou les parties des plus anciennes chaines soumises récemment à des dénivellalions résultant de dislocations par fractures, seront parti- culièrement propres à mettre en évidence ces phéno- mèênes d'alléralion, que nous trouverons donc déve- loppés, d'une manière tout à fait nette, le long des chaines et des dislocations tertiaires (prolongeant, pour la plupart, la zone méditerranéenne d'Europe) qui traversent l'Asie. L'Asie Mineure en offre quel- ques types, qui méritent de devenir classiques : celui de Bulgar Maden notamment.On retrouve des condi- tions comparablesen Arménie, dansle Petit Caucase, en Perse, dans l'Himalaya, au Japon, ete. Les ancien- nes plales-formes, au contraire, sont le plus souvent remarquables par leur peu d'altération superficielle, qui, lorsqu'on n'y réfléchit pas, étonne d'abord dans des pays généralement couverts de tourbières, de marécages et de lacs, mais qui, en réalité. tient ! Traité des Sources thermo-minérales, p. 213 et suiv, ? Contribution à l'étude des gites métallifères. Du rôle des phénomènes d'altération (Ann. d. M., aout 1897). précisément à ce que le niveau hydrostalique, par lequel cette stagnation des eaux est entretenue, se trouve presque confondu avec la superficie, Des pays comme la Sibérie (ou, en d’autres continents, la Scandinavie, le Canada) se font remarquer par l'abondance de leurs gîtes pyriteux, prolongés sans oxydation nolable, jusqu'au jour. Il faut, d'autre part, remarquer, comme nous avons toujours eu soin de le faire, que des altéra- tions semblables ne sont pas restreintes à la période actuelle ou très récente, mais ont pu, comme toute autre manifestation d'origine continentale, se pro- duire pendant toute la succession des temps géo- logiques. Si leurs effets anciens sont moins visibles, c'est pour la même raison qui fait que les formalions continentales, d'une facon générale, ontété rarement conservées dans les terrains anciens. Mais cette ob- servalion n'empêchepasquede telsrestes, survivants d'une période continentale ancienne, puissent avoir étéexceptionnellement préservés, et l’on doit signa- ler, à cet égard, le cas, plus fréquent qu'on ne le croirait, de voussoirs anciens ayant été enfoncés en profondeur après leur altération au voisinage du jour et s'étant trouvés par là échapper à une des- truction par érosion, qui faisait disparaître au voi- sinage les autres témoins, restés plus en saillie, du même phénomène. Des exemples de ce genre se présentent relativement souvent sur des horsts hercyniens : ceux-ci, en même temps qu'ils se trouvaient découpés et mis en relief par leurs accidents périphériques, ayant souvent subi des effondrements internes. On en rencontre des cas probables en Asie. Plus rares dans les plates-formes primitives, ils peuvent cependant, à l'occasion, s'y présenter aussi. L'application des idées générales qui viennent d'être succinctement exposées demanderait, pour être étendue à tout le continent asialique, des déve- loppements hors de proportion avec l'étendue de cet article. Nous nous bornerons donc à envisager l'Asie Russe (Sibérie, Oural, Caucase et Turkestan russe), qui nous offrira déjà à elle seule quelques types bien distincts de provinces métallogéniques, appartenant: les uns à des massifs primitifs, les autres à des chaînes de plissement hercyniennes et tertiaires. IT. — SIBÉRIE. En Sibérie, on peut établir une première grande classification tectonique des diverses régions sui- vant l'âge des plissements principaux dans la région considérée. Ainsi que nous venons de le faire remarquer, cet âge plus ou moins ancien a surtout pour conséquence une érosion plus ou moins avancée : par conséquent, une profondeur plus ou moins grande de la section horizontale que 978 * L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU CONTINENT ASIATIQUE cette érosion met aujourd'hui au jour: autrement dit, des portions de gisements utilisables pour nous. Il faut ajouter, ce qui est non moins impor- tant, une seconde distinction basée sur l'existence ou la non-existence des fractures de dislocation produites, après les plissements, par le contre- coup disjonctif des mouvements réalisés à distance dans une chaine plissée ultérieure. En se bornant tout d'abord à envisager ces deux points principaux, on peut, géologiquement et en dehors de toute considération métallogénique, distinguer, en Sibérie, des plissements apparte- nant aux quatre groupes : précambrien, calédo- nien, hercynien, tertiaire. 1° Les véritables zones précambriennes sont peu visibles, étant d'ordinaire masquées par un man- teau horizontal de terrains primaires, et nous fournissent peu de minerais utiles. D'ailleurs, là où elles se présentent, leurs conditions de métamor- phisme et d'imprégnation métallifère ne diffèrent pas sensiblement de celles qui ont pu être réalisées dans des chaines ultérieures, telles que la chaîne calédonienne, également ramenées en profondeur par un plissement très ancien et pénétrées de magmas ignés à structure granitique, en même temps que de fumerolles métallisantes. Pour la mé- tallogénie, ce n’est pas, nous l'avons indiqué en pas- sant, l’âge des phénomènes qui détermine leur type, mais les conditions de profondeur et de dislocation auxquelles cet âge correspond en moyenne; et, du moment que des terzains ont pris par métamor- phisme le facies archéen, quel qu'en soit. l'âge réel, ils deviennent pour nous équivalents à de l'archéen proprement dit. Nous ne pouvons donc pas établir de distinction essentielle entre les deux premiers groupes, auxquels nous rattacherons le type de gisements aurifères, si fréquent en Sibérie comme dans tous les semblables massifs anciens, qui consiste en imprégnations interstratifiées de pyrile aurifere, et en veines lenticulaires de quartz avec pyrite aurifère également intercalées dans la stratification : imprégnations et lentilles dont nous avons eu ailleurs l'occasion de montrer lelien d'ori- gine avec les granites. C’est le type métallogénique ordinaire des gisements de l'Iénisséi et de la Léna. Ils sont généralement trop disséminés sous leur forme primitive pour être utilisables autrement qu'après destruction et remaniement dans les placers. À plus forte raison encore que l'or, les métaux qui peuvent se trouver associés avec lui, à l'état d’imprégna- lions sulfurées, sont d'habitude, en ce genre de gites, trop peu abondants pour être exploitables dans les conditions industrielles de la Sibérie et n'ont pas été signalés. 2° Il y à lieu d'envisager ensuite les zones hercy- niennes plissées, mais peu ou pas disloquées posté- \ rieurement. Sur ces zones plissées, on se retrouve, | à la profondeur près, dans des conditions ana- | logues à celles que nous venons d'indiquer pour les chaines plus anciennes, et l’on pourra donc rencontrer de même des imprégnations, prenant ici la forme de filons-couches, dont l'Altaï offre des exemples instructifs. Mais, la profondeur ori- ginelle ayant élé moindre, on rencontrera, à côlé du type pétrographique des granites, le tvpe, plus superficiel, des microgranulites et porphyrites, auxquelles commencent à s'associer les métaux du groupe plombo-zincifère, avec tendance à se | concentrer sur des fractures, à l'état de filons | (dont les filons-couches, comme ceux de l'Altaï, analogues à ceux des Pyrénées, sont déjà un pre- mier exemple). Ces mêmes zones pourront nous offrir des minerais de ségrégation ferrugineux associés à des roches acides, tels que ceux de | l'Oural ou du sud de Minoussinsk. A cet ordre d'idées se ratlachent les gisements de la steppe kirghise, de l'Allaï russe, de l'Alataou de Kouznetsk et des monts Sayan. 3° Des zones hercyniennes, redisloquées par les mouvements tertiaires et divisées par ceux-ci en séries de horsts et coulisses d’effondrements, avec fractures filoniennes, nous offrent le genre de gise- ments auquel nous sommes habitués sur la plu- part de nos voussoirs hercyniens de l'Europe cen- trale, dans le Plateau Central, les Vosges, la Bohème et la Saxe : système de filons à sulfures complexes, dont nous avons ici les meilleurs types dans le district de Nertchinsk et en Transbaïkalie. Des gisements d'or peuvent s'y associer, nolam- ment en Transbaïkalie, sous la forme de filons analogues à ceux du groupe auro-stannifère, avec association aux granulites el aux aplites. À mesure les venues éruptives tertiaires tendent à prendre de l'importance dans ce groupe, il peut S'y joindre des minerais récents d’un type encore plus superficiel, tels que ceux rattachés aux rhyo- | lithes, andésites, elc., dont nous commencons à | trouver des exemples en nous rapprochant de la mer d'Okhotsk, et qui annoncent là le (ype destiné à dominer au Japon et dans les guirlandes d'îles de l'océan Pacifique. En ce qui concerne spécialement les gisements d'or, l'étude des minerais sibériens fait ressortir les deux conditions bien différentes dans lesquelles des gites métallifères, autres que les ségrégations inmédiales de roches éruplives, ont pu, selon nous, se former, conditions qui, ramenées à leurs que | tout à fait essentiels, peuvent se résumer | 1° retour en profondeur d'une série sédi- | mentaire par l'effet de plissements orogéniques et imprégnation de ces sédiments réalisée dans la profondeur par un départ des magmas éruplifs trails ainsi BL. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU CONTINENT ASIATIQUE qui, dans celle profondeur, se trouvent, à leur voisinage, en situation de les métamorphiser; 90 dislocations disjonelives d’un compartiment qui n'est plus susceptible de se plisser, ouverture de fractures pouvant jouer le rôle de failles et, dans de telles fissures, cristallisation de sels provenant d'eaux thermales, également minéralisées en pro- fondeur par un départ éruplif, mais ayant pu s'écarter davantage de ce magma, monter davan- tage vers la superficie, sans cependant, à notre avis, l’atteindre d'ordinaire. Les métallisations ne portent pas seulement ici sur des sédiments comme dans le premier cas, mais aussi sur les roches cristallines, fût-ce les plus compactes, du moment qu'elles ont été disjointes; de plus, la nécessité d'un « retour en profondeur », au moment même de la métallisation, n'apparaît, pas autant, quoique nous venions de considérer une certaine profondeur comme nécessaire. Mais il semble, en général, que les métallisations, comme les manifestations pétro- graphiques dont elles sont le corollaire, aient été alors le plus souvent provoquées par le jeu relatif dans le sens vertical des compartiments juxtaposés ayant déterminé, soit des refusions internes, soit tout au moins des déplacements des magmas fondus. On à une image de ces deux modes de métalli- sation, où plutôt d'ouverture de vides destinés à être mélallisés, en comparant ce qui se passe lors- qu'on essaie de rompre, d’une part, un schiste flexible ou un agrégat instable, dont les plans de stratification et les surfaces de joints facilitent la lissuration qui à tendance à les suivre, et, d'autre part, une masse solide homogène, qui peut du reste être composée de fragments complètement res- soudés. Dans les deux cas, nous arrivons, pour les métal- lisations, à une idée analogue à celle qui domine aujourd'hui l’orogénie. De même que les grandes chaînes montagneuses se sont réalisées en profon- deur pour surgir après coup, de même, el en dépit de l'illusion que peut produire le volcanisme par sa violence extérieure, les grandes formalions de minerais et de roches cristallines doivent être des manifestations profondes. III. — OuraL. Les données tectoniques qui peuventfaire prévoir la métallogénie de l'Oural sont, avant tout, les sui- vantes : 1° L'Oural est une chaîne hercynienne Nord-Sud, superposée, comme un pli posthume, à de plus anciens plissements de même direction et faisant partie d'une très large zone plissée, qui commence dès la plate-forme scandinave, à l'Ouest, et se continue probablement sous le Quaternaire, à 979 l'Est, vers la plate-forme sibérienne d'Irkoutlsk; 2 Il ya eu, sur cet alignement Nord-Sud, dont la direction ne nous élonne que par une géntralisa- tion trop rapide des observations failes dans l'Europe centrale, des premiers plis précambriens, reproduits pendant le Silurien, puis vers le milieu du Carbonifère, à la fin du Permien et ayant pu avoir encore quelques plus faibles échos ultérieurs ; 3° Tant par suite de sa superposition aux plis anté- rieurs que par sa silualion au centre d'une immense zone partout plissée de même, l'Oural n'affecte pas les caractères d’autres (roncons hercyniens, qui se sont trouvés pris et laminés entre deux voussoirs primilifs très rapprochés. Son ‘éloignement des accidents alpins et postérieurs l’a mis également à l'abri des dislocations provoquées, en d’autres cas, sur des horsts hercyniens, par le choc des grandes vagues venues des Alpes ou de l'Himalaya. Malgré les mouvements plus récents dont l'Oural peut présenter la trace locale, on ne doit donc pas s'attendre à y trouver le type des larges cassures métallisées qui constituent les filons d'incrustation de la Saxe, du Harz, de la Bohème, de la Meseta espagnole, ele., et dont nous avons vu un cerlain équivalent dans la steppe kirghise, l'Allaï, le dis- triet de Nertchinsk, etc., pas plus qu'on n'y observe les roches d'épanchement volcanique, ni les bassins tertiaires effondrés qui sillonnent ces vieux massifs. Les gisements métallifères doivent, en principe, y remonter aux mouvements dévoniens et carboni- fères, — sinon à des accidents antérieurs ayant pu laisser déjà leur empreinte, comme on l’'observe dans la plupart des chaines plissées, où il existe des manifestations attribuables à deux périodes dis- linctes. L'érosion à puissamment travaillé sur ces gise- ments primaires; elle a surtout entaillé le versant Est de l'Oural, réduit presque à une pénéplaine, où se sont trouvées mises à nu les trainées de roches profondes avec minerais connexes.Les gisements ot donc toutes les chances d'appartenir là à des types de profondeur, sans être toutefois aussi profonds que dans les plates-formes primitives deScandinavie ou du Canada. Nous v rencontrons, en effet, des formations, dont les principales se rattachent à la mise en place des magmas à structure granilique ou microgranilique et aux auréoles de mélamorphisme qui accom- pagnent cette mise en place dans les sédiments encaissants, notamment dans les calcaires. Les principaux de ces gisements, ceux de magnétite avec chalcopyrite, peuvent être considérés comme remplissant, au contact des magmas microsyéni- tiques dont ils dérivent, et le long des enclaves prises dans ces magmas, des fractures ayant sou- vent l'allure de filons-couches, avec accompagne- 9850 ment ordinaire de roches à grenat et à épidote dues à la réaction interne sur les calcaires encaissants. Ils se différencient par là fortement des minerais assez analogues que l'on trouve en Scandinavie et que l’on a souvent élé tenté de leur comparer : minerais dérivés de roches très basiques et for- mant, au milieu d'elles, des amas de ségrégation, comme les fers chromés des serpentines. Dans l'Oural, la zone des roches basiques est distincte de celle des gisements de fer et située en moyenne plus à l'Ouest; elle ne renferme ni fer ni cuivre, mais d'autres métaux de ségrégation basique, comme le platine, l'or ou le chrome. Au contraire, les magnétites de l'Oural ne présentent ni le nickel, ni le titane habituels aux ségrégations scandinaves; ‘ on leur trouverait des équivalents dans les cica- trices tertiaires à suture de roches cristallines dont le Banat fournit l'exemple Le plus classique. Un type de gisements tout à fait différents, qui existe encore dans l'Oural, présente des caractères filoniens plus accusés, sans ressembler pourtant en aucune facon aux filons concrétionnés du groupe plombifère, que nous considérons comme ayant occupé en moyenne une position plus élevée dans la hauteur des plissements orogéniques. Ce sont des craquelures minces et multiphiées, ayant plus ou moins l'allure d'un stockwerk, comme en pré- sentent les gites stannifères (dont il n'existe pour- tant pas ici de représentant) : filons dont le minerai principal est un minerai d'or, qui apparaît à Bé- rézovsk, Kotchkar, ete., comme cela lui arrive très souvent ailleurs, dans des conditions analogues à celles du groupe stannifère, en dérivations presque immédiates d'un magma acide, en départ chloruré ou fluoré des granulites. On semble voir là, autour des magmas à structure granilique (syénites et microsyénites), qui ont dû provoquer une auréole immédiate de chlorures de fer donnant les magné- tites, une auréole un peu plus excentrique (c'est, en effet, sa position géographique), dans laquelie les départs de roches plus chargées de carbonates alca- lins, à magma plus fluide, comme les granulites, de fumerolles aurifères fluorées, avec quelques sulfures, comme la galène, ont élé accompagnés commencant à apparaitre. Enfin, certaines régions de l'Oural, dont la plus célèbre celle de Miask et des monts Ilmen, offrent toute cette famille de minéraux remarqua- blement caractérisés, qui se rattachent, eux aussi, les émeraudes, les est aux magmas granulitiques topazes, les corindons, etc. En tout cela, la métallogénie de l'Oural présente: lantôt certains caractères qui la rapprochent des gisements tout à fait primitifs (ségrégations ba- siques, gemmes associées aux granulites comme au Canada, etc.), tantôt des caractères qui annoncent L. DE LAUNAY — LA MÉTALLOGÉNIE DU CONTINENT ASIATIQUE déjà les phénomènes filoniens proprement dits, mais en connexion plus intime avec les magmas éruplifs que ne le sont les filons plombifères et mercuriels. Les types des filons ouraliens peuvent accuser une zone de cristallisation plus profonde que ces derniers, el, par conséquent, une prédomi- nance des métaux dont les fumerolles se sont dé- posées les premières dans ce départ, c'est-à-dire les fumerolles chlorurées et fluorées, tandis qu'on y rencontre moins la trace de fumerolles sulfurées (plomb, zine, ete.). On peut ajouter que l'érosion très avancée de l’Oural, qui à déterminé l'aspect orographique du pays, se traduit par une altération très forte des gisements superficiels : altération leur donnant par- fois, comme dans le cas des gites de cuivre, leur forme industrielle, mais ne descendant pas à des profondeurs aussi grandes que dans les pays dont le relief est resté plus accidenté. IV. — CAUCASE. La métallogénie du Caucase confirme l'idée gé- nérale que l’on peut se faire en étudiant, dans le même ordre d'idées, les autres chaînes récemment plissées, comme les Alpes, le Jura, les Pyrénées, etc. Tant qu'on reste dans la véritable chaîne de plis- sements récents, indépendamment des noyaux plus anciens que cette chaîne a pu s’incorporer, les minerais sont rares. Quand ils apparaissent, c'est souvent sous la forme de filons-couches ayant une tendance fâcheuse à s'éparpiller. Entre les deux formes qu'ont pu prendre les manifestations tectoniques, plissements et déplacements verticaux, les premiers impliquent évidemment d’une facon bien plus directe une compression et correspon- dent, en outre, à une zone de l'écorce plus élevée, plus superticielle : double raison pour être plus pauvres en métaux. Sans doute, quand on se hasarde à de semblables réflexions générales, il faut tenir compte des conditions industrielles qui rendent plus difficile l'exploitation des minerais situés à de fortes altitudes, surtout dans des chaines peu explorées comme le Caucase, et qui peuvent contribuer à les faire paraître rares. Néanmoins la remarque semble à retenir, et l'on en retrouverait l'application dans l'Himalaya. Elle apparait avec une nelteté spéciale quand on envisage une zone simplement plissée, sans intervention de roches éruplives ni retour à la surface de noyaux anciens disloqués : zone dont le Jura français fournit le meilleur type et dont le Daghestan nous donne ici un certain équivalent. I suffit de reporter, sur une carte géologique du Caucase, les principaux gisements mélalliféres connus, pour voir le rôle joué dans la métallogénie D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 981 de cette chaine : d'un côté, par la zone cristalline et paléozoïque, qui constitue, suivant la crête, un noyau ancien, où la plupart des filons du Caucase proprement dit sont concentrés; de l'autre, par des roches demi-profondes du groupe des diabases, inélaphyres, andésiles quartzifères, etc., qui ont éié accompagnées par de très importantes mani- festations cuprifères, formant la principale richesse métallique de l'Anti-Caucase. On connait, en outre, quelques rares filons dans les sédiments secondaires plissés, mais seulement assez pour montrer la possibilité théorique d’un phénomène qui n'a donné lieu à aucun gisement important. V. — TURKESTAN RUSSE. Le Turkeslan russe peut être divisé pour notre sujet en deux régions distinctes : l’une vers l'ouest et le sud, à plissements réguliers, qui ne renferme, en fait de gisements métallifères connus, que des poudingues aurifères tertiaires, produit d’une des- truction exercée sur des filons antérieurs situés probablement plus à l’est; l’autre, toute différente, et très métallisée, au nord du Syr-Daria, dans le anassif montagneux situé entre Tachkent, Kokand æl le lac Balkach, sur le prolongement du Tien-chan. Ici la tectonique nous montre le conflit général de deux directions N.-E. et N.-W., qui se rencontrent en une série de redents, de dents de scie successives, dans des conditions que nous sommes habitués à voir, en des pays très divers (Hartz, Plateau Cen tral, elc.), provoquer souvent, par un effet de lor- sion fait, disjonctive, des dislocations métallisées. En Mouchketov a pu dresser, des filons contenus dans ce massif, de longues listes. Mais les gisements peut-être les plus typiques de celte région appartiennent à ces auréoles de con- act autour des syénites ou diorites encaissées dans les calcaires, dont le Banat fournit les types les plus classiques et dont nous venons de retrouver un équivalent probable dans l'Oural. Cette chaine, avec ses gisements de sel et de pétrole tertiaires el ses minerais de contact dans des terrains cré- tacés ou tertiaires, offre donc d'assez nombreuses analogies métallogéniques avec certaines régions des Carpathes et contraste, au contraire, avec la steppe kirghise, comme avec la plate-forme primi- tive de l’Angara. L. De Launay, Ingénieur en chef des Mines, Professeur à l'Ecole natiouale supérieure des Mines. REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE ÏJ. — ANESTHÉSIE LOCALE. A diverses reprises nous avons eu l'occasion, 2) que l'auteur y aborde. On ne peut dire qu'il la traite à proprement parler, puisqu'une méthode n'est pas exposée, et que cette méthode est celle de Kummer. IL était, il est vrai, impossible de faire autre- ment, tout souci de rester élémentaire mis à part : l'introduction des corps circulaires et des idéaux au- rait exigé, à elle toute seule, un volume aussi impor- tant que celui qui nous occupe. Ajoutons, d'ailleurs, qu'on trouvera dans celui-ci des résultats déjà fort remarquables, obtenus par des moyens élémentaires et notamment par l'emploi de certains déterminants simples. Malgré tout, ce chapitre est peut-être celui de tous qui montre le mieux combien la Théorie des nombres est une branche difficile des Mathématiques, et cam- bien il faut se résigner à employer, pour l'aborder, tous les moyens dont la science dispose. Jacques HaDAMARD, Professeur au Collège de France, Examinateur d'admission à l'Ecole Polytechnique. ET INDEX Blancarnoux (Paul), /ugénieur civil, Ex-second maitre chargé de chauflerres. Maladies de chau- dières industrielles et de leurs accessoires. 1 vol. in-8° de 200 pages, avec 18 figures. (Prix 8 fr.) Lucien Laveur, editeur. Paris, 4910. M. Blancarnoux a entrepris de condenser en un volume « des documents essentiellement pratiques qui sont susceptibles d'intéresser les 60.000 propriétaires français d'appareils à vapeur, nombre qui. avec les ingé- nieurs, contremaitres et chauffeurs, atteint plusieurs centaines de mille, rien qu'en France » : ces mots sont empruntés à la préface du livre et ils font ressortir le but utilitaire poursuivi par l’auteur. Il a réuni et classé tous les accidents dont il à eu connaissance, survenus de l’année 1876 à 1905, en les décrivant aussi exacte- ment que cela a été possible, et en essayant d'en spé- cifier la cause. Ce recueil d'exemples est extrêmement instructif et de nature à éclairer aussi bien ceux qui construisent les appareils à vapeur que ceux qui les emploient. Le livre se compose de trois chapitres : le premier est consacré aux chaudières à bouilleurs, le second aux multitubulaires, et le dernier aux appareils divers : récipients, tuyauteries et accessoires. L'auteur passe en revue les défauts de construction, d'établissement et d'entretien avant d'aborder la monographie des accidents. M. Blancarnoux fait observer que les accidents de chaudières industrielles ont diminué considérablement depuis vingt ans, et il attribue avec raison ce résullat aux progrès de la construction et aux soins plus éclairés et plus empressés du personnel préposé à la conduite de ces « engins à la fois grossiers et délicats ». On est frappé, par contre, du grand nombre d'accidents des récipients divers, dont la gravité est quelquefois considérable, et qui doivent par suite devenir l'objet d’une surveillance aussi active que les générateurs de vapeur. ADÉ Wirz, Membre correspondant de l'Institut. 2° Sciences physiques Merveau (J.), Pharmacien de 1° classe. — Re- cherches sur la Viscosité. (Thèse de Doctorat de l'Université de Paris.) — 1 vol. in-8° de 78 pages, avec 6 figures. Declume, éditeur. Lons-le-Saunier, 1910. Le but de l’auteur est de nous donner un appareil simple permettant de mesurer avec exactitude la vis- cosité des liquides usuels: solutions aqueuses des sels, solutions gommeuses, etc. Après avoir insisté sur la définition rigoureuse du coefficient de viscosité tiré de la formule de Poiseuille, M. Merveau passe une revue critique de la plupart des instruments proposés jusqu'ici, et il en détaille les points faibles. Il insiste, bien entendu, sur l'influence prépondérante de la température, mais il montre aussi que ses prédécesseurs n'ont pas tenu suflisamment compte de la densité des solutions, ni, par conséquent, de la pression sous laquelle doit se faire l'écoulement capillaire. ; Il faut s'assurer, en outre, que le liquide le plus fluide suit bien la loi de Poiseuille, c'est-à-dire que la vitesse d'écoulement des gouttelettes est bien proportionnelle à la pression. l L'appareil fort simple décrit par M. Merveau remplit toutes ces conditions; il permet de comparer Ja visco- sité d’un liquide à celle de l’eau, mais l'auteur à omis 990 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX d'en indiquer exactement les dimensions. Il eût été souhaitable qu'il en fit un examen un peu plus appro- fondi, en répétant la même mesure un certain nombre de fois, afin de connaître l'erreur relative commise; il ne semble pas, en effet, que ses chiffres soient des moyennes Une étude critique de ce genre doit évi- demment précéder toute recherche de relation entre la viscosité et la concentration. Parmi les résultats de ce travail très consciencieuse- ment exécuté, nous signalerons les différences remar- quables, allant du simple au double, entre la viscosité de solutions de gommes d'origines diverses, malgré l’'égaiité de la concentration et de la densité. P.-Tu. MuLLer, Professeur à l'Université de Nancy. Ostwald {W.), Membre de l'Académie des Sciences de Berlin, Luther (R.), Professeur à l'Ecole tech- nique de Dresde, et Drueker (K.), Privat-docent à l’Université de Leipzig. — Hand und Häülfsbuch Zur Ausführung physiko-chemischer Messungen (GUIDE POUR L'EXÉGUTION DES MESURES PHYSICO-CHIMIQUES). 3° édition. — 1 vol. in-& de 373 pages avec 351 figures. (Prix cartonné : 16 fr. 25.) W. Engelmann, éditeur. Leipzig, 1910. La première édition de cet ouvrage, due à W. Ostwald, remonte à l'année 1893. Elle rencontra un tel succès auprès des chercheurs qui se tournaient alors nombreux vers les problèmes de la Chimie physique, qu'elle fut rapidement épuisée. Une nouvelle édition, pour laquelle l'auteur s'adjoignit la collaboration de R. Luther, parut en 1902. Elle fait place aujourd'hui à une troisième, qui a été revue et remaniée complètement par MM. Luther et Drucker. Il est inutile de refaire l'éloge de ce guide, certaine- ment le plus complet sur la matière, el dont la plupart des physico-chimistes font un usage courant. Ragno (S.), Professeur de Technologie et entreprises industrielles à l'Ecole Polytechnique de Naples. — La Soudure autogène des métaux. — 1 vol. 1n-8° de 88 pages, avec 17 figures. (Prix: 2 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. La soudure autogène, comme son nom l'indique, consiste dans la réunion de deux morceaux d’un même métal ou alliage, obtenue par la seule fusion des parties rapprochées. Elle est utilisée depuis longtemps, environ un demi- siècle, pour les métaux et les alliages ayant de basses températures de fusion, 350° par exemple comme le plomb. Plus récemment, on l’a étendue aux métaux employés couramment dans les Constructions méca- niques : acier, fer, fonte, cuivre, aluminium, bronze, et elle rend des services importants. Mais on est encore très mal fixé sur Ja valeur relative des diverses variantes de cette soud ure, pour tel ou tel métal, parce qu'on n'a guère à ce sujet que les rensei- snements fournis par les maisons qui construisent le matériel nécessaire à chacune de ces variantes. À celle documentation peu désintéressée, M. Ragno, qui a déjà publié, il y a deux ans, une critique sCi-n- tifique en même temps qu'un classement méthodique des divers modes de soudure autosène, à voulu ajouter une étude comparative plus impartiale. Elle débute par une revue de ces divers modes : 1° Soudure électrique, à la température d'environ 3500°, par arc voltaïque ou par court-circuit, que l'on emploie beaucoup pour les aciers coulés, qui est cer- tainement la plus économique des soudures aulogènes, mais à laquelle M. Ragno reproche de causer, par sa haute température, de véritables altérations dans la constitution du métal, notamment des aciers. Le court- circuit à sur l'arc l'avantage de permettre un réslage de la température. 2 Soudure oxyacétylénique (3.000), obtenue au cha- lumeau avec un mélange d'oxygène et d'acétylène, dans la proportion volumétrique de 2 à 1; elle est moins violente, plus maniable que la soudure élec- rique. Si l'acétylène n'est pas épuré, il introduit du carbone et du phosphore dans le métal à souder; mais ce procédé est le seul qui permette, pour des épaisseurs de métal s'élevant Jusqu'à 12 ou 15 millimètres, d'oh- tenir une certaine constance dans les résultats. 3° Soudure oxhydrique (2.500°), obtenue avec un mé- lange d'oxygène et d'hydrogène dans la proportion de 1 à #. Elle est plus chère que Ja précédente. Elle a le grand avantage, lorsque l'oxygène n'est pas en excès, - de ne donner aucune modification de la substance. Mais elle est insuffisante dès que l'épaisseur des tôles dépasse 5 ou 6 millimètres. 4° Soudure à gaz d'éclairage et oxygène (2.000), qui a les mêmes avantages et les mêmes inconvénients que la soudure oxhydrique. 5° Soudure aluminotherm ique, basée sur ce fait qu'un mélange, en poudre, d'aluminium et d'un oxyde métal- lique brûle, avec une température d'environ 3.000, une fois la combustion commencée sur un point quel- conque du mélange. Ce mélange est placé dans un creuset, qui laisse le métal fondu couler autour des deux morceaux à souder, dans un moule préparé comme pour un moulase ordinaire. Elle est appliquée en Autriche, en Belgique; mais elle ne parait pas devoir prendre le développement qu'on avait prédit. En tout cas, elle sera toujours chère, à cause de l’ou- tüllage particulier qu'elle exige. Après celle revue des soudures autogènes, M. Ragno cherche à quels emplois chacune d'elles semble con- venir. Quand il s’agit d'obtenir une union de lorce, comme avec l'acier et le fer, l'arc voltaïque ne peut être uti- lisé que pour de petites fusions successives, martelées et ébarbées à mesure: l'oxhydrique peut être employée pour les petites épaisseurs de 5 à 6 millimètres; l'oxy- acétylénique peut être mise à contribution pour äes épaisseurs un peu plus grandes, mais ne dépassant pas 40 ou 15 millimètres. En somme, il ne faut pas, pour ces unions de force, employer la soudure autogène à titre de moyen courant. En revanche, comme moyen de réparation, elle est d'un emploi plus justifié. Pour produire une union hermétique et de force, comme dans une chaudière à vapeur timbrée à haute pression, la soudure autogène ne doit pas non plus servir de moyen courant. Pour une chaudiere à basse pression, la soudure oxyacétylénique est tres recom- mandable, pour des épaisseurs de 8 à 12 millimètres; pour des épaisseurs moindres, l'oxhydrique et la sou- dure au gaz d'éclairage donnent aussi de bons résul- tats. Pour corriger les poches ou soufflures, si fréquentes dans les pièces d'acier moulé, la soudure électrique est la plus économique ; mais, quand il est possible, on doit lui préférer l'oxhydrique ou l'oxyacétylénique. Pour la fonte, l'oxhydrique est la mieux appropriée. Pour le cuivre, la soudure électrique doit être exclue d'une facon absolue, parce qu'elle le brûle. En résumé, M. Ragno estime qu'on ne doit faire qu'un emploi rationnel et réfléchi des soudures auto- gènes. Il ajoute qu'il y faut des opérateurs exercés, Sachant réduire au minimum les causes d'altération des métaux, qui ont tant de tendance à se produire quand on soude ces métaux en fusion. GéranD LAvERGNE, Ingénieur civil des Mines. 3° Sciences naturelles Saurin (Jules). — Le Peuplement français en Tunisie. — { vol. in-16 de 461 pages. Challamel, éditeur. Paris, 1910. Sous ce titre, M. Saurin a réuni une série d'études publiées antérieurement. Il les a complétées par de nouveaux aperçus. Il serait difficile d'analyser succes- sivement ces divers chapitres, écrits à des dates qui S'échelonnent de 4889 à 1909, dont la lecture permet BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET de se rendre compte du mouvement colonial tunisien. Nous pensons qu'il sera plus clair d'exposer les idées maîtresses qui ont déterminé les conclusions de l'au- teur. Commençons par dire que M. Saurin est un convaincu. Professeur au lycée de Tunis, il se passionna pour la colonisation française en Tunisie. Grâce à ses démar- ches, une société des 'ermes françaises fut constituée. Abandonnant sa situation, M. Saurin en prit la direc- tion. De nombreux cultivateurs français furent placés dans ces exploitations agricoles; la plupart ont réussi. Cependant, M. Saurin n'a pas trouvé de nombreux imitateurs : le capitaliste francais préfère placer ses fonds dans les emprunts russes ou turcs. La conviction de l'auteur vient de cet axiome la domination politique d'un pays appartient toujours à l'élément qui occupe le sol. Malheureusement, tel n'est pas le cas des Français en Tunisie : à peine compte-t on 3.000 nationaux cultivateurs. Le paysan français peut cependant bien réussir en Afrique. M. Saurin expose le budget d'une famille pre- nant en métayage cinquante hectares. Cette famille pourra encaisser avee des cultures convenables 2.500 à 3.000 francs au bout de l’année. Cette situation est plus avantageuse que celle de beaucoup de nos culti- vateurs métropolilains. Seulement, il est nécessaire de ne pas faire une cul- ture barbare. La question des assolements, des fumiers et des fourrages, joue un grand rôle dans cette réali- sation de bénéfices. M. Saurin insiste d’une facon très particulière sur la transformation des fourrages en viande par l'élevage. Pour arriver au peuplement par nos nationaux, il faudrait que les grands domaines possédés par nos compatriotes fussent morcelés et mis en métayage. Ces « latifundia » sont, en général, peu prospères; ils ne font pas vivre de colons francais dans les conditions actuelles. À part un contremaître francais, l'ouvrier agricole y est indigène ou Sicilien. L'Administralion du Protectorat aurait dû aussi amorcer davantage le mouvement d'immigration française. Son action a produit d'excellents résultats dans l’ordre administratif. De grands travaux publics ont été exécutés ; le pays est sillonné de nombreuses voies ferrées. Mais la question du peuplement francais n'a pas été résolue. Les Français hauts fonctionnaires acquièrent une mentalité tunisienne. Les idées impo- sées sous le nom de Politique d'association font le jeu des indigènes, peu désireux de voir augmenter l'im- portance de l'élément francais. Ces derniers sont dans leur rôle ; nos dirigeants, par contre, manquent à leur tâche. Ils auront peut-être un jour à rendre compte devant l'histoire de leur indifférence à l'égard du peu- plement de la Tunisie par l'élément francais. Ce manque de colonisation agricole francaise, cette absence de protection de l’ouvrier national a facilité la concurrence de l'étranger et surtout de l'Italien. Il y a actuellement 100.000 Italiens et 40.000 Francais dans la Régence. Un seul moyen permettra de parer à cet avenir. M. Saurin l’expose à chaque page de son livre : intro- duire des paysans francais en Tunisie. Selon lui, on peut formuler avec certitude les trois lois suivantes : 1° Tout paysan français qui vient en Afrique y reste; 29 Tout paysan francais qui vienten Afrique, y devient propriétaire du sol; 3° Tout paysan français venu en Afrique y attire deux ou trois de ses compatriotes. Un moyen d'attirer des familles paysannes par des emplois temporaires serait de franciser le petit person- nel des Compagnies à monopole d'Etat (chemins de fer, ports, tramways). Les poseurs de la voie des chemins de fer sont à peu près tous Siciliens ou indigènes. Les emplois de can- tonnier pourraient fixer aussi dans le pays un certain nombre de familles; le même raisonnement s'applique aux autres administrations d'Etat : postes, mono- INDEX J91 poles, ete., qui pourraient relenir un grand nombre de nos compatriotes. On créerait de la sorte une réserve où pourrait se recruter la colonisalion agrivole. En résumé, pour faire de la Tunisie un français, il faudrait un changement dans la dire l 1VS Lion dés affaires tunisiennes, Que les Francais qui les ademi nistrent songent qu'ils ont le devoir d'assurer l'avenir de la colonisation française au sud de la Méditerranée. D' BERTHOLON. Stoykowiteh (Wélimir), Zagénieur agricole, Secré- taire au Ministère du Commerce et de l'Agriculture de Serbie. Recherches physiologiques sur la Prune et méthodes à employer pour l’améliora- tion de l’industrie prunière en Serbie. 1'hèse de la Faculté des Sciences de Nancy. — À vol. in-8° de 228 pages avec 72 figures. Imprimerie Vagner, Nancy, 1910. La culture de la prune présente dans quelques pays un intérêt économique de premier ordre : en France, par exemple, la production est évaluée à 20 à 30 mil- lions de francs annuellement, dont les trois quarts fournis par le département de Lot-et-Garonne: la Bosnie-Herzégovine en produit pour 10 millions de francs; aux Etats-Unis, la prune est cultivée partout, principalement dans l'Etat de Californie; la production a triplé de 1889 à 1899 et dépasse actuellement celle des autres pays. Mais, immédiatement après, et avec une production supérieure à celle de la France et de la Bosnie, se place la Serbie, dont le rendement annuel atteint souvent une valeur de 25 millions de francs et dépasse parfois 30 à 40 millions. La production des prunes, la fabrication des pruneaux, l'exportation de ces produits, jouent dans ce pays un rôle économique de premier ordre ; aussi le Gouvernement serbe a-t-il encouragé M. Stoykowitch à poursuivre une étude approfondie des méthodes de culture des prunes et de la fabrication des pruneaux dans les différents pays producteurs,afin de pouvoir leur comparer les méthodes actuellement employées en Serbie et de rechercher par quels moyens la prune serbe peut être améliorée et la fabrication des pruneaux rendue plus parfaite. M. Stoykowitch a choisi la France comme centre de ses recherches, et c’est au Laboratoire de Botanique agricole de l'Université de Nancy, que dirige M. Gain, qu'il a mené à bien les recherches physiologiques que comportait l'étude de la question. Son travail fait l'objet d'une thèse de doctorat de cette Université L'auteur apporte au point de vue de la Serbie tout un programme d'améliorations concernant à la fois la culture, qui y est effectuée par des procédés peu per- fectionnés, etl'industrie prunière, qui ne permet pas actuellement de produire des pruneaux de première qualité, alors cependant que ce pays en est le plus grand exportateur. M. Stoykowitch a fait un certain nombre d'observa- tions personnelles, appuyées sur l’expérimentalion, portant surtout sur la maturation et la composition des prunes aux divers stades de leur développement. Il à suivi la variation de composition chimique du fruit en prenant comme type la quetsshe et la mirabelle. I a établi des graphiques concernant des variations de l'eau, du sucre, de l'acidité, des matières azotées, de la cellulose, des matières minérales. Les données ainsi acquises sont non seulement intéressantes au point de vue théorique, mais elles servent encore à l’auteur à établir sur une base scientifique l'étude des procédés de dessiccation des prunes. Il conclut à ce point de vue que les prunes doivent être cueillies à maturité complète, au fur et à mesure de la maturation ; si elles sont incomplètement müres, elles seront exposées au soleil pendant deux ou trois jours pour parfaire leur maturation. Elles seront ensuite triées, puis trempées dans une solution alcaline qui non seulement enlèvera les impuretés qui lessouillent,maisencore fera crevasser la peau, préparant ainsi une dessiccation plus rapide, ou bien on pratiquera le piquage de l'épiderme. Parmi 992 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX les procédés de dessiccation, l'auteur établit la supé- riorilté des évaporateurs, ces appareils étant les seuls susceptibles de fournir un pruneau d'excellente qualité et d’un moindre prix de revient. Les pruneaux mal desséchés sont exposés à des altérations dont M. Stoykowitch fait une étude métho- dique; la plus commune est de couleur blanche : elle est due à uue levure dépréciant les pruneaux d’une facon notable, car elle est capable de transformer tout le sucre en alcool. L'auteur constate en passant que cette levure pourrait être susceptible, après sélection, de jouer un rôle important dans la fabrication des eaux-de-vie de prunes. Une altération rouge, due à un Monilia, est plus rare que les précédentes. Enfin, assez fréquemment se rencontrent sur les pruneaux avariés des moisissures banales telles que: Aspergillus glaueus, Penicillium glaucum, Rhizopus nigricans ; l'analyse chi- mique montre à l’auteur qu'elles font perdre aux fruits une grande partie de leur valeur alimentaire. L’humi- dité étantle facteur le plus important de l'existence de ces moisissures, la nécessité de pousser la dessiceation des pruneaux le plus loin possible s'impose nettement. La dissémination des spores de champignons s'effectue surtout pendant la manipulation simultanée des prunes el des pruneaux: cette pratique devra donc être aban- donnée. L'auteur rappelle enfin les allérations mieux connues dues aux Acariens et celle qui fait désigner les pruneaux sous le nom de « bloater » et se manifesté par le boursouflement du fruit devenu creux avec un noyau fendu en deux, et qui paraît due à une levure. Au point de vue de la culture, M. Stoykowitch préco- nise divers moyens d'améliorer la prune serbe Poje- gatcha : soit par l'introduction lente et méthodique de variétés étrangères supérieures à efle, la prune d'Agen, par exemple, — le département de Lot-et-Garonne se trouve sous la mème latitude que la Serbie et le climat y est à peu près le même, — soit par des greflages de variétés sélectionnées, soit en modifiant les pro- cédés de culture (fumure, taille, éclaircissage des fruits, soins de la terre), de façon à obtenir le meilleur fruit possible de la variété existante. Ce travail renferme encore une documentation botanique sur les principales variétés de prüniers cultivés en vue de l’industrie des pruneaux et donne des statistiques concernant les questions économiques qui touchent la culture des pruneaux et le commerce international des prunes. Ce livre constitue une monographie complète et très critique de la question, avec des observations pér- sonnelles ; il sera indispensable à ceux qu'intéresse cette branche très importante de l'arboriculture frui- lière et de l'industrie agricole. J. REAUVERIE, d'un Cours de Bolanique appliquée à la Faculté des Sciences de Lyon. Chargé Trouessart (E.), ?rofesseur au Muséum national d'Histoire naturelle de .Paris. — Conspectus Mammalium Europæ. Faune des Mammifères d'Europe. — 1 vol. in-8 de 266 Æ xvit pages. ft. Fricedländer und Sobhn, éditeurs. Berlin, 1910. Dans ce volume, l’auteur de l'excellent Cataloqus Mannalium s'est proposé de donner une faune des Marmmilères d'Europe, au courant de l'état actuel de la Mammalogie, qui a été complètement transformée par les études des savants américains et anglais, et accrue d'un grand nombre d'espèces et sous-espèces nouvelles. Toutes les espèces d'Europe sont énumérées dans l'ordre de la classification : les familles et les genres sont définis par une courte diagnose, puis chaque espèce est décrite d'une facon succincte, mais très suftisante pour la faire reconnaitre; une bibliographie permettant de retrouver la description originale et l'iconographie et une indication sommaire de l'habitat complètent cet ensemble. M. Trouessart, très sagement, a utilisé surtout dans les diagnoses les caractères exté- rieurs, plus facilement saisissables, et laissé au second plan les caractères craniens, difficiles à comprendre sans figures. C'est avant tout pour les zoologistes classificateurs, pour ceux qui dans les Musées ont la charge de déter- miner les spécimens, que celte faune a été rédigée; et il n'est pas douteux qu'elle leur rendra les plus grands services, les descriptions publiées depuis une quinzaine d'années étant dispersées dans des recueils souvent peu répandus que l’on n'a pas facilement l’occasion de consulter. Il est intéressant de voir quelle est la position prise par M. Trouessart vis-à-vis de la conception de l'espèce. Avant tout morphologiste, il ne s'inquiète pas de savoir si les formes qu'il définit sont séparées les unes des autres par une barrière physiologique (non pas que je lui en fasse un reproche, car la Mammalorie n’est pas encore assez avancée pour être arrivée à ce stade, les centaines d'expériences nécessaires, toujours difficiles et souvent impossibles, n'ayant pas été faites). Aussi, de parti pris, tend-il à multiplier les espèces plutôt qu'à en réduire le nombre, séparant, par exemple, le Bison bonasus de Lithuanie du Bison caucasicus du Caucase, le Chacal du Loup, ete.; puis, dans chaque espèce, pour les espèces naissantes qui ont, soit la valeur de mutations coexistant avec le type, soit le pius souvent la valeur de colonies géographiquement isolées, il emploie la nomenclature trinominale, par exemple Aus musculus muralis pour la Souris de l’île de Saint-Kilda, 47. musculus fa-roensis pour la Souris des îles Feroë, etc. Il en vient même parfois à une nomenclature quadrinominale, quand il juge néces- saire d'indiquer un sous-genre, ce qui ne laisse pas que d’ètre assez bizarre, quand il y a triple répétition du mème mot, ainsi que l’exigent les codes en vigueur : Myotis {Myolis\ myotis oxyquathus Monticelli. I est. évident qu'on n'arrivera à fonder une nomenclature raisonnable (ce dontnoussommes plus loin que jamais, malgré les codifications et peut-être à cause de celles-ci) que lorsqu'on connaîtra à fond un groupe comme celui des Mammifères; l'œuvre considérable de M. Trouessart, tantle Cataloqus que le présent Conspectus. en plus de sa très grande utilité pratique, prépare sans aucun doute l'apparition du Messie de la nomenclature, que les Congrès internationaux de Zoologie ont annoncé, mais qui n’est point venu: les biologistes sont las d'avoir à apprendre tous les ans de nouveaux noms pour les ani- maux les plus communs, et il est humiliant pour les savants que les nams vulgaires aient moins changé et soient plus explicites que les noms latins. Puis-je me permettre de faire remarquer à M. Troues- sart que Aus rattus alexandrinus est un hôte fréquent de la cale des navires (Marseille), ce qu'il a omis d'in- diquer ? LL. Cuéxot, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Roubinoviteh (J.), Médecin en Chef de Bicétre. — Aliénés et Anormaux. — 1 vo/. in-8° de 320 pages de la Bibliothèque scientifique internationale. (Prix : 6 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 41910. Dans ce volume se trouvent réunis une trentaine d'articles publiés par l'auteur dans différents journaux el revues. C'est une œuvre de vulgarisation qui, dans sa diversité, échappe à l'analyse. On ne peut que signaler les chapitres sur les causes et les variétés de la folie, sommairement décrites, mais mises très clai- rement à la portée du public qui ignore presque tout de la folie. Saciologues, juristes et.pédagosues liront avec intérêt les considérations sur les enfants anor- maux et sur le problème de leur éducation. En somme, ouvrage utile qui contribuera à détruire les nombreux préjugés que bien des gens conservent encore à propos de l’aliénation mentale, de ses causes, de s-s consé- quences et de son traitement. J. C. S ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 993 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1% Novembre 1910. M. le Président annonce la mort de M. J. Tannery, membre libre de l'Académie. — M. L. Teisserenc de Bort est élu membre libre de l'Académie, en rem- placement de M. E. Rouché, décédé. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Bachelier étudie le mouvement d’un point ou d’un système matériel soumis à l’action de forces dépendant du hasard. — M. Arnodin montre que l'emploi du système de pont suspendu Gisclard fournit une ressource fort appré- ciable pour l'établissement des voies ferrées en pays accidentés, car il procure la rigidité désirable au pas- sage des trains en vilesse, tout en profitant des avan- tages inhérents au travail de tension et au pont sus- pendu sur câbles. — M. A. Perot signale avec quelle prudence, dans la mesure spectroscopique de la rota- tion des astres possédant une atmosphère, il faut pas- ser des vitesses radiales aux vitesses de rotation, dans l'ignorance où l’on est de la direction réelle du rayon lumineux au point où il rencontre la couche renver- sante et de sa propagation dans les couches qu'il tra- verse ultérieurement. — M. Javelle adresse ses obser- vations de la comète de Halley, faites à l'Observatoire de Nice. — M. P. Chofardet communique ses obser- vations de la comète Cerulli (1910 c), faites à l’'équato- rial coudé de l'Observatoire de Besancon.— M.Coggia transmet ses observations de la même comète, faites à l'Observatoire de Marseille. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. Ed. Bauer et M. Mou- lin ont déterminé la constante d’Avogrado d’après l'observation du bleu du ciel, en se basant sur la théo- rie de Lord Ravleigh. Les valeurs obtenues sont de l’ordre de grandeur voulu, ce qui confirme la théorie précédente. - M. A. Lafay montre combien la nature de la surface des corps placés dans un courant d’air peut modifier les actions aérodynamiques qu'ils su- bissent; ainsi, sous cette seule influence, pour un vent de 32 mètres et une vitesse de rotation de 2.500 tours par seconde, l'effet Magnus passe de + 150 grammes à — 210 grammes. — M. F. Dussaud : Applications de sources lumineuses discontinues (voir p.967). — M. J. Becquerel à étudié la phosphorescence polarisée des cristaux biréfringents. Il a reconnu qu'un changement d'orientation dans la lumière excitatr ice entraîne, non un changement dans l’état de polarisation de chaque raie, mais une variation dans l'intensité émise, et cette variation peut être différente d’une raie à l’autre. — MM. A. Cotton et H. Mouton ont mesuré en valeur absolue la biréfringence magnétique du nitrobenzène; elle est de 2,32 X 0-2, — M. F. Michaud décrit un capillarimètre permettant la mesure de la tension superficielle des liquides visqueux. — M. L. Grenet a constaté que les bronzes trempés et légèrement recuits sont plus durs que les bronzes recuits à haute température. — M. Barré à préparé une série de sulfates doubles avec les sulfates de lanthane et de cérium; ces sels doubles présentent une grande analogie de composition, de solubilité et de conditions de formation. — MM. A. Besson et L. Fournier, en faisant réagir H sur POCF sous l'influence de l’effluve électrique, ont obtenu un dépôt d'oxyde phospho- reux P*0. — M. M. Delépine, en faisant réagir la pyri- dine sur les solutions d'iridosulfates, a obtenu des pyridinoiridosulfates du type [HO(C“H*Az).Ir(S0:)}. R:H7.1H°0, où R est un métal et x ee —2 Ce sont des sels verts, solubles dans l’eau à des degrés divers. L'ÉTRANGER — MM. G. Guiïllemin et B. Delachanal ont conslalé que les laitons spéciaux forgeables retiennent, à l'état occlus, un volume important (1 à 30 volumes) de gaz (H, CO*, CO). Dans les pièces saines, le gaz occlus est presque exclusivement formé d'H; dans les pièces non saines, H est accompagné d'une quantité importante de CO. Les bronzes phosphoreux renferment peu de gaz occlus. — M. J. Taffanel à expérimenté les explo- sifs dits de sûreté employés dans les mines et reconnu que les gaz de la détonation ont une composition dif- férente de celle que prévoit l'équation théorique; il se forme des oxydes d'azote et souvent une forte quan- tité de gaz combustibles. — M. G. Darzens, en conden- sant le dichloracétate d'éthyle avec l'acétone par Mg, a obtenu l'éther z-chloro-$-oxyisovalérique, Eb. 108° sous 25 millimètres, qui, traité par l’éthylate de sodium, fournit quantitativement l'éther diméthylglycidique. — MM. G. Bertrand el G. Weisweiller out reconnu que le glucose et l’arabinose entrant dans la constitution du vicianose sont liés l’un à l’autre par la fonction aldéhydique du pentose; la fonction aldéhydique du glucose reste libre, et c'est elle qui sert de lien entre le vicianose et le nitrile phénylglycolique pour consti- tuer la vicianine. — M. Ch. Mauguin a constaté que les plages liquides homogènes d’azoxyphénétol se com- portent exactement, aussi bien en lumière convergente qu'en lumière parallèle, comme des lames cristallines révulièrement orientées dans toute leur épaisseur. L'orientation de ces plages, véritables cristaux liquides, n'est pas imposée par des lames de verre. — MM. A. Fernbach et M. Schoen montrent que la neutralisa- sation au méthyl-orange, qui augmente l'activité sac- charifiante des extraits de malt, ‘diminue notablement leur résistance à la chaleur. D'autre part, l'auto-activa- tion est maxima dans le milieu neutre à la phtaléine, qui favorise le plus la résistance à la chaleur. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Amar a constaté que le début du travail de la machine humaine accuse un excès de consommation d'oxygène, coincidant avec un abaissement du quotient respiratoire. Après un intervalle de repos, la reprise du Travail exige une con- sommation moindre d'oxygène et le quotient respira- toire s'abaisse aussi d'une quantité plus faible. — M. L. Launoy a déterminé les doses maxima des com- posés organiques de l’arsenic compatibles avec la sur- vie prolongée chez le cobaye. l'injection quotidienne chez le cobaye d’une dose d' atoxyl très inférieure à la dose mortelle ne crée pas d'accoutumance à ce com- posé. — M. L. Léger : Le goût de vase chez les Pois- sons d’eau douce (voir p.968). — M. M. Gard a récolté à Mimizan (Landes) des hybrides des Fucus p'alyear- pus et F. ceranoïdes. Ces hybrides sont toujours uni- sexués (mäles); l'hermaphroditisme du #. platycarpus y est à peine perceptible. — M. L. Daniel, ayant semé des graines de haricots issus de greffes de haricots noirs de Belgique sur Soissons gros, a obtenu quelques pieds dont les racines ont passé l'hiver en se tubercu- lisant, et ont donné au printemps des pousses vigou- reuses, des fleurs et des fruits.— M. J. Deprat distingue, dans le Yun-nan oriental, quatre zones de plissement bien nettes : zone de bordure des massifs anciens du Haut-Tonkin, géosynclinal triasique oriental. zone paléozoïique occidentale, masse charriée du haut Fleuve Bleu. — M. Ph. Glangeaud montre que ce sont les mouvements post-oligocènes du Forez qui surélevèrent et redressèrent les poudingues olizocènes sur les flancs de celle région montagneuse, où ils constituent au- jourd'hui une cuirasse, rappelant par son origine celle que forme le poudingue du Palassou le long de la 994 chaine pyrénéenne. — M. F. Grandjean propose de mesurer le laminage des sédiments (calcaires et schistes) par celui de leurs cristaux élastiques de tour- maline. Séance du 2 Novembre 1910. M. Francotte est élu Correspondant dans la Section d'Anatomie et de Zoologie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Cartan a appliqué la méthode du trièdre mobile au cas des développables isotropes. — M. Eug. Fabry présente ses recherches sur l’ordre des points singuliers d’une série de Taylor. — M. A. Chatelet indique quelques applications du cal- cul des tableaux à la théorie des ordres d’entiers algé- briques. — M. T. Lalesco reprend et complète la méthode simple d'identification employée par M. B. Heywood dans l'étude des noyaux résolvants. — M. M. Brillouin résume ses recherches sur le mouvement discontinu de Helmholtz etle cas des obstacles courbes. — M. Villat étend la méthode de M. Levi-Civita à la détermination de tous les mouvements permanents plans d'un fluide limité par une paroi fixe rectiligne indéfinie et dans lequel un obstacle fixe est immergé. — MM. A. Claude, Ferrié et L. Driencourt ont fait de nouvelles comparaisons radiotélégraphiques de chronomètres par la méthode des coïncidences entre Paris et Brest. La méthode est susceptible d'une très grande précision et ne comporte pas d'équation personnelle, — M. J. Guillaume adresse ses obser- vations de la comète Cerulli, faites à l'Observatoire de Lyon. — MM. M. Luizet, J. Guillaume et J. Merlin ont observé à Lyon un certain nombre d'occultations pendant l’éclipse totale de Lune du 46 novembre 1910. — M. L. Montangerand a fait à Toulouse des observa- tions du même genre. — M. A. Lebeuf a noté à l'Observatoire de Besançon, pendant l’éclipse totale de Lune du 16 novembre, la grande transparence de l'ombre et sa coloration généralement gris-rose. M. Bourget a suivi la mème éclipse à l'Observatoire Marseille, et M. R. Jonckheere à l'Observatoire Hem (Lille). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. A. Hemsalech à étudié les modifications que subissent dans un champ magnétique les raies spectrales émises par la vapeur lumineuse de l’étincelle électrique. Pour le fer, il à observé : 1° un effet général (diminution des durées et de l'intensité lumineuse des raies) ; 2° un effet longi- tudinal (prolongement de la durée et augmentation de l'éclat); 3° un effet transversal (prolongement dé la durée de certaines raies). — M. G. A. Andrault décrit une méthode graphique et rapide pour mesurer le glissement des moteurs d'induction, basée sur les propriétés du papier télégraphique Bain. — M. F. Grenet a étudié la porosité des bougies filtrantes en déterminant la pression qui se produit à l’intérieur lorsqu'on les immerge dans l'eau. MM. J. de Kowalski et J. de Dzierzbicki ont reconnu que le phénomène de phosphorescence progressive dépend essentiellement de la constitution du corps étudié. — M. C. Cépède décrit un perfectionnement du microscope binoculaire qui augmente l'éclairement des objets observés ; il consiste à faire arriver la lumière réfléchie à l’aide d'un miroir concave sur la région ombrée de l'objet en observation. — MM. Ch. Moureu et J. Ch. Bongrand, par action de AzH* sur le propiolate de méthyle, ont obtenu la propiolamide HG : C.COAZzH?, F.619-62, qui, déshydratée par P*0", donne le cyanacé- tvlène, HG : C.GAz,.F. 59, Eb: 420,5. 3° SCIENCES NATURELLES. M. J. Amar à reconnu que l'excès de dépense de l'organisme qui à lieu postérieurement au travail se dissipe avec une vitesse, fonction de plusieurs variables, qui doit être étudiée dans chaque cas particulier. — M. Ch. Gravier à observé que, lorsque deux Madréporaires sont en concurrence sur un même support où ils se disputent la place, c’est la forme encroûtante ou foliacée qui l'emporte en tuant son adversaire qu'elle recouvre ou ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES enveloppe peu à peu. Les formes globuleuses ou massives succombent le plus vite ; les formes arbores- centes peuvent résister davantage. — M.E. Roubaud a étudié l’évolution du ÆRoubaudia ruüfescens Nillen., Tachinaire parasite des guêpes sociales d'Afrique des genres /caria et Belenogaster. Ce Diptère est lui-même parasité par un minuscule Chalcidien. — M. M. Mirande a constaté que le goudronnage des routes peut exercer une influence nocive sur la végétation. Lorsque l'air est chaud et que le goudron dégage des vapeurs, celles-ci produiseut sur les feuilles un effet anesthé- sique qui peut être suivi par le noircissement. — MM. P. Fabre-Domergue et R. Legendre ont reconnu que les sels de l’eau de mer ont, en quantités suffi- santes, une action de plus en plus retardataire et défavorable sur le développement des cultures de colibacille. La recherche de ce dernier dans les eaux de mer et les eaux d’huitre doit être faite en bouillons non salés. — MM. J. Couyat et P. H. Fritel ont découvert un gisement de plantes fossiles dans le grès nubien des environs d’Assouan. L'étude de ces restes permet de synchroniser le grès, dans une certaine mesure, avec les lignites fuvéliens de la Provence. Séance du 28 Novembre 1910. M. H. Lorentz estélu Associé étranger de l'Académie et Lord Avebury Correspondant pour la Section d’Ana- tomie et de Zoologie. — M. le Président annonce le décès de M. Angelo Mosso, Correspondant pour la Sec- tion de Médecine. — La Section de Mécanique présente la liste suivante de candidats à la place vacante par le décès de M. M. Lévy: 1° M. Léon Lecornu; 2° M. G. Kænigs; 3° MM. A. Rateau et J. Résal. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. M. G. Tzitzeica démontre un théorème de M. Darboux par une voie nouvelle qui permet de donner une théorie géométri- que des équations de Laplace à six solutions quadra- tiques. — M. W. Stekloff signale une application nou- velle de sa méthode de développement des fonctions fondamentales. — M. P. Lévy présente ses recherches sur l'intégrabilité des équations définissant des fonc- tions de ligne. — M. G.. Eiffel a étudié la résistance des plans rectangulaires frappés obliquement par le vent. Le rapport de la poussée de l’air surune plaque inclinée à la poussée sur la même plaque normale atteint un maximum pour une inclinaison de 38° et décroît ensuite brusquement, pour rester constant de 50° à 900. — M.G. Fayet a reconnu que la comète Cerulli 1910 est identique avec la comète Faye; ses éléments provi- soires ne diffèrent que peu de ceux que Stromgren a calculés pour le retour de cette comète. — M. C. Popo- vici présente une observation de la comète Cerulli- Faye, faite à l'Observatoire de Paris. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Jean Becquerel a éludié le renversement des bandes de phosphorescence de cerlains cristaux. Ses résullats montrent non seule- ment que certains centres qui produisent de la phos- phorescence sont semblables aux centres absorbants, mais que les mouvements des particules lumineuses sont, en moyenne, orientés dà la mème façon dans l'un et l’autre cas. — M. R. Jouaust à déterminé les propriétés magnétiques du fer aux fréquences élevées, en opérant sur des tôles et avec des ondes non amorties. Deux variétés d'acier, ordinaire et au silicium, ont pré- senté, à la fréquence de 150.000, une perméabilité vraie constante et égale à 150. — MM. G.. Friedel et F. Grand- jean, à propos de la note récente de M. Mauguin, rappellent que l'azoxyphénétol présente, outre les plages signalées par cet auteur, des plages qui s'étei- snent en lumière blanche entre nicols croisés et dont toute théorie des liquides anisotropes devra rendre compte. — MM. F. Reverdin el A. de Luc ont constaté que la présence simultanée, dans les amines diacylées, des résidus acétyle et toluène-sulfonyle donne de la stabilité à la molécule en ce qui concerne la nitration. — M. L. H. Philippe, en traitant le nonose par HCAz, est parvenu à obtenir l’amide x-déconique, F, vers 2509, ACADÉÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 9954 el l'acide «-déconique, sous forme d'un mélange de lactone, F. anhydre 214%, et d'anhydride, F. 2509, La lactone, réduite par l'amalgame de Na, donne le gluco- décose. — M. A. Fernbach, en traitant divers hydrates de carbone par des macérations ou des cultures vivantes de Zyrothrix tenuis, a isolé des produits de dégradation de la dioxyacétone, puis du méthylglyoxal et enfin un dérivé de l’aldéhyde formique. — M. J. Effront a reconnu que.le ferment bulgare détruit très rapidement les matières albuminoïdes, en leur enle- vant leur azote, qui prend la forme d'ammoniaque. Il y a lieu de croire que c’est grâce à cette propriété, et non comme agent producteur d'acide lactique, que le fer- ment bulgare agit favorablement dans les affections intestinales. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. P. Chaussé a constaté que l'inhalation de matière tubereuleuse bovine par pulvérisation liquide permet d'infecter le bœuf avec la dose bacillaire la plus infime. Elle donne de la tuberculose thoracique primitive identique à l'affec- tion spontanée, — M. A. Gruvel à déterminé les Lan- goustes de la côte occidentale d'Afrique; ce sont : le Palinurus vulgaris Latr. avec sa variété inflatus, le Palinurus regius, plus au sud, et le Jasus Lalander, de l’Angola au Cap de Bonne-Espérance. — M. J.Cha- tenay à capluré, en Algérie, un certain nombre de Zonabris variabilis v. Sturmi, présentant une ano- malie caractéristique de lélytre droit. — M. P. de Beauchamp à découvert dans le tube digestif d'un crabe une Grégarine nouvelle appartenant au genre Porospora, qu'il nomme P. Legeri. L'enkystement y est toujours double et précédé de la formation d'une syzygie extrêmement étroite. — M. A. Dehorne montre que, dans toute mitosé, il y a non seulement divi- sion, mais même subdivision des chromosomes à la télophase précédente. — M.M.Molliard à reconnu qu'on peut faire produire à une plante des fleurs chasmo- games à une lumière où, dans les conditions nor- males de nutrition, elle ne produit que des fleurs fermées, en lui fournissant une quantité suffisante de glycose. — M. P. A. Dangeard décrit une algue nou- velle observée au Laboratoire de Concarneau et inter- médiaire entre les Polyblepharides el les Pyrami- monas ; il lui donne le nom de Stephanoptera Fabreæ. — M. M. Ringelmann a étudié le rendement en jus des pressoirs; il peut atteindre 70 °/, de [a quantité de jus renfermée dans les pommes. En pralique, on a tout intérêt à ne presser que des charges de faible épaisseur primitive. — M. J. Deprat à observé au Yunnan, dans l'aire pléistocène, une région d'activité séismique intense, caractérisée par de grands plisse- ments et des charriages. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 15 Novembre 1910. M. Gaucher déduit d'un grand nombre d'observa- tions cliniques que l’arséno-benzol (606) ne guérit pas la syphilis et n'empêche pas les accidents de se repro- duire, même quand il les a fait disparaître. Il exerce une action manifeste sur les lésions cutanées et mu- queuses, surtout sur les lésions ulcéreuses de toutes les périodes de la syphilis, et surtout sur les lésions superficielles, dans beaucoup de cas sinon dans tous. Son action, quand elle existe, est habituellement plus rapide que celle du mercure, mais souvent momen- tanée. Elle peut être rapidement efficace dans des cas où le mercure avait échoué, mais non dans tous. Ce produit ne possède aucune efficacité et peut même être dangereux dans les lésions viscérales. — MM. F. Wi- dal, Léon-Kindberg et Cotoni signalent un cas de contagion de laboratoire de la fièvre de Malte, chez un garçon ayant manipulé des cultures de Wicrococcus melitensis. Etant donnée la propagation très facile de cette maladie par la consommation de lait de chèvre non bouilli, les auteurs demandent que la déclaration des cas de fièvre de Malle soit rendue obligatoire en France, L'Académie vote cette proposition. Séance du 22 Novembre 1910. MM. Debayle el Oui sont élus Correspondants natio- naux de l’Académie dans la Division de Chirurgie. M. H. Vincent propose d'introduire les fièvres para- typhoïdes, la fièvre de Malte, la piroplasmose humaine aiguë (kala-azar) parmi les maladies dont la déclaration doit être rendue obligatoire aux colonies ; d'enregistrer la dysenterie amibienne parmi les mêmes maladies à déclaration obligatoire, en la mentionnant à côté de la dysenterie bacillaire; d'ajouter la filariose, la bilhar- ziose et la dengue parmi les maladies dont la déclara- tion est facultative. Ces propositions sont adoptées par l'Académie. — M. Galippe présente un Rapport su une communication de M. et Me Fildermann relative au traitement des caries dentaires pénétrantes. Leur méthode consiste à aspirer les produits septiques con- tenus dans la cavité pulpaire et le canal radiculaire en les mettant en rapport avec un appareil dans lequel on à fait préalablement le vide. On laisse ensuite arriver dans le fond de la dent de l'oxygène gazeux, puis des vapeurs de formol, etenfin on comble le canal radiculaire avec de la paraffine goménolée, fusible à 40° C. — M. H. Vincent propose de rendre obliga- toire en France la déclaration des fièvres paraty- phoïdes. Cette proposition est renvoyée à la Commission des Epidémies, — M. A. Prenant lit un travail sur la formation du pigment hématogène. — M. E. Retterer donne lecture d’une étude sur la signification des ano- malies de l'appareil hyoïdien chez l'homme. — M. le D' Sébileau lit un travail sur l'appareil de couverture du larynx. Séance du 29 Novembre 1910. M. Ch. Fiessinger propose un nouveau mode de traitement de l’angine de poitrine : le repos au lit. Le repos au lit est, en effet, un hypotenseur, un tonique du cœur et un modérateur de sa sensibilité. Dans les deux tiers des cas observés, il a abaissé la tension artérielle élevée; dans d'autres cas exceptionnels, I: tension ne s'est pas abaissée; elle s'est mème élevée, mais les douleurs ont cédé. — M. J.-P. Langlois lit une étude concernant les effets de la ventilation sur l'organisme pendant le travail. — M. le D' Guisez donne lecture d'un travail sur une forme peu connue de sténose de l’æsophage (sténose inflammatoire ou cicatricielle spontanée). — MM: Triboulet, Rolland et Fenestre communiquent un mémoire sur un Cas de méningite cérébro-spinale à localisation intra- ventriculaire initiale, traitée par la sérothérapie intra- ventriculaire, avec guérison. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 19 Novembre 1910. MM. Vedel et Mansillon ont constaté qu'à toutes les périodes de la maladie, l'infection syphilitique ne pro- duit qu'une très légère diminution des globules rouges, tandis qu'elle abaisse nettement le taux de l'hémoglo- bine et la valeur globulaire. D'autre part, la syphilis n’augmente un peu les globules blancs qu'à la période secondaire ; mais à toutes les périodes il y a augmen- tation des grands et moyens mononucléaires aux dé- pens des lymphocytes. A toutes les périodes, le traite- ment mercuriel augmente le taux de l'hémoglobine et la valeur globulaire d'une part, et le nombre des lym- phocytes, d'autre part. — MM. À. Netter et A. Gendron ont étudié les modifications du liquide céphalo-rachi- dien à la suite de l'injection intra-rachidienne de sérum humain. La quantité des éléments cellulaires devient beaucoup plus considérable etlespolynucléaires y prédominent. — M. L. Ambard a reconnu qu'une seule loi régit les rapports de l’excrétion uréique au taux de l’urée sanguine : la racine carrée du débit de 996 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'urée, multipliée par une constante urémique k, est égale au taux de l'urée du sang. — M. P. Remlinger montre que les bouillons en cubes du commerce, dis- sous dans l’eau bouillante et chauffés à 120°, puis filtrés, constituent d'excellents milieux de culture pour les bactéries. — MM. A. Robin et N. Fiessinger ont constaté que le sang possède un pouvoir catalytique très notablement diminué chez les cancéreux et les tubereuleux, diminution quin'est pas toujours en pro- portion avec l'intensité de l'anémie. — M. E. Devaux a observé que l'anesthésie chloroformique fait appa- raîitre de l’œdème chez des sujets qui n'en avaient pas et accroit l'æœdème de ceux qui en avaient déjà. — M. C. Pezzi montre que le soufile cardio-vasculaire est dû à l'association de deux facteurs : une veine liquide et une paroi cardio-vasculaire, mise en vibration soit par la brisure de la veine liquide contre elle, soit par les chocs successifs que créent contre cette paroi les ondes engendrées par le passage de la veine fluide. — M. J. Ville a observé la formation d'urobilinogène aux dépens des pigments biliaires par l'action réductrice du palladium hydrogéné en présence d’un hypophos- phite. — M. H. Iscovesco a con-taté que les colloïdes lyophobes (instables) diminuent légèrement la tension superficielle de l’eau. Quand on leur ajoute un électro- lyte à dose croissante, la précipitation coïncide avec le maximum de la tension superficielle, et la précipitation totale est immédiatement suivie d'une chute considé- rable de la tension. — M. P. Mulon à découvert, dans la glande interstitielle ovarienne, une sécrétion lipoide nouv-Île, analogue à celle de la surrénale corticale. — M. S. Marbé signale que, dans lascarlatine desadultes, les plis de flexion du genou et surtout du coude sont constamment rouges, luisants et plus larges que chez les sujets normaux. — M. E. Maurel a reconnu que les pâtisseries et les sucreries laissées à l’air libre sans moyen de protection présentent à leur surface des micro-organismes divers : filaments, microcoques, bacilles, etc., qui conservent leur reproduction et peuvent n'être pas sans danger, puisqu'ils produisent de l’amaigrissement chez le lapin. — MM. L. Massol et J. Nowaczynski ont observé que l’hypertonicité du sérum de cobaye conserve le pouvoir alexique cons- tant pendant quelques jours, tandis que l'hypotonicité hâte l’affaiblissement de l'alexine. — MM. J. Nowac- zynski el J. Leclereq ont préparé un sérum hémoly- tique polyvalent par injection sous la peau du lapin d’un mélange de globules de divers animaux. — M. Ch. Richet établit que les sels des métaux homo- logues et analogues sont d'autant plus toxiques qu'ils sont plus rares dans le sol, les eaux et les organismes. — M. M. Letulle décrit les métamorphoses adénoma- teuses des glandes myo-épithéliales chez l'homme. Séance du 26 Novembre 1910. M. P. Chaussé montre que, chez les oiseaux, la dégénérescence tuberculeuse n'est en réalité qu'une simple dégénérescence granulo-graisseuse. — MM. R. Turro et P. Gonzalez ont obtenu l’anaphylaxie 7» vitro, selon la méthode de Richet, en employant les globulines. Le poison anaphylactique s’oxyde facile- ment à l'air à 37%; il est rapidement dialysable. — M. G. Billard a constaté que le suc d’autolyse du foie de porc, filtré sur kaolin, puis sur bougie, perd la plus grande partie de ses substances nocives, qui sont adsorbées par les milieux filtrants. — MM. G. Billard et E. Dechambre ont observé que le suc d’autolyse du loie de porc filtré possède une action antitoxique manileste contre le venin de cobra. — M. Em. Feuillié a reconnu que l'oligurie et l'albuminurie orthosta- liques sont identiques comme origine; l’opsiurie est d'origine extra-rénale. — M. A. Le Play montre que l'introduction réitérée de substances minérales dans l’économie facilite les processus infectieux et toxiques; le liquide d'ascite a une action irritante sur le tissu hépatique. — M. A. Jousset a constaté que la tuber- culine irradiée par les rayons ultra-violets, qui a perdu son activité, est toujours précipitée par le sérum anti- tuberculeux, tandis que le sérum antituberculeux irradié perd son pouvoir précipitant. — MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez ont observé que, pour que la fibrine soit rétractile, il faut, entre autres conditions, que ses constituants soient dans un état donné qui paraît assez instable et que suffit à perturber le chauf- fage à 45°-460. Cet élat peut ètre ramené à son équi- libre primitif par acidification du milieu. — M.S. Marbé résume l’ensemble de ses recherches sur les opsonines et la phagocytose dans les états thyroïdiens. — M. H. Iscovesco a constalé que l’eau de mer natu- relle, l'eau de mer diluée, les eaux de Vichy et celle de Chàtelguyon ont des tensions superficielles inférieures à celles des solutions salines qui leur sont isotoniques, fait attribuable à la présence de colloïdes. — M. H. Triboulet montre que la réaction rosée fugace à la phénolphtaléine des selles de nourrissons caractérise la présence d'acides de fermentation. — MM.H.Triboulet, Ribadeau-Dumas et Harvier confirment expérimen- talement le rôle de la région iléo cæcale et surtout de ses amas lymphoiïdes dans la production de la sterco- biline. — MM. H. Vincent et Collignon sont parvenus à immuniser de jeunes chèvres contre la fièvre de Malte par l’inoculation d’antigène préparé en tuant des cultures de Micrococcus melitensis par l'éther. — M. J. Jolly estime que les expériences de culture des tissus de MM. Carrel et Burrows ne démontrent pas péremptoirement qu'il s’agit de phénomènes de survie; on sait, d'ailleurs, depuis longtemps que, dans certains Lissus, in vitro, des multiplications cellulaires peuvent continuer quelque temps à s'effectuer. — M, E. Maurel a conslaté que des micro-organismes divers (diplo- coques) existent fréquemment à la surface des pâtés et y conservent leur reproductivité; ils peuvent n'être pas sans danger puisqu'ils provoquent de l'amaigris- sement chez le lapin. — M. G. Peron a reconnu que le piæonol ne préexiste pas dans la racine de Pæonia Moutan; cette racine renferme un glucoside dédou- blable en pæonol et en un sucre dextrouyre sous l'influence d’un ferment spécifique contenu dans la racine et aussi telle des acides minéraux étendus. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 15 Novembre 1910. M. A. Raybaud a obtenu un grand nombre de réac- tions positives avec l'indol nitreux dans les cultures de matières fécales en l'absence de vibrions cholériques; celte réaction n'est done pas spécifique du choléra. — M. A. Joleaud à étudié la faune de poissons miocènes de la basse vallée du Rhône. La fossilisation y a mis en évidence d'une facon frappante les caractères histo- logiques de certaines dents d'Elasmobranches. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 8 Novembre 1940. M. G. Denigès montre que l'acide diacétique, libre ou salifié, s'il se dédouble assez rapidement à l’ébul- lition de ses solutions en CO* et acélone, est assez longtemps stable à froid, au moins dilué, et que, sans enfermer d’acétone libre, il présente, à un haut degré, la réaction colorée de Legal. — Le même auteur à détermimé le coefficient de partage des solutions aqueuses d’acétone vis-à-vis de l’éther. Pour des doses d'acétone comprises entre 0,5 el 10 grammes par litre, il est constant et égal à 1,6. I1 est impossible de déterminer l’acétone urinaire par extraction éthérée. — M.J. Gautrelet a étudié l’action d'extraits hépa- tiques et génitaux de divers mollusques sur la pression sanguine du chien. — M. J. Sabrazès a reconnu que, pendant la pause apnéique du rythme respiratoire de Cheyne-Stokes, la pression artérielle systolique baisse. — M.J. Chaine a constaté en Charente que, chez les plantes herbacées, c'est uniquement par les parties souterraines que les Termites pénètrent. Les arbres ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sont, en général, atteints d'une façon identique; mais ils peuvent aussi présenter d'autres modes d'envahis- sement. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 Novembre 1910. M. J. Duclaux : Ze maximum de densité et les pro- nriétés physiques de l'eau. L'auteur rappelle que les nombreuses anomalies que présentent les propriétés physiques de l’eau (maximum de densité, augmentation de volume par solidification : anomalies de la compres- sibilité, de la viscosité, de la chaleur spécifique) ont été rattachées par Rüntgen à une cause commune : la présence dans l'eau, à la température ordinaire, de molécules polymérisées qui sont probablement iden- tiques aux molécules de glace, de telle sorte que l’eau doit être considérée, non pas comme un liquide homo- gène, mais comme une solution de glace. Le nombre des molécules polymérisées diminue à mesure que la température s'élève. Ceite conception s'accorde avec les mesures de Ramsay et Shields, d'après lesquelles l'eau est un liquide à molécules associées, et elle rend compte sans difficulté des propriétés particulières de l'eau. Plusieurs procédés (Sutherland, Van Laar) per- mettent de calculer approximativement la quantité de glace qui existe en solution dans l’eau à diverses tem- pératures. En appliquant la loi qu'a donnée Van't Hoff pour le déplacement des équilibres par variation de température, on a une première relation entre la con- centration moléculaire de la glace dissoute, la chaleur de transformation de cette glace en eau et la tempé- rature. L'étude de la chaleur spécifique de l'eau en donne une seconde, et en combinant les deux on arrive à la relation approchée : Vu CT TU où e est la concentration moléculaire de la glace dis- soute, & une constante, M le poids moléculaire de la glace et T la température absolue. Il reste à déterminer M. Or, en admettant l'exactitude de cette formule, on est conduit à représenter le volume spécifique de l'eau par la formule : V=a+bT+eT — et cette formule peut servir à déterminer M en cher- chant la valeur de ce nombre qui concorde le mieux avec l'expérience. On trouve ainsi pour l'exposant de T un nombre compris entre 5,5 el 6. Diverses corrections doivent être faites à ce résultat, de telle sorte que la valeur la plus probable de l’exposant est 3,6 environ : on en déduit pour M un nombre voisin de 54, c'est- à-dire que les molécules de glace seraient (H*0)*, comme l'a déjà indiqué Sutherland. La chaleur de transforma- tion de la glace dissoute en eau est alors de 40 calories par gramme environ. — M. L. Dunoyer : Appareil très sensible pour mesurer les variations de Ja composante horizontale du champ magnétique terrestre. I à déjà été fait allusion à cet appareil dans une communication présentée le 6 mai 1910 par l'auteur, devant la Société de Physique. Si l'on dispose l'un au-dessus de l’autre deux aimauts identiques, horizontaux, mobiles autour d’un même axe vertical passant par le milieu, la for- mule qui relie l'intensité H de la composante horizon- tale du champ magnétique, l’angle x que chaque aimant fait avec la direction de ce champ, la distance verticale des aimants , leur longueur 2/ et leur moment magné- tique M, peut s'écrire : l 1 = COS à FRANT EE À — à o L? 3 ee + sin? x) (5 + cos? ) Si le rapport 2/21 est suffisamment grand (supérieur à 2 par exemple), le crochet qui figure au second 1910. — 81 Ni REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 997 membre est pratiquement constant. C'est sur cette propriété qu'est fondé le dygographe, présenté par l'au- teur dans la communication précitée. Mais, si le rapport h/21 est très petit, la fonction de & qui figure au deuxième membre présente un palier horizontal très étendu, possédant un minimum au voisinage de 490,5. C'est ce que montrent très nellement les courbes projetées par l'auteur, lesquelles résultent d’une cons- tuction graphique aussi exacte que possible. Dans l'appareil décrit devant la Société (construit par les établissements [enry-Lepaute), l'une des aiguilles, de 10 centimètres de longueur, est portée par un élrier à longues branches verticales en verre, souteuu par un fil de cocon; à l'extrémité supérieure de celte fourche est accroché un deuxième fil de cocon qui supporte un étrier semblable, mais plus court, destiné à soutenir la deuxième aiguille, identique à la première. Les deux étriers portent des miroirs qui renvoient à 45° Ja lumière qu'ils reçoivent à (ravers une fente et une lentille. Les deux faisceaux lumineux tombent à 45° sur deux autres miroirs fixes qui forment sur une même échelle deux images de la fente. Ce sont les variations de distance de ces deux images que l’on mesure. Si « varie de 489 à 49°, l'angle des deux fais- ceaux réfléchis varie de 4. Sur une échelle placée à 2, {un correspond donc à une variation relative du champ égale à 25.10%. Cette sensibilité à été même dépassée expérimentalement, en s’approchant davantage du minimum de f(x). Cette position marque la frontière, pour & croissant, de positions d'équilibres instables pour le système des deux aiguilles. L'examen des courbes de f(x) permet d'indiquer un cas simple, numériquement étudié, où l'action directrice d’un champ extérieur uniforme sur un système d’aimants se traduit par des changements d'équilibre hrusques et irréversibles, les plages d'équilibres correspondant aux valeurs croissantes de « ne coincidant pas avec celles qui correspondent aux valeurs décroissantes de cet angle. C’est l'image simpliliée de ce qui se passe dans les expériences d'Ewing et dans l’aimantation des corps ferromagnétiques. — M. Léon Bloch : Sur les ions et les particules neutres présents dans certains gaz récemment préparés. I. L'auteur commence par rappeler les recherches qui lui ont permis d'établir l'identité de nature entre l’ionisation par barbotage et l'ionisation par action chimique (en milieu liquide). Il s’agit d'expériences sur les couches liquides superti- cielles (couches minces d'alcool, de benzine, etc., ver- sées à la surface du liquide où se passe la réaction). Les liquides inactifs par barbotage suppriment lioni- sation chimique. Parmi les liquides actifs, les uns produisent le mème effet (alcool amylique, éther, etc.); d’autres laissent subsister tout ou partie de l'ionisation (acétone, aldéhyde). Les différeuces qui subsistent entre l'ionisation par barbolage et l'ionisalion par action chimique peuvent s'expliquer par la différence de grosseur des bulles. IL. L'ionisation par action chi- mique et l’ionisation par barbotage sont l'une et l’autre des modalités de l'ionisation par pulvérisation. L'action chimique et le barbolage s'accompagnent toujours de poussières liquides. En étudiant pour lui-même le phénomène de la pulvérisation à l’aide de l'appareil de Gouy, on arrive à cette conclusion très nette : /es liquides actifs ou inactifs par barbotage sont aussi aetils ou inactifs par pulvérisation. I. Les réactions chimiques par voie humide donnent lieu à deux phé- nomènes distincts : 1° une ionisation proprement dite; 20 une pulvérisation de particules neutres susceptibles de se charger par voie électrostatique. De ces deux phénomènes, le deuxième est de beaucoup le plus gros. On l’observe à peu près seul lorsqu'on cherche à cons- truire des courbes de saturation statiques (en l'absence de courant gazeux). La méthode du courant gazeux per- met de recueillir les ions proprement dits si l’on a soin d'éviter, au lieu même de la réaction chimique, tout champ parasite. Les particules neutres se chargent électrostatiquement lorsqu'elles prennent naissance 23** 998 dans un champ électrique : elles possèdent des charges et des mobilités qui sont fonction du champ où elles se forment. IV. Les particules neutres libérées dans les réactions chimiques se différencient très nettement des centres neutres signalés par M. de Broglie dans les gaz du barbotage. D'après M. de Broglie : 1° les centres neutres prennent naissance exclusivement dans les liquides inactifs. L'eau et les solutions acides ne donnent pas de centres neutres; 2° ils se transforment en gros ions lorsqu'on les charge au moyen du radium ; 3° ils sont visibles dans l'éclairage à are. Au contraire, les particules neutres créées dans les réactions chi- miques : 1° prennent naissance dans un liquide actif; 20 elles ne peuvent se charger au moyen du radium; 3° elles échappent à l'examen ultramicroscopique. V. Par des méthodes purement électrostatiques on a déter- miné la charge, la grosseur et le nombre des particules produites dans les réactions chimiques. Dans des con- ditions bien déterminées, la charge des particules s’est montrée égale à deux ou trois fois la charge électrique élémentaire e. On peut donc dire que, lorsque ces par- ticules sont chargées, elles ne peuvent plus se distinguer des ions à charge double ou multiple. Elles peuvent s'appeler indifféremment des poussières électrisées ou des ions d'origine électrostatique. Leur rayon est très probablement de l’ordre de 10—7 et le nombre de par- ticules libérées par seconde atteint 2,8.107. VI. Les couches liquides superficielles modifient le courant de convection (particules chargées) de la même manière que le courant d'ionisation : la benzine, l’alcool amy- lique, l’éther suppriment d'une façon complète le cou- rant de convection comme le courant d'ionisation. Il reste à décider si cette suppression tient vraiment à ce qu'il n’y a plus de particules pulvérisées ou à ce que les particules cessent de porter une charge électrosta- tique. L'auteur termine par quelques considérations sur les centres neutres du barbotage et les particules neutres des réactions chimiques. Il indique l'importance des particules neutres dans le mécanisme des phéno- mènes d'ionisation en général. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 3 Novembre 1910. SCIENCES NATURELLES. — MM. H. G. Plimmer, W. B. Fry et H. S. Ranken ont poursuivi leurs recherches sur le traitement expérimental des trypanosomiases. Ils confirment le fait que l’antimoine est un trypano- cide plus puissant que l’arsenic, tout en étant généra- lement moins toxique; toutefois, il offre quelques incon- vénients : escarre et nécrose au point d'injection et douleur prononcée. L'injection intraveineuse n'a pas ces inconvénients; mais l'élimination est si rapide que l'effet est très faible. Si l’on injecte l'antimoine à l’état de très grande division, il est absorbé par les leuco- cytes et graduellement transformé en un composé soluble qui se répand dans tout le corps; cette méthode a donné les résultats les plus satisfaisants, mais la technique est plus difficile. En outre, l’action est plus lente que celle des sels, mais elle est plus prolongée par suite du retard de l'élimination. Une administra- tion soignée ne provoque pas d'irritation des tissus. — MM. J. W. W. Stephens et H. B. Fantham : Mor- phologie particulière d'un Trypanosome dans un cas de maladie du sommeil; peut-être constitue-t-il une nou- velle espèce (Tr. rhodesiense)? Ce trypanosome a été d'abord observé dans le sang d’un rat infecté par la maladie du sommeil d’un patient provenant de la Rhodésie. Ce trypanosome présente des formes longues et des formes trapues presque sans flagelle; 6 °/, des formes ont le noyau à l'extrémité postérieure (non fla- gellée), près du blépharoplaste, quelquefois postérieu- rement à celui-ci. On n'a jamais signalé de formes semblables chez le Tr. gambiense. Elles ne sont pas dues au séchage des pellicules de sang, car on peut les observer par coloration intra vitam. Elles ne sont pas ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dues au traitement et persistent par inoculation chez divers animaux. Les auteurs pensent qu'il s'agit d’une nouvelle espèce de trypanosome humain, provoquant la maladie du sommeil et pour laquelle ils proposent le nom de Tr. rhodesiense. — M. F. W. Mott a examiné le système nerveux central dans un cas de trypanosomiase humaine quérie. Il s'agit d'un soldat sikh ayant contracté la trypanosomiase en juin 1905; traité par l’arsenie inorganique, il finit par guérir. Revu en 1908 et 1909, il était en excellente santé; son liquide céphalo-rachidien ne renfermait plus de trypanosomes et ne donnait rien par injection au singe. Il mourut de pneumonie en 1909. Le cerveau, examiné post mortem, présentait une apparence normale. L'examen histolo- gique n’a permis de constater ni l'infiltration méningée et périvasculaire caractéristique, ni gliose. Il en résulte que la trypanosomiase humaine est curable; mais cela ne veut pas dire que la maladie du sommeil le soit, car il n’est pas prouvé que, dans ce cas, les trypanosomes aient envahi l’espace sous-arachnoïdien. Séance du 10 Novembre 1910. SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Horton a étudié /a nature des porteurs d'électricité positive qui se dégagent du phosphate d'aluminium chauffé. On sait que le phos- phate d'aluminium produit par chauffage une très forte ionisation positive. L'auteur à recueilli üans un tube les porteurs de la charge positive et il en a observé le spectre en les rendant lumineux par une décharge annulaire sans électrode. On observe dans tous les cas le spectre de l'oxyde de carbone, malgré toutes les précautions prises pour exclure la présence de ce gaz. 1! faut donc conclure que les ions positifs sont formés par de l’oxyde de carbone; le poids moléculaire de celui-ci concorde bien, d'ailleurs, avec le résultat des déterminations de e/m pour cesions. — MM. F. Soddy et À. J. Berry : Conduction de la rhaleur à travers les gaz raréfiés. Les auteurs arrivent à la conclusion que la conductibilité calorifique à basse pression varie moins avec la nature du gaz et la température de l’ex- périence que la théorie cinétique le fait prévoir. Les valeurs extrêmes trouvées pour les conductibilités de l’argon, de l’hélium et de l'hydrogène sur un inter- valle d'environ 450° vont de 0,8 à 3,4, tandis que les valeurs calculées se trouvent entre 0,95 et 16,2 X 10 —5 cal. par centimètre carré de surface chaude pour 1° de différence de température et 0,01 millimètre de pression gazeuse. — M. W. H. Hatfeld a étudié la physico-chimie de la précipitation du carbone libre dans les alliages fer-carbone. L'auteur estime que le carbone libre ne peut être produit que par dissociation d'un carbure libre. Par la méthode d'analyse électro- lytique, il a obtenu le carbure cémentite avec des fers de composition variable; il montre qu'en faisant varier le pourcentage de Si, de Mn ou de S dans ces fers, la composition de la cémentite se modifie. La dimension et la structure du carbone de trempe pré- cipité sont dues en grande partie à la dimension et à la structure de la cémentite originelle. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 11 Novembre 1910. M. C. Chree étudie la question de la simultanéité des perturbations magnétiques enregistrées en diffé- rentes stations. On peut supposer : 1° ou bien que ces perturbations commencent absolument en même temps dans toutes les stations ; 2° ou bien qu'il y a une petite différence de temps, correspondant à la vitesse de propagation des ondes électromagnétiques; 3° ou bien, enfin, suivant le D" Bauer, il y a une différence plus grande entre les stations, correspondant à quelques minutes pour les stationsles plus éloignées. D’après les observations de Faris, Bauer conclut à l'exactitude de sa théorie, le commencementdes perturbations mettant environ 3 3/4 minutes pour se propager autour de la ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Terre. M. Chree pense que cette théorie pourra être facilement vériliée par une comparaison soigneuse des courbes enregistrées dans des stations choisies, entou- rant bien complètement le globe. — M. W.B. Morton: Sur les ondes lumineuses en forme de cornes et la théorie de l'are-en-ciel. L'auteur montre que l'onde lumineuse plane tombant sur une goutte de pluie sphérique et deux fois réfléchie par l'intérieur de la goutte émerge sous forme d'onde à bords en forme de cornes qui courent le long des surfaces caustiques. La phase sur une onde de ce type n'est pas constante, les deux portions situées sur les bords opposés d'une corne différant en général d'un quart de période. Il est avantageux de considérer la distribution de la Jumière dans l’arc-en-ciel comme une conséquence de l'interférence des ondes à cornes qui descendent vers l'œil de l'observateur le long de la direction de déviation minimum. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances (suite). M. F. L. Pyman montre que les glyoxalines simples réagissent comme des composés tautomères, car, par méthylation, la 4- (ou 5-) méthylglyoxaline fournit un mélange des 1:4- et1:5-diméthylglyoxalines, bouil- lant respectivement à 1989-1999 et 2249-2250, — MM. F. G. Donnan et H. E. Potts ont étudié la cinétique de la réaction entre les sels d'argent et les iodures alipha- tiques. En général, le sel d'argent non dissocié réagit avec l'iodure d’alkyle en formant probablement un composé intermédiaire. — M. A. G. Perkin a reconnu que l’osyritrine et la myrticolorine ne sont autre chose que de la rutine, comme on l'avait déjà montré pour la violaquercitrine. — MM. G. Clarke jun. et S. C. Ba- nerjee montrent que le glucoside jaune du Tephrosia purpurea possède la formule C*H*0'°,34°0 et s’hydro- lyse en donnant de la quercétine, du dextrose et du rhamnose. Il est donc identique à la rutine. — MM. A. N. Meldrum et W. E. S. Turner ont reconnu que la plupart des amides en solution dans l’eau sont asso- ciées. — M. W.H. Mills et M'e À. M. Bain, en faisant cristalliser le sel de morphine de l'acide 4-oximinocy- clohexane-carboxylique, ont obtenu un sel de l'acide droit, tandis qu'avec la quinine il cristallise d'abord un sel de l'acide gauche. Les sels de sodium des deux acides ont respectivement comme rotation moléculaire 740,5 et — 790,9. — M. F. Tutin a résolu la benzoyl- oscine en ses composants actifs par cristallisation de son d-bromocamphosulfonale. La benzoyl-d-oscine donne |æh—+ 39,5 en solution alcoolique à 50 °/, ; la d-oscine a une rotation spécifique d'environ H 770,7. — MM. H.D.Gardner, W.H.Perkin jun.et H. Watson décrivent la préparation des acides carboxyliques de la cyclohexanone et de quelques-uns de leurs dérivés. — M. Ch. W. Moore confirme la formule C*#H0* que Berg a attribuée à l'élatérine ; il a reconnu que ce corps renferme 20H, un groupe acétyle et un groupe lactonique. Par oxydation de l'acide élatérique, il a obtenu deux substances, C#H*0*et C#H%0"; la dernière est une dicétone, qu'il nomme élatérone. — M. M. P. Appleby a déterminé la viscosité des solutions aqueuses de nitrate de lithium de concentrations variables à 25°, 489 et 0°. La formule de Gruneisen ne représente pas le phénomène pour lés solutions diluées. L'auteur, par contre, a trouvé une relation entre les viscosités et les nombres d'hydratation, qui se vérilie pour les solutions de nitrate de Li. — MM. S. Deakin et N. T. M. Wils- more, par action de HCAz sur le cétène, ont obtenu un liquide incolore, C'H°0?Az, se congelant en un solide blanc, F. —196° à — 1950. Il est décomposé par l’eau avec formation d'acides acétique et cyanhydrique ; c'est probablement l’«-acétoxyacrylonitrile CH° : C (CAz).0.C0.CH5. — MM. F. Chick et N. T. M. Wils- more ont étudié le premier produit de polymérisation du cétène, qu'ils ont identifié avec la cyclobutane-1 :3- 999 dione. AzH° réagit sur cette dernière en formant d'abord dé l'acétoacétamide, puis de l'aminocrotonamide. Far H en présence de noir de platine, la cyelobutane-1 : 3- dione est réduite en aldéhyde butyrique. — M.P.May à préparé l'oxyde de la triphénylstibine en l'oxydant par H*#SO' et KMnO®., — M. G. H. Frank, en traitant la malière colorante appelée « indone immédiate » par l'acide chloracétique, a obtenu un dérivé dicarboxylé CHHMOIAZS*, — MM. F. B. Power et H. Rogerson ont isolé, de la portion soluble dans l’eau de l'extrait alcoolique de Leptandra virginiea:de l'acide 3:4-dimé- thoxycinnamique, du mannitol, un sucre donnant de la d-phénylglucosazone, et un produit amorphe amer ; puis, de la partie de l'extrait insoluble dans l'eau : un phytostérol, F.135°-1360, (x), —=— 339, qu'iis nomment vérostérol, un mélange d'acides gras et de l'acide p-méthoxycinnamique. — MM. J. Kenner el E. Witham, en faisant réagir la poudre de cuivre sur le p-chlorobenzotrichlorure, ont obtenu le tétrachlorure de 4:4! -dichlorotolane, qui, traité par la poudre de Zn à 50° pendant deux jours, donne un mélange de dichlo- rures de cis- et trans- #:4' -dichlorotolane, F.166°-167° et 86-870. — MM. T. F. E. Rhead et R. V. Wheeler ont déterminé l'équilibre entre C, CO et CO* entre 850° et 1.200°; voici les proportions de gaz qu'ils ontobservées : T co co 8500 93:11 9000 97,78 950° 98,68 10000 99,41 10500 99,6% 11000 99,85 12000 93,9% — MM. W. E. S. Turner etE. W. Merry ont déterminé la complexité moléculaire à l’état liquide de composés organiques de l'azote. Les amines primaires sont légère- ment associées, les amines secondaires et tertiaires fortement. Les nitrosoamidesetles nitriles aliphatiques sont associés ; les composés aromatiques correspon- dants sont peu ou pas associés. Les amides et anilides sont associés, surtout les amides aromatiques. Séance du 20 Octobre 1910. M. F. Tutin a méthylé l’ériodictyol, l'homoériodic- tyol et l'hespéritine ; il a obtenu avec chacun d'eux de là 2-hydroxy-4 : 6-diméthoxyphényl-3 : 4-diméthoxy- styryleétone, F. 154, et de la 2: #: 6-triméthoxyphényl- 3 : 4-diméthoxystyrylcétone, F. 117,5. L'ériodictyol a donc la formule : OH_ (4 10€ CH: CH.COQ OH; (3) Où oH l'homoériodictyol est son dérivé méthylé en (3) et l'hespéritine son dérivé méthylé en (4). — MM. F. Tu- tin et F. W. Caton, en condensant la 2 : 4: 6-trimé- thoxyacétophénone avec l'éther méthylique de la vanilline, ont obtenu la 2 : 4 : 6-triméthoxyphényl-3 : 4-diméthoxystyrylcétone, identique au produit préparé ci-dessus. — MM. A. G. Green et A. E. Woodhead onl préparé certaines substances qui se forment dans la conversion du chlorhydrate d'aniline en noir d'aniline. La première est l'émeraldine : C‘H5.AzH.C°H*. AzH.C°H*. AzH.CSHi.AzH.C6Ht.Az: Ci: Az.C'HM.Az: C'H*AZH ; des quatre autres, deux sont obtenues par oxydation : la nigraniline et la pernigraniline, les deux autres par réduction : la protoémeraldine et la leucoémeraldine. __ M. H.T. Tizard a mesuré quantitativement les varia- tions de couleur moléculaire du méthylorange et du méthvlrouge en solutions contenant des concentra- tions variables d'ions H. Le point neutre du méthyl- rouge est situé entre les concentrations 10—%7 et 10—7 d'ions H. L'auteur a appliqué ces résultats à la mesure colorimétrique de l'hydrolyse des sels d'aniline en solution aqueuse; la détermination de la couleur du 1000 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES méthylorange donne directement la concentration en ions H. — MM. J. T. Hewitt et F. B. Thole ont cons- taté que le phénylxanthénol et le phénylméthylacridol ont presque le même spectre d'absorption; l'addition d'acides provoque la formation de sels ayant des cons- litutions analogues. Ces sels ont probablement une structure oxonium. — M. A. E. Dunstan a appliqué la viscosimétrie à la mesure de la vitesse de réaction dans les changements moto-isomériques, isodynamiques, tautomériques, etc. — M. H. Crompton et M!!° M. K. Harrison, en faisant réagir l'iode sur l’acénaphtène en présence de HgO jaune, ont obtenu l'iodoacénaph- tène C'H°I, cristallisant de l'alcool en prismes inco- lores, F. 650,5 ; il est oxydé par le dichromate de Na en acide 4-iodonaphtalique. — M.J. Me C. Sanders décrit une forme perfectionnée d'appareil à extraction. — MM. E. Hope et R. Robinson, en faisant bouillir des quantités équimoléculaires de cotarnine et de nitro- méconine, ont obtenu presque quantitativement la nitrognoscopine , cristallisant du trichloroéthylène chaud en prismes jaunes, F. 191° avec décomposition. Par réduction, elle fournit l’aminognoscopine, F.205°. — M. A. Clayton à préparé deux éther-esters méthy- lique et éthylique de l'acide 5-nitro-coumarinique; cet acide doit être un isomère cis de l'acide o-coumarique OH.C'H°.CH : CH (CO*H). — M. R. R. Enfield a constaté qu'une solution diluée d'acide chlorique pur n’est pas réduite par lamalsame de Na ou l'alcool méthylique ; l'addition d’autres acides amorce aussitôt la réduction. Cet effet stimulant est dû à l’action catalytique des ions H, la réduction portant sur l'ion CIO*, — MM. L. Green et O. Masson ont étudié la décomposition de l'acide persulfuriqueet deses sels en solutions aqueuses. Chaque sel paraît avoir sa propre constante monomo- léculaire normale, qui augmente d’une quantité pro- portionnelle aux ions H ou à l'accélérateur acide présent. — M. R. Meldola, en traitant le 2 : 6-dinitro- 4-aminophénol par un alcali et le sulfate de méthyle en quantité un peu supérieure à celle qui est néces- saire pour introduire un seul groupe méthyle, a obtenu un composé triméthylé, la 2 : 6-dinitrodiméthyl-p-ani- sidine, F,=>300°. II y a donc tendance à la méthylation complète dans ce cas. — M. E. Barrett a étudié la dissociation des sels d'hydroxylamine en solution aqueuse par la méthode de la conductibilité électrique et celle de la détermination colorimétrique de l’aci- dité. — MM. A. F. Joseph et J. N. Jinendradasa, en ajoutant un bromure soluble au brome aqueux, ont vu la couleur devenir plus claire; il se forme probable- ment un polybromure moins foncé que le brome libre. — MM. H. M. Dawson et R. Wheatley ont déterminé la vitesse avec laquelle l’iode réagit sur diverses cétones en solution aquo-alcoolique en présence d’acide sul- furique comme catalysateur; ils en déduisent les vitesses avec lesquelles ces diverses cétones sont con- verties de la forme cétonique à la forme énolique. — MM. J. E. Purvis, H. O. Jones et H. S. Tasker ont étudié l'effet de la substitution du soufre à l'oxygène dans un certain nombre de substances similaires. 1° Cette substitution provoque une augmentation mar- quée du pouvoir d'absorption du composé et cause souvent la production d'une bande d'absorption et de la couleur. 2 Le groupe C:S doit être considéré comme un chromophore puissant. 3° Dans certains composés aromatiques, le remplacement de O par S produit une oblitération des bandes d'absorption. — MM. H.S. Tasker et H. O. Jones montrent que l'action du phénylmercaptan sur le chlorure de thionyle est représentée par l'équation : 8 C‘H*SH—+4S0CP— 8 HCI + 2S0? + 3 (C°H5.S)L(C°H5)S:. L'anhydride sullureux est formé par la décomposition du sous-oxyde de soufre SO produit temporairement. — M. S. Ruhemann a fait réagir KOH sur l'hydrate de tricétohydrindène C'H*(CO)C(0H}; la réaction a lieu en trois phases : il se forme d'abord une coloration jaune, due à la pro- duction d'acide phénylglyoxal-o-carboxylique CO'H. C‘H'.CO.CHO, puis une coloration bleue, provenant d'un composé intermédiaire inconnu; enlin, la solu- tion devient incolore et renferme de l'acide o-carbo- xymandélique CO?H.C°H*.CH (OH). CO*H. L'hydrate de tricétohydrindène donne une coloration bleue intense avec les acides «-aminoaliphatiques. — M. T. S. Pat- terson et Ml: E. F. Stevenson ont étudié la relation entre la constitution chimique et l'influence de divers solvants sur la rotation du tartrate d'éthyle. — MM. B. Foster et H. A. D. Neville ont déterminé la solubilité du phosphate de chaux et des phosphates des engrais commerciaux dans des solutions saturées de CO: con- tenant AzH*'. Avec des quantités croissantes d'ammo- niaque, la quantité de phosphate passant en solution augmente d'abord rapidement, puis plus lentement, la solubilité du phosphate étant presque proportionnelle à la quantité d'AzH* présente. — M. R. E. Slade, par l'étude de la conductibilité des solutions d’aluminate de sodium, confirme le fait que l'hydrate d’AI se com- porte comme un acide monobasique. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 28 Novembre 1910. MM. J. G. Parker et M. Paul ont déterminé l’eau de cristallisation des sulfates d’alumiuium, de magné- sium et de sodium incorporés au cuir. On sait que ces sels, non hygroscopiques et contenant une forte pro- portion d'eau, sont souvent employés pour adultérer les cuirs pour semelles. Les auteurs ont constaté que le sulfate de Mg absorbe 7 molécules d’eau dans les cuirs séchés à la température ordinaire et 5 molécules dans les cuirs séchés à haute température. Pour le sulfate d'Al, la quantité d’eau absorbée s'élève à 10-12 molécules suivant les températures, et pour le sulfate de Na à 3 molécules. SECTION DE SYDNEY Séance du 21 Septembre 1910. MM. G. Harkeret J. Me Namara ont étudié l'emploi de lélectrolyse comme moyen de prévenir la corrosion du fer et de l'acier. On considère généralement la cor- rosion du fer ou de l'acier en contact avec le cuivre ou le laiton comme un phénomène d'électrolyse où le fer agit comme anode et passe en solution. On à proposé d'empêcher la corrosion en envoyant dans le fer un courant d'électricité suffisant pour renverser le sens du phénomène et faire du fer la cathode; cette méthode aurait donné des résultats excellents pour les chaudières, au milieu desquelles on suspendait une barre de fer, alimentée par un courant de 1 à2 ampères sous # à 8 volts. Les auteurs se sont proposé de déter- miner la valeur pratique de ce procédé et ils ont entrepris une série d'expériences à ce sujet. Celles-ei ont montré que le procédé électrolytique n'empêche pas actuellement le métal de la cathode d'entrer en solution, car, là où le poids de la cathode reste cons- tant, il y a un dépôt qui provient de la dissolution de l'anode; cependant, la tendance des métaux à entrer en solution est notablement diminuée. Le Gérant : A. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 91e ANNÉE N° 24 30 DÉCEMBRE 1910 Revue générale L LA pures et appliquées Foxpareur : LOUIS OLIVIER DIRECTEUR : J.-P. LANGLOIS, Docteur ès Sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. J.-P, LANGLOIS, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie A. Mosso (1846-1910). — La Physiologie vient de: perdre un de ses plus illustres maîtres, le plus illustre peut-être, A. Mosso, professeur à l'Université de Turin. L'œuvre de Angelo Mosso est considérable. Il avait le rare, très rare bonheur d'inventer, et, en reprenant une question ancienne, en traitant un problème déjà débattu, d'y apercevoir des points de vue nouveaux, et de l'aborder par des méthodes imprévues. Nul plus que Mosso n'a eu le don presque génial de trouver dans les vieilles banalités physiologiques l’occasion de faire d'inattendues découvertes. Au début de sa carrière de physiologiste, il subit la forte empreinte de Ludwig à Leipzig; et, quoiqu'il eût été aussi l'élève de Schiff, il semble bien que, de ces deux maîtres, c'est Ludwig qui a eu le plus d'influence. Aussi ses premiers grands travaux furent-ils des appli- cations de la méthode graphique à la Physiologie. C’est à Mosso qu'on doit le pléthysmogr aphe et l'er- gographe. Non content d'avoir créé ces deux mer- veilleuses méthodes d'investigation, il a, dès ses pre- miers mémoires, grâce à son activité, à sa patiente et sagace industrie, découvert à peu près tout ce qu'on pouvait découvrir par l'emploi de ces deux méthodes. La connaissance approfondie de la circulation céré- brale, encore qu'elle eùt été antérieurement bien indiquée dans ses grandes lignes par Magendie et A. Richet, date vraiment, pour les détails plus précis et la perfection des procédés d'investigation, du Mémoire célèbre de Mosso. L’ergographie, c'est-à-dire l'inscription graphique du travail musculaire chez l'homme, a permis de con- naitre les lois de la fatigue, et de mettre enfin quelque rigueur scientitique dans l appréciation du travail mus- culaire humain modifié par les influences les plus diverses. Puis un autre sujet l'a passionné : l'étude des modi- fications que l'altitude, autrement dit la diminution de la pression barométrique, fait subir à la respiration et aux échanges respiratoires. [l a sur de solides et ingé- nieuses expérimentations fondé sa théorie de l'acapnie, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. à savoir de l'influence nocive qu'exerce sur la res- piralion la diminution de pression de l'acide carbo- nique, alors que, jusqu’à lui, on estimait, avec P. Bert, que l'oxygène seul est en cause, et que le rôle de l'acide car bonique dans le phénomène du mal des montagnes est à peu près nul. Pour faire avec profit cette étude de la pression diminuée, il eut l'idée d'un laboratoire physiologique d altitude, au col d’Olen, sur le Monte-Rosa ; et il eut la joie de pouvoir constituer cet établissement interna- tional, pourvu de ressources précieuses, grâce à la géné- rosité de la reine mère Marguerite de Savoie, du Gou- vernementitalien, et de quelques autres Gouvernements étrangers. Il faudrait, si nous voulions entrer dans le détail de son œuvre physiologique, mentionner encore bien des travaux importants : les variations de température du cerveau, l'action toxique du sérum des anguilles et des murènes (action toxique qu'il a le premier observée); les conditions de la respiration dans les tunnels de chemins de fer, etc. Mais son activité ne se bornait pas aux recherches physiologiques. Il fut aussi un écrivain habile et un psychologue délicat. Il a écrit sur la peur, sur l’éduca- tion physique des jeunes gens et des jeunes femmes, sur la réforme de l'éducation, des livres profonds et spi- rituels, où une science sévère se dissimule sous un lan- gage simple, clair et pénétrant. I] n'était pas de ceux qui croient qu'un savant déroge en écrivant pour le grand public, et qui s’enferment dans une soi-disant tour d'ivoire, pour s’admirer et se contempler eux- mêmes avec dévotion. Mais, dans toutes ses œuvres de psychologie et de vulgarisation, il n'oublia jamais qu'il était avant tout un savant et un physiologiste; et l'explication physiologique, c'est-à-dire logique, des choses humaines a toujours rh la première place. J1 aimait tant la Physiologie qu'il créa une œuvre de diffusion physiologique vraiment admirable : les Ar- chives italiennes de Biologie, un journal excellent que les biologistes du monde entier devraient connaître et méditer; car cette revue contient, tantôt résumés, tantôt étendus, les travaux biologiques de tous les savants ita- liens. Et, de par l'activité, le nombre, le talent de nos 1 L 24 1002 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE confrères italiens, ces travaux sont considérables. La création des Archives italiennes de Biologie, écrites en langue française, fait autant d'honneur à l'Italie qu’à la France, et nous serions des ingrats si nous ne rap- portions pas à Mosso, et à lui plus qu’à tout autre, la gloire de cette belle publication (1883-1910). Vers la fin de sa vie, souffrant cruellement de la maladie qui a fini par l'emporter (diabète), il dut, sur le conseil de ses médecins, quitter le rude climat de Turin, et aller vivre dans le sud de la Méditerranée. Et alors, en Crète, comme son esprit enthousiaste et ardent était toujours en éveil, il se prit de passion pour l'archéologie préhistorique, et tout de suite, en abor- dant ces études, nouvelles pour lui, il y apporta une précision scientifique el une puissance imaginative qui firent la stupeur des archéologues professionnels, qu'il dépassa bien vite par son génie (Æscursioni nel Mediterranco e gli seavi di Creta, 1907. — Le origini della civilta mediterranea, 1909.) Ceux qui ont eu l’heureuse fortune de connaître ce grand savant l'ont aimé et l'ont admiré. Rarement on a vu réunies dans la même personnalité tant de qualités diverses. Il pouvait parler avec une presque égale facilité en français, en anglais, en allemand. C'était un pro- fesseur remarquable et un expérimentateur aussi patient qu'ingénieux. Il fut aussi à la tribune du Sénat un orateur ; et, comme écrivain, il a été un des pre- miers vulgarisateurs de son temps. Sa simplicité et son aménité élaient, chez un homme aussi grand que lui, tout à fait charmantes, et vraiment on ne saurait dire si, en le connaissant, on ressentait plus d'amitié que d’admiration. C’est une grande lumière qui s’est éteinte. Charles Richet, Professeur de Physiologie à la Faculté de Médecine de Paris. $S 2. — Art de l'Ingénieur Les nouveaux paquebots géants de la White Star Line. — On sait les progrès considérables réalisés en ces dix dernières années dans la cons- truction des grands paquebots, et qui ont abouti à la mise en service de navires gigantesques tels que les Cunard des types Lusilania et Mauretania, avec leurs déplacements de 30.000 tonnes, leurs turbines de 70.000 chevaux et leur vitesse de 25 nœuds et demi. Ces magnifiques navires sont aujourd'hui dépassés par les types nouveaux de la White Star : l'O/ympie et le Titanic, au sujet desquels M. G. Richard a donné quelques renseignements à l’avant-dernière séance de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale. Le premier, qui vient d'être lancé, possède un dépla- cement de 60.000 tonnes au tirant de 40,20, une lon- de 8 mètres de diamètre, ne feront que 75 tours. Prix probable du navire : 38 millions. Et ce monstre sera, lui-même, bientôt dépassé par son concurrentallemand de la Hamburg America, d’un déplacement de 52.000 tonnes, long de 274 mètres, large de 282,50, profond de 192,25, avec turbines de 60.000 chevaux: vitesse : 22 nœuds. Ces paquebols sont, on le voit, à vitesses modérées et disposés de manière à recevoir, à côté de nombreux passagers (2.500, dont 730 de 1'° classe), de très importantes cargaisons : 6.000 tonnes environ; c'est le type mixte, intermédiaire entre le cargo et l’express. On y voyage moins vite, mais avec un confortable exceptionnel et moins coûteux. Leur clientèle de pas- sagers semble assurée, mais celle des marchandises est moins certaine, bien que capitale pour leur rende- ment commercial. Tels sont, aujourd'hui, les plus grands paquebots du monde. Est-ce pour longtemps? Ce ne sont pas des questions de construction navale qui, maintenant, limitent ces dimensions, mais, bien plus, des consi- dérations commerciales et surtout la rareté des ports, bassins, docks.… capables de recevoir de pareils navires. Le tirant d’eau de 10,40 parait difficile à dépasser, ainsi que la largeur des coques, de sorte qu'il semble que l'on devra faire de grands progrès et de très coûteux travaux dans l'établissement des ports avant de pouvoir dépasser notablement les dimensions de ces immenses navires. Le lancement de cette énorme masse, 27.000 tonnes en ce moment, a exigé des dispositions spéciales : des glissières exceptionnellement robustes, un déclanche- ment hydraulique très sûr, des moyens d'arrêt du navire sur l’eau consistant principalement en un frein composé de 80 tonnes de chaînes trainées au fond de l'eau. L'opération a parfaitement réussi; elle n’a duré que 62 secondes, et le navire s'est arrèté à 150 mètres du rivage. On n'a même pas eu besoin de le pousser sur ses glissières au moyen des deux verrins hydrau- liques de 100 tonnes prévus à cet effet. À $ 3. — Physique Lunette de pointage pour pièces à recul limité. — Les navires de guerre sont armés, comme on sait, en plus de leur grosse artillerie, d’un assez grand nombre de pièces de petit calibre, montées sur le pont ou installées dans les hunes, et qui sont essen- tiellement destinées à repousser l'attaque des torpil- leurs. Les dimensions relativement faibles et la grande mobilité du but exigent qu'on le suive constamment, dans un tir à l'épaulé, exécuté comme avec un fusil. Ce tir est très rapide : jusqu’à vingt coups par minute; Fig, 1.— Diagramme optique de la lunette de pointage. — A, objectif à trois verres; D', diaphragme; PP", prisme redresseur: “_ _R, verre réticulaire; L,, L,, oculaire; 0, anneau oculaire; dd', diaphragme; 5, in, 15, 1'n, faisceaux extrêmes. cueur de 265 mètres, une largeur maxima de 27%,75, une profondeur de 194,35 et des machines de 45.000 chevaux seulement, en raison de sa faible vitesse rela- tive de 21 nœuds. Ces machines seront constituées par des moteurs à pistons de 30.000 chevaux, à # cylindres de 1,37, 2,13, 2»,47, 2m,47 sur 1,90 de course, avec turbines d'échappement de 16.000 chevaux et trois arbres d'hélices, dont celui du milieu commandé par turbine. Le rotor de cette turbine de 3,60 de diamètre pèse 130 tonnes. La vapeur y arrive à la pression absolue de 0 kil. 27 et en sort à 0 kil. 07. L'hélice des turbines, avec 4 ailes en bronze phos- les points de chute sont suivis par le pointeur, qui cherche à les amener sur l'objet visé. Depuis quelque temps, on cherche à rendre plus efficace l’action des petites pièces, en les munissant de lunettes de poin- tage d'un grossissement modéré, mais d'un champ étendu et d'une grande clarté. Le problème paraissait élémentaire; cependant on a vu surgir, dès le début, une grave difficulté. Le recul des pièces, bien que ne dépassant guère 4 centimètres (il s’agit de pièces sur crinoline), était assez considérable pour que le poin- teur, s'il gardait, conformément aux instructions, l'œil à la lunette jusqu'au moment du tir, reçut un phoreux, a 5 mètres de diamètre et fera 465 tours, | choc susceptible de provoquer des blessures sérieuses. tandis que celles des machines à pistons, à 2 ailes et Divers systèmes protecteurs avaient été essayés sans pi ME CF: “Éaen. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1002 grand succès, lorsque le lieutenant de vaisseau Viol- lette eut l’ingénieuse idée d'un système optique agencé de telle sorte qu'il reportât l'œil du pointeur à une certaine distance en arrière de l'oculaire, réuni à l'œilleton par une monture élastique. Pour avoir toute sécurité, la distance de l'œil à l'oculaire fut prise égale à 72 millimètres; or le champ imposé, qui était de 11 degrés, obligeait à faire un oculaire de 60 milli- mètres de diamètre, dimensions non encore atteintes à beaucoup près, et qui faisaient naître un problème nouveau d'optique géométrique, pour l'étude duquel M. Viollette s'associa MM. E. Lacour et Ch. Florian. La figure 4 donne le diagramme optique de cette ‘lunette. En avant de l'objectif se trouve un prisme re- -dresseur PP’, représenté dans la figure 2, et qui, pour Fig. 2. — Disposilion du prisme redresseur. ‘l'intelligence du principe, a été développé dans la Migure 1 suivant la direction des faisceaux lumineux. Conformément au programme établi par la Marine francaise, la lunette doit utiliser des faisceaux inclinés sur l’axe de 5°30/. Les faisceaux extrêmes, 75, in, 15, ln, laissent donc, au milieu du prisme, un espace marginal non utilisé, et que, pour éviter les rayons nuisibles, on a coupé par un diaphragme D’. L'objectif à trois verres À projette, sur la face arrière du verre réticu- laire R, une image plane des objets éloignés. Chaque pinceau issu de cette image-est, après la traversée de l'oculaire, ramené à un faisceau parallèle passant par l'anneau oculaire 0, que l’on peut, sans le restreindre, -entourer du diaphragme dd', fixant la position de l'œil. Or si, partant maintenant de celui-ci, on suit la marche des faisceaux à travers l’oculaire L,L,, jusqu'au verre réticuiaire, on voit qu'ils ne font pas suite à ceux qui sont émanés de l’objet; d’où la nécessité de courber -en avant le verre réticulaire, ce qui, étant donnée la faible distance de l’image, n’a aucune action appré- ciable sur le grossissement. Les essais de la nouvelle lunette, construite par ‘les Etablissements Lacour-Berthiot, à Paris, ont pleine- ment confirmé les prévisions de ses inventeurs. Le tir des petites pièces a lieu maintenant sans le moindre ‘inconvénient pour les pointeurs. $ 4. — Electricité industrielle Une nouveauté dans l'éclairage : Ia Ju- mière du néon. — Le Salon de l'automobile, qui “vient de fermer ses portes, à vu surgir une nouveauté dont l’importance n'a échappé à aueun de ses nombreux visiteurs : l'éclairage par la luminescence du néon. A côté de l'éclairage par l'incandescence proprement -dite, la luminescence a déjà conquis une place res- treinte, mais pleine de promesses pour les grosses unités destinées aux espaces de quelque étendue ; la lampe au mercure éclaire des hangars, des ateliers, des chantiers, des laboratoires même ; el, si son usage s'est peu répandu dans l'intérieur des appartements, c'est que la teinte verdâtre de la lampe Cooper-Hewitt est peu avantageuse aux teints les plus frais, qui, à cette lumière, paraissent horriblement brouillés, D'un autre côté, l'emploi de tubes à azote donne une lumivre douce, d'une, teinte rosée charmante ; aussi la voit-on, depuis quelque temps, se répandre dans l'éclairage di quelques grands magasins ; le Palais de glace de Berlin est illuminé par des tubes Moore du plus joli effet, et qui constituent une appréciable attraction pour l'élé- gante société qui s'y presse chaque soir. Le grand avantage de la lampe au mercure sur les autres luminaires est l'économie de puissance élec- trique qu'elle réalise : la consommation y est d'environ un demi-watt par bougie, soit la moitié de celle des lampes métalliques les plus économiques. La lumière Moore est plus coûteuse : 1,9 watt par bougie environ pour les lampes intenses, fonctionnant dans de bonnes conditions relatives. On savait, d'autre part, que le néon permettrait d'obtenir des résultats plus avantageux ; sa cohésion diélectrique, trouvée par M. Bouty très inférieure à celle des autres gaz, exige, pour être rompue, une dif- férence de potentiel beaucoup plus faible que dans l'emploi de l'azote : 1000 volts aux bornes d’un tube de 6 mètres, au lieu de 3000 volts pour l'azote. Mais il restait à rendre pratique l'usage du gaz rare décou- vert par Sir W. Ramsay, et dont l'atmosphère contient 1/60.000 environ. Ce fut le nouveau problème que se posa M. Georges Claude, à qui la séparation indus- trielle de l'air en ses constituants doit déjà tant de progrès marquants. Il fallait d'abord obtenir le néon en quantités consi- dérables. Or l'usine de Boulogne-sur-Seine, de la So- ciété de l'Air liquide, où sont appliqués les procédés Claude, a constamment en marche des appareils qui, laissant échapper l'azote, fournissent par heure 0 mètres cubes d'oxygène livrés à la consommation. Un dispositif spécial permet de récupérer les gaz très volatils, hélium et néon, qui sortent de l'appareil, mé- langés d'un peu d'argon et d'azote. La purification doit être poussée très loin, car les gaz associés au néon font tomber rapidement la puissance lumineuse des tubes ; et cet abaissement de l'éclat est si considérable qu'il faut même sé débarrasser des gaz qui, en marche, se dégagent des électrodes. L'hélium ayant été séparé du néon par distillation fractionnée, les autres gaz, moins liquéfiables, sont absorbés par des récipients à char- bon, refroidis dans l'air liquide. Puis, après un traite- ment prolongé des tubes en marche, leur luminescence d'une belle teinte orangée se stabilise, et maintient la source de lumière à sa faible consommation spé- citique. Cette lumière est riche en radiations rouges, qui forment le contre-pied de la lumière du mercure, constituant, en combinaison avec elle, un ensemble à la fois très économique et très voisin de la lumière du jour. Mais il n'y à aucun inconvénient à employer seuls les tubes au néon ; leur teinte, qui, en comparaison avec celle des autres luminaires intensifs, semble au premier moment pousser un peu trop à l’orangé, donne en réalité à tous les objets, comme aux personnes qu'elle éclaire, une teinte chaude très attrayante. M. Claude a fait, sur un tube de 6 mètres de longueur, avec 1000 volts aux bornes, des mesures qui ren- seignent déjà très exactement sur les conditions de son fonctionnement. La différence de potentiel est, d’ailleurs, très peu dépendante de l'intensité du cou- rant dans le tube; pour le potentiel indiqué ci-dessus, l'intensité du courant était de 0,94 ampère, et la puissance consommée de 0,850 watt; le facteur de puissance était donc voisin de 0,9, comme M. Wedding l'avait trouvé pour des tubes Moore. Dans ces condi- tions, l'intensité lumineuse était de 220 bougies par mètre courant, soit 1320 bougies ou 0,64 w : b. Mais il faut encore déduire la perte dans la transformation, 1004 ainsi que dans la bobine de self-induction régulatrice, intercalée dans le circuit primaire ; en tenant compte de ces facteurs, on arrive à une consommation globale de 0,80 w : b. Ce résultat est déjà extrêmement avantageux ; mais il est probablement encore assez éloigné de la valeur minima que l'on pourra réaliser dans la suite; en effet, une grande partie de la puissance est dépensée aux électrodes, et l'allongement des tubes ne pourra qu'en abaisser la valeur relative. Ensuite, il ne faut pas oublier que les expériences actuellement en ‘cours ne font que marquer le début de la période industrielle d'emploi du néon dans l'éclairage. La possibilité a déjà été démontrée, par l'éclairage du Grand-Palais, de mettre en action des tubes de 36 mètres de longueur. C'est là, pour une première expérience publique, un résultat qui présage d'importantes applications. Ainsi, les industries fondées sur la liquéfaction et la sépara- tion des gaz de l'air ajoutent à leur arc une corde nouvelle, par l’utilisation d'un sous-produit dont per- sonne, il y a quinze ans, ne soupconnait l'existence. $ 5. — Physiologie L'immunité naturelle de quelques ani- maux à sang chaud contre le venin de la vipère. — Les naturalistes signalent parmi les ennemis de la vipère un grand nombre d'animaux; notamment, dans le livre de Brehm, Les Merveilles de la Nature, on peut voir notés comme tels le Jean le Blanc, la buse, le busard, le milan, la cigogne, le corbeau, le hérisson, le blaireau, le chat, le renard, la martre, le putois, la belette, le porc, la civette, l'aigle, la hase, le secrétaire, l’autour, le gerfaut, le moine, etc. Les assertions de l’auteur reposent presque toutes sur des observations qui doivent être, la plupart du temps, considérées comme insuffisantes au point de vue expérimental. Par exemple, il signale que le putois chasse la vipère; mais je ne crois pas qu'il ait jamais vu un putois mordu par une vipère. J'ai, pour ma part, constaté que le furet et le putois sont très sensibles au venin de vipère. Ils succombent très rapidement à la morsure. Il est plus facile de con- cevoir que les oiseaux résistent à leur ennemi, qui ne peut les atteindre à travers leurs plumes. J'ai voulu m'assurer, en faisant mordre un certain nombre d’ani- maux, ou en leur injectant du venin dans le péritoine, de l'immunité réelle de ceux-ci. Voici les résultats auxquels je suis arrivé : 4° /mmunité naturelle du lérot commun (Eliomys nitela Wagner) contre le venin de la vipère. —— Je ne crois pas que l'immunité naturelle du lérot contre le venin de la vipère soit un fait connu; je ne l’ai vue signalée nulle part et, dans une récente conférence, M. Calmette, de Lille, indique seulement trois mam- mifères réfractaires au venin des serpents : le hérisson, le pore, la mangouste. On considère habituellement le lérot comme un frugivore. Cependant Brehm le décrit comme un petit animal féroce, ce qui est la réalité. Je possédais, le mois dernier, dans une grande cage vitrée, deux lérots, qui, en quelques semaines, ont tué et dévoré quatre orvets, dix grenouilles, une souris, cinq cou- leuvres vipérines, cinq vipères et, en outre, un kilo- gramme de pommes et un kilogramme de cerises. - Le combat du lérot contre la vipère est particulière- ment émouvant. Un des deux petits animaux, le mâle, était remarquablement courageux : au cours d'une bataille, il eut un œil crevé par les crochets d’une énorme vipère. Malgré celte injection presque intra- cérébrale du venin, malgré de nombreuses morsures envenimées sur plusieurs points du corps, sa santé resta excellente. Le 20 juin, j'injectai dans le péritoine de la femelle 4 milligrammes de venin desséché, dissous dans un centimètre cube d’eau salée à 5 °/,,. Une demi-heure CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE après l'injection, l'animal grignotait une pomme et je n'ai pu conslater aucun signe d'intoxication. Or, d’après Calmette, cette dose de venin suffirait à tuer dix cobayes de 500 grammes. Mon lérot pesait 99 grammes. Le 1°" juillet, j'ai sacrifié le lérot mâle et j'ai injecté un centimètre cube de son sang à un cobaye de 520 grammes. Dix minutes après, j'ai fait mordre celui-ci par deux vipères; un témoin (535 grammes) est mordu par une seule vipère. Le témoin a suc- combé, l’autre a survécu. Que conclure de ces faits? Sans doute, le nombre de mes expériences est trop restreint pour que je tire des conclusions fermes. Cependant, je peux affirmer que mes deux lérots étaient immunisés contre des doses énormes de venin. Cette immunité est-elle acquise ou naturelle? Pour affirmer qu'elle est naturelle, il faudrait opérer sur de jeunes lérots élevés en cage, ce que je me propose de faire par la suite, si c’est possible. Mais il est bien difficile, si cet animal ne possède pas une immunité naturelle, d'expliquer comment il a pu l’acquérir. De plus, il n'est pas douteux que le sang de ces animaux possède des propriétés antivenimeuses remarquables. Enfin, il est probable que d'autres hibernants possèdent cette immunité contre le venin. ; J'ai pu conserver tout l'hiver deux lérots que j'ai fait mordre par des vipères au mois de mai. Ces animaux ont parfaitement résisté au venin de deux très grosses vipères, mais ont présenté localement des accidents inflammatoires suivis de la chute des poils. Mes lérots avaient été mordus pour la dernière fois en août 1909; leur immunité persistait donc neuf mois après. 20 /mmunité naturelle du blaireau contre le venin de la vipère. — Lenz, cité par Brehm, a démontré que les combats signalés depuis longtemps entre le blaireau et les vipères sont absolument vrais. Brehm ajoute : « Il faut ménager le blaireau, là surtout où les vipères sont en abondance. » L'immunité du blaireau est donc probable, sinon certaine. C’est un fait que j'ai pu vé- rifier. Le 6 juin, j'ai fait mordre par deux grosses vipères, et à plusieurs reprises, un jeune blaireau de huit livres. Celui-ci n’a nullement été incommodé et se porte ac- tuellement très bien. Il n’est donc pas douteux que le blaireau possède une immunité naturelle contre le venin de vipère, puisque mon animal, tout jeune, n'avait certainement guère quitté son terrier et que mes vipères devaient avoir les glandes gorgées de venin, puisqu'elles n'avaient pas mordu depuis un mois. 30 Zmmunité naturelle du chat domestique contre le venin de la vipère. — Le chat est également signalé par Brehm parmi les chasseurs de serpents. Je me suis assuré qu'un chat peut être à peu près impu- nément mordu par une vipère. I. — Un chat angora, âgé de six mois, est placé dans une cage avec une grosse vipère (V. Aspis). Celle-ci se dirige vers lui en sifflant; d’un coup de patte très vivement appliqué sur la tête, le chat la renvoie dans un angle de la cage. Bientôt se produit une nouvelle attaque de la vipère. Le chat décoche un nouveau coup de griffe à la tète et bondit par- dessus le serpent qui, par suite de l’espace réduit où a lieu le combat, peut mordre le chat sous le ventre. A partir de ce moment, impossible de provoquer une attaque de part et d'autre. La vipère est examinée et on constate qu'elle n'a plus de crochets : elle les à laissés dans la peau du chat. Celui-ci est indifférent aux évolutions de son adversaire, replacé près de lui, et ne songe qu'à s'échapper de sa cage. Le lendemain, la vipère est morte; le chat est bien portant. Les seules complications observées à la suite sont des accidents locaux : un peu d'œdème de la région mordue et chute de poils au bout de quelques jours. La santé de l'animal a été très bonne par la suite. II. — J'injecte à un chat de trois mois, dans le CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1005 péritoine, un milligramme et demi de venin de vipère. | naturellement immunisés contre le venin est consi- Quelques instants après, il se couche, urine et vomit. | dérable. Ce fait offre un intérêt certainement très Au bout d’une demi-heure, je constate un tremblement qui se généralise, et trois quarts d'heure après sur- viennent des convulsions. Celles-ci durent peu, et une heure et demie après l’envenimation l'animal mange. Cependant il vomit de nouveau deux heures après et reste couché pendant plusieurs heures. Le lendemain il se promène, mange, est caressant comme d'habitude. II. — Cinq centimètres cubes de sérum de chat ayant reçu l'injection intra-péritonéale sont injectés à un cobaye de 250 grammes. Celui-ci présente les accidents convulsifs déjà signalés avec le sérum de chat normal. Deux heures après, j'injecte dans son péritoine un demi-milligramme de venin de vipère et 1] succombe au bout de trois heures. Je crois pouvoir conclure que l’immunité naturelle du chat contre la neurotoxine du venin provenant d’une morsure de vipère est à peu près complète. Les accidents dus à l'hémorragine sont insignifiants et certainement aussi peu marqués que ceux que j'ai pu observer chez le hérisson. Enfin, il est très probable que tous les grands félins (lion, tigre, elc.) sont immunisés naturellement contre les morsures de serpents venimeux ou, du moins, contre la neurotoxine. 4° Immunité du canard domestique et de la chouette (chevéche commune) contre le venin de vipère. — I] n'est pas surprenant de voir réfractaires au venin des serpents les grands échassiers qui, sans doute, ont de tout temps chassé les reptiles. Certains oiseaux sont bien connus comme réfractaires, et Fontana à pu injecter à un corbeau des doses colossales de venin sans provoquer la mort. Mais je crois intéressant de signaler que, parmi les Palmipèdes, le canard domes- tique montre une indifférence des plus remarquables au venin de vipère. I. — J'ai fait mordre un canard au niveau du talon par une très grosse vipère. Après la morsure, il a présenté des accidents dyspnéiques qui ont duré une demi-heure. Mouvements respiratoires très profonds, très amples, bien que le rythme fût très rapide (80 à la minute, dix minutes après la morsure). Ces acci- dents ont rapidement cessé et, au bout d’une demi- heure, l'animal se promenait dans le laboratoire. Mordu une deuxième fois, quatre jours apres, l'a- nimal présente des symptômes identiques avec des accidents locaux plus marqués, c'est-à-dire que la première morsure n'avait déterminé aucun œdème local apparent, ni même de boiterie. À la deuxième morsure nous avons, au contraire, constaté un léger ædème et une boiterie qui a duré deux jours. Nous savions déjà que Kauffmann avait signalé le canard parmi les animaux destructeurs de vipères; mais je ne crois pas que des expériences précises aient été faites sur cet animal au sujet de son immu- nité naturelle. Je me réserve de publier ultérieure- ment les résultats obtenus chez lui par des doses croissantes de venin. II. — Deux chouettes sont mises en cage avec une vipère de taille moyenne. Dans la journée, les oiseaux mordillent la vipère lorsqu'elle passe à portée et paraissent se préoccuper fort peu de sa présence. La vipère attaque et vient en vain mordre dans les plumes. Le lendemain matin, elle est morte et ses entrailles ont été mangées. Le même jour, les deux chouettes, tenues en main, sont mordues aux pattes par deux vipères de forte taille, J'ai seulement constaté un très léger œdème local et une boiterie qui n’a pas duré deux heures.Pas de troubles généraux. Je me suis assuré qu'à chaque morsure mes vipères injectent au moins cinq à sept milligrammes de venin sec, dose énorme pour ces oiseaux, puisque avec quatre dixièmes de milligramme de venin j'ai tué, en une heure, des pigeons aussi gros que la chouette, Il est très probable que le nombre des animaux grand si l’on admet que les venins sont comparables aux toxines microbiennes et aux toxines cancéreuses. Il y à certainement là une orientalion possible dans la thérapeutique de beaucoup d’intoxications qui peut être un Jour réalisée avec les humeurs de ces diverses espèces animales. D' G. Billard, : Professeur de Physiologie à l'École de Médecine de Clermont-Ferrand $ 6. — Géographie et Colonisation L'achèvement du chemin de fer transan- din. — La haute barrière des Andes, éloignée d'en- viron 4.200 kilomètres de l'estuaire de la Plata, oppose un puissant obstacle au développement des communi- cations entre la République Argentine et le Chili. Jusqu'à la conquête de son indépendance (1818), ce dernier pays ne formait qu'une marche militaire, une « dépendance négligée de la vice-royauté du Pérou ». La traversée de la Cordillère, à cette date, par le gé- néral argentin San Martin, fut une sorte de révélation, et M. Lorin fait remarquer que l'itinéraire de la marche militaire se rapproche beaucoup de celui qui a été adopté pour le chemin de fer transandin, inauguré quatre-vingt-douze ans plus tard, le 5 avril 1910. En 1904, la ligne atteignait Sallo del Soldado, sur territoire chilien, à 1.262 mètres d'altitude, et Puente del Inca, dernière localité argentine. On comptait vingt-quatre heures pour faire franchir aux voyageurs la solution de continuité, en passant par le col de la Cumbre (3.900 mètres!. Le voyage (olal de Buenos- Ayres au Pacifique durait environ quatre-vingts heures, et le courrier circulait presque sans interruptions. En 1906, le rail était posé Jusqu'à las Cuevas à l'Est, jus- qu'à Juncal à l'Ouest. Pour franchir définitivement la crête, on avait d’abord pensé à un long tunnel de 15 kilomètres; on préféra établir des sections à crémaillère qui ont per- mis de réduire à 3.165 mètres la longueur de la per- foration, à une altitude de 3.000 mètres. Le percement a été terminé le 27 novembre 1909. Le revêtement du tunnel et la voie définitive n'étaient pas encore complètement terminés en mai dernier, mais les trains de service circulent de bout en bout depuis le mois d'avril. On ne compte plus aujourd'hui que trente-cinq heures de Buenos-Ayres à Valparaiso, pour une distance de 1.400 kilomètres, soit une vitesse moyenne de 40 kilomètres à l'heure, qui n'est guère dépassée sur les transcontinentaux de l'Amérique du Nord. La valeur économique du Transandin doit être sur- tout envisagée au point de vue des relations « domes- tiques » des deux Républiques, dont les productions sont, dans une large mesure, complémentaires. Le Chili présente des débouchés importants à l'élevage argentin; en revanche, il pourra fournir à sa voisine ses fruits, ses vins, ses produits miniers et, tout par- ticulièrement, ses nitrates, précieux pour rendre plus intensives les cultures de la République Argentine. En fait, ces dernières marchandises lourdes passeront encore en grande partie par le détroit de Magellan avec les exportations chiliennes à destination de l'Europe; mais les voyageurs, — pour éviter une traversée de douze jours, souvent pénible du fait des « grands frais d'Ouest », — les produits chers et les colis postaux emprunteront toujours le chemin de fer. La section andine, à voie étroite, limitera la capacité de transport de la voie ferrée, et, d'autre part, la concurrence aidant, les Compagnies de navigation amélioreront leurs ser- vices et réduiront leurs tarifs. La circulation du gros fret sera peu modifiée, même le jour où le Transandin sera doublé par celui que l’on construit en ce moment de Bahia-Blanca sur Concepcion par Neuquen. Pierre Clerget, Professeur à l Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 1006 DE DROUIN DE BOUVILLE Er MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES LA FURONCULOSE DES SALMONIDES Dans la plupart des pays d'Europe, la Salmoni- culture est fort en honneur depuis un quart de siècle ; on paraissait en droit de fonder sur elle les plus belles espérances. Malheureusement, une crise sévit à l'heure actuelle; cette crise, plus ou moins aiguë suivant les régions, présente un caractère indéniable de généralité. M. L. Passy s'est fait, en mars 1909, l'écho des inquiétudes et des récriminations des salmonicul- teurs français à la Société nationale d'Agriculture et a signalé que, « par suite de difficultés de toute sorte dans l'élevage, on voit tous les établissements abandonnés ou revendus au bout de deux à trois années de laborieux essais ». Parmi ces difficultés qui arrêtent les éleveurs, il faut citer en premier lieu les maladies variées qui frappent les Poissons aux divers stades de leur existence ; quand des épidémies se déclarent dans un élevage, le piscicul- teur assiste, le plus souvent impuissant, au dépeu- plement de ses auges ou bassins; ignorant la cause du mal, il se trouve dans l'incapacité d'y porter remède. Aujourd'hui, plusieurs maladies des Poissons d'eau douce sont bien connues; cependant, ilest des cas où, pour les diagnostiquer avec certitude, il faut recourir à un spécialiste. Mais agir ainsi, c'est meltre un tiers au courant de ses ennuis, s'exposer à voir critiquer ses installations, ses appareils, ses méthodes; les éleveurs ne s’y résolvent pas volon- liers, et, quand ils ont à pätir de mortalités, ne s'occupent guère que de dissimuler leurs décon- venues. Cette facon de faire, très humaine, il faut le reconnaitre, ne porte pas préjudice au seul exploi- tant chez lequel éclate une épidémie; elle rend d'une facon générale très difficiles les recherches ichthyopathologiques,entravant ainsiles progrès de la Science et ceux de la Pisciculture. Heureusement, celle-ci est pratiquée dans quelques établissements officiels, qui n'auraient guère de raison d’être s'ils rationnelles de l'élevage. Quand des maladies viennent à y sévir, on peul, ne servaient à l'étude des conditions à certains points de vue, ne pas le regretter, puisqu'elles peuvent faire l'objet d'obser- vations presqueimpossibles ailleurs, et dont Putilité n'a pas besoin d’être démontrée. Plus que toutes les autres installations similaires, l'établissement de Pisciculture de l’École nationale des Eaux et Forêts, à Bellefontaine, près Nancy, a élé créé en vue de servir aux recherches ichthyo- biologiques. Nous avons eu l’occasion d'y étudier, depuis l'an dernier, deux maladies très redoutables pour les Salmonides. En 1909, nos observations ont porté sur une épi- démie ayant sévi dans un élevage d'Omble de ruis- seau et qui, en trente jours, a fait 8.423 victimes sur 10.574 alevins. Il s'agissait de la costiase, maladie causée par un Flagellé ectoparasite, le: Costia necatrix Henneguy. Comme nous l'avons: reconnu, cette maladie peut heureusement être combattue avec succès, notamment au moyen des bains de formol à 4 °,, préconisés par le Professeur Léger, de Grenoble. Au printemps de la présente année 1910, nous- avons eu l’occasion d'étudier la furonculose (furon-- culosis salmonicida), affection qui doit son nom: aux furoncles dont sont porteurs les Poissons. atteints. Elle a causé à Bellefontaine une mortalité: importante; par ailleurs, elle mérite d'attirer tout spécialement l'attention, en raison des ravages récents qu'elle a exercés dans les rivières d’Alle- magne, d'Autriche et de Suisse. Pour lutter contre celte maladie, la connaissance de ses symp- tômes, de l'agent pathogène, des conditions d’évo- lution et de propagation de ce dernier est indis- pensable. Seule, elle permettra d'intervenir avec chances de succès, sinon pour guérir les sujets. atteints, ce qui ne parait pas possible, du moins pour empêcher les épidémies de s'étendre. C'est dans ce but de vulgarisation que nous nous. sommes résolus à écrire le présent article. I. — HISTORIQUE. La furonculose est connue en Europe depuis une: vingtaine d'années, ayant été bien étudiée, dès. 1888-1890, au Laboratoire universitaire d'Hygiène de Munich, par le Professeur R. Emmerich et le Dr E. Weibel: les deux savants avaient eu l’occa- sion d'observer fcette maladie dans un établisse- ment de pisciculture où elle avait, dans l’espace de trois mois, provoqué la perte de 441 reproduc- teurs. D'après ce qu'on sait actuellement, cette épidémie de furoneulose ne devait pas être la pre- mière, et lon est en droit de soupconner que la maladie à dû apparaître en Bavière dès que l'Omble de ruisseau (Salvelinus fontinalis Mitch.) y a été répandu dans les élevages; cette espèce, originaire du Canada et des États-Unis, où elle abonde dans tous les fleuves tributaires de l'Atlantique à eaux claires et fraîches, du Labrador à la Caroline du Sud, a toujours, en effet, été spécialement éprouvée par les mortalités. Pendant lougtemps, la furoneu- lose ne s'est attaquée qu'à elle et à la Truite ordi- naire (7rutta fario L.). DE DROUIN DE BOUVILLE er MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES 1007 Jusqu'à une époque récente, celle maladie n'avail pas exercé ses ravages en dehors des salmonicultures d'une région relativement peu élendue, comprenant une parlie de lAllemagne méridionale et de l'Autriche. De lemps en temps, cependant, on trouvait dans les rivières bavaroises quelques Truites présentant des furonceles; mais on admettait qu'elles s'étaient évadées d'exploita- tions piscicoles, hypothèse d'ailleurs parfaitement plausible. Dans le courant de l'été 1908, un fait nouveau se produisit. Une vérilable épidémie éclata dans une rivière de Thuringe, provoquant une assez forte mortalité, el il semble bien qu'on eut affaire à la furonculose; ce cas, ayant élé unique, n'altira guère l'attention. Mais, au mois de juin 1909, l'émotion fut grande quand, sur divers points de rivières très poisson- neuses de la Haute-Bavière : Ammer supérieur, Gennach, Glonn, Moosach, Singold, Verlorene Bach, on vit s'accumuler, en quantités considé- rables, des cadavres pustuleux de Truite ordinaire, d'Omble de ruisseau, et aussi d'Omble commun (Thymallus vexillifer Nilss.). I n'y avait plus à douter : la maladie avait gagné les eaux libres et provoquait le dépeuplement de biefs entiers. En juillet, d’autres mortalités se produisent dans l’Eberfingerbach. l'Etlingerbach, l'Huglfin- gerbach, la Mangfall, la Schwielach, la Sempt, le Tiefenbach, toujours en Haute-Bavière. La furon- culose prend une extension énorme, apparaissant dans des régions où elle était inconnue et y cau- sant des pertes considérables. Sa marche n’est pas régulière el progressive; elle éclate, en même temps, sur des points fort éloignés les uns des autres. Ses allures capricieuses, comme aussi sa puissance dévaslatrice, évoquent celles de la fameuse peste des Écrevisses, qui a fait disparaitre ces Crustacés de l'Europe presque entière et d’une notable partie de l'Asie. Les Truites sont-elles exposées à pareille destruction? On peut malheu- reusement le craindre, si le fléau continue à sévir comme il le fait depuis un an. Au mois d'août, des épidémies 8e manifestent : — en Franconie, dans la Pegnitz, — sur le terri- toire badoiïis, dans le Rhin et la Rench, — et en Alsace dans l'IIL. En septembre, on signale des mor- talités: — aux environs de Bade, près de Géra, chef-lieu de la principauté de Reuss-Schleiz, — à Langenthal et Säckingen en Suisse. En octobre, le mal fait des progrès rapides dans les eaux helvé- tiques, dépeuplant : l’Aar, où périssent en masse les Poissons conservés dans les viviers des mar- chands en gros, en amont et en aval de Berne, l’'Emme, la Langeten, la Reuss et la Limmat, enfin le Rhin, entre Schaffhouse et Bâle, et aussi près de Thusis dans les Grisons; des morlalités sont aussi constatées en Bohème, On observe à celle époque que le nombre des espèces alleintes par la maladie augmente sensi- blement, A celles déjà indiquées viennent s'ajouter: le Saumon commun (Salmo salar L.)' (le Professeur Heuscher, de Zurich, eut l’occasion d'examiner un individu porteur de furoncles de la grosseur du poing), la Truite arc-en-ciel (Zrutta iridea W.Gibb, (jusque-là considérée comme réfractaire, puisque, dans les salmonicullures où elle est avec la Truite ordinaire et l'Omble de ruisseau, elle n'avait payé aucun tribut aux épidémies), l’'Omble heusch (Sa- velinus hucho L.), le Brochet lucius L.), enfin mème, à en croire certains obser- commun (Æ£sox vateurs, un Cyprinide, le Chondrostome nase (C'hon- dostroma nasus L.). Avec le mois de novembre, une accalmie semble se produire dans la marche du fléau. Mais y a-t-il réellement arrêt? Il est difficile d'être affirmatif à cet égard. Sans doute, à partir du début de l'hiver, la presse spéciale qui signalait jusque-là, au fur el à mesure qu'elles se produisaient, les manifesta- tions épidémiques, n'en mentionne plus guère. Mais il y a à cela des raisons très compréhensibles; tout d'abord, presque partout, les rivières entrent en crueet se maintiennent à un niveau élevé; dans ces conditions, il est difficile de s'apercevoir des mortalités, au moins aux points où elles se pro- duisent, les cadavres étant charriés au loin par le courant. Puis, l'opinion publique commence à s'alarmer ; les autorités suisses et autrichiennes ont attiré l'attention sur les graves inconvénients qu'il y avail à s'approvisionner d'œufs embryonnés de Salmonides, d’alevins ou de Poissons vivants de tout àge, dans les exploitations piscicoles des régions éprouvées par la maladie. Continuer à parler d'elle, alors qu'elle apparaît comme un fléau redoutable, c’est arrèter nombre de transactions, ruiner tout un commerce. Les journaux de pêche deviennent donc muets, à moins même qu'ils ne publient des articles rassurants. Une chose est cependant certaine : furonculose à été quelquefois observée durant la saison froide en Bavière, en Tyrol et surtout en Suisse. C'est même à cette époque que lOmble chevalier (Salvelinus umbla L.) vint prendre rang sur la liste des Poissons qu'elle peut atteindre (des individus conservés dans un vivier du Tegernsee x c'est que la 1 La nomenclature adoptée est : — pour les espèces indi- gènes, celle du Manuel d'Ichthyologie française du Dr Mo- reau, Paris, G. Masson, 1892; — pour les espèces de l'Europe centrale, celle de Susswasserfauna, de Brauer, Jena, Fischer, 1940; — pour les espèces américaines, celle de l'ouvrage de D. S. Jordan et B. W. Evermann : À check list of the fishes and fish-like vertebrates of North and Middle America. Washington, 1896. 1008 DE DROUIN DE BOUVILLE rr MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES périrent avec les symptômes caractéristiques de l'affection). Avec le mois de juin 1910, on assiste à une recru- descence très sensible de l'épidémie de furonculose. C'est à celle même époque que la maladie avait éclaté l’année précédente en Bavière ; elle y sévit de nouveau avec violence. Il n’est plus possible, pour les raisons indiquées plus haut, de dire exactement où ont eu lieu des mortalités, mais on a la certitude qu'elles ont été nombreuses et importantes ; les autorités se sont émues et ont jugé nécessaire de renouveler les recommandations déjà faites en 1909 quant aux constatations etaux mesures préventives à prendre. Dans le reste de l'Allemagne, des épidémies se produisent à la même époque dans le grand-duché de Bade, puis en Hanovre, en Hesse, en Saxe et en Wurtemberg, mais moins graves et moins fré- quentes que dans le territoire badois. S'il faut en Berne, Soleure et Argovie ». Le bassin du Rhône a élé jusqu'ici épargné; mais celui du Rhin, en dépit de toutes les mesures prises pour enrayer la propa- gation du mal, semble bien avoir été dévasté. Quant à la France, rien n'a encore été observé danslesrivières; mais au mois d'avril la furonculose s'est déclarée à la salmoniculture de Bellefontaine, près Nancy, y causant des pertes sérieuses et éprouvant tout particulièrement la Truite pourpre (Trutta mykiss Walb.). Vers la même époque, elle faisait aussi quelques victimes dans une exploi- tation piscicole du Centre. Telle élait donc la situation à la fin du mois de juillet 1910. Elle est de nature, on le voit, à susciter pour l'avenir de très légitimes appréhensions. IT. — SYMPTÔMES. AGENT PATHOGÈNE. Ce sont les recherches d'Emmerich et Weibel Fig. 1. — Truite ordinaire (née le 5 Avril 1905) présentant deux furoncles. croire le Professeur Eckstein, la maladie se serait alors étendue à la Carpe commune (Cyprinus carpio L.); mais cet observateur a seulement constaté qu'un certain nombre de sujets de l'espèce, ayant péri dans un vivier, étaient porteurs d’abcès ; il n’a pas cherché l'agent pathogène de la maladie. Dans ces conditions, c'était beaucoup s'avancer, el l’on comprend que M. Plehn et Heyking se soient élevés vivement contre cette conclusion, très préjudiciable aux intérêts des cypriniculteurs allemands. En Autriche, il ne semble pas que le mal ait beaucoup progressé ; lout au moins n'a-t-on cons- talé officiellement que trois manifestations certaines en eaux libres. Au contraire, en Suisse, les ravages ont été consi- dérables. Aux termes d'une circulaire récente du Département central vaudois de l'Agriculture, de l'Industrie et du Commerce, « la furonculose..…., apparue pour la première fois dans les eaux suisses l'été dernier, .…. a dès lors fait des progrès (1894) qui ont fixé pour la première fois d'une façon certaine les symptômes de la furonculose et Ja nature de l'agent pathogène. Depuis, les données fournies par ces auteurs ont été confirmées et complétées, grâce aux recherches de Hofer et de ses collaborateurs, parmi lesquels nous citerons tout particulièrement M®° Plehn, de Fiebiger, de Neresheimer, etc. Les symptômes de la furoneulose sont,en général, très caractéristiques, et le simple examen des Poissons permet, la plupart du temps, de diagnos- tiquer la maladie. Les animaux atteints perdent toute vivacité, se tiennent à l'écart des autres, sur les bords des bassins, inertes au point qu'ils se laissent prendre à la main sans résistance. Ils sont presque toujours porteurs de furoncles cutanés de grosseur variable et silués sur des points quelconques du corps (fig. 1 et 2). Les furoncles ressemblent beaucoup aux tumeurs que présentent les Barbeaux infestés par le Myxobolus Pfeifreri sous- inquiétants, spécialement dans les cantons de | (Protozoaire qui détermine la maladie des abeès du DE DROUIN DE BOUVILLE Er MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES 1009 Barbeau : myxoboliasis tuberosa), et l'attention doit être attirée sur ce point pour éviter toute con- fusion. La partie saillante des furoncles et les alentours présentent fréquemment des ecchymoses. Au début, ils renferment une masse de consistance caséeuse, blanc jaunâtre, qui se résout ensuile en un pus san- guinolent. Ils finissent par crever et font place à des plaies ulcéreuses dont la sanie rougeñtre se délaie dans l’eau. Ces furonceles sont lypiques ; mais ils peuvent manquer. On utilise alors, comme élé- ments de diagnostic, certains signes précurseurs. ou concomitants de la formation des abcès : épan- chements sanguins sous-cutanés qui existent no- tamment dans la région de l'anus et au-dessous des pectorales ; taches grisätres de « mousse » résultant de l’envahissement, par des Saprolégnia- cées, de certaines parties nécrosées de l’épiderme. On pralique aussi l’aulopsie qui amène généra- sante -pour qu'il en reste encore à l'arrivée, el l'expédition doit être faite par les voies les plus rapides. Emmerich et Weibel ont reconnu comme agent pathogène de la furonculose une Bactérie, le Parcïl- lus salmonicida. Ce bacille se rencontre chez tous les Poissons atteints: il est répandu dans tous les organes, dans le sang, dans les foyers hémorra- giques des chairs. Si l'on d’un furoncle non ouvert, on constate, au milieu ait un frotlis avec le pus sanguinolent d'éléments variés, la présence de nombreux bacilles (fig. 3). Ces bacilles sont de très pelite taille (4 à 3), immobiles; souvent, ils sont accolés deux par deux. Ils se colorent facilement par les couleurs d’aniline, mais ils se décolorent lorsqu'on traite les préparations par la méthode de Gram. Il est possible d'obtenir des cultures du bacille; pour cela, il suffit de faire un prélèvement asep- ae s- …:i 7 rs 0 PP AE Ford à ia Fig. 2. — Truile pourpre furonculeuse (née le 16 Juin 1906). lement la découverte, dans les parties profondes de la musculature, de foyers hémorragiques diffus, dont la couleur tranche vivement sur la teinte päle des régions avoisinantes. Mais il arrive parfois que tout symptôme, même d'ordre secondaire, fasse défaut. L'ouverture du cadavre permet de constater seulement une forte inflammation de l'intestin, occasionnellement aussi du péritoine; l'inflammation de l'intestin n'a rien de caractéristique, l’entérite se produisant dans beaucoup d'infections. Pour être fixé, il faut procéder à la recherche de l’organisme pathogène, ce qui n’est possible que dans un laboratoire outillé pour ce genre de travaux. Dans le cas où il y aura lieu de faire des envois à l’un de ces laboratoires, il est nécessaire de prendre certaines précautions. Après avoir enveloppé séparément chacun des Poissons à examiner dans une feuille de papier parchemin propre, on les place dans une caissette remplie de glace, de facon qu'ils en soient entourés de tous côtés. La quantité de glace doit être suffi- tique du pus sanguinolent d'un abeès non ouvert et d'ensemencer des tubes de culture renfermant un milieu approprié : bouillon, gélatine, gélose. Les caractères des cultures obtenues sur ces divers milieux ont été fixés par Emmerich et Wei- bel et ils permettent de préciser et de confirmer l'examen macroscopique et microscopique. Le Pacillus salmonicida n'est aucunement in- fluencé par la présence ou l'absence d'oxygène; la température optimum qui convient aux cultures est comprise entre 10° et 15° C. Que ce bacille soit bien l'agent de la maladie, cela ne fait aucun doute. 1] se rencontre chez tous les Poissons atteints et exclusivement chez ceux-là. De plus, il a été possible de reproduire expérimen- talement la maladie et d'infecter des sujets sains. La maladie à été communiquée à des Truites, des Ombles, des Tanches, etc., par injection sous-cuta- née et intra-musculaire de cullures de 2. salmoni- cida. Une dose de 1 centimètre cube suffit pour provoquer la mort. 1019 DE DROUIN DE BOUVILLE £r MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES L'infection directe par l'eau a été tentée par Emme- rich et Weibel. Elle paraît assez difficile dans les conditions suivant lesquelles ont opéré ces deux savants; elle n'a pu être obtenue ni avec l'Anguille, ni avec la Carpe, et pour la Truite deux tentatives seulement sur cinq ont abouti. Comment le bacille pénètre-t-il chez le Poisson? À la rigueur, on pourrait supposer que l'entrée du parasite peut se faire par des lésions de l’épiderme. Mais la voie d'entrée d'élection est certainement le tube digestif. En effet, chez les animaux atteints, l'intestin est presque toujours le siège initial de l’inflammation, et chez les sujets peu résistants, qui succombent Fig. 3.— Frottis d'un furoncle non ouvert de Truite pourpre. B. Salmonicida épars parmi des globules sanguins (Gros- sissement : 1.200). dès le début de la maladie, le seul symptôme cons- taté est celui d’une forte entérite. Nous avons élé à même de constater à Bellefon- taine un exemple direct de contamination. Quelques Truites furonculeuses (Truites pourpres) ayant été entreposées pendant une nuit dans une auge du laboratoire, des alevins de dix mois mis dans cette auge, quelques jours après, furent décimés par la maladie (on avait négligé par une regrettable inad- vertence de désinfecter ce bac). Il importe de noter que pas un seul cas de furonculose n'a été relevé dans les vingt-cinq autres auges du laboratoire. La pénétration du bacille par la voie digestive nous explique cerlaines particularités. Au cours de l'une des quelques épidémies qui se sont produites en rivières durant le mois de novembre 1909, 97°}, des Truites qui ont succombé etaient des mâles. Même observation à été faite à Bellefontaine au début de la maladie. Le privilège dont les femelles auraient bénéficié s'explique par le fait que celles-ci cessent de s'alimenter quelque temps avant læ ponte, et par suite subissent un lavage du tube digestif. On sait également que la Truite arc-en-ciel ne : fournit qu'un très faible tribut à la maladie, soit en eaux libres, soit en eaux closes, et cependant cette: Truite succombe rapidement aux injections sous- cutanées ou intra-musculaires d’une culture de: PB. salmonicida. M Plehn explique l’immunité rela- tive dont jouit cette espèce, par comparaison avec la Truite ordinaire et l'Omble de ruisseau, par le: fait de l'acidité particulière du contenu de son tube digestif qui s'oppose au développement du bacille. Une question intéressante se pose : le PB. salmo- nicida est-il une forme indigène, ayant existé de tout temps dans les eaux européennes, devenue- pathogène grâce à un concours de circonstances que nous étudierons par la suite; ou bien, est-ce un bacille importé des États-Unis en même temps que les nombreuses espèces de Salmonides exotiques dont on a tenté l'acclimatation? En effet, il existe en Amérique une maladie qui sévit sur les Salmo- nides et qui ressemble beaucoup, comme l'a fait remarquer M Plehn, à la furonculose. D'après les recherches de Marsh, cette maladie est également causée par un bacille, le . truttæ. Le fait que le bacille américain n'ait encore déter- miné d'épidémie que dans les établissements de, pisciculture et non en eaux libres peut tenir sim- plement à ce que c'est seulement dans ces élablis- semen{(s qu'il a rencontré les conditions suffisantes pour devenir virulent, alors que celles-ci ne sont pas encore réalisées dans les rivières. Cependant, il importe de remarquer que la constatation de la maladie due au /?. truttæ est postérieure de qua- torze ans à celle de la furonculose (1888 à 1902) et qu'elle n’a été observée jusqu'ici que dans quelques: établissements du Michigan et du Wisconsin. On voit qu'il est impossible à l'heure actuelle de se prononcer avec cerlitude sur l'origine du bacille de la furonculose. Cette question n’a d’ailleurs qu'un intérêt relatif. Ce qui est certain, c'est que nous. possédons en Europe le germe d’une maladie redoutable pour les Salmonides, et le résultat sera le même qu'il s'agisse d’un bacille importé d’Amé- rique, ou d'un bacille européen devenu pathogène. Il est bien plus intéressant de savoir si le B. sal- monicida existe partout à l'état de germe banal, répandu dans toutes les eaux, inoffensif lorsqu'il est peu abondant et se trouve en présence d’orga- nismes résistants, ou bien, au contraire, si l’on se trouve en présence d’un germe essentiellement pathogène, mais localisé en certains points qui sont ceux éprouvés jusqu'ici. D'après Hofer, l'hypothèse d’après laquelle le B. salmonicida serait un germe banal parait la plus L à DE DROUIN DE BOUVILLE Er MERCIER LA FURONCULOSE DES SALMONIDES 1011 probable. En effet, si l'on a été tenté d'admettre volontiers, au début des épidémies en eaux libres, que la furonculose y était toujours importée des piscicultures à la suite des déversements d'alevins, on à constaté l'été dernier que des ruisseaux de Bavière, dans lesquels ou à proximité desquels aucune tentative de repeuplement n'avait eu lieu depuis plusieurs années, ont été dépeuplés. I faut donc bien se rendre à l'évidence : le 2. salmonicida peut exister maintenant dans les rivières en dehors de toute introduction. ñ III. — EXAMEN DES CONDITIONS BIOLOGIQUES SUSCEP- TIBLES DE FAVORISER L'EXTENSION DE LA FURONCU- LOSE. Il nous à été malheureusement impossible d'éta- blir d'une facon précise à la suite de quel concours de circonstances s’est déclarée l'épidémie de furon- cles qui a sévi cette année à Bellefontaine. Mais nous pouvons rechercher, d'une facon générale, les conditions qui, d’après nous, exposent les Salmo- nides à cette maladie. Pour qu'un germe pathogène provoque une épidémie, il faut, d’une part, qu'il soit abondant et, d'autre part, qu'il rencontre chez l'hôte un terrain favorable; cette dernière condition est réalisée dans le cas d'un organisme affaibli, en moindre état de résistance et, par suite, incapable de réagir. Or, dans le cas particulier qui nous intéresse, ces conditions se trouvent réalisées en beaucoup d'endroits. Si lon admet, avec Hofer, l'hypothèse extrêmement vraisemblable que le Z. salmonicida est un germe banal, se rencontrant partout où ont lieu des processus de décomposition, on concoil facilement qu'à notre époque, des foyers de conla- minalion peuvent se conslituer dans les élablisse- ments de pisciculture et dans les rivières. En effet, beaucoup de bassins d'élevage sont, et Hofer a, il y a douze ans déjà, attiré l'attention sur ce point, ou mal installés ou mal entretenus. Tels sont ceux établis sur des terrains marécageux ou alimentés par des sources en provenant, ceux recevant les suintements des fosses à purin, fumiers, dépôts d'immondices; ceux surtout où, la nourriture arti- ficielle distribuée aux Poissons n'étant pas inté- gralement consommée, les restes et déchets forment des amas plus ou moins considérables de matières putrides. Dans les rivières, la pollution de certaines est telle que des biefs entiers réalisent les condi- tions de vastes bouillons de culture. Même dans les clairs ruisseaux des montagnes, dont beaucoup ont été dépeuplés en Bavière en 1909 et 1910, la forma- tion de foyers d'infection s'explique aisément; car, même dans un torrent, il est des endroits calmes : dormants, gours, planiols, où se déposent les malières charriées; celles d'origine organique se décomposant pendant les périodes de chaleur, le milieu devient propice au développement de nombreux micro-organismes. C'est à la sécheresse intense ayant régné en Bavière depuis l'été 1908 jusqu'à celui de 4909 que Hofer attribue l'apparition de la furonculose dans le haut bassin du Danube: beaucoup de ruisseaux s'étaient presque asséchés, ne conservant plus d'eau que dans des creux où la teneur en germes devait être fort élevée. La pollution des eaux, qui favorise l'existence el lapullulation de nombreux micro-organismes, a, en outre, pour conséquence de créer un milieu défa- vorable pour s'adapter à ce milieu, mais le plus grand nombre supporteront mal ces eaux impures, subiront une crise pendant laquelle ils seront dans un état de moindre résistance et, par conséquent, à même d'être infestés par le premier germe pathogène venu. Mais, à côté de cette première cause déjà suffi- sante pour créer des individus réceptifs, il en existe beaucoup d’autres. En effet, les Salmonides conservés dans les bassins d'élevage sont mainte- nus dans des conditions très différentes des condi- tions naturelles. Les animaux reçoivent presque exclusivement une nourriture artificielle; cette nourriture est mise à leur portée en abondance, et certains individus, les plus robustes, se gavent (condition défavorable), tandis que les autres ne trouvent à ramasser que les miettes de leur repas. A cela, il faut encore ajouter le défaut de qualité, et tous les éleveurs savent que la nourriture artifi- cielle, même donnée dans les meilleures conditions, ne vaut jamais la nourriture naturelle. La question de l'alimentation est connexe de celle de laction de l’espace. Les bassins d'élevage ont forcément une étendue très limitée; or, on sait, comme Audigé et Loup l'ont montré, que la limitation de l’espace, poussée à l'extrême, peut aller jusqu’à déterminer la dégénérescence des glandes génitales des Pois- les Poissons; cerlains pourront sons. On concoit facilement que les facteurs biolo- giques que nous venons d'examiner soient sufli- sants pour mettre en état de réceptivité les Pois- sons élevés dans les eaux closes; ils sont tels, d'ail- leurs, que les espèces indigènes, comme la Truite de pays, réussissent mal dans les élevages. Aussi les pisciculteurs se sont-ils adressés aux Salmo- nides américains, qui, moins délicats, semblait-il, devaient donner plus de satisfaction. Mais les mêmes causes ont eu les mêmes conséquences, et il serait intéressant de faire une étude d'ensemble des caractères de dégénérescence que présentent les formes introduites : rachitisme, adéno-carcinome de la thyroïde, insuffisance operculaire, etc., et 1012 surtout insuffisance génitale. Aussi les éleveurs éprouvent-ils le besoin de renouveler leurs repro- ducteurs quelques années après l'acclimatation dans le but de rajeunir «le sang » de leurs éle- vages. Le semblant de succès obtenu par l'élevage en eaux closes de ces espèces exotiques a eu, d'autre part, cette conséquence : on les a introduites en masse dans les eaux libres sous prétexte de repeu- plement; mais, grâce à cela, il existe maintenant dans les rivières des quantités notables de sujets peu vigoureux et presque aussi prédisposés aux infections que ceux des établissements de piscicul- ture. Ils y ont, en effet, passé toute la première partie de leur existence et se sont habitués à des conditions de vie toutes différentes de celles qu'ils rencontrent dans la Nature. Une fois en liberté, ils ne sont plus nourris à heure fixe, ne sont plus pro- tégés contre leurs ennemis, etc. ; le changement des conditions de vie provoque une crise. Il semble que les animaux supportent d'autant moins celte crise qu'ils sont plus âgés ; et, à ce sujet, nous ferons remarquer que c'est en Suisse, où l’on est surtout partisan du repeuplement avec alevins âgés, que la furonculose a sévi avec le plus de violence. Enfin, les conditions biologiques du milieu où l'on déverse ces espèces exotiques peuvent ne leur convenir que très médiocrement; là où la Truite indigène n'a pu se maintenir devant les modifica- tions apportées aux fonds el au régime des eaux (régularisalion, barrages, pollution), il semble que ces espèces aient peu de chance de réussir. De fait, elles ne s'acclimatent pas; leur reproduction natu- relle n’a été observée qu'à titre de très rare excep- tion, el on ne les maintient que par des déverse- ments répétés. Aussi, d'une facon générale, on peut considérer tous ces Poissons importés, dont l'acclimatation est loin d’être acquise, comme des êtres que leur débilité prédispose aux infections. Et s'il en est ainsi pour des animaux de race pure, que sera-ce pour les nombreux hybrides que la fantaisie des éleveurs s'est plu à créer? Comme l'a montré récemment M. Heyking, de Lichterfelde, près Berlin, ces métis n'ont réussi nulle part. En résumé, nous ne pouvons que constater l'af- faiblissement des races de Salmonides dans les établissements de pisciculture et, par conséquent, celui des sujets employés au repeuplement des eaux libres. Ces Poissons affaiblis se trouvent à la merci du premier germe pathogène qui pénétrera dans leur organisme, el en particulier du Z. sal- monicida. D'autre part, il faut le reconnaître, hélas! les conditions optima réclamées par ce bacille se trouvent, trop souvent, réalisées en pisciculture et dans les eaux libres. DE DROUIN DE BOUVILLE Er MERCIER — LA FURONCULOSE DES SALMONIDES IV. — LA LUTTE CONTRE LA FURONCULOSE. Il est facile de déduire de ces considérations d'ordre général les mesures qui permettront de lutter contre la furonculose. Disons tout de suite qu'on ne peut songer à guérir les sujets atteints; il n'existe pas, jusqu'à présent, de traitement, curatif. On ne peut, dans l’état actuel de nos con- naissances, qu'empêcher la maladie de s'étendre ou encore, ce qui est préférable, tenter de la prévenir. Les mesures à prendre dans le but d'enrayer une épidémie sont les suivantes : Il faut recueillir avec soin les cadavres des Poissons morts, et, à ce sujet, il est à souhaiter que les Administrations compétentes donnent des instructions suffisantes à leurs agents pour leur permettre de reconnaitre la maladie lorsqu'elle sera suffisamment caractérisée. Les cadavres, dont la récolte est parfois difficile par les temps de grandes crues, seront soumis à une ébullition prolongée ou mieux incinérés ou enfouis entre deux lits de chaux vive. En agissant ainsi, on évitera que ces victimes, dont le corps est bourré de bacilles, soient dévorées par leurs congé- nères, qui peuvent ainsi absorber des germes à vi- rulence exaltée. Il faut admettre aussi que, si l’on ne recueille pas avec soin les animaux morts, ceux-ci peuvent servir de proies à des Oiseaux, à des Insectes, qui deviennent autant d'agents de dissémination du germe. Le pisciculleur doit envisager le cas où il se trouvera dans la nécessité, et de par la disposition de l'alimentation de ses bassins, el du point où se déclare l'épidémie, de sacrifier tout ou partie de son élevage. Lorsque des bassins auront été conta- minés, il sera prudent de procéder immédiatement à un curettage à fond, et ensuite de procéder à leur chaulage. À cet effet, on emploie la chaux, soit en poudre qu'on répand à la dose de 250 à 300 grammes par mètre carré sur le sol encore humide, soit en solution dont on arrose les terres après qu'elles se sont ressuyées. Un procédé très recommandable consiste à ne pas vider le bassin et à introduire dans l'eau de la chaux vive en quantité telle que celle-ci prenne une couleur laiteuse. Après l'une ou l'autre de ces opérations, il faut attendre de deux à trois semaines avant de remettre le bassin en service. L'opération du chaulage, possible en Salmoni- culture, n’est pas praticable en rivières ; c'est ainsi qu'en Suisse on a dû y renoncer; en effet, toute tentative de désinfection anéantit non seulement le bacille nuisible, mais encore toute flore et toute faune aquatiques. Dans ce cas, il n'y à à compter que sur l’auto-épuration; elle demande un certain temps : aussi il ne faut pas essayer de repeupler immédiatement les biefs dévastés. mt di DE DROUIN DE BOUVILLE Er MERCIER On peut juger facilement combien sont radicales, surtout pour le pisciculteur, cés mesures propres à enrayer une épidémie ; aussi, à notre avis, le vieux proverbe se justifié une fois de plus : « Mieux vaut prévenir que d’avoir à guérir. » Dans ce but, il faudra s'abstenir d'une facon absolue, ainsi que le Syndicat des pisciculteurs en à récemment émis le vœu, d'acheter des Poissons à l'étranger dans les régions contaminées (se renseigner auprès des Consuls qui recevraient des instructions). Il serait même prudent d'interdire l'importation en France par toute notre frontière Est, de la mer du Nord à la Méditerranée, de Salmonides vivants. À la rigueur, On pourrait admettre les Poissons morts, mais avec celle restriction que, sur les marchés, les vétérinaires inspecteurs, mis à même de dia- gnostiquer la maladie, saisiraient impitoyablement tout arrivage suspect. Nous ajouterons même, quelle que soit en la matière l'autorité d'Hofer et de Fuhrmann, qu'il serait prudent de s'abstenir également de toute importalion d'œufs embryonnés et de jeunes ale- vins; en effet, contrairement à l'opinion émise par ces deux savants, Neresheimer a montré que les œufs et les alevins en provenance de régions conta- minées peuvent être souillés de bacilles. Mais ces mesures prohibilives vis-à-vis de l'é- tranger constituent des barrières bien fragiles, et tout permet de supposer qu à l'heure actuelle le B. salmonicida possède une large extension géo- graphique ; il est d’ailleurs plus d'une manière suivant laquelle il peut se répandre au loin. Ses hôtes effectuent, en effet, au moment de la repro- duction, des migrations plus ou moins considéra- bles; celles des Saumons s'étendent de la mer aux pelits ruisseaux des montagnes. Quant au passage de bassin à bassin, même en dehors de toute com- munication par canaux, les ichthyophages de toute sorte s'en chargent. Ce qu'il importe, c’est donc d'éviter de laisser se créer des foyers en France. Or, comme ces foyers, pour les raisons indiquées dans un paragraphe précédent, apparaissent de préférence dans les établissements de pisciculture, il faudrait mettre les salmoniculteurs francais dans l'obligation de faire une déclaration de maladie. Evidemment, ce ne sera pas là chose facile, car, afin de continuer leur commerce, ils auront certainement tendance à dissimuler. À ce sujet, nous ne pouvons mieux faire que de rappeler un article récent de Heyking, dans lequel cet auteur constate que le fait d'avoir attiré l'attention sur la furonculose en Allemagne a amené une forte baisse dans le commerce d'impor- tation avec l'Autriche, article dans lequel nous relevons la phrase picturale suivante : « Chaque état, chaque famille, chaque individu même a, LA FURONCULOSE DES SALMONIDES 40143 dit-on, un squelette dans son armoire, mais Ja plu- part sont assez avisés pour ne pas le moutrer à tout le monde. » Il nous semble cependant que les vété- rinaires, liés par le secret professionnel, seraient tout indiqués pour exercer une surveillance sur les pisciculteurs français. Dans le but d'éviter la pullulation du bacille dans les eaux, les éleveurs auront soin de n'ins- taller leurs bassins que sur des terrains sains, sur fond de gravier ou de sable, et de les alimenter suffisamment. Ils se garderont d'y laisser couler, à l'instar de ce qui se pratique dans les étangs à Carpes, des eaux purinées ou riches en matières organiques. La plus grande propreté devra régner; on procédera à de fréquents netloyages pour enlever les excréments et déchets dont l'accumulation est toujours dangereuse. La nourrilure sera l'objet d'une attention particulière; il ne faut donner aux repas que ce qui peut être immédiatement con- sommé. On doit observer les allures des sujets en élevage et cesser la distribution d'aliments dès qu'ils cessent de manifester de l'appétit. Des mesures devront être prises également pour éviter la pollution des rivières. Les déversements usiniers devront être surveillés el contrôlés avec soin, surtout ceux qui sont riches en matières organiques. Enfin, il nous semble qu'il serait à souhaiter que l’on renoncât au repeuplement de nos rivières en Salmonides exotiques, si en honneur depuis une quinzaine d'années. Il faut bien se rendre compte, en effet, que les résultats obtenus sont vraiment insignifiants eu égard aux frais qu'ils ont entraînés; de plus, ces déversements n'ont pas seulement l'inconvénient d'être inutiles, ils peuvent ètre fort nuisibles. En effet, comme nous l'avons montré, on introduit dans les eaux libres des Poissons dégénérés, peu vigoureux et par là même prédisposés à l'infection par le P. salmonicida. Ce serait. une mesure radicale, mais cerlainement avantageuse. Mieux vaudrait faire des repeuple- ments avec les espèces indigènes les plus aptes à s’accommoder des conditions réalisées actuelle- ment dans nos rivières, et ne pas s’entêter à réin- troduire des Salmonides dans les biefs d'où ils ont disparu, alors que les causes qui ont amené cette disparition n'ont pas cessé d'exister. L. Mercier, Chef des Travaux de Zoologie à la Faculté des Sciences de Nancy. R. de Drouin de Bouville, Inspecteur adjoint des Eaux et Forêts. Chargé de cours à l'Ecole nationale des Eaux et Forèts. Brieciocrapuie. — 189% : Eumerica et WeïgeL : Ueber eine durch Bakterien erzeugte Seuche unter den Forellen (Areh. 1. Hyg., L XX, p. 1). — 1898 : Horer : Zur Entstehung der Furunkulose bei Salmoniden (A//gemeine Fischerei Zei- tung, 2°s., t. XIII, n° 2). — 1901 : Horer : Zur Entstehung Quand un navigateur veut connaître sa position en mer, il doit recourir aux observations astrono- miques qui lui permettent de déterminer la latitude et l'heure, cette dernière donnée entraînant la dé- termination de la longitude par comparaison avec l'heure de Paris que conservent les chronomètres. Les instruments à réflexion dont il fait usage donnent aux résultats cherchés une précision suf- fisante pour assurer sa route et, en fin de traversée, pour atterrir avec sécurité. Ce système de déterminations isolées ne serait évidemment pas de mise à terre; bien rarement un explorateur cherchera uniquement sa route à tra- vers un pays totalement inconnu en n'ayant que le but de traverser un continent; presque toujours il voudra rapporter de son voyage une carte, füt-elle sommaire, des contrées parcourues. Ce qu'il im- porte done de connaitre, ce sont les positions rela- tives des divers points remarquables rencontrés en route; les observations astronomiques, surtout avec les instruments très portatifs, les seuls qui conviennent aux explorateurs, ne donnaient jus- qu'à ces derniers temps qu'une approximalion trop srossière. Des points déterminés isolément par positions géographiques absolues risqueraient de paraître situés à des positions relatives entière- ment fausses. Force est donc de combiner la triangulation, ou pour mieux dire les visées horizontales, avee les observations astronomiques, et ces opérations mixtes, dont les travaux de d'Abbadie en Ethiopie el cerlains levés hydrographiques fournissent des modèles, pourraient donner des résultats excellents pour peu que les instruments astronomiques fus- sent doués d’une précision plus grande. der Furunkulose (/bid., t. XXI, p. 291). — 1902 : Horer : Die Krankheilen unserer Fische die Furunkulose (/bid., t. XVII, p. 61). — Marsu : Bacterium trutiæ, a new species of bacterium pathogenic to Trout (Science, t. XVI). — 1903 : Marsn : À more complete description of Bacterium truttæ (Bull. of the U. S. Fish Commission, t. XXII, p. #11). — 1904 : Horer: Handbuch der Fischkrankheïiten. — 1906 : Marsn : Brown trout disease at Pleasant Valley Hatchery (Æleventh annual report of Forests, Fishes and Game Commission, New-York, p. 117). — 1907 : n£ Drouin pe Bouvice : La furonculose des Salmonides (Ann. de Ja Science agronomique française et étrangère, 3° Ss., 1. ], Berger-Levrault, Paris, Nancy). — 1908 : pe DrRouIN ne Bou- viLe : Les maladies des Poissons d'eau douce d'Europe, l'après les travaux originaux et le Tiaité du professeur Hofer. Laveur, Paris. — 1909 et 1940 : Nombreux articles de : Horer, PLENN, FCnRMANN, HEUSCHER, ECKSTEIN, GERSON, NE- RESHEIMER, FiegiGer, etc. (principalement dans l'A //gemeine Fischerei Zeitung). PH. HATT — L'ASTROLABE A PRISME L’ASTROLABE À PRISME À PROPOS D'UN LIVRE RÉCENT Malheureusement, le théodolite, qui est l'instru- ment parfait pour l'observation des angles hori- zontaux, laisse beaucoup à désirer au point de vue de celle des distances zénithales des astres. A l'usage, on reconnait les difficultés, dont quelques- unes irrémédiables, empêchant d'obtenir des résul- tats exacts. C'est le manque de stabilité qui fait obstacle au nivellement de l'instrument, qui rend même illusoire la lecture du niveau, car l'état change notablement pendant le retournement au- quel astreint l'obligation de la double visée néces- saire pour obtenir une distance zénithale. C'est la chute de l’axe, faussant en principe la lecture. C’est la difficulté d'opérer assez rapidement dans l'obser- vation des astres qui culminent au zénith. D'ail- leurs, le manque de précision provient encore de la dimension forcément restreinte que l’on est obligé de donner aux instruments portatifs. Les hydrographes anglais préfèrent de beaucoup l'emploi du sextant, dontils ontadoptéun modèle de grande dimension, à celui du théodolite; ils déter- minent la latitude par des hauteurs d'étoiles obser- vées à leurs culminations au moyen de l'horizon artificiel à mercure. S'ils obvient à beaucoup de défauts signalés, ils doivent, par contre, subir l’'in- convénient de ne pouvoir observer que les étoiles à moins de 60° de hauteur, sans compter que la recherche des étoiles avec l'horizon artificiel est d'une difficulté presque insurmontable quand leur éclat est faible. Il faut convenir, en outre, que, par sa construction même, le sextant ne se prête guère, en principe, à des observations très précises. C'est aux géographes pratiquant ces reconnais- sances mixtes, où l'astronomie est étroitement mélée"à la triangulation, que l’astrolabe à prisme de MM. Claude et Driencourt est appelé à rendre d'incomparables services, en résolvant aussi com- plètement que possible le problème ardu de la. détermination des positions géographiques en cam- pagne. Les premiers essais de cet instrument remontent à une dizaine d'années et, depuis cinq ans, il est entré dans la pratique courante; les observateurs qui ont eu l'occasion de s'en servir sont unanimes à proclamer sa parfaite adaptation au but visé. Aujourd'hui, les inventeurs publient un traité théorique et pralique' concernant leur 1 A. Ccaune et L. Drrencourtr : Descriplion et usage de l'Astrolabe à prisme. 1 volume in-$° de 392 pages avec 7 planches el figures (Prix : 45 fr.). Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1910. PPT PH. HATT — L'ASTROLABE A PRISME appareil, complétant ainsi leur œuvre par des ins- tructions détaillées, précédées d'un exposé théo- rique du problème de la détermination des posi- tions géographiques et d'une description de Fins- trument. Il nous semble opportun de profiter de cette publication pour rappeler brièvement le principe de l'instrument et les diverses applications dont il est susceptible. Comme on a pu le lire ici-même il y a quelques années’, l’astrolabe à prisme consiste en une lunette horizontale devant l'objectif de laquelle est fixé un prisme dont les deux faces, se coupant suivant une horizontale perpendiculaire à l'axe optique, font un angle de 60°. Un bain de mercure disposé devant la lunette réfléchit le rayon lumineux provenant d'une étoile dont la hauteur est de 60°; ce rayon réfléchi tombe sur la face inférieure du prisme pendant que le rayon direct tombe sur la face supé- rieure; tous deux se réunissent suivant l'axe de la lunette, formant à son foyer deux images super- posées au moment où la hauteur devient égale à 60°. L'observation consiste donc à estimer l'heure de la coïncidence, ce qui est d'autant plus facile que les deux images se rapprochent l'une de l’autre avec une vitesse angulaire double de celle qu'elles possèdent isolément. Rien de plus simple, comme on le voit, el rien de plus exact, car peu importent les petits défauts de réglage que présentera l'ins- trument; l'heure de l'observation n'en sera pas sensiblement influencée si l'on prend quelques précautions. Tous les astres seront observés à la même Lau- teur apparente, donc à la même hauteur vraie si la réfraction est symétrique par rapport au zénith”. Il est vrai que la hauteur apparente ne pourra jamais être rigoureusement de 60°; il est impos- sible de tailler un prisme d'une manière par- faile, mais on atteint facilement le degré de per- fection nécessaire pour que les erreurs des angles et le défaut de parallélisme des arêtes soient sans influence sur la constance de la hauteur apparente mesurée, et c'est là ce qui importe. Ainsi se trouvent réalisées les conditions d’'ap- plication de la méthode des hauteurs égales de Gauss dans le cas particulier d'une distance zéni- thale voisine de 30°. Le problème de la détermina- tion simultanée de l'heure et de la latitude est 4 Voir la Revue générale des Sciences des 30 novembre et 30 décembre 1905. = Les variations de la réfraction pendant la durée des observations n'empêchent pas de considérer la hauteur vraie comme constante, car il est aisé d'en tenir compte dans le calcul. 1015 théoriquement résolu par l'observalion de trois concoive le triangle sphérique formé par le zénith, éloiles différentes à mème hauteur. Que l'on le pôle céleste et un astre : il fournit une relation entre la colatitude du lieu, la distance polaire, la distance zénithale et l'angle horaire de l'astre. De ces quatre éléments, un seul est entièrement connu; c'est la distance polaire, fournie par les tables astronomiques; la distance zénithale exacte esl inconnue, mais constante ; il en est de même de la colatitude. Reste l'angle horaire, qui est variable d’un astre à l'autre, mais qui se déduit immédiate- ment de l'ascension droite de l'astre, de l'heure observée et de la correction du chronomètre, la- quelle doit, pour une courte période, être consi- dérée comme une inconnue constante’. Chaque observation fournit donc trois inconnues : colatitude, distance zénithale el correction du chronomètre, et des quantités con- une relation entre les nues; trois observations suffiront pour résoudre le système. Telle est la théorie; mais on peut dire, en renversant le sens du proverbe, qu'il y à loin de la théorie à l’application pratique. Les inven- teurs n'ont pas déployé moins d'ingéniosité dans la solution simple de ce problème que dans Ja conception de l'appareil qui en fournit les élé- ments. C'est par un choix rationnel d'inconnues et par un recours aux méthodes d'approximation qu'ils y sont parvenus. Il L'heure et la latitude seront évidemment déter- minées si l’on connait, à un moment donné, la position du zénith sur la sphère céleste; car l'heure sidérale est marquée par l'ascension droite du méridien céleste passant par le pôle et le zénith ; d'autre part, la colatitude n’est autre que la dis- tance du zénith au pôle. Pour définir le zénith, il suffira de mesurer, à un instant donné, sa distance à une série d'étoiles connues; à chaque mesure correspondra un petit cercle de la sphère céleste déerit de l'étoile comme pôle avec la distance zéni- thale mesurée comme rayon sphérique. Le zénith cherché se trouvera à l'intersection commune de tous ces lieux géométriques. Rappelons, d'autre part, que la méthode géné- rale d’approximalion consiste à partir de valeurs approchées des inconnues et à calculer, par un renversement du problème, les valeurs que de- vraient avoir les quantités observées pour satis- faire à ces conditions hypothétiques. Ces valeurs, dites calculées, différeront sans doute un peu des observations, et les différences sont, en général, ! Ou dont la variation est connue. 1016 PH. HATT — L'ASTROLABE A PRISME exprimées algébriquement par des sommes de termes où les corrections des inconnues entrent au premier degré. On obtient ainsi autant d'équa- tions qu'il y a d'observations; le nombre de celles-ci dépasse toujours celui des inconnues, car on peut les multiplier à volonté; la méthode des moindres carrés indique la solution la plus plausible dans ce dernier cas. Quand le nombre des inconnues ne dépasse pas deux, on peut recourir à la méthode graphique, qui fait trouver la solution par l'inter- section d'un nombre de droites égal à celui des observations, chacune des droites correspondant à une équation de condition. Le problème actuel comporte trois inconnues; les auteurs ont ramené ces trois dimensions à deux, et ce n'est pas la moindre originalité de leur travail. Nous avons dit qu'à chaque mesure de distance zénithale d’un astre correspond un petit cercle, lieu géométrique de tous les points qui pourraient servir de zénith dans les conditions de l'observa- tion. D'une observation à l’autre, le zénith change, il est vrai; mais rien n'empêche de reculer fictive- ment la deuxième observation jusqu'à la première, en diminuant l'ascension droite de l’astre de la différence constatée des deux heures d'observation. En admettant, tout d'abord, que l’astrolabe soit parfaitement construit et, en outre, que toutes les observations supposées exactes soient rendues simullanées, on peut imaginer la petite portion de sphère au voisinage du point de rencontre de ces cercles dits de hauteur dont chacun correspond à l'une des étoiles fictives. Une représentation géo- métrique pourra être obtenue en tracant lous ces cercles sur une sphère matérielle, et la représen- tation sera d'autant plus précise que le rayon de la sphère sera plus grand. Rien n'empêche de l’aug- menter jusqu'au point où la petite portion de sur- face considérée sera sensiblement plane, et alors sensiblement des lignes droites dirigées perpendiculairement aux plans verticaux des astres. Cela posé, revenons aux conditions normales : aussi {ous ces cercles deviendront on à fait une série d'observations d'étoiles, dans un lieu dont la latitude est connue d'une manière astrolabe dont le prisme est supposé de 60° et avec un chronomètre très approximative, avec un dont.la correction est à peu près connue. On mar- quera, au centre d'une feuille de papier, un point figurant le zénith approximatif et on tracera, comme repère, une droile figurant la direction du pôle céleste. Les valeurs admises pour la latitude et la correction du chronomètre serviront à cal- culer la distance zénithale de l'étoile observée. Si celte valeur est plus forte que la distance théorique de 30°, cela voudra dire que le zénith vrai est plus rapproché de l'étoile que le zénith approximatif, et } il conviendra de déplacer, parallèlement à elle- même, vers l'étoile, la droite figurant le cerele de hauteur”.Si la valeur calculée est plus faible que la distance théorique, la droite de hauteur sera dé- placée à l'opposé de l'étoile. La direction de cette droite est connue par rapport à l'axe de repère tracé sur la feuille; le déplacement à partir de l’origine est donc entière- ment déterminé si l'échelle du dessin est fixée. En opérant de même pour toutes les étoiles, on obtient une série de droites qui devraient se cou- per au même point s'il n'y avait pas d’erreurs d'observation et si l'angle du prisme était exacte- ment de 60°. Cette dernière condition est rarement réalisée ; les droites, au lieu de converger, seront donc tangentes à une circonférence dont le centre occupera la position du zenith vrai et dont le rayon figurera, à l'échelle du dessin, la correction du prisme. Le choix de la solution est à peine plus difficile que dans le cas de l'intersection centrale; les droites de hauteur dessinent avec netteté leur enve- loppe, et, au bout de très peu de tâtonnements, on arrive à tracer la circonférence qui la représente de la manière la plus satisfaisante. Il convient de tenir comple du poids des droites de hauteur pour faire ce choix. Ce poids est inversement propor- tionnel au carré de l'erreur probable. On pourrait croire, comme il s'agit de l’eslime du temps, que le poids serait d'autant plus grand que le mouve- ment en hauteur de l'étoile est plus rapide, tandis que c'est l'inverse qui se produit en réalité. La latitude est, de ce fait, particulièrement bien déterminée ; c'est tout bénéfice au point de vue des opérations de triangulation astronomique, dans lesquelles la latitude est un élément essentiel : on s'efforce, en effet, de faire servir cette donnée à la détermination de l'échelle du levé, quand, au moyen des directions horizontales, on a réussi à se procurer une figure semblable à celle du terrain. III Quoique moins essentielle, la détermination des longitudes absolues a été examinée par MM. Claude et Driencourt, qui ont consacré à cette question un chapitre remarquable de leur livre. L'astrolabe est, en effet, immédiatement approprié à l'emploi d'une méthode déjà recommandée par l’astronome celle des hauteurs lunaires. Détail assez piquant : c’est par réaction contre les observations du temps et par crainte de l'erreur personnelle à Liais, ! Dans le but de simplifier cet exposé sommaire, il n'a pas été fait mention de la réfraction: pour en tenir compte, il suffira d'appeler «distance zénithale théorique » la somme de 30° et de la réfraction. AT eh ni PH. HATT — L'ASTROLABE À PRISME 1017 laquelle ces observations sont sujettes que Liais arrivait à proscrire les culminations lunaires au profit des hauteurs observées au théodolite, ou mieux à l'altazimut. Aujourd'hui, c’est au [profit du temps que les hauteurs lunaires reviennent en faveur. Hâtons-nous d'ajouter qu'il s'agit ici d’une méthode originale et surtout de procédés de calcul entièrement nouveaux. Liais déterminait l’ascen- sion droite de la Lune par des observations répé- tées de hauteurs et déduisait l'heure du premier méridien des tables publiées par les éphémérides, exactement comme on le fait dans le cas des cul- minations lunaires. MM. Claude et Driencourt sup- posent tracées sur la sphère les positions de la Lune aux heures successives du premier méridien. À une distance zénithale déterminée correspond un petit cercle (d'environ 30°), décrit du zénith momentané comme pôle. Son intersection avec la courbe des positions de la Lune, graduée suivant l'heure de Paris, déterminera cette heure, dont la différence avec l'heure du lieu sera la longitude cherchée. C Dans le tracé à grande échelle, le petit cercle devient une ligne droite, ainsi que la trajectoire lunaire ; l'intersection est immédiatement obtenue. La méthode est très simple en principe; dans l'application, elle se complique un peu par suite des corrections nécessitées par la parallaxe, laquelle dépend de la ligne qui joint l'observateur au centre de la Terre et qui, par suite, diffère de la verticale perpendiculaire à la surface de l’ellip- soïde terrestre. 11 semble bien que, dans ce cas, la méthode des culminations conserve l'avantage de la simplicité et, en outre, celui des observations répétées à plusieurs fils. 1 On peut, à cette occasion, se demander si l'as- trolabe à prisme est destiné à supplanter les instru- ments méridiens dans toutes les observations astronomiques de haute précision. Il semble diffi- cile de répondre actuellement à cette question. Sans doute, la lunette méridienne pèche par la détermination directe de l’inclinaison de l'axe, à laquelle le calcul ne peut suppléer. Mais elle pré- sente tant d’autres avantages qu'aucune tentative n'a pu lui enlever sa suprématie depuis que Rœmer, il y a plus de deux cents ans, en a fait la reine des instruments des observatoires. Se lais- sera-t-elle détrôner sans protestation ? Les astro- nomes qui la défendent ne sauront-ils pas s'ingénier à l'effet de découvrir un procédé moins imparfait que le niveau pour déterminer l’inclinaison de l’axe horizontal ? Liais avait déjà proposé de remé- dier à toutes les défectuosités constatées de l’appa- reil de nivellement en faisant de l’axe horizontal un collimateur au moyen duquel on pouvait suivre toutes les variations en hauteur et en azimut. En REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. combinant l'aulo-collimation avec le bain de mercure, ne pourrait-on transformer celle mesure relative en mesure absolue, en ce qui concerne l'inclinaison ? Il serait donc téméraire de se pro. noncer actuellement au sujet de l'avenir des ins truments des observaloires fixes. Mais on pourrait sans doute, dès à présent, assu- rer un avantage très notable à l’astrolabe dans le cas des observatoires volants. I] y a un intérêt con- sidérable à compléter les observations géodésiques proprement dites par des déterminations astrono- miques directes des principaux sommets d'une triangulation. On se contente habituellement d'un très petit nombre de ces déterminations, quand il importerait, au point de vue de la figure du gévïde, de multiplier, au contraire, les mesures de la posi- tion de la verticale. C’est ici que l’astrolabe est appelé à rendre des services signalés, en dispen- sant de l'établissement long et coûteux des obser- vatoires provisoires et en permettant d'obtenir des stations aussi nombreuses qu'on peut le désirer. IA Les trois derniers chapitres du volume de MM. Claude et Driencourt sont consacrés à la pré- paration des observations, à l'identification des étoiles observées et aux applications numériques. Avec un grossissementtrès considérable, lechamp de la lunette est très restreint. D'autre part, l'étoile reste très peu de temps visible, el on manquerait l'observation si la lunette n'était pas exactement orientée. Il importe donc que l’azimul soit déter- miné à l'avance, el le calcul doit être conduit avec une assez grande précision, comme le montre l'étude très serrée qui fait l’objet du chapitre V. Des méthodes variées ont été proposées pour sim- plifier ce calcul; pour certains azimuts, des ta- bleaux à double entrée paraissent suffisants; pour d’autres, il est nécessaire de pousser l’approxima- tion plus loin, et c’est ce à quoi lon parvient au moyen d'abaques tres ingénieusement combinés. Dans le même ordre d'idées, les auteurs ont étu- dié l'identification des étoiles observées fortuite- ment en dehors de celles qui sont cataloguées pour l'observation. Le problème est inverse, mais il se résout au moyen des mêmes tables où abaques servant à la préparation. La dernière partie, toute pratique, de l'ouvrage sera très utile aux observateurs en leur fournissant les types de calculs autographiés. Il y a loin, comme dimensions, de la lettre moulée à l'écriture: les types de caleuls facilitent singulièrement le travail des observateurs, mais, quand ils sont présentés en caractères d'imprimerie, l'adaptation aux cahiers de calcul expose à des mécomptes; eeux-ei sont 24* 1018 évilés grâce à la mesure prise par les auteurs. On ne saurait, en résumé, trop les louer de leur publication ; l'ouvrage qu’ils présentent au publie est aussi intéressant qu'utile. L'éditeur, M. Gau- thier-Villars, mérite une bonne part de ces éloges; P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS il a donné au volume nouveau une forme éléganté- à la fois par l'impression, le format et la reliure :. l'attrait de la lecture en est augmenté. Ph. Hatt, Membre de l'Institut. LES INSTALLATIONS D’ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS RÉCENTS I. — COMPOSITION DE L'ARMEMENT. L'apparition du Dreadnought en 1906 marque le début de l’évolution qu'ont effectuée successive- ment loutes les marines militaires. Antérieurement 16 7m Fig. 4. — Plan du République. à cette époque et depuis 1895, la conception qui présidait à la constitution de l'armement du navire de guerre élait la suivante : à quelques canons de gros calibre, destinés à l'attaque des blindages épais de l'adversaire, on adjoignait une quantité plus grande de bouches à feu de moyen calibre, ayant pour objectif la destruction des superstruc- tures et la perforation des blindages minces; enfin, une artillerie légère et nombreuse, logée surtout dans les hauts du navire, avait pour mission de repousser l'attaque des torpilleurs. En France, les dernières mises en chantier des bateaux de l'espèce sont celles des navires du type République (fig. 1), concu vers 1900. Leur arme- ment comprend : 4 canons de 30°",5, logés dans 2 tourelles doubles axiales situées à l'avant et à Hig. 2: — Elévation du Magnificent. l'arrière du navire, 48 canons de 16 centimètres, 12 dans 6 tourelles doubles disposées symé- triquement de chaque côté entre les tourelles de 30, placés : el 6. dans des réduits; 26 canons de 47 non proté- gés, constituant lartillerie légère du bord. L'augrnentation continue de la portion de la surface du navire protégée par des cuirasses. épaisses, en même temps que l'accroissement des distances de combat, vint modifier les notions qui avaient présidé jusque-là à la composition de l'ar- mement des unités de combat. Pour nous rendre compile de l'influence de ces facteurs, examinons les conditions d'attaque efficace d'un cuirassé an- glais du type Magnificent (fig. 2) par le canon fran- cais de 16 centimètres. Sur ces navires, lancés de 1895 à 1898, l'artillerie moyenne, composée exelu- sivement de canons de 152 millimètres, est dis- posée dans des réduits blindés à 15 centimètres,. séparés par des surfaces étendues de tôleries non protégées. À une distance de combat inférieure à 4.000 mètres et sous l'incidence normale, lobus. de rupture de 16 centimètres pouvait encore per- forer, strictement il est vrai, la euirasse protec- trice des réduits en question. À fortiori, son actiom Fig. 3. — Plan du Lord Nelson. el celle des obus de semi-rupture étaient-elles redoutables sur les superstructures. Au delà de- 4.000 mètres, la grosse artillerie était seule capable de contrebattre avec succès les canons de 452 mil- limètres installés comme il vient d'être dit. Sur les navires des classes Xing Edward VIT et Lord Nelson (fig. 3), mis en service en 1905, les canons de 15 centimètres sont placés dans un réduit occupant la moitié de la longueur du navire et revêtu d'une muraille ayant 18 centimètres d’épais- seur minima. À la même époque, et grâce aux progrès réalisés surtout dans la conduite du tie et dans le pointage, on admet que le feu peut être- ouvert avantageusement jusqu'à des distances de: l'ordre de 8.000 mètres. Dans ces conditions, l'infé- riorité du canon de 16 centimètres devient mani- feste ; jusqu'à la distance ci-dessus, son projectile de rupture est, même en tir normal, impuissant à perforer une plaque en acier spécial de plus de 70 millimètres d'épaisseur. P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE A RORD DES CUIRASSES Pour replacer l'attaque et la défense dans leur ancienne siluation respective, il fallait done ac- croître la puissance de l'artillerie moyenne, et c'est à cette nécessité qu'a répondu la conception logique du Dreadnought et des all big qun ships dont il à été le prototype. L’armement principal de ce eui- “assé (fig. 4) est composé de 10 canons de 30°",5, placés dans 5 tourelles doubles réparties comme l'indique la figure 4. Quant à l'artillerie légère, elle comporte 16 canons de 102 millimètres. Iei encore l'augmentation de calibre est manifeste, puisque le calibre maximum de la petite artillerie n'était que de 76 millimètres sur les Lord Nelson et King Edward VII. Au point de vue de l'armement, les caractéris- tiques du Dreadnought sont donc les suivantes : Augmentation et unificalion du calibre de la grosse artillerie, constiluée uniquement par du 30centimètres,etdisparition de l'artillerie moyenne. Augmentation de puissance de la petite artillerie. Cette dernière modification est aussi rationnelle que les précédentes et découle de la transformation 30 %m — 5 (RES 30%m5 XO 30%7m 5 e—-- ER FiG. 4. — Plan du Dreadnought. qu'a subie le torpilleur d’escadre. Ce dernier est aujourd'hui un contre-torpilleur, dont le déplace- ment varie de 700 à 1.800 tonneaux (type Swift) et qui, grâce à ces dimensions, peut maintenant jouer son rôle à peu près par tous les temps. Cet accrois- sement de taille du destroyer a eu pour corollaire inévitable un renforcement de l’échantillonnage de sa coque, et comme, grâce aux progrès de la tor- pille, la distance efficace de lancement de cette dernière s'est notablement accrue dans ces der- nières années, il s'ensuit que, pour maintenir dans son ancienne condition la puissance offensive de l'artillerie légère contre le torpilleur, il.a fallu augmenter aussi le calibre de cette dernière. Les considéralions précédentes, jointes aux enseignements de la guerre russo-japonaise, ont déterminé un courant d'opinion unanime et, à l'heure actuelle, les cuirassés mis en chantier ont, quelle que soit leur nationalité, des caractéristiques similaires en ce qui concerne leur armement prin- cipal. La France et le Japon, tout en renoncant à l'emploi de l'artillerie moyenne dans les types Danton et Satsuma, n'avaient pas cependant adopté l'unité de calibre pour la grosse artillerie; leur adhésion à ce principe est aujourd'hui complète. On doit cependant signaler que la tendance à l'accroissement du calibre est maintenant générale, 1019 aussi bien en ce qui concerne l'armersent prinei- pal que l'armement secondaire. Le Lion el l'Orion, lancés tout récemment en Angleterre, recoivent, le premier, 8 canons de 13 pouces 5 (34 centimetres), le second, 40 bouches à feu du mème calibre, Le cuirassé brésilien /t10o-de-Janeiro, en construction sur les chantiers anglais, aura 12 canons de 354 millimètres, et l’on annonce que la marine italienn: éludierail un canon de 406 millimètres. Le pouvoir perforant du canon de 30 centimètres, qui arme la presque totalité des cuirassés récents, peut, sans doute, être considéré comme suffisant à toutes les distances de combat, étant donnée l’épais- seur de leurs cuirasses de flottaison ; mais, par l'accroissement du calibre, on à surtout voulu réaliser l’augmentalion de la charge d'explosif du projectile. Relativement à l'artillerie légère, son calibre maximum vient d'être élévé à 127 millimètres par les États-Unis (type Wyoming) et à 14 centimètres par la France (type Jean-Bart). Il est même de 15 centimètres sur les derniers navires allemands, japonais et brésiliens. En définitive, les cuirassés des derniers modèles sont armés de 10 à 143 pièces (Giulio-Cesare), d'un calibre au moins égal à 30 centimètres, logées en tourelles doubles ou triples. Quant à leur arme- ment secondaire, il comprend une vingtaine de pièces d'un calibre compris entre 10 et 15 centi- mètres. L'artillerie moyenne, supprimée sur le Dreadnoughl, réapparaît done déjà chez certains de ses similaires, mais son rôle avoué, différent de celui de jadis, consiste surtout à repousser l'at- taque des torpilleurs. Une telle composition de l'armement secondaire, qui parait justifiée si l’on ne considère que les con- ditions d'une attaque de jour par des contre- torpilleurs, semble, par contre, prèter le flanc à la critique si l’on envisage les circonstances d'un combat de nuit. Dans ce cas, en effet, et malgré les projecteurs du cuirassé, l'assaillant ne sera le plus souvent découvert par celui-ci qu'à une distance relati- vement faible. Dans ces conditions, l'avantage que procure la supériorité du calibre, au point de vue de la précision du tir et de la puissance de perfora- tion, s'atténue déjà sensiblement. Il se réduit encore, si l’on considère que la rapidité de tir d’une bouche à feu diminue la nuit d'une fraction notable de sa valeur normale. Or, comme cette rapidité décroît lorsque le calibre augmente, on concoit que, le nombre des canons étant limité, il puisse exister un calibre limite au-dessus duquel la vitesse de tir obtenue devienne absolument insuf- fisante. En vertu de ces considérations, on serait donc 1020 P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE A BORD DES CUIRASSÉS amené à maintenir la petite artillerie dans l’arme- ment des bords; mais alors surgit la difficulté d'as- surer une protection suffisante à ces bouches à feu, que l’on ne saurait guère loger ailleurs que dans les hauts du navire. Aucune solution satisfaisante n’est encore intervenue à cet égard, bien qu'on ait proposé l'installation de dispositifs à éclipse per- mettant de dissimuler l'artillerie légère dans des tubes cuirassés de faible diamètre. 11. — RÉPARTITION DE L'ARMEMENTI. La répartition de l'armement précédent est variable. Le Jreadnouyht et ses sisters ships ont 5 tourelles doubles de 30 centimètres, dont 3 axiales et une de chaque bord. Le navire peut ainsi tirer en chasse ou en retraite 6 canons de 30 centimètres et8 par le travers. Sur le Minas Geraes (fig. 5\et le Sao Paulo, construiis en Angleterre pour le Brésil, l'armement principal consiste en 12 canons de °30 centimètres, abrités en 6 tourelles doubles, dont 4 axiales;les deux autres sont placées dissymétri- quement sur les flancs du navire. Les tourelles axiales n% 2 et 3 sont contiguës aux tourelles axiales extrêmes n°° 1 et 4 et surélevées par rapport à ces dernières, de manière à pouvoir tirer par- dessus elles. Grâce à cette disposition, 8 canons de 30 centimètres peuvent être tirés simultanément en chasse et en retraite, et 10 par le travers. Les essais de tir effectués dernièrement sur ces deux navires ont donné, paraît-il, toute satisfaction, et on affirme que le tir des tourelles surélevées n’au- rait nullement gêné celui des tourelles extrêmes. En Angleterre, aux Etats-Unis, en Italie et en Russie, on est d'accord pour augmenter le plus possible l'importance de la bordée du travers. Cette conceplion, qu’on justifie par des considérations tactiques, à naturellement conduit à l'emploi des tourelles axiales. En plaçant les seconde et avant- dernière tourelles comme il vient d'être dit plus haut, on parvient à tirer encore # canons de gros — Plan du Minas Geraes. FiG. 5. calibre en chasse et en retraite, tandis que tous peuvent tirer par le travers. Les nouveaux 23.500 tonneaux français (fig. 6) reproduisent, au contraire, les dispositions du Minas Geraes. Le tableau I de la page suivante résume, en ce qui concerne l'armement, les principales données concernant les unités de combat récemment mises en chantier par les grandes puissances maritimes. Pour renforcer encore la puissance de l'artillerie de gros calibre, il faudrait — la question de l'accroissement du calibre étant réservée — aug- menter soit le nombre des tourelles, soit celui des canons qu'elles contiennent. On est limité dans la c-de 14 %m c de 14 %m c.de 14 Ym Fic. 6. — Plan des nouveaux 53.500 tonneaux français. première de ces voies par la difficulté d'accroitre notablement le tonnage des navires actuels. Ce dernier est, en effet, voisin de la limite déterminée par les dimensions des ports existants, tant au point de vue de leur profondeur qu'à celui de la largeur des bassins en service. Reste à envisager l'emploi des tourelles triples. III. — TOURELLES TRIPLES. Cette question parait avoir été étudiée avec soin dans un certain nombre de pays, et les conclusions générales qui semblent découler de cette étude sont les suivantes : Le poids total d'une tourelle triple peut varier entre les 4/3 et les 5/4 de celui d'une tourelle double du même type et abritant des canons iden- tiques. Les surfaces latérales exposées au feu ennemi sont, par ailleurs, dans le rapport de AR es : 1 à Vi ou de 1 à + Pour un même nombre de ‘ 4 canons abrités, il y a donc un avantage marqué, au double point de vue des poids et de la réduction de la surface de la cible, à employer des tourelles triples au lieu de tourelles doubles. Citons un exemple sur les trois cuirassés italiens de 29.500 tonneaux de la classe Leonardo da Vinei, qui sont encore en chantier, l’artillerie principale, composée de 43 canons de 30 em. 5, a été répartie entre trois tourelles triples axiales placées à l'avant, - à l'arrière et au milieu du navire, et deux tou- relles doubles placées dans les intervailes des pré- cédentes. Grâce à l'emploi des tourelles triples, le tonnage par canon de 30 centimètres n'est plus, sur ce navire, que de 1.692 tonneaux, alors qu'il s'élève à 2.166 tonneaux sur le Wycming et à près de 1.900 sur le Saint-Vincent et l'Helgoland. Sur les nouveaux cuirassés russes de 23.300 tonnes, ce même tonnage n'est encore que de 1.940 tonneaux, malgré la puissance relativement considérable des machines et une protection très complète, carac- P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE A BORD DES CUIRASSES 1021 térisée par un double cuirassement formant un caisson latéral sur les flancs du navire. Ainsi donc, el malgré les différences qui peuvent exister entre les caractéristiques autres que celles ayant trait à l'armement, il semble ressortir des chiffres précédents une économie de poids notable due à l'emploi de la tourelle triple. de ces cuirassés, TaBLEAU I. à un coup direct en raison de sa plus grande sur- face et de sa courbure moindre. Il convient, cepen- dant, de ne pas s'exagérer la valeur de cet argu- ment, l'expérience de la guerre russo-japonaise ayant fait ressortir que la mise hors de combat d'une tourelle entière constitue un faitexceplionnel, On peut encore objecter contre la tourelle triple — Composition de l'armement des cuirassés récents des grandes puissances maritimes. DÉSIGNATION ÉTATS ANNÉE de la conception des navires RE RNREONE EE | 1 4 ci Minas-Geraes. 1 Brésil (construction anglaise) Rio-de-Janeirc. 1 France Jean-Bart. 1 Nassau. 1 1 Allemagne. . . . Helgoland. Russie Gangout. 1 Japon. Kawashi. 1 Etats-Unis. . . . . Wyoming. Dante-Alighieri.| 1 Conte-di-Cavour. Argentine (construction américaine) Moreno. Saint-Vincent. 1 Neptune. 1 Angleterre. . . . Orion. Lion. ou de la mise en chantier 907 909 909 907 908 909 908 1909 908 1909 1910 907 908 1909 1909 TOURELLES de GROSSE MOYENNE PETITE DÉPLA- artillerie artillerie artillerie CEMENT gro; calibre A — tonneaux (6 doubles 500 : dont ( 4 axiales. (6 doubles 2.000 dônt , axiales. 6 doubles dont % axiales. 6 doubles dont 2 axiales. 12 de 305mm|22 de 120mm| $ cle 47 mm 19. 12 de 356 14 de 152 14 de 102 12 de 305 22 de 140 12 de 280 12 de 150 16 de S8 12 de 305 1% de 150 2) de 88 » & triples dont axiales. 5 doubles dont 2 axiales. 5 doubles dont 6 axiales. 2 triples, 2 doubles, 4 axiales. 3 triples, 2 doubles, 5 axiales. 6 doubles dont 4 axiales. 5 doubles dont 3 axiales. 5 doubles dont 3 axiales. 5 doubles dont 5 axiales. 4 doubles dont 4 axiales. 12 de 305 16 de 120 {2 de 305 10 de 152 Qt 1 =" =" 12 de 305 21 de 127 =" œ ®œ® Sel 1 JD Den + ns 10 de 305 18 de 120 13 de 76 .000 13 de 305 18 de 120 13 de 76 2.500 12 de 305 12 de 152 16 de 100 .000 10 de 305 .250 20 de 102 10 de 305 16 de 102 10 de 340 20 de 102 2.860 8 de 340 26.000 | | | | | | | | A cel avantage vient s'ajouter le fait que la plus grande masse de la tourelle triple la rend plus capable de résister aux effets de percussion dus au choc des projectiles qui l’atteindraient sans perforer ses murailles. Par contre, un coup heureux pénétrant dans l’in- térieur de la tourelle triple mettra hors de service une fraction de l'armement du navire plus grande que dans le cas de la tourelle double; la valeur de cet argument est encore renforcée du fait que ia première est un peu plus exposée que la seconde le fait que sa rapidité de tir sera toujours inférieure aux 3/2 de celle de la tourelle double. Cettte asser- tion est fondée, et l’infériorité unitaire de rende- ment des canons couplés dans une tourelle par rapport à celui d'une pièce unique installée d’une manière semblable a été mise en évidence lors de l'apparition des tourelles doubles. Enfin, il y a lieu de remarquer que, par suite des efforts développés sur la coque par l'intermédiaire des freins et des récupérateurs, le tir d’une pièce de gros calibre a pour effet la production de vibra- 1022 P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS tions internes de la plate-forme qui la supporte, en même temps que celle d’un nuage de fumées et de gaz chauds. Ces deux phénomènes, dont la durée dépasse plusieurs secondes, ont souvent pour résultat d'entraver sérieusement les opérations de pointage des canons chargés. Il est, en outre, bien évident que, toutes choses égales d'ailleurs, la gêne due à ces perturbations se fait d'autant plus sentir que la vitesse de tir de la tourelle est plus grande. Peu notable, lorsque les grosses pièces placées en tourelle ne tirent un coup que toutes les trois minutes environ, elle est, au contraire, sensible avec les vilesses de tir actuelles qui, pour les canons de 30 centimètres, sont voisines et souvent inférieures à deux coups par minute. L'ébranlement dû au tir d'un des canons laté- raux de la tourelle triple serait d'ailleurs supérieur à celui qu'engendre un canon identique d'une tou- relle double, ear le moment de la force qui tend à produire le déplacement latéral de la tourelle est, dans le premier cas, près du double de celui afférent au second cas. Comme, d'autre part, la valeur maxima du rapport des masses des deux tourelles n’est que de 4/3, il s'ensuit que les dépla- cements des plates-formes seraient plus grands pour la toureile triple que pour la tourelle double. Il est, d’ailleurs, évident qu'on pourra toujours faire dis- paraître, atténuer, cel inconvénient, en ayant recours à des dispositifs ayant pour but d'augmenter les efforts antagonistes du déplace- ment en question. sinon L'ensemble de ces diverses objections n'est pas sans valeur et, en fait, à part les marines italienne el russe, aucune n'a jusqu'à présent mis en ser- vice de tourelles triples. Ainsi que nous venons de le voir, le calibre de l'artillerie destinée à repousser l'attaque des des- troyers peut atteindre 452 millimètres. L'emploi d'un tel calibre, non seulement permet de combattre efficacement les contre-torpilleurs à plus de 4.000 mètres, mais il facilite encore le réglage du tir des canons de gros calibre et peut contribuer à la des- truetion des superstructures de l'adversaire. Dans tous les cas, et en se plaçant au seul point de vue de la conduite du tir, il y a avantage à grouper en sections les bouches à feu composant l'armement secondaire. À cet effet, on les loge généralement dans un réduit cuirassé placé sur le pont supérieur. Sur le (rangout et ses similaires, ces bouches à feu sont disposées dans la coursive comprise entre les deux cuirasses de flane. Quelle que soit d’ailleurs la solution adoptée pour leur groupement, il faut avoir soin de disposer les bouches à feu de telle sorte que l’immobilisation de l’une d'elles ne diminue pas la liberté de manœuvre el de pointage de ses voisines: IV. — MANOŒUVRE ET ORGANISATION DES TOURELLES. La lutte entre les partisans des tourelles fermées et ceux des tourelles barbettes semble devoir se ter- miner à l'avantage des derniers. Cette préférence est justifiée par la meilleure protection assurée au matériel par les tourelles barbettes, tout au moins au-dessus du pont; on allégue, de plus, en leur faveur le fait que les réactions dues au tir y sont moindres que dans les tourelles fermées, le fléchis- sement du tube-pivot de ces dernières donnant lieu à des réactions très violentes du berceau sur les appareils de pointage en hauteur. La force de ces arguments est telle que, malgré l'infériorité de poids des tourelles fermées, celles-ci sont de plus en plus abandonnées. L'eau, ou la glycérine sous pression, continuent à être employées par la plupart des puissances pour la manœuvre des tourelles et de l'artillerie. Seules, la France et les Etats-Unis utilisent dans le même but l'énergie électrique. Tout récemment, cependant, l'Angleterre a équipé électriquement les quatre tourelles et l'artillerie du croiseur cui- rassé /nvincible. Dans le mème ordre d'idées, on notera que les manœuvres afférentes au pointage en direction des cuirassés brésiliens de la classe Minas Geraes s'effectuent électriquement, tandis que la firme Armstrong, qui a construit ces navires, a lenu à conserver l'énergie hydraulique pour actionner les monte-charge et le pointage en hau- teur des canons. Cette divergence d'opinions provient naturelle- ment de la diversité des avantages et des inconvé- nients inhérents à la nature de l'énergie motrice employée. Pour se faire une idée nette de la ques- tion, il convient donc de passer ceux-ci en revue : le critérium à envisager tout d'abord doit être la sécurité d'emploi et la facilité d'adaptation aux manœuvres; or, à cet égard, il semble bien que l'appareillage hydraulique soit au moins équivalent à l'appareillage électrique. Relativement à la sécurité, on doit observer qu'avec l'hydraulique, il est facile de découvrir une avarie et de la localiser exactement; la répa- ration en est de plus aisée, alors que des courts- circuits peuvent entraîner des arrêts prolongés. En ce qui concerne la facilité d'adaptation aux manœuvres, il est certain, en principe, que les opé- rations de pointage en hauteur, de refoulement de la charge et d’ascension des monte-charge utilisent plus simplement le mouvement rectiligne d'un piston plongeur que le mouvement de rotation d'un moteur électrique, car, jusqu'à ces derniers temps, celui-ci exigeait un mécanisme démultipli- cateur, lourd, bruyant et d'une usure très rapide. En oulre, et jusqu'à l'apparition de lappareil P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS 1023 Janney dont nous allons parler tout à l'heure, la | d'un cylindre de révolution lerminé par deux nécessité de disposer d’une gamme nombreuse de | calottes, est divisé en deux parties par une cloison vitesses pour les opérations de pointage conduisait, avec l'électricité, à l'emploi d'appareils coûteux et compliqués, qui ne permettaient jamais d'éviter complètement les à-coups des deux changements de vitesse. Au point de vue de leur poids, les deux systèmes paraissent équivalents, car, si les mécanismes hydrauliques sont un peu plus pesants, ils sont, par contre, installés dans les fonds du navire, ce qui n'est pas sans offrir un sérieux avantage au point de vue de la sta- bilité. .Si l’on exami- ne maintenant les difficultés et Jes sujétions en- lrainées par la ‘production des deux formes d’é- F V médiane et plane, perpendiculaire à son axe. Cha- cune de ces parties recoit un mécanisme : l’un est le mécanisme moteur, que nous appellerons A: l'autre est le mécanisme récepteur B. Ajoutons que À et B sont presque identiques. Deux presse-éloupes, placés aux extrémités de l'axe du carter, donnent passage, l’un à l'arbre moteur de A, l’autre à l'arbre commandé par B. Outre une ouverture centrale pour les extrémités de ces deux arbres, la cloison médiane est en- formant coussinel core percée de deux mi-annulaires $S par deux intervalles pleins. Chacun fentes se- séparées des nergie, il est cer- ain que l'em- Pa ploi de l’électri- cité présente de grands avanta- ges, car les bords sont toujours obligés de possé- der des groupes lectrogènes d'u- À SE À | DA mécanismes À el B est constitué ainsi qu'il suit Un manchon mn est claveté sur l'arbre moteur (ou récepteur), dont il est ainsi rendu solidaire ; la face plane in- térieure de ce .ne puissance re- Jativement con- -sidérable, tandis que l'emploi des ‘compresseurs n'est imposé que si l’on fait choix de l'énergie hy- médiane montrant les 2 Fig. 7. — Appareil Janney pour la manœuvre ‘des tourelles. — En haut, coupe longitudinale passant par l'axe; en bas, à gauche, vue d'un manchon, montrant les orifices des 9 pompes; en bas, à droite, vue de la cloison ouvertures semi-annulaires. — a, carter rempli d'huile; A, mécanisme moteur; B, mécanisme récepteur; 22, manchon >: manchon est en contact aussi parfait que pos- sible avec la face correspondante de la cloison mé- diane. Chacun a- des manchons , A velé sur l'axbre; {, trous cylindriques; p, pistons pleins; K, rotuless PRE draulique pour b, anneau: ec, cuvette mobile: /, axe transversal: d, arbre: f, presse- est percé de Le lamanœuvre des étoupes; S, ouvertures semi-annulaires. en part de neuf tourelles. trous cylindri- L'emploi de l'appareil Janney semble devoir faire ‘pencher définitivement la balance du côté de l’élec- tricité. $ 1. — Appareil Janney. Cet appareil, extrêmement original, consiste en un dispositif à la fois mécanique et hydraulique, qui transforme un mouvement de rotation à vitesse constante en un autre mouvement de rotation de sens et de vitesse variables à volonté. Ajoutons que la transformation dont il s'agit est caractérisée par un rendement très élevé et voisin de 90 °/,. L'ensemble du dispositif(fig. 7) est complètement renfermé dans un carter résistant 4, rempli d'huile privée d'air. Ce carter, qui a sensiblement la forme ques { parallèles à l'axe du carter. Leurs axes ren- contrent la cloison médiane suivant la circonfé- rence moyenne des fentes semi-annulaires S pra- tiquées dans l'épaisseur de la cloison. Les neuf trous / constituent les cylindres de pompes dont les pistons pleins p sont actionnés par des tiges qui s'articulent sur eux par des rotules K. Les autres extrémités de ces tiges sont reliées de la même manière à un anneau À rendu solidaire de l'arbre moteur (ou récepteur) par un joint à la Cardan. Chacun de ces anneaux b roule, par l’inter- médiaire d'une couronne de billes, à l'intérieur d'une cuvette mobile € et autour d'un axe trans- versal 7 fixé sur le carter et passant par le centre du 1024 joint à la Cardan. Une denture fixée à la cuvette mobile montée sur l'arbre moteur engrène avec les filets d'une vis sans fin commandée par un volant dont l'arbre d passe à travers un troisième presse- étoupes fpratiqué dans le carter. En manœuvrant le volant, on peut donc faire osciller la cuvette et, par conséquent, l'anneau qui roule sur elle; il en résulte qu’on peut donner au plan de ce dernier une inclinaison variable par rapport à l'arbre moteur, comprise entre 90° et une valeur limite minima. L'appareil est construit de facon à ce que cette inclinaison limite soit la même dans les deux sens suivant lesquels on peut faire varier l'inclinaison de la cuvette ec. Quant à la cuvette mobile montée sur l'arbre récepteur, elle est assujettie à une position inva- riable qui est telle que l'inclinaison correspondante soit la même que l’inclinaison limite précitée. L'appareil étant ainsi décrit, examinons ce qui va se passer lorsque l'arbre moteur est mis en mouvement. Si le plan de la cuvette de A est perpendiculaire à l'arbre moteur, il est évident que les pistons des 9 pompes vont rester immobiles, et il en sera de même du mécanisme récepteur B. Le plan de la cuvette de A étant, au contraire, incliné sur l'arbre moteur, la rotation de ce dernier déterminera un mouvement de va-et-vient des tiges des pistons. Considérons l'un d'eux ; lorsqu'il est à la limite de sa course, il reste sans vitesse pendant un certain temps, dont la grandeur est fonction de la vitesse angulaire de A; l'appareil est d’ailleurs réglé de telle sorte qu'à cet instant l’orifice de la pompe considérée est en face de la partie de la cloison mé- diane qui sépare les ouvertures semi-annulaires. Il résulte de là que l'huile est toujours animée d'un mouvement de même sens, à travers une de ces ouvertures. Par suite du mouvement alternatif des pistons provoqué par la rotation de A, l'huile est donc refoulée par une partie d'entre eux à tra- vers une desouvertures semi-annulaires, et ce refou- lement, par suite de l'incompressibilité de l'huile, provoque un mouvement de mème sens des pistons de la partie du mécanisme de B qui se trouve en face de l'ouverture considérée. On voit immédia- tement qu'un mouvement de sens contraire au pré- cédent se produit dans les groupes des deux méca- nismes qui se font face à travers l'autre ouverture semi-annulaire. L'obliquité de la cuvette de B étant constante, le mouvement alternatif des pistons du mécanisme récepteur détermine la rotation de l'arbre de celui-ci. La vitesse de rotation du mécanisme B est fonc- tion de la quantité d'huile qui le traverse pendant un temps donné. Pour nous en rendre compte, supposons que l'inclinaison de la cuvette de B | piston plongeur. P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS soit égale à l'inclinaison maxima de A. Si chacune des pompes a une capacité de 20 centimètres cubes, pendant une révolution de B, les 9 groupes de ce mécanisme effectueront une course complète et auront aspiré à travers une des ouvertures semi- annulaires 180 centimètres cubes d'huile. Admettons maintenant que la cuvette de A soit inclinée de telle sorte qu’à cette inclinaison corres- ponde une course des pistons de ce mécanisme déterminant un refoulement d'huile de 1 centimètre cube par pompe. Il en résulte qu'une révolution de l'arbre moteur provoquera un refoulement total de 9 centimètres cubes seulement. Il faudra, par suite, vingt tours de A pour déterminer un tour de B. A deux inclinaisons égales et de sens contraires de la cuvette A correspondent deux vitesses de B égales et de sens contraires. On remarquera que la seule masse d'huile agis- sante est celle qui existe dans les cylindres des pompes, la masse d'huile remplissant le reste du carter ayant seulement pour but de s'opposer aux fuites et d'assurer le remplissage des pompes en même temps que la lubrification des organes. La pression normale de la masse d'huile active est d'environ 30 kilogs par centimètre carré. Des sou- papes de süreté installées dans la cloison médiane et ayant leur orifice sur les ouvertures semi- annulaires évitent les surpressions dues à un blo- cage accidentel du mécanisme récepteur. La souplesse de fonctionnement de l'appareil Janney est des plus remarquables; ainsi, Ja dynamo motrice tournant à raison de 500 tours par minute, on à pu, par l'intermédiaire de l'appareil précité, faire effectuer à une tourelle une révolution com- plète en dix-huit heures. Dans la description précédente, nous avons admis que la cloison médiane avait la forme d’un disque à faces parallèles. Le parallélisme des deux faces n'est évidemment pas indispensable au bon fonctionnement de l'appareil; pour loger plus commodément l'ensemble de l'installation, on peut séparer le mécanisme À du mécanisme B par une cloison médiane dontles deux faces font entre elles un angle notable. Le mécanisme B peut d'ailleurs être employé comme machine hydraulique. Il suffit, pour cela, de relier à un compresseur celle des ouvertures semi- annulaires qui correspond à l'aspiration; le fluide refoulé retourne à la pompe par l’autre ouverture semi-annulaire. Enfin, il est encore aisé de réaliseravec l'appareil Janney des dipositifs mixes où l’on obtient, par le moyen d'une dynamo, le mouvement, de vitesse variable dans un sens ou dans l’autre, d'un double P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSES 1025 dente soit réalisée. Toutes choses égales d'ailleurs, à $ 2. — Appareil Antoinette. Dans ces derniers Lemps, on a proposé d'autres dispositifs hydrauliques tendant à remplir le même rôle que l'appareil Janney. Il ne semble pas que ce but ait été complètement atteint jusqu'à présent, et ce qu'on peut dire de ces appareils c'est qu'ils constituent surtout des embrayages progressifs. À titre d'exemple, nous allons décrire l’un d'eux, l'appareil Antoinette” : Son fonctionnement découle immédiatement du simple examen de la figure 8. Si les palettes à,, à,, n'avaient aucun déplacement suivant le rayon du fond de l'enveloppe E et si la rainure e était con- stamment tangente à la périphérie du fond de l’en- veloppe, il est clair que le mouvement des palettes n'exercerait aucune influence sur l'enveloppe E ; l'arbre récepteur qui en est solidaire resterait, par suite, immobile, étant donnée la très faible valeur du frottement exercépar l'huile contre les parois de E. Mais, en Ne chaque position du robinet correspondra donc une vilesse particulière de l'arbre récepteur. Une petite pompe auxiliaire maintient dans l'en- veloppe une pression initiale suffisante pour assurer la récupération des pertes d'huile. L'encombrement de l'appareil est très faible, puisqu'un transforma- teur de 30 chevaux consiste en un cylindre n'ayant que 40 centimètres de diamètre sur 10 de hau- teur. L'appareil est réversible, c'est-à-dire qu'on peut commander l’arbre moteur par l'arbre récepteur. Par contre, on ne peut changer le sens de la rotation de l'arbre récepteur qu’en inversant en même temps celle de l'arbre moteur. Le rendement de l'appareil serait, parait-il, assez élevé. De l'étude précédente, nous retiendrons cette con- clusion que, grâce à l'emploi du transformateur continu de vi- tesse, on peut ac- tuellement don- ner aux installa- tions électriques une souplesse à raison de l’exis- tence du noyau CD et du robi- net R, ainsi que de la forme de la rainure e dans la région MCDN, il en va tout au- trement. R étant d'abord supposé complètement ou- vert, fermons-le au moment où a, arrive en M. L'arbre moteur continuant son mouvement, le volume occupé par la masse d'huile comprise entre les palettes a,, a, et le robinet R tend à diminuer; mais, l'huile étant incompressible, il en résulte une pression intérieure du liquide, qui, s’exerçant sur la partie du noyau CD et du robinet R située à gauche de xy, a pour effet d’entrainer l'enveloppe, el, par conséquent, l'arbre récepteur dans le même sens que l'arbre moteur et avec la même vitesse angulaire. Si l’on ouvre R, l'huile poussée par la palette à, s'écoule par l'orifice qui lui est offert, et de telle manière qu'à tout instant le débit du robinet cor- responde à la quantité de liquide en excédent, amenée par les palettes dans la région précitée de l'enveloppe. Cet afflux grandissant et l'ouverture du robinet restant constante, la pression x déve- loppée dans l'huile à gauche de xy croitra presque instantanément jusqu'à ce que la condition précé- 1 Brevet francais n° 361.867. Fig.8.— Appareil Antoinette pour la manœuvre des tourelles. — E, enveloppe; e, rainure; R, robinet; CD, noyau; a,, 4,, a;, palettes. peu près compa- rable à celle des dispositifs hy- drauliques, tout en réalisant l’é- conomie de poids inhérente aux premières. Ces avantages expli- quent la généralisation croissante de leur emploi. S à] 3. — Écouvillonnage pneumatique. Les gaz provenant de la combustion de charges de poudre colloïdales contiennent une proportion très notable d'oxyde de carbone, d'hydrogène et de méthane. C’est ainsi que 100 centimètres cubes du mélange gazeux engendré par la combustion en vase clos de la cordite MD, sous une densité de chargement de 0,25, ont, d'après sir A. Noble, la composition suivante : CO*. 22,25 (ue 28,45 H. . 16,65 CH:. 3,95 ON EE 5e dot RE H2 07 2°) MAMIE RTE ROS Si donc la vitesse relative du navire par rapport à l'atmosphère est dirigée de la culasse vers la bouche, l'ouverture de celle-ci aura pour effet d'in- troduire dans la tourelle ou la casemate abritant le canon une partie des gaz contenus dans l’âme de celui-ci. Etant donnée la forte proportion et la toxi- 1026 P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS cité de l’oxyde de carbone, il pourra résulter, du fait de cette introduction, des troubles physiolo- giques graves chez les canonniers. En outre, comme les gaz ci-dessus sont combustibles, ils pourront encore s'enflammer au contact de l'air (phénomène du retour de flammes), et la gerbe de flammes résul- tant de celte inflammation sera susceptible de pro- duire une véritable catastrophe. Etant donnée la gravité du retour de flammes, on a cherché à l'em- pêcher par divers procédés, que nous allons exa- miner successivement. L'un d'eux consiste à modifier la composition de ces gaz de facon à les rendre ininflammables. Par ce moyen, on supprime le retour de flammes, mais on n'atténue en rien les effets toxiques dont nous avons montré le danger. Il n’en est pas moins inté- ressant de réaliser cette ininflammabilité*. M. Dautriche, ingénieur des Poudres et Salpêtres, a montré” que, pour obtenir ce résultat, il suffisait de surdoser les poudres colloïdales avec de petites quantités de sels de potasse ou de soude, le nuage formé par les poussières de ces sels s'opposant à la combustion des gaz. En dehors de ce procédé, qui ne résout qu'imparfaitement le problème posé, on a recours à des dispositifs réalisant à coup sûr l'éjection des gaz hors de la tourelle. Les plus usités procèdent par injection d'air dans la chambre du canon, soit après l'ouverture com- plète de la culasse, soit avant qu'elle ne soit ache- vée. Dans le premier cas (système Marbec), la chasse d'air s'effectue au moyen d'un ajutage manœuvré par un servant et relié à une bouteille d'air com- primé; dans le second cas, la chasse d'air s'exécute automatiquement au travers de trous pratiqués dans les parois d'un canal annulaire placé sur le pourtour du logement de l’obturateur plastique ou de la rondelle mobile. L'ouverture de la valve d'acier placée sous la conduite reliant le réservoir d'air sous pression au canal annulaire est provo- quée par le début de la rotation de la vis-culasse. Outre ce dernier système, les Etats-Unis ont rendu dernièrement réglementaire une disposition consis- tant à fermer complètement les tourelles et à y faire régner une surpression de quelques centi- mètres d'eau. On assure ainsi, non seulement l'ex- pulsion des gaz du coup de canon, mais encore la ventilation de la tourelle. Au lieu d'injecter de l'air sous pression dans l’âme du canon, Krupp à pro- posé, au contraire, tout récemment" d’aspirer l’atmo- sphère de celle-ci immédiatement après le début du Re + | * D'autant qu'elle entraine la suppression presque com- plète de l'éclair du coup de canon, dû à la combustion des gaz de la charge au contact de l'air, suppression qui est des plus intéressantes pour l'artillerie de campagne. * Comptes rendus de l'Académie des Sciences, Séance du 7 mai 1908. # Brevet francais n° 398.484. mouvement en arrière de la vis-culasse. Le dispo- sitif a élé étudié pour une position fixe de charge- ment et comporte l'emploi d’un ventilateur et d'une double tuyauterie d'aspiration et de refoulement à « travers le toit de la tourelle. V. — INSTALLATIONS DE RAVITAILLEMENT DES BOUCHES A FEU. La rapidité de tir actuelle des canons de 30centi- mètres est voisine et inférieure à 30 secondes. On se rendra compte de la difficulté du problème mécanique qu'implique cette vitesse de tir en consi- dérant la série des opérations relativement nom- breuses que comporte le chargement et en ayant égard, d'autre part, au poids élevé de la munition, compris entre 500 et 600 kilogr., et à la distance verticale qu'elle doit parcourir, qui est le plus sou- vent d'à peu près 15 mètres. Pour difficile que paraisse ce problème, la solu- tion en a élé amenée par les diverses marines à un degré de perfection sensiblement équivalent, malgré la diversité des dispositifs adoptés. On doit cependant constater que l'accord est à peu près complet concernant les caractéristiques essen- tielles des installations susceptibles de réaliser les conditions indiquées plus haut. Tout d'abord, on admet qu'un mécanisme actionné par moteur doit toujours être doublé par un méca- nisme à bras, destiné à suppléer le premier en cas d'avarie. La précaution précédente serait cepen- dant inefficace s'il fallait élever à bras les divers élements de la munition depuis les soutes jusqu'à la culasse. Afin de remédier, dans la mesure du possible, aux conséquences d'un arrêt dans le fonctionnement du mécanisme des monte-charge, on fait déboucher ceux-ci dans une chambre-relais située immédiatement au-dessous de la plate-forme de tir. Si l’on à placé un approvisionnement de réserve dans la chambre-relais, on n'aura, en cas d’avarie des monte-charge, qu'à élever à bras les munitions de la chambre-relais à la chambre detir. L'arrêt du fonctionnement du monte-charge n'étant pas trop prolongé et les dispositifs de transbordement ins- tallés dans la chambre-relais étant convenablement étudiés, on concoit que les conséquences de l'arrêt du monte-charge puissent alors être palliées en grande partie. Les vitesses de tir actuelles ne peuvent d’ailleurs être réalisées qu'à la condition de pointer d'une manière ininterrompue, toute interruption dans le pointage se traduit par une perte de temps notable, due à la recherche du recommence à pointer. On considère, en outre, d'une facon peut-être trop car but, lorsqu'on ème. de À À P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSES 1027 absolue, que le chargement du canon sous tous les angles est le seul procédé qui soit compatible avec les exigences d'un pointage précis et continu. La solution consistant à charger la bouche à feu sous un angle déterminé el à pointer d'une manière continue avec une ligne de visée indépendante, sur laquelle vient s'enclencher le canon une fois son chargement opéré, est aujourd'hui généralement rejetée. On objecte contre elle le fait que l’enclen- chement précédent détermine toujours pendant un temps notable une série de vibrations de la ligne de visée qui sont de nature à troubler et à ralentir le pointage. Actuellement, pour réaliser le pointage continu, on assujettit l'ensemble solidaire canon-ligne de visée à suivre constamment les mouvements du but; par suite, pour effectuer le chargement dans une position quelconque de la bouche à feu, il faut que le chargeur puisse décrire dans toute son amplitude un chemin concentrique à celui parcouru par la culasse et suivre tous les mouvements du canon à partir du moment où leurs deux axes sont en coïncidence. Cet asservissement peut, d’ailleurs, être réalisé avec ou sans enclenchement ; dans le premier cas, l'inconvénient qui en résulte est beaucoup moins sérieux que celui signalé plus haut, carla masse du chargeur est toujours bien petite par rapport à celle du système canon-ber- ceau. C'est surtout pour cette raison quele chargement sous tous les angles s'est généralisé dans les diverses marines, bien que les avantages qu'il procure au point de vue de la vitesse, du tir, par rapport au chargement à poste fixe, soient plutôt douteux. Les soutes à munitions sont généralement placées à l’aplomb des tourelles qu'elles desservent. Etant donné que, dans un combat, les pièces d'un bord pourront tirer plus souvent que celles du bord opposé, il s'ensuit que l’approvisionnement des premières pourra être dépensé, alors que celui des secondes sera intact. Il y a donc un intérét évident à mettre en relations faciles les soutes des deux bords; dans la pratique, la réalisation de ce deside- ratum se heurtera le plus souvent à des difficultés très grandes, tenant à la quasi-impossibilité d'éta- blir une coursive de communication à travers les chaufferies ou les chambres des machines. Ces considérations générales émises, nous allons décrire quelques types récents d'installations pour approvisionnement de bouches à feu de calibres. Dans cette description, nous laisserons de côté ce qui est relatif à l'artillerie secondaire, les bennes et les norias employées pour l'approvi- sionner ne présentant aucun caractère partieulier «de nouveauté. gros Su Tourelles anglaises. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les tourelles anglaises sont des tourelles-barbettes avec charm- bres-relais. Le puits des monte-charge, mobile avec la plate-formede tir, est complètement isolé des soutes à munitions et à projectiles. Des portes à ferme ture automatique donnent accès aux projectiles el aux gargousses introduits dans les cages de l'as- censeur qui les amène à la chambre-relais. Ce dis- positif a pour but de mettre les soutes à l'abri de tout incendie provenant de la combustion de gar- gousses dans le puits ou la chambre-relais. La rotation de la tourelle est commandée par des moteurs hydrauliques, qui sont en double, ainsi que le mécanisme entier d'entrainement de la tourelle. Cet ensemble est généralement.fixé sur la paroi de la chambre-relais et, dans quelques cas, à la plate-forme de tir. Les pignons conducteurs engrènent avec une crémaillère placée au-dessous du chemin de roule- ment des galets supports de la tourelle et commu- niquent à celle-ci une vitesse angulaire d'à peu près 6° par seconde. On à parfois recours à un méca- nisme électrique, mais seulement en cas d’avarie: la vitesse ainsi obtenue est alors plus lente et voi- sine de 2 par seconde. Des lambours de butée élastiques limitent le mouvement latéral de la tourelle et déterminent son arrêt graduel. Des verrous de sécurité assurent, en temps ordinaire, la tenue de la tourelle à la mer. Les projectiles, saisis par des mächoires à griffes, sont amenés des soutes par des chariots- treuils roulant sur les ailes inférieures de fers à I fixés aux plafonds. Leurs changements de direc- tion s’opèrent au moyen de plaques tournantes, manœuvrées hydrauliquement. A leur auprès du puits des monte-charge, les obus sont déposés sur des postes d'attente. Quant aux gar- gousses, elles sont portées à bras et placées dans une trémie dont la porte est à fermeture automa tique, et d'où elles tombent dans la partie supé- rieure de la cage du monte-charge. Un transbor- deur sur rails, roulant concentriquement au puits, recoit les projectiles venant du poste d'attente ; ils passent de ce transbordeur à la partie inférieure de la cage du monte-charge sous la seule action de leur poids. L'introduction des éléments de la charge dans la cage précitée n'est, d’ailleurs, possible qu'autant que celle-ci est en position de chargement. Dans le cas contraire, une sécurité empêche le transborde- ment de s'effectuer. arrivée Suivons maintenant la charge dans son mouve- ment d'ascension vers le canon. A leur arrivée 1028 P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS dans la chambre-relais, les divers éléments dont elle se compose passent sur un transbordeur formé d'éléments élagés et en forme de berceau. Des refouloirs hydrauliques les font passer dans les étages d'un caisson placé en regard des berceaux précédents. C'est ce caisson mobile qui assure leur transfert entre la chambre-relais et la bouche à feu. A cet effet, le caisson en question roule, par l'in- termédiaire de galets-guides portés par lui, sur des rails courbés concentriquement aux tourillons de la bouche à feu. Ce mouvement est commandé par un câble actionné par un palan hydraulique. A sa partie inférieure, le caisson porte une saillie for- mant butée contre la génératrice inférieure du canon, lorsqu'il rencontre celui-ci dans son mouve- ment d'ascension. D'autre part, la presse de pointage vertical est plus puissante que celle qui ac- tionne le palan d'ascension du caisson chargé; il résulte de là que, quel que soit le sens du mouvement du canon, le caisson restera toujours en contact lui, sans qu'il y avec ait besoin de les verrouiller lun à l’autre, si la presse qui ac- tionne le palan du caisson est à la position d’ad- mission, c'est-à-dire d’élévation. Dans la position d'évacuation de la presse, le caisson redescend entrainé par son poids. Le réglage de la vitesse de descente est effectué par une détermination convenable des orifices d'évacuation. Le refoulement de la charge est effectué au moyen d'un refouloir à chaîne actionné par un moteur Brotherhood à trois cylindres. L'ensemble de ce dernier mécanisme est porté par un bras de chargement fixé au berceau. $ 2. —- Tourelles allemandes. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les tourelles allemandes sont des tourelles-barbettes. Toutes les manœuvres sont hydrauliques, mais la pression normale de régime, qui est de 60 kilogrammes par centimètre carré, est obtenue au moyen d’une pompe électrique. Le refouloir télescopique est porté par un bras de chargement fixé au berceau et le chargement peut avoir lieu sous tous les angles. Nous décrivons plus loin un des dispositifs D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSÉS réalisés par Krupp à cet effet (Brevet allemand n° 400.090). Une presse hydraulique, placée sous la plate- forme, actionne le pointage vertical de la pièce par l'intermédiaire de bras articulés. Les munitions, hissées par un monte-charge débouchant sur le côté de la bouche à feu, sont dépo- sées dans un transbordeur qui les amène ensuite dans l'axe du canon. Celui-ci recule dans un ber- ceau en acier moulé, d’une seule pièce, portant à sa partie inférieure deux freins hydrauliques et un récupérateur à air comprimé. L'affüt repose sur une plate-forme recouvrant la chambre de ma- nœuvre el portant la coupole protectrice de la bouche à feu. Latéralement et à côté de la culasse débouche le monte-charge. Celui-ci est constitué par un puits F, dans lequel peut se mouvoir une cage porte- charge actionnée par un appareil de levage. Le puits Fest lié à la plate-forme C, au mouvement de laquelle il par- licipe. Le porte- charge consiste en une Caisse Ou- verte du côté du canon ; cette caisse est guidée dans son mouve- ment par les galets roulant directement sur la paroi du puits, d'une part, et sur les côtés d'un rail fixé à cetle même paroi, d'autre part. La charge élant supposée constituée par un projectile et deux gargousses, la caisse porte-charge comporte trois compartiments formés par des augets, dont le plus élevé reçoit le projectile, et les deux autres les deux demi-gargousses, celle d’arrière étant logée dans l’auget inférieur. Ces augets peuvent osciller chacun autour de deux tourillons logés dans les parois du porte- charge et dont les axes sont parallèles aux généra- trices de l'auget et perpendiculaires à celui des tourillons du canon. La surface de chaque auget est constituée par une partie cylindrique et par une partie plane se raccordant tangentiellement à la précédente du côté tourné vers la pièce. Les trois augels sont rendus solidaires par un jeu de tiges, constituant un parallélogramme articulé, de telle sorte que leurs parties planes restent constamment parallèles. Fig. 9.— Schéma de la disposition d'une tourelle allemande.— C, plate-forme ; F, puits du monte-charge: J, transbordeur; K, refouloirs: M, Caisson ; S, boite contenant un refouloir hydraulique et télescopique. Sous l'action de leur poids et de la commande P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS des tiges précédentes, les augets occupent une position telle que les parties planes de leurs sur- faces intérieures sont inclinées vers l’intérieur du porte-charge. Il est visible que, dans cette posi- tion, les éléments de la charge ne peuvent quitter d'eux-mêmes l’auget. D'autre part, la partie supé- Fig. 10. — Détails de la tourelle allemande. — F, puits du monte-charge; K, refouloir; M, caisson; P, bielles de manœuvre du caisson; T, auget recevant la douille. rieure du puits et le rail qui y est fixé sont établis concentriquement aux lourillons du canon. On peut done amener le porte-charge dans une posi- tion telle que les axes des trois éléments constitutifs de la charge seront parallèles à l'axe du canon, quel que soit l'angle de pointage de ce dernier. Le transbordeur J est installé entre la partie supérieure du puits du monte-charge et la culasse. Ce transbordeur est lié d’une manière rigide au berceau et constitue une boîte ouverte vers le puits du monte-charge; son fonds est en forme d’auget et sert à recouvrir la gargousse arrière logée dans l’auget inférieur du porte-charge. La gar- gousse avant et le projectile sont logés dans deux fonds intermédiaires, également en forme d’augets et solidement fixés aux parois du porte-charge. Les génératrices de ces derniers augets sont parallèles à l'axe du canon; leur surface est égale- ment constituée par une partie cylindrique et une partie plane. Celle-ci est inclinée vers le milieu des augets et se raccorde à leur partie cylindrique du côté de l'ouverture du puits du monte-charge. Un arrêt est fixé sur le transbordeur J, en saillie sur la cage de celui-ci; de son côté, l'auget supé- rieur du porte-charge porte une butée qui, dans le mouvement d'ascension de celui-ci,vient rencontrer l'arrêt. Par suite de cette rencontre, l’auget supé- rieur tourne autourde ses tourillonsetentraine dans le même mouvement les deux augets inférieurs. D'autre part, la position respective de l'arrêt et de la butée a été réglée de telle sorte qu'après achève- ment de la rotation des augets du porte-charge, leur position augulaire est telle que la partie plane de leurs surfaces entières est dans le même plan que celle des augets correspondants de J. Dans ces conditions, et sous la seule action de leur poids, les D'ARTILLERIE À BORD DES CUIRASSES 1029 éléments de la charge passent de l'augel occupé par eux dans le porte-charge dans l’augel corres- pondant du transbordeur. Une boîte fixée au berceau et placée entre les tourillons et le transbordeur J contient trois refou- loirs K formant râteau, à l’aide desquels les trois éléments de charge sont poussés de J dans un caisson fixé au berceau derrière le transbordeur. Ce caisson est ouvert sur la face en contact avec J et aussi sur la face opposée. Le récipient M peut osciller par rapport au ber- ceau du canon. À cet effet, il est organisé de la manière suivante : il comporte deux parois latérales planes et deux parois cylindriques reliant précédentes. Deux cloisons, en forme de gouttières, le divisent en deux compartiments, dont le premier sert à logerle projectile et l’autreles deux gargousses de la charge. Un rail m de section en V sépare les deux gar- gousses; il est maintenu par deux bras articulés pouvant tourner autour de pivots placés sur la paroi latérale du caisson M. Lorsque le râteau K à fait passer la charge du transbordeur J dans M, ce rail occupe une position telle qu'une des branches du V disposée en augel sert de support à la gargousse d'avant. Des ressorts spirales tendent à faire tourner les bras articulés dans le sens représenté par la flèche. Cette rotation est d'ailleurs limitée par deux arrêts à deux posi- tions extrêmes. L'une de celles-ci correspond à les — M, cais- Fig. 11. — Dispositif de manœuvre du caisson. 3 P, bielle; son; m,' rail de section en V; »,, coulisse: T, auget. l'effacement complet du rail dans une rainure de la paroi de M au travers de laquelle peuvent passer les bras articulés; dans cette position, le rail peut ètre verrouillé. Par l'intermédiaire des coulisses 2, 2, et des 1030 bielles P, dont l'axe de rotation est fixé au berceau, le caisson M peut tourner autour des tourillons lixés au berceau et en même temps se déplacer parallèlement à l'axe du canon. Un encliquetage manœuvré à la main permet d'assurer le caisson M contre tout déplacement parallèle à l'axe du canon effectué à l'aide d’un glissement sur les coulisses. Le refouloir hydraulique et télescopique est placé dans une boite S fixée solidement au berceau par un bras passant en dessous du récupérateur. Un auget T, destiné à recevoir la douille de la gargousse après éjection, oscille par rapport au bâti supportant le récipient M. Son mouvement d'oscillation est commandé par un système de bras et de biellettes, de telle manière que l’auget aban- donne la douille dès que le chargement est commencé. Dans les deux positions angulaires qu'il peut occuper, l’auget T se trouve en dehors du chemin parcouru par le canon pendant son recul. Ceci posé, le fonctionnement du système est le suivant : Le porte-charge étant chargé dans la chambre de relais, on le fait monter dans le puits F. Au cours P. BOURGOIN — LES INSTALLATIONS D'ARTILLERIE A BORD DES CUIRASSÉS de cette ascension, il bute contre l'arrêt du trans- bordeur; par suite de cette butée, ses augets oscil- lent et vident leur contenu dans ceux du transbor- deur. Après quoi, le monte-charge redescend. Le caisson Mélant dans la position verticale de chargement, la manœuvre du râteau fait passer la charge du transbordeur dans le récipient M, On fait ensuite tourner M, en le rabattant vers la culasse : ce mouvement, facilité par le poids du caisson chargé, est limité par des butées placées près des tou- rillons du système formé par le caisson et ses articu- lations. Dans la position de rabattement extrême, le projectile est amené à sa position de chargement par l'action du refouloir. L'encliquetage étant dégagé à la main, on fait mouvoir le caisson à bloc sur les coulisses et on refoule la première gargousse, la deuxième étant maintenue par le rail en V; celui-ci abattu, la gargousse vient se placer d'elle-même en face de la culasse et est. refoulée à son tour. Après quoi on ramène M dans. sa position verticale. P. Bourgoin, Ingénieur en chef d'Artillerie navale, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 1031 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Dingeldey (Friedrich). Professeur à l'Ecole techni- que de Darmstadt. — Sammlung von Aufeaben zur Anwendung der Differential und Integralrech- nung (RECUEIL DE PROBLÈMES RELATIFS AUX APPLICA- TIONS DU CALCUL DIFFÉRENTIEL ET INTÉGRAL). — Première partie: Calcul différentiel. — 1 vo/. de 1v-202 pages. {Prix : 7 fr. 50.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1910. Les recueils d'exercices de Calcul infinitésimal sont assurément nombreux et concus pour des buts divers. Le présent ouvrage vise avant tout à montrer combien nombreuses sont les applications qu'on peutemprunter aux domaines exclusivement pratiques des sciences physiques, mécaniques et même naturelles. Ainsi, c'est la théorie mécanique de la chaleur qui illustre, par ses premiers théorèmes, le chapitre des Différentielles de Fonctions. De même, les applications de l'étude des Maxima et Minima sont tirées d’autres domaines physi- ques nombreux : densité de l’eau, transports minima, vitesse des cours d'eau, résistance des matériaux, construction de routes, disposition des rayons dans le prisme, etc. A cet égard, le livre de M. Dingeldey présente un intérêt certain pour le physicien et surtout pour le technicien. La disposition en paraît heureuse : en tête de chaque chapitre sont rappelées, sans démonstra- tions, les règles et formules nécessaires, et toutes les solutions sont données, quelques-unes avec les détails utiles aux commencants et des notes historiques. E. Druouis, Professeur à l'Ecole professionnelle de Genève. Combebiace (G.), Chef de Bataillon du Génie, Doc- teur es Sciences mathématiques. — Les actions à distance. — 1 vol. in-8° de 89 pages. Collection Seientia. (Prix 2 fr.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1910. Exposer de la manière la plus directe le bilan des résultats obtenus dans l'étude des actions qu'exerce le mouvement d'un fluide incompressible, soustrait à toute force ‘extérieure, sur des sphères qui y sont immergées, — et cela en s'inspirant des ouvrages de V. Bjerkness et d'A. Korn, — tel est le principal objet de ce petit livre. L'emploi de la notation vectorielle des quaternions a permis de condenser singulièrement la rédaction, et c'est un nouvel exemple de l'utilité de ce symbolisme, comme de ses rivaux. À ce propos, il est regrettable que les tentatives faites en mainte parlote depuis quelques années pour unilier les notations vectorielles n'aient pas mieux réussi que les essais de langue uni- verselle. Cette unification déciderait peut-être les mathématiciens français à user plus sobrement de ce cumbrous apparatus ol Mr. Cartesian si bien carica- turé par sir Robert Ball dans sa dynamical parable. Comme les mouvements envisagés du fluide sont supposés irrotationnels et que la viscosité est rarement compatible avec de tels mouvements, les résultats de la présente étude n'ont guère qu'un intérèt spéculatif. Ils ont donné lieu cependant à d'intéressantes expé- . riences de C. A. Bjerkness sur les sphères pulsantes, auxquelles, il y a vingt ans déjà, M. Poincaré faisait une place dans notre enseignement, et qui fournissent un exemple de corpuscules s'attirant en raison inverse du carré de la distance. Des sphères oscillantes en accord exercent entre ET INDEX elles des actions analogues à celles qu'on observe entre des aimants élémentaires, mais opposées à celles-ci. Quant aux propriétés des corpuscules peu compressibles plongés dans un fluide incompressible, elles ont fourni à M. Korn une explication mécanique de la gravitation qui n'est pas toutefois sans soulever de graves objectisns. Le commandant Combebiac examine aussi l’action exercée par un fluide sur un anneau très délié, et cette étude conduit, comme on sait, à des analogies avec les phénomènes électrodynamiques. ; Quelle est la valeur de ces analogies au point de vue scientifique? Ne serviraient-elles qu'à montrer qu'une conception mécaniste des actions à distance n'est pas à rejeter à priori, ce serait déjà beaucoup. Quant à y voir un progrès dans la connaissance des causes, ce serait uneillusion. Ces considérations amènent l'auteur à rompre quelques lances contre M. Duhem et son agnosticisme; petite polémique qui est un signe du temps présent : le cours des « actions » du mécanisme remonte sensiblement. A. ROULANGER, Répétiteur à l'École Polytechnique. Dorcel (René). — Les Hélices de canots automo- biles. — 1 vol. in-8° de 127 pages. (Prix : 3 fr. 35.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. La première partie de cet ouvrage est un exposé sommaire de la théorie des hélices, dite théorie de Drzewiecki. La seconde, plus personnelle à l’auteur, contient des recettes isolées pour la détermination des divers éléments des propulseurs hélicoïdaux. Ces recettes peuvent, en certains cas, être appliquées avec succès dans la pratique courante, mais elles risque- ront de se trouver en défaut dès que les conditions du fonctionnement des hélices s'écarteront des conditions habituelles. 2° Sciences physiques Chwolson(0.D.), Professeur à l'Université de Saint- Pévershourg. — Traité de Physique, traduit sur les éditions russe et allemande par M. E. Davaux. 7.111, fascicule 2 : Thermodynamique générale. Fusion. Vaporisation. — 1 vol. 1n-8° de 336 pages avec °06 figures. (Prix : A1 (r.). Librairie scientifique A. Hermann et fils. Paris, 490. Ce nouveau fascicule du grand Traité de Chwolson est consacré à la Thermodynamique et à ses applica- tions. Dans un premier chapitre, l'auteur expose les deux grands principes de la Thermodynamique, celui de Meyer-Joule, d’où dérive la notion d'équivalent mé- canique de la chaleur, et celui de Carnot-Clausius, d'où dérive entre autres la notion de l’entropie. Puis il envisage les applications de la Thermodynamique aux phénomènes antérieurement étudiés et au cas gé- néral du passage d'une substance d'un état à un autre (fusion et solidification, vaporisation et liquéfaction). Mauduit (M. A.), Ancien Elève de l'Ecole Polytecl- nique. — Électrotechnique appliquée : Machines électriques (théorie, essais et construction). Cours professé à l'Institut électrotechnique de Nancy. Pré- face de M. A. BLoxpez. — 1 vol. 25 X°16 de 930 pages avec 566 figures. (Prix : 25 fr.) H. Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1910. L'ouvrage de M. Mauduit est une nouvelle édition de celui paru en 1904 et qui, déjà, avait été universelle- ment apprécié. Les progrès si rapides de l'industrie 1032 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX électrique, les transformations et perfectionnements apportés dans la construction des machines électriques rendaient nécessaires des modifications et des complé- ments, que l’auteur a donnés avec sa précision et son éclectisme ordinaires. M. Mauduit a cette qualité, assez rare pour un technicien, de faire accueil sans parti pris à toutes les théories d'origines les plus diverses, françaises ou étrangères, pourvu qu’elles aient une valeur pratique. Lorsqu'une question peut être envi- sagée à plusieurs points de vue différents, il présente contradictoirement et successivement les différentes méthodes d'essai, de raisonnement et de calcul, lais- sant à ses lecteurs le soin de contrôler l’une par l’autre. C'est ce qui rend particulièrement intéressantes les études si consciencieuses faites par M. Mauduit sur les alternateurs, les transformateurs statiques, les moteurs synchrones et asynchrones. L'emploi des diagrammes, l'exposé des travaux de son éminent collaborateur, M. Blondel, contribuent à la clarté des théories et à l'intérêt que présente cet ouvrage pour tout spécialiste. G. DE LAMARCODIE, , Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique Industrielles. Masselon, Cillard et Roberts. — Le Celluloïd. (Fabrication. Applications. Substituts.) — 1 vol. in-8° de 630 pages et 7 planches. (Prix : 20 fr.) Cil- lard, éditeur. Paris, 1910. : Nouveauté relative de l’industrie, secrets ou pseudo- secrets jalousement gardés par les fabricants, ces raisons font que, malgre le développement très impor- tant pris par les technologies du celluloïd, il n'existe encore que très peu de publications les concernant. Nous n'avons, en français, que la traduction de l’opus- cule de Boekmann, très succinct, datant déjà, et dont les inexactitudes témoignent que, non praticien, l’au- teur s'est trop exclusivement documenté sur les publi- cations de brevets, source toujours fort suspecte. Aussi doit-on féliciter les auteurs du présent ou- vrage de leurinitiative. L'un, ingénieur-chimiste d'une fabrique de celluloïd, a apporté la note pratique indis- pensable à ces sortes d'études ; tous ont su judicieuse- ment mettre à profit les publications antérieures, — volumes, articles de revues et brevets français et étrangers, — pour faire un ensemble très complet. Après un exposé sommaire de l’origine et des pro- priétés du celluloïd, les auteurs étudient la chimie des nitrocelluloses, la pratique de la théorie des pro- cédés de nitration, puis le blanchiment, le séchage et, enfin, le mouillage et le malaxage avec l'alcool camphré. Les chapitres suivants traitent de la coloration, du laminage, de la compression, du coupage, du séchage et du polissage, traitements que subit la masse cellu- losique pour être amenée à l’état marchand. L'orga- nisation générale de l'usine, le contrôle chimique des opérations par le laboratoire, les méthodes d'essais du celluloïd forment autant de chapitres terminant la première partie du volume. La seconde partie est consacrée au travail du cel- luloïd : on y décrit les méthodes employées pour la fabrication des peignes, des manches de cannes et de parapluies, des corps creux, du simili-linge, des boutons, des films, ainsi que la préparation des vernis et des apprèts pour tissus imperméables ou imitant le cuir. Enfin, la dernière partie est une monographie consacrée aux celluloïds incombustibles et aux divers succédanés du celluloïid. Au cours de ces dernières années, en effet, on est parvenu à supprimer le grand inconvénient du produit par divers moyens; on peut remplacer le camphre par son imitation synthétique ou différents autres substituts moins inflammables et, au demeurant, souvent meilleur marché; on peut ajouter aux masses plastiques d'assez forts pourcen- tages de matières azotées telles que la maiïsine, ou même n'employer que ces derniers produits (gala- lithe); on peut, enfin, remplacer le celluloïd par des sels cellulosiques : xanthate (viscose) et acétates. Peut-être doit-on adresser aux auteurs une légère critique. Certaines questions les intéressant particu- lièrement, ou pour lesquelles il existait des travaux qu'ils ont simplement reproduits, — par exemple, étude des bains de nitration, emploi du dynamomètre Breuil, du réfractomètre Zeiss, — eussent gagné à être un peu moins longuement exposées. Mais il est vrai que, l'ouvrage s'adressant surtout aux techniciens spé- cialistes, c'était sans doute un service à leur rendre que d’être le plus complet possible, ce qui évite de renvoyer à des travaux originaux parfois difficilement accessibles. Si les chimistes et techuiciens des industries chi- miques de la cellulose, — et celles-ci sont maintenant nombreuses, de la fabrication des pyroxyles pour ex- plosifs à celles du celluloïd et des soies artificielles, — doivent posséder le nouvel ouvrage, tous les savants et curieux de science seront intéressés à le lire : ils y trouveront les renseignements les plus détaillés, illus- trés de nombreuses gravures, et complétés de nom- breuses indications bibliographiques sur une de nos industries chimiques dont le développement fut le plus considérable et le progrès le plus rapide. H. Rousser. 3° Sciences naturelles Cayeux (L.), Professeur de Géologie à l'Ecole supé- rieure des Mines et à l’Institut agronomique. — Les Minerais de fer oolithique de France, fase. I. Minerais de fer primaires. — 1 vol. in-4° de 294 p. avec19 pl. Imprimerie Nationale (Ministère des Tra- vaux publics), Paris, 1910. L'étude des minerais de fer oolithique est excessi- vement complexe, à cause des modifications nom- breuses subies par les dépôts, variant d'un gisement à l’autre; mais, malgré les difficultés qu'elle présente, M. Cayeux a considérablement augmenté nos connais- sances sur cet intéressant sujet. L'auteur, qui s’est déjà occupé, avec beaucoup de succès, de l'étude micros- copique des roches sédimentaires, a consacré le pre- mier fascicule de ce grand travail à celle des minerais siluriens et dévoniens. Il a étudié avec détail, aux points de vue géologique, chimique et surtout minéralogi- que, les minerais siluriens de la Basse-Normandie et du Maine (May-sur-Orne, Saint-Rémy, Ferrière-aux- Etangs, Mont-les-Geraume, La Patricière), de l’Anjou, de la Bretagne, les minerais dévoniens de l'Hermitage (gerinniens), de Dielette (coblenziens), de l'Ardenne franco-belge. La description, très complète. est accom- pagnée de cartes géologiques, de croquis, de coupes et de magnifiques héliogravures, reproduisant les photo- graphies de préparations microscopiques caractéris- tiques, qui facilitent singulièrement la lecture du texte. Le minerai est habituellement formé d’oolithes et du ciment les englobant. L’oolithe est constituée par un noyau qui a servi de centre d'attraction et par une enveloppe corticale. Ce noyau peut être tout à fait étranger à l'oolithe et être un corps quelconque, mi- néral ou organique, et même un fragment d'une autre oolithe. La composition minéralogique de l'enveloppe est aussi très compliquée, tous les minéraux existant dans le minerai pouvant contribuer à le former et lui donner ainsi un faciès particulier. D'après la structure, la composition minéralogique et les particularités que présentent actuellement les oolithes, M. Cayeux a cherché à remonter à leur compo- sition première, à leur mode de formation et à déter- miner les modifications diverses qu’elles ont subies, leur déformation et leur destruction. Il n'est pas possible de suivre l’auteur dans toutes ses observations et considérations; je me borne à indiquer quelques résultats. Les éléments des minerais se sont déposés dans une eau très agitée. Le fer se trouve sous les états suivants : 1° fer oxydé anhydre ou hydraté (magnétite, oligiste, martite (rare), hématite rouge, hématite brune et BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX rôthite); 2 fer carbonate (sidérose); 3° fer silicaté hlorite, variété bavalite). Près de la surface seule- ment apparaissent la limonite et la pyrite qui sont d'origine secondaire. La sidérose, l'hématite rouge, la chlorite et parfois aussi la magnétile sont les minéraux essentiels, mais c’est la sidérose qui est théoriquement l'espèce fondamentale des minerais primaires, le mi- néral dont dérivent les autres. Sa genèse est assez compliquée; elle comporte au moins trois temps bien distincts : 1° développement de la sidérose de l’enve- loppe corticale des oolithes et exceptionnellement des nucléus; 2 formation des nucléus de sidérose pure ; 30 remplissage des fentes par du fer carbonaté. La genèse de tous les autres minéraux est aussi exa- minée. Pour le quartz, l'auteur est conduit à admettre que, puisque ce minéral s’est substitué à la sidérose, il en résulte une diminution progressive du premier en profondeur, compensée par un enrichissement équi- valent en fer carbonaté. Le carbonate de chaux, rare dans les minerais siluriens, est fréquent dans les mine- rais dévoniens. L'évolution minéralogique des oolithes est la suivante : D'abord carbonatées, elles sont deve- nues chloritées etse sont ensuite hématisées. Le ciment et les fossiles ont suivi, mais avec un temps inégal, les mêmes évolutions que les oolithes. La magnétite est due aux actions métamorphiques. L'auteur étudie longuement le rôle des Gtrvanella (algues), organismes perforants et parasites, et fait remarquer les différenres entre les minerais siluriens et dévoniens : les premiers sont plus oolithiques que les seconds, qui sont partiellement ou totalement orga- nogènes. Je cite en terminant les vues de l’auteur sur le pro- longement des couches ferrifères de la presqu'île armoricaine sous le bassin parisien : conclusions très intéressantes au point de vue économique. « Le mine- rai oolithique doit s'étendre bien loin sous le bassin de Paris, si l'opinion que j'ai exprimée sur la nature première des dépôts ferrugineux est conforme à la vérité. Il y à même une raison de supposer que son épaisseur est susceptible d'augmenter graduellement, mais jusqu'à une distance inconnue. Je suis guidé en cela par l’idée théorique suivante : les minerais déri- vent des calcaires... Si mon hypothèse est fondée, les gisements connus ne sont, dans leur ensemble, que l'extrémité ou, si l’on veut, l'amorce de gites qui ont leur principal développement sous le bassin de Paris. » PAUL GAUBERT, Docteur ès Sciences, Assistant au Muséum national d'Histoire naturelle. Maiden (J.-H.), Directeur des Jardins botaniques de Sydney. — The forest flora of New South Wales (La FLORE FORESTIÈRE DE LA NOUVELLE GALLES DU Sup), publié par autorité du Gouvernement de la Nou- velle-Galles du Sud. — % vol. in-k d'environ 200 pages avec planches. (Prix : 12 fr. 50 le volume). Sydney, 1903-1910. Depuis que le cri d'alarme concernant la disette prochaine des bois a été jeté, nous en sommes arrivés à nous intéresser, bien plus qu'autrefois, à la produc- tion forestière mondiale. C'est pourquoi la publication du monumental ouvrage de Maiden ne saurait nous laisser indifférents, surtout lorsqu'on se rappelle qu'à part le Canada, les Etats-Unis et la Russie, aucun Etat du monde ne possède une plus grande surface boisée que l’Australie. Les régions les plus riches en bois sont celles situées à l’est et au sud, la Tasmanie comprise, et dans le sud- ouest. Dans l'est, c'est sur la crête des montagnes et sur le flanc qui fait face à la mer que la végétation est la plus active, tandis que dans le sud-ouest elle est surtout remarquable entre la mer et la chaine de montagnes «ligne de partage des eaux » et, en deça du pied de la chaîne, jusqu'à plusieurs milles dans l’'inté- rieur. Les coilines qui entourent Adélaïde, les pénin- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 1033 sules de York et d’'Eyre et le district de Kimberley sont très boisés. 11 existe aussi des forêts d'une étendue considérable dans le Northern Territory el dans les régions situées près du golfe de Carpentarie. Comme on le voit, les forêts se trouvent dans les régions littorales et assez avant dans les terres; par contre, toute la côte à l’ouest et au nord-ouest, ainsi que l’intérieur du continent, sont dépourvus de vegé- tation arborescente et présentent l'aspect morne des solitudes désertes des climats sans pluies. Il faut dire à ce propos que, même dan, les régions où croissent les gigantesques forêts d'Eucalypius, l'homme ne trouve pas là l'ombre et la fraicheur de nos bois touffus. On sait, en effet, que l'Eucalyptus se protège contre une radiation trop intense en orientant ses feuilles raides, en lame de sabre, parallèlement aux rayons du soleil; aussi leur couvert est-il des plus décevants pour le voyageur qui y cherche vainement un abri contre un soleil parlois implacable. Ce fait eût donné à réfléchir aux partisans de la théorie anthropocen- trique s'ils l’'eussent connu. On ne peut parler des bois d'Australie sans insister sur les Eucalyptus, qui forment le fond de la végéta- tion ligneuse et qui constituent des arbres à la fois extraordinaires et précieux. Tout le monde sait que ce sont les géants du règne végétal, pouvant atteindre 150 mètres de hauteur, et qu'à ce titre ils ont détrôné lès célèbres Séquoiïa ou big tree de la vallée de Mari- posa en Californie. A ce sujet, l'histoire de leur décou- verte est caractéristique : en 1791, le naturaliste La Billardière, qui faisait partie de l’exp:dition envoyée à la recherche de La Pérouse sous le commandement de d'Entrecasteaux, fut frappé de l'aspect très spécial des forêts des côtes de la Terre de Van Diémen (Tas- manie). Il se fit débarquer et se trouva au milieu d’ar- bres géants dont les premières branches étaient à plus de 60 mètres du sol; le naturaliste, d sireux de recon- naître quelques caractères de ces végétaux extraordi- naires, ayant vainement essayé d'y arriver à l’aide de sa longue vue, dut recourir aux balles de sa carabine pour abattre quelques rameaux fleuris. Il nomma l'arbre Æucalyptus globulus. On sait quelle à été la fortune de cet arbre, que l’on a acclimaté dans le Midi de l’Europe dans la région de l'Oranger, en Algérie, ainsi que dans i Amérique du Nori, l'Inde et l'Afrique du Sud. Il rend partout de grands services en provo- quant, par sa végétation très rapide, l'assèchement de marais insalubres. Cependant l’£ucalyptus globulus n'est pas l'essence la plus précieuse des forêts de l'Australie; les espèces d'Eucalyptus qui donnent le meilleur bois sont (par ordre d'abondance) : le Jarrah (Æ. marginata), le Karri (£. versicolor), le Tuart (£. Gomphocephalus), etc.; il y a plus de 150 espèces d'Eu- calyptus, dont F. von Mueller a établi la liste et dont Maiden, l’auteur de la flore dont nous parlons ici, vient d'achever une très considérable « revision ». Ces Eucalyptus possèdent un bois très compact, à grain; fin ils sont très durables, d'une résistance remarquable, et leur poli en fait des bois aussi beaux que l’acajou; aussi les Anglais, qui l'emploient beau- coup, le désignent-ils sous le nom de Mahogany (acajou). !l faut se promener dans le Museum IIL des admirables Xew (Gardens, consacré entièrement aux bois, ainsi que dans les galeries du Musée colonial de l'Ampérial Institute de Londres, pour se rendre compte de l'importance du matériel ligneux que peuvent fournir les Eucalyptus. On y voit de gigantesques sec- tions ou plateaux admirablement polis; et les grands meubles et vitrines de ces expositions permanentes sont faits, en ce qui concerne l'Australie, avec ces bois indigenes. Les usages des Eucalyptus, en Europe même, sont fort nombreux. On pourra les trouver décrits dans notre livre : Les bois industriels (0. Doin, 1910). Siles Eucalyptus sont les essences les plus intéres- santes d'Australie, ils ne sont pas cependant les seuls représentants de la végétation arborescente : on Y 24°* 103% trouve des Protéacées, généralement de petite taille, | des Aragias et des Mimosas dont on exploite l'écorce riche eu tanin, des WMelaleuca, des Casuariua, quel- ques Conifères : Cullitris, Arauearia. Maiden évalue à 450 le nmbre des espèces d'arbres de la Nouyelle- Galles du sud. Parmi ces espèces, quelques-unes méritent une men- tion spéciale : le /ysoxylum Fraseranum (Mélhacées ou /tosewood; le Cedrela australis (Méliacées) ou « Cedar », bois très précieux voisin de l’acajau; le Syucarpia laurilolia ou Turpentiue (Myrtacées), dont le bois, qui laisse exsuder une abondante oléo-résine, est propre à toutes sorles d’usages en tant que bais d'ébenisterie et de service; divers Santalum où Fasanus (Santalacée-) donnent le Saudalwood parfumé, dont on extrait par distillation une huile odorante précieuse. Quoique de grandes quantités de bois soient utilisées sur place, tant pour la construction que comme bois à brüler, l'exportation est considérable et se répartit entre presque tous les pays du monde. Si extraordi- naire que cela puisse paraître, l'Australie importe annuellement pour une somme allant jusqu'à 20 anil- lions de francs de bois provenant surtout de la Norvège et des Etats-Unis. Cela tient à ce que les bais indi- gènes ne sont pas adaptés à tous les usages. Quoi qu'il en soit de cette richesse forestière, comme dans beaucoup d'autres contrées malheureusement, une exploitation abusive a amené une diminution de la production. Les besoins augmentant de jour en jour et la croissance des arbres ne pouvant suflire à y taire face, — il faut cinquante ans à un Eucalyptus pour arriver à malurilé, — on à pris sur le fond de réserve qui s'épuise. Cet élal de choses est trop préjudiciable aux intérêts du pays pour ne pas avoir attiré l'atten- tion des Gouvernemepts; aussi chaque Etat s'est-il yu dans l'obligation de créer un Département spécial s'occupant exclusivement des questions forestières. C'est saus doute de préoccupations de cet ordre qu'est né l'important travail de Maiden, publié d'ail- leurs par autorité du Government of the State of New South Wales. L'ampleur donnée à cet ouvrage, son volume, l'abondance des planches, attestent les puissantes ressources dun Gouvernement servant d'éditeur. Il comprend quatre volumes in-4° de 200 à 250 pages, ornés de 40 à 60 planches hors texte chacun. Chaque arbre décrit l’est avec un luxe de détails, un soin typographique des titres de paragraphes qui font de ce travail, en mème temps qu'un ouvrage scienti- fique, un livre de haute vulgarisation. Chaque espèce décrite fait l’objet d'une monographie étendue. Le genre est d'abord bolaniquement caractérisé; c’est ensuite au tour de l'espèce pour laquelle sont donnés : les noms botaniques, avec la synonymie dont il est fait un exposé historique; les noms vernaculaires; les noms indigènes; les caractères botaniques avec para- graphes ayant leurs titres spéciaux pour la corolle, les anthères, l'ovaire, le style, le fruit, la graine, l'inflo- rescence, la feuille, l'écorce qui si souvent sert aux forestiers pour reconnaître un arbre; le bois est étudié à fand sinon au point de vue anatomique, malheureu- sement passé sous silence, mais en ce qui concerne ses caractères ma-roscipiques, ses propriétés et usages et le mode d'exploitation, les exsudats, si l'arbre en produit, les dimensions, l'habitat et la propagation. Chaque essence comporte au moins une planche repré- sentant un rameau fleuri ou fructifié, et, dessinés dans tous leurs détails, des fleurs et fruits plus ou moins disséqués. On y trouve, en outre, de nombreux docu- ment: photographiques donnant le port des arbres, las- pect de l'écorce, des scènes d'exploitation du bois et mème de grands paysages auxquels les troncs blancs, droits et élancés des Eucalyptus donnent une esthé- tique à la fois élégante et froide. Nous retrouvons dans cet ouvrage l'information large, la beauté des documents photographiques, le sens didactique très sûr et très avisé, la richesse d’édi- tion, trahissant l'ampleur des budgets, que nous avons BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX admirés et enviés dans plusieurs productions de pays de langue anglaise concernant leurs richesses fores- tières : en première ligne les expositions du Museum of Natural History de Londres, les publications de Hough sur les bois des Etats-Unis et du Canada, etc. S'il fallait absolument attribuer une ombre au tableau, nous regretterions que le grand ouvrage de Maiden, dont le but est en somme de favoriser exploitation dés bois, ne donne pas, à côté de tous ses documents gra- phiques. des photographies, et surtout des micropho- tographies de coupes de hois. Ce sont là, comme on le sait, des sources de renseignements extrêmement utiles pour permettre de prévoir les usages auxquels ils pourro (s'adapter. Tel qu'ilest, ce travail fait honneur à l'esprit pratique et méthodique des Gouvernements du Commonwealth australien. J. BEAUVERIE, Chargé d'un cours de Botanique appliquée à la Faculté des Sciences de Lyon. 4° Sciences médicales Jungano (M.) et Distaso (A.), de / Institut Pasteur. — Les Anaëérobies.— | vol. iu-8 de 228 pages avec 58 figures. Préface de M. Mercanrore. (Prix : 5 fr.) Masson et Ci*, éditeurs. Paris, 4910. L'étude des microbes anaérobies s'est longtemps limitée à quelques espèces, comme le vibrion septique etle bacille tétanique ; mais, dans ces dernières années, de nombreuses recherches ont permis de constater que l'expansion des anaérobies est considérable et qu'on les rencontre dans les circonstances les plus diverses. Aussi élait-il nécessaire de coordonner les notions actuellement acquises, de manière à faire connaître le chemin déjà parcouru et à faciliter le travail de cha- cun; c'est à ce besoin que répond le livre de MM. Jun- gano et Distaso, livre qui a sa place marquée dans tous les laboratoires. Après un premier chapitre consacré à la technique, surtout aux procédés de culture, les auteurs étudient le rôle des anaérobies, tout d'abord dans les fermenta- tions, puis dans la pathologie humaine; cette dernière partie est, à juste titre, traitée en détail, chaque appa- reil étant étudié séparémeut (appareil digestif, appa- reil urinaire, etc.). Vient ensuite la description des espèces, que les auteurs classent en quatre groupes : bacilles protéolytiques, bacilles peptolytiques, spi- rilles, cocci. Signalons, parmi les bacilles protéoly- tiques, les groupes du perfringens, du vibrion septique, du botulinus, du tétanos; parmi les bacilles peptoly- tiques, le groupe de bacille butyrique. Pour chacune des espèces, les auteurs font connaître tous les carac- ières requis pour la différenciation : morphologie, cul- tures, propriétés chimiques et biologiques, etc. Ce manuel, très complet, rendra les plus grands ser- vices à ceux qui voudront désormais s'occuper des microbes anatrobies, — et on sait qu'à l'heure actuelle aucun bactériologiste n’a le droit de les ignorer. D' E. SAcQUÉPÉE. 5° Sciences diverses Dupuis (A.),, Ancien professeur à l'Ecole d'Arts et Métiers d'Angers, et Lombard (l.), chef d'ateliers à l'Ecole d'Art et Métiers de Lille. — Cours de Dessin industriel. — 3 vol. in-8°, dont 2 vol. de texte de vii-314 pages avec 673 fiqures et20 planches, et 1 atlas de 32 planches. (Prix cartonnés : 15 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs Paris, A0. Le Cours de dessin industriel de MM. Dupuis et Lombard comprend trois parties. Dans les deux premières, les auteurs ont donné les principes et conventions qui régissent le dessin industriel, la technique du dessin industriel proprement dit; dans la troisième, ils ont réuni une série de planches classées d'une facon progressive d’après les difficultés d'exécution. ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 1045 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 5 Décembre 1910. M. L. Lecornu est élu membre de la Section de Mécanique. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. E. Gau étudie l'intégration, par la méthode dé M. Darboux, d'une équalion aux dérivées partielles du second ordre quel- conque. — M. T. Lalesco présente quelques remarques sur les pôles des noyaux résolvants. — M. H. Villat, étudiant les mouvements d'un fluide autour d'un obs- tacle de forme donnée, est parvenu à introduire une nouvelle fonction arbitraire, reliée intimement à la forme de l'obstacle, et au moyen de laquelle s'expri- ment tous les éléments du mouvement. — M. G. D. Boerlage insiste sur l'épaisseur du bord antérieur de l'aile chez les oiseaux, sur les toufbillons aériens qui se forment sous l'aile, qu'ils soutiennent par leur résis- tance à la déformation et dont ils favorisent la pro- gression par leur roulement sur l'air situé en dessous. — M. Lambert présente une nouvelle fornie des équa- tions du mouvement d'üne petite planète. — M: Bor- relly et M. Coggia adressent leurs observations de la comète Cerulli-Faye, faites à l'Observatoire de Mar- seille. 20 ScrENCES PHYSIQUES. — M. G. Lippmann a réalisé des contacts électriques efficicés Sans pression, en employant d'un côté un métal, de l’autre une bande de päpier itibibée d'une solution d’un électrolyte (CaCP, par exemple). Le contact platiné-mefcuré n’est pas efficace sañs pression. — M. G. Gouy, étudiant le potentiel de décharge dans lé Champ mägnétique, a réconnu que le champ multiplie le potentiel par un facteur N d'autant plus grand que 16 faisceau magnéto- cathodique est plus raccourci. — M. M. Chopin mesure en valeur absolue les courants de grande intensité au inoyen d'une boussole des tangentes réduite à üne seulé spire de grand rayon excentrée par rapport au cadre. En ädjoignant à la composante horizontale du magnétisme terrestre uné Composante artificielle de grandeur connue dirigée dans lé même sens, of ratnène la déviation vers l’ängle dé 7/4 pour leqüel l'erreur est minimuin. — M. P. Jégou décrit l'appareil qu'il a réalisé pour la réception de lheure transmise deux fois par jour par la Tour Eiffel. — M. Br. Glatzel, en faisañit passer les éliicelles dans l'hydrogène entre des éleclrodes de nickel et choisissant convenable- ment les autres conditions de l'expérience, est arrivé à un amiortissement parfait dans le circuit primaire de l’excitateur d'ondes hertziennes. — M. F. Charron a poursuivi ses recherches sut les modifications 4ppor- tées par l'air dans le frottement de glisséiient entre corps solides. — M. L. Décombe propose une nou- véllé rélation exprimant le principe de Carnot-Clausius pour les transformations compensées. — M. R. Mar- celin donne une règle quantitative qui permet de pré- voir les vitesses de transformation des phénomènes irréversibles en fonction des variations de l'énergie utilisable, et une formule permettant de prévoir ces vitesses ën fonction des valeurs de l’affinité chimique. — M. Tian montre que la décomposition de H*O* par la lumière est une réaction uñimoléculaire ; l’action dé la lumière est tout à fait différente de celle de la chaleüt ; elle paraît änalogüe à celle d'ut catälyseur. — M. E. A. Salmon décrit un procédé pour faire réagir deux corps dans l'arc électrique: où fait jaillir Farc entre deux électrodes percées d'ün canal suivant leûr axe, tandis que le gaz arrive par l'un dés canaux &t que lës produits de la réaction S'échappent par l'autre. Il à pu ainsi combiner C et A7. — MM. À. Besson tr! L. Fournier, en faisant réagir HBr sur Si amorphe au rouge, oùt übltehu SiBr', SiBi®H, SiBr‘H* et SiBrHf. L'action de l'elffluve éléctrique sur SiBr*H donne SiBr!, SitBre, F:95°, SitBr', F:1339, et Si‘Bitt; F:1855: — M. À. Verneuil, par l'analyse d'un cértain nombre de säphirs exenipts de gängue él d'inclusions, ÿ à reconnu la présence conslätite;, à côté du fer, d'ühe faible quär- lité d'acide litänique. C'est à ces deux constitudnts qe le saphir oriental doit sa belle coloration bleue. — NM. L. Tehougaëe el W. Fomin montrent que les trois carbures oblenus par hydrogénation modérée {avec le noir de Pt) des thuyènes 3 ét 8 et du säbinène corres- pondénht à lä même formule CH et possèdent dés propriélés physiques presque idettiques. Ils doivent donc constituer tous trois le même thuyane: — M: G. Denigées décrit une nouvelle réaction de la morphine, basée sur la coloration rose à rouge intense qu'elle donne avec H°0*, AzH* et une goutte de solution de sulfate de cuivre. — MM. G. Bertrand et A. Compton ont constaté que la température optima d'action de la cellase est voisirie de #69; la céllase coimence à se détruire vers 60° et l'est complètement à 75°. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Doyon signäle là pos- sibilité de faire apparaitre l’antithrombine dans le foie préaläblément congelé à une températüte iñférieüre à celle dé la solidification du mercure: — M.G. Lemoine a observé dans l’aor{e atliéromateuse la formation d'un dépôt relativement considérable de composés choles- tériques. — MM. Melchissédec et Frossard montrent que le chanteur peut donner facilement un beau son sur une note tenué s'il mobilisé ses muscles ëh päs- sant sans arrêt de la plus petite à la plus grande ouverture buccalé compatible avec le Son à émettre; dans ces conditions, la fatigue est minima pour un travail donné. — MM. A. Laveran el A. Pettit ont découvert, dans le sang du Väamonia subtrijuga, une hémogrégarine nouvelle, qu'ils nomment 4. Pellegrini. — M. H. Coupin a étudié l'influence de diverses sub- stänces volatiles sur les végétaux supérieurs; en général; ceux-ci supportent quelque temps des atmo- sphères qui seraient asphyxiantes pour les änimaüx. — M. Ed. Griffoñ à expérimenté l'influence du gou- dronhage. des routes sur la végétation avoisinante: ses résultats Soit presque entièrement en faveur du £ou- dronnäge; même dans l'avenue du Bois, à Paris; beau- coup d'espèces herbäcées où ligneuses sont restées indemnes. — MM. L: Moreau et E. Vinet ont détér- iiné la proportion d'insecticide retenue par les grappes dans le traitemetit dé la Cochylis. Après le premier traitémienl, ellé est très faible (moins de 4 °/;); après- le secüind traitement, l’utilisation est ieilléure, par suite du développemeñt de là grappe. — M. G. Linos- sieér inontie que l'impossibilité d'oliténir une Sporü- lation de l'Aspergillus higjer dans les liquides sans fer résulte de ce que le pigment, qui contient du fer, ne peut se former. — MM. W. Kilian et M. Gisnoux ont étudié les niveaux de cailloutis et les terrasses des environs. de Saint-Rambert d'Albon (Drôme) ét de Beaurepaire (Isère), qui paraissent antérieurs aux plus anciennes extensions glaciaires connues. — MM: CH. Vélait et A1b. Michel-Lévy ünt distingué, dans les terrains primaires du sud des Vosges, deux séries de rôthes : l'üne nettement sodique, composée de roches antérieures aù granite; l’autre potassique, composée dé #granite ét de roches postérieures. — MM. Bernard et Moügin ont étudié la stratificätion des névés ët de la glâce dans les régions élevées des bassins d’alimen- 1036 tation des glaciers. Les couches superficielles inclinées parallèlement à la surface libre du glacier représen- tent ce qui reste des neiges tombées annuellement; les couches fortement redressées ne sont que d’an- ciennes couches superficielles. — M. Ph. Glangeaud montre que les monts du Forez ont été recouverts par les glaciers au Pliocène supérieur et au Pléistocène moyen, et que les deux phases glaciaires ont été suivies de deux phases de creusement des vallées. — M. L. Gentil déduit de ses recherches sur le cours inférieur de la Mlouya que le moyen Atlas ne prend pas naissance au Maroc, mais résulte d’une brusque inflexion versle sud-ouest, dans la région de la Mlouya, de la chaine plissée du Tell Algérien. — M. P. Mer- canton a mesuré l'état magnélique des diabases de l'Isfiord, au Spitzhberg. Les résultats divergents obtenus sembleraient montrer que l’inclinaison magnétique terrestre a changé de sens dans l’Isfjord, au cours des âges. — M. E. Martel montre que, dans certains cas, les désobstructions d'abîimes pourraient réussir et donner accès à des réservoirs souterrains utilisables ou à des rivières souterraines permettant la régulari- salion de certaines résurgences à débits par trop variables. — M. P. Bertrand décrit les caractères généraux des stipes d'Asterochlæna laxa Stenzel. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 6 Décembre 190. M. J. Nageotte lit une étude sur les mitochondries. — M. C. Delezenne donne lecture d’un travail sur les diastases protéolytiques coagulantes des venins. — M. L. Hallion lit un mémoire sur la pathogénie de l’æœdème pulmonaire expérimental provoqué par l'adrénaline. — M.le D' Tuffier lit un travail sur la néphrectomie partielle pour uropyonéphrose. Séance du 13 Décembre 1910. M. G. Weiss présente le Rapport général sur les prix décernés par l’Académie en 1910, et M. G. Dieu- lafoy proclame les noms des lauréats. — M. A. Thoinot prononce l'éloge de Paul Brouardel. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 3 Décembre 1910. M. M. Doyon montre que l'antithrombine se produit dans le foie sous l'influence du sang artériel normal ou du sang peptoné, même si l'organe a été soumis au préalable à une température inférieure à la tempéra- ture de congélation du mercure. — M. G. Billard a constaté que le suc d’autolyse du foie de porc immu- nise le cobaye contre une morsure de vipère. — MM. G. Billard et E. Dechambre ont reconnu que le suc d’autolyse du foie de porc immunise le cobaye et le pigeon contre une dose mortelle de chlorhydrate de cocaine. — MM. Javal et Boyet ont étudié l'effet de la putréfaction sur la concentration moléculaire et la teneur du sérum sanguin en azote, albumine et NaCI. — M. H. Iscovesco a observé qu'un grand nombre de colloïdes lyophiles présentent une tension superficielle inférieure à celle de l’eau distillée; dans le cas con- traire, il faut presque toujours soupçonner l'existence d'impuretés salines. — M. J. Jolly montre que la bourse de Fabricius se développe aux dépens de l'épi- thélium du cloaque; elle est donc bien d’origine endo- dermique, et n’est pas produite par une invagination ectodermique comme on l'a soutenu. — M. F. Gué- guen estime que les champignons des teignes ne sont, au sens strict du mot, que des mycéliums stériles de Gymnoascées; ils n’ont donc aucune spécificité bota- nique. — M. A. Brissemoret a constaté que l’hexahy- drophénanthrène (voisin de la morphine) et le tétrahy- dronaphtalène possèdent des propriétés narcotisantes analogues à celles de la morphine. — Me L. Fassin a ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES reconnu que c'est la thyroïde délipoïdée (thyratoxine) qui renferme la substance active, douée du pouvoir alexigène, de la glande thyroïde. — M. J. Mawas a observé que l'humeur aqueuse produite après ponction est très différente de l'humeur aqueuse no1male; elle n'est autre chose que du plasma sanguin transsudé. — MM. Ch. Fleig et Et. de Rouville montrent que la toxicité du suc salivaire des Céphalopodes est le résultat d'une élaboration intra-glandulaire, d'une sécrétion vraie, et non d'une simple filtration cellulaire, les produits toxiques du suc ne se décelant pas physio- logiquement dans le sang. — M. Ch. Fleig estime qu'il n’est pas prouvé actuellement que la survie des vaisseaux de Mammifères puisse être prolongée pen- dant des mois, ni que ces vaisseaux, après plusieurs mois à la glacière, continuent réellement à vivre dans l'organisme où on les greffe. — M. L. Ambard, en appelant D' et D?, Ct et C? les débits et les concentra- tions uréiques de l'urine dans deux expériences diffé- rentes, montre que l'on a D:/D: — VC:/Vcr. — M. 9. Camus a reconuu que les accidents toxiques nerveux déterminés par les solutions faibles de bichlorure et de biiodure de mercure sont beaucoup plus rapides et beaucoup plus intenses que ceux qui sont déterminés par l’hectine et le 606 employés même à des doses plus forles. — Mie M. Loyez décrit un procédé de coloration des fibres nerveuses par la méthode à l'hé- matoxyline au fer apres inclusion à la celloïdine. — M. E. Maurel a constaté qu'il peut exister des micro- organismes à la surface du cervelas et du saucisson, même tout à fait frais et pris dans les magasins les mieux tenus; le plus fréquent est un diplocoque. Séance du 10 Décembre 1910. M. 5. Nageotte montre que les coupes à la celloi- dine peuvent être colorées, non seulement à l’héma- toxyline au fer, comme l’a montré Mi: Loyez, mais aussi par l'hématéine, avec décoloration au ferricya- nure. — M. G. Billard a observé, sur des cobayes préalablement immunisés contre le venin de vipère par des injections de suc d'autolyse du foie de porc, une véritable anaphylaxie vis-à-vis de l’'hémorragine du venin, tandis que les accidents d'ordre général dus à la neurotoxine étaient absolument nuls. — MM. G. Billard et E. Dechambre ont reconnu que le suc d’autolyse du foie de porc retarde la coagulation du sang et peut même l'empêcher s'il est en quantité suffisante; ilempêche également la coagulation du lait en présence de la présure. — M. J. Mawas a constaté que la pilocarpine agit sur la sécrétion de l'humeur aqueuse en augmentant sa teneur en matières pro- téiques et en glucose et en faisant passer des globules blancs du sang dans la chambre antérieure. — M. G. Fabre a étudié les altérations organiques et fonction- nelles des organismes végétaux sous l'influence du radium. — M. Ch. Dopter, par l'étude de l'action bac- tériolytique comparée du sérum antiméningococcique sur les méningocoques et les germes similaires, injectés par voie veineuse, arrive à la conclusion que la spécificité du sérum n'est pas absolue. — Mme Z. Gruzewska décrit un procédé de purification rapide de grandes quantités de glycogène et de séparation de granules de différentes grandeurs. — M. S. Marbé et Mie T. Rachewski, en scarifiant avec un bistouri trempé dans du sérum de cheval des cobayes en état d'anaphylaxie sérique latente, ont vu se produire, au bout de deux heures, un état d’immunité énergique, dit état phylactique, qui dure quarante-huit heures, pendant lequel les cobayes sont insensibles à l’injec- tion d’une dose qui provoque la mort chez des témoins simplement anaphylactisés. Cette période est suivie d'une période d’anaphylaxierenforcée.— M. A. Alexeieff a constaté que le prétendu blépharoplaste des Trypa- noplasmes et des Bodo n'en est pas un; l’ordre des Binucleata d'Hartmann paraît très artificiel. — M. E. Fauré-Frémiet montre que les Haplophragmium cana- me gl ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES rienseeltglobigerinifornis ainsi que quelques Verneil- lina doivent être considérés comme des variétés de H. latidorsatum, espèce déjà très variable lorsqu'on la considère sensu strielo. — M. H. Triboulet recom- mande l'emploi systématique de la réaction de Petten- kofer en coprologie clinique. — M. H. Iscovesco à observé que le cerveau, la glande thyroïde et le stroma globulaire contiennent des lipoides qui abaissent beau- coup moins la tension superficielle de l’eau que les lipoides des organes glandulaires (foie, rein). De tous les lipoides de l'organisme, c’est la cholestérine qui abaisse le moins la tension superficielle. —M. C. Fleig a reconnu que, chez les Invertébrés dont le sang ne contient ni hémoglobine, ni hémocyanine, l'étude de l’activité peroxydasique du sang et des tissus montre l'intervention prépondérante des tissus dans les actions de peroxydation. M. P. Mulon est élu membre titulaire de la Société. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séañce du 2 Décembre 1910. M. P. Lauriol : Vérification du débit des injecteurs de brüleurs à incandescence et mesure des densités de gaz au moyen des orifices-étalons. Le débit d’un orifice est donné par la formule : g—#4Vp/d, où gq est le débit, p la dépression sous laquelle fonctionne l'orifice, d la densité absolue du gaz, À une constante qui caractérise l'orifice. Pour véritier que Æ est bien égal à la valeur prescrite, il faut donc mesurer q, p et d. On ne saurait, en matière de gaz d'éclairage, consi- dérer d comme une constante : les variations relatives qui, au cours de l’année, affectent la valeur de ÿ/4 sont plus fortes que celles qu'on peut admettre sur %. L'emploi des orifices-étalons permet de mesurer direc- tement À sans passer par g et d. Soit un orifice-étalon qui donnera, d’après une loi analogue à la précédente : Q—KVP/D. En opérant avec du gaz de densité connue, par exemple de l'air à température et pres- sion connues, en mesurant Q et P par des procédés ordinaires, on détermine K une fois pour toutes. Cela fait, si l'on connecte en série l’un sur l’autre l’orifice- étalon et l'injecteur à vérifier, en les faisant parcourir par le même courant gazeux, on a : 9 —Q et d =D. De ces deux équations et des deux équations écrites plus haut, on tire : Vp=KVP. K étant connu, pour avoir k, il suffit de mesurer p et P. Au moyen d'un robinet de réglage, on- s'arrange de facon à donner à p une valeur fixe (par exemple 50 millimètres d'eau). 11 suffit alors de mesurer P. La vérification des injecteurs est sûre et rapide. Avec un orifice-étalon où K est connu, la mesure de Q et de P permet de déter- miner D. — M. P. Lauriol : Photométrie rapide des brüleurs à gaz à incandescence. Les opérations, por- tant sur un grand nombre de becs, doivent être rapides; elles ne doivent pas exiger le transport du bec; le bec étant allumé, on doit, sans l’éteindre, le connecter en série avec un compteur pour mesurer son débit en même temps que son intensité lumineuse. Le dispo- sitif adopté est le suivant : Deux tubes horizontaux, longitudinaux, reçoivent du gaz; sur l’un d'eux est établi un compteur de précision. Ils sont réunis par des tubes transversaux sur chacun desquels est ajusté un brûleur; normalement, tous les brûleurs sont ali- mentés par le tube non muni de compteur. Par des manœuvres de robinets, on peut, sans éteindre les becs, les faire alimenter successivement et isolément par le tube muni de compteur, et mesurer leur débit en même temps que leur intensité lumineuse. Un chariot mobile parallèlement à la rangée de brûleurs porte une lampe-tare el un photomètre. Le photo- mètre est choisi parmi les divers types à sourcesimmo- biles et à appareil immobile, la mesure se faisant par la variation de largeur de diverses ouvertures. En transportant successivement l'équipage mobile au 1037 droit de chaque brûleur, on compare chaque brûleur à la lampe-tare, Avant et après chaque série d'opéra- tions, on compare de même à la lampe-tare une lampe- élalon placée dans l'alignement des brûleurs, Chaque brûleur se trouve comparé à la lampe-étalon par une méthode analogue à celle de la double pesée. La lampe- élalon, électrique, n'est employée que pendant de faibles durées, condition essentielle pour sa conser- vation. La lampe-tare, électrique également, n'a à être maintenue identique à elle-même que pendant une série d'essais. — M. G. Berlemont présente, au nom de M. M. Moulin, une pompe à mercure fonctionnant à l’aide d'une manivelle ou d'un moteur et permettant d'obtenir un vide de l’ordre du millième de millimètre en partant de la pression atmospherique (Noir Supplé- ment, p. 122). — M. A. Pérot : Luminescence dans lare au mercure daus le vide. M. Pérot indique d’abord les différents aspects que peuvent présenter les anneaux d'interférence de la raie verte du mercure quand la lumière est fournie par un arc à mercure dans le vide dont la pression de vapeur croît. Il rap- pelle que la raie verte est formée d'une composante principale et d’un grand nombre de satellites, parmi lesquels s'en trouve un particulièrement intense. Pour des arcs à très basse pression, la composante principale se présente toujours sous la forme d'un simple anneau brillant; si la pression croit, et si la lumière traverse une région non lumineuse, un ren- versement apparaît, avec une largeur et un déplace- ment vers le rouge d'autant plus grands que la pres- sion est plus élevée; en même temps l'éclat du satellite augmente, mais il ne montre jamais de frace de ren- versement. Si la pression est de # centimètres, le bord rouge seulement de la composante principale subsiste. On peut obtenir ces apparences en examinant la lumière fournie par un arc en forme de } daus diffé- rentes directions. Le fait important pour ce qui va suivre est la stabilité du satellite, dont la longueur d'onde a toujours été trouvée invariable. Les arcs qui ont servi pour l'étude de la luminescence avaient en général la forme de ballons d’une dizaine de centi- mètres de diamètre, la décharge traversant le ballon suivant un diamètre. Voici les observations faites 1° Pour de très faibles pressions, la décharge remplit tout le ballon sous la forme d’une luminosité blanche ; si l’on fait rentrer de l'air petit à petit, on voit se former une colonne rose, qui, la pression continuant à croître, devient un cordon lumineux, analogue à la colonne positive des tubes à gaz; 2° Il se produit un transport de mercure de l’anode à la cathode; 3 Si, la pression étant très basse, on introduit de la vapeur d'eau, le ballon devient complètement obscur, rien d'ailleurs ne paraissant changé dans le reste de l’arc ; 4° L'étude de la longueur d'onde du satellite principal, faite avec la lumière émise dans le sens du courant et en sens inverse, montre que les centres lumineux se déplacent dans le sens du courant avec une vitesse qui varie de 30 mètres à 350 mètres à la seconde, suivant la pression; 5° L'étude de la répartition du potentiel dans l'arc montre une chute de potentiel à l’anode, d'environ une dizaine de volts, la chute de potentiel dans l'arc étant environ 1,3 volt par 100; 6° Si l’on mesure la pression sur l’auode à l’aide d’un tube soudé au bas du tube qui contient celle-ci et aboutissant à la chambre de condensation, on con- state l'existence d’une surpression qui varie instan- tanément avec le courant et croît avec celui-ci; elle dépend du diamètre du tube; 7 Si l’on admet que les supports des charges positives sont des atomes de mercurosum, on peut relier la chute anodique à la surpression; on trouve par le calcul des surpressions extrèmement voisines de celles qui ont été mesurées, la vitesse des porteurs électriques étant voisine de 2,4 kilomètres : seconde. Les faits énoncés plus haut conduisent aux hypothèses suivantes : 1° l'émission des raies spectrales par les porteurs électriques est extrêmement faible, sinon nulle ; 2 cette émission est 1038 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES due à des atomes mercuriels mis en vibration par le choc des porteurs électriques ; 3° les centres lumineux rencontrent dans leur mouvement des molécules inertes qu'ils mettent en mouvement sans les rendre lumineuses; 4° l'énergie de vibration des centres lumineux n'est pas altérée par les chocs; une difié- rence de phase seule se produit. En y joignant la théorie de H.-A. Lorentz sur l'amortissement du mou- vement lumineux, M. Pérot et M. J. Bosler ont calculé la vitesse spectroscopique qu'on devait trouver dans les expériences précédentes et constaté qu'on obtient bien les vitesses mesurées. M. M. Moulin, au sujet dé l'hypothèse proposée par M. Pérot, dit qu'il avait déjà songé à uñe interprétation analogue pour l’expli- cation d'un certain nombre de faits observés par M. Starck et par M. Paschen sur l'effet Dôppler des rayons cataux. Îl suffisait d'admettre que les molé- culés rencontrées prennent la vitesse que fournit la loi des chocs et que la luminescence de la molécule dépend de la composante de la vitesse suivant la ligne des centrés. M. A. Dufour sighale qué, dans les äres à mercure dont il s’est servi, el dont la forme diffère, il est vrai, de celle des ärés de M. Pérot, c’est le fivedu du tnerCure central relié au pôle négatit de la Souïce qui s’abaissé pendant le fonctionnement de l'arc; on peut donc en conclure que la distillation du mercure s'effectue ici du pôle négatif au pôle positif; elle se produüirait én sens contraire de celle observée par M. Pérot. Au sujet de l'expérience montrée à la Société et relative à l'existence d'une surpréssion sur lé mercure anodique, M. A. Düfour demaïide ce que donne la même expérience faite sûr le mercure catho- diqüe, afin dé savoir si, à ce point de vue, la cathode et l’änode se comportent différemment. M. Pérot répond que, dans les arcs de la forme qu'ils ont ima- ginée, M. FabrY et lui, et que M. Dufour emploie, une très petite partie seuleinent de la surface mercurielle positive fonctionne comme anode. 1l en résulte une température très basse de celle-ci et, par suite, une distillation thermique intense du mercure de la cathode qui, elle, ést au contraire très petite, et par Suite très chaude. Dans les arcs qu'il a employés, le ballon intermédiaire sert à éviter le transport ther- mique di fercure. Au sujet de la pression sur la cäthode, M. Pérot répond que, la surface de celle-ci élant coïstamment dénivelée, les expériences sont très difficiles et les mesures n'ont fias de signification irécise. Il n'a pu arriver à aucune Conclusion nette. D'ailleurs, il semble que le choc des porteurs élec- tiques sur là cathode devrait y produire une surpres- sion, mesurable si toute la surface était intéressée à là fois. Le phénomène paraît comparable à ce qui se pässe Quand des projectiles sont lancés dans une miasse de liquide, ou qu'un jet violent de gaz est envoyé normalement à la surface d'un liquide. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 10 Novembre 1910 (fn). 12 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Sir G. Darwin : Les observations de marées de l'Expédition äntaretique britannique eh 1907. L'auteur décrit d’abord la métliode d'observation employée. Däns une seconde partie, il explique là réduction dés obsérvations et donne une comparaison entre les nouveaux résultats et ceux übtenus far la Discovery en 1902-1903. Enfin, une troisième partie est consacrée à la discussion de certaines oscillations remarquables du niveau moyen de la mer et à dés hypothèses sur leur cause et leur signification. — Le même aüteut signale üne erreur däns les instructions pour l'emploi d'un appareil ser- vant aux réduclions de marées. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-J. Manleÿ : Sur les irrégularités des balances délicates et les moyens d'augmenter lexactilüde des pesées. L'aüteur étudie les petites irrégularités que présentent fréquemment les balances délicates; il existe quatre causes possibles de ces fluctuations : 1° glissement latéral du couteau central sur son support; 2 flexion différentielle et continue du fléau après la charge; 3° déplacéiñnent latéral d’un où plusieurs couteaux ; 4° petites variations de température des deux bras du fléau. L'auteur montre que les causes (1) et (2) sont p'atiquement inopérantes et que les variations observées sont dues presque entièrement aux causes (3) et (4). IL recom- mande d’entourer le fléau d’une enveloppe intérieure supplémentaire en métal, bois ét verre, qui fait office d'écran pour les radiations calorifiques ét les courañts de convection, et diminue considérabletnent les irré- gularités observées. On peut placer, dans celte encéitite supplémentaire, un bolomètre différentiel, qui permet de s'assurer en tout temps, si la lémpérature des deux bras du fléau est uniforme ou non. — M. N. Bohr pré- sente quelques remarques sur /a détermination de Ja tension d'une surface aqueuse récemment formée. L'au- teur, contrairement aux assertions de Lenard, con- lirme sa conclusion antérieure que la tension super- licielle de l’eau reste parfaitement constante pendant l'intervalle de temps qui sert à la détermination de cette tension après la formation de la surlace, et que cette tension continue à être là même pendant très longtemps si la surface est préservée de toute conta- mination. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séañtce dû 25 Novembre 1910. M: À. Russell a déterminé /a tension électrique à laquelle l'ionisation commence dans Fair. Il emploie comme électrodes un tube métallique et un fil cylin- drique coaxial. Si à est le rayon du fil interne, la ten- sion électrique maximum provoquant l'ionisation est de 32 + 13,4 Va kilovolts par centimètre. Cette tension est indépendante de la nature des électrodes et du rayon interne du tube extérieur. Cependant, la tension électrique, au moment de la décharge, possède une valeur minimum quand la distance des électrodes est une certaine fonétion de leurs rayons. L'auteur attribue un grand rôle aux courants d'air électrisé qui entoufent l'électrode avant que la décharge n'ait lieu et qu'on néglige généralement; ceux-ci modifient souvent d'une facon très appréciable les valeurs de la tension disrup- tive au moment de la décharge. Il y a une sitiilitude frappante entre la formule qui donne lé gradient de la température à la surface d’un fil chaud se r froidissant dans l'air et la formule empirique du gradient de poten- tiel à la surface d'un fil électrisé quand l’'ionisation cominence à sa surfice. — M. R. J. Strutt : La luini- nesrence résiduelle après la décharye électrique. On sait que, lorsqu'une décharge électrique se produit, à basse pression, dans certains gaz, une lueur persiste pendaiit quelques secondes après la décharge, L'auteur a constaté que, pour l'oxygène pur, cette luminescence résiduelle, Si elle existe, est excessivement faible. Dans l'air, elle est d’un beau jaune; dans l'azote pur, elle ne se tontre pas. Cetie luminesrente est généralement attribuée à la formation d'ozone, car elle ne se produit que si l'oxygène est présent, et elle est détruite par la chaleur. M. Strutt coûtirme le fait en montrant : 1° qu'elle ne se produit pas si l’on plonge le tube dans l'air liquide, par suite de la condensation de l'ozone: 2° qu'elle est détruite par passage sur les oxydes de Cu, Mn et Ag: 3% que le gaz luminescent oxyde l'argent. L'auteur montre ensuite que la lumineseence n'est autre chose qu'une flimme à basse température, provenant de l'oxydation de l'oxyde nitrique par l'ozone. — M. J. S. Dow décrit un instrument com- pact et portatif pour la mesure de l'illumination des surfaces. — M. L. F. Richardson : La solülion äpproxi- mative de divers problèmes de limites pat l'intégration des surfaces combinée avec des graphiques à maiñ levée. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1039 SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 3 Novembre 4910, M. R. L. Taylor à constalé que CO réagit sur la poudre à blanchir, solide ou en solution, avec dégage- ment de Cl seul; l’action est donc la même que celle des autres acides, L'air débarrassé de CO? libère len- tement d'une solution de poudre à blanchir un peu d'acide hypochloreux. L'air humide ordinaire dégage de la poudre à blanchir solide d'abord HCIO et CI, puis seulement CI, — MM. A. G. Green et R. N. Sen ont étudié l'influence de l'introduction d'un ou plusieurs groupes azométhine dans un colorant azoïque; celle-ci n'augmente ui la puissance tinctoriale, ni l'aflinité, et ne change pas la couleur. — M.F.Tutin, en trailant à chaud par AZH° l’u-chloracétophénone, l'w-chlaro-p- méthoxyacétophénone et l’w-chloro-11-p-diméthoxya- cétophénone, a obtenu des mélanges de 2:5- et 2:6- pyrazines substituées. Cette réaction est réversible, car les pyrazines, traitées par HI, fournissent les iodhy- drates des phénones primitives. — MM. F. Tutin el F. W. Caton ont déterminé le spectre d'absorption des diverses pyrazines précédentes et de leurs iadhy- drates. — MM. M. O. Forster et A. Zimmerli, par action de l'hydrate d'hydrazine sur la camphoquinone, ont obtenu deux hydrazones isomères, F. 2060etF. 1029, interconvertibles par la chaleur. Traitées par le phényl- carbimide, elles fournissent les 4- et 5-phénylcarba- mylhydrazones, F. 211° et 161°. Ces deux hydrazunes sont oxydées immédiatement en diazocamphre par une solution aqueuse froide d'acétamide mercurique. — M. Ch. W. Moore à extrait par l'alcool le rhizome et les racines du Gelsemium sempervirens. La partie de l'extrait insoluble dans l’eau est formée par une résine brune (3,8 °/,), contenant du pentatriacontane, des traces d'éther monométhylique de l'émodine, un phytostérol, C*H#O, F. 1360, [ain — — 40°,4, un peu d'ipuranolet un mélange d'acides palmitique, stéarique, oléique et linolique. La partie soluble dans l’eau con- tient de la scopolétine, un alcaloïde cristallisé, la gel sémine, CH®#?0%A7?, EF. 1780, et deux alcaloïdes amor- phes. — MM. G. Barger et A. J. Ewins ont prépart un certain nombre de dérivés phénoliques de la &-phé- nyléthylamine. — MM. C. F. Cross, E. J. Bevanel W. Bacon, par aclion de la monochloroamine sur la formaldéhyde, ont obtenu la méthylènechloroamine : AZH°CI + CH°0 = CHE : AzCI + H°0:; elle cristallise du chloroforme en grosses aiguilles. — MM. À. D. Mit- chell et J. F. Thorpe ont constaté que le produit préparé par Gabriel et Hausmann par action du sadio- malonate d’éthyle sur le chlorure d'c-cyanobenzyle, et considéré par eux comme un 0-cyano-B-phénylpropio- late d'éthyle, est en réalité le 4-iminohydrindène-2- carboxylate d'éthyle, que HCI convertit en 1-hydrin- done-?-carboxylate d'éthyle. Dans certainesconditions, on peut obtenir le produit normal de la condensation, soit le cyanobenzyImalonate d'éthyle. — M. W. H. Perkin jun. à converti l'acide 1-méthylcyclohexane- 3-ol 5-carboxylique en acides méthyl-A* et Af-cyclohe- xène-3-carboxyliques etces derniers en »-menthénols (8) correspondants. — MM. B. D. W. Luff et W. H. Perkin jun. décrivent une nouvelle méthode de pré- paration de l'acide 1-méthyl-A°-cyclohexène-3-carboxy- lique et de conversion de celui-ei en A*-»-menthénol (8) et A%°8 G-m-menthadiène. — M. G. Jerusalem «a déterminé les formes cristallines du tribenzylcarbinol, du chlorure de tribenzylméthyle, du tribenzylsilicol, du triphénylearbinol et du triphénylsilicol, et observé des relations morphotropiques très étroites entre les trois premiers de ces composés. C’est le premier cas signalé de morphotropie entre les composés corres- pondants du carbone et du silicium. Les données cris- tallographiques s'accordent avec l'hypothèse que les valences fondamentales du carbone sontdansle rapport de # à 2. — MM. W. J. Pope et Ch. S. Gibson ont préparé par une nouvelle méthode la dihydropapavé- rine (pavine) et l'ont résolue quantilativement en ses composés opliquement actifs au moyen des acides d- et /-2-bromocampho-7-sulfoniques. Les auteurs ont mesuré les pouvoirs rotatoires des quatre sels de d- et /-pavine avec ces acides pour diverses longueurs d'ondes lumineuses. — MM. W. J. Pope et J. Read ont résolu la tétrahydroquinaldine en ses constituants actifs par la même méthode que la pavine. — M. W. Ch. Evans a étudié comment se comportent à la dis- tillation divers mélanges optiquement actifs de d- et I-camphre et d- et / 2-tétrahydroquinaldine; il ny à pas trace de séparation des composants. — Le même auteur a préparé une série de dérivés acidiques et alkyliques tertiaires de la d-camphorimide pour en mesurer le pouvoir rotatoire. — MM. W. Barlow el W. J. Pope représentent les paraflines, les oléfines et les hydrocarbures acétyléniques par des assemblages compacts de sphères d'influence atomique de deux sortes, représentant le carbone et l'hydrogène, et d'un rapport volumétrique de 4 à 4. On obtient ainsi des couligurations géométriques qui sont d'accord avec les données cristallographiques utilisables pour les dérivés chlorés des hydrocarbures. — MM. A. W. Crossley et Ch. Gilling, en faisant réagir CH*Mgl sur la 4 : 4-di- méthyleyclohexane-3-one, ont obtenu le 4 : 1 : 3-trimé- thylcyclohexane-3-ol, dont le dérivé bromé, traité par KÔH, fournit le 4 : 4 : 3-triméthyleyelohexène, iden- tique avec le cyclogéraniolène. — M. T. R. Merton à déterminé les densités et les viscosités des solutions de nitrate de cæsium dans l’eau à 0°, 40°, 18° et 25°, à des concentrations allant de 0,02 N à la saturation. La viscosité diminue quand la concentration augmente. M. W. Harrison a constaté que, pour la formation de l'iodure bleu d'amidon, la présence d'iodures n'est pas nécessaire. L'addition graduelle d'alcool fait passer la couleur du bleu au violet, au rouge, à l'orange, au jaune; le changement inverse à lieu par l'addition d’eau. Tout l'iode de l’iodure d'amidon peut être enlevé par lavage avec de l'eau pure; l’auteur en conclut que la solution bleue d'iode et d’amidon est une solution colloïdale d'iode, l'amidon agissant comme colloïde protecteur. — Mie M. Gazdar et M. S. Smiles ont constaté que les dérivés hydroxylés des sulfoxydes aromatiques sont attaqués par l'acide sulfurique concentré en donnant une couleur bleu sombre. — MM. B. D. Steele et L. S. Bagster ont déterminé les variations de tension de vapeur avec la température et la composition pour divers mélanges de gaz liquéfié : SO? et HBr, HS et HBr, HS et HI. La courbe des mélanges HS et HBr indique l'existence d'un mélange à pression de vapeur minimum, Cas qui ne se repré- sente pas paur H?S et HI. — Sir Ed. Thorpe et Ch, Simmonds ont constaté que la présence d'alumine dans les silicates de plomb rend le composé plus stable vis-à-vis des acides; celle de la soude à un effet opposé. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 20 Octobre 1910. M. A. W. Knapp : Sur l'interprétation des couleurs obtenues avec le tintomètre de Lovibond. Le principe de ce tintomètre est que toute couleur peut être repro- duite par une combinaison convenable de verres types rouges, jaunes et bleus. Or, l'auteur à constaté qu'avec cet appareil, il est possible, avec des verres de diffé- rentes valeurs, de reproduire la même couleur. Ainsi, la combinaison de 3 rouges, à jaunes et 1 bleu donne la même couleur que 2,2 rouges, 4,2 jaunes et 0,2 bleu. La cause de ce fait est que les verres types ne sont pas parfaitement transparents pour la lumière blanche; la lumière ainsi perdue devrait être prise en ligne de compte pour l'enregistrement de la couleur, et elle 1040 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES varie avec le nombre total de verres employés pour reproduire la couleur. Il faut donc, pour faire une comparaison correcte, avoir le même nombre de verres dans chaque combinaison. SECTION DE MANCHESTER Séance du 4 Novembre 1910. M. S. Delépine présente une contribution à l’élude des désinfectants chimiques, où il discute successive- ment le rôle de trois facteurs : le microbe, le désinfec- tant et la malière associée. Il montre que la valeur relative des désinfectants est déterminée «on par leur action sur la bactérie pathogène seule, mais sur celle-ci, plus les divers produits auxquels elle est associée. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 24 Octobre 1910. MM. H. R. Procter et H. Seymour-Jones présentent leurs recherches sur l'acidité des liqueurs tanniques, qu'ils ont déterminée au moyen d’une série d'indica- teurs, tels que l’azolithmine, l'hématéine, la fluores céine, l'acide rosolique, l’eau de chaux, le rouge Congo, etc. Les résultats différents obtenus dans chaque cas peuvent donner une idée de la nature des différents acides contenus dans les liqueurs. CADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 2% Septembre 1910. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute : Sur le rapport entre les sommets d’un polytope six- dimensional déterminé et les droites d'une surface cubique. Dans sa thèse, qui paraîtra en 1911, M. E. L. Elte fait connaître un polytope sixdimensional à 27 sommets jouissant de la propriété que chacun des 27 sommets est à une distance 212 de 16 autres et à la distance # des 10 autres sommets restants; en rappro- chant ce résultant nouveau du résultat bien connu que les 27 droites de la surface cubique générale montrent une disposition analogue, une queiconque de ces droites étant coupée par 10 autres et ne coupant pas les 16 droites restantes, l'auteur fait voir comment la conli- guration très régulière des 27 sommets du polytope révèle plusieurs propriétés de la configuration des 27 droites et réciproquement. — Ensuite M. Schoute présente aussi au nom de Mie À. Stott-Boole : La réciprocité en connexion avec les polytopes et les réseaux semi-réguliers. Explication par la théorie de la réciprocité de la déduction du même polytope semi- régulier ou du même réseau de polytopes semi-régu- liers de polytopes ou réseaux différents à l’aide d'opé- rations différentes. — M. W. Kapteyn : Sur le calcul de l'intégrale finale qui se présente dans l'étude de M. C. H: Wind : Diffraction... (voir ci-dessous). Il s’agit de l'intégrale : CL LU. À — Ras —= — Ras ———— Il y L De AS — Ras EVE m 2 —— | dx Vi | k où às signifie arcsinus et R. veut dire qu'on ne consi- dère que la partie réelle. — MM. H. G. van de Sande Bakhuyzen, C. Lely, C. H. Wind : Rapport sur une question concernant la Commission internationale de la Carte du monde. 20 SGrENCES PHYSIQUES. — M. C. H. Wind : Diffraction d'une, onde impulsive à travers une fente, d'après la théorie de Kirchhoff. Il y a quelques années, MM. Haga et Wind ont étudié expérimentalement le mage d’une fente projetée par des rayons Rôntgen sur une plaque photographique. En c omparant les résultats de leurs épreuves (/tev. geñér. des Sciences, t. XII, p. 4047) à des images counues de diffraction, ils pou- + Ras vaient déterminer à peu près le domaine des longueurs d'ondes dans lequel les rayons Rüntgen, considérés comme un mélange de rayons homogènes de différentes longueurs d'onde, possèdent une énergie maxima. Ici M. Wind étudie le rayonnement dû à une impulsion, qui peut être appelé une onde impulsive, considéré comme un mélange de rayons homogènes d’un nombre infini de longueurs d'onde. A l’aide d’un rapport entre la distance séparant le premier front d'onde du dernier, ce qui représente « la longueur de l’onde impul_ sive », et de ce qu'on déduit des épreuves comme « longueur de l’oude d'énergie maximale », le problème en question est ramené à un problème de Kirchhoff sur la diffraction de la lumière homogène par une fente. Le calcul mèue à l'intégrale indiquée ci-dessus. — M. H. Kamerlingh Onnes présente au nom de M. C. A. Crommelin : /sothermes de qaz monoatomiques et de leurs mélanges binaires. NI. Densités de fluide et de vapeur d’argon coexistantes; calcul de la densité critique de l’argon. 1. Appareil. 2. Précision des épreuves. 3. Déduction des valeurs des densités. 4 Représentation des expériences par des formules. — M. H.E J. G. du Bois :Sur un electro-aimant semi- . annulaire perfectionné. Seconde communication. — Ensuite M. Du Bois présente au nom de M. G.J Elias : L'ellet Zeeman des raies d'émission dans une direction oblique par rapport aux lignes de force. Dans cette communication, l'auteur fait connaitre les résultats de quelques expériences provisoires avec des raies d'é- mission dans un champ magnétique. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. J. van Laar : Sur l’élat solide. N. — M. T. Place présente au nom de M. W. P. C. Zeeman : Mesures de lentilles et emmé- tr'opisalion. 3° SCIENCES NATURELLES. é- r'uplion volcanique de l'ile Téon (Tyan) en 1659. — M. C. Winkler présente; en son nom et au nom de M. G. van Rijnberk : /techerches expérimentales sur l'innervation segmentale de la peau du chien. Septième communication : Sur l'arrangement et la variabilité des dermatomes des pattes postérieures. M. G-. Gryns : La perméabilité des corpuscules rouges du sang, en particulier pour les metaux alcalins et les meélaux alcalino-terreux, dans des conditions physiolo- giques. Critique des essais mentionnés par M. H. J. Hamburger dans sa communication du mois de juin ({iev. génér. des Sciences, t. XXI, p. 916). D’après l’auteur, dans trois des quatre épreuves qui peuvent être contrôlées, les erreurs de l'analyse surpassent les différences formant les bases des conclusions de M. Hamburger. — M. F. A. F. C. Went présente au nom de M. À. A. L. Rutgers : L'influence de la tem- pérature sur le temps de présentation de l'Avena sativa. D'après M. F. F. Blackman, dans le domaine physiolo- gique, la loi de van’t Hoff doit s'appliquer à la vitesse de réaction considérée comme fonction de la tempé- ralure, et un processus physiologique est représenté par une courbe à point d'inflexion ; d’après M. Blackman, ce point d’inflexion est dû à des influences secondaires. D'après lui, la loi de van’t Hoff est de rigueur dans le domaine botanique entre les températures de 10 et de 21°C.; les déviations à des températures plus grandes s'expliquent à l’aide de l'influence du temps. Dans cette communication provisoire, l'auteur tâche d'ap- pliquer les idées de M. Blackman au domaine de la physiologie de l'irritation et de les comparer aux faits. 1. Introduction. 2. Méthode. 3. Résultats. 4. Compa- raison de ces résultats à ceux d'investigateurs anté- rieurs. — Rapport de M. J. Kuyper sur ses recher- ches scientifiques au Jardin botanique de Buitenzorg Java) de janvier à juillet 1910. P. il. SCHOUTE, Le Gérant : A. MARETHEUX. Paris. — L. MARETHEUX. imprimeur, 1, rue Casselto. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XXI DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES (DU 15 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1910) Astronomie et Géodésie. Axpré (Ch.).— Un dernier mot sur les canaux de Mars. Cnagoskau (A.). — L'Observatoire populaire de Zurich. Decenaxe (H.). — L'Observatoire populaire de Rouen. Moreux (1h.). — La constitution physique des co- mètes c — Relation entre la grandeur stellaire minimum et l'ouverture des lunettes. Rexaunor (G.). — La comète de Halley dans le Tal- DOG me ER HR EE TIME CECI REP CETTE ; La comète 1910 à. . Sole, PAL SEA LOUER MURS Botanique et Agronomie. La culture des plantes en sol stérilisé. . . . . . . . Une entrave naturelle à la maladie du blanc du chêne. Les qualités combustibles du tabac. . . . . ar Un succédané du thé : le Catha edulis Les transformations de la cyanamide calcique dans la HAT ANNE LRO MEN ERT NRTN Chimie. La synthèse industrielle de Granenwirz (AIS). — l'ammoniaque Marcuann (A.). — La gazéification de la tourbe . . . — Les procédés modernes pour l'extraction de l'or. Rousser (H.). — La nature et la nuance du pourpre antique — Le rôle des laboratoires municipaux. . . . . . . — Les nouveaux succédanés des caoutchoues et les caoutchoucs de synthèse — La formation des chimistes dans les Universités. Senve (Louis. — Nouveau procédé pour stériliser l'eau par le permanganate de potasse L'enseignement de la Photographie industrielle et des procédés photo-mécaniques à l'Ecole Estienne. . Le jubilé de la théorie de la dissociation électroly- WEEG dus Me CNE D O0 PO DE do MR Eee La D oactioc d'oxydes de l'azote dans la combustion HEMOXNUBAUENCALDONE.,. NL TE Uninouveau/sazipouriballons. RU 0e La préparation du bore à l’état pur et ses propriétés. Le mécanisme de l'absorption de l'hydrogène par le charbon La production des solutions colloïdales à l’aide des CANDOSULICEEVIOIE ISERE ce Dee L'influence de l'azote sur les propriétés des aciers. . Recherches ultra-microscopiques sur le mécanisme de l'électrolyse La classification biochimique des matières albumi- noïdes La décomposition chimique de l’eau sous l'action des T'AVOLA UE NO)OUMIERSEEN L'emploi du soufre pour la fabrication de l'acide sul- LUTIQUE TONER EL OS |: de RDA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. terre arable.. CM DPÉTAUE ES NS EAPTEUE Congrès. Ducroux (E. Herrero). — Le Congrès scientifique in- ternational de Buenos-Ayres . . . . . D EU Le Il° Congrès international d'Agronomie coloniale et UFOPICALER EN M TELE NE MA RE ON VIe Distinctions et solennités scientifiques. Dusex (P.). — Le jubilé du Professeur van Bemmelen. GERNEZ (D.). — Le prochain centenaire de la nais- 89, 133, x aus 10 2925, Elections à l’Académie des Sciences de Saint-Péters- Electricité industrielle. CrerGer (P.). — L'industrie de l'énergie électrique, ses conditions économiques. . Marcnann (H.). — Le haut fourneau électrique. —erelais télÉPRONIQUE EN UN ; Un arc triphasé à quatre charbons . . . . . . . . Une nouveauté dans l'éclairage : la lumière au néon. Enseignement, Universités et Sociétés. A l'Ecole Polytechnique. . . . . Nominations universitaires . . . . . . . . . 5, BEEN EE TEINTE 138, 273, 461, 672, Une réforme au Collège de France. . . . . : . . . . Les « Amis du Muséum ». . . . . . . . . RME IE Conseil de l'Université de Paris . . . . . . . . . 94 JFaéronautique en} SO0TbONDE PE EE La vie de la Faculté des Sciences de Paris. . . . . . Le Bulletin scientilique de la France et de la Bel- GIQUEN +7 Me RAT A ER EE La Société de secours des amis des Sciences, . . . . 25 1642 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES L'Office national des Universités et Ecoles francaises. Bureau des Longitudes . A Ecole centrale des Arts et ‘Manufactures : Géographie et Colonisation. CLERGET (P.). — Les conventions récentes du Gothard et du Simplon ; < "USER — La régénération de la Corse. DES — La situation du Congo français . . . . . . — La décadence des Antilles francaises . . — Une colonie australe : la terre de Kerguélen. — Le chemin de fer du Cap au Caire — Un nouveau percement des Vosges — La question du Spitzberg — L'achèvement du chemin de fer transandin. . . Macuar (J.).— Résultats généraux de la seconde Mis- sion Charcot dans l'Antarctique. . REGELSPERGER (Gustave). — Le passage du Nord-Ouest : Roald Amundsen En tot dédie — La civilisation bouddhique préislamique au Tur- kestan chinois et dans la Chine centrale : Les Missions Stein et Pelliot . : — Les récentes explorations de l Himalaya à — L'étude des bois de la Côte d'Ivoire et leur utili- sation industrielle : SERRE : Un pare national suisse. . . La Mission Tilho au Tchad . ; La forme du continent antarctique : Départ de deux expéditions polaires. Le Bulletin de l'Union franco-persane. Géologie et Paléontologie. Freury (E.). — Les méandres encaissés des cours d'eau. . . Les effets des tremblements de terre sur les sources minérales. Er ER RAI ete Mathématiques. L'initiateur mathématique. 2 La fonction £ {s) de Riemann. . Mécanique et Génie civil. AGuILLoN (L.). — À propos de la formation des ingé- nieurs en France et à l'étranger. CLerGet (P.). — L'état actuel des travaux dans le canal de Panama. . - — Une forme récente de ‘la concentration trielle : L'intégration dans la métallurgie . — La répartition du trafic entre les voies ferrées et les voies navigables : Leregvre (M.). — Détermination expérimentale de la maitresse seclion. = Log (L.). -- L'Exposition internationale aéronautique de Francfort-sur-le-Main . ; MARCHAND (RS — Les PASRTÉS de l'industrie de la ‘indus - 1910 . SERVE (Louis). — “La ‘zrenade-shrapnel Marten Hale. La dessiccation de l'air soufflé dans les hauts four- neaux . EEE L'emploi de la surchauffe sur les locomotives . L'utilisation du grisou comme combustible . La chronométrie fraucaise en 1910 Les locomotives à essence . Les nouveaux paquebots g géants de la White Star Line. Météorologie et Physique du Globe. WenxgenG (Boris). — Conservation des grêlons et étude de leur microstructure . . È L'influence du tonnerre sur les gouttes de pluie . La radio-activité de la rosée. . . La propagation des odeurs à Paris et les circon- stances métÉDrOQOPIQUES RE CT La décomposition de l’eau sous l'action des Tay ons ultra-violets du Soleil. . . . . . . . La déperdition de l'électricité atmosphérique at au voisi- nage immédiat du sol SAUCES & 804 S0# 804 Nécrologie. QU (Maurice). — Eduard Friedrich ee flüger : LISTEN MERE Brune (L. }. — Ludwig Mond: Lee DR RER — Henri, Caro CRE Caspant (C.-Ed.), — Bouquet de la Grye. rte (M). — Alexandre Agassiz. É FrenericQ (Léon). — Edouard van Beneden . HASsEL8ERG (K. B.) — Knut Angstrüm . HocnreuTINER (B. P. G.). — Melchior Treub. Laworre (Marcel). — Bernard Bruvhes MAQUENNE (L.\. — Emile Bréal. . . . . . — Stanislas Cannizzaro . Mane (C.). — Hans Landolt. — Richard Abegg . . PC e Mesniz (Félix). — Robert Koch . . . Moneux (Abbé Th.). — G. V. Schiaparelli. Ricuer (Ch.).— Louis Olivier et le de se — A. Mosso. : 5 F. W. Kohlrausch Alexandre Etard Eugène Rouché. Océanographie. Joueix (J.).— Inauguration du Musée océanographique de’Monaco RS ET RC EE Une nouvelle expédition océanographique dans l'At- lantiquet SERRES Plan de travaux océanographiques ‘à exécuter dans les stations maritimes de la Méditerranée . Physique. Granexwrrz (Alf). — L'activation artificielle de l’eau L'influence de l'air dissous sur la densité de l’eau . . Les membranes aqueuses et les phénomènes superf- CLelS RERO Recherches spectroscopiques sur les ares voltaïques aux pressions réduites. . . Mesures de grandes longueurs d'onde spectrales. . . L' action des ayons x Sur la conductivité des diélec- Le passage Lee rayons 5 à travers la matière . . La conductivité de l'électricité à travers le chlorure d'argent solide . . Les vitesses de chute finales des petites sphères tom- bant dans l'air 3 : : L'invention de la télégraphie sans file. LA L'orientation magnétique dans une sseloméetse de petits aimants. . . 0 : Un solide peut-il être sur. rchauffé? | La propagation du son dans les explosions acciden- telles. 7 NS EE SE OS EC Une nouvelle méthode d inscription phonographique. Les sources lumineuses discontinues en cinématogra- RICE La électrique des alliages métallique s liquides. . . : Lunette de pointage pour pièces ‘à recul limité. . . Sciences médicales. Cuagoseau-Napras (Louise). — ‘The Rockfeller Insti- tute for medical ES E ee = GRaDeNwitz (Alfred). — [ anesthésie électrique L'hygiène de la boulangerie. : : Le 3° Congrès international de Physivthérapie 5 La diaphylaxie s La rage dans l'agglomération parisienne de 1904 à 1909 Zoologie, Anatomie et Physiologie BEaucuawr (P. de). — Les résultats et les méthodes des re CHERS limnobiologiques en Danemark :l'œu- vre de Wesenberg Lund. BiLLarD (G.).— L' immunité naturelle de quelques ani- maux à sang chaud contre le venin de la vipère. 1002 540 1004 EE TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Gaapexwirz (A.). ; du UE os Préron (H.). mérales des Cladocères planktoniques. 2 — La genèse des instincts pipes res et esclava- gistes chez les fourmis Etudes d'alimentation. La disparition du mouton en E urope. Les effets thermiques des courants de haute fré “quence dans les tissus organisés . : — L'inscription graphique des sons — Le mécanisme des migrations nye thé- IL. Astronomie, Météorologie et Physique du Globe. AmaubRuT {A.). — Le champ électrique des corps cé- Becor (Emile). — Les tourbillons et le dualisme en CDS MOL ONE EEE ea ne = ue BrGouRDAN nes .. — La découverte des lois de Képler. Brester (A.). — Nos protubérances terrestres . BurrauLr (Paul). — La forêt et les inondations. Harr (P.). — L'astrolabe à prisme . . . . . . . . . Marouet (F.) — Le point à la mer et son histoire. Mascart (Jean). — L'actinométrie et la météorologie à DÉDÉCE SEE MA ed e dress el e/tel a Ulete note Puiseux (H.). — Revue annuelle d'Astronomie. . Saviren (D.). — Le calcul et l'observation de l'échpse de Soleil du 17 avril 1912, visible en France. . Botanique et Agronomie. Burraurt (Paul). — La forêt et les inondations. . . . Maquenne (L). el Demoussy (E). — Le noircissement Bot SONG EST ENTER IE RE VuizLeMN (R.). — La classification des mycoses. . . — Revue annuelle de He 1re partie : Myco- logie générale. . . . . SEC US ME — 2° partie : Mycologie Spéciale . — Le blanc du chène , . . . . . AR ERREN ZorLa (D.). — Revue annuelle d' Agronomie ON VA UE Chimie, BLaxc (G.). — Le campbre synthétique. Son avenir industriel ‘Bucuxer (Ed.). — La fermentation alcoolique du sucre COnEnN (Ernest). — Recherches physico-chimiques sur les maladies contagieuses des métaux. . -Coux (H. de la). — La cellulose et l'état actuel de l'in- dustrie de la soie artificielle à: . . - . .. DucLaux (Jacques). — La matière organisée. . . . . Durort (P.). — La volumétrie physico-chimique . . LE CHATELIER | dpi — Progrès récents de la sidérur- APR 2 de Ve he NON OU ENS se (L.) ï. Revue des industries de l'alimentation. Préparation industrielle de nos aliments et de nos HONOR ee. CADENCE MEN Maicue (Alph.) — Revue annuelle de Chimie minérale. — Revue annuelle de Chimie organique . . Mauraix (Ch.). — Les poids moléculaires dans les diffé- rents états a nles de la matière. . . Procrer (H.-R.). — Les EE mes de : l'industrie ‘du CU ET ee ee SAPOJENIKOW cellulose . Enseignement. ‘BourRey (Georges). — La formation des ingénieurs et l’enseignement technique supérieur. . Mancuaxn (H.). — Les tendances nouvelles de Ten- seignement technique et professionnel en Amé- rique. Ne ee A LE = db PeLLETAN (André). — La formation des ingénieurs ‘en France et à l'étranger. AE 2 MT ET à Sur l'absorption de la sécrétine. Les taupes et les taupinières . Venin de cobra et curare. Sérothé rapie : anticobre sus L'élevage du renard à fourrures . La valeur comparative des divers modes d'éclairage au point de vue ophtalmologique. Survie des leucocytes . La photographie des oiseaux en liberté et les mœurs du jeune coucou . . Le goût de vase chez les poissons ‘d'eau douce. — ARTICLES ORIGINAUX Géographie et Colonisation. Mnazek (L.). — La région d'inondation : du Danube en Roumanie . . HN Géologie, Minéralogie et Paléontologie. Brux (Albert). — Les recherches modernes sur le vol- uanisme. . . 2e DepéRer (C.). — kevue annuelle de Paléontologie c JourDY (Général). — Orogénie systématique et tecto- nique positive . Koroerue (Karl Fred.) — Les fjords de Norvège et leur mode de formation. Lauxay (L: de). — La métallogénie du continent CHOCO SE AMOR CONTE Réviz (Joseph). — Revue annuelle de Géologie. ire partie. RES NN AL TRE — 2e partie. . . — Une nouvelle percée des Alpes. | Le : petit Saint- Bernard. : +. à : : Mathématiques. Micuaup. — La Géométrie d'Apastamba . . . SAINTE-LAGUE (A.).— La a proportion: nelle et les Mathématiques . SEC Mécanique et Génie civil. BounGoix (P.). — Les installations d'artillerie à bord des cuirassés récents . Drénert (F.) — Les égouts de Paris pendant Tinon- dation de 1910. .. . Dune (Pierre). — La Mécanique expé rimentale d° après un livre récent. Rexaro (Commaudant Paul). Considérations générales : — 2e partie : Le moyen de réaliser le vol mécanique. Revercron (Léopold). — L'horlogerie mécanique . . — L'aviation. 1° partie : Nécrologie. GuiLLAUME (Ch. Ed.) Ocivier (Louis). travaux, 1852 — Louis Olivier. Alexandre Etard. Sa vie et ses -1910 I LS due Physiologie. Laricoce (L.). — Principe pour uve théorie du fonc- tionnement nerveux élémentaire. = Weiss (G.). — La production de la chaleur animale et les subslitutions alimentaires . . DAS à Physique. Escarp (Jean). — Propriétés diélectriques de l'air. Son emploi joue isolant électrique. . . MarcHano (H.) Progrès récents en radiotélégraphie et radiotéléphonie- = Pécueux (H.). — Résistivité et thermo- électricité des aluminiums et des cupro-aluminiums , Sacer (Pierre). — Spectres multiples et spectrales tueuse Ë variations 1043 319 #11 501 632 632 y21 719 968 605 101S 923 581 Sciences médicales. ALBAHARY (J. M.) — Etude pathogénique des dia- ES 2 RME lo ce DioLot cé HarrManx (Henri). — Revue annuelle de Chirurgie . . LÉTIENNE (A.). — Revue annuelle de Médecine . . . . Répix (Ch.). — La pathogénie du goitre endémique. . Roue (R.). — L'étiologie et la prophylaxie de la Hèvre typhoide EEE ECC ICE Vurizcemn (P.). — La classification des mycoses . . . Zoologie et Anatomie. Lorsez (Gustave). — Revue annuelle d'Embryologie . Marnesco (G.). — Recherches sur la cyto-architec- tonie de l'écorce cérébrale. {re partie. . . . . . —\2P}partie NN CCE CE CRU Mercrer (L.) et be DrouIN DE BOUVILLE (R.). — La fu- ronculose des Salmonides. . . . . . . . . . . . Prérox (H.). — La genèse des instincts esclavagistes et parasitaires chez les fourmis. 1re partie. Les EU CNE PET EL) aie ea ae) 000 die — 2e partie : Les Théories. Examen critique. . . . PRENANT (A.). — Les cellules géantes. . . . - . . . . TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Sciences diverses. Bruner (Louis). — Le Congrès de Sheffield de l’Asso- ciation britannique pour l'avancement des Sciences. 1. COMMENT RENE NT NE E Mascarr (Jean). — Une Mission scientifique interna- tionale aMénÉNIe EN CR EE RoxcaGLr (Commandant Jean). — La prime ration- nellerä TaMaAVISa tion EEE Revues annuelles. Drrérer (C.). — Revue annuelle de Paléontologie. . . Hartmann (H.). — Revue annuelle de Chirurgie. . . . LÉTIENXE (A.). — Revue annuelle de Médecine. . . . Loisez (Gustave). — Revue annuelle d'Embryologie . MarLue (Alph.). — Revue annuelle de Chimie minérale. — Revue annuelle de Chimie organique. . . . . . . Puiseux (P.). — Revue annuelle d'Astronomie . . . . Révi (J.). — Revue annuelle de Géologie. 4re partie. — 2e partie ES EE VuiLLEMIN (P.). — Revue annuelle de Mycologie. 1re partie": Mycolopieigénérale We ER RNRER — 29 partie: Mycologie!spéciale PSS Zozra (D.). — Revue annuelle d'Agronomie III. — BIBLIOGRAPHIE 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES Mathématiques. Axpré (Désiré). — Des notations mathématiques; énu- mération, choix et usage . . . Arvoux (Gabriel). — Arithmétique graphique; les espaces arithMÉQUES- EN EC 123 Baicumanx (Paul). — Théorie élémentaire des nombres. 2e partie : Théorie additive des nombres. . . . . 989 BzumentaL (Otto). — Principes de la théorie des fonc- tions entières d'ordre infini . . . . . . . . . . . 909 Borer (Emile). — Lecons sur la théorie de la crois- RANCE TANT NE EN CR QU des Ji DixGeLpey (F.). — Sammlung von Aufgaben zur An- wendung der Differential- und Integralrechnung. Are partie : Differentialrechnung. . . . . . . . . 1031 Fagry (E.).:— Problèmes et exercices de Mathéma- LIQUES SÉRÉTAES NE CR CE CE 617 Foüer (£.-A.). — Lecons élémentaires sur la Théorie des fonctions analytiques. II. Les fonctions algé- briques. Les séries simples et multiples. Les inté- CTALOS NS ER NN EE I EN PRE ee 655 Hapamarp (J.). — Lecons sur le Calcul des variations. 350 Lexox (Ernest). — Savants du jour : Henri Poincaré. 75 — Savants du jour : Gaston Darboux. . . . . . . . 485 — Savants du jour : Emile Picard. |» . - : . Or 972 LecaaLas (Georges). — Etude sur l’espace et le temps. 707 Riquier (Charles). — Les systèmes d'équations aux dérivées partielles CCE 256 Rouse-Baz (W.). — Récréations mathématiques et problèmes des temps anciens et modernes. . . . 166 TeixerA (F. Gomes). — OEuvres mathématiques. V : Traité des courbes spéciales planes et gauches. . 32 Mécanique générale et Mécanique appliquée. ArMeNGauD (jeune). — Le problème de l'aviation, sa solutionMpar laéroplane PRE CR 166 BLaxcarnoux (Paul). — Traité pratique des chaufferies à vapeur francaises et étrangères. . . . - . . . 562 — Théorie et pratique du chaulfage par la vapeur, industriellett domestique CHOC 8172 — Maladies de chaudières industrielles et de leurs ACCESSOITES Ne de RE ed Eu code 989 Bocarrr (Ed. W.).— Notes sur le problème de l’aéro- plane (équilibre et stabilité) . . . . ©: . : 257 BouLvix (J.). — Cours de Mécanique appliquée aux machines. Etude organique desmachinesàavapeur. 617 BricLouIx (M.). — Stabilité des aéroplanes; surface métacentrique Camus (G.). — La technique des hélices aériennes. . CnaLon (P.-F.). — Manuel du mineur. Recherches des minesiet leuriexploitation FR PR EE CrauneL (J.). — Pratique de l’art de construire. . . . CouBEeBrac (G.). — Les actions à distance. . . . . . . Conpemoyx (C. de). — Exploitation des ports mari- times. MORE EN Cosserat (E. et F.). — Théorie des corps déformables. DEsmoxs (R.). — L'équilibre des aéroplanes . . . .. DorceL (R.). — Les hélices de canots automobiles . . Fournter (Vice-Amiral E.). — Vitesse des navires. Résistance de l’eau en navigation ordinaire et en AVIS ON SOUS-NATUNE ES EE GorGeu (P.). — Machines-outils, outillage, vérifica- teurs; motions pratiques ERP ENR ER RE Hopkinson (B ). — Vibrations des systèmes ayant un degrétde liberté 1 CCR PR ER Laroque (L.). — Pratique de l’art de construire. . . . Marcus (L.). — Le navire aérien (architecture, équi- libre, stabilité) — Cours d’aéronautique. 10° Statique et dynamique destballons-ÆREsistance delai ee Maxim (Sir Hiram S.). — Le vol naturel et le vol arti- ficiel Miccrorco (A.). — Qualités que devront posséder les aéroplanes et les hélicoptères de l'avenir. . . . . MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE. — Compte rendu et résul- tats des études et travaux du Service des forces hydrauliques au 31 décembre 1907 RexarD (Cl). — Guide de l’aéronaute-pilote. . . . . . SaLzvertr (Vicomte de). — Mémoire sur l'attraction du parallélipipède ellipsoïqal . $ TIMERDING (H.-E.). — Géométrie des forces . . QUE ViNSONNEAU (Jules). — La route moderne. . . . . . . Astronomie, Geodésie et Météorologie. Arcrowski (Henryk).— L'enchaînement des variations CHMATQUES MERE CCR EEE Bercor (André). — Carte de l'ile de Délos 1/10.000, avec un commentaire explicatif. . . . . . . . à Guicerrt (Gabriel). — Nouvelle méthode de prévision Au ÉEMPS PEER IN CPE SP LowELz (Percival). — Mars et ses canaux . . . . . . Poincaré (Henri). — Lecons de Mécanique céleste pro- fessées à la Sorbonne. Il. Théorie de la Lune . . SERVICE GÉOGRAPHIQUE DE L'ARMÉE. — Rapport sur les travaux exécutés en 1908 au Service géographique de l'Armée OEM IC NENREERRERRE TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 2° SCIENCES PHYSIQUES Physique. Arès (Lieutenant-colonel E.). — L'Electricité consi- dérée comme forme de l'énergie. I. Les notions fondamentales. Le potentiel et la quantité d'élec- tricité. II. Electrostatique. . ARMmAGNAT (H.). — Wattmètres. . . . . . . . . . . . Barmizcron (L.). — Les compteurs électriques à cou- rants continus et à courants alternatifs Barrezzt (A.), OccnraLint (A.), CueLa (S.). — La radio- activité et la constitution de la matière. . . . . Bouasse (H.).— Cours de Physique conforme aux pro- grammes des certificats et de l'agrégation de Phy- sique. V. Electro-optique. Ondes hertziennes . — Cours de ÉPySIque VI. Etude des symétries . . Brunswick (E.-d.). — L'électricité dans les Mines. Applications diverses. Extraction CawoLson (0.-D.). — Traité de Physique. III. 1. Ther- mométrie, capacité calorifique, thermochimie, con- ductibilité CAOUÉQUE NET See — Traité de Physique. IL. 2. Thermodynamique générale. Fusion. Vaporisation Drucker (K.). — Guide pour l'exécution des mesures physico-chimiques Dune (Pierre). — Thermo-dynamique et Chimie (leçons élémentaires) Fernoux (G.). — Les compteurs électriques à courants continus et à courants alternatifs . . . . . . . . Foveau DE COURMELLES. — L'anoée électrique, électro- thérapique et radiographique Fuick (J.). — Physikalische Technik. . . . . . . . . Gossarr (E.). — La grammaire des électriciens. 1. à courant continu Jocx (F. R. S.). — Radioactivity and Geology. An account of the influence of radioactive enere. on terrestrial history KAYSER le ). — Handbuch der Spectroscopie. . . . . Lopré (F.). — Emploi des accumulateurs. . . . . . . — Essais des machines électriques. Mesures mécani- ues eur (H.-A.). — Théorie des électrons Lurner (R.). — Guide pour l'exécution des mesures PAVSICOE CDI UE RENE ee cer Maupuir (M. A.). Electrotechnique appliquée : Machines électriques OsrwaLp {(W.). — Guide pour l'exécution des mesures physico-chimiques Paquer (N. A.), Docourer (A. C.) et MONTPELLIER (J. A.). — L'électrotechnique. II. Production de l'énergie CCCOIQUE SN EE CU Ce Pécneux (H.). — Le pyromètre thermo-électrique pans la mesure des températures élevées . . . . . Racxo (S.). — La soudure autogène des métaux . . SARTORI (Giuseppe). — La technique pratique des courants alternatifs. 11. Développements et calculs pratiques relatifs aux phénomènes du courant GHÉSNATIE NM re en Sc UE Scnarrers (V.). — La machine à influence, son évo- lutin sa RéOTIE Eu NT ET NE. SibERskY (D.). — La réfractométrie et ses applications PA OUES Eee ete CIE TurpaIn (Albert). — Notions fondamentales de Télé- ON EM MT ONCE EME PONT CETTE TES GT MM EE OR ER EE Chimie. Boum (C. R.). — La fabrication des manchons à incan- descence Boyer (Jacques). — La synthèse des pierres précieuses. Brocner (André). — La soude électrolytique. Théorie, laboratoireindustrie te CLONE EN CavaLier (J.). — Leçons sur les alliages métalliques. CorriGnier (Ch.). — Nouveau manuel du fabricant de CONEDRE ES ENS co OO OR EN N ST E Damranovicx (H.). — Estudio fisico-quimico y bio-qui- mico de las materias colorantes organicas artifi- STEP RS CR PEN 0 US ce ee DoczaL (Etienne). — Production électrique de l'ozone et applications à l'industrie, l'hygiène, la théra- DOUÉ ER EN ER Ci. CIDRE DeuCKkER (K.). — Guide pour l'exécution des mesures physico-chimiques 955 1045 Dune (Pierre). — AAA SUN es tnnIe (Le eçons ÉléMENtHITES) 0e NE I UE: . Escaro (Jean). — Les métaux spéciaux et leurs com- posés TS ET ME — La fabrication électrochimique de l'acide nitriq que et des composés nitrés à l'aide des éléments ‘de NS LT MES Po C0 DS oo ee. SR Eucer (H.). — Fondements et résultats de la Chimie végétale. II : Les lois générales de la vie des plantes. III : Les phénomènes chimiques dans le corps des plantes. . . . . GRANGER (Albert). — Pierres et de construction. ; — Fabrication et emploi des me atériaux et produits réfractaires utilisés dans l'industrie . GrunwazD (Jules). — La technique de matériaux artificiels l'émaillerie ON NN SEE à CRE NENR ARENA. RTE GuicnarD (M.). — Manuel de travaux pratiques de Chimie nérale CRC CO TD NUE 00e s : HivaRD (G.). — Analyse des laits . . . . . . . . . . HozLarp (A.) et Benrraux (L.). — Analyse des métaux par électrolyse. Métaux industriels, alliages, MINOTEIS APTOQUIÉS TIVETS CR UN Kayser (E.) et MancEau (T.). — Les ferments de la graisse rs VIS AM SEINS Eole, etat 78e LADEN8uRG (A.). — Histoire du développement de la Chimie, Fu he Lavoisier jusqu à nos jours. . . . LEewkowiTscu (J.). — Technologie et Analyse chimiques des huiles, se CLICITES ER CN ET Lurner (R.). — Guide pour l'exécution des mesures physico-chimiques MasseLow, CizLarp et Rogerrs. — Le Celluloid (Fabri- cation, applications, substituts) Maurain (Ch.). — Les états physiques de la matière . Mazé (P.). — Technique fromagère. . . . . . . . . 2 Monter (F.), CHESNAY ie) et Roux. — Traité théorique et pratique sur les fraudes et falsifications. . . . NoëLriNG (F. À. M.). — Contributions à la connaissance des Oxyaldéhydes. L'orthovanilline et l'aldéhyde orthovératrique D OS dB D NI To MOD DC Osrwazp (W.).— L'évolution d'une science : La Chimie. — Guide pour l'exécution des mesures RATAGOC -chi- INIAUES MEME Per = Fee ele de D-0 eee Pecer-Jouiver (L.). — La théorie de la teinture. . PLcimuer (R. H. Aders). — The chemical constitution DETTES OMR OS Ne ee VEN ee à 1005 Posr (J.) et Neumann (B.). — Traité complet d’ Analyse chimique appliquée aux essais industriels. 11 : Sucre de betterave, sucre de canne, amidon et fécule textrine, PIUCOSE EE RoussET (H.) et CHAPLET (A). — Les combustions industrielles (Le contrôle chimique de la com- QUS TON) ER ER Wozrr (Jules). — Contribution à la connaissance de ae phénomènes oxydasiques naturels et arti- CIEL RES CR RE Tr 3° SCIENCES NATURELLES Géographie. Augix (Eugène). — En Haïti. Planteurs d'autrelois, nègres d'aujourd'hui. . BeLcer (Daniel). — Les grandes nulles Bérarp (Victor. — Révolutions de la Perse (Les provinces, les peuples et le gouvernement Ga roi des rois). CENTRE INDUSTRIEL DU BRÉSIL. — Le Brésil, ses richesses naturelles, ses industries. [ : Introduction. In- dustrie extractive. Il : Industrie agricole etélevage. Voies et moyens de communication. Industrie OAnU EC LUTIÉLE PR ENS NC CES CnaïzLey (Joseph). — L'Inde britannique (Société indi- gène, Politique indigène ; les idées directrices). COMMISSION GÉOGRAPHIQUE ET GÉOLOGIQUE DE L'ÉTAT DE SainT-Pauz. — Carte générale de l'Etat de Saint- RENE ns toto Bas 4 DauzaT (Albert). — L'Italie nouvelle. . . . . . . . . DEgéraiN (Henri). — Etudes sur l'Afrique. Le Cap de Bonne Espérance AU XVII SCIE AR ee Duc n'OrLéANs. — Croisière océanographique accomplie à bord de la Belgica dans la mer du Grünland (1905). GazLois (L.). — Régions naturelles et noms de pays (Etude sur la région parisienne). . . . . : Hepix (Sven). — Le Tibet dévoilé. . . . . Izarr (J.). — La Belgique au travail. . 1046 Mañronxe (Emmanuel de). — Traité de Géographie POVSIQUERE. Lie die ee RD EEE Marroso (Ernesto). — Album de l'Etat de Para. . SAURIN (Jules). — Le peuplement francais en Tunisie. VipaL DE LA BLacnE (P.). — Atlas général (Histoire et GÉDENAPNE) EE EE LEE WALLE (Paul). — Au pays de l'or noir (Para, Amar Matto- GrOSS0) CAS CR . Minéralogie, Géologie et Paléontologie. Cayeux (L.). — Les minerais de fer oolithique de France. 1er fasc. : Minerais de fer primaires. Duparc (L.) Pearce (F.) et Tixaxowrren (Mie M.). — Recherches géologiques et pétrographiques sur l'Oural du Nord Le bassin de la Haute-Wichéra. FLamaxp (G.-B.-M.). — Compte rendu de la campa- gne 1907-1908 du Service géologique des terri- vitres dUISUd Tel ACTE ENTRER TC FLeury (Ernest). — Le Sidérolithique suisse. Contri- bution à la connaissance des phénomènes d'alté- ration superficielle des sédiments . . . . . . . . GEIKIE (James). — Traité pratique de Géologie. . . . Hayes (W.-C.). — Manuel pour géologues sur le ter- Jozy (J.). — Radioactivity and Geology. An account of the influence of radioactive energy on terrestrial RISTORVE EEE Lacroix (Alfred). Ses colonies re CN. Le ON RU EE MEuxIER (Stanislas). — La terre qui tremble . . STEFANESCO (A.). — Coup d'œil sur le pétrole roumain. Tomas | (Philippe) . — Essai d'une description géologi- que de la Tunisie, d'après les travaux des mem- bres de la Mission de l'exploration scientifique de 1884 à 1891 et ceux parus depuis . . . . . . . Vax DEN BROECK (E.), MarTeL (E.-A.\ et Ranim (Ed.). — Les cavernes et les rivières souterraines de la Belgique, étudiées spécialement dans leurs rap- ports avec l’hydrologie des calcaires et avec la question des eaux potables SOS ho à 50 _ Minéralogie de la France et de Botanique et Agronomie. BEAUVERIE (J.). — Les bois industriels . . . . . . . . BEAUVISAGE (G.). — Guide des étudiants au Jardin botanique de la Faculté de Médecine et de Phar- macie de Lyon . BERGERET (Jean). — Flore des Basses-Pyrénées. Boxxier (Gaston). — Les noms des fleurs trouvés par la méthode simple sans aucune notion de Bota- NIQUE PNEU E A DEP CEE Bourcarr (Em.). — Les maladies des plantes. Leur traitement raisonné et efficace en Agriculture et en Horticulture. Dop (P.) et GaurIÉ (A.). — Manuel de Technique bota- nique. Histologie et microbie végétales . . . . . Lioxer (Professeur D: P.).— Atlas des bases micros- copiques delle fermentation CN ERA Mainex (J.-H.). — The Forest Flora of New South Wales ed Ne ME ANNE. EEE MEN PNR Viaa (P.) et VERMOREL (V.). — Ampélographie. . WicneMan (E. de). — Sciences biologiques et colonisa- LOS A EN mega at Pl EN CU EE Zoologie, Anatomie et Physiologie de l’homme et des animaux. Ayxacn (M.). — Le globulin des Mammifères . . . Bcaxenarn (R.). — L'insecte et l'infection. Histoire naturelle et médicale des RRQ patho- génes. il" ACATIPNS Es cu CUS CET 3RANCA (A.). — Précis d’ Histologie RARE Courx (Henri). — Animaux de nos pays. . . . . . . Cyox (D'E. von). — Les glandes vasculaires, organes régulateurs de protection du système nerveux centrales OU (er MERS PAR - 00 Decace (Yves) et Gorosurra (Mie) . — Les théories de l'ÉVOLUHONS UNS NET NAN EURE Duvar (Mathias). — ‘Traité élémentaire de Physio- SA RS EE 'É A ; « ca GALLARDO Augel). — Zoologia. É GLEY (E.). — Traité élémentaire de Physiologie. à Ixsrrrur Marey. — Travaux de l'Association de l'Ins- titut Morey RON CES ER EE RES 619 398 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES LE Danrec (F.). — La stabilité de la vie. Etude éner- gétique de l'évolution des espèces. . . . . . . . LescarDé (F.). — L'œuf de poule, sa conservation par le froid Lors (Jacques). — L'excitation chimique du dévelop- pement de l'œuf animal : Parthénogénèse artii- cielle + SR EEE EEE Marinesco (G.). — La cellule nerveuse. . . . . . . . Nicari (William). — Physiologie oculaire, humaine et comparée, normale et pathologique. . . . . . . Pavy (F.-W.). — Les hydrates de carbone, leur trans- formation; étude de Physiologie pathologique. Considérations sur le diabète et son traitement. Piérox (Henri). — L'évolution de la mémoire. . . . . Rein (G. Archdall). — Les lois de l'hérédité . . . . . RoGer (G.-H.). — Digestion et nutrition . . . . . . . STEENSBY (H. P.). du Danemark ss LE NE RP RER TRouessarT (E.). — Conspectus mammalium Europæ. Faune des Mammifères d'Europe. . . . . . . . . — Contributions à l'Anthropologie UexkcL (J.). — Le monde extérieur et intérieur des animaux :L. NE EME PRONENS Weiss (G.). — Physiologie générale du‘travail muscu- laire et de la chaleur animale. . . . . . . + . 4° SCIENCES MÉDICALES Chirurgie, Gynécologie, Ophtalmologie. Desrosses (P.). — Petite chirurgie pratique. . . . . . Iu8erT (L.) et Frocce (J.). — Les sutures vasculaires. Turrtr (Th.). — Petite chirurgie pratique Hygiène. CuanTEMESssE et Mosxy. — Traité d'Hygiène. Hygiène générale destyilles RE ENTER PE GALTIER-BOISSiÈRE (D'). — Hygiène nouvelle . . . . . LABBÉ (HARSeD — Régimes alimentaires. . . . . . . MARTINET (A.) et LEGENDRE (Paul). — Les régimes usuels. MaureL (E.). — Traité de l'alimentation et de la nutri- tion à l'état normal et pathologique . . . . . . . RogEert-Simox (Dr).— Dépopulation et mortalité infantile Médecine. Les maladies mentales dans ANTHEAUME (A. — l’Arméefrancaise PME CN ET RE E Bcaxcuarp (R.).— L'insecte et l'infection. Histoire natu- relle et médicale des Arthropodes pathogènes. I. Acariens #59. PEN CN OR RENE EEE Bousquet (L.). — Les métaux colloïdaux électriques en oies con RL me ne us 2 CasraiGne (J.) et Cuiray (M.). — Manuel des maladies du foie et des voies biliaires . . . . . ... Desove (G.-M.), Poucxer (G.) et SazLaRD (A.). — Aide- RÉTene deMThÉTEPEUIQUE CREER FLeiG (C.).— Les eaux minérales, milieux vitaux. Séro- thérapie artificielle et Balnéologie tissulaire par leur injection daus l'organisme JANET (P.). — Les névroses L'atis NES MOUSONEENSS JuxGano (M.) et Disraso (A.). — Les Anaérobies LanpouzY, GAUTIER, MOUREU, DE Lauxay, P. Carnor, Herr/, LALESQUE, LAMARQUE. — Crénothérapie, Ci matothérapie, Thalassothérapie à Lecraix. — Les folies à éclipse LéPixE (R.). — Le diabète sucré . . . . . Lévy (P.-Emile). — Neurasthénie et névroses. Leur guérison définitive en cure libre. . . . . . . . . Lonpe. — Essais de médecine préventive. . . . . . . MARIE (A.). — Les dégénérescences auditives Maroxer (Alfred). — “Thérapeutique usuelle des ma- ladies de l'appareil respiratoire Meunier (Raymond). — Le Hachich MicnarD (M.). — La joie passive . . . : - . . . «| Miéxor (R.). — Les maladies mentales dans l'Armée fran CAES PUS EE RS et EC ER Pavx (F.W.). — Pathogénie et traitement du diabète SUCTÉE 8.705) TRS: Le:.4 Ma ACTEUR CEST SR ER RCE RoGer (H.). — Les métaux colloïdaux électriques en PRÉ ETE Rousnoviren (J.). — Aliénés et anormaux Zimmerx (A.) et Turc Hini (S.). — Les courants de haute fréquence et la d'Arsonvalisation di Hd TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 5° SCIENCES DIVERSES Annuaire de la vie internationale (1908-1909). . . . . Bixer (Alfred). — Les idées modernes sur les enfants. — L'Année psychologique (1909) . . . Bouquer (H.). — L'évolution psychique de l'enfant . Cana (René). — Carthage, Timgad, Tébessa et les villes antiques de l'Afrique du Nord. . . . . . . Catalogue du matériel scolaire de la Direction géné- rale de l'Instruction primaire de la République orientale de l'Uruguay, présenté à l'Exoosition annexe du Congrès international d'Hygiène sco- laire CzerGer (Pierre). — Manuel d'Economie commerciale. Core (Auguste). — Cours de Philosophie positive . . Cxox (Elie de). — Dieu et Science Derrino (Victor). — Anuario cientifico è ao 1909 . . Duneu (Pierre). — Etudes sur Léonard de Vinci; qu il a lus et ceux qui l'ont lu. . . Duxob. — Agendas Dunod pour 1910. . . . . . . . . Dupuis (A.) et LouBanp (J.). — Cours de Dessin indus- triel ë BEN (P.)— Venine CLS ou US - Jaunes (William). — Précis de Psychologie. . . — Philosophie de l'Expérience Ne Lixoer (Léon). — L'esprit et le cœur de l'enfant . . LUMIÈRE ET FILS. — Agenda pour 1910 . . . . Marquez (Dr Miguel). — I. Album de l'Enseignement primaire. 11. L'institut scientifique et littéraire de l'Etat de Chihuahua MaxweLz (J.). — Le crime et la société Naxsoury (Max de). — Les trucs du théâtre, du cirque et de Ë RAS eo Me PSE Pérez (Abel-J.). — Memoria correspondiente al ano 1908, presentada à la Direccion general de Instruc- cion primaria PEyre (Roger). — Padoue et Vérone. . . . . . . . . Prrexxe (Henri). — Les anciennes démocralies des Pays-Bas Rousiers (Paul de). — Les grands ports de France, leur rôle économique. . . . . . . - . . . - Roux (Paul). — La crise agraire en Italie. . tifico è industrial, ceux 1047 SALADIN (Henri). — Tunis et Kairouan. . . . . . . . 488 SELLA (E.). — La vie de la richesse 400 SoLvay (Ernest). — Rien sociale et politique Don sine tn ‘ 309 Vase (N.). — Essai sur la Psychologie de la main. 36 Thèses pour le Doctorat présentées aux Univer- silés françaises (1909-1910), et analysées dans la lievue en 1910. ° SCIENCES MATHÉMATIQUES IV. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER Académie des Sciences de Paris. Séances des 13 décembre 1909 = 209 = LE — 27 _ — janvier 1910 . = Ac = == = 17 = = 5 94 A 2e = 31 2= _ février : — = 14 Es se 91 = 15 se 98 A _ mars — Roy (Louis). — Recherches sur les propriétés thermo- mécaniques des corps solides. . . . . . . . . . 154 SALET (P.). — Sur l'étude de la polarisation en Astro- DOME COUR RE eee Pie 7 20 TRS 2° SCIENCES PHYSIQUES Physique et Chimie. CaaupiEr (J.). — Sur les propriétés électro-optiques Les TOIeUTSMIRIeS Re Eee EN US 32 Léauré (André). — Recherches sur la décharge des CONTENSATEUTS EN = Ce .. 485 MERvEAU (J.). — Recherches sur la viscosité. : 989 Work (Dr Daffy). — Contribution à l'étude de l'azo- ture d'aluminium et de l’azoture de baryum . . . 527 3° SCIENCES NATURELLES ABELSON (A.-R.). — La fatigue mentale et sa mesure par l'eSthésIomeirTe EN CN 169 Massoxvar (Em.). — Contribution à l'étude des Pupi- POS Me MN Se Laurent à lobe RON RL de 447 Sroykowircx (Wélimir). — Recherches physiologiques sur la prune et méthodes à employer pour l'amé- lioration de l'industrie prunière en Serbie. 991 Séances des 4 TU MOI ER 660 _ il — ES PT lente DEN 661 1S — SNS MN 7411 -- 25 — PET PRE 158 — ee août NS roc 197 8 — — 197 — 16 = HR om 198$ — 22 — — 198 — 29 — — S39 — DASeD EME EN NC TE 83S — 12 = = 1 MOSS 1 — 19 — Cet 50) — 26 — 70) ee SPAOCCODEP PR CE 876 — 10 — — aa — 17 — — 912 - 24 — — 913 = 3 — —- 113 — 7 novembre — 959 — 14 — _ 993 — 21 — — 994 — 28 — — 99% — 5 — — 1035 Académie de Médecine. Séances des 1k décembre MINE CN ML 39 — 21 — =— bi — 28 = SET Or in RS — AA NVIe OR ET EEE ER SR — Il — EN CE D | 1048 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Séances des 18e anvier A0 ER ER 171 |, Séances des 3 mai 1910 Ua + SON O02 — 8 LEVTIeL Te NE PT TP IT — 1 juin = LORS ER 510 = 15 = es PANTE EN 247 = DOMATUTIELERS NEUTRE AGE — 22 -- be to HEMDAT — $. novembre A4 CEE 995 — Jer mars ERNST RE 263 —_ 8 — RE NS ln à 263 £ Fe 15 & ST AR, 312 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST A ee S NA RE 512 | Séance du 24 janvier 1910. . . . . . .. 264 — 3 — PRE RON EN EU Joe 355 — D avril EE EE M LL 356 — 12 — GR ENE . 356 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE = 19 — OR POS EE à 403 Æ 96 = TRE CIRE 103 | Séances des 21, décembre 1909 RS 83 #7 3 mai CA NL 2Ue LA AE NIET 450 = 18 janvier AUDE 172 _ 10 — NU ÉTAT 450 — 15." février. MR T CUE 264 17 NE PU SIM 491 — 15 mars nt he Ve MORE 351 — 24 — ET ENCRES VOUS 491 — 19 avril = Lier ee 451 Le 31 — RME LL Es 531 — 17 mai =, fs et TN 532 — fl juin MA EN COM AR 531 — 21 juin RU Us 2: 663 _ 14 _ SN ES ME TE et 568 — 42. piuillet LP TRES rOOUL2 ee 21 = LE et ET à 568 — 15, nOVemMmbre M 996 28 — SN Me de EN Ce 621 = 1 JLNer RAP ONE RENE se RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY à pl mn M 0 AO DA ie CE 112 | Séances des 21 «novembre "19092 RER 40 cu 25 NE ne MP PEUE ue — 44 décembre — . .. 0". 83 “7 FH OCT SRE e IE NSRANeTE # 11, janvier O0 ORNE 129 Fe : ra RE RO ET ARS ae — 8 mars ML JEANS SN PEU — = + M nn CM 3 + = 2 i — 5 w. 25 "4 MR te 914 23 MAL À = SPP 570 — SNNOVEMPTEM A EME Ne LOS 959 = E RAT OS ET UE de Société française de Physique. — 22 _— RE AN PE RE e 995 == 29 — EN Se RS 993 | Séances des 3 décembre MIDI EEE 40 _— GROS Lo LE . 1036 = Up no = CU RC EE 83 = 13 = it CCR 1036 — 1 janvier MAIDEN DE LEE — 21 — =" rte NOM TERRE 172 — 18 février, —°°7'L PNA 264 Société de Biologie. D 4, OS EEE 313 — 18 — RE Séances des HMdécembre 19091 FE 0 39 EN ie pu LR TNA FT Fe == 18 — PR UE ENS 0e si . se FE ANTON = 8 L'janvier 1910. PAT) = fr À LT LT ATEN = 15 = RRQ Rom te 128 n ETS RAR Et : DES 99 ve Ex À ! 199 — IN à IE Rd JE ee 29 = HERO ET HAS 171 — 18 novembre — . ....... 997 5e à RATER RE p OS ONE _— 2, décembre NA ENS 1037 — 12 — HR D EC ENERE 217 — 19 _— ER RUE été teh ni 96 En NS 82 263 Société chimique de Paris. ue: = ee 9 Je 12 RÉ MNE STR RE: Séances ües 10 décembre MIDI SNS #1 D PT LEA LME RE LUE 1 eu 94 Rx FE NE — 19 = yes oo Mo 356 RAS RE — DMÉANT NN ETS RS AE à 357 ci 2 one USERS ne PE Ur EU COST #18 œ 11e: février /— I NIUS 219 _ 23 ARR GTA 40% a de EE = “+. — 30 — ML ee ce 450 11 + Fe rie ER se - : Le — mars Ts. PACA CES 359 — 1 mai CN PE UE a 451 a g El Æ 0% — 14 _— = MAG RO UE MORE 491 99 MR 1 © à 193 = 21 — ES EAST ONE 491 ca 22 CL ie AURAS Les = 28 PE. 531 “ 2004 EL 04 NOIRS nus . à = 10 ex 71 Le , 9 juin, = UC 5 # juin RE ee eue 532 ES 9, = 624 — 11 — UN ONU 569 à tige es LUE 665 — 18 _ ENT NN 569 où 5, AMEL ST CIRE 22), — 25 _ = Jécoi dt ST 56 622 œ è juillet; RE - Lee Société Royale de Londres. -s Le 2 ne see Séances des 25Mnovembre MIRE 85 & 30 = ENORME. 109 2 DR ete ANR : n+ Li 99 dE 914 = écembre — ..... RE A M re © ©" "ES A — 13 janvier 4910: . . . . . . | 174 — 5 novembre —— ‘PS 960 à 20 + er |; FN OA 219 Œ 2 “æ RS ER - 27 — RE lie 266 + 19 = Rdv D re 995 — SLTENTICENE NU LE LEONE . PA 3 er et. + Er _ AN CAE 360 — 3 décembre — . . . . ... . 1036 = ci a LAMPE ce 4 10 LE 2e 1036 — 24 — CC UN DU 405 MALI Ta — 3 mars paie RARE 406 | = 10 = 2 AO ANS 453 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX _ 1% avril PUS ONU 533 — 21 — = ben eus Séances des 1 ‘décembre 4909 "RER 00:82 — 28 — — 512 — KA Janvien PAOAIDIE RE 129 — 5 mai Te de 665 — jer AMfÉVrIEr = MEET 219 _ 26 — =, SCENE 666 — 115 mars = ei CRE C3 à juin = TU - ME 713 — 5 avril RE Lt D LtNo 40% — J — ET SAR de 139,499 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1019 Séances des 16 Jin 0 AOAD ARE na 10l — 23 — LIT TIR I ES 839 — 30 — RE oui TN! Commnunicalions reçues pendant les vacances. . 915, 961 Séances des SÉDOVEMDTE AOAUL- PEER 998 — 10 — = . . . 998, 1038 Société de Physique de Londres. Séances des a sat MANS, v 174 _— il FÉVNELE TS A RE M 02220 — cl mars — AR EI "361 — S avril SLI ï . 406 — 22 — RUSSE, RON EE — 21 mai ie co ARC O1 — 10 juin RE S e e 000 _ 8 juillet NE re TE COL 05 SUD 28Mractobre Len M. ne HUB — NO TEMbNENEE MEN TRE NE 998 — 25 _— ADR) AA Ps à 1038 Société de Chimie de Londres. Séances des DMUÉCEMDNEMIUE ST 42 — 16 — LE St 700 oi 86 — D he ON ONE SE Sen NET 7 5) — - SU LUTTE PRES EME 10 1624220 — 17 — RS el ee 267 _— 3 mars MR TO DE COS 361 — 17 — ne EMEA SRE ERA RS 362 18 — NE RS 0 ed 453 — 21 avril RAT 0e, PES 5 mai AR Le el a ja 49% 26 — Rs nuls cle fo _ 2 juin PET CS ACER SRRE 624 — 16 — er 5 do 0 NET 713 Communications recues penlant les vacances. . 961, 999 Séances des DODMMOCIODLE RAID PRE NT 999 — 3 novembre — . .. : . . . . 1039 Société anglaise de Chimie industrielle. SECTION DE BIRMINGHAM Séances des DARAOCIObreS MIDI PP MEN s7 — 9 décembre — . . ... 268, 362 — POTENTIEL mt CLS LR 495 — 14 avril TR AURAS SEX 514, 7159 — S0MMOCIODrEN C1 7 : 1: M 1039 SECTION CANADIENNE Séances des 22 OCIONCE MIDONEE ANT NT — OPPTANVIe RATIO RCE 313 — AH ATEUTIELe UN Re Er c 495 SECTION D'ÉCOSSE Séances des 23mn0vembre MIVIME 313 — ABMNTANVIer UOTE MEN SN 14 363 _— DD AE IER = RE. Pen e 495 SECTION DE LIVERPOOL Séances des ADbnovembre ACIER PRET — 9 mars LOTS MEN EN A 05 — 21 avril — ne CS 7 (800 — D TO EN ES de 915 SECTION DE LONDRES Séances des ler novembre 1909 . . . . . . LD NS. — 6“décémbret— RTE 87 _ SAN AO 10 RE 175 — 17 — — EC En au Det dE — ïl LENTIEDE. —" DÉCHOBAE — H mars 00 400 — 4 avril LE PUS — 2 mai +, ALON TR 159 — 6 juin = ben: MET59 _ 2 juillet ER te Cd 00) Séances des Séance du Séances des Séances des Séance du | Séances des Séances des SECTION DE MANCHESTER 3 décembre 1909 . . . . . 175, 363 14 janvier 1910 . : SUD # mars het : .… ET& Aer avril A . 574 4 novembre — ..... sv à A0$0 SECTION DE NEWCASTLE 17 mars AE EEE 20 7. à 'BOD SECTION DE NEW-YONK 49 novembre 1909 . . . . . . . . 268 DOS téVrIeL MA I10 2 EUR Ce LUE 25 mars TRE CE Poe L'ADE 22 avril RL RAR ae: |: 20 mai RS a tas 910 SECTION DE NOTTINGHAM DU to) 4 CIE OS 17 novembre — ... na) NOT Stadécembré —. "40e 82 PÂTE TOURS MN EL IUONS" SEEN . 454 23 LÉVDIEDE Ci — a Ve Et MODE 23 mars RS CR :34, 5714 27 avril NT ARR NEA Mt Er 18 mai Me UT 159 28 novembre — . .... 22.1-11000 SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE SHdécempbre AIUIEMEN CN CRE 132 SECTION DE SYDNEY 18 mai AID NE AT. 2 0025 24 septembre — . .... . . 1000 SECTION DU YORKSHIRE . BénovempremtdiI EM RAS 13% décembre — . : . . - 1.6, 268 AT TANT MIA EN NE SU E 21 ÉOVTIEL AP 0. MN CONSO) 21 mars AE NOR ENS ARS X 25 avril EN SONT RTE 02 23 mai ET ST EN © 760 DÉMEOCLODIE Cle 1040 Académie des Sciences de Berlin. Séances des JRÉMoctobre AI 0IEN ER NE R- 221 LDIOVEMPTE EN 221 18 _ MEME 221 25 — MALE Li 2 2 décembre — 16 — RE TE 6 janvier 1910 . 13 — — 3 TÉVTIE DE 17 on = 24 — = 3 mars SRE IT PERS 10 _- — 17 — RE de 14 avril — 21 — — 12 mai — 2 juin — 9 = = 16 — = L,, NENR, MO Ee 23 — STRESS) ICE MEET A ES RES 21 — A LUE Ta RUE 28 — TT = Vo RE LE 819 Société allemande de Physique. Séances des 19 novembre 1909 . . 3 décembre — 17 —_ fon s ne DRMIANVIET AM TUE 7 == 1050 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Séances des Arojanvier MAIDEN TRE 456 — Er" MéVIer M NE rer 535 — 18 — NOR VE CCE 535 — 4 mars Se ae 575 _ 18 — TN FAR 575 — 28 — NE Ms LS 2 625 — 29 avril EN ME RE 626 — 13 mai ON EN ORS €67 — 10 juin = che En à S40 _ 24 — NP EE Se) à 818 Mémoires recus pendant les vacances . . . . . . : . S80 Académie des Sciences d'Amsterdam. Séances des SDMAOE OT RRAII EE RREEN REREECE 43 — 2APNOVEMETE NME NE E-R 176 — 94 (décembre — MP CE 268 — 29 An vie MONIEREEREETETE 315 _— 26 février RTE PE 407 — 26 mars PER EM ete 576 — 21 avril M RER Te Te 627 — 28 mai NS 5 ET OS 715 — 23% juin LT RS LME SE . 915 — 2% “septeMmDre "1 1040 Académie royale des Sciences et des Lettres de Danemark. Communications présentées en 1909 (suite). . . . . . 87 Académie des Sciences de Vienne. Séances des 11 novembre 1909 . . — AS — SR ne 43 Séances des 2. décembre MILITE RNCS 9 = ET, COQ ER 16 — AE ER 7 sv MOI RME RES 43 — PRE D 20 _— NE sde FU DEN 3 février. — 10 — MR EE 17 — NE Me TRS NUE 3 mars ME 0 Lt Gr 10 — = Rire M'ÉRNDÉE 47 _— I 2 avril TMS 0 TONER 28 — Te ONE 6 mai Se PER 12 — RES 2 juin A INT ORNE 9 — à 16 — ET OU ee ri 30 — A4 40e NÉE 1 juillet HS TRE 13: MOCIODTP EN MREEE 20 — —ÿ VLC 21 RP EE 3 novembre /— "ANNE Académie royale des Lincei. Séances de HAN septembre MOI EEE octobre — à - novembre = ANT décembre — Janvier ou 01 D) PRES TévVrIien = LUN CMRNERE mars CS ACIER avril RO 0 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XXI DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES" A Agsinrue. — La composition chimique de l’absinthe. AgsonPrion. — Sur l'absorption des liquides par les SUDSIAN CES ROLEUSES MER De re es ele — Absorption des gaz par le charbon de bois. AcanémEe. — Noces d'argent académiques. < — Elections à l'Académie des Sciences de Paris. 89, 133, 295! — Elections à l'Académie de Saint-Pétersbourg. ACCumuLaATEURS. — Emploi des accumulateurs . . Acives. — Rôle des acides aminés dans l'organisme . ACIDE NITRIQUE. — La fabrication électrochimique de l'acide nitrique et des composés nitrés à l'aide des HÉROS TERRE ET EN. ACIDE SULFURIQUE. — L'emploi du soufre pour la fabri- cation de l'acide sulfurique . Acers. — L'influence de l'azote sur les propriétés des ACLBLS SUN De en de NAN UE Lis de ACTINOMÉTRIE. — L’ Actinométrie et la Météorologie à Ténérile . Eh È Acrions. — Les actions à ‘distance . Acnvariox. — L'activation artificielle de l'eau. . ApsOrPTION. — Le mécanisme de HESOEEON de l'hy- dropenemmarle Chachon: #4 00. 2 AËRONAUTE. — Guide de l'aéronaute pilote : AÉRONAUTIQUE. — L'Exposition internationale aéronau- tique de Francfort-sur-le-Main . . . . . . ë — L'Aéronautique en Sorbonne . . — Cours d'Aéronautique. 1° Statique et dynamique des ballons. Résistance de l'air. . AËROPLANE. — Le problème de l'aviation, sa solution AM LAETODIENE ES PEN ue Notes sur le problème de l'aéropiane (équilibre et stabilité). 4 = L'équilibre des aéroplanes. à Qualités que devront posséder les aéroplanes et es hélicoptères de l'avenir . Stabilité des aéroplanes. Surface métacentrique . AruiQue. — Etudes sur l'Afrique. Le an de Bonne- Espérance au xvir° siècle . Le AGENDA. — Agendas Dunod pour 1910 . — Agenda Lumière pour 1910 . AGGLuriniNE. — La vitesse de réaction dans l'absorp- tion des agglutiuines spécifiques par les bactéries et dans l'adsorplion des agglutinines, de la tryp- sine et de l'acide sulfurique par le noir animal. — L'absorption de l'agglutinine par les bactéries et l'application des lois “phy sico- en à ce lue MAN ÉTE EUR ne 5 AGronomE — Revue annuelle d' Agronomie. Aimants. — L'orientation magnétique dans une agelo- mération de petits aimants. . . AimanrariON. — Sur la mesure de l'intensité d'aiman- tation à saluration et la loi d'approche vers la saturation . ee Propriétés diélectriques de l'air. Son emploi comine isolant électrique . AcgumNoine. — La classification biochimique des ma- tières albuminoïdes . . . ALGÉRIE, — Compte rendu de Ja campagne 1907-1908 du Service EÉPgeIQNE des Territoires du Sud de Air. l'Algérie. .4 Les chiffres gras reportent aux articles originaux. ALTÉNÉS. — Aliénés el anormaux . . ALIMENTATION, — La production de la chaleur animale et les substitutions alimentaires, DER les tra- vaux de Rubner. SRE — Etudes d'alimentation. — Revue des industries de l'alimentation. Prépa- ration industrielle de nos aliments et de nos DOISSONS ARS: CT NN TE — Traité de l'alimentation et de la nutrition à l'état ‘ normal et pathologique. . . . . : ArLraGEs. — Lecons sur les alliages métalliques. — Surles propriétés thermo- “électriques des alliages métalliques. . . — La conductivitéélectri ique des alliages métalliques REC MER PE EE AzLotROPE. — Une nouvelle théorie de l'allotropie. ALpEs. — Une nouvelle percée des Alpes. Le petit SIN BAPDATA ee Ce ie ile ALUMINIUM. — Résistivité et thermo-électricité des aluminiums et des cupro-aluminiums . . AMAZONIE. — Au pays de l'or noir (Para, Amazonas, Matfo Grosso) ME. cu le Sister ect AMMONIAQUE. — La Synthèse industrielle de l'ammo- Made ie ere cen Cu le Me didehe.e AMPÉLOGRAPHIE. — Ampélographie . ANAÉROBIES. — Les anaérobies. ANALYSE. — Analyse des métaux par électrolyse. Métaux industriels, alliages, minerais, PrDAURE GUN EU ENCORE CEE — Sur une méthode d'analyse quantitative de mé- Janges ternaires. . . . - . . . . . . — Technologie et analyse SbTENR des “huiles, graisses GEICITES Re ra CNE ANR ANT Anesrnésie. — L'ane sthésie électrique . AO RO Aximaux. — Le monde extérieur et intérieur des ani- maux. . . ATOMEU QUE MENCRPTRES 10 — Animaux de nos pays. er AnxéE. — L'Année psychologique É ANNUAIRE. — Annuaire de la vie internationale. — Anuario cientifico é industrial, ano 1909. ANORMAUXx. — Aliénés et anormaux. . - ANTARCTIQUE. — La forme du continent antarctique : — Résultats généraux de la seconde Mission Charcot dans l'Antarctique. ANTHROPOLOGIE. — Contribution à | Anthropologie ‘du Danemark . . PE ANTILLES. — Les grandes Antilles . — La décadence des Antilles francaises. AppareiLs. — Quelques nouveaux appareils : — Au sujet de nouveaux appareils de mesure . . . Argre. — Sur le rôle des éléments vivants du bois dans le courant de transpiration des arbres . — Recherches spectroscopiques sur les arcs voltaiques aux pressions réduites . . SEE — Un arc triphasé à quatre charbons. — Luminesceuce dans l'arc au mercure MAUR ENS LU PR TUE MCE ARC-EN-CIEL. — Sur les ondes lumineuses à cornes et la théorie de l'arc-en-ciel ARC. dans le | ArGenr. — La solubilité de l'oxy rwène daosl argent fandu AnGox. — La réfraction et la dispersion de l'argon et les rédéterminations de la dispersion de l hélium, du néon, du krypton et du xénon . AnGox. — La variation avec la tempér ature des visco- sités des gaz du groupe de l'argon. . . : les espaces ARITHMÉTIQUE. — SR PRE arithmétiques. A 1052 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ARMÉE. — Les maladies mentales dans l'armée fran- CASE NT LU 2 ele it le le AL NT RS EE 214 ART DE CONSTRUIRE, — Pratique de l'art de construire. 562 ARTILLERIE. — Les installations d'artillerie à bord des CUIXASSÉSIDÉCENTE EU RÉ CEE 1018 ASIE. — La AA de du continent asiatique. . . 974 ASSIMILATION. — Recherches expérimentales sur l'assi- milation et la respiration végétales. VI. L'assimi- lationte lan libre EREER EEE TE 800 ASSOCIATION BRITANNIQUE. — Le Congrès de Sheffield de l'Association britannique pour l'avancement des SCIENCes Lee: ER CR 940 ASTROLABE. — L'Astrolabe à prisme, d'après un livre CÉCENLTEN EE CC NT OT EE 1014 ASTRONOMIE. — Revue annuelle d'Astronomie . . . . 342 — Sur l'étude de la polarisation en Astronomie. . . 793 ATLANTIQUE. — Une nouvelle expédition océanogra- phiqueldans l'Atlantique RPC 4 ATLAS. — Atlas général (Histoire et Géographie) . . 125 ATTRACTION. — Mémoire sur l'attraction es paralléli- PIRÉdeseliPSOAlE PEN ER TRE 955 AUTO-TOXÉMIE. — Auto-toxémie et infection. . . . . . 840 Aviarion. — Le problème de l'aviation, sa solution Par FAËTOPIanE EC ECC 166 — L'aviation. 1e partie : Considérations générales . 483% — 2° partie : Les moyens de réaliser le vol méca- mue Us re Ne ee CEE 231 AzoTE. — La production d'oxydes de l'azote dans la combustion de l'oxyde de carbone. . . . . . ., 181 — L'influence de l'azote sur les propriétés des ACICTS- enter tee NE EE ar AZOTURE. — Contribution à l'étude de l'azoture d’alu- minium et de l’azoture de baryum. . . . . . . . 521 B BaGasse. — L'emploi de la bagasse comme matière première pour la fabrication du papier . . . . . 843 BALANCE. — Nouvelle balance à pesées très rapides. . 452 — La balance magnétique de Curie et Chèneveau. . 494 BALLONS. — Un nouveau gaz pour ballons. . . . . . 228 — Cours d’Aéronautique. 1'° partie : Statique et Dynamique des ballons. Résistance de l'air . . . 955 BELGIQUE. — Les cavernes et les rivières souterraines de la Belgique (étudiées spécialement dans leurs rapport avec l'hydrologie des calcaires et avec la question des‘eaux potables)...""".. 398 = Hatbelgique au ira vaileE Re ER CRREE 659 BIRÉFRINGENCE. — Sur la biréfringence megnétique des Loqudes aTOMAUNQUES EEE EN E 571 BÉANG-—\Leblanciduchene NE RE - S12 — Une entrave naturelle à la maladie du blanc du CRÉES eV PT EU NE Te RE 20e, EE) Borss = Les DdiSMndUSiTel EN RE RE 187 — L'étude des bois de la Côte d'Ivoire et leur utili- SAONNNAUMUElle PRIE ER RE ET 969 Bone. — La préparation du bore à l'état pur et ses Propriété ES EC CE EE ET 229 BouLanGente. — L'hygiène de la boulangerie. . . . . 48 Brésiz. — Le Brésil, ses richesses naturelles, ses industries. 1. Introduction. Industrie extractive. IL. Industrie agricole et élevage. Voies et moyens de communication. Industrie manufacturière . . 445 BrRuLEURS. — Vérifications du débit des injecteurs de bruleurs a ncandescénc ce 04037 — Photométrie rapide des bruleurs à gaz à incan- deSCENCE SFA A NON TN CPE EE 1037 Buzcetix. — Le Bulletin scientifique de la France et de Ja" BelTIQUES MN RENE NC 322 — Le Bulletin de l'Union fre anco-persane . . . . . 804 BUREAU. — Bureau des Longitudes. . . . . . O0, ‘804 Cc CAFÉINE, — La toxicité comparée de la théobromine et détla’caféine. ETES CIEL MR OR RENE 877 Cazcuz. — Leçons sur le { jalcul des variations. . . . 350 | CALORIMÉ THIE. — La calorimétrie des combustibles. . 800 CAMPHRE, — Le camphre synthétique, son avenir industriel... Ne ARE RP EE ner 2 I CANADA. — Historique du bouclier canadien . . . . . 949 CanaL. — L'état actuel des travaux dans le canal de Panama =, 773 LCR CRE EN PE 45 — Ün dernier mot sur les canaux de Mars ..... 459 — Mers et ses CANAUX NON EEE 485 Cancer. — Contraste entre les réactions d'implanta- tion du cancer après l’inoculation de cellules vivantes ou de cellules désintégrées mécanique- LOTO PO D à Modo STATS À eo € Caxors. — Les hélices de canots automobiles . . . . Caourcnouc. — Les nouveaux succédanés des caout- choucs et les caoutchoucs de synthèse. . . . . . — Essai du caoutchouc par le moyen de l'hystérèse MECADIQUE ». NM MM ere le oo vie Car DE BONNE-EsPÉRANCE. — Etudes sur l'Afrique. Le Cap de Bonne-Espérance au xvu° siècle. . . . . CarBonE. — Le sous-azoture de carbone . . . . . . . — Sur le monosulfure de carbone . . . . . . . . . CaTaRACTE. — La pathogénie de la cataracte sénile. . Cara EDuLIS. — Un succédané du thé : le Catha CUISINE NN EME AN CENTRE CaverxEe. — Les cavernes et les rivières souterraines de la Belgique (étudiées spécialement dans leurs FABRQNS avec l'hydrologie des calcaires et avec la question des eaux potahles). . . . . . . . . . Céciré. — La cécité des couleurs et la théorie trichro- matique de la vision colorée . . . . . . . . . : CELLULE. — Cellule nerveuse. . . LA Te SU MEET — Lesscellules séantes ER — Relations entre la tension superficielle et les pro- cessus CelAireS RENE EE CELLuLoïr, — Le celluloïd (fabrication, application, substituts) MER RER FELELOSS, — Le théorie de la nitration de la cellu- É CT PE I OS NO 0 mo OM Co + à 2 — La cellulose et l'état actuel de l’industrie de la soje artificielle EC LME TMC CRE — Nouveaux dérivés de la cellulose à faible teneur en azote Ts CRC RU RER CPR RERO CenrenatRE. — La célébration du centenaire de Charles Darwin par la Section des Sciences de l'Institut NOTION EENDE VOIS EEE ER — Le prochain centenaire delanaissance de H. Victor Regnault FE CR RE CFRVEAU. — Présence d'un repli mésocælique ‘dans le cerveau human PR EN EEE — Recherches sur la cyto-architectenie de l'écorce céréhrale "Te parte EN PEN EE = 29 partie WE EN TE CE ER CuaLEUR. — La production de la chaleur animale et les substitutions alimentaires, d’après les travaux de Rubner: "NN EE EL ER AE — La conduction de la chaleur à travers les gaz ra- TÉRES SR MR RE Re PR 0 LE — Les chaleurs spécifiques de saturation avec les caractéristiques de Van der Waals et de Clausius. — Physiologie générale du travail musculaire et de la chaleur ennaile EE T — Les chaleurs spécifiques aux basses températures. Caawr. — Le champ électrique des corps célestes . . — Sur une méthode simple pour la mesure d'un ChaMPIMEBNEEUE PEN CENERE — Méthode de mesure d’un champ magnétique en grandeur et direction; dygographe . . . . . . . — Un effet physiologique du champ magnétique alternant UNS NE NEC CE ET EE — Appareil très sensible pour mesurer les variations de la composante horizontale du champ magné- tique terrestre. LL MIO CNET CaaRBoON. — Le mécanisme de l'adsorption de l'hydro- gène par le{ChaTbOn ER ET CHAUDIÈRE. — Maladies de chaudières industrielles et de leurs'acCeSBOiTeS En CR RE CaAUrFAGE. — Théorie et pratique äu chauffage par la vapeur, industriel et domestique . . . . . . . . Cnaurreries. — Traité pratique des chaufferies à va- peur françaises et étrangères es-tu CHEMIN DE FER. — Le chemin de fer du Cap au Caire . — Le développement des chemins de fer anglais . — L'achèvement du chemin de fer transandin PT CHÈNE. — Le blanc du chêne . . . . . . . —_ Une entrave naturelle à la maladie du blanc du Cane. — Histoire du développement de la Chimie, depuis Lavoisier jusqu'à nos jours. . . . . . . . — Revue annuelle de Chimie minérale . . . . . . . — Manuel de travaux pratiques de Chimie minérale. — Fondements et résultats de la Shimie végétale. . — L'évolution d'une science : La Chimie. . . . . — Revue annuelle de Chimie organique . . . . —Thermodynamique et{Chimiel "M Cnimisre. — La formation des Chimistes dans les Uni- versités NET TN TRS 398 405 168 370 953 1032 117 203 534 S16 S5? 19 998 174 214 455 130 * CHRONOMÉTRIE. TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Cuixe. — La civilisation bouddhique préislamique an Turkestan chinois et dans la Chine centrale; les Missions Stein et Pelliot . . APE Cuimounore, — Petite chirurgie pratique . — Revue annuelle de Chirurgie. Cuconoruyzce. — La formation photochimique de la chlorsphylle dans les plantes vertes. . Cuoresrénoc. — L'origine et la destinée du cholestérol dans l'organisme animal Cunomospnère, — L'origine de la lumière de la chro- mos hère. . . — La chronométrie francaise en 1910. 498, Cuure. — La vitesse de chute tranquille des par ticules sphériques à travers un milieu fluide . — Les vitesses de chute finales des petites sphères tombant dans l'air. : Cinématograrme. — Les sources lumineuses disconti- nues en cinématographie . . CLanocère. — Le mécanisme des migrations nycthé- mérales des Cladocères planktoniques. Cuimar. — L'enchainement des variations climatiques. CLIMATOTHÉRAPIE. — Crénothérapie, RC pe thalassothérapie. . . . . . . . . . . . .. CLosrerium. — Sur la structure du noyau et la carÿo- cinèse du Closterium. Cour. — L'inscription graphique des sons du cœur. ConÉREUR. — Sur les cohéreurs Couésron. — Cohésion diélectrique du néon et ‘de ses mélanges . He Cozcter. — Une réforme au Collège de France. CoLLoïnes. — La production des solutions colloïdales à l'aide des rayons ultra-violets. . . CoLonisariox. — Sciences biologiques et colonisation. Cororant. — Les colorants employés dans la fabrica- tion des produits alimentaires. . . . . . . . . — La production d'acide sulfurique aux dépens des colorants sulfurés et du soufre libre. CoveusniBLe. — L'utilisalion du grisou comme com- BUS DIE NATURE SP NA TAREENT E NE Comausrrons. — Les combustions industrielles. (Le contrôle chimique de !a combustion.) ie Couère. — La constitution physique des comètes 3 — La Comète de Halley dans le Talmud . 3 —(La/Gomète 1910 4%. .... — A propos de la comète de Halley É — Les perturbations de l'électricité atmosphérique et du magnétisme terrestre au passage de la comète de “Halley . AAA CUE COMPTEUR. — Les compteurs électriques à courants continus et à courants alternatifs. Conoensareur. — Recherches sur la décharge des con- HEDSAIEULENS NN TA Ts Connucreur. — Accroissement de résistance des con- ducteurs subdivisés, dans le cas des oscillations TEDTAES AR RME NS VE Le eee Mers ConoucrisiiTé ÉLECTRIQUE. — La conductibilité électri- que et la densité des solutions d'acide fluorhy- CHA MENT RENTE ED & LE MON Ve NES — La conductivité de l'électricité à travers le chlo- POTE ATRED ASC EN NEC ED RE — La conductivité électrique des alliages métalli- QUES AUTEUR OP LEE CONGÉLATION. — La dépression du point de congé- lation en solutions aqueuses très diluées . . , . Cox6o. — La situalion du Congo français . CoxGrès. — Le 111: Congrès international de Physio- thérapie — Le Il° Congrès international d'Agronomie colo- niale et tropicale se — Actas y Trabajos del Tercer Congreso medico- latino-americano (Montevideo) . — Le Congrès scientifique international américain deMBUENOS AYTES NAN NE . 461, — Le Congrès de Sheffield de l'Association britan: nique pour l'avancement des Sciences. . . . . ConSranTE. — La constante de la loi de Stefan . . . Coxracr. — Un dispositif à contacts électriques régi par la rotation d'un organe mobile autour d'un axe fixe. 1e Corps. — Théorie des corps déformables. : — Recherches sur les propriétés thermomécaniques GESSCONDSESDIIAES MN AE NEUTRE Cornosrox. — Emploi de |” électrolyse pour RRÉTeRIr Ja corrosion du fer et de l'acier : Corse. — La régénération de la Corse. . . . . . . Cosmoconte. — Les tourbillons et le dualisme en Cos- DMOZONLE MAN MEN, ARR AT DA 1053 Core D'Ivorne. — L'étude des bois de la Côte d'Ivoire et leur utilisation industrielle . 969 Coron-pouDnEe., — Signification de l'essai calorifique d'Abel pour le coton-poudre et la nitro-glycérine. 314 Coucou, — La photographie des oiseaux en liberté et les mœurs du jeune coucou, . 719 Coureurs. — Nouveau manuel du fabricant de cou- leurs . 618 Couxanr. — Sur les courants d'air provoqués au sein des corps poreux par les différences de tempé- rature,. 7 87 — La grammaire ‘des électriciens. 1. Le courant continu. ea ile 123 — La Technique pratique des courants alternatifs, t. Il. Développements et calculs pratiques relatifs aux phénomènes du courant alternatif. 212 — La conversion du courant alternatif en courant continu, 222 — Les elfets thermiques ‘des courants de haute fré- quence dans les tissus organisés è RE EE — Les courants électriques terre-air . . . 361 — Démonstration des courants téléphoniques ‘dans les lignes chargées et non chargées . + 406 — Le calcul des Courants de Foucault dans le fer. 626 — Les courants de haute fréquence et la d'Arsonva- lisation. . . 875 — Nouvelle méthode de production ‘des courants à haute fréquence. . . . . 819 Course. — Traité des courbes spéciales planes et gauches. . - 32 CRÉNOTHÉRAPIE. — {Grénothérapie, “climatothérapie, thalassothérapie. LME as te CE Cume. — Le crime et la société. 400 CRISTAUX. — La purification spontanée ‘des cristaux QUI CE SR ARE VE EN RER A TER 270 — La cristallisation spontanée et les courbes de points de fusion et de congélation de mélanges de deux substances formant des cristaux mixtes. 877 CROISIÈRE. — Croisières de la ARevue générale des Sciences . s01 CROISSANCE. — Lecons sur la Théorie de la croissance. 835 Cuir. — Les problèmes de l'industrie du euir . 465 Cuirassés. — Les installations d'artillerie à bord des cuirassés récents. TRIO LS Currure. — La culture des plantes en sol stérilisé . . 47 CURARE. — Venin de cobra et curare. Sérothérapie anticobraïque. 50 CYANAMIDE. — La transformation de la cyauamide cal- cique dans la terre arable . . Mol Pc 921 D Danewark. — Contributions à l'Anthropologie du Danemark . . 709 Danuse. — La région d'inondation du Danube en ROUMANIE MERE ET CE 605 D'ARSONVALISATION. — Les courants de haute fréquence etila d'ArTSOnvalSBtion EP EN Ne eee 875 DÉCHARGES. — Sur les décharges électriques dans les champs magnétiques intenses, ns Le Se 130 — La décharge oscillatoire lente d'un condensateur doMP00DEMICrONARA SE ER ES CE 314 — Allure des potentiels à proximité immédiate de la cathode dans la décharge par eïtluves. . 515 — Excitation des ampoules e décharge à cathodes iucandescentes et la possibilité de es appliquer BusNteléStaphie sans HI ER RE 625 — Quelques résultats préliminaires obtenus dans l'application du rhéographe à l'étude des déchar- ES OSCAR TES EEE ER PE EC ER 664 — Les relations qui existent ‘entre la loi de Faraday et les décharges gazeuses. - +. 0. eu 667 DÉGÉNÉRESCENCES. — Les dégénérescences auditives. . 659 Décos. — Carte de l'ile de Délos au 1/10.000°, avec un commentaire explicatif. . . 306 Densité. — L'influence de l'air dissous sur la densité GENE MR MEL NE EE Me 16 — Les relations qui existent entre la ‘densité ‘et le degré de dissociation des solutions salines aqueuses. . . 456 — Le maximum de densité et les propriétés ‘phy. si- Ques deul'ÉAN EE SN SE NO 997 DÉPOPULATION. — Dépopulation et mortalité infantile. 354 Dessin. — Cours de Dessin industriel. . . . . . 1034 Dérecrecr. — Contributicn à l'étude des détec feurs et Contac{s SONTES EE PR CE -E ANS JE 1054 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES DÉTECTEUR. — Sur un détecteur d'oscillations actionné seulement par les variations de résistance dues à la température . HÉDCRENENE RE UE Diauère. — Le diabète sucré. . — Pathogénie et traitement du diabète sucré. — Etude pathogénique des diabètes . DiaPnyLAxIE. — La diaphylaxie A CR DiécecrriQue. — L'action des rayons X sur la conduc- tivité des diélectriques liquides se fe Dicesriox. — Digestion et nutrition. Disrerston. — La réfraction et la dispersion du néon. — La réfraction et la dispersion de l'air, de l'oxy- gène, de l'azote et de l'hydrogène et leurs rela- ÉLONB.: fe 5 6. RENE RP TE D — La réfraction et la dispersion de l'anhydride sul- fureux et de l'hydrogène sulfuré. . . . . . . . . — Sur la dispersion de la lumière par les molécules. Dissocrariox. — La loi des tensions fixes de dissocia- tion Dycocraene. — Méthode de mesure d'un champ magné- tique en grandeur et direction; dygographe . . . E — L'influence de l'air dissous sur la densité de REA E — Les eaux minérales, milieux vitaux. Sérothérapie artificielle et Balnéologie lissulaire par leur injec- tion dans l'organisme. — Nouveau procédé pour stériliser l’eau par le per- manganate de potasse. . . — La décomposition de l’eau sous l'action des rayons ultra-violets du Soleil. . . . . — Le maximum de densité et les propriétés phy- siques de l'eau . Esvzuirion. — Influence de la pression sur le point d'ébuliition des métaux. . . . . . . EcLainaGe. — La valeur comparative des divers modes d'éclairage au point de vue ophtalmologique. — Une. nouveauté dans l'éclairage : la lumière du néon . . Ecurse. — Le calcul et l'observation de l'éclipse ‘de Soleil du 17 avril 1912, visible en France. 5 Ecore. — A l'Ecole Polytechnique. — Ecole centrale des Arts et Manufactures . Ecoxomte. — Manuel d'Economie commerciale. . Econce GÉRÉBRALE. — Recherches sur la cyto-archi- tectonie de l'écorce cérébrale, 1'° partie. ; — 2° partie . ECOULEMENT. — Sur l'écoulement de l'eau à travers des tubes et des conduites ayant des bords conver- gents ou divergents. . . # — L'écoulement de l'eau dans les tuy aux courbes. Evrgr. — L'elfet magnéto-optique de Kerr chez les composés et les alliages ferro-magnétiques. Errer PHOTO-ÉLECTRIQUE. — Effet photo-électrique des métaux alcalins en lumière polarisée etsa relation avec les longueurs d'onde. . . . . . — Etude de l'effet photo-électrique de Hertz pour des radiations de longueur d'onde bien définie. Eau. ErrLuve. — Mesures électriques et optiques relatives à l'effluve au sein des vapeurs de sodium et de POLASS IUT EE ECM AU es Le Ecours. — Les égouts de Paris pendant l'inonda- tion de 1910. ELECTRICITÉ. — Recherches expérimentales sur l'ori- give de l'électricité de frottement — L'année électrique, électrothérapique et radiogra- phique — L'industrie de l'énergie électrique, ses conditions économiques . . — J'électricité dans les mines. Applications diverses. Extraction — L'électricité considérée comme forme de v énergie. I. Les notions fondamentales. Le potentiel et la quantité d'électricité. Il. Electrostatique. — La déperdition de l'électricité atmosphérique au voisinage immédiat du sol ELecrusariox. — Sur l'électrisation positive due au phosphate d'aluminium chauffé . . . 667, ELEcrrObIAPAsON. — L'électrodiapason. ELecrrozyse. — Recherches ultra- microscopiques sur le mécanisme de l'électrolyse. . EcecrnoLyre. — Sur la constitution de la charge ‘élec- trique à la surface d’un électrolyte . . — Force électromotrice due à la gravitation au sein des électrolytes. PAQUET ErEcrron. — La théorie des électrons . : . . . . . . — La direction du mouvement d'un électron émis par un atome sous l'influence de la lumière ultra- violette. 1x. ue "RENTREE RARE — Sur la présence d'électrons libres dans les gaz Sn OL inertes à la pression atmosphé- rique . d'a lee RENE CRE NERO TEE Errc ErKOTRCHNIQUE. — — L'électrotechnique. Il. Produc- tion de l'énergie électrique RETOUR — Electrotechnique appliquée. Machines électriques. EcecrroraÉéRAPIE. — L'année électrique, électrothéra- pique etlradiocraphique MERE EN RENE EMaiLLeRIE. — La technique de l'Emaillerie. EugrYoLoGiE. — Revue annuelle d'Embryologie. . . ExuLsiox. — Recherches sur la séparation directe des émulsions par la filtration et l'ultra-filtration . . Exranr. — L'esprit et le cœur de l'enfant . — L'évolution psychique de l'enfant. — Les idées modernes sur les enfants . . . . . . . ENSEIGNEMENT. — Les tendances nouvelles de l’ensei- gnement technique et professionnel en Amérique. — Album de l'enseignement primaire. II. L'Institut scientifique et littéraire de l'Etat de Chihuahua. — La formation des ingénieurs et l'enseigoement technique SUPÉTIEUT DR ER ER Exzyues. — Etudes sur l'action des enzymes. XL. Enzymes du type de l'émulsine. . . . . . . . . EQuArioN. — Les systèmes d'équations aux dérivées partielles". RC Re NE EQuiLigre. — Sur les positions DÉRIURE stable de parallélipipèdes flottants . . . . . . . . . . . . — La pression maximum et la pression minimum d'équilibres hétérogènes à une température con- stanlé : 4 CRE Re OR IPC Esvacr. — Etude sur l'espace et le temps. tee Ess — Nouveaux essais de matériaux ‘fragiles sous des teusions combinées: 4. AC ONE EraLoxs. — Les étalons Rômer . . . . . .. Eroize. — Relation entre la grandeur stellaire mini- “um et l'ouverture des lunettes. AE =: — Les températures effectives des étoiles . . . . . Erunranr. — Les étudiants étrangers de l'Université de Paris EUROPE. — Conspectus mammalium Éurcpæ. ‘Faune des Mammifères d'Europe CE EE PE Evozuriox. — Les théories de l'évolution. . . . . . . — La stabilité de la vie. Etude énergétique de l'Evo- lutionides:espèces-/* CMP CERN ExPÉDITION. — Une nouvelle Expédition ‘océanogra- phique dans l'Atlantique. . . ExPLOsiON. — La propagation du son dans les explo- sionS accidentelle ER NERO — L'explosion des gaz dans les cy lindres de moteurs. ExPosITIoN. — L Exposition internationale aéronautique de-Francfort-sür-le-Main "OR F FacuLré. — La vie de la Faculté des Sciences de Paris. FALSIFICATION. — Traité théorique et DrAtRs sur les fraudes et.falsifications "ECO FanGue. — La fatigue mentale et sa mesure par l'es- thésiomètre. JR ess fe MOINS Fer. — La structure cristalline du fer aux hautes tem- pératures:: RS PR CIS RE PE — Les minerais de fer oolithique de France, fasc. FEnmEenr. — Les ferments de la graisse des vins . . . Fermexrarox. — La fermentation alcoolique du suc de levure. V: La fonction des HHOAPPAIES CRRE la fermentation alcoolique. < — La fermentation alcoolique du sucre. . . — Atlasdes bases microscupiques de la fermentation — La fermentation du galactose par la levure et le suc'de levure "#2 Féuiues. — Le noircissement post- “mortal des feuilles Fièvre. — L'étiologie et la prophylaxie de la fièvre typhoide . . Fionp. — Les fjords de Norvège et leur mode de for- MATION MEME EE RE CIE FLeurs. — Les noms des fleurs trouvés par la méthode simple sans aucune notion de Botanique. . . . . FLoRE. — Flore des Basses-Pyrénées. . . . . . . . . Foie. — Manuel des maladies du foie et des voies bi- liaires. VASTE: : Koure. — Les folies à éclipse : Foxcriox. — Sur les trajectoires d° une fonction obtenue par itération infinitésimale dans son plan complexe TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Honcrion. — Lecons élémentaires sur la théorie des fonctions analytiques. 11: Les fonctions algébri- ques. Les séries simples et wultiples. Les HARRIS — La fonction £ (s) de Riemann . er : Forces. — Géométrie des forces. . . FoncE HYDRAULIQUE. — Compte rendu et résultats des études et travaux au 31 décembre 1907 du Service d'études des grandes forces hydrauliques du Mi- nistère de l'Agriculture , . . RTE Fonèr. — La forêt et les inondations. . . : — La flore forestière de la Nouvelle Galles du Sud. FonmuLAtRE. — Formulaire des Centraux . . Fourmis. — La genèse des instincts esclavagistes et parasitaires chez les fourmis, 1re partie. Les faits — 2e partie: Les théories, Examen critique. . . . — La genèse des instincts RARES et esclava- gistes chez les fourmis . . , , . . : . FrauDes. — Traité théorique et pratique sur les frau- des et falsifications. . . . * EURE Lan Le FrovaGe . — Technique fr omagère. LT: Furoxcurose. — La furonculose des Salmonides. . G GaLacrTose. — La fermentation du galactose par la le+ vureetle suc de levure..." s : GALVANOMÈTRE. — Un galvanomètre pour” circuits à courant alternatif. . . Gaz. — Un nouveau gaz pour ‘ballons. Le Géocrapnie. — Traité de Géographie physique . Se - GéoLocte. — Revue annuelle de G éologie, 1e partie. D ANpartierr ee. DD ET EE EN PEU Me — Traité pratique ‘de Géologie. em Re — Radioactivity and Geology. Au account of the in- fluence of radioactiveeuergy on terrestrial history GÉOLOGUE. — Manuel pour géologues sur le terrain. . GéomérRiE. — La Géométrie d'Apastamha . . . . GÉOTROPISME. — AadmiSBUNE de la théorie des statolithes pour le géotropisme . . . GLACIATION. — Quelques aspects de l'histoire glaciaire de l’Europe occidentale . . . . . GLANDEs. — Les glandes vasculaires, organ s régula- teurs de protection du système nerveu) central. GLoguLiN. — Le globulin des Mammifères. . GLossina. — La nourriture naturelle de la GJossina palpalis. GoiTRE. — La pathogénie du goitre endémique. Le GONIOMÈTRE. — Sur un goniomètre réfractomètre auto- collimateur. . . . Gormtranp. — Les Conventions récentes du Gothard et du Simplon . . . . Gour. — Le goût de vase chez les poissons d'eau douce. GRAISSES. — Technologie et Analyse chimique des huiles, graisses et cires. GRÊLONS. — ? Conservation des grélons et ‘étude ‘de leur microstructure . . . GRENADE. — La grenade- shrapnel Marten Hale. : Grisou. — L’ utilisation du grisou comme combustible 4RÔNLAND. — Croisière océanographique accomplie à bord de la Belgica dans la mer du Grünland. H Hacurca. — Le hachich . . ; Haïrr. — En Haïti. Planteurs d'autrefois, nègres d'au- jourd'hui . : Haurs-rourneaux. — La dessiceation de l'air soufflé ‘dans les hauts-fourneaux. . . AA: — Le haut fouroeau électrique. SG Hézices. — La technique des hélices aériennes. — Les hélices de canots automobiles . . . , . . . Hécrum. — La libération de l’hélium des minéraux par l’action de la chaleur . . è HéwoLyse. — La reconnaissance de l'individu pur les méthodes hémolytiques. . . Héréorré. — Les lois de l'hérédité . . . Himaraya. — Les récentes explorations del Himalaya. HiStTOLOGiE. — Précis d’ Histologie HorLoGerte. — L'horlogerie mécanique. . . Huires.— Technologie et Analyse chimique des huiles, graisses et cires. « … . HYDRATES DE CARBONE. — Les hydrates de carbone, ‘leur transformation; étude de Physiologie pathologi- que. PE ge sur le diabète et son traite- men Hyprocène. — L'émission et l'absorption de l'hydro- gène lumineux . 0 ROC OR LOU 957 .1906 359 879 HxGnNE, — L'hygiène de la boulangerie. . . . . . Traité d'Hygiène. Hygiène générale des villes. — Hygiène nouvelle. : PMR — Catalogue du matériel scolaire de ‘l'instruction primaire de la République orientale de l'Uruguay présenté à l'Exposition d'Hygiène scolaire. Hysrénèse. — Les variations thermiques des hysté- rèses tournante et alternative; grandeurs magné- tiques homologues. . IMAGE. — Images changeantes à deux ou trois PATTES sur plaques autostéréose opiques. . . lumeniré. — L'immunité naturelle de quelques ani- maux à sang chaud contre le venin de la vipère. Ixoe. — L'Inde britannique (Société indigène, politique indigène ; les idées directrices) . . . (voice. — Sur la mesure de l'indice de réfraction des iiquides au moyen du microscope . . . . . . . . Ixeecrtox. — L'insecte et l'infection. Histoire natu- relle et médicale des Arthropodes pathogènes. Acariens . : INGÉNIEURS. — La formation des ingénieurs en France et à l'étranger. . . — À propos de la formation des ingénieurs en France et à l'étranger. — La formation des ingénieurs et l'enseignement technique supérieur. . . AE A tcte Inoxparions. — La forêt et les inondations. — Les égouts de Paris pendant l'inondation de 1910. Ixsecte. — L'insecte ét l'infection. Histoire naturelle et médicale des Arthropodes pathogènes. . . Ixsrerur. — The Rockefeller Institute for medical research. . . 4 Travaux de l’ Association de l' Institut Marey. : INSTRUCTION. — Memoria correspondiente al ano 1908 presentada à la Direccion general del Instruccion primaria del Uruguay. . . INTERFÉRENCES. — Sur les interférences de deux fais- ceaux superposés en sens inverse le long d'un circuit optique de grandes dimensions. . InvozurTIox. — Une involution biquadratique du plan et une involution cubique qui en dépend. . . . . loxisaTION. — Sur la nature de l'ionisation d'une mo- lécule par une particule &. . . — L'ionisation produite par une particule & «. IP Re- lation entre l'ionisation et l'absorption. . . . . . — L'ionisation des gaz par voie chimique. ; — L'ionisation totale produite dans différents gaz par les rayons cathodiques émis par les rayons x. — Les fluctuations de courant daus l'ionisation par chocs . 1oxs. — La recombinaison des ions à différentes tem- pératures . — La mobilité des ions au sein de l'argon et l'in- fluence de faibles quantités d'oxygène sur cette grandeur . — Sur les ions et les particules neutres présents dans certains 42 récemment préparés. . . . ISOLANT. — Propriétés diélectiques de l'air. Son emploi comme isolant électrique. DE de Irazie. — L'Italie nouvelle. . . — La crise agraire en Italie . J JARDIN BOTANIQUE. — Guide des étudiants au Jardin botanique de la Faculté de Médecine et de Phar- macie de Lyon . ARE ALI Joe. — La joie passive . . Jueizé. — Le jubilé de la théorie de la dissociation électrolytique. — Le jubilé du Professeur ‘van ‘Bemmelen : L Lagorarorre. — Le rôle des laboratoires LORIE AVES Larr. — Analyse des laits. Laure. — La loi du rayonnement des lampes à incan- descence . LÉONARD DE VINCI. — ‘Etudes sur Léonard de “Vinci: ceux qu'il a lus et ceux qui l'ont lu. . Leucocyres. — Survie des leucocytes. . Luwnosrococie. — Les résultats et les méthodes des recherches limnobiologiques en Danemark l'œuvre de Wesenberg-Lurd. . . . . . . . . 351 911 137 s02 179 130 1056 Liqueur. — Sur les propriétés électro-optiques des Donenrsmiries a EM EEE PAR LocomoTIvEs. — L'emploi de la surchauffe sur les locomotives. He He oc DOTE GRO — Les locomotives à essence. . . AO Lor. — La constante de la loi de Stefan . — La découverte des lois de Képler. . . . . LonGueurRs D'oNpe. — Mesures de petites variations de longueurs d'onde, par la méthode interféren- tielle ; “application à dilférents problèmes de spec- troscopie solaire — Mesures de grandes longueurs d'onde spectrales. Lumière. — L'incidence de là lumière sur une Sphère transparente de. dimensions NGOMREARIES à une longueur d'onde. . . . . . OM AL EE 2 Luxe. — Théorie de la Lune. Lunerre. — Relation entre la grandeur stellaire mi- nimum et l'ouverture des lunettes. — Lunette de pointage pour pièces à recul limité . M MACHINE. — La machine à en son évolution, S'ANUNÉOTIE CE PE EN EE — Essais des machines électriques. — Mesures mé- CARIQUES LE LPC De Macurxes-ourics. — Machines-outils, outillage, vérifi- cateurs, notions pratiques. . . Maoxérisariox. — Recherche sur la magnétisation à des températures très basses . — Recherches sur la magnétisation de solide. Marx. — Essai sur la psychologie de la main Macavies. — Les maladies mentales dans l’armée fran- caise . — Recherches ‘physico- “chimiques sur les maladies contagieuses des métaux . MAMMIFÈRE. Conspectus marmmalium ‘Europe. Faune des Mammifères d'Europe. . Maxcuox. — La fabrication des manchons à incandes- l'oxygène cence Mars. — Un dernier mot sur les canaux de Mars. — Mars et ses canaux. . Matériaux. — Fabrication et emploi des matériaux et produits réfractaires utilisés dans l'industrie. . . MATHÉMATIQUES. — Problèmes et exercices de Mathé- TIiQUES 2-2 RC — L'initiateur mathématique. - — La représentation proportionnelle et les Mathé- matiques . . Matière. — Les poids moléculaires dans les différents états physiques de la matière. nr ME — La matière organisée . . . Al: — les états physiques de la matière . MATIÈRES COLORANTES. — Estudio fisico- -quimico y bio- quimico de las Materias colorantes organicas arti- ficiales ee Méanpre. — Les méandres encaissés des cours d’eau. Mécaxique. — Lecons de Mécanique céleste professées à la Sorbonne. Théorie de la Lune. . — La Mécanique expérimentale — Cours de Mécanique appliquée aux ” machines. Etude organique des machines à vapeur. 2 Méoecine. — Revue annuelle de Médecine . — Essais de Médecine préventive. . . Memeraxes. — Les membranes aqueuses € et les phé- nomèues superficiels . AE - « .Mémotke. — L'évolution de la mémoire. MÉtaALLOGÉNIE. — La métallogénie du contivent asia- AU CBI JAN MAS 5 MAC MÉTALLURGIE, — U ne forme récente de la concentration industrielle. L'intégration dans la métallurgie . . Méraux. — Recherches physico- cAURIqUES sur les ma- ladies contagieuses des métaux. . — Les métaux spéciaux et leurs composés métallur- giques. MORE CNRC LA — Le flux visqueux des métaux. . — Les métaux colloïdaux électriques e en Thérapeu- tique. . : : : — La soudure autogène des métaux. MéréoroLoGiEe. — L'actinométrie et la météorologie à Ténérife s : MicroPnoE, — Ün nouveau systè me de microphone : Mixerais. — Les minerais de fer oolithique en France, fase. 4. : MINÉRALOGIE. colonies — Minéralogie de la France et de ses TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Mixes. — Manuel du mineur. Recherches des mines et leur exploitation RAS EIRE LT PER CURE — L'électricité dans les mines. Applications diverses. Extraction... um NE ENTRE Mission. — La Mission Tilho au Chad EEE RURES — Résultats généraux de la seconde Mission Charcot dans l'Anfarcthque EE RENTRER Mocécures. — Pseudo-association ou entassement de molésules: 22,720 EEE MorraLiTé. — Dépopulation et mortalité infantile Mourox. — La disparition du mouton en Europe . . Muscce. — Vitesse d'action des médicaments sur le muscle en fonction de la température. . . . . . — La production de créatine dans les muscles pen- dant le tonus et le développement de la rigidité . Musée. — Inauguratiou du Musée océanographique de Monaco . ne Muséuw. — Les « Amis du Muséum». . | MycoLocie. — Revue annuelle de e Mycologie. 1 Myco- logie générale PES : Il. Mycologie spéciale. ; SA TRE Re Mycoses. — La classification des mycoses . F0 CAC N Narcose. — L'origine des effets osmotiques. Il. La fonction des horwones consistant à stimuler les changements enzymatiques dans la narcose. NaviGarTion. — La prime rationnelle à la navigation Navires — Vitesse des navires. Résistance de l’eau en navigation ordinaire et en navigation sous-marine. — Le navire aérien (architecture, équilibre, stabilité). NeiGe. — L'électricité de la pluie et de la neige . . . NEoN. — La réfraction et la dispersion du néon . . . — Cohésion diélectrique du néon et de ses mélanges. — Une nouveauté dans l'éclairage : la lumière du néon NERF. — Principe pour une théorie du fonctionnement nerveux élémentaire — Récepteurs et afférents des troisième, quatrième et sixième nerfs craniaux . NeurASTHÉNE, — Neurasthénie et névroses. Leur ER rison définitive en cure libre. Névroses. — Les névroses. . . NotRCISSEMENT. — Le noircissement post- mortal des feuilles." 2 RUES den ee ee de EN DRE Nowsre. — Théorie élémentaire des nombres. . . NorvÈGe. — Les fjords de Norvège et leur mode ‘de for ation ee ME CRE NE RE PER RE Notation. — Des notations mathématiques. Enuméra- tion, (Choïtietrusape- #2 NE NouveLLE-GALLES pu Su. — La flore forestière de la Nouvelle-Galles du Sud. Re EN e < . Nurritiox. — Digestion et nutrition . . [e) OBsERVATOIRE. — J,'Observatoire populaire de Zürich . — L'Observatoire populaire de Rouen . . . . . . . OcéaxoGraPpaie. — Plan de travaux océanographiques à exécuter dans les stations maritimes de la Médi- terranée I CN PER LT Oneur. — La propagation des odeurs à Paris et les circonstances météorologiques . . . . . . . . . OEiz. — Physiologie oculaire, humaine et comparée, normale et pathologique . . . . . . . . . . . . OEur. — L'œuf de poule, sa conserv ation par le froid. — L'excitation chimique du développement de l'œuf animal. Parthénogénèse artificielle Oiseaux. — La photographie des oiseaux en liberté et les mœurs du jeune coucou - -:. . . .. : OxvE. — Diffraction d'une onde de percussion à tra- vers une fente Or. — Les procédés modernes pour l extraction de l'or. OROGÉNIE. — OREne systématique et tectonique posi- Yet OscrLLarions. — Les oscillations autour d'une position d'équilibre dans le cas d'une relation linéaire simple entre les nombres de vibration . Ouraz. — Recherches géologiques et pétrographiques sur l'Oural du Nord. Le bassin de la Haute- Wichéra.- 22-400 USER OxvaLvényves, — Contributions à la connaissance des oxyaldéhydes. L'orthovanilline et l° ARTUE €) ortho- vératrique + OxYp4ses. — La théorie des oxydases Me 103 754 631 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Oxypases. — Contribution à la connaissance de divers phénomènes oxydasiques naturels et artificiels. . Oz0N6. — Production électrique de l'ozone et applica- tions à l'industrie, l'hygiène, la thérapeutique . . P PALÉONTOLOGIE. — Revue annuelle de Paléontologie. . Para. — Album de l'Etat de Para — Au pays de l'or noir (Para, Amazonas, Matto- Grosso Parc. — Un parc national suisse, . . . . . . . . . . PARTHÉNOGÉNESE. — L'excitation chimique du dévelop- pement de l'œuf animal. Parthénogenèse artiti- ONE EP 0 so ATUUE SERA NE eee Panricuze. — L'éparpillement des particules & par la DNA 0 AA ET TT ENS MOT — L'ionisation produite par une particule &. II. Rela- tion entre l'ionisation et l'absorption . . . . . . — Sur les ions et les particules neutres présents dans certains gaz récemment préparés . . . . . . . . Passe. — Le passage du Nord-Ouest : Roald Amun- CE ERA NBE. à ot RON Perception, — La relation de la perception lumineuse AIG peLCEPLIONICOIQT EEE UN. AR-2e C0 Perse. — Révolutions de la Perse (Les peuples et le gouvernement du Roi des Rois). . . . . . . . . PERTURBATION. .— Le caractère rotatoire de quelques perturbations magnétiques terrestres à Greenwich, etenrdistnibution diurne NN EN 0: Perir SaiT-BERNARD. — Une nouvelle percée des Alpes. Le Petit Saint-Bernard Pérroze. — Coup d'œil sur le pétrole roumain. . . . Pnacocyres. — L'influence de petites quantités de cal- cium sur le.mouvement des RaGOONtES me orte Puacocyrose. — Influence des endotoxines bactérien- nes SUPIIa pag OC yLOSEL. AMEN ARE UNS PnénomèxE. — Sur les phénomènes de Zeeman dissy- métriques rencontrés dans des spectres d'émission. Paicosoraie. — Cours de Philosophie positive. . . . — Philosophie de l'expérience PuonoGraPne. — Une nouvelle méthode d'inscription PHOHOBTOPRIQUE AE EN ET EN -L-RENTe7re PHOSPHORESCENCE. — Sur. la phosphorescence à basse LOLRDÉTALIURE RS eee: Aa ee eee 0e Puoro-ÉLEcTRiCITÉ. — La sensibilité photo-électrique . — La sensibilité photo-électrique des métaux alcalins en fonction de la longueur d'onde. . . . . . …. — La chute cathodique au sein de l’argon sur les cathodes de potassium et sa réduction par l'effet photo-électrique — Expériences photo-électriques sur l'anthracène. . — Nouvelles expériences sur l'effet photo-électrique ÉCART ET ENS SU les EE physico-chimiques PuysioLoGre. — Traité élémentaire de Physiologie . . Paysiorérapre. — Le Ille Congrès international de BHYSIOHÉT ADI REC CT EE Paysique. — Cours de Physique conforme aux pro- grammes, des certificats et de l'agrégation de Physique. V. Electro-optique. Ondes hertziennes. — Traité de Physique. Thermométrie, capacité calo- rifique. Thermochimie, conductibilité calorifique. — Cours de Physique. VI. Etude des symétries . . . — Traité de Physique. Thermodynamique générale. Fusion. Vaporisation . Prerre. — La synthèse des pierres précieuses . . . . — Pierres et matériaux artificiels de construction. . PLanre. — Sur le mouvement de l'eau dans les plantes — Changements dans le développement et les formes des plantes résultant du milieu — Les maladies des plantes. Leur traitement rai- sonné et efficace en Agriculture et en Horticul- ÉURE SE RE echec ehreniehienieL store voue fs Le PLaoues. — Les courbes de noircissement des plaques PHOÉOSRED OUEST CU EE. ee PLurEe. — L'électricité de la pluie et de la neige . . . — L'influence du tonnerre sur les gouttes de pluie. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1910. 367 Poins aromique. — Nouvelle détermination du poids ATOMIQUE" AUISÉTONEUME Ne Re eu, F . L , 2 — La Table internationale des poids atomiques pour 1911 DC OP PE NT EU PC LOUE cé r ete Poins moLécuLAInE. — Les poids moléculaires dans les différents élats physiques de la matière. Poixr. — Le point à la mer et son bistoire. PTE Porssoxs. — Le goût de vase chez les poissons d'eau DOUCE LE PDT Net . « PoLaRiSATION. — Le degré d'achèvement de la polari- sation circulaire de raies décomposées magnéti- GUEMENRTER ENS EURE rate de TER Fe — Sur l'étude de la polarisation en Astronomie. . . PôLe. — Départ de deux expéditions polaires . . . . PourriQue. — Energétique sociale et politique positive. Pozyrore. — Déduction de polytopes et de réseaux de polytopestsemirépuliers. CRE PACE CET — Sur le rapport entre les sommets d’un polytope six dimensional déterminé et les droites d’une SDTACBYCUDIQUe FPT A NC : Ports. — Exploitation des ports maritimes . . . . . — Les grands ports de France, leur rôle écono- AE ee OO CU DUC Te CARE NET EE Porassiun. — La dispersion de la lumière par la vapeur LeDOTASSIUNE IN ME A EEE Poumoxs. — Les causes de l'absorption de l'oxygène PARMIESpOUMONS EEE PEN EDEN z Pourpre. — La nature et la nuance du pourpre an- EE A ER RER A SR 7 LEE PRÉCI?ININE. — Sur le poids de précipité qu’on oblient dans les réactivns de précipitine. . . . . . . . . Prime. — La prime rationnelle à la navigation. . . . PROBLÈMES. — Récréations mathématiques et problèmes des temps anciens et modernes . . . . . . . . . — Recueil de problèmes relatifs aux applications du Calcul différentiel et intégral. I : Calcul différen- LICE ER PROTUBÉRANCE. — Nos protubérances terrestres : Pauxe. — Recherches physiologiques sur la prune et les méthodes à employer pour l'amélioratiou de l'industrie .prunière en Serbie . . . . . . . . . . PsycnoLoGiE. — Précis de Psychologie. . . . . . . . Pupipares. — Contribution à l'étude des Pupipares. Pyrénées. — Flore des Basses-Pyrénées . . . . . . . PyRouETRE. — Le pyromètre thermo-électrique pour la mesure des températures élevées . : . . . . . R Ranio-acrivité. — L'action photographique des parti- cules «x émises par les substances radio-actives . — La radio-activité de la rosée. . . . . . . . . . . — Radioactivity and Geology. An account of the in- fluence of radioaclive energy on terrestrial his- — La radio-activité et la constitution de la matière. RADIO-BALANCE. Radio-balance thermo-électrique pour la mesure absolue de la radiation. ... .. Rapi0GraPHIE. — L'année électrique, électrothérapique eEradiopTaphiquer Ne MSN RME RTE RaproTÉLÉGRAPRIE. — Progrès récents en radiotélégra- phie et radiotéléphonie . RDC PRE RaDium. — Détermination à longue période de la vi- tesse de production de l'hélium par le radium. . — L'action de la radiation du bromure de radium sur lapeautde/Loretlle(duMapne CRT EE — L'isolement du radium métallique. . . — Le poids moléculaire de l'émanation du rsdium. RAGE. — La rage dans l’agglomération parisienne de AD 8 4000 ITEE Robe Ne M RE EU Rate. — Les anomalies qui se présentent dans l'inver- sion des raies du sodium dans un bec de Bunsen- Beckmann per-Hewitt pour la production des rayons ultra- violets - 1057 —_—_—_———_—_— 666 520 166 1031 716 222 76 383 991 215 447 34 617 1058 Rayox. — L'action des rayons x sur la conductivité des diélectriques liquides . . = — Sur la nature des rayons magnéto- û cathodiques : — L'action des rayons 4 sur le verre . . — La production des solutions colloïdales à l'aide des rayons ultra-violets. . . PA — Le passage des rayons 8 à travers la matière À — Absorption des rayons cathodiques au sein des gaz, ; » — L'ionisalion totale produite dans différents gaz par les rayons calthodiques émis PE les ra- YODSEX >: — La décomposition ‘chimique de l'eau sous l'action des rayons x du polouium. . , . . “RER IENT — La structure des rayons y. . . . — La dispersion des rayons $ homogènes et le nombre d'électrons contenus dans l'atome. — La décomposition de l'eau sous l'action des de ultra-violets du soleil. . , . . STORE A — Les rayons positifs . RAYON-CANAL. — Sur la scintillation ues ray ons- -canal. — Observations relatives aux rayons-canal. . . . . — Sur de simples dispositifs pour FRA les rayons-canagl . . . . ' RécréATION, — Récréations mathématiques et” pro- blèmes des temps anciens et modernes . . . . . RérrAGrION. — La réfraction et la dispersion du néon. — La réfraction et la dispersion de l'air, de l'oxygène, de l'azote et de l'hydrogène et leurs relations . — La réfraction et la dispersion de l’anhydride sul- fureux et de l'hydrogène sulfuré. . — Mesure des indices absolus de réfraction dans le verre déformé. RérracroméTutE. — La réfractométrie et ses applica- tions pratiques . . . 5 6100 etat 1e RéGiMEes, — Régimes alimentaires ; — Les régimes usuels . . . RéGioxs, — Régions naturelles et noms de pays. (E tude sur la région parisienne.) . REIX. — Rec herches sur le régime alimentaire ‘dans les ‘affections durent el... Linux Reratrs. — Le relais té léphonique. : Renan. — L'élevage du renard à fourrures . . REPRÉSENTATION, — La représentation proportionnelle et les Mathématiques . . Resernariox. — Les bronches saccales et le mécanisine de la respiration des oiseaux . — La biochimie de la respiration. . . . ... . . . . Revue. — Revue annuelle de Médecine. . . . . . . . — Revue annuelle de Géologie . . 247, — Revue annuelle d'Astronomie . . . . . . . . . . — Revue annuelle de Chimie minérale . — Revue annuelle de Mycologie. 1re partie : ‘Myco= logie générale. : TT RS — 2° partie : Mycologie spéciale HP AE, — Revue annuelle de Paléontologie. — Revue annuelle d'E mbryologie. — Revue annuelle d'Agronomie. — Croisières de la Revue genérale des Sciences. — Revue annuelle de Chimie organique . . . . — Revue annuelle de Chirurgie. DUO, Ricn£gsse. — La vie de la richesse … . RiGiprré, — La production de créatine dans les wuseles pendant le tonus et le sp tirs 0 de la rigi- dité. 74.7 Mrncle lee ss tosée. — La radio-activité de Ja rosée. XOUMANIE. — La région d'inondation du Danube en Roumanie. . . Se Roure. — La route mode ne. à S SarNt-PAuL. — Carte générale de l'Etat de Saint-Paul Brésil): #1 0 IREM EE ENT REC SALMONIDES. — La furonculose des Salmonides. . . Sax. — Le volume du sang des Mammifères et ses rapports avec le poids du corps et sa surface . — La composition inorganique du sang de quelques Vertébrés et Invertébrés et son origine . . . — La perméabilité pour les métaux alcalins et les métaux alcalino-terreux des corpuscules rouges du sang dans des conditions physiologiques . . . SavaxrT. — Savants du jour : Henri Poincaré . ; — Savants du jour : Gaston Darboux. . . — Savants du jour : Emile Picard À SCANDIUM, Recherches sur le sc andium ; SCIENCE, —: Dieu et-Science . . . "1. 219, S16 715 95% 64 297 343 555 A3? 433 556 692 279 801 860 9s1 400 268 410 6 05 5 75 165 4006 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ScLéromérniEe. — Sclérométrie physiologique, . . . . Sécnérine. — Sur l'absorption de la sécrétine . . SECTION. — Détermination Grains de la mai- tresse section. : . Senie. — Recherches physiologiques sur la prune el méthodes à employer pour l'amélioration de l'in- dustrie prunière en Serbie. . . SÉROTHÉRAPIE. — Les eaux minérales, milieux vitaux | : Sérothérapie artificielle et Balnéologie tissulaire par leur injection dans l'organisme. . . SERVICE. GÉOGRAPHIQUE. — Rapport sur les travaux exé- cutés en 1908 au Service géographique de l'Armée. SinéroLirmiquE. — Le sidérohthique suisse. Contribu- tion à la connaissance des phénomènes d’altéra- lion superficielle des sédiments . SIDÉRURGIE. — Progrès récents de la Sidérurgie SIL — La formation des silicates complexes . SivrLox. — Les Conventions récentes du Gothard et du Simplon. : . SISMOGRAPHE. — Sismographe à colonne liquide. SN #5 Société. — Election à la Société api des Sciences de Liége . - — La Société d'Histoire naturelle de Afrique ‘du Nord — Le erime et la société : : : 3 — La Société de secours des Amis des Sciences. . : — La médaille Albert de la Société Royale des Arts . -— La Société des Amis du Muséum . Soir, — La cellulose et l'état actuel de l'industrie ‘de la soie artificielle "=." SE Soc. — La culture des plantes en sol stérilisé . Soueir. — Le calcul et l'observation de l'éclipse de Soleil du 17 avril 1912, visible en France . . - Utilisation ‘de l'énergie de la radiation solaire . . Soroetiré. — La solubilité du xénon, du krypton, de l’argon, du néon et de l'hélium dans l'eau à diverses températures . . ; : Sox. — L'extinction du son dans une atmosphère vis- queuse par de petits obstacles de forme cylin- drique et sphérique. . — La perception du son chez le Sammarus pulex. . — L'amortissement du son par les liquides écumeux. — La propagation du son dans les Res acci- dentelles. -2,; © ae — La propagation du son dans un brouillard Socne. — La soude électrolytique . . Sououre, — La soudure autogène des métaux . Sourre. — L'emploi du soufre EOrE la fabrication de l'acide sulfurique è — Le spectre d’ absorption de la vapeur de soufre et ses relations avec la complexité moléculaire de cet élément. Sorrce. — Les effets des tremblements de terre sur les sources minérales . : SPECTRE, — Sur les phénomènes de Zeeman dissymé- triques rencontrés dans des spectres d'émission . La partie à grandes longueurs d'ondes du SES — Les spectres üe dissociation. . . . MES — Spectres multiples et variations spectrales . Un type particulier de spectres d'émission dis- continus des corps solides. ; Le spectre os et le spectre de Doppler des rayons-canal . . — Sur Ja variation du pouvoir d'émission des métaux dans le spectre infra-rouge à courtes longueurs d'ondes, pour des températures variables , . . . — La production des spectres fondamentaux du potassium, du rubidium et du cæsium. . à — Effet de la pression sur le spectre d'arc. IV: Or. — Relation entre les spectres et la série périodique des éléments . £ Srrcruoscorte, — Handbuch der Spectroscopie Ter led Srrrzserc. — La question du Spitzherg. . SraroLirue. — L'inadmissibilité de la théorie des sta- tolithes pour ie géotropisme prouvée par des expé- riences . SrÉRÉOSCOPIE. — Images stéréoscopiques à aspect changeant. … . «+ .., home us AID 08 SréririsaTiIoN. — Nouveau procédé pour stériliser l'eau par le permanganale de potasse . . . Srnonrium. — Nouvelle détermination du poids ato- rique du strontium . SUBSTANCE. — Sor l'absorption ‘des liquides par es substances poreuses. . . Aug Sucre. — La fermentation alcoolique ‘du sucre . Surcnaurre. — L'emploi de la surchautle sur les ioco- motives.…. . Er EUR — Ün solide peut- -il étre surchauffé? : 576: 319 918. TABLE ALPHABÉTIQUE DES Surorré. — Un nouveau signe pour dévoiler la simu- lation de la surdité . DMC ; — Les sutures vasculaires . SUTURES. Svrnzis. — L'hectine ou le 606 dans le traitement de la syphilis : Sxsrime. — Vibrations des systè mes ayant un degré de liberté. RUE CEE En et Mn à T Tanac. — Les aualités combustibles du tabac . . . Tauce. — La table internationale des Poids atomiques pour 1911 Tacues. — La décomposition magnétique ‘de raies d'absorption en relation avec le spectre des taches solaires. . . USE Taxis. — Sur l'existence du tanin dans la plante vivante et sur sa signification. Ce Nas ue Taure. — Les taupes et les taupinières Tenan. — La Mission Tilho au Tchad . . . TecuniQue. — Manuel de Technique botanique. Histo- logie et microbie végétales . . . . MERS _ Phy sikalische Technik . . TecroniQre. — Orogénie systématique et tectonique positive. . . . Re DS Ur ee « Tentone. — La théorie de la teinture : | Térécrarme, — L'invention de la télégraphie sans fil. Nolions fondamentales de Télégraphie, . . . éenoxe, — La détermination absolue de l'amortis- sement des circuits téléphoniques. . . . — Le relais téléphonique. CPÉRURETE — Téléphonie . . . SEE END TecLure. — Etudes sur le tellure. 1. Sur la conduite mutuelle des éléments sodium e tellure. - . . . Température. — La mesure de la LU erAtUrE vraie des métaux. . 5 Temes. — Nouvelle méthode de prévision du ‘temps — Etude sur l'espace et le lemps. . . . . Ténénire., — Une Mission scientifique internationale à Ténérife .. T — L'Actinométrie et la Météorologie à Ténérife. Tension. — Détermination oplique des tensions TEerRe. — La terre qui tremble . — Une colonie australe; la terre de Kerguélen : TÉTRACHLORÉTHANE, — Les” propriétés physiques et phy- siologiques du tétrachloréthane et du trichloré- thylèner. + . THALASSOTHÉRAPIE. — = Crénothérapie, climatothérapie, thalassothérapie. . . . Tuauuum. — Les relations du thallium et des métaux alcalins. . . : Tu. — Un succédané du thé : le Catha edulis : : | Tuéarre. — Les trucs du théâtre, du sirque et de la foire ï TuéoBROMINE, — La toxicité ‘comparée ‘de ia théobro- mine et de la caféine . . . . Tuéorie. — Conséquence de la théorie d° ‘Young. Le blanc binaire, le blanc ternaire, le cercle chroma- tique . È * — Principes de la théorie des fonctions entières d'ordre infini . . . . APE — Théorie élémentaire des nombres . THÉRAPEUTIQUE. — Aide-mémoire de Thérapeutique. — Thérapeutique usuelle des maladies de l'appareil respiratoire. . — Les métaux colividaux électriques en “Thérapeu- QUES . THERMODYNANMIQUE. — Thermodynamique et Chimie. . THERMOMAGNÉTISME. — Les POAPNIÈIES thermomagné- RUES Te TÉJÉMIENtS. 0 + 102 LE Tiger. — Le Tibet dévoilé. . . Tissu, — Les effets thermiques des courants de haute fréquence dans les tissus organisés . . : — Les tissus chromaphiles et la moelle adrénale. : Toxxenne., — L'influence du tonnerre sur les gouttes deplure = Touree. — Les progrès de l'industrie de la tourbe : : — La gazéification de la tourbe A ToureiLLons. — Les tourbillons et le dualisme en Cos- mogonie . . . . TRANSFORMATEUR. — Un transformateur à résonance ; Thavaiz. — Physiologie générale du travail muscu- laire et de la chaleur animale . : TREMBLEMENT DE TERRE. — Les effets des tremblements de terre sur les sources minérales. *ÉMARSES ES — Développement des Trypanosomes datsriesmonches (86-156 F0: 7. 0. CE CRE MATIÈRES Tayranosome. — Les maladies à trypanosomes des animaux domestiques dans FARPende. ! TORRES HOSOIMA pPCCorurn . — Morphologie particulièr e d'un ‘Trypanosome ‘dans un cas de inaladie du sommeil Tuvranosomiase. — Recherches sur le traitement expé- rimental des trypanosomiases. . — Le système nerveux central dans un ‘cas de tr ypa - nosomiase humaine guérie . . . Temeur. — Dimensions relatives des organes des rats et des souris portant des tumeurs malignes . — Le métabolisme azoté total de rats porteurs de tumeurs malignes. , . — La distribution des substances azolées dans les tissus de tumeurs et somatiques Tuxisis. Essai d'une description gé Sologigue de la Tunisie, d'après les travaux des membres de la Mission de l'exploration scientifique de 1884 et 1891 et ceux parus depuis. fer — Le peuplement francais en Tunisie TurkesrTax. — La civilisation bouddhique préislamique au Turkestan chinois et dans la Chine centrale; les Missions Stein et Pelliot U Urcire. — La pathologie de l'ulcère gastrique . . . Uutra-microscoPie. — Un nouveau progrès en ultra- microscopie. Aa" - UNIVERSITÉ, — Nominations universitaires . , 8, 50, 138, 273, 461, 612, 720, Conseil de l'Université de Paris . . . UNS Les Universités provinciales, écoles techniques Les étudiants étrangers de l'Université de Paris . La forwation des chimistes dans les Universités. L'office national des Universités et Ecoles fran- çaises . , V Vareurs. — Procédé de récupération frigorifique des vapeurs diluées dans de grandes quantités d'air . Vecieurs. — Sur des distributions continues de vec- teurs sur des surfaces. . . . . VENIN. — Venin de cobra et curare. | Sérothérapie anti- cobraïque. . . — Immunité naturelle de quelques animaux à ‘sang chaud contre le venin de la vipère. . . . . . . Verre. — L'action des rayons à sur le verre. : — La synthèse du vernis des poteries, du verre ‘et d’autres silicates complexes. Il. Action de la cREUX sur la silice et sur l'alumine . J1I : La réaction des oxydes solides . . IV : Action de la soude sur la silice et l'alumine. — V : Les mélanges ternaires de soude, chaux, alu- mine et silice. . . VI : Le mélange quadruple d'oxyde de sodium, chaux, alumine et silice. MINES CC LE Verre. — L'électrolyse du verre. . . Vie. — La stabilité de la vie. Etude énergétique ‘de l'évolution des espèces . . : .. Vin. — Les ferments de la graisse ‘des \ins À ViscosaccHARASE. — La visecsaccharase, un enzyme transformant le sucre de canne en une €mulsion. Viscosité. — Méthode pour la détermination de la viscosité des gaz . . . . À — Les viscosités des gaz du groupe de l'ar gon. — Recherches sur la Viscosité . . Vores rERRÉES. — La répartition du trafic entre les voies ferrées et les voies navigables. . . . Voie LACTÉE. — Recherches sur la structure de la Voie lactée. . - PROD Ex LE Vo. — Le vol naturel et le vol artificiel. VoLcaxisue. — Les recherches modernes sur le volca- MSIE NL 22 5 MU Ron Ne 2: Vorunérrie. — La volumétrie physico-chimique Vosces. — Un nouveau percement des Vosges. . W Waärmrmérres. — Waflméires. "Tnt ne ZO0Lo61E. — Zoologia : « + « ©» o e « - 1059 308 716 501 4004 270 vob 83 : ” LL à i * n x LEP al Fo 4 " '4 a à & 4 "a LL fr = ‘ss 14 * TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS" A Aalderink (A.), 576. Abeille de Perrin, 83. Abelous (J.-E.), 38, 82, 529, 532, 660, 662, 663, 712, 158, 838, 914. Abelson (A.-R.), 169. Abney (Sir W. de W.), 85, 266, 405. Abraham (H.), 490, 664, 158. Abrami (P.), 914, 960. Achard (Ch.), 82, 129, 171, 219, 264, 403, 623, 3 85, 80410, 403. Aiïgner (F.), 064. Albahary (J.-M.), 551 à 556. Albrecht (C.-Th.), 311. Alexeieff (A.), 40, 1036. TE (H.), 83, 172, 264, 357, 660, 712, 1 Allmand (A.-J.), 361. Almagia (R.), 627. Almansi (E.), 224, 364, 627. Alquier (L.), 218, 451, 532. Amadori, 621. Amaduzzi (L.), 661. Amar (J.), 912, 993, 994. Amaudrut (A.), 430 à 432. Ambard (L.), 995, 4036. Amblard (L.-A.), 918. Amerio (A.), 88, 364. Amoroso (L.), 364. Awstel (Mie J. Van), 716. Andoyer (H.), 262. Andrade (E.-N. da C.), 5 Andrault (G.-A.), 994. André (Ch.), 127, 402, 459. André (Désiré), 525. André (E.), 533, 660. André (G.), 261, 311. Andreasch (R.), 760. Angelis d’ Ossat (G. de), 364. Anglas (J.), 448. Angot (A. js 80, 127, 261, 262, 490, 621. Antheaume | (A, 214. Anthony (R.), 37, 530. Antoniadi (E.-M. À 197. Antropoff (A. von), 406. Antulisch (0O.), 160. A ORIÉDSE (M.-P.), 999. Arago (F.), 262. Arbuckle (H.-E.), 131. Arctowski (H.), 38, 257, 310. Argaud, 491. Ariëns Kappers (C.-U.), 628, 916. Ariès (Lieutenant-colonel E.), 526. Arloing (F.), 128, 264, 404, 491. Armagoat (H.), 656. Armand-Delille (P.-F.), 312, 623. Armengaud jeune, 166. Armstrong (E.-F.), 713. Armstrong (H.-E.), 453, 624 Le Arnal, 82, 172. 1 Les noms imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. Les chiffres gras reportent à ces ar- ticles. Arnaud (de Toulouse), 129, 171, 403. 264, | Arnaud (A.), 449, 489, 530, 571. Arnodin, ie Arnoult (J (3.) 567. Arnoux (G. ), Les Arnoux (R.), Aronssohn fe 356, 622, Arrhenius (S.), 2 Arsandaux (H.), de Arsonval (A. d’), 402. Arthaud (G.), 38. Arthus (Maurice), 367, 528, 660, 756. Artmann (P.), 223. Ashdown (Mile O.-E.), 714. Aston (B.-C.), 175. Athanasiu (J.), 839. Aubel (Edm. Van), 81, 127. Aubert (P.), 128. Aubin (Eugène), 755. Auché (B.), 219. Auclair (J.), 38. Audebeau Bey, 759. Auer (J.), 129. Auer von Welsbach (K.), 496. Auger (V.), 217, 265, 660, 665. Augistrou, 219. Auld (S.-J.-M.), €25. Auspitzer (0.), 964. Austerweil (G.), 568, 198. Autonne A 567. Avebury (Lord), 994. Aynaud (M.), 527, 532, 569, 662. Azambuja (L.), 170, 568. Babes (Al.), 264. Babes (V.), 218. Babinski (Dr), 403. Babonneix (L.), 217. Bachelier (L.), 993. Bachmann (Paul), 989. Backe (A.), 261, 660. Bacon (W.), 1039. Baerwald (H.), 535. Baeyer (Ad. von), 170. Baglioni (S.), 627. Bagster (L.-S.), 1039. Baïllaud (J.), 310, 529, 567, 621. Baiïllet (Ml A.), 129. Bain (Miie Al.-M.), 999. Bain (D.), 494. ne (H.-G. Van de Sande), Boldet (F.), 797. Ball {W.-C.), 42, 744. Balland, 265. Ballner A 456. Balss (H.), 963. Baly (E. -C.-C.), Bamberger (M) 5 2 Bamford (H.), 962. Banerjee (S.-C.), Barbieri (N.-A.), 797. Barbillion (L.), 793. Bareroît (J.), 665. Bardier (E.), 38, 82, 529, 532, 623, 660, 662, 663, 712, 758, 914. LÉ pra ne AGICAN Barger (G.), 42, 1 Barkhausen (H.), Barlow (W.), 4039. Barnett (E. de B.), 86,175, 267, 4:54. Baroni (V.), 263, 913, 914. Barratt (J.-0.-W.), 534. Barre, 490, 567, 660, 711. Barré (E.), 530, 993. Barrett (E.), 1000. Barthe (L.), 216. Bary (Paul), 492. Barzetti (E.), 627. Bashford fe -F.), 267. Basile (C.), 364. Bassot, 959. Bataillon (E.), 402. Bateman (H.-R.), 86, 132, 220, 666, 500, 878. Battelli (A.), 909. Battelli (F.), 82, 451, 49 914, 960. Baubigny (H.), 217, 402. Baud (E.), 261, 568. Baudran (G.), 450. Bauer (Edmond), 40, 127, 262, 568, 621, 914, 998. Baufle (P.), 129. 1, 532, 569, 663, Bayeux (R.), 798. Baynes (R.-E.), 174. Bazy, 112. Beard (S.-H.), 362. Beauchamp (P. de), 311, 541, 995. Beaufumé, 312. Beaulard (P.), 660. Beaume (G.), 661, 839. Beaussart, 129. Beauverie (J.), 74; 352, 403, 487, 7 992, 1034. Beauvisage (Dr G.), 351. Béchamp (G.), 356, 357, 662, 712. Béclère (H.), 312, 622. Becquerel (H.), 310. Becquerel (Jean), 38, 83, 310, Becquerel (P.), 37, 530, 661. Bedford (T.-G.), 406. Bee (J.), 175. Behacker (M.), 536. Béhal (A.), 173, 217, 621, 665. Belia (M.), 357, 531, 663. Bellet (Daniel), 168. Bellion (Mie M.), 622. Bellot (André), 306. Belot (Emile), 642 à 652. Bemmelen (J.-M. van), 44. Bemmelen (W. van), 916. Bénard (H.), 129, 1, 219, 451- Bénard (R.), 172, 218, 199. Beneden (Ed. Van), 449. Benndorî (H.), 223. Bérard (Victor). 910. Beresteyn (M.-H. Van), #4, Berg (A.), 402. Berger (E.), 129, 451, 491, 569, 959. Bergeret (Jean), 34. Bergonié (Dr), Berlemont (G.), 1037. Bernard (A.), 37, 110, 449, 1035. Bernard (P.-N.\, 623. Bernstein (S.), 261, 660, 711, Berry (A.-J.), 131, 115, 998. Berthault (P.), 80. Bertheaume (J.). 403, 489, 661. 993, 992. 176. 912. 1062 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 82, 356, 451, 450, 490, 530, 991. 568. 197, 198. Berthelot (A.), Berthelot (D.), Bertholon (Dr), Berti (A.),-627. Bertiaux (L.), 307. Bertin (E.), 357, 451, 839. Bertrand (C.-Eug.), 403. Bertrand (G.), 38 85, 127, 198, 174, 449 158, 197, 903, 103%. Bertrand (P aul), 1036. Besredka (A.), 529, 622, 663. Besson (A.), 81, 355, 449, 489, 621, 995, 1035. Besson (L.), 216, 912. Beth (H.-J.), 315, 407. Bettencourt (N.), 559. Beutef (E.), 668. Bevaa (E.-J.), 1039. Bevan (P.-V.), 361, 840. Beyerinck (M.-W.}, 316, 628. Beys (C.), 489, 660. Bezdzik (A.), 43. Biedl (A.), 668. Biehler (A. von), Bielecki (J.), 530. Bieler-Chatelan, 310, 355, #49. Bierry (H.), S1, 128, 356, 490, Bignami (A.), 364. Bigourdan (6). 970 à 974. Bilderbeek (Mme Van), 268. Billard (G.), 491, 532, 569, 622, 915, 996, 1005, 1036. Billon-Daguerre, 217. 536, 760. 494, T5S. Binet (Alfred), 354, 838. Binet (E.-M.), 357. Biot (C.), 357. Biquard, me Birkeland (K . 127. Birkeland (R.), 170. Blaizot (L.), ie. 622, 712, 199. Blane (G.), 4419, 453, 532, 224 à 725, 155, 799. Blancarnoux Paul), 562, 872, 989. Blanchard (R.), 260, 491. Blanquies (Mlle L.), 660. Blaringhem (L.), 216, 312, 402. Blaserna, 489. Blein (Jean), 359. Blichfeldt (S.-H.), 759. Bloch (Eug.), 37, 449, 492, 959. Bloch (L.), 310, 402, 997. Blockey (J.-R.), 962. Blondel (A.), 401, 490. Blondel (G.), 566. Blondel (M.), 533, 621. Bloxam (W.-P.), 714. Blumenthal (Otto), 909. Bobisut (0.), 223. Bodroux (K.), 261, 489, 711. Boeckel (J.), 876. Boeke (J.), 716. Boerlage (G.-D.), 1035. Boëseken (J.), 44, 268. Bogaert (Ed.-W.), 257. Boggio (T.), 364. Bohm (C.-R.), 794. Bobn (G.), 218, 532, 622, 659, Bobr (H.), 797, 963. Bohr (N.), 1038. Boinet (E.), 39, 662, 713, Boïinot (A.), 567. Bois (H. du), 222, 316, Bolk (L.), 268, 916. Bolland (A.), 456, Bolton (C.), 219. 914. 1040. Boltzmann | Al 668. Bonamartini (G.), ; 224. Bone (W.-A.), 625. Bonfigli (Ms B , 224. Bongrand | (J.-Ch.), 128, 174, 994. Bonnamour (M.), 960. , Bonnema (J.-H.), 916. Bonnerot (S.), 121, 912. Bonnet (Amédée), 532. Bonnet (N.), 311. Bonnet (P.), 311. Bonnier (G.), 957. Bonnier (P.), 38. Boole Stott (Mme A.), 407, 715. Boon CE 454, 962. Borck (H.), 879. Bordas (F .), 474, 261. Bordas (L.), 311. Bordier (4), 262, 395. Borel (Emile), 216, 261, S35. Borel (F.), 712. Borgatti (F.), 627. Born (M.), 667. Borrel (A.), 82, 357, 450. Borrelly, 38, 110, 216, 489, Borrien (V.), 403, 622. Bosler (J.), 711, 758. Bosscha (J.), 449. Bottazzi (F.), 88, 224. Bôttcher (R.), 963. Bottomley (W.-B.), 877. Bouasse (H.), 76, 4#4. 798, 1035. Bouchard, 914. Boudouard PE : J.), . 261, 265, 355, 405. Boulanger AUS S72, 955, 1031 Boulangier, 83. Boule (M.), 312, 530. Boulet (V:), 450. Boulud, 218, 960. Boulvin (J.), 611. Bounhiol (J.-P.), 450. Bouquet (D° H.), 260. Bouquet de la Grye, 38. Bourcart (Em.), 910. Bourgeois (L:), 521. Bourgeois (R.), 262. 306, Bourget (H.), 127, 994. Bourgoin (PS: 1048 à 1030. Bourion (F. ), 358, 404. Bourlet (C.), 216. Bournay (V.), 38. Bourne (G.-C.), 665. Bourquelot (Em.), 81, 660, 662, 915. Bourrey (Georges, 7264 à 369. Bousquet (L.), 356, 569, 958. Boussac (J.), SU, 449, 489, 531. Boussaguet, 569, 623. Boussinesq (J.), 261, 262, 660. Boutan (L.), 529. Bouty (E.), 127, 529, Bouvier (E -L.) * 661, Boyd (R.), 962. Boyé (G.), 914. Boyer (G.), 489. Boyer (Jacques), 33, Boyet, 263, 264, 312, Boyle (Mile M.), 175. Braak (C.). 628, 916. Bradford (J.-R.), 86. Brady (0. Sa il 961. Bron le y (A. GE Branca (A. js En Branca QUE h 535, 8178. Brandéis (R.), 83, 129, 492. Brandsen (P. ), 43. Brassert (W.), 363. Bratu (G.), 401. Brault (J.), 450. Braun (L.), 668. Braun (P.), 38. Breisig (F.), 535. Bresson, 798. Brester (A. 383 à 388. Bridel (M.), S1, 913. Bridré (J.), 402, 489. Brillouin (M.), 216, 262, 872, 994. Brimont (E.), 663. Briner (E.), 38, 490, 758. Briot (A.), 262, 264, 622, 663, 712. 166, 306, 4#4, 198, 876. 568, 66%, 797. 123. 396, 1036. Briquet (A.), po, 159, 912. Brissaud (E), Brissemoret fa È 82, 1036. Brizard (L.), 402, 510. Broca (Dr A.), 565. Brochet (A.), 81, 170, 216, 261, Brocq-Rousseu, 567. Brogle (M. de), 449, 563. 529, 570, 660. 310, 568, 621, Broglie (V. de), 402 ANRT EEE (J. Se w d Broniewski (W.), 621. Brouwer (H.-A. ), 2 268. Brouwer (L.-E.-J.), 40 Brown (He -T..), 314. Brown (LC) 625 Brown (J.-N.), 759. Bruce {Sir D.), 86, 818. Bruin (J.), 5176. Brun (Albert), S1à5s. Brunel (L.), Dies 530. Brunelli ( (G.) ), 224, 627. Brunet on 3, 308, 496, 536, 563, 668, 760, 842, 940 à 95 4, 958. Brunbhes (B.), 127, 797. Brunhes (Jean), 262. Bruninghaus (£L.), 31, 38. Brunnthaler (J.), 45, 496. Brunswick (E.-J.), 395. Bruyant (L.), 357. Bruyn (H.-E. de), 44 Bubanovic (K.), 916. Huchner (Ed.), 502 à 51t. Büchner (E.-H.), 915. Bücking (H.), 715. Buffautt (Paul), S94 à 902. Buglia (G.), 224. Bugnion A ), 451. Buguet (A.), 758. Bubhl (A.), 567. Buisson (H.), 84, 568, 711. Buil (L.), 81, 712. Burck (W.), 44. Burgatti (P.), 88, ee Burgess (M.-J.), 9 Burrows (T.-M.), = 960. Burson (V.), 568. Burt (F.-P ), 513, S717. Busignies, 839. Busquet (H.), 40, 171, 172, 492, 532. Butscher (E.), 964. Baytendijk (F.-J.-J.}, 628. Byk (A.), 874. 132, 220, 666, 800, C Cagnat (René), 448. Cain (J.-C.), 362. Calderara, 21. Callendar (A.), 220. Callendar (H.-L.), S5, 800. Callery (Mie G.), 399. Calmette (A.). 128, 172, 660, 758. Calvet (L.), 313. Cambier (R.), 38, 758. Camboulives (P.), 127, 128. Cameron (Al.-T.), 625. Campbell (A.), 175, 220. Campbell (A. Æ. J'TE Camus (G. ), 166. Camus (J.), 313, 356, 357, 404, 4914, 662, 712, 1036. Cavnizzaro (St.), 489. Cantaloube (P.), 128. Capgras (J.), 659, 757, M1. Capitan, 39. SApalE (H. van), 408, 628. Capus (J.), 491. Carcanague, 2635. Cardoso (E. \ 661. Carles (J.), 319. Carnot (P.), 491, 569, 659. Carpentier (J.), 80. Carr (F.-H.), 714. Carrasco (0.), 88. Carré (H.), 171. Carré (P.), 661. Carrel (AL.), 914, 960. Carrieu, 356. Cartan (E.), 994. Carvallo (J.), 913. Caspari ( (CG. -Ed.), 134. tisse (J.), 838. Cathoire (E.), 662, 199. Caton (F.-W.). 42, 999, 4039. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1063 ‘Catouillard (G.), 82. Clewer (H.-W.-B.), 86. Cumwing (Al.-Ch.), 362. ‘Caudrelier (E.), 37, 262, 486. Clough (C.-W.), 453. Cunningham (E.), 85, 266. Caullery (M.), 318, 621. Ciunet (J.), 218, | Curie (Mm: P.), 216, 220, 839 Caustier (E.), 353. Cobb (J.-W.), 116, 54, 155, 534, 625, | CusHiny (R. Me Cavalié, S3. 160, Cuthbertson (C.), 85, 533. Cavalier A2 242. Cochin (G.), 568, 798. | Cuthbertson (Nile M.). 85,533 Caven (R.-M.), 714. Coffignier (Ch.), 618. Cyon (Elie de), 354, 931. ra (AL), 5392; 663. Cogoia. 37, 38, 110, 217, 450, 197, 198, Cayeux (L.), 39, SL; 171, 661, 1032. 913, 993. Cépède (C.), 994. Cohen (E.), 44, 323 à 337. | D Cereser (0.), 88. Cohen (B.-S.), 406. | ‘Cernovodeanu (Mie P.), Sû, 262, 311. AE (J.-B.), 224, 962. Daday (E. von), 496. Cerulli (V.), 364. Col (A.), 83. Daday de Dées (E.), 92. Chaboseau (A.), 135. Golardieau (E.), 76, 445, 618, 910, 957. | Dafert (F.-W.), 668, 963. Chaboseau-Napias (Louise), 580. Cole (F.-J.), 572. Daimer {J ), 668. Chabrol (E.), 491, 532, 622, 960. Coleman (A.-P.), 665. Dale (H.-H.), 574. ‘Chailley (Josep h), 874. Colgate (R.-T.), 6 624. Damianovich (H.), 563. ‘Chaine (J.), 219, 261, 313, 492, 529, 570, Colin (H.), 403. Daumerman (K.-W.), 7116. 996. Collet (L.- WA); 128. | Danaila, 38. ‘Challenger (F.), 175, 362. Collie (J.-N.), 453. Danzeard (P.-A.), 913, 995. Chalon (Paul-F.), 306. Collignon, 531, 996. Daniel (J.), 567, 993. Chaney (K.), 220. Collin (B.), 38, 759. Danois (Ed.), 912. Chantemesse (A.), 39,353, 712. Collin (Eug.), 711. Darboux (G.), 216, 449, 489. Chaplet (A.), 651. Collin (R.), 40. Darwois {E.), 401. Chapman (D.-L.), 362, Collot (A.), 452. Darmois ((r.), 197. ‘Chapæwan (H.-G.) 666. Colson (A.), 314. Darrasse, 404. ‘Chappelier (A.), 623, 960. Comandon, 662. Darwin (Sir G.), 1038. ‘Charabot (Eugène), 709. Comas-Sola (J.), 216, 489, 530, 568, 797. | Darzens (G.), 310, 360, 489, 943. 993. ‘Charcot (J.), 312. Combe (E.), S1, 312. Das (T. N.), 574. Charlois, 170. Combebiace (G.}), 1031. Dastre (A.), 313. Charon (E.), 84, 567. Combes (R.), 450, 530, 568. Daublebsky von Sterneck (R.), 223 Charpy (G.), 121, 197, 912. Compton (A.), 797, 1035. Daumas (A.), 401. Charron (K.), 401, 1035. Comte CAL CA 79. Dauzal (Albert), 77. Chassy (A.), 490. Comtesse (A.), 490. Davey (W.-S.), 574. Chastenet de Géry, 531. Conor (A.), 404, 912. | David, 913. ‘Chatelet (A.), 311, 449, 530, 994. Conseil (E.), 621, 711, 798, 8176, 912. Davidson (W.-B.), 87. ‘Chatelu (J.), 310. Contamin {A.), 38, 81, 530. Davis (E.-G.), 454, 714. Chatenay (J.), 995. Contardi (A.), 364. Davis (O.-Ch.-M.), 454. ‘Chatin (J.), 711, 839. Conte (A.), 127, 261, 312. Dawson (H.-M.), 495, 962, 1000. Chattaway (F.-D.), 220, 714. Contejean (Ch.), 530, 568. Deakin (S.), 999. -Chatton (Ed.), 39, 912, 960. Cooper (W.-R.), 220. Debayle, 995. Chaudier (J.), 32, 128. Copaux (H.), 217, 404. Debierne (A.), 216, 621, 839. Chauffard (A.), 312, 662. Coquidé (E.), 37. Debove (G.-M.), 710, 91%. Chaumasse, 170. Corbino (0.-M.), 364, 627. Debré (R.), 402. Chaussé (P.), 39, 403, 959, 960, 995, 996. | Cordemoy CE de), 32. Dechambre |E.\, 1036. Chauveau (A.), 530, 568. Cornaille (K.), 403. Dechant (J.), 668. Chauvenet (E.), 128, 797. Cornec (E.), Si. Dechend ‘H. von), 879. Chazarain Wetzel (P.), 39, 129. Cosserat (E.), 396. Décombe QE ), 216, 493, 1035. Chazy (J.), 216, 449, 711. Cosserat (F.). 396. Décombes (L.), 127. Chella (S.), 909. Costa (S.), 83, 172, 451. Dedekind (R.), 262. Chenal, 173. Coste (J.-H.), 42. Defant (A.), 496. Chéneveau (C.), 130, 355, 402, 451, 452, Cotoni, 995. Dehérain (Henri), 168, 212. 490, 494. Cotte (J.), 358. Dehorne (A.), 450, 529, 567, 798, 995. Cherchefisky (M.), 490 Cotton (A.), #1, 344, 355, 574, 993. Delachanal (B.), 993, Chéron, 712. Cotton (Em.), 261. Delage (Yves), 308. Chertier (G.), 913. Cotty (G.) 216. Delagenière, 312. Chesnay (K.), 398. Coupia 39, 82, 450, 488, 1035. Delbet (P.), S1, 450, 662. Chesneau (G.), 31. Courmont (1), 40, 403, 529, 622, 663. Delcourt (Am.), 711. Chevalier (Aug.), 37, 216, 262, 661. Courtman (H.2R.), 624. Delehaye (H.), 227. Chevalier (J.), 171, 218, 403, 451. Courtois-Suffit, 312. Delépine (G.), 31. Chick (F.), 999. L Cousin (H.), 490. Delépine (M.), 42, 81, 172. 216, 261, Chiray (M.), 838. Cousin (M.), 533. 265, 355, 403, 405, 567, 572, 993. Choay (E.), 263, 510. Coutière {(.), 82. Delépine (S.), 1040. Chofardet (P.), 38,170, 993. Coutière (H.), 489. Delezenne (C.), 1036. Chopin (Marcel), 1035. Couturier (K.), 310, 401. Delfino (Victor), AT ‘Chree (C.), 360, 998. Coux (H. de la), 203 à 210. Dell'Agnola (C.-A.), 621. Christiansen (C.), 57. Couyat (J.), 994. Delorme (E.), 39 ‘Chuard (E.). ÉTTA Couzens (E.-G.', 714. Del Re (A.), 224. €Chwolson (0.-D.), 307, 1031. Cowap (M.-D.), 362. Delval (C.), 218. Ciamician (G.), 224, 627. Coward (H.-F.), 625. Demanche (R.), 404. Cillard, 1032. Cramer (W.), 406. Demeny (G.), 569. Cirera (P.), 530, 561. Crane (J.-E.), 534. Demetresco (G.), 529. ‘Cisotti (U.), 127, 364. Creighton (H.-J.-M.), 267. Demolis (Ed.), 166, 617, 1031. Cisotti (V.), 627. Crémieu (V.), 355. Demoulin (A.), S0, 427, 170, 836, 959, Clarke (G. jnu.), 999. Crochetelle, 530. | Demoussy !E.), 196 à 203, 71! Clarke (H.-T.), ne Crommelin (C.-A.), 628, 4040. | Dendy (A.), 713, 878. Clarke (R.-W.-L.), 86, 454. Cromptou (H.), 1000. Denet (J.), 912. Claude (A.), 82, Uo. 994. Crookes (Sir W.), 86, 219, 713. Denham (W.-S.), 42 Claude (G.), 358, 490, 943. Cross (C.-F.), 1039. Denigès (G.), 261, 313, 355, 490, 996, Claude (H.), 129, 312. Crossley (A.-W.), 475, 361, 453, 1039. 1035. Claudel (J.), 562. Crossley (T.-L.), 313. Deniker qu), 710. Clausmann (P.), 490, 660, 665, 797. Crowther (J.-A.), 8717. Denjoy (A.), 80, 262, 661. Clayton (A.), 314, 1000. Croze (F.), 355, 568. Deueret (G) , 556 à 561. Clément (L.), 84. Crudeli (N.), 994. —_. | Deprat (J.) , 839, 913, 993, 995. ' Clerc (A.), 39, 82. Cruveilhier (L.), 623. \ Derrien (E.}, 569. €lerget (Pierre), 5, 46, 94, 137, 438, 182, | Cuénot (L.), 40, 214, 309, 529, 620, 838, | Desbouis, 569. 210, 446, 486, 566, 612, 120, 763, 922, 875, 911, 992. Desch (C.-H.), 362. 966, 1005. 663. Cumia (H.), 570. Descomps (P.), 1064 Desfosses (P.), 36, 710, 757. Deslandres (H.), 37, 80, 110, 310, 402, 490, 568, 758, 797. Desmons (R.), 306. Desroche (P.), 532, 5G9. Détré (G.), 532. Devaux (E.), 996. Dévé (F.), 623, 961. Dewar (Sir J.), 266, 624. Dhéré (Cn.), 401, 402, 914. Dienert (F.), 217, 259, 354, 355, 399, 930 à ES Dienes (Paul), 7 Dieulafoy (G..), DU 531, 1036. Dimmer (C ), 668. Dingeldey (K.), 1031 Distaso (A.), 1034. Dixey (F.-A.), G65. Dixon (A.-E.), 221, 454 Dixon (H.-B.), 453 Djénab (K.), 663. Dobbie (J.-J.), 453 Doby (A.), 531. Docquier (A.-C.), 754. Dœælter (Go , 2923, 407, 963. Dolezal ( É s 962. Dolce Domek TN 395. Dominici (H. ), 82, 198, 3114: Donau (J), 964. Doncaster (L.), 131. Donder (Th. de), 197. Donnan (F.-G.), 915, 999. Dons eneuR (O.), 873. Jop (P.), 78, 489. opter &) 125. 622, 663, 712, 1036. Dorcel (R.), 1031 Dorello (F.), 621. Douglas (C.-G.), 453. Douglas (J.-S.-C.), 219, 220. Doumer (E.), 261. Douvillé (H.), 170, 912, 913, 914, Douzal (Et.), 794. Dow (J.-S.), 1038. Doyen, 661. Doyon (M.), 40, 82, 171, 172, 218, 341, 312, 403, 451, 532, 960, 961, 1035, 1036. Drach (Jules), 711. Dragoiu (J.), 839. Dreaper (W.-P.), 87. Drecq (M.), 489. Dreyer (G.), 219, 220, 840. Dreyfus (L.), 570. Driencourt (L.), 110, 959, 994. Driot, 529. Drouin de Bouville (R. de), 40, 759, 4006 à 1014. Drucker (K.), 990. Drzewina (Me A.), 557, 569. Duaue (W.), 529, 711, 797, 798. Duboscq (0.), 759. Dubreuil (G.), 357, 404, 569, 622, 662, 742. Ducelliez (F.), 81. Duckworth (Sir D.), 263, 312. Duclaux (Jacques), 439 à 147%, 913, 97. Ducloux (E. Herrero), 842 Ducretet (F.), 660. Duddell (W.), 220. Dudgeou (L.-S.), 131, 713. Dudley (H.-W.), 962. Duffield (W.-G.), 799. Dufougère (W.), 81. Dufour (A.), 40, 262, 660, 1038. Dufour (M.). 357. Dufourt (A.), 264, 403, 914, 960. Dugas, 712 Dugast (J.), 355. Duguet, 621. Duhem (P.), 125, 802, 956. Dujardin-Beaumetz, 622. Dumas (G.), 400. Dumas (J. Dumont Pt Dunn (F.-P. » 494. Dunoyer (L.), 37, 170, 402, 162 à 465, 527, 493, 568, 997. Dunstan (A.-E.), 625, 962, 1000. Dupare (L ), 83 Dupérié (R. ), 83. Dupont (G «)) 38, 449, 490, 530. Dupont (J.), 85. Dupré (Dr), 914. . Dupuis (A.), 1034. Dupuis (P.), 262. Durand-Gréville (E.), 757 Dussaud (F +), 401, 993. Dutilh (H.), 44 Datoit (P.), Dutta (J.-M.) Duval Maths) (2. Durillier (E.), 471, 356. Duvoir (M.), 218, 712. Dyhrenfurth (G.), 43. Dyson (F.-W.), 915. Dzierzbicki (J. de), 994. 673 à 6S%. E Eagle (A.), 573. Easterfield (Th.-H.), 175. Eberhardt (G.), 667. Ebner (V. von), 496. Eccles (W.-H.), 361, 573, 800. Eckert (A.), 964. Eder (J.-M.), 132, 223, 363, 668. Edminson (S.-R.), 175. Edridye-Green (F.-W.), 877 Effront (J.), 995. Eginitis (D.), 529, 567, 660, 758. Ehrenhaît (K.), 496, 668. Ehrlich (H.), 407. Eiffel (G.), 994. Elias (G.-J.), 1040. Ellerman (F.), 85. Elliott ÊE H.), 268. Ellis (R.), 800. Elschois (A) 496, 668. Elsden (A MOPRRÉE Emile- Weil (P.), 914. Eufield (R.-R.), 1000. Engler (A.), 222. Eredia (F.), 88. Escard (Jean), 351, 709, S05 à S12. Esclangon (E.), 80, 127, 216, 449, 489, 711. Esmein (Ch.), 39, 82. Espine (d'), 263. pelnare (E.), 80, 310, 313, 57 Etard (A.), 568. Etévé (A.), 170. ae (G.), 83, 570. Euler (H.), 708. Eustice (J.), 71: Evans (S. EC Evans (W.-Ch. 9. Ewins (A.-J.), 135, 1039. Exner (Fr.), 668. Exner (E. -M.), 223, 496. Exner (S.), 223. F Fabre (G.), 1036. Fabre-Domergue (P.), 913, 959, 994. Fabry (Ch.), 84, 170, ‘568, 111. Fabry (E.), 617, 994. Fage, 39, 82. Faltis (F.), 496. Fano (G ), 491. Fantham (H.-B.), 998. Farabeuf, 876. Fassin (Ml: L Faure (G.), 627. Faure-Beaulieu (H.), 128. Fauré-Frémiet (E.), 82, 356, 491, Fava (A.), 451, 914. , 1036. Favé (L.), 959. Favre (M.), 218, 261. Fayet (G.), 451, 994. Féger (L.), 261, 490. Fehr (H.), 75, 655. Feije (A.), 913. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1036. Fekete (M.), 402, 798. Feldzer (Mile), 218. Félix (A.), 88. Fenby (A.-V.-C.), 574. Fenestre, 995. Fernbach (A.), 39. 912, 913, 993, 995. Ferret, 660. Ferrié, 170, 994. Ferrier (P.), 960. Ferroux (G.), 193. Féry (C.), 127, 130, 261, 310, 313. Feuillié (Em.), 451, 663, 960, 996. Feytaud (J.), 491, 492. 529. Fichtenholz (M'e A.), 660, 662. Fiedler (K.), 223. Fiessinger (Ch.), 995. Fiessinger (N.), 129, 313, 663, 914, 996. Fieux (G.), 492. Fildermaon (Mt), 712, 995. Fildermann (Mr), 712, 995. Filehne, 662. Filliozat (M.), 489. Filon (Mi: G.), 569. Filon (L.-G.), 406, 532, 665. Findlay (Al.), 267. Finzy (G.), 129, 218, 404, 622, 662. Fiolle (J.}, 710. Fischer (Em.}, 878. Fischer (H.), 661, 711. Fitzgerald (M.), 85. Fitzgerald (M'i: M. P.), 453. Flamand (G.-B.-M.), 33 Flandin (Ch.), 663. Flaschner (0.), 43. Fleck (Al.), 962. Fleig (C.). 82, 129, 309, 532, 569, 662, 712, 8176, 913, 1036, 1037. Fleury (E.), 93, 213, 876. Fleury (M. de), 39. Floquet (P.). 839. Florence, 568. Flurscheim (B.), 453. Foa (Mie A.), 88, 224. Foix (Ch.), 82. Fomin (MW 529, 1035. Fondard (L.), 799. Fontein (F.), 176. Fonvielle (W. de), 355. Forcrand (de), 38, 529. Forster (A.), 874. Forster (M.-O.), 42, 175, 221, 453, 494, 961, 1049. Fortineau (L.), 529, 663. Fosse (R.), 127. Foster (B.), 1000. Foucar (J.-L.), 759. Foüet (E.-A.), 655. Fougerat, 530. Fouquet (G.), 170. Fourneau (E.), 402. Fournier (D.), 531. Fournier (Vice-Amiral E.), 211. Fournier (J.-B.), 261. Fournier (L.), 993, 1035. Foveau de Courmelles, 124. Fowler (A.), 665. Fox (J.-J), 221, 574, 714. Foy (G.), 217. Francesconi (L.), 88. Francis (A.-G.), 174. Franck (J.), 575, 667, 880. François (P.), 264. Francois-Franck (Ch.-A.), 172 Francotte, 994. Frank CEE), CRE: Franke (Ad.), 364. Frankland (E.-P.), 714, 962. Frankland (P.-F.), 135. Fraser (A.), 314. Fraser (Mile M.-T.), 877. Fréchet (M.), 489. Fredericq (Léon), 410, 958. Frenkel, 263. Freundler (P.), 37, 113, 450. Frezouls (J.), 489. Frick (J.), 445. Friedel (G.), 758, 198, 913, 994. ; 622: 81, 355, 449, 489, 694, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Friedl (F.), 9 FT en (B M} 43, 88. Friend (J.-A.-N.), 454, 714. Fritel (P.-H.), 994. Frobenius (G.), 221, 455, Frossard, 1038, Frouin (A.), 82, 662, 799. Fry (W.-B.), 998. Fubini (G.), 627. Fumouze (P.), 217. 493, RTS. 171, 218, 451, G Gabbi (U.), 621. Gabet (G.), 261. Gagneux (C Ch ), 499; 4745-2197 Gaife (G.), 797. Gaillard (G.), 128. Gaillardot (R.), 622. Gain (Ed.), 561, 911. Galbrun, 127. Galeotti (G:), 224, 621. Galippe (V.), 914, 995. Galitzine (B.), Gallardo (Angel), 838. Galliot, 959. Gallissot (Ch.), 262. Gallo (G.), 364, 627. Gallois (L.), 168. Galtier-Boissière (D'), 620 Gamble ee We) 179 », 993, Garnier (René), “A. Garrelon, 263, 569, 623, 662. Garrett (A.-E.), 6617. Garrett (Gh -S.), 625. Garrigou (F.), 402, 490. Garrod (A.-E.), 665. Gasperi (F. de), 914. Gau (P.-E.), 449, 529, 1035. Gaubert (Paul), 837, 839, 1033. Gaucher (D'), 356, 491, 995. Gaudechon (H.), 217, 420, 568, 197, 198. Gauge (A. LT H.), 221. Gauit (H.), 449, 490, Gauthié E 709. Gauthier (J.-C.), 83, 172, 532. Gautié (A.), 78. 490, 567. Gautier (A.), 38, 217, 529, 567, 621, 624, 659, 660, 797, 959. Gautier (CI.), 40, 82, 171, 172, 21S, 532, 663. Gautrelet (E.), 31, 404. Gantrelet (J.), 129, 313, 996. Gay (L.), 368, 876, 913. Gazdar (M'e M.), 1039. Geba (J.), 668. Gehlhoff (G.), 626, 840. Gehrcke (E), 222, 626. Geiger (H.), 405. Geikie (Sir Archibald, 86 Geikie (James), 259. tune (A:),1995. Gentil (L.), 489, 530, 914, 1036. Georgévitch (J. \, 248. Georgevitch | (Ps 313, 914. Géraudel (E.), 81, 218, 450. Gerber (C.), 83, fn. 264, 351, 490, 532, 1663, fee Gernez (D), 171, 318, 660, 758, 915. Gessard (C.), ETYA 569, 621. Gèze (J.-B. LG. Ghosh (A.-C.), Giacobini, 110, 310, 401, 530. . Giacomo (A. de) ), 40. 150, 45 Giaja (J.), 311, 199. Gibson (A. H), 360. Gibson (Ch.-S.), 1039. 332, 623, 962, 311, 401, 402, 621. 530, 404, 510, 712, Gifford (J.-W.), 840 Gignoux (M.), 355, 1095. Gilbert (A.), 217, 414, 663. Gilbert-Ballet (Dr), 403. Gilling (Ch.), 361, 1039. Giltay (J.-W.), 176. COPA 128. Cest 4 742. Girard (P LÀ 529, 622, 661. Giroux (L.), ? 218. Ce (D. Glangeaud 1036. Glatzel (Br.), 879, 1035. Gley (E.), 34, 82, 491, 158. Glover (W.-H.), 714. Godard (H.), 661. Godchot (M.), 37, 489. Godden (W.), 714. Godin (P.), 622, 876. Goldschmiedt (G.), ), 495. Goldsmwith (Mi!e), 308. Goldstein (E.), 626, 667, 880. Gonnessiat, 839. Gonzalez (P.), 960, 996. Gorce (P. de la), 170. Gorgeu (P.), 166. Gorgolewski (M.), 401, Gorini (C.), 224. Gorjanovic-Kramberger (K.) Gortner (R.-A.), 86. Gossart (E.), 123. Gotham (W.), 455. Gougerot (H. ja 912, 914. Gourdon EL ns see Goutal (E.), Gouy (G.), 130, :965, 568, UERE Gradenwitz (Alfred), 4, 88, 229, 223, 315, 456, 495, 535, 536, 540, 516, 627, 668, 612 810, 878, 880, 922. Grafe (V 96. Graham (J.-1.), 840. Gramont (À. de), 80, 127, 489, 570, 158, 193, 813. Grandidier (A -) Aa: Grandjean (K.), 449, 758, 798, 943, 994: Granger (Al.), 124, 618, 910. Grassi (B.), 88, 364. Gravier (Ch.), 912, 913, 994. Gray (J.-A.), 159. Gray (R.-W.), 661. Graziani (F.), 88. Graziani (Mile G.), 88, 224. Green (A.-G.), 999, 1039. Green (L.), 1000. Greenwood (H.-C.), 405. Grégoire (G.), 404. Gréhant (N.), 356. Grenet (L.), 401, 995. Grenet (I°.), 994. Griffon EC ), 262, 1035. Grigaut (A.), 451, 491, 531. Grignard (V.), 450, 758. Grunwald GIE 910. 4191, 532, 101, 993, 402. Gruvel (A.), 9 re qe Z.), 218, 533,510, 1036. Grynfelt (E.), 216. Gryns (G.), 1040. Grysez (V.), 357, 491. Guccione (A.), 218. Guéguen (F.), 172, 1036. Guerbet (M.), 42, 127, 961. Guérin (C.), 660. Gugl (F.), 668. Guglielmo (G.), 224. Guiart (Jules), 260. Guichard (C.), 80, 449. Guichar] (Marcel), 33, 656, Guieysse-Pellissier (A.) 1739: Guilbert (Dr), 356. Guilbert | |Gabriel), 167. Guillain (G.), 172, 662. Guillaume (Ch.-Ed.), 929. Guillaume (J.), 170, 262, 311, 198, 839, 994. 19, 263, 402, 711. 624, 656, 923 à 530, 758, 1065 Guillemard (A.), 663. Guillemard (H.), 3%, 8176. Guillemin (G.), 993. Guilleminot (H.), 170, 218, 567. Guillet, 173. Guilliermond (A.), 218, 263, 355. Guilloz (Th.), 40, 357, 568. Guinard (L.), 449. Guisez ARR 403, 995. Guntz (A.), 959. Gupta (N.), 43. Gusman (P.), 488. Gusmano (G.), 88. Guttenberg (R. von), Guye (C.-E.), 170, 401, Guye (Ph.-A.), 31, 108. Guyénot !E.), “AA. Guyot (A., 874. 196. 402. H Haag (J.), 38, 311, 355, 449. Haaland (M. i, 261. Haas (A. -E.), 456. Haas (M. de), 176. Haas (P.), 175. Hachet-Souplet (P.), 128, 311. Hackspill (L.), 758. Hadamard (J.), 262, 311, Hagen (E.), 661. Hahn (0.), 667. Haiser (F.), 223. Haken (W.), 536. Halberstadter (L.), 818. Haldane (J.-S.), 453. Hale (G.-E.), 85, 220. Haller (Aus 173, 261, 262, 310, 530, 91 Hallez | “ \, 217, 261. Halliburton (W.-D.), 131. Hallion (L.), 532, 510, 914, 1036. Hallopeau (H ), 211, 490, 531, 662, 8176. Hamburger (H.-J.), 116, 916. 350, 568, 989. 103, 490, Hawerton (A.-E.), 86, 132, 220, 666, 878. Hammer (W.), 8 Hamonet (J.) NA Hamy Be 62, 444. Hancock (W.-C.), 363. Handel- Mazzetti (H. von), 496. Hankam (0O.), 364. Hann (A.-C.-0.), 42 Haoriot, 173, 360. Harcourt (A.-G.-V.), 453 Häarden Go 405, 961. Harding (Ve -J.), 220, 362, 574. Hardy (J. ST 665. Harker (G.), ne Harker (J.-A.) Harrison (Mie ] M ke. ), 495, 1000. Harrison (W.), 1039. Hartley (E.-G.-J.), 454, 962. Hartmann (D' Henri), 981 à 988. Hartog (M) 661. ‘Harvier (P.), 356, 712, 996. Haschek | (E.), 668. Hasenührl (F.), 536. Reset (K.-B.), 360. | Hasselt (J. -F.-B. van), Hatfield (W.-H.), 98. Hatschek (E.), 314. Hatt (Ph.), 1014 à 4018. Haudié (E.), 33, 401. Haushalter ( P.), 40, 351. Hausmann (w., 963. Hautier (C.), 80. Havelock (T.-H.), 839. Haworth (W.-N.), 362. Hawthorn (Ed.), 451. Hayes (W.-C.), 78. SR (W.), 454. Hébert (A.), 1173. Heckel (Ed. ), 661. Hedin (Sven), : Hédon (E.), S2, 263, 403. Hegyi, 171. i Heitz, 659. 716. 1066 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Helbronner (A.), 1, 404, 912. Helbronner (Pÿ, 197, 912. Helmert (J.-K.), 221. Hemsalech (G.-A.), 37, 38,17 942, 943, 994. Henderson (G.-G.), 962. Henderson (J.-B.), 363. Henri (V.), 41, S0, 262, 311, 158, 912, 9143. 0, 621, 14, Henri-Cernovodeanu (Mme V.), 913. Henriot (E.), 621. Henry (A.), 172, 218, 355, 454. Henry (E.), 488. Hepperger (1. von), 223. Héribaud- Joseph, 80. Hérissey (H.), 490, 533, 798. Herrgott, 489. Herry (A.), 356, 357. Hertal (Br. je 668. Hertwig (0. } 878. Hervieux (L.), 82, 198. Heryng (Dr), 356. Heryng (Th. Te 403. Herzfeld (Mile S.), 963. Herzig (J.), 668. Hesius (B. ), 878. Hess (V.-F.), 495. Hesse (Ed. k, 216, 799. Hewitt (J.-T.), 361, 665, 714, Hicks (Me -L.), 454. Hicks (W.-M.), 130. Higgins (S.-H.), 574. 1000. Hilditch (T. ne x 175, 454, 625, 714. Hill (E.-G.), 8 Hillebrand (Mne S.), 760. Himmelbauer (A.), 132. Hinard (G.), 71. Hinks (A.-R.), 401. Hinrichs (G.-D.\, 839, Hirtz (H.), 362, 662, M4. Hittorf (W.), 310. Hitzel (Edm. ), 661. Hnatek (Ad.), 964. Hoche (L.), 570. Hochreutiner (B.-P.-G.), 882. Hodgson (H.-H.), 625. Hoeter (H.), 536. Hoehnel (von), 43. Hoek (P.-P.-C.), 176. Hoff (J.-H. van't), 224, 878. Hofmeier ( (ec), 364. Holcroft (H ) 268. Holderer (M.), 3 Holetschek (J.), 668. Hollard (A.), 212, 307, 351, 709, 794. Holleman (A.-F.), 268. 407, Hollnagel (H.), 455, 456. Holloway (G.-T.), 173. Homer (Mile A.), 135, 221. Homfray (Mer -F.), 665, 96 Honda (K.), 839. Hünigschmid (0.), 963. ORPRURE (C.-J.-C. van), Hope (E.), 42, 714, 1000. Hopfner (FE), 132. Hopkinson (B.), 665, 154, 759. Hopwood ( 362. Horand (R.), 262, 255: Horsley (Sir V.), 263. Hort (E.-C.), 840! Horton (E.), 453. Horton (F.), 998. ( 7, 38, 128, 170, 174, 311. 145, 564, M5, 916. 1. 268. Houllevigne (L.), 38, 489, 568. Howard {H.), 86, 132, 453, Hub (A.) 963. Hübruche (A.-A.-W.), 268. Hue, 759. Huggins (Sir William), 529. Hughes (E.-Cli.), 714. Hughes (L.-F.), 945. Hugounenq (Dr Le Huil (T.-E.), 454. Humbert (G.), 216. Humfrey (J.-C.-W.). 86 Humphries (H.-B.-P.), 175, Humphries (T.-C.), 368. Huntly (G.-N.), 363, 8u0. 194. 404, 491, | Idrac (P.), 310, 449 Iltis A ï 7396. Imbert (H.), 960. Imbert (A.), 214, 913. Imbert (L. HO, 712. Iniguez (Fr. 18 4S9, 660. Irvine {J.-C.), 625, 961. Isaac (Mie F.) » 871. Iterson (J.-G. van), 716. Ives (F.-E.), 534. Jzart (J.), 658. . J Jaboin (A.), 311. Jaccoud (5.), 39. Jacobi (W: ), 314. Jacobson {D.), 128, 357. Jacquet (L ), 81. EN (F. M). 316. Jaffé (A.), 268. James (T.-C.), £ James (William 215, 796. Jammes (L.), 216, 711. Janet (Ch.), 876. Janet (Pierre), 469. Janiszewski (S.), 262, 711. Jaquerod (A.), 912. Jarkowski (W. tie Jaroschy (S.), 760. Jarry-Desloges (R.), 3 Javelle, 170, 993. Javillier (M, QE 533. Jeande!ize (P.), 83, 129, 357. Jégou (P.), 490, 1035. Jeneic (A. ), 964. Jerusalem (G.) ), 1039. Jinendradasa GN , 1000. | John (W.-T.), 713. Joleaud (A.), 663, 996. | Joleaud (L.), 403. | Jolibois (P.), 81, 797. Iscovesco (H. ; 960, 996, 1036, 1037. Jacob de Cordemoy (H.), 530. loire on. 126, 161, 837 161. Javal (A), 263, 264, St 356, 492, 1036. Joily (J. ), 39, 82! 662, 914, 996, 1036. Joltrain (Ed.), 799. Joly (J.), 656. Joly | (L.), 355. Jones (Ch.), 267. Jones (H. -O.), 266, 361, 624, Jones (W. -d.), 86. Jonesco- Mihatesti (G.), 263, | Jonnesco (Th.), 871. Jorissen ( W. =P.), 42, 176. Joseph (A. -F.), 314, 1000. Josué (0.), 403, 404. | Jouan (C.) 798. Dora (R.), 994. Joubin (L.), 216, 369. Jouguet (E.), 38, 81. Jourdain (PR.), 216. Jourdan, 960. Jourdanet, 81. 1000. 569, 914. Jourdy (Général), 26 à 34. Jousset (AL), ne 996. ) Joxe (A.), | Joyce (CL. M ï 534. Judd (Mie H.-M.), 221. Julius (W. -H.), 176, 628. Jumelle (Henri), 709. Jung (F.), 363. Jungano (M.), 1034. Jungjohann (W.), 456. Justin-Mueller, 41. K | Kalicum (B.), 668. Kametaka (T.), 714. Kapteyn (J.-C.), 176. | Kapteyn (W.), 1040. Karczag (L.), 224. : Karwacki (L.), 472,218, 342. Kaufmann (W.-P.), 495. Kaye (GW .-C.), 131. Kayser (E.), 258, 959. Kayser (H.), 872! Keane (Ch._Al. ), 495. Keissler (K. von), 964. Kelsch, 81, sie rs Kemp (A. -B.) Kenner (J.), Do Kerforne (K.), 128, 217. Kerillis (de). 390. Kernbaum (M.), 758. Kerschbaum (E.), 364. Kiebitz (F.), 456. Kielhauser (E.), 760. Kilian (W.), 127, 1035. Kingzett | (GC. Ha 159: Kinoshita (S.), 134. Kipping (F. S)), 175, 362, 453. Kirmisson (E. 312, 450, 531, 662. Kirpal ), 456, 963. Klebs ( Ho) 666. Mens (R.-D.), 131,453, 572, Klemenc (A.), 668, Kling (A.), 262, 493. Klingatsch (A.), 963. Klippel (M.), 960. Knapp (A.-W.), 1039. Knight (W -=A°),267: Knôpfer (G.\, 223. Knudsen (Martin), 87. Koch (R.), 599, 531. Kœnigs (G.), 80, 216, 994. Kohn (M.), 496. Kohn-Abrest (E.), 127, 265, 401. Kohnstamm (Ph.), 268. Kolderap (Karl-Fred.), 337 à 512 Kolowrat (L.), 839. Komnenos (T.), 407, 496. Konen (H.), 456. Künigsberger (J.), 879. Koorders (S.-H.), 170. Koref (F.), 158: Korn (A.), 660, 758. Kotaro-Honda, 316. Kowalski (J. de), 129, 959, 994. Kramer (E ), 176. Kraus (R.), 407. Kranse (E.), 364, 536. Kreidl (A.), 668. Kremann (R.), 363, ee Vi 668. Sn à (H.-V. ), 5 Kruppa (E.), 363. Krüse (K.), a Kruyt (H. _R.) . 268, 716, Krylofl (N.), 110, 224. Ktenas (CA. ), 314. Kübn (Julius), 401. Kunstler (J. } 712. Kuntzen (H.), 362. Kutschewski (J.), 879. Kuyper (J.), 176. L Laar (J.-J. van), 136, 407, 1040. Labaune (L.), 85, 1000. | Labbé (H.), 429, 797, 959. Labbé (L.), 450. Labbé (Marcel), 36, 79, 125, 260, 100, 448, 4SS, 528, 799. Laborde (A.), 529. Lacava (F.), 627. Lacroix (A.), 80, 489, 527, 530. 661 1 138. Ladenburg (A.). 37, 167, 456, 175$. Ladenbure (R.), 879. Laederich (L.), ÊTES Lafay (A.). 37, 490, 661, 919, 993. Lafont, 960. Latforgue, 263, 404, 492. Lafite- Dupont, 404, 492. Lagriffoul (A.), S1, 82, 128, 472. 263, 311,356, 357, 569. Laguesse (E.), 263, 658. Laignel-Lavastine (M.), 129, 451. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1067 Laïisant (C.-A.), 526. Lalesco (T.), 994, 1035. Lalesque, 659. Lallemand (Ch.), 170, 262, 310, 660, 798. Lalou (S.), 959. Lamarcodie (G. de), 123, 167, 212, 307, 397, 562, 618, 656, 754, 194, 872, 1032. Lamarque, 659. Lamb (H.), 86. Lambert (M.), 663, 1035. Lamotte (Marcel), 351, 445, 458. Lampe (E.), 626. Lancereaux (E.), Landerer (J.-J), é Landouzy (L.), 659, 912, 913, 914. Landsteiner (K.), 80, 81, 82, 218, 264, 451. Lang (R.), 760. Lang (V. von), Langeron que jf Langevin (P.), 798. Langlois (J.-P.), 263, 569, 623, 662, 995. Langstein (E.), 760. Lankester (Ray), 711. Lanvelongue, 39, 261, 356. Lannois, 403. Lanzenberg (A.), 943. Lapicque (Mme L.), 311, 451, 532, 914. 917, 569, Lapicque (L.), 103 à 44%, 128, 129, 911, 451, 532, 569, 623, 662. Lapie (Paul), 215, 354, 196, 838. Laporte (F.), 170. Lapparent (J. de), 401, 531. Lapworth (A.), 86, 665. Larmor ( Sir J.), 86. Laroche (G.), Laroque (L.), Larose (H.), 529, 621, 797, M3. Larose (3.) 310. Lasausse, 129, 251. Lassablière (P.), 81, 82, 263. Lassieur (A.), 405, 913. Lattès (S.), Lattey (T.-S. ji Laugier (H.), 128, 623. Launay (L. de), 38, 974 à Launoy ( 489, 659. 661, L.), 82, 312, 357, 449, 623, 719, Lauricella (E.), 627. Lauriol (P.), 1037. Lautier (R.), 82, 404, 570. Lavallée (A.), 621. Laveran (A.), 82, 129, 171, 357, 451, 539, 711, 712, 798, 876, 914, 1035. Lavergne (Gérard). 76, 123, 306, 990. Law (D.-J.), 534. Léauté (A.), 449, 485. Lebel (J.-A.), 490. Lebesgue (H.), 80. Lebœuf (A.), 960, 994. Lebon (Ernest), 75, 485, 812. Lécaillon (A.\,82, 128, 172, 218, 357, 623, 663, 712. Lechalas (G.), 707. Le Châtelier (H.), 53, SS6 à S93. Leclerc du Sablon, 661, 759. Leclercq (J.), 799, 596. Lecoq, 310, 355. Lecoq de Boisbaudran, 529. Lecornu (L.), 38, 994, 1035. Le Dantec (KF.), 815. Le Dentu. 38, 712. Lederer (Ch.), 876. Leersum (P. van), 716. Lees (C.-H.), 220, 360. Leeuw (H.-L. de), 916. Lefebvre (M.), 918. Legendre (J.), 712. Legendre FEDE 488. Legendre (R.), ÿ2, 128, 451, 532, 569, 510, 622, 994. Léger (E.), 402, 493, 568, 624, 665. Léger (L.), 216, 993. Léger (M.), 39, 82, 129, 623, 960. Legrain, 757. 491, 492, Legros (G.), 492. Legry (Dr), 531. Leishman (Sir W.-B. Lejonne (P.), 129. Lelieuvre (M.), 32, 257, 350, 835, 909. Lelièvre (Aug.), 39, 81, 128, 129, 357, 451, 532, 569, 622, 662, 742, 960. Lemaire (G.), 960, ), 665. Lemoine (G.), 261, 263, 356, 403, 1033. Lemoine (P.), 37. Lemoult (P.), 657. Lenk (E.), 668, Léonard (A.-G.-G.), 625. Léon-Kindberg, 995. Léopold-Lévi, Le Lepage (Ad.), 3 Lépine (R), 59. 218, 312, 960. Le Play (A.), 996. Leprince (M.), 38. Lerch (F. von), 132. Leriche (M.), 959. Leriche (R.), 39, 531. 876. Leroux (H.), 797. Le Roux (J.), 80,127, 216, 529, 567. Lescardé (F.\, 352. Lesieur (Ch.), 140. Lesné (E.), 402, 570. Le Sourd (L.\, 128, 451, 996. Lespieau (R. j! 81, 572, 624. Le Sueur (H.-R.), Létienne (A. 64 à 74. Letombe (L.), Letulle (M.), 39, 8, 218, 351, 403, 451, 491, 570, 662. Levi (E.), 621. Lévy (Maurice), 876. Lévy (P.), 404, 797, 994. Lévy (Dr Paul-Emile), 35. Lewis (P.-A.), 129. Lewkowitsch (J .), 486. Leyden (E. von), 912. Lezé (R.), 71. Lhermitte (J.), 218. DÉS (L:), 449. Lieb (H.), 568. Léebiseh (Th.), Limb (C.), 490. Liodemann (F.-A.), 455. Lindemann (R.), 222, 880. Linden (F. van der), 407, 945. Lindet (L. k Lindner (P.), 155. Linossier (G.), 263, 356 Linsbauer |K.), 964. Lioret, 529. Lippmann (G. hé A0 358, 567, 1035. Lisbonne (M.), Lissofsky Me 8 : 622. Liversidge (A. pes 453. Lloyd (L.-L.), Lob (Léopold), 4 Loeb (Jacques), “és. Lœæffler, 959. Loeper (M.), Loiseau (G.), 667. 356, 357, 492, 662, 712. 569, 622, 623. Loisel (G.), 171, 692 à 706. Lombard (D, 356, 876. Lombard (J.), 1034. Lombard (M. c)) 128. Londe (Dr), 565 Longo (B.), 994. Lonius (A.), 818. Loppé (K.), 307, 618. Lorentz (H.-A.), 315, 350, 994. Loria (S.), 628. Loris-Melikov (J.), 82. Lortat-Jacob (L.), 129. Lortet, 38, 39. Lo Surdo (A... Le 364. Louguinine (W. , 490. Louise (E. }, Love (E.-G.), 268. Lowell (P.;. 216, 402, 485. Lowry (T.-M.), 362, 13, U4. Loyez (Mie M.), 1036. Luc (A. de), 994. 356, 198, 450, 622, 996. Levaditi (C.), s0, 81, 82, 218, 264, 312, 4573 à 165, 169, 312, 957. 403, 404, 1035. Maire (R.), Lucas (Mlle P.), 402. Lucas-Championnière (J Lucet (Dr), 217, 312, 711. Lucien (M.), 40, 83. Luff (B.-D.-W.), 574, 1039. Luizet (M.), 470, 530, 994. Lumière (A.), 876. Lumière (L.), 876. Lumière (et fils), 79. Luther (R.), 990. Lutz (L.\, 450. Lux (P.), 963 Lyon- Caen (L. ), » SL. 129, 313. Mac All (T.), 363. Macallum (A.-B.), 871. Mac Ewan (B.-Ch.), 625. Machat (J.), 875, S85. Mache (H.), 223, 963. Mac Intosh (J.), 312, 357. Mac Kenzie (Al), 175, 361, 453, Mac Keuzie (J.-E.), 714. Mac Kenzie (K.), 454. Mackey (W. Mac D.), 43. Mackie (F.-P.), 86, 132, 220, 666, 878. Mac Mahon (P.-S.), 362, 454. Mac Namara (J.), 1000. Mac Nicoll (D.), 961. Magnan (A.), 568, 661, 93. Mahar (Dr), 263. Mahler (P.), 530, #67. Maiden (ER 1033. Maignon ), 310. Maiïlhe (A.), 3555, 388 à 395%, 499, 567, 657, 197, 198, S60 à 871. Maillet (Em. ), 342. 621. Majcen (G.), 963. Malassez (L.), 34, 82. Malclès (L.), 490, 660. Mailfitano (G.), 310, 359, Malher (P.), 912. Mallock (A.), S40. Maltézos (C.\, 798. Mameli (Mlle E.), 627. Mamelle (Th.), 80. Manceau (E.), 258. Manceaux (L.), 355. Mancini (Ernesto), 88, Mangin (L.). Manley (J.-J.), Mann (J.-C.), 759. Mansillon, 995. Manson (Sir Patrick), 170. Mansuy (H.), 839, 959. 714. s00, 959. 224, 364, 627. Maquenne |L.), 2, 196 à 205, 45, HA Marage, 128, 450, 959. Marbé (S.), 82, 171, 263, 264, 313, 492, 510, 960, 996, 1036. Marcelin (R.), 1035. Marchal (P.), 912, 913, 959. Marchand (Em. \, 567. Marchand (E.-F.-L.), 494, 529. Marchand (H.), 59 à 64, 179, 272, 369. 501, 652 à 654, 921. Marchi (L. de). 627. Marchiafava (E.), 364. Marchis (L.), 955. Marchoux (E.), 263, 622. Marcou, 569.} Marfan (Dr), Margaillan (L.) Marguet | (F.), "ae 541. Marie (A.), 621, 659. Marie (C.), 307, 319, 563. Marie (P.), 450. Marinesco (G.), 168, 264, 312, S4 S34, S52 à S60. Marino (F.), 199: Marle (E.-R.), 962. Marmorek, 171. Marquez, 662. Marquez (Dr Miguel), 710; Le a 6 à 1068 Marquis (R.), 42, 173. Marre (L.), 218. Marret (L.), 403. Marsden (Mie E.-G.), 361, 714 Marsh (J.-E.), 361. Marshall (H.), 494. Marshall (J.,, 221. Martel Eh 211. Martel (E.-A.), : Martelli (A.), 2 Martens (A.), 4 Martienssen (0. Martin (A.), 216. Martin (André), 711. Martin (E.), 81. Martin (Ed.), 403. Martia K. J'4716: Martin (L.), 569, 622, 623. Martinet (A.), 125, 309, 488, 751, 195, 958. Martonne (Em. Marty (J.), 261, Marty (P.), 712. Mascarelli (L.), 88, 364, 627. Mascart (J.), 902 à 908. Mason (F.-A.), 220. Masselon, 1032. 262, 402, 530. Massol (G.), 450, 621, 188, 198. L.), 198, 172, 357, 491, Massol Masson (J.), 135. Masson (L.), 127. Masson 0O.), 1000. Masson (P.), 568. Massonnat (E.), 312, 441. Mathias (E. je 198. Mathieu (H.), 932, 510. Mathis (C Matignon (C.), 124, 527, 618. Matruchot (L.), 261. Matteuzzi (E.), 364. Mattoso (Ernesto), 34. Maubant (E.), 121. Maublant (E.), 915. Mauduit (M.-A.), 1031. Mauguin (Ch.), 41, 593. Mauraïn (Ch.), 6 à 19, 171, Maurel (E.), 39, 81, 129, 171, 351, 403, 448, 569! 622, 663, 996, 1036. Maurette (L.), 561. Mauriac (P.), 492. Maurice (H.), 914. : Mawas (J.), 81, 312, 623, 1036. Maxim (Sir Hiram S.), 562. Maxw ch (J.), 400. May (P.), 362, ee 999. MS (A.); 40, 82, 963, 264 539. Mayet (L.), 567. Mazé (P.), 129, 957. Mazurkiewicz (Et.), 758. Mazzucchelli (A.), 88. Medeiros (M. de), 171. Medigreceanu (K.), 267. Meillière (G.), 356, 568. ME OHISREAEC, 1035. Meldola (R.), 362, 574, Meldrum (A.-N.), 962, 999. Mello (U.), 960. Ménard (J.-P.), 404. Méaétrier (Dr), 531. Mengel (O.), 959. Menneret, 402. Menozzi (A.), 364. Menz (Mie J.), 223, 496. Mercanton (P.), 567, 1036. Mercer (J.). 406. Mercier (L.), 40, 529, 75! 1014. Merlin (J.), 839, 994. Merriman (R.-W.), 42. Merry (E.-W.), 574, 999. Mertens (F.), 363, 668, 964. Merton (Th.-R.), 1039. Merveau (J.) , 989. Meslin (G.), 190. Mesnil Felix), 538, 665, 960. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 566, 639, de), 39, 81, 124, 128. 530, 633 à 641, 8, 138, 996. .), 39, 82, 129, 623. 960. 314, 708. 263, 264, 712, 960, , 349, 356, 759, 1000. , 4006 à Mestrezat (W.), 129, 263, 311, Metchnikotf (E.), 311, Meunier (J.), 85, 311. Meunier (L.), 404. Meunier (Raymond), 125. Meunier (Stanislas), 351. Meurice (Dr J.), 796. Meyer (A.), 621. Meyer (E.), 5175, 715. Meyer (H.), 963, 964. Micciollo (A.), Xha. Michaud (F.), 993. Michel-Lévy (Alb.), 311, 1035. Micklethwait (Mie F. M. -G.) Mignard (M.), 911. Mignot (R.), 214. Miklauz (R.), 668, 963. Milhaud (G. Jr 512 à 520, 707. Miller (J.), 4 Millochau (& ), 661. Millosevich (E.), 223, 364. Mills (W.-H.) Lopse 299! Minchin (E. A.), 261. Minet qe }, je. Minot (H.), 451, 491, 492. THE (A.), 88. Mirande (M.), je 994. Mirimanoff (D,), 127. Mitchell (A.-D.), 42, 494, 1039. Mohr (H.), 43, 223, 964. Moir (J.), 494. se (G.-A.-F.), 44. Molisch (H , 964. Müller Te AN 626. Mollereau, Sn Mollerup (J.), Molliard, 995. Mond {L.), 362. Monges (F.), 662. Mongour (Ch.), 404. Monier, 532. Monier (F.), 398. Monier-Vinard, 81, 450. Monnier (U.), 663. Monprofit, 312. Montangerand (L.), 38, 660, 994. Monlessus de Ballore (De), 217. Montpellier (J.-A.), 154. Moog (R.), 37. Moore (Ch.-W.), FL 573, 114, 115, 1039. Moore (W.-R.), Mooy (W. -d. ns Gi, Moreau (L.), 1035. Moreaux (kR.), 129. Morel (A.), 622. Morel (L.), 82, 198, 171, 532. Moreschi (A.), 364. Moreux (Th.), 3, 90, 258, 630. Morgan (G.-T.), 86, 453, 625, 114. Morgenroth (J.), 878. Morgenstero (O.), 407. Morrell (R.-S.), 362. Morton (W.-B.), 999. Moruzzi (G.), 172, 264. Mosrhkoff (Mile A.), 310, 959. Mosay, 353, 492. Moss (H.), 85. Mossler (G.), 43, 407. Mosso (Angelo), 994. Mott (F.-W.), 131, 998. Mouchet (A.), 914. Mougin, 1035. Moulin (M.), 40,127, Moulinier (R.), 451. Moureu (Ch.), 659. Mouriquand (G.), 491. Moussu (G.), 404. Moutier (A.), 449. Mouton (H.), 311, 355, 571, Mrazek (L.), 605 à 612. Mukhergee (S.-C.), 714. Muller (P.-Th.), 990. Muller (R.), 42, 175, 494. Müller-Breslau (H.), 221, 456. 993, 994. Mulon (P.), 129, 492, 532, 960. 996, 1037. Muntz (A.), 170, 529, 959. Murmann (E.), 964. 712, 199. , 86, 625. 568, 993, 1037, 1038. 31,128, 113, 114, 263, 624, Musatty (L.), 364. Mussell (A.-G.), 962. Mutermilch (S.), 570, 662. Myrbach-Rheïnfeld (O0. von), 223. Nageotte (J.), 81,128, 261, 311, 313,570, 1036. Nansouty (Max de), 448. Nanty (T.), 490. Nattan-Larrier, 218. Neave (G.-B.), 961. Neesen (F.), 222. Négre (L.), 402, 489, 569. Negri (A.), 224. Negris (Ph.), 341. Nélaton (Ch.), 312. Nernst (W.), 455, 879. Netter (A.), 357, 491, 531, 876, 995. Neumann (B.), 445. Neumann (K.), 668. Neville (H.-A.-D.), 1000. Newman (S.-H.), 961. Nicati (br William), 565. Nicholls (G.-E.), 713. Nicloux (M.), 82, 356, 357, 404, 451, 489, 491, 493, 621, 622. Nicolardot (P.), 84, 913. Nicolas (J.), 218. Nicolau, 568. Nicolle (Ch.), 355, 621, 622, 7411, 198, 199, 876, 912. Niessl (G. von), 963. Noble (Sir A.), 86. Nodon (A.), 310, 403. Noe (G.), 364. Noel (E.), 39, 568. Noelting (F.-A.-M.), 154. Nogier (Th.), 38, 529, 532, 663. Nomblot (L.), 171. Nordmann (Ch.), 172, 216, 310, 485, 621, 959: Norris (R.-V.), 961. Noss (F.), 668. Nouailhac-Pioch, 312. Nouri (0.), 129, 404. Nowaczynski (J.), 996. Noyons (A.-K.-M.), 176, 576. O0 Oberreil, 170. Obiedoff, 533, 621. Occhialiai (A.), 909. O'Connor (H.), 495. Oddo, 532. Oddone (E.), 224, 627. Obkabo (S.), 357, 403, 451 Olie jun. (J.), 44. 88, 364. Oliveri-Mandalà (E.), 5841 à 605, 798. Olivier (Louis), Ollivier (H.), 402. Olmer (D.), 351. Olmsted (J.-M.-D.), 362. Onnes (H.-K.), 310, 407, 628, 711, 798. Onslow fa MS 495. Orléans (Duc d’), 794. Orson Wood (D Orth (J.), 221. Orton (K.-J.-P.). S6. Ostwald (W.), 835, 990. Ottinger (L.), 534. Otto (M.), 536. Oui, 312, 995. Ouivet (E.), 402, 489. Oxner (M.), 567. Ozoux, 532. Olivari (F.), 88, 294. ( de NSTe. P Pachon (V.), 171, 172 ,492, 532, 568. Pacottet (P.), 621. Padoa (M.), 88, 224. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1069 Page (H.-J.), 574. Pagliani, 662. Pagniez (Ph. ), 128, 172, 451, 996. Paillard (H.), 218, 357, 403, 404. Painlevé (P.), 84. Paisseau (G.), 356, 492. Palazzo (F.-C.), 364%. Panisset (L.), 129, 403. Pannekoek (A.), 915. Paunelli (M.), 627. Pantanelli (E.), 224, 564, 627 Panton (P.-N.), 713. Paquet (N.-A.), 754. Parhon (C.), 264. Paris (A.), 218. Paris (pu. 40%. Pariselle (H.), 402, 490. Parisot (J.), 40, 83, 357. Parker (J.-G.), 363, 800, 1000. Parr (G.-W.), 625. Parry (W.), 86. Partington (J. R.), 86, 175, 404. Parturier, 404. Parvu (M.), 217. Pascal (E.), 224. Pascal (P.), 402, 450, 530. Pastella (V.), 622. Pasteur (M° Louis), 876. Patterson (T.-S.), 962, 1000. Paucob, 312. Paul (M.), 363, 1000. Pauli (W.), 496. Paulus (F.), 264. Pavy (F.-W.), 260, 399. Pearce (F.), 831. Pearson (K.), 572. Pécheux (H.), 242 à 246, 617. Pecsi (A.), 913. Peglion (V.), 224. Pekelharing (C.-A.), 268. Pekelharing (Mit C.-J.), 44, 176. Pélabon (H.), Dies Pelet-Jolivet (L.\, 874. Pelletan (André), 224 à 284. Pellini (G), 88, 627. Péneau (H.), 712, 913: Penck (A.), 495. Pentecost (S.-J.), 43 Pérez (A.-J.), 958. Pérez (Ch.), 128, 129, 171, 529, 569. Péricas, 567. Perkin (A.-G.), 42, 220, 714, 999. Perkin (W.-H. jun.), 42, 220, 267, 454, 574, 714, 961, 999, 1039. Perndanner (H.-F.), 964. Peron (G.), 996. Perot (A.), 530, 568, 660, 711, 797, 993, 1037, 1038. Péroux (E ), 80, 81. Perrier (A.) 628, 661, 663. Perrier (R.), 661, 711. Perrilliat, 913. Perrin (Jean), 452. Perrin (M.), 83, 129. Perroncito (A). 129. Perrot (Em.), 38, 568. Perrot (F.-L.), 839. Pervinquière (L.), 34, 619. Pestalozza, 413 Petetin (J.), 662. Petit (D.), 263. Petit (G.), 341. Petot (A.), 401, 959. Petri (L.), 224, 364, 627. Pettit (A.), 82, 129, 117 ASS OTAGE TEE 112. 798, 914, 1035. Peyre (Roger), 488. 1 RE 83, 172, 26%, 357, 660, 112, | Purvis (J.-E.), 175, 221, 267, 361, 713 Pezet, 713. Pezzi (G), 914, 096. Pfannl (M.), 132, 407. Pflüger (A.), 535. Phelps (J.), 624. Philibert (A.), 217. Philip (J.-Ch.), 624. Philipi (E.), 760. Philippe (L. H.), 994. Phillips (P.), 174. Phillips (W.-C.-S,), 666, Phisalix (Mme), 216, 262. Picard (Alfred), 798. Picard (Emile), 38, 261, Pick AN 621. Pickard (J.-A.), 86. Pickering (S.-U.), 220. Picqué (Dr), 491, 662, 914. Pidduck (de ne E "360. Piédallu (A.), 797. Piéron (H.) 230, 532, 622, 226 à 236, 769 à 779, Pilch (F. ), 364, 964. Pinard (A.), 531. Pirani (Von, 575. Pirenne (Henri), #88. Pitres (A.), 492, 570. Piutti (A.), 224. Plancher (G.), 88, 224. Plancherel (M.), 170. Plimmer (R.-H.-Aders), 76 Plimmer (H.-G.), 665, 998. Pochettino (A.), 224. Pocklington (H.-C.), 85 Pobl (R.), 222, 336, 516, 880. 330. Policard (A.), 82, 198, 312, 356, 491. Poincaré (H.), 37, 444, Pollacci (G.), 621. Pollack (J.), 668. Pollock (E.-F.), 962. Poma (G.), 364. Pompeiu (D.), 38, 216. Poncet (A.), 39, 263, 531, 876. Ponselle (A.), 404, 914. Pope (F.-G.), 86, 453, 494. Pope AE -J.), 495, 1039. Popoff (K.), 529. Popovici (C.), 994. (G Porcher (Ch.,, 81, 82, 128, 171, Portier (P.), 569, 799. Possek (R.), 88. Pouiton (E.-B. ; 86 Power (F.-B.), 115, 220, 573, 999. Pozerska nice Foi Pozerski (E.), 622. Pozzi-Escot (Emm.), 37, 38, 355 370 à 383, Prayon (Ern.), 655. Prenant (A.), 169, 995. Prévot (Al.), 569, 622, 623. Pribram (B.-0.), 132. Price (G.-M.), 221. Price (T.-S.), 363, 574. Prideaux (E.-B.-R.), 962. Priglinger (J.), 407, 760. Prince de Monaco (S. 529. Pring (J.-N.), 361, 454. Pringle (H.), 406. Pringsheim (E.), 758. Pringsheim (P.), 536, 516, 880. Prins (Me A), JA Proca (G.), 967. Procter (H.-R.), 455, 574, 1040. Prunet (A.), 37 Prytz (K.), 87 Przybram (K.), 88, 536, 760. Puiseux (P.), 343 à 349, 661. Purdie (T.), 961. 961, 962, 1000. Pyman (F.-L.), 220, 714, 999. Q Quagliariello (G.), 88. Queirel, 81. Quénisset (F.), 797. Quidor (A.), 959. Rabaud (Et.), 82. Rabl (H.), 88, Race (J.), 574, Rachewski (Mile T.), 1036. Radais, 661, Ragno (S.), 990. Rahir (Ed.), 398. Raïlliet (A.), 172, 218, 365, 451. Ramsay (Sir W.), 221, 621, 624, 661. Ranc (A.), 490, 758. Ranjard, 311. Ranken (H.-S.), 998. Rankin ([.-G.), 43. Raokine (A.-0.), 174, 405, 799. Ranzi (E.), 407. Rateau (A.), 994. Rathery (F.), 40, 172, 264, 512, 356. Ratnowsky ( Ravaz (L.), 311. Ravenna (C. ), 8 8, 224. Ray (P.-C.), 17: Ray (W.), 840. Raybaud (A.), 83, 172, 532, 996. Raybaud (L.), 264, 451. Rayleigh | Dors 127, 5172, 945: Raymond (F.), 312, 876. Read (J.), 495, 759, 1039. Rebattu (J.), 660, 662. Rebel (H.), 760. Reboul (G.), 758. Recklinghausen (de), #1, 401, 912. Reclus (P.), 450. Redgrove (H.-S.), 454, Regaud (Cl.), 38, 261, 356. Regelsperger (Gustave), 49, 213, 322, 351, 565, 155, 845, 910, 969. Régis, 531. 5. S.), 449, 489, 530, 571. ), 465 à 473, Regnard, 355. Regnier (G.), 37, 876. Reichenheim (0O.), 626. Reid (C.), 800, 916. Reid (Me E.-AL.), 916. Reid (E.-M.), 800. Reid (J.-F.), 454. Reid (G. Archdall), 911. Reignier (Ch.), à8. Reinders (E.), 316. Remlinger (P.), 129, 263,404, 996. Rémy (L.), 83, 310. Renard (Ct Paul), 166, 483 à 196, 231 à 244, 257, 562, 568, 655. Renaudot (G.), 118, 226. Renaut (J. l Eu 40%, 569. Renier (A.), Rénon (NS ET 450. Repaci (G.), 128,172, 218, 264, 356. Repelin (J.), 312, 651. Répin (Ch.), 236 à 353. Repossi (E.), 627. Résal (J.), 994. Retterer (Ed.), 39, S1, 128, 129, 356, 357, 451, 532, 569, 622, 663, 712. 798, 960, 995, Retzius, 959. Reverchon (Léopold), 414 à 429. 499. Reverdin (F.), 216, 529, 574, 994. Révil (J.), 213, 246 à 255, 260, 297% à 305, 687 à 691. Revillet (Dr), 914. Reynès (Dr), 491. Reynier (P.), 568. Reynolds (W.-C.), 714. Rhead (T.-F.-E.), 999. Ribadeau-Dumas (L.), 356, 712, 996. Ribereau (L.), 663. Ricci (G ), 364. ‘| Ricco (A.), 403, 621. Rich (Miie E.-M.), 267. Richards (M.-B.), 454, 961. Richards (Th. W.), 963 Richardson {F. W.), 968. | Richardson (L.-F.), 174, 1038. | Richet (Ch.), 82, ’264, 351, 494, 1622, 965, 1002. 1070 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Richet (Ch. fils), 356. 357, 531, Richon {L.), 129, 337. Riesz (F.), 310. Righi (A.). 88. Rimbaud (L.), 218. Ringelmann (M.), 995. Riokes (J.-J.), 268, 716. Riquier (Charles), 256. Rist (Ed.), 312. Rivett (A.-Ch.-D.), Roberts, 1032. Roberts (R.-W.), 314. Robert-Simon (D.), 354. Robertson (R.), 314. Robin (Albert, 171, 311, 313, 996. Robin (F.), 912, 913. Robinson (R.). 42, 220, 574, S39, 959, 1000. Rochaix (A.), 529, 663, 914, Rodd (E.-H.), 624. Rodet (A.), 34, 351. Roger (E.), 660. Roger (H.), 82, 198, 528, 569, 621, 663, Roger-Jourdaia (P.), Rogers (F.), 961. Rogerson (H.), 494 Rolla (L.), 224, 364. Rolland, 995. Rollet (M.), 199 Roman, 531. Romme !{R., 2835 à 296. Roncagli (C! Jean), Rose, 530. Rosenblatt (M: M.), 490. Rosenblatt (M.), 449, 491. Rosenbain (W.), S6. Rosenstiehl (A.\, Rosenthal (G.), 451, 569, 662, 663, Ross (Q.), 574, S00. Rossard, 38. Rosset {Th.), 530 Rossi (R.), 361. Rost, 913. Rothe (H.), 406. Rothschild (H. de), Rottgardt (K.). 839. Roubaud (E.), 199, 839, 913, 994. Roubinovitch (J ), 218, 357, 992. Rouch, 711. Rouché (Eug.), 198. Roudowska (L.), 914. Roudsky (D.), 264, 313, Roule (L.), 81, 171. Roullet-Chéry (Lucien), 78. Rous {P.), 960. Rouse-Bal: { W.), 166. Rousiers (Paul de). 487. Rouslacroix, 83. Roussanof (V.). 312, 531. Roussel (J.), 839, 876. 362, 961. 262, 267, 960. 712, 958. 567. , 99. 39, 82, 960, 961. 662, 960. Rousset (H.), 93, 481, 619, 657, 803, 1032. Roussy (G.), 218, 491. Routhier, 569. 6235. Rouville (Et. de), 491. 492, 1030. Roux, 398. Roux (Paul), 528. Rovdowska (L.), 663 Roy (Louis), 154. Rubens (H.), 455, 456, 667. Rubens-Duval (H-), 39, 82, 112. Rubner (M.), Rufz (J. de), Ruhemann (S.) 942. 5. 403, 362, 961, 1000. Rumpf (E.), 536. Russell (A), “800, 1038. Russell (B.-R.-G.), 267. Russell (W.-F.), 454. Russenberger (J.-H.), Russo (Ph.), 404. Russyan (C.), 80, 402. Rutgers (A.-A.-L.), 4040. Ruttan RE , 81. Rutten/( (3.). 42. 110, 264. 944, 520 à 524. 914, 960. 959, 490, 172, 263, 311, 403, 128, 171, 173, 624, 660. 129, 263, 366, 162, | Schoop (U.), | | | Sella (M), S Sabaréanu (G.), 218, 356. Sabatier (P.), 355, 489, 567, Sabrazès (J.), 83, 996. Sacquépée (E.), 1034. Sagnac (G.), 490, 568, 623. Sainte-Laguë |{A.), 197, Saint-Girons, 914, 960. Saint-Philippe, 81. Saint-René de -C.), 217. Saison (M.). 172. Saladin (Honri) 488. Salet (Pierre), 642 à 646, 193. Salin (H.), 356, 622, 912, 914. Salles (Ed.), 913. Salmon (E.-A.), Salpeter (J. à 223. Saltykow (N.), 530, 567. CHE (Vicomte de), 955. Salway (A.-H.), 220, 454. Samec (M.), 760, 964. Samter (H.), 221. Sand (H.-J.-S.), 453. Sanders (J. Mc C.,, 1000. Sangouard (P:); 369. Sangster (R.-B.), 360, 572. Sapoienikow (A. , 447 à 4122. Sappey (F.), 712, 799. Sarthou (J.), 81, 312, 356. Sartori (G.), 212. Sartory, 661. Sarvonat (F.), 663. Saurin (Jules, 990. Saussure (R. de , 567. Sauton (B.), 84. 311. 712. Sauvage (H.-E.), 311, 312, 405. Sauvageau NE n 82. Sauvan (A.), 351. Savignac (k. ), 491. Savini | (E:), 944. Savitch (D. 95 à 105, Savornin (J.) | 39. Scal (CL.), 262, 913. Scala (A.), 224. Scalinci (N.), 224. Schæfer (G.-L.), 915. Schæffer (G.). 82, 263, 532. Schatïfer (F.-X. Schaffer (J.), 88, 963. Schaffers { (V) 167. Schapper (Hi), 402, Schaumasse, 798. Scheffer (F.-E.-C.), 628, 916. Schiaparelli (G.-V.), 364, 661. Schidrowitz (Ph.}, 534. Schlæsing fils (Th.). 660. Schmidinger (K.), 668. Schmidt (W.), 962. Schnee (W.), 132. Schæn (M.), 993. 402. Schottky (F.), 21, Schoute (P.-H.), #4, 628, 716, 916, 1040. Schræ FREE E.), 760 Schryver (S.-B. 266. Schulhof, 711. Schulze (E.-E.), 715. Schuster (Edgar), 131, 220. Schuster (J.)., 914. Schwartz (Ed.). 491. Schwarz (H.-A.), 878. Schwærer, 791. Scoble (W.-A.), 491. Scott (AL.}, 42, 86, 453. Scott (M!15 J.-D.), 961. Sébileau (Dr), 995. Seeger (R.), 964. Seer (Chr.), 496. Séguier (de). 262. Seidlitz (W. von), 401. Seillière (G.), 129, 569. Seliber (G.), 489, 530, 568. Sella (E.), 400, 224. 197, 198. 1035. 212: 264, 312, , 407. 456. 268. 316, 408, 576 S26 à S52. 396, Sen (R.-N.),1039. Senderens (J.-B.), S{. 839. Senter (G.), Sérégé (H.), Sergent (Ed Sergent (E t.), 7 Sérieux (P.), 245, Serin (J.), 622. Serpek (4. -0. ). 530. Serra (A.), 224, ne Serve (Louis), 91, sève (P.), 490, 634. Sewell (C.-J.-T.), 453, 877. Seyewetz (A.), 876. Seymour-Jones (H.), 1040. Sézary (A.), 218, 403, 569, 960. Shaw (T. ar -A.) RES Shelton (HS Se 494. SROADE EE + ), 199: Shibata (Y.) Short (A ), 00. Sibirani (F.), 621. Sicard (J. en ', 356, 622. Sidersky (D) 563. Sidgwick (NV. 362, 961. Siebenrock te 760. Siedentopf (H.), 314. Sigmund (W. ÿ) 7196. Silber (P.), 627. Silberzweig (C.;, 261. Silla (L.), 224. Simmiler (G.), 223. Simmonds (Ch.), 1039. Simon (G.), 402, 960. Simon (M.), 964. Simon (P.), 357. Simon (R.), 217. Simon (Th.), 453. Simond (P.-L.), 713. Simonelli (E.), 224. Simonsen (J.-L.), 42, 964, 962, Simpson (G.-C.), 174, 361, Sirk (H.), 496, 360, 963. Sirkar (A.-Ch.), 42 Sirkar (A.-P.), 85. Sizes (G.), 621, 758, 798. Skinner (S.\, 220. 310, 490, = 220. Skirrow (F.-W.), 363. Skraup (Zd. sie) 7164, 407, 536. Skrzynski (Z.), S39. Slade (R.-E.. 1000. Slator fr U 453. Slavu (G.-I.), 264, 491, 569. Sleeswyk (J.-G.), 576. Smart (B.-J.), 314. Smedley. Nue d.) Smiles (S.), 175, 1039. Smith (Mie C.), 42 2. Gr. 454, 574, 2, 267. Smith (d- -J.), 44. Smith (S.), 573. Smith (S.- ALES J.); 220, 573. Smits (A.), 44, 516, 916. SE pe 491. Smythe (J.-A.), 574. Snow EE Fa , 811. Soddy | 131, 665. Solvay | en 309. Somigliana (C.), 364. Soreau (R.), 567. Souczek (Muc H.), 406 Southerns (L.), 877. Southgate (H.-W.), 362. Spaeth (E.), 407, 963. Spencer (J.-F.), 221, 495. Spillmann (L.), 129, 357. Spillmann (P.), 712. Spitz (A.), 43. Stanesco (V.), 2 Stark (J.), 760. Stassano (H.), 401, 799. Staub (A.), 798. Stawska (Mile B.), 530. Stazzi (P.), 491. Stead (J.-C.), 87. Steel (T:), 915. Steele (D.-B.) 998. 1S, 403. ; 361, 1039. 372,701. 760, 11%, 963. 961, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Steensby (Ph.-H.-P.), 709. Stefanesco (A.), 657. Stefani (C. de), 364, 627. Steindachner(F.), 43, 88, 132, 456, 760. Stekloff (W.), 216, 262, 959, 994. Stella Starabba (F. Jr 627. Stephens (J.-W.-W.), 998. Stern (Mie L.) 32) 663, 914, 960. Steuer (Ad.), 963, 964. Stevenson (Mie E.-F.), Stirling (is 86. Stobbe (H.), 962. Stodel (G.), 40 Stoecklir. 530. Stoecklin (E. de), 8 Stærmer (C .) 1507: Stoklasa {J.), 964. Storey (R.), 42. Stortmer (C.), 839. 876, 912. Stott-Boole (Mile A.), 1040. Stoykowitch { Wélimir), 991. Strich (M.), 715. Strohl (J.), 1. Strong (PB. -M.) Strutt (R.-J.), Us 759, 915, 103$. Ste (O.), 455. Study (E.), 660. Sudborough (J.-S.), Suida (H.), 536. Sumpner { W.-E.), 666. Sutherland (Mie M-M.-l)) Suzuki (T.), 221. Sykes (Mile M.-G.), 878. EUR TES (Mie W.) Szilard (B.), 568. Szokalski (C.), 172, 312. Szokalski (S.), 218. Szreter (1.), 660. Szücs (J.), 963. 1000. 0, 798. 362. . 962. . 622. T Taboury (F.), 261, 489. Tatfanel (J.), 37, 993. Taillandier (0.), 218. Talarico (J.), 403, 532, 199, Tanakadaté (A.), 711. Tandler (J.), 760. Tannery (J.), 993. Tanon, 662, 712. Tanret (C.), 265. 198. Tanton, 312. Tarbouriech (P.-J.), 561. Tasker (H.-S.), 1000. Tassilly (E.), 158. Tatlock (R.-R.), 313. Taub (S.). 963. Tavernier, 569. Taylor (G.-L.), Fur Tayler (J.-M.), 87, 221, Taylor (R.-L.), ui Tcherniavski | A.) 401. Tchougaeff (L.), 529, 1033. Teisserenc de Bort (L.), 993. Teissier (Dr), 450, 712. Teissier (J.), 491, 660. Teissier (P.), 172, 218. Teixera {F. Gomes), 32. Telmon (H.), 532, 623. Tenani {M.), 364. Téréchine (S.), 456. Termier (P.), 531. Terroine (E.-F.), 263, 264. 312, 336, 403. 451. 960. 454. Tesch (J.), LE Testut (L.), 7112 Thaon (P.) * 40, 199, M#. Thévenot (L.), 491. Thibault Es, 128. Thirkill (H), 266. Thirode (G.), 449. Thiroux (A.), 51. Thoday (D.), S00. Thoinot (A.), 1056. Thole (F.-B.), 625, 1000. Thole (H.-F.), 361. | Thomas (Ph.), 213, 454, 491, 532, 569, 619. Thompson (D.), 800. Thompson (S.-P.), 220, 402, 800. Thomson (J.-D.), 220, 267, 514. Thomson (Silvanus P., 534. Thomson (ROT.,. 313. Thoruton, 174. Thorpe (Sir Ed.), 42, 174, 1039. Thorpe (I.-K.), 86, 449, 453, 494, 532, 114, 1039. Thoulet (J.), 216, 262, 401, 491. Thovert (G.), 170. Tian (A.), 711, 1035. Tieri (1), 627. Titfeneau (M.), 85, #50. Tikanowitch (Miie M.), 557. Tinerding (H.-E.), 7 Tinel (J.), 403. Tison (A.), 621. Tissier (H.), 82. Tissot (C.), 358 Tissot (J.), 310. Titherley (A =W.), 175, 454, 714. Tixier (L.), 218, 356, 492. Tizard (H.-T.), 362, 513, 909. Todd (C.), 799. Tonelli (L.), 88, 364. Touplain (F. JTE Tourpaïan (M.), 912. Tozer (M!te F.-M.), 799. Trabert ( W.), 43, 88, 132. Trabut (L.), 37. Traquair (J.), 363. Treub (M.), 912. Triboulet (H.), 82, 996, 1037. Trillat (A.), 84, 171, 311, 356. Trolard, 531. Trotman (S.-R.), 43, 83, 454, 574 Trouessurt (E.-L.), 912, 992. Truc (H.), 876, 913. Tsunoda (D'), 221. Tucakovic (R.), 668. Tuck (W.-B.), 461, 714. Tucker (Al.-E.), 495. Tuffier (Dr), 356, 531, 712, 737, Tumlirz (O.), 495. Turchini (S.), 815. Turner(W.-E.-S.), 514, 962, Rue (Albert), 707, 955. Turro (R.) 960, 996. Tutin (F.). 42, 86, 114, 999, 1039. Tutton (AE He 85. Twiss (D.-F.), 15, 574. Tyrer (D), 362, 962. Tzitzeica (G.), S0, 401, 489, 994. 356, 351, 960, 1056. 999: U Ubach, 530. Uexküll Qs von), 214. Ublig (E.-C.), 268. Uhlis (W. ), 963. Urbain (Ed.\, 262. Urbain (G.), 359, 401, 533, 621, 661, 913. 220, 871. Usher (F.-L.), 86, k4, 176, 627, T6. Uven (M.-J. van), V Vaillant Ge 127, 310, 402. Valenta (E.), 132. 223, 363, 668. a. -H.), 363. 407, 408. Valentine Valeton (J.-J.-P.), Valeur (A), 85. Valkenburg (C.-F. van), 916. Vallée (H.), 39, 21$, 449. Vallée (M.), 108, 956. Vallet (G.), 218, 262, 403. Van den Broeck (E.), 398. 539. Vandernotte, 661, Vaney (C.), 261, 312, 404. Vanney (A.), 404, 663. Van Rijnberk (G.), 1040. Vanstone (E.), 267. Van Tieghem (Ph.:, 621 995, Vanzelti (B.-L.), 88. Vaquier, 569. Variot (D.), 150. Vaschide (N.), 36. Vas Nunes (A. 268. Vasticar (E.), 174. Vavon (G.), 449. 529. Vayssière (A.), 83. Vedel, 995. Verllon (A.), 129. Vélain (Ch.), 1035. Veley (V.-H.), 131, 219, 453, 877. Vergne (H.), 402. Vermorel (V.), 446. Verneuil (A.), 127, Vessiot (E.), 568. Vèzes (M.), 310. Viala (P.), 446, 621. Vidal (E.), 569. Vidal de la Blache (P.), 125. Vignon (L.) , 217, 262, 401, 660, 912. Vigouroux | (Em m.), 38. Viguier (P.), 402, 529, 661. Vila (A.), 568. Villard (P.), 490, 569, 664, 758. Villat (H.), 994, 4035. Ville (J.), 311, 996 Villemin (F.), 83, 357, 492, 570. Villey (Jean), 660, 913. Vilmorin (Ph. de), 839. Vinceat (H.), 39, 81, 171, 217 996. Vincent (Swale), 573. Vinet !E.), 311, 1035. Vinsonneau (Jules), 75 Viola (C.), 364. Violle (J.), 449. Virchow (Hans), 818. Virieux (J.), 759. Viès (F.), 38. Voisenet (E.), 80, 355, Volgraff (J.-A.), 44. Volkmann (W.), Volmar [V.), 450. Volterra (V.), 22: Vouk (V.), 964. Vournasos, 401. Vournassos (A.-C.), Voyer (Ct), 397, 655, 955. Vries (J. de). 307, 416, 627, T5. Vnillemin (P.), 148 à 45%. 355,432 à 443, 473 à AS4, S12 à S16, 942: Vulquin (E.), 39, 912. . 068, 995, 567, 839. œe W Waals (J.-D. van der), 170, 716. Wade (J.), 42. Wagner (A.), 132 Wagner (K.-L.), Fes. Wahl (A.), 261. Wahl (B.), 536. Waldeyer (W.), 221. Walker (G.W. } 266. Walker (J.), 453. Wallach (O:), 961. | Walle (Paul), 307. Waller (ee 131, 219, Wallisch (Dr), 217. Walpole (G. -S.), 453. Walsh (Mle G. at ), 362. Warcollier (G.), 171. Warnes (A.-R.). 574. Wartburg (E. von 192, Wartenbe re (H. von), 156. Watson (ER) 42. Watson (H.), 999. Watson (H.-E.), 362, 574. Watson (W.), 220. Watson (W.-H.), 361. Watteville (C. de), 37, 38, 170. Watts (C.-H.), 267. Wechsler (E.), Le Wegscheider | W ehnelt ( A.), ee Weichselbaum (A.), 456. ), 668, 963, 964. 1072 Weigert (F.), 840. Weil (Me J. \L 532. W. ill (J. ), 569. Weill-Hallé (B.), 9641. Weinberg (Boris), 460. Weinberg (M.), 312, 401, 569, 399. Weiss (Georges), 49 à 26, 59, 214, 263, 404, 450, 712, 876, 1036. Weiss (P.), 310, 313, 407. Weisweiller (G.), 127, 158, 993. Weitzenbück (R.), 223, 296. Weizmann (Ch.), 20, 362, 574. Welsc? (J.), 355, 567. Wenchebach (K.-F.), 716. Wenzel !F.), 223. Wertenstein (L.), 355, 798. Wertheimer (E.), 35, 171, 356. Westphal (W.-H.). 575. Wheatley (R.), 1000. Wheeler (R.-V.), 962, 999. Whitby (G.-S.), 86. White (E.-J.). 361. White (R.-G.), 799. Whitehouse (R.-H.), 131. Wichmann (A.), 1040. Widal (F.), 171,450, 662, 995. Wiedemann (E.), 535. Wiesner “ Von), 962. Wigand (A.), 878. ieman . ). 109. Wilhelm (A.), 218. Wilkie (J.-M.), 132, 759. Wilsmore (N.-T.-M.), 999. Wilson (E.), 961. Wilson (F.-J.), 962. . Wilson (H.-A.-F.), 131, 713. Wilson {W.), 159. Wilson (H.-W.), 961. Winawer (B.), 315, 628, 915. Wind (C.-H.), 1040. Winkler (C.), 916, 1040. Winter (J.), 661. Wintrebert (P.), 172, 218, 264, 5 663, 712, 799. Wirtinger (W.), 88. Wisselingh (C. van), 408, 916. Witasek (Mlie J.), 496. Witby (G.-S.), 625. Witham (E.). 999. Witz (Aimé), 617, 154, 989. Wogau (M. von), 222. Wohlgemuth ({J.), 715. Wolf (C.), 661. Wolf (H.), 963. Wolff (J.), 217, 263, 198, 873. Woilk (Dr Daffy), Wood (J.-K.), 454, 961. Wood (J.-T.), 87, 534, 575. Woodcock ra 159. Woodhead (A.-r.), 999. Woodmansey (A.), 962. Wootton (W.-0.), 86, 261. Worrall (Mlle E.), 454. Woude (W. van der). 576. Wren (Mie G.-H.), 175. Wren (H.), 361, 714. Wright (Th.), 130 Wroczynski (A.), 38, 490, 758 Würschmidt (J.), 625, 880. Wyse-Lauzun, 83. 10, 662, 527, 624, 158. | 2EMAES) (J TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Y Yamanouchi (T.), 129, 569. Young (C.-R.), 961. Young (W.-J.), 405. Yvon (P.), 170, 355. Zach (F.), 496. Zachariadès (N.), 37. Zamorani (M.), ss. Zamorani (N.), Zangerle (J.), 5. Zdobnicjy (W.) Zeeman (P.), 44, Zeeman RL Zeiller (R.), 5 Ah, De. Zeltner (F. de), 530. Zerner (E.), 495, 668, 760. Zikes (H.), 132. Zimmerli (Ad.), 1039. Zimmermann, 455. Zimmern (A.), S1s. Zirk (H.), 407. Zmerzlikar (F.), 760. Zolla (D.), 379 à 2792. Zondadari (E.), 621. Zoretti (L.), 127, 530, 711. Zorn (L.), 450. Zwaardemaker (H.). 4%, 408, 576. Zylstra (K ), 316. Paris. — L, MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. TP RE PR So ee ete SEE A nu Nu DS en ee ; DCNRCEES ét 2 “ roro A ren un ete etat AN es SS Sn ENS ; : = DÉS TT TS Se MNETt f 4 : = - = a ns